Observations écrites de l'Allemagne sur la déclaration écrite de la République hellénique

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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

AFFAIRE RELATIVE AUX IMMUNITÉS JURIDICTIONNELLE DE L’ÉTAT

(ALLEMAGNE c. ITALIE ; GRÈCE (INTERVENANT))

OBSERVATIONS ÉCRITES DE L’ALLEMAGNE SUR LA DÉCLARATION ÉCRITE

DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE DU 3 AOÛT 2011

26 août 2011

[TRADUCTION DG REFF] Sommaire

I. Observations générales (Section 1)

II. Immunités (Sections 2-4)

III. Existe t il en droit international humanitaire un droit individuel à réparation ? (Sections 5-16)

IV. Conclusion (Section 17) I. OBSERVATIONS GÉNÉRALES

1. L’Allemagne a pris note de la déclaration écrite que la Grèce a présentée le 3août2011
conformément à l’ordonnance du 4juillet2011 par la quelle la Cour l’avait autorisée à intervenir

dans l’instance. Elle considère que la Grèce n’a pas été en mesure de produire le moindre élément
nouveau pertinent pour le différend entre l’Allemagne et l’Italie soumis à la Cour, pas davantage
qu’elle n’a apporté un éclairage nouveau sur la ques tion de l’immunité, ni soumis d’éléments de
preuve qui permettraient d’établir que le dro it international coutumie r garantit aux personnes

victimes de violations du droit international humanitaire un droit individuel à réparation. En
revanche, l’Allemagne se félicite que la Cour ait ainsi désormais en sa possession toutes les
informations voulues relatives à l’affaire Distomo (déclaration écrite de la Grèce, par.8-13

et 20-30). L’Allemagne ne conteste pas les faits tels que présentés par la Grèce.

II. MMUNITÉS

2. En ce qui concerne la question de l’immunité, qui est au cŒur du différend, la Grèce a peu
à ajouter. Elle reconnaît, certes, qu’il n’existe pour l’instant aucune règle qui limiterait la portée de
l’immunité juridictionnelle des Etats lorsque sont en cause de graves violations du droit

international des droits de l’homme ou du droi t international humanitaire, mais évoque une
évolution qui serait en cours («mutation») (par.31) et une «rénovation de l’architecture juridique
globale» (par. 33), sans toutefois avancer la moindr e preuve que cette transformation soit parvenue

à son terme. Dans ses écritures, la pratique intern ationale fait remarquablement défaut. Il est vrai
que nombre de traités intern ationaux relatifs à la protection des droits de l’homme ⎯ tous très
nettement postérieurs aux faits ici en cause ⎯ prévoient pour les victimes un mécanisme de

recours, mais ces recours doivent invariablement être soumis aux organes internationaux chargés
de l’application de ces instruments, et l’on ne trouve, dans la pratique récente, nulle trace d’un droit
qu’auraient les personnes privées de poursuivre un Etat étranger devant la justice de leur propre

pays lorsque le comportement incriminé consiste en acta jure imperii, autrement dit en actes
souverains de cet Etat.

3. L’article40 des Arti1les de la CDI sur la responsabilité de l’Etat pour faits
internationalement illicites ne vient en rien étayer la thèse de la Grèce. L’article40 tendrait à
indiquer que l’immunité souverain e ne joue plus dès lors qu’il y a violation de normes de
jus cogens (par.59); or, cette conclusion ne peut nullement être inférée du libellé de cette

disposition. La CDI s’est délibérément mont rée très prudente dans sa façon d’exposer les
conséquences de la violation d’une règle de jus cogens. L’on comprend immédiatement, à la
lecture du texte, qu’elle s’est abstenue d’attacher aux violations de normes impératives du droit

international général la moindre conséquence d’ordre procédural. Même lorsqu’une telle violation
est alléguée, les règles procédurales normales trou vent à s’appliquer. L’Etat auquel est imputée
une grave violation n’est privé d’aucun de ses dr oits souverains, mais se trouve sur un pied

d’égalité avec les autres membres de la communauté des nations vis-à-vis de toute procédure qui
pourrait être engagée en vue d’examiner le comportement qui lui est reproché.

4. Lorsqu’elle renvoie (par.46) 2 l’arrêt rendu par le Tribunal pé nal international pour
l’ex-Yougoslavie en l’affaire Tadić , la Grèce commet la même erreur que la cour de cassation
(Corte di Cassazione) italienne en l’affaire Ferrini : elle méconnaît le fait que l’immunité de l’Etat
doit être soigneusement distinguée de l’immunité de la personne. De nos jours, la communauté

internationale tend dans sa grande majorité à accepter, voire à exiger, que les auteurs de graves

1
Dont l’Assemblée générale a pris note dans sa résolution 56/83 du 12 décembre 2001.
2
Du 2 octobre 1995, ILM 35 (1996), p. 32. - 2 -

crimes du droit des gens soient traduits devant des juridictions pénales, et l’Allemagne figure

d’ailleurs parmi les Etats ayant Œuvré en faveur de l’élaboration et de la conclusion du Statut de
Rome de la Cour pénale internationale. Toutefois, si la justice veut que toute personne inculpée de
crimes de cette nature soit jugée, réfléchir, à l’issue d’un conflit armé, au meilleur moyen de

réparer les torts causés relève de toute autre chose. Il est cependant inutile de s’attarder sur cet
aspect du différend, nombre d’observations ayant déjà été présentées à la Cour à cet égard.

Si les individus auteurs de graves crimes du droit des gens peuvent incontestablement être

traduits devant des juridictions internationales ou, dans certaines limites, devant un juge national en
application du principe de la compétence universelle , l’on ne saurait en déduire que des personnes
privées sont en droit de former devant la justice de leur propre pays des demandes de réparation

contre un Etat auteur de faits illicites.

III. E XISTE -T-IL EN DROIT INTERNATIONAL HUMANITAIRE

UN DROIT INDIVIDUEL À RÉPARATION ?

5. La Grèce s’efforce de démontrer que toute personne privée victime de violations graves du

droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire possède un droit
individuel à réparation (par. 34), mais ne fournit aucun élément de preuve convaincant à l’appui de
cette thèse. De fait, c’est bien malgré elle, sans doute, qu’elle e xpose au paragraphe 35 la véritable

situation juridique, à savoir qu’il n’existe aucun droit de cette nature.

6. L’Allemagne reconnaît que certains aute urs ont cru pouvoir déduire des travaux

préparatoires de la quatrième convention de La Haye de1907 que l’article3 de cette convention4
était destiné à établir un droit individuel à réparation (voir la note de bas de page24) . Or,
l’article3 (qui se lit comme suit: «La Partie belligérante qui violerait les dispositions dudit

Règlement sera tenue à indemnité, s'il y a lieu. Elle sera responsable de tous actes commis par les
personnes faisant partie de sa force armée.») ne précise pas à qui est due la réparation.

Par ailleurs, l’affirmation selon laquelle les Et ats parties présents à LaHaye entendaient

garantir des droits individuels se concilie mal avec le contexte historique.

Avant la première guerre mondiale, en effet, le droit international était, de manière générale,

conçu comme un régime de droits et de devoirs excl usivement applicable entre les Etats. Il aurait
été pour le moins singulier, dans ce cadre de pensée, d’accorder aux victimes du droit international
humanitaire des droits individuels. Du reste, la pratique ultérieure n’est jamais venue confirmer
une vision si révolutionnaire de l’ordre juridique in ternational. A l’issue de la première guerre

mondiale, le règlement opéré par le traité de Versailles était un arrangement entre Etats ⎯ les
puissances victorieuses, d’une part, et l’Allemagne, de l’autre. Le traité ne prévoyait pas de droits

individuels à réparation à raison de viol ations du droit international humanitaire ⎯ réparation qui
aurait, bien sûr, dû être accordée aux victimes des deux camps.

7. En outre, l’analyse des travaux de la conférence de la paix de 1907 dressée par Kalshoven
est loin d’être convaincante ⎯ si elle n’est pas tout bonnement erronée ⎯, ainsi que le montreront
les observations ci-après.

3Voir Mandat d’arrêt du 11 avril2000 (République démo cratique du Congo . elgique), arrêt,

C.I.J. Recueil 2002, p. 3, par. 24.
4Voir, notamment, FritzKalshoven, «State Respons ibility for Warlike Acts of the Armed ForceICLQ 40
(1991), p.827, p.830-832; repris dans: «Some Comment s on the International Re sponsibility of States», in Wolff
Heintschel vonHeinegg et VolkerEpping (sous la dir. de), International Humanitarian Law Facing New Challenges
(Berlin et al.: Springer, 2007), p. 207, p. 212. - 3 -

8. Lors de la conférence, le Gouvernement allemand présenta des amend5ments dans le cadre
de l’une des commissions créées dans le cadre de celle-ci . L’un d’eux mentionnait
l’indemnisation de «personnes». Le texte prop osé se limitait toutefois aux «personnes neutres»,

autrement dit aux ressortissants de pays neutres, lesquels constituent une exception en temps de
guerre. L’autre proposition prévoyait en des termes très généraux que, en cas de préjudice à la
partie adverse, «la question de l’indemnisation sera[it] reglée lo rs de la conclusion de la paix».

Autrement dit, il ne fut nullement avancé que les victimes de guerre devaient, de manière générale,
être indemnisées à titre individuel; bien au cont raire, l’Allemagne partait du principe qu’il
convenait de s’en tenir au mode traditionnel de réparation des dommages de guerre causés à la

«partie adverse», qui passait par la conclusion de traités interétatiques. Dans la suite de la
discussion, la possibilité d’établir une distinction entre personnes neutres et ressortissants de la
partie adverse divisa les intervenants. Il est vrai que ceux-ci faisaient pour l’essentiel référence aux

personnes lésées. Mais le délégué britannique, lord Reay, déclara également que le
dédommagement de ressortissants de la partie a dverse «dépend[ait] des conditions qui ser[aient]
insérées dans le traité de paix et qui ser[aient] le résultat de négociati ons entre les belligérants» . 6

Au final, les deux textes furent réunis et remani és, et le texte définitif ne mentionne pas le
bénéficiaire de l’éventuelle demande de réparati ons. Une lecture objective des documents cités ne
révèle rien qui tendrait concrètement à indiquer que , à l’issue de leurs délibérations, les rédacteurs

aient entendu mettre en avant des droits indivi duels. Ces documents semblent au contraire
conforter la conclusion selon laquelle ils renoncèrent à insérer une clause spéciale en faveur des
ressortissants de pays neutres . 7

9. Il est vrai, ainsi que l’a relevé la Grèce da ns sa déclaration (par. 38), que, dans le cadre de

la codification des règles coutumières du droit inte rnational humanitaire qu’il réalisée, le Comité
international de la Croix-Rouge a indiqué que «[l]a tendance [était] de plus en plus à autoriser les
personnes victimes de violations du droit in ternational humanitaire à demander directement
8
réparation à l’Etat responsable» . La circonspection dont ont fait preuve les auteurs de l’étude en
formulant cette phrase n’en est pas moins émine mment significative. Une «tendance» n’est pas
une règle. De plus, il va de soi que les données synthétisées par le CICR correspondent à des

évolutions récentes et sont sans pertinence aucune à l’égard d’événements survenus voici plus de
soixante ans.

10. Cette critique vaut également en ce qui c oncerne la référence faite au paragraphe2 de
l’article33 des articles de la CDI sur la res ponsabilité de l’Etat pour faits internationalement
illicites. La CDI a simplement complété le te xte de son article en ajoutant une clause de

sauvegarde. Elle ne s’est pas prononcée sur la que stion de savoir si, et dans quelle mesure, les
personnes privées jouissent de droits individuels lors qu’un Etat viole les obligations qui sont les
siennes en vertu du droit international. Là encore, l’élément déterminant réside en ceci que, dans le

cadre du droit international «class ique» tel qu’il existait au cours de la Seconde guerre mondiale,
les demandes individuelles de réparation en vertu du droit international général étaient en pratique
inconnues. Dans cet esprit, la CDI a circonscrit sa codification du droit relatif à la responsabilité

étatique aux relations entre Etats en tant que sujets traditionnels du droit des gens.

5
Deuxième Conférence Internationale de la paix, La Haye 15 Juin-18 Octobre 1907, Actes et Documents,
TomeIII, LaHaye 1907, p.247, annexe1. Voir, pour la version anglaise, The Proceedings of TheHague Peace
Conferences, The Conference of 1907. Acts and Documents (Vol.III, NewYork: Oxford University Press, 1921),
p. 139 ; annexe 2.
6
Ibid., p. 147.
7 Voir aussi l’analyse minutieuse des travaux préparatoires réalisée par le tribunstrict de Tokyo dans sa
décision du 7 décembre 1963, 32 ILR 627.

8 Jean-Marie Henckaerts et Louise Doswald-Beck (sous la dir. de), Droit international humanitaire coutumier,
vol. I : règles, CICR, Bruylant, Bruxelles, 2006, p. 713. - 4 -

11. Au paragraphe 41, la Grèce mentionne une décision de la Cour constitutionnelle fédérale

allemande en date du28juin2004. Elle rec onnaît ouvertement que cette décision ne vient pas à
l’appui de la thèse selon laquelle des violations du droit international humanitaire généreraient des
droits individuels. Le passage pertinent mérite cependant d’être cité :

«L’article 3 de la convention de La Ha ye de 1907 n’institue pas, en principe, de

droit individuel à la réparation, mais codi fie seulement le principe général de droit
international d’une responsabilité entre les parties contractantes. Or, une telle
demande de réparation secondair e n’existe que dans le rapport de droit international

entre les Etats concernés. La demande de réparation diffère à cet égard du droit
substantiel de l’intéressé au respect des inte rdictions prévues par le droit international
humanitaire applicable entre l’Etat occupant un territoire et la population vivant sur
9
celui-ci.» [Traduction du Greffe]

La Cour constitutionnelle fédérale allemande est donc attentive à faire la distinction entre

règles primaires et règles secondaires. Des particuliers peuvent être détenteurs de droits en vertu de
règles primaires, sans pour autant acquérir automatiquement des droits en vertu des règles
secondaires régissant les conséquences d’un manquement aux règles primaires.

12. La Grèce a également invoqué (en note de bas de page35) un récent arrêt de la Cour
d’appel de La Haye, en date du 5juillet2011 (dont elle n’a fourni ni le texte ni, a fortiori, une

traduction dans l’une des langues officielles de la Cour). L’Allemagne en a néanmoins pris
connaissance dans sa version néerlandaise. Ce faisant, il lui est apparu que l’arrêt ne dit pas ce que
la Grèce, dans sa déclaration, voudrait lui faire dire. A l’évidence, dans une instance relative aux

manquements imputés au «Dutchbat» (contingent militaire néerlandais) déployé à Srebrenica
en1995, la Cour d’appel de La Haye n’avait pas à se pencher sur les questions d’immunité. Les
fondements juridiques d’une demande de réparation devaient néanmoins être abordés; or, aux

paragraphes 6.3 et 6.20, la cour indique qu’elle considère cette demande comme fondée sur le droit
de la Bosnie en matière d’obligations ⎯ et non sur le droit international humanitaire.

13. L’Allemagne appelle également l’atten tion sur une décision récemment rendue par la
Cour européenne des droits de l’homme en l’affaire Sfountouris et autres . Le premier requérant
était l’une des victimes du massacre de Distomo, ayant perdu ses parents alors qu’il était enfant.

La cour de Strasbourg a pris note, sans soulever la moindre objection, de l’avis des tribunaux
allemands saisis contestant «l’existence d’un dr oit individuel des requérants à être indemnisés
fondé directement sur le droit international public, en particulier sur l’article 3 de la Convention de

LaHaye et de l’article23 lit.g) du règlement anne xe». Elle a, en conséquence, conclu que les
demandeurs n’étaient pas fondés à «prétendre qu ’ils avaient une espérance légitime de pouvoir
bénéficier d’une indemnisation pour le préjudice subi» et déclaré la requête irrecevable.

14. Au paragraphe 56, la Grèce soutient que l’a pplication de la règle de l’immunité ainsi que

le déni du droit individuel à réparation aboutirai ent, en dernière analyse, à «l’irresponsabilité des
Etats ayant commis des atrocités». Cette affirmation ne laisse pas de surprendre, puisqu’elle

9 «Art.3 des Haager Abkommens von 1907 be gründet grundsätzlich keinen individuellen
Entschädigungsanspruch, sondern positiviert nur deallgemeinen völkerrechtlichen Grundsatz...einer
Haftungsverpflichtung zwischen den Vertra gsparteien. Dieser sekundärrechtliche
Schadensersatzanspruch besteht je doch nur in dem Völkerrechtsverhäl tnis zwischen den betroffenen
Staaten. Der Schadensersatzanspru ch unterscheidet sich insoweit von dem primärrechtlichen Anspruch
der betroffenen Personen auf Einhaltung der Verbote des humanitäre n Völkerrechts, der in dem

Völkerrechtsverhältnis zwischen dem ein Territorium be setzenden Staat und der in diesem Gebiet
lebenden Bevölkerung besteht.» Europäische Grundrechte Zeitschrift 31 (2004), p. 439, p. 441.
10Requête n 24120/6, 31 mai 2011. - 5 -

méconnaît le fait que tout l’édifice du droit intern ational repose sur une claire distinction entre,
d’une part, le droit matériel, qui établit des règl es de conduite et, d’autre part, les procédures visant
à l’application de ces règles. En droit internati onal, l’accès à un juge est plus limité qu’en droit

national Mais il existe bien d’autres procédures, en particulier diplomatiques, qui peuvent se
révéler aussi efficaces que les procédures judiciaire s. Il est donc faux de penser que l’absence de
remède judiciaire remettrait en cause l’importance des règles substantielles de droit international au

point d’abolir toute responsabilité. Rappelons que les articles de la CDI, en particulier, ne
comprennent pas de partie consacrée aux aspects procéduraux. Il a été jugé suffisant de déterminer
la teneur des règles secondaires pertinentes en ma tière de responsabilité des Etats sans tenter, en

parallèle, de les compléter par des dispositions relatives aux mécanismes et procédures d’exécution.

15. L’Allemagne note que la Grèce hésite plutôt à reconnaître que, dans l’affaire Margellos,

l’instance suprême grecque établie en vertu de l’article100 de sa cons titution a infirmé l’arrêt
rendu par l’Areios Pagos dans l’affaire Distomo, indiquant que la règle traditionnelle de l’immunité
demeurait en vigueur (par.57-59). La Grèce ne saurait toutefois contester que sa plus haute

instance judiciaire, expressément chargée du «règlement des contestations sur le caractère de règles
de droit international comme généralement reconnues» (article 100 1) f)), a choisi de s’en tenir à la
règle traditionnelle, dont la raison d’être n’est en rien affectée. D’apr ès les informations dont

dispose l’Allemagne, les arrêts de cette juridiction suprême en matière d’existence et de portée des
règles générales de droit international sont applicables erga omnes, notamment par l’ensemble des
11
institutions gouvernementales .

16. Puisque la Grèce donne à entendre que le dr oit international est en perpétuelle évolution

et que la situation juridique a pu changer depuis l’ arrêt rendu par la cour spéciale établie en vertu
de l’article100 de sa constitution, l’Allemagne prés entera troisdécisions de justice récentes, qui
émanent de différentes parties du monde et qui, toutes, confirment sans la moindre ambiguïté la

règle traditionnelle de l’immunité. Dans les trois cas, l’Allemagne était la partie défenderesse, et
l’affaire s’inscrivait également dans le contexte de la Seconde guerre mondiale. Ces trois décisions
sont les suivantes :

a) décision rendue par le juge de la justice fédérale de l’Etat de Rio de Janeiro le 9 juillet 2008 12;

b)décision succincte du tribunal de grande instance de TeA l viv-Jaffa en date du
13
31 décembre 2008 ;
14
c) arrêt de la Cour suprême de Pologne en date du 29 Octobre 2010 .

Ces trois décisions de justice montrent qu’il ne saurait être question d’une «tendance» dont pourrait

se déduire une limitation de la por tée de l’immunité juridictionnelle des Etats en cas de grave
violation du droit international des droits de l’homme et du droit humanitaire. L’Allemagne
s’abstiendra ici d’examiner ces décisions en détail. Elle les commentera de manière exhaustive au

cours des audiences qui doivent se tenir prochainement.

11Article 54 1) de la loi n 345 (1976).
12
Annexe 3.
13
Annexe 4.
14Annexe 5. - 6 -

IV. C ONCLUSION

17. L’Allemagne se félicite de ce que l’occasi on soit donnée à la Grèce de s’exprimer sur
certaines des questions d’ordre juridique que soul ève le présent différend, et ne doute pas qu’à
l’audience, la Grèce saura circonscrire son propos aux limites fixées par la Cour dans son

ordonnance du 4 juillet 2011.

Berlin, le 26 août 2011

L’agent du Gouvernement de la République Le Directeur général des affaires juridiques et
fédérale d’Allemagne, Agent du Gouvernement de la République
fédérale d’Allemagne,

Christian OMUSCHAT . Susanne W ASUM -RAINER .

___________ - 7 -

L ISTE DES ANNEXES

Annexe 1 Deuxième conférence internationale de la paix, La Haye, 15 juin-18 octobre 1907,
Actes et documents, tome III, La Haye, 1907, p. 247.

Annexe 2 The Proceedings of The Hague Peace Conferences, The Conference of 1907, Acts
and Documents, Volume III, New York, 1921, p. 139.

Annexe3 Décision rendue par le juge de la justice fédérale de l’Etat de Rio de Janeiro le
o
9juillet2008, procédure ordinaire n 2006.5101016944-1, Barreto c.République
fédérale d’Allemagne.

Annexe4 Tribunal de grande instance de TelAviv-Jaffa, décision du 31décembre2009,

affaire 2143-07, Orith Zemach et autres c. République fédérale d’Allemagne.

Annexe 5 Cour suprême de Pologne, arrêt du 29 octobre 2010, réf. dossier : IV CSK 465/09,
Natoniewski c. République fédérale d’Allemagne.

___________

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