COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
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Communiqué de presse
Non officiel
No 2024/74
Le 12 novembre 2024
Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Azerbaïdjan c. Arménie) La Cour dit qu’elle a compétence, sur la base de l’article 22 de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, pour connaître de la requête déposée par l’Azerbaïdjan
LA HAYE, le 12 novembre 2024. La Cour internationale de Justice a rendu aujourd’hui son arrêt sur les exceptions préliminaires soulevées par l’Arménie en l’affaire relative à l’Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Azerbaïdjan c. Arménie).
Il est rappelé que, le 23 septembre 2021, l’Azerbaïdjan a introduit une instance contre l’Arménie à raison de violations alléguées de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (la « CIEDR ») (voir le communiqué de presse no 2021/21). L’Azerbaïdjan a invoqué comme base de compétence de la Cour le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de celle-ci et l’article 22 de la CIEDR, à laquelle les deux États sont parties. Le 21 avril 2023, l’Arménie a soulevé trois exceptions préliminaires d’incompétence de la Cour et d’irrecevabilité de la requête (voir le communiqué de presse no 2023/23). Des audiences publiques sur ces exceptions préliminaires se sont tenues du 22 au 26 avril 2024 (voir le communiqué de presse no 2024/35).
Dans l’arrêt rendu ce jour, la Cour retient les première et troisième exceptions préliminaires soulevées par l’Arménie, et rejette la deuxième.
Dans sa première exception préliminaire, l’Arménie soutenait que la Cour n’avait pas compétence à l’égard des demandes de l’Azerbaïdjan relatives à des faits qui se seraient produits entre le 23 juillet 1993 et le 15 septembre 1996, période durant laquelle l’Arménie était partie à la CIEDR, mais pas l’Azerbaïdjan. L’Arménie soutenait que la Cour n’avait pas compétence ratione temporis à l’égard desdites demandes, ou, à titre subsidiaire, que celles-ci étaient irrecevables.
Dans son arrêt, la Cour considère que, en l’espèce, la portée temporelle de la compétence que lui confère l’article 22 de la CIEDR doit être liée à la date à laquelle les obligations découlant de cette convention ont pris effet entre les Parties, à savoir le 15 septembre 1996, et non à celle à laquelle l’Arménie est devenue partie à la convention. La Cour conclut qu’elle n’a pas compétence ratione temporis pour connaître des demandes de l’Azerbaïdjan fondées sur des faits qui se seraient produits entre le 23 juillet 1993 et le 15 septembre 1996. Elle retient la première exception préliminaire d’incompétence soulevée par l’Arménie et considère qu’il n’y a pas lieu pour elle d’examiner les arguments des Parties sur la question de la recevabilité.
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Dans sa deuxième exception préliminaire, l’Arménie faisait valoir que la Cour n’avait pas compétence ratione materiae au titre de la CIEDR « à l’égard des demandes de l’Azerbaïdjan relatives à la pose alléguée de mines terrestres et de pièges ».
Dans son arrêt, la Cour rejette la deuxième exception préliminaire de l’Arménie, concluant que, puisque l’Azerbaïdjan ne prétend pas que la pose alléguée de mines terrestres et de pièges constitue en soi une violation des obligations que la CIEDR impose à l’Arménie, la deuxième exception préliminaire est sans objet.
Dans sa troisième exception préliminaire, l’Arménie affirmait que la Cour n’avait pas compétence ratione materiae à l’égard des demandes de l’Azerbaïdjan relatives aux dommages environnementaux allégués.
Dans son arrêt, la Cour conclut que, quand bien même les actes qui auraient causé des dommages à l’environnement seraient établis et attribuables à l’Arménie, ils n’entrent pas dans le champ d’application de la CIEDR, dès lors qu’ils ne sont pas susceptibles de constituer un traitement différencié fondé sur un motif prohibé par le paragraphe 1 de l’article premier de la convention. La Cour conclut qu’elle est incompétente ratione materiae à l’égard des demandes de l’Azerbaïdjan relatives aux dommages environnementaux et retient la troisième exception préliminaire de l’Arménie.
Dans le dispositif de son arrêt, lequel est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour,
« 1) Par quatorze voix contre trois,
Retient la première exception préliminaire soulevée par la République d’Arménie ;
POUR : M. Salam, président ; Mme Sebutinde, vice-présidente ; MM. Tomka, Abraham, Mme Xue, MM. Bhandari, Iwasawa, Nolte, Mme Charlesworth, MM. Brant, Gómez Robledo, Aurescu, Tladi, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Yusuf, Mme Cleveland, juges ; M. Koroma, juge ad hoc ;
2) Par seize voix contre une,
Rejette la deuxième exception préliminaire soulevée par la République d’Arménie ;
POUR : M. Salam, président ; Mme Sebutinde, vice-présidente ; MM. Tomka, Abraham, Yusuf, Mme Xue, MM. Bhandari, Iwasawa, Nolte, Mme Charlesworth, MM. Brant, Gómez Robledo, Mme Cleveland, MM. Aurescu, Tladi, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Koroma, juge ad hoc ;
3) Par douze voix contre cinq,
Retient la troisième exception préliminaire soulevée par la République d’Arménie ;
POUR : M. Salam, président ; Mme Sebutinde, vice-présidente ; MM. Tomka, Abraham, Yusuf, Mme Xue, MM. Bhandari, Iwasawa, Brant, Gómez Robledo, Aurescu, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Nolte, Mmes Charlesworth, Cleveland, M. Tladi, juges ; M. Koroma, juge ad hoc ;
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4) À l’unanimité,
Dit qu’elle a compétence sur la base de l’article 22 de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, sous réserve des points 1 et 3 du présent dispositif, pour connaître de la requête déposée par la République d’Azerbaïdjan le 23 septembre 2021. »
*
M. le juge TOMKA joint à l’arrêt l’exposé de son opinion individuelle ; M. le juge YUSUF joint une déclaration à l’arrêt ; M. le juge IWASAWA joint à l’arrêt l’exposé de son opinion individuelle ; M. le juge NOLTE, Mmes les juges CHARLESWORTH et CLEVELAND et M. le juge TLADI joignent à l’arrêt l’exposé de leur opinion dissidente commune ; Mme la juge CHARLESWORTH joint à l’arrêt l’exposé de son opinion individuelle ; Mme la juge CLEVELAND joint à l’arrêt l’exposé de son opinion dissidente ; M. le juge TLADI joint à l’arrêt l’exposé de son opinion dissidente.
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Un résumé de l’arrêt figure dans le document intitulé « Résumé 2024/10 ». Ce résumé ainsi que le texte intégral de l’arrêt sont disponibles sur la page de l’affaire sur le site Internet de la Cour.
Les communiqués de presse précédents concernant l’affaire sont également disponibles sur le site Internet de la Cour.
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Remarque : Les communiqués de presse de la Cour sont établis par son Greffe à des fins d’information uniquement et ne constituent pas des documents officiels.
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La Cour internationale de Justice (CIJ) est l’organe judiciaire principal de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Elle a été instituée en juin 1945 par la Charte des Nations Unies et a entamé ses activités en avril 1946. La Cour est composée de 15 juges, élus pour un mandat de neuf ans par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité de l’ONU. Elle a son siège au Palais de la Paix, à La Haye (Pays-Bas). La Cour a une double mission, consistant, d’une part, à régler, conformément au droit international, les différends juridiques dont elle est saisie par les États et, d’autre part, à donner des avis consultatifs sur les questions juridiques qui lui sont soumises par les organes de l’ONU et les institutions du système des Nations Unies dûment autorisés à le faire.
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