Document (avec annexes) de la Fédération de Russie exposant sa position sur le prétendu «défaut de compétence» de la Cour en l'affaire

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182-20220307-OTH-01-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
Fédération de Russie
1. Le 28 février 2022, l’ambassade de la Fédération de Russie aux Pays-Bas a reçu, sous le couvert d’une lettre du greffier de la Cour portant la même date, copie d’une requête de l’Ukraine introduisant une instance contre la Fédération de Russie, intitulée «Allégations de génocide au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide» (ci-après la «requête»), ainsi que d’une demande en indication de mesures conservatoires en date du 26 février 2022 (ci-après la «demande»).
2. Le même jour (le 28 février 2022), l’ambassadeur de la Fédération de Russie a été consulté par le greffier de la Cour au sujet de dates auxquelles pourrait se tenir la procédure orale aux fins de l’examen de la demande. Il a indiqué qu’il serait difficile, sinon impossible, de prendre toutes les décisions nécessaires concernant la participation à l’instance et d’analyser comme il se devait la demande en cinq jours ouvrables. Le 1er mars 2022, l’ambassadeur de la Fédération de Russie a reçu une lettre du greffier de la Cour l’informant que la procédure orale avait été programmée pour les 7 et 8 mars 2022.
3. Le Gouvernement de la Fédération de Russie déplore que, alors même qu’il avait expressément indiqué qu’il s’y opposait, les audiences aient été programmées à si brève échéance. Le 5 mars 2022, l’ambassadeur de la Fédération de Russie a informé le greffier de la Cour que le Gouvernement de la Fédération de Russie ne participerait pas à la procédure orale. Dans le même temps, par respect envers la Cour, la Fédération de Russie a décidé de porter par la présente à son attention sa position concernant son incompétence en la présente affaire.
4. Le Gouvernement ukrainien cherche à soumettre à la Cour les questions de la licéité de l’emploi de la force par la Russie en Ukraine et de la reconnaissance par la Russie des Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk en invoquant à cet effet la convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide (ci-après la «convention»).
5. S’agissant de la clause relative au règlement des différends contenue dans la convention, dont l’objectif principal consiste «à prévenir et à punir» le crime de génocide et les crimes connexes, l’Ukraine cherche à obtenir que la Cour prescrive immédiatement à la Russie de «cesser ... toute action militaire sur [le] territoire [ukrainien]»1, de «suspendre immédiatement les opérations militaires commencées le 24 février 2022» et de «veiller immédiatement à ce qu’aucune des unités militaires ou unités armées irrégulières ... ne prenne de mesures en soutien aux opérations militaires»2. Ces deux dernières mesures conservatoires revêtent un caractère général3.
6. La Cour ne peut connaître d’une demande, fût-ce au stade des mesures conservatoires, sans s’assurer au préalable d’avoir compétence à son égard. Ainsi qu’elle l’a répété à maintes reprises, «l’un des principes fondamentaux de son Statut est qu’elle ne peut trancher un différend entre des Etats sans que ceux-ci aient consenti à sa juridiction»4 ;
1 Demande, par. 1.
2 Demande, par. 20 a)-b).
3 Demande, par. 20 c)-d).
4 Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt, C.I.J. Recueil 1995, p. 90, par. 26.
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«en présence d’une demande en indication de mesures conservatoires, ... la Cour ... ne peut indiquer ces mesures que si les dispositions invoquées par le demandeur ou figurant dans le Statut semblent prima facie constituer une base sur laquelle la compétence de la Cour pourrait être fondée»5.
7. La seule base de compétence à laquelle se réfère le Gouvernement ukrainien est la clause de règlement des différends de la convention, qui «n’est pas une disposition générale sur le règlement des différends»6. Même si la Fédération de Russie et l’Ukraine sont toutes deux parties à la convention sans avoir, ni l’une ni l’autre, formulé de réserve, la Cour, pour avoir compétence, doit établir que «l’objet du différend a trait à «l’interprétation, l’application ou l’exécution» de la convention»7.
8. Ainsi qu’elle l’a souligné, la Cour,
«à l’effet d’établir, même prima facie, si un différend au sens de l’article IX de la convention sur le génocide existe, … ne peut se borner à constater que l’une des parties soutient que la convention s’applique alors que l’autre le nie ; … elle doit rechercher si les violations de la convention alléguées … sont susceptibles d’entrer dans les prévisions de cet instrument et si, par suite, le différend est de ceux dont la Cour pourrait avoir compétence pour connaître ratione materiae par application de l’article IX»8.
9. La Cour doit également s’assurer de ce que les droits que l’Ukraine cherche à protéger entrent dans le champ de la convention. Elle a ainsi jugé que, «ayant établi qu’il exis[tait] une base sur laquelle sa compétence pourrait être fondée, à savoir l’article IX de la convention sur le génocide», elle «ne devrait pas indiquer de mesures tendant à protéger des droits contestés autres que ceux qui pourraient en définitive constituer la base d’un arrêt rendu dans l’exercice de la compétence ainsi établie prima facie»9.
10. Il ressort clairement du sens ordinaire des termes de la convention que celle-ci ne régit ni l’emploi de la force entre Etats, ni la reconnaissance des Etats. Y est tout d’abord défini le génocide aux fins de la convention10, puis y sont énoncées l’obligation pour les parties de «prendre … les mesures législatives nécessaires»11, celle de punir les personnes ayant commis le génocide ou d’autres crimes connexes12 et celle d’«accorder l’extradition conformément à leur législation et aux
5 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie‑Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), mesures conservatoires, ordonnance du 8 avril 1993, C.I.J. Recueil 1993, p. 3, par. 14.
6 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 49, par. 93.
7 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), mesures conservatoires, ordonnance du 8 avril 1993, C.I.J. Recueil 1993, p. 16, par. 26.
8 Licéité de l’emploi de la force (Yougoslavie c. Italie), mesures conservatoires, ordonnance du 2 juin 1999, C.I.J. Recueil 1999 (I), p. 490, par. 25.
9 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), mesures conservatoires, ordonnance du 13 septembre 1993, C.I.J. Recueil 1993, p. 342, par. 36.
10 Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, art. II.
11 Ibid., art. V.
12 Ibid., art. IV.
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traités en vigueur»13. La convention prévoit la possibilité pour toute partie contractante de saisir les organes compétents de l’ONU afin que ceux-ci prennent, conformément à la Charte des Nations Unies, les mesures qu’ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes de génocide.
11. Ni le renvoi à la notion de prévention que fait l’article premier de la convention ni la mention de la Charte des Nations Unies qui figure à son article VIII ne sauraient avoir pour effet d’incorporer dans la convention la Charte des Nations Unies et, ce faisant, de faire entrer des questions liées à l’article 51 de celle-ci dans la compétence de la Cour, ni encore de faire de l’article IX de la convention «une disposition générale sur le règlement des différends»14 par la Cour.
12. La convention ne renvoie nullement à l’emploi de la force entre Etats et à la reconnaissance des Etats, qui sont régis par la Charte des Nations Unies et le droit international coutumier. Considérer que ces deux questions sont implicitement envisagées dans la convention reviendrait à modifier et déformer gravement l’objet et le but de celle-ci. Et c’est bien l’intention qui sous-tend les prétentions de l’Ukraine. Si, dans la pratique de la Cour, des différends se sont fait jour sur la question de savoir si l’emploi de la force par un Etat contre d’autres pouvait, en soi, être qualifié de crime de génocide au regard de la convention15, cela n’est toutefois clairement pas le cas pour ce qui est de l’Ukraine.
13. En vue d’«agréger» l’emploi de la force et la reconnaissance des Etats à la convention afin de pouvoir en invoquer la clause de règlement des différends, le Gouvernement de l’Ukraine prétend, dans sa demande en indication de mesures conservatoires, que, «[e]n s’appuyant sur [des] allégations de génocide, [la Fédération de Russie] a … lancé, sans provocation préalable, une invasion de l’ensemble du territoire ukrainien»16, et prie la Cour, dans sa requête, de «dire et juger que l’«opération militaire spéciale» annoncée et mise en oeuvre par la Fédération de Russie à compter du 24 février 2022 est fondée sur une allégation mensongère de génocide et ne trouve donc aucune justification dans la convention sur le génocide» (les italiques sont de nous), et
«de dire et juger que la reconnaissance, par la Fédération de Russie, de l’indépendance des … «République populaire de Donetsk» et «République populaire de Louhansk» … est fondée sur une allégation mensongère de génocide et ne trouve donc aucune justification dans la convention sur le génocide» (les italiques sont de nous)17.
Le fait est, cependant, que la convention ne fournit aucune justification juridique s’agissant d’opérations militaires quelles qu’elles soient ou de reconnaissance d’un Etat, et ce, pour la simple raison que ces questions n’entrent pas dans son champ d’application.
14. La Cour a confirmé que si elle n’est pas en mesure de conclure que les actes imputés au défendeur «seraient susceptibles d’entrer dans les prévisions de la convention sur le génocide»,
13 Ibid., art. VII.
14 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 49, par. 93.
15 Licéité de l’emploi de la force (Serbie-et-Monténégro c. Belgique), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 283-284, par. 1 ; Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 144-149, par. 245-261, p. 154-155, par. 276-277 ; Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 120, par. 411.
16 Demande en indication de mesures conservatoires, par. 2.
17 Requête introductive d’instance, alinéas c) et d) du paragraphe 30.
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celle-ci «ne constitue … pas une base sur laquelle la compétence de la Cour pourrait prima facie être fondée»
18.
15. L’opération militaire spéciale menée par la Russie sur le territoire ukrainien est fondée sur l’article 51 de la Charte des Nations Unies et sur le droit international coutumier. Le fondement juridique de cette opération a été communiqué le 24 février 2022 au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies et au Conseil de sécurité par le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation, sous la forme d’une notification en vertu de l’article 51 de la Charte. Le Secrétaire général était prié de transmettre cette lettre en tant que document du Conseil de sécurité, accompagnée du «discours de S. Exc. M. Vladimir Poutine, président de la Fédération de Russie, aux citoyens russes à propos des mesures prises conformément à l’article 51 de la Charte des Nations Unies dans l’exercice du droit de légitime défense» (les italiques sont de nous) (ci-joint).
16. Dans son discours, le président de la Fédération de Russie a notamment déclaré ce qui suit :
«[i]ls ne nous ont pas laissé d’autre choix, pour défendre la Russie et son peuple, que d’agir comme nous sommes contraints de le faire aujourd’hui. Ces circonstances exigent que nous prenions des mesures radicales et immédiates. Les républiques populaires du Donbass ont sollicité l’aide de la Russie. Dans ce contexte, conformément à l’article 51 (chapitre VII) de la Charte des Nations Unies, avec l’autorisation du Conseil de la Fédération russe et en application des traités d’amitié et d’assistance mutuelle conclus avec la République populaire de Donetsk et la République populaire de Lougansk, ratifiés par l’Assemblée fédérale le 22 février, j’ai pris la décision de mener une opération militaire spéciale.»19.
17. La reconnaissance des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk est un acte politique souverain de la Fédération de Russie. Elle relève du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes consacré par la Charte et par le droit international coutumier, comme l’ont rappelé, dans leurs déclarations, le président de la Fédération de Russie et le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des Nations Unies, se référant plus particulièrement à cet égard au principe de l’autodétermination tel que reflété dans la déclaration de 1970 relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la Charte des Nations Unies.
18. Le président de la Fédération de Russie a notamment déclaré ce qui suit :
«[l]es acquis de la Seconde Guerre mondiale et les sacrifices que notre peuple a consentis pour vaincre le nazisme sont sacrés. Cela est sans préjudice des valeurs primordiales que sont les libertés et les droits de l’homme, telles qu’elles ont émergé au cours des décennies qui ont suivi la guerre. Les nations ne sont pas pour autant privées de la jouissance du droit à l’autodétermination prévu par l’article 1 de la Charte des Nations Unies. Il ne faut pas oublier que personne n’a demandé aux peuples qui habitent les territoires faisant partie de ce qui est aujourd’hui l’Ukraine comment ils souhaitaient mener leur vie au moment de la création de l’URSS ou après la Seconde Guerre
18 Licéité de l’emploi de la force (Yougoslavie c. Belgique), mesures conservatoires, ordonnance du 2 juin 1999, C.I.J. Recueil 1999 (I), p. 124, par. 41.
19 Site Internet officiel du président de la Fédération de Russie, «Address by the President of the Russian Federation», 24 février 2022, accessible à l’adresse suivante : http://en.kremlin.ru/events/president/news/67843.
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mondiale. C’est la liberté qui guide nos décisions : la liberté de choisir, en toute autonomie, notre avenir et celui de nos enfants. Nous sommes convaincus que tous les peuples qui vivent dans l’Ukraine actuelle et qui le souhaitent doivent pouvoir jouir du droit de choisir librement.»
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19. Se référant au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York a expliqué ce qui suit :
«[je] tiens à rappeler que, comme le prévoit la déclaration de 1970 relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats, le principe de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des Etats — que nous sommes accusés d’avoir violé en ce qui concerne l’Ukraine — doit être scrupuleusement respecté s’agissant de tout Etat se conduisant conformément au principe de l’égalité de droits et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes énoncé ci-dessus et doté ainsi d’un gouvernement représentant l’ensemble du peuple appartenant au territoire sans distinction de race, de croyance ou de couleur». Le Gouvernement ukrainien actuel ne correspond pas à cette description. D’ailleurs, le drame ukrainien a débuté après le coup d’Etat illégitime de Maïdan en 2014, lorsque les nouvelles autorités ukrainiennes, au lieu de s’adresser à la population russophone, l’ont attaquée avec des armes et des avions. Bien qu’il existe suffisamment d’informations et d’éléments de preuve à ce sujet, nos partenaires occidentaux préfèrent ne pas y prêter attention.»21
20. Evoquer un génocide ne revient pas à invoquer la convention ni à admettre l’existence d’un différend au regard de celle-ci, puisque la notion de génocide existe en droit international coutumier indépendamment de la convention. Cette notion existe également dans les systèmes juridiques nationaux, dont ceux de la Fédération de Russie et de l’Ukraine. Dans la déclaration à laquelle se réfère le Gouvernement ukrainien, le président de la Fédération de Russie ne mentionne nullement la convention. L’analyse qui est faite de la situation désastreuse dans le Donbass, notamment concernant les atrocités et les actes de génocide qui y sont commis, décrit le contexte humanitaire général, entre autres facteurs et considérations. C’est dans une déclaration du ministère ukrainien des affaires étrangères, publiée sur le site Internet de celui-ci le jour du dépôt de ses demandes à la Cour, que l’Ukraine a, pour la première fois, mentionné la convention dans le cadre d’une référence au génocide dans le Donbass ; nul doute qu’elle entendait ainsi établir de toutes pièces une base de compétence22. Deux jours plus tôt, pourtant, le 24 février 2022, ledit ministère, s’exprimant au sujet de l’opération militaire spéciale, avait évoqué l’emploi de la force sans faire mention ni de la convention, ni d’un génocide23.
21. Comme l’a dit la Cour,
20 Site Internet officiel du président de la Fédération de Russie, «Address by the President of the Russian Federation», 24 février 2022, accessible à l’adresse suivante : http://en.kremlin.ru/events/president/news/67843.
21 Site Internet officiel de la mission permanente de la Fédération de Russie auprès de l’Organisation des Nations Unies, «Statement and reply by Permanent Representative Vassily Nebenzia at UNSC briefing on Ukraine», 23 février 2022, accessible à l’adresse suivante : https://russiaun.ru/en/news/230222un.
22 Site Internet officiel du ministère des affaires étrangères de l’Ukraine, «Statement of the Ministry of Foreign Affairs of Ukraine on Russia’s False and Offensive Allegations of Genocide As a Pretext For Its Unlawful Military Aggression», 26 février 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mfa.gov.ua/en/news/zayava-mzs-ukrayini-shchodo-nepravdivih-ta-o….
23 Site Internet officiel du ministère des affaires étrangères de l’Ukraine, «Statement of the Ministry of Foreign Affairs of Ukraine on the new wave of aggression of the Russian Federation against Ukraine», 24 février 2022, accessible à l’adresse suivante : https://mfa.gov.ua/en/news/statement-ministry-foreign-affairs-ukraine-n… against-ukraine.
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«puisque la compétence prévue par l’article IX est limitée à «l’interprétation, l’application ou l’exécution de la … [c]onvention, y compris … à la responsabilité d’un Etat en matière de génocide ou de l’un quelconque des autres actes énumérés à l’article III», elle ne s’étend pas aux allégations concernant la violation du droit international coutumier en matière de génocide»24.
22. Le Gouvernement ukrainien martèle qu’il est urgent de prescrire les mesures de protection en cause au vu de la situation actuelle. Or l’urgence doit tenir, non à la situation de manière générale, mais à la protection de droits énoncés dans la convention. Comme elle l’a déjà dit, la Cour doit «se limiter[], dans son examen des mesures demandées, et des motifs mis en avant pour justifier ces demandes, à prendre en considération ceux qui entrent dans le champ d’application de la convention sur le génocide»25.
23. Il s’ensuit que la requête et la demande dépassent manifestement le champ d’application de la convention et donc la compétence de la Cour.
24. Compte tenu de ce qui précède, le Gouvernement de la Fédération de Russie prie respectueusement la Cour de renoncer à indiquer des mesures conservatoires et de radier l’affaire de son rôle.
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24 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (I), p. 3, par. 87.
25 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Yougoslavie (Serbie et Monténégro)), mesures conservatoires, ordonnance du 8 avril 1993, C.I.J. Recueil 1993, p. 3, par. 35.

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