Ordonnance du 2 juin 1999

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107-19990602-ORD-01-00-EN
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Incidental Proceedings
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ETORDONNANCES

AFFAIRE RELATIVE À LA LICÉITÉ

DE L'EMPLOI DE LA FORCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

ORDONNANCE DU 2 JUIN 1999

INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCERNING

LEGALITY OF USE OF FORCE

(YUGOSLAVIA vFRANCE)

REQUEST FOR THE INDICATION OF PROVISIONAL
MEASURES

ORDER OF 2 JUNE 1999 Mode officiel de citation:
Licéitéde l'emploi de laforce (Yougoslavc.France),
mesures cons~rvatoire., rdonnance du 2 juin 1999,
C.1.J. Recueil 1999p. 363

Officia1citati:n
Legality of Use of Force (Yugoslaviv.France),
Provisional Measures, Order of 2 June 1999,
1.C.J. Reports 1999p. 363

~àevenîe: 729 (
ISSN 0074-4441 Sales number
ISBN 92-1-070797-4 2 JUIN 1999

ORDONNANCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

LEGALITY OF USE OF FORCE

(YUGOSLAVIA v.FRANCE)

REQUEST FOR THE INDICATION OF PROVISIONAL
MEASURES

2 JUNE 1999

ORDER COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

1999 ANNÉE 1999
2 juin
Ràno107néral 2 juin1999

AFFAIRE RELATIVE À LA LICÉITÉ

DE L'EMPLOI DE LA FORCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

ORDONNANCE

Présents: M. WEERAMANTRvY ic,e-président,faisunr fonction de prési-
dent en I'afjcuire; M. SCHWEBEp,résident de lu Cour;
MM. ODA,BEDJAOUG I,UILLAUMRA,NJEVAH,ERCZEGSH. I,
FLEISCHHAUER K,OROMA,VERESHCHETIN, Mme HIGGINS,
MM. PARRA-ARANGURE KO,OIJMANjS,es; M. KRECAj,uge
ad hoc; M. VALENCIA-OSPINgrel,fier.

La Cour internationale de Justice,
Ainsi composée,

Après délibéren chambre du conseil,
Vu les articles 41 et 48 du Statut de la Cour et les articles 73 et 74 de
son Règlement,
Vu la requête déposear la Républiquefédéralede Yougoslavie (ci-
aprèsdénomméela «Yougoslavie») au Greffe de la Cour le 29 avril 1999,
par laquelle elle a introduit une instance contre la République française
(ci-après dénomméela «France»)our violation de l'obligation de ne
pas recourir l'emploi de la force)).

Rend I'ordonnuncesuiiwn:e 1. Considérant que, dans cette requête, la Yougoslaviedéfinit l'objet
du différend ainsique suit:

((L'objet du différend porte sur les actes commis par la Répu-
blique française, en violation de son obligation internationale de ne
pas recourirà l'emploi de la force contre un autre Etat, de I'obliga-
tion de ne pas s'immiscerdans lesaffaires intérieuresd'un autre Etat,
de I'obligation de ne pas porter atteintela souveraineté d'unautre
Etat, de l'obligation de protégerlespopulations civileset lesbiens de
caractère civil en temps de guerre, de I'obligation de protégerl'envi-
ronnement, de I'obligation touchantà la libertéde navigation sur les
cours d'eau internationaux, de I'obligation concernant les droits et
libertésfondamentaux de la personne humaine, de I'obligation de ne
pas utiliser des armes interdites, de I'obligation de ne pas soumettre
intentionnellement un groupe national à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique));

2. Considérant que, dans ladite requête, laYougoslavie, pour fonder
la compétencede la Cour, invoque l'article IX de la convention pour la
prévention et la répressiondu crime de génocide,adoptéepar I'Assem-
bléegénérale desNations Unies le 9 décembre1948(ci-aprèsdénommée
la ((convention sur le génocide))) et le paragraphe 5 de l'article 38 du
Règlementde la Cour;
3. Considérant que, dans sa requête,la Yougoslavie expose que les

demandes qu'elle soumet à la Cour sont fondéessur les faits ci-après:
«Le Gouvernement de la Républiquefrançaise, conjointement avec
les gouvernements d'autres Etats membres de l'OTAN, a recouru à
l'emploi de la force contre la Républiquefédéralde Yougoslavie en
prenant part au bombardement de cibles dans la Républiquefédérale
de Yougoslavie. Lors des bombardements de la Républiquefédérale

de Yougoslavie, des cibles militaires et civiles ont été attaqu. nU
grand nombre de personnes ont ététuées,dont de très nombreux
civils. Des immeubles d'habitation ont subi des attaques. Un grand
nombre d'habitations ont été détruites. D'énormes dégâotn st été
causés àdes écoles,des hôpitaux, des stations de radiodiffusion et de
télévision. es structures culturelles et sanitaires. ainsi au'a des lieux
de culte. Nombre de ponts, routes et voies de chemin de fer ont été
détruits. Les attaques contre des raffineries de pétroleet des usines
chimiques ont eu de graves effets dommageables pour l'environne-
ment de villes et de villages de la Républiquefédéralede Yougosla-
vie. L'emploi d'armes contenant de l'uranium appauvri a de lourdes
conséquencespour la viehumaine. Les actes susmentionnésont pour
effet de soumettre intentionnellement un groupe ethniquedescondi-
tions devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle. Le
Gouvernement de la République française prend part a l'entraîne-
ment, à l'armement, au financement, a l'équipementet à l'approvi-
sionnement de laprétendue((arméede libérationdu Kosovo»;365 LICÉITE DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

et considérant qu'elle indique en outre que lesdites demandes reposent
sur les fondements juridiques suivants:

«Les actes susmentionnés du Gouvernement français constituent
une violation flagrante de l'obligation de ne pas recourirà l'emploi
de la force contre un autre Etat. En finançant, armant, entraînant et
équipantla prétendue ((arméede libérationdu Kosovo)), le Gouver-
nement français apporte un appui à des groupes terroristes et au
mouvement sécessionnistesur le territoire de la République fédérale
de Yougoslavie, en violation de l'obligation de ne pas s'immiscer
dans les affaires intérieuresd'un autre Etat. De surcroît, les dispo-
sitions de la convention de Genève de 1949 et du protocole addi-

tionnel no I de 1977relatives à la protection des civils et des biens
de caractère civil en temps de guerre ont étéviolées. Il y a eu aussi
violation de I'obligation de protéger l'environnement. La destruc-
tion de ponts sur le Danube enfreint les dispositions de l'article I
de la convention de 1948 relative a la libertéde navigation sur le
Danube. Les dispositions du pacte international relatif aux droits
civils et politiques et du pacte international relatif aux droits éco-
nomiques, sociaux et culturels de 1966 ont elles aussi étéviolées.
En outre, I'obligation énoncéedans la convention pour la préven-
tion et la répression du crime de génocide de ne pas soumettre
intentionnellement un groupe national à des conditions d'existence

devant entraîner sa destruction physique a étéviolée. De plus,
les activités auxquelles la République française prend part sont
contraires au paragraphe 1 de l'article 53 de la Charte des Nations
Unies »;
4. Considérant que les demandes de la Yougoslavie sont ainsi formu-

léesdans la requête:
((LeGouvernement de la Républiquefédérale de Yougoslavie prie
la Cour internationale de Justice de dire et juger:

- qu'en prenant part aux bombardements du territoire de la Répu-
blique fédéralede Yougoslavie, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas recourirà l'emploide la force contre un
autre Etat;
- qu'en prenant part à l'entraînement, a l'armement, au finance-
ment, à l'équipement et à l'approvisionnement de groupes terro-
ristes, savoir la prétendue((arméede libérationdu Kosovo », la
République française a agi contre la République fédéralede

Yougoslavie, en violation de son obligation de ne pas s'immiscer
dans les affaires d'un autre Etat;
- qu'en prenant part à des attaques contre des cibles civiles, la
République française a agi contre la République fédéralede
Yougoslavie, en violation de son obligation d'épargnerla popu-
lation civile, lescivils et les biens de caractérecivil; LICÉITÉ DE L'EMPLOIDE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

qu'en prenant part à la destruction ou à l'endommagement de
monastères, d'édificesculturels, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas commettre d'actes d'hostilitédirigés
contre des monuments historiques, des Œuvresd'art ou des lieux
de culte constituant le patrimoine culturel ou spirituel d'un
peuple;
qu'en prenant part à l'utilisation de bombes en grappe, la Répu-

blique française a agi contre la Républiquefédéralede Yougo-
slavie, en violation de son obligation de ne pas utiliser des armes
interdites, c'est-à-dire des armes de natureà causer des maux
superflus;
qu'en prenant part aux bombardements de raffineries de pétrole
et d'usines chimiques, la République française a agi contre la
Républiquefédéralede Yougoslavie, en violation de son obliga-
tion de ne pas causer de dommages substantiels à l'environne-
ment;
qu'en recourant a l'utilisation d'armes contenant de l'uranium
appauvri, la République française a agi contre la République
fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation de ne pas
utiliser des armes interdites et de ne pas causer de dommages de
grande ampleur à la santé et a l'environnement;

qu'en prenant part au meurtre de civils,à la destruction d'entre-
prises, de moyens de communication et de structures sanitaires et
culturelles, la République française a agi contre la République
fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation de res-
pecter le droit la vie, le droit au travail, ledàol'information,
le droit aux soins de santé ainsi que d'autres droits fondamen-
taux de la personne humaine;
qu'en prenant part a la destruction de ponts situéssur des cours
d'eau internationaux, la République française a agi contre la
Républiquefédéralede Yougoslavie, en violation de son obliga-
tion de respecter la libertéde navigation sur lescours d'eau inter-
nationaux :
qu'en prenant part aux activitésénuméréecsi-dessus et en parti-

culier en causant des dommages énormes à l'environnement eten
utilisant de l'uranium appauvri, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas soumettre intentionnellement un groupe
national à des conditions d'existencedevant entraîner sa destruc-
tion physique totale ou partielle;
que la République française porte la responsabilité de la viola-
tion des obligations internationales susmentionnées;
que la République française est tenue de mettre fin immédiate-
ment à la violation des obligations susmentionnéesà l'égardde
la Républiquefédéralede Yougoslavie;
que la Républiquefrançaise doit réparation pour les préjudices causés à la République fédéralede Yougoslavie ainsi qu'à ses
citoyens et personnes morales));

et considérant qu'au terme de sa requêtela Yougoslavie se réservele
droit de modifier et de complétercelle-ci;
5. Considérant que, le 29 avril 1999,immédiatement aprèsle dépôtde
sa requête,la Yougoslavie a en outre présenté unedemande en indication
de mesures conservatoires invoquant l'article 73 du Règlement de la
Cour; et que la demande était accompagnée d'unvolume d'annexes pho-
tographiques produites à titre de ((preuves));
6. Considérant que, à l'appui de sa demande en indication de mesures
conservatoires, la Yougoslavie soutient notamment que, depuis le début
des bombardements contre son territoire, et du fait de ceux-ci, environ

mille civils,dont dix-neuf enfants, ont été tuéest plus de quatre mille cinq
cents grièvement blessés;que la vie de trois millions d'enfants est mena-
cée;que des centaines de milliers de personnes ont été exposéesà des gaz
toxiques; qu'environ un million de personnes sont privéesd'approvision-
nement en eau; qu'environ cinq cent mille travailleurs ont perdu leur
emploi; que deux millions de personnes sont sans ressources et dans
l'impossibilitéde se procurer le minimum vital; et que les réseauxroutier
et ferroviaire ont subi d'importants dégâts; considérant que, dans sa de-
mande en indication de mesures conservatoires, la Yougoslavie énumère
par ailleurs les cibles qui auraient étéviséespar les attaques aérienneset
décriten détailles dommages qui leur auraient étéinfligés(ponts, gares
et lignes de chemins de fer, réseauroutier et moyens de transport, aéro-
ports, commerce et industrie, raffineries et entrepôts de matières pre-
mières liquides et de produits chimiques, agriculture, hôpitaux et

centres médicaux, écoles,édificespublics et habitations, infrastructures,
télécommunications, monuments historiques et culturels et édifices
religieux); et considérant que la Yougoslavie en conclut ce qui suit:

«Les actes décrits ci-dessus ont causé desmorts ainsi que des
atteintesà l'intégrité physiqueet mentale de la population de la
Républiquefédéralede Yougoslavie, de trèsimportants dégâts,une
forte pollution de I'environnement, de sorte que la population you-
goslave setrouve soumise intentionnellement àdes conditions d'exis-
tence devant entraîner la destruction physique totale ou partielle de
ce groupe));

7. Considérant que, au terme de sa demande en indication de mesures
conservatoires, la Yougoslavie préciseque

((Siles mesures demandéesne sont pas adoptées,il y aura de nou-
velles pertes en vies humaines, de nouvelles atteintes à l'intégrité
physique et mentale de la population de la République fédéralede
Yougoslavie, d'autres destructions de cibles civiles, une forte pollu-
tion de I'environnement et lapoursuite de la destruction physique de
la population de Yougoslavie»;368 LICÉITÉDE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

et considérant que, tout en se réservant le droit de modifier et de com-
pléter sademande, elle prie la Cour d'indiquer la mesure suivante:
<<LaRépublique françaisedoit cesser immédiatement derecourir à
l'emploi de la force et doit s'abstenir de tout acte constituant une
menace de recours ou un recours à l'emploi de la force contre la

République fédéralede Yougoslavie »;
8. Considérant que la demande en indication de mesures conserva-
toires était accompagnéed'une lettre de l'agent de la Yougoslavie, adres-
séeau présidentet aux membres de la Cour, qui étaitainsi libellée:

«J'ai l'honneur d'appeler l'attention de la Cour sur le dernier
bombardement qui a frappé le centre de la ville de Surdulica le
27 avril 1999 a midi et entrainéla mort de civils, pour la plupart des
enfants et des femmes, et de vous rappeler les morts de Kursumlija,
Aleksinac et Cuprija, ainsi que le bombardement d'un convoi de
réfugiés etde l'immeuble abritant la radio et la télévision serbes,

pour neciter que quelques exemplesdes atrocités quechacunconnaît.
Je tiens en conséquence à prévenir la Cour qu'il est fort probable
qu'ily aura encore d'autres victimes civileset militaires.
Considérant le pouvoir conféré à la Cour aux termes du para-
graphe 1 de l'article 75, de son Règlement, et compte tenu de I'ex-
trêmeurgence de la situation néedes circonstances décritesdans les
demandes en indication de mesures conservatoires, je prie la Cour
de bien vouloir se prononcer d'office sur les demandes présentées
ou de fixer une date pour la tenue d'une audience dans les meilleurs
délais);

9. Considérant que le 29 avril 1999, date à laquelle la requêteet la
demande en indication de mesures conservatoires ont été déposéeasu
Greffe, le greffiera fait tenir au Gouvernement français des copies signées
de la requêteet de la demande, conformément au paragraphe 4 de l'ar-
ticle 38 et au paragraphe 2 de I'article 73 du Règlement de la Cour; et
qu'il a égalementfait tenir audit gouvernement une copie des documents

qui accompagnaient la requêteet la demande en indication de mesures
conservatoires ;
10. Considérant que, le 29 avril 1999,le greffier a aviséles Parties que
la Cour avait décidé,conformément au paragraphe 3 de l'article 74 de
son Règlement, de tenir audience les 10 et 11 mai 1999 aux fins de les
entendre en leurs observations sur la demande en indication de mesures
conservatoires ;
11. Considérantqu'en attendant que lacommunication prévueau para-
graphe 3 de l'article40 du Statut età l'article42 du Règlementde la Cour
ait été effectuépear transmission du texte bilingue impriméde la requête
aux Membres des Nations Unies et aux autres Etats admis à ester devant
la Cour, le greffier a, le 29 avril 1999,informéces Etats du dépôt de la

requêteet de son objet, ainsi que du dépôt de la demande en indication
de mesures conservatoires: 12. Considérant que, la Cour ne comptant pas sur le siègede juge de
nationalitéyougoslave, le Gouvernement yougoslave a invoquéles dispo-
sitions de I'article 31du Statutde la Cour et a désignéM. Milenko KreEa
pour siégeren qualité dejuge ad hocen l'affaire; et qu'aucune objection
a cette désignation n'a été soulevédeans le délaifixéà cet effet en vertu
du paragraphe 3 de I'article35 du Règlementde la Cour;
13. Considérant que, aux audiences publiques qui ont ététenues entre
le 10et le12 mai 1999,des observations orales sur la demande en indica-
tion de mesures conservatoires ont étéprésentées:

aunom delu Yougosluvie:

par M. Rodoljub Etinski, agent,
M. Ian Brownlie,
M. Paul J. 1.M. de Waart,
M. Eric Suy,
M. Miodrag MitiE,
M. Olivier Corten;

aunom delaFrance:
par M. Ronny Abraham, agent,

M. Alain Pellet;
14. Considérant que, dans cette phase de la procédure,les Parties ont
présenté lesconclusions suivantes :

aunom de laYougoslavir:

«[L]a Cour [est priée]d'indiquer la mesure conservatoire sui-
vante:
[L]aRépublique française ..doi[t]cesserimmédiatement derecou-
rira l'emploi de la force et doi[t] s'abstenir de tout acte constituant
une menace de recours ou un recours à l'emploide la force contre la
République fédéralede Yougoslavie >;

aunom delaFrance:

«[L]a France estime que la Cour ne peut donner suite ala requête
de la Républiquefédéralede Yougoslavie. Aucune des deux bases de
compétenceinvoquées n'étaitpertinente. Ni l'une ni l'autre ne sau-
rait fonder la compétence dela Cour en l'espèce.))
«[Il est] demand[é]a la Cour, au nom de la Républiquefrançaise,
de bien vouloir prononcer la radiation du rôle généralde la requête

forméepar la République fédéralede Yougoslavie));

15. Considérant que la Cour est profondément préoccupéepar le
drame humain, les pertes en vieshumaines et les terribles souffrances que370 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

connaît le Kosovo et qui constituent la toile de fond du présent différend,
ainsi que par les victimes et les souffrances humaines que l'on déplorede
façon continue dans l'ensemble de la Yougoslavie;
16. Considérant que la Cour est fortement préoccupéepar l'emploi de
la force en Yougoslavie; que, dans les circonstances actuelles, cet emploi
soulèvedes problèmes trèsgraves de droit international;
17. Considérant que la Cour garde présents à l'esprit les buts et les

principes de la Charte des Nations Unies, ainsi que lesresponsabilitésqui
lui incombent, en vertu de ladite Charte et du Statut de la Cour, dans le
maintien de la paix et de la sécurité;
18. Considérant que la Cour estime nécessairede souligner que toutes
lesparties qui se présententdevant elledoivent agir conformément àleurs
obligations en vertu de la Charte des Nations Unies et des autres règles
du droit international,y compris du droit humanitaire;

19. Considérant qu'en vertu de son Statut la Cour n'a pas automati-
quement compétencepour connaître des différends juridiques entre les
Etats parties audit Statut ou entre les autres Etats qui ont été admis à
ester devant elle; que la Cour a déclaréà maintes reprises ((que l'un des

principes fondamentaux de son Statut est qu'ellene peut trancher un dif-
férendentre des Etats sans que ceux-ci aient consenti à sa juridiction))
(Timor orientul (Portugul c. Ausirulie), urrêl, C.I.J. Recueil 1995,
p. 101, par. 26); et que la Cour ne peut donc exercer sa compétence à
l'égardd'Etats parties à un différendque si ces derniers ont non seule-
ment accès à la Cour, mais ont en outre accepté sa compétence, soit d'une
manière générales ,oit pour le différendparticulier dont il s'agit;
20. Considérant que, en présence d'une demande en indication de
mesures conservatoires, point n'est besoin pour la Cour, avant de décider
d'indiquer ou non de telles mesures, de s'assurer de manière définitive
qu'elle a compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'ellene peut indi-
quer ces mesures que si les dispositions invoquéespar le demandeur sem-

blent prima Jucie constituer une base sur laquelle la compétence de la
Cour pourrait ètre fondée;

21. Considérant que la Yougoslavie, dans sa requête, prétenden pre-
mier lieu fonder la compétencede la Cour sur l'article IX de la conven-
tion sur le génocide,aux termes duquel:
«Les différendsentre les Parties contractantes relatiàsl'interpré-

tation, l'application ou l'exécutionde la présenteconvention, com-
pris ceux relatiàsla responsabilité d'unEtat en matièrede génocide
ou de l'un quelconque des autres actesénumérés à l'article III, seront
soumis à la Cour internationale de Justice, à la requêted'une partie
au différend»;371 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD.2 VI 99)

et considérantque, danssa requête, la Yougoslavie indiqueque l'objet du
différendporte notammentsur «les actescommis par la Républiquefran-
çaise, en violation de son obligation international...de ne pas soumettre
intentionnellement un groupenational à des conditions d'existencedevant
entraîner sa destruction physique)); qu'en décrivantles faits sur lesquels
la requêteest fondée, la Yougoslavie précise:«Les actes susmentionnés
ont pour effet de soumettre intentionnellement un groupe ethnique àdes
conditions devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle));
qu'en exposant les fondements juridiques de la requête,elle soutient que
«l'obligation ...de ne pas soumettre intentionnellement un groupe natio-
nal a des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique
a été violée)); etque l'une des demandes au fond contenues dans la
requêteest ainsi formulée :

«qu'en prenant part aux activitésénuméréec si-dessus et en particu-
lier en causant des dommages énormes à I'environnement et en uti-
lisant de l'uranium appauvri, la Républiquefrançaise a agi contre la
République fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation
de ne pas soumettre intentionnellement un groupe national à des
conditions d'existencedevant entraîner sadestruction physique totale
ou partielle));

22. Considérant que la Yougoslavie soutient en outre que le bombar-
dement constant et intensif de l'ensemble de son territoire, y compris les
zones les plus peuplées,constitue «une violation grave de I'article II de la
convention sur le génocide));qu'elle fait valoir que «la pollution du sol,
de l'air et de l'eau, la destruction de l'économiedu pays, la contamination
de I'environnement par de l'uranium appauvri reviennent a soumettre la

nation yougoslave ë des conditions d'existence devant entraîner sa des-
truction physique)); qu'elle affirme que c'est lanation yougoslave tout
entière, en tant que telle, qui est prise pour cible; et qu'elle souligneque
le recoursa certaines armes, dont on connaît par avance lesconséquences
dommageables à long terme sur la santéet l'environnement, ou la des-
truction de la plus grande partie du réseaud'alimentation en électricité
du pays, dont on peut prévoird'avance lesconséquencescatastrophiques,
«témoigne[nt]implicitement de l'intention de détruire totalement ou par-
tiellement)) le groupe national yougoslave en tant que tel;
23. Considérantque la France soutient pour sa part que l'article IX de
la convention sur le génocide ne constituepas une base de compétenceen
l'espèce,«et cela de façon absolument manifeste)); et considérant que, se
référant à l'alinéac) de I'article II de la convention, elle indique que le
génocide,tel que le définitla convention de 1948, comporte deux élé-

ments, «[l']un objectif: la destruction en tout ou en partie d'un groupe
national ou religieux comme tel. L'autre subjectif: l'intention d'aboutirà
ce résultatqui est contraire ..aux ((principes de morale les plus élémen-
taires)))); qu'en ce qui concerne l'élémentbjectif, elleaffirme notamment
que «les forces de l'OTAN ..s'efforcent de ne causer aucun mal superflu
aux populations civiles)), que, «quant a l'allégation d'utilisationd'ura-372 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

nium affaibli, ...les forces armées françaises [ne sont] dotées d'aucune
arme de ce type)) et que ((l'utilisation de telle ou telle arme, surtout
quand elle n'est nullement illicite, est sans rapport aucun avec la défini-
tion du génocide));et qu'ence qui a trait à l'élémens tubjectif, la France
souligne ((l'absencemanifeste en l'espècede l'élémenitntentionnel))et «le
silence total de 1'Etatrequérant)) sur ce point;
24. Considérantqu'il n'est pas contestéquetant la Yougoslavie que la
France sont parties à la convention sur le génocide,sans réserves;et que
I'articleIX de la convention semble ainsi constituer une base sur laquelle
la compétencede la Cour pourrait êtrefondée,pour autant que l'objet du
différendait trait à ((l'interprétation,l'application ou l'exécution))de la

convention, y compris lesdifférends ((relatifsà la responsabilitéd'un Etat
en matière de génocideou de I'un quelconque des autres actes énumérés
à I'article 111))de ladite convention;
25. Considérant que, à l'effet d'établir,même prima facie, si un diffé-
rend au sens de I'article IX de la convention sur le génocideexiste, la
Cour ne peut se borner à constater que l'une des parties soutient que la
convention s'applique alors que l'autre le nie; et que, au cas particulier,
elledoit rechercher si lesviolations de la convention all"guéesDarla You-
goslavie sont susceptibles d'entrer dans lesprévisionsde cet instrument et
si, par suite, le différend estde ceux dont la Cour pourrait avoir compé-
tence pour connaître rutione materiue par application de I'article IX

(cf.Plates-firmes pétrolières (République islamique d'Iran c. Etats- Unis
d'AmPrique), exception préliminaire, urrêt, C.I. J. Recueil 1996 (II),
p. 810, par. 16);
26. Considérantque la définitiondu génocide,figurant à I'article IIde
la convention sur le génocide,se lit comme suit:
«Dans la présente convention le génocides'entend de I'un quel-

conque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en
tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux,
comme tel :
u) meurtre de membres du groupe;
b) atteinte grave à l'intégritéphysique ou mentale de membres du
groupe ;
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;

d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe));
27. Considérantqu'il apparaît à la Cour, d'aprèscette définition,«que
la caractéristiqueessentielle du génocide estla destruction intentionnelle
d'un ((groupe national, ethnique, racial ou religieux)))(Application de la
convention pour lu prévention et la répression du crimede génocide,me-
sures conservatoires, ordonnance du 13 septembre 1993, C.I.J. Recueil

1993, p. 345, par. 42); que le recours ou la menace du recours à l'emploi
de la force contre un Etat ne sauraient en soi constituer un acte de géno-
cide au sens de I'article II de la convention sur le génocide; etque, de373 LICEITÉDE L'EMPLOIDE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

l'avis de la Cour, il n'apparaît pas au présentstade de la procédureque
lesbombardements quiconstituent l'objet de la requêteyougoslave ((corn-
porte[nt] effectivement l'élémendt'intentionnalité,dirigécontre un groupe
comme tel, que requiert la disposition sus-citée))Licéitéde la menace ou
de l'emploi d'armes nucléaires. avis consultatif: C.I.J. Recueil 1996 (I),
p. 240, par. 26);
28. Considérant que la Cour n'est dèslors pas en mesure de conclure,
à ce stade de la procédure, que les actes que la Yougoslavie impute au
défendeur seraientsusceptibles d'entrer dans les prévisionsde la conven-
tion sur le génocide; etque I'article IX de la convention, invoqué par la
Yougoslavie, ne constitue partant pas une base sur laquelle la compé-

tence de la Cour pourrait primu,fucie êtrefondéedans le cas d'espèce;

29. Considérantque la Yougoslavie, dans sa requête, prétend en second
lieu fonder la compétencede la Cour sur le paragraphe 5 de I'article 38
du Règlement, ainsi libellé:

((5. Lorsque le demandeur entend fonder la compétence de la
Cour sur un consentement non encore donnéou manifestépar I'Etat
contre lequel la requêteest formée, la requêteest transmise à cet
Etat. Toutefois elle n'est pas inscrite au rôle généralde la Cour et
aucun acte de procéduren'est effectuétant que 1'Etatcontre lequel
la requête est forméen'a pas accepté la compétencede la Cour aux
fins de l'affaire))

30. Considérantque la France soutient que le paragraphe 5 de I'article
38 du Règlement estinopérantparce qu'elle n'accepte pas,en l'espèce,la
compétencede la Cour;
31. Considérant qu'il est manifesteque, en l'absence de consentement
de la France donné conformément au paragraphe 5 de l'article 38 du
Règlement, la Cour ne saurait avoir compétencedans la présente affaire,
même prima facie;

32. Considérant qu'il résultede ce qui précèdeque la Cour n'a pas
prima facie compétencepour connaître de la requêtede la Yougoslavie;

et qu'elle ne saurait dèslors indiquer quelque mesure conservatoire que
ce soità l'effetde protégerles droits qui y sont invoqués;
33. Considérant toutefois que les conclusions auxquelles la Cour est
parvenue en la présente procédure ne préjugene tn rien la compétencede
la Cour pour connaître du fond de l'affaire sur la base de I'articleX de
la convention sur le génocide, niaucune question relativea la recevabilité
de la requêteou au fond lui-même,et qu'elles laissentintact le droit du
Gouvernement yougoslave et du Gouvernement français de faire valoir
leurs moyens en la matière;374 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

34. Considérantque la Cour ne saurait par suite accéder, àce stade de

la procédure, a la demande de la France tendant a ce que l'affaire soit
rayéedu rôle;

35. Considérantqu'il existeune distinction fondamentaleentre la ques-
tion de l'acceptation par un Etat de la juridiction de la Cour et la com-
patibilitéde certains actes avec le droit international; la compétenceexige

le consentement; la compatibilité ne peut êtreappréciéeque quand la
Cour examine le fond, après avoir établisa compétence etentendu les
deux parties faire pleinement valoir leurs moyens en droit;
36. Considérant que les Etats, qu'ils acceptent ou non la juridiction
de la Cour, demeurent en tout état de cause responsables des actes
contraires au droit international, y compris au droit humanitaire,
qui leur seraient imputables; que tout différend relatif la licéitde tels
actes doit êtreréglépar des moyens pacifiques dont le choix est laisséaux

parties conformément àl'article 33 de la Charte;
37. Considérant que dans ce cadre les parties doivent veiller a ne pas
aggraver ni étendrele différend;
38. Considérant que, lorsqu'un tel différend susciteune menace contre
la paix, une rupture de la paix ou un acte d'agression, le Conseil de sécu-
ritéest investi de responsabilités spéciales vertu du chapitre VI1de la
Charte;

39. Par ces motifs,

1) Par douze voix contre trois,

Rejette la demande en indication de mesures conservatoires présentée
par la Républiquefédéralede Yougoslavie le 29 avril 1999;

POUR: M. Weeramantry. vice-présidentf.aisunt foncrioti de présidenten
I'affàirr; M. Schwebel, président de ieu Cour; MM. Oda, Bedjaoui,
Guillaume, Ranjeva, Herczegh, Fleischhauer,Koroma, Mlne Higgins,
MM. Parra-Aranguren,Kooijmans,juges;
CONTRE: MM. Shi, Vereshchetinj,ugesM. Kreia,jugr ad hoc;
2) Par quatorze voix contre une,

Réserve la suite de la procédure.

POUR: M. Weeramantry, vice-pr.c;si&nt,uisant,/Onctionde prk.rsidenten
I'uflairaM. Schwebel,prhident de la Cour; MM. Bedjaoui,Guillaume,
Ranjeva,Herczegh,Shi, FleischhauerK, oroma,Vereshchetin,Mm' Higgins,
MM. Parra-Aranguren,Kooijmans,juges; M. Kreca,juge adhoc;
CONTR~ :M. Oda,juge. Fait en français et en anglais, le texte français faisant foi, au Palais de
la Paix,à La Haye, le deux juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, en
trois exemplaires, dont l'un restera dépaux archives de la Cour et les
autres seront transmis respectivement au Gouvernement de la Répu-

blique fédéralede Yougoslavie et au Gouvernement de la République
française.

Le vice-président,
(Signé) Christopher G. WEERAMANTRY.

Le greffier,
(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA.

M. WEERAMANTRv Yi,e-président, faisant fonction de président en
l'affaire, etM. SHI, KOROMA et VERESHCHETI jNg,es, joignent des
déclarationsiil'ordonnance.

MM. ODAet PARRA-ARANGURjE ug,s, joignentiil'ordonnance les
exposésde leur opinion individuelle.

M. KRECAj,uge ad hoc, joint à l'ordonnance l'exposéde son opinion
dissidente.

(Paraphé) C.G.W
(Paraphé) E.V.O.

Bilingual Content

COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ETORDONNANCES

AFFAIRE RELATIVE À LA LICÉITÉ

DE L'EMPLOI DE LA FORCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

ORDONNANCE DU 2 JUIN 1999

INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCERNING

LEGALITY OF USE OF FORCE

(YUGOSLAVIA vFRANCE)

REQUEST FOR THE INDICATION OF PROVISIONAL
MEASURES

ORDER OF 2 JUNE 1999 Mode officiel de citation:
Licéitéde l'emploi de laforce (Yougoslavc.France),
mesures cons~rvatoire., rdonnance du 2 juin 1999,
C.1.J. Recueil 1999p. 363

Officia1citati:n
Legality of Use of Force (Yugoslaviv.France),
Provisional Measures, Order of 2 June 1999,
1.C.J. Reports 1999p. 363

~àevenîe: 729 (
ISSN 0074-4441 Sales number
ISBN 92-1-070797-4 2 JUIN 1999

ORDONNANCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

LEGALITY OF USE OF FORCE

(YUGOSLAVIA v.FRANCE)

REQUEST FOR THE INDICATION OF PROVISIONAL
MEASURES

2 JUNE 1999

ORDER COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

1999 ANNÉE 1999
2 juin
Ràno107néral 2 juin1999

AFFAIRE RELATIVE À LA LICÉITÉ

DE L'EMPLOI DE LA FORCE

(YOUGOSLAVIE c. FRANCE)

DEMANDE EN INDICATION DE MESURES
CONSERVATOIRES

ORDONNANCE

Présents: M. WEERAMANTRvY ic,e-président,faisunr fonction de prési-
dent en I'afjcuire; M. SCHWEBEp,résident de lu Cour;
MM. ODA,BEDJAOUG I,UILLAUMRA,NJEVAH,ERCZEGSH. I,
FLEISCHHAUER K,OROMA,VERESHCHETIN, Mme HIGGINS,
MM. PARRA-ARANGURE KO,OIJMANjS,es; M. KRECAj,uge
ad hoc; M. VALENCIA-OSPINgrel,fier.

La Cour internationale de Justice,
Ainsi composée,

Après délibéren chambre du conseil,
Vu les articles 41 et 48 du Statut de la Cour et les articles 73 et 74 de
son Règlement,
Vu la requête déposear la Républiquefédéralede Yougoslavie (ci-
aprèsdénomméela «Yougoslavie») au Greffe de la Cour le 29 avril 1999,
par laquelle elle a introduit une instance contre la République française
(ci-après dénomméela «France»)our violation de l'obligation de ne
pas recourir l'emploi de la force)).

Rend I'ordonnuncesuiiwn:e INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

YEAR 1999 1999
2 June
General List
2 June 1999 No. 107

CASE CONCERNING
LEGALITY OF USE OF FORCE

(YUGOSLAVIA v. FRANCE)

REQUEST FOR THE INDICATION OF PROVISIONAL
MEASURES

ORDER

Present: Vice-President WEERAMANTRA Yc,ting Preside;tPresident
SCHWEBELJ;udges ODA, BEDJAOUIG , UILLAUMER , ANJEVA,
HERCZEGH,SHI, FLEISCHHAUERK , OROMA,VERESHCHETIN,
HIGGINS,PARRA-ARANGUREK NO, OIJMANSJ;udge ad hoc
KRECAR ; egistrur VALENCIA-OSPINA.

The International Court of Justice,

Composed as above,

After deliberation,
Having regard to Articles and 48 of the Statute of the Court and to
Articles3 and 74 of the Rules of Court,
Having regard to the Application by the Federal Republic of-

slavia (hereinafter "Yugoslavia") filed in the Registry of the Court on
29 April 1999,instituting proceedings against the French Republic
inafter "France") "for violation of the obligation not to use force",

Mukes thefolloiving Order: 1. Considérant que, dans cette requête, la Yougoslaviedéfinit l'objet
du différend ainsique suit:

((L'objet du différend porte sur les actes commis par la Répu-
blique française, en violation de son obligation internationale de ne
pas recourirà l'emploi de la force contre un autre Etat, de I'obliga-
tion de ne pas s'immiscerdans lesaffaires intérieuresd'un autre Etat,
de I'obligation de ne pas porter atteintela souveraineté d'unautre
Etat, de l'obligation de protégerlespopulations civileset lesbiens de
caractère civil en temps de guerre, de I'obligation de protégerl'envi-
ronnement, de I'obligation touchantà la libertéde navigation sur les
cours d'eau internationaux, de I'obligation concernant les droits et
libertésfondamentaux de la personne humaine, de I'obligation de ne
pas utiliser des armes interdites, de I'obligation de ne pas soumettre
intentionnellement un groupe national à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique));

2. Considérant que, dans ladite requête, laYougoslavie, pour fonder
la compétencede la Cour, invoque l'article IX de la convention pour la
prévention et la répressiondu crime de génocide,adoptéepar I'Assem-
bléegénérale desNations Unies le 9 décembre1948(ci-aprèsdénommée
la ((convention sur le génocide))) et le paragraphe 5 de l'article 38 du
Règlementde la Cour;
3. Considérant que, dans sa requête,la Yougoslavie expose que les

demandes qu'elle soumet à la Cour sont fondéessur les faits ci-après:
«Le Gouvernement de la Républiquefrançaise, conjointement avec
les gouvernements d'autres Etats membres de l'OTAN, a recouru à
l'emploi de la force contre la Républiquefédéralde Yougoslavie en
prenant part au bombardement de cibles dans la Républiquefédérale
de Yougoslavie. Lors des bombardements de la Républiquefédérale

de Yougoslavie, des cibles militaires et civiles ont été attaqu. nU
grand nombre de personnes ont ététuées,dont de très nombreux
civils. Des immeubles d'habitation ont subi des attaques. Un grand
nombre d'habitations ont été détruites. D'énormes dégâotn st été
causés àdes écoles,des hôpitaux, des stations de radiodiffusion et de
télévision. es structures culturelles et sanitaires. ainsi au'a des lieux
de culte. Nombre de ponts, routes et voies de chemin de fer ont été
détruits. Les attaques contre des raffineries de pétroleet des usines
chimiques ont eu de graves effets dommageables pour l'environne-
ment de villes et de villages de la Républiquefédéralede Yougosla-
vie. L'emploi d'armes contenant de l'uranium appauvri a de lourdes
conséquencespour la viehumaine. Les actes susmentionnésont pour
effet de soumettre intentionnellement un groupe ethniquedescondi-
tions devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle. Le
Gouvernement de la République française prend part a l'entraîne-
ment, à l'armement, au financement, a l'équipementet à l'approvi-
sionnement de laprétendue((arméede libérationdu Kosovo»; 1. Whereas in that Application Yugoslavia defines the subject of the
dispute as follows:

"The subject-matter of the dispute are acts of the Republic of
France by which it has violated its international obligation banning
the use of force against another State, the obligation not to intervene
in the interna1 affairs of another State,the obligation not to violate
the sovereignty of another State, the obligation to protect the civil-
ian population and civilian objects in wartime, the obligation to pro-
tect the environment, the obligation relating to free navigation on
international rivers, the obligation regarding fundamental human
rights and freedoms, the obligation not to use prohibited weapons,
the obligation not to deliberately inflict conditions of life calculated
to cause the physical destruction of a national group";

2. Whereas in the said Application Yugoslavia refers, as a basis for the
jurisdiction of the Court, to ArticleIX of the Convention on the Preven-
tion and Punishment of the Crime of Genocide, adopted by the General
Assembly of the United Nations on 9 December 1948 (hereinafter the
"Genocide Convention"), and to Article 38, paragraph 5, of the Rules of
Court;
3. Whereas in its Application Yugoslavia States that the claims sub-

mitted by it to the Court are based upon the following facts:
"The Government of the Republic of France, together with the
Governments of other Member States of NATO, took part in the
acts of use of force against the Federal Republic of Yugoslavia by
taking part in bombing targets in the Federal Republic of Yugosla-

via. In bombing the Federal Republic of Yugoslavia military and
civilian targets were attacked. Great number of people were killed,
including a great many civilians. Residential houses came under
attack. Numerous dwellings were destroyed. Enormous damage was
caused to schools, hospitals, radio and television stations, cultural
and health institutions and to places of worship. A large number of
bridges, roads and railway lines were destroyed. Attacks on oil refin-
eries and chemical plants have had serious environmental effects on
cities, towns and villagesin the Federal Republic of Yugoslavia. The
use of weapons containing depleted uranium is having far-reaching
consequences for human life. The above-mentioned acts are deliber-
ately creating conditions calculated at the physical destruction of an
ethnie group, in whole or in part. The Government of the Republic
of France is taking part in the training, arming, financing, equipping
and supplying the so-called 'Kosovo Liberation Army'";365 LICÉITE DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

et considérant qu'elle indique en outre que lesdites demandes reposent
sur les fondements juridiques suivants:

«Les actes susmentionnés du Gouvernement français constituent
une violation flagrante de l'obligation de ne pas recourirà l'emploi
de la force contre un autre Etat. En finançant, armant, entraînant et
équipantla prétendue ((arméede libérationdu Kosovo)), le Gouver-
nement français apporte un appui à des groupes terroristes et au
mouvement sécessionnistesur le territoire de la République fédérale
de Yougoslavie, en violation de l'obligation de ne pas s'immiscer
dans les affaires intérieuresd'un autre Etat. De surcroît, les dispo-
sitions de la convention de Genève de 1949 et du protocole addi-

tionnel no I de 1977relatives à la protection des civils et des biens
de caractère civil en temps de guerre ont étéviolées. Il y a eu aussi
violation de I'obligation de protéger l'environnement. La destruc-
tion de ponts sur le Danube enfreint les dispositions de l'article I
de la convention de 1948 relative a la libertéde navigation sur le
Danube. Les dispositions du pacte international relatif aux droits
civils et politiques et du pacte international relatif aux droits éco-
nomiques, sociaux et culturels de 1966 ont elles aussi étéviolées.
En outre, I'obligation énoncéedans la convention pour la préven-
tion et la répression du crime de génocide de ne pas soumettre
intentionnellement un groupe national à des conditions d'existence

devant entraîner sa destruction physique a étéviolée. De plus,
les activités auxquelles la République française prend part sont
contraires au paragraphe 1 de l'article 53 de la Charte des Nations
Unies »;
4. Considérant que les demandes de la Yougoslavie sont ainsi formu-

léesdans la requête:
((LeGouvernement de la Républiquefédérale de Yougoslavie prie
la Cour internationale de Justice de dire et juger:

- qu'en prenant part aux bombardements du territoire de la Répu-
blique fédéralede Yougoslavie, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas recourirà l'emploide la force contre un
autre Etat;
- qu'en prenant part à l'entraînement, a l'armement, au finance-
ment, à l'équipement et à l'approvisionnement de groupes terro-
ristes, savoir la prétendue((arméede libérationdu Kosovo », la
République française a agi contre la République fédéralede

Yougoslavie, en violation de son obligation de ne pas s'immiscer
dans les affaires d'un autre Etat;
- qu'en prenant part à des attaques contre des cibles civiles, la
République française a agi contre la République fédéralede
Yougoslavie, en violation de son obligation d'épargnerla popu-
lation civile, lescivils et les biens de caractérecivil; LEGALITY OF USE OF FORCE (ORDER 2 VI 99) 365

and whereas it further states that the said claims are based on the follow-
ing legal grounds:

"The above acts of the Republic of France represent a gross viola-
tion of the obligation not to use force against another State. By
financing, arming, training and equippingthe so-called 'Kosovo Lib-
eration Army', support is given to terrorist groups and the secession-

ist movement in the territory of the Federal Republic of Yugoslavia
in breach of the obligation not to intervene in the interna1 affairs of
another State. In addition, the provisions of the Geneva Convention
of 1949and of the Additional Protocol No. 1of 1977on the protec-
tion of civilians and civilian objects in time of war have been vio-
lated. The obligation to protect the environment has also been
breached. The destruction of bridges on the Danube is in contraven-
tion of the provisions of Article 1 of the 1948 Convention on free
navigation on the Danube. The provisions of the International Cov-
enant on Civil and Political Rights and of the International Cov-

enant on Economic, Social and Cultural Rights of 1966 have also
been breached. Furthermore, the obligation contained in the Con-
vention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide
not to impose deliberately on a national group conditions of life cal-
culated to bring about the physical destruction of the group has been
breached. Furthermore, the activities in whichtheRepublic of France
is taking part are contrary to Article 53, paragraph 1,of the Charter
of the United Nations";

4. Whereas the claims of Yugoslavia are formulated as follows in the
Application :

"The Government of the Federal Republic of Yugoslavia requests
the International Court of Justice to adjudge and declare:

- by taking part in the bombing of the territory of the Federal
Republic of Yugoslavia, the Republic of France has acted against
the Federal Republic of Yugoslavia in breach of its obligation
not to use force against another State;

- by taking part in the training, arming, financing, equipping and
supplying terrorist groups, i.e. the so-called 'Kosovo Liberation
Army', the Republic of France has acted against the Federal
Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to inter-
vene in the affairs of another State;

- by taking part in attacks on civilian targets, the Republic of
France has acted against the Federal Republic of Yugoslavia in
breach of its obligation to spare the civilian population, civilians
and civilian objects; LICÉITÉ DE L'EMPLOIDE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

qu'en prenant part à la destruction ou à l'endommagement de
monastères, d'édificesculturels, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas commettre d'actes d'hostilitédirigés
contre des monuments historiques, des Œuvresd'art ou des lieux
de culte constituant le patrimoine culturel ou spirituel d'un
peuple;
qu'en prenant part à l'utilisation de bombes en grappe, la Répu-

blique française a agi contre la Républiquefédéralede Yougo-
slavie, en violation de son obligation de ne pas utiliser des armes
interdites, c'est-à-dire des armes de natureà causer des maux
superflus;
qu'en prenant part aux bombardements de raffineries de pétrole
et d'usines chimiques, la République française a agi contre la
Républiquefédéralede Yougoslavie, en violation de son obliga-
tion de ne pas causer de dommages substantiels à l'environne-
ment;
qu'en recourant a l'utilisation d'armes contenant de l'uranium
appauvri, la République française a agi contre la République
fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation de ne pas
utiliser des armes interdites et de ne pas causer de dommages de
grande ampleur à la santé et a l'environnement;

qu'en prenant part au meurtre de civils,à la destruction d'entre-
prises, de moyens de communication et de structures sanitaires et
culturelles, la République française a agi contre la République
fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation de res-
pecter le droit la vie, le droit au travail, ledàol'information,
le droit aux soins de santé ainsi que d'autres droits fondamen-
taux de la personne humaine;
qu'en prenant part a la destruction de ponts situéssur des cours
d'eau internationaux, la République française a agi contre la
Républiquefédéralede Yougoslavie, en violation de son obliga-
tion de respecter la libertéde navigation sur lescours d'eau inter-
nationaux :
qu'en prenant part aux activitésénuméréecsi-dessus et en parti-

culier en causant des dommages énormes à l'environnement eten
utilisant de l'uranium appauvri, la République française a agi
contre la République fédéralede Yougoslavie, en violation de
son obligation de ne pas soumettre intentionnellement un groupe
national à des conditions d'existencedevant entraîner sa destruc-
tion physique totale ou partielle;
que la République française porte la responsabilité de la viola-
tion des obligations internationales susmentionnées;
que la République française est tenue de mettre fin immédiate-
ment à la violation des obligations susmentionnéesà l'égardde
la Républiquefédéralede Yougoslavie;
que la Républiquefrançaise doit réparation pour les préjudices- by taking part in destroying or damaging monasteries, monu-

ments of culture, the Republic of France has acted against the
Federal Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to
commit any act of hostility directed against historical monu-
ments, works of art or places of worship which constitute cul-
tural or spiritual heritage of people;

- by taking part in the use of cluster bombs, the Republic of

France has acted against the Federal Republic of Yugoslavia in
breach of its obligation not to use prohibited weapons, i.e. weap-
ons calculated to cause unnecessary suffering;

by taking part in the bombing of oil refineries and chemical
plants, the Republic of France has acted against the Federal
Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to cause
considerable environmental damage;

- by taking part in the use of weapons containing depleted ura-
nium, the Republic of France has acted against the Federal
Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to use
prohibited weapons and not to cause far-reaching health and
environmental damage;
- by taking part in killing civilians,destroying enterprises, commu-
nications, health and cultural institutions, the Republic of France

has acted against the Federal Republic of Yugoslavia in breach
of its obligation to respect the right to life, the right to work, the
right to information, the right to health care as well as other
basic human rights;

by taking part in destroying bridges on international rivers, the
Republic of France has acted against the Federal Republic of
Yugoslavia in breach of its obligation to respect freedom of

navigation on international rivers;

- by taking part in activities listed above, and in particular by
causing enormous environmental damage and by using depleted
uranium, the Republic of France has acted against the Federal
Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to delib-
erately inflict on a national group conditions of lifecalculated to

bring about its physical destruction, in whole or in part;

- the Republic of France is responsible for the violation of the
above international obligations;
- the Republic of France is obliged to stop immediately the viola-
tion of the above obligations vis-à-vis the Federal Republic of
Yugoslavia;
- the Republic of France is obliged to provide compensation for causés à la République fédéralede Yougoslavie ainsi qu'à ses
citoyens et personnes morales));

et considérant qu'au terme de sa requêtela Yougoslavie se réservele
droit de modifier et de complétercelle-ci;
5. Considérant que, le 29 avril 1999,immédiatement aprèsle dépôtde
sa requête,la Yougoslavie a en outre présenté unedemande en indication
de mesures conservatoires invoquant l'article 73 du Règlement de la
Cour; et que la demande était accompagnée d'unvolume d'annexes pho-
tographiques produites à titre de ((preuves));
6. Considérant que, à l'appui de sa demande en indication de mesures
conservatoires, la Yougoslavie soutient notamment que, depuis le début
des bombardements contre son territoire, et du fait de ceux-ci, environ

mille civils,dont dix-neuf enfants, ont été tuéest plus de quatre mille cinq
cents grièvement blessés;que la vie de trois millions d'enfants est mena-
cée;que des centaines de milliers de personnes ont été exposéesà des gaz
toxiques; qu'environ un million de personnes sont privéesd'approvision-
nement en eau; qu'environ cinq cent mille travailleurs ont perdu leur
emploi; que deux millions de personnes sont sans ressources et dans
l'impossibilitéde se procurer le minimum vital; et que les réseauxroutier
et ferroviaire ont subi d'importants dégâts; considérant que, dans sa de-
mande en indication de mesures conservatoires, la Yougoslavie énumère
par ailleurs les cibles qui auraient étéviséespar les attaques aérienneset
décriten détailles dommages qui leur auraient étéinfligés(ponts, gares
et lignes de chemins de fer, réseauroutier et moyens de transport, aéro-
ports, commerce et industrie, raffineries et entrepôts de matières pre-
mières liquides et de produits chimiques, agriculture, hôpitaux et

centres médicaux, écoles,édificespublics et habitations, infrastructures,
télécommunications, monuments historiques et culturels et édifices
religieux); et considérant que la Yougoslavie en conclut ce qui suit:

«Les actes décrits ci-dessus ont causé desmorts ainsi que des
atteintesà l'intégrité physiqueet mentale de la population de la
Républiquefédéralede Yougoslavie, de trèsimportants dégâts,une
forte pollution de I'environnement, de sorte que la population you-
goslave setrouve soumise intentionnellement àdes conditions d'exis-
tence devant entraîner la destruction physique totale ou partielle de
ce groupe));

7. Considérant que, au terme de sa demande en indication de mesures
conservatoires, la Yougoslavie préciseque

((Siles mesures demandéesne sont pas adoptées,il y aura de nou-
velles pertes en vies humaines, de nouvelles atteintes à l'intégrité
physique et mentale de la population de la République fédéralede
Yougoslavie, d'autres destructions de cibles civiles, une forte pollu-
tion de I'environnement et lapoursuite de la destruction physique de
la population de Yougoslavie»; LEGALITY OF USE OF FORCE (ORDER 2 VI 99) 367

the damage done to the Federal Republic of Yugoslavia and to
its citizens and juridical persons";

and whereas, at the end of its Application, Yugoslavia reserves the right
to amend and supplement it;
5. Whereas on 29 April 1999,immediately after filing its Application,
Yugoslavia also submitted a request for the indication of provisional
measures pursuant to Article 73 of the Rules of Court; and whereas that
request was accompanied by a volume of photographic annexes pro-
duced as "evidence" ;
6. Whereas, in support of its request for the indication of provisional
measures, Yugoslavia contends inter ulia that, since the onset of the
bombing of its territory, and as a result thereof, about 1,000 civilians,
including 19 children, have been killed and more than 4,500 have sus-
tained serious injuries; that the livesof three million children are endan-
gered; that hundreds of thousands of citizens have been exposed to poi-

sonous gases; that about one million citizens are short of water supply;
that about 500,000 workers have become jobless; that two million citi-
zens have no means of livelihood and are unable to ensure minimum
means of sustenance; and that the road and railway network has suffered
extensive destruction; whereas, in its request for the indication of provi-
sional measures, Yugoslavia also lists the targets alleged to have come
under attack in the air strikes and describes in detail the damage alleged
to have been inflicted upon them (bridges, railway lines and stations,
roads and means of transport, airports, industry and trade, refineriesand
warehouses storing liquid raw materials and chemicals, agriculture, hos-
pitals and health care centres, schools, public buildings and housing
facilities, infrastructure, telecommunications, cultural-historical monu-
ments and religious shrines); and whereas Yugoslavia concludes from

this that:
"The acts described above caused death, physical and mental
harm to the population of the Federal Republic of Yugoslavia; huge

devastation; heavy pollution of the environment, so that the Yugo-
slav population is deliberately imposed conditions of life calculated
to bring about physical destruction of the group, in whole or in
part" ;

7. Whereas, at the end of its request for the indication of provisional
measures, Yugoslavia States that

''If the proposed measure were not to be adopted, there will be
new losses of human life, further physical and mental harm inflicted
on the population of the FR of Yugoslavia, further destruction of
civilian targets, heavy environmental pollution and further physical
destruction of the people of Yugoslavia";368 LICÉITÉDE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

et considérant que, tout en se réservant le droit de modifier et de com-
pléter sademande, elle prie la Cour d'indiquer la mesure suivante:
<<LaRépublique françaisedoit cesser immédiatement derecourir à
l'emploi de la force et doit s'abstenir de tout acte constituant une
menace de recours ou un recours à l'emploi de la force contre la

République fédéralede Yougoslavie »;
8. Considérant que la demande en indication de mesures conserva-
toires était accompagnéed'une lettre de l'agent de la Yougoslavie, adres-
séeau présidentet aux membres de la Cour, qui étaitainsi libellée:

«J'ai l'honneur d'appeler l'attention de la Cour sur le dernier
bombardement qui a frappé le centre de la ville de Surdulica le
27 avril 1999 a midi et entrainéla mort de civils, pour la plupart des
enfants et des femmes, et de vous rappeler les morts de Kursumlija,
Aleksinac et Cuprija, ainsi que le bombardement d'un convoi de
réfugiés etde l'immeuble abritant la radio et la télévision serbes,

pour neciter que quelques exemplesdes atrocités quechacunconnaît.
Je tiens en conséquence à prévenir la Cour qu'il est fort probable
qu'ily aura encore d'autres victimes civileset militaires.
Considérant le pouvoir conféré à la Cour aux termes du para-
graphe 1 de l'article 75, de son Règlement, et compte tenu de I'ex-
trêmeurgence de la situation néedes circonstances décritesdans les
demandes en indication de mesures conservatoires, je prie la Cour
de bien vouloir se prononcer d'office sur les demandes présentées
ou de fixer une date pour la tenue d'une audience dans les meilleurs
délais);

9. Considérant que le 29 avril 1999, date à laquelle la requêteet la
demande en indication de mesures conservatoires ont été déposéeasu
Greffe, le greffiera fait tenir au Gouvernement français des copies signées
de la requêteet de la demande, conformément au paragraphe 4 de l'ar-
ticle 38 et au paragraphe 2 de I'article 73 du Règlement de la Cour; et
qu'il a égalementfait tenir audit gouvernement une copie des documents

qui accompagnaient la requêteet la demande en indication de mesures
conservatoires ;
10. Considérant que, le 29 avril 1999,le greffier a aviséles Parties que
la Cour avait décidé,conformément au paragraphe 3 de l'article 74 de
son Règlement, de tenir audience les 10 et 11 mai 1999 aux fins de les
entendre en leurs observations sur la demande en indication de mesures
conservatoires ;
11. Considérantqu'en attendant que lacommunication prévueau para-
graphe 3 de l'article40 du Statut età l'article42 du Règlementde la Cour
ait été effectuépear transmission du texte bilingue impriméde la requête
aux Membres des Nations Unies et aux autres Etats admis à ester devant
la Cour, le greffier a, le 29 avril 1999,informéces Etats du dépôt de la

requêteet de son objet, ainsi que du dépôt de la demande en indication
de mesures conservatoires: LEGALITY OF USE OF FORCE (ORDER 2 VI 99) 368

and whereas, while reserving the right to amend and supplement its
request, Yugoslavia requests the Court to indicate the following measure:

"The Republic of France shall cease immediately its acts of use of
force and shall refrain from any act of threat or use of force against
the Federal Republic of Yugoslavia";

8. Whereas the request for the indication of provisional measures was
accompanied by a letter from the Agent of Yugoslavia, addressed to the

President and Members of the Court, which read as follows:
"1 have thehonour to bring to the attention of the Court the latest
bombing of the central area of the town of Surdulica on 27 April
1999at noon resulting in losses of lives of civilians, most of whom
were children and women, and to remind of killings of peoples in
Kursumlija, Aleksinac and Cuprija, as well as bombing of a refugee

convoy and the Radio and Television of Serbia, just to mention
someof the well-known atrocities. Therefore, 1would like to caution
the Court that there is a highest probability of further civilian and
military casualties.
Considering the power conferred upon the Court by Article 75,
paragraph 1, of the Rules of Court and having in mind the greatest
urgency caused by the circumstances described in the Requests for
provisional measure of protection 1 kindly ask the Court to decide
on the submitted Requests proprio nlotuorto fixa date for a hearing
at earliest possible time";

9. Whereas on 29 April 1999,the day on which the Application and
the request for the indication of provisional measures were filed in the
Registry, the Registrar sent to the French Government signed copies of
the Application and of the request, in accordance with Article 38, para-
graph 4, and Article 73, paragraph 2, of the Rules of Court; and whereas
he also sent to that Government copies of the documents accompanying
the Application and the request for the indication of provisional meas-
ures;

10. Whereas on 29 April 1999the Registrar informed the Parties that
the Court had decided, pursuant to Article 74, paragraph 3, of the Rules
of Court, to hold hearings on 10and 11May 1999,where they would be
able to present their observations on the request for the indication ofo-
visional measures;
Il. Whereas, pending the notification under Article 40, paragraph 3,
of the Statute and Article 42 of the Rules of Court, by transmittal of the
printed bilingual text of the Application to the Members of the United
Nations and other States entitled to appear before the Court, the Regis-
trar on 29 April 1999informed those States of the filing of the Applica-
tion and of its subject-matter, and of the filing of the request for the
indication of provisional measures; 12. Considérant que, la Cour ne comptant pas sur le siègede juge de
nationalitéyougoslave, le Gouvernement yougoslave a invoquéles dispo-
sitions de I'article 31du Statutde la Cour et a désignéM. Milenko KreEa
pour siégeren qualité dejuge ad hocen l'affaire; et qu'aucune objection
a cette désignation n'a été soulevédeans le délaifixéà cet effet en vertu
du paragraphe 3 de I'article35 du Règlementde la Cour;
13. Considérant que, aux audiences publiques qui ont ététenues entre
le 10et le12 mai 1999,des observations orales sur la demande en indica-
tion de mesures conservatoires ont étéprésentées:

aunom delu Yougosluvie:

par M. Rodoljub Etinski, agent,
M. Ian Brownlie,
M. Paul J. 1.M. de Waart,
M. Eric Suy,
M. Miodrag MitiE,
M. Olivier Corten;

aunom delaFrance:
par M. Ronny Abraham, agent,

M. Alain Pellet;
14. Considérant que, dans cette phase de la procédure,les Parties ont
présenté lesconclusions suivantes :

aunom de laYougoslavir:

«[L]a Cour [est priée]d'indiquer la mesure conservatoire sui-
vante:
[L]aRépublique française ..doi[t]cesserimmédiatement derecou-
rira l'emploi de la force et doi[t] s'abstenir de tout acte constituant
une menace de recours ou un recours à l'emploide la force contre la
République fédéralede Yougoslavie >;

aunom delaFrance:

«[L]a France estime que la Cour ne peut donner suite ala requête
de la Républiquefédéralede Yougoslavie. Aucune des deux bases de
compétenceinvoquées n'étaitpertinente. Ni l'une ni l'autre ne sau-
rait fonder la compétence dela Cour en l'espèce.))
«[Il est] demand[é]a la Cour, au nom de la Républiquefrançaise,
de bien vouloir prononcer la radiation du rôle généralde la requête

forméepar la République fédéralede Yougoslavie));

15. Considérant que la Cour est profondément préoccupéepar le
drame humain, les pertes en vieshumaines et les terribles souffrances que 12. Whereas, since the Court includes upon the bench no judge of
Yugoslav nationality, the Yugoslav Government has availed itself of the
provisions of Article 31 of the Statute of the Court to choose Mr.
Milenko Kreta to sit as judge ud hoc in the case; and whereas no objec-
tion to that choice was raised within the time-limit fixed for the purpose
pursuant to Article 35, paragraph 3, of the Rules of Court;
13. Whereas, at the public hearings held between 10and 12May 1999,
oral observations on the request for the indication of provisional meas-
ures were presented by the following:

On hrhalf'of Yugosluvia.

Mr. Rodoljub Etinski, Agent,
Mr. Ian Brownlie,
Mr. Paul J.1. M. de Waart,
Mr. Eric Suy,
Mr. Miodrag Mitic,
Mr. Olivier Corten;

On behalJ'9f France.

Mr. Ronny Abraham, Agent,
Mr. Alain Pellet;
14. Whereas, in this phase of the proceedings, the Parties presented the
following submissions :

On behulf'of Yugoslu~~ia.

"[Tlhe Court [is asked] to indicate the following provisional
measure :
[Tlhe Republic of France . . .shall cease immediately the acts of
use of force and shall refrain from any act of threat or use of force
against the Federal Republic of Yugoslavia";

On behalf'of France.

"France considers that the Court cannot proceed upon the Appli-
cation of the Federal Republic of Yugoslavia. Neither of the two
bases of jurisdiction relied upon is pertinent. Neither of them is
capable of founding the jurisdiction of the Court in this case";
"The Court [is requested], on behalf of the French Republic, to

order that the Application submitted by the Federal Republic of
Yugoslavia be removed from the General List" ;

15. Whereas the Court is deeply concerned with the human tragedy,
the loss of life, and the enormous suffering in Kosovo which form the370 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

connaît le Kosovo et qui constituent la toile de fond du présent différend,
ainsi que par les victimes et les souffrances humaines que l'on déplorede
façon continue dans l'ensemble de la Yougoslavie;
16. Considérant que la Cour est fortement préoccupéepar l'emploi de
la force en Yougoslavie; que, dans les circonstances actuelles, cet emploi
soulèvedes problèmes trèsgraves de droit international;
17. Considérant que la Cour garde présents à l'esprit les buts et les

principes de la Charte des Nations Unies, ainsi que lesresponsabilitésqui
lui incombent, en vertu de ladite Charte et du Statut de la Cour, dans le
maintien de la paix et de la sécurité;
18. Considérant que la Cour estime nécessairede souligner que toutes
lesparties qui se présententdevant elledoivent agir conformément àleurs
obligations en vertu de la Charte des Nations Unies et des autres règles
du droit international,y compris du droit humanitaire;

19. Considérant qu'en vertu de son Statut la Cour n'a pas automati-
quement compétencepour connaître des différends juridiques entre les
Etats parties audit Statut ou entre les autres Etats qui ont été admis à
ester devant elle; que la Cour a déclaréà maintes reprises ((que l'un des

principes fondamentaux de son Statut est qu'ellene peut trancher un dif-
férendentre des Etats sans que ceux-ci aient consenti à sa juridiction))
(Timor orientul (Portugul c. Ausirulie), urrêl, C.I.J. Recueil 1995,
p. 101, par. 26); et que la Cour ne peut donc exercer sa compétence à
l'égardd'Etats parties à un différendque si ces derniers ont non seule-
ment accès à la Cour, mais ont en outre accepté sa compétence, soit d'une
manière générales ,oit pour le différendparticulier dont il s'agit;
20. Considérant que, en présence d'une demande en indication de
mesures conservatoires, point n'est besoin pour la Cour, avant de décider
d'indiquer ou non de telles mesures, de s'assurer de manière définitive
qu'elle a compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'ellene peut indi-
quer ces mesures que si les dispositions invoquéespar le demandeur sem-

blent prima Jucie constituer une base sur laquelle la compétence de la
Cour pourrait ètre fondée;

21. Considérant que la Yougoslavie, dans sa requête, prétenden pre-
mier lieu fonder la compétencede la Cour sur l'article IX de la conven-
tion sur le génocide,aux termes duquel:
«Les différendsentre les Parties contractantes relatiàsl'interpré-

tation, l'application ou l'exécutionde la présenteconvention, com-
pris ceux relatiàsla responsabilité d'unEtat en matièrede génocide
ou de l'un quelconque des autres actesénumérés à l'article III, seront
soumis à la Cour internationale de Justice, à la requêted'une partie
au différend»;background of the present dispute, and with the continuing loss of life
and human suffering in al1parts of Yugoslavia;

16. Whereas the Court is profoundly concerned with the use of force
in Yugoslavia; whereas under the present circumstances such use raises
very serious issues of international law;
17. Whereas the Court is mindful of the purposes and principles of the
United Nations Charter and of its own responsibilities in the mainte-
nance of peace and security under the Charter and the Statute of the
Court;
18. Whereas the Court deems it necessary to emphasize that al1parties
appearing before it must act in conformity with their obligations under
the United Nations Charter and other rules of international law, includ-
ing humanitarian law;

19. Whereas the Court, under its Statute, does not automatically have
jurisdiction over legal disputes between States parties to that Statute or
between other States to whom access to the Court has been granted;
whereas the Court has repeatedly stated "that one of the fundamental
principles of itsStatute is that it cannot decide a dispute between States
without the consent of those States to itsjurisdiction" (Eusr Timor (Por-

tugal v. Australiu), Judgment, I.C.J. Reports 1995, p. 101,para. 26);and
whereas the Court can therefore exercisejurisdiction only between States
parties to a dispute who not only have access to the Court but also have
accepted the jurisdiction of the Court, either in general form or for the
individual dispute concerned;
20. Whereas on a request for provisional measures the Court need not,
before deciding whether or not to indicate them, finally satisfy itself that
it has jurisdiction on the merits of the case, yet it ought not to indicate
such measures unless the provisions invoked by the applicants appear,
prima facie, to afford a basis on which the jurisdiction of the Court might
be established:

21. Whereas in its Application Yugoslavia claims in the first place to
found the jurisdiction of the Court on Article IX of the Genocide Con-
vention, which provides :

"Disputes between the Contracting Parties relating to the interpre-
tation, application or fulfilment of the present Convention, including
those relating to the responsibility of a State for genocide or for any
of the other acts enumerated in article III, shall be submitted to the
International Court of Justice at the request of any of the parties to
the dispute";371 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD.2 VI 99)

et considérantque, danssa requête, la Yougoslavie indiqueque l'objet du
différendporte notammentsur «les actescommis par la Républiquefran-
çaise, en violation de son obligation international...de ne pas soumettre
intentionnellement un groupenational à des conditions d'existencedevant
entraîner sa destruction physique)); qu'en décrivantles faits sur lesquels
la requêteest fondée, la Yougoslavie précise:«Les actes susmentionnés
ont pour effet de soumettre intentionnellement un groupe ethnique àdes
conditions devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle));
qu'en exposant les fondements juridiques de la requête,elle soutient que
«l'obligation ...de ne pas soumettre intentionnellement un groupe natio-
nal a des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique
a été violée)); etque l'une des demandes au fond contenues dans la
requêteest ainsi formulée :

«qu'en prenant part aux activitésénuméréec si-dessus et en particu-
lier en causant des dommages énormes à I'environnement et en uti-
lisant de l'uranium appauvri, la Républiquefrançaise a agi contre la
République fédéralede Yougoslavie, en violation de son obligation
de ne pas soumettre intentionnellement un groupe national à des
conditions d'existencedevant entraîner sadestruction physique totale
ou partielle));

22. Considérant que la Yougoslavie soutient en outre que le bombar-
dement constant et intensif de l'ensemble de son territoire, y compris les
zones les plus peuplées,constitue «une violation grave de I'article II de la
convention sur le génocide));qu'elle fait valoir que «la pollution du sol,
de l'air et de l'eau, la destruction de l'économiedu pays, la contamination
de I'environnement par de l'uranium appauvri reviennent a soumettre la

nation yougoslave ë des conditions d'existence devant entraîner sa des-
truction physique)); qu'elle affirme que c'est lanation yougoslave tout
entière, en tant que telle, qui est prise pour cible; et qu'elle souligneque
le recoursa certaines armes, dont on connaît par avance lesconséquences
dommageables à long terme sur la santéet l'environnement, ou la des-
truction de la plus grande partie du réseaud'alimentation en électricité
du pays, dont on peut prévoird'avance lesconséquencescatastrophiques,
«témoigne[nt]implicitement de l'intention de détruire totalement ou par-
tiellement)) le groupe national yougoslave en tant que tel;
23. Considérantque la France soutient pour sa part que l'article IX de
la convention sur le génocide ne constituepas une base de compétenceen
l'espèce,«et cela de façon absolument manifeste)); et considérant que, se
référant à l'alinéac) de I'article II de la convention, elle indique que le
génocide,tel que le définitla convention de 1948, comporte deux élé-

ments, «[l']un objectif: la destruction en tout ou en partie d'un groupe
national ou religieux comme tel. L'autre subjectif: l'intention d'aboutirà
ce résultatqui est contraire ..aux ((principes de morale les plus élémen-
taires)))); qu'en ce qui concerne l'élémentbjectif, elleaffirme notamment
que «les forces de l'OTAN ..s'efforcent de ne causer aucun mal superflu
aux populations civiles)), que, «quant a l'allégation d'utilisationd'ura-and whereas in its Application Yugoslavia states that the subject of the
dispute concerns inter uliu "acts of the Republic of France by which it
has violated its international obligation .. .not to deliberately inflictcon-
ditions of life calculated to cause the physical destruction of a national
group"; whereas, in describing the facts on which the Application is

based, Yugoslavia states: "The above-mentioned acts are deliberately
creating conditions calculated at the physical destruction of an ethnic
group, in whole or in part"; whereas, in its statement of the legal grounds
on which the Application is based, Yugoslavia contends that "the obliga-
tion . . not to impose deliberately on a national group conditions of life
calculated to bring about the physical destruction of the group has been
breached"; and whereas one of the claims on the merits set out in the
Application is formulated as follows:
"by taking part in activities listed above, and in particular
by causing enormous environmental damage and by using depleted

uranium, the Republic of France has acted against the Federal
Republic of Yugoslavia in breach of its obligation not to deliberately
inflict on a national group conditions of life calculated to bring
about its physical destruction, in whole or in part";

22. Whereas Yugoslavia contends moreover that the sustained and
intensive bombing of the whole of its territory, including the most heavily
populated areas, constitutes "a serious violation of Article II of the
Genocide Convention"; whereas it argues that "the pollution of soil, air

and water, destroying the economy of the country, contaminating the
environment with depleted uranium, inflicts conditions of life on the
Yugoslav nation calculated to bring about its physical destruction";
whereas it asserts that it is the Yugoslav nation as a whole and as such
that is targeted; and whereas it stresses that the use of certain weapons
whose long-term hazards to health and the environment are already
known, and the destruction of the largest part of the country's power
supply system, with catastrophic consequences of which the Respondent
must be aware, "impl[y] the intent to destroy, in whole or in part", the
Yugoslav national group as such;

23. Whereas for its part France contends that Article IX of the Geno-
cide Convention does not constitute a basis of jurisdiction in this case,
and that "this is absolutely manifest"; whereas, referring to Article II (c)
of the Convention, France states that genocide, as defined by the 1948
Convention, consists of two elements: "One is objective: the destruction
of al1or part of a national or religious group as such. The other is sub-
jective: an intention to achieve this result, which is in conflict . . with
'the most elementary principles of morality'"; and whereas, with regard
to the objective element, France asserts inter ulia that "the NATO forces
. ..are making al1efforts to ensure that the civilian population suffers no

needless harm", that, "as to the allegation of the use of depleted uranium,372 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

nium affaibli, ...les forces armées françaises [ne sont] dotées d'aucune
arme de ce type)) et que ((l'utilisation de telle ou telle arme, surtout
quand elle n'est nullement illicite, est sans rapport aucun avec la défini-
tion du génocide));et qu'ence qui a trait à l'élémens tubjectif, la France
souligne ((l'absencemanifeste en l'espècede l'élémenitntentionnel))et «le
silence total de 1'Etatrequérant)) sur ce point;
24. Considérantqu'il n'est pas contestéquetant la Yougoslavie que la
France sont parties à la convention sur le génocide,sans réserves;et que
I'articleIX de la convention semble ainsi constituer une base sur laquelle
la compétencede la Cour pourrait êtrefondée,pour autant que l'objet du
différendait trait à ((l'interprétation,l'application ou l'exécution))de la

convention, y compris lesdifférends ((relatifsà la responsabilitéd'un Etat
en matière de génocideou de I'un quelconque des autres actes énumérés
à I'article 111))de ladite convention;
25. Considérant que, à l'effet d'établir,même prima facie, si un diffé-
rend au sens de I'article IX de la convention sur le génocideexiste, la
Cour ne peut se borner à constater que l'une des parties soutient que la
convention s'applique alors que l'autre le nie; et que, au cas particulier,
elledoit rechercher si lesviolations de la convention all"guéesDarla You-
goslavie sont susceptibles d'entrer dans lesprévisionsde cet instrument et
si, par suite, le différend estde ceux dont la Cour pourrait avoir compé-
tence pour connaître rutione materiue par application de I'article IX

(cf.Plates-firmes pétrolières (République islamique d'Iran c. Etats- Unis
d'AmPrique), exception préliminaire, urrêt, C.I. J. Recueil 1996 (II),
p. 810, par. 16);
26. Considérantque la définitiondu génocide,figurant à I'article IIde
la convention sur le génocide,se lit comme suit:
«Dans la présente convention le génocides'entend de I'un quel-

conque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en
tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux,
comme tel :
u) meurtre de membres du groupe;
b) atteinte grave à l'intégritéphysique ou mentale de membres du
groupe ;
c) soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence
devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle;

d) mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e) transfert forcé d'enfants du groupe à un autre groupe));
27. Considérantqu'il apparaît à la Cour, d'aprèscette définition,«que
la caractéristiqueessentielle du génocide estla destruction intentionnelle
d'un ((groupe national, ethnique, racial ou religieux)))(Application de la
convention pour lu prévention et la répression du crimede génocide,me-
sures conservatoires, ordonnance du 13 septembre 1993, C.I.J. Recueil

1993, p. 345, par. 42); que le recours ou la menace du recours à l'emploi
de la force contre un Etat ne sauraient en soi constituer un acte de géno-
cide au sens de I'article II de la convention sur le génocide; etque, de. .. French armed forces have no weapons of this kind", and that "the
use of any given weapon, especiallywhen this is in no way illegal, has no
connection with the definition of genocide" ;and whereas with regard to
the subjective element France stresses "the manifest absence in this case
of the element of intention" and "the total silenceof the applicant State"
on this point;
24. Whereas it is not disputed that both Yugoslavia and France are
parties to the Genocide Convention without reservation; and whereas
Article IX of the Convention accordingly appears to constitute a basis on
which the jurisdiction of the Court might be founded to the extent that

the subject-matter of the dispute relates to "the interpretation, applica-
tion or fulfilment" of the Convention, including disputes "relating to the
responsibility of a State for genocide or for any of the other acts enumer-
ated in article III" of the said Convention;
25. Whereas, in order to determine, even prima facie, whether a dis-
pute within the meaning of Article IX of the GenocideConvention exists,
the Court cannot limit itself to noting that one of the Parties maintains
that the Convention applies, while the other denies it; and whereas in the
present case the Court must ascertain whether the breaches of the Con-
vention alleged by Yugoslavia are capableof falling within the provisions
of that instrument and whether, as a consequence, the dispute is one
which the Court has jurisdiction ratione materiue to entertain pursuant
to Article IX (cf.Oil Plaiforms (Islarnic Republic of Iran v.United States

of America), Prrliminary Objection, Juclgment, 1.C.J. Reports 1996 (II),
p. 810, para. 16);
26. Whereas the definition of genocide set out in Article II of the
Genocide Convention reads as follows:
"In the present Convention, genocide means any of the following
actscommitted with intent to destroy, in whole or in part, a national,
ethnical, racial or religious group, as such:

(u) Killing members of the group;
(b) Causing serious bodily or mental harm to members of the
group ;
(c) Deliberately inflicting on the group conditionsof life calculated
to bring about its physical destruction in whole or in part;
(dl Imposing measures intended to prevent births within the group;
(e) Forcibly transferring children of the group to another group";

27. Whereas it appears to the Court, from this definition, "that [the]
essential characteristic [of genocide] is the intended destruction of 'a
national, ethnical, racial or religious group'" (Application of'the Conven-
tion on the Prevention und Punishment of tlzr Crime of'Genocide, Provi-
sional Measurrs, Order of' 13 Septembrr 1993, 1.C. J. Reports 1993,
p. 345, para. 42); whereas the threat or use of force against a State can-
not in itselfconstitute an act of genocide within the meaning of Article II
of the Genocide Convention;and whereas, in the opinion of the Court, it373 LICEITÉDE L'EMPLOIDE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

l'avis de la Cour, il n'apparaît pas au présentstade de la procédureque
lesbombardements quiconstituent l'objet de la requêteyougoslave ((corn-
porte[nt] effectivement l'élémendt'intentionnalité,dirigécontre un groupe
comme tel, que requiert la disposition sus-citée))Licéitéde la menace ou
de l'emploi d'armes nucléaires. avis consultatif: C.I.J. Recueil 1996 (I),
p. 240, par. 26);
28. Considérant que la Cour n'est dèslors pas en mesure de conclure,
à ce stade de la procédure, que les actes que la Yougoslavie impute au
défendeur seraientsusceptibles d'entrer dans les prévisionsde la conven-
tion sur le génocide; etque I'article IX de la convention, invoqué par la
Yougoslavie, ne constitue partant pas une base sur laquelle la compé-

tence de la Cour pourrait primu,fucie êtrefondéedans le cas d'espèce;

29. Considérantque la Yougoslavie, dans sa requête, prétend en second
lieu fonder la compétencede la Cour sur le paragraphe 5 de I'article 38
du Règlement, ainsi libellé:

((5. Lorsque le demandeur entend fonder la compétence de la
Cour sur un consentement non encore donnéou manifestépar I'Etat
contre lequel la requêteest formée, la requêteest transmise à cet
Etat. Toutefois elle n'est pas inscrite au rôle généralde la Cour et
aucun acte de procéduren'est effectuétant que 1'Etatcontre lequel
la requête est forméen'a pas accepté la compétencede la Cour aux
fins de l'affaire))

30. Considérantque la France soutient que le paragraphe 5 de I'article
38 du Règlement estinopérantparce qu'elle n'accepte pas,en l'espèce,la
compétencede la Cour;
31. Considérant qu'il est manifesteque, en l'absence de consentement
de la France donné conformément au paragraphe 5 de l'article 38 du
Règlement, la Cour ne saurait avoir compétencedans la présente affaire,
même prima facie;

32. Considérant qu'il résultede ce qui précèdeque la Cour n'a pas
prima facie compétencepour connaître de la requêtede la Yougoslavie;

et qu'elle ne saurait dèslors indiquer quelque mesure conservatoire que
ce soità l'effetde protégerles droits qui y sont invoqués;
33. Considérant toutefois que les conclusions auxquelles la Cour est
parvenue en la présente procédure ne préjugene tn rien la compétencede
la Cour pour connaître du fond de l'affaire sur la base de I'articleX de
la convention sur le génocide, niaucune question relativea la recevabilité
de la requêteou au fond lui-même,et qu'elles laissentintact le droit du
Gouvernement yougoslave et du Gouvernement français de faire valoir
leurs moyens en la matière;does not appear at the present stageof the proceedings that the bombings
which form the subject of the Yugoslav Application "indeed entai1 the
element of intent, towards a group as such, required by the provision
quoted above" (Lrgulity of tlze Tlzreutor Useof Nuclear Weuponns,Advi-
sory Opinion, 1.C.J. Reports 1996 (I), p. 240, para. 26);

28. Whereas the Court is therefore not in a position to find, at this
stage of the proceedings, that the acts imputed by Yugoslavia to the
Respondent are capable of coming within the provisions of the Genocide

Convention; and whereas Article IX of the Convention, invoked by
Yugoslavia, cannot accordingly constitute a basis on which the jurisdic-
tion of the Court could prima facie be founded in this case;

29. Whereas in its Application Yugoslavia claims, in the second place,
to found the jurisdiction of the Court on Article 38, paragraph 5, of the
Rules of Court, which reads as follows:

"5. When the applicant State proposes to found thejurisdiction of
the Court upon a consent thereto yet to be given or manifested by
the State against which such application is made, the application
shall be transmitted to that State. It shall not however be entered in
the General List, nor any action be taken in the proceedings, unless
and until the State against which such application is made consents
to the Court's jurisdiction for thepurposes of the case";

30. Whereas France contends that Article 38, paragraph 5, of the
Rules of Court is without effect, because France does not accept the
jurisdiction of the Court in this case;
31. Whereas it is quite clear that, in the absence of consent by France,
given pursuant to Article 38, paragraph 5, of the Rules, the Court cannot
exercisejurisdiction in the present case, even prima facie;

32. Whereas it follows from what has been said above that the Court
lacks prima faciejurisdiction to entertain Yugoslavia's Application; and
whereas it cannot therefore indicate any provisional measure whatsoever
in order to protect the rights invoked therein;
33. Whereas, however, the findings reached by the Court in the present

proceedings in no way prejudge the question of the jurisdiction of the
Court to deal with the merits of the case under Article IX of the Geno-
cide Convention, or any questions relating to the admissibility of the
Application, or relating to the merits themselves; and whereas they leave
unaffected the right of the Governments of Yugoslavia and France to
submit arguments in respect of those questions;374 LICÉITÉ DE L'EMPLOI DE LA FORCE (ORD. 2 VI 99)

34. Considérantque la Cour ne saurait par suite accéder, àce stade de

la procédure, a la demande de la France tendant a ce que l'affaire soit
rayéedu rôle;

35. Considérantqu'il existeune distinction fondamentaleentre la ques-
tion de l'acceptation par un Etat de la juridiction de la Cour et la com-
patibilitéde certains actes avec le droit international; la compétenceexige

le consentement; la compatibilité ne peut êtreappréciéeque quand la
Cour examine le fond, après avoir établisa compétence etentendu les
deux parties faire pleinement valoir leurs moyens en droit;
36. Considérant que les Etats, qu'ils acceptent ou non la juridiction
de la Cour, demeurent en tout état de cause responsables des actes
contraires au droit international, y compris au droit humanitaire,
qui leur seraient imputables; que tout différend relatif la licéitde tels
actes doit êtreréglépar des moyens pacifiques dont le choix est laisséaux

parties conformément àl'article 33 de la Charte;
37. Considérant que dans ce cadre les parties doivent veiller a ne pas
aggraver ni étendrele différend;
38. Considérant que, lorsqu'un tel différend susciteune menace contre
la paix, une rupture de la paix ou un acte d'agression, le Conseil de sécu-
ritéest investi de responsabilités spéciales vertu du chapitre VI1de la
Charte;

39. Par ces motifs,

1) Par douze voix contre trois,

Rejette la demande en indication de mesures conservatoires présentée
par la Républiquefédéralede Yougoslavie le 29 avril 1999;

POUR: M. Weeramantry. vice-présidentf.aisunt foncrioti de présidenten
I'affàirr; M. Schwebel, président de ieu Cour; MM. Oda, Bedjaoui,
Guillaume, Ranjeva, Herczegh, Fleischhauer,Koroma, Mlne Higgins,
MM. Parra-Aranguren,Kooijmans,juges;
CONTRE: MM. Shi, Vereshchetinj,ugesM. Kreia,jugr ad hoc;
2) Par quatorze voix contre une,

Réserve la suite de la procédure.

POUR: M. Weeramantry, vice-pr.c;si&nt,uisant,/Onctionde prk.rsidenten
I'uflairaM. Schwebel,prhident de la Cour; MM. Bedjaoui,Guillaume,
Ranjeva,Herczegh,Shi, FleischhauerK, oroma,Vereshchetin,Mm' Higgins,
MM. Parra-Aranguren,Kooijmans,juges; M. Kreca,juge adhoc;
CONTR~ :M. Oda,juge. 34. Whereas in consequence the Court cannot, at this stage of the pro-
ceedings, accede to France's request that the case be removed from the
List;

35. Whereas there is a fundamental distinction between the question

of the acceptance by a State of the Court's jurisdiction and the compat-
ibility of particular acts with international law; the former requires con-
sent; the latter question can only be reached when the Court deals with
the merits after having established its jurisdiction and having heard full
legal arguments by both parties;
36. Whereas, whether or not States accept the jurisdiction of the
Court, they remain in any event responsible for acts attributable to them
that violate international law, including humanitarian law; whereas any

disputes relating to the legality of such acts are required to be resolved
by peaceful means, the choice of which, pursuant to Article 33 of the
Charter, is left to the parties;
37. Whereas in this context the parties should take care not to aggra-
vate or extend the dispute;
38. Whereas, when such a dispute gives rise to a threat to the peace,
breach of the peace or act of aggression, the Security Council has special

responsibilities under Chapter VI1of the Charter;

39. For these reasons,

(1) By twelve votes to three,
Rejects the request for the indication of provisional measures submit-

ted by the Federal Republic of Yugoslavia on 29 April 1999;
IN FAVOUR: Vice-President Weeramantry, Acting Presiu'rnt; President
Schwebel: Judge.~ Oda, Bedjaoui, Guillaume, Ranjeva, Herczegh,
Fleischhauer,Koroma, Higgins,Parra-Aranguren, Kooijmans;

AGAINST: Judges Shi, Vereshchetin;Judge ad hoc Kreca;

(2) By fourteen votes to one,

Rcservrs the subsequent procedure for further decision.
IN FAVOUR : Vice-Prc>.sidt>nWeeramantry, Acting President; President
Schwebel; Judges Bedjaoui. Guillaume, Ranjeva, Herczegh, Shi.
Fleischhauer, Koroma, Vereshchetin, Higgins, Parra-Aranguren,
Kooijmans; Judg? ad hocKreéa;

AGAINST: Judge Oda. Fait en français et en anglais, le texte français faisant foi, au Palais de
la Paix,à La Haye, le deux juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf, en
trois exemplaires, dont l'un restera dépaux archives de la Cour et les
autres seront transmis respectivement au Gouvernement de la Répu-

blique fédéralede Yougoslavie et au Gouvernement de la République
française.

Le vice-président,
(Signé) Christopher G. WEERAMANTRY.

Le greffier,
(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA.

M. WEERAMANTRv Yi,e-président, faisant fonction de président en
l'affaire, etM. SHI, KOROMA et VERESHCHETI jNg,es, joignent des
déclarationsiil'ordonnance.

MM. ODAet PARRA-ARANGURjE ug,s, joignentiil'ordonnance les
exposésde leur opinion individuelle.

M. KRECAj,uge ad hoc, joint à l'ordonnance l'exposéde son opinion
dissidente.

(Paraphé) C.G.W
(Paraphé) E.V.O. LEGALITY OF USE OF FORCE(ORDER 2 VI 99) 375

Done in French and in English, the French text being authoritative, at
the Peace Palace, The Hague. this second day of June, one thousand
hundred and ninety-nine, in three copies, one of which will be placed in
the archives of the Court and the others transmitted to the Government
of the Federal Republic of Yugoslavia and the Government of the
French Republic, respectively.

(Signrd) Christopher G. WEERAMANTRY:
Vice-President.

(Signed) Eduardo VALENCIA-OSPINA,
Registrar.

Vice-President WEERAMANTRA Y,ting President, and Judges SHI,

KOROMA and VERESHCHETa INpend declarations to the Order of the
Court.

Judges ODAand PARRA-ARANGURaE ppend separate opinions to the
Order of the Court.

Judge ad hoc KRECA appends a dissenting opinion to the Order of the
Court.

(Initialled) C.G.W.

(Inirialled) E.V.O.

ICJ document subtitle

Demande en indication de mesures conservatoires

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Ordonnance du 2 juin 1999

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