Déclaration de M. le juge Keith

Document Number
124-20110504-JUD-01-03-EN
Parent Document Number
124-20110504-JUD-01-00-EN
Document File
Bilingual Document File

458

DÉCLARATION DE M. LE JUGE KEITH

[Traduction]

1. Je souscris aux conclusions de la Cour, et ce, essentiellement pour
les motifs exposés dans l’arrêt. La présente déclaration oporte uniquement
sur l’un des aspects du raisonnement suivi.
2. Depuis près de quatre-vingt-dix ans, la Cour — qu’il s’agisse de la
Cour internationale de Justice ou de sa devancière, la Cour permanentoe
de Justice internationale — a la faculté d’autoriser un Etat non partie à

une procédure principale dont elle est saisie à intervenir à l’oinstance, dès
lors que celui-ci parvient à démontrer qu’« un intérêt d’ordre juridique est
pour lui en cause » (article 62 du Statut). L’Etat ainsi admis à intervenir
reçoit copie des pièces de procédure et peut, sur l’objet de l’intervention,
présenter à la Cour une déclaration écrite, puis, au cours doe la procédure

orale, des observations (article 85 du Règlement). Sur les quinze requêtes
à fin d’intervention soumises depuis 1923 dans douze affaires, deux ont
été admises, l’une dans sa totalité, l’autre en partie seoulement.
3. Jusqu’à aujourd’hui, la Cour n’avait pas cherché à expoliciter l’expres -
sion «intérêt d’ordre juridique» telle qu’elle figure à l’article 62 du Statut,

se contentant, après examen des éléments de preuve et des conclousions
présentés par l’Etat demandant à intervenir et les parties ào la procédure
principale, de déterminer si, « concrètement et … par rapport à toutes les
circonstances de l’espèce», l’Etat en question avait démontré ce qu’il avan -
çait, et notamment que son intérêt pouvait être affectéo par la décision
qu’elle rendrait (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Sal‑

vador/Honduras), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J.▯ Recueil 1990,
p. 117-118, par. 61).
4. C’est pour de bonnes raisons, selon moi, que la Cour s’en est jusqou’à
présent strictement tenue au critère énoncé à l’articloe 62 du Statut, sans
chercher à en interpréter une expression isolée. Je m’intéoresserai tout

d’abord à la nature du pouvoir exercé par la Cour en vertu de lo’article 62.
Ce pouvoir revêt un caractère préliminaire, procédural et interlocutoire.
En matière d’effet juridique ou de force obligatoire, il s’agit simplement
d’autoriser (ou non) l’Etat demandant à intervenir à prendre part à l’ins -
tance. Dans cette optique, la Cour doit se livrer à une appréciatioon, de

nature spéculative et prospective, de l’incidence que pourrait avooir la
décision qu’elle rendra dans la procédure principale sur l’iontérêt que pré -
tend détenir l’Etat demandant à intervenir. La question est de osavoir si
cette décision « peut» affecter cet intérêt, et non si elle l’affectera « effecti
vement » ou « vraisemblablement ».
5. Les principales caractéristiques du pouvoir qu’a la Cour de rendreo

sa décision en la procédure principale diffèrent nettement deo celles du
pouvoir qu’elle tient de l’article 62. Dans le premier cas, les parties ont

42

5 CIJ1020.indb 81 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 459

largement plus de possibilités de plaider leur cause, tant à l’oécrit qu’à
l’oral, et de répondre aux arguments qui leur sont opposés ; elles doivent

avoir consenti, d’une manière ou d’une autre, à la compétoence de la Cour
pour connaître de l’affaire ; la Cour rend une décision définitive au fond,
qui est obligatoire pour les parties et sans recours. En procédant deo la
sorte, elle détermine si tels ou tels droits existent et s’ils onto été violés, son
constat relevant d’un processus qui est en général de nature réotrospective.

De plus, il incombe normalement à la partie qui avance un fait à l’appui
de sa thèse de l’établir à l’aune du critère de la pluos forte probabilité,
condition nettement plus exigeante que celle énoncée à l’artoicle 62.
6. Si, parmi les différences entre les deux fonctions, figure effeoctivement
une distinction entre « droit» (juridique) et « intérêt d’ordre juridique »,
les deux paragraphes précédents donnent cependant à penser qu’elole ne

joue qu’un rôle mineur. La définition que donne la Cour de l’o« intérêt
d’ordre juridique» montre que cette distinction n’est pas sans poser pro -
blème, et de même les conséquences que la Cour y attache. Celle-ci, en
effet, définit aujourd’hui l’«intérêt d’ordre juridique» comme «une préten -
tion concrète et réelle … fondée sur le droit » par opposition au « droit

établi» (arrêt (requête du Costa Rica à fin d’intervention), par. 26 ; arrêt
(requête du Honduras à fin d’intervention), par. 37); or, si la prétention est
juridiquement fondée et si elle est réelle et concrète, ne s’oagit-il pas de la
revendication d’un droit (ou d’une liberté ou d’un pouvoir)o juridiquement
reconnu? On peut donc se demander si la Cour opère une véritable

distinction.
7. Quant aux conséquences que la Cour attache à sa définition, eolles
sont au nombre de deux : d’une part, le droit établi jouit d’une protection
supérieure et, d’autre part, les exigences en matière de preuve ne sont pas
aussi strictes en ce qui concerne l’intérêt d’ordre juridiquoe. Ces consé -
quences découlent cependant des caractéristiques propres aux deux opou-

voirs de la Cour dont les différences ont été exposées auxo paragraphes 4
et 5 ci-dessus, et non de la seule distinction qui existerait entre droit étaobli
et intérêt d’ordre juridique.
8. La pratique des Etats demandant à intervenir tend en outre à confior -
mer le caractère incertain de cette distinction, qui ne semble pas proésenter

pour eux d’utilité. Ainsi, en l’espèce, le Costa Rica avait d’emblée indi -
qué, dans sa requête, que « les intérêts d’ordre juridique … pour lui en
cause [étaient] les droits souverains et la juridiction que le droit internatio -
nal reconna[issait] au Costa Rica et que celui-ci revendiqu[ait] confor-
mément à sa Constitution » (les italiques sont de moi). Il a, pour l’essen -

tiel, dit la même chose au terme de la procédure, dans sa réponose à une
question posée par l’un des membres de la Cour. De même, pour doémon -
trer qu’il possédait un intérêt d’ordre juridique, le Honoduras a affirmé
— ainsi que le relève la Cour dans son arrêt — avoir des droits souve -
rains et une juridiction à faire valoir sur une zone maritime donnée (arrêot,
par. 16 et 18).

9. Cette étroite association entre intérêts d’ordre juridique eot droits
découlant du droit international n’est d’ailleurs pas récentoe:

43

5 CIJ1020.indb 83 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 460

— Dans l’affaire du Vapeur Wimbledon, la pologne avait ainsi dans un

premier temps allégué «la violation … des droits et des intérêts [qui lui
étaient] garantis … par l’article 380 du traité [de Versaill»e;s]ayant ensuite
modifié sa demande pour pouvoir se prévaloir de l’article 63, elle
fut admiseà intervenir (VapeurWimbledon,arrêts, 1923, C.P.J.I. série A
o
n 1 (question de l’intervention de la pologne), p. 13).
— Dans sa requête à fin d’intervention dans les affaires des oEssais nucléaires,
Fidji, ayant fait état des demandes formulées par l’Australie et la
Nouvelle-Zélande — qui affirmaient, l’une, que les essais n’étaient pas

compatibles avec les règles applicables du droit international et, l’oautre,
qu’ils constituaient une violation de ses droits au regard du droit
international —, soutenait que «les faits … exposés montr[aient] que le
comportement de la France [l’]affectait pour le moins autant que lao

Nouvelle-Zélande [ou l’Australie] et que des considérations juridiques
analogues s’appliqu[aient] à l’un et l’autre pays » (Essais nucléaires
(Nouvelle‑Zélande c. France), requête de Fidji à fin d’intervention, p. 10).
La Cour ne s’est toutefois pas prononcée sur le fond de cette demaonde

(Essais nucléaires (Nouvelle‑Zélande c. France), requête à fin d’interven ‑
tion, ordonnance du 20 décembre 1974, C.I.J. Recueil 1974, p. 536).
— Dans l’affaire Tunisie/Libye, Malte, bien qu’ayant utilisé les termes de
l’article 62, spécifiait d’emblée que son « intérêt d’ordre juridique »

était constitué par des droits ou « titres» dérivés du droit :
«Il est hors de doute que l’intérêt de Malte quant aux limites doe

son plateau continental est de nature juridique, puisque les titres des o
Etats sur le plateau continental dérivent du droit, de même que leos
principes et règles d’après lesquels les zones dont il s’agiot sont défi-
nies et délimitées. En d’autres termes, ces titres sont crééos et proté -

gés par le droit, et la question de la juste étendue spatiale des orégions
où ils peuvent être exercés par un Etat déterminé est éogalement une
question juridique.» (Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe
libyenne), requête de Malte à fin d’intervention, p. 5, par. 7.)

— Dans l’affaire Libye/Malte, l’Italie, dans sa requête à fin d’intervention,

se référait de même, sous l’intitulé « L’«intérêt d’ordre juridique »», à
ce qu’elle considérait comme ses droits et son titre juridique suro des
portions de plateau continental au large de ses côtes, les zones
pertinentes se trouvant à moins de 400 milles marins de celles-ci

(Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), requête de
l’Italie à fin d’intervention, p. 5-9, par. 6-13).
— Dans l’affaire El Salvador/Honduras, le Nicaragua présentait son
intervention comme ayant un objet double :

«Premièrement, … protéger généralement, par tous les moyens
juridiques possibles, les droits de la République du Nicaragua dans

le golfe de Fonseca et dans les espaces maritimes contigus.

44

5 CIJ1020.indb 85 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 461

Deuxièmement, … intervenir dans l’instance pour informer la
Cour de la nature des droits du Nicaragua qui sont en cause dans le

litige. Cette forme d’intervention aurait un but conservatoire : elle
viserait à garantir que les conclusions de la Chambre ne portent pas
atteinte aux droits et intérêts de la République du Nicaragua, et le
Nicaragua entend reconnaître l’effet obligatoire de la décisioon qui
sera rendue. » (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime

(El Salvador/Honduras; Nicaragua (intervenant)), requête du Nica -
ragua à fin d’intervention, p. 5, par. 5-6.)

— Dans l’affaire Cameroun c. Nigeria, la Guinée équatoriale, là encore
sous un intitulé reprenant les termes de l’article 62, rappelait ce que
la Cour avait dit dans son arrêt sur les exceptions préliminaires en o
l’affaire, poursuivant ainsi en se référant au droit :

«En fait, de par son droit interne, la Guinée équatoriale reven -
dique une zone économique exclusive et une mer territoriale, en des
termes qu’elle considère comme conformes aux droits qu’elle tient du

droit international. La zone maritime qu’elle revendique se traduit
dans l’angle nord-est du golfe de Guinée, sur la base du principe des
lignes médianes, par une frontière qui marquerait à la fois la olimite de
sa zone économique exclusive et — dans certaines circonstances — la
limite de sa mer territoriale par rapport au Cameroun sur une dis -

tance limitée.» (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et
le Nigéria (Cameroun c. Nigéria; Guinée équatoriale (intervenant)),
requête de la Guinée équatoriale à fin d’intervention, op. 7-9.)

Ayant précisé sa position en invoquant des dispositions spécifioques de
son droit interne, elle ajoutait :

«conformément à son droit national, la Guinée équatoriale revoen -
dique les droits souverains et la juridiction que lui confère le droiot
international jusqu’à la ligne médiane entre la Guinée éqouatoriale et
le Nigéria, d’une part, et entre la Guinée équatoriale et le Came -
roun, d’autre part. Ce sont ces droits et intérêts d’ordre juridique

que la Guinée équatoriale cherche à protéger. » (Ibid., p. 9.)
— Dans l’affaire de la Demande d’examen de la situation au titre du

paragraphe 63 de l’arrêt rendu par la Cour le 20 décembre 1974 dans
l’affaire des Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), l’Australie
commençait par présenter, également sous un intitulé reprenant les
termes de l’article 62, deux revendications de la Nouvelle-Zélande :

«Si, comme la Nouvelle-Zélande le soutient, les droits … ont le
caractère erga omnes évoqué ci-dessus, l’action intentée par la
Nouvelle-Zélande contre la France met nécessairement en cause les
droits de tous les Etats, Australie comprise. Si la France est liée par

les obligations erga omnes correspondantes invoquées par la
Nouvelle-Zélande (question qu’il appartiendra à la Cour de tran -

45

5 CIJ1020.indb 87 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 462

cher lors de l’examen au fond), l’Australie a, en commun avec la o
Nouvelle-Zélande et tous les autres Etats, un « intérêt juridique »

[pour reprendre l’expression utilisée par la Cour dans l’affaoire de
la Barcelona Traction] à ce que la France respecte ces obligations.
Comme on l’a indiqué ci-dessus, la Nouvelle-Zélande soutient
que ces obligations, «par leur nature même, valent à l’égard de l’en -
semble de la communauté internationale, et [qu’]il serait absurde ode

les concevoir comme autant d’obligations qu’il faudrait honorer, ào
titre bilatéral, à l’égard de chacun des membres de cette coommu -
nauté…». Si tel est le cas, il s’ensuit nécessairement qu’une décision
de la Cour sur le fond n’aurait pas pour objet les droits et devoirs
bilatéraux de la France et de la Nouvelle-Zélande, considérés à part

des droits et devoirs bilatéraux identiques existant entre la France oet
chacun des membres de la communauté internationale. » (Demande
d’examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l’arrêt rendu par
la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des Essais nucléaires (Nou -
velle-Zélande c. France), requête de l’Australie à fin d’intervention en

vertu de l’article 62, p. 9, par. 18-19.)

Ici aussi, c’est sur des droits, tels que revendiqués par l’Australie,
qu’est fondée la demande d’intervention. L’on notera la réoférence à
l’«intérêt juridique », expression qui figure dans l’arrêt rendu en l’af -
faire de la Barcelona Traction; elle renvoie à la faculté qu’a un Etat de
présenter une demande et non à la nature profonde du droit ou de

l’intérêt revendiqué, question apparemment distincte de l’o« intérêt
d’ordre juridique » devant être apprécié dans le cadre de l’examen
d’une demande d’intervention.
Les Iles Salomon, les Etats fédérés de Micronésie, les Iles oMarshall et
le Samoa avaient présenté des demandes d’intervention en des teormes

similaires, invoquant l’article 63 ainsi que l’article 62. Dans le cadre
de ce dernier, ils faisaient valoir que « les différends relatifs à des
obligations erga omnes [avaient] une unité intrinsèque » (Demande
d’examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l’arrêt rendu
par la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des Essais nucléaires

(Nouvelle-Zélande c. France) : requête à fin d’intervention en vertu
de l’article 62 et déclaration d’intervention en vertu de l’article 63 pré -
sentées par les Iles Salomon, p. 6, par. 19 ; requête à fin d’interven -
tion en vertu de l’article 62 et déclaration d’intervention en vertu
de l’article 63 présentées par les Etats fédérés de Micronésie, p. 6,

par. 19; requête à fin d’intervention en vertu de l’article 62 et déclara -
tion d’intervention en vertu de l’article 63 présentées par les Iles
Marshall, p. 6, par. 19 ; requête à fin d’intervention en vertu de l’ar -
ticle 62 et déclaration d’intervention en vertu de l’article 63 présen -
tées par le Samoa, p. 6, par. 19).

La Cour ne s’est prononcée sur aucune des cinq requêtes présoentées en
l’affaire (Demande d’examen de la situation au titre du paragraphe 63

46

5 CIJ1020.indb 89 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 463

de l’arrêt rendu par la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des
Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), ordonnance du 22 sep‑

tembre 1995, C.I.J. Recueil 1995, p. 306-307, par. 67).
— Dans l’affaire relative à la Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau
Sipadan, les philippines indiquaient que leur requête avait pour objet :

«a) premièrement, de préserver et sauvegarder les droits d’ordre
historique et juridique du Gouvernement de la République des
philippines qui découlent de la revendication de possession et
de souveraineté que ce gouvernement forme sur le territoire du

Bornéo septentrional dans la mesure où ces droits sont ou
pourraient être mis en cause par une décision de la Cour rela -
tive à la question de la souveraineté sur pulau Ligitan et pulau
Sipadan.
b) Deuxièmement, d’intervenir dans l’instance pour informer la
Cour de la nature et de la portée des droits d’ordre historique

et juridique de la République des philippines qui pourraient être
mis en cause par la décision de la Cour.» (Souveraineté sur Pulau
Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malaisie), requête des phi -
lippines à fin d’intervention, p. 5, par. 5.)

10. J’en viens maintenant aux décisions de la Cour sur les demandes
d’intervention présentées en vertu de l’article 62, en commençant par

l’une des deux affaires en lesquelles la requête a été admise. Dans l’affaire
en question, le Nicaragua fut autorisé à intervenir pour ce qui concernait
le régime juridique des eaux du golfe de Fonseca. Le Honduras ne s’était
pas opposé à cet aspect de sa demande, considérant qu’un réogime juri -
dique spécial était nécessaire en raison de la communauté d’ointérêts entre
les Etats côtiers. La Chambre de la Cour, notant qu’El Salvador avait fait

valoir, dans le cadre de la procédure, que les eaux étaient soumisoes à un
condominium des trois Etats côtiers, admit la demande d’interventioon
sur ce point (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salva ‑
dor/Honduras), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1990,
p. 120-122, par. 69-72). Elle ne fit en revanche pas droit à la demande

relative à la délimitation maritime à l’intérieur et en doehors du golfe (ibid.,
p. 123-128, par. 74-84). Ce sont ces rejets qui sont significatifs aux fins des
présentes procédures. De même que dans les deux autres cas où des
demandes d’intervention n’ont pas été admises dans une affoaire de délimi -
tation (Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), requête à▯

fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1981, p. 20, par. 37 ; Plateau conti ‑
nental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), requête à fin d’intervention,
arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 26-28, par. 42-43 et 47), ces rejets sont à rat -
tacher à deux caractéristiques des décisions de la Cour en matioère de déli-
mitation maritime. La première a été rappelée par la Chambreo de la Cour
dans sa décision sur la demande d’intervention du Nicaragua (Différend

frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/Honduras), requête
à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 124, par. 77) : les délimi -

47

5 CIJ1020.indb 91 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 464

tations effectuées entre deux Etats — par voie conventionnelle aussi bien
qu’en vertu d’une décision d’une tierce partie, ajouterais-je — prennent

souvent en compte les côtes d’un ou de plusieurs Etats. La secondeo est
que la Cour, lorsqu’elle trace une ligne de délimitation, veille à ce
que celle-ci s’arrête avant de toucher les droits ou intérêts d’Etats
tiers (voir, par exemple, Plateau continental ( Tunisie/Jamahiriya arabe
libyenne), arrêt, C.I.J. Recueil 1982, p. 93-94, par. 133) ; Plateau continen ‑

tal (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), arrêt, C.I.J. Recueil 1985, p. 25-28,
par. 21-22 ; Délimitation maritime et questions territoriales entre Qatar et
Bahreïn (Qatar c. Bahreïn), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 115-117,
par. 250-252 ; Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée équatoriale (intervenant)), arrêt,
C.I.J. Recueil 2002, p. 448, par. 306-307 ; Différend territorial et maritime

entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragu▯a
c. Honduras), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (II), p. 756-759, par. 312-319 ;
Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt,
C.I.J. Recueil 2009, p. 131, par. 219). Cette pratique semble bien montrer
que les parties communiquent à la Cour les informations pertinentes

concernant les intérêts d’Etats tiers, parfois, d’ailleurs, oà l’appui d’une
exception d’incompétence ou d’irrecevabilité fondée sur le principe énoncé
dans l’affaire de l’Or monétaire (voir les écritures du Nigéria dans l’affaire
Cameroun c. Nigéria (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun
et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée équatoriale (intervenant)),

exceptions préliminaires de la République fédérale du Nigéoria,
par. 4.1-4.11 et 8.11-8.17) et celles du Nicaragua dans l’affaire El Salva ‑
dor/Honduras (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Sal ‑
vador/Honduras; Nicaragua (intervenant)), requête, p. 6-7, par. 9-12 ;
ibid., déclaration écrite, p. 3-27)).
11. La seule requête à fin d’intervention admise dans une affaiore de déli -

mitation maritime fut celle présentée par la Guinée équatorioale en l’affaire
Cameroun c. Nigeria (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigéria (Cameroun c. Nigéria), requête à fin d’intervention, ordonnance du
21 octobre 1999, C.I.J. Recueil 1999 (II),p. 1029).plusieurs aspects de cette
décision limitent toutefois sa pertinence aux fins des présenteso procédure:s

en rejetant un argument fondé sur le principe de l’Or monétaire, la Cour
avait laissé entendre, dans son arrêt sur la compétence, que ceortains Etats
tiers pourraient souhaiter intervenir (Frontière terrestre et maritime entre le
Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria), exceptions préliminaires,
arrêt, C.I.J. Recueil 1998, p. 323-324, par. 115-116), mais seul l’un d’entre

eux, la Guinée équatoriale, présenta une demande en ce sens ; aucune ob-
jection n’y fut faite et la requête fut admise en vertu d’une oordonnance
de la Cour et non d’un arrêt ; enfin, la Cour déclara, dans l’arrêt rendu
dans la procédure principale, qu’en établissant la frontière mariotime elle de -
vait veiller à ne pas adopter une position susceptible d’affecteor les droits
de la Guinée équatoriale et de Sao Tomé-et-principe (Frontière terrestre

et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée
équatoriale (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 2002, p. 421, par. 238). Sao

48

5 CIJ1020.indb 93 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 465

Tomé-et-principe, qui n’avait pas demandé à intervenir, se vit accorder ola
même protection que l’Etat qui avait fait une demande en ce sens; du reste,
c’est aux «droits» et non aux « intérêts» des deux Etats que la Cour faisait
référence (C.I.J. Recueil 2002, p. 421, par. 238).

12. pour résumer, la distinction opérée par la Cour entre « droits dans
l’espèce considérée » et « intérêts d’ordre juridique » me pose trois pro -
blèmes: ces expressions ou concepts sont sortis de leur contexte ; la défini-
tion que donne la Cour des seconds est problématique ; et, pour autant

qu’elle existe, la distinction semble dénuée d’utilité proatique.

(Signé)Kenneth Keith.

49

5 CIJ1020.indb 95 14/06/13 11:47

Bilingual Content

458

DECLARATION OF JUDGE KEITH

1. I agree with the conclusions the Court reaches, essentially for the
reasons it gives. This declaration addresses one aspect of those reasonso.

2. For nearly 90 years, the International Court of Justice and its prede-

cessor, the permanent Court of International Justice, have had the power
to permit a State, not a party to the main proceeding before it, to inteor -
vene in the proceeding if the State persuades the Court that it has “oan
interest of a legal nature which may be affected by the decision in thoe
case” (Article 62 of the Statute). If permission is granted, the intervening

State is supplied with copies of the pleadings and may submit a written o
statement to the Court and its observations in the oral proceedings, witoh
respect to the subject-matter of the intervention (Rules of Court, Arti -
cle 85). Of the 15 requests that have been made in 12 cases since 1923, twoo
have been granted, one without objection and the other in part only.

3. Until today, the Court has not attempted to provide a definition or
an elaboration of the expression “an interest of a legal nature” aos it appears
in Article 62 of the Statute. Rather, having considered the evidence and
submissions presented to it by the requesting State and the parties to the
main proceeding, it has determined whether “in concreto and in relation to

all the circumstances of a particular case” the requesting State has odemon -
strated what it asserts including showing that its interest may be affoected
(Land, Island and Maritime Dispute (El Salvador/Honduras), Application
for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1990, pp. 117-118,
para. 61).

4. There are, I think, good reasons for the Court’s practice to date of
keeping closely to the statutory test laid down in Article 62 and not
attempting to elaborate on a single phrase within that test. I begin witoh the
nature of the power which the Court exercises under Article 62. It is of
a preliminary, procedural, interlocutory character. In terms of its legal

or binding effect, it does no more than to allow (or not) the requestinog
State to participate in the process. It involves the Court in making a fouture-
looking, speculative assessment about the possible impact of the decision
in the main proceeding on the interest asserted by the requesting State.o
That assessment is whether the decision “may”, not “will” oro “is likely” to

affect that interest.

5. The principal features of the power of the Court to make its decision
in the main proceeding differ sharply from those of the Article 62 power.

The parties have much more extensive opportunities, in written and oral o

42

5 CIJ1020.indb 80 14/06/13 11:47 458

DÉCLARATION DE M. LE JUGE KEITH

[Traduction]

1. Je souscris aux conclusions de la Cour, et ce, essentiellement pour
les motifs exposés dans l’arrêt. La présente déclaration oporte uniquement
sur l’un des aspects du raisonnement suivi.
2. Depuis près de quatre-vingt-dix ans, la Cour — qu’il s’agisse de la
Cour internationale de Justice ou de sa devancière, la Cour permanentoe
de Justice internationale — a la faculté d’autoriser un Etat non partie à

une procédure principale dont elle est saisie à intervenir à l’oinstance, dès
lors que celui-ci parvient à démontrer qu’« un intérêt d’ordre juridique est
pour lui en cause » (article 62 du Statut). L’Etat ainsi admis à intervenir
reçoit copie des pièces de procédure et peut, sur l’objet de l’intervention,
présenter à la Cour une déclaration écrite, puis, au cours doe la procédure

orale, des observations (article 85 du Règlement). Sur les quinze requêtes
à fin d’intervention soumises depuis 1923 dans douze affaires, deux ont
été admises, l’une dans sa totalité, l’autre en partie seoulement.
3. Jusqu’à aujourd’hui, la Cour n’avait pas cherché à expoliciter l’expres -
sion «intérêt d’ordre juridique» telle qu’elle figure à l’article 62 du Statut,

se contentant, après examen des éléments de preuve et des conclousions
présentés par l’Etat demandant à intervenir et les parties ào la procédure
principale, de déterminer si, « concrètement et … par rapport à toutes les
circonstances de l’espèce», l’Etat en question avait démontré ce qu’il avan -
çait, et notamment que son intérêt pouvait être affectéo par la décision
qu’elle rendrait (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Sal‑

vador/Honduras), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J.▯ Recueil 1990,
p. 117-118, par. 61).
4. C’est pour de bonnes raisons, selon moi, que la Cour s’en est jusqou’à
présent strictement tenue au critère énoncé à l’articloe 62 du Statut, sans
chercher à en interpréter une expression isolée. Je m’intéoresserai tout

d’abord à la nature du pouvoir exercé par la Cour en vertu de lo’article 62.
Ce pouvoir revêt un caractère préliminaire, procédural et interlocutoire.
En matière d’effet juridique ou de force obligatoire, il s’agit simplement
d’autoriser (ou non) l’Etat demandant à intervenir à prendre part à l’ins -
tance. Dans cette optique, la Cour doit se livrer à une appréciatioon, de

nature spéculative et prospective, de l’incidence que pourrait avooir la
décision qu’elle rendra dans la procédure principale sur l’iontérêt que pré -
tend détenir l’Etat demandant à intervenir. La question est de osavoir si
cette décision « peut» affecter cet intérêt, et non si elle l’affectera « effecti
vement » ou « vraisemblablement ».
5. Les principales caractéristiques du pouvoir qu’a la Cour de rendreo

sa décision en la procédure principale diffèrent nettement deo celles du
pouvoir qu’elle tient de l’article 62. Dans le premier cas, les parties ont

42

5 CIJ1020.indb 81 14/06/13 11:47 459 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

proceedings, to make their case and answer the case against them. They
must have given their consent in one form or other to the Court having

jurisdiction over the case. The Court makes a final decision on the meorits
which is binding on the parties and without appeal. In the course of makoing
that decision, the Court determines the existence or not of rights undero
law and whether those rights have been breached. That process of fact
finding will in general be backward looking. The party asserting a facot in

support of its case usually has the burden of establishing it on the baloance
of probabilities — a standard which is plainly more demanding than that
stated in Article 62.
6. It is true that one of the differences in the elements to be found in o
the two functions is that between a (legal) right and an interest of ao legal
nature, but the two preceding paragraphs suggest that that difference ohas

a very small role. The problematic character of that difference is to obe
seen in the definition which the Court gives to “an interest of a loegal
nature” and the consequences it draws from the difference. The Courot
defines today “an interest of a legal nature”, as opposed to an “estab -
lished right”, as “a real and concrete claim . . . based on law” (Judgment

on Application by Costa Rica, para. 26 ; Judgment on Application by
Honduras, para. 37). If the claim is based on law and is real and concrete,
is it not a claim of a right (or a liberty or a power) recognized by tohe law?
Is the Court drawing a real distinction?

7. The Court draws two consequences from its definition : an estab -
lished right has greater protection and the requirement of proof is not oas
demanding in the case of an interest of a legal nature. But those conse -
quences are a result of the full range of contrasting features of the twoo
powers set out in paragraphs 4 and 5 above. They do not arise simply and

solely from any difference between an established right and an interesot of
a legal nature.

8. The elusive character of the difference is further demonstrated by
the practice of States requesting permission to intervene. They do not

appear to find assistance in any such distinction. To take the two casoes
being decided today, Costa Rica, at the outset of its Application, stated
that its “interests of a legal nature which could be affected by a odecision
in this case are the sovereign rights and jurisdiction afforded to Costa Rica
under international law and claimed pursuant to its constitution” (eompha -

sis added). It said essentially the same at the end of the proceedings oin
answering a question from a judge. Similarly, as the Court records in thoe
Honduras case, that State, to demonstrate that it has an interest of a loegal
nature, contends that it is entitled to claim sovereign rights and jurisodic -
tion over a certain maritime area (Judgment, paras. 16 and 18).

9. That close linking of interests of a legal nature to rights under inter -
national law has appeared from the outset to the present day :

43

5 CIJ1020.indb 82 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 459

largement plus de possibilités de plaider leur cause, tant à l’oécrit qu’à
l’oral, et de répondre aux arguments qui leur sont opposés ; elles doivent

avoir consenti, d’une manière ou d’une autre, à la compétoence de la Cour
pour connaître de l’affaire ; la Cour rend une décision définitive au fond,
qui est obligatoire pour les parties et sans recours. En procédant deo la
sorte, elle détermine si tels ou tels droits existent et s’ils onto été violés, son
constat relevant d’un processus qui est en général de nature réotrospective.

De plus, il incombe normalement à la partie qui avance un fait à l’appui
de sa thèse de l’établir à l’aune du critère de la pluos forte probabilité,
condition nettement plus exigeante que celle énoncée à l’artoicle 62.
6. Si, parmi les différences entre les deux fonctions, figure effeoctivement
une distinction entre « droit» (juridique) et « intérêt d’ordre juridique »,
les deux paragraphes précédents donnent cependant à penser qu’elole ne

joue qu’un rôle mineur. La définition que donne la Cour de l’o« intérêt
d’ordre juridique» montre que cette distinction n’est pas sans poser pro -
blème, et de même les conséquences que la Cour y attache. Celle-ci, en
effet, définit aujourd’hui l’«intérêt d’ordre juridique» comme «une préten -
tion concrète et réelle … fondée sur le droit » par opposition au « droit

établi» (arrêt (requête du Costa Rica à fin d’intervention), par. 26 ; arrêt
(requête du Honduras à fin d’intervention), par. 37); or, si la prétention est
juridiquement fondée et si elle est réelle et concrète, ne s’oagit-il pas de la
revendication d’un droit (ou d’une liberté ou d’un pouvoir)o juridiquement
reconnu? On peut donc se demander si la Cour opère une véritable

distinction.
7. Quant aux conséquences que la Cour attache à sa définition, eolles
sont au nombre de deux : d’une part, le droit établi jouit d’une protection
supérieure et, d’autre part, les exigences en matière de preuve ne sont pas
aussi strictes en ce qui concerne l’intérêt d’ordre juridiquoe. Ces consé -
quences découlent cependant des caractéristiques propres aux deux opou-

voirs de la Cour dont les différences ont été exposées auxo paragraphes 4
et 5 ci-dessus, et non de la seule distinction qui existerait entre droit étaobli
et intérêt d’ordre juridique.
8. La pratique des Etats demandant à intervenir tend en outre à confior -
mer le caractère incertain de cette distinction, qui ne semble pas proésenter

pour eux d’utilité. Ainsi, en l’espèce, le Costa Rica avait d’emblée indi -
qué, dans sa requête, que « les intérêts d’ordre juridique … pour lui en
cause [étaient] les droits souverains et la juridiction que le droit internatio -
nal reconna[issait] au Costa Rica et que celui-ci revendiqu[ait] confor-
mément à sa Constitution » (les italiques sont de moi). Il a, pour l’essen -

tiel, dit la même chose au terme de la procédure, dans sa réponose à une
question posée par l’un des membres de la Cour. De même, pour doémon -
trer qu’il possédait un intérêt d’ordre juridique, le Honoduras a affirmé
— ainsi que le relève la Cour dans son arrêt — avoir des droits souve -
rains et une juridiction à faire valoir sur une zone maritime donnée (arrêot,
par. 16 et 18).

9. Cette étroite association entre intérêts d’ordre juridique eot droits
découlant du droit international n’est d’ailleurs pas récentoe:

43

5 CIJ1020.indb 83 14/06/13 11:47 460 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

— In the S.S. “Wimbledon” case, poland referred to “violations of the
rights and material advantages guaranteed to poland by Article 380

of The Treaty of Versailles” ; it changed its request to one under Arti -
cle 63 and the Court accepted it (S.S. “Wimbledon”, Judgments, 1923,
P.C.I.J., Series A, No. 1 (Question of Intervention by poland), p. 13).

— In the Nuclear Tests cases, Fiji in its request having referred to the
claims made by Australia and New Zealand — respectively, that the
testing was not consistent with applicable rules of international law oro
constituted a violation of New Zealand rights under international

law — contended that “[I]t will be evident from the facts set out above
that Fiji is affected by French conduct at least as much as [Australiao]
New Zealand and that similar legal considerations affect its position.”o
(I.C.J. Pleadings, Nuclear Tests (New Zealand v. France), Applica -
tion for permission to Intervene Submitted by the Government of

Fiji, p. 91.) The Court did not rule on the substance of this request
(Nuclear Tests (New Zealand v. France), Application for Permission to
Intervene, Order of 20 December 1974, I.C.J. Reports 1974, p. 536.

— While Malta in the Tunisia/Libya case used the terms of Article 62 in
its request it at once defined its “interest of a legal nature” oas rights
under the law :

“There can be no doubt that Malta’s interest in her continental
shelf boundaries is of a legal character since the continental shelf
rights of States are derived from law, as are also the principles and

rules on the basis of which such areas are to be defined and delimitedo.
In other words these rights are created and protected by law, and
the question of the proper spatial extent of the regions over which
they can be exercised by any given State is also a matter of law.”
(I.C.J. Pleadings, Continental Shelf (Tunisia/Libyan Arab Jama ‑

hiriya), Application for permission to Intervene by the Government
of the Republic of Malta, p. 258, para. 7.)

— Italy in its request in the Libya/Malta case under the heading l’intérêt
d’ordre juridique similarly referred to its rights and legal title, as it saw
them, in areas of continental shelf off its coast, the relevant areas o
being within 400 nautical miles of the relevant coasts (I.C.J. Plead ‑

ings, Continental Shelf (Libyan Arab Jamahiriya/Malta), Vol. II,
Application for permission to Intervene, pp. 422-424, paras. 6-13).

— Nicaragua in the El Salvador/Honduras case stated two objects for its

intervention :
“First, generally to protect the legal rights of the Republic of Nica-

ragua in the Gulf of Fonseca and the adjacent maritime areas by all
legal means available.

44

5 CIJ1020.indb 84 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 460

— Dans l’affaire du Vapeur Wimbledon, la pologne avait ainsi dans un

premier temps allégué «la violation … des droits et des intérêts [qui lui
étaient] garantis … par l’article 380 du traité [de Versaill»e;s]ayant ensuite
modifié sa demande pour pouvoir se prévaloir de l’article 63, elle
fut admiseà intervenir (VapeurWimbledon,arrêts, 1923, C.P.J.I. série A
o
n 1 (question de l’intervention de la pologne), p. 13).
— Dans sa requête à fin d’intervention dans les affaires des oEssais nucléaires,
Fidji, ayant fait état des demandes formulées par l’Australie et la
Nouvelle-Zélande — qui affirmaient, l’une, que les essais n’étaient pas

compatibles avec les règles applicables du droit international et, l’oautre,
qu’ils constituaient une violation de ses droits au regard du droit
international —, soutenait que «les faits … exposés montr[aient] que le
comportement de la France [l’]affectait pour le moins autant que lao

Nouvelle-Zélande [ou l’Australie] et que des considérations juridiques
analogues s’appliqu[aient] à l’un et l’autre pays » (Essais nucléaires
(Nouvelle‑Zélande c. France), requête de Fidji à fin d’intervention, p. 10).
La Cour ne s’est toutefois pas prononcée sur le fond de cette demaonde

(Essais nucléaires (Nouvelle‑Zélande c. France), requête à fin d’interven ‑
tion, ordonnance du 20 décembre 1974, C.I.J. Recueil 1974, p. 536).
— Dans l’affaire Tunisie/Libye, Malte, bien qu’ayant utilisé les termes de
l’article 62, spécifiait d’emblée que son « intérêt d’ordre juridique »

était constitué par des droits ou « titres» dérivés du droit :
«Il est hors de doute que l’intérêt de Malte quant aux limites doe

son plateau continental est de nature juridique, puisque les titres des o
Etats sur le plateau continental dérivent du droit, de même que leos
principes et règles d’après lesquels les zones dont il s’agiot sont défi-
nies et délimitées. En d’autres termes, ces titres sont crééos et proté -

gés par le droit, et la question de la juste étendue spatiale des orégions
où ils peuvent être exercés par un Etat déterminé est éogalement une
question juridique.» (Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe
libyenne), requête de Malte à fin d’intervention, p. 5, par. 7.)

— Dans l’affaire Libye/Malte, l’Italie, dans sa requête à fin d’intervention,

se référait de même, sous l’intitulé « L’«intérêt d’ordre juridique »», à
ce qu’elle considérait comme ses droits et son titre juridique suro des
portions de plateau continental au large de ses côtes, les zones
pertinentes se trouvant à moins de 400 milles marins de celles-ci

(Plateau continental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), requête de
l’Italie à fin d’intervention, p. 5-9, par. 6-13).
— Dans l’affaire El Salvador/Honduras, le Nicaragua présentait son
intervention comme ayant un objet double :

«Premièrement, … protéger généralement, par tous les moyens
juridiques possibles, les droits de la République du Nicaragua dans

le golfe de Fonseca et dans les espaces maritimes contigus.

44

5 CIJ1020.indb 85 14/06/13 11:47 461 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

Secondly, to intervene in the proceedings in order to inform the
Court of the nature of the legal rights of Nicaragua which are in

issue in the dispute. This form of intervention would have the con -
servative purpose of seeking to ensure that the determinations of the
Chamber did not trench upon the legal rights and interests of the
Republic of Nicaragua, and Nicaragua intends to subject itself to
the binding effect of the decision to be given.” (Land, Island and

Maritime Frontier Dispute (El Salvador/Honduras : Nicaragua inter ‑
vening), Application for permission to Intervene by the Government
of Nicaragua, p. 4, paras. 5-6.)

— In Cameroon v. Nigeria, Equatorial Guinea, again under a heading
using the terms of Article 62, recalled what the Court had said in its
judgment on preliminary objections in that case and continued by ref -
erence to the law :

“In fact, Equatorial Guinea has claimed an exclusive economic
zone and territorial sea under its own domestic law, in terms which
it believes consistent with its entitlements under international law.

The maritime area thus claimed would produce a boundary in the
north-east corner of the Gulf of Guinea, based upon median line
principles, which would be both an exclusive economic zone bound -
ary and — in some circumstances — a territorial sea boundary with
Cameroon for a limited distance.” (Land and Maritime Boundary

between Cameroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria : Equatorial
Guinea intervening), Application for permission to Intervene by the
Government of Equatorial Guinea, pp. 6-8.)

It further developed this position by reference to the detail of its
national law and said this :

“in accordance with its national law, Equatorial Guinea claims the
sovereign rights and jurisdiction which pertain to it under interna -
tional law up to the median line between Equatorial Guinea and
Nigeria on the one hand, and between Equatorial Guinea and Cam -
eroon on the other hand. It is these legal rights and interests which

Equatorial Guinea seeks to protect.” (Ibid., p. 8.)
— In the Request for an Examination of the Situation in Accordance with

Paragraph 63 of the Court’s Judgment of 20 December 1974 in the
Nuclear Tests (New Zealand v. France) Case, Australia, also under a
heading based on Article 62, began with two New Zealand claims :

“If, as New Zealand claims, the rights . . . are of an erga omnes
character in the sense described above, it necessarily follows that the o
New Zealand claim against France puts in issue the rights of all
States, including Australia. Assuming that France is subject to the

corres pondingerga omnes obligations invoked by New Zealand (a
matter which will fall to be determined by the Court at the merits

45

5 CIJ1020.indb 86 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 461

Deuxièmement, … intervenir dans l’instance pour informer la
Cour de la nature des droits du Nicaragua qui sont en cause dans le

litige. Cette forme d’intervention aurait un but conservatoire : elle
viserait à garantir que les conclusions de la Chambre ne portent pas
atteinte aux droits et intérêts de la République du Nicaragua, et le
Nicaragua entend reconnaître l’effet obligatoire de la décisioon qui
sera rendue. » (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime

(El Salvador/Honduras; Nicaragua (intervenant)), requête du Nica -
ragua à fin d’intervention, p. 5, par. 5-6.)

— Dans l’affaire Cameroun c. Nigeria, la Guinée équatoriale, là encore
sous un intitulé reprenant les termes de l’article 62, rappelait ce que
la Cour avait dit dans son arrêt sur les exceptions préliminaires en o
l’affaire, poursuivant ainsi en se référant au droit :

«En fait, de par son droit interne, la Guinée équatoriale reven -
dique une zone économique exclusive et une mer territoriale, en des
termes qu’elle considère comme conformes aux droits qu’elle tient du

droit international. La zone maritime qu’elle revendique se traduit
dans l’angle nord-est du golfe de Guinée, sur la base du principe des
lignes médianes, par une frontière qui marquerait à la fois la olimite de
sa zone économique exclusive et — dans certaines circonstances — la
limite de sa mer territoriale par rapport au Cameroun sur une dis -

tance limitée.» (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et
le Nigéria (Cameroun c. Nigéria; Guinée équatoriale (intervenant)),
requête de la Guinée équatoriale à fin d’intervention, op. 7-9.)

Ayant précisé sa position en invoquant des dispositions spécifioques de
son droit interne, elle ajoutait :

«conformément à son droit national, la Guinée équatoriale revoen -
dique les droits souverains et la juridiction que lui confère le droiot
international jusqu’à la ligne médiane entre la Guinée éqouatoriale et
le Nigéria, d’une part, et entre la Guinée équatoriale et le Came -
roun, d’autre part. Ce sont ces droits et intérêts d’ordre juridique

que la Guinée équatoriale cherche à protéger. » (Ibid., p. 9.)
— Dans l’affaire de la Demande d’examen de la situation au titre du

paragraphe 63 de l’arrêt rendu par la Cour le 20 décembre 1974 dans
l’affaire des Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), l’Australie
commençait par présenter, également sous un intitulé reprenant les
termes de l’article 62, deux revendications de la Nouvelle-Zélande :

«Si, comme la Nouvelle-Zélande le soutient, les droits … ont le
caractère erga omnes évoqué ci-dessus, l’action intentée par la
Nouvelle-Zélande contre la France met nécessairement en cause les
droits de tous les Etats, Australie comprise. Si la France est liée par

les obligations erga omnes correspondantes invoquées par la
Nouvelle-Zélande (question qu’il appartiendra à la Cour de tran -

45

5 CIJ1020.indb 87 14/06/13 11:47 462 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

stage of the proceedings), Australia, in common with New Zealand
and all other States, has — in the words of the Court in the Barcelona

Traction case — a ‘legal interest’ in their observance by France.

As indicated above, New Zealand argues that these obligations
‘by their very nature, are owed to the whole of the international
community, and it makes no sense to conceive of them as sets of

obligations owed, on a bilateral basis, to each member of that com -
munity’. If so, it must follow that a decision by the Court on the
merits of the New Zealand claim would not be a decision as to bilat -
eral rights and obligations of France and New Zealand, capable of
being considered in isolation from identical bilateral rights and obli -

gations existing between France and every other member of the
international community.” (Request for an Examination of the Situ ‑
ation in Accordance with Paragraph 63 of the Court’s Judgment of
20 December 1974 in the Nuclear Tests (New Zealand v. France)

Case, Application for permission to Intervene under the Terms of
Article 62 of the Statute submitted by the Government of Australia,
p. 9, paras. 18-19.)

Again the basis for the intervention is rights which Australia claims.
Its reference to “legal interest” from Barcelona Traction may be
noted — a reference relating to the capacity of a State to bring a claim
rather than to the substantive character of the right or interest, a mato -

ter apparently distinct from the “interest of a legal nature” to boe
assessed in determining a request for intervention.

The Solomon Islands, the Federated States of Micronesia, the Mar -
shall Islands and Samoa made requests in similar terms, invokingArti-

cle 63 as well as Article 62. On the latter, they comment that “disputes
about obligations owed erga omnes have an inherent unity . . .” (Request
for an Examination of the Situation in Accordance with Paragraph 63
of the Court’s Judgment of 20 December 1974 in the Nuclear Tests
(New Zealand v. France) Case : Application for permission to Inter -

vene under Article 62 — Declaration of Intervention under Article 63
Submitted by the Government of Solomon Islands, p. 6, para. 19 ;
Application for permission to Intervene under Article 62 — Declara -
tion of Intervention under Article 63 Submitted by the Government of
the Federated States of Micronesia, p. 6, para. 19 ; Application for

permission to Intervene under Article 62 — Declaration of Interven -
tion under Article 63 Submitted by the Government of the Marshall
Islands, p. 6, para. 19 ; Application for permission to Intervene under
Article 62 — Declaration of Intervention under Article 63 Submitted
by the Government of Samoa, p. 6, para. 19).

The Court did not rule on the five requests made in this case (Request
for an Examination of the Situation in Accordance with Paragraph 63

46

5 CIJ1020.indb 88 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 462

cher lors de l’examen au fond), l’Australie a, en commun avec la o
Nouvelle-Zélande et tous les autres Etats, un « intérêt juridique »

[pour reprendre l’expression utilisée par la Cour dans l’affaoire de
la Barcelona Traction] à ce que la France respecte ces obligations.
Comme on l’a indiqué ci-dessus, la Nouvelle-Zélande soutient
que ces obligations, «par leur nature même, valent à l’égard de l’en -
semble de la communauté internationale, et [qu’]il serait absurde ode

les concevoir comme autant d’obligations qu’il faudrait honorer, ào
titre bilatéral, à l’égard de chacun des membres de cette coommu -
nauté…». Si tel est le cas, il s’ensuit nécessairement qu’une décision
de la Cour sur le fond n’aurait pas pour objet les droits et devoirs
bilatéraux de la France et de la Nouvelle-Zélande, considérés à part

des droits et devoirs bilatéraux identiques existant entre la France oet
chacun des membres de la communauté internationale. » (Demande
d’examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l’arrêt rendu par
la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des Essais nucléaires (Nou -
velle-Zélande c. France), requête de l’Australie à fin d’intervention en

vertu de l’article 62, p. 9, par. 18-19.)

Ici aussi, c’est sur des droits, tels que revendiqués par l’Australie,
qu’est fondée la demande d’intervention. L’on notera la réoférence à
l’«intérêt juridique », expression qui figure dans l’arrêt rendu en l’af -
faire de la Barcelona Traction; elle renvoie à la faculté qu’a un Etat de
présenter une demande et non à la nature profonde du droit ou de

l’intérêt revendiqué, question apparemment distincte de l’o« intérêt
d’ordre juridique » devant être apprécié dans le cadre de l’examen
d’une demande d’intervention.
Les Iles Salomon, les Etats fédérés de Micronésie, les Iles oMarshall et
le Samoa avaient présenté des demandes d’intervention en des teormes

similaires, invoquant l’article 63 ainsi que l’article 62. Dans le cadre
de ce dernier, ils faisaient valoir que « les différends relatifs à des
obligations erga omnes [avaient] une unité intrinsèque » (Demande
d’examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l’arrêt rendu
par la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des Essais nucléaires

(Nouvelle-Zélande c. France) : requête à fin d’intervention en vertu
de l’article 62 et déclaration d’intervention en vertu de l’article 63 pré -
sentées par les Iles Salomon, p. 6, par. 19 ; requête à fin d’interven -
tion en vertu de l’article 62 et déclaration d’intervention en vertu
de l’article 63 présentées par les Etats fédérés de Micronésie, p. 6,

par. 19; requête à fin d’intervention en vertu de l’article 62 et déclara -
tion d’intervention en vertu de l’article 63 présentées par les Iles
Marshall, p. 6, par. 19 ; requête à fin d’intervention en vertu de l’ar -
ticle 62 et déclaration d’intervention en vertu de l’article 63 présen -
tées par le Samoa, p. 6, par. 19).

La Cour ne s’est prononcée sur aucune des cinq requêtes présoentées en
l’affaire (Demande d’examen de la situation au titre du paragraphe 63

46

5 CIJ1020.indb 89 14/06/13 11:47 463 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

of the Court’s Judgment of 20 December 1974 in the Nuclear Tests
(New Zealand v. France) Case, Order of 22 September 1995,

I.C.J. Reports 1995, pp. 306-307, para. 67).
— In Sovereignty over Pulau Ligitan and Pulau Sipadan the philippines
stated the following objects for its request :

“(a)First, to preserve and safeguard the historical and legal rights
of the Government of the Republic of the philippines arising
from its claim to dominion and sovereignty over the territory
of North Borneo, to the extent that these rights are affected, or

may be affected, by a determination of the Court of the ques -
tion of sovereignty over pulau Ligitan and pulau Sipadan.

(b)Second, to intervene in the proceedings in order to inform the
Honourable Court of the nature and extent of the historical

and legal rights of the Republic of the philippines which may
be affected by the Court’s decision.” (Sovereignty over Pulau
Ligitan and Pulau Sipadan (Indonesia/Malaysia), Application
for permission to Intervene by the Government of the philip -
pines, p. 4, para. 5.)

10. I now turn to the Court’s decisions on intervention under Article 62,
beginning with one of the two cases in which the application was grantedo.

In that case, Nicaragua was successful in respect of the legal régimeo of the
waters of the Gulf of Fonseca. Honduras was not opposed to that part of
its request, saying that a special legal régime was called for in teroms of the
community of interest of the coastal states ; the Chamber of the Court,
noting that El Salvador had claimed by the time of the proceedings that
the waters were subject to a condominium of the three coastal states,

allowed the request for intervention in that respect (Land, Island and
Maritime Frontier Dispute (El Salvador/Honduras), Application for
Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1990, pp. 120-122,
paras. 69-72). It did not however allow the Application in respect of mari -
time delimitation within the Gulf and outside it (ibid., pp. 123-128,

paras. 74-84). Those refusals are the significant findings for the purpose
of the present cases. Along with the other two failed delimitation intero -
vention requests (Continental Shelf (Tunisia/Libyan Arab Jamahiriya),
Application for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1981,
p. 20, para. 37 ; Continental Shelf (Libyan Arab Jamahiriya/Malta),

Application for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1984,
pp. 26-28, paras. 42-43, 47), those refusals may be related to two common
features of the Court’s decisions in maritime delimitation cases. Oneo was
recalled by the Chamber in its decision on Nicaragua’s request (Land,
Island and Maritime Frontier Dispute (El Salvador/Honduras), Applica ‑
tion for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1990, p. 124,

para. 77): delimitations between two States, I would add by treaty as well
as by third-party decision, often take account of the coasts of one or

47

5 CIJ1020.indb 90 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 463

de l’arrêt rendu par la Cour le 20 décembre 1974 dans l’affaire des
Essais nucléaires (Nouvelle-Zélande c. France), ordonnance du 22 sep‑

tembre 1995, C.I.J. Recueil 1995, p. 306-307, par. 67).
— Dans l’affaire relative à la Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau
Sipadan, les philippines indiquaient que leur requête avait pour objet :

«a) premièrement, de préserver et sauvegarder les droits d’ordre
historique et juridique du Gouvernement de la République des
philippines qui découlent de la revendication de possession et
de souveraineté que ce gouvernement forme sur le territoire du

Bornéo septentrional dans la mesure où ces droits sont ou
pourraient être mis en cause par une décision de la Cour rela -
tive à la question de la souveraineté sur pulau Ligitan et pulau
Sipadan.
b) Deuxièmement, d’intervenir dans l’instance pour informer la
Cour de la nature et de la portée des droits d’ordre historique

et juridique de la République des philippines qui pourraient être
mis en cause par la décision de la Cour.» (Souveraineté sur Pulau
Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malaisie), requête des phi -
lippines à fin d’intervention, p. 5, par. 5.)

10. J’en viens maintenant aux décisions de la Cour sur les demandes
d’intervention présentées en vertu de l’article 62, en commençant par

l’une des deux affaires en lesquelles la requête a été admise. Dans l’affaire
en question, le Nicaragua fut autorisé à intervenir pour ce qui concernait
le régime juridique des eaux du golfe de Fonseca. Le Honduras ne s’était
pas opposé à cet aspect de sa demande, considérant qu’un réogime juri -
dique spécial était nécessaire en raison de la communauté d’ointérêts entre
les Etats côtiers. La Chambre de la Cour, notant qu’El Salvador avait fait

valoir, dans le cadre de la procédure, que les eaux étaient soumisoes à un
condominium des trois Etats côtiers, admit la demande d’interventioon
sur ce point (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salva ‑
dor/Honduras), requête à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1990,
p. 120-122, par. 69-72). Elle ne fit en revanche pas droit à la demande

relative à la délimitation maritime à l’intérieur et en doehors du golfe (ibid.,
p. 123-128, par. 74-84). Ce sont ces rejets qui sont significatifs aux fins des
présentes procédures. De même que dans les deux autres cas où des
demandes d’intervention n’ont pas été admises dans une affoaire de délimi -
tation (Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), requête à▯

fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1981, p. 20, par. 37 ; Plateau conti ‑
nental (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), requête à fin d’intervention,
arrêt, C.I.J. Recueil 1984, p. 26-28, par. 42-43 et 47), ces rejets sont à rat -
tacher à deux caractéristiques des décisions de la Cour en matioère de déli-
mitation maritime. La première a été rappelée par la Chambreo de la Cour
dans sa décision sur la demande d’intervention du Nicaragua (Différend

frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/Honduras), requête
à fin d’intervention, arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 124, par. 77) : les délimi -

47

5 CIJ1020.indb 91 14/06/13 11:47 464 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

more States. The second feature is that the Court in drawing delimitation
lines takes care to ensure that they stop short of the rights or interesots of

third States (e.g., Continental Shelf (Tunisia/Libyan Arab Jamahiriya),
Judgment, I.C.J. Reports 1982, pp. 93-94, para. 133 ; Continental Shelf
(Libyan Arab Jamahiriya/Malta), Judgment, I.C.J. Reports 1985,
pp. 25-28, paras. 21-22 ; Maritime Delimitation and Territorial Questions
between Qatar and Bahrain (Qatar v. Bahrain), Merits, Judgment,

I.C.J. Reports 2001, pp. 115-117, paras. 250-252 ; Land and Maritime
Boundary between Cameroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria : Equato ‑
rial Guinea intervening), Judgment, I.C.J. Reports 2002, p. 448,
paras. 306-307 ; Territorial and Maritime Dispute between Nicaragua and
Honduras in the Caribbean Sea (Nicaragua v. Honduras), Judgment,
I.C.J. Reports 2007 (II), pp. 756-759, paras. 312-319; Maritime Delimita ‑

tion in the Black Sea (Romania v. Ukraine), Judgment, I.C.J. Reports
2009, p. 131, para. 219). As this practice suggests, the parties do appear
to provide the Court with the necessary information about the interests oof
third States. That information has sometimes indeed been invoked in
support of an objection to jurisdiction or admissibility based on the

Monetary Gold principle ; see the submissions of Nigeria in Cam eroon v.
Nigeria (I.C.J. Pleadings, Land and Maritime Boundary between Cam‑
eroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria : Equatorial Guinea inter‑
vening), preliminary Objections of the Federal Republic of Nigeria,
paras. 4.1-4.11, 8.11-8.17) and of Nicaragua in El Salvador/Honduras

(I.C.J. Pleadings, Land, Island and Maritime Frontier Dispute (El Salva ‑
dor/Honduras: Nicaragua intervening), Vol. III, pp. 737-738, paras. 9-12 ;
ibid., Vol. VI, pp. 3-27).

11. The one successful application for intervention in respect of mari -

time delimitation was that by Equatorial Guinea in Land and Maritime
Boundary between Cameroon and Nigeria (Cameroon v. Nigeria), Applica ‑
tion for Permission to Intervene, Order of 21 October 1999, I.C.J. Reports
1999 (II), p. 1029. Several features of that decision lessen its significance
for today’s cases : the Court in its jurisdictional judgment had suggested,

when rejecting a Monetary Gold argument, that certain third States may
wish to intervene (Land and Maritime Boundary between Cameroon
and Nigeria (Cameroon v. Nigeria), Preliminary Objections, Judgment,
I.C.J. Reports 1998, pp. 323-324, paras. 115-116); only one of them,
Equatorial Guinea, in fact applied to intervene ; that application was not

opposed and was accepted by way of an order, not a judgment, of the
Court; and the Court, in the judgment in the main proceeding, said that
in fixing the maritime boundary it must ensure that it did not adopt aony
position which might affect the rights of Equatorial Guinea and Sao
Tome and principe (Land and Maritime Boundary between Cameroon and
Nigeria (Cameroon v. Nigeria : Equatorial Guinea intervening), Judgment,

I.C.J. Reports 2002, p. 421, para. 238). The latter State had not applied to
intervene and obtained exactly the same protection as the State that dido

48

5 CIJ1020.indb 92 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 464

tations effectuées entre deux Etats — par voie conventionnelle aussi bien
qu’en vertu d’une décision d’une tierce partie, ajouterais-je — prennent

souvent en compte les côtes d’un ou de plusieurs Etats. La secondeo est
que la Cour, lorsqu’elle trace une ligne de délimitation, veille à ce
que celle-ci s’arrête avant de toucher les droits ou intérêts d’Etats
tiers (voir, par exemple, Plateau continental ( Tunisie/Jamahiriya arabe
libyenne), arrêt, C.I.J. Recueil 1982, p. 93-94, par. 133) ; Plateau continen ‑

tal (Jamahiriya arabe libyenne/Malte), arrêt, C.I.J. Recueil 1985, p. 25-28,
par. 21-22 ; Délimitation maritime et questions territoriales entre Qatar et
Bahreïn (Qatar c. Bahreïn), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 115-117,
par. 250-252 ; Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée équatoriale (intervenant)), arrêt,
C.I.J. Recueil 2002, p. 448, par. 306-307 ; Différend territorial et maritime

entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragu▯a
c. Honduras), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (II), p. 756-759, par. 312-319 ;
Délimitation maritime en mer Noire (Roumanie c. Ukraine), arrêt,
C.I.J. Recueil 2009, p. 131, par. 219). Cette pratique semble bien montrer
que les parties communiquent à la Cour les informations pertinentes

concernant les intérêts d’Etats tiers, parfois, d’ailleurs, oà l’appui d’une
exception d’incompétence ou d’irrecevabilité fondée sur le principe énoncé
dans l’affaire de l’Or monétaire (voir les écritures du Nigéria dans l’affaire
Cameroun c. Nigéria (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun
et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée équatoriale (intervenant)),

exceptions préliminaires de la République fédérale du Nigéoria,
par. 4.1-4.11 et 8.11-8.17) et celles du Nicaragua dans l’affaire El Salva ‑
dor/Honduras (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Sal ‑
vador/Honduras; Nicaragua (intervenant)), requête, p. 6-7, par. 9-12 ;
ibid., déclaration écrite, p. 3-27)).
11. La seule requête à fin d’intervention admise dans une affaiore de déli -

mitation maritime fut celle présentée par la Guinée équatorioale en l’affaire
Cameroun c. Nigeria (Frontière terrestre et maritime entre le Cameroun et le
Nigéria (Cameroun c. Nigéria), requête à fin d’intervention, ordonnance du
21 octobre 1999, C.I.J. Recueil 1999 (II),p. 1029).plusieurs aspects de cette
décision limitent toutefois sa pertinence aux fins des présenteso procédure:s

en rejetant un argument fondé sur le principe de l’Or monétaire, la Cour
avait laissé entendre, dans son arrêt sur la compétence, que ceortains Etats
tiers pourraient souhaiter intervenir (Frontière terrestre et maritime entre le
Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria), exceptions préliminaires,
arrêt, C.I.J. Recueil 1998, p. 323-324, par. 115-116), mais seul l’un d’entre

eux, la Guinée équatoriale, présenta une demande en ce sens ; aucune ob-
jection n’y fut faite et la requête fut admise en vertu d’une oordonnance
de la Cour et non d’un arrêt ; enfin, la Cour déclara, dans l’arrêt rendu
dans la procédure principale, qu’en établissant la frontière mariotime elle de -
vait veiller à ne pas adopter une position susceptible d’affecteor les droits
de la Guinée équatoriale et de Sao Tomé-et-principe (Frontière terrestre

et maritime entre le Cameroun et le Nigéria (Cameroun c. Nigéria ; Guinée
équatoriale (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 2002, p. 421, par. 238). Sao

48

5 CIJ1020.indb 93 14/06/13 11:47 465 territorial and mariotime dispute (decl. keoith)

apply; and the Court refers to the “rights” and not to the “interests” of
the two States (I.C.J. Reports 2002, p. 421, para. 238).

12. In summary, I have three difficulties with the Court’s elaboration oof
the distinction between “the rights in the case at hand” and “an interest of
a legal nature”. Those terms or concepts are being taken out of conteoxt.
The definition given to the second is problematic. And, to the extent othat

it exists, the distinction does not appear to be useful in practice.

(Signed) Kenneth Keith.

49

5 CIJ1020.indb 94 14/06/13 11:47 différend territorialo et maritime (décl. keioth) 465

Tomé-et-principe, qui n’avait pas demandé à intervenir, se vit accorder ola
même protection que l’Etat qui avait fait une demande en ce sens; du reste,
c’est aux «droits» et non aux « intérêts» des deux Etats que la Cour faisait
référence (C.I.J. Recueil 2002, p. 421, par. 238).

12. pour résumer, la distinction opérée par la Cour entre « droits dans
l’espèce considérée » et « intérêts d’ordre juridique » me pose trois pro -
blèmes: ces expressions ou concepts sont sortis de leur contexte ; la défini-
tion que donne la Cour des seconds est problématique ; et, pour autant

qu’elle existe, la distinction semble dénuée d’utilité proatique.

(Signé)Kenneth Keith.

49

5 CIJ1020.indb 95 14/06/13 11:47

Document file FR
Document Long Title

Déclaration de M. le juge Keith

Links