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Résumé des conclusions scientifiques du DHI sur le
différend concernant le statut et l'utilisation des
eaux du Silala (Chili c. Bolivie)
Déclaration écrite du DHI
10-01-2022
[TRADUCTION]
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Résumé des conclusions scientifiques du DHI sur le différend concernant le statut et
l'utilisation des eaux du Silala (Chili c. Bolivie)
Déclaration écrite du DHI
10-01-2022
[TRADUCTION]
Ce document a été sollicité par la Cour Internationale de Justice (CIJ) dans le cadre du
différend concernant le statut et l'utilisation des eaux du Silala (Chili c. Bolivie). Le document
résume le travail du DHI concernant l'évaluation des flux d'eaux de surface et souterraines du
Silala, en soulignant les points sur lesquels DHI est d'accord avec les experts du Chili et les
points sur lesquels DHI est en désaccord avec les experts du Chili.
TABLE DES MATIÈRES
1. Résumé
1.1 Principales conclusions sur lesquelles DHI est en accord avec les experts du Chili
1.2 Principales conclusions sur lesquelles DHI est en désaccord avec les experts du
Chili
2. L'expertise
2.1 Les experts du DHI
2.2 Le rôle du DHI dans la procédure
3. Les caractéristiques du Silala
4. La méthodologie du DHI
5. Points d’accord entre les experts de la Bolivie et du Chili
6. Points de désaccord entre les experts de la Bolivie et du Chili
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6.1 L'impact des canaux sur les flux transfrontaliers
6.2 Désaccords entre les experts de la Bolivie et du Chili sur la méthodologie et les
résultats
7. Discussion technique détaillée sur les points de désaccords
7.1 Le bilan hydrique: modèles de Champ Lointain et du Champ Proche
7.2 L’étendue de la zone du modèle du Champ Proche et les conditions de contour
assignées
7.3 Les différences topographiques entre les canaux et le terrain
7.4 Le modèle hydrogéologique du DHI est valide
8. Bibliographie
1. RESUME
Les zones humides et les sources du Silala en Bolivie sont situées à 0,5-3 km de la frontière
avec le Chili, dans la partie sud-ouest du Département de Potosí. Au début du siècle dernier,
ces zones humides ont été drainées et canalisées et leur débit exploité par l'Antofagasta (Chili)
et Bolivian Railway Compagnie Ltd. au Chili. En 2017, à la demande de l'État Plurinational
de Bolivie, DHI a réalisé une étude technique des flux du système des zones humides et des
sources du Silala en Bolivie, en quantifiant les flux de surface et souterraines, à la fois dans
leur état actuel, avec des canaux artificiels et un réseau de drainage, et dans leur état naturel
futur estimé.
Un des objectifs principaux a été de mener une analyse indépendante des eaux de surface et
les aquifères d'eau souterraine du Silala afin de déterminer leur nature et leur connectivité.
Pour cela, il a fallu se documenter sur les connaissances physiques factuelles et la
compréhension du système du Silala afin de créer une base transparente pour l’analyse et les
conclusions ultérieures.
Ces objectifs ont été atteints en employant la méthodologie technique suivante :
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a) Des programmes détaillés de collectes de données sur le terrain qui ont été réalisées
in situ en Bolivie, notamment :
- des enquêtes détaillées et des programmes d'échantillonnage du sol
- la surveillance du débit des eaux de surface et du débit des sources dans les
zones humides du Silala en Bolivie, et
- un programme intensif de caractérisation hydrogéologique de l'aquifère
souterrain.
b) Des études détaillées de modélisation numérique simulant l'écoulement d'eaux
souterraines/de surface et leurs échanges dans les conditions actuelles et naturelles (en
d’autres termes, les conditions en l’absence des canaux artificiels et du réseau de
drainage d’une part, et avec les zones humides restaurées d’autre part).
1.1 Principales conclusions sur lesquelles DHI est d'accord avec les experts du Chili
1) La principale source d'eau de surface des sources du Silala est l'écoulement des eaux
souterraines1, l'eau de surface interagit avec les eaux souterraines sous-jacentes le long de
son cours.
2) Les canaux n'ont pas modifié la direction générale de l'écoulement des eaux de surface ou
souterraines.
3) Le Silala est de nature complexe et comprend un système couplé d'eaux souterraines et
d'eaux de surface qui prend naissance sur le territoire bolivien (en amont) et s'étend au
Chili (en aval).
4) L'évaporation des zones humides augmentera si les canaux sont supprimés.
5) Le débit des eaux de surface diminuera et celui des eaux souterraines augmentera à la
frontière si les canaux sont mis hors service et si les zones humides sont restaurées à leur
état naturel.
6) Les données recueillies sur le terrain et les modèles établis suggèrent que l'eau déversée
du bassin de captation2 du Silala (représentant les pertes par évapotranspiration3 des sols,
1 En hydrologie, le débit est l'écoulement de l'eau d'une rivière, d'un aquifère, d'un lac ou d'une autre masse d'eau.
2 Un bassin est une zone de terrain où les précipitations s'accumulent et s'écoulent vers une embouchure
commune.
3 La transpiration est le processus par lequel l'eau est transférée dans l'atmosphère par 1) l'évaporation du sol et
d'autres surfaces et 2) la transpiration des plantes.
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des zones humides et des canaux) s'écoule finalement vers le Chili sous forme d'eaux
souterraines ou de surface, avec ou sans canaux.
1.2 Principales conclusions sur lesquelles DHI est en désaccord avec les experts du Chili
7) Sur l'ampleur de la diminution du débit des eaux de surface transfrontalières à l'état naturel
(c'est-à-dire sans les canaux et le réseau de drainage). La fourchette estimée de la
diminution du DHI, basée sur les données et modèles de terrain sur site, est de 11% à 33%,
tandis que l’expert du Chili déclare (sans calculs détaillés) qu'elle est négligeable.
8) Les mesures historiques du débit de surface avant la canalisation montrent une diminution
de 18% par rapport aux débits actuels, ce qui est cohérent avec la fourchette des résultats
du DHI. Le Chili ne reconnaît pas la valeur de ces mesures historiques.
9) Les experts du Chili affirment qu'en raison d'inexactitudes dans les données d'entrée, le
modèle de Champ Proche du DHI ne peut pas être utilisé pour prédire les impacts des
structures de drainage artificielles sur le flux transfrontalier. Au contraire, DHI estime que
le modèle de Champ Proche, qui est basé sur des mesures de terrain réelles dans la zone
d'impact, fournit la meilleure base pour les évaluations d'impact malgré les imprécisions
ou les incertitudes qui sont inhérentes à ces modèles.
10) Les experts du Chili remettent en question les mesures, interprétations, analyses et
modèles du DHI mais n'ont pas présenté d'analyse alternative détaillée reflétant les
conditions du site du Silala et les différentes propriétés des zones humides du Silala. Ils
n'ont pas non plus présenté d'analyse hydrologique détaillée, ni d'évaluation d'impact
approfondie.
2. SUR LES EXPERTS
11) Le DHI (anciennement: Danish Hydraulic Institute [Institut hydraulique danois]) est une
organisation indépendante, à but non lucratif, basée au Danemark, qui compte 30 bureaux
et environ 1.100 employés à temps plein dans le monde. DHI est une société de recherche
et de conseil spécialisée dans la résolution des défis liés à l'environnement aquatique.
Depuis plus de 50 ans, DHI a été le fer de lance du développement de la technologie
appliquée à l'évaluation des ressources hydriques et a mené de nombreuses études sur la
disponibilité et le partage des ressources, la prévision et la planification des inondations,
ainsi que l'évaluation des impacts des infrastructures artificielles sur l'environnement
aquatique. Les progiciels avancés de simulation des flux d'eau étant souvent des éléments
cruciaux pour ces projets, DHI intègre ses expériences et les connaissances tirées de ces
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projets dans des progiciels avancés de modélisation de l'eau (commercialisés sous la
marque "MIKE"). Depuis des décennies, des milliers de professionnels de l'eau dans le
monde entier (autorités publiques, entreprises publiques de services de l'eau, entreprises
d'énergie et d'irrigation et consultants en ingénierie) utilisent les connaissances et les
technologies du DHI pour résoudre leurs défis liés à l'eau. DHI a développé le logiciel
MIKE SHE spécifiquement pour les investigations détaillées des systèmes hydrologiques
où les eaux de surface et les eaux souterraines interagissent étroitement, ce qui rend ce
logiciel particulièrement adapté à l'étude du cas du Silala.
12) DHI a participé à des projets dans le monde entier et possède une grande expérience de la
gestion durable des ressources en eau, notamment de l'interaction entre les eaux
souterraines et les eaux de surface. DHI a beaucoup travaillé sur l'hydrologie de montagne,
notamment dans les Andes et a construit des systèmes de gestion de l'eau pour de grandes
zones humides telles que les Everglades, l'Okavango et certains des plus grands deltas du
monde, notamment le Gange/Brahmapoutre, le Mékong, l'Ayeyarwady et le Yangtze. DHI
a joué un rôle déterminant dans l'élaboration des principes modernes de gestion intégrée
des ressources hydriques et dispose d'un centre de collaboration permanent avec le
Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUMA) afin de promouvoir
davantage cette question.
13) De plus, DHI a été responsable des conceptions hydrauliques de grands projets
d'infrastructure sensibles au niveau international, garantissant un faible impact sur
l'environnement, telles que les grands ponts traversant le Grand Belt et l'Oresund,
susceptibles d'influencer la salinité de la mer Baltique. L'Institut a également été impliqué
en tant qu'expert technique dans des affaires d'eaux transfrontalières telles que la
"Revendication territoriale de Singapour à l'intérieur et autour du détroit de Johor
(Malaisie c. Singapour)" devant le TIDM, l'affaire du projet Gabčíkovo-Nagymaros
(Hongrie c. Slovaquie) devant la CIJ et l'arbitrage sur les eaux de l'Indus Kishenganga
(Pakistan c. Inde).
2.1 Les experts du DHI
14) M. Roar A. Jensen (MSc) a dirigé l'équipe du DHI sur ce projet. M. Jensen est un expert
en hydrologie et en ressources hydriques. Il a plus de 35 ans d'expérience dans la
planification et l'évaluation des ressources hydriques, acquise dans le cadre de nombreux
projets menés dans de nombreux pays d'Europe, d'Amérique latine, d'Asie et d'Afrique
où, au fil des ans, il a collaboré avec de nombreuses institutions spécialisées dans les
ressources hydriques, agissant à la fois comme chef de projet et comme hydrologue
principal. Il a été responsable de projets dans le domaine de la gestion et de la prévision
des inondations, de l'évaluation de la disponibilité de l'eau et de la planification des
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ressources hydriques, avec une utilisation conjointe des eaux souterraines et des eaux de
surface. M. Jensen est un modélisateur mathématique expérimenté dans les hautes Andes.
15) Le Dr. Torsten V. Jacobsen est un des principaux spécialistes de la modélisation des
eaux de surface et souterraines. Il est titulaire d'une maîtrise en ingénierie civil avec une
spécialisation en modélisation hydraulique et hydrologique, d'un doctorat en dynamique
des fluides et a plus de 25 ans d'expérience en hydraulique et hydrologie complexes,
acquise dans le cadre de projets relatifs aux ressources hydriques au Danemark, mais aussi
en Europe, aux États-Unis, en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud et en Australie. Dans
ces projets, il a été un expert de premier plan dans les domaines de l'hydrologie intégrée,
de la modélisation des ressources hydriques et de la gestion de l'eau. Il a géré un large
éventail de projets de conseil et de recherche, portant sur l'évaluation des ressources
hydriques de surface et souterraines et leurs interactions, la gestion des ressources
hydriques, la gestion et la restauration des zones humides, la protection des eaux
souterraines et le changement climatique. Le Dr. Jacobsen a également beaucoup travaillé
sur les zones humides dans les bassins arides, semi-arides et humides.
16) M. Michael M. Gabora (MSc) a dirigé l'étude portant sur la caractérisation
hydrogéologique et le développement des éléments du modèle conceptuel
hydrogéologique du projet. Il a plus de 22 ans d'expérience professionnelle dans la
définition de la portée, la mise en oeuvre et la gestion des études hydrologiques et
hydrogéologiques. Son expérience comprend un large éventail de projets, mais s'est
principalement concentrée sur la caractérisation hydrogéologique et la modélisation
numérique des eaux souterraines des aquifères de roches fracturées pour les études
d'assèchement, l'exploration des eaux souterraines, les interactions entre les eaux
souterraines et les eaux de surface et le transport des contaminants. M. Gabora a beaucoup
travaillé dans les Andes arides de la Bolivie, du Chili, d'Argentine et du Pérou sur des
projets liés à l'évaluation de l'impact environnemental d'infrastructures prévues ou
existantes, à la conception technique et à l'aide à la décision dans le domaine de l'eau.
Cette expérience comprend des études hydrogéologiques dans des zones humides de haute
altitude (bofedales) bien développées en Argentine, ainsi que de nombreuses autres études
pour lesquelles les interactions entre les eaux souterraines et les eaux de surface étaient
une composante essentielle de l'analyse de l'impact environnemental. M. Gabora est
titulaire d’un diplôme en sciences de la terre et des planètes et d'un M.Sc. en ressources
hydriques, obtenus tous deux à l'université du Nouveau-Mexique. M. Gabora est
également géoscientifique professionnel (Ontario, Canada), géologue agréé (Arizona,
États-Unis) et hydrologue professionnel certifié par l'American Institute of Hydrology.
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2.2 Le rôle du DHI dans la procédure
17) En 2017, à la demande de l'État Plurinational de Bolivie, DHI a réalisé une étude technique
des flux des zones humides et du système des sources du Silala, en quantifiant les flux de
surface et de subsurface, à la fois dans leur état actuel et dans leur état naturel, c'est-à-dire
sans les canaux artificiels et le réseau de drainage. Mener une analyse indépendante des
eaux de surface et des eaux souterraines du Silala afin de déterminer leur nature et leur
connectivité a été un objectif clé de l’étude. Il était également important d'obtenir et de
documenter les connaissances physiques factuelles et la compréhension du système du
Silala afin de créer une base scientifiquement solide pour les analyses et conclusions
ultérieures.
18) A cet égard, DHI a préparé les rapports suivants qui ont été soumis à la Cour :
(DHI 1) : Etude des écoulements dans le système des zones humides et des sources
du Silala (partie du Contre-mémoire de la Bolivie (CMB) annexe 17). Ce rapport
et ses annexes décrivent en détail la collecte exhaustive de données sur de terrain
et l'analyse des conditions hydrologiques et hydrogéologiques dans le Silala ainsi
que l'évaluation de l'impact de son débit.
(DHI 2) : Analyse technique et avis de validation indépendant des études
techniques complémentaires sur les sources du Silala, décembre 2018 (Duplique
de la Bolivie, annexe 23). Ce rapport contient la revue technique générale du DHI
sur les études techniques boliviennes sur le Silala initiées après DHI 1. Le rapport
comprend des copies des études boliviennes originales.
(DHI 3) : Analyse et évaluation de la Réplique du Chili sur les demandes
reconventionnelles de la Bolivie dans l'affaire du Silala. Mars 2019, (Duplique de
la Bolivie, annexe 24) contenant les commentaires du DHI sur les observations
des experts du Chili sur DHI 1 et DHI 2.
(DHI 4) : Actualisation des scénarios du modèle hydrologique mathématique des
eaux des sources du Silala par une analyse de sensibilité des limites du modèle,
avril 2019 (Duplique de la Bolivie, annexe 25). Ce rapport décrit les résultats de
l’analyse de sensibilité des conditions de contour les plus restrictives qui
conduisent à ce que les impacts du système de drainage artificiel soient définis
comme une fourchette entre une limite supérieure et une limite inférieure. Le
rapport commente également les réponses des experts du Chili (W&P 3 et W&P
4).
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Suite à la soumission du dernier rapport du DHI à la Cour, les experts du Chili,
dans l'Écrit Additionnel du Chili (W&P 5), ont soulevé des considérations
supplémentaires sur les évaluations du DHI. DHI n'a pas eu l'occasion de
commenter ces dernières considérations devant la Cour.
3. LES CARACTERISTIQUES DU SILALA
19) Les bofedales du Silala sont, désignées par la Convention de Ramsar4, comme des zones
humides situées dans les Andes boliviennes à une altitude d'environ 4300 m au-dessus du
niveau de la mer, près de la frontière entre la Bolivie et le Chili. Le bassin de captation
versant et les zones humides environnantes descendent de la Bolivie vers le Chili et sont
entourés de volcans s'élevant à 5600 m au-dessus du niveau de la mer. Il s'agit d'une région
au climat froid et venteux, à la végétation très clairsemée, et la zone peuplée la plus proche
de la Bolivie se trouve à plus de 20 km. Les sols grossiers dominent le bassin de captation
versant en amont des sources du Silala et permettent aux rares précipitations de s'infiltrer
dans la couche superficielle du sol, laissant peu de traces des eaux de surface courantes.
Une grande partie de l'infiltration des événements de précipitation les plus petits s'évapore
de la couche superficielle du sol par temps sec. Par conséquent, seuls les événements de
précipitations plus importants fournissent une recharge significative des eaux
souterraines.
Schéma 3-1. Schéma des zones humides du Silala en Bolivie.
4 Dans le cadre de la Convention de Ramsar de 1971 relative aux zones humides d'importance internationale,
particulièrement pour les oiseaux aquatiques qui l’habitent ("la Convention de Ramsar"), une zone humide est
un site considéré comme important au niveau international.
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20) Les bofedales de Bolivie (le type de zones humides de haute altitude auquel appartiennent
les zones humides du Silala) sont des écosystèmes fragiles dotés d'une flore et d'une faune
uniques, une sorte d'oasis dans un paysage aride et sec. L'écoulement des sources et la
couche superficielle du sol partiellement inondée des bofedales naturels maintiennent un
écosystème unique. Ces conditions, qui étaient naturelles dans le Silala, ont été
sévèrement dégradées. À l'exception des lacs de cratère plutôt inaccessibles situés au
sommet du volcan Inacaliri, les zones humides du Silala et les eaux de surface associées
constituent la seule source permanente d'eau douce de surface en Bolivie dans un rayon
de 20 km.
21) En 1910, la société Antofagasta and Bolivia Railway Compagnie Ltd. a commencé à tuber
l'écoulement des zones humides du Silala en Bolivie vers le chemin de fer pour l'utiliser
pour ses locomotives à vapeur. Par la suite, en 1928, la société a construit un réseau dense
de 6,4 km de canaux et de tuyaux de drainage sur le territoire bolivien. Cette infrastructure
artificielle dirige l'eau rapidement depuis chacune des nombreuses sources dans les zones
humides jusqu'à la frontière avec le Chili, où elle est encore aujourd'hui collectée et
canalisée pour alimenter les utilisateurs d'eau éloignés.
22) Les zones humides du Silala se composent de plusieurs sources, à deux endroits différents
(désignés par DHI comme zones humides Sud et Nord), où les eaux souterraines se
déversent à la surface (Figure 3-1). Au total, 138 sources individuelles ont été excavées et
reliées par des canaux de drainage individuels ou des tuyaux de drainage aux deux
principaux canaux collecteurs (le canal nord et le canal sud). À partir de la zone humide
sud, le canal sud conduit l'eau à travers une gorge étroite et raide jusqu'au point de
confluence où il rejoint le canal nord de la zone humide nord. À partir du point de
confluence, le canal principal transporte l'écoulement combiné des zones humides du nord
et du sud jusqu'à la frontière via un ravin raide mais plus large.
23) Avant la canalisation, l'écoulement soutenu des eaux souterraines à travers des sources
avait permis le développement du bofedales dans les zones humides du nord et du sud et
le long du fond des gorges, et d'importantes tourbières se sont développées.
24) Dans les Andes arides, l'expérience a montré que les systèmes de bofedales étendus se
trouvent souvent dans des zones de roches hautement fracturées qui peuvent transmettre
des eaux souterraines importantes et sont connectées à des aquifères régionaux qui
peuvent soutenir les flux. Cela correspond à la situation observée dans le Silala bolivien.
Il est également bien connu que les bofedales sont très sensibles aux changements
relativement modestes dans les élévations des eaux souterraines (Cooper et al., 2019);
(Cooper et al., 2015); (FUNDECO, 2019, RB, Vol. 5, annexe 26). Oyague et Copper
(2020) donnent la description générale suivante des bofedales : "...les pousses de plantes
poussent de manière si dense qu'elles forment un barrage presque imperméable qui limite
11
le mouvement latéral de l'eau, et lorsque les coussins se touchent, ils isolent les
piscines empêchant un drainage rapide". Cela tend également à prouver que les matériaux
qui excavés et enlevés pour construire le réseau de drainage devaient avoir une faible
perméabilité et devaient donc avoir pour effet de restreindre l'écoulement naturel des
sources.
25) Dans le Silala, le réseau de drainage artificiel a réduit le niveau des eaux souterraines dans
les zones humides sous la surface du sol et a asséché des sols auparavant saturés qui
présentaient des eaux stagnantes généralisées ou à écoulement lent dans la surface. Par
conséquent, il y a moins d'eau disponible pour l'évaporation directe de la surface et pour
la transpiration5 dans les zones humides actuelles du Silala que dans la situation naturelle,
non canalisée (voir Figure 3-2). La végétation dans les zones actuellement drainées est
dominée par des herbes caractéristiques des zones de hautes terres où la profondeur des
eaux souterraines est plus grande. Le drainage et l'élimination des eaux de surface
stagnantes ou les eaux qui coulent lentement dans les zones humides ont considérablement
perturbé l'écosystème d'origine.
26) En plus de l'abaissement artificiel des eaux souterraines par le système de drainage
construit, il existe des preuves que les sources ont également été excavées et que la tourbe
et la couche supérieur du sol, densément enracinées à l’origine, qui limitaient l'écoulement
des sources, ont été enlevées. Cela a augmenté le débit des eaux souterraines dans les
zones humides et, par conséquent, le débit des eaux de surface dans l'ensemble des zones
humides.
27) Les changements décrits dans les zones humides sont évidents sur le terrain. Les
photographies de la partie supérieure de la figure 3-3 permettent de comparer l'écoulement
à grande vitesse actuel, concentré dans le chenal principal du Silala avec l'écoulement lent
passé, entrelacé à travers la surface marécageuse d'un bofedal non canalisé à 50 km du
Silala (en haut à droite). On trouve la preuve directe que ces écoulements lents et la
morphologie du bofedal dominaient les zones humides du Silala avant la canalisation dans
une petite parcelle mal drainée de la zone humide Nord qui présente la même végétation
et le même schéma d'écoulement qu'une tourbière non canalisée (Figure 3-3, en bas à
droite). Le changement de végétation, conséquence des canaux, est évident lorsqu'on
compare la partie artificiellement drainée de la zone humide Nord (Figure 3-3, en bas à
gauche), qui montre une terre sèche dominée par des herbes envahissantes sur les rives du
canal à écoulement rapide, avec la partie contrastée naturellement et faiblement drainée,
de la même zone humide (Figure 3-3, en bas à droite).
5 La transpiration est le processus d'évaporation à travers les feuilles de la végétation.
12
Schéma 3-2 Élément de la pente d’une colline en zone humide naturelle non perturbée (en
haut) et en zone humide canalisée et drainée (en bas), montrant le niveau d'eau et les impacts sur
cette zone humide.
A l’état naturel
Après canalisation
En aval
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28) Indépendamment des impacts des travaux de drainage introduits sur les flux
transfrontaliers d'eaux de surface et souterraines, ces travaux ont sans aucun doute eu des
impacts écologiques majeurs sur les zones humides.
29) Les mesures du système naturel non canalisé ont été réalisées par l'ingénieur Robert Fox,
qui était chargé de la conception de l'approvisionnement en eau de la compagnie
ferroviaire et a étudié la quantité et la qualité des eaux du Silala (Fox R. H. 1922). Il a
mesuré un débit de 131 l/s "avec de très légères variations" (18% de moins que le débit
moyen actuel de 160 l/s).
Les mesures de M. Fox sont les seules mesures in situ connues du débit des eaux de surface
transfrontalières du Silala naturel avant l'installation des travaux de canalisation, et
correspondent parfaitement aux évaluations du DHI des débits non perturbés du DHI (11-
33 % inférieurs aux débits canalisés) (DHI 4, 2019, RB, Vol. 5, annexe 25).
Schéma 3-3. Exemples d'impacts du réseau de canaux et de drainage. Canal étroit bordé de
pierres dans le Silala avec de l'eau qui s'écoule rapidement (en haut à gauche) comparé à des
écoulements de surface lents et étendus dans le bofedal naturel voisin de Villamar (en haut à
droite) et dans une parcelle du Silala non perturbée, ayant conservé le schéma d'écoulement
original (rangée inférieure droite). En bas à gauche: des herbes envahissantes empiètent sur la
végétation originale dans la section drainée plus sèche du canal principal de la zone humide nord.
14
4. LA METHODOLOGIE UTILISÉE PAR DHI
30) Comprendre la combinaison des eaux de surface et souterraines et les impacts
hydrologiques associés à l'assèchement et à la canalisation est une tâche complexe. Il est
bien connu que la nature est diverse et que la pente et l'altitude du terrain, la végétation,
les propriétés du sol, etc. varient dans l'espace. Dans certaines parties de la zone des
sources du Silala, elles varient en quelques mètres. De même, l'épaisseur des différentes
formations géologiques de subsurface varie dans l'espace, tout comme leur capacité à
stocker et à transmettre les eaux souterraines. Ces caractéristiques hydrogéologiques
"cachées" sont tout aussi importantes pour comprendre les interactions entre les eaux de
surface et les eaux souterraines dans la région.
La collecte de données souterraines est beaucoup plus difficile et coûteuse que les mesures
de surface car elle nécessite des études géophysiques, le forage de puits pour recueillir des
échantillons de roche, la mesure du niveau des eaux souterraines et des puits d'essai pour
déterminer les propriétés hydrauliques de la roche qui régissent sa capacité à stocker et à
transmettre les eaux souterraines.
31) Si la présence d'eaux souterraines est bien attestée par l'existence de sources, les
connaissances sur l'origine et la nature de ces eaux souterraines étaient rudimentaires au
début des travaux du DHI en 2017. Par conséquent, DHI a formulé des recommandations
et des spécifications détaillées pour une campagne intensive de collecte de données sur le
terrain (in situ) pendant 6 mois, qui a ensuite été exécutée par la Bolivie avec des équipes
d'enquête spécialisées supervisées par DHI et son sous-consultant. Ces types de
programmes de collecte de données sur le terrain sont réalisés pour comprendre la nature
du système d'écoulement des eaux souterraines et sont appelés programmes de
caractérisation hydrogéologique. Le travail sur le terrain s'est concentré sur le Champ
Proche du Silala, car c'est la zone qui a été la plus affectée par les canaux et le drainage
des zones humides et où les prédictions de modèle de ces impacts seront les plus sensibles
aux niveaux d'eau et aux paramètres hydrauliques mesurés sur le terrain. Au total, 35 puits
de surveillance ou piézomètres6 ont été installés dans 29 puits forés sur et le long du cours
des gorges et des zones humides du Silala en Bolivie (certains à des profondeurs de plus
de cent mètres) (DHI 1; annexe F pp. 1-99, CMB, annexe 17). Un registre géologique
d'échantillons de roche provenant des puits a été réalisé afin de comprendre les
caractéristiques géologiques et hydrogéologiques du sous-sol.
32) Des mesures de l'élévation des eaux souterraines ont été obtenues à partir de piézomètres
afin de comprendre les gradients et les schémas d'écoulement des eaux souterraines. Des
6 Un piézomètre mesure le niveau d'eau (ou la hauteur piézométrique) des eaux souterraines à un endroit et à une
profondeur spécifiques.
15
essais de forage et des puits ont été réalisés pour quantifier la capacité de la roche
ignimbrite7 à transmettre et à stocker les eaux souterraines.
33) Une vaste campagne de mesures du débit de surface a été réalisée le long de l'ensemble
du réseau de canaux et combinée à des études détaillées des sources et des canaux de
drainage individuel. Ces mesures et analyses permettent de comprendre où les eaux
souterraines se déversent dans les eaux de surface et où les eaux de surface perdent de
l'eau au profit des eaux souterraines, ainsi que de comprendre les contributions des
différents tronçons du canal8.
34) Afin de compléter la compréhension des conditions des eaux souterraines et de surface,
les données du programme de caractérisation hydrogéologique ont été combinées avec les
données hydrogéologiques du Chili accessibles (Arcadis 2017, MC).
35) L'étude de caractérisation hydrogéologique a révélé un aquifère d'ignimbrite épais,
latéralement étendu, hautement fracturé et hétérogène, capable de transmettre et de stocker
de grands volumes d'eau. Par conséquent, cet aquifère est capable de maintenir un débit
d'eau souterraine vers les sources et les écoulements de surface au fil du temps. Les
élévations mesurées des eaux souterraines indiquent également que les eaux souterraines
plus profondes s'écoulent vers le haut de l'aquifère en direction des zones humides du
Nord et du Sud et que le gradient général (la pente de la nappe phréatique) est relativement
raide en direction du Chili. Un tel gradient implique que les eaux souterraines qui ne sont
pas déversées dans les eaux de surface ou les sources s'écouleront au-delà de la frontière.
36) À l'heure actuelle, la quantification du débit des eaux souterraines transfrontalières est
approximative, mais on estime qu'il dépasse 230 l/s (voir les détails de l'estimation dans
DHI 1, 2018, annexe F, p. 81) (CMB, Vol. 4, annexe 17). Affiner l'estimation des flux
transfrontaliers d'eaux souterraines aurait nécessité des études géophysiques, des puits
profonds supplémentaires, des tests de pompage et une compréhension géologique
détaillée (c'est-à-dire une lithologie, une stratigraphie) obtenue par un programme plus
étendu de caractérisation de la surface. Cependant, les contraintes de temps n'ont pas
permis une telle extension du programme déjà intensif.
37) La méthodologie scientifique appliquée suit des approches techniques bien établies pour
de telles études qui mettent l'accent sur la collecte de données hydrologiques et
hydrogéologiques spécifiques au site. Les données in situ sont la base du modèle
7 L'ignimbrite est une roche formée par des éruptions volcaniques explosives et déposée à haute température. Au
Silala, les ignimbrites forment les principaux aquifères (masses de roches perméables qui peuvent contenir ou
transmettre des eaux souterraines) de la région.
8 Un tronçon d'un canal ou d'une rivière est une petite section d'un canal ou d'une rivière plutôt que sa longueur
totale.
16
conceptuel9 de l'hydrogéologie de la zone, qui constitue le cadre du développement d'un
modèle hydrologique intégré utilisé pour analyser les flux d'eaux de surface et souterraines
dans le Silala pour différents scénarios.
38) Pour analyser l'impact des canaux artificiels sur la baisse du niveau des eaux souterraines
dans les zones humides du Silala et les impacts hydrologiques connexes sur le flux
transfrontalier, DHI a développé un modèle hydrologique intégré du Champ Proche.
Comme le montre la Schéma 4-1, le développement du modèle de Champ Proche a suivi
les meilleures pratiques établies pour de tels modèles, à savoir :
1) Développement d'un modèle conceptuel et d'un modèle10 numérique référentiel11
cohérent avec les informations tirées des recherches sur le terrain et des études
précédentes ;
2) Calibration du modèle (référentiel / ligne de base) pour reproduire les élévations
des eaux souterraines et les débits de surface mesurés sur le terrain ;
3) Modification du modèle calibré (référentiel / ligne de base) pour représenter les
zones humides du Silala dans leur état naturel (c'est-à-dire sans canaux et
infrastructures connexes) afin de permettre une comparaison des flux non
canalisés avec ceux du modèle de ligne de base).
9 Un modèle conceptuel est une représentation simplifiée des principaux processus et caractéristiques d'un
système, tel qu'un système hydrologique.
10 Le modèle de Champ Proche est utilisé dans différentes configurations, chacune d'entre elles représentant un
scénario à analyser : ligne de base (la situation actuelle); pas de canaux (similaire à la ligne de base mais sans
canalisation) et non perturbé (sans canalisation et avec des couches de tourbe restaurées).
11 Un modèle numérique est une représentation mathématique du modèle conceptuel qui est habituellement
appliquée pour simuler d'abord les états mesurés et observés, par exemple d'un système hydrologique intégré,
puis à calculer les impacts de différents changements (scénarios).
17
Schéma 4-1 Méthode d'évaluation de l'impact
39) La délimitation du domaine du modèle de Champ Proche (la zone simulée par le modèle)
est fondée sur l'étendue du programme de caractérisation hydrogéologique et est limitée
aux endroits où la géologie et l'hydrogéologie sont relativement bien connues.
40) En raison de la mesure du modèle de Champ Proche, les limites [contours] du modèle sont
potentiellement affectées par les canaux. Par conséquent, les simulations ont été répétées
en utilisant différentes conditions-cadres pour évaluer l'impact sur les prédictions du
modèle. Le résultat de cette analyse de sensibilité est une limite supérieure et inférieure
des impacts attendus sur les flux transfrontaliers.
41) Il est internationalement reconnu que les analyses et la quantification des impacts des
structures artificielles sur les systèmes hydrologiques complexes sont mieux réalisées par
l'application de modèles mathématiques intégrés que par de simples calculs analytiques
manuels, tels que ceux produits par les experts du Chilis, qui ne peuvent reproduire les
complexités du monde naturel. Par conséquent, l'approche technique adoptée par DHI
dans ce cas est considérée comme une pratique courante pour de telles enquêtes et, en fait,
est exigée par les organismes de réglementation environnementale pour autoriser les
projets d'infrastructure dans le monde entier.
18
Schéma 4-2 Estimation de la baisse du débit des eaux de surface transfrontalières
en cas de mise hors service des canaux et de restauration des zones humides
42) Nos analyses montrent qu'en raison de la canalisation artificielle des zones humides et des
gorges, les eaux de surface qui traversent la frontière internationale ont augmenté et
devraient diminuer de 11% à 33 % par rapport à la situation actuelle si les structures de
drainage étaient démantelées et si les zones humides étaient restaurées dans leur état
d'origine. Ce résultat est confirmé par les mesures effectuées par M. Fox, avant la
canalisation, du débit des eaux de surface des zones humides non perturbées (Fox, R. H.,
1922), qui était inférieur de 18% au débit moyen mesuré récemment (Schéma 4-2).
43) Les analyses chimiques de l'eau ont suggéré qu'une grande partie des eaux souterraines se
déversant dans les sources du Silala et les eaux de surface ont eu de longs temps de
résidence dans l'aquifère et se sont potentiellement infiltrées dans les sols il y a des milliers
d'années (c'est-à-dire l'âge apparent de la datation au carbone 1412, voir la discussion sur
les limites de ces méthodes dans DHI 1, 2018, annexe F CMB, Vol. 4, annexe 7). Un
modèle plus grossier et à plus grande échelle du Champ Lointain a été développé, défini
comme la meilleure estimation de l'étendue géographique du bassin de captation d'eau
souterraine des sources du Silala en Bolivie, avec les objectifs suivants: 1) évaluer la
probabilité que la source d'eau des sources du Silala soit susceptible d'être une ressource
12 La datation au carbone 14: la radioactivité du carbone 14 présent dans les eaux souterraines sous forme de
carbone inorganique dissous a été utilisée dans des études hydrologiques pour déterminer la date de la plus
ancienne recharge des eaux souterraines depuis les années 1960.
Limite inférieure Limite supérieure
Limite Plage de sensibilité
19
renouvelable ou non et 2) vérifier que les temps de mouvement des eaux souterraines
simulés dans l'aquifère étaient du même ordre de ampleur que les âges apparents13
déterminés à partir des analyses du carbone 14. Ces âges devraient être similaires si les
âges apparents sont quelque peu représentatifs de l'âge réel ou idéalisé des eaux
souterraines14 et si la compréhension conceptuelle du bassin de captation des eaux
souterraines (le Champ Lointain) et des zones de recharge est correcte.
44) Les résultats du modèle de Champ Lointain confirment qu'une grande partie de l'eau qui
se déverse dans la zone du Silala est âgée de milliers d'années, mais probablement pas
aussi vieille que certains des âges apparents de la datation au carbone 14, ce qui suggère
qu'il peut y avoir eu une certaine diminution du carbone 14 associée à des processus
chimiques le long de la voie d'écoulement des eaux souterraines ou à un écoulement
potentiellement interbassin dans le domaine de Champ Lointain ou à une combinaison de
ces deux processus. Le modèle indique également que certains des rejets d'eau dans les
sources auraient des âges moyens de la nappe souterraine inférieure, associés à une
recharge localisée et à un régime d'eau souterraine localisé, conformément au modèle
conceptuel (DHI 1, 2018, annexe F, p. 1-99 CMB, Vol. 4, annexe 17). Les simulations du
modèle du Champ Lointain montrent que les précipitations sur le bassin de captation du
Champ Lointain peuvent générer une recharge moyenne des eaux souterraines de 150 l/s
à 370 l/s ou plus15. Cette recharge (également connue comme une ressource renouvelable)
est interprétée comme étant légèrement supérieure aux mesures des eaux de surface
transfrontalières (160-170 l/s). Cependant, il faut également tenir compte du débit
transfrontalier des eaux souterraines, qui est estimé à 230 l/s ou plus pour un débit
transfrontalier combiné de l'ordre de 390 l/s ou plus. Par conséquent, il n'est pas possible
de déterminer de manière définitive si (a) le flux transfrontalier combiné correspond au
taux de recharge moyen pour le Champ Lointain (c'est-à-dire 150 l/s à plus de 370 l/s) et
constitue donc une ressource renouvelable; ou (b) si une partie du flux provient d'un
système d'eaux souterraines plus grand (c'est-à-dire un flux interbassin); ou c) si une partie
du débit est constituée d'eau souterraine non renouvelable qui s'est accumulée au cours
d'une période climatique plus humide et qui s'évacue maintenant lentement de l'aquifère à
mesure que l'élévation des eaux souterraines s'adapte aux conditions climatiques actuelles.
13 Age apparent au carbone 14 : l'âge apparent est déduit de la datation au carbone 14 et représente l'âge maximal
de l'eau souterraine dans l'échantillon. Comme le carbone 14 ne fait pas partie de la molécule d'eau, son activité
et les âges interprétés au carbone 14 peuvent être affectés par des réactions entre les constituants dissous dans
les eaux souterraines et les matériaux de l'aquifère, ce qui peut entraîner des âges apparents plus anciens que
l'âge réel des eaux souterraines.
14 Âge des eaux souterraines : l'âge des eaux souterraines est défini comme le temps écoulé entre la recharge de
la nappe phréatique et le moment où les échantillons d'eaux souterraines ont été prélevés.
15 Les chutes de neige sont fréquentes dans la région, mais sont difficiles à enregistrer dans les pluviomètres
normaux, de sorte que les précipitations et, par extension, la recharge des eaux souterraines peuvent être sousestimées.
20
5. POINTS D’ACCORD ENTRE LES EXPERTS DE LA BOLIVIE ET DU CHILI
45) La principale source d'eau de surface des sources du Silala est l'écoulement des eaux
souterraines, et les eaux de surface (à l'intérieur et à l'extérieur des canaux) interagissent
avec les eaux souterraines sous-jacentes le long de leurs parcours (DHI 1, 2018, point 9
CMB, Vol. 2, annexe 17; W&P 5, Vol. 1, p. 3 point 2).
46) Le Silala est de nature complexe et comprend un système couplé d'eaux souterraines et
d'eaux de surface qui prend naissance sur le territoire bolivien (en amont) et s'étend au
Chili (en aval) (DHI 1, 2018, p. 2 point 9, CMB, Vol. 2, annexe 17 ;W&P 5, Vol. 1, p. 3
point 2).
47) Le programme de caractérisation hydrogéologique a clairement identifié des couches
géologiques d'épaisseur significative, des conductivités hydrauliques élevées16 et des
gradients17 d'eau souterraine significatifs vers le Chili (DHI 1, 2018, p. 2, points 5-6 ,
CMB, Vol. 2, annexe 17 ; W&P 5, p. 3 point 3).
48) En général, les pentes de la nappe phréatique et du terrain sont importantes et la
construction des canaux ne peut pas avoir changé la direction générale de l'écoulement
des eaux de surface ou souterraines. Par conséquent, les données de terrain et les analyses
des modèles du Champ Proche et du Champ Lointain suggèrent que l'eau qui s’évacue du
bassin de captation du Silala (représentant l'évapotranspiration des sols, des zones
humides et des canaux) s'écoule finalement vers le Chili sous forme d'eau souterraine ou
de surface, avec ou sans canaux (DHI 3, 2019 p. 11 ; DB, Vol. 5, annexe 24 ; W&P 5,
p.3).
49) Les experts des deux parties s'accordent à dire que les travaux de drainage de 1928 ont
affecté les écoulements de surface à travers la frontière (W&P 3, p. 12) et ont conduit à
une réduction des pertes d'eau directes par évapotranspiration et possiblement par
infiltration. Par conséquent, l'évapotranspiration des zones humides augmentera si les
canaux sont supprimés (DHI 3, 2019, p. 11, para. 5 ; DB, Vol. 5, annexe 24 ; W&P 5, p.
3 para. 3).
50) Les experts chiliens sont d'accord avec DHI pour dire que les travaux de drainage sur les
zones humides ont réduit les nappes phréatiques (souterraines) dans les zones humides et
les gorges du Silala. Ils conviennent également que l'augmentation des gradients
hydrauliques et la réduction de la résistance hydraulique à travers les sources et
16 La conductivité hydraulique est la mesure de la facilité relative avec laquelle l'eau peut s'écouler à travers les
espaces poreux et les fractures.
17 Un gradient, une pente ou un taux de changement de niveau d'eau décrit la différence de niveau d'eau entre
deux points en relation avec la distance.
21
l'augmentation du débit des sources qui en résulte sont des effets plausibles de la
canalisation. (W&P 3 pp. 11-14). L'augmentation du débit à travers les sources entraîne
une augmentation du débit des eaux de surface transfrontalières. Nous sommes donc
également d'accord sur le fait que le flux à travers la frontière a augmenté en raison des
drains artificiels et de la canalisation (DHI 1, 2018, p. 2 point 10 ; CMB, Vol. 2, annexe
17 ; W&P 5, p. 3, point 4 et par. 2), mais le désaccord sur l'ampleur de cette augmentation
persiste, comme détaillé ci-dessous.
51) Les estimations de l’ampleur de l'augmentation du débit des eaux de surface associée à la
canalisation ne sont pas des données exactes. Il y a toujours une incertitude associée aux
prédictions hydrologiques et hydrogéologiques (DHI 3, 2019, p. 7, par. 7 ; DB, Vol. 5,
annexe 24).
52) Les experts du Chili conviennent également que le simple calcul manuel de Darcy du
profil bas de l'impact des canaux de drainage présenté par les experts du Chili est
insuffisant pour évaluer l'ampleur de l'impact des canaux (DHI 3, 2019, p. 7, paragraphe
8 ; DB, Vol. 5, annexe 24 ; W&P 5).
6. POINTS SUR LESQUELS LES EXPERTS DE LA BOLIVIE ET DU CHILI SONT
EN DESACCORD
6.1 L'impact de la canalisation sur les flux transfrontaliers
53) Si bien les experts techniques du Chili et de la Bolivie s'accordent à dire que les flux d'eau
de surface à travers de la frontière ont augmenté en raison du drainage des zones humides,
l'ampleur de ce changement est contestée.
Les experts du Chili l'évaluent comme négligeable, mais n'ont présenté qu'une analyse
très simplifiée pour étayer leur position – une analyse dont ils ont ensuite admis qu'elle
n'était pas suffisante pour quantifier un impact de ce type (W&P 5, p. 4). Contrairement à
DHI, les experts du Chili n'ont pas effectué de recherches sur le terrain dans les bofedales
boliviens.
L'analyse du DHI démontre que la canalisation a considérablement augmenté les flux de
surface vers le Chili. DHI a mené plusieurs missions de recherche et de collecte de
données dans les zones humides du Silala en Bolivie et fonde son estimation sur un vaste
programme de caractérisation in situ, sur des analyses détaillées du modèle numérique
basées sur des données in situ (approche normalement appliquée pour de telles analyses)
et sur des mesures de débit historiques et actuelles sur le site.
22
54) Les experts du Chili ont déclaré que les conditions-cadre originales du modèle n’étaient
pas adaptées aux conclusions du DHI. DHI convient qu'en raison des limitations du
programme de caractérisation sur le terrain, les contours du modèle sont potentiellement
affectés par les canaux. Par conséquent, plusieurs simulations différentes du modèle ont
été effectuées pour évaluer comment les contours affectent les prédictions du modèle des
flux transfrontaliers avec et sans canalisation, respectivement.
Le résultat de l'analyse est que si les canaux sont démantelés et que les zones humides
sont restaurées à leur état naturel, les flux d'eau de surface transfrontaliers devraient
diminuer de 11% à 33 %.
55) Les conditions-cadres testées comprennent à la fois un scénario de contour supérieur
(pression constante le long des contours du débit d'entrée) qui entraînera des différences
de débit estimées dans le contour supérieur (33%) et un scénario de contour inférieur
(contour de débit constant), qui est considéré comme conservateur dans le sens où il est
probable de sous-estimer la différence de débit (11%). Par conséquent, il faut supposer
que le résultat le plus correct se situe quelque part entre les contours supérieur et inférieur.
56) Les seules observations du débit du Silala avant la canalisation, 131 l/s (Fox 1922), sont
inférieures de 18% aux observations moyennes actuelles (160 l/s). Ceci est cohérent avec
la gamme de résultats du modèle de Champ Proche (par. 55).
57) Les experts du Chili réfutent la mesure de l'ingénieur Fox et remettent en question
l'exactitude et la fiabilité de sa mesure, arguant que même aujourd'hui, il semble difficile
de mesurer les flux. Cependant, Fox a passé beaucoup de temps à étudier les conditions et
la planification des travaux, de sorte que ses conclusions sauraient être rejetées. De plus,
DHI est convaincu que la plupart des problèmes liés aux relevés de débit du Silala
proviennent de problèmes liés aux équipements automatiques (maintenant installés sur les
sites) ou à des opérateurs de compteurs mal formés. Il est possible que Fox ait utilisé des
méthodes manuelles pour mesurer le débit. Ces méthodes sont connues depuis de
nombreuses années, et Fox cite le débit avec une précision à trois chiffres18 et qu'il
présente de "très légères variations". Cela signifie qu'il a effectué plusieurs mesures
cohérentes sur une période donnée. De plus, Fox, en tant qu'ingénieur professionnel
responsable de la conception des nombreux kilomètres de tuyauterie, devait pouvoir se
fonder sur des mesures précises. Il a même effectué des analyses chimiques assez
détaillées de l'eau du Silala, ce qui, selon nous, n'était pas la norme au début du siècle XX.
DHI conclut donc qu'il semble hautement improbable qu'il n'ait pas effectué correctement
ces mesures cruciales et que leur validité doit donc être reconnue.
18 Il est de bonne pratique technique que le nombre de chiffres reflète la précision présumée de la mesure.
23
58) Les experts du Chili contestent également l'endroit où les mesures de Fox ont été prises.
DHI estime que leur description est suffisamment précise pour localiser leur site de
surveillance dans la gorge près du barrage actuel, à environ 600 m en amont de la frontière.
Cet emplacement se trouve dans un tronçon du gorge où, selon des mesures récentes (DHI
1, 2018, p. 23, Schéma 13 ; CMB, Vol. 2, annexe 17), le débit ne varie pas beaucoup. Par
conséquent, les observations peuvent être considérées comme représentatives des flux de
surface traversant la frontière dans des conditions naturelles sans réseau de drainage
artificiel.
59) L'ampleur des modifications estimées sur les eaux de surface traversant la frontière est
tout à fait cohérent avec les observations de débit réalisées dans antérieurement à la
canalisation. Pourtant les experts du Chili contestent ce changement significatif tel qu’il
ressort des analyses et des observations sus mentionnées.
60) Les zones humides du Silala en Bolivie ont été largement drainées, disséquées, altérées
et, par conséquent, leur étendue a été réduite. Les sols se sont asséchés, les dépôts de
tourbe ont été excavés et enlevés, et la végétation native des zones humides a été
remplacée par des herbes envahissantes caractéristiques des zones à faible teneur en
humidité et d’eaux souterraines plus profondes (Schéma 3-3 et Schéma 6-1). DHI
considère qu'il s'agit d'un changement écologique significatif de la zone humide Ramsar.
Schéma 6-1 Photographie aérienne d'ensemble du canal de la zone humide nord.
24
6.2 Points de désaccords entre les experts de la Bolivie et du Chili sur les méthodologies
utilisées et les résultats obtenus
61) Les experts techniques du Chili comparent les estimations de l'évapotranspiration par
télédétection de la petite zone humide voisine non perturbée de la Quebrada Negra, du
côté chilien de la frontière, avec les deux zones humides du Silala en Bolivie. Comme les
estimations (W&P 3, p. 41) semblent indiquer des taux d'évaporation plus élevés dans les
zones humides boliviennes que dans les zones humides chiliennes, les experts du Chili
concluent que la canalisation en Bolivie "ne semble pas avoir eu un effet significatif sur
les taux d'évapotranspiration". DHI n'est pas d'accord avec cette conclusion, car elle
compare trois zones humides, chacune avec des conditions d'eaux souterraines (et de
climat) différentes. Il est en outre évident que les satellites ne peuvent pas observer les
conditions initiales, non canalisées, dans les zones humides du Silala en Bolivie, plusieurs
années après la mise en oeuvre de la canalisation. De plus, la formule de calcul ne semble
pas prendre en compte l'évaporation des surfaces d'eau libre qui constituerait une part
importante de l'évapotranspiration dans le cas des zones humides non perturbées du Silala.
Enfin, les taux d'évapotranspiration estimés pour Quebrada Negra non perturbée ne
représentent qu'environ 50% des valeurs potentielles citées (CR Vol 3, p. 151, Muñoz &
Suárez 2019, p. 61) ; cela est inférieur à ce que l'on pourrait attendre d'une zone humide
naturelle où l'eau est abondante. Cependant, il est frappant de constater que les sous-zones
au sein des zones humides que les experts du Chili associent à des taux
d'évapotranspiration élevés (CR Vol 3, p. 153, Muñoz & Suárez 2019A, p. 63)
correspondent à des sous-zones relativement moins drainées et plus caractéristiques des
bofedales naturelles restantes. Cela contredirait la conclusion des experts du Chili.
62) Selon les experts du Chili, le modèle du Champ Proche du DHI ne peut être utilisé
pour prédire l'impact des drains et des canaux artificiels car :
Il ne reflèterait pas l'hydrogéologie (par exemple, le modèle n'intègre pas les
aquifères perchés19 tels qu'identifiés au Chili). DHI n'est pas d'accord car aucun
aquifère perché n'a été identifié par aucun des nombreux puits hydrogéologiques
forés et étudiés dans la zone modèle. En outre, DHI fait valoir que le modèle est
construit et calibré à l'aide d'une grande quantité de données de terrain recueillies
sur le site, tant en surface que dans le sous-sol. Le modèle reproduit les schémas
d'écoulement des eaux souterraines, les gradients hydrauliques et les taux de
décharge observés dans les zones humides du Sud et du Nord, ainsi que les débits
de surface mesurés dans tout le système en Bolivie.
19 Un aquifère perché se produit lorsque l'eau infiltrée est interceptée par une couche ou une lentille
de faible perméabilité, ce qui entraîne une accumulation d'eau au sommet de la lentille de faible
perméabilité, au-dessus de la nappe phréatique principale.
25
La zone du modèle serait trop petite et ne couvrirait qu'un petit pourcentage du
bassin de captation versant. DHI n'est pas d'accord. Le domaine du modèle
couvre le Champ Proche, où les données de terrain ont été collectées et, plus
important encore, où la plupart des impacts hydrologiques se sont produits. DHI
admet qu'il existe certains effets de contour20, mais des analyses de sensibilité ont
été appliquées pour tenir compte des effets qui donnent lieu à des prédictions de
contour supérieur et inférieur. Comme indiqué, les experts du Chili n'ont pas
effectué d'études sur le terrain dans la zone concernée et n'ont pas non plus
développé de modèles numériques pour reproduire les conditions hydrologiques
et hydrogéologiques mesurées sur le terrain.
63) La réinterprétation du modèle hydrogéologique conceptuel des experts du Chili
(W&P 4, 2019) s'écarte du modèle conceptuel du DHI en termes d'étendue latérale
de l'aquifère ignimbrite au-delà de la zone immédiate des gorges du Silala et
ignore les observations géologiques et la datation de l'âge des unités rocheuses
complétées in situ en Bolivie. Par conséquent, la stratigraphie21 au-delà de la
zone immédiate des g o r g e s est contestée. DHI rappelle que le plus petit
modèle a été délibérément limité aux zones du Champ Proche qui pourraient être
raisonnablement bien représenté et où les impacts de la canalisation sont les
plus importants. Il est peu probable que la stratigraphie en dehors du domaine
du modèle modifie de manière significative les prédictions modélisées des
impacts hydrologiques des canaux et des drains artificiels. En outre, une faille
coïncidant avec la gorge du Silala, qui était précédemment incluse dans le
modèle conceptuel du Chili, a maintenant été supprimée sans explication
(Arcadis, 2017). En outre, les experts du Chili tentent d'extrapoler à la Bolivie
leurs conclusions sur les aquifères perchés du Chili, alors qu'un programme
intensif de caractérisation hydrogéologique n'a pas permis d'identifier
d’aquifères perchés.
64) Le modèle de Champ Proche du DHI est basé sur des preuves de terrain et a
été calibré pour refléter les modèles d'écoulement des eaux souterraines sur le
terrain. Il reproduit de manière fiable les données prises in situ. Un exemple
est la simulation du schéma d'écoulement de surface dans la zone humide sud
qui a été partiellement restaurée en bloquant les canaux, ce qui démontre que
les zones humides retiennent l'eau en surface lorsque les canaux sont inactifs
(Schéma 6-2).
20 C'est-à-dire où les conditions le long de la frontière du modèle affectent les résultats.
21 La stratigraphie désigne l'ordre et la position relative des strates et leur relation avec l'échelle des temps
géologiques.
26
65) Les experts du Chili remettent en question le cadre hydrogéologique du
modèle de Champ Proche, les propriétés hydrauliques attribuées, la cohérence
interne entre les ensembles de données utilisés et la pertinence de l'approche
de modélisation adoptée dans l'étude. DHI a évalué, expliqué et répondu aux
questions techniques soulevées par les experts du Chili et a conclu que
l'approche, les propriétés et les hypothèses du DHI sont valables. Ces
désaccords sont développés au chapitre 7 ci-dessous.
66) Il n'existe pas de modèle parfait ; il s'agit par nature d'une simplification du monde
naturel complexe et les prédictions comportent donc un certain degré inhérent
d'incertitude. Cependant, DHI a analysé comment les hypothèses clés ou les
limitations du modèle affectent les prédictions du modèle et rend compte d'une
variété d'impacts hydrologiques potentiels basés sur ces analyses. Les limites du
modèle sont largement pris en compte et les organismes de réglementation
demandent et acceptent fréquemment le type d'analyses présentées par DHI pour
les évaluations de l'impact hydrologique.
67) Les experts du Chili supposent que les divergences ou inexactitudes locales dans
les données d'entrée du modèle de Champ Proche entraînent de graves erreurs
unilatérales qui entravent les résultats du modèle et le disqualifient dans
l'évaluation de l'impact. Mais, DHI estime que le modèle calibré basé sur des
données réelles de terrain fournit la meilleure base et, avec les observations in situ
de l'ingénieur Fox sur l'écoulement des eaux de surface non perturbées avant la
canalisation, reste le meilleur outil disponible pour évaluer l'impact de la
canalisation sur l'écoulement des eaux de surface, indépendamment des
inexactitudes mineures ou des incertitudes inhérentes à tous les modèles.
68) À titre de comparaison, les experts du Chili ont présenté un calcul manuel
simplifié pour faire valoir que l'impact de la canalisation serait 20 fois moins
important que celui prévu par le modèle intégré développé par DHI. Le calcul
se fonde sur un profil d'écoulement des eaux souterraines idéalisé et uniforme
(en une dimension) qui ne reflète en aucune façon les conditions du site du
Silala. Dans des observations ultérieures à la Cour, les experts du Chili ont
expliqué qu'un tel calcul simplifié n'était pas adapté à la quantification de
l'impact et n'avait pour but que d'illustrer l'effet des conditions limites (W&P
5, p. 4). Néanmoins, le Chili continue de citer le facteur 20 pour prétendre que
les impacts du DHI sont surestimés.
27
Schéma 6-2 Schéma montrant comment les débits et les inondations simulés par
le modèle de Champ Proche (image du bas), reflètent les débits de surface réels
dans la zone humide du sud (représentés par des zones vert foncé sur l'image
satellite ci-dessus). En outre, des zones dégradées (sèches) de la zone humide
d'origine avec une végétation de tourbière morte sont clairement visibles en gris
clair sur l'image satellite. L'image montre la situation actuelle de la zone humide
du sud, où le flux a été obstrué dans plusieurs canaux. Cela a fait monter le niveau
de l'eau dans les canaux (et les eaux souterraines) et la zone humide a commencé
à se transformer pour retrouver son état d'origine avec des sols tourbeux saturés
et des eaux de surface se déplaçant lentement (les zones vertes foncées sur
l'image et dansle diagramme ci-dessous). Ce schéma d'écoulement, généré par
le blocage des flux dans les canaux de drainage, est la preuve que l'assèchement
de la zone humide a étécausé par les structures de drainage artificielles.
28
7. DISCUSSION TECHNIQUE DÉTAILLÉE SUR LES POINTS DE
DÉSACCORD
69) Ce chapitre présente des arguments plus techniques concernant les critiques
des experts du Chili sur l'analyse du DHI et inclut un langage et des
formulations plus techniques sur les points de désaccord résumés ci-dessus.
70) Les experts du Chili affirment que le seul impact des canaux est une
modification de surface des zones humides et que les taux d'évapotranspiration
ne représentent qu'un changement mineur du débit des canaux. Selon les
résultats du modèle DHI de Champ Proche, le changement de flux total des
eaux souterraines et de surface à travers la frontière peut être limités, mais les
canaux ont augmenté le flux des eaux de surface et par conséquent réduit les
flux des eaux souterraines. Le débit transfrontalier estimé des eaux de surface
provenant des zones humides naturelles non canalisées est donc inférieur de
11 % à 33 % par rapport à la situation actuelle (DHI 4, 2019, p.8 DB, Vol. 5,
annexe 25). Dans les sections 6.2 à 6.3 ci-dessous, nous exposons plus en
détail les réserves des experts du Chili sur le modèle.
7.1. Le bilan hydrique : les modèles de Champ Lointain et de Champ Proche
71) DHI a développé et appliqué trois modèles différents pour comprendre, décrire
et analyser l'hydrologie du Silala :
a. Un modèle de bilan hydrique (modèle MBH ou modèle de Champ
Lointain) pour l'analyse de la recharge et de la durabilité;
b. Un modèle détaillé de la section Confluence-Frontière pour des
études d'infiltration détaillées;
c. Un modèle de Champ Proche (NFM) pour les évaluations d'impact
des canaux et des réseaux de drainage.
72) Les modèles sont indépendants et sont utilisés à des fins différentes. Par
conséquent, c'est un contresens lorsque les experts du Chili supposent qu'ils
sont liés et que les conditions (-cadres) aux limites sont transférées ou
coïncident.
29
73) Le modèle de bilan hydrique a été établi avant l'achèvement du programme
de caractérisation hydrogéologique détaillée du Champ Proche. Par
conséquent, il s’est fondé sur des informations géologiques éparses et des
données préliminaires pour le contour aval dans la zone de Champ Proche
(DHI 1, 2018, annexe E, p. 20 CMB, Vol. 3, annexe 17).Ces conditions (-
cadres) aux sont cependant suffisantes pour établir des bilans hydriques.
74) Les experts du Chili laissent entendre que DHI part du principe que les
simulations des 49 dernières années sont représentatives des variations
climatiques des 5 000 dernières années. Ce n'est pas le cas, nous considérons
qu’elles sont représentatives du climat actuel. C'est le climat actuel qui
importe pour évaluer les débits du Silala comme étant une ressource
renouvelable ou non (paragraphe 44).
75) Cependant, il est vrai que nous avons utilisé le climat actuel comme la meilleure
estimation du climat préhistorique pour évaluer si le bassin de captation présumé
d'eau souterraine (le Champ Lointain) et les informations hydrogéologiques
générales disponibles pour ce modèle sont compatibles avec l'âge ancien observé
de l'eau de source. Nous avons calculé les temps de parcours des eaux souterraines
dans le Champ Lointain et avons trouvé des temps de déplacement de l'ordre de
milliers d'années (ce qui, selon nous, fait du Champ Lointain un bassin de
captation des eaux souterraines).
7.2. Étendue de la zone du modèle de Champ Proche et conditions aux limites
attribuées
76) Des experts du Chili ont remis en question l'étendue spatiale limitée du modèle
de Champ Proche. Cependant, la zone modélisée (le Champ Proche)
comprend toutes les zones humides, les canaux et les réseaux de drainage. Les
impacts du canal sont simulés par les processus hydrologiques dans cette zone
de modélisation. Les experts du Chili continuent de prétendre que la zone est
trop petite pour une évaluation d'impact (W&P 5, p. 40).
77) La taille du modèle de Champ Proche a été choisie car elle constitue une zone
pour laquelle il était possible de collecter suffisamment de données
hydrogéologiques pour former une base adéquate pour la modélisation
hydrogéologique, étant donné les contraintes temporelles. Notre modèle
hydrogéologique conceptuel et le modèle du Champ Proche sont tous deux
basés sur les données tirées d'une campagne intensive de forage et d'essais sur
30
le terrain (comprenant plus de 35 piézomètres) dans le Champ Proche du Silala
(analyse de la stratigraphie, des caractéristiques hydrauliques, des niveaux et
des gradients des eaux souterraines).
78) Comme pour tous les modèles d'eau souterraine, les conditions (-cadres) pour
le modèle de Champ Proche sont approximatives. Une délimitation unique de
l'étendue exacte des segments de contour ouverts et fermés n'est pas
possible, mais les contours sont généralement décrits par rapport aux données
du niveau potentiel. Partout où le gradient des eaux souterraines est parallèle
à la limite d'un modèle, les eaux souterraines s'écouleront parallèlement au
contour et, dans de telles situations, peuvent être considérées comme des
contours fermés (par opposition aux contours ouverts). Dans le modèle de
Champ Proche, des contours fermés ont été introduits là où c'est
approximativement le cas.
79) Les experts du Chili soulignent que le long d'un segment de ces contours,
l'écoulement des eaux souterraines peut être presque parallèle au contour.
Nous trouvons toujours que l'approximation est tout à fait raisonnable, compte
tenu également du fait que le segment du contour sud remis en question est
associé à de faibles perméabilités, c'est-à-dire à un écoulement limité.
80) Pour explorer les effets potentiels de la zone du modèle et les conditions-
(cadres), DHI a effectué une analyse de sensibilité. Nous notons que les
experts du Chili conviennent que l'approche utilisée dans l'analyse de
sensibilité représente les contours supérieurs et inférieurs de l'évaluation
d'impact (W&P 5, p. 42).
7.2.1 Représentation du flux de surface du modèle de Champ Proche
81) Les différences entre les deux schémas d'écoulement ont été détaillés ci-dessus
(Schéma 3-3). Les conditions d'humidité et d'évaporation du sol étant
différentes dans les deux situations, le modèle doit refléter ces différences.
L'approche de modélisation intégrée des eaux de surface et des eaux
souterraines pour évaluer les impacts des canaux est simple. Le système actuel
des sources du Silala est modélisé d'abord avec les canaux artificiels existants
(modèle de base) et ensuite sans les canaux (modèle sans canaux). La
configuration du modèle est modifiée en supprimant la composante
unidimensionnelle du débit des canaux (car il n'y a pas de canaux à l'état
naturel) et les différences entre les débits simulés dans les scénarios de base et
sans canaux sont comparées. Les experts du Chili affirment que des modèles
différents sont utilisés pour le scénario avec canaux et le scénario sans canaux
31
et que, en ne tenant pas compte du modèle de flux canalisé, ils ne sont « pas
directement comparables ». Il semble assez évident que les impacts
hydrologiques associés aux canaux correspondent à la différence entre les
scénarios du modèle avec et sans canaux. Critique cette approche est quelque
peu surprenante et contradictoire.
82) Le cadre de modélisation DHI et l'approche de modélisation reflètent la tâche
à accomplir, à savoir évaluer les impacts de la suppression des canaux
entraînant un changement dans le régime d'écoulement, dans la mesure où
l'écoulement souterrain et l'écoulement de surface bidimensionnel deviennent
plus dominants. Par conséquent, l'approche du modèle a été soigneusement
choisie pour atteindre l'objectif visé.
83) Les experts du Chili affirment que le modèle ne décrit pas la "réalité" (W&P
5, p. 47). DHI montrent qu'il décrit la réalité observée, mesurée et décrite par
le modèle conceptuel et numérique. Cela dit, le modèle est une simplification
en ce qui concerne la résolution spatiale et les processus physiques du système.
Ceci est vrai pour tous les modèles et, comme pour tous les modèles, il y aura
un certain degré d'incertitude par rapport aux données d'entrée et aux
paramètres du modèle, ce qui se traduit par une incertitude anticipée.
Toutefois, c'est le cas pour tout modèle et cela ne le disqualifie donc pas
comme outil d'évaluation d'impact.
84) Même un modèle informatique avancé est une simplification par rapport au
système naturel (par exemple, la variabilité à petite échelle) et pourtant, en
utilisant les données du programme complet de collecte de données sur le
terrain, il fournit le meilleur outil d'évaluation quantitative disponible et est
supérieur aux calculs manuels qui manquent de données spécifiques au site.
7.3 Les différences topographiques entre le canal et le terrain
85) Les experts du Chili décrivent les différences topographiques entre le terrain et
les canaux et entre les terrains dans les scénarios du modèle. Pour expliquer
comment les données sont utilisées et représentées dans le modèle intégré, il est
nécessaire d'expliquer comment le logiciel de modélisation largement utilisé
(MIKE SHE- MIKE11) combine les données d'élévation de la surface et du canal.
86) Pour résumer la description détaillée disponible dans les manuels du logiciel,
MIKE SHE utilise différentes résolutions dans les données topographiques
pour la composante de l'écoulement en canal et la composante de
32
l'écoulement en surface. Dans le cas du modèle de Champ Proche du Silala, le
modèle MIKE SHE découpe et analyse les canaux en sections d’une dizaine
de centimètres et l'écoulement de surface est reporté sur une grille de 10 m x 10
m, ce qui est courant dans la modélisation numérique et est appelé
discrétisation22.
87) Les échanges entre l'eau du canal et l'eau de surface a lieu numériquement au
niveau des contours des cellules de la grille (Schéma 7-1). C'est-à-dire que,
bien que le canal soit situé au milieu de la cellule, l'échange d'eau se produit à
la limite de la cellule, une simplification qui est nécessaire dans tous les
modèles MIKE-SHE.
Schéma 7-1 Zoom avant de la méthode MIKE SHE de cartographie de la
topographie du bassin de captation du Silala et du réseau de canaux sur les
éléments de grille du modèle, les liens fluviaux alignant les cellules de la grille.
Le réseau de canaux est cartographié aux bords des cellules de la grille comme
des liens de canaux. La géométrie de ces liens est interpolée à partir du réseau
de canaux sur les liens de canaux.
88) Le Schéma 7-2 montre la relation entre la topographie utilisée dans la
composante écoulement de surface MIKE SHE et la topographie utilisée dans
la composante d’écoulement canalisé de MIKE SHE, MIKE 11. La
topographie utilisée dans MIKE SHE pour la grille bidimensionnelle
d'écoulement de surface (10 mx 10 m) est indiquée par les deux lignes noires
horizontales.
22 Dans la modélisation numérique, la discrétisation est le processus qui consiste à transposer des données
continues en éléments discrets (grille du modèle) afin de les rendre adaptées à une solution numérique par
ordinateur.
33
89) Les informations topographiques utilisées pour calculer le débit du canal sont
intégrées dans la section transversale (ligne bleue). A titre d'illustration, la
section transversale la plus proche du canal est représentée par les élévations
des deux cellules adjacentes à la liaison du canal qui est incluses dans les
calculs de transfert de flux. Dans le modèle numérique, la géométrie du canal
à chaque bord est interpolée à partir des sections transversales réelles.
90) L'échange de flux entre le canal et la surface dépend du niveau d'eau dans le
canal. Au fur et à mesure que le niveau d'eau dans le canal s'élève, l'eau se
déverse du canal dans la cellule de surface adjacente, lorsque le niveau d'eau
du canal dépasse le plus élevé des niveaux des berges du canal ou des cellules
de surface. Si, comme dans le cas illustré au Schéma 7-2, la topographie de la
surface est plus élevée que le niveau des berges du canal, l'eau s'écoulera
d'abord du canal vers la surface lorsque le niveau de l'eau atteindra la plus
basse des deux cellules situées de part et d'autre de la liaison du canal. Par
conséquent, le canal débordera sur la plus basse des deux banques de canaux
(la gauche ou la droite) - ce que les chiffres du Chili ne reflètent pas.
91) Les experts du Chili affirment que la topographie utilisée dans les scénarios
"Pas de canal" et "Pas de perturbation" est trop différente de celle utilisée dans
le scénario de base pour donner des résultats fiables et ont pris quatre
exemples pour illustrer ce propos. Cependant, les exemples révèlent certaines
incompréhensions quant au traitement de la topographie par le modèle. Les
différences sont beaucoup plus faibles que celles rapportées par le Chili. Il est
courant pour les modèles à différences finies, et ce n'est pas spécifique à la
configuration du modèle du Silala ou au logiciel de modélisation MIKE SHE,
de représenter les données topographiques d'entrée à une résolution spatiale
représentée par la taille de la cellule de grille (c'est-à-dire que la topographie
est moyennée pour chaque cellule de grille de 10 mx 10m).
92) L'élévation est une valeur moyenne sur la cellule de la grille, ce qui signifie
que les élévations de la topographie sont généralement plus élevées que les
élévations de la section transversale du canal dérivées du modèle numérique
d'élévation à plus fine échelle. Chile compare le niveau topographique à un
noeud de cellule de grille unique avec les élévations du canal. Cependant, le
modèle relie un segment de canal par des liens de canal le long du bord de
deux cellules de grille voisines. Ces deux cellules voisines (côté gauche et côté
droit) ont des niveaux topographiques différents. Cela signifie que les
différences d'élévation apparentes dessinées dans les schémas du Chili sont
exagérées et ne sont pas représentatives du fonctionnement du modèle.
34
Schéma 7-2 Schémas de coupes transversales comparant l'interprétation du
Chili à gauche et la représentation correcte à droite.
93) Le schéma 7-2 montre les différences entre la représentation par les experts
du Chili à gauche et la représentation correcte selon le logiciel de modulation
MIKE SHE à droite. Toute différence de topographie doit être mesurée en
partant du niveau inférieur des deux cellules, car c'est lui qui détermine
l'endroit où l'écoulement de surface se produit en premier lorsque l'eau
déborde de la plaine d'inondation depuis le canal, comme décrit ci-dessus.
L'examen d'une seule cellule est trompeur, et la colonne de droite du schéma
7-2 montre que, par rapport au point le plus bas, les différences sont beaucoup
plus faibles. De plus, si l'on considère l'ensemble du modèle, la différence
35
moyenne entre l'élévation de la topographie et l'élévation du lit du canal est
inférieure à 1 mètre.
Schéma 7-3 Profil longitudinal de la topographie le long de la voie d'écoulement
depuis la zone humide sud jusqu'à la frontière pour le scénario de base et le
scénario sans canal. Les niveaux topographiques font référence à l'élévation du
point le plus bas à des endroits spécifiques.
94) Le schéma 7-3 montre les différences de topographie par rapport à la pente
globale. Avec et sans ajustement des élévations des sections transversales des
canaux, des différences localisées modérées peuvent être observées,
principalement immédiatement en amont de la frontière où des modèles
topographiques plus fins et plus approximatifs se rejoignent. D'après les
mesures et les résultats du modèle, le débit du canal ne change pas de manière
significative entre la confluence du canal et la frontière avec le Chili, et les
différences topographiques ne modifient pas la pente générale du canal ni la
direction du débit.
95) Les experts du Chili ont signalé l’utilisation de noms de fichiers différents
pour les données d'entrée topographiques du modèle dans les scénarios de base
et sans canal. Nous les remercions d’avoir attiré notre attention sur ce point. Les
différences de topographie sont mineures et limitées à une petite zone près de la
frontière.
36
7.3.1 Les séries de modèles stationnaires atteignent l'équilibre
96) Les experts du Chili affirment qu'il y a une différence dans les niveaux
initiaux d'eau souterraine entre les scénarios et que les niveaux d'eau
souterraine n'ont pas complètement atteint l'équilibre à la fin de la simulation
de base. Le schéma 7-4 montre le développement du stockage des eaux
souterraines ainsi que le développement de l'écoulement de surface à la limite.
Il est clair qu'après 3 mois, les deux courbes sont indépendantes des conditions
initiales. Il est vrai que le stockage des eaux souterraines change encore
légèrement, de l’ordre d’environ 3 l/s après 3 mois. Plus important encore,
l'écoulement à la frontière est en équilibre. Toutefois, pour vérifier ces
résultats, la même simulation a été reconduite sur un an. Les résultats présentés
au schéma 7-4 montrent clairement que le débit de surface à la limite à la fin
de la simulation n'a pas changé par rapport au résultat après 3 mois et que la
variation du stockage souterrain est proche de zéro (0,6 l/s). Le
renouvellement du stockage après trois mois est déjà intégré dans les marges
d'erreur du tableau de résultats. Puisque l'écoulement de surface à la limite est
équilibré, les résultats sont toujours valides.
Schéma 7-4 Résultat de la même simulation que le modèle de base, mais
étendue à un an. Tracé de la variation du stockage souterrain et de la décharge
à la limite après 12 mois.
37
7.3.2 L’application des paramètres de rugosité du canal
97) La résistance à l'écoulement ou la rugosité effective du canal est généralement
représentée par un paramètre appelé coefficient de Manning (n). Les experts du
Chili affirment, en se référant à Muñoz et al. (2019B), que DHI a "utilisé des
valeurs irréalistes pour ce paramètre, allant bien au-delà des valeurs acceptées
par la doctrine pour les types de les canaux décrits ici". C’est inexact car il faut
tenir compte des effets supplémentaires de la rugosité à grande échelle, des
irrégularités du lit et des séquences de bassins et de piscines.
98) L'approche généralement utilisée pour estimer les valeurs n dans les cours
d'eau de montagne (Jarret, 1985) consiste à sélectionner une valeur de rugosité
de base pour un canal droit, uniforme et lisse dans les matériaux concernés.
Ensuite, après examen de divers facteurs, des valeurs de modification sont
ajoutées à la valeur n de base pour obtenir la valeur n du canal considéré
(Chow, 1959; Cowan, 1956). Ces valeurs additionnelles tiennent compte de
l'irrégularité de la section transversale, des variations du canal, de l'effet des
obstructions, de la densité de la végétation et du degré de méandre.
99) DHI convient que les modèles unidimensionnels tels que MIKE 11 sont des
outils utiles pour simuler le calcul d’un débit. Nous sommes également
d'accord, comme cela est reconnu par la doctrine(Jarret, 1984 ; Bathurst, 1985
; Aguirre-Pe et Fuentes, 1990), que l'application de tels modèles à des cours
d'eau analogues au Silala peut être difficile car "en plus de la rugosité du lit à
petite échelle, les effets de la rugosité à grande échelle, de l'irrégularité de la
géométrie du lit et des séquences de bassins et de mares doivent être pris en
compte à une échelle moyenne dans l'espace" (Meier et Reichert, 2005).
100) Selon Jarret (1985), une première estimation de la rugosité des canaux du
Silala serait de l'ordre de [0,071-0,12] et des conditions "extrêmement" dures
pourraient nécessiter des ajustements plus importants". Par conséquent, la valeur
de 0,2 utilisée dans le modèle du canal du Silala n'est en aucun cas irréaliste.
7.3.3 La précision des sections transversales des canaux
101) De façon générale, les sections transversales du modèle sont cohérentes
avec la topographie et les dimensions du canal mesurées. Toutefois, les experts
du Chili ont signalé certaines inexactitudes dans de petites parties du tronçon
allant du confluent à la frontière. Dans la section aval du modèle, un modèle
numérique de terrain a été utilisé, qui est plus approximatif que celui utilisé
pour le reste du Silala. A une distance plus courte (300 m) dans la partie
38
inférieure de la section de la gorge, le canal n'a pas été correctement localisé
mais a apparemment été légèrement déplacé (de quelques mètres de la ligne
centrale du canal). Par conséquent, l'eau dans le modèle suit la partie inférieure
de la gorge (où le canal physique est réellement situé) mais en utilisant une
zone d'écoulement de forme légèrement différente dans ce tronçon que le canal
dicterait. La correction de cet écart devrait réduire la résistance à l'écoulement
car la zone d'écoulement deviendrait plus rectangulaire. En principe, cela peut
réduire les niveaux d'eau du canal simulé et augmenter l'apport net d'eau
souterraine (légèrement), ce qui générerait un débit d'eau de surface plus
important dans le scénario de base, mais n'affecterait pas les deux autres
scénarios. De l'avis du DHI, cela tendrait à augmenter les impacts estimés de la
canalisation.
102) Un effet similaire est à prévoir si la section transversale la plus en aval du
modèle devait être légèrement réduite. Cet effet serait certainement plus
proche de la réalité, et pourrait également conduire à des niveaux d'eau
légèrement inférieurs à la frontière, niveaux d'eau que le Chili conteste.
7.4 Le modèle hydrogéologique du DHI est fiable
103) Dans cette section, nous nous attacherons à démontrer que les interprétations
hydrogéologiques et les modèles conceptuels du DHI sont basés sur un vaste
programme de caractérisation hydrogéologique et qu'à de nombreux égards, ils
sont cohérents avec les constats de l'étude hydrogéologique du Mémoire du Chili
(Arcadis, 2017) tels que : distribution verticale de l'aquifère d'ignimbrite au sud
des gorges ; le fait que le tectonisme et les failles sont susceptibles d'avoir
augmenté le degré de fracturation des ignimbrites le long de la gorge du Silala ;
le fait que l'aquifère d'ignimbrite a une perméabilité élevée ; et que l'écoulement
des eaux souterraines dans l'ignimbrite se fait principalement par les fractures.
Des modifications ont été apportées au modèle conceptuel élaboré par les experts
du Chili (W&P 4) sans qu'il ait été nécessaire d'effectuer des forages et des tests
géophysiques ou hydrogéologiques supplémentaires sur le site. Les changements
d’interprétations de leurs experts sur la stratigraphie entrent en conflit avec les
datations radiométriques boliviennes des unités rocheuses en question et la
suppression de la faille qui coïncide avec la gorge du Silala contredit les rapports
précédemment soumis par les experts du Chili (Arcadis, 2017).
104) La géologie de la région est en grande partie le résultat d'une activité
volcanique du Miocène supérieur qui a entraîné la mise en place de centres et de
dômes volcaniques dans la région. Des éruptions volcaniques explosives au cours
39
de cette période ont entraîné un dépôt d'ignimbrite étendu à l'échelle régionale,
appelé l'Ignimbrite du Silala.
105) Les failles, les fractures et les diaclases de l'ignimbrite de la région du Silala
exercent un fort contrôle sur le nombre de sources d’eau, leur distribution
spatiale et l'ampleur de leur débit dans les zones humides du Silala
(SERGEOMIN, 2017 ; DHI 2, 2019 - DB, Vol. 4, annexe 23.5).
Photographie 7-5 Exemple de fracturation dans une ignimbrite coïncidant avec une
crue printanière et qui représente une remontée des eaux souterraines à la surface.
106) Une étude structurelle détaillée des fractures et des failles, incluant une
cartographie spécifique du site réalisée par SERGEOMIN (2017 ; DHI 2, 2019
DB, Vol. 4, annexe 23.5) montre que les réseaux de fractures commandent la
majeure partie de l'écoulement des eaux souterraines dans l'ignimbrite. Les
densités de fractures les plus élevées ont été mesurées dans la zone des sources
du Silala, où l'on peut observer des fractures ouvertes dans l'ignimbrite qui
40
transmettent les eaux souterraines à la surface et qui coïncident avec
l'emplacement des sources (Photographie 7-5).
107) Les études hydrogéologiques du Champ Proche du Silala confirment
l'hypothèse selon laquelle la plupart des flux d'eaux souterraines se produisent
dans les fractures de l’ignimbrite et dans les zones érodées des fragments de roches
rubéfiées. Le débit soutenu et relativement constant des sources du Silala et les
examens sur site spécifiques des propriétés hydrauliques de l'ignimbrite montrent
que le système de fracture associé aux sources du Silala est interconnecté à de
grands volumes de roche sur de grandes étendues spatiales.
108) En général, les gradients d'eaux souterraines mesurés indiquent que les
eaux souterraines, qui ne sont pas déversées dans les bofedales ou les canaux
artificiels du Silala, s'écoulent vers l'ouest-sud-ouest en direction du Chili
(DHI 1, 2018 ; annexe F CMB, Vol. 4, annexe 17). La cartographie des
fractures et les résultats des tests hydrauliques (DHI 1, 2018 annexe F,
Schéma 40; CMB, Vol. 4, annexe 17) suggèrent que cet écoulement se produit
préférentiellement près de la gorge du Silala, où la perméabilité de la roche est
la plus grande et où il a été démontré que l'aquifère perméable d'ignimbrite
s'étend jusqu'à au moins 117 m sous la surface du sol (ce qui signifie que la
limite inférieure de l'ignimbrite s'étend beaucoup plus profondément dans
cette zone). Les mesures indiquent que le système d'eaux souterraines se
déverse dans les eaux de surface le long des tronçons nord et sud des canaux
au-dessus de leur confluence, et que les eaux de surface perdent une quantité
modeste d'eau dans le système d'eaux souterraines du sud-ouest de la
confluence à la frontière chilienne (DHI 1 ; 2018 ; annexe F, Schéma 42 et
tableau 15 ; CMB, vol. 4, annexe 17). Les variations mesurées du niveau des
eaux souterraines, combinées à la perméabilité élevée et à l'étendue spatiale et
verticale de l'aquifère d'ignimbrite, suggèrent qu'il existe un important flux
transfrontalier d'eaux souterraines vers le Chili (DHI 1, 2018 annexe F CMB,
Vol. 4, annexe 17).
109) Les mesures de l'écoulement des eaux de surface (DHI 1, 2018; annexe C
CMB, Vol. 2, annexe 17) et les rapports de mélange hydro-chimique suggèrent
que la majorité (60-70%) des eaux souterraines qui se déversent dans la source
et le canal du Silala proviennent d'eaux souterraines dont la provenance
régionale est plus profonde. Les 30 à 40 % restants proviendraient eux de
d'écoulements plus localisés, plus rapprochés du Champ Proche du Silala. La
déclaration "a clairement démontré qu'il y a vraisemblablement deux sources
primaires et distinctes qui se déversent d'eaux souterraines dans les sources
du Silala". Le rapport hydrogéologique du DHI (DHI 1, 2018; annexe F; CMB,
41
Vol. 4, annexe 17) a été mal interprétée dans W&P 5 (2019) comme signifiant
deux aquifères distincts, ce qui n'est pas exact. Dans les deux cas, l'écoulement
des eaux souterraines se fait dans l'aquifère d'ignimbrite qui comprend des
voies d'écoulement localisées et régionales avec un certain degré de mélange
entre les deux régimes d'écoulement.
7.4.1 Existence et fonction de la faille du Silala dans le processus
hydrogéologique et les interactions entre eaux souterraines et eaux de
surface
110) De nombreux éléments de preuve ont été fournis à la Cour pour étayer
l'existence d'une faille coïncidant approximativement avec les gorges du
Silala, appelée Zone de faille du Silala (DHI 1, 2018 ; annexe F - CMB, vol.
4, annexe 17 ; SERGEOMIN, 2017 ; DHI 2, 2019, DB, vol. 4, annexe 23.5).
La faille a été cartographiée comme une extension du système de failles Uyuni-
Khenayani (UKFS) en Bolivie par de nombreux chercheurs (Sempere et al.,
1988 ; Martínez et al., 1994 ; Elger et al., 2005).
111) Cependant, l'existence de cette faille est aujourd'hui remise en question,
comme le montrent les extraits suivants des plaidoiries du Chili (Chili, 2019)
du Silala:
a) "Selon les experts du Chili, son existence est "si improbable que nous la
croyons impossible"" (W&P 4, p. 45).
b) Le Chili affirme également que le système de failles Uyuni-Khenayani,
auquel est associée la faille du Silala, ne peut pas être responsable de la
fracturation ou de la formation de failles dans les ignimbrites de la zone
du Silala parce que le "système de failles principal est situé à 31 km à
l'ENE de la rivière Silala" et n'a pas été actif depuis 10 Ma23 et ne peut
donc pas être responsable de la "zone de haute perméabilité qui traverse
les Bofedales Norte (Cajones), les Bofedales Sur (Orientales) et la
gorge de la rivière Silala" (W&P).P 5, p.135).
112) Ces déclarations remettent en question le rôle de la faille du Silala dans
l'augmentation du degré de fracturation et de perméabilité de l'aquifère
d'ignimbrite. Les experts du Chili, cependant, documentent l'existence d'une
23 Ma : Il y a des millions d'années.
42
faille de chevauchement coïncidant avec la gorge du Silala et soulignent en
outre qu'elle était active après le dépôt d'ignimbrites :
"La géologie du bassin de captation de la rivière Silala est dominée par
une série d'épisodes volcaniques entrecoupés de périodes d'activité
sédimentaire pendant une période de tectonique active au cours des 6
derniers Ma environ" (Arcadis, 2017, p. 12; annexe 2, Vol. 4, MC, 2017) ;
"Par la suite, à la fin du Pliocène et au début du Pléistocène (environ 2,6
Ma - 1,5 Ma), le bassin de captation de la rivière Silala a été soumis à une
faille de compression locale qui a exposé et fait basculer les dépôts
d'ignimbrite de Cabana" (Arcadis, 2017, p. 12, annexe 2, Vol. 4, MC,
2017); et "La qualité de la roche de l'UH3 le long de la gorge du Silala est
très hétérogène, avec des zones de fracture/faille et des zones fortement
altérées, où la roche est très friable et perméable." (Arcadis, 2017, p. 6 ;
annexe 2, Vol. 4, MC, 2017).
113) De nombreuses autres références à des failles le long des ravines et gorges
de faille intersectées dans des échantillons de carottes de forage sont également
faites tout au long du Mémoire de Chili (Arcadis, 2017, annexe 2, Vol.4, MC,
2017), y compris dans la présentation de la faille dans des diagrammes de
l'évolution géologique et de la stratigraphie de la zone (Schéma 7-6).
Cependant, la faille coïncidant avec la gorge du Silala (représentée en noir sur
la Schéma 7-6) a été supprimée de la coupe transversale révisée du Chili
(Schéma 7-7) sans discussion, explication ni nouvelle preuve géologique ou
étude hydrogéologique.
114) Les experts du Chili concluent désormais que l'existence de la faille est "si
improbable que nous la considérons comme impossible". Ceci malgré les
preuves techniques, notamment la cartographie des failles par SERGEOMIN
(2017; DHI 2, 2019, DB, Vol. 4, annexe 23.5), les densités de fractures
mesurées plus élevées le long des lignes de failles cartographiées
(SERGEOMIN, 2017 ; DHI 2, 2019, DB, Vol. 4, annexe 23.5), des mesures
de tendance du réseau de fractures principal indiquant une cohérence avec la
tendance régionale du système de failles Uyuni-Khenayani (SERGEOMIN,
2017; DHI 2, 2019; DB, vol. 4, annexe 23.5) et des pompages à haute
conductivité hydraulique (DHI 1, 2018 ; annexe F, p. 81 ; CMB, vol. 4, annexe
17) le long de la gorge (y compris des opérations réalisées au Chili), qui
confirment plutôt qu'ils ne réfutent l'existence d'une zone de faille dans cette
région. Le Chili considère également que le déplacement relativement faible
de l'ignimbrite à la limite serait une preuve de l’absence de formation de failles
(W&P 4, 2019 ; p. 52). Cependant, le déplacement de la direction des failles
43
varie souvent, et les ignimbrites sont connues pour dissimuler les failles en
absorbant la déformation de chaque fracture de manière incrémentielle sur une
large zone (Wohletz, 2006).
Schéma 7-6 Conceptualisation par SERNAGEOMIN de la gorge du Silala montrant
une faille de chevauchement coïncidant avec la gorge (schéma inclus dans le
Mémoire du Chili) et un aquifère d'ignimbrite s'étendant latéralement.
44
Schéma 7-7 Conceptualisation actualisée du Chili de la gorge du Silala - on
notera l'absence de faille et les changements dans l'étendue de l'aquifère
d'ignimbrite (W&P 4, 2019.)
115) Peut-être plus important encore, les allégations chiliennes dénaturent le
niveau d'importance attribué à la zone de faille du Silala d'un point de vue
hydrogéologique. Les propriétés hydrogéologiques et les gradients
hydrauliques mesurés du Champ Proche du Silala et le long des transepts de
faille cartographiés sont définis et ne sont pas contestés. Ce sont ces propriétés
qui contrôlent en définitive l'écoulement des eaux souterraines et les
interactions entre les eaux souterraines et les eaux de surface. Les valeurs de
conductivité hydraulique présentées sont cohérentes avec les tests de pompage
effectués dans et près de la gorge du Silala, tant en Bolivie qu'au Chili. Elles
démontrent que l'aquifère ignimbrite fracturé est hautement perméable, avec
des résultats de tests de conductivité hydraulique compris entre 2,8 et 17 m/d
au Chili (Arcadis, 2017) et entre 13,8 m/d et 138,2 m/d en Bolivie (DHI 1,
2018, annexe F ; CMB, Vol. 4, annexe 17). Les causes du degré plus élevé de
fracturation et de perméabilité de l'aquifère ignimbrite dans la zone de la gorge
du Silala sont sans incidence.
116) Nous sommes d'accord avec les experts du Chili pour dire qu'une grande
partie de la fracturation associée aux ignimbrites est liée au refroidissement.
Ce qui est le postulat du DHI 1 2018 (annexe F, p.81 CMB, Vol. 4, annexe 17)
est que la tectonique a probablement affecté la densité des fractures et donc
les propriétés hydrauliques (c'est-à-dire la conductivité hydraulique, le
rendement spécifique, le stockage spécifique) qui coïncident
approximativement avec les failles et les ravines cartographiées. Cependant, la
présence d'un degré plus élevé de fracturation et par extension de perméabilité
près des transepts de faille cartographiés qui coïncident avec les gorges ne
supposent pas de mouvement tectonique postérieur au dépôt d'ignimbrite.
45
7.4.2 Ages géologiques des unités stratigraphiques et étendue latérale des
ignimbrites dans le modèle conceptuel hydrogéologique chilien révisé
117) Les datations radiométriques sont contradictoires de la roche ignimbrite qui
forme les aquifères dominants de la région du Silala (voir le résumé détaillé dans
W&P 4, 2019 ; tableau 1). La datation des ignimbrites par rapport aux [roches]
volcaniques du Miocène est importante car cela fournit des informations sur
l'étendue spatiale et verticale potentielle de l'aquifère d'ignimbrite, qui est un
facteur majeur pour déterminer le modèle d'écoulement des eaux souterraines, le
débit des sources et les flux transfrontaliers vers le Chili.
118) La datation permet de déterminer si les ignimbrites se sont déposées avant ou
après les roches volcaniques environnantes, telles que celles associées aux
volcans Inacaliri et Silala Chico. Les répercussions sur l'interprétation
stratigraphique sont importantes. Cela peut être illustré à l'aide de l'exemple des
interprétations de subsurface sous Silala Chico, où le Chili a proposé un modèle
conceptuel en 2017 (Arcadis, 2017 ; annexe II, Vol. 4) et a révisé l'interprétation
en 2019 (W&P 4, 2019), comme démontré par les Schémas 7-6 et 7-7. Comme le
montre le Schéma 7-6, si l'ignimbrite est antérieure aux [roches] volcaniques du
Miocène, on peut s'attendre à ce que l'ignimbrite soit présente sur une zone et des
profondeurs beaucoup plus importantes. Si les [roches] volcaniques du Miocène
sont antérieurs aux dépôts d'ignimbrite, l'ignimbrite peut être beaucoup moins
expansive latéralement et verticalement.
119) Conceptuellement, les deux modèles alternatifs sont plausibles selon l'âge
de la roche et la séquence stratigraphique correspondante qui sont acceptés
comme corrects. Les experts du Chili écartent les échantillons boliviens et se
basent sur les échantillons collectés au Chili pour leur interprétation de la
séquence stratigraphique en Bolivie. Selon le DHI il est fondamental de
prendre en considération les échantillons collectés sur le terrain en Bolivie
pour l'interprétation de la stratigraphie en Bolivie. Il convient de s’appuyer sur
ces âges dans l'interprétation conceptuelle.
120) Cependant, la géométrie tridimensionnelle de l'aquifère ignimbrite au Chili
et en Bolivie ne peut être établie que par un programme de tests géophysiques
et de sondages. Elle restera incertaine tant qu'un tel programme n'aura pas été
mis en oeuvre. Toutefois, des études collaboratives sur la datation des
ignimbrites pourraient conduire à une interprétation unifiée de la stratigraphie
et du modèle conceptuel.
46
121) Les principales implications de ces deux modèles conceptuels concurrents sont
des taux d'écoulement transfrontalier des eaux souterraines potentiellement
différents au Chili et des schémas d'écoulement des eaux souterraines locales
différents selon que l'aquifère d'ignimbrite est plus ou moins étendu dans l’espace
et verticalement (DHI 1, 2018 ; annexe F, pp. 1-99 CMB, Vol. 4, annexe 17 ;
Arcadis, 2017, annexe II, Vol. 4) (Schéma 7-7). Il n'existe pas de données sur la
lithologie du sous-sol ni de mesures du niveau des eaux souterraines dans la
zone du Silala Chico, ce qui implique que ces interprétations sont par nature
incertaines.
122) Les incertitudes quant aux conditions hydrogéologiques identifiées par W&P
4, 2019, situées au-delà des zones caractérisées par les forages et les piézomètres,
justifient l'approche consistant à restreindre le modèle de Champ Proche aux
régions où la géométrie de l'aquifère et les propriétés hydrauliques ont été
caractérisées.
Photographie 7-8 Fracture dans les parois d'ignimbrite de la gorge du Silala - on
notera la fracture verticale qui traverse la section et qui comprend différents
degrés de soudure et de variations lithologiques.
123) Les experts du Chili affirment que des aquifères perchés ont été observés
au Chili (W&P 4, 2019 ; Arcadis, 2017 ; SERNAGEOMIN, 2019 ; Herrera et
Aravena, 2017) et que ceux-ci existent également en Bolivie et auraient donc
dû être inclus dans le modèle numérique en raison des différentes distributions
des niveaux piézométriques.
47
124) La présence d'un aquifère perché au Chili n'est ni admise ni réfutée, bien
qu'il soit tout à fait possible qu'un tel système existe. Cependant, en Bolivie,
aucun aquifère perché n'a été observé ou documenté au cours du vaste
programme de caractérisation hydrogéologique impliquant plus de 30 puits.
Les données de pompage indiquent que la conductivité hydraulique verticale
peut être légèrement inférieure à la conductivité hydraulique horizontale en
raison de la stratification lithologique dans l'ignimbrite. Par conséquent, le
modèle numérique incorpore également une conductivité hydraulique
verticale qui est inférieure à la valeur horizontale. Comme c'est le cas pour de
nombreuses ignimbrites, il existe une fracturation verticale étendue est
évidente dans toute la gorge du Silala (Photographie 7-8). Les fractures
verticales créent des conduits pour l'écoulement vertical entre les diverses
lithologies d'ignimbrite ou couches stratigraphiques, ce qui réduit le potentiel
d'eau souterraine perchée étendue. Dans les bofedales sud et nord, des
gradients verticaux ascendants ont généralement été mesurés dans l'aquifère
d'ignimbrite (DHI 1, 2018 ; annexe F, p. 91, tableau 15 CMB, vol. 4, annexe
17), ce qui prouve que les eaux souterraines plus profondes s'écoulent vers le
haut et se déversent finalement dans les eaux de surface et les sources.
125) L'argument en faveur d'un aquifère perché en Bolivie masque le fait que
les deux parties ont estimé qu’il existerait un régime d'écoulement localisé
avec une source de recharge plus proche en raison d’une chimie de l'eau
différente. En Bolivie, ce régime d'écoulement localisé a été identifié dans les
parties saturées de l'aquifère ignimbrite peu profonde. Contrairement à ce que
prétendent les experts du Chili, la formulation des contours du modèle de
Champ Proche du nord des zones humides n’a eu aucune conséquence dans la
formulation des contours par l'eau perchée au contact alluvial-ignimbrite,
comme le démontrent les puits DS-25 et DS-27-II (DHI 1, 2018 ; annexe F
CMB, vol. 4, annexe 17). Ces puits d’observation sont forés dans l'aquifère
d'ignimbrite saturé, et les élévations d'eau souterraine de ces puits permettent
de déterminer les niveaux d'eau souterraine dans la zone située au nord des
zones humides du nord, qui ont servi à la configuration du modèle de Champ
Proche.
48
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52
Au nom du DHI A/S
Date: 10 janvier 2022
Roar A. Jensen,
hydrologue et
chef d'équipe
Torsten V. Jacobsen,
hydrologue
Michael M. Gabora,
hydrogéologue
Exposé écrit des experts de la Bolivie