Exposé écrit de la Gambie

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186-20230725-WRI-22-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
18853
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
CONSÉQUENCES JURIDIQUES DÉCOULANT DES POLITIQUES ET PRATIQUES D’ISRAËL DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST (REQUÊTE POUR AVIS CONSULTATIF)
EXPOSÉ ÉCRIT DE LA RÉPUBLIQUE DE GAMBIE
25 juillet 2023
[Traduction du Greffe]
TABLE DES MATIÈRES
Page
I. L’occupation israélienne est illicite car elle viole le droit du peuple palestinien à l’autodétermination ................................................................................................................2
II. L’occupation israélienne est illicite car elle constitue un régime d’apartheid .............................3
III. L’occupation israélienne est illicite car elle viole le jus ad bellum .............................................5
IV. L’occupation doit prendre fin immédiatement ........................................................................ 10
1.1. Conformément à l’ordonnance rendue par la Cour le 3 février 2023, la République de Gambie (ci-après, la « Gambie ») soumet le présent exposé écrit dans la procédure consultative sur les Conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est.
1.2. Israël occupe les territoires palestiniens, englobant la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et Gaza, depuis plus de 56 ans. Pendant des décennies, les divers organes de l’ONU et des Nations Unies ont adopté maintes résolutions appelant Israël à mettre fin à son occupation. Nombre de titulaires de mandats de l’ONU ont étudié la situation, et tous sont parvenus à la même conclusion, à savoir que l’occupation par Israël des territoires palestiniens emporte de graves violations du droit international, notamment de normes impératives qui en procèdent. La Cour elle-même, dans l’avis consultatif qu’elle a donné sur les Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (ci-après, l’« avis consultatif relatif à l’édification d’un mur »), a conclu que le comportement d’Israël, dans ce contexte, emportait manquement à plusieurs des obligations incombant à cet État au titre du droit international1.
1.3. Au cours des quasi 20 années qui se sont écoulées depuis l’avis consultatif relatif à l’édification d’un mur, l’occupation n’a fait que s’aggraver. Israël a annexé davantage de territoire et étendu ses colonies de peuplement illicites. Les territoires palestiniens occupés sont de plus en plus fragmentés. Un système de discrimination institutionnalisé caractérisé par des structures politique et judiciaire distinctes pour les colons israéliens et pour les Palestiniens — autrement appelé apartheid —, est aujourd’hui bien établi2. Le peuple palestinien continue d’être privé de son droit à l’autodétermination, et ce, pour une période indéfinie. Et rien, pendant ce temps, ne justifie en droit international l’emploi continu de la force par Israël pour maintenir l’occupation — pour autant que quelque chose ne l’ait jamais justifié.
1.4. Une décision de la Cour concluant clairement à l’illicéité de l’occupation contribuerait à donner un nouvel élan à l’action internationale visant à protéger les droits du peuple palestinien. L’exposé de la Gambie porte essentiellement sur la seconde question posée à la Cour par l’Assemblée générale, c’est-à-dire celle qui concerne le statut juridique de l’occupation et les conséquences juridiques qui en découlent pour tous les États et l’Organisation des Nations Unies. Comme nous le verrons ci-après, l’occupation indéfinie des territoires palestiniens par Israël est illicite car elle viole le droit à l’autodétermination (I), constitue un régime d’apartheid (II), et viole le jus ad bellum (III). Parmi les conséquences juridiques découlant de l’illicéité de l’occupation, la plus importante est qu’il doit être mis fin immédiatement à celle-ci (IV).
1 Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 193-194, par. 137.
2 Nations Unies, Conseil des droits de l’homme, « Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », doc. A/HRC/49/87, 12 août 2022, par. 51-56.
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I. L’OCCUPATION ISRAÉLIENNE EST ILLICITE CAR ELLE VIOLE LE DROIT DU PEUPLE PALESTINIEN À L’AUTODÉTERMINATION
1.5. L’occupation israélienne viole le droit à l’autodétermination du peuple palestinien et est donc illicite. Le droit erga omnes à l’autodétermination est l’« un des principes essentiels du droit international contemporain »3, une norme de jus cogens consacrée par la Charte des Nations Unies4. L’obligation de respecter le droit à l’autodétermination est également directement applicable à Israël car celui-ci a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels5. Elle s’applique à l’intégralité des territoires palestiniens occupés6.
1.6. À cet égard, la Gambie renvoie également à la déclaration des Nations Unies sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dans laquelle il est dit que « [l]a sujétion des peuples à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme, est contraire à la Charte des Nations Unies et compromet la cause de la paix et de la coopération mondiales »7.
1.7. L’occupation israélienne ne semble pas près de se terminer. Son caractère prolongé enfreint le droit à l’autodétermination du peuple palestinien, et ce, de manière indéfinie8. Comme l’a indiqué la rapporteuse spéciale de l’ONU concernant la situation des droits humains dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 :
« Depuis 1967, Israël viole, de façon délibérée et intentionnelle, le droit à l’autodétermination des Palestiniens présents dans le territoire palestinien occupé, en les empêchant d’exercer leur souveraineté territoriale sur les ressources naturelles, en gommant leur identité culturelle et en réprimant leurs tentatives d’affirmation politique et de résistance. En bref, les agissements d’Israël dans les territoires palestiniens occupés sont indissociablement liés au colonialisme de peuplement. Le fait qu’Israël se soit emparé du territoire occupé, l’ait annexé et fragmenté et y ait transféré sa population civile constitue une violation de la souveraineté territoriale palestinienne ; l’extraction et l’exploitation des ressources des Palestiniens au bénéfice de parties tierces, dont les “colons”, violent la souveraineté de ce peuple sur les ressources naturelles nécessaires au développement d’une économie indépendante ; l’élimination de symboles représentatifs de l’identité palestinienne ou leur appropriation par la Puissance occupante met en danger l’existence culturelle du peuple palestinien ; la répression, par la Puissance occupante, de l’activité politique et des efforts de plaidoyer et de
3 Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt, C.I.J. Recueil 1995, p. 102, par. 29.
4 Charte des Nations Unies, art. 1, par. 2. Voir également Commission du droit international (ci-après « CDI »), « Projet de conclusions sur la détermination et les conséquences juridiques des normes impératives du droit international général (jus cogens) avec commentaires », doc. A/77/10 (2022), conclusion 23 (annexe h)).
5 Voir Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 16 décembre 1966, Recueil des traités des Nations Unies (RTNU), vol. 999, p. 171, article premier ; Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 16 décembre 1966, RTNU, vol. 993, p. 3, article premier.
6 Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2019 (I) (ci-après, l’« avis consultatif sur les Chagos »), p. 134, par. 160. Voir aussi Nations Unies, Assemblée générale, résolution 67/19 du 29 novembre 2012, intitulée « Statut de la Palestine à l’Organisation des Nations Unies », doc. A/RES/67/19, par. 1.
7 Nations Unies, Assemblée générale, résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960, intitulée « Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux », doc. A/RES/1514 (XV), par. 1.
8 Nations Unies, Assemblée générale, « Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », Michael Lynk, doc. A/72/556, 23 octobre 2017, par. 31-32.
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militantisme des Palestiniens entrave la capacité de ces personnes à s’organiser en tant que peuple, sans contrôle extérieur ni domination étrangère. »9
1.8. Le droit à l’autodétermination étant une norme impérative du droit international, il n’est pas permis de déroger à celui dont jouit le peuple palestinien. En tant que telle, l’occupation israélienne est illicite, et il doit y être mis fin dans les meilleurs délais.
II. L’OCCUPATION ISRAÉLIENNE EST ILLICITE CAR ELLE CONSTITUE UN RÉGIME D’APARTHEID
1.9. L’occupation par Israël des territoires palestiniens est illicite également parce qu’elle équivaut à un régime d’apartheid. Tout comme le droit à l’autodétermination, l’interdiction de l’apartheid est une norme impérative du droit international10. La Cour a décrit l’apartheid comme « une violation flagrante des buts et principes de la Charte »11. L’article 3 de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, à laquelle Israël et la Palestine sont tous deux parties, prohibe lui aussi l’apartheid12.
1.10. Comme l’a exposé le rapporteur spécial dans son rapport sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, l’occupation par Israël des territoires palestiniens constitue un régime d’apartheid :
« Premièrement, un régime institutionnalisé d’oppression raciale systématique et de discrimination a bien été mis en place. Les Juifs israéliens et les Arabes palestiniens de Jérusalem-Est et de Cisjordanie vivent sous un régime unique qui répartit différemment les droits et les avantages en fonction de l’identité nationale et ethnique, et qui organise la suprématie d’un groupe sur un autre et au détriment de l’autre. … Les différences dans les conditions de vie et les droits et avantages liés à la citoyenneté sont considérables, profondément discriminatoires et maintenues grâce à une oppression systématique et institutionnalisée.
[] Deuxièmement, ce système d’administration étrangère a été établi dans l’intention de maintenir la domination d’un groupe racial, national et ethnique sur un autre. Les dirigeants politiques israéliens d’hier et d’aujourd’hui ont à maintes reprises répété qu’ils avaient l’intention de conserver le contrôle de l’ensemble du territoire occupé afin d’étendre l’assise territoriale des parcelles des colonies juives actuelles et futures tout en maintenant les Palestiniens confinés dans des réserves de population. Il faut voir les deux faces de la pièce : les plans visant à accroître le nombre de colons juifs et à augmenter l’assise territoriale des colonies juives sur les terres occupées ne peuvent être menés à bien sans que davantage de Palestiniens soient expropriés et sans recourir à des méthodes plus musclées et plus sophistiquées de contrôle de la population afin de
9 Nations Unies, Assemblée générale, « Rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », Francesca Albanese, doc. A/77/356, 21 septembre 2022, par. 73.
10 Nations Unies, CDI, « Normes impératives du droit international général (jus cogens) : Texte du projet de conclusions et d’annexe tel qu’adopté par le Comité de rédaction en seconde lecture », doc. A/CN.4/L.967, 11 mai 2022, conclusion 23 (annexe e)).
11 Voir Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité (1970), avis consultatif, C.I.J. Recueil 1971 (ci-après, l’« avis consultatif sur la Namibie »), p. 57, par. 129-131.
12 Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, 21 décembre 1965, RTNU, vol. 660, p. 195, art. 3.
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gérer l’inévitable résistance. Dans un tel système, un groupe ne peut exercer ses libertés sans soumettre l’autre.
[] Troisièmement, ce système de discrimination institutionnalisée visant à exercer une domination permanente a été imposé en recourant régulièrement à des actes cruels et inhumains, des exécutions arbitraires et extrajudiciaires et des actes de torture, en acceptant que des enfants meurent de mort violente, en privant des personnes de leurs droits humains fondamentaux, en mettant en place un système de tribunaux militaires fondamentalement défectueux et en ne respectant pas les garanties d’une procédure pénale régulière, en procédant à des détentions arbitraires, et en imposant des punitions collectives. La répétition de tels actes sur de longues périodes, et le fait que la Knesset et le système judiciaire israélien les cautionnent, montrent qu’ils ne sont pas le fruit du hasard et n’ont rien de faits isolés mais font partie intégrante du système de domination mis en place par Israël.
[] Ces actes relèvent de l’apartheid. Sous les yeux grands ouverts de la communauté internationale, Israël a imposé à la Palestine la réalité d’un apartheid dans un monde de l’après-apartheid. »13
1.11. Ce n’est pas là seulement l’avis d’un titulaire de mandat isolé. Il existe aussi un consensus international crédible selon lequel l’occupation israélienne relève de l’apartheid. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, par exemple, a constaté ce qui suit :
« S’agissant de la situation particulière du Territoire palestinien occupé, le Comité demeure préoccupé (voir CERD/C/ISR/CO/14-16, par. 24) par les conséquences des politiques et des pratiques assimilables à la ségrégation appliquées dans ce territoire, illustrées notamment par l’existence de deux systèmes juridiques et institutionnels totalement distincts, dont l’un est conçu pour les communautés juives vivant dans les implantations illégales, d’une part, et l’autre pour les populations palestiniennes habitant dans les villes et les villages palestiniens, d’autre part. Le Comité est consterné par le caractère hermétique de la séparation entre ces deux groupes, qui vivent sur le même territoire mais ne sont pas sur un pied d’égalité pour ce qui est de l’utilisation du réseau routier et des infrastructures et de l’accès aux services de base et aux ressources en eau. Cette séparation se manifeste concrètement par l’existence d’un ensemble complexe de restrictions à la liberté de circulation découlant de la présence du Mur, des implantations, des barrages routiers et des postes de contrôle militaires, ainsi que de l’obligation d’utiliser des routes distinctes et de l’application d’un régime de permis qui a des conséquences préjudiciables pour la population palestinienne (art. 3). »14
1.12. De hauts responsables internationaux et d’anciens responsables israéliens sont parvenus à la même conclusion :
« Ban Ki-moon, ancien Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, a écrit en 2021 que l’intention d’Israël de maintenir “sa domination structurelle et son oppression du peuple palestinien par une occupation indéfinie … constitu[ait] sans doute un apartheid”. Desmond Tutu, lauréat du prix Nobel, a déclaré, en 2014 : “J’ai moi-même constaté qu’Israël a créé une situation d’apartheid à l’intérieur de ses
13 Nations Unies, Conseil des droits de l’homme, « Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, Michael Lynk, doc. A/HRC/49/87, 12 août 2022, par. 53-56.
14 Nations Unies, Comité de la CIEDR, « Observations finales concernant le rapport d’Israël valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques », doc. CERD/C/ISR/CO/17-19, 27 janvier 2020, par. 22.
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frontières et par l’occupation.” La Ministre des affaires étrangères d’Afrique du Sud, Naledi Pandor, a dit, en 2022, que son pays “déplor[ait] la poursuite par Israël de ses pratiques d’apartheid à l’égard du peuple palestinien, dont les souffrances duraient depuis longtemps”. Michael Ben-Yair, ancien Procureur général d’Israël, a dit en 2022 qu’Israël était devenu “un régime d’apartheid … un État unique, avec deux peuples différents n’ayant pas les mêmes droits”. L’ancien directeur du Shin Bet, Ami Ayalon, a écrit, dans ses mémoires : “Nous avons déjà créé une situation d’apartheid en Judée-Samarie, où nous contrôlons les Palestiniens par la force, en leur refusant le droit à l’autodétermination.” Enfin, deux anciens ambassadeurs d’Israël en Afrique du Sud, Ilan Baruch et Alon Liel, ont déclaré, en 2021, que la discrimination systématique instaurée par Israël, “fondée sur la nationalité et l’origine ethnique”, s’apparentait désormais à une situation d’apartheid. »
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1.13. Les très sérieuses organisations non gouvernementales de défense des droits de l’homme qui rendent compte de la situation dans les territoires palestiniens ont elles aussi conclu que l’occupation s’apparentait à un régime d’apartheid16.
1.14. Dans les observations qu’il a formulées devant l’Assemblée générale en mai 2021, l’ambassadeur et représentant permanent de la Gambie auprès de l’Organisation des Nations Unies a déclaré que, selon son pays, l’occupation équivalait à un apartheid17.
1.15. En tant que régime d’apartheid, l’occupation israélienne des territoires palestiniens est illicite et il doit y être mis fin d’urgence.
III. L’OCCUPATION ISRAÉLIENNE EST ILLICITE CAR ELLE VIOLE LE JUS AD BELLUM
1.16. L’occupation israélienne, depuis 56 ans, du territoire palestinien viole le droit relatif à l’emploi de la force  le jus ad bellum  et est illicite pour cette même raison.
1.17. Le paragraphe 4 de l’article 2 de la Charte des Nations Unies interdit de recourir à la menace ou à l’emploi de la force18. Cette interdiction relève du droit international coutumier19 et
15 Nations Unies, Conseil des droits de l’homme, « Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », Michael Lynk, doc. A/HRC/49/87, 12 août 2022, par. 13.
16 Human Rights Watch, « A Threshold Crossed: Israeli Authorities and the Crimes of Apartheid and Persecution », 2021, accessible à l’adresse suivante : https://tinyurl.com/3s2vdjw9, p. 10 ; Amnesty International, « L’apartheid israélien envers le peuple palestinien : Un système cruel de domination et un crime contre l’humanité », 1er février 2022, accessible à l’adresse suivante : https://www.amnesty.org/fr/documents/mde15/5141/2022/fr/, p. 267 ; B’Tselem, « Un régime de suprématie juive de la Méditerranée au Jourdain : c’est un apartheid », 12 janvier 2021, accessible à l’adresse suivante : https://www.btselem.org/sites/default/files/publications/202101_this_is_apartheid_fr.pdf ; Al Haq, « Israeli Apartheid: Tool of Zionist Settler Colonialism, 29 novembre 2022, p. 181 (approuvé par Addameer, Al Mezan, le Jerusalem Legal Aid and Human Rights Center à Jérusalem, le Community Action Center of Al-Quds University, et la Palestinian Initiative for the Promotion of Global Dialogue and Democracy (MIFTAH)).
17 Nations Unies, Assemblée générale, M. Yabou, déclaration, « La situation au Moyen-Orient (point 37) ; Question de Palestine (point 38) », 25 mai 2021, accessible à l’adresse suivante : General Assembly official records, 75th session : (un.org) (« Il est temps que la communauté internationale mette un terme à la politique d’apartheid et agisse de manière décisive pour mettre fin à ce conflit de longue date. »).
18 Charte des Nations Unies, art. 2, par. 4.
19 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 423, par. 69, p. 424, par. 71.
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constitue une norme de jus cogens
20. Les cas de légitime défense sont la seule exception à cette interdiction21. Même lorsque le recours à la force est justifié par l’existence d’une attaque armée, la force employée peut quand même être illicite si elle n’est pas nécessaire, ou si elle est disproportionnée à la menace contre laquelle elle est exercée22.
1.18. Une occupation belligérante découle de l’emploi de la force et est maintenue par celui-ci23. Ainsi, les occupations belligérantes non conformes au droit relatif à l’emploi de la force sont en elles-mêmes illicites. La déclaration de l’Assemblée générale relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États, qui reflète le droit international coutumier24, prévoit que « [l]e territoire d’un État ne peut faire l’objet d’une occupation militaire résultant de l’emploi de la force contrairement aux dispositions de la Charte »25. La déclaration sur le renforcement du principe de l’abstention du recours à la menace ou à l’emploi de la force dans les relations internationales, adoptée par l’Assemblée générale en 1987, prévoit que « [n]e seront reconnues comme légales ni l’acquisition de territoire résultant du recours à la menace ou à l’emploi de la force, ni l’occupation de territoire résultant du recours à la menace ou à l’emploi de la force en violation du droit international »26.
1.19. La Cour a déjà jugé à plusieurs reprises que des occupations étaient illicites. Dans la procédure consultative au sujet des Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité (ci-après, l’« avis consultatif sur la Namibie »), la Cour a dit que, en « occup[ant] le territoire sans titre, l’Afrique du Sud encour[ait] des responsabilités internationales »27. De la même manière, dans l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), elle a conclu que l’occupation de la province congolaise de l’Ituri par l’Ouganda « viol[ait] le principe du non-recours à la force »28. Le Conseil de sécurité de l’Organisation des
20 Nations Unies, CDI, « Projet d’articles sur le droit des traités et commentaires », Annuaire de la Commission du droit international, 1966, vol. II, p. 270, art. 50, par. 1.
21 Charte des Nations Unies, art. 51 ; Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 436, par. 98.
22 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 223, par. 147.
23 Nations Unies, Assemblée générale, résolution 3314 du 14 décembre 1974, intitulée « Définition de l’agression », annexe, dans laquelle l’occupation militaire est considérée comme faisant partie des « mesures de force ». Voir aussi ibid., art. 3 a) (où il est indiqué que « toute occupation militaire, même temporaire, résultant d’une telle invasion ou d’une telle attaque » peut être qualifiée d’« acte d’agression »).
24 Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif, C.I.J. Recueil 2010 (II), p. 437, par. 80.
25 Nations Unies, Assemblée générale, résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970, intitulée « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies », doc. A/RES/25/2625.
26 Nations Unies, Assemblée générale, résolution 42/22 du 18 novembre 1987, intitulée « Déclaration sur le renforcement de l’efficacité du principe de l’abstention du recours à la menace ou à l’emploi de la force dans les relations internationales », doc. A/RES/42/22.
27 Avis consultatif sur la Namibie, p. 54, par. 118.
28 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 280, par. 345, point 1) du dispositif.
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Nations Unies
29 et l’Assemblée générale des Nations Unies30 ont également qualifié d’illicites des occupations résultant de l’emploi illicite de la force.
1.20. En outre, même si la présence militaire d’un État sur le territoire d’un autre État est à l’origine licite, elle peut ne pas le rester et devenir une occupation illicite. Dans l’avis consultatif sur la Namibie, la Cour a conclu que l’Afrique du Sud occupait illicitement cet État après la fin de son mandat et l’adoption de la résolution correspondante du Conseil de sécurité, qui avait déclaré illicite sa présence continue31. Ainsi, une occupation belligérante licite peut cesser de l’être si elle ne peut être justifiée par le droit de légitime défense.
1.21. Pour déterminer si une occupation prétendument justifiée par la légitime défense est licite, il faut vérifier non seulement si cette occupation a été déclenchée par une attaque armée, mais aussi si elle constituait une réponse nécessaire et proportionnée à cette attaque. Par exemple, dans l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo, la Cour a fait observer ce qui suit :
« la prise d’aéroports et de villes situés à plusieurs centaines de kilomètres de la frontière ougandaise ne semble guère proportionnée aux diverses attaques transfrontalières dont l’Ouganda se prévaut pour justifier l’exercice de son droit de légitime défense, ni nécessaire pour l’exercice de ce droit »32.
1.22. Les questions de la nécessité et de la proportionnalité doivent également être prises en considération pour déterminer la licéité d’une occupation prolongée. Par exemple, l’occupation durable, par l’Afrique du Sud, d’une zone-tampon en Angola de 1981 à 1988, ainsi que la présence d’Israël au sud du Liban pendant 22 ans, de 1978 à 2000, étaient toutes deux revendiquées comme étant justifiées au titre de la légitime défense, et pourtant elles ont toutes deux été condamnées à
29 Voir Nations Unies, Conseil de sécurité, résolution 674 du 29 octobre 1990, doc. S/RES/674 (1990) (rappelant à l’Iraq qu’« il est responsable de toute perte, tout dommage ou tout préjudice subis, s’agissant du Koweït et d’États tiers ainsi que de leurs nationaux et sociétés, du fait de l’invasion et de l’occupation illégale du Koweït par l’Iraq ») ; résolution 545 du 20 décembre 1983, doc. S/RES/545 (1983) (condamnant l’occupation militaire, par l’Afrique du Sud, de parties du sud de l’Angola, en « violation flagrante du droit international »).
30 Nations Unies, Assemblée générale, résolution 3061 (XXVIII) du 2 novembre 1973, intitulée « Occupation illégale par les forces militaires portugaises de certains secteurs de la République de Guinée-Bissau et actes d’agression commis par elle contre le peuple de la République », doc. A/RES/3061 (XXVIII) (« condamn[ant] énergiquement la politique menée par le Gouvernement portugais pour perpétuer son occupation illégale de certains secteurs de la République de Guinée-Bissau »).
31 Voir avis consultatif sur la Namibie, p. 54, par. 118-119. De la même manière, dans l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), la Cour a conclu que, si la République démocratique du Congo (RDC) avait initialement autorisé les forces ougandaises à entreprendre des actions militaires contre les rangs des rebelles anti-ougandais sur le territoire de la RDC, leur refus ultérieur de partir et leur occupation d’un territoire donné au sein de la RDC violaient le principe du non-recours à la force (arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 199, par. 53 ; p. 223, par. 147 ; p. 227, par. 165 ; p. 230-231, par. 176-179 ; p. 280, par. 345, point 1 du dispositif. Voir également Nations Unies, Assemblée générale, résolution 3061 (XXVIII) du 2 novembre 1973, doc. A/RES/3061 (XXVIII) (« Condam[nant] énergiquement la politique menée par le Gouvernement portugais pour perpétuer son occupation illégale de certains secteurs de la République de Guinée-Bissau », à la suite du refus du Portugal de mettre fin à son régime colonial en Guinée-Bissau après la déclaration d’indépendance de cette dernière).
32 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 223, par. 147.
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maintes reprises par l’ensemble de la communauté internationale au motif qu’elles n’étaient ni nécessaires ni proportionnées
33.
1.23. L’occupation par Israël du territoire palestinien viole le jus ad bellum et est donc en elle-même illicite. Israël a lancé en juin 1967 la guerre qui a abouti à l’occupation du territoire palestinien34. Après l’attaque-surprise qui a déclenché cette guerre, Israël a occupé le reste du territoire palestinien en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, la bande de Gaza, ainsi que les hauteurs du Golan en Syrie et la péninsule du Sinaï en Égypte, « ce qui a eu pour effet de tripler la taille du territoire sous [son] contrôle »35. Même à supposer, arguendo, qu’il avait été l’objet d’une attaque armée, Israël n’aurait en aucun cas pu avoir besoin d’occuper un territoire faisant plusieurs fois la taille du sien. Puisque ce n’est pas en réponse à une attaque armée qu’Israël a employé la force, et que, même dans ce cas de figure, ce recours à la force n’aurait pas été nécessaire ni proportionné, l’occupation constituait dès le commencement une violation flagrante du droit relatif à l’emploi de la force.
1.24. Même si l’occupation était licite à un moment (quod non), elle ne pourrait en aucun cas, étant donné qu’elle s’est poursuivie pendant plus de cinq décennies, l’être encore aujourd’hui. Premièrement, l’emploi de la force au titre de la légitime défense n’est justifié que « dans les limites qui … sont strictement définies » à l’article 51 de la Charte, et « n’autorise pas, au-delà du cadre ainsi établi, l’emploi de la force par un État pour protéger des intérêts perçus comme relevant de la sécurité »36. L’exercice du droit de légitime défense « suppose tout d’abord qu’une agression armée a eu lieu »37. Ainsi, l’emploi de la force « essentiellement de nature préventive » n’entre pas dans le champ de l’article 5138. L’occupation constitue par conséquent un emploi de la force qui « ne peu[t] donc être justifié[], comme le fait souvent Israël, au motif qu’il s’agit d’[un] acte[] de légitime défense “préventive” »39.
1.25. Deuxièmement, l’article 51 ne s’applique pas aux situations concernant des attaques alléguées qui ne sont pas imputables à un État étranger. Ainsi que la Cour l’a indiqué dans l’avis consultatif relatif à l’édification d’un mur :
33 Voir Nations Unies, Conseil de sécurité, résolution 425 du 19 mars 1978 [sur l’établissement d’une force intérimaire des Nations Unies pour le Sud du Liban], doc. S/RES/425 (1978) (appelant Israël à mettre fin à son occupation illicite du Sud du Liban) ; résolution 545 du 20 décembre 1983, doc. S/RES/545 (1983) (condamnant « l’occupation militaire par l’Afrique du Sud de certaines parties du sud de l’Angola, ce qui constitue une violation flagrante du droit international ainsi que de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Angola »).
34 Nations Unies, Assemblée générale, « Rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », Francesca Albanese, doc. A/77/356, 21 septembre 2022, par. 37.
35 « Israel’s borders explained in maps », BBC News, 16 septembre 2020, accessible à l’adresse suivante : https://www.bbc.com/news/world-middle-east-54116567.
36 Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 223-224, par. 148.
37 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique) , fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 120, par. 232.
38 Cf. Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 222, par. 143.
39 Nations Unies, Assemblée générale, « Rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », 21 septembre 2022, doc. A/77/356, par. 71-72.
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« L’article 51 de la Charte reconnaît ainsi l’existence d’un droit naturel de légitime défense en cas d’agression armée par un État contre un autre État. Toutefois, Israël ne prétend pas que les violences dont il est victime soient imputables à un État étranger. »40
Près de 20 ans plus tard, Israël n’est toujours pas l’objet d’une attaque armée qui soit imputable à un État étranger  et il ne le prétend d’ailleurs même pas.
1.26. Troisièmement, l’article 51 ne s’applique pas aux situations dans lesquelles un comportement est adopté en réaction à des menaces supposées provenant de l’intérieur d’un territoire occupé41. La Cour a dit que, dans ces circonstances, « l’article 51 de la Charte est sans pertinence »42. Israël ne peut donc prétendre que son occupation était une réponse à des menaces alléguées  et encore moins à des « attaques armées »  émanant de l’intérieur des territoires palestiniens occupés proprement dits.
1.27. Ainsi, Israël n’est tout simplement pas l’objet d’une attaque armée, et ne saurait s’en prévaloir pour justifier son occupation. De plus, même à supposer, arguendo, que l’occupation était à l’origine nécessaire et proportionnée — ce qui n’était pas le cas —, elle est ensuite manifestement devenue non nécessaire et disproportionnée, et donc illicite.
1.28. Il est tout simplement impossible de considérer que le maintien de l’occupation israélienne depuis 1967 était nécessaire. Dans l’affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), la Cour a conclu que l’emploi de la force par les États-Unis ne correspondait pas à une nécessité car il avait eu lieu « plusieurs mois après que la grande offensive de l’opposition armée au Salvador contre le gouvernement de ce pays eut été totalement repoussée »43. En l’espèce, Israël a maintenu son occupation, au moyen de la force, pendant 56 ans. De plus, il l’a fait en violation flagrante du droit des Palestiniens à l’autodétermination, comme nous l’avons vu dans la section I.
1.29. Pour la même raison, Israël ne saurait prétendre que sa colonisation et son annexion du territoire occupé constituaient une réponse nécessaire à une quelconque menace ressentie. La « proscription absolue de toute acquisition de territoire par la force ne fait aucune distinction entre les territoires occupés lors d’une guerre en légitime défense ou lors d’une guerre d’agression ; l’annexion est interdite dans toutes les circonstances »44. En colonisant et en annexant le territoire occupé, Israël a ipso facto pris des mesures non nécessaires en recourant à la force.
1.30. L’occupation israélienne prolongée est en outre totalement disproportionnée à tout objectif légitime. L’occupation par Israël de l’intégralité des territoires palestiniens « longtemps après la période durant laquelle toute agression armée supposée … pourrait raisonnablement être
40 Avis consultatif relatif à l’édification d’un mur, p. 194, par. 139.
41 Ibid.
42 Ibid.
43 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 122, par. 237 (les italiques sont de nous).
44 Nations Unies, Assemblée générale, « Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 », 23 octobre 2017, doc. A/72/556, par. 31 (les italiques sont de nous).
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envisagée »
45 la rend encore plus disproportionnée aujourd’hui. Et c’est aussi la manière dont cette occupation s’est déroulée  notamment l’instauration d’un régime d’apartheid  qui la rend disproportionnée.
1.31. En résumé, l’occupation israélienne, qui dure depuis des décennies, viole le droit relatif à l’emploi de la force et est donc illicite. Même si l’emploi de la force avait un temps été licite, en réponse à une attaque armée — ce qu’il n’était pas —, il n’aurait jamais pu le rester pendant 56 ans. Israël n’est pas l’objet d’une attaque armée et l’occupation prolongée n’était ni nécessaire ni proportionnée. Par conséquent, l’occupation israélienne dans son ensemble est illicite et doit prendre fin.
IV. L’OCCUPATION DOIT PRENDRE FIN IMMÉDIATEMENT
1.32. Si la Cour conclut que l’occupation par Israël des territoires palestiniens est illicite — ce dont la Gambie ne doute pas —, cette décision devra être suivie d’effets46. Selon la Gambie, la Cour devrait conclure qu’Israël est tenu de mettre un terme à tous ses actes illicites, d’offrir des assurances et des garanties de non-répétition, et de réparer intégralement les préjudices causés47. En outre, la Cour devrait dire que tous les États et l’Organisation des Nations Unies ont les obligations de ne pas reconnaître comme licites l’occupation israélienne ou tout autre comportement illicite, de ne pas prêter aide ou assistance au maintien de l’occupation, et de coopérer pour mettre fin à celle-ci48.
1.33. La Gambie soutient également que la Cour devrait conclure qu’Israël, tous les autres États et l’Organisation des Nations Unies sont tenus de mettre fin à l’occupation israélienne immédiatement ou, du moins, dans les plus brefs délais.
1.34. Pareille conclusion irait dans le sens des décisions antérieures de la Cour. Dans l’avis consultatif sur la Namibie, la Cour a conclu ce qui suit : « la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie étant illégale, l’Afrique du Sud a l’obligation de retirer immédiatement son administration de la Namibie et de cesser ainsi d’occuper le territoire »49. De la même manière, dans l’avis consultatif qu’elle a donné sur les Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965, la Cour a dit que « le Royaume-Uni [était] tenu, dans les plus brefs délais, de mettre fin à son administration de l’archipel des Chagos, ce qui permettra[it] à Maurice d’achever la décolonisation de son territoire dans le respect du droit des peuples à l’autodétermination »50.
45 Cf. Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 122, par. 237.
46 Avis consultatif sur la Namibie, p. 54, par. 117.
47 Nations Unies, CDI, « Projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite », Annuaire de la Commission du droit international, 2001 (vol. II, deuxième partie) (ci-après, les « articles sur la responsabilité de l’État »), art. 30, 31, 34-37.
48 Articles sur la responsabilité de l’État, art. 41. Voir aussi CDI, « Projet d’articles sur la responsabilité des organisations internationales », Annuaire de la Commission du droit international, 2011 (vol. II, deuxième partie), art. 42.
49 Avis consultatif sur la Namibie, p. 58, par. 133, point 1) du dispositif (les italiques sont de nous).
50 Avis consultatif sur les Chagos, p. 139, par. 178 (les italiques sont de nous).
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1.35. Dans le cas d’espèce, le peuple palestinien pâtit d’une occupation étrangère depuis plus de 56 ans  occupation qui a pris la forme d’un régime d’apartheid. La Cour devrait dire qu’il doit être mis fin à l’occupation israélienne immédiatement, ou du moins dans les plus brefs délais.
Respectueusement,
Le 25 juillet 2023.
L’agent de la Gambie,
Attorney General et ministre de la justice,
(Signé) S. Exc. M. Dawda JALLOW.
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Exposé écrit de la Gambie

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