Déclaration d'intervention modifiée du Luxembourg

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182-20240731-INT-02-00-EN
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Incidental Proceedings
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
D~CLARATION MODIFIANT LA D~CLARATION
D'INTERVENTION DU GRAND-DUCH~ DE
LUXEMBOURG
INTERVENTION EN VERTU DE L'ARTICLE 63 DU STATUT DE LA
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
en l' aff aire
ALL~GATIONS DE G~NOCIDE AU TITRE DE LA CONVENTION POUR
LA PR~VENTION ET LA R~PRESSION DU CRIME DE G~NOCIDE
(UKRAINE c. F~D~RATION DE RUSSIE)
3 1 juillet 2024
D~CLARATION MODIFIANT
LA D~CLARATION D'INTERVENTION
DU GRAND-DUCH~ DE LUXEMBOURG
INTERVENTION EN VERTU DE L'ARTICLE 63 DU STATUT
DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
A Monsieur le Greffier de la Cour internationale de Justice (ci-apr~s « la Cour »), le soussign~
~tant d~ment autoris~ par le gouvernement du Grand-Duch~ de Luxembourg (ci-apr~s
« Luxembourg ») :
1 . Au nom du Luxembourg, j'ai l'honneur de soumettre a la Cour un bref expose ajustant la
d~claration d'intervention faite en vertu de l'article 63, paragraphe 2, du Statut de la Cour
internationale de Justice (ci-apr~s le « Statut ») en date du 1 1 octobre 2022 aux fins du
maintien de son intervention dans la phase de l' examen au fond de l'affaire des
All~gations de g~nocide en vertu de la convention pour la pr~vention et la r~pression du
crime de g~nocide (Ukraine c. F~d~ration de Russie).
2. Selon la lettre du Greffier en date du 18 juin 2024, les Etats qui ont demand~ ~ intervenir
au stade des exceptions pr~liminaires et au stade du fond ont ~t~ invit~s ~ indiquer s'ils
maintiennent leurs d~clarations d'intervention et ~ modifier leurs d~clarations le cas
~ch~ant avant le 2 ao~t 2024. La pr~sente d~claration fait suite ~ cette demande.
3. Dans son arr~t rendu le 2 f~vrier 2024, la Cour a conclu qu'elle ~tait comp~tente, en vertu
de l'article IX de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(ci-apr~s « convention sur le g~nocide »), pour conna~tre de la conclusion b) figurant au
paragraphe 178 du m~moire de I'Ukraine, par laquelle cette derni~re demande ~ la Cour
de «dire et juger qu'il n'y a pas d'~l~ment cr~dible prouvant que l'Ukraine est
responsable de la commission d'un g~nocide en violation de la convention sur le
g~nocide dans les oblasts ukrainiens de Donetsk et de Louhansk», et que cette conclusion
est recevable. 1
4. Le Luxembourg entend tout d'abord rappeler que la convention sur le genocide est de la
plus haute importance pour pr~venir le g~nocide et tenir les auteurs redevables de leurs
actes. Tout acte commis dans l'intention de d~truire, en tout ou en partie, un groupe
' All~gations de g~nocide au titre de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(Ukraine c. F~d~ration de Russie : 32 ~tats intervenants), exceptions pr~liminaires, arr~t du 2 f~vrier 2024, p. 5657,
paragraphe 149.
2
national, ethnique, racial ou religieux constitue un crime au regard du droit international.
L'interdiction du g~nocide est une norme reconnue comme ~tant de jus cogens en droit
international.' Les droits et obligations consacr~s par la convention sont dus ~ la
communaut~ internationale dans son ensemble (droits et obligations erga omnes).3 Dans
une telle situation, lorsqu'un instrument international porte sur des questions d'int~r~t
collectif, le, regrett~ juge Can~ado Trindade a appel~ tous les Etats parties ~ contribuer ~
l'interpr~tation correcte du trait~ comme une sorte de « garantie collective du respect des
obligations contract~es par les Etats parties »
5. Par sa d~claration en date du I 1 octobre 2022, le Luxembourg s'est pr~valu du droit que
lui conf~re l'article 63, paragraphe 2, du Statut d'intervenir dans la phase des exceptions
pr~liminaires et dans la phase de lexamen au fond. La Cour a reconnu que l'article 63
conf~re un « droit » d'intervention, et qu'une telle intervention « se limite ~ pr~senter
des observations sur l'interpr~tation de la convention en question et ne permet pas a
l'intervenant, qui ne devient pas partie ~ la proc~dure, de traiter de tout autre aspect de
l'affaire dont la Cour est saisie ; et consid~rant qu'une telle intervention ne peut porter
atteinte ~ l'~galit~ des Parties au diff~rend » . °
6. Dans sa d~claration susvis~e, le Luxembourg s'est concentr~ sur l'interpr~tation des
articles IX et premier de la convention sur le g~nocide. Conform~ment ~ la port~e
restreinte des interventions en vertu de l'article 63 du Statut, la pr~sente d~claration
compl~te la position du Luxembourg telle qu'elle est expos~e dans sa d~claration en ce
qui concerne l'interpr~tation de l'article premier et de l'article II de la Convention,
conform~ment aux r~gles coutumi~res d'interpr~tation, en ce qui concerne le fond de
l' affaire. 7
7. Le Luxembourg r~it~re qu'il nentend pas acqu~rir la qualit~ de partie au pr~sent
diff~rend et accepte que l'interpr~tation de la convention sur le g~nocide donn~e par l'arr~t
Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (BosnieHerz~
govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007, p. 43, ~ la p. 1 1 1 , paragraphes 161-162.
? Application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (Gambie c. Myanmar),
mesures conservatoires, ordonnance du 23 janvier 2020, C.I.J. Recueil 2020, p. 3 avec d'autres references ;
Application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (Gambie c. Myanmar),
arr~t du 22 juillet 2022, p. 36, paragraphe 107.
4 Opinion individuelle du juge Carn;:ado Trindade, jointe a Chasse a la baleine dans l'Antarctique (Australie c.
Japon), d~claration d'intervention de la Nouvelle-Z~lande, ordonnance du 6 f~vrier 2013, C.I.J. Recueil 2013, p.
33, paragraphe 53.
" Haya de la Torre (Colombie c. P~row), arr~t, C.I.J. Recueil 1951, p. 76 ; Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya
arabe libyenne), demande d'intervention, arr~t, C.I.J, Recueil 1981, p. 13, paragraphe 21.
Chasse ~ la baleine dans l'Antarctique (Australie c. Japon), d~claration d'intervention de la Nouvelle-Z~lande,
ordonnance du 6 f~vrier 2013, C.I.J. Recueil 2013, p. 3, p. 9, paragraphe 18.
' Application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (Gambie c. Myanmar),
arr~t du 22 juillet 2022, p. 31, paragraphe 87 : « La Cour aura recours aux r~gles coutumi~res de droit
international relatives ~ l'interpr~tation des trait~s, telles que refl~t~es aux articles 3I ~ 33 de la convention de
Vienne sur le droit des trait~s du 23 mai 1969 »; voir aussi Application de la Convention internationale sur
l'~limination de toutes les formes de discrimination raciale (Qatar c. Emirats arabes unis), exceptions
pr~liminaires, arr~t du 4 f~vrier 2021, p. 24, paragraphe 75 avec d'autres r~f~rences.
3
de la Cour lui soit ~galement opposable. Son intervention ne portera pas sur des questions
d'application de la convention.
LA CONVENTION CONCERN~E EN L'INSTANCE :
D~CLARATION COMPL~MENTAIRE SUR LE FOND
8. Aux fins de la pr~sente proc~dure, le Luxembourg entend compl~ter son interpr~tation
des articles premier et II de la convention sur le g~nocide, dans la mesure o~ elle est
pertinente pour le fond de l'affaire.
9. L'article premier de la convention est ainsi libell~:
« Les Parties contractantes confirment que le g~nocide, qu'il soit commis en temps de
paix ou en temps de guerre, est un crime de droit international qu'elles s'engagent a
pr~venir et ~ punir. »
10. L'article premier dispose donc que tous les Etats parties sont tenus ~ pr~venir et ~ punir
le g~nocide. Le Luxembourg rappelle ainsi que, comme la Cour l'a d~j~ soulign~, les
parties contractantes doivent agir dans les limites autoris~es par le droit international
lorsqu'elles s'acquittent de leur obligation de pr~venir le g~nocide." En outre,
l'accomplissement de l'obligation pr~vue ~ l'article premier de la convention doit se faire
de bonne foi. La Cour a fait observer que le principe de bonne foi « oblige /es parties a
appliquer fun trait~] d'une mani~re raisonnable et de telle sorte que son but puisse ~tre
r~alis~ ». L'interpr~tation de bonne foi constitue donc un bouclier contre l'utilisation
abusive des termes et des institutions de la convention. En tant que «[l'un] des principes
de base qui pr~sident ~ la cr~ation et ~ l'ex~cution d'obligations juridiques », la bonne
foi est ~galement directement li~e ~ la « confiance r~ciproque [qui] est une condition
inh~rente ~ la coop~ration internationale ».""
1 1 . Le Luxembourg r~it~re dans ce contexte sa d~claration du 1 1 octobre 2022, en ce que la
r~f~rence de l'article premier de la convention ~ la notion de « s'engagent de pr~venir »
implique que chaque Etat partie doit ~valuer l'existence d'un g~nocide ou d'une menace
s~rieuse de g~nocide avant de qualifier une situation de g~nocide et de prendre des
Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (BosnieHerz~
govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007, p. 221, paragraphe 430 ; All~gations de
g~nocide au titre de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (Ukraine c. F~d~ration
de Russie), ordonnance du 16 mars 2022, paragraphe 57.
° Projet Gab~ikovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arr~t, C.I.J. Recueil 1997, p. 7, ~ la p. 79, paragraphe 142.
I? Essais nucl~aires (Australie c. France), C.I.J. Recueil 1974, p. 142.
4
mesures en vertu de l'article premier.'' Une telle ~valuation doit ~tre ~tay~e par des
~l~ments de preuve substantiels et objectifs « ayant pleine force probante ».'
12. Il peut ainsi ~tre consid~r~ de bonne pratique de s'appuyer sur les r~sultats d'enqu~tes
ind~pendantes men~es sous les auspices des Nations Unies avant de qualifier une
situation de g~nocide et de prendre toute autre mesure en vertu de la convention.'
1 3 . L'interpr~tation correcte de l'article premier est donc qu'un Etat qui pr~tend agir en
pr~vention du g~nocide est soumis ~ une obligation de « diligence raisonnable » (due
diligence) de recueillir des ~l~ments de preuve substantiels et concluants aupr~s de
sources ind~pendantes sur la question de savoir si un g~nocide a ~t~ « commis » avant
d'all~guer qu'un autre Etat partie ~ la convention sur le g~nocide est responsable d'un
g~nocide.
14. Cette interpr~tation de l'article premier concerne la d~termination de la charge de la
preuve dans les cas o~ un Etat pr~tend avoir fait l'objet d'une fausse all~gation de
g~nocide de la part d'un autre Etat. En g~n~ral, il appartient ~ la partie qui all~gue un fait
en soutien de ses pr~tentions de faire la preuve de !'existence de ce fait. Toutefois, il ne
s'agit pas dune r~gle absolue. L'~tablissement de la charge de la preuve d~pend, en
r~alit~, de l'objet et de la nature de chaque diff~rend soumis ~ la Cour ; il varie en fonction
de la nature des faits quil est n~cessaire d~tablir pour les besoins du jugement dans
l'affaire.14
15. En particulier, la Cour a reconnu qu'il peut y avoir des circonstances dans lesquelles on
ne saurait exiger du requ~rant qu'il prouve le fait n~gatif qu'il invoque.'
16. Le Luxembourg fait valoir, en gardant ce contexte a !'esprit, qu'un Etat partie engageant
une action contre un autre Etat partie pour une fausse all~gation de g~nocide doit apporter
un commencement de preuve que ses actes, ou toute acte de ses forces, ne relevaient pas
de la d~finition du g~nocide au sens de l'article II de la convention. A son tour, si le
d~fendeur souhaite se d~fendre en affirmant que son all~gation n'~tait pas fausse, il doit
prouver qu'il existe des ~l~ments de preuve cr~dibles et concluants attestant que le
demandeur est responsable de la commission du g~nocide tel qu'il est all~gu~. I
appartiendrait alors ~ la Cour dappr~cier la valeur de lensemble des ~l~ments de preuve
Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(Bosnie-Herz~govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007, p. 43, p. 221-222, paragraphes 430431.
Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(Bosnie-Herz~govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007, p. 43, p. 129, paragraphe 209.
I3 Voir par exemple le fait que la Gambie s'est appuy~e sur les rapports de la Mission internationale ind~pendante
d'~tablissement des faits sur le Myanmar ~tablie par le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies avant de
saisir la Cour ; pour de plus amples d~tails, voir Application de la convention pour la pr~vention et la r~pression
du crime de g~nocide (Gambie c. Myanmar), arr~t du 22 juillet 2022, pp. 25-27, paragraphes 65-69.
Ahmadou Sadio Diallo (R~publique de Guin~e c. R~publique d~mocratique du Congo), fond, arr~t, C.I.J.
Recueil 2010 (II), p. 660, paragraphe 54.
5 Ibid., paragraphe 55.
5
produits par les deux parties et d~ment soumis au d~bat contradictoire, afin de parvenir
~ ses conclusions.'°
17. Partant, le Luxembourg consid~re que l'interpr~tation correcte de l'article premier, qui
inclut le devoir de diligence dans l'~valuation de l'existence d'un g~nocide, permet de
conclure que la partie avan~ant des all~gations de g~nocide porte la charge de la preuve
qu'un tel g~nocide est effectivement en train d'~tre commis.
18. Le Luxembourg souhaite ~galement ajouter certaines observations sur l'article II de la
convention sur le g~nocide pertinentes pour lexamen au fond. L'article II de la
convention traite de la d~finition du g~nocide et est ainsi libell~ :
« Dans la pr~sente Convention, le g~nocide s'entend de l'un quelconque des actes ciapr~
s, commis dans l'intention de d~truire, en tout ou en partie, un groupe national,
ethnique, racial ou religieux, comme tel :
(a) Meurtre de membres du groupe;
(b) Atteinte grave ~ l'int~grit~ physique ou mentale de membres du groupe;
(c) Soumission intentionnelle du groupe a des conditions d'existence devant entrainer sa
destruction physique totale ou partielle ;
(d) Mesures visant ~ entraver les naissances au sein du groupe;
(e) Transfert forc~ d'enfants du groupe ~ un autre groupe. »
19. Le Luxembourg soutient que les ~l~ments du g~nocide sont d~j~ bien ~tablis dans la
jurisprudence de la Cour et appuie l'interpr~tation actuelle.
20. En particulier, pour quil y ait g~nocide en vertu de l'article II, il est n~cessaire d'~tablir
objectivement et de bonne foi ~ la fois un « acte» et une « intention » de g~nocide
(sp~cifique) ~ ct~ des ~l~ments psychologiques pr~sents dans les actes ~num~r~s aux
alin~as (a) ~ (e) de cette disposition.'
2 1 . Les termes de l' article II de la convention sont par ailleurs repris al' identique par I' article
6 du Statut de Rome qui fournit un compl~ment de contexte. Les « El~ments des crimes
», adopt~s par Assemble des Etats parties en vertu de l'article 9 du Statut de Rome,
constituent une aide suppl~mentaire dans linterpr~tation et lapplication de l article 6 du
Statut de Rome.! Les El~ments des crimes ~noncent pour les articles 6 a) ~ 6 d) du Statut
de Rome tout autant l'exigence cumulative dun comportement (acte de g~nocide), des
cons~quences associ~es ~ ce comportement, ainsi que dun ~l~ment psychologique
I" Ibid., paragraphe 56.
Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(Bosnie-Herz~govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007 (1), p. 43, p. 121-122, paragraphes 186189.
I Cour p~nale internationale, El~ments des crimes : Documents officiels de I Assembl~e des Etats Parties au
Statut de Rome de la Cour p~nale internationale, premi~re session, New York, 3-10 septembre 2002 compl~t~es
par les ~l~ments de crime adopt~s lors de la Conf~rence de r~vision de 2010, Kampala, 31 mai-1l juin 2010
(https:/ /www.icc-cpi.int/sites/default/files/ElementsOfCrimesFra. pdf).
6
sp~cial afin d~tablir l'infraction de g~nocide pouvant entrainer la responsabilit~ p~nale
individuelle des auteurs.
22. La d~finition du g~nocide ~ larticle II de la convention fournit une liste claire et
exhaustive des actes pouvant constituer des actes de genocide et qui, selon la Cour, sont
tous « par leur nature m~me des actes conscients, intentionnels ou d~lib~r~s »." ~ cela
s'ajoute l'intention de g~nocide, qu'il importe de distinguer dautres mobiles que pourrait
avoir Fauteur pour la commission de lacte. En ~tablissant cet ~l~ment psychologique
sp~cial, la Cour a soulign~ quil « faut prendre le plus grand soin pour conclure, ~ partir
des faits, ~ une manifestation suffisamment claire de cette intention. ? Il ne suffit pas
que les membres du groupe soient vises parce qu'ils appartiennent a ce groupe, il faut que
l'auteur ait une intention discriminatoire.21
23. Le seuil d'~valuation de l'intention sp~cifique par d~duction, en l'absence de preuve
directe, est ~lev~. La Cour a d~termin~ que « pour d~duire l'existence d'un dolus specialis
d'une ligne de conduite, il faut et il suffit que cette conclusion soit la seule qui puisse
raisonnablement ~tre d~duite des actes en cause »??
24. En ce qui concerne le niveau de preuve, la Cour soutient que les all~gations formul~es
contre un Etat qui comprennent des accusations dune exceptionnelle gravit~ doivent ~tre
prouv~es par des ~l~ments ayant pleine force probante. La Cour exige d~s lors « d'~tre
pleinement convaincue qu 'ont ~t~ clairement av~r~es les all~gations formul~es au cours
de l'instance, selon lesquelles le crime de g~nocide ou les autres actes punissables
~num~r~s ~ l'article III de la convention ont ~t~ commis. Le m~me crit~re s'applique ~ la
preuve de l'attribution de tels actes. »23
CONCLUSION
25. Sur la base des informations figurant dans sa declaration d'intervention en date
du 1 l octobre 2022, telles que pr~cis~s par le pr~sent expos~, le Luxembourg continue
de se pr~valoir du droit que lui conf~re l'article 63, paragraphe 2, du Statut d'intervenir
en tant que partie intervenante dans la proc~dure engag~e par I'Ukraine contre la
F~d~ration de Russie en l'esp~ce.
" Ibid., paragraphe 186.
20 bid., paragraphe 189.
Ibid., paragraphes 187, 189.
2 Application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide (Croatie c. Serbie), arr~t,
C.I.J. Recueil 2015, p. 3, p. 67, paragraphe 148.
2 Affaire relative ~ l'application de la convention pour la pr~vention et la r~pression du crime de g~nocide
(Bosnie-Herz~govine c. Serbie-et-Mont~n~gro), arr~t, C.I.J. Recueil 2007 (1), p. 43, p. 129, paragraphe 209.
7
26. Le gouvernement du Luxembourg maintient la designation des agents aux fins de la
pr~sente proc~dure. Le Greffier de la Cour peut ~galement continuer ~ acheminer toute
communication relative ~ la pr~sente affaire ~ l'adresse suivante :
Ambassade du Grand-Duch~ de Luxembourg
aupr~s du Royaume des Pays-Bas
N assaulaan 8
2514 JS La Haye
Pays-Bas
Luxembourg, le 3 1 juillet 2024
Respectueusement,
(sign~)
Alain Germeaux
Agent du gouvernement
Annexe A : Lettre du Greffier de la Cour internationale de Justice a l'agent du Grand-Duch~
de Luxembourg en date du 18 juin 2024.
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