Exposé écrit de la Norvège

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186-20230724-WRI-07-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
18839
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE CONSÉQUENCES JURIDIQUES DÉCOULANT DES POLITIQUES ET PRATIQUES D’ISRAËL DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST (REQUÊTE POUR AVIS CONSULTATIF) EXPOSÉ ÉCRIT DU ROYAUME DE NORVÈGE
7 juillet 2023
[Traduction du Greffe]
DEMANDE D’AVIS CONSULTATIF EN VERTU DE LA RÉSOLUTION 77/247 DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES NATIONS UNIES
Agissant sur instructions, j’ai l’honneur de soumettre par la présente, dans le délai expirant le 25 juillet 2023, un exposé écrit au nom du Gouvernement de la Norvège, comme suite à l’invitation contenue dans l’ordonnance de la Cour internationale de Justice (ci-après la « Cour ») du 3 février 2023 concernant la demande d’avis consultatif sur la question des Conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.
I.
Lors du vote sur la résolution 77/247, par laquelle l’Assemblée générale sollicitait un avis consultatif, le Gouvernement de la Norvège a décidé de s’abstenir. Pendant le débat, la Norvège a indiqué qu’une demande d’avis consultatif adressée à la Cour ne soutiendrait pas les efforts entrepris par les deux parties pour relancer un dialogue politique, que seule une solution négociée des deux États pouvait assurer une paix durable entre Israéliens et Palestiniens, et que le délai imparti pour évaluer et peaufiner le libellé proposé des questions soumises à la Cour était trop bref. La résolution a été adoptée par l’Assemblée générale le 11 novembre 2011 par 98 voix contre 17, avec 52 abstentions. Les questions ont ainsi été soumises à la Cour, et la situation présente est différente de celle du débat à l’Assemblée générale. La Norvège considère par ailleurs qu’il est opportun et utile de préciser le cadre juridique dans lequel les futures négociations devront avoir lieu, et reconnaît les contributions de la Cour à cet égard.
La Cour a examiné à plusieurs reprises, par le passé, l’argument selon lequel un avis consultatif est susceptible de faire obstacle à une solution politique négociée dans un conflit. Ainsi, dans son avis consultatif sur la question de la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, elle a déclaré :
« La Cour sait que, quelles que soient les conclusions auxquelles elle pourrait parvenir dans l’avis qu’elle donnerait, ces conclusions seraient pertinentes au regard du débat qui se poursuit à l’Assemblée générale, et apporteraient dans les négociations sur la question un élément supplémentaire. »
La Norvège partage ce point de vue, qui donne la mesure de l’importance qu’elle attache au droit international public et aux procédures de règlement judiciaire.
La Cour doit évaluer l’opportunité de rendre un avis consultatif en usant du pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 65 de son Statut. Conformément à sa jurisprudence constante, la Cour ne doit pas, en principe, refuser de donner un avis consultatif, à moins que des « raisons décisives » ne l’y conduisent (voir, par exemple, la demande d’avis consultatif sur la question de la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires). Compte tenu des avis précédemment rendus par la Cour, la Norvège estime qu’il n’existe pas, en l’espèce, de telles raisons décisives, et que la Cour devrait exercer sa compétence pour donner l’avis consultatif sollicité par l’Assemblée générale. La Norvège est convaincue que la Cour prendra tous les facteurs pertinents en compte lorsqu’elle envisagera d’user de son pouvoir discrétionnaire en vertu de l’article 65.
La Norvège considère qu’une solution pacifique durable au conflit israélo-palestinien doit être trouvée au moyen de négociations politiques et qu’elle doit s’inscrire dans le cadre du droit international. La Norvège note à cet égard qu’il est loisible à la Cour de s’écarter du libellé des questions qui lui sont soumises, comme celle-ci l’a indiqué dans son avis consultatif sur les Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965. La Norvège est convaincue
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que la Cour saura faire un usage judicieux de ce pouvoir discrétionnaire pour préciser le cadre juridique dans lequel une solution négociée peut être recherchée.
La Norvège estime qu’un avis consultatif de la Cour apportera de précieuses orientations à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité et contribuera à faire avancer le processus de négociation d’une solution des deux États fondée sur des paramètres internationalement convenus et le droit international public. Aussi la Norvège se réjouit-elle à la perspective d’étudier le fruit des délibérations de la Cour.
II.
La Norvège a maintes fois exprimé sa position sur la licéité des diverses mesures mises en oeuvre par Israël dans les territoires occupés et sa préférence pour une solution des deux États négociée et pacifique dans le cadre du droit international.
Elle a fait valoir à de nombreuses occasions, notamment dans une déclaration faite lors d’un débat en plénière de l’Assemblée générale sur la question de la Palestine, le 30 novembre 2022, qu’une solution négociée des deux États fondée sur des paramètres internationalement convenus était le meilleur moyen de parvenir à une paix durable et de garantir les droits et la sécurité des Israéliens et des Palestiniens. La Norvège n’a jamais dévié de sa position de principe selon laquelle toute acquisition de territoire par la force est inadmissible et constitue une violation grave du droit international. Elle rappelle aussi à cet égard la résolution 2334 (2016) du Conseil de sécurité, qui souligne en outre qu’aucune modification aux frontières du 4 juin 1967, autre que celles convenues par les parties par la voie de négociations, ne sera reconnue.
La Norvège a appuyé et cité avec constance les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, notamment la récente résolution 2334 (2016), dans laquelle celui-ci réaffirme que les colonies de peuplement israéliennes dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 constituent une violation flagrante du droit international, et exige la cessation immédiate et complète de toutes les activités de peuplement.
La Norvège a maintes fois exprimé, notamment dans une déclaration devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 3 décembre 2019, ses profondes inquiétudes quant à l’évolution de la situation sur le terrain dans le Territoire palestinien occupé, notamment face à de nouveaux projets d’expansion des colonies israéliennes à Jérusalem-Est et en Cisjordanie, ainsi qu’à d’éventuelles nouvelles annexions de territoires occupés depuis 1967. La Norvège a clairement affirmé que toutes les mesures prises pour étendre encore les colonies et poursuivre les annexions, y compris à Jérusalem-Est, violent le droit international et réduisent les possibilités de trouver une solution négociée des deux États.
La Norvège a aussi fait part de ses préoccupations, notamment dans sa déclaration au Conseil de sécurité de l’ONU le 28 juillet 2021, face à l’expansion constante des colonies et à la poursuite des démolitions de maisons, des évictions et des actes de violence. La Norvège a pris note des signalements d’un fort accroissement des démolitions et des évictions en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est. Elle s’alarme en particulier des démolitions répétées qui visent les communautés locales bédouines de Palestine, ainsi que des projets de construction d’infrastructures qui isoleront Bethléem et le sud de la Cisjordanie de Jérusalem-Est. À cet égard, la Norvège a souligné que toutes les mesures israéliennes ayant pour effet de modifier la composition, le caractère et le statut du Territoire palestinien occupé étaient illicites en droit international humanitaire et compromettaient gravement la perspective d’une solution des deux États.
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En 2013, la Norvège a été l’un des coauteurs d’une résolution du Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies (A/HRC/22/L.43) sur le Droit du peuple palestinien à l’autodétermination, dans laquelle est réaffirmé le droit inaliénable, permanent et absolu du peuple palestinien à disposer de lui-même, y compris son droit de vivre dans la liberté, la justice et la dignité et de créer un État souverain, indépendant, démocratique et sans discontinuité territoriale. Cette résolution souligne en outre la nécessité de respecter et de préserver l’unité territoriale, la contiguïté territoriale et l’intégrité de tout le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.
Le représentant du Royaume de Norvège,
(Signé) Kristian JERVELL.
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