C.I.J. Co~uniqué no 67/6
Non-off iciel
Les renseignements suivants émanant du Greffe de la Cour inter-
na.tionGle de Justice sont mis à 1s disposition de la presse :
Aujourd 1lzui, 18 juillet 1966, la Cour internfitionale de Justice
a rendu son .arrêt en la deuxième phase des affaires du Sud-Ouest africain
(J3thiopie c. Afrique du Sud; Lib6ria.c. Afrique du sud).
Cos affaires, qui concernent le mintien en vigueur du E1a.nda-bpour
le Sud-Ouest africain et les devoirs et le comporteraent de likfrique .
du Sud à l'égard de ce xfsi.ndst, avaient été introduites par req-tes des
Gomernements de 1lEthiopie et du Libéria déposées au Greffe le
4 novembre 1960. Psr ordonnance du 20' mai 1961, la Cour ava.it joint les
deux inst8nces. IR Gouvernement de l'Afrique du Sud a.vait soulevé des
exceptions pr6liminaires, que la Cour avait rejetees le 21 décembre 1962
:en se déclarant compétente pour statuer sur le fond du différend.
Dans son arrêt de ce jour, la. Cour, par la voix prépondérante du
Président, les voix'etant pertagées sept contre sept, jugé que les .
~tets.'d~ymdeurs riesauraient &tre considérés coime ayant prouvé quiils
ont' un .'&oit ou intér&t juridique au 'regard de 1 1objet ,de leurs demandes;
la Cour i. e...onséquence décidé de rejeter ces demandes.
,. .
Sir Percy Spender, Président, a joint à 1 'arrêt une déc1c.ra.tion.
G. Morelli, jGe, et M. van Vbylc, juge ad hoo, y ont jo'int les exposés
de leur opinion individuelle, P!I. Wellington KOO,Vice-Président,'
1s";Koretsky, Tanaka, Jessup, Padilla Nervo, et Forster, juges, et
sir Louis $Tocnef O, jugead hocp ont joint Ètlf8rret les expos6.s de leur
opinion di'ssidente .
Les aemandeurs, agisseAt en qualité d 1anciens. Etats tiembres de la
:S.~.N,', ont a.11éguéque divèrses infractions au liIaandat de la S.d.N. pour
le Sud-Ouest africain auraient été commises per la Républiq,ue sud-
a.. ic aine'.
~çu th&& des 'parties ont ?orté entre autres sur les points suivants r
le Manda.t'pour Xe Sud-,Ouest africain est-il toujours en vigueur? Da.ns
1 affirmative, 11 obligation incombant au Nandataire 'd ''envoyer au Conseil
de .la.S. d,?~. ',n ra-pport 'annuel sur s'on'adui~~istr~tion s iest-elle trans-
formée en ,me obligat'ion d icd.resser s.des rapports à l.l~ssemblée générs~jle
de&.Nations Unies? L!Afrique du sud. &t-elle, conf ormérmnt .au l!landat:,
accru par tous les moyens en son pouvoir le bien-être matériel ef moral
airif;i q~~e le progres' sociql des hcbitcnts du ternit obe? ,A-.telle . .
contreveilu à la disp.osition du P.ia;n&.finterdisant I1 instruction milritaire
des indigènesn. et prohibant; l~,installation de bases militaires ou *ales
ou 116tablisaement "de 'fort if ications dans le temitoire? A-t-elle . ..
enfreint la clnuse du Ya.nda.t suivant laquelle l~autorisation du*,C?nseil
de la s.d.A.' était nécessaire pour modifier les dispositions du Mandat,
en essayant do le modifier s2.n~ liautorisation de ItAsseniblée générale
des Nations Unies, laquelle aura-it, selon les demandeurs, remplacé le
Conseil à cet égard comme à d'autres égards? La Cour estime qu' il se pose a.upa.ravant deux que stions .relova,nt
du fond mis aya.nt un caractère prioritaire et pouvant rendre inutile
tout examen des autres aspects de l,.affaire. L'une est de savoir si
le 1kImdat subsiste et 11 autre concerne la qualité des denla-ndeurs en
la phase actuelle de lc~ procédure, ciest-à-dire leur droit ou intérêt
juridique au regard de 11objet de la demande. Pondant son arrêt sur
oe motif que les demandeurs nf ont pas un pa.reil droit ou intérêt
juridique, la Cour ne se prononcera pas sur la question du maintien
en vigueur du Tdandc?.t. Il y a lieu de souligner en outre que la
décision rendue 'par Cour en 1962 sur sa compétence ne préjugeait pas
cette derriièrs question, laquelle relève du fond et ne se posait pas
en 1962, si ce n'est en ce sens que la Cour devait postuler le maintien
en vigueur du Ilandat en vue de trmcher le problèrûe purement juridio-
.
tionnel qui était' I.le seul dont elle fût alors saisie. ._
Abordant llénoncé des motifs de sa. décision en Ilespèce, la Cour
rappel.le. que le systèm des Ma.iidats a été créé par llarticle 22 du Pacte
de la s.~.N.' Il y avait trois catégories de IcImdats, les ldmd&ts'.A, 13
et C , qui présentaient entre eux des similitudes de structure. Liélé-
ment principal de chaque acte de IvIandat était constitué par les ~~rtioles
définissant les pouvoirs du l.kndataire, ses. ob1ie;ations concernant les
habitants du territoire et ses oblig~ktions envers la S.d.N. et les
organe? de celle-ci. La Cour les dénommedispositions relatives à la
stion. D 1autre part, chaque acte de 1landa.t contenait des articles
Ei conferaient directement aux Etats Membres de la S.d.N., dans leur
intér8t indi~idue~ ou dans. 1fintérêt de leurs ressortissants, certains
droits concerna.nt les territoires sous. l!L:.:ndzt. Ccs droits correspondant
à des intérêts particuliers, la Cour dénommeles articles en .question
dispositions des l~landats relatives aux intérêts particuliers.
Chaque lJcmdat contenait en outre une clause juridictionnelle dont,
à urie exception près, le libellé était identique et qui prévoyait le '
renvoi des différends à la Com permanente de Justice internationale 9
or, la Cour'a jugé dans -21 première phase de 11affa.ire que, par appli-
cation de IImticle 37 de son Statut, elle constitua.it la juridiotion
compétente à, la place de la Cour permanente.
5s Cour éta'dlit un6 distinction entre les diapositio& dos
Ma.ndats selon qui elles visa.ient lé!pst ion ou les intérêt$ part ioilliers.
Les dispositions de cette dernière catégorie ne faisant lfobjet diaucune
contestation en IIespèce, la question à résoudre est de savoir si les
Membres de la S.d.N. avaient à titre inaividuel uridroit ou interet ,.
juridique leur permettant de réolamr 1rexécut ion des dispositions des
Mandats relatives i la gestion, ou en .diautres texmes si les Fandataires
avaient unè 'obligation directe envers les autres Membres de la S.d.N.
à titre individuel en ce qni concernait Ifexécution de ces dispositions,
Si la réponse est que les deriiandeurs ne saura.ient *être ccnsidérés oomme
a.pnt le droit ou intérêt juridique invoqué, il s lensuivra que, même
à -supposer établies les infractions alléguées au 16mdat pour le 'Sud-Ouest
africain, les demandeurs ne seront pas pour autant fondés à obtenir
de la Co..r les .éc.arations qufils sollicitent par leurs conclusions
finales. " . . Clest en q~a.lit6 d'anciens i4embres de la. S.d=I'\r. que les demandeurs
se présentent devant la. Cour et les droits qu 'ils revendiquent sont
ceux dont, dle.près eux, jouissa,isnt les ;k:~bres de la S .dehie à l'époque
de celle-ci. En conséquence, polir déteiminer les droits et les devoirs
des Pa.rties -- 1-léga,rd du l"ianda.t, la Cour doit se placer à la. date. oii le
système des ila.nda.ts r7ét4 institué. Un examen des dmits et des
ohliga.tions des Pa.rtiss doit consister principalement à étudier, en les
rspla.çant à leur Gpoque, les textes des instruments et dispositions
pertinents.
11 faut a.ussi tenir coinpte de la nature et de la. structiirs
juridiques de la. S.d.N., institv.tion dans le cadre de la,qur?lle a été
orgonisé Le s:rst hine de3 ILânda-ts- Un élbient fonciarnente.1 en était
énoncé 5,llarticle 2 d.u Pa,cte : "Liection de 1:; Socigté, telle qu'elle
est ci6firii.e dsns le prc4sent ?o.cte, s'exerce par une Assemblée et mi
Conseil a.ssistés d'un Secréta.riat pernrinznt.'' Sauf disposition formelle
en sens contraire,, les Etarts i4einbres ne pouva.ient S.titre individuel
a.gir- a,utr~ment en ce qui conce-mait les a.f?a.ires relevant de la Société.
D 'ci.pr63 llarticle 22 du Fo.cte, la. "meilleure méthode de réaliser
pra.tiqu~inent Lld principal1 selon lequel !Ile bien-&tre et le dévelop
peinent1' des peuples d.es anciennes colonies enner-xies l'non encore ca.pables
de se diriger eu-mbes tt fo rinûit "une rrLssion sa.crée de civilisa,tionll
consise,it à Ilconfier la tutelle de ces peuples awc nations développées.. .
qui Lconsentaient7 à lfacceptertl ; le texte ajoiitail expr6ssément que
c'était "au noni de la SociBtén qu'elles ltexercera.ient cette tutelle en
qualité di-:&.nda.ta.ires". Les 3bnda.taire.s devaient être les a,gents de
la. S.d.N. et lion de chacun de ses Xembres iildividuellemnt .
hx termes de l'article 22, il convenait Udfincorporer dans le
présent Pacte des ga.ra.ntie s pour 1 a.ccornplisse~!ent~ de la. mission
sacrée de ci.?lisation. En vertu des pa.ra.gra.phes 7 et 9 de cet article,
tout &.nda,teàre devait I1envo er a.u Conseil un rapport annuel concrrnaht
le territoire dont 5.1 Fv3.i~ f la, charge1' et une Cormission permanente
des b.nd2.t s devait Atre constituée a.fin Ilde recevoir et d 'examiner1' les
rap-orts aniluels et "d.e donner a.u Conseil san avis sur toutes questions
rela,tives à Ifexécution des .:zndotsu. En outre, les actes de ï&nda8t
spécif iû.ient que les ra.pports a4nnuels devaient sa.tisfa.ire le Conseil
Les Etaks 5ïembrss de la, S.d.lV. ne pouva.ient û,voir une pa.rt dans
ce proce.ssus 8.dministratif qu'en pa-rticipant au: C,ra,vaux des orgafies
pa.r 1 'intermédiaire desq-aels 1 'orga.nisa.tion pou.va.it agir. Us n 'a.va.ient
aucun droit d'intervention directe a lléga.rri des ih.nda.ta.ires, ce qui
était une prBm.5ative des organes de la 3.d.N.
séthode suivie pour le. rédaction des 3.ctc.s de ;kniia,t
indique bien que !.es kembres de la. S-d.PJ. en généraJ n'ont pas
éti: tenus pour directment intéressés à If kla.borr.tion des fia.ndats. .
Au surplus, les ikndat s, qui contenni.ent une cla.use subordonnant
toute ~odifica~tion de leurs di spositions c':11autorisa.tion du Conseil,
n exigeaient p2.s en outre 1'a.ssentL'11ent inciividuel des Hembres de
la, 3.d-M. Cewc-ci n'étaient pas pa.rties a.l-ccj%,nda,ts i?la.is, daans une '
mesure limitée et A certains lgards seuler:~ent, ils étaient à même
dlen tirer des droits- 11- ne pouira.it sla.gir que de droits conférés
sans équivoqv-e.
Si cha.qiie 15enbre de la, S-d.N. axait ?ossédS .?ititre indivicluel
les droits a,ujouflih invoqués pax les demandeurs, la. situation
des i-buida,ta.ires,pris dons un réseax de demandes différent es émw,ont
de quelque qua.rante ou cj.nyua.nte Eta.t s, ci.ura.it ét6 très difficile .
Au....jiu surplus, 1-3 règle de vote nonna.lement a.-plicable à la. S.d.N. était
celle de I'una.nimité et, comme un :,Ia.nda,ta.ire était membre du Conseil
lorsque celui-ci traitait de questions rela.tives su i%nda.t dont il
a,vo.it la. cha.rge, ces questions ne pouvaient être tranchées contre son
vote. Un.tel systkme est incompa.tible a.vec la, situa:tion que les
deriiauideurs prétendent a.voir été celle des Ikmbres de la. Sed.N. ; or si,
à l'époque où ils éta.i~nt Iiembres de l'orga.nisa,tion, ils ne posséde.ient
pas les droits invoqués, ils ne les possèdent pas a.ujourdlhui.
P,
X H
On soutient qu'un dimit ou intéret .juridique û,u rega.rd de la.
gestion du. j.bnc3.a.tdécoliLera.it de la. simple existence de la ttmission
sa.créeIt ou de çe p-inci~e. La. mission sacrée, dit-on, est une "mission
sacrée de civilisc..tiontt ; pa.r suite, toutes les nations civilisées
a.ura.ier;t ur~ inté fit. à son accorrrplissement . il'als, pour que cet intérêt
puisse *rendre u.n co.ractère spécifiquem!~nt juridique, il faut que la.
liussion sz.crée elle-filerne soit ou devienne quelque chose de plus qu'un
idéal .bora.l ou hufia.nita.ire . Pour engendrer des droits et des obliga.tions
juridiques, elle doit avoir une e-qression et une forme juridiques. Il
ne faut pa.s conf ondrr: 1 'idéal rnorr?,l et les rSgles juridiques destinées
a ].es mettre en a.pp3-ice.tion. Le principe de la. rtmission sa,crée de
civi1.isa:t iont1 ne contient aucun éléinei~tjuridique résiduel pouvant,
dans le cas d'un Ka.nda.t particulier, don~er à lui seul na.issa,nce à
des droits et 2 des obligû.tions jv.ridiquus en dehors du système des
I1enda.tS. . .
La. Cour ne sn.ura.it non plus a.dmettre que, mêmesi les dema,ndeurs
--
et les a.utras i.embras de la, S.d.fJ se sont trouvés dans la. situa:tion
juridique indiquSr-: p3.r la. Cour, il en a.it 6té ainsi ur~iquement pendant
lrexistence de la S.d.lJ. et que," à la. dissolution de celle-ci, les
droits antérieurement conferes à I'organisotion elle-m&me ou à ses
orsanes compét~nts aient ét6 dévolus à titre individuel a.m Etats
qui en étaient :ihiibl-es à cette da,te. La. Cour a: jugé en 1962 que les
enciens riitembres cilune: organisa.tion internationale dissoute, tout en
n'en fa.isc?.nt plus ï~a.rtie, sont censés conserver les droits qu'ils
posséda.ient individuellement à, titre de uembre lorsque ltorganisci.tion
existait ; rï3.i~ on ne sa.ur3it a.ller jusqu'à leur a,ttribuer, des la.
dissol~ztion et & ra.ison de celle-ci, des droits qu'ils .n'avaient jamais
possédés indj.vid.uellement , m&me 5 titre do Iblefilbres. D1a.ut re pa.rt, '
a.ucun des évi.,niaeïits qui ont suivi la, disso1ui;ion de la, S.d.N. n'a pu
anvoir l'effet cle coi1f6rer à ses L;enibres des droits qu'ils n'evaient
pas aupa,ra.vant en tant que tels. Ln Cour ne saura.it non p1u.s interpréter
les d&clara.tior~s unila:téra.les, dites déclasrations d'intention, par
lesquelles les ;ihnda.ti:.irr ont,. B. 1-toccasion de la. dissolution de
la Sed.M., annoncé qu'ils étaient disposés a continuer à s'inspirer
des idia.nda.t8sa,w fins de 1 artri&nistra.tion des .territoires en ca.use,
com?e ayant confer4 k titre individuel a,ux'ilieri~l;red.e la. S.d.N.
des droits ou intérets juridiques noibvea,ux qu'ils ne possédaient
pas ant érieurenent .
On.... On pourrait dire que l'opinion de la Cour est inecceptable dans
la mesure où elle mène à conclure quvil nvexiste plus actuellerilent
d ventité fondée à réclmer la bonne exScution du Mandat pour le
Sud-Ouest africain ; mais si, après avoir interpréte d une manière
juridiquement ex~cte une situztion donnee, on considère que certains
droits allégués nkexistent p2s, on doit en accepter les conséquences.
Postuler lVedstence de ces droits pour éviter de telles consSquences
serait se livrer à une tâche essentiellement législutive, pour servir
des fins politiques.
Sgagissant de le thèse dvepr.ès laquelle la question du droit ou
intérêt juridique des dewndems été rSglée par lparrêt de 1962 et
ne saurait être rouverte, le Cour souligne quPune décision sur une
exception prélirni~ire ne seurzit empêcher 1 'exzmen d ?une question
relev~nt du fond, que. celle-ci cit Sté en fait traitée ou non à propos
de 17exceptionpréliminaire. Lorsque dans une aflaire le dkfendeur
presente des exceptions prélbinaires, la procédure sur le fond est
suspendue 'conformément à 1 ?article 62, paragr?.phe 3, du Règleïaent de
la Cour. Jusqu9à ce que cette procédure soit reprise, il ne peut y
avoir de décision qui règle définitivanent ou préjuge une qucstion de
fond. Il se peut qu'un arrêt sur une exception préliminaire touche à
un point de fond, iiiaisce n possible qu7à titre provisoire et dans
la mesure nécessaire pour décider la question soulevée par lvexception.
Cela ne saurait être une décision definitive sur le point de fond,
Lvarrêt de 1962 ayant décidé. qu'ils 'itaient fondés à invoquer la
clause juridictionnelle du Pbadat, les demandeurs devaient encorc
établir au fond quvils avaient 'm droit ou intérêt juridique qucnt à
lVexécution des dispositions par eux invoquées et quvils étaient fondés
à obtenir de la Cour les. déclarations par eux sol.licitées. Il ne szurait
y avoir d'opposition entre la decision admettant que les demandeurs
zvsient. qualitté' pour. invoquer la cleuse juridictionnelle et la àécision
dvaprès. laquelle 5.15 'nPont pas établi la base juridique de leur 'demande
au fond.
En ce qui concerne la thèse d'après lnquelle 12 clause juridictionnelle
du ivlandat coriférerait un droit au fond, qui serait celui de réclamer
du Pfiandntzire l?exécution des dispositions du Pkndat reletives à la
gestion, il convient de noter quvil ser&t surprenant quvun droit aussi
ifilportant ait &té institué presque incidement, Rien ne distingue
la clause juridictionnelle dont il s 'agit de nombreuses autres clauses
juridictionnelles; cqest un principe presque élémentsire du droit de
le procédure qu'il faut di.stinguer entre, dPune part, le droit de saisir
un tribunal et le droit du tribunil de connaîtri! du fond de la demande
et, d9ûutre part, le droit au regard de lvobjet de ln dem-nde que le
demandeur doit établir à ia satisfaction du tribunal. Une clsuse juri-
dictionnelle est en principe, pcrr.sa ncture et par son effet, une dispo-
sition de procédare et non de fond; elle ne détermine ps si.les ,narties
ont des droits de fond mis seu1ei::cnt si, à supposer qu elles les aiont,
elles peuvmt les feire valoir devant un tribunal.
La Cour exaine ensuite les droits des ri~enbres 'du Conseil de la
S.d.N. en vertu de la clause juridictionnelle des tr+t,és de ninorités
conclus après la prerriière guerre filondiale et elle distingue cette clause
de celle qui figurait dans les actes de iizndzt. Dcns le cas des Iviandats,
I
la....la clause juridictionnelle av~t pour but de donner aux ibiernbres de le
S.d.N. le moyen de protéger leu~s intérêts particuliers relatifs EUX
territoires sous Mmdat; dans le cas des treites de minorites, le
droit dYaction des nerribres du Conseil en vertu de la cleuse juridic-
tionnelle ne visait que les populetions minoritsires. Au surplus,
toute 97divergence d qopinion'. pouvzit fvre lvobjet d recours en
justice puisquvon devait 1V~ssi.niler à un "difi'Srend apnt un caractère
interns.tion2lW. La question de lqexistence dvun droit ou intérst
juridique ne pouvait donc se poser. Eh revanche, la cleuse juridic-
tionnelle des lkndets n9avait aucun des caructères ou des effets parti-
culiers de celle qui figurxit àans les traités de minorités.
La Cour traite ensuite du libellé de la cleuse juridictionnelle
du Mandat (article 7, deuxième alinéa), que lvon a qualifié de large
et szns équivoque - cvest-à-dire du sens littéral des membres de phrase
juxtaposés : "tout difierend, quel quPil soitq9, '<entre lui le 3hdateirg
et un autre Membre de le Société des Nntionsri et ivrelatif E ... aux ..g
dispositions du PhdczttF, qui pernettraient, dit-on, de sounettre à
la Cour un différend concernant n9inporte lzquelle des dispositions
du bkndat. La Cour ne considère pas que les mots *'quel quqil soitvv
aient dqautreeffet que de souligner une expression qui sans eux durait
e~ctement le mêmesens, quz lss termes "tout différendt7 (quel quPil soit)
.aient. intrinsèquement une autre signification que un différend, ni que
la nontion des P~dispositionsTq du llandat au pluriel introduise une autre
idée que si lvon avait dit une disposition. De nol?lbreuses déclarations
dvacceptation de la juridiction obligatoire de la Cour faites en vertu
d'e lvarticle 36, paragraphe 2, du Stztut sont rédigées en terines aussi
larges et aussi peu équivoques, ,voire plus généraux. On ne saursit
supposer que, en raison de le vaste portée des ternes utilisés, 1fEtat
auteur de la dSclaration soit dispensé dvGtablir lqeastence dPun droit
ou intérêt juridique au regarà de lPobjet dqune deniade. La 'cour ne
saurait ednettre la proposition d'zprès laquelle une clause juridictionnelle
attributive de compétence pourreit conf6rer en elle-même un droit
quant au fond.
Eh ce qui concerne le problèi~ie de la recevabilité, la Cour fait
observer que lVarrêt de 1962 a sir.lpleriient dit que la Cour était
qvcompétente pour statuer sur le fondfP; si une question de recevabilité
se posait, c lest aïmintenant quvil faudrait la trancher, c0m.e cela
sPest produit dans la dedèriie phase de lvaffaire Nottebohn; en pareil
cas, la Cour statueret exactai~ent de la nêne nanière, cvest-à-dire ,
que, si' elle envisagecit le problène du point de vue de l,qaptitude
des daaandeurs à présenter lc demande, elle dirait quqils nvont pas
cette aptitude et 'que la de~zande est parLooneéquent irrecevzble.
La Cour trzite enfin de 19argurnent dit de la nécessit6, argument
qui consiste essentiellenent en ceci : puisque le Conseil de ki S.d.N.
nvavait aucun iioyen dtiixpiposer son point dc vue aux Iicndatnires et quTun
avis consultatif de la Cour nPaurait pu être obligatoire pour ces
derniers, les Pfandats.auraient pu être tournss à volonté; il était
p?.r suite essentiel, à titre dvultinie sauvegarde ou garcntie pour
1 qaccompliss~~ent de la EUS çion sacrBe de civilisation, que chaque
Xembre de la S.d,N. se voie reconnaître un droit ou intérêt juridique'
en la natière et puisse agir directment à cet égard. Ikis en
pratique, on a pris grmd soin, dens le fonctionreiiient du systènle des
Xandats, d9aboutir par la voie de la persuasion, de la discussion, de
la négociation et de la coopération à des conclusions génére1er:lent
-...
acceptablesacceptables et d qéviter de mettre les iiandetaires dvls 1 Oobligation
ds~vcir à choisir entre lP2dçption du point de vue des ~utres Nembres
du Conseil et un vote contrzire. Lqexistence de droits de fond
touchant à 1.7 esti ion des M;?ïldats que lcs i.iieL!bresde lc S.d.N. zuraient
?
pu exercer independamlent du Conseil aurait 6th étrzngère à ce contexte.
Le Cour nvinsiste pas sur le fzit évident que, au cas OUles auteurs
du syst61ile des l~hdnts auraient voulu que lPon puisse à un
Mandataire une politique déten:~inSa, ils ne s ?en seraient ps remis à
l'action zléetoire et inccrteine des Zernbres de la S.d.M. à titre indi-
viduel. Il deixure peu vraiseilblable, alors quPon a donnj de propos
délibéré aux 3kndetaires le pouvoir dqe1npêcher par leur veto le Coilsuil
de prendre une décision, quPon ait en m%e terj?ps attribué eu &ier&res
de lqorgnnisation & titre inàividuel le droit d'agir en Justice au cas
où les Mafidatrrires exerceraient leur veto. Dcznsle dorfi~ine internntional.,
lqeristence clqobligntions dont lP execution ne peut fzire l'objet dvune
procedure juridique a.toujows constitué le règle plutôt que lqexception;
cela éteit cncore plus vrai en 1920 qufaujourd 'hui.
Au surplus, lqarguriier~t de 12 ngcessité revient 2 dire que la Cour
devrzit admettre une sorte dqactio popdaris, ou un droit pour chaque
membre dPune collectivité dYintenter une i?ction pour la défense dqun
intérêt public. Or, le droit international tel qu ?il existe actuellenent
ne reconnaît pas cette notion et la Cour ne saurait y voir lvun des
vvprincipes gen6raux de droitqq filentionne à 17article 38, peragraphe 1 A,
de son Statut.
En dernière malyse, 1 de la nécessité saable entièrement
fondé sur des considérctions extrajuridiques découvertes à posteriori.
La prétendue nécessité est née uniquer'lsnt des jvénements ultérieurs
et non dvélénents inhérents au système des Mandats tel quvil a été
conçu à ly origine; si elle existe, elle relève du domine politique
et ne constitue pes une nécessité au regard du droit. La Cour
nqest p~s un Jrgane législetif. Les parties à un différend peuvent
toujours lui dennnder de statuer ex aequo et bon0 eux temies de
1 Iarticle 38, paragraphe 2, du Statut. En dehors de cc cas, la ïlussion
de la Cour est claire : elle doit eppliquer 1% droit tel quqclle le
constate et non le créer.
On peut fGre vzloir. que la Cour serait fond& à combler d.es lc?,cunes
en application dPun principe t6léologique dqir;terprét~tion 2ux ternes
duquel il fzudrait donner aux iiisi;rur;i~nts leur effet LBXLÏI~;~ en vue
dvessurer 17acconplis seï'ient de leurs objectifs fondac~entt.iux. Ce principe,
qui est fortaaent sujet à controverse, ne pourrait en tout cas sqzppU.quer
en des circonstances où la Cour devrait sortir du doraine que 190n peut
normalement considérer comxe celui de lVinterprételion pour entrer ciculs .
celui de le rectification ou de la revision. On ne saurait présuner quvun
droit existe sinpla;,ent perce que son existence peut praître souheitable.
La. Cour ne saurait rei116dier à une lncune si cela doit 1 7~mener à deborder
le cadre norri~l dvune zction judici~re.
On pourrait égâle~~ent, zll6guer que la Cour 'est fondée à réporcr une
omission due à lqirnpr&voyance cies nuteurs di., ihndat et à prendre en
consideretion ce quvon peut kaginer qu vils aur,ai.cnt souhait6 ou ner.le
auraient expressement pr6vu s Iils avaient su d Vav~!nce ce quo réserv3i t
Ifavenir. Pi'i._isla Cour ne saurait pr6sur;ier les voeux et les intentions
des intéressés à lVégard dqdvénenents futurs quFils nqont pas prévu et
qui fteient imprévisibles; le pourrait-elle, il nqen serait pas r~~oins in,
possible dvaccepter les hypothèses zvancées en sub~t~ance par les
dei:~?.ndeurs quant à ces intentions.
Par ces ~iotifs, la Cour dkcide de rejeter lcs derxmdes de lfEhpire
dvEthiopic et dc la République du LibGria.
La Haye, le 18 juillet 1966.
Sud-Ouest africain (Ethiopie c. Afrique du Sud; Libéria c. Afrique du Sud) - Arrêt