Opinion dissidente de M. le juge ad hoc Barak

Document Number
192-20240524-ORD-01-05-EN
Parent Document Number
192-20240524-ORD-01-00-EN
Incidental Proceedings
Date of the Document
Document File

OPINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE AD HOC BARAK
[Traduction]
1. Une nouvelle fois, l’Afrique du Sud a demandé à la Cour de prescrire à l’État d’Israël de « cesser … ses opérations militaires dans la bande de Gaza … et de retirer immédiatement, entièrement et inconditionnellement son armée de l’ensemble de la bande de Gaza »1. Une nouvelle fois, la Cour a rejeté la demande de l’Afrique du Sud. En lieu et place, elle a indiqué, par une première mesure additionnelle, que
« [l]’État d’Israël d[eva]it, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, et au vu de la dégradation des conditions d’existence auxquelles [étaie]nt soumis les civils dans le gouvernorat de Rafah :
Arrêter immédiatement son offensive militaire, et toute autre action menée dans le gouvernorat de Rafah, qui serait susceptible de soumettre le groupe des Palestiniens de Gaza à des conditions d’existence capables d’entraîner sa destruction physique totale ou partielle »2.
Cette mesure n’impose à Israël d’arrêter son offensive militaire dans le gouvernorat de Rafah que pour autant que cela est nécessaire pour lui permettre de s’acquitter des obligations que lui impose la convention sur le génocide. En ce sens, elle réaffirme simplement les obligations qui incombent déjà à celui-ci au regard de cet instrument. Même en l’absence d’ordonnance de la Cour, toute offensive militaire susceptible d’entraîner le manquement d’un État aux obligations mises à sa charge par la convention devrait cesser. Israël ne l’a jamais contesté. Les mesures indiquées par la Cour diffèrent donc de manière décisive de celles sollicitées par l’Afrique du Sud. Au lieu d’ordonner une suspension générale des opérations militaires et un retrait total de la bande de Gaza, l’ordonnance de la Cour est expressément limitée à l’offensive menée dans le gouvernorat de Rafah. Étant donné que la mesure établit un lien explicite avec les obligations auxquelles Israël est déjà tenu sur le fondement de la convention sur le génocide (« susceptible de soumettre le groupe des Palestiniens de Gaza à des conditions d’existence capables d’entraîner sa destruction physique totale ou partielle »), rien n’empêche Israël de mener son opération militaire dans le gouvernorat de Rafah tant qu’il satisfait auxdites obligations. Il s’agit donc là d’une mesure limitée, qui préserve le droit d’Israël de prévenir et de repousser les menaces et attaques du Hamas, de se défendre et de défendre ses citoyens, ainsi que de libérer les otages.
2. L’Afrique du Sud s’est tournée vers la Cour internationale de Justice à quatre reprises en l’espace de cinq mois à peine. Chaque fois, elle a demandé un cessez-le-feu ou la suspension de l’opération militaire israélienne à Gaza, accusant Israël de se livrer à un génocide contre le peuple palestinien. La Cour s’est refusée, dans ses décisions des 26 janvier 2024, 16 février 2024 et 28 mars 2024, à prescrire une forme quelconque de cessez-le-feu ou de suspension. Les raisons à cela étaient aussi simples qu’importantes. L’Afrique du Sud n’a pas étayé son grief selon lequel l’opération militaire israélienne était, de manière plausible, sous-tendue par une intention génocidaire. En réalité, la Cour elle-même a pris en considération le contexte immédiat dans lequel Israël avait décidé d’entreprendre cette opération, soit les attaques commises le 7 octobre 2023 par le Hamas, qui continue de menacer son existence même, ainsi que l’enlèvement de centaines de citoyens israéliens et de ressortissants étrangers, emmenés à Gaza. Dans ces conditions, la Cour a compris qu’elle ne pouvait enjoindre à une partie de cesser ses actions, tandis que l’autre serait libre de les poursuivre.
1 Demande de l’Afrique du Sud, 10 mai 2024, par. 25.
2 Ordonnance, alinéa a) du point 2 du dispositif (par. 57).
- 2 -
Ces raisons n’ont rien perdu de leur validité depuis que la Cour a rendu ses premières ordonnances, et celle rendue ce jour ne retire rien aux considérations exposées ci-dessus.
3. La Cour avait pleinement conscience que l’opération militaire d’Israël dans la bande de Gaza n’aurait pas eu lieu si le Hamas n’avait pas commis ses attaques le 7 octobre 2023 ni enlevé 250 personnes. Selon moi, les éléments de preuve spécifiques, crédibles et récents fournis par Israël, que son équipe juridique a présentés de manière professionnelle et convaincante à l’audience, ont contribué de manière décisive à réfuter toute allégation formulée par l’Afrique du Sud quant à l’existence d’une intention. Israël est parvenu à produire ces éléments de preuve en dépit du temps extrêmement court dont il a disposé pour préparer les audiences. Alors même qu’il se trouvait dans une position défavorable sur le plan procédural, l’Afrique du Sud n’a pas obtenu gain de cause s’agissant de la demande principale qu’elle avait présentée à la Cour.
4. De fait, je ne peux que relever la différence existant entre la demande écrite du 10 mai 2024 déposée par l’Afrique du Sud, les conclusions finales qu’elle a présentées le 16 mai 2024 et les mesures indiquées par la Cour. Alors qu’elle avait initialement prié la Cour, de manière bien plus limitée et spécifique, de dire qu’Israël devait « immédiatement se retirer du gouvernorat de Rafah et y cesser son offensive militaire »3, l’Afrique du Sud est par la suite revenue à la demande qu’elle avait déjà formulée à trois reprises dans des termes quasi identiques, sollicitant une mesure qui prescrirait à Israël de « cesser … ses opérations militaires dans la bande de Gaza, notamment dans le gouvernorat de Rafah, d’évacuer le point de passage de Rafah, et de retirer immédiatement, entièrement et inconditionnellement son armée de l’ensemble de la bande de Gaza »4. Ses manoeuvres ont cependant échoué. Une nouvelle fois, sa demande tendant au « ret[rait] immédia[t], enti[er] et inconditionne[l] » de l’armée israélienne de la bande de Gaza, présentée sur le fondement d’allégations de génocide, a été rejetée. À mon sens, cela indique clairement que l’ordonnance rendue ce jour n’a pas été adoptée parce qu’il existait un quelconque élément de preuve étayant les allégations formulées par l’Afrique du Sud au titre de la convention sur le génocide.
5. Je n’oublie pas les souffrances toujours plus grandes subies à Gaza, et suis, au contraire, tout comme mes collègues de la Cour, profondément préoccupé par la situation humanitaire de la région. J’ai néanmoins estimé ne pas pouvoir voter en faveur du dispositif de l’ordonnance rendue ce jour, car l’opération militaire ne soulève plausiblement aucune question relevant de la convention sur le génocide. En particulier, rien ne prouve l’existence d’une intention génocidaire. Tout conflit armé  et celui-ci ne déroge pas à la règle  soulève à l’évidence des questions pertinentes au regard du droit relatif aux droits de l’homme et du droit international humanitaire. C’est toutefois dans le cadre du système judiciaire indépendant et fiable d’Israël que ces questions, ainsi que les responsabilités qui en découlent, doivent continuer d’être examinées et tranchées.
6. Le traitement réservé par la Cour aux éléments de preuve relatifs aux conditions régissant l’indication de mesures conservatoires destinées à protéger des droits garantis par la convention sur le génocide est particulièrement préoccupant. La Cour s’est principalement fondée sur des déclarations faites par des responsables de l’Organisation des Nations Unies sur les réseaux sociaux et sur des communiqués de presse publiés par des organisations compétentes (voir ordonnance, par. 44 à 46). Elle s’est appuyée sur ces déclarations et communiqués sans même chercher à savoir sur quels éléments de preuve ils reposent. L’approche de la Cour tranche nettement avec sa jurisprudence antérieure, dans laquelle elle a précisé que « les rapports de l’ONU [n’étaient] des éléments de preuve fiables que “dans la mesure où ils [avaie]nt une valeur probante et [étaie]nt
3 Demande de l’Afrique du Sud, 10 mai 2024, par. 25.
4 CR 2024/27, p. 63, par. 3 (Madonsela).
- 3 -
corroborés, si nécessaire, par d’autres sources crédibles” »
5. En la présente espèce, les déclarations et communiqués de presse mis en avant par la Cour n’ont tout simplement pas été corroborés. Celle-ci n’a pas cherché à déterminer quelles méthodes avaient été suivies ou si des recherches approfondies avaient été effectuées aux fins de leur élaboration, contrairement à ce qu’elle avait fait dans d’autres affaires6. Je ne vois pas comment l’approche adoptée par la Cour dans la présente instance pourrait être compatible avec ses décisions précédentes de ne pas tenir compte d’éléments tirés de rapports de l’Organisation des Nations Unies qui reposaient uniquement sur des informations de seconde main7. Le fait que la Cour se soit nettement écartée de sa pratique habituelle concernant les éléments de preuve est d’autant plus inquiétant que la présente affaire porte sur des « accusations d’une exceptionnelle gravité » qui doivent être « prouvée[s] avec un degré élevé de certitude, à la mesure de [leur] gravité »8. Même si, j’en ai bien conscience, ce critère a été élaboré pour une phase ultérieure de la procédure dans ce type d’affaire, la Cour aurait dû, au minimum, en tenir compte dans son traitement des preuves au stade des mesures conservatoires.
7. Dans le présent exposé de mon opinion, je souhaite faire trois choses. Premièrement, je formulerai quelques observations sur la situation à Rafah et à Al-Mawasi. Deuxièmement, je montrerai que rien ne justifie l’indication de nouvelles mesures. Aucune des allégations de l’Afrique du Sud n’indique qu’il y ait eu un « changement dans la situation », ce qui constitue l’une des conditions auxquelles est subordonnée l’indication de nouvelles mesures. Par sa demande, l’Afrique du Sud cherche, en réalité, à obtenir que la Cour s’ingère dans les détails de la conduite du conflit armé. Dans ce contexte, je traiterai également de l’absence flagrante de preuve démontrant, même selon un critère de plausibilité, l’existence de circonstances qui dénoteraient une intention génocidaire. Troisièmement, j’entends préciser la portée des mesures indiquées, notamment le caractère limité de la suspension des opérations militaires et la manière dont la Cour continue de préserver le droit fondamental d’Israël de se défendre et de défendre ses citoyens.
I. LA SITUATION À RAFAH ET À AL-MAWASI
8. L’opération militaire d’Israël dans la bande de Gaza ne peut se comprendre — et n’aurait d’ailleurs pas eu lieu — sans la menace que fait peser le Hamas sur l’existence même d’Israël et les plus de 100 otages qui demeurent en captivité. Élément révélateur, la menace du Hamas et la situation des otages n’ont été mentionnées ni dans la demande écrite ni dans les plaidoiries de l’Afrique du Sud, et ce, pas même une seule fois.
9. Depuis des années, Rafah, qui fait partie de la bande de Gaza, est et reste le bastion du Hamas. Israël a exposé qu’il subissait les menaces et attaques indiscriminées incessantes de ce
5 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), réparations, arrêt, C.I.J. Recueil 2022 (I), p. 85, par. 215.
6 Ibid., p. 66, par. 152.
7 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 225, par. 159.
8 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 129-130, par. 209-210.
- 4 -
dernier
9. Le Hamas continue de se retrancher à l’intérieur ou à proximité des hôpitaux et des écoles, et d’utiliser les civils palestiniens comme boucliers humains10.
Israël a soutenu que des centaines de roquettes avaient été tirées depuis Rafah au cours des deux dernières semaines, frappant plusieurs villes ou localités situées sur son territoire11. Il a également mentionné le large réseau de tunnels creusés sous Rafah qui comprend plus de 700 galeries, dont une cinquantaine vont jusqu’en Égypte12. Selon Israël, ces tunnels sont utilisés aux fins de l’approvisionnement en armes et en munitions du Hamas, et pourraient servir à faire sortir clandestinement de Gaza des otages ou des membres importants de l’organisation13.
10. Afin de prévenir et de repousser la menace que fait peser sur lui le Hamas et de libérer les otages, Israël doit mener des opérations militaires à Rafah et dans l’ensemble de la bande de Gaza. Il a le droit autant que le devoir de prévenir et de repousser ces menaces et attaques. Comme l’ont déclaré ses plus hautes autorités, Israël ne poursuit qu’un seul objectif : vaincre le Hamas et ramener les otages.
11. Israël a précisé à l’audience, ainsi que dans sa réponse à la question posée par le juge Nolte, qu’il avait pris des mesures visant à établir des zones humanitaires susceptibles d’accueillir en toute sécurité la population civile évacuée. Al-Mawasi a été désignée comme la principale  mais pas la seule  de ces zones sûres destinées aux personnes fuyant Rafah. Israël a produit des éléments attestant que la zone d’Al-Mawasi est reliée aux deux grandes voies d’accès humanitaire de Gaza et à la nouvelle jetée temporaire14. Cette zone ne se réduit pas à une étendue de « dunes de sable arides »15. Israël indique qu’elle est raccordée à la conduite d’eau de Bani Suheila, qu’il a contribué à réparer, et qu’elle est équipée de réservoirs d’eau, de pompes à eau et d’usines de dessalement16. La zone humanitaire a en outre reçu des stocks supplémentaires d’abris, de denrées alimentaires, de médicaments et d’autres fournitures, et deux hôpitaux de campagne y ont été établis17. Le 12 mai 2024, Israël a annoncé la mise en service à Al-Mawasi d’un nouvel hôpital de campagne. Il s’agit du huitième qu’Israël aide à établir à Gaza depuis le début de la guerre18.
9 CR 2024/28, p. 9-10, par. 11-15 (Noam) ; voir aussi le dossier de documents en date du 10 janvier 2024 soumis par l’État d’Israël aux fins des audiences sur les mesures conservatoires tenues les 11 et 12 janvier 2024, onglets 6 (« The Hamas Agenda ») et 7 (« Hamas Threat to the Israeli Population »).
10 Dossier de plaidoiries soumis par Israël (17 mai 2024), onglet 2 ; CR 2024/28, p. 11, par. 19 (Noam) ; voir aussi le dossier de documents en date du 10 janvier 2024 soumis par l’État d’Israël aux fins des audiences sur les mesures conservatoires tenues les 11 et 12 janvier 2024, onglet 7 (« The Embedment of Hamas Military Infrastructure in the Urban Terrain and the Risk to Civilians in Gaza »).
11 Dossier de plaidoiries soumis par Israël (17 mai 2024), onglet 1 ; CR 2024/28, p. 9-10, par. 11-15 (Noam).
12 Ibid. ; voir aussi CR 2024/28, p. 10, par. 14 (Noam).
13 CR 2024/28, p. 10, par. 14 (Noam).
14 Réponse de l’État d’Israël à la question posée par le juge Nolte à l’audience du 17 mai 2024 sur la quatrième demande en indication de mesures conservatoires de l’Afrique du Sud, 18 mai 2024, par. 8.
15 CR 2024/27, p. 20, par. 13 (Dugard).
16 Réponse de l’État d’Israël à la question posée par le juge Nolte à l’audience du 17 mai 2024 sur la quatrième demande en indication de mesures conservatoires de l’Afrique du Sud, 18 mai 2024, par. 22-25.
17 Ibid., par. 19-21 et 26-31.
18 Ibid., par. 32-34.
- 5 -
II. RIEN NE JUSTIFIE L’INDICATION DE NOUVELLES MESURES
12. Dans mes précédentes opinions, j’ai exposé mes vues concernant le raisonnement peu judicieux suivi par la Cour depuis que l’Afrique du Sud a introduit la présente instance en décembre 2023. Ce raisonnement entache l’ordonnance rendue ce jour et toutes les précédentes. Comme c’était déjà le cas de celle du 28 mars 2024, la nouvelle ordonnance ne satisfait pas aux conditions énoncées au paragraphe 1 de l’article 76 du Règlement de la Cour, selon lesquelles cette dernière ne peut modifier une ordonnance en indication de mesures conservatoires que s’il s’est produit un changement dans la situation qui justifie pareille modification. Alors même que ces conditions n’étaient pas réunies, la Cour a imposé des mesures additionnelles à Israël. Ce faisant, elle a agi en dehors de sa fonction judiciaire et outrepassé la compétence que les États lui ont conférée au titre de l’article 41 de son Statut. Son raisonnement porte en outre gravement atteinte à l’intégrité de la convention sur le génocide.
1. Absence de changement dans la situation
13. L’Afrique du Sud a cherché à présenter l’opération militaire menée par Israël à Rafah comme un « changement dans la situation » qui justifierait l’indication de nouvelles mesures. Or, il ne s’agit pas d’une nouvelle campagne militaire. Cette opération s’inscrit dans le cadre de celle qu’Israël mène actuellement dans toute la bande de Gaza et qui a débuté en octobre 2023. Elle fait partie intégrante des efforts qu’il a mis en oeuvre, plus largement, pour prévenir et repousser les menaces et attaques continues du Hamas et libérer les otages toujours détenus. De fait, la Cour, dans sa décision en date du 16 février 2024 autant que dans son ordonnance du 28 mars 2024, avait expressément mentionné l’aggravation de la situation à Rafah. Il n’y a pas lieu qu’elle agisse à chaque nouvelle évolution des hostilités, car cela reviendrait pour elle à s’ingérer dans les détails de la conduite d’un conflit armé.
2. Absence de justification de nouvelles mesures
14. La Cour ne peut modifier une ordonnance en indication de mesures conservatoires que si les mesures existantes ne sont pas à même de répondre pleinement aux conséquences découlant du changement dans la situation. Or, toutes les conséquences susceptibles de découler des actions d’Israël à Rafah sont déjà couvertes par ses deux ordonnances précédentes. Dans celle du 26 janvier, la Cour avait déjà enjoint à Israël de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir la commission d’actes entrant dans le champ d’application de la convention sur le génocide19. Israël devait également veiller, avec effet immédiat, à ce que son armée ne commette aucun des actes prohibés par cet instrument20. En outre, il devait prendre sans délai des mesures effectives pour permettre la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence21. Les obligations relatives à la fourniture de l’aide ont été renforcées par l’ordonnance du 28 mars 202422. Bien que j’aie voté contre plusieurs d’entre elles, ces mesures constituent des décisions contraignantes de la Cour23. Ainsi, les précédentes ordonnances soumettent déjà à restrictions l’opération militaire menée par Israël à Rafah afin de protéger tout droit jugé plausible au regard de la convention sur le génocide. Il convient de noter que, au paragraphe pertinent de l’ordonnance rendue ce jour, la Cour ne précise nullement les raisons pour lesquelles elle considère que les mesures
19 Ordonnance du 26 janvier 2024, point 1 du dispositif (par. 86).
20 Ibid., point 2 du dispositif (par. 86).
21 Ibid., point 4 du dispositif (par. 86).
22 Ordonnance du 28 mars 2024, alinéa a) du point 2 du dispositif (par. 51).
23 LaGrand (Allemagne c. États-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 506, par. 109.
- 6 -
précédentes « ne couvrent pas intégralement les conséquences découlant du changement dans la situation » (voir ordonnance, par. 30).
15. La demande de l’Afrique du Sud semble avoir pour objet l’exécution par Israël des précédentes ordonnances. Il n’appartient toutefois ni à l’Afrique du Sud ni à la Cour d’apprécier cette question au présent stade de la procédure. Ce n’est que dans le cadre de l’examen au fond que la Cour pourra procéder à une telle appréciation. L’Afrique du Sud semble en outre inviter la Cour à endosser le rôle de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité. Or la Cour ne saurait outrepasser sa fonction judiciaire du seul fait que cet État estime que les organes en question ne se sont pas acquittés de manière effective de leurs responsabilités.
3. Absence de circonstances justifiant d’indiquer des mesures conservatoires : le défaut d’intention génocidaire
16. Le pouvoir d’indiquer des mesures conservatoires que la Cour tient de l’article 41 de son Statut a pour objet de sauvegarder, dans l’attente de sa décision sur le fond de l’affaire, les droits revendiqués par une partie. En l’espèce, les droits en cause sont ceux qui existent au titre de la convention sur le génocide. Ni plus ni moins. La tâche de l’Afrique du Sud consistait dès lors à démontrer que les actions entreprises par Israël créaient le risque qu’un préjudice irréparable fût causé à ces droits-là. Pas à des droits découlant du droit international humanitaire ou du droit relatif aux droits de l’homme, mais aux droits découlant de la convention sur le génocide, et à eux seuls. L’Afrique du Sud ne l’a pas démontré.
17. Le comportement d’un État ne peut créer le risque qu’un préjudice irréparable soit causé à des droits protégés par la convention sur le génocide que si ce comportement entre dans les prévisions de celle-ci. Pour qu’il en soit ainsi, il faut qu’une intention spécifique de commettre un génocide (dolus specialis) existe. En l’absence de dolus specialis, le comportement en question ne relève pas de la convention et, partant, les droits qu’elle protège ne sont pas en jeu.
18. Les conditions requises pour qu’une intention génocidaire puisse être établie sont très exigeantes. En l’affaire du génocide en Bosnie, la Cour a jugé que
« [l]e dolus specialis, l’intention spécifique de détruire le groupe en tout ou en partie, d[eva]it être établi en référence à des circonstances précises, à moins que l’existence d’un plan général tendant à cette fin puisse être démontrée de manière convaincante ; pour qu’une ligne de conduite puisse être admise en tant que preuve d’une telle intention, elle devrait être telle qu’elle ne puisse qu’en dénoter l’existence »24.
19. L’Afrique du Sud n’a produit aucune preuve pouvant permettre à la Cour de tirer cette conclusion, même selon un critère de plausibilité. Elle n’a en effet pas présenté le moindre élément nouveau susceptible d’étayer l’existence plausible d’une intention génocidaire.
20. Contrairement à l’Afrique du Sud, Israël établit une distinction entre le Hamas et les civils présents à Gaza. Il me semble pertinent de rappeler que, le 12 février 2024, l’Afrique du Sud a présenté une demande en indication de mesures conservatoires au motif qu’une opération militaire était imminente à Rafah. La Cour a rejeté à juste titre cette demande. Israël n’a pas agi en février. Au
24 Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), p. 196-197, par. 373.
- 7 -
lieu de cela, comme il l’a précisé, il a préparé son opération militaire de manière à réduire dans toute la mesure possible les dommages susceptibles d’être causés aux civils. Entre février et mai, Israël a pris plusieurs mesures visant à protéger les civils qui seraient contraints d’évacuer la région de Rafah, mesures dont certaines ont été exposées en détail dans sa réponse à la question posée par le juge Nolte. L’objectif clairement annoncé de son opération militaire à Rafah était de prévenir et de repousser la menace présentée par le Hamas, de se défendre et de défendre ses citoyens, ainsi que de libérer les otages. Plusieurs hauts responsables israéliens ont répété que l’opération militaire était dirigée contre le Hamas, et non le peuple palestinien
25.
21. Israël a en outre relevé que ses forces de défense avaient demandé aux résidents de la partie est de Rafah de quitter la zone. Les messages d’évacuation ont été communiqués au moyen de tracts, de messages SMS, d’appels téléphoniques et d’annonces diffusées en arabe par les médias. Ces informations ont été corroborées par des articles de presse indépendants26.
22. Israël a pris des dispositions en vue d’atténuer le préjudice subi par les Palestiniens de Rafah qui ont dû rejoindre la zone humanitaire établie à Al-Mawasi. Il ne les envoie pas au milieu de nulle part, ni, comme l’affirme l’Afrique du Sud, « dans les dunes de sable arides d’Al-Mawasi ». Bien au contraire, il les évacue dans des zones spécialement conçues à cet effet, où il fait acheminer l’aide et l’assistance humanitaires. Au paragraphe 11 du présent exposé de mon opinion, j’ai décrit les mesures prises par Israël dans la zone d’Al-Mawasi.
23. Je peine à comprendre pourquoi la Cour n’a pas confirmé, ne serait-ce que par une seule phrase, l’augmentation du volume d’aide et d’assistance humanitaires qui entre dans la bande de Gaza. De fait, le nombre de camions humanitaires qui ont pénétré dans Gaza au cours des derniers mois n’a jamais été aussi élevé depuis le début de la guerre. Il importe de relever que, la semaine passée, les forces de défense israéliennes ont rapporté qu’elles avaient autorisé des centaines de camions humanitaires chargés de farine et de carburant à entrer dans Gaza par les points de passage de Kerem Shalom et d’Erez. Comme cela ressort de la déclaration de Sigrid Kaag, coordonnatrice humanitaire principale de l’Organisation des Nations Unies, et des rapports qu’Israël a soumis à la Cour, la quantité d’aide humanitaire fournie à Gaza a considérablement augmenté27. La jetée temporaire nouvellement construite est désormais opérationnelle, et le couloir maritime chypriote permettra d’accroître encore les livraisons d’aide et d’assistance humanitaires. Israël fait valoir qu’il a facilité l’une et l’autre de ces initiatives. Malheureusement, la Cour n’a pas examiné ni même pris en considération ces développements.
24. L’on peut penser qu’Israël devrait en faire plus pour protéger les civils à Rafah, mais cette question n’est pas en jeu dans la présente affaire. La Cour peut uniquement indiquer des mesures visant à protéger des droits qui sont plausibles au regard de la convention sur le génocide. La question pertinente est celle de l’intention plausible. Je ne vois pas comment le comportement d’Israël pourrait être considéré, ne serait-ce que de manière plausible, comme constituant une ligne de conduite dont pourrait être déduite l’intention spécifique requise par ladite convention. Pourquoi un État ayant
25 Dossier de documents soumis par l’État d’Israël aux fins des audiences consacrées aux mesures conservatoires tenues les 11 et 12 janvier 2024, 10 janvier 2024, onglet 2 (« Selected Public Statements by Israeli Leaders Stating the War’s Objectives and Commitment to International Law ») ; voir également CR 2024/28, p. 25-26, par. 22-24 (Kaplan Tourgeman).
26 CR 2024/28, p. 28, par. 31 (Kaplan Tourgeman).
27 OCHA, Remarks to the Security Council by Sigrid Kaag, Senior Humanitarian and Reconstruction Coordinator for Gaza, 24 April 2024.
- 8 -
l’intention de détruire un groupe fournirait-il des tentes, de l’aide humanitaire et des hôpitaux de campagne ? Pourquoi émettrait-il des avertissements et établirait-il des zones humanitaires ?
25. L’absence de preuve d’une intention plausible dans l’ensemble des demandes de l’Afrique du Sud compromet de manière rédhibitoire l’argumentation qu’elle avance. La Cour ne peut examiner l’actus reus sans s’intéresser aussi à la mens rea. Comment les mesures qu’elle a indiquées peuvent-elles préserver les droits protégés par la convention sur le génocide lorsqu’il n’existe pas le moindre signe d’une intention ? Telles sont les raisons pour lesquelles j’ai voté contre la majeure partie des mesures indiquées par la Cour jusqu’ici.
26. La voie empruntée par la Cour est périlleuse. Elle affaiblit le régime de la convention sur le génocide en l’utilisant (ou en le détournant) pour arbitrer un conflit armé. Comment les États peuvent-ils confier à la Cour le règlement de leurs différends concernant l’interprétation et l’application de conventions multilatérales si celles-ci sont employées à des fins très éloignées de l’intention initiale des parties ?
III. LE CARACTÈRE LIMITÉ DES MESURES INDIQUÉES PAR LA COUR
27. Par la première mesure indiquée, la Cour réaffirme les ordonnances précédentes des 26 janvier et 28 mars 2024. Ayant voté contre la majeure partie des mesures indiquées par la Cour dans ces ordonnances, j’ai également voté contre celle-ci.
28. La première mesure additionnelle indiquée par la Cour réaffirme une obligation déjà imposée à Israël par la convention sur le génocide et précise les mesures déjà contenues dans les ordonnances du 26 janvier et du 28 mars 2024. Elle se lit comme suit :
« L’État d’Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention [sur le] génocide, et au vu de la dégradation des conditions d’existence auxquelles sont soumis les civils dans le gouvernorat de Rafah :
Arrêter immédiatement son offensive militaire, et toute autre action menée dans le gouvernorat de Rafah, qui serait susceptible de soumettre le groupe des Palestiniens de Gaza à des conditions d’existence capables d’entraîner sa destruction physique totale ou partielle ».
J’ai voté contre cette mesure parce que les conditions nécessaires à son indication, énoncées au paragraphe 1 de l’article 76 du Règlement de la Cour, n’étaient pas réunies. Je relèverai cependant qu’elle n’exige pas qu’Israël s’abstienne totalement de mener son opération militaire à Rafah. Elle ne constitue pas une obligation inconditionnelle de mettre fin à cette opération, mais précise qu’Israël doit, conformément aux obligations que lui impose la convention de 1948 sur le génocide, conduire son offensive militaire d’une manière qui ne prive pas la population civile palestinienne de ses moyens d’existence essentiels. Il va de soi que, si elle était menée en violation des obligations que ladite convention fait à Israël, cette offensive militaire devrait cesser. Néanmoins, il n’existe aucun élément établissant, même selon le niveau de preuve peu élevé requis au stade des mesures conservatoires, qu’un quelconque droit garanti par cet instrument serait en cause. En conséquence, la première mesure indiquée par la Cour porte exclusivement sur l’action militaire menée à Rafah à des fins offensives (et non défensives), et n’exige l’arrêt de celle-ci que pour autant qu’il sera nécessaire pour protéger le groupe des Palestiniens de Gaza contre des conditions d’existence susceptibles d’entraîner sa destruction physique. Cette mesure conditionnelle montre que la Cour a conscience de la nécessité pour Israël d’entreprendre les opérations militaires qui s’imposent pour
- 9 -
lui permettre de prévenir et de repousser les menaces et attaques du Hamas, et d’agir pour se défendre, défendre ses citoyens et libérer les otages toujours en captivité à Gaza.
29. La deuxième mesure additionnelle se lit comme suit :
« L’État d’Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention [sur le] génocide, et au vu de la dégradation des conditions d’existence auxquelles sont soumis les civils dans le gouvernorat de Rafah :
Maintenir ouvert le point de passage de Rafah pour que puisse être assurée, sans restriction et à grande échelle, la fourniture des services de base et de l’aide humanitaire requis de toute urgence ».
Cette mesure réaffirme les deux ordonnances précédentes de la Cour. En particulier, elle précise les mesures qui étaient indiquées au point 4 du dispositif (par. 86) de l’ordonnance du 26 janvier 2024 et à l’alinéa a) du point 2 du dispositif (par. 51) de celle du 28 mars 2024. J’avais voté en faveur de ces deux mesures, la fourniture de l’aide et de l’assistance humanitaires étant à mes yeux essentielle. Je ne peux, en revanche, appuyer cette nouvelle prescription, car elle concerne spécifiquement le point de passage de Rafah. La Cour ne possédait pas la moindre preuve se rapportant à la situation de ce point de passage, les Parties n’ayant produit aucun élément concernant la question de savoir si la responsabilité de sa fermeture actuelle revient à Israël, à l’Égypte ou aux deux. Plus important encore, ce point de passage ne peut être opérationnel que si l’Égypte et Israël y consentent l’une et l’autre. Je ne comprends pas comment ce dernier peut se voir prescrire de « maintenir ouvert » un point de passage sur lequel il n’exerce pas un contrôle exclusif. La Cour a indiqué cette mesure alors qu’elle ne disposait que de maigres éléments de preuve, et sans tenir compte du fait qu’un second État souverain contrôle l’autre moitié du point de passage.
30. La troisième mesure additionnelle se lit comme suit :
« L’État d’Israël doit, conformément aux obligations lui incombant au titre de la convention [sur le] génocide, et au vu de la dégradation des conditions d’existence auxquelles sont soumis les civils dans le gouvernorat de Rafah :
Prendre des mesures permettant effectivement de garantir l’accès sans entrave à la bande de Gaza à toute commission d’enquête, toute mission d’établissement des faits ou tout autre organisme chargé par les organes compétents de l’Organisation des Nations Unies d’enquêter sur des allégations de génocide ».
Cette mesure réaffirme elle aussi des obligations déjà imposées à Israël par les deux premières ordonnances, qui exigent qu’il préserve les éléments de preuve. J’ai voté contre son indication, car l’Afrique du Sud n’a pas produit d’élément attestant que des mesures additionnelles étaient requises aux fins de la conservation des preuves. Ni la zone géographique d’intervention ni le mandat de ces missions d’établissement des faits ne sont clairement définis. En outre, il est difficile de savoir ce qu’il faut entendre par « organes compétents » dans ce contexte. Même si je comprends l’intérêt des enquêtes indépendantes, pareilles mesures ne devraient pas découler d’une ordonnance de la Cour ; elles devraient reposer sur le consentement.
31. La quatrième mesure additionnelle dispose qu’« Israël devra, dans un délai d’un mois à compter de la date de la présente ordonnance, soumettre à la Cour un rapport sur l’ensemble des mesures qu’il aura prises pour donner effet à cette ordonnance ». Elle prolonge les obligations qui incombent déjà à Israël en matière de présentation de rapports. J’ai voté contre cette mesure, car les obligations en question n’ont pas d’utilité réelle.
- 10 -
IV. OBSERVATIONS FINALES
32. Pour conclure, je tiens à répéter que j’espère sincèrement voir cette guerre cesser aussitôt que possible et les otages rentrer sans tarder en Israël28. À cet égard, je me félicite de ce que la Cour, au paragraphe 56 de l’ordonnance rendue ce jour, ait « estim[é] qu’il [étai]t profondément inquiétant que nombre de ces otages demeur[ai]ent en captivité et réit[éré] son appel en faveur de leur libération immédiate et inconditionnelle ». Comme tout État, Israël a le droit fondamental de protéger ses citoyens et de se protéger lui-même. Ce droit prend une dimension particulière dans le cas des otages, en ce sens qu’il impose à l’État le devoir de faire tout ce qui est en son pouvoir pour les ramener sur son territoire. L’accomplissement de ce devoir n’entre pas en conflit avec les obligations mises à la charge d’Israël par la convention sur le génocide, puisque l’intention sous-jacente est de protéger ses citoyens, et non pas de commettre des actes prohibés par ladite convention. Comme je l’ai écrit dans ma première opinion en la présente affaire, « [c]’est pour défendre ces valeurs que les filles et les fils d’Israël ont sacrifié leurs vies et leurs rêves, victimes d’une guerre qu’Israël n’a pas choisie »29. Demander à la Cour d’intervenir dans le conflit sur le fondement d’allégations de génocide non étayées formulées contre Israël ne mettra pas fin à la guerre. La fin de la guerre est entre les mains du Hamas. C’est lui qui a déclenché la guerre et c’est lui qui peut y mettre un terme en libérant les otages et en assurant à Israël et à ses citoyens le plein respect de leur sécurité.
33. La Cour se trouve dans une position délicate et doit répondre à des attentes élevées. Cela dit, elle n’aurait pas dû céder à ces pressions publiques en sacrifiant l’intégrité de la convention sur le génocide et en outrepassant les limites de sa compétence. Il est compréhensible qu’elle ressente le besoin de « faire quelque chose », d’autant plus que c’est la quatrième fois qu’il lui est demandé d’imposer un cessez-le-feu. Toutefois, cela ne saurait être suffisant. Le fait que le Hamas ne soit pas partie à la procédure et le fait que la compétence de la Cour soit limitée par la convention sur le génocide et l’article 41 du Statut de la Cour demeurent des obstacles de taille, comme c’était déjà le cas en janvier, lorsque l’Afrique du Sud a présenté sa première demande.
34. J’ai vécu des expériences analogues au cours des 28 années pendant lesquelles j’ai siégé à la Cour suprême d’Israël. Il m’a semblé que le seul moyen de rester fidèle à la vérité en tant que juge était de faire abstraction du « bruit de fond » et de me concentrer exclusivement sur le raisonnement juridique. C’est la seule langue que nous, juges, partagions. Nous ne devons pas nous laisser envahir par des problématiques politiques ou militaires ou par des considérations de politique publique. Nous ne devons nous préoccuper que de questions juridiques. Nous sommes une cour de justice, et non un tribunal où s’exprimerait l’opinion publique. Alors même que nous jugeons, nous sommes aussi jugés. Nous ne serons pas jugés par l’hystérie et les turbulences passagères, mais par l’histoire.
(Signé) Aharon BARAK.
___________
28 Voir l’exposé de mon opinion individuelle, Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide dans la bande de Gaza (Afrique du Sud c. Israël), mesures conservatoires, ordonnance du 28 mars 2024, par. 37.
29 Ibid., ordonnance du 26 janvier 2024, par. 49.

Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. le juge ad hoc Barak

Order
5
Links