Exposé écrit de la Bolivie

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186-20230725-WRI-25-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
18855
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE CONSÉQUENCES JURIDIQUES DÉCOULANT DES POLITIQUES ET PRATIQUES D’ISRAËL DANS LE TERRITOIRE PALESTINIEN OCCUPÉ, Y COMPRIS JÉRUSALEM-EST (REQUÊTE POUR AVIS CONSULTATIF) EXPOSÉ ÉCRIT DE L’ÉTAT PLURINATIONAL DE BOLIVIE
[Traduction du Greffe]
Comme suite à la note n° 2023/7, par laquelle la Cour internationale de Justice a invité les États Membres à lui communiquer des exposés écrits concernant la demande d’avis consultatif qui lui a été soumise par l’Assemblée générale des Nations Unies dans le cadre de la résolution A/RES/77/247 relative aux conséquences juridiques découlant des politiques et pratiques israéliennes dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, adoptée le 30 décembre 2022, l’État plurinational de Bolivie a l’honneur de soumettre à la Cour internationale de Justice le présent exposé écrit, en réponse aux questions que celle-ci a transmises par son ordonnance du 3 février 2023.
a) Quelles sont les conséquences juridiques de la violation persistante par Israël du droit du peuple palestinien à l’autodétermination, de son occupation, de sa colonisation et de son annexion prolongées du territoire palestinien occupé depuis 1967, notamment des mesures visant à modifier la composition démographique, le caractère et le statut de la ville sainte de Jérusalem, et de l’adoption par Israël des lois et mesures discriminatoires connexes ?
Droit applicable
 droit international coutumier ;
 Charte des Nations Unies ;
 droit international humanitaire ;
 droit international des droits de l’homme ;
 Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
 Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;
 convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale ;
 convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ;
 convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
 convention relative aux droits de l’enfant ;
 résolutions du Conseil de sécurité, de l’Assemblée générale et du Conseil des droits de l’homme ;
 résolution 2625 (XXV), adoptée le 24 octobre 1970 par l’Assemblée générale et portant approbation de la « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies », laquelle établit l’illicéité de toute acquisition territoriale résultant de la menace ou de l’emploi de la force et réaffirme le droit des peuples à l’autodétermination ;
 résolutions du Conseil de sécurité 242 (1967) du 22 novembre 1967, 338 (1973) du 22 octobre 1973, 446 (1979) du 22 mars 1979, 478 (1980) du 20 août 1980, 1397 (2002) du 12 mars 2002, 1515 (2003) du 19 novembre 2003, 1850 (2008) du 16 décembre 2008 et 2334 (2016) du 23 décembre 2016.
Le droit à l’autodétermination consacre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, énoncé au paragraphe 2 de l’article 1 de la Charte des Nations Unies. Selon la déclaration de l’Assemblée générale des Nations Unies relative aux principes du droit international touchant les relations
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amicales entre les États, ce droit emporte pour chaque État le devoir « de s’abstenir de recourir à toute mesure de coercition qui priverait [les peuples] de leur droit à l’autodétermination, à la liberté et à l’indépendance » et « de favoriser, conjointement avec d’autres États ou séparément, la réalisation du principe … [du] droit [des peuples] à disposer d’eux-mêmes ».
Le droit à l’autodétermination est défini comme la liberté de tous les peuples de déterminer leur statut politique et de poursuivre leur développement économique, social et culturel sans ingérence extérieure, et est considéré comme un droit fondamental ne souffrant aucune exception. Le respect de ce droit est également une obligation erga omnes puisque tous les États y ont un intérêt juridique et ont le devoir de le protéger.
Les conséquences juridiques pour Israël : Israël est tenu de s’acquitter de son obligation de respecter le droit du peuple palestinien à l’autodétermination. Il doit immédiatement mettre fin au manquement à son obligation internationale de respecter le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, en cessant tous les actes et mesures qui entravent l’exercice par le peuple palestinien de son droit à l’autodétermination, notamment en mettant immédiatement fin à l’occupation dans toutes ses manifestations.
Contexte relatif à la délimitation territoriale
La Bolivie souligne que la Cour internationale de Justice, dans son avis consultatif sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé (Nations Unies, doc. A/ES-10/273 du 13 juillet 2004), a établi l’illicéité de l’occupation par Israël en tant que précédent historique, citant, entre autres, la convention de Rhodes du 3 avril 1949 entre Israël et la Jordanie, dont les articles V et VI fixaient la ligne de démarcation de l’armistice entre les forces israéliennes et les forces arabes (dénommée par la suite « Ligne verte » du fait de la couleur retenue pour la tracer sur les cartes), faisant observer que, aux termes du paragraphe 2 de l’article III de cette même convention, aucun élément des forces militaires ou paramilitaires de l’une ou l’autre partie ne devait franchir, pour quelque motif que ce soit, les lignes de démarcation de l’armistice, et précisant que cette disposition ne pouvait en aucun cas être interprétée au détriment d’un règlement politique définitif entre les parties.
De même, il est nécessaire de souligner que, le 22 novembre 1967, le Conseil de sécurité a approuvé à l’unanimité la résolution 242 (1967), dans laquelle il soulignait l’inadmissibilité de l’acquisition de territoire par la guerre et appelait au retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit, ainsi qu’à la cessation de tous états de belligérance ou de toutes assertions de belligérance.
Dans la résolution 252 (1968) du 21 mai 1968, le Conseil de sécurité a répété que toutes les mesures et dispositions législatives et administratives prises par Israël, y compris l’expropriation de terres et de biens immobiliers, qui tendent à modifier le statut juridique de Jérusalem, étaient non valides et ne pouvaient modifier ce statut. Dans la même veine, il a, dans sa résolution 271 (1969) du 15 septembre 1969, enjoint à Israël d’observer scrupuleusement les dispositions des conventions de Genève et du droit international régissant l’occupation militaire et de s’abstenir d’entraver l’exercice des fonctions qui appartiennent au conseil suprême musulman de Jérusalem, et reconnu en outre que tout acte de destruction ou de profanation des Lieux saints, des édifices religieux et des sites de Jérusalem, ou tout encouragement à un acte de cette nature ou toute connivence dans un tel acte, pouvait mettre gravement en péril la paix et la sécurité internationales.
Dans le même ordre d’idées, le Conseil de sécurité n’a eu de cesse de répéter que l’acquisition de territoire par la conquête militaire était inadmissible, aspect qui a été ratifié dans sa résolution 298 (1971) du 25 septembre 1971, dans laquelle il a réaffirmé de la façon la plus explicite que toutes les dispositions législatives et administratives prises par Israël en vue de modifier le statut de la ville de Jérusalem, y compris l’expropriation de terres et de biens immeubles, le transfert de populations et
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la législation visant à incorporer la partie occupée, étaient totalement nulles et non avenues et ne pouvaient modifier le statut de la ville. Il n’a par la suite été tenu aucun compte des dispositions législatives et administratives modifiant ce statut.
Il est par ailleurs impératif de conserver à l’esprit que le Conseil de sécurité a enjoint à Israël d’observer scrupuleusement les dispositions des conventions de Genève et du droit international régissant l’occupation militaire1, et répété que la convention de Genève du 12 août 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre s’appliquait aux territoires arabes occupés par Israël depuis 1967, y compris Jérusalem. Il a de surcroît enjoint à maintes reprises à Israël, en sa qualité de puissance occupante, de se conformer scrupuleusement aux dispositions de ladite convention2.
De l’illicéité de l’occupation par Israël du territoire palestinien et de l’inadmissibilité de l’acquisition de territoire par la force
La question essentielle est celle de l’illicéité de l’occupation par Israël du territoire palestinien dans son ensemble, et non simplement des aspects ou caractéristiques illicites de cette occupation. Une occupation aussi persistante, assortie de l’implantation de colonies de peuplement, a été délibérément conçue pour l’acquisition de territoire par la force, au moyen de son annexion de facto et de jure, notamment par la colonisation, l’isolement et la fragmentation des territoires palestiniens occupés. Les colonies de peuplement et le régime qui leur est associé, qui impliquent le transfert de citoyens israéliens dans ces colonies et le déplacement de force de familles et communautés palestiniennes, l’application d’une politique de remodelage artificiel de la démographie du territoire occupé, ainsi que la violation et le déni du droit du peuple palestinien à l’autodétermination, notamment par sa soumission à un système de régime militaire étranger et d’apartheid conçu pour le persécuter et le traiter de façon discriminatoire, constituent une violation du droit international.
Depuis le début de l’occupation, Israël a délibérément pris des mesures et adopté des politiques et pratiques pour s’assurer le contrôle total et permanent sur les territoires palestiniens occupés.
Ces politiques et pratiques, qui portent gravement atteinte aux droits fondamentaux du peuple palestinien et constituent une violation grave du droit international (en particulier dans ses branches humanitaire et des droits de l’homme), sont encore aggravées par leur effet volontairement cumulatif. Elles sont conçues pour entraîner, lorsqu’elles se conjuguent, le déplacement et le remplacement du peuple palestinien, servant ainsi l’objectif ultime d’acquérir le territoire par la force.
Ces actes d’occupation constituent par conséquent une violation manifeste de la Charte des Nations Unies. À cette violation doivent être opposées des conséquences graves et directes, passant notamment par l’action d’États tiers.
L’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies ont réaffirmé le principe de l’inadmissibilité de l’acquisition de territoire par la force, et condamné et rejeté les mesures prises par Israël pour modifier la composition démographique, le caractère et le statut de Jérusalem et du Territoire palestinien occupé dans son ensemble.
De même, par la résolution 242 (1967) du 22 novembre 1967, le Conseil de sécurité a confirmé que l’accomplissement des principes de la Charte exigeait l’instauration d’une paix juste et durable au Moyen-Orient qui devrait comprendre l’application des deux principes suivants :
1 Résolution 271 (1969) du 15 septembre 1969.
2 Résolution 681 (1990) du 20 décembre 1990.
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1) retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit (guerre des Six Jours) ;
2) cessation de toutes assertions de belligérance ou de tous états de belligérance et respect et reconnaissance de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de chaque État de la région et de son droit de vivre en paix à l’intérieur de frontières sûres et reconnues à l’abri de menaces ou d’actes de force.
Il a également réaffirmé la nécessité de garantir l’inviolabilité territoriale et l’indépendance politique de chaque État de la région, par la création de zones démilitarisées.
Cela posé, la résolution 2625 (XXV) du 4 octobre 1970, portant approbation de la « Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies », établit, entre autres, le principe selon lequel « les États s’abstiennent, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies ».
C’est précisément en conformité avec ces buts et principes que les États ont le devoir de s’abstenir de toute propagande en faveur des guerres d’agression, et aussi celui de s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force pour violer les lignes internationales de démarcation, telles que les lignes d’armistice établies par un accord international qui leur est opposable. De même, la résolution dispose que le territoire d’un État ne peut faire l’objet d’une occupation militaire résultant de l’emploi de la force contrairement aux dispositions de la Charte, ni d’une acquisition par un autre État à la suite du recours à la menace ou à l’emploi de la force, ce qui indique clairement qu’aucune acquisition territoriale résultant de tels agissements ne sera reconnue comme licite.
La déclaration dispose en outre qu’aucun État ne peut appliquer ni encourager l’usage de mesures économiques, politiques ou de toute autre nature pour contraindre un autre État à subordonner l’exercice de ses droits souverains et pour obtenir de lui des avantages de quelque ordre que ce soit, et que l’usage de la force pour priver les peuples de leur identité nationale constitue une violation de leurs droits inaliénables et du principe de non-intervention.
Dans ce contexte, il est nécessaire de souligner que, depuis 1977, Israël a appliqué une politique et mis au point des pratiques comportant l’implantation de colonies de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, en contravention des dispositions du sixième alinéa de l’article 49 de la quatrième convention de Genève.
Aux termes du sixième alinéa de l’article 49 de la quatrième convention de Genève, « [l]a Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ». Cette disposition interdit non seulement les déportations ou transferts forcés de population comme ceux qui ont été commis pendant la seconde guerre mondiale, mais également toutes les mesures prises par une puissance occupante en vue d’organiser ou de favoriser le transfert d’une partie de sa propre population dans le territoire occupé.
Le Conseil de sécurité a réaffirmé que ces politiques et pratiques n’avaient aucune validité en droit et a demandé à maintes reprises à Israël de respecter la quatrième convention de Genève et de renoncer à toute mesure qui modifierait le statut juridique et la nature géographique des territoires arabes occupés depuis 1967, y compris Jérusalem, et en particulier de ne pas transférer une partie de sa propre population civile dans les territoires arabes occupés et d’en modifier ainsi sensiblement la
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composition démographique, répétant que l’expropriation des terres et des biens, le transfert de populations et la législation visant à incorporer la partie occupée étaient totalement invalides
3.
Le Conseil a réaffirmé sa position dans les résolutions 452 (1979) du 20 juillet 1979 et 465 (1980) du 1er mars 1980, qualifiant de violation flagrante de la quatrième convention de Genève la politique et les pratiques d’Israël consistant à installer des éléments de sa population et de nouveaux immigrants dans les territoires occupés.
À cet égard, la Bolivie estime que les colonies de peuplement israéliennes dans le Territoire palestinien occupé, à savoir Jérusalem-Est, la Cisjordanie, la bande de Gaza et le Golan syrien, ont été établies en contravention du droit international et sont par conséquent illicites au regard des conventions et traités internationaux applicables.
De même, la Bolivie considère que l’acquisition de territoire par la force, la transgression des délimitations territoriales établies par les Nations Unies et acceptées par les deux parties, de même que le déplacement forcé qui s’en est suivi de la population palestinienne hors de ses terres, de ses foyers et de ses biens afin d’encourager l’installation de colons soutenus par les forces militaires employant la force de façon disproportionnée et commettant des violations des droits de l’homme, sont autant de faits qui, non seulement sont susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité, mais sont manifestement illicites et violent de surcroît le droit international humanitaire.
En outre, les actes d’expansion qu’Israël légitime par sa législation interne sont menés au mépris flagrant des résolutions approuvées par le Conseil de sécurité des Nations Unies et au détriment de la solution des deux États ainsi que de l’indépendance, de la souveraineté et du droit à l’autodétermination du peuple palestinien.
La Bolivie observe avec préoccupation que ces actes se sont accompagnés de violations systématiques des droits de l’homme qui ont été constatées tant par le Conseil de sécurité que par le Conseil des droits de l’homme, ainsi que par des organes conventionnels dont Israël est membre du fait de la ratification de diverses conventions sur la protection des droits de l’homme.
De la violation des droits de l’homme dans la conduite de l’occupation
Les politiques et pratiques mises en application dans la conduite de l’occupation et dans la poursuite de l’objectif illicite de l’annexion portent atteinte à de nombreux droits du peuple palestinien protégés par le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire.
Malgré les condamnations répétées de la communauté internationale, ces violations n’ont pas diminué. Les droits du peuple palestinien qui sont constamment et quotidiennement violés comprennent les droits « à l’autodétermination, à la non-discrimination, à la libre circulation, à l’égalité, à un procès équitable, au respect de la légalité, à ne pas être arbitrairement détenu, à la liberté et à la sécurité de la personne, à la libre expression, au libre accès aux lieux de culte, à l’éducation, à l’eau, au logement, à un niveau de vie suffisant, à la propriété, à l’accès aux ressources naturelles et à un recours utile »4. Ces violations sont factuelles et concomitantes de l’occupation continue et permanente du territoire palestinien.
Le Conseil de sécurité a relevé à maintes reprises des violations des droits de l’homme, déplorant vivement les politiques et pratiques d’Israël, qui violent les droits de l’homme du peuple palestinien dans les territoires occupés, en particulier le fait que l’armée israélienne a ouvert le feu,
3 Résolutions 446 (1979) du 22 mars 1979 ; 298 (1971) du 25 septembre 1971 ; 446 (1979) du 22 mars 1979 ; 465 (1980) du 1er mars 1980 ; 478 (1980) du 20 août 1980 et 592 (1986) du 8 décembre1986.
4 Résolutions 694 (1991) du 24 mai 1991 et 726 (1992) du 6 janvier 1992.
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tuant ou blessant des civils palestiniens sans défense
5, et a engagé la puissance occupante à respecter immédiatement et scrupuleusement la convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre6 et à renoncer immédiatement à ses politiques et pratiques qui contreviennent aux dispositions de cet accord.
En outre, le Conseil de sécurité a demandé à Israël, la puissance occupante, de s’abstenir d’expulser des civils palestiniens des territoires occupés7 et d’assurer le retour immédiat et en toute sécurité dans les territoires palestiniens de ceux qui avaient déjà été expulsés8. Il l’a également exhorté à prendre et appliquer des mesures, y compris la confiscation des armes, afin de prévenir les actes de violence illégaux et les massacres de la part des colons israéliens9. Il a aussi exigé la cessation immédiate des mesures prises de facto, notamment la destruction des infrastructures civiles et des installations de sécurité palestiniennes10.
Le Conseil des droits de l’homme a maintes fois exprimé ses préoccupations et condamné les violations des droits de l’homme commises par Israël contre la population palestinienne, notamment le meurtre de civils palestiniens, dont des femmes et des enfants, ainsi que des membres du personnel médical dans des villes et villages palestiniens11. Il s’est également dit alarmé et préoccupé par les violations graves et systématiques des droits de l’homme commises contre le peuple palestinien dans les territoires occupés, notamment celles résultant des incursions incessantes et répétées de l’armée israélienne12.
Dans ce contexte, le Conseil des droits de l’homme a demandé à maintes reprises la protection immédiate des civils palestiniens du Territoire palestinien occupé, conformément au droit des droits de l’homme et au droit international humanitaire13, souligné que toutes les politiques et mesures prises par Israël pour limiter l’accès des Palestiniens aux Lieux saints, en particulier dans Jérusalem-Est occupée, sur la base de l’origine nationale, de la religion, du sexe, de l’âge ou de tout autre critère, violaient les dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et de la quatrième convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, et demandé en conséquence qu’il y soit immédiatement mis fin14.
De même, le Conseil des droits de l’homme a exprimé son horreur devant le bombardement israélien d’habitations palestiniennes et le meurtre de leurs occupants civils, et a qualifié de contraire au droit international humanitaire la politique israélienne consistant à punir collectivement la population civile15, exigeant en outre qu’Israël arrête, comme le prescrit la quatrième convention de Genève, de prendre pour cible des civils et des installations et personnels médicaux, de détruire
5 Résolution 605 (1987) du 22 décembre 1987.
6 Résolution 672 (1990) du 12 octobre 1990.
7 Résolution 607 (1988) du 5 janvier 1988.
8 Résolutions 608 (1988) du 14 janvier 1988 et 363 (1989) du 6 juillet 1989.
9 Résolutions 904 (1994) du 18 mars 1994 et 1322 (2000) du 7 octobre 2000.
10 Résolutions 1435 (2002) du 24 septembre 2002 et 1544 (2004) du 19 mai 2004.
11 Résolution A/HRC/S-3/2 du 15 novembre 2006, par. 2 et 4.
12 Résolution A/HRC/S-6/2 du 24 janvier 2008.
13 Résolution A/HRC/S-3/2 du 15 novembre 2006, par. 5.
14 Résolutions A/HRC/6/22 du 28 septembre 2007 et A/HRC/RES/S-12/1 du 21 octobre 2009.
15 Résolution A/HRC/7/78 du 6 mars 2008.
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systématiquement le patrimoine culturel du peuple palestinien et de détruire en outre des biens publics et privés
16.
De plus, alors qu’il défendait le droit du peuple palestinien de disposer de lui-même conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies et aux résolutions et déclarations pertinentes de l’Organisation des Nations Unies, le Conseil des droits de l’homme a, dans sa résolution A/HRC/10/29 du 26 mars 2009, réaffirmé le droit inaliénable, permanent et absolu du peuple palestinien de disposer de lui-même17, y compris son droit de vivre dans la liberté, la justice et la dignité, et de créer un État souverain, indépendant, démocratique et viable, réaffirmant la nécessité de respecter et de préserver l’unité, la continuité et l’intégrité territoriales de l’ensemble du Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est18.
Dans ce contexte, alors qu’il déplorait la persistance des violations des droits de l’homme, le Conseil a condamné à plusieurs reprises19 la confiscation de terres et d’autres biens, la démolition de maisons et de biens privés, la construction de colonies et l’extension des colonies existantes, la modification du caractère démographique et géographique de Jérusalem-Est et les restrictions à la liberté de circulation des citoyens palestiniens dans ce territoire20.
De même, concernant les droits de la population particulièrement vulnérable, le Conseil a exhorté Israël à faire en sorte que toute arrestation ou détention et/ou tout procès d’enfants palestiniens soit en conformité avec la convention relative aux droits de l’enfant, notamment en s’abstenant de déférer les intéressés devant des tribunaux militaires qui, par définition, ne sauraient offrir les garanties nécessaires pour que leurs droits soient respectés et qui portent atteinte à leur droit à la non-discrimination21.
Observations formulées par les organes conventionnels
La Bolivie relève qu’un nombre important de recommandations récemment adoptées par des organes conventionnels réaffirment les effets délétères et le caractère attentatoire aux droits de l’homme des pratiques d’Israël qui ont été abondamment évoqués par les différents organes de l’ONU précédemment cités.
La Bolivie observe ainsi que le Comité des droits de l’homme, dans ses observations finales concernant le cinquième rapport périodique d’Israël en date du 5 mai 202222, et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, dans ses observations finales concernant le quatrième rapport périodique d’Israël en date du 12 novembre 201923, ont tous deux exprimé la même préoccupation devant la position erronée que maintient Israël et selon laquelle, d’une part, ses obligations en matière de droits de l’homme ne s’appliquent pas dans le Territoire palestinien occupé et, d’autre part, le droit international des droits de l’homme et le droit international humanitaire ne s’appliquent pas concurremment en situation de conflit armé ou d’occupation, position contraire à la jurisprudence
16 Résolutions A/HRC/S-9/2 du 12 janvier 2009 ; A/HRC/10/29 du 26 mars 2009 et A/HRC/RES/13/8 du 24 mars 2010.
17 Résolutions A/HRC/RES/16/30 du13 avril 2011 et A/HRC/RES/25/27 du 11 avril 2014.
18 Résolutions A/HRC/RES/22/28 du 16 avril 2013 ; A/HRC/RES/49/28 du 11 avril 2022 ; A/HRC/RES/43/33 du 3 juillet 2020 et A/HRC/RES/37/34 du 13 avril 2018.
19 Résolutions A/HRC/RES/S-12/1 du 21 octobre 2009 et A/HRC/RES/34/29 du 12 avril 2017.
20 Résolutions A/HRC/RES/16/29 du 13 avril 2011 ; A/HRC/RES/19/16 du 10 avril 2012 et A/HRC/RES/52/34 du 18 avril 2023.
21 Résolution A/HRC/RES/25/29 du 11 avril 2014.
22 Nations Unies, doc. CCPR/C/ISR/CO/5.
23 Nations Unies, doc. E/C.12/ISR/CO/4 du 12 novembre 2019.
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établie des deux comités, de divers autres organes conventionnels et de la Cour internationale de Justice.
En outre, au paragraphe 15 de ses observations finales, le Comité des droits de l’homme a exhorté Israël à cesser la construction et l’expansion des colonies dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et le Golan syrien occupé, et toute activité liée à la colonisation, notamment le transfert de sa propre population dans les colonies, et à mettre fin à la pratique consistant à exproprier des Palestiniens et la population arabe syrienne de leurs terres et à déclarer celles-ci « terres d’État » à des fins de colonisation24. Il lui a également enjoint de prendre immédiatement des mesures visant à démanteler le mur édifié en Cisjordanie, conformément à l’avis consultatif donné le 9 juillet 2004 par la Cour internationale de Justice25, en vue de garantir aux Palestiniens le plein accès à leurs terres et à leurs moyens de subsistance, et la pleine jouissance de leurs droits, y compris le droit à l’autodétermination.
Dans le même contexte, le Comité a demandé énergiquement à Israël de s’abstenir de procéder à des expulsions et des démolitions fondées sur des politiques d’aménagement, des lois et des pratiques discriminatoires à l’égard des Palestiniens ainsi que des Bédouins en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est.
De surcroît, le Comité a demandé instamment à Israël de redoubler d’efforts pour prévenir et combattre les violences perpétrées contre les Palestiniens par les colons israéliens en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, ainsi que par les forces de sécurité israéliennes aux côtés de ces colons, et de fournir une protection adéquate aux victimes. Il l’a aussi exhorté à prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à la pratique de la torture et des mauvais traitements contre les détenus palestiniens, en particulier les enfants.
La Bolivie relève que ces recommandations et observations n’ont pas été suivies d’effet et que, au contraire, Israël a intensifié les comportements qui y étaient visés en mettant en oeuvre des plans et programmes permettant l’expansion des colonies de peuplement israéliennes moyennant le déploiement d’une violence extrême, avec le soutien des forces de l’ordre.
Cela posé, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, dans ses observations finales concernant le quatrième rapport périodique d’Israël, a conclu26 que celui-ci avait des obligations positives et des obligations négatives à l’égard du Territoire palestinien occupé, et qu’il ne devrait pas faire obstacle à l’exercice des droits au travail, à la nourriture, à l’eau et à l’assainissement, à la santé et à l’éducation, ainsi que des droits culturels du peuple palestinien, et que, pour cette raison, aucune mesure de politique générale ou mesure législative adoptée à l’égard du territoire occupé ne pouvait entraîner la modification permanente du statut politique ou juridique de ce territoire ni avoir des conséquences irréparables pour les personnes qui y vivent.
À cet égard, le Comité a engagé Israël à lever immédiatement le blocus et les mesures de bouclage imposés contre la bande de Gaza et à permettre l’accès sans restriction de l’aide humanitaire d’urgence ; à prendre immédiatement des mesures facilitant la libre circulation des Palestiniens dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est et la bande de Gaza, et à veiller à ce que toute restriction de la libre circulation des civils et des biens en provenance ou à destination de la bande de Gaza ainsi qu’à l’intérieur de ce territoire soit conforme aux obligations mises à sa charge par le Pacte ; à mettre immédiatement fin à toutes les politiques d’implantation et les activités connexes menées en Cisjordanie, y compris à Jérusalem-Est, et dans le Golan syrien occupé, et à inverser le processus d’implantation ; lui recommandant en outre de mettre un terme à la destruction
24 Nations Unies, doc. E/C.12/ISR/CO/4 du 12 novembre 2019, par. 11, point d).
25 Nations Unies, doc. A/ES-10/273 du 13 juillet 2004, par. 163.
26 Nations Unies, doc. E/C.12/ISR/CO/4 du 12 novembre 2019, par 11.
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des infrastructures hydrauliques palestiniennes et de faire en sorte que les Palestiniens aient accès à une eau salubre et potable en quantité suffisante
27.
Concernant les effets négatifs des politiques mises à effet par Israël et consistant à démolir les habitations et les écoles, le Comité a exhorté Israël à mettre immédiatement fin à la pratique de la démolition collective de logements et de biens privés à titre punitif, et à faire en sorte que les victimes d’une telle pratique obtiennent une réparation intégrale et effective, notamment la restitution des biens concernés28 ; à annuler la démolition d’écoles et les ordres de suspension de travaux visant la construction d’écoles29 ; à n’autoriser les forces de sécurité israéliennes à pénétrer dans les établissements scolaires et à y mener des perquisitions que dans la stricte mesure où la situation l’exige ; à prendre des mesures effectives pour garantir l’accès sans entrave et en toute sécurité des élèves et des enseignants aux établissements scolaires, à l’abri du harcèlement et des menaces de la part des colons et des forces de sécurité israéliens, et à traduire en justice les auteurs de ces actes de violence.
La Bolivie observe qu’aucune des recommandations n’a été suivie d’effet et que, au contraire, les démolitions d’habitations, d’écoles et d’hôpitaux ont été menées en tant que politique d’État, au mépris flagrant des principes élémentaires du respect des droits de l’homme. Ces transgressions nuisent clairement à l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels de la population palestinienne, dont elles restreignent à l’évidence les perspectives et capacités de développement.
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, dans ses observations finales30 concernant le rapport d’Israël valant dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques, a instamment invité l’État partie à donner pleinement effet à l’article 3 de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale en éliminant toutes les formes de ségrégation entre les communautés juives et les communautés non juives, et toutes les politiques ou pratiques qui ont des conséquences graves pour la population palestinienne en Israël proprement dit et dans le Territoire palestinien occupé et l’affectent de manière disproportionnée, en particulier les dispositions relatives à la prévention, à l’interdiction et à l’élimination de toutes les politiques et pratiques d’apartheid.
De même, le Comité a exhorté Israël à autoriser et faciliter sans délai la reconstruction des habitations et des infrastructures civiles palestiniennes, à garantir l’accès de la population concernée à l’aide humanitaire urgente nécessaire et à garantir également l’exercice du droit à la liberté de circulation, au logement, à l’éducation, aux soins de santé, à l’eau et à l’assainissement, conformément à la convention31, l’engageant de surcroît à garantir à tous les résidents du Golan syrien occupé l’accès dans des conditions d’égalité aux droits fondamentaux, dont le droit à la terre, au logement, à l’eau et aux services de base, ainsi qu’à mettre fin à l’expansion des implantations israéliennes illégales et à trouver une solution satisfaisante au problème de la séparation des familles.
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, dans ses observations finales concernant le sixième rapport périodique d’Israël32, a appelé ce dernier à mettre un terme immédiat à l’ensemble des violations des droits de l’homme et des exactions commises contre les femmes et les filles dans le Territoire palestinien occupé et à lever toutes les restrictions à la liberté
27 Nations Unies, doc. E/C.12/ISR/CO/4 du 12 novembre 2019, par. 47, point b).
28 Ibid., par. 51 et 53.
29 Ibid., par. 65.
30 Nations Unies, doc. CERD/C/ISR/CO/17-19 du 27 janvier 2020.
31 Ibid., par. 45 et 47.
32 Nations Unies, doc. CEDAW/C/ISR/CO/6 du 17 novembre 2017.
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de circulation, ainsi qu’à veiller à ce que les auteurs des violations et exactions répondent de leurs actes et à ce que des voies de recours soient ouvertes aux victimes
33.
De la même manière, il a exhorté la puissance occupante à abroger toutes les politiques relatives à la pratique des démolitions punitives et des expulsions forcées, et à cesser d’exécuter les ordres d’expulsion et de démolition fondés sur des politiques de planification et de zonage discriminatoires qui nuisent au bien-être physique et psychologique des femmes et des filles arabes israéliennes ainsi que des femmes et des filles palestiniennes du Territoire palestinien occupé.
Dans ses observations finales concernant le cinquième rapport périodique d’Israël34, le Comité contre la torture a réaffirmé que la convention s’appliquait à l’ensemble du territoire et des personnes sous la juridiction d’Israël, y compris les territoires occupés, conformément à son observation générale no 235, aux avis donnés par d’autres organes conventionnels et à la jurisprudence de la Cour internationale de Justice36.
À cet égard, le Comité s’est dit préoccupé par des rapports faisant état du recours excessif à la force, létale ou non, par les forces de sécurité, notamment contre les Palestiniens en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et dans les zones d’accès restreint de la bande de Gaza, en particulier dans le contexte de manifestations organisées pour protester contre les attaques effectivement ou censément menées contre les forces de sécurité ou des civils israéliens, et dans le cadre de la mise en oeuvre des restrictions à l’accès de certaines zones de la bande de Gaza, faisant observer que certaines de ces mesures évoquaient manifestement des exécutions illégales, voire d’éventuelles exécutions extrajudiciaires37.
En outre, le Comité a rappelé à Israël que la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants dispose que l’interdiction de la torture est absolue et non susceptible de dérogation, et qu’aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée par un État partie pour justifier des actes de torture, lui a recommandé d’incorporer dans son droit interne le principe de l’interdiction absolue de la torture, conformément aux dispositions de la convention susmentionnée38 et l’a exhorté à cesser et à interdire immédiatement l’application de la mise au secret et des mesures équivalentes contre les mineurs et les personnes souffrant de troubles intellectuels ou psychosociaux, ainsi qu’à prendre de toute urgence les mesures voulues pour garantir dans la pratique que les médecins et autres professionnels de santé qui s’occupent des personnes privées de liberté consignent dûment tous les signes et allégations de torture et de mauvais traitement et les signalent sans retard aux autorités compétentes.
Cela posé, le Comité s’est inquiété des nombreuses allégations indiquant que des mineurs palestiniens auraient été torturés ou maltraités, notamment dans le but de leur extorquer des aveux39. À cet égard, il a exhorté Israël à veiller à ce que tous les mineurs privés de liberté jouissent de toutes les garanties juridiques de base dès le début de leur privation de liberté, et à ce que les renseignements obtenus hors la présence de tout avocat ou d’un adulte de confiance soient déclarés inadmissibles en justice. Il a aussi demandé à la puissance occupante de faire en sorte que les mineurs torturés ou
33 Nations Unies, doc. CEDAW/C/ISR/CO/5, par. 23.
34 Nations Unies, doc. CAT/C/ISR/CO/5 du 3 juin 2016.
35 Nations Unies, doc. CAT/C/GC/2 du 24 janvier 2008, par. 7.
36 Ibid., par. 9.
37 Nations Unies, doc. A/HRC/31/40, par. 10.
38 Nations Unies, doc. CAT/C/ISR/CO/5 du 3 juin 2016, par. 14-15.
39 Ibid., par. 28.
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maltraités bénéficient de mesures de réparation appropriées, notamment des moyens permettant leur réadaptation.
40
Le Comité des droits de l’enfant, dans ses observations finales concernant les deuxième, troisième et quatrième rapports périodiques d’Israël41, a relevé que le refus persistant de l’État partie de fournir des informations et des données, et de répondre aux questions du Comité à propos des enfants vivant dans le Territoire palestinien occupé, y compris à Jérusalem-Est et dans le Golan syrien occupé, compromettait grandement l’utilité du processus de présentation de rapports et nuisait gravement à la transparence de l’État dans l’application de la convention relative aux droits de l’enfant.
À cet égard, le Comité a instamment prié Israël de se conformer à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le Territoire palestinien occupé42 et de s’acquitter de ses obligations de garantir la pleine application de la convention en Israël et dans le Territoire palestinien occupé, notamment en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et dans le Golan syrien occupé, répétant que l’occupation permanente et illégale du territoire palestinien et du Golan syrien, l’expansion continue des colonies illégales, la construction du mur en Cisjordanie, ainsi que la confiscation des terres et la destruction des logements et des moyens de subsistance des Palestiniens, constituaient des violations graves et répétées des droits des enfants palestiniens et de leur famille, alimentant le cycle de l’humiliation et de la violence43 ; et l’a appelé à mettre fin à l’occupation, à démanteler toutes les colonies établies illégalement et à cesser de transférer sa population dans les territoires occupés, ainsi qu’à autoriser d’urgence l’entrée de tous les matériaux de construction nécessaires à la reconstruction par les familles palestiniennes des habitations et des infrastructures civiles afin de garantir le respect des droits de l’enfant au logement, à l’éducation, à la santé, à l’eau potable et à l’assainissement44.
Dans ces conditions, le Comité a instamment prié Israël d’inclure l’interdiction de la discrimination et le principe d’égalité dans sa Constitution, et de prendre des mesures immédiates pour interdire et éradiquer les politiques et les pratiques qui portent atteinte de façon grave et disproportionnée à la population palestinienne dans le Territoire palestinien occupé, en particulier les enfants, de sorte qu’ils puissent exercer leurs droits au titre de la convention sans discrimination aucune45, rappelant que les enfants vivant dans le Territoire palestinien occupé doivent être considérés comme tels jusqu’à l’âge de 18 ans et qu’ils doivent bénéficier dans les faits de la pleine protection prévue par la convention, en particulier pour les dispositions relatives à l’administration de la justice pour mineurs46 ; et qu’il a l’obligation incontournable de prévenir et d’éradiquer la torture et les mauvais traitements envers les enfants vivant dans le Territoire palestinien occupé, conformément aux dispositions de la convention relative aux droits de l’enfant et de la quatrième convention de Genève.
Le Comité a aussi instamment prié Israël de garantir à tous les enfants et femmes enceintes vivant dans le Territoire palestinien occupé un accès sûr et inconditionnel aux services de santé, y compris aux soins médicaux d’urgence, et de cesser de lancer des attaques contre les hôpitaux, les centres médicaux et les écoles, et de les utiliser comme avant-postes et centres de détention, l’appelant en outre à décréter immédiatement un moratoire sur la destruction d’écoles dans le
40 Nations Unies, doc. CAT/C/ISR/CO/5 du 3 juin 2016, par. 29.
41 Nations Unies, doc. CRC/C/ISR/CO/2-4, 4 juillet 2013.
42 Nations Unies, doc. A/ES-10/273 du 13 juillet 2004, par. 163.
43 Nations Unies, doc. CRC/C/ISR/CO/2-4 du 4 juillet 2013, par. 7.
44 Ibid., par. 2[6], point c).
45 Ibid., par. 22.
46 Ibid., par. 20.
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Territoire palestinien occupé et dans le Néguev ; et à lever toutes les restrictions disproportionnées à la liberté de circulation qui empêchent les enfants palestiniens d’aller à l’école
47.
b) Quelle incidence les politiques et pratiques d’Israël visées au paragraphe 18 a) ci-dessus ont-elles sur le statut juridique de l’occupation et quelles sont les conséquences juridiques qui en découlent pour tous les États et l’Organisation des Nations Unies ?
Illicéité de l’occupation
La conduite et les pratiques de la puissance occupante sont strictement encadrées par le droit international. Les obligations et interdictions qui lui sont applicables au titre du droit international humanitaire ont pour objectif, outre la protection des civils contre les actes arbitraires de l’ennemi, de l’empêcher de se servir de l’occupation comme moyen d’acquérir le territoire par la force. Ainsi qu’il a été indiqué, le sixième alinéa de l’article 49 de la quatrième convention de Genève pose l’interdiction suivante : « [l]a Puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ».
Le droit international ne reconnaît pas l’« occupation permanente » ni l’« occupation coloniale » en droit international. En tant que telles, les politiques et pratiques d’Israël ressemblent davantage à celles adoptées par les puissances coloniales qu’à celles d’une puissance occupante.
L’occupation israélienne, tant par ses moyens que par son but, ne s’inscrit pas dans le cadre de la légalité établi par le droit international positif.
L’annexion de facto du territoire se traduit pour les Palestiniens par l’imposition de restrictions concernant les lieux où ils peuvent vivre ou se rendre, ainsi que d’un régime juridique et administratif de discrimination raciale qui favorise les colons israéliens et prive les Palestiniens de leurs droits fondamentaux. Le droit international oblige la puissance occupante à administrer le territoire pour le bénéfice de la population vivant sous son occupation.
Israël administre le territoire pour le seul bénéfice de ses citoyens, qu’elle y a transférés aux dépens de la population vivant sous son occupation, et ce, aux fins de pérenniser la colonisation. La puissance occupante dispose certes de pouvoirs d’administration temporaires et provisoires, mais il lui est absolument interdit de revendiquer l’annexion du territoire qu’elle occupe ou la souveraineté sur celui-ci. Israël a entrepris d’exercer une souveraineté de fait sur Jérusalem et le Territoire palestinien occupé dans son ensemble, annexant certaines parties de celui-ci de jure et d’autres de facto.
La conclusion inévitable est donc qu’Israël a prétexté de son occupation prolongée pour atteindre son objectif illicite d’annexer les territoires palestiniens occupés, en violation de la Charte des Nations Unies, et que, par conséquent, l’occupation israélienne dans son ensemble doit être considérée comme illicite.
Conséquences juridiques pour Israël
Une déclaration de la Cour internationale de Justice selon laquelle l’occupation par Israël du territoire palestinien est illicite tant dans sa conduite que dans son but aura pour conséquence juridique d’établir un précédent pour demander à Israël de s’acquitter de son obligation de mettre fin, de façon immédiate, inconditionnelle et pacifique, à la situation illicite pour laquelle sa responsabilité
47 Nations Unies, doc. CRC/C/ISR/CO/2-4 du 4 juillet 2013, par. 54 et 64.
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internationale est engagée, à savoir l’occupation des territoires palestiniens en cause, et de fournir une réparation suffisante.
Conséquences juridiques pour les États tiers
Une déclaration de la Cour internationale de Justice selon laquelle l’occupation par Israël des territoires palestiniens en cause est illicite et qu’il doit y être mis fin de façon immédiate et inconditionnelle aura pour conséquence juridique de mettre à la charge des États tiers et des organisations internationales l’obligation de soutenir les efforts pacifiques visant à mettre fin sans délai à l’occupation illicite et de s’abstenir de tout acte ou omission contribuant au maintien de la situation illicite. Les États Membres ont l’obligation de veiller au respect de la Charte des Nations Unies.
Conséquences juridiques pour l’Organisation des Nations Unies
L’Organisation des Nations Unies, en particulier l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, doit examiner quelles nouvelles mesures sont nécessaires pour mettre fin de façon immédiate et inconditionnelle à l’occupation par Israël des territoires palestiniens en cause, et prendre les dispositions nécessaires pour assurer sans plus tarder l’application des résolutions s’y rapportant.
CONSIDÉRATIONS FINALES DE LA BOLIVIE
La Bolivie relève avec préoccupation que, outre le Conseil de sécurité, le Conseil des droits de l’homme, l’Assemblée générale et la Cour internationale de Justice, divers organes conventionnels ont demandé à Israël de s’acquitter des obligations que lui impose le droit international, de mettre fin à l’expansion des colonies de peuplement illicites et de garantir à la population palestinienne le plein exercice, la jouissance et le respect des droits de l’homme, sans qu’Israël ait l’intention de remédier aux violations commises. Au contraire, il a continué de mettre ces mesures à exécution, ce qui a, entre autres, récemment donné lieu à des réactions de la part de l’Organisation des Nations Unies.
Ainsi, la Bolivie prend note de la déclaration de la présidente du Conseil de sécurité48 publiée le 20 février 2023, dans laquelle le Conseil exprime sa profonde préoccupation et sa consternation face à l’annonce par Israël, le 12 février 2023, de la poursuite de la construction et de l’expansion de colonies de peuplement et de la « légalisation » des avant-postes de colonies, et réaffirme que la poursuite des activités de peuplement israéliennes met gravement en péril la viabilité de la solution des deux États fondée sur les frontières de 1967.
De même, la Bolivie fait sienne la position exprimée dans la déclaration précitée, où le Conseil de sécurité souligne avec force la nécessité pour toutes les parties de respecter leurs obligations et engagements internationaux. Elle s’oppose fermement à toutes les mesures unilatérales qui entravent la paix, notamment la construction et l’expansion de colonies de peuplement par Israël, la confiscation de terres palestiniennes et la « légalisation » des avant-postes de colonies, la destruction de maisons palestiniennes et le déplacement de civils palestiniens.
La Bolivie réitère son rejet catégorique des politiques expansionnistes et colonialistes qu’Israël pratique depuis un demi-siècle, poussant sans relâche le peuple palestinien à la suffocation, au mépris et en violation flagrants du droit international et des résolutions respectives du Conseil de sécurité, du Conseil des droits de l’homme et de l’Assemblée générale.
48 Nations Unies, doc. S/PRST/2023/1 du 20 février 2023.
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Il existe une inégalité historique et indéniable, puisque l’une des parties a employé et continue d’employer la force pour occuper le territoire d’une autre, et a construit un mur dont l’édification constitue, selon l’avis consultatif rendu par la Cour internationale de Justice, un fait illicite et une violation du droit international.
La prolifération constante des colonies de peuplement illicites, le déplacement forcé de civils, la confiscation de terres, la démolition d’habitations et le transfert de colons vers des colonies construites dans l’illicéité constituent des transgressions du droit international qui contreviennent par ailleurs aux engagements pris par la puissance occupante et font litière des déclarations contraignantes du Conseil de sécurité et des différents organes de l’Organisation des Nations Unies.
En conséquence de ces faits, plus de cinq millions de réfugiés palestiniens ne peuvent pas retourner dans leurs foyers ou sur leurs terres, et ceux qui survivent encore à ces attaques constantes sont systématiquement privés d’accès à l’eau, à la santé, à l’éducation, aux services de base, au travail et, en définitive, à la vie, devant composer avec de graves violations des droits de l’homme du fait de l’affront permanent que constituent pour eux les politiques étatiques mises à effet par Israël, qui se caractérisent par des actes de violence disproportionnés et une impunité généralisée.
Ces mesures illicites constituent un obstacle évident à l’autodétermination, à l’indépendance et à la souveraineté auxquelles le peuple palestinien est en droit d’aspirer depuis l’approbation de la résolution 181 du 29 novembre 1947 par l’Assemblée générale, qu’Israël n’a cessé de transgresser pendant 75 ans.
En ce sens, tant qu’Israël continue de manquer à ses obligations internationales aux dépens du peuple palestinien, il ne sera pas possible de parler d’un droit au développement susceptible d’exercice, ni du programme de développement durable à l’horizon 2030 en tant que plan d’action en faveur de la population et de la prospérité, puisque la population palestinienne, tant dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, la Cisjordanie, la bande de Gaza, que dans le Golan syrien occupé, se voit privée d’accès aux nécessités telles que l’eau, l’assainissement et l’électricité, et bien plus limitée encore dans l’exercice de ses droits au travail, à l’éducation, à la santé, à la nourriture et, dans nombre de cas, à la vie même.
La Bolivie considère qu’Israël, puissance occupante, foule aux pieds et viole ouvertement ses obligations internationales et celles qui sous-tendent le multilatéralisme. Les politiques approuvées et mises en application avec une force disproportionnée pour tenter de légitimer les colonies de peuplement illicites dans les territoires palestiniens sous son occupation, notamment au moyen d’un appui armé, ont permis aux colons de s’en prendre aux familles palestiniennes et ouvert la voie à l’usurpation et à la dépossession des terres et des biens de celles-ci.
En outre, les forces de défense israéliennes agissent en toute impunité, détruisant écoles, centres médicaux et hôpitaux, et, dans de nombreux cas, exécutant des ordres de démolition contre des maisons de familles palestiniennes, en sus d’avoir créé différents types de postes de contrôle pour empêcher les Palestiniens de circuler librement, et de les expulser de force de leurs propres territoires, de façon inhumaine, violant ainsi non seulement le droit international des droits de l’homme, mais aussi le droit international humanitaire, lequel prévoit la protection des biens essentiels à la survie et à la subsistance de la population civile (par exemple, les installations d’approvisionnement en nourriture et en eau potable) et des ouvrages mettant en jeu des forces dangereuses (par exemple, les barrages, les stations d’épuration et les centrales électriques).
Pour cette raison, la Bolivie considère que, dans le cadre des résolutions susmentionnées, Israël doit immédiatement et totalement mettre fin à l’ensemble de ses activités de colonisation dans le Territoire palestinien occupé, et réaffirme que l’implantation de colonies de peuplement par lui dans le Territoire palestinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, n’a aucune validité en droit et constitue une violation flagrante du droit international et un obstacle majeur à la réalisation de la solution des deux États et d’une paix générale, juste et durable.
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La Bolivie considère que la résolution A/RES/ES-10/15 reprend des aspects fondamentaux de l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice sur les conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le Territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, qui devraient faire partie des éléments à prendre en considération s’agissant des conséquences juridiques des politiques et pratiques d’Israël dans le Territoire palestinien occupé, en raison de l’analogie entre les deux questions. Ces aspects fondamentaux sont les suivants :
1) L’implantation et l’expansion par Israël de colonies de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui leur est associé, sont contraires au droit international.
2) Israël est dans l’obligation de mettre un terme aux violations du droit international dont il est l’auteur ; il est tenu de démanteler immédiatement toutes les colonies de peuplement, infrastructures et sites construits dans le territoire palestinien (dont la Palestine a été dépossédée, qui lui été confisqué et qui est occupé de force), et d’abroger immédiatement ou de priver immédiatement d’effet l’ensemble des actes législatifs et réglementaires qui confèrent un soutien juridique à ces politiques d’expansion.
3) Israël est dans l’obligation de réparer tous les dommages causés dans le Territoire palestinien occupé, y compris à l’intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est.
4) Israël est dans l’obligation d’identifier, de poursuivre et de punir tous les auteurs, civils ou militaires, de violations des droits de l’homme.
5) L’Organisation des Nations Unies, et spécialement l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, doivent examiner quelles nouvelles mesures doivent être prises afin de mettre un terme à la situation illicite découlant de l’expansion illicite des colonies de peuplement israéliennes et de la modification démographique forcée qui en résulte.
La Bolivie, en tant que pays pacifiste et favorable à la paix, considère que seuls le dialogue et la négociation peuvent garantir une paix juste et durable dans le conflit qui oppose Israël et la Palestine, les deux parties devant clairement exprimer la volonté politique de parvenir à une solution à deux États, dans laquelle un État palestinien libre, souverain et indépendant est enfin consolidé dans les frontières internationales antérieures à 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et de l’Assemblée générale s’y rapportant.
Nous confirmons notre plein attachement au multilatéralisme et au respect du droit international, et nous réaffirmons notre soutien à tous les efforts internationaux menant à une solution pacifique du conflit, notamment la feuille de route du quatuor, les principes de Madrid et l’initiative de paix arabe, entre autres, qui constituent des garanties pour une paix juste et durable et permettent aux deux peuples de vivre dans des frontières reconnues et sûres.
L’ambassadeur de l’État plurinational de Bolivie
auprès du Royaume des Pays-Bas,
(Signé) Roberto CALZADILLA SARMIENTO.
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Exposé écrit de la Bolivie

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