Volume 5 - Documents 235-342

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191-20231214-REQ-06-00-EN
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Document no 235
CIT, 81e session, 1994, Rapport III (Partie 4B), Liberté
syndicale et négociation collective, Étude ensemble de la
Commission d’experts pour l’application des conventions
et recommandations, pp. 63-81

Bibliothèque du BIT, CH-1211 aenève 22
SYNDICALE
ET NÉGOCIATION
COLLECTIVE
Conférence internationale du Travail
81e session 1994
Rapport III (Partie 4B)
Troisième question à l'ordre du jour:
Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Etude d'ensemble des rapports
sur la convention (n 0 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948,
et la convention (n 0 98) sur le droit d'organisation
et de négociation collective, 1949
Rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions
et recommandations (articles 19, 22 et 35 de la Constitution)


Document no 236
CIT, 101e session, 2012, Rapport III (Partie 1B), Donner un
visage humain à la mondialisation, Étude ensemble sur
les conventions fondamentales concernant les droits au
travail à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice
sociale pour une mondialisation équitable, 2008, pp. 47-
67

Donner un visage humain
a la mondialisation
CONFERENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL
101' SESSION, 2012
Bureau
international
du Travail
Geneve
101e
session de la
Conference
internationale
du Travail
6,,isfr-,ire
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e/ice.-rf
ILC.101/III/1B
Conférence internationale du Travail, 101e session, 2012
Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales
concernant les droits au travail à la lumière de la Déclaration
de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission d’experts
pour l’application des conventions et recommandations
(articles 19, 22 et 35 de la Constitution)
Rapport III (Partie 1B)
Bureau international du Travail Genève
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 47
116. Quant aux activités politiques des organisations, la commission est d’avis que tant
les législations qui associent étroitement organisations syndicales et partis politiques
que les dispositions interdisant toute activité politique aux syndicats soulèvent des
difficultés par rapport aux principes de la convention. Notant que l’existence d’un
mouvement syndical stable, libre et indépendant est une condition indispensable à
l’établissement de bonnes relations professionnelles et devrait contribuer à améliorer,
dans tous les pays, les conditions sociales en général 258, la commission estime qu’une
certaine souplesse de la législation est souhaitable, afin de réaliser un équilibre
raisonnable entre, d’une part, l’intérêt légitime des organisations à exprimer leur point de
vue sur les questions de politique économique et sociale intéressant leurs membres et les
salariés en général et, d’autre part, le degré de séparation voulu entre l’action politique
proprement dite et les activités syndicales 259.
Droit de grève
Introduction
117. La grève constitue un moyen essentiel permettant aux travailleurs et à leurs
organisations de défendre leurs intérêts; il existe cependant différentes opinions sur le
droit de grève. Si la grève constitue certes un droit fondamental, elle ne constitue pas une
fin en soi, mais un recours ultime des organisations de travailleurs, en raison du fait
qu’elle est lourde de conséquences non seulement pour les employeurs, mais aussi pour
les travailleurs, leurs familles et leurs organisations ainsi que pour des tiers dans certains
circonstances. En l’absence d’une disposition expresse dans la convention no 87, c’est
essentiellement sur la base de l’article 3 de la convention qui consacre le droit des
organisations de travailleurs d’organiser leurs activités et de formuler leur programme
d’action et de l’article 10 qui établit comme objectif de ces organisations de promouvoir
et de défendre les intérêts des travailleurs que fut développé progressivement – comme
ce fut d’ailleurs le cas en ce qui concerne les autres dispositions de la convention – par le
Comité de la liberté syndicale en tant qu’organe tripartite spécialisé (depuis 1952) et par
la commission d’experts (depuis 1959, prenant en considération essentiellement les
principes établis par le comité) un certain nombre de principes sur le droit de grève.
Cette position des organes de contrôle en faveur de la reconnaissance et de la protection
du droit de grève a toutefois fait l’objet de certaines critiques de la part du groupe des
employeurs au sein de la Commission de l’application des normes de la Conférence
internationale du Travail.
Groupe des employeurs
Le groupe des employeurs au sein de la Commission de la Conférence estime
que ni les travaux préparatoires de la convention no 87 ni une interprétation fondée sur
la Convention de Vienne sur le droit des traités ne permettent de dégager, à partir de
la convention, des principes régissant de manière détaillée le droit de grève 1.
Selon les membres employeurs, le droit de grève n’a pas de base juridique dans
les conventions sur la liberté syndicale. A leur sens, la convention no 87 contient au
plus un droit général à la grève qui, néanmoins, ne peut être réglementé en détail en
vertu des dispositions de cette convention. Ils considèrent que, lorsque la commission
d’experts exprime son opinion de manière détaillée sur les politiques de grève, en
particulier en ce qui concerne les «services essentiels», elle applique une approche
«unique et valide pour tous» sans reconnaître les différences de développement
258 Résolution concernant l’indépendance du mouvement syndical, 1952 (préambule).
259 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 130-133.
Donner un visage humain à la mondialisation
48 ILC.101/III/1B
économique ou industriel ou l’impact de la conjoncture économique. Ils ajoutent que
l’approche de la commission met à mal le tripartisme et lui demandent de revoir son
interprétation de la question 2. En 2011, les membres employeurs réitérèrent leur
position, estimant que les observations de la commission d’experts sur le droit de
grève et les services essentiels ne sont pas conformes avec le texte, les travaux
préparatoires et l’historique de la négociation de la convention no 87 3.
Dans sa communication datée du 7 juillet 2011, l’Organisation internationale des
employeurs (OIE) rappelle et développe en détail la position exprimée de longue date
par le groupe des employeurs concernant le droit de grève, comme elle apparaît dans
les Comptes rendus des travaux de la Commission de la Conférence, en particulier
ceux de la 81e session de la Conférence internationale du Travail (1994) lors de la
discussion de la dernière étude d’ensemble sur la liberté syndicale et négociation
collective.
1 Commission de l’application des normes, Extraits du Compte rendu des travaux, CIT, 99e session, Genève,
juin 2010, Partie I, Rapport général, paragr. 57. 2 Ibid. 3 Commission de l’application des normes, Rapport
général, CIT, 100e session, Genève, juin 2011, Partie I, Extraits du Compte rendu des travaux, paragr. 55.
Par ailleurs, dans la discussion de l’étude d’ensemble de 1994, les membres employeurs ont indiqué que «la
grève n’est mentionnée ni dans la convention no 87 ni dans la convention no 98. Par ailleurs, l’étude donne
[…] une grande importance à l’historique de ces instruments; or cette méthode d’interprétation historique n’a
qu’une importance secondaire, puisqu’il y a en premier lieu le texte, le but et la signification des dispositions
elles-mêmes. Il n’existe pas de dispositions expresses sur la grève et il n’était pas utile de citer les normes
contenues dans les instruments d’autres organisations, où les grèves ou l’action collective sont parfois
mentionnées dans un tout autre contexte, de façon très générale ou seulement indirecte […] Le début du
chapitre indique à juste titre que le droit de grève avait été mentionné durant les travaux préparatoires, mais
il est ajouté au paragraphe 142 que «... lors des discussions à la Conférence en 1947 et 1948, aucun
amendement consacrant ou écartant expressément le droit de grève ne fut adopté, ni même présenté». Les
membres employeurs ont toutefois cité le passage suivant: «Plusieurs gouvernements, tout en donnant leur
assentiment à la formule, ont toutefois souligné, à juste titre semble-t-il, que le projet de convention ne porte
que sur la liberté syndicale et non pas sur le droit de grève, problème qui sera examiné à propos de la
question VIII (conciliation et arbitrage) inscrite à l’ordre du jour de la Conférence. Dans ces conditions, il
nous a semblé préférable de ne pas faire figurer une disposition à cet effet dans le projet de convention sur
la liberté syndicale.» (31e Conférence, 1948, rapport VII, p. 92.) Une conclusion semblable fut retenue en
séance plénière: «Le président de la Commission déclara à ce propos que la convention ne prétend pas être
un “code de réglementation” du droit syndical, mais se borne à énoncer dans un texte succinct certains
principes fondamentaux.» (31e Conférence, 1948, Compte rendu des travaux, annexe X, p. 499.) Par la
suite, la recommandation no 92 sur la conciliation et l’arbitrage volontaires a traité de cette question de façon
neutre sans en réglementer le contenu. Durant la séance plénière, le porte-parole des travailleurs, Léon
Jouhaux lui-même, s’était amèrement plaint du résultat insatisfaisant de la discussion; il n’a pas mentionné
explicitement l’absence du droit de grève mais d’autres délégués l’ont fait. De plus, lors de l’adoption de la
convention no 98, deux demandes présentées par les délégués travailleurs en vue d’inclure une garantie du
droit de grève ont été rejetées au motif qu’il n’était pas couvert par le texte proposé et que cette question
devrait être traitée ultérieurement. (32e Conférence, 1949, Compte rendu des travaux, annexe VII, pp. 464
et 466; voir également BIT: Industry and Labour, vol. II, juillet-décembre 1949, pp. 147 et suiv.) «Peu après,
un délégué gouvernemental a fait la même demande, que le président a déclarée irrecevable pour les
mêmes raisons […] Dans ces circonstances, il est incompréhensible pour les membres employeurs que les
organes de contrôle aient pu se prononcer sur la portée et le contenu exacts du droit de grève en l’absence
de dispositions concrètes et explicites sur le sujet, et que cette absence semble précisément avoir constitué
la justification de leur démarche, comme il est mentionné au paragraphe 145. Ce que la commission
d’experts a mis ici en pratique s’appelle un axiome en mathématiques, et un dogme en théologie catholique:
il s’agit de l’acceptation totale, sans conditions préalables, d’une vérité tenue pour certaine et de laquelle
tout dérive.» (Compte rendu des travaux, CIT, 81e session, Genève, 1994, paragr. 117-119, pp. 25/36 et
suiv.).
Groupe des travailleurs
Les membres travailleurs de la Commission de la Conférence contestent cette
position des employeurs et considèrent que, bien que le droit de grève ne soit pas
expressément mentionné dans la convention, cela n’empêche pas que son existence
puisse être reconnue sur la base notamment de plusieurs instruments internationaux 1.
Dans la discussion sur l’étude d’ensemble de 1994, ils déclarèrent que le droit de
grève constituait un corollaire indissociable du droit d’association syndicale protégé
par la convention no 87 et par les principes énoncés dans la Constitution de l’OIT.
Selon eux, sans droit de grève, la liberté syndicale serait vidée de sa substance. Ils ont
ajouté que les objectifs de la grève ne peuvent être restreints aux seuls différends liés
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 49
au lieu de travail ou à l’entreprise, notamment en raison des phénomènes de
fragmentation des entreprises et d’internationalisation. C’est là la conséquence logique
du fait que les activités syndicales ne sauraient se limiter aux questions strictement
professionnelles. Les grèves de solidarité, ainsi que les grèves aux niveaux sectoriel,
national et international, devraient être possibles. Enfin, ils ont estimé qu’en limitant
considérablement la marge de manoeuvre des syndicats par des restrictions juridiques
ou administratives les gouvernements et les employeurs risquent de se trouver
confrontés de plus en plus souvent à des actions spontanées 2.
Selon les membres travailleurs, les restrictions éventuelles au droit de grève dans
les services essentiels et pour certaines catégories de fonctionnaires devraient être
définies restrictivement, étant donné qu’il s’agit d’une dérogation à une règle générale,
concernant un droit fondamental. Ils ajoutent que la commission d’experts à
l’unanimité, tous les membres travailleurs et la très grande majorité des membres
gouvernementaux sont d’avis que la protection efficace de la liberté syndicale implique
nécessairement des règles et principes opérationnels concernant les modalités du
droit de grève. Enfin, ils indiquent que les experts ont développé leurs vues sur cette
question de manière prudente, graduelle et équilibrée, avec l’appui d’une majorité de
la Commission de la Conférence, et qu’il serait préférable de ne pas ébranler le
consensus général qui s’est maintenant établi à cet égard 3.
1 Commission de l’application des normes, Extraits du Compte rendu des travaux, CIT, 99e session, Genève,
juin 2010, Partie I, Rapport général, paragr. 74. 2 Compte rendu des travaux, CIT, 81e session, Genève,
1994, Rapport général, paragr. 136-143, pp. 25/42 et suiv. 3 Ibid.
118. Concernant les avis selon lesquels les travaux préparatoires ne permettraient pas de
soutenir l’inclusion du droit de grève, la commission souhaite d’abord observer que
l’absence d’une disposition expresse n’est pas déterminante puisque les termes de la
convention doivent être interprétés à la lumière de son objet et de son but. Bien que la
commission considère que les travaux préparatoires soient un moyen complémentaire
d’interprétation important dans l’examen de l’application d’une convention en particulier
dans un pays donné, ils peuvent être écartés au profit des autres règles d’interprétation,
notamment, dans ce cas spécifique, de la pratique ultérieurement suivie pendant plus de
cinquante-deux années (voir art. 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des
traités). En outre, et comme indiqué ci-dessous en réponse à des commentaires formulés
tant par les organisations de travailleurs que par les organisations d’employeurs, le
processus permettant de déterminer s’il y a respect ou non d’un droit de grève général
implique systématiquement un examen des circonstances spécifiques dans le contexte
desquelles la commission est appelée à déterminer le champ d’application et les
modalités de ce droit. La commission a également gardé à l’esprit, à travers les années,
les considérations présentées par les constituants tripartites et souhaite rappeler à cet
égard que le droit de grève a en effet été d’abord affirmé comme un principe
fondamental de la liberté syndicale par le Comité de la liberté syndicale, comité tripartite,
en 1952 et a été reconnu et développé par ce comité dans un grand nombre de décisions
au cours de plus d’un demi-siècle. De plus, l’étude d’ensemble de 1959, dans laquelle la
commission s’est exprimée pour la première fois sur la question du droit de grève en lien
avec la convention, a été pleinement discutée par la Commission de l’application des
normes de la Conférence, sans aucune objection de la part de l’un quelconque de ses
constituants.
119. La commission réaffirme que le droit de grève découle de la convention. En outre,
la commission souligne qu’il est largement mentionné par la grande majorité des
législations nationales et par un nombre important de constitutions, ainsi que par
plusieurs instruments internationaux et régionaux, ce qui justifie les interventions de la
commission sur la question. En effet, les principes développés par les organes de
contrôle ont pour objectif uniquement d’assurer que ce droit ne constitue pas un outil
Donner un visage humain à la mondialisation
50 ILC.101/III/1B
théorique mais qu’il soit véritablement reconnu et respecté dans la pratique et que les
organes de contrôle se préoccupent également de délimiter l’étendue de ce droit afin de
déterminer les cas d’abus et de se prononcer sur les sanctions qu’ils peuvent entraîner.
Pour toutes ces raisons et compte tenu du fait que la commission d’experts n’a jamais
considéré que le droit de grève constituait un droit absolu ou illimité 260, le regard posé
sur le droit de grève et sur les principes qui se sont développés avec le temps sur une
base tripartite, comme d’ailleurs dans de nombreux autres domaines, ne devrait pas
susciter de controverse. La commission relève d’autre part qu’il arrive également que les
organisations d’employeurs fassent appel aux principes développés par les organes de
contrôle au sujet de la grève ou de questions connexes très concrètes, en particulier en ce
qui concerne la liberté de travail des non-grévistes, le non-paiement des jours de grève,
l’accès de la direction aux installations de l’entreprise en cas de grève, l’imposition de
l’arbitrage obligatoire par décision unilatérale des organisations syndicales ou les actions
de protestation des employeurs contre les politiques économiques et sociales.
120. Ainsi, l’affirmation du droit de grève par les organes de contrôle s’inscrit dans le
cadre plus large de la reconnaissance de ce droit au niveau international, en particulier
par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations
Unies (article 8, paragraphe 1(d)) 261, lequel a été ratifié, à ce jour, par 160 pays, dont la
plupart sont Membres de l’OIT, ainsi que par certains instruments régionaux, comme
indiqué au paragraphe 35 de la présente étude. C’est dans le cadre du Conseil de
l’Europe que la protection du droit de grève est la plus élaborée sur le plan régional en
raison de l’abondante jurisprudence du Comité européen des droits sociaux, organe de
contrôle de l’application de la Charte sociale européenne adoptée en 1961 et révisée en
1996 qui consacre ce droit.
121. D’autres instruments de l’OIT se réfèrent également au droit de grève,
principalement la convention (no 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957 – qui interdit
le recours à toute forme de travail forcé obligatoire, en tant que punition pour avoir
participé à des grèves – et la recommandation (no 92) sur la conciliation et l’arbitrage
volontaires, 1951 – qui énonce que les parties doivent être encouragées à s’abstenir de
grève et de lock-out en cas de conciliation et d’arbitrage volontaires et qu’aucune de ses
dispositions ne pourra être interprétée comme limitant d’une manière quelconque le droit
de grève. Certaines résolutions en font également état 262.
122. Chaque année, la commission examine de nombreux cas individuels portant sur les
dispositions nationales réglementant les grèves, le plus souvent sans contestation de la
part des gouvernements concernés, qui en général adoptent des mesures pour donner
suite aux commentaires de la commission d’experts. Au fil des années, les organes de
contrôle ont précisé une série d’aspects concernant l’exercice pacifique du droit de grève,
de la finalité et des conditions de licéité de la grève qui peuvent être résumés comme suit:
i) le droit de grève est un droit dont doivent jouir les organisations de travailleurs
(syndicats, fédérations et confédérations); ii) en tant que moyen essentiel pour la défense
des intérêts des travailleurs au travers de leurs organisations, les catégories de
260 Lors de la discussion de l’étude d’ensemble de 1994, les membres employeurs ont tenu à faire remarquer
«qu’ils ne critiquent pas tant le fait que la commission d’experts veut reconnaître le principe du droit de grève,
mais plutôt qu’elle prend comme point de départ un droit de grève absolu et illimité.» (Compte rendu des travaux,
CIT, 81e session, Genève, 1994, Partie I, Rapport général, paragr. 121, pp. 25/37.)
261 Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels recommande aux Etats parties de prendre les mesures
nécessaires en vue «d’assurer le plein exercice du droit de grève ou en vue d’assouplir les limitations imposées» à
ce droit.
262 Voir notamment la résolution adoptée en 1970 par la Conférence internationale du Travail sur les droits
syndicaux et leurs relations avec les libertés civiles.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 51
travailleurs susceptibles d’être privées de ce droit et les restrictions susceptibles d’être
mises à son exercice par la loi ne peuvent être que limitées; iii) la grève doit avoir pour
but de promouvoir et de défendre les intérêts économiques et sociaux des travailleurs; et
iv) l’exercice légitime du droit de grève ne peut entraîner de sanctions d’aucune sorte,
lesquelles seraient assimilables à des actes de discrimination antisyndicale. Dès lors,
sous réserve des restrictions autorisées, l’interdiction générale de la grève est
incompatible avec la convention, mais les organes de contrôle admettent l’interdiction
des grèves sauvages. De plus, les grèves sont souvent déclenchées par les fédérations et
confédérations qui devraient, selon la commission, se voir reconnaître le droit de grève.
Par conséquent, les législations qui leur interdisent ce droit ne sont pas compatibles avec
la convention 263.
Reconnaissance au niveau national
123. Si l’exercice du droit de grève est assez communément soumis dans la plupart des
pays à certaines conditions ou restrictions, le principe de ce droit, moyen d’action des
organisations de travailleurs, est admis de façon quasi universelle. Dans un très grand
nombre de pays, le droit de grève est maintenant explicitement reconnu, y compris au
niveau constitutionnel 264. La commission nota avec satisfaction, par exemple, pour ce
qui est du continent africain, l’abrogation récente des dispositions interdisant le droit de
grève au Libéria 265 ainsi que l’abrogation des restrictions considérables au droit de
grève qui subsistaient en République-Unie de Tanzanie 266. Elle a noté également avec
satisfaction la définition de la grève inscrite dans le nouveau Code du travail du Burkina
Faso 267, aux termes de laquelle la grève est considérée comme une cessation concertée
et collective du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles et d’assurer
la défense des intérêts matériels ou moraux des travailleurs.
Modalités
124. Plusieurs législations nationales considèrent expressément ou tacitement les
«grèves politiques» comme illégales 268. La commission considère que les grèves visant
la politique économique et sociale du gouvernement sont légitimes, y compris lorsqu’il
s’agit de grèves générales, et qu’elles ne devraient donc pas être assimilées aux grèves
purement politiques, lesquelles ne sont pas couvertes par les principes de la convention.
Pour elle, les organisations syndicales et les organisations d’employeurs, ayant vocation
à défendre des intérêts socio-économiques et professionnels, doivent pouvoir utiliser
263 Voir, par exemple, Colombie – CEACR, observation, 2010; Equateur – CEACR, observation, 2010;
Honduras – CEACR, observation, 2010; et Panama – CEACR, observation, 2011.
264 Voir, par exemple, Afrique du Sud, Albanie, Algérie, Angola, Argentine, Arménie, Azerbaïdjan, Bélarus,
Bénin, Etat plurinational de Bolivie, Bosnie-Herzégovine, Brésil, Bulgarie, Burkina Faso, Burundi, Cambodge,
Cameroun, Cap-Vert, République centrafricaine, Chili, Chypre, Colombie, Congo, République de Corée, Costa
Rica, Côte d’Ivoire, Croatie, Djibouti, République dominicaine, El Salvador, Equateur, Espagne, Estonie,
Etats-Unis, Ethiopie, ex-République yougoslave de Macédoine, France, Géorgie, Grèce, Guatemala, Guinée,
Guinée-Bissau, Guyana, Haïti, Honduras, Hongrie, Italie, Kazakhstan, Kenya, Kirghizistan, Lettonie, Lituanie,
Luxembourg, Madagascar, République des Maldives, Mali, Maroc, Mauritanie, Mexique, République de
Moldova, Monténégro, Mozambique, Nicaragua, Niger, Panama, Paraguay, Pérou, Philippines, Pologne,
Portugal, République démocratique du Congo, Roumanie, Fédération de Russie, Rwanda, Saint-Marin, Sao
Tomé-et-Principe, Sénégal, Serbie, Seychelles, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Suriname, Tchad, République
tchèque, Timor-Leste, Togo, Turquie, Ukraine, Uruguay et République bolivarienne du Venezuela.
265 Libéria – CEACR, observation, 2009.
266 République-Unie de Tanzanie – CEACR, observation, 2005.
267 Burkina Faso – CEACR, observation, 2010.
268 Voir, par exemple, Gabon – CEACR, demande directe, 2004; Nigéria – CEACR, observation, 2011; Panama
– CEACR, observation, 2011; Paraguay – CEACR, observation, 2011; et Turquie – CEACR, observation, 2010.
Donner un visage humain à la mondialisation
52 ILC.101/III/1B
respectivement la grève ou des actions de protestation pour appuyer leur position dans la
recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique
économique et sociale qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres 269. De
plus, notant que le système démocratique est fondamental pour le libre exercice des
droits syndicaux, la commission estime que, dans une situation où ils estimeraient ne pas
jouir des libertés essentielles pour mener à bien leur mission, les syndicats et les
organisations d’employeurs seraient fondés à demander la reconnaissance et l’exercice
de ces libertés et que de telles revendications pacifiques devraient être considérées
comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes 270, y compris lorsque ces
organisations ont recours à la grève.
125. En ce qui concerne les grèves dites «de solidarité», la commission considère
qu’une interdiction générale de cette forme de grève risquerait d’être abusive – en
particulier dans le contexte de la mondialisation marquée par une interdépendance
croissante et par l’internationalisation de la production – et que les travailleurs devraient
pouvoir exercer de telles actions pour autant que la grève initiale qu’ils soutiennent soit
elle-même légale 271. Elle a noté en particulier la reconnaissance en Croatie 272 du droit à
la grève de solidarité dans la législation nationale et la reconnaissance de ce droit à
l’égard des fonctionnaires par la convention collective en vigueur. Elle a noté également
avec intérêt l’abrogation, dans la Constitution de la Turquie 273, de la disposition qui
interdisait «les grèves et les lock-out à caractère politique, les grèves et les lock-out de
solidarité, l’occupation de locaux professionnels, le ralentissement du travail et toute
autre forme d’obstruction».
126. Enfin, selon la commission, tout arrêt de travail, si bref et limité soit-il, peut
généralement être considéré comme une grève et des limitations à cet égard ne se
justifieraient que si la grève perdait son caractère pacifique 274
. Les «grèves du zèle» et
les «grèves perlées» sont ainsi couvertes par les principes développés. Certains pays
continuent cependant à considérer ces formes de grèves comme des pratiques déloyales
du travail passibles d’amendes, de destitution des fonctions syndicales et d’autres
sanctions 275.
Restrictions autorisées et garanties compensatoires
127. Le droit de grève n’est pas absolu et peut être exceptionnellement restreint, voire
interdit. Outre les forces armées et la police, dont les membres peuvent être exclus du
champ d’application de la convention en général, d’autres restrictions au droit de grève
peuvent viser: i) certaines catégories de fonctionnaires; ii) les services essentiels au sens
269 Le Comité de la liberté syndicale a considéré, dans le contexte d’une plainte présentée par des employeurs,
que cette possibilité de recourir à des grèves (ou à des actions) de protestation, notamment en vue de critiquer la
politique économique et sociale du gouvernement, devait être reconnue aux employeurs, comme aux travailleurs
(348e rapport, cas no 2530 (Uruguay) (vol. XC, 2007, Série B, no 3), paragr. 1190).
270 Voir, par exemple, Swaziland – CEACR, observation, 2011.
271 Dans son rapport soumis en vertu de l’article 19 de la Constitution, le gouvernement de la Nouvelle-Zélande
indique que la raison pour laquelle il n’a pas ratifié la convention no 87 est liée au fait que la jurisprudence de
l’OIT requiert que les grèves de solidarité et les grèves portant sur des questions sociales ou économiques plus
générales puissent être tenues sans crainte de sanctions légales.
272 Croatie – CEACR, observations, 1999 et 2004.
273 Turquie – CEACR, observation, 2011.
274 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 173.
275 Voir, par exemple, Pakistan – CEACR, observation, 2010 (la grève du zèle est considérée comme une
pratique déloyale du travail).
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 53
strict du terme; ou iii) les situations de crise nationale ou locale aiguë, mais pour une
durée limitée et uniquement dans la mesure nécessaire pour faire face à la situation.
Dans ces cas, des garanties compensatoires devraient être prévues pour les travailleurs
ainsi privés du droit de grève.
128. Dans ce contexte, la commission a noté avec préoccupation l’impact potentiel de la
jurisprudence récente de la Cour de justice de l’Union européenne au sujet de l’exercice
du droit de grève, en particulier le fait que, dans de récents arrêts, la cour a considéré que
le droit de grève pouvait être sujet à des restrictions lorsque ses effets pouvaient affecter
de manière disproportionnée la liberté d’établissement d’un employeur ou sa liberté de
fournir des services 276 . Dans une communication datée du 29 août 2011, la
Confédération européenne des syndicats (CES) a attiré l’attention de la commission sur
ses préoccupations particulières à l’égard de l’impact de récents arrêts de la Cour de
justice de l’Union européenne (Viking, Laval, Rüffert et Luxembourg) sur la liberté
syndicale et la reconnaissance effective de la négociation collective. La CES ayant
demandé à la commission de déterminer si ces décisions sont compatibles avec les
conventions nos 87 et 98, la commission rappelle, comme elle l’avait fait lors de
l’examen de questions similaires en ce qui concerne le Royaume-Uni, que son mandat se
limite à examiner l’application des conventions dans un Etat membre donné. La
commission note cependant avec intérêt les récentes initiatives de la Commission
européenne pour clarifier la portée de ces jugements et attend de connaître les progrès
réalisés à cet égard.
Fonction publique
129. Prenant en considération l’importance d’assurer la continuité des missions des trois
pouvoirs de l’Etat (aux niveaux législatif, exécutif et judiciaire) et des services essentiels,
la commission et le Comité de la liberté syndicale considèrent que les Etats peuvent
restreindre ou interdire le droit de grève des fonctionnaires «qui exercent des
fonctions d’autorité au nom de l’Etat» 277
. Les décisions mettant en oeuvre ce principe
au niveau national divergent. Par exemple, en Suisse 278 , alors qu’autrefois tous les
fonctionnaires fédéraux étaient privés du droit de grève, une ordonnance limite
désormais cette interdiction aux fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom
de l’Etat.
130. Plusieurs Etats interdisent ou imposent des restrictions au droit de grève dans la
fonction publique qui vont au-delà du cadre établi par la commission 279. Ces restrictions
visent notamment les enseignants. Pourtant, la commission estime que les enseignants du
276 Royaume-Uni – CEACR, observation, 2010, et CEACR, observation, 2011. CJCE, 11 déc. 2007, International
Transport Workers’ Federation et Finnish Seaman’s Union c. Viking Line ABP, Aff. C-438/05, et CJCE, 18 déc.
2007, Laval un Partneri c. Svenska Byggnadsarbetareforbundet, Aff. C-341/05.
277 Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, 2006, paragr. 541, et étude
d’ensemble de 1994, paragr. 158 et suiv. Pour un exemple de définition de la catégorie de travailleurs «exerçant
des fonctions d’autorité au nom de l’Etat», voir: Danemark – CEACR, demande directe, 2010. Pour un exemple,
voir Comité de la liberté syndicale, 333e rapport, cas no 2288 (Niger) concernant l’interdiction de l’exercice du
droit de grève au personnel des douanes.
278 Suisse – CEACR, demande directe, 2011.
279 Voir, par exemple, Albanie – CEACR, observation, 2010; Bulgarie – CEACR, observation, 2011; El Salvador
– CEACR, demande directe, 2010; Estonie – CEACR, observation, 2010; Japon – CEACR, observation, 2010
(dans son rapport soumis en vertu de l’article 19 de la Constitution, le gouvernement du Japon indique qu’il est
en train d’examiner la question de savoir si le droit de grève devrait être octroyé dans le secteur public);
Kazakhstan – CEACR, observation, 2011; Lesotho – CEACR, observation, 2011; Niger – CEACR, observation,
2011; Panama – CEACR, observation, 2011; et République-Unie de Tanzanie – CEACR, observation, 2010.
Donner un visage humain à la mondialisation
54 ILC.101/III/1B
secteur public n’appartiennent pas à la catégorie des fonctionnaires «exerçant des
fonctions d’autorité au nom de l’Etat» et qu’ils devraient en conséquence bénéficier du
droit de grève sans s’exposer à des sanctions même si, dans certaines circonstances, le
maintien d’un service minimum peut être envisagé dans ce secteur 280 . Ce principe
devrait également s’appliquer aux travailleurs des services postaux et des employés des
chemins de fer 281 ainsi qu’au personnel civil des institutions militaires quand ils ne sont
pas engagés dans les services essentiels au sens strict du terme 282.
Services essentiels
131. La deuxième restriction admissible à la grève concerne les services essentiels. La
commission estime que seuls peuvent être considérés essentiels – aux fins de la
restriction ou de l’interdiction du droit de grève – les services «dont l’interruption
mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la
sécurité ou la santé de la personne» 283. Cette notion ne revêt pas un caractère absolu
dans la mesure où un service non essentiel peut devenir essentiel si la grève dépasse une
certaine durée ou une certaine étendue ou en fonction des caractéristiques spécifiques
d’un pays (par exemple un Etat insulaire). En pratique, le recours à la notion de service
essentiel dans les législations nationales pour limiter ou interdire le droit de grève est
assez fréquent. Cela peut aller d’une simple énumération limitative assez brève à une
longue liste de services inscrite dans la loi. Dans les cas extrêmes, la législation dispose
qu’une simple déclaration des autorités suffit à justifier le caractère essentiel du service.
Il arrive cependant, dans certains pays, que le droit de grève puisse être exercé dans
l’ensemble de la fonction publique et dans l’ensemble des services dits essentiels pour la
communauté, comme par exemple en Bulgarie 284.
132. En pratique, la manière dont la grève est appréhendée au niveau national est très
variable: plusieurs Etats continuent à définir les services essentiels de manière trop
large 285 ou laissent trop de discrétion aux autorités pour déclarer unilatéralement un
service comme étant essentiel 286; d’autres permettent d’interdire les grèves en raison de
leurs conséquences économiques potentielles 287 (notamment lorsqu’elles affectent des
zones franches d’exportation ou des entreprises récentes 288), ou interdisent les grèves en
raison du risque qu’elles comportent d’atteinte à l’ordre public ou à l’intérêt général ou
280 Voir, par exemple, Allemagne – CEACR, observation, 2010.
281 Ibid.
282 Voir, par exemple, Angola – CEACR, demande directe, 2010.
283 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 159.
284 Bulgarie – CEACR, observation, 2008 (abrogation de l’interdiction de la grève dans les secteurs de l’énergie,
des communications et de la santé).
285 Voir, par exemple, Chili – CEACR, observation, 2010.
286 Voir, par exemple, Zimbabwe – CEACR, observation, 2011.
287 Voir, par exemple, Australie – CEACR, observation, 2010; Bénin – CEACR, observation, 2001; et Chili
– CEACR, observation, 2010.
288 Voir, par exemple, Bangladesh – CEACR, observation, 2010 (interdiction des grèves pendant trois ans à
compter de la date de mise en production d’un nouvel établissement); et Panama – CEACR, observation, 2011
(déni du droit de grève dans les entreprises de moins de deux ans).
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 55
national 289. De telles dispositions ne sont pas compatibles avec les principes concernant
le droit de grève.
133. D’autres encore, tels que la Colombie 290 , laissent aux autorités judiciaires
supérieures le soin de déterminer, cas par cas, le caractère essentiel d’un service même
lorsqu’il existe dans la loi une définition générale en ce sens. Enfin, ailleurs, la
détermination des services essentiels est le résultat d’une décision commune des parties,
au travers d’un accord entre partenaires sociaux, comme par exemple à Chypre 291. Dans
ce contexte, la commission nota avec satisfaction plusieurs avancées intéressantes,
notamment l’abrogation au Guatemala 292 de l’interdiction de la grève ou de l’arrêt de
travail pour les travailleurs des entreprises ou services dont l’interruption, de l’avis du
gouvernement, aurait pu nuire gravement à l’économie nationale; la suppression en
Turquie 293 de l’imposition d’un arbitrage obligatoire empêchant la grève dans les zones
franches d’exportation; et l’abrogation à Chypre 294 des dispositions conférant au Conseil
des ministres le pouvoir discrétionnaire d’interdire les grèves dans les services qu’il
considérait comme essentiels.
Activités qui ne sont pas considérées comme services essentiels
134. Lors de l’examen de cas concrets, les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que
des grèves devraient pouvoir être organisées tant par les travailleurs du secteur public et
que du secteur privé dans un grand nombre de services, y compris les suivants: secteur
bancaire 295 , services des chemins de fer 296 , services de transport et de transport
public 297, services de transport aérien ou aviation civile 298, enseignants et service public
289 Voir, par exemple, Antigua-et-Barbuda – CEACR, observation, 2010; Bangladesh – CEACR, observation,
2010; Pakistan – CEACR, observation, 2010; Philippines – CEACR, observation, 2011; Seychelles – CEACR,
observation, 2011; Swaziland – CEACR, observation, 2001; et Zambie – CEACR, observation, 2011.
290 Colombie – CEACR, observation, 2010. (Arrêt en cassation de la Chambre du travail de la Cour suprême de
justice du 3 juin 2009 (dossier no 40428).)
291 Chypre – CEACR, observation, 2006.
292 Guatemala – CEACR, observation, 2002.
293 Turquie – CEACR, observation, 2005.
294 Chypre – CEACR, observation, 2008.
295 Voir, par exemple, Botswana – CEACR, observation, 2011; Belize – CEACR, observation, 2010; Etat
plurinational de Bolivie – CEACR, observation, 2010; Ghana – CEACR, demande directe, 2010; Mexique
– CEACR, observation, 2011; Nigéria – CEACR, observation, 2011; Sao Tomé-et-Principe – CEACR,
observation, 2010; Togo – CEACR, observation, 2011; Trinité-et-Tobago – CEACR, observation, 2011; et
Turquie – CEACR, observation, 2010.
296 Voir, par exemple, Allemagne – CEACR, observation, 2010; Azerbaïdjan – CEACR, observation, 2010;
Bangladesh – CEACR, observation, 2010; Botswana – CEACR, observation, 2011; Costa Rica – CEACR,
observation, 2010; Indonésie – CEACR, observation, 2010; Kirghizistan – CEACR, demande directe, 2010;
Pakistan – CEACR, observation, 2010; Fédération de Russie – CEACR, observation, 2011; et Turquie
– CEACR, observation, 2010.
297 Voir, par exemple, Azerbaïdjan – CEACR, observation, 2010; Botswana – CEACR, observation, 2011;
Equateur – CEACR, observation, 2010; Ethiopie – CEACR, observation, 2011; Ghana – CEACR, demande
directe, 2010; Guatemala – CEACR, observation, 2011; Guinée – CEACR, observation, 2011; Nigéria – CEACR,
observation, 2011; Panama – CEACR, observation, 2011; Royaume-Uni (Jersey) – CEACR, observation, 2011; et
Turquie – CEACR, observation, 2010.
298 Voir, par exemple, Bangladesh – CEACR, observation, 2010; Belize – CEACR, observation, 2010; Costa Rica
– CEACR, observation, 2010; Ethiopie – CEACR, observation, 2011; Ghana – CEACR, demande directe, 2010;
Kirghizistan – CEACR, demande directe, 2010; Ouganda – CEACR, demande directe, 2011; et Pakistan
– CEACR, observation, 2010.
Donner un visage humain à la mondialisation
56 ILC.101/III/1B
de l’éducation 299, secteur agricole 300, services de distribution de combustibles 301 et
secteur des hydrocarbures, gaz naturel ou secteur pétrochimique 302 , secteur de la
production de charbon 303 , entretien des ports et aéroports 304 , services ou autorités
portuaires 305 et services de chargement et déchargement des navires 306 , services
postaux 307 , services municipaux 308 , services de chargement et déchargement
d’animaux 309 et de denrées alimentaires périssables 310, zones franches d’exportation 311,
services d’imprimerie 312 et services de nettoyage des chaussées et d’enlèvement des
ordures ménagères 313 , la radiotélévision 314 , les services de l’hôtellerie 315 , la
construction 316.
Activités considérées comme services essentiels
135. Lors de l’examen de cas concrets, les organes de contrôle de l’OIT ont estimé que
peuvent être considérés comme constituant des services essentiels au sens strict du terme,
notamment, les services de contrôle du trafic aérien 317, les services téléphoniques 318 ou
les services devant intervenir en cas de catastrophes naturelles, de même que les services
de lutte contre les incendies, les services de santé et d’ambulance, les services
pénitentiaires, les forces de sécurité, les services des eaux et de l’électricité. La
299 Voir, par exemple, Allemagne – CEACR, observation, 2010; Canada – CEACR, observation, 2010 (Colombie
britannique et Manitoba); Togo – CEACR, observation, 2011; Trinité-et-Tobago – CEACR, observation, 2011; et
Turquie – CEACR, observation, 2010.
300 Voir, par exemple, Chili – CEACR, observation, 2010.
301 Voir, par exemple, Equateur – CEACR, observation, 2010; Ghana – CEACR, demande directe, 2010;
Guatemala – CEACR, observation, 2011; et Mozambique – CEACR, observation, 2011.
302 Voir, par exemple, Bangladesh – CEACR, observation, 2010; Belize – CEACR, observation, 2010; Equateur
– CEACR, observation, 2010; et Turquie – CEACR, observation, 2010.
303 Voir, par exemple, Turquie – CEACR, observation, 2010.
304 Voir, par exemple, Nigéria – CEACR, observation, 2011.
305 Voir, par exemple, Antigua-et-Barbuda – CEACR, observation, 2010; Dominique – CEACR, observation,
2010; Ghana – CEACR, demande directe, 2010; Grenade – CEACR, demande directe, 2010; Guyana – CEACR,
observation, 2011; et Pakistan – CEACR, observation, 2010.
306 Voir, par exemple, Costa Rica – CEACR, observation, 2010; Grenade – CEACR, demande directe, 2010; et
Guyana – CEACR, observation, 2011.
307 Voir, par exemple, Allemagne – CEACR, observation, 2010; Belize – CEACR, observation, 2010; Equateur
– CEACR, observation, 2010; Mozambique – CEACR, observation, 2011; Nigéria – CEACR, observation, 2011;
Pakistan – CEACR, observation, 2010; et Fédération de Russie – CEACR, observation, 2011.
308 Voir, par exemple, Fédération de Russie – CEACR, observation, 2011.
309 Voir, par exemple, Mozambique – CEACR, observation, 2011; et Nigéria – CEACR, observation, 2011.
310 Voir, par exemple, Dominique – CEACR, observation, 2010; et Mozambique – CEACR, observation, 2011.
311 Voir, par exemple, Mozambique – CEACR, observation, 2011.
312 Voir, par exemple, Antigua-et-Barbuda – CEACR, observation, 2010; et Nigéria – CEACR, observation,
2011.
313 Voir, par exemple, Nigéria – CEACR, observation, 2011.
314 Voir, par exemple, Comité de la liberté syndicale, 306e rapport, cas no 1884 (Swaziland).
315 Voir, par exemple, Comité de la liberté syndicale, 328e rapport, cas no 2120 (Népal).
316 Voir, par exemple, Comité de la liberté syndicale, 338e rapport, cas no 2326 (Australie).
317 Voir, par exemple, Nigéria – CEACR, observation, 2010.
318 Voir, par exemple, Kirghizistan – CEACR, demande directe, 2010.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 57
commission estime que d’autres services (par exemple les services météorologiques ou
les services de sécurité sociale) comportent certaines composantes essentielles et
d’autres qui ne le sont pas.
Service minimum négocié
136. Dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de la
grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la plus
grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction des
besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des
installations, l’introduction d’un service minimum négocié, comme solution de rechange
possible à une interdiction totale de la grève, pourrait être appropriée. De l’avis de la
commission, le maintien de services minima en cas de grève ne devrait être possible que
dans certaines situations, à savoir: i) dans les services dont l’interruption risquerait de
mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans
l’ensemble de la population (soit les services essentiels «au sens strict du terme»);
ii) dans les services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme, mais où les grèves
d’une certaine ampleur et durée pourraient provoquer une crise aiguë menaçant les
conditions normales d’existence de la population; ou iii) dans les services publics
d’importance primordiale.
137. Un tel service devrait toutefois à tout le moins répondre à deux conditions: i) il
devrait effectivement et exclusivement s’agir d’un service minimum, c’est-à-dire limité
aux opérations strictement nécessaires pour que la satisfaction des besoins de base de la
population ou des exigences minima du service soit assurée, tout en maintenant
l’efficacité des moyens de pression; ii) étant donné que ce système limite l’un des
moyens de pression essentiels dont disposent les travailleurs pour défendre leurs intérêts,
leurs organisations devraient pouvoir, si elles le souhaitent, participer à la définition de
ce service tout comme les employeurs et les pouvoirs publics 319. En outre, un service
minimum peut toujours être exigé, qu’il s’agisse ou non d’un service essentiel au sens
strict du terme, afin d’assurer la sécurité des installations ou la maintenance de
l’équipement.
138. La commission souligne l’importance d’adopter des dispositions législatives
expresses au sujet de la participation des organisations concernées à la définition des
services minima 320. Par ailleurs, tout désaccord sur les services minima devrait être
résolu non pas par les autorités gouvernementales, comme c’est le cas dans certains
pays 321, mais par un organisme paritaire ou indépendant ayant la confiance des parties,
appelé à statuer rapidement et sans formalisme sur les difficultés rencontrées et habilité à
rendre des décisions exécutoires. En pratique cependant, certaines législations continuent
à fixer unilatéralement et sans consultations le niveau auquel doit se situer le service
minimum et imposent qu’un pourcentage déterminé de ce service soit fourni pendant la
grève 322. D’autres autorisent les pouvoirs publics à déterminer les services minima de
319 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 161.
320 Voir, par exemple, République de Moldova – CEACR, observation, 2011; et Panama – CEACR, observation,
2011.
321 Voir, par exemple, Cambodge – CEACR, demande directe, 2011; et Cap-Vert – CEACR, demande directe,
2011.
322 Voir, par exemple, Bulgarie – CEACR, observation, 2011 (dans le domaine des chemins de fer); et Roumanie
– CEACR, observation, 2011 (dans le domaine des transports).
Donner un visage humain à la mondialisation
58 ILC.101/III/1B
manière discrétionnaire, sans consultations 323 ou à requérir du pouvoir judiciaire qu’il
émette une ordonnance à cette fin 324.
139. Dans ce contexte, la commission a noté plusieurs avancées intéressantes,
notamment la création et la composition tripartite de la Commission des garanties
chargée d’établir les services minima en Argentine 325; la modification de la loi sur les
grèves au Monténégro 326 prévoyant que, pour la détermination du service minimum,
l’employeur est tenu d’obtenir l’avis de l’organe compétent de l’organisation syndicale
autorisée ou de plus de la moitié des salariés de l’employeur; l’institution au
Guatemala 327 d’un service minimum dans les services publics essentiels déterminé avec
la participation des parties et de l’autorité judiciaire; et la décision, au Pérou 328, qu’en
cas de désaccord sur le nombre et la profession des travailleurs qui doivent continuer à
travailler, l’Autorité du travail désignera un organe indépendant qui tranchera.
Situation de crise nationale ou locale aiguë
140. La troisième restriction au droit de grève porte sur la situation de crise nationale
ou locale aiguë. Etant donné que les interdictions générales de recourir à la grève en
vertu de pouvoirs d’urgence ou exceptionnels constituent une entrave considérable à l’un
des moyens d’action essentiels dont disposent les travailleurs, la commission estime
qu’elles ne sauraient se justifier que dans une situation de crise aiguë, et ce pour une
durée limitée et seulement dans la mesure nécessaire pour faire face à la situation. Il faut
entendre par là de véritables situations de crise, comme celles qui se développent
notamment en cas de conflit grave, d’insurrection, ou encore de catastrophe naturelle,
sanitaire ou humanitaire tels que les conditions normales de fonctionnement de la société
civile ne sont plus réunies 329.
Garanties compensatoires pour travailleurs privés du droit de grève
141. Lorsque le droit de grève a été restreint ou supprimé dans certaines entreprises ou
services considérés comme essentiels, ou pour certains fonctionnaires exerçant des
fonctions d’autorité au nom de l’Etat, les travailleurs devraient bénéficier d’une
protection adéquate de manière à compenser les restrictions qui auraient été imposées à
leur liberté d’action. Cette protection devrait comprendre, par exemple, des procédures
de conciliation et, éventuellement, d’arbitrage impartiales recueillant la confiance des
intéressés auxquelles les travailleurs et leurs organisations pourraient être associés 330.
De telles décisions arbitrales devraient avoir un caractère obligatoire pour les deux
parties et, une fois rendues, pouvoir être exécutées rapidement et complètement.
323 Voir, par exemple, Arménie – CEACR, demande directe, 2011; Paraguay – CEACR, observation, 2011;
Tchad – CEACR, observation, 2010; et Turquie – CEACR, observation, 2010.
324 Voir, par exemple, Maurice – CEACR, demande directe, 2011.
325 Argentine – CEACR, observation, 2011. A contrario, au Mexique, la Commission nationale bancaire chargée
de veiller à ce que, durant la grève, le nombre indispensable d’agences restent ouvertes n’est pas une instance
tripartite.
326 Monténégro – CEACR, demande directe, 2011.
327 Guatemala – CEACR, observation, 2002.
328 Pérou – CEACR, demande directe, 2011.
329 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 152.
330 Suisse – CEACR, demande directe, 2011.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 59
Restrictions à la grève pendant la durée d’une convention collective
142. Plusieurs législations ne prévoient pas de restrictions en ce qui concerne le moment
où une grève peut être déclenchée, sauf à respecter les délais de préavis fixés dans la loi
ou par voie conventionnelle. Dans d’autres systèmes, la convention collective est conçue
comme un traité de paix sociale à durée déterminée durant laquelle la grève et le lock-out
sont interdits. La commission considère que ces deux options sont compatibles avec la
convention. Toutefois, dans l’un ou l’autre système, il ne devrait pas être impossible
pour les organisations de travailleurs de mener une grève pour protester contre la
politique économique et sociale du gouvernement, en particulier lorsque la protestation
ne vise pas uniquement cette politique mais également les effets que celle-ci peut avoir
sur certaines clauses d’une convention collective. Si les grèves sont interdites pendant la
durée de validité des conventions collectives, cette restriction doit être compensée par le
droit de recourir à une procédure d’arbitrage, impartiale et rapide, des griefs individuels
ou collectifs concernant l’interprétation ou l’application des conventions 331.
143. Zones franches d’exportation. Un certain nombre de pays qui établissent un régime
particulier de relations professionnelles dans les zones franches d’exportation interdisent
spécifiquement ou indirectement la grève dans ces zones 332. De l’avis de la commission,
de telles interdictions sont incompatibles avec les principes de non-discrimination qui
doivent présider à la mise en oeuvre de la convention. Elle a noté dès lors avec
satisfaction, notamment, l’abrogation en Turquie 333 de la disposition qui prévoyait, pour
dix ans, un arbitrage obligatoire en vue du règlement des conflits collectifs du travail
dans les zones franches d’exportation; de même que l’abrogation en Namibie 334 de la
disposition qui interdisait à tout salarié de recourir à la grève ou de participer à une telle
action dans les zones franches d’exportation, sous la menace de sanctions disciplinaires
ou de licenciement.
Conditions d’exercice
Epuisement des procédures préalables
(conciliation, médiation et arbitrage volontaire)
144. Un nombre important de pays imposent une notification préalable de la grève aux
autorités administratives ou à l’employeur et/ou l’obligation d’avoir recours à des
procédures de conciliation et d’arbitrage volontaire préalables dans les différends
collectifs avant de pouvoir déclencher une grève 335. De l’avis de la commission, ces
procédures devraient cependant avoir pour seule finalité de faciliter la négociation et ne
devraient pas être si complexes ou entraîner des délais si longs qu’une grève licite
devienne impossible ou soit privée de toute efficacité 336. En ce qui concerne la durée des
procédures de conciliation et d’arbitrage préalables, la commission a considéré, par
exemple, qu’imposer une durée allant au-delà de 60 jours ouvrables, en tant que
331 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 166 et 167.
332 Voir, par exemple, Pakistan – CEACR, observation, 2011 (informations transmises par la Confédération
syndicale internationale); Panama – CEACR, observation, 2011.
333 Turquie – CEACR, observation, 2005.
334 Namibie – CEACR, observation, 2003.
335 Voir, par exemple, Libye – CEACR, observation, 2011; République démocratique du Congo – CEACR,
demande directe, 2011; et République-Unie de Tanzanie (Zanzibar) – CEACR, observation, 2010.
336 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 171.
Donner un visage humain à la mondialisation
60 ILC.101/III/1B
condition préalable à l’exercice d’une grève légale, était susceptible de rendre difficile,
voire impossible, l’exercice du droit de grève. Dans d’autres cas, elle a proposé de
réduire le délai de médiation 337. La situation est également problématique lorsque les
législations ne prévoient aucune limite de temps pour l’épuisement des procédures
préalables et confèrent aux autorités le pouvoir de prolonger celles-ci à leur entière
discrétion 338.
Préavis, périodes de temporisation et durée de la grève
145. Un nombre important de pays connaît l’obligation de respecter un préavis ou une
pause de réflexion avant le déclenchement d’une grève 339. Dans la mesure où elles sont
conçues comme une étape destinée à encourager les parties à engager d’ultimes
pourparlers avant le recours à la grève, de telles dispositions s’inscrivent dans l’éventail
des mesures qui peuvent être prises pour encourager et promouvoir le développement de
la négociation collective volontaire. Là encore, toutefois, le délai de préavis ne doit pas
constituer un obstacle supplémentaire à la négociation, et devrait être d’autant plus court
s’il s’ajoute à une procédure de médiation ou de conciliation préalable obligatoire déjà
longue en elle-même. Par exemple, la commission a estimé qu’un préavis de 60 jours
était excessif 340.
146. Enfin, dans certains cas, le préavis doit s’accompagner d’une information sur la
durée de la grève, au risque pour les travailleurs ayant participé à une grève dont le
préavis n’en précise pas la durée d’être sanctionnés 341. La commission estime que les
travailleurs et leurs organisations devraient pouvoir déclarer une grève pour une durée
indéterminée s’ils le souhaitent 342.
Quorum et majorité pour décider de la grève
147. Certains pays prévoient que, pour pouvoir être déclenchée, la grève doit être
décidée par les deux tiers 343 ou les trois quarts 344 des travailleurs. De manière générale,
la commission estime qu’imposer de recueillir l’adhésion de plus de la moitié des
travailleurs concernés pour pouvoir déclarer la grève est une condition trop rigoureuse,
qui pourrait affecter indûment la possibilité de faire grève, notamment dans les grandes
337 République-Unie de Tanzanie (Zanzibar) – CEACR, observation, 2011.
338 Voir, par exemple, Kiribati – CEACR, observation, 2011.
339 Voir, par exemple, Burundi – CEACR, demande directe, 2011; Honduras – CEACR, observation, 2010;
Mozambique – CEACR, observation, 2011; Seychelles – CEACR, observation, 2011; République-Unie de
Tanzanie (Zanzibar) – CEACR, observation, 2011; et Tunisie – CEACR, observation, 2011.
340 République-Unie de Tanzanie – CEACR, observation, 2011.
341 Voir, par exemple, Burundi – CEACR, demande directe, 2011; Bulgarie – CEACR, observation, 2011; Egypte
– CEACR, demande directe, 2011; Géorgie – CEACR, observation, 2010; Kirghizistan – CEACR, demande
directe, 2011; Mongolie – CEACR, demande directe, 2011; Mozambique – CEACR, observation, 2011; et
Tadjikistan – CEACR, demande directe, 2011.
342 Voir, par exemple, Mozambique – CEACR, observation, 2011; Tchad – CEACR, observation, 2010; et Tunisie
– CEACR, observation, 2011.
343 Voir, par exemple, Arménie – CEACR, demande directe, 2011; Honduras – CEACR, observation, 2010;
et Mexique – CEACR, observation, 2011.
344 Voir, par exemple, Bangladesh – CEACR, observation, 2010; et Etat plurinational de Bolivie – CEACR,
observation, 2010.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 61
entreprises 345. A son sens, si un pays juge opportun d’exiger un vote des travailleurs
avant qu’une grève puisse être déclenchée, il devrait faire en sorte que seuls soient pris
en compte les votes exprimés et que le quorum ou la majorité requis soient fixés à un
niveau raisonnable 346. Par exemple, le respect d’un quorum de deux tiers des présents
pourrait être difficile à atteindre et pourrait restreindre le droit de grève en pratique 347.
Dans ce contexte, elle nota avec satisfaction notamment l’amendement législatif en
Lettonie 348 qui a fait passer le quorum requis pour organiser une grève des trois quarts à
la majorité simple des membres du syndicat ou de l’entreprise qui participent à la
réunion en question. De même, au Guatemala 349, l’obligation d’obtenir les voix des
deux tiers des membres d’un syndicat pour décider de faire ou de ne pas faire la grève a
été supprimée et il suffit désormais d’obtenir le vote favorable de la moitié plus un des
membres constituant le quorum de l’assemblée concernée.
Approbation préalable et supervision des scrutins de grève
148. La commission estime que l’exigence législative d’obtenir l’approbation préalable
de la grève par une organisation syndicale de degré supérieur 350 constitue une entrave au
libre choix des organisations concernées d’organiser leurs activités. En outre, elle estime
que le contrôle ou la supervision du scrutin de grève par l’autorité administrative 351
constitue un acte d’ingérence dans les activités syndicales incompatible avec la
convention, à moins que les organisations syndicales ne le lui demandent, conformément
à leurs propres statuts.
Déroulement de la grève
Piquets, occupation des locaux, accès à l’entreprise
et liberté du travail
149. Les mouvements de grève s’accompagnent souvent de la présence, à l’entrée des
lieux de travail, de piquets de grève destinés à assurer le succès de l’action en persuadant
les travailleurs concernés de ne pas travailler. Selon la commission, tant que la grève
reste pacifique, les piquets de grève et l’occupation des locaux devraient être permis. Les
limitations aux piquets de grève et à l’occupation des locaux ne peuvent être acceptées
que si les actions perdent leur caractère pacifique. Il est cependant nécessaire, dans tous
les cas, de garantir le respect de la liberté de travail des non-grévistes et le droit de la
direction de pénétrer dans les locaux. En pratique, alors que certains pays fixent des
cadres très généraux qui se bornent à éviter la violence et à protéger le droit au travail et
le droit de propriété, d’autres limitent ou interdisent expressément le droit d’installer des
345 Voir, par exemple, Arménie – CEACR, demande directe, 2011; Etat plurinational de Bolivie – CEACR,
observation, 2010; et Maurice – CEACR, demande directe, 2011.
346 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 170.
347 Voir, par exemple, Kazakhstan – CEACR, observation, 2011; République tchèque – CEACR, demande
directe, 2011; et Tadjikistan – CEACR, demande directe, 2011.
348 Lettonie – CEACR, observation, 2007.
349 Guatemala – CEACR, observation, 2002.
350 Une telle approbation est exigée, par exemple, en Egypte – CEACR, observation, 2011; et Tunisie – CEACR,
observation, 2011.
351 Un tel contrôle est effectué, par exemple, en Angola – CEACR, demande directe, 2010; Bahamas – CEACR,
observation, 2010; Colombie – CEACR, observation, 1997; Swaziland – CEACR, observation, 2010; et
République-Unie de Tanzanie – CEACR, observation, 2011.
Donner un visage humain à la mondialisation
62 ILC.101/III/1B
piquets de grève 352 ou l’occupation des locaux pendant la grève 353. La commission
estime que les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que
dans des circonstances exceptionnelles et des situations graves où l’ordre public est
gravement menacé, et qu’un tel recours à la force doit être proportionnel à la situation.
150. Plusieurs plaintes ont été déposées par des organisations d’employeurs devant le
Comité de la liberté syndicale au sujet de questions relatives au droit de grève. Les
principaux sujets portaient sur l’impossibilité pour la direction d’accéder aux locaux de
l’entreprise pendant la grève, les conditions pour le versement des salaires aux grévistes,
la liberté de travail des non grévistes et les modalités de l’arbitrage obligatoire par
décision unilatérale des organisations syndicales. Le comité a considéré notamment que
l’imposition par la législation de la fermeture de l’entreprise, de l’établissement ou du
commerce en cas de grève pouvait porter atteinte à la liberté de travail des non-grévistes
et pouvait ne pas tenir compte des nécessités fondamentales de l’entreprise (entretien des
installations, prévention des accidents et droits des chefs d’entreprise et du personnel de
direction à se rendre dans les installations de l’entreprise et d’y exercer leurs activités) et,
par là, poser des problèmes de compatibilité avec la convention. Il a considéré également
qu’un système de relations professionnelles stables devait tenir compte des droits et
obligations tant des organisations de travailleurs que des employeurs et de leurs
organisations 354. Dans ce contexte, la commission a noté avec satisfaction, par exemple,
la modification de la législation au Panama 355 , qui dispose désormais que les
propriétaires, les cadres supérieurs, le directeur général et le personnel immédiatement
attaché à ces charges ainsi que les travailleurs occupant des postes de confiance peuvent
entrer dans l’entreprise au cours de la grève, à condition que ce ne soit pas pour ordonner
la reprise des activités productives (l’accès à l’entreprise des travailleurs non grévistes
n’est cependant pas mentionné).
Réquisition de grévistes et embauche de travailleurs extérieurs
151. Bien que certains systèmes continuent à autoriser de manière assez large la
réquisition de travailleurs en cas de grève 356 , la commission considère qu’il est
souhaitable de limiter les pouvoirs de réquisition aux cas dans lesquels le droit de grève
peut être limité, voire interdit, à savoir: i) dans la fonction publique à l’égard des
fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ii) dans les services
essentiels au sens strict du terme; ou iii) en cas de crise nationale ou locale aiguë.
152. Par ailleurs, la commission rappelle que le maintien du lien d’emploi constitue une
conséquence juridique normale de la reconnaissance du droit de grève. Or, dans certains
pays de «common law», on considère qu’un des effets de la grève est la cessation du
contrat de travail, ce qui laisse l’employeur libre de remplacer les grévistes par de
nouveaux employés 357 . La commission estime que des mesures permettant à
352 Voir, par exemple, République-Unie de Tanzanie – CEACR, observation, 2011.
353 Voir, par exemple, Burkina Faso – CEACR, observation, 2010 (interdiction sous peine de sanctions pénales);
Côte d’Ivoire – CEACR, demande directe, 2010; Mauritanie – CEACR, demande directe, 2011 (interdiction sous
peine de sanctions pénales); et Sénégal – CEACR, observation, 2011.
354 Comité de la liberté syndicale, 310e rapport, cas no 1931 (Panama) (vol. LXXXI, 1998, Série B, no 2),
paragr. 497 et 502.
355 Panama – CEACR, observation, 2011.
356 Voir, par exemple, Angola – CEACR, demande directe, 2010; Burkina Faso – CEACR, observation, 2011; et
Djibouti – CEACR, observation, 2011.
357 Royaume-Uni – CEACR, observation, 2011.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 63
l’employeur de licencier les grévistes ou de les remplacer temporairement ou pour une
période indéterminée constituent un sérieux obstacle à l’exercice du droit de grève,
d’autant plus si les grévistes ne retrouvent pas, de droit, leur emploi à la fin du conflit.
Une protection réellement efficace devrait exister à cet égard dans la législation 358.
Arbitrage obligatoire
153. Un autre moyen de dénier le droit de grève ou d’en restreindre sérieusement
l’exercice réside dans l’imposition d’un arbitrage obligatoire qui permet d’interdire
pratiquement toutes les grèves ou de les faire cesser rapidement. Dans ces cas, les
différends collectifs de travail sont réglés par une décision judiciaire définitive ou une
décision administrative ayant force obligatoire pour les parties intéressées, le recours à la
grève étant interdit pendant la procédure et une fois la décision rendue. La commission
estime que le recours à l’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du
travail et à une grève n’est acceptable que dans certaines circonstances, à savoir:
i) lorsque les deux parties au conflit en conviennent; ou ii) lorsque la grève peut faire
l’objet de restrictions, voire d’une interdiction, c’est-à-dire: a) dans le cadre de conflits
concernant des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat;
b) de conflits survenant dans les services essentiels au sens strict du terme; ou c) dans
des situations de crise nationale ou locale aiguë mais pour une durée limitée et dans la
mesure nécessaire pour faire face à la situation uniquement 359. Ainsi, le seul fait que des
conflits se prolongent, ou l’échec de la conciliation, ne constitue pas en soi des éléments
qui justifieraient l’imposition d’un arbitrage obligatoire 360 . La commission admet
toutefois également qu’il arrive un moment dans les négociations où, après des
négociations prolongées et infructueuses, l’intervention des autorités publiques peut être
justifiée, lorsqu’il devient évident que l’impasse ne pourra être résolue sans une initiative
de leur part 361.
154. En pratique, plusieurs Etats continuent à autoriser le recours à l’arbitrage
obligatoire soit de manière automatique, soit à la discrétion des autorités publiques 362,
soit à la demande d’une seule des parties (le cas échéant, après l’épuisement des
procédures de conciliation ou de médiation préalables obligatoires) 363. De l’avis de la
commission, le recours systématique à ce type de procédure équivaut en pratique à une
interdiction générale de la grève incompatible avec la convention. L’arbitrage imposé
par les autorités à la demande d’une seule partie est par ailleurs, d’une manière générale,
contraire au principe de la négociation collective. Néanmoins, de nombreux pays
continuent à autoriser le recours à l’arbitrage obligatoire dans des situations qui
358 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 139.
359 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 257.
360 Kiribati – CEACR, observation, 2011.
361 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 258.
362 Voir, par exemple, Botswana – CEACR, observation, 2011; Dominique – CEACR, observation, 2010; Fidji
– CEACR, observation, 2010; Honduras – CEACR, observation, 2010; Koweït – CEACR, observation, 2011;
Mali – CEACR, observation, 2011; Maurice – CEACR, demande directe, 2011; Panama – CEACR, observation,
2010; Royaume-Uni (Anguilla) – CEACR, demande directe, 2011; Sri Lanka – CEACR, observation, 2011; et
Turquie – CEACR, observation, 2010.
363 Voir, par exemple, Canada – CEACR, observation, 2010 (lorsque l’arrêt de travail dépasse soixante jours);
Côte d’Ivoire – CEACR, demande directe, 2010; Egypte – CEACR, observation, 2004; Fidji – CEACR,
observation, 2010; Géorgie – CEACR, observation, 2010 (après quatorze jours); Haïti – CEACR, observation,
2010; Malte – CEACR, observation, 2010; Ouganda – CEACR, observation, 2010; Pakistan – CEACR,
observation, 2010; Panama – CEACR, observation, 2011; République démocratique du Congo – CEACR,
demande directe, 2011 (dès l’expiration du préavis de grève); et Roumanie – CEACR, observation, 2011.
Donner un visage humain à la mondialisation
64 ILC.101/III/1B
dépassent le cadre établi par la commission 364, notamment si le conflit s’étend au-delà
d’une certaine durée 365.
155. D’autres pays prévoient que, lorsque la tentative de conciliation entre les parties au
conflit n’a pas abouti, le différend peut être transmis à un organe spécifique chargé
d’établir un rapport ou des recommandations qui, passé un certain délai, peuvent devenir
exécutoires si les parties en conflit ne les ont pas contestés 366. La commission estime
que ce type de disposition peut être compatible avec la convention à condition toutefois
que le délai susmentionné soit suffisamment long pour que les parties bénéficient des
délais de réflexion nécessaires.
156. La question de l’arbitrage est également largement développée au chapitre 2
ci-après, consacré à la convention no 98.
Sanctions
157. Les principes élaborés par les organes de contrôle en matière de droit de grève ne
valent que pour les grèves licites, conduites conformément aux dispositions de la
législation nationale, pour autant que celles-ci soient elles-mêmes conformes aux
principes de la liberté syndicale. Ils ne couvrent pas l’exercice abusif ou illégal du droit
de grève, qui peut prendre diverses formes et qui peut faire l’objet de certaines sanctions.
Si la grève est déclarée illégale par l’autorité judiciaire compétente sur la base de
dispositions législatives qui sont conformes avec les principes de la liberté syndicale, des
sanctions disciplinaires proportionnées peuvent être prononcées contre les grévistes (par
exemple des réprimandes, des suppressions de prime, etc.) 367 . La question de la
détermination du caractère légal ou non de la grève est dès lors centrale. Selon la
commission, la responsabilité de déclarer une grève illégale devrait non pas appartenir
aux autorités gouvernementales, mais devrait incomber à un organisme indépendant
bénéficiant de toute la confiance des parties intéressées 368 . Dans ce contexte, la
commission a noté avec satisfaction notamment qu’en Colombie 369 la légalité ou non
d’une suspension ou d’un arrêt collectif du travail sera déclarée par l’autorité judiciaire
en vertu d’une procédure préférentielle. Il est utile de souligner que le non-versement du
salaire correspondant à la période de la grève n’est qu’une conséquence de l’absence de
travail et non une sanction. Les déductions salariales pour jours de grève ne posent donc
364 Voir, par exemple, Burundi – CEACR, demande directe, 2011 (le recours possible à la Cour administrative
dans le cadre du différend semble aboutir à un système d’arbitrage obligatoire); Egypte – CEACR, observation,
2011 (art. 179, 187, 193 et 194 du Code du travail); Equateur – CEACR, observation, 2010 (art. 326, paragr. 12,
de la Constitution); Ghana – CEACR, demande directe, 2010 (art. 160(2) de la loi sur le travail); Mauritanie
– CEACR, observation, 2011 (art. 350 et 362 du Code du travail); Mozambique – CEACR, observation, 2011
(art. 189 de la loi sur le travail); Ouganda – CEACR, demande directe, 2011 (art. 5(1) et 5(3) de la loi sur les
conflits du travail); Panama – CEACR, observation, 2011 (art. 452 et 486 du Code du travail); Sao Tomé-et-
Principe – CEACR, observation, 2010 (art. 11 de la loi no 4/92); Togo – CEACR, observation, 2011; et Turquie
– CEACR, observation, 2010 (art. 29, 30 et 32 de la loi no 2822).
365 Voir, par exemple, Nicaragua – CEACR, observation, 2011 (après trente jours de grève); et Roumanie
– CEACR, observation, 2011 (après vingt jours).
366 Voir, par exemple, les articles 242-248 du Code du travail du Congo.
367 Kiribati – CEACR, observation, 2011; Madagascar – CEACR, observation, 2011; Mozambique – CEACR,
observation, 2011; Nigéria – CEACR, observation, 2011; République arabe syrienne – CEACR, observation,
2011; Tunisie – CEACR, observation, 2011; et Zambie – CEACR, observation, 2011.
368 Certains systèmes ne sont pas en conformité avec la convention sur ce point: voir, par exemple, Fidji
– CEACR, observation, 2010; Ouganda – CEACR, demande directe, 2011 (la responsabilité de déclarer une
grève illégale incombe au gouvernement); et Pérou – CEACR, demande directe, 2011 (cette responsabilité
incombe à l’autorité administrative du travail).
369 Colombie – CEACR, observation, 2009.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 65
pas de problème de compatibilité avec la convention. La question du paiement des
salaires correspondant à la période de la grève est une matière de négociation entre les
parties concernées.
Sanctions pénales
158. La plupart des législations qui restreignent ou interdisent le droit de grève
prévoient diverses sanctions à l’encontre des travailleurs et des syndicats qui enfreignent
cette interdiction, en ce compris des sanctions pénales 370. La commission n’a cependant
de cesse de souligner qu’un travailleur ayant participé à une grève d’une manière
pacifique n’a fait qu’user d’un droit essentiel et, par conséquent, ne doit pas être passible
de sanctions pénales et que, ainsi, aucune peine d’amende ou de prison ne peut être
encourue; que de telles sanctions ne sont envisageables que si, à l’occasion de la grève,
des violences contre les personnes ou les biens, ou d’autres infractions graves de droit
pénal sont commises, et ce exclusivement en application des textes punissant de tels faits,
notamment du Code pénal (par exemple en cas de non-assistance à personne en danger,
de blessures volontaires, ou de dommages délibérément causés à la propriété). La
préoccupation exprimée par la commission de s’assurer que des peines
d’emprisonnement ne puissent en aucun cas être infligées à des grévistes est par ailleurs
relayée par les organes de contrôle des Nations Unies, en particulier par le Comité des
droits économiques, sociaux et culturels, qui a estimé que l’imposition de telles sanctions
constituait une cause de non-accomplissement des obligations contractées par les Etats
parties au Pacte 371. En dépit de ces principes, plusieurs Etats continuent à prévoir des
sanctions pénales spécifiques pour faits de grève 372 , en ce compris des peines
d’emprisonnement 373, en violation des principes établis par la commission.
370 Il convient de relever que l’article 1 d) de la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, interdit
le recours au travail forcé en tant que punition pour avoir participé à des grèves.
371 Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies, Observations finales: République
arabe syrienne, 24 sept. 2001 (E/C.12/1/Add.63), paragr. 21. En particulier, le comité exprime «des
préoccupations au sujet des restrictions concrètes signalées par l’OIT en ce qui concerne le droit de grève, telles
que l’imposition de sanctions, y compris l’emprisonnement, ce qui constitue une inobservation par l’Etat partie de
l’obligation qui lui incombe en vertu de l’article 8 du Pacte».
372 Voir, par exemple, Barbade – CEACR, observation, 2011; Etat plurinational de Bolivie – CEACR,
observation, 2010; Burkina Faso – CEACR, observation, 2010; Chili – CEACR, observation, 2010; Congo
– CEACR, demande directe, 2010; Guatemala – CEACR, observation, 2010; Guyana – CEACR, observation,
2011; Kiribati – CEACR, observation, 2011; République de Moldova – CEACR, observation, 2011; Nigéria
– CEACR, observation, 2011; République démocratique du Congo – CEACR, demande directe, 2011; Tunisie
– CEACR, observation, 2011; et Ukraine – CEACR, observation, 2011.
373 Voir, par exemple, Angola – CEACR, demande directe, 2010 (art. 27 de la loi no 23/91 sur la grève);
Azerbaïdjan – CEACR, observation, 2010 (art. 233 du Code pénal); Bahamas – CEACR, observation, 2010
(art. 74(3), 75(3), 76(2)(b) et 77(2) de la loi sur les relations de travail); Bangladesh – CEACR, 2010
(art. 196(2)(e) et 291, 294 à 296 de la loi sur le travail); Barbade – CEACR, observation, 2011 (art. 4 de la loi de
1920 sur l’amélioration de la sécurité); Bénin – CEACR, observation, 2010 (en ce qui concerne les marins:
ordonnance no 38 PR/MTPTPT du 18 juin 1968); Chili – CEACR, observation, 2010 (art. 11 de la loi no 12927
sur la sécurité intérieure de l’Etat); Equateur – CEACR, observation, 2010 (décret no 105 du 7 juin 1967); Fidji
– CEACR, observation, 2010 (art. 256(a) et 250 de l’ERA); Guyana – CEACR, observation, 2011 (art. 19 du
projet de loi de 2006 sur l’arbitrage dans les entreprises de services collectifs et les services de santé publique
(modification)); Libye – CEACR, demande directe, 2011 (art. 176 du Code du travail); Madagascar – CEACR,
observation, 2011 (art. 258 du Code du travail); Nigéria – CEACR, observation, 2011 (art. 30 de la loi sur les
syndicats, tel que modifié par l’article 6(d) de la nouvelle loi); Ouganda – CEACR, demande directe, 2011
(art. 29(3) de la loi sur les conflits du travail (arbitrage et règlement)); Pays-Bas (Aruba) – CEACR, observation,
2011 (art. 374(a) à (c) du Code pénal et art. 82 de l’ordonnance no 159 de 1964); Pakistan – CEACR,
observations, 2011 (ordonnance présidentielle no IV de 1999 qui porte modification de la loi antiterroriste), et
2010 (loi sur les services essentiels); Philippines – CEACR, observation, 2011 (art. 264(a) et 272(a) du Code du
travail); République démocratique du Congo – CEACR, demande directe, 2011 (art. 326 du Code du travail);
Donner un visage humain à la mondialisation
66 ILC.101/III/1B
159. D’autres types de sanctions sont parfois imposées, telles que des amendes, la
fermeture des locaux syndicaux, la suspension voire l’annulation de l’enregistrement du
syndicat concerné 374 ou la destitution des responsables syndicaux de leurs fonctions 375.
La commission estime que de telles sanctions ne pourraient être imposées que si
l’interdiction de la grève est conforme à la convention et que si les sanctions en question
sont proportionnées à la gravité de la faute commise. En tout état de cause, un droit
d’appel devrait exister à l’encontre des sanctions imposées par les autorités. Enfin,
certains systèmes présentent des particularités et condamnent les grévistes sur la base de
dispositions plus générales de la législation pénale, comme par exemple le délit
«d’entrave à l’activité d’une entreprise» 376; ou prévoient des peines d’emprisonnement
en cas de non-comparution devant le conciliateur dans le cadre du règlement d’un conflit
du travail 377; ou appliquent des sanctions pénales en cas de grève du zèle 378. De l’avis
de la commission, de telles sanctions ne sont pas compatibles avec la convention. Dans
ce contexte, elle a noté avec satisfaction notamment la suppression des sanctions pénales
pour faits de grève en République de Moldova 379, au Guatemala 380 et en République
arabe syrienne 381.
160. Elle a noté également avec satisfaction l’adoption de dispositions en Colombie 382
établissant que quiconque fera obstacle à une réunion licite ou effectuera des représailles
à l’encontre d’actes de grève, de réunion ou d’association légitimes encourra une peine
d’amende d’un montant correspondant à 100 ou 300 fois le salaire mensuel minimum
légal.
Licenciement pour faits de grève et réintégration des grévistes
161. Dès lors que le maintien de la relation de travail constitue une conséquence
normale de la reconnaissance du droit de grève, l’exercice licite de celui-ci ne doit pas
avoir comme résultat que les grévistes soient licenciés ou fassent l’objet d’une mesure de
discrimination 383. Selon la commission, un licenciement pour faits de grève en cas de
grève légitime constitue une grave discrimination pour exercice d’activités syndicales
République arabe syrienne – CEACR, observation, 2011 (art. 330, 332, 333 et 334 du décret législatif no 148 de
1949, portant Code pénal); Serbie – CEACR, demande directe, 2011 (art. 167 du Code pénal); Seychelles
– CEACR, observation, 2011 (art. 56(1) de la loi sur les relations professionnelles); Tadjikistan – CEACR,
demande directe, 2011 (art. 160 du Code criminel); Trinité-et-Tobago – CEACR, observation, 2011 (pour les
enseignants et les employés de la Banque centrale); Tunisie – CEACR, observation, 2011 (art. 388 du Code du
travail); Turquie – CEACR, observation, 2010 (art. 70, 71, 72, 73 (sauf pour le paragraphe 3, abrogé par la Cour
constitutionnelle), 77 et 79 de la loi no 2822); Ukraine – CEACR, observation, 2011 (art. 293 du Code pénal); et
Zambie – CEACR, observation, 2011 (art. 107 de la loi sur les relations du travail); Zimbabwe – CEACR,
observation, 2011 (art. 109 et 112 de la loi sur le travail).
374 Voir, par exemple, Pakistan – CEACR, observation, 2010 (art. 64(7) de la loi sur les relations
professionnelles); et Zimbabwe – CEACR, observation, 2011 (art. 107 de la loi sur le travail).
375 Pakistan – CEACR, observation, 2010.
376 Comité de la liberté syndicale, 359e rapport, cas no 2602 (République de Corée) (vol. XCIV, 2011, Série B,
no 1), paragr. 342-370.
377 Voir, par exemple, Bangladesh – CEACR, observation, 2010 (art. 301 de la loi sur le travail).
378 Voir, par exemple, Pakistan – CEACR, observation, 2010.
379 République de Moldova – CEACR, observation, 2011.
380 Guatemala – CEACR, observation, 2002.
381 République arabe syrienne – CEACR, observation, 2002.
382 Colombie – CEACR, observation, 2010.
383 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 179.
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
ILC.101/III/1B 67
licites, contraire à la convention no 98. Elle estime que, pour que le droit de grève soit
effectivement garanti, les travailleurs qui recourent à une grève légale devraient être en
mesure de réintégrer leur emploi une fois la grève terminée et que le fait de rendre le
retour au travail tributaire de certains délais ou du consentement de l’employeur
constitue un obstacle à l’exercice effectif de ce droit 384.
Dissolution et suspension des organisations
par voie administrative
162. La dissolution et la suspension des organisations syndicales constituent des
formes extrêmes d’intervention des autorités dans les activités des organisations et
devraient donc être entourées de toutes les garanties nécessaires. Celles-ci ne peuvent
être assurées que par une procédure judiciaire normale, qui devrait par ailleurs avoir
un effet suspensif. Certains pays continuent toutefois à permettre la dissolution
d’organisations de travailleurs et d’employeurs par voie administrative, ce qui constitue
une violation grave et directe de la convention 385 . S’agissant de la répartition du
patrimoine syndical en cas de dissolution, les biens devraient être affectés aux finalités
pour lesquelles ils ont été acquis. Les autorités et l’ensemble des organisations
concernées devraient coopérer pour faire en sorte que tous les syndicats aient la
possibilité d’exercer leurs activités en toute indépendance et sur un pied d’égalité 386.
Droit des organisations de constituer des fédérations
et des confédérations et de s’affilier aux organisations
internationales
163. Afin de mieux pouvoir défendre les intérêts de leurs mandants, les organisations
de travailleurs et d’employeurs devraient avoir le droit de constituer des fédérations et
des confédérations de leur choix, qui devraient elles-mêmes jouir des divers droits
reconnus aux organisations de base, notamment en ce qui concerne la liberté de
fonctionnement, d’activités et de programme d’action. La solidarité internationale des
travailleurs et des employeurs exige également que leurs fédérations et confédérations
nationales puissent se regrouper et agir librement sur le plan international 387.
384 Voir le chapitre 2 ci-après, consacré à la convention no 98.
385 Voir, par exemple, Nigéria – CEACR, observation, 2011.
386 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 180 et suiv.
387 Etude d’ensemble de 1994, paragr. 189 et suiv.

Document no 237
CIT, 102e session, 2013, Rapport III (Partie 1A), Rapport
de la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations, Rapport général,
paragr. 31

ILC.102/III(1A)
Conférence internationale du Travail, 102e session, 2013
Rapport de la Commission d’experts
pour l’application des conventions
et recommandations
(articles 19, 22 et 35 de la Constitution)
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport III (Partie 1A)
Rapport général
et observations concernant certains pays
Bureau international du Travail Genève
Rapport général
RAPPORT GÉNÉRAL
11
et objectif, dont les membres sont désignés par le Conseil d’administration, organe tripartite, à titre personnel précisément
en raison de ce statut d’impartialité et d’indépendance; ii) elle a souvent fait valoir que, si son mandat ne l’autorise pas à
donner des interprétations définitives des conventions (cette compétence appartenant exclusivement à la Cour
internationale de Justice (CIJ)), pour pouvoir s’acquitter de sa mission consistant à évaluer l’application et la mise en
oeuvre des conventions, elle a eu à analyser et exprimer son avis sur la portée juridique et le sens de certaines de leurs
dispositions; iii) à compter, tout au moins, des années 1950, elle a exprimé son avis sur le sens de certains instruments de
l’OIT dans des termes qui relevaient inévitablement d’un langage interprétatif.
27. Réexaminant la position du groupe employeur au fil des ans, la commission a souligné que, si l’on se place
dans une perspective historique, ce groupe a accepté le rôle interprétatif de la commission comme faisant partie de son
mandat. Par exemple, la commission a rappelé que, à la Commission de l’application des normes de la Conférence de
1987, répondant à des préoccupations soulevées par certains gouvernements, le porte-parole des employeurs a «récusé
l’argument selon lequel la CEACR serait allée au-delà de son mandat», et le porte-parole des employeurs comme celui des
travailleurs ont «exprimé leur soutien aux méthodes de travail suivies par la CEACR». En 1993, à la Commission de la
Conférence, le groupe employeur a fait observer que «des désaccords sur la méthode même et le fond des interprétations
ne surgissent que dans une proportion minime de la multitude des commentaires qui ont été formulés au fil des ans par la
commission d’experts». Plus récemment, à la Commission de la Conférence de 2011, le groupe employeur n’a pas réagi à
la discussion détaillée des méthodes interprétatives que la CEACR avait présentées aux paragraphes 10 à 12 de son
rapport général, paragraphes qui examinaient de manière particulièrement détaillée: a) la nécessité logique d’interpréter
les conventions pour s’acquitter de sa mission; b) la nécessité de demeurer attachée à son indépendance, son objectivité et
son impartialité dans l’accomplissement de ses travaux; et c) la commission a toujours eu présentes à l’esprit toutes les
méthodes d’interprétation du droit des traités, notamment la Convention de Vienne.
28. La commission a en outre souligné que son mandat découle de trois grands principes. Premièrement, l’analyse
et l’évaluation du sens du texte font logiquement partie intégrante de l’application des conventions ratifiées. A cet égard,
elle a observé qu’il lui incombe de signaler à l’attention de la Commission de la Conférence: i) toutes pratiques ou normes
nationales qui ne seraient pas conformes aux conventions, ce qui requiert inévitablement l’évaluation et donc un certain
degré d’interprétation de la législation nationale et des termes de la convention; ii) conformément à ses méthodes de
travail, les cas de progrès dans l’application des normes, ce qui, là encore, présuppose un certain degré d’interprétation.
Deuxièmement, l’égalité et l’uniformité de traitement dans l’application des conventions est un gage de sécurité juridique.
La commission a souligné à cet égard que la démarche qu’elle suit en examinant le sens des conventions fait une priorité
de l’égalité et de l’uniformité de traitement entre les Etats quant à l’application pratique. Cela était essentiel pour mettre en
exergue les principes de légalité qui incitent les gouvernements à accepter ses avis concernant l’application d’une
convention et, de cette manière, apportent le degré de certitude indispensable au bon fonctionnement du système de l’OIT.
Troisièmement, la commission a souligné que sa composition, qui repose sur des personnes indépendantes faisant autorité
dans le domaine et ayant une expérience directe de divers systèmes juridiques nationaux dans le cadre desquels les
conventions sont appliquées, contribue à garantir une large acceptation de ses avis sur le sens des conventions.
29. Abordant les avis exprimés par le porte-parole des employeurs au cours de la séance, la commission a pris acte
des soucis exprimés par ces derniers, qui craignent que ses observations ne «soient perçues par le monde extérieur comme
une sorte de jurisprudence de “droit mou” sur les normes du travail». La commission a toutefois observé que le monde
extérieur à l’OIT n’est pas son audience désignée ou recherchée; au contraire, ses opinions et conclusions, à caractère non
contraignant, s’adressent aux gouvernements, aux partenaires sociaux et à la Commission de la Conférence,
conformément au rôle bien établi qu’elle occupe dans le mécanisme de contrôle de l’OIT. Tout en étant consciente que les
orientations qu’elle propose sont accueillies avec sérieux dans certains cadres, qu’il s’agisse de tribunaux nationaux ou
d’instances internationales, la commission estime qu’il s’agit là d’un juste hommage à son indépendance et à son
impartialité en tant que source, ainsi qu’à la valeur de persuasion qui s’attache à ses analyses et conclusions, naturellement
non contraignantes. La commission a rappelé que ces analyses ou conclusions ne peuvent acquérir d’autorité dans un sens
«contraignant» que si un tribunal international, un tribunal national ou un instrument établi indépendamment en décident
ainsi.
30. S’agissant de ses méthodes de travail et, en particulier, de son examen des rapports des gouvernements et des
commentaires des partenaires sociaux, la commission a rappelé que celles-ci reposent exclusivement sur l’écrit et qu’elles
ne font pas place à une quelconque oralité des débats. Si elle prend dûment note des commentaires bien documentés et
constructifs des partenaires sociaux, la commission souhaiterait recevoir davantage de tels commentaires de la part des
employeurs pour avoir une meilleure perception de leurs opinions. La commission a souligné le travail de fond qu’elle
accomplit individuellement et collectivement en examinant l’application des conventions, travail qui se trouve enrichi par
un échange intensif d’opinions provenant d’une multiplicité de sources juridiques, sociales et culturelles. Enfin, la
commission a rappelé que son mandat doit nécessairement être perçu dans le cadre de la Constitution de l’OIT, qui affirme
que les buts et objectifs de l’Organisation sont l’élimination de l’injustice, de la misère et des privations, et l’instauration
de la justice sociale comme moyen de garantir une paix universelle et durable.
31. Sur la question du droit de grève, la commission d’experts s’est réjouie de la discussion franche de questions
qui lui ont permis d’aborder directement un certain nombre de points. En premier lieu, il semble qu’il y ait toujours un
problème quant à l’acceptation de l’existence même d’un droit de grève selon la convention no 87. La commission prendra
RAPPORT GÉNÉRAL
12
en compte les arguments formulés par les employeurs, même si elle considère qu’elle a déjà abordé cette question en
détail dans son étude d’ensemble de 2012. Si le vice-président employeur semble faire une distinction entre une
application interprétative de la convention et ce que les employeurs ressentent davantage comme s’apparentant à une prise
de position politique, la commission d’experts a indiqué que, dès l’instant où la commission a décidé en 1959 que la
convention inclut le droit de grève, il est devenu nécessaire de déterminer les restrictions de ce droit qui sont acceptables
plutôt que de le laisser comme un droit absolu. C’est ce qu’a fait la commission d’experts, en procédant au cas par cas
d’année en année, examinant le droit et la pratique à l’échelle nationale, ayant à l’esprit les informations qui lui étaient
communiquées et prenant en compte la situation nationale, tout en cherchant à assurer un traitement égalitaire et une
application universelle. Pour procéder à une telle évaluation, la commission d’experts a encouragé et continue
d’encourager toutes les parties, mais en particulier les organisations d’employeurs, à faire usage de l’article 23 2) de la
Constitution pour soumettre à sa réflexion les informations pertinentes. S’il est vrai que la commission s’appuie sur les
décisions du Comité de la liberté syndicale (CLS), elle prend ses propres décisions. Elle prend en compte les décisions du
CLS, mais elle ne justifie pas ses observations en fonction de ces décisions. En outre, elle a évoqué divers exemples de
plaintes et de commentaires d’organisations nationales et internationales d’employeurs s’adressant au CLS et à elle-même
et demandant à l’un et l’autre de se prononcer sur la nécessité de mettre des limites à l’exercice du droit de grève lorsque,
à son avis, la législation comporte des dispositions critiquables.
32. Enfin, la commission a souligné que, à la différence des partenaires sociaux qui, souvent, défendent des intérêts
contradictoires, ce qui les met dans la nécessité de négocier, la commission ne défend pas des intérêts et, même si des
divergences peuvent surgir entre les experts lors de l’examen de l’application de conventions par les Etats, ils ne négocient
pas entre eux pour formuler leurs commentaires. Ils recherchent dans la plus grande objectivité la vérité juridique, de
manière impartiale.
Avis de la commission sur son mandat
33. La commission est consciente que, suite aux consultations ayant eu lieu en septembre 2012, les trois mandants
de l’OIT ont demandé que le Bureau établisse en vue de la 317e session (mars 2013) du Conseil d’administration un
document d’information sur le mandat de la commission d’experts. Suite à la réunion qu’elle a tenue avec les viceprésidents
de la Commission de l’application des normes de la Conférence, la commission a désormais une
compréhension plus large des opinions ou préoccupations que les travailleurs et les employeurs ont évoquées à propos de
son mandat, opinions et préoccupations qui ont été présentées clairement par les deux vice-présidents à la séance tenue par
la commission le 1er décembre 2012. La commission a décidé d’exposer ce qui suit, dans le but de faciliter la
compréhension de sa mission par les mandants de l’OIT, et elle appelle en particulier l’attention sur les quatre principaux
facteurs exposés ci-après:
a) Logiquement partie intégrante de l’application. Le mandat de la commission d’experts appelle cette dernière à
examiner un vaste ensemble de rapports et d’informations pour effectuer un suivi de l’application des conventions et
des recommandations. Dans l’accomplissement de cette mission, il incombe à la commission d’experts d’appeler
l’attention de la Commission de l’application des normes de la Conférence sur toutes pratiques ou normes nationales
qui ne seraient pas conformes aux conventions, et notamment sur la gravité de certaines situations. Cette démarche
requiert logiquement et inévitablement une évaluation, laquelle implique elle-même un certain degré d’interprétation
tant de la législation nationale que du texte de la convention.
A cela s’ajoute que, conformément à des méthodes de travail établies de longue date, la commission d’experts a
identifié depuis 1964 plus de 3 000 cas de progrès (dont elle a pris note avec satisfaction), démarche qui elle aussi
requiert logiquement un jugement interprétatif du changement survenu dans la législation ou la pratique suivie par le
gouvernement pour faire porter plus pleinement effet à une convention ratifiée, telle qu’elle est comprise par la
commission.
b) Egalité de traitement et uniformité sont les garants de la prédictibilité dans l’application. La démarche suivie par
la commission dans son analyse du sens des conventions met en exergue sa juste préoccupation d’égalité de
traitement des Etats et d’uniformité dans l’application pratique. Cette attitude est essentielle pour la préservation des
principes de légalité, encourageant les gouvernements à accepter ses avis sur l’application d’une convention. Ce
faisant, la commission renforce le degré de certitude nécessaire au bon fonctionnement du système de l’OIT.
c) Composition. Les avis de la commission d’experts sur le sens des conventions sont largement acceptés parce que la
commission est composée de personnes indépendantes, qui font autorité par leur connaissance du droit et leur
expérience directe de la multiplicité des systèmes juridiques nationaux par rapport auxquels ils doivent évaluer
l’application des conventions. L’indépendance de la commission est un aspect inhérent à la profession de chacun de
ses membres, ceux-ci étant principalement des juges de juridictions nationales et internationales et des professeurs
de droit du travail et de droit humanitaire. Cette indépendance découle également du processus selon lequel ses
membres sont choisis. En effet, leur nom est proposé par les gouvernements, les employeurs ou les travailleurs, mais
c’est le Directeur général qui les désigne, avec l’approbation du Conseil d’administration. Cette combinaison
d’indépendance, d’expérience et de compétence contribue à asseoir la légitimité de la commission au sein de la
communauté de l’OIT.

Document no 238
CIT, 107e session, 2018, Rapport III (Partie A), Rapport de
la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations, Rapport général,
paragr. 17

ILC.107/III(A)
Conférence internationale du Travail, 107e session, 2018
Rapport de la Commission d’experts
pour l’application des conventions
et recommandations
(articles 19, 22, 23 et 35 de la Constitution)
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport III (Partie A)
Rapport général
et observations concernant certains pays
Bureau international du Travail, Genève
RAPPORT GÉNÉRAL
10
manière concise, claire et directe pour rendre compte des mesures concrètes prises pour traiter les problèmes
d’application. Etant donné que les questions sujettes à controverse sont délibérément omises des conclusions,
l’intervenante a invité la commission d’experts à prendre en considération l’équilibre global de ces conclusions lorsqu’elle
en examine le suivi. Elle a également invité la commission à envisager d’autres moyens pour rendre le rapport plus lisible
et plus transparent. S’agissant de la sous-commission sur les méthodes de travail, par exemple, certains éléments de ses
travaux ont été fournis dans le rapport général mais l’intervenante souhaiterait disposer d’informations plus concrètes sur
les questions examinées et sur l’issue de la discussion au cours de la session actuelle, car ces informations enrichiraient les
discussions du Conseil d’administration, dans le cadre de l’initiative sur les normes. La vice-présidente employeuse a
également porté certaines questions à l’attention des experts au sujet de l’organisation de leurs travaux, compte tenu du
nombre de rapports reçus cette année et, se référant aux pays qui manquent gravement à leur obligation de présenter des
rapports, elle a demandé si l’on envisage des mesures pour donner plus de visibilité à ces cas dans le rapport. Enfin, en ce
qui concerne la position bien connue de son groupe sur le droit de grève, la vice-présidente employeuse a demandé si la
commission avait eu l’occasion de réfléchir davantage à cette question et comment elle traite cette question cette année.
17. La commission d’experts a indiqué avoir pris bonne note des discussions qui se sont tenues dans le cadre de
l’initiative sur les normes à propos des moyens de renforcer le système de contrôle. La commission a informé les
vice-présidents des décisions adoptées sur la base des travaux de la sous-commission sur les méthodes de travail,
notamment celle consistant à donner davantage d’attention à certains cas de manquements graves aux obligations de
présenter des rapports et à leur accorder plus de visibilité en général et plus particulièrement vis-à-vis de la Commission
de la Conférence. La commission a également décidé de s’inspirer des critères utilisés pour réclamer des rapports anticipés
afin d’assouplir les critères extrêmement rigoureux permettant de déroger au cycle d’examen lorsqu’elle reçoit des
commentaires d’organisations de travailleurs et d’employeurs au titre de l’article 23, paragraphe 2, de la Constitution de
l’OIT. Les experts ont également discuté des innovations apportées par la convention du travail maritime, 2006, telle
qu’amendée (MLC, 2006), qui sont le fruit du regroupement, de la mise à jour et de la révision de 37 conventions et
31 recommandations, et permettent, grâce à un formulaire de rapport innovant, un contrôle cohérent et permanent de son
application. La MLC est un instrument complet, holistique et innovateur qui a atteint un degré d’acceptation extraordinaire
par la rapidité avec laquelle il a été ratifié par un nombre élevé d’Etats Membres. La même démarche a été suivie pour
l’adoption de la convention (no 188) sur le travail dans la pêche, 2007, et pour son formulaire de rapport. Les experts ont
également insisté sur l’importance des conventions techniques qui constituent la plupart des normes internationales du
travail. Outre les conventions fondamentales et de gouvernance, les conventions techniques couvrent un large éventail de
matières et représentent une part importante des travaux de la commission qui consacre beaucoup de son temps et de son
attention à ces instruments. Depuis 2012, un des outils utilisés pour l’examen de ces conventions a consisté à produire des
commentaires groupés sur des questions soulevées au titre de plusieurs conventions ratifiées par le même pays dans
certains domaines. Cette façon de procéder a renforcé la cohérence des commentaires et mis en avant les questions
soulevées, sans en perdre l’une ou l’autre de vue. Dans certains cas, cette démarche a permis d’identifier d’autres
questions essentielles et de les reprendre dans des observations. Le but était d’accroître l’impact des commentaires de la
commission de telle sorte que le suivi à l’échelon national puisse être aussi ciblé et constructif que possible. S’agissant des
dossiers reportés, les experts ont donné aux vice-présidents l’assurance que la commission a toujours mené à bien
l’examen de tous les dossiers que le secrétariat lui avait soumis. Cependant, un certain nombre de rapports ont dû être
reportés chaque année pour deux raisons principales. La première était la soumission tardive des rapports après l’échéance
du 1er septembre, ce qui a sérieusement perturbé le fonctionnement du système. La seconde est le nombre croissant de
commentaires des organisations d’employeurs et de travailleurs, dont on peut se féliciter, mais qui a aussi eu pour effet
d’augmenter la charge de travail du secrétariat. Dans ces conditions, il a fallu que les efforts convergent pour s’attaquer au
problème avec des méthodes de travail mieux étudiées et plus efficaces pour la commission et par la poursuite des
discussions en cours au Conseil d’administration dans le cadre de l’initiative sur les normes. Enfin, s’agissant du droit de
grève, les experts ont informé le vice-président travailleur qu’ils avaient réexaminé attentivement la déclaration qu’elle
avait prononcée devant la Commission de la Conférence, et ils ont insisté sur trois points. Premièrement, la commission
d’experts a examiné, au titre de la convention no 87, un certain nombre de thèmes récurrents, tels que les violations des
libertés publiques, le refus du droit des employeurs et des travailleurs de constituer des organisations de leur choix et de
s’y affilier, et le droit de ces organisations d’organiser librement leurs activités et de formuler leurs programmes sans
ingérence de l’Etat. Le droit de grève a été souvent examiné en tant que sous-thème de la première question (violations
des libertés publiques) et de la troisième question (organisation des activités sans ingérence). Les experts ont donc
examiné un large éventail de questions d’importance relevant de la convention no 87, et pas principalement le droit de
grève. Deuxièmement, les experts ont dûment prêté attention à des rapports reçus d’Etats Membres qui renferment souvent
des informations sur la manière dont le droit de grève a été réglementé à l’échelon national, accompagnées de nombreux
commentaires d’organisations d’employeurs et de travailleurs à ce sujet. Troisièmement, même si l’article 9 de la
convention no 87 laisse à la législation nationale le soin de déterminer la mesure dans laquelle doivent s’appliquer les
garanties prévues par la convention en ce qui concerne les forces armées et la police, aucune des autres dispositions n’est
du ressort exclusif de la législation nationale et, par conséquent, il incombe à la commission de revoir la manière dont la
convention est appliquée dans tous les Etats Membres ayant ratifié la convention.
Document no 239
CIT, 108e session, 2019, Rapport III (Partie A), Rapport
de la Commission d’experts pour l’application
des conventions et recommandations, Rapport
général, paragr. 28-29

ILC.108/III(A)
Conférence internationale du Travail, 108e session, 2019
Rapport de la Commission d’experts
pour l’application des conventions
et recommandations
(articles 19, 22, 23 et 35 de la Constitution)
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport III (Partie A)
Rapport général
et observations concernant certains pays
Bureau international du Travail, Genève
RAPPORT GÉNÉRAL
12
est disposée à tenir dûment compte des suggestions faites par les deux vice-présidents dans les débats futurs sur cette
question.
28. Enfin, la commission s’est félicitée de l’occasion qui lui a été donnée de procéder à un échange de vues sur la
convention no 87 et sur le droit de grève, ainsi que de l’utilisation faite, dans ses observations, des conclusions et
recommandations formulées par le Comité de la liberté syndicale. Cette dernière question avait été soulevée par la
vice-présidente employeuse lors de la dernière session de la Commission de la Conférence en mai-juin 2018. La position
de la commission d’experts sur le droit de grève a été exposée dans de nombreux échanges avec les vice-présidents depuis
2013. Les experts ont constaté que les parties avaient des vues différentes sur la question. Cela étant, les deux
commissions sont d’accord sur les thèmes récurrents abordés dans les commentaires de la commission en ce qui concerne
la liberté d’association. Il s’agit en premier lieu du droit d’être à l’abri de toute violence et menaces contre les libertés
civiles; en second lieu de l’exclusion de certaines catégories de travailleurs du droit de s’organiser que leur confère la
convention; et en troisième lieu de l’autonomie des organisations de travailleurs et d’employeurs explicitement protégée
par la convention en ses articles 2, 3, 4, 5 et 6. L’un des aspects de cette autonomie, le droit des organisations de
travailleurs et d’employeurs d’organiser leurs activités et de formuler leurs programmes d’action, implique d’entreprendre
une action collective dans des circonstances appropriées. Le droit de grève, bien qu’important, n’est pas l’objet principal
de l’examen de la commission. Compte tenu de l’obligation constitutionnelle de rendre compte de la manière dont les
conventions ratifiées sont appliquées en droit et en pratique, les commentaires de la commission visent à guider l’action
des autorités nationales en ce qui concerne ce droit. Les orientations de la commission reposent aussi sur les rapports des
gouvernements et les commentaires des partenaires sociaux, qui reflètent l’application de ce droit dans différents contextes
nationaux. C’est en s’efforçant de comprendre la diversité et la complexité des différentes situations nationales que les
experts examinent l’application de toutes les conventions, et pas seulement l’application de la convention no 87, et c’est
certainement un aspect qu’ils prennent très au sérieux lorsqu’ils examinent les questions relatives au droit de grève.
29. En ce qui concerne les commentaires de la vice-présidente employeuse au sujet des références faites aux cas
portés devant le Comité de la liberté syndicale, la commission a pleinement reconnu les différents mandats et méthodes de
travail des deux commissions et n’a pas systématiquement fait référence aux conclusions et recommandations du Comité
de la liberté syndicale. Lorsque la commission y a fait référence, c’est essentiellement pour deux raisons: soit parce que le
Comité de la liberté syndicale a renvoyé les aspects législatifs d’un cas à la commission d’experts, soit pour d’autres
raisons intersectorielles, par exemple lorsque le Comité de la liberté syndicale avait traité de questions similaires dans un
passé récent comme l’ont parfois indiqué le gouvernement ou les partenaires sociaux eux-mêmes. L’évaluation par le
Comité de la liberté syndicale de l’application pratique des conventions sur la liberté syndicale a parfois permis à la
commission d’experts de savoir de quelle manière la convention est appliquée, d’autant plus que le Comité de la liberté
syndicale fonde son examen sur des plaintes. L’approche de la commission renforce l’intégration des mécanismes de
contrôle, tout en s’appuyant sur un ensemble de circonstances bien adapté, dans le cadre de l’indépendance et du pouvoir
discrétionnaire que la commission est censé exercer.
30. En ce qui concerne les considérations de diversité dans le choix de doubles notes de bas de page, le critère le
plus important pour les experts est l’urgence de la question, mais ils sont conscients de la nécessité de maintenir tous les
types d’équilibre. Les experts se rendent bien compte des difficultés rencontrées par les deux vice-présidents pour
maintenir un équilibre entre les cas examinés par la Commission de la Conférence, en particulier en ce qui concerne la
diversité régionale. Les préoccupations exprimées par les deux vice-présidents ont été prises très au sérieux par les experts
et seront prises en compte pour aller de l’avant.
31. Une information sur la suite donnée par la commission aux conclusions de la Commission de la Conférence à
sa 107e session (2018) figure au paragraphe 73 du présent rapport général 3.
Mandat
32. La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations est un organe
indépendant établi par la Conférence internationale du Travail; ses membres sont nommés par le Conseil
d’administration. Elle est constituée de juristes ayant pour mission d’examiner l’application des conventions et
recommandations de l’OIT par les Etats Membres de cette organisation. La commission d’experts procède à une
analyse impartiale et technique de la façon dont les conventions ratifiées sont appliquées dans la législation et la
pratique par les Etats Membres, en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les différents systèmes
juridiques. Ce faisant, elle examine la portée juridique, le contenu et la signification des dispositions des
conventions. Ses avis et recommandations ont un caractère non contraignant, leur objet étant de guider l’action des
autorités nationales. Ils tirent leur valeur persuasive de la légitimité et de la rationalité du travail de la commission
qui est basé sur son impartialité, son expérience et son expertise. Le rôle technique de la commission et son autorité
morale sont largement reconnus, en particulier du fait qu’elle poursuit sa tâche de contrôle depuis plus de
quatre-vingt-dix ans et en raison de sa composition, de son indépendance et de ses méthodes de travail qui se
fondent sur un dialogue continu avec les gouvernements et prennent en compte les informations fournies par les
3 En outre, une information mise à jour sur la suite donnée par le secrétariat aux conclusions de la Commission de la Conférence
sera publiée, à partir du 1er avril 2019, sur le site Web officiel de la Commission de la Conférence.
Document no 240
CIT, 58e session, 1973, Rapport de la Commission de
l’application des normes, p. 605 (Mauritanie)

CONFERENCE INTERNATIONALE
DU TRAVAIL
CINQUANTE-HUITIÈME SESSION
GENÈVE, 1973
COMPTE RENDU
DES TRAVAUX
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
GENÈVE, 1973
ANNEXES
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE: Rapport général 582
DEUXIÈME PARTIE : Application des conventions sur la liberté syndicale et le droit d'organisation et de négociation
collective 587
Annexe A: Situation dans certains pays qui n'ont pas ratifié les conventions nos 87 et 98 ou l'une d'entre
elles 592
Annexe B: Situation dans certains pays ayant ratifié les conventions nos 87 et 98 ou l'une d'entre elles . . 596
TROISIÈME PARTIE : Annexes 615
Annexe I: Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22
de la Constitution) 615
A. Observations générales et informations concernant certains pays '. 615
B. Observations et informations sur l'application des conventions 619
C. Rapports détaillés sur les conventions ratifiées 633
D. Tableau statistique des rapports annuels sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 635
E. Rapports reçus au 21 juin 1973 sur deux conventions sur la liberté syndicale et le droit d'organisation
et de négociation collective (article 19 de la Constitution) 635
Annexe II: Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 636
A. Observations générales 636
B. Observations et informations portant sur l'application de certaines conventions 637
C. Rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains . . . . 638
Annexe III: Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 639
Observations et informations 639
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 647
en 1962. A partir du moment ou on a tente d'organiser
Jes travailleurs des plantations de Firestone, des syndicalistes
ont ete arretes. Firestone et Jes autres plantations ont
reussi a faire adopter des lois contre Jes travailleurs des
plantations. En 1966 et en 1967, la CISL, la Federation internationale
des travailleurs des plantations et le Congres des
organisations industrielles du Liberia ont depose des plaintes
au BIT concernant les restrictions a la Iiberte syndicale
dans Jes plantations. Etant donne la lenteur de la procedure,
Jes syndicats ont fait un effort pour discuter avec le gouvernement.
En mars l 972, ils ont adresse une petition au
President pour que la loi soit modifiee et la convention
n° 87 appliquee. Ils ont l'espoir que le President fera quelque
chose. II a cree une commission composee des ministres
du Travail et de la Justice. Les syndicats ont pu discuter
avec le ministre de la Justice, mais n'ont pas encore eu de
reponse a leur petition. II faut esperer que des changements
seront apportes a la legislation actuelle, pour permettre en
particulier aux tra vailleurs des plantations de s'affilier a
des organisations syndicales. Ils ne sont pas capables de
s'organiser seuls, ils ont besoin d'organisations deja formees.
Le membre travailleur de la Sierra Leone a estime que le
Liberia n'est pas dans une phase de transition, et qu'il
devrait etre mentionne dans la liste speciale sous le critere 7,
pour inciter le gouvernement a resoudre d'urgence Jes problemes
actuels.
En reponse a des questions posees par Jes membres
employeurs et le membre travailleur des Etats-Unis, le
representant gouvernemental a declare ce qui suit :
Le nouveau Code du travail a pris en consideration toutes
Jes divergences signalees par la commission d'experts en ce
qui concerne les conventions n°• 87 et 98, et il contient des
dispositions conformes a ces conventions, comme la commission
pourra le voir l'annee prochaine, quand il aura ete
adopte. II a d'ailleurs ete prepare avec !'aide d'un expert du
BIT. Le texte en sera communique au BIT apres !'adoption.
Les restrictions au droit des employes du secteur public de
s'affilier a des organisations syndicales et le controle des
autorites publiques dans les elections syndicales sont supprimes
par le projet de Code du travail.
Les membres travailleurs ont fait la declaration suivante:
Dans le cas de la convention n° 98, le gouvernement
avait indique dans son rapport que la legislation serait mise
en conformite avec la convention. II indique aujourd'hui que
le projet de Code du travail mettra la legislation en conformite
avec la convention n° 87 egalement. Malgre la gravite
des violations de ces deux conventions, et compte tenu des
elements positifs apportes par le representant gouvernemental
ainsi que de la situation actuelle au Liberia, la
commission pourrait donner au gouvernement un delai
d'un an pour mettre sa legislation en ordre et demander
a la commission d'experts d'examiner tres attentivement
la question. Le cas devrait etre inclus dans la liste speciale
l'annee prochaine, s'il n'y a pas eu d'amelioration sensible.
La commission a demande que la commission d'experts
examine la situation avec une attention toute particuliere et
elle a exprime l'espoir que la legislation nationale sera mise
en pleine conformite avec les conventions n°" 87 et 98 d'ici
a l'annee prochaine.
Madagascar (ratification : 1960). - Le gouvernement a
communique les informations suivantes :
La refonte en cours du Code du travail malgache eliminera
de !'article 3 la phrase << toute activite politique est
interdite aux syndicats >> ; et !'article 17 sera modifie en ce
sens que Jes mots << interets economiques, industriels, commerciaux
et agricoles >> seront remplaces par << interets communs
>). Tel est le sens de la recommandation de la Commission
nationale d'harmonisation qui a conclu que !'article 3
du Code du travail devrait etre remplace par la phrase
suivante : << Les syndicats ont exclusivement pour objet
l'etude et la defense des interets professionnels. >>
Un representant gouvernemental a en outre declare que les
amendements du Code du travail envisages sauvegardent
entierement la liberte des syndicats, sans que !'administration
en soit pour autant desarmee pour poursuivre eventuellement
devant les tribunaux judiciaires les membres des
syndicats qui seraient tentes de contrevenir a la legislation
concernant la liberte de presse, la liberte de reunion, la
liberte d'association, ainsi qu'a la legislation penale ..
Les membres travailleurs et employeurs ont declare que la
communication par Jes gouvernements de reponses trop tardives
ne peut etre consideree comme une maniere de proceder
satisfaisante car elle entrave le travail des organes de
cont role.
La commission a pris note des informations fournies par
le gouvernement, lesquelles seront examinees par la commission
d'experts.
605 -
Mauritanie (ratification: 1961). - Un representant gouvernemental
a fait la declaration suivante :
En 1969, des contacts directs avaient ete deman'des sur
huit conventions. A la suite de ces contacts, le gouvernement
s'est engage a i1armoniser progressivement la legislation avec
ces conventions. La commission d'experts a note avec satisfaction
les textes reglementaires et legislatifs pris en 1972 en
ce qui concerne les conventions n°• 3, 18, 33, 52, 81, 90
et 94. Restait la convention n° 87, au sujet de laquelle le
gouvernement a communique au BIT, par lettre du l l mai
1973, un projet de loi en indiquant que, si ce projet etait
juge satisfaisant par le BIT et la commission d'experts, ii
serait soumis au Parlement en vue de son adoption avant la
session suivante de la Conference.
En 1969 et en 1970, des syndicalistes, profitant de remous
internes au mouvement ouvrier, avaient voulu creer des
syndicats sur une base ethnique et linguistique, ce qui avait
ete juge contraire a l'unite nationale ; le gouvernement, pour
mettre fin a cette tendance dangereuse pour le pays, decida
de ne permettre qu'un seul syndicat par profession. Malheureusement,
le gouvernement n'avait pas explique ces raisons
a la commission d'experts qui avait considere ce texte
comme contraire au principe de la liberte syndicale, alors
que, en realite, ce sont les syndicalistes qui avaient detourne
!'esprit de la convention. Ces difficultes ont aujourd'hui
disparu, les syndicalistes ayant compris la necessite de !'unite
syndicale sur des bases professionnelles. C'est la raison pour
laquelle un nouveau texte a ete propose qui vise a respecter
la convention n° 87, tout en protegeant le pays contre des
actes susceptibles de nuire a !'unite nationale. S'il n'etait pas
juge satisfaisant par la commission d'experts, de nouveaux
contacts directs pourraient etre demandes au BIT.
11 a ete indique a la commission que, dans une lettre
adressee le 11 mai et re9ue au BIT le 25 mai I 973, le
gouvernement a expose Jes raisons qui avaient conduit a la
loi de 1970; ii a indique qu'il entend faire honneur a ses
engagements et qu'il demande !'assistance du BIT au sujet
des modifications legislatives qu'il envisage et qui portent
sur les articles l, 2 et 9 du livre III du Code du travail.
C'est a la commission d'experts qu'il appartient de donner
un avis. Le BIT a envoye une reponse interimaire le 29 mai
1973 notant l'envoi du projet de texte et indiquant que celuici
semblait encore presenter certaines divergences avec la
convention, malgre les ameliorations apportees. Le BIT
demeure a la disposition du representant de la Mauritanie.
Les membres travailleurs ont fait la declaration suivante
:
II y a liea de prendre note des efforts faits par le gouvernement
pour mettre sa legislation en conformite avec la
convention et du fait qu'il desire obtenir l'avis tant du BIT
que de la commission d'experts. Le gouvernement s'est refere
aux raisons qui ont motive !'adoption de la Joi de 1970.
Cependant, les motivations ne constituent pas un critere
pour juger s'il y a ou non conformite avec une convention.
Il faut que les travailleurs restent libres de former Jes syndicats
de leur choix. L'exigence que les dirigeants syndicaux
appartiennent a la profession representee est incompatible
avec !'article 3 de la convention. Le fait que le ministre du
Travail puisse decider discretionnairement d'interdire une
greve en soumettant un differend collectif a la procedure
d'arbitrage est contraire aux articles 3 et 8 de la convention.
Les membres employeurs se sont associes aux remarques
faites par les membres travailleurs. Ils ont estime qu'il est
indispensable de mettre la legislation en harmonie avec la
convention.
Le representant du gouvernement a declare que le projet
de Joi envisage tend a supprimer diverses divergences signalees
par la commission d'experts. Le gouvernement desire
remplir ses obligations, mais ii souhaite que l'on tienne
compte des difficultes des pays oil la tradition syndicale
n'est pas aussi ancienne que dans les pays industrialises.
La commission a pris note de !'intention formulee par le
gouvernement de se conformer pleinement a la convention,
ainsi que de la demande d'avis qu'il a adressee au BIT.
Mexique (ratification: 1950). - Le gouvernement a communique
Jes informations suivantes :
Les commentaires qui ont ete formules par la commission
d'experts au sujet de la reglementation legale du droit syndical
des travailleurs au service de l'Etat portaient sur trois
questions fondamentales.
1. Article 2 de la convention, re/atif au droit des travailleurs
de constituer des organisations de /eur choix. Non
seulement les travailleurs au service des particuliers, mais
aussi Jes travailleurs au service de I'Etat beneficient du droit
de s'associer pour la defense de leurs interets. L'activite de
l'Etat, par sa nature propre, ne peut se voir interrompue ou
entravee, parce que la puissance publique, en tant que
gerante de la collectivite, a a sa charge des fonctions

Document no 241
CIT, 64e session, 1978, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 29/31-29/32 (Éthiopie)

29
^ferile^pairièffle s^l^it ©wèspe; liSTB
-4lMaftâMë!jpMiM^â;f^p^1 #i,|iwtM M-tig|pBM 'me- l^âp^MUi
• \ .-•' •''•.> '_ • ,- . : j' •••:L __•, • • • - _ • ;_: ".--•; ; ";: ' ".,••,••>•:••.. ' • •• ':••-.:• . ,;.
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, jMmÈmvmïïm: Âmoexes • • •. -.%%
•.•.'•• A • fc #fe8er\«ati©ms et MMMMiftti-inr ï'apptGaitioa 4te «
>Ç. Tafeleaa áes fa^poifts aélaàlés sw les «w
. - . .. B. Ofeseií'Ka'tiiOíis ©t inf©¡EMaiioâs .SH» Faillie
.',;.;_. •• C. TaWeara des iraip|>èîrts\aétaiiïiés; sw î'af^teaiti^a ^te
\Wt^vmMmm'-iM^MÊmÊêÊsÊm:-.-*':>.. , •.,. .,-.. , *... , „ *:;v „••..,.•>, •,.•..-," t . , .„ * . •!&
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• ,. ; i^^^liMífc-ftlMWh^, lÜS » ,.;•.. ,,.,., ,»,„,. •„". , -,, V-... '.... * ., ,',,•.-,•'-. y . ••, :,•.: .,'-i » -fi
faites, §msi la ptepsu*, à des dates amtMewes h la visite
eîâeetmÊe put éis, reprèsemtaiats êa BIT dams sem pays. Le
M jmm tfî% déjà, il a-vaiit adressé mme lettre à \m mmahie
dto Coaseii d'adtaMsteatioii dw BIT, sema^jaDt qu'il m pemsait
pas qnie la siteatít» de sum pays était amssi grave qiaê
l'oii a Mem VOTta la dépetadre. Aters qw'il m'était pas à même
de faire ides commentaires sur ces accusations, 1 a souligné
cpsll avait dis iseès grades dentes fue som gmwemmmM
tolér^FaiM |>areffles vidatioms de la l^isla/tkoe d'à travai pair
des soGiétés tiatioaales ©m étrangères, atoés fue le & Joaqpdm
ia)l8gweJ•, Présîdemt ée la Répmbliftte dojattieaiae, a
toMJQïirs été tua défemsasir db la jastkse sociale et (p'iî a été
loué par la èoiffiffiiiijfflajuté iateraatiomate pwir avoir eortmbiié
à la désioeraiisaitioîi de son pays. Le représemtaat gisravermesáeuflal
a era ce matiB même tme emtrevae avec le DireC'
leur général dm BIT et il semMeiait qji'wi certain nombre
de «soïHiWfflieatioas me soient pas fwrvemies à leurs destin
nataires. H a afassi ajoraté qwe la délégatk» de son pays à
la ConféréBce se ooraposait d'une seule persouaie et qia'l est
diCfîeile de se déiistAler «t de satisfaire aux feesoims :de tomites
te comBMSsioas.
ILes membres travaillwtrs onit regretté de ne pas pomvoir
traiter véritablemeat ce cas, cpui devrait ôtre imscrît la ^rodteaime
fois, en tête de l'ardre dw jojir. Ss oait mamiíesté lew
préoooupatioii devarrt îe fait qMe des comBaerntaiires m s^eî
de eette coavemtiom étaieni foractulés depuis des années par
la commissioá d'experts et qiue des violatioas graves 4m droit
syadâcal, ¡mettant en cause plïmwrs catégories de travail^
leurs, aîn«i qme dés infractions à la liberté symdieale avaient
été traitées aa Comité de la Mberlé syndicale, qui avait â<&
regretter l'attiludé amative dw gouvernemeat, çeâïïi»ei n'ayaat
pas donné son consentement à l'envoi d'uae mfesion sur
place. Le Cmmáíí d'audmiaistratioa a donaé mne large pubM--
cité à ses conclusions concernant les faits iacriminés : arrestations,
Masademeals, disparitions de syadMaustes, violation
en Éroit de grève, ooaùpatioa de locaux syndicaKs, droits
sya^eaK des travaSeiirs a^rMîoles, etc. L¿. membres travaiHtears
©at imsisté pour que le gouvememeat preaae très
au sérieux la préocoupation manifestée à diverses instances
et oat demaadé ipe des progrès puisseat être oaastatés
l'armée procliaine et qiu'uae missioa paisse se readre dans
le pays.
Les membres ©mptoyeurs se sont associa awx membres
travailleurs poar demander qji'ane mission puisse ooastatw
la situatîoa et que le cas soit,traité parmi les premiers
l'àaaée procteiae.
La «¡©mmissiffli a décidé de refléter daas s©a ra^iort les
k!íferv©nitíi«)as précédeates.
EÉtiopie (ratification : 1962). Ua représeataat goavermemental
a fait la déclaration suivante :
M est aécessawe de considérer les «baagemeats fonáamiemtams:
ttstâmmab les acquis de la révrfatioa éthiopisnae po«r
ciampreadire te siteatiffln d'ua pays qui entre daas mm aouvele
ère. Oa a assisté en qaatr© aas à la eoasolîaatM» d'ua
©at aaaveaa, à la aatioaaîisatioa de la terre avec les corollaires
de la propriété eolective «t de l'orgaaisatiioa des
paysMjs ea assoeiations dám«*Eratiqiu«s en même temps qa'à
la constitution d'associations urbaines, à la nationalisation
des moyens de prodaetion ©t, ©afia, à la mise au poiat
'd'uae législatioa eu travail progressiste.
La coamuissioa d'experts a estimé qme ruaité syndicale
powcrait ae pits être voteataiee. C'est là déclarée mue dâcfcotornie
entre les aspiratioas dés travaiMeurs et la Proelamatíoa
da travail, ea même temps que, supposa: • aux syadicats aa
rôle sealemeat passif dans la mise ea ceavre de eette proclamatioa.
Jl est aécessaire de preadre en compte le •développement
historique du syndicalisme et des aspirations des
travaiDlears pour juger 4© l'aaité syadieale : 'cette imité qai
reforcé les travâilears «st 1© résulat AifaM que faaca^ia©
Coafédératioo d©s travailleurs aalérieure à 1975 a été reformé
©, les travaîlteoers étamt maîatenaat orgaaisé en coaCorraîté
avec Jes principes révolutioaaaires. Ce serait ignorer
tes vmes. ¿tes teava&eurs ©uxHMt&a^ qae d'ialeaipeÊter la
PtorilamatioB au traval comme imposée par le gouvermemeat
IMS. progrès réalisés mériteat d'êtee reconaus par Î'OIT :
ea ©utee, une étude devrait tee ©atreprise pour examiner
et amender si aéoessadr© la Proclamation ém travail, étué© à
laqjiteile les syBidî(§ats partieiperoat ©a foaîmulaat leurs
reeoBDimawiatiioas.
Ba ce qui caneferae les cadras as -direBtMia et les geas de
maisoa, ffl fau* souiKgaer qpe la Proclamation du travail a'est
pas le seul test© à réglemealer le droit ¡d'associaticm. Beaucoup
d'associations ont été créées, associations urbaines, de
paysans et astres. Le fait que la l©i a© touefce pas certaias
travaBllears a© veut pas «Mr© qu'ils ae soient pas protégés.
aotammeat par le biais des procéAires d'arbitrage et de
coa^ffliatioa. La possîbfflÉé pour les foactioamaires de se
syndiquer est à l'étud©.
Ea ce qui eomcerae le droit de ¡ptève, la Proolamatioa du
travail ae l'interdit pas mais fixe dés procédures, qui a'empêclieat
pas les travaiieiKS de '•défeadire leurs droits. Quant
.à î'affîliatioa imteraatioaalie dfes syndicats, elte a© subit
aucuae limitatiaffl. Les buts 4© TOaioa éés syndicats d'ÉïMopie
figareat dans ses statuts earegistrés auprès du mimistère.
finfim, la dissototioa de là ' Fédération d'employeurs
d'BtMópie ae résulte pas d'un acte du gouveraement mais
de la aatioaalisatioa des graades eatreprises effectuées à
partir de 1975 ©t à îa suite de iaquele le secrétariat 4e la
fédéràtioa a demandé au gouveraememt ide aouveaux prim»
cipes d'orgaaisatîoa. Les 'direeteurs des seètems pubMe et
privé peaveat maiatenaat èebaager des informations ©t le
efeàngemeat ¡iaterveau dams tes structures se traduit dans b
compositioa de la Clambre de coaimeree.
Pne mMoa de I'OIT s'est readue ©n mars 1977 ©a
fitMopie, ©t ses ©toservatioas, qui soal basées sur des faits,
iadiqueat que les coaditions de travail sembleat adaptées au
milieu actuel daas ce pays. M faut souligaer que, malgré
l'état de guerre existant, il n'a pas été fait recours aux possibilités
d'uae Mgislatioa spéciale, d'ua état d'urgence ou
de siège, ce qui iadique ua© attitude positive de la part du
giajyeraemeat. La possifeiité d'établir des contacts directs
pourra être envisagée.-
Les membres teavàEleurs oat dédaré que, qu©l que soit
te système économique et social ©a cause, et l'existeac© ou
aoa d'une traasífoimatioa dé celui-ci, le respect de la Coastitutioa
de l'OIT et dès conveatioas ratifiées reste essentiel.
Si te ieoataets #r^;ts qui paraissent soMbaités (teiveat permettre
d'arriver à use .solutioa, ils doivent être utilisés. H est
certes aéeesaaire d© faire preuve de oampràeasioa daas la
préseate situatioa, mais l'on ae devrait pas «sherebier ua
préteste daas <te cireoffistaaees-passées ou préseates pour se
dérober à ses obligatiaas. La Proclamatíoa du travail coatieat
plusieurs points qui a© soat pas ea barmoaie avK; la coaveatioa
a° 87. Puisque te gouvememeat a indiqué soa itteatioa
de la rés^amiarar, ils oat été d'accord pour maaifester une
oertaiae patiraice, d'autaat plus qu© les acte actuels du
gouvera©meat voat dans lie sens du respoet de la ooaventioa.
H faut, d'autre part, que le gouvernement réponde aux
commeataires de la ooiwnissioa d'experts, ce qui n'a pas
Les membres employeurs oat déclaré comprends l'anportaaee
des problèmes posés par te okangeaaeats opérés dans
le pays et la situatiom exc^tioaaeîle et la aécsssiité de les
prendre ea coasMéraMoa daas ce cas comme daas d'autres.
Ûes questioas restent cepeadaat saas r%©ase et, >ea partieulîer,
celtes qui survéat : le personmiei domestique a-t-ü le
droit de faire appel à uae seme© d'arbitrage et de oaaciMatten
f Le droit de grève a4-l été maaifesté de fait pm urne
grève depuis Î974 ? Le droit des ©mplôyears dé créer des
orgaaisatioas dims le cadre des c&ambres de coaamsree
représeat&-t-il uae eè%àtk» ou ua choix Mbr© ? ,
Ua autre représentant gouvernemental a indiqué que les
gens de maison oat le droit de faire appel à ma s^vice de
conciliation et d'arbitrage taat daas les associations urbaines
que ruraltes. Coacermàat le droit dé grève, celui-ci s'est pas
iaterdît,' mmmm le r©co«naît îa commissioa d'experts. Cependant,
des procédures doiiveat être suivies avamt qu'une
grève soit déeîèaeàée. Les associations d'employeurs, erfin,
ae sont pas obligées de rejoindre la Cbambr© ie ecMnmerce
mais peuvent le faire si ©lites te scwibaiteat.
Les membre employeurs oat estimé que, outre îa
demandé de c®ataots directs, il faut tenir compte des ©bservàtioas
de là cemmissioa d'experts, ©t oat déclaré attendre
Le membres gouveraemeatal de IIJSSS a iadiqué que le
cas était 4© ceux qui exigeât uae attitude prudeate. La
commission accorde traditioaneMement la plus grande attention
aux problèmes de priorités daas te pays, ©t l'oa est
ici en face d'uae situatioa exceptiomadle qm n'est pas
terminée, à la suite d'une agressioa1 extérieure. C'est daas
cette taaaère que devraieat êtee ooasidépés les commeataires
de la commissioa d'experts, te expKeattoas veaaat d'être
fomfflte étaat, ©a «utr©, uae' 'preuve dé l'attitedé çoastruetive
:da gouveraenBeat vis^t-vis de I'OIT.
Quant au foad, la questioa du êaraetère volôatàire et de
l'unifté spidieaie ©a Bthiopie est envisagée sous des jours
différeats par la commissioa d'experts et par ce pays. Ce
deraier estime que l'ututé syndicate est le résultat de Vkâtiativ
© 'Mstorique des sjmdîcats ©t la commissioa d'esperts
devrait teimr dômeat compté de cette inforanaitioa et jeter
un regard différait sur la question. Conceraaat 1© dïoit de
29/31
g3?è¥e, la ooMiwaisoii d'experts ipiéeke hmn qm ha dîsp©^
sitiiMts «criHainées n'ÎEfljpcseQt pas i»© ifflteKMcttom «afeso^
te©» de la grève, aters qw'eîtas m'apposent ©n fait ânitow.e
interdiction la soumettant siroplenaent à une procédure.
C'est là mm pké«i(iwaèîiie qw n'est pas ¡pairtieuiiigac à ffitMopie
tmk m retroiw-e ailtews,. dans dtes ipays oô l'on ne «onstate
ni sit«ati®m exee^kamaie m linÊraction anx disjp^àtians de
la canrioeitiioa,. M est d'aiSeiiirs donitmix q®e les ¡eiaffintes de
Î'Oît ttàiteniï éo, ;#0it de gcèv® et, si tel était le cas, 1 n'«st
en tomt cas pas possifeie poar la «cHniMMon d'esprits de
relever iiae áiseardanse entre la législâticMi ethiMfaemne et
la eonventiÉ» if W.
Le gowernemeiït a mentienné le travail de perfeetioañeasieBlt
de la législatk» envisagé ei la posaiMiité dé eantacts
direets, ©t c'est là wne pireiiiive de la coopérati«a vAntaire
recherchée, laquelle constitue un aspect fondamental, audelà
4es (Évêrgencês d'opinions. Il devrait done être admis
qjae la positiom dm gonvermement éttiiopieia doive reneontrer
dans cette enceinte un élément de compréhension.
Le mewifere gonvernemsuital dto SióyaniHae-tJni a déclaré
que, tout en reconnaissant les raisons qui doivent faire
remeBcier le refrésentant de l'BtWopie powt ses éxplcations,
il faut r^retter l'abseoce d!u raH>Qirt densanidé par la
G®minissio.n d'ësperts pomr cette année, qwi a interdit à eetie
éetnfére d'eanetfere tin avis réfléchi swr la sitiiatioe. Il a
espéré qra'nn rapport serait- psrésenité en tenais ntik, qwi
permetite de traiter vraimenit des questions oomsnie ceîifs
de FiimieM dm "¡moiuveiBent syndical, souvent éveqùée et
fondamentale, et dû ipoit de grève qwi, s'il n'est pas éaspressémeot
püévn dans la convention n" 81, esft cependant
imfiqné du fait, de la dispossition qu'elle contient qwint aa
droit des organisationis d'organiser iMbrement lews activités,
liberté qu'un© législation du tj^p© de la Proclamation dm
travail vient limiter. H a estimé que la déelaratian du représentant
goitvefnemental, Mon laquiele là FMeration des
emplôyencs n'a pas été dksoate mais a simplement dispara
du fait d© la .révolution socialiste, ilwtrait liai par ailleurs
le point de vue exprimé di^à par les employeurs seten
îeqiuidl, dans nu systène éoonóraiqnie ©t social tel que eetei
de fBthwpie,. te droits des employeurs ne peuvent pins
exister, démontrant ainsi «an incompatibilité avec la strucitaire
teifartite de TOIT.
Le meaafere gomvememental de la Bulgarie a souligné
les ehangements Msteriqracs et tes meswpes réaffisées dans
'l'ikiitérit des travailleurs, se traduisant par xm ©fiort d'adiaptalion
pá'pétmel du législiteur. Tout cela eorrespond à ce qnsà
est demandé dans le point 6 de la déclaration de fa Conférence
mondiale de remploi. Il faut prendre aete du fait
que lés employeiiEFs ont la possibiiMÉé de s'inscrwe aux
ohàmibres de oommeEse., et du fait que les gens de maison
et les fomotiomnaires ont des posaibMités .d'orgaiM»ti©n, La
révisian de la Proclamation dto travail peut eontribiuer à ^s
âmélorations ; il doit être fait frettve à cet égard de bonne
volonté. Sur 1® plan de la eoopérítóon t^imiqne, l'OÏT
apporte une contribratióa importante au dév©lof¿em©Bt de
l'Sthiopie. Il faut prendre acte des déclarationis dw représentant
du gouvernement.
Le meMbre ©mpioyerar de l'UIUS a déoteé, au nom des
employeurs des pays sociaistes, être satisfait des esplcati
«aas du goinvernemeat éthiopien et du ton positif dé ceUes-ci.
H a souMgné que, malgré que la sâtitation dm pays né soit
pas encore normalisée, le gowememenít, sur le chemin dés
transformations sôcialési s'engage à la coopération active
avec l'OIT. M a appuyé les propositioms visant à donner
un simple reflet des débats sm ce cas dans l'annexe du
rapport de la commission.
Les membres travailemps ont proposé d'éxpsrimsr dans
un paragrajà.©, 'de façon positive, les interventions amanees
de afférents côtés, suite à la disoussion dé l'armée âernière
et prenant en considératiOTi la steatiom exceptionnelle du
pays, malgré le fait de l'absence de réponse à la Gommissîon
d'esperts, mais compte tenu dés ^p&;»tions ici apiportées,
sacÉuant aussi que la Profllamatian du trawaîl doit Être réexâmiaée
et peut-être amendée et que des contacts direels powraient
être instsueés.
Le représentant gouvememeattal a in#qñé que des rapports
sur les eonventions ratifiées seraient envoyés le plus
tôt possible, qui tiendraient compte des 0bservat»ns faites
cette année,
Les membres employeurs se sont declares d'accord avec
la proposition d'an paragraphe specsaa. Bs ont demandé que
l'on essaie, au cas ou des contacts directs seraient effectués,
de savoir pourquoi les emptoyeurs des soeiélés nationalisées
ont démissioimé de leur organisation nationale et ont également
demandé que le paragraphe spécial reflète espressément
leur ¡préoccupation devant ia dissolution de la fédération
des empteyears éWMôjpim.
Là. cômimâssion. a noté les informatioms fourmes par lé
gouvernement. Hle s'est (élditée dtn fait que, monobsîanit Sa
siteatioa dttficie du 'pays, le gouvernemest avait l'iratenticMi
d'exaoïimer soigneusement les éommentaires de la commis*
s«w d'ssperts dans le eontexste dé la révision envisagée 4e
la législation existant© et qu'l se (proposait d'avoir recours
à la proeédure de contacte dîfects an sujet de cette eonventicm.
BUe a ex|wiimé l'espoir que des 'pemgeës seraient réaffisis
et que des informations complètes seraient oommuaniquiées
pour examen l'année prochaine à la comanssion d'saperts
et à ia oommi^iom dé la Catáérencei
La eommisàon a décidé d'incltore dans son rafpdiit un
"en ce sens.
&tMmuâë (ratificatiw. ; 1'952). Un- refréseñtanf gouvernemenial
a regretté que te projet dé loi qui avait été préparé
lors des .contacts directs de 1975 n'ait pu encore être gsainnné
par le Congrès. Toutetfois.i un changement de gouvêr*
nement -initerviendra au mois de ¡pjîbt Wlt et le Congrès
envisagera te mesures à prendre pmt mettre la iégfelatten
nationale en conformité avec la convention.
Les membres travailleurs ont rapfrfé que 1^ convention
n0 81 contient des normes fondamertales et qtt'il est particulièrement
important que le gôaveenement prenne des
mesures, .en ce' domaine.
Les membres empîoyeiws ont exprimé l'esipoir qi«e le
Guatemala assurerait prochainement l'application de la
convention.
La conumissM» a exprimé l'espoir qwe les maures nécessaires
seraient rapidemenit prises pomr donner effet à la
convention.
Hmâums (ratiCîeaiion : l$S6)i Un représentanît gouveaiêmental
a rappelé la déclaration ©fieetoiée l'an dernier devant
de la mise en oeuvre des modifications du Code du travail.
L'adoption de ces modifications qui était initialement prévue
pour aovembr© 19ff a subi qwelqùes retards, ©es CMitaetis
dired;s ont eu lieu en' ¿ovemfere dernier posr .mettre ' au
pcànt un texte permettant la mise en conformité de la législation
avec la .convention. Ce teste a fait l'objet d'un examen
«Éautiieux et «ne câreuiaÉre a été adressée a«x iédêrations
syndicales afin qu'elles .púissenit f«nâtt|er des oomm^ajtair^.
Le .ministère du Travafi a par' la suite ppéfaré un. projet
qui tient compte des commentaires de ces lédérations. Le
Comseii des ministres a soumis ce ppojet à là Cour suprême
de justice qui l'a .examiné et qui a préwaÉé ses ©ommentaires
à son sujet. Le chef de l'Etat doit maintenant procéder
à l'adoption du projet on Conseil des ministres. Il est possible
que le projet soit promulgué et ptubMé au journal <*ffieiel
très prochainement. Pe toute manière, îa délégation gouvernemental
© informera le gouvernement des discussions qui ont
eu lieu au sein de la présente commission.
Les membres travafileurs ont relevé fa'aBcúne mesare
n'avait été prise depuis que des contacts directs ont eu lieu
il y a trois ans. Us se sont déclarés très inquiets devant les
retards apportés à l'adoption des modifications de la législation
qwi reste sur de nombreux points an oontradtetion
avec la convention, fis onît proposé que ia eoamissiom
adresse un appel au gouvernement pour que ceîawci prenne
les mesures nécessaires. Au cas où auciin progrès n'interviendrait
d'ici l'an prochain la question devrait être réexaminée
de façon altentitve par la oommission.
I«s membres employeurs ®át appuyé la déclaration des
membres travailleurs et exprimé l'espoir qu'âne amélioration
pourrait être constatée l'ansée prochaine dans le cas en
La commission a prié lé reppésenitant goravernemeBital de
transmettre au gouvernement l'espoir de la commission que
tous tes efforts possibles seront faits pour que les modifique
possible.
Mumâe (ratMication : 19SS). Le fouvemsmemt a in&pé
qpe les observations coneemamt les conventions n08 87, 88,"
8f • et MS seront icaasidérées dans les rapports poor ia
période se terminant le 30 juin Î97S qui seront o«aifflmiani<-
quiês au BIT M temps utile.
J@f@m (ratification : 1965). Le gowwmement a eommu-
.mq«é les informations suivantes :
1. QmeMî&m ireimtiwes mx ¿eux projets Je Im. Ces deoec
projets 0© «projet révisant pfrtîeBement la M sm te
29/32

Document no 242
CIT, 65e session, 1979, Rapport de la Commission de
l’application des normes, p. 36/38 (Irlande)

""I Conférence internationale du Travail ,
Compte rendu provisoire
Soixante-cinquième session, Genève, 1979
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE: Rapport général 2
ANNEXE: Rapport du Groupe de travail de la Commission de l'application des conventions et
recommandations 16
DEUXIÈME PARTIE: Annexes 18
ANNEXE I : Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22
de la Constitution) 18
A. Observations générales et informations concernant certains pays 18
B. Observations et informations sur l'application des conventions 24
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 56
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) . . . . 57
ANNEXE II : Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires
non métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 58
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 58
B. Observations et informations sur l'application des conventions 58
C. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains 59
ANNEXE III : Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 60
ANNEXE IV : Informations complémentaires '.' 62
Rapports reçus au 22 juin 1979 sur la convention (n° 29) sur le" travail forcé, 1930, et sur la
convention (n° 105) sur l'abolition du travail forcé, 1957 (article 19 de la Constitution) 62
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 63
Il convient de préciser que le taux de financement des organisations
syndicales par l'ODEPES est proportionnel au nombre des
membres de ces organisations qui ont rempli leurs obligations
financières. Par ailleurs ce système de financement n'empêche
nullement le système de retenue à la source, déjà applicable dans
plusieurs organisations en vertu de conventions collectives.
En outre, l'application par une organisation du système de
financement par l'ODEPES doit être prévue par ses propres
statuts et approuvée par l'assemblée générale des membres.
Guatemala (ratification: 1952). Un représentant gouvernemental
a rappelé que le ministre du Travail a déclaré à la présente
session de la Conférence que le Congrès de la République
recevrait le 1" juillet de cette année le projet de nouveau code du
travail qui garantira la liberté syndicale..Le gouvernement fera en
sorte que ces droits soient garantis et fournira de nouvelles
informations sur les améliorations apportées.
Les membres travailleurs ont regretté que la convention ne soit
pas pleinement appliquée. Des amendements au Code du travail
ont été préparés pendant les contacts directs de 1975, mais aucun
progrès n'a été fait. Ils ont espéré que le gouvernement ferait état
de progrès réels l'année prochaine.
Les membres employeurs ont exprimé l'espoir que ce cas serait
réexaminé l'année prochaine. Il est assez préoccupant que le
gouvernement n'ait pas été capable d'appliquer cette convention
depuis qu'il l'a ratifiée en 1952, et ils ont espéré que les assurances
données seraient respectées.
La commission a exprimé l'espoir que cette convention très
importante puisse être pleinement appliquée dès que possible.
Honduras (ratification : 1956). Le gouvernement a communiqué
les informations suivantes:
Eu égard aux observations réitérées de la commission d'experts,
le décret n° 760 du 25 mai 1979 a été adopté, (copie jointe),
modifiant diverses dispositions du Code du travail qui n'étaient en
conformité ni avec la lettre ni avec l'esprit de la convention n° 87.
Irlande (ratification: 1955). Un représentant gouvernemental a
félicité la commission d'experts pour son contrôle du respect par
les pays des obligations qu'ils ont librement acceptées.
Dans son rapport, le gouvernement avait déclaré ne pas
admettre qu'il pourrait enfreindre les articles 3, 8 et 10 de la
convention en raison des effets de la loi sur les conflits du travail de
1906. Les seuls droits positifs prévus par ces articles sont ceux
mentionnés à l'article 3, et parmi ces droits le seul pertinent à la loi
de 1906 est le droit pour les organisations de travailleurs d'organiser
leur administration et leurs activités. La seule raison avancée
par la commission d'experts pour justifier son opinion que ces
articles ne sont pas respectés est que la situation découlant de la loi
de 1906 constitue une limitation des moyens d'action auxquels les
organisations peuvent recourir pour « défendre les intérêts de leurs
membres ». Bien que le gouvernement n'admette pas qu'il enfreint
la convention, il envisage de modifier la loi en cause. Il n'est pas
exact, comme le dit l'observation, que les travaux sur la modification
de la législation sont en cours, mais l'opinion des départements
gouvernementaux concernés a été recueillie et la question
de la modification est à l'étude.
Les membres travailleurs accueillent favorablement le fait que
des consultations ont déjà eu lieu. Ils espèrent que le gouvernement
n'attendra, pas trop longtemps pour donner une suite à ces
consultations. Ils sont préoccupés du fait qu'aucun progrès n'a été
réalisé et espèrent que le gouvernement fera des propositions
aussitôt que possible.
Le membre travailleur de l'Irlande se déclare troublé par le fait
que le gouvernement ait mis en question l'interprétation de la
convention par la commission d'experts. Il est important de
reconnaître que le problème provient du fait que certains travailleurs
peuvent être poursuivis en dommages-intérêts s'ils se mettent
en grève, car ils ne sont pas protégés par la loi de 1906 et leurs
piquets de grève sont illégaux. Le gouvernement a déclaré que les
articles 3, 8 et 10 de la convention ne mentionnent pas le droit de
grève, mais la commission d'experts a dit à de nombreuses reprises
que, bien qu'il ne soit pas fait mention dans la convention du droit
de grève, ce droit est impliqué pour tous les travailleurs, sauf ceux
de la fonction publique. Il n'accepte pas que la commission
d'experts se soit trompée dans son interprétation.
L'orateur est préoccupé également par la déclaration du gouvernement
selon laquelle il étudie la possibilité d'amender la loi, bien
qu'il ne propose encore aucun amendement. En 1965, le gouvernement
avait déjà accepté la nécessité de modifier cette législation.
En 1976, un projet recommandait des modifications, mais en 1969
ce projet est devenu caduc. En 1975, et à deux reprises en 1977, la
nécessité de changement a été reconnue. Il est très troublant que le
gouvernement étudie à nouveau la nécessité de ces amendements,
dont il est reconnu si souvent qu'ils sont nécessaires.
Les membres employeurs ont indiqué que la déclaration du
représentant gouvernemental ne fournit pas d'informations supplémentaires
par rapport à ce qui a été relevé dans le rapport de la
commission d'experts. Ils ne peuvent présenter aucun commentaire
sur la question de savoir si la loi de 1906 est appropriée à la
situation syndicale dans le pays. Ils notent avec préoccupation que
le représentant gouvernemental, au sujet de l'examen des amendements
à la législation, a fait mention de commentaires recueillis
auprès des départements gouvernementaux, mais qu'il ne s'est pas
référé à des consultations avec les organisations d'employeurs et
de travailleurs.
Le représentant gouvernemental a déclaré que la procédure
normale pour l'élaboration d'une loi est de consulter tous les
départements gouvernementaux intéressés dans le souci de respecter
le principe de la responsabilité collective. Aucune législation du
travail ne serait mise en oeuvre sans consulter les organisations
d'employeurs et de travailleurs.
Cette question constitue un problème depuis longtemps en
Irlande car elle implique l'extension du pouvoir d'établir des
piquets de grève. Des travailleurs qui ne sont pas considérés
comme étant employés dans le commerce ou l'industrie ne sont pas
couverts par la loi sur les conflits du travail qui prévoit une
protection contre les conséquences des actions syndicales. En
Irlande, les piquets de grève représentent, en pratique, un grand
pouvoir. L'extension, au moyen de la loi, du pouvoir d'établir des
piquets de grève à d'autres catégories de travailleurs a été
attentivement étudiée. Il y a quelques années, le Congrès irlandais
des syndicats (ICTU) a tenté de limiter le pouvoir des piquets de
grève, mais la pratique continue à présenter des abus, en particulier
lors de grèves sauvages. La commission ne devrait pas avoir
l'impression que les personnes qui ne sont pas dans le commerce
ou l'industrie sont privées du droit de constituer des piquets de
grève. Il y a eu une grève de treize semaines dans les services
postaux, qui ne sont pas couverts par la loi en question.
Il répète qu'aucun projet de loi n'est encore en préparation,
mais se montre optimiste.
Les membres travailleurs ont estimé que la possibilité pour les
employeurs et les travailleurs de participer à l'amélioration de la
situation est un bon signe et ils espèrent que des progrès pourront
bientôt être réalisés.
La commission a noté que les discussions tripartites se poursuivent
dans le pays et elle espère que ces discussions aboutiront à des
conclusions satisfaisantes et rendront superflus tous commentaires
ultérieurs de la commission d'experts.
Japon (ratification: 1965). Le gouvernement a communiqué les
informations suivantes :
1. Motifs pouvant conduire à la radiation de l'enregistrement
d'une organisation syndicale :
Ces motifs sont inscrits à l'article 108-3 (paragraphe 6) de la loi
sur la fonction publique nationale et à l'article 53, paragraphe 6 de
la loi sur la fonction publique locale, et dans tous les cas où les
conditions indiquées ci-dessous sont réunies :
i) lorsqu'une organisation syndicale enregistrée a cessé de se
conformer aux conditions qu'une «organisation d'employés»
doit remplir, telles que le maintien et l'amélioration des
conditions de travail de ses membres ;
ii) lorsqu'un syndicat enregistré a cessé de remplir les conditions
d'enregistrement, telles que l'adoption ou la révision de ses
statuts, l'élection des membres de son bureau, et d'autres
activités importantes qui seraient décidées en dehors des
procédures démocratiques prévues par la loi ;
iii) quand une organisation syndicale enregistrée ayant effectué
des modifications dans ses statuts ou dans les dispositions
prévues pour pouvoir demander à être enregistrée, a omis de
soumettre un rapport à ce sujet.
A cet égard, les points suivants devraient être ajoutés:
i) une procédure détaillée comportant une audition à effectuer à
l'avance, en cas de radiation de l'enregistrement est prévue par
la loi ;
ii) la radiation de l'enregistrement n'implique pas un déni de
l'existence et des fonctions d'une organisation syndicale, mais
seulement que l'organisation syndicale ne pourra plus jouir des
avantages offerts par la loi et les règlements en fonction de
l'enregistrement ;
iii) depuis trente ans que le système de l'enregistrement est en
fonction aucune radiation n'a été prononcée par l'autorité
nationale chargée du personnel.
2. Interprétation donnée dans la pratique à l'expression «personnes
qui prennent des décisions administratives importantes ou
qui participent à la prise de telles décisions».
En ce qui concerne les fonctionnaires de l'administration
publique nationale dans les ministères ou les départements ministériels,
l'expression « personnes qui prennent des décisions administratives
importantes » signifie le vice-ministre pour l'administration,
les directeurs généraux de départements, etc., qui prennent
36/38
Document no 243
CIT, 68e session, 1982, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 31/50-31/52 (Uruguay)

Conférence internationale du Travail 2 |
Compte rendu provisoire
Soixante-huitième session, Genève, 1982
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIERES
PREMIèRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 14
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 14
A. Observations générales et informations concernant certains pays . 14
B. Observations et informations sur l'application des conventions 17
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 71
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) .... 72
II. Observations et irtformations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constítution) 73
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 73
B. Observations et informations sur l'application des conventions 73
C. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains 73
III. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 74
IV. Informations sur la situation dans certains pays concernant la consultation tripartite 77
Rapports reçus au 18 juin 1982 concernant la convention (n0 144) et la recommandation (n0 152)
sur la consultation tripartite, 1976 77
Index parpays des observations et informations contenues dans le rapport 78
31/1
volonté, comme fait le soi-disant délégué travailleur de l'Uruguay
qui, à vrai dire, ne représente personne. II suggère qu'un séminaire
sur le rôle des syndicats dans une société socialiste se tienne dans
son pays. Cela permettrait aux participants d'avoir l'occasion de
discuter de ces questions avec les dirigeants syndicaux, les membres
des fermes collectives et d'autres et apporterait plus de
lumière aux débats relatifs au rôle des syndicats dans les pays
socialistes.
La représentante gouvernementale a déclaré que dès qu'on
s'éloignait de la définition littérale de la question en discussion on
trouvait un vaste champ de discussion ouvert sur le rôle et la place
des syndicats dans les pays socialistes. Elle appuie la suggestion
concernant un séminaire, lequel devrait également porter sur la
convention n" 98. Les syndicats soviétiques pourraient ainsi fournir
des informations détaillées sur leur système de négociations
collectives. Malheureusement, dans le cadre de la discussion
présente il n'a pas été possible de préciser les questions qui
demeurent obscures. Certaines des interprétations données à
propos du système juridique socialiste ne sont toujours pas claires
mais elles pourraient être clarifiées. Les accusations formulées au
sujet de l'absence de liberté pour s'organiser en syndicat ne
méritent même pas de réponse. Ceux qui les ont formulées
devraient plutôt s'efforcer de résoudre les problèmes qui existent
dans leur propre pays.
La commission a pris note des informations fournies par le
gouvernement. Elle a noté que persistent des divergences de vues
fondamentales concernant l'application de la convention n0 87 et
elle a exprimé l'espoir que le dialogue et la discussion se
poursuivent. Elle s'est réjouie du fait que le débat se pousuivrait
de façon plus détaillée l'an prochain dans le cadre de l'étude
d'ensemble sur les conventions sur la liberté syndicale.
Uruguay (ratification: 1954). Un représentant gouvernemental
a fait la déclaration suivante :
Il s'est réjoui de l'occasion qui lui est donnée par la commission
de pouvoir exposer l'évolution de la situation en Uruguay en ce qui
concerne l'application de la convention n0 87. En effet, l'Uruguay,
par le passé, a connu certaines difficultés pour assurer la pleine
application de cette convention. Cependant, son gouvernement n'a
jamais cessé de manifester son intention de normaliser la situation
syndicale, par des mesures législatives tenant dûment compte des
engagements internationaux de l'Uruguay, et dans le cadre du
respect des droits des employeurs, des travailleurs et de la
communauté. C'est ainsi qu'a été adoptée la loi sur les associations
professionnelles. Les organisations les plus représentatives des
employeurs et des travailleurs de l'Uruguay ont été consultées au
cours du processus de son élaboration. Par ailleurs, son pays est
resté en communication permanente avec l'OIT et, en particulier,
avec le Comité de la liberté syndicale. Ce dernier et le Conseil
d'administration ont très justement exprimé leur satisfaction pour
les progrès réalisés grâce à l'adoption de la nouvelle loi sur les
associations professionnelles. A cet égard, il convient de souligner
que plusieurs missions de contacts directs ont eu lieu et ont
largement contribué à la solution des problèmes en cause. Dans
son rapport à la présente Conférence, le Directeur général
mentionne que, dans le cas de l'Uruguay, il a été noté avec
satisfaction qu'à la suite de contacts directs qui ont eu lieu une loi
qui améliore considérablement les dispositions de textes antérieurs
en la matière a été adoptée. La commission d'experts, au
paragraphe 37 de son rapport, indique également que dans le cas
de l'Uruguay on a noté avec satisfaction qu'à la suite des contacts
directs entre le gouvernement et les représentants du Directeur
général une loi sur les associations professionnelles a été adoptée,
introduisant des améliorations importantes par rapport aux dispositions
des projets antérieurs. De même, au paragraphe 92 de ce
rapport, la commission a été amenée à exprimer sa satisfaction
pour les mesures prises par le gouvernement en vue d'introduire
les modifications nécessaires dans sa législation ou sa pratique à la
suite des commentaires que la commission a formulés auparavant
pour la convention n" 87. Après l'adoption de la loi sur les
associations professionnelles, le gouvernement a pris un règlement
d'application afin d'en garantir l'application pratique. Le système
d'enregistrement des syndicats fonctionne désormais et le nombre
des demandes en cours dépasse actuellement 150.
Les membres travailleurs ont déclaré que ce cas les plaçait dans
une situation inconfortable. En effet, le rapport du Directeur
général et le rapport de la commission d'experts mentionnent ce
cas comme un des cas de progrès accomplis à la suite des contacts
directs. Cependant, dans la pratique, des problèmes graves continuent
à exister. La nouvelle législation devrait réjouir les travailleurs
mais, si des améliorations ont été effectuées sur le papier, de
sérieuses lacunes demeurent dans les faits. Ils se demandent ce qui
en est de la libération des syndicalistes emprisonnés.
Us se demandent aussi pourquoi tant de dirigeants syndicaux
sont encore exilés. En outre, certaines organisations syndicales
uruguayennes estiment que la nouvelle législation et son règlement
d'application sont trop limités. Par ailleurs, il semble qu'une
répression antisyndicale subsiste. La loi est une chose, son
application en est une autre, et ils souhaitent que les améliorations
deviennent effectives. Au reste, dans son rapport, le Comité de la
liberté syndicale du Conseil d'administration du BIT a exprimé le
ferme espoir que des mesures seront prises pour la pleine
application de la convention n0 87. S'il convient donc de se réjouir
des changements législatifs qui sont intervenus, les membres
travailleurs restent préoccupés en ce qui concerne les mesures
d'application pratique et ils estiment que les séquelles des restrictions
antérieures doivent disparaître.
Les membres employeurs ont rappelé que pour leur part ils
n'avaient pas souhaité inscrire le cas de l'Uruguay sur la liste des
cas qui seraient discutés dans la commission. Ils ont le sentiment
qu'ils ne disposent pas d'informations suffisamment précises pour
se faire une opinion sur la nature de la législation nouvelle et de ses
implications. D'ailleurs, cela est du domaine de la commission
d'experts. A cet égard, la commission d'experts signale des lacunes
dans la législation, en particulier en ce qui concerne l'égilibilité des
dirigeants syndicaux et le fait que les associations professionnelles
n'ont pas le droit de représenter, leurs affiliés devant les instances
judiciaires. Ce sont là de sérieuses carences. Par ailleurs, le
gouvernement a signalé qu'il se proposait d'élaborer une réglementation
en matière de droit de grève. S'il est vrai que le droit de
grève n'est traité dans aucune convention, il n'en demeure pas
moins que le Comité de la liberté syndicale s'en préoccupe.
Le membre travailleur de l'Uruguay s'est associé pleinement
aux remarques faites par les porte-parole des travailleurs et des
employeurs. Il rappelle qu'en Uruguay les organisations syndicales
ont présenté des observations à propos de la nouvelle loi, en
particulier en ce qui concerne l'atomisation des centrales syndicales
dans le secteur industriel. D'autre part, la convention n0 87
n'est qu'un maillon dans la chaîne des conventions qui protègent
les droits syndicaux. Elle doit être complétée par la convention
n0 98 et par la convention n0 151. D'autre part, il faut regretter que
le règlement d'application ne soit pas entré en vigueuret que les
travailleurs dans leur grande majorité ne soient pas syndiqués. Le
droit de grève relève de la convention ; or le projet réglementant la
grève n'a pas encore été soumis au législateur. Or sans droit de
grève, que d'ailleurs la Constitution reconnaît, le syndicalisme est
inopérant. Il n'y a pas non plus de négociations collectives
officielles et sa confédération a dit à plusieurs reprises qu'elle
souhaite de véritables négociations collectives. Aussi la commission
devrait-elle exprimer l'espoir que des progrès continuent à
être effectués, que le droit de se syndiquer soit reconnu aux
fonctionnaires publics et que le droit de grève soit garanti.
Le membre travailleur de l'Italie a rappelé que les droits
syndicaux doivent être respectés comme élément intégral du
tripartisme. Les travailleurs de l'Uruguay ont demandé l'institution
d'une commission nationale tripartite qui s'occuperait entre
autres des questions relatives aux normes et aux relations avec
l'OIT. Le gouvernement n'a pas encore donné de réponse à cette
demande, cela parce qu'il est presque inutile d'avoir une commission
nationale tripartite dans un pays où la liberté syndicale est
inexistante.
Le membre travailleur de l'Espagne a indiqué que les doutes
qu'on pouvait avoir ou qu'on avait au sujet de l'inclusion de
l'Uruguay sur la liste des cas à discuter nécessitaient quelques
commentaires. Bien qu'on pouvait croire qu'il y avait eu une
amélioration dans la législation en constatant que dans la loi sur les
associations professionnelles l'exigence d'une déclaration d'allégeance
politique pour devenir dirigeant syndical avait été supprimée,
la situation en fait était bien différente, étant donné que, par
la suite, le gouvernement a adopté le règlement du 12 octobre
1981 dont l'article 39, alinéa b), prévoit que « ceux qui ont occupé
des fonctions de direction dans des organisations qui ont été
déclarées illégales conformément à la loi » ne pourront pas devenir
dirigeants syndicaux. Dès lors que la Convention nationale du
travail (CNT) a été déclarée illégale, on prive de cette manière la
quasi-totalité des syndicalistes de la possibilité de devenir dirigeants,
et les travailleurs de la liberté d'élire leurs propres
représentants. D'autre part, l'acte institutionnel n" 7 du 27 juin
1977 exige que tous les travailleurs du secteur public fassent une
déclaration sous serment d'adhésion au système républicain représentatif
de gouvernement. Etant donné qu'au travers de ce qu'il
appelle «les actes institutionnels» le gouvernement déroge ou
modifie la Constitution, l'orateur estime qu'il est très difficile à
quelqu'un de jurer fidélité à un système de gouvernement qui, à
tous moments, peut déroger à la Constitution ou modifier une loi
votée par le parlement. D'autre part, l'orateur n'estime pas qu'il y
ait eu des améliorations réelles à l'égard des détentions arbitraires
pour des raisons syndicales et il cite, à cet égard, les décisions de la
Commission des droits de l'homme adoptées en avril dernier où il
est fait mention notamment du fait qu'Alberto Altesor «n'a pas
été l'objet d'un jugement impartial » et qu'au cours de sa-détention
31/50
Mario Teli « a été l'objet d'attaques physiques et de menaces de
mort » ; or tous deux sont des dirigeants syndicaux.
Le membre travailleur des Pays-Bas a déclaré que d'après les
informations qui lui parviennent de diverses sources d'Amérique
latine la situation en Uruguay en matière de liberté syndicale est
des plus difficiles. Il est très surpris de ce que la commission
d'experts ait classé le cas parmi leseas de progrès dans son rapport.
Une amélioration législative ne devrait pas être le seul critère des
experts pour identifier des progrès. En fait, si la législation
s'améliore et que la pratique reste aussi mauvaise qu'elle est, on
pourrait très logiquement arguer qu'en fait la situation s'est
détériorée avec un élargissement de là différence entre la législation
et la pratique. La législation et la pratique ne vont pas
toujours de pair et dans le présent cas l'écart entre une législation
qui s'est améliorée et une pratique qui se détériore s'est élargi. Les
faits laissent à désirer, selon le rapport de la commission d'experts,
dans le présent cas, comme l'a dit le porte-parole des membres
employeurs, comme dans le cas de la Pologne, auquel la commission
a consacré de longs débats. Le gouvernement devrait fournir à
la présente commission des informations claires, des chiffres, des
statistiques et des réponses aux questions posées. Autrement la
commission devrait noter que la législation s'est améliorée mais
que la pratique continue à être mauvaise et que l'écart entre les
deux s'est élargi au cours de la dernière année.
Le membre travailleur du Mali a rappelé que le cas de l'Uruguay
avait été examiné par la commission à la demande du groupe des
travailleurs. Il se demande pourquoi le Comité de la liberté
syndicale et le Conseil d'administration ne s'en étaient pas
préoccupés d'eux-mêmes. L'Uruguay compte plus d'exilés qu'aucun
autre pays. Quant aux travailleurs du secteur public et aux
fonctionnaires, à propos desquels la jouissance du droit d'association
se pose en Uruguay, il faudrait examiner la situation de cette
catégorie de travailleurs en matière de droit syndical dans tous les
pays. Le cas de l'Uruguay, qui n'est pas isolé, ne devrait pas être
simplement prétexte à déclarations, mais bien faire l'objet de
mesures de la part de la commission.
Le membre travailleur de l'Autriche a rappelé que le cas avait
été traité en 1978 et 1979 et qu'un paragraphe spécial lui avait été
consacré. Un règlement d'application de la loi sur les associations
professionnelles a été promulgué en octobre 1981, mais la
commission d'experts a observé que ni cette loi ni son règlement
ne réglaient complètement la question de l'application de la
convention n° 87. A moins que le représentant gouvernemental ne
soit à même de fournir des explications complémentaires satisfaisantes,
on ne saurait considérer que l'Uruguay constitue un cas de
progrès.
Le membre travailleur de l'URSS a déjà indiqué que la
commission d'experts ne devrait pas se baser sur des informations
unilatérales, c'est-à-dire en l'occurrence émanant du gouvernement.
Ce cas est flagrant à cet égard, dans la mesure où la
commission d'experts constate des progrès au point de vue de la
législation, qui camouflent pourtant la violation persistante des
droits syndicaux. Il ne connaît pas le contenu de la loi de 1981 mais
note qu'elle a été adoptée sans consultation avec les représentants
authentiques des travailleurs, qui n'en sont d'ailleurs pas satisfaits.
La loi ne prévoit pas l'exercice du droit de grève et elle n'est pas
conforme à la convention n0 87. Plus de 60 000 personnes ont été
arrêtées en Uruguay dans les dernières années et des dirigeants
syndicaux souvent éminents ont été emprisonnés. L'un d'entre eux
est mort en prison en 1981. Soixante mille personnes ont quitté le
pays. La violation flagrante des drois syndicaux qui y règne doit
être condamnée. Le gouvernement ne peut pas se contenter de
donner des informations et il doit revoir la législation du travail
dans son intégralité et rétablir les droits syndicaux.
Le membre gouvernemental des Pays-Bas a pris acte avec
satisfaction de ce que des mesures aient été adoptées par le
gouvernement, ainsi que de la déclaration selon laquelle l'exercice
du droit de grève serait prochainement réglementé. L'application
totale de la convention n0 87 n'est donc plus entravée par la
législation. Elle a exprimé l'espoir que le gouvernement ne se
limite pas à des mesures d'ordre juridique, mais s'attache à mettre
en pratique la législation adoptée.
Le membre travailleur de l'Angola a souligné le très mauvais
état de la situation syndicale en Uruguay et relevé la mise en
pratique boiteuse de la législation adoptée, d'après le rapport de la
commission d'experts. Il veut bien croire que des efforts sont faits
par le gouvernement pour régler la situation mais il souhaiterait
connaître la situation des détenus et recevoir des informations à
propos des exilés.
Le membre travailleur du Libéria a appuyé la déclaration
précédente.
Le représentant gouvernemental a rappelé que, lors de la
discussion générale, l'immense majorité de la commission avait
rendu hommage à l'indépendance, l'objectivité et l'impartialité de
la commission d'experts. Son gouvernement partage naturellement
le point de vue majoritaire ' selon lequel les travaux de la
commission d'experts sont un élément fondamental des activités
de' l'OIT. Les commentaires de la commission d'experts appellent
donc la plus grande considération.
Concernant la libération des syndicalistes détenus, il est impossible
que la présente commission analyse les cas individuels de
personnes en cause. Ces cas ont été évoqués au Comité de la
liberté syndicale. Son gouvernement a maintenu à cet égard une
position invariable, selon laquelle il n'y a pas en Uruguay de
personnes détenues pour des activités syndicales. Lors des derniers
contacts directs de 1981, le représentant du Directeur général a
pu, comme il en avait exprimé l'intention, rencontrer sans témoins
plusieurs personnes détenues et examiner également les actes
d'accusation portés contre ces personnes. Il a ainsi pu constater
qu'elles n'avaient pas été détenues pour des motifs syndicaux. Il
renvoie à cet égard aux paragraphes 50 et suivants du 209e rapport
du Comité de la liberté syndicale (mai-juin 1981).
On a évoqué des documents que le groupe des travailleurs aurait
reçus de certains travailleurs concernant des cas de répression de
syndicaliste. Mais peut-être faudrait-il donner au gouvernement
connaissance de manière détaillée des graves accusations ainsi
formulées avant de lui demander des réponses à leur sujet. Un
éclaircissement a été demandé d'autre part par les membres
employeurs au sujet de la portée de l'article 12 b) du règlement
n° 513/981. Le droit du travail fait traditionnellement la distinction
entre conflits individuels et conflits collectifs. Les conflits
collectifs se résolvent par des mécanismes spéciaux de négociation
collective et non devant les tribunaux. Si un travailleur a recours
en raison d'un conflit individuel à un tribunal, il est représenté
gratuitement, s'il le désire, par un avocat du ministère du Travail,
mais dans ce cas le syndicat, en tant qu'institution de droit collectif,
n'a pas qualité pour agir. Il est donc impossible qu'un syndicat
agisse devant un tribunal au nom de l'un de ses membres à propos
d'un conflit individuel.
S'agissant du droit d'association des fonctionnaires, certains
orateurs ont évoqué la convention n° 151. Mais celle-ci ne traite
pas du droit syndical des fonctionnaires, qui. est reconnu par la
convention n" 87. D'autre part, la convention n" 151 n'est pas
applicable dans le présent cas car elle n'a pas été ratifiée par
l'Uruguay. Selon l'article 27 du Statut du fonctionnaire de 1943,
les employés publics ont le droit de se syndiquer, et le président de
l'organisation syndicale la plus représentative dans son pays n'est
autre qu'un fonctionnaire. Concernant le droit de grève, il
réaffirme l'intention du gouvernement de réglementer prochainement
l'exercice de ce droit reconnu depuis plus de 40 ans dans la
Constitution. Il est surprenant que la commission d'experts
exprime l'espoir que cette réglementation ne contiendra pas de
dispositions contraires à la convention n0 87, puisque cette dernière,
ni aucune autre convention de l'OIT, ne traite du droit de
grève. Le Comité de la liberté syndicale et la commission d'experts
ont énoncé, certes, une série de principes au sujet du droit de
grève, mais seule la valeur personnelle des membres de ces
institutions peut en commander le respect. C'est la Constitution
uruguayenne qui sera appliquée.
A la suite de la déclaration du membre travailleur de l'Uruguay
lors de la discussion de l'étude d'ensemble, il indique que son pays,
qui n'a pas ratifié la convention n0 144, n'en accorde pas moins
une importance fondamentale au tripartisme et consulte régulièrement
les organisations professionnelles sur les questions liées à
l'OIT. Il est vrai que la Confédération générale des travailleurs de
l'Uruguay a présenté un projet de commission tripartite pour
l'OIT, et celui-ci fait l'objet d'une étude approfondie de la part du
gouvernement.
On a soulevé le problème de la hiérarchie des normes juridiques.
L'article 5 de la loi n0 15137, rédigé après la mission de
contacts directs en Uruguay, autorise qu'un règlement fixe les
conditions à remplir pour être dirigeant syndical. La réglementation
ne fait donc rien d'autre à cet égard qu'utiliser le mandat
contenu dans la loi. L'article 5 de la loi n0 15 137 concernant les
conditions nécessaires pour être dirigeant syndical a été rédigé en
étroite collaboration avec la mission de contacts directs du BIT,
qui s'était rendue en Uruguay.
Concernant la demande faite au gouvernement de donner des
chiffres pour prouver l'évolution positive de la situation syndicale,
la commission a toujours procédé dans ses travaux sur la base du
rapport de la commission d'experts. Les cas individuels ressortent
à l'examen du Comité de la liberté syndicale et ne relèvent pas de
la présente commission. L'orateur renvoie aux travaux du comité,
qui poursuit l'examen de certains cas après en avoir classé d'autres.
Plusieurs membres travailleurs ont exprimé le souci légitime que
les progrès de la législation ne soient pas uniquement sur le papier.
L'application d'une loi peut naturellement ne pas coïncider avec
son texte, mais cela peut se produire dans n'importe quel pays.
C'est une affaire de bonne foi et l'intention du gouvernement est
bien d'appliquer dans la pratique la loi et son règlement et de tenir
le plus grand compte des commentaires effectués par la commission.
Son gouvernement a donné des preuves de sa bonne foi
31/51
toutes ces dernières années en répondant aux commentaires, en
acceptant des contacts directs et en modifiant la législation. Il
applique la loi de façon suffisante, loyale et correcte.
Les membres travailleurs ont reconnu la contribution apportée
régulièrement par le gouvernement au dialogue avec TOIT et ses
efforts pour améliorer la situation. On ne doit pas essayer de
susciter une contradiction entre la commission d'experts et la
présente commission. Ce serait d'ailleurs impossible. La commission
d'experts a constaté des améliorations dans la législation mais
a également exprimé le voeu que celle-ci soit encore adaptée. Le
mécanisme de contrôle se compose de la commission d'experts, du
Comité de la liberté syndicale et de la présente commission et
dispose également de méthodes telles que les contacts directs.
Toutes ces instances doivent collaborer en harmonie parfaite.
Comme le relèvent la commission d'experts et le Comité de la
liberté syndicale, il reste encore des points à régler en dépit des
améliorations intervenues. Les membres travailleurs reconnaissent
ces améliorations mais souhaitent que des efforts soient faits en
vue de l'application complète de la convention et pour réaliser le
tripartisme au niveau national. Sans rouvrir le débat sur les
détenus, ils constatent que d'une manière générale on n'est jamais
détenu dans aucun pays pour des motifs syndicaux... Les membres
travailleurs continueront de se référer aux informations en provenance
d'organisations de travailleurs pour connaître le degré
d'application réelle de la convention. Avant de parler d'un cas de
progrès, qui soit réel, la commission doit d'abord attendre que les
textes et leur application s'accordent.
Les membres employeurs ont remercié le représentant gouvernemental
de ses explications, bien qu'il n'ait pas répondu à la
question posée par la commission d'experts concernant les dispositions
restées incompatibles avec la convention, et à propos
desquelles la commission d'experts demandait qu'elles soient
alignées sur la convention. Certes, la pratique et la loi diffèrent
dans nombre de pays. Ils ne voient pas, d'autre part, comment on
pourrait dénier à un travailleur, par exemple licencié, le droit de
recourir à l'avocat du syndicat pour se défendre, dans la mesure où
il s'agit d'un conflit individuel surgi des relations de travail.
L'exigence de l'écoulement d'un délai pour être réélu dirigeant
syndical interdit aux syndicats une continuité suffisante de leur
direction et freine pas là même leurs activités. Ils souhaitent que le
représentant gouvernemental puisse assurer à la commission que
l'observation de la commission d'experts sera prise en considération,
que le gouvernement poursuivra la discussion et que les
questions qui n'ont pas encore été réglées seront portées à sa
connaissance. Il ne suffit pas d'édicter une nouvelle législation
mais il faut l'appliquer. Ils ont rappelé que le Comité de la liberté
syndicale serait saisi l'année prochaine à nouveau du cas de
l'Uruguay.
La commission a pris note des informations fournies par le
représentant du gouvernement et des réponses apportées aux
questions qui lui ont été posées. Elle a reconnu que des progrès
importants avaient été effectués sur le plan législatif, mais a
exprimé son inquiétude au sujet de certains aspects relatifs à
l'application pratique de la législation. Elle a souhaité que les
problèmes législatif et réglementaires qui continuent de se poser
soient rapidement résolus, afin qu'elle puisse constater l'année
prochaine que la situation est, en droit comme en fait, en pleine
conformité avec la convention n" 87.
Convention n0 89: Travail de nuit (femmes) (révisée), 1948
Italie (ratification: 1952). Le gouvernement a communiqué les
informations suivantes :
La loi n0 903/77 comporte en principe la suppression de
l'interdiction du travail nocturne des femmes. Les observations de
la commission d'experts sur la non-conformité de la loi aux
dispositions de la convention restent donc pertinentes.
D'autre part, depuis son adoption (1948) jusqu'à maintenant, la
convention n'a subi aucune modification, tandis que l'évolution et
la dynamique du progrès social ont notablement modifié les
rapports d'éthique sociale, ce qui se reflète plus ou moins, mais
toujours dans le même sens, dans la législation de nombreux pays,
qui tend à affirmer autant que possible le principe de l'égalité entre
les travailleurs des deux sexes.
La même évolution se constate aussi dans le contenu des
instruments normatifs récemment adoptés par l'OIT, où sont
privilégiés les principes de non-discrimination tendant à dépasser
les modèles sociaux traditionnellement fondés sur une division des
rôles de l'homme et de la femme de moins en moins justifiée à
l'étape actuelle de l'évolution sociale.
L'orientation du gouvernement italien est par conséquent de
mener une enquête approfondie pour voir s'il existe les conditions
voulues pour une révision de la convention dans le sens indiqué cidessus
; si, pour diverses raisons, cette solution n'est pas praticable,
le gouvernement italien n'aurait d'autre recours que, à l'échéance
prévue par la convention, de dénoncer cette dernière.
Convention n" 94: Clauses de travail (contrats publics), 1949
Guatemala (ratification : 1952). Le gouvernement a indiqué que
les informations que demande la commission d'experts seront
fournies dans le prochain rapport sur l'application de la convention.
Les membres travailleurs ont déclaré que, vu le récent changement
de gouvernement, la commission devrait décider de ne pas
discuter de l'application de cette convention cette année, Mais de
demander au gouvernement de fournir des informations supplémentaires
pour examen par la commission d'experts.
Les membres employeurs ont soutenu la proposition faite par les
membres travailleurs, et le gouvernement de réexaminer les
questions concernées.
La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement fournirait
de plus amples informations pour examen par la commission
d'experts à sa prochaine session.
Convention n" 95 : Protection du salaire, 1949
Jamahiriya arabe libyenne (ratification : 1962). Un représentant
gouvernemental a fait la déclaration suivante :
Les dispositions sur le salaire minimum s'appliquent à tous les
travailleurs. La loi n0 15 de 1981 sur les salaires, en vigueur depuis
le 1er janvier 1982, est applicable à tous les salariés, y compris dans
l'agriculture. Aucun travailleur agricole n'est employé dans le
secteur privé, étant donné que ces travailleurs sont soit indépendants,
soit associés et reçoivent alors leur part de la production.
Aucune déduction sur les salaires n'est opérée pour les avantages
en nature,
Les membres employeurs ont fait remarquer que déjà l'année
dernière le gouvernement avait indiqué que la loi s'applique à tous
les salariés. Or, il semble qu'il n'y ait pas de salariés dans
l'agriculture. Ils ont souhaité que la législation soit alignée sur la
convention et que la question soit examinée lorsque le texte de la
nouvelle loi sur les salaires entrée en vigueur en 1982 serait
disponible.
Les membres travailleurs ont fait remarquer qu'il est certes
possible qu'il n'existe pas de salariés dans l'agriculture puisque le
gouvernement parle d'associés, mais que même des associés
peuvent avoir besoin d'avances, que celles-ci soient ou non
qualifiées de salaire. Il faut donc garantir la protection du salaire
quelle qu'en soit la forme. D'autre part, même si aucune déduction
n'est opérée pour les avantages en nature, il serait bon que cela fût
stipulé clairement dans la législation.
Le représentant gouvernemental a indiqué que la loi sur les
salaires à présent en vigueur concerne l'ensemble des rémunérations
et n'exclut pas les salariés de l'agriculture du secteur public.
L'ensemble de la législation n'a pas encore été révisé, mais la
nouvelle loi sur les salaires sera envoyée au BIT.
La commission a pris note des informations du représentant
gouvernemental. Elle a pris acte de ce qu'une nouvelle loi sur les
salaires est entrée en vigueur qui couvre tous ceux qui reçoivent
une rémunération y compris dans le secteur agricole et a souhaité
qu'elle soit communiquée pour examen à la commission d'experts.
Turquie (ratification: 1961). Le gouvernement a communiqué
les informations suivantes :
1. Il faut préciser qu'il n'y a aucun lien entre la protection des
salaires et l'exclusion du champ d'application du Code du travail
de certains travailleurs comme les travailleurs agricoles et ceux qui
travaillent dans des petites entreprises commerciales et artisanales.
En effet, les salaires des travailleurs qui restent en dehors du
champ d'application du Code du travail sont protégés par d'autres
lois (notamment l'article 73, les articles 323 et suivants, et plus
particulièrement l'article 326 du Code des obligations pour ceux
qui travaillent dans l'agriculture ou dans les petites entreprises
commerciales et artisanales).
D'autre part, il faut signaler que la convention n" 95 ne prévoit
pas la protection du salaire uniquement par la voie législative.
Presque dans toutes les dispositions de la convention, les conventions
collectives et les sentences arbitrales sont citées en même
temps que la loi comme moyens de protection. Par conséquent, si
les salaires des travailleurs sont protégés par des conventions
collectives au lieu de la loi, ce serait tout à fait conforme à la
convention n0 95. Donc, si les dispositions des différentes lois qui
protègent les salaires des travailleurs n'existaient pas en Turquie,
seul le système de convention collective régi par la loi n" 275
depuis 1963, suffirait à assurer la conformité à la convention n" 95.
En effet, toutes les catégories de travailleurs, y compris les
travailleurs agricoles, ont le droit de négocier d'une manière
collective pour la protection de leurs salaires. C'est ainsi que les
travailleurs agricoles, profitant de ce droit, ont conclu des conventions
collectives, dans lesquelles se trouvent les clauses de protection
de salaire.
31/52
Document no 244
CIT, 69e session, 1983, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 31/44-31/46 (Uruguay)

Conférence internationale du Travail
Compte reridu provisoire
Soixante-neuvième session, Genève, 1983
31
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 19
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 19
A. Observations générales et informations concernant certains pays 19
B. Observations et informations sur l'application des conventions 23
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 74
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) . . . 75
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 76
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 76
B. Rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains . . . 76
III. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 77
Index parpays des observations et informations contenues dans le rapport 79
31/1
s'agirait de dire clairement dans un paragraphe de la partie du
rapport relative à la discussion concernant l'étude d'ensemble que
la commission a constaté, non seulement à l'occasion de la
discussion générale mais également lors du traitement des cas
individuels d'un certain nombre de pays, notamment socialistes,
ces divergences fondamentales qu'il faudrait tenter de mieux
clarifier avec l'aide du BIT et par des moyens divers, de façon à
arriver à une meilleure application de ces instruments et à mettre
fin aux années de discussions et au dialogue de sourds qui s'est
parfois instauré.
Le porte-parole des membres employeurs a été d'accord pour
que la discussion sur le cas de l'URSS se termine normalement par
des conclusions au sujet de l'application par ce pays de la
convention n0 87. L'on aurait sans doute pu envisager une autre
issue à ce débat, et résumer la discussion de façon un peu
différente de celle des membres travailleurs, et il conviendrait
peut-être de préciser aussi dans les conclusions que la commission
d'experts n'était pas satisfaite de la façon dont est appliquée la
convention en URSS. Mais comme il n'est pas habituel de discuter
chaque terme des conclusions normales auxquelles arrive la
commission dans ces cas individuels, il s'est déclaré généralement
d'accord avec des conclusions telles que proposées par le porteparole
des membres travailleurs, dont l'énoncé exact pourrait être
trouvé. Il a également appuyé la proposition de ce dernier de
prévoir un résumé qui fasse état des difficultés de l'application des
conventions sur la liberté syndicale et la négociation collective et
qui reflète l'ensemble des conclusions de caractère général, à
rédiger et approuver à la fin des travaux de la commission.
Un représentant gouvernemental a fait remarquer que les
conclusions de la commission ne pouvaient porter ici que sur le cas
concret de l'application par l'URSS de la convention n0 87, et non
faire allusion à l'étude d'ensemble de la commission d'experts.
En réponse aux questions soulevées par plusieurs membres, le
président a précise que les conclusions proposées sur le cas de
l'application par l'URSS de la convention n" 87 constituaient une
question distincte de celle de la proposition faite par les membres
travailleurs et appuyée par les membres employeurs d'inclure dans
le rapport général de la commission un paragraphe reflétant les
conclusions de la commission sur l'application des conventions sur
la liberté syndicale en général.
C'est dans ce paragraphe que devrait figurer la mention de
mesures telles que des cycles d'études et des séminaires, comme de
nature à contribuer à une meilleure compréhension mutuelle, et en
particulier celle de la proposition faite par des membres du groupe
des travailleurs d'organiser un séminaire sur le rôle des syndicats
dans les pays socialistes.
Le membre travailleur de l'URSS a exprimé son accord de
principe avec la proposition de conclusion sur l'application de la
convention n0 87 par l'URSS, sous réserve qu'il n'y ait pas
d'imprécisions dans son libellé.
Le représentant gouvernemental de l'URSS a exprimé son
accord avec la proposition de conclusion du président sur l'application
par l'URSS de la convention n0 87, en précisant que les
conclusions d'ordre général sur l'application des conventions sur la
liberté syndicale devraient être formulées au moment de la
discussion du rapport général de la commission.
La commission a noté, à la suite de l'observation faite par la
commission d'experts et au terme de la discussion détaillée et
prolongée qui s'est déroulée au sujet de l'application en URSS de
la convention n° 87, que des divergences d'opinions fondamentales
demeurent mais que les nombreux échanges de vues intervenus
prouvent qu'il existe une volonté véritable de poursuivre le
dialogue. La commission a estimé que ce dialogue était de nature à
contribuer à une meilleure compréhension mutuelle, et que
d'autres mesures pourraient également être mises en oeuvre afin de
clarifier et résoudre les divergences actuelles.
Uruguay (ratification: 1954). Un représentant gouvernemental
a fait la déclaration suivante :
Les développements qui ont eu lieu en Uruguay concernant
l'application de la convention n° 87 sont la preuve de l'efficacité du
dialogue constructif qui a eu lieu avec l'OIT. Il était inévitable
qu'en raison du très grave terrorisme qui sévissait il y a quelques
années il y ait des difficultés d'application de la convention. Afin
d'y remédier, le gouvernement a pris des mesures pour consulter
les organisations les plus représentatives de travailleurs et d'employeurs
sur un projet de loi concernant les organisations professionnelles
; il a fait appel également à l'OIT au sujet de ce projet de
loi afin d'obtenir ses commentaires et il a accepté que trois
missions de contacts directs aient lieu durant lesquelles le représentant
du Directeur général de l'OIT a eu l'entière possibilité de
visiter les lieux et les personnes concernés. Après l'adoption du
projet de loi, le Comité de la liberté syndicale de l'OIT a noté avec
satisfaction des améliorations considérables par rapport au projet
de loi initial dans l'application de la convention. Le Conseil
d'administration a appuyé ses conclusions et la commission
d'experts note avec satisfaction l'adoption de la nouvelle loi et cite
le cas de l'Uruguay, convention n" 87, dans sa liste de cas de
progrès. La commission de la Conférence note avec satisfaction
également que, suite aux contacts directs, la nouvelle législation
apporte des améliorations importantes à la situation qui prévalait,
et le rapport du Directeur général note également avec satisfaction
les progrès réalisés dans l'application de la convention.
En conséquence, le gouvernement a poursuivi sa coopération
avec l'OIT, ce qui a permis de surmonter la plupart des problèmes
existants, et l'attitude du gouvernement a permis de résoudre les
problèmes syndicaux dans l'intérêt des employeurs et des travailleurs
ainsi que dans l'intérêt général: l'Uruguay a fait des progrès
concernant la convention. Malgré ces progrès, il y a pourtant des
difficultés, et la commission d'experts a soulevé plusieurs points
sur lesquels il faudrait porter attention afin que la convention soit
appliquée dans son ensemble.
Le membre travailleur de l'Uruguay a demandé des informations
au représentant gouvernemental sur le droit pour les
fonctionnaires de constituer des organisations et si la convention
n" 151 serait ratifiée par l'Uruguay. Il a demandé également des
informations sur l'actuelle condition des dirigeants syndicaux. Il a
désiré savoir quand seront adoptées des dispositions, conformément
à la convention et à la Constitution nationale, qui régiront le
droit de grève, s'il est possible de constituer des organisations
syndicales au niveau national et quelles mesures sont envisagées
afin d'accorder la personnalité juridique plus rapidement aux
syndicats.
Le porte-parole des membres travailleurs a déclaré que la
coopération et l'aide de l'OIT ont permis des améliorations à la
législation et se félicite de l'attitude positive du gouvernement,
mais plusieurs questions concernant l'application pratique sont
encore préoccupantes, comme le souligne la commission d'experts.
Beaucoup de syndicalistes sont encore en prison ou vivent en exil
et la question est de savoir si des mesures seront prises afin
d'aligner la situation de facto sur la situation de jure.
Les membres employeurs se sont félicités des progrès notés par
la commission d'experts à la suite de la coopération entre le
gouvernement et l'OIT ces dernières années et en particulier grâce
aux contacts directs. Le représentant gouvernemental a fait état
des difficultés et il faut se féliciter que la discussion soit basée sur
les commentaires de la commission d'experts. Cependant, il faut
qu'il y ait des améliorations en ce qui concerne les limites imposées
aux travailleurs qui appartiennent à différentes entreprises ou
branches d'activité de former une seule organisation de base;
également concernant les longs délais, aux termes du décret
n" 640/973, avant qu'une association professionnelle puisse être
enregistrée et, enfin, concernant la réélection immédiate de
dirigeants syndicaux, qui est actuellement interdite. Le gouvernement
doit indiquer quelles mesures il a l'intention de prendre afin
de mettre sa législation en conformité avec la convention et il
devrait également fournir certaines indications sur la date à
laquelle ces mesures seront prises.
Le membre gouvernemental des Etats-Unis a indiqué que le
dialogue et la discussion qui ont eu lieu dans le présent cas se
distinguent de ceux qui ont eu lieu dans d'autres cas, et cela est à
mettre au crédit du gouvernement de l'Uruguay. Il constate
également que la commission d'experts, en 1983, avait pris note
des progrès dans le cas de l'Uruguay sur trois conventions et en
1982 sur la convention n" 87, ce qui lui permet de croire que
l'Uruguay poursuivra sa coopération avec l'OIT et s'efforcera de
résoudre les dernières difficultés.
Le membre travailleur de l'Equateur a déclaré que le gouvernement
violait la convention. Il n'autorise actuellement l'existence de
syndicats que sur une base temporaire ; les syndicalistes ne peuvent
pas mener à bien leurs activités et d'une façon continuelle la police
intervient afin de priver les travailleurs et leurs dirigeants de leur
droit d'association. Il faut que l'on explique quels sont les droits
syndicaux des fonctionnaires ainsi que ce qu'est le droit de grève
qui est nié et aboli comme étant un délit à caractère militaire
depuis dix années, et ce contrairement à la Constitution de
l'Uruguay et en violation de la convention, La situation n'est pas
claire non plus en ce qui concerne la discrimination antisyndicale,
même si le gouvernement déclare qu'il existe une protection
contre la discrimination dans l'emploi. Enfin, depuis que la
dictature militaire est au pouvoir, de nombreux syndicalistes sont
en prison et ont même été torturés.
Le membre travailleur des Pays-Bas a appuyé la déclaration
faite par le membre travailleur de l'Equateur. Concernant la
déclaration du membre gouvernemental des Etats-Unis, il faut
distinguer deux niveaux de dialogue : l'un relève de la loi et l'autre
de la pratique. Il y a certains doutes concernant cette dernière
question et il faut souligner que le gouvernement doit entamer
également le dialogue dans son propre pays, notamment avec les
syndicalistes qui sont actuellement en prison et privés ainsi d'une
liberté fondamentale.
31/44
Le membre travailleur de l'Autriche a déclaré que le présent cas
faisait l'objet de discussions fréquentes. En 1978 et 1979, le
rapport de la commission contenait un paragraphe spécial où il
était fait mention du manque d'observation de la convention, et en
1981 et 1982 l'application de la convention, tant en droit que dans
la pratique, a été discutée. Il faut que le représentant gouvernemental
fournisse davantage d'informations sur les points soulevés
par la commission d'experts et par les autres orateurs à la présente
commission et indique quelle est l'importance qui leur est donnée.
Tous les Etats Membres de l'OIT ont l'obligation de coopérer avec
celle-ci et il faut examiner la position du gouvernement en fonction
de cela.
Le membre travailleur du Panama a appuyé la déclaration faite
par le membre travailleur de l'Equateur : le représentant gouvernemental
doit faire état des organisations représentatives consultées
lors de l'adoption de la loi sur les associations professionnelles.
Il se pose des questions à cet égard, au sujet du Congrès
national des travailleurs (CNT) qui a été contraint à l'exil en vertu
d'un décret militaire.
Le membre travailleur de la Colombie a appuyé les membres
travailleurs qui venaient de parler et n'était pas d'accord avec
l'opinion selon laquelle il faudrait donner crédit au gouvernement
pour ses déclarations. Elle se demande quand les libertés syndicales
seront observées en Uruguay alors que beaucoup de dirigeants
syndicaux sont encore détenus même, dans certains cas,
lorsqu'ils ont purgé leur sentence. Des milliers de travailleurs et de
dirigeants syndicaux ont été contraints à l'exil et ne peuvent
participer au mouvement syndical. Il ne peut y avoir de liberté
syndicale si les droits de l'homme ne sont pas respectés dans le
pays. Quand les camarades emprisonnés depuis des années serontils
libérés ? II faut que le gouvernement réponde de façon concrète.
Le membre travailleur du Mali a déclaré que les paroles sont
insuffisantes pour résoudre les problèmes d'application pratique
des conventions, et il faut qu'une information concrète soit donnée
notamment sur les syndicalistes en exil.
Le membre travailleur de l'URSS a apporté son entier soutien
aux déclarations des autres membres travailleurs. Le groupe des
travailleurs est unanime et demande au gouvernement de restaurer
la situation qui prévalait antérieurement concernant la liberté
d'association, de libérer les syndicalistes emprisonnés et de rétablir
la démocratie.
Le représentant gouvernemental a déclaré que, depuis 1943, le
droit pour les fonctionnaires de constituer des syndicats était
reconnu aux termes de l'article 1 du décret-loi nu 10388 du
13 février 1943. L'année dernière, le délégué travailleur à la
Conférence était un fonctionnaire. Le gouvernement a satisfait à
son obligation de soumettre la convention n0 151 aux autorités
compétentes à qui il revient maintenant,de prendre une décision
sur la question. Les syndicats sont reconnus par la législation
nationale et le gouvernement ne peut empêcher qu'il y ait
occasionnellement des licenciements ou que des mesures disciplinaires
soient prises à l'égard de dirigeants syndicaux. La seule
chose qu'ils puissent faire est d'obliger une entreprise à réengager
les personnes concernées s'il a été démontré qu'elles agissaient
pour raisons syndicales. Il y a quarante ans que le droit de grève est
reconnu dans la Constitution qui stipule qu'une loi d'application
doit être prise à cet égard. Il est prévu que cette disposition de la
Constitution sera appliquée, et un projet de loi sur le droit de
grève est à l'étude. La commission d'experts exprime l'espoir que
les dispositions de ce texte ne seront pas en conflit avec la
convention, mais il n'y a aucun article dans la convention qui
renvoie au droit de grève. En ce qui concerne les retards dans
l'octroi de la personnalité juridique aux syndicats, la commission
d'experts n'a pas estimé que la convention était violée à cet égard,
mais elle déclare seulement que la période d'attente devrait être
raccourcie. Compte tenu du nombre important d'organisations, le
ministre du Travail n'a pas été en mesure de régler suffisamment
rapidement cette question, mais son gouvernement a l'intention de
résoudre ce problème administratif. Le gouvernement a fourni une
réponse aux demandes du Comité de la liberté syndicale concernant
les syndicalistes emprisonnés et a déjà pratiquement réglé
cette question. L'incarcération de certaines personnes qui ont à un
moment donné exercé des fonctions syndicales n'est pas niée, mais
les raisons de cette incarcération ne sont pas dues à des raisons
syndicales. Lors des trois missions de contacts directs, toutes les
facilités ont été accordées pour que l'on puisse voir les personnes
et les endroits sans aucune restriction et, dans le rapport du
Directeur général, lors de la 209e session du Conseil d'administration,
on a indiqué que les raisons pour la détention de ces
personnes n'étaient pas liées à des activités syndicales. Ces
personnes seront libérées lorsqu'elles auront purgé leur sentence.
En ce qui concerne la réélection des dirigeants syndicaux, le
Comité de la liberté syndicale a déclaré que seule l'interdiction
absolue était contraire à la convention n0 87 alors qu'en Uruguay il
n'existe que des limites raisonnables qui se fondent sur les intérêts
des travailleurs et les principes démocratiques ; ainsi, après avoir
été élus une première fois et avant qu'il y ait une nouvelle élection,
il doit y avoir une période d'attente transitoire. De plus, il est faux
d'affirmer que les organisations enregistrées font l'objet d'une
autorisation temporaire pour pouvoir agir et qu'il existerait un
droit de veto que les autorités pourraient exercer contre les
dirigeants syndicaux. Concernant les questions qui ont été soulevées,
les organisations professionnelles consultées lors de la
préparation de la loi sur les associations professionnelles sont les
mêmes que celles qui ont envoyé des représentants travailleurs aux
dernières Conférences de l'OIT sans que leur représentativité ait
pu être mise en cause avec succès. Le crédit donné au gouvernement
pour les progrès réalisés dans l'application de la convention
vient de sources impartiales comme le Comité de la liberté
syndicale, le Conseil d'administration, la présente commission, la
Conférence et le Directeur général de l'OIT. Il y a eu beaucoup de
progrès dans la législation et on ne nie pas qu'il y a des difficultés
en pratique, mais des progrès certains ont eu lieu. Le gouvernement
poursuivra son effort afin d'assurer l'application de la
convention dans la pratique en vue de poursuivre les efforts déjà
entrepris concernant la législation.
Le membre travailleur du Danemark a réclamé une réponse plus
nette du gouvernement quant au droit de grève. Il n'est pas exact
de dire que le droit de grève n'est pas couvert par la convention
comme en témoigne par exemple l'étude d'ensemble de la
commission d'experts cette année. Il se demande pourquoi ce droit
ne peut être librement exercé si la Constitution nationale le
reconnaît.
Le représentant gouvernemental a déclaré que le droit de grève
était reconnu à l'article 57 de la Constitution et que cet article
prévoyait l'adoption de dispositions d'application, ce qui est
envisagé par la législation actuellement à l'étude.
Les membres employeurs ont déclaré que la convention doit
être appliquée en même temps aux niveaux légal, administratif et
pratique. Le représentant gouvernemental avait déclaré que des
progrès avaient eu lieu dans l'application de la convention, et il
faut espérer que les commentaires de la commission d'experts
seront suivis afin qu'aussi bien en pratique qu'en droit il y ait une
parfaite conformité avec la convention et qu'il y ait davantage de
progrès l'année prochaine.
Le porte-parole des travailleurs a souligné qu'un certain nombre
de membres du groupe travailleur avaient marqué leur préoccupation
concernant la situation et l'application de la convention, et il
s'est félicité de ce que le gouvernement admette qu'il reste
beaucoup à faire. Les membres travailleurs se sont félicités des
progrès et ont pris note des dispositions auxquelles le gouvernement
s'était référé. Ils ont noté également qu'un projet de loi
traitant du droit de grève était en cours d'élaboration. Ils ont
exprimé l'espoir que le gouvernement se conformerait aux commentaires
de la commission d'experts et ils ont rappelé qu'une fois
adoptée la législation devait être appliquée.
Le membre travailleur de l'Equateur a déclaré que la commission
devait prendre une décision et noter que le gouvernement de
l'Uruguay violait la convention n" 87. L'information fournie par le
représentant gouvernemental ne donne aucune satisfaction et
toute déclaration de bonne intention ne justifie pas la violation de
la convention. Le droit de grève est véritablement couvert par la
convention, et la Constitution nationale le garantit même si, depuis
dix ans, il n'y a eu aucune disposition adoptée pour appliquer le
droit de grève existant avant la dictature. Le représentant gouvernemental
a admis que les dirigeants syndicaux étaient en prison
même, même s'il a déclaré que le motif de leur incarcération
n'était pas de nature syndicale. Il ne s'agit cependant là que d'une
excuse pour la violation de la convention. L'orateur nomme un
certain nombre de dirigeants syndicaux actuellement emprisonnés
et fait mention d'une liste de plus de 70 dirigeants syndicaux en
prison. En outre, beaucoup de dirigeants syndicaux de grande
valeur sont en exil et ainsi empêchés d'exercer leurs activités dans
le mouvement syndical et exclus de leur rôle dirigeant parmi les
travailleurs. Le gouvernement pourrait faire preuve de sa bonne
volonté en ce qui concerne la convention en proposant formellement
de libérer les syndicalistes emprisonnés et de permettre le
retour des dirigeants exilés. Il est insuffisant de faire état de sa
bonne intention. La réponse du représentant gouvernemental
concernant le droit pour les fonctionnaires de constituer des
organisations n'est pas satisfaisante. Il faut que des mesures soient
prises afin de rétablir la situation existant avant la dictature
militaire.
Le membre travailleur de Cuba a apporté son soutien à la
déclaration du membre travailleur de l'Equateur. Le 1" mai 1983,
200 000 personnes ont défilé pour manifester contre dix années de
dictature, ce qui signifie l'échec de celle-ci. En outre, beaucoup
d'organisations syndicales ont réclamé une amnistie générale,
attendu que beaucoup de membres et de dirigeants syndicaux sont
en prison.
Le représentant gouvernemental se demande comment les
célébrations du 1" mai, qui ont été permises par le gouvernement
31/45
et où la participation a, semble-t-il, été très grande, peuvent être
contraires à l'application de la convention.
La commission s'est félicitée du dialogue que le gouvernement
poursuit concernant la convention. Tout comme la commission
d'experts, elle a noté que des progrès ont été apportés à la
législation à la suite des contacts directs. Malgré des progrès
partiels, la commission a estimé qu'il est possible de poursuivre ces
progrès et qu'il y a de sérieuses raisons de s'inquiéter en ce qui
concerne le droit d'association des fonctionnaires, l'exercice du
droit de grève, la reconnaissance légale des organisations syndicales
et quant à la libération des dirigeants syndicaux emprisonnés.
La commission a formulé l'espoir que des progrès seront réalisés
afin d'assurer la conformité de la loi et de la pratique avec la
convention. La commission a demandé au gouvernement de faire
un geste de bonne volonté et d'améliorer la situation en libérant
les membres et dirigeants syndicaux actuellement emprisonnés.
Convention n° 88 : Service de l'emploi, 1948
Zaïre (ratification: 1964). Un représentant gouvernemental a
déclaré que, par l'ordonnance n0 80/105, le Service national de
l'emploi a été élevé au niveau d'une direction et que son pays doit
établir des bureaux régionaux et locaux de l'emploi avec l'assistance
technique du BIT. Cependant, un service de placement
régional et local ne peut fonctionner que grâce à un personnel
qualitifié et à un équipement technique approprié. C'est pourquoi
le Zaïre a besoin de l'assistance du BIT. Il a donc élaboré un projet
en vue de relancer les services de l'emploi, mais ce projet
«piétine» du côté du PNUD et du BIT. A défaut de cette
assistance technique que le BIT écarte sans ménagement, son pays
se verra obligé de résoudre ses problèmes seul et dans la mesure de
ses possibilités. Il souhaite néanmoins, dans le courant de l'année
prochaine, être en mesure de mobiliser les fonds nécessaires pour
mettre en oeuvre ce projet. D'autre part, le Conseil national du
travail a été institué par le Code du travail pour associer les
travailleurs, les employeurs et les autres partenaires aux discussions
de l'ensemble des problèmes du travail. La situation financière
difficile de son gouvernement ne permet pas de convoquer
une session du Conseil national du travail sur l'organisation et le
fonctionnement du service national de l'emploi ou de faire
fonctionner les commissions consultatives régionales de l'emploi.
Cependant, son pays étudie les voies et moyens qui lui permettront
de réaliser l'organisation d'une telle consultation. Les difficultés
financières ne lui permettent pas d'organiser un service régional ou
local de l'emploi et il compte sur l'appui technique du BIT pour
faire face aux dépenses en formation et en matériel. Il reste ouvert
à une telle réalisation dans la mesure de ses capacités de
financement.
Les membres travailleurs ont regretté qu'il n'y ait pas de
progrès. Ils ont déclaré qu'ils comprenaient les difficultés réelles
auxquelles le pays doit faire face, mais qu'il est nécessaire de sortir
de la situation de passivité dans laquelle on se trouve. Il s'agit
d'appliquer une convention importante. Ils souhaitent que la
commission sera bientôt en mesure de constater des changements
dans la législation et dans la pratique et ils ont exprimé l'espoir
que, grâce à ces discussions et à la bonne volonté manifestée par le
gouvernement et en s'appuyant sur la concertation existant au
Zaïre entre les employeurs et les travailleurs, les problèmes
pourront être surmontés rapidement.
Les membres employeurs ont pris note de ce que le gouvernement
a manifesté son intention de respecter ses obligations. Ils
prient le gouvernement de donner des informations concrètes à la
commission d'experts pour lui permettre de constater des progrès.
La commission a pris note des informations fournies par le
gouvernement et déplore cependant l'absence de progrès quant à
l'application de la convention n0 88. Elle exprime l'espoir que la
pratique sera modifiée dans un avenir proche, dans le contexte du
pluralisme, pour assurer l'application de la convention.
Convention n" 94: Clauses de travail (contrats publics), 1949
Burundi (ratification: 1963). Le gouvernement a déclaré que le
projet de décret visant à appliquer la convention est encore à
l'étude et que les résultas seront communiqués avec le prochain
rapport.
Egypte (ratification: 1960). Le gouvernement a communiqué les
informations suivantes :
Le gouvernement est complètement d'accord avec les commentaires
de la commission d'experts et considère que la convention
est appliquée en Egypte, mais il semble qu'il y a eu un malentendu
dans le dernier rapport du gouvernement concernant l'application
de la convention n" 94. Pour cette raison, le gouvernement
voudrait apporter les éclaircissements suivants :
1. Les relations de travail en Egypte sont régies par trois
législations: 1) si le travailleur est un fonctionnaire de l'Etat ou
d'une administration publique, il est soumis aux dispositions de la
loi des fonctionnaires civils de l'Etat n" 47 de 1978; 2) si le
travailleur travaille dans le secteur public, il est soumis aux
dispositions de la loi des travailleurs engagés dans le secteur public
n0 48 de 1978 ; 3) si le travailleur est engagé dans le secteur privé,
il est soumis aux dispositions du Code du travail n" 137 de 1981.
Les travailleurs engagés en vertu de contrats passés avec
l'autorité publique sont soumis aux dispositions du Code du travail
n" 137 de 1981, et ce conformément à l'article 1 de la loi des
travailleurs engagés dans le secteur public, qui stipule que le Code
du travail demeure applicable dans tous les cas non régis par la loi
des travailleurs engagés dans le secteur public. Ainsi, certaines
dispositions du Code du travail - sécurité et hygiène du travail -
s'appliquent aux trois secteurs, fonctionnaires, public et privé, et
ce conformément à l'article 3 du Code du travail. De même, la loi
sur la sécurité sociale n" 79 de 1975 s'applique à ces mêmes
secteurs.
2. En examinant les dispositions de ces diverses législations,
l'on constate que les principales dispositions qui régissent le salaire
minimum, les congés et les heures de travail sont identiques.
Quant aux autres, on s'aperçoit que celles qui régissent le secteur
privé sont les plus avantageuses.
3. Dans le cas précis, l'Etat charge de l'exécution d'un contrat
public soit une entreprise publique, soit un entrepreneur (secteur
privé). Dans ce cas, les travailleurs de l'entreprise publique sont
soumis à la loi des travailleurs engagés dans le secteur public et
ceux d'une entreprise privée au Code du travail. Dans les deux cas,
les conditions de travail ne sont pas moins favorables, mais
meilleures, que celles applicables à leurs homologues engagés
auprès de l'autorité publique. En fait, ce qui se passe en Egypte
c'est que les travailleurs dans le secteur public essaient par le
truchement de leurs organisations syndicales d'obtenir les mêmes
privilèges que ceux qui sont occupés dans le secteur privé, y
compris ceux qui le sont conformément à des contrats passés avec
l'autorité publique.
4. Si les lois appliquées en Egypte donnent aux travailleurs sous
contrat avec l'Etat des droits et des privilèges qui ne soient pas en
dessous de ceux accordés à leurs homologues occupés ailleurs dans
la même activité, cela est tout à fait normal et, en même temps,
obligatoire, car une disposition légale prévaut sur une disposition
contractuelle et, si une clause d'un contrat est contradictoire avec
une disposition légale, c'est cette dernière qui s'applique le cas
échéant.
En plus de ce qui précède et conformément aux directives de la
commission d'experts, les contrats de droit public précisent
toujours que les droits des travailleurs engagés en vertu de ces
contrats ne doivent pas être inférieurs à ceux de leur homologues
engagés ailleurs. Le ministère de la Main-d'oeuvre et de la
Formation professionnelle a l'intention de demander aux autorités
responsables de l'organisation du travail dans le secteur public
(ministères et départements publics) de publier et de faire circuler
continuellement des instructions auprès des intéressés, qui vont
dans le sens précité. La question ne nécessite pas l'adoption d'une
législation, mais simplement d'une campagne d'information, et
copies de ces instructions, dès leur publication, seront transmises
au BIT. En outre, le gouvernement informera des résultats s'y
rapportant.
Guatemala (ratification: 1952). Le gouvernement a indiqué
qu'un projet d'accord gouvernemental contenant les dispositions
établissant l'obligation d'insérer dans tous les contrats publics des
clauses de travail qui, conformément au contrat type fourni par le
BIT, appliquent les dispositions de la convention a été étudié,
élaboré et soumis aux autorités compétentes. Il contient les
éléments indiqués dans l'observation de la commission.
Convention n° 95: Protection du salaire, 1949
Turquie (ratification: 1961). Le gouvernement a communiqué
les informations suivantes :
En ce qui concerne les sections 73, alinéa 1, et 78 du Code des
obligations, ces dispositions correspondent à celles de l'article 13
de la convention.
En ce qui concerne les travailleurs agricoles et les travailleurs
des entreprises commerciales et artisanales qui sont actuellement
exclus du champ d'application du Code du travail, le gouvernement
est obligé de préciser encore une fois qu'il n'y a aucun lien
entre la protection des salaires et l'exclusion du champ d'application
du Code du travail avant et après 1960 de certains travailleurs
comme les travailleurs agricoles et ceux qui travaillent dans des
petites entreprises commerciales et artisanales.
Les salaires des travailleurs qui restent en dehors du champ
d'application du Code du travail sont protégés par la législation.
31/46
Document n° 245
CIT, 71e session, 1985, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 30/49-30/52 (Royaume-
Uni)

"H Conférence internationale du Travail fe '
Compte rendu provisoire
Soixante et onzième session, Genève, 1985
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 17
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 17
A. Observations générales et informations concernant certains pays 17
B. Observations et informations sur l'application des conventions 22
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 90
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) . . . 91
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 92
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 92
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains 92
'///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 93
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations 96
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 97
Royaume-Uni: (ratification, 1949). Un representant gouvernemental
a fait un historique de !'observation contenue dans le
rapport de la commission d'experts: le 25 janvier 1984, le ministre
des Affaires etrangeres a informe le parlement que des certificats
avaient ete signes aux termes de la legislation sur la protection de
l'emploi excluant le personnel de la fonction publique du Centre
gouvernemental des communications de Cheltenham (CGCC) (un
etablissement gouvernemental regroupam des fonctionnaires
occupes A un travail secret d'une importance capitale pour la
securite nationale qui doit etre mene sans interruption), des
dispositions et, dans une certaine mesure, de la protection de
cette legislation. En meme temps, le ministre des Affaires
etrangeres declarait que de nouvelles conditions d'emploi seraient
fixees pour cette categorie de travailleurs, A savoir qu'ils ne
pourraient appartenir qu'A une association de personnel limitee
aux membres du CGCC et qu'il ne leur etait plus permis d'etre
membres d'un
30/49
syndicat regroupant d'autres membres du secteur public ou privé.
Le ministre a clairement indiqué que le gouvernement avait pris sa
décision après un examen approfondi et soigneux de tous les
aspects de la question, y compris le souci d'éviter une répétition
des grèves qui avaient eu lieu au CGCC entre 1979 et 1981, suite
au conflit général sur les salaires et autres questions. Selon le
gouvernement, le fait pour le syndicat de la fonction publique de
choisir le CGCC et d'y déclencher une grève pour poursuivre un
conflit de nature plus générale a placé le personnel du CGCC face
à un sérieux conflit de loyauté. Le gouvernement a considéré très
attentivement ses obligations aux termes des conventions de l'OIT
avant de prendre des mesures. Son gouvernement a conclu qu'il
n'y avait aucune violation de ses obligations et il en est toujours
convaincu.
Suite aux mesures prises par le gouvernement, les syndicats de la
fonction publique et le Congrès des syndicats (TUC) ont fait de
très vigoureuses représentations auprès du gouvernement et ont
tenu plusieurs réunions au cours desquelles les syndicats ont essayé
de persuader le gouvernement de reconsidérer sa décision. Ces
discussions ont été menées de bonne foi de part et d'autre. Le
gouvernement, cependant, a conclu que les différences entre les
parties étaient insurmontables et qu'on ne pourrait trouver une
solution assur?nt que les activités du CGCC soient interrompues et
menées en toute sécurité à l'avenir. Les syndicats ont décidé de
poursuivre leur argumentation en déposant une plainte devant le
Comité de la liberté syndicale qui a examiné le cas en mai 1984 et,
à nouveau, en février 1985. A sa réunion de février, le comité avait
reçu une seconde communication du gouvernement très substantielle
et qui fournissait de nouvelles informations sur l'interprétation
des conventions pertinentes ; cependant, ce comité n'a pas fait
état de ces nouvelles informations dans son rapport et a exprimé
l'opinion que la communication ci-dessus mentionnée n'apportait
aucune nouvelle information quant aux faits qui justifieraient un
réexamen du cas. En conséquence, le Comité de la liberté
syndicale a décidé d'attirer l'attention de la commission d'experts
sur cette communication qui a été mentionnée dans son observation.
Le représentant gouvernemental note que le TUC allègue que le
gouvernement viole les articles 2, 3, 4 et 5 de la convention n° 87
mais que le gouvernement affirmait qu'il n'y avait aucune violation
des principes de la liberté syndicale sur la base de la convention
n° 151 adoptée environ 30 ans après les conventions nM 87 et 98.
Il souligne que la convention n° 151 concerne l'application pratique
des principes généraux exprimés dans la convention n° 87
dans la fonction publique. Aux termes de l'article 1, 2) de la
convention n° 151, la portée des garanties prévues par la convention
concernant la protection du droit d'association des employés
de niveau supérieur ou des employés dont les responsabilités ont
un caractère hautement confidentiel doit être déterminée par les
lois et les règlements nationaux. Il est donc clair que la protection
prévue à l'article 4 de la convention contre tous actes de discrimination
syndicale doit être déterminée par les gouvernements en ce
qui concerne les employés occupés à des travaux très confidentiels.
Dans le cas du Royaume-Uni, le gouvernement a fait usage de son
droit d'adopter des lois et des règlements nationaux en ce qui
concerne les employés du CGCC. Il rappelle que les syndicats ont
contesté l'action du gouvernement et que le plus haut tribunal
britannique, la Chambre des lords, a confirmé que le gouvernement
avait agi dans l'intérêt de la sécurité nationale et que son
action était conforme à la loi.
C'est une pratique à l'OIT de s'assurer qu'il n'y ait pas de
contradiction entre conventions adoptées et, selon son gouvernement,
la convention n° 87 ne devrait pas être examinée indépendamment
des conventions nOT 98 et 151. Il apparaît, d'après les
compte rendus, que des discussions ont eu lieu ; en conséquence, il
a été nécessaire d'adopter un instrument traitant spécifiquement
de cette question. La convention n° 151 a donc été adoptée,
dépassant les principes généraux de la convention n° 87 dans ce
domaine. A la lecture du préambule de la convention n° 151, il
apparaît clairement que cette convention a été élaborée en tenant
compte des deux conventions précédentes.
Il note également que le TUC a attiré l'attention sur l'article 11)
de la convention n° 151 qui prévoit que la convention s'applique à
toutes les personnes employées par les autorités publiques dans la
mesure où des dispositions plus favorables dans d'autres conventions
internationales du travail ne leur sont pas applicables. Le
TUC affirme que la convention n° 87 est plus claire et plus
favorable que la convention n° 151. Le gouvernement, de son côté,
est d'avis que ce point de vue conduit à un non-sens en ce qui
concerne la convention n° 151, en particulier son article 1 2). En
fait, les conventions nOT 87 et 151 sont étroitement liées et l'article
1 2) doit primer sur les dispositions correspondantes de la
convention n° 87. L'article 1 1) de la convention n° 151 ne peut en
aucun cas être dissocié des dispositions de l'article 1 2) et il n'y a
aucun fondement aux affirmations du TUC à cet effet. La
convention n° 151, en particulier l'article 1 2), doit signifier ce qui
y est prévu, à savoir qu'il appartient aux gouvernements de
déterminer par des lois et des règlements nationaux l'étendue des
protections prévues par la convention aux travailleurs et, dans le
cas en question, aux travailleurs occupés à des travaux hautement
confidentiels. Voilà ce que son gouvernement a fait.
Au point 6 de l'observation de la commission d'experts, ces
questions n'ont pas été mentionnées comme telles, mais il est noté
qu'elles soulèvent des difficultés et que la Cour internationale de
justice serait plus en mesure de formuler, une opinion dans ce
domaine.
Le représentant gouvernemental est donc d'avis que la commission
d'experts a clairement reconnu que l'interprétation des
conventions formulées antérieurement par le Comité de la liberté
syndicale n'était pas la seule possible et nécessairement définitive.
Si les experts avaient été d'avis que les conclusions du Comité de la
liberté syndicale étaient définitives, ils l'auraient indiqué. Le fait
que la commission d'experts envisage la possibilité de requérir
l'interprétation des conventions auprès de la Cour internationale
de justice est la preuve, selon lui, que les arguments avancés par
son gouvernement sont sérieux et ne manquent pas de poids et
méritent un examen plus approfondi avant qu'une opinion définitive
puisse être formulée.
Le représentant gouvernemental rappelle que la commission
d'experts a repris le point de vue du Comité de la liberté syndicale
selon lequel si des négociations avec des organisations pertinentes
avaient lieu, l'objectif déclaré du gouvernement d'assurer le
fonctionnement continu et ininterrompu des travaux au CGCC
pourrait être atteint dans un climat social harmonieux et que la
question de la conformité des mesures gouvernementales avec les
normes internationales du travail ratifiées ne serait pas soulevée.
Les experts ont également souligné les limites qui peuvent être
fixées, conformément aux principes de l'OIT, concernant le droit
d'association des fonctionnaires et les moyens d'action à la
disposition des fonctionnaires publics. Tout en soulignant avec
intérêt cette suggestion très utile et constructive formulée par la
commission d'experts, il indique, à cet égard, que les organes de
contrôle de l'OIT ont fait état d'un point extrêmement pertinent
concernant la possibilité «d'accord excluant le recours à la grève»,
ce qui aurait pour effet d'éviter que des gouvernements suspendent
les droits d'association et de négociation collective. Les
circonstances, cependant, examinées par la commission d'experts
sur cette question dans son étude d'ensemble de 1983 diffèrent de
la situation à laquelle est confronté le Royaume-Uni : premièrement,
il s'agit de situations où des gouvernements reconnaissent
que les droits prévus par les conventions de l'OIT s'appliquent
normalement aux travailleurs concernés; ainsi qu'il a été déjà
indiqué, son gouvernement ne partage pas cette opinion en ce qui
concerne le personnel CGCC, aux termes des conventions pertinentes
de l'OIT. Deuxièmement, les circonstances envisagées par
la commission d'experts ne concernent pas des situations mettant
en cause la sécurité nationale - à savoir la sécurité de l'Etat luimême,
mais la sécurité publique. Le cas actuellement posé est un
cas unique et son gouvernement ne peut considérer les cas
auxquels la commission se réfère comme une approche possible,
dans les circonstance présentes. Il déclare que son gouvernement a
envisagé très sérieusement la question de savoir si une solution aux
problèmes du CGCC pourrait être trouvée par de nouvelles
négociations avec les syndicats concernés. Avec re'gret, il a dû
conclure que la poursuite de négociations avec les syndicats ne
serait pas utile. Cette opinion s'est vue confirmée dans la mesure
où les deux principaux syndicats de la fonction publique concernés
ont formellement rejeté, à leur conférence annuelle, l'année
dernière, toute négociation en vue de conclure un «accord
excluant le recours à la grève» au CGCC. Les syndicats, bien sûr,
pourraient modifier leur position sur ce point mais cette possibilité
elle-même confirme la position du gouvernement car il considère
comme essentiel à l'intérêt national de garantir des activités
ininterrompues au CGCC, et que la situation ne pourrait être
garantie si des accords conclus avec les syndicats représentant les
travailleurs concernés peuvent être niés en tout temps, suite à un
changement de position des syndicats concernés.
Le membre travailleur du Royaume-Uni considère que l'argument
avancé par le représentant gouvernemental est une façon de
s'esquiver légalement et une tentative d'obscurcir la question qu'il
entend clarifier en rappelant à la commission que le gouvernement
britannique avait offert aux fonctionnaires du CGCC le plus grand
pot-de-vin jamais noté dans l'histoire du mouvement syndical, afin
qu'ils renoncent à leurs droits syndicaux. On leur a offert 1 000
livres sterling et, bien sûr, en cas de refus de leur part, il s'offrait un
autre terme à l'alternative : ils pouvaient être renvoyés. Il estime
qu'il faut mettre au crédit de l'OIT, de ses normes et aux croyances
des travailleurs de la Grande-Bretagne, le fait que beaucoup
d'employés ont refusé ce pot-de-vin, et il est d'avis que le
gouvernement britannique craint actuellement de les renvoyer. Il
craint d'agir ainsi parce qu'il se soucie de l'opinion de l'OIT et
parce que les syndicats britanniques ont fait savoir que, si une
30/50
personne était renvoyée, il y aurait une grève générale en Grande-
Bretagne à l'appel de tous les syndicats.
Il indique que le Comité de la liberté syndicale, dans ses
conclusions définitives, a exprimé l'espoir que des discussions
permettraient de résoudre le conflit et de rétablir pour ses
fonctionnaires le droit bien établi de s'affilier et d'appartenir à un
syndicat. Lors de son second examen du cas, en février 1985, ce
comité a réaffirmé son point de vue en dépit des nouveaux faits
qui, selon le gouvernement, ont été apportés. Il déclare que le
gouvernement du Royaume-Uni a agi au mépris de ces conclusions
et a essayé de semer la confusion en affirmant que la convention
n° 151 primait sur la convention n° 87. Ce n'est pas le cas car si
l'on acceptait que d'autres conventions priment sur la convention
n° 87 qui est fondamentale, alors chaque Etat serait en mesure
d'échapper à ses obligations. Le gouvernement britannique luimême
a constamment félicité la commission d'experts pour son
impartialité et a toujours mis l'accent sur l'importance du caractère
universel des normes ; il se demande cependant si le gouvernement
n'est pas en train de demander que des normes particulières soient
adoptées pour lui.
Il espère que cette commission réaffirmera le principe selon
lequel il n'existe qu'une norme applicable à tous. La commission
d'experts a conclu en ce sens en ce qui concerne la question
spécifique soulevée devant le Comité de la liberté syndicale et
mentionnée par le TUC. Concernant la convention n° 87, les
conclusions du Comité de la liberté syndicale sont bien fondées. Il
ne pourrait pas y avoir quoi que ce soit de plus positif que cette
conclusion.
En ce qui concerne le renvoi de la question devant la Cour
internationale de justice, il met le gouvernement au défi, s'il est
d'avis que subsistent certains doutes, de porter effectivement le cas
devant cette cour. Quant à la victoire momentanée du gouvernement
devant les tribunaux britanniques, il considère que la
question portait sur la définition de l'expression «sécurité nationale
». A cet égard, il offre une définition : la sécurité nationale est
en jeu lorsque le gouvernement britannique déclare qu'elle est en
jeu. C'est effectivement ce que le gouvernement a plaidé devant
les tribunaux. En termes politiques, cependant, cette définition
implique une confiance dans le gouvernement que les travailleurs
ne sont pas près de ressentir. Il y a eu des syndicats au CGCC
depuis 1947 et les grèves qui ont eu lieu en 1981 n'étaient pas de
simples conflits concernant les salaires mais portaient sur un
problème fondamental concernant l'abolition unilatérale par le
gouvernement d'un accord sur les salaires qui existait depuis 25
ans dans le pays. Le CGCC n'était pas directement impliqué, mais
il s'est joint au mouvement à une ou deux occasions et il y eut des
grèves d'une journée ou d'une demi-journée. Il note que trois ans
plus tard, le gouvernement a décidé que la question de la sécurité
nationale était si importante que les syndicats devaient être exclus
du CGCC. Le gouvernement a déclaré que les retards s'expliquaient
par le fait qu'il n'avait jamais reconnu publiquement
l'existence du CGCC jusqu'en 1983 lorsqu'un espion y a été
découvert. Etant donné la situation géographique de cet énorme
établissement, il ne peut croire à cette explication. Enfin, il
souligne que les syndicats soutenus par le TUC ont indiqué qu'ils
étaient prêts à conclure un accord excluant le recours à la grève
avec le gouvernement, sujet aux mêmes garanties que celles
recommandées par la commission d'experts lorsque, dans des
circonstances spéciales, les grèves sont interdites. Le gouvernement
cependant est trop entêté pour changer d'opinion. Néanmoins
il est d'avis qu'il devrait le faire parce qu'il s'agit d'une
recommandation de la commission d'experts et il espère que cette
commission confirmera cette opinion. Il demande au gouvernement
de se déclarer d'accord ici et immédiatement pour que des
consultations aient lieu avec le mouvement syndical, conduit par le
TUC, en vue d'arriver à un accord ; deuxièmement, si des doutes
en matière juridique subsistent, de porter la question devant la
Cour internationale de justice. Il est bien conscient que la situation
concernant le CGCC n'est pas aussi impérative et sérieuse
comparée aux problèmes syndicaux auxquels font face des travailleurs
dans d'autres pays tels que la mort, l'emprisonnement, etc.,
et il comprend qu'il faut garder le sens des proportions. Il est
toutefois honteux que le pays qui est considéré comme le berceau
du syndicalisme par de nombreux pays et comme une source
d'inspiration pour le monde entier agisse de cette façon. Si un
gouvernement peut être laissé libre lorsqu'il nie des droits humains
et syndicaux, des dictateurs à travers le monde pourront se sentir
libres de commettre les pires atrocités. Les travailleurs sont eft
droit de faire part de leurs sérieuses préoccupations face à
l'attitude du gouvernement et, à défaut d'une action plus constructive,
un paragraphe spécial pourrait convaincre le gouvernement
de modifier sa position actuelle.
Les membres employeurs notent que ce cas, en fait, soulève des
questions juridiques nouvelles et complexes mettant en cause les
liens entre les conventions nM 87 et 151. Le fait que les arguments
dépassent le cadre spécifique de la convention n° 87 explique que
la commission d'experts ait suggéré que l'opinion de la Cour
internationale de justice soit recherchée. Ils se sont déclarés
intéressés à connaître les développements futurs concernant ce cas.
Les membres travailleurs considèrent que la question est très
claire, et ils espèrent que les sages conclusions formulées par le
Comité de la liberté syndicale reprises par la commisison d'experts
seront examinées par toutes les parties concernées et qu'elles
s'efforceront ensemble de trouver une solution. Cela devrait être
également l'approche de cette commission.
La commission a pris note des explications approfondies' fournies
par le représentant gouvernemental ainsi que des discussions
détaillées qui ont eu lieu en son sein. Elle a exprimé l'espoir que le
gouvernement sera en mesure de trouver des solutions appropriées
pour résoudre les problèmes posés dans l'application de la
convention en tenant compte des commentaires de la commission
d'experts.
Le président de la commision a indiqué, en réponse à une
remarque des membres travailleurs et du membre gouvernemental
de la Bulgarie, que la référence aux commentaires de la commission
d'experts englobe la référence faite par celle-ci dans ses
commentaires aux conclusions et recommandations du Comité de
la liberté syndicale.
République arabe syrienne (ratification: 1960). Un représentant
gouvernemental a dressé un tableau de la situation syndicale dans
son pays. Il précise que la moitié des membres des conseils
populaires sont des agriculteurs et des travailleurs et que les
organisations syndicales participent à l'élaboration des lois et sont
responsables du développement économique et social du pays,
conformément aux décrets-lois n05 84 de 1968, 250 de 1969 et à la
loi n° 21 de 1974. Elles participent au Conseil de planification en
application du décret n° 91 de 1974 et au Conseil supérieur de
l'agriculture, ainsi qu'au Conseil de production concernant les
entreprises et les sociétés en vertu de la loi n° 6 de 1978. En outre,
elles participent au conseil d'administration des sociétés en application
de l'article 12 de la loi de 1961 et sont représentées dans les
commissions compétentes en matière de licenciement des travailleurs
(décret n° 49 de 1962) et aux commissions d'arbitrage dans
le secteur agricole. Elles sont enfin membres du Conseil d'administration
de la sécurité sociale et des conseils et commissions chargés
du développement économique, social et administratif. En application
des lois syndicales, les travailleurs peuvent former des
syndicats professionnels dans toutes les branches d'activité. Ces
syndicats peuvent former des fédérations dans chaque province du
pays et des unions de syndicats. Les fonctionnaires de l'Etat, les
travailleurs du secteur public peuvent appartenir, comme les
travailleurs du secteur privé, sans aucune exception à une organisation
syndicale. La loi n° 1 de 1985 qui entrera en vigueur au
début de 1986 accorde aux fonctionnaires le droit de former des
syndicats qui leur sont propres. L'article 145 de cette loi dispose
que les fonctionnaires sont régis par la législation du travail.
Dans ses commentaires, la commission d'experts estime que les
articles 7 du décret-loi n° 84 de 1968 et l'article 2 du décret-loi
n° 250 de 1969 imposent un système d'unité syndicale non
conforme aux exigences de la convention n° 87. Or l'article 7 en
cause dispose que «les unions des ouvriers d'une province et les
unions professionnelles ont le droit de constituer une fédération
générale des syndicats ouvriers qui aura son siège à Damas».
L'article 2 dispose que les artisans de chaque artisanat provincial
ont le droit de se constituer en associations, ces associations ont le
droit de se constituer en unions et les unions de l'ensemble du
territoire ont le droit de se constituer en fédérations générales. Il
est clair que la formation de ces unions constitue un droit et non un
devoir. La loi n'impose aucune obligation et surtout pas la constitution
d'organisations syndicales. Il existe plusieurs unions de
travailleurs dans le domaine agricole et plusieurs unions d'artisans.
Ce droit étant exercé en toute liberté au sein des associations
syndicales, la situation est en conformité avec la convention.
La commission d'experts estime également que l'article 32 du
décret-loi n° 84 et le paragraphe 4 de l'article 6 du décret-loi
n° 250 ne sont pas conformes à la convention parce que ces lois ne
permettent pas aux associations de percevoir, sans l'approbation
de la fédération générale et du ministère, des dons et legs ou de
renoncer à une partie de leurs biens. Ces textes ont été adoptés
pour empêcher que des dons qui viennent de sources non
acceptables soient autorisés. S'agissant de l'article 25 de la loi
n° 84, qui dispose que les ouvriers étrangers non arabes travaillant
en Syrie depuis plus d'une année ont le droit d'adhérer aux
syndicats sous réserve de réciprocité; cette disposition garantit
l'égalité des travailleurs entre eux: les étrangers qui travaillent
dans son pays ont la liberté de s'affilier à des syndicats professionnels.
En ce qui concerne les articles 35 et 36 du décret-loi n° 84 et
les articles 6 et 12 du décret-loi n° 250 qui confèrent au ministère
le droit de contrôler les activités des syndicats, l'orateur estime que
le contrôle financier se limite à contrôler la comptabilité des
syndicats, les décisions concernant les dépenses relevant des
30/51
syndicats eux-memes. Par ailleurs, la justification de ce controle
tient 􀃇 ce que l'Etat accorde aux organisations syndicates des
subsides d'un montant tr􀃈s eleve afin de batir notamment des
hopitaux pour les travailleurs, hopitaux qui sont geres par les
associations syndicates. S'agissant de l'article 36, paragraphes 4 et
5, qui dispose que le syndicat est tenu d'affecter 10 pour cent de
ses revenus effectifs 􀃇 l'union professionnelle et 15 pour cent 􀃇 la
federation generate, de telles dispositions ne sont pas en conflit
avec la convention. A propos du paragraphe 4 de l'article 44 du
decret-loi n° 84, qui impose d'avoir effectivement exerre la
profession pendant six mois pour pouvoir etre elu dirigeant
syndical, cette disposition vise 􀃇 assurer que Jes dirigeants syndicaux
aient une experience professionnelle suffisante pour etre
capables de reussir dans ce domaine. En ce qui concerne l'article
49 c), qui autorise le conseil de la federation generale 􀃇 dissoudre
le bureau d'une organisation syndicale, ii convient de remarquer
que ce droit de dissolution ne peut etre exerce que si !'organisation
syndicale commet une contravention grave en violant Jes objectifs
de !'organisation ou en depassant ses aUributions. Cet article
dispose-egalement que le conseil de la federation generale a le
droit de designer un bureau provisoire et de convoquer le congr􀃈s
en vue d'elire un nouveau bureau. Jusqu'􀃇 present, aucune
dissolution de ce genre n'est intervenue et la federation generale
ne pourrait decider d'une dissolution qu'apr􀃈s avoir prouve qu'il y
a eu violation des objectifs de l'organisation. Au sujet de
!'article 160, qui interdit la gr􀃈ve dans le secteur agricole, son
gouvernement a dej􀃇 indique en 1983 qu'un projet de texte visant
􀃇 eliminer cette disposition est 􀃇 l'etude. Nfanmoins, le projet n'a
pas encore ete adopte.
L'orateur indique qu'il a un profond respect pour l'application
des conventions et recommandations internationales du travail et
que son gouvernement souhaite s'acquitter de toutes ses obligations.
Une etude serieuse visant 􀃇 mettre la legislation en harmonie
avec la convention est en cours avec le concours des organisations
syndicales concernees; le 8 mai 1984, son gouvernement a envoye
une lettre 􀃇 !'Union generale des travailleurs en vue d'aboutir 􀃇
une solution acceptable et le 15 avril 1985, ii s'est de nouveau
adresse 􀃇 !'Union generate des travailleurs pour Jui demander
d'etudier des propositions qu'il envisage d'adopter et pour recueillir
son accord. Le dialogue etabli entre le gouvernement et Jes
organisations syndicales a provoque un retard dans l'envoi du
rapport concernant !'application de la convention. Cependant, le
rapport a ete envoye le 15 mai 1985 et doit etre parvenu au BIT.
L'Union generate des travailleurs a indique qu'elle etudiait Jes
propositions du gouvernement et celui-ci tiendra la commission
informee du resultat de ces consultations. Nfanmoins, le representant
gouvernemental souhaiterait savoir si la commission estime
que le texte des articles 2 et 7 des decrets-lois n05 250 et 84,
respectivement, constitue une restriction aux libertes syndicales. II
souhaite egalement savoir si la commission estime que le droit de
regard de l'Etat sur la gestion des subventions accordees aux
syndicats et aux associations dans toutes Jes regions du pays ainsi
qu'􀃇 !'Union generale des travailleurs, constitue une restriction
aux libertes syndicales. Les organisations syndicales consultees sur
ces points ont repondu que ces dispositions ne constituaient pas
une violation de la convention.
Les membres travailleurs ont remercie le representant gouvernemental
de sa collaboration aux travaux de la commission. Ils ont
rappele neanmoins que la commission d'experts soul􀃈ve des
questions concernant l'application de la convention par ce pays
depuis plusieurs annees. Ils se rejouissent de ce que le gouvernement
coop􀃈re desormais avec la commission d'experts, avec la
presente commission et avec l'organisation syndicale des travailleurs
syriens. En ce qui concerne la premi􀃈re question posee par le
representant gouvernemental, ils observent que s'il est possible de
, constituer des organisations syndicales sur le. plan regional et
professionnel, ii faut noter, comme le fait remarquer la commission
d'experts, que lesdites organisations syndicates ne peuvent se
constituer que dans un contexte d'unite syndicale. C'est la raison
pour laquelle la commission d'experts souhaite que le gouvernement
modifie Jes articles 2 du decret-loi n° 250 de 1969 et 7 du
decret-loi n° 84 de 1968. Pour la deuxi􀃈me question, qui concerne
Jes pouvoirs du gouvernement de contr61er la gestion financi􀃈re
des syndicats, les membres travailleurs estiment que le contrOle de
la gestion financi􀃈re des syndicats doit appartenir, conformement 􀃇
la legislation du pays, aux organisations syndicales elles-memes. Ils
comprennent que dans la mesure oil l'Etat accorde des subsides,
notamment pour la creation d'un h6pital, Jes subsides en question
fassent l'objet d'un contr61e de l'Etat. Mais cela n'a rien 􀃇 voir
avec !'affectation obligatoire des cotisations syndicates prevues
dans la legislation. Par consequent, si le gouvernement l􀃈ve ce
malentendu, ii pourrait y avoir conformite de la legislation avec la
convention. Par ailleurs, la commission d'experts a souligne que
d'autres divergences subsistent en mati􀃈re d'election des dirigeants
syndicaux, de cooperatives agricoles et d'interdiction de la gr􀃈ve
dans l'agriculture. Les membres travailleurs ont pris note de ce que
30/52
des etudes sont en cours et de ce que I'organisation syndicale
syrienne est consultee. Le gouvernement pourrait souhaiter
demander !'assistance technique du BIT pour mettre la totalite de
sa legislation sur la liberte syndicate en conformite avec la
convention. II semble qu'il s'agisse essentiellement de probl􀃈mes
de droit et non d'application pratique; c'est la raison pour laquelle
ils croient qu'une aide technique permettrait de resoudre l'ensemble
des probl􀃈mes en cause.
Les membres employeurs ont egalement remercie le representant
gouvernemental pour le tableau tr􀃈s complet de la situation
syndicale en Syrie qu'il a presente devant la commission. Ils
rappellent que ce cas a ete examine par la presente commission au
cours des derni􀃈res annees sur une base plus ecrite qu'orale. La
commission d'experts formule ses observations apr􀃈s avoir examine
les informations ecrites communiquees par les gouvernements.
Elle rel􀃈ve qu'un syst􀃈me d'unite syndicale est impose par
la loi, tant' au niveau des travailleurs qu'au niveau des employeurs
et des petites entreprises, et que ce syst􀃈me de monopole syndical
existe egalement dans l'agriculture. Elle rel􀃈ve egalement d'autres
divergences, telles que la possibilite donnee 􀃇 la centrale syndicale
de dissoudre les syndicats, !'obligation d'appartenir 􀃇 la profession
pour etre elu dirigeant syndical, les pouvoirs de contrOle du
gouvernement sur les fonds syndicaux, etc. Les membres
employeurs se rejouissent des informations tr􀃈s detaillees fournies
par le representant gouvernemental et notamment du fait qu'il a
indique que son gouvernemnt respecte pleinement la liberte
syndicate. Ceci constitue un point de depart tout 􀃇 fait positif.
Neanmoins, le representant gouvernemental a indique que !'obligation
d'appartenir 􀃇 la profession pour etre elu dirigeant syndical
ou l'obligation de residence en Syrie pendant six mois faite aux
travailleurs etrangers pour qu'ils puissent appartenir 􀃇 un syndicat
sont conformes 􀃇 la convention. Les membres employeurs estiment
au contraire que de telles dispositions devraient etre
reglementees dans les statuts des syndicats et non pas imposees par
la loi. Les membres employeurs souhaitent que les informations
communiquees par le gouvernement 􀃇 la presente commission
soient examinees par la commission d'experts. Ils prennent acte
des efforts accomplis par le gouvernement pour mettre sa legislation
en conformite avec la convention et appuient la suggestion des
membres travailleurs d'inviter le gouvernement 􀃇 demander l'assistance
technique du Bureau pour l'aider 􀃇 resoudre les pro-
. bl􀃈mes en cause. Ils souhaitent egalement savoir si le projet de
Code du travail dont le gouvernement avait fait etat les annees
precedentes sera adopte rapidement.
Le representant gouvernemental a reitere ses declarations
anterieures au sujet des articles 2 du decret-Ioi n° 250 et 7 du
decret-Ioi n° 84, ainsi qu'au sujet de la loi concernant la gestion
financi􀃈re des syndicats. Le rapport qu'il a adresse au BIT le
23 mai 1985 contient une copie des propositions concr􀃈tes que le
minist􀃈re du Travail a adressees 􀃇 l'Union generale des syndicats
pour modifier Jes articles qui font l'objet des commentaires de la
commission d'experts. En ce qui concerne le projet de Code du
travail auquel les membres employeurs se sont referes, ii precise
que le texte est actuellement examine par Jes parties concernees
mais qu'il ne traite que des relations de travail et qu'il ne contient
pas de dispositions relatives 􀃇 la legislation syndicate. A propos de
la suggestion des membres travailleurs de demander l'assistance
technique du BIT pour permettre un examen complet et global de
la question, ii indique que l'aide fournie par le BIT a souvent
contribue 􀃇 apporter de grandes ameliorations, mais qu'actuellement
son gouvemement examine lui-meme les questions en cause.
II n'estime pas, pour le moment, avoir besoin de l'assistance du
BIT mais ii formulera eventuellement une demande eil ce sens le
moment venu.
Le membre travailleur de Bahrein a indique que Jes contributions
financi􀃈res accordees par le gouvernement syrien aux syndicats
ne signifient rien en comparaison de l'appui moral que les
associations de travailleurs ne peuvent pas obtenir si elles sont en
Republique arabe syrienne et ii a estime que la commission aurait
souhaitee entendre le point de vue des representants des travailleurs
de la Republique arabe syrienne.
La commisison a pris note avec preoccupation des nombreux
probl􀃈mes souleves par la commission d'experts au sujet de
l'application de la convention. La commission a exprime l'espoir
que le gouvernement prendra les mesures appropriees pour
resoudre ces probl􀃈mes dans un proche avenir et qu'elle sera 􀃇
meme de constater des progr􀃈s reels 􀃇 la fois dans la legislation et
dans l'application pratique de la convention 􀃇 une date rapprochee.
Elle sugg􀃈re au gouvernement d'examiner la possibilite de
demander l'assistance technique du BIT pour mettre sa legislation
en conformite avec la convention.

Document no 246
CIT, 72e session, 1986, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 31/33-31/36 (République
arabe syrienne)

r~~l Conférence internationale du Travail
"' Campte rendu provisoire
Soixante-douzième session, Genève, 1986
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIÈRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 21
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 21
A. Observations générales et informations concernant certains pays 21
B. Observations et informations sur l'application des conventions 23
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 63
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) . . . 64
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles22 et35 de la Constitution). . . .. 65
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 65
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains 65
III. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 66
TV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) . . . 70
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 71
31/1
appartient aux syndicats de désigner les commissaires aux comptes
avec l'approbation du greffier. On peut donc voir que l'initiative
appartient aux syndicats et que le greffier n'a que des pouvoirs
limités et non de larges pouvoirs.
Décret n° 7 sur les différends du travail: Interdiction du droit
de grève
L'objectif du décret n° 7 sur les différends du travail est de
régler les conflits, non d'interdire les grèves. En pratique, les
travailleurs se mettent en grève avant de recourir à la procédure de
conciliation prévue par décret. En pratique également, le gouvernement
n'a jamais pris de mesures à rencontre des travailleurs en
grève. La pratique a toujours consisté en ce que le gouvernement a
adopté des mesures pour mettre un terme à une action directe ou à
une autre grève en renvoyant les parties au mécanisme de
conciliation et, si nécessaire, d'arbitrage.
En outre, un représentant gouvernemental a ajouté que l'objectif
de la restructuration des syndicats est uniquement d'accroître
l'efficacité des travailleurs dans la négociation. Actuellement, les
travailleurs des douanes, des postes, des télécommunications et
des finances sont syndiqués dans un syndicat national. En ce qui
concerne l'enregistrement des syndicats, il déclare qu'il est incorrect
d'affirmer que le greffier responsable de l'enregistrement
possède de larges pouvoirs de contrôle et d'investigation sur les
avoirs syndicaux. Sa responsabilité se limite à l'enregistrement des
organisations syndicales et de leur statut, en s'assurant que les
dirigeants syndicaux ne violent pas les statuts. Vu les sommes
énormes qui sont recueillies au titre des cotisations, il indique qu'il
appartient au gouvernement de contrôler la gestion financière des
organisations syndicales. ïl revient aux organisations syndicales de
désigner des commissaires aux comptes qualifiés. Au sujet du
décret n° 7 sur les conflits du travail, il indique que l'objet de ce
texte est de résoudre les conflits et non d'interdire la grève. En
pratique, les travailleurs déclenchent une grève avant même
d'utiliser la procédure de conciliation qui est prévue par le décret.
Le gouvernement n'a pas réprimé, dans les faits, des travailleurs
pour participation à une grève. La pratique du gouvernement a
consisté à agir en vue de mettre fin à une grève pour que les parties
s'en remettent, si nécessaire, aux mécanismes de conciliation et
d'arbitrage.
Les membres travailleurs ont signalé que diverses dispositions
juridiques n'étaient pas conformes à la convention, Il s'agit d'une
part de la nomination par le gouvernement de membres de
l'Organisation centrale du travail, et d'autre part, du fait que cette
centrale est la seule reconnue. De ce fait, d'autres syndicats ne
peuvent pas se constituer. Une autre question se rapporte à
l'interprétation stricte de la notion des services essentiels, en
fonction de laquelle toute une série de travailleurs, par exemple
des douanes, des postes et des télécommunications, n'ont pas le
droit de se syndiquer. Cette situation est contraire à la convention.
Le représentant gouvernemental n'explique pas dans quelle
mesure le gouvernement a l'intention de modifier cette situation
pour la rendre conforme aux conventions nM 87 et 98. De plus, les
syndicalistes de l'Organisation centrale du travail ne peuvent
actuellement exercer leurs droits syndicaux. Environ cinquante
syndicalistes ont été arrêtés par le gouvernement, parmi lesquels le
délégué travailleur à cette Conférence, le camarade Chiroma, qui
est membre du Conseil d'administration.
Le représentant gouvernemental a présenté une motion d'ordre,
déclarant que la discussion devait se limiter à la question de la
liberté syndicale et que les membres travailleurs sortaient du sujet
en discussion.
Les membres travailleurs ont indiqué qu'en discutant de la
convention, on discute de la liberté syndicale et de la liberté de
négociation des syndicats. En mentionnant les syndicalistes qui
avaient été arrêtés, ils n'avaient nullement l'intention de déclencher
une polémique mais plutôt de signaler que ce fait est la
conséquence de la situation juridique prévalant dans ce pays.
Les membres employeurs se sont référés aux limitations que la
loi impose à la liberté syndicale au Nigeria et qui ont été signalées
par la commission d'experts. Ces limitations se rapportent à la
création de syndicats et à l'exercice des droits syndicaux, notamment
dans la fonction publique. Cela viole la convention. Ils
signalent que les organisations d'employeurs et de travailleurs
doivent être en mesure de définir leurs propres règlements et de
contrôler elles-mêmes leurs activités. Ils sollicitent du gouvernement
qu'il modifie la situation juridique actuelle et qu'il réexamine
les observations de la commission d'experts.
Le membre travailleur du Nigeria a fait référence à la convention
du point de vue des attributions du greffier chargé de
l'enregistrement des syndicats. Il a informé la commission qu'un
litige était pendant devant les tribunaux à ce sujet. En ce qui
concerne la notion des services essentiels et le droit de grève, il
déclare qu'il est vrai que dans la pratique les dispositions mentionnées
n'ont pas entravé l'action des syndicats. Il cite l'exemple des
travailleurs du pétrole qui se sont mis en grève, et auxquels les
dispositions mentionnées n'ont pas été appliquées. Il signale que
des discussions successives ont eu lieu avec différents gouverne-
. ments sur la nécessité de changer cette loi. Par ailleurs, il déclare
que dans le contexte africain le pluralisme syndical peut être
synonyme de désunion et que l'unité syndicale est un facteur
d'indépendance syndicale, intimement lié au développement historique
du syndicalisme en Afrique.
Le représentant gouvernemental, en réponse à des interventions
au sujet des personnes qui ont été arrêtées, déclare qu'il s'agit de
problèmes qui ont surgi à propos d'émeutes dans certaines
universités, et de la mort de plusieurs étudiants qui est intervenue
à l'occasion d'affrontements avec la police. Les personnes arrêtées
l'ont été pour leur participation à des manifestations, en infraction
aux lois en vigueur. Il ne s'agit donc pas d'un problème syndical,
mais bien de la sécurité de l'Etat. Il fait état des possibilités
existant dans son pays de recours aux tribunaux et à la puissance
de l'Organisation centrale du travail.
Le représentant des travailleurs du Nigeria a déclaré que les
personnes arrêtées ont été accusées de subversion et que toutes
sont des syndicalistes. Au mois de juin une manifestation avait été
organisée par la centrale syndicale mais, devant le déploiement des
forces répressives, elle avait été annulée. Par la suite, des
dirigeants syndicaux ont été arrêtés, et quatorze d'entre eux se
trouvent encore en prison. Les universitaires arrêtés appartiennent
à l'organisation d'étudiants qui est affiliée à la centrale syndicale.
Les membres travailleurs font remarquer que, contrairement à
ce qu'a déclaré le représentant gouvernemental à propos des
possibilités de faire grève, des dirigeants syndicaux ont été arrêtés
à la suite d'une grève. Ils demandent au gouvernement la
libération des quatorze représentants syndicaux encore détenus.
Ils demandent que soit mentionné dans les conclusions le comportement
du gouvernement relatif à l'arrestation de syndicalistes, ce
qui constitue une violation de la convention et des principes de
l'OIT.
Le représentant gouvernemental a déclaré que l'on était en
présence de deux questions différentes. Il est d'avis que les
problèmes liés à la manifestation ne doivent pas être liés à ceux
. concernant la convention. Les solutions sont en voie d'être
trouvées par des voies pacifiques. Il émet de sérieuses réserves sur
l'inclusion de cette question dans les conclusions de la commission.
La commission a pris note des informations écrites et orales qui
ont été fournies. La commission a noté que des divergences
continuent à exister entre la législation nationale et les dispositions
de la convention. Elle demande au gouvernement de prendre les
mesures nécessaires pour mettre la législation nationale en conformité
avec les dispositions de la convention.
République arabe syrienne (ratification: 1960). Un représentant
gouvernemental a souligné la nécessité d'améliorer les méthodes
de travail de la commission d'experts et, en particulier, la nécessité
de prendre en considération les réalités économiques, sociales et
politiques du pays en cause. Il est impossible de contrôler
l'application des conventions sans comprendre la réalité prévalant
dans le pays en question. Son gouvernement attache une grande
importance aux normes de l'OIT, mais il n'est pas entièrement
satisfait des conclusions auxquelles la commission d'experts est
arrivée en ce qui concerne l'application de la convention dans son
pays. Il convient de rappeler que, selon la Constitution, la
commission d'experts n'a qu'un rôle consultatif, les avis qu'elle
donne sont de nature technique et juridique et ne créent pas
d'obligations. Il y a une contradiction entre les constatations de la
commission d'experts selon lesquelles les syndicats jouent un rôle
essentiel et ses conclusions qui sont susceptibles de jeter le doute
sur la liberté dont jouissent les syndicats. Dans son pays, les
syndicats participent à la prise de décisions en matière économique
et sociale. Aucune entrave n'est imposée à leur liberté. La
constitution des syndicats se fait librement de même que l'élection
des dirigeants syndicaux. Personne n'a le droit de s'ingérer dans
cette procédure. Après avoir rappelé l'effet de la ratification des
conventions internationales sur la législation nationale, il a rappelé
que les dispositions de la convention étaient très souples et qu'elles
permettaient donc certaines possiblités d'interprétation.
. Il découle clairement des dispositions du décret-loi n° 84 et, en
particulier, de ses articles 5 et 6 que la constitution des syndicats et
leur affiliation dans les districts relèvent de la compétence des
seuls travailleurs sans que personne ne puisse s'ingérer dans leurs
décisions. En vertu de l'article 7 dudit décret-loi, les syndicats de
district et les unions professionnelles ont le droit de constituer une
fédération générale des syndicats ouvriers, qui aura son siège à
Damas. Sur cette base, la commission d'experts a estimé que ces
dispositions interdisent tout autre syndicat et imposent un système
d'unité syndicale avec un seul organisme central. En réalité, le
système est tout à fait différent: les syndicats sont parfaitement
autonomes, le système d'affiliation centrale visant à protéger les
intérêts des membres des syndicats. Si on examine la manière dont
se fait l'affiliation syndicale dans tous les districts du pays et dans
31/33
tous les secteurs, on constate que c'est volontairement eue les
travailleurs choisissent de s'affilier à une centrale syndicale, de
manière à pouvoir réaliser leurs objectifs et leurs ambitions en
qualité de partenaires dans les négociations. Si la loi permet aux
syndicats de s'affilier à une centrale et que ceux-ci en décident
ainsi, cela ne signifie pas que la loi impose le principe de l'unicité
syndicale, car l'autonomie de la décision relève des différents
districts qui ont établi les différents types de syndicats. Tant que la
structure du pays permet la constitution des syndicats et l'affiliation
avec des organisations professionnelles et tant que cette
affiliation est tout à fait libre et autonome, on doit conclure que ces
nombreuses possibilités représentent l'essentiel même du système
et de la structure syndicale qui sont multiples et sont composés de
divers éléments. Le décret-loi n° 84 est complété par le décret-loi
n° 250 de 1969 sur les syndicats professionnels ainsi que par la loi
n° 21 de 1974 qui concerne les associations de paysans. En outre, il
existe un syndicat d'enseignants établi en vertu d'un décret de
1982. Dans chaque district, il existe diverses associations qui sont
complètement différentes des syndicats des travailleurs: associations
professionnelles, organisations d'employeurs, associations
d'enseignants, de travailleurs autonomes, les chambres de commerce,
d'industrie et d'agriculture, etc. Toutes ces associations
s'occupent du bien-être de leurs membres. Cela montre la
multiplicité du système syndical. Chaque syndicat a son autonomie,
son règlement intérieur et jouit d'une grande liberté. Il y a
peut-être des différences d'interprétation en ce qui concerne la
convention, c'est pourquoi il appartient à cette commission,
comme elle en a reçu le mandat de la Conférence, d'examiner en
profondeur les cas qui lui sont soumis avant d'adopter sa position.
Il s'agit là d'une question qui relève de la souveraineté nationale
qui tient une grande importance sur le plan international. La
commission d'experts a estimé que l'article 25 du décret-loi n° 84
établit une différence de traitement à l'égard des travailleurs
étrangers non arabes. Or cette disposition confirme le droit des
étrangers d'adhérer au syndicat sous réserve de réciprocité;
l'adoption d'une clause de réciprocité est un droit qui relève de la
souveraineté de l'Etat. Dans la pratique, du reste, aucun travailleur
ne s'est vu refuser le droit d'appartenir à un syndicat ni d'être
privé de ses droits de citoyen.
S'agissant de l'article 32 du décret-loi n° 84, la commission
d'experts a estimé que cette disposition n'était pas conforme à la
convention parce qu'elle ne permet pas aux associations de
percevoir, sans l'approbation de la fédération générale et du
ministère, des dons en espèces ou autres. A cet égard, il existe des
lois qui réglementent les donations et s'appliquent à tous les
citoyens, toutes les organisations et tous les secteurs. En particulier,
les lois précisent de qui de tels dons peuvent être acceptés. Il
ne serait pas logique d'accepter un don d'une personne ou d'une
organisation qui ne serait pas favorable aux objectifs nationaux ou
qui risque de menacer la souveraineté du pays. De l'avis du
représentant gouvernemental, la convention a adopté une interprétation
identique sur ce point. Cette règle ne constitue donc pas
une ingérence dans les principes de la liberté syndicale.
En ce qui concerne l'article 35 du décret-loi n° 84 qui confère au
ministère un droit de contrôle financier sur les fonds des syndicats,
cette disposition a été introduite afin de s'assurer que les comptes
soient tenus de manière correcte. La manière et les buts dans
lesquels les fonds sont dépensés relèvent de la décision des
syndicats, le ministère n'ayant absolument rien à voir dans la
question. A cet égard, les instructions prises par le ministère en
1968 précisent qu'il est important de vérifier les fonds et les
déclarations financières ainsi que de donner des conseils à toutes
les personnes responsables de la tenue des comptes de maiière à
leur éviter de commettre des erreurs. Cela montre que le contrôle
exercé par le ministère revêt uniquement un caractère d'assistance
et n'empiète pas sur les libertés des syndicats,
S'agissant de l'article 36 qui porte sur l'assistance financière
accordée aux syndicats, il ne saurait non plus être considéré
comme une entrave à la liberté syndicale car, quelles que soient la
structure et l'affiliation syndicales choisies par les organisations,
elles ont droit à cette assistance financière.
S'agissant de l'article 44- qui prévoit pour l'égilibiliié aux
fonctions syndicales une condition de six mois pour assurer la
compétence et la formation des dirigeants syndicaux : elle n'a donc
aucune incidence sur la liberté syndicale.
En ce qui concerne l'alinéa c) de l'article 49 qui autorise la
dissolution de l'organe exécutif d'une organisation affiliée en cas
de faute grave, il convient de rappeler que cette dissolution ne peut
intervenir qu'après qu'une enquête complète ait été faite notamment
sur la nature de la faute commise par l'organe exécutif. Selon
la législation nationale, le retrait de la confiance des membres de
l'organe exécutif relève de la compétence du directorat général de
la fédération, qui ne fait que souscrire aux voeux du syndicat
demandant la dissolution de son bureau.
En ce qui concerne l'article 160 du Code du travail agricole qui
interdit la grève dans ce secteur, un projet de loi a été soumis par le
31/34
gouvernement afin d'abroger cette disposition. Le processus
législatif prenant du temps, cette question se trouve toujours
devant les autorités compétentes. Le gouvernement déploiera tous
ses efforts pour que la disposition susmentionnée soit abrogée.
En conclusion, le représentant gouvernemental a indiqué qu'il
ne saurait être question pour le gouvernement de demander
l'assistance du Bureau dans la recherche de solutions, étant donné
que les questions en suspens sont dues à un problème d'interprétation
et non pas à un problème de mise en oeuvre de la convention.
Les membres travailleurs ont déclaré qu'il ne fallait pas ouvrir à
nouveau la discussion concernant le rôle de la commission
d'experts. Celle-ci n'est du reste pas le seul organe qui discute
l'application des conventions : il y a aussi la présente commission.
H est faux de prétendre que la commission d'experts traite de
questions qui ne relèvent pas de sa compétence, puisqu'elle tire
son mandat du Conseil d'administration, et son appréciation de
l'application des conventions est essentielle pour les travaux de la
présente commission.
En ce qui concerne le cas particulier, certaines constatations
s'imposent. En premier lieu, la question fait l'objet de discussions
au sein de cette commission depuis 1983 et aujourd'hui on
recommence plus ou moins la même discussion. Il faut donc
trouver les moyens pour apporter une solution aux divergences
constatées ou, comme le dit le représentant gouvernemental, aux
divergences d'interprétation, qui doivent pouvoir disparaître.
Deuxièmement, il convient de rappeler que dans la législation du
pays il y a des dispositions qui, du point du vue juridique, ne sont
pas conformes à la convention. Il s'agit de l'unicité syndicale, de
l'ingérence des pouvoirs publics dans la gestion des syndicats, du
contrôle de leurs comptes, ainsi que des problèmes dans le secteur
agricole. Certains aspects positifs peuvent être notés comme
l'adoption de la loi n° 1 de 1985 qui autorise les fonctionnaires à
former leurs propres organisations syndicales. En outre, le gouvernement
a manifesté sa volonté de revoir un certain nombre de
problèmes. Mais sur beaucoup d'autres points des difficultés
demeurent. Il est regrettable que le représentant gouvernemental
ait déclaré que son gouvernement n'avait pas besoin de l'assistance
du Bureau, car il y a tout heu de croire que sans cette assistance la
situation n'évoluera pas. Les difficultés entre la commission
d'experts et cette commission d'une part et le gouvernement,
d'autre part, vont subsister, ce qui risque de rendre le problème
toujours plus aigu. C'est pourquoi les membres travailleurs
insistent auprès du représentant gouvernemental pour qu'il puisse,
avec son gouvernement, envisager l'acceptation d'une mission de
contacts directs, ce qui devrait permettre d'éclaircir la situation et
d'examiner les mesures qui devraient être prises.
Les membres employeurs ont exprimé leurs remerciements au
représentant gouvernemental pour ses informations détaillées. En
réponse aux objections du représentant gouvernemental quant au
rôle de la commission d'experts, ils ont rappelé certaines conclusions
auxquelles souscrit la majorité des membres de cette
commission: premièrement, les travaux de la commission d'experts
ont une base légale bien fondée ; deuxièmement, depuis des
décennies la commission d'experts a accompli un travail remarquable
; enfin, il n'y a pas d'alternative à ce système de contrôle et plus
particulièrement à la commission d'experts.
Le rapport de la commission d'experts fait état de certaines
modifications dans la situation en République arabe syrienne. En
particulier, les fonctionnaires ont le droit de former leur propre
syndicat. Par ailleurs, l'année dernière le gouvernement a annoncé
qu'une étude approfondie concernant les problèmes soulevés était
en cours. Une telle étude et le fait que la commission en a été
informée constituent, dans une certaine mesure, la reconnaissance
que des mesures doivent encore être prises. Ainsi que l'a rappelé la
commission d'experts, certains des problèmes constatés continuent
d'exister. La législation contient des dispositions prévoyant l'unicité
syndicale, système qui est contraire à la convention. Il existe
également d'autres restrictions à la liberté syndicale ayant trait aux
droits syndicaux des travailleurs étrangers non arabes, à l'administration
des syndicats, à la vérification de leur comptabilité, etc. Il
n'est pas possible pour la commission au stade d'une discussion
orale d'examiner la déclaration du représentant gouvernemental
dans tous ses détails. Mais l'objectif doit rester toujours le même:
éliminer les divergences entre la législation et la pratique, d'une
part, et la convention, d'autre part. Le gouvernement a rejeté
l'idée de se prévaloir d'une mission de contacts directs étant donné
que, d'après lui, les problèmes constatés n'ont pas trait à des
difficultés de mise en oeuvre mais à des difficultés d'interprétation
de la convention. A cet égard, rien ne s'oppose à limiter une
mission de contacts directs à un aspect des problèmes en excluant
les autres. Il est évident que les difficultés d'interprétation peuvent
également faire l'objet de ce type d'assistance. La frontière entre
problèmes d'interprétation et problèmes de mise ne oeuvre n'est
pas toujours nette. Dans ces conditions, les membres employeurs
ont estimé que ce type d'assistance pourrait être utile et qu'il
vaudrait la peine d'y recourir pour voir si les divergences qui
existent ne pourraient pas être surmontées, selon cette procédure.
Cela serait, en tout cas, un signe de bonne volonté et de confiance
de la part du gouvernement. C'est pourquoi, ils ont demandé au
représentant gouvernemental de bien vouloir réexaminer sa position,
car il ne semble pas y avoir d'autre possibilité d'arriver à une
amélioration de la situation après toutes ces années de discussions.
Le membre travailleur de la RSS de Biélorussie a indiqué que la
déclaration du porte-parole des travailleurs ne reflétait pas complètement
les opinions prévalant au sein de son groupe. Pour sa
part, il accepte pleinement les informations fournies à la commission
par le représentant gouvernemental.
Le membre gouvernemental de la Tchécoslovaquie a rappelé
que le problème de savoir si les syndicats peuvent ou non être
établis dans le cadre d'une structure syndicale unique a été discuté
à de nombreuses occasions par cette commission pour un certain
nombre de pays. La position de la commission d'experts est fondée
sur des arguments juridiques; elle établit une distinction entre
l'unicité syndicale et le monopole syndical. Il existe une variété de
systèmes de relations professionnelles ainsi que de conditions
nationales économiques et sociales dans lesquelles les syndicats
développent leur activité. A cet égard, il est intéressant de noter
que la tendance dominante au sein de l'Organisation est de décrire
les situations existant dans les pays en développement comme des
monopoles syndicaux et en tant que telles de les déclarer incompatibles
avec la convention, alors que dans les pays à économie de
marché des situations similaires sont toujours considérées comme
des exemples de liberté et d'unité syndicale. Cela paraît être une
simplification excessive et ne permet pas de brosser un tableau
complet de la situation. En ce qui concerne le cas de la République
arabe syrienne, il convient de rappeler que c'est aux travailleurs
eux-mêmes qu'il appartient de décider librement à l'action à
entreprendre. Ils désirent certainement des syndicats forts et ils
ont conscience que leurs intérêts ne peuvent pas être défendus
correctement en l'absence d'une structure syndicale solide. En
outre, les syndicats en République arabe.syrienne, comme dans
d'autres pays en développement de même type, prennent conscience
de leur responsabilité en matière de développement économique
et social national et de nouvelles voies s'ouvrent à eux pour
défendre les intérêts professionnels de leurs membres, telles que la
participation à divers organes de prise de décision. En ce qui
concerne la possibilité d'établir des organisations syndicales en
dehors de la structure établie, le représentant gouvernemental a
expliqué la question de manière très convaincante. Il faut, en
outre, se rappeler qu'il y a des situations dans d'autres pays à
économie de marché où il est presque impossible d'établir un
syndicat en dehors d'une organisation centrale et que, dans de tels
cas, personne n'a jamais mis en doute la conformité de la
législation et de la pratique nationales avec la convention. Ce qui
est le plus important c'est d'assurer que les travailleurs ont le droit
de constituer des syndicats dans toutes les branches de l'économie
et dans toutes ¡es régions du pays même si cela doit être dans le
cadre existant, et qu'ils ont le droit d'élire librement leurs
représentants. Le gouvernement ayant donné des assurances dans
ce sens, il n'y a donc pas matière à préoccupation, et cela d'autant
plus que le représentant gouvernemental a indiqué que son
gouvernement était désireux de continuer le dialogue en vue
d'éclaircir certains aspects de la question, même s'il ne veut pas
avoir recours à des contacts directs.
Le membre gouvernemental de la République démocratique
allemande a déclaré que les informations communiquées par le
représentant gouvernemental de la République arabe syrienne
montraient clairement l'importance qui est accordée aux syndicats.
Ceux-ci jouissent du droit à la (»determination dans une mesure
appréciable, ce qui leur permet d'exercer une influence considérable
dans leur pays. H est évident, d'après la déclaration du
représentant gouvernemental, que la commission d'experts n'a pas
pleinement compris la situation dans ce pays. Le gouvernement n'a
pas besoin de contacts directs pour régler la question des relations
professionnelles. Par contre, ce dont il a besoin c'est d'une certaine
compréhension pour la situation réelle prévalant dans ce pays. La
République arabe syrienne est un des pays qui connaissent le
système de l'unicité syndicale. A cet égard, son gouvernement,
comme d'autres, ne saurait souscrire aux conclusions de la
commission d'experts selon laquelle cette situation serait en
contradiction avec la convention. La libre constitution d'un
syndicat unique permet aux travailleurs des pays en développement
de se faire représenter au mieux par les syndicats de manière
à participer étroitement aux objectifs de développement du pays.
En ce qui concerne la conclusion de la commission d'experts selon
laquelle le droit de grève n'est pas reconnu aux travailleurs, il
convient de rappeler que la convention ne mentionne dans aucune
de ses dispositions le droit à la grève. Pourtant la commission
d'experts déclare que l'interdiction de ¡a grève est contraire à
l'article 3 de la convention. Cette conclusion ne repose pas sur le
texte de la convention, mais doit être considérée comme une
simple interprétation de la commission d'experts. Une telle
méthode de travail doit être rejetée car elle est en contradiction
directe avec le principe selon lequel les gouvernements n'ont
l'obligation de faire rapport que sur les instruments qu'ils ont
ratifiés. Toute autre conclusion serait susceptible de conduire à des
incertitudes et à une insécurité juridique qui risquent d'empêcher
de nouvelles ratifications, les Etats ne pouvant connaître à l'avance
les interprétations qui seront données ultérieurement sur les
conventions considérées. En outre, de telles interprétations sont
faites par des organes qui, comme la commission d'experts, ne sont
pas compétents en la matière. Le cas de la République arabe
syrienne ne constitue pas un cas unique de l'attitude intolérable de
la commission d'experts. Celle-ci rend d'autant plus nécessaire la
démocratisation des méthodes de travail en matière de contrôle.
En conclusion, l'orateur a estimé que la commission d'experts
devrait adopter une approche plus réaliste dans l'examen de ce cas
et s'est félicité qu'au cours de la discussion d'autres voix se soient
fait entendre dans ce sens.
Les membres travailleurs, après avoir rappelé la nécessité de
s'en tenir à l'examen du cas de la République arabe syrienne, ont
indiqué que la convention n° 87 ratifiée par ce pays déployait les
mêmes obligations pour tous. L'unicité syndicale ne saurait être
imposée ni par le législateur ni par l'autorité politique mais doit
relever uniquement de la volonté des travailleurs. Comme les
membres employeurs, ils ont insisté pour que la République arabe
syrienne accepte de recourir à une assistance appropriée qui
permette de régler les problèmes d'interprétation.
Le membre gouvernemental de l'URSS a souligné le caractère
très détaillé des informations fournies par le représentant gouvernemental
de la République arabe syrienne, tant en ce qui concerne
la position de principe du gouvernement sur le mouvement
syndical dans son pays qu'en ce qui concerne les commentaires de
la commission d'experts ainsi que certaines autres questions. Il
convient de tenir compte des remarques formulées par celui-ci
quant aux méthodes de travail de la commission d'experts. Les
rapports de la commission d'experts servant de base à la discussion
sur les cas individuels, il n'est pas possible de ne pas discuter de ses
méthodes de travail. Il ne s'agit donc pas de rouvrir la discussion
générale, mais il est nécessaire lorsqu'un représentant gouvernemental
a des objections à rencontre de la position prise par la
commission d'experts qu'il puisse exposer ses arguments. Si son
gouvernement a des objections en ce qui concerne le rapport de la
commission d'experts, c'est parce que les constatations auxquelles
elle arrive se fondent sur certaines idées préconçues. Cela s'applique
particulièrement à la convention n° 87 sur la base de laquelle
les experts s'efforcent d'imposer le pluralisme syndical, malgré les
nombreuses discussions intervenues sur la question au sein de la
présente commission. Enfin, l'orateur estime que c'est aux gouvernements
de décider s'ils veulent accepter une mission de contacts
directs dans leur pays. Une telle décision relève en effet de leur
souveraineté. La commission ne saurait donc prendre de décisions
qui imposeraient à un gouvernement l'obligation d'inviter ou
d'accepter une mission de contacts directs.
Le membre travailleur de l'URSS a estimé que le représentant
gouvernemental de la République arabe syrienne avait démontré
de manière convaincante et sur la base de faits concrets que la
convention était pleinement appliquée dans son pays. La commission
d'experts reconnaît elle-même qu'il y a eu des améliorations
dans certains domaines, notamment en ce qui concerne le droit des
fonctionnaires de former leurs propres organisations. Il en est de
même de la déclaration du gouvernement selon laquelle les
travailleurs du secteur agricole ont désormais le droit de participer
à la solution de tous les problèmes, politiques, économiques et
autres. L'ensemble de la question dépend de la manière dont est
interprétée la convention. Deux questions demeurent en suspens:
la question du contrôle des fonds syndicaux et celle de l'unicité et
du pluralisme syndical. En ce qui concerne la question du contrôle
des fonds syndicaux, il convient de l'aborder en tenant compte des
conditions sociales et économiques prévalant dans le pays considéré.
Il est bien connu que dans divers pays certaines forces
s'emploient à désorganiser les organisations syndicales en soudoyant
au moyen de sommes considérables les dirigeants syndicaux
à des fins politiques. Il est donc nécessaire que des mesures
soient prises pour assainir la situation, et il faut en tenir compte.
Quant à la seconde question dont on discute depuis de nombreuses
années, il convient de savoir ce qui est prioritaire dans la mise en
oeuvre de la convention. S'agit-il de réaliser le pluralisme syndical
ou d'assurer l'existence du mouvement syndical ? Depuis plusieurs
années, on avance un certain nombre d'arguments dont le bienfondé
doit être mis en doute et selon lesquels l'unicité syndicale
serait une bonne chose lorsqu'elle est réalisée uniquement par les
travailleurs, alors que lorsqu'elle est le fait de la législation elle ne
serait pas appropriée. A son avis, toute tentative d'imposer le
pluralisme syndical comme seul principe permettant d'assurer le
développement du mouvement syndical est erronée et doit être
rejetée. Il faut souhaiter que la commission d'experts soumette
31/35
l'année prochaine des propositions concernant ses méthodes de
travail.
Le membre travailleur de la République démocratique allemande,
s'exprimant également au nom du membre travailleur de
la Tchécoslovaquie, a déclaré souscrire pleinement à la déclaration
très convaincante du représentant gouvernemental de la République
arabe syrienne, il a souligné que ce cas montre une fois d2 plus
le caractère unilatéral de l'interprétation donnée par la commission
d'experts sur la convention. Dans le pays en question, la
structure syndicale est déterminée par les syndicats ; ceux-ci ont
décidé de se constituer en un système unique dans le but de
défendre les intérêts de leurs membres. La législation reflète leurs
décisions, il n'y a donc pas violation des dispositions de leur
convention.
Les membres gouvernementaux de la Bulgarie et de la RSS
d'Ukraine ainsi que le membre travailleur de la Bulgari s ont
déclaré souscrire pleinement. aux interventions des membres
gouvernementaux de la République démocratique allemande, de
la Tchécoslovaquie et de l'URSS ainsi que du membre travailleur
de l'URSS.
Le représentant gouvernemental de la République arabe
syrienne, après avoir rappelé que les experts peuvent quelquefois
se tromper comme tout être humain, a insisté sur le caractère
particulièrement souple de la convention, ce qui ouvre la porte à
de nombreuses possibilités d'interprétation. Il serait souhaitable
que l'on puisse en déterminer les critères d'interprétation afin
d'éviter que des situations semblables à celle-ci ne se retrouvent
d'année en année. Le fait que son gouvernement ne désire ni une
assistance technique ni des contacts directs ne signifie pas qu'il les
refuse. Mais la commission d'experts doit définir et préciser son
interprétation de ia convention.
La commission a pris note des informations détaillées communiquées
par le représentant gouvernemental ainsi que des discussions
qui ont eu lieu au sein de la commission. Elle a noté que
certaines divergences d'opinions existaient en ce qui concerne la
mise en oeuvre de la convention. La commission a exprimé l'espoir
que des mesures appropriées seront prises, de préférence en
coopération avec le BIT, afin de résoudre ces difficultés d'interprétation.
Le porte-paroie des membres travailleurs a déclaré qu'il comprenait
la référence à la coopération avec le BIT comme signifiant
une assistance appropriée destinée à mettre fin aux interprétations
divergentes de la convention.
Convention n° 95: Protection da salaire, 1949
République dominicaine (ratification: 1973). Le gouvernement
a communiqué les informations suivantes :
1. Mesures législatives
a) Article 2 de la convention. Le gouvernement indique à
nouveau que les conditions économiques, politiques et sociales du
pays n'ont pas permis d'approuver une disposition qui devait
étendre les dispositions du Code du travail relatives à la protection
des salaires dans les entreprises agricoles qui emploient dix
travailleurs au moins.
b) Article 3. Le gouvernement réitère ses indications antérieures
selon lesquelles ces pratiques sont abolies. Avec la révision
de la législation du travail, cette disposition sera expressément
abrogée.
c) Le gouvernement réitère les indications qu'il a formulées,
lors de la 71e session de la Conférence internationale du Travail,
selon lesquelles des difficultés internes d'ordre législatif n'ont pas
permis de soumettre des projets concrets relatifs à ces recommandations
pour donner effet aux exigences des articles 5, 6, 8,10,13,
14 et 15 de la convention; cependant, en pratique, ces dispositions
sont mises en oeuvre.
2. Mesures pour garantir l'observation du salaire minimum légal
dans l'agriculture
Les salaires minima légaux dans l'agriculture sont payés régulièrement.
La plus grande partie des travailleurs de l'agriculture
préfère le système des primes et du paiement au rendement, étant
donné qu'il rapporte davantage. Dans l'industrie sucriers, les
coupeurs de canne sont payés par un système au rendement qui est
supérieur au salaire minimum établi pour une journée de huit
heures de travail. En ce qui concerne la répartition du temps de
travail pour les coupeurs de canne, le gouvernement renvoie à ses
commentaires antérieurs dans lesquels il a expliqué qu'il n'a pas
été possible d'établir un horaire spécifique pour les coupeurs de
canne puisque dans le système de rendemeat le travailleur choisit,
pour exécuter son travail, les heures qui lui conviennent le mieux
en fonction de la température, etc. Les autorités contrôlent
l'exactitude du poids de la canne et les représentants des travailleurs
contrôlent pour s'assurer du poids exact de la canne coupée.
3. Paiement des salaires en bons de salaire négociables
Le gouvernement réitère les indications qu'il a fournies dans son
rapport sur cette convention, d'où il ressort que la pratique du
paiement des salaires en bons de salaire négociables a été abolie et
que la disposition du Code du travail sera abrogée dès que la
réforme du code sera adoptée.
4. Mesures en vue d'assurer que le ravitaillement en produits
alimentaires de base soit fourni aux travailleurs des plantations de
canne à sucre à des prix justes et raisonnables (art.- 7)
Les mesures adoptées se poursuivent et davantage de fruits
divers ont été mis en production dans le cadre du programme de
diversification agricole du Conseil d'Etat du sucre (CES).
5. Paiement différé des salaires
Le gouvernement réitère ses commentaires antérieurs selon
lesquels cette pratique a été abolie. Etant donné qu'il n'y a pas eu
de recrutement de travailleurs haïtiens en provenance d'Haïti, le •
gouvernement ne fait aucun commentaire sur le change en dollars
ni sur les orimes correspondantes. En ce qui concerne le paiement
des primes aux travailleurs dominicains et haïtiens résidents, le
CES a versé aux travailleurs pour cette récolte de canne la somme
de 50 dollars dominicains par tête bien qu'il n'ait pas encore
obtenu le bénéfice de la récolte qui leur donne ce droit.
6. Service de l'inspection du travail
Le Service de l'inspection du travail effectue des visites d'inspection
périodiques dans les plantations de canne à sucre, dans les
limites de ses faibles capacités en personnel et en moyens de
transport, afin de contrôler le paiement effectif des salaires des
travailleurs. Jusqu'à présent, aucune infraction au paiement des
salaires n'a été relevée.
Portugal (ratification: 1983). Le gouvernement a communiqué
les informations suivantes :
Le gouvernement communiquera de façon plus complète, dans
son prochain rapport, les renseignements demandés par le comité
désigné par le Conseil d'administration pour examiner la réclamation
présentée au titre de l'article 24 de la Constitution de l'OIT,
au sujet des mesures adoptées pour résoudre le problème du
retard dans le paiement des salaires, les résultats obtenus par
l'application de ces mesures, ainsi que ia nature juridique des
entreprises ayant des paiements en retard.
Il voudrait, pourtant, communiquer déjà quelques informations
complémentaires qui font présager la suite de changements positifs
dans cette situation. A savoir :
1. Sur le plan législatif, a eu lieu l'adoption:
- du décret-loi n° 7-A/86, du 14 janvier, visant à assurer le
paiement d'une indemnité équitable aux travailleurs qui voudraient
résilier leurs contrats pour cause de salaires en retard ;
- de la décision conjointe des ministères des Finances, de
l'Industrie et du Commerce, du Travail et de la Sécurité
sociale, constituant un groupe exécutif, formé de l'inspecteur
général des finances, du directeur général de l'industrie et de
l'inspecteur général du travail, afin d'analyser des procédures
concernant des entreprises ayant des salaires en retard (Journal
de la République, IIe série, n° 54, du 6 mars 1986) ;
- de la décision conjointe du secrétaire d'Etat à l'Emploi et à
la Formation professionnelle et du secrétaire d'Etat à la
Sécurité sociale, aux termes de laquelle l'Inspection du travail
infermera les institutions de sécurité sociale, jusqu'au 10 de
chaque mois et relativement au mois précédent, des entreprises
se trouvant dans des situations irrégulières, notamment de
celles qui sont en retard pour le paiement des salaires et de
celles qui ne versent à leurs travailleurs qu'une partie des
rémunérations qui leur sont dues ; le but de cette collaboration
est d'élargir et de perfectionner le contrôle des feuilles de paie
et du versement de contributions dues en vertu de la loi
(Journal de la République, IIe série, n° 62, du 15 mars 1986) ;
- de la décision conjointe des ministères des Finances et du
Travail et de la Sécurité sociale, prescrivant une notification
appropriée, à l'Inspection générale des finances, des entreprises
en retard dans le paiement des rémunérations mensuelles
dues aux travailleurs (Journal de la République, IIe
série, n° 94, du 23 avril 1986).
2. Sur le plan des résultats pratiques, la comparaison des chiffres
estimés par l'Inspection du travail, dans son rapport «Entreprises
ayant des salaires en retard» concernant le premier
trimestre de 1986, avec les chiffres estimés dans les rapports
trimestriels de 1985, fait ressortir l'évolution suivante :
- au niveau d'incidence d'une action coercitive, on constate,
par rapport au dernier trimestre de 1985, non seulement une
diminution de 28 pour cent du nombre de travailleurs et de 16
pour cent du nombre d'établissements, mais encore un accroissement
de 33,5 pour cent de la valeur des rémunérations
mensuelles en retard consignées dans les procès-verbaux
résultant du développement de l'action coercitive ;
31/36

Document no 247
CIT, 78e session, 1991, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 24/39-24/42 (Colombie)

Ì Conférence internationale du Travail ^
il Compte rendu provisoire
Soixante-dix-huitième session, Genève, 1991
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
PREMIÈRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE : Observations et informations concernant certains pays 25
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 25
A. Observations générales et informations concernant certains pays 25
B. Observations et informations sur l'application des conventions 30
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 97
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 98
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 99
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 99
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions ratifiées dans les territoires
non métropolitains 100
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 101
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 103
Rapports reçus au 22 juin 1991 concernant la convention (n° 140) et la recommandation (n° 148)
sur le congé-éducation payé, 1974.et la convention (n° 142) et la recommandation (n° 150) sur la
mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 104
Convention n° 87: Liberte syndicate et protection du droit syndical,
1948
Colombie (ratification: 1976). Un representant du gouvemement
de la Colombie, le ministre du Travail et de la Securite
sociale, a indique que les observation de la commission d'experts
mettaient !'accent, s'agissant de la convention n° 87, sur les changements
apportes par la loi n° 50, qui a permis d'ameliorer la
situation en ce qui concerne la personnaJite juridique des syndi- •
cats. II appartient desormais aux tribunaux du travail de resoudre
les conflits qui pourraient surgir en la matiere. I.;Assemblee constituante
a approuve l'enregistrement d'un certain nombre de syndicats
qui ont maintenant le droit de s'engager dans les negociation
collectives et de conclure des conventions collectives. Ces
syndicats representent environ un tiers des travailleurs et ii est
desormais possible de former des syndicats mixtes.
Le representant gouvememental a releve certaines inexactitudes
dans le commentaire de la commission d'experts, qui indique
que !'election des dirigeants syndicaux doit etre soumise a !'approbation
des autorites administratives en violation de !'article 3 de la
convention. A l'appui de cette affirmation, la commission
d'experts
mentionne des resolutions datant de 1952, 1972 et 1979.
Or le texte de la resolution de 1958 ne fait aucune reference a
!'approbation
de !'election des dirigeants responsables
syndicaux: ii ne s'agit que de communiquer les noms aux
autorites .. De meme, selon la commission d'experts, !'article
380, paragraphe 3 nouveau,
du Code du travail prevoirait la
suspension pouvant aller jusqu'a trois ans, avec privation des
droits d'association, des dirigeants
syndicaux qui sont a
l'origine d'une diss9lution de leur syndical. Or ii ne s'agit pas
d'une mesure administrative, mais d'une faculte a la disposition
du gouvemement en cas d'infraction aux normes, avec la
possibilite de recourir aux tribunaux du travail.
S'agissant de
!'interdiction faite aux syndicats d'intervenir dans les questions
politiques, !'article mentionne du Code du travail
a ete abroge
en 1990. Les dirigeants syndicaux ont toujours ete libres d'etre
actifs en matiere politique - bon nombre d'entre eux sont
membres du Congres. S'agissant de la reference faite par la
commission d'experts au nouvel article 450 du Code du travail tel
qu'amende en 1990 le representant gouvememental a indique que
la suspension ou la dissolution de la personnalite juridique d'un
syndical, a la suite d'un arret de travail illegal, necessite une
decision prealable du tribunal du travail. Le nouvel article 450 du
code du travail prevoit done la suspension ou le retrait de la per-·
sonnalite juridique, mais pas par voie administrative.
En ce qui concerne le droit de greve, le representant gouvernemental
a estime que les procedures constitutionnnelles et le Reglement
de la Conference devraient permettre de discuter cette
question de fa􀄖on appropriee dans le cadre de l'OIT. Selon la
commission d'experts, en Colombie, la greve n'est pas seulement
interdite dans les services essentiels au sens strict, mais aussi dans
toute une serie de services publics qui n'ont pas necessairement ce
caractere « essentiel ». Si la Constitution interdit la greve dans les
services publics, c'est qu'en Colombie tous les services publics
sont consideres comme «essentiels». Son gouvemement a
propose
a l'Assemblce constituante des dispositions legislatives
qui selon lui seraient conformes a la convention n° 87. Ces
circonstances
sont prevues dans la Constitution etant donne que
quand les autorites appliquent des mesures qui sont de leur
competence, elles doivent tenir compte du fait que les greves
doivent etre liees a des questions economiques d'interet direct
pour les travailleurs. II a ete fait mention du pouvoir du ministre
du Travail d'autoriser le licenciement de tous les travailleurs
d'une entreprise dans certaines
circonstances, notamment si une
greve n'est pas resolue par !'arbitrage. La loi de la majorite doit
aussi prevaloir dans le cas d'un syndical. En outre, son
gouvernement estime qu'il importe de maintenir les mesures
legislatives de 1968 qui prevoient certai-
24/39
nés restrictions en cas de grève affectant l'économie nationale.
Mais, même dans ce cas, un accord de la Chambre du travail de la
Cour suprême est nécessaire.
S'agissant des commentaires de la commission d'experts sur
l'interdiction de la grève associée à des sanctions administratives
lorsque l'état de siège est décrété, le représentant gouvernemental
a souligné que ce n'était que dans des circonstances très particulières
que de telles sanctions pouvaient être décidées. La Colombie a
connu de très graves difficultés du fait d'arrêts de travail - et non
de grèves authentiques - qui restreignaient le droit de travailler de
ceux qui ne voulaient pas participer à ces actions subversives visant,
par exemple, à paralyser les transports ou à interrompre les
communications. Dans cescas particuliers, le gouvernement a pris
les mesures que lui permet la Constitution, comme il y a été
amené par les circonstances prévalant en Colombie qui sont bien
connues.
En ce qui concerne les mesures prises contre les dirigeants
syndicaux qui ont encouragé ces arrêts de travail illégaux, le représentant
gouvernemental a déclaré que la loi interdit les arrêts
de travail qui interviennent à des fins subversives. Or l'article 8 de
la convention dispose que, dans l'exercice des droits qui leur sont
reconnus par la convention, les travailleurs, les employeurs et
leurs organisations respectives sont tenus, à l'instar des autres personnes
ou collectivités organisées, de respecter la légalité. Pour
ces raisons, il s'est dit préoccupé des imprécisions contenues dans
le rapport de la commission d'experts, qui montrent la nécessité
d'une définition plus claire du droit de grève dans toutes ses implications.
S'agissant de la convention n° 98, la loi n° 50 de 1990 autorise la
formation de syndicats mixtes regroupant des travailleurs des secteurs
public et privé. Un grand effort de réforme du Code du
travail, qui est vieux de quarante ans, a été engagé par le gouvernement,
de façon à ce que la législation se rapproche de plus en
plus des dispositions des conventions. L'Assemblée constituante
travaille actuellement à donner de nouvelles compétences au Congrès
dans ce domaine, et c'est dans ce nouveau contexte institutionnel
et législatif que le gouvernement va procéder à toutes ces
réformes.
Le membre travailleur du Royaume-Uni, tout en remerciant le
représentant gouvernemental de sa déclaration très détaillée, a
fait part de son désaccord avec la plupart de ce qu'il a dit. La
commission d'experts a fort justement indiqué les points de droit
nécessaires pour rendre la législation colombienne conforme aux
conventions nos 87 et 98. Tout en prenant acte de certains progrès
résultant de l'adoption de la loi n° 50 de 1990, la présente commission
et la commission d'experts se préoccupent aussi de la pratique.
Et, comme on l'a vu l'année dernière, les faits sont dans ce
cas particulièrement terrifiants : on peut faire la liste des dirigeants
syndicaux connus assassinés, disparus, torturés, violés et, depuis
l'année dernière, cette liste s'est encore allongée. Se limiter aux
noms fournis par la Confédération internationale des syndicats
libres et Amnesty International ou d'autres organisations de défense
des droits de l'homme ne rendrait pas justice aux centaines
de victimes dont les noms ne sont pas connus. Le gouvernement
dira, comme l'année dernière, que cette violence contre les syndicalistes
est le fait de trafiquants de drogue et de criminels. C'est en
partie le cas, mais il existe des preuves concordantes que des
membres des forces de sécurité ont toléré ou même directement
participé à certains de ces crimes. L'attitude du gouvernement à
l'égard des organisations syndicales, faite de restrictions au droit
d'organisation et de détentions sans procès, participe d'une atmosphère
où les criminels et les trafiquants de drogue peuvent avoir
l'impression de pouvoir agir comme des agents du gouvernement.
Ce sont les syndicalistes qui sont traités comme des criminels en
Colombie, dès lors qu'ils cherchent à faire reconnaître leurs droits
fondamentaux. Partout dans le monde, les syndicats cherchent à
promouvoir leur cause pacifiquement. Si le gouvernement de la
Colombie recherchait la coopération pacifique des syndicats plutôt
que de les réprimer, il aurait peut-être plus de succès dans la
lutte contre la criminalité régnant dans la société colombienne.
On constate que les grandes forces militaires déployées contre les.
grèves sont mystérieusement absentes lorsque des violences sont
perpétrées contre les membres des syndicats.
Les membres employeurs ont constaté que la commission d'experts
avait enregistré un certain nombre de progrès dans la nouvelle
législation par rapport aux conventions nos 87 et 98. S'agissant
d'un cas qui fait l'objet de discussions depuis plusieurs
années, on ne peut que se féliciter de tout changement positif.
Mais il demeure une longue liste d'insuffisances persistantes. Des
quatre points soulevés à propos de la convention n° 87, les deux
premiers concernent la création et le fonctionnement interne des
organisations syndicales. Les dispositions visées sont manifestement
contraires à la convention tout en étant superflues. Elles
doivent être modifiées. Le représentant gouvernemental a fait
état d'une amélioration sur un certain nombre de points mais il
n'est pas évident que tous les aspects qui ont fait l'objet de l'observation
de la commission d'experts aient été rectifiés, et il est nécessaire
qu'un rapport mentionnant clairement les modifications
apportées et envisagées soit fourni. En ce qui concerne les points
3 et 4, la situation est moins évidente. Il s'agit de la distinction,
souvent difficile, entre syndicats et organisations politiques. Sans
doute ne peut-on pas interdire des activités ou des réunions de
caractère politique, mais il doit être possible de distinguer entre
les organisations politiques et celles qui ne le sont pas. Et il est
évident que les organisations à vocation réellement politique ne
sont pas couvertes par la convention. Quant à la possibilité d'apporter
des restrictions au droit de grève, les employeurs ont déjà
indiqué en 1989 qu'ils ne partageaient pas le point de vue de la
commission d'experts, selon lequel ces restrictions ne pourraient
s'appliquer qu'aux services publics au sens strict du terme. Une
limite à l'interdiction du droit de grève doit exister, sans toutefois
être trop restrictive, et la situation en Colombie doit aussi être
modifiée à cet égard.
Au sujet de la convention n° 98, la commission d'experts a pris
note avec satisfaction de l'augmentation des amendes sanctionnant
les actes antisyndicaux. Les membres employeurs ont souligné,
une fois de plus, qu'il n'y avait pas lieu de mentionner ainsi
les montants, dans la mesure où les articles 1 et 2 de la convention
prévoient une protection «adéquate», tandis que l'article 4 mentionne
«des mesures appropriées aux conditions nationales». Un
autre point concerne l'interdiction faite aux membres de la fonction
publique de mener des négociations collectives, qui s'étend
aux travailleurs des entreprises commerciales ou industrielles appartenant
à l'Etat. Les membres employeurs et aussi les travailleurs
ne devraient pas être privés du droit de négociation collective.
Comme le représentant gouvernemental a indiqué que
certaines restrictions ont été supprimées, il est nécessaire qu'un
rapport détaillé soit soumis par écrit pour permettre l'examen de
tous ces éléments.
Des divergences considérables demeurent, s'agissant notamment
de la convention n° 87, qui appellent des changements importants,
et la présente commission doit insister pour qu'ils aient
lieu rapidement, tant dans la législation que dans la pratique.
Un membre travailleur de la Colombie a remercié l'OIT ainsi
que tous ceux qui ont exprimé leur préoccupation et leur tristesse
quant au sort terrible des travailleurs colombiens. Se référant à la
déclaration du représentant gouvernemental, il a rappelé que l'ensemble
des organisations syndicales faisaient l'objet d'une ingérence
indue de la part de l'Etat dans tous les aspects de leur
fonctionnement. C'est une véritable guerre qui est ainsi engagée
contre le mouvement syndical en Colombie, comme le reflète la
législation la plus récente mentionnée par la commission d'experts
dans son rapport. Le mouvement syndical demande depuis de
nombreuses années une réforme démocratique du droit du travail,
mais s'est toujours heurté à la résistance du gouvernement et des
employeurs. Lorsque le gouvernement a déclaré qu'il allait procéder
à des réformes en concertation avec les travailleurs et les employeurs,
les syndicats ont cru que leur souhait allait être exaucé.
Mais c'est un projet rétrograde qui est devenu la loi n° 50 de 1990.
Le gouvernement tente de faire croire à l'opinion publique mondiale
que cette réforme est favorable aux travailleurs, alors qu'elle
ne fait qu'adapter les lois aux exigences de la Banque mondiale et
du Fonds monétaire international. Certes, on peut enregistrer une
certaine amélioration par rapport à 1989 et 1990 mais, bien que les
conventions nos 87 et 98 aient été introduites dans le droit colombien
depuis 1976, et en dépit de toutes les lois adoptées depuis,
leurs dispositions n'ont jamais été appliquées. Le représentant
gouvernemental a prétendu que ce n'était par les grèves qui
étaient interdites, mais seulement les arrêts de travail illégaux.
Or, lorsque les quatre confédérations syndicales ont organisé le 14
novembre 1990 une grève visant exclusivement à défendre les intérêts
des travailleurs, le gouvernement a répondu à cette action
pacifique par des mesures telles que, entre autres, des peines
d'emprisonnement de trois ans pour les instigateurs, la confiscation
des avoirs syndicaux, la censure de la radio et de la télévision
des syndicats. Les forces militaires ont été déployées dans un but
d'intimidation et le gouvernement a orchestré une campagne de
désinformation pour faire croire que la grève était un échec. En
conclusion, l'orateur a estimé que le travail de la commission d'experts
devait se poursuivre et suggéré qu'une mission de contacts
directs se rende de nouveau sur place afin d'établir clairement
comment s'appliquait dans les faits la loi n° 50 de 1990.
Un autre membre travailleur de la Colombie, après avoir
écouté les déclarations du représentant gouvernemental, a déclaré
à la commission que la situation des travailleurs colombiens ne
pouvait être pire. La nouvelle législation du travail n'est pas seulement
en infraction avec les principes fondamentaux de l'OIT,
mais elle peut être considérée comme visant à détruire le mouvement
syndical de Colombie. Plutôt que de prévoir une «élimination
» des obstacles à la formation de syndicats, la loi autorise
l'emploi sur la base de contrats précaires afin de rendre impossible
au travailleur l'adhésion au syndicat, en raison du caractère tem-
24/40
poraire de son emploi. Ces travailleurs savent que, s'ils adhèrent à
un syndicat, ils risquent de ne pas voir renouveler leur contrat. Du
fait de l'institutionnalisation de l'emploi précaire - alors que la loi
interdisait autérieurement les contrats de moins d'un an -, il est
impossible en pratique d'appartenir à un syndicat et de conclure
des conventions collectives. La nouvelle loi a aussi introduit des
changements sur les conditions de déclenchement d'une grève. Il
est très difficile de voter la grève car la décision doit désormais
être prise par une assemblée au niveau de l'entreprise, à laquelle
peuvent participer des travailleurs non syndiqués. Le gouvernement
propage l'idée fallacieuse selon laquelle ce n'est pas la grève
qui est interdite, mais uniquement les arrêts de travail. Mais la
grève du 14 novembre 1990 visait précisément à protester contre
l'introduction de la nouvelle loi sur laquelle les travailleurs
n'avaient pas été consultés. Ils ont pu assister aux réunions de la
commission discutant le projet de loi, mais sans droit de parole,
alors que d'autres parties ont pu exprimer leur avis. L'arrêt de
travail en question n'avait aucun caractère subversif et les confédérations
ont publiquement appelé les groupes de la guérilla à
n'intervenir d'aucune façon; or cet arrêt de travail a été déclaré
illégal avant même de commencer. Une autre dégradation introduite
par la loi nouvelle concerne l'âge minimum d'admission à
l'emploi ramené de 14 à 12 ans, ce qu'il est difficile de qualifier de
progrès. L'orateur a demandé l'envoi d'une mission en Colombie
qui se rendra compte de la situation réelle. Enfin, il s'est référé à
un rapport du Comité de la liberté syndicale demandant aux autorités
de prendre des mesures pour assurer la réintégration d'un
groupe de travailleurs licenciés de façon injustifiée dans le secteur
textile. Le gouvernement n'a, à ce jour, fourni aucune information
à ce sujet, ce qui montre la différence entre ce que dit le
gouvernement pour l'opinion publique et ce qu'il fait en réalité
dans son pays.
Un autre membre travailleur de la Colombie a souligné que les
travailleurs colombiens ont connu une des décennies les plus difficiles
de leur histoire-. Le représentant gouvernemental n'a pas
rendu compte de la réalité ni de la politique d'ajustement structurel
qui n'est pas, en fait, décidée en Colombie mais à Washington
par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international. Il
s'agit d'un néo-libéralisme imposé par une politique cruelle de soidisant
développement qui n'hésite pas à détruire la base démocratique
du mouvement syndical pour imposer son nouvel ordre économique
en Amérique latine. Ce n'est pas par hasard que les
dirigeants actuels en Amérique latine ont reçu des instructions sur
le nouvel ordre économique qui se met en place au détriment de la
justice sociale. En Colombie, cette politique frappe cruellement
les secteurs les plus pauvres et les plus défavorisés de la population.
La nouvelle loi ne fait que se plier à ces exigences et l'avenir
en conséquence est plutôt sombre. L'orateur a souligné qu'il fallait
poursuivre les efforts de lutte contre la répression des intérêts
des travailleurs colombiens, car ce sont aussi les intérêts des travailleurs
d'Amérique latine, du tiers monde et du monde en général.
Le représentant gouvernemental de la Colombie, revenant sur
les interventions des membres des confédérations syndicales colombiennes,
a appuyé leur proposition pour qu'une mission de
l'OIT se rende rapidement en Colombie pour étudier sur place les
différentes questions soulevées ici. Son gouvernement pourra
ainsi aider l'OIT à mieux connaître la situation du pays. Se référant
à la déclaration des membres travailleurs le représentant gouvernemental
s'est élevé énergiquement contre l'assertion selon laquelle
des terroristes et des trafiquants de drogue agiraient
comme des agents virtuels du gouvernement. Leurs actes sont
condamnables et aucun n'est attribuable, de quelque façon que ce
soit, au gouvernement. Dans le cadre du mandat qui lui a été
confié par le peuple, le gouvernement a tout fait pour combattre
ces actes subversifs. Par ailleurs, le représentant gouvernemental
a rejeté l'insinuation selon laquelle une puissance étrangère pourrait
s'immiscer dans les affaires intérieures du pays. Des interventions
ont eu lieu dans le passé en Amérique latine. Elles sont
aujourd'hui oubliées et les relations avec les Etat-Unis sont excellentes.
S'agissant de la longue liste des syndicalistes victimes d'attentats,
si le représentant gouvernemental n'en a pas parlé, c'est
parce que le rapport de la commission d'experts n'en traitait pas.
Il n'y a pas que les syndicalistes qui sont victimes d'attentats mais
aussi des candidats à l'élection présidentielle, des magistrats, des
policiers, des soldats, des chefs d'entreprise, des entrepreneurs,
des citoyens. Tous les Colombiens sont affectés par cette situation
douloureuse et les syndicalistes savent mieux que personne qu'il
est nécessaire de mettre fin à ces attaques subversives. Se référant
aux commentaires des membres employeurs, le représentant gouvernemental
a déclaré qu'il en avait pris bonne note et que le
gouvernement prendrait les mesures nécessaires pour remédier à
la situation. Afin de clarifier les choses, il a répété que la nouvelle
loi avait aboli la suppression de la personnalité juridique des syndicats
par l'autorité administrative : tout ce qui concerne le retrait
ou la suspension de la personnalité juridique est désormais de la
compétence des tribunaux. En outre, il a répété que l'article 450
de la nouvelle loi avait été cité de manière erronée. Enfin, il a
renouvelé ses voeux que l'OIT se livre à une étude attentive de
tous les aspects du droit de grève, et répété qu'une mission devrait
visiter le pays pour constater les progrès accomplis, des progrès
qui ont, dans une certaine mesure, été reconnus par les dirigeants
syndicaux qui se sont antérieurement exprimés.
Les membres travailleurs ont estimé que deux éléments sont
nécessaires pour améliorer la situation : une législation pleinement
conforme aux principes et aux obligations des conventions, et une
application pratique de ces principes et obligations. Sur le premier
point, le rapport de la commision est clair: s'il enregistre certains
progrès avec satisfaction, il rappelle qu'une série de questions fondamentales
n'ont pas été réglées. Quant à l'application pratique,
la commission a entendu les interventions des membres travail-'
leurs. Par ailleurs, le Comité de la liberté syndicale est saisi de
plusieurs plaintes, qui demandent au gouvernement de prendre
des mesures pour mettre fin à la violence contre les syndicalistes
et à renforcer la protection des travailleurs et des dirigeants syndicaux
contre les actes de discrimination antisyndicale. Sur tous ces
points, la déclaration du représentant gouvernemental est regrettable,
quant à la forme, et préoccupante quant au contenu. Il est
regrettable qu'alors que ce cas fait l'objet d'un paragraphe spécial
depuis deux années consécutives, aucune réponse écrite n'ait été
apportée, mais seulement un déclaration orale qu'on ne peut examiner
en profondeur. Il est préoccupant que le gouvernement, qui
connaît bien le point de vue de la commission d'experts et de la
présente commission, se borne à donner des assurances sur le fait
qu'un jour on parviendra à une meilleure situation. La présente
commission doit insister pour que le gouvernement prenne des
mesures non seulement pour répondre aux questions soulevées,
mais aussi pour changer la législation et la rendre conforme aux
conventions. Les membres travailleurs souhaitent poursuivre le
dialogue mais il faut maintenir la pression. Ils avaient tout d'abord
envisagé de proposer que ce cas soit mentionné dans le rapport de
la présente commission comme un cas de défaut continu d'application
et de reprendre ce cas pour la troisième fois dans un paragraphe
spécial. Mais, au vu des progrès notés par les experts, ils
peuvent y renoncer, dans la mesure où le gouvernement a demandé
une mission de contacts directs et à la condition que cette
mission ait lieu rapidement.
Les membres employeurs ont retenu de la discussion que la
situation en Colombie était inquiétante et dépassait largement le
cadre des conventions considérées. En ce qui concerne celles-ci,
un changement est clairement nécessaire et toutes les mesures
doivent être prises dans ce sens. Concernant la proposition d'une
mission de contacts directs, il faut rappeler qu'une telle mission a
déjà eu lieu en 1988. Ce n'est pas toujours le moyen de régler les
problèmes, mais il faut présumer la bonne volonté. L'an dernier,
les conclusions de la présente commission enregistraient la demande
du gouvernement d'une assistance technique de l'OIT.
Cela peut être répété, mais il faut que cette mission ait lieu dès
que possible et qu'elle obtienne des résultats.
Le membre employeur de l'Algérie a fait part de sa vive préoccupation
concernant la détérioration de la situation en Colombie
en ce qui concerne les normes les plus fondamentales de l'OIT, à
savoir les conventions n°s 87, 98 et toutes celles liées à la nondiscrimination.
Le cas discuté n'est pas nouveau pour la présente
commission, et il faut souligner que les organisations de travailleurs
et d'employeurs doivent pouvoir jouir des droits démocratiques
découlant des conventions nos 87 et 98. L'orateur a observé
dans son propre pays qu'il était aisé, pour le pouvoir, de qualifier
de «subversive»,1a lutte pour les droits démocratiques. Ainsi que
l'ont exprimé les membres travailleurs, c'est une obligation morale
de maintenir la pression à son plus haut niveau, quels que
soient les progrès enregistrés. La mission de contacts directs doit
avoir lieu et il faut souhaiter que l'on n'ait plus à revenir sur ce cas
dans les années à venir. La situation est très sérieuse, et chacun
est tenu de prendre les responsabilités qu'il a acceptées au titre de
la Constitution de l'OIT.
La commission a noté les informations fournies par le gouvernement
ainsi que le débat qui a eu lieu en son sein et les soumet à
l'attention de la commission d'experts. Elle a pris note de la demande
qui a été adressée au BIT de l'envoi d'une mission de
contacts directs. La commission a noté avec intérêt certaines améliorations
législatives intervenues dans l'application des conventions
nos 87 et 98 depuis l'année dernière. Cependant, compte
tenu de la profonde préoccupation qu'elle exprime depuis plusieurs
années à l'égard des nombreuses et graves insuffisances qui
subsistent dans la loi et dans la pratique en ce qui concerne l'application
des conventions, la commission exprime le ferme espoir
que le gouvernement sera en mesure de communiquer aux organes
de contrôle de l'Organisation internationale du Travail, aussi
rapidement que possible, des informations précises sur les mesures
prises ou envisagées pour mettre la législation et la pratique en
pleine conformité avec les exigences de ces conventions. Eut
24/41
egard a la gravite de la situation syndicate confirmee par le Comite
de la liberte syndicate lors de l'examen des cas en instance, la
commission insiste pour que le gouvernement puisse faire etat de
progres reels et substantiels dans son prochain rapport.
24/42

Document no 248
CIT, 78e session, 1991, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 24/44-24/46 (République
dominicaine)

Ì Conférence internationale du Travail ^
il Compte rendu provisoire
Soixante-dix-huitième session, Genève, 1991
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
PREMIÈRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE : Observations et informations concernant certains pays 25
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 25
A. Observations générales et informations concernant certains pays 25
B. Observations et informations sur l'application des conventions 30
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 97
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 98
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 99
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 99
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions ratifiées dans les territoires
non métropolitains 100
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 101
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 103
Rapports reçus au 22 juin 1991 concernant la convention (n° 140) et la recommandation (n° 148)
sur le congé-éducation payé, 1974.et la convention (n° 142) et la recommandation (n° 150) sur la
mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 104
Republique dominicaine (ratification: 1956). Le gouvernement
a communique les informations suivantes:
l. Les droits syndicau.x dans les zones /ranches d'exportation
24/44
S'agissant du droit syndical des travailleurs des zones franches,
le gouvernement se refere a sa reponse, en date du 19 mars 1991,_a
la demande directe de la commission d'experts. Actuellement,
20 syndicats d'entreprises de zones franches sont enregistres aupres
de la Section du registre syndical du secretariat d'Etat au
travail. II est fait droit, sans aucun retard, a toute demande d'enregistrement
d'un syndical de zone franche, pour autant qu'elle
soit conforme a la loi.
S'agissant du faible taux de syndicalisation dans les zones franches,
cela est du fondamentalement au fail que le personnel des
entreprises situees dans ces zones est compose a plus de 90 pour
cent de femmes originaires du monde rural, qui travaillent pour la
premiere fois.
Par ailleurs, dans le projet de Code du travail, qui fail actuellement
l'objet de discussions entre employeurs et travailleurs, pour
etre ensuite soumis au Congres national, conformement aux dispositions
du decret no 404/90, figurent des dispositions visant a
vaincre toute reticence eventuelle de la part des autorites administratives
du travail vis-a-vis de l'enregistrement des syndicats. En
ce sens, !'article 280 du projet dispose que « si le secretaire d'Etat
au Travail ne procede pas a l'enregistrement dans le delai de
soixante jours, les travailleurs peuvent le mettre en demeure de
prendre sa decision et, si celle-ci n'a pas ete prise dans les trois
jours qui suivent, le syndical sera repute etre enregistre avec tous
les effets legaux attaches audit enregistrement ».
2. Travailleurs des entreprises agricoles n'occupant pas plus de
JO travailleurs
L'article 265 du Code du travail en vigueur sera abroge lorsque
sera approuve le projet de modification du Code du travail dans
lequei ne figure plus la disposition excluant les entreprises agricoles
qui n'emploient pas plus de 10 travailleurs de maniere continue
et permanente. Dorenavant, Jes entreprises agricoles, agro-industrielles,
d'elevage ou sylvicoles qui n'oc;cupent pas de maniere
continue et permanente plus de 10 travailleurs, seront regies par
les dispositions du nouveau code (article 285 du projet de Code du
travail).
3. Fonctionnaire et autres travailleurs et techniciens du secteur
public
L'article 13 de la loi n° 520 de 1920 a ete abroge par la Constitution
qui consacre la liberte syndicate et admet comme normes
internes les conventions internationales ratifiees par la Republique
dominicaine. II s'agit de dispositions legales posterieures et de
rang superieur. Conformement a !'article 46 de la Constitution de
1966: « Sont nuls de plein droit tous lois, decrets, decisions, reglements
ou actes contraires a la presente Constitution. »
En outre, la loi sur la fonction publique et la carriere administrative,
approuve par la Chambre des deputes le 22 janvier 1991 et
par le Senat de la Republique le 8 mai 1991, prevoit le droit d'organisation
des agents du service public (article 30 de la Joi).
S'agissant de la Joi n° 56 du 24 novembre 1965 et de la Joi
n° 5915 de 1962, elles seront abrogees des que sera approuve le
projet de modification du Code du tavail qui, comme ii a deja ete
dit, fail l'objet de discussions entre employeurs et travailleurs,
avant d'etre soumis au Congres national (article 736 du projet de
Code du travail).
La Joi n° 2059 du 22 juillet 1949 ne se refere pas a la liberte
syndicale et ne prevoit aucune restriction a celle-ci. Neanmoins,
dans le projet de modification du Code du travail, ii est propose
d'abroger partiellement ladite Joi, en ce sens que les employes des
institutions autonomes de l'Etat de caractere commercial, industriel
ou du secteur des transports seront regis par la Joi du travail,
y compris en ce qui concerne le droit d'organisation, la negociation
collective et la greve ( article 2 et 737 du projet de Code du
travail).
Enfin, dans ce domaine, la Joi de la fonction publique et de la
carriere administrative, qui vient d'etre approuvee par le Congres
national, reconna1t le droit d'organisation syndicale des agents de
la fonction publique et abroge toutes les dispositions y relatives de
la loi n° 2059 du 22 juillet 1949.
4. Restrictions au droit de greve
Le projet de nouveau Code du travail tient compte des recommandations
de la commission d'experts: l'article 371 du Code du
travail est modifie et !'article 408 du projet exclut de la definition
de «service public d'utilite permanente » les transports, la vente
des denrees alimentaires sur les marches, les services sanitaires et
la vente de combustible pour les transports. Cette exclusion signifie
que dans ces services les greves et les arrets de travail seront
autorises lorsque le nouveau code sera approuve.
De la meme maniere, seront supprimees de !'article 373 du
code en vigueur les references aux greves politiques et de solidarite
(article 410 du projet). De meme, la loi n° 5915 de 1962 qui
interdit les grèves de solidarité sera expressément abrogée par
l'article 736 du projet de nouveau Code du travail.
En ce qui concerne la majorité requise pour déclarer une
grève, qui est prévue à l'article 374 du Code du travail en vigueur,
l'article 411 du projet de modification dudit code ramène à 51 pour
cent la majorité nécessaire pour le déclenchement d'une grève.
Dans le projet de modification du Code du travail, il est prévu
que la procédure d'arbitrage est réputée entamée à partir de la
date de notification de la décision judiciaire statuant sur la reprise
des activités, ces reprise devant avoir lieu dans les cinq jours qui
suivent la date de ladite décision judiciaire (articles 414 et 688 du
nouveau Code du travail).
S'agissant de la conclusion du Comité de la liberté syndicale
dans le cas n° 1549, il convient de noter qu'en cas de grève dans les
services publics les travailleurs ont actuellement le droit de recourir
au Comiténnational des salaires si le sujet est du ressort de ce
comité (article 370 du Code du travail) et que l'arbitrage est régi
par les articles 636 et suivants du Code du travail en vigueur. En
conséquence, le code actuel prévoit une formule qui remet entre
les mains de tiers impartiaux le règlement d'un conflit d'ordre
économique et social.
En outre, le représentant gouvernemental de la République
dominicaine, le secrétaire d'Etat au Travail, se référant à la convention
n° 87, a rappelé que la question des droits syndicaux des
travailleurs dans les zones franches d'exportation avait fait l'objet
d'une réponse à la commission d'experts. Comme indiqué dans la
communication écrite de son gouvernement, 20 syndicats d'entreprise
sont actuellement enregistrés dans ces zones, et le faible taux
de syndicalisation qu'on y observe est dû au fait que les travailleurs
de ces zones sont des femmes du monde rural qui travaillent
pour la première fois. Une enquête menée d'octobre 1990 à juin
1991 a montré qu'il fallait un délai d'à peine dix jours pour obtenir
l'enregistrement du syndicat. Le taux d'affiliation aux syndicats le
plus élevé se trouve dans la région de Sans Pedro et Marcoris qui a
une forte culture syndicale. Le représentant gouvernemental „a
souligné que le projet de Code du travail comportait des dispositions
visant à surmonter toute réticence des autorités du travail
dans l'enregistrement des syndicats dans ces sens. S'agissant du
droit syndical des travailleurs des entreprises agricoles n'occupant
pas plus de 10 travailleurs et de celui des fonctionnaires et autres
travailleurs du secteur public, il a rappelé que le noveau projet du
Code du travail n'exclura plus les entreprises agricoles de son
champ d'application, et que la nouvelle loi sur la fonction publique
et la carrière administrative promulguée en mai 1991 accorde
le droit syndical aux fonctionnaires publics. Sur ce dernier point,
avec l'approbation des projets d'amendement au Code du travail
en cours de discussion, les lois n° 56 de 1965 et n° 5915 de 1962
seront abrogées. Le représentant gouvernemental a indiqué que la
loi n° 2059 de 1949 ne traitait pas de la liberté syndicale et n'y
apportait pas de restriction. Dans le projet de réforme du Code du
travail, il est proposé d'amender en partie cette loi afin que le
Code du travail s'applique aux employés concernés. S'agissant des
restrictions au droit de grève, l'orateur s'est de nouveau référé à la
communication écrite de son gouvernement, en soulignant que le
nouveau Code du travail tient compte des recommandations de la
commission d'experts et exclut de la définition des «services publics
d'utilité permanente» le transport, la vente de denrée alimentaire,
sur les marchés, les services sanitaires et la vente de
combustible pour les transports. De même, seront supprimées du
nouveau Code du travail les notions de grève politique et de grève
de solidarité. Le projet de code ramène à 51 pour cent la majorité
nécessaire au déclenchement d'une grève. Il prévoit aussi que la
procédure d'arbitrage commence dès le moment où il y a notification
de la reprise du travail qui devrait avoir lieu dans les cinq
jours à partir de ladite notification. Le représentant gouvernemental
a rappelé que le Code actuel prévoyait une formule d'arbitrage
totalement impartiale pour le règlement des conflits du travail
avec un arbitre nommé par le gouvernement, un par les
employeurs et un par les travailleurs.
En ce qui concerne les articles 1 et 2 de la convention n° 98 sur
la nécessité de renforcer les mesures de protection des travailleurs
contre la discrimination antisyndicale et les actes d'ingérence, le
représentant gouvernemental a rappelé les informations écrites
communiquées par son gouvernement et souligné que la liberté
syndicale était expressément consacrée par la' Constitution qui dispose
que «l'organisation syndicale est libre». En outre, le Code
du travail en vigueur contient un ensemble de dispositions qui
garantissent l'autonomie du syndicat contre les actes d'ingénieurs
tant des employeurs que des pouvoirs publics. La révision du
Code du travail renforcera les droits syndicaux en consacrant l'immunité
syndicale des fondateurs et des dirigeants de syndicats:
ceux-ci ne pourront être licenciés qu'avec l'autorisation préalable
du tribunal du travail qui devra également examiner les mesures
dans la quelle il existe des raisons sérieuses de licenciement ou s'il
s'agit d'actes de représaille motivés par des syndicats de dirigeant
renforce substantiellement la protection contre les atteintes à la
liberté syndicale. S'agissant de la question, soulevée par la Confédération
des travailleurs indépendants présentée devant la commission
d'experts et le comité de la liberté syndicale sur des licenciements
de travailleurs dans les zones franches, le gouvernement
indique qu'elle fait l'objet d'actions devant les tribunaux. De toute
façon, le projet du Code prévoit la protection absolue des responsables
syndicaux contre le licenciement pour activités syndicales
dans les zones franches d'exportation. S'agissant des travailleurs
des exploitations agricoles n'occupant pas plus de 10 travailleurs,
exclues du Code du travail, le représentant gouvernemental a renvoyé
à ses indications sur la convention n° 87.
Les membres travailleurs ont pris note de la communication
écrite du gouvernement et des commentaires du secrétaire d'Etat
décrivant un changement dans la situation des droits syndicaux
dans les zones franches d'exportation. Mais il est clair que ces
données restent à être examinées par la commission d'experts.
Pour les autres points, l'élément clef est le projet de nouveau
Code du travail qui, selon le gouvernement, tiendrait compte des
commentaires formulés par les ecperts. Concernant la convention
n° 87, ces commentaires portent sur la limitation des droits syndicaux
dans les entreprises agricoles employant moins de 10 travailleurs,
sur les restrictions importantes aux droits syndicaux dans le
secteur public et au droit de grève dans les services essentiels.
Concernant la convention n° 98, ils portent surtout sur la protection
contre la discrimination antisyndicale. Sur tous ces points, on
peut parler d'un progrès annoncé, mais non encore réalisé. Les
membres travailleurs ont estimé que les conclusions devront insister
plus précisément pour que la nouvelle législation respecte vraiment
toutes les obligations découlant des deux conventions, ainsi
que les conclusions et recommandations du Comité de la liberté
syndicale dans le cas n° 1549 sur les grèves dans' les services essentiels.
Il faudra insister pour que l'information et les nouveaux
textes législatifs soient communiqués, de sorte que la commission
d'experts et la présente commission soient en mesure d'exminer à
nouveau la situation l'année prochaine.
Les membres employeurs ont observé qu'à propos de la convention
n° 87 se posaient quatre questions. La première, question
est de savoir si la liberté syndicale fait l'objet d'entraves dans les
zones franches d'exportation. La commission d'experts a estimé
qu'il existait des violations, au moins dans le cas de petites organisations
syndicales. Le représentant gouvernemental a déclaré que
le faible taux de syndicalisation était dû au fait que les travailleurs
étaient surtout des femmes d'origine rurale, mais il y a d'autres
raisons à une telle situation. Selon le gouvernement, les dispositions
du nouveau Code du travail sur l'enregistrement des syndicats
amélioreront considérablement la situation en prévoyant l'enregistrement
automatique ou le droit à ce que le refus soit
expressément motivé. Deuxièmement, en ce qui concerne la li- ,
berte syndicale dans le secteur agricole, là aussi, le nouveau Code
du travail devrait apporter des changements considérables en supprimant
les restrictions actuelles. Troisièmement, il devrait en
être de même s'agissant des restrictions à la liberté syndicale dans
le secteur public. Ces trois problèmes seraient donc éliminés.
Quatrièmement, en ce qui concerne le droit de grève, les experts
font référence à leur définition classique selon laquelle on ne peut
accepter de restrictions au droit de grève que dans les services
essentiels, au sens strict tel que la commission d'experts entend
cette notion. Les membres employeurs ont indiqué que ce n'était
pas nécessairement le sens qui découlait de la convention, mais
qu'il n'y avait pas lieu de s'étendre sur la question dans la mesure
où le gouvernement a indiqué son intention de modifier la législation.
Bien entendu, si le gouvernement suivait les souhaits de la
commission d'experts, personne ne le critiquerait. Mais on peut
considérer que les services essentiels au sens strict du terme peuvent
ne pas se limiter aux risques pour la sécurité et la santé, ou à
la distribution d'eau et d'électricité. D'autres éléments pourraient
être évoqués à ce titre. Par exemple, on comprend difficilement
que les experts n'incluent pas l'enseignement dans les services
essentiels. On peut renvoyer sur ce point aux règles d'interprétation
fixées par l'article 31 de la Convention de Vienne sur le droit
des traités. Mais dans la mesure où le gouvernement a indiqué
qu'il s'était engagé à modifier la situation,- les membres employeurs
ne lui feront pas la critique de suivre les recommandations
de la commission d'experts.
En ce qui concerne la convention n° 98, les membres employeurs
ont pris acte de la réponse du gouvernement selon
laquelle il souhaitait et allait amender la législation afin de la
rendre conforme à la convention. Aussi, une longue discussion sur
cette question n'est-elle pas nécessaire. Toutefois, les membres
employeurs ont remarqué que la convention parlait d'une protection
«adéquate» par «des mesures appropriées aux conditions
nationales», sans indiquer de mesures concrètes et spécifiques. Il
y a beaucoup de manières d'appliquer cette convention et, aux
termes de la Constitution de l'OIT, les Etats Membres s'engagent
à appliquer toutes les conventions qu'ils ratifient et à prendre les
mesures nécessaires à leur mise en oeuvre. L'Etat Membre a donc
24/45
une certaine marge de manreuvre a cet egard, et les organes de
controle peuvent statuer sur la validite des mesures choisies.
Comme le gouvernement a annonce que des reformes legislatives
fondamentales devraient repondre aux vreux de la commission
d'experts, les membres employeurs n'6nt pas juge utile d'approfondir
cette question, mais ils ont souhaite qu'il soit tenu compte
de leurs vues dans les conclusions.
Le membre gouvernemental de l'Allemagne a exprime; d'une
fa􀄊on generale, son accord avec les propositions des membres travailleurs.
II s'est toutefois interroge sur le point de savoir si des
progres n'avaient pas eu lieu dans les conditions de travail dans les
zones franches d'exportation, auquel cas les conclusions devraient
en tenir compte d'une fai;on ou d'une autre. Par ailleurs, on peut
se demander si une mention, dans les conclusions de la presente
commission sur la necessite de mettre en reuvre les recommandations
du Comite de la liberte syndicale ne constitue pas un depassement
du mandat de la presente commission. Ces reserves portent
sur la forrne, et non sur le cas particulier qui est evoque.,
Entin, le fait que la commission d'experts ait emis des observations
sur une legislation particuliere relative au droit de greve dans
la fonction publique et le fait que le gouvernement soit dispose a
la suivre sur ce point ne devra pas etre interprete comme signifiant
que tous les gouvernements qui se rallient au consensus relatif aux
conclusions de la commission font leur !'interpretation de la commission
d'experts.
Le membre gouvernemental de !'Argentine a souligne que, en
ce qui concerne les services essentiels. ii s'agit de ceux dans lesquels
la greve, a cause de sa duree, peut porter atteinte a la surete
ou a la sante de la population. II ne s'agit pas d'identifier un
service en particulier, mais plut6t la notion. Essayer d'y inclure
!'education ou tout autre service n'est pas du ressort de la presente
commission, qui doit s'en tenir a la notion clairement definie par
l'OIT.
Le membre travailleur de la Republique dominicaine a observe,
s'agissant des zones franches d'exportation, que ce secteur
industriel connaissait dans son pays une croissance demesuree: ii
existe maintenant trois pares d'industrie regroupant plus de 350
entreprises et 120 000 travailleurs. Sans doute s'agit-il,d'un moyen
de faire face au ch6mage qui touche environ 30 pour cent de la
population active de la Republique dominicaine. Mais les conditions
de travail dans certaines entreprises de ces zones sont totalement
inhumaines et s'apparentent au travail carceral. La Confederation
des syndicats de la Republique dominicaine et d'autres
organisations luttent de fai;on tenace pour que le plus grand nombre
possible de ces travailleurs s'organisent et pour la negociation
de meilleure􀄋 conventions collectives. Jusqu'a present ces efforts
sont restes sans succes. Entre octobre 1990 et avril 1991, le minis-
• tere du Travail a reconnu plusieurs syndicats dans les zones franches
d'exportation, dont cinq affilies a la Confederation. Dans des
entreprises telles que Westinghouse, Electric Corporation, Undergarment
Fashion, Sylvania, entre autres, des que !'existence
d'un syndical a ete connue, ii y a eu renvoi massif des dirigeants et
des membres. Les entreprises de ces zones ne tolerent aucune
forme de syndical. Dans un passe recent, les autorites du travail
on\ ete complices de ces entreprises qui sont pour la plupart des
multinationales.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a estime que certains
elements introduits dans la discussion n'etaient pas pertinents au
regard du cas considere. Le representant du gouvernement a indique
ses intentions, et ii ne convient pas d'introduire dai:is les conclusions
des declarations des employeurs sur le droit de greve que
ne partagent pas les travailleurs. I.:orateur a en outre exprime son
desaccord avec la suggestion faite par le membre gouvernemental
de l'Allemagne de ne pas faire reference au Comite de la liberte
syndicale dans les conclusions de la presente commission. II suffit
de se reporter aux conclusions de la commission de l'annee derniere
pour y trouver des references au Comite de la liberte syndicale,
et ii n'y a pas lieu d'introduire de nouveaux principes dans la
discussion d'un cas ou le representant gouvernemental a deja fait
part de sa volonte de se conformer aux recommandations de la
commission d'experts.
Le membre employeur des Etats-Unis ayant remarque
qu'avaient ete mentionnees plusieurs multinationales americaines
operant dans les zones franches d'exporta'tion en Republique dominicaine,
a informe la commission que le gouvernement des
Etats-Unis, ainsi que l'y oblige la loi de 1988 sur le commerce,
avait procede en 1990 a une serie d'enquetes sur les pratiques des
multinationales americaines dans diverses zones franches d'exportation
a travers le monde, y compris en Repliblique dominicaine.
La conclusion de ces etudes a ete que, fondamentalement, la pratique
de ces multinationales au regard des norrnes fondamentales
de l'OIT, c'est-a-dire de la liberte syndicale, du droit d'organisation,
du travail force, de la sante et de la securite dans l'emploi, et
de !'age minimum, etait exemplaire.
La commission a pris note des informations ecrites et orales
fournies par le gouvernement et du debat qui a eu lieu en son sein.
24/46
La commission a observe que des 1985 une mission de contacts
directs avait prepare, en accord avec le gouvernement, des projets
d'amendements dans le but de supprimer les graves divergences
existant entre la legislation et les dispositions des conventions
n°• 87 et 98, afin de donner effet aux commentaires de la commission
d'experts. La commission a egalement note qu'une nouvelle
mission de contacts directs s'etait rendue recemment en Republique
dominicaine. Elle a, en oμtre, constate que de nombreuses
plaintes en violation de la liberte syndicale faisant etat de discrimination
antisyndicale ont ete recemment examinees par le Comite
de la liberte syndicale. La commission a note que la nouvelle loi
·sur la fonction publique, promulguee en mai 1991, reconnait le
droit d'association aux fonctionnaires publics. Elle a note en outre,
avec interet, les assurances foumies par le representant gouvememental
selon lesquelles un projet de Code du travail a ete
discute avec les partenaires sociaux dans le cadre d'un seminaire
qui s'est tenu sous les auspices du BIT afin de satisfaire aux commentaires
de la commission d'experts et d'assurer la pleine application
des dispositions de ces conventions. La commission a exprime
l'espoir que les bonnes dispositions dont a fait etat le
gouvemement pourront etre concretisees a breve echeance et permettront
a la commission d'experts et a la presente commission de
constater des progres reels l'annee prochaine.
Document no 249
CIT, 78e session, 1991, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 24/49-24/50 (Guatemala)

Ì Conférence internationale du Travail ^
il Compte rendu provisoire
Soixante-dix-huitième session, Genève, 1991
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
PREMIÈRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE : Observations et informations concernant certains pays 25
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 25
A. Observations générales et informations concernant certains pays 25
B. Observations et informations sur l'application des conventions 30
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 97
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 98
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 99
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 99
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions ratifiées dans les territoires
non métropolitains 100
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 101
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 103
Rapports reçus au 22 juin 1991 concernant la convention (n° 140) et la recommandation (n° 148)
sur le congé-éducation payé, 1974.et la convention (n° 142) et la recommandation (n° 150) sur la
mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 104
Guatemala (ratification: 1952). Un representant gouvernemental
a declare que son gouvernement a accueilli avec interet les
observations formulees par la commission d'experts concernant
!'application de la convention. II a precise neanmoins que quelques
clarifications sont necessaires sur trois points: a) les questions
que l'on peut considerer comme resolues du fail de !'adoption
de la nouvelle Constitution de la Republique et pour
lesquelles la commission d'experts demande formellement ]'adoption
de mesures legislatives d'application; b) les cas de dispositions
qui ont deja fait l'objet d'une abrogation expresse, et c) les
cas concrets de divergences entre la Constitution et la convention.
L' orateur a souligne que des efforts ont deja ete accomplis avec
!'assistance de l'OIT pour moderniser !'ensemble de la legislation
du travail et· !'adapter aux norrnes internationales du travail. A la
suite de ces efforts, le gouvernement precedent a soumis au Congres
non seulement un projet de code du travail, mais egalement
un projet de code de procedures du travail et des projets de lois
organiques portant sur le secteur du travail et de la prevision sociale.
Le processus legislatif n'est toutefois pas parvenu a son
terme etant donne que plusieurs secteurs de la societe se sont
prononces contre les􀄹its projets. Cependant, le nouveau gouver-
24/49
nement a elabore un pacte social qui est !'expression veritable du
tripartisme sans precedent dans l'histoire du pays et a le mettre en
reuvre. C'est precisement dans le cas du debat et de la conclusion
de ce pacte social que !'on avance avec fermete vers l'institutionnalisation
et !'adaptation de la legislation du travail aux, conventions
internationales du travail. I..;orateur a releve que compte
tenu des conditions politiques qui touchent et compliquent le processus
visant a promulguer la nouvelle legislation du travail, le
ministere du Travail et de la Prevoyance sociale favorise, dans le
cadre de consultations tripartites, )'approbation d'un ensemble
restreint de refonnes ponctuelles et transitoires du Code du travail
afin qu'elles se concretisent dans des lois. l..;orateur a assure que
son gouvernement va informer et envoyer tous les materiaux et
documents portant sur le cas a la commission d'experts et que le
ministere du Travail et de la Prevoyance sociale s'engage a veiller
a ce que les divergences signalees, qui ne vont pas a l'encontre de
la Constitution de la Republique, puissent etre eliminees de la
legislation du travail, une fois conclu le pacte social precite. Le
. representant gouvernemental a rappele que le Code du travail de
1948 est en cours d'actualisation et que la Constitution de la Republique
est entree en vigueur en janvie 1986. Nombre d'observations
qui formulees par les experts ont ete corrigees par la Constitution
elle-meme; ii a conclu en accueillant favorablement
!'assistance de l'OIT pour mener a son terme la reforme legislative
du travail en cours dans son pays de la fa9on la plus technique et la
plus efficace possible'. Cette assistance fait deja partie des conversations
engagees avec le Bureau.
Les membres travailleurs ont pris note des informatoin fournies
par le representant gouvernemental concernant les modifications
intervenues depuis la derniere discussion du cas. Ils ont rappele
les divergences soulevees par la commission d'experts entre
la legislation et les dispositions de la convention. II s'agit de six
problemes essentiels: 1) contr6le strict des activites des syndicats
par le gouvernement; 2) dissolution des syndicats qui sont intervenus
dans Jes questions de politique electorale ou de parti ; 3) limitation
aux seuls Guatemalteques de la possibilite d'ete elus dirigeants
syndicaux; 4) obligation, pour declencher une greve, de
reunir la majorite des deux tiers des travailleurs interesses;
5) interdiction de la greve aux travailleurs agricoles pendant la
recolte ainsi qu'aux travailleurs operant dans des entreprises ou
services dont la suspension d'activites est consideree par le gouvernement
comme ayant des repercussions serieuses sur l'economie
nationale (ils ont rappele a cet effet que la commission d'experts
a fait observer que le droit de greve ne peut etre limite que
dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-a-dire
ceux dont !'interruption risque de mettre en danger, dans !'ensemble
ou dans une partie de la population, la vie, la sante ou la
securite de la personne) ; 6) lour des peines de prison infligees aux
auteurs d'actes visant a paralyser ou a perturber le fonctionnement
des entreprises contribuant au developpement economique
du pays en vue de porter prejudice a la production nationale. Les
membres travailleurs ont observe d'apres la declaration du representant
gouvernemental que des progres auraient ete faits par rapport
ace qui a ete mentionne dans !'observation de la commission
d'experts. Le projet de code du travail semble en cours de discussion
dans le cadre de la legislature. Ils ont demande un eclaircissement
au representant gouvernemental sur la poursuite des consultations
triparties pour resoudre les problemes.
Les membres employeurs ont rappele que le present cas a ete
discute plusieurs fois au debut des annees quatre-vingt et que trois
ans ont passe depuis la derniere discussion. D'une maniere generale,
ils ont fait Jeurs les commentaires des membres travailleurs,
mais ii ont exprime une reserve quant au droit de greve qui s'appuie
sur Ieur conception que !'interpretation precise de ce droit ne
saurait decouler de la convention n° 87. A Ieur sens le cas demontre
egalement que la formule definissant Ies services essentiels est
tres restreinte et ne prend pas en consideration les specificites
d'un cas donne. Ils se sont demande si, dans un pays qui vit essen-.
tiellement de !'agriculture, ii ne serait pas utile de considerer la
recolte comme un service essentiel. En depit de cette question
paniculiere, ils ont releve I'existance persistante d'un nombre important
de divergences entre la legislation nationale et les dispositions
de la convention. Notant les indications du representant gouvernemental
selon Iesquelles des amendements a la legislation, et
en particulier au Code du travail, sont en cours d'elaboration, ils
ont recommande que le gouvernement soit prie d'accelerer ce processus
et de fournir des que possible Ies textes pertinents afin de
permettre a la commission d'experts d'exercer son controle.
Le representant gouvernemental du Guatemala a apprecie l'interet
reflete dans Ies questions concretes qui Iui ont ete posees. II
a souligne que toutes Jes circonstances et tous Jes elements relatifs
au controle strict des activites syndicates par le gouvernement, a la
participation des dirigeants syndicaux a la politique, a la majorite
requise pour declencher une greve, a )'interdiction de greve aux
travailleurs agricoles et a la greve dans Ies services essentiels ont
ete consideres par la Constitution de 1986. On peut assumer que
24/50
ces normes restrictives a la liberte synpicale ont ete abrogees ou
modifiees par la Constitution. Le gouvernement s'efforce d'assurer
que le processus de readaptation de la legislation aille dans le
sens d'une pleine conformite des nonnes nationales a la convention.
Le gouvernement respecte certains droits relevant du secteur
syndical tels que l'eligibilite des dirigeants syndicaux. En ce qui
concerne Jes sanctions contre ceux qui paralysent l'economie du
pays, ii a souligne que la Constitution de la Repub.lique est tres
claire dans la determination des comportements j uges illicites et
des garanties sociales minimales du travailleur comprenant egalement
le droit de greve dans ce secteur. Sur la question relative au
fait qu'un pays essentiellement agricole comme le Guatemala
puisse se permettre de restreindre ou non le droit de greve, ii a
releve que son pays adopte la definition universelle des services
essentiels retenue par les organismes internationaux, c'est-a-dire
ceux dont !'interruption risque de mettre en danger la sante, la
securite et le bien-etre de la population. II a reitere que son pays
croit a la necessite de modifier la legislation dans le sens d'une
harmonisation avec Jes conventions internationales du travail,
mais ces amendements devront se faire dans un esprit de tripartisme
et de consensus et dans l'interet de tous les secteurs du pays.
Les membres travailleurs, tout en remerciant le gouvernement
pour Jes precisions apportees aux questions soulevees, ont demande
que la nouvelle legislation soit envoyee des que possible au
Bureau pour examen.
La commission a pris note des informations detaillees communiquees
par le representant gouvernem􀃼ntal et du debat qui a eu
lieu en son sein. Elle a rappele que la commission d'experts demande
au gouvernement depuis de tres nombreuses annees de
remedier aux graves divergences qui existent entre la legislation et
la pratique nationales, et la convention. Prenant acte de ce qu'un
projet de code du travail qui devrait tenir compte des observations
de la commission d'experts est en cours d'adoptioil par le Congres
de la Republique, la commission a exprime le ferme espoir que le
gouvernement fera etat dans son prochain rappo rt de mesures
concretes prises pour mettre tant sa legislation que sa pratique en
conformite avec Jes exigences de la convention qu'il a ratifiee depuis
presque quarante ans.

Document no 250
CIT, 78e session, 1991, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 24/51-24/53 (Nigéria)

Ì Conférence internationale du Travail ^
il Compte rendu provisoire
Soixante-dix-huitième session, Genève, 1991
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
PREMIÈRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE : Observations et informations concernant certains pays 25
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 25
A. Observations générales et informations concernant certains pays 25
B. Observations et informations sur l'application des conventions 30
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 97
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 98
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 99
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 99
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions ratifiées dans les territoires
non métropolitains 100
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 101
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 103
Rapports reçus au 22 juin 1991 concernant la convention (n° 140) et la recommandation (n° 148)
sur le congé-éducation payé, 1974.et la convention (n° 142) et la recommandation (n° 150) sur la
mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 104
Nigeria (ratification: 1960). Un representant gouvernementa!
se referant au premier point sou!eve par la commission d'experts
concernant le systeme d'unicite syndicale etabli par la !oi selon
laquelle certains syndicats enregistres sont affi!ies au Congres nigerian
du travail (CNT), a indique que les quatre organisations
centrales de travailleurs avaient de leur propre gre decide de s'unifier
pour former le CNT et qu'en vertu du decret sur les syndicats
de 1978 le gouvernement n'avait fait qu'enteriner !'organisation
que les travai!leurs s'etaient eux-memes donnee. Le CNT procede
actuellement a sa restructuration pour passer de 41 a 22 syndicats
professionnels, et le gouvernement ne prend aucune part a cette
restructuration. II a indique que le membre travailleur du Nigeria
present au sein de la commission sera mieux a meme d'evoquer ce
probleme precis.
Deuxiemement, en ce qui concerne le deni du droit syndical a
certaines categories de travailleurs, ii tient ace que les travai!leurs
en question exercent, dans !es conditions locales, des fonctions de
secuiite: ils sont employes dans des services d'une importan·ce
strategique pour !'economie nigeriane. En tout etat de cause, cet
aspect du droit du travail est actuellement en cours de reexamen
devant le Conseil consultatif tripartite du travail.
24/51
Troisièmement, en ce qui concerne les larges pouvoirs du greffier
de contrôler les comptes des syndicats, la loi se borne à demander
aux syndicats de soumettre leurs comptes vérifiés au greffier
une fois l'an. Grâce au système de précompte obligatoire, la
loi permet aux employeurs de déduire sur les salaires à la source
les cotisations syndicales dues par les travailleurs, ces montants
déduits étant versés au compte du syndicat approprié. Aussi, le
greffier n'a pas à examiner dans le détail les dépenses, car les
comptes doivent être vérifiés par des experts comptables agréés.
Cette mesure a pour seul objet que les comptes des syndicats
soient réellement vérifiés. Le greffier a le devoir de rappeler aux
syndicats qu'ils doivent soumettre leurs comptes au comptable de
leur choix s'ils ne le font pas par eux-mêmes. Il faut noter cependant
que tout travailleur qui le désire peut sortir du système de
précompte obligatoire en en informant son employeur par écrit.
Quatrièmement, sur la question des grèves, la loi a institué une
procédure que les syndicats doivent suivre s'ils souhaitent mener
une grève.
Par exemple, si la convention collective pertinente comporte
des dispositions relatives aux méthodes de règlement des litiges,
elles devront être épuisées ; en cas d'échec, le cas est transmis au
ministère de l'Emploi, du Travail et de la Productivité qui soumettra
le différend à un arbitre, un conciliateur ou une commission
industrielle d'arbitrage. Au cas où le litige ne serait pas résolu, les
tribunaux du travail seraient saisis. Malgré toutes ces procédures,
les travailleurs continuent à faire grève au Nigeria, mais le gouvernement
estime qu'il y a toujours un moyen de parvenir à un accord
avec les dirigeants syndicaux par la consultation, la conciliation,
l'arbitrage, la persuasion ou la sentence judiciaire.
Enfin, s'agissant du décret n° 35 de 1989 interdisant toute affiliation
internationale aux syndicats et ordonnant à la centrale syndicale,
aux syndicats de branche et aux associations d'employeurs
de mettre fin à toute affiliation internationale existante en dehors
des dispositions du décret, le représentant gouvernemental s'est
dit heureux d'informer la présente commission que son gouvernement
avait décidé d'abroger cette loi. Le Procureur général travaille
actuellement à préparer la publication de l'instrument
d'abrogation qui sera prêt en temps voulu.
Les membres travailleurs ont indiqué que les commentaires de
la commission d'experts n'étaient pas nouveaux et ont été formulés
depuis de nombreuses années. Il est clair qu'il .s'agit de problèmes
très importants qui concernent l'application de la convention :
le système d'unicité syndicale ; le déni du droit syndical à certaines
catégories de travailleurs; les larges pouvoirs de contrôle du gref-,
fier sur les comptes des syndicats ; et les restrictions au droit de
grève. La commission d'experts signale que, depuis 1989, le Conseil
national consultatif du travail examine comment la législation
pourrait être adaptée de façon à être rendue conforme à la convention;
il est d'autant plus surprenant que ce soit au moment
même où a lieu cet examen que le décret n° 35 de 1989 et d'autres
mesures en pleine contradiction avec la convention soient adoptés.
S'agissant de cette interdiction de toute affiliation internationale,
le représentant gouvernemental a déclaré que ce décret sera
abrogé. Dès que ce sera officiellement le cas, le gouvernement
devra en informer l'OIT pour que ce point soit examiné. Quant
aux autres questions soulevées par la commission d'experts, les
membres travailleurs ont estimé qu'il convenait d'insister auprès
du gouvernement pour qu'il fasse avancer les choses afin de mettre
la législation en pleine conformité avec les dispositions de la
convention.
Les membres employeurs ont observé que ces mêmes questions
sont discutées depuis de nombreuses années, et ont fait l'objet
des débats de la présente commission au moins trois fois au
cours des dix dernières années. Ils ont fait leurs les remarques
précédentes concernant le système d'unicité syndicale, le déni du
droit syndical à certains travailleurs et l'intervention dans le domaine
financier. A l'exception du problème de la limitation du
droit de grève, ils ont dit partager le point de vue selon lequel il
s'agit de violations manifestes de la convention. Il est souhaitable
d'entendre le membre travailleur du Nigeria sur la question du
système d'unicité syndicale, qu'il défendra sans doute. Il s'agit
pourtant d'une question sur laquelle les dispositions de la convention
sont claires: il doit y avoir la possibilité de constituer des
syndicats libres sans que la loi y apporte de restriction. C'est clairement
le problème dans le cas présent. Le décret de 1989 aggrave
encore la situation, mais son abrogation, annoncée par le représentant
gouvernemental, ne résoudra pas les autres problèmes.
Aussi la commission doit-elle insister pour que la situation juridique
change très rapidement et pour que le cas soit de nouveau
examiné prochainement. Les conclusions devraient indiquer que
la commission se réserve le droit d'agir si des changements n'interviennent
pas rapidement.
Le membre travailleur du Nigeria a souligné que, avant le décret
n° 22 de 1987 sur les syndicats, il existait 1500 syndicats au
Nigeria faisant l'objet d'une exploitation par les employeurs qui,
de temps à autre, poussaient les syndicats à lutter les uns contre
les autres, selon la tactique du diviser pour régner. Les travailleurs
ont alors estimé qu'il était préférable d'unifier ces syndicats plutôt
que de les laisser se faire exploiter par les employeurs. Cette unification
fut décidée par une conférence de 1975 et, en 1978, les
travailleurs demandèrent à la loi de reconnaître la seule organisation
centrale du travail et la fusion de 1500 syndicats en 41 syndicats
professionnels. Ce fut une bonne chose pour les travailleurs,
pour les syndicats et pour le pays; et l'OITdevrait donner son aval
à cet arrangement. Après près de trois ans de débat, il a été décidé
démocratiquement de réduire à 22 le nombre des syndicats professionnels
qui sont aujourd'hui 41. Cette décision a été soumise à la
fois au gouvernement fédéral et aux employeurs dans l'organisme
national tripartite qui approuve de tels arrangements par la législation.
Une telle approbation législative est nécessaire afin d'éviter
les problèmes dans la négociation avec les employeurs. En ce
qui concerne la non-reconnaissance du droit syndical de certaines
catégories de travailleurs (de la frappe des monnaies de la Banque
centrale, des télécommunications extérieures, des douanes), il
s'agit d'une violation flagrante de la convention. Les travailleurs
continueront à faire pression sur le gouvernement afin que les
travailleurs de tous ces établissements soient autorisés à se syndiquer.
L'argument du gouvernement selon lequel les travailleurs
des douanes ne pourraient s'organiser en syndicat parce qu'ils portent
des armes n'est pas acceptable. C'est la nature de leur travail
qui les amène à porter des armes, mais ils ne sont pas membres
des forces armées. S'agissant de l'interdiction de l'affiliation internationale,
l'orateur a indiqué que son organisation était parvenue
à un accord avec le gouvernement afin que celui-ci abroge le décret
n° 35. Les travailleurs estiment en effet que si les employeurs
du Nigeria ont le droit de rejoindre leurs pairs d'autres parties du
monde dans des organisations, il n'y a pas de raison que les travailleurs
soient empêchés de faire de même. L'orateur croit que le
gouvernement prendra les mesures pratiqueS[ pour abroger ce
décret.
Le représentant gouvernemental a demandé aux membres employeurs
des éclaircissements à propos de leur déclaration sur les
grèves dans les services essentiels. Se rapportant aux propos du
membre travailleur du Nigeria, il a observé que, jusqu'à plus ample
informé, les documents concernant la restructuration des syndicats
affiliés au CNT en 22 syndicats professionnels n'étaient pas
parvenus au ministère. Cependant, le gouvernement enregistrera
certainement les 22 syndicats concernés, car la restructuration relève
de la volonté des travailleurs et le gouvernement n'a pas le
droit d'y objecter. Aussi le membre travailleur nigérian peut-il
être assuré que le gouvernement n'agira pas contre la volonté du
CNT. En ce qui concerne le droit syndical des travailleurs des
douanes et d'autres travailleurs de secteurs sensibles, le gouvernement
estime qu'une certaine prudence s'impose lorsqu'il s'agit
d'autoriser des personnes portant des armes à se syndiquer. Le
gouvernement ne cherche pas à s'écarter des obligations découlant
des conventions qu'il a ratifiées. Il est très attaché à ces conventions
et veut mettre en oeuvre leurs dispositions à la lettre.
Cependant, les situations dans les différentes parties du monde
doivent être prises en compte. Enfin, le représentant gouvernemental
a répété que le processus d'abrogation du décret n° 35 était
en cours même s'il supposait un certain délai nécessaire à ce que
soient respectées toutes les procédures engagées par exemple entre
le ministre du Travail et le ministre de la Justice. Il a exprimé
l'espoir que le décret serait abrogé avant la prochaine session de la
Conférence.
Le membre travailleur du Nigeria a indiqué que les documents
concernant la restructuration du mouvement syndical ont été envoyés
au gouvernement. Sur le problème de l'adaptation aux conditions
locales, rien n'empêche le strict respect par le Nigeria de la
convention dans les douanes. La raison pour laquelle ils portent
des armes est bien connue. De nombreux contrebandiers portent
des armes et les douaniers et le personnel chargé du contrôle de
l'immigration doivent être équipés de façon à pouvoir remplir
pleinement leur tâche.
Les membres employeurs, en réponse à la demande du représentant
gouvernemental, ont expliqué leur réserve : la convention
constitue la base dont on peut déduire le droit de grève, mais elle
n'indique pas expressément les limites à ce droit, et la conception
de la commission d'experts selon laquelle il ne peut être limité que
dans les services essentiels au sens strict du terme ne se trouve pas
dans la convention, qui doit être interprétée, comme tout traité
international, selon les règles fixées par la convention de Vienne
sur le droit des traités.
La commission a pris note du rapport de la commission d'experts
et des informations orales fournies par le représentant gouvernemental.
La commission s'est déclarée préoccupée de ce que
le gouvernement ne. semble avoir fait aucun progrès pour mettre
sa législation et sa pratique en conformité avec les exigences des
articles 2 et 3 de la convention concernant en particulier le système
d'unicité syndicale consacrée dans la législation, le déni du
droit syndical de certaines catégories de travailleurs et les restric-
, 24/52
tions aux activites des syndicats. La commission a rappele la persistance
de ces divergences depuis de nombreuses annees. De
plus, la commission a note avec preoccupation que le decret n° 35
de 1989 constitue une violation grave du droit des organisations de
travailleurs et d'employeurs de s'affilier au% organisations internationales
de leur choix, garanti par !'article 5 de la convention. Elle
a exprime le ferme espoir que le gouvernement prendra, dans un
bref delai, Jes mesures necessaires pour assurer la pleine application
de la convention et, en particulier, qu'il abrogera le decret
n° 35 dans un proche avenir, comme ii !'a promis a plusieurs reprises,
et qu'il communiquera le texte d'abrogation au BIT des qu'il
sera adopte. Au cas ou la situation n'evoluerait pas rapidement,
de maniere favorable, la commission devra envisager d'autres mesures
dans l'examen de ce cas.
24/53
Document no 251
CIT, 78e session, 1991, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 24/54-24/57 (Panama)

Ì Conférence internationale du Travail ^
il Compte rendu provisoire
Soixante-dix-huitième session, Genève, 1991
Troisième question à l'ordre du jour : Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
PREMIÈRE PARTIE : Rapport général 2
DEUXIÈME PARTIE : Observations et informations concernant certains pays 25
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 25
A. Observations générales et informations concernant certains pays 25
B. Observations et informations sur l'application des conventions 30
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 97
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 98
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 99
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 99
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions ratifiées dans les territoires
non métropolitains 100
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 101
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 103
Rapports reçus au 22 juin 1991 concernant la convention (n° 140) et la recommandation (n° 148)
sur le congé-éducation payé, 1974.et la convention (n° 142) et la recommandation (n° 150) sur la
mise en valeur des ressources humaines, 1975.
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 104
24/54
Panama (ratification: 1958). Le gouvernement a communique
Jes informations suivantes:
1. Au sujet du nombre prétendument élevé de membres requis
pour la création d'un syndicat, soit un minimum de 50 travailleurs
ou 10 employeurs (article 344 du Code du travail) : cette condition
ne limite pas le droit universellement reconnu d'organisation,
étant donné que la convention n'établit pas de paramètres minima
ou maxima pour la constitution d'un syndicat et qu'il n'existe non
plus aucune recommandation de la commission d'experts à cet
égard. Il convient de souligner qu'à l'article 64 de la Constitution
nationale le nombre ou les quantités qu'établit l'article 344 du
Code du travail ont pour seul objet de renforcer les organisations
syndicales afin qu'elles puissentrendre effectif le droit de négociation
comme fondement du droit collectif qui repose sur un principe
de majorité.
Les organisations professionnelles ont actuellement tendance à
aller vers la formation de syndicats de branches pour développer
leur activité sur l'ensemble du territoire national, ce qui implique
un regroupement des forces de travail bien supérieures au nombre
exigé par la loi. Les organisation syndicales elles-mêmes s'opposent
à la diminution du nombre minimum de membres nécessaire
pour créer un syndicat, qui constituerait un fractionnement de la
classe travailleuse et affaiblirait gravement le mouvement ouvrier.
2. En ce qui concerne l'observation sur l'exigence que 75 pour
cent des membres d'un syndicat soient panaméens, contenue à
l'article 347 du Code du travail, il ne s'agit pas d'une norme discriminatoire
mais d'une norme qui est au-dessous des aspirations des
organisations de travailleurs, car l'activité économique était entre
les mains d'étrangers, et cette domination s'étendait dans les activités
commerciales où les travailleurs n'étaient pas panaméens.
Afin de favoriser les nationaux, des normes ont été élaborées, qui
imposent des pourcentages en vue de garantir le travail et le droit
de s'organiser des panaméens. Indépendamment de ce critère, il
n'existe pas de limitation ni d'interdiction faite aux syndicats de
permettre, au sein de leur organisation, l'adhésion d'étrangers,
pourvu que leurs statuts l'indiquent. Cette situation est rendue
possible par la législation qui ne considère pas comme étrangers
ceux qui ont un conjoint panaméen ou résident depuis dix ans ou
plus dans le pays. Le gouvernement estime qu'aucun des articles
de la convention ne contient quelque disposition que ce soit sur
l'inclusion, l'exclusion ou l'interdiction au nom de limitations à
l'adhésion syndicale des étrangers. Mais il ajoute qu'aucune disposition
législative du travail en vigueur en matière syndicale au
Panama n'interdit ou ne limite le droit des étrangers à se syndiquer
en raison de leur nationalité, pourvu qu'ils n'excèdent pas 25
pour cent des membres inscrits du syndicat concerné, ainsi que
disposent les articles 17 et 20 de la Constitution nationale qui
réservent certaines activités aux nationaux panaméens et l'article
39 de la grande Charte qui consacre la liberté des associations.
3. En ce qui concerne l'observation sur la révocation automatique
du mandat d'un dirigeant syndical licencié, le gouvernement
estime normal que le mandat du dirigeant d'un syndicat d'entreprise
prenne fin lorsque celui-ci n'est plus affilié pour avoir cessé
d'être employé de ladite entreprise. Le gouvernement admet qu'il
n'est pas clair dans le Code du travail quel est le sort d'un dirigeant
de syndicat d'industrie ou mixte auquel ne s'applique pas
l'article 359 du Code du travail. Selon le gouvernement, les syndicats
d'entreprise pourraient sinon être dirigés et/ou dominés par
d'anciens travailleurs de celle-ci, ce qui serait illogique et incommode.
4. En ce qui concerne les larges pouvoirs de contrôle des
autorités sur les registres, les procès-verbaux et la comptabilité
des syndicats (article 376, paragraphe 4 du Code du travail), le
gouvernement indique que l'Etat ne contrôle pas l'activité syndicale
par le seul fait de mener des examens comptables et d'enregistrer
les procès-verbaux ainsi que le dispose l'article considéré.
Etant donné que les syndicats sont d'intérêt public, le ministère du
Travail et du Bien-être social a, en conséquence, en tant qu'organe
d'Etat, l'obligation d'encourager la constitution de ces organisations
et de garantir leurs existence légale et leur rayonnement.
Selon le gouvernement, il n'est pas certain qu'il existe de tels
pouvoirs de contrôle sur la documentation syndicale chaque fois
que ces « registres de procès-verbaux » se limitent à ceux qui ont
trait à des changements ou élection de dirigeants, réforme des
statuts et autorisation pour exercer des droits dans les relations
avec des tiers comme principe de base de la publicité et de
l'authenticité de la personnalité juridique et du représentant légal
de l'organisation.
Selon le gouvernement, le ministère n'intervient que dans les
contestations, par une partie des membres, de l'élection d'un comité
directeur, selon des procédures ordinaires et à la connaissance
des juges du travail. Il n'existe pas de contrôle de la comptabilité
des syndicats toutes les fois où la vérification a pour seule fin
de vérifier des allégations de mauvaise utilisation des fonds des
syndicats ou, d'office, pour constater le soin ou l'hnnêteté dans la
gestion des mêmes fonds. Le ministère ne peut suspendre aucun
dirigeant pour «mauvaise manipulation des fonds syndicaux» ni
pour «appropriation indue» de ceux-ci. La protection de l'intégrité
de la « gestion » syndicale empêche le ministère de déposer des
plaintes judiciaires ou d'autre sorte, ce qui constitue la cause principale
de la corruption et du discrédit des syndicats.
Par ailleurs, la formalité de présenter une demande d'inscription
d'un nouveau syndicat a pour objectif de doter de la protection
ou de l'immunité syndicale «tous les membres d'un syndicat
en formation», comme disposent les articles 381 et 385 du Code
du travail. Sans la formalité de présentation de la demande du
syndicat en formation au ministère, cette protection ne serait pas
effective.
5. En ce qui concerne l'observation sur l'exclusion des fonctionnaires
publics du champ d'application du Code du travail et,
par conséquent, des droits d'organisation et de négociation collective
(article 2, paragraphe 2 du Code du travail), le gouvernement
indique que les chapitres 2 et 3 du titre XI de la Constitution de
1946 établissent respectivement «les principes fondamentaux de
l'administration du personnel» et «l'organisation de l'administration
du personnel». En application de ces dispositions constitutionnelles
a été promulguée la loi de la carrière administrative en
1963, qui a été ratifiée par un décret de Cabinet de 1968 abrogeant
les articles concernant la stabilité des emplois publics. On ne peut
appliquer le Code du travail aux fonctionnaires publics, sauf dans
le cas des exeptiòns qui permettent le droit d'organisation contenue
dans la loi n° 8 du 25 février 1975 et les lois nos 34 et 40 de
février 1979, applicables respectivement aux entreprises d'Etat
comme l'IRHE, INTEL, l'autorité portuaire nationale et les Chemins
de fer de Panama. Il existe encore d'autres carrières administratives
autorisées par l'article 300 de la Constitution, comme la
carrière judiciaire (consacrée par le Code judiciaire), la carrière
enseignante de l'éducation nationale; la carrière diplomatique, la
carrière sanitaire, la loi sur l'avancement des infirmières et auxiliaires,
les lois des laborantins, des pompiers de Panama, des employés
des postes et télégraphes, des employés de la Banque nationale
de Panama, etc., toutes lois spéciales qui ne sont pas
modifiées par la loi de la carrière administrative. De plus, Panama
n'a pas ratifié la convention n° 151 sur le droit d'association des
employés de l'administration publique et n'est donc pas lié par
cette convention. En conséquence, les conventions nos 87 et 98,
qui n'ont rien à voir avec le droit d'organisation des employés de
l'administration publique, ne sont pas violées, puiqu'elles régissent
les relations syndicales entre les travailleurs des entreprises
privées et les entrepreneurs, une relation que couvre pleinement
le Code du travail.
6. En ce qui concerne les commentaires de la commission
d'experts relatifs à la loi n° 13 du 11 octobre 1990 qui contiendrait
des restrictions au droit de grève et de négociation collective, le
gouvernement indique que la possibilité qu'a l'autorité du travail
de recourir à l'arbitrage dans les cas de grève prolongée pouvant
susciter de graves perturbations économiques dans l'entreprise
constitue un pouvoir discrétionnaire qui s'exercera après la constatation
sommaire des faits, avec audition des travailleurs, comme
prévoit la loi qui a un caractère transitoire pour une période de
trois ans. A ce jour, il n'en a pas été fait application. Ce pouvoir
discrétionnaire n'est pas nouveau dans la législation panaméenne.
Antérieurement, la loi ,n° 95 de 1976 avait introduit un même
pouvoir.
7. En ce qui concerne l'observation sur la loi n° 25 du
14 décembre 1990, le gouvernement explique qu'il s'agit d'une loi
d'ordre public contre les actes subversifs de fonctionnaires publics,
de caractère temporaire qui restera en vigueur jusqu'au
31 décembre 1991. Elle ne prévoit pas de licenciement ou de sanctions
visant les «dirigeants syndicaux» à raison de leur qualité,
mais des sanctions visant les employés publics qui ont participé à
un complot avec des militaires golpistes «pour renverser le gouvernement
» au moyen d'exhortations des organisateurs du mouvement
à «mener un arrêt de travail général permanent jusqu'à la
chute du gouvernement» et comportant la communication entre
les fonctionnaires organisateurs de l'arrêt de travail illégal et un
insurgé en armes suite à la prise du quartier général de la Police
nationale. N'ont été sanctionnés que les fonctionnaires qui ont
commis des actes de violence physique contre d'autres fonctionnaires
pour les empêcher d'accéder aux lieux de travail et des
atteintes à la propriété d'Etat. Le gouvernement indique qu'il
s'agissait d'«associations civiles» irrégulières, constituées sous
couvert des dispositions du Code civil concernant les associations
civiques et de bienfaisance, qui prétendaient fonctionner illégalement
en tant que syndicats de ministères, comme la Fédération
nationale des fonctionnnaires publics. Il ne s'agissait pas d'une
«grève» car elle n'avait aucun caractère de conflit du travail mais
d'un «arrêt de travail général» illégal.
A la fin mars, le Procureur de la Cour suprême de justice n'a
considéré inconstitutionnel que le paragraphe 2 qui prétendait
24/55
établir que «l'organe exécutif, à travers le conseil de Cabinet,
déterminera si les actions, actes ou faits considérés portent atteinte
à la démocratie et à l'ordre constitutionnel de l'Etat», car
ce pouvoir est de compétence législative. Le 23 mai 1991, la Cour
suprême en séance plénière a rendu un arrêt sur le recours en inconstitutionnalité
déposé par divers dirigeants syndicaux ou anciens
employés de l'IRHE et de l'INTEL, déclarant conformes à
la Constitution l'ensemble des dispositions de la loi n° 25 de 1990,
à l'exception du paragraphe de l'article 2.
En outre un représentant gouvernemental a réitéré en totalité
le contenu des informations écrites transmises par son gouvernement.
Il s'est également référé aux difficultés rencontrées par son
gouvernement pour respecter l'envoi des rapports dus pour 1990
et a indiqué que depuis le mois de mars 25 rapports sur différentes
conventions ont été envoyés. Il a indiqué que les observations de
la commission d'experts au sujet'des lois n° 13 d'octobre 1990 et
n° 25 de décembre de la même année devraient être exclues de
l'examen du cas jusqu'à ce que la commission puisse examiner
l'importante documentation présentée avec les rapports de 1990 et
1991. Il a saisi cependant l'occasion pour clarifier que la loi n° 25
ne porte pas sur le domaine pénal, qu'elle n'impose pas de détention
et ne crée pas de discrimination. L'analyse de cette loi par le
Procureur (avril 1991) et la décision de la Cour suprême de justice
(mai 1991) affirment de manière concordante que la loi ne viole
pas les principes constitutionnels ni les droits de l'homme. La loi
ouvre des voies de recours administratifs et, après l'épuisement de
ceux-ci, ouvre le droit au recours devant la Cour suprême de justice.
La constitutionnalité et la «viabilité» de la «rétroactivité» de
la loi s'expliquent par leur caractère de loi d'ordre public qui normalement
s'applique sans limites. Cette loi a été appliquée rétroactivement
au moment d'une grève générale illimitée au sujet de
laquelle une série d'informations ont été communiquées dans le
cadre du cas n° 1569 examiné par le Comité de la liberté syndicale.
Concernant les dispositions du Code du travail auxquelles se
réfère la commission d'experts, l'orateur a indiqué au sujet du
nombre prétendument élevé de membres requis pour la constitu-.
tion d'un syndicat, soit un minimum de 50 travailleurs ou de 10
employeurs (article 344 du Code du travail) que cette condition ne
limite pas le droit universellement reconnu d'organisation, étant
donné que la convention n'établit pas de paramètres minima ou
maxima pour la constitution d'un syndicat, et qu'il n'existe non
plus aucune recommandation de la commission d'experts à cet
égard.
En ce qui concerne l'exigence que 75 pour cent des membres
d'un syndicat soient Panaméens, contenue à l'article 347 du Code
du travail, il ne s'agit pas d'une norme discriminatoire, mais d'une
norme visant à protéger les organisations de travailleurs, étant
donné que dans le passé l'activité économique était entre les
mains d'étrangers, et cette domination s'étendait aux activités
commerciales. Indépendamment de ce critère, il n'existe pas de
limitation ni d'interdiction faite aux syndicats d'admettre l'affiliation
d'étrangers, lorsque leurs statuts l'indiquent.
En ce qui concerne la révocation automatique du mandat d'un
dirigeant syndical licencié (article 359 du Code du travail), son
gouvernement estime normal que le mandat du dirigeant d'un
syndicat d'entreprise prenne fin lorsque celui-ci n'est plus affilié
pour avoir cessé d'être employé de ladite entreprise. Son gouvernement
reconnaît que le Code du travail ne traite pas clairement
du sort d'un dirigeant de syndicat d'industrie ou mixte auquel ne
s'applique pas l'article 359 du Code du travail.
En ce qui concerne les larges pouvoirs de contrôle des autorités
sur les registres, les procès-verbaux et la comptabilité des syndicats
(article 376, paragraphe 4, du Code du travail), l'orateur a
indiqué que le ministère n'intervient que dans les contestations
d'élections des organes dirigeants, par une partie des membres, et
que le contrôle de la comptabilité des syndicats a pour seule fin de
vérifier des allégations de mauvaise utilisation des fonds des syndicats
ou, d'office, pour constater le soin ou l'honnêteté dans la
gestion des mêmes fonds. Le gouvernement étudie un décret réglementaire
de l'article 376 du Code du travail pour fixer et déterminer
quels seront les documents qu'il conviendra de communiquer
au ministère pour être archivés afin d'éviter que les pouvoirs
des autorités ne soient considérés comme trop extensifs.
Par ailleurs, la formalité de demander l'inscription d'un nouveau
syndicat a pour objectif de doter de la protection ou de
l'immunité syndicale «tous les membres d'un syndicat en formation
», comme disposent les articles 381 et 385 du Code du travail.
En ce qui concerne l'observation sur l'exclusion des fonctionnaires
publics du champ d'application du Code du travail et, par
conséquent, des droits d'organisation et de négociation collective,
la Constitution établit les principes fondamentaux et l'organisation
de l'administration du personnel. En application de ces dispositions
constitutionnelles a été promulguée la loi de la carrière
administrative en 1963. Il existe encore d'autres carrières administratives
autorisées par l'article 300 de la Constitution, par exemple
la carrière judiciaire et la carrière enseignante.
En ce qui concerne l'application de la convention n° 98, l'orateur
a déclaré que la loi n° 13 de 1990 a été adoptée dans le cadre
d'une politique de stabilisation applicable de manière exceptionnelle
et temporaire pour une brève période, afin de permettre la
nécessaire restauration de l'économie et de stimuler la création de
nouvelles sources d'emploi. Cependant, la loi n° 13 reconnaît les
augmentations de salaires pactises et leur application en fonction
de l'augmentation moyenne annuelle, sur chaque année de prorogation,
ce qui constitue une garantie pour les travailleurs, augmentations
qu'il ne serait pas possible d'obtenir actuellement par
la voie de la négociation collective, étant donné la situation économique
précaire. Elle ne limite en rien la négociation collective, si
les parties se mettent d'accord.
Les membres travailleurs, relevant que la commission d'experts
formule des commentaires depuis 1967 auxquels le gouvernement
n'a pas apporté de réponse et rappelant que la commission
avait en 1989 exprimé l'espoir que la législation serait mise
prochainement en conformité avec la convention, ont constaté
que les informations écrites et orales communiquées par le gouvernement
ne fournissent pas de réponse et ne permettent pas de
noter un progrès. Au contraire, des lois restreignant la liberté
syndicale et la négociation collective ont été adoptées en 1990:
ainsi la loi n° 25 du 14 décembre 1990 porte gravement atteinte au
droit des associations d'agents publics d'organiser leurs activités, y
compris par le recours à la grève. Relevant que dans ses réponses
le gouvernement semble faire preuve d'une certaine agressivité en
indiquant par exemple que les conventions nos 87 et 98 n'ont rien à
voir avec le droit d'organisation des employés de l'administration
publique, les membres travailleurs se sont demandé comment de
tels arguments peuvent encore être avancés après tant d'années et
après que la commission ait exprimé l'espoir en 1989 que le gouvernement
tienne compte des commentaires de la commission
d'experts. Etant donné le manque de progrès, ainsi que le contenu
des informations fournies par le gouvernement, les membres travailleurs
ont proposé de mentionner ce cas dans un paragraphe
spécial.
Les membres employeurs ont exprimé leur préoccupation au
sujet de ce cas examiné à de nombreuses reprises. En effet peu de
choses ont changé. Les informations écrites et orales communiquées
par le gouvernement montrent à l'évidence qu'il n'existe
aucune volonté de changement. Ils ont considéré les points mentionnés
par la commission d'experts au début de son observation
comme manifestement contraires aux principes de la liberté syndicale
de la convention n° 87: il n'y a pas de raison d'exclure les
fonctionnaires publics du droit d'association ; il n'y a pas de raison
d'exiger que 75 pour cent des membres d'un syndicat soient Panaméens,
même si le représentant gouvernemental lie ceci au fait
qu'à Panama beaucoup de travailleurs sont des étrangers. Il n'est
pas logique d'exclure des étrangers de la participation dans des
organisations. La révocation automatique du mandat d'un dirigeant
syndical quand il est licencié est également une violation
claire de la convention.
Les membres employeurs ont estimé qu'il n'est pas possible de
déterminer si le droit de grève est l'objet de restrictions excessives,
étant donné que les experts ont utilisé le mauvais critère. En
ce qui concerne les seules restrictions qu'elle considère acceptables
dans les services essentiels au sens strict du terme la commission
s'est à juste titre référée à «ses» principes; ceux-là ne sont,
en tout cas, pas les principes de la convention n° 87. A cet égard
les membres employeurs se sont référés aux vues qu'ils ont exprimées
au cours du débat général en relation avec les questions
d'interprétation des conventions de l'OIT. Quant aux autres
points mentionnés dans l'observation de la commission d'experts,
ils ont estimé qu'il s'agit de violations de la convention n° 87.
Ils ont constaté qu'il n'y a pas non plus de progrès en ce qui
concerne l'application de la convention n° 98. Considérant les restrictions
en matière de négociation collective des fonctionnaires
publics et les mesures législatives allant à rencontre de la libre
négociation collective, ce cas est en discussion depuis très longtemps.
Il n'y a pas d'indice indiquant qu'il puisse y avoir de changement
dans un futur proche. Les membres employeurs proposent
de mentionner ce cas dans un paragraphe spécial.
Le membre travailleur de Panama a déclaré que la loi n° 13 de
1990 restreint la liberté syndicale en prorogeant la validité des
conventions collectives et qu'en application de la loi n° 25 de nombreux
travailleurs du secteur public ont été licenciés. Il a souligné
que les travailleurs souffrent des conséquences de la désorganisation
que provoquèrent les événements ayant eu lieu dans son
pays. Il a affirmé sa confiance dans le tripartisme et il espère que
certains des commentaires de la commission d'experts pourront
être pris en compte par le gouvernement pour se conformer aux
conventions. Il a estimé qu'une mission de contacts directs devrait
se rendre dans le pays pour vérifier ce qui s'y passe réellement.
Le membre travailleur de l'Allemagne, se référant à l'intervention
du porte-parole des membres employeurs au sujet de l'interprétation
par la commission d'experts en matière de droit de
24/56
greve, a exprime l'avis que de telles declarations devaient faire
partie de la discussion generate, car sinon le travail de la commission
sur les cas individuels pourrait etre ralenti par des reserves
repetees. II a souligne que la discussion ne peut se derouler si les
principes s'appliquant a une convention particuliere ne sont pas
acceptes.
Les membres employeurs ont releve, en se referant a leur declaration
!ors du debat generl!.l, qu'il est inevitable, !ors de l'examen
d'un cas, d'examiner les questions juridiques afin de determiner
si un gouvernement a rempli ses obligations.
Le representant gouvernemental a declare que l'actuel Code
du tr!jvail date de 1972 et qu'en consequence les observations formulees
depuis 1967 ne sont plus d'actualite, etant donne que le
nouveau Code a reconnu de nombreux instruments internationaux.
Par ailleurs, dans le cadre du cas n° 1569 en instance devant
le Comite de la liberte syndicate, une documentation concernant
la loi n° 25 a ete envoyee, y compris des preuves et des documents
qui ne peuvent etre analyses en ce moment. II a estime qu'il n'est
pas juste de parter de mission de contacts directs au sujet de lois
qui n'ont pas ete totalement examinees par la commission d'experts
ni que le rapport ne soit mentionne dans un paragraphe
_ special etant donne qu'en dix-huit mois d'un gouvernement democratique
on a pas eu le temps de rectifier les erreurs et les fautes
qui s'etaient accumulees depuis plus de vingt ans. Corateur a
indique que son gouvernement n'est pas occupe a mettre en conformite
sa legislation avec les conventions, mais que la mefiance
injustifiee des travailleurs ne permet pas de realiser les reformes
necessaires du Code du travail. Son gouvernement a lance un
appel a la concertation nationale tripartite en vue de proceder a la
modification du Code du travail et de pennettre le redemarrage
economique du pays. Corateur a estime qu'il n'est pas opportun
qu'une mission de contacts directs se rende dans le pays.
La commission a pris note des informations ecrites et orales
fournies par le representant gouvernemental ainsi que du debat
qui a eu lieu en son sein. La commission a regrette que ces informations
ne contiennent aucun element nouveau qui_ permettrait
d'assurer une meilleure application des conventions. La commission
a rappele que la plus grande partie des commentaires formules
par la commission d'experts remonte a 1967. Compte tenu de
!'importance des points souleves dans les commentaires qui concement
tant la liberte syndicale que le droit a la libre negociation
collective, la commission a exprime sa profonde preoccupation
devant la persistance d'un grand nombre de graves divergences
entre la legislation et la pratique, d'une part, et les conventions,
d'autre part. La commission a insiste aupres du gouvernement
pour qu'il prenne a breve echeance les dispositions necessaires
pour assurer une pleine application de la convention n° 87 comme
de la convention n° 98. Tout en rappelan􀄒 la substance de ses
conclusions de 1989, la commission a souligne qu'elle attend que
des mesures concretes allant dans le sens des commentaires de la
commission d'experts puissent etre constatees des l'annee
prochaine.
La commission a decide de mentionner ce cas dans un paragraphe
special de ce rapport.
24/57

Document no 252
CIT, 79e session, 1992, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 27/52-27/57 (Colombie)

Conférence internationale du Travail
Compte ren.u propre Z1
Soixante-dix-neuvième session, Genève, 1992
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 23
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 23
A. Observations générales et informations concernant certains pays 23
B. Observations et informations sur l'application des conventions 28
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 99
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 100
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) 101
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 101
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
102
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 103
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant les conventions nos 26, 99 et 131 et les recommandations
nos 30, 89 et 135 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant la convention n0 111 105
Jndex par pays des observations et informations contenues dans le rapport 106
27/1
27/52
Convention n" 87: Lihcrtc syndicale et protection du droit 􀀯yndical,
1948
Colombie (ratification: 1976)_ Le gouvernement a communique
les informations suivantes:
La Constitution intcrdit la suspension et la dbsolution par voie
administrative de la pcrsonnalite juridique des orgamsations syndicales.
En outre, ii convient de rappelcr que cette inkrdiction est
consacree par la loi n° 50 de 1990.
En cc qui conccrne !'obligation selon laqucllc un syndical doit
etre constituc pour Jes dcux tiers de Colombiens, !'intervention
supposee dans !'administration des syndicats due a la presence de
fonctionnaires du ministi:re aux reunions (notammen1 !ors du declcnchement
d'une greve), !'obligation d'etre ressorti􀑊sant colombien
pour etre elu ii des fonctions syndicales, la sanction acccssoirc
qu'un juge pcut infligcr a un dirigeant syndical responsable de la
dissolution d'un syndical qui consiste en !'interdiction d'exercer le
droit d'association pendant une periode maJ<imale de trois ans
ainsi que la condition d'appartenanee a la profession ou au metier
pour etre elu dirigeant syndical, le gouvcrncment s'est deja rcfcrc
amplemcnt aces questions dans sa lettre du 25 octobre 1991 adressee
au Directeur general du BIT, dont le gouvcrnement a joint en
annexe une copic.
Le gouvernement a demande dans unc communication du 9
octobrc 1991 et adressec au Directeur general qu'une convention
sur cette matiere soil adoptcc comptc tcnu de !'importance du
droit de greve. Le gouvernement regrette que le Directeur general
Iui ait communique, en date du 22 novembre 1991, que, pour des
raisons de procédure, il n'est pas possible d'inclure ce thème important
à l'ordre du jour de la Conférence inlernationale du Travail
de 1992 ou de 1993. Le gouvernement souhaite insister sur sa
demande concernant l'urgence de l'adoption par TOIT d'une convention
portant expressément sur le droit de grève ainsi que sur le
fait que ce droit ne doit pas dériver d'interprétations qui. même si
elles sont très valables, ne sont que les opinions de juristes respectables.
Dans cet ordre d'idée, il reconnaît qu'il existe des resliictions
à l'exercice du droit de grève, qui découlent du fait que le
ministre du Travail et le Président de la République peuvent
convoquer des tribunaux d'arbitrage pour résoudre les conflils
après soixante jours de grève ou lorsqu'une grève affecte l'économie
nationale considérée dans son ensemble.
A cet égard, il est significatif de mentionner la jurisprudence de
la Cour suprême de justice, qui a estimé que la loi n" 50 de 1990 est
conforme à la Constitution et qui a précisé ce qui suit;
« Essentiellement lors de ses moments d'apogée, le mouvement
syndical a toujours souhaité que le droit de grève soit un droit
absolu et illimité afin que le conflit collectif puisse être résolu
uniquement grâce à sa volonté souveraine cl inconditionnelle; cependant,
il a été reconnu que la grève affecte non seulement les
intérêts des travailleurs qui s'appuient sur elle pour arriver à leurs
fins, mais également ceux de l'entreprise et en général de l'ordre
économique qui méritent une égale protection; il était nécessaire,
par conséquent, de rechercher un équilibre entre des intérêts opposés,
ce qu'ont compris ceux qui ont élaboré la Constitution de
1936 en ne permettant pas la grève dans les services publics et en
laissant à la loi le soin de réglementer son exercice, comme l'a l'ait
très judicieusement le précepte examiné ici: l'image bien connue
des institutions industrielles désolées, abandonnées, inutiles, livrées
indélinimcnt à la détérioration et non productives, en tant
que témoins permanents d'un eonllit que personne n'a voulu résoudre
pour récupérer les biens perdus et l'emploi lui-même, a eu
pour conséquence que la loi est venue empêcher l'appauvrissement
général et le dommage social que l'obstination des parties
occasionnait, au moyen de méthodes alternatives qui laissent intacte
la protection due à tous et qui actuellement se trouve spécialement
confortée dans l'article 55 de la Conslilulion, qui dispose
«l'Etat a le devoir de promouvoir... les autres moyens pour la
solution pacifique des conflits collectifs du travail», comme l'est
précisément l'instance arbitrale (Cour suprême de justice, toutes
Chambres réunies, arrêt du 26 septembre 1991).
Pour ce qui est du droit de grève, l'article 56 de la Constitution
dispose :
« Le droit de grève est garanti, sauf dans les services essentiels
tels qu'ils sont définis par la loi.
La loi réglementera ce droit.
Une commission permanente regroupant le gouvernement, des
représentants des employeurs et des représentants des travailleurs
favorisera de bonnes relations professionnelles, contribuera au règlement
des conflits collectifs du travail et s'efforcera d'aboutir à
la concertation des politiques salariales et professionnelles. La loi
réglementera sa composition et son fonctionnement.»
Pour donner suite à ce mandat constitutionnel, le gouvernement,
par l'intermédiaire du ministère du Travail et de la Sécurité
sociale, a convoque les représentants des employeurs et des travailleurs
dans le but de conclure un accord sur la composition et
les fonctions de ladite commission permanente et a présenté, au
mois de décembre 1991, à l'Assemblée de la République un projet
de loi y relatif. Après la promulgation de la loi, la commission
permanente susmentionnée, conformément à son mandai constitutionnel
et dans le cadre de sa fonction de concertation de la
politique du travail, indiquera comment la législation devra être
adaptée aux conventions n1" 87 et 98.
En outre, un représentant gouvernemental, le ministre du Travail
et de la Sécurité sociale, a déclaré que la commission d'experts
a constaté un progrès significatif dans l'application de la convention,
même si elle a également signalé un nombre de
dispositions qui pourraient être incompatibles avec la convention.
En ce qui concerne les obligations imposées par la loi en matière
de nationalité au sujet desquelles la commission d'experts a formulé
des objections (nécessité de réunir deux tiers de membres
colombiens pour constituer un syndicat, et d'être ressortissant colombien
pour être élu à des fonctions syndicales), la nouvelle
Constitution confère aux étrangers les mêmes droits et garanties
qu'aux ressortissants nationaux mais dispose que ces droits peuvent
être réglementés par la loi. La législation ne porte atteinte ni
à la Constitution ni à la convention. Les étrangers ont le droit de
se syndicaliser, mais il leur est interdit de contrôler un syndical ou
d'être dirigeant syndical. Ces dispositions trouvent leur base dans
la souveraineté nationale, par exemple pour empêcher que des
dirigeants étrangers déclenchent une grève dans des secteurs de
l'industrie qui ont une relation avec la sécurité nationale. Il est
probable que. dans la plupart des pays, de telles normes existent.
Les centrales syndicales du pays n'ont pas soulevé d'objections
quant aux exigences relatives à la nationalité, mais la modification
des dispositions en question pourra être discutée lors de l'établissement
de la commission tripartite en matière de travail que
l'Assemblée nationale devra réglementer prochainement dans une
loi. En ce qui concerne le contrôle de l'administration interne des
syndicats et la présence des fonctionnaires publics dans les réunions
syndicales (article 486 du Code du travail), la présence de
ces derniers a pour but la vérification de la majorité qualifiée prévue
par les statuts syndicaux, par exemple pour le déclenchement
d'une grève. Souvent, les syndicats même demandent la présence
de fonctionnaires lorsque des conflits internes se produisent; dans
ce cas, le fonctionnaire a la tâche de recueillir des preuves permettant
d'éviter dans le futur de tels conflits. En ce qui concerne la
suspension pouvant aller jusqu'à trois ans, des dirigeants syndicaux
qui sont à l'origine d'une dissolution de leur syndicat (article
380 (3) du Code du travail), la loi n" 50 de 1990 a supprimé la
possibilité administrative de suspendre les dirigeants. Actuelle
ment, les autorités judiciaires sont compétentes pour une telle suspension
lorsqu'il est prouvé qu'un dirigeant syndical est responsable
de la dissolution ou de la suspension d'un syndicat. Liant
donné qu'une telle dissolution ou suspension est prononcée par
voie judiciaire, l'article 380 (3) du Code du travail n'est pas en
contradiction avec la convention. S'agissant de l'obligation d'appartenir
à la profession ou au métier considéré pour être élu dirigeant
syndical, la nature du syndicat entraîne que ses dirigeants
exercent la même profession que ses membres. Toutefois, le gouvernement
n'insiste pas sur ce point et est ouvert à un dialogue
avec les centrales syndicales; à cet égard, il demande l'assistance
technique du BIT. En ce qui concerne le droit de grève des fédérations
et des confédérations, le représentant gouvernemental a déclaré
qu'un projet de loi sur ce thème est en instance devant l'Assemblée
générale et qu'il sera discuté. Le droit de grève a connu
une évolution en Colombie. La Constitution antérieure avail reconnu
ce droit sauf dans les services publics; la nouvelle Constitution
de 1991 le limite uniquement dans les services publics essentiels
qui doivent être définis par le législateur dans une loi future.
Une concertation tripartite sur cette question sera engagée. Par
ailleurs, son gouvernement a demandé au Conseil d'administration
du BIT d'étudier la possibilité d'une future convention sur le
droit de grève parce que, actuellement, ce droit fait l'objet d'interprétations
de caractère prestidigitateur de la part de la commission
d'experts ou du Comité de la liberté syndicale. En vue de la
sécurité juridique. l'OlT doit réglementer le droit de grève. En ce
qui concerne le pouvoir du ministre du Travail et du Président de
la République d'intervenir dans un conflit (articles 448 (3). (4) et
450 (1) g) du Code du travail), il entraîne la convocation d'un
tribunal d'arbitrage obligatoire conformément aux principes des
organes de contrôle de l'OIT relatifs aux situations dans lesquelles
le droit de grève peut être restreint. Quant à la possibilité de
licencier les dirigeants syndicaux qui sont intervenus dans une
grève illégale ou qui y ont participé (article 450 (2) du Code du
travail), les organes de contrôle de l'OIT reconnaissent la légitimité
du licenciement en cas de grève illégale, et la convention
dispose que les organisalions de travailleurs doivent respecter la
légalité. Par conséquent ledit article ne porte pas atteinte à la
convention.
Les membres travailleurs se sont référés au rapport de la commission
d'experts qui a attiré l'attention sur le rapport du gouvernement,
les discussions qui se sont déroulées à la présente commission
en 1991, les rapports du Comité de la liberté syndicale
ainsi que la mission de contacts directs qui s'est effectuée en 1991.
Dans la description du contexte dans lequel se déroulait la discussion
de ce cas, ils ont rappelé le grand nombre de dirigeants
. syndicaux qui ont été assassinés ou qui ont disparu, et ils ont indiqué
que la situation ne s'était pas encore améliorée.
Le représentant gouvernemental a indiqué que les situations
relatives au maintien de l'ordre public ne relève pas de la présente
convention. Il s'est référé non seulement aux disparitions et aux
morts des syncalistes, mais également à celles d'hommes politiques,
de militaires, d'enseignants, d'enfants, et a souhaité en
conséquence que la discussion se limite aux thèmes relatifs à la
convemion.
Les membres travailleurs ont fait remarquer que la commission
d'experts s'est référée à la discussion qui s'est déroulée au sein de
la présente commission en 1991 au cours de laquelle ce problème
avait été mentionné. Ils ont fait observer que, dans leurs remarques
introductives, ils se sont référés aux disparitions et aux
morts de dirigeants syndicaux afin de décrire le contexte difficile
dans lequel se trouve la liberté syndicale en Colombie. Ils ont pris
note des informations écrites communiquées par le gouvernement
ainsi que des mesures législatives notées avec satisfaction par la
commission d'experts dans son rapport. Toutefois, ils se sont référés
aux probfèmes soufevés par les experts et qui ne sont pas
conformes à la convention. En ce qui concerne l'exigence selon
laquelle les dirigeants syndicaux doivent être colombiens, ils ont
été d'avis qu'il s'agit toujours d'une violation de la convention,
même s'il n'est pas interdit par la loi d'être membre d'un syndicat.
27/53
comme il Fa été souligné par le représcmam gouvernemental. Ils
se sont cependant félicités de la déclaration du ministre du Travail
selon laquelle le gouvernement discutera de ce problème avec les
travailleurs, el ils ont exprimé l'espoir que cette divergence entre
la législation et la convention sera prochainement éliminée. En ce
qui concerne les dispositions qui autorisent la présence des autorités
lors des assemblées générales au cours desquelles un vote sur
le déclenchement d'une grève a lieu, ils ont été d'avis que. si une
telle présence n'est pas spécifiquement réclamée par le syndicat
lui-même, elle constitue une ingérence dans les affaires internes
des syndicats et par conséquent une violation de la convention. En
ce qui concerne la suspension, pouvant aller jusqu'à trois ans. avec
privation des droits d'association, des dirigeants syndicaux qui
sont à l'origine d'une dissolution de leur syndicat, ils ont rejeté
l'argument selon lequel celle-ci se justifierait parce qu'elle est prononcée
par les autorités judiciaires el pas par le gouvernement,
étant donné que. en lout état de cause, une telle suspension est
permise par les lois du pays, et que ces lois ne sont pas conformes
à la convention. Ils ont souligné, tout comme l'avaient fait les
membres employeurs dans le contexte d'un autre cas, que les dirigeants
syndicaux ne cherchent pas une immunité vis-à-vis du droit
commun du pays, mais que la convention les protège lorsqu'ils
agissent en tant que syndicalistes, dans le respect d'une législation
qui est en conformité avec la convention. S'agissant de l'obligation
d'apparlenir à la profession ou au métier considéré pour être élu
dirigeant syndical, ils ont exprime des doutes sur la déclaration du
représentant gouvernemental selon laquelle les lois pertinentes
avaient été abrogées. Au cas où ces lois n'aient pas été abrogées et
nonobstant le fait que la plupart des dirigeants syndicaux appartienneni
à la profession ou au métier considéré, ils ont été d'avis
que la loi ne doit pas interdire aux syndicats de désigner à plein
temps des dirigeants professionnels n'appartenant pas au métier
considéré, bien qu'en général ceux-ci exercent la profession ou le
métier représenté par le syndicat. Se référant à la déclaration du
ministre selon laquelle l'interdiction de la grève dans les services
publics avait été abrogée, sauf dans les services publics essentiels,
les membres travailleurs ont fait remarquer que des differences
peuvent exister entre l'opinion de la commission d'experts et celle
du gouvernement sur la déiinition des services essentiels. Même si
la convenlion ne se réfère pas, comme il l'a été dit, d'une manière
specilique à la grève, la commission d'experts a indiqué de façon
relativement claire que la grève doit être permise lorsque les travailleurs
agissent pour défendre leurs intérêts économiques et sociaux
et que toute tentative de restriction de ce droit constitue une
violation de la convention. Sans vouloir entrer dans une discussion
générale sur le droit de grève, ils ont insisté pour qu'il soit noté
que les membres travailleurs partagent l'interprétation de la convention
à ce sujet, formulée par la commission d'experts depuis de
nombreuses années. Ils ont demande au représentant gouvernenienlal
d'indiquer à la commission d'experts quelle est la définition
précise des services publics afin qu'elle puisse être en mesure
d'évaluer l'étendue de cette exception. Ils ont souligné le principe
établi par la commission d'experts selon lequel, au cas où la grève
est restreinte voire interdite dans les services essentiels, des garanties
compensatoires appropriées telles qu'une procédure impartiale
et rapide de conciliation, de médiation ou d'arbitrage devraient
être mises à la disposition de travailleurs. En ce qui
concerne la question des grèves illégales, ils ont été d'avis que le
problème n'est pas constitue par des grèves qui sont considérées
illégales par des lois conformes à la convention, mais par des lois
qui définissent une grève illégale de façon très large comme le font
la législation et la Constitution de la Colombie. Ils se sont félicités
du fait que. lors de la mission de contacts directs, en septembre
1991, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a exprimé le
désir de demander officiellement l'assistance technique du BIT
dans le processus de révision de la législation du travail, et ils ont
noté que la commission d'experts en avait pris note avec intérêt.
Ils ont demandé que les conclusions de la présente commission
fassent état de leur espoir que, suite à cette assistance, les lois
nationales seront dans un proche avenir mises en pleine conformité
avec la convention.
Les membres employeurs ont fait remarquer que le rapport de
la commission d'experts sur ce cas peut se diviser en trois parties.
La première partie porte sur les améliorations réalisées quant à la
conformité de la législation nationale avec la convention. Il y a
deux ans. la présente commission a estimé nécessaire de consacrer
un paragraphe spécial à la Colombie; aujourd'hui, en revanche, un
certain nombre de cas de progrès peuvent être constates. La seconde
partie indique un certain nombre de points sur lesquels des
questions peuvent être posées ou au sujet desquelles les experts
sont d'avis qu'il v a toujours infraction aux dispositions de la convention.
En ce qui concerne l'obligation selon laquelle un syndicat
doit être constitué pour les deux tiers de Colombiens et les dirigeants
syndicaux doivent être Colombiens, le représentant gouvernemental
a déclaré que la Constitutioin de son pays laisse cette
question ouverte mais que le Code du travail contient des dispositions
qui ressortissent à la souveraineté du pays, et il a supposé
que la situation est semblable dans d'autres pays. A cet égard, les
membres employeurs ont fait remarquer que, suite à la législation
des Communautés européennes et les directives européennes, la
discrimination fondée sur la nationalité n'existe plus en Europe.
Etant donné que le gouvernement s'est déclaré prêt à établir un
dialogue avec les travailleurs et les employeurs à ce sujet, sa position
n'est pas rigide et des changemenls sont possibles. En ce qui
concerne la suspension des dirigeants syndicaux qui sont à l'origine
d'une dissolution de leur syndicat, les membres employeurs
ont exprimé des doutes sur la question de savoir si la protection
des dirigeants syndicaux est véritablement assurée par une telle
disposition et ils ont été d'avis qu'il appartient au gouvernement
de réfléchir à ce problème et d'étudier des modifications éventuelles
de la loi. Quant à l'obligation d'appartenir à la profession
ou au métier considérés pour être élu dirigeant syndical, ils ont
exprimé l'avis qu'il s'agit d'une réglementation à terme qui pourrait
être stipulée par le syndicat et qu'il n'est par conséquent pas
nécessaire de réglementer celte question en détail. Etant donné la
déclaration du représentant gouvernemental selon lequel le gouvernement
est prêt à procéder à des consultations également à ce
sujet, ils ont estimé que la commission tripartite à laquelle il s'est
référé pourrait être l'organisme approprié pour discuter do ces
questions. S'agissant de la question relative aux licenciements
massifs de travailleurs dans le secteur public et à l'augmentation
du nombre de contrats de courte durée dans le secteur privé, les
membres employeurs ont déclaré qu'il peut y avoir d'autres raisons
que celle invoquée par les experts qui se réfèrent à l'affaiblissement
du mouvement syndical, justifiant ces mesures. Ils ont
par conséquent estimé qu'il n'était pas nécessaire de continuer la
discussion sur ce point, La troisième partie du rapport porte sur
les restriclions au droit de grève. Le représentant gouvernemental
a indiqué que la convention ne contient pas de disposition précise
à cet égard et que l'OIT devrait élaborer un nouvel instrument sur
les droits et devoirs relatifs à la grève ainsi que sur ses restrictions.
Les membres employeurs ont fait observer qu'un projet de résolution
contenant des éléments analogues, qui a été proposé cette
année, n'a été retenu de manière prioritaire. Il faut donc, au stade
actuel, s'en tenir à la convention qui a été le point de départ de la
philosophie de la commission d'experts. Se référant à des prises de
position antérieures, ils ont prié la commission d'experts de bien
vouloir réfléchir à nouveau à leur argumentation sur le droit de
grève puisque les résultats auxquels elle est arrivée ne relèvent pas
directement de la convenlion. Comme la commission d'experts l'a
déclaré elle-même ailleurs dans son rapport, les membres employeurs
estiment que la convention n" 87 doit être interprétée
exclusivement au sens de la Convention de Vienne sur le droit des
traités, en particulier de ses articles 31 et 32 qui disposent qu'outre
le contexte il faut tenir eomple. de manière égale: a) de tout accord
ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation
du traité ou de l'application de ses dispositions; h) de toute
pratique ultérieurement suivie dans l'application du traité par laquelle
est établi l'accord des parties à l'égard de l'interprétation
du traité. Actuellement, le rapport de la commission d'experts
contient un très grand nombre d'éléments concernant l'application
de la convention dans le monde entier et il ressort de ces éléments
que la situation est très différente selon les pays et qu'il n'existe
pas d'application commune relative à la pratique cl aux restrictions
du droit de grève. Selon les critères de la Convention de
Vienne, les critères d'interprétation appliqués par les experts ne
sont pas corrects. Il ne faut pas oublier que la grève ne porte pas
seulement atteinte aux droits des employeurs, mais qu'elle touche
également les intérêts des tiers; pour cette raison, la définition de
l'ampleur et des restrictions de cette grève ne saurait être laissée à
la libre discrétion d'une seule partie. Seul l'Etat doit être responsable
de la détermination de l'étendue du droit des grèves et des
limitations à celui-ci. Les membres employeurs ont été d'avis que
ce cas, parmi d'autres, fournit de nouveau une occasion de prier
instamment la commission d'experts de réfléchir une fois de plus
sur ses conclusions. Le fait qu'elle formule, à l'instar du Comité de
la liberté syndicale, les mêmes conclusions depuis de nombreuses
années ne fonde pas la justesse de celles-ci ni la déclaration
qu'elles peuvent être dérivées de la convention n" 87. Enfin, les
membres employeurs ont exprimé leur désaccord avec les conclusions
de la commission d'experts sur les restrictions du droit de
grève en Colombie,
Un membre travailleur de la Colombie a indique qu'au cours
de ce mois de juin neuf syndicalistes ont été assassinés dans son
pays et que, contrairement à ce qu'a déclaré le ministre du Travail,
la situation syndicale en Colombie est très grave tant au niveau de
la législation (comme l'avaient signalé les membres travailleurs en
1991 en se référant plus particulièrement à la loi n" 50 de 1990)
qu'au niveau de la pratique. Le gouvernement intervient dans la
vie syndicale par l'obligation juridique imposée aux syndicats d'inviter
des fonctionnaires du ministère du Travail aux assemblées
générales. Ceux-ci vont jusqu'à demander à tous les travailleurs de
27/54
présenter leur carle d'identité lors du vote sur le déclenchement
d'une grève. Les syndicats sont obligés de se réunir pendant la
nuit et en cachette afin d'éviter des représailles. Même si en vertu
de la nouvelle législation la personnalité juridique des syndicats
s'obtient automatiquement, le ministère continue à les approuver
d'une façon discrétionnaire. La généralisation des contrats de
courte durée (entre quinze ¡ours et trois mois) constitue une grave
entrave à la liberté syndicale parce que les travailleurs affectés
savent que leur contrat ne sera pas renouvelé s'ils s'affilient à un
syndicat. La grande majorité des grèves sont déclarées illégales, y
compris celles dans les services qui ne sont manifestement pas
essentiels. Tel a été le sort de la grève déclenchée à l'Hôtel Tcguendama
suite au licenciement de 24 travailleurs et nonobstant
un accord dans le sens contraire signé dans le cadre du procès
verbal du règlement du conllit. Récemment, pour avoir déclenché
une grève dans la société des télécommunications, des dirigeants
syndicaux ont été jugés en droit pénal pour sabotage et, par la
suite, leur cas a été transmis à des juges «anonymes», chargés de
traiter les délits de terrorisme. En outre, 27 travailleurs ont été
menacés de licenciemenl et le président de l'entreprise ainsi que le
ministre du Travail ont demandé l'annulation de la personnalité
juridique du syndicat et la suspension de leurs fonctions pendant
trois ans des dirigeants syndicaux. Dans le secteur pétrolier, un
syndicat s'est vu imposer une amende de plusieurs millions suite à
une grève. Dans de nombreux cas, les grèves avaient été déclarées
pour revendiquer le droit à la vie des dirigeants syndicaux. Enfin,
étant donné les violations graves et multiples de la liberté syndicale
dans son pays, l'orateur a demandé que ce cas soit mentionné
dans un paragraphe spécial.
Un autre membre travailleur de la Colombie a déclaré que le
droit de se syndiquer n'existe pas vraiment en Colombie où la
législation et la pratique présentent les éléments suivants qui
constituent des atteintes directes ou indirectes à la liberté syndicale:
les contrats de travail sont dissimulés sous forme de contrats
civils ou commerciaux : des contrats de très courte durée, dont le
nombre est actuellement plus de 1 OSOOOO, sont permis; le droit de
recours, pour être réintégrés dans leur poste, qui était ouvert aux
travailleurs avant plus de dix ans d'ancienneté et ayant été licenciés
sans raison, a été abrogé; une période de grâce de dix ans est
accordée aux entreprises pendant laquelle celles-ci ne se déclarent
pas l'unité de négociation vis-à-vis de leurs filiales, affaiblissant
ainsi les avantages obtenus par la négociation collective dont doivent
bénéficier les organisations syndicales; le travail intermédiaire
est facilité et ainsi est favorisé l'établissement d'entreprises
fournissant des services temporaires, empêchant l'afliliation syndicale
; des accords collectifs de travail sont conclus avec les travailleurs
non syndiqués; la loi n'1 60 et ses décrets d'application créent
des systèmes de licenciement et de retraite massifs sur hase de
chantage et favorisent ainsi la retraite, accompagnée d'une indemnisation
dérisoire, des travailleurs de l'Etat (4()()01)() retraites et
licenciements de ce genre sont attendus lors des deux années à
venir) ; dans le but de rendre la grève illégale, tout service public
est déclaré essentiel, y compris l'irrigation des terres, les secteurs
du ciment, financier et pétrolier; récemment, il a été permis aux
patrons d'introduire des recours en droit pénal en cas de grève
pour empêcher l'exercice du droit de travail; de nombreuses
sommes équivalentes à 80 mois de salaire minimum ont été imposées
au Syndicat des travailleurs du secteur pétrolier pour avoir
organisé des arrêts de travail entre deux et trois heures; et la grève
est considérée comme un délit de terrorisme cl est soumise à des
juges «anonymes» et à des procédures lors desquelles il n'est
même pas permis d'avoir accès aux dossiers. Etant donné qu'il n'y
a pas de conformité avec la convention, que des progrès ne peuvent
pas être constatés et que depuis l'année passée 102 dirigeants
et membres syndicaux ont été assassinés, l'orateur a demandé que
ce cas soit inclus dans un paragraphe spécial et que le BIT fournisse
une assistance technique pour la rédaction de la future législation
du travail.
Un membre travailleur de l'Espagne a déclaré que les améliorations
de la législation qui ont été signalées par la commission
d'experts doivent être évaluées dans leur propre contexte qui est
caractérisé par un niveau peu élevé du respect des droits syndicaux.
L'orateur a été d'avis que les dispositions de la législation
relatives au contrôle de l'administartion interne des syndicats, y
compris la présence de fonctionnaires dans les assemblées générales
qui suppose toute absence de confiance dans les syndicats,
qui fait preuve de soupçon à leur égard et qui constitue une discrimination
vis-à-vis des autres associations, sont inadmissibles. Il a
fait remarquer que les syndicats ne constituent pas un élément
pervers mais qu'ils sont nécessaires pour le progrès du pays,
comme le prouvent les quarante dernières années de triparlisme
en Europe. D'autre part, la convention confère les mêmes droits
aux fédérations et confédérations qu'aux syndicats de base et également,
pour cette raison, il est inadmissible que la législation
interdise la grève aux fédérations et aux confédérations, surtout à
la lumière du fait que ce droit fait partie du contenu essentiel de la
liberté syndicale. Se référant aux déclarations du ministre du Travail
sur i'interprélalion du droit de grève par la commission d'experts,
il a refusé d'accepter que ceux-ci soient des prestidigitateurs;
au contraire les experts, tout comme les juges ou les
magistrats d'un tribunal constitutionnel, seront toujours indispensables
et définissent le contenu des droits. Enfin, il a déclaré qu'un
gouvernement qui ne garantit pas la vie n'est pas digne de ce nom
et qu'en Colombie ont lieu, comme l'ont signalé des orateurs antérieurs,
des assassinats et des tortures de dirigeants syndicaux, violations
les plus extrêmes de la convention.
Un membre travailleur de la tirèce a nié que dans tous les pays
des restrictions aux droits syndicaux des étrangers existent sous le
prétexte que ceux-ci constituent des menaces éventuelles à la sécurité
du pays, et il a mentionné les cas de la Belgique et de
l'Allemagne où les travailleurs immigrés font partie du comité
d'entreprise. La question de la sécurité intérieure en cas de grève
se pose uniquement dans certains secteurs concrets. La législation
doit être mise en conformité avec la convention et il faut que le
gouvernement indique ses intentions à cet égard et demande l'assistance
technique du BIT.
Un membre travailleur de la France a déclaré que les interventions
faites précédemment par les syndicalistes colombiens démontraient,
s'il en était encore besoin, l'intensité des difficultés
auxquelles le mouvement syndical se trouve actuellement
confronté en Colombie. Il a relevé les limitations faites à la syndicalisation
dans ce pays: le problème des travailleurs étrangers,
évoqué par le membre travailleur de la Grèce ; celui des travailleurs
à temps partiel, dont le nombre est en constante augmentation
; et l'immixtion du pouvoir politique dans le mouvement syndical,
notamment au travers de la présence des autorités dans les
assemblées générales réunies pour voter le déclenchement des
grèves. Quant à la demande du porte-parole des membres employeurs
pour que l'OIT se prononce sur l'adoption d'une convention
relative au droit de grève, il a déclaré que le débat en cours
n'était pas le moment idéal pour vouloir se référer au rapport et à
l'interprétation des experts en ce qui concerne l'étendue des libertés
syndicales. Le droit d'organiser librement leurs activités et de
formuler leur programme d'action, prévu par l'article 3 de la convention,
est une prérogative des organisations syndicales, raison
pour laquelle on n'a pas voulu, depuis 1919, tenter d'en freiner ou
d'en limiter la portée au travers d'une convention. L'encadrement
strict du droit de grève doit être évité et les dispositions de la
convention n" 87 respectées. Enfin, il a souligné que la meilleure
façon d'aider le gouvernement à faire évoluer sa législation c'était
de formuler des exigences fermes lors des conclusions de ce débat.
Un membre gouvernemental de l'Allemagne a déclaré que ses
commentaires ne se référaient qu'au rapport de la commission
d'experts sur ce cas ainsi qu'aux déclarations faites oralement et
par écrit; elles ne pouvaient se référer qu'à certains événements
menlionnés par les orateurs qui étaient intervenus avant lui, événements
certes choquants mais difficiles à vérifier par la présente
commission à ce stade. Il a noté que des progrès considérables ont
été accomplis, même si des divergences importantes demeurent
entre la législation nationale et la convention. Cependant, il a insisté
sur le l'ait que ce point de vue ne s'appliquait pas à tout ce qui
avait été dit ni à toutes les conclusions de la commission d'experts
concernant les restrictions du droit de grève dans le service public.
Un autre membre travailleur de Colombie a déclaré que dans
son pays il n'y avait ni justice, ni démocratie, ni syndicalisme libre
et qu'il était dans l'obligation de parler devant la commission, car
se taire serait trahir la confiance de ceux qui l'ont envoyé devant
la présente commission pour défendre leurs droits. Dans son pays,
il existe la justice que l'on appelle sans visage, laquelle permet de
juger quelqu'un sans que celui-ci sache qui le juge, qui l'accuse et
de quoi il est accusé. Plusieurs dirigeants du syndicat de la Compagnie
nationale des télécommunications qui ont déclenché une grève
lorsqu'on a voulu privatiser cette entreprise sont jugés à l'heure
actuelle par des juges anonymes sans visage. Cette année de célébration
du cinquième centenaire de la découverte de l'Amérique,
des Indiens ont été assassinés pour le fait qu'ils cherchaient des
lopins de terre où travailler, une terre qui leur a toujours appartenu.
Il a déclaré qu'il considérait que le gouvernement de la Colombie
méritait que ce cas soit inclus dans un paragraphe spécial.
Un membre travailleur de l'Uruguay s'est référé aux conséquences
des politiques de reconversion sauvage et de privatisation
des entreprises publiques. Il a déclare que le droit de grève est un
droit inaliénable; l'outil qu'ont les travailleurs pour se défendre.
Dès lors, les restrictions à ce droit signifient couper le plus important
de leurs possibilités de défense. En se référant à la déclaration
du représentant gouvernemental sur la nécessité d'adopter
une norme internationale sur le droit de grève, il s'est demandé si
ce que l'on voulait c'était d'imposer des restrictions, et il a indiqué
que le Comité de la liberté syndicale avait déclaré que les limitations
du droit de grève ne se justifient que dans les cas où tes
grèves ne sont pas pacifiques. Il a rappelé qu'en Colombie on
assassine des dirigeants syndicaux, la grève est interdite, il n'y a
27/55
pas de liberté syndicale et la convention n" 87 est violée. Par conséquent,
il a demandé à la commission d'inclure ce cas dans un
paragraphe spécial.
Le représentant gouvernemental a déclaré que son pays garantit
la liberté syndicale aux étrangers, mais qu'il ne permet pas
qu'un groupe d'étrangers puisse dominer un syndicat et déclencher
la grève. Quant à la définition claire et constitutionnelle du
droit de grève, il a déclaré que la Constitution garantit ce droit,
excepté dans les services essentiels, mais que ces services n'ont pas
encore été définis.'Cette tâche incombe au Congrès. Il a déclaré
qu'il considère qu'en matière de droit de grève la situation varie
selon les pays en fonction de leur développement. L'allusion faite
à la possibilité d'adopter un instrument international de cette nature
ne signifie pas que son gouvernement souhaite limiter le droit
de grève. Ce droit se trouve limité, y compris par les experts et le
Comité de la liberté syndicale, lequel a établi qu'il ne peut pas y
avoir de grève ni dans les services publics essentiels ni dans la
fonction publique. Son idée d'adopter un instrument international
sur le droit de grève vise à ce qu'une convention impose une limite
à ce droit. En se référant à l'intervention du membre travailleur
de l'Espagne, selon laquelle le droit à la vie ne serait pas respecté
en Colombie, il a insisté sur le fait que son gouvernement respecte
ce droit non seulement en appliquant des instruments internationaux
relatifs aux droits de l'homme, mais également en application
de la Constitution nationale, 11 a refuse énergiquement cette
assertion au nom de son gouvernement. Il s'est référé à la situation
difficile de son pays, terrain par excellence des narcotrafiquants,
mais a refusé l'insinuation selon laquelle l'assassinat d'un
certain nombre d'Indiens serait dû à l'inaction du gouvernement.
Celui-ci lutte contre cette situation et il lui semble que d'autres
gouvernements, comme par exemple l'Espagne ou le Royaume-
Uni, connaissent des situations similaires, en ce qui concerne les
activités terroristes, sans que l'on puisse penser qu'ils ne respectent
pas le droit à la vie.
Un membre travailleur de la Colombie a déclaré que le gouvernement
n'avait pas pu répondre aux questions qui lui avaient été
posées par rapport à la situation du mouvement syndical et a réitéré
sa demande, à savoir quels sont les services publics essentiels
en Colombie, car l'absence d'une délinition dans la législation
laisse au gouvernement le pouvoir discrétionnaire de déterminer
ces services.
Lin membre travailleur de l'Equateur a déclaré qu'il partageait
les différentes opinions exprimées au sein de la commission
concernant les rapports de la commission d'experts selon lesquelles
certains progrès sur le plan juridique ont été enregistrés en
Colombie, Cependant, il a remarqué que les membres travailleurs
ont souligné, dans leurs interventions, la divergence existant entre
ces dispositions cl la pratique. Il s'est référé par la suite à l'intervention
des fonctionnaires publies dans les réunions syndicales,
lesquelles, selon le représentant gouvernemental, visent à garantir
la démocratie des décisions adoptées, A son avis, il s'agit d'une
violation llagranle de la convention. Il a déclare qu'il considérait
que le gouvernement aurait intérêt à supprimer cette participation
dans les réunions syndicales, car ce fait peut donner lieu à penser
qu'il y aurait un rapport avec les cas d'assassinat des dirigeants
syndicaux. En effet, une relation de cause à effet peut être établie
entre ces deux faits. Il a fait remarquer qu'actuellement les droits
des travailleurs garantis dans les conventions de l'OIT semblent
rétrocéder. Dans ce contexte, il y précisé que la liberté syndicale
qui ne s'accompagne pas du droit de grève en tant quecomplément
indispensable est une liberté syndicale inexistante.
Un membre travailleur du Chili a déclaré que les syndicalistes
chiliens ont une grande expérience en matière de lois restrictives
du mouvement syndical. Après avoir entendu les syndicalistes colombiens
et ceux qui exercent le pouvoir politique dans ce pays, il
a déclaré qu'il considérait que l'on était devant une réalité propre
à l'Amérique latine. Les lois restrictives existant en Colombie
existaient également au Chili et étaient caractéristiques de
l'époque de la dictature, La Colombie est un pays qui s'efforce de
perfectionner l'institution de la démocratie, mais cela ne peut se
faire qu'avec les travailleurs. Les travailleurs libres non seulement
font la grève, mais également construisent le pays avec les employeurs
et les hommes politiques, 11 a déclaré qu'il souhaitait que
le représentant gouvernemental indique si les autorités ont réellement
la volonté de respecter la convention, 11 a exprimé l'espoir
qu'en 1993 on ne parlera plus d'assassinat et qu'il n'y aura plus de
représentant gouvernemental essayant de donner une explication.
Il a déclaré qu'il espérait également que l'année prochaine les
droits des travailleurs et les droits de l'homme soient mieux respectés
afin que les travailleurs puissent remplir leur rôle dans le
développement du pays.
Un membre travailleur de la Grèce a déclaré qu'il devait y
avoir eu un malentendu, car personne n'avait confondu le pouvoir
politique et le pouvoir judiciaire. Celui-ci, dans tous les pays démocratiques,
ne fait qu'interpréter et faire appliquer les lois. Ce
qu'il est demandé au représentant gouvernemental, c'est de changer
sa législation pour la mettre en conformité avec la convention.
En outre, il a demandé au gouvernement si celui-ci comptait solliciter
une aide technique au BIT à cette fin.
Le membre travailleur de l'Espagne, se référant à l'intervention
du représentant gouvernemental, a indiqué que la différence
essentielle entre ce qui se passe en Espagne et en Colombie réside
dans le fait qu'en Espagne on sait qui commet les assassinats et les
actes de terrorisme, L'Etat se charge de la répression de ces assassinats
avec beaucoup de succès. Il a demandé au représentant gouvernemental
d'indiquer: quand le contrôle de l'administration
exercé sur le mouvement syndical par la présence d'un fonctionnaire
lors des réunions syndicales disparaîtra et quand les confédérations
se verront reconnaître le droit d'appeler à la grève.
Les membres travailleurs ont déclaré que les membres travailleurs
colombiens avaient fourni des informations utiles sur les
types de grèves qui étaient interdites, et considérées comme ayant
eu lieu dans des «services essentiels» dans leur pays, notamment
les grèves dans l'hôtellerie et dans l'industrie pétrolière. Ils ont
observé qu'une telle interprétation des termes «services essentiels
» ne constituait pas une application correcte des principes de
la convention. Ils ont accepté qu'en général une distinelion est
admise entre le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire; selon
cette distinelion. le gouvernement établit les lois tandis que le
pouvoir judiciaire les applique. Ils ont toutefois signalé que. si la
loi était incorrecte, le gouvernement ne pourrait s'en remettre au
pouvoir judiciaire et invoquer son indépendance pour justilîer
l'absence d'action, A leur avis, la loi est incorrecte et doit être
changée. Le gouvernement s'est référé à des actes de terrorisme
qui ont lieu en Espagne, au Royaume-Uni et aux Etals-Unis, cl
qui violaient le droit à la vie. Les membres travailleurs ont indiqué
que, si des centaines de syndicalistes disparaissaient ou pire encore
étaient assassinés toutes les années dans ces pays, il ne pouvait
y avoir de doute sur le fait que ces événements intéressent la
présente commission et font l'objet d'une importante discussion. 11
existe des escadrons de la mort qui opèrent en Colombie et qui
tuent des syndicalistes. Ce fait ne peut pas être ignoré. Ils ont
déclaré qu'ils n'estimaient pas utile de rouvrir le débat sur la convention
n" 87 cl le droit de grève. Ils ont noté qu'une résolution au
sujet de cette question avait été soumise à la Commission des
résolutions, mais qu'elle n'a pas reçu de première priorité, A leur
avis, cela indique que les membres travailleurs et de nombreux
membres gouvernementaux présents à cette Conférence ont estimé
qu'un examen plus détaillé de ces points ne sérail pas utile, et
que certainement le travail de la présente commission risquerait
de devenir chaotique au cours d'un examen qui pourrait durer
plusieurs années. Les gouvernements qui ont strictement suivi les
interprétations de la commission d'experts relatives au droit de
grève pourraient se poser des questions sur la justesse des mesures
qu'ils ont pris aux lins d'appliquer les principes de la convention si
cette question devenait l'objet d'un long examen. L'opinion de la
commission d'experts à ce sujet a été claire depuis des décennies
et n'avait pas été mise en question sauf depuis les deux dernières
années par les membres employeurs et par le gouvernement de la
Colombie. Les membres travailleurs ont suggéré de cemander au
gouvernement s'il était prêt à accepter l'assistance technique du
BIT. Bien qu'ils aient remarqué des signes positifs concernant des
actions visant à mettre la législation nationale en coniormité avec
la convention, ils ont déclaré qu'ils souhaitent que les conclusions
de la commission soient formulées d'une façon assez ferme de
sorte qu'il soit établi que le gouvernement doit encore accomplir
un long chemin pour mettre sa législation en conformité avec la
convention.
Les membres employeurs ont déclaré que, malgré les divers
problèmes auxquels est confrontée la Colombie, ce gouvernement
s'est efforcé d'adopter des mesures positives en ce qui concerne la
convention, ce qui a conduit la commission d'experts à considérer
ce cas comme ayant enregistré des progrès. Se référant à la distinction
entre la loi et l'interprétation de la loi. ils ont fait remarquer
que, lorsque la loi n'est pas claire ou qu'elle contient des
échappatoires, l'interprétafion qui est faite de la loi devient indépendante
au fur et à mesure qu'on s'efforce de clarifier le
contenu des textes. Cela est également vrai de la convention n" 87,
au sujet de laquelle la commission d'experls a développé une jurisprudence.
Cette jurisprudence est extrêmement favorable aux Iravailleurs.
Cependant selon eux elle ne découle pas de la convention.
Toutefois, quand la commission d'experts fait de longues
déclarations sur le droit de grève et sur les restrictions à ce droit,
cette commission doit les examiner,
La commission a pris dûment note des informations écrites et
orales fournies par le gouvernement. Elle a également pris note
des progrès réalisés en conformité avec la convention et se considère
dans l'obligation de rappeler qu'il demeure des points soulevés
par la commission d'experts où la loi est en contradiction avec
la convention, La commission a noté, cependant, que le gouvernement
était en train de créer une commission tripartite pour préparer
un projet de loi qu'il devrait soumettre au parlement. Elle a
27/56
egalcmcnt pris note de !'intention du gouvcrnement de demander
!'assistance technique du BIT. La commission dcmcurc prcoccupee
par la situation. pas sculcment sur le plan juridique, existante
dans le pays. Par consequent, cllc a instamment pric le gouverncment
de prendre toutcs les mesurcs n.;ccssairc, pour mettrc
sa legislation en complete conformitc avcc la convention dans lcs
mcillcur􀙐 dcl.iis afin quc la commission puisse !'examiner pkine-
111ent !ors de sa prochaine session.
27/57

Document no 253
CIT, 79e session, 1992, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 27/62-27/63 (Honduras)

Conférence internationale du Travail
Compte ren.u propre Z1
Soixante-dix-neuvième session, Genève, 1992
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 23
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 23
A. Observations générales et informations concernant certains pays 23
B. Observations et informations sur l'application des conventions 28
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 99
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 100
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) 101
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 101
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
102
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 103
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant les conventions nos 26, 99 et 131 et les recommandations
nos 30, 89 et 135 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant la convention n0 111 105
Jndex par pays des observations et informations contenues dans le rapport 106
27/1
27/62
1/rmdura.1· (ratification : 1 956). Le gouvernemcnt a ,·ommuniquc
les informations suivantcs :
Le gouvcrncmcnt est conscient de la ncccssite de reformer son
Code du travail afin de le meure en conformitc avec les
conventions
ratilices et avec !'evolution qui s'est opcrec dans la
socicte. La volontc du gouvernement au sujet de ces
changcmcnts a cte exprimee de manicrc particulicrc par le
President de la Rcpubliquc
en di\'crscs occasions, et son
interct s'cst traduit par la creation d'unc commission speciale au
scin de laquelle le gouverncmcnt
intervicnt commc
coordonnatcur en la pcrsonnc du viccministrc
du Travail et de
la Prevoyance sociale, conjoi11temen1 avcc les employeurs prives
et les travaillcurs. La volonte du gouverncmcnt
est d"assurcr ccs
changcmcnts ainsi quc tous ceux qui interviendront sur le plan
tripartite. aussi loin qu"il scra possible, avcc !"intention
d"cntreprendre unc concertation de tous lcs scctcurs
intercsscs.
Le gouverncment a mis en place cet1e action parallelemcnt
au
projet dcnommc « Modernisation et rcnforcement institutionncls
de !"administration du travail a J'appui du programme
de
reorganisation economique ,,, dont cette commission a eu
connaissance. Les ohjectifs de cc projet concordcnt avec ccux de
la commission speciale. Ccpcndant, le gouvernement comprend la
preoccupation de la commission au sujct du temps ecoule depuis
la prcmicrc ohscrvation de la commission d'experts (des annfrs )
alors que ks n:formcs ncccssaires n·ont pas ctc cntrcpriscs. Le
gouvcrncmcnt continuera ii informer la comm i!\.􀠿ion d'cxpcrts pcrio<liqucment
sur lcs progrcs qu'clle a accomplis.
En out re, w, rcprcscntant gouve rncmental. le ministre du Travail
et de la Prcvoyancc socialc. aprcs s'ctre relfre aux problcmes
considcrahlcs dont souffre son pays dans tous lc.:s domaincs. a indique
quc son gouvcrnt!mt::nt encourage le dialogue et la conccrtation
avec tous lcs scctcurs. Se n: ferant a l'ohscrvation de la commission
d'experts, ii a admis quc quclques contradictions existent
entre certains articles du Code du travail et les dispo,itions de la
convention. hien que ·ces dilfcrcnces portent ,ur des points sccondaires.
Pour declarer unc greve . par cxemplc, ii est neces􀡀aire
de rcunir un certain pourccntagc de travaillcurs ou. pour cntaincs
cntrcprises puhliqucs. d'obtcnir J'autorisation des autori tC-s. Le
droil de gri:vc n·cst en rcv:mche p;is inlerdit. Etant donne qu'il est
inutilc de legiferer de rac;on ahstraitc et d' elahorer des normcs
idcalcs. son go11vernemcnt a decide quc !'adoption d·un nouveau
Code du travail ou de rcformcs ,uhstanticllcs de cl'iui-ci doit ,e
baser sur et ctre le l'ruit d·unc conccrt ation dans le pays et quc.
d,rns ce proccssus, ii fa ut tenir complc de, rccom mandations de la
commission d'experts et considerer !'assistance o!Tcrtc par le BIT.
Dc11x seminaircs ont ctc cffectucs et ont ctc hautcmcnt producti!'s
dans la mcsurc ou ils ont perm is de dcgagcr les prcmicrc, i ndications
relative􀡁 ii la volonlc des di!Terents scctcurs. A fin de modilicr
la structure de la legislation du travail ainsi que de donncr suite
aux reformes suggcrccs par la commission d'cxpcrts pour ahoutir
a une conformit6 de la legislation avcc la conven tion. unc commission
trip:1rtitc. prcsidcc par le vice- ministrc du Trava il. " cte misc
en place et ks resultuts qu'dk a ohtcnus pourront etn: constatcs
au cours de cellc annfr. Son gouvcrnement communiqucra scs
observations. accompagnccs de prcuvcs concluantcs. relative􀡂 aux
plaintcs en i11stance devant le Comitc de la libcrte syndicalc. II a
soul igne le desir de son gouvcrnemcnl de rnopcrer avcc le BIT.
Les mcmbrcs trnvailleurs sc sonl l'e licitcs des informations
communiquce, par le ministre du Travail selon lc􀡃quellcs unc
commission tripartite a cte ctahlie en vuc d'ctudier lcs modilicatinns
ncccssa ires du Code du travail pour mettre la legislation en
pleine eon l'orm itc avcc la conwntion. lls sc so11t cgalcment !'clicites
des informations sur les consultations rclalivcs a t'Cs questions
quc le gouvernemcnt a cues avcc le BIT. Tout en nvtant que ccs
devcloppcmcnts sont cncourageants, ils ont rnppelc quc la commisison
d'experls rorm ule dcpuis de nomhreuses annfrs des commentaircs
sur pl u􀡄icurs points <:t quc des 111csurcs lcgblativc, pour
modilicr le Code du travail n·om toujours pas ctc adoptccs. Sc
rercrant au langag.c scvi:re employc par la commi􀡅ion d'cxperts
dans son rapport. ils ont rappclc au gouvcrnemcnt la necessitc de
tenir comptc des commcntaires formulcs par lcs experts. y
compris sur les sept points pour lc:squcl􀡆 ib 0111 M>Uhaite des modilications
de la legislation. afin de l'harrnoni,er avcc la convention.
II conv icnt de m􀡇 1dilier l'actuel Code du travail. C'onsi deranl quc
la convention a ctc ratilice ii y a longtcmps. ils ont dcm;mdc instammcnt
au gouvcrncmcnt de s'ellorccr d'adoptcr dans lcs meillcurs
d6lais des textcs lcgi,latif􀡈 pour modifier le Code du travail
ainsi quc de garnntir leur plcine application dans la pratiquc.
Les memhres employeurs 0111 cstimt' quc k, sept points qui on t
fait l'ohjet de commentaircs de In comrnis,ion d'cxperls n·ont pas
le meme poids. En diet. !'interdiction pour lcs travaillcurs des
petites exploitations agricolcs ou d'clcvage de s'a rlilicr ii un syndical.
!'interdiction de !'existence de plus d'un syndical d'cntrcprise.
ou encore !'ex igence pour lcs dirigcanls syndicaux ll'avoir cxerce
pendant plu, de 􀡉ix mois la prokssion ou le ,rn:ticr rcprese ntc pur
le syndical , ,ont des violations du tcxll! mcmc de la convention,
Les mcmhrcs cmploycurs ont par consi;quent ete d'accord :ivcc lcs
commentaires formulcs sur ccs points par lcs experts et ont estimc.
comme ccux-ci, quc le gouwrnement doi1 prcndre les mesurcs
necessaircs pour mcttrc sa legislation en conformitc avcc la
convention. lb ont egalemcnt cxprim0 l'e:;poir quc le gouvcrnemcnt
proccdcra aux modifications de la lcgislmion dans :.in prochc
avenir. Les autres points critiques par la commbsion d'cxpcrt􀡊. en
rcvanche, nc pcuvcnt pas ctre dirL' Ctcment derives de la convention.
Lors de !'elaboration de cellc-ci en 1948. la question de J'introduction
du droit de gri:vc. par cxcmpk. n'a pas ctc rc:tenuc
dans le lt!xte. Les commentaires de􀡋 experts ,ur la legislation nationalc
relative aux services cssc nticls cl aux autrcs aspects du
droit de grcvc nc sont done pas fondcs dans la convention mcmc.
En cc qui conccnc !'exigence lcgalc d'unc majoritc des dcux tiers
d' unc asscmblec gcncrale d'un syndical pour dcclan:r une greve.
lcs mt:mhres cm ploycurs ont fail rcmarquer quc. dans de nomhrcux
pays. hi majoritc pour declarer une grcvc est rcglcc par la
Joi ou par les statuts 􀡌yndicaux et que. en tout cas. 'quand ics
stat uts syndicaux sont mucts a cct cgard. ii apparticnt a 1·i::1a1 de
lixl!r des limites. ctant donnc quc toutc gri:vc cntrainc des perturbations.
ui definition de la majorite est une que,tion nalionalc <1ui
doit ctrc rcsoluc par la loi et la pratiquc du pays. A la lumii:re de
l:es considerations. lcs mcmhrcs cmployeur, n·ont pas partagc
l'avis des cxpL' r\'i sek,n lequcl ,·exigence d'une majorite des dcux
tier.\ d'unc .i,ser11i1icc gcneralc d'un sy ndiecil pour declarer une
gri:ve co11stiluc une violation de la convention.
Le memhrc travaillcur du Hondura􀡍 a conlirmc qu·unc commission
tripartite a elTcct ivemcnl 0tc t.:t ablic en vuc des rel'ormes
du Code du travail et de sa misc en conformite avcc la convention
dun, le scns indiquc dans lcs commt:ntaires de ltl commission d'cx- •
pens. avcc ct:pcndant une sculc exception . nolammcnt la rccommand11tion
porta nt 􀈾ur la possihilitc de !'existe nce de plusieurs
syndicats d'cntrcprise au sein d'unc mi:me cntreprise, instilution
ou ctahlisscment. En diet. si on donnait suite a cctte recommandation.
on ouvrirait au Honduras lcs portes au phenomcne grave
des organisations solidaristes que certains cmploycu1 s pretendcnt
soutrnir pour hnycollcr lcs activitcs qui sont proprc1; aux orga nisations
syndirnlcs. II a indiquc qu·en 1991 la Con!'cderntion des travailleurs
du Honduras a 􀈾igne un accord avcc le President de la
Rcpubliquc pour trouver unc formulc immediate de rcl'ormc du
Code du trav:ril afin d'cmpcchcr le developpc:mcnl du solidarisme
et que. depuis. k, orgunisations d'cmploycurs et de travailleurs
ont soumi􀡎 a11x autorites compctc111cs des propositions dans cc
scns. Entin. l'oratcur a insiste sur le ra il qu·unc date limitc. ii
laquellc la concertation sur lcs diffcrcntcs rcform􀡏s du Code du
trnvail doit ctrc achevcc. doit ctre tixee et ii ,1 indique qu'au cas ou
la rnnccrtution ne produit pas de rcsultats 1i appartient au gouvernc•
m ent de prcndrc lcs decisions nccessa ires.
Le rcprc,en1,1n1 ,1?.ouvernemc ntal a signalc quc le gouvcrnemcnt
nc voit pa, d'ineonvcnicnt pour soumdtre lcs rceommandations
de la commission t1·cxperts an Congri:s national. et ii a n: itere
SL'S declarations antcricurcs scion lcsquelles ii est nccessairc
quc la conccrtation s·uchcve pour proccdcr aux rcformes. ctant
uonnc quc ccrtaincs d'cntrc cllcs pcuvcnt rairc l'objet de contmvcrscs
entrc lcs cmployeurs et lc:s travaillcurs.
L:i commissi1>n a pris note dL'S inl'ormations fournics par k
gouvcrncmcnt . Elle s·l!st rc licitcc des progrcs qui sont en train
d'i:trc realises. en pa, ticulicr en cc qui concern: lcs rdorm cs du
Code du travail actucllcmcnt en preparat ion. Nonobstant. clle a
rappclc quc la wmmission d'cxpcrts a sign:ilc au gou vcrncmcnt
lcs dispositions de la loi qui exigent unc modilkation sans quc
et:l les-ci n'aicnt cte rcalisccs jusqu·a present. Par conse quent. la
commis.􀡐 ion a exprimc l"espoir quc le gouvc rncmcnt pourra trcs
prochaincmcnt com muniqucr qu.: lcs rcformes ncecssaircs ont etc
adoptfrs et qu'il cnverra les textcs en quest inn au BIT.
27/63

Document no 254
CIT, 79e session, 1992, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 27/63-27/65 (Koweït)

Conférence internationale du Travail
Compte ren.u propre Z1
Soixante-dix-neuvième session, Genève, 1992
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 23
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 23
A. Observations générales et informations concernant certains pays 23
B. Observations et informations sur l'application des conventions 28
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 99
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 100
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) 101
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 101
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
102
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 103
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant les conventions nos 26, 99 et 131 et les recommandations
nos 30, 89 et 135 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant la convention n0 111 105
Jndex par pays des observations et informations contenues dans le rapport 106
27/1
Kowei) (ratilication : 1961). Un rcprcscntanl gouvcrncmcntal a
cxpliquc lcs raison􀡑 pour lcsquellcs son gouvernemrnt n'a pas pu
mettrc en o.: uvre la convention et a declare quc. dcpuis son rctour
dans le pays. le gouvcrncmcnt a commence a examiner les ohservat
ions de la commis,ion d'experK Une commission ;i ctc institucc
pour ctudicr la possihilitc de rcdigcr un projet de code du
travail en consultation avcc la Federation gcncralc des travailleurs
du Koweit et lcs Chamhre, de commerce et d'industric. en prcnant
en consideration le􀡒 observations de la com mission d'cxpcrts.
Cc11e commission a tcrminc l'etudc du projet de code qui sera
soumis nux autorilcs legislatives. Les relations profcssionnclles dcpasscnt
le cadre de h1 loi n" 38 de 1964; les travaillcurs jouisscnt
d·un cnscmhk' de <lroi ts dans le cadre de ncgociations et conventions
collectives entcrinccs par le ministi:re du Travail et des Affaires
sociales et sur }e_,quelles se ro ndent lcs trih11m111x. F.n vcrlu
de !'article 13 de la loi n" 38 de 1964, lcs travaillcurs et lcs cmployeur,
ont le droit de s'organiser et la loi delinit egalement le
ni le de ccs orga ni􀡓;Hions. Elle reconnait le droit des travaillcurs a
Iii lihcrtc syndicalc et a la protection du droit svndical et conl'crc
ainsi aux sy11dica1s lcgitimitc et cgalitc. Le Kowc'it a l'ait de grands
progrcs dans le dcvdoppemcnt des relations proressionncllcs et
du mouvcmcnt syndical. de mcmc quc dans la protection des
droits des trnvaill cur, et dans !'amelioration de !c urs condilions de
1rav.1il. conformcmcnt aux dispositions de la convention, Le minislcrc
du Travai l et de􀡔 A!Taires s11c iales n·exerce plus de vastcs
pouvoirs de contr61c. II sc limitc ii fournir unc aide aux organisations
lorsqu'cllt·s le dcmandcnt. Le ministcrc u le droit de contr6-
lcr toute activile qui serait contrairc au droit national. En cc qui
conccrnc l'cligihilitc dcs _ travailkur.; ctrangcrs a des functions synd1cales,
le textt' de la lot n° 38 nc lcs cxclut pas cxpressemcnt du
droit d'etre clu, ou d'exercer une ronction syndicalc conformcmcnl
au chapitrc 3. article 72. Quant au systi:me d'unicite syndicalc,
sou haitant protcgcr lcs droits des travaillcurs. le gonvcrncmcnt_
a pcrmis a cc_ux-ci d􀡕 constit uer plus d'un seul syndical. En
rclat,on avcc Jes rcclamallons des travaillcurs. le rcgl ement des
connits du trav;iil et !'imposition de !'arbitrage, le rcpresentant
go􀡖verncmcntal a_ indique que la loi n" 38 de 1964 prcvoit quc lcs
pluintes des t:-nvadleurs peuvcnt ctrc: reglce, sur une base hilatcralc.
Le syndical pcut agir au nom des travnillcurs conl'ormement
ii la loi. alors quc ccllc-ci nc s·appliquc pas c:n cas de plainle des
employcurs contrc lei; travaillcurs. Les decisions des organc,; d'arbrlra
􀡗c sont contra,gnante􀡘 et definit ives. Etimt donnc quc Ics
conlhts du travail sont des quc\Lions delkates qui exigent une so-
27/63
lution rapide, ils sont traites par un organe dépendant de la Cour
d'appel, en vertu de l'article 88 de la loi n" 38. selon des procédures
justes et équitables, compatibles avec la convention.
Les membres travailleurs ont rappelé que ce cas a été discuté
par la commission de la Conférence en 1981, 1982 et 1983. La commission
d'experts dans son rapport se réfère à des informations du
gouvernement selon lesquelles la convention a contribué à renforcer
la liberté syndicale et l'organisation syndicale, à développer les
activités syndicales et à orienter la liberté syndicale vers ses objectifs
en matière de défense des droits des travailleurs; elle fait
également référence à un projet d'un Code du travail. Etant
donné, cependant, que la situation législative n'a pas changé, la
commission d'experts a rappelé les divergences existantes, parmi
lesquelles il convient de mentionner notamment les dispositions
concernant l'unicité syndicale, les restrictions en matière d'activités
syndicales des travailleurs étrangers, les pouvoirs de contrôle
des autorités dans le fonctionnement des organisations syndicales
et surtout les restrictions au libre exercice du droit de grève. Les
membres travailleurs ont d'ailleurs estimé nécessaire de rappeler
leur point de vue en ce qui concerne le droit de grève, alin de
préserver l'équilibre du présent rapport, et, en vue de l'avenir des
travaux de la commission, étant donné qu'à plusieurs reprises, au
cours de l'examen des cas individuels, le porte-parole des membres
employeurs a abordé ce sujet pour expliquer l'attitude des
employeurs en la matière. Les membres travailleurs ont déclaré
réitérer, en termes clairs et sans équivoque, leur soutien à l'interprétation
de la commission d'experts concernant le droit de grève,
non seulement quant aux grands principes du droit de grève, mais
également quant aux modalités et aux limitations éventuellement
acceptables. Ils ont été d'avis que les experts ont correctement
appliqué les principes et les méthodes de travail mentionnés au
paragraphe 6 de leur rapport général. Le droit de grève dans son
principe et dans ses modalités est un moyen essentiel de réalisation
de la liberté syndicale. C'est également une composante intégrale
de celle-ci. Le point de vue de la commission d'experts n'est
pas nouveau, il est connu depuis des années; elle l'a conlirmé et
répété à maintes reprises dans ses rapports. Ce point de vue est
fondé sur la jurisprudence établie du Comité tripartite de la liberté
syndicale, et il n'y a aucune raison ni aucun motif de changer
des points de vue bien établis. Contrairement aux itlées exprimées
par le porte-parole des membres employeurs, l'universalité des
normes ne permet pas une interprétation sélective de la liberté
syndicale dans toutes ses composantes - y compris le droit de
grève - en fonction du régime politique ou de la situation économique
et sociale d'un pays donné. Les membres travailleurs ont
tenu à souligner de nouveau leur position à l'occasion de la discussion
des problèmes relatifs aux restrictions au libre exercice du
droit de grève qui existent au Koweït. Se référant aux déclarations
du représentant gouvernemental selon lesquelles le gouvernement
s'est efforcé d'améliorer la situation et qu'un projet de code a été
élaboré, les membres travailleurs ont estime que le gouvernement
doit transmettre rapidement les informations pour examen par la
commission d'experts au Bureau sur tous les points abordés dans
le rapport alin que la présente commission puisse suivre l'évolution
et examiner de nouveau ce cas l'année prochaine.
Les membres employeurs ont déclaré qu'ils sont conscients des
circonstances particulières auxquelles le gouvernement a dû faire
face au cours des derniers mois, et qu'ils ont apprécié la rapidité
avec laquelle il est revenu sur les questions en cause et a procédé à
l'élaboration d'un projet de code pour soumission aux autorités
législatives. Le gouvernement devrait envoyer une copie de ce
projet au BIT pour que la commission d'experts puisse examiner
dans quelle mesure les exigences de la convention sont respectées.
Fn ce qui concerne le droit de grève, ils ont rappelé leur position
selon laquelle il n'est pas approprié, dans le cadre de la convention
n" 87, de donner un schéma détaillé étant donné que les mots
«droit de grève» ne ressortent pas dans le texte de la convention.
La commission de la Conférence, en décidant de ne pas traiter de
la question controversée du droit de grève, a précisé que cet instrument
porte sur la «liberté syndicale et non sur le droit de
grève». Ils ont rappelé les remarques qu'ils avaient faites en 1991
selon lesquelles nombre de décisions et d'interprétations de la
commission d'experts sont basées sur des décisions du Comité de
la liberté syndicale et que ce comité n'est pas tenu de se limiter au
texte même des conventions nm 87 et 98 et qu'il est en droit d'invoquer
des principes généraux. Ils ont rappelé leur réserve sur le
droit de grève et sur la position des experts au sujet de la délimitalion
que les experts ont introduite dans le cas des grèves dans les
services essentiels, au sens strict du terme. Ils considèrent que
cette délimitation va trop loin et qu'elle sort du cadre de ce qui est
envisagé par la convention n" 87. Sous cette réserve, les membres
employeurs se sont associés aux commentaires des membres travailleurs,
et ils ont exprimé l'espoir que le gouvernement sera
bientôt à même d'indiquer qu'il se conforme aux exigences de la
convention.
Un membre travailleur de la France, observant que le cas est
en discussion depuis un certain nombre d'années, a lait référence
à la situation des travailleurs immigrés qui constituent une part
importante de la main-d'oeuvre du Koweït; étant donné les restrictions
en matière de liberté syndicale qui touchent ces travailleurs,
il a estimé que dans ce pays très peu de travailleurs peuvent en fait
être syndiqués. La nature même du pouvoir politique est loin
d'être démocratique : le régime a un caractère féodal, les modilications
promises n'ont pas été introduites, les travailleurs immigrés
sont taillables et corvéables à merci et placés en dehors de la
législation. Le gouvernement devrait préciser si les propositions
de modification prévoient explicitement que toute forme de discrimination
à l'égard des travailleurs étrangers est éliminée. Se référant
au droit de grève, l'orateur a déclaré que ce droit découle des
normes internationales du travail, et que tout gouvernement qui
s'engage à respecter la convention doit aussi respecter le droit de
grève pour toutes les catégories de travailleurs.
Un membre gouvernemental de l'Allemagne a déclaré qu'en ce
qui concerne le cas concret en discussion il peut s'associer complètement
aux orateurs précédents. Par contre, son accord sur les
conclusions qui seront adoptées par la commission dans ce cas ne
s'étend pas à tous les aspects de l'interprétation qui a été donnée
de la convention par l'un ou l'autre côté.
Un membre travailleur de l'Italie a estimé que le Koweït a fait
des efforts insuffisants en ce qui concerne le respect de la convention,
alors qu'au cours des événements récents il avait donné des
assurances de s'engager sur la voie de la démocratie, dont la liberté
syndicale est une des composantes essentielles. Si la convention
n'est pas respectée, la démocratie est loin d'être réalisée. Le
rôle des syndicats est essentiel à la resconstruction du pays sur des
bases sociales plus équitables. L'interdiction des activités politiques
des syndicats est en contradiction avec la participation très
politique de ces derniers à la libération du pays. La majorité des
travailleurs dépendants étant des immigrés, il y a restriction à la
liberté syndicale si on leur refuse le droit de s'affilier au syndical
de leur choix. Le Koweït dispose de ressources importantes, et le
gouvernement devrait adopter une législation conforme à la convention.
Le représentant gouvernemental a indiqué que des progrès importants
ont été faits dans le pays, qu'une Constitution a été approuvée
par le peuple cl par un gouvernement démocratique et
non féodal. Des élections générales auront lieu en octobre 1992, ce
qui permettra au peuple de choisir ses représentants au parlement
et de garantir la légitimilé du gouvernement. S'agissant des travailleurs
migrants, l'orateur a déclaré qu'environ un demi-million
de travailleurs étrangers sonl rclournés au Koweït. Au sujet du
système d'unicité syndicale, il a indiqué que plusieurs syndicats
représentent les travailleurs non seulement des banques ou des
industries, mais également des ministères; les travailleurs étrangers
peuvent également s'affilier à des syndicats. 11 a rappelé sa
déclaration initiale selon laquelle il n'existe pas d'interdiction d'affiliation
aux syndicats et a déclaré que des personnes de quatrevingts
nationalités différentes vivent dans le pays. De nombreuses
grèves ont été organisées même dans le secteur public, et son
gouvernement n'est pas intervenu pour mettre lin à ces grèves ou
pour arrêter les représentants des travailleurs pour avoir agi de
manière indisciplinée. Son gouvernement s'est contenlé d'appeler
les deux parties à régler le conflit. De nombreuses conventions
collectives ont été signées pour régler des conflits qui avaient provoqué
des grèves. Quant au contrôle du gouvernement sur les
activités syndicales, le ministère du Travail et des Affaires sociales
donne des subventions à toutes les associations représentatives,
aux syndicats et aux organisations volontaires privées. Même si le
gouvernement contrôle l'utilisation de ces subventions, les syndicats
ont le droit d'exercer toutes les activités qu'ils souhaitent.
L'orateur a déclaré que son gouvernement s'efforcerait de soumettre
des informations complètes sur l'application de la convention,
y compris sur la révision du Code du travail qui est une des
priorités des autorités législatives dans la réorganisation de la société.
Les membres travailleurs ont plutôt l'impression que la législation
du travail en général et plus particulièrement les aspects touchant
directement ou indirectement aux droits des travailleurs migrants
ne figurent pas parmi les priorités du gouvernement.
La commission a pris note des informations fournies par le
représentant gouvernemental, tille a conscience des dilficultés
rencontrées récemment par le gouvernement, mais clic a estimé
de son devoir de rappeler que la question a fait l'objet des préoccupations
du rapport de la commission d'experts depuis de nombreuses
années et elle s'est déclaré déçue que, dans son intervention,
le gouvernement ait fondé son argumentation sur une loi
de 1964. alors que cette législation a déjà été examinée par la
commission d'experts. Par ailleurs, la commission a eu l'impression
que des progrès sonl en vue pour meure la législation en
conformité avec la convention. Afin que la commission d'experts
puisse évaluer pleinement la situation, elle a exprimé l'espoir que
27/64
le gouvcrncmcnt enverrnil au B IT une copie du projct de Code du
1rav:1il. et l'lle a 􀠏uggcrc au gouvernemcnt de demander l'assislancc
du BIT a cct cgard.
27/65
Document no 255
CIT, 79e session, 1992, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 27/67-27/68 (Panama)

Conférence internationale du Travail
Compte ren.u propre Z1
Soixante-dix-neuvième session, Genève, 1992
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 23
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 23
A. Observations générales et informations concernant certains pays 23
B. Observations et informations sur l'application des conventions 28
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 99
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) 100
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) 101
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 101
B. Tableau des rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
102
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 103
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant les conventions nos 26, 99 et 131 et les recommandations
nos 30, 89 et 135 105
Rapports reçus au 22 juin 1992 concernant la convention n0 111 105
Jndex par pays des observations et informations contenues dans le rapport 106
27/1
Pnnnmn (ratilicaiion : 19."i8). Sc rc'l'C:rmll ii ccnains points
mcnl
ionnes dans l'ohscrvation de la commission <l'cxpcrts, le
gouvcrnemcnt
a communique lcs documents suivanls:
I. Projct de Joi n' 70 «qui ctablit et rcgit l,1 carrii:rc administrative
».
2. Resolution ll'' D . M . 23/92 du 21 mai l 'll/2, qui rcduit le nomhrc
de documents requis pour la reconnaissance des organisations
sociales.
En outrc, un reprcscntant gouvcrncmcnlal sc rcfcrant au point
dl'. l'nhse1 vat ion de la commission d'cxpcrb sur !'application de la
convention relatir a rexclu,ion de, 1·01ictionnaires puhlies du
champ d'application du Code du travail, qui dccoule des dispositions
contcnucs darn lcs chapitrc, I et 2 du titre XI de la Constitut
ion du Panama, a indiqu6 qu'un projct de loi sur la carriere administrative
avail ctc prcscnlc rormel!emcnt a l'As,cmblec
legislative aux !ins d'etudc d <l'adoption. Son gouvcrnement a
!'intention d'accordcr aux fonctionnaires puhlics un cadre leg.al
conformc aux prineipes d'un « systcmc de meritc », ainsi que
d·autre􀉜 droits et ohligations rb,ullant des normcs conslitutionncllcs
en harmonic avec Jes dispo,ii ions du Code du travail pour le
secleur prive. S'agissant des disposi1 ions sur !'exigence d'« un
nombrc trop clcvc de mcm bres pour wnstitucr unc organisation
p1 urcssionndlc » et de eel le de « 75 pour cent de mcmhres panamccns
dans un syndical », rclcvccs par la commission d'expcrts
dans son observation, la modification eventuellc <le ccs dispositions
est un theme susceptible de faire l'ohjct d'un dcbat tripartite
dans le cadre du processus de conccrtation socialc lance par son
gouvcrncment. Cettc conccrtation, et lcs sous-commissions consti-
1 uec:s en sun sein. rormcnt un cad, c appropric pour amcliorcr le
Code du travail conformemcnt aux conventions interrn1tionales du
travail ratilices. Elle a cgalcmcnt pour objct d'augmentcr h1 prod
m:timt nationale, d'ameliorcr la condition gcncralc des travaillcurs
et des cmploycurs ainsi quc lcs possihilites de creation <le
nouveaux emplois. La question de la « revocation automatiquc du
mandat d'un dirigcant syndical quand ii est liccncie » doit cgalemcnt
ctre ahordee dans le cadre de la conccrtation socialc. Ccttc
revocation nc s'appliquc qu'aux dirigeants des 􀉜yndicats d'cntrepriscs
(qui doivent ctrc des employes) et clle ne s'c1ppliquc pas
dans Jes S\'lldicats de hnrnchc ni dans lcs federations, lcs conl'cderations
OLI lcs ccntralcs. En cc qui conccrnc lcs pouvoir, de
contr61c des autorites sur les registres, Jes proces-vcrhaux et la
comptahilitc des syndicats, ii eonvicnt de rclevcr quc la resolution
n" 23/92 du 21 mai 1 992, qui reduit le nomhre de documents ncccssaircs
a la reconnaissance et au fonetionncmcnt des organisations
soeialcs, limite et reglcmcntc de fai;on appropriee l'an iclc 376,
alinea 4, du Code du travail, en tenant compte des commcntaircs
antcricurs de la commission d'cxpcrts. S'agissant des cornmcntaircs
portant sur la Joi n" 13 du 1 1 octohrc 1990, ii a soulignc le
carnetcrc tcmpornirc et execptionncl de ccltc mesure, qui avail ctc
justilicc par unc politiquc de stabilisation conjoncturcllc visant i1
pcrmet tre le retahlisscment tic !'economic Ceite loi n'a pa􀜥 empcchc
la ncgociation de six conventions collectives en 1990, ni ! 'adoption
de ncuf aulrcs con,,cn1ions collectives par voie de ncgoeiations
dircetcs en 1 99 1 . Ccttc loi n·a pas non plus cmpcchc lcs
grcves, mab a st:ukmcnt introduit !'arbitrage aprcs consultation
avcc lcs travailkurs pour cvitcr la fermeturc delinitive de rcntrcprisc
et la pc rte des moycns de travail , pour lcs cas de greves qui
sc prnlongcnt Li loi 1 1 ' ' Ll doit ctrc rfrxaminec dans le cadre du
proccssus de concertalion. alin de relahlir rapidcment l'ncrcice
de la ncl!ociation collective conrormcment aux conventions intcrna1
ion;il􀜦s du I ravail. Quant 􀜧 la loi n" 25 d'urdrc public du
14 dcccmbrc 1 990, scs dispositions ont expire le 31 dcccmhre 1991.
II n'csl pas ctabli qu'« un nomhrc important » de travailleurs ait
ctc liccncics : ont etc viscs lcs ,euls ronctionnaircs ayant commis
des actes de violence i, l'eneontrc d'autres agents puhlies ou d·rn;agcrs
de􀜨 services publics. et cause de, domniage, aux installations
et aux bicns de l'EiaL ;111 cours d'activitcs non syndicalcs, comme
ce rut le cas dans deux cntrcprises publiq ues et non a cause de !cur
condition de diri geant svndical. Pounant. le nomhrl' de, 1 r;1vailleurs
licencics 11·􀜩 rcprcscntc quc 23 pour cent des cmploycs de
chacunc de ccs deu:x cntrepriscs. De nombrcux trnvaillcurs liccncics.
l07 it l'lnstitul des rcssourccs hydrauliqucs et de l'electricitc
et 37 ii I ' l nstitut national des telecommunications, ont depose des
rccours dcvanl les trihunaux eompctcnls, qui ont donnc lieu i, unc
procedure admin istrntiYc contcnticusc deYant ctrc tranchcc par la
chamhrc compi'tcnte tie la Cour supreme. Des in!'ormat ions detaillccs
i, cct cgard ont egalement ctc soumiscs au Comitc de la
lihertc syndicalc (cas n" 1569). ainsi quc dans lcs rapports sur lcs
conventions n'􀜪 87 et 98 cnvoycs en janvicr 1992.
Les mcmbrcs travaillcurs ont rappck quc la commission <le la
Conference avail discutc de cc cas en 198 1 , 1989 et 1991. Le long
cxamcn auqud ellc s·cst livrce l '.i nncc dernicrc a donnc lieu a une
conclusion qui a ctc reprise darn, un paragraphc special de son
rnppnrt. Outrc le􀜫 points dcsormais birn cunnus, la commission
d\:xpcrts rele\c egalcmcnt cctte anncc quc de􀜬 Iois rccentes
contienncnt des restrictions au droit de grcve et prcvoicnt des
mcsurcs antisyndicalcs contrc lcs agents puhlics. La situation, dans
la loi ou la pratiquc, nc semblc gucrc avoir change dcpuis un an.
Le· scul clcmcnI nouveau consbtc e11 eel " accord de conccrtation
socialc » conclu cn:re ks cmploycurs, lcs travailleurs et le gouvcrncmcnt
en dcecmbre 199L qui dcvrait permeltre l'ouvcrturc de
consultations visant it une modificalion cvc ntucllc de la loi n" 13 de
1 990 rcstrcignant le droit de grcvc, Quant aux tcxtcs mentionncs
<lans la cummunicalion ccrite du gouvernemcnt, !cur portce rcstc
obscure. Unc ccrtainc evolution semhlc toutcfois perceptible dans
!'attitude du gouvcrncmcnt, qui scmblc plus positive ecttc anncc
que lors des dchals de l l/9L Le gouvernemcnt - commc d'aillcurs
ccrtains autrcs gouvernements, notamment en Amcrique latine -
donne ! 'impression de souh;dtcr collaburer davantagc avcc lcs organcs
de contr(J!e. La volontc, encore timide, du gouvcrnemcnt de
proccder a ccrtains changcmcnts n'a pas encore donnc lieu ii de
reels progres dans la pratiquc. Aussi convicnt-il d'i nsistcr pour
quc lcs initiatives annoncccs donncnt lieu it une modilication elfeciive
de !11 legislation sur ILJU􀜭 lcs points signalc􀜮 pa, la commission
d'experts depuis des annccs, notammcnt en cc qui eonecrnc
! 'elimination des ingcrcnccs, la suppression de !'exigence quant ii
la nationalite, la garantic de la libcnc syndiealc aux travailleurs du
seeteur public et le respect du droit de grcve. Comptc tcnu de la
gravitc des prnblcmc,, lJUi a ctc souligncc dans les conclusions de
ccttc commission en 1991, cl cu cgard il la complcxitc des informations
communiquccs par le gouvcrncmcnt, rcnvoi d'unc mission
du B IT pourrniI i'Irc envisage. Fa utc d'une evolution it breve
cchcancc, non seulemcnt dans lcs propos, mais aussi dans la rca Iitc.
la presente commission risquerait d'etre amenee a constatcr
u nc nouvelle fois l 'anncc prochainc l'ccart cntrc Jes i ntentions
ariichees et les actes.
Les mcmbrcs cmploycurs ont indiquc que !cur point de vuc
s'ccartait <le cclui des mcmhrcs travaillcurs sur un certain mimbrc
<le points, En cc qui conccrnc lcs questions de fond posces par cc
cas, ii est en premier lieu clair que le dcni du droit des fonctionnaires
de ncgocicr colleetivcmcnt constitue unc violation tlagrante
de la convent ion , Les informations sur leur situation juridiquc figurant
dans le rapport clc la commission d'experts et dans la declaration
du representant gouvernemental sont toutcfois source
d'une ccrtaine conrusion et ii conviendrait quc lcs cxpcns cxamincnt
de nouveau attcntivcmcnt cette que,tion, Sur le point de
savoir si !'exigence d'un nombrc minimum de SO travaillcurs ou de
10 employeurs pour eons1i1 uer unc organisation est trop clcvcc, ii
y a lieu de s'intcrrogcr sur cc quc serait le bon chiffrc : la commission
d\:xperls le trouvc trop elcvc, le gouvcrnement promet de le
modifier, et pourtant la convention est muettc sur la question II
faut done sc gardcr de proposer des chiffrcs qui ne peuvent
qu'avoir un caractcrc arhitrairc. En revanchc, s'agissant de l'exi-
27/67
gencc de 75 pour cent de mcrnbrcs panamccn,. ii e,1 iml,;niable
qu"il s'agit d'une violation de la convention qui garantit la liberte
syndicale a tous lcs travailleurs sans consideration de nationalite.
Le gouvernemcnt a indique que la question est ou va etrc cxaminec
et ii faut cspcrcr que cct examen aboutisse. Quant au problcme
des largcs pouvoirs de contr6lc des activitcs syndicales par
ks autoritcs. ii importe de distingucr cntrc ceux qui sont susceptibles
de donner lieu ii une veritable ingcrcncc dans Jes affain.:s
intericures d'un syndical et la simple verification des comptcs dcstincc.
scion le gouvernement. a prcvcnir ou ii sanctionner Jes malvcrsations.
La commission d'experh rcconnait cllc-meme qu"il
pcut y avoir verification des comptcs des lors que la demandc en
est faitc par un tribunal ou par la majorite des mcmbres. Les
membres des syndicats doivcnt en effet etrc protegcs contrc
d'cvcntuels abus et ii conviendrait quc ccttc protection puisse
aussi bcncficier aux minoritcs. Dans le domaine des restrictions au
drnit de grcve. !'accord conclu en dcccmbrc 1991 cntrc Jes partenaires
sociaux et le gouvcrnement constitue un clement nouveau
et important. Les mcmbrcs employcurs ont fait conna1tre l'anncc
dernicre lcur avis motive 􀔢ur la manicre d<mt !'et endue du droit de
greve etait intcrprctcc par la commission d'expcrts. Ccllc-ci ne
scrnblc toutcl"ois avoir tenu compte ni de la nouvelle Joi. ni des
remarqucs des mcmbrcs cmployeurs. qui ont pourtant expose en
detail Jes raisons pour lcsqucllcs Jes prindpc􀔣 memes de J"intcrprctation
de la commission d"cxpcrts nc lcur scmblaient pas acccptablcs.
La commission d'experts. qui sc plait. au paragraphc 6
de son rapport general. a louer ,, rcsprit de respect mutucl. de
collaboration et de responsabilitc » gouvernant scs relations avcc
la prcscnte commission. s\:sl. en J·nccurrcnce. bornce a rcitcrcr sa
position sans avancer d'argumcnts nouveaux. En resume. Jes
mcmbrcs cmploycurs sont tout a la rois en plein accord avcc la
commission d'expcrts quant a la gravitc exccptionncllc du cas. et
en complct dcsaccord quant a certains elements de son analyse.
Le mcmbre travaillcur du Panama a c.lcclare qu'il partagcait Jes
opinions cxprimccs par la commission d"cxpcrts dans son observation
sur !'application de la convention. Le processus de conccrtation
socialc a suseitc un grand espoir de voir rcsoudre lcs problemes
vises. S'agissant des questions examinees par lcs experts. ii
est certain que la loi n" 13 a ctc adoptce dans de, circonstanccs
exceptionnclles, mais son application a cte unilateralc. De nombrcux
travaillcurs ont ctc liccncics en vcrtu de la loi n" 2.'i. et Jes
rccommandations formulces a cct cgard par le Comitc de la libertc
syndicalc doivent etre miscs en a:uvrc. En dcpit de son souticn
au proccssus de conccrtation et de son ortimismc quant a son
issue, qui dcvrait permettre de surmontcr Jes difficultcs visces d"ici
la prochainc reunion de la prescnte commis􀔤ion. l'orateur a cstimc
qu'il convenait de continuer a suivrc cc cas. Le BIT pourrait apportcr
son assistance a la revision du droit du travail en vigucur.
Le reprcsentant gouvcrncmcntal a indique que certains des
points examines par la commission d"experts ctaicnt en suspcns
depuis de nombrcuses annccs. mais que la situation avail cte aggravee
par Jes dispositions introduitcs en 1990 en raison des evcnements
cxccptionncls survenu􀔥 dans son pays. Son gouvcrncmcnt a
la ferme intention d'apportcr une solution it l'ensemble des diflicultcs
rclevees par la commission d. experts. Le process us de
conccrtation constituc un cadre particulierement appropric pour
abordcr ccs questions par la voie du dialogue entre le gouvcrncment
et les organisations d'cmploycurs et de travaillcurs. Cctte
concertation sc propose de discuter des amendements it !'ensemble
du Code du travail et pas sculcmcnt de la Joi n" 13. Rcitcrant
scs propos antcricurs, le reprcscntant gouvernemcntal a
communique un ensemble de donnces relatives aux conventions
collectives ncgociecs aprcs l'entrcc en vigucur de la Joi n" 13.
La commission a pris note des informations ecrites et orales
fournies par le gouverncmcnt dont ii rcssort qu'une procedure de
consultation tripartite a ete entamee en vuc d'assurcr la misc en
pleine conformitc de la legislation avcc Jes prescriptions de la convention.
Dans le mcmc temps, la commission a eu sentiment quc
les progres realises jusqu·a present etaient encore de portec limitec.
Eu egard au profond changement intcrvenu dans la situation
politiquc du pays ii y a sculement quelques annees et au fait que le
nouveau gouvernement se trouve confronte it des problemcs dans
ce domaine, la commission a suggere au gouvernement d'invitcr
une mission de contact direct du BIT afin d'atteindrc ccs ohjectif􀔦
dans un proche avenir.
27/68

Document no 256
CIT, 85e session, 1997, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 19/80-19/83 (Bangladesh)

Conference internationale du Travail
Compte rendu provisoire
19
Ouatre-vingt-cinquieme session, Geneve, 1997
Troisieme question a l'ordre du jour: informations et rapports sur l'application
ties cunveniions et recommandations
Rapport de la Commission de )'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIERE PARTIE: Rapport general . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
A. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
B. Questions generales relatives aux normes intemationales du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
C. Rapports demandes au titre de l'article 19 de la Constitution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
D. Execution d'obligations specifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
DEUXIEME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
A. Observations generales et informations concemant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
B. Observations et inf ormations sur l'application des conventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
C. Tableau des rapports detailles sur les conventions ratifiees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la Constitution) . . 139
II. Observations et informations concernant !'application des conventions dans les territoires non metropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
A. Informations concemant certains territoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
B. Ta􀁗le􀁘u des rapports detailles sur l'application des conventions dans les territ oires non metropohta1ns
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Ill. Soumission aux autorites competentes des conventions et recommandations adoptees par la Conference
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
Iv. Rapports sur les conventions non ratifiees et les recommandations (article 19 de la Constitution) -
Etudes d 'ensemble des rapports sur la convention ( n° 15 0) et la recommandation ( n° 158) sur I' administration
du travail, 1978 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
Rapports re􀁙us au 17 juin 1997 concemant la convention n° 150 et la recommandation n° 158 . . . . 144
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
19/1
Convention n° 87: Liberte syndicale et protection du droit syndical,
1948
Bangladesh (ratification: 1972). Un representant gouvememental,
se referant aux observations de la commission d'experts sur ce
cas, a declare que la liberte syndicale est garantie dans son pays par
la Constitution et la legislation sur Ies syndicats, a savoir l'ordonnance
sur Jes relations professionnelles de 1969 ( 0 RP). L'O RP couvre
seulement le secteur structure qui emploie 5 a 6 millions de travailleurs.
Les autres secteurs de I'economie sont couverts par Jes
dispositions de la Constitution relatives a la liberte syndicale. Les
violations de ces droits sont soumises a la Cour Supreme du Bangladesh,
le plus haut organe judiciaire du pays.
Ence qui conceme le droit d'association des personnes exen;ant
des fonctions de direction ou d'administration, l'ORP permet aux
travailleurs et aux employeurs de constituer des organisations sans
autorisation prealable. Toute personne travaillant dans une usine,
un bureau, une industrie, une boutique ou une entreprise du secteur
public peut s'affilier a un syndicat. Les fonctionnaires du Departement
des telecommunications et du Departement des chemins de
fer sont egalement couverts par cette ordonnance. Par contre, Jes
fonctionnaires des autres organes gouvemementaux sont exclus de
son champ d'application. En outre, Ies personnes travaillant dans
les entreprises industrielles ou commerciales et exen;:ant des fonctions
de direction ou d'administration ne peuvent pas s'affilier a des
syndicats. Representant environ 2 pour cent de la force du travail,
elles peuvent creer des associations pour promouvoir Ieurs droits et
interets, conformement a !'article 38 de la Constitution du Bangladesh
qui accorde a tout citoyen le droit de constituer une association
ou un syndicat dans Jes limites imposees par la Ioi en matiere de
moralite et d'ordre public. En consequence, Ies personnes exe􀄾t
des fonctions de direction et d'administration dans le secteur prive
jouissent du droit d'association.
Quant au droit d'association des fonctionnaires, ii convient de
rappeler que la legislation du Bangladesh est confonne aux exigences
de la convention. Comme cela a ete dit en 1995 au sein de cette
commission de la Conference, les fonctionnaires, bien qu'exclus du
champ d'application de l'ORP, ont le droit de constituer des associations
afin de defendre Ieurs interets. Ces associations tiennent
des reunions, discutent des problemes rencontres par Ieurs membres
et formulent des revendications qui seront presentees au gouvemement
pour negociation. En ce qui conceme le deni du droit
des travailleurs de «l'imprimerie des titres bancaires» et des fonctionnaires
de creer des syndicats, la Constitution Ieur garantit le
droit de constituer des associations pour promouvoir Ieurs droits.
Lors de la session de la Commission de la Conference de 1995,
le gouvemement a repondu aux commentaires de la commission
d'experts concemant les categories de personnes qui ne peuvent
pas exercer de fonctions syndicales. A !'exception des travailleurs
licencies pour faute ou reconnus coupables de detoumement de
fonds syndicaux, d'atteintes a la morale ou encore de pratiques de
travail deloyales, tout travailleur a le droit de s'affilier au syndicat
de son choix et d'exercer des fonctions syndicales, quels que soient
son age, son sexe ou sa caste. De plus, un travailleur licencie pour
faute peut introduire un recours contre son employeur devant un
tribunal. Le fait de permettre a des travailleurs licencies de devenir
membres d'un syndicat ou d'exercer des fonctions syndicales est
susceptible de troubler le deroulement des activites syndicales ainsi
que la paix sociale et la productivite, ce qui risquerait de compromettre
Jes buts des syndicats et de la negociation collective. Au
Bangladesh, Jes travailleurs licencies ne son! pas elus pour exercer
des fonctions syndicales. Toutefois, !'article 7-A 1) b) de I'ORP,plutot
que de restreindre, garantit le droit de choisir librement Ies responsables
syndicaux.
En reponse aux commentaires de la commission d'experts relatifs
au controle exterieur, ii faut savoir que l'ORP confere au Greffier
des syndicats certaines fonctions quasi judiciaires. Toutefois,
tout acte du Greffier peut faire l'objet d'un recours devant un tribunal,
et la loi nc lui octroic pas le pouvoir d'a."lnuler l'enregistrement
d'un syndicat sans autorisation prealable du tribunal du travail.
L'orateur est en desaccord avec la commission d'experts lorsqu'elle
affirme que la procedure de controle par le Greffier des affaires
19/80
financieres du syndicat doit faire l'objet d'un controle de I 'autorite
judiciaire competente qui assure toutes Jes garanties d'impartialite
et d'objectivite, dans la mesure ou ii est deja pre vu que tout acte du
Greffier peut etre conteste devant un tribunal. En outre, une fois le
syndical enregistre, son existence est toujours reconnue.
Le representant gouvememental a ajoute que la regle selon Iaquelle
aucun syndical ne peut etre constitue a moins de reunir 30
pour cent au minimum de l'effectif total des travailleurs concemes
est necessaire compte tenu du niveau de developpement social,
economique et politique du pays. Cette mesure contnbue a enrayer
la proliferation des syndicats qui est prejudiciable aux interets des
travailleurs. D'apres Jes dispositions en vigueur, ii peut etre constitue
jusqu'a trois syndicats dans chaque etablissement. De plus,
l'ORP comprend des dispositions sur la determination de !'agent de
negociations collectives. On ne peut pas considerer que la regle des
«30 pour cent» restreint le droit d'association des travailleurs. Toutefois,
des mesures adaptees a la situation pourraient etre adoptees
dans un futur proche. Dans ce contexte, ii faut souligner que la convention
ne prend pas en compte le danger de proliferation des syndicats,
mais prevoit que Jes travailleurs peuvent constituer librement
Jes organisations de leur choix. La multiplication des
organisations conduirait a leur affaiblissement.
En ce qui conceme le droit d'association des travailleurs des zones
franches d'exportation, ceux-ci ne sont pas prives de ce droit
puisqu'il est garanti par !'article 38 de la Constitution. De la meme
maniere, le Bangladesh, comme d'autres pays qui ont etabli des zones
franches d'exportation dans un but de developpement economique,
a suspendu le droit de constituer des syndicats dans ces zones
de fa<;:on strictement temporaire, conformement aux
dispositions de I'ORP. En fait, les travailleurs des zones franches
d'exportation jouissent de meilleures conditions d'emploi et de travail,
de salaires plus eleves et de relations professionnelles plus harmonieuses.
Ils acceptent la realite de la situation comme le prouve
!'absence de plainte emanant de syndicats et alleguant la violation
de leurs droits. Toute convention ratifiee permet une certaine souplesse
pour s'adapter aux differentes conditions nationales. En
outre, Ies zones franches d'exportation se developpent dans de
nombreux pays d'Asie. Leur creation est necessaire au developpement
economique, mais ne doit pas se faire au detriment du bienetre
economique et social des travailleurs. Le gouvemement est
particulierement conscient des responsabilites qui lui incombent a
l'egard de ses citoyens.
Le gouvemement du Bangladesh a pris note des observations de
la commission d'experts concemant Jes restrictions au droit de greve.
Tout en appreciant que la commission ail conscience des difficultes
auxquelles un pays peut se heurter en cas de crise nationale
profonde, l'orateur a rappele que Jes articles 28,32 2), 32 4), 33 1),
57, 58 et 59 de l'ORP ont ete examines par la Commission nation ale
tripartite (NLLC) dont le rapport est toujours en cours d'etude par
le gouvemement. Le gouvemement du Bangladesh souhaiterait
beneficier de !'assistance technique du BIT dans tous Jes domaines
lies a !'application de la convention.
Les membres travailleurs ont deplore que, malgre la declaration
du gouvemement en 1995, aux termes de Iaquelle ii s'engageait a
transmettre des informations detaillees a la commission d'experts,
peu semble avoir ete accompli a cet egard. Les sept questions traitees
par la commission d'experts ne sont pas nouvelles et exigent
que des mesures soient prises sans delai par le gouvemement pour
rendre la situation plus conforme avec Ies principes de la liberte
syndicale. Elles ont deja fait l'objet d'une discussion approfondie en
1995 tout comme des problemes connexes, lies a la convention (n°
98) sur le droit d'organisation et de negociation collective, 1949,
I'ont ete en 1994. A titre de remarques liminaires, ils regrettent que,
depuis de nombreuses annees, la commission d'experts formule des
commentaires sur des points importants relatifs a des principes fondamentaux
de la Iiberte syndicale. En 1994 et 1995, le gouvemement
du Bangladesh a fait reference aux discussions tenues au sein
du Conseil national tripartite. Cet organe aurait apparemmcnt soumis
des recommandations sur plusieurs points dont une partie figurerait
dans un projet de Joi qui n'a pas encore abouti a une modification
de la legislation. La plupart des critiques soulevees par la
commission d'experts, dans le cas du Bangladesh, concement des
points que chaque pays doit respecter quel que soit son degre de
developpement economique et social. Cette exigence s'inscrit du
reste dans le cadre de la campagne du Directeur general du BIT aux
fins de promouvoir la ratification et !'application des conventions
fondamentales. Les membres travailleurs sont conscients des difficultes
economiques et sociales auxquelles est confronte le Bangladesh.
Une meilleure collaboration entre les autorites publiques et la
societe civile, incluant Jes organisations de travailleurs et d'employeurs,
pourrait contribuer a combattre la pauvrete et !'exclusion
socia!e et pourrait promouvoir la justice sociale et la paix sociale.
En fait, Jes problemes d'application de la convention trouvent leur
origine, au moins pour une bonne partie, dans Jes tensions entre Jes
autorites publiques et la societe civile du Bangladesh.
Pour ce qui est des commentaires specifiques formules par la
commission d'experts, Jes membres travailleurs deplorent que le
rapport du gouvernement ne fournisse que peu d'informations pertinentes
en ce qui concerne le droit d'association des personnes assumant
des fonctions de direction et d'administration et des fonctionnaires.
Le gouvernement se refere laconiquement a !'existence
de deux associations de fonctionnaires dans le secteur public et fait
reference a d'autres associations sans Jes designer nommement. En
outre, le rapport ne contient pas d'informations sur Jes dispositions
qui garantissent I'exercice du droit d'association dans le secteur prive
pour Jes fonctions de direction. Les membres travailleurs insistent
pour que soit garanti a cette categorie de travailleurs le droit de
constituer des syndicats de Ieur choix ainsi que de s'y affilier, incluant
Jes syndicats couvrant Jes autres categories de travailleurs.
La notion de fonction de direction doit etre definie strictement afin
de ne pas affaiblir Jes svndicats des autres travailleurs.
Pour ce qui est de i'intervemion des autorites pubiiques dans
l'etablissement et le fonctionnement des syndicats, ils notent que
lcs problemes sont graves 􀅸􀅹 "1."• .':! ........... iH,"' ... .:.1􀅺nt J-.:.., .:.􀅻􀅼tii...:tions sur
des categories de personnes po11vant <"-Y"''""'r des fonctions de dirigeants
dans le syndicat, de l'ingerence des autorites publiques dans
Jes affaires internes des syndicats et des !iniJtations excessives pour
etablir et maintenir un syndical au niveau de l'entreprise.
En ce qui concerne le contri'ile externe, ils regrettent que !'information
dont dispose la commission d'experts ne permette pas de
verifier si le controle est Iimite a la verification des statuts et de la
Joi et s'il peut faire l'objet d'un recours judiciaire reellement impartial.
En cc qui .:.un.;cm., l'ublig.alivu pvut un 􀅽yndicat de reunir 30
pour cent des travailleurs d'une entreprise pour pouvoir etre enregistre,
cette limite pose de serieux problemes dans Jes systemes de
reconnaissance dans Jes organisations syndicales, bases totalement
ou pour partie sur des syndicats d'entreprise puisque Jes travailleurs
de petites et moyennes entreprises risquent d'etre exclus. IIs insistent
des lors sur la necessite d'adopter sans delai des procedures et
des dispositions qui facilitent la Iiberte syndicale, telle que prevue
dans le Preambule de la Constitution de l'OIT et dans la convention.
Pour ce qui est des zones franches d'exportation, ils notent que
le gouvernement se refere aux recommandations du Conseil national
sur la legislation du travail et a un projet de Joi et que, par anticipation
aux modifications legislatives, certains travailleurs semblent
etre autorises a constituer des syndicats. Les travailleurs des
zones franches d'exportation et Ieurs organisations doivent se voir
garantir a travers des dispositions legales specifiques l'exercice effectif
de la Iiberte syndicale. La protection des droits de ces travailleurs
est une preoccupation majeure du BIT (qui a du reste mis
sur pied un programme specifique a cet egard) et des mouvements
syndicaux nationaux et international.
Enfin, en ce qui concerne le droit de greve, Jes procedures et Jes
modalites pour l'exercice du droit de greve sont telles que, dans la
pratique, le principe meme du droit de greve est remis en question.
Tout en rappelant Jes conclusions de la commission en 1995, aux
termes desquelles elle priait instamment le gouvernement de veiller
ace que Jes modalites et procedures en matiere de greve ne reviennent
pas a denier ce droit fondamental, ils deplorent que le gouvernement
ait simplement repondu qu'il avait pris note des commentaires
de la commission d'experts. La faculte offerte au
gouvernement d'interdire le droit de greve, s'il juge qu'elle est contraire
a l'interet national, constitue une violation des principes de la
Iiberte syndicale et est inadmissible dans une societe democratique.
La legislation reflete I 'ecart entre la societe civile et Jes autorites
publiques. Pourtant, une meilleure collaboration entre ceux-ci
pourrait promouvoir la paix sociale et !'emergence d'un systeme de
relations industrielles plus stable.
Les membres travailleurs concluent en requerant que le Code
du travail et Jes autres lois pertinentes soient modifies dans Jes plus
brefs delais afin de tenir compte de toutes Jes observations de la
commission d'experts et des recommandations des partenaires sociaux
nationaux. IIs insistent sur le fait que le gouvernement doit
informer en detail la commission d'experts sur tous Jes developpements,
notamment sur Jes travaux de la Commission nationale pour
la legislation du travail et Jes developpements dans la Joi ou la pratique.
Enfin, le gouvernement doit utiliser au maximum Jes possibilites
offertes par )'assistance technique du BIT.
Les membres employeurs ont rappele que !'application de la
convention n° 87 par le Bangladesh a ete examinee par la commission
d'experts trois fois au cours des annees quatre-vingt-dix et discutee
par la Commission de la Conference en 1995. Ce cas souleve
un certain nombre de questions importantes qu'il convient d'examiner
une par une.
En ce qui concerne le droit d'association des personnes exerc,ant
des fonctions de direction et d'administration dans Jes secteurs public
et prive, ii importe de savoir comment ces categories de personnes
sont definies. Aucune information n'a ete donnee ace sujet par
le representant gouvernemental. Toutefois, la reponse du gouvernement
aux commentaires de la commission d'experts fait reference
a deux associations, et Jes experts ont demande au gouvernement
de fournir des informations precises sur le nombre et la taille
des autres associations de cette nature. Le probleme qui se pose,
tant dans le secteur prive que dans le secteur public, est que Jes personnes
en question peuvent etre, en pratique, des representants des
employeurs. Elles ne pourraient etre des !ors egalement membres
d'un syndicat, car elles devraient alors negocier avec elles-memes.
Selon le representant gouvernemental, ces employes representent
2 pour cent des travailleurs, pourcentage paraissant raisonnable.
Bien que tous ceux qui font partie reellement du personnel de direction
peuvent se voir denier le droit de constituer des syndicats et
d'en devenir membres, ii n'en reste pas moins que ceux qui n'appartiennent
pas a cette categorie doivent etre consideres comme des
travailleurs ordinaires. II convient done de demander au eouvernement
de fournir un rapport supplementaire contenant de plus ampies
informations sur ce point.
En cc qui concernc le droit d'association des fonctionnaires, Jes
membres employeurs ont note que le projet de Code du travail ne
leur accorde toujours pas ce droit. Par ailleurs, ils font egalement
l'objet de restrictions en ce qui concerne Jes publications syndicales.
Le representant gouvernemental a fourni peu d'explications sur
!'intention du gouvernement de modifier Jes dispositions du projet.
Quant aux restrictions portant sur Jes categories de personnes
pouvant exercer des fonctions syndicales, ii convient de noter que
Jes personnes ayant ete Iicenciees pour inconduite ne peuvent assumer
de telles fonctions. Le representant gouvernemental a declare
4ue u:lie mesure a pour bul de proleger Jes activiles des syndicats.
La commission d'experts a toutefois souligne qu'une telle legislation
comporte le risque d'une ingerence de la part des employeurs.
C'est a juste titre qu'elle a demande que Jes dispositions legislatives
concernees soient modifiees pour permettre une plus grande souplesse
a l'egard de l'appartenance a un syndical et de l'exercice de
fonctions syndicales. II est necessaire qu'un examen juridique des
cas qui se sont produits dans ce domaine soit effectue meme si la
commission d'experts n'a pas demande de precision sur ce point.
En ce qui concerne le contri'ile exterieur des activites des syndicats,
Jes membres employeurs ont note que le Greffier des syndicats
dispose de Iarges pouvoirs qui incluent le droit d'examiner toutes
sortes de documents, a tout moment et non selon une certaine periodicite.
Dans de tels cas, ii est necessaire que soient mises en place
des procedures independantes adequates pour prevenir toute ingerence
dans Jes activites syndicales. Le representant gouvernemental
a indique que de telles procedures existent. II convient des !ors
de demander au gouvernement de fournir des informations additionnelles
sur Jes dispositions qui delimitent Jes pouvoirs du Greffier
et qui prevoient un contri'ile independant de ses activites.
Quant a la regle des «30 pour cent» selon Iaquelle un syndical
ne peut etre enregistre a moins de reunir 30 pour cent au minimum
de l'effectif total des travailleurs occupes dans l'etablissement ou le
groupe d'etablissements considere, Jes membres employeurs ont
releve qu'un syndical peut voir son enregistrement annule lorsque
ses effectifs tombent en dec,a de cette limite. II s'agit d'une limitation
qui restreint de fac,on abusive la liberte syndicale et empeche
l'etablissement de nouveaux syndicats. II est important de rappeler
que certains syndicats ont commence leurs activites avec peu de
membres. Bien que la convention ne contienne pas de conditions
particulieres a cet egard, ii appartient a l'Etat de mettre en place Jes
conditions necessaires. Ces conditions ne doivent pas etre des obstacles
a la constitution de nouveaux syndicats.
En ce qui concerne Jes zones franches d'exportation, qui existent
dans de nombreux pays, la commission d'experts a note que la
NLLC avait soumis un rapport au gouvernement sur ce sujet et que
celui-ci etait en train de l'etudier. Ce rapport ainsi qu'un projet de
Joi devaient etre soumis au Parlement. Bien que le representant
gouvernemental n'ait pas donne d'informations complementaires
sur le rapport de la Commission nationale pour la legislation du travail
(NLLC), ii a declare que Jes travailleurs des zones franches
d'exportation jouissent de meilleures conditions de travail que Jes
travailleurs du reste du pays et ne sont pas mecontents de leur sort.
Meme si la convention ne prevoit pas que la meme legislation du
travail doive s'appliquer sur tout le territoire, et en particulier dans
Jes zones franches d'exportation, elle requiert le respect des principes
de la liberte syndicale sur )'ensemble du territoire.
Quant aux commentaires de la commission d'experts sur Jes restrictions
au droit de greve au Bangladesh, Jes membres employeurs
se sont referes a leur propre position sur la question et ont souligne
qu'il n'y avait dans la convention aucune base Iegale permettant de
mesurer l'etendue des restrictions imposees ace droit. l..es dispositions
de la convention ne seraient pas respectees si le droit de greve
etait reduit au point de ne plus exister. II convient toutefois de rappeler
que Jes greves peuvent avoir de graves repercussions sur
l'economie nationale, particulierement compte tenu de l'interdependance
croissante entre Jes secteurs de la production et des servi-
19/81
ces. II est en consequence frequent que Ies gouvemements etablissent
un certain seuil pour la proportion de travailleurs qui doivent
etre prealablement d'accord avec le declenchement d'une greve
afin d'empecher une perturbation dans le processus de production.
Dans ce cas, la regle necessitant l'accord des trois quarts des effectifs
concemes semble raisonnable. La commission d'experts a egalement
fait reference a la possibilite d'interdire une greve si elle
pouvait porter atteinte a l'interet national ou si elle concemait des
services d'utilite publique. Ces expressions ne sont pas tres claires.
Les curnmentaire􀅄 1k la .:ummi􀅅>iun J'e.,;perl, ,c fonJcn! ,ur unc
interpretation etroite de la notion de services essentiels. II convient
de demander au gouvemement de foumir des informations complementaires
sur !'application dans la pratique des dispositions legislatives
pertinentes ainsi que sur Jes cas et Jes circonstances dans
lesquels ces dispositions ont ete invoquees. Toutefois, la commission
d'experts n 'a pas requis ces informations. II convient en outre
de rappeler que la determination de l'etendue des limites qui peuvent
etre imposees au droit de greve pour des motifs lies a I'interet
general est une prerogative fondamentale de chaque Etat.
Compte tenu de la complexite et du nombre des questions soulevees,
ii n'est pas possible d'arriver a une conclusion simple. De
plus amples informations doivent done etre demandees sous la
forme d'un rapport qui couvrirait en detail toutes Ies questions
soulevees. En outre, le gouvernement doit preciser Jes domaines
dans lesquels des changements sont serieusement envisages afin
que ces points puissent etre etudies dans le futur et Jes mesures
adoptees evaluees.
Le membre travailleur du Burkina Faso a rappele que la presente
commission et la commission d'experts demandent depuis de
nombreuses annees au Bangladesh de modifier sa legislation et sa
pratique pour Ies rendre plus conformes aux principes de la liberte
syndicale. L'oratrice deplore que, malgre ces appels, de nombreuses
et graves violations de ces principes sont encore commises, incluant
des actes de violence contre les membres et Jes dirigeants
d'organisations syndicales. A titre d'exemple, elle a precise que le
Syndical in dependant des travailleurs du textile du Bangladesh ainsi
que ses membres, dont la plupart sont des femmes, ont fait l'objet
d'actes d'agression de la part des autorites publiques. En aofit 1995,
Jes dirigeants de ce syndical ont depose un dossier de reconnaissance
officielle qui a ete accueilli par une fin de non-recevoir. A la suite
de !'institution d'une action judiciaire conjointe avec l'association
des exportateurs du Bangladesh, le siege de ce syndical a Dhaka, en
novembre 1995, a ete saccage et Jes membres se trouvant sur Ies
lieux violentes. En outre, les membres et dirigeants d'un syndicat
d'une entreprise de Dhaka, reuvrant dans le textile, ont fail l'objet
de menaces et de harcelement de la part des autorites publiques au
cours des annees 1995 et 1996. Au mois de juin 1996, ce syndical se
voyait refuser pour la deuxieme fois, par Ies autorites competentes,
son enregistrement officiel. Elle a observe avec preoccupation que,
de fai;:on generale, lorsque les travailleurs deposent des plaintes
aupres des autorites publiques competentes, ils ne sont pas entendus
et n'obtiennent aucune collaboration dans la recherche d'un
reglement acceptable aux problemes auxquels ils doivent faire face.
Elle a regrette que le rapport du gouvemement ne donne aucune
information quant aux mesures qui auraient ete prises a cet egard
depuis le dernier examen de ce cas par la commission en 1995. Entin,
en ce qui concerne Jes travailleurs des zones franches d'exportation,
elle insiste sur !'importance que ces travailleurs, dont la plupart
sont des femmes travaillant dans des conditions miserables,
puissent beneficier du droit d'organisation sans limitation ou discrimination
d'aucune sorte. Elle doute fort que !'absence de plaintes
emanant de ces travailleurs signifie effectivement qu'ils n'ont aucune
recrimination a formuler, comme l'a souligne le representant
gouvememental. Enfin, elle prie instamment le gouvernement du
Bangladesh de modifier sans delai sa loi et sa pratique afin de les
rendre plus conformes aux principes de la Iiberte syndicale, et notamment
aux dispositions de la convention.
Le membre travailleur des Etats-Unis a insiste sur la gravite de
ce cas qui met en jeu des dispositions fondamentales de la convention,
telles que le droit d'association des fonctionnaires, le deni du
droit de se syndiquer aux travailleurs des zones franches d'exportation,
des restrictions portant sur les categories de personnes pouvant
exercer des fonctions syndicates, l'ingerence des autorites publiques
dans Ies affaires des syndicats et des restrictions excessives
du droit de greve. II est regrettable que le representant gouvememental
n'ait fourni que tres peu d'informations nouvelles a la presente
commission depuis qu'elle a commence a examiner ce cas en
1995. En se referant a.la declaration du membre travailleur du Burkina
Faso sur l'etendue, en pratique, des violations repetees des dispositions
de la convention a l'egard des travailleurs de l'industrie de
I'habillement, l'orateur a affirme qu'environ 80 pour cent des travailleurs
de cette industrie etaient des femmes. De nombreuses usines
sont situees dans les zones franches d'exportation, dans Iesquelles
ii est toujours illegal de constituer des syndicats. Le representant
gouvernemental ne semble pas s'en excuser et semble meme infor-
19/82
mer la presente commission que cette pratique va se poursuivre.
Cette question devra etre suivie de pres.
Au cours de ces demieres annees, des efforts courageux ont ete
entrepris pour constituer des syndicats independants dans I'industrie
de l'habillement et pour Jes regrouper au sein d'une federation
professionnelle unique, le Syndical des travailleurs independants
de l'habillement du Bangladesh (BIGU), independante des partis
politiques, des employeurs et du gouvemement. Si cette tentative
de constituer une federation professionnelle independante et dem,1,.,
,11 iquc est couronncc de succcs, ii s'agira la d'unc avancec his
torique pour les travailleurs du Bangladesh. Malheureusement,jusqu'a
maintenant, le gouvernement du Bangladesh refuse de
reconnaftre legalement le BIGU, viol ant ainsi clairement les dispositions
de la convention. Cet effort d'organisation a coi'ncide avec la
conclusion d'un accord avec I' Association des producteurs et expor•
tateurs de l'habillement du Bangladesh (BGMEA) sur I'elimination
du travail des enfants dans cette industrie. L'OIT a joue un r61e
dans la conclusion de cet accord et participe egalement a sa mise en
reuvre. Le BIGU soutient activement cet accord et a d'ailleurs mis
en place les premieres ecoles destinees aux enfants sauves des usines.
Au Bangladesh, toutefois, nombreux sont ceux qui travaillent
activement pour saper les efforts du BIGU. Le rapport annuel de la
CISL sur les violations des droits syndicaux (1997) contient malheureusement
de nombreux autres cas, en particulier dans I'industrie
de l'habillement qui exporte massivement vers de nombreuses
entreprises multinationales americaines et etrangeres renommees.
Ce cas met en evidence qu'il n 'appartient pas seulement au gouvernement
et aux dirigeants de ces usines d'assurer que Ies conventions
de I'OIT relatives aux droits fondamentaux de I'homme soient respectees,
mais que cette responsabilite incombe egalement aux entreprises
multinationales qui tirent profit de la production de leurs
marchandises au Bangladesh. Nier cette responsabilite ne fera que
renforcer la position de ceux qui s'elevent, partout dans le monde,
contre I'expansion du commerce, !'integration economique et la
mondialisation. L'application de !'ensemble des dispositions de la
convention par le gouvemement du Bangladesh, avec le soutien et
I 'assistance actifs des entreprises multinationales qui operent dans
ce pays, contribuerait grandement a resister aces forces protectionnistes
et encore plus a assurer que les benefices retombent sur un
plus grand nombre de personnes, tant au Bangladesh qu'ailleurs, et
ne soient pas uniquement reserves aux personnes Ies plus avantagees.
Malheureusement, le chemin est long, comme en temoigne
ce cas.
Le membre travailleur de l'Inde est d'avis que ce cas souleve de
serieuses questions. Voisin du Bangladesh, ii rei;:oit constamment
des rapports qui font etat de la violation des droits syndicaux. Bien
que le representant gouvememental ait declare que les syndicats
ont acces aux tribunaux, la pratique revele que ce n'est pas toujours
possible. II se r6fere a un <:as uu les travailleurs ont ete licencies, en
1996, puisqu'ils envisageaient d'introduire un recours judiciaire.
Les representants syndicaux qui les avaient aides ont ete forces de
quitter leur emploi, battus et se sont vu offrir des emplois differents
a la condition qu'ils mettent un terme a la procedure judiciaire. II
est des !ors errone de dire que les tribunaux du Bangladesh assurent
aux travailleurs et a leurs representants la protection de leurs
droits.
Rappelant la declaration du representant gouvememental relative
au droit d'organisation des fonctionnaires, ii a mis en garde sur
la question de la difference entre les syndicats et Ies associations
soulevee par cette declaration. Ces demieres n'ont pas les memes
droits que Jes syndicats. II est des lors errone de dire que les fonctionnaires
au Bangladeshjouissent du droit d'organisation. Pour ce
qui est de la question des 30 pour cent minimum de travailleurs
d'une entreprise pour qu'un syndical puisse etre enregistre, ii a indique
que ce niveau est bien inferieur dans la plupart des Etats. Bien
que le representant gouvememental ait explique que cette mesure
vise a prevenir la multiplicite des syndicats, ii semble que son objectif
reel soit d'empecher la constitution de syndicats en general. En
outre, la situation qui prevaut dans les zones franches d'exportation
au Bangladesh est particulierement grave. La publicite adressee
aux entreprises multinationales par les autorites nationales responsables
de la promotion de ces zones insiste sur le fail que la loi interdit
la constitution de syndicats. Cela constitue en soi une preuve
que le gouvemement ne respecte pas le droit d'organisation et de
negociation collective dans Jes zones franches d'exportation. Une
autre mesure antisyndicale non acceptee par les syndicats des
autres Etats est le large pouvoir conlere au Greffier de s'ingerer
dans Ies activites syndicales en s'introduisant dans les locaux ou en
inspectant les documents ou le personnel.
En ce qui concerne les restrictions sur Ies categories de personnes
pouvant exercer des fonctions syndicales, ii a note que Ies travailleurs
peuvent etre Iicencies pour inconduite, sans que l'inconduite
soil plus avant precisee dans la loi. Ce large pouvoir donne au
gouvernement lui permet de licencier comme bon lui semble les dirigeants
syndicaux. Une autre limitation grave imposee a la liberte
syndicale est l'exigence de reunir 75 pour cent des travailleurs concernes
pour le declenchement de la greve et la possibilite d'interdire
Jes greves qui durent plus de 30 jours ou qui sont prejudiciables a
l'interet national. Ces mesures constituent de serieuses Iimites au
droit syndical et octroient au gouvernement un large pouvoir pour
Jes interdire. II a ete possible, par exemple, pour le gouvernement
d'empecher une greve des travailleurs du service du telephone en
declarant qu'il s'agissait d'un service essentiel.
Bien que le Premier ministre du pays soit en faveur de modifications
legislatives a cet egard, aucune action n'a encore ete entreprise.
11 est necessaire d'amender Jes dispositions legislatives pertinentes
et de prendrc les mesures necessaires en collaboration avec Jes
organisations de travailleurs. Le gouvernement doit etre prie de
prendre Jes mesures necessaires afin que des progres soient constates
par la commission l'annee prochaine dans )'application de toutes
Jes questions couvertes oar la convention
Le membre rravaill􀇌ur de la Grece a estimc que, dans ce cas
comme dans d'autres, on pouvait s'interroger sur la signification
d'unc ratificatiua ... w,sitot uub]i<;c quand ii s'agit J,; passc1 ;. J'application
prntique. Ce qu'on peut lire dans !'observation de la commission
d'experts temoigne d'une sollicitude etrange a l'egard de travailleurs
qui sont pourtant des adultes et dcvraicnt etre Iaisscs
libres de s'organiser comme ils I'cntendent. L'explication selon laquelle
des travailleurs seraient licencies pour «inconduite» doit etre
precisee, car ii serait inquietant qu'il revienne a I'employeur ou a
une instance gouvernementale, et non a l'autorite judiciaire, de determiner
ce qui constitue une «inconduite». En tout etat de cause,
Jes travailleurs ne sont pas assez inconsequents pour se donner des
1cp1c,enlanls malhonneles. Celle disposition don done etre aorogee.
En ce qui concerne )'exigence d'une majorite des trois quarts
pour decider d'une greve, elle constitue une ingerence flagrante. La
situation economique est souvent invoquee pour ne pas appliquer
Jes normes, alors que )'experience demontre qu'aucun pays ne peut
progresser sans Jes respecter. Si le gouvernement veut vraiment appliquer
la convention, qu'il s'y engage, et la presente commission
sera a meme de constater des progres l'annee prochaine. Le dialogue
au sein de la presente commission ne doit pas avoir un caractere
purement diplomatique mais faire entendre la voix des travailleurs
qui ne peuvent y etre presents et ne peuvent s'exprimer dans leur
propre pays.
Le membre travailleur de l'ltalie a estime qu'en depit des timides
elements de reponse fournis par le gouvernement Jes sept
points releves par la commission d'experts n'en temoignaient pas
mains d'une violation generale et persistante de la Iiberte syndicale.
Les dispositions visees affectent le droit des organisations de choisir
Iibrement leurs dirigeants et prevoient des modalites injustifiees
d'intervention des autorites dans Jes locaux syndicaux. Une plainte
en violation de la liberte syndicale introduite par un syndical de travailleurs
du textile a d'ailleurs conduit le Comite de la Iiberte syndicale
a de severes conclusions ace sujet. L'exigence des 30 pour cent
revient, dans la pratique, a empecher Jes syndicats de recruter de
nouveaux adherents. En outre, l'ordonnance sur Jes relations professionnelles
permet le licenciement des responsables syndicaux.
En ce qui concerne le deni du droit de se syndiquer dans Jes zones
franches d'exportation, ii convient de rappeler qu'en 1992 le gouvernement
s'etait engage a y mettre fin. Quant a la question du
droit de greve dans Jes services essentiels, elle devrait etre reglee
par la negociation tripartite et non de maniere autoritaire. Les elections
qui se sont tenues l'annee derniere temoignent de la volonte
de ce pays de progresser vers la democratie. Or celle-ci ne peut
prosperer hors du respect des droits fondamentaux. Les debuts du
programme conjoint des employeurs du textile, de l'UNICEF et du
BIT pour )'elimination du travail des enfants sont encourageants;
peut-etre un programme analogue pourrait-il aider aussi a lever Jes
entraves a la liberte syndicale.
Le membre travailleur de la Colombie s'est declare preoccupe
par Jes carences qui ressortent des indications donnees par le rcpresentant
gouvernemental, compte tenu, notamment, des perspectives
de garantie du libre exercice de l'activite syndicale qui avaient
ete entrevues. L'ingerence du gouvernement dans Jes affaires internes
des syndicats s'avere preoccupante, notamment en ce qui concerne
I'impossibilite, pour un travaillcur licencie pour «inconduite»,
d'exercer des fonctions syndicales. Dans certains pays, le seul fait
de s'affilier a un syndical peut declencher des licenciements sans
juste cause. Le droit de se syndiquer et l'exercice du droit de greve
doivent etre garantis aussi bien dans Jes zones franches d'exportation
que dans le secteur public. Ces droits syndicaux doivent etre
respectes dans tous Jes pays du monde, en particulier dans Jes pays
en developpement. En depit des observations formulees par la
commission d'experts, la situation a peu evolue et la repression continue
de sevir: tout ce que )'on peut souhaiter, c'est de constater, )'an
prochain, un reel progres dans le sens de la garantie des droits des
travailleurs.
Le membre travailleur du Pakistan, soulignant que le nouveau
gouvernement qui a ete mis en place I'annee derniere s'est engage a
respecter la Iiberte syndicale, a demande au representant gouvernemental
de respecter la convention n° 87. L'important n'est pas de
ratifier la convention mais d'en appliquer la lettre et l'esprit.
D'abord, Jes droits syndicaux doivent etre respectes aussi bien dans
Jes zones franches d'exportation que dans les zones rurales. Ensuite,
Jes restrictions apportees au droit des organisations syndicales
d'elire leurs representants doivent etre supprimees puisque la Iiberte
syndicale exige que Jes organisations syndicales puissent elire librement
leurs representants - sans ingerence du gouvernement.
Par consequent, l'article 7-A 1) b) de l'Ordonnance sur Jes relations
professionnelles (ORP) de 1969 doit etre abroge. Enfin, )'exigence
posee par l'ORP, aux tennes de laquelle aucun syndicat ne
peut etre enregistre a mains de reunir 30 pour cent minimum de
l'effectif total des travailleurs rend difficile la constitution d'une organisation
syndicale dans Jes grandes entreprises et doit done etre
5-11pprime"e Il Rex-prime J'espoir que le gouvemement accepte !'0ffre
d'assistance technique du Bureau.
Le membre employeur de l'lnde a indique que la legislation du
travail au Bangladesh est similaire ii et:lle de l'Inde. Ainsi, si la Joi
sur Jes syndicats en Inde exige simplement un effectif de sept travailleurs
pour enregistrer un syndical, Jes personnes exeri;ant des
fonctions de direction ou d'administration prefcrcnt en general
constituer des associations et etre enregistrees conformement a la
Joi sur Jes societes, compte tenu de la nature de Ieur fonction. Des
Iors, Jes restrictions qui sont imposees aces personnes au Bangladesh,
aux termes de I'ORP, apparaissent justifiees. Sont egalement
justifiees Jes restrictions sur Jes categories de personnes pouvant
exercer des fonctions dans un syndical car elles permettent au dirigeants
synclicaux de se developper. vuant a Ja regJe des 3U pour
cent posee par I 'ORP, elle doit etre maintenue afin d'eviter une proliferation
d'organisations syndicales qui ne serait ni dans l'interet de
l'industrie ni de celui des travailleurs. Enfin, le droit de greve n'est
pas un droit absolu et devrait etre subordonne a l'interet de l'Etat.
Le genre de reglementation en faveur des travailleurs, pronee dans
Jes discussions de la commission, erode le droit des employeurs de
gerer leurs entreprises. II a exprime l'espoir que la commission
adopte un point de vue equilibre et qu'elle garde a )'esprit le systeme
de relations professionnelles dans sa globalite.
Les membres employeurs ant rappele que sur Jes sept points releves
par la commission d'experts, qui n'ont pas tous la meme importance,
de nouvelles informations devraient etre fournies et Jes
modifications necessaires devraient etre apportees.
La commission a pris note de la declaration du representant gouvernemental
et du debat qui a suivi. Elle a constate que depuis de
nombreuses annees ii existe d'importantes et nombreuses divergences,
en particulier dans Jes zones franches d'exportation entre,
d'une part, la legislation et la pratique nationales et, d'autre part,
Jes dispositions de la convention. Elle a exprime I'espoir que la
commission nationale de la legislation du travail parviendra rapidement
au terme de ses travaux de revision de la legislation du travail
et que le nouveau projet du Code du travail tiendra compte des observations
nombreuses et repetees de la commission d'experts et
aussi de celles de la presente commission. Ellea rappele au gouvernement
qu'il Jui est possible de demander !'assistance technique du
Bureau a cet egard.
19/83

Document no 257
CIT, 85e session, 1997, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 19/89-19/93 (Costa Rica)

Conference internationale du Travail
Compte rendu provisoire
19
Ouatre-vingt-cinquieme session, Geneve, 1997
Troisieme question a l'ordre du jour: informations et rapports sur l'application
ties cunveniions et recommandations
Rapport de la Commission de )'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIERE PARTIE: Rapport general . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
A. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
B. Questions generales relatives aux normes intemationales du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
C. Rapports demandes au titre de l'article 19 de la Constitution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
D. Execution d'obligations specifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
DEUXIEME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
A. Observations generales et informations concemant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
B. Observations et inf ormations sur l'application des conventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
C. Tableau des rapports detailles sur les conventions ratifiees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la Constitution) . . 139
II. Observations et informations concernant !'application des conventions dans les territoires non metropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
A. Informations concemant certains territoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
B. Ta􀁗le􀁘u des rapports detailles sur l'application des conventions dans les territ oires non metropohta1ns
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Ill. Soumission aux autorites competentes des conventions et recommandations adoptees par la Conference
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
Iv. Rapports sur les conventions non ratifiees et les recommandations (article 19 de la Constitution) -
Etudes d 'ensemble des rapports sur la convention ( n° 15 0) et la recommandation ( n° 158) sur I' administration
du travail, 1978 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
Rapports re􀁙us au 17 juin 1997 concemant la convention n° 150 et la recommandation n° 158 . . . . 144
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
19/1
Costa Rica (ratification: 1960). Un representant gouvernemental,
ministre du Travail et de la Securite sociale, a declare que son
pays respecte l'Etat de droit et que Jes differends que suscite la vie
en societe relevent des decisions des tribunaux de justice. Le droit
de greve est consacre, au Costa Rica, depuis 1949 dans l'article 61
de la Constitution. Cet article dispose que la reglementation du
droit de greve releve de la Joi, en l'espece le Code du travail, qui
n'impose au legislateur que deux limites: la premiere conceme
l'etendue de ce droit qui n'est pas autorise dans le secteur public,
la deuxieme concerne Jes modalites d'exercice de ce droit, Jes
actes de violence et de contrainte devant etre interdits. L'article
364 du Code du travail dispose que «la greve est definie par
)'abandon temporaire du travail dans une entreprise, un etablissement
ou un commerce, concerte et execute pacifiquement par un
groupe de trois travailleurs ou plus, dans le but exclusif d'ameliorer
ou de defendre Jes interets economiques et sociaux communs».
Cette definition est completee par Jes dispositions de I'article 366
dudit code, deuxieme partie, qui enoncent Jes conditions devant
etre reunies pour que la greve soit Iegale: se conformer strictement
aux dispositions de l'article 364, epuiser Jes procedures de
conciliation mentionnees au titre VII, chapitre III du code - articles
500 et suivants -, et reunir au moins 70 pour cent des personnes
travaillant dans I'entreprise, commerce ou lieu de travail
en question. II faut en conclure que toute greve qui ne reunit pas
Jes exigences mentionnees a )'article 366, premiere partie, cite cidessus,
est illegale. N'ayant pas respecte ces conditions, la greve
des travailleurs de la societe Lignes aeriennes du Costa Rica -
LACSA, mentionnee dans le rapport de la commission d'experts,
est illegale. Elle n'est pas illegale parce qu'elle s'est deroulee dans
le service public, mais parce que Jes travailleurs n'ont pas respecte
Jes exigences requises par la legislation.
En ce qui concerne le droit de greve dans le secteur public en
general, l'article 61 de la Constitution exclut Jes travailleurs des services
publics de son champ d'application et Iaisse totale discretion
au Iegislateur a Ieur egard. L'article 368, premiere partie, du Code
du travail reprend la disposition constitutionnelle et enonce: «la
greve dans Jes services publics est interdite ... ». II est important
d'ouvrir une parenthese et de noter que la deuxieme partie dudit
article qui dispose que «Jes differends entre Jes patrons et Jes travailleurs,
ainsi que tous ceux pour lesquels la greve est interdite,
sont obligatoirement soumis a la competence des tribunaux du travail
» a ete declaree inconstitutionnelle par un vote de la Chambre
constitutionnelle, le 23 aout 1992. De meme, ont ete declares inconstitutionnels
Jes articles 467 a 535 dudit code concernant Jes
fonctionnaires et Jes administrations publiques qui ne sont pas soumis
a un regime de droit prive, et Jes articles 398 a 404 et 535, sans
prPjnrllr-P rlPc: rlrnlk !lr-qnic: ,-Ip hnnnp fnl p􀇠:n· rlPr-ic:inn '!lrh1tr-:.1P nn-1
le. La decision de la Chambre constitutionnelle declare qu'il existe
deux types de relations d'emploi differentes dans le secteur public:
la relation de service des employes du secteur public lies aux administrations
publiqucs par «un regime de droit public» qui dccoulc
du regime statutaire prevu dans la Constitution aux articles 190 et
191, et la relation de travail qui n'est pas legalement soumise a un
regime d'emploi de droit public concernant Jes entreprises publiques
dans Iesquelles I'Etat detient la totalite ou la majorite du capital
et pour Iesquelles Jes employes ne sont pas soumis a un regime
statutaire mais a un regime de droit prive. La Chambre constitutionnelle,
dans le considerant XI de son arret, fait reference a ces
administrations quand ii affirme: «Evidemment, la declaration contenue
dans cette decision couvre la relation d'emploi qui intervient
entre l'administration (ou mieux, Jes administrations) publique et
ses employes mais, pour Jes secteurs dans lesquels existe une reglementation
nationale qui renvoie a un regime de travail de droit prive,
la solution doit etre differente. Ces cas seront soumis aux procedures
d'arbitrage si elles se fondent sur des lois, des reglements ou
des decisions gouvernementales en vigueur. De plus, ils ne pourront
faire l'objet de sentences arbitrales prises en iime et conscience, ni
de decisions prononcees par des tribunaux composes de personnes
non assermentees». En application de la legislation, ii rappelle que
le gouvernement respecte consciencieusement Jes decisions des tribunaux
de justice et de la Chambre constitutionnelle qui ont des
effets erga omnes. Par ailleurs, le dispositif juridique garantit l'independance
des pouvoirs de I'Etat et le respect de la «chose jugee»,
comme le prevoient Jes articles 9 et 153 de la Constitution.
Dans I'ordre juridique du Costa Rica, l'article 369 du Code du
travail definit la notion de services publics et dispose que: conformement
a l'article precedent, on entend par service public: a) tous
ceux qui sont assures par Jes travailleurs de l'Etat ou de ses institutions
quand I'activite de I'Etat ou de ses institutions n'a pas le caractere
d'une activite exercee egalement par des entreprises privees a
but lucratif; b) ceux qui sont exerces par Jes travailleurs occupes aux
semences, a la culture, au soin ou a la recolte des produits agricoles
et forestiers, ou a l'elevage ainsi qu'a la transformation des produits
dans Jes cas ou ils seraient menaces d'alteration a defaut d'execution
immediate des travaux. Cependant sont exclues de cette enumeration
Jes activites realisees par Jes travailleurs agricoles des
entreprises qui ont conclu des contrats avec I 'Et at, devenus par la
suite lois de la Republique dans lesquels est stipule que Jes entreprises
et Ieurs employes pourront d'un commun accord soumettre
Ieurs conflits a une procedure d'arbitrage; c) Jes activites qui occupent
Jes travailleurs des entreprises de transport ferroviaire, maritime
et aerien et celles qui occupent Jes personnels roulants ou volants
de n'importe quelle entreprise privee; d) Jes activites qui
occupent des travailleurs dont la presence est indispensable au
fonctionnement continu des entreprises privees qui ne peuvent suspendre
Ieur activite sans causer un dommage grave et immediat a la
sante ou I'economie publique, comme par exemple Jes services de
sante, d'hygiene, de nettoyage et eclairage publics; e) Jes activites
identifiees par le pouvoir executif comme service public sur le territoire
de la Republique, dans la mesure ou I' Assemblee legislative a
fait usage de son droit constitutionnel de suspendre certaines garanties
individuelles.
Le gouvernement du Costa Rica informe la commission d'experts
qu'a plusieurs reprises depuis l'entree en vigueur du Code du
travail des tentatives de reforme concernant la notion de service
public ont ete entreprises. Le projet de Joi sur le regime statutaire
de I'emploi public, dossier n° 11.888, actuellement en discussion a
I'Assemblee legislative, constitue une de ces tentatives. Le titre VI
(chapitre unique, articles 110 a 119) de ce projet reglemente la greve
dans Jes services publics afin que soit reconnu le droit de greve
dans Jes services qui ne sont pas des services essentiels au sens strict
du terme, tout en prevoyant des limites a son exercice ainsi que des
sanctions, outre Jes interdictions et Jes modalites d'exercice. La
commission a, en ce qui concerne la greve dans Jes entreprises de
transport, evoque le conflit intervenu dans I'entreprise des lignes
aeriennes du Costa Rica - LACSA; a ce sujet, le gouvemement
19/89
tient a rappeler Jes dispositions de l'article 113, alinea.f), du projet
precite selon lesquelles: Article 113- Conditions generales de Iegalite.
«Pour que la greve dans l'administration publique soit Iegale,
Jes travailleurs et leurs organisations doivent respecter Jes exigences
suivantes: f) Jes navires, aeronefs, trains, autobus et autres
moyens de transport public, doivent atteindre Ieur destination
avant de se mettre en greve.»
Cela montre que le dispositif legislatif autorise Jes travailleurs
des entreprises de transport, telles que LACSA, a participer aux
greves si, et seulement si, ils respectent ces exigences afin qut: la
greve puisse etre qualifiee de «legale». Ainsi, le gouvemement du
Costa Rica fait preuve de sa volonte de respecter Jes observations
de la commission relative a la greve dans ce secteur. II ne fait aucun
doute qu'avec cette legislation, soumise a )'approbation de l'Assemblee
legislative, le gouvemement garantit le service minimum
et reconnait le droit de greve dans Jes services des institutions publiques
qui ne sont pas consideres comme essentiels, cherchant a trouver
un nouvel equilibre entre Jes droits de la societe et des usagers
des services publics, d'une part, et Jes droits des employes publics,
d'autre part.
Les droits garantis formellement par la legislation du Costa Rica
et par Jes projets du gouvemement en discussion a I' Assemblee sont
consacres dans la pratique. Ainsi, ii y a un peu plus d'un an, Jes educateurs
et la Confederation syndicale, plus forte et mieux organisee,
se sont mis en greve car ils n'etaient pas d'accord avec Jes reformes
proposees par le gouvemement relatives au regime des pensions.
Cette greve de six semaines s'est terminee quand Jes negociations
avec le corps enseignant ont abouti. Bien que cette greve ait ete
illegale car intervenue dans un service public et sans respect des
exigences legales, aucune personne ayant participe au mouvement
n'a ete licenciee et aucune mesure de represailles n'a ete prise contre
Jes grevistes. Recemment, Jes travailleurs des telecommunications
ont decide de mettre fin a Ieur greve sans aucune pression de
la part du gouvemement. Bien que le mouvement ait ete illegal,
aucune sanction n'a ete prise contre Jes grevistes. II y a quelques
mois, dans un h6pital, Jes travailleurs se sont mis en greve pour
l'augmentation de leur allocation de panier. Ce mouvement a pris
fin de leur propre initiative et, la aussi, aucune sanction n'a ete prise
contre Jes participants ace mouvement illegal. L'orateur evoque ces
cas pour demontrer une fois de plus que, sans tenir compte de la
legalite des mouvements de greve, et sans appuyer )'utilisation de la
violence pour exprimer un point de vue, ces formes d'expression
meme illegales existant dans le pays sont respectees. Les mouvements
de greve ne sont ni interdits ni re primes par la force et aucune
mesure de represailles n'est prise a l'encontre de Ieurs participants.
La commission d'experts demande que Jes etrangers puissent
exercer des fonctions de direction dans Jes svndicats, au moins
apres un delai raisonnable de residence dans le pays; cette interdiction
derive de la Constitution. L'article 60 (2) de la Constitution
dispose que «Jes etrangers ne peuvent exercer des fonctions de direction
ou de responsabilite dans Jes syndicats». Cet article trouve
son fondement juridique dans Jes principes de la souverainete nationale.
D'apres l'ordre constitutionnel inteme, la «souverainete
reside exclusivement dans la Nation». L'exercice des droits politiques
est reserve par la Constitution aux nationaux car ils sont la
consequence directe de l'exercice de la souverainete populaire. En
effet, si d'apres Jes articles 2, 3 et4 de la Constitution, la souverainete
reside dans le peuple, ii est clair que Jes differentes modalites
d'exercice par lesquelles la volonte populaire peut s'exprimer, notamment
Jes fonctions de direction et de responsabilite dans Jes syndicats,
sont reservees au peuple. Cependant, le gouvemement toujours
pret a rendre ces dispositions normatives conformes aux
principes de l'OIT, a demande )'assistance technique du BIT afin de
trouver une solution le gale en accord avec l'observation de la commission.
En ce qui conceme la greve dans le secteur de l'agriculture, de
l'elevage et de la foresterie, ii declare que la conception selon Iaquelle
l'activite agricole est consideree comme un service public ne
se trouve pas dans la doctrine et est pratiquement absente de tout
reglement; aussi, ii est interessant de connaitre Jes motivations du
Iegislateur. L'explication se trouve dans l'expose des motifs envoye
au Congres par le President de la Republique !ors de la remise du
projet du Code du travail. Ce document precise: «Nous savons que
l'OIT a adopte, le 12 novembre 1921 a Geneve, une convention qui
oblige ses signataires a garantir a toutes Jes personnes occupees
dans l'agriculture Jes memes droits qu'aux travailleurs urbains et a
exclure toute reglementation qui vise a limiter pour Jes travailleurs
agricoles ces droits d'association. Nous sommes neanmoins convaincus
que )'agriculture et ses activites connexes constituent pour
notre pays, qui depend exclusivement de ce que produisent ses
champs, un veritable service public qui, dans l'interet de la nation,
ne peut ni ne doit etre paralyse par la greve ou le ch6mage». II est
probable cependant que le fondement de la disposition en question
est plut6t d'ordre politique. En effet, la disposition qui ne permet
19/90
pas aux travailleurs agricoles de recourir a la greve n'est pas une
disposition isolee. Elle est un element d'une politique legislative
dont la consequence est la presence d'une serie de dispositions exceptionnelles,
dispersees dans differentes parties du code; ces normes
donnent corps a une reglementation speciale moins favorable
pour le travailleur agricole. Certaines de ces normes ont ete supprimees
ou modifiees, mais ii ne fait aucun doute que, lors de la promulgation
du code, on a voulu ne pas l'appliquer au secteur agraire.
On peut observer que la disposition envisage deux situations et
un cas d'exceptton. La prcmiere situation, plus generale, conceme
toutes Jes activites relatives aux produits de )'agriculture, de l'elevage
ou de la foresterie alors que la deuxieme situation ne conceme
Jes activites relatives aces produits que dans la mesure oil elles soot
necessaires afin d'eviter qu'ils ne perissent. La situation d'exception
conceme Jes travailleurs agricoles des entreprises ayant conclu
avec l'Etat des «contrats lois» dans lesquels ii a ete convenu de recourir
d'un commun accord a la procedure d'arbitrage. Dans ces
cas, considerant que la greve n'est pas autorisee et que le recours a
)'arbitrage est obligatoire et considerant que Jes contrats lois ne
peuvent etre modifies par la Joi, le Iegislateur a dfi ajouter cette disposition
pour etre logique. Le gouvemement, conscient du traitement
special moins favorable reserve aux travailleurs de )'agriculture,
surtout en ce qui conceme le droit de greve, a tente a plusieurs
reprises, depuis I'entree en vigueur du Code du travail, de proposer
des reformes relatives a la notion de service public. Le projet de Joi
sur le regime statutaire de l'emploi public, dossier n° 11.888, a l'etude
a I' Assemblee legislative, constitue une de ces tentatives. Le titre
VI (chapitre unique, articles 110 a 119) de ce projet reglemente la
greve dans Jes services publics afin que soit reconnu le droit de greve
dans Jes services qui ne sont pas des services essentiels en tant
que tels, en Iimitant son exercice, en prevoyant des sanctions, des
interdictions et des modalites d'exercice. Conformement aux dispositions
de l'article 110 du projet, la legislation autorisera la greve
dans le secteur de l'agriculture, de l'elevage et de la foresterie. II
considere personnellement que !'interdiction du droit de greve
pour ces travailleurs est discriminatoire et viole le principe d'egalite
juridique, et c'est pourquoi ii confirme la necessite de demander
l'assistance du BITafin d'elaborer un projet de Joi sans la presence
de cette restriction. D'apres ce qui est expose, le gouvemement
confirme une fois de plus sa volonte de respecter Jes observations
formulees par cette commission.
Les membres travailleurs rappellent que, en 1993, la commission
a examine en detail )'application de la convention au Costa Rica.
Parmi Jes preoccupations majeures qui ont retenu )'attention de la
commission figurait, outre le droit de greve et Jes differentes entraves
a la Iiberte d'association, le probleme des associations solidaristes.
Ils constatent que le gouvemement a tenu compte des observations
et commentaires de la commission d'experts et de la presente
commission dans !'elaboration des projets de Joi pertinents. Toutefois,
ils deplorent que de serieux problemes perdurent dans la pratique.
Selon des informations obtenues, un nombre croissant d'employeurs
se servent de ces associations non representatives pour
echapper aux obligations decoulant de la negociation collective. Ils
insistent pour que le projet de Joi, elabore ii y a deja plus de deux
ans avec l'assistance technique du BIT et qui conceme le fonds de
prevoyance des travailleurs et la democratisation economique, soit
adopte sans delai afin d'assurer a toutes Jes organisations syndicales
le droit d'administrer Jes foods d'indemnisation du ch6mage.
En ce qui conceme !'interdiction faite aux etrangers d'exercer
des fonctions de direction ou de responsabilite dans Jes syndicats
aux termes de )'article 60 (2) de la Constitution, Jes membres travailleurs
reiterent leur position, prise en 1993, en demandant a nouveau
au gouvemement de reexaminer la question afin de permettre
aux travailleurs de choisir librement leurs representants, conformement
aux dispositions de la convention.
En ce qui conceme Jes limitations imposees au droit de greve, ils
rappellent Jes conclusions formulees par la commission d'experts
aux paragraphes 158 et 159 de l'etude d'ensemble de 1994 sur la
liberte syndicale et la negociation collective, aux termes desquelles
le droit de greve ne doit pouvoir faire l'objet de restrictions, voire
d'interdictions, dans le secteur public que pour Jes fonctionnaires
qui exercent des fonctions d'autorite au nom de l'Etat ou dans Jes
services essentiels au sens strict du terme, c'est-a-dire Jes services
dont l'interruption pourrait mettre en danger, dans !'ensemble ou
dans une partie de la population, la vie, la securite ou la sante de la
personne. Comme l'affirme la commission, ils considerent que Jes
services de transport en general ne sont pas essentiels stricto sensu.
Ils insistent pour que le gouvemement prenne Jes mesures necessaires
pour supprimer Jes limitations au droit de greve dans le secteur
public ainsi que dans Jes secteurs de !'agriculture, de l'elevage et de
la foresterie. lls expriment l'espoir que le gouvemement approuvera,
dans un proche avenir, le projet de Joi definissant Jes services
publics pour Iesquels la greve peut etre limitee a la lumiere des observations
formulees par la commission d'experts et la presente
commission.
Enfin, s'il est possible de constater que des projets de Joi couvrant
nombre de questions soulevees par Ja presente commission en
1993 ont ete prepares avec ]'assistance technique du BIT, ils expriment
leur grande preoccupation face a la Ienteur des demarches et
aux pratiques contradictoires qui risquent d 'entraver l'application
effective de la convention. IIs insistent pour que le gouvernement
prenne Jes mesures necessaires en vue de regler Jes problemes souleves
par la commission d'experts. Dans ce contexte, ii est essentiel
que la nouvelle information fournie par le representant gouvememental
soit transmise a la commission d'experts pour examen et
que la presente commission envisage de reexaminer ce cas !ors de
ses prochaines sessions.
Les membres employeurs ont remercie le ministre du Travail du
Costa Rica pour ses commentaires abondants et clairs. Lorsque le
cas a ete examine en 1993, la commission a traite un grand nombre
de points souleves par la commission d'experts. Le fait qne le nombre
Je ces points ait diminue porte a croire qu'il y a moins de matiere
a critiquer. De plus. en 1994, la commission d'experts a eu !'occasion
de placer le Cost:; Rica Jan􀆃 la !istc J<.:s cas J.; prvgri:, puur la
convention.
En ce qui concerne !'interdiction faite aux etrangers d'exercer
des fonctions de direction ou de responsabilite dans lcs syndicats,
Jes membres employeurs reconnaissent que cela est unc restriction
a la liberte des travailleurs et des syndicats d'exercer librement
leurs activites. Bien que le ministre ait foumi Jes raisons historiques
des mesures critiquees, ii se declare pret a adopter des reformes et a
demander )'assistance technique du BIT. On peut done s'attendre a
des changements sur ce point.
En cc qui conc.;rne l'i11te1Jktiun Ju Jruit de gri:ve cians ie secteur
public et dans le secteur de I'agriculture, de I'elevage et de la
foresterie, le ministre foumit de nombreuses explications. A cet
egard, Jes membres employeurs remarquent que des changements
dans la pratique sont actuellement examines par la Cour constitutionnelle
afin de determiner leur validite constitutionnelle. Toutefois,
le pays ne dispose pas de reglement uniforme s'appliquant a
tous Jes cas de greve et de lock-out. Sur la question de savoir si le
secteur des transports peut etre considere comme un service essentiel,
Jes membres employeurs ont souligne Jes differences qui existent
entre Jes nombreux Etats Membres dans Ieur structure, niveau
de developpement et situation economique. On ne peut done pas
juger la situation d'un point de vue unique. IIs observent que I'Etat
apparait souvent comme l'employeur lorsque l'on etudie la question
des greves dans le secteur public et qu'il devrait etre la partie la
plus puissante. Toutefois, ii s'avere que bien souvent la situation
contraire prevaut et que l'Etat est la plus faible partie. La population
est la principale victime des greves et est prise en otage Iorsque
celles-ci concement le secteur public. II appartient a chaque Etat de
trouver l'equilibre necessaire en determinant Jes conditions dans
lesquelles Jes greves peuvent se derouler. La convention ainsi que
d'autres instruments intemationaux pertinents ne contiennent que
des principes generaux que Jes Etats doivent appliquer a la Jumiere
de leurs conditions nationales. Les membres employeurs sont heureux
d'entendre que le ministre est pret a apporter Jes changements
necessaires en reponse aux critiques de la commission d'experts.
Des progres futurs sont a envisager. Le contexte politique du Costa
Rica explique la plupart des points souleves, notamment Iorsqu'il
s'agit des secteurs d'activite ou l'Etat a une situation de monopole.
Cette situation evolue; cependant, la legislation du travail n'est pas
a jour dans tous Jes secteurs. II semble que le Costa Rica avance
dans la bonne direction car ii realise que Jes disparites qui subsistent
dans sa reglementation sur la liberte syndicale doivent etre supprimees.
A cet egard, Jes membres employeurs font remarquer que la
pratique de la commission consiste a examiner de nouveau Jes cas
dans lesquels elle avail formule des observations. Cela a pour consequence
le reexamen de certains cas tous Jes ans. Les membres
employeurs ont le sentiment que Jes cas comme celui-ci ne necessitent
pas un nouvel examen a la prochaine session de la commission.
Les prochaines mesures devraient etre decidees sur la base des observations
que la commission d'experts formulera dans son rapport
annuel.
Le membre travailleur du Costa Rica a appuye Jes declarations
des membres travailleurs. Au Costa Rica, la greve est interdite dans
le secteur public et la negociation collective n'existe pas; de meme,
Jes effets des sentences arbitrales sont annules par la Cour constitutionnelle.
En cinquante ans, seules deux greves ont ete declarees
le gales dans Jes secteurs ou la greve est autorisee par la legislation;
et quand la greve est illegale, comme dans le cas de la societe LACSA,
on en arrive a des situations ou Jes travailleurs sont licencies, Jes
conventions collectives abrogees alors que la procedure judiciaire
est encore en instance cinq ans apres Jes faits. Le gouvemement n'a
pas suivi Jes recommandations de la mission de contacts directs et
de la presente commission, Jui demandant de laisser aux syndicats
la possibilite de gerer Jes fonds de pension (interdit aux termes de la
Joi n° 73 60). Les quelques concessions obtenues par Jes syndicats
l'ont ete grace a ]'action de I' AFL-CIO qui, dans la reclamation
qu'elle a soumise aux autorites des Etats-Unis, leur a demande de
ne pas octroyer d'exemptions douanieres au Costa Rica. Enfin,
l'orateur s'est refere au 305e rapport du Comite de la liberte syndicale
concemant I' Association des travailleurs de FERTICA SA reIatif
au Iicenciement antisyndical de centaines de travailleurs. Le
Comite de la liberte syndicale a exprime sa preoccupation vu la lenteur
et le peu d'efficacite des procedures dans un nombre considerable
de cas. Cette Ienteur deplorable doit etre corrigee. L'orateur
s'est demande s'il fallait s'attendre a la disparition du mouvement
syndical, compte tenu du fait que Jes missions de contacts directs
ainsi que !'assistance technique du BIT n'ont pas permis de mettre
un frein a l'action de pouvoirs publics.
Le membre travailleur de I' Argentine a rappele que le gouvernement
du Costa Rica a pris ]'engagement de mettre sa legislation
en conformite avec Jes dispositions de la convention. Le Code du
tn,v􀆄i1 interdit l'exercice du droit de greve dans le secteur pub!ic et
dans le secteur de !'agriculture et de la foresterie. Le gouvernement
a indique ]'existence de projets de Joi modifiant la legislation en vigueur.
II est deplorable que Jes declarations du gouvemement demontrent
sa volonte de maintenir des c ntraves legislatives au droit
de greve. La greve est l'instrument de Jutte le plus legitime des travailleurs.
C'est pourquoi, le concept de ,,services essentiels» doit
etre restreint et limite. La fin du traitement discriminatoire des travailleurs
du secteur public a ete acquise de longue Jutte par J'OIT
face a la reticence des gouvemements a admettre la syndicalisation
et la negociation collective. Les conventions n°' 151 et 154 illustrent
clairement ce qu'a ete Ja Jutte de ces travailleurs pour obtenir J'egalite
de traitement en matiere de droits fondamentaux. Ces convennons
s·appllquent, a peu d'exceptions pres, a tous Jes travailleurs du
secteur public. C'est pour cette raison que le gouvemement du Costa
Rica doit abroger toute norme Iimitant le droit de greve, le droit
de se syndiquer et le droit a la negociation collective. Pour autant, ii
ne suffit pas de disposer de lois, encore faut-il que la pratique soit en
accord avec l'exercice effectif des droits syndicaux. Le gouvemement
doit foumir des informations sur Jes points mentionnes et demontrer,
a tres court terme, que Jes droits consacres par la convention
sont garantis dans ce pays. L'orateur a fait observer que la
declaration des membres employeurs sur le droit de greve en general
etait hors de propos. On ne peut pas mettre en cause l'utilite et la
Iegitimite des greves comme arme de defense et de pression des
travailleurs. Dans certaines situations, la greve est le seul moyen a
la disposition des travailleurs pour faire entendre leurs revendications,
L'experience au niveau mondial demontre que Jes travailleurs
savent quand et comment l'utiliser. Certes, ii a existe des
periodes ou ce droit a ete reprime mais ii est inutile d'essayer
aujourd'hui de le limiter malgre Jes programmes de modernisation
en cours. II a insiste sur le fait que Jes travailleurs de la Communaute
europeenne et du MERCOSUR ont amplement demontre ces
demieres annees que l'exercice du droit de greve est ]'unique
moyen dont ils disposent pour se faire en tend re.
Le membre travailleur des Etats-Unis a rappele aux delegues
que ceux qui ne savent pas tirer Jes Ie1;ons de l'histoire sont condamnes
a repeter Jes memes erreurs. Dans le cas du Costa Rica, c'est le
gouvemement qui n'a pas tire Jes le1;ons de l'histoire, mais c'est le
mouvement des travailleurs costa-riciens qui a paye ces erreurs. Le
Costa Rica connait bien le Comite de la liberte syndicale puisque 40
plaintes le concemant ont ete deposees devant ce comite depuis
1967. D'ailleurs ii est ironique de constater que, bien que Jes Jois sur
le travail au Costa Rica aient subi certaines reformes, Jes lois Jes
plus anciennes sont interpretees et appliquees d'une fa1;on qui entraine
des violations encore plus frequentes de la convention. En ce
qui conceme !'interdiction du droit de greve dans le secteur public,
la commission d 'experts a fait reference au secteur des transports
aeriens et a demande que cette interdiction soit limitee aux fonctionnaires
qui exercent une fonction d'autorite au nom de l'Etat, ou
dans Jes services essentiels au sens strict du terme. La commission
d'experts esperait que le gouvernement du Costa Rica prenne Jes
mesures necessaires pour eliminer l'interdiction generale concernant
Jes fonctions de direction occupees par des etrangers dans Jes
syndicats, ainsi que ]'interdiction de greve dans le secteur public et
dans Jes secteurs de l'agriculture, de l'elevage et de la foresterie.
Toutefois, Jes questions abordees par la commission d'experts ne
constituent qu'une partie des problemes lies a la liberte syndicale
dans le pays. II est toujours pratiquement impossible de constituer
un syndical dans le secteur prive, y compris dans Jes neuf zones
tranches d'exportation du pays, parce que Jes syndicalistes sont
constamment licencies et mis sur des listes noires sans aucune protection.
La negociation collective est quasi inexistante dans le secteur
prive. Ainsi, l'interdiction du droit de greve dans le secteur
public ne constitue qu'une partie d'un probleme plus vaste. En pratique,
Jes greves sont interdites pour environ 65 pour cent des travailleurs
a:uvrant dans Jes secteurs manufacturiers et de services,
designes d'interet public. En plus des secteurs mentionnes par Ja
commission d'experts, ]'interdiction des greves affecte egalement
Jes domaines des assurances, des banques, des industries petrolie-
19/91
res, de l'electricite, de l'eau, des telecommunications, du batiment,
de l'education et des soins de sante. C'est done sans surprise que
seulement deux greves ont ete declarees legales dans ce pays au
cours des cinquante demieres annees. On sait que le gouvemement
du Costa Rica s'est fermement oppose a toute tentative de Iier Jes
droits des travailleurs au processus de libre-echange dans le commerce.
La question se pose alors de savoir si le Costa Rica veut
respecter l'OIT et ses mecanismes de controle. II espere que le gouvemement
pourra tirer des Iec;:ons de l'histoire et traitera serieusement
Jes conclusions contenues dans ie rapport de la commission
d'experts, bien que ses conclusions ne f assent pas mention de tous
Jes problemes relatifs a la Iiberte syndicale dans le pays. II prie instamment
le gouvemement de mettre un terme aux abus dont Jes
travailleurs costa-riciens sont victimes et ainsi de s'assurer que l'histoire
ne se repete pas.
Le membre travailleur de la Colombie a indique que la commission
est confrontee a un cas evident de violation, par le gouvemement.
de la convention. II a affirme que c'est un denominateur commun
dans la region latino-americaine de constater qu'en matiere de
liberte syndicale ii est interdit aux travailleurs non nationaux
d'exercer des fonctions de direction dans Jes syndicats ou d'interdire
le droit de greve dans le secteur public. II a observe que le mouvement
syndical a toujours critique Jes politiques affectant gravement
la liberte syndicale mais que, dans le cas present, I'on est face
a une violation encore plus grave puisque )'interdiction du droit de
greve est etendue aux travailleurs du secteur de l'agriculture, de
l'elevage, de la foresterie et du transport aerien. II a affirme que Jes
travailleurs ne peuvent pas rester impassibles face a des dispositions
qui violent gravement Jes droits syndicaux et a rappele que la
greve ne constitue pas une fin en soi mais bien un moyen ultime
auquel ont recours Jes travailleurs confrontes a l'intransigeance du
gouvemement ou d'un employeur. Enfin, ii a souligne que le Comite
de la liberte syndicale a maintes fois reitere que le droit de greve
est un corollaire indissociable de la Iiberte syndicale, et qu'il a developpe
le concept de «services essentiels» dans le but de determiner
Jes cas pour lesquels ii est possible de limiter ou interdire le droit de
greve. Les conventions intemationales doivent etre appliquees de
bonne foi et l'on ne peut pas invoquer le droit national, comme le
fait le gouvemement du Costa Rica, pour justifier )'interdiction de
la greve a tous Jes services publics.
Le membre travailleur de la Grece partage )'opinion exprimee
par quelques orateurs selon Iaquelle une certaine avancee a ete notee
du point de vue legislatif depuis 1993. Toutefois, ces interventions,
tout comme Jes observations de la commission d'experts, ont
mis en exergue de serieux problemes quant a l'application des dispositions
de la convention. II estime que ce cas devra etre evalue en
fonction du prochain rapport de la commission d'experts afin de
clecicler s'il fera l'objet d'un nouvel examen au sein de la presente
commission. Pour ce qui est des limitations imposees au droit de
greve, ii releve que le representant gouvememental a declare que
ce droit etait reconnu a tous Jes travailleurs reuvrant dans Jes services
non essentiels. Toutefois, l'orateur estime que la reconnaissance
du droit de greve doit etre universelle et que, pour ce qui est des
services qui doivent etre maintenus, Jes organisations syndicales ont
toujours fait preuve de serieux puisqu'elles sont conscientes de I 'importance
de l'appui du public dans la reussite de tout mouvement
qui implique une greve. Les services essentiels doivent etre fixes
non par le gouvemement de fac;:on unilaterale, mais par la negociation
avec Jes organisations syndicales concemees.
Pour ce qui est de l'interdiction faite aux etrangers d'exercer des
fonctions de direction ou de responsabilite dans Jes syndicats aux
termes de )'article 60 (2) de la Constitution, ii est difficile de comprendre
)'attitude de gouvemements comme celui du Costa Rica,
dont une grande partie des ressortissants vivent et travaillent a
l'etranger. II rappelle que l'Europe a connu, au sortir du deuxieme
grand conflit mondial, un grand mouvement migratoire et
qu'aujourd'hui plusieurs immigrants occupent des postes cles dans
Jes organisations syndicales des pays oil ils resident. Cette implication
a facilite leur integration et leur a permis de participer pleinement
au developpement economique et social de leur nouveau
pays. II a exprime le ferme espoir que le gouvemement prendra
toutes Jes mesures necessaires pour supprimer cette interdiction faite
aux etrangers d'exercer des fonctions de responsabilite dans Jes
syndicats.
Le membre travailleur de l'Allemagne a note que des progres
peuvent etre discemes dans ce cas. Toutefois, ii a emis des doutes
serieux en ce qui conceme la conformite de la legislation du Costa
Rica par rapport au droit international public. II subsiste, comme
par le passe, de graves violations de la convention et un groupe important
de travailleurs se voit refuser l'exercice d'un de Ieur droit
fondamental. Le concept de «services essentiels» est interprete
dans ce pays d'une fa􀄦on tres large et arbitraire par le gouvemement
avec pour consequence une interpretation abusive et trompeuse
des categories de travailleurs couvertes par ce concept. A cet
egard, Jes donnees de ce cas demontrent amplement que I'on ne
19/92
peut pas Iaisser a chaque Etat le soin de definir Jes Iimites de ce
concept. Si l'approche mentionnee par Jes membres employeurs -
aux termes de Iaquelle le concept de «services essentiels» peut etre
interprete differemment selon Jes pays - devait etre retenue dans
la pratique, cela reviendrait a remettre en cause cette convention
fondamentale. La convention doit etre interpretee de maniere uniforme
conformement a la jurisprudence habituelle. En consequence,
ii a exprime son soutien a l'interpretation de la commission d'experts
et notarnment sa reference aux travaux du Comite de la
hber1e syndJCale qm ont ctc cxtrtmement utiles dans It: d6vduppt:ment
du concept de «services essentiels». II faudra a l'avenir s'assurer
que ce concept est interprete de maniere restreinte. II a done
appele le gouvemement a appliquer l'esprit ainsi que la lettre de la
convention dans sa legislation et sa pratique. A cet egard, ii a rappele
que le droit de greve est un droit universe) et qu'il ne doit pas etre
Iimite en ce qui conceme Jes differentes categories de travailleurs
employees par l'Etat.
Le representant gouvememental du Costa Rica a etabli une distinction
entre Jes declarations des membres employeurs et des
membres travailleurs et celles des autres representants des travailleurs.
II a apprecie le ton pondere et mesure des interventions
des membres employeurs et des membres travailleurs en reponse a
sa declaration. Elles refletent fidelement la fac;:on dont devraient se
derouler, pour etre fructueux, Jes travaux de la presente commission.
La force de cette institution reside dans la tolerance et le respect
du point de vue des interlocuteurs. II a exprime l'espoir que la
commission respecte ce principe pour que l'OIT en sorte chaque
j our renforcee.
D'un autre cote, ii a affirme que certains representants travailleurs,
notamment celui du Costa Rica, nc comprennent pas Jes
exigences d'un Etat de droit. L'Etat de droit garantit le respect du
droit a un proces equitable, c'est-a dire la possibilite laissee aux parties
concemees d'exposer en detail leurs points de vue avant qu'un
jugement soit rendu. Si tous Jes points de vue ne sont pas entendus
avec la rapidite souhaitee par beaucoup, cela est du au fait que Jes
parties concemees - et non le gouvemement- utilisent differents
moyens dilatoires pour retarder le jugement. Pourtant, ce delai est
necessaire pour que le droit a un proces equitable soit respecte et
eviter qu'ulterieurement une des parties n'invoque la violation des
droits de la defense. II a declare que, lorsqu'il se refere aux parties,
cela conceme aussi bien Jes employeurs que Jes travailleurs. En effet,
tant Jes travailleurs que Jes employeurs beneficient du principe
du droit a un proces equitable qui leur garantit a tous que Jes points
de vue, preuves et arguments seront pris en compte dans le jugement.
Parallelement, l'orateur a indique que, se faisant l'echo des
recommandations du Comite de la liberte syndicale dans son
305• rapport, ii avait envoye une requete a la Cour supreme de justice
dans Iaquelle ii exprimait sa preoccupation face a la duree de la
procedure devant Jes tribunaux du travail. Le President de la Cour
supreme de justice a transmis cette requete a la juridiction du travail
concemee, qui est seule competente en la matiere. Ce n'est pas
au pouvoir executif de dire au President de la Cour, ou au pouvoir
judiciaire en general, ce qu'il doit faire. Le respect de la separation
de pouvoirs de la Republique est un des elements fondamental de
la democratie.
En ce qui conceme Jes affirmations du representant des travailleurs
du Costa Rica, ii a declare que ce demier avait depeint une
situation qui n'existe pas, en decrivant une realite qui ne correspond
pas a ce que vivent Jes Costa-Riciens. II a observe que son
pays venait de connaftre trois annees de paix sociale absolue. La
paix sociale repose sur le dialogue permanent avec Jes partenaires
sociaux. II a indique que, la semaine passee, ii avait negocie avcc la
centrale syndicale, presidee par le representant travailleur du Costa
Rica present a la Conference, une augmentation salariale de deux
ou trois points superieure a )'inflation pour tous Jes travailleurs du
secteur prive; c'est la une preuve de l'esprit de concertation du gouvemement.
Le mouvement syndical a toujours la possibilite de faire
part au Conseil superieur du travail - compose de trois representants
travailleurs, trois representants employeurs et trois representants
gouvemementaux - de ses preoccupations. Les affirmations
qui viennent d'etre faites par le membre travailleur du Costa Rica
n'ont ete soulevees ni par Jui ni par son representant au sein du
Conseil superieur du travail.
P our ce qui conceme la lenteur de la procedure en matiere
d'examen de projets de Joi, elle s'explique par la realite politique du
pays ainsi que son systeme democratique qui imposent la transmission
des projets de Joi au Parlement. Au sein de cette instance, oil
sont representes differents secteurs de la societe, l'obtention d'un
accord ne peut resulter que d'une negociation. Ce n'est pas par la
force que Jes choses se resolvent dans son pays. Par exemple, le projet
de Joi relatif a la modification de l'indemnite de fin de contrat a
ete initie par le parti politique qui est au pouvoir. La contribution du
mouvement syndical a ete presque nulle. Si a ce jour la Joi n'est
toujours pas adoptee, ce n'est pas faute de volonte politique du gouvemement,
etant donne que cette question releve de la competence
exclusive du Parlement. L'influence du gouvernement, si elle est
importante, n'est en aucun cas determinante; meconnaitre cette situation,
c'est meconnaitre le fonctionnement d'une institution essentielle
du systeme democratique.
En ce qui concerne Jes limitations apportees a I'acces des travailleurs
etrangers a des fonctions de direction au sein des organisations
syndicales, ii a souligne que le Costa Rica fait preuve de solidari
te en accueillant sur son territoire des et rangers qui
representent plus de 15 pour cent de la population economiquement
active. Conformement a la Constitution politique, Jes etrangers
ont acces au logement, a l'education et a la securite sociale -y
compris Jes etrangers en situation irreguliere. Le gouvernement
leur offre la possibilite de beneficier d'un permis de travail afin de
regulariser Ieur situation contractuelle avant meme d'avoir regularise
leur situation migratoire. Le peuple costa-ricien est solidaire de
J'etranger et en a donne la preuve tout au long de son hi:;toirc. Le
gouvernement actualisera la legislation comme ii I'a indique precedemment.
Enfin, ii a declare etre d'accord pour reiaboratJon d'un dr01t mternational
du travail qui regirait lcs rd .. tiuns pruft:ssiunnelies, y
compris a l'interieur des pays de la region, commc l'a suggere le
Dircctcur g6n6rdl Ji111, ,uu 1<1ppurt.
Les membres travailleurs ont souscrit a l'opinion expnmee par
Jes membres employeurs selon Iaquelle ii faut faire preuve de circonspection
dans le choix des cas qui seront examines l'annee prochaine,
mais rappellent que, dans le cas du Costa Rica, Ieur proposition
se limite a ce que la commission envisage son examen, si elle le
juge a propos. IIs partagent aussi )'evaluation des membres employeurs
selon 1aquelle une certaine amelioration a ete notee pour
une serie de points deja discutes au sein de la presente commission,
mais expriment leur serieuse reserve au sujet des deux questions
soulevees par la commission d'experts dans son observation. II n'est
pas exclu que Jes informations additionnelles fournies par le representant
gouvernemental revelent des avancees positives mais, cornme
l'a souligne le porte-parole des membres employeurs, elles meritent
un examen approfondi et detaille de la part de la commission
d'experts. Entin, ils insistent pour que la presente commission prie
le gouvernement d'adopter a breve echeance Jes projets de Iois conformes
a la convention, et de prendre Jes mesures necessaires pour
assurer sa mise en a:uvre dans la pratique.
La commission a pris note des informations detaillees fournies
par le representant gouvernemental. La commission a observe que,
malgre Jes missions de contacts directs qui se sont rendues dans le
pays en 1991 et 1993, la commission d'experts considere que des
divergences importantes demeurent entre, d'une part, la legislation
et la pratique nationales et, d'autre part, Jes dispositions de la convention.
La commission a exprime l'espoir que le gouvernement
adopte Jes mesures necessaires pour que soient supprimees )'interdiction
faite aux etrangers d'exercer des fonctions de direction ou
de responsabilite dans Jes syndicats ainsi que Jes limitations importantes
imposees au droit d'organisation dans Jes secteurs public, de
l'agriculture, de l'elevage et de la foresterie. La commission a pris
note avec interet de la declaration du ministre du Travail du Costa
Rica selon laquelle ii demandera )'assistance technique du BIT. Elle
a exprime l'espoir que cette assistance technique sera fournie dans
Jes plus brefs delais de telle sorte que la commission d'experts puisse
verifier la realisation substantielle de progres dans l'application
dans cette convention fondamentale.
19/93
Document no 258
CIT, 85e session, 1997, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 19/101-19/104 (Swaziland)

Conference internationale du Travail
Compte rendu provisoire
19
Ouatre-vingt-cinquieme session, Geneve, 1997
Troisieme question a l'ordre du jour: informations et rapports sur l'application
ties cunveniions et recommandations
Rapport de la Commission de )'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIERE PARTIE: Rapport general . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
A. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
B. Questions generales relatives aux normes intemationales du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
C. Rapports demandes au titre de l'article 19 de la Constitution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
D. Execution d'obligations specifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
DEUXIEME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
A. Observations generales et informations concemant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64
B. Observations et inf ormations sur l'application des conventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
C. Tableau des rapports detailles sur les conventions ratifiees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 137
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiees (article 22 de la Constitution) . . 139
II. Observations et informations concernant !'application des conventions dans les territoires non metropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
A. Informations concemant certains territoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140
B. Ta􀁗le􀁘u des rapports detailles sur l'application des conventions dans les territ oires non metropohta1ns
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141
Ill. Soumission aux autorites competentes des conventions et recommandations adoptees par la Conference
internationale du Travail (article 19 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 142
Iv. Rapports sur les conventions non ratifiees et les recommandations (article 19 de la Constitution) -
Etudes d 'ensemble des rapports sur la convention ( n° 15 0) et la recommandation ( n° 158) sur I' administration
du travail, 1978 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144
Rapports re􀁙us au 17 juin 1997 concemant la convention n° 150 et la recommandation n° 158 . . . . 144
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145
19/1
Swaziland (ratification: 1978). Le gouvemement a communique
Jes informations suivantes:
En ce qui conceme l"artich: 2 <le la convention, le statut du personnel
pcnitcntiaire est comparable a celui de la Police royale de
Swaziland et de la Force de defense de Swaziland: ces trois secteurs
sont consideres comme partie integrante des forces armees.
T 'nh11g􀀮t1nn rlP<: t􀀯u􀀰111Pnrc <fp c:'"""g􀀱n1<:Pr rlP m􀀱n1,\,.rp. <:"Prtnrtf>l
le ne pose, a la connaissance du gouvemement, aucun probleme
fonctionnel et,jusqu'a present, aucune plainte n'a ete deposee par
lcs organisations. La main-<l'ceuvre est peu abondante au SwaZiland
et la multiplicite de syndicats dans une mcmc branchc d'industric
peut affecter leur puissance. Le danger auquel doivent faire face Jes
syndicats au Swaziland en ce qui conccmc le pluralisme est l'eisi,tence
uniquement sur papier de certains syn<licats <lepourvus <le
pouvoir reel. De meme, le pouvoir du commissaire du Travail de
refuser d'enregistrer un syndicat se justifie par le faible nombre de
travailleurs.
Un changement est intervenu depuis I'entree en vigueur de la Joi
de 1996 sur Jes relations de travail, dont l'article 41(1) prevoit uniquement
la consultat10n du mmistre, contrairement a Ja legislation
de 1980, qui prevoyait son autorisation.
En ce qui conceme !'article 3 de la convention, la limitation des
activites des federations est necessaire pour eviter des conflits juridictionnels
entre federations et syndicats. Les Iimites aux activites
politiques constituent une question de degre. Aux termes de I'article
42(1) de la Joi de 1996 sur Jes relations de travail, Jes federations
ont le droit d'exprimer leur point de vue sur toutes Jes questions
d'administration publique et de politique publique. Au-delil, toutefois,
les federations risquent de violer la legislation sur la protection
de la securite de l'Etat.
L'interdiction de la greve dans Jes services postaux et publics est
necessitee par )'importance de ces services. Toutefois, le secteur de
l'enseignement a ete supprime de la Iiste des services essentiels (article
73(6)(a) de la loi de 1996 sur Jes relations de travail).
Comme dans tous les pays, l'interet national est d'importance
supreme. Toutefois, le ministre ne constitue pas l'autorite de dernier
ressort; sa perception de l'interet national est soumise a l'appreciation
des tribunaux ( article 70 de la Joi de 1996 sur les relations
de travail).
L'article 12 du decret de 1973 sur Jes reunions et manifestations
ne vise pas a resteindre Jes organisations professionnelles qui aperent
en tant que telles (voir egalement l'article 40(2) de la Joi de
1996 sur Jes relations de travail).
Le projet de loi de 1995 sur Jes relations de travail est maintenant
promulgue. Le projet d'amendement sur l'emploi est toujours
devant le Parlement.
En outre, le ministre du Travail et de la Fonction publique a
reaffirme l'engagement de son gouvemement a respecter les principes
contenus dans la Constitution de l'OIT et la Declaration de Philadelphie.
II reitere le sentiment exprime par les differents delegues
selon lequel ii faut renforcer le mecanisme de contr6Ie, afin de realiser
1 'objectif de justice sociale. II souligne egalement la necessite
de renforcer le mecanisme de contr6Ie de l'OIT en vue de permettre
aux mandants de I'OIT de tirer le maximum de profit de Ieur
appartenance a l'Organisation. La ratification des conventions par
elle-meme ne suffit pas car, apres la ratification, les pays doivent
donner effet, en droit comme en pratique, aux dispositions des conventions
ratifiees. Le Swaziland applique les 31 conventions qu'il a
ratifiees, meme si subsistent quelques difficultes relevees dans la
communication ecrite du gouvemement. Se referant a !'observation
de la commission d'experts selon laquelle la loi sur les relations
professionnelles de 1996 constitue un recul quant a la protection
prevue par la convention, ii a note avec grand interet que les experts
ont reconnu que son gouvemement essaie, dans une certaine
mesure, de mettre la Joi et la pratique en conformite avec les precedents
commentaires de la commission - par exemple la suppression
de l'enseignement de la Iiste des services essentiels. Neanmoins,
certaines divergences demeurent et doivent etre rectifiees.
Dans un document prepare il !'attention du Conseil consultatif du
travail, qui se reunira le 27 juin 1997, son gouvemement soumettra
ces questions dans le but de mettre les recommandations deja proposees
par le Conseil consultatif du travail en conformite avec les
normes de l'OIT dans toute la mesure possible. Cela est conforme
aux assurances formulees par son gouvemement !ors de la 268• session
(mars 1997) du Conseil d'administration, au cours de Iaquelle il
avait declare qu'il n'etait pas oppose a la revision de la legislation
en vigueur. Son gouvemement croit aux vertus du dialogue social et
au fait que celui-ci doit etre ouvert a toutes les parties concemees.
L'orateur a informe que le Premier ministre, dans sa declaration de
politique generale, a indique que la Joi sur Jes relations professionnelles
serait amendee si elle menace la paix sociale de la nation.
Cette declaration politique a ete ensuite inseree dans le programme
de reforme sociale et economique gouvememental a realiser dans
un certain delai. Si tout se deroule comme prevu, et si Jes representants
des travailleurs et des employeurs cooperent au programme
de reforme legislative, le projet de Joi devrait etre pret d'ici la fin du
mois d'aoiit 1997. L'orateur a exhorte le BIT a considerer son pays
comme prioritaire en matiere d'assistance technique. A cet egard,
une reunion tripartite de la delegation du Swaziland doit se tenir le
16 juin 1997 a Gen eve et sera presidee par un haut fonctionnaire du
BIT. Cette reunion constitue une etape du processus de consultat;""
,..t ,-Pqt:"ir';<"fq",-.,.. """1eo,,. i,,,n 􀀵1111rrP "1111 r-16.l-,nt ,-1,,. ror--ft.,.. qnn&:P, 1,.,..-,..􀀶•-....
!'attention du gouvemement a ete attiree sur les divergences de la
loi sur Jes relations profcssionnclles avec Jes dispositions de la convention.
11 a exprime l'espoir que, grace ii un dialogue construcur,
cc mecanisme permette de resoudre la question.
Les membres travailleurs ant rappele que l'annee demiere ce
1,;a:, a 6te l' uu <le, plus impu1taul> <li􀅯cutes <levant la comnli»iun. Ils
ant note avec preoccupation la deterioration croissante de la situation.
Le climat de terreur, d'intimidation et de harcelement des syndicalistes
continue. Dans son observation, la commission d'experts
note que la nouvelle Joi sur les relations professionnelles perpetue
non seulement la plupart des divergences precedentes entre la legislation
et la convention, mais contient de nouvelles dispositions
qui contreviennent davantage encore aux exigences des principes
de la liberte syndicale contenus dans la convention n° 87. La Joi impose
des sanctions penales contre certaines activites Iegales des
syndicats. L'article 30 de la loi confere au commissaire du travail le
pouvoir de refuser l'enregistrement d'un syndical si un syndicat
existe deja dans ce secteur. En plus, la Joi interdit aux federations
syndicales d'organiser des manifestations, tout cela en violation flagrante
des principes de la liberte syndicale. La commission d'experts
mentionne, par exemple, I'article 40(3) de la Joi qui interdit
aux federations ou a tout responsable syndical d'inciter ii un arret
de travail ou au ralentissement des cadences de travail sous peine
d'emprisonnement. Egalement, de severes amendes sont appliquees
aux organisations syndicales ou dirigeants syndicaux responsables
d'organiser ou de financer des greves dans les services essentiels.
Cependant, la Joi donne une definition large de la notion de
services essentiels, et le ministre du Travail a le pouvoir unilateral
de reviser cette definition. Le Procureur general peut ordonner I'arret
d'une greve et le ministere du Travail peut l'interdire, alleguant
l'interet general qui, Jui, n'est pas clairement defini. La Joi viole le
droit d'organisation et de greve des syndicats, ce qui est clairement
contraire aux decisions du Comite de la liberte syndicale qui etablissent
que personne ne peut etre prive de sa Iiberte ou ne peut
etre sujet a des sanctions penales pour le simple fait d'organiser ou
de participer ii une greve pacifique. Selan Jes membres travailleurs,
le gouvemement introduit cette Joi sans avoir consulte Jes partenaires
sociaux. De plus, bien que l'organe tripartite ait adopte unanimement
62 amendements a la Joi, le gouvemement n'a tout simplement
tenu compte que de la version originale du projet. Les
membres travailleurs notent les conclusions de la mission de contacts
directs selon Iesquelles le gouvemement a ete incapable de
donner des explications convaincantes sur son refus d'amender la
legislation: en tenant compte, par exemple, des propositions formulees
en mars 1996 par le Conseil consultatif du travail. Ces propositions
sont substantiellement similaires ii celles contenues dans le
protocole tripartite. En plus de cette nouvelle loi, ii existe d'autres
dispositions legislatives qui violent Jes exigences de la convention n°
87. Par exemple, le decret de 1973 sur Jes reunions et manifestations
limite le droit des organisations syndicales d'organiser des reunions
et des manifestations publiques. En vertu de la loi de 1963 sur l'ordre
public, une autorisation de la police est necessaire pour certaines
reunions ou regroupements publics. Par ailleurs, la police a le
droit d'assister ou de participer ii des reunions syndicales. Certains
evenements recents suscitent une profonde preoccupation. En janvier
1997, la Federation des syndicats du Swaziland (SFTU) a appele
ii un boycott dans le but d'obliger le gouvemement ii negocier les
27 demandes relatives, inter alia, aux mesures positives ii prendre
dans le secteur economique et social, et a appele a la levee de l'etat
d'urgence impose depuis 1973. La commission tripartite a souhaite
que des mesures immediates soient prises sur 16 des 27 demandes et
en appelle a la volonte politique du gouvemement. Le Comite de la
liberte syndicale a decide que deux des mesures prises pour soutenir
Jes 27 propositions -la premiere en janvier 1996 et la seconde
en janvier 1997 -constituent des activites syndicales legitimes. Le
comite considere que la declaration d'illegalite concemant ces deux
greves nationales -pour protester contre Jes consequences de la
politique sociale du gouvemement -constitue de serieuses violations
ii la Iiberte syndicale.
19/101
Les membres travailleurs ont souligne d'autres violations de la
convention dans la pratique. Dans la nuit du 31 janvier au 1 er fevrier
1997, quatre leaders de la SITU ont ete arretes en vertu de !'article
12 de Ja Joi de 1963 sur l'ordre public, sous l'inculpation d'intimidation
ne pouvant donner lieu a liberation sous caution. Ils ont tous
ete acquittes par la suite. Le juge qui a relaxe Jes accuses n'a pas eu
de mots assez durs pour souligner I 'absence de charge depuis le debut.
Cette situation est analogue a celle prise par le juge qui a statue
en janvier 1996 sur le cas de M. Jan Sithole de la SITU et d'autres
,i;,;g ... a11L􀀼 ... y11,1;,.,.111, .... 1 yui ,A ..:1...: 1111..:,; ........... lllt:l'' ... .Al}• 1i .. nn..:_ L,i;
gouvernement utilise ouvertement Jes medias pour menacer Jes
syndicalistes et le mouvement syndical. II existe des preuves afin
qu'ils ne couvrent pas Jes activites des syndicats. Les membres travailleurs
notent que, en depit des commentaires presentes par le
representant gouvernemental !ors de la discussion de l'annee derniere,
la radiodiffusion etait toujours inscrite a !'article 73 de la Joi
sur Jes relations professionnelles comme un service essentiel. En
de pit des recommandations pertinentes du Comite de la Ii be rte syndicale,
le gouvernemeni continue a uiiliser la police et Jes forces
armees pour disperser Jes reunions syndicales et perturber !'organisation
Jegitime des syndicats, comme, par exemple, Jes arrestations
du 1 er fevrier 1997 et la perquisition des locaux de la SITU sans
mandat judiciaire. Le gouvernement utilise des balles, des gaz Iacrymogenes
et des matraques pour disperser Jes rassemblements,
ce fut le cas !ors de la fusillade du 11 fevrier 1997 a Big Bend. Le
gouvernement perpetue et intensifie le climat de peur et d'intimidation
autour des organisations et activites syndicales, comme par
exemple )ors de !'incident du 3 fevrier 1997 ou 150 policiers armes
ont entoure 23 membres du conseil general de la SITU et leur ont
ordonne de se rendre dans un poste de police local ou ils ont ete
enfermes dans un local rempli de gaz lacrymogenes pendant plusieurs
heures. Le gouvernement use de violence, d'intimidation et
de menaces sur Jes families, Jes amis et Jes proches de ces syndicalistes;
le 1 er fevrier 1997, la mere et la famille proche de M. Si thole ont
ete harcelees pendant que celui-ci etait en prison. Les membres travailleurs
ont souligne que le Comite de la liberte syndicale a clairement
indique que la liberte syndicale ne pouvait etre exercee que
lorsque Jes droits fondamentaux de l'homme - en particulier ceux
qui ont trait a la vie et a la securite des personnes - soot pleinement
respectes et garantis. La violence, la peur, !'intimidation et
!'absence de liberte d'expression soot incompatibles avec la convention
n° 87, de meme que !'absence de processus democratique. II
est done profondement preoccupant pour Jes membres travailleurs
de noter qu'il n'y a eu aucun progres en matiere d'amendement de
la Constitution nationale, puisque le Swaziland est le seul pays
d'Afrique australe ou le multipartisme democratique n'a pas ete
introduit. La suspension de la SITU est maintenant levee, mais ii
n'en va pas de meme pour Jes syndicats de base dont l'enregistrement
a ete annule il y a deux semaines, en vertu de la Joi, et qui ont
perdu le droit de negocier, de fonctionner et de representer leurs
membres au sein du Conseil consultatif du travail. La suppression
de l'enregistrement a ete decidee par le commissaire du travail alleguant
que Jes organisations syndicales concernees n'avaient pas
soumis leurs rapports annuels, alors que la Joi ne precise pas la periode
de l'annee budgetaire ou ils doivent Jes soumettre. Une telle
dissolution administrative des organisations syndicales constitue
une claire violation de !'article 4 de la convention. En fait, la dissolution
est une mesure qui doit etre prise par l 'autorite judiciaire afin
de garantir le droit a la defense.
Les membres travailleurs exhortent la commission a adopter des
conclusions fermes sur ce cas. Le gouvernement semble au mieux
complaisant et au pire meprisant apropos du mecanisme de controle
et de l'autorite de l'OIT. II est temps d'adresser un message clair
au gouvernement, etant donne qu'il a eu le temps necessaire pour
accomplir le progres demande et que ccla n'a malheureusement pas
eu lieu. En realite, la situation s'est meme deterioree. Plus precisement,
Jes membres travailleurs demandent des progres, conformement
aux commentaires de la commission d'experts et aux recommandations
du Comitc de la liberte syndicale, dans un calendrier
prealablement et clairement etabli sur Jes points suivants: amendement
de la Joi de 1963 sur l'ordre public de telle maniere qu'il nc
soit plus possible de reprimer lcs actions legitimes et lcs greves pacifiques;
annulation de !'article 12 du decret de 1973, qui limite abusivement
le droit des organisations syndicales d'organiser des manifestations,
afin de permettrc ainsi aux syndicats de fonctionner
librement sans avoir peur de l'ingerence policiere; amendement de
la Joi de 1996 sur Jes relations professionnelles pour la mettre en
conformite avec Jes exigences de la convention, en tenant compte
des propositions faites par le Conseil consultatif du travail. Les
membres travailleurs demandent que le gouvernement assure la
participation des partenaires sociaux dans la procedure de revision
des lois ci-dessus mentionnees et que, grace a !'assistance du BIT,
des progres soient signales avant la prochaine reunion du Conseil
d'administration en novembre 1997; qu'il arrete toute forme de harcelement,
de menaces, d'arrestations arbitraires et d'intimidation
19/102
des travailleurs, de leurs dirigeants ainsi que de leurs families, et
autorise le libre exercice de la Iiberte d'expression; que soit etablie
une commission d'enquete independante sur Jes differents incidents
qui ont eu lieu ces derniers mois comme, par exemple, la demission
de M. Jabulani Nxumalo, secretaire general adjoint de la SITU; et
que des negociations soient entreprises sur Jes 27 demandes exprimees
par la commission tripartite. Les membres travailleurs concluent
que ce cas est l'un des plus graves concernant la violation de
la convention et des principes de la liberte syndicale. Le gouvernemu1l
,Jui! , \.ugdgu i111111􀅃Jiatcmcnt a appliqucr, a court terme, Jes
recommandations de la mission de contacts directs et a accepter
!'assistance technique du BIT.
Les membres employeurs ont rappele que !'application de la
convention par le Swaziland avait deja ete discutee par la presente
commission en 1996. Ce cas a trait a de nombreuses restrictions mises
a l'exercice des droits et libertes fondamentaux garantis par la
convention, par des limites au droit de fonder des organisations syndicales
et de s'y affilier, l'ingerence dans Jes affaires interieures des
syn<licats, Ja non-reconnaissance du droit d'association d'un certain
groupe de travailleurs ou le pouvoir excessif confere au commissaire
du travail de refuser l'enregistrement d'un syndical s'il estime
qu'un autre syndical deja enregistre est suffisamment representatif,
ou des restrictions au droit de se reunir et de manifester pacifiquement.
II s'agit la de violations flagrantes qui sont dans !'ensemble
Jes memes que celles evoquees I'annee derniere. En ce qui concerne
Jes limites apportees au droit de greve, la position des membres
employeurs est bien connue selon laquelle le point de depart n'est
pas le droit de greve illimite et, si Jes termes de la convention n° 87
ne peuvent servir de fondement a un droit de greve illimite, ii n'en
demeure pas moins que le droit de greve a ete tellement limite
qu'on ne peut plus dire qu'il existe. II a rappele que Jes greves ont
toujours un impact, non seulement sur Jes interets des parties en
presence, mais aussi sur Jes droits des personnes non directement
concernees par le conflit d'interets. II est necessaire d'equilibrer Jes
interets des parties au conflit, d'une part, et ceux de la population
en general, d'autre part. Quant a !'exigence d'une majorite qualifiee
pour decider de la greve, elle n'est pas en soi excessive. Ce qui
est preoccupant, c'est que, loin d'ameliorer la situation, la Joi de
1996 sur Jes relations professionnelles !'a aggravee. S'agissant de la
mission de contacts directs qui s'est deroulee l'annee derniere, !'invitation
d'une telle mission est en general le signe que le gouvernement
est dispose a modifier la Joi et la pratique pour corriger la situation.
Or !'attitude du gouvernement a l'egard des changements
indispensables reste peu claire. Le representant gouvernemental
s'est par exemple refere a la tenue de consultations tripartites, mais
sans preciser dans quelles conditions et avec quel objet. S'agissant
des conclusions de la mission de contacts, Jes membres employeurs
ont recommande qu'elles soient integrees a la legislation, Jes partenaires
sociaux etant deja parvenus a un accur<l ,m ces points. Le
gouvernement devrait accepter ces recommandations et Jes incorporer
dans la Joi. Le gouvernement devra fournir des informations
detaillees afin quc la presente commission puisse, le cas echeant,
revenir sur ce cas.
Le membre travailleur du Swaziland a souligne que son pays,
bien que signataire de divers instruments internationaux, vit sous
l'etat d'urgence depuis le 12 avril 1973, date a laquelle Jes droits des
citoyens ont ete usurpes. Ainsi, etant devenus la seule voix des opprimes,
Jes travailleurs ont presente au gouvernement Jes «27 demandes
» populaires concernant notamment Jes questions de travail,
Jes questions economiques ainsi que celles relatives aux droits
de l'homme et aux droits civils. Tout en ignorant ces demandes, le
gouvernement a demande a un forum tripartite de proceder a leur
examen dans le cadre d'une concertation. Ainsi, une serie de structures
tripartites ont ete mises en place avec pour role de deliberer
sur toutes ces questions et de conseiller le gouvernement en consequence.
Toutefois, celui-ci a encore ignore toutes ces recommandations.
Plusieurs organisations internationales et regionales de travailleurs
ont visite le Swaziland entre 1995 et 1997 pour contribuer
a la recherche d'une solution, mais leur conseil a egalement ete
ignore par le gouvernement, sous pretexte d'ingerence etrangere
dans la souverainete nationale. L'inaction du gouvernement a donne
lieu a une serie de mouvement de greves auxquelles Jes autorites
ont reagi en procedant a des arrestations ainsi qu'en tirant sur Jes
travailleurs. En outre, le gouvernement a presente des recours devant
la Haute Cour aux fins de faire declarer l'illegalite des greves
prevues, et ii a publie dans des gazettes officielles extraordinaires
l'illegalite des greves et !'indication que Jes juges qui ne feraient pas
droit aces demandes seraient l'objet d'une reprimande, d'une retrogradation
et/ou d 'un licenciement. L'orateur a estime que le gouvernement
a agi de mauvaise foi, puisque, tout en reconnaissant Jes
violations de la convention devant Jes forums internationaux, ii est
reste intransigeant sur le plan local. Le gouvernement a de,;u Jes
partenaires sociaux parce qu'il avait promis de deposer des amendements
a la Joi en mars 1996, mais ces demiers n'ont, jusqu'a present,
pas ete soumis au Parlement. En outre, en declarant qu'il
n'etait pas au courant du harcelement des syndicats, le gouvemement
n'a pas dit la verite: Jes forces regulieres de securite ont effectue
des descentes dans Jes locaux des syndicats, interrompu Ieurs
reunions, mis en detention et arrete des dirigeants et des affilies -
y compris Jes 23 membres du conseil general de la SFIU - de
meme qu'ils Jes ont physiquement agresses. Apres avoir decrit certaines
desdites violations dans la pratique de la convention, l'orateur
a declare que Jes dispositions de la Joi de 1996 constituaient une
violation flagrante de la convention ainsi qu'un manquement grave
aux principes de la liberte syndicale. II a exprime le souhait que le
Swaziland et d'autres pays egalement membres du Conseil d'administration
de l'OIT sc fassent Jes .ivocat, .:t le, dHknl, defenseurs
des principes de !'Organisation et particulicrcment de la justice sociale.
Ainsi seront-ils les champions d'un comportement exemplaire.
En consequence, ii souscrit a la position de la commission d'ex!)
erts et dn C'omit,< ,1,. 1􀁶 1;h,.rt.< •:mt1;M1,. ePln., l􀈘quel!e !e
gouvernement devrait mcttre Jes dispositions legales susvisees en
harmonie avec le􀈙 P.Yigenrpo ,Ip b rnnvPntinn. T ,,. • .,, demandes
doiv􀈚nt Cliw ti a.:. .. 􀀚""., 􀀛􀀜.􀀝"-'U;)'-'lll'l;;UL UJ.1'1;; UU1111'1;; 1.Ul􀀞 puur toulc􀈛.
T !orateur propose que le cas present fig-.;re d!:.ns 􀈜r: paragraphe special
du rapport de la commission. Une date limite explicite doit etre
etablie pour !e gcuycrncmcnt, ar,:c.: prCcisi.Jn de !a date a laqucllc
Jes problemes devront etrc traitcs et rcsolus. En outre, ]'assistance
technique du BIT pourrait contribuer a l'amendement de la legislation.
Le membre employeur de I' Afrique du Sud a souligne que, dans
ce cas, ii y a eu beaucoup de promesses, mais tres peu de progres. La
commission d'experts a note dans son observation que non seulemenl
la Joi dt: .i9% sur ies reiauons proress10nneues perpetue Ies
precedentes divergences entre la legislation nationale et la convention,
mais en plus comporte de nouvelles dispositions contrevenant
encore davantage a certaines dispositions de la convention. Le
comportement du gouvemement, en elaborant cette Joi, montre
clairement qu'il n'a pas tenu compte des propositions faites par Jes
partenaires sociaux. En mars 1994, la commission tripartite a ete
etablie par le gouvemement dans le but d'examiner une serie de
requetes introduites par la SFIU. Des progres significatifs ont ete
notes sur 21 des 27 points souleves par la federation. Bien que le
gouvernement ait exprime son appui a certaines recommandations
de la commission tripartite, ii a neanmoins indique qu'il formulera
ses propres amendements a la legislation. Au debut de 1995, le gouvemement
a publie le projet de Joi, pour commentaires, et l'a presente
plus tard au Parlement, mais Jes partenaires sociaux n'ont pas
ete consultes. Quelques discussions ont ete menees entre le gouvernement
et Jes partenaires sociaux avant que le projet de Joi ne soit
transmis au Senat parce qu'il y avait un desaccord general sur un
certain nombre de dispositions. En juillet 1995, la commission tripartite
a adopte une resolution tendant a favoriser !'adoption
d'amendements acceptables par toutes Jes parties. Le gouvemement
a soumis ces amendements alors que le projet etait deja sournis
au Senat. En septembre 1996, la commission tripartite a formellement
adopte un protocole contenant 65 amendements au projet
de loi. Cependant, le gouvernement a presente le projet au Senat
sans en tenir compte. Les partenaires sociaux ont exprime leur
consternation face a la situation, et la bonne foi du gouvemement a
ete mise en question. Apres ]'adoption de la Joi, plusieurs initiatives
de revision ont ete tentees, et Jes preoccupations de la SITU ont
porte sur le Conseil consultatif du travail qui, en mars 1996, a soumis
des amendements au ministre. A ce jour, ils n'ont pas ete presentes
au Parlement. Ainsi, l'histoire de cette procedure reflete
clairement Jes promesses non tenues du gouvemement. La mission
de contacts directs, qui s'est rendue au Swaziland en octobre 1996, a
note qu'aucune explication convaincante n'a ete donnee de la decision
unilaterale du gouvemement de reviser la Ioi et de son refus de
prendre en compte Jes arnendements proposes par le Conseil consultatif
du travail. A cet egard, bien que le representant gouvernemental
exprime son appui a la Constitution et aux conventions de
l'OIT, ce qui importe maintenant c'est de pouvoir constater que des
progres auront lieu. Le gouvemement doit mettre en reuvre sans
delai Jes recommandations de la mission de contacts directs avec
!'assistance technique du BIT.
Le membre travailleur des Etats-Unis a indique que c'est la
deuxieme annee consecutive au cours de laquelle ce cas, qui concerne
des violations graves de la convention, est presente devant la
commission. En plus de violations de nature legislative telles que
mentionnees dans le rapport de la commission d'experts, cette commission
a ecoute dans le moindre detail le recit des violations dans
!'application pratique, notamment des vastes campagnes d'intimidation
et de harcelement des dirigeants syndicaux et de Ieurs families.
Cette attitude du gouvemement temoigne de son mepris
non seulement envers l'OIT et cette commission, mais envers la
communaute intemationale. L'epoque oil Jes gouvemements operaient
dans une relative obscurite est revolue. Les membres travailleurs
suivent de tres pres Jes developpements de Ja question syndicale
dans ce pays depuis que la securite et le bien-etre des
membres de la SFIU sont menaces. Si le gouvemement compte
serieusement respecter Jes obligations contenues dans la convention,
ii doit done mettre fin immediatement aux campagnes d'intimidation
et de harcelement contre Jes dirigeants syndicaux et Jes
organisations syndicales. De plus, ii doit retoumer immediatement
autour de la table des negociations avec la SFIU et Jes employeurs
en vue de negocier, de bonne foi, la revision de la Joi sur Jes relations
professionnelles. Cette annee, la commission doit adresser au gouvemement
un message plus fort qu'en 1996 et esperer que cela
pourra !'amener a respecter Jes droits fondamentaux des travailleurs,
plutot que de choisir la repression et de se livrer ainsi a la
condamnation intemationale.
Le membre travailleur de la Zambie a insiste sur le fait que le
representant gouvememental n'a fait que repeter Jes promesses
que le gouvemement a faites a cette commission l'annee demiere.
A rPt -'g􀈝:n·rf, 11 􀁶 􀁶ppuyP 1􀈞 p1"npnc1t'inn cP.ln'" 1..,quPllP lP gnHHP.ffiP.ment
doit s'engager devant la presente commission a negocier avec
Jes travailleurs et Jes employeurs du Swaziland dans le but de modifit:
r ia Iu1 sur ie::s re::iauons profess10nnelles ainsi que les autres lois,
da.'ls le scns voulu par lcs normcs intcrnationalcs du travail. Par
ailleurs, ces mesures doivent etre prises dans Jes plus brefs delais.
L; m,.;ml,1., guuv,.;mem,.;ntal du Royaume-Uni s'est felicite du
fail 4u'um: mission de:: contacts directs s'est rendue au Swaziland, et
de la disponibilite du gouvernement a dialoguer avec l'OIT. II a appuye
la demande d'assistance technique formulee par le gouvemement,
afin de resoudre les problemes qui ont ete identifies. Bien
que son gouvemement ait ete preoccupe par l'arrestation, en janvier
1997, des principaux dirigeants de la SFIU et ait, a l'epoque,
expnme cette mqmetude aupres des autorites du Swaziland, ii s'est
felicite de constater que Jes dirigeants syndicaux ont ete relaches.
La commission d'experts, dans son observation, a note que la Joi de
1996 sur Jes relations professionnelles contient un certain nombre
de divergences avec les dispositions de la convention. A cet egard, ii
s'est rejoui de noter que le gouvemement du Swaziland souhaitait
rectifier la situation et a exprime l'espoir que cet engagement se
traduirait par des actions concretes dans Jes meilleurs delais.
Le membre travailleur de la Norvege, parlant au nom du groupe
des travailleurs des pays nordiques, a exprime leur profonde preoccupation
sur Jes violations de la convention. Malgre Jes appels repetes
de la communaute internationale, la mission de contacts directs
de l'OIT, la visite de la CISL et les interventions des dirigeants syndicaux
des pays voisins, le gouvemement a continue son harcelement
contre Jes organisations syndicales et leurs dirigeants. Dans ce
contexte, l'oratrice a approuve Jes commentaires de la commission
d'experts relatifs a la Joi sur Jes relations professionnelles. II est inquietant
que, dans un pays dit democratique, on puisse interdire le
droit de greve des travailleurs, limiter leur droit d'organiser des
reunions pacifiques et publiques, ou encore suspendre par decision
judiciaire une federation qui a participe activement a des campagnes
considerees indfiment comme politiques alors qu'elles portaient
sur des questions sociales. De plus, des dirigeants syndicaux
ont ete emprisonnes, y compris quatre responsables de la SITU,
pour avoir menace d'organiser une greve a l'appui de leurs revendications.
Alors qu'ils ont ete finalement liberes, Jes reformes democratiques
et l 'ouverture de negociations n 'ont pas suivi. La situation
s'est gravement deterioree. Juste avant la presente Conference, le
gouvemement aurait suspendu les activites de la SFIU et des 17
autres syndicats affilies, apparemment pour n'avoir pas soumis a
temps leur rapport financier pour l'annee 1996. II est difficilement
acceptable que Jes activites des syndicats soient suspendues pour
cette raison. L'oratrice a assure les travailleurs du Swaziland du
soutien des syndicats des pays nordiques. Le droit d'exercer Jes activites
syndicales, y compris le droit de greve, est si fondamental pour
Jes pays nordiques qu'il leur est difficile d'admettre les entraves qui
ont lieu au Swaziland. Pour conclure, elle a declare qu'il est inacceptable
qu'en 1997 Jes droits fondamentaux des travailleurs leur
soient ainsi refuses.
Le membre gouvememental des Etats-Unis a approuve le propos
du membre gouvememental du Royaume-Uni et a espere que
Jes recommandations de la mission de contacts directs seraient mises
en pratique par le gouvernement du Swaziland.
Le membre travailleur de la Republique-Unie de Tanzanie a
partage la preoccupation exprimee par la commission concernant la
gravite de la situation au Swaziland. Le gouvemement ne devrait
en aucune maniere etre fier du fait qu'il a ratifie 31 conventions de
l'OIT, al ors qu'en pratique ii Jes a quotidiennement violees. En consequence,
l'orateur a insiste pour que le gouvemement adopte un
programme d'action clairement defini allant dans le sens de l'application
de la convention, y compris !'abrogation de la loi sur Jes relations
professionnelles. De plus, le gouvernement doit engager un
vrai dialogue avec la SITU.
Le membre travailleur du Zimbabwe a indique que la situation
au Swaziland - contrairement aux promesses faites, en 1996, par
le ministre du Travail devant la commission - s'est considerablement
deterioree. La commission d'experts a identifie deux aspects
19/103
j
du probleme, a savoir la legislation nationale et la situation dans
la pratique. La Joi sur Jes relations professionnelles de 1996 contient
de nouvelles dispositions qui violent davantage la convention,
comme releve dans )'observation de la commission d'experts.
Dans la pratique, le gouvernement a harcele Jes dirigeants
de la SFrU, tout en ayant recours a la force pour empecher les
travailleurs d'organiser des reunions et d'exercer Ieurs autres
droits au regard de la convention. Tout en approuvant la concertation,
l'orateur considere que Jes autorites ont utilise cette dernii:n::
cunnm: um: lactiym: uiialuire. La 1.uuunissiuu uuil agir Ul'
maniere decisive, en faisant figurer le cas dans un paragraphe
special de son rapport.
Le membre gouvernemental de la Zambie, ministre du Travail
et de la Securite sociale, a exprime sa preoccupation concernant
l'evolution de la situation au Swaziland. II estime que le gouvernement
doit prendre des mesures allant dans le sens de la democratisation
et des droits des travailleurs, comme cela a ete le cas dans
d'autres pays d' Afrique australe; c'est )'unique moyen d'assurer le
respect des droits syndicaux.
Le representant gouvernemental a indique qu'il prenait serieusement
en consideration Jes declarations au sein de la presente
commission. II ressort clairement, aussi bien de ]'observation de la
commission d'experts que des recommandations de la mission de
contacts directs et des debats, que Jes principaux problemes d'application
de la convention sont dus a )'adoption de la loi de 1996 sur les
relations professionnelles. II a assure la presente commission qu'il
ne s'agit pas de promesses vaines, et que son pays est reellement
dispose a garantir le respect des dispositions de la convention. Le
document prepare par le Conseil consultatif du travail avec )'assistance
technique du BIT sera discute le 27 juin 1997, en association
etroite avec Jes partenaires sociaux. Enfin, le projet de Joi sera soumis
au Parlement en aofit 1997. Tout comme la presente commission,
le gouvernement souhaite que la legislation nationale soit
mise en conformite avec la convention, et ii va prendre Jes mesures
necessaires a cet effet.
Les membres travailleurs ont releve que le representant gouvernemental
s'en tenait dans sa reponse aux discussions qui se sont tenues
au sujet de la Joi sur Jes relations professionnelles. Pourtant,
Jes conclusions de la mission de contacts directs ne portent pas seulement
sur cette loi, mais traitent aussi d'autres violations de la convention
dans la pratique. Tous, au sein de la presente commission,
s'accordent pour exiger du gouvernement son engagement a mettre
en reuvre immediatement )'ensemble des recommandations de la
mission de contacts directs, y compris celles qui ne portent pas sur la
Joi. Les membres travailleurs ont exprime )'opinion que Ies mesures
prises pour mettre en reuvre ces recommandations fassent l'objet
d'une surveillance permanente.
Les membres employeurs, se referant aux recommandations du
rapport de la m1ss1on de contacts directs, ant insiste pour qu'elles
soient immediatement mises en reuvre, notamment sur Jes questions
pour Iesquelles ii existe deja un accord. Des changements rapides
sont necessaires pour ameliorer la situation et, compte tenu de l'experience
malheureuse d'une nouvelle deterioration apres la mission
de contacts directs, ii sera necessaire de revenir prochainement
sur ce cas. Le gouvernement doit fournir un rapport complet sur Jes
modifications legislatives reellement apportees. Les membres employeurs
ont appuye la proposition de mentionner ce cas dans un
paragraphe special du rapport general.
La commission a pris note des informations ecrites et orales
communiquees par le ministre du Travail ainsi que des discussions
qui ont eu lieu. La commission a pris note de la preoccupation exprimee
par la commission d'experts et le Comite de la liberte syndicale
selon laquelle, malgre la mission de contacts directs d'octobre
1996 et le progres ponctuel relatif au secteur de
l'enseignement, la Joi sur Jes relations professionnelles de 1996
contient des dispositions contrevenant encore davantage aux principes
fondamentaux de la liberte syndicate. La commission a exprime
sa profonde preoccupation pour Jes nombreuses divergences
entre la legislation et la pratique nationales, d'une part, et Jes
dispositions de la convention, d'autre part. La commission recommande
instamment au gouvernement d'assurer le plein respect
des Iibertes publiques qui est essentiel pour I'application de la
convention, et de mettre tres rapidement en pratique Jes recommandations
de la mission de contacts directs, en particulier celles
pour lesquelles ii y a deja eu un accord entre les partenaires sociaux.
La commission a aussi insiste pour que le gouvernement
adopte toutes les mesures necessaires pour lever Jes restrictions au
droit des travailleurs de constituer les organisations de Ieur choix,
de tenir des reunions et des manifestations pacifiques, de formuler
Ieur programme d'action et de negocier collectivement. La commission
veut croire que, dans son prochain rapport detaille, le
gouvernement indiquera toutes Jes mesures effectivement adoptees,
avec l'assistance du BIT, pour assurer la pleine application de
la convention. La commission a decide de faire mention de ce cas
dans un paragraphe special.
19/104

Document no 259
CIT, 87e session, 1999, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 23/112-23/117 (Canada)

Conférence internationale du Travail
Compte rendu provisoire
Quatre-vingt-septième session, Genève, 1999
23
PREMIERE
PARTIE
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des normes
TABLE DES MATIERES
Pages
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
A. Introduction 2
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail 6
C. Les rapports demandés au titre de l'article 19 de la Constitution 48
D. Exécution d'obligations spécifiques 72
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 81
/. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 81
A. Observations générales et informations concernant certains pays 81
B. Observations et informations sur l'application des conventions 86
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 158
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées reçu au 17 juin 1999 (article 22 de
la Constitution) 160
//. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non métropolitains
(articles 22 et 35 de la Constitution) 161
A. Informations concernant certains territoires 161
B. Tableau des rapports sur les conventions ratifiées (territoires non métropolitains) 162
///. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (article 19 delà Constitution) 163
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (article 19 de la Constitution) -
Etude d'ensemble des rapports sur la convention (n0 97) et la recommandation (n" 86) sur les
travailleurs migrants (révisée), 1949, et sur la convention (n" 143) et la recommandation (n" 151)
sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975 165
Rapports reçus au 17 juin 1999 concernant les convention nos 97 et 143 et les recommandations
nos 86 et 151 165
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport 166
23/1
23/112
Canada (ratification: 1972). Un representant gouvememental
du Canada, se referant a un document de la Confederation intemationale
des syndicats libres (CISL), a releve que cette publication
reconnait la jouissance par Jes travailleurs canadiens, tant clans le
secteur public que clans le secteur prive, de la liberte syndica!e qui
leur permet de constituer et de joindre des syndicats. La législation
canadienne interdit la discrimination antisyndicale et oblige les employeurs
à réintégrer les travailleurs licenciés pour cause d'activité
syndicale, y compris pour faits de grève. Le même document reconnaît
que les travailleurs du secteur public (à l'exception de certains
membres de la police) et du secteur privé disposent du droit d'organisation
et du droit de négocier collectivement en vertu de la loi,
même si ce n'est pas toujours le cas dans la pratique, et que la plupart
des travailleurs ont le droit de faire grève.
L'orateur rappelle que le Canada reconnaît qu'il est extrêmement
important de respecter les principes de l'OIT sur le droit d'organisation
et la négociation collective, et de protéger les droits des
travailleurs. Cependant, les gouvernements, y compris les autorités
fédérales, provinciales et territoriales du Canada, sont élus afin de
prendre des décisions et d'exercer leurs responsabilités pour le
bien-être de l'ensemble de la population. Dans les sociétés démocratiques,
les gouvernements ont le mandat et le devoir de réconcilier
des intérêts légitimes mais divergents, ainsi que des demandes
contradictoires, afin d'assurer le bien-être maximum de la société.
En ce qui concerne les observations spécifiques de la commission
d'experts relatives au Canada, la Constitution canadienne stipule
que les provinces détiennent le contrôle complet sur les relations
professionnelles à l'intérieur de leur juridiction. Par conséquent, les
informations transmises à la présente commission sur la législation
et la pratique des provinces ont été fournies par les gouvernements
provinciaux concernés.
Pour ce qui est de l'observation de la commission d'experts sur
la procédure de désignation des «salariés des services essentiels»
en vertu de la loi sur la négociation collective dans la fonction
publique de Terre-Neuve, le processus de consultation publique
auquel la commission d'experts a fait référence est maintenant
achevé. Le groupe de travail mixte employeurs-travailleurs du
Conseil consultatif de l'économie a transmis au gouvernement
concerné un rapport détaillé contenant ses recommandations. Une
copie de ce rapport sera remise à la commission. Les recommandations
du groupe de travail mixte concernant la désignation des
salariés des services essentiels approuvent pour l'essentiel les dispositions
pertinentes de la loi sur la négociation collective dans la
fonction publique. En outre, un groupe de travail interministériel
du gouvernement de Terre-Neuve a achevé son analyse des recommandations
précitées et attend des orientations finales. Au
début des années quatre-vingt-dix, le Conseil des relations professionnelles
de la province a traité de certains cas liés à l'établissement
de la procédure de désignation des travailleurs des services
essentiels. Dans tous ces cas, les travailleurs et les employeurs se
sont présentés volontairement devant le Conseil des relations professionnelles
après avoir conclu un accord sur les travailleurs devant
être considérés comme relevant des services essentiels. Cela
démontre l'entière approbation des dispositions légales existantes
par les travailleurs et par les employeurs. Le gouvernement de
cette province n'envisage donc pas pour le moment d'adopter
d'autres modifications à la législation relative aux travailleurs des
services essentiels.
En ce qui concerne le droit de grève des salariés des hôpitaux en
vertu de la loi sur les relations professionnelles dans la fonction publique
de l'Alberta, l'orateur a expliqué que, dans cette province,
les salariés des hôpitaux approuvés par le ministère de la Santé
n'ont pas le droit de grève et les employeurs n'ont pas le droit de
lock-out. Les hôpitaux approuvés comprennent les unités de soins
intensifs, mais ne comprennent pas les services de santé communautaires,
les établissements de santé mentale et certaines unités de
soins continus. Dans ces unités et services, les salariés ont le droit de
grève et les employeurs ont le droit de lock-out. En Alberta, l'existence
ou non du droit de grève et de lock-out dépend de la nature de
l'organisation fournissant le service plutôt que du type de travail
exécuté par les salariés. En réalité, tout le système provincial des
soins de santé a été régionalisé il y a environ cinq ans. Bien que le
gouvernement n'envisage actuellement pas de modifier sa législation,
il continue à suivre le fonctionnement du système de relations
professionnelles au fur et à mesure de l'évolution et de l'intégration
des prestations de service dans un système coordonné au niveau
régional.
L'orateur s'est ensuite référé à l'observation de la commission
d'experts sur les restrictions du droit d'organisation dans les domaines
de l'agriculture et de l'horticulture dans les provinces de l'Alberta,
de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick. En Alberta, bien que
les travailleurs agricoles soient exclus du champ d'application de la
législation sur les relations professionnelles, aucune disposition de
la législation du travail n'interdit spécifiquement à ces travailleurs
de mener des négociations volontaires avec leurs employeurs. Les
négociations entre la province et l'association médicale de l'Alberta
constituent un exemple de négociations volontaires menées en
dehors du cadre de la législation statutaire du travail de l'Alberta.
Ce groupe a négocié les barèmes provinciaux pour les médecins
membres de l'association. Par ailleurs, les internes, qui sont également
exclus du champ d'application de la loi, ont négocié leurs
conditions d'emploi avec les hôpitaux universitaires de la province.
En Ontario, il existe des raisons légitimes d'exclure certains employés
du droit statutaire de négociation en vertu de la loi sur les
relations de travail, mais les travailleurs exclus restent libres de
constituer des associations volontaires ou des syndicats en dehors
du régime statutaire de négociation collective. Les caractéristiques
uniques et la nature du travail dans le secteur agricole posent des
questions importantes ayant trait à l'opportunité d'appliquer à ce
secteur le régime de négociation collective prévu par la loi sur les
relations de travail et, en particulier, les mécanismes de résolution
des différends sur lesquels repose la négociation collective, à savoir
le droit de grève et de lock-out, ainsi que l'arbitrage obligatoire.
L'exigence, dans la législation sur les relations professionnelles
du Nouveau-Brunswick, qu'une unité comprenne au moins cinq
travailleurs agricoles pour pouvoir mener des négociations collectives
est nécessaire afin de libérer les petites fermes familiales de
contraintes législatives inappropriées.
L'orateur a exprimé la satisfaction de son gouvernement suite à
la remarque positive de la commission d'experts, au troisième paragraphe
de l'observation, sur l'adoption du projet de loi C-19 modifiant
le Code canadien du travail et, en particulier, sur l'interdiction
faite aux employeurs de recourir aux travailleurs de remplacement
dans le but de miner la capacité de représentation d'un syndicat.
Enfin, il a insisté sur la volonté de son gouvernement de coopérer
pleinement avec le système de contrôle de l'OIT pour les cas ayant
été récemment soumis au Comité de la liberté syndicale.
Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental
pour l'information fournie. Ils ont rappelé que le Canada
avait ratifié la convention en 1992 et que la commission d'experts a
fait état de plusieurs problèmes d'application concernant les articles
2 et 3 de la convention dans certaines provinces. Plus spécifiquement,
le rapport de la commission d'experts demande d'abord
plus d'informations sur la situation de la province de Terre-Neuve.
Le gouvernement de cette province avait informé la commission
d'experts qu'elle avait introduit une procédure efficace pour déterminer
les travailleurs des services essentiels et que le comité conjoint
employeurs-travailleurs avait déposé un rapport sur la révision
des lois sur la liberté syndicale. A cet égard, les membres
travailleurs demandent au gouvernement d'informer la commission
d'experts des derniers développements.
La commission d'experts demande également des informations
complémentaires pour la province d'Alberta concernant les services
essentiels dans le secteur des soins de santé. A cet égard, ils
souscrivent à la position fermement établie par la commission d'experts
sur le droit de grève et sur les cas restreints où il peut être
limité. Les membres travailleurs n'envisagent pas de discuter des
modalités du droit de grève dans le cadre de la discussion de ce cas.
Les membres travailleurs ont précisé que les problèmes syndicaux,
tels qu'ils sont vécus sur le terrain, seront évoqués plus tard par le
membre travailleur du Canada. Néanmoins, les membres travailleurs
ont demandé au gouvernement de répondre aux questions
de la commission d'experts et de garantir l'application de sa législation
en conformité avec l'article 3 de la convention selon laquelle
les organisations syndicales ont le droit de formuler leurs programmes
d'action. De plus, les membres travailleurs ont souligné que le
point 3 du rapport de la commission d'experts fait état de violation
assez grave des articles 2 et 3 de la convention dans les provinces
d'Alberta, du Nouveau-Brunswick et de l'Ontario. En particulier,
les membres travailleurs ont dénoncé les lois récentes dans la
province de l'Ontario qui sont en violation flagrante avec la
convention.
Le Comité de la liberté syndicale a reçu récemment plusieurs
plaintes et il a formulé des conclusions dans le cas n01900 sur le
déni du droit syndical aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture,
aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux avocats,
aux médecins et à d'autres catégories de travailleurs dans la province
de l'Ontario. Selon certaines informations, plusieurs catégories
de travailleurs avaient effectivement établi des syndicats et les organisations
avaient conclu des conventions collectives. Dans le cas
n01900, le Comité de la liberté syndicale a aussi constaté que la
nouvelle loi a également des effets négatifs sur le droit syndical en
cas de rachat ou de reprise de la société par un entrepreneur dans le
domaine de la construction. De plus, le Comité de la liberté syndicale
traite actuellement les cas nos 1951 et 1975 concernant le déni
du droit syndical pour certaines catégories de travailleurs comme
les directeurs d'école et leurs adjoints et les personnes employées
dans les programmes d'assistance sociale dans la province de l'Ontario.
A cet effet, ils ont invité les membres de cette commission à
lire attentivement le cas n01900 sur le déni du droit syndical aux
travailleurs de l'agriculture, de l'horticulture, aux travailleurs domestiques
et à d'autres catégories de travailleurs. La loi de 1995 a
modifié la loi sur les relations de travail de l'Ontario en excluant les
catégories de travailleurs des lois essentielles pour garantir l'exercice
effectif du droit syndical. Les membres travailleurs ont estimé
23/113
qu'il s'agit de la négation explicite et délibérée d'un droit et d'un
principe fondamental. Ils ont cité à cet égard la déclaration du gouvernement
de l'Ontario reprise dans le paragraphe 181 du cas
n01900 auquel fait référence la commission d'experts: «Le comité
note que le gouvernement de l'Ontario a un régime légal de relations
de travail et que les mécanismes de résolution des différends
collectifs ne sont pas appropriés aux travaux agricoles et aux lieux
de travail non industriels en raison de faibles marges bénéficiaires
et de relations de travail non structurées et hautement personnalisées.
» Selon les membres travailleurs, si ce raisonnement est poursuivi,
la grande majorité des travailleurs dans le monde et en particulier
dans les pays en développement serait privée du droit
syndical. En outre, le gouvernement de l'Ontario poursuit sa politique
délibérée. La loi n0 22 est entrée en vigueur le 18 décembre
1998 et elle poursuit un objectif précis et explicitement mentionné
en tant que tel dans le texte: il s'agit de la loi visant à empêcher la
syndicalisation des travailleurs en fin de droits mis au travail dans
les programmes d'assistance sociale. Une autre loi du 1er décembre
1997 exclut les directeurs et directeurs adjoints d'école de la législation
sur les relations du travail et affecte ainsi sensiblement les
droits collectifs de ces travailleurs. Le gouvernement de l'Ontario
ainsi que le gouvernement fédéral ont également utilisé l'argument
selon lequel les catégories de travailleurs concernés ont la possibilité
de s'associer sur la base de la common law. Mais, dans le système
légal canadien, la liberté syndicale n'est pas effective en dehors du
cadre des lois fondamentales sur les relations de travail.
Enfin, les membres travailleurs ont demandé de tenir compte
dans les conclusions du fait que des droits et principes fondamentaux
sont en cause en Alberta, au Nouveau-Brunswick et en Ontario.
De plus, ils ont insisté sur l'importance des articles 2 et 3 de la
convention. Tous les travailleurs sans distinction d'aucune sorte ont
le droit de constituer des organisations syndicales, de s'affilier à ces
organisations, et ces organisations ont le droit de formuler leur programme
d'action. Finalement, les lois concernées devraient être
instamment révisées afin que le Canada puisse respecter ses obligations
internationales en rapport aux droits et principes fondamentaux
reconnus par les articles 2 et 3 de la convention fondamentale.
Les membres employeurs ont pris note des informations communiquées
par le représentant gouvernemental, qui complètent
celles contenues dans l'observation de la commission d'experts.
Une partie des commentaires de la commission d'experts souligne
les développements législatifs récents qui sont intervenus dans le
pays. Cependant, les membres employeurs ne peuvent pas être
d'accord avec certains aspects de l'observation. Le droit des travailleurs
et des employeurs de constituer des organisations de leur
choix sans autorisation préalable, y compris le droit de formuler
leurs programmes d'action, droit consacré par les articles 2 et 3 de
la convention, constitue un bon point de départ pour les commentaires
de la commission d'experts. En ce qui concerne la situation à
Terre-Neuve, l'orateur a pris note de la déclaration du représentant
gouvernemental, aux termes de laquelle les partenaires sociaux ont
convenu de la procédure à suivre pour la réforme législative qui
apparaît nécessaire et qui a révélé que des consultations tripartites
ont eu lieu à ce sujet. A cet égard, l'orateur a appuyé le souhait de la
commission d'experts d'être tenue informée des développements
en la matière. Pour ce qui est de la province de l'Alberta, la situation
est différente et les restrictions au droit de grève des salariés
des hôpitaux ont été imposées par la loi. Cependant, l'interdiction
de la grève n'est applicable qu'à certains hôpitaux. De l'avis de la
commission d'experts, le droit de grève est un corollaire de la liberté
syndicale et les restrictions relatives à ce droit devraient par conséquent
se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions
d'autorité au nom de l'Etat ou dans les services essentiels au sens
strict du terme et comme défini par la commission d'experts. Au
contraire, les membres employeurs estiment que l'Etat a le droit de
définir les termes «services essentiels». Le concept de «services essentiels
» ne peut pas être compris par simple référence au texte de
la convention n0 87. Bien que la commission d'experts puisse souhaiter
ouvrir une discussion sur la question de savoir si le travail des
aides de cuisine, des portiers et des jardiniers constitue des services
essentiels dans les hôpitaux, une telle discussion ne peut pas faire
partie de l'examen de l'application de la convention. En ce qui concerne
l'observation plutôt positive relative à l'adoption du projet de
loi C-19 modifiant le Code canadien du travail (partie I) qui, selon
les experts, a mis la législation en plus grande conformité avec les
principes de la liberté syndicale, l'orateur a estimé à cet égard que
les dispositions concernant le droit de grève et le droit de lock-out
ne concernent pas la mise en oeuvre du principe de la liberté syndicale.
La législation présente certaines lacunes en ce qui concerne le
droit d'organisation dans les domaines de l'agriculture et de l'horticulture.
Cependant, la question de savoir si le droit de grève fait ou
non l'objet de restrictions dans ce secteur ne relève pas de la convention
et n'a d'ailleurs pas été soulevée dans l'observation de la
commission d'experts. En conclusion, l'orateur a rappelé que les
membres employeurs et les membres travailleurs ont toujours eu
des opinions différentes en ce qui concerne le droit de grève, et les
membres employeurs conviennent que les deux groupes ne soient
pas d'accord sur ce point. C'est pour cette raison qu'il s'est abstenu
de répéter une fois de plus les arguments bien connus des membres
employeurs sur la question. Les arguments qui sous-tendent la position
des membres employeurs peuvent néanmoins être lus aux paragraphes
115 à 134 du rapport de la Commission de la Conférence
de 1994, ainsi que des explications concernant le rôle de la commission
d'experts qui existe depuis 1926.
Le membre travailleur du Canada a déclaré que la violation par
le Canada de la convention est une réalité qui persiste. D'ailleurs, le
Comité de la liberté syndicale a été saisi d'un grand nombre de cas
concernant le Canada, à propos desquels le comité, dans ses conclusions,
a demandé au gouvernement de prendre des mesures pour
que la convention soit respectée. L'orateur a déploré que, parmi ces
conclusions lorsqu'il y en a eu, rares sont celles à avoir été suivies
d'effets. Il a rappelé que, en 1985, une mission d'études et d'informations
avait été dépêchée au Canada en raison des nombreux cas
de violations des principes fondamentaux de la liberté syndicale.
Dix ans plus tard, en 1995, le gouvernement a rejeté la recommandation
du Comité de la liberté syndicale visant à ce qu'il ait recours
à l'assistance du BIT, en particulier par le biais d'une mission consultative.
Toutefois, peu de temps après, a été adopté le projet de loi
n0 7 du gouvernement de l'Ontario en vertu duquel: les travailleurs
agricoles, les travailleurs domestiques et ceux de certaines professions
libérales se sont vu refuser l'accès à la négociation collective
et au droit de grève; il a été mis fin aux droits d'organisation existants
de ces travailleurs; ont été annulées leurs conventions collectives
et supprimées les mesures de protection contre la discrimination
syndicale et les actes d'ingérence de l'employeur; ont été
supprimées les obligations de l'employeur (obligations du successeur)
acquéreur d'une entreprise et des droits corollaires à l'égard
des employées de la Couronne, ainsi que la protection des travailleurs
contre l'employeur successeur dans le secteur des services
de la construction. Le projet de loi n0 7 a donné lieu à un autre cas
(cas n01900) soumis au Comité de la liberté syndicale. Le Comité
de la liberté syndicale a fermement recommandé: de prendre des
mesures afin que ces travailleurs bénéficient de la protection nécessaire
pour pouvoir constituer des organisations de leur choix et s'y
affilier, et afin qu'ils ne se voient pas nier le droit de grève; de garantir
l'accès de ces travailleurs au mécanisme et aux procédures facilitant
la négociation collective; de s'assurer que ces travailleurs jouissent
effectivement d'une protection contre la discrimination
antisyndicale et l'ingérence de l'employeur; de faire en sorte que les
organisations retrouvent leur reconnaissance; de rétablir la validité
des conventions collectives concernant les travailleurs de l'agriculture
et les membres de professions libérales, et d'assurer la protection
adéquate du droit d'organisation et des droits de négociation
collective dans les services de la construction. Enfin, le comité avait
attiré l'attention de la commission d'experts sur les aspects législatifs
de ce cas. L'orateur a déclaré que ces recommandations
n'avaient pas été encore suivies d'effets. Au contraire, dans le
309e rapport (mars 1998) du Comité de la liberté syndicale, le gouvernement
a indiqué qu'il n'entendait amender la législation en vue
de supprimer l'exclusion des travailleurs agricoles de quelque système
statutaire de relations du travail que ce soit. L'orateur a estimé
que cette attitude est tout à fait critiquable si l'on tient compte du
fait que les travailleurs agricoles et les travailleurs domestiques figurent
parmi les catégories de travailleurs les plus vulnérables, et
que ce type de tâches est souvent effectué, dans de mauvaises conditions
de travail, par des immigrants. Le gouvernement avait également
indiqué que le projet de loi n0 7 avait créé un équilibre de
pouvoir correct entre les syndicats et les employeurs, et facilité des
négociations collectives productives, que le gouvernement considérait
comme un élément important de sa stratégie visant à renforcer
l'économie et à créer des emplois. L'orateur a estimé que priver certaines
catégories de travailleurs de droits aussi fondamentaux que
le droit d'adhérer à un syndicat, le droit de grève et le droit de négociation
est une façon curieuse d'établir un équilibre de pouvoir correct.
Cela est également valable pour le cas de l'Alberta dans lequel
le droit de grève est également refusé à une catégorie de travailleurs
qui, dans certains hôpitaux, n'assurent pas des services essentiels,
tels que les jardiniers.
L'orateur a pris note des informations que le gouvernement a
fournies à propos du cas de Terre-Neuve et s'est dit impatient
de pouvoir examiner le rapport auquel le gouvernement a fait
référence.
L'orateur a ensuite rappelé que, depuis le cas n01990, le Comité
de la liberté syndicale a été saisi de six autres cas. Le premier porte
sur les enseignants du Manitoba qui ont été privés du droit de grève
et pour qui certaines questions ont été exclues du champ de la négociation
collective, voire soustraites à la compétence des arbitres des
différends (cas n01928, Canada/Manitoba, 310e rapport).
Le deuxième porte sur l'ingérence du gouvernement dans les tribunaux
d'arbitrage et du travail (310e et 311e rapports).
23/114
Le troisième cas, pour lequel l'assistance du BIT a été recommandée,
a trait: au déni du droit des directeurs d'école et des directeurs
adjoints de s'organiser, de négocier collectivement et de faire
grève, droit dont ils jouissaient auparavant; à l'ingérence de l'employeur
dans la négociation collective et à l'élimination d'autres
protections (cas n0 1951, Ontario).
Le quatrième porte sur une loi visant à empêcher la syndicalisation.
En vertu de cette loi, les personnes qui ont droit à une aide
sociale et qui, pour en bénéficier, alors qu'elle est souvent inférieure
au salaire minimum, sont tenues de travailler pour l'Etat, n'ont
pas le droit de s'affilier à un syndicat pour négocier leurs conditions
de travail alors qu'auparavant elles possédaient ce droit. Au Canada,
on utilise désormais l'expression «Programme de participation
communautaire» («workfare») au lieu de l'expression «travail
forcé» (cas n01975, Ontario).
Le cinquième porte sur une loi visant à obliger à reprendre le
travail. Cette loi a été mise en oeuvre pour mettre un terme à une
grève du service des postes. Là encore, cette loi est entrée en vigueur
dès le début de la grève pour que les travailleurs ne puissent
pas recourir au droit de grève prévu par la législation. Dans ce droit,
le droit de grève a été supprimé afin que les travailleurs n'aient plus
la force collective de négocier - raison de s'affilier à un syndicat -,
de sorte que le gouvernement puisse imposer à l'arbitre désigné
conformément à la loi certaines des dispositions favorables à l'employeur.
L'orateur s'est demandé si, dans ce cas, le gouvernement
fédéral, à l'instar du gouvernement de l'Ontario, estime que supprimer
les droits des travailleurs consacrés par la loi revient à établir
un équilibre de pouvoir correct entre les syndicats et les employeurs
(cas n" 1985).
Enfin, le sixième cas traite également d'une législation destinée
à obliger à reprendre le travail, législation qui va à rencontre des
travailleurs du secteur de l'énergie (cas n01999, Saskatchewan). En
outre, l'orateur a signalé que, récemment, au Saskatchewan et à
Terre-Neuve, ont été introduites au niveau fédéral des lois qui privent
les travailleurs du droit de grève.
En conclusion, l'orateur a dit qu'il se rangeait à l'avis des membres
travailleurs. Il a souligné que le droit de grève fait partie de la
force collective que recherchent les travailleurs quand ils s'affilient
à un syndicat. Si ce n'était pas le cas, quelle raison aurait-on de former
des syndicats?
Le membre travailleur des Etats-Unis a appuyé les commentaires
formulés par les membres travailleurs ainsi que par le membre
travailleur du Canada. Il a estimé nécessaire d'intervenir sur le cas
canadien et évoqué les relations commerciales et financières étroites
entre les Etats-Unis et le Canada. Les deux pays présentent de
grandes similitudes dans leur structure, y compris le système d'accréditation
de syndicats fondé sur l'autorisation de la majorité des
travailleurs dans certaines unités de négociation ainsi que le système
de négociation collective dans le secteur privé. En outre, de
nombreuses structures syndicales nord-américaines sont issues du
commerce, de l'artisanat et de l'industrie et ont une base internationale
avec des adhérents du Canada et des Etas-Unis. Malgré ces
ressemblances, le mouvement du travail des Etats-Unis a toutefois
également noté des différences importantes entre les deux systèmes.
Par exemple, dans les provinces canadiennes, il existe des procédures
d'accréditation d'unités de négociation plus rapides qu'une
législation limitant ou interdisant le remplacement définitif des grévistes.
De telles différences expliquent en partie le haut niveau d'organisation
des travailleurs au Canada par rapport aux Etats-Unis.
Les développements de la législation canadienne du travail ainsi
que la pratique limitant les droits des travailleurs canadiens d'exercer
des libertés syndicales et augmentant les possibilités pour l'employeur
de s'ingérer dans l'exercice de leurs droits syndicaux, de
grève et de négociation collective sont préoccupants. Se référant au
rapport de la commission d'experts et à l'étude annuelle de la CISL
sur les droits au travail, l'orateur a relevé que certaines catégories
d'emplois sont exclues de la protection de la loi dans différentes
provinces canadiennes. En Ontario, la législation du travail exclut
les travailleurs agricoles, les travailleurs domestiques, les architectes,
les dentistes, les arpenteurs, les avocats et les médecins des garanties
juridiques assurant les droits d'organisation et de négociation
collective des travailleurs. Sont exclues d'autres catégories de
travailleurs tels les travailleurs contractuels comme les agents de
service de nettoyage, les travailleurs de la restauration et les agents
de sécurité dans les cas de reprise d'affaires ou de changement de
partenaire. En outre, suite aux modifications de la législation de
l'Ontario, il est interdit aux travailleurs participant à des programmes
de travaux communautaires («workfare»), comme condition
pour recevoir des allocations sociales, de créer des syndicats, de
négocier collectivement ou de faire grève. Cette question préoccupe
tout particulièrement les travailleurs des Etats-Unis au regard
des réformes sociales. Des modifications récentes de la législation
du travail de l'Ontario ont supprimé des dispositions antibriseurs de
grève permettant ainsi aux employeurs de remplacer de manière
définitive les travailleurs grévistes. En ce qui concerne la législation
de l'Alberta, le rapport de la commission d'experts met l'accent sur
la définition déraisonnable de la notion de services essentiels. La
jurisprudence récente du Canada affirme que les facteurs des zones
rurales sont en fait des travailleurs en régime de sous-traitance et
non des employés à qui on a dénié les garanties légales de s'organiser
et de négocier collectivement. En conclusion, l'orateur a appuyé
pleinement les commentaires de la commission d'experts et instamment
prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires en
vue d'amender sa législation de manière à en assurer la conformité
avec la convention. De telles mesures produiront certainement un
impact sur le bien-être de tous les travailleurs nord-américains.
Le membre travailleur de l'Afrique du Sud a d'abord souligné
l'importance de la convention et a dit que sa pleine application est
essentielle pour l'exercice de la démocratie et de la justice sociale. Il
a appuyé les déclarations des membres travailleurs et noté avec une
profonde préoccupation le fait que les travailleurs agricoles et domestiques
qui constituent les groupes de travailleurs les plus vulnérables
sont privés du droit de s'organiser. Il a ajouté qu'un grand
nombre de travailleurs agricoles au Canada sont des immigrants,
lesquels ont particulièrement besoin de protection. En outre, il a
fait observer que le déni de droit de grève à l'encontre de certaines
catégories d'employés d'hôpitaux publics en Alberta va totalement
à l'encontre des principes que défend depuis longtemps le Comité
de la liberté syndicale. Enfin, il s'est dit préoccupé qu'au Manitoba
les enseignants se voient refuser le droit de grève. Il a fermement
exhorté le gouvernement fédéral à faire en sorte que la législation
interne soit modifiée et alignée sur la convention n0 87.
Le membre travailleur de l'Allemagne a souscrit pleinement à la
déclaration des membres travailleurs et a indiqué que le cas du Canada
revêtait une importance fondamentale concernant les principes
contenus dans la convention. Il rappelle que le Comité de la
liberté syndicale a examiné de nombreux cas concernant le Canada
et qu'il a toujours exprimé sa profonde préoccupation concernant
les limitations aux droits prévus par la convention. Concernant les
restrictions au droit de grève prévu par la législation de la province
de l'Alberta, il a souligné que les commentaires de la commission
d'experts expriment clairement qu'aucune restriction ne devrait
entraver le droit de grève. Ainsi, le gouvernement et les employeurs
devraient expliquer pourquoi certaines catégories de travailleurs
telles que le personnel de cuisine et les jardiniers oeuvrant
dans le domaine de la santé devraient être privés de ce droit. A cet
égard, il a prié instamment le gouvernement de tenir compte des
commentaires de la commission d'experts et de prendre immédiatement
des mesures afin de mettre la législation en pleine conformité
avec les dispositions de la convention. Se référant aux commentaires
des membres employeurs lors de la discussion générale sur le
droit de grève et les références y relatives de ce jour, il a noté que
plusieurs de ces arguments présentent un caractère historique et il a
indiqué que la commission d'experts a, pour sa part, adopté une
interprétation plus systématique et objective concernant cette
question. Il a rappelé que, ce jour, les membres travailleurs célèbrent
le 50e anniversaire de la convention n0 98, comme ils avaient
célébré le cinquantenaire de la convention n0 87 l'année dernière.
Le cas du Canada devant cette commission, qui se rapporte à des
questions de liberté syndicale, de négociation collective et de droit
de grève, démontre clairement que ces questions sont toujours des
sujets d'actualité même dans les pays industrialisés. Enfin, il a exprimé
l'espoir que le Canada servira d'exemple aux autres pays en
appliquant pleinement et sans délai les principes contenus dans la
convention n0 87, sinon cela donnera l'impression que seuls les pays
en développement subissent des pressions spéciales pour appliquer
les conventions de l'OIT
Le membre gouvernemental de l'Australie a observé que, au
sujet de la non-application des textes législatifs cités par la commission
d'experts à certaines catégories de travailleurs, le gouvernement
canadien a expliqué que ces catégories ont la liberté de créer
des syndicats sur une base volontaire et de négocier collectivement
en dehors du cadre statutaire formel. Le gouvernement australien
estime que le rapport de la commission d'experts sur l'application
de la convention n0 87 au Canada ne contient pas d'informations
suffisantes susceptibles de permettre aux membres de la présente
commission d'apprécier les problèmes soulevés. Une description
plus exhaustive de la situation est nécessaire à cet effet. Le rapport
de la commission d'experts ne pouvait manifestement pas contenir
un examen approfondi des informations soumises par le gouvernement
canadien, la commission d'experts ayant demandé au gouvernement
canadien de fournir des informations complémentaires au
sujet de certaines questions. Dans ces circonstances, il serait plus
utile, plutôt que de continuer à examiner ce cas à ce stade, de donner
au gouvernement canadien l'opportunité de fournir à la commission
d'experts les informations complémentaires demandées.
Le membre travailleur de la Finlande, s'exprimant au nom des
membres travailleurs des pays nordiques, a appuyé les déclarations
des membres travailleurs ainsi que du membre travailleur du Canada.
Il a remercié le représentant gouvernemental des informations
23/115
fournies. Considérant que le Canada a ratifié la convention n0 87
mais non la convention (n0 98) sur le droit d'organisation et de négociation
collective, 1949, il a exprimé son intérêt pour les propos
tenus par le représentant gouvernemental dans le cadre de la discussion
générale, indiquant que le gouvernement entend poursuivre
le dialogue avec l'OIT en vue d'une ratification éventuelle de ce
deuxième instrument. Il a cependant déploré qu'un pays développé
et industrialisé tel que le sien ne puisse satisfaire aux dispositions de
la convention, notamment en ce qui concerne le droit de grève et le
droit de se syndiquer et de négocier collectivement. Il a déclaré que
les violations de la convention sont devenues une réalité persistante
au Canada. Relevant qu'il a été procédé à quelques modifications
législatives mineures pour rendre le Code du travail canadien plus
conforme aux principes de la liberté syndicale, l'intervenant a exprimé
l'espoir que le gouvernement sera en mesure, dans un proche
avenir, de faire état d'autres développements positifs. La persistance
des membres employeurs à remettre en question l'interprétation
des organes de contrôle de l'OIT concernant le droit de grève suscite
des préoccupations, de même que le fait que le gouvernement
semble se rallier à cette remise en question. Le droit de grève est un
droit universel qu'impliquent tacitement la Constitution de l'OIT
ainsi que l'interprétation des conventions n05 87 et 98 par la commission
d'experts et le Comité de la liberté syndicale. Le droit de
grève a été reconnu comme un moyen non seulement légitime mais
encore essentiel dont les travailleurs disposent pour défendre leurs
intérêts professionnels. De l'avis de l'intervenant, les interprétations
données par les organes de contrôle de l'OIT se fondent valablement
sur les articles 3,8 et 10 de la convention. Conformément à
l'article 8 de la convention, l'exercice des droits prévus par cet instrument
ne porte pas atteinte à la législation du pays; cependant,
cette législation ne doit pas elle-même altérer les garanties prévues
par la convention. Pour ce qui est notamment du droit de grève
dans le secteur public de la province de l'Alberta, si une interdiction
généralisée de la grève est contraire à la convention, certaines restrictions
de ce droit sont néanmoins admissibles, notamment dans le
cas des services essentiels au sens strict du terme et des fonctionnaires
exerçant une autorité au nom de l'Etat. Dans ce contexte, on
peut dire que la législation et la pratique de la province de l'Alberta
ne satisfont pas aux exigences de la convention telles qu'interprétées
par les organes de contrôle. Pour conclure, l'intervenant a appelé
le gouvernement à prendre ses responsabilités vis-à-vis de ce
qui se passe dans les différentes provinces.
Le membre travailleur du Zimbabwe a rappelé que le principe
du droit de grève découle de l'article 10 de la convention qui dispose
que les organisations de travailleurs signifie toute organisation
ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts de ses
membres. Cette définition est d'une importance fondamentale car
elle fixe la raison d'être de ces organisations. De plus, contrairement
à ce que les membres employeurs semblent croire, les travailleurs
des services essentiels sont définis au sens strict du terme
dans le Recueil des décisions du Comité de la liberté syndicale. En
conséquence, il n'y a aucun doute que le personnel de cuisine, les
porteurs et jardiniers, tels que mentionnés dans l'amendement du
Code du travail de l'Alberta, ne sont pas inclus dans la catégorie de
travailleurs des services essentiels malgré le fait qu'ils travaillent en
milieu hospitalier. De plus, l'amendement au Code du travail du
Nouveau-Brunswick qui exclut certaines catégories de travailleurs
de cette protection constitue une violation directe de la convention.
Enfin, il a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures
nécessaires pour amender sa législation afin de la rendre conforme
aux principes de la liberté syndicale, tel que la commission d'experts
l'a observé.
Le membre travailleur de la Grèce s'est dit perplexe face à la
longue discussion qui a eu lieu pendant plus de deux heures et qui
conserve l'application d'une convention fondamentale par un pays
tel que le Canada, admirable à plein d'égards. Se référant aux observations
des membres employeurs, il a relevé que, bien que les
Etats soient libres de choisir les moyens visant à mettre en oeuvre la
convention, ils doivent toutefois en assurer le respect. Egalement
pour ce qui est de l'opposition entre droit de grève et lock-out, il a
indiqué que, dans son pays, le lock-out est interdit depuis 1982 sans
que les employeurs ne s'en soient plaints. L'égalité entre travailleurs
et employeurs ne s'évalue pas à la lumière de la reconnaissance
ou non du droit de grève et du lock-out; selon l'orateur, il ne
pourra être question d'égalité que lorsque les travailleurs bénéficieront
du même pouvoir que les employeurs. Enfin, il a soumis que le
Canada devrait faire tout ce qui est possible pour mettre sa législation
en conformité avec la convention afin - à tout le moins - d'éviter
la situation embarrassante dans laquelle il se trouve aujourd'hui
et la mauvaise publicité qu'il en tire.
Le membre gouvernemental de l'Afrique du Sud a déclaré que
son gouvernement a noté avec préoccupation les commentaires de
la commission d'experts dans le cas du Canada eu égard à la convention.
Il y a cinq ans, son gouvernement s'est attaqué et a résolu
les défis que le gouvernement canadien avait promis de résoudre
quelque vingt-sept années auparavant. Le gouvernement de l'Afrique
du Sud a aussi reconnu que les travailleurs agricoles et les travailleurs
domestiques représentent les groupes de travailleurs les
plus vulnérables et que cette situation est sûrement la même qui
prévaut au Canada. Son gouvernement prie instamment le gouvernement
canadien d'amender la législation et la pratique en conformité
avec la convention, et ce dès que possible.
Le représentant gouvernemental a remercié l'ensemble des participants
à la discussion pour leur contribution. Il a assuré que toutes
les opinions exprimées, ainsi que les conclusions de la commission,
seraient transmises aux autorités compétentes du pays.
Les membres employeurs ont déclaré que, même s'ils ne partagent
pas toutes les opinions qui ont été exprimées au cours de la
discussion en ce qui concerne la liberté syndicale et la négociation
collective, il existe un consensus général sur la question. Les divergences
d'opinions exprimées concernent des questions spécifiques.
Il ne faut pas réouvrir le débat fondamental sur le droit de grève,
mais le Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté
syndicale (CLS), qui a été mentionné à plusieurs reprises, est une
simple compilation de commentaires et d'observations faits par le
CLS. A cet égard, les références au recueil ont acquis un statut
autonome dans le débat. En ce qui concerne la déclaration par un
membre travailleur de l'Allemagne, selon lequel les restrictions apportées
au droit de grève constituent une limitation d'un droit fondamental,
l'orateur a estimé que les termes «droit fondamental»
doivent d'abord être définis. En principe, les membres employeurs
ne sont pas opposés à la reconnaissance du droit d'engager des actions
collectives, qui comprend le droit de grève ou de lock-out.
Cependant, ce droit ne dérive pas de la convention. Le droit de
mener des actions revendicatives étant reconnu, la question qui se
pose est celle de la base juridique du droit de grève. En ce qui concerne
les questions de détail, reprenant la position générale des
employeurs sur la question, il s'est référé au rapport de 1994 de la
commission (paragr. 115 à 134). En conclusion, la convention ne
constitue pas la base juridique du droit de grève. Cependant, au vu
des divergences entre l'opinion des membres employeurs et celle
des membres travailleurs sur ce sujet, les membres employeurs soulignent
que les points de concordance entre les positions des employeurs
et des travailleurs concernant la plupart des éléments de la
liberté syndicale devraient aussi être relevés, dès lors que l'OIT et
ses Etats Membres attachent une grande importance à la liberté
syndicale. En outre, le gouvernement devrait fournir des informations
complémentaires en ce qui concerne les mesures prises en vue
de mettre la législation en conformité avec les dispositions de la
convention.
Se référant aux observations des membres employeurs, les
membres travailleurs ont rappelé que tous connaissent les divergences
qui les opposent en ce qui concerne le droit de grève et notamment
son inclusion dans le champ couvert par la liberté syndicale.
Bien que les membres travailleurs aient regretté qu'il n'y ait pas
de progrès à cet égard cette année, ils ont exprimé l'espoir que les
membres employeurs continuent à analyser les situations qui prévalent
dans les différents pays et notamment l'interprétation faite
par ces pays de la liberté syndicale et de ce qu'elle signifie, et que le
dialogue et les échanges à cet égard soient poursuivis au sein de la
commission.
La commission a noté la déclaration du représentant gouvernemental
et la discussion qui a eu lieu par la suite. La commission a
également noté l'information relative à l'établissement d'une procédure
effective pour la détermination des «travailleurs des services
essentiels» mise sur pied par le gouvernement de Terre-Neuve à
la suite d'une consultation tripartite. Tout en notant avec intérêt
l'adoption du projet de loi C-19, modifiant le code canadien du travail,
la commission a observé que, depuis de nombreuses années, la
commission d'experts et le Comité de la liberté syndicale ont formulé
des commentaires sur différentes questions relatives à la convention.
Ces questions concernent les restrictions excessives au
droit des organisations de travailleurs de formuler leurs programmes
d'action sans ingérence de la part des autorités publiques découlant
des interventions législatives fédérales et/ou provinciales.
La commission a également noté que les lois du travail dans quelques
provinces (Alberta, Ontario, Nouveau-Brunswick) excluent
des travailleurs de leur champ d'application, incluant des travailleurs
oeuvrant dans l'agriculture et l'horticulture ainsi que des
travailleurs domestiques, leur niant ainsi la protection au regard des
droits de s'organiser et de négocier collectivement. La commission,
comme la commission d'experts, a souligné que les garanties prévues
au regard de la convention s'appliquent à tous les travailleurs
sans distinction d'aucune sorte et que tous les travailleurs doivent
bénéficier du droit de constituer les organisations de leur choix ainsi
que de s'affilier à ces organisations en vue de promouvoir et défendre
leurs intérêts. La commission a également souligné que les
organisations de travailleurs doivent jouir du droit de formuler
leurs programmes sans ingérence de la part des autorités publiques.
La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement fournisse
23/116
un rapport detaille a la commission d'experts sur Jes mesures concretes
prises en vue de mettre la legislation et la pratique en pleine
conformite avec la convention.
23/117

Document no 260
CIT, 90e session, 2002, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 28 Partie 2/32-28
Partie 2/35 (Swaziland)

Troisième question à l’ordre du jour: Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l’application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Pages
28
PREMIÈRE
PARTIE
Conférence internationale du Travail
Compte rendu provisoire
Quatre-vingt-dixième session, Genève, 2002
PREMIÈRE PARTIE: Rapport général . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
A. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution – Etude d’ensemble des rapports
concernant la convention (no 137) et la recommandation (no 145) sur le travail dans les ports, 1973 33
D. Exécution d’obligations spécifiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
DEUXIÈME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (Article 22 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
A. Observations générales et informations concernant certains pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
B. Observations et informations sur l’application des conventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
II. Observations et informations concernant l’application des conventions dans les territoires non métropolitains
(Articles 22 et 35 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
Informations concernant certains territoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
Annexe I.I Tableau des rapports reçus sur les conventions ratifiées (Articles 22 et 35 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
Annexe II. Tableau statistique des rapports reçus sur les conventions ratifiées (Articles 22 et 35 de la
Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74
III. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la Conférence
internationale du Travail (Article 19 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76
IV. Rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations (Article 19 de la Constitution) . . 78
Index par pays des observations et informations contenues dans le rapport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80
28 Partie 2/32
C. 87
Swaziland (ratification: 1978). Un représentant gouvernemental
a remercié le BIT de l’assistance technique reçue, grâce à laquelle
son gouvernement a adopté une loi amendée sur les relations
professionnelles. Il a voulu indiquer, pour commencer, que son gouvernement
s’est engagé dans l’initiation d’un dialogue social dans le
pays, comme la commission d’experts le lui avait instamment recommandé.
Il a rappelé que la commission d’experts a soulevé deux questions
relatives à l’application de la convention dans son pays. La
première concerne le droit d’organisation des membres du personnel
du service pénitentiaire pour défendre leurs intérêts économiques
et sociaux. La seconde concerne les procédures de résolution
des conflits, lesquelles sont, de l’avis de la commission d’experts,
trop longues. L’adoption de la loi modifiée sur les relations professionnelles
introduisant des modifications aux articles 40, paragraphe
13, et 52, à la suite de l’assistance technique du BIT, a été notée
avec intérêt par la commission d’experts.
En ce qui concerne la requête de la commission d’une modification
de la législation dans le but de réduire la longueur de la procédure
obligatoire de règlement des différends prévue par les articles
85 et 86, lus conjointement avec les articles 70 à 82 de la loi sur les
relations professionnelles, le gouvernement a indiqué que l’objet de
la procédure de règlement des différends n’était pas d’interdire les
grèves, mais de permettre un règlement alternatif du problème
avant le recours à la grève comme ultime moyen. Le représentant
du gouvernement a rappelé qu’aucune loi n’était parfaite et que ces
dispositions n’étaient pas gravées dans la pierre. Il a espéré que la
Commission de l’application des normes de la Conférence ainsi que
la commission d’experts allaient apprécier à leur juste valeur les efforts
entrepris par son gouvernement pour se conformer à la convention.
Il a demandé au Bureau d’aider le gouvernement en lui
communiquant une copie de l’étude d’ensemble de 1994 sur la liberté
syndicale.
Les membres employeurs ont indiqué que ce cas familier fait
l’objet de discussions au sein de la Commission de la Conférence
depuis le milieu des années quatre-vingt et tous les ans depuis 1996.
Trois questions sont soulevées. La première concerne la procédure,
longue avec un scrutin compliqué, qui est requise pour protester
pacifiquement. La commission d’experts a noté avec intérêt les
changements effectués sur ces deux aspects dans les lois du gouvernement
et a demandé des rapports sur l’application pratique de l’ar28
Partie 2/33
C. 87
ticle 40 de la loi sur les relations professionnelles. La commission
d’experts a inclus, au paragraphe 113 de la partie générale du rapport,
le Swaziland pour l’application de la convention no 87 dans la
liste des cas de progrès. La Commission de la Conférence devrait en
prendre note.
La deuxième question a trait au refus d’accorder le droit d’association
au personnel pénitentiaire. La commission d’experts indique
avec raison que ce personnel pénitentiaire ne peut être considéré
comme faisant partie des forces armées et, en conséquence,
être exclu par la loi. En prenant note du fait que la commission
d’experts a également conclu que leur droit de grève pourrait faire
l’objet de restrictions, les membres employeurs ont indiqué que la
Commission de la Conférence n’avait pas à traiter cette question.
Le troisième point concerne la lenteur de la procédure requise
pour qu’une grève soit licite. Les experts ne donnent aucune autre
information quant à la procédure, si ce n’est sa lenteur. La position
bien connue des employeurs, c’est que tous ces détails au sujet du
droit de grève ne peuvent être mentionnés dans les conclusions de
ce cas. En clair, il n’y a pas de réponse standard à cette question.
Depuis la dernière discussion de ce cas par la commission, il y a eu
des progrès et la commission ne peut que se féliciter des mesures
positives et encourager le gouvernement à continuer sur cette lancée.
Les membres travailleurs ont souligné que le Swaziland a ratifié
la convention no 87 depuis vingt-quatre ans. Compte tenu des graves
violations constatées à l’exercice de la liberté syndicale, ce cas
est discuté par cette commission depuis 1996. Il pose tout particulièrement
le problème de la syndicalisation du personnel pénitentiaire.
Malgré l’adoption de la loi no 8 de 2000 modifiant plusieurs articles
de la loi sur les relations de travail, les restrictions à la liberté
syndicale et au droit de grève demeurent. Ainsi le personnel pénitentiaire
n’a pas le droit de se syndiquer, ce qui porte atteinte au
droit de grève de ce corps professionnel. Des aménagements à la loi
régissant la syndicalisation du personnel pénitentiaire sont donc
nécessaires, d’autant plus que cette corporation possède des spécificités
qui exigent que son personnel soit syndiqué.
La procédure obligatoire à suivre pour qu’une action revendicative
puisse avoir lieu légalement a été qualifiée de procédure particulièrement
laborieuse par la commission d’experts. Cette procédure
clairement en contradiction avec l’article 3 de la convention
vise en fait à décourager toute action revendicative. L’objectif probablement
recherché est de museler les syndicats et à long terme de
les faire disparaître. Une réduction de la durée de la procédure obligatoire
préalable à une action revendicative s’impose donc pour assurer
un meilleur exercice des libertés publiques fondamentales
que sont la liberté syndicale et l’exercice du droit de grève. Le gouvernement
doit procéder aux modifications de la législation relative
à la syndicalisation du personnel pénitentiaire et à la procédure relative
au règlement des conflits de manière à assurer le respect de la
convention et garantir la libre expression au personnel pénitentiaire
en particulier et aux syndicats en général.
Le membre travailleur du Swaziland a déclaré que le personnel
pénitentiaire n’a toujours pas le droit de s’organiser et de s’affilier
aux organisations de son choix à des fins de négociations collectives.
La procédure de grève est toujours trop longue de sorte qu’elle
fait échouer ce droit, comme cela a été le cas lorsque la commission
a recommandé au gouvernement de réduire la période en question.
La clause de responsabilité civile existe toujours et demeure une
menace et une entrave pour les travailleurs d’aborder leurs problèmes
socio-économiques par voie d’action revendicative. En bref,
l’année passée, les tentatives des employeurs et des travailleurs
pour amender la loi dans le cadre du Conseil consultatif sur le travail
ont toujours été sapées par le gouvernement.
L’orateur a rappelé que le Swaziland est interpellé devant la
commission pour la septième année consécutive, pour violations
continues de la liberté syndicale, illustrant l’évidente obstination du
gouvernement. Comme par le passé, le gouvernement a fait un tas
de promesses à la commission, qu’il n’a pas tenues. La consultation
tripartite pour l’amendement des lois a été ignorée. A l’inverse, le
gouvernement a arbitrairement décidé avec la loi de 1996 sur les
relations professionnelles de criminaliser les relations professionnelles.
Ayant obtenu l’assistance technique de l’équipe du BIT, il a
manqué d’amender la loi pour la mettre en conformité avec les conventions.
Le gouvernement a fait la sourde oreille aux conseils qui
lui étaient donnés depuis plusieurs années de ne plus utiliser les ordres
et les décrets d’urgence contre les travailleurs, particulièrement
l’ordre public de 1963 et la section 12 du décret de 1973.
Aucun rapport n’a été fait par les commissions d’enquête mises en
place pour enquêter sur la mort d’une écolière de 16 ans abattue par
la police durant une manifestation de la SFTU et sur l’enlèvement
du secrétaire général de la SFTU. En dépit de l’adoption de la loi
sur les relations professionnelles de 2000 (IRA) sous la pression des
paragraphes spéciaux de cette commission et du risque de pertes de
profits commerciaux en vertu du Système généralisé de préférences
des Etats-Unis, diverses évolutions ont eu lieu dans le pays: les rassemblements
de travailleurs ont été interdits; des travailleurs ont
été arrêtés et inculpés pour avoir mené des manifestations pacifiques
et brutalisés pour y avoir participé. On leur a dénié le droit de
tenir des conférences de presse, de faire des pétitions. L’orateur a
déclaré qu’il ne peut y avoir de droits des travailleurs sans droits de
l’homme et libertés civiles et que ni les uns ni les autres ne pourraient
exister ni se maintenir sans liberté d’association.
L’orateur a considéré que, bien que la loi de 2000 (IRA) soit
largement en conformité avec la convention, elle est nulle et non
avenue aux yeux des autorités parce qu’elle est en contradiction
avec les dispositions du décret d’état d’urgence de 1973 qui est la loi
suprême du pays. Cette opinion est confirmée par les évolutions
ultérieures. Le gouvernement a adopté le décret gouvernemental
no 2 de 2001 qui usurpait tous les droits fondamentaux et a été par la
suite abrogé après une violente protestation nationale et internationale.
Le gouvernement a introduit ensuite un projet de loi empêchant
les directeurs des écoles de s’affilier au syndicat des enseignants.
Il y a également eu un projet de loi sur le conseil des médias
visant à museler les médias et la liberté d’expression en cours d’examen.
Avant le mois de mai de cette année, le responsable exécutif
de son syndicat a été appelé et mis en garde de ne pas de ne pas
critiquer le gouvernement. Depuis lors, le gouvernement a publié
un nouveau projet de loi sur la sécurité interne qui propose des
mesures draconiennes et des restrictions telles que l’interdiction
d’annoncer des grèves et la qualification de la grève de sabotage
économique. Les améliorations des lois du travail sont contrecarrées
par d’autres lois. En effet, c’est comme une situation d’état
d’urgence permanent. Bien que le Swaziland ait ratifié six des huit
conventions fondamentales de l’OIT, la charte africaine et le droit
des peuples, la loi constitutive de l’Union africaine et bien qu’il soit
membre des Nations Unies, de l’OUA et du Commonwealth, il revient
à des lois archaïques et déshumanisantes.
En vue de trouver une solution durable, l’orateur a appelé l’OIT
à envoyer une mission tripartite politique de haut niveau dans le
pays pour rencontrer les autorités afin de leur signifier l’urgence
d’amender les lois en question et de respecter les lois dans la pratique.
Le membre travailleur de l’Afrique du Sud a indiqué que le contexte
dans lequel ce cas portant sur la convention no 87 est discuté a
été exposé dans le chapitre II du Recueil de décisions du Comité de
la liberté syndicale. Au paragraphe 33 de ce recueil, il est clairement
indiqué que les droits conférés aux travailleurs et employeurs
doivent avoir comme base les libertés civiles énoncées par la Déclaration
universelle des droits de l’homme et l’absence de ces libertés
enlève toute signification au concept des droits syndicaux. Au paragraphe
34 du recueil il est indiqué qu’un système démocratique est
fondamental pour l’exercice des droits syndicaux. Le Swaziland est
loin d’être une démocratie. Le décret de 1973, qui est toujours en
vigueur, interdit les partis politiques et suspend la Déclaration des
droits contenue dans la Constitution. Il en résulte que les syndicats
ont pris sur eux de lutter pour les droits de l’homme et les droits
syndicaux. Des progrès en matière de législation du travail sans
aucun progrès en matière de liberté civile reviennent à une absence
de progrès. Malgré l’article 8, paragraphe 2, de la convention selon
lequel la législation nationale ne devrait pas porter atteinte aux garanties
qui y sont prévues, le gouvernement du Swaziland utilise des
lois sur la sécurité, précisément pour aboutir à cela. Le projet de loi
sur la sécurité interne, adopté à l’intention du terrorisme, paralyse
sérieusement les activités syndicales et confisque la liberté d’association.
Ce cas est discuté depuis plusieurs années dans cette commission.
Le gouvernement avait promis l’adoption d’une législation qui
serait conforme à la convention. La commission a insisté sur le droit
d’organisation du personnel des services correctionnels tout en admettant
la possibilité de limiter leur droit de grève. Le gouvernement
doit donner des réponses justifiables aux commentaires de la
commission d’experts. La commission a également demandé des
amendements à la législation sur la procédure de recours préalable
à la grève. En conclusion, l’orateur a estimé que la commission devrait
rester saisie de ce cas au moyen d’un paragraphe spécial.
Le membre travailleur de la Norvège a exprimé sa solidarité envers
les syndicats du Swaziland et elle s’est dite préoccupée par leur
situation. Depuis un certain temps, les syndicats du Groupe nordique
ont suivi de près la situation politique du Swaziland, la situation
de ces syndicats ainsi que le comportement du gouvernement. Elle
a appuyé la proposition d’envoyer une mission de haut niveau au
Swaziland dans les plus brefs délais afin d’aider le gouvernement à
rendre la législation conforme aux conventions fondamentales de
l’OIT.
Le membre travailleur du Sénégal a noté que ce n’est pas la première
fois que le cas du Swaziland est examiné par la commission.
28 Partie 2/34
C. 87
Encore le rapport de la commission d’experts ne fait-il état que
d’une partie de la situation. Le régime est en effet demeuré antisyndical
et continue de traquer les dirigeants syndicaux, les harcelant
de procédures judiciaires, leur reprochant d’avoir exercé leur droit
de grève. Ce régime d’exception où toutes les libertés constitutionnelles
sont suspendues depuis 1973 est toujours en vigueur. Les
seuls efforts faits par le gouvernement en vue d’amender la loi
adoptée en 2000 l’ont été par peur de perdre des privilèges commerciaux,
notamment ceux attachés au Système généralisé de préférences.
En contravention à l’article 3 de la convention, la législation du
Swaziland comporte un nombre important de restrictions, notamment
l’exclusion du personnel de prison du champ d’application
d’un droit de l’homme fondamental, la liberté de former un syndicat.
La commission d’experts a attiré l’attention sur le fait que le
gouvernement a mis en place des mesures qui enlèvent toute sa
substance à l’article 3 de la convention et qui ont pour effet de priver
les organisations syndicales de leur droit. Il n’y a pas d’autres
façons d’expliquer le fait que l’on veuille assujettir une action revendicative
pacifique à la tenue d’un scrutin. Les pouvoirs répressifs
instaurés par le décret no 2 ont été abrogés par le décret no 3 qui
a toutefois conservé le déni de caution pour certains délits. Le système
en vigueur tente de contrôler la SFTU de façon encore plus visible
que par le passé. Les longues procédures qui précèdent le déclenchement
d’une grève ont cette fonction non déclarée. Le
gouvernement n’arrive plus à dissimuler sa volonté de démanteler
les organisations syndicales. Le cas du Swaziland doit faire l’objet
d’un paragraphe spécial du rapport de la commission.
Le membre travailleur du Japon a rappelé que, même si la commission
a examiné ce cas à plusieurs reprises et que le gouvernement
a adopté les recommandations faites par la commission, la
clause de responsabilité civile existe encore et demeure une menace
et une entrave à la libre expression par les travailleurs de leurs opinions.
La liberté syndicale se fonde sur le droit d’expression qui
devrait être pleinement garanti par le gouvernement. Il ne pourrait
y avoir aucun droit syndical sans le droit à la liberté syndicale, le
droit d’association pacifique et le droit à la liberté d’expression. Selon
les rapports d’Amnesty International, ces droits demeurent limités
au Swaziland. L’action du gouvernement menace encore l’indépendance
du système judiciaire, mine les décisions des tribunaux,
et on rapporte de nombreux cas de torture et de mauvais traitements
par la police.
Citant un certain nombre d’exemples concrets, l’orateur a demandé
au gouvernement de fournir à la commission des informations
détaillées sur ces exemples. M. Mario Masuku, président du
Mouvement populaire démocratique uni, a été une fois de plus arrêté
le 4 octobre 2001. Il avait été arrêté en novembre 2000 sous des
accusations de sédition et a été libéré moyennant l’observance de
strictes conditions de cautionnement, notamment l’obligation d’obtenir
la permission du commissaire de police avant de s’exprimer en
public et d’obtenir la permission de la Cour suprême pour voyager
à l’étranger. Il a dû demander son hospitalisation en raison des
mauvaises conditions d’emprisonnement. Il faut également citer les
décès de Edison Makhanya et de Sisbusiso Jele, qui sont survenus
quelques heures après leur arrestation par la police le 20 mars 2001.
Il ne s’agit là que de quelques exemples des nombreux cas rapportés
de torture et de mauvais traitements par la police.
Le 19 octobre 2001, la police a interrompu une conférence de
presse organisée par des membres et des personnes affiliées de l’Alliance
démocratique du Swaziland pour protester contre la détention
du chef de l’opposition, Mario Masuku. Plusieurs journalistes
ont aussi été harcelés par la police à cause de leur travail et un certain
nombre de publications ont été interdites. Le gouvernement a
aussi menacé de présenter à nouveau un projet de loi sur le conseil
de presse afin de resserrer les restrictions sur les journalistes et les
publications.
Le gouvernement est prié de donner effet, en droit et en pratique,
aux promesses qu’il a faites devant cette commission. Le devoir
du gouvernement n’est pas d’éviter la critique, mais de prendre
des mesures directes afin de construire un pays démocratique en
coopération avec les syndicats. Il est à espérer que le gouvernement
mettra fin à la confrontation avec le mouvement syndical et acceptera
la délégation tripartite de l’OIT, laquelle aidera les partenaires
sociaux à engager un dialogue en vue de trouver des solutions aux
problèmes des droits de l’homme au Swaziland.
Le membre travailleur de la Côte d’Ivoire a déclaré que le cas du
Swaziland est d’une importance capitale car il concerne la liberté
syndicale, qui est la pierre angulaire du droit syndical, et du droit de
grève qui est son corollaire. La liberté syndicale et l’exercice du
droit de grève sont inextricablement liés et font partie des libertés
publiques fondamentales dont chaque Etat se doit d’être le garant.
La situation au Swaziland est symptomatique de celle qui prévaut
dans de nombreux pays, notamment en Afrique. Elle s’inscrit dans
une logique visant à faire taire les syndicats et leurs revendications
mais l’article 2 de la convention est clair et sans équivoque. Suivant
cet article, tous les secteurs professionnels sans exception ont le
droit de se syndiquer. La militarisation de certains corps professionnels
est effectuée aux seules fins d’empêcher ces corps de se syndiquer
et de revendiquer. La législation du Swaziland doit être modifiée
pour permettre au personnel pénitentiaire de se syndiquer.
S’agissant de l’article 3 de la convention, la procédure obligatoire
relative aux règlements des conflits prévue aux articles 85 et 86,
en relation avec les articles 70 à 82 de la loi IRA, est désuète et
dangereuse pour les syndicats. Elle contrevient directement aux
prescriptions de l’article 3 de la convention et menace l’action syndicale
en rendant le déclenchement de la grève difficile, voire impossible.
Ces procédures sont des atteintes à la liberté, violent la
convention et sont une entrave à l’action des syndicats. Elles doivent
être retirées. Plusieurs Etats ont de telles procédures qui dénient
aux travailleurs le droit de grève alors qu’il s’agit de la seule
arme dont ils disposent. De plus, les lourdes sanctions imposées
dans les cas de non-respect de ces procédures aggravent encore la
situation. La commission discute du cas du Swaziland depuis sept
ans, et la position des membres travailleurs et du membre travailleur
du Swaziland doit être appuyée.
Le membre travailleur des Etats-Unis a exprimé la solidarité de
l’AFL-CIO avec les travailleurs du Swaziland et sa préoccupation
profonde au sujet de la situation politique du Swaziland qui se détériore,
particulièrement en ce qui concerne les libertés civiles, et qui
sape la liberté d’association. L’AFL-CIO entend renouveler ses efforts
pour déposer une plainte en vertu du Système généralisé de
préférences contre le gouvernement du Swaziland en raison de la
détérioration de la situation politique.
Le membre employeur du Swaziland a indiqué que, suite aux
discussions, il appert clairement que la poursuite du dialogue social
est une nécessité absolue dans le cas du Swaziland. Les réformes du
marché du travail survenues au Swaziland avec l’assistance de
l’OIT démontrent comment ce processus est puissant. La conduite
d’un tel dialogue et les gains obtenus ont été le résultat de leurs
efforts acharnés à promouvoir le dialogue entre les partenaires sociaux.
L’OIT doit continuer d’aider le Swaziland afin d’accélérer le
processus de dialogue social, et ce particulièrement au niveau national.
Les autres partenaires sociaux doivent renouveler leur engagement
dans le processus. Finalement, il s’est dit convaincu que l’assistance
de l’OIT afin de promouvoir le dialogue pourrait aider le
pays à faire des progrès significatifs pendant l’année en cours vers la
résolution de ses problèmes.
Le représentant gouvernemental a remercié tous les orateurs
pour leurs déclarations sur le cas. Vu le contenu politique de certaines
des déclarations, il est important de décrire le contexte politique
en cours au pays. Le gouvernement a créé un comité chargé de
rédiger la Constitution nationale en conformité avec les normes internationales.
Un projet de loi comme celui sur la sécurité intérieure
constitue une question nationale qui n’appelle pas une discussion
devant la commission. Le processus législatif dans son pays prévoit
qu’à la suite de la publication d’un projet de loi il est possible de
commenter les textes proposés dans un délai de trente jours.
Il est trompeur de prétendre que son pays fait un pas en arrière.
Il est important de suivre une procédure équitable devant les organes
de contrôle de l’OIT. La prochaine étape du processus sera
pour la commission d’experts d’analyser l’information fournie par
le gouvernement et de demander toute autre information requise.
Il sera alors possible d’examiner les progrès qui ont été faits. Le
gouvernement confirme son engagement de prendre avis des organes
de contrôle et d’entamer des discussions avec les partenaires
sociaux au niveau national, en vue de prendre les mesures nécessaires.
Les déclarations selon lesquelles les travailleurs au Swaziland
sont privés de leurs libertés fondamentales sont fausses. Personne
au Swaziland n’est emprisonné en raison de ses activités syndicales.
De plus, il y a eu de nombreuses demandes en vertu de la nouvelle
loi pour créer de nouvelles organisations. Le Swaziland confirme
son engagement de se conformer à ses obligations internationales.
Toutefois, il serait prématuré, dans le processus de dialogue avec les
organes de contrôle, d’envoyer dès maintenant une mission de haut
niveau au Swaziland.
Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental
pour son intervention et les informations fournies. Le
Swaziland a ratifié la convention il y a vingt-quatre ans et son cas a
été traité par la commission à plusieurs reprises. Depuis 1996, il est
question des difficultés d’application du principe de la liberté syndicale
au Swaziland à chaque session de la commission. De graves
violations ont été constatées et persistent encore. Les membres travailleurs
ont pris acte de l’observation de la commission d’experts
et de l’adoption de la loi no 8 modifiant les articles 29, 40 et 52 de la
loi de 2000 sur les relations du travail. Des restrictions aux libertés
publiques fondamentales existent au Swaziland en ce qui concerne
notamment la liberté syndicale et le droit de grève. En effet, le per28
Partie 2/35
C. 87
sonnel pénitentiaire n’a pas le droit de se syndiquer. Le caractère
absolu d’une telle restriction viole l’article 2 de la convention et
porte gravement atteinte au droit de grève de ce corps professionnel.
Des aménagements à la loi régissant la syndicalisation de ce
corps professionnel s’imposent. Le droit de se syndiquer et son corollaire,
le droit de grève, doivent être librement exercés par le personnel
pénitentiaire.
Sur le point de l’action revendicative, il faut relever que la procédure
obligatoire de règlement des conflits prévue aux articles 85 et
86, lus conjointement avec les articles 70 à 82 de la loi sur les relations
du travail, est longue. A cet effet, la commission d’experts parle
de «procédure laborieuse». Une telle procédure contrevient à la
règle énoncée par l’article 3 de la convention et vise à décourager
toute action revendicative. La conséquence directe est le musellement
des syndicats, leur essoufflement et enfin leur disparition à
long terme, ce qui est probablement l’objectif poursuivi. Une telle
réglementation n’est pas seulement inacceptable pour les membres
travailleurs sur la base de leur conviction et de leur engagement
syndical, mais aussi à la lumière des libertés fondamentales de
l’homme qui sont internationalement reconnues. Cette procédure
est clairement en contradiction avec la convention. Une réduction
de la durée de la procédure obligatoire préalable à une action revendicative
s’impose donc pour assurer un meilleur exercice des libertés
publiques fondamentales que sont la liberté syndicale et
l’exercice du droit de grève.
La loi sur la syndicalisation du personnel pénitentiaire et sur la
procédure relative au règlement des conflits doit être modifiée afin
de respecter la convention et la libre expression du personnel pénitentiaire
et des syndicats en général. Au cas où le gouvernement
n’accepterait pas de recevoir une mission de haut niveau, les conclusions
de la commission devraient faire l’objet d’un paragraphe
spécial de son rapport.
Les membres employeurs ont apprécié l’expression de bonne
volonté du représentant gouvernemental. Le gouvernement est
prié de prendre des mesures pour rendre la législation et la pratique
nationales conformes à la convention. Toutefois, si aucun progrès
ne devait être réalisé, la commission pourrait considérer ce cas différemment
l’an prochain. La discussion du cas par la commission
doit se fonder strictement sur les commentaires de la commission
d’experts. Si la commission d’experts détermine qu’il existe
d’autres questions relatives à ce cas, elle pourra demander des informations
supplémentaires. Le gouvernement doit prendre des
mesures pour s’assurer que la législation et la pratique sont en conformité
avec la convention. Une convention ne saurait être appliquée
du seul fait de l’adoption des lois appropriées. Des mesures
doivent être également prises pour assurer son application dans la
pratique. Le gouvernement est instamment prié de prendre au sérieux
les questions soulevées par la commission d’experts dans son
analyse de l’information fournie et de suivre la recommandation
qui lui est faite. Même si, de l’avis des membres employeurs, une
mission consultative technique serait normalement prématurée à ce
stade, le contexte du présent cas fait en sorte que le gouvernement
devrait sérieusement examiner la proposition de recevoir une mission
d’assistance technique. Toutefois, il serait à leur avis prématuré
que la commission fasse figurer ses conclusions sur ce cas dans un
paragraphe spécial de son rapport, comme l’ont proposé les membres
travailleurs.
La commission a pris note de la déclaration du représentant
gouvernemental et de la discussion qui a suivi. Elle a noté avec intérêt
l’adoption de la loi no 8 de 2000, portant amendement des articles
29, 40 et 52 de la loi sur les relations professionnelles, 2000,
qui paraît mettre la législation en plus grande conformité avec les
dispositions de la convention, bien que, selon la commission d’experts,
certains problèmes d’application de la convention subsistent.
Elle a aussi noté qu’un certain nombre de préoccupations ont
été exprimées pendant la discussion au sujet de l’application pratique
de la législation. Elle a prié le gouvernement de fournir les
informations demandées par la commission d’experts à cet égard.
La commission a en outre noté avec préoccupation les déclarations
selon lesquelles a été préparé un projet de loi sur la sécurité
interne qui imposerait de graves restrictions au droit des organisations
de travailleurs et d’employeurs d’exercer leurs activités. Elle
a demandé au gouvernement de transmettre une copie du projet
de loi à la commission d’experts ainsi que toute information pertinente
concernant les développements intervenus à ce sujet afin
que la commission puisse examiner la conformité du projet avec
les dispositions de la convention à sa prochaine session. Rappelant
que le respect des libertés publiques est essentiel pour l’exercice
des droits syndicaux, la commission a exprimé le ferme espoir
qu’elle pourra noter une amélioration significative dans l’application
de la convention dans un prochain avenir, tant en droit qu’en
pratique. A cette fin, la commission a suggéré une fois de plus au
gouvernement d’envisager la possibilité d’une mission de haut niveau
en vue de recueillir des informations sur l’application pratique
de la convention et de contribuer à une meilleure mise en
oeuvre de la convention.

Document no 261
CIT, 95e session, 2006, Rapport de la Commission
de l’application des normes, pp. 24 Partie 2/15-24
Partie 2/19 (Zimbabwe)

24 Partie 2/1
DEUXIÈME PARTIE
TROISIÈME QUESTION À L’ORDRE DU JOUR: INFORMATIONS ET RAPPORTS
SUR L’APPLICATION DES CONVENTIONS ET RECOMMANDATIONS
Rapport de la Commission de l’application des normes
TABLE DES MATIÈRES
Page
DEUXIÈME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées
(Articles 22 et 35 de la Constitution) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
A. Discussion sur les cas de manquements graves des Etats Membres leurs obligations de faire rapport
et à d’autres obligations liées aux normes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3
a) Manquement à l’envoi de rapports depuis deux ans ou plus sur l’application des conventions ratifiées . 3
b) Manquement à l’envoi de premiers rapports sur l’application des conventions ratifiées . . . . . . . . . 3
c) Manquement à l’envoi d’informations en réponse aux commentaires de la commission d’experts . . . . 3
d) Informations écrites reçues jusqu’à la fin de la réunion de la Commission de l’application des normes . 5
B. Observations et informations sur l’application des conventions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
Convention no 26: méthodes de fixation des salaires minima, 1928 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
– DJIBOUTI
Convention no 29: travail forcé, 1930 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
– MYANMAR (voir la troisième partie), OUGANDA
Convention no 87: liberté syndicale et protection du droit syndical, 1948 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
– BOSNIE-HERZEGOVINE, RÉPUBLIQUE BOLIVARIENNE DU VENEZUELA, ZIMBABWE
Convention no 87: liberté syndicale et protection du droit syndical, 1948 et
Convention no 98: droit d’organisation et de négociation collective, 1949 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
– AUSTRALIE, BELARUS
Convention no 95: protection du salaire, 1949 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
– RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE, JAMAHIRIYA ARABE LIBYENNE
Convention no 98: droit d’organisation et de négociation collective, 1949 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
– BANGLADESH, COSTA RICA, GUATEMALA, PAKISTAN, SUISSE
Convention no 100: égalité de rémunération, 1951 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
– ROYAUME-UNI
Convention no 111: discrimination (emploi et profession), 1958. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
– RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE D’IRAN, MEXIQUE, SLOVAQUIE
Convention no 122: politique de l’emploi, 1964 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
– THAILANDE
Convention no 138: âge minimum, 1973 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
– KENYA
Convention no 159: réadaptation professionnelle et l’emploi des personnes handicapées, 1983. . . . . . . . 60
– IRLANDE
24
DEUXIÈME
PARTIE
Conférence internationale du Travail
Compte rendu provisoire
Quatre-vingt-quinzième session, Genève, 2006
ZIMBABWE (ratification: 2003). Le gouvernement a communiqué
les informations écrites suivantes.
Depuis 2002, le cas du Zimbabwe a été examiné par la
Commission de l’application des normes à quatre reprises. A
chacune de ces occasions, le cas du Zimbabwe a été abordé sur la
base de la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de
négociation collec-tive, 1949. Cette année, le cas du Zimbabwe a été
examiné sur la base de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948. Dans toutes les précédentes
analyses, les inter-ventions du groupe des travailleurs et aussi
des représentants de l’Union européenne et de ses Etats membres
se sont concentrées sur des questions politiques du Zimbabwe,
difficultés n’ayant pas de lien avec les cas étudiés. En outre, les
conclusions des représentants de la commission étaient dans tous
les cas partiales, ce qui explique la
contestation et le rejet par le gouvernement du Zimbabwe de la
mission de contacts directs suggérée en 2005.
Le gouvernement du Zimbabwe constate que, malheureusement,
les méthodes de travail de la Commission d’application des normes
doivent être révisées de toute urgence, en effet, il apparaît que cellesci
se transforment en une plate-forme politique pour ridiculiser les
pays en voie de développement. Dans le cas du Zimbabwe, l’ancienne
puissance coloniale depuis 2000 a porté au plan international les
différends politiques entre les deux pays concernant les questions des
terres. Les organisations des travailleurs provenant principalement
d’Europe et coordonnées par la CISL travaillent de mèche avec
certains individus issus du Congrès des syndicats du Zimbabwe. Ces
derniers ont beaucoup d’appétit pour l’agenda politique du Zimbabwe
élaboré par l’ancienne puissance coloniale et abordé tant aux sessions
de la Conférence internationale du Travail qu’au Zimbabwe.
Pour cette session, le Zimbabwe est placé dans la liste des cas pour
la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948. Dans le rapport du Comité d’experts pour l’application
des normes, à la page 140, référence est faite aux cas individuels
qui tombent dans le domaine de compétence du Comité de la liberté
syndicale (CLS). Les gouvernements répondent habilement à ces cas
et ces derniers sont finalisés par le Comité de la liberté syndicale. En
outre, la loi sur l’ordre public et la sécurité (POSA) a été citée. Il est
intéressant de noter que la majorité des cas cités à la page 140 sont
les mêmes cas auxquels le groupe des travailleurs, le ZCTU inclus,
faisait référence à l’occasion des précédentes analyses. Ces cas ont
été jugés non recevables par le gouvernement, soit parce qu’ils étaient
infondés, ou pour leur nature politique. Certains aspects couverts par
ces cas doivent encore être finalisés par le Comité de la liberté syndicale,
dus au manque d’informations adéquates, à une argumentation
non convaincante de la part du plaignant, en l’espèce la CISL. Le
comité d’experts a noté que le POSA ne s’applique pas aux activités
des syndicats ou rassemblements publics qui ne sont pas politiques.
Etonnamment, le POSA peut néanmoins «être utilisé en pratique pour
imposer des sanctions aux syndicalistes qui organiseraient une grève,
une réunion de protestation, une manifestation ou tout autre rassemblement
public».
Les craintes du comité d’experts sont infondées et il est malheureux
que sa position ait été influencée à la lecture des cas nos 2313 et
2365 qui avaient été examinés par le Comité de la liberté syndicale.
Comme répondu par le gouvernement, il ne s’agit pas d’activités
syndicales, mais plutôt de questions politiques. Il est notoire que
certains individus au sein du Congrès des syndicats du Zimbabwe
(ZCTU) sont politisés et travaillent avec le Mouvement pour le changement
démocratique (MDC), l’Assemblée nationale constitutionnelle
(une organisation quasi politique) et la coalition de crise des
organisations non gouvernementales menée par l’actuel secrétaire
général du ZCTU. Leur objectif est de renverser le gouvernement du
Zimbabwe élu démocratiquement, en effet certains pouvoirs étrangers
veulent un changement de régime au Zimbabwe. Le POSA est
relatif à la protection de la souveraineté au Zimbabwe et ses citoyens.
Cela n’a aucun lien avec les activités syndicales suivies par un pourcentage
insignifiant de la population. En conséquence, le POSA
demeurera intact malgré les vives critiques qui sont associées aux
organisations syndicales ayant une orientation politique. Des législations
similaires au POSA existent dans bien des pays dont les
gouvernements respectent attentivement leur devoir de protection de
leurs citoyens contre des éléments internes ou externes motivés par
le désordre. Les véritables syndicats au Zimbabwe n’ont aucun
problème avec le POSA et aucune crainte à avoir car le POSA ne
s’applique pas à leur réunion. Seuls ceux qui font la promotion de
l’agenda de politiques de puissances étrangères pour un changement
de régime sont contre le POSA. Le POSA n’est pas en contradiction
avec le droit du travail (28:01) qui gouverne les relations industrielles
au Zimbabwe.
En outre, devant la Commission de la Conférence, un représentant
gouvernemental (ministre de la Fonction publique, du Travail
et du Bien-être social) a rappelé que la Commission de la Conférence
avait discuté de l’application par son pays de la convention no 98 lors
de quatre sessions consécutives entre 2002 et 2005 et que la seule
différence, cette année, était l’inscription du Zimbabwe sur la liste
pour la discussion de l’application de la convention no 87. Le gouvernement
estime que les interventions lors des précédentes sessions ne
se sont pas focalisées sur les points découlant de l’application de la
convention no 98 et ont dévié vers un discours politique. C’est la
raison pour laquelle les Etats Membres du mouvement des pays non
alignés, en particulier le Groupe africain, ont le sentiment que l’apparition
du Zimbabwe sur la liste des cas s’explique par des motifs
politiques. L’orateur a instamment invité la commission à se concentrer
sur les questions relevant de sa compétence et à laisser de côté
les questions de caractère politique. S’agissant des observations de
la commission d’experts, l’orateur a déclaré que les cas individuels
des travailleurs licenciés cités par les experts et le Comité de la liberté
syndicale étaient insignifiants et de nature politique. On peut se
24 Partie 2/15
C. 87
demander si la commission souhaite vraiment examiner des conflits
du travail, lesquels sont habituellement traités par les mécanismes
nationaux de règlement des litiges. En ce qui concerne la loi sur
l’ordre public et la sécurité de l’Etat (POSA), l’orateur a assuré à la
commission que cette loi n’a jamais eu pour but de permettre une
ingérence dans les activités syndicales. Au contraire, elle a été adoptée
pour résoudre le problème du terrorisme et protéger la souveraineté
du Zimbabwe, ainsi que l’ordre et la paix dans le pays. La POSA
a été adoptée à la demande expresse de gouvernements qui avaient
invité son pays à durcir sa législation après les attentats terroristes de
2001. Les questions liées aux activités syndicales sont traitées dans
le cadre de la loi sur le travail, qui est pleinement conforme aux
exigences de la convention no 87.
Les membres employeurs ont rappelé que la Commission de la
Conférence a discuté à plusieurs reprises de l’application de la
convention no 98 par le Zimbabwe. Certains progrès ont été accomplis
mais des points importants ne sont toujours pas résolus. Etant
donné que c’est la première fois que la commission discute du cas du
Zimbabwe au regard de la convention no 87, il est important que le
gouvernement comprenne ce que sont les obligations qui découlent
de cette convention et celles qui résultent de la convention no 98. L’un
des aspects essentiels de la convention no 87 concerne l’interdépendance
entre libertés civiles et droits syndicaux. Selon les organes de
contrôle de l’OIT, les restrictions aux activités civiles et politiques
constituent de graves entraves à la liberté d’association. Des syndicats
libres et indépendants ne peuvent se développer que dans un
environnement de liberté et de respect des droits civils et politiques.
Dans ce contexte, l’orateur s’est référé au cas du Nicaragua, qui revêt
une importance majeure pour le groupe des employeurs. Tout en
comprenant le souhait du gouvernement de séparer les questions politiques
de celles découlant de la convention no 87, les employeurs ont
réaffirmé que ces deux questions sont indissociables. Les dispositions
de la convention no 87 présupposent le droit de chacun à la
liberté et à la sécurité, le droit à la liberté d’aller et venir, le droit à la
liberté d’opinion et d’expression, et le droit à la liberté de réunion et
d’association. Cela implique que les activités syndicales peuvent très
bien ne pas se limiter aux seules questions syndicales, dans la mesure
où elles sont aussi étroitement liées aux questions politiques.
Les membres travailleurs ont regretté que, dans sa réponse, le
gouvernement ait à peine abordé les préoccupations exprimées par
la commission d’experts et qu’il se soit limité à des observations
générales ne répondant pas aux demandes de ladite commission. Il
ne fait pas de doute que le gouvernement du Zimbabwe commet des
violations grossières et flagrantes des droits de l’homme fondamentaux,
notamment du droit à la liberté syndicale, bien qu’il ait ratifié
les conventions de l’OIT sur la liberté syndicale et que, ce faisant, il
se soit engagé à les respecter. Le Zimbabwe ne fait pas l’objet d’un
examen pour la sixième année consécutive à cause de sa politique de
réforme agraire, de son statut international ou de son importance
géographique, mais à cause de son mépris flagrant pour la convention
no 87. Les membres travailleurs ont attiré l’attention de la
commission sur le fait que le gouvernement s’est souvent appuyé sur
les dispositions de la loi sur l’ordre public et la sécurité de l’Etat pour
interdire des rassemblements publics, des manifestations et des
grèves et pour harceler les dirigeants syndicaux. A l’appui de leurs
dires, les membres travailleurs ont présenté à la commission un
certain nombre de documents dans lesquels les autorités ont refusé
des demandes d’autorisations pour la tenue de réunions publiques et
de manifestations. Dans l’un des cas, où il s’agissait de célébrer la
Journée de la femme, l’autorisation a été accordée, mais les restrictions
imposées par les pouvoirs publics ont été entre autres une interdiction
de chanter ou crier des slogans, d’aborder explicitement ou
implicitement des questions politiques ou d’en discuter, et l’obligation
de suivre un emploi du temps strict tout au long du déroulement
de la manifestation, en étant contrôlé par les forces de sécurité. Dans
ce contexte, les travailleurs ont invité le gouvernement à reconnaître
l’importance de la résolution adoptée par la Conférence internationale
du Travail en 1970, selon laquelle «les droits conférés aux organisations
de travailleurs et d’employeurs doivent se fonder sur le
respect des libertés civiles qui ont été énoncées notamment dans la
Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, et [...] l’absence de ces
libertés civiles enlève toute signification au concept des droits
syndicaux».
Les travailleurs ont également évoqué des cas encore en suspens
devant le Comité de la liberté syndicale, comme preuves que le
Zimbabwe ne respecte pas les droits syndicaux. Ils ont donné des
exemples d’arrestations arbitraires et de dommages corporels dont
ont été victimes des syndicalistes et des dirigeants syndicaux (cas
no 2313), de licenciements et d’expulsions de syndicalistes sud-africains
pour participation à une grève (cas no 2365), du licenciement
antisyndical du président récemment réélu du Congrès des syndicats
du Zimbabwe (ZCTU), Lovemore Matombo, de la suspension d’un
paiement pourtant dû (cas no 2328), d’une descente de police au siège
du ZCTU (cas no 2184) et des mauvais traitements infligés au secrétaire
général récemment élu Wellington Chibebe (cas no 2238). Pour
conclure, les travailleurs ont également attiré l’attention de la
Conférence sur le cas récent d’expulsion de syndicalistes étrangers
qui avaient été invités à participer au congrès du ZCTU.
La membre gouvernementale de Cuba a fait observer que c’est
la cinquième fois que le Zimbabwe est ainsi inclus dans la liste des
pays appelés à donner des explications devant la commission et qu’à
chaque fois le gouvernement a présenté des arguments suffisants pour
une compréhension aisée de la part de tous. En particulier, il ressort
du rapport de la commission d’experts qu’il s’agit d’un cas qui
concerne l’application de lois nationales d’un Etat, question purement
interne qui touche aux principes inhérents à un Etat souverain.
Le gouvernement du Zimbabwe a besoin que l’on lui témoigne de la
confiance pour appliquer la loi sur la sécurité sociale et l’ordre public
de la manière qui conviendra et sans porter atteinte aux engagements
internationaux qui lui incombent en vertu de la convention no 87 et
ce, d’autant plus qu’il a assuré, selon ce qui ressort du document
D.12, que la loi en question ne s’applique pas aux activités syndicales
ni aux réunions publiques n’ayant pas de connotation politique.
Pour cette raison, il conviendrait de faire preuve de prudence à propos
de ce cas, car on prétend traiter au niveau de l’application des normes
internationales du travail une situation interne à un pays, ce qui
revient à prendre une position sur une question qui ne rentre pas dans
le mandat de la présente commission. Ce qu’il conviendrait de proposer,
c’est une assistance technique et une coopération du BIT.
Le membre gouvernemental de l’Autriche s’est exprimé au
nom des gouvernements des Etats membres de l’Union européenne;
les pays adhérents (Bulgarie et Roumanie), les pays candidats
(Croatie, ex-République yougoslave de Macédoine et Turquie),
la Bosnie-Herzégovine, pays du Processus de stabilisation et d’association
et candidat potentiel, l’Islande et la Norvège, pays de l’AELE
et membres de l’Espace économique européen, se sont ralliés à cette
déclaration. L’orateur a déclaré qu’une réaction s’imposait vu la
réponse du gouvernement aux observations de la commission d’experts,
contenues dans le document D.12. Il a fortement rejeté l’allégation
du Zimbabwe, selon laquelle les commentaires faits par les
Etats membres de l’Union européenne, au cours de sessions antérieures
portant sur les obligations du pays en vertu de la convention
no 87, mettaient l’accent sur des questions politiques non directement
liées au mandat de la commission. Les normes sociales et du travail
sont inséparables des droits de l’homme et sont en soi «politiques».
Il est donc parfaitement légitime pour les membres de la commission
de se référer à la situation des droits de l’homme en général lorsqu’ils
examinent le respect, par un pays donné, des normes du travail examinées.
Selon l’Union européenne, le langage employé dans le document
D.12 est polémique, voire insultant et attentatoire, à l’autorité
et aux travaux des organes de contrôle de l’OIT. Dans ce contexte, le
groupe de l’Union européenne réitère son soutien au système de
contrôle de l’OIT qui doit être renforcé. L’orateur a noté cependant
que la déclaration orale du gouvernement était d’un ton plus modéré
que le document D.12 précité. Concernant l’application de la convention
no 87 par le Zimbabwe, les membres de l’Union européenne ont
partagé les préoccupations exprimées par la commission d’experts
concernant l’impact, sur la liberté syndicale, de la loi sur l’ordre
public et la sécurité de l’Etat. Cette loi interdit les réunions ou les
rassemblements syndicaux qui ne sont pas organisés à des fins strictement
syndicales, tout en ne précisant pas les critères permettant de
juger du caractère «strictement syndical», laissant ainsi la porte
ouverte à des décisions arbitraires. Les organisations d’employeurs
doivent être libres d’exprimer leurs opinions sur des questions politiques,
dans le sens large du terme, et d’exprimer leurs vues publiquement
sur les politiques économiques et sociales du gouvernement.
L’orateur a appuyé les demandes faites par la commission d’experts
en ce qui concerne l’application de la convention no 87 par le
Zimbabwe.
Le membre gouvernemental du Canada a déclaré que sa délégation
était préoccupée par le fait que le gouvernement utilise la loi
sur l’ordre public et la sécurité de l’Etat pour dénier aux syndicalistes
leur droit d’organiser une grève, une campagne de protestation, une
manifestation ou tout autre type de rassemblement public. De plus,
le gouvernement canadien a protesté contre l’arrestation et la détention
de dirigeants et de membres du Congrès des syndicats du
Zimbabwe et a présenté des réclamations pour que soient respectés
le droit à la liberté d’expression et de réunion et le droit à la liberté
d’association. Le Canada a en particulier invité le gouvernement du
Zimbabwe à s’abstenir de commettre des actes de violence ou de faire
un usage abusif de la force contre des manifestants pacifiques. De
plus, le fait que des représentants de syndicats internationaux soient
fréquemment empêchés d’entrer dans le pays afin de s’y entretenir
avec des représentants des syndicats nationaux est troublant. Le
gouvernement devrait faciliter les échanges internationaux entre
représentants syndicaux. L’orateur a mentionné le soutien que son
pays apporte au mouvement syndical au Zimbabwe, notamment dans
24 Partie 2/16
C. 87
le domaine de la recherche sur l’économie informelle. Il a conclu en
encourageant les discussions du Forum de négociation tripartite entre
le gouvernement, les entreprises et le ZCTU qui ont repris l’an
dernier.
La membre gouvernementale du Nigéria, s’exprimant au nom
du Groupe africain, a indiqué que la demande formulée en 2005 par
le Groupe africain, au sujet de l’équilibre entre les régions, dans le
choix des pays inscrits sur la liste des cas, a été entendue. En ce qui
concerne le cas à l’examen, l’oratrice a rappelé que, dans son rapport,
la commission d’experts a déclaré que l’article 24 de la loi sur l’ordre
public et la sécurité de l’Etat, qui a été critiquée en raison du fait
qu’elle confère aux autorités le pouvoir discrétionnaire d’interdire
tout rassemblement public, ne s’applique pas aux rassemblements
des membres d’organisations professionnelles, qui sont organisés
dans un but non politique ou qui sont organisés par des syndicats à
des fins strictement syndicales. Le Groupe africain a apprécié les
préoccupations de la commission d’experts, mais comme ce
problème particulier est actuellement en instance devant le Comité
de la liberté syndicale sous les cas nos 2313 et 2365, la Commission
de la Conférence aurait dû attendre, avant de traiter du même cas, que
le comité ait eu suffisamment de temps pour tirer ses conclusions.
L’examen du même cas par deux organes de contrôle est contreproductif
et fait en sorte que le pays a le sentiment d’être harcelé. En
ce qui concerne la question portant sur la manière dont les syndicats
doivent faire valoir leurs demandes, l’oratrice a appuyé l’idée d’une
pratique qui favorise le tripartisme et le dialogue social, plutôt que la
tenue de protestations, manifestations et grèves. Elle a fait référence
à l’expérience vécue par son pays qui, dans le cadre de ses efforts
pour surmonter des problèmes semblables, a réalisé l’importance du
dialogue social. Les syndicalistes africains devraient comprendre, à
partir de cette expérience, que les droits des travailleurs sont mieux
protégés par le biais de la négociation. Elle a demandé à la commission
de retirer le cas de la liste des cas individuels et a invité le Bureau
à renforcer la capacité des partenaires sociaux, pour que ceux-ci puissent
s’engager dans un dialogue social significatif.
Le membre gouvernemental de la Namibie a déclaré que le
gouvernement du Zimbabwe a répondu de façon très complète aux
demandes de la commission d’experts. En ce qui concerne la loi sur
l’ordre public et la sécurité de l’Etat, il ressort clairement de sa
réponse qu’il ne limite pas et n’interdit pas les activités syndicales.
L’orateur s’est déclaré surpris par l’inclusion de ce cas dans la liste
de la Conférence, et a appelé à plus de clarté et de transparence dans
les méthodes utilisées pour décider de l’inscription de tel ou tel pays
sur la liste. Enfin, il a demandé que l’on évite de faire porter les
discussions sur des questions politiques.
Le membre gouvernemental du Kenya a déclaré que le gouvernement
du Zimbabwe a répondu aux questions soulevées et a souligné
que la situation au Zimbabwe est un mélange particulier de politique
nationale et internationale. Etant donné les relations étroites
entre le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) et le
Mouvement pour un changement démocratique, les organes de
contrôle devraient appliquer les principes d’impartialité et d’honnêteté
et laisser de côté les cas dans lesquels les activités syndicales
sont teintées de politique.
Le membre gouvernemental de l’Afrique du Sud a mentionné
que ce cas est très général et ne contient pas d’accusations spécifiques.
La commission d’experts devrait séparer les questions politiques
des questions syndicales, puisque le problème réside en partie
dans la poursuite par un syndicat d’un agenda politique. L’orateur a
demandé à la commission de donner au Zimbabwe la confiance
nécessaire pour poursuivre l’application de la convention sans avoir
l’impression d’être harcelé.
Le membre travailleur du Zimbabwe a déclaré que ces cinq
dernières années, le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU)
avait fait l’objet d’harcèlement répété de la part de la police et
d’autres organismes chargés de la sécurité, et qu’à chaque fois, les
personnes arrêtées et placées en garde à vue avaient été accusées en
vertu de la loi sur l’ordre public et la sécurité de l’Etat, alors que l’article
24 de la loi prévoit expressément que les syndicats ne sont pas
tenus de demander une autorisation pour organiser des réunions ou
des manifestations. Dans les décisions rendues ces cinq dernières
années, les tribunaux ont estimé que les syndicats n’avaient commis
aucun délit, mais les policiers continuent à les harceler. Pour pouvoir
se réunir librement afin d’exercer leurs activités, les syndicats doivent
demander une autorisation spéciale à la police, qui la leur refuse très
souvent. L’orateur a fait part de sa préoccupation à propos de la décision
de la Cour suprême déclarant, pour la première fois, une grève
illégale. Par ailleurs, au cours de la sixième Conférence du ZCTU,
certains invités ont été expulsés. L’orateur a souligné qu’aucune
réforme des services pénitentiaires n’avait été engagée, même si le
gouvernement disposait de la majorité au parlement, et qu’il n’existait
toujours pas de cadre permettant aux fonctionnaires de mener des
négociations collectives. En conclusion, il a déclaré que les observations
de la commission d’experts à propos de la situation de son pays
sont justes et que les relations professionnelles et le règlement des
différends du travail relèvent désormais de la loi sur l’ordre public et
la sécurité de l’Etat.
La membre travailleuse de l’Allemagne a déclaré qu’elle s’exprimait
en tant que porte-parole des travailleurs au sein du Comité
de la liberté syndicale. Ce qui est discuté au sein du Comité de la
liberté syndicale concerne des cas spécifiques et est extrêmement
important pour le travail de la présente commission.
Le membre gouvernemental du Nigéria a soulevé une question
d’ordre et déclaré que les conclusions du Comité de la liberté syndicale
ne constituent pas le sujet des discussions qui ont lieu au sein de
la présente commission.
Le Président a statué sur la question d’ordre, en déclarant que tout
genre d’informations qui permet de bien illustrer la situation est
admissible devant la commission et il a demandé au membre
travailleur de l’Allemagne de se limiter à fournir ce genre d’informations.
La membre travailleuse de l’Allemagne a déclaré que le Comité
de la liberté syndicale a eu à se pencher sur le cas du Zimbabwe il y
a à peine deux semaines de cela. Le cas no 2365 concerne plusieurs
membres dirigeants du mouvement syndical, qui sont emprisonnés
depuis 2004 sans raisons apparentes; il est question du licenciement
de 56 travailleurs de l’usine de Netone, qui ont participé à une grève,
en raison du fait que la direction avait quitté la table des négociations;
le cas concerne également l’expulsion du Zimbabwe d’une délégation
syndicale provenant de l’Afrique du Sud. Le cas a été examiné
par le comité pour la troisième fois. En l’absence de réponse du
gouvernement en juin de l’année passée, le comité a dû, il y a deux
semaines, examiner le cas sans aucun rapport du gouvernement. Le
cas en question touche l’un des droits les plus fondamentaux des
syndicats concernant la défense de leurs droits économiques et
sociaux: le droit de grève.
Dans le cas de la grève menée par les travailleurs chez Zimpost et
TelOne, deux compagnies des postes et des télécommunications de
l’Etat, les travailleurs protestaient contre le non-paiement par la direction
d’augmentations salariales, décidées par voie judiciaire. La direction
a décidé unilatéralement de payer moins de la moitié de ce que
la décision judiciaire prévoyait. Les travailleurs de TelOne ont ensuite
demandé l’intervention du ministère responsable et le secrétaire
permanent du ministère, Karkoga Kasela, a conseillé à la direction
de rechercher un règlement à l’amiable. Suite au refus de la direction,
les travailleurs ont déposé un préavis de grève et la grève a
débuté deux semaines plus tard, soit le 6 octobre 2004. Le 12 octobre,
quelques 25 000 travailleurs (soit la moitié des travailleurs des postes
et du secteur des télécommunications) se sont joints à l’action de
grève. Le 21 octobre, le gouvernement a déployé du personnel armé
dans les principaux bureaux de poste et télécommunications dans tout
le pays. Le personnel armé a été utilisé pour intimider et harceler les
travailleurs grévistes ainsi que les dirigeants syndicaux locaux. Un
jour avant le début de cette grève majeure, le dirigeant syndical M.
Sikosana a été arrêté à Bulawayo, six autres syndicalistes ont été arrêtés
à Gweru et n’ont été relâchés qu’après avoir payé une amende.
Le Comité de la liberté syndicale a conclu que l’arrestation de syndicalistes
dans ce contexte, même pour un bref instant, constitue une
violation fondamentale du droit de la liberté d’association.
L’arrestation de syndicalistes en rapport avec leurs activités syndicales
liées à la représentation de leurs membres constitue un acte d’ingérence
grave dans les droits civils en général et dans les droits syndicaux.
Le présent gouvernement n’a ratifié la convention no 87 qu’en
2003. La question a été soulevée de savoir pourquoi le gouvernement
n’est pas en mesure d’appliquer la convention.
La loi et la pratique sont, malheureusement, loin d’être en conformité
avec la convention no 87. Le gouvernement du Zimbabwe doit
faire tout ce qui est en son pouvoir pour mettre en oeuvre la convention,
de manière à ce que les travailleurs du Zimbabwe et les syndicalistes
puissent exercer leur droit d’association sans crainte de
mesures répressives. L’oratrice a espéré que le gouvernement accepterait
l’offre d’une mission de contacts directs. Cela démontrerait
qu’il est prêt à coopérer avec l’OIT pour se conformer aux obligations
de la convention.
La membre travailleuse du Brésil a déclaré que la contradiction
flagrante que présente ce cas du Zimbabwe ne tient pas à une contradiction
entre travailleurs et gouvernement, mais à une contradiction
entre un gouvernement d’un pays pauvre exploité d’Afrique et un
certain nombre de superpuissances qui veulent toujours dominer et
contrôler les richesses de la planète. Il s’agit de la contradiction entre
la justice et l’injustice. Depuis quatre années de suite, le prétexte pour
infliger des sanctions au Zimbabwe est la convention (nº 98) sur le
droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Comme l’année
précédente, le rapport de la commission d’experts montre clairement
qu’il n’existe aucune justification technique pour que le
Zimbabwe figure sur la liste de la Commission de l’application des
normes de la Conférence. On s’est borné à changer de prétexte, puisqu’aujourd’hui
on invoque la convention no 87. En tout état de cause,
24 Partie 2/17
C. 87
ce que l’on cherche, c’est un prétexte pour essayer d’imposer des
sanctions au Zimbabwe, ce qui constitue une ingérence politique
absolument contraire aux principes de l’OIT. L’OIT ne saurait laisser
renaître la haine raciale de ceux qui ont promu pendant des siècles
l’apartheid et qui veulent toujours rester maîtres des terres et des
richesses qui sont celles du peuple du Zimbabwe. En laissant s’exercer
ce type de discrimination à l’égard de pays en développement qui
cherchent à se construire en suivant leur propre chemin, sans respecter
les principes du multilatéralisme, l’OIT court le risque de se muer
en un instrument politique permettant aux grandes puissances d’imposer
leur domination.
Le membre travailleur du Nigéria a souligné la solidarité existant
entre les travailleurs des différents pays et entre les Etats. Si son
gouvernement et d’autres gouvernements d’Afrique acceptaient les
grèves, ils devraient partager leurs expériences dans un esprit de
collaboration et encourager le gouvernement frère du Zimbabwe à
faire de même. Au Zimbabwe, la création d’emplois a uniquement
lieu dans l’économie informelle, et les tentatives d’organisation du
Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) dans ce secteur ont été
sérieusement entravées par le gouvernement. Vu que cette question
se situe au coeur de la convention no 87, il a demandé au gouvernement
d’arrêter d’entraver la liberté syndicale, car cette entrave est
également néfaste pour le dialogue social et prié le gouvernement de
respecter pleinement la convention no 87 tout en l’encourageant à
entamer un véritable dialogue social avec le ZCTU.
Le membre travailleur de la Malaisie a exprimé sa sérieuse
préoccupation face à l’ampleur des violations de la convention no 87.
La coopération et la solidarité internationale entre les syndicats sont
des éléments fondamentaux de la convention. Des ateliers organisés
par les syndicats avaient été interrompus par les autorités. A cet égard,
l’orateur a dénoncé l’expulsion par le gouvernement de délégations
de syndicats internationaux, incluant le secrétaire général de la
COSATU. L’orateur a prié instamment le gouvernement d’arrêter
immédiatement la répression de ses propres citoyens et de la solidarité
internationale syndicale – répression à laquelle il a lui-même été
exposé. Finalement, il a déploré le manque de respect du gouvernement
des droits des travailleurs et de la convention no 87.
La membre travailleuse de l’Afrique du Sud a noté que la liberté
syndicale ainsi que le droit de manifester étaient reconnus dans la
plupart des pays voisins du Zimbabwe. Dans son pays, et comme
dans la plupart des pays de la Communauté de développement de
l’Afrique australe, les travailleurs manifestent contre tout ce qui les
gêne. L’oratrice a exprimé son désaccord avec la position de certains
membres gouvernementaux pour qui ce cas est une conspiration des
pays développés à l’encontre du Zimbabwe. Ce cas est un cas de
violation sans équivoque de la convention no 87 et tous les pays
devraient adopter une position ferme de façon à ce que les travailleurs
du Zimbabwe soient un jour libres.
Le membre employeur du Zimbabwe a déclaré que le gouvernement
a, pour la toute première fois, initié des discussions avec les
partenaires sociaux afin de réorienter l’économie du pays. Le présent
cas découle des efforts déployés par le gouvernement pour atteindre
la stabilité macroéconomique. Le gouvernement est apparu à de
nombreuses reprises devant cette commission au sujet de la convention
no 98, et le résultat est que certaines mesures ont été prises pour
amender la législation du travail, en collaboration avec tous les partenaires
sociaux. Cependant, les employeurs du Zimbabwe trouvent
que les problèmes qui sont soulevés sont trop généraux et éloignés
de la législation du travail. Par exemple, la référence faite à la loi sur
l’ordre public et la sécurité de l’Etat est liée à des problèmes politiques.
De plus, certains cas auxquels la commission d’experts fait
référence remontent à 1997, alors que d’autres cas sont toujours en
instance devant le Comité de la liberté syndicale ou d’autres autorités.
L’orateur a déclaré ne pas être à l’aise avec les commentaires
relatifs à ces cas qui sont en instance. L’orateur a espéré que le
dialogue social qui semble se développer, par le biais du Forum de
négociation et le Conseil national de relance de l’économie, se renforcera.
Il a salué l’assistance technique continue fournie par le BIT pour
faciliter la création d’un environnement favorisant les affaires et l’investissement
dans le but de faire prospérer le pays et de créer plus
d’opportunités d’emplois.
Le représentant gouvernemental, en réponse à une observation
de la membre travailleuse de l’Allemagne, a déclaré qu’aucun dirigeant
syndical n’a été emprisonné depuis 2004. Le droit de manifester
existe, certes, mais le gouvernement n’en doit pas moins protéger
le droit de propriété et les droits d’autrui. C’est la raison pour
laquelle la police zimbabwéenne impose des conditions pour les
manifestations du ZCTU, car celles-ci sont souvent violentes.
L’orateur a mis l’accent sur les efforts déployés, lors de la réunion de
l’an dernier avec les partenaires sociaux, pour résoudre les problèmes
liés au travail. Il faut espérer que ce dialogue débouchera sur l’adoption
d’un protocole de stabilisation des revenus et des prix. En ce qui
concerne les employés des Postes licenciés, l’orateur a fait observer
que les tribunaux ont confirmé le bien-fondé de ces licenciements en
application de la règle de droit. Cela n’a pas empêché de discuter de
certaines questions administratives afin d’aider les travailleurs licenciés
dans ce cas-là, et le gouvernement est prêt à poursuivre ces
discussions. Aucun vice n’a été décelé dans la législation du travail
du Zimbabwe, et même le ZCTU a salué l’adoption de la loi sur le
travail comme étant une législation progressiste. L’orateur a réaffirmé
qu’au Zimbabwe certains syndicats font de l’agitation pour déstabiliser
le pays et qu’ils affichent ouvertement des ambitions politiques.
Par exemple, une autorisation avait été donnée pour la célébration de
la semaine de la santé et de la sécurité au travail, au cours de laquelle
un haut fonctionnaire du ministère du Travail devait prendre la parole.
Or les personnes présentes arboraient toutes des t-shirts et des
casquettes avec des inscriptions politiques, ce qui n’est pas approprié
dans une réunion syndicale. L’orateur a expliqué que ce type de manifestation
est fréquemment organisé lorsque sa délégation s’apprête à
partir pour Genève afin d’y participer à la Conférence internationale
du Travail, car les manifestants espèrent ainsi attirer l’attention de la
communauté internationale. Quant à l’expulsion de syndicalistes
étrangers du Zimbabwe, l’orateur a souligné que tous les pays ont
des lois sur l’immigration qui autorisent les états souverains à déterminer
qui peut entrer dans le pays. L’orateur a conclu en déclarant
qu’il s’agit là d’un cas motivé par des raisons politiques et exprimé
l’espoir que les questions en jeu dans ce cas puissent être résolues
par le dialogue social. Son pays serait heureux de recevoir l’assistance
technique fournie habituellement par le BIT.
Les membres employeurs ont apprécié la manière raisonnable
dont le gouvernement a abordé les problèmes soulevés au cours de
la présente séance. Il est évident, à la lumière des discussions qui ont
eu lieu, que le gouvernement ne comprend pas la différence entre la
protection des droits des organisations syndicales par le Comité de
la liberté syndicale et les obligations découlant de la convention no 87
ni la différence entre les conventions nos 87 et 98. La ratification de
la convention no 87 exige que la loi et la pratique soient en conformité
avec la convention, y compris la protection des libertés civiles
des organisations de travailleurs ou d’employeurs. Le gouvernement
s’est engagé dans un dialogue social, mais le dialogue social est différent
de la liberté syndicale. Le dialogue social peut cependant être un
moyen pour le gouvernement de résoudre les problèmes, avec l’assistance
technique du BIT. Ils ont espéré que le gouvernement accepterait
de recevoir une assistance technique dans le présent cas.
Les membres travailleurs ont dit regretter le fait qu’un grand
nombre de gouvernements africains aient soutenu le gouvernement
du Zimbabwe dans son mépris de la convention no 87. Ils ont déclaré
qu’ils refusaient de se laisser intimider et qu’ils étaient résolus à poursuivre
leur quête d’une reconnaissance de leurs libertés fondamentales
inaliénables, telles qu’elles sont consacrées par la Charte africaine
des droits de l’homme et des peuples qui, à leur avis, est
grossièrement violée par les membres de la commission qui ont
soutenu le gouvernement du Zimbabwe. Ils se sont également dissociés
du membre travailleur du Brésil, dont les assertions ne représentent
pas l’opinion du mouvement syndical. Les membres
travailleurs ont réaffirmé leur droit de résoudre l’ensemble des questions
découlant de la convention no 87, en expliquant que ce droit est
directement lié à leur capacité de trouver un emploi et d’obtenir des
conditions de travail convenables. Ils ont rappelé qu’en août 2001
trois travailleurs de la société de métallurgie ZISCO, qui appartient
au gouvernement, ont été abattus par balle au cours d’une grève organisée
pour demander de meilleures conditions de travail et de rémunération.
En dépit de leurs appels répétés au président Mugabe pour
qu’une enquête soit ouverte sur ces décès, rien n’a encore été fait à
ce jour. Les membres travailleurs ont également condamné le gouvernement
pour sa «politisation» systématique de l’ensemble des questions
socio-économiques légitimement soulevées par le Congrès des
syndicats du Zimbabwe, ainsi que pour ses attaques systématiques et
abusives contre la Confédération internationale des syndicats libres
chaque fois qu’elle soulève la question des droits fondamentaux. A
leur avis, ce serait renoncer à leur responsabilité que d’accepter que
le monde syndical reste silencieux face à ces violations. Chaque pays
a ses lois sur la sécurité, mais tous les pays ne les utilisent pas contre
les droits syndicaux légitimes. Les membres travailleurs ont exprimé
l’espoir que l’appui apporté par les pays africains au gouvernement
du Zimbabwe ne soit qu’une opération de relations publiques ou de
solidarité diplomatique et qu’en coulisses ces mêmes pays encouragent
le gouvernement à se conformer aux normes stipulées dans la
convention.
Le représentant gouvernemental a déclaré que son gouvernement
n’a jamais refusé l’assistance technique du BIT. Cependant, il
n’acceptera pas de recevoir une mission de contacts directs. Il acceptera
que le bureau sous-régional situé à Harare soit renforcé.
Suite à une pause préalable à la lecture des conclusions, les
membres travailleurs ont souhaité attirer l’attention de la commission
sur l’attitude inacceptable de la délégation gouvernementale du
Zimbabwe. Ses agressions verbales et physiques à l’encontre de
certains délégués travailleurs et membres du personnel du BIT ne
24 Partie 2/18
C. 87
peuvent être tolérées. Les travailleurs ont demandé au gouvernement
de présenter des excuses pour son comportement, faute de quoi ils
demanderaient que cet incident apparaisse dans le Compte rendu
provisoire.
Un autre représentant gouvernemental a déclaré qu’il n’avait
eu connaissance d’aucun «incident» et qu’il n’avait pas l’intention
de s’excuser par rapport à une demande sans aucun contenu de la part
des travailleurs.
La commission a pris note des informations fournies par le
représentant gouvernemental et du débat qui a suivi.
La commission a constaté que les observations de la commission
d’experts portent sur l’usage qui est fait de la loi sur l’ordre
public et la sécurité de l’Etat (POSA) et sur les accusations dont
font l’objet des dirigeants syndicaux et membres des syndicats en
raison de leurs activités syndicales, de même que sur le pouvoir
discrétionnaire conféré aux autorités d’interdire tout rassemblement
public et d’imposer des peines d’amende ou d’emprisonnement
en cas de non-respect de cette interdiction. La commission
a également noté que le Comité de la liberté syndicale a examiné
plusieurs plaintes contre le gouvernement au sujet de ces graves
questions.
La commission a pris note de la déclaration du gouvernement
selon laquelle les cas examinés par le Comité de la liberté syndicale
et mentionnés par la commission d’experts ne sont pas
nouveaux et concernent de petites affaires insignifiantes sur
lesquelles les partenaires sociaux n’ont pas attiré l’attention du
gouvernement. Elle a en outre pris note de la déclaration du
gouvernement selon laquelle la POSA ne s’applique pas à l’exercice
d’activités syndicales légitimes. Les réunions syndicales qui
n’ont pas de but politique peuvent avoir lieu sans ingérence.
La commission a cependant pris note avec préoccupation des
informations fournies sur la situation des syndicats au Zimbabwe,
l’utilisation abusive de la POSA pour interdire les rassemblements
publics et le refus de laisser entrer dans le pays certains syndicalistes
internationaux.
La commission a demandé au gouvernement de prendre des
mesures pour veiller à ce que la POSA ne soit pas utilisée pour
empêcher l’exercice du droit des organisations de travailleurs
d’exercer leurs activités ou d’organiser des réunions et des manifestations
publiques sur la politique économique et sociale du
gouvernement. La commission a souligné que l’exercice des droits
syndicaux est intrinsèquement lié à la garantie des libertés civiles
fondamentales, y compris le droit de libre expression et le droit
de tenir des rassemblements et des réunions publiques. Comme
la commission d’experts, la commission a rappelé que le développement
du mouvement syndical et l’acceptation du fait que ce
mouvement est de plus en plus reconnu comme un partenaire
social à part entière impliquent que les organisations de
travailleurs puissent donner leur avis sur les questions politiques
au sens large du terme, et en particulier, qu’elles puissent exprimer
publiquement leur opinion sur la politique économique et
sociale du gouvernement. La commission a insisté sur le fait
qu’aucun syndicaliste ne devrait être arrêté ou accusé pour l’exercice
d’activités syndicales légitimes. Elle a demandé au gouvernement
d’envisager d’accepter une mission d’assistance technique
de haut niveau du Bureau chargée de garantir le plein respect de
la liberté d’association et des libertés civiles fondamentales non
seulement en droit, mais aussi en pratique. La commission a
exprimé le ferme espoir d’être en mesure de constater, dans un
proche avenir, des progrès concrets en ce qui concerne le respect
des droits garantis par la convention, et elle a demandé au gouvernement
de faire parvenir au BIT un rapport détaillé sur ce sujet
pour la prochaine réunion de la commission d’experts.
Le représentant gouvernemental a refusé d’accepter les conclusions
sous leur forme actuelle. Il a réitéré qu’une mission d’assistance
technique de haut niveau, organisée à l’initiative de la
Commission de la Conférence ne serait pas acceptable, mais que le
gouvernement serait disposé à accepter la forme habituelle de coopération
technique. Il a en outre fait valoir que sa délégation fait aisément
la différence entre une mission d’assistance technique de haut
niveau organisée à l’initiative de la commission et la coopération
technique sous sa forme habituelle.
Les membres employeurs ont affirmé que le ministre avait
accepté une coopération technique renforcée.
Les membres travailleurs ont dit partager l’avis des employeurs
sur ce point. L’assistance technique du BIT a été acceptée maintes
fois au cours de la présente session de la commission. La coopération
technique de haut niveau, telle qu’envisagée, serait mise en
oeuvre par le Bureau, et non par cette commission. Les conclusions
sont donc bel et bien appropriées au contexte.
24 Partie 2/19
C. 87 et C. 98
Document no 262
CIT, 97e session, 2008, Rapport de la Commission
de l’application des normes, pp. 19 Partie II/67-19
Partie II/72 (Zimbabwe)

19 Partie II/1
Conférence internationale du Travail Compte rendu des travaux 19
97e session, Genève, 2008 DEUXIÈME PARTIE
DEUXIÈME PARTIE
TROISIÈME QUESTION À L’ORDRE DU JOUR: INFORMATIONS ET RAPPORTS
SUR L’APPLICATION DES CONVENTIONS ET RECOMMANDATIONS
Rapport de la Commission de l’application des normes
Table des matières
Page
DEUXIÈME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays .......................................................... 5
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées
(articles 22 et 35 de la Constitution) ............................................................................................................. 5
A. Discussion sur les cas de manquements graves des Etats Membres à leurs obligations
de faire rapport et à d’autres obligations liées aux normes ................................................................... 5
a) Manquements à l’envoi de rapports depuis deux ans ou plus sur l’application
des conventions ratifiées ................................................................................................................. 5
b) Manquements à l’envoi de premiers rapports sur l’application de conventions ratifiées ............... 6
c) Manquements à l’envoi d’informations en réponse aux commentaires
de la commission d’experts ............................................................................................................ 7
d) Informations écrites reçues jusqu’à la fin de la réunion de la Commission de l’application
des normes ...................................................................................................................................... 8
B. Observations et informations sur l’application des conventions ........................................................... 10
Convention nº 29: Travail forcé, 1930 ................................................................................................................ 10
INDE (ratification: 1954) ................................................................................................................ 10
MYANMAR (ratification: 1955) ...................................................................................................... 14
PARAGUAY (ratification: 1967) ...................................................................................................... 14
SOUDAN (ratification: 1957) ........................................................................................................... 18
Convention nº 81: Inspection du travail, 1947 ................................................................................................... 22
OUGANDA (ratification: 1963) ........................................................................................................ 22
SUÈDE (ratification: 1949) .............................................................................................................. 24
Convention nº 87: Liberté syndicale et protection du droit syndical, 1948 ..................................................... 27
BANGLADESH (ratification: 1972) .................................................................................................. 27
BÉLARUS (ratification: 1956) ......................................................................................................... 32
BULGARIE (ratification: 1959) ....................................................................................................... 39
COLOMBIE (ratification: 1976) ...................................................................................................... 42
EGYPTE (ratification: 1957) ........................................................................................................... 53
GUATEMALA (ratification: 1952) ................................................................................................... 58
GUINÉE ÉQUATORIALE (ratification: 2001) ................................................................................... 63
JAPON (ratification: 1965) .............................................................................................................. 64
ZIMBABWE (ratification: 2003) ...................................................................................................... 67
19 Partie II/67
ZIMBABWE (ratification: 2003)
La présidente de la commission a invité les représentants
gouvernementaux à intervenir dans la discussion. Après
avoir constaté l’absence de la délégation du Zimbabwe,
qui avait pourtant été dûment accréditée et enregistrée à la
Conférence, la présidente s’est référée aux méthodes de
travail de la commission. La non-participation d’un gouvernement
aux travaux de la commission constitue un
obstacle significatif pour la poursuite des objectifs de
l’Organisation internationale du Travail. C’est pour cette
raison que la commission peut débattre du fond des cas
concernant les gouvernements qui se sont enregistrés et
qui sont présents à la Conférence mais qui ont fait le
choix de ne pas se présenter devant la commission. Le
débat qui a lieu sur ces cas se reflète dans la partie pertinente
du rapport, à la fois celle relative aux cas individuels
et celle portant sur la participation aux travaux de la
commission.
Les membres travailleurs ont déclaré que le gouvernement
du Zimbabwe s’est engagé dans une voie qui se caractérise
par une action systématique de malveillance, en
violation de la convention, qui revêt la forme
d’arrestations, de détentions, de brutalités et de harcèlement
des dirigeants syndicaux, activistes et défenseurs des
droits de l’homme. Le Zimbabwe, sous le même gouvernement,
avait pourtant été une démocratie, dans un pays
qui était le grenier à blé de l’Afrique australe, avec une
monnaie forte, avant de sombrer dans le despotisme et de
laisser plonger l’économie dans l’abîme par sa gouvernance
désastreuse.
L’indifférence flagrante du gouvernement à l’égard du
peuple du Zimbabwe éclate à travers le déni des libertés
publiques, et notamment l’exploitation incessante de la
loi 2006 portant Code pénal (codification et réforme) et
de la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) pour réglementer
les activités syndicales. Les membres travailleurs
signalent que M. Wellington Chibebe a malheureusement
été arrêté pour la deuxième fois avec
19 Partie II/68
M. Lovemore Matombo, président du Congrès des syndicats
du Zimbabwe (ZCTU). Ils ont été placés en détention
pendant douze jours et sont aujourd’hui libres sous caution.
Le représentant sous-régional du BIT aurait voulu
leur rendre visite mais sa demande a été rejetée. Les
membres du ZCTU et de simples travailleurs sont régulièrement
victimes de tortures, d’arrestations, de harcèlement
et de déplacements forcés. Dans les régions rurales,
de nombreux enseignants sont persécutés et battus devant
leurs élèves: 67 enseignants ont ainsi dû être hospitalisés;
M. Raymond Mazongwe a été arrêté puis remis en liberté.
Il y a lieu de rappeler au gouvernement la résolution relative
aux droits syndicaux adoptée par la Conférence en
1970, selon laquelle l’absence de libertés civiles, telles
qu’énoncées dans la Déclaration universelle des droits de
l’homme, ôte tout sens au concept de droit syndical. De la
même manière, le Comité de la liberté syndicale déclare
que les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs
ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt
de violences, de pressions et de menaces contre les dirigeants
et les membres de ces organisations et que c’est
aux gouvernements de faire respecter ce principe.
Le gouvernement du Zimbabwe boycotte délibérément
cette commission et traite par le mépris, d’une année sur
l’autre, les avis qu’elle exprime concernant les droits syndicaux
et les libertés civiles. Les membres travailleurs
appellent donc la commission à prier instamment le gouvernement
de ne plus utiliser la loi sur la sécurité et
l’ordre public pour s’ingérer dans les affaires des syndicats;
d’abroger la loi pénale qui incrimine les activités
syndicales; d’abroger la règle de l’autorisation préalable
de toute activité syndicale; de mettre un terme aux violences,
au harcèlement, aux détentions et aux brutalités
contre les syndicalistes et les citoyens en général; de retirer
toutes les procédures engagées contre des dirigeants
syndicaux; d’accorder réparation à toutes les victimes de
tortures et de laisser les personnes déplacées revenir dans
leurs foyers; de rétablir le dialogue social et d’appliquer la
convention en droit et dans la pratique. Pour conclure, les
membres travailleurs ont demandé l’envoi d’une mission
de l’OIT dans le pays et ont réclamé instamment que la
commission fasse figurer ses conclusions dans un paragraphe
spécial.
Les membres employeurs ont déclaré que le gouvernement
du Zimbabwe continue de promulguer des lois qui
paralysent la liberté syndicale, en particulier la loi sur la
sécurité et l’ordre public (POSA), et d’engager des procédures
pénales contre les dirigeants syndicaux qui participent
à des manifestations publiques. Le gouvernement
refuse également la mission d’assistance technique de
haut niveau du BIT, alors qu’en ratifiant cette convention
le Zimbabwe avait souscrit à l’obligation internationale de
mettre sa législation et sa pratique en conformité avec la
convention. Cela inclut la protection des libertés publiques.
C’est la seconde année que le gouvernement du Zimbabwe,
bien qu’il ait participé aux discussions de la commission
cette année, n’apparaît pas devant elle, ce qui est
regrettable. Conformément aux méthodes de travail de la
commission, telles que révisées lors de la présente session,
la discussion de ce cas individuel sera toutefois incluse
dans la Partie II du rapport de la commission et devra
également faire l’objet d’un paragraphe spécial pour
défaut continu d’application.
Ce cas implique des violations flagrantes des éléments
les plus fondamentaux de la liberté d’association. Il y a
des preuves d’agressions, d’arrestations, de tortures, de
violences policières contre les dirigeants syndicaux. Les
libertés civiles, dont la liberté de parole, la liberté de
mouvement, la liberté syndicale et la liberté de réunion ou
la liberté et la sécurité des personnes sont inexistantes. Ce
cas porte sur un pays qui nie les droits humains, et notamment
la pierre angulaire la plus fondamentale de
l’OIT: la liberté d’association.
Le membre employeur de l’Afrique du Sud a déclaré que
les événements au Zimbabwe constituent une véritable
tragédie. Les atrocités et les souffrances humaines sont
au-delà de toute description. Des travailleurs voient leurs
droits bafoués et sont persécutés lorsqu’ils défendent la
justice. La situation affecte également les employeurs. Le
refus du gouvernement de se présenter devant la commission
est une preuve de son mépris de l’OIT et de ses principes
fondamentaux. Compte tenu des violations incessantes
de la convention par le gouvernement, le moment
est à l’introspection non seulement pour les Zimbabwéens,
mais également pour les dirigeants africains et
internationaux afin de prendre toutes les mesures à leur
disposition pour éviter davantage de souffrances humaines.
Des millions de travailleurs ont fui le pays et leurs
familles sont séparées.
Le membre travailleur du Zimbabwe a déclaré que la
convention no 87, un des piliers sur lesquels se mesure et
s’évalue une démocratie, est menacée en raison du refus
du gouvernement, de respecter les précédentes conclusions
de la commission. La question devant la commission
est de savoir si le Zimbabwe respecte et applique
plus amplement la convention depuis la discussion de
2007. Ce n’est malheureusement pas le cas.
En 2007, la commission a débattu du besoin d’une réforme
de la loi sur le travail de manière à autoriser les
fonctionnaires à s’affilier à un syndicat, avec la possibilité
de négocier leurs conditions de service par le biais d’un
conseil national de l’emploi. L’orateur a constaté avec
une grande inquiétude les tergiversations du gouvernement
relatives aux distorsions des relations professionnelles,
critiquées par la commission d’experts. De manière
surprenante, suite à l’harmonisation en 2002 de la loi sur
les services publics (PSA) avec la loi sur le travail, le
gouvernement a décidé en 2005, sans consultation des
parties prenantes aux relations professionnelles, de revenir
à l’application de l’ancien texte. En outre, le personnel
des services pénitentiaires et des services de police n’est
pas autorisé à former des syndicats.
L’orateur a également rappelé que la loi sur le travail
n’est même pas conforme aux normes internationales du
travail élémentaires. Le chapitre 28:01 (article 2 (A)) ne
fait qu’une référence aux normes internationales du travail
et les tribunaux refusent de les appliquer, les conventions
pertinentes n’ayant pas été transposées en droit national.
C’est l’essence même du problème auquel doivent
faire face les syndicats dans leur lutte quotidienne pour
protéger leurs membres.
Le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU) a souffert
d’actions brutales du gouvernement. Le gouvernement
refuse de tirer les leçons de ses actions et omissions
passées. Le 13 septembre 2006, un certain nombre de
travailleurs, parmi lesquels les dirigeants du ZCTU, qui
s’étaient rassemblés pour faire prendre conscience aux
autorités du niveau insupportable de pauvreté et du besoin
d’accès à des médicaments antirétroviraux, ont été
confrontés à une brutalité policière sans précédent. Ils ont
subi des tortures indescriptibles pour avoir seulement
voulu s’exprimer. Les arrestations et les détentions deviennent
la norme.
Après les commémorations du 1er mai organisées par le
ZCTU, le 8 mai 2008, la police a perquisitionné les maisons
de ses dirigeants, et celle de l’orateur, et les a arrêtés.
Ils ont été traduits en justice pour «communication de
mensonges préjudiciables à l’Etat», puis libérés sous caution
à condition de s’abstenir de faire toute déclaration
politique. Cependant, il est impossible de déterminer de
manière exacte ce qui est considéré comme «politique» ou
non lorsqu’il s’agit de questions liées au travail sur le plan
national. Les membres du ZCTU ont également subi des
violences, dans le contexte des élections de 2008, les
fonctionnaires ainsi que les enseignants ayant été les plus
visés car considérés comme les faiseurs d’opinion dans
leurs communautés. Les organes de contrôle de l’OIT
19 Partie II/69
avaient pourtant demandé au gouvernement de respecter
les droits des travailleurs dans un environnement libre et
démocratique.
Bien que l’on ait rarement recours aujourd’hui à la loi
sur la sécurité et l’ordre public (POSA), celle-ci a été
remplacée par la loi de 2006 portant codification et réforme
de la loi pénale. Cette loi est utilisée pour empiéter
sur les droits du ZCTU et de ses membres d’exprimer
leurs points de vue sur la politique économique et sociale
du gouvernement. L’orateur a déclaré que, en vertu de
cette loi, il passe en jugement le 23 juin 2008.
Le membre gouvernemental de la Slovénie s’est exprimé
au nom des membres gouvernementaux des Etats membres
de l’Union européenne, des pays candidats: la Turquie,
la Croatie et l’ex-République yougoslave de Macédoine;
des pays du processus de stabilisation et
d’association ainsi que des candidats potentiels:
l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro; de la
Norvège en tant que membre de l’Association européenne
de libre-échange (AELE), de la Suisse, ainsi que de
l’Ukraine, de la République de Moldova et de l’Arménie.
L’orateur a profondément regretté que le gouvernement
du Zimbabwe ait refusé une nouvelle fois de participer à
la discussion de la commission et a recommandé instamment
au gouvernement de reprendre immédiatement le
dialogue avec l’OIT et d’accepter une mission
d’assistance technique de haut niveau selon les termes
requis par la commission en 2006. La détérioration de la
situation en ce qui concerne les droits syndicaux au Zimbabwe
demeure préoccupante, et les préoccupations constantes
de la commission d’experts au regard de la loi sur
la sécurité et l’ordre public ne peuvent qu’être partagées.
Le gouvernement doit prendre toutes les mesures nécessaires
pour garantir que cette loi ne sera plus utilisée pour
empiéter sur les droits des travailleurs et de leurs organisations.
L’orateur a constaté avec une grande préoccupation des
actions de discrimination antisyndicale et des ingérences
effectuées sous couvert de la loi pénale en ce qui concerne
les activités politiques des syndicalistes, et il a souscrit
aux conclusions pertinentes du Comité de la liberté syndicale.
Le gouvernement doit abandonner toutes les charges
liées aux activités syndicales et s’abstenir de toute mesure
d’arrestation et de détention de dirigeants syndicaux ou
syndicalistes pour des motifs liés à leurs activités. Le
gouvernement est prié de fournir des informations complètes
et détaillées sur la situation de M. Matombo et
M. Chibebe.
L’orateur a insisté sur l’interdépendance entre les libertés
publiques et les droits syndicaux. Un véritable mouvement
syndical libre et indépendant ne peut se développer
que dans un climat de respect des droits fondamentaux
de l’homme. Le peuple zimbabwéen a le droit à la
liberté d’expression sans harcèlement, intimidation ou
violence, et le droit d’être protégé par la loi. En conséquence,
il a appelé instamment le gouvernement à restaurer
le plein respect du droit et prendre des mesures immédiates
pour mettre fin aux violations continues des droits
de l’homme.
Le membre travailleur du Botswana a déclaré que les actes
de violence au Zimbabwe visent aussi bien les enseignants
que les étudiants, c’est-à-dire la communauté éducative
dans son ensemble. L’Association des enseignants
du Zimbabwe (ZIMTA) et le Syndicat des enseignants
progressistes du Zimbabwe (PTUZ) ont été témoins de
nombreuses violences, telles que des assassinats ou des
tortures et d’autres formes de sévices à l’encontre
d’enseignants des régions rurales.
Dans le cadre des élections nationales de 2008, des enseignants
ont été accusés d’influencer le vote, étant perçus
comme des faiseurs d’opinion dans leurs communautés.
Dans certaines régions, des enseignants ont reçu l’ordre
d’évacuer leur école ou ont été transférés, et d’autres ont
été menacés. La plupart des actes de violence ont été perpétrés
par des vétérans de guerre ou des milices de jeunes.
Certains enseignants ont été arrêtés ou enlevés par des
agents de l’organe central de renseignement. De plus, des
milliers d’enseignants n’ont pu exercer leur droit de vote
au premier tour parce qu’ils ont été délibérément transférés
à l’extérieur de leur circonscription électorale pour
exercer la fonction de scrutateurs. Cela constitue une violation
du droit constitutionnel des enseignants d’élire
leurs dirigeants politiques.
Le PTUZ a rapporté qu’au moins 250 écoles dans
23 districts à travers le pays ont fait l’objet de violences,
sous une forme ou une autre, durant la période du 3 au
9 mai 2008. Dans certains cas, des enseignants ont été
battus devant leurs élèves et les membres de leur communauté.
Soixante-sept enseignants ont été hospitalisés à
Harare, Kotwa, Karoi, Rusape, Bonda, Howard, Guruve,
Marondera et ailleurs. Cent trente-neuf enseignants ont dû
fuir leur école et 213 résidences d’enseignants ont été
pillées. De nombreux enseignants ont fui dans les pays
voisins et il est peu probable qu’ils reviennent, aggravant
ainsi la fuite des cerveaux dans le domaine de l’éducation.
Le 15 mai 2008, M. Raymond Majongwe, le secrétaire
général du PTUZ, a une fois de plus été brièvement arrêté
par la police alors qu’il se trouvait à la Cour suprême du
Zimbabwe pour assister à l’audition de dirigeants syndicaux.
Son arrestation faisait suite à la publication
d’annonces par le PTUZ déplorant le fait que des enseignants
avaient été battus et victimes de harcèlement sur
leurs lieux de travail. Raymond Majongwe est régulièrement
victime de harcèlement et a été emprisonné pour
avoir réclamé l’amélioration du système éducatif affaibli.
Le 6 octobre 2007, la police est brutalement intervenue
pour disperser les manifestants lors de la Journée mondiale
des enseignants. Elle a procédé à l’arrestation de
M. Majongwe et l’a interrogé longuement. Auparavant,
son passeport avait été confisqué afin de l’empêcher de
quitter le pays pour se rendre à une réunion syndicale
internationale. L’orateur a condamné les actes de violence
commis par le gouvernement à l’encontre des enseignants
et des syndicalistes. Il a appelé les autorités du Zimbabwe
à respecter les droits de l’homme et les droits syndicaux.
L’Internationale des services publics (ISP),
l’Internationale de l’éducation (IE) et l’OIT doivent envoyer
une mission spéciale au Zimbabwe.
La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré
que son gouvernement regrette profondément que la
commission discute de ce cas extrêmement grave sans la
participation du gouvernement du Zimbabwe. Son gouvernement
est profondément préoccupé par les abus massifs
et systématiques commis contre les droits de l’homme
et les droits des travailleurs au Zimbabwe. Le palmarès
sans équivoque du gouvernement au chapitre des droits
syndicaux, confirmé tant par la commission d’experts que
par le Comité de la liberté syndicale, inclut des cas
d’entraves, de harcèlement, d’emprisonnement et de représailles
qui constituent des violations massives, flagrantes
et provocatrices de la convention no 87 que le gouvernement
du Zimbabwe a par ailleurs ratifiée en toute liberté.
Les récents événements démontrent que le respect de
l’Etat de droit continue de se détériorer au Zimbabwe.
En dépit du fait que l’offre d’assistance du BIT ne constitue
pas une sanction mais bien une aide qui peut avoir
des effets positifs, le gouvernement malheureusement
persiste à refuser d’accepter une mission de haut niveau
pour régler les violations persistantes de la convention
no 87. Qu’il accepte ou non la mission de haut niveau, le
gouvernement du Zimbabwe a des obligations internationales
immuables d’appliquer les dispositions de la
convention no 87 tant en droit que dans la pratique et de
tenir l’OIT informée des mesures prises à cet égard.
L’oratrice a estimé souhaitable que le gouvernement reconsidère
son attitude envers les mécanismes de contrôle
de l’OIT, mais elle a souligné qu’il devrait à tout le moins
prendre d’urgence les mesures qui s’imposent pour garan19
Partie II/70
tir à tous ses citoyens le respect de leurs droits fondamentaux
de l’homme et du travailleur.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a déclaré que, le
13 septembre 2006, le ZCTU a planifié une manifestation
pour protester contre le coût de la vie et les impôts élevés
et pour demander des médicaments antirétroviraux pour
les personnes atteintes du VIH. Le préavis en vertu de la
loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) a été envoyé
aux autorités policières qui ont autorisé la manifestation.
Peu après le début de la manifestation, les dirigeants du
ZCTU et des syndicats affiliés ont été encerclés par la
police qui leur a ordonné de s’asseoir sur la route. Les
dirigeants du ZCTU, dont notamment le président Matombo,
le secrétaire général Wellington Chibebe et la
vice-présidente Lucia Matibenga, ont été emmenés au
poste de police de Matapi. Ils ont été soumis à de graves
actes de violence qui se sont prolongés de la part des policiers
et ils ont été accusés immédiatement, selon les dispositions
de la POSA, d’avoir planifié une manifestation
illégale dans l’intention de renverser un gouvernement
démocratiquement élu.
Les dirigeants du ZCTU ont souffert à cette occasion de
nombreuses blessures, y compris des fractures et des lacérations,
mais toute assistance médicale leur a été refusée
de même que l’assistance de leur avocat durant deux
jours. Ils ont été amenés à l’hôpital le 15 septembre. Cependant,
seul Wellington Chibebe reçut des soins et ce,
uniquement après que des avocats du ZCTU et qu’un
membre de l’ONG Médecins pour les droits de l’homme
soient intervenus. En dépit de ses nombreuses blessures
graves, il a été opéré seulement quatre jours plus tard. Son
procès s’est par ailleurs déroulé en secret à l’hôpital. Ses
autres collègues, notamment Matombo, Lucia Matibenga,
Denis Chiwara, James Gumbi et George Nkiwane, ont été
reconduits à leur cellule au poste de police, sans avoir
reçu de soins médicaux. Ils ont été déférés au tribunal le
lendemain et ont été libérés sous caution. Le tribunal a
jugé que les passages à tabac dans les cellules du poste de
police devaient faire l’objet d’une enquête et que les auteurs
devaient être poursuivis en justice. Toutefois, étant
donné que l’enquête incombait aux autorités policières,
plus de deux ans après ces terribles événements, aucune
accusation n’a été portée contre les officiers de police qui
ont commis ces actes de torture ni contre aucun officier
supérieur les ayant ordonnés.
Le membre travailleur des Etats-Unis a déclaré que ce
cas est celui de la lutte que mènent le Congrès des syndicats
du Zimbabwe (ZCTU) et les travailleurs du ZCTU
contre l’injustice sociale et la tyrannie du gouvernement.
Le gouvernement a réprimé les manifestations pacifiques
organisées par le ZCTU en septembre 2006. Il est de notoriété
que des détentions dans des conditions abominables,
des violences physiques et des injures ont été perpétrées
à l’encontre des dirigeants et des membres du
ZCTU. Le Président du Zimbabwe avait cru pouvoir
étouffer la vérité en refusant l’entrée du territoire à une
délégation de la Coalition of Black Trade Unionists, affiliée
à la Fédération américaine du travail – Congrès des
organisations industrielles (AFL-CIO). L’AFL-CIO avait
cependant déjà commencé à diffuser des informations sur
la répression contre la manifestation du ZCTU.
Le gouvernement ne peut cacher la vérité sur toutes les
violations en droit de la convention. La loi sur le travail
de 2005 a refusé d’accorder aux fonctionnaires le droit de
constituer ou de s’affilier à des syndicats, de négocier
collectivement ou de faire grève. Des organisations syndicales
authentiques ont été ébranlées par la reconnaissance
officielle de prétendus comités de travailleurs. De plus, la
loi entrave la grève en imposant une obligation d’obtenir
l’accord de la majorité des salariés, des périodes de conciliation
obligatoire, l’obligation de notifier la grève deux
semaines avant son déclenchement et la possibilité d’un
recours unilatéral à l’arbitrage obligatoire. Les employeurs
disposent légalement du droit de remplacer les
grévistes qui peuvent, à titre individuel, être poursuivis
pour dommages économiques. La définition des services
essentiels par le gouvernement ne correspond pas à celle
de la jurisprudence de l’OIT, et les grèves illégales peuvent
conduire à des condamnations à cinq années de prison.
Compte tenu de ces violations flagrantes de la
convention, la commission est instamment priée d’inclure
ce cas dans un paragraphe spécial de son rapport.
La membre travailleuse de l’Afrique du Sud a fourni des
exemples de violations graves des droits syndicaux et de
cas de harcèlement de dirigeants syndicaux au Zimbabwe.
Le 28 février 2008, le secrétaire général du ZCTU a soumis
une demande d’autorisation afin de tenir une réunion
du comité des femmes le 8 mars. Le gouvernement n’a
pas autorisé la réunion et le ZCTU a en conséquence déposé
une plainte devant la cour qui a rendu une décision
en sa faveur.
A l’occasion de la fête du travail cette année, le ZCTU
a fait des demandes pour tenir 34 événements dont cinq
ont été refusées. Dans certains cas, les raisons de ce refus
n’ont pas été explicitées clairement ni de façon immédiate
alors que dans d’autres cas, le refus a été notifié le jour
même de l’événement. Le ZCTU a dû annuler les événements
commémoratifs en dépit du fait que certains travailleurs
s’étaient déjà regroupés et que ces événements
avaient déjà engendré des dépenses.
Le harcèlement des dirigeants du ZCTU s’est intensifié
à partir du 6 mai, lorsque la police s’est présentée aux
domiciles du secrétaire général du ZCTU et de son président.
Les deux dirigeants ont été arrêtés, interrogés durant
plus de six heures et accusés d’avoir incité la population à
se rebeller contre le gouvernement et sur la base
d’informations fausses puisqu’ils auraient dit aux travailleurs
que des personnes avaient été assassinées, victimes
des violences politiques. Au départ, leur libération sous
caution a été refusée au motif que ces deux dirigeants
étaient dangereux. Elle a finalement été accordée mais
sous la condition inacceptable qu’ils ne doivent assister
ou prendre la parole dans aucun rassemblement politique.
Leur cause sera entendue le 23 juin 2008 et ils sont passibles
d’une amende de niveau 14 et de 20 ans
d’emprisonnement ou les deux. La violence fait partie du
quotidien au Zimbabwe. Des parents se font battre devant
leurs enfants. La population fuit dans les pays voisins.
Elle a exprimé sa détresse face à la façon dont les autorités
du Zimbabwe traitent les syndicalistes et a réclamé
l’abandon des accusations contre les deux dirigeants du
ZCTU.
La membre gouvernementale de Cuba a indiqué que ses
interventions ont toujours eu pour but d’inciter les gouvernements
à respecter leurs obligations de présentation
de rapports ou de coopération avec les organes de
contrôle. Dans le cas présent, la situation est confuse et
les motifs de l’absence du gouvernement ne sont pas
connus. En conséquence, des efforts supplémentaires devraient
être déployés pour établir le contact avec le gouvernement
du Zimbabwe. Le mouvement de révolte du
gouvernement pourrait s’expliquer par son insatisfaction
des résultats des travaux de la commission. Sa délégation
ne partage pas les propositions prônant des mesures ou
des sanctions à l’encontre d’un gouvernement, quel qu’il
soit, sans avoir épuisé tous les contacts et l’assistance
technique nécessaires.
Le membre gouvernemental du Canada, prenant la parole
également au nom des membres gouvernementaux de
l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, a exprimé sa profonde
préoccupation à l’égard des graves violations à la
liberté syndicale au Zimbabwe, liberté essentielle à
l’existence d’une société démocratique. Il a souscrit à
l’opinion de la commission à l’effet qu’un mouvement
syndical véritablement libre et indépendant ne peut se
développer que dans un climat qui respecte les droits fondamentaux
de l’homme. La crise actuelle de gouvernance
19 Partie II/71
au Zimbabwe est notamment due à l’échec à établir un tel
climat.
A la suite des élections générales du 29 mars 2008, des
dirigeants syndicaux, dont le président du ZCTU et son
secrétaire général Lovemore Matombo et Wellington
Chibebe, ainsi que le secrétaire général du Syndicat des
enseignants progressistes, Raymond Majongwe, ont été
victimes de harcèlement et d’arrestations. Les syndicalistes
sont victimes de graves atteintes à leurs droits puisqu’ils
font l’objet de violences motivées par des intérêts
politiques, d’assassinats, d’actes d’intimidation et de harcèlement.
Afin de surmonter la crise politique et économique
actuelle, le gouvernement doit s’assurer d’octroyer
aux acteurs sociaux et politiques l’espace nécessaire pour
qu’ils puissent défendre les droits des travailleurs et ainsi
leur permettre de jouer un rôle constructif dans le dénouement
de la crise.
La POSA est utilisée de manière à violer les droits des
organisations de travailleurs en dépit des amendements
qui y ont été apportés. Le gouvernement est instamment
prié de veiller à permettre aux syndicats de mener leurs
activités et d’exercer leurs droits garantis par la convention,
de restaurer le plein respect du droit et de mettre un
terme aux violations des droits de l’homme. Le Canada,
l’Australie et la Nouvelle-Zélande appuient le travail de la
commission d’experts, particulièrement ses efforts pour
demander de plus amples informations et sa proposition
de dépêcher une mission d’assistance technique de haut
niveau au Zimbabwe.
Les membres travailleurs ont déclaré que, là où le gouvernement
prône l’impunité, les travailleurs appellent au
dialogue, là où le gouvernement propage la violence, les
travailleurs appellent à la paix, là où le gouvernement
prône l’injustice, les travailleurs aspirent à la justice, et là
où le gouvernement utilise la force brutale, les travailleurs
opposent la force de la vérité. Les témoignages des violences
perpétrées après les élections générales de 2008
sont également disponibles sur Internet.
Le gouvernement de Cuba a soutenu les sanctions
contre l’apartheid en Afrique du Sud mais sa position
concernant le Zimbabwe semble aujourd’hui hypocrite.
Le gouvernement du Zimbabwe confisque actuellement
les documents d’identité de la population pour les empêcher
d’avoir accès aux rations alimentaires ou leur retirer
le droit de vote. Il a aussi décidé d’interdire aux ONG de
distribuer de la nourriture. De telles mesures désespérées
et inhumaines doivent être condamnées.
Les membres travailleurs ont recommandé à la commission
de prendre certaines mesures. En premier lieu, la
commission devrait réfléchir à la possibilité d’envoyer
une mission tripartite de haut niveau, composée de membres
du Conseil d’administration, qui aura pour mandat
d’enquêter et d’aider le gouvernement à trouver des solutions
aux problèmes qui se posent. Ensuite, la commission
devrait demander aux gouvernements ayant une représentation
diplomatique au Zimbabwe de suivre le procès de
M. Chibebe et de M. Matombo qui doit débuter le 23 juin
2008. Les membres travailleurs ont également exhorté le
gouvernement du Zimbabwe à prendre certaines mesures.
Le dialogue social doit être restauré. La loi portant codification
et réforme de la loi pénale doit être abrogée. Toutes
les charges retenues contre des syndicalistes doivent être
abandonnées. La loi sur la sécurité et l’ordre public
(POSA) ne doit pas être utilisée contre les syndicats. Les
syndicalistes et les citoyens ordinaires ne doivent pas faire
l’objet de persécution, harcèlement, arrestation ou détention.
Les victimes des tortures doivent être indemnisées et
les personnes qui ont été déplacées de force de leur foyer
doivent pouvoir le retrouver.
Les membres employeurs ont soutenu la déclaration des
membres travailleurs et leurs recommandations. La présente
discussion marque pour le Zimbabwe un jour de
honte. Le gouvernement a perdu sa légitimité et son autorité
morale. Il aurait pu et aurait dû accepter la mission de
haut niveau du BIT, tenir compte des recommandations
de l’OIT sur l’application de la convention no 87, reconnaître
la liberté d’expression, garantir la liberté politique,
assurer la sécurité, reconnaître le droit de réunion, respecter
le droit d’association et protéger les libertés publiques,
mais il ne le fera pas. Les membres employeurs ont rappelé
que les cas les plus graves peuvent faire l’objet d’une
plainte en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT.
Ils ont instamment prié les 147 autres Membres de l’OIT
qui ont ratifié la convention no 87 à soutenir une telle
plainte contre le gouvernement du Zimbabwe et le
Conseil d’administration à former une commission
d’enquête selon la procédure prévue.
La membre gouvernementale de Cuba a précisé que
l’attitude de son gouvernement vis-à-vis de l’apartheid ne
saurait être qualifiée d’«hypocrite». Elle a rappelé que,
loin de se limiter à de simples déclarations, la lutte contre
l’apartheid a vu couler le sang de Cubains. Son gouvernement
a réitéré sa position de principe d’opposition à
toute décision qui prévoirait des mesures ou des sanctions
à l’encontre d’un gouvernement, quel qu’il soit, sans avoir
utilisé tous les contacts et l’assistance technique nécessaires.
Conclusions
La commission a profondément déploré l’attitude
d’obstruction dont le gouvernement fait preuve de manière
persistante en refusant de venir devant elle, pour la
deuxième année consécutive, entravant ainsi gravement le
fonctionnement des mécanismes de contrôle de l’OIT par
rapport à l’examen de l’application de conventions volontairement
ratifiées. Elle a rappelé que le mépris du gouvernement
à l’égard de la présente commission et la gravité des
violations constatées avaient déjà conduit cette commission,
l’année précédente, à mentionner ce cas dans un paragraphe
spécial de son rapport et à appeler le gouvernement à accepter
une mission d’assistance technique de haut niveau.
La commission a en outre déploré le refus par le gouvernement
de recevoir la mission d’assistance technique de haut
niveau qu’elle l’avait invité à accepter. Elle a observé avec
un profond regret que les commentaires de la commission
d’experts ont trait à de graves allégations de violation des
libertés civiles fondamentales, notamment des arrestations et
des placements en détention quasi systématiques de syndicalistes
ayant participé à des manifestations publiques. A cet
égard, elle a en outre regretté le recours incessant du gouvernement
à la loi sur la sécurité et l’ordre public (POSA) et,
plus récemment, à la loi de 2006 portant codification et réforme
de la loi pénale pour faire arrêter et emprisonner des
syndicalistes ayant exercé leurs responsabilités syndicales, en
dépit des appels qui lui ont été adressés de ne plus recourir à
de tels procédés. Elle a enfin noté que le Comité de la liberté
syndicale est actuellement saisi de nombreuses plaintes portant
sur ces graves questions.
La commission a pris note avec une profonde préoccupation
de la somme des informations présentées, qui concourent
à démontrer une aggravation des violations des droits
syndicaux et des droits de l’homme dans le pays et attestent
des menaces visant les syndicalistes dans leur intégrité physique.
Elle déplore en particulier les arrestations récentes de
M. Lovemore Matombo et de M. Wellington Chibebe, la
violence massive dirigée contre les enseignants ainsi que les
graves allégations d’arrestation et d’agression ayant fait
suite aux manifestations de septembre 2006.
La commission a insisté sur le fait que les droits syndicaux
ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de toute
violence, pression ou menace. Elle a rappelé en outre que ces
droits sont indissociablement liés à la garantie pleine et entière
des libertés civiles fondamentales, notamment à la liberté
d’expression, à la sécurité de la personne, à la liberté
de déplacement et à la liberté de réunion. Elle a rappelé qu’il
est essentiel pour qu’elles soient en mesure de jouer leur rôle
de partenaires sociaux légitimes que les organisations de
travailleurs et d’employeurs puissent exprimer leur opinion
sur des questions de politique au sens large du terme et
qu’elles puissent exprimer publiquement leur avis sur la
politique économique et sociale du gouvernement. En conséquence,
elle a appelé instamment le gouvernement à veiller à
ce que toutes les libertés civiles fondamentales soient garanties,
à abroger la loi pénale et à cesser de recourir abusivement
à la loi sur la sécurité et l’ordre public. Elle a appelé le
gouvernement à mettre immédiatement un terme à toutes les
mesures d’arrestation, de détention, aux menaces et au harcèlement
visant les dirigeants et membres des syndicats, à
abandonner toutes les charges retenues contre eux et à garantir
qu’ils reçoivent une juste réparation. Elle a appelé
tous les gouvernements ayant une représentation dans ce
pays à être présents au procès de M. Matombo et de
M. Chibebe et observer étroitement l’évolution de la situation
en ce qui les concerne.
La commission a prié instamment le gouvernement de
coopérer pleinement à l’avenir avec les organes de contrôle
de l’OIT, conformément aux obligations internationales
qu’il a volontairement souscrites de par son appartenance à
l’Organisation.
La commission a prié instamment le gouvernement de garantir
à tous les travailleurs et employeurs le plein respect
des libertés civiles inscrites dans la Déclaration universelle
des droits de l’homme et le Pacte international sur les droits
civils et politiques, libertés sans lesquelles la liberté
d’association et les droits syndicaux seraient dénués de tout
sens. Elle a appelé instamment le gouvernement à accepter
une mission spéciale d’enquête de haut niveau à caractère
tripartite pour examiner ce cas de déni flagrant des droits
les plus fondamentaux de la liberté syndicale. Elle a appelé
instamment les autres gouvernements ayant ratifié la présente
convention à étudier sérieusement la possibilité de déposer
une plainte en vertu de l’article 26 de la Constitution
de l’OIT et elle a appelé le Conseil d’administration à approuver
le principe d’une commission d’enquête.
La commission a décidé d’inclure les présentes conclusions
dans un paragraphe spécial de son rapport. Elle a également
décidé de signaler ce cas comme un cas de défaut persistant
d’application de la convention.
Les membres travailleurs ont souligné la déclaration exceptionnelle
des membres employeurs sur ce cas et leur
ont adressé leurs remerciements à cet égard.
19 Partie II/72

Document no 263
CIT, 98e session, 2009, Rapport de la Commission
de l’application des normes, pp. 16 Partie II/69-16
Partie II/74 (Swaziland)

16 Partie II/1
Conférence internationale du Travail Compte rendu des travaux 16
98e session, Genève, 2009 DEUXIÈME PARTIE
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
DEUXIÈME PARTIE
OBSERVATIONS ET INFORMATIONS CONCERNANT CERTAINS PAYS
Table des matières
Page
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées
(articles 22 et 35 de la Constitution) ............................................................................................................ 5
A. Discussion sur les cas de manquements graves des Etats Membres à leurs obligations
de faire rapport et à leurs autres obligations liées aux normes ............................................................. 5
a) Manquement à l’envoi de rapports depuis deux ans ou plus sur l’application
des conventions ratifiées .............................................................................................................. 5
b) Manquement à l’envoi de premiers rapports sur l’application des conventions ratifiées ............. 5
c) Manquement à l’envoi d’informations en réponse aux commentaires
de la commission d’experts .......................................................................................................... 6
d) Informations écrites reçues jusqu’à la fin de la réunion de la Commission
de l’application des normes .......................................................................................................... 7
B. Observations et informations sur l’application des conventions .......................................................... 9
Convention nº 29: Travail forcé, 1930 ................................................................................................................. 9
MYANMAR (ratification: 1955) ...................................................................................................... 9
Convention nº 35: Assurance-vieillesse (industrie, etc.), 1933 ........................................................................... 9
CHILI (ratification: 1935) .............................................................................................................. 9
Convention nº 81: Inspection du travail, 1947 .................................................................................................... 15
NIGÉRIA (ratification: 1960) ......................................................................................................... 15
Convention nº 87: Liberté syndicale et protection du droit syndical, 1948 ...................................................... 18
BÉLARUS (ratification: 1956) ........................................................................................................ 18
COLOMBIE (ratification: 1976) ..................................................................................................... 25
ETHIOPIE (ratification: 1963) ....................................................................................................... 39
GUATEMALA (ratification: 1952) .................................................................................................. 45
16 Partie II/69
SWAZILAND (ratification: 1978)
Un représentant gouvernemental, ministre du Travail et
de la Sécurité sociale, soulignant la valeur immuable de la
liberté syndicale, de la protection du droit syndical et du
syndicalisme, a regretté que son pays figure parmi les cas
retenus par la Commission de la Conférence à propos de
l’application de la convention no 87, compte tenu des mesures
prises par son gouvernement afin de respecter pleinement
les conventions de l’OIT, principalement avec
l’assistance du Bureau. Il s’est néanmoins réjoui de
l’opportunité ainsi offerte de partager avec la commission
les progrès accomplis par son pays dans l’application de
la convention. Il a rejeté les allégations de la Confédération
syndicale internationale (CSI) et de la Fédération des
syndicats du Swaziland (SFTU) selon lesquelles le gouvernement
aurait harcelé, arrêté et emprisonné des dirigeants
syndicaux ayant participé à une manifestation organisée
en soutien d’une pétition. Il est un fait que le secrétaire
général de la SFTU, M. Sithole, a été interrogé
par la police, mais sans pour autant que ses droits constitutionnels
ou ceux des membres de sa famille aient été
violés. Il n’est pas dans les pratiques du gouvernement de
menacer ni de harceler les gens, encore moins à raison de
l’exercice de leurs droits syndicaux. L’orateur a expliqué
que M. Sithole avait été interrogé à propos de déclarations
injurieuses à l’égard du Roi du Swaziland prononcées lors
d’une manifestation qui s’est tenue à Johannesburg, en
Afrique du Sud, le 16 août 2008. Ces déclarations ne sont
pas loin de constituer un délit pénal, et toute personne
tenant de pareils propos ou ayant un lien quelconque avec
ceux-ci peut s’attendre à être interrogée par la police. Le
21 août 2008, M. Sithole s’est présenté de lui-même au
commissariat de la police régionale de Manzini, accompagné
de deux autres syndicalistes, après que les fonctionnaires
de police, dont deux seulement étaient armés,
sont venus à son domicile pour lui demander de le faire
comme il est d’usage dans la police. Il n’a pas été allégué
que M. Sithole avait été tenu sous la menace d’une arme à
feu. Il a pu rentrer chez lui après avoir été interrogé pendant
moins d’une heure. Même s’il y avait suspicion de
délit, il n’a été ni harcelé ni arrêté, ni emprisonné, la police
n’ayant fait que son devoir, consistant à faire respecter
la loi en traitant tous les individus sur un pied d’égalité.
Ce n’est pas attenter aux droits syndicaux que d’interroger
quelqu’un au sujet d’une infraction présumée, dès lors
que l’interrogatoire se déroule dans le cadre d’une procédure
équitable. L’orateur a souligné la nécessité d’étayer
les accusations que l’on porte par des éléments tangibles.
Le représentant gouvernemental a noté que des questions
ont également été soulevées à propos du syndicalisme
dans l’administration pénitentiaire et dans la police, et
du fait que certaines personnes, exerçant leurs droits constitutionnels,
ont engagé des procédures contre le gouvernement.
Tout en déboutant les requérants sur la question
de la constitution de syndicats, l’arrêt rendu par la cour
suggère que le gouvernement devrait envisager de modifier
certains textes de loi. Le gouvernement réexaminera
l’ensemble de la législation afin de la mettre en conformité
avec la Constitution, et le rapport du Comité tripartite
de rédaction sur le projet de loi portant modification de la
loi sur les relations de travail contient d’importantes propositions
à cet égard.
Le représentant gouvernemental a déclaré que les allégations
selon lesquelles la police aurait arrêté plusieurs
dirigeants syndicaux qui se rendaient à une manifestation
pacifique de protestation, violant ce faisant la convention
no 87, que le Swaziland a ratifiée et incorporée dans sa
législation interne, étaient exagérées. Le Swaziland a pris
un certain nombre de mesures législatives tendant à
l’application pleine et entière des normes internationales
du travail, y compris à travers un suivi de la législation et
sa modification en tant que de besoin, avec le concours de
l’OIT. Les allégations relatives à de graves violations des
droits des travailleurs, y compris des tirs à balles réelles et
des passages à tabac, à l’occasion d’une grève pacifique et
légale menée par les travailleurs du secteur du textile,
comportent de graves inexactitudes. Il est faux que les
forces de l’ordre aient tiré sur les travailleurs à balles réelles
et il n’existe aucun élément qui étaierait ces affirmations.
Ceux qui les soutiennent omettent de dire que la
grève, initialement pacifique, a dégénéré dans la violence,
notamment à l’égard des travailleurs non grévistes et de la
police. Il est faux que la grève aurait été stoppée par les
brutalités policières, comme il est faux d’affirmer que des
fonctionnaires de police auraient subtilisé des rapports
médicaux et enjoint les médecins de ne pas publier de tels
rapports sans leur autorisation. La police n’est en effet pas
autorisée à le faire et rien ne prouve qu’elle l’aurait fait.
En fait, les grévistes ont pris eux-mêmes la décision de
mettre fin à la grève, qui durait depuis près d’un mois.
Malgré les provocations, la police, dont certains fonctionnaires
ont subi des lésions corporelles dans l’exercice de
leurs fonctions, a maintenu l’ordre en ne recourant à la
force que dans la stricte mesure nécessaire. A propos des
allégations selon lesquelles un travailleur non identifié
aurait été noyé par la police, l’orateur a souligné que le
public attend de la police qu’elle agisse dans le cadre de
la légalité. Toute personne qui serait en possession de
16 Partie II/70
preuves à l’appui de telles allégations devrait saisir la
justice. Les diverses allégations concernant des coups de
feu et des menaces de mort ne reposent, elles non plus,
sur aucun élément de preuve et donnent injustement une
image tyrannique de la police. On a également affirmé
que des travailleurs ayant participé à un mouvement de
grève légal auraient été licenciés, fait qui serait automatiquement
constitutif d’un licenciement sans juste cause et
pourrait se révéler coûteux pour l’employeur au regard de
la loi du Swaziland. Le gouvernement n’approuve pas de
tels licenciements.
Le représentant gouvernemental a évoqué une tendance
croissante des manifestations pacifiques à motivations
économiques et sociales à basculer dans la violence, ce
qui est contraire à l’esprit de la convention no 87.
Conformément à l’article 40 de la loi sur les relations de
travail, les travailleurs qui ne sont pas engagés dans un
service essentiel ont le droit de participer à des protestations
pacifiques tendant à promouvoir leurs intérêts économiques
et sociaux, mais bon nombre de ces manifestations
sont détournées par des groupes politiques poursuivant
leurs objectifs propres, lesquels diffèrent souvent
de ceux des travailleurs concernés. La violence à l’égard
de la police et du public à l’occasion de telles manifestations
devient de plus en plus fréquente et constitue une
menace contre l’ordre public. Dans de telles situations, la
police est amenée à accomplir son devoir. Il a évoqué
divers exemples de manifestations qui se sont terminées
dans la violence, notamment l’une d’elles qui avait été
programmée pour coïncider avec les élections nationales
de septembre 2008. Le gouvernement avait refusé
d’autoriser cette manifestation, considérant qu’elle était
purement politique, mais les travailleurs ont passé outre,
menaçant gravement, ce faisant, le déroulement des élections.
Même si, assurément, la ligne de démarcation entre
les questions économiques et sociales et les questions
politiques est mince, en l’occurrence, la manifestation en
question était manifestement politique, puisqu’elle tendait
à un changement de régime. Il convient de noter que le
Comité directeur de haut niveau pour le dialogue social
est d’ores et déjà saisi d’une demande tendant à apporter
des modifications à la Constitution, suivant les recommandations
faites par la mission de haut niveau de l’OIT
au Swaziland en juin 2006.
L’orateur a déclaré que le dialogue social est bienvenu
au Swaziland, où d’importants résultats ont été obtenus
sur la voie de son institutionnalisation. Une série de questions
identifiées par les partenaires sociaux font l’objet
d’un examen par des comités dans le cadre des structures
existantes. Le Conseil consultatif du travail est parvenu
récemment à un accord sur le projet de loi portant modification
de la loi sur les relations de travail, et les amendements
proposés répondent à la plupart des commentaires
formulés par les organes de contrôle de l’OIT. Certes, le
processus a pris du temps, mais cela est inévitable lorsque
l’on procède à des consultations tripartites. L’orateur a
évoqué certains des amendements proposés, démontrant
que les commentaires de la commission d’experts et
ceux des autres organes ont été pleinement pris en considération.
De son point de vue, les droits des travailleurs trouvent
en outre un appui dans la Constitution, dont les clauses
priment sur toute autre législation. Il a réaffirmé
l’attachement de son pays à respecter, en droit et dans la
pratique, toutes les conventions de l’OIT qu’il a ratifiées,
dans leur lettre et dans leur esprit, et il a exprimé l’espoir
d’une poursuite de la coopération et de l’appui de l’OIT.
Les membres travailleurs ont estimé que le cas du Swaziland
doit être examiné à la lumière des précédentes observations
de la commission d’experts, de la mission de
haut niveau effectuée par l’OIT dans ce pays en 2006 et
des violations continuelles, délibérées, systématiques et
calculées, que le gouvernement a perpétrées au moyen de
divers instruments législatifs. Se référant à la précédente
discussion relative à l’application de la convention no 87
par le Swaziland et à la mission de contacts directs de
1996, les membres travailleurs ont déclaré que ces violations
persistantes avaient amené l’OIT à envoyer une mission
de haut niveau dans le pays afin d’examiner l’impact
de sa Constitution sur les droits des travailleurs et de faire
des suggestions en vue d’instaurer un cadre efficace pour
le dialogue social, à la lumière des mesures déjà prises. La
mission de haut niveau a pris note d’un certain nombre de
lois qui interfèrent directement avec le fonctionnement
des syndicats et de la société civile en général, et elle a
demandé au gouvernement de la tenir informée des progrès
accomplis dans un certain nombre de domaines. La
mission a eu des entretiens avec les parties intéressées à
tous les niveaux, du Premier ministre aux groupes représentatifs
de la société civile. Malgré tout, ni la mission de
contacts directs ni la mission de haut niveau n’ont réussi à
persuader le gouvernement de satisfaire à ses obligations.
Les membres travailleurs ont ajouté que, bien qu’il affirme
le contraire, le gouvernement n’a pas communiqué
copie du projet de loi sur le Conseil pour les médias. Ce
projet de loi tend à instaurer des restrictions à la nomination
des candidats aux élections syndicales et à leurs
conditions d’éligibilité, ce qui va directement à l’encontre
des objectifs de la convention no 87. Alors que les organes
de contrôle de l’OIT ont demandé que certains articles de
ce projet de loi soient modifiés, le gouvernement s’est
contenté d’affirmer qu’il lui faut plus de temps. Pour ce
qui est des dispositions permettant à l’employeur de licencier
un travailleur pendant une grève, le gouvernement
argue que ces dispositions ont pour but de dissuader les
travailleurs d’éviter de respecter les procédures préalables
à une grève. De nombreuses autres lois contiennent des
dispositions similaires, mais les recommandations formulées
à ce sujet par la mission de haut niveau sont restées
sans suite. En dépit des diverses missions effectuées par
l’OIT au Swaziland, les arrestations et violences à l’égard
des syndicalistes et des défenseurs des droits de l’homme
ou des manifestants pacifiques se poursuivent. Des travailleurs
qui avaient mené une grève pacifique dans
l’industrie textile ont été licenciés et les manifestants ont
fait l’objet d’attaques malveillantes, en violation flagrante
des droits des travailleurs. Le Swaziland a ratifié de son
plein gré la convention no 87. Par ce geste, il s’est obligé à
reconnaître les libertés syndicales qu’elle énonce et à appliquer
la convention en droit et dans la pratique, dans sa
lettre comme dans son esprit. Les membres travailleurs
ont évoqué diverses mesures prises par la police contre
des syndicalistes, démontrant que le pluralisme n’est pas
accepté au Swaziland. Le système de gouvernement autocrate
étouffe la société civile, syndicats compris. Les travailleurs
soupçonnent que c’est à des fins malintentionnées
que le gouvernement s’oppose à la reconnaissance de
la liberté syndicale pour le personnel pénitentiaire, en lui
refusant même la possibilité de constituer un syndicat, en
partie à cause des actes commis contre les syndicalistes
incarcérés.
Estimant que les décrets ont toujours servi à circonvenir
le processus législatif et ne servent que les intérêts des
pouvoirs publics, les membres travailleurs ont affirmé
que, si cette pratique devait se systématiser, tout espoir de
démocratie sur le lieu de travail serait à jamais interdit
aux travailleurs du Swaziland. L’OIT encourage toujours
les Etats Membres à s’engager dans le dialogue social,
dans le but de garantir que les droits des travailleurs
soient respectés. Or, dans ce domaine, plusieurs lois et
décrets toujours en vigueur ont des effets véritablement
punitifs à l’égard des travailleurs. Ressuscitant certaines
pratiques de l’ère coloniale, la police s’immisce dans les
réunions et les conférences syndicales. Dans sa teneur
actuelle, la loi sur les relations de travail entraîne des dissensions
et n’apparaît pas nécessaire, alors même que la
Communauté de développement de l’Afrique australe,
dont le Swaziland fait partie, encourage ses membres à
16 Partie II/71
harmoniser leurs lois en vue d’une intégration économique
régionale. Les membres travailleurs ont rappelé que
la commission d’experts avait dûment pris note de
l’engagement pris sur une base tripartite en vue de la
constitution d’un sous-comité consultatif tripartite spécial
dans le cadre du Comité directeur de haut niveau pour le
dialogue social, qui serait chargé d’examiner l’impact de
la Constitution sur les droits consacrés par la convention
no 87, et d’adresser à l’autorité compétente des recommandations
propres à l’élimination des divergences entre
les dispositions en vigueur et la convention. En octobre
2007, cette décision a été entérinée et la liste des membres
du comité directeur a été publiée. Malheureusement, cette
initiative n’a pas produit de résultats. A ce jour, on ne voit
toujours aucun signe d’un programme de révision de la
législation, et la situation ne fait qu’empirer. Les membres
travailleurs ont souligné que le gouvernement du Swaziland
n’est pas une entité isolée mais qu’au contraire il doit
coexister avec les citoyens de ce pays. Les arrestations,
les emprisonnements et autres formes d’oppression ne
donnent pas une bonne image du Swaziland. Les décrets
en question vont à l’encontre de la paix. Or la paix et la
justice sociale sont les fondements de l’OIT et répondent
aux aspirations de l’humanité entière. Le gouvernement
du Swaziland semble résolu à continuer à infliger des
souffrances aux travailleurs, et à fouler aux pieds le
concept de dialogue social. L’instauration d’une structure
tripartite opérationnelle et d’un sous-comité pour examiner
la Constitution et la notion de constitutionnalité est
une condition fondamentale pour garantir une véritable
démocratie dans le monde du travail. Les membres travailleurs
ont estimé qu’il valait mieux éviter de parler de
changement de régime dans le contexte de l’Afrique subsaharienne,
compte tenu des connotations malencontreuses
de cette formule. Les droits fondamentaux des travailleurs
n’ont rien à voir avec un changement de régime.
Les propos du représentant gouvernemental concernant
plusieurs questions ne font qu’apporter des arguments aux
travailleurs dans leur dénonciation des actes du gouvernement,
de la police et des autres organes. Les syndicats
détiennent des preuves des arrestations et tortures subies
par un certain nombre de personnes, mais la question reste
posée des suites que les autorités y donneront. A l’heure
même où se déroulent les discussions de la présente
commission, le gouvernement s’apprête à adopter de nouvelles
lois qui porteront atteinte aux droits des travailleurs.
Les membres employeurs ont fait part de leurs doutes
concernant les progrès allégués par le gouvernement du
Swaziland. La législation nationale est restée presque
inchangée depuis le premier examen du cas en 1996 et
l’exigence de 50 pour cent de travailleurs pour former un
syndicat ne constitue pas un progrès, car ce seuil est bien
trop élevé. Ce cas reflète une histoire ininterrompue de
répression de la liberté d’expression, de brutalités policières
et d’oppression. Les membres employeurs ont exprimé
leur incrédulité à l’égard de la déclaration du gouvernement
selon laquelle les questions soulevées pourraient
être résolues. Ils ont également exprimé de sérieux doutes
quant à la possibilité de voir cette situation s’améliorer
dans un futur proche.
La membre gouvernementale de la Norvège, s’exprimant
au nom des membres gouvernementaux des pays nordiques
(Danemark, Finlande, Suède et Norvège), a déclaré
que la situation des droits de l’homme au Swaziland, y
compris le droit syndical et le droit des travailleurs
d’organiser et de participer à des grèves légales conformément
à la convention no 87, est un cas déjà ancien que
cette commission a examiné à plusieurs reprises. Elle a
pris note des allégations relatives aux atteintes à
l’exercice des activités syndicales et aux licenciements de
travailleurs ayant pris part à des actions revendicatives
légales. Le fait que la CSI ait fait état de graves actes de
violence et de brutalité commis par les forces de sécurité
contre les militants et dirigeants syndicaux est également
préoccupant. Elle a demandé au gouvernement de répondre
en détail à ces allégations. Son gouvernement a également
noté que la commission d’experts a une fois de
plus souligné la non-conformité de certains textes de loi
avec la convention no 87. Si la commission d’experts a
reconnu que le projet de loi portant modification de la loi
sur les relations de travail a pris en compte certains de ses
commentaires, certaines questions n’ont toujours pas été
réglées. Notamment, la législation nationale ne garantit
toujours pas le droit des travailleurs de se syndiquer et
d’organiser des actions revendicatives légales, comme le
prévoit la convention. Elle a demandé instamment au
gouvernement du Swaziland de continuer à avoir recours
à l’assistance technique du Bureau de façon à mettre la
législation en conformité avec la convention no 87, et de
fournir des informations détaillées au sujet des actes de
violence dont il est fait état à l’encontre de militants syndicaux
et de personnes ayant participé à des grèves légales
et pacifiques.
Le membre travailleur du Swaziland a indiqué que le
Swaziland est encore malheureusement sur la liste des
pays violant la convention no 87. Depuis plus de dix ans,
l’OIT demande au gouvernement de ne pas mettre en oeuvre
la loi de 1963 sur l’ordre public et d’abroger le décret
de proclamation de l’état d’urgence de 1973. Toutefois, la
loi de 1963 continue d’être appliquée et le gouvernement
déclare que la nouvelle Constitution reprend le décret de
1973. En conséquence, la nouvelle Constitution, comme
le décret de 1973, ne respecte pas la doctrine de séparation
des pouvoirs, interdit les partis politiques et assure
seulement l’accès à un nombre très limité de droit fondamentaux.
L’orateur a fait état d’un certain nombre de violations
flagrantes de la convention no 87, constamment
perpétrées par le gouvernement, telles que: l’arrestation et
la détention de travailleurs d’usines textiles, le plus souvent
des femmes, qui avaient participé à une grève légale,
certains d’entre eux ayant été gravement blessés par la
police; la détention et l’interrogation par la police de dirigeants
syndicaux et autres travailleurs ayant participé aux
manifestations de Sandton et de Johannesburg, en vue de
remettre une pétition au Sommet de la Communauté de
développement de l’Afrique australe; le blocage d’une
manifestation légale par la police en septembre 2008;
l’ingérence de la police dans les autres événements organisés
par les travailleurs ainsi que l’arrestation des militants.
L’orateur a indiqué que certains partis politiques ont
été interdits en vertu de la loi sur le terrorisme et que le
projet de loi sur les fonctionnaires a été élaboré par le
gouvernement, sans qu’il ait sollicité l’avis du Conseil
consultatif du travail. En conclusion, il a déclaré que le
système de gouvernance au Swaziland est profondément
antidémocratique, économiquement injuste et socialement
discriminatoire. Le gouvernement évite systématiquement
de recourir au seul outil permettant la gestion des conflits,
à savoir un dialogue social accompagné de l’assistance
technique du Bureau.
La membre employeuse du Swaziland a indiqué que le
Comité tripartite de rédaction a achevé ses travaux et que
le projet de loi a récemment été adopté par le Conseil
consultatif du travail. Toutes les questions soulevées par
la commission d’experts ont été traitées de manière adéquate.
En ce qui concerne l’application de la convention
dans la pratique, l’oratrice a indiqué n’avoir eu connaissance
d’aucun licenciement de travailleurs ayant participé
à une grève légitime. Si tel avait été le cas, le tribunal des
relations professionnelles du Swaziland serait l’autorité
compétente pour examiner de tels cas de violations et
punir de manière effective les employeurs jugés coupables
d’atteintes aux droits des travailleurs. L’oratrice a
instamment recommandé à tous les membres de sa fédération
de se conformer à la législation à cet égard. Les employeurs
ne sont d’une manière générale pas toujours en
faveur des grèves en raison de leur impact négatif sur
16 Partie II/72
l’économie et les affaires. Un nombre significatif de grèves
et d’actions revendicatives est dû à la réticence de
s’engager pleinement dans le dialogue social. Même si le
gouvernement du Swaziland s’est engagé dans le dialogue
social, les progrès sont désespérément lents et les infrastructures
récemment établies ne sont pas fréquemment
utilisées. Cependant, dans le contexte de la crise économique
de grande ampleur que l’on traverse actuellement,
ce n’est que par le dialogue social qu’un pays peut aller
de l’avant.
Le membre travailleur de l’Afrique du Sud a rappelé que
la commission d’experts examine ce cas depuis plusieurs
années. Malgré l’engagement pris par le gouvernement
d’accomplir des progrès, la situation ne s’est pas améliorée
en pratique. L’adoption en 2000 de la loi sur les relations
de travail semblait constituer une avancée positive.
Cependant, le gouvernement applique toujours, à
l’encontre des travailleurs et de leurs organisations, des
dispositions relevant de l’état d’urgence telles que la loi
de 1963 sur l’ordre public et l’article 12 du décret de 1973
relatif aux droits des syndicats, violant ainsi les libertés
civiles. Depuis 1973, le gouvernement actuel gouverne le
pays par l’emploi de la force, l’impunité, l’absence de
dialogue social, la négation de l’Etat de droit, la brutalité
à l’encontre des citoyens lors de manifestations pacifiques
et le non-respect des autorités judiciaires. En mai 2008, le
parlement du Swaziland a adopté une loi controversée qui
autorise le Premier ministre à qualifier quasiment toute
personne ou activité de terroriste. La mission panafricaine
d’observation a conclu que les élections parlementaires de
septembre 2008 avaient violé les droits démocratiques
fondamentaux, et une équipe d’experts du Commonwealth
a recommandé qu’une réforme de la Constitution
soit entreprise afin d’assurer un pluralisme politique. Il ne
sera pas possible de constater des progrès tangibles tant
que la loi sur les relations de travail et la loi sur le terrorisme
ne seront pas abrogées, que les arrestations et les
détentions de dirigeants politiques et syndicaux continueront,
que la révision de la Constitution permettant au peuple
de choisir démocratiquement le gouvernement ne sera
pas entreprise, et qu’un dialogue social véritable, authentique,
orienté vers les résultats et visant à une justice sociale
et économique, au travail décent et à une gouvernance
appropriée ne sera pas instauré. Les syndicalistes et les
militants politiques qui craignent pour leur vie se réfugient
en Afrique du Sud. Le cas du Swaziland devrait, par
conséquent, être mentionné dans un paragraphe spécial.
Le membre travailleur du Botswana a souligné que la
monarchie contourne la déclaration des droits consacrés
par la Constitution en rétablissant, par la petite porte, le
décret de 1973 relatif à l’état d’urgence, avec l’introduction
de la loi de 2008 relative à la répression du terrorisme.
Cette loi supprime l’ensemble des droits fondamentaux
garantis par la Constitution et par la Déclaration
universelle des droits de l’homme, laquelle consacre les
libertés fondamentales d’opinion, d’expression, d’association,
de croyance et de conscience. L’orateur a exprimé
sa surprise et de la consternation face à l’arrestation de
Mario Masuku et Thulani Naseko. Mario Masuku, leader
du Mouvement démocratique uni du peuple, est accusé
d’avoir eu des activités en lien avec le terrorisme ou de
sédition. Thulani Naseko, un avocat spécialisé dans les
questions relatives aux droits de l’homme, a été accusé
d’avoir fait des déclarations appelant à la sédition le jour
de la fête du travail de 2009. Leur arrestation et celle
d’autres personnes sont des indications claires de
l’inexistence de la liberté syndicale et de la liberté
d’expression au Swaziland. Jan Sithole, secrétaire général
de la Fédération des syndicats du Swaziland, est
l’exemple même d’un militant syndical soumis à la torture
et au harcèlement par les forces de sécurité. L’orateur a
condamné les arrestations de Mario Masuku et Thulani
Naseko et a appelé à leur libération immédiate et inconditionnelle.
Il a également demandé au Bureau de fournir
une assistance au gouvernement en ce qui concerne sa
réforme législative et a souligné que la grève est une forme
d’exercice de la liberté d’expression.
Le membre travailleur du Sénégal a rappelé que le cas du
Swaziland a été discuté plusieurs fois dans cette enceinte,
et que travailleurs et employeurs se sont toujours entendus
pour souligner la gravité de ce cas. Les commentaires de
la commission d’experts restent préoccupants malgré les
conclusions sévères formulées par la Commission de la
Conférence depuis de nombreuses années. Le gouvernement
ratifie les conventions de l’OIT mais trouve à chaque
fois le moyen de se soustraire à ses obligations et les
travailleurs se voient toujours dénier leurs droits fondamentaux
de s’organiser librement. Le silence que le gouvernement
oppose à la demande de la commission
d’experts est le témoignage de sa volonté de se soustraire
à ses obligations. L’orateur s’est joint aux regrets exprimés
par la commission d’experts au sujet du refus persistant
du gouvernement de modifier sa législation de 1973,
qui établit un régime d’exception depuis plus de trente-six
ans et qui utilise l’ordre public comme prétexte pour réprimer
les grèves légitimes et pacifiques. Le gouvernement
semble avoir oublié l’ordre public social et la responsabilité
d’assurer la mise en oeuvre de la convention.
L’orateur a considéré que ce cas doit être qualifié de défaut
continu d’application des conventions sur la liberté
syndicale. Il a rappelé la gravité extrême de la situation
sur le terrain, comme en a témoigné M. Sithole lors d’une
visite au Sénégal. Une telle situation requiert que ce cas
soit mentionné dans un paragraphe spécial du rapport de
la commission.
La membre travailleuse de l’Allemagne, s’exprimant au
nom des membres travailleurs de l’Union européenne, a
évoqué les relations entre l’Union européenne et le Swaziland,
qui sont basées sur l’Accord de Cotonou et sur
l’appartenance du Swaziland à la Communauté de développement
de l’Afrique australe. La mission de haut niveau
de l’Union européenne qui s’est rendue au Swaziland
en mai 2009 a constaté que la Commission des droits
de l’homme n’avait pas encore été mise en place et que la
Constitution n’avait toujours pas été amendée. Elle a également
noté que la liberté de réunion n’était toujours pas
garantie; que la loi sur le terrorisme était utilisée pour
interdire l’organisation de manifestations par la société
civile, y compris les syndicats, et que les responsables des
meurtres et des actes de torture à l’encontre des membres
de la société civile n’étaient toujours pas poursuivis.
L’oratrice a indiqué que l’Accord de Cotonou conditionne
l’aide au développement à la démocratie et aux droits de
l’homme. Tel qu’illustré ci-dessus, le Swaziland n’a pas
accompli de progrès en matière de droits de l’homme,
mais a au contraire régressé. Les membres travailleurs de
l’Union européenne attendent de cette dernière qu’elle tire
les conclusions qui s’imposent de l’absence de tout progrès
tangible en ce qui concerne la démocratie et les droits
de l’homme, cela ne signifie pas que l’aide au développement
pour le Swaziland doit être interrompue. Toutefois,
l’Union européenne doit demander au gouvernement
du Swaziland de respecter les engagements qu’il a pris en
vertu de l’Accord de Cotonou et de mettre en oeuvre les
recommandations formulées par la mission de haut niveau
de l’Union européenne.
Le représentant gouvernemental du Swaziland a déclaré
être encouragé par les commentaires constructifs faits par
certains membres de la commission et a assuré que tous
ces commentaires seront dûment pris en considération.
Etant donné qu’il avait déjà couvert la plupart des commentaires
dans sa déclaration principale, il s’est abstenu
de les répéter. Bien que ce ne soit pas la première fois que
le Swaziland comparaisse devant la commission au sujet
de la convention, il a répété que ceci ne signifie pas que
rien n’a été fait à cet égard. D’importants progrès ont été
réalisés en ce qui concerne la réforme législative visant à
garantir que la convention sera respectée à l’avenir. A cet
16 Partie II/73
égard, la loi de 2000 sur les relations de travail a été
amendée à plusieurs reprises depuis sa promulgation et
d’autres amendements sont en cours d’adoption, tout ceci
avec la pleine participation des partenaires sociaux et
l’assistance du BIT. Pour ce qui est du dialogue social, le
Royaume du Swaziland a créé un Comité national de haut
niveau pour le dialogue social, composé de ministres du
gouvernement, de membres du parlement, de personnes
issues du monde des affaires, ainsi que de travailleurs. Il a
souhaité informer la commission que les partenaires sociaux
tripartites du Swaziland se sont mis d’accord sur
l’élaboration d’un programme par pays de promotion du
travail décent et sur la centralisation du dialogue social
afin d’atteindre les objectifs du travail décent. Le dialogue
social sert également de point d’entrée pour l’assistance
technique du BIT. Le gouvernement s’engage à travailler
avec les partenaires sociaux afin de réaliser leurs objectifs
au niveau national et améliorer la qualité de vie. Le soutien
technique du BIT est nécessaire afin que l’initiative
qui a été lancée au Swaziland en ce qui concerne le développement
du dialogue social puisse être menée à son
terme. Les projets d’amendements législatifs ont été soumis
au BIT selon la pratique habituelle. Le ministère a
arrêté un programme afin que les projets soient adoptés
par les autorités législatives compétentes et rendra compte
des progrès réalisés à cet égard à la commission d’experts
en novembre 2009.
Les membres travailleurs ont rappelé que la commission
avait décidé en 2005 qu’une mission de haut niveau se
rendrait au Swaziland, à la suite de laquelle un accord
tripartite avait été signé en 2007. Toutefois, pas la moindre
mesure n’a été prise à ce jour pour mettre en oeuvre
l’accord et, sur les deux dernières années écoulées, la situation
des syndicats et celle en matière de droits fondamentaux
de la personne s’étaient dégradées, par rapport
notamment aux dispositions de la loi sur le terrorisme. Il
n’existe pas de dialogue social au Swaziland, et le gouvernement
doit prendre des mesures effectives pour mettre
en oeuvre l’accord tripartite de 2007. Les mesures devant
être immédiatement prises concernent la révision de
la Constitution en vue de la mettre en conformité avec la
convention no 87 et la formulation de recommandations
aux autorités compétentes en vue d’éliminer, tant en droit
que dans la pratique, les divergences avec les conventions
nos 87 et 98, en tenant compte des commentaires des organes
de contrôle de l’OIT. Ils ont demandé à être informés
des progrès effectués en matière de dialogue tripartite
en ce qui concerne l’évaluation du projet de loi relatif au
secteur public et ont demandé au gouvernement de faire
rapport au Conseil d’administration en novembre 2009.
Ils ont demandé l’abrogation de la loi sur le terrorisme. Le
Bureau a offert sa coopération technique au gouvernement
du Swaziland afin de rendre la Constitution, la loi de
1963 sur l’ordre public, le décret de 1973 et la loi sur les
relations de travail pleinement conformes aux conventions
de l’OIT. De plus, ils ont appelé le gouvernement à libérer
immédiatement et sans condition Mario Masuku et Thulani
Maseko. En outre, le gouvernement doit mettre un
terme aux brutalités exercées à l’encontre des syndicalistes
et des défenseurs des droits de la personne; et à la répression
violente des rassemblements pacifiques et des
actions civiques; respecter les droits de la personne; et
agir immédiatement pour mettre fin à l’impunité dont
jouissent les responsables de la répression antisyndicale.
Eu égard à la longue tradition de violence et à la situation
actuelle, ils ont demandé que ce cas soit mentionné dans
un paragraphe spécial. Etant donné que tous les syndicalistes
du Swaziland présents à la Conférence risquent
d’être victimes de persécutions lorsqu’ils rentreront dans
leur pays, ils ont demandé au Bureau d’être vigilant et de
prendre des mesures pour garantir leur sécurité et une
protection suivie.
Les membres employeurs ont pris note du consensus au
sein de la commission quant au manque de dialogue social.
Au paragraphe 62 de son rapport, la commission
d’experts a souligné la nécessité d’une assistance technique
dans ce cas. Il est clair que l’assistance technique
serait utile, étant donné que des progrès n’ont pas été enregistrés
depuis longtemps. Il est évident que, depuis la
première discussion de ce cas en 1996, le gouvernement
sait ce qu’il doit faire, mais qu’il ne l’a pas fait. Les
membres employeurs sont d’accord avec la proposition
des membres travailleurs de faire figurer les conclusions
sur ce cas dans un paragraphe spécial afin de mettre en
évidence la nécessité pour le gouvernement de mettre
enfin en oeuvre la convention no 87, et notamment
d’adhérer à la liberté d’expression et au dialogue social, et
de mettre un terme à la répression policière. Le gouvernement
doit rapidement adopter les lois nécessaires pour
traiter de manière appropriée les questions identifiées par
la commission d’experts.
Conclusions
La commission a pris note de la déclaration du représentant
gouvernemental et de la discussion qui a suivi.
La commission a observé que les commentaires de la
commission d’experts se réfèrent depuis de nombreuses années
à la nécessité d’abroger le décret proclamant l’état
d’urgence, ses règlements d’application, et la loi sur l’ordre
public, ainsi qu’aux restrictions au droit syndical du personnel
pénitentiaire et des travailleurs domestiques, au droit des
organisations de travailleurs d’élire leurs dirigeants librement
et d’organiser leurs activités et programmes d’action.
La commission a pris note de la réponse détaillée du gouvernement
aux allégations relatives à l’arrestation et à la
détention du secrétaire général de la Fédération des syndicats
du Swaziland (SFTU). Bien que le gouvernement reconnaisse
que la police a convoqué M. Sithole à son siège pour le
questionner sur de graves insultes qu’il aurait proférées à
l’égard du roi en sa présence, le représentant gouvernemental
a insisté sur le fait que cela n’était en rien lié à ses activités
syndicales et qu’il n’avait pas été détenu plus longtemps.
Le représentant gouvernemental a fourni des informations
additionnelles concernant les autres allégations et, tout en
reconnaissant que certains éléments étaient véridiques, il a
souligné qu’il y avait aussi plusieurs graves inexactitudes. Il
a de plus indiqué que la demande de modification de la
Constitution nationale avait déjà été soumise au Comité directeur
de haut niveau pour le dialogue social, tel que demandé
par la mission de haut niveau de l’OIT de 2006. Il a
en outre indiqué qu’un projet de loi élaboré au sein du
Conseil consultatif du travail modifiait quelques dispositions
contestées par la commission d’experts et qu’il serait présenté
au parlement cette année. Enfin le représentant gouvernemental
a souligné que les droits des travailleurs étaient
pleinement garantis par la Constitution de 2005.
La commission a noté avec préoccupation la réponse du
gouvernement aux allégations soumises par la Confédération
syndicale internationale (CSI) à la commission d’experts
concernant les actes de violence perpétrés par les forces de
l’ordre et la détention de travailleurs pour avoir exercé leur
droit de grève, et s’est vue dans l’obligation de rappeler
l’importance qu’elle attache au plein respect des libertés
civiles fondamentales telles que la liberté d’expression, la
liberté de réunion et la liberté de la presse. La commission a
souligné qu’il relève de la responsabilité des gouvernements
d’assurer le respect du principe selon lequel le mouvement
syndical ne peut se développer que dans un climat exempt de
violence, de menaces ou de peur et a appelé le gouvernement
à s’assurer de la libération de toute personne détenue pour
avoir exercé ses libertés civiles.
La commission a regretté que, bien que le gouvernement
ait bénéficié de l’assistance technique du BIT depuis un certain
temps maintenant, y compris par le biais d’une mission
de haut niveau, les amendements législatifs exigés depuis plusieurs
années n’avaient pas encore été adoptés. La commission
a prié instamment le gouvernement de prendre les mesures
nécessaires afin que les modifications demandées par la
commission d’experts soient finalement adoptées.
Notant avec préoccupation que le sous-comité consultatif
tripartite spécial du Comité directeur de haut niveau pour le
dialogue social ne s’était pas réuni depuis plusieurs mois, la
commission a souligné l’importance du dialogue social, particulièrement
en ces temps de crise économique, et a prié
instamment le gouvernement de réactiver le sous-comité
dans les plus brefs délais. La commission a mis l’accent sur
les demandes qu’elle avait adressées au gouvernement et qui
restent en suspens, concernant l’abrogation du décret de
1973, la modification de la loi de 1963 sur l’ordre public et
de la loi sur les relations de travail, et a exprimé le ferme
espoir que des progrès rapides et significatifs seraient accomplis
dans le projet de révision de la Constitution soumis
au Comité directeur de haut niveau pour le dialogue social
ainsi qu’à l’égard des autres lois et projets de loi contestés.
La commission a proposé que l’assistance technique du Bureau
soit poursuivie en ce qui concerne toutes les questions
susmentionnées. La commission a demandé au gouvernement
de soumettre, pour examen par la commission
d’experts à l’occasion de sa prochaine session, un rapport
détaillé contenant un calendrier pour la résolution de toutes
les questions en suspens. La commission a exprimé le ferme
espoir d’être en mesure de constater des progrès tangibles
l’année prochaine.
La commission a décidé d’inclure ses conclusions dans un
paragraphe spécial de son rapport.
16 Partie II/74

Document no 264
CIT, 99e session, 2010, Rapport de la Commission de
l’application des normes, pp. 16 Partie II/45-16 Partie
II/51 (Swaziland)

16 Partie II/1
Conférence internationale du Travail Compte rendu des travaux 16
99e session, Genève, 2010 DEUXIÈME PARTIE
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
DEUXIÈME PARTIE
OBSERVATIONS ET INFORMATIONS CONCERNANT CERTAINS PAYS
Table des matières
Page
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées
(articles 22 et 35 de la Constitution) ............................................................................................................ 5
A. Discussion sur les cas de manquements graves des Etats Membres à leurs obligations
de faire rapport et à leurs autres obligations liées aux normes ............................................................. 5
a) Manquements à l’envoi de rapports depuis deux ans ou plus sur l’application
des conventions ratifiées .............................................................................................................. 5
b) Manquements à l’envoi des premiers rapports sur l’application de conventions ratifiées ........... 5
c) Manquements à l’envoi d’informations en réponse aux commentaires
de la commission d’experts ......................................................................................................... 6
d) Informations écrites reçues jusqu’à la fin de la réunion de la Commission
de l’application des normes ......................................................................................................... 7
B. Observations et informations sur l’application des conventions .......................................................... 8
Convention no 29
Convention (no 29) sur le travail forcé, 1930 ....................................................................................................... 8
MAURITANIE (ratification: 1961) .................................................................................................. 8
MYANMAR (ratification: 1955) ..................................................................................................... 11
SOUDAN (ratification: 1957) .......................................................................................................... 11
Convention no 87
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 ........................................ 14
BÉLARUS (ratification: 1956) ........................................................................................................ 14
CAMBODGE (ratification: 1999) .................................................................................................... 20
CANADA (ratification: 1972) ......................................................................................................... 23
EGYPTE (ratification: 1957) .......................................................................................................... 28
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/45
SWAZILAND (ratification: 1978)
Un représentant gouvernemental, ministre du Travail et
de la Sécurité sociale, a déclaré que le gouvernement attache
beaucoup d’importance aux travaux de la Commission
de la Conférence et aux objectifs de l’OIT, et qu’il
s’emploie à toujours se conformer à la lettre et à l’esprit
des conventions de l’OIT ratifiées, dont la convention
no 87. Il entend démontrer que le Swaziland a accompli
des progrès importants dans la mise en application des
normes internationales du travail.
S’agissant de la loi sur les relations de travail (IRA), le
gouvernement a publié le projet d’amendement à l’IRA et
l’a déposé devant le parlement où il est actuellement
examiné. Le projet de loi répond à plusieurs points soulevés
par la mission de haut niveau de l’OIT ainsi que par la
commission, en ce qu’il: 1) accorde le droit de se syndiquer
aux travailleurs domestiques en élargissant la définition
du terme «entreprise» (article 2(1) b)); 2) prévoit
l’établissement d’un service minimum en cas de grève
dans les services sanitaires; 3) supprime les restrictions
légales concernant la désignation de candidats à des fonctions
de dirigeant syndical et leur éligibilité (article 3);
4) réduit la durée de la procédure de règlement des conflits
(articles 5 et 6); et 5) garantit que la Commission de
conciliation, de médiation et d’arbitrage (CMAC) ne supervise
les scrutins relatifs à une grève que sur la demande
des organisations syndicales (article 6 b)).
Quant au dialogue social, l’orateur a annoncé que le
Comité directeur national pour le dialogue social a été
nommé et qu’il comprend le ministre du Travail et de la
Sécurité sociale en tant que président, des représentants
des deux fédérations de travailleurs et des deux fédérations
d’employeurs, ainsi que le secrétaire principal, le
commissaire du travail et le conseiller juridique du ministère.
Ce comité est pleinement opérationnel et a convenu
de se réunir tous les mois en 2010. En outre, les discussions
relatives au programme national de promotion du
travail décent se sont achevées et les partenaires sociaux
doivent le signer prochainement.
Le représentant gouvernemental a rejeté avec vigueur
l’idée que la loi de 1963 sur l’ordre public serait utilisée
largement pour réprimer des grèves légitimes et pacifiques.
La loi ne s’applique pas aux réunions de syndicats
enregistrés légalement. Si toutefois une manifestation
devient violente, la police peut intervenir pour maintenir
l’ordre public. Sa présence est essentielle pour protéger à
la fois les droits des personnes qui participent à l’action
de grève et ceux des citoyens innocents. Il convient également
d’attirer l’attention de la commission sur la nomination,
en septembre 2009, des membres de la Commission
sur les droits de l’homme et l’administration publique.
Cet organisme autonome qui a pour mission de
protéger les droits de l’homme, dont les droits des travailleurs,
a commencé ses travaux. En ce qui concerne la négociation
collective pour le personnel pénitentiaire, le
gouvernement a pris la décision de modifier la loi sur les
prisons, en conformité avec la recommandation de la mission
de haut niveau de l’OIT.
Quant à l’application pratique de l’article 40 de l’IRA
concernant la responsabilité civile et pénale des travailleurs
et de leurs organisations, cet article ne porte pas
atteinte au droit de grève. Cela étant, les actions de grève
et de protestations deviennent de plus en plus violentes et
destructives pour les biens. Le gouvernement doit non
seulement veiller à ce que les travailleurs exercent librement
le droit de grève, mais aussi à sauvegarder les droits
des tiers. Les organisations de travailleurs doivent donc
s’assurer que seuls leurs membres prennent part à des
grèves légales et leur inculquer le sens des responsabilités.
En ce qui concerne l’abrogation du décret de proclamation
de l’état d’urgence (ci-après le décret de 1973),
c’est la Constitution de 2005 qui est la loi suprême du
pays. En dernier lieu, le Swaziland est déterminé à se conformer
aux normes internationales du travail et continuera
à s’acquitter de son obligation de soumettre des rapports.
Les membres travailleurs ont déclaré que le Swaziland a
une longue tradition de répression syndicale et c’est pourquoi
ce cas a été régulièrement examiné par cette commission
et a même figuré, l’année précédente, dans un
paragraphe spécial. Les faits sont malheureusement familiers
et les réponses du gouvernement, même si elles varient
quelque peu, ne laissent guère d’espoir
d’amélioration.
S’agissant tout d’abord des faits, il y a lieu de rappeler
qu’il s’agit de violences et de brutalités commises par la
police contre des syndicalistes et contre des manifestations
syndicales, de menaces de licenciement de syndicalistes
ayant fait grève dans le secteur du textile, de convocations
et d’arrestations de dirigeants syndicaux tels que
le secrétaire général de la Fédération des syndicats du
Swaziland (SFTU) et, tout récemment, il y a une semaine,
de perquisitions de domiciles privés avec usage d’armes
offensives.
Sur le plan législatif, la commission a constaté, lors de
chaque examen de ce cas, que le gouvernement n’avait
pas adopté les amendements sollicités depuis des années,
malgré l’assistance technique du BIT et la visite d’une
mission de haut niveau en 2006. Il convient de rappeler
qu’il est nécessaire de modifier l’IRA, en particulier sur
les points suivants: le contrôle exercé sur la désignation
de dirigeants syndicaux, la supervision des scrutins relatifs
à une grève, l’interdiction du droit de grève dans le
secteur de la santé et l’obligation d’avoir 50 pour cent des
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/46
travailleurs comme membres pour être reconnu comme
syndicat. Le gouvernement vient seulement de transmettre
au parlement les amendements à l’IRA sur lesquels le
Conseil consultatif sur les questions de travail s’est entendu
en 2009. Il n’y a donc aucune garantie que la nouvelle
loi soit adoptée et appliquée dans un proche avenir. En
outre, de nombreuses autres lois portent atteinte directement
ou indirectement aux activités syndicales: le décret
de 1973, qui aurait été abrogé par la nouvelle Constitution
– qui contient toutefois les mêmes dispositions; la loi de
1963 sur l’ordre public invoquée pour réprimer les grèves
légitimes et les manifestations pacifiques; la loi sur la
police utilisée pour arrêter les dirigeants syndicaux et
confisquer les biens syndicaux; la loi sur les prisons interdisant
au personnel pénitentiaire de se syndiquer; et enfin,
et surtout, la loi sur la suppression du terrorisme servant à
justifier des actions contre les activités syndicales.
Le dialogue social est également une source de préoccupation.
Le gouvernement évoque l’existence d’une
commission de haut niveau pour le dialogue social. Si
celle-ci a bien existé, elle a toutefois été dissoute en 2009
et remplacée par un comité d’un niveau nettement inférieur
composé des partenaires sociaux et des seuls ministres
chargés des questions sociales, comité qui ne s’est
pas réuni depuis des mois. Ce dialogue social sans mot
illustre l’approche du gouvernement en la matière qui ne
fait qu’annoncer des réformes ou la création de commissions
sans que rien ne soit concrétisé.
Les membres employeurs ont rappelé que ce cas n’est
hélas qu’une longue histoire de non-respect de la convention.
Il a fait l’objet de 17 observations de la part de la
commission d’experts et est examiné par la Commission
de la Conférence pour la neuvième fois. En ce qui concerne
l’intervention qu’ils ont faite plus tôt au cours de la
discussion générale, les membres employeurs ont souhaité
souligner que, selon eux, la convention no 87 ne prévoit
pas le droit de grève ni ne garantit certaines formes de
grève. Par conséquent, il n’est pas possible d’être
d’accord avec les commentaires de la commission
d’experts concernant la nécessité d’assurer que le droit de
grève soit reconnu dans les services sanitaires, que les
sanctions imposées aux grévistes ne portent pas atteinte
au droit de grève et que les travailleurs puissent s’engager
dans des grèves de solidarité sans encourir de sanctions. Il
aurait également été utile pour les discussions de la commission
d’être en mesure de consulter les commentaires
de 2009 de la Confédération syndicale internationale
(CSI) concernant les allégations de détention du secrétaire
général de la SFTU ainsi que la réponse du gouvernement.
Il subsiste deux questions fondamentales dans ce cas:
1) le défaut persistant d’adoption d’une législation nationale
garantissant la liberté syndicale et la protection du
droit d’organisation; et 2) le défaut de participation effective
au dialogue social. En ce qui concerne la première
question, la dure réalité est que, plus de 30 ans après la
ratification de la convention, et en dépit de la mention du
cas dans un paragraphe spécial du rapport de la commission
de l’année dernière et l’assistance technique fournie
par le BIT, y compris une mission de haut niveau en
2006, les amendements à l’IRA n’ont pas encore été
adoptés. Par conséquent, on ne peut que demeurer très
sceptique quant au fait que la législation sera finalement
modifiée. Rappelant que, en ratifiant la convention, le
gouvernement s’est engagé à donner effet à ses articles 2,
8 et 11, les membres employeurs ont déclaré que le gouvernement
doit continuer à se prévaloir de l’assistance
technique du BIT, afin de traiter de manière urgente tous
les problèmes en suspens portant sur la législation, qui ont
été mentionnés par la commission d’experts dans son observation.
S’agissant de la seconde question, notant que le Souscomité
tripartite des affaires légales et institutionnelles du
Comité directeur de haut niveau pour le dialogue social ne
s’est pas réuni depuis plusieurs mois et, en l’absence de
toute information concernant un nouveau comité de niveau
inférieur, les membres employeurs ont prié instamment
le gouvernement de relancer sans délai tous les efforts
pour engager le dialogue social. L’inaction du gouvernement
jusqu’à ce jour jette de sérieux doutes sur sa
volonté de se conformer aux exigences de la convention,
s’agissant d’un cas caractérisé par des allégations permanentes
de violations de la liberté d’expression, par des
brutalités policières et par l’oppression. Lorsque l’on
examine le rapport de la commission d’experts, il est difficile
de conclure qu’il y a eu de véritables progrès. Les
membres employeurs ont donc respectueusement invité le
gouvernement à donner aujourd’hui: 1) un calendrier clair
et sans équivoque pour l’adoption d’une législation nationale
donnant effet à la convention, en particulier aux articles
2, 8 et 11; et 2) un engagement clair et non équivoque
de prendre effectivement part au dialogue social.
Le membre travailleur du Swaziland a déclaré que le déni
de la liberté syndicale a atteint un niveau déplorable au
Swaziland, et que l’atmosphère est devenue si menaçante
et oppressante que des travailleurs ont perdu la vie dans
leur lutte pour s’associer et se réunir librement. L’absence
de dialogue social est l’un des facteurs clés qui contribuent
aux défis sociaux, politiques et économiques auxquels
le pays est confronté. Malgré la promesse faite lors
de la discussion de 2009 de convoquer le Comité directeur
de haut niveau pour le dialogue social, qui est présidé
par le Vice-Premier ministre, le gouvernement a fait le
contraire en dissolvant ce comité en décembre 2009 et en
le remplaçant par un comité d’un niveau inférieur qui sera
présidé par le ministre du Travail et de la Sécurité sociale.
Contrairement à l’organe précédent, le Comité national
pour le dialogue social actuel ne dispose d’aucun budget,
les partenaires sociaux doivent supporter les coûts, et aucune
question importante ni la mise en place d’un sous
comité n’ont encore été discutées. Ces mesures sont manifestement
destinées à entraver les travaux du comité,
compte tenu de la préférence du gouvernement pour un
soi-disant «processus de dialogue de partenariat intelligent
» qui n’est pas représentatif, mais qui est entièrement
financé. Ce qui précède démontre clairement que le gouvernement
ne soutient pas le dialogue social.
En ce qui concerne l’amendement ou l’abrogation des
dispositions législatives non conformes, il convient de
souligner que la Constitution de 2005 ne peut annuler les
effets du décret de 1973, puisque la Constitution ne peut
invalider qu’une loi qui est incompatible avec ses dispositions.
Le décret de 1973 est donc toujours en vigueur. Les
actions syndicales pacifiques de protestation continuent
d’être violemment perturbées sous le couvert de
l’application de la loi sur l’ordre public ou de la loi sur la
suppression du terrorisme. Les syndicats demeurent civilement
et pénalement responsables des actes qui surviennent
au cours des actions de protestation en vertu de
l’article 40 de l’IRA. Dans ce contexte, l’orateur a nié que
des actes de violence ont été initiés par les travailleurs au
cours des actions de protestation. Le gouvernement a
soumis le projet d’amendement à l’IRA au Conseil consultatif
sur les questions de travail seulement en mai 2010,
bien que le processus de rédaction tripartite ait pris fin
avant le mois de juin 2009, ce qui prouve que les déclarations
du gouvernement alléguant des progrès sont trompeuses.
De plus, l’orateur a indiqué qu’il ne sait pas si des
procédures ont été entamées afin de modifier la loi sur les
prisons dans le but de garantir au personnel pénitentiaire
le droit d’organisation.
La loi sur la suppression du terrorisme est utilisée pour
réprimer les voix dissidentes des syndicats et des partis
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/47
politiques. Le terme «acte de terrorisme» est défini
comme tout acte ou action qui oblige le gouvernement à
accomplir ou à s’abstenir de faire quelque chose. Compte
tenu du rôle de surveillance exercé par les syndicats pour
s’assurer que les actions du gouvernement sont dans
l’intérêt des travailleurs, les activités syndicales peuvent
facilement entrer dans cette vaste définition qui couvre à
la fois les moyens pacifiques et violents. La loi est utilisée
pour supprimer les activités syndicales sous le prétexte de
vouloir supprimer le terrorisme. Les célébrations de la
fête du travail du 1er mai 2010 ont été violemment perturbées
par des fouilles physiques, des confiscations et des
arrestations. M. Sipho Jele a été inculpé en vertu de la loi
sur la suppression du terrorisme et, après trois jours de
garde à vue, il a été déclaré qu’il s’était pendu en prison.
Contrairement aux instructions de la police, qui voulait
que l’enterrement ait lieu le jour suivant, la famille a demandé
une autopsie indépendante. Les obsèques, qui ont
eu lieu le 15 mai, ont été interrompues par 400 policiers
armés et, à l’enterrement, le 21 mai, le leader du Mouvement
démocratique uni du peuple (PUDEMO) a été arrêté.
Le gouvernement a depuis ouvert une enquête sur la
mort de M. Jele, mais celle-ci se limite à la détermination
des causes de décès et ne couvre pas le comportement de
la police le 1er mai. En novembre 2009, des agents de police
ont maintenu en détention les organisateurs du Syndicat
des travailleurs du transport et des activités connexes
du Swaziland, ont confisqué les formulaires d’adhésion et
interrogé tous les dirigeants syndicaux, sur la base
d’ordonnances interdisant la syndicalisation des travailleurs
des transports publics. En conclusion, le Swaziland
s’est transformé en un État policier. Le gouvernement doit
être encouragé à éliminer d’urgence toutes les entraves
aux droits et libertés fondamentaux.
Une membre employeuse du Swaziland a salué les progrès
significatifs accomplis par le gouvernement en ce qui
concerne les amendements législatifs. Le projet de loi
modifiant l’IRA vise à reconnaître aux travailleurs domestiques
le droit de s’organiser ainsi que le droit de
grève dans les services sanitaires, à éliminer les restrictions
légales concernant la nomination et l’éligibilité des
candidats à des fonctions de dirigeant syndical, à assurer
que le CMAC ne puisse pas superviser les scrutins relatifs
à une grève, à moins qu’on lui demande de le faire, et à
diminuer la durée des procédures de règlement des différends.
Bien que la mise en oeuvre de ces dispositions
constitue un défi, il convient d’être optimiste car le pays a
fait un pas dans la bonne direction.
Il est regrettable qu’une fois encore l’application de
cette convention fondamentale par le Swaziland soit examinée
par la commission. Les questions soulevées auraient
pu être résolues si le gouvernement avait véritablement
engagé un processus de dialogue social. Les employeurs
du Swaziland croient fermement dans le dialogue
social, en particulier dans le contexte économique
difficile auquel le pays est confronté. Il faut se féliciter de
la mise en place du Comité directeur national pour le dialogue
social, qui a prévu de se réunir une fois par mois
pour aborder les principales questions préoccupant les
partenaires sociaux. On ne peut qu’être déçu par le faible
rythme du processus de dialogue social. Cette question a
été portée maintes fois à l’attention des autorités concernées.
Le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a fait
preuve de bonne volonté, mais on ne peut pas en dire autant
d’autres composantes du gouvernement. Tant que les
partenaires sociaux et le gouvernement sont engagés dans
le processus de dialogue social, il est possible de réaliser
des progrès sur toutes les questions en suspens dans ce
cas. L’oratrice a, par conséquent, fermement recommandé
la mise en place, à titre prioritaire, d’un cadre effectif de
dialogue social et a souhaité que le cas du Swaziland ne
soit pas inclus dans un paragraphe spécial du rapport de la
commission.
Un autre membre employeur du Swaziland a déclaré
qu’une solution ne pouvait être trouvée que dans le cadre
d’un dialogue social constructif et s’est engagé à persuader
le gouvernement à aborder toutes les questions soulevées
par la commission. Requérant un environnement
politique stable et libre dans lequel les entreprises peuvent
opérer, son organisation n’est pas engagée dans la politique
et vise à jouer un rôle de modérateur. Les réunions
du Comité directeur national pour le dialogue social ont
commencé et les partenaires sociaux se sont engagés à en
faire un succès. Par conséquent, le cas ne devrait pas être
inclus dans un paragraphe spécial.
La membre gouvernementale de la Norvège, s’exprimant
au nom des gouvernements du Danemark, de la Finlande,
de l’Islande, de la Norvège et de la Suède, s’est déclarée
de plus en plus préoccupée par la dégradation continue de
la situation générale en matière de droits de l’homme dans
le pays et le défaut d’application de la convention en particulier.
L’oratrice s’est également déclarée profondément
préoccupée par l’aggravation de la situation dans laquelle
se trouvent l’opposition politique et des syndicats au
Swaziland, en particulier en ce qui concerne la liberté
d’expression et le droit d’organisation. Relevant que la
CSI a fait état de «graves actes de violence et de brutalité
commis par les forces de sécurité contre les activités des
syndicats et les dirigeants syndicaux en général»,
l’oratrice a déploré la mort en garde à vue de Sipho Jele,
membre du PUDEMO, qui avait été arrêté le jour de la
fête du travail.
La commission d’experts a de nouveau souligné la nonconformité
de certaines lois avec la convention. Tout en
tenant compte des mesures prises afin de modifier la législation,
l’oratrice a instamment prié le gouvernement de
prendre les mesures nécessaires pour assurer que sa législation
sera pleinement conforme à la convention. La situation
des droits de l’homme dans le pays, en particulier
du droit des travailleurs de s’organiser et d’organiser des
grèves légales et d’y participer, conformément à la convention,
a été examinée à maintes reprises par cette commission.
Par conséquent, le gouvernement est instamment
prié de continuer à avoir recours à l’assistance technique
du BIT de façon à mettre la législation en conformité avec
la convention no 87 et à assurer l’application effective de
la législation. Le gouvernement est également prié de
fournir des informations détaillées au sujet des actes de
violence à l’encontre de militants syndicaux et de personnes
ayant participé à des grèves légales et pacifiques.
La membre travailleuse de l’Afrique du Sud a déclaré que
le Swaziland est devenu la tragédie de l’Afrique australe.
Les travailleurs sud-africains ont travaillé en étroite collaboration
avec les syndicats swazis en soutenant leur combat
en faveur des droits des travailleurs et de la démocratie.
Il apparaît désormais clairement qu’il ne peut y avoir
de véritable liberté syndicale, de dialogue social constructif
et d’amélioration réelle de la vie des travailleurs sans
démocratie. Dans la région, la patience devant la détérioration
toujours plus grande de la situation au Swaziland
s’amenuise, et des mesures drastiques doivent être prises
pour inverser la tendance. La mort mystérieuse de Sipho
Jele et les impitoyables persécutions qui s’intensifient à
l’encontre des travailleurs et des militants politiques montrent
que le régime est déterminé à intensifier les traitements
cruels à l’égard de son peuple. L’ordonnance du
Roi d’étouffer l’opposition, qui vise particulièrement les
militants du Congrès de la jeunesse du Swaziland
(SWAYOCO) et du PUDEMO, et son président Mario
Masuku, constitue le fondement du niveau actuel intolérable
des persécutions contre les travailleurs. La loi sur la
suppression du terrorisme, le projet de loi sur la fonction
publique et toute une série d’autres lois confirment que la
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/48
militarisation de la société s’accentue, en limitant et dégradant
les possibilités de liberté syndicale. Les militaires
sont partout et intimident la population. La persécution
des militants politiques et syndicaux est une attaque systématique
contre les personnes qui réclament la démocratie
et la justice sociale. L’Etat swazi ne s’est jamais senti
aussi menacé et désespéré, comme en témoigne
l’augmentation du nombre des attaques perpétrées contre
des travailleurs et contre ceux qui se battent pour la démocratie.
Cette tactique est similaire à celle qui a été utilisée
par le régime de l’apartheid en Afrique du Sud, qui
opérait des perquisitions au domicile de militants avec
usage d’armes offensives. Comme le Swaziland figure
tous les ans sur la liste des Etats qui violent les dispositions
de la convention no 87 établie par l’OIT, des mesures
décisives doivent être prises pour obtenir l’impact
recherché. Par conséquent, l’oratrice a soutenu l’appel
lancé pour l’envoi d’une délégation tripartite de haut niveau
de l’OIT, dont les constats serviraient de bases concrètes
pour mesurer les progrès réels; et elle a appelé à un
dialogue social constructif, authentique et durable permettant
au Swaziland de sortir du bourbier actuel. Elle a également
appelé à la réalisation d’une enquête indépendante
sur la mort de Sipho Jele et le comportement des forces de
sécurité swazies à l’égard des activités des travailleurs.
Le membre travailleur du Ghana a souligné que la situation
sur les plans de l’exercice de la liberté syndicale par
les travailleurs et de la protection du droit syndical prévu
par la convention no 87 reste très mauvaise. Le gouvernement
a accompli des progrès très limités pour assurer et
garantir les droits des travailleurs en général même si,
comme l’a fait observer la commission en 2009, le pays
bénéficie de l’assistance technique du BIT et de missions
de haut niveau. Cela est dû à l’absence, au Swaziland, de
véritable environnement démocratique pluraliste et à la
suppression de la liberté de choisir. Même si le décret de
1973, qui était une mesure draconienne, a été abrogé par
l’adoption d’une nouvelle Constitution en 2005, le statu
quo politique qui existe depuis 1973 s’est maintenu, les
pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire restant acquis au
Roi, et les partis politiques et les réunions, y compris syndicales,
étant interdits, ce qui est apparu en 2010 lors des
manifestations pour le 1er mai, brutalement interrompues
par les services de sécurité de l’Etat. Les intimidations,
les arrestations arbitraires et les brutalités visant les militants
syndicaux ont continué en toute impunité. Le recours
aux services de sécurité de l’Etat pour intimider et
harceler les travailleurs et les responsables syndicaux est
particulièrement préoccupant, car cela a créé un climat de
crainte et d’insécurité chez les travailleurs et dans la société,
et remis en cause l’essence même de la liberté syndicale.
Avec l’adoption de la loi sur la suppression du terrorisme,
les conditions d’exercice des droits prévus par la
convention se sont détériorées. Invoquant cette loi, le
gouvernement a commencé à qualifier d’actes terroristes
les actions des travailleurs, des associations syndicales,
des militants politiques et de la société civile en général.
Cette pénalisation des activités des syndicats et des travailleurs
n’est pas acceptable, car elle porte atteinte aux
droits fondamentaux des travailleurs et, contrairement à
ce qu’affirme le gouvernement, le dialogue social en tant
que tel n’existe pas.
Tant que le gouvernement n’assurera pas aux citoyens,
notamment aux travailleurs, un environnement et un espace
démocratiques, et qu’il continuera à appliquer une
législation répressive, aucun progrès significatif ne sera
fait concernant les droits des travailleurs, notamment dans
le cadre de la convention no 87. La modification récente
de certaines lois mentionnée par le gouvernement est seulement
cosmétique car, sur le terrain, la pratique montre
que les progrès réalisés sont infimes, voire inexistants.
Etant donné que la liberté syndicale est particulièrement
importante pour la réalisation des objectifs de l’OIT, le
gouvernement est instamment prié de collaborer rapidement
avec les partenaires sociaux et les autres parties intéressées
pour abroger toutes les lois répressives, y compris
la loi sur la suppression du terrorisme, et à créer un environnement
démocratique permettant l’exercice de la liberté
syndicale.
Le membre gouvernemental du Mozambique,
s’exprimant au nom des gouvernements membres de la
commission, des pays membres de la Communauté de
développement d’Afrique australe (SADC), a exprimé son
soutien au rapport et à l’engagement formulé par le gouvernement
du Swaziland d’appliquer et de respecter
toutes les conventions de l’OIT ratifiées, en particulier la
convention no 87. Prenant note des observations de la
commission d’experts, les pays de la SADC ont estimé
que les efforts actuellement déployés, auxquels les
membres employeurs ont fait référence, vont dans la
bonne direction. La réunion des ministres du travail et des
partenaires sociaux de la SADC a accueilli avec satisfaction
la ratification de l’ensemble des conventions fondamentales
de l’OIT. Les membres de la SADC s’efforcent
de pleinement appliquer ces conventions.
Le membre travailleur des Etats-Unis a souligné que, depuis
1997, le cas concernant l’application de la convention
no 87 par le Swaziland a été examiné de nombreuses
fois et a fait l’objet d’un paragraphe spécial du rapport de
la commission à plusieurs reprises, y compris en 2009. La
commission d’experts a demandé explicitement à ce que
de réels résultats soient présentés à la session de la Commission
de la Conférence de 2010, notamment en ce qui
concerne: 1) l’abrogation du décret de 1973, qui a été
utilisé pour réprimer l’exercice du droit des travailleurs à
la liberté syndicale; 2) la modification de la loi de 1963
sur l’ordre public afin qu’elle ne soit pas utilisée pour
interdire les grèves pacifiques; 3) la modification de la loi
sur les prisons afin d’accorder des droits syndicaux au
personnel pénitentiaire; et 4) la révision des dispositions
de l’IRA sur la responsabilité civile et pénale des dirigeants
syndicaux qui ont exercé leur droit d’organiser une
action de grève pacifique. Il est regrettable que, dans ce
cas, les employeurs n’aient pas reconnu la jurisprudence
irréfutable des organes de contrôle de l’OIT affirmant que
le droit de grève est également au coeur de la convention
no 87.
En 2009, la commission a demandé que le gouvernement
fournisse «un rapport détaillé contenant un calendrier
pour la résolution de toutes les questions en suspens
». Dans la mesure où le gouvernement n’a donné
suite à aucune des demandes et, comme le projet de loi
visant à modifier certaines dispositions de l’IRA reste un
projet, le gouvernement a une fois de plus traité avec mépris
les conclusions du système de contrôle de l’OIT. Le
gouvernement continue à utiliser des instruments tels que
le décret de 1973 et la loi sur l’ordre public pour exercer
des représailles à l’encontre de la SFTU, par le biais
d’actes de harcèlement et d’arrestations effectués par la
police, ainsi que pour justifier les menaces de mort contre
la famille de Jan Sithole. Ces instruments ont également
été utilisés pour démanteler les activités syndicales légitimes
dans l’important secteur du textile qui est dominé
par des entreprises taïwanaises. En mars 2008, la police a
réprimé une grève de milliers de travailleurs du textile au
moyen de gaz lacrymogènes et de tirs d’armes à feu.
Tout cela est vraiment regrettable, car le gouvernement,
même en ces temps de crise mondiale, pourrait facilement
commencer à réviser les mesures législatives et administratives
utilisées pour justifier les arrestations et
l’emprisonnement des syndicalistes swazis ainsi que les
actes de violence et ceux visant à les terroriser, particulièrement
dans les secteurs du textile et de l’habillement. Il
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/49
pourrait aussi facilement commencer à se conformer à
toutes les demandes formulées par les organes de contrôle
de l’OIT depuis ces dernières dix années. Le respect de
ces demandes pourrait s’avérer bénéfique dans la mesure
où les politiques relatives au commerce et à l’accès au
marché mises en oeuvre par les Etats-Unis, telles que la loi
sur la croissance et les possibilités de l’Afrique, récompensent
le respect des normes fondamentales du travail, y
compris la liberté syndicale. Tout en exprimant l’espoir
que le gouvernement prendrait des mesures importantes
pour faire avancer tant le concept de travail décent que les
principes consacrés par la convention no 87, l’orateur a
demandé à ce que les conclusions de la commission soient
incluses dans un paragraphe spécial du rapport et qu’une
mission tripartite de haut niveau soit réalisée.
Le membre travailleur du Royaume-Uni a été surpris, en
2009, d’entendre les membres employeurs indiquer que,
depuis 1997, le représentant gouvernemental avait déclaré
à plusieurs reprises que la législation était en cours de
modification, que la situation s’améliorait et que le Swaziland
serait bientôt en conformité. Si la situation a changé
c’est pour le pire, comme en témoigne l’adoption de la
nouvelle loi visant à supprimer le droit d’obtenir la liberté
sous caution d’une personne arrêtée pour avoir participé à
des manifestations. Par conséquent, la déclaration du
gouvernement ne doit pas être prise pour argent comptant
comme on peut le constater lorsque la discussion actuelle
est replacée dans un contexte historique. Le Swaziland a
gagné l’indépendance et, comme on l’espérait, une véritable
liberté pour son peuple en 1968 avec l’établissement
d’une monarchie constitutionnelle. Toutefois, en 1973, le
parti alors au pouvoir a effectivement cédé le pouvoir
absolu au Roi et a établi un état d’urgence durable qui, en
dépit de l’espoir qu’a fait naître la Constitution de 2005,
est toujours en vigueur aujourd’hui. Le Swaziland est
devenu Membre de l’OIT en 1975 et a ratifié de nombreuses
conventions sans toutefois se conformer aux obligations
d’un certain nombre d’entre elles, notamment la
convention no 87 et la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949.
Les partis politiques étant interdits, les syndicats ont
continué à jouer un rôle essentiel pour représenter les intérêts
des citoyens du Swaziland. Rappelant les répressions
mentionnées précédemment par d’autres orateurs,
l’orateur a ajouté que récemment des cambriolages et des
vols suspects de matériels informatiques ont eu lieu aux
domiciles de dirigeants syndicaux ainsi qu’une attaque à
la bombe contre la maison d’Alex Langwenya. Si l’on
ignore qui sont les coupables, le fait que la police soit
arrivée quelques minutes à peine après l’attaque et ait
arrêté M. Langwenya lui-même n’est pas très rassurant.
L’une des plus récentes violations s’est produite le jour du
1er mai 2010, lorsqu’une fête organisée par des syndicats
qui se déroulait sur le terrain de sport de Salesian a fait
l’objet d’une descente de police sur la base de la loi sur la
suppression du terrorisme. Cherchant les personnes qui
portaient des tee-shirts d’organisations interdites, la police
a arrêté, non sans violence parfois, de nombreux participants,
dont des orateurs invités. Le chef de l’Association
swazie des consommateurs a été arrêté au motif qu’il
n’était pas un travailleur. La plupart des personnes arrêtées
ont été relâchées par la suite mais on ignorait ce qui
était advenu au syndicaliste Sipho Jele, dont la famille a
été interrogée durant quatre heures sans qu’on lui dise où
il se trouvait. Le 4 mai 2010, son corps a été remis à sa
famille qui a été informée qu’il se serait pendu aux barreaux
des toilettes de la prison et qu’il devait être enterré
sans attendre. Rares sont les gens qui ont cru qu’il s’était
donné la mort. A la lumière des commentaires de la
commission d’experts et compte tenu des déclarations
faites par le représentant gouvernemental, il convient de
souligner que tous ceux qui, comme Sipho Jele, se battent
au Swaziland pour défendre leurs droits les plus élémentaires,
doivent voir que le BIT peut prendre des mesures à
même de faire réellement changer les choses.
Le membre gouvernemental de l’Afrique du Sud s’est rallié
à la déclaration faite par le membre gouvernemental du
Mozambique au nom de la SADC, en exprimant ses condoléances
à la famille de M. Jele. Il s’est félicité du rapport
de la commission d’experts et a offert l’assistance de
son pays pour promouvoir le dialogue social au Swaziland,
puisque ce dialogue avait joué un rôle clé dans le
succès de son propre pays. L’orateur s’est également félicité
de l’engagement du gouvernement à collaborer avec
la commission et a instamment prié le BIT d’apporter son
soutien à la promotion d’un dialogue social constructif et
durable au Swaziland.
Le membre travailleur de l’Allemagne, prenant la parole
au nom des syndicats européens, a fait observer que le
Swaziland était en état d’urgence depuis 35 ans. Le Roi
est investi de tous les pouvoirs, et les partis d’opposition
sont interdits, de même que les réunions. C’est la population,
dont 70 pour cent vit en dessous du seuil de pauvreté,
qui souffre le plus. La violation des droits syndicaux
dans le pays a fait l’objet d’un paragraphe spécial du rapport
de 2009 de la commission. Malgré les promesses du
gouvernement, la situation des militants syndicaux et des
représentants des travailleurs ne s’est améliorée en rien.
Les droits syndicaux ont été restreints et les militants syndicaux
qui oeuvrent pour la promotion de la démocratie et
du pluralisme sont persécutés, menacés et paient souvent
leur engagement de leur vie.
Le gouvernement a constitué des comités nationaux dits
de «dialogue» et, il semble également, à l’en croire, vouloir
relever les défis nationaux grâce au concept de «partenariat
». Toutefois, il s’agit de sa part de tromperies et
d’utilisation abusive de termes qui désignent normalement
des échanges où les parties sont sur un pied d’égalité. Le
gouvernement prend toujours les décisions unilatéralement,
dans son propre intérêt et pour consolider son pouvoir,
et non pour le bien de la population. Cette attitude
trouve, entre autres, son illustration dans le Comité directeur
national de haut niveau pour le dialogue social qui,
nonobstant ce nom charmant, n’a toutefois rien à voir
avec le dialogue social – bien que le gouvernement assure
qu’il y est favorable. Voici à quoi se résume le dialogue
social au Swaziland: le gouvernement s’adresse, mais
c’est rare, aux représentants des employeurs et des travailleurs,
puis il agit à sa guise. Ce n’est pas un dialogue social
mais un monologue antisocial.
Le dialogue social implique que les représentants des
travailleurs, des employeurs et du gouvernement communiquent
de manière à connaître et comprendre leurs positions
réciproques et à parvenir à un accord. Ce n’est que
sur cette base que l’on peut promouvoir le progrès économique
et social d’un pays. Le dialogue social est en
outre indispensable pour combler les lacunes de la législation
et appliquer cette dernière. L’orateur s’est déclaré
très inquiet de ce que, en dépit des demandes de la communauté
internationale invoquant le fait que la ratification
remonte à plus de trente ans, le gouvernement viole la
convention no 87 depuis des années et n’ait donc pas été
en mesure de remédier aux graves insuffisances de la législation
nationale. La commission d’experts a signalé
que le Comité directeur national de haut niveau pour le
dialogue social ne s’est pas réuni pendant plusieurs mois.
Par conséquent, le gouvernement est instamment prié:
1) d’associer les partenaires sociaux à toutes les décisions
visant à rendre la Constitution et la législation nationale
conformes aux prescriptions de la convention no 87;
2) d’accepter le dialogue social, non seulement en théorie
et par euphémisme, mais aussi pour cesser véritablement
son monologue antisocial; et 3) mettre le cadre juridique
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Swaziland (ratification: 1978)
16 Partie II/50
et les mesures concrètes en adéquation avec les prescriptions
de la convention no 87.
Le membre gouvernemental de la Zambie s’est rallié à la
déclaration faite par le représentant gouvernemental du
Mozambique, qui s’était exprimée au nom des gouvernements
membres de la SADC, et s’est félicité des mesures
prises par le gouvernement du Swaziland dans le cadre
des efforts déployés pour donner suite aux recommandations
de la commission d’experts. La ratification de plus
de 30 conventions, y compris des huit conventions fondamentales,
est également une avancée positive et digne
d’être saluée. L’orateur a également exprimé son soutien
au gouvernement pour les réformes législatives qu’il a
entreprises.
Un autre représentant gouvernemental, ministre de la
Justice et des Affaires sociales, a indiqué que le gouvernement
actuel n’est au pouvoir que depuis 2008 et que
l’une de ses priorités a été de mettre la législation nationale
en conformité avec la Constitution. Trente projets de
loi sont actuellement élaborés par le ministère de la Justice,
mais le manque de personnel rend cette tâche difficile.
Tous les citoyens pourront saisir la Commission sur
les droits de l’homme et l’administration publique, nommée
en septembre 2009, au sujet de questions relatives
aux droits de l’homme. L’amendement apporté à la loi sur
les prisons est une décision administrative que doit
prendre le ministère de la Justice et des Questions constitutionnelles.
Une fois le processus en cours terminé, le
projet de loi sera envoyé au ministère du Travail et de la
Sécurité sociale et soumis au Conseil consultatif sur les
questions de travail. L’allégation des travailleurs selon
laquelle rien n’est fait s’agissant de la loi sur les prisons
est donc fausse. D’autre part, les syndicats ont rencontré
la police préalablement aux manifestations du 1er mai
pour discuter des questions de sécurité. La police n’a pas
harcelé les travailleurs mais était présente pour faire respecter
la loi s’agissant de certains individus qui ne la respectaient
pas. Le gouvernement déplore le décès de M.
Sipho Jele durant sa garde à vue et a ouvert immédiatement
une enquête publique que dirige un magistrat principal.
Le gouvernement n’a rien à cacher à ce sujet et, de ce
fait, un médecin de la famille a été autorisé à procéder à
une autopsie avec un médecin du gouvernement, et un
avocat, désigné par la famille, était présent lors de
l’enquête afin de vérifier les éléments de preuve. Concernant
le meurtre d’un travailleur dont il a été fait état auparavant,
il a souligné que le gouvernement a été mis hors
de cause au terme de la mission de haut niveau.
Lorsque le projet de loi de 2009 sur la fonction publique
a été soumis au parlement, les travailleurs ont fait
campagne pour qu’il soit transmis au Conseil consultatif
sur les questions de travail, et les recommandations du
conseil ont été examinées par le Cabinet. S’agissant de
toute autre question concernant le projet, l’orateur a demandé
aux syndicats d’approcher le parlement dans la
mesure où le projet est maintenant devant cette institution.
Le gouvernement a contesté la déclaration selon laquelle
il utilise de manière généralisée la loi sur la répression
du terrorisme pour intimider les travailleurs. Le texte
de la loi est conforme à la résolution no 1373 du Conseil
de sécurité des Nations Unies (2001) et aux dispositions
législatives types concernant les mesures pour lutter
contre le terrorisme et les conflits du Secrétariat du
Commonwealth, et s’inspire des dispositions de l’Office
des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC).
Selon les objectifs poursuivis, la loi entend éliminer tous
les actes de terrorisme, et tous les individus qui contreviennent
à cette loi sont arrêtés. En conclusion, l’orateur a
demandé à la commission de prendre note des progrès
importants accomplis par le gouvernement pour remédier
aux problèmes signalés et a par conséquent insisté pour
que le Swaziland ne figure plus dans un paragraphe spécial
du rapport de la commission.
Les membres employeurs ont annoncé que, leur position
étant claire, ils ne se prononceraient pas plus longuement
sur les commentaires de la commission d’experts à propos
du droit de grève et des dispositions de la convention
relatives à la liberté syndicale et au droit syndical.
Comme par le passé, il n’est pas possible d’évaluer les
informations techniques fournies par le gouvernement à la
commission. Les progrès significatifs dont se prévaut le
gouvernement sont sujets à controverse. Le projet de loi
sur le travail a été déposé devant le parlement, mais la
demande portant sur un calendrier précis pour son
adoption n’a pas reçu de réponse claire du gouvernement.
Les membres employeurs ont exprimé leur préoccupation
devant le manque de personnel du ministère du Travail.
S’agissant du dialogue social, aucun engagement n’a été
pris pour la tenue de réunions du Comité de pilotage de
haut niveau, et l’affirmation du gouvernement selon
laquelle ce comité est pleinement opérationnel est
contestable. Le seul engagement explicite qu’ait pris le
gouvernement sur ces questions a été de continuer à
soumettre d’autres rapports. Le ministère du Travail a
sollicité une aide pour faire en sorte que la législation
nationale soit adoptée dans le respect de la convention,
que le gouvernement remette des rapports sur la réalité de
la situation dans le pays et pour que des ressources soient
dégagées pour le dialogue social. Trente ans après la
ratification de la convention par le Swaziland, le
scepticisme reste de mise. Si des mesures positives ne
sont pas prises pour se conformer à la convention, ce cas
risque de rester sur la liste des cas discutés par la
commission. Les membres employeurs ont dit souscrire
aux mesures législatives adoptées à ce jour. Ce cas mérite
de figurer dans un paragraphe spécial du rapport général.
Il faudrait envoyer au Swaziland une mission technique
tripartite de haut niveau pour enquêter sur le défaut
d’adoption d’une législation visant à assurer la mise en
oeuvre de la convention et pour évaluer les obstacles
actuels au dialogue social.
Les membres travailleurs ont indiqué que la situation au
Swaziland est préoccupante depuis de nombreuses
années, et ce pour plusieurs raisons: le harcèlement, les
persécutions et meurtres commis à l’encontre de
syndicalistes; les nombreuses lois qui demeurent
contraires aux dispositions fondamentales de la
convention; et la mauvaise volonté du gouvernement qui
ne veut pas restaurer un climat de non-violence et une
démocratie à part entière. Par conséquent, ils ont insisté
pour que le gouvernement cesse tout acte de violence
contre des syndicalistes, toute répression des activités
syndicales et tout déni des droits humains, et pour qu’il
diligente une enquête indépendante sur les événements du
1er mai dernier. Ils ont également demandé au
gouvernement d’achever enfin les réformes législatives
recommandées par la commission d’experts, en ce qui
concerne notamment la modification de la loi sur les
relations de travail et de la loi de 1963 sur l’ordre public,
ainsi que l’abrogation du décret de proclamation de l’état
d’urgence et de la loi sur le terrorisme. Les membres
travailleurs ont plus particulièrement insisté pour que le
gouvernement tienne enfin ses promesses et crée les
conditions d’un dialogue social significatif et durable. A
cette fin, ils ont proposé également l’organisation d’une
mission tripartite de haut niveau et demandé que les
conclusions de la commission figurent dans un
paragraphe spécial de son rapport.
Conclusions
La commission a pris note de la déclaration du représentant
gouvernemental et de la discussion qui a suivi. La commission
a constaté que les commentaires de la commission
Convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948
Turquie (ratification: 1993)
16 Partie II/51
d’experts ont trait, depuis de nombreuses années, à la nécessité
de modifier les dispositions de la législation qui restreignent
le droit syndical du personnel pénitentiaire et des travailleurs
domestiques, le droit des organisations de travailleurs
d’élire en toute liberté leurs représentants et celui
d’organiser leurs activités et leur programme d’action, ainsi
que la nécessité d’abroger le décret de proclamation de l’état
d’urgence de 1973 et ses règlements d’application et de modifier
la loi de 1963 sur l’ordre public pour éviter qu’elle soit
invoquée dans le but de réprimer une grève légitime et pacifique.
La commission a pris note des informations fournies par le
représentant gouvernemental, selon lesquelles le projet de loi
sur les relations de travail (amendement), qui modifie un
certain nombre de dispositions dénoncées par la commission
d’experts, est actuellement examiné par la commission parlementaire
compétente. Le représentant gouvernemental a
indiqué que le Comité directeur tripartite national pour le
dialogue social au Swaziland a été constitué, ayant arrêté un
calendrier de réunions mensuelles. Il a précisé qu’en septembre
2009 a été créée la Commission des droits de
l’homme et de l’administration publique qui est chargée de
renforcer la protection des droits de l’homme, y compris les
droits des travailleurs. Enfin, le représentant gouvernemental
a réitéré ses déclarations précédentes sur le décret de
proclamation de l’état d’urgence de 1973 et ses règlements
d’application et sur la loi de 1963 sur l’ordre public.
La commission a rappelé que ce cas a été examiné à de
nombreuses occasions ces dix dernières années et qu’elle a
décidé l’année dernière d’inclure ses conclusions dans un
paragraphe spécial de son rapport. La commission a noté
avec préoccupation les constantes allégations faisant état
d’actes de brutalité des forces de l’ordre à l’encontre de manifestants
pacifiques, de menaces de licenciements de syndicalistes
et d’arrestations répétées de dirigeants syndicaux et
a rappelé avec fermeté l’importance qu’elle accorde au respect
plein et entier des libertés civiles fondamentales comme
la liberté d’expression, la liberté de réunion et de la presse,
ainsi que le lien intrinsèque qui existe entre ces libertés, la
liberté syndicale et la démocratie. La commission a souligné
une fois de plus qu’il incombe au gouvernement d’assurer le
respect du principe selon lequel le mouvement syndical ne
peut se développer que dans un climat dépourvu de violences,
de menaces et de craintes, et elle a demandé au gouvernement
de veiller à la libération de toute personne détenue
pour avoir exercer ses libertés civiles.
La commission a exprimé le ferme espoir que le projet de
loi sur les relations de travail (amendement) sera adopté très
prochainement et que ses règlements d’application seront
pleinement en conformité avec la convention. Rappelant
qu’il incombe au gouvernement de garantir un climat de
crédibilité, la commission a prié instamment le gouvernement
de prendre des mesures concrètes et définitives pour
procéder à l’abrogation effective et sans délai du décret de
1973 et pour garantir la modification de la loi de 1963 sur
l’ordre public, de façon à se conformer pleinement aux dispositions
de la convention no 87 et éviter que ces textes ne
soient invoqués à l’avenir pour réprimer des activités syndicales
légitimes et pacifiques. La commission a instamment
prié le gouvernement d’accepter une mission tripartite de
haut niveau afin qu’elle lui apporte l’assistance nécessaire
pour mettre la législation en pleine conformité avec la convention,
réaliser une enquête sur l’incident survenu le
1er mai 2010 et faciliter dans le pays la promotion d’un dialogue
social significatif et effectif.
La commission a exprimé le ferme espoir que le Comité
directeur national pour le dialogue social du Swaziland sera
convoqué immédiatement afin de réaliser des progrès significatifs
et rapides sur les questions soulevées. La commission
a demandé au gouvernement que, dans le cadre du prochain
rapport qu’il fournira à la commission d’experts, il communique
des informations détaillées, notamment à propos des
progrès accomplis dans l’adoption de la loi sur les relations
de travail (amendement) et des mesures concrètes adoptées
s’agissant des questions en suspens. La commission a exprimé
le ferme espoir qu’elle pourrait l’année prochaine constater
des progrès tangibles.
La commission a décidé d’inclure ses conclusions dans un
paragraphe spécial de son rapport.
Document no 265
CIT, 69e session, 1983, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 61-62

Conférence internationale du Travail
Compte reridu provisoire
Soixante-neuvième session, Genève, 1983
31
Troisième question à l'ordre du jour: Informations et rapports sur l'application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l'application des conventions et recommandations
TABLE DES MATIÈRES
PREMIèRE PARTIE: Rapport général 2
DEUXIèME PARTIE: Observations et informations concernant certains pays 19
I. Observations et informations concernant les rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la
Constitution) 19
A. Observations générales et informations concernant certains pays 19
B. Observations et informations sur l'application des conventions 23
C. Tableau des rapports détaillés sur les conventions ratifiées 74
D. Tableau statistique des rapports sur les conventions ratifiées (article 22 de la Constitution) . . . 75
II. Observations et informations concernant l'application des conventions dans les territoires non
métropolitains (articles 22 et 35 de la Constitution) 76
A. Observations générales et informations concernant certains territoires 76
B. Rapports détaillés sur l'application des conventions dans les territoires non métropolitains . . . 76
III. Soumission aux autorités compétentes des conventions et recommandations adoptées par la
Conférence internationale du Travail (article 19 de la Constitution) 77
Index parpays des observations et informations contenues dans le rapport 79
31/1
la diversité syndicale car l'unté a toujours été l'idéal
des travailleurs du monde, sur l'initiative desquels la
convention n0 87 a été élaborée. Il existe à son avis
une différence fondamentale entre une situation où
la structure unifiée est établie par voie législative à
partir de syndicats existants et celle où les travailleurs
et leurs syndicats se sont unis volontairement dans
une organisation unique. Cette opinion a été appuyée
par les membres travailleurs de la RSS de Biélorussie
et de l'URSS.
59. Certains membres ont souligné les dangers
que peuvent présenter, à leur avis, des situations de
pluralisme syndical. Le membre travailleur de la
Colombie a signalé que dans les pays où le pluralisme
existait, ou était supposé exister, de nombreuses
organisations de travailleurs étaient utilisées par les
gouvernements à des fins politiques. Les membres
gouvernementaux de l'Ethiopie et de la Tchécoslovaquie
et les membres travailleurs de la RSS de
Biélorussie, de la Colombie, de l'Equateur, du Mali
et de la Tchécoslovaquie ont indiqué que le pluralisme
syndical favorisait les employeurs et entraînait
un affaiblissement des travailleurs.
60. Se référant à l'étude publiée par le BIT en
1960 sur la situation syndicale en URSS, le membre
gouvernemental des Etats-Unis a observé que les
organes de contrôle avaient rejeté, de façon répétée,
les idées présentées dans ce rapport.
Droit de grève
61. La question du droit de grève a fait l'objet de
plusieurs commentaires de la part des membres de la
commission. Les membres travailleurs ont affirmé
que sans la reconnaissance du droit de grève la liberté
syndicale n'existe pas. Ils se sont félicités que la
commission d'experts ait considéré que ce droit
constitue un des moyens essentiels dont disposent les
travailleurs pour défendre et promouvoir leurs intérêts.
Selon eux, l'étude d'ensemble a révélé que le
droit de grève est soumis à de nombreuses restrictions
dans beaucoup de pays et ils ont lancé un appel
à tous les Etats Membres pour qu'ils améliorent cette
situation préoccupante, y compris dans la fonction
publique et le personnel d'encadrement. Dans les cas
exceptionnels, et pour des raisons d'intérêt général,
d'interdiction et de restrictions à la grève, des dispositions
doivent être prévues, apportant toutes garanties
aux travailleurs. Le membre travailleur du Japon,
se référant aux sanctions fréquemment imposées à
des grévistes, a relevé que, selon la commission
d'experts, la participation à des grèves pacifiques,
même illégales, ne devrait pas entraîner des peines
d'emprisonnement. Il a estimé que cette interprétation
aura une répercussion favorable sur les décisions
judiciaires concernant les syndicalistes arrêtés pour
fait de grève. Considérant que les syndicats responsables
ne déclenchent la grève que quand cela est
nécessaire, le membre travailleur du Libéria a considéré
que le droit de grève devait être accordé aux
travailleurs de tous les pays, y compris ceux des pays
en voie de développement.
62. Le membre gouvernemental de la Tunisie a
remarqué que la commission d'experts a, depuis
plusieurs années, cherché à introduire plus de clarté
dans les conditions d'exercice du droit de grève en
essayant de concilier les droits des travailleurs à
défendre leurs intérêts personnels, économiques et
sociaux et la nécessité de préserver la paix sociale et
les intérêts de la communauté nationale, condition
essentielle pour préserver le rythme de l'effort de
développement national. Il a cependant indiqué que
son gouvernement divergeait avec la commission
d'experts quant à l'interprétation que celle-ci a
donné à la notion de services essentiels. Sur ce point,
a-t-il estimé, l'application de la norme internationale
à vocation universelle ne devrait pas faire abstraction
des différences concrètes qui caractérisent les conditions
nationales des Etats Membres. Aussi l'orateur
s'est demandé s'il ne serait pas utile de mieux définir
la notion difficile et fondamentale du droit de grève
ou de prévoir une convention internationale spécifique
sur cette question.
Négociation collective
63. Dans son ensemble, la commission a souligné
les liens étroits qui existent entre la liberté syndicale
et la négociation collective. Sans respect des principes
de la liberté syndicale, a précisé le membre
gouvernemental de la Belgique, toute concertation
valable entre groupes sociaux perd la signification
que les promoteurs d'une démocratie économique et
sociale veulent lui assigner. Pour les membres travailleurs,
la négociation collective a été soumise ces
dernières années à trop de limitations, du fait que les
gouvernements ont invoqué de graves difficultés
économiques et financières. Même dans ces cas, ontils
estimé, les restrictions adoptées devraient constituer
des mesures exceptionnelles de courte durée.
Les membres employeurs ont également considéré
que le droit de négocier collectivement sans entrave
ni restriction est primordial parce qu'il implique le
dialogue et l'idée de consensus qui peuvent porter
leurs fruits s'il peut s'exercer sans ingérence de l'Etat.
Le membre employeur du Venezuela a souligné que
l'intervention des gouvernements dans la détermination
des conditions d'emploi, non seulement méconnaît
les principes de base de la liberté de négociation,
mais ne contribue pas au progrès économique et
social des peuples. Selon ce membre employeur, le
dialogue et l'accord direct entre les parties sont la
meilleure méthode pour résoudre les problèmes en
matière de relations de travail.
64. Plusieurs membres travailleurs, dont celui du
Danemark, de la France et des Pays-Bas, se sont
référés aux entraves apportées par les gouvernements,
au nom d'une politique des revenus, à la libre
détermination des salaires, notamment dans les pays
développés. Le membre travailleur de la France a
estimé, en particulier, que les difficultés économiques
des pays occidentaux risquent de remettre en cause le
droit de négociation collective. Or, a-t-il ajouté,
garantir ce droit est une obligation pour les Etats, et
les gouvernements ont le devoir de jouer un rôle
d'incitation à la négociation collective.
65. Le membre gouvernemental des Pays-Bas a
regretté que la commission d'experts n'ait pas mentionné,
dans son étude d'ensemble, quelle était son
interprétation des obligations en matière de négociation
collective découlant de la convention n" 87. Il a
fait état des problèmes auxquels se heurtent certains
pays pour réconcilier les notions de négociation
collective et de politique socio-économique, notamment
la politique de l'emploi. A son avis, l'étude
d'ensemble ne fournit que peu de directives sur la
31/14
Document no 266
CIT, 80e session, 1993, Rapport de la Commission de
l’application des normes: présentation, discussion et
adoption, pp. 28/8-28/18

CONFERENCE INTERNATIONALE
DU TRAVAIL
QUATRE-VINGTIÈME SESSION
GENÈVE, 1993
COÌIPTE RENTJI
DES TRAVAUX
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
GENÈVE
RAPPORT DE LA COMMISSION DE L'APPLICATION DES
NORMES: PRÉSENTATION, DISCUSSION ET ADOPTION
Original arabe: Le PRÉSIDENT - Le deuxième
point de l'ordre du jour est l'examen du rapport de la
Commission de l'application des normes (Compte
rendu provisoire n° 25).
J'ai le plaisir de demander aux membres du bureau
de cette commission de bien vouloir venir
prendre place à la tribune, à savoir le président,
M. Pérez del Castillo, membre gouvernemental, Uruguay
; M. Wisskirchen, membre employeur, Allemagne,
vice-président employeur; M. Peirens, membre
travailleur, Belgique, vice-président travailleur;
et le rapporteur, Mme Wiklund, membre gouvernemental,
Suède.
J'ai maintenant le plaisir de donner la parole à
Mme Wiklund, rapporteur de la commission, pour
présenter son rapport.
Original anglais: Mme WIKLUND (membre gouvernemental,
Suède; rapporteur de la Commission de
l'application des normes) - J'ai l'honneur de présenter
à la Conférence le rapport de la Commission de
l'application des normes, que vous trouverez au
Compte rendu provisoire n° 25.
La commission a été constituée conformément à
l'article 7 du Règlement de la Conférence pour examiner
la troisième question à l'ordre du jour: «Informations
et rapports sur l'application des conventions
et recommandations».
La commission a fait son travail en se fondant sur
le rapport de la Commission d'experts pour l'application
des conventions et recommandations. Comme à
l'accoutumée, la commission a divisé ses travaux en
trois parties, ainsi qu'il ressort de la première partie
du rapport. Elle a commencé par un débat général
sur les différents aspects de l'application des normes
internationales du travail. Ensuite, elle s'est penchée
sur l'étude d'ensemble de la commission d'experts
qui portait cette année sur les travailleurs ayant des
responsabilités familiales.Enfin, la commission a examiné
des cas individuels concernant le respect, par
les Etats, des obligations qui leur incombent en matière
de normes internationales du travail.
Nous avons eu de nombreuses interventions dans
le cadre de la discussion générale et de nombreux
avis ont été exprimés concernant le rôle des organes
de contrôle et la complémentarité de la commission
d'experts et de la Commission de l'application des
normes de la Conférence.
La commission de la Conférence a rendu hommage
à la commission d'experts qui a fait un excellent
travail dans un esprit d'indépendance, d'objectivité
et d'impartialité et a souligné une fois de
plus l'importance du dialogue entre les deux organes.
La Commission de l'application des normes de la
Conférence s'est distinguée cette année, car ce fut la
première fois que la commission d'experts y a été
représentée. En effet, le président de la commission
d'experts, M. José María Ruda, était présent pendant
le débat général et aussi pendant les discussions sur
l'étude d'ensemble, et cela conformément au voeu
émis l'année dernière par la commission de la Conférence.
La commission s'est félicitée de cette innovation
qui est la preuve d'une intensification du dialogue
constructif des deux commissions. Chacune est un
élément essentiel du mécanisme de contrôle de l'OIT
qui, selon le M. Ruda et bien d'autres, est le plus
efficace du genre parmi toutes les organisations internationales.
La commission s'est félicitée de ce contact direct
entre les deux commissions et a exprimé l'espoir que
le président de la commission d'experts sera également
présent lors des prochaines sessions.
La commission a appris qu'au sein de l'Organisation
on étudie comment on pourrait améliorer la
procédure de demande de rapport sur les conventions
ratifiées au titre de l'article 22 de la Constitution,
cela à la suite des discussions que la commission
a eues au cours des années écoulées sur les difficultés
rencontrées par bon nombre de gouvernements pour
remplir leur obligation de soumission de rapports.
Un tel effort a été largement appuyé, mais de
nombreux membres de la commission ont insisté sur
la nécessité - et la commission a été rassurée à cet
égard par le représentant du Secrétaire général -
d'empêcher qu'une réforme future quelle qu'elle soit
puisse de quelque manière que ce soit affaiblir la
qualité ou l'efficacité du système de contrôle.
La commission a cru comprendre qu'un ensemble
équilibré de mesures pourrait être proposé pour substituer,
à certaines procédures de soumission automatique
de rapports des procédures plus sélectives et
plus objectives. La commission voudrait souligner le
rôle vital que jouent les organisations d'employeurs
et de travailleurs à diverses étapes du contrôle.
La question de l'interprétation des conventions a
également été abordée par bon nombre d'orateurs, à
la lumière d'un document que le Bureau avait soumis
le mois dernier au Conseil d'administration et
qui traite de la possibilité, en vertu de l'article 37,
paragraphe 2, de la Constitution, de créer un tribunal
qui serait compétent pour interpréter les instruments.
Les avis les plus divers se sont manifestés au
cours des débats. Un certain nombre de membres
ont appuyé, dans des mesures variables, la création
d'un tribunal qui, à leur avis, réglerait rapidement
les désaccords portant sur l'interprétation. D'autres
membres se sont demandé si la création d'un tel tribunal
était vraiment justifiée compte tenu du système
de contrôle déjà en place. La commission a
décidé que la question appelait une étude plus approfondie.
La politique normative de l'OIT a été abordée par
un certain nombre de membres. Une innovation intéressante
à cette session de la Conférence est la participation
d'un fonctionnaire supérieur du Département
des normes internationales du travail au
secrétariat des commissions techniques de la Conférence
chargées de l'élaboration de nouveaux instruments.
La commission a estimé qu'il s'agit là d'un
moyen d'améliorer la rédaction des conventions et
recommandations à la lumière de l'expérience acquise
par l'Organisation en liaison avec les instruments
déjà adoptés.
Personnellement, je me félicite de cette coopération
entre les départements techniques et le Département
des normes internationales du travail. C'est un
fait que dans les commissions techniques qui sont
chargées de la tâche difficile de formuler des normes
internationales sur des sujets précis, la majorité des
membres, tout au moins sur les bancs gouvernementaux,
n'ont pas précédemment eu de contacts
concrets avec l'OIT et avec les activités normatives
internationales.
28/8
Grâce à l'aide d'experts au sein des commissions
techniques provenant à la fois des départements
techniques et du Département des normes internationales
du travail, le risque de confusion et d'ambiguïté
dans la formulation, et par la suite, dans l'application
des normes, peut être diminué.
La commission appelle également l'attention de la
Conférence sur les différents points de vue exprimés
au sujet de la souplesse des normes de l'OIT. Bon
nombre de membres ont insisté sur l'importance du
principe d'universalité, à la fois pour ce qui est du
libellé des normes internationales du travail et pour
ce qui a trait à leur application dans un environnement
économique et social en constante mutation.
Dans ce contexte, quelques membres ont insisté
sur la nécessité de revoir et d'adapter l'activité normative,
notamment, afin de répondre aux défis nouveaux.
D'autres membres ont insisté sur le lien existant
entre le développement économique et la
transition, d'une part, et le maintien et l'amélioration
de la protection sociale qui constituent les tâches de
l'OIT, d'autre part.
Le lien entre normes et développement a été cité
explicitement ou implicitement à plusieurs occasions
pendant nos réunions.
Sans aucun doute, il y a eu un accord très large au
sein de notre commission sur le rôle des activités
normatives de l'OIT dans la lutte contre la pauvreté
et dans l'atteinte d'un objectif de justice sociale qui
constituent les priorités de l'Organisation.
Personnellement, je suis entièrement d'accord.
Toutefois, je pense qu'il nous faut comprendre - et
accepter aussi - qu'une question aussi vaste que la
diminution de la pauvreté peut être envisagée sous
d'autres angles dans certaines instances. Il nous faut
aussi tenir compte de l'opinion que nous et les autres
- principalement des économistes - avons les uns sur
les autres.
Peut-être parce que la langue maternelle de notre
président est l'espagnol, j'en suis venu à penser à un
des ouvrages les plus traduits dans le monde, à savoir
le Don Quichotte de Cervantes. Son sujet bien connu
est l'idéalisme et le réalisme.
Comme Cervantes, je suis persuadé que nous
avons besoin des deux - le chevalier et son écuyer.
C'est pourquoi les deux parties qui participent au
débat doivent apprendre l'une de l'autre - car les
moyens sont toujours subordonnés aux fins.
Deux sujets - la liberté syndicale et la politique de
l'emploi - ont retenu tout particulièrement l'attention
de la commission. Le rapport montre l'avis des
membres de la commission qui se sont penchés sur la
question très précise de l'interprétation de la convention
(n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical, 1948, et qui se sont demandé si cette
convention protège le droit de grève, et, dans l'affirmative,
dans quelle mesure.
Ce n'est pas à la commission d'arriver à des
conclusions sur ce point. La commission a noté que
l'an prochain l'ensemble de la commission d'experts
traitera de la liberté syndicale et de la convention
n°87.
L'autre sujet traité dans cette partie du rapport
est l'application d'une politique de plein emploi,
productif et librement choisi en vertu de la convention
(n° 122) sur la politique de l'emploi, 1964.
Contrairement à la plupart des conventions, il s'agit
d'un instrument traitant d'une politique, et, à mon
avis, il faut l'aborder et l'étudier différemment de
ce que l'on ferait pour la plupart des autres instruments.
La convention ne peut pas être considérée comme
un projet de politique économique ou de politique
de l'emploi dans une économie mondiale en perpétuelle
mutation. Cette convention élabore plutôt, et
c'est extrêmement important, un cadre, des idées et
des principes fondamentaux, et également des procédures
de base que l'on doit retrouver dans une politique
économique et d'emploi.
Comme vous le constaterez dans le rapport, la discussion
sur cette convention, par voie de conséquence
et comme d'habitude, présente ses propres
caractéristiques.
Pour ce qui est de la coopération technique et des
normes, et des diverses formes d'assistance donnée
par le Bureau, la commission a appris avec intérêt
que des spécialistes en matière de normes ont été
nommés dans les douze nouvelles équipes multidisciplinaires
sur le terrain. Plusieurs membres gouvernementaux
ont parlé de l'aide qu'ils ont reçue par le
truchement du Bureau. La commission a noté que le
Bureau a pour objectif d'augmenter ses activités promotionnelles
pour compléter ses activités de contrôle
et en aucun cas pour en réduire l'efficacité.
La commission s'est fort intéressée aux indications
de la commission d'experts concernant les relations
de l'OIT avec les autres organisations internationales,
notamment dans le domaine des droits de
l'homme, et tout particulièrement en liaison avec la
Conférence mondiale sur les droits de l'homme qui
se tient à Vienne. La commission a exprimé sans ambiguïté
son opinion selon laquelle l'OIT devrait améliorer
son image et jouer un rôle plus actif dans le
débat relatif aux questions sociales et aux questions
de travail dans les pays se trouvant aux différents
stades de développement, notamment dans des domaines
tels que la protection de l'enfance.
La commission a consacré la deuxième partie de
sa discussion générale à l'étude d'ensemble de la
commission d'experts, qui a traité cette année de
l'application par tous les Etats de la convention
(n° 156) et de la recommandation (n° 165) sur les
travailleurs ayant des responsabilités familiales, 1981.
Ces normes de l'OIT répondent à un double objectif.
Elles visent à créer l'égalité de chances et de traitement
au travail entre hommes et femmes exerçant
des responsabilités familiales. Elles visent en outre à
promouvoir l'égalité entre les travailleurs assumant
des responsabilités familiales et les autres.
Il ressort clairement des nombreuses interventions
que, dans le monde entier, les femmes ont des difficultés
particulières à combiner un emploi rémunéré
avec leurs responsabilités familiales. Les femmes assument
tout ou l'essentiel des tâches familiales et
ménagères alors que les hommes fournissent le principal
gagne-pain - point à la ligne.
En outre, la discussion fait ressortir que les femmes
souffrent encore d'une forte discrimination dans
le domaine de la formation professionnelle et de
l'emploi, en raison de leurs responsabilités familiales,
réelles ou futures. En effet, bon nombre de déclarations
ont indiqué que les conditions de travail des
femmes avaient empiré à cet égard, à la suite d'un
chômage de plus en plus élevé dû souvent aux conséquences
des mesures d'ajustement structurel.
Bien qu'il y ait eu un soutien général aux objectifs
des normes en question, des réserves ont été exprimées
par certains quant à la possibilité d'atteindre
28/9
ces objectifs par l'application de ces normes. Certains
membres ont conclu qu'il était nécessaire de
revoir la convention dans l'espoir qu'elle serait modifiée
et rendue plus applicable, permettant ainsi un
taux de ratification élevé.
De façon générale, on peut dire toutefois que la
discussion s'est achevée sur une note optimiste.
Nombreux ont été les orateurs à féliciter la commission
d'experts d'avoir donné des éclaircissements et
des explications sur les nécessités prévues par ces
instruments, comme par exemple encourager un plus
grand nombre de pays à appliquer les instruments et
à ratifier la convention n° 156. Pour de nombreux
orateurs, également, l'étude était une contribution
importante aux activités à déployer l'année prochaine,
qui a été déclarée Année internationale de la
famille par les Nations Unies.
Ce moment a été considéré opportun par l'OIT
pour diffuser des informations sur l'application de
ses instruments, à la fois ses lacunes et ses succès,
aux Nations Unies et aux Etats Membres de l'OIT,
afin de promouvoir l'égalité dans le monde entier et
d'inspirer à davantage d'Etats le désir de ratifier la
convention n° 156.
La troisième et la partie la plus importante du travail
de la commission a consisté à examiner les cas
individuels de respect des normes de l'OIT en se fondant
sur les observations faites par la commission
d'experts. Pour discuter ces cas individuels, la commission
a continué à appliquer les méthodes de travail
qui ont été les siennes jusqu'à présent.
Pour ce qui est des cas portant sur le respect de
certaines obligations, ce qu'on appelle les cas automatiques,
la commission, toutefois, a essayé une méthode
nouvelle destinée à augmenter l'impact de la
discussion et à mieux utiliser le temps dont elle dispose.
Il s'agit des cas concernant le respect des obligations
prévues en vertu des articles 19, 22 et 35 de la
Constitution de présenter des rapports sur les conventions
ratifiées, pour répondre aux commentaires
de la commission d'experts, de présenter des rapports
aux autorités nationales compétentes et des
rapports sur les conventions et les recommandations
non ratifiées.
Cette nouvelle méthode consistait simplement à
discuter de tous ces cas en une seule réunion, plutôt
que de les examiner séparément sur plusieurs réunions.
Les résultats peuvent être considérés comme
intéressants, et la commission espère poursuivre l'année
prochaine le perfectionnement de la façon de
procéder dans ces cas afin de trouver les meilleurs
moyens d'améliorer son efficacité à cet égard.
Les cas examinés de cette façon sont mentionnés
sous les titres appropriés dans la section D du rapport
et, comme à l'accoutumée, la partie 2 du rapport
donne tous les détails des informations fournies par
les gouvernements à la Conférence en réponse aux
indications de la commission d'experts et de la discussion
de ces cas par la commission de la Conférence.
En outre, la commission a examiné le respect par
33 gouvernements de leurs obligations au titre de
conventions ratifiées individuellement.
Nous avons été heureux de constater que tous les
gouvernements présents à la Conférence ont répondu
à l'invitation du Président à participer aux discussions
de la commission sur leurs cas. Bon nombre
d'entre eux avaient trait à des problèmes d'application
des conventions sur la liberté syndicale, le travail
forcé ou l'égalité de chances et de traitements
entre hommes et femmes.
La commission a décidé d'attirer l'attention de la
Conférence sur le cas du Myanmar, relatif à la liberté
syndicale et la protection du droit syndical (convention
n° 87). Dans le paragraphe 125 du rapport, la
commission fait état de sa profonde préoccupation et
a demandé que des mesures nécessaires soient prises
afin de garantir l'application de cette convention.
La commission a décidé également au paragraphe
127 de faire état de sa préoccupation face au défaut
continu pendant plusieurs années d'éliminer de sérieuses
carences dans l'application par le Soudan de
la convention (n° 29) sur le travail forcé, 1930.
Dans ces deux cas, la commission invite le gouvernement
intéressé à présenter les informations et rapports
appropriés qui permettront à la commission de
suivre les questions mentionnées à la prochaine session
de la Conférence.
La deuxième partie du rapport rend compte des
discussions détaillées sur les cas individuels et expose
les conclusions adoptées par la commission.
Je voudrais saisir cette occasion pour remercier le
président de la commission, M. Pérez del Castillo, les
vice-présidents employeur et travailleur, MM. Wisskirchen
et Peirens, pour la compétence et l'efficacité
qui ont été les leurs et qui ont permis à la commission
d'effectuer un travail aussi intense et d'être ainsi
à la hauteur de la responsabilité que la Conférence
lui avait accordée. Pourrais-je également remercier
M. Bartolomei de la Cruz pour son appui précieux et
tous ses collaborateurs pour leur dévouement, que
nous les ayons vus ou non à la réunion.
Comme vous pouvez le constater, la Commission
de l'application des normes continue à remplir ses
tâches vitales dans un esprit qui reconnaît à la fois la
force des traditions et des procédures établies et la
nécessité de maintenir une attitude dynamique dans
la recherche constante d'une efficacité maximale.
Je suis convaincu que telle est l'idée du dialogue
qui se trouve à la base à la fois de sa force et de son
dynamisme - et c'est parce que j'en suis persuadé -
que j'ai l'honneur de présenter ce rapport à la Conférence.
(M. Gray prend place au fauteuil présidentiel.)
Original allemand: M. WISSKIRCHEN (membre
employeur, Allemagne; vice-président de la Commission
de l'application des normes) '- Notre commission
a réussi, une fois de plus, à présenter un rapport très
riche, pour ce qui est de la longueur et du contenu.
Le rapporteur a abordé un certain nombre de points
essentiels et les a expliqués.
Depuis des années, nous constatons également,
dans notre commission, que le monde se trouve dans
une phase de mutation rapide et intensive.
Je pourrais donc placer mon intervention sous le
signe du changement et traiter des défis que ce changement
pose pour l'efficacité et la crédibilité de
notre Organisation. En effet, ces modifications, à
l'aube du XXIe siècle, touchent également l'OIT.
Elle doit apporter sa contribution. C'est pourquoi
elle doit réexaminer ses objectifs et ses priorités dans
ses domaines d'action.
Il faut réfléchir au domaine de l'élaboration des
normes, au contrôle de leur application, à la coopération
technique, aux services consultatifs, ainsi qu'à
28/10
une structure interne de l'Organisation qui*soit appropriée
aux nouveaux défis. L'Organisation internationale
du Travail a récemment présenté, sur l'ensemble
de ces questions, des propositions pour une
réforme fondamentale de l'OIT, que nous appuyons
énergiquement.
Dans notre Commission de l'application des
normes, nous constatons depuis longtemps qu'il est
urgent de modifier les modalités d'élaboration des
normes. Nous avons pris acte du net abaissement du
chiffre des ratifications des instruments nouveaux au
cours des quinze dernières années. Nous voyons également
que les Etats Membres, de plus en plus, ne
respectent pas les obligations qui leur incombent en
vertu des ratifications. Le lien étroit entre l'élaboration
des normes, leur ratification et leur application
dans la pratique est évident depuis longtemps. Les
normes qui ont des contenus et des objectifs trop
élevés, trop complexes, peu clairs ou trop détaillés,
soit ne sont pas ratifiées, soit sont ratifiées en toute
connaissance du fait qu'elles ne pourront pas être
traduites dans le droit et la pratique. Une telle attitude
porte atteinte à l'image et à la crédibilité des
Etats Membres et de l'Organisation internationale
du Travail dans son ensemble.
Dans ce contexte, il convient d'acquérir une plus
grande sensibilité pour déterminer quand certaines
normes sont dépassées, et de ne pas réagir seulement
lorsque s'accumulent les dénonciations d'une convention.
Une adaptation sensée aux défis nouveaux qui se
posent exige d'utiliser plus activement l'ensemble
des possibilités d'assistance, d'appui et de conseil de
l'OIT. Nous estimons que ces services, du point de
vue de l'efficacité pratique, constituent un moyen au
moins aussi important d'assurer l'application des
normes que le dispositif de contrôle au sens traditionnel.
Les observations que la commission d'experts formule
dans son rapport général au sujet de la convention
(n° 122) sur la politique de l'emploi sont essentiellement
un inventaire timide des problèmes qui s'y
rapportent. Il existe un accord assez large sur le fait
qu'il ne peut y avoir de politique de l'emploi isolée
qui puisse créer des emplois durables et rentables. A
cette fin il faut une coordination des politiques menées
dans de nombreux domaines, et en particulier
de la politique conventionnelle, permettant aux partenaires
sociaux eux-mêmes de fixer des orientations
déterminantes en vue d'une augmentation ou d'une
diminution des emplois.
Un certain nombre de questions fondamentales
ayant trait au contrôle des normes et au système de
contrôle peuvent être placées sous le signe du changement.
Depuis deux ans au moins, il est indiscutable
que les deux instances de contrôle les plus importantes
de l'OIT, la commission d'experts et la commission
de la Conférence, assument leurs tâches individuellement
et de façon indépendante l'une de
l'autre. Il est également indiscutable, d'après les déclarations
sans ambiguïté formulées pour la commission
d'experts, que les avis d'une instance ne sont pas
des décisions contraignantes pour l'autre, et que
leurs évaluations ne sont pas contraignantes pour
tous. Nous voyons dans le fait que le président de la
commission d'experts a accepté l'invitation de notre
commission et a été présent lors de la discussion générale
en tant qu'auditeur attentif un signe encourageant
de l'instauration d'un nouveau dialogue entre
les deux organes de contrôle de l'OIT. M. Ruda, président
de la commission d'experts, s'est félicité de
cette nouvelle forme de dialogue. C'est un dialogue
qui, selon lui, comprend également une réflexion sur
les avis exprimés jusqu'à présent.
Une fois résolue la question plus formelle et fondamentale
de l'indépendance des deux instances, il
s'agira exclusivement à l'avenir du contenu des avis
divergents qui, à l'occasion, peuvent être formulés au
sujet d'affaires particulièrement importantes. Le
point le plus important concerne les méthodes
d'interprétation à appliquer fondamentalement au
sujet des conventions et les résultats qui en découlent.
Comme critères d'interprétation des conventions,
seuls s'appliquent, à notre avis, le droit
coutumier international et le droit international écrit,
visés dans les articles 31 et 32 de la Convention de
Vienne sur le droit des traités. Cela est reconnu fondamentalement
par la commission d'experts. Comme
nous l'avons expliqué à maintes reprises de façon détaillée
en commission, aucune des méthodes d'interprétation
pertinentes du droit international ne permet
de créer un droit de grève extrêmement large
aux termes de la convention n° 87, comme l'a fait à
maintes reprises la commission d'experts. Ni le libellé
ni un accord reconnaissable des Etats parties
ou leur attitude ultérieure ne permettent une telle
interprétation. Au contraire, lors de l'élaboration des
conventions nos87 et 98, il s'était avéré clairement
que les questions du droit de grève ne devaient pas
être traitées. Nous avons déjà indiqué les documents
pertinents. Les faits historiques confirment simplement
ce qui ressort de la règle d'interprétation primordiale.
Les employeurs avaient déjà exprimé fermement
cette opinion au Conseil d'administration,
en janvier 1953 par exemple, lorsque le Comité de la
liberté syndicale a commencé à développer un droit
de grève.
Il ne s'agit pas ici d'une interprétation classique de
lege artis. Un lien étroit pourrait exister avec ce fait
indiscutable, que l'instance décisive de l'OIT, c'est-àdire
la plénière de la Conférence, a été à dessein
tenue à l'écart de cette question. Une proposition
des employeurs l'année dernière visant à inscrire ce
problème à l'ordre du jour de la Conférence a été
rejetée.
Sur le plan du contenu, le droit de grève tel qu'il
est conçu par la commission d'experts est pratiquement
illimité. Les possibilités de réglementation des
Etats Membres sont quasiment nulles.
Les formules élaborées par la commission d'experts,
qui autorisent quasiment toute grève et qui
interdisent quasiment toute limitation comme étant
contraire au droit international, ne peuvent être déduites
de la convention n° 87 au moyen d'aucun instrument
d'interprétation juridique. En effet une
grève n'est manifestement pas l'affaire intérieure
d'un syndicat. Elle est dirigée tout d'abord contre
l'employeur mais, dans notre monde de division du
travail, ses conséquences, inévitables, calculées,
touchent de plus en plus les tiers et la collectivité.
Les grèves de solidarité visent en premier lieu des
personnes qui ne participent pas au conflit en question.
Les grèves politiques veulent placer le législateur
sous pression, c'est-à-dire en démocratie, le parlement.
De telles mesures de lutte sociale non
réglementées ne sont acceptables pour aucun Etat.
De plus, dans le domaine de la lutte sociale, chaque
Etat a pour tâche de garantir la protection nécessaire
28/11
de chaque citoyen, et de la population dans son ensemble.
Une protection optimale des citoyens demeure
l'objectif principal d'un Etat et la justification
principale de son existence.
Il a été suggéré ces dernières années, et ce n'est
pas sans rapport avec ces questions d'interprétation,
qu'il convenait d'examiner de plus près l'article 37,
paragraphe 2 de la Constitution de l'OIT. D'après
cette disposition, la Conférence peut, sur proposition
du Conseil d'administration, formuler des règles
pour instituer un tribunal en vue du prompt règlement
de questions ou difficultés relatives à l'interprétation
d'une convention. Le Bureau a élaboré un
document sur ce sujet, qui traite des divers aspects
de l'article 37, paragraphe 2, de la Constitution de
l'OIT, ainsi que d'autres questions d'interprétation.
Nous remercions le Bureau de ce document détaillé
et minutieux. Un certain nombre de déclarations
sont très explicites. Certaines remarques ne sont pas
tout à fait aussi claires et nécessitent une explication
et un examen plus approfondis. Au cours de la discussion
en commission, nous avons discuté et partiellement
critiqué un certain nombre de points particuliers.
En outre plusieurs questions qui ne sont pas
abordées dans le document devraient être examinées.
Nous résumons la situation comme suit: nous
ne pouvons encore trancher ces questions importantes
sur la base des documents existants. Il
convient de procéder à des enquêtes plus approfondies.
C'est seulement lorsque toutes les possibilités
auront été examinées que l'on pourra décider si et
comment un tel tribunal peut être institué en vertu
de l'article 37, paragraphe 2, de la Constitution de
l'OIT.
L'étude d'ensemble établie en vertu de l'article 19
de la Constitution de l'OIT est consacrée à la convention
(n° 156) et la recommandation (n° 165) sur
les travailleurs ayant des responsabilités familiales,
1981. Il s'agit de la question de l'égalité entre
les travailleurs, notamment ceux ayant ou n'ayant
pas des responsabilités familiales. Personne ne sousestimera
l'importance de ce thème, ou ne sera opposé
aux objectifs généraux qu'il implique. Mais les
mesures nécessaires pour parvenir à ces objectifs ne
se bornent nullement aux relations typiques entre
travailleurs et employeurs et débordent sur des domaines
de politique générale et de politique sociale.
Pour parvenir pleinement à ces objectifs, il serait nécessaire
d'adopter un ensemble de mesures concrètes
difficiles à imaginer, notamment du point de vue juridique.
Un tel ensemble de règles devrait être en
conflit avec les principes fondamentaux d'un ordre
social libre. La convention évite donc cette voie impossible
à embrasser mais s'engage dans une voie
tout aussi problématique. Elle fixe des objectifs extraordinairement
larges et en font le contenu obligatoire
d'une politique pertinente. Ces objectifs prévoient
des sous-objectifs qui ne sont pas toujours très
clairs et qui éveillent l'impression que, grâce aux mesures
et aux normes prises par les Etats, il pourrait y
avoir une combinaison qui n'opposerait pas la famille
et la profession. Comme ces objectifs relèvent
de l'idéal, on se heurte immédiatement à un fardeau
excessif. Les experts parlent ici de souplesse. Au lieu
de cela, nous voyons un certain nombre d'incertitudes
et d'imprécisions importantes, cela ressort également
du traitement des dispositions de la convention
prises individuellement dans le rapport de la
commission d'experts. Les Etats Membres ont posé
beaucoup de questions sur la signification et l'interprétation
des dispositions individuelles de la convention.
Les experts essaient d'y apporter des réponses
qui conduisent de façon tendancieuse à un descriptif
très large des obligations.
Il est intéressant de noter, sur le plan de la méthode,
que les experts dans ces efforts d'interprétation
se sont appuyés pour chaque disposition sur les
travaux préparatoires et qu'ils ont élaboré leur interprétation
ensuite. Cet aspect nous paraît important,
notamment en rapport avec la question traitée dans
le cadre de la discussion générale, à savoir comment
le droit de grève peut être induit de la convention
n°87.
Etant donné que les instruments ci-dessus mentionnés
ne précisent pas des mesures concrètes et limitées
mais un but vers lequel on tend, il ne s'agit
plus des normes flexibles exigées des employeurs,
mais d'un instrument surchargé qui décrit un objectif
idéal. Le rapport de la commission d'experts apporte
du reste la preuve qu'il ne s'agit pas d'une convention
flexible et facile à appliquer car les mesures
adoptées par les Etats Membres, telles qu'elles sont
évaluées par les experts, sont considérées comme
étant insuffisantes, et sont de ce fait critiquées.
Les Etats Membres ont reconnu de toute évidence
les problèmes que posent ces instruments car il n'y a
eu que 19 ratifications à ce jour. Un certain nombre
d'Etats qui ont ratifié la convention ne seraient objectivement
guère en mesure d'appliquer totalement
ce que l'instrument exige. Un Etat contractant n'a
d'ailleurs même pas présenté son premier rapport.
Bien que les employeurs aient un intérêt naturel
pour que tous ceux qui le souhaitent puissent se réaliser
dans leur profession, un regard d'ensemble renforce
notre scepticisme à ce propos: la traduction
d'un tel rêve dans la réalité est impossible sur la
seule base des normes. Il faut tenir compte de valeurs
traditionnelles et profondément ancrées et il
faut procéder à tout changement avec prudence.
Pour cela, il faut y aller à petits pas. En pratique, ceci
existe dans les entreprises et dans les usines sous de
multiples façons. Un exemple global qui tienne
compte de tous les systèmes de valeurs différents et
qui donne le temps nécessaire pour changer les mentalités
n'est pas encore en vue.
Nous recommandons en tout état de cause de
prendre acte et de prendre en considération le rapport
de la commission d'experts. Ses analyses pourraient
conduire à réexaminer sérieusement la convention
n° 156 afin de la rendre plus précise, plus
maniable et plus réaliste.
La tâche principale de notre commission est d'examiner
dans quelle mesure les Etats Membres s'acquittent
bien de leurs obligations vis-à-vis de l'OIT II
s'agit de l'obligation de faire rapport et de l'obligation
matérielle d'appliquer les conventions ratifiées.
En ce qui concerne la procédure, nous avons cette
année séparé très précisément ce qui est formel et ce
qui est obligatoire.
Nous avons voulu traiter de façon concentrée la
question du rapport en un seul après-midi et tous les
Etats intéressés ensemble, cela afin de faire un meilleur
usage du peu de temps imparti à la commission.
Cela semble avoir réussi, mais l'objectif de cette nouvelle
procédure n'était pas de dispenser les Etats
Membres concernés de l'obligation de répondre.
D'ailleurs, pour l'obligation de faire rapport, on
constate une tendance à la baisse ou au mieux à la
28/12
stagnation. C'est pourquoi les experts sont profondément
préoccupés de cet état de choses, tout comme
le sont les membres de notre commission. Un
contrôle sérieux réside en effet dans le respect de
l'obligation de faire rapport. Le retard, l'insuffisance
ou, pis encore, l'absence de rapport remettent en
question l'ensemble du système et sont la cause d'un
règlement inégal et injustifié entre les Etats Membres.
Etant donné que, d'une part, les chiffres absolus
des rapports atteignent sans cesse des records,
étant donné le chiffre croissant des Membres de
l'OIT, des ratifications et des conventions, depuis
longtemps la commission est consciente de la nécessité
de porter remède à cette situation le plus rapidement
possible. A la demande de la commission de la
Conférence, le Bureau a élaboré un document dans
l'intervalle, étoffé de nombreuses propositions en
vue d'améliorer cette situation. Nous lui. sommes reconnaissants
de ses réflexions minutieuses. Nous
sommes d'accord sur la ligne proposée et nous espérons
que le Conseil d'administration adoptera les décisions
nécessaires le plus rapidement possible.
Comme nous l'avons déjà déclaré lors de la discussion
en commission, la seule chose qui ne puisse
pas, qui ne doit pas se produire, c'est précisément
qu'il ne se passe rien du tout.
La nature même de notre système d'examen stipule
que nous traitions prioritairement des cas où
des divergences importantes existent entre le droit et
la pratique d'un Etat Membre et les exigences des
conventions. Nous n'oublions pas le fait que la plupart
des Etats Membres remplissent de façon fidèle
les obligations qu'ils contractent en vertu de la
Constitution et des conventions ratifiées. S'agissant
des cas problématiques et des discussions qui en découlent
en commission, vous trouverez des détails
précis dans l'annexe du rapport général de notre
commission. Nous n'allons pas toucher des cas particuliers,
car cela semble toujours un peu arbitraire.
Permettez-moi pourtant de vous dire qu'il y a des
violations des droits de l'homme graves, telles que la
persécution pour motif ethnique, religieux ou politique,
qui se produisent de façon massive et
conduisent à la mort beaucoup d'êtres humains. Malheureusement,
nous ne sommes pas du tout en mesure
de traiter ces violations flagrantes en contradiction
avec les dispositions des conventions, et encore
moins d'y porter remède. Nous nous trouvons,
comme beaucoup d'autres organisations du monde,
tout à fait impuissants face à cet état de choses monstrueux.
Malgré tout ce qui évolue si rapidement, ce qui
demeure c'est notre reconnaissance à l'égard du président
de notre commission pour la manière dont il a
dirigé nos débats, à l'égard du rapporteur et de tous
les collaborateurs du Bureau qui, sous la direction de
M. Bartolomei, ont très bien travaillé. Ce qui demeure
aussi, c'est notre volonté déterminée de coopérer
aussi objectivement que possible avec le
groupe des travailleurs et leur porte-parole, M. Peirens.
Et, enfin, mes remerciements s'adressent au
groupe des employeurs de la commission, pour son
appui sans faille qui s'est manifesté pour moi grâce à
la présence de M. Potter.
M. PEIRENS (membre travailleur, Belgique; viceprésident
de la Commission de l'application des
normes) - Le rôle de l'OIT concernant les normes
internationales du travail et le système de contrôle
dans ce monde en changement ont été le fil conducteur
de nombreux intervenants lors de la discussion
générale de notre commission.
Plusieurs membres ont, dans ce contexte, plaidé
pour une révision et une mise à jour du système de
contrôle, et plus particulièrement des obligations
constitutionnelles de l'envoi des rapports. Le Bureau
prépare également un document pour le Conseil
d'administration de novembre 1993.
Le groupe des travailleurs de notre commission est
d'avis qu'il ne s'agit nullement d'un aspect secondaire
d'ordre technique. Bien au contraire, l'envoi
des rapports est, avec les observations des organisations
de travailleurs et d'employeurs, indispensable
pour le fonctionnement du système de contrôle.
Nous soulignons que la prudence s'impose et demandons
aux organes compétents de l'OIT, c'est-àdire
au Conseil d'administration, de ne pas prendre
de décisions précipitées qui pourraient, directement
ou indirectement, affaiblir le contrôle et donc le
fonctionnement de notre commission.
Le groupe des travailleurs de notre commission
propose que le Conseil d'administration, après une
première discussion en novembre, renvoie la question
à l'année prochaine pour en débattre à la Conférence,
et plus particulièrement à la Commission de
l'application des normes. Notre commission a d'ailleurs
convenu de consacrer, lors de la session de la
Conférence de l'année prochaine, une séance spéciale
aux réflexions sur l'avenir du système normatif
et de contrôle (paragr. 136 du rapport de notre commission).
La commission d'experts nous signale, dans
le paragraphe 12 de son rapport, qu'elle aussi nous
présentera sa réflexion sur le futur des normes et du
système de contrôle de l'OIT. Le Conseil d'administration
pourrait ainsi prendre une décision après la
81e session de la Conférence.
Le groupe des travailleurs de la commission estime
que le bon fonctionnement du système de
contrôle est d'une importance capitale. Nous ne
sommes pas contre le changement, à condition que le
fonctionnement futur du système de contrôle soit
renforcé.
Nous voulons appeler l'attention de la Conférence
sur le fait que les groupes des travailleurs et des employeurs
ont plaidé, à maintes reprises, pour un renforcement
du système de contrôle. La plupart des
gouvernements ont explicitement manifesté leur soutien
aux normes et au système de contrôle.
Plusieurs membres gouvernementaux ont déclaré
que le système de contrôle de l'OIT est supérieur à
celui des autres organisations internationales ou
supranationales et qu'il ne faut pas se laisser orienter
par des systèmes de qualité inférieure.
Nous demandons fermement le maintien d'un
contrôle très régulier de l'application, en droit et en
pratique, des conventions. Dans ce cadre-là, nous insistons
pour qu'une attention particulière soit accordée
aux conventions classées dans la catégorie des
droits fondamentaux de l'homme et à certaines conventions
de la catégorie des normes prioritaires,
comme les conventions nos 81, 122 et 144. Ce classement
a été formellement décidé par le Conseil d'administration
en 1987, sur proposition du rapport Ventejol.
Nous voulons appeler l'attention de tous les délégués
de la Conférence sur les conclusions du rapport
Ventejol relatif à la classification des conventions.
28/13
Ledit rapport conclut que les conventions concernant
les droits fondamentaux de l'homme, comme
les conventions nos 87 (liberté syndicale) et 98 (libre
négociation collective) ne nécessitent aucune révision
et que, par ailleurs, la plupart d'entre elles
avaient déjà été révisées.
L'intervention du système de contrôle ne peut se
limiter aux seules violations flagrantes et apparentes
des droits fondamentaux de l'homme. Celles-ci sont
d'ailleurs devenues de nature sophistiquée et masquée
par des législations complexes, y compris dans
les pays industrialisés.
C'est la raison pour laquelle nous attachons une
grande importance à l'envoi des premiers rapports
après la ratification d'une convention et à l'envoi des
questionnaires et rapports détaillés, de façon très régulière,
plus particulièrement pour les conventions
fondamentales concernant la liberté syndicale, la
libre négociation collective, l'interdiction de la discrimination
et du travail forcé.
L'OIT pourrait également étendre le système actuel
de la procédure de plaintes devant le Comité de
la liberté syndicale à d'autres conventions et principes
fondamentaux, comme l'égalité de traitement,
ainsi que suggéré par la commission d'experts à sa
session de mars dernier.
D'autre part, nous demandons au Bureau d'envoyer
plus tôt le rapport de la commission d'experts.
Cela faciliterait également la participation des travailleurs
en provenance des pays en voie de développement.
Concernant la création éventuelle d'un tribunal
compétent pour résoudre des problèmes d'interprétation
d'une convention donnée, en exécution de
l'article 37, paragraphe 2, le groupe des travailleurs
est d'avis que la création d'un tel tribunal pourrait
mettre en doute la crédibilité et l'autorité de la commission
d'experts. Nous ne sommes pas convaincus,
du moins jusqu'à ce jour, de la valeur ajoutée d'un
tribunal par rapport aux experts, au dialogue dans
notre commission et à la possibilité existante de recourir
à la Cour internationale de justice.
L'étendue du droit de grève a, une fois de plus,
donné lieu à des discussions approfondies, étant
donné que les employeurs ont des divergences de
vues avec la commission d'experts.
Nous, en tant que groupe des travailleurs, nous
soutenons fermement les points de vue de la commission
d'experts concernant les modalités du droit
de grève.
La commission d'experts s'est toujours basée sur
les principes développés et affinés, de façon consensuelle,
par le Comité tripartite de la liberté syndicale.
Même si le mandat de la commission d'experts,
d'une part, et celui du Comité de la liberté syndicale,
d'autre part, sont différents, on voit mal comment les
interprétations respectives pourraient être divergentes.
Ce serait illogique et inconsistant.
La valeur juridique des critiques d'un groupe de
notre commission, en l'occurrence les employeurs,
par rapport aux positions de la commission d'experts,
devrait nécessairement être relativisée vu la
délimitation des tâches respectives des deux commissions.
La commission d'experts garantit, par sa
composition et ses méthodes de travail, une évaluation
objective, et notre commission tripartite fait
vivre et anime le système grâce à notre connaissance
des réalités sur le terrain.
La position des employeurs, affirmant que les
modalités du droit de grève ainsi que la portée de
la notion de services essentiels devraient être réglées
par le droit international, n'est pas compatible
avec le principe fondamental de l'universalité des
normes.
Nous avons eu, lors de la discussion des cas individuels,
un cas choquant qui illustre bien les conséquences
graves du non-respect du principe de l'universalité
des normes. Il s'agit du déni des droits
syndicaux et de la non-application du Code du travail
dans les zones franches d'exportation au Pakistan
(conventions nos 87 et 111). Notre commission,
dans son ensemble, a adopté des conclusions très
fermes dans ce cas. Et si, l'année prochaine, notre
commission ne constate pas un progrès concret, le
cas du Pakistan devrait, selon le groupe des travailleurs,
être mentionné dans un paragraphe spécial. Le
gouvernement a, de plus, formellement accepté une
mission d'assistance technique du BIT.
Comme notre rapporteur l'a déjà mentionné,
notre commission a aussi traité de l'Etude d'ensemble
concernant les travailleurs ayant des responsabilités
familiales (convention n° 156 et recommandation
n° 165).
Le groupe des travailleurs est d'avis que les objectifs
de ces instruments sont d'actualité et que les
pays devraient augmenter leurs efforts pour les
concrétiser.
L'étude d'ensemble a clarifié la portée de la convention.
Cette clarification facilitera sans doute sa ratification,
et nous encourageons les Etats à le faire.
Cette convention ne devrait pas, selon nous, être révisée.
Notre commission a également adopté des conclusions
importantes dans plusieurs cas graves. Même
s'il ne s'agit pas de paragraphes spéciaux dans notre
rapport, les conclusions impliquent des engagements
très importants dans des termes précis et concrets.
Nous nous référons aux cas de la Colombie (très
graves violations en droit et en pratique de la convention
n° 87), du Costa Rica (convention n° 87:
mouvements solidaristes ou syndicaux jaunes), du
Brésil (convention n° 29: travail forcé, y compris le
travail des enfants, et la convention n° 107 concernant
les populations aborigènes et tribales), et de
l'Inde (convention n° 29: servitude pour dettes des
enfants).
Nous avons aussi accordé une attention particulière
à la convention n° 122 concernant la politique
de l'emploi. Dans deux cas (le Royaume-Uni et la
Nouvelle-Zélande), nous avons pu constater que
l'emploi est considéré comme un élément ou une variable
d'ajustement parmi d'autres. Une telle politique
n'est pas conforme à la convention n° 122, et
nous vous suggérons de lire le paragraphe 55 de la
partie générale du rapport de la commission d'experts.
Dans les deux cas, le gouvernement ne
consulte pas pleinement les organisations de travailleurs
et d'employeurs pour la mise en oeuvre de la
politique de l'emploi (article 3 de la convention).
Le cas de la Suède (convention n° 98: libre négociation
collective) nous a démontré que certains pays
adoptent des politiques socio-économiques sans une
consultation approfondie des organisations d'employeurs
et de travailleurs, auteurs et signataires des
conventions collectives, politiques qui ont des effets
directs ou indirects sur les conventions collectives et
sur le déroulement des négociations collectives. Une
28/14
telle approche va à rencontre des principes de base
de la convention fondamentale n° 98.
Le respect des conventions collectives et des résultats
des négociations est un principe, selon nous, non
négociable.
Notre commission a pu, pour la première fois, discuter
d'un cas concernant la convention n° 144 (le
tripartisme au niveau national). Le Royaume-Uni
n'a pas respecté la convention n° 144 car celui-ci n'a
pas consulté, de manière approfondie, les organisations
de travailleurs et d'employeurs au sujet de la
dénonciation de certaines conventions et concernant
les réponses aux observations de la commission d'experts.
Les conventions techniques ont aussi été discutées.
Nous nous référons à la conclusion du cas du Maroc
pour la convention n° 136 (protection des travailleurs
contre le benzène). Notre commission a constaté que
le Maroc n'applique pas les prescriptions essentielles
de cette convention dont l'importance pratique va
au-delà d'une simple question technique. La santé et
la vie même des travailleurs sont en question. S'il n'y
a pas un progrès décisif à brève échéance, nous y
reviendrons l'année prochaine.
Nous avons également traité des questions de fond
quant à l'organisation et au fonctionnement de la sécurité
sociale au Chili (convention n° 35). A cet
égard, il est important de souligner que le régime de
pensions au Chili non seulement viole la convention
n° 35 mais est également mis en doute quant aux
performances de sa crédibilité à terme par des spécialistes
indépendants. De plus, ce régime n'est pas
conforme aux principes fondamentaux de la sécurité
sociale (convention n° 102), ni à la convention n° 128.
Le Chili n'a d'ailleurs pas encore ratifié ces deux
conventions. La commission a fermement insisté
pour que le Chili reconsidère sa position.
Faute de temps, il ne nous a pas été possible de
traiter d'un certain nombre de cas. Nous espérons
que le rapport d'experts nous permettra de les aborder
l'an prochain si nous l'estimons nécessaire (par
exemple, en ce qui concerne l'Allemagne pour les
conventions nos 87 et 111, le Bangladesh pour la
convention n° 107 et le Canada pour la convention
n° 87).
Comme signalé par notre rapporteur, nous avons
dû mettre Myanmar dans un paragraphe spécial de
notre rapport (paragraphe 125), vu que la commission
d'experts et la commission de la Conférence signalent
depuis de nombreuses années, au sujet de la
convention n° 87, des dispositions de la législation
qui nécessitent des modifications sans que celles-ci
aient été réalisées jusqu'à maintenant.
Le Soudan est repris dans le paragraphe 127
comme un « défaut continu d'application » de la convention
n° 29 sur le travail forcé. Je vous rappelle
que l'année passée nous avons dû mettre le Soudan
dans un paragraphe spécial vu la persistance du travail
forcé et le manque de collaboration du gouvernement
avec le BIT et notre commission.
Pour terminer, je voudrais moi aussi remercier
notre président, M. Pérez del Castillo, qui a guidé et
mené nos discussions de manière remarquable, remercier
également notre rapporteur, Mme Wiklund,
le représentant du Directeur général, M. Bartolomei
de la Cruz, M. Zenger et M. Gernigon, ainsi que la
totalité de l'équipe du Bureau et les interprètes pour
leurs efforts et leur dévouement. Je voudrais également
remercier le porte-parole des employeurs,
M. Wisskirchen, pour son esprit de dialogue, pour
son esprit constructif.
Je voudrais remercier également les membres du
bureau du groupe des travailleurs, dont notre ami
Hickey, Etats-Unis, qui a malheureusement dû quitter
la Conférence en raison de problèmes de santé, et
tous ceux qui nous ont aidés.
Notre rapport a été approuvé à l'unanimité par la
commission et je recommande également à la Conférence
de l'adopter.
Original espagnol: M. PEREZ DEL CASTILLO
(membre gouvernemental, Uruguay; président de la
Commission de l'application des normes) - Je ne
pensais pas intervenir, mais je voudrais saisir cette
occasion pour vous remercier encore une fois, et remercier
notamment les membres de la Commission
de l'application des normes, du travail que nous
avons effectué en commun.
Je voudrais mentionner tout particulièrement la
collaboration, le travail sérieux, responsable, l'esprit
d'équipe de M. Bartolomei de la Cruz, de M. Zenger
et de M. Gernigon. En même temps, je voudrais, par
leur intermédiaire, remercier tous ceux, comme
notre rapporteur l'a dit, que nous voyons ou non
dans la salle mais dont nous savons qu'ils sont là et
que nous pouvons compter sur eux et sur leur travail.
Ce travail caché de tant de fonctionnaires de notre
Bureau a permis à la commission de mener à bien ses
activités, des activités particulièrement difficiles,
pressées par le temps, avec un travail écrasant, un
travail que la commission a pu terminer à temps pour
vous présenter ce rapport qui, comme toute oeuvre
humaine, peut avoir des parties claires et des parties
obscures, mais qui est le résultat d'une bonne intention
et d'efforts communs que nous avons tous déployés
pour qu'une activité aussi importante que le
contrôle des nonnes puisse se dérouler également au
sein de cette Conférence.
Je vous remercie une fois de plus et j'espère que
nous nous reverrons l'an prochain à une nouvelle
Conférence pour poursuivre nos objectifs et atteindre
notre but de justice sociale, comme nous
l'impose notre Constitution.
Original japonais: M. HIROMI (conseiller technique
et délégué suppléant gouvernemental, Japon) -
Je voudrais intervenir sur ce qui figure au Compte
rendu provisoire n° 25, deuxième partie, I, B, concernant
le Japon
Ce texte ne reflète pas l'amendement soumis par
le gouvernement japonais. Je voudrais donc que
l'amendement présenté par le gouvernement japonais
soit inclus dans le compte rendu de la Conférence.
En invitant l'OIT au Japon à propos de la convention
n° 83, le président a dit à ce moment-là, et je
cite: «... à visiter le Japon pour discuter du droit
d'organisation du personnel de lutte contre l'incendie,
pour évaluer la situation par eux-mêmes sur
place et discuter avec les personnes directement intéressées.
» Toutefois, dans le procès-verbal n° 13 de
la commission, ce commentaire est résumé comme
suit: «Visiter le Japon et obtenir des informations
directes. » Etant donné que nous considérons que ces
conclusions ne sont pas les mêmes que les conclusions
orales du président de la commission, nous
avons présenté un amendement. A la commission, il
a été dit que cette partie était adoptée dans sa forme
28/15
révisée. Toutefois, la réunion s'est terminée avant
qu'un texte précis pour cet amendement soit présenté.
La version du rapport de la commission qui
vous a été distribuée aujourd'hui (Compte rendu provisoire
n° 25) n'a pas été amendée et ne reflète donc
pas la décision prise par la commission.
Je regrette qu'une telle situation ait pu se produire.
On aurait dû résoudre cette petite difficulté au
niveau de la commission. Mais, puisque la situation
ne l'a pas permis, je voudrais dire que le gouvernement
du Japon insiste sur le fait que la version juste
est celle du président de la commission et nous demandons
que cette déclaration figure dans le Compte
rendu provisoire.
Original allemand: M. ADAMY (conseiller technique
et délégué suppléant des travailleurs, Allemagne)
- La Conférence mondiale sur les droits de
l'homme, qui siège actuellement à Vienne, montre
clairement que les instruments visant à assurer le respect
des droits de l'homme doivent être affinés et
développés, mais dans le cadre de notre mandat, et
nous devons veiller à ce qu'on ne s'écarte pas de
l'universalité et du caractère obligatoire des normes
fondamentales en matière de droits de l'homme.
Cela est tout particulièrement vrai de la convention
la plus importante de notre Organisation, la convention
n°87, qui porte sur la liberté syndicale. Mais
justement, les critiques portées par les employeurs
au sein de la Commission de l'application des
normes visent particulièrement cette convention,
comme cela est apparu clairement cette année. Ils
souhaitent relativiser l'importance de cette norme et
remettre en cause la jurisprudence relative à l'étendue
du droit de grève.
La critique du porte-parole des employeurs allemand
dans cette commission porte essentiellement
sur les points où mon pays éprouve des difficultés à
respecter les dispositions de cet instrument. Il n'est
donc pas étonnant que le représentant gouvernemental
de mon pays à cette commission essaie également
de relativiser cette convention qui touche aux
droits de l'homme; il partage ainsi la position adoptée
par le groupe des employeurs. Leurs critiques récentes
se fondent sur le fait que la convention n° 87
ne contient aucune garantie explicite du droit de
grève. Pourtant cela n'est pas propre à l'OIT, c'est
vrai aussi pour la Constitution de nouveaux Etats
Membres, par exemple celle de mon pays.
Les organismes de contrôle de l'OIT ont reconnu
cela très tôt. Dans une jurisprudence vieille de quarante
ans, ils ont admis que le recours à la grève est
essentiel aux travailleurs et à leurs syndicats pour
faire appliquer les conventions collectives. Pour garantir
le respect des activités syndicales, il faut admettre
le droit de grève.
La commission d'experts et le Comité de la liberté
syndicale ont défini une série de principes qui précisent
les conditions dans lesquelles le droit de grève
peut être interdit ou limité. Il n'est pas vrai, cependant,
que les organismes de contrôle aient reconnu
un droit de grève pratiquement illimité, comme vient
de l'affirmer ici même à cette tribune le représentant
des employeurs. Ce qu'on vise, grâce à la jurisprudence,
c'est un équilibre entre les intérêts contradictoires
en jeu qui évite en même temps d'avoir à limiter
de manière injustifiée les activités syndicales.
Dans l'intervalle, le Comité de la liberté syndicale
a défini un ensemble de règles qui montre que le
groupe des employeurs à la Commission d'experts
pour l'application des conventions et recommandations
a accepté pendant des années les principes fondamentaux
de la liberté syndicale. Mais, depuis la fin
des années quatre-vingt et de la guerre froide, ce
consensus est de plus en plus remis en question par
les employeurs au sein de la commission de la Conférence.
Les arguments avancés ne sont guère convaincants.
On parle toujours de la Convention de Vienne
sur le droit des traités pour justifier une large intervention
de l'Etat sur l'exercice du droit de grève et
pour exercer ainsi une influence croissante sur la jurisprudence
de l'OIT En fait - et ici j'adopte un
point de vue diamétralement opposé à celui du représentant
des employeurs - la Convention de
Vienne ne s'applique pas aux organisations internationales
comme l'OIT, dans la mesure où elles disposent
de leurs propres règles en matière d'interprétation.
Il n'y a pas en droit international de principe
selon lequel les normes qui ont été adoptées par une
organisation internationale devraient être interprétées
selon les règles qui sont propres à la Convention
de Vienne. L'article 5 de la Convention de Vienne
précise par exemple que ses propres règles ne l'emportent
pas sur les règles qui régissent l'interprétation
donnée par les organisations internationales.
Ainsi, la jurisprudence de l'OIT, vieille de plusieurs
décennies, l'emporte sur les dispositions correspondantes
de la Convention de Vienne. Cependant,
même si l'on invoque les règles de la Convention de
Vienne, l'article 31, paragraphe 3, précise qu'il n'est
pas nécessaire que toutes les parties se soient déclarées
d'accord avec l'interprétation de l'instrument en
question. Au contraire, un accord tacite peut être
suffisant.
Toujours selon l'article 31 de la Convention de
Vienne, « il sera tenu compte de toute .pratique ultérieurement
suivie dans l'application du traité par laquelle
est établi l'accord des parties à l'égard de
l'interprétation du traité». Pendant des années, les
représentants des employeurs à la commission de la
Conférence ne se sont pas opposés à cette jurisprudence.
Dans les autres organisations de contrôle,
comme le Comité de la liberté syndicale, ils sont
d'accord avec le principe de la liberté syndicale et la
manière dont il est appliqué.
Par ailleurs, les éléments ci-après nous conduiraient
aussi à considérer que la liberté syndicale est
devenue partie intégrante du droit international
commun. 1) La Commission des droits de l'homme
de l'ONU a reconnu dès 1990 l'interprétation de
l'OIT sur le droit de grève. 2) La Commission d'investigation
et de conciliation pour l'Afrique du Sud a
également considéré que de nombreux principes fondamentaux
de la liberté syndicale font partie du droit
commun des peuples. 3) Le Conseiller juridique s'est
prononcé sur l'article 37, paragraphe 2, en disant
qu'une interprétation admise pendant des années au
sein de la commission pouvait avoir valeur obligatoire.
Selon la Convention de Vienne également, ce
principe du droit international doit être respecté. Il
serait également erroné d'affirmer qu'il faudrait suivre
une interprétation qui ménagerait un Etat partie.
Cela ne peut s'appliquer aux organisations internationales,
surtout en ce qui concerne les instruments
qui traitent des droits de l'homme car, s'il en était
autrement, le caractère universel et obligatoire de
28/16
ces normes serait remis en cause. L'interprétation
historique invoquée par les employeurs n'est pas non
plus convaincante. Les remarques critiques faites par
les employeurs peu après l'adoption de la convention
n° 87 donnent lieu aujourd'hui à une interprétation
excessive. Même à l'époque, on ne pouvait les considérer
comme une remise en cause fondamentale du
droit de grève.
Pour ce qui est de la convention n° 35, les employeurs
ont eux-mêmes relativisé cette année dans
le cas du Chili une interprétation historique. Une
interprétation historique soulève très fréquemment
des difficultés car, comme nous le savons tous, dans
l'élaboration des normes, il y a souvent des compromis
politiques qui sont conclus en dehors des réunions
des commissions, et dont il ne reste aucune
trace écrite. C'est ce qu'a indiqué le conseiller juridique
dans la déclaration que j'ai citée plus haut.
Mais avant tout, il y a le fait que, selon la Convention
de Vienne, invoquée sans cesse par les employeurs,
la méthode historique ne peut être considérée
que comme un moyen complémentaire. Selon
l'article 32 de ladite convention, cette méthode peut
être valable lorsque l'interprétation de la règle laisse
le sens ambigu ou obscure. Cela n'est pas du tout le
cas pour ce qui est de la pratique et des organes de
contrôle de l'OIT. Une interprétation historique perd
toutes ses bases, même dans le contexte de la Convention
de Vienne.
Il serait bon que la pratique et les décisions des
organes de contrôle ne soit pas mises en cause de
façon directe ou indirecte, car cela est conforme à
l'indispensable garantie du droit. La façon dont on
évalue l'application des normes'ne doit pas être fonction
de certaines idées préconçues découlant d'un
système social et économique particulier. Par conséquent,
la pratique de certains pays industriels ne peut
pas être le paramètre invoqué quand il s'agit d'interpréter
des conventions.
Après l'effondrement des pays anciennement socialistes,
nous ne devrions pas céder à la tentation de
faire du système de contrôle un outil tendancieux à
des fins politiques et économiques.
La commission d'experts mérite notre plus grand
respect, eu égard à l'indépendance et à la compétence
de ses membres. A la différence de cette commission
d'experts, la commission de la Conférence
n'est pas composée d'experts indépendants. Nous y
trouvons les représentants de différents milieux qui
interviennent dans l'application des normes. Cela ne
signifie pas du tout que les remarques formulées par
la Conférence, les interventions et les réflexions
soient dépourvues de valeur morale et politique.
Nous devrions toutefois veiller à ne pas accorder une
importance excessive à la commission de la Conférence,
car s'il en était autrement, à long terme il y
aurait le danger que les décisions prises à la majorité
dans cet organisme à caractère politique entreraient
en conflit avec une procédure indépendante. Par
conséquent, nous devrions tous ensemble faire le nécessaire
pour que les conclusions de la commission
d'experts ne soient pas mises en cause ni affaiblies et
que les mécanismes de contrôle et d'interprétation
soient utilisés à cette fin. Si nous voulons maintenir
la crédibilité de cette Organisation, nous devons
nous opposer à toute relativisation des droits de
l'homme, où que ce soit mais également dans le
monde du travail. Cela est particulièrement vrai pour
la commission d'experts.
Heureusement, le président de la commission,
M. Ruda, a une fois de plus souligné au sein de la
commission de la Conférence que les experts sont
toujours animés par les principes de l'objectivité, de
l'indépendance et de l'impartialité. Ce sont leurs
trois critères. Nous voudrions leur dire que nous les
appuierons toujours et vigoureusement.
Quand le porte-parole des employeurs nous dit
que nous ne sommes pas en mesure d'apporter une
solution, quand il s'agit d'atteintes aux dispositions
du droit international, nous devrions dans ces cas-là
élargir notre champ d'action plutôt que de faire le
contraire, si nous voulons rester crédibles.
Original anglais: M. POTTER (conseiller technique
et délégué suppléant des employeurs, Etats-
Unis) - Je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce
débat général, mais j'y suis contraint par l'attaque
malencontreuse qui a été faite contre le représentant
du groupe des employeurs. Il a en effet été qualifié
d'employeur allemand. Or, j'aimerais souligner que
les points de vue énoncés par M. Wisskirchen sont
bien ceux de l'ensemble de notre groupe.
Ces dernières années ont connu une réorientation
manifeste des relations mondiales et tout particulièrement
la fin de la lutte entre l'Est et l'Ouest. Ce
conflit qui sévissait avant et opposait des points de
vue diamétralement antagonistes jetait une ombre
sur les travaux de la commission de la Conférence et
sur le mécanisme de contrôle dans son ensemble. Le
rejet par les employeurs de l'interprétation donnée
par les experts à un petit nombre seulement de dispositions
des conventions internationales du travail,
particulièrement en ce qui concerne le droit de
grève, s'est fait discret, par esprit de solidarité et
pour sauvegarder le mécanisme de contrôle. Il était
important à l'époque de soutenir ce mécanisme et
cela continue de l'être. Pour la plus grande part, la
commission de la Conférence a suivi les avis et les
interprétations des experts. Cela ne signifie pas pour
autant que la commission doive suivre entièrement
les avis de la commission d'experts. Si le rapport des
experts est indispensable à l'action de la commission
de la Conférence, celle-ci ne saurait remplir les obligations
que lui impose l'article 7 du Règlement sans
procéder par elle-même à une évaluation en toute
indépendance. Le plus souvent les conclusions de la
commission de la Conférence co ¡incident avec celles
de la commission d'experts.
Cette année dans un certain nombre de cas - ceux
de l'Equateur, de la Colombie et du Pakistan, pour
n'en citer que quelques-uns -, les employeurs ont développé
de façon assez détaillée les raisons pour lesquelles
notre interprétation du droit de grève diffère
de celle de la commission d'experts. Les conventions
nos 87 et 98 et la jurisprudence ne traitent pas des
aspects sociaux et juridiques du droit de grève. De
plus, s'appuyer sur des décisions du Comité de la
liberté syndicale n'est pas une procédure appropriée,
car les décisions du Comité de la liberté syndicale
sont fondées sur des principes généraux et ne se limitent
pas au texte des conventions nos 87 et 98 et à
la jurisprudence qui les concerne, telles qu'elles sont
interprétées et appliquées conformément aux articles
31 et 32 de la Convention de Vienne. Mais il
n'est pas essentiel de se référer à la Convention de
Vienne pour arriver à cette conclusion, parce que les
conventions s'appliquent traditionnellement selon
28/17
les règles d'interprétation généralement acceptées
dans les traités internationaux.
Ce qui est peut-être le plus important, c'est que
l'exercice du droit de grève ne se pratique pas dans
le vide. De par sa nature, il ne touche pas seulement
les employeurs mais la communauté dans son ensemble.
Les grèves ont lieu dans des contextes juridiques
différents, des degrés de développement
économique et industriel différents et des circonstances
économiques différentes. Cela a toujours
été la position du groupe employeur depuis 1953.
L'approche «taille unique» des experts, notamment
en ce qui concerne les services essentiels du
secteur public, ne tient pas compte de ces réalités et
de l'absence d'une disposition explicite sur le droit
de grève dans les conventions nos 87 et 98. Au lieu de
réitérer simplement les vieilles déclarations sur le
droit de grève, les experts doivent tenir compte de
ces facteurs juridiques et économiques et réexaminer
le droit de grève dans le contexte des observations
sur des cas particuliers, et dans leur étude d'ensemble
sur les conventions nos 87 et 98 qu'ils feront
en 1994.
Original anglais: Le PRÉSIDENT (M. Gray) -
Puis-je considérer que le rapport de la Commission
de l'application des normes est adopté ?
(Le rapport est adopté.)
(La séance est levée à 13 heures.)
28/18
Document no 267
CIT, 99e session, 2010, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 74-78

ILC99-PR16-PI-2010-Fr.doc 16 Partie I/1
Conférence internationale du Travail Compte rendu des travaux 16
99e session, Genève, 2010 PREMIÈRE PARTIE
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
PREMIÈRE PARTIE
RAPPORT GÉNÉRAL
Table des matières
Page
A. Introduction ................................................................................................................... 3
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail ............................ 9
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution ...................................... 29
D. Rapport du Comité conjoint OIT/UNESCO d’experts sur l’application
des Recommandations concernant le personnel enseignant (CEART) ......................... 53
E. Exécution d’obligations spécifiques ............................................................................. 59
F. Adoption du rapport et remarques finales ..................................................................... 68
Appendice 1. Travaux de la commission ............................................................................. 72
Appendice 2. Cas au sujet desquels les gouvernements sont invités à fournir
des informations à la commission ................................................................. 84
ILC99-PR16-PI-2010-Fr.doc 16 Partie I/25
l’intégration et la simplification des conventions de l’OIT en se concentrant sur des règles
essentielles. Les membres employeurs ont proposé la mise en place d’un mécanisme qui
permettrait d’examiner régulièrement les normes de l’OIT afin d’assurer l’application
constante d’un corpus normatif actualisé correspondant toujours aux besoins des mandants.
La mise en place d’un tel mécanisme est de plus en plus urgente, car le dernier examen des
normes de l’OIT par le Conseil d’administration a été effectué entre 1995 et 2002.
S’agissant de l’absence de réponse aux commentaires de la commission d’experts, la
stratégie de simple renvoi des mêmes demandes directes ne semble pas être la solution la
plus efficace.
73. En ce qui concerne la révision des formulaires de rapports au titre de l’article 22, la
membre gouvernementale de Cuba a souligné que cette procédure devrait notamment avoir
pour objectif d’alléger la charge de travail, tant celle des administrations nationales que
celle du Bureau international du Travail et de la commission d’experts, afin de centrer les
travaux sur les aspects fondamentaux de l’application des conventions. Toutefois, cela ne
doit en aucun cas affaiblir les aspects importants de l’application dont le respect doit être
assuré par la commission d’experts, ni permettre d’éviter l’examen des conventions dont le
contenu est totalement ou partiellement obsolète. Il y a lieu de souligner que ces questions
doivent être abordées au cours de discussions impliquant tous les membres de l’OIT,
comme prévu par les règlements et la Constitution de l’OIT elle-même. Rappelant
l’importance de respecter l’obligation d’envoi des rapports et des informations en réponse
aux commentaires de la commission d’experts, l’oratrice a estimé qu’il était encourageant
de voir que la proposition de grouper les conventions par thème avait été bien accueillie,
car cela faciliterait la collecte d’informations au niveau national et donnerait une meilleure
idée de l’application des conventions dans un domaine particulier. La proposition de
modifier le cycle d’envoi des rapports sur les conventions fondamentales permettrait de
mieux remplir l’obligation de soumission des rapports. Les commentaires des
organisations d’employeurs et de travailleurs sont importants, mais il convient de traiter
avec prudence, et d’examiner de manière objective et impartiale, ceux qui s’éloignent des
questions soulevées dans le cadre d’une convention particulière et qui traitent d’une
situation non avérée, sans lien avec les objectifs de respect des conventions.
Remarques finales
74. Les membres travailleurs ont souhaité répondre aux commentaires des membres
employeurs et de certains gouvernements concernant le droit de grève et l’impartialité des
membres de la commission d’experts. Il n’est pas possible de laisser sans réponse les
attaques perpétrées par les membres employeurs contre les principes posés par les organes
de contrôle de l’OIT relatifs au droit de grève dans le cadre de la convention no 87. Depuis
plusieurs années, le fait, pour les représentants des travailleurs et des employeurs, de
discuter des questions d’intérêt commun avec la commission d’experts est devenu une
pratique établie. La collaboration saine et transparente qui s’est ainsi développée repose sur
la confiance de toutes parties en l’honnêteté intellectuelle et en l’impartialité des membres
de la commission d’experts. Cette dernière est un organe composé d’experts juridiques
venant de tous les horizons et de toutes les cultures juridiques, qui sont nommés par le
Conseil d’administration pour un mandat de trois ans renouvelable. Les membres
travailleurs souhaiteraient savoir s’il existe une crise de confiance vis-à-vis du Conseil
d’administration. Bien que le droit de grève ne soit pas expressément mentionné dans une
convention de l’OIT, ce qui est d’ailleurs le cas dans la législation de nombreux pays, cela
n’empêche pas que son existence puisse être reconnue sur la base de plusieurs instruments
internationaux qui considèrent que le droit de grève constitue un corollaire de la liberté
syndicale et du droit de négociation collective. Dans ses articles 3 et 10, la convention
no 87 affirme le droit des organisations de travailleurs et d’employeurs «d’organiser leur
gestion et leur activité, et de formuler leur programme». Se fondant sur ces dispositions, le
16 Partie I/26 ILC99-PR16-PI-2010-Fr.doc
Comité de la liberté syndicale (depuis 1952) et la commission d’experts (depuis 1959) ont,
à maintes reprises, réaffirmé que le droit de grève est un droit fondamental des travailleurs
et de leurs organisations. Ces organes de contrôle ont défini le champ d’application du
droit de grève et développé un ensemble de principes fixant le champ d’application de la
convention. Il semble que les membres employeurs, tout en ne remettant pas en cause le
droit de grève lui-même, contestent son champ d’application. Pourtant, les principes
énoncés respectent également le droit des entreprises et n’approuvent pas les grèves
sauvages, violentes ou politiques. Ils constituent seulement un outil bien défini permettant
de fournir aux travailleurs, dont les droits sont bafoués, une arme de dernier recours. Dans
la mesure où le Comité de la liberté syndicale a également été établi par le Conseil
d’administration, les membres travailleurs se sont demandé une nouvelle fois s’il y a une
crise de confiance à l’égard de cette institution.
75. Les membres employeurs ont exprimé leur appréciation des commentaires formulés par les
membres travailleurs et gouvernementaux au cours de la discussion générale, et plus
particulièrement de la déclaration du membre travailleur du Pakistan. En réponse aux
remarques finales faites par les membres travailleurs, les membres employeurs ont
expliqué qu’ils demandent seulement à ce que la gouvernance tripartite du contrôle de
l’application des normes de l’OIT soit rétablie conformément à l’article 23 de la
Constitution de l’OIT et à l’article 7 du Règlement de la Conférence. Il ne s’agit pas de
remettre en cause le rôle précieux de la commission d’experts mais seulement certaines de
ses interprétations. En particulier, comme on le sait, depuis de nombreuses années, les
membres employeurs ont soulevé certaines questions concernant la réglementation
détaillée du droit de grève, questions auxquelles la commission d’experts n’a jamais
répondu. Il ne s’agit en aucun cas de remettre en cause le droit de grève lui-même, mais
plutôt la réglementation détaillée établie, en ce qui le concerne, par les organes de contrôle.
La procédure de contrôle a conduit à l’élaboration et au développement d’une
réglementation détaillée du droit de grève. La commission d’experts s’est référée au droit
de grève pour la première fois dans une observation de 1961, et les travaux préparatoires
des conventions nos 87 et 98 montrent que les tentatives d’y inclure des dispositions se
référant expressément au droit de grève ont été rejetées. Il n’est pas forcément approprié
pour la commission d’experts de se fonder sur le Comité de la liberté syndicale pour
examiner l’application des conventions ratifiées. Les membres employeurs ont réaffirmé
leur soutien au système de contrôle et souligné l’importance des recherches, examens et
conclusions de la commission d’experts. Toutefois, faire taire un des mandants qui soulève
des questions valables s’agissant d’une minorité de commentaires de la commission
d’experts n’est pas conforme à la gouvernance tripartite du système de contrôle.
Réponse de la présidente de la commission d’experts
76. La présidente de la commission d’experts a tout d’abord souligné que la commission
d’experts s’efforce d’être rigoureusement impartiale et de se limiter aux faits qui figurent
dans le dossier. La commission d’experts est consciente que le gouvernement et les
partenaires sociaux, agissant de bonne foi, abordent naturellement un problème selon leur
propre point de vue. C’est pourquoi la commission d’experts cherche à séparer les
plaidoyers, opinions et allégations des faits. S’agissant de l’obligation du gouvernement de
communiquer copie de son rapport aux organisations d’employeurs et de travailleurs afin
de leur permettre de faire leurs commentaires, il convient de souligner que, presque de la
même manière, lorsque la commission d’experts reçoit des observations d’une organisation
d’employeurs ou de travailleurs alléguant le non-respect d’une convention, la commission
d’experts envoie ces observations au gouvernement et lui demande d’y répondre. Si une
réponse est envoyée par le gouvernement, la commission d’experts en tient compte dans
son observation ou sa demande directe.
ILC99-PR16-PI-2010-Fr.doc 16 Partie I/27
77. En ce qui concerne le droit de grève, il convient de souligner que ce droit a été reconnu par
la commission d’experts depuis plus de cinquante ans. La dernière étude d’ensemble sur la
liberté syndicale a été rédigée en 1994, c’est-à-dire avant que les membres de la présente
commission d’experts aient été nommés. Se référant aux quinze années qu’elle vient de
passer en qualité de membre de la commission d’experts, l’oratrice a indiqué qu’elle ne se
souvient pas d’un seul cas dans lequel la commission d’experts a développé sa
jurisprudence en matière de droit de grève. Dans une certaine mesure, la commission
d’experts répond aux questions soulevées par les parties. Il est possible que la question du
droit de grève ait été abordée plus fréquemment dans les observations au titre de la
convention no 87, mais cela ne vient pas d’une intention délibérée de la commission
d’experts d’étendre sa jurisprudence dans ce domaine.
78. Enfin, il convient de souligner que la commission d’experts est l’organe impartial le plus
élevé ayant une fonction de contrôle à l’OIT. Elle a été créée en tant qu’organe neutre et
impartial au sein d’une organisation dont le système de gouvernance est tripartite. Au fil
des ans, la Conférence a créé des moyens permettant aux éléments de ce système tripartite
de se faire entendre, y compris de faire entendre leurs points de vue sur le rapport et
l’étude d’ensemble de la commission d’experts, et d’assurer leur publication. La séparation
traditionnelle entre le rapport et l’étude d’ensemble de la commission d’experts, d’une
part, et les points de vue exprimés par les gouvernements, les employeurs et les travailleurs
sur les mêmes questions, d’autre part, a été très utile à l’organisation au fil du temps. Elle a
instamment prié la commission de procéder à un examen approfondi avant de proposer un
changement qui, s’il pouvait sembler minime, pouvait toutefois modifier le fragile
équilibre qui avait permis à cette organisation tripartite unique de faire avancer ses
précieux travaux pendant plus de quatre-vingt-dix ans.
Réponse de la représentante du Secrétaire général
79. Tout d’abord, la représentante du Secrétaire général a souhaité remercier tous ceux qui
avaient pris part à la discussion. La présidente de la commission d’experts a déjà répondu à
certaines questions concernant le rapport de la commission d’experts et son étude
d’ensemble. Abordant les questions qui sont du ressort du Bureau, elle a souhaité
confirmer, à propos de la question soulevée par la Jamahiriya arabe libyenne, que
l’ensemble des commentaires de la commission d’experts sont traduits vers l’arabe. Quant
au point soulevé par les membres travailleurs concernant l’application de la convention
no 29 par le Japon, ce cas sera examiné par la commission d’experts lors de sa prochaine
session, puisque le rapport du gouvernement est dû cette année. L’examen portera sur le
rapport du gouvernement, mais également sur les observations transmises par les
organisations de travailleurs. S’agissant de la demande de cesser de promouvoir la
convention no 94, adressée par les membres employeurs au Bureau, elle a renvoyé à la
discussion de la commission telle qu’elle est retranscrite aux paragraphes 73 à 139 du
Rapport général de la commission de 2008. Dans ses remarques finales, elle notait qu’«à
l’exception des membres employeurs et du membre gouvernemental du Canada, tous les
orateurs [s’étaient] prononcés en faveur d’activités de promotion et de sensibilisation».
L’oratrice a souligné que le Bureau est tenu de suivre les décisions tripartites existantes ou
nouvelles concernant la promotion des conventions de l’OIT. De manière générale, la
mission du Bureau est de promouvoir les conventions jusqu’à ce qu’une décision tripartite
soit prise selon laquelle telle convention de l’OIT est dépassée et ne répond plus aux
objectifs de l’organisation.
80. L’oratrice a ensuite souhaité aborder le point de vue de l’employeur selon lequel une plus
grande visibilité est donnée au rapport de la commission d’experts qu’à celui de la présente
commission, malgré les améliorations apportées au cours des dernières années. Elle a
souligné que cette commission et la commission d’experts sont les deux piliers du système
Document no 268
CIT, 101e session, 2012, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 82-236

19(Rev.) Partie I/1
Conférence internationale du Travail 19(Rev.)
PREMIÈRE PARTIE
Compte rendu des travaux
101e session, Genève, mai-juin 2012
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
PREMIÈRE PARTIE
RAPPORT GÉNÉRAL
Table des matières
Page
A. Introduction ................................................................................................................... 3
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail ............................ 8
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution – Etude d’ensemble
sur les conventions fondamentales ............................................................................... 16
D. Exécution d’obligations spécifiques ............................................................................. 29
E. Discussion relative à la liste des cas individuels devant être examinés
par la commission ......................................................................................................... 34
F. Discussion de suivi sur les suites à donner ................................................................... 49
G. Point de décision soumis par le président de la commission après
consultation tripartite .................................................................................................... 52
H. Adoption du rapport et remarques finales ..................................................................... 56
Appendice 1. Travaux de la commission .......................................................................... 62
Appendice 2. Liste préliminaire des cas pouvant être examinés par la Commission
de l’application des normes de la CIT de juin 2012 ................................... 76
19(Rev.) Partie I/23
qui ne l’ont pas encore fait à ratifier toutes les conventions fondamentales, et a souligné
qu’il est particulièrement important, compte tenu de la crise économique mondiale et de
ses conséquences, de se conformer aux conventions nos 87 et 98. L’OIT doit s’attacher
avant tout à appliquer de nouvelles mesures pour l’élimination de toutes les formes de
discrimination au travail, dont la discrimination relative à la rémunération des travailleurs
et des travailleuses.
80. La membre gouvernementale de la Norvège a insisté sur la nécessité de renforcer
l’inspection du travail et le dialogue social dans le cadre de la mise en oeuvre des
conventions fondamentales au niveau national. Elle a attiré l’attention sur le fait qu’il faut
se préoccuper avant tout des travailleuses et des travailleurs de l’économie informelle et
des groupes vulnérables de travailleurs et travailleuses, ainsi que des questions d’équité et
de non-discrimination. Il faut également accorder plus d’importance, dans l’ensemble des
activités du BIT, aux commentaires des organes de contrôle, et les partenaires sociaux
devraient jouer un rôle plus actif, dès la conception, dans les projets de coopération
technique.
81. Un membre travailleur de la République bolivarienne du Venezuela a indiqué que son pays
a inscrit les droits fondamentaux des travailleurs dans la loi organique du travail, laquelle
donne effet aux huit conventions fondamentales, et qu’il enregistre depuis quelques années
une croissance économique tout en respectant tous les principes et droits fondamentaux au
travail. Des accords collectifs ont été négociés et d’autres sont en passe de l’être dans
nombre de secteurs, et la durée de travail a été réduite à 40 heures par semaine, avec deux
jours de repos. Une membre travailleuse de la République bolivarienne du Venezuela a
ajouté que, grâce à l’établissement des droits des travailleurs dans la législation, au
nouveau modèle de production instauré grâce à la participation des travailleurs et à une
distribution équitable de la richesse, son pays est désormais considéré comme l’un des
pays d’Amérique latine où les niveaux d’inégalité sont les plus faibles.
Liberté syndicale et négociation collective
82. Les membres employeurs, faisant référence aux commentaires du président de la
commission d’experts concernant la discussion du droit de grève dans le contexte de
l’étude d’ensemble de 1994, ont souligné que, comme indiqué dans la présente étude
d’ensemble, ils avaient clairement exposé leurs objections, lors de la discussion de 1994, à
l’interprétation que la commission d’experts faisait du droit de grève. S’ils admettent
l’existence d’un droit de grève, comme le reconnaissent au niveau national de nombreuses
juridictions, les membres employeurs n’acceptent absolument pas que les commentaires
sur le droit de grève qui figurent dans l’étude d’ensemble représentent les points de vue
politiques reconnus des mandants tripartites de l’OIT. Comme l’a régulièrement souligné,
année après année, le groupe des employeurs, ils s’opposent fondamentalement à ce que
les vues de la commission d’experts concernant le droit de grève soient considérées ou
promues comme une jurisprudence de «soft law». Aucune mention du droit de grève ne
figure dans le texte de la convention no 87, et l’organe compétent pour se prononcer sur de
telles règles, reconnu par l’OIT, est la Conférence, non la commission d’experts.
Conformément à l’article 37 de la Constitution de l’OIT, seule la Cour internationale de
Justice peut donner une interprétation définitive des conventions internationales du travail.
La situation s’est exacerbée car les études d’ensemble sont importantes et sont publiées et
distribuées dans le monde entier sans aucune approbation préalable de la Commission de la
Conférence. Les conventions fondamentales sont incorporées dans nombre d’instruments
et de processus internationaux, comme le Pacte mondial des Nations Unies, les Principes
directeurs de l’OCDE pour les entreprises multinationales et les normes ISO 26000. Les
membres employeurs se sont donc opposés très fermement à l’interprétation par la
commission d’experts de la convention no 87 et du droit de grève, à l’usage de l’étude
d’ensemble s’agissant du droit de grève et à être placés dans une telle position par l’étude
19(Rev.) Partie I/24
d’ensemble. Ils ont indiqué que, pour maintenir la crédibilité et la cohérence du groupe des
employeurs, leurs positions et leurs actions dans tous les domaines d’activités de l’OIT
concernant la convention et le droit de grève en seront profondément modifiées.
83. De façon plus générale, les membres employeurs ont approuvé les commentaires de la
commission d’experts selon lesquels, en l’absence d’un système démocratique respectant
les principes et les droits fondamentaux, la liberté syndicale ne peut se développer
pleinement. Des cas de défaut d’application de la convention no 87 qui sont soulignés dans
l’étude d’ensemble, comme le déni du droit syndical à l’égard de certaines catégories de
personnes, des restrictions imposées à la tenue d’élections libres au sein des organisations
représentatives, des restrictions à l’égard de catégories de personnes qui peuvent occuper
des fonctions syndicales, des restrictions à l’indépendance et au fonctionnement des
organisations, le fait de fixer un nombre excessif de membres pour créer un syndicat,
touchent au coeur de la convention et concernent également certains employeurs. Qui plus
est, la commission d’experts a souligné à juste titre que les employeurs sont également
protégés par les instruments relatifs à la liberté syndicale.
84. Un membre employeur du Danemark a relevé qu’il représentait les employeurs publics,
bien qu’il ne représentât pas l’Etat, et qu’il souhaitait se prononcer sur l’impact des
conventions nos 87 et 98 sur les employeurs publics. La commission d’experts a créé des
distinctions arbitraires en interprétant le droit de grève, ce qui l’a obligée à formuler des
règles spéciales pour le secteur public. Les employeurs publics ne suivent pas les
inventions créatives de la commission d’experts, le droit de grève dépendant de la
législation nationale et non des conventions internationales de l’OIT. L’interprétation de la
convention no 98 par la commission d’experts pose problème en ce qu’elle permet à des
syndicats minoritaires de conclure des accords alors même qu’aucun syndicat ne représente
la majorité des travailleurs. Bien que les syndicats minoritaires puissent négocier des
accords, les employeurs conservent le droit de refuser.
85. Se référant aux remarques des membres employeurs, les membres travailleurs ont
réaffirmé que le droit de grève est un corollaire indispensable de la liberté syndicale et
qu’il apparaît clairement qu’il découle de la convention no 87. De plus, la commission
d’experts a exprimé une nouvelle fois l’argument, fruit d’une mûre réflexion, lui
permettant d’affirmer que le droit de grève fait partie intégrante des droits du travail
fondamentaux. Il est important de rappeler que la commission d’experts est un organe
technique qui respecte les principes d’indépendance, d’objectivité et d’impartialité. Il serait
erroné d’envisager une modification de sa jurisprudence au motif que ses mandants ont des
opinions divergentes. Bien que le mandat de la commission d’experts ne prévoie pas de
donner des interprétations définitives des conventions, il est toutefois nécessaire, aux fins
de la sécurité juridique, qu’elle examine le contenu ainsi que le sens des dispositions des
conventions et, le cas échéant, qu’elle exprime son opinion à cet égard.
86. Selon les membres travailleurs, le droit de grève s’inscrit dans l’exercice ordinaire de la
liberté syndicale. Sans lui, les travailleurs ne pourraient avoir la moindre influence dans la
négociation collective. Remettre en question le droit de grève, qui fait partie intégrante de
la liberté syndicale, impliquerait que les autres droits et libertés seraient vains dans la
pratique. Les droits fondamentaux au travail et leur interprétation dans le cadre du
processus de contrôle sont des éléments essentiels pour assurer la pérennité des droits
sociaux et des libertés publiques.
87. Le membre travailleur du Pérou a ajouté que le droit de grève est un droit sacré, inaliénable
et non négociable, pour la défense duquel des milliers de travailleurs ont perdu leur vie ou
ont subi des tortures. Selon le membre travailleur du Brésil, le droit de grève est aussi
important que le droit au travail et le droit à des salaires décents.
19(Rev.) Partie I/25
88. Les membres travailleurs se sont félicités de ce que l’étude d’ensemble fasse état de leurs
préoccupations au sujet de l’orientation que la Cour européenne de justice a prise dans sa
jurisprudence concernant le lien existant entre le droit de grève et la libre circulation des
services. Faisant part de leur pessimisme quant au règlement appelé «règlement Monti II»,
ils font remarquer que la jurisprudence européenne va à l’encontre non seulement des
principes de la liberté syndicale, mais également du droit à la négociation collective. Bien
que la commission d’experts précise qu’elle a pour mandat de traiter les problèmes des
Etats Membres mais pas de s’étendre aux organisations régionales, il est impossible de
faire une distinction catégorique entre la politique nationale et la politique régionale. La
question se pose donc de savoir si le système de contrôle devrait couvrir également les
problèmes rencontrés à l’échelle régionale, et ce pas uniquement en Europe.
89. Plusieurs membres travailleurs ont fait part de cas de restriction des droits syndicaux
relevés dans leur pays. Le membre travailleur des Etats-Unis a indiqué qu’aux Etats-Unis,
en 2011, les autorités de certains Etats ont invoqué les déficits budgétaires dus à la crise
financière pour justifier des réductions de salaires et la diminution des avantages dont
bénéficiaient les enseignants et autres travailleurs du secteur public, et pour éliminer ou
restreindre leurs droits à la négociation collective. Les employeurs des Etats-Unis sont
extrêmement hostiles aux syndicats et continuent à avoir recours à des tactiques
antisyndicales pour faire pression auprès des travailleurs afin de les empêcher de se
syndiquer. Dans le contexte actuel où le taux de chômage est toujours élevé et la
croissance économique faible, certains employeurs du secteur privé ont imposé des lockouts
pour faire pression auprès des travailleurs afin qu’ils acceptent les concessions
sollicitées en termes de salaires et d’avantages sociaux et pour accroître le nombre des
travailleurs temporaires et la sous-traitance. Au Sénégal, le statut général des
fonctionnaires, statut réservé à une minorité, a retiré les droits à la négociation collective et
à la consultation, de sorte que les fonctionnaires perdent toute possibilité de négocier leurs
salaires. En République de Corée, la loi sur les syndicats a récemment été révisée, cette
révision correspondant à une mesure rétrograde. Les travailleurs qui tiennent un rôle
dirigeant dans les activités syndicales et dans l’action collective sont menacés de renvoi,
d’emprisonnement ou d’actions en justice en compensation des dommages qu’ils auraient
entraînés. Certaines confédérations de travailleurs ont été à plusieurs reprises menacées de
se voir retirer leur licence en raison du fait qu’elles comptaient parmi leurs adhérents un
nombre élevé de travailleurs précaires. De plus, lorsque les travailleurs en sous-traitance
tentent d’exercer leur droit syndical, leur contrat risque d’être résilié, ce qui provoque le
même effet qu’un licenciement collectif.
90. Plusieurs membres gouvernementaux ont rappelé que le droit de grève est clairement établi
et largement accepté en tant que droit fondamental. La membre gouvernementale des
Etats-Unis se félicite des efforts constants déployés par la commission d’experts pour
promouvoir une meilleure compréhension du sens et de la portée des conventions
fondamentales, y compris du droit de grève. La membre gouvernementale de la Norvège
ajoute que son pays approuve entièrement la position de la commission d’experts, selon
laquelle le droit de grève est un droit fondamental protégé par la convention no 87.
Travail forcé
91. Faisant observer que les conventions nos 29 et 105 gardent toute leur pertinence, les
membres employeurs ont accueilli favorablement les informations détaillées contenues
dans l’étude d’ensemble, concernant l’application desdites conventions, dans le droit
comme dans la pratique. Cependant, l’heure n’est pas à la complaisance car les problèmes
sont bien là, en particulier en ce qui concerne l’absence de volonté de prendre des mesures
efficaces en vue de l’élimination du travail forcé et de la mise en place de mécanismes
visant son interdiction. De plus, les membres employeurs ont noté que l’étude d’ensemble
19(Rev.) Partie I/26
tend à étendre la définition du travail forcé à de nouveaux domaines, tels que le travail
pénitentiaire et les heures supplémentaires. Ils ont mis en garde les membres sur le fait que
cela risque fort de banaliser le problème. Dans le cas du travail pénitentiaire, la définition
que la commission d’experts donne au caractère volontaire de ce travail est selon eux trop
étroite. En outre, si la notion de conditions proches de conditions de travail libre peut être
un indicateur de l’absence de travail forcé, il existe d’autres indicateurs tout aussi viables.
Il serait certainement bon de définir de façon plus précise les limites du caractère
volontaire du travail. En ce qui concerne les heures supplémentaires, il convient d’insister
sur le fait que, même si des heures supplémentaires excessives ne sauraient être assimilées
à des conditions de travail décent, elles ne peuvent pas pour autant être considérées comme
un travail forcé si le travailleur est libre de mettre un terme à sa relation de travail. Se
rapportant à l’interdiction stipulée dans la convention no 105 d’imposer un travail forcé
afin de punir un travailleur ayant participé à des grèves, les membres employeurs ont
ajouté que ladite convention n’est pas un instrument chargé de réglementer les grèves et
qu’elle n’interdit pas l’imposition de sanctions suite à des grèves. Elle interdit seulement le
recours au travail forcé pour condamner une personne ayant pris part à des grèves, qu’il
s’agisse de grèves légales ou non.
92. D’après les membres travailleurs, le travail forcé, qui est l’antithèse du travail décent, n’est
pas propre à certains pays ou à certains secteurs. Il se trouve dans le monde entier et se
traduit par la traite des personnes, des types nouveaux de migration, la privatisation des
prisons, et même dans les politiques de sécurité sociale «quid pro quo» actuellement en
cours (en vertu desquelles les travailleurs sans emploi ou vivant dans la pauvreté effectuent
des travaux d’intérêt public en échange des avantages qu’ils perçoivent).
Elimination du travail des enfants
93. Les membres employeurs se sont félicités de la première étude d’ensemble rédigée au sujet
de la convention no 182, et de la première étude d’ensemble qui ait été réalisée depuis plus
de trente ans au sujet de la convention no 138. Il est temps de se pencher sur les progrès
accomplis dans le domaine de l’élimination du travail des enfants et l’on ne peut que se
féliciter de la richesse des informations fournies sur l’application de ces deux conventions.
De toute évidence, la question du travail des enfants a une incidence sur l’avenir des
nations. Les enfants qui travaillent ont, pour la plupart, peu de chance de poursuivre leur
éducation et leur formation, de sorte qu’ils auront plus tard beaucoup de mal à accéder à un
travail autre qu’un travail nécessitant des compétences faibles et offrant de faibles taux de
rémunération. C’est pourquoi la lutte contre le travail des enfants devrait être étroitement
liée à des mesures à prendre en matière d’éducation et de formation. Les membres
employeurs prennent note des exemples nombreux qui illustrent les efforts accomplis par
les Etats Membres de l’OIT, dans la loi comme dans la pratique. Ils observent cependant
que les mesures prises restent souvent insuffisantes. En particulier, la législation ne
parvient pas à interdire le travail des enfants dans l’économie informelle, alors que c’est là
qu’il est le plus fréquent. Dans certains pays, la législation relative au travail des enfants ne
couvre pas certains secteurs tels que le travail domestique, l’agriculture et le commerce. De
plus, bien que l’inspection du travail soit l’un des principaux moyens de faire respecter
l’interdiction du travail des enfants, les services concernés manquent souvent de la
documentation et des ressources humaines nécessaires, ainsi que de la formation
appropriée. Il convient de rappeler que les partenaires sociaux ont un rôle important à jouer
dans la lutte contre le travail des enfants, mais qu’il arrive souvent que des groupes tels que
les employeurs ne soient pas suffisamment consultés.
94. Les membres employeurs ont demandé que cesse immédiatement l’implication des
institutions de l’Etat dans bon nombre de pires formes de travail des enfants, y compris
dans le recrutement obligatoire des enfants dans les forces armées nationales, la
19(Rev.) Partie I/27
mobilisation obligatoire des enfants dans des programmes scolaires et la complicité de
fonctionnaires gouvernementaux dans la traite des enfants.
95. Les membres travailleurs ont reconnu que des progrès significatifs ont été faits dans divers
pays, en particulier dans le domaine des pires formes de travail des enfants, et que, parmi
les programmes assortis de délais mis en place, beaucoup se sont avérés efficaces.
Cependant, selon le rapport global de 2010, le nombre d’enfants qui travaillent de par le
monde est considérable (215 millions). Parmi eux, beaucoup ont moins de 15 ans
(153 millions) et nombreux sont ceux (116 millions) qui effectuent des travaux dangereux,
en particulier dans l’économie informelle, l’agriculture et le travail domestique. La
commission d’experts a eu raison d’insister sur les risques nouveaux ou supplémentaires
qu’ont fait apparaître la mondialisation du marché du travail, le problème constant de la
traite des personnes, le recrutement d’enfants soldats dans des zones de conflit, ainsi que le
rôle d’Internet dans la promotion du tourisme sexuel et dans l’exploitation des enfants à
des fins sexuelles.
Egalité, non-discrimination et égalité de rémunération
96. Les membres employeurs ont fait observer que la discrimination au travail constituait une
violation d’un des droits de l’homme, et qu’elle entravait aussi l’amélioration de la
situation des travailleurs et l’utilisation de l’ensemble de leur potentiel, représentant de ce
fait un obstacle à la promotion d’entreprises durables. Diversifiée, la main-d’oeuvre permet
aux employeurs de recruter les travailleurs les plus talentueux parmi un large groupe de
candidats, ce qui est bénéfique pour les entreprises, et permet aux travailleurs de proposer
des expériences, des perspectives et des conceptions culturelles très diverses. Toutefois, les
lacunes de la mise en oeuvre des conventions concernant la non-discrimination sont
essentiellement liées à des représentations sociales fondées sur des comportements et des
stéréotypes traditionnels et difficiles à modifier, qui parfois nécessitent une longue période
d’adaptation. Compte tenu des effets des normes sur la non-discrimination pour les
activités des employeurs, les politiques qu’elles impliquent ne devraient pas faire peser de
charge sur les entreprises, car cela risquerait d’entraver leur pérennité et leur capacité à
créer des emplois.
97. S’agissant du principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, les
membres employeurs ont souligné l’importance d’une certaine flexibilité pour appliquer la
convention no 100 au niveau national. Les gouvernements ont le droit d’associer tous les
moyens dont ils disposent pour appliquer le principe, même si l’adoption d’une législation
est peut-être la seule chose qu’ils aient à faire. A cet égard, la négociation collective est
utile car elle permet aux travailleurs et aux employeurs de prendre en considération les
besoins des entreprises et les besoins en matière d’emploi lors de l’élaboration de
programmes sur l’égalité de rémunération et de mesures concernant la non-discrimination.
S’agissant du concept de l’égalité de rémunération, le problème est lié au fait qu’aucun
système satisfaisant permettant de définir la valeur des emplois ne fait l’objet d’un accord
général. Les commentaires de la commission d’experts selon lesquels certains éléments
comme les compétences, les responsabilités, l’effort et les conditions de travail présentent
un intérêt pour déterminer la valeur des emplois, et que la valeur globale d’un emploi ne
peut être déterminée qu’en tenant compte de l’ensemble des éléments, laissent au concept
une certaine ambiguïté. Celle-ci montre qu’il est difficile de chercher à donner une
définition unique de la «valeur égale», et porte à croire qu’une plus grande latitude devrait
être tolérée pour procéder à cette détermination au niveau national.
98. En ce qui concerne le contrôle de la mise en oeuvre des conventions nos 100 et 111, les
membres employeurs ont ajouté que ni l’une ni l’autre ne nécessitait un renversement de la
charge de la preuve, laquelle incomberait à l’employeur, car, dans les pays où cela avait été
le cas, cela avait entraîné des contraintes bureaucratiques très lourdes pour les employeurs.
19(Rev.) Partie I/28
Les entreprises ont déjà fait beaucoup pour appliquer les principes d’égalité posés dans les
deux conventions, notamment au moyen des conventions collectives, et de l’adoption de
codes de bonne conduite volontaires, d’une cartographie des salaires et de plans d’action.
Par conséquent, les normes sur la non-discrimination devraient être cohérentes et souples.
99. Les membres travailleurs se sont félicités que la commission d’experts ait accordé une
attention particulière aux écarts de salaires entre hommes et femmes, contre lesquels on ne
peut lutter qu’en tenant compte simultanément de l’ensemble des facteurs qui sous-tendent
la ségrégation sur le marché du travail. S’agissant de la convention no 111, son article 1 ne
prévoit aucune restriction spécifique et s’applique à toute discrimination qui a pour effet de
détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de
profession. Toutefois, en pratique, de nombreux pays établissent des listes de limitations,
ou en restreignent le champ d’application à leurs propres ressortissants. L’extension du
champ d’application de la convention revêt une importance croissante pour lutter contre les
nouvelles formes de discrimination, comme la discrimination génétique et la
discrimination fondée sur le choix du style de vie. Il importe aussi de lutter contre la
discrimination fondée sur les activités syndicales et de mettre en place des mesures de
protection spécifiques, comme le renversement de la charge de la preuve et la protection de
l’emploi au moyen de procédures judiciaires et administratives spéciales.
Remarques finales
100. Les membres employeurs ont remercié la commission d’experts et ont souligné qu’ils
étaient en mesure de soutenir 95 pour cent de l’étude d’ensemble. La discussion a été
fructueuse. Les conventions fondamentales suscitent un intérêt évident et leur importance
est manifestement reconnue.
101. Les membres travailleurs, renvoyant aux observations des membres employeurs sur
l’absence de référence au concept d’entreprises durables dans l’étude d’ensemble, ont
indiqué qu’il faudrait aussi insister sur l’emploi durable et correctement rémunéré, le droit
à la protection sociale au sens large du terme et la garantie d’emplois de qualité où les
travailleurs sont respectés, et où leur santé, leur sécurité et leur environnement familial
sont préservés. L’ensemble de ces droits dépendent de l’application réelle des huit
conventions fondamentales et présentent un intérêt pour les employeurs et les
gouvernements en favorisant une plus grande cohésion sociale.
102. Les membres travailleurs ont rappelé l’importance cruciale de la liberté syndicale et de la
négociation collective pour l’application des autres conventions. Les huit conventions
fondamentales concernent les droits de l’homme et sont des instruments essentiels pour
faire progresser la démocratie. De plus, il importe de réaffirmer que le droit de grève
découle clairement de la convention no 87 et qu’il s’agit d’un corollaire obligé de la liberté
syndicale. La commission d’experts est un organe technique qui agit selon des principes
d’indépendance, d’objectivité et d’impartialité. En conséquence, elle ne peut pas modifier
sa jurisprudence en fonction de divergences ou de changements de points de vue. A cet
égard, dans le rapport qu’elle a présenté à la Conférence en 1990, la commission d’experts
a donné l’indication suivante: «La commission a déjà eu l’occasion de préciser qu’aux
termes de son mandat elle n’est pas appelée à donner une interprétation définitive des
conventions, cette compétence étant confiée à la Cour internationale de Justice, en vertu de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT. Néanmoins, pour remplir sa fonction […], la
commission se doit d’examiner le contenu et la signification des dispositions de[s] […]
convention[s], d’en déterminer la portée juridique et, le cas échéant, d’exprimer ses vues à
ce sujet. Il apparaît donc à la commission que, tant que ses vues ne sont pas contredites par
la Cour internationale de Justice, elles sont réputées valables et communément admises.
[…] La commission estime que l’acceptation des considérations qui précèdent est
19(Rev.) Partie I/29
indispensable à l’existence même du principe de légalité et, partant, de la sécurité juridique
nécessaire au bon fonctionnement de l’Organisation internationale du Travail.»
103. Les membres travailleurs, s’intéressant à la teneur de l’étude d’ensemble, se sont montrés
très favorables à ce qu’une attention particulière soit accordée aux catégories de
travailleurs vulnérables, notamment les travailleurs domestiques, les travailleurs migrants,
les travailleurs du secteur informel et les travailleurs agricoles, ainsi qu’aux problèmes
croissants qu’ils rencontrent lorsqu’ils exercent leurs droits et libertés fondamentaux au
travail. Concernant les formes de travail atypiques, les membres travailleurs ont demandé
qu’une réunion d’experts tripartite soit organisée sur cette question par l’OIT. S’agissant
de l’élimination de toutes les formes de travail forcé, même si les conventions nos 29 et 105
comptent parmi les plus largement ratifiées, différentes formes de travail forcé ou
obligatoire persistent. Par conséquent, les gouvernements devraient élaborer un cadre
politique et juridique complet pour lutter contre toutes les formes de travail forcé, lequel
comporterait des mesures punitives, mais aussi une protection des victimes et une
réparation des dommages subis. Le principe fondamental de l’égalité entre les sexes et
l’élimination de la discrimination en matière d’emploi sont des droits de l’homme dont
jouit toute personne, homme ou femme; ils ont une incidence non négligeable sur
l’exercice de tous les autres droits. Il faudrait peut-être organiser une discussion sur les
nouvelles formes d’atteinte à l’égalité, en vue de l’élaboration éventuelle d’un instrument
moderne tenant compte de l’évolution de la société, et comprenant une liste des nouvelles
formes de discrimination, ainsi que des propositions sur les moyens d’y remédier.
104. Pour conclure, les membres travailleurs ont encouragé l’OIT à poursuivre la campagne
qu’elle mène pour promouvoir la ratification et le respect des conventions fondamentales
afin d’instaurer, d’ici à 2015, un cadre social propice à la paix, à la stabilité, au
développement économique, à la prospérité et à la justice sociale.
D. Exécution d’obligations spécifiques
105. Le président a expliqué les nouvelles méthodes de travail de la commission pour la
discussion des cas de manquements graves par les Etats Membres à leurs obligations de
faire rapport et à leurs autres obligations liées aux normes.
106. Les membres employeurs ont indiqué que le système de contrôle est tributaire des rapports
que remettent les gouvernements sur l’application des conventions. Ce système ne pourrait
fonctionner sans le dépôt régulier de rapports. Ils notent les contraintes institutionnelles et
structurelles causées, par exemple, par l’agitation politique, qui entraînent un manque de
ressources humaines et financières et une insuffisance de communication entre les
ministères. Le Bureau pourrait apporter une assistance technique adéquate et il espère que
les gouvernements se prévaudront de cette possibilité. Lorsqu’ils envisagent de ratifier des
conventions, les gouvernements doivent savoir qu’ils sont tenus de fournir ces rapports.
Les membres employeurs ont constaté une amélioration générale par rapport à l’année
dernière s’agissant de l’obligation pour les Etats Membres de faire rapport au titre des
articles 22 et 35 de la Constitution de l’OIT, comme l’indiquait le rapport général de la
commission d’experts. Ils soulignent toutefois que d’autres efforts s’imposent.
107. Les membres travailleurs ont insisté sur le fait que l’obligation d’envoyer des rapports aux
dates prévues et avec des informations utiles devait être respectée par tous les
gouvernements. La régularité des envois et la qualité des réponses fournies influencent
grandement le travail de la commission d’experts. Lorsque les rapports sont de bonne
qualité, le système de contrôle peut atteindre ses objectifs, et ce pour le plus grand bien des
travailleurs et la défense de leurs droits. Les progrès notés à ce jour concernant l’envoi des
19(Rev.) Partie I/30
rapports étant insuffisants, les gouvernements concernés doivent prendre toutes les
mesures nécessaires pour remplir leurs obligations à cet égard.
108. Pour l’examen des cas individuels concernant l’exécution par les Etats de leurs obligations
au titre des normes internationales du travail ou relatives à celles-ci, la commission a mis
en oeuvre les mêmes méthodes de travail et critères que l’année précédente.
109. En appliquant ces méthodes, la commission a décidé d’inviter tous les gouvernements
concernés par les commentaires figurant aux paragraphes 31 (manquement à l’envoi de
rapports depuis deux ans ou plus sur l’application des conventions ratifiées),
37 (manquement à l’envoi de premiers rapports sur l’application de conventions ratifiées),
40 (manquement à l’envoi d’informations en réponse aux commentaires de la commission
d’experts), 89 (défaut de soumission des instruments aux autorités compétentes) et
98 (manquement à l’envoi de rapports depuis les cinq dernières années sur des conventions
non ratifiées et des recommandations) du rapport de la commission d’experts à fournir des
informations à la commission au cours d’une séance d’une demi-journée consacrée à
l’examen de ces cas.
Soumission des conventions, protocoles
et recommandations aux autorités compétentes
110. Dans le cadre de son mandat, la commission a examiné les mesures prises en vertu de
l’article 19, paragraphes 5 à 7, de la Constitution de l’OIT. Ces dispositions prévoient que
les Etats Membres soumettent, dans le délai d’un an ou, par suite de circonstances
exceptionnelles, de dix-huit mois, à partir de la clôture de la session de la Conférence, les
instruments adoptés au cours de cette session à l’autorité ou aux autorités dans la
compétence desquelles rentre la matière, en vue de la transformer en loi ou de prendre des
mesures d’un autre ordre, et informent le Directeur général du BIT des mesures prises à cet
effet, en lui communiquant tous renseignements sur l’autorité ou les autorités considérées
comme compétentes.
111. La commission a noté dans le rapport de la commission d’experts (paragr. 87) que des
efforts considérables ont été faits pour remplir l’obligation de soumission des instruments
dans les pays suivants: Cap-Vert, République centrafricaine, Kenya, Mongolie et Qatar. En
outre, elle a reçu des informations sur la soumission des instruments aux parlements de la
part de nombreux gouvernements, notamment du Cambodge, de l’ex-République
yougoslave de Macédoine, de l’Ouzbékistan et du Turkménistan, ainsi que la ratification
par Saint-Kitts-et-Nevis de la convention du travail maritime, 2006 (MLC, 2006), et par le
Togo de la convention (no 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au
travail, 2006.
Défaut de soumission
112. La commission a noté que, afin de faciliter le travail de cette commission, le rapport de la
commission d’experts fait mention uniquement des gouvernements qui n’ont fourni aucune
information sur la soumission aux autorités compétentes pour les instruments adoptés par
la Conférence au cours d’au moins sept sessions (de la 90e session en juin 2002 jusqu’à la
99e session en juin 2010, puisque la Conférence n’a pas adopté de convention ni de
recommandation à ses 93e (2005), 97e (2008) et 98e (2009) sessions). Cette période est
considérée comme suffisamment longue pour inviter les gouvernements à la séance
spéciale de la commission afin de fournir des explications sur les délais dans la
soumission.
19(Rev.) Partie I/31
113. La commission a noté les excuses exprimées par plusieurs délégations concernant le retard
à fournir des informations complètes sur la soumission aux parlements des instruments
adoptés par la Conférence. Certains gouvernements ont demandé l’assistance du BIT pour
clarifier la marche à suivre et compléter la procédure de soumission aux parlements
nationaux, en consultation avec les partenaires sociaux.
114. La commission s’est déclarée très préoccupée par le non-respect de l’obligation de
soumettre les conventions, recommandations et protocoles aux parlements nationaux. Elle
a également rappelé que le Bureau peut fournir une assistance technique pour contribuer au
respect de cette obligation constitutionnelle.
115. La commission a relevé que les 33 pays qui sont toujours concernés par ce grave
manquement à soumettre aux autorités compétentes les instruments adoptés par la
Conférence sont: Bahreïn, Bangladesh, Belize, Colombie, Comores, Congo, Côte
d’Ivoire, Djibouti, Dominique, Ethiopie, Fidji, Géorgie, Guinée, Guinée équatoriale,
Haïti, Iles Salomon, Iraq, Irlande, Kirghizistan, Libye, Mozambique, Ouganda,
Papouasie-Nouvelle-Guinée, République démocratique du Congo, Rwanda, Sainte-
Lucie, Sao Tomé-et-Principe, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Suriname et
Tadjikistan. La commission a exprimé l’espoir que les gouvernements et les partenaires
sociaux concernés prendront les mesures nécessaires de manière à se mettre à jour et éviter
d’être invités à fournir des informations à la prochaine session de cette commission.
Envoi des rapports sur les conventions ratifiées
116. La commission a examiné dans la Partie II de son rapport (respect des obligations)
l’exécution par les Etats de leur obligation de faire rapport sur l’application des
conventions ratifiées. A la date de la réunion de la commission d’experts de 2011, la
proportion de rapports reçus s’élevait à 67,8 pour cent comparée à 67,9 pour cent pour la
session de 2010. Depuis lors, d’autres rapports ont été reçus, portant le chiffre à
77,3 pour cent (comparé à 77,4 pour cent en juin 2011 et à 77,6 pour cent en juin 2010).
Manquements à l’envoi de rapports et d’informations
sur l’application des conventions ratifiées
117. La commission a noté avec regret qu’aucun rapport sur les conventions ratifiées n’a été
fourni depuis deux ans ou plus par les Etats suivants: Djibouti, Grenade, Guinée
équatoriale, Nigéria, Sierra Leone, Somalie et Tchad.
118. La commission a également noté avec regret que les premiers rapports dus sur les
conventions ratifiées n’avaient pas été fournis par les Etats suivants:
19(Rev.) Partie I/32
Etats Conventions nos
Bahamas – depuis 2010: convention no 185
Guinée-Bissau – depuis 2010: convention no 182
Guinée équatoriale – depuis 1998: conventions nos 68, 92
Kazakhstan – depuis 2010: convention no 167
Kirghizistan – depuis 1994: convention no 111
– depuis 2006: conventions nos 17, 184
– depuis 2009: conventions nos 131, 144
– depuis 2010: conventions nos 97, 157
Nigéria – depuis 2010: convention no 185
Royaume-Uni (Sainte-Hélène) – depuis 2010: convention no 182
Sao Tomé-et-Principe – depuis 2007: convention no 184
Seychelles – depuis 2007: conventions nos 147, 161, 180
Vanuatu – depuis 2008: conventions nos 87, 98, 100, 111, 182
– depuis 2010: convention no 185
119. La commission a souligné l’importance toute particulière des premiers rapports sur la base
desquels la commission d’experts établit sa première évaluation de l’application des
conventions ratifiées.
120. Dans le rapport de cette année, la commission d’experts a noté que 43 gouvernements
n’avaient pas communiqué de réponse à la plupart ou à l’ensemble des observations et des
demandes directes sur les conventions pour lesquelles des rapports étaient demandés pour
examen cette année, soit un total de 537 cas (comparé à 669 cas en décembre 2010). La
commission a été informée que, depuis la réunion de la commission d’experts, 15 des
gouvernements intéressés ont envoyé des réponses, lesquelles seront examinées par la
commission d’experts à sa prochaine session.
121. La commission a noté avec regret qu’aucune information n’a encore été reçue en ce qui
concerne l’ensemble ou la plupart des observations et des demandes directes de la
commission d’experts pour lesquelles une réponse était demandée pour la période se
terminant en 2011 de la part des pays suivants: Bahamas, Barbade, Burkina Faso,
Burundi, Comores, Danemark (Groenland), Djibouti, Ghana, Grenade, Guinée,
Guinée équatoriale, Guyana, Haïti, Irlande, Islande, Kazakhstan, Kirghizistan,
Kiribati, Nigéria, Pakistan, République démocratique du Congo, Saint-Marin,
Slovaquie, Sao Tomé-et-Principe, Sierra Leone et Tchad.
122. La commission a pris note des explications données par les gouvernements des pays
suivants sur les difficultés rencontrées dans l’exécution de leurs obligations: Afghanistan,
Bahreïn, Burkina Faso, Danemark (Groenland), Irlande, Islande, Nigéria, Pakistan,
Seychelles, Soudan et Tchad.
19(Rev.) Partie I/33
Envoi des rapports sur les conventions non ratifiées
et les recommandations
123. La commission a noté que 160 des 282 rapports demandés au titre de l’article 19
concernant les conventions fondamentales avaient été reçus à la date de la réunion de la
commission d’experts, soit 56,23 pour cent des rapports demandés.
124. La commission a noté avec regret que, au cours des cinq dernières années, aucun des
rapports sur les conventions non ratifiées et les recommandations, demandés au titre de
l’article 19 de la Constitution, n’avait été fourni par les pays suivants: Afghanistan,
Cap-Vert, Guinée-Bissau, Samoa, Sierra Leone, Somalie, Turkménistan et Vanuatu.
Communication des copies de rapports
aux organisations d’employeurs et de travailleurs
125. Cette année encore, la commission n’a pas eu à faire application du critère selon lequel «le
gouvernement a manqué pendant les trois dernières années d’indiquer les organisations
représentatives d’employeurs et de travailleurs auxquelles, conformément à l’article 23,
paragraphe 2, de la Constitution, doivent être communiquées copies des rapports et
informations adressées à l’OIT au titre des articles 19 et 22».
Application des conventions ratifiées
126. La commission a noté avec un intérêt particulier les mesures prises par un certain nombre
de gouvernements pour assurer l’application des conventions ratifiées. La commission
d’experts a pu faire état, au paragraphe 61 de son rapport, de nouveaux cas dans lesquels
les gouvernements ont apporté des changements à leur législation et à leur pratique, à la
suite des commentaires qu’elle a formulés sur le degré de conformité des législations ou
pratiques nationales avec les dispositions d’une convention ratifiée. Ces cas étaient au
nombre de 72 et concernaient 54 Etats. Dans 2 875 cas, la commission a été amenée à
exprimer sa satisfaction au sujet des progrès accomplis, et cela depuis 1964, date à laquelle
la commission d’experts a entrepris de dresser la liste de ces cas dans son rapport. Ces
résultats sont une preuve tangible de l’efficacité du système de contrôle.
127. Cette année, la commission d’experts a relevé avec intérêt, au paragraphe 64 de son
rapport, différentes mesures prises à la suite de ses commentaires pour assurer une
meilleure application des conventions ratifiées. Les 325 cas dans lesquels des mesures de
ce genre ont été prises concernent 130 pays.
128. Au cours de la présente session, la Commission de la Conférence a été informée d’un
certain nombre d’autres cas dans lesquels des mesures ont été prises récemment ou étaient
sur le point d’être adoptées par les gouvernements en vue d’assurer la mise en oeuvre des
conventions ratifiées. Bien qu’il appartienne en premier lieu à la commission d’experts
d’examiner ces mesures, la Commission de la Conférence s’est félicitée de ces nouvelles
marques d’efforts des gouvernements pour remplir leurs obligations internationales et
donner suite aux commentaires formulés par les organes de contrôle.
19(Rev.) Partie I/34
Indications spécifiques
129. Les membres gouvernementaux de l’Afghanistan, Bahreïn, Bangladesh, Burkina Faso,
Cap-Vert, Colombie, Congo, Danemark (Groenland), Ethiopie, Ghana, Guinée,
Guyana, Irlande, Islande, Nigéria, Ouganda, Pakistan, Papouasie-Nouvelle-Guinée,
Seychelles, Soudan, Suriname et Tchad se sont engagés à remplir leurs obligations de
soumettre des rapports dès que possible.
Séance spéciale sur l’application par le Myanmar
de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
130. La commission a tenu une séance spéciale sur l’application de la convention no 29 par le
Myanmar, conformément à la résolution adoptée par la Conférence en l’an 2000. Un
procès-verbal détaillé de cette séance se trouve dans la deuxième partie de ce rapport.
Participation aux travaux de la commission
131. La commission a tenu à exprimer sa gratitude aux 43 gouvernements qui ont collaboré
avec elle en lui fournissant des informations sur la situation dans leur pays.
132. La commission a cependant regretté que, en dépit des invitations qui leur ont été adressées,
les gouvernements des Etats suivants n’aient pas pris part aux discussions concernant leur
pays au sujet de l’exécution de leurs obligations constitutionnelles de faire rapport:
Bahamas, Barbade, Belize, Burundi, Comores, Côte d’Ivoire, Djibouti, Dominique,
Fidji, Géorgie, Grenade, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Haïti, Iraq, Iles
Salomon, Kazakhstan, Kirghizistan, Kiribati, Libye, Mongolie, Mozambique,
République démocratique du Congo, Royaume-Uni (Sainte-Hélène), Rwanda,
Sainte-Lucie, Saint-Marin, Samoa, Sao Tomé-et-Principe, Sierra Leone, Slovaquie,
Somalie, Tadjikistan, Turkménistan et Vanuatu. Elle a décidé de mentionner ces pays
aux paragraphes appropriés du présent rapport et d’en informer les gouvernements
conformément à la pratique habituelle.
133. La commission a noté avec regret que les gouvernements des pays qui n’étaient pas
représentés à la Conférence, à savoir: Bahamas, Belize, Dominique, Grenade,
Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Sainte-Lucie, Samoa, Somalie et Vanuatu n’ont
pas été en mesure de participer à l’examen des cas les concernant. Elle a décidé de
mentionner ces pays aux paragraphes appropriés du présent rapport et d’en informer les
gouvernements conformément à la pratique habituelle.
E. Discussion relative à la liste des cas
individuels devant être examinés
par la commission
134. S’agissant de l’adoption de la liste des cas individuels à être discutés par la commission
pendant la deuxième semaine, les membres travailleurs ont souligné que seuls les
représentants des travailleurs et des gouvernements étaient présents dans la salle le
vendredi 1er juin 2012, après 20 h 30, et ont souhaité fournir des explications sur les efforts
déployés en vue de parvenir à un accord sur une liste de 25 cas individuels. Cela n’a
malheureusement pas été possible, étant donné que les conditions avancées par les
membres employeurs étaient inacceptables. Les membres travailleurs ont estimé que ce
n’était pas à eux d’expliquer quelles étaient ces conditions. Sur le fond, le problème
soulevé par les membres employeurs est identique à celui qu’ils avaient évoqué
19(Rev.) Partie I/35
précédemment, à savoir le fait que la commission d’experts a pris l’initiative de donner des
explications sur le droit de grève dans l’étude d’ensemble, ce que les membres employeurs
ne peuvent accepter. Les membres travailleurs considèrent cependant que la commission
d’experts travaille en toute autonomie. Comme elle l’a souligné elle-même dans son
rapport annuel, elle est «un organe indépendant, constitué de juristes ayant pour mission
d’examiner l’application des conventions et recommandations de l’OIT dans les Etats
Membres de cette Organisation». Il n’est pas possible de juger de son indépendance d’une
façon différente de celle qui a été suivie jusqu’à présent. Le constat est qu’il n’a pas été
possible de parvenir à un consensus entre les membres employeurs et les membres
travailleurs. Les membres travailleurs auraient souhaité proposer une liste incluant des cas
qui leur sont chers et qui sont très pénibles pour les travailleurs des pays concernés. Il n’a
malheureusement pas été possible de parvenir à un accord avec les membres employeurs
sur une telle liste. Les membres travailleurs le déplorent car cette situation montre que le
tripartisme et le dialogue social ne permettent pas toujours de parvenir à des solutions
positives et constructives. Ils ont par conséquent recherché une solution pratique à cette
impasse et ont proposé une «liste par défaut», c’est-à-dire une liste établie en l’absence
d’une liste négociée et approuvée par les groupes. Ils ont proposé de commencer par
l’examen des cas ayant fait l’objet d’une double note de bas de page, en suivant l’ordre
alphabétique français à partir de la lettre K: Mauritanie (convention no 81); République
dominicaine (convention no 111); Sénégal (convention no 182); Fidji (convention no 87); et
Guatemala (convention no 87). Les membres travailleurs ont également proposé
d’examiner 20 cas individuels en suivant le même ordre alphabétique, sur la base de la liste
préliminaire. Les membres travailleurs ont réaffirmé que cette liste n’avait pas leur
préférence et qu’il s’agissait d’une liste par défaut. Ils ont exprimé le souhait d’avoir la
possibilité de formuler d’autres remarques au début de l’examen des cas individuels. Pour
conclure, les membres travailleurs ont souligné qu’ils n’avaient pas créé cette situation. Ils
se sentent victimes d’une situation créée par d’autres et dans laquelle ils n’ont pas joué un
rôle actif.
135. Le président a invité les membres gouvernementaux à s’exprimer sur la déclaration des
membres travailleurs et sur la situation à laquelle la commission devait faire face.
136. Le membre gouvernemental du Zimbabwe a informé la commission du fait qu’il ne se
présenterait pas devant elle en cas de «liste par défaut».
137. La membre gouvernementale des Etats-Unis a déclaré son extrême déception; selon elle,
de nombreux autres gouvernements voudront également s’exprimer par la suite. Elle s’est
interrogée sur le fait de savoir si le fait que les membres employeurs n’étaient pas dans la
salle signifiait qu’ils ne participeraient pas à la discussion d’une «liste par défaut».
138. Le membre gouvernemental du Brésil, s’exprimant au nom du GRULAC, a exprimé sa
profonde frustration à l’égard de la situation qu’il a qualifiée d’offensive et de non
respectueuse des gouvernements. Il a rappelé les déclarations qui avaient été faites par le
groupe gouvernemental et par le GRULAC pour souligner l’importance d’avoir une liste
des cas individuels publiée à temps. Il a considéré que le fait qu’il n’y ait pas encore cette
liste entravait gravement la réalisation du mandat constitutionnel de l’OIT.
139. Le membre gouvernemental de la Grèce a soutenu la déclaration prononcée par le membre
gouvernemental du Brésil et, notant l’absence des membres employeurs, a interrogé le
Bureau sur les suites à donner.
140. Les membres travailleurs ont demandé des clarifications concernant la manière dont le
résultat des discussions de la commission serait transmis à la Commission pour la
discussion récurrente. En l’absence de conclusions communes, les groupes pourraient
envisager de soumettre des conclusions séparément.
19(Rev.) Partie I/36
141. La représentante du Secrétaire général a indiqué, en réponse aux diverses questions posées,
que le Bureau devait d’abord examiner les possibles suites. Dans l’après-midi, la
commission s’était mise d’accord sur le résumé succinct de la discussion de l’étude
d’ensemble. Une version révisée du document (D.8(Rev.)), qui incluait les commentaires
formulés par les vice-présidents travailleur et employeur, serait transmise à la Commission
pour la discussion récurrente samedi 3 juin 2012, dans l’après-midi. La commission ne
s’était pas mise d’accord sur le résultat proposé, mais il était déjà prévu dans le programme
que les membres du bureau de la commission informeraient la Commission pour la
discussion récurrente sur le résultat. Le Bureau n’avait pas été informé du fait que les
membres employeurs quitteraient la salle; il avait été pris par surprise. Les membres
gouvernementaux avaient été très patients et l’oratrice les en a remerciés, autant que pour
leur respect envers l’institution.
142. Le samedi après-midi, en ce qui concerne les efforts en cours pour établir une liste de cas
qui soit acceptable par tous, le président a annoncé qu’il a pris l’initiative d’inviter tous les
coordinateurs régionaux et les vice-présidents à une réunion informelle mais que,
malheureusement, cette réunion n’avait pas été un succès. Il a également indiqué qu’il
serait répondu lundi 4 juin, au cours de la prochaine réunion de la commission, aux
diverses questions posées par certains membres gouvernementaux sur la manière dont les
travaux de la commission allaient se poursuivre.
143. Le membre gouvernemental du Brésil, s’exprimant au nom des membres gouvernementaux
du Groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a déclaré que ce
groupe s’était réuni et qu’à cette occasion le GRULAC avait réitéré son engagement à
l’égard du système de contrôle, tout en notant qu’une fois de plus la liste des cas n’étaient
pas publiée à temps. Il a réitéré la position du GRULAC selon laquelle le fait qu’il n’y ait
pas encore de liste était offensif et non respectueux à l’égard des gouvernements. Dès lors,
sa position était que, si une liste n’était pas présentée d’ici la fin de la journée (et il se
référait bien à une liste complète), le GRULAC ne voulait en ce cas pas de liste du tout. La
situation qui s’était présentée montrait que les procédures devaient être revues par le
Conseil d’administration. Il a conclu en réitérant le ferme soutien du GRULAC en faveur
du respect du plan de travail et de la position du groupe gouvernemental.
144. Lundi 4 juin 2012, les membres employeurs et travailleurs, ainsi que certains membres
gouvernementaux, ont fait les déclarations suivantes.
145. Les membres employeurs ont fourni les explications suivantes en ce qui concerne la
situation qui s’était présentée s’agissant de la liste des cas. En ce qui concerne
l’interprétation du droit de grève, ils se sont référés à la publication de l’étude d’ensemble
de la commission d’experts sur les huit conventions fondamentales en amont de la
101e session de la Conférence internationale du Travail. L’étude d’ensemble est un guide
pour aider la Commission de la Conférence dans son travail de supervision de l’application
des normes par les Etats Membres de l’OIT. L’étude d’ensemble, comme le rapport de la
commission d’experts sur les conventions ratifiées, n’est pas un document adopté par les
mandants tripartites de l’OIT (qui sont les gouvernements, les employeurs et les
travailleurs) qui ferait autorité. En dehors de l’OIT, cette distinction était soit mal
comprise, soit oubliée, et les études d’ensemble étaient perçues comme exprimant la
position de l’OIT, alors que ce n’est pas le cas. Les membres employeurs avaient exprimé
cette position relative aux études d’ensemble et aux rapports de la commission d’experts de
manière constante depuis de nombreuses années. Le rôle du Bureau international du
Travail est de servir les mandants tripartites du mieux qu’il peut. L’OIT est les
gouvernements, les employeurs et les travailleurs. Tant les études d’ensemble que les
rapports de la commission d’experts sont élaborés avec l’assistance du Bureau
international du Travail. Les gouvernements, les employeurs et les travailleurs ne sont pas
impliqués dans leur élaboration ou leur publication. La première opportunité que les
19(Rev.) Partie I/37
gouvernements, les employeurs et les travailleurs ont de considérer ces publications en
groupes est lors de la Conférence internationale du Travail.
146. Les huit conventions fondamentales sont importantes non seulement au sein de l’OIT, mais
aussi parce que d’autres institutions internationales les utilisent régulièrement dans leurs
activités. Les conventions fondamentales sont intégrées dans le Pacte mondial des Nations
Unies, dans les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises
multinationales et dans le cadre d’action «Protéger, respecter et réparer» du Conseil des
droits de l’homme des Nations Unies. Le système de contrôle de l’OIT s’adresse seulement
aux Etats Membres, et pas aux entreprises, et il est donc essentiel que, lorsque d’autres
institutions internationales utilisent les conventions fondamentales, cette utilisation soit
juste. Une compréhension correcte des conventions fondamentales est impérative pour les
entreprises parce qu’elles sont utilisées dans des accords-cadres internationaux, dans des
accords d’entreprise transnationaux et dans des accords-cadres européens avec les
syndicats internationaux, sans y être définies. En conséquence, l’étude d’ensemble de cette
année a une importance particulière pour les membres employeurs au regard du contexte
dans lequel elle s’inscrit. Dans l’étude d’ensemble, les développements relatifs à la
convention no 87 sur la liberté syndicale comprennent une interprétation par la commission
d’experts de l’exercice du droit de grève.
147. Une telle interprétation du droit de grève par la commission d’experts est
fondamentalement inacceptable pour les membres employeurs. Les membres employeurs
ont déclaré qu’ils avaient clairement indiqué la semaine précédente à la Commission de la
Conférence qu’ils considéraient que la position de la commission d’experts sur le droit de
grève exposée dans l’étude d’ensemble de cette année ne reflète pas les vues des membres
employeurs et travailleurs exprimées à la Commission de la Conférence. Le groupe des
employeurs soutient de longue date à l’OIT sa position politique sur cette question. Ils ont
exprimé, de manière répétée, leur opposition à toute tentative de la part de la commission
d’experts d’interpréter la manière dont pouvait s’exercer le droit de grève, lorsqu’il est
reconnu par la législation nationale. Cette question est rendue plus compliquée par le fait
que la convention no 87 ne fait aucune mention du droit de grève, ce qui implique, selon les
membres employeurs, que la commission d’experts n’a pas à se prononcer sur cette
question. Le mandat de la commission d’experts est de commenter sur l’application de la
convention no 87 et non d’interpréter un droit de grève dans cette convention. L’étude
d’ensemble a simplement vocation à être utilisée par la Commission de la Conférence, à
éclairer ses travaux, en laissant aux constituants tripartites la détermination de la position
de l’OIT en matière de supervision des conventions, lorsqu’un consensus existe. En outre,
en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, seule la Cour internationale de Justice
pourrait donner une interprétation définitive des dispositions d’une convention
internationale du travail. Si la Constitution devait être appliquée et au vu de l’absence de
référence au droit de grève dans le texte de la convention no 87, les règles d’interprétation
adoptées au niveau international appellent à ce que la convention no 87 soit interprétée sans
un droit de grève. De plus, il convenait de noter que les principes de la liberté syndicale
contenus dans la convention no 87 bénéficient d’une procédure de contrôle spéciale, le
Comité de la liberté syndicale (CLS). Les membres employeurs avaient également objecté
depuis de nombreuses années à l’utilisation par la commission d’experts des cas du CLS
lorsqu’elle examine la convention no 87 et qu’elle interprète le droit de grève, ainsi qu’à
l’utilisation des interprétations de la commission d’experts par le CLS. Les membres
employeurs critiquaient la confusion et le manque de certitude créés par le système de
contrôle.
148. Selon les membres employeurs, les cas relatifs à la convention no 87 qui concernent un
droit de grève reconnu au niveau national ne devraient être examinés que par le CLS afin
de garantir la cohérence. Ils se sont opposés à toute opinion selon laquelle les
interprétations de la commission d’experts sur le droit de grève forment une jurisprudence,
la commission d’experts ne disposant pas d’un mandat judiciaire au sein de l’OIT. La
19(Rev.) Partie I/38
commission d’experts ne dispose pas d’un pouvoir décisionnel au sein du système de
contrôle. La commission d’experts ne supervise pas les normes internationales du travail;
ce rôle est celui des mandants tripartites. Dès lors, il n’est pas approprié de renvoyer à la
Cour internationale de Justice les interprétations du droit de grève dans la convention
no 87. Le CLS émet des recommandations pour adoption par le Conseil d’administration.
Le Conseil d’administration n’a pas non plus un rôle judiciaire et lui non plus ne supervise
pas les normes. Pour la même raison, renvoyer les recommandations du Conseil
d’administration à la Cour internationale de Justice n’est pas approprié.
149. L’interprétation du droit de grève est importante, les membres employeurs soutenant qu’il
revient aux gouvernements au niveau national d’établir leurs propres règles/pratiques
concernant le droit de grève lorsqu’ils envisagent la manière de résoudre les conflits
nationaux survenant dans les relations de travail. Il est important, dans le contexte du débat
sur les droits de l’homme au niveau international, qu’une utilisation correcte de la
convention no 87 soit faite, une inclusion incorrecte du droit de grève pouvant amener à ce
que l’interprétation de la commission d’experts du droit de grève devienne un droit de
l’homme à la grève internationalement accepté, ce qui restreindrait la capacité des
gouvernements nationaux à définir leur droit de grève. Cela réduisait le rôle des
gouvernements, par exemple, au regard des circonstances dans lesquelles une grève légale
peut être déclenchée ou encore de la définition des services essentiels. Cela était
inacceptable pour les membres employeurs. Il n’y a pas d’obligations juridiques pour les
gouvernements qui ont ratifié la convention no 87 de traiter l’interprétation du droit de
grève par la commission d’experts. Les membres employeurs ne pouvaient pas accepter
l’interprétation du droit de grève par la commission d’experts parce qu’il y a un risque
qu’elle soit mal utilisée.
150. En ce qui concerne la Conférence de cette année, les membres employeurs ont déclaré
qu’ils avaient cherché, étant donné leur objection, réitérée de longue date, à l’interprétation
du droit de grève par la commission d’experts, à clarifier le mandat de cette dernière en
lien avec l’étude d’ensemble. Ils avaient attiré l’attention des membres travailleurs sur
cette question importante et avaient, ensemble, négocié et formulé le projet
d’éclaircissement suivant: «L’étude d’ensemble fait partie du processus de contrôle
régulier et est le résultat de l’analyse de la commission d’experts. Elle n’est pas un texte
adopté par les mandants tripartites de l’OIT ou qui ferait autorité.» La proposition des
membres employeurs était que le Bureau international du Travail reçoive l’instruction
d’insérer immédiatement cet éclaircissement dans les publications de l’étude d’ensemble
de cette année et du rapport de la commission d’experts, y compris dans la version
disponible en ligne sur le site de l’OIT. Il n’était pas possible de retirer simplement les
interprétations de la commission d’experts puisque le Bureau international du Travail avait
déjà publié l’étude d’ensemble contenant l’interprétation de la commission d’experts sur le
droit de grève. Ils avaient été clairs sur le fait que, sans cet éclaircissement concernant
l’étude d’ensemble, ils ne pourraient pas, afin que l’examen des cas par les membres
employeurs au sein de la commission soit cohérent, accepter la supervision de cas relatifs à
la convention no 87 qui comprendrait des interprétations du droit de grève par la
commission d’experts. Malgré de nombreuses négociations confidentielles avec les
membres travailleurs, ces négociations avaient, de manière regrettable, atteint une impasse
dont elles ne pouvaient pas sortir. Les membres employeurs considéraient à cet égard qu’il
était inapproprié de lever le voile sur ces négociations qui étaient et restaient
confidentielles.
151. Les membres employeurs ont souligné que, vendredi 1er juin 2012, la négociation étant
irrémédiablement rompue, le vice-président employeur est revenu dans la salle de la
commission, ayant été informé que le vice-président travailleur avait fait de même. Sa
position était que les négociations avaient échoué et que, par conséquent, la confusion
régnait sur la question de savoir pourquoi il aurait fallu retourner en salle. Pendant le temps
passé dans la salle, il a observé les fonctionnaires du Bureau international du Travail qui
19(Rev.) Partie I/39
discutaient avec des membres travailleurs et gouvernementaux de la commission. Il faut
savoir que les membres employeurs avaient déclaré clairement que la liste des cas à
examiner ne pouvait être décidée qu’en négociation directe avec les membres travailleurs.
Les gouvernements ne pouvaient pas intervenir parce qu’ils avaient un conflit d’intérêt
national. Le Bureau international du Travail ne pouvait être impliqué parce qu’il n’est pas
un mandant de l’OIT et parce qu’il doit demeurer impartial. Les membres du groupe des
employeurs attendaient dans la salle de la commission, depuis 17 h 00, une confirmation
quant aux négociations. Le vice-président employeur informa les membres employeurs que
les négociations avaient échoué. A 20 h 31, alors que l’heure prévue pour la clôture de la
réunion, soit 19 h 00, était dépassée de 91 minutes et sans qu’aucun membre du Bureau
international du Travail lui ait fait savoir ce qui se passait, il a alors informé la directrice
adjointe du Département des normes internationales du travail que les employeurs
quittaient la salle pour le reste de la soirée. Les membres employeurs sont alors sortis. A ce
moment, la Commission de la Conférence ne siégeait pas, ce qui veut dire qu’il ne
s’agissait pas d’une sortie en guise de protestation. Les membres employeurs ont quitté la
salle après l’heure prévue pour la fin de la réunion, alors que se tenaient entre d’autres
personnes des réunions privées dont les membres employeurs ne savaient rien. Beaucoup
d’autres délégués étaient déjà partis ou étaient sur le point de le faire. Les membres
employeurs ont assisté à la réunion suivante prévue au programme.
152. Samedi 2 juin 2012, à la suite d’une demande pour une réunion informelle des
vice-présidents employeur et travailleur émanant des coordinateurs régionaux des
gouvernements, le vice-président employeur a assisté à cette réunion informelle et expliqué
qu’il ne négocierait pas une liste de cas en présence des gouvernements. Il a confirmé qu’il
transmettrait une déclaration précisant la position des membres employeurs à propos de
l’échec de la négociation sur la liste des cas.
153. Les membres employeurs ont ensuite proposé une piste possible pour la Commission de la
Conférence et formulé les suggestions suivantes:
– Les membres employeurs conservent leur soutien à l’application des normes du
travail pour autant que soit respecté un authentique tripartisme des mandants de
l’OIT.
– L’éclaircissement proposé doit apparaître clairement dans tous les documents du
Bureau international du Travail et de la commission d’experts préparés en vue d’un
débat et d’une discussion devant la Conférence internationale du Travail ou le Conseil
d’administration.
– Il y a lieu de réexaminer d’urgence les méthodes de travail et le mandat du système de
contrôle des normes internationales du travail (y compris son interaction avec d’autres
domaines de l’OIT), notamment la commission d’experts, la Commission de la
Conférence et le Bureau international du Travail.
– Les vice-présidents employeur et travailleur devront se réunir avec la commission
d’experts chaque année avant d’entamer leurs travaux, et la commission d’experts
devra interagir beaucoup plus étroitement avec les bureaux des employeurs et des
travailleurs, au sein du BIT, afin de renforcer la coopération et la gouvernance. Les
activités de la commission d’experts devraient s’inscrire dans un cadre tripartite fixé
de commun accord. Dans le passé, les membres employeurs ont proposé de modifier
la présentation des rapports de la commission d’experts afin qu’ils rendent mieux
compte des points de vue tripartites. Plus précisément, les membres employeurs ont
proposé que les employeurs, les travailleurs et les gouvernements aient la possibilité
d’exposer dans les rapports de la commission d’experts leurs points de vue sur des
questions liées au contrôle des normes, notamment sur l’application et l’interprétation
de conventions prises individuellement.
19(Rev.) Partie I/40
– Il y a lieu de réexaminer d’urgence le Département des normes internationales du
travail du Bureau international du Travail. Le rôle des fonctionnaires du BIT exige
d’eux le respect du tripartisme et de l’impartialité dans leurs actions. Leur rôle
consiste à seconder et faciliter le travail des mandants tripartites de l’OIT, ce qui
exige de la neutralité et de la pondération. Cela nécessite un personnel composé de
fonctionnaires internationaux politiquement neutres, qui aident la commission
d’experts dans son travail; ce ne doit pas être la commission d’experts qui aide le
Bureau dans son travail. La neutralité est propice à des relations professionnelles
internationales matures et respectueuses entre les gouvernements, les employeurs et
les travailleurs.
– Les relations avec d’autres institutions internationales doivent être respectées pour
faire en sorte que les points de vue de l’OIT soient ceux de ses mandants tripartites.
154. En conclusion, les membres employeurs déclarent que l’OIT est maintenant confrontée à
une crise multiforme concernant l’interprétation du droit de grève en rapport avec la
convention no 87. Nul ne peut accepter d’être perplexe ou induit en erreur quant à la nature
réelle d’un texte de l’OIT simplement parce qu’il est revêtu de son logo ou qu’il est muet
sur sa nature. Il ne s’agit pas seulement d’un problème se rapportant à l’étude d’ensemble,
parce qu’il touche aussi des cas de la convention no 87 devant être contrôlés par la
Commission de la Conférence. L’absence d’une mention expresse du droit de grève dans la
convention no 87 signifie que, concrètement, la commission d’experts prend des décisions
politiques et outrepasse ainsi son mandat. La prise de décision est du domaine exclusif des
gouvernements, des employeurs et des travailleurs. La commission d’experts peut remettre
des avis sur l’application, elle ne peut pas définir l’application au nom de l’OIT et
certainement pas arrêter des droits nouveaux et des obligations nouvelles en matière de
droit de grève dans le cadre de la convention no 87. Il est important que tous les
gouvernements, employeurs et travailleurs alertent leurs mandants ainsi que les autorités
concernées quant au statut réel de l’interprétation du droit de grève que donne la
commission d’experts.
155. Les membres travailleurs ont souligné que la situation vécue aujourd’hui est du
«jamais vu» dans l’histoire de la Commission de l’application des normes. La déclaration
qui suit résulte de longues discussions avec le groupe des travailleurs de la commission
qui, alarmé par le déroulement des événements, a souhaité une déclaration faite en des
termes clairs et forts mais néanmoins constructifs. Pour les membres travailleurs, la
commission doit travailler et des cas doivent pouvoir être discutés sans délai, comme l’ont
demandé avec vigueur les représentants gouvernementaux présents vendredi soir et samedi
après-midi.
156. Les membres travailleurs ont relevé qu’il résulte de la lecture des comptes rendus
provisoires de la commission des années précédentes que, depuis quelques années, la
question du choix des cas individuels est devenue un exercice très difficile, et pas
seulement en raison de l’évolution de la situation politique ou économique dans de
nombreux Etats. Des considérations liées aux mécanismes de contrôle eux-mêmes ont été
mises en évidence par les membres employeurs qui, dès 2010, ont commencé à exprimer
leur volonté d’affaiblir les méthodes de contrôle. Pourtant, en 2009, le porte-parole du
groupe des employeurs déclarait ceci: «Les membres employeurs ont souligné que la
participation de la présidente de la commission d’experts aux travaux de la commission
reflète le rôle d’investigation essentiel que joue la commission d’experts en relation avec le
travail de la Commission de la Conférence. Sans l’aide de la commission d’experts, cette
commission ne pourrait fonctionner.» (Compte rendu des travaux no 16, paragr. 42.) Ceci
est évidemment vrai et, comme le rappelait vendredi dernier M. Yokota, président de la
commission d’experts, la commission d’experts prend tout en compte lorsqu’elle établit ses
rapports. Elle a une vision globale des informations apportées et, sur cette base, elle fait
une analyse du droit et de la pratique.
19(Rev.) Partie I/41
157. Les membres travailleurs ont souligné qu’en 2010 les membres employeurs avaient sonné
une première charge en règle contre un grand nombre de principes communément acceptés
et reconnus comme garants du travail de cette commission – organe de contrôle de
l’application des conventions ratifiées de l’OIT. Les membres employeurs ont clairement
fait savoir, à plusieurs reprises, qu’à leur avis la gouvernance tripartite dans le contrôle de
l’application des normes était compromise ou, du moins, qu’il y avait une faille dans ce
processus de gouvernance tripartite.
158. Les membres travailleurs ont souligné qu’en 2011 ils avaient rappelé que la liste devait
être composée ensemble, c’est-à-dire avec les employeurs, et que c’est ensemble qu’un
compromis devait être atteint, le veto n’ayant pas sa place dans ce processus, que ce soit
directement (en rejetant un pays donné) ou indirectement (en établissant des critères
restrictifs). Ils avaient alors précisé que la règle ne peut pas être que l’une des parties doive
toujours courber l’échine et qu’il était regrettable que le fonctionnement basé sur un
consensus soit de plus en plus difficile à atteindre.
159. Les membres travailleurs ont souligné qu’ils sont, cette année, très brutalement confrontés
au fait que les membres employeurs contestent le mandat de la commission d’experts,
essentiellement en ce qui concerne l’interprétation du droit de grève sous la convention
no 87. A cet égard, il convient de clarifier que cette contestation de l’étude d’ensemble et
du mandat de la commission d’experts ne vient que des membres employeurs à qui il
n’appartient pas de faire des remarques au nom de cette commission à l’encontre du
système de contrôle. La conséquence directe de cette contestation a été qu’un veto explicite
a été exprimé vis-à-vis du possible examen de cas individuels pour lesquels le droit de
grève aurait pu découler de la discussion.
160. Les membres travailleurs ont considéré que cette confrontation avait été «brutale» pour les
raisons suivantes. Comme toutes les années, un important travail préparatoire a été mené
au sein du groupe des travailleurs. Ce travail de préparation est fait de manière sérieuse
car, pour les membres travailleurs, la discussion des cas individuels les plus graves, lors de
la Conférence, est un moment unique. C’est le seul moment où ils peuvent exposer
ouvertement et sans crainte les atteintes nombreuses aux droits que les normes de l’OIT
leur reconnaissent. Le rapport de la commission d’experts a été publié le 28 février 2012.
L’étude d’ensemble l’a été à la même date. Les versions électroniques de ces documents
ont été publiées sur le Web le 2 mars 2012. Au cours de la 313e session du Conseil
d’administration, qui s’est déroulée en mars 2012, les employeurs n’ont, à aucun moment,
donné de signal quant à d’éventuelles critiques sur le rôle de la commission d’experts, ni
sur un excès de pouvoir de sa part quant à son interprétation du droit de grève. Ce n’est que
le vendredi 1er juin 2012, au moment de la discussion du rapport général, que les membres
employeurs ont clairement exposé, dans le cadre de cette commission, leur vision sur cette
divergence de vues. Or, sur la base des rapports publiés, le travail préparatoire du groupe
des travailleurs a commencé en mars 2012, par des coordinations régionales, ensuite par
une réunion internationale qui s’est tenue à Bruxelles, le 2 avril. Il s’est terminé en mai par
une série de contacts ouverts, francs et confiants avec le porte-parole du groupe des
employeurs de cette commission. Ce dernier a alors, sans aucune réserve, proposé la liste
des cas de son groupe sans faire aucun commentaire sur le mandat de la commission
d’experts, ni sur une quelconque réserve à discuter de la convention no 87. Une liste
préliminaire de 49 cas a ainsi été établie et acheminée par le BIT vers les gouvernements,
en date du 8 mai 2012.
161. Compte tenu de leur conception de l’approche du travail de contrôle de l’application des
normes, les membres travailleurs ont très sincèrement pensé que l’apport du groupe des
employeurs, par le biais de leur porte-parole qui a fait des suggestions sur les cas à intégrer
dans la liste provisoire, signifiait qu’un travail préparatoire semblable à celui des membres
19(Rev.) Partie I/42
travailleurs avait été réalisé. Et ce d’autant plus que la liste devait être communiquée aux
gouvernements.
162. Les membres travailleurs ont reconnu sans mal que, dans certains pays, les droits des
employeurs sont aussi violés et que des thématiques plus techniques tiennent à coeur aux
membres employeurs. Rien n’oblige évidemment à procéder à un travail préparatoire au
sens où les membres travailleurs le conçoivent. Chaque groupe est en effet libre
d’organiser son travail. Mais prendre les mécanismes de contrôle au sérieux impose un
travail préalable pour soi-même et pour ceux impliqués dans le processus de discussion.
C’est pourquoi les membres travailleurs étaient certains qu’il était possible de travailler de
façon constructive, dès leur arrivée à la Conférence. Il n’était pas imaginable alors que
l’établissement de la liste finale des 25 cas individuels, à discuter dans cette commission,
serait aussi dramatique qu’il ne l’a été cette année. Jamais les membres travailleurs n’ont
pensé qu’ils auraient été conduits à faire la proposition qu’ils ont faite vendredi soir.
163. Les membres travailleurs ont souligné que leur objectif est bien entendu de mettre
ensemble et de façon consensuelle l’accent sur les cas les plus graves, de donner un signal
très clair aux gouvernements inscrits sur cette liste quant au caractère grave de leurs
manquements. Il est bien évident que définir une liste préliminaire de 49 cas a déjà
constitué un travail très frustrant pour de nombreux travailleurs présents dans cette salle.
Même s’ils avaient déjà compris que le cas de leur gouvernement ne serait pas évoqué, de
nombreux collègues ont néanmoins fait le déplacement vers Genève, vers la Conférence,
seule enceinte où leurs voix peuvent être entendues et où ils peuvent participer
effectivement aux discussions.
164. Les membres travailleurs ont rappelé ce que le membre travailleur de la Colombie a
déclaré vendredi: la confection de la liste définitive a toujours été un exercice difficile mais
cette liste n’est pas un butin de guerre, elle n’exige pas de prise d’otages et, la sagesse
l’emportant toujours, une liste consensuelle pourra certainement être présentée aux
gouvernements. Beaucoup de membres travailleurs attendaient ce consensus, ce signal
politique sérieux que l’on croit encore au dialogue social, au fonctionnement des
mécanismes de contrôle de l’OIT et donc aux normes.
165. Les membres travailleurs ont déclaré avoir l’impression que, pour les membres
employeurs, cette session de la commission est déjà terminée et que tout ira bien demain,
et qu’en 2013 le travail reprendra comme si rien ne s’était passé. Cependant, il sera
nécessaire de réfléchir aux suites à donner. Les membres employeurs ont fait des
propositions mais cette tâche relève du Conseil d’administration qui devra se saisir sans
tarder des derniers événements. Les membres travailleurs ont souligné que cette
commission n’est pas l’endroit pour en discuter. En prendre conscience avant la
Conférence aurait permis à cette commission d’avancer dans son travail de contrôle au lieu
de créer une situation de crise préjudiciable à tous.
166. Les membres travailleurs ont déclaré qu’ils voulaient, plus que quiconque, traverser cette
tempête. Les employeurs ont besoin des travailleurs et de leurs représentants, ils ne doivent
pas l’oublier. Sans paix sociale, sans interlocuteur, ce sera la loi de la jungle et plus
question de productivité ou de croissance. Les membres travailleurs se sont demandé si
l’intention était une remise à plat des pactes sociaux qui régissent les relations industrielles
dans bon nombre de pays.
167. Les membres travailleurs ont souligné que les gouvernements sont choqués, ce qui est
compréhensible. Les membres travailleurs le sont également et ils sont perdants: parce que
les membres travailleurs ont joué le jeu et que, dès le mois de mars, certains collègues ont
déjà renoncé à voir leur situation évoquée par solidarité avec d’autres collègues auxquels
ils ont donné priorité; parce que les membres travailleurs sont pris en otage dans un
19(Rev.) Partie I/43
prétendu combat qui oppose les employeurs à la commission d’experts; parce que la
discussion du rôle de la commission d’experts et de sa compétence pour interpréter le droit
de grève n’appartient pas à cette commission mais au Conseil d’administration; parce
qu’au travers du sabotage des mécanismes de contrôle ce sont les droits des travailleurs qui
sont méprisés; parce que ce sont les travailleurs et leurs familles qui sont les premières
victimes du fait que les situations graves dans lesquelles ils vivent ne peuvent pas être
discutées.
168. Les membres travailleurs se sont demandé ce que veulent les membres employeurs au
terme de cette stratégie qui s’est construite au fil du temps et certainement depuis les
travaux de cette commission en 2010. A cette époque, les membres travailleurs avaient
déjà dû réagir aux mêmes attaques que celles réitérées cette année – sans sommation – au
début des travaux de la commission. Les membres travailleurs se sont demandé si les
membres employeurs veulent la fin de la commission d’experts et si la prochaine victime
sera le Comité de la liberté syndicale. Ils ont rappelé que ces organes sont pourtant
nommés de façon tripartite.
169. Les membres travailleurs ont déclaré que, vendredi soir, en absence de liste négociée, et
prenant le risque de choquer de nombreux membres travailleurs, le vice-président
travailleur a dû présenter une proposition à cette commission. Ceci a été fait au profit des
seuls gouvernements car les membres employeurs avaient quitté la salle sans sommation
alors que le président n’avait pas levé la séance. Il n’y avait pas de liste négociée car les
conditions qui étaient imposées par les membres employeurs aux membres travailleurs
étaient inacceptables. En absence de liste finale, le vice-président travailleur a donc
proposé de traiter 25 cas à prendre de la liste dite longue telle que communiquée aux
gouvernements le 8 mai. Un premier groupe était composé des cinq cas de double note de
bas de page. Un second groupe était composé de 20 cas, pris dans cette longue liste, en
commençant depuis la lettre K vers la suite de l’alphabet en français. Cette proposition de
travail était basée sur la méthode de travail convenue dans le document D.1. La technique
d’élaboration choisie, livrée à la pure logique alphabétique en langue française, est et reste
très délicate. Les membres travailleurs ont rappelé à cet égard que la liste – longue ou
courte – est un des éléments du système de contrôle lui-même car, à travers cette liste, un
signal clair est fourni aux gouvernements que la situation du non-respect des conventions
de l’OIT ne peut plus perdurer sur leur territoire. Etre sur la liste longue, c’est un signal
que la pression est mise et que la communauté internationale est saisie de la gravité d’une
situation de mépris des droits des travailleurs. C’est la seule solution pour avancer dans la
dignité.
170. Au terme de ces explications, les membres travailleurs ont souhaité faire acter que ce qui
se passe au sein de cette commission n’est pas de leur volonté. A aucun moment, il n’y a
eu d’accord sur une liste comme certains ont essayé de le faire croire. Les membres
travailleurs n’ont jamais rompu le dialogue et ont toujours fait preuve de bonne foi. Ils ne
sont en rien responsables des contestations avancées par les membres employeurs quant au
rôle de la commission d’experts et à son pouvoir d’interpréter les liens entre la convention
no 87 et le droit de grève. Au demeurant, les membres travailleurs ont déclaré ne pas
cautionner ces contestations. Ce type d’argumentation n’a pas été porté à la connaissance
des membres travailleurs avant la Conférence, ni lors du Conseil d’administration du mois
de mars, ni lors des contacts pour établir la liste préliminaire, ni à d’autres moments, ou par
une voie quelconque.
171. Les membres travailleurs ont conclu en déclarant qu’il est pour eux inacceptable de se voir
imposer des conditions purement exorbitantes et qui dépassent la compétence de cette
commission, parce qu’elles sont de nature politique. Les membres travailleurs ne peuvent
pas accepter ces oukases, fondés sur des éléments sur lesquels ils n’ont aucune prise, au
sein de cette commission, et qui ont pour conséquence que les cas sélectionnés en mai
pourraient ne jamais être discutés. Tout cela est regrettable et c’est un gaspillage immense:
19(Rev.) Partie I/44
de nombreux syndicats et des organisations patronales investissent du temps et de l’argent
dans le travail de cette commission tout comme les gouvernements. Ces personnes ne
peuvent pas revenir les mains vides. Cette dépense d’argent notamment est
incompréhensible d’autant plus si l’on pense aux appels des membres employeurs qui
encouragent l’OIT à être plus économe. Les membres travailleurs en ont appelé à la
sagesse de tous et ont déclaré qu’ils restent ouverts à toute solution agréée et négociée de
manière constructive.
172. Le membre gouvernemental du Soudan, s’exprimant au nom du groupe gouvernemental, a
regretté qu’il n’y ait pas de liste de cas individuels à examiner devant cette commission. Il
a estimé qu’une discussion plus approfondie sur les points importants soulevés par les
membres employeurs et travailleurs doit avoir lieu dans une enceinte appropriée. L’orateur
estime aussi que la situation démontre clairement la nécessité de revoir les méthodes de
travail de cette commission.
173. Le membre gouvernemental du Pakistan, s’exprimant au nom des membres
gouvernementaux du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC), a déclaré que son
groupe accorde une grande importance au système de contrôle pour promouvoir les normes
de l’OIT et contrôler leur application. Depuis de nombreuses années, c’est au moyen de ce
système que les gouvernements reçoivent des partenaires sociaux les orientations leur
permettant de surmonter les difficultés liées au respect des valeurs et principes
fondamentaux au travail. Parallèlement, les gouvernements sont d’avis qu’il conviendrait
de rationaliser davantage ce système, afin qu’il soit plus efficient et plus équitable. Ils
estiment nécessaire d’établir des critères en vertu desquels les partenaires sociaux
sélectionneraient plus objectivement, et au moment voulu, les cas à examiner. Une telle
réforme conduirait sans nul doute à un système de contrôle plus transparent, plus efficace
et qui lui conférerait une autorité incontestable. Il a indiqué que, compte tenu des
événements survenus l’an passé et pendant les débats de la commission cette année, une
telle réforme est inévitable et doit être au centre des priorités. En même temps, le
GASPAC estime que le retard inutile dans la finalisation de la liste des cas individuels à
examiner cette année a provoqué de graves inconvénients pour les gouvernements. En
conséquence, le GASPAC a demandé que cette question particulière soit réglée avant de
traiter des cas individuels devant cette commission à l’avenir.
174. La membre gouvernementale du Niger, s’exprimant au nom des membres
gouvernementaux du groupe africain, a appuyé l’analyse du groupe gouvernemental sur
l’absence de la liste des cas individuels et a estimé que cette situation regrettable a mis en
évidence la nécessité de revoir les méthodes de travail concernant l’élaboration de la liste
des cas, qui nécessite plus de transparence et des critères objectifs partagés par tous. La
situation actuelle doit mener à une réflexion urgente sur la révision de l’ensemble du
système de contrôle des normes internationales du travail. A l’avenir, il sera nécessaire et
indispensable de communiquer la liste des cas individuels bien avant le début des travaux
de la Conférence afin de permettre aux Etats de préparer leur réponse. Enfin, au regard du
retard pris cette année, aucune liste ne peut être objectivement examinée durant la présente
session de cette commission.
175. Le membre gouvernemental du Brésil, s’exprimant au nom du GRULAC, a déclaré que la
position du GRULAC n’a pas changé. Depuis 2011, le groupe fait valoir qu’il conviendrait
d’éviter que ne se reproduisent les événements survenus à la 100e session de la Conférence,
et que soit publiée la liste conformément au plan de travail, le deuxième jour de la session
de la commission. Le groupe a demandé une fois encore de respecter ces délais au Conseil
d’administration en novembre 2011 et en mars 2012. Le GRULAC a fait preuve de
souplesse en acceptant la publication de la liste au plus tard le troisième jour de la session
de la commission. Le quatrième jour de la session de la commission, le groupe a demandé
que soit publiée la liste des cas le jour même, ce qui témoigne de sa bonne volonté et de sa
souplesse. Le groupe a toujours affiché la même position et le même engagement à l’égard
19(Rev.) Partie I/45
du système de contrôle de l’OIT et le mandat constitutionnel de la commission. Il a estimé
totalement inacceptable la situation actuelle et a fait part de la nécessité de revoir les
procédures de la commission. Les incertitudes rencontrées aujourd’hui nuisent à la
crédibilité de la commission. L’élaboration de la liste des cas à examiner est une
prérogative des partenaires sociaux. Comme pour toute prérogative, c’est avec
responsabilité et respect à l’égard des gouvernements que doit se dérouler le processus.
Une fois encore, la façon dont il s’est déroulé témoigne d’un manque de respect à l’égard
des gouvernements, puisqu’ils n’ont pas eu le temps de se préparer ni de prendre part aux
débats. Pour terminer, l’orateur a réitéré la nécessité de respecter le délai fixé pour la
publication de la liste des cas à examiner et de modifier les procédures de la commission,
afin d’en accroître l’objectivité et la transparence, et de garantir un plus grand respect à
l’égard des membres gouvernementaux.
176. La membre gouvernementale des Etats-Unis, s’exprimant au nom du groupe des PIEM, a
indiqué qu’à la séance d’ouverture de la commission le groupe des PIEM s’est associé à
l’appel unifié du groupe gouvernemental d’adopter rapidement la liste des cas individuels à
examiner. Le blocage qui a suivi et qui a empêché l’adoption de la liste est sans précédent
depuis quatre-vingt-cinq ans qu’existe la commission, ce qui est à la fois décevant et
affligeant.
177. La position ferme et de longue date du groupe des PIEM est que les gouvernements ne
doivent pas participer à l’élaboration de la liste des cas à examiner. Cette position est
inchangée. L’oratrice a souhaité qu’il soit pris note du fait que les gouvernements n’ont pas
participé aux négociations liées à la liste des cas et qu’ils n’ont jamais demandé à y
participer. La Conférence doit comprendre que les gouvernements n’ont aucune part de
responsabilité dans la situation actuelle.
178. Si les gouvernements n’ont pas participé à l’élaboration de la liste des cas individuels, ils
constituent néanmoins un élément clé de la commission. Les gouvernements ratifient et
appliquent les conventions, et acceptent de débattre des questions de conformité avec les
groupes des travailleurs et des employeurs à la Conférence internationale du Travail. La
situation créée à la Conférence a placé les gouvernements dans une position extrêmement
difficile et le groupe des PIEM regrette le manque de courtoisie clairement démontré à leur
égard.
179. Il appartient aux partenaires sociaux de s’accorder sur une liste définitive des cas
individuels à examiner. Si les partenaires disposent du droit de s’accorder sur les critères à
appliquer pour constituer cette liste, le groupe des PIEM estime qu’il n’est pas approprié
que les membres employeurs et travailleurs s’accordent sur une liste conditionnée par des
questions extérieures sur lesquelles les gouvernements ont un rôle à jouer, tant dans les
discussions que dans le processus décisionnel qui s’y rapporte.
180. Le groupe des PIEM estime que le rôle de la Commission de l’application des normes est
d’examiner le rapport de la commission d’experts concernant les cas individuels, et non de
remettre en question la valeur de ce rapport. Les questions soulevées par les membres
employeurs doivent être traitées dans une enceinte appropriée, et le groupe des PIEM ne
pense pas que la Commission de l’application des normes en soit une, et demande à la
Conseillère juridique du BIT de communiquer les options possibles.
181. Plusieurs raisons expliquent pourquoi le groupe des PIEM est profondément affligé par la
non-adoption d’une liste de cas individuels par les partenaires sociaux. Premièrement, la
non-adoption de la liste de cas individuels empêche la commission de mener à bonne fin
ses travaux très importants visant à contrôler l’application des normes dans les pays,
comme prévue par la Constitution de l’OIT et les précédentes décisions de la Conférence
internationale du Travail. Deuxièmement, le système de contrôle de l’OIT est unique en
19(Rev.) Partie I/46
son genre, de même qu’un élément essentiel du mandat et de la mission de l’Organisation.
Les mécanismes de contrôle de l’OIT sont depuis longtemps cités comme étant les
mécanismes les plus perfectionnés et fonctionnant le mieux du système international. La
situation actuelle a non seulement des répercussions négatives sur la commission, mais
aussi sur l’ensemble du système de contrôle de l’OIT, et risque d’entamer de façon
irréparable la crédibilité de l’Organisation tout entière.
182. Le groupe des PIEM a toujours appuyé l’indépendance, l’impartialité et l’objectivité de la
commission d’experts, ainsi que son autonomie. Le groupe peut comprendre que certains
membres ou groupes au sein de la Commission de l’application des normes aient des
points de vue différents de ceux de la commission d’experts, mais tous les membres ont le
droit fondamental d’exprimer leur point de vue. Néanmoins, il est regrettable que les
événements de ces derniers jours aient conduit à créer une situation qui pourrait nuire à la
crédibilité de l’OIT et de son système de contrôle.
183. A ce stade se pose la question de savoir ce qu’il va advenir de la commission. A ce propos,
le groupe des PIEM s’est dit encouragé par le fait que, dans son exposé devant la
commission, le président de la commission d’experts ait explicitement exprimé la volonté
de poursuivre un dialogue constructif avec la commission sur des questions au centre du
conflit actuel. En outre, la question relative au droit de grève dans le cadre de la
convention no 87 est un problème de longue date que le dialogue tripartite n’a pas permis
de régler à ce jour. Le groupe des PIEM note que l’article 37 de la Constitution de l’OIT
prévoit que l’interprétation juridique de questions de cet ordre peut être soumise à la Cour
internationale de Justice.
184. L’oratrice a conclu à la nécessité d’impliquer les gouvernements dans les discussions et les
décisions sur des questions autres que la négociation de la liste et, à cet égard, le groupe
des PIEM se félicite de l’occasion qui est ainsi donnée de travailler avec les partenaires
sociaux afin de remédier aux préoccupations exprimées par les membres employeurs. Le
groupe des PIEM tient à réitérer son profond attachement au système de contrôle de l’OIT
et au rôle joué par la Commission de l’application des normes. Il est aussi déterminé à aller
de l’avant sur un mode positif, constructif, dans l’esprit du tripartisme.
185. Les membres employeurs ont déclaré que, malheureusement, ils partent désormais du
principe qu’il n’y aura pas de liste de cas individuels cette année. Ils conviennent aussi de
la nécessité de poursuivre la discussion sur les points qui ont été soulevés. Ils rappellent
que la Conférence internationale du Travail est l’instance suprême de l’OIT, que c’est à
elle qu’il appartient de trouver une solution et que la question ne doit pas être déférée au
Conseil d’administration. Il faut incontestablement arriver à un accord sur les méthodes de
travail de la commission, et des réformes s’imposent. De plus, ils ont insisté sur le fait que
l’attitude, les actions et les négociations des membres employeurs relèvent de la bonne foi.
Ils ont rappelé que les membres employeurs ont toujours eu l’intention de respecter les
délais des gouvernements et que les négociations qui se sont poursuivies au-delà de la
limite fixée à jeudi après-midi ne se voulaient pas discourtoises envers les gouvernements.
Lorsque les méthodes de travail seront discutées, il faudra prendre en considération la
communication, compte tenu de la taille de la commission. Enfin, les membres employeurs
réitèrent leur vif attachement à la Commission de la Conférence et à un authentique
tripartisme.
186. Les membres travailleurs ont insisté sur le fait qu’ils ne pouvaient pas donner leur accord
sur un avertissement («a disclaimer») à apposer sur l’étude d’ensemble, qui est le résultat
d’analyses menées par la commission d’experts. Les membres travailleurs trouvent qu’il ne
revient pas à la Commission de l’application des normes et certainement pas aux membres
employeurs et aux membres travailleurs seuls de discuter d’un tel avertissement car une
telle discussion relève de la compétence de tous les mandants de l’OIT. Cette approche a
19(Rev.) Partie I/47
été confirmée par de nombreux gouvernements. Néanmoins, sans en tenir compte, les
employeurs continuent à insister sur l’insertion d’une telle mention. Les membres
travailleurs pourraient éventuellement donner leur accord sur une déclaration commune
constatant la divergence de vues sur le rôle et le mandat de la commission d’experts. Aussi,
ils pourraient envisager de discuter de cette divergence de vues, là où elle devrait être
discutée, c’est-à-dire au niveau du Conseil d’administration. Il reviendrait ainsi au Conseil
d’administration d’élaborer un plan pour traiter le sujet. La Constitution de l’OIT prévoit
aussi la compétence de la Cour internationale de Justice pour l’interprétation des
conventions. Les membres travailleurs regrettent énormément que les membres
employeurs ne puissent pas donner leur accord à une telle approche. Ils ont conclu en
affirmant qu’un véritable dialogue social tripartite ne pouvait pas se tenir dans une
situation d’impasse.
Réponse de la représentante du Secrétaire général
187. La représentante du Secrétaire général, en réponse aux commentaires formulés par les
membres employeurs, a confirmé que la Commission de la Conférence n’avait jamais,
depuis sa création en 1926, été confrontée à une situation comme celle à laquelle elle
faisait face actuellement. La commission était le point culminant du système de contrôle,
en vertu d’un mandat constitutionnel, mais, cette année, elle n’avait rempli son mandat que
de manière partielle, puisqu’elle l’avait rempli en vertu de l’article 19 de la Constitution de
l’OIT, mais pas en vertu de l’article 22.
188. Le Département des normes internationales du travail avait fourni son soutien au système
de contrôle et continuerait à le faire en toute neutralité, avec équilibre et impartialité. Le
Bureau était gouverné par l’article 9 de la Constitution de l’OIT, par le Statut du personnel
du Bureau et par les Normes de conduite requises des fonctionnaires internationaux.
L’article 9 de la Constitution prévoit que, dans l’accomplissement de leurs devoirs, les
membres du personnel ne solliciteront ni n’accepteront d’instructions d’aucun
gouvernement ni d’aucune autorité extérieure à l’Organisation. Les articles 1.1 et 1.4 du
Statut du personnel prévoient que tous les membres du Bureau ne doivent ni solliciter ni
accepter d’instructions, dans l’exercice de leurs fonctions, d’aucun gouvernement ou autre
autorité extérieure au Bureau international du Travail. Ils sont soumis à l’autorité du
Directeur général et sont responsables envers lui dans l’exercice de leurs fonctions.
L’oratrice a également rappelé que le travail du Département des normes internationales du
travail n’avait jamais été mis en cause jusqu’à ce jour par les instances officielles de
l’Organisation. Bien au contraire, il avait été félicité à de nombreuses reprises par le passé
par l’ensemble des organes de contrôle, y compris par les groupes de la Commission de la
Conférence.
189. Elle a indiqué qu’il est clair que les principes et recommandations de la commission
d’experts, du Comité de la liberté syndicale et les recommandations de la Commission de
la Conférence sont des opinions et des recommandations qui ne sont donc pas
contraignantes. Elles n’en ont pas moins une autorité morale énorme. Les conventions
internationales du travail et les recommandations ont incontestablement plus d’autorité
juridique qu’aucune autre recommandation émanant d’un organe de contrôle.
190. Les principes de la commission d’experts applicables au droit de grève ont une source
tripartite: le Comité de la liberté syndicale. Il est difficile de comprendre comment ces
principes pourraient être remis en cause dans le cadre de la commission d’experts, alors
qu’ils sont acceptés dans le cadre du Comité de la liberté syndicale. L’oratrice a ensuite
évoqué une publication intitulée Les organisations d’employeurs et les mécanismes de
contrôle de l’OIT, publiée conjointement par le Département des normes internationales du
travail et le Centre international de formation de Turin, en coopération avec le Bureau des
activités pour les employeurs, qui a été signée par le Secrétaire général de l’Organisation
19(Rev.) Partie I/48
internationale des employeurs, le directeur du Bureau des activités pour les employeurs et
la directrice du Département des normes internationales du travail; elle a précisé que les
employeurs avaient formulé une série de principes relatifs au droit de grève dans le
contexte des organes de contrôle.
191. Un affaiblissement des mécanismes de contrôle de l’OIT entraverait l’action du Bureau
visant à remédier aux problèmes auxquels étaient confrontées des organisations
d’employeurs et de travailleurs dans plusieurs pays. L’oratrice a tenu à faire remarquer que
beaucoup d’organisations d’employeurs ont pu exister et sont maintenant florissantes grâce
à l’action de la commission d’experts et de la Commission de la Conférence. Il n’est dans
l’intérêt de personne de ne pas discuter des cas individuels, parce que les organisations de
travailleurs comme les organisations d’employeurs sont venues à la Conférence pour lui
soumettre leurs préoccupations, comme le prévoit le Règlement de la Conférence
internationale du Travail.
192. De nombreuses pistes ont été proposées pour apporter une solution aux questions relatives
au droit de grève. Il faut avoir à l’esprit que toute décision de renvoyer la question du droit
de grève à la Cour internationale de Justice, comme le prévoit l’article 37 1) de la
Constitution de l’OIT, pourrait avoir pour effet de rendre les principes relatifs au droit de
grève obligatoires, alors qu’il ne s’agit pour l’instant que de «soft law». Il ne faut pas
oublier que les membres de la commission d’experts sont nommés par le Conseil
d’administration suivant un processus tripartite. L’oratrice a conclu en déclarant que c’est
un jour sombre pour le système de contrôle et qu’elle partage les préoccupations exprimées
pendant la séance de la commission.
Réponse du président de la commission
193. Le président a exprimé ses vifs regrets à propos de la situation actuelle. Quoi qu’il en soit,
il reste optimiste parce qu’elle devrait permettre une réflexion pour la recherche d’une
solution. Les partenaires sociaux ont les mêmes objectifs de justice sociale, de paix et de
bien-être, et la confiance qui les unit n’est pas rompue.
Réponse de la Conseillère juridique
194. En réponse à une question du groupe des PIEM au sujet des options dont dispose la
Commission de la Conférence pour traiter les questions soulevées par les membres
employeurs à propos des mécanismes de contrôle et quelles seraient les modalités et
l’enceinte appropriées pour le faire, la Conseillère juridique a présenté deux options. La
première consisterait à créer, dans le rapport de la Commission de l’application des
normes, un chapitre particulier rendant compte de la teneur de la discussion et des
différents points de vue exprimés à propos du fonctionnement de cette commission,
notamment ceux portant sur les rapports de la commission d’experts. Ce chapitre pourrait
s’achever par une requête demandant à la Conférence de décider de demander au Directeur
général de communiquer ce chapitre au Conseil d’administration, ainsi que par une autre
requête de suivi approprié d’urgence. Les termes de cette requête pourraient être précisés
dans la décision proposée et pourraient comporter des suggestions quant à la manière dont
la Conférence poursuivrait l’examen de la question à la suite de l’initiative prise par le
Conseil d’administration dans le cadre de son mandat, y compris d’éventuelles
propositions pertinentes en matière de réforme du fonctionnement de la Conférence.
Deuxièmement, les membres de la commission concernés pourraient soumettre le texte
d’un projet de résolution à la commission qui le soumettrait à la Conférence en même
temps que son rapport. Cette résolution pourrait prendre note des différents points de vue
qui se sont exprimés pendant la session et demander un examen des questions soulevées et
du fonctionnement de la commission, et notamment pour ce qui a trait aux rapports de la
19(Rev.) Partie I/49
commission d’experts. Elle pourrait inviter le Conseil d’administration à se pencher
d’urgence sur la question, dans le contexte de sa réflexion en cours sur la réforme de la
Conférence ou de toute autre manière appropriée. Cette résolution serait présentée et
discutée dans les conditions prévues à l’article 63 du Règlement de la Conférence.
* * *
195. Le président a indiqué qu’il se doit de clore la discussion puisqu’il n’a pas été possible
d’adopter une liste des cas à discuter pendant cette session de la Commission de la
Conférence.
F. Discussion de suivi sur les suites à donner
196. Le membre gouvernemental du Soudan, s’exprimant au nom du groupe gouvernemental, a
déclaré que son groupe n’était actuellement pas en mesure de débattre des questions
importantes de procédures liées au fonctionnement de la Commission de la Conférence et
aux rapports de la commission d’experts. Le groupe gouvernemental a pris note des
options présentées par la Conseillère juridique, qui a recommandé d’inclure dans le rapport
de la Commission de l’application des normes un chapitre particulier reflétant le contenu
de la discussion sur le sujet, ainsi que les différents points de vue exprimés. Le groupe
gouvernemental a proposé que le chapitre particulier se termine en appelant la Conférence
internationale du Travail à demander au Directeur général de transmettre ce chapitre au
Conseil d’administration et à lui demander aussi de prendre d’urgence les mesures de suivi
appropriées.
197. Le membre gouvernemental du Bélarus a appuyé la déclaration du groupe gouvernemental
et a ajouté que la question du chapitre particulier est importante et qu’elle devrait être
portée à l’attention de la Conférence internationale du Travail.
198. Les membres employeurs étaient convaincus que les réflexions sur la situation permettront
à la commission de trouver une solution, étant donné l’objectif commun des mandants
tripartites – la justice sociale. Ils se sont dits satisfaits de l’avis juridique donné par la
Conseillère juridique et s’attendent à ce que la commission d’experts soulève d’autres
questions. Néanmoins, les membres employeurs craignent que les deux options proposées
par la Conseillère juridique ne nécessitent un laps de temps supplémentaire pour mettre au
point une solution, et ils ont demandé à cette commission, bien qu’étant un organe
souverain et la plus haute instance du système de contrôle, de renvoyer la question devant
un organe inférieur, à savoir le Conseil d’administration. Ils sont d’avis que le problème ne
sera pas réglé devant le Conseil d’administration et qu’il sera renvoyé ultérieurement
devant la Conférence internationale du Travail. Il est donc préférable de trouver dès
maintenant une solution plutôt que de faire perdurer la crise. En conséquence, les membres
employeurs ont proposé d’ajouter le texte suivant dans un paragraphe d’introduction à
l’étude d’ensemble et au rapport de la commission d’experts:
L’annexe V (article 408 du Traité de Versailles) au compte rendu de la Conférence
internationale du Travail de 1926 indique la nécessité de mettre en place une commission
technique d’experts (appelée par la suite Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR)) comme suit:
«Les fonctions de cette commission seraient entièrement d’ordre technique et d’aucune
façon d’ordre judiciaire.»
«Mais il fut reconnu que la commission d’experts ne devrait pas assumer de fonctions
d’ordre judiciaire et qu’elle ne serait pas compétente pour donner des interprétations des
dispositions des conventions ni pour se prononcer en faveur d’une interprétation plutôt que
d’une autre.»
19(Rev.) Partie I/50
A la 103e session du Conseil d’administration en 1947, il a été expliqué que la CEACR
«avait pour fonction de procéder à un examen des rapports annuels fournis par les
gouvernements … afin de préparer l’examen plus général par la Conférence» et que cela a
valeur de travail «préliminaire indispensable à l’examen d’ordre général de l’application
auquel procède la Conférence par la voie de sa Commission de l’application des conventions»
(Procès-verbaux, annexe XII, paragr. 36).
199. Les membres employeurs ont souligné que ce texte a été approuvé en 1926 et réaffirmé en
1947, et qu’aucune modification n’a été apportée à ce jour. Ils ont posé la question de
savoir pourquoi on ne pouvait pas s’accorder sur l’insertion de ce texte aujourd’hui. Tout
en reconnaissant que la situation actuelle est particulièrement difficile pour les
gouvernements, et que ces derniers ont besoin de temps pour consulter la capitale de leur
pays, les membres employeurs ont souligné une fois encore la nécessité de régler
d’urgence cette question essentielle et d’en débattre immédiatement. Le 7 juillet 2011, le
Bureau des activités pour les employeurs a fait part des points de vue de l’Organisation
internationale des employeurs (OIE) concernant le droit de grève, avant l’élaboration de
l’étude d’ensemble, indiquant en particulier que:
Le droit de grève n’est prévu ni par la convention no 87 ni par la convention no 98, et ne
prétend pas l’être. L’historique législatif de la convention no 87 montre incontestablement que
«la convention proposée ne concerne que la liberté syndicale et non le droit de grève». En
outre, comme l’a souligné le porte-parole des employeurs pendant la discussion finale sur la
convention no 98 en 1949, «le Président de la Conférence a déclaré irrecevables les deux
amendements visant à introduire la garantie du droit de grève, dans la mesure où ceux-ci ne
relèvent pas du champ d’application de la convention. L’orateur a estimé que le passage en
question constituait une erreur factuelle eu égard aux fondements historiques du droit de
grève, fondamentalement inhérent à ces conventions.»
200. Les membres employeurs estiment qu’ils soulèvent régulièrement la question du droit de
grève depuis un certain nombre d’années et qu’il n’en n’a pas été tenu compte. Le contenu
de l’étude d’ensemble, et l’utilisation ou l’utilisation incorrecte qu’en fait le monde
extérieur, rend impérative, pour les membres employeurs, la nécessité de clarifier la
situation, dans la mesure où il est indispensable que les gouvernements, les employeurs et
les travailleurs sachent clairement ce qu’est le droit de grève au sens de l’OIT. Les
membres employeurs ont indiqué que, si la Commission de la Conférence acceptait
d’insérer immédiatement le paragraphe d’introduction susmentionné dans l’étude
d’ensemble et le rapport de la commission d’experts, cela répondrait aux préoccupations
exprimées concernant la valeur accordée à ces rapports, auquel cas ils seraient prêts à
examiner les cas en «double note de bas de page» qui concernent les violations des
conventions ratifiées les plus graves.
201. Pour terminer, les membres employeurs estiment que tous les membres de cette
commission doivent tirer les enseignements de la communication et de la gestion d’une
situation de crise telle que celle-ci. Concernant le point soulevé par les membres
gouvernementaux, à savoir que cette question aurait dû être précédemment soulevée
devant le Conseil d’administration de façon tripartite, les membres employeurs ont
répondu que la question n’était pas à l’ordre du jour du Conseil d’administration et que la
Conférence internationale du Travail est un organe souverain. Les membres employeurs
préféreraient que la situation actuelle, qui a été précipitée par l’étude d’ensemble de cette
année et l’utilisation qu’en fait le monde extérieur, et non par d’autres facteurs, soit réglée
sans délai au sein de cet organe tripartite souverain. Aucune autre question n’est aussi
importante que le droit de grève en matière de relations professionnelles, et l’étude
d’ensemble a mis en évidence la nécessité de régler cette question d’urgence, de manière à
ce qu’il y ait une certitude entre les mandants tripartites.
19(Rev.) Partie I/51
202. Les membres travailleurs ont souligné qu’ils ont fait preuve, depuis le début des travaux de
la commission, d’une attitude réellement constructive, au-delà même des mots, en mettant
des propositions sur la table. Toutefois, la situation actuelle de blocage est due aux
conditions inacceptables voire illégitimes qui ont été posées pour établir la liste de cas
individuels, alors même que la mission première de la commission est l’examen de cette
liste.
203. Les membres travailleurs ont remercié la Conseillère juridique pour les réponses apportées
aux questions soulevées par le groupe des PIEM relatives aux options dont disposait la
commission. S’agissant des explications ainsi données, il convient de revenir sur quelques
points et de poser d’autres questions, étant entendu que le fait de poser ces questions ne
signifie en rien que les membres travailleurs acceptent une quelconque solution juridique
ou marquent leur accord à l’égard d’une procédure ou d’une autre. A de nombreuses
reprises, il a été fait référence à l’article 37 de la Constitution de l’OIT qui prévoit que
«toutes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la présente Constitution et des
conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution,
seront soumises à l’appréciation de la Cour internationale de Justice». La Cour
internationale de Justice est établie par l’article 92 de la Charte des Nations Unies et sa
compétence est soit contentieuse, soit consultative. Si la compétence contentieuse de la CIJ
est limitée aux Etats, dans le cadre de sa compétence consultative, elle peut être saisie par
l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, et cette compétence s’étend aussi aux autres
organes et institutions de l’ONU, notamment l’OIT, après accord de l’Assemblée. Les
Etats sont exclus de la compétence consultative.
204. Les membres travailleurs ont demandé à la Conseillère juridique des précisions sur les
points suivants:
– la compétence de la CIJ dans le cadre de l’application de l’article 37 concernant
l’interprétation de la Constitution et des conventions est-elle de caractère contentieux
ou consultatif, le paragraphe 2 de l’article 37 semblant prévoir les deux options?
– quels sont les modes de saisine de la CIJ?
– quelle est la procédure à suivre pour saisir éventuellement la CIJ et quels sont les
délais habituels dans lesquels la Cour traite des questions ou difficultés relatives à
l’interprétation des conventions? et
– de quelle façon les Etats Membres vont traiter concrètement l’intégration des arrêts
ou avis interprétatifs de la CIJ dans leur jurisprudence nationale et en exiger le respect
par les juridictions de tous niveaux?
205. En outre, l’orateur a demandé si la CIJ a déjà eu l’occasion de se prononcer sur des
questions d’interprétation des conventions de l’OIT et qui l’aurait amenée à réduire à néant
l’analyse effectuée par la commission d’experts.
206. Les membres travailleurs ont par ailleurs souligné que la possibilité d’apposer un «caveat»
ou un «disclaimer» ou encore un «avertissement» ou «paragraphe introductif» sur les
documents émanant de la commission d’experts et destinés à remplir les obligations de
rapport en vertu des articles 22 et 19 de la Constitution de l’OIT, c’est-à-dire les études
d’ensemble ou les rapports de la commission, a été évoquée à plusieurs reprises. Cette
demande des membres employeurs n’est pas du tout soutenue par les membres travailleurs.
En effet, selon les membres employeurs, l’étude d’ensemble et le rapport ne peuvent être
vus comme des textes faisant autorité pour les trois composantes de l’OIT. Mais alors
plusieurs questions se posent: qui est compétent pour décider de l’apposition d’un tel
«caveat»? L’initiative en revient-elle aux travailleurs ou aux employeurs agissant seuls et
d’office? Un consensus entre travailleurs et employeurs suffit-il? Quid des
19(Rev.) Partie I/52
gouvernements? Faut-il un accord des trois composantes de l’OIT? Une des composantes
de l’OIT peut-elle imposer aux autres ce «caveat» et, en cas de refus de celles-ci, les
travaux de la Commission de la Conférence sont-ils ajournés définitivement et ainsi mis en
péril, alors même que cette commission constitue l’un des autres niveaux du processus de
contrôle? Ces questions étant particulièrement délicates, les membres travailleurs ont
demandé à la Conseillère juridique de s’exprimer à cet égard en temps utile.
207. Enfin, les membres travailleurs ont proposé que le Groupe de travail tripartite sur les
méthodes de travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence soit
convoqué en novembre 2012 pour examiner les conséquences des discussions ayant eu lieu
au sein de cette commission et discuter des actions possibles en vue de la prochaine session
de la Conférence internationale du Travail (2013).
G. Point de décision soumis par le président
de la commission après consultation tripartite
208. Le président a soumis à la commission, après consultation tripartite, le projet de point de
décision suivant:
La commission note que des vues différentes ont été exprimées quant au fonctionnement
de la commission concernant les rapports de la commission d’experts qui lui ont été soumis
pour examen, comme indiqué aux paragraphes 21, 54, 81 à 89, 99 à 103 et 133 à 224 du
présent rapport.
La commission recommande à la Conférence de: 1) demander au Directeur général de
communiquer ces vues au Conseil d’administration; et 2) d’inviter le Conseil d’administration
à donner la suite qu’il convient de toute urgence, notamment par le biais de consultations
tripartites informelles avant sa session de novembre 2012.
209. Les membres employeurs ont pleinement soutenu le projet de point de décision et ont
réitéré leur optimisme quant au fait qu’avec du calme et après réflexion sur les difficultés
qui avaient été soulevées, les mandants tripartites trouveraient ensemble une solution. Ils
étaient soulagés et fiers que cette commission prenne, de manière tripartite, la
responsabilité de trouver une solution à la question de l’éclaircissement du mandat de la
commission d’experts et de l’insertion proposée d’un paragraphe introductif aux rapports
de la commission d’experts en vue d’éviter toute mauvaise compréhension au sein du
monde du travail. La position des membres employeurs est et reste que le mandat de la
commission d’experts est celui qui a été accepté par le passé de manière tripartite.
210. Reconnaissant les difficultés que la situation avait engendrées pour les gouvernements, les
membres employeurs ont souligné qu’ils avaient toujours eu la volonté, cette année, et
qu’ils l’auraient également toujours à l’avenir, d’examiner les cas que la commission
d’experts considérait comme les pires cas de violations des droits des travailleurs.
Réaffirmant que tous les membres de la commission pourraient tirer les enseignements des
difficultés de communication et de gestion de la commission qui s’étaient présentées cette
année et pourraient faire mieux à l’avenir, ils ont renouvelé leur engagement total à l’égard
de cette commission et de son important travail. Ils ont indiqué qu’ils se réjouissaient de la
perspective de travailler avec les membres travailleurs et les membres gouvernementaux
lors des consultations informelles qui se tiendraient pour éclaircir pour tous la question clé
sur les plans politique, social et économique du droit de grève, étant donné qu’il n’y avait
de question en matière de relations de travail sur le plan national qui soit plus importante.
Les membres employeurs ont exprimé leur détermination et renouvelé leur espoir que, lors
de la Conférence l’année prochaine, la commission annoncerait dès le premier jour la
solution trouvée par les mandants tripartites et que les membres gouvernementaux
recevraient la liste finale des cas individuels au plus tard le jeudi de la première semaine.
19(Rev.) Partie I/53
211. Les membres travailleurs ont déclaré qu’ils souhaitaient être constructifs afin que tout soit
mis en place pour permettre de travailler aujourd’hui, demain et plus tard encore,
notamment dans le cadre des réunions de la commission en 2013. Toutefois, être
constructif ne signifie en rien être content ou satisfait par cette déclaration solennelle, trop
impersonnelle pour être vraiment susceptible de rendre justice aux travailleurs. Cette
déclaration est très importante pour la préservation des missions de l’OIT et surtout du
mécanisme de contrôle de l’application des normes, même si elle ne compense pas le fait
que beaucoup trop de temps ait été perdu et qu’en fin de compte aucun des cas figurant sur
la liste n’ait été abordé. Il incombe maintenant au Conseil d’administration de s’emparer
rapidement et utilement de ce dossier complexe.
212. Les membres travailleurs ont souligné qu’ils ne pourraient jamais avoir une vision positive
des événements qui ont entaché les activités de la commission au cours de la semaine
écoulée. Cependant, l’OIT doit vivre et se développer sans cesse pour atteindre au mieux
l’objectif de justice sociale qui est le sien depuis la Déclaration de Philadelphie. La veille,
après de longues et éprouvantes négociations, une proposition a été soumise par le
président à l’approbation de la commission, selon laquelle les divergences de vues entre
travailleurs et employeurs relatives aux rapports de la commission d’experts, qui ont été
constatées et seront certainement dûment consignées, doivent être résolues de manière
urgente et, en tout cas, dans un délai permettant de suivre le calendrier institutionnel
imposé par la préparation des travaux de la Commission de l’application des normes en
2013. A cet égard, il est important que les questions posées à la Conseillère juridique
soient dûment consignées dans un procès-verbal.
213. Les membres travailleurs ont indiqué que la proposition avait été soumise à l’ensemble des
membres travailleurs et avait donné lieu à des débats houleux. La détresse face aux
événements qui se sont produits est en effet immense. Si l’on accepte la proposition et, par
conséquent, la procédure qu’elle prévoit, il convient de faire un certain nombre de
commentaires. Les négociations éprouvantes et le déroulement des événements, y compris
des contacts préliminaires, dont la chronologie a été précédemment rappelée, laisseront des
traces négatives dans la mémoire des travailleurs, car la confiance entre les parties a été
très sérieusement mise à l’épreuve et même presque rompue. Les événements de ces
derniers jours resteront également gravés dans la mémoire du personnel du Bureau. A cet
égard, il convient de souligner la déclaration faite, ce matin, par le Directeur général
devant la plénière de la Conférence, dans laquelle il a vigoureusement défendu l’intégrité
du personnel du BIT et l’impartialité des experts chargés du contrôle de l’application des
conventions et recommandations 6.
214. Les membres travailleurs ont souligné que le retour des travailleurs dans leur pays sera
douloureux et parfois marqué par la peur. Venus ici pour exposer les cas de violations de
leurs droits garantis par les conventions de l’OIT, ils rentrent les mains vides, sans
conclusions de la part de la commission, sans le soutien de la communauté internationale
pour leur redonner le courage d’affronter les harcèlements, agressions et assassinats ou
violations de leur droit élémentaire à un traitement digne par les gouvernements et les
entreprises nationales ou internationales. Que dire à la famille et aux collègues de Manuel
de Jesús Ramirez, le dirigeant syndical guatémaltèque assassiné le 1er juin, au moment
même où la commission entamait ses travaux? Que dire aux travailleurs de Fidji et à leurs
représentants confrontés dans leur pays à un gouvernement militaire qui n’a aucun respect
pour les droits des travailleurs et pour qui seules l’OIT et la Commission de l’application
des normes représentaient un espoir? Que dire aux travailleurs grecs, turcs, colombiens, à
ceux du Swaziland, du Bélarus et d’autres pays? Faut-il demander une minute de silence à
la mémoire des 25 cas qui ne seront pas traités? Comment comprendront-ils l’attaque
6 Le texte intégral de la déclaration du Directeur général peut être consulté dans le Compte rendu provisoire no 7,
p. 3.
19(Rev.) Partie I/54
menée contre la commission d’experts que le communiqué de presse de l’OIE qualifie de
«demande légitime de clarification officielle du statut des observations de la commission
d’experts»? Comment comprendre que cette attaque a eu pour effet d’empêcher que la liste
des cas soit examinée?
215. Les membres travailleurs ont rappelé que, dès les premières interventions des membres
employeurs contre l’interprétation des fondements du droit de grève faite par la
commission d’experts, ils ont souligné que ce contentieux relevait de la seule et unique
compétence du Conseil d’administration et proposé que la question lui soit renvoyée. Cette
proposition aurait alors permis d’examiner «la liste» soumise par les membres travailleurs
à la commission, qui contenait notamment, outre les cinq cas ayant une double note de bas
de page, de nombreux cas présentés par les membres employeurs. Il ne faut pas oublier que
de nombreuses organisations d’employeurs ont été capables d’exister et de prospérer grâce
aux travaux de la commission d’experts et de la Commission de l’application des normes
de la Conférence. L’absence d’examen d’une liste de cas lors de la Conférence n’est
profitable ni aux travailleurs ni aux employeurs. En effet, l’échec des travaux de la
présente commission va profiter à tous ceux qui mettent en cause l’efficacité de l’OIT et de
sa fonction normative.
216. Les membres travailleurs ont déclaré qu’ils respecteraient l’accord passé car ils ont
toujours respecté la «Maison OIT» et pleinement joué le jeu du tripartisme et du dialogue
social. Il est important de chercher des solutions constructives, même en cas de
divergences de vues et de confrontations difficiles. Toutefois, le travail confié au Conseil
d’administration devra être encadré. L’OIT tient sa spécificité de son tripartisme unique au
sein des institutions des Nations Unies et il n’est pas pensable qu’il en soit autrement. La
commission d’experts, qui est le point culminant des mécanismes de contrôle depuis 1926,
conserve la confiance des membres travailleurs et ses avis, qui certes ne sont pas
juridiquement obligatoires, ont encore et toujours une haute autorité morale. Tant que ces
avis ne sont pas contredits par la Cour internationale de Justice, ils sont réputés valables et
communément admis. Accepter ce préalable est indispensable, entre autres, à la sécurité
juridique nécessaire au bon fonctionnement de l’OIT. Les reproches adressés aux experts
quant à leur excès de pouvoir en matière d’appréciation des relations entre la convention
no 87 et le droit de grève sont excessifs et constituent une forme indirecte de déni de la
jurisprudence du Comité de la liberté syndicale, organe tripartite lui aussi. Le droit de
grève n’est pas qu’une matière nationale à traiter et à juger en fonction de considérations
temporelles ou économiques. En dehors des conventions nos 87 et 98, il y a également le
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et certains textes de
portée régionale tels que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la
Charte sociale européenne, la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales ou le Protocole additionnel à la Convention
américaine relative aux droits de l’homme traitant des droits économiques, sociaux et
culturels (Protocole de San Salvador).
217. Après consultation avec les membres employeurs, les membres travailleurs ont demandé à
la commission de se prononcer sur la proposition suivante:
Compte tenu du fait que la Commission de l’application des normes n’a été en mesure
d’examiner aucun des cas figurant dans la liste préliminaire et afin d’éviter toute
perturbation supplémentaire dans le fonctionnement des mécanismes de contrôle de l’OIT,
la commission prie les gouvernements mentionnés dans la liste préliminaire 7 d’envoyer un
rapport à la commission d’experts pour examen à sa prochaine session.
7 Voir appendice 2.
19(Rev.) Partie I/55
218. En conclusion, les membres travailleurs ont souligné que seule l’OIT permet un dialogue
qui fait évoluer les droits des plus faibles. Ils ont également indiqué qu’ils travailleront au
respect de l’accord passé aujourd’hui, demain et après-demain.
219. Les membres employeurs ont accepté la proposition des membres travailleurs, à condition
qu’elle soit acceptable pour les membres gouvernementaux.
220. La membre gouvernementale du Canada, s’exprimant au nom du groupe des PIEM, a
endossé la proposition des membres travailleurs.
221. Le membre gouvernemental de la République bolivarienne du Venezuela a déclaré qu’il
respecte la position prise par chacun des gouvernements à propos de la liste préliminaire et
comprend les motivations exprimées par les membres travailleurs. Cette proposition, qui a
été présentée à la commission à la dernière minute, sur la base de tout ce qui s’est passé
pendant les réunions de la commission, démontre une fois encore l’urgente nécessité de
débattre des procédures et normes claires, objectives et transparentes à établir pour les
méthodes de travail de la commission. Cela ne peut plus être remis à plus tard si l’on veut
maintenir la crédibilité et le caractère sérieux de la Commission de l’application des
normes, car sinon ce sont les droits légitimes des gouvernements qui continueraient d’être
altérés, en ce sens que c’est le tripartisme même de l’Organisation qui serait remis en
question.
222. La membre gouvernementale de Cuba, ayant écouté la proposition des membres
travailleurs, a indiqué qu’elle n’y était pas opposée, mais a exprimé sa préoccupation face
à une proposition présentée à la dernière minute qui ne peut faire l’objet de consultations
entre les membres gouvernementaux. Ces faits démontrent le manque de transparence des
méthodes de travail de cette commission et l’urgente nécessité de les réformer. Elle a
demandé de préciser la portée de l’examen cette année par la commission d’experts des
informations communiquées par les gouvernements qui figurent sur la liste préliminaire.
223. Le membre gouvernemental de la République islamique d’Iran réitère l’attachement total
de son gouvernement au système de contrôle de l’OIT, ainsi qu’au travail de cette
commission, et il attache beaucoup d’importance à l’analyse objective, apolitique et
impartiale à laquelle a procédé la commission d’experts dans le cadre de son mandat bien
défini. Son gouvernement regrette vivement que la liste finale des cas individuels n’ait pas
été adoptée et il déplore cette clôture inattendue des travaux de la commission. Les
désolants événements de ces derniers jours ont sérieusement entravé la capacité des
gouvernements à participer de manière adéquate aux travaux de ce mécanisme
irremplaçable et ont, de ce fait, affecté de manière négative l’exécution du mandat de la
commission. Les événements de cette année s’inscriront dans l’histoire de l’OIT comme
des événements malheureux et mémorables ayant terni la réputation d’un organe de
contrôle autrefois tenu en haute estime et montrant clairement la nécessité d’un réexamen
approprié des procédures en la matière par une remise en activité du Groupe de travail
tripartite sur les méthodes de travail de la Commission de la Conférence, institué en juin
2006, qui s’est réuni à 11 reprises et dont les réunions furent fructueuses. Enfin, il faut
espérer que la commission pourra compter sur la collaboration constructive des partenaires
sociaux sur cette importante question.
224. Le membre gouvernemental du Brésil a exprimé l’inquiétude de son gouvernement face à
la situation dans laquelle se trouve la commission en ce qui concerne la publication de la
liste. Il a souligné la nécessité de préserver le système de contrôle et attiré l’attention sur le
danger que représente la situation actuelle pour ce système. Il a également souligné la
nécessité de publier la liste dans les temps et réitéré la demande formulée dans ce sens par
le GRULAC.
19(Rev.) Partie I/56
225. En réponse à une demande de la membre gouvernementale de Cuba, la représentante du
Secrétaire général insiste sur l’importance que la commission d’experts attache aux travaux
de la Commission de la Conférence et sur la diligence avec laquelle elle prend en compte
les commentaires de cette commission. Cette année, le rapport de la commission d’experts
contenait un chapitre spécial sur tous les cas discutés précédemment par la Commission de
la Conférence. Etant donné le respect et la déférence que la commission d’experts
témoigne à cette commission, il est certain qu’elle aura à coeur de répondre à la demande
de la Commission de la Conférence d’examiner les cas de la liste préliminaire, pour autant
que les rapports seront présentés en temps voulu, à savoir pour le 1er septembre 2012.
Plusieurs pays ont déjà fourni des informations à la commission et certains gouvernements
devront confirmer si ces informations sont bien à jour ou s’il faudra en attendre de
nouvelles.
226. Le président a observé que les membres gouvernementaux n’ont pas exprimé de désaccord
sur les propositions qui figurent aux paragraphes 207 et 216, et, par conséquent, ces
propositions ont été adoptées.
H. Adoption du rapport et remarques finales
227. Le rapport de la commission a été adopté tel qu’amendé.
228. Le Président de la Conférence a déclaré que des synergies évidentes existent entre la
discussion sur l’emploi des jeunes, le socle de protection sociale, les principes et droits
fondamentaux au travail et l’éminent mandat de cette commission. La Commission de
l’application des normes constitue une instance fondamentale des mécanismes de contrôle
régulier de l’OIT qui a été d’un apport inestimable pour l’élaboration du droit international
du travail et qui a conféré un prestige exceptionnel à un mécanisme de contrôle de
l’application des normes internationales qui a peut-être été le plus prolifique de ceux
connus au fil de l’histoire. L’orateur a fait siennes les paroles du professeur Nicolas
Valticos qui a déclaré que les fondateurs de l’OIT ont mis en place, dès le départ, un
mécanisme précis destiné en particulier à assurer le contrôle de l’application des normes
adoptées par l’organisation et qu’il est avéré que les procédures de contrôle de l’OIT sont
les plus abouties sur la scène internationale, et cela est dû à la participation des
organisations d’employeurs et de travailleurs et aux qualités d’indépendance et de valeur
professionnelle des membres des organes de contrôle. Par ailleurs, à l’occasion du
85e anniversaire de la commission, l’accent a été mis sur le fait que celle-ci a «un potentiel
dont on n’a pas encore totalement tiré parti. Son caractère tripartite et universel, son rôle
législatif et son autorité inégalable lui confèrent une importance particulière et en font la
pierre angulaire du système de contrôle de l’OIT.» L’influence de la doctrine des organes
de contrôle de l’OIT est une donnée sans laquelle on peut difficilement comprendre le
fonctionnement des juridictions du travail et constitutionnelles. L’étude d’ensemble sur les
conventions fondamentales de l’OIT, intitulée Donner un visage humain à la
mondialisation, peut être considérée comme une étude sans précédent à l’OIT et dans le
monde du travail, puisqu’elle symbolise l’interdépendance et la complémentarité des
conventions fondamentales ainsi que leur faculté d’application universelle, offrant ainsi
une réponse de l’OIT aux défis de la mondialisation. L’orateur a exprimé sa préoccupation
devant les vicissitudes qui ont marqué les travaux de la commission et a manifesté l’espoir
de voir cette situation aboutir à une réflexion qui permette aux partenaires sociaux de
trouver une solution dans les limites de ses buts et de son mandat. Il a lancé un appel au
dialogue, lequel a permis à la commission de préserver et renforcer une instance unique en
son genre sur la scène internationale et a exprimé son soutien pour accompagner toute
initiative visant à renforcer l’action future de cette commission.
19(Rev.) Partie I/57
229. Les membres travailleurs ont relevé que, cette année, leurs remarques finales seraient
différentes puisqu’ils n’avaient pas à évaluer les conclusions adoptées par la commission
dans le cadre de la discussion des cas individuels. Ils ont fortement déploré les incidents
graves qui ont empêché la tenue des travaux de la commission. Une solution commune a
cependant été trouvée, elle doit être mise en oeuvre de bonne foi et avec rapidité.
Premièrement, il incombe maintenant au Conseil d’administration d’assurer rapidement le
suivi de la décision prise par la commission le 6 juin 2012. Les divergences de vues entre
membres travailleurs et employeurs concernant les rapports de la commission d’experts
devront connaître une solution urgente et, en tout cas, dans un délai qui permettra de tenir
le calendrier en vue de la réunion de 2013 de la Commission de l’application des normes.
Deuxièmement, il est attendu des 49 pays repris sur la liste préliminaire qu’ils soumettent,
au plus tard le 1er septembre 2012, un rapport contenant des réponses aux commentaires
formulés par la commission d’experts, ceci afin d’éviter toute rupture dans la continuité
des mécanismes de contrôle.
230. Ils ont rappelé que l’étude d’ensemble et les travaux de la Commission de la discussion
récurrente sont liés, en raison du processus mis en place dans le cadre de la Déclaration de
2008 sur la justice sociale pour une mondialisation équitable. Cette déclaration doit être
prise au sérieux et ne constitue pas un processus de plus parmi tant d’autres. Elle souligne
l’avantage comparatif unique et la légitimité de l’OIT, fondés sur le tripartisme et sur
l’expérience fructueuse et complémentaire acquise par ses mandants tripartites en ce qui
concerne les politiques économiques et sociales qui influent sur la vie des gens. La
déclaration a été adoptée en vue de renforcer la capacité de l’OIT en référence aux
objectifs de la Déclaration de Philadelphie, et se base sur quatre objectifs stratégiques
d’égale valeur. La discussion récurrente de cette année portait sur le respect, la promotion
et la mise en oeuvre des principes et droits fondamentaux au travail, tandis que l’étude
d’ensemble portait sur les mêmes principes et droits fondamentaux au travail, repris dans
les huit conventions fondamentales. Afin de souligner le lien entre les travaux dont la
Commission de l’application des normes est chargée, en vertu des articles 19 et 22 de la
Constitution, et ceux de la Commission de la discussion récurrente, il était attendu que la
présente commission transmette des conclusions communes à cette dernière. Toutefois,
l’attaque en règle menée par les membres employeurs contre l’étude d’ensemble a
empêché cette commission de se présenter devant la Commission de la discussion
récurrente, laquelle n’a donc pas pu travailler pleinement dans le cadre prévu par la
Déclaration de 2008. Cela pose une question politique que le BIT devra examiner lors de
l’évaluation de l’impact de la Déclaration de 2008 sur la justice sociale pour une
mondialisation équitable. Les membres travailleurs se sont dits désolés de l’impact que les
incidents survenus au sein de cette commission ont eu sur les travaux de la Commission de
la discussion récurrente. Un consensus tripartite aurait cependant pu être trouvé sur un
message à transmettre à cette dernière, sans faire état de ces incidents. En effet, les
membres employeurs ne paraissent pas opposés à la convention no 87 en tant que telle.
Leur souci découle du fait que, de l’avis de la commission d’experts et des membres
travailleurs, le droit de grève trouve son fondement dans cette convention. Ils considèrent
par conséquent que le pouvoir d’interprétation des experts sur le droit de grève est exagéré
et injustifié. Hormis ce point, la convention est incontestée et elle est d’ailleurs aussi le
fondement du droit d’organisation des employeurs. Au-delà de cette question, la
commission ne pouvait-elle réaffirmer que les huit conventions fondamentales sont plus
que jamais d’actualité, face à la crise économique mondiale et face à d’autres défis
influençant le bien-être et les moyens de subsistance des travailleurs dans toutes les
régions? Ses membres ne pouvaient-ils dire ensemble que, dans le contexte de la crise et
face aux plans d’austérité de nombreux gouvernements, il est essentiel que les mesures de
relance soient conçues en prenant les conventions fondamentales en considération? Ne
pouvaient-ils inviter ensemble le Conseil d’administration à élaborer un plan d’action, d’ici
2015, en vue d’une ratification universelle des conventions fondamentales, en ciblant tout
particulièrement les 48 Etats Membres qui ne les ont pas encore toutes ratifiées et en
encourageant les Etats dont la population est la plus élevée à ratifier ces huit conventions?
19(Rev.) Partie I/58
Ne pouvaient-ils demander ensemble des ressources suffisantes pour assurer la mise en
place d’une assistance technique par le BIT portant sur les questions de ratification et de
mise en oeuvre dans la pratique? Ne pouvaient-ils demander ensemble que la place du
dialogue social dans la mise en oeuvre des conventions fondamentales soit accrue
effectivement et que ce dialogue social soit plus efficace? Cet échec des travaux de la
commission en ce qui concerne les huit conventions fondamentales est inquiétant pour
l’avenir. L’étude d’ensemble de 2013 portera sur les normes relatives au dialogue social
dans la fonction publique et celle de 2014 portera sur les salaires. Allons-nous au-devant
de nouvelles difficultés? Allons-nous entendre que les salaires ne doivent pas être protégés
et ne sont plus qu’une variable économique dans la course au profit?
231. En ce qui concerne le contexte géopolitique des violations des droits des travailleurs, les
membres travailleurs ont déclaré ne pas avoir de mandat pour passer sous silence les cas
non évoqués au sein de la commission. Il n’est cependant pas question de faire en quelques
minutes tout le travail que cette dernière n’a pas effectué. Le seul objectif est de rendre
justice, de manière fort incomplète, aux membres travailleurs qui sont venus avec l’espoir
de pouvoir parler de ce qu’ils vivent, à savoir des situations répétées de violations de leurs
droits garantis par les conventions de l’OIT. Ils repartent les mains vides, sans s’être
exprimés sur la pratique de terrain en matière d’application des conventions ratifiées par
leurs gouvernements. Ils repartent sans les conclusions de la commission, qui sont souvent
le signe officiel que la communauté internationale les soutient et veut les aider en vue de
faire cesser les situations de harcèlement, d’agressions et d’assassinats ou les violations de
leurs droits. Les membres travailleurs ont organisé en leur sein, de leur propre initiative, un
examen de certains des cinq cas dits de double note de bas de page, et de certains autres
cas très graves, au cours de réunions auxquelles les autres groupes étaient libres de se
joindre. Ce tour d’horizon ne constitue pas un travail d’examen des cas mais une mise en
contexte des dégradations de la situation des travailleurs dans le monde entier. Les
membres travailleurs avaient inclus dans leur liste de cas plusieurs des 27 Etats membres
de l’Union européenne, et en particulier l’Espagne pour la convention no 158, la Roumanie
pour la convention no 95 et la Grèce pour la convention no 98. L’Europe est en crise grave.
Le rapport sur le travail dans le monde en 2012, publié récemment par le BIT, démontre
que «la vision étroite qu’ont de nombreux pays de la zone euro de la rigueur budgétaire,
approfondit la crise de l’emploi et pourrait même déboucher sur une nouvelle récession en
Europe». La priorité donnée à une combinaison d’austérité budgétaire et de réforme
drastique du marché du travail a entraîné en Europe une crise dangereuse de l’emploi. Le
Commissaire européen pour l’emploi, les affaires sociales et l’inclusion, M. Lazlo Andor,
a confirmé très récemment cette approche en se demandant «si le remède proposé dans de
nombreux Etats membres de l’Union européenne, ne tuait pas le patient plutôt que de le
sauver». L’examen des trois cas susmentionnés aurait permis de s’interroger sur les effets
concrets sur la législation nationale du travail des politiques de réformes engagées dans de
nombreux Etats de l’Union européenne. Il aurait permis de voir si ces politiques de
réforme permettent encore aux gouvernements de considérer qu’ils respectent les
conventions de l’OIT. Les trois cas précités concernent les salaires et leur négociation, les
mesures relatives à la cessation de la relation d’emploi et leur négociation et, de façon plus
générale, les atteintes à l’autonomie des partenaires sociaux et la mise en valeur du modèle
de négociation décentralisée au niveau des entreprises. Au-delà de ces cas, on aurait
évoqué les attaques gouvernementales contre les travailleurs au nom de l’orthodoxie
budgétaire et de l’assainissement à tout prix des finances publiques. Se pose la question du
rôle dérégulateur des institutions financières européennes et internationales qui se croient
au-dessus des conventions de l’OIT et mettent des gouvernements sous pression. Le
rapport annuel des violations des droits syndicaux 2012 de la CSI, publié voici quelques
jours, met en lumière des violations de la convention no 87 que les membres travailleurs
avaient placées sur leur liste préliminaire. La commission d’experts avait aussi mis ces cas
en exergue, en insistant parfois sur le caractère récurrent et quasi historique des
manquements signalés.
19(Rev.) Partie I/59
232. Les droits syndicaux des travailleurs sont violés partout dans le monde, c’est pourquoi se
pose chaque année la question d’une sélection d’un trop grand nombre de cas relatifs à la
convention no 87, sans d’ailleurs que la question de la grève soit posée. Les membres
travailleurs ont assuré la commission qu’ils aimeraient ne pas devoir sélectionner autant de
ces cas. Ils ont évoqué la situation dans les zones franches d’exportation, qui ne se limitent
plus à des territoires géographiques mais s’appliquent à des secteurs d’activités, ainsi que
les expériences de solidarismes qui se développent en Europe avec le seul objectif de
détruire le mouvement syndical. Ils ont également mentionné les cas de Fidji et du
Guatemala – où des représailles physiques contre les membres travailleurs sont à craindre,
ainsi que ceux du Myanmar, du Swaziland, du Zimbabwe, de la Turquie, de l’Algérie, du
Bélarus (qui est un cas historique pour la commission et où rien ne bouge), et de la
Colombie où, malgré quelques avancées, 29 syndicalistes sont morts en 2011. Ils ont
également cité le cas de l’Egypte en rappelant que, en 2011, le ministre de la
Main-d’oeuvre et des Migrations avait souligné «la valeur du dialogue social entre
gouvernements, employeurs et travailleurs afin de réaliser la paix sociale et de créer un
climat propice au développement économique». Un an après, c’est un constat de carence
totale. Les membres travailleurs ont aussi mentionné le cas du Mexique pour la convention
no 155, que la commission traite depuis plusieurs années, y compris en 2011, et où rien ne
change. Ils ont relevé que l’année 2011 avait été spectaculaire car marquée par la montée
de mouvements démocratiques dans les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, y
compris en Egypte, qui a déjà été citée. Pour les membres travailleurs, il aurait été
important de mettre aussi l’accent sur les violations persistantes de la convention no 111 en
Arabie saoudite, car ce pays a valeur d’exemple pour l’ensemble des émirats arabes. Mais
une discussion d’autres cas se serait aussi justifiée pleinement. Ils ont déclaré rester
préoccupés par les violations nombreuses de la convention no 169, et le cas du Paraguay
leur apparaissait particulièrement significatif des violations des droits des peuples
indigènes et tribaux. Les membres gouvernementaux et employeurs ont accepté l’idée de
demander aux gouvernements figurant sur la liste préliminaire de soumettre un rapport
d’ici au 1er septembre 2012. Les cas évoqués plus haut représentent un échantillon des cas
les plus préoccupants pour lesquels un rapport documenté s’impose. Les membres
travailleurs ont déclaré avoir été très mortifiés par le déroulement des débats. L’élaboration
d’une liste définitive de cas s’est avérée un exercice impossible en 2012. La solution pour
l’avenir dépend en partie du travail confié au Conseil d’administration suite à l’accord
conclu au sein de la commission. Une solution devra être trouvée avant mars 2013.
233. Pour conclure, les membres travailleurs ont remercié le président et le rapporteur de la
commission, le président et les membres de la commission d’experts. Ils ont aussi remercié
les membres gouvernementaux de la commission pour leur coopération. Sans leur soutien,
il n’aurait peut-être pas été possible de parvenir à un accord. Le résultat obtenu appartient
aux membres tripartites de la commission, et il est à espérer que cela soit le début du
chemin vers une solution durable. Enfin, ils ont demandé aux membres de la commission
d’approuver son rapport afin qu’il soit soumis à la Conférence en séance plénière.
234. Les membres employeurs ont jugé que cette année a été une année inhabituelle pour la
commission et ils réfutent les rumeurs de victoire dans le chef de certains. Personne n’a
gagné cette année. Le but de la commission était de discuter de cas individuels
d’allégations de violations de conventions ratifiées. Il n’y a pas eu de liste de cas
individuels cette année. Les membres employeurs auraient aussi aimé que certains cas
soient discutés devant la commission, comme ceux de la Serbie (convention no 144), de
l’Uruguay (convention no 98) et de l’Ouzbékistan (convention no 182). Tous les mandants
tripartites avaient des cas qu’ils auraient voulu voir discutés. Les membres employeurs ont
dit qu’ils n’ont rien gagné et ont insisté sur le fait que tous les partenaires sociaux ont
échoué à cet égard. Toutefois, ils ont été en mesure de soulever un point important
s’agissant des travaux de la commission d’experts et de la Commission de la Conférence.
Répondant à de précédents commentaires qui disaient que ces questions auraient dû être
19(Rev.) Partie I/60
soulevées plus tôt, ils ont indiqué que c’est effectivement ce qu’ils faisaient depuis de
nombreuses années. Evoquant la discussion qui a eu lieu dans la Commission de la
Conférence en 1991, ils ont souligné qu’à l’époque les membres employeurs avaient déjà
soulevé la question et avaient noté que le dialogue peut être fait à la fois de critiques et de
louanges, ainsi que le fait que, de leur point de vue, l’interprétation de la convention no 87
y associant le droit de grève n’était pas correcte. Des questions similaires avaient encore
été soulevées par les membres employeurs en 1994 et en 1998; la commission d’experts ne
devait pas faire jurisprudence. Les rapports de la Commission de la Conférence montrent
eux aussi que, depuis 2000, les membres employeurs ne cessent de dire que le mandat de la
commission d’experts ne peut s’étendre à des interprétations définitives des conventions de
l’OIT et que son interprétation de la convention no 87, qui inclut implicitement le droit de
grève, est fausse. Ce droit n’a jamais figuré dans la convention no 87.
235. Les membres employeurs ont conclu en remerciant le président, la représentante du
secrétaire général et le secrétariat; ils ont remercié également les membres travailleurs, et
en particulier leur porte-parole pour sa collaboration. L’orateur a remercié encore les
gouvernements pour la patience dont ils ont fait preuve tout au long de la commission et il
a souligné que les membres employeurs n’ont jamais eu l’intention de causer des
désagréments.
236. Le président de la commission a déclaré qu’à la fin de ses travaux la commission entre
dans une phase sabbatique qui appelle à la réflexion, à la programmation et à la
préparation de l’avenir. La commission a montré que des changements s’imposent.
Pour la première fois, l’examen des cas individuels a été interrompu. Cependant, les
objectifs de la commission que sont la quête de la paix, de l’égalité et de la liberté pour
un monde meilleur se perpétuent. La tâche ardue consistant à trouver des solutions
pour aller de l’avant et améliorer les travaux de la commission constitue un défi
tripartite auquel il faut s’atteler dès à présent en espérant des résultats plus positifs à
l’avenir. Les yeux du monde étaient tournés vers la commission et, cette année, elle n’a
rien eu à offrir. Aucun pays ne bénéficiera de l’assistance technique qui lui permettrait
d’améliorer l’application des normes à la suite de l’examen auquel procède la
commission. Il faut souligner qu’il n’y a pas lieu de penser en termes de vainqueurs et
de vaincus. Tout le monde est responsable lorsqu’il s’agit de faire avancer une
discussion constructive sur les questions qui se sont posées et dont le rapport adopté
par la commission est le reflet. Il faut restaurer la confiance au sein de la commission,
reprendre son travail à la base et l’améliorer; oeuvrer dans l’intérêt des normes en
poursuivant les objectifs communs de paix, de justice, de travail décent, d’entreprises
durables et de liberté à tous les niveaux. L’orateur a remercié tous les membres de la
commission, du secrétariat et des services d’interprétation pour leur coopération et
pour le travail qu’ils ont fourni pendant cette session de la commission.
Genève, le 12 juin 2012 (Signé) Sérgio Paixão Pardo
Président
David Katjaimo
Rapporteur

Document no 269
CIT, 106e session, 2017, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 37, 39, 43

ILC106-CRT15-PI-Fr.docx 15 Partie I/1
Conférence internationale du Travail
15
PREMIÈRE PARTIE
Compte rendu des travaux
106e session, Genève, juin 2017
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
PREMIÈRE PARTIE
RAPPORT GÉNÉRAL
Table des matières
Page
A. Introduction ................................................................................................................... 3
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail ............................ 8
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution ...................................... 17
D. Exécution d’obligations spécifiques ............................................................................. 39
E. Adoption du rapport et remarques finales ..................................................................... 44
Annexe 1. Travaux de la commission .................................................................................... 47
Annexe 2. Cas au sujet desquels les gouvernements sont invités
à fournir des informations à la commission .......................................................... 62
ILC106-CRT15-PI-Fr.docx 15 Partie I/11
de la commission d’experts aux travaux de la Commission de la Conférence, la séance
spéciale constitue le cadre institutionnel et la bonne pratique qui permettent aux
représentants des deux commissions d’échanger des vues sur des questions revêtant un
intérêt commun. A sa dernière séance spéciale, la commission d’experts a souligné la
manière systématique dont elle contrôle le suivi des conclusions de la Commission de la
Conférence. La commission d’experts s’est dite à nouveau préoccupée par sa charge de
travail. Elle a exprimé l’espoir que des mesures seront prises pour remédier à cette situation,
et demandé aux membres employeurs et travailleurs d’apporter leur soutien sur ce point dans
le cadre de l’initiative sur les normes. Des éclaircissements ont été fournis sur les méthodes
de travail des deux commissions, éclaircissements d’autant plus utiles que ces méthodes ont
des incidences sur les travaux respectifs des commissions. La commission d’experts
envisage d’examiner ses méthodes de travail en ce qui concerne la mention du nom
d’entreprises et la longueur des commentaires, notamment pour ce qui est des conventions
techniques, en tenant compte des vues échangées sur ces questions par les vice-présidents
employeur et travailleur.
35. De plus, la commission d’experts a souligné dans son rapport le nombre sans précédent
d’observations reçues d’organisations d’employeurs et de travailleurs sur l’application des
conventions et des recommandations, ce qui est un indicateur de la vitalité du mécanisme de
contrôle, et aide beaucoup la commission d’experts à procéder à ses évaluations. La
commission d’experts a aussi rappelé le problème qui la préoccupe depuis longtemps, à
savoir la faible proportion de rapports reçus au 1er septembre, situation qui perturbe le bon
fonctionnement du système de contrôle régulier. En outre, la commission d’experts a appelé
tous les gouvernements à faire en sorte que copie des rapports sur les conventions ratifiées
soit communiquée aux organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs afin de
veiller à cet aspect important du mécanisme de contrôle. S’agissant des différents moyens
de donner davantage de visibilité à ses conclusions par pays, la commission d’experts a mis
l’accent sur les outils électroniques disponibles, en particulier la base de données
NORMLEX, et sur les importantes orientations pratiques données aux Etats Membres par le
biais de l’assistance technique. Dans ce contexte, la commission d’experts a réitéré son
espoir que soit formulé dans un avenir proche un programme d’assistance technique complet
et doté de ressources suffisantes pour aider tous les mandants à mieux appliquer les normes
internationales du travail dans la législation et la pratique. Enfin, l’orateur a attiré l’attention
de la Commission de la Conférence sur les cas, identifiés par la commission d’experts, dans
lesquels, au vu de la gravité des questions traitées, les gouvernements ont été priés de fournir
des données complètes à la Conférence (paragraphe 48 de son rapport général).
36. Enfin, l’orateur a assuré que la commission d’experts est résolument engagée en faveur d’un
dialogue constructif avec la Commission de la Conférence et avec tous les autres organes de
contrôle de l’OIT, dans l’intérêt d’un système de contrôle crédible et faisant autorité et, en
fin de compte, pour la cause des normes internationales du travail et de la justice sociale
partout dans le monde.
Déclaration des membres employeurs
37. Les membres employeurs se sont félicités de la présence du président de la commission
d’experts à la discussion générale de la commission. Ils accueillent favorablement le rapport
de 2017 de la commission d’experts et en soulignent trois éléments positifs. Premièrement,
le mandat de la commission d’experts a été reproduit au paragraphe 17 de son rapport
général, ce qui a contribué à préciser que ses vues et ses recommandations n’ont pas force
contraignante pour les Etats Membres. Deuxièmement, les membres employeurs ont noté
avec satisfaction que la plupart des conclusions adoptées l’an dernier ont été suivies d’une
aide du Bureau, par exemple sous la forme de missions de contacts directs, d’une assistance
technique ou de services consultatifs. Les membres employeurs ont convenu avec les
15 Partie I/12 ILC106-CRT15-PI-Fr.docx
membres travailleurs que les cas examinés par la Commission de la Conférence devraient
figurer dans une section spécifique du rapport de la commission d’experts. A cet égard, il
faut être plus réaliste dans le contrôle de l’application des normes en s’efforçant davantage
d’évaluer la mise en oeuvre des conventions ratifiées à la lumière des conditions spécifiques
des pays respectifs, et prendre acte des progrès qui peuvent être escomptés de manière
réaliste dans un délai donné. Les évaluations et les recommandations en vue de rectifications
du contrôle de l’application des normes et d’autres moyens d’assistance dont l’OIT dispose
devraient s’harmoniser de façon à ne pas laisser de lacune. Troisièmement, le fait que la
commission d’experts fait systématiquement référence dans ses observations aux
discussions et aux conclusions de la Commission de la Conférence met en évidence une
intégration croissante de l’activité des deux principaux organes de contrôle, ce qui constitue
une évolution positive et très importante. A propos de la mention continue dans certaines
observations sur la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, et sur la convention no 98 de considérations du Comité de la liberté syndicale,
les membres employeurs ont rappelé les mandats distincts du Comité de la liberté syndicale
et de la commission d’experts et indiqué que la commission d’experts était seulement
appelée à analyser les aspects législatifs dans certains cas du Comité de la liberté syndicale.
38. Enfin, les membres employeurs ont formulé un certain nombre de propositions concrètes
visant à accroître l’efficacité, la transparence, la pertinence et la viabilité du contrôle de
l’application des normes: i) étant donné la nécessité de rendre le rapport de la commission
d’experts plus facile à consulter, plus transparent et plus pertinent, les membres employeurs,
notant que les conclusions de la sous-commission de la commission d’experts sur les
méthodes de travail n’ont pas été présentées dans le rapport, ont proposé de créer un groupe
de travail conjoint composé de membres des deux organes, qui sera chargé de rechercher des
améliorations; de manière alternative, des membres de la commission d’experts pourraient
être invités à participer à des réunions spéciales avec les membres de la Commission de la
Conférence afin d’examiner d’éventuelles améliorations de ses méthodes de travail. On
renforcerait ainsi la coopération entre les deux piliers du système de contrôle régulier et, de
la sorte, son fonctionnement et sa cohésion; ii) il serait souhaitable que le texte de l’ensemble
des commentaires soumis à la commission d’experts par des organisations d’employeurs et
de travailleurs soit rendu disponible par un hyperlien dans la version électronique de son
rapport, et sur le site de NORMLEX, si ces organisations le souhaitent; iii) comme indiqué
dans la Position commune de 2017 du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs,
il est attendu que les rapports de mission sur les conclusions de la commission, ou qu’un
résumé des résultats concrets et sans caractère confidentiel d’une mission, soient publiés sur
NORMLEX; et iv) la page Internet de la session de 2017 de la Commission de la Conférence
devrait être enrichie, par exemple en ajoutant des informations concernant les délibérations
tripartites, y compris les documents soumis par les mandants.
39. Enfin, les membres employeurs ont soulevé trois points préoccupants dans le rapport de la
commission d’experts. Premièrement, étant donné l’accroissement depuis l’an dernier du
nombre de cas de manquement grave à l’obligation de présenter des rapports, les membres
employeurs ont suggéré d’envisager une discussion approfondie ainsi que des mesures
spécifiques au cours de la prochaine réunion sur les méthodes de travail de la Commission
de la Conférence. Les membres employeurs ont demandé quelles mesures concrètes sont
prises par le Bureau pour accroître le nombre de rapports présentés et pour donner suite aux
commentaires de la commission d’experts, en particulier en ce qui concerne les pays qui ne
soumettent pas de rapports depuis longtemps. Deuxièmement, les membres employeurs ont
exprimé leur préoccupation quant à la lourdeur de la charge de travail de la commission
d’experts, qui est due au nombre en augmentation constante de ratifications et de rapports à
examiner. Les mesures prises jusqu’à présent, par exemple l’allongement des intervalles de
soumission des rapports, semblent avoir atteint leurs limites. Il est nécessaire de mettre
l’accent dans les rapports sur les aspects essentiels des conventions de l’OIT et d’envisager
de concentrer, de consolider et de simplifier le système normatif et de contrôle de
ILC106-CRT15-PI-Fr.docx 15 Partie I/13
l’application des normes afin d’en assurer la viabilité. A ce sujet, les membres employeurs
ont déclaré attendre beaucoup de l’action du Groupe de travail tripartite du mécanisme
d’examen des normes. Se fondant sur les informations figurant au paragraphe 38 du rapport,
les membres employeurs ont demandé combien de rapports n’avaient pas été soumis à
l’attention de la commission d’experts faute de temps ou de ressources et quelles mesures
seront adoptées pour éviter l’examen de rapports contenant des informations dépassées.
Troisièmement, les membres employeurs ont exprimé à nouveau leur conviction que les
principes et les droits fondamentaux au travail, y compris la liberté syndicale, constituent le
fondement de la démocratie. Cela étant, ils ont fait état de leur désaccord avec le lien direct
que la commission d’experts a créé entre la convention nº 87 et la réglementation du droit
de grève, et avec l’interprétation trop ample qui en découle. Les membres employeurs ont
souligné que, sur 64 observations, 45 portaient sur le droit de grève et, sur 62 demandes
directes, 51 portaient d’une manière ou d’une autre sur le droit de grève. Enfin, sur ces
51 demandes directes, 22 traitaient exclusivement du droit de grève. Les membres
employeurs ont ainsi été dans l’obligation de réitérer leur profonde préoccupation du fait que
le droit de grève reste un point important, voire le principal, de l’examen de l’application de
la convention no 87. Etant donné que la commission d’experts a continué à réaffirmer sa
position à cet égard, les membres employeurs se sont dits obligés d’exprimer encore leurs
vues divergentes à ce sujet afin de ne pas laisser entendre qu’ils acceptent tacitement cette
position et d’éviter tout malentendu. Faisant observer que les interprétations de la
commission d’experts sur ce point n’ont bénéficié que d’un soutien limité du groupe
gouvernemental lors des discussions de mars 2017 du Conseil d’administration, les membres
employeurs ont souligné que les demandes de la commission d’experts en vue d’un
alignement de la législation et de la pratique à l’échelle nationale n’ont pas force
contraignante et que les gouvernements ne sont donc pas tenus de fournir des informations
concernant la législation et la pratique sur le droit de grève. Enfin, les membres employeurs
ont souligné que les conclusions de la Commission de l’application des normes ne
contiendraient pas de requêtes liées aux observations controversées sur le droit de grève et
que l’assistance technique du Bureau et le suivi des conclusions devraient se concentrer
exclusivement sur le consensus trouvé entre les mandants.
Déclaration des membres travailleurs
40. Les membres travailleurs se sont félicités de la présence du président de la commission
d’experts au cours de la discussion générale. Le rapport annuel de la commission d’experts
offre une perspective mondiale de la mise en oeuvre des normes internationales du travail en
ce qu’il compile les rapports des gouvernements sur l’application des normes ainsi qu’un
nombre important d’observations formulées par les organisations de travailleurs et
d’employeurs. La qualité d’analyse et l’indépendance de la commission d’experts permettent
non seulement de promouvoir concrètement le respect des normes internationales du travail
et leur application dans les pays concernés, mais aussi à la Commission de la Conférence de
mener un travail de fond en les enrichissant par les interventions des différents groupes qui
la composent. Par ailleurs, les études d’ensemble de la commission d’experts permettent
d’éclairer sur les perspectives de développement des normes internationales du travail. Ce
travail d’ampleur et de qualité de la commission d’experts au vu de la quantité
d’informations à traiter doit être salué.
41. Les membres travailleurs formulent cependant certaines observations qui pourraient
contribuer à améliorer la qualité du rapport. Ils suggèrent notamment de refléter plus
largement les observations formulées par les partenaires sociaux, qui dans beaucoup de cas
contiennent des informations de nature à enrichir l’examen des experts. Par ailleurs, les
membres travailleurs sont interpelés par le ton adopté dans le rapport à certains égards:
certains commentaires formulés depuis plusieurs années ont disparu alors que la situation
problématique demeure. Le ton adopté est parfois très modéré compte tenu des situations de
violations graves décrites. Certains commentaires sont si concis qu’ils rendent compliquée
15 Partie I/14 ILC106-CRT15-PI-Fr.docx
la tâche de sélection et de préparation des cas. Enfin, les membres travailleurs regrettent que
de nombreux éléments importants figurent dans les demandes directes et non dans les
observations de la commission d’experts. Afin d’assurer une meilleure lisibilité dans certains
cas, il est suggéré de reprendre de telles informations dans le rapport de la commission
d’experts.
42. Les remarques des membres travailleurs à l’égard du rapport de la commission d’experts
doivent être entendues dans une démarche constructive et ne remettent pas en cause l’action
de la commission d’experts dont il faut reconnaître un certain degré d’interprétation dans
l’évaluation de la conformité de la législation nationale et de son application aux dispositions
des normes internationales du travail. Par ailleurs, l’uniformité des observations de la
commission d’experts doit contribuer à assurer la sécurité juridique pour les Etats Membres
et à garantir un certain degré de prévisibilité. Enfin, la composition collégiale de la
commission d’experts, dont les membres proviennent de régions dont les systèmes
juridiques, économiques et sociaux sont différents, garantit un travail équilibré, indépendant
et impartial, renforçant ainsi l’autorité des observations et recommandations formulées. Les
membres travailleurs ont tenu à réaffirmer la confiance qu’ils accordent au travail de la
commission d’experts et indiquent que la charge de travail de cette dernière constituera un
point d’attention dans l’évaluation et l’amélioration des méthodes de travail des mécanismes
de contrôle de l’Organisation, en vue de les renforcer.
43. Les membres travailleurs ont souhaité réagir par rapport aux commentaires des membres
employeurs sur le traitement du droit de grève dans le rapport de la commission d’experts.
Tout en rappelant la position conjointe adoptée par les groupes travailleurs et employeurs en
février 2015, réaffirmée par le Conseil d’administration en mars 2017, ainsi que la
déclaration du groupe gouvernemental, les membres travailleurs ont réitéré que leur position
sur le droit de grève dans le cadre de la convention no 87 n’a pas changé en ce qu’ils estiment
que le droit de grève doit être reconnu dans le cadre de cette convention, dans la mesure où
ce droit est lié à la liberté syndicale qui est un principe et un droit fondamental de l’OIT.
Cependant, il n’a jamais été question pour les membres travailleurs de prétendre que le droit
de grève a un caractère absolu; il suffit pour s’en convaincre de consulter les nombreuses
décisions consensuelles adoptées en ce sens au sein du Comité de la liberté syndicale.
44. Souhaitant réagir à certaines propositions faites lors des discussions, les membres
travailleurs sont favorables à une section distincte dans le rapport de la commission
d’experts, portant sur les cas individuels traités par la Commission de la Conférence l’année
précédente, avec une attention plus particulière sur les cas de manquements répétés. Une
telle section permettrait une plus grande visibilité et un meilleur suivi des suites données par
les Etats Membres aux conclusions de la commission. Toutefois, les membres travailleurs
ont indiqué ne pas être favorables à la proposition de prévoir un suivi des cas et un
accompagnement au-delà d’une année, car cela risquerait de mettre le cycle de contrôle en
péril. Ils ne sont pas non plus favorables à la proposition des membres employeurs de la
publication sur NORMLEX des observations transmises à la commission d’experts par les
organisations d’employeurs ou de travailleurs qui le souhaiteraient en ce qu’elle risquerait
de fragiliser le rôle de la commission d’experts. Par contre, les membres travailleurs estiment
que la reproduction des recommandations du Comité de la liberté syndicale par la
commission d’experts ne soulève pas de difficulté et que la proposition que le président du
comité présente un rapport à la Commission de la Conférence est intéressante. Par ailleurs,
les membres travailleurs souscrivent à la proposition des membres employeurs de publier
les rapports des missions de contacts directs effectuées à la demande de la Commission de
la Conférence car cela permet de bénéficier d’informations importantes dans l’évaluation
des progrès accomplis dans les cas que la commission a eu à discuter.
45. Les membres travailleurs se sont félicités du travail constructif mis en place au sein de la
commission depuis 2015 et ont exprimé le souhait que, à nouveau cette année, des
discussions franches et constructives puissent être menées en vue d’aboutir, au-delà des
divergences de vues, à des conclusions consensuelles qui offriront aux Etats Membres des
perspectives de résolution des manquements constatés.

Document no 270
CIT, 107e session, 2018, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 46, 51

ILC107-CRT9A-Partie I-Fr.docx 1
Conférence internationale du Travail
9A
Compte rendu des travaux PREMIÈRE PARTIE
107e session, Genève, mai-juin 2018
Date: jeudi 7 juin 2018
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission
de l’application des normes
PREMIÈRE PARTIE
RAPPORT GÉNÉRAL
Table des matières
Page
A. Introduction ...................................................................................................... 3
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail ............... 9
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution.......................... 20
D. Exécution d’obligations spécifiques ................................................................ 40
E. Adoption du rapport et remarques finales ........................................................ 46
Annexe 1. Travaux de la commission ....................................................................... 50
Annexe 2. Cas au sujet desquels les gouvernements sont invités
à fournir des informations à la commission ............................................. 65
ILC107-CRT9A-Partie I-Fr.docx 15
d’administration à sa session de mars 2018, faciliteront la présentation de rapports et
augmenteront leur taux de présentation à l’avenir. Toutefois, il faudrait adopter des mesures
plus fondamentales pour répondre à ce problème et envisager, plus spécifiquement, les
consolidation, concentration et simplification des normes de l’OIT elles-mêmes. Cette
démarche a déjà été adoptée dans une large mesure dans le domaine maritime, et il est à
espérer que les travaux du Groupe de travail tripartite du mécanisme d’examen des normes
permettront de progresser en ce sens dans d’autres domaines; ii) les critères employés pour
différencier les observations et les demandes directes, décrits au paragraphe 41 du rapport
de la commission d’experts, et en particulier la «nature essentiellement technique» des
questions abordées dans les demandes directes et les «divergences importantes» soulignées
dans les observations, ne sont pas totalement clairs et suscitent une certaine confusion. Dans
plusieurs cas, il est difficile de comprendre pourquoi un commentaire est classé dans l’une
ou l’autre catégorie. C’est un point important puisque les demandes directes ne sont pas
incluses dans le rapport de la commission d’experts. La formulation de commentaires et de
recommandations aux gouvernements sous la forme de demandes directes soustrait une
partie importante des questions de fond liées à l’application des conventions ratifiées à la
supervision tripartite. Les membres employeurs ont donc invité la commission d’experts à
formuler tous les commentaires relatifs aux questions d’application et les recommandations
y relatives sous la forme d’observations; iii) les membres employeurs ont aussi exprimé leurs
préoccupations quant à la décision de la commission d’experts de s’écarter du cycle régulier
de présentation des rapports dans certains cas et pas dans d’autres. Tout en reconnaissant à
la commission d’experts son pouvoir discrétionnaire en la matière, il faudrait que, dans un
souci de bonne gouvernance, les raisons qui l’ont poussée à modifier le cycle de présentation
des rapports soient transparentes. A l’avenir, le rapport de la commission d’experts devrait
contenir des informations utiles sur les cas semblables; et iv) les membres employeurs ont
fait part de préoccupations liées aux divergences qui peuvent apparaître entre les conclusions
de la Commission de la Conférence et les commentaires de la commission d’experts, se
référant à un cas pour lequel la commission d’experts a pris note avec satisfaction de l’action
du gouvernement qui n’a pas tenu compte des conclusions de la Commission de la
Conférence; ils ont exhorté la commission d’experts à dûment tenir compte des conclusions
de la Commission de la Conférence, reflets d’un consensus tripartite, à l’occasion de ses
évaluations.
46. Les membres employeurs ont de nouveau exprimé leur conviction que les principes et les
droits fondamentaux au travail, y compris la liberté syndicale, constituent le fondement de
la démocratie. Cependant, ils ont tenu à réitérer leur désaccord avec le lien direct que la
commission d’experts a créé entre la convention no 87 et un droit de grève exprès, et avec
l’interprétation large qui en découle. Les membres employeurs ont souligné que, dans le
rapport de la commission d’experts, 33 observations concernant la convention no 87 sur un
total de 49 portent d’une façon ou d’une autre sur le droit de grève, y compris plusieurs
observations traitant exclusivement du droit de grève. Les membres employeurs ont estimé
nécessaire de faire consigner que le pouvoir d’interprétation de la commission d’experts d’un
droit de grève découlant de la convention no 87 n’était pas reconnu par les employeurs et
qu’ils maintenaient fermement leur position divergente sur ce point. En outre, ils ont exprimé
leur préoccupation quant aux nombreuses références faites par la commission d’experts aux
cas examinés par le Comité de la liberté syndicale. Ils ont considéré que le Comité de la
liberté syndicale et la commission d’experts ont des bases juridiques et des mandats
différents. Si les situations auxquelles le Comité de la liberté syndicale et la commission
d’experts sont confrontés peuvent souvent être similaires, il convient de garder à l’esprit les
différences entre les deux procédures lorsque des références sont faites.
16 ILC107-CRT9A-Partie I-Fr.docx
Déclaration des membres travailleurs
47. Les membres travailleurs se sont félicités de la présence du président de la commission
d’experts au cours de la discussion générale. Ils ont souligné que le monde connaît
actuellement de nombreux bouleversements: i) la mondialisation des économies permettant
aux capitaux de circuler librement dans l’unique objectif du profit, souvent au détriment des
conséquences sociales et environnementales; ii) les changements climatiques et la question
environnementale qui poseront de plus en plus de questions relatives au travail; et iii) les
conflits armés qui dévastent certaines régions entières. Ces trois phénomènes sont
intimement liés et sont à l’origine de flux migratoires massifs qui posent de véritables
questions sur la manière d’aborder les questions du travail dans ce contexte qui voit en outre
émerger dans certains pays des pouvoirs autoritaires peu respectueux des libertés publiques
et des droits fondamentaux. Les problèmes posés dans ce constat constituent autant de défis
pour l’OIT, et la commission doit y jouer un rôle important en tant qu’un des deux piliers de
l’Organisation dans le système de contrôle des normes internationales du travail, à côté de
la commission d’experts.
48. Les membres travailleurs se sont félicités du fait que le rapport de la commission d’experts
fasse référence de manière extensive aux conclusions de la Commission de la Conférence.
Il s’agit d’une évolution appréciable, mais il est suggéré à la commission d’experts
d’examiner de manière plus détaillée la mesure dans laquelle chacune des recommandations
aura été mise en oeuvre par les gouvernements. En outre, les membres travailleurs ont
accueilli favorablement l’initiative de la commission d’experts d’assurer un meilleur
équilibre entre les différents types de conventions dans la sélection des cas faisant l’objet
d’une double note de bas de page. Il est souhaitable que la commission d’experts accorde
autant que possible son attention aux conventions dites techniques.
49. Les membres travailleurs ont déclaré partager la préoccupation de la commission d’experts
quant au retard pris par beaucoup de gouvernements dans la présentation de leurs rapports.
Seuls 38,2 pour cent des rapports ont été reçus au 1er septembre 2017, ce qui représente un
recul par rapport à l’année passée. Ces retards ont pour conséquence de nuire à la qualité du
travail de la commission d’experts. Les membres travailleurs ont donc invité les
gouvernements à respecter leur obligation d’envoyer les rapports dans les délais requis. Ils
sont toutefois conscients du fait que ces manquements ne découlent pas toujours d’une
mauvaise volonté mais de difficultés pratiques. L’assistance technique qu’assure le Bureau
à cet égard s’avère précieuse. Il convient dès lors de réfléchir à la meilleure manière de la
renforcer. Par ailleurs, les membres travailleurs ont souhaité faire écho à la remarque de la
commission d’experts relevant que plusieurs gouvernements demeurent en défaut de leurs
obligations de communiquer au préalable leurs rapports aux organisations de travailleurs et
d’employeurs. Ces cas de manquement fournissent une indication sur l’importance accordée
au dialogue et à la concertation sociale dans les pays concernés.
50. Souhaitant réagir à certaines propositions faites par les membres employeurs lors des
discussions, les membres travailleurs ont indiqué que: i) les observations du rapport de la
commission d’experts s’adressent à des interlocuteurs habitués au vocabulaire spécifique
employé, à savoir les gouvernements et les partenaires sociaux. Ces observations ne
devraient donc obéir qu’à des impératifs de clarté et de précision. La proposition des
membres employeurs de simplification du vocabulaire employé dans le rapport de la
commission d’experts devrait donc faire l’objet d’une discussion approfondie; ii) ils ne sont
pas favorables à la proposition des membres employeurs de la publication des observations
transmises à la commission d’experts par les organisations d’employeurs ou de travailleurs
qui l’accepteraient en ce qu’elle risquerait de fragiliser la liberté d’appréciation et
l’indépendance de la commission d’experts; iii) le paragraphe 64 du rapport de la
commission d’experts paraît assez clair et suffisant en ce qu’il explicite les circonstances
pouvant amener à une interruption du cycle de rapport. Celles-ci constituent des mesures de
ILC107-CRT9A-Partie I-Fr.docx 17
sauvegarde visant à préserver l’efficacité du mécanisme régulier de contrôle; et iv) les
occasions d’échanges entre la Commission de la Conférence et la commission d’experts, qui
sont déjà en place, sont suffisantes et il n’apparaît pas nécessaire de les multiplier.
51. Souhaitant en outre réagir à la mise au point des membres employeurs qui ont rappelé leur
position concernant la convention no 87 et le droit de grève, les membres travailleurs ont
souhaité rappeler, à leur tour, qu’ils considèrent que le droit de grève est reconnu dans le
cadre de la convention no 87. Ce droit est lié à l’exercice de la liberté syndicale qui est non
seulement un principe et un droit fondamental de l’OIT, mais aussi un élément fondamental
de toute démocratie. A cet égard, les membres travailleurs ont rappelé que le Rapporteur
spécial des Nations Unies sur le droit de réunion pacifique et d’association a indiqué que le
droit de grève est consacré par le droit international et que sa protection est nécessaire pour
assurer des sociétés justes, stables et démocratiques. Ils ont tenu à rappeler le travail
constructif et consensuel mis en place au sein de la commission depuis 2015 pour établir des
mécanismes réguliers de contrôle efficaces et expriment le souhait que ces mécanismes
continueront d’être renforcés, au-delà des divergences de vues, afin d’atteindre les objectifs
de l’OIT.
Déclarations de membres gouvernementaux
52. La membre gouvernementale de la Bulgarie, s’exprimant au nom de l’Union européenne
(UE) et de ses Etats membres; du Monténégro, de la Serbie et de l’Albanie en tant que pays
candidats; et de la Bosnie-Herzégovine et de la Géorgie en tant que candidats potentiels, a
souligné que le contrôle régulier et efficace de l’application des normes internationales du
travail est essentiel pour garantir le mandat de l’OIT et asseoir son autorité, et a salué les
nouveaux changements apportés au fonctionnement de la commission. L’amélioration des
méthodes de travail de la commission étant en cours, l’oratrice a formulé quelques
commentaires et recommandations: i) les points traités dans le cadre de la procédure de
plainte en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT ne doivent, dans la mesure du
possible, pas être abordés lors des discussions de la commission afin d’éviter les doublons;
ii) la lecture du rapport de la commission d’experts ne permet pas toujours d’apprécier la
gravité de certains cas, en particulier lorsque le rapport n’a pas pu s’appuyer sur des
informations récentes. Les gouvernements figurant sur la liste préliminaire sont donc
vivement encouragés à fournir au Bureau toutes les informations dont ils disposent dès la
publication de la liste afin de les porter à la connaissance de tous les mandants de l’OIT. A
cet égard, il serait utile d’avoir, pour chaque cas, une évaluation claire de la situation de la
part de la commission d’experts. Dans certains cas, les évaluations figurant dans le rapport
ne portent que sur des éléments particuliers, ne permettant pas de se faire une idée générale
et précise du niveau de respect des conventions concernées. Dans d’autres, la commission
d’experts ne se réfère qu’aux observations des partenaires sociaux, et il est alors difficile
d’évaluer la gravité de la situation sur la base du rapport; iii) même si les contraintes des
organisations de travailleurs et des organisations d’employeurs en matière de consultations
internes sont compréhensibles, il est compliqué, au niveau de la préparation, de ne disposer
de la liste finale des cas que lorsque la Commission de la Conférence a démarré ses travaux.
Il est donc essentiel de disposer, pour chaque cas discuté lors de la Commission de la
Conférence, d’une description claire des questions soulevées, ainsi que des informations et
des avis de la commission d’experts les plus récents, pour permettre une discussion éclairée
et fructueuse; et iv) les études d’ensemble doivent faciliter et alimenter les discussions du
Groupe de travail tripartite du mécanisme d’examen des normes dont la tâche consiste à
mettre à jour et à moderniser le corpus de conventions et de recommandations. Ses
conclusions peuvent également enrichir la discussion sur l’étude d’ensemble lors de la
Commission de la Conférence. Les résultats des discussions du Groupe de travail tripartite
du mécanisme d’examen des normes et de celles sur les études d’ensemble pourraient ensuite
être transmis au Conseil d’administration pour y faire l’objet d’autres débats.
Document no 271
CIT, 111e session, 2023, Rapport de la Commission de
l’application des normes, paragr. 44, 93, 147-148

 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I
Compte rendu des travaux 4A
Conférence internationale du Travail – 111e session, Genève, 2023
Date: 16 juin 2023 Première partie
Troisième question à l’ordre du jour:
Informations et rapports sur l’application
des conventions et recommandations
Rapport de la Commission de l’application des normes
Première partie
Rapport général
Table des matières
Page
A. Introduction ........................................................................................................................................ 3
B. Questions générales relatives aux normes internationales du travail ...................................... 11
C. Rapports demandés au titre de l’article 19 de la Constitution .................................................... 34
D. Exécution d’obligations spécifiques ................................................................................................ 40
E. Conclusions adoptées suite à l’examen des cas individuels........................................................ 44
F. Adoption du rapport et remarques finales .................................................................................... 68
Annexe I ..................................................................................................................................................... 74
Annexe II .................................................................................................................................................... 90
 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I 10
41. Je souhaite également exprimer la préoccupation des membres travailleurs concernant la
situation en Tunisie. L’espace de liberté dans le pays ne cesse d’être restreint. Les libertés
syndicales sont en particulier soumises à rude épreuve. Les pratiques que nous observons
desservent les intérêts des travailleurs tunisiens et bafouent leurs droits. Le gouvernement
tunisien ne peut ignorer que le mouvement syndical dans le pays a toujours été un vecteur et
gage de stabilité. Nous l’invitons donc à respecter les libertés individuelles et singulièrement
la liberté syndicale. Nous souhaitons enfin évoquer le cas de la France, pays où la protection
contre le licenciement abusif a été fortement restreinte; cela fait partie d’une remise en cause
plus générale des droits des travailleurs dans le pays, ce qui accroît nos inquiétudes. Je
renouvelle mon souhait de voir toutes les parties aborder la discussion des 24 cas dans un
esprit constructif et respectueux.
42. Membres employeurs: Comme les membres travailleurs, nous sommes satisfaits de
l’adoption de la liste des cas. Comme chacun le sait, il s’agit d’une liste négociée et, par
conséquent, elle représente des compromis qui ont dû être faits au sujet des cas qui seront
entendus et ceux qui ne le seront pas. L’idéal aurait été que la commission examine davantage
de cas de progrès. Le Népal est le seul exemple sur la liste de cette année qui entrerait dans
cette catégorie. Nous aimerions voir davantage de cas dans lesquels le respect des conventions
favoriserait des conditions durables et viables pour la croissance des entreprises et la création
d’emplois. À propos des conventions fondamentales, nous notons qu’aucune convention sur
la sécurité et la santé au travail (SST) cette année ne figure sur la liste, ce qui est regrettable
puisque nous avons salué l’an dernier le fait que la SST avait été élevée au rang des principes
et droits fondamentaux au travail.
43. À l’inverse, nous estimons que certains cas n’auraient pas dû figurer sur la liste. Je n’entrerai
pas dans les détails car les détails apparaîtront lorsque ces cas seront discutés. Nos
préoccupations portent sur le fait que chacun de ces cas présente des caractéristiques qui
s’écartent du mandat principal de cette commission, qui est d’examiner le respect de la
convention à l’examen. D’une manière générale, ces cas se répartissent en trois grands
groupes: i) les cas au sujet desquels les discussions visant à traiter certaines questions
d’application sont déjà bien avancées au niveau national; ii) les cas ayant déjà fait l’objet de
discussions à la Commission de la Conférence et dont les éléments n’ont pas changé; ou iii) les
cas concernant des questions qui dépassent la portée des conventions de l’OIT, par exemple
le contexte politique qui prévaut dans le pays. À notre avis, cette commission devrait se
concentrer sur l’examen d’un cas dans le strict cadre de la convention qui fait l’objet du rapport
de la commission d’experts. Dévier de cette ligne de conduite, c’est s’exposer à des critiques
sur la pertinence et l’efficacité de notre travail, ce qu’aucun d’entre nous ne souhaite.
44. Deuxièmement, d’emblée, je voudrais rappeler à la commission que, comme les années
précédentes, toute question contenant une référence à un droit de grève dans la convention
(nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, qui, comme nous le
savons, a été contesté, ne sera pas incluse dans les conclusions des cas. Cette année, cela
s’appliquera aux cas du Guatemala, du Libéria, de Madagascar, du Nicaragua, des Pays-Bas:
Sint-Maarten, du Pérou, des Philippines et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande
du Nord. Comme beaucoup d’entre vous s’en souviendront, nous avons exprimé, lors de
précédentes sessions de la commission, nos préoccupations quant à l’évaluation approfondie,
mais non contraignante, de la convention no 87 par la commission d’experts sur ce point. Les
employeurs ont souligné à maintes reprises l’historique législatif de la convention no 87, qui
est attesté dans le compte rendu des travaux de la Conférence internationale du Travail. Il
ressort clairement de ce compte rendu que la convention en question ne portait que sur la
liberté syndicale et non sur le droit de grève.
 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I 21
respectueusement à la commission d’experts de fournir des informations plus détaillées sur
ce qui a été dit et éventuellement convenu lors de cet échange avec les gouvernements.
91. Nous avons également noté au paragraphe 13 qu’une réflexion commune a eu lieu entre la
commission d’experts et les présidents de sept organes créés en vertu d’instruments
internationaux relatifs aux droits humains sur les moyens de renforcer les synergies et les
complémentarités dans le contexte d’un repositionnement du système des Nations Unies pour
le développement et de l’appel à l’action du Secrétaire général de l’Organisation des Nations
Unies (ONU) en faveur des droits humains. Si les membres employeurs soutiennent l’idée de
créer des synergies entre les différents organes conventionnels des Nations Unies relatifs aux
droits de l’homme, ils souhaitent souligner les différences notables entre les mandats et les
compétences de chaque organe, ainsi que la nécessité absolue de ne pas confondre ou mettre
sur le même plan la nature unique des différents traités et instruments internationaux. La
spécificité des normes internationales du travail est le cadre tripartite dans lequel elles sont
créées, mises en oeuvre et supervisées. Au sein de ce système, la commission d’experts a un
rôle technique spécifique, mais elle ne représente pas les normes de l’OIT en tant que telles et
ne devrait pas être perçue comme telle. Malheureusement, dans la présente déclaration
conjointe, la nature tripartite du système de normes de l’OIT n’est pas mentionnée.
92. Quatrièmement, nous nous félicitons de la poursuite de l’échange de vues entre la commission
d’experts et les vice-présidents employeurs et travailleurs de cette commission, à l’occasion de
la séance spéciale avec la commission d’experts. Nous pensons qu’un échange plus structuré
et plus approfondi sur des questions spécifiques, telles que l’interprétation des conventions de
l’OIT, serait bénéfique à la coopération entre les deux commissions et au fonctionnement de
l’ensemble du système de contrôle. Les différentes interprétations que fait la commission
d’experts de la négociation collective au titre de l’article 4 de la convention no 98 en est un bon
exemple. Il s’agit par exemple de savoir si les organisations de travailleurs indépendants ont
droit à la négociation collective. Il s’agit d’une question qui a récemment fait l’objet de
discussions controversées dans le cadre de diverses consultations tripartites au sein de l’OIT.
Dans la plupart des pays, seules les organisations de travailleurs dans une relation de travail
bénéficient du droit à la négociation collective, tandis que les organisations de travailleurs
indépendants qui n’ont pas d’employeur ne peuvent pas bénéficier de ce droit. Elles relèvent
d’un régime juridique différent. D’autres questions se posent dans ce contexte, notamment s’il
existe, conformément à l’article 4, un niveau préférentiel de négociation collective, si l’article 4
prévoit une hiérarchie des normes selon laquelle les conventions collectives ne peuvent
s’écarter de la législation applicable, s’il existe une obligation légale pour les employeurs de
négocier au titre de l’article 4, ou si l’arbitrage obligatoire, à la seule initiative d’une
organisation de travailleurs, est compatible avec la nature volontaire de la négociation
collective, comme le prévoit l’article 4. La question est de savoir si un pays a le droit de décider
de la pertinence d’une convention collective et si seul un syndicat peut décider de l’existence
d’une convention collective, de son ampleur et de son champ d’application. Ce sont là les
principales questions que nous nous posons – il y en a évidemment beaucoup d’autres.
93. S’agissant de la question du droit de grève dans le contexte de la convention no 87, les
membres employeurs notent que, dans le rapport de la commission, sur les 63 observations
relatives à cette convention, 49 portent partiellement ou exclusivement sur le droit de grève.
En outre, sur 42 demandes directes, 35 traitent également, d’une manière ou d’une autre, du
droit de grève. Nous reconnaissons que le droit de grève revêt une importance considérable
pour les systèmes nationaux de relations professionnelles, et que les pays ont mis en place des
pratiques législatives variées et spécifiques pour traiter cette question. Nous rappelons
néanmoins que l’interprétation et les évaluations détaillées de la commission d’experts sur le
 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I 22
droit de grève ne se fondent ni sur le texte ni sur les travaux préparatoires de la convention
no 87. Nous rappelons également à la commission d’experts que le groupe gouvernemental du
Conseil d’administration estime que les conditions et la pratique du droit de grève doivent être
définies au niveau national. Compte tenu de la récente discussion sur un éventuel renvoi de
cette question controversée devant la Cour internationale de Justice, les membres employeurs
sont plus que jamais convaincus qu’une solution réaliste et durable ne peut être trouvée que
par le biais de discussions au sein des forums et procédures tripartites de l’OIT. L’interprétation
de la commission d’experts et du Bureau préparant ses travaux étant à l’origine de ce différend,
nous leur demandons à nouveau respectueusement de contribuer à la recherche d’un
consensus tripartite au lieu de ne pas réagir et continuer comme par le passé.
94. En ce qui concerne les besoins des entreprises durables, nous souhaitons rappeler
l’importance d’accorder plus d’attention à ces besoins dans l’application des normes. Nous
sommes d’avis que la commission d’experts néglige cette question centrale. Les entreprises
durables respectent la législation nationale et contribuent à la croissance économique, à la
création d’emplois et au progrès socio-économique. Le Programme 2030 reconnaît le rôle
central que jouent les entreprises pour faire face aux défis sociétaux par le biais d’une conduite
responsable des entreprises, de l’innovation et de la collaboration. La Déclaration du
centenaire de l’OIT dispose que les normes internationales du travail doivent également
répondre aux évolutions du monde du travail, protéger les travailleurs et tenir compte des
besoins des entreprises durables et être soumises à un contrôle faisant autorité. Accorder aux
besoins des entreprises durables l’attention voulue améliorerait l’équilibre des observations
de la commission d’experts et, par conséquent, la pertinence et l’acceptation de ses
recommandations.
95. Enfin, sur le thème de la justice sociale, en ce qui concerne la partie du rapport de la
commission d’experts sur «l’application des normes internationales du travail et la quête de
justice sociale sur fond de crises durables et interdépendantes», notamment le soutien
explicite de la commission d’experts au lancement d’une Coalition mondiale pour la justice
sociale et le besoin urgent d’un nouveau contrat social, les employeurs se disent préoccupés.
Il ne s’agit pas de questions liées à la supervision des normes du travail. La commission
d’experts n’a pas pour mandat, selon nous, de porter une parole politique. Notre inquiétude
est d’autant plus grande que toutes ces propositions, qui toutes font encore l’objet de
discussions, doivent être adoptées par les mandants tripartites au sein des organes
compétents de l’OIT. Nous pensons que la commission d’experts aurait dû reconnaître ce fait
et nous espérons qu’elle fera preuve de plus de retenue sur des questions similaires.
96. En conclusion, nous souhaitons réaffirmer notre engagement en faveur du processus de
contrôle de l’application des normes de l’OIT qui est un instrument de gouvernance essentiel
à l’avancement de la justice sociale universelle. En disant cela, nous affirmons également que
la priorité de la commission d’experts, et en fait de la Commission de la Conférence, devrait
être de s’assurer que le contrôle et la surveillance de la conformité des États Membres avec les
conventions qu’ils ont ratifiées demeurent au centre de leurs préoccupations; laissons la
politique à d’autres. Mais nous reconnaissons également que, pour que les normes de l’OIT et
le système de contrôle aient un impact réel et durable, ils doivent être adaptés à l’évolution
constante des situations et des besoins des États Membres et du monde en général. C’est dans
cet esprit que nous nous réjouissons de coopérer avec les gouvernements et les représentants
des travailleurs de cette session de la Commission de la Conférence.
 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I 32
141. La position des membres employeurs concernant le droit de grève a également été rappelée.
Nous avons fait état de quelques éléments à ce propos mais souhaitons rappeler notre refus
de voir notre commission devenir le théâtre d’une discussion qui doit être menée ailleurs. Je
ne vois d’ailleurs pas le rôle que la commission d’experts pourrait jouer dans la solution à cette
divergence de vues, étant donné que la Constitution prévoit les moyens spécifiques pour y
parvenir, comme nous l’avons affirmé à plusieurs reprises.
142. Je ne m’attarderai pas sur l’interprétation unilatérale que les membres employeurs font de
l’article 4 de la convention no 98, étant donné que nous avons déjà abordé ce point par le passé
et que notre point de vue est connu et est inchangé. Je me contente de souligner que la
persistance sur cette voie n’est pas compatible avec le respect de l’autonomie de la commission
d’experts.
143. Les membres travailleurs considèrent qu’il faudrait avoir des débats qui permettent d’avancer
vers une mise en oeuvre effective des normes internationales du travail et suggèrent vivement
que les propositions qu’ils ont faites pour améliorer l’impact du système de contrôle fassent
l’objet d’une analyse et d’un débat approfondis. La modernisation ne consiste pas à réactiver
de manière incessante des discussions dépassées mais consiste plutôt à étudier les moyens
permettant de donner des perspectives pour l’avenir.
144. Membres employeurs: Je voudrais tout d’abord remercier le gouvernement et les membres
travailleurs pour leurs précieuses et intéressantes contributions à la discussion générale et à
la discussion sur l’Étude d’ensemble. Nous apprécions également grandement la réponse de
la représentante du Secrétaire général et nous attendons avec intérêt la déclaration du
Professeur Ago concernant la commission d’experts. En effet, la présence du Professeur Ago,
au nom du président de la commission d’experts, et le dialogue continu entre la commission
d’experts et la Commission de la Conférence sont essentiels, non seulement pour permettre
aux mandants de l’OIT de mieux comprendre les exigences découlant des normes, mais aussi
pour faciliter la compréhension qu’ont les experts des réalités et des besoins des utilisateurs
du système de contrôle.
145. Il est donc de la plus haute importance, à notre avis, de parvenir à une convergence de vues,
la plus large possible, entre la Commission de la Conférence et la commission d’experts afin
de fournir des conseils efficaces et pratiques aux mandants tripartites dans les États Membres
de l’OIT. Nous souhaitons répondre à certaines des remarques formulées par divers
intervenants au cours de la discussion générale.
146. Tout d’abord, nous considérons que le travail de la commission d’experts est essentiel au bon
fonctionnement de la Commission de la Conférence et au contrôle régulier des normes dans
son ensemble. À cet égard, il est tout aussi essentiel que la Commission de la Conférence
donne son avis sur l’interprétation et l’application des normes internationales du travail de
manière indépendante, tout en tenant compte de la réalité du monde du travail. Nous sommes
d’accord avec les membres travailleurs pour dire que le contrôle des normes doit préserver
l’équilibre. Toutefois, cela signifie que la commission d’experts devrait tenir compte à la fois
des perspectives des membres travailleurs et de la promotion d’un environnement favorable
aux entreprises durables, comme indiqué dans la Déclaration du centenaire de l’OIT.
Contrairement à ce que pensent les membres travailleurs, la prise en compte d’un point de vue
ne signifie pas que l’on néglige l’autre. Nous pensons que la commission d’experts devrait en
fait promouvoir ces deux points de vue de manière égale.
147. Deuxièmement, nous devons revenir, une fois de plus, et nous le déplorons, sur le fait que la
Commission de la Conférence n’a pas pour mandat de discuter du droit de grève. La
commission a un champ de compétence de grande ampleur pour examiner le respect des
 ILC.111/Compte rendu no 4A/P.I 33
conventions ratifiées par les pays. Dès lors que la commission d’experts continue à fournir une
interprétation détaillée du droit de grève, dans le contexte de la convention no 87, la
Commission de la Conférence doit être au moins en mesure d’y répondre. Nous ne pensons
pas que les propositions discutées lors de la réunion du Conseil d’administration de mars 2023
visant à soumettre le différend à la Cour internationale de Justice ou à un tribunal interne
soient en fait le moyen le plus efficace de réconcilier ces différents points de vue. Tout d’abord,
ces propositions ne tiennent pas compte du fait que c’est l’interprétation de la commission
d’experts qui est à l’origine du différend. Autrement dit, sans cela, il n’y aurait pas de
controverse. Nous demandons simplement à la commission d’experts et au Bureau, en tant
qu’éléments clés des organes de supervision des normes, de faciliter une solution plutôt que
de poursuivre dans cette voie. Nous sommes fermement convaincus que la question de savoir
si des règles internationales sur le droit de grève devraient être adoptées et, dans l’affirmative,
à quoi elles devraient ressembler ne peut être abordée de manière sérieuse que par le biais
du dialogue social et des organes disponibles et compétents de l’OIT. Organiser, par exemple,
une réunion technique tripartite de l’OIT, ou une discussion spécifique lors de la Conférence
sur le droit et la pratique en vigueur dans les États Membres en matière de droit de grève, un
processus de médiation, voire une discussion normative sont autant de moyens à envisager
pour tenter de régler la question de l’interprétation qui est posée. Nous regrettons que de tels
événements tripartites n’aient jamais eu lieu auparavant et nous croyons fermement que le
moment est venu d’envisager cette option. Une telle approche pourrait garantir que tous les
mandants de l’OIT prennent une part active au processus, que les solutions se fondent sur le
consensus et que les résultats adoptés sont universellement pertinents et acceptés.
148. Cela étant, permettez-moi de préciser que nous n’avons pas l’intention de donner des
instructions à la commission d’experts sur la manière dont elle devrait fournir des évaluations
non contraignantes, mais nous estimons qu’il est important que cette commission ne crée pas
de nouvelles obligations allant au-delà de ce qui a été prévu et convenu par les mandants
tripartites lors de la Conférence. En d’autres termes, il n’est pas acceptable que la flexibilité de
mise en oeuvre délibérément accordée aux États Membres dans les conventions soit ensuite
restreinte par des interprétations unilatérales de la commission d’experts.
149. J’en viens maintenant à l’Étude d’ensemble. Nous avons présenté des observations détaillées
sur l’Étude d’ensemble et nous avons également entendu de nombreux autres points de vue.
Nous sommes d’accord avec la commission d’experts sur de nombreux points, mais nous
avons aussi respectueusement exprimé notre désaccord avec certains de ses points de vue et
de ses conclusions. Ce faisant, nous nous sommes efforcés de contribuer à un débat plus large
et plus factuel et nous remercions les autres intervenant qui en ont fait autant. Nous jugeons
les instruments sélectionnés dans l’Étude d’ensemble particulièrement opportuns et
pertinents à l’heure actuelle, notamment parce que la pandémie de COVID-19 n’a fait
qu’aggraver les inégalités persistantes pour les femmes et les jeunes filles dans le monde
entier. Selon nous, la réalisation de l’égalité des genres et de la non-discrimination, le soutien
aux travailleurs ayant des responsabilités familiales et la protection de la maternité sont
essentiels au développement social, économique et commercial. Pour autant, nous avons des
préoccupations légitimes quant à la portée, au contenu et à la mise en oeuvre effective des
instruments examinés dans l’Étude d’ensemble, ainsi que concernant le format de cette
dernière. D’une manière générale, nous attirons l’attention de la commission sur la nécessité
de promouvoir une mise en oeuvre inclusive, équilibrée et efficace, en consultation avec les
partenaires sociaux les plus représentatifs, afin de garantir une prise en compte adéquate des
réalités et des circonstances nationales.
Document no 272
Cas no 1304 (Costa Rica), Réclamation présentée
par la Confédération des travailleurs du Costa Rica
(CTC), la Confédération authentique des travailleurs
démocratiques (CATD), la Confédération unitaire des
travailleurs (CUT), la Confédération des travailleurs
démocratiques du Costa Rica (CCTD) et la
Confédération nationale des travailleurs (CNT),
alléguant l’inexécution des conventions internationales
du travail nos 11, 87, 98 et 135 par le Costa Rica,
Bulletin officiel, vol. LXVIII, 1985, paragr. 95-102

BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
BULLETIN OFFICIEL
Vol. LXVIII, 1985
239e RAPPORT
lnt roduc t ion ................................... .
Cas n'appelant pas un examen plus approfondi
Cas no 1292 (Espagne): Plainte presentee par
l'Association professionnelle syndicale
de l'assistance et de la sante municipales
centre le gouvernement de l'Espagne ...... .
Conclusions du comite .................... .
Recommandation du comite ................... .
Cas no 1302 (Colombie): Plainte presentee
pa􀁁 la Federation syndicale mondiale
centre le gouvernement de la Colombie
Conclusions du comite .................... .
Recommandation du comite ................... .
Serie B, n° 2
Paragraphes Pages
1-29
30-81
30--45
41-44
45
46-55
52-54
55
1-10
11-23
11-14
13-14
14
14-17
16-17
17

liste de ceux
travailler, ont
fassent pas.
qui
fait
travai llent
l'objet de
240e rapport
ou de ceux qui, souhaitant
pressions pour qu'ils ne le
- Une fois que les tribunaux auront d~clar~ l'ill~galit~ de la
greve, le d~partement du personnel proc~dera aux d~marches
n~cessaires en vue du licenciement des gr~vistes, sans engager la
responsabilit~ de l 'employeur, conform~ment aux dispositions du
Code du travail.
- Le d~partement juridique demandera, en m@me temps, au ministere
de la Justice d'engager devant le Ministere public les poursuites
juridiques appropri~es l l'encontre des responsables et des
instigateurs du mouvement de greve ill~gal.
- Vous @tes pri~s de tenir inform~e la Pr~sidence de tout mouvement
ou situation anormal ayant trait aux faits sur lesquels porte la
pr~sente circulaire officielle."
96. En ce qui concerne cette circulaire officielle d'aoQt 1983
concernant l' ill~galit~ de toute greve dans le secteur public, le
comit~ estime que de telles questions ne relevent pas de la comp~tence
du pouvoir administratif.
97. Pour ce qui est de l'all~gation relative l l'application de
sanctions p~nales en raison de l'exercice d'activit~s syndicales, le
comit~ observe que les plaignants n'ont apport~ des informations
concretes que sur un cas seulement. Il s'agit d'un jugement, du
27 mars 1984, qui condamne dix dirigeants du Syndicat des employ~s de
la Banque nationale l des peines de six mois et un jour
d!emprisonnement (bien qu' ils aient b~n~fici~ d 'une libert~
conditionnelle de trois ans) et l une amende de 1.200 col6ns pour
avoir en particulier abandonn~ leurs fonctions publiques et incit~ l
l'abandon collectif de fonctions publiques.
98. Des consid~rants du jugement en question, il ressort que:
1) la d~claration de greve a fait suite au refus de l'Autorit~ charg~e
du budget d'approuver les r~percussions budg~taires d'un accord
relatif au r~ajustement des salaires fond~ sur l'augmentation du coQt
de la vie, conclu entre le syndicat et la banque; 2) que la greve a
dur~ trois jours (du 26 au 28 septembre 1983) et qu'elle a ~t~ suivie
par 90 pour cent des travailleurs; 3) que la Ugislation n' autorise
pas les greves dans lea organismes de l'Etat faisant partie du service
public, comme la Banque nationale du Costa Rica, et que c'est la
raison pour laquelle les sanctions p~nales dont il est question dans
le paragraphe pr~c~dent ont ~t~ appliqu~es.
99. A cet ~gard, le comit~ tient l rappeler que le droit de
greve ne peut faire 11 objet de restrictions importantes ou ne peut
E!tre interdit que dans le cas des fonctionnaires publics qui agissent
en tant qu' organes de la puissance publique (dont ne font
159
Rapports du Comite de la liberte syndicale
manifestement pas partie ceux qui assurent des services bancaires) ou
dans celui des travailleurs qui assurent des services essentiels au
sens strict du terme (c 'est-a-dire des services dont l' interruption
pourrait mettre en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la
population, la vie, la securite ou la sante de la personne) [voir, par
exemple, 233e rapport, cas no 1225 (Bresil), paragr. 668]. Le comite a
estime que le secteur bancaire ne constitue pas un service essentiel
dans le sens indique [voir 233e rapport, cas no 1225 (Bresil),
paragr. 668] et que nul ne devrait pouvoir @tre prive de liberte ni
faire l'objet de sanctions penales pour le simple fait d'avoir
organise OU d'avoir participe a une greve pacifique [voir
230e rapport, cas no 1184 (Chili), paragr. 282]. En outre, le comite a
estime que l'exercice des prerogatives de puissance publique en
matiere financiere, d'une maniere qui a pour effet d'emp@cher le
respect des conventions collectives prealablement negociees par des
organismes publics, n'est pas compatible avec le principe de la
liberte de negociation collective [voir, par exemple, 234e rapport,
cas no 1173 (Canada-Colombie britannique), paragr. 87]. 11 prie le
gouvernement de prendre les mesures necessaires pour garantir
l'exercice du droit de greve aux travailleurs de la Banque nationale
du Costa Rica.
100. A cet egard, le comite observe que la greve de septembre
1983, survenue a la Banque nationale du Costa Rica alors qu'elle etait
interdite, a ete declenchee a la suite du refus du gouvernement de
respecter les implications budgetai res d' un accord re lati f a
l'ajustement des salaires conclu entre la banque et le syndicat. Ceci
a conduit a la condamnation penale de dix membres de la direction du
syndicat pour avoir organise la greve. le comite estime que
l'interdiction de la greve et l'imposition de sanctions penales
etaient incompatibles avec les principes de la liberte syndicale.
101. D'une maniere generale, le comite appelle l'attention de la
Commission d'experts pour l'application des conventions et
recommandations sur les aspects legislatifs qui posent des problemes
quanta leur conformite avec les conventions nos 87 et 98.
Recommandations du comite
102. Dans ces conditions, le comite recommande au Conseil
d'administration d'approuver le present rapport interimaire et, en
particulier, les conclusions suivantes:
a) Le comite rappelle, d'une maniere generale, que les gouvernements
doivent respecter pleinement les engagements pris lors de la
ratification des conventions de l'OIT et qu'un Etat ne peut tirer
argument de la cone lusion d' autres engagements ou accords pour
justifier la non-application des conventions ratifiees.
160


Document no 273
Cas no 1364 (France), Réclamation contre le
gouvernement de la France présentée en vertu de
l’article 24 de la Constitution de l’OIT par la
Confédération générale du travail (CGT); Plainte contre
le gouvernement de la France présentée par l’Union
internationale des syndicats du textile, de l’habillement
et des cuirs et peaux, Bulletin officiel, vol. LXX, 1987,
paragr. 138-142

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BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVA L 2 1 SEP. 1987
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BULLETIN OFFICIEL
Vol. LXX, 1987 Serie B, n° 1
Rapports du Comite de la liberte syndicale
(248e, 249e et 2soe rapport)
248e RAPPORT
Introduction ................................. .
Cas n'appelant pas un examen plus approfondi
Cas no 1358 (Espagne): Plainte contre le
gouvernement de l'Espagne presentee par
le Syndicat de l'assistance et de
la sante municipales ..................... .
Conclusions du comite .................... .
Recommandation du comite ................... .
Cas no 1387 (Irlande): Plaintes contre le
gouvernement de l'lrlande presentees par
le Congres irlandais des syndicats, la
Confederation mondiale des organisations
de la profession enseignante (CMOPE) et
le Secretariat professionnel international
de l 'enseignement (SPIE) ................. .
Conclusions du comite .. , ................. .
Recommandation du comite ................... .
Paragraphes Pages
1-23
24-66
24-35
33-34
35
36-66
60-65
66
1-12
12-24
12-15
14
15
15-24
21-23
24
I llllll iii llll lllll llli llll II I
54027

Rapports du Comite de la liberte syndicale
donne en outre que la legislation fixe des criteres objectifs de la
determination de la representativite des organisations syndicales, le
comite estime en consequence que cet aspect de la reclamation
n'appelle pas un examen plus approfondi.
V. Mesures de repression contre
l'exercice du droit de greve
138. Les allegations se referent a des atteintes au droit de
greve qui resul teraient notamment de recours abusif s aux procedures
judiciaires dans les entreprises nationalisees et privees, d'expulsion
de grevistes et de recours a la sous-traitance ou aux contrats
interimaires pour remplacer les grevistes.
139. Tout en observant que le droit de greve n'est pas mentionne
dans les conventions nos 87 et 98, le gouvernement indique que ce
droit est reconnu dans le Preambule de la Constitution qui dispose que
ce droit s'exerce dans le cadre des lois qui le reglementent. Le
Conseil d I Eta t a precise a cet egard que ce droi t' tout comme tout
autre droit, doit etre limite en vue d 'en eviter un usage abusif ou
contraire aux necessi tes de 1 'ordre public. En out re, la Cour de
cassation a estime dans un arret de novembre 1982 cite par la CGT que
les syndicats devaient etre declares responsables des agissements
auxquels ils ont effectivement participe, lorsque ces agissements sont
constitutifs d'infractions penales ou ne peuvent se rattacher a
l'exercice normal du droit de greve.
140. Co11111e il l'a souligne a plusieurs reprises, le comite estime
que le recours a la greve est un moyen legitime de defense des
interets des travailleurs. [Voir, par exemple, 244e rapport, cas
no 12 70 ( Bres i1), paragr. 225. ] I1 appart ien t done au comi te
d'examiner si les faits allegues mettent en cause indument l'exercice
du droit de greve.
141. Le comite constate que les condamnations de grevistes ou de
syndicats a 1 'occasion de greves auxquelles a fait reference
1 'organisation plaignante sont prononcees par les tribunaux en cas
d 'actes illegaux, co11111e par exemple voies de fait, sequestration,
delits, atteinte a la circulation des personnes et des biens, etc. De
meme, l'expulsion de grevistes occupant un lieu de travail n'est
realisee que sous certaines garanties et dans les cas ou il y a
obstacle au travail des non-grevistes. Le comite, considerant que le
recours a la greve n'est legitime que s'il s'exerce de fa~on pacifique
et sans intimidation ou contrainte physique, estime done que ces
aspects de la reclamation n'appellent pas un examen plus approfondi.
142. Au sujet du remplacement des grevistes par une main-d'oeuvre
temporaire, le comite note qu'il ne peut etre fait appel au:it salaries
d'entreprises de travail temporaire aux termes de la loi du 25 juillet
1985. Le comite observe egalement que, par une ordonnance du 11 aout
228

Document no 274
Cas nos 1810 et 1830 (Turquie), Réclamation présentée
par la Confédération des syndicats ouvriers de Turquie
(TURK-IS), alléguant l’inexécution par la Turquie de la
convention no 87; Plainte contre le gouvernement de la
Turquie présentée par la Confédération des syndicats
progressistes de Turquie (DISK), Bulletin officiel,
vol. LXXIX, 1996, paragr. 61-63

303' rapport
ceci sert mieux Les interets des travailleurs et permet de renforcer Les syndicats. Le
comite observe que Les syndicats de branche peuvent creer autant de sections locales
qu 'ils le souhaitent au niveau regional ou local, mais ii estime que la legislation n 'a pas
pour incidence de promouvoir et de stimuler la negociation collective sans entrave au
niveau de l'entreprise. En effet, s'agissant de conventions collectives de travail
d'entreprise, la legislation prevoit que Les etablissements sont consideres comme
constituant une seule unite aux fins du calcul de la majorite de plus de 50 pour cent des
travailleurs pour negocier collectivement. Les conventions ne peuvent en outre etre
signees qu 'avec des syndicats qui representent JO pour cent de la branche et 50 pour cent
des travailleurs de l'entreprise (art. 12). Compte tenu des nombreuses et graves
allegations concretes presentees par la DISK qui portent sur un nombre important de
secteurs de l 'activite economique ou Les travailleurs ne sont pas couverts par une
convention collective a cause des differends relatifs a la question de la representativite
des syndicats, le comite prie instamment le gouvernement de modifier sa legislation pour
la mettre en conformite avec Les exigences des conventions n"' 87 (art. 2) et 98 (art. 4).
58. Maintien de /'interdiction d'appartenance a plus d'un syndical (art. 22 de la
loi sur les syndicats). Le comite note que le gouvernement se contente d'indiquer que
cette disposition vise a eviter la proliferation des syndicats rivaux. Le comite estime
neanmoins que, sides travailleurs sont occupes dans plusieurs activites professionnelles,
ils devraient pouvoir s'affilier au syndicat de leur choix couvrant ces diverses activites.
59. Maintien de la limitation du montant des cotisations syndicales (art. 23). Le
comite note que le gouvernement indique seulement que cette mesure vise a protege; Les
travailleurs. Le comite estime qu 'ii devrait appartenir aux statuts des syndicats de decider
en cette matiere.
60. Maintien de /'obligation de dix ans de service effectif dans la branche
applicable aux candidats aux elections syndicales (art. 14). Le comite regrette que le
gouvemement n 'air pas foumi d 'informations sur Les mesures qu 'ii envisage de prendre
a cet egard. Le comite rappelle en effet I 'importance qu 'ii attache aux principes selon
lesquels Les organisations de travailleurs et d'employeurs ont le droit d'elire librement
leurs representants. Notant Les allegations concretes foumies par la DISK a cet egard,
le comite exprime le ferme espoir que cette disposition extremement prejudiciable aux
interets des syndicats sera Levee a breve echeance.
61. Interdiction de la greve politique, de la greve de solidarite et de la greve qui
porte prejudice a la societe ou detruit la richesse nationale, limitation excessive des
piquets de greve accompagnes de peine d'emprisonnement Ires lourdes a l'encontre des
syndicats (art. 53 de la Constitution et 25 et 47, 70, 72, 73 et 79 de la loi sur les
conventions collectives, la greve et le lock-out). Le comite conclut que ces restrictions
excessives a l'exercice du droit de greve imposees aux travailleurs constituent une
violation importante des principes de la liberte syndicale et ii considere que ces
limitations ne se justifieraient que si la greve perdait son caractere pacifique. En tout etat
de cause, l'interdiction generale de la greve de solidarite est abusive et Les travailleurs
devraient pouvoir exercer de telles actions si la greve initiale qu 'ils soutiennent est
legale. Seule ['interdiction de la greve politique peut etre consideree comme admissible
puisque Les greves purement politiques ne tombent pas dans le champ d'application des
principes de la liberte syndicale. [Voir Recueil de decisions et de principes du Comite
de la liberte syndicale du Conseil d'administration, quatrieme edition, 1996,
paragr. 481.]
UBSYND\27C-8.f'96 171
Rapports du Comite de la liberte syndicale
62. Maintien de I 'interdiction de la greve au-dela des services essentiels au sens
strict du terme (an. 29 et 30) de la Loi n• 2822, arbitrage obligatoire et clauses de
temporisation de 60 jours accompagnes de peine d'emprisonnement pour Les
contrevenants (arl. 54 de la Constitution, 33, 37 et 75 de la loi n• 2822). Le comite
estime que ces restrictions a l'exercice du droit de greve sont beaucoup trop importantes
et ii insiste en particulier sur le fait que I 'arbitrage obligatoire ne devrait pouvoir etre
impose que dans Les services essentiels au sens strict du terme, a savoir ceux dont
I 'interruption risque de mettre en danger la vie, la sante ou la securite de la personne
dans tout ou partie de la population. En outre, ['interdiction generale de la greve dans
Les banques et Les transports n'est pas conforme aux principes de la liberte syndicale et
devrait done etre Levee. De plus, Les sanctions devraient pouvoir etre injligees pour faits
de greve uniquement dans Les cas ou Les greves ne sont pas en conformite avec Les
principes de la liberte syndicale et elles ne devraient pas etre disproportionnees par
rapport a la gravite des infractions, ce qui n 'est pas le cas quand Les grevistes encourent
des peines pouvant aller jusqu 'a deux ans meme trois ans de prison.
63. Restrictions graves a la liberle syndicale resultant de la loi de 1985 sur les
zones Jranches d'exponation. Le comite regrette que le gouvemement se soit contente
de confirmer Les informations des organisations plaignantes sur cette allegation. II
rappelle ['importance qu'il attache au respect de la liberte syndicale sur ['ensemble du
territoire de la Turquie et prie le gouvernement de lever a breve echeance ces restrictions
incompatibles avec I 'application des conventions n"' 87 et 98.
64. Le comite observe egalement avec preoccupation que le gouvemement se borne
a confirmer que le syndical TUMHABER-SEN a ete dissous par voie judiciaire au motif
que la transformation de la legislation nationale apres la ratification des conventions
n"' 87 et 151 n 'a pas encore ete effectuee et qu 'aucune Loin 'existe encore pour conferer
la personnalite juridique a cette organisation. le comite rappelle qu 'en ratifiant Les
conventions n"' 87 et 151 en juillet 1993, le gouvernement s'est engage a ce que
I 'acquisition de la personnalite juridique par Les organisations de travailleurs ne soit pas
subordonnee a des conditions de nature a mettre en cause I 'application des dispositions
des conventions sur la liberte syndicale et la protection du droit syndical, y compris pour
Les organisations de fonctionnaires. Le comite prie instamment le gouvemement de
prendre Les mesures necessaires pour accorder la personnalite juridique au syndical
TUMHABER-SEN et a tous Les autres syndicats de fonctionnaires publics.
65. Par ailleurs, le comite regrette profondement que le gouvemement se borne a
indiquer que Les mesures de represailles antisyndicales ref event des tribunaux. II rappelle
qu 'en cas de licenciement de syndicalistes en raison de leur affiliation ou de leurs
activites syndicales, ii a maintes fois demande aux gouvemements de prendre Les mesures
necessaires pour permettre aux dirigeants et aux membres des syndicats qui ont ete
licencies en raison de leurs activites syndicales legitimes d 'obtenir leur reintegration dans
leur poste de travail et d'appliquer au.x entreprises Les sanctions legales pertinentes. A
cet egard, le comite note avec interet que la loi du travail sera amendee pour permettre
la reintegration. II prie le gouvernement de le tenir informe de I' evolution de la situation
a ce egard. En outre, de l'avis du comite, Les gouvemements devraient prendre Les
mesures necessaires pour que Les inspecteurs du travail puissent penetrer librement et
sans avertissement prealable dans Les etablissements assujettis a leur controle, et
proceder au controle ou a l'enquete qu'ils jugent necessaires pour s'assurer que Les
dispositions legales - notamment en matiere de discrimination antisyndicale - sont
172 UBSYNDl27C-8.F96
Document no 275
Cas no 1971 (Danemark), Réclamation présentée
par l’Association des employés du secteur des
transports aériens (ASEATS) et l’Association du
personnel de vol de Maersk Air (ACCMA) alléguant le
non-respect par le Danemark des conventions
nos 87 et 98, Bulletin officiel, vol. LXXXII, 1999,
paragr. 52-61

BibHothèque du BIT, CH-1211 Genève 22
P09635 (DISPJt'A¥) Z1 ~,ULjl
BULLETIN OFFICIEL.
AIL
BULLETIN OFFICIEL
Vol. LXXXII, 1999 Série B, n° 2
Rapports du Comité de la liberté syndicale
(316e et 317e rapport)
TABLE DES MATIÈRES
316e rapport
' " Pages
Introduction 1
Cas n° 1939 (Argentine): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution
de la situation
Plainte contre le gouvernement de l'Argentine présentée par la Centrale latinoaméricaine
des travailleurs (CLAT) et la Centrale des travailleurs argentins (CTA).. 23
Conclusions du comité 26
Recommandations du comité 28
Cas n° 1949 (Bahreïn): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution
de la situation
Plainte contre le gouvernement de Bahreïn présentée par le Syndicat des travailleurs
de Bahreïn (STB) et la Fédération syndicale mondiale (FSM) 29
Conclusions du comité 32
Recommandations du comité 35
Cas n" 1992 (Brésil): Rapport intérimaire
Plainte contre le gouvernement du Brésil présentée par la Centrale unique
des travailleurs (CUT) 36
Conclusions du comité 39
Recommandations du comité 41
Cas n" 1997 (Brésil): Rapport où le comité demande à être tenu informé de l'évolution
de la situation
Plainte contre le gouvernement du Brésil présentée par la Confédération nationale
des travailleurs des transports maritimes, fluviaux et aériens, de la pêche et des ports
(CONTTMAF) 41
317e rapport
Pages
Introduction 203
Cas n" 1971 (Danemark): Rapport définitif
Réclamation présentée par l'Association des employés du secteur des transports
aériens et l'Association du personnel de vol de Maersk Air en vertu de l'article 24
de la Constitution de l'OIT alléguant le non-respect par le Danemark de la convention
(n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
et de la convention (n°98) sur le droit d'organisation et de négociation collective,
1949 203
Conclusions du comité 210
Recommandations du comité 213
v
317' rapport
si l'organisation représentant le plus grand nombre de travailleurs du secteur rejette le
projet d'accord global. [Voir cas n" 1725, 307e rapport, paragr. 29.] Le fait que, dans le
cas présent, le résultat du vote est conforme à la position des plaignants ne change pas le
fait que la législation actuelle peut limiter le droit de l'organisation majoritaire à une
libre négociation collective, en contradiction avec l'article 4 de la convention n°98.
51. De plus, le comité considère que l'analogie avec les conventions collectives
d'industrie est sans objet. Les particularités du système danois présentées par le gouvernement,
comme l'existence de plusieurs conventions collectives différentes dans une entreprise
donnée, n 'ont un sens que dans la mesure où le droit de ces multiples et divers syndicats
sectoriels représentatifs à mener des négociations véritables est reconnu. L'argument
de l'interdépendance des emplois et du risque de pression ne devrait pas avoir pour effet
de nier les droits des syndicats légitimes représentants à participer à une libre négociation
collective.
52. Enfin, le comité note que l'article 12 peut également avoir des répercussions
négatives sur la possibilité d'une organisation de travailleurs à exercer le droit de grève,
dans la mesure où cette organisation peut être liée par une décision de l'ensemble des travailleurs
d'accepter un projet global de conciliation auquel est associée une convention
collective relative à leur secteur. Le comité demande au gouvernement d'examiner, en
consultation avec les partenaires sociaux, la législation afin de garantir que l'opinion de
la majorité des travailleurs d'un secteur donné n'est pas subordonnée à l'opinion de la
majorité des travailleurs de l'ensemble du marché du travail en ce qui concerne la possibilité
de poursuivre une négociation collective libre portant sur les conditions d'emploi et
la possibilité d'entreprendre une action de revendication.
53. En ce qui concerne la légitimité de l'intervention consistant à prolonger de deux
ans les conventions collectives examinées en avril 1998, y compris celles intéressant les
plaignants, le comité prend dûment note des considérations évoquées par le gouvernement
selon lequel: la prorogation de deux ans correspond à la durée habituelle de validité des
conventions collectives danoises; le secteur des transports, qui inclut l'organisation plaignante,
est dans toutes les circonstances essentiel au fonctionnement de la société, et des
concessions sont également accordées aux travailleurs dans plusieurs domaines essentiels.
54. Le comité doit néanmoins observer d'abord que le principal effet de cette intervention
a été d'empêcher la négociation collective dans le secteur privé pendant la
période de deux ans correspondant à la prolongation des conventions collectives. A cet
égard, le comité rappelle l'importance qu'il attache au principe selon lequel les autorités
publiques devraient s'abstenir de toute intervention qui aurait pour effet de restreindre ou
d'empêcher l'exercice légal, par les syndicats, de leur droit, que le comité considère
comme un élément essentiel de la liberté syndicale, de chercher à améliorer les conditions
de vie et de travail de ceux qu 'ils représentent, et ce par la négociation collective ou par
d'autres moyens légaux; le comité considère également que toute intervention de ce genre
apparaîtrait comme une infraction au principe selon lequel les organisations
d'employeurs et de travailleurs devraient avoir le droit d'organiser leurs activités et de
formuler leurs programmes. [Voir cas n" 1338 (Danemark), 243e rapport, paragr. 245.]
55. Le comité observe également qu 'une autre conséquence du renouvellement de
certaines conventions collectives a été de mettre un terme aux mesures de revendication
qui avaient déjà été lancées et d'interdire toute autre mesure de revendication risquant de
se produire dans les secteurs concernés durant la période pendant laquelle les conventions
collectives étaient statutairement prolongées. A cet égard, le comité rappelle que le
droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique, uniquement
211
Rapports du Comité de la liberté syndicale
pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat; ou 2) dans
les services essentiels, au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont l'interruption
mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité
ou la santé de la personne. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la
liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 526.] Tout en notant la position du
gouvernement selon lequel le secteur des transports, qui concerne l'organisation plaignante
dans le cas présent, est, dans toutes les circonstances, essentiel au fonctionne ment
de la société, le comité doit rappeler qu'il ne considère pas que le transport en général
constitue un service essentiel au sens strict du terme. [Voir Recueil, paragr. 545.]
56. De plus, en ce qui concerne l'argument du gouvernement selon lequel les problèmes
qui ont commencé à se poser vers la fin du conflit ne pouvaient être réglés en
accordant des dérogations ou par d'autres mesures d'urgence, le comité rappelle que, tout
en reconnaissant que l'arrêt du fonctionnement de services ou d'entreprises tels que les
sociétés de transports pourrait être de nature à perturber la vie normale de la communauté,
il serait difficile d'admettre que l'arrêt de tels services soit par définition propre à
engendrer un état de crise nationale aiguë. Le comité a estimé en conséquence que les
mesures de mobilisation des travailleurs prises lors de conflits dans de tels services
étaient de nature à restreindre le droit de grève de ceux-ci en tant que moyen de défense de
leurs intérêts professionnels et économiques. [Voir Recueil, paragr. 530.]
57. En outre, en ce qui concerne la nature des services à fournir par l'organisation
plaignante, le comité note que le gouvernement n 'évoque dans ce cas qu 'un risque général
concernant le transport essentiel de médicaments. A cet égard, le comité souhaite rappeler
qu 'un service minimum peut être maintenu en cas de grève dont l'étendue et la durée
pourraient provoquer une situation de crise nationale aiguë telle que les conditions normales
d'existence de la population pourraient être en danger. Pour être acceptable, ce service
minimum devrait se limiter aux opérations strictement nécessaires pour ne pas compromettre
la vie ou les conditions normales d'existence de tout ou partie de la population
et les organisations de travailleurs devraient pouvoir participer à sa définition tout
comme les employeurs et les autorités publiques. [Voir Recueil, paragr. 558.] Le comité
note avec regret que le gouvernement ne semble avoir fait aucune tentative de négociation
en vue de la mise en place d'un service minimum pendant la durée des actions de revendication
en question, de manière à permettre aux parties au conflit de parvenir à un accord
par la négociation collective libre plutôt qu'en ayant recours à un règlement statutairement
imposé qui lie les parties pour deux ans.
58. Enfin, le comité note, à partir de la liste des organisations couvertes par le compromis
proposé par le conciliateur, que les mesures prises par le gouvernement concernent
un nombre important de salariés (plus de 400 000) couverts par plus de
500 conventions collectives sans qu'aucun effort ne soit fait pour établir une distinction
entre les secteurs pouvant être considérés comme véritablement essentiels (risque de crise
nationale aiguë) et les autres.
59. A la lumière des paragraphes qui précèdent, le comité estime que la loi de 1998
renouvelant certaines conventions collectives a impliqué une intervention statutaire dans
le processus de négociation collective contraire au principe de libre négociation collective
et au droit des organisations d'employeurs et de travailleurs d'organiser leurs activités et
de formuler leurs programmes. Le comité invite donc le gouvernement à garantir
qu'aucune intervention de ce type n'ait lieu à l'avenir.
60. Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des
conventions et recommandations sur l'aspect législatif de ce cas.
212
317e rapport
RECOMMANDATIONS DU COMITÉ
61. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil
d'administration à approuver les recommandations suivantes:
a) Le comité demande au gouvernement d'examiner l'article 12 de la loi
sur la conciliation dans les conflits du travail, comme indiqué dans ses
conclusions, en consultation avec les partenaires sociaux, afin de garantir
que l'opinion de la majorité des travailleurs d'un secteur donné n'est
pas subordonnée à l'opinion de la majorité des travailleurs du marché du
travail en général en ce qui concerne la possibilité de poursuivre une
négociation collective libre portant sur les conditions d'emploi et la possibilité
d'entreprendre une action de revendication.
b) Considérant que la loi de 1998 renouvelant certaines conventions collectives
a impliqué une intervention statutaire dans le processus de négociation
collective contraire aux principes de la libre négociation collective
et au droit des organisations d'employeurs et de travailleurs d'organiser
leurs activités et de formuler leurs programmes, le comité invite instamment
le gouvernement à garantir qu'aucune intervention de ce type n'ait
lieu à l'avenir.
c) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application
des conventions et recommandations sur l'aspect législatif de ce
cas.
Genève, le 4 juin 1999. Max Rood,
Président.
213

Document no 276
Rapport de la Commission d’enquête instituée en
vertu de l’article 26 de la Constitution pour examiner les
plaintes au sujet de l’observation par la Grèce des
conventions nos 87 et 98, présentées aux termes de
l’article 26 de la Constitution par un certain nombre de
délégués à la 52e session de la Conférence
internationale du Travail, Bulletin officiel, vol. LIV, 1971,
paragr. 260-261

<0%¡-4í- (1L
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
BULLETIN OFFICIEL
SUPPLÉMENT SPÉCIAL
Vol. LIV 1971 N° 2
SOMMAIRE
Rapport de la Commission instituée en vertu de l'article 26 de la
Constitution de l'Organisation internationale du Travail pour examiner
les plaintes au sujet de l'observation par la Grèce de la convention
(n0 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, et de la convention (n" 98) sur le droit d'organisation et de
négociation collective, 1949, présentées aux termes de l'article 26 de
la Constitution de l'OIT par un certain nombre de délégués à la
52e session de la Conférence internationale du Travail
CHAPITRE PREMIER Paragraphes Pages
Dépôt des plaintes et institution de la commission 1-8 1-6
Dépôt des plaintes 1-2 1-2
Dispositions de la convention (n0 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, et de la convention (n0 98) sur le droit
d'organisation et de négociation collective, 1949 3 2-4
Dispositions de la Constitution de l'Organisation internationale du
Travail en ce qui concerne les plaintes au sujet de l'observation des
conventions ratifiées 4 4-5
Résumé des mesures prises par le Conseil d'administration à la suite du
dépôt des plaintes 5-7 5-6
Composition de la commission S 6
CHAPITRE 2
Plaintes et réponses du gouvernement 9-41 7-11
Dissolution de syndicats et confiscation de leurs biens 10-11 7
Déportation et emprisonnement de syndicalistes 12-15 1
Prix: 5 fir. suisses; 1,25 dollar
Conclusions
259. Le libellé de cette disposition est très large et beaucoup dépend de la manière
dont elle est interprétée et appliquée. Jusqu'ici, aucune mesure n'a été prise en application
de cette disposition et la commission estime qu'il serait prématuré de déclarer
qu'il y a eu violation de la convention n0 87.
Le droit de grève.
260. Les dispositions figurant à l'article 3 du décret-loi n0 185 limitent la durée
d'une grève à trois jours, à moins qu'un vote émis à la majorité des membres d'un
syndicat réunis en assemblée générale n'en autorise la prolongation. Toute décision
de faire grève doit être notifiée à l'association des employeurs qui est compétente pour
négocier une convention collective, ainsi qu'au ministère du Travail. De plus, pendant
toute grève, l'organe exécutif d'un syndicat veillera à ce que le personnel nécessaire
à la surveillance des installations du lieu de travail soit disponible. Les grèves sont
interdites à titre temporaire pendant une médiation, conformément à l'article 4 du
décret-loi n0 185.
261. La commission a constaté que la convention n0 87 ne contient aucune garantie
spécifique concernant le droit de grève. La commission est toutefois d'avis qu'une
interdiction absolue de la grève constituerait une limitation sérieuse du droit des
organisations de promouvoir et de défendre les intérêts de leurs membres (art. 10
de la convention) et pourrait aller à rencontre de l'article 8, paragraphe 2, de la
convention en vertu duquel « la législation nationale ne devra porter atteinte ni être
appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues [par la convention] »,
garanties qui comportent le droit pour les syndicats d'organiser librement leur activité
(art. 3). La commission n'a recueilli aucun élément de preuve indiquant que les dispositions
du décret-loi n0 185 étaient telles qu'elles rendent en pratique les grèves
impossibles ou les limitent au point de restreindre les droits garantis par la convention.
Par ailleurs, le décret-loi en question n'est pas en vigueur depuis suffisamment longtemps
pour permettre de déterminer pleinement ses eifets pratiques. La commission
estime que l'absence de grèves en Grèce est plus le résultat de la situation qui prévaut
encore dans le pays en raison du climat politique que la conséquence de la législation
en vigueur. Dans ces conditions, la commission n'est pas disposée à admettre que la
législation constituerait une violation de la convention.
Décret-loi n° 186/1969.
Négociation collective.
262. Comme on l'a vu plus haut, le décret-loi n0 186/1969 énonce des conditions
précises qui doivent être remplies avant qu'une organisation syndicale puisse être
reconnue comme étant représentative et, par conséquent, juridiquement capable
d'entamer des négociations en vue de l'établissement d'une convention collective.
L'observation de ces exigences dépend principalement d'un nombre déterminé de
membres ayant voté lors des élections les plus récentes de l'organisation intéressée.
En outre, la législation enlève à la Confédération générale du travail de Grèce le
droit de conclure des conventions collectives fixant le salaire minimum national et
donne au gouvernement le pouvoir d'arrêter celui-ci à l'avenir.
263. La commission note que l'article 4 de la convention n0 98 prévoit que « des
mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour
encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures
de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les
63
Document no 277
Rapport de la Commission d’enquête instituée en
vertu de l’article 26 de la Constitution pour examiner la
plainte au sujet de l’observation par la Pologne des
conventions nos 87 et 98, présentée par des délégués à
la 68e session de la Conférence internationale du
Travail, Bulletin officiel, vol. LXVII, 1984, paragr. 517,
552-557

ISSN 0378-553X
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
BULLETI N OFFICIEL
SUPPTEMENT SPECIAT
VoL LXVil 1984 S€rie B
Rapport de Ia Commission institu6e
en vertu de I'article 26 de Ia Constitution
de I'Organisation internationale du Travail
pour examiner Ia plainte au sujet de I'observation par la Pologne
de la convention (n'87) sur Ia libert6 syndicale
et Ia protection du droit syndical, 1948,
et de Ia convention (n" 98) sur Ie droit d'organisation
et de n6gociation collective, 1949,
pr6sent6e par des d6l6gu6s i la 68" session
de Ia Conf6rence internationale du Travail
142 Les droits syndicaux en Pologne
motifs 1i6s i leur affiliation ou leur activit6 syndicale l6gitime ou pour y mettre fin
et que, d'autre part, lorsque des syndicalistes sont accus6s de d6lits politiques-ou
criminels que le gouvernement considdre comme dtrangers ir leurs activit6s
syndicales,-les peisonnes en question b6n6ficient d'une proc6dure judiciaire
r6gulidre engag6e le plus rapidement possible.
514. Puisque l'arrestation ou la condamnation d'un syndicaliste ne constitue
pas en elle-m6me une violation de la convention, il convient de rechercher les
motifs r6els qui en sont d I'origine et c'est seulement si ces mesures visaient en
r6,alit1 des aitivit6s proprement syndicales qu'il y aurait atteinte aux garanties
pr6vues par la convention n'87. En outre, les int6ress6s devant b6n6ficier d'une
pr6sompiion d'innocence, il appartient au gouvernement de montrer que les
mesurei prises n'avaient pas leur origine dans les activit6s syndicales des personnes
concern6es.
515. Si l'on se r6fdre aux d6clarations du gouvernement sur les motifs des
internements, on constate que celui-ci s'est born6 i affirmer de fagon g6n6rale que
ces mesures ont 6t6 prises en raison d'actions politiques et non d'activit6s
syndicales. Aucun 6l6ment de preuve concret n'a 6tE fourni d l'appui de_ces dires.
La commission doit cependant relever que, parmi les personnes intern6es,
figuraient la grande majorit6 des dirigeants nationaux ainsi qu'un nombre
important de dirigeants r6gionaux de I'organisation Solidarit6. De I'avis de la
commission, il est difficilement concevable qu'un nombre aussi 6lev6 de dirigeants
syndicaux se soient livr6s d des activit6s de nature d mettre en p6ril la s6curit6 ou la
d6fense de l'Etat alors que, comme l'a d6jd constat6 la commission, peu de temps
avant la proclamation de la loi martiale, le congrds de I'organisation avait adopt6
un programme de nature essentiellement syndicale. Il convient de constater, en
outie, {ue I'immense majorit6 des syndicalistes intern6s n'a fait par la suite I'objet
d'aucune instruction judiciaire. Ces divers 6l6ments peuvent conduire i estimer
que l'un des objectifs du gouvernement, en privant de libertd la-majorit6 des
<iirigeants de Solidarit6, a €t€ d'6liminer ou de pr6venir,l'action et le d6veloppement
du mouvement syndical qu'incarnait cette organisation et qu'en cons6quence
il a agi en violation de I'article 3 de la convention n' 87.
516. Comme la commission l'a d6jd indiqu6, les motifs des condamnations
prononc6es par les tribunaux trouvaient leur origine dans l'organisation de grdves
Et la participation d celles-ci ou dans Ia diffusion de publications de I'organisation
Solidirit6 dissoute. La question qui se pose dans ces cas est donc de d6terminer si
ces activit6s peuvent 6tre consid6r6es comme de nature syndicale.
517. La convention n" 87 ne contient aucune garantie sp6cifique concernant la
grdve. Toutefois, les organes de contr6le de I'OIT ont toujours consid6r6 - et la
dommission partage cet avis - que le droit de grdve constitue un des moyens
essentiels dont devlaient disposer les organisations syndicales pour, conform6ment
d l'article 10 de la convention, promouvoir et ddfendre les int6r0ts de leurs
membres. Une interdiction absolue de la grdve constitue donc, de I'avis de la
commission, une limitation s6rieuse du droit des syndicats d'organiser leur activit6
(art. 3 de la convention) et va en outre d l'encontre de l'article 8, paragra-phe 2, en
vertu duquel <la l6gislation ne devra pas porter atteinte, ni 6tre appliqude de
manidre i porter atteinte aux garanties pr6vues [par la convention] >.
518. Pour ce qui est de l'impression et de la diffusion de publications, la
commission doit souligner que le droit de libre expression de la pens6e revOt une
importance sp6ciale en tant (ue partie int6grante de la libert6 dont doivent jouir les
organisationJ syndicales. En effet, comme le Comit6 de la libert6 syndicale l'a
150 Les droits.syndicaux en Pologne
Droit des syndicats d'organiser leurs activitds - Droit de grive
552. Tout en reconnaissant aux syndicats le droit d'organiser des grdves (art.
36 (1)), la loi fixe un'certain nombre de conditions d son exercice et 6tablit une
interdiction de ce droit dans certains secteurs d'activit6.
553. La commission doit examiner ces dispositions pour d6terminer si elles
imposent des restrictions de nature i remettre en cause le droit de grdve et par ld
m6me le droit des syndicats d'organiser leurs activit6s (art. 3 de la convention
n'87) en vue de promouvoir et d6fendre les int6rdts de leurs membres (art. 10 de
cette mdme convention). Elle a relev6 que certaines d'entre elles pouvaient
constituer des limitations importantes d cet 6gard.
554. Il s'agit, d'une part, des conditions fix6es au d6clenchement de la grdve
par l'article 38 (1), qui impose I'acceptation de.la d6cision par la majorit6 des
travailleurs concern6s, et non simplement la majorit6 des votants. La commission
estime qu'une telle majorit6 pourrait €tre difficile d atteindre, en particulier dans le
cas des grandes entreprises, et compromettre la possibilit6 pour les travailleurs
concern6s de d6clencher un mouvement de grdve. En outre, ce m6me article 38 (1)
exige l'accord pr6alable de l'organe sup6rieur du syndicat, c'est-i-dire, semble-t-il,
de la f6d6ration d laquelle l'organisation est affili6e. La commission estime qu'une
telle exigence, inscrite dans la l6gislation, impose une restriction excessive au droit
des syndicats d'organiser leurs activit6s.
555. D'autre part,la commission a constat6 que la loi, en son article 40, 6tablit
une liste trBs extensive des services essentiels of la grdve est interdite. Elle croit
devoir se r6f6rer sur ce point aux opinions dmises par les organes de contr6le de
I'OIT selon lesquelles l'interdiction des grdves devrait 6tre limit6e aux services
essentiels au sens strict du terme, c'est-i-dire aux services dont I'interruption
mettrait en danger, dans l'ensemble ou une partie de la population, la vie, la
s6curit6 ou la sant6 de la personne.
556. La commission doit aussi relever la s6v6rit6 des sanctions pr6vues ir
I'encontre des organisateurs de grdves allant jusqu'd une peine d'un an de prison en
cas d'infraction aux dispositions sur le droit de grdve (art. 47 de la loi).
557. La commission estime que les dispositions relatives aux proc6dures de
n6gociation, conciliation et arbitrage devant Otre 6puis6es avant le d6clenchement
de Ia grdve n'appellent pas de commentaires particuliers, puisque la sentence
arbitrale finale ne rev6t pas un caractdre obligatoire, chacune des parties pouvant
faire savoir, avant l'engagement des proc6dures, que la sentence ne la liera pas (art.
35 (5) de la loi).
Droit de fddiration et de confid€ration
558. Comme la commission l'a d6jd,signal6'e, les syndicats ont le droit, en
vertu de l'article 2O de la loi, de former des unions et organisations intersyndicales.
Cette disposition donne effet d l'article 5 de la convention no 87, selon lequel les
organisations de travailleurs ont le droit de constituer des f6d6rations et conf6d6rations.
Cependant, pour que cet article soit pleinement respect6, il conviendrait que
l'article 20 de la loi soit appliqu6 de telle manidre que les syndicats puissent former
des unions non seulement par branche d'activit6, mais 6galement par r6gion.
559. Dans le cadre des dispositions transitoires de la loi (art. 53), il 6tait pr6vu
que l'activit6 syndicale serait reprise aprds le 31 d6cembre 1983 pour les
organisations syndicales nationales et aprCs le 31 d6cembre 1984 pour les
D Voir ci-dessus, paragr. 547 .

Document no 278
Rapport de la Commission d’enquête chargée
d’examiner la plainte concernant l’exécution par
le Nicaragua des conventions nos 87, 98 et 144,
présentée par plusieurs délégués employeurs à la
73e session (1987) de la Conférence en vertu de
l’article 26 de la Constitution, Bulletin
officiel, vol. LXXIV, 1991, paragr. 500-509

Bibliothèque du BIT, CH-1211 Genève 22
P09635/3 (ILO)
ILO. - BULLETIN OFFICIEL.
13 OCT 1991
VIL
BULLETIN OFFICIEL
SUPPLEMENT 2
Vol. LXXIV, 1991 Série B
Rapport de la Commission d'enquête chargée d'examiner
la plainte concernant l'exécution, par le Nicaragua,
des conventions (n0 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, (n0 98) sur le droit d'organisation et de négociation
collective, 1949, et (n0 144) sur les consultations tripartites relatives aux
normes internationales du travail, 1976, présentée par plusieurs
délégués employeurs à la 73e session (1987) de la Conférence en vertu
de l'article 26 de la Constitution de l'OIT
NICARAGUA
indirectement le choix des travailleurs en ce qui concerne
l'organisation à laquelle ils entendent appartenir, puisque ces
derniers seront enclins à adhérer au syndicat le plus apte à les
servir, alors que pour des raisons d'ordre professionnel,
confessionnel, politique ou autre leurs préférences les auraient
portés à s'affilier à une autre organisation^. Quoi qu'il en soit,
s'il y avait des cas de favoritisme ou de coercition de la part des
autorités ou des entraves à l'inscription susceptibles de détourner la
procédure de son but, ceci porterait atteinte au droit des
travailleurs de constituer sans autorisation préalable les
organisations de leur choix (article 2 de la convention).
Administration interne
497. La commission d'experts a formulé des commentaires sur
l'article 36 du règlement concernant les associations syndicales, car
celui-ci permet une intervention excessive des autorités du travail
dans les livres et les registres des syndicats. Cette disposition
prévoit en effet que ces documents doivent être présentés aux
autorités à la demande de l'un quelconque des membres du syndicat.
Ainsi que l'ont expliqué les autorités du travail à un représentant du
Directeur général du BIT à l'occasion d'une mission de contacts
directs en 1983, l'objectif de la disposition aurait été de protéger
les adhérents contre toute irrégularité. Il s'agit donc de concilier
cet objectif avec l'article 3 de la convention no 87 qui oblige les
autorités publiques à s'abstenir de toute intervention de nature à
limiter le droit des syndicats d'organiser leur gestion et leurs
activités ou d'entraver leur exercice légal. A cet effet, le
représentant du Directeur général a proposé une formule de rechange
qui a été considérée comme pertinente par les autorités et les
dirigeants syndicaux.
498. La comnission n'a pas eu connaissance de plaintes relatives
à cette question. Malgré le délai écoulé, la disposition en question
n'a pas été modifiée et elle n'a perdu son effet que dans le court
laps de temps pendant lequel le règlement des associations syndicales
a été abrogé, c'est-à-dire entre la fin du régime sandiniste et les
débuts du gouvernement actuel qui l'a remise en vigueur.
499. Ainsi, la commission ne peut que conclure qu'à l'exception
de la période mentionnée, à la suite de l'adoption de la loi no 97, la
législation sur ce point n'a pas été et n'est pas en conformité avec
l'article 3 de la convention no 87.
Activités et programmes d'action
500. Sous cette rubrique, on examinera deux autres questions
relatives à l'article 3 de la convention no 87, qui sont en instance
depuis longtemps devant la commission d'experts, à savoir
l'interdiction pour les syndicats d'exercer des activités politiques
126 1751n
RAPPORT DE LA COMMISSION D'ENQUETE (ART. 26 DE LA CONSTITUTION)
conformement à l'article 204 b) du Code du travail, et les
restrictions apportées au droit de grève en vertu des articles 225,
228 et 3U du même Code.
501. La commission d'experts et le Comité de la liberté
syndicale ont eu à se prononcer à maintes occasions sur des
législations qui interdisent d'une manière générale aux syndicats
d'exercer des activités politiques, et ont estimé que, si
l'interdiction est générale, elle est incompatible avec les principes
de la liberté syndicale, sans compter qu'elle manque de réalisme sur
le plan de l'application pratique^. Déjà dans les travaux
préparatoires de la convention no 87, il avait été précisé dans la
définition d'une "organisation de travailleurs" qu'elle avait pour
objectifs "de promouvoir et de défendre les intérêts des
travailleurs", que ces termes ne limitaient pas le droit des syndicats
de participer à des activités politiques et ne restreignaient pas
l'action syndicale au seul domaine professionnel^.
502. La présente commission estime que l'interdiction générale
qui serait faite aux organisations de travailleurs et d'employeurs de
participer à des activités politiques serait contraire à l'article 3
de la convention, car elle va à l'encontre du droit qu'elles ont
d'organiser leur activité et de formuler leur programme d'action.
Cependant, ces organisations doivent conserver leur indépendance à
l'égard des partis et dans l'exercice de leur activité politique.
503. Les informations disponibles ne permettent pas de conclure
que les syndicats ont été dissous, comme l'autorise l'article 204 b)
du Code, à cause de leur participation à des activités politiques. En
ce qui concerne d'autres mesures adoptées par le gouvernement, voir
les paragraphes 433 à 469. Les autorités avaient indiqué au
représentant du Directeur général en 1983 qu'il serait possible de
supprimer la disposition de l'article 204 puisqu'elle n'était pas
appliquée dans la pratique. Or cela ne s'est fait qu'à compter de
l'adoption de la loi no 97 portant modification du Code: lorsque cette
loi a été modifiée à son tour par la loi no 102, on s'est trouvé
ramené à la situation antérieure.
504. En dehors, par conséquent, de cet intervalle de temps, la
législation sur les activités politiques des syndicats n'a jamais été
conforme à l'article 3 de la convention no 87.
505. Il ressort des informations reçues qu'il y a eu peu de
grèves importantes, les syndicats recourant plutôt à de brefs arrêts
de travail. Les organisations antisandinistes, en particulier, ont
signalé que, chaque fois que cela arrivait, les syndicats et les
travailleurs de ce courant faisaient l'objet de représailles de la
part des autorités. Au contraire, les dirigeants syndicaux
prosandinistes ont soutenu que, dans leur secteur, les grèves ne
donnaient pas lieu à des représailles, mais tout le monde, y compris
les autorités antérieures et actuelles du ministère du Travail et le
COSEP, est d'accord sur un point: la non-application des normes
relatives à la grève et à la procédure de règlement des conflits
1751n 127
NICARAGUA
collectifs. On estime en effet que cette procédure est tellement
complexe que l'application en est impossible. De ce point de vue, les
grèves et arrêts de travail seraient le plus souvent en marge de la
légalité sans pour autant être déclarés illégaux.
506. La commission d'experts avait commenté l'obligation faite
aux syndicats de réunir une majorité de 60 pour cent de travailleurs
intéressés pour déclencher une grève (article 225 du Code);
l'interdiction des grèves dans les professions rurales lorsque les
produits risquent de se détériorer si l'on n'en dispose pas
immédiatement (article 228 1)); la possibilité pour les autorités de
mettre fin à une grève qui a duré trente jours par l'arbitrage
obligatoire (article 314). Il s'agit là de restrictions au droit de
grève qui vont au-delà de celles acceptées par les organes de contrôle
de l'OIT et qui restreignent le droit des syndicats d'organiser leur
activité (article 3 de la convention) en vue de promouvoir et de
défendre les intérêts de leurs membres (article 10). En effet,
l'article 225, déjà évoqué, du Code ne prévoit pas une majorité
simple, mais une majorité qualifiée des travailleurs pour déclencher
une grève, ce qui rend toute décision à cette fin plus difficile;
l'article 228 1) comprend dans la définition des travaux d'intérêt
collectif (dans lesquels la grève est interdite en vertu de
l'article 227) des tâches qui ne sont pas des services essentiels au
sens strict tels que définis par les organes de contrôle (services
pour lesquels une interdiction ou une restriction de la grève serait
acceptable); l'article 314 prévoit un arbitrage obligatoire qui
équivaut en l'occurrence à interdire toute grève une fois qu'elle a
duré plus de trente jours.
507. La loi no 97 instaurait une procédure plus simple pour le
règlement des conflits socio-économiques (article 25, dans le chapitre
sur la convention collective): elle supprimait implicitement en effet
une partie de la procédure antérieure en disposant que ces conflits
seraient réglés selon la nouvelle procédure (article 28). De même,
elle ôtait tout effet à l'article 314 qui était lié à l'ancienne
procédure. En revanche, la loi no 97 maintenait les articles 225 et
228 1) évoqués plus haut, qui figurent au chapitre relatif aux grèves.
508. Cependant, la loi no 102 a annulé les modifications de la
loi no 97 relatives à cette procédure, rétablissant le régime légal
antérieur. Telle est la situation actuelle.
509. Il convient de conclure de tous ces éléments que, sauf
pendant la brève période d'application de la loi no 97 en ce qui
concerne l'article 314 du Code, les dispositions qui restreignent le
droit de grève et vont à l'encontre de la convention no 87 n'ont pas
cessé d'être en vigueur.
Négociation collective
510. La plainte déposée au titre de l'article 26 de la
Constitution et les observations en instance de la commission
128 1751n
Document no 279
Droits syndicaux au Bélarus, Rapport de
la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article
26 de la Constitution pour d’examiner
l’application par le gouvernement de la
République du Bélarus des conventions nos 87 et
98, Bulletin officiel, vol. LXXXVII, 2004, paragr. 622-627

BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
BULLETIN OFFICIEL
Vol. LXXXVII 2004 Série B
SUPPLÉMENT SPÉCIAL
Droits syndicaux au Belarus
Rapport de la commission d'enquête
instituée en vertu de l'article 26 de la Constitution
de l'Organisation internationale du Travail
pour examiner l'application par le gouvernement
de la République du Belarus de la convention (n0 87)
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, et de la convention (n0 98) sur le droit d'organisation
et de négociation collective, 1949
Rapport de la commission d'enquête
son refus d'obtempérer à l'ordre que la police lui a donné de mettre un terme à son action.
La présence d'une personne à cette heure et en ce lieu ne saurait avoir constitué une menace
pour la santé ou la sécurité du public ni même une entrave à la circulation. De fait, la
commission ne trouve rien dans la décision du tribunal qui permette de supposer le
contraire.
620. En ce qui concerne M. Yarochouk, des fonctionnaires du ministère de la
Justice et même le Procureur général adjoint se sont déclarés surpris qu'on ne lui ait pas
simplement infligé une amende. En outre, la commission note que les arguments qu'il a
présentés pour sa défense, selon lesquels ses critiques étaient dirigées contre le système
répressif en général et non contre le juge ayant mis en marche la procédure d'annulation de
l'enregistrement du SCTAB, ne semblent pas avoir fait l'objet d'une analyse détaillée. En
ce qui concerne M. Odynets, il a déjà été pris note du fait que, normalement, l'absence d'un
avocat devant le tribunal n'est sanctionnée que d'une amende.
621. Pour la commission, les difficultés endurées par MM. Boukhvostov,
Yarochouk et Odynets, même si elles appartiennent maintenant au passé, sont une
expression de la défaillance du gouvernement à protéger les droits des syndicalistes et, plus
précisément, à protéger ces syndicalistes contre une discrimination fondée sur leur
appartenance à un syndicat ou sur les activités qu'ils déploient en son sein. Une telle
discrimination n'est pas seulement incompatible avec la liberté syndicale, elle a un effet
destructeur sur celle-ci.
D. Législation ayant des répercussions sur les syndicats
622. Ayant abordé la question du décret n02 dans la première partie de ses
conclusions, la commission traitera ici des questions soulevées par le décret n024 (qui a
remplacé le décret n0 8) relatif à l'utilisation d'une aide gratuite de l'étranger et la loi sur les
activités de masse (qui a repris en substance le décret n0 II).
623. Le décret n024 maintient les restrictions préalables à l'utilisation d'une aide
gratuite de l'étranger par des organisations, y compris d'employeurs et de travailleurs, qui
ont déjà fait l'objet d'un examen par les organes de contrôle de l'OIT à propos du décret
n0 8. La commission observe que le décret interdit toujours l'utilisation d'une aide gratuite
de l'étranger pour, entre autres choses, mener des réunions publiques, des rassemblements,
des cortèges, des manifestations, des piquets, des grèves ou organiser des séminaires ou
d'autres formes de campagne auprès de la population. Le non-respect de cette disposition
fait encourir à l'organisation contrevenante de fortes amendes ainsi que la cessation de ses
activités. Alors que le gouvernement affirme que le décret n0 24 ne vise qu'à rendre la
situation antérieure transparente et instaure une procédure simple et rapide d'enregistrement
de l'aide de l'étranger, la commission a entendu de l'une des organisations d'employeurs
qu'il s'agissait, au contraire, d'une démarche onéreuse et de longue haleine.
624. La commission rappelle que, selon les principes des organes de contrôle de
l'OIT, le droit reconnu aux articles 5 et 6 de la convention n0 87 implique le droit de
bénéficier des liens qui peuvent avoir été noués avec une organisation internationale
d'employeurs ou de travailleurs. Une législation qui interdit à un syndicat national ou à une
organisation nationale d'employeurs d'accepter une aide financière venant d'une
organisation internationale d'employeurs ou de travailleurs, à moins que cette aide n'ait été
approuvée par le gouvernement, et qui permet d'interdire une organisation s'il est avéré
qu'elle a reçu une telle aide sans l'autorisation prescrite, n'est pas conforme à ce droit. Bien
qu'il n'y ait pas eu de dénonciations spécifiques concernant l'application pratique de ce
BO-SérieB-2CI06-03-0113-01 -Fr doc 151
Droits syndicaux au Belarus
décret, la commission réitère les conclusions de ces mêmes organes de contrôle, selon
lesquelles l'autorisation préalable prescrite par le décret n0 24 avant de pouvoir bénéficier
d'une aide gratuite de l'étranger et les restrictions qu'il impose à l'utilisation de cette aide
sont incompatibles avec le droit des organisations d'employeurs et de travailleurs
d'organiser leurs propres activités et de bénéficier de l'assistance que peuvent leur apporter
des organisations internationales d'employeurs et de travailleurs.
625. Pour ce qui est de la loi sur les activités de masse, la commission rappelle que
cette loi fixe la procédure permettant de demander une autorisation préalable pour toute
activité de masse, rassemblement, réunion en plein air, cortège, manifestation ou piquet. La
loi énonce un certain nombre de restrictions, dont l'interdiction des manifestations de
masse dont le but est de modifier l'ordre constitutionnel par la force, de faire l'apologie de
la guerre, de diviser la société ou la nation, ou encore de susciter la haine religieuse ou
raciale. D'autres restrictions concernent la proximité des activités de masse de certains
bâtiments gouvernementaux et des stations de métro. A la réception d'une demande
d'autorisation d'une manifestation de masse, l'organe administratif et exécutif local est
habilité à changer, en concertation avec l'organisateur de la manifestation, la date, le lieu et
l'heure de la manifestation au nom de la sauvegarde des droits et libertés des tiers ou de la
sécurité publique, ou pour garantir le fonctionnement normal des transports et des
administrations. Les organisations contrevenantes s'exposent à être dissoutes et les
organisateurs à des poursuites sur les fondements du Code administratif.
626. Le gouvernement a expliqué que cette loi instaure une procédure relative aux
manifestations de masse qui est nécessaire pour protéger les droits de la collectivité au sens
large, faire respecter la loi et assurer l'ordre. Il a ajouté que, même si cette loi envisage
effectivement la dissolution du syndicat en cas d'infraction, cela ne s'est jamais produit. La
commission rappelle cependant le cas, évoqué précédemment de M. Boukhvostov, qui a été
condamné à dix jours de détention administrative pour avoir tenu un piquet seul en un lieu
non autorisé, fait également sanctionné par cette même la loi. Le gouvernement ayant
expliqué qu'une telle action, en l'absence d'autorisation, constitue une violation du Code
administratif, M. Boukhvostov a précisé à l'adresse de la commission que les demandes
d'autorisation de manifester sur les places publiques ayant une situation centrale étaient
systématiquement rejetées, les autorités substituant systématiquement et unilatéralement au
lieu demandé un lieu peu connu et peu fréquenté. C'est ce qui est advenu en octobre, alors
qu'il avait demandé l'autorisation de manifester contre les violations des droits des
travailleurs et des syndicats au Belarus. Ayant décidé de manifester seul sur la place alors
que l'autorisation lui en avait été refusée, il a été immédiatement arrêté, jugé et condamné,
la décision le concernant n'étant pas susceptible d'appel.
627. Sur la base de ces éléments, la commission fait sien l'avis des organes de
contrôle de l'OFT, selon lequel plusieurs dispositions de la loi sur les activités de masse
violent le droit des organisations de travailleurs d'organiser leur activité librement, sans
intervention des autorités publiques, conformément à l'article 3 de la convention n0 87. En
ce qui concerne la mesure prise à l'encontre de M. Boukhvostov sur le fondement de cette
loi, lue conjointement avec le Code administratif, la commission considère qu'il y a eu
atteinte grave aux libertés civiles de l'intéressé. A cet égard, la commission rappelle les
termes de la résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les libertés
civiles, adoptée en 1970 par la Conférence internationale du Travail (C1T), selon lesquels
les droits reconnus aux organisations d'employeurs et de travailleurs ne peuvent être fondés
que sur le respect des libertés civiles, étant donné qu'en l'absence de telles libertés la notion
de droits syndicaux serait vidée de sa substance. La liberté d'opinion et d'expression, la
1 52 BO-SérieB-2006-03-0113-01-Fr doc
Rapport de la commission d'enquête
liberté de réunion, le droit en vertu duquel nul ne peut être arrêté ou détenu arbitrairement
et le droit à un procès équitable par un tribunal indépendant et impartial figurent parmi les
libertés essentielles à l'exercice normal des droits syndicaux.
E. Dialogue social
628. La commission observe tout d'abord que de nombreuses formes de
discrimination antisyndicale et de nombreux actes d'ingérence, de même que le défaut
d'enregistrement entraîné par le décret n0 2, ont eu pour effet de priver plusieurs syndicats
du premier degré de l'exercice de leur droit de négociation collective. Les syndicats du
premier degré qui n'ont pas été enregistrés n'ont pas le droit d'exercer d'activités
syndicales et, par conséquent, de négocier avec l'employeur pour tenter de trouver une
solution à leur difficulté de justifier d'une adresse légale recevable. Le syndicat du premier
degré des contrôleurs du trafic aérien a été déchu immédiatement de son droit de négocier
collectivement suite à la décision de l'annulation de son enregistrement. Enfin, les
organisations du premier degré du STIAM, dont l'enregistrement a été annulé par la FSB
suite à l'adoption de ses nouvelles instructions de procédure, ont elles aussi été déchues de
ce droit. La commission estime en conséquence que les diverses formes d'intervention déjà
examinées plus haut ont eu, en outre, pour effet de porter atteinte aux droits de ces
organisations de négocier avec l'employeur.
629. La commission considère en outre qu'il y a eu un déficit considérable sur le
plan du dialogue social à l'échelle du pays dans son ensemble. Même si le gouvernement se
réfère à des ordonnances instaurant un Conseil national du travail et des questions sociales
(CNTQS) et introduisant des mesures destinées à améliorer la coopération entre les organes
administratifs de l'Etat et les syndicats, la commission peut difficilement reconnaître que
ces textes reflètent exactement la réalité concrète. S'il est vrai que le CNTQS a pu
reprendre vie après l'arrivée de M. Kozik à la FSB, il est vrai aussi que les représentants du
CSDB, l'autre centrale syndicale nationale, n'ont été invités qu'à deux de ses réunions et
que la seconde invitation n'a été que purement symbolique, si l'on veut bien admettre que
M. Yarochouk, président du CSDB, n'a pas eu le droit d'y participer. La commission est
fermement convaincue qu'il ne peut y avoir de véritable dialogue social en présence de
stipulations quant aux personnes censées représenter un syndicat, la désignation de ces
personnes devant obéir aux seules règles internes du syndicat lui-même.
630. Par ailleurs, la commission a pris note avec préoccupation des déclarations du
gouvernement selon lesquelles celui-ci réexaminerait la représentativité de syndicats
comme le CSDB au sein du CNTQS, au motif qu'il n'y a aucune raison de permettre à ce
syndicat d'être représenté au Conseil alors que de nombreux syndicats de branche de la
FSB ont un effectif beaucoup plus important. Visiblement, la nécessité d'assurer que des
points de vue différents puissent s'exprimer dans le cadre du dialogue social n'est pas, aux
yeux du gouvernement, l'un de ces critères convaincants de représentativité. La
commission estime que limiter le dialogue social à une seule fédération syndicale, dont
l'indépendance est d'ailleurs sujette à caution, non seulement aurait pour effet de renforcer
encore davantage un monopole syndical de fait placé sous le contrôle de l'Etat, mais encore
constituerait une atteinte au droit des travailleurs de constituer des organisations de leur
choix et de s'y affilier, conformément à l'article 2 de la convention n0 87, car cela
consacrerait un favoritisme à l'égard de la FSB et lui conférerait un avantage de nature à
altérer la liberté pour les travailleurs de choisir leur organisation.
BO-SérieB-2006-03-0113-01 -Fr.doc I53
Document no 280
Vérité, réconciliation et justice au Zimbabwe,
Rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu
de l’article 26 de la Constitution pour d’examiner
le respect par le gouvernement du Zimbabwe des
conventions nos 87 et 98, Bulletin officiel, vol. XCIII,
2010, paragr. 572-575

BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
BULLETIN OFFICIEL
Vol. XCIII 2010 Série B
SUPPLÉMENT SPÉCIAL
Vérité, réconciliation et justice au Zimbabwe
Rapport de la Commission d'enquête instituée en vertu
de l'article 26 de la Constitution de l'Organisation
internationale du Travail pour examiner le respect,
par le gouvernement du Zimbabwe, de la convention (n0 87)
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
et de la convention (n0 98) sur le droit d'organisation
et de négociation collective, 1949
Vérité, réconciliation etjustice au Zimbabwe
grève. La commission rappelle à cet égard que le Conseil Apex, qui représente les
travailleurs de la fonction publique, a indiqué que les fonctionnaires n'avaient pas le droit
de se syndiquer, et que les autorités avaient toute discrétion pour reconnaître ou non leurs
associations. Le commissaire adjoint des services pénitentiaires a également informé la
commission que les gardiens de prison, bien que ne relevant pas du champ d'application de
la loi sur la fonction publique, font partie des forces assujetties à la discipline et, à ce titre,
ne jouissent pas des droits syndicaux.
569. La commission prend note des déclarations du gouvernement, qui a exprimé
son intention de réviser la législation sur les droits du travail fondamentaux des
fonctionnaires, en harmonisant la loi sur le travail et la loi sur la fonction publique. Notant
avec intérêt l'engagement du gouvernement d'étendre le droit syndical aux fonctionnaires
dans un avenir rapproché, la commission considère qu'un pas important a déjà été accompli
à cet égard, compte tenu des mesures prises en ce sens avec l'assistance technique du BIT
en juillet 2009.
570. Toutefois, la commission n'a cependant pas pu obtenir d'informations précises
sur le statut des modifications législatives visant à harmoniser la législation du travail. En
outre, la commission constate avec préoccupation que toutes les organisations de
travailleurs et d'employeurs qu'elle a rencontrées estiment que leur avis n'a pas été
suffisamment pris en compte à ce propos. Elle doit constater qu'au 18 décembre 2009 elle
n'avait encore reçu aucune information concernant les amendements législatifs à la loi sur
le travail et à la loi sur la fonction publique, et en est réduite à supposer que le processus
d'harmonisation est quelque peu retardé.
571. La commission réaffirme que tous les travailleurs, sans distinction d'aucune
sorte et sans autorisation préalable, devraient jouir du droit de constituer les syndicats de
leur choix et de s'y affilier pour promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels et
économiques. La convention n0 87 garantit le droit de syndicalisation aux travailleurs de la
fonction publique, y compris le personnel des services pénitentiaires. La commission
estime que la législation actuelle au Zimbabwe n'est pas en pleine conformité avec
l'article 2 de la convention n0 87, dans la mesure où les fonctionnaires sont privés du droit
de se syndiquer.
Le droit de grève
572. Le droit de grève est reconnu par la loi sur le travail du Zimbabwe. Toutefois,
de nombreux représentants d'organisations de travailleurs et d'employeurs et des avocats
spécialisés en droit du travail ont reconnu que le droit de grève ne pouvait pas être exercé
en pratique. Les témoins ont expliqué à la commission qu'une grève pouvait très
difficilement être déclarée légale en vertu de la loi sur le travail, en raison d'une procédure
complexe et extrêmement lente. En outre, la commission a été informée de la définition
trop large des «services essentiels» dans la législation zimbabwéenne, ce qui signifie qu'un
nombre important de travailleurs n'ont pas le droit de grève.
573. La commission note que les grèves sont généralement, sinon toujours, jugées
illégales au Zimbabwe et que les grévistes sont régulièrement condamnés aux sanctions
prévues par la loi sur le travail en cas de grève illégale - sanctions qui comprennent la
possibilité d'amendes, de licenciement et de sanctions pénales pour les particuliers, et des
amendes et la radiation pour les syndicats. La commission a appris qu'un grand nombre de
travailleurs ont été licenciés de leur emploi pour avoir participé à des actions collectives, ce
qui a eu de profondes répercussions sur leur vie et celle de leur famille, compte tenu de la
146 BO-SérieB-2010-07-0154-01 -Fr.doc/v.2
Rapport de la commission d'enquête
crise économique et sociale que connaît le Zimbabwe. Elle note avec préoccupation que,
souvent, les membres des comités de travailleurs et les dirigeants syndicaux ont été
particulièrement visés par des licenciements à la suite d'une grève.
574. La commission souligne qu'elle est particulièrement préoccupée des
informations reçues concernant l'intervention régulière de la police et de l'armée lors des
grèves. On lui a notamment présenté des informations concernant des blessures et des
décès, résultant de coups de feu tirés contre des grévistes en 2001. La commission est
profondément perturbée par d'autres informations reçues, soit que les forces de sécurité ont
ouvert le feu sur des travailleurs en grève dans le secteur minier en septembre 2009, moins
d'un mois après qu'elle eut quitté le pays.
575. Compte tenu de ce qui précède, la commission se voit obligée d'observer que
le droit de grève n'est pas totalement garanti en droit ou en pratique et est notamment
préoccupée du fait: que la législation prévoit des sanctions disproportionnées par rapport à
l'exercice du droit de grève; qu'elle donne une définition trop large des services essentiels;
que, dans la pratique, la procédure de déclaration de grève est problématique; et que les forces
de sécurité interviennent souvent lors des grèves. La commission confirme que le droit de
grève est un corollaire indissociable du droit syndical protégé par la convention n0 87.
Ingérence
576. La commission a été informée d'actes d'ingérence graves lors des réunions et
manifestations du ZCTU, notamment en raison du fait qu'en pratique les syndicats sont
tenus de demander à la police l'autorisation d'organiser ces rassemblements. La
commission est préoccupée par les informations faisant état de la présence, ouverte ou
cachée, d'agents des services secrets à toutes les réunions du ZCTU. Elle n'a pas été
autrement surprise d'apprendre à cet égard que, fréquemment, les membres du ZCTU ne
souhaitent pas participer activement aux réunions à cause de la présence d'agents de
la CIO.
577. Plusieurs dirigeants et membres du ZCTU ont déclaré que, lors des
perquisitions à leur domicile ou dans les locaux syndicaux, des articles et documents
syndicaux - y compris des affiches, des tracts et des casquettes - avaient été confisqués
sans mandat judiciaire.
578. La commission a également été informée que la législation autorise l'ingérence
des autorités dans les affaires financières des syndicats (art. 120(2) de la loi sur le travail),
et qu'elles s'étaient prévalues de ce pouvoir dans le cadre d'une enquête financière sur le
ZCTU en 2006, durant laquelle des documents financiers et administratifs du syndicat ont
été saisis, ce qui a entravé un fonctionnement normal pendant cette période. La commission
a également pris note des préoccupations relatives aux dispositions législatives concernant:
la surveillance des élections des dirigeants syndicaux (art. 51 de la loi sur le travail); les
contrôles exercés sur la collecte des cotisations syndicales (art. 28(2), 54(2) et (3) et 55 de
la loi sur le travail) et sur leur utilisation par des restrictions sur le nombre de personnes que
les syndicats peuvent employer et de l'équipement et des biens qu'ils peuvent acheter
(art. 55 de la loi sur le travail).
579. La commission a noté en particulier l'allégation selon laquelle la Banque
centrale du Zimbabwe a ouvert un compte de banque parallèle où ont été versés les fonds
envoyés par des donateurs étrangers au ZCTU. Ce dernier a informé la commission qu'il ne
pouvait pas accéder librement à ces fonds, et qu'une importante somme d'argent avait été
BO-SérieB-2010-07-0154-01-Fr.doc/v.2 147

Document no 281
Vers la liberté et la dignité au Myanmar,
Rapport de la commission d’enquête établie
conformément à l’article 26 de la Constitution pour
d’étudier la question du non-respect par le Myanmar
des conventions nos 87 et 29, 4 août 2023,
paragr. 585-586

Vers la liberté et la dignité au Myanmar
Rapport de la commission d’enquête établie conformément
à l’article 26 de la Constitution de l’OIT pour étudier la question
du non-respect par le Myanmar de la convention (no 87)
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
et de la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930
4 août 2023
 Vers la liberté et la dignité au Myanmar 195
étaient souvent accusés de collecter des fonds pour la Force de défense populaire. La
commission constate en outre qu’il est courant de créer des syndicats «jaunes» pour montrer
que les usines sont favorables aux syndicats et empêcher la mise en place d’une véritable
représentation des travailleurs. Ces derniers sont ensuite obligés d’adhérer et de verser des
cotisations. La commission relève comme autres difficultés le fait que les employeurs préfèrent
avoir affaire à des comités de coordination sur le lieu de travail plutôt qu’à des syndicats déjà
en place et que ces comités sont constitués sans consulter les travailleurs, voire sans désigner
de représentants des travailleurs, ce qui signifie que les travailleurs ne sont pas véritablement
représentés au sein de ces comités et que le rôle des syndicats est fragilisé. La commission
estime important de préciser que, si ce type d’ingérence des employeurs dans les affaires
internes des syndicats est couvert par la convention no 98, qui n’a pas été ratifiée par le
Myanmar et ne relève pas du mandat de la commission, les actions ou omissions des autorités
militaires ont une incidence décisive à cet égard, raison pour laquelle la commission traite ces
questions au titre de la convention no 87. Elle estime en particulier que les mesures prises par
les autorités militaires depuis le coup militaire non seulement légitiment ce type de
comportement des employeurs aux yeux de la population, mais permettent également de
limiter le droit des syndicats d’organiser librement leur gestion et leur activité et de formuler
librement leur programme d’action, ce qui accroît encore plus leur fragilité dans le pays. Bien
que les autorités militaires aient affirmé que les organes de conciliation et de coordination sur
le lieu de travail étaient opérationnels, la commission a constaté l’absence d’accès à des voies
de recours effectives permettant de s’attaquer aux problèmes qui se posent sur le lieu de
travail et d’y remédier, notamment à des tribunaux indépendants et impartiaux, à l’inspection
du travail et à d’autres mécanismes de règlement des différends. Cette situation fait ressortir
encore plus clairement les obstacles concrets auxquels se heurtent les syndicats pour mener
leurs activités.
585. Par ailleurs, la commission note que le droit de grève est soumis à des restrictions. En premier
lieu, les autorités militaires ont interdit les rassemblements publics de plus de cinq personnes,
et imposent donc aux travailleurs des restrictions en matière de manifestation et de grève dans
l’espace public. Dans les lieux de travail privés, notamment dans le secteur de l’habillement,
les travailleurs renoncent à mener des actions collectives pour dénoncer les violations des
droits au travail, car les supérieurs hiérarchiques tiennent des listes de grévistes et menacent
de faire intervenir la police ou l’armée. Dans certains cas, on menace de faire arrêter les
travailleurs qui se sont plaints aux autorités compétentes en matière de travail au sujet de
violations sur le lieu de travail s’ils organisent des manifestations. La commission a été
informée qu’à plusieurs reprises l’armée ou la police était intervenue pour mettre un terme à
des grèves sur le lieu de travail, qui n’étaient pas de nature à troubler l’ordre public, et les
organisateurs et participants avaient été passés à tabac ou arrêtés. Lors d’un incident récent
porté à l’attention de la commission, des syndicalistes et des militants syndicaux qui
organisaient une grève dans une usine d’habillement ont été arrêtés et accusés de provocation
au titre de l’article 505(a) du Code pénal (une disposition récemment introduite sur les crimes
contre les services de défense ou les agents de l’État), bien qu’ils n’aient porté aucune demande
politique et aient seulement essayé de négocier une hausse des salaires. La commission note
en outre que les ingérences des autorités militaires dans les grèves, les conflits du travail et les
activités des syndicats se concentrent dans les zones industrielles couvertes par la loi martiale,
dans lesquelles il n’existe tout simplement aucune garantie de procédure régulière. Ces
ingérences ont été rendues possibles et encouragées par la déclaration de l’état d’urgence et
la création de nouvelles infractions pour lesquelles les travailleurs peuvent être arrêtés sans
mandat, comme expliqué plus haut. Sur la base des informations qui lui ont été
communiquées, la commission conclut que les menaces et les répercussions auxquelles
 Vers la liberté et la dignité au Myanmar 196
s’exposent les travailleurs s’ils participent à des grèves sur le lieu de travail et à des
manifestations les dissuadent dans la pratique d’agir collectivement.
586. À cet égard, la commission doit souligner que toute intervention des forces de sécurité dans
des situations où des travailleurs font grève devrait avoir pour seul objectif d’assurer l’ordre
public. Le recours aux forces de sécurité pour d’autres objectifs, et en particulier celui de
disperser des grévistes pacifiques sur un lieu de travail, est une ingérence dans les affaires des
syndicats. En outre, il convient de souligner que des sanctions pénales ne devraient en aucun
cas être imposées pour simple organisation d’une grève pacifique ou participation à une telle
grève. Sur la base des éléments de preuve reçus, la commission conclut que le droit de grève,
qui est un moyen essentiel pour les travailleurs de défendre leurs intérêts, est sévèrement
limité depuis le coup militaire, en raison à la fois des ordonnances militaires imposant des
restrictions aux rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public et des risques
et répercussions considérables auxquels s’exposent les participants à une grève, et que cette
situation est contraire à l’article 3 de la convention no 87.
587. Enfin, la commission estime que, outre les problèmes exposés ci-dessus, le climat de violence
et d’intimidation envers les dirigeants et les membres des syndicats, qui conduit à leur
stigmatisation et à leur mise en accusation permanentes, restreint encore davantage le droit
des organisations de travailleurs d’organiser librement leur gestion et leur activité et de
formuler librement leur programme d’action. Il est indéniable que les syndicats dont les
membres et les dirigeants sont entrés dans la clandestinité ou ont été placés en détention,
font l’objet de menaces, d’intimidation ou d’une surveillance et n’ont accès qu’à des canaux de
communication limités, ainsi que les organisations de travailleurs, dont les bureaux ont été
perquisitionnés et fermés, ne peuvent librement mener des activités syndicales pour défendre
les intérêts de leurs membres.
Article 4 – Dissolution et suspension des organisations
588. Les demandes adressées par les autorités militaires aux syndicats en vue de la restitution de
leurs certificats d’enregistrement («formulaire 7») ont déjà été examinées par la commission
en lien avec l’article 2 de la convention (voir plus haut, paragr. 573 à 577). Toutefois, cette
pratique soulève aussi des questions au regard de l’article 4 de la convention, car l’annulation
de l’enregistrement d’un syndicat entraîne, dans les circonstances actuelles, de graves
conséquences s’apparentant à une dissolution ou à une suspension par voie administrative.
589. En outre, la commission note que les autorités militaires ont déclaré 16 syndicats et
organisations de la société civile comme non enregistrés légalement au sens de la loi sur
l’organisation du travail (voir plus haut, paragr. 434). Bien que les autorités militaires aient
affirmé dans des communications adressées aux organes de contrôle de l’OIT et dans la presse
nationale que cela ne signifiait pas qu’elles avaient déclaré ces organisations «illégales», c’est
bien ainsi qu’elles les ont qualifiées dans plusieurs prises de parole publiques. Que ces
organisations aient ou non été déclarées illégales, le fait de les déclarer non enregistrées au
sens de la loi sur l’organisation du travail, en particulier compte tenu des mesures que les
autorités ont prises ou menacé de prendre à leur encontre dans ce cadre, a pour conséquence
concrète de les priver de la capacité de mener leurs activités de défense des droits des
travailleurs.
590. La commission souligne que, conformément à la convention no 87, les organisations de
travailleurs et d’employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie
administrative. Lorsque les autorités administratives prennent des mesures de dissolution ou
de suspension – ce qui comporte de graves risques d’ingérence arbitraire dans le

Document no 282
BIT, Compilation des décisions du Comité de la liberté
syndicale du Conseil d’administration du BIT, Sixième
édition, 2018, pp. 143-183

La liberté
syndicale
Sixième édition, 2018
Compilation des décisions
du Comité de la liberté syndicale
143
Droit de grève
Importance du droit de grève et légitimité
751. Si le comité a toujours considéré le droit de grève comme étant un des droits
fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations, c’est dans la mesure seulement
où il constitue un moyen de défense de leurs intérêts économiques.
(Voir Recueil 2006, paragr. 520.)
752. Le comité a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit
de grève comme moyen légitime de défense de leurs intérêts économiques et sociaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 521; 345e rapport, paragr. 96; 346e rapport, cas no 2528,
paragr. 1446; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 419; 351e rapport, cas no 2566, paragr. 980;
352e rapport, paragr. 72; 353e rapport, cas no 2589, paragr. 126; 355e rapport, cas no 2602,
paragr. 662; 356e rapport, cas no 2696, paragr. 306; 358e rapport, cas no 2737, paragr. 636;
360e rapport, cas no 2803, paragr. 340; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 767, cas no 2841,
paragr. 1036; 363e rapport, cas no 2704, paragr. 399, cas no 2602, paragr. 465; 365e rapport,
cas no 2829, paragr. 577; 367e rapport, cas no 2938, paragr. 227; 370e rapport, cas no 2994,
paragr. 735; 374e rapport, cas no 3057, paragr. 213; 376e rapport, cas no 2994, paragr. 1002.)
753. Le droit de grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs
et leurs organisations pour promouvoir et pour défendre leurs intérêts économiques
et sociaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 522; 342e rapport, cas no 2323, paragr. 695, cas no 2365,
paragr. 1048; 344e rapport, cas no 2496, paragr. 407, cas no 2471, paragr. 891; 346e rapport,
cas no 1865, paragr. 780, cas no 2473, paragr. 1532; 349e rapport, cas no 2548, paragr. 538;
350e rapport, cas no 2602, paragr. 681; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1329; 354e rapport,
cas no 2581, paragr. 1103; 356e rapport, cas no 2696, paragr. 306; 357e rapport, cas no 2713,
paragr. 1101; 360e rapport, cas no 2803, paragr. 340; 362e rapport, cas no 2723, paragr. 842;
365e rapport, cas no 2723, paragr. 778; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 614; 377e rapport,
cas no 3107, paragr. 240 .)
754. Le droit de grève est un corollaire indissociable du droit syndical protégé par
la convention no 87.
(Voir Recueil 2006, paragr. 523; 344e rapport, cas no 2471, paragr. 891; 346e rapport,
cas no 2506, paragr. 1076, cas no 2473, paragr. 1532; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 419;
354e rapport, cas no 2581, paragr. 1114; 362e rapport, cas no 2838, paragr. 1077.)
10
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
144
755. Les grèves, par leur nature même, sont coûteuses et entraînent des perturbations;
elles supposent également des sacrifices importants de la part des travailleurs,
qui choisissent d’y avoir recours comme ultime moyen de pression sur l’employeur
afin de remédier à ce qu’ils estiment être une injustice.
(365e rapport, cas no 2829, paragr. 577.)
756. Il ne semble pas que réserver le droit de déclencher une grève aux seules
organisations syndicales soit incompatible avec les normes de la convention no 87.
Encore faut-il que les travailleurs, et en particulier leurs dirigeants dans les entreprises,
soient protégés contre des actes éventuels de discrimination en raison d’une
grève exercée en vue de promouvoir et défendre leurs intérêts professionnels et qu’ils
puissent constituer des syndicats sans être en butte à des pratiques antisyndicales.
(Voir Recueil 2006, paragr. 524.)
757. L’interdiction faite aux fédérations et confédérations de déclencher la grève
n’est pas compatible avec la convention no 87.
(Voir Recueil 2006, paragr. 525.)
Finalité de la grève
(grèves socio-économiques, politiques, de solidarité, etc.)
758. Les intérêts professionnels et économiques que les travailleurs défendent par le
droit de grève se rapportent non seulement à l’obtention de meilleures conditions de
travail ou aux revendications collectives d’ordre professionnel, mais englobent également
la recherche de solutions aux questions de politique économique et sociale et aux
problèmes qui se posent à l’entreprise, et qui intéressent directement les travailleurs.
(Voir Recueil 2006, paragr. 526; 344e rapport, cas no 2496, paragr. 407; 353e rapport,
cas no 2619, paragr. 573; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 668; 357e rapport, cas no 2698,
paragr. 224; 371e rapport, cas no 2963, paragr. 236, cas no 2988, paragr. 852; 378e rapport,
cas no 3111, paragr. 712.)
759. Les organisations chargées de défendre les intérêts socio-économiques et
professionnels des travailleurs devraient en principe pouvoir utiliser la grève pour
appuyer leur position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les
grandes orientations de politique économique et sociale, qui ont des répercussions
immédiates pour leurs membres, et plus généralement pour les travailleurs, notamment
en matière d’emploi, de protection sociale et de niveau de vie.
(Voir Recueil 2006, paragr. 527; 340e rapport, cas no 2413, paragr. 901; 342e rapport,
cas no 2323, paragr. 685; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1025; 344e rapport, cas no 2496,
paragr. 413; 346e rapport, cas no 2506, paragr. 1076; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 668;
362e rapport, cas no 2838, paragr. 1077; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 852; 378e rapport,
cas no 3111, paragr. 712.)
145
10. Droit de grève
760. Les grèves purement politiques et celles décidées systématiquement longtemps
avant que les négociations aient lieu ne tombent pas dans le champ d’application des
principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 528; 340e rapport, cas no 2413, paragr. 901; 344e rapport,
cas no 2509, paragr. 1245; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573.)
761. Les grèves purement politiques ne bénéficient pas de la protection des conventions
nos 87 et 98.
(Voir 346e rapport, cas no 1865, paragr. 749; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 705.)
762. Si un arrêt de travail national est exclusivement politique et insurrectionnel, le
comité ne serait pas compétent en la matière.
(Voir 334e rapport, cas no 2254, paragr. 1082.)
763. Bien que les grèves de nature purement politique n’entrent pas dans le champ
d’application des principes de la liberté syndicale, les syndicats devraient avoir la
possibilité de recourir aux grèves de protestation, notamment en vue de critiquer la
politique économique et sociale du gouvernement.
(Voir Recueil 2006, paragr. 529; 344e rapport, cas no 2509, paragr. 1247; 345e rapport,
paragr. 96; 348e rapport, cas no 2530, paragr. 1190; 351e rapport, cas no 2616, paragr. 1012;
352e rapport, paragr. 72; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573; 355e rapport, cas no 2602,
paragr. 668; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 841; 372e rapport, cas no 3011, paragr. 646.)
764. Il y a une distinction à faire entre la grève et le lock-out, mais dans le présent
cas, il s’agit d’une «manifestation pacifique» et d’une «omission de la prestation» qui
ne semblent pas englober la relation entre l’employeur et le travailleur, il s’agit plutôt
d’une protestation et d’une paralysie des activités de la part de l’employeur. Dans
ces conditions, les employeurs, comme les travailleurs, devraient avoir la possibilité
de recourir à la grève (ou à des actions) de protestation, notamment en vue de critiquer
la politique économique et sociale du gouvernement, et que cette possibilité ne
devrait être limitée que pour les services essentiels ou les services publics de première
importance pour lesquels on pourrait établir un service minimum.
(Voir 348e rapport, cas no 2530, paragr. 1190.)
765. Dans un cas où une grève générale contre une ordonnance sur la conciliation et
l’arbitrage était sans aucun doute une grève dirigée contre la politique du gouvernement,
le comité a estimé qu’il est moins sûr que les allégations formulées à son propos
puissent être repoussées d’emblée, sous prétexte qu’elle ne constituait pas un aspect
d’un conflit du travail, les syndicats étant en conflit avec le gouvernement, en sa qualité
d’employeur important, à la suite d’une mesure prise par lui dans le domaine des
relations professionnelles, mesure qui, selon les syndicats, restreignait l’exercice des
droits syndicaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 530.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
146
766. Le droit de grève ne devrait pas être restreint aux seuls différends de travail
susceptibles de déboucher sur une convention collective particulière : les travailleurs
et leurs organisations doivent pouvoir manifester, le cas échéant, dans un cadre plus
large leur mécontentement éventuel sur des questions économiques et sociales touchant
aux intérêts de leurs membres.
(Voir Recueil 2006, paragr. 531; 344e rapport, cas no 2486, paragr. 1208, cas no 2509,
paragr. 1245; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1543; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 668;
362e rapport, cas no 2814, paragr. 443; 363e rapport, cas no 1865, paragr. 118; 367e rapport,
cas no 2814, paragr. 354; 372e rapport, cas no 3011, paragr. 648; 374e rapport, cas no 3050,
paragr. 468; 376e rapport, cas no 3011, paragr. 151.)
767. La solution d’un conflit de droit motivé par une différence d’interprétation d’un
texte légal devrait relever des tribunaux compétents. L’interdiction de la grève dans
une telle situation ne constitue pas une violation de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 532; 367e rapport, cas no 2907, paragr. 897; 373e rapport,
cas no 3005, paragr. 192.)
768. Si les grèves sont interdites tant que les conventions collectives sont en vigueur,
cette restriction doit être compensée par le droit de recourir à des mécanismes
impartiaux et rapides, autorisant à examiner des plaintes individuelles ou collectives
concernant l’interprétation ou l’application des conventions collectives; ce type
de mécanismes non seulement permet de régler pendant la période de validité des
conventions les difficultés d’application et d’interprétation qui apparaissent immanquablement,
mais présente en outre l’avantage de préparer le terrain pour de futures
séries de négociations dans la mesure où cette procédure permet de déterminer les
problèmes qui se sont posés pendant la période de validité de la convention collective
en question.
(Voir Recueil 2006, paragr. 533; 344e rapport, cas no 2509, paragr. 1245; 364e rapport,
cas no 2907, paragr. 673; 367e rapport, cas no 2907, paragr. 898.)
769. Une grève pour obtenir une augmentation de salaire et le paiement des arriérés
de salaires entre dans le cadre de l’exercice d’activités syndicales légitimes.
(Voir 342e rapport, cas no 2323, paragr. 691.)
770. Une interdiction générale des grèves de solidarité risque d’être abusive et les
travailleurs devraient pouvoir avoir recours à de tels mouvements, pour autant que
la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légitime.
(Voir Recueil 2006, paragr. 534; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1543; 357e rapport,
cas no 2698, paragr. 220.)
771. En excluant les grèves de solidarité, les boycotts secondaires et les actions
revendicatives en soutien à des accords multi-entreprises du champ d’application de
l’action revendicative protégée, des dispositions législatives pourraient avoir un effet
négatif sur le droit des organisations cherchant à obtenir et à négocier des accords
multi-employeurs et limiteraient par ailleurs de manière abusive le droit de grève.
(Voir 357e rapport, cas no 2698, paragr. 220.)
147
10. Droit de grève
772. Le fait d’avoir recours à la grève pour obtenir la reconnaissance d’un syndicat
est un intérêt légitime qui peut être défendu par les travailleurs et leurs organisations.
(Voir Recueil 2006, paragr. 535; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1537; 350e rapport,
cas no 2602, paragr. 681; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 662; 363e rapport, cas no 1865,
paragr. 118.)
773. L’interdiction des grèves liées à des conflits en matière de reconnaissance (en vue
de la négociation collective) n’est pas conforme aux principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 536.)
774. Une réclamation de reconnaissance aux fins de la négociation collective adressée
à l’entreprise à l’origine d’un contrat de sous-traitance ne rend pas une grève illégale.
(Voir 350e rapport, cas no 2602, paragr. 681.)
775. Les grèves de protestation contre les situations dans lesquelles les travailleurs
se trouvent pendant de longs mois sans aucune rémunération du fait du non-paiement
des salaires par le gouvernement, constituent des activités syndicales légitimes.
(Voir Recueil 2006, paragr. 537; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573.)
776. L’interdiction des grèves non liées à un conflit collectif auquel les travailleurs
ou le syndicat seraient parties est contraire aux principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 538; 344e rapport, cas no 2496, paragr. 408; 346e rapport,
cas no 2473, paragr. 1543; 350e rapport, cas no 2602, paragr. 681; 371e rapport, cas no 2988,
paragr. 852; 372e rapport, cas no 3011, paragr. 648.)
777. Les dispositions légales qui interdisent les grèves liées au problème de l’application
d’un contrat collectif à plus d’un employeur sont incompatibles avec les
principes de la liberté syndicale en matière de droit de grève; les travailleurs et leurs
organisations devraient pouvoir déclencher une action de revendication à l’appui de
tels contrats.
(Voir Recueil 2006, paragr. 539.)
778. Les travailleurs et leurs organisations devraient être en mesure de recourir
à des actions collectives (grèves) pour obtenir des contrats (collectifs) liant plusieurs
employeurs.
(Voir Recueil 2006, paragr. 540; 357e rapport, cas no 2698, paragr. 220.)
779. Le comité a affirmé à diverses reprises que les grèves nationales étaient légitimes
dès lors qu’elles avaient des objectifs économiques et sociaux et non purement
politiques; l’interdiction de la grève n’est admissible que pour les fonctionnaires agissant
en tant qu’organe de la puissance publique ou pour les travailleurs des services
essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire les services dont l’interruption risquerait
de mettre en danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble
ou dans une partie de la population).
(Voir Recueil 2006, paragr. 541.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
148
780. La déclaration d’illégalité et l’interdiction d’une grève nationale déclenchée
pour protester contre les effets sociaux de la politique économique du gouvernement
constituent une grave violation de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 542.)
781. Pour ce qui est de la grève générale, le comité a considéré que la grève est l’un
des moyens d’action dont doivent pouvoir disposer les organisations de travailleurs.
Une grève générale de vingt-quatre heures pour revendiquer une augmentation des
salaires minima, le respect des conventions collectives en vigueur et un changement
de politique économique (diminution des prix et du chômage) est légitime et ressortit
au domaine d’activité normal des organisations syndicales.
(Voir Recueil 2006, paragr. 543.)
782. Le déclenchement d’une grève générale de protestation pour qu’il soit mis un
terme aux centaines d’assassinats de dirigeants et de militants syndicaux qui ont été
commis ces dernières années constitue une action syndicale légitime et son interdiction
constitue donc une atteinte grave à la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 544.)
Formes de grève
783. D’une manière générale, la grève est un arrêt de travail temporaire (ou un
ralentissement) délibérément mené par un ou plusieurs groupes de travailleurs en
vue de faire appliquer des exigences ou d’y résister, ou en vue d’exprimer des revendications
ou de soutenir d’autres travailleurs dans leurs exigences ou revendications.
(Voir 358e rapport, cas no 2716, paragr. 862.)
784. Pour ce qui concerne les modalités du droit de grève refusées aux travailleurs
(paralysies intempestives, grèves perlées, grèves des bras croisés, grèves du zèle, occupation
de l’entreprise ou du lieu de travail, grèves sur le tas), le comité a considéré
que ces limitations ne se justifieraient que si la grève perdait son caractère pacifique.
(Voir Recueil 2006, paragr. 545; 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1143; 362e rapport,
cas no 2815, paragr. 1370.)
785. Le comité a considéré que l’occupation de plantations par des travailleurs et
d’autres personnes, surtout lorsque sont commis des actes de violence, est contraire
à l’article 8 de la convention no 87. Par conséquent, le comité a demandé au gouvernement
d’exécuter à l’avenir les ordres d’expulsion délivrés par l’autorité judiciaire
lorsque des actes délictueux sont commis dans les exploitations ou centres de travail
en raison de conflits du travail.
(Voir Recueil 2006, paragr. 546.)
786. Dans un cas où la justice avait considéré le fait de se présenter au travail dans
un hôtel les cheveux tondus ou coupés à ras comme une action de grève et comme
149
10. Droit de grève
une violation des normes de présentation du personnel de l’hôtel, le comité, tout
en prenant en compte les préoccupations de la direction de l’hôtel concernant son
image, a estimé que le fait de considérer la simple expression de mécontentement
manifesté de manière pacifique et légale comme une grève constitue une violation de
la liberté syndicale et des droits d’expression.
(Voir 358e rapport, cas no 2716, paragr. 862.)
Partie employeur pendant la grève
787. Dans le cadre d’un conflit collectif de travail, il n’est ni réaliste, ni nécessaire
de traiter systématiquement, côté employeur, avec l’entité assumant la responsabilité
financière ou économique finale ou avec le représentant de l’employeur de plus haut
niveau, que ce soit dans le secteur public (par exemple, le ministre compétent) ou
dans le secteur privé (par exemple, la société mère).
(Voir 378e rapport, cas no 3111, paragr. 708.)
788. Au vu de l’obligation incombant à la fois à l’employeur et au syndicat de négocier
de bonne foi et de déployer tous les efforts nécessaires pour parvenir à un accord,
ainsi que de l’importance du droit de grève comme l’un des moyens essentiels de
défense des intérêts économiques et sociaux des travailleurs et de leurs organisations,
il devrait être garanti que la partie patronale à un conflit collectif du travail a le pouvoir
de faire des concessions et de prendre des décisions concernant les salaires et les
modalités et conditions d’emploi, de sorte que la pression exercée au cours des différentes
étapes d’un conflit collectif du travail vise effectivement l’entité appropriée.
(Voir 378e rapport, cas no 3111, paragr. 708.)
Conditions préalables
789. Les conditions posées par la législation pour qu’une grève soit considérée
comme un acte licite doivent être raisonnables et, en tout cas, ne pas être telles
qu’elles constituent une limitation importante aux possibilités d’action des organisations
syndicales.
(Voir Recueil 2006, paragr. 547; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1026; 346e rapport,
cas no 2488, paragr. 1331; 357e rapport, cas no 2698, paragr. 225; 359e rapport, cas no 2203,
paragr. 524; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 850; 375e rapport, cas no 2871, paragr. 231.)
790. Les procédures légales régissant le droit de grève ne devraient pas être compliquées
au point que, dans la pratique, il soit impossible de se mettre légalement
en grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 548; 359e rapport, cas no 2203, paragr. 524.)
791. Des considérations économiques ne devraient pas être invoquées pour justifier
des restrictions au droit de grève.
(Voir 362e rapport, cas no 2841, paragr. 1041; 367e rapport, cas no 2894, paragr. 339.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
150
792. Aux termes de la recommandation (no 92) sur la conciliation et l’arbitrage
volontaires, 1951, des organismes de conciliation volontaire adaptés aux conditions
nationales devraient être établis en vue de contribuer à la prévention et au règlement
des conflits du travail entre employeurs et travailleurs. Des dispositions devraient
être prises pour que la procédure puisse être engagée soit sur l’initiative de l’une des
parties au conflit, soit d’office par l’organisme de conciliation volontaire.
(Voir 298e rapport, cas no 1612, paragr. 22.)
793. L’on ne saurait considérer comme attentatoire à la liberté syndicale une législation
prévoyant le recours aux procédures de conciliation et d’arbitrage (volontaire)
dans les conflits collectifs en tant que condition préalable à une déclaration de grève,
pour autant que le recours à l’arbitrage ne présente pas un caractère obligatoire et
n’empêche pas, en pratique, le recours à la grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 549; 359e rapport, cas no 2725, paragr. 261, cas no 2776,
paragr. 288; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 853.)
794. En règle générale, une décision de suspendre une grève pour une période raisonnable
de façon à permettre aux parties de rechercher une solution négociée grâce
à des efforts de médiation ou de conciliation ne constitue pas une violation des principes
de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 550; 359e rapport, cas no 2725, paragr. 261, cas no 2776,
paragr. 288; 371e rapport, cas no 2987, paragr. 167.)
795. Les procédures de conciliation et de médiation doivent avoir pour seule finalité
de faciliter la négociation et elles ne devraient donc pas être si complexes ou entraîner
des délais si longs qu’une grève licite devienne impossible en pratique ou soit privée
de toute efficacité.
(Voir 375e rapport, cas no 2794, paragr. 387.)
796. Dans les cas de conciliation obligatoire, il est désirable que la décision d’engager
une procédure de conciliation dans les conflits collectifs revienne à un organe
indépendant des parties en conflit.
(Voir 336e rapport, cas no 2369, paragr. 212; 338e rapport, cas no 2377, paragr. 403;
342e rapport, cas no 2420, paragr. 221; 344e rapport, cas no 2458, paragr. 302.)
797. Dans les cas de conciliation obligatoire, il est nécessaire que la décision d’entreprendre
la procédure de conciliation obligatoire dans les conflits collectifs soit
confiée à un organe indépendant des parties en conflit.
(Voir 349e rapport, cas no 2535, paragr. 351; 368e rapport, cas no 2942, paragr. 18.)
798. Le comité a insisté sur le fait que, si la loi peut restreindre provisoirement les
grèves jusqu’à ce que tous les moyens de négociation, de conciliation et d’arbitrage
aient été épuisés, une telle restriction devrait s’accompagner de procédures de conciliation
ou d’arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles
les intéressés devraient pouvoir participer.
(Voir Recueil 2006, paragr. 551; 340e rapport, cas no 2439, paragr. 363; 364e rapport,
cas no 2827, paragr. 1123.)
151
10. Droit de grève
799. L’obligation de donner un préavis à l’employeur ou à son organisation avant
de déclencher une grève peut être considérée comme admissible, pour autant que le
préavis soit raisonnable.
(Voir Recueil 2006, paragr. 552; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1257; 344e rapport,
cas no 2509, paragr. 1246; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1542; 376e rapport, cas no 2994,
paragr. 1002.)
800. Un préavis de quarante-huit heures est un délai raisonnable.
(Voir 344e rapport, cas no 2509, paragr. 1246.)
801. L’imposition d’un préavis de vingt jours n’est pas contraire aux principes de la
liberté syndicale dans les services d’intérêt social ou public.
(Voir Recueil 2006, paragr. 553.)
802. L’imposition légale d’une clause de temporisation de quarante jours avant le
déclenchement d’une grève dans un service essentiel a pour finalité d’accorder aux
parties un délai de réflexion et n’est pas contraire aux principes de la liberté syndicale.
Cette clause de temporisation peut permettre aux deux parties de négocier à
nouveau et, éventuellement, d’aboutir à un accord sans avoir à recourir à la grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 554.)
803. Les informations à mentionner dans un préavis de grève doivent être raisonnables
ou interprétées de façon raisonnable et les injonctions qui peuvent en découler
ne doivent pas être utilisées de manière à rendre virtuellement impossible l’activité
syndicale légitime.
(Voir 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1542.)
804. La faculté du ministère de la Fonction publique et du Logement de déterminer
la date et le lieu de la grève pourrait constituer une entrave excessive à l’exercice du
droit de grève.
(Voir 371e rapport, cas no 2988, paragr. 850.)
805. Quant à la majorité exigée par une législation pour la déclaration d’une grève
légale (les deux tiers des voix de la totalité des membres de l’organisation ou section),
et dont l’inobservation peut entraîner une sanction des autorités administratives, y
compris la dissolution du syndicat, le comité a rappelé les conclusions de la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations, selon lesquelles
une telle disposition constitue une intervention des autorités publiques dans
l’activité des syndicats, intervention de nature à limiter les droits de ces organisations,
contrairement à l’article 3 de la convention.
(Voir Recueil 2006, paragr. 555.)
806. Le fait que la décision de déclarer une grève doive être approuvée par plus de la
moitié de tous les travailleurs concernés est une exigence trop élevée qui pourrait par
trop limiter la possibilité de faire grève, surtout dans les grandes entreprises.
(Voir Recueil 2006, paragr. 556; 357e rapport, cas no 2698, paragr. 225; 371e rapport,
cas no 2988, paragr. 850.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
152
807. La majorité absolue des travailleurs concernés pour le déclenchement d’une
grève peut être difficile à atteindre, en particulier dans les cas de syndicats regroupant
un grand nombre d’adhérents. Une disposition exigeant une telle majorité peut
donc entraîner un risque de limitation importante au droit de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 557.)
808. Le comité a demandé à un gouvernement de prendre des mesures pour modifier
la disposition légale qui exige que la décision de déclarer une grève soit approuvée
par plus de la moitié des travailleurs concernés, en particulier dans les entreprises qui
regroupent un grand nombre d’affiliés.
(Voir Recueil 2006, paragr. 558.)
809. L’obligation de respecter un certain quorum et de prendre la décision de faire
grève au scrutin secret peut être considérée comme admissible.
(Voir Recueil 2006, paragr. 559.)
810. Le respect d’un quorum de deux tiers des membres pourrait être difficile à
atteindre, en particulier dans les cas de syndicats regroupant un grand nombre d’adhérents
couvrant un large secteur géographique.
(Voir Recueil 2006, paragr. 560.)
811. Le comité a estimé que, subordonner la déclaration de grève à l’accord de la
majorité des adhérents des fédérations ou confédérations et à l’approbation de la
majorité absolue des travailleurs de l’entreprise, dans les autres hypothèses, peut avoir
pour effet de limiter gravement les possibilités d’action des organisations syndicales.
(Voir 214e rapport, cas no 1081, paragr. 266.)
812. Le comité a considéré conforme aux principes de la liberté syndicale que l’assemblée
générale des sections locales puisse prendre la décision concernant le déclenchement
d’une grève dans les sections locales d’une organisation syndicale lorsque le
motif de la grève est local et que, dans les organisations syndicales de degré supérieur, la
décision concernant la déclaration de grève puisse être prise par le comité directeur de
ces organisations à la majorité absolue des voix de l’ensemble des membres du comité.
(Voir Recueil 2006, paragr. 562.)
813. Dans un cas où la législation nationale prévoyait qu’une organisation syndicale
majoritaire et qu’une majorité absolue de l’ensemble des travailleurs de l’entreprise
ont à la fois la faculté de déclarer une grève, de mettre fin à une grève en cours, ainsi
que de demander la constitution d’un tribunal arbitral, le comité a estimé, dans ces
circonstances spécifiques, que le vote majoritaire appelant à mettre fin au mouvement
de grève et appelant à mettre en place un tribunal arbitral n’est pas contraire
aux principes de la liberté syndicale.
(Voir 380e rapport, cas no 3097, paragr. 324.)
814. L’obligation de tenir un deuxième vote si une grève n’a pas eu lieu dans les trois
mois suivant le premier vote ne constitue pas une menace pour la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 563.)
153
10. Droit de grève
Limitation de la durée de la grève
815. Le comité a exprimé sa préoccupation quant à l’imposition d’une limite dans la
durée d’une grève qui, de par sa nature de recours ultime pour la défense des intérêts
des travailleurs, ne peut être prédéterminée.
(Voir 376e rapport, cas no 2994, paragr. 1002.)
Recours à l’arbitrage obligatoire
816. L’arbitrage obligatoire pour mettre fin à un conflit collectif du travail est acceptable
soit s’il s’intervient à la demande des deux parties au conflit, soit dans les cas
où la grève peut être limitée, voire interdite, à savoir dans les cas de conflit dans la
fonction publique à l’égard des fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au
nom de l’Etat ou dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les
services dont l’interruption risquerait de mettre en danger dans tout ou partie de la
population la vie, la santé ou la sécurité de la personne.
(Voir Recueil 2006, paragr. 564; 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1093; 346e rapport,
cas no 1865, paragr. 757, cas no 2488, paragr. 1331; 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1149;
353e rapport, cas no 1865, paragr. 713; 367e rapport, cas no 2894, paragr. 340; 370e rapport,
cas no 2983, paragr. 284; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 853; 372e rapport, cas no 3038,
paragr. 468; 374e rapport, cas no 3084, paragr. 871; 377e rapport, cas no 3107, paragr. 241;
378e rapport, cas no 3147, paragr. 570.)
817. L’arbitrage obligatoire est également acceptable en cas de crise nationale aiguë.
(Voir 374e rapport, cas no3084, paragr. 871.)
818. Dans la mesure où l’arbitrage obligatoire empêche la grève, il porte atteinte au
droit des organisations syndicales d’organiser librement leurs activités et ne pourrait
se justifier que dans la fonction publique ou dans les services essentiels au sens strict
du terme.
(Voir Recueil 2006, paragr. 565; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 853.)
819. Il est difficile de concilier un arbitrage imposé par les autorités de leur propre
initiative avec le droit de grève et le principe du caractère volontaire de la négociation.
(Voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1093; 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1149;
378e rapport, cas no 3147, paragr. 570.)
820. Une disposition qui permet à l’une des parties au conflit de demander unilatéralement
l’intervention de l’autorité du travail pour qu’elle s’occupe de régler ledit
conflit présente un risque pour le droit des travailleurs de déclarer la grève et porte
atteinte à la négociation collective.
(Voir Recueil 2006, paragr. 566.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
154
821. Le droit de grève serait affecté si une disposition législative permettait aux
employeurs de soumettre, dans tous les cas, un conflit résultant de l’impossibilité de
conclure un accord par voie de négociation collective à une décision arbitrale obligatoire,
empêchant de ce fait le recours à la grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 567.)
822. Le comité a estimé qu’un système d’arbitrage obligatoire par les soins de l’administration
du travail, lorsqu’un différend n’a pas été réglé par d’autres moyens,
peut avoir pour résultat de restreindre considérablement le droit des organisations
de travailleurs d’organiser leurs activités et risque même d’imposer une interdiction
absolue de la grève, contrairement aux principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 568; 346e rapport, cas no 1865, paragr. 757; 353e rapport,
cas no 1865, paragr. 713; 367e rapport, cas no 2894, paragr. 340; 370e rapport, cas no 2983,
paragr. 284; 377e rapport, cas no 3107, paragr. 241.)
823. Pour obtenir et conserver la confiance des parties, tout système d’arbitrage
doit être véritablement indépendant, ce qui signifie que les résultats des arbitrages ne
doivent pas être prédéterminés par des critères législatifs.
(Voir Recueil 2006, paragr. 569 et 995.)
Cas dans lesquels la grève peut faire l’objet de restrictions
ou d’interdictions, et garanties compensatoires
A. Crise nationale aiguë
824. L’interdiction générale des grèves ne saurait être justifiée que dans une situation
de crise nationale aiguë et pour une durée limitée.
(Voir Recueil 2006, paragr. 570; 343e rapport, cas no 2426, paragr. 284; 371e rapport,
cas no 3001, paragr. 211.)
825. La responsabilité de la suspension d’une grève pour des raisons de sécurité
nationale ou de santé publique ne doit pas incomber au gouvernement mais à un
organe indépendant qui ait la confiance de toutes les parties concernées.
(Voir Recueil 2006, paragr. 571; 346e rapport, cas no 1865, paragr. 757, cas no 2506,
paragr. 1079; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 713; 362e rapport, cas no 2838, paragr. 1078.)
B. Fonction publique
826. La reconnaissance du principe de la liberté d’association aux fonctionnaires
publics n’implique pas nécessairement le droit de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 572.)
155
10. Droit de grève
827. Le comité a admis que le droit de grève pourrait faire l’objet de restrictions,
voire d’interdictions, dans la fonction publique ou les services essentiels dans la
mesure où la grève pourrait y provoquer de graves préjudices pour la collectivité
nationale et pourvu que ces limitations soient accompagnées de certaines garanties
compensatoires.
(Voir Recueil 2006, paragr. 573; 374e rapport, cas nos 2941 et 3026, paragr. 662.)
828. Le droit de grève peut être restreint, voire interdit, dans la fonction publique,
uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom
de l’Etat.
(Voir Recueil 2006, paragr. 574; 344e rapport, cas no 2365, paragr. 1446; 372e rapport,
cas no 3025, paragr. 152.)
829. Une définition trop extensive de la notion de fonctionnaires est susceptible
d’aboutir à une limitation très large, voire à une interdiction, du droit de grève de
ces travailleurs. L’interdiction du droit de grève dans la fonction publique devrait
se limiter aux fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat.
(Voir Recueil 2006, paragr. 575; 344e rapport, cas no 2365, paragr. 1446; 378e rapport,
cas no 3111, paragr. 715.)
830. Le droit de grève peut être restreint, voire interdit : 1) dans la fonction publique
uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de
l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme, c’est-à-dire les services
dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la
population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne.
(Voir Recueil 2006, paragr. 576; 340e rapport, cas no 1865, paragr. 751; 344e rapport,
cas no 2467, paragr. 578; 346e rapport, cas no 2500, paragr. 324; 348e rapport, cas no 2433,
paragr. 48, cas no 2519, paragr. 1141; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 421; 351e rapport,
cas no 2355, paragr. 361, cas no 2581, paragr. 1336; 353e rapport, cas no 2631, paragr. 1357;
354e rapport, cas no 2649, paragr. 395; 356e rapport, cas no 2654, paragr. 370; 357e rapport,
cas no 2698, paragr. 224; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 767, cas no 2723, paragr. 842;
365e rapport, cas no 2723, paragr. 778; 367e rapport, cas no 2894, paragr. 335, cas no 2885,
paragr. 384, cas no 2929, paragr. 637, cas no 2860, paragr. 1182; 370e rapport, cas no 2956,
paragr. 142; 371e rapport, cas no 3001, paragr. 211, cas no 2988, paragr. 851; 372e rapport,
cas no 3022, paragr. 614; 374e rapport, cas no 3057, paragr. 213; 377e rapport, cas no 3107,
paragr. 240; 378e rapport, cas no 3111, paragr. 715.)
831. Les «employés publics» des entreprises commerciales ou industrielles de l’Etat
devraient pouvoir négocier des conventions collectives, bénéficier d’une protection
adéquate contre les actes de discrimination antisyndicale, et même jouir du droit de
grève dans la mesure où l’interruption des services qu’ils fournissent ne met pas en
danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la
santé de la personne.
(Voir Recueil 2006, paragr. 577; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1254; 348e rapport,
cas no 2519, paragr. 1144; 350e rapport, cas no 2543, paragr. 728; 358e rapport, cas no 2735,
paragr. 605; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 614.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
156
832. Les fonctionnaires de l’administration de la justice et du pouvoir judiciaires
sont des fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, et leur
droit de recourir à la grève peut donc faire l’objet de restrictions, telle que la suspension
de l’exercice du droit, voire même l’interdiction d’exercice de ce droit.
(Voir Recueil 2006, paragr. 578; 344e rapport, cas no 2461, paragr. 313; 348e rapport,
cas no 2088, paragr. 176; 353e rapport, cas no 2614, paragr. 398; 359e rapport, cas no 2776,
paragr. 288; 371e rapport, cas no 2203, paragr. 534; 374e rapport, cas no 3024, paragr. 556.)
833. L’interdiction du droit de grève aux travailleurs des douanes, fonctionnaires
exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, n’est pas contraire aux principes
de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 579; 357e rapport, cas no 2690, paragr. 947; 362e rapport,
cas no 2723, paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778.)
834. Les travailleurs qui accomplissent des fonctions d’administration, de supervision
et de prélèvement des impôts internes exercent des fonctions d’autorité au nom
de l’Etat.
(Voir 357e rapport, cas no 2690, paragr. 947.)
835. Les mesures prises par un gouvernement pour obtenir d’un tribunal une
injonction en vue de mettre fin provisoirement à une grève dans le secteur public ne
constituent pas une violation des droits syndicaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 580.)
C. Services essentiels
836. Pour déterminer les cas dans lesquels une grève pourrait être interdite, le critère
à retenir est l’existence d’une menace évidente et imminente pour la vie, la sécurité
et la santé dans tout ou partie de la population.
(Voir Recueil 2006, paragr. 581; 343e rapport, cas no 2355, paragr. 469; 346e rapport,
cas no 2488, paragr. 1328; 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1141; 349e rapport, cas no 2552,
paragr. 421; 364e rapport, cas no 2907, paragr. 670.)
837. Ce que l’on entend par service essentiel au sens strict du terme dépend largement
des conditions spécifiques de chaque pays. En outre, ce concept ne revêt pas un
caractère absolu dans la mesure où un service non essentiel peut devenir essentiel si
la grève dépasse une certaine durée ou une certaine étendue, mettant ainsi en péril
la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans une partie ou dans la totalité de
la population.
(Voir Recueil 2006, paragr. 582; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2519, paragr. 1142; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport, cas no 2355,
paragr. 361, cas no 2581, paragr. 1336; 354e rapport, cas no 2581, paragr. 1114; 372e rapport,
cas no 3038, paragr. 469.)
157
10. Droit de grève
838. Le principe relatif à l’interdiction des grèves dans les «services essentiels» risquerait
de perdre tout son sens s’il s’agissait de déclarer illégale une grève dans une
ou plusieurs entreprises qui ne fournissent pas un «service essentiel» au sens strict du
terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble
ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne.
(Voir Recueil 2006, paragr. 583; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2519, paragr. 1142.)
839. Il ne paraîtrait pas approprié que toutes les entreprises d’Etat soient placées
sur le même pied, en ce qui concerne les restrictions apportées au droit de grève, sans
que la législation distingue entre celles qui sont vraiment essentielles et celles qui ne
le sont pas.
(Voir Recueil 2006, paragr. 584; 374e rapport, cas no 3057, paragr. 214.)
840. Peuvent être considérés comme services essentiels :
le secteur hospitalier
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport,
cas no 2581, paragr. 1336; 355e rapport, cas no 2659, paragr. 240);
les services d’électricité
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport, cas no 2581,
paragr. 1336; 362e rapport, cas no 2723, paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778);
les services d’approvisionnement en eau
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport,
cas no 2581, paragr. 1336; 354e rapport, cas no 2649, paragr. 395; 362e rapport, cas no 2723,
paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778);
les services téléphoniques
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport, cas no 2581,
paragr. 1336; 362e rapport, cas no 2723, paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778);
la police et les forces armées
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
les services de lutte contre l’incendie
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1336);
les services pénitentiaires publics ou privés
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
la fourniture d’aliments pour les élèves en âge scolaire
et le nettoyage des établissements scolaires
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 360e rapport, cas no 2784, paragr. 243);
le contrôle du trafic aérien
(voir Recueil 2006, paragr. 585; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422; 351e rapport,
cas no 2581, paragr. 1336; 353e rapport, cas no 2631, paragr. 1357; 362e rapport, cas no 2785,
paragr. 736, cas no 2841, paragr. 1041; 376e rapport, cas no 3079, paragr. 421).
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
158
841. Le principe selon lequel le contrôle aérien est un service essentiel s’applique à
toutes les grèves quelles que soient leurs formes – grève du zèle, grève perlée, déclaration
fictive de maladie – car elles peuvent s’avérer aussi dangereuses qu’une grève ordinaire
pour la vie, la sécurité personnelle ou la santé de tout ou partie de la population.
(Voir Recueil 2006, paragr. 586.)
842. Ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme :
la radio-télévision
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2519, paragr. 1144; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1336; 362e rapport, cas no 2723,
paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778);
le secteur pétrolier et les installations pétrolières
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2355, paragr. 469, cas no 2432,
paragr. 1024; 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1144; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422;
362e rapport, cas no 2841, paragr. 1036; 364e rapport, cas no 2727, paragr. 1082; 371e rapport,
cas no 2988, paragr. 851; 372e rapport, cas no 3038, paragr. 469; 374e rapport, cas no 2946,
paragr. 253);
la distribution de pétrole pour le fonctionnement du transport aérien
(362e rapport, cas no 2841, paragr. 1041);
le secteur du gaz
(voir 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
la mise en bouteille du gaz et sa commercialisation
(voir 358e rapport, cas no 2727, paragr. 979);
les ports (docks)
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2540, paragr. 817, cas no 2519, paragr. 1142, cas no 2530, paragr. 1191; 349e rapport,
cas no 2552, paragr. 422; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573; 357e rapport, cas no 2690,
paragr. 943; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 851);
les banques
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 349e rapport,
cas no 2545, paragr. 1149; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1336; 362e rapport, cas no 2723,
paragr. 842; 365e rapport, cas no 2723, paragr. 778);
la Banque centrale
(voir 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1144);
les services d’assurance
(voir 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1149);
les services de l’informatique chargés de percevoir les impôts directs et indirects
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
les grands magasins et parcs de loisirs
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
159
10. Droit de grève
le secteur de la métallurgie et l’ensemble du secteur minier
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
les transports en général, y compris ceux d’une grande métropole
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1254; 342e rapport,
cas no 2252, paragr. 155; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 346e rapport, cas no 2506,
paragr. 1071; 348e rapport, cas no 2540, paragr. 817, cas no 2519, paragr. 1144; 349e rapport,
cas no 2552, paragr. 422; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 767; 371e rapport, cas no 2988,
paragr. 851);
les pilotes de ligne
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 851);
la production, le transport et la distribution de combustibles
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 348e rapport, cas no 2530, paragr. 1191; 362e rapport,
cas no 2841, paragr. 1036; 364e rapport, cas no 2727, paragr. 1082; 371e rapport, cas no 2988,
paragr. 851);
les services ferroviaires
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1144; 372e rapport,
cas no 3022, paragr. 614);
les transports métropolitains
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2530, paragr. 1191; 377e rapport, cas no 3107, paragr. 240);
les services postaux
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024; 348e rapport,
cas no 2519, paragr. 1144; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1336; 367e rapport, cas no 2894,
paragr. 335);
le service de ramassage des ordures ménagères
(Voir Recueil 2006, paragr. 587);
les entreprises frigorifiques
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
les services de l’hôtellerie
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
la construction
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
la fabrication d’automobiles
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
les activités agricoles, l’approvisionnement et la distribution de produits alimentaires
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 348e rapport, cas no 2530, paragr. 1191; 363e rapport,
cas no 2704, paragr. 399);
les plantations de thé, de café et de cocotiers
(voir 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1144);
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
160
la monnaie
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024);
le Service des imprimeries d’Etat et les monopoles d’Etat
des alcools, du sel et du tabac
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
le secteur de l’enseignement
(voir Recueil 2006, paragr. 587; 344e rapport, cas no 2364, paragr. 91; 346e rapport, cas no 2489,
paragr. 463, cas no 1865, paragr. 772; 348e rapport, cas no 2364, paragr. 122; 349e rapport,
cas no 2562, paragr. 406, cas no 2552, paragr. 422, cas no 2489, paragr. 686; 351e rapport,
cas no 2569, paragr. 639; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573; 354e rapport, cas no 2587,
paragr. 1057; 355e rapport, cas no 2657, paragr. 573; 360e rapport, cas no 2803, paragr. 340);
les entreprises d’embouteillage d’eau minérale
(voir Recueil 2006, paragr. 587);
la réparation d’avions
(voir 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1024);
les services d’ascenseur
(voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1093);
les services d’exportation
(voir 348e rapport, cas no 2519, paragr. 1144);
les services de sécurité privés, à l’exception des services pénitentiaires
(voir 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
les aéroports, à l’exception du contrôle aérien
(voir 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
les pharmacies
(voir 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
les boulangeries
(voir 349e rapport, cas no 2552, paragr. 422);
la production de bière
(voir 364e rapport, cas no 2907, paragr. 670);
l’industrie du verre
(voir 374e rapport, cas no 3084, paragr. 871).
843. Si l’impact que l’annonce d’un arrêt total de la production pétrolière et gazière
peut avoir sur l’appréciation des conséquences de cette action collective sur la vie quotidienne
constitue, sans doute, une circonstance nationale pertinente dont le comité
doit tenir compte, il est nécessaire que de tels impacts dépassent la simple entrave aux
échanges et au commerce et aient mis en danger la vie, la sécurité personnelle et la santé
de toute ou partie de la population pour justifier un recours à l’arbitrage obligatoire.
(Voir 372e rapport, cas no 3038, paragr. 470.)
161
10. Droit de grève
844. Bien que le secteur de l’enseignement ne constitue pas un service essentiel,
les directeurs d’école et directeurs adjoints peuvent voir leur droit de grève limité
ou interdit.
(Voir Recueil 2006, paragr. 588; 346e rapport, cas no 2414, paragr. 18, cas no 1865,
paragr. 772; 351e rapport, cas no 2569, paragr. 639.)
845. Les arguments selon lesquels traditionnellement les fonctionnaires ne bénéficient
pas du droit de grève parce que l’Etat en tant qu’employeur a un devoir de
protection supérieur à la moyenne vis-à-vis d’eux, n’ont pas convaincu le comité de
modifier sa position sur le droit de grève des enseignants.
(Voir Recueil 2006, paragr. 589; 348e rapport, cas no 2364, paragr. 122; 351e rapport,
cas no 2569, paragr. 639.)
846. Les conséquences éventuelles à long terme d’une grève dans le secteur de l’enseignement
ne sauraient justifier l’interdiction des grèves.
(Voir Recueil 2006, paragr. 590; 348e rapport, cas no 2364, paragr. 122; 360e rapport,
cas no 2803, paragr. 340.)
847. Le comité a considéré que, dans les cas où un service minimum obligatoire
est admissible, comme dans le domaine du ramassage des ordures, des mesures
devraient être prises pour garantir qu’un tel service minimum évite la mise en danger
de la santé ou de la sécurité publique.
(Voir 309e rapport, cas no 1916, paragr. 100.)
848. Le fait d’établir un lien entre les restrictions aux actions revendicatives et l’entrave
aux échanges et au commerce permet de porter atteinte à une large gamme
d’actions légitimes. Certes, l’impact économique des actions revendicatives et leurs
effets sur les échanges et le commerce sont regrettables; cependant, ils ne suffisent pas
à rendre le service «essentiel» et le droit de grève devrait être maintenu.
(Voir Recueil 2006, paragr. 592; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 715; 362e rapport,
cas no 2723, paragr. 842; 363e rapport, cas no 2602, paragr. 465; 365e rapport, cas no 2829,
paragr. 577, cas no 2723, paragr. 778; 370e rapport, cas no 2983, paragr. 285; 372e rapport,
cas no 3038, paragr. 469.)
849. Dans les services essentiels, certaines catégories d’employés, par exemple les
ouvriers et les jardiniers des hôpitaux ne devraient pas être privées du droit de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 593; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 851; 374e rapport,
cas no 3057, paragr. 215.)
850. L’exclusion du droit de grève des travailleurs du secteur privé en période d’essai
n’est pas compatible avec les principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 594.)
851. Bien qu’il ait toujours été sensible au fait que l’interruption prolongée des services
postaux est susceptible d’affecter des tiers totalement étrangers aux différends
opposant les parties et qu’elle peut par exemple avoir de graves répercussions pour
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
162
les entreprises et affecter directement les individus (en particulier les allocataires des
indemnités chômage ou d’aide sociale et les personnes âgées qui dépendent du versement
de leur pension de retraite), le comité a néanmoins considéré que, quoi qu’il en
soit, pour aussi regrettables que soient ces conséquences, elles ne sauraient justifier
une limitation des droits fondamentaux à la négociation collective, à moins qu’elles
n’atteignent une telle gravité qu’elles mettent en danger la vie, la sécurité ou la santé
de la personne dans une partie ou dans la totalité de la population.
(Voir 316e rapport, cas no 1985, paragr. 322 et 323; et 367e rapport, cas no 2894, paragr. 336.)
852. Dans un cas où la convention collective prévoyait la classification de certaines
services comme essentiels, le comité a observé que, en règle générale, la liste figurant
dans la convention collective, qui allait bien au-delà du secteur minier pour couvrir
la fourniture de services à la collectivité en général, correspondait à sa notion des
services essentiels. Bien que certains des services répertoriés dans la convention, tels
que ceux qui concernent l’assainissement et les transports, ne relevaient pas des services
essentiels au sens strict du terme, les dites restrictions du droit de grève résultaient
d’un accord librement conclu par les deux parties.
(Voir 346e rapport, cas no 2500, paragr. 325.)
D. Garanties compensatoires en cas d’interdiction de la grève
dans la fonction publique ou dans les services essentiels
853. Lorsque le droit de grève a été restreint ou supprimé dans certaines entreprises
ou services considérés comme essentiels, les travailleurs devraient bénéficier d’une
protection adéquate de manière à compenser les restrictions qui auraient été imposées
à leur liberté d’action pendant les différends survenus dans lesdites entreprises
ou lesdits services.
(Voir Recueil 2006, paragr. 595; 344e rapport, cas no 2467, paragr. 578; 349e rapport,
cas no 2552, paragr. 421; 350e rapport, cas no 2543, paragr. 726; 356e rapport, cas no 2654,
paragr. 376; 367e rapport, cas no 2860, paragr. 1182; 370e rapport, cas no 2956, paragr. 142.)
854. Au cas où une intervention serait nécessaire pour des raisons de sécurité, il
serait souhaitable que toutes les occasions possibles soient données aux parties pour
négocier collectivement, pendant un laps de temps suffisant, avec le concours d’une
médiation indépendante ainsi que de mécanismes et de procédures établis avec une
seule finalité : faciliter les négociations collectives.
(Voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1095.)
855. Partant du principe qu’un accord négocié, aussi insatisfaisant qu’il puisse être,
est préférable à une solution imposée, il devrait toujours être possible aux parties de
retourner volontairement à la table des négociations, ce qui implique que tout mécanisme
de règlement des conflits adopté devrait inclure la possibilité de suspendre le
processus d’arbitrage obligatoire si les parties veulent reprendre la négociation.
(Voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1095.)
163
10. Droit de grève
856. En ce qui concerne la nature des «garanties appropriées» en cas de restriction
de la grève dans les services essentiels et dans la fonction publique, la limitation du
droit de grève devrait s’accompagner de procédures de conciliation et d’arbitrage
appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés
devraient pouvoir participer, et dans lesquelles les sentences rendues devraient être
appliquées entièrement et rapidement.
(Voir Recueil 2006, paragr. 596; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1256; 344e rapport,
cas no 2484, paragr. 1095; 349e rapport, cas no 2552, paragr. 421; 350e rapport, cas no 2543,
paragr. 726; 353e rapport, cas no 2631, paragr. 1357; 356e rapport, cas no 2654, paragr. 376;
359e rapport, cas no 2383, paragr. 182; 367e rapport, cas no 2885, paragr. 384, cas no 2929,
paragr. 637; 370e rapport, cas no 2956, paragr. 142; 371e rapport, cas no 2203, paragr. 534.)
857. Le fait que le pouvoir budgétaire est réservé à l’autorité législative ne devrait
pas avoir pour conséquence d’empêcher l’application des jugements rendus par un tribunal
d’arbitrage obligatoire. Toute déviation de ce principe affaiblirait l’application
effective du principe d’après lequel lorsque les grèves sont interdites ou restreintes
pour les travailleurs des services essentiels, une telle interdiction doit s’accompagner
de l’existence d’un mécanisme de conciliation et d’une procédure impartiale d’arbitrage
dont les jugements soient obligatoires pour les deux parties.
(Voir Recueil 2006, paragr. 597; 359e rapport, cas no 2383, paragr. 181.)
858. En cas de médiation et d’arbitrage de conflits collectifs, l’essentiel réside dans
le fait que tous les membres des organes chargés de telles fonctions doivent non seulement
être strictement impartiaux, mais doivent apparaître comme tels aussi bien
aux employeurs qu’aux travailleurs, afin que la confiance dont ils jouissent de la part
des deux parties et dont dépend le succès de l’action, même s’il s’agit d’arbitrage obligatoire,
soit maintenue.
(Voir Recueil 2006, paragr. 598; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1256; 356e rapport,
cas no 2654, paragr. 382; 359e rapport, cas no 2383, paragr. 183; 367e rapport, cas no 2894,
paragr. 341; 370e rapport, cas no 2983, paragr. 286.)
859. La désignation par le ministre des cinq membres du tribunal d’arbitrage pour
les services essentiels met en cause l’indépendance et l’impartialité d’un tel tribunal
ainsi que la confiance des intéressés dans un tel système. Les organisations représentatives
des travailleurs et des employeurs, respectivement, devraient pouvoir choisir
les membres du tribunal d’arbitrage pour les services essentiels qui les représentent.
(Voir Recueil 2006, paragr. 599.)
860. Les employés privés du droit de grève parce qu’ils rendent des services essentiels
doivent bénéficier de garanties appropriées destinées à sauvegarder leurs intérêts;
par exemple, interdiction correspondante du droit de lock-out, établissement d’une
procédure paritaire de conciliation et, seulement lorsque la conciliation échoue, institution
d’une procédure paritaire d’arbitrage.
(Voir Recueil 2006, paragr. 600; 355e rapport, cas no 2659, paragr. 241; 371e rapport,
cas no 2988, paragr. 854.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
164
861. En se référant à sa recommandation selon laquelle des restrictions au droit de
grève seraient acceptables si elles sont assorties de procédures de conciliation et d’arbitrage,
le comité a précisé que cette recommandation ne concerne pas l’interdiction
absolue du droit de grève, mais la restriction de ce droit dans les services essentiels ou
dans la fonction publique, auquel cas il a établi qu’il devrait être prévu des garanties
appropriées pour protéger les intérêts des travailleurs.
(Voir Recueil 2006, paragr. 601.)
862. Au sujet de l’obligation faite aux parties de payer les services de conciliation
et de médiation-arbitrage, le comité a conclu que, si les coûts sont d’un montant
raisonnable et ne nuisent pas à la capacité des parties, en particulier celles disposant
de ressources financières insuffisantes, de recourir aux services offerts, il n’y a pas
violation de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 602.)
863. Le comité ne prend pas position sur la supériorité de la conciliation par rapport
à la médiation étant donné qu’il s’agit de deux moyens d’aider les parties à
atteindre un accord volontaire. Il ne prend pas position non plus sur la supériorité
d’un système de conciliation distinct de l’arbitrage par rapport à un système combiné
médiation-arbitrage tant que les membres des organes chargés de ces fonctions sont
impartiaux et apparaissent comme tels.
(Voir Recueil 2006, paragr. 603.)
Situations dans lesquelles un service minimum
peut être imposé pour garantir la sécurité des personnes
et des installations (service minimum de sécurité)
864. Les restrictions au droit de grève dans certains secteurs visant à ce que
soient respectées des prescriptions statutaires de sécurité constituent des restrictions
normales.
(Voir Recueil 2006, paragr. 604.)
865. Une législation obligeait les organisations professionnelles de toutes les activités
à ce que le personnel nécessaire à la sécurité des installations et à la prévention
des accidents continue de fournir ses services, les divergences concernant le personnel
nécessaire devant être tranchées par un tribunal administratif d’arbitrage.
Le comité a estimé que cette limitation du droit de grève pouvait être considérée
comme admissible.
(Voir Recueil 2006, paragr. 605.)
165
10. Droit de grève
Situations et conditions dans lesquelles pourrait être imposé
un service minimum de fonctionnement
866. Le maintien de services minima en cas de grève ne devrait être possible que: 1)
dans les services dont l’interruption risquerait de mettre en danger la vie, la sécurité
ou la santé de la personne dans une partie ou dans l’ensemble de la population (services
essentiels au sens strict du terme); 2) dans les services qui ne sont pas essentiels
au sens strict du terme mais où les grèves d’une certaine ampleur et durée pourraient
provoquer une crise nationale aiguë menaçant les conditions normales d’existence de
la population; et 3) dans les services publics d’importance primordiale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 606; 343e rapport, cas no 2355, paragr. 469, cas no 2432,
paragr. 1024; 344e rapport, cas no 2509, paragr. 1242; 346e rapport, cas no 2506, paragr. 1071;
348e rapport, cas no 2355, paragr. 308; 349e rapport, cas no 2548, paragr. 538, cas no 2534,
paragr. 558; 362e rapport, cas no 2841, paragr. 1037; 364e rapport, cas no 2727, paragr. 1082.)
867. Un service minimum pourrait être approprié comme solution de rechange possible
dans les situations où une limitation importante ou une interdiction totale de
la grève n’apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de grève de la
plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d’assurer la satisfaction
des besoins de base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu
des installations.
(Voir Recueil 2006, paragr. 607; 344e rapport, cas no 2461, paragr. 313, cas no 2484,
paragr. 1094; 348e rapport, cas no 2433, paragr. 48; 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1153;
350e rapport, cas no 2543, paragr. 727; 354e rapport, cas no 2581, paragr. 1114; 356e rapport,
cas no 2654, paragr. 371; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 768, cas no 2841, paragr. 1041;
371e rapport, cas no 2988, paragr. 851; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 614; 377e rapport,
cas no 3107, paragr. 240.)
868. En cas de paralysie d’un service non essentiel au sens strict du terme dans un
secteur de très haute importance dans le pays, l’imposition d’un service minimum
peut se justifier.
(Voir 362e rapport, cas no 2841, paragr. 1041; 367e rapport, cas no 2894, paragr. 339;
370e rapport, cas no 2983, paragr. 285.)
869. Il serait souhaitable qu’en cas d’action collective qui aurait paralysé un secteur
qui, s’il n’est pas un service essentiel au sens strict du terme, est toutefois un secteur
très important de l’économie – en l’occurrence le secteur pétrolier et gazier -, les parties
concernées puissent conclure un accord relatif à des services minimums suffisants
pour répondre aux préoccupations du gouvernement face aux conséquences
d’un arrêt total de la production de pétrole et de gaz, tout en préservant le respect
des principes du droit de grève et du caractère volontaire de la négociation collective.
Le comité a donc encouragé le gouvernement à examiner la possibilité de mettre en
place un service minimum dans ce secteur en cas d’action collective dont la portée et
la durée pourraient entraîner des dommages irréversibles.
(Voir 372e rapport, cas no 3038, paragr. 471 et 472.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
166
870. Des mesures devraient être prises pour garantir que le service minimum évite
la mise en danger de la santé ou de la sécurité publique.
(Voir Recueil 2006, paragr. 608; 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1094.)
871. Il est légitime qu’un service minimum puisse être demandé en cas de grève
dont l’étendue et la durée pourraient provoquer une situation de crise nationale aiguë
mais, dans ce dernier cas, les organisations syndicales devraient pouvoir participer à
sa définition tout comme les employeurs et les autorités publiques.
(Voir Recueil 2006, paragr. 609; 349e rapport, cas no 2549, paragr. 368.)
872. La réquisition d’une partie des salariés grévistes dans le secteur pétrolier pour
assurer le besoin de ravitaillement des véhicules prioritaires pourrait s’apparenter à la
mise en place provisoire d’un service minimum pour répondre à une difficulté d’ordre
public qui pourrait avoir un impact sur la vie, la santé ou la sécurité de la population.
(Voir 362e rapport, cas no 2841, paragr. 1038.)
873. Un service minimum peut être maintenu en cas de grève dont l’étendue et
la durée pourraient provoquer une situation de crise nationale aiguë telle que les
conditions normales d’existence de la population pourraient être en danger. Pour
être acceptable, ce service minimum devrait se limiter aux opérations strictement
nécessaires pour ne pas compromettre la vie ou les conditions normales d’existence
de tout ou partie de la population, et les organisations de travailleurs devraient pouvoir
participer à sa définition tout comme les employeurs et les autorités publiques.
(Voir Recueil 2006, paragr. 610; 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1094; 349e rapport,
cas no 2552, paragr. 422; 354e rapport, cas no 2587, paragr. 1057; 356e rapport, cas no 2696,
paragr. 308; 363e rapport, cas no 2854, paragr. 1039; 371e rapport, cas no 2988, paragr. 851;
372e rapport, cas no 3038, paragr. 471.)
874. Le service minimum doit être limité aux opérations nécessaires pour que la
satisfaction des besoins de base de la population ou des exigences minima du service
soit assurée, tout en garantissant que le champ du service minimum n’ait pas comme
conséquence de rendre la grève inefficace.
(Voir 356e rapport, cas no 2696, paragr. 309.)
875. Il serait souhaitable lorsque cela est opportun que les négociations sur la définition
et l’organisation du service minimum ne se tiennent pas au cours du conflit de
travail afin que toutes les parties puissent en étudier les enjeux avec la pleine franchise
et l’objectivité indispensables.
(Voir 356e rapport, cas no 2654, paragr. 375.)
876. Des négociations sur le service minimum devraient en principe se tenir avant
un différend du travail, de manière à ce que toutes les parties puissent examiner la
question avec l’objectivité et le détachement nécessaires. Tout désaccord devrait être
réglé par un organisme indépendant, comme par exemple les autorités judiciaires, et
non par le ministère concerné.
(Voir 346e rapport, cas no 2506, paragr. 1073; 349e rapport, cas no 2506, paragr. 124;
362e rapport, cas no 2841, paragr. 1039.)
167
10. Droit de grève
877. Le comité a demandé à un gouvernement de prendre les mesures nécessaires
pour garantir que toute définition des services minima devant être assurés en cas
de grève soit le résultat de négociations entre les organisations d’employeurs et de
travailleurs du secteur maritime, étant entendu que ces négociations peuvent avoir
lieu sinon avant le début d’un conflit, du moins entre le dépôt du préavis de grève et
la date prévue pour le déclenchement de la grève en question, et ce d’autant plus que
l’ordre de mobilisation civile est toujours en vigueur.
(Voir 362e rapport, cas no 2838, paragr. 1076.)
878. Même si, idéalement, un service minimum devrait être négocié par les parties
concernées de préférence avant l’apparition d’un conflit, le comité reconnaît que le
service minimum à fournir dans les cas où la nécessité ne s’en fait sentir qu’après
l’annonce de la grève ne peut être mis en place que durant le conflit.
(Voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1094; 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1152.)
879. En l’absence de tout accord sur ce point entre les parties au niveau de l’entreprise,
un organe indépendant pourrait être établi afin d’imposer un service minimum
suffisant pour répondre aux préoccupations du gouvernement concernant les conséquences
du conflit, tout en préservant le respect des principes du droit de grève et du
caractère volontaire de la négociation collective.
(Voir 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1152.)
880. Le comité a signalé l’importance d’assurer que les dispositions relatives au service
minimum à appliquer en cas de grève dans un service essentiel soient déterminées
avec clarté, appliquées strictement et connues en temps utile par les intéressés.
(Voir Recueil 2006, paragr. 611; 344e rapport, cas no 2461, paragr. 313.)
881. Dans la détermination des services minima et du nombre de travailleurs qui
en garantissent le maintien, il importe que participent non seulement les pouvoirs
publics, mais aussi les organisations d’employeurs et de travailleurs concernées. En
effet, outre que cela permettrait un échange de vues réfléchi sur ce que doivent être en
situation réelle les services minima strictement nécessaires, cela contribuerait aussi
à garantir que les services minima ne soient pas étendus au point de rendre la grève
inopérante en raison de son peu d’impact et à éviter de donner aux organisations
syndicales l’impression que l’échec de la grève tient à ce que le service minimum a été
prévu d’une manière trop large et fixé unilatéralement.
(Voir Recueil 2006, paragr. 612; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1255; 344e rapport,
cas no 2509, paragr. 1243; 346e rapport, cas no 2506, paragr. 1073; 349e rapport, cas no 2548,
paragr. 538, cas no 2534, paragr. 559; 350e rapport, cas no 2543, paragr. 727; 354e rapport,
cas no 2587, paragr. 1059, cas no 2581, paragr. 1114; 356e rapport, cas no 2696, paragr. 309,
cas no 2654, paragr. 372; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 768, cas no 2841, paragr. 1039,
cas no 2838, paragr. 1076.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
168
882. Les organisations de travailleurs et d’employeurs intéressées doivent pouvoir
participer à la détermination des services minimums qui doivent être garantis et, en
cas de divergences sur ce point, la législation doit prévoir un arbitrage par un organisme
indépendant et non par l’autorité administrative.
(Voir 348e rapport, cas no 2540, paragr. 817, cas no 2530, paragr. 1191; 349e rapport,
cas no 2548, paragr. 539, cas no 2534, paragr. 559.)
883. La définition unilatérale du service minimum par l’employeur quand les
négociations ont échoué n’est pas conforme aux principes de la liberté syndicale.
Tout désaccord à cet égard doit être réglé par un organisme indépendant ayant la
confiance des parties concernées.
(Voir 349e rapport, cas no 2525, paragr. 188.)
884. En ce qui concerne l’allégation relative à l’exigence légale d’un service minimum
lorsqu’il s’agit d’une grève qui touche des services publics essentiels et que c’est l’administration
du travail qui réglera toute divergence quant à la composition de ce
service minimum, le comité estime que la législation devrait prévoir le règlement de
pareille divergence par un organe indépendant et non par le ministère du Travail ou
le ministère ou l’entreprise publique concernés.
(Voir Recueil 2006, paragr. 613; 349e rapport, cas no 2534, paragr. 559; 350e rapport,
cas no 2543, paragr. 727; 355e rapport, cas no 2659, paragr. 241; 362e rapport, cas no 2741,
paragr. 768; 376e rapport, cas no 3096, paragr. 890.)
885. Une opinion définitive fondée sur tous les éléments d’appréciation pour savoir
si le niveau des services minima a été ou non le niveau indispensable ne peut être
émise que par l’autorité judiciaire, étant donné que, pour la formuler, cela suppose
en particulier une connaissance approfondie de la structure et du fonctionnement
des entreprises et des établissements concernés, ainsi que des répercussions effectives
des actions de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 614; 356e rapport, cas no 2654, paragr. 375; 376e rapport,
cas no 3096, paragr. 891.)
Exemples concrets dans lesquels le comité a considéré que les circonstances
étaient réunies pour imposer un service minimum de fonctionnement
886. Le service des transbordeurs n’est pas un service essentiel. Toutefois, compte
tenu des difficultés et des inconvénients que pourrait entraîner une interruption des
services de transbordeurs pour la population installée dans les îles le long de la côte,
un service minimum peut être maintenu en cas de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 615; 346e rapport, cas no 2506, paragr. 1071; 349e rapport,
cas no 2506, paragr. 124; 362e rapport, cas no 2838, paragr. 1076.)
887. Dans le secteur maritime, le service minimum peut se rapporter à la fréquence
des traversées au lieu du nombre des membres d’équipage travaillant à bord des navires.
(Voir 353e rapport, cas no 2506, paragr. 101.)
169
10. Droit de grève
888. Les services qu’assurent l’Office national des ports et les ports ne constituent
pas des services essentiels, même s’il s’agit d’un service public important dans lequel
pourrait être prévu le maintien d’un service minimum en cas de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 616; 348e rapport, cas no 2540, paragr. 817; 353e rapport,
cas no 2619, paragr. 573; 357e rapport, cas no 2690, paragr. 943; 363e rapport, cas no 2854,
paragr. 1039.)
889. Le respect de l’obligation de maintenir un service minimum des activités du
métro pour satisfaire aux nécessités minimales des collectivités locales ne va pas à
l’encontre des principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 617; 344e rapport, cas no 2509, paragr. 1242; 362e rapport,
cas no 2741, paragr. 768.)
890. En cas de grève des travailleurs du transport métropolitain, il conviendrait de
confier à un organe indépendant la tâche d’établir un service minimum en l’absence
d’un accord entre les parties.
(Voir Recueil 2006, paragr. 618; 362e rapport, cas no 2741, paragr. 768.)
891. L’établissement d’un service minimum en cas de grève dans les chemins de fer
est légitime.
(Voir Recueil 2006, paragr. 619; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 614.)
892. Compte tenu de la situation particulière des transports ferroviaires dans un
pays, une grève totale et prolongée pourrait provoquer une situation de crise nationale
aiguë compromettant le bien-être de la population, ce qui peut justifier dans certaines
conditions une intervention qui établirait, par exemple, un service minimum.
(Voir Recueil 2006, paragr. 620.)
893. Le transport de voyageurs et de marchandises ne constitue pas un service essentiel
au sens strict du terme; il s’agit toutefois d’un service public d’une importance
primordiale où l’imposition d’un service minimum en cas de grève peut se justifier.
(Voir Recueil 2006, paragr. 621; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1254; 346e rapport,
cas no 1865, paragr. 755, cas no 2506, paragr. 1071, cas no 2488, paragr. 1332; 348e rapport,
cas no 2540, paragr. 817, cas no 2530, paragr. 1191; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 711;
362e rapport, cas no 2838, paragr. 1076; 377e rapport, cas no 3107, paragr. 240.)
894. Le maintien d’un service minimum peut être prévu dans le service des postes.
(Voir Recueil 2006, paragr. 622.)
895. L’institut monétaire, les banques et le secteur du pétrole constituent des secteurs
où un service minimum négocié pourrait être assuré en cas de grève en vue de
garantir que les besoins essentiels des consommateurs soient satisfaits.
(Voir Recueil 2006, paragr. 624; 346e rapport, cas no 1865, paragr. 755; 348e rapport,
cas no 2355, paragr. 308; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 711; 364e rapport, cas no 2727,
paragr. 1082.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
170
896. Bien que les services bancaires ne soient pas des services essentiels au sens
strict du terme, le comité reconnaît que, afin d’éviter de causer des dommages irréversibles
ainsi que des préjudices aux tiers, à savoir les usagers ou les consommateurs
victimes des effets économiques des conflits collectifs, les autorités pourraient
imposer le respect des procédures relatives au service minimum convenues par les
parties plutôt que d’imposer l’arbitrage obligatoire.
(Voir 349e rapport, cas no 2545, paragr. 1152.)
897. Compte tenu du fait que le secteur pétrolier est un secteur stratégique qui revêt
une importance fondamentale pour le développement économique du pays, rien
n’empêche d’imposer un service minimal dans ce secteur.
(Voir 343e rapport, cas no 2355, paragr. 469.)
898. Des services minima peuvent être établis dans le secteur de l’enseignement en
pleine consultation avec les partenaires sociaux dans les cas de grève de longue durée.
(Voir Recueil 2006, paragr. 625; 353e rapport, cas no 2619, paragr. 573; 354e rapport,
cas no 2587, paragr. 1057; 356e rapport, cas no 2696, paragr. 308; 360e rapport, cas no 2784,
paragr. 243, cas no 2803, paragr. 340.)
899. Le comité a considéré qu’il n’est pas contraire aux principes de la liberté syndicale
d’établir un service minimum dans le secteur de l’éducation.
(Voir 354e rapport, cas no 2587, paragr. 1058.)
900. La décision prise par un gouvernement d’imposer un service minimum dans
la division de la santé animale alors que sévissait une maladie très contagieuse n’enfreint
pas les principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 626.)
901. L’absence prolongée d’une maintenance qualifiée des ascenseurs et de la fourniture
de services de base peut potentiellement créer un danger à la santé et sécurité
publiques.
(Voir 344e rapport, cas no 2484, paragr. 1093.)
902. Tenant compte du fait que les services rendus par l’Institut national de météorologie
et de géophysique sont essentiels pour que le contrôle du trafic aérien puisse
être effectué dans des conditions de sécurité, il s’agit d’une institution dans laquelle
des services minima peuvent être établis quand les travailleurs décident de recourir
à la grève.
(Voir 349e rapport, cas no 2534, paragr. 558.)
903. Dans le cas en espèce concernant la détermination par l’employeur des services
minima, le comité a estimé que la production d’aluminium ne peut être considérée
comme un service essentiel pour lequel un service minimum peut être exigé.
(Voir 346e rapport, cas no 2525, paragr. 1240.)
171
10. Droit de grève
904. Certains services, tels que la délivrance de permis de chaudières et appareils
sous pression, la délivrance de permis pour les détectives privés et les agents de sécurité,
le personnel de blanchisserie et les chauffeurs d’une division «de la vie en société»
dépendant des autorités publiques ne devraient pas être unilatéralement déclarés
comme «essentiels» dans lesquels des services minima doivent être maintenus.
(Voir 356e rapport, cas no 2654, paragr. 371.)
Non observation du service minimum
905. Même si la décision en dernier ressort de suspendre ou d’annuler le statut syndical
à une organisation de travailleurs est prise par un organe judiciaire indépendant, de telles
mesures ne devraient pas être adoptées en cas d’inobservation d’un service minimum.
(Voir Recueil 2006, paragr. 627.)
906. Le comité a demandé à un gouvernement de garantir que le recours à la réquisition
civile ne soit possible que dans les cas où les services minima établis conformément
aux principes de la liberté syndicale ne seraient pas respectés.
(Voir 349e rapport, cas no 2534, paragr. 560.)
Déclaration d’illégalité de la grève
907. La décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement
mais à un organe indépendant des parties et jouissant de leur confiance.
(Voir Recueil 2006, paragr. 628; 342e rapport, cas no 2356, paragr. 360; 343e rapport,
cas no 2355, paragr. 470; 346e rapport, cas no 2489, paragr. 464; 348e rapport, cas no 2355,
paragr. 309, cas no 2356, paragr. 368; 349e rapport, cas no 2513, paragr. 329, cas no 2489,
paragr. 686; 351e rapport, cas no 2613, paragr. 1091; 353e rapport, cas no 2614, paragr. 401,
cas no 2650, paragr. 420, cas no 2619, paragr. 575; 354e rapport, cas no 2587, paragr. 1060;
355e rapport, cas no 2664, paragr. 1088; 357e rapport, cas no 2664, paragr. 811, cas no 2697,
paragr. 984; 358e rapport, cas no 2735, paragr. 605; 360e rapport, cas no 2664, paragr. 954;
362e rapport, cas no 2723, paragr. 842, cas no 2794, paragr. 1137; 363e rapport, cas no 2837,
paragr. 310, cas no 2867, paragr. 357; 364e rapport, cas no 2866, paragr. 873; 365e rapport,
cas no 2723, paragr. 778; 368e rapport, cas no 2867, paragr. 17; 370e rapport, cas no 2994,
paragr. 735; 371e rapport, cas no 2928, paragr. 313, cas no 3033, paragr. 763; 374e rapport,
cas no 3029, paragr. 109, cas no 3032, paragr. 416.)
908. Le comité a prié un gouvernement de prendre les mesures nécessaires, y compris,
si besoin est, des mesures législatives pour que la décision de déclarer une grève
légale ou illégale n’appartienne pas au gouvernement, mais à un organe indépendant
et impartial.
(Voir 374e rapport, cas no3029, paragr. 109)
909. La décision de déclarer la grève illégale ne devrait pas appartenir au gouvernement
mais à un organe indépendant et impartial.
(Voir 378e rapport, cas no 3032, paragr. 392)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
172
910. Pour déclarer une grève ou une cessation d’activités illégales, l’autorité judiciaire
est l’autorité indépendante par excellence.
(Voir 343e rapport, cas no 2355, paragr. 471; 348e rapport, cas no 2355, paragr. 309,
cas no 2356, paragr. 368.)
911. Les décisions en dernier ressort d’illégalité des grèves ne devraient pas être
prononcées par le gouvernement, notamment dans les cas où ce dernier est partie
au conflit.
(Voir Recueil 2006, paragr. 629; 343e rapport, cas no 2355, paragr. 471; 348e rapport,
cas no 2355, paragr. 309; 362e rapport, cas no 2794, paragr. 1137; 367e rapport, cas no 2860,
paragr. 1182.)
912. Le comité a estimé contraire à la liberté syndicale que le droit de qualifier
une grève dans la fonction publique d’illégale appartienne aux chefs des institutions
publiques, qui sont juges et parties dans l’affaire.
(Voir Recueil 2006, paragr. 630; 358e rapport, cas no 2735, paragr. 605; 367e rapport,
cas no 2860, paragr. 1182.)
913. A propos d’une circulaire officielle concernant l’illégalité de toute grève dans le
secteur public, le comité a estimé que de telles questions ne devraient pas relever de
la compétence des autorités administratives.
(Voir Recueil 2006, paragr. 631.)
Suspension de la grève
914. La responsabilité de la suspension d’une grève ne devrait pas incomber au
gouvernement mais à un organe indépendant qui ait la confiance de toutes les parties
concernées.
(Voir 374e rapport, cas no 3084, paragr. 872.)
915. Le comité a prié un gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin de
modifier la législation de façon à s’assurer que la décision finale de suspendre ou non
une grève appartient à un organe indépendant et impartial.
(Voir 374e rapport, cas no 3084, paragr. 872.)
916. Une disposition qui autorise le gouvernement à suspendre une grève et à
imposer l’arbitrage obligatoire pour des motifs de sécurité nationale ou de santé
publique, n’est pas en soi contraire aux principes de la liberté syndicale si elle est
appliqué en toute bonne foi et conformément au sens ordinaire des termes «sécurité
nationale» et «santé publique».
(Voir 374e rapport, cas no 3084, paragr. 871.)
173
10. Droit de grève
Ordre de reprise du travail, embauche de travailleurs
pendant la grève, réquisition
917. On ne devrait procéder au remplacement des grévistes que dans les cas suivants
: a) en cas de grève dans un service essentiel au sens strict du terme pour lequel
la législation interdit la grève et b) quand apparaît un état de crise nationale aiguë.
(Voir 354e rapport, cas no 2587, paragr. 1061.)
918. L’embauche de travailleurs pour briser une grève dans un secteur qui ne saurait
être considéré comme un secteur essentiel au sens strict du terme, où la grève pourrait
être interdite, constitue une violation grave de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 632; 343e rapport, cas no 2472, paragr. 966; 344e rapport,
cas no 2465, paragr. 722; 346e rapport, cas no 1865, paragr. 757; 349e rapport, cas no 2562,
paragr. 406, cas no 2548, paragr. 538; 350e rapport, cas no 2563, paragr. 230; 353e rapport,
cas no 2619, paragr. 574; 357e rapport, cas no 2638, paragr. 797, cas no 2697, paragr. 983;
360e rapport, cas no 2770, paragr. 372; 372e rapport, cas no 3011, paragr. 650; 376e rapport,
cas no 3096, paragr. 893.)
919. Si une grève est légale, l’utilisation d’une main-d’oeuvre étrangère à l’entreprise
afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque
d’atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 633; 343e rapport, cas no 2472, paragr. 966; 344e rapport,
cas no 2365, paragr. 1448; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 711; 357e rapport, cas no 2638,
paragr. 797; 360e rapport, cas no 2770, paragr. 371.)
920. Lorsque, dans un secteur important de l’économie, un arrêt total et prolongé
du travail peut provoquer une situation telle que la vie, la santé ou la sécurité de la
population peuvent être mises en danger, il semble légitime qu’un ordre de reprise
du travail soit applicable à une catégorie de personnel déterminée en cas de grève
dont l’étendue et la durée pourraient provoquer une telle situation. Par contre,
exiger la reprise du travail en dehors de tels cas est contraire aux principes de la
liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 634; 344e rapport, cas no 2467, paragr. 578; 346e rapport,
cas no 2506, paragr. 1075.)
921. L’usage de la force armée et la réquisition de grévistes pour briser une grève de
revendications professionnelles, en dehors des services essentiels ou dans des circonstances
de la plus haute gravité, constituent une violation grave de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 635.)
922. L’utilisation des forces armées ou d’un autre groupe de personnes pour remplir
des fonctions abandonnées à l’occasion d’un conflit du travail ne saurait, si la grève
est par ailleurs légale, être justifiée que par la nécessité d’assurer le fonctionnement
de services ou d’industries dont l’arrêt créerait une situation de crise aiguë.
(Voir Recueil 2006, paragr. 636; 360e rapport, cas no 2770, paragr. 372.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
174
923. Tout en reconnaissant que l’arrêt du fonctionnement de services ou d’entreprises
tels que les sociétés de transports, de chemin de fer ou du secteur pétrolier
pourrait être de nature à perturber la vie normale de la communauté, il serait difficile
d’admettre que l’arrêt de tels services ou entreprises soit par définition propre à
engendrer un état de crise nationale aiguë. Le comité a estimé en conséquence que
les mesures de mobilisation des travailleurs prises lors de conflits dans de tels services
étaient de nature à restreindre le droit de grève de ceux-ci en tant que moyen de
défense de leurs intérêts professionnels et économiques.
(Voir Recueil 2006, paragr. 637.)
924. En cas de grève, la réquisition des travailleurs de l’industrie sidérurgique, la
menace de licencier les piquets de grève et le recrutement de travailleurs sous-payés
et interdits de syndicalisation pour briser des grèves légitimes et pacifiques dans les
services qui ne sont pas essentiels au sens strict du terme ne sont pas en conformité
avec le respect de la liberté syndicale.
(Voir 236e rapport, cas no 1270, paragr. 620.)
925. Le comité admet l’embauche de non-grévistes en cas de services essentiels tels
que le service de santé.
(Voir 376e rapport, cas no 3096, paragr. 893.)
926. Lorsqu’un service public essentiel, tel que le service des téléphones, est interrompu
par une grève illégale, un gouvernement peut être appelé, dans l’intérêt
général, à assumer la responsabilité d’en assurer le fonctionnement et, à cette fin,
il peut considérer comme nécessaire de faire appel aux forces armées ou à un autre
groupe de personnes pour remplir les fonctions qui ont été abandonnées et prendre
les mesures propres à permettre à ces personnes d’accéder aux locaux où de telles
fonctions doivent s’exercer.
(Voir Recueil 2006, paragr. 639.)
Ingérence des autorités pendant la grève
927. La simple possibilité que le ministre intervienne dans les grèves en dehors
des secteurs des services essentiels au sens strict du terme, secteurs qui sont fermement
ancrés dans la loi, ainsi que l’habitude d’intervenir dans des secteurs qui
ne semblent pas, à première vue, indispensables à l’intérêt national, ajoutées aux
nombreuses prescriptions à respecter pour qu’une grève soit légale et aux sanctions
graves en cas de grève illégale, ont inévitablement une incidence sur le cadre et le
climat des négociations.
(Voir 346e rapport, cas no 2488, paragr. 1330.)
175
10. Droit de grève
928. Dans un cas où le gouvernement avait procédé à une consultation générale du
personnel pour déterminer sa volonté quant à la continuation ou l’arrêt d’une grève,
l’organisation du référendum ayant été confiée à un organisme de caractère permanent
et indépendant et les travailleurs ayant bénéficié de la garantie du secret de
vote, le comité a insisté sur l’opportunité qu’il y aurait à consulter les organisations
représentatives afin d’assurer qu’aucune influence ou aucune pression de la part des
autorités ne vienne affecter en pratique l’exercice du droit de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 640.)
929. L’intervention de l’armée dans le règlement des différends collectifs ne favorise
pas un climat exempt de violence, de pression ou de menaces, essentiel à l’exercice
des droits syndicaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 641.)
Intervention de la police pendant la grève
930. Le comité a recommandé de classer des allégations concernant l’emploi des
forces de sécurité lorsque les faits prouvaient que l’intervention de celles-ci avait été
limitée au maintien de l’ordre public et n’avait pas porté atteinte à l’exercice légitime
du droit de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 642.)
931. L’emploi de la police pour briser une grève constitue une atteinte aux
droits syndicaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 643; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 841.)
932. Les autorités ne devraient avoir recours à la force publique dans des cas de
mouvements de grève que dans des situations présentant un caractère de gravité et
où l’ordre public serait sérieusement menacé.
(Voir Recueil 2006, paragr. 644; 340e rapport, cas no 2416, paragr. 1024; 349e rapport,
cas no 2564, paragr. 611; 351e rapport, cas no 2581, paragr. 1332; 362e rapport, cas no 2832,
paragr. 1333; 367e rapport, cas no 2938, paragr. 227.)
933. Si les travailleurs et leurs organisations ont l’obligation de respecter les lois du
pays, l’intervention des forces de sécurité dans une grève doit se borner strictement
au maintien de l’ordre public.
(Voir Recueil 2006, paragr. 645; 356e rapport, cas no 2478, paragr. 956; 367e rapport,
cas no 2938, paragr. 227.)
934. Si les travailleurs et leurs organisations sont tenus de respecter la légalité,
l’intervention des forces de police pour obtenir l’exécution d’une décision judiciaire
visant des grévistes, devrait quant à elle respecter les garanties élémentaires applicables
dans tout système respectueux des libertés publiques fondamentales.
(Voir Recueil 2006, paragr. 646; 350e rapport, cas no 2602, paragr. 697.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
176
935. Les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que si
l’ordre public est réellement menacé. L’intervention de la force publique devrait être
proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements
devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes
reçoivent des instructions appropriées en vue de supprimer le danger qu’impliquent
les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient
troubler l’ordre public.
(Voir Recueil 2006, paragr. 647; 340e rapport, cas no 2416, paragr. 1024 et 1025; 343e rapport,
cas no 2472, paragr. 966; 349e rapport, cas no 2564, paragr. 611; 359e rapport, cas no 2760,
paragr. 1169; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 841, cas no 2745, paragr. 1073; 363e rapport,
cas no 2792, paragr. 375; 364e rapport, cas no 2745, paragr. 1001; 370e rapport, cas no 2745,
paragr. 679; 372e rapport, cas no 3018, paragr. 494, cas no 3011, paragr. 650.)
Piquets de grève
936. Les piquets de grève organisés dans le respect de la loi ne doivent pas voir leur
action entravée par les autorités publiques.
(Voir Recueil 2006, paragr. 648; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1544; 356e rapport,
cas no 2488, paragr. 148, cas no 2652, paragr. 1216; 363e rapport, cas no 2792, paragr. 374;
376e rapport, cas no 3096, paragr. 894.)
937. L’interdiction des piquets de grève ne se justifierait que si la grève perdait son
caractère pacifique.
(Voir Recueil 2006, paragr. 649; 350e rapport, cas no 2252, paragr. 171; 356e rapport,
cas no 2488, paragr. 148, cas no 2652, paragr. 1216; 376e rapport, cas no 3096, paragr. 894.)
938. Le comité a jugé légitime une disposition légale interdisant aux piquets de
grève de troubler l’ordre public et de menacer les travailleurs qui poursuivraient
leurs occupations.
(Voir Recueil 2006, paragr. 650; 346e rapport, cas no 2473, paragr. 1544; 350e rapport,
cas no 2602, paragr. 694; 376e rapport, cas no 3096, paragr. 894.)
939. Le seul fait de participer à un piquet de grève et d’inciter fermement, mais pacifiquement,
les autres salariés à ne pas rejoindre leur poste de travail ne peut être considéré
comme une action illégitime. Il en va toutefois autrement lorsque le piquet de grève
s’accompagne de violences ou d’entraves à la liberté du travail par contrainte exercée
sur les non-grévistes, actes qui, dans beaucoup de pays, sont punis par la loi pénale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 651; 343e rapport, cas no 2432, paragr. 1026; 350e rapport,
cas no 2602, paragr. 682; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 716; 354e rapport, cas no 2668,
paragr. 676; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 666; 363e rapport, cas no 2867, paragr. 351,
cas no 2792, paragr. 374; 372e rapport, cas no 3025, paragr. 152.)
940. Le droit de grève doit s’exercer dans le respect de la liberté du travail des
non-grévistes prévue par la législation nationale, ainsi que du droit de la direction de
l’entreprise de pénétrer dans les locaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 652; 349e rapport, cas no 2548, paragr. 540; 350e rapport,
cas no 2602, paragr. 682; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 716.)
177
10. Droit de grève
941. Des restrictions légales exigeant que les piquets de grève ne puissent être placés
que près d’une entreprise ne portent pas atteinte aux principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 653.)
Déductions de salaire
942. Les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d’objections
du point de vue des principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 654; 344e rapport, cas no 2464, paragr. 330, cas no 2467,
paragr. 579; 353e rapport, cas no 2614, paragr. 397, cas no 2650, paragr. 421; 355e rapport,
cas no 2657, paragr. 573; 358e rapport, cas no 2302, paragr. 18; 359e rapport, cas no 2725,
paragr. 261; 362e rapport, cas no 2788, paragr. 252, cas no 2795, paragr. 326, cas no 2741,
paragr. 773, cas no 2794, paragr. 1138; 363e rapport, cas no 1865, paragr. 110, cas no 2867,
paragr. 356; 364e rapport, cas no 2847, paragr. 104; 367e rapport, cas no 2938, paragr. 230,
cas no 2885, paragr. 385, cas no 2904, paragr. 418, cas no 2929, paragr. 639; 371e rapport,
cas no 3001, paragr. 210; 372e rapport, cas no 3024, paragr. 430; 374e rapport, cas no 3029,
paragr. 110, cas no 3024, paragr. 558; 376e rapport, cas no 3101, paragr. 859, cas no 3096,
paragr. 892; 378e rapport, cas no 2897, paragr. 242.)
943. Des sanctions supplémentaires telles que les retenues sur le salaire supérieures
au montant correspondant à la durée de la grève revêtent, dans ce cas, un caractère
de sanction visant à réprimer une action légitime de revendication.
(Voir 362e rapport, cas no 2741, paragr. 773.)
944. Lorsque les déductions de salaire ont été supérieures aux montants correspondant
à la durée de la grève, le comité a rappelé que le fait d’imposer des sanctions
pour faits de grève n’est pas de nature à favoriser le développement de relations professionnelles
harmonieuses.
(Voir Recueil 2006, paragr. 655; 344e rapport, cas no 2467, paragr. 579; 378e rapport,
cas no 2897, paragr. 242.)
945. Ne pas payer les journées travaillées par des enseignants en remplacement
des jours de grève, en particulier lorsqu’un tel remplacement résulte d’un accord
avec les conseils de direction des établissements d’enseignement, pourrait constituer
une sanction excessive ne favorisant pas la mise en place de relations professionnelles
harmonieuses.
(Voir 355e rapport, cas no 2657, paragr. 574.)
946. Si les déductions de salaire ne visent que des militants d’un syndicat uniquement,
et dans la mesure où tous les syndicats ont appelé à la grève, cette situation
constituerait de fait un traitement discriminatoire à l’encontre du syndicat visé affectant
les principes de la liberté syndicale.
(Voir 372e rapport, cas no 3024, paragr. 430; 374e rapport, cas no 3024, paragr. 558.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
178
947. A propos d’allégations selon lesquelles les déductions salariales ont touché, ou
ont menacé de toucher, les travailleurs affiliés à l’organisation syndicale et non les
autres grévistes, le comité a souligné que cette façon de procéder pose des problèmes
en relation avec les principes de la liberté syndicale.
(Voir 364e rapport, cas no 2847, paragr. 104.)
948. Le fait d’obliger l’employeur à verser les salaires correspondant aux jours de
grève lorsque la grève a été déclarée «imputable» à l’employeur, outre qu’il peut
altérer l’équilibre des relations professionnelles et s’avérer trop coûteux, pose des
problèmes de conformité aux principes de la liberté syndicale, dans la mesure où
ce versement ne devrait ni être interdit, ni obligatoire. C’est pourquoi cette question
devrait être résolue par les parties.
(Voir Recueil 2006, paragr. 656.)
949. Le fait de ne pas répondre à un cahier de revendications peut être considéré
comme une pratique déloyale et contraire au principe de la bonne foi dans la négociation
collective qui peut entraîner certaines sanctions prévues par la législation
mais sans pour autant que l’employeur soit obligé légalement de payer les jours de
grève, cette question devant être laissée aux parties concernées.
(Voir Recueil 2006, paragr. 657.)
950. Les déductions de salaire pour jours de grève ne devraient s’appliquer qu’aux
travailleurs qui ont participé à la grève ou à une action de protestation.
(Voir 363e rapport, cas no 2867, paragr. 356.)
Sanctions
A. En cas de grève légitime
951. Imposer des sanctions à des syndicats parce qu’ils ont mené une grève légitime,
constitue une grave violation des principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 658; 362e rapport, cas no 2794, paragr. 1138, cas no 2797,
paragr. 1454.)
952. La fermeture des bureaux syndicaux, par suite d’une grève légitime, constitue
une violation des principes de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 659.)
953. Nul ne devrait faire l’objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de
déclencher une grève légitime.
(Voir Recueil 2006, paragr. 660; 343e rapport, cas no 2472, paragr. 966; 346e rapport,
cas no 2473, paragr. 1532; 348e rapport, cas no 2494, paragr. 961; 351e rapport, cas no 2569,
paragr. 640; 355e rapport, cas no 2664, paragr. 1089; 358e rapport, cas no 2735, paragr. 608;
359e rapport, cas no 2754, paragr. 680; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 840; 362e rapport,
179
10. Droit de grève
cas no 2794, paragr. 1138; 367e rapport, cas no 2938, paragr. 227; 368e rapport, cas no 2972,
paragr. 824; 370e rapport, cas no 2994, paragr. 735; 372e rapport, cas no 3004, paragr. 573;
374e rapport, cas no 3030, paragr. 536; 376e rapport, cas no 2994, paragr. 1002.)
954. Aucun travailleur participant à une grève de façon pacifique ne devrait être
passible de sanctions pénales.
(Voir 374e rapport, cas no 3057, paragr. 217.)
955. Des sanctions pénales ne devraient être imposées que si, dans le cadre d’une
grève, des actes de violence contre les personnes et les biens ou d’autres graves violations
du droit pénal ordinaire sont commis, et cela sur la base des lois et règlements
qui sanctionnent de tels actes.
(Voir 353e rapport, cas no 1865, paragr. 716.)
956. Des dispositions législatives qui imposent des sanctions en rapport avec une
menace de grève sont contraires à la liberté d’expression et aux principes de la
liberté syndicale.
(Voir 374e rapport, cas no 3057, paragr. 217.)
957. Le licenciement de travailleurs pour fait de grève constitue une grave discrimination
en matière d’emploi pour exercice d’activité syndicale licite contraire à la
convention no 98.
(Voir Recueil 2006, paragr. 661; 340e rapport, cas no 2419, paragr. 1293; 342e rapport,
cas no 2450, paragr. 428; 343e rapport, cas no 2472, paragr. 966; 350e rapport, cas no 2602,
paragr. 681; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 662; 358e rapport, cas no 2737, paragr. 636;
359e rapport, cas no 2754, paragr. 680; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 842; 362e rapport,
cas no 2797, paragr. 1454; 372e rapport, cas no 3018, paragr. 494.)
958. Quand les syndicalistes ou les dirigeants syndicaux sont licenciés pour avoir
exercé leur droit de grève, le comité ne peut s’empêcher de conclure qu’ils sont sanctionnés
pour leur activité syndicale et font l’objet d’une discrimination antisyndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 662; 355e rapport, cas no 2664, paragr. 1089; 357e rapport,
cas no 2664, paragr. 812; 358e rapport, cas no 2735, paragr. 606; 360e rapport, cas no 2747,
paragr. 842; 362e rapport, cas no 2815, paragr. 1370, cas no 2797, paragr. 1454; 368e rapport,
cas no 2972, paragr. 824; 374e rapport, cas no 3030, paragr. 536.)
959. Le respect des principes de la liberté syndicale exige que l’on ne puisse ni
licencier des travailleurs, ni refuser de les réengager, en raison de leur participation
à une grève ou à toute autre action de revendication. Que le congédiement soit
prononcé pendant ou après la grève n’est pas pertinent dans ce contexte. Logiquement,
le fait que le licenciement précède une grève ne devrait pas non plus entrer en
ligne de compte si celui-ci a pour objet d’entraver ou de pénaliser l’exercice du droit
de grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 663; 362e rapport, cas no 2815, paragr. 1370; 371e rapport,
cas no 2937, paragr. 653.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
180
960. Le comité ne saurait considérer avec équanimité un ensemble de règles juridiques
qui :
a) semblent traiter virtuellement toute action collective directe comme une rupture
de contrat de la part de ceux qui y ont participé;
b) exposent tout syndicat ou dirigeant syndical qui aura incité à cette rupture de
contrat à des poursuites en dommages intérêts pour les pertes que l’employeur
aura pu subir en conséquence de leur action;
c) permettent à l’employeur confronté à une telle action de demander aux tribunaux
d’interdire le début (ou la poursuite) de la conduite illicite. L’effet cumulé de ces
dispositions semble être de priver les travailleurs de la possibilité de faire grève
légalement pour promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 664.)
961. L’annonce faite par le gouvernement de l’obligation de travailler au-delà de la
durée normale du travail afin de pallier les effets de la grève pourrait en elle-même
influencer indûment le déroulement de la grève.
(Voir Recueil 2006, paragr. 665.)
962. Le recours à des mesures extrêmement graves comme le licenciement de travailleurs
du fait de leur participation à une grève et le refus de les réembaucher impliquent
de graves risques d’abus et constituent une violation de la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 666; 343e rapport, cas no 2355, paragr. 477; 344e rapport,
cas no 2380, paragr. 197; 346e rapport, cas no 2488, paragr. 1331; 348e rapport, cas no 2355,
paragr. 311; 353e rapport, cas no 2380, paragr. 269, cas no 2619, paragr. 576; 357e rapport,
cas no 2702, paragr. 162; 362e rapport, cas no 2794, paragr. 1138; 365e rapport, cas no 2902,
paragr. 1121; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 615, cas no 3011, paragr. 647.)
963. S’il s’avère, suite aux procédures judiciaires ou aux informations collectées,
qu’un ou plusieurs des travailleurs licenciés à la suite d’une grève étaient employés
dans un service autre qu’un service dit «essentiel» au sens de la convention collective,
les mesures nécessaires doivent être prises afin d’assurer que ces travailleurs soient
pleinement réintégrés dans leur poste.
(Voir 346e rapport, cas no 2500, paragr. 325.)
964. Des travailleurs licenciés en raison de leur participation à une grève ne sauraient
être privés de leurs prestations de retraite légalement acquises après avoir travaillé
plusieurs années dans une entreprise.
(Voir 360e rapport, cas no 1914, paragr. 104.)
181
10. Droit de grève
B. En cas d’abus dans l’exercice du droit de grève
965. Les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du
droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux.
(Voir Recueil 2006, paragr. 667; 343e rapport, cas no 2472, paragr. 959; 344e rapport, cas no 2465,
paragr. 718, cas no 2486, paragr. 1208; 348e rapport, cas no 2472, paragr. 936; 349e rapport,
cas no 2548, paragr. 540; 354e rapport, cas no 2668, paragr. 676; 355e rapport, cas no 2602,
paragr. 666; 356e rapport, cas no 2478, paragr. 956; 358e rapport, cas no 2742, paragr. 279;
360e rapport, cas no 2747, paragr. 840; 362e rapport, cas no 2710, paragr. 464, cas no 2832,
paragr. 1333; 368e rapport, cas no 2912, paragr. 227; 371e rapport, cas no 2928, paragr. 314;
374e rapport, cas no 2946, paragr. 252, cas no 3032, paragr. 413, cas no 3030, paragr. 536.)
966. Des sanctions pénales ne devraient pouvoir être infligées pour faits de grève
que dans les cas d’infraction à des interdictions de la grève conformes aux principes
de la liberté syndicale. Toute sanction infligée en raison d’activités liées à des grèves
illégitimes devrait être proportionnée au délit ou à la faute commis, et les autorités
devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement contre ceux qui organisent
une grève pacifique ou y participent.
(Voir Recueil 2006, paragr. 668; 340e rapport, cas no 2415, paragr. 1259; 343e rapport,
cas no 2472, paragr. 959; 346e rapport, cas no 2525, paragr. 1242; 348e rapport, cas no 2472,
paragr. 936; 351e rapport, cas no 2616, paragr. 1012; 355e rapport, cas no 2659, paragr. 242;
356e rapport, cas no 2488, paragr. 146; 358e rapport, cas no 2616, paragr. 66; 362e rapport,
cas no 2723, paragr. 842; 363e rapport, cas no 2602, paragr. 465; 365e rapport, cas no 2829,
paragr. 577, cas no 2723, paragr. 778; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 616.)
967. Considérant que certaines des mesures prises temporairement par les autorités
par suite d’une grève effectuée dans un service essentiel (interdiction des activités du
syndicat, suspension de la retenue des cotisations à la source, etc.) étaient contraires
aux garanties prévues à l’article 3 de la convention no 87, le comité a appelé l’attention
du gouvernement sur le fait que les mesures prises par les autorités pour assurer la
prestation des services essentiels doivent rester proportionnelles aux buts visés sans
aboutir à des excès.
(Voir Recueil 2006, paragr. 669.)
968. Des amendes équivalant à un montant de 500 à 1000 salaires minimum par
jour de grève abusive risquent d’avoir un effet d’intimidation sur les syndicats et d’inhiber
leurs légitimes actions de revendication syndicale, d’autant que l’annulation
de l’amende est subordonnée au non déclenchement d’une nouvelle grève qui serait
considérée comme abusive.
(Voir Recueil 2006, paragr. 670; 372e rapport, cas no 3022, paragr. 616.)
969. Le comité s’attend à ce que les amendes qui pourraient être infligées à l’endroit
des syndicats pour faits de grève illégale ne soient pas d’un montant susceptible de
mener à la dissolution du syndicat ni d’avoir un effet d’intimidation sur les syndicats
et d’inhiber leurs légitimes actions de revendication syndicale et veut croire que le
gouvernement s’efforcera de résoudre de telles situations au moyen d’un dialogue
social franc et effectif.
(Voir 372e rapport, cas no 3011, paragr. 649.)
La liberté syndicale – Sixième édition (2018)
182
C. En cas de grève pacifique
970. Les autorités ne devraient pas recourir aux mesures d’arrestation et d’emprisonnement
en cas d’organisation ou de participation à une grève pacifique, et de
telles mesures comportent de graves risques d’abus et de sérieux dangers pour la
liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 671; 344e rapport, cas no 2471, paragr. 894; 353e rapport,
cas no 1865, paragr. 728; 355e rapport, cas no 2602, paragr. 669; 359e rapport, cas no 2760,
paragr. 1172; 360e rapport, cas no 2747, paragr. 840; 362e rapport, cas no 2812, paragr. 395;
364e rapport, cas no 2727, paragr. 1083; 367e rapport, cas no 2938, paragr. 227; 368e rapport,
cas no 2912, paragr. 227; 372e rapport, cas no 3018, paragr. 494; 378e rapport, cas nos 3110 et
3123, paragr. 625.)
971. Nul ne devrait pouvoir être privé de liberté ni faire l’objet de sanctions pénales
pour le simple fait d’avoir organisé une grève pacifique ou d’y avoir participé.
(Voir Recueil 2006, paragr. 672; 344e rapport, cas no 2471, paragr. 894; 348e rapport,
cas no 2494, paragr. 962; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 715; 358e rapport, cas no 2742,
paragr. 279; 362e rapport, cas no 2788, paragr. 254, cas no 2812, paragr. 395, cas no 2741,
paragr. 772; 363e rapport, cas no 2854, paragr. 1042; 364e rapport, cas no 2727, paragr. 1083;
374e rapport, cas no 3029, paragr. 111.)
972. Des sanctions pénales ne sont envisageables que si des actes de violence contre
des personnes ou des biens ou d’autres violations du droit commun prévues dans les
dispositions légales sanctionnant de tels actes ont été commis pendant la grève.
(Voir 358e rapport, cas no 2742, paragr. 279.)
973. L’exercice pacifique des droits syndicaux (grève et manifestation) par les travailleurs
ne devrait pas conduire à des arrestations et à des déportations.
(Voir Recueil 2006, paragr. 673; 351e rapport, cas no 2569, paragr. 640; 372e rapport,
cas no 3018, paragr. 494.)
974. Tout en soulignant l’importance de mener des activités syndicales légitimes de
manière pacifique, le comité estime que la judiciarisation pénale des relations professionnelles
ne peut en aucune façon conduire à l’établissement de relations professionnelles
harmonieuses et pacifiques.
(Voir 346e rapport, cas no 1865, paragr. 774; 353e rapport, cas no 1865, paragr. 728;
355e rapport, cas no 2602, paragr. 669.)
D. Sanctions massives
975. Des arrestations et des licenciements massifs de grévistes comportent de graves
risques d’abus et de sérieux dangers pour la liberté syndicale. Les autorités compétentes
devraient recevoir des instructions appropriées afin de prévenir les risques que
ces arrestations ou ces licenciements peuvent avoir pour la liberté syndicale.
(Voir Recueil 2006, paragr. 674; 371e rapport, cas no 2928, paragr. 314; 372e rapport,
cas no 3008, paragr. 244, cas no 3018, paragr. 494; 374e rapport, cas no 3032, paragr. 416.)
183
10. Droit de grève
Discrimination en faveur des non-grévistes
976. En ce qui concerne les mesures accordées pour faire bénéficier les travailleurs
n’ayant pas participé à la grève d’une bonification, le comité a estimé que de telles
pratiques discriminatoires constituent un obstacle important au droit des syndicats
d’organiser leurs activités.
(Voir Recueil 2006, paragr. 675; 367e rapport, cas no 2977, paragr. 861.)
Fermeture des entreprises en cas de grève
977. La fermeture de l’entreprise prévue par la législation en cas de grève de la majorité
des travailleurs porte atteinte à la liberté de travail des non- grévistes et ne tient
pas compte des nécessités fondamentales de l’entreprise (entretien des installations,
prévention des accidents, droit des chefs d’entreprises et du personnel de direction à
se rendre dans les installations de l’entreprise et d’y exercer leurs activités).
(Voir Recueil 2006, paragr. 676.)
978. Le droit de grève et l’occupation du lieu de travail doivent être exercés dans le
respect de la liberté de travailler des non-grévistes, tout comme le droit de la direction
de pénétrer dans les locaux de l’entreprise.
(Voir 356e rapport, cas no 2699, paragr. 1391.)
Document no 283
Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948,
article 20

4. Reque,t, the United Nations International
Children's Emergency Fund, as the United
Nations agency entrusted with special responsibility
for meeting emergency needs of children
in many parts oí the world :
(a) To assist in the conduct oí national cam•
pa1gns íor the benefit of the lnternational
Children's Emergency Fund, with a view to
providing international co-ordination oí voluntary
governmental and non-governmental appeals
for the benefit of children;
(.b) To report concerning the appeals to the
ninth session of the Economic and Social Council
and to the íourth regular session of the General
Assembly.
Hundred and ,eventy-seventh plmuiry meeting,
8 Deamber 1948.
216 (ffi). Advisory social welfare ser•
vices
TA. General A,,embly,
Hat·in¡¡ romiáered resolution 15 5 (VII) of the
Economic and Social Council of 13 August 1948
on advisory social welfare services,
Approve, the provisions of that resolution.
Hundred and ll8Veflty-,eventh plmuiry 11UNJtin¡¡,
8 Deamber 1948.
217 (111). lnternational Bill of Human
Rights
A
UNIVERSAL DECLARATION
OF HUMAN RIGHTS
PREAIIBLB
Wherea, recognition of the inherent dignity
and oí the equal and inalienable rights of • all
members oí the human family is the íoundation
oí freedom, justice and pcace in the world,
Whereaa disregard and contempt for human
rights have resulted in barharous acts which have
outraged the conscience of mankind, and the
advent of a world in which human beings shall
enjoy íreedom of speech and belief and freedom
from fear and want has been proclaimed as the
highest aspiration oí the common people,
Wliereas it is essential, if man is not to be compelled
to have recourse, as a last resort, to rebellion
against tyranny and oppression, that human
rights should be- protected by the rule of law,
Whereaa it is essential to promote the development
of friendly relations between nations,
71
4. Invite !e t''lndR intcmati.onal de secours a
l'enfance de l'Organiílation des Nations Unies en
sa qualité d'institution de l'Organisation dea
Nations Unies spécialernent chargée de pourvoir
aux pressants besoins des enfants dans de nombreuses
parties du monde;
a) A contribuer a l'organisation de campagnes
nationales en faveur du Fonds international de
secours a l'enfance, afin d'assurer la coordination
internationale des appels gouvernementaux et
non gouvernementaux hénévoles en fawmr de
l'enfance;
h) A faire rapport sur !es résultats des appels
a la neuvieme session du Conseil écon'lmique et
social ainsi qu'a la quatrieme session ordinaíre
de l'Assemblée générale.
Cent-soixante-Jix-s1ptil¼ne séance pléniere,
le 8 décembre 19 48.
216 (111). Fonctions consultatives en
matiere de service social
L'Assemblée générale.
Ayant examiné la résolution 155 (VII) du
Conseil économique et social, en date du 13 aodt
1948, relative aux fonctions consultatives en
matiere de service social,
Approuve les dispositions de ladite résolution.
Cent-soixante-dix-septieme séance pMniere,
le 8 dérembre 1948.
217 (111). Charle internationale de11
droits de l'homme
A
DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS
DE L'HOMME
PRÉAMBULE
Considérant que la reconnaissance <le la <lignité
inhérente a tous les membres de la famille
humaine et de leurs droits égaux et inaliénables
constitue le fondement de la liberté, de la justice
et de la paix dans le monde,
Comidérant que la méconnaissance et le mépris
des droits de l'homme ont conduit a des actes
de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité
et que l'avenement d'un monde ou les etres
humains seront libres de parler et de croire,
libérés de la terreur et de la misere, a été proclamé
comme la plus haute aspiration de l'homme,
Considérant qu'il est essentiel que les droits de
l'hommc soient protégés par un régime de droit
pour que l'homme ne soit pas contraint, en
supreme recours, a la révolte contre la tyrannic
et l' oppression,
Consúlérant qu'il cst essentiel <l'encourager le
développement de relations amicales entre
nations,
WAmtu the peoples o( the U nited Nations have
in the Charter reaffinned their faith in fundamental
human rights, in the dignity and worth
of the human person and in the equal rights of
men and wo~en and have determined to promote
social progress and better standards of lif e
in larger freedom,
W/i,reas Member States have pledged themselves
to achieve,in co-operation with the United
Nations, the promotion of universal respect for
and observance of human rights and fundamental
freedoms,
W.limwu a common understanding of these
rights and freedoms is of the greatest importance
for the full realization o( this pledge,
N O'l1J, therefore,
The General A,aembly
Proclaim, this Universal Declaration of Human
Rights as a common standard of achievement for
ali peoples and ali nations, to the end that every
individual and every organ of society, keeping
tlús Declaration constantly in mind, shall strive
by teacbing and education to promote respect for
these rights and freedoms and by progressive
measures, national and international, to secure
their universal and effective recognition and
observance, both among the peoples of Member
States themselves and among the peoples of
territories under their jurisdiction.
!RTICLE 1
Ali human beings are born free and equal in
dignity and rights. They are endowed with
reason and conscience and should act towards
one another in a spirit of brotherhood.
ARTICLE 2
Everyone is entitled to all the rights .and freedoms
set forth in this Declaration, without disti
nction of any kind, such as race, colour, sex,
language, religion, political or other opinion,
national or social origin, property, birth or
other status.
Furthermore, no distinction shall be made on
the basis of the political, jurisdictional or international
status of the country or territory to
which a person belongs, whether it be independeut,
trust, non-self-governing or under any
other limitation of sovereignty.
ARTICLE 3
Everyone has the right to life, liberty and the
security of person.
Coniidbant que dans la Charte les peuples des
Nations Unies ont proclamé a nouveau leur foi
dans les droits fondamentaux de l'homme, dans
la dignité et la valeur de la personne humaine,
dans l' égalité des droits des hommes et des
femmes, et qu'ils se sont déclarés résolus a favoriser
le progres social et a instaurer de meilleures
conditions de vie dans une libérté plus grande,
Considérant que les États Membres se sont
engagés a assurer, en coopération avec l'Organisation
des Nations Unies, le respect universel et
effectif des droits de l'homme et des libertés
fondamentales,
Considérant qu'une conception commune de ces
droits et libertés est de la plus haute importance
pour remplir pleinement cet engagement,
L' Asaemblée cénirale
ProclamB la· présente Déclaration universelle
des droits de l'homme comme l'idéal commun
a atteindre par tous les peuples et toutes les
nations afin que tous les, in di vid us et tous les
organes de la société, ayant cette Déclaration
constamment a l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement
et l'éducation, de développer le respect
de ces droits et libertés et d'en assarer, par des
mesures progressives d'ordre national et international,
la reconnaissance et l'application universelles
et effectives, tant parmi les populations
des États Membres eux-mémes que parmi celles
des territoires placés sous leur juridiction.
ARTICLE PREMIER
Tous les étres humains naissent libres et
égaux en dignité et en droits. lis sont doués de
raison et de conscience et doivent agir les uns
envers les autres dans un esprit de fraternité.
72
ARTICLE 2
Chacun peut se prévaloir de tous les droits
et de toutes les libertés proclamés dans la présente
Déclaration, sans distinction aucune, notamment
de race, de couleur, de sexe, de langue,
de religion, d'opinion politique ou de toute
autre opiníon, d'origine nationale ou sociale,
de fortune, de naissance ou de toute autre
situation.
De plus, il ne sera fait aucune distinctioo
fondée sur le statut politique, juridique ou
international du pays ou du territoire dont une
personne est ressortissante, que ce pays ou
territoire soit indépendant, sous tutelle, non
autonome ou soumis a une limitation quelconque
de souveraineté.
ARTICLE 3
Tout individu a droit a la vie, a la liberté et
a la st'ireté de sa personne.
ARTICLE á
No one shall he held in slavery or servitude;
slavery and the slave trade shall he prohibited in
all their fonns.
ARTICLE 5
No one shall he subjected to torture or to
cruel, inhuman or degrading treatment or
pu nishment.
ARTICLE 6
Everyone has the right to recognition everywbere
as a person before the law.
ARTICLE 7
AH are equal before the law and are entitled
without any discrimination to equal protection
oí the law. Ali are entitled to equal protection
against any discrimination in violation of this
Declaration and against any incitement to such
discrimination.
ARTICLE 8
Everyone has the right to an effective remedy
by the competent national tribunals for acts
violating the fundamental rights granted him by
the constitution or by law.
ARTICLE 9
No one shall be subjected to arhitrary arrest,
detention or exile.
ARTICLE 1 O
Everyone is entitled in full equality to a fair
and public hearing by an independent and
impartial tribunal, in the detennination of his
rights and obligations and of any criminal charge
against him.
ARTICLE 11
1. Everyone charged with a penal offence has
the right to be presumed innocent until proved
guilty according to law in a public tria! at which
he has had ali the guarantees necessary for his
defence.
2. No one shall be held guilty of any penal
oflence on account of any act or omission which
did not constitqte a pen&.l offence, under national
or international law, at the time when it was
committed. Nor shall a heavier penalty be
imposed than the one that was applicable at the
time the penal off ence was committed.
ARTICLE 12
No one shall be subjected to arbitrary interference
with his privacy, family, home or correspondence,
nor to attacks upon his honour and
reputation. Everyone has the right to the pro-
73
ARTICLE á
Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude;
l' esclavage et la traite des esclaves sont
interdits sous toutes leurs formes.
ARTICLE 5
Nul ne sera soumis a la torture, ni a des
peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants.
ÁRTICLE 6
Chacun a le droit a la reconnaissance en tous
lieux de sa personnalité juridique.
ÁRTICLE 7
Tous sont égaux devant la loi et ont droit
sans distinction a une égale protection de la
loi. Tous ont droit a une protection égale contre
toute discrimination qui violerait la présente
Déclaration et contre tontP provocation a une
telle discrimination.
ARTICLE 8
Toute personne a droit a un recours effectif
devant les juridictions nationales compétentes
contre les actes violant les droits fondamentaux
qui lui sont reconnus par la constitution ou par
la loi.
ARTICLE 9
Nul ne peut ~tre arbitrairement arrété, détenu
ni exilé.
ARTICLE 1 O
Toute personne a droit, en pleine égalité,
a ce que sa cause soit entendue équitablement
et publiquement par un tribunal indépendant
et impartial, qui décidera. soit de ses droits et
obligations, soit du bien fondé de toute accusation
en matiere pénale dirigée contre elle.
ARTICLE 11
1. Toute personne accusée d'un acte délictueux
est présumée innocente jusqu'a ce que
sa culpabilité ait été légalement établie au cours
d'un proces jmblic ou toutes les garanties nécessaires
a sa défense luí auront été assurées.
2. Nul ne sera condamné pour des actions
ou omissions qui, au moment ou elles ont été
commises, ne constituaient pas un acte délictueux
d'apres le droit national ou international.
De méme, il ne sera infligé aucune peine plus
forte que celle qui était applicable au mement
ou l' acte délictueux a été commis.
AnricLB 12
Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires
dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa
correspondance, ni d'atteintes a son honneur
et a sa réputation. Toute personne a droit a la
tection of the law against such interference or
attacks.
ARTICLE 13
1. Everyone has the right to freedom of movenent
and residence within the borders of each
State.
2. Everyone has the right to leave any country,
inclnding his own, and to return to his country.
ARTICLE 14
1. Everyone has the right to seck and to enjoy
in other countries asylum from persecution.
2. This right may not be invoked in the case
of prosecutions genuinely arising from nonpolitical
crimes or from acts contrary to the purposes
and principies of the United Nations.
ARTICLE 15
1. Everyone has the right to a nationality.
2. No one shall he arbitrarily deprived of his
nationality nor denied the right to change his
nationality.
ARTICLE 16
1. Men and women of full age, without any
limitation due to race, nationality or religion,
have the right to marry and to found a family.
They are entitled to equal rights as to marriage,
during marriage and at its dissolution.
2. Marriage shall be entered into only witb.
the free and full consent of the intending spouses.
3. The family is the natural and fundamental
group unit of society and is entitled to protection
by society and the State.
ARTICLE 17
1. Everyone has the right to own property
alone as well as in association with · others.
2. No one shall be arbitrarily deprived of his
property.
ÁRTICLE 18
Everyone has the right to freedom of thought,
conscience and religion; this right includes freedom
to change bis religion or belief, and freedom,
either alone or in community with others
and in public or prívate, to manifest his religion
or belief in teaching, practice, worship and ohservance.
ARTICLE 19
'Everyone has the right to freedom of opinion
and expression; this right includes freedom to
7{!
protection de la loi contre de telles immixtions
ou de telles atteintes.
ARTICLE 13
1. Toute personne a le droit de circuler
librement et de choisir sa résidence a l'intérieur
cl'un État.
2. Toute personne a le droit de quitter tout
pays, y compris le sien, et de revenir dans son
pays.
ARTICLE 1 li
1. Devant la persécution, toute personne a
le droit de cherchcr asile et de bénéficier de
l' asile en d' autres pays.
2. Ce droit ne pcut étre invoqué dans le cas
de poursuites réellement fondées sur un crime
de droit commun ou sur des agissements contraires
aux buts et aux principes des Nations
Unies.
ARTICLE 15
1. Tout individu a droit a une nationalité.
2. Nul ne peut étre arbitrairement privé de
sa nationalité, ni du droit de changer de nationalité.
ARTICLE 16
1. A partir <le l'áge nuhile, l'homme et la
femme, sans aucune restriction quant a la race,
la nationalité ou la religion, ont le droit de se
marier et de fonder une famille. Ils ont des
droits égaux au regard du mariage, durant le
mariage et lors de sa dissolution.
2. Le mariage ne peut étre conclu qu' avec le
libre et plein consentement des futurs époux.
3. La famille est l' elément naturel et fondamental
de la sociét~ et a droit a la protection de
la société et de l'Etat.
ARTICLE 17
1. Toute personne, aussi bien seule qu'en
collectivité, a droit a la propriété.
2. Nul ne peut étre arbitrairement privé de
sa propriété.
ARTICLE 18
Toute personne a droit a la liberté de pensée,
de conscience et de religion; ce droit implique
la liberté de changer de religion ou de conviction
ainsi que la liberté de manifester sa religion ou
sa conviction, seule ou en commwi, tant en
public qu' en privé, par l' enseignement, les
pratiques, le culte et l' accomplissement des
rites.
ABTICLE 19
Tout individu a droit a la liberté d'opinion
et d'expression, ce qui implique le droit de ne
hold opinions without interference and to seek,
receive and impart informati,on and ideas
through any media and regardless of frontiers.
ARTICLE 20
1. Everyone has the right to freedom of
peaceful assemhly and association.
2. No one may be compelled to belong to an
association.
ARTICLE: 21
1. Everyone has the right to take part in the
government of his country, directly or through
freely chosen representatives.
2. Everyone has the right of equal access to
public service in his country.
3. The will of the people shall be the basis of
the authority of government; this will shaH be
expressed in periodic and genuine elections
which shall be by universal and equal suffrage
aml shall be held by secret vote or by equivalent
frc1' voting procedures.
ARTICLE 22
Everyonc, as a mcmber of society, has the
right to social security and is entitled to realizati
on, through national effort and international
co-operation and in accordance with the organization
and resources of each State, of the economi1:,
social and cultural rights indispensable for
his dignity and the free development of his
personality.
ÁRTICLE 23
1. Everyone has the right to work, to free
choice of employment, to just and favourahle
conditions of work and to protection against
unemployment.
2. Everyone, without any discriinination, has
the right to equal pay for equal work.
3. Everyone who works has the right to just
and favourable remuneration ensuring for himself
and his family an existence worthy of human
dignity, and supplemented, if necessary, by other
means of social prntection.
4. Everyone has the right to forro and to join
trade unions for the protection of his interests.
ARTICLE 24
Everyone has the right to rest and leisure,
including reasonable liinitation of working hours
and periodic holidays with pay.
75
pas étre inquiété pour ses opinions et celui de
chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations
de frontieres, les informations et les
idées par quelque moyen d' expression que ce
soit.
ÁRTICLE 20
1. Toute personne a droit a la liberté de
réunion et d'association pacifiques.
2. Nul ne peut étre obligé de faire partie
d'une association.
ÁRTICLE 21
1. Toute personne a le droit de prendre part
a la direction des affaires publiques de son pays,
soit directement, soit par l' intermédiaire de
représentants librement choisis.
2. Toute personne a droit a accéder, dans des
conditions d' égalité, aux fonctions publiques
<le son pays.
3. La volonté du peuple est le fondement de
l' autorité des pouvoirs publics; cette volonté
doit s' exprimer par des élections honnétes qui
doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage
universel égal et au vote secret ou suivant une
procédure équivalente assurant la liberté du
vote.
ARTICLE 22
Toute personoe, en tant que membre de la
société, a droit a la sécurité sociale; elle est
fondée a obtenir la satisfaction dei droits économiques,
sociaux et culturels indispensables
a sa dignité et au libre développement de sa
personnalité, grace a l' effort national et a la
coopération internationale, compte tenu de
l' organisation et des ressourccs de chaque pays.
ARTICLE 2 3
1. Toute personne a droit au travail, au libre
choix de son travail, a des conditions équitables
et satisfaisantes de travnil f'l a la protection
contre le chomage.
2. Tous ont droit, sans nucune discrimination,
a un snlaire égal pour un travail égal.
3. Quiconque travaille a droit a une rémunération
équitable et satisfaisante lui assurant
ainsi qu'a sn famille une existence conforme a
la dignité humaine et compldée, s'il y a lien,
par tous autres moyens de protection sociale.
4. Toute personne a le droit de fonder avec
d 'autres des syndicats et de s' affilier a des syndirats
pour la défense de ses intérMs.
ARTICLE 2 !i
Toute personne a droit au repos et aux loisirs
et notamment a une limitation raisonnable de
la durée du travail et a des congés payés périodiques.
ARTICLE 25
1. Everyone has the right to a standard of
living adequate for the health and well-being of
himself and of his farnily, including food, clothing,
housing and medical care and necessary
social services, and the right to security in the
event of unemployment, sickness, disability,
widowhood, old age or other lack of livelihood
in circumstances beyond his control.
2. Motherhood and childhood are entitled
to special care and assistance. AH children,
whether born in or out of wedlock, shall enjoy
the same social protection.
ARTICLE 26
1. Everyone has the right to education.
Education shall be free, at lcast in the elementary
and fundamental stages. Elementary cducation
shall be compulsory. Technical and professional
education shall be made generally available and
higher education shall be equally aecrssible to
ali on the basis of mcrit.
2. Education shall he dirccted to the full
devclopment of the human personality and to
the strengthening of respect for human rights
and fundamental freedoms. It shall promote
understanding, tolerance and friendship among
all nations, racial or religious groups, and shall
further the activities of the United Nations for
the maintenance of peace.
3. Parents have a prior right to choose the
kind of education that shall be given to their
children.
ARTICLE 27
1. Everyone has the right freely to participate
in the cultural life of the community, to enjoy
the arts and to share in scientific advancement
and its benefits.
2. Everyonc has the right to the protection
of the moral and material interests resulting
frorn any scientific, literary or artistic production
of which he is the author.
ARTICLE 28
Everyone is cntitled to a social and international
order in which the rights and freedoms
set forth in this Dcclaration can be fully realized.
ARTICLE 29
1. Everyone has duties to the comrnunity
in which alone the free and full development
of his personality is possible.
ARTICLE 25
1. Toute personne a droit a un niveau de vie
suffisant pour assurer sa santé, son bien-~tre
et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation,
l'habillement, le logement, les soins
médicaux ainsi que pour les services sociaux
nécessaires; elle a droit a la sécurité en cas de
chómage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de
vieillesse ou dans les auttes cas de perte de ses
moyens de suhsist.ance par suite de circonstances
indépendantes de sa volonté.
76
2. La maternité et l'enfance ont droit a une
aide et a une assistance spéciales. Tous les
cnfants, qu'ils soient nés dans le mariage ou
hors mariage, jouissent de la méme protection
sociale.
ARTICLE 26
1. Toute personne a droit a l'éducation.
L' éducation doit Mre gratuite, au moins en ce qui
concerne l' enseignement élémentaire et fondamental.
L'enseignement élémentaire est obligatoire.
L' enseignement technique et professionnel
doit Mre généralisé; l' acces aux études
supérieures doit étre ouvert en pleine égalité
a tous en fonction de leur mérite.
2. L'éducation doit viser au plein épanouissement
de la personnalité humain_e et au rcnforcement
du respect des droits de l'homme et des
libcrtés fondamentales. Elle doit favoriser la
compréhension, la tolérance et l'amitié entre
toutes les nations et tous les groupes raciaux ou
rcligieux, ainsi que le développement des activit_
és des Nations Unies pour le maintien de la
paix.
3. Les parents ont, par priorité, le droit de
choisir le genre d'éducation a donner a leurs
rnfants.
ARTICLE 27
1. Toute personne a le droit de prendre part
librement a la vie culturelle de la communauté,
de jouir des arts et de participer au progres
scientifique et aux bienfaits qui en résultent.
2. Chacun a droit a la protection des intéréts
moraux et matériels découlant de toute production
scientifique, littéraire ou artistique dont il
est l'auteur.
ARTICLE 28
Toute personne a droit a ce que regnc. "nr
le plan social et sur le plan international. un
ordre tel que les droits et libertés énoncés dans
la présente Déclaration puissent y trouvrr plein
pffd.
ARTICLE 29
1. L'individu a des devoirs envers la communauté
dans laquelle seule le libre rt plein développement
de sa personnalité est possible.
2. In the exercise of his rights and freedoms,
everyone shall be subject only to such limitations
as are determined by law solely for the purpose
of securing due recognition and respect for the
rights and freedoms of others and of meeting
the just requirements of morality, public order
and the general welfare in a democratic society.
3. These rights and freedoms may in no case
be exercised contrary to the purposes and principies
of the United Nations.
ÁRTICLE 30
Nothing in this Declaration may be interpreted
as implying for any State, group or person any
right to engage in any activity or to perform
any act aimed at the destruction of any of the
rights and freed~ms set forth herein.
Humlred m11l r1ght.'l-thinl pll'l1ar:¡ 11uwting.
10 h1•cemlwr 19 4 8.
B
RIGHT OF PETITION
The General Assembly,
Considering that the right of petitwn is an
essential human right, as is recognized in the
Constitutions of a great number of countries,
Having considered the draft article on petitions
in document A/C.3/306 and the amendments
offered thereto by Cuba and France,
Decides not to take any action on this matter
at the present session;
Requests the Economic and Social Council to
ask the Commission on Human Rights to give
further examination to 'the problem of petitions
when studying the draft covenant on human
rights and measures of implementation, in
order to enable the General Assembly to consider
what further action, if any, should be taken at
its next regular session regarding the problem
of petitions.
Hundred and eight,9-thii·d plenar.,¡ meeting,
10 Dmmber 1948.
e
FATE OF MINORITIES
The General Assembly,
Considering that the United Nations cannot
remain indifferent to the fate of minorities,
Considering that it is difficult to adopt a
uniform solution of this complex and delicate
question, which has special aspects in · each
State in which it arises,
77
2. Dans l'exercice de ses droits et dans la
jouissance de ses libertés, chacun n' est soumis
qu'aux limitations établies par la loi exclusivement
en vue d'assurer la reconnaissance et le
respect des droits et libertés d' autrui et afin
de satisfaire aux justes exigences de la morale,
de l'ordre public et du bien~tre général dans
une société démocratique.
3. Ces droits et libertés ne pourront, en
aucun cas, s'exercer contrairement aux buts
et aux principes des Nations Unies.
ÁRTICLE 30
Aucune disposition de la présente Déclaration
ne peut étre interprétée comme impliquant
pour un État, un groupement ou un individu
un droit quelconque de se livrer a une activité
ou d'accomplir un acte visant a la destruction
des droits et libertés qui y sont éñoncés.
Cent-qw1trr-1•i11gt-t,·ois1'ili11e :té,mce pl,imere.
ft. 1 O déceml,re 1948.
B
DROIT DE n:TITION
L'Assembwe générale,
Considérant que le droit de pétition est un des
droits essentiels de l'homme, comme le reconnaissent
les constitutions de nombreux pays,
Ayant examiné le projet d'article relatif aux
pétitions qui figure dans le document A/C.3/306
et les amendements a cet article déposés par
Cuba et la France,
Décide de ne prendre aucune mesure a ce sujet
au cours de la présente session;
Prie le Conseil économique et social d'inviter
la Commission des droits de l'homme a procéder
a un nouvel examen du probleme des pétitions
lorsqu' elle examincra le projet de pacte relatif
aux droits de l'homme et aux mesures de mise
en reuvre, afin que l'Assemblée générale puisse,
au cours de sa prochaine session ordinaire,
examiner quelles mesures doivent étre prises,
s' il y a lieu d' en prendre, en ce qui concerne le
probleme des pétitions.
Cent-quatrc-vingt-troisieme séance plé11iere.
le 10 décembre 1948
G
SORT DES MINORITÉS
L' Auemblée générale,
Comidérant que les Nations Unies ne peuvent
pas demeurer indifférentes au sort des minorités,
Considérant qu'il est difficile d'adopter une
soluti?n unif?rme de cette question complexe
et déhcate qm revét des aspects particuliPrs dam
chaque État ou elle se e._ose,
Consideríng the universal character 01 tne
Declaration of Human Rights,
Decides not to deal in a specitic provision with
the question of minorities in the text of this
Declaration;
Refers to the Economic and Social Council the
texts submitted by the delegations of the Union
of Soviet Socialist Republics, Yugosiavia and
Denmark on this subject ·contained in <locument
A/C. 3/307 /Rev. 2, and requests the Council 1
to ask the Commission on Human Rights and
the Sub-Commission on thc Prevcntion of
Discrimination and thc Protection of Minorities
to make a thorough study of the prohlem of
minoritie:,;, in urder that the United Nations
may be able to take effoctivc mcasures for the
pro'tection of racial, nationd, rcligious or linguistir,
minorities.
flw,dr,·i! and 1•1gl11_1¡-tl11nl ¡deuai·y me1•ting.
l 1, /)¡,uw!wr 1.9.1¡8_
D
PUBLIC!TY TO BE GTVEN TO THE UNIv
ERSAL DECLARAT!ON OF HUMAN RIGHTS
Th.e General Assembly,
Considering that the adoption uf the Universal
Dedaration of Human llights is an historie act,
destiued to consolidatc world peace through the
contribution of the United Nations towards the
liberation of rndividuals frnm the nnjustified
oppression and coustraint to whidi they are
too often subjecte1l,
Considering that the text of the Declaration
should be disseminated among all peoples
throughout the world,
l. Recornmends Governments of Membcr States
to show their adherence to Article 56 of the
Cherter by using every mean¡¡ within their power
solemnly to publicize the text of the Declaration
and to cause it to be disseminated, displayed,
read and expounded principally in schools and
other educational institutions, without distinction
based on th,~ political :.;tatus of countries or
territories;
2. Requests the Secretary-General to have
this Declaration widely disseminated and, to that
end, to puhlish and distribute texts, not only in
the official 1:rnguages, but also, using every
mea ns at bis disposal, in ali languages possible;
3. Invites thc specialized agencies and nongovernmental
or¡,;anizatio:r:s of the world to do
their utrr10st to bring this Dtclaration to the
a fontion of thi•ir members.
llu111/r1•,Í 1111d mght!¡-tl,zrd ¡den11rJ meeting.
1 fJ n-cember 19 !,R.
78
Considérant le caractere universel de la Déclaration
des droits de l'homme,
Décide de ne pas traiter par une disposition
spécifique dans le corps de cette Déclaration la
question des minorités;
Renvoie au Conseil économique et social les
textes soumis par les délégations de l'Union des
Républiques sociafütes soviétiques, de la Yougoslavie
et du Danemark sur cette question dans le
docum,mt A/C.3/307/Rev. 2, et prie le Conseil
d' invitn la Commission des droits de l'homme et
la Sous-Commission <le la lutte contre les mesures
discriminatoires et de la protection des minorités
a procéder a un examen approfondi du
probleme des minorités, afin que l'Organisation
des Nations Unies puisse adopter des mesures
dficacrs <le protection des minorités raciaies,
nationales, religieust>s et linguistiques.
Cent-g11atre-1·ingt-troisihnR séance pléni·ere,
le 10 décemhre 19!,8.
D
PUBLICITÉ 1\ DONNER Á LA DÉCLARATION
U NIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME
L' Assemblée générale,
Considérant que le vote de la Déclaration universelle
des droits de l'homme est un acte
historique, destiné a affermir la paix. mondiale
en faisant contribuer l'Organisation des Nations
Unies a libérer l' individu de l' oppression et
des contraintes illégitimes dont il est trop souvent
victime,
Considérant que le texte de la Déclaration doit
avoir une <liffusion de caractere vraiment populaire
et universel,
1. Recommande aux Gouvernements des États
Membres de manifester leur fülélité a l'Article 56
de la Charte, en ne négligeant aucun des moyens
en leur pouvoir pour publier solennellement le
texte de la Déclaration et, ensuite, pour faire en
sorte qu' il soit distribué, affiché, lu et commenté
principalement dans les écoles et autres établissements
d' enseignement, sans distinction fondée
sur le statut politique des pays ou des territoires;
2. Prie le Secrétaire général de donner a cette
Déclaration une tres large diffusion P-t, a ces
fins, de publier et faire distribuer les textes non
seulement dans les langues officielles, mais
encore, dans la mesure de ses moyens, dans
toutcs IPs langues possibles;
3. Invite les institutions spécialisées et les
organisations non gouvernementales du monde
a bien vouloir faire leur possible pour porter
cette Déclaration a la eonnaissance de leurs
membres.
Ci•11t-yuatre-ringt-troisie111e séance pléniere,
le 10 décembre 1948.
f
PREPARATION OF A DRAFT COVENANT ON
HUMAN RIGHTS AND DRAFT MEASURES
OF IMPLEMENTATIOI\'
The General Assembly,
Considering that the plan of work of the
Commission on Human Rights provides for an
lnternational Bill of Human Rights, to include
a Declaration, a Covenant on Human Rights
and measures of implementation,
Requests the Economic and Social Council to
ask the Commission on Human Rights to continue
to give priority in its work to the preparation
of a draft Covenant on Human Rights
and draft measures of implementation.
Hurulred arul eighty-third plenary meeting,
1 O December 1948.
79
E
PREPARATION D'LN PROJET DE PACTE
RELATIF AUX DROITS DE L'HOMME ET
DE MESURES DE MISE EN OOUVRE
L · Assemblée générale,
Considérant que le plan <le travail de la Commission
des droits de l'hommc prévoit l' élaboration
d'une rharte intcrnationale des droits de
l'homme, qui devra comprendre une Déclaration,
un Pact1) relatif aux clroits de l'homme d des
mesures de mise en Leuvn';
lnv,ite le Conseil économique et social a demander
a la Commission des droits de l'homme de
continuer a donner la priorité, <lans son plan
de travail, a la préparation d'un projet de pacte.
relatif aux droits de l'homm!' et a l' élaboration
des mesures ele mise en o.mvre.
Cent-quatre-1,ingt-troisieme séance pléniere,
le 10 décembre 1948.

Document no 284
Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, 1966, article 8

PACTE INTERNATIONAL
RELATIF AUX DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Ш Ш .
NATIONS UNIES
1967
c) La meme possibilité pour tou6 d*être promus, dans leur travail, à la catégorie
Supérieure appropriée, sans autre considération que la durée des servlcee
accomplis et les aptitudes;
d) Le repos, les loisirs, la limitation raisonnable de la durée du travail et
les éohgés payés périodiques, ainsi que la rémunération des Jours fériés.
Article 8
1, Les Etats parties au présent Pacte s'engagent à assurer :
a) Le droit qu*a toute personne de former avec d'autres des syndicats et de
s'affilier au syndicat de son choix, sous la seule réserve des règles fixées par
l'organisation Intéressée, en vue de favoriser et de protéger ses Intérêts économiques
et sociaux. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions
prévues par la loi et qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique,
dans l'intérêt de la sécurité nationale ou de l'ordre public, ou pour
protéger les droits et les libertés d'autrui;
b) Le droit qu'ont les syndicats de former des fédérations ou des coniédérations
nationales et le droit qu'ont celles-ci de former des organisations syndicales internationales
ou de s'y affilier;
Le droit qu'ont les syndicats d'exercer librement leur activité, san» limitations
autres que celles qui sont prévues par la loi et qui constituent des mesures
nécessaires dans une société démocratique, dans l'Intérêt de la sécurité nationale ou
de l'ordre public, ou pour protéger les droits et les libertés d'autrui;
d) Le droit de grève, exercé conformément aux lois de chaque pays.
2. Le présent article n'empêche pas de soumettre à des restrictions légales
l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de la
fonction publique.
3. Aucune disposition du présent article ne permet aux Etats parties à la
Convention de 19l*8 de l'Organisation internationale du Travail concernant la liberté
syndicale et la protection du droit syndical de prendre des mesures législatives
portant atteinte - ou d'appliquer la loi de façon à porter atteinte - aux garanties
prévues dans ladite convention.
Article 9
Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à
la sécurité sociale, y compris les assurances sociales.
Article 10
Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent que :
1. Une protection et une assistance aussi larges que possible doivent être
accordées à la famille, qui est l'élément naturel et fondamental de la société, en
particulier pour sa formation et aussi longtemps qu'elle a la responsabilité de
l'entretien et de l'éducation d'enfants à charge. Le mariage doit être librement
consenti par les futurs époux.
2. Une protection spéciale doit être accordée aux mères pendant une période de
temps raisonnable avant et après la naissance des enfants. Les mères salariées
doivent bénéficier, pendant cette même période, d'un congé payé ou d'un congé accompagné
de prestations de sécurité sociale adéquates.
3. Des mesures spéciales de protection et d'assistance doivent être prises en
faveur de tous les enfants et adolescents, sans discrimination aucune pour des raisons
de filiation ou autres. Les enfants et adolescents doivent être protégés contre
l'exploitation économique et sociale. Le fait de les employer à des travaux de nature
à compromettre leur moralité ou leur santé, à mettre leur vie en danger ou à nuire à

Document no 285
Pacte international relatif aux droits civils et politiques,
1966, article 22

PACTE INTERNATIONAL
RELATIF AUX DROITS CIVILS
ET POLITIQUES
i
I\ AT ION s UNIES
1967
2. Toute personne a drcbit à la liberté d*ejcpresslon; ce droit comprend la liberté
de rechercher, de recevoir et de répandra des informations et des idées de toute espèce,
sans considération de frontières, eous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique,
ou par tout autre tnoyen de sort choix.
3«' L'exercice des libertés prévueá au paragraphe 2 du présent article comporte
des de\^irs spécia'^ et des responsabilités spécidles. Il peut en conséquence être
soumifl à certaines restrictions qui doivent toutefois être expressément fixées par la
loi et qui sont nét^essaires :
a) Au respect des droite ou de la réputation d*autruijl
b) A la sauvegarde de là sécurité nationale, de l'ordre public, de la santé ou
de la moralité publiques.
Article 20
It Toute propagande en ii'aveur de Iti guerre est interdite par la loi.
2. Itou-c appel à la hainé nationale^ raciale ou religieuse qui constitue une
incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence est interdit par la loi.
Article 21
Le droit de réunion pacifique est reconnu. L*exercice de ce droit ne peut faire
l'objet 'que des seules restrictions imposée® conformément à la loi et qui sont
nécessaires dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale, de
la sûreté publique, de l'ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques,
ou les droits et les libertés d'autrui.
Article 22
1. Toute personne a le droit de s'associer librement avec d'autres, y compris le
droit de constituer des syndicats et d'y adhérer pour la protection de ses intérêts.
2. L*exercice de ce dreit ne peut faire l'objet que des seules restrictions
prévues par la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l'intérêt
de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre public, ou pour protéger la
santé ou la moralité publiques ou les droits et les libertés d'autrui. Le présent
article n'empêche pas de soumettre à des restrictions légales l'exercice de ce droit
par les membres des forces armées et de la police.
3 . Aucune disposition du présent article ne permet aux Etats parties à la
Convention de de l'Organisation internationale du Travail concernant la liberté
syndicale et la protection du droit syndical de prendre des mesures législatives
portant atteinte - ou d'appliquer la loi de façon à porter atteinte - aux garanties
prévues dans ladite convention.
Article 23
1. La famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à
la protection de la société et de l'Etat.
2. Le droit de se marier et de fonder une famille est reconnu à l'homme et à la
femme à partir de l'âge nubile.
3 . Nul mariage ne peut être conclu sans le libre et plein consentement des
futurs époux.
if. Les Eitats parties au parésent Pacte prendront les mesures appropriées poUr
assurer l'égalité de droits et de responsabilités des époux au regard du mariage, durant
le mariage et lors de sa dissolution. En cas de dissolution, des dispositions seront
prises afin d'assurer aux enfants la protection nécessaire.
Article 2k
1. Tout enfant, sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le
sexe, la langue, la religion, l'origine nationale ou sociale, la fortune ou la nalseancej

Document no 286
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales, 1950, article 11

No. 2889
BELGIUM, DENMARK, FRANCE,
FEDERAL REPUBLIC OF GERMANY, ICELAND, etc.
Convention for the Protection of Human Rights and Fun
damental Freedoms. Signed at Rome, on 4 November
1950
Protocol to the above-mentioned Convention. Signed at
Paris, on 20 March 1952
Official texts: English and French.
Registered on 11 August 1955 by the Council of Europe acting on behalf of the-
Contracting Parties in accordance with Resolution (54) 6 of the Committee
of Ministers of the Council of Europe adopted on 3 April 1954.
BELGIQUE, DANEMARK, FRANCE,
RÉPUBLIQUE FÉDÉRALE D'ALLEMAGNE, ISLANDE, etc.
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales. Signée à Rome, le 4 novembre
1950
Protocole additionnel à la Convention susmentionnée.
Signé à Paris, le 20 mars 1952
Textes officiels anglais et français.
Enregistrés le 11 août 1955 par le Conseil de l'Europe agissant au nom des parties
contractantes conformément à la résolution (54) 6 adoptée le 3 avril 1954 par
le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe.
1955 Nations Unies — Recueil des Traités 233
Article 11
1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté
d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de
s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.
2. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que
celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une so
ciété démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense
de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale,
ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit
pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par
les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'État.
Article 12
A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et
de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit.
Article 13
Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Conven
tion ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance
nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes
agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.
Article 14
La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention
doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la
race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres
opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale,
la fortune, la naissance ou toute autre situation.
Article 15
1. En cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la
nation, toute Haute Partie Contractante peut prendre des mesures dérogeant
aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où
la situation l'exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradic
tion avec les autres obligations découlant du droit international.
2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation à l'article 2,
sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre, et aux articles 3,
4 (paragraphe 1) et 7.
N° 2889
Document no 287
Charte sociale européenne (révisée), 1996, article 6

Série des traités européens - n° 163
Charte sociale européenne (révisée)
Strasbourg, 3.V.1996
Préambule
Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,
Considérant que le but du Conseil de l'Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses
membres afin de sauvegarder et de promouvoir les idéaux et les principes qui sont leur
patrimoine commun et de favoriser leur progrès économique et social, notamment par la
défense et le développement des droits de l'homme et des libertés fondamentales;
Considérant qu'aux termes de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des
Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et de ses Protocoles, les Etats
membres du Conseil de l'Europe sont convenus d'assurer à leurs populations les droits civils
et politiques et les libertés spécifiés dans ces instruments;
Considérant que, par la Charte sociale européenne ouverte à la signature à Turin le
18 octobre 1961 et ses Protocoles, les Etats membres du Conseil de l'Europe sont convenus
d'assurer à leurs populations les droits sociaux spécifiés dans ces instruments afin
d'améliorer leur niveau de vie et de promouvoir leur bien-être;
Rappelant que la Conférence ministérielle sur les droits de l'homme, tenue à Rome le
5 novembre 1990, a souligné la nécessité, d'une part, de préserver le caractère indivisible de
tous les droits de l'homme, qu'ils soient civils, politiques, économiques, sociaux ou culturels
et, d'autre part, de donner à la Charte sociale européenne une nouvelle impulsion;
Résolus, comme décidé lors de la Conférence ministérielle réunie à Turin les 21 et 22 octobre
1991, de mettre à jour et d'adapter le contenu matériel de la Charte, afin de tenir compte en
particulier des changements sociaux fondamentaux intervenus depuis son adoption;
Reconnaissant l'utilité d'inscrire dans une Charte révisée, destinée à se substituer
progressivement à la Charte sociale européenne, les droits garantis par la Charte tels
qu'amendés, les droits garantis par le Protocole additionnel de 1988 et d'ajouter de nouveaux
droits,
Sont convenus de ce qui suit:
Partie I
Les Parties reconnaissent comme objectif d'une politique qu'elles poursuivront par tous les
moyens utiles, sur les plans national et international, la réalisation de conditions propres à
assurer l'exercice effectif des droits et principes suivants:
1 Toute personne doit avoir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement entrepris.
STE 163 – Charte sociale européenne (révisée), 3.V.1996
__________________________________________________________________________________
5
L'exercice de ces droits doit être assuré soit par voie de conventions collectives librement
conclues, soit par des méthodes légales de fixation des salaires, soit de toute autre manière
appropriée aux conditions nationales.
Article 5 – Droit syndical
En vue de garantir ou de promouvoir la liberté pour les travailleurs et les employeurs de
constituer des organisations locales, nationales ou internationales, pour la protection de leurs
intérêts économiques et sociaux et d'adhérer à ces organisations, les Parties s'engagent à ce
que la législation nationale ne porte pas atteinte, ni ne soit appliquée de manière à porter
atteinte à cette liberté. La mesure dans laquelle les garanties prévues au présent article
s'appliqueront à la police sera déterminée par la législation ou la réglementation nationale. Le
principe de l'application de ces garanties aux membres des forces armées et la mesure dans
laquelle elles s'appliqueraient à cette catégorie de personnes sont également déterminés par
la législation ou la réglementation nationale.
Article 6 – Droit de négociation collective
En vue d'assurer l'exercice effectif du droit de négociation collective, les Parties s'engagent:
1 à favoriser la consultation paritaire entre travailleurs et employeurs;
2 à promouvoir, lorsque cela est nécessaire et utile, l'institution de procédures de négociation
volontaire entre les employeurs ou les organisations d'employeurs, d'une part, et les
organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler les conditions d'emploi par des
conventions collectives;
3 à favoriser l'institution et l'utilisation de procédures appropriées de conciliation et d'arbitrage
volontaire pour le règlement des conflits du travail;
et reconnaissent:
4 le droit des travailleurs et des employeurs à des actions collectives en cas de conflits
d'intérêt, y compris le droit de grève, sous réserve des obligations qui pourraient résulter des
conventions collectives en vigueur.
Article 7 – Droit des enfants et des adolescents à la protection
En vue d'assurer l'exercice effectif du droit des enfants et des adolescents à la protection, les
Parties s'engagent:
1 à fixer à 15 ans l'âge minimum d'admission à l'emploi, des dérogations étant toutefois
admises pour les enfants employés à des travaux légers déterminés qui ne risquent pas de
porter atteinte à leur santé, à leur moralité ou à leur éducation;
2 à fixer à 18 ans l'âge minimum d'admission à l'emploi pour certaines occupations
déterminées, considérées comme dangereuses ou insalubres;
3 à interdire que les enfants encore soumis à l'instruction obligatoire soient employés à des
travaux qui les privent du plein bénéfice de cette instruction;
4 à limiter la durée du travail des travailleurs de moins de 18 ans pour qu'elle corresponde aux
exigences de leur développement et, plus particulièrement, aux besoins de leur formation
professionnelle;
Document no 288
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne,
2000, article 28

CHARTE DES DROITS FONDAMENTAUX DE
L'UNION EUROPÉENNE
(2012/C 326/02)
26.10.2012 FR Journal officiel de l’Union européenne C 326/391
Article 26
Intégration des personnes handicapées
L'Union reconnaît et respecte le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures visant à
assurer leur autonomie, leur intégration sociale et professionnelle et leur participation à la vie de la
communauté.
TITRE IV
SOLIDARITÉ
Article 27
Droit à l'information et à la consultation des travailleurs au sein de l'entreprise
Les travailleurs ou leurs représentants doivent se voir garantir, aux niveaux appropriés, une information
et une consultation en temps utile, dans les cas et conditions prévus par le droit de l'Union et
les législations et pratiques nationales.
Article 28
Droit de négociation et d'actions collectives
Les travailleurs et les employeurs, ou leurs organisations respectives, ont, conformément au droit de
l'Union et aux législations et pratiques nationales, le droit de négocier et de conclure des conventions
collectives aux niveaux appropriés et de recourir, en cas de conflits d'intérêts, à des actions collectives
pour la défense de leurs intérêts, y compris la grève.
Article 29
Droit d'accès aux services de placement
Toute personne a le droit d'accéder à un service gratuit de placement.
Article 30
Protection en cas de licenciement injustifié
Tout travailleur a droit à une protection contre tout licenciement injustifié, conformément au droit
de l'Union et aux législations et pratiques nationales.
Article 31
Conditions de travail justes et équitables
1. Tout travailleur a droit à des conditions de travail qui respectent sa santé, sa sécurité et sa
dignité.
2. Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de
repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu'à une période annuelle de congés payés.
26.10.2012 FR Journal officiel de l’Union européenne C 326/401
Document no 289
Convention américaine relative aux droits de l’homme,
1969, article 16

No. 17955
MULTILATERAL
American Convention on Human Rights: "Pact of San José,
Costa Rica". Signed at San José, Costa Rica, on 22 No
vember 1969
Authentic texts: Spanish, English, Portuguese and French.
Registered by the Organization of American States on 27 August 1979.
MULTILATÉRAL
Convention américaine relative aux droits de l'homme :
« Pacte de San José de Costa Rica ». Signée à San José
(Costa Rica) le 22 novembre 1969
Textes authentiques : espagnol, anglais, portugais et français.
Enregistrée par l'Organisation des États américains le 27 août 1979.
Vol. 1144. I-I7955
188 _____United Nations — Treaty Series • Nations Unies — Recueil des Traités_____1979
Article 13. LIBERTÉ DE PENSÉE ET D'EXPRESSION. 1. Toute personne
a droit à la liberté de pensée et d'expression; ce droit comprend la liberté de
rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute
espèce, sans considération de frontières, que ce soit oralement ou par écrit, sous
une forme imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix.
2. L'exercice du droit prévu au paragraphe précédent ne peut être soumis
à aucune censure préalable, mais il comporte des responsabilités ultérieures qui,
expressément fixées par la loi, sont nécessaires :
a) Au respect des droits ou à la réputation d'autrui; ou
b) A la sauvegarde de la sécurité nationale, de l'ordre public, ou de la santé ou de
la morale publiques.
3. La liberté d'expression ne peut être restreinte par des voies ou des moyens
indirects, notamment par les monopoles d'Etat ou privés sur le papier journal, les
fréquences radioélectriques, les outils ou le matériel de diffusion, ou par toute
autre mesure visant à entraver la communication et la circulation des idées et des
opinions.
4. Sans préjudice des dispositions du paragraphe 2 ci-dessus, les spectacles
publics peuvent être soumis par la loi à la censure, uniquement pour en régle
menter l'accès en raison de la protection morale des enfants et des adolescents.
5. Sont interdits par la loi toute propagande en faveur de la guerre, tout appel
à la haine nationale, raciale ou religieuse, qui constituent des incitations à la
violence, ainsi que toute autre action illégale analogue contre toute personne ou
tout groupe de personnes déterminées, fondée sur des considérations de race, de
couleur, de religion, de langue ou d'origine nationale, ou sur tous autres motifs.
Article 14. DROIT DE RECTIFICATION ou DE RÉPONSE. 1. Toute personne
offensée par des données inexactes ou des imputations diffamatoires émises à
son égard dans un organe de diffusion légalement réglementé et qui s'adresse
au public en général a le droit de faire publier sa rectification ou sa réponse, par
le même organe, dans les conditions prévues par la loi.
2. En aucun cas la rectification ou la réponse ne déchargera les auteurs
de la publication incriminée des autres responsabilités encourues au regard de
la loi.
3. En vue d'assurer la sauvegarde effective de l'honneur et de la réputation
d'autrui, toute publication ou entreprise de presse, de cinéma, de radio ou de
télévision sera pourvue d'un gérant responsable qui ne sera protégé par aucune
immunité et ne bénéficiera d'aucun statut spécial.
Article 15. DROIT DE RÉUNION. Le droit de réunion pacifique et sans
armes est reconnu. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules
restrictions qui, prévues par la loi, sont nécessaires dans une société démocra
tique dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté et de l'ordre publics
ou pour protéger la santé ou la moralité publiques, ou les droits ou les libertés
d'autrui.
Article 16. LIBERTÉ D'ASSOCIATION. 1. Toute personne a le droit de
s'associer librement à d'autres à des fins idéologiques, religieuses, politiques, éco
nomiques, professionnelles, sociales, culturelles, sportives ou à toute autre fin.
Vol, 1144, 1-17955
1979_____United Nations — Treaty Series • Nations Unies — Recueil des Traités______189
2. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions
qui, prévues par la loi, sont nécessaires dans une société démocratique dans l'inté
rêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre public, ou pour pro
téger la santé ou la moralité publiques, ou les droits ou les libertés d'autrui.
3. Les dispositions du présent article n'empêchent pas l'imposition de
restrictions légales, ni même l'interdiction de l'exercice du droit d'association,
aux membres des forces armées et de la police.
Article 17. PROTECTION DE LA FAMILLE. 1. La famille est l'élément
naturel et fondamental de la société; elle doit être protégée par la société et
par l'Etat.
2. Le droit de se marier et de fonder une famille est reconnu à l'homme
et à la femme s'ils ont l'âge requis et réunissent les conditions exigées à cet effet
par les lois nationales, dans la mesure où celles-ci ne heurtent pas le principe de
la non-discrimination établi dans la présente Convention.
3. Le mariage ne peut être conclu sans le libre et plein consentement des
parties.
4. Les Etats parties prendront les mesures appropriées pour assurer l'éga
lité de droits et l'équivalence judicieuse des responsabilités des époux au regard
du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. En cas de dissolution,
des dispositions seront prises afin d'assurer la protection nécessaire aux enfants,
en fonction uniquement de leur intérêt et de leur bien-être.
5. La loi doit reconnaître les mêmes droits aux enfants nés hors des liens
du mariage qu'à ceux qui y sont nés.
Article 18. DROIT À UN NOM. Toute personne a droit à un prénom pro
pre et aux noms de ses parents ou de l'un d'entre eux. La loi réglemente les
moyens à employer pour assurer ce droit à tous, y compris, le cas échéant, le
recours à l'adoption de nom.
Article 19. DROIT DE L'ENFANT. Tout enfant a droit aux mesures de
protection qu'exigé sa condition de mineur, de la part de sa famille, de la société
et de l'Etat.
Article 20. DROIT À UNE NATIONALITÉ. 1. Toute personne a droit à une
nationalité.
2. Toute personne a le droit d'acquérir la nationalité de l'Etat sur le terri
toire duquel elle est née, si elle n'a pas droit à une autre nationalité.
3. Nul ne peut être privé arbitrairement de sa nationalité ni du droit de
changer de nationalité.
Article 2l. DROIT À LA PROPRIÉTÉ PRIVÉE. 1. Toute personne a droit à
l'usage et à la jouissance de ses biens. La loi peut subordonner cet usage et
cette jouissance à l'intérêt social.
2. Nul ne peut être privé de ses biens, sauf sur paiement d'une juste indem
nité, pour raisons d'intérêt public ou d'intérêt social, et dans les cas et selon les
formes prévus par la loi.
3. L'usure ainsi que toute autre forme d'exploitation de l'homme par
l'homme sont interdites par la loi.
Vol. 1144, 1-17955

Document no 290
Protocole additionnel à la Convention américaine relative
aux droits de l’homme traitant des droits économiques,
sociaux et culturels (Protocole de San Salvador), 1988,
article 8

[SIGNATAIRES ET RATIFICATIONS]
PROTOCOLE ADDITIONNEL A LA CONVENTION AMERICAINE RELATIVE
AUX DROITS DE L'HOMME TRAITANT DES DROITS ECONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS, "PROTOCOLE DE SAN SALVADOR"
(Adopté à San Salvador, El Salvador le 17 novembre 1988,
à la dix-huitième Session ordinaire de l'Assemblée générale)
Préambule
Les Etats parties à la Convention américaine relative aux droits de l'homme;
Réaffirmant leur propos de consolider sur ce continent, dans le cadre des institutions
démocratiques, un régime de liberté individuelle et de justice sociale, fondé sur le respect des
droits fondamentaux de l'homme;
Reconnaissant que les droits fondamentaux de l'homme ne découlent pas de son
appartenance à un Etat donné, mais reposent sur les attributs de la personne humaine, ce qui
leur justifie une protection internationale, d'ordre conventionnel, secondant ou complétant
celle que procure le droit interne des Etats américains;
Considérant l'étroite relation existant entre la pérennité des droits économiques,
sociaux et culturels et celle des droits civiques et politiques, dans la mesure où ces diverses
catégories de droits forment un tout indissoluble fondé sur la reconnaissance de la dignité de
l'individu et devant donc bénéficier d'une protection et d'une promotion permanente pour en
assurer le plein respect, sans qu'à aucun moment, la violation de certains droits puisse être
justifiée au nom de la défense de certains autres;
Conscients des bienfaits du développement de la coopération entre les Etats et des
relations internationales;
Rappelant que, conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme et à la
Convention américaine relative aux droits de l'homme, l'idéal d'un être humain libre, affranchi
de la peur et de la misère, ne pourra se réaliser que si sont réunies les conditions qui
permettent à chaque individu de jouir autant de ses droits économiques, sociaux et culturels
que de ses droits civiques et politiques;
Conscients de ce que, bien que les droits économiques, sociaux et culturels
fondamentaux aient été reconnus par d'autres instruments internationaux antérieurs, aussi
bien de portée universelle que régionale, il est de la plus haute importance qu'ils soient
réaffirmés, développés, perfectionnés et protégés afin de consolider, en Amérique, à partir du
respect intégral des droits de l'individu, le régime de la démocratie représentative, le droit des
peuples au développement et à l'autodétermination et au droit de disposer librement de leurs
richesses et ressources naturelles;
Considérant que la Convention américaine relative aux droits de l'homme prévoit que l'on
peut soumettre à l'examen des Etats parties réunis à l'occasion de l'Assemblée générale de
Article 7
Conditions de travail justes, équitables et satisfaisantes
Les Etats parties au présent Protocole reconnaissent que le droit au travail mentionné à
l'article précédent, implique que toute personne puisse jouir de ce droit à des conditions
justes, équitables et favorables, et à cet effet, ces Etats garantissent d'une manière spéciale
dans leur législation nationale:
a. Une rémunération qui procure au minimum à tous les travailleurs des conditions
de vie décentes et respectables pour eux et leurs familles et un salaire juste et
égal pour un travail de valeur égale, sans distinction aucune;
b. Le droit de tout travailleur de suivre sa vocation et de se consacrer à l'activité
qui convient le mieux à son attente et de changer d'emploi, conformément à la
réglementation nationale considérée;
c. Le droit de tout travailleur d'être promu ou de bénéficier de l'avancement dans
leur travail, et, à cet effet, il sera tenu compte de ses qualifications, de sa
compétence, de sa probité et de la durée de ses services;
d. La sécurité de l'emploi, compte tenu des caractéristiques des industries et des
professions et des causes légitimes de cessation de services. En cas de renvoi
injustifié, le travailleur a droit à une indemnité, à sa réintégration ou à toute
autre prestation prévue par la législation nationale;
e. La sécurité et l'hygiène au travail;
f. L'interdiction du travail de nuit ou en milieu insalubre ou nocif aux moins de 18
ans et en général de tout travail pouvant mettre en danger leur santé, leur
sécurité et leur moralité. La durée de la journée de travail des moins de 16 ans
devra être assujettie aux dispositions légales régissant la fréquentation scolaire
obligatoire, et en aucun cas ne peut constituer un empêchement à l'assistance
aux cours ou être une entrave au bénéfice de l'instruction;
g. La limitation raisonnable des heures de travail journalières et hebdomadaires.
Les journées seront de moindre durée lorsqu'il s'agit de travaux dangereux et de
nuit ou de travaux exécutés dans des lieux insalubres;
h. Le repos, la mise à profit du temps libre, les congés payés, ainsi que la
rémunération des jours de fêtes nationales.
Article 8
Droits syndicaux
1. Les Etats parties garantissent:
a. Le droit des travailleurs d'organiser des syndicats et de s'affilier à ceux de leur
choix pour protéger et favoriser leurs intérêts. En vertu de ce droit, les Etats
parties permettront aux syndicats de former des fédérations et des
confédérations nationales, de s'associer à celles qui existent déjà, de constituer
des organisations syndicales internationales et de s'affilier à celle de son choix.
Les Etats parties permettront également que les syndicats, fédérations et
confédérations fonctionnent librement;
b. Le droit de grève.
2. L'exercice des droits énoncés plus haut ne peut faire l'objet que des restrictions
prévues par la loi et qui constituent les mesures nécessaires, dans une société démocratique,
pour sauvegarder l'ordre public et protéger la santé ou la moralité publiques ainsi que les
droits et libertés d'autrui. Les membres des forces armées et de la police ainsi que ceux des
autres services publics essentiels exercent ces droits compte tenu des restrictions établies par
la loi.
3. Nul ne peut être contraint à appartenir à un syndicat.
Article 9
Droit à la sécurité sociale
1. Toute personne a droit à la sécurité sociale qui la protège contre les
conséquences du chômage, de la vieillesse et de l'invalidité qui la rend physiquement ou
mentalement incapable d'obtenir les moyens de mener une vie décente et respectable. En cas
de mort du bénéficiaire, les prestations de la sécurité sociale sont réversibles sur la tête des
personnes à charge.
2. Quand il s'agit de personnes membres de la population active, le droit à la
sécurité sociale couvre au moins les soins médicaux, le versement d'une allocation ou la mise
à la retraite en cas d'accident de travail ou de maladie professionnelle. La femme au travail a
droit à un congé de maternité avant et après la naissance des enfants.
Article 10
Droit à la santé
1. Toute personne a droit à la santé qui est considérée comme le droit de jouir du
meilleur état de santé physique, mentale et sociale.
2. Afin d'assurer le plein exercice du droit à la santé, les Etats parties s'engagent
à reconnaître ce droit comme un bienfait public et notamment à adopter pour garantir
l'exercice de ce droit les mesures suivantes:
a. l'octroi des soins primaires de santé, autrement dit, la mise à la disposition de
tous les individus et de toutes les familles de la communauté de l'aide médicale
essentielle;
b. l'extension des services de santé à tous les individus relevant de la juridiction de
l'Etat;
c. l'immunisation complète contre les principales maladies infectieuses;
d. La prophylaxie et le traitement des maladies endémiques, professionnelles et
autres;
e. L'information de la population sur la prévention et le traitement des problèmes
de santé;
f. La solution des problèmes de santé des groupes à plus haut risque et qui sont
plus vulnérables à cause de leur pauvreté.
Article 11
Droit à un environnement salubre
1. Toute personne a le droit de vivre dans un environnement salubre et de
bénéficier des équipements collectifs essentiels.
2. Les Etats parties encourageront la protection, la préservation et l'amélioration
de l'environnement.
Article 12
Droit à l'alimentation
1. Toute personne a droit à une alimentation adéquate qui lui assure la possibilité
d'atteindre son plein développement physique et son plein épanouissement affectif et
intellectuel.
2. Dans le but d'assurer l'exercice de ce droit et d'éradiquer la malnutrition, les
Etats parties s'engagent à perfectionner les méthodes de production, d'approvisionnement et
de distribution des aliments. A cet effet, ils s'engagent à encourager une plus large

Document no 291
Charte africaine des droits de l´homme et des peuples,
1981, article 15

Document no 292
Principes et lignes directrices sur la mise en oeuvre des
droits économiques, sociaux et culturels dans la Charte
africaine des droits de l’homme et des peuples, 2010,
paragr. 59

1
PRINCIPES ET LIGNES DIRECTRICES SUR LA MISE EN OEUVRE DES DROITS
ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS DANS LA CHARTE AFRICAINE DES DROITS
DE L’HOMME ET DES PEUPLES
AFRICAN UNION
UNION AFRICAINE
African Commission on Human & Peoples’
Rights
UNIÃO AFRICANA
Commission Africaine des Droits de l’Homme & des
Peuples
31 Bijilo Annex Layout, Kombo North District, Western Region, P. O. Box 673, Banjul, The Gambia
Tel: (220) 4410505 / 4410506; Fax: (220) 4410504
E-mail: [email protected]; Web www.achpr.org
20
circonstances, l’intérêt public pourrait requérir une indemnisation inférieure à la
valeur marchande ou, exceptionnellement aucune indemnisation du tout.
Groupes vulnérables, égalité et non-discrimination
f. S’assurer que les membres des groupes vulnérables et désavantagés, y compris les
populations/communautés autochtones victimes d’injustices foncières historiques, aient
un accès indépendant et fassent usage de leurs terres et aient le droit de revendiquer
leurs droits ancestrauxxii et qu’elles soient correctement indemnisées de cette
destruction ou aliénation historique et actuelle de leurs richesses et de leurs ressources.
Il peut s'agir de programmes de redistribution des terres mis en oeuvre selon des
procédures de droit régulières.xiii Les Etats doivent protéger la propriété foncière
traditionnelle tout en veillant à l'égalité entre les genres.
g. Prévenir l’exploitation inéquitable des ressources naturelles par les acteurs étatiques et
non-étatiques nationaux et internationaux.
h. Assurer l'égalité et la non-discrimination dans l'accès, l’acquisition, la propriété,
l’héritage et le contrôle des terres et des logements, par les femmes en particulier.xiv
Cela inclut notamment l’obligation de prendre des mesures pour modifier ou interdire
les pratiques sociales, culturelles ou autres néfastes qui empêchent les femmes et les
autres membres des groupes vulnérables et désavantagés de jouir de leur droit de
propriété, en ce qui concerne en particulier le logement et la terre.
Droit au travail (Article 15)
56. L’Article 15 stipule que : “Toute personne a le droit de travailler dans des conditions équitables
et satisfaisantes et de percevoir un salaire égal pour un travail égal”.
57. Le droit au travail est essentiel pour la réalisation des autres droits économiques, sociaux et
culturels. Il est inséparable et inhérent à la dignité humaine est fait partie intégrante du rôle de
l’individu dans la société. L’accès à un travail équitable et décent qui respecte les droits
fondamentaux de la personne humaine et les droits des travailleurs en termes de conditions,
de sûreté et de rémunération peut également être crucial tant pour la survie que pour le
développement humain.
58. Le droit au travail ne doit pas être perçu comme un droit absolu et inconditionnel d’obtenir un
emploi.xv Mais plutôt l’Etat a l’obligation de faciliter l’emploi par la création d’un environnement
propice au plein emploi des individus au sein de la société dans des conditions susceptibles
d’assurer la réalisation de la dignité de l’individu.xvi Le droit de travailler comprend le droit de
choisir librement et volontairement quel travail accepter.
59. Le droit au travail impose à l’Etat les obligations suivantes :
Obligations essentielles minimales
a. Interdire l’esclavage, le travail forcé qui comportent toutes les formes de travail ou de service
arraché à une personne sous la menace d'une sanction et/ou pour lesquels ladite personne n'e
s’est pas proposée volontairement.xvii Cela inclut toutes les formes d’exploitation économique des
enfantsxviii et d’autres membres des groupes vulnérables et désavantagés.
21
b. Assurer le droit à la liberté d’association, y compris le droit de négociation collective, de
grève et d'autres droits organisationnels et syndicaux pertinents. Ces droits incluent celui
de constituer et adhérer un syndicat de son choix (y compris le droit de ne pas le faire), le
droit des syndicats d’adhérer à des fédérations et à des confédérations nationales et
internationales et le droit des syndicats de fonctionner librement sans ingérence indue.
c. Assurer une protection adéquate contre les destitutions arbitraires et déguisées, injustes
et non justifiées et autres pratiques professionnelles inéquitables.
Plans Nationaux, politiques et systèmes
d. Adopter et mettre en oeuvre une stratégie nationale de l’emploi et un plan d’action visant à
répondre aux préoccupations de tous les travailleurs (du secteur formel et du secteur
informel) et des chômeurs.
e. Prendre des mesures appropriées pour réaliser le droit de chacun à gagner sa vie par un
travail librement choisi et accepté. Ces mesures sont, par exemple, les programmes
d’orientation et de formation technique et professionnelle, les politiques visant un
développement économique, social et culturel constant et un plein emploi productif,
l’administration de services d’assistance et de soutien aux individus afin de leur permettre
d’identifier et de trouver un emploi disponible y compris la mise en place de banques de
données sur les opportunités d’emploi et la promotion des droits et des opportunités des
travailleurs du secteur informel, de l’agriculture de subsistance et des petites entreprises.
f. Promouvoir un environnement social propice à la création d’entreprises, aux opportunités
de travail libéral, d’entreprenariat et au développement de coopératives.
g. Veiller à ce que les systèmes éducatifs préparent les jeunes aux compétences nécessaires
pour obtenir un premier emploi.
h. Garantir le droit de chacun à des conditions de travail équitables et satisfaisantes, y
compris des conditions de travail sûres et hygiéniques, une rémunération équitable, du
repos, des loisirs et une limite raisonnable des heures de travail, des congés payé
périodiques, des jours fériés payés et des congés parentaux. Cette protection doit être
spécifiquement étendue aux personnes travaillant dans le secteur informel, y compris
celles travaillant à des tâches domestiques et dans des entreprises agricoles et/ou
familiales.
Groupes vulnérables, égalité et non-discrimination
i. Assurer l’égalité et la non-discrimination dans l’accès à un travail décent et à un salaire
égal pour un travail de valeur égale et la promotionxix sans discrimination de toutes sortes
de garanties de conditions de travail aux membres des groupes vulnérables et
désavantagés qui ne soient pas inférieures à celles dont jouissent les autres employés.
j. Prendre des mesures spéciales pour garantir que les femmes aient des opportunités
égales d’accepter un emploi. Cela peut prendre la forme de programmes spéciaux
d’éducation et de formation à l'intention des femmes, qui ont souvent moins accès à
l’éducation, à chercher un travail décent de leur propre choix.
k. Promulguer et appliquer des lois et introduire des mesures de mise en oeuvre telles que
les voies de recours et l’accès à la justice dans les cas de non-respect, de harcèlement sur

Document no 293
Charte arabe des droits de l’homme, 2004, article 35

CHR/NONE/2004/40/Rev.1
GE.04-14688 (F) 290604 300604
CHARTE ARABE DES DROITS DE L’HOMME
Préambule
Procédant de la foi de la Nation arabe dans la dignité de l’homme que Dieu a honoré
depuis la création du monde et dans le fait que la patrie arabe est le berceau des religions et des
civilisations dont les nobles valeurs ont consacré le droit de l’homme à une vie digne fondée
sur la liberté, la justice et l’égalité,
Afin de concrétiser les principes éternels de fraternité, d’égalité et de tolérance entre
les êtres humains consacrés par l’Islam et les autres religions révélées,
Fiers des valeurs et des principes humanitaires que la Nation arabe a établis au cours
de sa longue histoire, lesquels ont contribué, dans une large mesure, à la diffusion de la science
entre l’Orient et l’Occident, faisant de la région le point de mire du monde entier et la destination
privilégiée des personnes en quête de savoir et de sagesse,
Ayant foi dans l’unité de la patrie arabe, qui lutte pour sa liberté et défend le droit des
nations à disposer d’elles-mêmes, à préserver leurs richesses et à se développer; ayant foi dans
la primauté du droit et dans sa contribution à la protection des droits de l’homme envisagés
dans leur universalité et leur complémentarité et convaincue que la jouissance par l’être humain
de la liberté, de la justice et de l’égalité des chances est l’aune à laquelle se mesure la valeur
de toute société,
Rejetant toutes les formes de racisme et le sionisme qui constituent une violation des droits
de l’homme et une menace pour la paix et la sécurité internationales, consciente du lien étroit
existant entre les droits de l’homme et la paix et la sécurité internationales, réaffirmant les
principes de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des droits de l’homme
et les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et du Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et tenant compte de
la Déclaration du Caire sur les droits de l’homme en Islam,
Les États parties à la présente Charte conviennent de ce qui suit:
Article premier
La présente Charte vise, dans le cadre de l’identité nationale des États arabes et
du sentiment d’appartenance à une civilisation commune, à réaliser les objectifs suivants:
1. Placer les droits de l’homme au coeur des préoccupations nationales dans les États arabes
de façon à en faire de grands idéaux qui orientent la volonté de l’individu dans ces États
et lui permettent d’améliorer sa réalité en accord avec les nobles valeurs humaines;
2. Inculquer à l’être humain dans les États arabes la fierté de son identité, la fidélité à sa
patrie et l’attachement à sa terre, à son histoire et à ses intérêts communs et faire en sorte
qu’il s’imprègne d’une culture de fraternité humaine, de tolérance et d’ouverture sur autrui,
-10-
la production, la liberté du travail et l’égalité des chances sans distinction aucune fondée
sur la race, la couleur, le sexe, la religion, la langue, l’opinion politique, l’appartenance
à un syndicat, l’origine nationale, l’origine sociale, un handicap ou toute autre situation;
2. Chaque travailleur a le droit de jouir de conditions de travail justes et favorables qui
assurent un salaire équitable lui permettant de subvenir à ses besoins essentiels et à ceux
de sa famille et fixent les heures de travail et de repos, les congés payés et les règles
pour préserver l’hygiène et la sécurité du travail et la protection des femmes, des enfants
et des personnes handicapées dans le cadre du travail;
3. Les États parties reconnaissent le droit de l’enfant d’être protégé contre l’exploitation
économique et de n’être astreint à aucun travail potentiellement dangereux ou susceptible
d’entraver son éducation ou de nuire à sa santé ou à son développement physique, mental,
spirituel, moral ou social. À cette fin, et compte tenu des dispositions des autres
instruments internationaux pertinents, les États parties, en particulier:
a) Fixent un âge minimum d’admission à l’emploi;
b) Prévoient une réglementation appropriée des horaires de travail et des conditions
d’emploi;
c) Prévoient des peines ou d’autres sanctions appropriées pour assurer l’application
effective du présent article;
4. Il est interdit de faire une distinction entre l’homme et la femme dans l’exercice du droit
de bénéficier de manière effective d’une formation, d’un emploi, de la protection du travail
et d’un salaire égal pour un travail de valeur et de qualité égales;
5. Chaque État partie assure aux travailleurs qui immigrent sur son territoire la protection
requise conformément à la législation en vigueur.
Article 35
1. Chaque individu a le droit de constituer des syndicats ou d’adhérer à des syndicats
et de pratiquer librement une activité syndicale pour défendre ses intérêts;
2. L’exercice de ses droits et libertés ne peut faire l’objet que des seules restrictions prévues
par les lois en vigueur et qui sont nécessaires pour préserver la sécurité nationale, la sûreté
publique, l’ordre public ou pour protéger la santé publique, la moralité publique ou
les droits et les libertés d’autrui;
3. Chaque État partie garantit le droit de grève dans les limites fixées par la législation
en vigueur.
Article 36
Les États parties garantissent le droit de chaque citoyen à la sécurité sociale, y compris
l’assurance sociale.
Document no 294
Charte des droits sociaux fondamentaux de
la SADC, 2003, article 4

La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC)
Charte des droits sociaux fondamentaux de la SADC
[Traduction non officielle]
ARTICLE 3
DROITS FONDAMENTAUX DE L'HOMME ET DROITS ORGANISATIONNELS
La présente Charte incarne la reconnaissance par les gouvernements, les employeurs et les
travailleurs de la Région de l'universalité et de l'indivisibilité des droits humains
fondamentaux proclamés dans des instruments tels que la Déclaration universelle des droits de
l'homme des Nations Unies, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, la
Constitution de l'OIT, la Déclaration de Philadelphie et d'autres instruments internationaux
pertinents.
2. Les États membres s'engagent à respecter les droits fondamentaux visés par la présente charte.
ARTICLE 4
LA LIBERTÉ D'ASSOCIATION ET LA NÉGOCIATION COLLECTIVE
Les États membres créent un environnement favorable compatible avec les conventions de l'OIT
sur la liberté d'association, le droit d'organisation et la négociation collective, de sorte que :
a) les employeurs et les travailleurs de la région ont le droit de constituer des associations
d'employeurs ou des syndicats de leur choix pour la promotion et la défense de leurs intérêts
économiques et sociaux ;
b) tout employeur et tout travailleur doit avoir la liberté d'adhérer ou non à ces associations
d'employeurs ou à ces syndicats sans qu'il en résulte pour lui ou elle un préjudice personnel
ou professionnel ;
c) les associations d'employeurs et les syndicats ont le droit de négocier et de conclure
des conventions collectives dans les conditions prévues par la législation et la
pratique nationales ;
d) le mécanisme de règlement des conflits du travail et son mode de fonctionnement doivent
être autonomes, accessibles, efficaces et faire l'objet d'une consultation tripartite, en
accord avec la garantie du droit de recours aux procédures d'appel ou de révision
établies ;
4
e) le droit de recourir à une action collective en cas de litige non résolu :
i) pour les travailleurs, notamment le droit de grève et le droit à la négociation
collective traditionnelle ;
ii) pour les employeurs, comprennent la négociation collective traditionnelle et
des voies de recours conformes aux instruments de l'OIT et à d'autres lois
internationales ;
f) Les droits organisationnels des syndicats représentatifs comprennent :
(i) le droit d'accès aux locaux de l'employeur à des fins syndicales, sous réserve
des procédures convenues ;
(ii) le droit de déduire les cotisations syndicales des salaires des membres ;
(iii) le droit d'élire des représentants syndicaux ;
(iv) le droit de choisir et de nommer des responsables syndicaux à temps plein ;
(v) le droit des représentants syndicaux à un congé d'éducation et de formation ;
et
(vi) le droit des syndicats à la divulgation d'informations ;
g) Les services essentiels et leurs paramètres seront définis et acceptés par les
gouvernements, les associations d'employeurs et les syndicats ;
h) en raison de la nature unique des services essentiels, les gouvernements, les
employeurs et les syndicats doivent mettre en place des mécanismes appropriés et
facilement accessibles pour une résolution rapide des litiges ;
i) la liberté d'association et les droits de négociation collective s'appliquent à toutes les
zones, y compris les zones franches d'exportation.
ARTICLE 5
CONVENTIONS DE L'ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL
Afin d'atteindre les objectifs de la présente Charte :
a) Les États membres établissent une liste prioritaire des conventions de l'OIT qui
comprend les conventions sur l'abolition du travail forcé (n° 29 et 105), la liberté
d'association et la négociation collective (n° 87 et 98), l'élimination de la
discrimination en matière d'emploi (n° 100 et 111) et l'âge minimum d'admission à l'emploi
(n° 138), ainsi que d'autres instruments pertinents ;
5

Document no 295
Accord Canada-Costa Rica de coopération dans le
domaine du travail, 2001, article 1 et annexe 1

Canada.ca
Emploi et Développement social Canada
Relations de travail
Affaires internationales
Négociation et mise en oeuvre d'accords internationaux de coopération dans le domai…
 


Accord Canada-Costa Rica de
coopération dans le domaine du travail
Texte de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le
Canada et le Costa Rica
L'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et le
Costa Rica (ACCRCT) a été signé en avril 2001 en même temps que
l'Accord de libre-échange entre les deux pays (ALÉCCR). Il est entré en
vigueur en novembre 2002.
L'ACCRCT fournit un cadre pour traiter les questions relatives au travail
dans le contexte de la libéralisation du commerce. Ses deux piliers sont
la coopération et l'application efficace des législations nationales du
travail. Les signataires s'engagent à tenir compte des principes et droits
fondamentaux relatifs au travail dans leur législation du travail et à
améliorer la gouvernance en administrant et en appliquant cette
législation d'une manière juste, équitable et transparente.
Les principes et droits fondamentaux relatifs au travail énoncés dans
l'Accord sont inspirés de la Déclaration relative aux principes et droits
fondamentaux au travail (1998) , qui représente un consensus mondial sur
les droits fondamentaux relatifs au travail que les pays doivent
promouvoir, quel que soit leur niveau de développement économique.
Reconnaissant que la coopération technique dans le domaine du travail
fait en sorte que dans le cadre d'une stratégie de développement social
et économique, les politiques économiques et sociales s'épaulent
mutuellement pour favoriser un développement durable,
Reconnaissant les différences qui existent entre leur niveau de
développement respectif et la taille de leur économie,
Convaincus des avantages à tirer d'une meilleure coopération entre eux
sur des questions dans le domaine de travail,
Sont Convenus de ce qui suit :
Partie I (1) Objectifs
Article premier : Objectifs
Le présent accord vise les objectifs suivants :
1. améliorer les conditions de travail et le niveau de vie sur le territoire
de chacune des Parties;
2. faire prévaloir, dans toute la mesure du possible, les principes et
droits dans le domaine du travail énoncés aux annexes 1 et 2;
3. encourager la coopération pour favoriser l'innovation et pour relever
les niveaux de productivité et de qualité sur le territoire de chacune
des Parties;
4. favoriser la publication et l'échange de renseignements et la
réalisation d'études conjointes, afin de contribuer à une meilleure
compréhension mutuelle des règles de droit et des institutions
régissant le travail sur le territoire de chacune des Parties;
5. élaborer des activités de coopération en matière de travail fondées
sur la réciprocité des avantages;
6. promouvoir l'observation et l'application effective, par chacune des
Parties, de ses règles de droit dans le domaine du travail; et
7. favoriser l'échange entre les Parties, de manière approfondie et
transparente, de l'information concernant l'administration de leurs
règles de droit dans le domaine du travail.
Partie II (2) Obligations
Article 2 : Engagements généraux
Dans le plein respect de la Constitution et des règles de droit dans le
domaine du travail des Parties et reconnaissant que celles-ci ont le droit
d'établir leurs propres normes du travail sur leur territoire, et d'adopter
ou de modifier en conséquence leurs règles de droit dans le domaine du
travail et d'établir leurs priorités quant à l'application de leurs politiques
en la matière, chacune des Parties devra faire en sorte que ses règles de
droit dans le domaine du travail concrétisent et garantissent les principes
et droits dans le domaine du travail énoncés aux annexes 1 et 2.
Article 3 : Portée de l'accord
Les règles de droit dans le domaine du travail sont considérés comme
relevant du présent accord si elles sont en rapport direct avec les
principes et droits dans le domaine du travail énoncés aux annexes 1 et
2.
Article 4 : Mesures gouvernementales d'application
1. Chacune des Parties devra promouvoir l'observation de ses règles
de droit dans le domaine du travail et en assurer l'application
effective, par la mise en oeuvre, sous réserve de l'article 24, de
mesures gouvernementales appropriées, consistant notamment à :
a. désigner et former des inspecteurs;
b. surveiller l'observation des règles de droit dans le domaine du
travail et règlements et enquêter sur les infractions présumées;
et
Fait en double exemplaire, à _____, ce ________________,
Pour le Gouvernement
de la République du
Costa Rica
Annexe 1 Principes et Droits
Fondamentaux au Travail
Les Parties s'engagent à respecter et promouvoir les principes et droits
reconnus dans la Déclaration relative aux principes et droits
fondamentaux au travail de l'OIT. Les Parties traduiront les principes et
droits suivants dans leurs lois, réglements, procédures et pratiques :
liberté d'association et protection du droit de s'organiser;
droit de négociation collective;
droit de grève;
interdiction du travail forcé;
protections accordées aux enfants et aux jeunes gens en matière de
travail;
élimination de la discrimination; et
égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.
Pour le Gouvernement
du Canada
Pour le Gouvernement
de la République du Costa Rica
Document no 296
Accord Canada-Colombie de coopération dans le
domaine du travail, 2008, article 1

Canada.ca
Emploi et Développement social Canada
Relations de travail
Affaires internationales
Négociation et mise en oeuvre d'accords internationaux de coopération dans le domai…
 


Accord Canada-Colombie de
coopération dans le domaine du travail
Texte de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le
Canada et la Colombie
Communication du public CAN 2016-1 (Colombie)
Communication du public CAN 2016-1 (Colombie) – acceptée aux
fins d’examen
Examen de la communication du public CAN 2016-1 - Rapport
publié conformément à l’Accord de coopération dans le
domaine du travail entre le Canada et la Colombie
Plan d'action en vertu de l'accord de coopération dans le
domaine du travail entre le Canada et la Colombie - 2018-2021
L'accord de libre-échange entre le Canada et la Colombie et ses accords
parallèles dans le domaine du travail et de l'environnement ont été
signés le 21 novembre 2008 et sont entrés en vigueur le 15 août 2011.
L'Accord de coopération dans le domaine du travail (ACT) entre le
Canada et la Colombie est basé sur la coopération entre les parties afin
de promouvoir et d'assurer l'application des principes et des droits
fondamentaux du travail.
Par cet ACT, les deux pays s'engagent à veiller à ce que leurs lois
respectent la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux
au travail (1998) de l'Organisation Internationale du Travail.
b. en incitant les employeurs et les employés de chaque pays à
observer le droit du travail et à collaborer en vue de maintenir un
environnement de travail équitable et propice à la santé et à la
sécurité au travail;
Reconnaissant l'importance d'assurer la protection des droits des
travailleurs migrants;
Reconnaissant l'importance d'encourager les pratiques librement
consenties de responsabilité sociale des entreprises dans les limites de
leurs territoires ou de leurs juridictions respectives, afin d'assurer la
cohérence entre les objectifs économiques et les objectifs dans le
domaine du travail;
S'appuyant sur les institutions et les mécanismes existants au Canada et
en Colombie afin de réaliser les objectifs économiques et sociaux
susmentionnés;
Sont convenus de ce qui suit:
Première partie : Obligations
Article 1 : Obligations générales
1. Chacune des Parties fait en sorte que ses lois et règlements, de
même que les pratiques établies sous son régime, incorporent et
protègent les principes et les droits internationalement reconnus
dans le domaine du travail, lesquels sont les suivants :
a. la liberté d'association et le droit de négociation collective (y
compris la protection du droit d'organisation et du droit de
grève);
b. la suppression de toutes les formes de travail forcé ou
obligatoire;
c. l'abolition effective du travail des enfants (y compris les mesures
de protection des enfants et des jeunes gens);
d. la suppression de la discrimination en matière d'emploi et
d'activités professionnelles;
e. des conditions de travail acceptables en ce qui touche au salaire
minimum, aux heures de travail et à la santé et sécurité au
travail;
f. la reconnaissance aux travailleurs migrants des mêmes
protections juridiques que celles dont jouissent les
ressortissants de la Partie concernée en matière de conditions
de travail.
2. Dans la mesure où les principes et les droits énoncés ci-dessus se
rapportent à l'OIT, les sous-paragraphes a) à d) se réfèrent
uniquement à la Déclaration de 1998 de l'OIT, alors que ceux
énoncés aux sous-paragraphes e) et f) sont plus étroitement liés à
l'Agenda pour le travail décent de l'OIT.
Article 2 : Engagement à ne pas déroger
Chacune des Parties assure qu'il ne renonce pas ou ne déroge pas, ni
n'offre de renoncer ou de déroger, à son droit du travail d'une façon qui
affaiblisse ou qui diminue l'adhésion aux principes et aux droits du
travail internationalement reconnus énoncés à l'article 1, dans le but de
stimuler le commerce entre les Parties, ou d'inciter la mise en place,
l'acquisition, l'accroissement ou le maintien d'un investissement sur son
territoire.
Article 3 : Mesures gouvernementales d'application
1. Chacune des Parties, sous réserve de l'article 22, promeut le respect
de son droit du travail et assure son application effective au moyen
de mesures gouvernementales appropriées, telles que :
a. instituer et maintenir des unités d'inspection du travail, en
procédant notamment à la désignation et à la formation
d'inspecteurs;

Document no 297
Accord Canada-Pérou de coopération dans le domaine du
travail, 2008, article 1

Canada.ca
Emploi et Développement social Canada
Relations de travail
Affaires internationales
Négociation et mise en oeuvre d'accords internationaux de coopération dans le domai…
 


Accord Canada-Peru de coopération
dans le domaine du travail
Texte de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le
Canada et le Pérou
(l'ACPCT en format PDF 138 ko )
L'accord de libre-échange entre le Canada et le Pérou et ses accords
parallèles dans le domaine du travail et de l'environnement ont été
signés le 29 mai 2008 et sont entrés en vigueur le 1er août 2009.
L'accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et le
Pérou est basé sur la coopération entre les parties afin de promouvoir et
d'assurer la mise en oeuvre des principes et des droits fondamentaux du
travail.
Voici des éléments clés de l'accord de coopération dans le domaine du
travail :
Le Canada et le Pérou se sont engagés à veiller à ce que leurs lois
respectent la Déclaration relative aux principes et droits
fondamentaux au travail de l'Organisation internationale du Travail
(OIT), adoptée en 1998.
Le Canada et le Pérou se sont également engagés à fournir des
protections en matière de santé et de sécurité au travail, à protéger
les droits des travailleurs migrants ainsi qu'à assurer des normes
b. en incitant les employeurs et les employés de chaque pays à
observer le droit du travail et à collaborer en vue de maintenir un
environnement de travail équitable et propice à la santé et à la
sécurité au travail;
Reconnaissant l'importance d'assurer la protection des droits des
travailleurs migrants;
Reconnaissant l'importance d'encourager les pratiques librement
consenties de responsabilité sociale des entreprises dans les limites de
leurs territoires ou de leurs juridictions respectives, afin d'assurer la
cohérence entre les objectifs économiques et les objectifs dans le
domaine du travail;
S'appuyant sur les institutions et les mécanismes existants au Canada et
au Pérou afin de réaliser les objectifs économiques et sociaux
susmentionnés;
Sont convenus de ce qui suit :
Premiére Partie - Obligations
Article 1 : Obligations générales
1. Chacune des Parties fait en sorte que ses lois et règlements, de
même que les pratiques établies sous son régime, incorporent et
protègent les principes et les droits internationalement reconnus
dans le domaine du travail, lesquels sont les suivants :
a. la liberté d'association et le droit de négociation collective (y
compris la protection du droit d'organisation et du droit de
grève);
b. la suppression de toutes les formes de travail forcé ou
obligatoire;
c. l'abolition effective du travail des enfants (y compris les mesures
de protection des enfants et des jeunes gens);
d. la suppression de la discrimination en matière d'emploi et
d'activités professionnelles;
e. des conditions de travail acceptables en ce qui touche au salaire
minimum, aux heures de travail et à la santé et sécurité au
travail;
f. la reconnaissance aux travailleurs migrants des mêmes
protections juridiques que celles dont jouissent les
ressortissants de la Partie concernée en matière de conditions
de travail.
2. Dans la mesure où les principes et les droits énoncés ci-dessus se
rapportent à l'OIT, les sous-paragraphes a) à d) se réfèrent
uniquement à la Déclaration de l'OIT, alors que ceux énoncés aux
sous-paragraphes e) et f) sont plus étroitement liés à l'Agenda pour
le travail décent de l'OIT.
Article 2 : Engagement à ne pas déroger
Toute Partie ne renonce pas ou ne déroge pas, ni n'offre de renoncer ou
de déroger, à son droit du travail d'une façon qui affaiblisse ou qui
diminue l'adhésion aux principes et aux droits du travail
internationalement reconnus énoncés à l'article 1, dans le but de
stimuler le commerce ou l'investissement.
Article 3 : Mesures gouvernementales d'application
1. Chacune des Parties, sous réserve de l'article 22, promeut le respect
de son droit du travail et assure son application effective au moyen
de mesures gouvernementales appropriées, telles que :
a. instituer et maintenir des unités d'inspection du travail, en
procédant notamment à la désignation et à la formation
d'inspecteurs;

Document no 298
Accord Canada-Jordanie de coopération dans le domaine
du travail, 2009, article 1

Canada.ca
Emploi et Développement social Canada
Relations de travail
Affaires internationales
Négociation et mise en oeuvre d'accords internationaux de coopération dans le domai…
 


Accord Canada-Jordanie de coopération
dans le domaine du travail
Texte de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le
Canada et la Jordanie
Lire le texte entier en format PDF (220 ko)
Le 28 juin 2009, le Canada et la Jordanie ont signé un accord de libreéchange
et deux accords auxiliaires dans le domaine du travail et de
l'environnement. Ils sont entrés en vigueur le 1er octobre 2012.
L'accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et la
Jordanie est basé sur la coopération entre les parties afin de promouvoir
et d'assurer la mise en oeuvre des principes et des droits fondamentaux
du travail. Il prévoit également un mode de règlement des différends
ouvert et transparent. Les deux pays sont tenus de respecter l'accord de
coopération dans le domaine du travail, et pourraient se voir imposer
des pénalités financières dans le cas où des dispositions seraient violées.
Les éléments clés de l'accord de coopération dans le domaine du
travail sont les suivants:
Le Canada et la Jordanie se sont engagés à veiller à ce que leurs lois
respectent la Déclaration relative aux principes et droits
fondamentaux au travail de l'Organisation internationale du Travail
(OIT), adoptée en 1998.
en encourageant la consultation et le dialogue entre les travailleurs,
les employeurs et l'État,
en encourageant les employeurs et les travailleurs de chacun des
deux pays à observer les lois du travail et à collaborer en vue de
maintenir un environnement de travail équitable, sain et sécuritaire;
Reconnaissant l'importance d'assurer la protection des droits des
travailleurs migrants;
Reconnaissant l'importance d'encourager les pratiques librement
consenties de responsabilité sociale des entreprises dans leurs sphères
de compétence ou sur leurs territoires respectifs, afin d'assurer la
cohérence des objectifs économiques et des objectifs relevant du
domaine du travail;
Faisant Fond sur les institutions et les mécanismes existants au Canada
et en Jordanie pour la réalisation des objectifs économiques et sociaux
précités;
Sont Convenus de ce qui suit:
Première partie
Obligations
Article 1: Obligations générales
1. Chacune des Parties fait en sorte que son droit du travail et ses
pratiques dans le domaine du travail confirment et protègent les
principes et les droits internationalement reconnus dans le domaine
du travail qui sont énoncés ci-après :
a. la liberté d'association et le droit de négociation collective (y
compris la protection du droit d'organisation et du droit de
grève);
b. la suppression de toutes les formes de travail forcé ou
obligatoire;
c. l'abolition effective du travail des enfants (y compris les mesures
de protection des enfants et des jeunes gens);
d. la suppression de la discrimination en matière d'emploi et de
profession (ycompris l'égalité de rémunération entre les
hommes et les femmes);
e. des normes minimales d'emploi acceptables, telles que le salaire
minimum et la rémunération des heures supplémentaires, pour
les salariés, y compris ceux qui ne sont pas visés par des
conventions collectives;
f. la prévention des accidents du travail et des maladies
professionnelles;
g. l'indemnisation des victimes d'accidents du travail et de
maladies professionnelles;
h. l'absence de conditions de travail discriminatoires envers les
travailleurs migrants.
2. Dans la mesure où les principes et les droits énoncés ci-dessus se
rapportent à l', les sous-paragraphesa) à d) renvoient uniquement à
la Déclaration de 1998 de l'OIT, alors que les droits énoncés aux
sous-paragraphese), f), g) et h) sont plus étroitement liés à l'Agenda
pour le travail décent de l'OIT.
Article 2: Non-dérogation
Chacune des Parties s'abstient de renoncer ou de déroger ou d'offrir de
renoncer ou de déroger, dans le but de stimuler le commerce ou
l'investissement, à son droit du travail d'une façon qui affaiblisse ou qui
diminue l'adhésion aux principes et aux droits internationalement
reconnus dans le domaine du travail énoncés à l'article 1.
Article 3: Mesures gouvernementales d'application
1. Chacune des Parties, dans le cadre de sa législation nationale et de
son système judiciaire, promeut le respect de son droit du travail et

Document no 299
Protocole sur l’emploi et le travail de la Communauté de
développement de l’Afrique australe, 2014, article 6

Document no 300
Accord entre les États-Unis d'Amérique, les États-Unis
mexicains et le Canada, 2018, article 23.3

ACCORD ENTRE LES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE, LES
ÉTATS-UNIS MEXICAINS ET LE CANADA
PRÉAMBULE
Le Gouvernement des États-Unis d’Amérique, le Gouvernement des États-Unis
mexicains et le Gouvernement du Canada (collectivement dénommés « les Parties »), ayant
résolu :
DE RENFORCER À NOUVEAU les liens d’amitié de longue date unissant leurs pays et
leurs peuples, ainsi que la solide coopération économique qui s’est développée par le
commerce et les investissements;
DE RENFORCER DAVANTAGE les relations économiques étroites qui existent entre eux;
DE REMPLACER l’Accord de libre-échange nord-américain de 1994 par un nouvel accord
de grande qualité adapté au XXIème siècle pour soutenir des échanges commerciaux
mutuellement avantageux qui conduiront à des marchés plus libres et équitables et à une
croissance économique vigoureuse dans les régions;
DE PRÉSERVER ET D’ACCROÎTRE la production et le commerce régionaux en
encourageant davantage le recours aux sources d’approvisionnement régionales en produits
et en matières;
D’AMÉLIORER ET DE PROMOUVOIR la compétitivité des exportations et des entreprises
régionales sur les marchés mondiaux, ainsi que des conditions de concurrence loyale dans les
régions;
DE RECONNAÎTRE que les petites et moyennes entreprises (les « PME »), y compris les
microentreprises, contribuent de manière significative à la croissance économique, à
l'emploi, au développement communautaire, à l'engagement des jeunes et à l'innovation, et
de chercher à soutenir leur croissance et leur développement en renforçant leur capacité de
participer aux opportunités créées par le présent accord et d'en tirer profit;
D’ÉTABLIR un cadre juridique et commercial clair, transparent et prévisible propice à la
planification d’entreprise, qui favorise la poursuite de l’expansion du commerce et de
l’investissement;
DE FACILITER le commerce entre les Parties par la promotion de procédures douanières
efficaces et transparentes, qui réduisent les coûts et garantissent la prévisibilité pour les
importateurs et les exportateurs, et d’encourager l’élargissement de la coopération en matière
de facilitation des échanges commerciaux et de mise en application;
23-2
Article 23.2 : Déclaration d’engagement commun
1. Les Parties affirment leurs obligations à titre de membres de l’OIT, y compris celles
énoncées dans la Déclaration de l’OIT sur les droits au travail et la Déclaration de l’OIT sur la
justice sociale pour une mondialisation équitable (2008).
2. Les Parties reconnaissent le rôle important des organisations de travailleurs et
d’employeurs dans la protection des droits internationalement reconnus dans le domaine du
travail.
3. Les Parties reconnaissent aussi l’objectif de faire uniquement le commerce de produits
qui sont produits en conformité avec le présent chapitre.
Article 23.3 : Droits dans le domaine du travail
1. Chacune des Parties adopte et maintient dans ses lois et règlements, ainsi que dans les
pratiques établies sous leur régime, les droits suivants comme ils sont énoncés dans la
Déclaration de l’OIT sur les droits au travail3, 4 :
a) la liberté d’association5 et la reconnaissance effective du droit de négociation
collective6;
b) l’élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire;
c) l’abolition effective du travail des enfants et, pour l’application du présent accord,
l’interdiction des pires formes de travail des enfants;
d) l’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession.
3 Les obligations énoncées dans le présent article qui concernent l’OIT font référence uniquement à la Déclaration
de l’OIT sur les droits au travail.
4 Pour établir qu’il y a violation d’une obligation au titre du paragraphe 1 ou 2, une Partie doit démontrer que l’autre
Partie a omis d’adopter ou de maintenir une loi, un règlement ou une pratique d’une manière qui a un effet sur le
commerce ou l’investissement entre les Parties. Il est entendu qu’une omission est commise « d’une manière qui a
un effet sur le commerce ou l’investissement entre les Parties » si elle concerne : 1) une personne ou un secteur qui
produit un produit ou fournit un service faisant l’objet d’un échange commercial entre les Parties ou qui a un
investissement sur le territoire de la Partie qui a omis de se conformer à cette obligation; ou 2) une personne ou un
secteur qui produit un produit ou fournit un service qui, sur le territoire d’une Partie, entre en concurrence avec un
produit ou un service d’une autre Partie.
5 Il est entendu que le droit de grève est lié au droit à la liberté d’association, lequel ne peut se réaliser sans la
protection du droit de grève.
6 L’annexe 23-A énonce les obligations relatives à la représentation des travailleurs dans les négociations
collectives.
23-3
2. Chacune des Parties adopte et maintient des lois et règlements, et des pratiques établies
sous leur régime, régissant les conditions de travail acceptables en ce qui concerne le salaire
minimum, les heures de travail ainsi que la santé et la sécurité au travail.
Article 23.4 : Non-dérogation
Les Parties reconnaissent qu’il est inapproprié d’assouplir ou de réduire, en vue
d’encourager le commerce ou l’investissement, les protections prévues dans le droit du travail de
chacune des Parties. En conséquence, une Partie ne renonce pas ou ne déroge pas d’une autre
manière, ni n’offre de renoncer ou de déroger d’une autre manière, à ses lois ou règlements qui :
a) mettent en oeuvre l’article 23.3.1 (Droits dans le domaine du travail), si la
renonciation ou la dérogation est incompatible avec un droit énoncé dans ce
paragraphe;
b) mettent en oeuvre l’article 23.3.1 ou 23.3.2 (Droits dans le domaine du travail), si
la renonciation ou la dérogation assouplit ou réduit le respect d’un droit énoncé à
l’article 23.3.1 (Droits dans le domaine du travail) ou d’une condition de travail
visée à l’article 23.3.2 (Droits dans le domaine du travail) dans une zone
commerciale ou douanière spéciale, par exemple une zone de transformation des
produits à l’exportation ou une zone franche, sur le territoire de la Partie,
d’une manière qui a un effet sur le commerce ou l’investissement entre les Parties7.
Article 23.5 : Application du droit du travail
1. Une Partie ne manque pas d’appliquer de manière effective son droit du travail, par une
façon d'agir ou de ne pas agir soutenue ou récurrente8, d’une manière qui a un effet sur le
commerce ou l’investissement entre les Parties9 après la date d’entrée en vigueur du présent
accord.
7 Il est entendu qu’une renonciation ou une dérogation a lieu « d’une manière qui a un effet sur le commerce ou
l’investissement entre les Parties » si elle concerne : 1) une personne ou un secteur qui produit un produit ou fournit
un service faisant l’objet d’un échange commercial entre les Parties ou qui a un investissement sur le territoire de la
Partie qui a omis de se conformer à l’obligation; ou 2) une personne ou un secteur qui produit des produits ou fournit
un service qui, sur le territoire d’une Partie, entre en concurrence avec un produit ou un service d’une autre Partie.
8 Il est entendu qu’une « action ou inaction soutenue ou récurrente » est « soutenue » si l’action ou l’inaction est
constante ou continue et « récurrente » si l’action ou l’inaction se produit périodiquement ou à répétition, dans des cas
qui sont liés ou de même nature. Une action ou inaction exclut les cas isolés.
9 Il est entendu qu’une « action ou inaction » est commise « d’une manière qui a un effet sur le commerce ou
l’investissement entre les Parties » si elle concerne : 1) une personne ou un secteur qui produit des produits ou
fournit des services faisant l’objet d’un échange commercial entre les Parties ou qui a un investissement sur le
territoire de la Partie qui a omis de se conformer à l’obligation; ou 2) une personne ou un secteur qui produit un

Document no 301
CDH, CCPR/C/79/Add.104 (1999), Examen des rapports
présentés par les États parties conformément à l’article
40 du Pacte, paragr. 25

Nations Unies
Pacte international
relatif aux droits civils
et politiques
Comité des droits de l'homme
Soixante-cinquième session
"""" "" CCPR/C/79/Add.104
Original : Anglais
Examen des rapports présentés par les États parties en vertu de
l'article 40 du Pacte
Observations finales du Comité des droits de l'homme
Chili
1. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique du Chili (CCPR/C/95/Add.1)
à ses 1733ème et 1734ème séances (CCPR/C/SR.1733-1734), tenues le 24 mars 1999, et a
adopté les observations finales suivantes à sa 1740ème séance (CCPR/C/SR.1740), tenue
le 30 mars 1999.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le quatrième rapport périodique très complet
de l'État partie, qui rend compte des changements importants intervenus dans le pays
depuis 1990. Le Comité prend note des informations utiles contenues dans le rapport
concernant les projets de propositions législatives. Il regrette toutefois la présentation
tardive du rapport et du document de base.
3. Elle apprécie les informations supplémentaires fournies par la délégation dans le
cadre de son dialogue avec le Comité.
B. Aspects positifs
4. Le Comité se félicite des progrès accomplis depuis l'examen du troisième rapport
périodique de l'État partie dans le rétablissement de la démocratie au Chili après la dictature
militaire, ainsi que des initiatives visant à réformer la législation incompatible avec les
obligations de l'État partie en vertu du . Pacte.
5. La création du Service national des femmes (SERNAM) et de la Commission
nationale pour la famille, l'adoption de la loi sur la violence domestique, le Comité
national pour l'éradication du travail des enfants et l'Académie judiciaire sont autant
d'évolutions positives.
99-09365S (E) 070499
[Traduction non officielle]
CCPR/C/79/Add.104
Le Comité recommande à l'État partie de prendre des mesures pour améliorer les
conditions de la participation des femmes, si nécessaire, en adoptant des programmes
d'action positive.
20. Le maintien en vigueur d'une législation qui criminalise les relations homosexuelles
entre adultes consentants implique une violation du droit à la vie privée protégé par l'article
17 du Pacte et peut renforcer les attitudes de discrimination entre les personnes sur la
base de l'orientation sexuelle. C'est pourquoi :
La loi devrait être modifiée afin d'abolir le crime de sodomie entre adultes.
21. L'âge minimum du mariage, 12 ans pour les filles et 14 ans pour les garçons, soulève
la question du respect par l'État partie de l'obligation qui lui incombe, en vertu du
paragraphe 1 de l'article 24, d'assurer la protection des mineurs. En outre, un mariage à un
si jeune âge signifie généralement que les personnes concernées n'ont pas la maturité
mentale nécessaire pour s'assurer que le mariage est contracté avec un libre et plein
consentement, comme l'exige le paragraphe 3 de l'article 23 du Pacte. C'est pourquoi :
L'État partie devrait modifier la loi afin d'introduire un âge minimum uniforme pour
le mariage des hommes et des femmes, ce qui garantira la maturité requise pour
que le mariage soit conforme aux exigences du paragraphe 3 de l'article 23 du
Pacte.
22. Le Comité prend note des différentes mesures législatives et administratives prises pour
respecter et garantir les droits des personnes appartenant aux communautés autochtones
du Chili à jouir de leur propre culture. Néanmoins, le Comité est préoccupé par les projets
hydroélectriques et autres projets de développement qui pourraient affecter le mode de
vie et les droits des personnes appartenant à la communauté Mapuche et à d'autres
communautés indigènes. La réinstallation et l'indemnisation peuvent ne pas être appropriées
pour se conformer à l'article 27 du Pacte. C'est pourquoi :
Lorsqu'il planifie des actions qui affectent les membres des communautés autochtones,
l'État partie doit accorder une attention primordiale à la durabilité de la culture et du
mode de vie autochtones et à la participation des membres des communautés
autochtones aux décisions qui les affectent.
23. Le Comité est préoccupé par l'absence d'une législation globale qui interdirait la
discrimination dans les domaines public et privé, tels que l'emploi et le logement. En vertu
du paragraphe 3 de l'article 2 et de l'article 26 du Pacte, l'État partie est tenu de protéger
les personnes contre une telle discrimination. Par conséquent, l'État partie est tenu de
protéger les personnes contre cette discrimination :
Une législation devrait être adoptée pour interdire la discrimination et offrir un
recours effectif à ceux dont le droit de ne pas être discriminé est violé. Le Comité
recommande également la création d'un défenseur national des droits de l'homme
ou d'un autre organisme efficace chargé de surveiller la mise en oeuvre de la
législation antidiscriminatoire.
24. Le statut spécial accordé en droit public aux églises catholique romaine et orthodoxe
implique une discrimination entre les personnes en raison de leur religion et peut
entraver la liberté de religion. C'est pourquoi :
L'État partie devrait modifier la loi afin d'accorder un statut égal à toutes les
communautés religieuses existant au Chili.
25. L'interdiction générale imposée au droit des fonctionnaires de constituer un syndicat et
de négocier collectivement, ainsi qu'à leur droit de grève, soulève de graves préoccupations
au regard de l'article 22 du Pacte. C'est pourquoi :
L'État partie devrait revoir les dispositions pertinentes des lois et décrets afin de
garantir aux fonctionnaires le droit de s'affilier à des syndicats et de mener des
négociations collectives, garanti par l'article 22 du Pacte.
Document no 302
CDH, CCPR/CO/80/LTU (2004), Examen des rapports
présentés par les États parties conformément à l’article
40 du Pacte, paragr. 18

GE.04-41256 (F) 130504 180504
Pacte international
relatif aux droits civils
et politiques
Distr.
GÉNÉRALE
CCPR/CO/80/LTU
4 mai 2004
FRANÇAIS
Original: ANGLAIS
COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME
Quatre-vingtième session
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE
Observations finales du Comité des droits de l’homme
Lituanie
1. Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique de la Lituanie
(CCPR/C/LTU/2003/2) à ses 2181e et 2182e séances, les 24 et 25 mars 2004, et a adopté
les observations finales ci-après, à sa 2192e séance, le 1er avril 2004.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique de la Lituanie et
se félicite du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation. Il salue la concision
du rapport et la pertinence des informations qu’il contient sur la mise en oeuvre dans la pratique
de la législation.
B. Aspects positifs
3. Le Comité relève avec satisfaction les efforts que l’État partie déploie sans relâche
pour réformer son système judiciaire et réviser sa législation de façon que la protection
qu’ils assurent soit conforme au Pacte. Il se félicite en particulier de la création du Comité
parlementaire sur les droits de l’homme et des trois institutions de médiateur: les Médiateurs
parlementaires, le Médiateur pour l’égalité des chances et le Médiateur pour la protection des
droits de l’enfant. Le Comité encourage l’État partie à étendre les pouvoirs des deux derniers
médiateurs, afin de les habiliter à engager des actions en justice, comme peuvent le faire
les Médiateurs parlementaires.
NATIONS
UNIES CCPR
CCPR/CO/80/LTU
page 5
sont désavantagées puisqu’elles ne peuvent pas avoir la personnalité juridique et qu’elles
peuvent de ce fait, comme la délégation l’a reconnu, être confrontées à certaines difficultés,
notamment pour ce qui est de la restitution des biens confisqués.
L’État partie devrait faire en sorte qu’il n’y ait aucune discrimination en droit
ni en fait dans le traitement des différentes religions.
17. Le Comité exprime à nouveau les inquiétudes qu’il avait formulées dans les observations
finales relatives au précédent rapport concernant les conditions imposées aux personnes qui
voudraient effectuer un service autre que militaire pour des raisons d’objection de conscience,
en particulier en ce qui concerne les critères admis par la Commission spéciale et la durée
du service civil par rapport au service militaire.
Le Comité recommande à l’État partie de préciser les motifs et les conditions
à remplir pour être admis à accomplir un service de remplacement en invoquant
l’objection de conscience ou les convictions religieuses, d’assurer le respect du droit
à la liberté de conscience et de religion en permettant dans la pratique de réaliser
un service de remplacement en dehors des forces armées, et de faire en sorte que
la durée de ce service ne lui donne pas un caractère punitif (art. 18 et 26).
18. Le Comité constate avec préoccupation que le nouveau Code du travail est trop restrictif
notamment en ce qu’il interdit la grève dans des services qui ne peuvent pas être considérés
comme essentiels et en ce qu’il impose une majorité des deux tiers pour lancer un mot d’ordre
de grève, ce qui peut représenter une violation de l’article 22.
L’État partie devrait apporter au Code du travail les modifications qui s’imposent
pour assurer la protection des droits garantis par l’article 22 du Pacte.
19. L’État partie devrait assurer une large diffusion au texte de son deuxième rapport
périodique, aux réponses apportées à la liste des points à traiter du Comité ainsi qu’aux présentes
observations finales.
20. Conformément au paragraphe 5 de l’article 70 du règlement intérieur du Comité, l’État
partie est invité à donner, dans un délai d’un an, toutes informations utiles sur la suite donnée
aux recommandations figurant dans les paragraphes 7, 9 et 13 ci-dessus. Le Comité demande que
les renseignements relatifs aux autres recommandations soient incluses dans le troisième rapport
périodique de l’État partie, qui devra être soumis avant le 1er avril 2009.
-----
Document no 303
CDH, CCPR/C/EST/CO/3 (2010), Examen des rapports
présentés par les États parties conformément à l’article
40 du Pacte, paragr. 15

GE.10-44093 (F) 240810 250810
Comité des droits de l’homme
Quatre-vingt-dix-neuvième session
Genève, 12-30 juillet 2010
Examen des rapports soumis par les États parties
conformément à l’article 40 du Pacte
Observations finales du Comité des droits de l’homme
Estonie
1. Le Comité des droits de l’homme a examiné le troisième rapport périodique de
l’Estonie (CCPR/C/EST/3) à ses 2715e et 2716e séances, les 12 et 13 juillet 2010
(CCPR/C/SR.2715 et CCPR/C/SR.2716), et a adopté les observations finales ci-après à sa
2736e séance (CCPR/C/SR.2736) le 27 juillet 2010.
A. Introduction
2. Le Comité se félicite de la soumission en temps voulu du troisième rapport
périodique de l’Estonie et se déclare satisfait du dialogue constructif qu’il a eu avec la
délégation. Il prend acte avec satisfaction des renseignements détaillés qui ont été donnés
sur les mesures prises par l’État partie et sur les futurs plans et projets visant à poursuivre la
mise en oeuvre du Pacte. Le Comité sait également gré à l’État partie d’avoir soumis à
l’avance des réponses écrites à la liste des points qui lui avait été adressée, ainsi qu’à la
délégation pour les renseignements complémentaires détaillés qu’elle a donnés oralement et
par écrit.
B. Aspects positifs
3. Tout en prenant note de l’engagement résolu de l’État partie en faveur de la
protection des droits de l’homme, le Comité accueille avec satisfaction les mesures d’ordre
législatif et autre suivantes:
a) L’adoption d’un nouveau Code de procédure pénale, entré en vigueur en 2004;
b) L’adoption de la loi sur l’aide aux victimes, entrée en vigueur en 2004;
c) La modification du Code pénal (art. 133), entrée en vigueur en 2007, qui
améliore la définition des éléments constitutifs de l’esclavage;
Nations Unies CCPR/C/EST/CO/3
Pacte international relatif
aux droits civils et politiques
Distr. générale
4 août 2010
Français
Original: anglais
CCPR/C/EST/CO/3
4 GE.10-44093
10. Le Comité est préoccupé par le fait que l’entrée dans le pays de couples du même
sexe étrangers demeure soumise au système de quotas, même lorsque la relation du couple
a été officiellement reconnue à l’étranger et que l’un des deux partenaires réside déjà dans
l’État partie (art. 2, 12, 17, 23 et 26).
L’État partie devrait revoir sa législation et sa pratique de façon à élargir les droits
des couples du même sexe, et en particulier à faciliter l’octroi d’un permis de séjour
aux étrangers dont le partenaire du même sexe réside déjà dans l’État partie.
11. Tout en notant qu’une personne dont la demande d’asile a été rejetée peut exercer un
recours devant une juridiction administrative, le Comité demeure préoccupé par le fait que,
conformément à la loi sur l’octroi d’une protection internationale aux étrangers, le recours
n’a pas d’effet suspensif (art. 2 et 13).
Le Comité réitère sa recommandation tendant à ce qu’une décision par laquelle une
demande d’asile est déclarée irrecevable n’entraîne pas le déni de l’effet suspensif
d’un recours.
12. Le Comité est préoccupé par le fait que les handicapés mentaux ou leurs tuteurs
légaux, le cas échéant, sont souvent privés du droit d’être dûment informés des poursuites
dont ils font l’objet et des faits qui leur sont reprochés, du droit à une procédure équitable,
ainsi que du droit à une aide juridictionnelle adéquate et efficace. Le Comité est préoccupé
en outre par le fait que des experts nommés pour déterminer la nécessité de soumettre un
patient à un traitement obligatoire continu sont employés par l’hôpital où se trouve le
patient (art. 14).
L’État partie devrait veiller à ce que les handicapés mentaux soient dûment informés
des poursuites pénales dont ils font l’objet et des faits qui leur sont reprochés, et leur
garantir la jouissance du droit à une procédure équitable ainsi que du droit à une aide
juridictionnelle adéquate et efficace pour assurer leur défense. Il devrait également
assurer l’impartialité des experts nommés pour déterminer la nécessité de poursuivre
le traitement obligatoire auquel est soumis un patient. En outre, l’État partie devrait
assurer aux juges et aux avocats une formation concernant les droits qui doivent être
garantis aux handicapés mentaux traduits devant une juridiction pénale.
13. Tout en notant les améliorations apportées au Code de procédure pénale de façon à
réduire la durée des procédures, le Comité demeure préoccupé par le fait qu’il n’existe pas
de dispositions spécifiques applicables aux procédures pénales quand l’inculpé est en
détention (art. 14).
L’État partie devrait revoir son Code de procédure pénale de façon à y intégrer des
dispositions prévoyant la nécessité d’accélérer la procédure quand l’accusé est en
détention.
14. Le Comité est préoccupé par le fait qu’il n’a été fait droit qu’à un petit nombre des
demandes présentées aux fins de l’exécution d’un service de substitution au service
militaire ces dernières années (11 sur 64 en 2007, 14 sur 68 en 2008, et 32 sur 53 en 2009).
Il s’inquiète également de l’absence de règles claires pour accepter ou rejeter une demande
tendant à l’exécution d’un service de substitution au service militaire (art. 18 et 26).
L’État partie devrait préciser les règles selon lesquelles les demandes tendant à
l’exécution d’un service de substitution au service militaire sont acceptées ou rejetées
et prendre des mesures pour garantir le droit à l’objection de conscience.
15. Tout en notant que l’actuel projet de loi sur la fonction publique, qui a été présenté
au Parlement, pourrait contenir une disposition limitant le nombre de fonctionnaires qui ne
sont pas autorisés à faire grève, le Comité est préoccupé par le fait que des fonctionnaires
CCPR/C/EST/CO/3
GE.10-44093 5
qui n’exercent pas l’autorité publique ne bénéficient pas pleinement du droit de grève
(art. 22).
L’État partie devrait assurer dans sa législation que seul un nombre très restreint de
fonctionnaires soit privé du droit de grève.
16. Tout en notant la mise en oeuvre du programme «Intégration dans la société
estonienne (2000-2007)» et du programme «Intégration estonienne (2008-2013)» par l’État
partie, le Comité s’inquiète de ce que les règles concernant la maîtrise de la langue
estonienne continuent d’avoir un effet défavorable sur le taux d’emploi et les niveaux de
revenu des membres de la minorité russophone, notamment dans le secteur privé. Le
Comité est préoccupé également par le fait que la population russophone fait moins
confiance à l’État et aux institutions publiques (art. 26 et 27).
L’État partie devrait renforcer les mesures visant à intégrer la minorité russophone
dans le marché du travail, notamment en ce qui concerne la formation professionnelle
et les cours de langue. Il devrait également prendre des mesures pour accroître la
confiance de la population russophone vis-à-vis de l’État et des institutions publiques.
17. Le Comité s’inquiète de ce que les informations concernant le Pacte, les
observations finales du Comité et les rapports soumis par l’État partie ne soient pas
diffusées largement, notamment parmi les procureurs, les juges et les avocats. Il s’inquiète
également du faible lien existant entre l’État partie et les organisations non
gouvernementales, et de ce que les organisations non gouvernementales ne sont pas
pleinement associées à l’élaboration des rapports soumis au Comité (art. 2).
L’État partie devrait prendre toutes les mesures voulues pour diffuser le Pacte en
estonien et en russe, et mettre pleinement à profit sa maîtrise des technologies de
l’information pour diffuser les observations finales adoptées par le Comité et les
rapports qui lui ont été soumis. L’État partie devrait assurer aux procureurs, aux
juges et aux avocats une formation concernant le Pacte, renforcer ses liens avec les
organisations non gouvernementales et les consulter lors de l’élaboration des rapports
périodiques soumis au Comité.
18. Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité,
l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite
qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 5 et 6 ci-dessus.
19. Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport
périodique, qui devra lui être soumis d’ici au 30 juillet 2015, des renseignements sur les
mesures prises pour donner effet aux autres recommandations et sur l’application du Pacte
dans son ensemble.

Document no 304
CDH, CCPR/C/DOM/CO/6 (2017), Observations finales
concernant le sixième rapport périodique de la
République dominicaine, paragr. 31-32

GE.17-20972 (F) 261217 271217

Comité des droits de l’homme
Observations finales concernant le sixième rapport
périodique de la République dominicaine**
1. Le Comité des droits de l’homme a examiné le sixième rapport périodique de la
République dominicaine (CCPR/C/DOM/6) à ses 3416e et 3417e séances (CCPR/C/
SR.3416 et 3417), les 16 et 17 octobre 2017. À sa 3441e séance (CCPR/C/SR.3441), le
3 novembre 2017, il a adopté les observations finales ci-après.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de la République
dominicaine et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte
de renouer un dialogue constructif avec la délégation de l’État partie au sujet des mesures
prises pendant la période considérée pour appliquer les dispositions du Pacte. Il remercie
l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/DOM/Q/6/Add.1) apportées à la liste de points
(CCPR/C/DOM/Q/6), des réponses qui ont été données oralement par la délégation et des
renseignements complémentaires qui lui ont été communiqués par écrit.
B. Aspects positifs
3. Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption par l’État partie, durant la période
considérée, de mesures législatives et institutionnelles relatives aux droits civils et
politiques, notamment :
a) L’adoption de la loi organique no 5-13 sur l’égalité des droits des personnes
handicapées, en 2013, et du règlement d’application de la loi, en 2016 ;
b) La mise en place du système de suivi des recommandations de l’Organisation
des Nations Unies aux fins de la compilation des recommandations des organes de l’ONU ;
c) L’adoption de la loi organique no 590-16 sur la police nationale, en 2016, et
du règlement relatif à l’usage de la force.
4. Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a ratifié les instruments
internationaux ci-après ou y a adhéré :
a) Le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif
aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, auquel l’État partie a adhéré
le 21 septembre 2016 ;
b) le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant,
concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, ratifié le 14 octobre 2016.
* Nouveau tirage pour raisons techniques (29 décembre 2017).
** Adoptées par le Comité à sa 121e session (16 octobre-10 novembre 2017).
Nations Unies CCPR/C/DOM/CO/6*
Pacte international relatif
aux droits civils et politiques
Distr. générale
27 novembre 2017
Français
Original : espagnol
CCPR/C/DOM/CO/6
GE.17-20972 7
26. L’État partie devrait d’urgence prendre des mesures efficaces pour :
a) Garantir la réintégration dans la nationalité dominicaine de toutes les
personnes qui ont été concernées par l’arrêt 0168/13 de la Cour constitutionnelle,
conformément aux dispositions du Pacte et des autres instruments internationaux
pertinents, notamment en donnant suite à l’arrêt de la Cour interaméricaine des
droits de l’homme d’août 2014. En particulier, l’État partie devrait veiller à ce que
toutes les personnes du groupe A reçoivent leurs documents de nationalité afin
qu’elles soient réintégrées dans la nationalité dominicaine, et à ce que toutes les
personnes qui satisfont aux critères du groupe B retrouvent immédiatement leur
nationalité dominicaine, notamment au moyen de mesures visant expressément les
personnes du groupe B qui n’ont pas pu s’inscrire pendant le processus spécial
d’enregistrement. Il devrait aussi rétablir la nationalité dominicaine des personnes
nées entre le 18 avril 2007 et le 26 janvier 2010. Il devrait également publier
régulièrement des informations actualisées sur toutes les personnes qui ont bénéficié
de la loi 169/14 ainsi que celles qui ont reçu leurs documents d’identité ;
b) Prendre toutes les mesures nécessaires, de jure et de facto, pour prévenir
et réduire les cas d’apatridie, notamment en envisageant d’adhérer à la Convention
relative au statut des apatrides de 1954 et à la Convention sur la réduction des cas
d’apatridie de 1961, comme l’avait précédemment recommandé le Comité
(CCPR/C/DOM/CO/5, par. 22).
Indépendance du pouvoir judiciaire
27. Le Comité constate avec préoccupation que les mécanismes existants peuvent ne pas
suffisamment garantir l’indépendance et la compétence de l’appareil judiciaire, notamment
la non-ingérence d’autres pouvoirs dans le pouvoir judiciaire. À cet égard, il note avec
préoccupation que la procédure de sélection et de nomination des juges ne permet pas de
garantir effectivement leur indépendance, leur aptitude et leur intégrité (art. 14 et 26).
28. L’État partie devrait poursuivre ses efforts pour faire en sorte que le processus
de sélection et de nomination des juges soit mené par un organisme indépendant et
garantir l’indépendance, l’aptitude et l’intégrité des juges, y compris leur protection
contre les ingérences politiques.
Corruption
29. Le Comité est préoccupé par les informations faisant état d’un niveau élevé de
corruption dans l’État partie, à tous les échelons de l’administration, et notamment par les
allégations concernant le versement de pots-de-vin pour accéder aux services de base et
influencer les agents de l’État, et par l’impunité qui entoure parfois ces actes (art. 25).
30. L’État partie devrait redoubler d’efforts pour combattre et éliminer la
corruption et l’impunité à tous les niveaux, notamment en diligentant des enquêtes, en
particulier sous la conduite du ministère public, et en imposant des sanctions et des
peines appropriées aux responsables, compte tenu des recommandations de la
Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption
concernant le Code pénal, les pots-de-vin et le détournement de fonds de la part
d’agents publics.
Liberté d’expression et d’association, et violence à l’égard des défenseurs des droits
de l’homme et des journalistes
31. Le Comité est préoccupé par les actes de violence et d’intimidation dont sont
victimes les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes, notamment ceux qui
s’opposent à l’arrêt 0168/13 de la Cour constitutionnelle. Il regrette également l’absence
d’informations sur les mesures prises pour garantir aux travailleurs migrants le droit de
réunion pacifique et le droit à la liberté d’association, y compris la liberté syndicale, et pour
que l’exercice de ces droits n’entraîne pas le licenciement ou l’expulsion des intéressés. Il
est préoccupé en outre par les informations selon lesquelles des employeurs et des chefs
d’entreprise empêcheraient l’exercice du droit à la liberté d’association et à la liberté
syndicale (art. 6, 7, 19, 21 et 22).
CCPR/C/DOM/CO/6
8 GE.17-20972
32. L’État partie devrait poursuivre ses efforts pour garantir la protection effective
des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme qui sont victimes de menaces
et d’actes de violence et d’intimidation. Il devrait également faire en sorte que ces
actes fassent rapidement l’objet d’enquêtes approfondies, indépendantes et
impartiales, veiller à ce que les auteurs soient poursuivis et reçoivent des peines
appropriées, et faire en sorte que les victimes bénéficient d’une assistance et d’une
protection et obtiennent pleine réparation. L’État partie devrait en outre garantir aux
travailleurs migrants la réalisation effective du droit de réunion pacifique et du droit
à la liberté d’association, en veillant à ce que l’exercice de ces droits ne deviennent pas
des motifs de licenciement ou d’expulsion. Il devrait prendre des mesures pour
protéger efficacement le droit à la liberté d’association des travailleurs, y compris le
droit syndical, le droit de négociation collective et le droit de grève.
Droits de l’enfant et certificats de naissance
33. Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour accroître
l’enregistrement des naissances, mais constate avec préoccupation que le taux
d’enregistrement reste insuffisant, en particulier dans les cas où un des parents n’a pas la
nationalité dominicaine. Il est également préoccupé par les informations concernant les
critères excessifs auxquels est subordonné l’enregistrement des enfants d’ascendance
haïtienne et les obstacles qui s’opposent à cet enregistrement, y compris lorsque l’un des
parents est d’origine dominicaine, ce qui expose ces enfants au risque d’apatridie et limite
l’exercice de leurs droits. Le Comité est également préoccupé par le fait que les enfants nés
sur le territoire national de parents d’ascendance haïtienne ou de parents étrangers en
situation irrégulière sont enregistrés comme étrangers. Il est aussi préoccupé par le nombre
élevé de mariages d’enfants, en particulier dans les zones rurales et les régions touchées par
la pauvreté (art. 16, 23 et 24).
34. L’État partie devrait poursuivre ses efforts pour faire en sorte que tous les
enfants nés sur son territoire, y compris ceux qui ne sont pas nés à l’hôpital et ceux
dont les parents n’ont pas la nationalité dominicaine, soient enregistrés et reçoivent un
certificat de naissance officiel. Il devrait également veiller à ce que la nationalité
dominicaine soit reconnue et accordée conformément au principe de nondiscrimination.
Il devrait en outre prendre les mesures nécessaires pour éliminer les
mariages d’enfants, de jure et de facto, notamment en adoptant des mesures
législatives instaurant l’interdiction absolue de tels mariages et en relevant l’âge
minimum du mariage de 16 ans à 18 ans pour les deux contractants.
D. Diffusion et suivi
35. L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, des deux Protocoles
facultatifs s’y rapportant, de son sixième rapport périodique, des réponses écrites à la liste
des points établie par le Comité et des présentes observations finales auprès des autorités
judiciaires, législatives et administratives, de la société civile et des organisations non
gouvernementales présentes dans le pays, ainsi qu’auprès du grand public, notamment des
membres des communautés minoritaires et des peuples autochtones, afin de les sensibiliser
aux droits consacrés par le Pacte.
36. Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité,
l’État partie est invité à faire parvenir, au plus tard le 10 novembre 2019, des
renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux
paragraphes 10 (non-discrimination), 16 (interruption volontaire de grossesse et droits
relatifs à la procréation) et 26 (apatridie).
37. Le Comité demande à l’État partie de lui soumettre son prochain rapport périodique
le 10 novembre 2022 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements sur la suite qu’il
aura donnée aux présentes observations finales. Il demande également à l’État partie,
lorsqu’il élaborera ce rapport, de tenir de vastes consultations avec la société civile et les
organisations non gouvernementales présentes dans le pays. Conformément à la résolution
68/268 de l’Assemblée générale, le rapport ne devra pas dépasser 21 200 mots. L’État
partie peut aussi indiquer au Comité, au plus tard le 10 novembre 2018, qu’il accepte
d’établir son rapport en suivant la procédure simplifiée. En pareil cas, le Comité transmet

Document no 305
CDH, CCPR/C/EST/CO/4 (2019), Observations finales
concernant le quatrième rapport périodique de l’Estonie,
paragr. 31-32

Nations Unies CCPR/C/EST/CO/4
Pacte international relatif
aux droits civils et
politiques
Distr :
Général 18
avril 2019
Original : Anglais
Comité des droits de l'homme
Observations finales sur le quatrième rapport périodique de
l'Estonie *.
1. Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de l'Estonie (CCPR/C/EST/4)
à ses 3570e et 3571e séances (voir CCPR/C/SR.3570 et 3571), tenues les 4 et 5 mars 2019.
sa 3596e séance, le 21 mars 2019, il a adopté les présentes observations finales.
A. Introduction
2. Le Comité remercie l'État partie d'avoir accepté la procédure simplifiée de
présentation des rapports et d'avoir soumis son quatrième rapport périodique en réponse à la
liste des points à traiter établie dans le cadre de cette procédure (CCPR/C/EST/QPR/4). Il se
félicite de l'occasion qui lui est donnée de renouer un dialogue constructif avec la délégation
de l'État partie sur les mesures prises au cours de la période considérée pour mettre en oeuvre
les dispositions du Pacte. Le Comité remercie l'État partie pour les réponses orales qu'il a
fournies et pour les renseignements complémentaires qu'il lui a communiqués par écrit.
B. Aspects positifs
3. Le Comité se félicite des mesures législatives, institutionnelles et politiques suivantes
prises par l'État partie :
(a) Les modifications apportées à la loi sur l'aide aux victimes, le 1er janvier 2017 ;
(b) L'adoption du plan d'action national pour la mise en oeuvre des programmes
de relocalisation et de réinstallation d'urgence de l'Union européenne ;
(c) L'adoption du plan de développement social pour la période 2016-2023.
4. Le Comité se félicite que l'État partie ait ratifié les instruments internationaux ci-après
ou y ait adhéré :
(a) Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l 'enfant,
concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, le 12 février 2014 ;
(b) La Convention relative aux droits des personnes handicapées et son protocole
facultatif, le 30 mai 2012.
* Adopté par le Comité lors de sa 125e session (4-29 mars 2019).
GE.19-06541(E)
[Traduction non officielle]
CCPR/C/EST/CO/4
Liberté snydicale
31. Tout en se félicitant de la diminution sensible du nombre de fonctionnaires touchés
par une interdiction d’avoir recours à la grève à la suite des modifications apportées à la loi
sur la fonction publique en 2013, la commission se fait l'écho des préoccupations du Comité
des droits économiques, sociaux et culturels concernant l'interdiction d’avoir recours à la
grève imposée aux fonctionnaires en vertu de cette loi (E/C.12/EST/CO/3, paragr. 26). Le
Comité est également préoccupé par les exigences énoncées dans la loi sur le règlement des
conflits collectifs de travail qui peuvent nuire à l'exercice effectif du droit de grève dans la
pratique, notamment en limitant la durée d'une grève d'avertissement à une heure, contre trois
jours pour les grèves de sympathie (art. 22).
32. Le Comité réitère la recommandation faite par le Comité des droits
économiques, sociaux et culturels (E/C.12/EST/CO/3, par. 27) tendant à ce que la loi sur
la fonction publique soit révisée afin de permettre aux fonctionnaires qui ne fournissent
pas de services essentiels d'exercer leur droit de grève. L'État partie devrait s'abstenir
d'imposer des restrictions injustifiées au droit de grève et veiller à ce que la loi sur le
règlement des conflits collectifs de travail soit pleinement conforme à l'article 22 du
Pacte.
Droit de vote des prisonniers
33. Le Comité est préoccupé par le refus général d'accorder le droit de vote à tous les
détenus condamnés pour une infraction pénale, et rappelle qu'un refus général ne répond pas
aux exigences du paragraphe 3 de l'article 10 du Pacte, lu conjointement avec l'article 25.
Tout en notant que la question a été abordée par les autorités, notamment par la Cour suprême
dans le cadre de plusieurs affaires judiciaires, et que des mesures ont été prises pour modifier
la législation pertinente, le Comité regrette que les progrès à cet égard restent lents (art. 10,
25 et 26).
34. L'État partie devrait revoir sa législation qui prive les détenus condamnés du
droit de vote à la lumière de l'Observation générale no 25 (1996) du Comité sur la
participation aux affaires publiques et le droit de vote (par. 14).
Nationalité
35. Tout en se félicitant des mesures prises pour résoudre la situation des personnes "à la
citoyenneté indéterminée", y compris les amendements de 2015 à la loi sur la citoyenneté
accordant aux enfants à la citoyenneté indéterminée nés en Estonie le droit d'acquérir
automatiquement la citoyenneté estonienne, le Comité reste préoccupé par a) la portée limitée
des amendements dans la mesure où ils excluent certaines catégories d'enfants apatrides ; b)
les exigences linguistiques strictes qui font partie des tests de naturalisation ; et c) l'impact
négatif du statut de "citoyenneté indéterminée" sur le droit des résidents de longue durée à la
participation politique (art. 24, 25 et 26). 24, 25 et 26).
36. L'État partie devrait renforcer ses efforts pour réduire et prévenir l'apatridie en
comblant les lacunes restantes, notamment en
(a) Établissant une procédure de détermination de l'apatridie qui garantisse
que les personnes apatrides soient systématiquement identifiées et bénéficient d'une
protection ;
(b) Facilitant la naturalisation des personnes ayant une "citoyenneté
indéterminée" et supprimer les obstacles excessifs qui entravent le processus ;
(c) Veillant à ce que chaque enfant ait une nationalité, conformément à
l'article 24 (3) du Pacte, notamment en accordant la citoyenneté aux enfants apatrides
âgés de 15 à 18 ans au 1er janvier 2016 et aux enfants nés de parents apatrides, quel que
soit leur statut juridique.
Droits des minorités
37. Tout en se félicitant des mesures prises et des progrès réalisés en ce qui concerne
l'intégration de la minorité russophone, y compris l'amélioration de la maîtrise de la langue
estonienne, le Comité reste préoccupé par les lacunes qui subsistent (CCPR/C/EST/CO/3,
par. 16), en particulier celles qui concernent l'impact de la langue
7
Document no 306
CDESC, E/C.12/1/Add.68 (2001), Observations finales,
Allemagne, paragr. 22, 40

GE.01-44777 (F)
E
Conseil Économique
et Social
Distr.
GÉNÉRALE
E/C.12/1/Add.68
24 septembre 2001
FRANÇAIS
Original: ANGLAIS
COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Vingt-sixième session (extraordinaire)
13-31 août 2001
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE
Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Allemagne
1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le quatrième rapport
périodique de l’Allemagne sur l’application du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (E/C.12/4/Add.3) à ses 48e et 49e séances, tenues le
24 août 2001 (E/C.12/2001/SR.48 et 49). À sa 58e séance (E/C.12/2001/SR.58), le 31 août 2001,
il a adopté les observations finales ci-après.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec intérêt le quatrième rapport périodique de l’État partie, qui suit
de façon générale les directives du Comité.
3. Le Comité prend note avec satisfaction de la grande qualité des réponses écrites et orales
circonstanciées fournies par l’État partie et du dialogue ouvert, franc et constructif engagé avec
la délégation de l’État partie, composée de représentants experts dans les domaines en relation
avec le Pacte.
NATIONS
UNIES
E/C.12/1/Add.68
page 4
22. Le Comité constate de nouveau avec préoccupation, à l’instar du Comité des droits de
l’homme et de la Commission d’experts de l’OIT, que l’interdiction de faire grève imposée par
l’État partie aux agents de la fonction publique – à l’exception des agents des services publics ne
fournissant pas de services essentiels – comme les juges, les Beamte et les enseignants, constitue
une restriction des activités des syndicats allant au-delà de la portée du paragraphe 2 de
l’article 8 du Pacte. Le Comité ne partage pas l’opinion de l’État partie selon laquelle «Faire
grève serait incompatible avec cette obligation de loyauté et en contradiction avec la notion de
service public» (E/C.12/4/Add.3, par. 82) car cette interprétation de la «fonction publique» au
sens du paragraphe 2 de l’article 8 du Pacte est plus large que celle qu’en donnent le Comité,
l’OIT (Convention no 98) et la Cour européenne de justice.
23. Le Comité craint que la réforme de la sécurité sociale à laquelle il a été procédé et la
réforme du système des retraites en cours dans l’État partie ne prennent pas suffisamment en
compte les besoins des familles, des femmes, des personnes âgées et des groupes les plus
défavorisés de la société. Il relève que la Cour constitutionnelle fédérale a récemment estimé que
le projet de réforme du système des retraites à l’étude risquait d’être discriminatoire pour les
familles.
24. Le Comité est très préoccupé par les conditions d’accueil inhumaines des patients dans les
centres de long séjour imputables aux carences structurelles affectant ce secteur, comme l’a
confirmé le Service médical des associations nationales des assurances santé (MDS).
25. Le Comité craint que les victimes du trafic d’êtres humains, en particulier les femmes,
soient doublement victimes vu que les policiers, les juges et les procureurs ne sont pas
sensibilisés à ce problème, que la prise en charge des victimes est inadaptée et qu’elles sont
exposées à divers risques et dangers après leur expulsion vers leur pays d’origine.
26. Le Comité est préoccupé par le manque de structures d’accueil de jour des enfants, qui
constitue un obstacle à la participation égale des femmes au marché du travail ainsi qu’à l’action
menée par l’État partie pour promouvoir l’égalité entre les sexes.
27. Le Comité constate à nouveau avec préoccupation que l’État partie ne s’est toujours pas
doté d’une définition de la pauvreté ni d’un seuil de pauvreté applicable à son territoire. Il relève
avec une préoccupation particulière que l’aide fournie aux pauvres et aux exclus – tels que
parents isolés, étudiants et retraités handicapés – dans le cadre de la loi fédérale sur l’aide sociale
n’assure pas un niveau de vie décent.
28. Le Comité exprime, comme dans ses observations finales de 1998, sa préoccupation face à
l’augmentation du nombre des sans-abri en Allemagne et à leur sort.
29. Le Comité note avec préoccupation que plusieurs Länder ont abandonné le principe de la
gratuité de l’enseignement supérieur, en imposant le paiement de droits qui, dans certains cas,
servent à couvrir les dépenses administratives des Länder et non les dépenses des universités.
E. Suggestions et recommandations
30. Étant donné le caractère limité des attributions et pouvoirs de l’Institut national allemand
des droits de l’homme, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures, soit pour
E/C.12/1/Add.68
page 6
38. Le Comité recommande vivement à l’État partie de prendre les mesures législatives et
administratives nécessaires pour obliger les employeurs à respecter la législation du travail et à
déclarer les personnes qu’ils emploient, afin de réduire le nombre de travailleurs en situation
irrégulière qui ne bénéficient pas même d’un minimum de protection de leur droit à la sécurité
sociale et à la santé.
39. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les détenus ne travaillent pour
des compagnies privées qu’une fois recueilli leur consentement préalable.
40. Le Comité recommande à nouveau à l’État partie de faire en sorte que les fonctionnaires
n’assurant pas des services essentiels se voient reconnaître le droit de faire grève, conformément
à l’article 8 du Pacte.
41. Le Comité invite instamment l’État partie à veiller à ce que le système réformé de sécurité
sociale et la réforme en cours du système de pensions prennent en compte la situation et les
besoins des groupes défavorisés et vulnérables de la société. En particulier, le Comité l’invite
instamment à résoudre les problèmes posés par la mise en application du système d’assurance
soins de longue durée et à remédier aux carences en la matière. Il le prie de fournir dans son
prochain rapport périodique des informations détaillées sur le fonctionnement du système révisé
de sécurité sociale.
42. Le Comité invite instamment l’État partie à adopter des mesures urgentes pour améliorer la
situation des patients dans les centres de long séjour.
43. Le Comité recommande vivement à l’État partie de mettre en place des programmes de
formation à l’intention des personnes appelées à s’occuper des victimes du trafic d’êtres
humains, afin de les sensibiliser aux besoins de ces victimes, d’offrir à ces dernières une
meilleure protection et une prise en charge adaptée, et de veiller à ce qu’elles puissent obtenir
réparation devant les tribunaux.
44. Le Comité recommande à l’État partie d’accroître l’offre en structures d’accueil de jour
des enfants, en particulier dans les Länder occidentaux.
45. Le Comité invite instamment l’État partie à déterminer un seuil de pauvreté pour son
territoire, en prenant en compte les paramètres utilisés par lui dans son premier rapport sur la
pauvreté et la prospérité ainsi que les définitions internationales de la pauvreté, y compris celle
figurant dans la Déclaration sur la pauvreté adoptée par le Comité. Il l’exhorte en particulier à
veiller à ce que l’aide sociale fournie dans le cadre de la loi fédérale sur l’aide sociale garantisse
un niveau de vie décent.
46. Le Comité exhorte également l’État partie à prendre des mesures efficaces, et à élaborer
des programmes, en vue de déterminer l’ampleur et les causes du problème des sans-abri en
Allemagne et de leur assurer des conditions de vie décentes.
47. Le Comité recommande que le Gouvernement fédéral de l’État partie inscrive dans la
législation-cadre nationale régissant l’enseignement supérieur la réduction des droits
d’inscription en vue de leur suppression à terme. Il prie, en outre, l’État partie de fournir dans
son prochain rapport périodique des informations détaillées et actualisées ainsi que des données

Document no 307
CDESC, E/C.12/1/Add.81 (2002), Observations finales,
Slovaquie, paragr. 27

GE.02-46371 (F) 220103 230103
E
Conseil économique
et social
Distr.
GÉNÉRALE
E/C.12/1/Add.81
19 décembre 2002
FRANÇAIS
Original: ANGLAIS
COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES,
SOCIAUX ET CULTURELS
Vingt-neuvième session
11-29 novembre 2002
EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES
CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE
Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels
SLOVAQUIE
1. Le Comité a examiné le rapport initial de la Slovaquie sur l’application du Pacte
(E/1990/5/Add.49) à ses 30e, 31e et 32e séances, tenues les 12 et 13 novembre 2002
(voir E/C.12/2002/SR.30 à 32) et a adopté à sa 56e séance, tenue le 29 novembre 2002, les
observations finales ci-après.
A. INTRODUCTION
2. Le Comité se félicite de la soumission du rapport initial de l’État partie, qui a été, de façon
générale, établi conformément aux directives du Comité.
3. Le Comité prend note avec satisfaction des réponses détaillées, présentées, par écrit et
oralement, par l’État partie, ainsi que du dialogue ouvert, franc et constructif qu’il a pu avoir
avec sa délégation, laquelle comprenait un grand nombre de responsables gouvernementaux
maîtrisant les sujets relatifs aux dispositions du Pacte. Le Comité se félicite également du fait
que la délégation est disposée à fournir, par écrit, des informations supplémentaires sur les
questions auxquelles elle n’a pas pu répondre au cours de ce dialogue.
B. ASPECTS POSITIFS
4. Le comité accueille avec satisfaction l’amendement apporté au paragraphe 5 de l’article 7
de la Constitution de la République slovaque, en vertu duquel le Pacte l’emporte sur la
législation interne et ses dispositions peuvent être invoquées devant les tribunaux.
NATIONS
UNIES
E/C.12/1/Add.81
page 3
17. Le Comité est profondément préoccupé par le fort taux de tabagisme ainsi que par la forte
consommation d’alcool chez les adultes.
18. Le Comité juge alarmant le faible taux de scolarisation dans le primaire et le fort taux
d’abandon scolaire dans le secondaire parmi les enfants roms.
E. SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS
19. Le Comité recommande à l’État partie de formuler et d’appliquer un plan d’action national
global pour la promotion et la protection des droits de l’homme, comme il est recommandé au
paragraphe 71 de la Déclaration et du Programme d’action de Vienne, adoptés en 1993.
Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son deuxième rapport périodique un
exemplaire du plan d’action national et des renseignements sur son application.
20. Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte de ses obligations en vertu du Pacte
dans la formulation de sa politique nationale relative à la protection sociale, au logement, à la
santé et à l’éducation.
21. Le Comité recommande aussi à l’État partie de prendre en compte les droits de l’homme,
y compris les droits économiques, sociaux et culturels, dans sa politique d’aide publique au
développement.
22. Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre des mesures concrètes,
y compris l’adoption d’une législation générale contre la discrimination, conformément au
paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte, en vue de combattre et éliminer la discrimination contre les
groupes minoritaires, les Roms en particulier.
23. Le Comité prie l’État partie de fournir, dans son deuxième rapport périodique, des
renseignements détaillés sur toute politique et tout programme ou mesure adoptés par le
Gouvernement pour faciliter l’application effective de la législation sur l’égalité entre les sexes,
s’agissant notamment de la représentation des femmes aux divers échelons du Gouvernement et
de l’administration de la justice.
24. Le Comité engage l’État partie à entreprendre une action efficace, y compris en
augmentant le montant des ressources allouées pour réduire le taux de chômage, en particulier
chez les femmes, les Roms et d’autres groupes défavorisés et marginalisés, ainsi que dans les
zones rurales.
25. Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que le salaire minimum
assure à tous les travailleurs ainsi qu’à leur famille un niveau de vie décent.
26. Le Comité demande instamment à l’État partie d’appliquer effectivement les mesures
adoptées dernièrement pour assurer l’égalité de salaire pour un travail équivalent, comme prévu
dans le Pacte, et réduire les écarts de salaire entre les hommes et les femmes.
27. Le Comité recommande à l’État partie de revoir sa législation sur le droit de grève, pour la
mettre en accord avec l’article 8 du Pacte et les conventions pertinentes de l’Organisation
internationale du Travail.
Document no 308
CDESC, E/C.12/GC/23 (2016), Observation générale
n° 23 (2016) sur le droit à des conditions de travail
justes et favorables (art. 7 du Pacte international relatif
aux droits économiques, sociaux et culturels), paragr. 1

GE.16-05357 (F) 120716 130716

Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observation générale no 23 (2016) sur le droit
à des conditions de travail justes et favorables
(art. 7 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels)
I. Introduction
1. Le droit qu’a toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables est
reconnu dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et
d’autres instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme1, ainsi que
dans des instruments juridiques internationaux portant sur des sujets similaires, en
particulier les conventions et les recommandations de l’Organisation internationale du
Travail (OIT)2. C’est une composante importante des droits liés au travail consacrés par le
1 Voir Déclaration universelle des droits de l’homme, art. 23 et 24 ; Convention internationale sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, art. 5 ; Convention sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, art. 11 ; Convention relative aux droits de
l’enfant, art. 32 ; Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs
migrants et des membres de leur famille, art. 25 ; Convention relative aux droits des personnes
handicapées, art. 27 ; Charte sociale européenne (révisée), partie I, par. 2, 3, 4, 7 et 8 ; et partie II,
art. 2, 3 et 4 ; Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 14, 23, 31 et 32 ; Protocole
additionnel à la Convention américaine relative aux droits de l’homme traitant des droits
économiques, sociaux et culturels, art. 7 ; et Charte africaine des droits de l’homme et des peuples,
art. 15. Le libellé des dispositions figurant dans les différents instruments varient. Les instruments
européens offrent une protection plus large, tandis que la Charte africaine prévoit l’obligation plus
restreinte d’une rémunération égale pour un même travail.
2 Si les conventions de l’OIT sont nombreuses à traiter directement et indirectement des conditions de
travail justes et favorables, le Comité a retenu les conventions ci-après comme étant pertinentes aux
fins de la présente observation générale : convention (no 1) sur la durée du travail (industrie), 1919 ;
convention (no 14) sur le repos hebdomadaire (industrie), 1921 ; convention (no 26) sur les méthodes
de fixation des salaires minima, 1928 ; convention (no 30) sur la durée du travail (commerce et
bureaux), 1930 ; convention (no 47) des quarante heures, 1935 ; convention (no 95) sur la protection
du salaire, 1949 ; convention (no 99) sur les méthodes de fixation des salaires minima (agriculture),
1951 ; convention (no 100) sur l’égalité de rémunération, 1951 ; convention (no 106) sur le repos
hebdomadaire (commerce et bureaux), 1957 ; convention (no 111) concernant la discrimination
(emploi et profession), 1958 ; convention (no 131) sur la fixation des salaires minima, 1970 ;
convention (no 132) sur les congés payés (révisée), 1970 ; convention (no 138) sur l’âge minimum,
1973 ; convention (no 153) sur la durée du travail et les périodes de repos (transport routier), 1979 ;
Nations Unies E/C.12/GC/23
Conseil économique et social Distr. générale
27 avril 2016
Français
Original : anglais
E/C.12/GC/23
2 GE.16-05357
Pacte, et c’est le corollaire du droit au travail en tant qu’il est librement choisi et accepté.
Dans le même ordre d’idées, les droits syndicaux, la liberté syndicale et le droit de grève
sont déterminants pour l’instauration, la préservation et la défense de conditions de travail
justes et favorables3. De même, les prestations de sécurité sociale compensent l’absence de
revenus du travail et complètent les droits des travailleurs4. L’exercice du droit à des
conditions de travail justes et favorables est aussi un préalable à l’exercice d’autres droits
prévus par le Pacte (et inversement), par exemple le droit au meilleur état de santé physique
et mentale susceptible d’être atteint par la prévention des accidents et des maladies
professionnelles, et le droit à un niveau de vie suffisant grâce à une rémunération décente.
2. L’importance du droit à des conditions de travail justes et favorables n’est pas
encore pleinement prise en compte. Près de cinquante ans après l’adoption du Pacte, le
niveau des salaires reste faible dans de nombreuses régions du monde, et partout les écarts
de rémunération entre les sexes subsistent. Le BIT estime que, chaque année, environ
330 millions de personnes sont victimes d’accidents du travail et 2 millions décèdent de
causes liées au travail5. Dans près de la moitié des pays, la durée légale du travail
hebdomadaire reste supérieure à quarante heures, atteignant souvent quarante-huit heures ;
dans certains d’entre eux, la durée moyenne du travail est excessivement élevée. En outre,
les travailleurs des zones économiques spéciales, des zones franches et des zones franches
industrielles sont souvent privés du droit de jouir de conditions de travail justes et
favorables car la législation du travail n’est pas appliquée dans ces lieux.
3. La discrimination, les inégalités et l’absence de repos et de loisirs garantis sont le lot
de beaucoup de travailleurs de par le monde. Les crises économiques, budgétaires et
politiques ont conduit à des mesures d’austérité qui rognent sur les acquis. La complexité
croissante des contrats de travail − contrats à court terme, contrats zéro heure et formes de
travail atypiques − ainsi que l’érosion des normes nationales et internationales du travail, de
la négociation collective et des conditions de travail se soldent par une protection
insuffisante des conditions de travail justes et favorables. Même en période de croissance
économique, nombreux sont les travailleurs qui ne jouissent pas de ces conditions.
4. Le Comité n’est pas sans savoir que la notion de travail et de travailleurs a évolué
depuis la rédaction du Pacte et que de nouvelles catégories de travailleurs sont apparues
telles que les travailleurs indépendants, les travailleurs de l’économie informelle, les
travailleurs agricoles, les travailleurs réfugiés et les travailleurs non rémunérés. Donnant
suite à l’observation générale no 18 sur le droit au travail et fort de l’expérience acquise
dans le cadre de l’examen des rapports des États parties, le Comité a rédigé la présente
observation générale afin de contribuer à l’application intégrale de l’article 7 du Pacte.
convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981 ; Protocole de 2002 relatif à la
convention sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981 ; convention (no 156) sur les travailleurs
ayant des responsabilités familiales, 1981 ; convention (no 171) sur le travail de nuit, 1990 ;
convention (no 175) sur le travail à temps partiel, 1994 ; convention (no 183) sur la protection de la
maternité, 2000 ; convention (no 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail,
2006 ; et convention (no 189) sur les travailleurs domestiques, 2011.
3 Au paragraphe 2 de l’observation générale no 18 (2005) sur le droit au travail, le Comité des droits
économiques, sociaux et culturels met en évidence l’interdépendance entre le droit au travail au sens
général de l’article 6 du Pacte ; la reconnaissance de la dimension individuelle du droit à des
conditions de travail justes et favorables au sens de l’article 7 ; et la dimension collective visée
à l’article 8.
4 Voir observation générale no 19 (2007) du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur
le droit à la sécurité sociale, par. 2.
5 D’après le Bureau international du Travail (BIT), le nombre d’accidents et de maladies mortels et non
mortels liés au travail dans le monde n’a pas varié sensiblement pendant la période allant de 1998
à 2008, même si le chiffre mondial masque des écarts entre les pays et les régions.
Document no 309
CDESC, E/C.12/DEU/CO/6 (2018), Observations finales
concernant le sixième rapport périodique de l’Allemagne,
paragr. 44-45

GE.18-20343 (F) 240119 240119

Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observations finales concernant le sixième rapport
périodique de l’Allemagne*
1. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le sixième rapport
périodique de l’Allemagne (E/C.12/DEU/6) à ses 31e et 32e séances (voir E/C.12/2018/SR.31
et 32), le 25 septembre 2018, et adopté les observations finales ci-après à sa 58e séance,
le 12 octobre 2018.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport soumis par l’État partie et
les informations complémentaires fournies en réponse à la liste de points
(E/C.12/DEU/Q/6/Add.1). Il se félicite en outre du dialogue constructif qu’il a eu avec la
délégation interministérielle de haut niveau de l’État partie.
B. Aspects positifs
3. Le Comité salue les mesures législatives et institutionnelles ainsi que les mesures
d’orientation générale qui ont été prises pour garantir une protection de haut niveau des
droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie, en particulier la mise en place
d’un salaire minimum national en 2015, avec l’adoption de la loi sur le salaire minimum
légal (Mindestlohngesetz).
C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Ratification du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
4. Le Comité prend note avec satisfaction de la déclaration de la délégation de l’État
partie selon laquelle le Gouvernement entend ratifier le Protocole facultatif se rapportant au
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et il encourage
l’État partie à procéder rapidement à cette ratification.
Obligation de l’État partie en tant qu’État fédéral
5. Le Comité prend acte du fait qu’en vertu du système fédéral de l’État partie, les États
fédérés (Länder) sont investis de certaines compétences et responsabilités, en particulier en
ce qui concerne la réalisation des droits consacrés par le Pacte, mais il constate avec
préoccupation que de grandes disparités en matière d’exercice des droits économiques,
sociaux et culturels − héritage de la séparation des deux Allemagne d’avant 1990 −
* Adoptées par le Comité à sa soixante-quatrième session (24 septembre-12 octobre 2018).
Nations Unies E/C.12/DEU/CO/6
Conseil économique et social Distr. générale
27 novembre 2018
Français
Original : anglais
E/C.12/DEU/CO/6
GE.18-20343 7
Écart de rémunération entre hommes et femmes
38. Le Comité note avec préoccupation que l’écart de rémunération entre les hommes et
les femmes reste de 21 % en 2018, ce qui s’explique essentiellement par la persistance de la
ségrégation verticale et horizontale de fait et par la prédominance des femmes dans les
emplois précaires. Il est également préoccupé par le fait que cette situation se traduit par un
large écart de pension entre les sexes (qui est actuellement de 53 %) et par un taux de
pauvreté plus élevé parmi les femmes âgées (art. 3, 7, 9 et 11).
39. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour réduire
l’écart salarial entre hommes et femmes en : a) luttant contre la ségrégation verticale
et horizontale de fait ; et b) revoyant ses politiques sociales et fiscales afin de
s’attaquer aux facteurs qui dissuadent les femmes de poursuivre leur carrière ou de
prendre un emploi à plein temps. Il l’encourage en outre à prendre des mesures
ciblées pour s’attaquer au taux élevé de pauvreté chez les femmes âgées.
Sécurité et santé du travail
40. Le Comité est préoccupé par le nombre insuffisant d’inspections effectuées dans le
secteur agricole, en particulier dans les petites entreprises, et par le nombre élevé
d’accidents du travail mortels dans ce secteur (art. 7).
41. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour prévenir
les accidents du travail et les maladies professionnelles, en particulier en renforçant
les inspections du travail dans le secteur agricole, en particulier dans les petites
exploitations agricoles.
Travailleurs domestiques
42. Le Comité constate qu’environ 163 000 personnes, essentiellement des travailleuses
migrantes, sont employées dans des ménages privés en Allemagne pour s’occuper d’autres
personnes, et il relève avec préoccupation que ces femmes effectuent un nombre excessif
d’heures de travail sans pouvoir se reposer normalement et qu’elles sont exposées à
l’exploitation, que les inspections du travail sont insuffisantes et que les mécanismes de
plainte auxquels les intéressées ont accès sont limités et fragmentaires (art. 7).
43. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour faire en
sorte que les travailleurs domestiques, qui sont principalement recrutés pour s’occuper
d’autres personnes, jouissent des mêmes conditions que les autres travailleurs en
matière de rémunération, de repos et de loisirs, de limitation du temps de travail et de
protection contre les licenciements abusifs. Il lui recommande également de protéger
ces personnes contre toutes les formes d’exploitation et de mauvais traitements. Il lui
recommande aussi d’améliorer les mécanismes de plainte afin de les rendre facilement
accessibles à cette catégorie de travailleurs et de mettre en place des mécanismes
d’inspection efficaces pour contrôler leurs conditions de travail. Il appelle l’attention
de l’État partie sur le paragraphe 47 f) de son observation générale no 23 (2016) sur le
droit à des conditions de travail justes et favorables.
Droit de grève des fonctionnaires
44. Le Comité demeure préoccupé par l’interdiction de faire grève imposée par l’État
partie à tous les agents de la fonction publique, y compris aux enseignants qui ont le statut
de fonctionnaire. Cette interdiction va au-delà des restrictions autorisées par le paragraphe 2
de l’article 8 du Pacte, étant donné que tous les fonctionnaires ne peuvent raisonnablement
être considérés comme des fournisseurs de services essentiels (art. 8).
45. Le Comité renouvelle la recommandation qu’il avait précédemment faite à
l’État partie (E/C.12/DEU/CO/5, par. 20) et l’enjoint de prendre des mesures pour
revoir la portée de la notion de « services essentiels » afin de garantir que les agents de
la fonction publique dont les services ne peuvent raisonnablement être considérés
comme essentiels puissent exercer leur droit de grève conformément à l’article 8 du
Pacte et à la Convention (no 87) de l’Organisation internationale du Travail sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Document no 310
CDESC, E/C.12/MEX/CO/5-6 (2018), Observations
finales concernant le rapport du Mexique valant
cinquième et sixième rapports périodiques, paragr. 35-36

GE.18-06120 (F) 310518 040618

Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observations finales concernant le rapport du Mexique
valant cinquième et sixième rapports périodiques*
1. Le Comité a examiné le rapport du Mexique valant cinquième et sixième rapports
périodiques (E/C.12/MEX/5-6) à ses 2e et 3e séances (voir E/C.12/2018/SR.2 et 3), les 12 et
13 mars 2018, et adopté les présentes observations finales à sa 28e séance, le 29 mars 2018.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction la soumission du rapport du Mexique valant
cinquième et sixième rapports périodiques et les réponses écrites apportées à la liste de
points (E/C.12/MEX/Q/5-6/Add.1), qui ont été complétées oralement par la délégation. Il
apprécie l’occasion qui lui a été offerte d’engager un dialogue honnête et constructif avec la
délégation de haut niveau de l’État partie. Il remercie en outre l’État partie des
renseignements complémentaires que celui-ci lui a communiqués au fil du dialogue.
B. Aspects positifs
3. Le Comité se félicite des mesures prises pour promouvoir l’exercice des droits
économiques, sociaux et culturels, en particulier de la réforme constitutionnelle de 2011,
qui a élevé ces droits au rang constitutionnel. Il salue également la mise en oeuvre de la
Croisade nationale contre la faim, lancée en 2013, du Plan national de développement
2013-2018 et du Programme national pour les droits de l’homme 2014-2018.
4. Le Comité note avec satisfaction que la Commission nationale des droits de
l’homme et les organisations de la société civile ont participé activement au processus
d’examen des rapports en communiquant des renseignements par écrit et oralement au
Comité.
C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Opposabilité des droits économiques, sociaux et culturels
5. Le Comité note que les droits visés dans le Pacte peuvent être invoqués devant les
tribunaux et dans les décisions de justice, mais il constate avec préoccupation que, dans la
pratique, les victimes de violations des droits économiques, sociaux et culturels ont des
difficultés à accéder à des recours utiles, notamment à la procédure d’amparo. Il note
également avec préoccupation que les décisions rendues dans le cadre des procédures
d’amparo et établissant qu’il y a eu violation des droits économiques, sociaux et culturels
ne sont pas toujours appliquées.
* Adoptées par le Comité à sa soixante-troisième session (12-29 mars 2018).
Nations Unies E/C.12/MEX/CO/5-6
Conseil économique et social Distr. générale
17 avril 2018
Français
Original : espagnol
E/C.12/MEX/CO/5-6
GE.18-06120 7
d) D’envisager de ratifier la Convention no 189 (2011) de l’OIT concernant
le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques.
34. Le Comité appelle une nouvelle fois l’attention de l’État partie sur son
observation générale no 23 (2016) sur le droit à des conditions de travail justes et
favorables.
Droits syndicaux
35. Le Comité prend note des réformes législatives et constitutionnelles qui ont été
approuvées en février 2017 dans le domaine du droit du travail et qui visent à améliorer la
protection des droits syndicaux, mais il est préoccupé par les informations selon lesquelles,
dans la pratique, il peut y avoir des restrictions à l’exercice de ces droits, notamment du
droit de grève et de négociation collective. Il est également préoccupé par les allégations
d’actes de violence commis contre des dirigeants et membres éminents d’organisations
syndicales (art. 8).
36. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures efficaces pour
éliminer dans les faits les restrictions qui entravent l’exercice effectif des droits
syndicaux de tous les travailleurs, conformément à l’article 8 du Pacte et aux
dispositions de la Convention de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical (no 87) et de la Convention de 1949 sur le droit d’organisation et de
négociation collective (no 98) de l’OIT. Il l’exhorte en outre à mettre en place des
mécanismes propres à protéger efficacement les droits syndicaux, notamment en
instruisant avec diligence toutes les plaintes portées à son attention et en décidant
d’une indemnisation adéquate pour les travailleurs concernés.
Sécurité sociale
37. Le Comité constate avec préoccupation que le système de protection sociale de
l’État partie est fragmenté par secteur et que cette protection dépend fortement du caractère
formel de l’emploi, ce qui exclut du système un nombre important de personnes,
notamment les travailleurs du secteur non structuré, les travailleurs indépendants et les
personnes, notamment les femmes, qui réalisent des travaux et autres tâches domestiques
non rémunérés (art. 9).
38. Le Comité recommande à l’État partie de continuer de travailler à
l’élaboration d’un système de sécurité sociale qui garantisse une couverture sociale
universelle et offre des prestations suffisantes à tous, en particulier aux groupes les
plus défavorisés et les plus marginalisés, de manière à leur garantir des conditions de
vie dignes. Il l’exhorte à redoubler d’efforts pour créer un socle de protection sociale
qui comprenne des garanties sociales universelles élémentaires, et le renvoie à son
observation générale no 19 (2008) sur le droit à la sécurité sociale, ainsi qu’à sa
déclaration intitulée « Les socles de protection sociale : un élément essentiel du droit à
la sécurité sociale et des objectifs de développement durable », adoptée en 2015.
Violence à l’égard des femmes
39. Le Comité constate avec inquiétude que la violence à l’égard des femmes persiste
dans tous les contextes, y compris au sein de la famille. Il est préoccupé, en particulier, par
le grand nombre de féminicides et le degré élevé d’impunité (art. 3 et 10).
40. Le Comité engage l’État partie :
a) À mener des enquêtes approfondies sur les féminicides et sur tous les
actes de violence commis contre des femmes, et à veiller à ce que les auteurs de ces
actes soient poursuivis et dûment sanctionnés ;
b) À renforcer les mécanismes destinés à prévenir les actes de violence à
l’égard des femmes, notamment en menant des campagnes d’information visant à
sensibiliser davantage le public à la gravité de ce phénomène et à ses conséquences
néfastes ;
Document no 311
CDESC, E/C.12/ESP/CO/6 (2018), Observations finales
concernant le sixième rapport périodique de l’Espagne,
paragr. 28-29

GE.18-06514 (F) 220518 240518

Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observations finales concernant le sixième rapport
périodique de l’Espagne*
1. Le Comité a examiné le sixième rapport périodique de l’Espagne (E/C.12/ESP/6) à
ses 16e et 17e séances (voir E/C.12/SR.16 et 17), les 21 et 22 mars 2018. À sa 28e séance, le
29 mars 2018, il a adopté les présentes observations finales.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le sixième rapport périodique de l’Espagne,
soumis selon la procédure simplifiée de présentation des rapports en réponse à la liste de
points établie avant la soumission du rapport conformément à cette procédure
(E/C.12/ESP/Q/6). Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir accepté la procédure
simplifiée, qui permet d’améliorer la collaboration et de mieux cibler le dialogue entre
l’État partie et le Comité. En outre, il se félicite du dialogue ouvert et constructif qu’il a eu
avec la délégation multisectorielle de l’État partie, des réponses apportées oralement par la
délégation et des informations complémentaires fournies pendant le dialogue.
B. Aspects positifs
3. Le Comité est conscient du profond impact que la crise financière internationale a eu
sur l’économie et la jouissance effective des droits économiques, sociaux et culturels dans
l’État partie. Dans ce contexte, il note avec satisfaction que l’État partie a surmonté la
récession économique et qu’il a pris des mesures et des politiques qui témoignent de son
engagement en faveur des droits économiques, sociaux et culturels, notamment en ratifiant
le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une
procédure de présentation de communications, ainsi qu’en adoptant le Plan d’action
national pour l’inclusion sociale (2013-2016), la stratégie nationale pour l’inclusion des
Roms (2012-2020), la stratégie nationale globale en faveur des sans-abri (2015-2020) et le
Plan d’action national sur les entreprises et les droits de l’homme.
4. Le Comité se félicite du rôle actif joué par les organisations de la société civile dans
le processus d’examen du sixième rapport périodique de l’État partie.
* Adoptées par le Comité à sa 63e session (12-29 mars 2018).
Nations Unies E/C.12/ESP/CO/6
Conseil économique et social Distr. générale
25 avril 2018
Français
Original : espagnol
E/C.12/ESP/CO/6
6 GE.18-06514
déterminée, notamment en proposant des emplois décents, sûrs et assortis d’une
protection adéquate des droits des travailleurs ;
b) De veiller à garantir pleinement, à la fois en droit et en pratique, le droit
à des conditions de travail justes et favorables ainsi qu’à la sécurité sociale pour les
personnes qui travaillent à temps partiel, qui sont au bénéfice de contrats à durée
déterminée ou qui exercent d’autres formes de travail précaire ;
c) De renforcer le système d’inspection du travail de sorte que, dans toutes
les régions de l’État partie, des ressources humaines et matérielles suffisantes soient
allouées pour la surveillance effective des conditions de travail.
27. Le Comité renvoie l’État partie à son observation générale no 23 (2016) sur le
droit à des conditions de travail justes et favorables.
Droits syndicaux
28. Le Comité constate avec préoccupation que les modifications apportées dans le
cadre de la réforme du marché du travail de 2012 peuvent compromettre l’exercice du droit
de négociation collective. Il est également préoccupé par les informations portées à sa
connaissance concernant l’application excessive du paragraphe 3 de l’article 315 du Code
pénal, qui s’est traduite par des poursuites pénales contre des travailleurs grévistes (art. 8).
29. Le Comité recommande à l’État partie de garantir l’effectivité de la
négociation collective et du droit de représentation syndicale, à la fois en droit et en
pratique, conformément à l’article 8 du Pacte et aux dispositions de la convention de
1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (no 87) et de la
convention de 1949 sur le droit d’organisation et de négociation collective (no 98) de
l’Organisation internationale du Travail (OIT). De plus, il prie l’État partie
d’envisager de réexaminer, voire d’abroger, le paragraphe 3 de l’article 315 du Code
pénal afin de protéger les travailleurs grévistes contre des poursuites pénales.
Sécurité sociale
30. Le Comité est préoccupé par le déficit chronique du système des retraites, le faible
taux de couverture des prestations non contributives et les montants insuffisants des
prestations contributives et non contributives, qui ne permettent pas de garantir un niveau
de vie décent aux bénéficiaires et aux personnes à leur charge (art. 9).
31. À la lumière de sa recommandation précédente (E/C.12/ESP/CO/5, par. 20), le
Comité prie l’État partie :
a) De prendre les mesures nécessaires, en concertation avec tous les acteurs
sociaux, notamment les syndicats, pour sortir le système des retraites du déficit et
assurer sa viabilité ;
b) De redoubler d’efforts pour que le système de sécurité sociale bénéficie
à tous, y compris aux personnes et aux groupes les plus défavorisés ou marginalisés ;
c) De faire en sorte que les montants des prestations sociales soient à
nouveau en adéquation avec le coût de la vie et permettent à leurs bénéficiaires et aux
personnes dont ceux-ci ont la charge d’accéder à un niveau de vie décent et, à cet effet,
d’instaurer un système d’indexation efficace et transparent.
32. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation générale
no 19 (2008) sur le droit à la sécurité sociale.
Pauvreté
33. Le Comité constate avec préoccupation que, pour un pays avec son niveau de
développement, l’État partie compte parmi sa population une proportion élevée de
personnes qui risquent de connaître la pauvreté et l’exclusion sociale, notamment dans
certains groupes tels que les jeunes, les femmes, les personnes avec un faible niveau
d’éducation et les migrants. Il constate aussi avec préoccupation que la part de la population
Document no 312
CDESC, E/C.12/EST/CO/3 (2019), Observations finales
concernant le troisième rapport périodique de l’Estonie,
paragr. 26-27

GE.19-05020 (F) 120419 180419

Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observations finales concernant le troisième rapport
périodique de l’Estonie*
1. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de l’Estonie (E/C.12/EST/3) à
ses 4e et 5e séances (voir E/C.12/2019/SR.4 et 5), les 19 et 20 février 2019, et a adopté les
présentes observations finales à sa 30e séance, le 8 mars 2019.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de l’État partie
ainsi que les renseignements complémentaires fournis dans ses réponses écrites à la liste de
points (E/C.12/EST/Q/3/Add.1). Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la
délégation interministérielle de l’État partie.
B. Aspects positifs
3. Le Comité se félicite des mesures législatives et institutionnelles et des orientations
que l’État partie a prises pour renforcer le niveau de protection des droits économiques,
sociaux et culturels, comme indiqué dans les présentes observations finales. Il prend note
en particulier de l’augmentation sensible du salaire minimum au cours de la période
considérée et de l’adoption du Plan de développement de l’aide sociale pour la période
2016-2023.
C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Applicabilité du Pacte
4. Le Comité constate que certains droits consacrés par le Pacte sont protégés par la
Constitution et que l’article 123 de la Constitution consacre la primauté des traités
internationaux sur le droit interne. Toutefois, il est préoccupé par l’absence d’informations
sur les recours judiciaires et d’exemples de cas où les droits consacrés par le Pacte sont
protégés par les tribunaux nationaux.
5. Le Comité recommande à l’État partie :
a) D’incorporer dans son ordre juridique interne tous les droits consacrés
par le Pacte ;
b) De renforcer dans son ordre juridique interne les recours judiciaires
pour la protection des droits consacrés par le Pacte ;
* Adoptées par le Comité à sa soixante-cinquième session (18 février-8 mars 2019).
Nations Unies E/C.12/EST/CO/3
Conseil économique et social Distr. générale
27 mars 2019
Français
Original : anglais
E/C.12/EST/CO/3
GE.19-05020 5
travail et la restructuration industrielle, en particulier dans les industries du textile et du
schiste bitumineux, et par le décalage entre les compétences de la population active et celles
requises sur le marché du travail (art. 6).
23. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour améliorer
ses programmes de formation et d’enseignement professionnels afin de doter la maind’oeuvre
des compétences et des connaissances nécessaires pour répondre à l’évolution
des besoins du marché du travail. Il lui recommande également de veiller à ce que les
travailleurs touchés par la restructuration industrielle et la transition vers les énergies
renouvelables, y compris les travailleurs des industries du textile et du schiste
bitumineux, soient en mesure de passer de manière effective et sans heurt à de
nouveaux emplois qui leur permettent de maintenir un niveau de vie suffisant.
Sécurité et santé au travail
24. Le Comité prend note des explications fournies par la délégation selon lesquelles les
écarts statistiques sont dus aux différentes méthodes de collecte de données utilisées, mais
reste préoccupé par le fait que les données recueillies par l’État partie ne reflètent pas
l’incidence réelle des accidents du travail et des maladies professionnelles. Il note
également avec préoccupation que l’incidence des accidents du travail a augmenté au cours
des dernières années. Il regrette de ne pas disposer de données complètes sur la situation en
matière de sécurité et de santé au travail pour la période considérée (art. 7 et 12).
25. Le Comité recommande à l’État partie :
a) D’améliorer sa collecte de données sur la sécurité et la santé au travail ;
b) De prévenir et d’atténuer les risques d’accidents du travail et de
maladies professionnelles ;
c) De renforcer les capacités des services d’inspection du travail,
notamment en augmentant leurs ressources financières et humaines, de manière à
contrôler les conditions de travail ;
d) De mettre en place un régime d’assurance contre les risques
professionnels.
Droits syndicaux
26. Malgré les explications données par la délégation, le Comité reste préoccupé par le
fait que l’article 59 de la loi sur la fonction publique n’autorise pas les fonctionnaires à
exercer leur droit de grève ou à prendre part à des actions menées dans le but d’exercer des
pressions collectives portant atteinte à l’exercice des fonctions assurées en application de la
loi par l’autorité qui les a recrutés ou par toute autre autorité (art. 8).
27. Le Comité recommande à l’État partie de revoir la loi sur la fonction publique
pour que tous les agents de la fonction publique qui ne fournissent pas des services
essentiels puissent exercer leur droit de grève, conformément à l’article 8 du Pacte et à
la Convention de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (no 87)
de l’Organisation internationale du Travail (OIT).
Pensions de vieillesse
28. Le Comité note avec préoccupation que le montant de l’assurance retraite de l’État
(premier pilier du régime de pension de vieillesse), qui est inférieur au seuil de risque de
pauvreté, n’est pas propre à assurer aux bénéficiaires un niveau de vie suffisant. Il note
aussi avec préoccupation que cela explique en partie le taux élevé de pauvreté relative
(47,5 %) enregistré chez les plus de 65 ans. Enfin, il constate avec préoccupation que le
régime obligatoire de retraite par capitalisation (deuxième pilier) ne couvre pas les
travailleurs indépendants et que sa couverture parmi les personnes nées entre 1942 et 1982
est de 62 % seulement (art. 9).
29. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le montant des
prestations de l’assurance retraite de l’État soit propre à assurer aux bénéficiaires, en
particulier à ceux qui vivent seuls, un niveau de vie suffisant et à réduire le taux de
Document no 313
CDESC, E/C.12/UZB/CO/3 (2022), Observations finales
concernant le troisième rapport périodique de
l’Ouzbékistan, paragr. 36-37

GE.22-04767 (F) 280422 290422
Comité des droits économiques, sociaux et culturels
Observations finales concernant le troisième rapport
périodique de l’Ouzbékistan*
1. Le Comité a examiné le troisième rapport périodique de l’Ouzbékistan1 à ses 13e, 15e
et 17e séances2, les 22, 23 et 24 février 2022, et adopté les présentes observations finales à sa
30e séance, le 4 mars 2022.
A. Introduction
2. Le Comité accueille avec satisfaction le troisième rapport périodique de l’État partie
et les renseignements complémentaires fournis dans les réponses écrites à la liste de points3.
Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation interministérielle de haut
niveau de l’État partie.
B. Aspects positifs
3. Le Comité se félicite des mesures législatives et institutionnelles et des orientations,
mentionnées dans les présentes observations finales, que l’État partie a prises pour améliorer
la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. En particulier, le Comité se félicite
de l’adoption de la loi relative à la lutte contre la corruption (loi no LRU-419 du 3 janvier
2017) et de la création de l’Agence de lutte contre la corruption.
C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations
Application du Pacte au niveau national
4. Le Comité note que, conformément à la Constitution, le Pacte fait partie intégrante du
cadre juridique interne et que les tribunaux ont compétence pour renvoyer à cet instrument,
mais il demeure préoccupé par le fait que les dispositions du Pacte sont rarement invoquées
devant les tribunaux (art. 2 (par. 1)).
5. Le Comité recommande à l’État partie de sensibiliser le public au Pacte et de
mettre en oeuvre des programmes de renforcement des capacités destinés aux juges, aux
procureurs et aux avocats afin que ceux-ci invoquent et appliquent les droits
économiques, sociaux et culturels devant les juridictions internes. Le Comité appelle
l’attention de l’État partie sur son observation générale no 9 (1998) sur l’application du
Pacte au niveau national.
* Adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (14 février-4 mars 2022).
1 E/C.12/UZB/3.
2 Voir E/C.12/2022/SR.13, E/C.12/2022/SR.15 et E/C.12/2022/SR.17.
3 E/C.12/UZB/RQ/3.
Nations Unies E/C.12/UZB/CO/3
Conseil économique et social Distr. générale
31 mars 2022
Français
Original : anglais
E/C.12/UZB/CO/3
GE.22-04767 7
Droits syndicaux
34. Le Comité prend note de l’information selon laquelle la loi sur les syndicats (loi
no ZRU-588 du 6 décembre 2019) a été adoptée. Il est toutefois préoccupé par le fait que
l’enregistrement des syndicats a lieu sous réserve de l’autorisation du Ministère de la justice.
Il est également préoccupé par le fait que le nombre de syndicats enregistrés n’a pas augmenté
depuis 2016, et par la faible proportion d’employés du secteur public et du secteur privé qui
sont membres d’un syndicat (art. 8).
35. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à garantir
le droit des employés de créer un syndicat de leur choix, en abrogeant les dispositions
instaurant l’obligation d’obtenir une autorisation préalable du Ministère de la justice
et en levant les obstacles administratifs à la création de syndicats. Il lui recommande
également d’adopter dans les meilleurs délais le projet de loi sur les rassemblements,
les réunions et les manifestations, avec la participation utile et constructive des
syndicats et des parties prenantes concernées, en veillant à ce que les syndicats puissent
exercer leurs droits et activités librement et sans faire l’objet de restrictions indues ni
d’actes intimidation. Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur son observation
générale no 18 (2005) sur le droit au travail et l’invite à se reporter à sa déclaration sur
le droit de s’associer librement avec d’autres, y compris le droit de constituer des
syndicats et d’y adhérer7, adoptée conjointement avec le Comité des droits de l’homme
en 2019.
Droit de grève
36. Le Comité est préoccupé par l’absence de cadre réglementaire régissant le droit de
grève dans l’État partie (art. 8).
37. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter les modifications de la loi sur
le travail dans les meilleurs délais et de faire en sorte que le droit de grève soit consacré
par la législation interne conformément aux normes internationales.
Droit à la sécurité sociale
38. Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie concernant
l’adoption de la Stratégie nationale relative à la protection sociale (2021-2030) et la mise en
oeuvre de la première phase du lancement du régime d’assurance maladie obligatoire. Il est
toutefois préoccupé par le manque de coordination entre les entités gouvernementales
compétentes dans l’application des différentes mesures de protection sociale, par
l’insuffisance des aides sociales et par le fait que ces aides ne sont pas accessibles à tous les
groupes de population concernés (art. 9 et 12).
39. Le Comité recommande à l’État partie de mettre effectivement en oeuvre sa
stratégie nationale en faveur de la protection sociale, notamment en établissant un
système de coordination et d’administration qui soit clairement défini et qui couvre tous
les groupes de population, en particulier les travailleurs du secteur informel, et
d’accélérer le lancement du régime d’assurance maladie obligatoire. Il lui recommande
également de faire en sorte que le niveau des prestations de protection sociale allouées
aux personnes handicapées, aux personnes âgées, aux Roms/Lyuli, aux réfugiés et aux
demandeurs d’asile soit suffisamment élevé et de recalculer périodiquement le montant
des allocations sociales. Il l’invite à se reporter à son observation générale no 19 (2007)
concernant le droit à la sécurité sociale et à sa déclaration adoptée en 2015, intitulée
« Les socles de protection sociale : un élément essentiel du droit à la sécurité sociale et
des objectifs de développement durable »8.
7 E/C.12/66/5-CCPR/C/127/4.
8 E/C.12/2015/1.
Document no 314
Déclaration commune du Comité des droits
économiques, sociaux et culturels et du Comité des
droits de l’homme, E/C.12/66/5-CCPR/C/127/4 (2019)

GE.19-21026 (F) 111219 131219

Comité des droits économiques, sociaux et culturels Comité des droits de l'homme
Déclaration sur le droit de s’associer librement avec d’autres,
y compris le droit de constituer des syndicats et d’y adhérer
Déclaration commune du Comité des droits économiques,
sociaux et culturels et du Comité des droits de l’homme*
1. À l’occasion du 100e anniversaire de l’Organisation internationale du Travail (OIT),
le Comité des droits économiques, sociaux et culturels et le Comité des droits de l’homme
ont décidé de publier la présente déclaration commune sur les principes fondamentaux de la
liberté d’association reconnus par les deux Pactes, notamment en ce qui concerne les droits
syndicaux, également protégés par la Déclaration universelle des droits de l’homme et la
Convention de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (no 87) de
l’OIT. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels et le Comité des droits de
l’homme saluent les progrès accomplis par les États pour garantir la liberté d’association
dans le cadre des relations employés-employeur. En même temps, les deux Comités
prennent note des difficultés rencontrées pour assurer une protection efficace de cette
liberté fondamentale, notamment des restrictions indues imposées au droit de toute
personne de constituer avec d’autres des syndicats et d’y adhérer, au droit des syndicats
d’exercer librement leur activité et au droit de grève.
2. Aux termes de l’article 8 du Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, les États parties s’engagent à assurer le droit qu’a toute personne de
former avec d’autres des syndicats et de s’affilier au syndicat de son choix en vue de
favoriser et de protéger ses intérêts économiques et sociaux. L’article 22 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques garantit à toute personne le droit de
s’associer librement avec d’autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d’y
adhérer pour la protection de ses intérêts. Ces dispositions ne sont pas identiques, mais ont
un important dénominateur commun qui tient au fait que le droit qu’a toute personne de
s’associer librement avec d’autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d’y
adhérer, relève tant des droits civils et politiques que des droits économiques, sociaux et
culturels. En outre, l’exercice de ce droit peut être considéré à la fois comme étroitement lié
à la liberté d’opinion et d’expression et au droit de réunion pacifique, protégés au titre des
articles 19 et 21 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et comme
essentiel à la protection des droits des travailleurs, notamment de leur droit au travail et de
leur droit de jouir de conditions de travail justes et favorables, garantis par les articles 6 et 7
du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
* Adoptée par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels à sa soixante-sixième session
(30 septembre-18 octobre 2019) et par le Comité des droits de l’homme à sa 127e session
(14 octobre-8 novembre 2019).
Nations Unies E/C.12/66/5−CCPR/C/127/4
Conseil économique et social
Pacte international relatif
aux droits civils et politiques
Distr. générale
6 décembre 2019
Français
Original : anglais
E/C.12/66/5
CCPR/C/127/4
2 GE.19-21026
3. Le droit de s’associer librement avec d’autres comprend le droit qui revient à toute
personne, sans distinction aucune, de constituer des syndicats et d’y adhérer pour la
protection de ses intérêts. L’exercice du droit de former des syndicats et d’y adhérer exige
que les syndicalistes soient protégés de toute forme de discrimination, de harcèlement,
d’intimidation ou de représailles, et suppose également que les syndicats soient autorisés à
exercer librement leurs activités, sans restriction excessive.
4. La liberté d’association, de même que le droit de réunion pacifique, sous-tend aussi
le droit qu’a toute personne de participer à la prise de décisions sur son lieu de travail et
dans sa communauté, afin d’assurer la protection de ses intérêts. Les Comités rappellent
que le droit de grève est le corollaire de l’exercice effectif du droit de constituer des
syndicats et d’y adhérer. Ils se sont tous deux évertués à protéger le droit de grève dans le
cadre du suivi de la mise en oeuvre par les États parties du Pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels et du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques.
Document no 315
Rapport sur le droit de réunion pacifique et liberté
d’association, A/71/385 (2016), paragr. 54, 56 et 99(i)

Nations Unies A/71/385
Assemblée générale Distr. générale
14 septembre 2016
Français
Original : anglais
16-15867 (F) 061016 061016
*1615867*
Soixante et onzième session
Point 69 b) de l’ordre du jour provisoire*
Promotion et protection des droits de l’homme :
questions relatives aux droits de l’homme, y compris
les divers moyens de mieux assurer l’exercice effectif
des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Droit de réunion pacifique et liberté d’association**
Note du Secrétaire général
Le Secrétaire général a l’honneur de transmettre aux membres de l’Assemblée
générale le rapport établi en application de la résolution 24/5 du Conseil des droits
de l’homme par Maina Kiai, Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et
la liberté d’association.
* A/71/150.
** Le présent rapport a été soumis après la date limite, afin de prendre en compte l ’évolution
récente de la situation.
A/71/385
16/31 16-15867 (F)
51. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose que les
États doivent respecter et garantir les droits de réunion et d ’association, et veiller à
ce que tous les individus se trouvant sur leur territoire et relevant de leur
compétence en jouissent, sans distinction aucune, et garantir la bonne suite par les
autorités compétentes à tout recours qui aura été reconnu justifié 67 . Les États
doivent aussi s’abstenir de violer les droits reconnus par le Pacte et sont tenus
responsables des violations de ces droits lorsque l’infraction se produit en raison de
leur incapacité à garantir le droit dans leur législation et dans la pratique. Le désir
de maximiser le profit économique ou de créer des conditions d ’investissement
attrayantes ne réduit en rien les obligations et les responsabilités de l’État. Le Pacte
fait également obligation aux États de lutter contre la discrimination de la part
d’acteurs privés68, y compris en matière d’emploi69.
52. Le principe de non-discrimination s’applique à tous les droits, et les États sont
tenus de veiller à ce que des groupes qui en sont traditionnellement exclus puissent
jouir de leurs droits à la liberté de réunion pacifique et d ’association. L’article 4 de
la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des
femmes fait obligation aux États de prendre des mesures positives pour assurer
l’égalité de jouissance des droits pour les femmes, y compris les droits de réunion et
d’association. Le Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs
migrants et des membres de leur famille impose aux États d’encourager l’autoorganisation
parmi les travailleurs migrants, quel que soit leur statut migratoire, et
de leur fournir des informations sur les associations susceptibles de leur venir en
aide70.
53. Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
exige que les États veillent à ce que les gens puissent s’organiser et adhérer à des
associations de travailleurs qui répondent à leurs préoccupations, et qu ’une attention
particulière soit accordée aux travailleurs domestiques, aux femmes travaillant en
milieu rural et dans des secteurs à prédominance féminine, ainsi qu’aux femmes qui
travaillent à domicile et qui sont souvent privées de ce droit71.
54. Les syndicats et le droit de grève sont deux outils essentiels de conquête des
droits des travailleurs, car ils fournissent des mécanismes par lesquels les
travailleurs peuvent défendre leurs intérêts collectivement et négocier avec les
grandes entreprises et les autorités en meilleure position. L’État est tenu de protéger
ces droits pour tous les travailleurs.
55. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte
international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels protègent
explicitement le droit de fonder des syndicats et de se syndiquer. Le droit
international des droits de l’homme impose aux États l’obligation de promouvoir
activement, d’encourager et de faciliter l’exercice des droits fondamentaux, y
compris le droit du travail (A/70/266, par. 4). En outre, l’idée selon laquelle les
__________________
67 Voir Pacte international relatif aux droits civils et politiques, art. 2 2) et 2 3) al. a) à c).
68 Ibid., art. 2 et 26.
69 Comité des droits de l’homme, Franz Nahlik contre l’Autriche, décision concernant la
communication no 608/1995, 22 juillet 1996 (CCPR/C/57/D/608/1995).
70 Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur
famille, observation générale no 2, 28 août 2013 (CMW/C/GC/2).
71 Voir Comité des droits économiques, sociaux et culturels, observation générale no 23 (2016) sur le
droit à des conditions équitables et satisfaisantes de travail, (E/C.12/GC/23).
A/71/385
16-15867 (F) 17/31
États doivent promouvoir le syndicalisme parmi les travailleurs est implicite dans le
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Les États
doivent prendre des mesures pour veiller à ce que des tiers n’entravent pas
l’exercice des droits syndicaux.
56. Le droit de grève est établi en droit international depuis des décennies, dans
des instruments internationaux et régionaux, et est également inscrit dans les
constitutions d’au moins 90 pays72. Le droit de grève a, de fait, intégré le droit
international coutumier73.
1. Instruments de l’Organisation internationale du Travail
57. L’Organisation internationale du Travail (OIT), seule institution tripartite
d’ampleur mondiale, joue un rôle unique dans la définition des normes concernant
les principes et droits fondamentaux au travail. Parmi ses conventions
fondamentales figurent notamment la Convention de 1948 sur la liberté syndi cale et
la protection du droit syndical (no 87), qui engage les États à prévenir la
discrimination à l’égard des syndicats, à protéger les organisations d’employeurs et
de travailleurs contre toute ingérence mutuelle et à encourager la négociation
collective, et la Convention de 1949 sur le droit d’organisation et de négociation
collective (no 98), qui protège les travailleurs exerçant leur droit d’organisation, qui
entérine le principe de non-ingérence entre organisations d’employeurs et de
travailleurs et favorise la négociation collective volontaire. Les droits qu’elles
consacrent sont indispensables à la protection des autres droits fondamentaux des
travailleurs. Les États signataires de la Déclaration de l’OIT sont tenus de respecter
le principe de la liberté d’association, qu’ils aient ou non signé les conventions
pertinentes74. Dans son programme pour un travail décent, l’OIT appelle les pays à
respecter les conventions fondamentales, à assurer la protection sociale, à créer des
emplois décents et à mener un véritable dialogue social tripartite. En outre, la
Convention no 189 de 2011 fixe des normes visant à promouvoir et à protéger
efficacement les droits fondamentaux des travailleuses et travailleurs domestiques.
__________________
72 Voir, par exemple, Clarence Wilfred Jenks, The International Protection of Trade Union Freedom,
The Library of World Affairs, no 35 (New York, Frederick A. Praeger, 1957), p. 561 et 562; Paul
O’Higgins, « International standards and British labour law », in Roy Lewis, Labour Law in
Britain (Oxford, United Kingdom, Oxfordshire, 1986), p. 577; Breen Creighton, « The ILO and
protection of freedom of association in the United Kingdom », in Keith D. Ewing, Conor A.
Gearty and Bob A. Hepple, éd., Human Rights and Labour Law: Essays for Paul O’Higgins (New
York, Mansell,1994), p. 2; ILO, International Labour Standards: A Workers’ Education Manual,
3e éd. rev. (Genève, 1990), p. 106.
73 Voir, par exemple, la Convention de l’Organisation internationale du Travail no 87, 1948, art. 3,
8 et 10. Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966, art. 8 ; Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, 1966, art. 22, et Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 1950, art. 11; et Convention
américaine relative aux droits de l’homme, 1969, art. 16.
74 Organisation internationale du Travail, Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits
fondamentaux au travail, Genève, 1998. Consultable à l’adresse www.ilo.org/
declaration/thedeclaration/textdeclaration/lang--fr/index.htm.
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30/31 16-15867 (F)
ix) Prêter une attention particulière à la protection et à la promotion du
droit de réunion pacifique et de libre association des travailleurs migrants qui,
en raison de leur statut d’immigration, ne disposent peut-être pas d’autres
mécanismes pour défendre leurs intérêts politiques, sociaux et économiques;
x) Faire inscrire la protection du droit de réunion et de libre association
des travailleurs dans les accords bilatéraux et multilatéraux relatifs au
commerce et à l’investissement et se concerter avec les organisations de la
société civile, y compris les syndicats, tout autant qu’avec les acteurs industriels
engagés dans ces accords;
xi) S’assurer que les acteurs non étatiques, en particulier les entreprises,
respectent les normes et règles internationales des droits de l’homme, à
commencer par le droit de réunion pacifique et de libre association. Les
mécanismes de réglementation devraient prévoir des procédures de diligence,
des évaluations de l’impact sur les droits de l’homme et des régimes de
divulgation obligatoires en ce qui concerne les chaînes d’approvisionnement
mondiales.
99. Le Rapporteur spécial recommande que les entreprises (employeurs,
maisons mères et filiales, fournisseurs, franchisés ou investisseurs dans les
chaînes d’approvisionnement) :
i) Se conforment à leur obligation de respecter le droit de réunion
pacifique et de libre association, c’est-à-dire notamment garantir le droit de
tous les travailleurs de former des syndicats et des associations professionnelles,
de se syndiquer, de participer à des négociations et autres actions collectives, et
de faire grève;
ii) S’abstiennent d’appliquer des politiques et pratiques antisyndicales
ou d’exercer des représailles à l’encontre de travailleurs exerçant leur droit de
réunion pacifique et de libre association;
iii) Appliquent les Principes directeurs relatifs aux entreprises et aux
droits de l’homme, en engageant des politiques de respect du droit de réunion
pacifique et de libre association et en s’imposant un devoir de diligence en ce
qui concerne les droits de l’homme dans les chaînes d’approvisionnement
mondiales.
100. Le Rapporteur spécial adresse les recommandations ci-après à la société
civile, et notamment aux syndicats :
i) Nouer des alliances dans l’ensemble de la société civile afin de
surveiller l’application concrète des présentes recommandations;
ii) Défendre le principe selon lequel les droits des travailleurs sont des
droits fondamentaux et affirmer l’urgente nécessité que les organisations des
droits de l’homme placent les droits des travailleurs au coeur de leurs mandats,
surtout en ces temps d’affaiblissement des droits en question;
iii) Faire en sorte que les syndicats axent plus précisément leurs activités
d’information et de sensibilisation sur les populations de travailleurs
historiquement marginalisés, notamment en intégrant pleinement les employés
de maison, les travailleurs migrants et les travailleurs du secteur informel dans
les syndicats et les négociations d’accords collectifs;
Document no 316
Comité européen des Droits sociaux, Confédération
générale du travail de Suède (LO) et Confédération
générale des cadres, fonctionnaires et employés (TCO)
c. Suède, Réclamation n° 85/2012, Décision sur la
recevabilité et le bien-fondé (2012), paragr. 110

EUROPEAN COMMITTEE OF SOCIAL RIGHTS
COMITÉ EUROPÉEN DES DROITS SOCIAUX
DÉCISION SUR LA RECEVABILITE
ET LE BIEN-FONDE
Adoption : 3 juillet 2013
Notification : 19 juillet 2013
Publicité : 5 février 2014
Confédération générale du travail de Suède (LO) et Confédération générale des
cadres, fonctionnaires et employés (TCO) c. Suède
Réclamation n° 85/2012
Le Comité européen des Droits sociaux, comité d’experts indépendants institué en
vertu de l’article 25 de la Charte sociale européenne (« le Comité »), au cours de sa
265e session où siégeaient :
Luis JIMENA QUESADA, Président
Monika SCHLACHTER, Vice-Présidente
Petros STANGOS, Vice-Président
Lauri LEPPIK
Birgitta NYSTRÖM
Rüçhan IŞIK
Alexandru ATHANASIU
Jarna PETMAN
Elena MACHULSKAYA
Giuseppe PALMISANO
Karin LUKAS
Eliane CHEMLA
Jozsef HAJDU
Marcin WUJCZYK
Assisté de Régis BRILLAT, Secrétaire exécutif
- 47 -
B - Appréciation du Comité
107. Eu égard aux observations liminaires sur le bien-fondé de la réclamation
(points 72 à 74 supra), le Comité considère qu’il a pour tâche non pas de juger de la
conformité de la décision préjudicielle de la CJUE dans l’affaire Laval au regard de la
Charte, mais de déterminer si les modifications législatives adoptées par le
Parlement suédois en avril 2010 (à la suite et en raison de la décision précitée) ainsi
qu’en décembre 2009 (pour donner effet aux dispositions de la directive
2006123/CE) constituent une violation de la Charte.
108. Pour se prononcer sur la violation alléguée des articles 6§2 et 6§4, le Comité
tiendra compte en particulier (a) des articles 5a et 5b (SFS 2012:857) et des articles
10 et 11 (SFS 2013:351) de la loi n° 678 de 1999 sur le détachement de travailleurs
à l’étranger, de l’article 41c de la loi n° 580 de 1976 sur la codétermination et de la loi
n° 854 de 2012 sur le travail intérimaire, ainsi que (b) des modifications apportées à
l’article 2 de la loi n° 1083 de 2009 relative aux filiales étrangères et de l’article 3 de
l’ordonnance n° 308 de 1992 relative aux filiales étrangères.
109. D’un point de vue général, le Comité considère que l’exercice du droit de
négociation collective et du droit de mener des actions collective que garantissent les
articles 6§2 et 6§4 de la Charte est essentiel à la jouissance d’autres droits
fondamentaux garantis par la Charte, notamment ceux qui portent sur les conditions
de travail équitables (article 2), la sécurité et l’hygiène dans le travail (article 3), la
rémunération équitable (article 4), l’information et la consultation (article 21), la
participation à la détermination et à l’amélioration des conditions de travail et du
milieu du travail (article 22), la protection en cas de licenciement (article 24), la
protection des créances des travailleurs en cas d’insolvabilité de leur employeur
(article 25), la dignité au travail (article 26) la protection des représentants des
travailleurs dans l’entreprise et les facilités à leur accorder (article 28), ou encore
l’information et la consultation dans les procédures de licenciements collectifs (article
29).
110. Le Comité note en outre que le droit de négociation collective et le droit de
mener des actions collectives sont reconnus par les constitutions d’une grande
majorité des Etats membres du Conseil de l’Europe, et qu’ils le sont aussi par un
nombre important d’instruments juridiques contraignants des Nations Unies et de
l’UE. Il renvoie notamment ici à l’article 8 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (voir point 37 supra), aux dispositions pertinentes
des Conventions nos 87, 98 et 154 de l’OIT (voir point 38 supra), ainsi qu’à la Charte
des droits fondamentaux de l’Union européenne, à la directive 2006/123/CE relative
aux services dans le marché intérieur (cf. article 1§7) et à la directive 2008/104/CE
relative au travail intérimaire - considérant 19 (voir point 36 supra).
111. Le Comité rappelle qu'au titre de l’article 6§2 de la Charte, « les Parties
contractantes […] s’engagent non seulement à reconnaître dans leur législation la
possibilité pour les employeurs et les travailleurs de régler leurs relations mutuelles
par voie de convention collective, mais également à promouvoir d'une façon positive,
avec l'aide de moyens appropriés, la conclusions de telles conventions si leur état de
développement spontané n'est pas suffisant et à garantir, en particulier, que les
partenaires sociaux soient disposés à ouvrir entre eux des négociations collectives
(…) » (Conclusions I - 1969, observation interprétative relative à l’article 6§2). Le
Document no 317
CEDH, Demir et Baykara c. Turquie (2008), paragr. 140-
170

CONSEIL
DE L’EUROPE
COUNCIL
OF EUROPE
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME
EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS
GRANDE CHAMBRE
AFFAIRE DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE
(Requête no 34503/97)
ARRÊT
STRASBOURG
12 novembre 2008
36 ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE
136. Il plaide par ailleurs que l’on ne peut établir l’existence d’une
pratique européenne uniforme quant au droit pour les fonctionnaires de
conclure des conventions collectives. Dans certains Etats contractants, seuls
les agents publics contractuels (c’est-à-dire autres que les fonctionnaires de
carrière) disposeraient de tels droits, tandis que dans d’autres seuls les
fonctionnaires occupant des postes élevés en seraient privés.
137. Enfin, le Gouvernement estime que les conventions de l’OIT
ratifiées par la Turquie ne sont pas pertinentes dans le contexte de
l’article 11 de la Convention. La Cour ne devrait pas s’en servir pour créer
de nouveaux droits opposables au titre de la Convention.
b) Les requérants
138. Les requérants précisent que leur grief principal est tiré de
l’annulation de la convention collective qu’ils avaient conclue avec la
municipalité de Gaziantep. Ils disent partager l’analyse livrée par la
chambre sur ce point, tout en soulignant que la position de la Cour de
cassation a totalement ignoré leurs droits à cet égard.
139. Ils souscrivent en outre à l’opinion concordante de trois juges de la
chambre selon laquelle le droit de négociation collective doit être considéré
de nos jours comme un des éléments essentiels du droit de former des
syndicats, au sens de l’article 11 de la Convention.
3. Sur l’existence d’une ingérence
a) Principes généraux concernant le contenu du droit syndical
i. L’évolution de la jurisprudence
140. Le développement de la jurisprudence de la Cour concernant les
éléments constitutifs du droit syndical peut se résumer comme suit : la Cour
a toujours considéré que l’article 11 de la Convention protège la liberté de
défendre les intérêts professionnels des adhérents d’un syndicat par l’action
collective de celui-ci, action dont les Etats contractants doivent à la fois
autoriser et rendre possibles la conduite et le développement (Syndicat
national de la police belge, précité, § 39, Syndicat suédois des conducteurs
de locomotives, précité, § 40, et Schmidt et Dahlström c. Suède, 6 février
1976, § 36, série A no 21).
141. Quant au contenu du droit syndical consacré par l’article 11 de la
Convention, la Cour a considéré que le paragraphe 1 de cette disposition
garantissait aux membres d’un syndicat, en vue de la défense de leurs
intérêts, le droit à ce que leur syndicat soit entendu, mais laissait à chaque
Etat le choix des moyens à employer à cette fin. Ce qu’exige la Convention,
selon la Cour, c’est que la législation permette aux syndicats, selon des
modalités non contraires à l’article 11, de lutter pour défendre les intérêts de
ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE 37
leurs membres (Syndicat national de la police belge, précité, § 39, Syndicat
suédois des conducteurs de locomotives, précité, § 40, et Schmidt et
Dahlström, précité, § 36).
142. En ce qui concerne le droit de conclure des conventions collectives,
la Cour a estimé, dans un premier temps, que l’article 11 n’assurait pas un
traitement spécifique aux syndicats et, en particulier, ne leur garantissait pas
le droit de conclure des conventions collectives (Syndicat suédois des
conducteurs de locomotives, précité, § 39). Elle a précisé par ailleurs que ce
droit ne constituait nullement un élément nécessairement inhérent à un droit
garanti par la Convention (Schmidt et Dahlström, précité, § 34).
143. Plus tard, dans l’affaire Wilson, National Union of Journalists et
autres, précitée, la Cour a considéré que même si la négociation collective
n’était pas indispensable à une jouissance effective de la liberté syndicale,
elle pouvait être l’un des moyens par lesquels les syndicats pouvaient être
mis en mesure de protéger les intérêts de leurs affiliés. Le syndicat devait
être libre, d’une manière ou d’une autre, de chercher à persuader
l’employeur d’écouter ce qu’il avait à dire au nom de ses membres (ibidem,
§ 44).
144. Il en ressort que l’évolution de la jurisprudence quant au contenu
du droit syndical consacré par l’article 11 est marquée par deux principes
directeurs : d’une part, la Cour prend en considération la totalité des
mesures prises par l’Etat concerné afin d’assurer la liberté syndicale dans la
mise en oeuvre de sa marge d’appréciation, d’autre part, la Cour n’accepte
pas les restrictions qui affectent les éléments essentiels de la liberté
syndicale sans lesquels le contenu de cette liberté serait vidé de sa
substance. Ces deux principes ne se contredisent pas, ils sont corrélés. Cette
corrélation implique que l’Etat contractant en cause, tout en étant libre en
principe de décider quelles mesures il entend prendre afin d’assurer le
respect de l’article 11, est dans l’obligation d’y inclure les éléments
considérés comme essentiels par la jurisprudence de la Cour.
145. De l’état actuel de la jurisprudence de la Cour se dégagent les
éléments essentiels suivants du droit syndical : le droit de former un
syndicat et de s’y affilier (voir, récemment, Tüm Haber Sen et Çınar,
précité), l’interdiction des accords de monopole syndical (voir, par exemple,
Sørensen et Rasmussen, précité), le droit pour un syndicat de chercher à
persuader l’employeur d’écouter ce qu’il a à dire au nom de ses membres
(Wilson, National Union of Journalists et autres, précité, § 44).
146. Cette liste n’est pas figée. Au contraire, elle a vocation à évoluer en
fonction des développements caractérisant le monde du travail. A cet égard,
il convient de rappeler que la Convention est un instrument vivant à
interpréter à la lumière des conditions de vie actuelles, auxquelles il y a lieu
d’intégrer l’évolution du droit international, de façon à refléter le niveau
d’exigence croissant en matière de protection des droits de l’homme, lequel
implique une plus grande fermeté dans l’appréciation des atteintes aux
38 ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE
valeurs fondamentales des sociétés démocratiques. Autrement dit, les
limitations apportées aux droits doivent être interprétées restrictivement,
d’une manière qui assure une protection concrète et effective des droits de
l’homme (voir, mutatis mutandis, Refah Partisi (Parti de la prospérité) et
autres c. Turquie [GC], nos 41340/98, 41342/98, 41343/98 et 41344/98,
§ 100, CEDH 2003-II, et Selmouni c. France [GC], no 25803/94, § 101,
CEDH 1999-V).
ii. Le droit de négociation collective
147. La Cour observe qu’en droit international, le droit de négociation
collective est énoncé par la Convention no 98 de l’OIT concernant
l’application des principes du droit d’organisation et de négociation
collective. Conclu en 1949, ce texte, qui constitue l’un des instruments
fondamentaux concernant les normes internationales du travail, a été ratifié
par la Turquie en 1952. Il précise dans son article 6 qu’il ne traite pas de la
situation des « fonctionnaires publics ». Cependant, la Commission
d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et des
recommandations a interprété cette disposition comme excluant uniquement
les fonctionnaires dont les activités sont propres à l’administration de l’Etat.
En dehors de ces derniers, toutes les personnes employées par le
gouvernement, les entreprises publiques ou les institutions publiques
autonomes doivent bénéficier, selon cette commission, des garanties de la
convention no 98 de l’OIT au même titre que les autres salariés, et en
conséquence pouvoir négocier collectivement leurs conditions d’emploi, y
compris salariales (paragraphe 43 ci-dessus).
148. La Cour relève aussi que la Convention no 151 (adoptée en 1978,
entrée en vigueur en 1981 et ratifiée par la Turquie) sur les relations de
travail dans la fonction publique (Convention no 151 de l’OIT concernant la
protection du droit d’organisation et les procédures de détermination des
conditions d’emploi dans la fonction publique), laisse aux Etats le choix de
reconnaître ou non aux membres des forces armées ou de la police le droit
de participer à la détermination des conditions de travail, mais dispose que
ce droit s’applique partout ailleurs dans la fonction publique, au besoin
selon des modalités particulières. En outre, les dispositions de la
convention no 151, en application de son article 1 § 1, ne peuvent être
utilisées afin de réduire l’étendue des garanties prévues par la
convention no 98 de l’OIT (paragraphe 44 ci-dessus).
149. Quant aux textes européens, la Cour constate que la Charte sociale
européenne, en son article 6 § 2 (que la Turquie n’a pas ratifié), reconnaît à
tout travailleur comme à tout syndicat le droit de mener des négociations
collectives, faisant ainsi peser sur les pouvoirs publics l’obligation
correspondante de promouvoir activement une culture du dialogue et de la
négociation dans l’économie, afin d’aboutir à une large couverture
ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE 39
conventionnelle. Elle observe cependant que cette obligation n’emporte pas
celle de conclure une convention collective. Selon le sens donné par le
CEDS à l’article 6 § 2 de cette charte, qui s’applique en fait pleinement aux
agents de la fonction publique, les Etats qui limitent le rôle des négociations
collectives dans le secteur public doivent, afin de se conformer à cette
disposition, garantir aux représentants du personnel un certain rôle dans le
processus d’élaboration des conditions d’emploi.
150. De son côté, la Charte des droits fondamentaux de l’Union
européenne, qui est l’un des textes européens les plus récents, prévoit, en
son article 28, que les travailleurs et les employeurs, ou leurs organisations
respectives, ont, conformément au droit communautaire et aux législations
et pratiques nationales, le droit de négocier et de conclure des conventions
collectives aux niveaux appropriés.
151. Quant à la pratique des Etats européens, la Cour rappelle que, dans
une grande majorité d’entre eux, le droit pour les fonctionnaires de mener
des négociations collectives avec les administrations a été reconnu, avec des
exceptions diverses tendant à exclure certains domaines considérés comme
sensibles ou certaines catégories de fonctionnaires détenteurs de pouvoirs
exclusifs de l’Etat. En particulier, le droit pour les fonctionnaires des
administrations locales non détenteurs de pouvoirs étatiques de mener des
négociations collectives pour la détermination de leur rémunération et de
leurs conditions de travail a été reconnu dans la majorité des Etats
contractants, les exceptions existantes ne pouvant être justifiées que par des
circonstances particulières (paragraphe 52 ci-dessus).
152. Il y a lieu de tenir compte également de l’évolution qu’a connue la
situation en Turquie depuis l’introduction de la requête. Suite à la
ratification de la convention no 87 de l’OIT, la Turquie a modifié en 1995
l’article 53 de sa Constitution en y insérant un paragraphe reconnaissant aux
syndicats fondés par des agents publics le droit d’ester en justice et
d’engager des négociations collectives avec l’administration. Plus tard, la
loi no 4688 du 25 juin 2001 a défini les modalités de l’utilisation par les
fonctionnaires de leur droit de mener des négociations collectives.
153. A la lumière de ces développements, la Cour estime que sa
jurisprudence selon laquelle le droit de négocier et de conclure des
conventions collectives ne constitue pas un élément inhérent à l’article 11
de la Convention (Syndicat suédois des conducteurs de locomotives, précité,
§ 39, et Schmidt et Dahlström, précité, § 34) doit être revue, de manière à
tenir compte de l’évolution perceptible en la matière tant en droit
international que dans les systèmes juridiques nationaux. Certes, il est dans
l’intérêt de la sécurité juridique, de la prévisibilité du droit et de l’égalité
devant la loi que la Cour ne s’écarte pas sans motif valable de ses
précédents ; toutefois, l’abandon par elle d’une approche dynamique et
évolutive risquerait de faire obstacle à toute réforme ou amélioration (Vilho
Eskelinen et autres, précité, § 56).
40 ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE
154. En conséquence, la Cour estime, eu égard aux développements du
droit du travail tant international que national et de la pratique des Etats
contractants en la matière, que le droit de mener des négociations collectives
avec l’employeur est, en principe, devenu l’un des éléments essentiels du
« droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats
pour la défense de ses intérêts » énoncé à l’article 11 de la Convention, étant
entendu que les Etats demeurent libres d’organiser leur système de manière
à reconnaître, le cas échéant, un statut spécial aux syndicats représentatifs.
Comme les autres travailleurs, les fonctionnaires, mis à part des cas très
particuliers, doivent en bénéficier, sans préjudice toutefois des effets des
« restrictions légitimes » pouvant devoir être imposées aux « membres de
l’administration de l’Etat » au sens de l’article 11 § 2, dont cependant les
requérants en l’espèce ne font pas partie (paragraphes 106-107 ci-dessus).
b) Application de ces principes dans le cas d’espèce
155. A la lumière des principes énoncés ci-dessus, la Cour estime que
déjà à l’époque des faits le syndicat Tüm Bel Sen disposait du droit de
mener des négociations collectives avec l’administration employeur, qui ne
l’avait du reste pas contesté. Ce droit constituait l’un des éléments inhérents
au droit de mener des activités syndicales garanti audit syndicat par l’article
11 de la Convention.
156. Quant à la convention litigieuse, conclue à l’issue de négociations
collectives, la Grande Chambre constate, à l’instar de la chambre, les faits
suivants :
« D’abord, le syndicat Tüm Bel Sen a persuadé l’employeur, la municipalité de
Gaziantep, d’engager une négociation collective sur les questions dont il estimait
qu’elles étaient importantes pour les intérêts de ses membres et de parvenir à un
accord afin de déterminer leurs obligations et devoirs réciproques.
Ensuite, à l’issue de ces négociations, une convention collective a été conclue entre
l’employeur et le syndicat Tüm Bel Sen. Tous les droits et les obligations des
membres de celui-ci ont été prévus et protégés dans le cadre de ce texte.
Par ailleurs, cette convention collective a été mise en application. Pendant deux ans,
à l’exception de certaines dispositions financières qui faisaient l’objet d’un litige entre
les parties, la convention collective en cause a régi toutes les relations de travail au
sein de la municipalité de Gaziantep. »
157. Partant, la Cour estime que les négociations collectives menées en
l’espèce et la convention collective conclue en conséquence constituaient
pour le syndicat concerné des moyens essentiels de promouvoir et assurer
les intérêts de ses membres. L’absence de la législation nécessaire pour
donner vie aux dispositions des conventions internationales de travail déjà
ratifiées par la Turquie et l’arrêt de la Cour de cassation du 6 décembre
1995 fondé sur cette absence, qui emporta, de fait, l’annulation rétroactive
de la convention collective en question, s’analysent en une ingérence dans
ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE 41
l’exercice par les requérants de leur liberté syndicale, telle qu’elle est
consacrée par l’article 11 de la Convention.
158. Quant aux arguments des requérants tirés de l’insuffisance des
dispositions de la nouvelle législation du point de vue des droits syndicaux
des fonctionnaires, la Cour rappelle que l’objet de la présente requête ne
s’étend pas au fait que la nouvelle législation turque n’impose pas à
l’administration l’obligation de conclure des conventions collectives avec
les syndicats de fonctionnaires, ni au fait que ces derniers n’ont pas le droit
de grève en cas de non-aboutissement des négociations collectives.
4. Sur la justification de l’ingérence
159. La Cour estime que l’ingérence litigieuse, à savoir l’annulation
avec effet rétroactif de la convention collective que le syndicat Tüm Bel Sen
avait conclue à l’issue de négociations collectives avec l’administration qui
employait les requérants, doit être considérée comme ayant violé
l’article 11, sauf s’il peut être démontré qu’elle était « prévue par la loi »,
qu’elle poursuivait un ou plusieurs buts légitimes au sens du paragraphe 2 et
qu’elle était « nécessaire dans une société démocratique » pour atteindre ces
buts.
a) La prévision par la loi
160. Le Gouvernement et les requérants souscrivent au constat de la
chambre selon lequel l’ingérence en question était prévue par la loi. Pour les
besoins de la présente affaire, la Grande Chambre peut accepter que
l’ingérence était prévue par la loi, telle qu’interprétée par les chambres
civiles réunies de la Cour de cassation, la plus haute instance juridique
intervenue en l’espèce.
b) La poursuite d’un but légitime
161. La Cour peut aussi accepter, à l’instar de la chambre ainsi que des
parties, que l’ingérence en question, dans la mesure où elle visait à
empêcher une disparité entre la loi et la pratique, poursuivait un but
légitime : la défense de l’ordre. Quant au fait que le risque de pareille
disparité résultait du temps mis par le législateur à adapter la législation aux
engagements internationaux de la Turquie en matière de normes
internationales du travail, la Cour estime que son appréciation relève
également de l’examen de la nécessité de la mesure litigieuse dans une
société démocratique.
c) La nécessité dans une société démocratique
162. La Cour se réfère à cet égard à sa jurisprudence exposée ci-dessus
relativement aux obligations négatives et positives résultant pour le
42 ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE
Gouvernement de l’article 11 de la Convention (paragraphes 109-111 cidessus).
163. Quant à l’application de ces principes dans la présente affaire, la
Cour note que le Gouvernement estime inutile de démontrer la nécessité
dans une société démocratique de la restriction incriminée, son argument
principal consistant à dire que les requérants, en leur qualité de
fonctionnaires, ne possédaient pas le droit de mener des négociations
collectives et de conclure des conventions collectives.
164. La Cour, procédant à son propre examen, considère qu’à l’époque
des faits plusieurs éléments montraient que le refus aux requérants,
fonctionnaires municipaux, du droit de mener des négociations collectives et
ainsi de convaincre l’administration de conclure une convention collective,
ne correspondait pas à un « besoin social impérieux ».
165. En premier lieu, le droit pour les fonctionnaires de pouvoir en
principe mener des négociations collectives était reconnu par des
instruments de droit international tant universels (paragraphes 147-148 cidessus)
que régionaux (paragraphes 149-150 ci-dessus). Par ailleurs,
l’examen de la pratique européenne montre que ce droit était reconnu dans
la majorité des Etats membres (paragraphes 52 et 151 ci-dessus).
166. En deuxième lieu, la Turquie avait dès 1952 ratifié la
convention no 98 de l’OIT, l’instrument principal garantissant, au plan
international, le droit pour les travailleurs de mener des négociations
collectives et de conclure des conventions collectives (paragraphes 42-43 et
151 ci-dessus). Aucun élément du dossier ne montre que le syndicat des
requérants représentait les « fonctionnaires publics », c’est-à-dire, selon
l’interprétation de la commission d’experts de l’OIT, les fonctionnaires dont
les activités sont propres à l’administration de l’Etat, lesquels relèvent de
l’exception prévue par l’article 6 de la convention no 98 de l’OIT.
167. Dans ces conditions, la Grande Chambre partage la considération
suivante de la chambre :
« La Cour ne saurait admettre que le moyen tiré d’une lacune dans la loi – causée
par le retard du législateur – puisse, à lui seul, rendre l’annulation d’une convention
collective, appliquée depuis deux ans, conforme aux conditions dans lesquelles la
liberté d’association peut être restreinte. »
168. Par ailleurs, la Grande Chambre observe que le Gouvernement n’a
pas démontré l’existence de circonstances particulières permettant d’exclure
les requérants, fonctionnaires municipaux, du droit, inhérent à leur liberté
syndicale, de faire usage de la négociation collective pour conclure la
convention en cause. L’explication selon laquelle les fonctionnaires ont,
sans distinction, une position privilégiée par rapport aux autres travailleurs
n’est pas suffisante dans ce contexte.
169. La Cour conclut donc que l’ingérence en cause, c’est-à-dire
l’annulation rétroactive de la convention collective conclue par le syndicat
ARRÊT DEMİR ET BAYKARA c. TURQUIE 43
des requérants à l’issue de négociations collectives avec l’administration,
n’était pas « nécessaire dans une société démocratique », au sens de
l’article 11 § 2 de la Convention.
170. Dès lors, il y a eu violation de l’article 11 de la Convention sur ce
point également, tant à l’égard du syndicat des requérants qu’à l’égard des
requérants eux-mêmes.
III. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 14 DE LA
CONVENTION
171. Les requérants soutiennent que les restrictions apportées à leurs
libertés de fonder des syndicats et de conclure des conventions collectives
s’analysent en une distinction discriminatoire au sens de l’article 14 de la
Convention combiné avec l’article 11.
172. Eu égard toutefois à ses conclusions sur le terrain de l’article 11, la
Cour, à l’instar de la chambre, ne juge pas nécessaire d’examiner ce grief
séparément.
IV. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
173. Aux termes de l’article 41 de la Convention,
« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et
si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer
qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie
lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
174. Devant la chambre, M. Kemal Demir avait réclamé 551 euros
(EUR) pour dommage matériel, somme correspondant selon lui aux
augmentations de salaire qu’il aurait obtenues en l’espace de treize ans si la
convention collective litigieuse n’avait pas été annulée. Il avait par ailleurs
sollicité une somme de 14 880 EUR pour le dommage moral qu’il disait
avoir subi en raison de la déception d’avoir été privé des moyens de faire
valoir ses droits.
175. Mme Vicdan Baykara avait quant à elle réclamé, au nom du syndicat
qu’elle représentait et de ses membres, une indemnité de 148 810 EUR pour
dommage moral.
176. La chambre a alloué 20 000 EUR pour dommage moral à
Mme Vicdan Baykara en sa qualité de représentante du syndicat Tüm Bel
Sen, somme à ristourner aux membres du syndicat, ainsi que 500 EUR, tous
dommages confondus, à M. Kemal Demir.

Document no 318
CEDH, Enerji Yapi-Yol Sen c. Turquie (2009), paragr. 17-
24

CONSEIL
DE L’EUROPE
COUNCIL
OF EUROPE
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME
EUROPEAN COURT OF HUMAN RIGHTS
TROISIÈME SECTION
AFFAIRE ENERJİ YAPI-YOL SEN c. TURQUIE
(Requête no 68959/01)
ARRÊT
STRASBOURG
21 avril 2009
DÉFINITIF
06/11/2009
Cet arrêt peut subir des retouches de forme.
ARRÊT ENERJİ YAPI-YOL SEN c. TURQUIE 3
II. LE DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL PERTINENT
16. Le droit interne et international pertinent en l’espèce est décrit dans
l’arrêt Demir et Baykara c. Turquie [GC], no 34503/97, §§ 34-52,
12 novembre 2008.
EN DROIT
I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 11 DE LA
CONVENTION
17. Le requérant estime que la circulaire no 1996/21 a porté atteinte à
son droit à la liberté syndicale. Il invoque à cet égard l’article 11 de la
Convention, ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté
d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à
des syndicats pour la défense de ses intérêts.
2. L’exercice de ces droits ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui,
prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique,
à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l’ordre et à la prévention
du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et
libertés d’autrui. Le présent article n’interdit pas que des restrictions légitimes soient
imposées à l’exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou
de l’administration de l’Etat. »
18. Le Gouvernement combat cette thèse.
A. Sur l’existence d’une ingérence
19. D’emblée, la Cour rappelle que dans sa décision sur la recevabilité
du 31 janvier 2008 elle a joint au fond l’exception préliminaire du
Gouvernement portant sur l’absence de la qualité de « victime » du
requérant.
20. Le requérant allègue que la circulaire contestée, qui interdisait aux
fonctionnaires de participer à une journée nationale de grève dans le cadre
des actions collectives de réunions et de manifestations, s’analyse en une
ingérence dans l’exercice de son droit à la liberté syndicale.
21. Le Gouvernement est d’avis que le requérant n’a en rien été affecté
par la circulaire susvisée. Il rappelle les dispositions législatives et soutient
que cette circulaire n’a pas empêché l’intéressé de mener ses activités
légales. Il affirme qu’il n’y a eu par conséquent aucune ingérence dans
4 ARRÊT ENERJİ YAPI-YOL SEN c. TURQUIE
l’exercice du droit du requérant à sa liberté syndicale au sens de l’article 11
de la Convention.
22. La Cour rappelle que pour pouvoir introduire une requête en vertu de
l’article 34 une personne physique, une organisation non gouvernementale
ou un groupe de particuliers doit pouvoir se prétendre « victime d’une
violation (...) des droits reconnus dans la Convention (...) ». Pour pouvoir se
prétendre victime d’une violation, un individu doit avoir subi directement
les effets de la mesure litigieuse (Irlande c. Royaume-Uni, arrêt du
18 janvier 1978, §§ 239-240, série A no 25 ; Eckle c. Allemagne, arrêt du
15 juillet 1982, § 66, série A no 51 ; Klass et autres c. Allemagne, arrêt du
6 septembre 1978, § 33, série A no 28). Ainsi, la Convention n’envisage pas
la possibilité que soit engagée une actio popularis aux fins de
l’interprétation des droits reconnus dans la Convention ; elle n’autorise pas
non plus les particuliers à se plaindre d’une disposition de droit interne
simplement parce qu’il leur semble, sans qu’ils en aient directement subi les
effets, qu’elle enfreint la Convention (Norris c. Irlande, arrêt du 26 octobre
1988, série A no 142).
23. Il est toutefois loisible à un particulier de soutenir qu’une loi viole
ses droits, en l’absence d’acte individuel d’exécution, si l’intéressé est
obligé de changer de comportement sous peine de poursuites (Norris,
précité ; Bowman c. Royaume-Uni, no 24839/94, Recueil des arrêts et
décisions 1998-I) ou s’il fait partie d’une catégorie de personnes risquant de
subir directement les effets de la législation (Burden c. Royaume-Uni [GC],
no 13378/05, §§ 33-35, 29 avril 2008 ; Johnston et autres c. Irlande, arrêt du
18 décembre 1986, série A no 112 ; Open Door et Dublin Well Woman
c. Irlande, arrêt du 29 octobre 1992, série A no 246-A).
24. En l’espèce, la Cour estime à l’aune de ces principes que le syndicat
requérant a subi directement les effets de la circulaire litigieuse et qu’il peut
en conséquence se prétendre victime d’une ingérence dans l’exercice de son
droit à la liberté syndicale. En effet, la Cour observe que la circulaire
no 1996/21 interdisait aux fonctionnaires de participer à une journée
nationale de grève organisée dans le cadre des actions programmées par la
Fédération des syndicats du secteur public pour la reconnaissance du droit à
une convention collective des fonctionnaires. Les personnes ayant participé
à cette journée se sont vues infliger des sanctions disciplinaires (paragraphe
9 ci-dessus). Or ce qu’exige la Convention, c’est que la législation permette
aux syndicats, selon les modalités non contraires à l’article 11, de lutter pour
la défense des intérêts de leurs membres (Schmidt et Dahlström c. Suède,
6 février 1976, §§ 34 et 36, série A no 21 ; Syndicat national de la police
belge c. Belgique, 27 octobre 1975, § 39, série A no 19 ; Syndicat suédois
des conducteurs de locomotives c. Suède, 6 février 1976, § 40, série A
no 20). La grève, qui permet à un syndicat de faire entendre sa voix,
constitue un aspect important pour les membres d’un syndicat dans la
protection de leurs intérêts (Schmidt et Dahlström, précité, § 36). La Cour
ARRÊT ENERJİ YAPI-YOL SEN c. TURQUIE 5
note également que le droit de grève est reconnu par les organes de contrôle
de l’Organisation internationale du travail (OIT) comme le corollaire
indissociable du droit d’association syndicale protégé par la Convention
C87 de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (pour
la prise en compte par la Cour des éléments de droit international autres que
la Convention, voir Demir et Baykara, précité). Elle rappelle que la Charte
sociale européenne reconnaît aussi le droit de grève comme un moyen
d’assurer l’exercice effectif du droit de négociation collective. Partant, la
Cour rejette l’exception du Gouvernement.
B. Sur la justification de l’ingérence
25. Pareille ingérence enfreint l’article 11 de la Convention, sauf si elle
était « prévue par la loi », dirigée vers un ou des buts légitimes au regard du
paragraphe 2 de l’article 11 de la Convention et « nécessaire dans une
société démocratique » pour atteindre ces buts.
1. « Prévue par la loi »
26. La Cour rappelle que les mots « prévue par la loi » signifient en
premier lieu que la mesure incriminée doit avoir une base en droit interne,
qu’elle entend le terme « loi » dans son acception matérielle plutôt que
formelle, et qu’elle y a également inclus des textes de rang « infralégislatif »
édictés par les autorités compétentes en vertu d’un pouvoir normatif délégué
(Frérot c. France, no 70204/01, § 57, 12 juin 2007 ; Lavents c. Lettonie,
no 58442/00, § 135, 28 novembre 2002).
27. Elle considère qu’en l’espèce la circulaire no 1996/21 prise dans
l’exercice d’un pouvoir normatif constituait la base légale de l’ingérence
litigieuse.
2. « But légitime »
28. La Cour doute que l’ingérence dans la présente affaire poursuivait un
but légitime au sens de l’article 11 § 2 de la Convention. Toutefois, elle juge
inutile de trancher la question eu égard à la conclusion à laquelle elle
parvient sous l’angle de la nécessité d’une telle ingérence (point 3
ci-dessous) (Urcan et autres c. Turquie, nos 23018/04, 23034/04, 23042/04,
23071/04, 23073/04, 23081/04, 23086/04, 23091/04, 23094/04, 23444/04 et
23676/04, § 29, 17 juillet 2008).
3. « Nécessaire dans une société démocratique »
29. Faisant référence aux arrêts Syndicat national de la police belge
c. Belgique (précité) et Schmidt et Dahlström (précité), le Gouvernement
affirme que l’article 11 de la Convention ne garantit pas aux syndicats un
traitement précis de la part de l’Etat. Il soutient que ce qu’exige la
Document no 319
CEDH, National Union of Rail, Maritime and Transport
Workers c. Royaume-Uni (2014), paragr. 26-33, 75-78 et
83-106

QUATRIÈME SECTION
AFFAIRE NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND
TRANSPORT WORKERS c. ROYAUME-UNI
(Requête no 31045/10)
ARRÊT
STRASBOURG
8 avril 2014
DÉFINITIF
08/09/2014
Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention.
10 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
en place en 1980 et 1990. Pour le syndicat requérant, les actions secondaires
étaient relativement rares, et l’immense majorité des grèves menées à cette
époque étaient des actions primaires. Il s’appuie sur les chiffres officiels
(figurant dans une publication du gouvernement intitulée « Employment
Gazette ») indiquant que, depuis les années 1960, le Royaume-Uni est resté
proche de la moyenne européenne pour ce qui est des jours perdus en action
revendicative. Selon cette source, le pays se situe à un niveau moyen depuis
la fin des années 1970, la seule exception étant l’année 1984, où eut lieu
dans l’industrie minière une grève longue et très suivie. Le Gouvernement
soutient que les statistiques comparées doivent être interprétées avec
prudence en raison de la profonde transformation qui s’est produite en
Europe au cours des vingt dernières années. Le fait que le Royaume-Uni
soit proche de la moyenne européenne à cet égard montre selon lui que,
contrairement à ce qu’indique le syndicat requérant, les règles régissant les
actions revendicatives ne sont pas restrictives au point qu’il soit
excessivement difficile d’organiser des grèves.
III. LE DROIT INTERNATIONAL PERTINENT
26. Le syndicat requérant présente à l’appui de sa requête d’autres
instruments internationaux ainsi que l’interprétation qui en est donnée par
les organes compétents. Les éléments les plus pertinents et précis sont repris
ci-dessous.
A. Les conventions de l’Organisation internationale du travail
27. Alors qu’aucune des dispositions des conventions adoptées par
l’Organisation internationale du travail (OIT) ne prévoit expressément le
droit de grève, tant le comité de la liberté syndicale que la commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations (« la
commission d’experts ») ont au fil du temps élaboré un certain nombre de
principes sur le droit de grève fondés sur les articles 3 et 10 de la
Convention (no 87) de 1948 sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical (résumés dans le rapport intitulé « Donner un visage humain à la
mondialisation », Bureau international du travail, 2012, § 117). Le
Royaume-Uni a ratifié cette convention le 27 juin 1949.
1. Les exigences en matière de préavis
28. La commission d’experts s’est exprimée à plusieurs reprises sur les
exigences en matière de préavis d’action revendicative prévues au
Royaume-Uni. Le syndicat requérant cite la déclaration suivante, adoptée en
2008 :
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 11
« Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait pris note des
commentaires formulés par le Congrès des syndicats (Trades Union Congress (TUC))
selon lesquels les prescriptions en matière d’avis, nécessaires pour qu’une grève
bénéficie de la protection de la loi, étaient excessivement lourdes. La commission
note, selon le gouvernement, que plusieurs mesures ont déjà été prises pour simplifier
les articles 226-235 de la TULRA et 104-109 de l’ordonnance de 1995 ; par ailleurs,
et dans le cadre d’un plan publié en décembre 2006 pour simplifier les dispositions de
la loi sur l’emploi, le gouvernement invite explicitement les syndicats à formuler des
propositions visant à simplifier davantage la loi sur les syndicats. Depuis lors, le
gouvernement a organisé des discussions avec le TUC pour examiner ses propositions
visant à simplifier les dispositions de la loi sur les votes et les avis de grève. Ces
discussions sont en cours. La commission note que, dans ses derniers commentaires,
le TUC signale qu’aucun progrès n’a été enregistré sur la voie de cette réforme. La
commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport tout
progrès réalisé à cet égard. »1
29. Plus récemment, dans une demande directement adressée au
gouvernement britannique, la commission d’experts a déclaré :
« Dans ses précédents commentaires, la commission avait pris note des
commentaires formulés par le TUC selon lesquels les prescriptions en matière d’avis,
nécessaires pour qu’une grève bénéficie de la protection de la loi, étaient
excessivement lourdes. La commission avait prié le gouvernement de continuer à
fournir des informations sur tout fait nouveau survenu à ce propos ainsi que tous
rapports ou statistiques pertinents sur l’application pratique et les effets dans la
pratique de ces prescriptions. La commission prend note de l’indication du
gouvernement selon laquelle, dans le cas RMT v. Serco et Aslef v. London Midland
[2011] EWCA 226, la Cour d’appel a cassé les injonctions qu’avaient obtenues Serco
et « London Midland Railway » contre les deux principaux syndicats nationaux du
transport, RMT et ASLEF. Dans les deux cas, ces injonctions avaient été obtenues en
invoquant les infractions commises par ces syndicats contre les procédures de
notification et de scrutin obligatoire. Ce cas est le dernier d’une série qui consistait à
évaluer la portée des obligations techniques des syndicats qui sont tenus de veiller à ce
qu’un processus de scrutin équitable soit respecté. S’agissant de la décision qu’il a
rendue dans l’affaire RMT v. Serco, la Cour d’appel a apporté des précisions
essentielles qui font que, à l’avenir, il sera probablement plus difficile à des
employeurs d’obtenir des injonctions visant à empêcher une grève pour cause de nonrespect
des prescriptions en matière de notification et d’organisation d’un scrutin. Une
décision de Cour d’appel fait autorité sur toutes les juridictions inférieures. Par la
suite, dans l’affaire Balfour Beatty v. Unite [2012] EWHC 267 [QB], la Cour d’appel
a débouté Balfour Beatty en invoquant la jurisprudence Serco et la nécessité de
trouver un juste équilibre entre la recherche de la légitimité démocratique et le fait
d’imposer des exigences irréalistes aux syndicats et à leurs responsables. La
commission note que, bien qu’il se félicite vivement de ces deux décisions, le TUC
considère qu’elles ne répondent pas complètement aux problèmes qui se posent en
application de la législation sur lesquels il a attiré l’attention et que la législation
continue à imposer des exigences intolérables aux organisations syndicales. La
commission prend note avec intérêt de ces éléments nouveaux et prie le
gouvernement de faire connaître ses commentaires à propos des préoccupations
dont le TUC fait état. »2
1. En gras dans l’original.
2. En gras dans l’original.
12 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
2. Les exigences en matière d’action revendicative secondaire
30. La commission d’experts a exprimé le point de vue suivant
(« Donner un visage humain à la mondialisation », rapport précité, § 125) :
« En ce qui concerne les grèves dites « de solidarité », la commission considère
qu’une interdiction générale de cette forme de grève risquerait d’être abusive – en
particulier dans le contexte de la mondialisation marquée par une interdépendance
croissante et par l’internationalisation de la production – et que les travailleurs
devraient pouvoir exercer de telles actions pour autant que la grève initiale qu’ils
soutiennent soit elle-même légale. »
31. Le comité de la liberté syndicale considère lui aussi que cette forme
d’action revendicative est protégée par le droit international du travail :
« 534. Une interdiction générale des grèves de solidarité risque d’être abusive et les
travailleurs devraient pouvoir avoir recours à de tels mouvements, pour autant que la
grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légitime. »
« 538. L’interdiction des grèves non liées à un conflit collectif auquel les
travailleurs ou le syndicat seraient parties est contraire aux principes de la liberté
syndicale. »
(« La liberté syndicale », Recueil de décisions et de principes du comité
de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT, Cinquième
édition (révisée), Bureau international du travail, 2006, §§ 534 et 538)
32. Dans ses considérations sur le respect par le Royaume-Uni de la
Convention no 87, la commission d’experts a critiqué à maintes reprises le
fait que les actions secondaires y sont illégales. La première de ces critiques
se trouve dans l’observation de 19893 relative au Royaume-Uni :
« La commission relève qu’en common law pratiquement toutes les formes de grève
ou d’autres moyens de pression sont considérés comme des actions illégales sur le
plan civil. Cela signifie que les travailleurs et les syndicats qui prennent part à de
telles actions s’exposent à des poursuites en dommages-intérêts du fait des
employeurs (ou d’autres parties) qui en subissent un préjudice et (ce qui est le plus
important sur le plan pratique) qu’ils peuvent se voir interdire la commission de ces
actes « illicites » au moyen d’injonctions (provisoires ou permanentes). De l’avis de la
commission, le fait que des parties puissent exercer sans aucune restriction de tels
recours nie aux travailleurs le droit de faire grève ou d’exercer d’autres moyens de
pression afin de protéger et de promouvoir leur[s] intérêts économiques et sociaux.
Par conséquent, il est de la plus haute importance que les travailleurs et leurs
syndicats puissent bénéficier d’une certaine protection contre les incidences de la
responsabilité civile. Cet impératif est consacré dans la législation depuis 1906, sous
la forme d’une série « d’immunités » (ou, ce qui serait plus exact, de « protections »)
contre les poursuites en responsabilité quasi délictuelle, accordées aux syndicats, à
leurs membres et à leurs administrateurs. Ces « immunités » sont contenues
actuellement dans la loi de 1974 sur les syndicats et les relations professionnelles.
Or, la portée de ces protections a été réduite à plusieurs égards depuis 1980. La
commission observe par exemple que l’article 15 de la loi de 1974 a été modifié de
3. À l’époque, les actions secondaires faisaient seulement l’objet de restrictions mais
n’étaient pas interdites.
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 13
façon à limiter le droit de placer des piquets de grève, qui ne peut être exercé que sur
le lieu d’emploi d’un travailleur ou, dans le cas d’un représentant syndical, que sur le
lieu de travail des travailleurs syndiqués concernés ; par ailleurs, l’article 17 de la loi
de 1980 abolit la protection à l’égard des « actions secondaires », expression
désignant les actions syndicales visant un employeur qui n’est pas directement partie à
un conflit de travail. En outre, la définition de l’expression « conflit de travail » à
l’article 29 de la loi de 1974 a été restreinte de façon à désigner seulement les conflits
entre les travailleurs et leur employeur propre, plutôt que les conflits « entre les
employeurs et les travailleurs » ou « entre travailleurs », comme c’était le cas
auparavant.
L’effet combiné de ces dispositions, semble-t-il, est qu’il est pratiquement
impossible aux travailleurs et aux syndicats de participer légalement à quelque forme
de boycott ou d’action de « solidarité » contre des parties qui ne sont pas directement
concernées par un différend. La commission ne s’est jamais prononcée sur le recours
au boycott en tant que modalité du droit de grève. Toutefois, elle est d’avis que,
lorsqu’un boycott a directement trait aux intérêts économiques et sociaux des
travailleurs concernés par le différend principal, par l’action secondaire, ou les deux,
et si le différend principal et l’action secondaire ne sont pas eux-mêmes illégaux,
pareil boycott devrait alors être assimilé à un exercice légitime du droit de grève.
Cette assertion est manifestement compatible avec l’approche adoptée par la
commission à l’égard des « grèves de solidarité ».
Il semble qu’on ait recours de plus en plus fréquemment à ce type de mouvement
(c’est-à-dire les grèves de solidarité) en raison de la structure ou de la concentration
des entreprises ou de la localisation des centres de travail dans les différentes régions
du monde. La commission estime à ce propos qu’une interdiction générale des grèves
de solidarité risquerait d’être abusive et que les travailleurs devraient pouvoir avoir
recours à de tels mouvements pour autant que la grève initiale qu’ils soutiennent soit
elle-même légale. »
33. Il apparaît que la commission d’experts n’a pas adopté de position
définitive sur l’interdiction avant son observation de 1995 au sujet du
Royaume-Uni, exprimée en ces termes :
« La commission appelle l’attention du gouvernement sur le paragraphe 168 de son
« Étude d’ensemble sur la liberté syndicale et la négociation collective de 1994 » où
elle relève qu’une interdiction générale des grèves de solidarité risquerait d’être
abusive et que les travailleurs devraient pouvoir exercer de telles actions pour autant
que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même légale. La levée de l’immunité
exposerait ce type d’action directe à des recours en responsabilité civile et
constituerait, par conséquent, un obstacle sérieux au droit des travailleurs d’organiser
des grèves de solidarité. »
Elle a depuis confirmé ce point de vue, déclarant dans son examen de la
situation le plus récent (observation de 2012, Rapport de la commission
d’experts à la Conférence internationale du travail, 102e session, 2013,
Rapport III (Partie 1A), pp. 168-169) :
« Protection par rapport à la responsabilité civile en cas de grève ou autres actions
revendicatives (articles 223 et 224 de la loi TULRA). Dans ses commentaires
antérieurs, la commission avait noté que, selon le TUC, compte tenu de la nature
décentralisée du système des relations du travail, il est important pour les travailleurs
de pouvoir s’engager dans une action revendicative contre les employeurs qui sont
14 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
plus aptes à saper l’action syndicale au moyen de structures d’entreprise complexes,
ou en recourant au transfert du travail ou à l’essaimage. La commission avait en
général souligné la nécessité de protéger le droit des travailleurs d’engager une action
revendicative en relation avec des questions qui les concernent, même si, dans certains
cas, l’employeur direct peut ne pas être partie au différend, et de participer à des
grèves de solidarité à condition que la grève initiale qu’ils soutiennent soit elle-même
légale. La commission prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle :
1) sa position reste la même que celle présentée dans le rapport pour 2006-2008, vu
que les circonstances n’ont pas changé et qu’il n’a donc pas l’intention de modifier la
loi dans ce domaine ; et 2) cette question fait partie d’une affaire portée devant la
Cour européenne des droits de l’homme par l’Union nationale des travailleurs du
transport, du transport ferroviaire et maritime (RMT), et la Cour n’a pas encore rendu
de décision à ce propos. La commission rappelle la préoccupation qu’elle avait
soulevée précédemment sur le fait que la mondialisation de l’économie et la
délocalisation des centres de travail peuvent avoir un impact grave sur le droit des
organisations de travailleurs d’organiser leurs activités de manière à défendre de façon
effective les intérêts de leurs membres, dans le cas où une action revendicative légale
est définie de manière trop restrictive. Compte tenu de ce qui précède, la commission
prie à nouveau le gouvernement de réviser les articles 223 et 224 de la TULRA, en
consultant pleinement les partenaires sociaux, et de fournir dans son prochain
rapport de nouvelles informations sur l’issue de ces consultations. »4
B. La charte sociale européenne
34. Le droit de grève est protégé par l’article 6 § 4 de la Charte sociale
européenne, ratifiée par le Royaume-Uni le 11 juillet 1962. L’article 6 se lit
ainsi, en ses passages pertinents :
« En vue d’assurer l’exercice effectif du droit de négociation collective, les Parties
contractantes s’engagent :
(...)
et reconnaissent
4. le droit des travailleurs et des employeurs à des actions collectives en cas de
conflits d’intérêt, y compris le droit de grève, sous réserve des obligations qui
pourraient résulter des conventions collectives en vigueur. »
1. Les exigences en matière de préavis
35. Le Comité européen des droits sociaux (CEDS) s’est penché sur les
règles britanniques en matière de scrutins préalables à une grève et les a
jugées incompatibles avec le bon exercice du droit de grève. Dans son
examen le plus récent de la question (conclusions XIX-3, 2010), il a
déclaré :
« Dans ses conclusions précédentes (...), le Comité a considéré que l’obligation
d’informer l’employeur de la tenue d’un scrutin relatif à une action collective (même
dans les conditions simplifiées prévues par la version révisée (2004) de la loi sur les
relations professionnelles [Employment Relations Act – ERA]), en plus du préavis que
4. En gras et en italique dans l’original.
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 31
avec d’autres droits et libertés concurrents, cela ne peut aller jusqu’à porter
atteinte à l’essence même de ce droit.
74. En réponse aux observations de Liberty, le Gouvernement fait
remarquer que cette organisation traite de questions vastes et de fond qui ne
sont pas pertinentes en l’espèce. Tout en reconnaissant que la structure du
marché du travail a évolué au cours des deux dernières décennies, le
Gouvernement ne pense pas que cela ait globalement empêché les
travailleurs concernés de jouir de leurs droits syndicaux. La pratique
montrerait en fait que les syndicats sont capables d’agir efficacement en
pareilles circonstances : les trois exemples cités par Liberty illustreraient en
réalité comment l’intervention de syndicats a permis de résoudre avec
succès un conflit du travail (ces trois exemples étant le personnel des
sociétés de restauration d’une compagnie aérienne, les conducteurs
d’autobus de Londres pendant les Jeux olympiques de 2012, et les
chauffeurs de camions transportant du carburant). L’accusation selon
laquelle les travailleurs sont empêchés de mener des actions contre l’entité
qui fixe réellement leurs conditions de travail ne serait rien de plus qu’une
hypothèse en l’absence d’exemples à l’appui. Il n’y aurait pas non plus eu
de baisse du nombre de jours de travail perdus par an pour grève au cours
des vingt dernières années, ce qui tendrait à réfuter le point de vue de
Liberty selon lequel le droit interne restreindrait de plus en plus la liberté
syndicale. À cet égard, le Royaume-Uni serait proche de la moyenne de
l’Union européenne et de l’Organisation de coopération et de
développement économiques. Quant à l’affirmation selon laquelle le seuil
de vingt et un salariés créerait une lacune facile à exploiter par les
employeurs pour éviter de reconnaître un syndicat, le Gouvernement n’en
voit pas la pertinence en l’espèce. En admettant que cela soit le cas, il
existerait des garanties empêchant les employeurs de se soustraire à leurs
obligations légales. Seules les très petites entreprises seraient exclues, ce qui
s’expliquerait par des raisons de politique valables. Enfin, le Gouvernement
considère que la jurisprudence de la Cour n’apporte aucun soutien explicite
à la thèse selon laquelle le droit de mener des actions secondaires est un
aspect essentiel de la liberté d’association ou que l’interdiction de telles
actions ne peut se justifier au regard du paragraphe 2 de l’article 11.
2. Appréciation de la Cour
a) Applicabilité de l’article 11
75. La Cour doit avant tout déterminer si, comme le syndicat requérant
l’indique, les actions secondaires relèvent du champ d’application de
l’article 11 de la Convention ou si, comme le Gouvernement le soutient, ce
n’est pas le cas. Il s’agit d’une question nouvelle qui ne s’est encore jamais
posée directement dans les affaires dont elle a eu à connaître jusqu’à
présent.
32 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
76. Le Gouvernement propose une lecture littérale du deuxième membre
de phrase du paragraphe 1 de l’article 11. Bien qu’il soit possible
d’interpréter ainsi le libellé de cette disposition prise isolément, la Cour
rappelle que, conformément à l’article 31 § 1 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités, un traité doit être interprété suivant le sens ordinaire
à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son
objet et de son but. Par ailleurs, elle a souvent déclaré que la Convention ne
doit pas être interprétée dans le vide mais de manière à se concilier avec les
principes généraux du droit international. Il y a lieu de tenir compte,
conformément aux termes de l’article 31 § 3 c) de la Convention de Vienne,
de « toute règle pertinente de droit international applicable dans les relations
entre les parties », en particulier des règles relatives à la protection
internationale des droits de l’homme (X c. Lettonie [GC], no 27853/09, § 92,
CEDH 2013, et les autres références citées). À cet égard, il ressort
clairement des extraits reproduits plus haut (paragraphes 26-37 ci-dessus)
que les actions secondaires sont reconnues et protégées, car considérées
comme faisant partie de la liberté syndicale, par la Convention no 87 de
l’OIT et par la Charte sociale européenne. Même si le Gouvernement a
donné un sens étroit aux positions adoptées par les organes de contrôle mis
en place dans le cadre de ces deux instruments, ces organes ont critiqué
l’interdiction adoptée par le Royaume-Uni à l’égard des actions secondaires,
y voyant de la part des employeurs un risque d’abus qu’ils ont illustré à
l’aide d’exemples. Le Gouvernement a également mis en cause l’autorité
qu’il convient de reconnaître, au regard de la Convention, aux avis
interprétatifs adoptés par les comités d’experts chargés de contrôler le
respect de ces normes internationales spécialisées. La Cour y viendra plus
tard. Elle se bornera pour l’instant à citer le passage suivant de l’arrêt Demir
et Baykara c. Turquie ([GC], no 34503/97, § 85, CEDH 2008) :
« La Cour, quand elle définit le sens des termes et des notions figurant dans le texte
de la Convention, peut et doit tenir compte des éléments de droit international autres
que la Convention, des interprétations faites de ces éléments par les organes
compétents et de la pratique des États européens reflétant leurs valeurs communes.
(...) »
Il ne serait pas cohérent avec cette méthode que la Cour adopte au titre
de l’article 11 une interprétation de la portée de la liberté syndicale
beaucoup plus étroite que celle qui prévaut en droit international. En outre,
de nombreux pays d’Europe partagent cette conception large de la liberté
syndicale puisqu’ils admettent depuis longtemps que les grèves secondaires
sont une forme légale d’action syndicale.
77. Il se peut que, de par sa nature, une action revendicative secondaire
soit un aspect accessoire, et non essentiel, de la liberté syndicale. La Cour y
reviendra à la prochaine étape de son analyse. Néanmoins, force est de
considérer que le fait pour un syndicat de mener contre un employeur une
action revendicative secondaire, y compris une grève, dans le cadre d’un
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 33
conflit opposant des membres de ce syndicat et un autre employeur doit
passer pour un aspect des activités syndicales relevant de l’article 11.
78. Dès lors, la Cour conclut que le souhait du syndicat requérant
d’organiser une action secondaire pour soutenir les salariés d’Hydrex doit
être considéré comme la volonté de sa part d’exercer son droit à la liberté
d’association garanti par l’article 11 § 1 de la Convention sans être entravé
par une restriction prévue en droit interne. Il s’ensuit que l’interdiction
légale des actions secondaires telle qu’appliquée dans l’exemple invoqué
par le syndicat requérant s’analyse en une ingérence dans l’exercice par
celui-ci de ses droits protégés par cette disposition. Pour être compatible
avec le paragraphe 2 de l’article 11, cette ingérence doit être « prévue par la
loi », viser un ou plusieurs buts légitimes et être « nécessaire, dans une
société démocratique » pour atteindre ce ou ces buts.
b) Sur le point de savoir si l’ingérence était prévue par la loi et légitime
79. Aucune des parties ne conteste que l’ingérence en question était
prévue par la loi. C’est aussi l’avis de la Cour.
80. Par ailleurs, le syndicat requérant considère que l’ingérence ne visait
aucun des buts légitimes cités à l’article 11 § 2. En effet, elle n’avait selon
lui manifestement pas trait à la sécurité nationale ou à la sûreté publique, à
la défense de l’ordre et à la prévention du crime, pas plus qu’à la protection
de la santé ou de la morale. Quant au dernier des buts légitimes cités, à
savoir « la protection des droits et libertés d’autrui », le syndicat requérant
affirme qu’il ne serait pas logique de restreindre le droit de grève à cause de
son impact éventuel sur l’employeur puisque, pour lui, le but même d’une
grève est d’avoir un fort impact sur l’employeur afin de l’inciter à accéder
aux demandes des travailleurs. À son sens, ce serait une erreur de permettre
que cet argument serve à justifier une restriction au droit de grève. C’est
pourquoi il invite la Cour à revenir sur le raisonnement adopté par elle à cet
égard dans l’affaire UNISON c. Royaume-Uni ((déc.), no 53574/99, CEDH
2002-I), où elle a admis que la restriction au droit de grève concernait les
« droits d’autrui », en l’occurrence l’employeur. Le syndicat requérant
pense qu’il ne faut pas que les intérêts économiques de l’employeur
l’emportent sur les droits de l’homme dans le chef des salariés. Si tel était le
cas, cela irait pour lui à l’encontre de la position du CEDS, par exemple, qui
s’oppose au principe de proportionnalité entre une action de grève et les
conséquences de celle-ci sur les intérêts de l’employeur. Le syndicat
requérant pense également que la décision UNISON se concilie mal avec
l’arrêt antérieur Gustafsson c. Suède (25 avril 1996, Recueil des arrêts et
décisions 1996-II), où il rappelle que la Cour n’a pas examiné le grief selon
lequel le boycott par le syndicat des affaires du requérant constituait une
atteinte à ses droits garantis par l’article 1 du Protocole no 1, et n’a pas non
plus admis que l’impact sur ses affaires, bien qu’il y ait eu un préjudice
économique considérable, ait fait naître pour l’État l’obligation positive de
34 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
lui venir en aide. Selon lui, la Cour devrait au contraire adopter une
approche stricte comme elle l’a fait dans deux affaires de sanctions dirigées
contre des salariés du secteur public qui avaient participé à une grève d’un
jour (Karaçay c. Turquie, no 6615/03, 27 mars 2007, et Kaya et Seyhan
c. Turquie, no 30946/04, 15 septembre 2009). À ses dires, dans ces deux
affaires, la Cour n’avait pas été convaincue par les arguments voulant que
l’ingérence eût visé des buts légitimes, bien qu’elle eût en fin de compte
laissé la question ouverte au motif qu’elle avait conclu par ailleurs que
l’ingérence litigieuse n’était pas « nécessaire dans une société
démocratique ».
81. Le Gouvernement plaide pour sa part que l’interdiction visait à
protéger les droits et libertés d’autrui, et avant tout ceux des personnes non
concernées par le conflit du travail en cause. Eu égard aux effets
potentiellement très étendus et incontrôlables des actions secondaires sur les
tiers, il serait manifestement légitime de protéger ces derniers, ce que le
Parlement aurait cherché à faire en adoptant cette interdiction. Le
Gouvernement ajoute que l’on peut aisément imaginer comment une action
secondaire peut menacer la jouissance de droits protégés par la Convention
tel que le droit de gagner sa vie.
82. La Cour considère que la présente espèce se distingue de la décision
UNISON, précitée. Celle-ci portait sur une action de grève primaire et le
syndicat requérant, un syndicat, se plaignait d’avoir été empêché de mener
une action revendicative pour défendre les intérêts futurs de ses membres,
dans un contexte de privatisation imminente des services hospitaliers. Au
cours de la procédure interne, la Cour d’appel avait estimé que l’impact de
cette grève sur le public était sans rapport avec les questions juridiques qui
se posaient. La Cour a elle-même adopté ce point de vue, jugeant ainsi que
la « protection des droits et libertés d’autrui » ne recouvrait en l’occurrence
que les droits de l’employeur. Or l’espèce se distingue de cette affaire en ce
qu’elle concerne une action secondaire. Comme le Gouvernement l’a fait
valoir, une action secondaire est par nature susceptible d’avoir des
ramifications beaucoup plus vastes qu’une action primaire et peut
éventuellement empiéter sur les droits de personnes étrangères au conflit du
travail, provoquer de grosses perturbations économiques et affecter les
services rendus au public. Dès lors, la Cour est convaincue que, en
interdisant les actions secondaires, le Parlement visait un but légitime, à
savoir la protection des droits et libertés d’autrui, étant entendu que le terme
« autrui » ne désigne pas uniquement l’employeur pris dans un conflit du
travail.
c) Sur le point de savoir si l’ingérence était nécessaire dans une société
démocratique
83. Il reste à déterminer si l’interdiction légale des actions secondaires,
pour autant qu’elle a eu des répercussions sur la capacité du syndicat
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 35
requérant à protéger les intérêts de ses membres travaillant pour Hydrex,
peut passer pour « nécessaire dans une société démocratique ». Pour qu’elle
puisse être considérée comme telle, il faut qu’il soit démontré qu’elle
répond à un « besoin social impérieux », que les motifs invoqués par les
autorités nationales pour la justifier sont pertinents et suffisants et qu’elle
est proportionnée au but légitime visé.
84. La Cour va commencer par examiner l’argument du syndicat
requérant selon lequel le droit de faire grève doit passer pour constituer un
aspect essentiel de la liberté syndicale garantie par l’article 11, en sorte que
le restreindre porterait selon lui atteinte à la substance même de la liberté
d’association. Elle rappelle avoir déjà statué sur un certain nombre
d’affaires où elle a conclu que des restrictions touchant aux actions
revendicatives avaient emporté violation de l’article 11 (voir, par exemple,
Karaçay, précité, Dilek et autres c. Turquie, nos 74611/01, 26876/02 et
27628/02, 17 juillet 2007, Urcan et autres c. Turquie, nos 23018/04 et
10 autres, 17 juillet 2008, et Enerji Yapı-Yol Sen c. Turquie, no 68959/01,
21 avril 2009). Le syndicat requérant accorde beaucoup d’importance au
dernier de ces arrêts, relevant que le droit de grève y est reconnu comme le
« corollaire indissociable » du droit d’association syndicale (Enerji Yapı-Yol
Sen, précité, § 24). Il y a lieu toutefois de noter que la Cour déclarait dans
cet arrêt que le droit de grève était reconnu comme tel par les organes de
contrôle de l’OIT et qu’elle n’entendait pas faire évoluer sa propre
interprétation de l’article 11 en conférant un statut privilégié au droit de
grève. De manière plus générale, les arrêts susmentionnés montrent que le
droit de grève est clairement protégé par l’article 11. La Cour ne voit donc
nullement en l’espèce la nécessité de rechercher si les actions revendicatives
doivent désormais se voir reconnues comme un élément essentiel du droit
garanti par l’article 11.
85. Les circonstances de la présente cause révèlent que le syndicat
requérant a pu exercer deux des aspects de la liberté d’association qui ont
été qualifiés d’essentiels, à savoir le droit pour un syndicat de chercher à
convaincre l’employeur d’entendre ce qu’il a à dire au nom de ses membres
et le droit de prendre part à une négociation collective. La grève menée par
les membres du syndicat travaillant chez Hydrex s’inscrivait dans ce cadre
et, même si elle n’a pas atteint son objectif, cette action n’a pas été vaine
puisqu’elle a conduit la société à revoir sa proposition, que le syndicat a
ensuite recommandée à ses membres. Bien que le Gouvernement ait critiqué
le syndicat requérant pour avoir été favorable à l’époque à la proposition
révisée puis avoir changé d’avis au cours de la présente procédure, la Cour
reconnaît que le syndicat requérant était obligé de respecter le vote négatif
de ses membres au sujet de cette proposition. Cependant, le fait que la
négociation et l’action collectives, y compris la grève dirigée contre
l’employeur des membres du syndicat pris dans le conflit, n’aient pas
conduit au résultat souhaité par le syndicat requérant et ses membres ne
36 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
signifie pas que l’exercice par eux des droits énoncés à l’article 11 ait été
illusoire. Le droit de négociation collective n’a pas été interprété comme
englobant un « droit » à une convention collective (voir à ce sujet l’arrêt
Demir et Baykara, précité, § 158, où la Cour a fait remarquer que l’absence
de toute obligation pour les autorités de conclure une convention collective
ne faisait pas partie de l’objet de l’affaire). Le droit de grève n’implique pas
non plus le droit d’obtenir gain de cause. Comme la Cour l’a souvent
déclaré, ce qu’exige la Convention, c’est que la législation nationale
permette aux syndicats, selon des modalités conformes à l’article 11, de
lutter pour défendre les intérêts de leurs membres (Demir et Baykara,
précité, § 141, et, plus récemment, Sindicatul « Păstorul cel Bun »
c. Roumanie [GC], no 2330/09, § 134, CEDH 2013). Or, en l’espèce, le
syndicat requérant et ses membres parties au conflit ont été largement en
mesure d’agir ainsi.
86. Dans de précédentes affaires concernant des syndicats, la Cour a
déclaré qu’il fallait tenir compte du juste équilibre à ménager entre les
intérêts concurrents de l’individu et de la collectivité. Étant donné que
parvenir à un juste équilibre entre les intérêts des salariés et ceux des
employeurs fait entrer en jeu des questions sensibles d’ordre social et
politique, il convient d’accorder aux États contractants une marge
d’appréciation quant à la manière d’assurer la liberté syndicale et la
possibilité pour les syndicats de protéger les intérêts professionnels de leurs
membres. Dans son examen le plus récent de la question, la Grande
Chambre a considéré, eu égard au fort degré de divergence entre les
systèmes nationaux dans le domaine concerné, qu’il fallait que les États
bénéficient d’une ample marge d’appréciation (Sindicatul « Păstorul cel
Bun », précité, § 133). Le syndicat requérant s’est beaucoup appuyé sur
l’arrêt Demir et Baykara, où la Cour a jugé que l’État défendeur ne devait
jouir que d’une marge d’appréciation limitée (arrêt précité, § 119). Or la
Cour fait observer que le passage en question figure dans une partie de
l’arrêt qui traitait d’une ingérence très importante dans l’exercice de la
liberté d’association et touchant au coeur même de celle-ci, puisqu’il
s’agissait de la dissolution d’un syndicat. On ne peut pas en déduire que la
marge d’appréciation des autorités nationales est réduite de manière
décisive et définitive lorsqu’elles réglementent, par un processus
démocratique normal, l’exercice de la liberté syndicale dans le cadre
économique et social du pays concerné. L’étendue de la marge
d’appréciation reste fonction des facteurs que la Cour a jugés pertinents
dans sa jurisprudence, notamment la nature et la portée de la restriction au
droit syndical en cause, le but visé par la restriction litigieuse et les droits et
intérêts concurrents des autres membres de la société qui risquent de pâtir de
l’exercice de ce droit s’il n’est pas limité. L’ampleur de la communauté de
vues entre les États membres du Conseil de l’Europe au sujet de la question
posée par l’affaire peut aussi constituer un élément pertinent, tout comme le
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 37
consensus international que peuvent le cas échéant révéler les instruments
internationaux applicables (Demir et Baykara, précité, § 85).
87. Si une restriction prévue par la loi touche au coeur même de l’activité
syndicale, il faut accorder une marge d’appréciation moins étendue au
législateur national et exiger une justification plus étoffée s’agissant de la
proportionnalité de l’ingérence qui en est résultée, pour protéger l’intérêt
général, dans l’exercice de la liberté syndicale. À l’inverse, si c’est un
aspect non pas fondamental mais secondaire ou accessoire de l’activité
syndicale qui est touché, la marge d’appréciation sera plus large et
l’ingérence, par nature, sera plus vraisemblablement proportionnée dans ses
conséquences sur l’exercice de la liberté syndicale.
88. La Cour considère que l’ingérence qu’il y a eu en l’espèce dans
l’exercice par le syndicat requérant de sa liberté syndicale n’a pas été aussi
importante que le syndicat requérant veut bien le dire, ni par sa nature ni par
son étendue. Comme les faits de la cause le montrent, le syndicat requérant
a pu mener une grève, même si elle n’a eu qu’une ampleur limitée et des
résultats limités. C’est son souhait d’étendre la grève en menaçant d’enrôler
ou en enrôlant des centaines de ses membres travaillant pour Jarvis, une
autre société nullement impliquée dans le conflit du travail en question, qui
a été mis en échec. La Cour note que le syndicat requérant est convaincu
qu’une action secondaire aurait permis de remporter la bataille. Or ce n’est
que pure conjecture, y compris s’agissant du résultat du vote qui aurait pu
être organisé sur la question, étant donné qu’il était clairement exclu de
mener une telle action. On ne peut pas dire que l’interdiction de l’action
secondaire ait porté atteinte à la substance même de la liberté d’association
du syndicat requérant. C’est pourquoi la présente espèce se distingue des
affaires mentionnées au paragraphe 84 ci-dessus, lesquelles concernaient
toutes des restrictions à une action revendicative « primaire » ou directe
menée par des salariés du secteur public. Il convient donc de reconnaître
aux autorités nationales la marge d’appréciation la plus large qu’il est
possible d’accorder dans le domaine de la réglementation, dans l’intérêt
public, des aspects secondaires de l’activité syndicale.
89. Quant au but de l’ingérence litigieuse, les extraits des actes des
débats parlementaires préalables à l’adoption de la loi de 1980 sur l’emploi
montrent clairement que le législateur avait l’intention de modifier
l’équilibre des relations entre les partenaires sociaux et de protéger l’intérêt
de l’économie au sens large en restreignant le droit de mener des actions
secondaires, alors très étendu. Une décennie plus tard, les autorités ont
considéré que, même avec ces limites, les actions secondaires entraînaient
un risque pour l’économie et pour les investissements étrangers dans
l’activité économique du pays. Elles ont estimé que, d’un point de vue
politique, limiter les actions revendicatives aux grèves primaires permettrait
de parvenir à un équilibre plus acceptable pour l’économie britannique. Le
Gouvernement a réaffirmé cette position au cours de la présente procédure.
38 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
À l’époque, cette analyse avait été vivement contestée, au sein du
Parlement, par l’opposition ; pour sa part, le syndicat requérant la rejette car
il considère qu’elle est motivée par une hostilité envers les syndicats au lieu
de reposer sur des preuves claires des nuisances directes susceptibles d’être
causées à l’économie. Quoi qu’il en soit, l’objet de la présente affaire est
indubitablement lié à la stratégie économique et sociale de l’État défendeur.
À cet égard, la Cour reconnaît d’ordinaire aux autorités nationales une
ample marge d’appréciation étant donné que, grâce à une connaissance
directe de leur société et de ses besoins, celles-ci, et en particulier les
parlements élus démocratiquement, se trouvent en principe mieux placés
que le juge international pour déterminer ce qui est d’utilité publique en
matière économique ou en matière sociale et quelles mesures législatives
sont les plus adaptées à la situation de leur pays pour la mise en oeuvre de la
politique sociale, économique ou industrielle choisie (voir, parmi beaucoup
d’autres, Stummer c. Autriche [GC], no 37452/02, § 89, CEDH 2011).
90. Certes, il existe des éléments qui militent en sens inverse s’agissant
des choix qui étaient ouverts au législateur britannique.
91. Premièrement, la question se pose de savoir si l’on peut dire qu’il
existe un consensus parmi les États européens en matière d’action
secondaire. Les données comparées fournies à la Cour montrent toute une
gamme de positions à cet égard, allant d’une attitude globalement
permissive dans des pays tels que la Grèce, la Finlande, la Norvège et la
Suède, à une absence de reconnaissance ou une interdiction dans d’autres
pays. Les autres États mentionnés plus haut (paragraphes 38-41 ci-dessus)
se situent entre ces deux extrêmes. Le Gouvernement a minimisé
l’importance de cette démarche comparative en mettant l’accent sur les
profondes différences structurelles et culturelles qui divisent les États
européens en matière de relations entre les partenaires sociaux. La Cour
admet que cette diversité existe, comme elle l’a reconnu dans d’autres
affaires portant sur les droits des syndicats (voir, par exemple, Sindicatul
« Păstorul cel Bun », précité, § 133, et Sørensen et Rasmussen c. Danemark
[GC], nos 52562/99 et 52620/99, § 58, CEDH 2006-I). Il n’en est pas moins
clair que, en interdisant totalement les actions secondaires, l’État défendeur
se situe à l’un des extrêmes et qu’il fait ainsi partie du petit groupe d’États
européens à avoir adopté une position aussi catégorique en la matière.
Cependant, la diversité de situations que révèlent les données comparées et
la place qu’occupe le Royaume-Uni à cet égard ne signifient pas en ellesmêmes
que les autorités nationales ont outrepassé leur marge d’appréciation
légitime en réglementant comme elles l’ont fait cet aspect de l’activité
syndicale.
92. Deuxièmement, la présente affaire se caractérise notamment par la
richesse des éléments de droit international disponibles. Le Royaume-Uni a
interdit les actions secondaires il y a plus de vingt ans et fait depuis lors
régulièrement l’objet de commentaires critiques de la part de la commission
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 39
d’experts de l’OIT et du CEDS. Le syndicat requérant a invoqué ces
éléments à l’appui de sa thèse. Le Gouvernement considère pour sa part que
ces critiques ne sont ni pertinentes vu la situation précise dénoncée en
l’espèce ni de toute façon significatives. La Cour va maintenant se pencher
sur la question.
93. Le Gouvernement conteste la pertinence en l’espèce des critiques
émanant de ces deux organes à cause de la manière dont elles sont
formulées, puisqu’elles portent sur des cas de figure très différents de celui
dénoncé par le syndicat requérant (paragraphes 33 et 37 ci-dessus).
94. Il considère que les avis du CEDS ne sont pas une source de droit
faisant autorité car cet organe, en dépit de l’indépendance et de l’expertise
de ses membres, n’a pas selon lui un statut judiciaire ou quasi judiciaire
mais a pour rôle de faire rapport au Comité des Ministres. La Cour fait
observer que la compétence du CEDS est définie dans le Protocole portant
amendement à la Charte sociale européenne (ou « Protocole de Turin »,
Série des traités européens no 142), à savoir « apprécie[r], d’un point de vue
juridique, la conformité des législations, réglementations et pratiques
nationales avec le contenu des obligations découlant de la Charte ». Il est
vrai que ce protocole n’est pas entré en vigueur car plusieurs États parties à
la Charte, dont le Royaume-Uni, ne l’ont pas ratifié. Cependant, la valeur
interprétative des avis du CEDS apparaît généralement admise par les États
et par le Comité des Ministres. Elle est en tout cas reconnue par la Cour, qui
a tenu compte à maintes reprises des interprétations de la Charte données
par le CEDS et des avis de celui-ci sur le respect par les États de diverses
dispositions de ce texte (voir, par exemple, Demir et Baykara, précité, et
Tüm Haber Sen et Çınar c. Turquie, no 28602/95, § 39, CEDH 2006-II,
affaire concernant un syndicat où la Cour a décrit le CEDS comme un
organe « particulièrement qualifié » dans ce domaine).
95. Quant à l’absence de recommandation adressée par le Comité des
Ministres au Royaume-Uni sur cette question, la Cour note premièrement
que la fonction confiée au Comité des Ministres dans le cadre du Protocole
de Turin consiste à adresser des recommandations aux États sur la base d’un
choix motivé par des considérations d’ordre social, économique ou autre et
que cet organe n’a pas pour rôle d’avaliser les conclusions adoptées par le
CEDS. Elle ajoute deuxièmement que le Comité gouvernemental de la
Charte sociale européenne a fait un premier pas sur la voie de l’adoption par
le Comité des Ministres d’une recommandation sur la question des actions
secondaires en adressant au Royaume-Uni un avertissement où il « appelle
instamment le Gouvernement à prendre toutes les mesures qui s’imposent
pour se conformer à la Charte » (Comité gouvernemental, rapport relatif aux
conclusions XIX-3 (2010), T-SG (2012)1 final, p. 61, § 263).
96. En ce qui concerne la commission d’experts de l’OIT, le
Gouvernement a formulé une observation analogue : cet organe selon lui
n’est pas formellement compétent pour donner des interprétations des
40 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
Conventions de l’OIT faisant autorité. Il attire l’attention de la Cour sur un
désaccord persistant au sein de l’OIT qui porterait précisément sur le statut
légal voire l’existence même d’un droit de faire grève. La commission
d’experts a récemment reconnu les limites de son rôle en déclarant que
« [ses] avis et recommandations (...) n’ont pas de force obligatoire dans le
contexte du processus de contrôle de l’OIT ou en dehors de l’OIT, sauf
lorsqu’un instrument international la leur donne expressément ou lorsque la
Cour suprême d’un pays le décide sans que ceci ne lui soit imposé » (avantpropos
au rapport de la commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations intitulé « La négociation collective dans la
fonction publique : un chemin à suivre », Conférence internationale du
travail, 102e session, 2013). Ce texte qualifie ensuite les interprétations de la
commission d’experts de « soft law » et se conclut ainsi :
« 8. En ce qui concerne l’interprétation des conventions de l’OIT et le rôle dévolu à
la Cour internationale de justice en la matière, la commission a précisé, dès 1990,
qu’aux termes de son mandat elle n’est pas en capacité de donner une interprétation
définitive des conventions, cette compétence étant confiée à la Cour internationale de
justice en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT. Elle a indiqué que,
néanmoins, pour remplir sa fonction qui consiste à déterminer si les prescriptions
d’une convention donnée sont respectées, elle se doit d’examiner le contenu et la
signification des dispositions de cette convention, d’en déterminer la portée juridique
et, le cas échéant, d’exprimer ses vues à ce sujet. La commission a ainsi soutenu que,
tant que ces vues ne sont pas contredites par la Cour internationale de justice, elles
doivent être réputées valables et communément admises. La commission considère
que l’acceptation de ces considérations était indispensable à l’existence même du
principe de légalité et, partant, de la sécurité juridique nécessaire au bon
fonctionnement de l’Organisation internationale du travail. »
97. La Cour ne pense pas que cette mise au point exige qu’elle
reconsidère le rôle de cet organe, qui est un rôle de référence et de guide
pour l’interprétation de certaines dispositions de la Convention (voir, de
manière générale, Demir et Baykara, précité, §§ 65-86). Alors que le
Gouvernement évoque des désaccords exprimés lors de la 101e Conférence
internationale du travail (2012), il ressort du compte rendu de cette
conférence que ces désaccords trouvaient leur origine dans le groupe
patronal et étaient confinés à celui-ci (compte rendu provisoire de la
101e session de la Conférence internationale du travail, 19(Rev.), §§ 82-90).
D’après ce compte rendu, les gouvernements qui ont pris la parole au cours
des débats ont déclaré que le droit de grève était « clairement établi et
largement accepté en tant que droit fondamental ». La représentante du
gouvernement norvégien a ajouté que son pays approuvait entièrement la
position de la commission d’experts selon laquelle le droit de grève était
protégé par la Convention no 87. En tout état de cause, le gouvernement
défendeur a reconnu dans le cadre de la présente procédure que le droit de
s’affilier à un syndicat énoncé à l’article 11 implique normalement la
capacité de faire grève (paragraphe 62 ci-dessus).
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 41
98. L’analyse précédente des avis interprétatifs émis par les organes
compétents instaurés au titre des instruments internationaux les plus
pertinents reflète la conclusion tirée des données comparées soumises à la
Cour, à savoir qu’avec son interdiction totale des actions revendicatives
secondaires, l’approche de l’État défendeur s’agissant de la réglementation
en la matière se situe parmi les plus restrictives et n’est pas conforme à la
tendance perceptible sur le plan international qui consiste à appeler à une
approche moins restrictive. L’importance qu’une telle conclusion est
susceptible de revêtir pour l’analyse de la Cour dans une affaire donnée est
exposée dans l’arrêt Demir et Baykara (précité, § 85) en ces termes :
« (...) Le consensus émergeant des instruments internationaux spécialisés et de la
pratique des États contractants peut constituer un élément pertinent lorsque la Cour
interprète les dispositions de la Convention dans des cas spécifiques. »
Cette déclaration de la Grande Chambre montre que l’examen effectué
par la Cour diffère de celui mené par les instances de contrôle de l’OIT et de
la Charte sociale européenne. Ces organes de contrôle internationaux
spécialisés ont une optique différente, comme le prouvent les termes plus
généraux qu’ils emploient pour analyser l’interdiction des actions
secondaires (paragraphes 33 et 37 ci-dessus). La Cour, pour sa part, a pour
tâche non pas d’examiner in abstracto la législation nationale pertinente,
mais de rechercher si la manière dont elle a concrètement été appliquée au
syndicat requérant a enfreint l’article 11 de la Convention (Von Hannover
c. Allemagne (no 2) [GC], nos 40660/08 et 60641/08, § 116, CEDH 2012, et
Kart c. Turquie [GC], no 8917/05, §§ 85-87, CEDH 2009). Le syndicat
requérant et les tiers intervenants ont exploré les effets possibles de
l’interdiction dans divers cas de figure allant jusqu’à l’interdiction de toute
forme d’action revendicative lorsque les travailleurs directement concernés
ne sont pas en mesure d’entreprendre une action primaire, ce qui,
contrairement à la situation en l’espèce, porte atteinte à la substance même
de la liberté syndicale. Ils ont aussi considéré que l’interdiction pouvait
permettre aux employeurs d’exploiter facilement la loi à leur avantage en
recourant à différents stratagèmes juridiques tels que la délocalisation des
centres de travail, le recours à la sous-traitance et l’adoption de structures
d’entreprise complexes pour transférer le travail à des entités juridiques
distinctes ou l’essaimage de sociétés. En bref, selon eux, les syndicats
pourraient dans ce cas se trouver sérieusement entravés dans l’exercice de
leurs activités normales et légitimes de protection des intérêts de leurs
membres. Or la Cour constate que l’interdiction légale n’a pas déployé des
effets négatifs aussi vastes dans le cas d’Hydrex. Elle précise que son
examen doit se limiter aux faits qui lui sont soumis dans une affaire donnée.
Dans ces conditions, elle considère que les appréciations négatives émanant
des organes de surveillance pertinents de l’OIT et de la Charte sociale
européenne ne sont pas d’un poids décisif s’agissant de déterminer si
l’interdiction légale des actions secondaires dans des circonstances telles
42 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
que celles dénoncées en l’espèce s’inscrivait dans le cadre des possibilités
que l’article 11 de la Convention offrait aux autorités nationales.
99. Le pouvoir d’appréciation des autorités nationales n’est toutefois pas
illimité mais va de pair avec un contrôle européen, la Cour ayant pour tâche
de se prononcer en dernier ressort sur le point de savoir si une restriction
particulière se concilie avec la liberté d’association garantie par l’article 11
(Vörður Ólafsson c. Islande, no 20161/06, § 76, CEDH 2010). Le
Gouvernement a plaidé l’existence d’un « besoin social impérieux » de
conserver l’interdiction légale des actions secondaires, et ce dans le but de
protéger l’économie domestique des perturbations provoquées par de telles
actions revendicatives qui, si celles-ci étaient autorisées, risqueraient
d’entraver la reprise économique dans le pays. Dans le domaine de la
politique économique et sociale, que l’on doit considérer comme englobant
la politique d’un pays dans le domaine des relations entre les partenaires
sociaux, la Cour respecte en principe la manière dont l’État conçoit les
impératifs de l’utilité publique, sauf si son jugement se révèle
« manifestement dépourvu de base raisonnable » (Carson et autres
c. Royaume-Uni [GC], no 42184/05, § 61, CEDH 2010). Par ailleurs, la
Cour a reconnu que lorsque des questions de politique générale sont en jeu,
sur lesquelles de profondes divergences peuvent raisonnablement exister
dans un État démocratique, il y a lieu d’accorder une « importance
particulière » au rôle du décideur national (voir dans le contexte de
l’article 10 de la Convention l’affaire MGN Limited c. Royaume-Uni,
no 39401/04, § 200, 18 janvier 2011, laquelle renvoie à l’arrêt Hatton et
autres c. Royaume-Uni [GC], no 36022/97, § 97, CEDH 2003-VIII, où la
Cour a évoqué la « légitimité démocratique directe » dont bénéficie le
législateur). L’interdiction des actions secondaires est demeurée intacte
pendant plus de vingt ans en dépit de deux changements de gouvernement.
Cela dénote un consensus démocratique en faveur de cette mesure et une
acceptation des raisons qui la motivent allant quasiment d’un bord à l’autre
de l’échiquier politique au Royaume-Uni. Voilà qui amène la Cour à
conclure que les autorités législatives du pays ont déterminé ce qui est
d’utilité publique en matière de relations entre les partenaires sociaux, avec
leur contexte politique, social et économique souvent chargé, en s’appuyant
sur des motifs qui étaient à la fois pertinents et suffisants au regard de
l’article 11.
100. La Cour doit aussi rechercher si la restriction litigieuse est ou non
contraire au principe de proportionnalité. Le syndicat requérant plaide que
oui au motif qu’elle présente un caractère absolu qui exclut toute mise en
balance des droits et intérêts concurrents en jeu et interdit toute
différenciation en fonction des situations. Le Gouvernement défend la
décision du législateur de préférer une règle uniforme à un examen au cas
par cas et soutient qu’une approche moins restrictive serait impossible à
mettre en oeuvre et inefficace. Pour lui, les différences que ne peuvent
ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI 43
manquer de présenter les cas individuels similaires au cas d’espèce,
potentiellement nombreux, ne sont pas de nature à remettre en cause
l’équilibre global trouvé par le Parlement.
101. La Cour relève que ce n’est pas parce que la loi sur laquelle se
fonde une ingérence revêt un caractère général qu’elle est en soi contraire au
principe de proportionnalité. Comme elle l’a rappelé récemment, un État
peut, tout en respectant la Convention, adopter des mesures législatives
générales s’appliquant à des situations prédéfinies sans qu’il soit prévu de
procéder à des appréciations individuelles des circonstances forcément
différentes et peut-être complexes de chaque cas tombant sous le coup de
cette législation (Animal Defenders International c. Royaume-Uni [GC],
no 48876/08, § 107, CEDH 2013, et les nombreuses références citées
relatives à d’autres dispositions de la Convention et du Protocole no 1). Cela
ne veut pas dire que les circonstances particulières de chaque cas individuel
sont sans importance aux fins de l’analyse qu’elle effectue de la
proportionnalité. De fait, elles permettent de se rendre compte des
répercussions pratiques de la mesure générale et sont donc pertinentes pour
l’appréciation de sa proportionnalité (ibidem, § 108). Ainsi qu’elle l’a déjà
déclaré, l’ingérence dans l’exercice par le syndicat requérant de la liberté
d’association dans l’exemple d’Hydrex qu’il invoque ne saurait être
qualifiée de particulièrement forte.
102. Le risque afférent à un assouplissement de l’interdiction constitue
une considération pertinente, qu’il appartient avant tout à l’État d’apprécier
(ibidem). À cet égard, le syndicat requérant a argué qu’il aurait limité son
action à une grève secondaire auprès de Jarvis et qu’il n’y aurait eu aucun
risque de contagion. Or cela n’est que pure conjecture. Comme le montrent
les éléments du dossier, le Parlement a été conduit à réduire la possibilité
jusqu’alors très étendue de mener des actions secondaires précisément en
raison de leur propension, avant 1980, à s’étendre largement et avec rapidité
au-delà du conflit professionnel initial. C’est à cette situation que, selon le
syndicat requérant, le Royaume-Uni devrait revenir pour respecter les
exigences de l’article 11.
103. Comme la Cour le reconnaît dans sa jurisprudence, il est légitime
que les autorités se fondent sur des considérations de faisabilité ainsi que
sur les difficultés pratiques – qui, pour certains régimes législatifs, peuvent
être de grande ampleur – auxquelles une approche au cas par cas est
susceptible de donner lieu, comme les risques d’incertitude, de litiges
interminables, de dépenses publiques excessives lésant le contribuable ou
d’arbitraire (ibidem). À cet égard, il convient de rappeler que pendant une
décennie, de 1980 à 1990, le Royaume-Uni a pu fonctionner avec une
restriction sur les actions secondaires plus légère (paragraphes 23-24 cidessus).
Le Gouvernement n’a pas avancé que ce régime législatif présentait
les difficultés évoquées ci-dessus ou que celles-ci étaient à l’origine de
l’interdiction litigieuse. Le syndicat requérant n’a pas formulé de
44 ARRÊT NATIONAL UNION OF RAIL, MARITIME AND TRANSPORT
WORKERS c. ROYAUME-UNI
commentaires détaillés sur la situation juridique au cours de cette période. Il
a estimé que la question de sa compatibilité avec la Convention présentait
un « intérêt purement théorique », tout en ajoutant que, si cet argument était
pertinent, il plaiderait que cette restriction n’était pas acceptable. La Cour
observe que, si l’histoire législative du Royaume-Uni montre qu’il pouvait
exister des solutions autres qu’une interdiction totale, cela n’est pas
déterminant pour trancher la question. En effet, la question n’est pas de
savoir s’il aurait fallu adopter des règles moins restrictives ni même de
savoir si l’État peut prouver que, sans pareille interdiction, le but légitime
visé n’aurait pas pu être atteint. Il s’agit bien plutôt de déterminer si,
lorsqu’il a adopté la mesure générale litigieuse, le législateur a agi dans le
cadre de sa marge d’appréciation (Animal Defenders International, précité,
§ 110) – que, pour les raisons indiquées ci-dessus, la Cour a qualifiée de
large – et si, globalement, il est parvenu à un juste équilibre. Bien que le
syndicat requérant ait avancé de puissants arguments tenant à la solidarité et
à l’efficacité de l’action syndicale, la Cour n’est pas convaincue que les
raisons politiques et factuelles sur lesquelles le Parlement britannique s’est
appuyé n’étaient pas suffisantes pour considérer l’interdiction des actions
secondaires litigieuse comme « nécessaire dans une société démocratique ».
104. Dans ces conditions, la Cour conclut que les circonstances
spécifiques contestées en l’espèce ne révèlent pas l’existence d’une
ingérence injustifiée dans l’exercice par le syndicat requérant du droit à la
liberté d’association, l’intéressé ayant pu faire usage de ses aspects
essentiels lorsqu’il a représenté ses membres, négocié avec l’employeur au
nom de ceux de ses membres en conflit avec celui-ci et organisé une grève
de ces membres sur leur lieu de travail (paragraphes 15-16 ci-dessus). Dans
ce domaine de politique législative reconnu comme sensible, l’État
défendeur bénéficie d’une marge d’appréciation suffisamment large pour
englober l’interdiction légale en vigueur sur les actions secondaires étant
donné qu’il n’y a aucun motif en l’espèce de considérer que la mise en
oeuvre de cette interdiction dans le cadre de la situation dans l’entreprise
Hydrex a emporté une restriction disproportionnée au droit que le syndicat
requérant tire de l’article 11.
105. Dès lors, la Cour conclut qu’il n’y a pas eu en l’espèce violation de
l’article 11 de la Convention.
106. Pour finir, la Cour souligne que sa compétence se limite à la
Convention. Elle n’a pas compétence pour se prononcer sur le respect par
l’État défendeur des textes pertinents de l’OIT ou de la Charte sociale
européenne, cette dernière renfermant des normes plus spécifiques et
exigeantes en matière d’action revendicative. Par ailleurs, la conclusion
rendue en l’espèce ne doit pas être interprétée comme remettant en cause
l’analyse effectuée sur la base de ces normes et de leurs buts par la
commission d’experts de l’OIT et par le CEDS.
Document no 320
CEDH, Ognevenko c. Russie (2018), paragr. 20-23 et
54-59

TROISIÈME SECTION
AFFAIRE OGNEVENKO c. RUSSIE
(Demande n° 44873/09)
ARRÊT STRASBOURG
20 novembre 2018
FINAL
06/05/2019
Le présent arrêt est devenu définitif en vertu de l'article 44 § 2 de la Convention. Il
peut faire l'objet d'une révision rédactionnelle.
[Traduction non officielle]
OGNEVENKO c. RUSSIE ARRÊT
dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale ou de l'ordre
public ou pour la protection des droits et libertés d'autrui ;
...
(d) le droit de grève, à condition qu'il soit exercé conformément à la législation du
pays concerné.
2. Le présent article ne fait pas obstacle à l'imposition de restrictions légales à
l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de
l'administration de l'Etat...".
B. Matériel de l'Organisation internationale du travail ("OIT")
1. Principes de l'OIT concernant le droit de grève
20. Dans son Recueil de décisions et de principes (cinquième édition
(révisée), 2006), le Comité de la liberté syndicale de l'OIT ("le CFA") a
déclaré ce qui suit dans la section intitulée "Droit de grève" (les citations cidessous
sont fournies sans les références à des cas spécifiques) :
"541. Le Comité a déclaré à maintes reprises que les grèves au niveau national sont
légitimes dans la mesure où elles ont des objectifs économiques et sociaux et non des
objectifs purement politiques ; l'interdiction des grèves ne pourrait être acceptable que
dans le cas des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l'Etat ou des travailleurs
des services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire des services dont
l'interruption pourrait mettre en danger la vie, la sécurité personnelle ou la santé de
l'ensemble ou d'une partie de la population.
...
587. Les services suivants ne constituent pas des services essentiels au sens strict du terme :
...
– le transport en général ;
...
– les services ferroviaires ;
...
592. En liant les restrictions aux actions de grève à l'interférence avec le commerce,
un large éventail d'actions de grève légitimes pourrait être entravé. Si l'impact
économique des actions syndicales et leur effet sur les échanges et le commerce peuvent
être regrettables, ces conséquences en elles-mêmes ne rendent pas un service
"essentiel", et le droit de grève doit donc être maintenu.
...
595. Lorsque le droit de grève est limité ou interdit dans certaines entreprises ou
certains services essentiels, une protection adéquate doit être accordée aux travailleurs
pour compenser la limitation ainsi apportée à leur liberté d'action en ce qui concerne
les conflits affectant ces entreprises et ces services.
596. En ce qui concerne la nature des garanties appropriées dans les cas où des
restrictions sont apportées au droit de grève dans les services essentiels et les services
publics ... devraient être accompagnées d'une conciliation et d'un arbitrage adéquats,
impartiaux et rapides.
[Traduction non officielle]
OGNEVENKO c. RUSSIE ARRÊT 9
des procédures auxquelles les parties concernées peuvent participer à tous les stades et
dans lesquelles les sentences, une fois rendues, sont pleinement et rapidement mises en
oeuvre.
...
621. Le transport de passagers et de marchandises n'est pas un service essentiel au
sens strict du terme, mais il s'agit d'un service public de première importance où
l'exigence d'un service minimum en cas de grève peut ê t r e justifiée.
...
628. La responsabilité de déclarer une grève illégale ne doit pas incomber au
gouvernement, mais à un organisme indépendant qui a la confiance des parties
concernées.
...
666. Le recours à des mesures extrêmement graves, telles que le licenciement de
travailleurs pour avoir participé à une grève et le refus de les réembaucher, implique un
risque sérieux d'abus et constitue une violation de la liberté d'association".
2. Jurisprudence pertinente concernant la Russie
21. Dans son rapport n° 333, mars 2004, concernant le cas n° 2251, le
CFA a conclu ce qui suit à l'égard de la Russie :
"993. ... le comité rappelle les cas dans lesquels le droit de grève peut être restreint,
voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui
exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au
sens strict du terme, c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans
l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la
personne; et 3) dans une situation de crise nationale aiguë. [Voir Recueil, op. cit.,
paragr. 526-527.] En ce qui concerne l’article 413(1)(b), au vu des inquiétudes
formulées par l’organisation plaignante, le comité demande au gouvernement
d’indiquer quels sont les services et entreprises qui sont directement impliqués dans des
types de production ou de matériel extrêmement dangereux et dans lesquels le droit de
grève est interdit. S’agissant des catégories de travailleurs susmentionnées qui, en vertu
des lois fédérales applicables, ne peuvent avoir recours à des actions de grève, le comité
note que la liste inclut les employés des chemins de fer qui ne font pas partie de services
essentiels au sens strict du terme. Le comité prie donc le gouvernement d’amender sa
législation de manière à inclure les employés des chemins de fer et les employés de la
fonction publique qui n’exercent pas des fonctions d’autorité au nom de l’Etat dans les
catégories jouissant de l’exercice du droit de grève.
22. La Commission d'experts pour l'application des conventions et
recommandations de l'OIT ("la CEACR") a également réaffirmé, en ce qui
concerne la Russie, que le droit de grève ne peut être limité ou interdit qu'à
l'égard des fonctionnaires exerçant une autorité au nom de l'État et dans les
services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les services dont
l'interruption mettrait en danger la vie, la sécurité personnelle ou la santé de
l'ensemble ou d'une partie de la population.
23. La CEACR a également rappelé à la Russie que le transport
ferroviaire ne constituait pas un service essentiel au sens strict du terme
permettant d'interdire les grèves et qu'à la place, un service minimum négocié
pouvait être établi. Elle continue de demander à la Russie de veiller à ce que
les cheminots puissent exercer le droit de grève.
[Traduction non officielle]
OGNEVENKO c. RUSSIE ARRÊT 17
49. Le requérant a également souligné que l'employeur aurait pu contester
la légalité de la grève devant un tribunal, comme l'exige l'article 413 de la
LC, mais qu'il ne l'a pas fait.
50. Il a donc conclu que la grève elle-même et sa participation à celle-ci
avaient été licites et que son licenciement n'avait donc pas été conforme à la
loi.
51. Se fondant sur l'absence de preuves de la prétendue menace que les
grèves feraient peser sur la défense du pays, la sécurité de l'État ou la vie et
la santé des personnes, le requérant a également estimé que la restriction de
son droit de grève n'avait pas de but légitime.
(iv) l'ingérence n'était pas nécessaire dans une société démocratique
52. Le requérant a rappelé que le critère de nécessité dans une société
démocratique impose à la Cour de déterminer si l'ingérence incriminée
correspondait à un "besoin social impérieux", si elle était proportionnée au
but légitime poursuivi et si les raisons invoquées par les autorités nationales
pour la justifier étaient pertinentes et suffisantes (voir, par exemple,
Federation of Offshore Workers' Trade Unions e.a.v. Norvège (déc.), no
38190/97, ECHR 2002-VI). Le requérant estimait que son licenciement
n'avait pas été proportionné à sa participation à une grève licite. Il s'est
également appuyé sur la jurisprudence du CFA de l'OIT selon laquelle nul ne
doit être sanctionné pour avoir participé à un mouvement de grève.
53. Le requérant considère donc que son licenciement pour participation
à une grève licite a violé l'article 11 de la Convention.
2. L'appréciation de la Cour
(a) Principes généraux
54. La Cour rappelle que l'article 11 § 1 présente la liberté syndicale
comme une forme ou un aspect particulier de la liberté d'association (voir
Syndicat national de la police belge, précité, § 38 ; Swedish Engine Drivers'
Union v. Suède, arrêt du 6 février 1976, § 39, série A n° 20 ; Tüm Haber Sen
et Çınar c. Turquie, n° 28602/95, § 28, CEDH 2006-II ; et Demir et Baykara,
précité, § 109).
55. Les mots " pour la défense de [ses] intérêts " qui figurent à l'article 11
§ 1 ne sont pas redondants et la Convention garantit la liberté de protéger les
intérêts professionnels des membres d'un syndicat par l'action syndicale, dont
les Etats contractants doivent à la fois permettre et rendre possible la conduite
et le développement (voir Syndicat national de la police belge, précité, § 39 ;
Swedish Engine Drivers' Union, précité, § 40 ; et Wilson, National Union of
Journalists and Others, précité, § 42). Un syndicat doit donc être libre
d'oeuvrer à la protection des intérêts de ses membres, et ses membres
individuels ont le droit, pour protéger leurs intérêts, d'être entendus par ce
syndicat (voir Syndicat national de la police belge,
[Traduction non officielle]
OGNEVENKO c. RUSSIE ARRÊT
p r é c i t é , §§ 39-40, et Swedish Engine Drivers' Union, précité,
§§ 40-41). Un autre droit essentiel d'un syndicat est le droit de négocier
collectivement avec un employeur (voir Demir et Baykara, précité, § 154).
56. L'article 11 de la Convention n'assure aucun traitement particulier aux
syndicats ou à leurs membres et laisse à chaque Etat le libre choix des moyens
à mettre en oeuvre pour assurer la liberté d'un syndicat de protéger les intérêts
professionnels de ses membres (voir Syndicat national de la police belge,
précité, §§ 38-39 ; Syndicat suédois des chauffeurs de locomotives, précité,
§§ 39-40 ; Wilson, National Union of Journalists et autres, précité,
§ 42 ; et Tüm Haber Sen et Çınar, précité, § 28). L'octroi du droit de grève
constitue sans aucun doute l'un des plus importants de ces moyens (voir
Schmidt et Dahlström, précité, § 36 ; UNISON c. Royaume-Uni (déc.), no.
53574/99, CEDH 2002-I ; et Wilson, National
Union des journalistes et autres, précité, § 45).
57. La Cour a jugé à plusieurs reprises que les actions de grève sont
protégées par l'article 11 (voir National Union of Rail, Maritime and
Transport Workers c. Royaume-Uni, no. 31045/10, § 84, CEDH 2014, avec
d'autres références).
58. Le droit de grève n'est pas absolu et peut être soumis en droit national
à une réglementation de nature à limiter ou à conditionner son exercice dans
certains cas (voir Schmidt et Dahlström, p r é c i t é , § 36, et Enerji Yapi-Yol
Sen, précité, § 32).
59. L'article 11 § 2 n'exclut aucune catégorie professionnelle de son
champ d'application. Tout au plus les autorités nationales sont-elles en droit
d'imposer des " restrictions licites " à certains de leurs employés (voir Tüm
Haber Sen et Çınar, précité, §§ 28-29 ; Demir et Baykara, précité, § 107, et
Sindicatul " Păstorul cel Bun " c. Roumanie [GC], no 2330/09, § 145, CEDH
2013 (extraits)). Toutefois, les restrictions imposées aux trois groupes
mentionnés à l'article 11 § 2 doivent être interprétées strictement ; seules des
raisons convaincantes et impérieuses peuvent justifier des restrictions à la
liberté d'association de ces parties (voir Tüm Haber Sen et Çınar, précité, §
35 ; voir aussi Adefdromil c. France, no. 32191/09, § 55, 2 octobre 2014, et
Matelly v. France, no 10609/10, § 71, 2 octobre 2014). Ces restrictions
doivent donc se limiter à l'" exercice " et ne doivent pas porter atteinte à
l'essence même du droit d'organisation (voir Demir et Baykara, précité, § 97).
(b) Application de ces principes à la présente affaire
(i) l'existence ou non d'une ingérence
60. Les parties n'ont pas contesté l'existence d'une ingérence dans les
droits protégés par l'article 11 de la Convention. La Cour ne voit pas de raison
d'en juger autrement.
61. Comme indiqué ci-dessus, le droit de grève est l'un des moyens par
lesquels un syndicat peut tenter de se faire entendre et de négocier
collectivement afin de
[Traduction non officielle]
18

Document no 321
CJCE, affaire C-438/05, International Transport
Workers’ Federation, Finnish Seamen’s Union c. Viking
Line ABP (2007), paragr. 43-44

ARRÊT DU 11. 12. 2007 — AFFAIRE C-438/05
ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)
11 décembre 2007 *
Dans l'affaire C-438/05,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l'article 234 CE,
introduite par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division) (Royaume-
Uni), par décision du 23 novembre 2005, parvenue à la Cour le 6 décembre 2005,
dans la procédure
International Transport Workers' Federation,
Finnish Seamen's Union
contre
Viking Line ABP,
OÜ Viking Line Eesti,
* Langue de procédure: l'anglais.
I - 10806
ARRÊT DU 11. 12. 2007 — AFFAIRE C-438/05
42 Ensuite, selon les observations des gouvernements danois et suédois, le droit de
mener une action collective, y compris le droit de grève, constituerait un droit
fondamental qui serait, en tant que tel, soustrait au champ d'application de
l'article 43 CE.
43 À cet égard, il convient de relever que le droit de mener une action collective, y
compris le droit de grève, est reconnu tant par différents instruments internationaux
auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré, tels que la charte sociale
européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961, d'ailleurs expressément mentionnée
à l'article 136 CE, et la convention n° 87 concernant la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, adoptée le 9 juillet 1948 par l'Organisation
internationale du travail, que par des instruments élaborés par lesdits États
membres au niveau communautaire ou dans le cadre de l'Union, tels que la charte
communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs adoptée lors de la
réunion du Conseil européen tenue à Strasbourg le 9 décembre 1989, également
mentionnée à l'article 136 CE, et la charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne, proclamée le 7 décembre 2000 à Nice (JO C 364, p. 1).
44 Si le droit de mener une action collective, y compris le droit de grève, doit donc être
reconnu en tant que droit fondamental faisant partie intégrante des principes
généraux du droit communautaire dont la Cour assure le respect, il n'en demeure
pas moins que son exercice peut être soumis à certaines restrictions. En effet, ainsi
que le réaffirme l'article 28 de la charte des droits fondamentaux de l'Union
européenne, lesdits droits sont protégés conformément au droit communautaire et
aux législations et pratiques nationales. Par ailleurs, ainsi qu'il ressort du point 5 du
présent arrêt, selon le droit finlandais, le droit de grève ne peut être exercé,
notamment, lorsque la grève serait contraire aux bonnes moeurs ou interdite par le
droit national ou communautaire.
I - 10826
Document no 322
CJCE, affaire C-341/05, Laval Un Partneri Ltd c. Svenska
Byggnadsarbetareförbundet (2007), paragr. 90-91

LAVAL UN PARTNERI
ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)
18 décembre 2007 *
Dans l'affaire C-341/05,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l'article 234 CE,
introduite par l'Arbetsdomstolen (Suède), par décision du 15 septembre 2005,
parvenue à la Cour le 19 septembre 2005, dans la procédure
Laval un Partneri Ltd
contre
Svenska Byggnadsarbetareförbundet,
Svenska Byggnadsarbetareförbundets avdelning 1, Byggettan,
Svenska Elektrikerförbundet,
* Langue de procédure: le suédois.
I - 11845
ARRÊT DU 18. 12. 2007 — AFFAIRE C-341/05
90 À cet égard, il convient de relever que le droit de mener une action collective est
reconnu tant par différents instruments internationaux auxquels les États membres
ont coopéré ou adhéré, tels que la charte sociale européenne, signée à Turin le
18 octobre 1961, d'ailleurs expressément mentionnée à l'article 136 CE, et la
convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail, du 9 juillet 1948,
concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical, que par des
instruments élaborés par lesdits États membres au niveau communautaire ou dans
le cadre de l'Union européenne, tels que la charte communautaire des droits sociaux
fondamentaux des travailleurs adoptée lors de la réunion du Conseil européen tenue
à Strasbourg le 9 décembre 1989, également mentionnée à l'article 136 CE, et la
charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, proclamée le 7 décembre
2000 à Nice (JO C 364, p. 1).
91 Si le droit de mener une action collective doit donc être reconnu en tant que droit
fondamental faisant partie intégrante des principes généraux du droit communautaire
dont la Cour assure le respect, il n'en demeure pas moins que son exercice peut
être soumis à certaines restrictions. En effet, ainsi que le réaffirme l'article 28 de la
charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, il est protégé conformément
au droit communautaire ainsi qu'aux législations et pratiques nationales.
92 S'il est vrai que, ainsi que le rappelle le gouvernement suédois, le droit de mener des
actions collectives jouit en Suède, comme dans d'autres États membres, d'une
protection constitutionnelle, il n'en demeure pas moins que, ainsi qu'il ressort du
point 10 du présent arrêt, selon la Constitution suédoise, ce droit, qui inclut, dans
cet État membre, le blocus de chantiers, peut être exercé sauf si des dispositions
prévues par une loi ou par une convention s'y opposent.
93 À cet égard, la Cour a déjà jugé que la protection des droits fondamentaux constitue
un intérêt légitime de nature à justifier, en principe, une restriction aux obligations
imposées par le droit communautaire, même en vertu d'une liberté fondamentale
I - 11884
Document no 323
CIADH, Avis consultatif OC-27/21, Droits à la
liberté syndicale, à la négociation collective et à la
grève, et leurs rapports à d’autres droits, dans une
perspective de genre (2021), paragr. 95-105

Elizabeth Odio Benito, Présidente ;
L. Patricio Pazmiño Freire, vice‐président
; Eduardo Vio Grossi, juge ;
Humberto Antonio Sierra Porto, juge ;
Eduardo Ferrer Mac‐Gregor Poisot, juge ;
Eugenio Raúl Zaffaroni, juge, et Ricardo
Pérez Manrique, juge ;
également présents,
Pablo Saavedra Alessandri, greffier, et
Romina I. Sijniensky, greffière adjointe,
en vertu de l'article 64, paragraphe 1, de la Convention américaine relative aux droits de l'homme (ciaprès
"la Convention américaine ou la Convention") et des articles 70 à 75 du règlement de procédure
de la Cour (ci‐après "le règlement"), émet le présent avis consultatif structuré comme suit :
[Traduction non officielle]
COUR INTERAMÉRICAINE DES DROITS DE L'HOMME
AVIS CONSULTATIF OC‐27/21 5
MAI 2021
À LA DEMANDE DE LA COMMISSION INTERAMÉRICAINE DES DROITS DE L'HOMME
LE DROIT À LA LIBERTÉ SYNDICALE, LE DROIT À LA NÉGOCIATION COLLECTIVE ET LE
DROIT DE GRÈVE, ET LEURS RAPPORTS AVEC D'AUTRES DROITS, DANS UNE
PERSPECTIVE DE GENRE
(INTERPRÉTATION ET PORTÉE DES ARTICLES 13, 15, 16, 24, 25 ET 26, EN LIAISON
AVEC LES ARTICLES 1(1) ET 2 DE LA CONVENTION AMÉRICAINE RELATIVE AUX DROITS
DE L'HOMME, LES ARTICLES 3, 6, 7 ET 8 DU PROTOCOLE DE SAN SALVADOR, LES
ARTICLES 2, 3, 4, 5 ET 6 DE LA CONVENTION DE BELEM DO PARA, LES ARTICLES 34, 44
ET 45 DE LA CHARTE DE L'ORGANISATION DES ÉTATS AMÉRICAINS, ET LES ARTICLES II,
IV, XIV, XXI ET XXII DE LA DÉCLARATION AMÉRICAINE DES DROITS ET DES DEVOIRS DE
L'HOMME)
La Cour interaméricaine des droits de l'homme (ci‐après "la Cour interaméricaine" ou "la Cour")
composé des juges suivants :
36
(la plus représentative) et celles qui incluent toutes les organisations ou les organisations les plus
représentatives conformément à des critères clairs et préétablis pour la détermination des organisations
habilitées à négocier sont toutes deux compatibles avec la convention n° 98" 123.
93. La Cour estime également que les travailleurs du service public doivent bénéficier d'une
protection efficace contre tous les actes de discrimination à l'encontre des syndicats en rapport avec leur
emploi, de sorte que l'État doit donner la priorité à la négociation collective comme moyen de régler les
différends liés à la détermination des conditions d'emploi dans le service public 124. Cela signifie que les
travailleurs et leurs représentants doivent être en mesure de participer pleinement et utilement aux
processus de négociation et, à cette fin, l'État doit fournir aux travailleurs l'accès aux informations dont
ils ont besoin pour se familiariser avec les documents nécessaires à la conduite des négociations. Cela
est particulièrement important pour les négociations salariales, car dans le contexte de la stabilisation
économique, les États devraient donner la priorité à la négociation collective comme moyen de
déterminer les conditions d'emploi des fonctionnaires, plutôt que d'adopter une législation visant à
restreindre les salaires dans le secteur public 125. La Cour estime également qu'aucune action n'est
admissible si elle implique d'exiger des travailleurs qu'ils appartiennent à une organisation particulière
de travailleurs du service public pour conserver leur emploi, ou de les licencier pour avoir pris part à des
activités syndicales.
94. Compte tenu de ce qui précède, la Cour ajoute en corollaire que le droit de négociation collective,
élément essentiel de la liberté syndicale, comporte plusieurs composantes, dont au moins les suivantes
: (a) le principe de non‐discrimination des travailleurs engagés dans des activités syndicales, la garantie
de l'égalité étant une condition préalable aux négociations entre employeurs et travailleurs ; (b)
l'absence d'ingérence directe ou indirecte des employeurs dans la création, le fonctionnement et
l'administration des syndicats de travailleurs, cette ingérence pouvant entraîner un déséquilibre dans les
négociations qui compromettrait l'objectif des travailleurs d'améliorer leurs conditions de vie et de
travail par la négociation collective ou par d'autres moyens légaux ; et (c) l'encouragement progressif
des processus de négociation volontaire entre employeurs et travailleurs visant à améliorer les
conditions de travail par la conclusion de conventions collectives.
D. Le droit de grève
95. Le droit de grève est l'un des droits fondamentaux des travailleurs et ceux‐ci peuvent l'exercer
même en dehors de leurs organisations. C'est ce qu'affirment les articles 45(c) de la Charte de l'OEA
(droit de grève des travailleurs) et 27 de la Charte interaméricaine des garanties sociales (droit de
grève des travailleurs) ; c'est aussi ce qu'affirment, en les séparant délibérément des droits des
organisations syndicales, les articles 8(b) du Protocole de San Salvador et 8(1)(d) du PIDESC126 (supra,
par. 47 et 48, et 56 à 60). Dans le cas contraire, la dimension négative de la liberté d'association au
sens individuel pourrait être violée. Il s'agit également d'un des principaux droits des organisations
syndicales en général.
123 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 1360. Comité de la liberté syndicale, 368e
rapport, cas n° 2919, paragraphe 651.
124 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 1241. Comité de la liberté syndicale, 343e
rapport, cas numéro 2430, paragraphe 361, et cas numéro 2292, paragraphe 794 ; 344e rapport, cas numéro 2364,
paragraphe 91 ; 376e rapport, cas numéro 3042, paragraphe 560 ; 377e rapport, cas numéro 3118, paragraphe 177 ; et 378e
rapport, cas numéro 3135, paragraphe 418.
125 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 1492. Comité de la liberté syndicale, 368e
rapport, cas n° 2918, paragraphe 362.
126 L'emplacement d'une disposition peut être un facteur d'une importance considérable pour l'interprétation. Cf.
l'applicabilité du droit de réponse ou de correction (articles 14(1), 1(1) et 2 de la Convention américaine des droits de l'homme).
14(1), 1(1) et 2 de la Convention américaine des droits de l'homme). Avis consultatif OC‐ 7/86 du 29 août 1986. Série A n° 7, par.
25, et Adhésion obligatoire à une association prescrite par la loi pour la pratique du journalisme (Arts. 13 et 29 de la Convention
américaine relative aux droits de l'homme). Avis consultatif OC‐5/85 du 13 novembre 1985. Série A n° 5, par. 47.
[Traduction non officielle]
37
96. La Cour rappelle que si le droit de grève n'est pas expressément reconnu dans les conventions de
l'OIT, l'article 3 de la Convention n° 87 reconnaît néanmoins le droit des organisations de travailleurs "
en toute liberté, d'organiser leur administration et leur activité et de formuler leur programme " (supra
par. 63). Le Comité de la liberté syndicale a donc reconnu l'importance du droit de grève en tant que
"corollaire intrinsèque du droit d'organisation protégé par la convention n° 87 " 127. Dans les deux cas, la
grève est un moyen légitime de défense des intérêts économiques, sociaux et professionnels. C'est un
moyen que les travailleurs utilisent pour faire pression sur leurs employeurs afin qu'ils corrigent une
injustice ou qu'ils recherchent des solutions aux questions de politique économique et sociale et aux
problèmes auxquels l'entreprise est confrontée et qui concernent directement les travailleurs.
97. La Cour note également qu'en plus d'être largement reconnu dans le corpus juris international,
le droit de grève a également été reconnu dans les constitutions et lois nationales des États membres de
l'OEA.128 Il peut donc être considéré comme un principe général du droit international.
98. Le Comité de la liberté syndicale, en termes généraux, entend par grève " un arrêt de travail
temporaire (ou un ralentissement) délibérément mené par un ou plusieurs groupes de travailleurs
en vue de faire appliquer des exigences ou d’y résister, ou en vue d’exprimer des revendications ou
de soutenir d’autres travailleurs dans leurs exigences ou revendications " 129. La Cour souscrit à cette
définition et considère le droit de grève comme l'un des droits fondamentaux des travailleurs et de
leurs organisations, car il s'agit d'un moyen légitime de défendre leurs intérêts économiques, sociaux
et professionnels. Il s'agit d'une ressource que les travailleurs utilisent pour faire pression sur leurs
employeurs afin de corriger une injustice ou de rechercher des solutions aux questions et problèmes
de politique économique et sociale auxquels l'entreprise est confrontée et qui concernent
directement les travailleurs 130. La Cour européenne a classé les grèves comme l'instrument "le plus
puissant" pour protéger les droits des travailleurs 131.
99. La Cour estime qu'il existe trois catégories d'objectifs ou de revendications qui peuvent être
exprimés par la grève et qui font l'objet d'une protection : les questions de travail visant à améliorer
les conditions de travail ou de vie des travailleurs ; les questions syndicales mettant en avant les
revendications collectives des organisations syndicales ; et les grèves visant à remettre en cause les
politiques publiques132.
127 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 754. Comité de la liberté syndicale, 344e
rapport, cas numéro 2471, paragraphe 891 ; 346e rapport, cas numéro 2506, paragraphe 1076, cas numéro 2473, paragraphe
1532 ; 349e rapport, cas numéro 2552, paragraphe 419 ; 354e rapport, cas numéro 2581, paragraphe 1114 ; et 362e rapport,
cas numéro 2838, paragraphe 1077.
128 Cf. Constitution de la nation argentine, article 14 bis ; Constitution politique de l'État plurinational de Bolivie, article
53 ; Constitution politique du Brésil, article 9 ; Constitution politique de la République du Chili, article 16 ; Constitution
politique de la Colombie, article 56 ; Constitution politique de la République du Costa Rica, article 61 ; Constitution de la
République de l'Équateur, article 35. 10 ; Constitution politique du Salvador, article 48 ; Constitution politique du Guatemala,
article 104 ; Constitution de la République du Honduras, article 128 ; Constitution politique des États‐Unis du Mexique, article
123 A XVIII ; Constitución Política de la República de Nicaragua, article 83, Constitución Política de Panamá, article 69 ;
Constitución de la República del Paraguay, article 98 ; Constitución Política de Perú, article 28 ; Constitución Política de la
República Dominicana, article 62. 6, et Constitución de la República Oriental del Uruguay, article 57, Charte canadienne des
droits et libertés, sanctionnée en 1982, article 2(b), et Saskatchewan Federation of Labour v. Saskatchewan, 2015 SCC 4,
[2015] 1 S.C.R. 245, par.3 .
129 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 783 ; Cf. Comité de la liberté syndicale, 358e
rapport, cas n° 2716, paragraphe 862.
130 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 758 ; Cf. Comité de la liberté syndicale, 344e
rapport, cas numéro 2496, paragraphe 407 ; 353e rapport, cas numéro 2619, paragraphe 573 ; 355e rapport, cas numéro
2602, paragraphe 668 ; 357e rapport, cas numéro 2698, paragraphe 224 ; 371e rapport, cas numéro 2963, paragraphe 236,
cas numéro 2988, paragraphe 852 ; et 378e rapport, cas numéro 3111, paragraphe 712.
131 CourEDH, Hrvatski Liječnički sindikat c. Croatie, n° 36701/09, arrêt du 27 novembre 2014, par. 59.
132 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 758 et 763. Comité de la liberté syndicale,
344e rapport, cas numéro 2509, paragraphe 1247 ; 348e rapport, cas numéro 2530, paragraphe 1190 ; 351e rapport, cas numéro
2616, paragraphe 1012 ; 353e rapport, cas numéro 2619, paragraphe 573 ; 355e rapport,
[Traduction non officielle]
38
100. La Cour confirme également que le critère de légalité est un facteur clé pour déterminer si le droit
de grève peut être exercé. La Cour estime, en ce sens, que les États doivent adopter les mesures de
droit interne nécessaires pour mettre leur législation en conformité avec le contenu de ce droit. Ce
f a isant , les États doivent considérer que, même en tenant compte de certaines exceptions prévues par
le droit international, la législation doit protéger l'exercice du droit de grève pour tous les travailleurs.
Ainsi, les conditions et exigences préalables autorisées par la loi pour qu'une grève soit considérée
comme légale ne devraient pas être compliquées au point de rendre une grève légale impossible dans la
pratique. L'obligation de donner un préavis à l'employeur avant d'appeler à la grève est admissible, pour
autant que le préavis soit raisonnable 133. Il n'en va pas de même pour l'obligation de fixer une limite à la
durée d'une grève qui, en raison de sa nature de dernier recours pour la défense des intérêts des
travailleurs, ne peut être prédéterminée 134.
101. La Cour souligne également que le pouvoir de déclarer une grève illégale ne doit pas appartenir
à un organe administratif, mais qu'il appartient à l'autorité judiciaire de prendre cette décision, en faisant
application de motifs obligatoires préalablement prévus par la loi, conformément aux droits aux
garanties judiciaires prévus à l'article 8 de la Convention américaine.135 La Cour estime également que
l'État doit s'abstenir d'appliquer des sanctions aux travailleurs qui participent à une grève légale, qui est
une activité syndicale légitime et l'exercice d'un droit de l'homme, et qu'il doit garantir que de telles
sanctions ne seront pas appliquées par les entreprises privées.
102. La Cour estime en outre que l'exercice du droit de grève ne peut être limité ou interdit que dans
le cas : (a) des fonctionnaires qui servent de bras de la puissance publique et exercent l'autorité au nom
de l'État, et (b) des travailleurs des services essentiels 136.
103. Les travailleurs qui fournissent des services essentiels doivent être définis au sens strict du terme,
c'e s t ‐ à ‐ d i r e qu'ils fournissent des services dont l' interruption entraîne une menace claire et
imminente pour la vie, la sécurité, la santé ou la liberté de l'ensemble ou d'une partie de la population
(par exemple, les travailleurs du secteur hospitalier, des services d'électricité ou des services
d'approvisionnement en eau)137. La Cour confirme également la nécessité de mettre en place des
garanties compensatoires appropriées pour les services considérés comme essentiels et pour les services
cas numéro 2602, paragraphe 668 ; 360ème rapport, cas numéro 2747, paragraphe 841 ; et 372ème rapport, cas numéro
3011, paragraphe 646.
133 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 799 ; Cf. Comité de la liberté syndicale, 340e
rapport, cas numéro 2415, paragraphe 1257 ; 344e rapport, cas numéro 2509, paragraphe 1246 ; 346e rapport, cas numéro
2473, paragraphe 1542 ; et 376e rapport, cas numéro 2994, paragraphe 1002.
134 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 815. Comité de la liberté syndicale, 376e
rapport, cas n° 2994, par. 1002.
135 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 910. Comité de la liberté syndicale, 343e
rapport, cas numéro 2355, paragraphe 471 ; 348e rapport, cas numéro 2355, paragraphe 309, et cas numéro 2356, paragraphe
368.
136 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 830. Cf. Comité de la liberté syndicale, 340e
rapport, affaire numéro 1865, paragraphe 751 ; 344e rapport, affaire numéro 2467, paragraphe 578 ; 346e rapport, affaire
numéro 2500, paragraphe 324 ; 348e rapport, affaire numéro 2433, paragraphe 48, affaire numéro 2519, paragraphe 1141 ;
349e rapport, affaire numéro 2552, paragraphe 421 ; 351e rapport, affaire numéro 2355, paragraphe 361, affaire numéro
2581, paragraphe 1336 ; 353e rapport, affaire numéro 2631, paragraphe 1357 ; 354e rapport, affaire numéro 2649,
paragraphe 395 ; 356e rapport, affaire numéro 2654, paragraphe 370 ; 357e rapport, affaire numéro 2698, paragraphe 224 ;
362e rapport, affaire numéro 2741, paragraphe 767, affaire numéro 2723, paragraphe 842 ; 365e rapport, affaire numéro
2723, paragraphe 778 ; 367e rapport, numéro 2894, paragraphe 335, numéro 2885, paragraphe 384, numéro 2929,
paragraphe 637, numéro 2885, paragraphe 384, numéro 2929, paragraphe 637, numéro 2929, paragraphe 637, numéro 2929,
paragraphe 637, numéro 2929, paragraphe 637 2860, paragraphe 1182 ; 370e rapport, affaire numéro 2956, paragraphe 142
; 371e rapport, affaire numéro 3001, paragraphe 211, affaire numéro 2988, paragraphe 851 ; 372e rapport, affaire numéro
3022, paragraphe 614 ; 374e rapport, affaire numéro 3057, paragraphe 213 ; 377e rapport, affaire numéro 3107, paragraphe
240 ; et 378e rapport, affaire numéro 3111, paragraphe 715.
137 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 836 et 840. Comité de la liberté syndicale,
343e rapport, cas numéro 2355, paragraphe 469 ; 346e rapport, cas numéro 2488, paragraphe 1328 ; 348e rapport, cas numéro
2519, paragraphe 1141 ; 349e rapport, cas numéro 2552, paragraphe 421 ; et 364e rapport, cas numéro 2907, paragraphe 670.
[Traduction non officielle]
39
publics, car la restriction du droit de grève doit s'accompagner de procédures de conciliation et
d'arbitrage adéquates, impartiales et rapides, auxquelles les parties concernées peuvent participer à
tous les stades et dans lesquelles les sentences, une fois rendues, sont pleinement et rapidement mises
en oeuvre138.
104. Toujours en ce qui concerne les services essentiels, la Cour souligne que les Etats doivent
rechercher des alternatives possibles pour les cas où un service minimum pourrait être une solution
appropriée pour éviter l'interdiction totale de la grève tout en garantissant les besoins fondamentaux
des usagers ou le fonctionnement sûr des installations fournissant un service considéré comme "
essentiel " 139. Elle souligne que ces services minimums devraient être limités aux opérations nécessaires
pour répondre aux besoins fondamentaux de la population ou aux exigences du service minimum, avec
la garantie que le champ d'application des services minimums ne soit pas si étendu qu'il rende la grève
impossible. Les négociations sur le service minimum doivent avoir lieu avant qu'un conflit du travail ne
survienne, afin que toutes les parties prenantes (autorités publiques, organisations de travailleurs et
organisations d'employeurs) puissent rester aussi objectives et lucides que possible.
105. Enfin, la Cour estime que les États peuvent fixer certaines conditions préalables qui doivent
être remplies, telles que définies dans le cadre du processus de négociation collective, avant qu'une
décision ne soit prise d'activer le mécanisme de grève pour défendre les travailleurs. Ces conditions
doivent toutefois être raisonnables et ne doivent en aucun cas porter atteinte au contenu essentiel
du droit de grève ou à l'autonomie des organisations syndicales 140.
E. Sur les questions spécifiques soulevées par la Commission interaméricaine
106. La Cour rappelle que la liberté d'association, la négociation collective et le droit de grève sont des
droits incorporés à l'article 26 de la Convention, car ils découlent de l'article 45, alinéas (c) et ( g) de la
Charte de l'OEA (supra, par. 48). Bien que chacun d'entre eux soit un droit en s o i , la Cour souligne qu'ils
sont interdépendants et indivisibles 141. En tant que tels, ils sont soumis aux obligations générales établies
aux articles 1(1) et 2 de la Convention, qui énoncent les devoirs de respecter et de garantir les droits qui
y sont reconnus sans discrimination, et d'adopter des mesures en vertu du droit interne pour donner
effet à ces droits et libertés.
107. Depuis ses premiers arrêts, la Cour a toujours affirmé que la première obligation assumée par les
États parties en vertu de l'article 1, paragraphe 1, est de "respecter les droits et libertés" reconnus par
la Convention. L'exercice de la puissance publique a certaines limites qui découlent du fait que les droits
de l'homme sont des attributs inhérents à la dignité humaine et qu'ils sont, par conséquent, supérieurs
au pouvoir de l'État. La protection des droits de l'homme, en particulier des droits civils et politiques
énoncés dans la Convention,
138 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 856. Cf. Comité de la liberté syndicale, 340e
rapport, cas numéro 2415, paragraphe 1256 ; 344e rapport, cas numéro 2484, paragraphe 1095 ; 349e rapport, cas numéro
2552, paragraphe 421 ; 350e rapport, cas numéro 2543, paragraphe 726 ; 353e rapport, cas numéro 2631, paragraphe 1357
; 356e rapport, affaire numéro 2654, paragraphe 376 ; 359e rapport, affaire numéro 2383, paragraphe 182 ; 367e rapport,
affaire numéro 2885, paragraphe 384, affaire numéro 2929, paragraphe 637 ; 370e rapport, affaire numéro 2956, paragraphe
142 ; et 371e rapport, affaire numéro 2203, paragraphe 534.
139 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 867. Cf. Comité de la liberté syndicale, 344e
rapport, affaire numéro 2461, paragraphe 313, affaire numéro 2484, paragraphe 1094 ; 348e rapport, affaire numéro 2433,
paragraphe 48 ; 349e rapport, affaire numéro 2545, paragraphe 1153 ; 350e rapport, affaire numéro 2543, paragraphe 727 ;
354e rapport, affaire numéro 2581, paragraphe 1114 ; 356e rapport, dossier numéro 2654, paragraphe 371 ; 362e rapport,
dossier numéro 2741, paragraphe 768, dossier numéro 2841, paragraphe 1041 ; 371e rapport, dossier numéro 2988,
paragraphe 851 ; 372e rapport, dossier numéro 3022, paragraphe 614 ; et 377e rapport, dossier numéro 3107, paragraphe
240.
140 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, par. 789‐790. Comité de la liberté syndicale,
343e rapport, cas numéro 2432, paragraphe 1026 ; 346e rapport, cas numéro 2488, paragraphe 1331 ; 357e rapport, cas
numéro 2698, paragraphe 225 ; 359e rapport, cas numéro 2203, paragraphe 524 ; 371e rapport, cas numéro 2988,
paragraphe 850 ; et 375e rapport, cas numéro 2871, paragraphe 231.
141 Affaire Acevedo Buendía et al. ("Employés licenciés et retraités du Bureau du Contrôleur") c. Pérou. Objection préliminaire,
fond, réparations et frais. Arrêt du 1er juillet 2009 Série C n° 198, par. 101, et affaire Lagos del Campo c. Pérou, supra, par. 141.
[Traduction non officielle]

Document no 324
CIADH, Affaire des anciens employés de l’Organisme
judiciaire c. Guatemala, 2021, paragr. 106-127

COUR INTERAMÉRICAINE DES DROITS DE L'HOMME
AFFAIRE DES ANCIENS EMPLOYÉS DE L'ORGANISME JUDICIAIRE C. GUATEMALA
ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2021
(Exceptions préliminaires, fond et réparations)
Dans l'affaire des anciens employés de l'Organisme judiciaire c. Guatemala,
la Cour interaméricaine des droits de l'homme (ci‐après "la Cour interaméricaine" ou "la Cour"),
composée des juges suivants :
Elizabeth Odio Benito, Présidente
Patricio Pazmiño Freire, Vice‐président
Eduardo Vio Grossi, Juge
Humberto Antonio Sierra Porto, juge
Eduardo Ferrer Mac‐Gregor Poisot, juge
Eugenio Raúl Zaffaroni, juge
Ricardo Pérez Manrique, juge,
également présent,
Pablo Saavedra Alessandri, greffier Romina
I. Sijniensky, greffier adjoint,
vu les articles 62, paragraphe 3, et 63, paragraphe 1, de la Convention américaine relative aux
droits de l'homme (ci‐après dénommée "la Convention américaine" ou "la Convention") et les
articles 31, 32, 42, 65 et 67 du règlement de procédure de la Cour (ci‐après dénommé "le
règlement" ou "le règlement"), rend le présent arrêt, dont la structure est la suivante :
49
[Traduction non officielle]
104. La Cour juge également pertinent de rappeler qu'il existe deux types d'obligations découlant
de la reconnaissance de l'ESCER, qui sont protégées par l'article 26 de la Convention : celles qui
sont immédiatement exécutoires et celles qui ont un caractère progressif. En ce qui concerne les
premières (obligations immédiatement exécutoires), la Cour rappelle que les États doivent adopter
des mesures efficaces pour assurer l'accès, sans discrimination, aux avantages reconnus par
l'ESCER et, en général, pour progresser vers leur pleine réalisation. En ce qui concerne ce dernier
point (obligations de nature progressive), la réalisation progressive signifie que les États parties
ont l'obligation spécifique et constante de progresser aussi rapidement et efficacement que
possible vers la pleine réalisation de ces droits, sous réserve des ressources disponibles, par le biais
de la législation ou d'autres moyens appropriés. Il existe également une obligation de nonrétrogression
en ce qui concerne la réalisation des droits acquis. Ainsi, les obligations
conventionnelles de respect et de garantie, ainsi que l'adoption de mesures de droit interne
(articles 1(1) et 2), sont essentielles pour assurer leur effectivité 109.
105. Compte tenu de ce qui précède, cette affaire ne nécessite pas une analyse du
comportement de l'État en ce qui concerne le développement progressif du CESER ; la Cour doit
plutôt déterminer si l'État a garanti la protection de ces droits aux 65 anciens employés qui ont
été licenciés du pouvoir judiciaire à la suite de la grève. En d'autres termes, la Cour doit
déterminer si l'État a rempli ses obligations immédiatement exécutoires en ce qui concerne le droit
au travail et le droit de grève. Il incombe donc à la Cour de se prononcer sur le comportement
de l'État quant au respect de ses obligations de garantir le droit de grève et le droit au travail et
à la sécurité de l'emploi.
B.2. Le droit de grève, en relation avec le droit à la liberté d'association et à la
liberté syndicale
106. Dans son rôle consultatif, cette Cour a déjà établi que le droit de grève est l'un des droits
fondamentaux des travailleurs, qui peut être exercé indépendamment de leurs organisations 110
. Cela est spécifié à l'article 45(c) de la Charte de l'OEA (droit de grève "par les travailleurs"), et
est indiqué par le placement délibéré de son libellé séparément des droits des associations
syndicales, aux articles 8(b) du Protocole de San Salvador et 8(1)(d) du PIDESC.111 Il est
également consacré à l'article 27 de la Charte interaméricaine des garanties sociales ("les
travailleurs ont le droit de grève"). Il est également inscrit dans l'article 27 de la Charte
interaméricaine des garanties sociales ("les travailleurs ont le droit de grève"). Il s'agit également
d'un droit des associations commerciales en général.
107. La Cour note que, bien que le droit de grève ne soit pas expressément reconnu dans les
conventions de l'OIT, il est significatif que l'article 3 de la convention n° 87 sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, à laquelle le Guatemala est partie, reconnaisse le droit des
organisations de travailleurs " d'organiser [...] leurs activités en toute liberté et de formuler leur
programme d'action ". A cet égard, le Comité de la liberté syndicale a reconnu l'importance du
droit de grève en tant que "corollaire intrinsèque du droit d'organisation protégé par la
convention n° 87" 112.
109 Cf. affaire Muelle Flores c. Pérou. Objections préliminaires, fond, réparations et frais. Arrêt du 6 mars 2019.
Série C n° 375, para. 190, et Affaire des Miskito Divers (Lemoth Morris et al.) c. Honduras, supra, para. 66.
110 Cf. les droits à la liberté d'organisation, à la négociation collective et à la grève, et leur relation avec d'autres
droits, dans une perspective de genre. Avis consultatif OC‐27/21 du 5 mai 2021. Série A n° 27, para. 95.
111 Le positionnement d'une disposition peut être un facteur de grande importance pour son interprétation. Cf.
l'opposabilité du droit de réponse. Avis consultatif OC‐5/85 7/86 du 29 août 1986. Série A n° 5, para. 47, et Avis consultatif
OC‐27/21, supra, para. 95.
112 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, para. 754. Cf. Comité
de la liberté syndicale, Rapport 344, affaire n° 2471, paragraphe 891 ; Rapport 346, affaire n° 2506,
31
[Traduction non officielle]
108. La Cour note également qu'en plus d'être largement reconnu dans le corpus iuris
international, le droit de grève a également été reconnu dans les constitutions et les législations
des États membres de l'OEA 113. En ce sens, il peut être considéré comme un principe général du
droit international. En particulier, la Constitution du Guatemala stipule ce qui suit
Article 104. Droit de grève et arrêt de travail. Le droit de grève est reconnu et doit être exercé
conformément à la loi, après épuisement des procédures de conciliation. Ces droits ne
peuvent être exercés que pour des raisons d'ordre économique ou social. La loi établit les cas
et les situations dans lesquels la grève ou l'arrêt de travail ne sont pas autorisés 114.
109. Selon le Comité de la liberté syndicale, la grève est généralement définie comme " un arrêt
de travail temporaire (ou un ralentissement) délibérément mené par un ou plusieurs groupes
de travailleurs en vue de faire appliquer des exigences ou d’y résister, ou en vue d’exprimer des
revendications ou de soutenir d’autres travailleurs dans leurs exigences ou revendications " 115.
La Cour souscrit à cette définition et considère que le droit de grève est l'un des droits
fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations, car il constitue un moyen légitime de
défense de leurs intérêts économiques, sociaux et professionnels. Il s'agit d'une mesure exercée
par les travailleurs comme moyen de pression sur l'employeur afin de corriger une injustice ou
de rechercher des solutions aux questions de politique économique et sociale et aux problèmes
qui se posent dans les entreprises et qui intéressent directement les travailleurs.116 À cet égard,
la Cour européenne a décrit la grève comme l'instrument "le plus puissant" pour la protection
des droits des travailleurs 117.
110. La Cour interaméricaine a déjà mentionné les liens étroits existant entre la liberté
d'association, la liberté syndicale et le droit de grève. En ce sens, la Cour a souligné que la relation
entre la liberté d'association et la liberté syndicale s'apparente à une relation de genre et
d'espèce, puisque la première reconnaît le droit des individus à créer des organisations et à agir
collectivement dans la poursuite de buts légitimes, sur la base de l'article 16 de la Convention
américaine, tandis que la seconde doit être comprise en relation avec la spécificité de l'activité et
l'importance de l'objectif poursuivi par les activités syndicales, ainsi qu'avec sa protection
spécifique découlant de l'article 26 de la Convention et de l'article 8 du Protocole de San
Salvador. De même, elle a indiqué que la protection des droits de négociation collective et de
grève, en tant qu'outils essentiels des droits d'association et de la liberté d'organisation, est
fondamentale118.
paragraphe 1076, affaire n° 2473, paragraphe 1532 ; rapport 349, affaire n° 2552, paragraphe 419 ; rapport 354,
affaire n° 2552, paragraphe 419 ; rapport 354, affaire n° 2473, paragraphe 1532 ; rapport 349, affaire n° 2552,
paragraphe 419
2581, paragraphe 1114 ; et Rapport 362, affaire n° 2838, paragraphe 1077.
113 Cf. Constitution de la nation argentine, article 14 bis ; Constitution de l'État plurinational de Bolivie, article 53;
Constitution du Brésil, article 9 ; Constitution de la République du Chili, article 16 ; Constitution de la Colombie, article
56 ; Constitution de la République du Costa Rica, article 61 ; Constitution de la République de l'Équateur, article 35.10
; Constitution du Salvador, article 48 ; Constitution du Guatemala, article 104 ; Constitution de la République du
Honduras, article 128 ; Constitution des États‐Unis du Mexique, article 123 A XVIII ; Constitution de la République du
Nicaragua, article 83, Constitution du Panama, article 69 ; Constitution de la République du Paraguay, article 98 ;
Constitution du Pérou, article 28 ; Constitution de la République dominicaine, article 62(6), et Constitution de la
République orientale de l'Uruguay, article 57, Charte canadienne des droits et libertés, signée en 1982, article 2.b.
114 Constitution de la République du Guatemala du 31 mai 1985. Texte disponible à l'adresse suivante :
https://www.congreso.gob.gt/assets/uploads/congreso/marco_legal/ab811‐cprg.pdf.
115 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, paragraphe 783 ;; Cf. Comité de la
liberté syndicale, rapport 358, affaire n° 2716, paragraphe 862.
116 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, para. 758 ; Cf. Comité de la liberté
syndicale, rapport 344, affaire n° 2496, paragraphe 407 ; rapport 353, affaire n° 2619, paragraphe 573 ;
Rapport 355, affaire n° 2602, paragraphe 668 ; rapport 357, affaire n° 2698, paragraphe 224 ; rapport 371, affaire n°
2963, paragraphe 236, affaire n° 2988, paragraphe 852 ; et rapport 378, affaire n° 3111, paragraphe 712.
117 CEDH, n° 36701/09. Arrêt du 27 novembre 2014, para. 59.
118 Cf. avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 121.
32
[Traduction non officielle]
111. En ce qui concerne la liberté d'association, l'article 16(1) de la Convention américaine
reconnaît le droit des personnes de s'associer librement à des fins idéologiques, religieuses,
politiques, économiques, professionnelles, culturelles, sportives ou autres. La Cour a souligné que
le droit d'association permet aux individus de créer ou de participer à des entités ou à des
organisations dans le but d'agir collectivement à la poursuite des objectifs les plus divers, pour
autant que ceux‐ci soient légitimes119. La Cour a établi que les personnes relevant de la juridiction
des États parties ont le droit de s'associer librement avec d'autres personnes, sans aucune
intervention des autorités publiques susceptible de limiter ou d'entraver l'exercice du droit en
question. Il s'agit donc du droit fondamental de constituer un groupe pour la poursuite d'un but
licite, sans pression ou ingérence susceptible d'altérer ou de dénaturer son objectif.120 La Cour a
également noté que la liberté d'association donne également lieu à des obligations positives de
prévention des atteintes à cette liberté, de protection de ceux qui l'exercent et d'enquête sur les
violations de cette liberté, ce qui nécessite l'adoption de mesures positives, même dans la
sphère des relations entre individus, si le cas le justifie121.
112. En matière de travail, cette Cour a établi que la liberté d'association protège le droit de
constituer des organisations syndicales et de mettre en oeuvre leur structure interne, leurs
activités et leurs programmes d'action, sans intervention des autorités publiques qui limiterait ou
entraverait l'exercice de ce droit122. En même temps, cette liberté présuppose que chaque
personne puisse déterminer, sans contrainte, si elle souhaite adhérer à l'association123. En outre,
l'État a le devoir de veiller à ce que les individus puissent exercer librement leur liberté
d'association sans craindre d'être soumis à une quelconque violence, faute de quoi la capacité des
groupes à s'organiser pour protéger leurs intérêts pourrait être réduite.124 À cet égard, la Cour a
souligné que la liberté d'association en matière de travail "ne s'épuise pas dans la
reconnaissance théorique du droit de constituer des [syndicats], mais correspond aussi, de
manière indissociable, au droit d'utiliser tous les moyens appropriés pour exercer cette liberté"
125.
113. En ce qui concerne le droit à la liberté d'association, l'article 45(c) et (g) de la Charte de
l'OEA stipule expressément que les employeurs et les travailleurs peuvent s'associer librement
pour la défense et la promotion de leurs intérêts, y compris le droit des travailleurs à la
négociation collective et à la grève. De même, l'article XXII de la Déclaration américaine
reconnaît le droit de toute personne "de s'associer avec d'autres pour promouvoir, exercer et
protéger ses intérêts légitimes de nature politique, économique, religieuse, sociale, culturelle,
professionnelle, syndicale ou autre".
114. Ainsi, la Cour a établi que la protection de la liberté d'association remplit une fonction
sociale importante, puisque le travail des syndicats permet de sauvegarder ou d'améliorer les
conditions de travail et de vie des travailleurs et que, dans cette mesure, sa protection permet
la réalisation d'autres droits de l'homme. En ce sens, la protection du droit de négociation
collective
119 Cf. affaire Escher et al. c. Brésil. Objections préliminaires, fond, réparations et frais. Arrêt du 6 juillet 2009.
Série C n° 200, para. 169 et Avis consultatif OC‐27/2, supra, para. 121.
120 Cf. l'affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 156 et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 121.
121 Cf. affaire Huilca Tecse c. Pérou. Fond, réparations et frais. Arrêt du 3 mars 2005. Série C n° 121, para.
76, et Avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 121.
122 Cf. l'affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 156 et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 71.
123 Cf. l'affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 158, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 71.
124 Cf. affaire Huilca Tecse c. Pérou, supra, para. 77, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 71.
125 Cf. affaire Huilca Tecse c. Pérou, supra, para. 70, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 71.
33
[Traduction non officielle]
La liberté d'association et de grève, en tant qu'outils essentiels du droit d'association et de la
liberté d'organisation, est fondamentale 126.
115. En relation avec ce qui précède, la Cour constate que la sphère de protection du droit
à la liberté d'association en matière de travail ne se limite pas à la protection des syndicats, de
leurs membres et de leurs représentants. Les syndicats et leurs représentants bénéficient d'une
protection spécifique pour l'exercice effectif de leurs fonctions, car, comme l'a établi la Cour
dans sa jurisprudence127 et comme l'indiquent divers instruments internationaux 128 , y compris
l'article 8 du Protocole de San Salvador, en matière syndicale, la liberté d'association est de
la plus haute importance pour la défense des intérêts légitimes des travailleurs et fait partie du
corpus juris des droits de l’homme 129.
116. En l'espèce, compte tenu de l'échec des négociations directes pour parvenir à une nouvelle
convention collective sur les conditions de travail, le STOJ a engagé un conflit économique et
social devant la première chambre d'appel du travail et de la protection sociale. La procédure
de conciliation prévue par le Code du travail a été suivie, mais s'est achevée le 15 février 1996,
sans que les parties ne parviennent à un accord. Devant l'impasse des négociations, le STOJ a
déposé un mémoire devant la première chambre de la Cour d'appel demandant à l'Inspection
générale du travail de procéder à un comptage afin de déterminer si les conditions d'une grève
légale au sens du Code du travail étaient réunies.
117. En effet, selon l'article 241 du code du travail en vigueur à l'époque des faits, pour qu'une
grève soit déclarée licite, les travailleurs doivent "constituer au moins les deux tiers des personnes
travaillant dans l'entreprise ou le centre de production respectif, qui ont entamé leur relation
de travail avant le conflit économique ou social collectif". En outre, conformément à l'article 4
de la loi sur la syndicalisation et la réglementation des grèves des employés de l'État, dans sa
version en vigueur à l'époque des faits, pour que les employés de l'État puissent exercer le droit
de grève, la loi établit la condition préalable d'avoir épuisé la procédure directe et l'alinéa c)
stipule qu'"aucune grève ne peut être menée lorsqu'elle vise à affecter les services essentiels
visés à l'article 243 du code du travail, au décret 1441 du Congrès de la République et autres
établis par la loi, ainsi que ceux ordonnés par l'exécutif conformément à la loi sur l'ordre
public".130
118. Dans son rôle consultatif, la Cour a déjà rappelé que le critère de légalité de la grève est
un élément central de la possibilité d'exercer le droit de grève. Ainsi, les conditions préalables
établies par la loi pour qu'une grève soit considérée comme légale ne devraient pas être
compliquées au point de rendre impossible, dans la pratique, l'organisation d'une grève légale.
En revanche, la Cour considère qu'il est possible pour les États d'établir le respect de certaines
conditions préalables dans le cadre de la négociation collective avant de recourir au mécanisme
de la grève pour se défendre
126 Cf. avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 124.
127 Cf. l'affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 156, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 72.
128 Cf. OIT. Convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, du 17 juin 1948 et Convention
n° 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective, du 8 juin 1949.
129 Cf. l'affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 158, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 72.
130 L'article 243 du code du travail définit les services essentiels : "Les travailleurs suivants ne peuvent pas faire grève :
a) les travailleurs des entreprises de transport, lorsqu'ils sont en voyage et ne l'ont pas terminé ; b) les travailleurs des
cliniques, des hôpitaux, des services d'hygiène et de nettoyage public ; et ceux qui travaillent dans des entreprises qui
fournissent des services d'électricité, d'éclairage, de télécommunications et de traitement et de distribution de l'eau à la
population, à moins que le personnel nécessaire ne soit fourni pour éviter la suspension de ces services, sans causer de
préjudice grave et immédiat à la santé, à la sécurité et à l'économie publique ; c) les forces de sécurité de l'État [...]".
34
[Traduction non officielle]
des travailleurs. Toutefois, ces conditions doivent être raisonnables et ne doivent pas porter
atteinte, de quelque manière que ce soit, au contenu essentiel du droit de grève ou à
l'autonomie des organisations syndicales131.
119. Dans ce cas, les conditions de légalité d'une grève des travailleurs de l'État étaient les
suivantes : 1) l'épuisement des négociations directes ; 2) que la grève ait lieu pour des
revendications de nature économique ou sociale ; 3) qu'elle n'affecte pas les services essentiels
et 4) le respect des exigences légales, dans ce cas, des dispositions de l'article 241 du Code du
travail en vigueur à l'époque, qui impliquait une participation minimale d'au moins deux tiers des
travailleurs à la grève. Le STOJ a respecté les premières conditions et, pour se conformer aux
dispositions du Code du travail, il a demandé à l'autorité judiciaire compétente, le 16 février
1996, d'ordonner à l'Inspection générale du travail de procéder au comptage. Cette demande a
été acceptée. Malgré le fait que les autorités aient rejeté les différents recours tentés par l'Etat
contre la décision d'ordonner le comptage (supra paragraphe 41), celui‐ci n'a jamais été effectué.
En effet, le bureau de l'inspecteur général a consulté la première chambre pour savoir si le
comptage devait avoir lieu, mais le 26 février 1996, la première chambre a ordonné la
suspension du comptage jusqu'à ce que les contestations soient résolues132. Compte tenu de
l'impossibilité matérielle de respecter les exigences légales, le STOJ a mené une grève de facto du
19 mars au 2 avril 1996.
120. Ainsi, dans le cas présent, la déclaration d'illégalité est liée au fait que le STOJ n'a pas
respecté cette exigence parce que l'Inspection générale du travail n'a pas été en mesure
d'effectuer le comptage. Or, le comptage n'a pas été effectué pour des raisons indépendantes
de la volonté du Syndicat. Il convient de noter que, dans ce cas, tant l'employeur que les autorités
chargées de la mise en oeuvre et de la vérification du respect des exigences font partie de l'État.
Bien que l'État‐employeur ait eu le droit de s'opposer à la décision de procéder au comptage
des participants à la grève ordonnée par la première chambre et exécutée par l'inspection
générale du travail, il convient de noter qu'une fois la décision finale rejetant ces appels rendue, le
comptage n'a pas été effectué et l'affaire est passée directement à l'examen de la requête
d'illégalité déposée par l'État‐employeur lui‐même pour que la grève soit déclarée illégale. Entre
les deux décisions ‐ la décision finale sur le décompte et le dépôt de la requête en déclaration
d'illégalité ‐ plus de vingt jours se sont écoulés, au cours desquels le décompte aurait pu être
effectué.
121. En ce qui concerne la complexité excessive et les longs délais des procédures préalables à
l'exercice du droit de grève, les organes de contrôle de l'OIT ont souligné que les mécanismes
juridiques de déclaration de la grève ne devraient pas être si complexes ou entraîner des délais
si longs que, dans la pratique, il devienne impossible de mener une grève légale ou que l'action
perde toute son efficacité. De même, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a
attiré l'attention des États sur le fait que la longueur de la procédure requise pour déclarer une
grève légale peut constituer une restriction du droit reconnu à l'article 8(1) du Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels133.
122. Étant donné que plus de deux ans se sont écoulés entre le début du conflit en 1994 et
l'action de grève, au cours desquels toutes les tentatives de négociation directe avec l'Étatemployeur
ont échoué 134 , on peut conclure que le seul outil dont disposaient les travailleurs
était la grève, en dernier recours.
131 Cf. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, para. 789‐790. Comité de la liberté
syndicale, rapport 343, affaire n° 2432, paragraphe 1026 ; rapport 346, affaire n° 2488, paragraphe 1331 ; rapport
357, affaire n° 2698, paragraphe 225 ; rapport 359, affaire n° 2203, paragraphe 524 ; rapport 371, affaire n° 2488,
paragraphe 1331 ; rapport 357, affaire n° 2698, paragraphe 225 ; rapport 359, affaire n° 2203, paragraphe 524 ;
rapport 371, affaire n° 2488, paragraphe 1331 ; rapport 357, affaire n° 2698, paragraphe 225 ; rapport 359, affaire
n° 2203, paragraphe 524 ; rapport 359, affaire n° 2203, paragraphe 524.
2988, paragraphe 850 ; et Rapport 375, affaire n° 2871, paragraphe 231.
132 Cf. l'arrêt de la première chambre de la Cour d'appel du travail et de la prévoyance sociale dans le cadre du conflit
collectif n° 730‐94 du 26 février 1996 (dossier de preuve, folios 41 et 41).
133 CESCR. Compilation des observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels sur les pays
d'Amérique latine et des Caraïbes (1989‐2004).
134 Dans les résultats de la vérification de la plainte déposée par le STOJ, MINUGUA a considéré que "les contestations
juridiques successives et les requêtes déposées par le bureau du procureur général et la Cour suprême de justice
empêchent, en fait, la mise en oeuvre de l'accord sur les droits de l'homme".
[Traduction non officielle]
35
Par conséquent, les nombreux recours introduits par l'État contre la décision autorisant le
comptage par l'Inspection générale du travail, et son manque de diligence dans la mise en oeuvre
de cette décision, ont constitué une obstruction arbitraire de l'État à l'exercice du droit de grève
par les anciens travailleurs du pouvoir judiciaire.
123. En ce qui concerne la violation de la liberté d'association et de la liberté syndicale, la Cour
note que ni la Commission ni le représentant n'ont expressément allégué la violation de ces droits
en l'espèce. Toutefois, en vertu du principe iura novit curia 135 , et compte tenu de la relation
étroite qui existe entre les droits précités (voir supra par. 110 à 115), la Cour se prononcera sur
ces violations en relation avec le droit de grève.
124. En effet, dans la présente affaire, la Cour constate qu'un nombre important des victimes
présumées étaient des travailleurs du pouvoir judiciaire qui, dans l'exercice de leurs droits à la
liberté d'association et à la liberté syndicale, avaient adhéré au STOJ.136 Entre le 19 mars et le 2
avril 1996, les membres du STOJ ont entamé une grève qui a été déclarée illégale et, à la suite de
cette déclaration, les 65 victimes présumées ont été licenciées, y compris certaines qui étaient
des dirigeants syndicaux et qui, par conséquent, bénéficiaient du privilège syndical (immunité
de licenciement) établi à l'article 223 du code du travail. La Cour a déjà déclaré que les syndicats
et leurs représentants bénéficient d'une protection spécifique pour l'exercice effectif de leurs
fonctions, car la liberté d'association en matière syndicale est de la plus haute importance pour
la défense des intérêts légitimes des travailleurs et fait partie du corpus juris des droits de
l'homme.137 Par conséquent, la Cour conclut que la déclaration d'illégalité de la grève a non
seulement violé le droit de grève, mais aussi le droit à la liberté d'association et à la liberté
syndicale des 65 victimes présumées dans cette affaire.
125. Enfin, compte tenu de l'exigence établie par la législation guatémaltèque à l'époque des
faits qu'un décompte soit effectué et que celui‐ci reflète la participation d'au moins deux tiers des
travailleurs, la Cour estime opportun d'analyser si ces conditions préalables pour opter pour le
mécanisme de grève sont raisonnables et n'affectent pas le contenu essentiel du droit de grève, de
la liberté syndicale et de la liberté d'association. À cet égard, le Comité de la liberté syndicale de
l'OIT s'est déjà prononcé sur l'impact de cette exigence sur le droit de grève et sur les activités
syndicales :
" Quant à la majorité exigée par une législation pour la déclaration d’une grève légale (les deux tiers des
voix de la totalité des membres de l’organisation ou section), et dont l’inobservation peut entraîner une
sanction des autorités administratives, y compris la dissolution du syndicat, le comité a rappelé les
conclusions de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, selon
lesquelles une telle disposition constitue une intervention des autorités publiques dans l’activité des
syndicats, intervention de nature à limiter les droits de ces organisations, contrairement à l’article 3 de la
convention."138
126. En effet, l'exigence d'un tel taux de participation à l'action rend la grève légale impossible
en pratique, de sorte que son imposition implique une restriction arbitraire du droit de grève,
de la liberté d'association et de la liberté d'organisation.
La négociation collective n'a pas pu se concrétiser ou a retardé la procédure nécessaire à sa mise en oeuvre". (Lettre de
MINUGUA à Víctor Hugo Godoy, président de COPRODEH du 15 mars 2000, dossier de preuve folio 625).
135 Cf. affaire Velásquez Rodríguez c. Honduras. Fond. Arrêt du 29 juillet 1988. Série C n° 4, para. 163 et Affaire
González et al. c. Venezuela. Fond et réparations. Arrêt du 20 septembre 2021. Série C n° 436, par. 144.
136 Selon les informations fournies par la Commission, 51 des 65 victimes présumées étaient membres du STOJ. Cinq
ont expressément déclaré qu'ils n'étaient pas membres et il n'y a pas d'informations concernant neuf d'entre eux.
137 Affaire Baena Ricardo et al. c. Panama, supra, para. 158, et l'avis consultatif OC‐27/21, supra, para. 72.
138 OIT. Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, supra, paragraphe 805.
36
[Traduction non officielle]
127. En conséquence, la Cour considère que l'État guatémaltèque est responsable de la violation
du droit de grève, de la liberté d'association et de la liberté syndicale reconnus aux articles 16
et 26 de la convention américaine, en relation avec les articles 1(1) et 2 du même instrument,
au détriment des 65 anciens employés du pouvoir judiciaire énumérés dans l'annexe unique.
B.2. Le droit au travail et à la sécurité de l'emploi
128. En ce qui concerne les droits spécifiques du travail protégés par l'article 26 de la Convention
américaine, la Cour a déjà déterminé que le libellé de cet article indique que ces droits sont
dérivés des normes économiques, sociales, éducatives, scientifiques et culturelles contenues dans
la Charte de l'OEA139. En ce sens, les articles 45(b) et (c),140 46,141 et 34(g)142 de la Charte
établissent que " le travail est un droit et un devoir social " et qu'il devrait être effectué avec "
des salaires équitables, des possibilités d'emploi et des conditions de travail acceptables pour tous
". Ces articles établissent également le droit des travailleurs à "s'associer librement pour la
défense et la promotion de leurs intérêts". Ils exigent également de l'État qu'il "harmonise la
législation sociale" pour protéger ces droits. Dans son avis consultatif OC‐10/89, la Cour a indiqué
que :
[Les États membres [...] ont manifesté leur accord pour que la Déclaration contienne et définisse les droits
fondamentaux de l'homme auxquels se réfère la Charte. Ainsi, la Charte de l'Organisation ne peut être
interprétée et appliquée, en ce qui concerne les droits de l'homme, sans relier ses normes, conformément
à la pratique des organes de l'OEA, aux dispositions correspondantes de la Déclaration.143
129. A cet égard, l'article XIV de la Déclaration américaine établit que " toute personne a le droit
de travailler, dans des conditions appropriées, et de suivre librement sa vocation ". Cette
disposition est pertinente pour définir la portée de l'article 26, étant donné que "la Déclaration
américaine constitue, le cas échéant et en relation avec la Charte de l'OEA, une source
d'obligations internationales".144 En outre, l'article 29(d) de la Convention américaine établit
expressément qu'"aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée
comme... [...] d) excluant ou limitant l'effet de l'article 26" : [...] d) exclure ou limiter l'effet que la
Déclaration américaine des droits et devoirs de l'homme et d'autres actes internationaux de même
nature ont."
130. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, dans son Observation générale n°
18 sur le droit au travail, a déclaré que ce droit "implique également le droit de ne pas être
injustement privé de son travail".
139 Cf. affaire Lagos del Campo c. Pérou, supra, para. 143, et affaire Vera Rojas et al. c. Chili, supra, para. 33.
140 Article 45 de la Charte de l'OEA. ‐ Les États membres, convaincus que l'homme ne peut parvenir à la pleine
réalisation de ses aspirations que dans le cadre d'un ordre social juste, du développement économique et d'une paix
véritable, conviennent de consacrer tous leurs efforts à l'application des principes et mécanismes suivants : [...b) Le
travail est un droit et un devoir social, il confère une dignité à celui qui l'accomplit et il doit être accompli dans des
conditions, y compris un système de salaires équitables, qui assurent la vie, la santé et un niveau de vie décent au
travailleur et à sa famille, aussi bien pendant ses années de travail que pendant sa vieillesse, ou lorsqu'une
circonstance quelconque le prive de la possibilité de travailler ; c) Les employeurs et les travailleurs, tant ruraux
qu'urbains, ont le droit de s'associer librement pour la défense et la promotion de leurs intérêts, y compris le droit de
négociation collective et le droit de grève des travailleurs, ainsi que la reconnaissance de la personnalité juridique des
associations et la protection de leur liberté et de leur indépendance, le tout conformément aux lois applicables [...].
141 Article 46 de la Charte de l'OEA. ‐ Les États membres reconnaissent que, pour faciliter le processus d'intégration
régionale de l'Amérique latine, il est nécessaire d'harmoniser la législation sociale des pays en développement, en
particulier dans les domaines du travail et de la sécurité sociale, afin que les droits des travailleurs soient protégés de
manière égale, et ils conviennent de déployer les plus grands efforts possibles pour atteindre cet objectif.
142 Article 34(g) de la Charte de l'OEA. ‐ Les États membres conviennent que l'égalité des chances, l'élimination
de l'extrême pauvreté, la répartition équitable des richesses et des revenus et la pleine participation de leurs peuples
aux décisions relatives à leur propre développement sont, entre autres, des objectifs fondamentaux du développement
intégral. Pour les atteindre, ils conviennent également de consacrer tous leurs efforts à la réalisation des objectifs
fondamentaux suivants : [g) Des salaires équitables, des possibilités d'emploi et des conditions de travail acceptables
pour tous.
143 Avis consultatif OC‐10/89, supra, paragraphe 43. 43.
144 Avis consultatif OC‐10/89, supra, paragraphes 43 et 45. 43 et 45.
37
[Traduction non officielle]
Document no 325
Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie, Sur le
cas concernant la vérification de constitutionnalité de
l’article 12 de la Loi de l'URSS du 9 octobre 1989 «Sur
l’ordre de règlement des conflits collectifs de travail»
(1995)

Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie, Sur le cas concernant la vérification de
constitutionnalité de l’article 12 de la Loi de URSS du 9 octobre 1989 «Sur l’ordre de règlement des
conflits collectifs de travail», 17 mai 1995
Constitution de la République Fédérale de Russie
Article 15, paragraphe 4
Les principes et normes universellement reconnus du droit international et les traités internationaux de la
Fédération de Russie sont partie intégrante de son système juridique. Si d’autres règles que celles prévues
par la loi sont établies par un traité international de la Fédération de Russie, les règles du traité international
prévalent.
Article 17, paragraphe 1
Dans la Fédération de Russie les droits et libertés de l’homme et du citoyen sont reconnus et garantis
conformément aux principes et normes universellement reconnus du droit international et en conformité avec
la présente Constitution.
Pays:
RUSSIE, FÉDÉRATION DE
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traité ratifié
Loi limitant l’exercice du droit de grève/ Saisine de la Cour constitutionnelle pour inconstitutionnalité de la loi/
Analyse des dispositions nationales et internationales pertinentes/ Interprétation de la constitutionnalité de la loi à
la lumière du droit international
Le personnel navigant de plusieurs compagnies aériennes avait fait grève. Celle-ci avait été jugée illégale par des
juridictions de droit commun. Elles estimaient en effet que la grève du personnel navigant était contraire à la loi
relative aux modalités de règlement des conflits de travail en Russie . Cette dernière fit l’objet d’un recours devant
la Cour constitutionnelle afin de faire reconnaître son inconstitutionnalité.
La Cour constitutionnelle s’est référée en premier lieu aux dispositions constitutionnelles qui reconnaissent la
légitimité du droit de grève mais autorisent le législateur à le limiter pour certaines catégories. La Cour a ajouté
que ces dispositions constitutionnelles étaient en accord avec le droit international et que ce dernier devait servir
de guide au législateur dans la détermination des restrictions pouvant être apportées au droit de grève:
«La restriction de ces droits ne contredit pas les principes et règles généralement acceptés du droit international.
Ainsi, donnant suite aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels,
l’interdiction du droit de grève est admissible vis-à-vis des personnes membres des forces armées, de la police et
de la fonction publique (partie 2 de l’article 8) . Vis-à-vis des autres personnes, les restrictions ne sont possibles
que si elles sont nécessaires dans une société démocratique, dans l’intérêt de la sécurité ou de l’ordre public ou
pour protéger les droits et les libertés d’autrui. (Paragraphe c de la partie 1 de l’article 8). En outre, les instruments
internationaux relatifs aux droits de l’homme attribuent la réglementation du droit de grève à la sphère de la
législation interne. Cette législation ne doit toutefois pas aller au-delà des restrictions autorisées par ces actes.»
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Après avoir pris en considération les sources de droit nationales et internationales, la Cour constitutionnelle a
estimé qu’une restriction du droit de grève du personnel volant était licite. Cependant l’article incriminé de la
législation était inconstitutionnel dans la mesure où il n’introduisait pas assez de différences entre les différentes
catégories de personnels travaillant dans l’aviation civile, étendant ainsi excessivement le champ de la restriction
du droit de grève.
La Cour a enjoint l’Assemblée Fédérale de Russie a reformuler l’article de la loi relatif aux restrictions au droit de
grève en prenant en compte les articles pertinents de la Constitution nationale et les principes et règles
généralement acceptés du droit international afin de déterminer l’ampleur des restrictions pouvant être apportées
au droit de grève.
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966.
Loi du 9 octobre 1989 sur le règlement des conflits de travail collectifs.
Article 37 4) de la Constitution de la Fédération de Russie: «Le droit aux conflits du travail, individuels et collectifs,
en recourant aux moyens de règlement établis par la loi fédérale y compris le droit de grève, est reconnu.»
Article 8 1) d), du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels: «1. Les États parties au
présent Pacte s’engagent à assurer: (…) Le droit de grève, exercé conformément aux lois de chaque pays.»
Article 8 2) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels: «Le présent article
n’empêche pas de soumettre à des restrictions légales l’exercice de ces droits par les membres des forces
armées, de la police ou de la fonction publique.»
Article 55 2) de la Constitution de la Fédération de Russie: «Dans la Fédération de Russie ne doivent pas être
adoptées de lois supprimant ou restreignant les droits et libertés de l’homme et du citoyen.»
Article 55 3) de la Constitution de la Fédération de Russie: «Les droits et libertés de l’homme et du citoyen ne
peuvent être limités par la loi fédérale que dans la mesure nécessaire pour protéger les fondements de l’ordre
constitutionnel, de la moralité, de la santé, des droits et des intérêts légaux d’autrui, la garantie de la défense et de
la sécurité de l’État.»
Texte intégral de la décision
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Document no 326
Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, South
African National Defence Union c. ministre de la
Défense, n° CCT 27/98 (1999)

Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, South African National Defence Union c. Ministre de la
Défense, 26 mai 1999, n° CCT 27/98
Pays:
AFRIQUE DU SUD
Sujet:
Droit de grève , Liberté syndicale
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés
Saisine de la Cour constitutionnelle pour déclarer inconstitutionnelles les dispositions de la loi interdisant aux
membres des forces armées de se syndiquer/ Importance de prendre en compte les conventions de l’OIT/
Interprétation de la Constitution nationale à la lumière du droit international
Saisie d’une demande en ce sens, la Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud devait déterminer s’il était
constitutionnel d’interdire aux membres des forces armées de participer à des actions de protestations publiques et
de s’affilier à un syndicat. La Cour avait choisi d’examiner, dans un premier temps, si la législation incriminée
portait atteinte à des droits protégés par la Constitution. En cas de réponse positive, elle aurait dû ensuite décider
si l’atteinte à ces droits était justifiée ou non.
L’article 23 2) de la Constitution nationale énonce: «Chaque travailleur a le droit: 1) de former et de s’affilier à un
syndicat 2) de participer aux activités et programmes du syndicat et 3) de faire la grève.»
Afin de déterminer si la loi portait atteinte aux droits protégés par la Constitution, la Cour a cherché à déterminer si
l’article 23 2) de la Constitution s’appliquait aux forces armées. À cette fin, la juridiction s’est interrogée sur le sens
du mot «travailleur» contenu dans cette disposition en recherchant s’il englobait effectivement l’ensemble des
personnes occupant un emploi. Pour interpréter l’article 23 de la Constitution, la Cour a estimé que les conventions
et les recommandations de l’OIT étaient utiles:
«La section 39 de la Constitution prévoit que lorsqu’une juridiction doit interpréter le chapitre 2 de la Constitution,
elle doit prendre en considération le droit international. À mon avis, les conventions et recommandations de
l’Organisation internationale du Travail, une des plus anciennes organisations internationales existante, sont des
ressources importantes pour examiner la signification et le champ couvert par la notion de «travailleur» (…)»
La Cour a cité les articles 2 et 9 1) de la convention n° 87 et en a conclu:
«D’après ces dispositions, il est clair que la convention inclut les forces armées et la police dans son champ
d’application mais que l’étendue de l’application de ces dispositions est une question relevant de la loi nationale et
n’est pas régie directement par la convention.»
La Cour constitutionnelle a noté que la convention n° 98 suivait la même approche et a conclu:
«L’OIT considère que les membres des forces armées et de la police sont des travailleurs aux termes de la
convention, mais estime que leurs fonctions sont particulières, allant jusqu’à laisser la possibilité aux états
membres de déterminer l’étendue de l’application des dispositions de la convention aux policiers et aux forces
armées.»
Adoptant la même approche que les conventions n 87 et 98 de l’OIT, la Cour a considéré que le mot «travailleur»
de l’article 23 2) de la Constitution s’appliquait également aux membres des forces armées mais que ces dernières
pouvaient voir leurs droits restreints par la législation nationale. Conformément à l’article 36 de la Constitution
nationale, la Cour a ensuite déterminé si la limitation de ce droit par la législation était raisonnable et justifié dans
une société ouverte et démocratique.
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La Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud a estimé que l’interdiction totale des syndicats ne remplissait pas cette
dernière condition et a suspendu l’article interdisant aux membres des forces armées de constituer ou de s’affilier à
des syndicats. La Cour a en revanche conclu que l’interdiction du droit de grève au sein des forces armées était
conforme à la Constitution.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) de
l’OIT sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
Article 2 de la convention n° 87: «Les travailleurs et les employeurs, sans distinction d'aucune sorte, ont le droit,
sans autorisation préalable, de constituer des organisations de leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces
organisations, à la seule condition de se conformer aux statuts de ces dernières.»
Article 9 1) de la convention n° 87: «La mesure dans laquelle les garanties prévues par la présente convention
s'appliqueront aux forces armées et à la police sera déterminée par la législation nationale.»
Texte intégral de la décision
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Document no 327
Cour constitutionnelle de Colombie, Quatrième chambre
de révision des tutelles, Sindicato de los Trabajadores de
las Empresas Varias de Medellín c. le ministère de l’Emploi
et de la Sécurité sociale, ministère des Relations
extérieures, Mairie de Medellín et Empresas Varias de
Medellín E.S.P., T-568/99 (1999)

Cour constitutionnelle de Colombie, Quatrième chambre de révision des tutelles, Sindicato de los
Trabajadores de las Empresas Varias de Medellín c. le Ministère de l’Emploi et de la Sécurité sociale,
Ministère des relations extérieures, Mairie de Medellín et Empresas Varias de Medellín E.S.P., 10
août 1999, T-568/99
Constitution nationale de Colombie
Article 53
(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).
Article 93, paragraphe 1
Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et
interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.
Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur
les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.
Pays:
COLOMBIE
Sujet:
Licenciement , Protection contre la discrimination dans l’emploi et la profession , Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés; instruments non soumis à ratification; travaux des organes de contrôle
Droit de grève/ Licenciements antisyndicaux découlant de la déclaration d’illégalité d’une grève par l’autorité
administrative/ Application directe du droit international pour écarter une disposition nationale moins protectrice du
droit des travailleurs
Des travailleurs introduisirent une action en justice réclamant leur réintégration suite à leur licenciement consécutif
à la participation à une grève déclarée illégale par les autorités administratives.
Le cas, qui avait déjà été antérieurement tranché par les tribunaux colombiens, avait, dans l’intervalle fait l’objet
d’une décision du Comité de la liberté syndicale de l’OIT invitant le gouvernement à réintégrer à leur poste les
travailleurs licenciés pour avoir participé à la grève précitée . Pour fonder leur nouveau recours, les demandeurs
s’appuyèrent sur la recommandation du Comité de la liberté syndicale. La demande fut toutefois rejetée sur le fait
que le syndicat avait déjà précédemment épuisé toutes les instances ordinaires et sur le fondement que les
décisions du Comité de la liberté syndicale n’étaient pas juridiquement obligatoires. Voyant leur requête rejetée, les
travailleurs introduisirent alors le présent recurso de amparo.
Afin de déterminer si les licenciements pour participation à une grève déclarée illégale par les autorités
administratives constituaient des licenciements antisyndicaux contraires à la Constitution nationale , la Cour
constitutionnelle se référa aux conventions n 87 et 98 de l’OIT . Elle considéra que la déclaration d’illégalité
d’une grève par les autorités administratives avait privé les travailleurs de la garantie d’impartialité et de protection
contre la discrimination antisyndicale.
De plus, la Cour reconnut une force obligatoire aux décisions du Comité de la liberté syndicale, concluant que les
recommandations que celui-ci formule et soumet au Conseil d’administration de l’OIT constituent un ordre
contraignant pour le gouvernement colombien, et estima ce qui suit: «[Le Comité] est l’organe qui peut émettre des
recommandations à caractère obligatoire selon les normes qui régissent l’organisation.»
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Elle ajouta que «dans le cas d’espèce, le Conseil reçut le rapport du Comité et ses recommandations et le publia
dans son rapport officiel (...).» «En vertu de sa qualité de partie au traité constitutionnel de l’OIT, la Colombie est
tenue d’honorer les recommandations du Conseil d’administration.»
Pour fonder sa décision en relation avec le licenciement antisyndical, la Cour se prononça en ces termes:
«(…) le syndicat ne fut pas informé de la procédure qui vérifia la cessation du travail et qui fut mise en oeuvre par
le Ministère de l’emploi et de la sécurité sociale avec la participation de l’employeur mais pas des travailleurs. (…)
cette procédure viole le droit de participation des travailleurs affiliés au syndicat (tant de ceux qui participèrent à la
grève que de ceux qui s’abstinrent) et du syndicat demandeur, ainsi que les conventions n° 87 et 98 de la OIT, qui
font partie du bloc de constitutionnalité.
(…) il convient également d’inclure la Constitution de l’OIT et les conventions n 87 et 98 sur la liberté syndicale
(traité et conventions dûment ratifiés par le Congrès, qui prévoient des droits qui ne peuvent être suspendus,
même en cas d’état d’exception), ainsi que les articles pertinents de la Déclaration universelle des droits de
l’homme, le Pacte international des droits économiques, sociaux et culturels et la Convention américaine des droits
de l’homme. On compara ceux-ci avec les articles 430 et 450 du Code du travail car c’est sur ces derniers que le
licenciement avait été fondé et, évidemment, avec la recommandation du Comité de la liberté syndicale de
l’Organisation internationale du travail.»
Par conséquent, la Cour constitutionnelle de Colombie appliqua les conventions n 87 et 98 de l’OIT et la
recommandation du Comité de la liberté syndicale, octroyant à celle-ci un caractère obligatoire, pour déterminer la
violation de la Constitution nationale. Sur ce fondement la Cour déclara la nullité des licenciements et la
réintégration des travailleurs licenciés, ainsi que la reconnaissance des salaires et prestations qui restaient à
percevoir.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) de
l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949; Pacte international des droits économiques,
sociaux et culturels, 1949; Convention américaine relative aux droits de l’homme (« Pacte de San José de Costa
Rica »), 1969.
Constitution de l’OIT, 1919; Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT.
Plainte contre le gouvernement colombien déposée par le Syndicat des travailleurs des Empresas Varias
Municipales de Medellín (EEVVMM), étant comme demandeurs dans la présente affaire (BIT: Rapport du Comité
de la liberté syndicale, cas 1916, 309 rapport, Bulletin officiel, vol. LXXXI, série B, n° 1, Genève, 1998).
Les articles 39 et 56 de la Constitution de Colombie consacrent expressément les droits d’association,
d’organisation et de grève, tandis que les articles 53 et 93 de la Carta Magna stipulent expressément que les
conventions internationales du travail font partie intégrante de la législation nationale et octroient aux traités
internationaux sur les droits de l’homme la primauté par rapport aux dispositions nationales.
En vertu de la Constitution de Colombie, les conventions internationales du travail dûment ratifiées font partie de
la législation nationale (article 53) et les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant
les droits de l’homme et interdisant leur limitation à des cas exceptionnels, priment la législation nationale (article
93). Comme on peut le voir, les traités sur les droits de l’homme s’intègrent dans la législation nationale avec rang
supérieur.
BIT: Rapport du Comité de la liberté syndicale, cas 1961, 309 rapport, op. cit.
Texte intégral de la décision
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Document no 328
Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, NUMSA c.
Bader Bop, n° CCT 14/02 (2002)

Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud, NUMSA c. Bader Bop, 13 décembre 2002, n° CCT 14/02
Pays:
AFRIQUE DU SUD
Sujet:
Droit de grève , Liberté syndicale , Négociation collective
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
traités ratifiés; travaux des organes de contrôle internationaux
Moyens d’action des syndicats minoritaires/ Importance des conventions et des travaux des organes de contrôle
de l’OIT dans l’interprétation du droit national/ Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Un syndicat minoritaire avait voulu organiser une grève pour se voir reconnaître le droit de disposer d’un délégué
d’usine. La législation sud-africaine prévoyait que les syndicats suffisamment représentatifs pouvaient chercher à
faire valoir leurs droits d’organisation par la médiation, l’arbitrage ou la grève. La loi était cependant muette sur les
moyens d’action des syndicats minoritaires. L’entreprise avait saisi la justice pour faire interdire cette grève.
D’après l’interprétation du Code du travail faite par la Cour d’appel, un syndicat minoritaire n’avait pas le droit
d’organiser une grève. Le syndicat saisit la Cour constitutionnelle.
Avant de considérer le fond du litige, la Cour constitutionnelle a défini les règles de droit applicables au litige. À
cette occasion, elle a constaté que la loi sud-africaine relative aux syndicats était censée mettre en oeuvre les
obligations de l’Afrique du Sud en tant qu’État membre de l’Organisation internationale du Travail et qu’en ce sens
la législation nationale devait être interprétée en conformité avec les obligations de droit international public de
l’État. En l’espèce, la Cour a considéré que les conventions de l’OIT n° 87 sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical et n° 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective devaient être prises en compte .
Après avoir cité les articles pertinents de ces deux conventions, la Cour constitutionnelle a expliqué les fonctions
du Comité de la liberté syndicale de l’OIT. La haute juridiction a estimé:
«Par conséquent, ces décisions constituent des développements faisant autorité vis-à-vis des principes relatifs à la
liberté syndicale contenus dans les conventions de l’OIT.»
La Cour s’est alors penchée sur la «jurisprudence» des deux organes de contrôle relative à la grève et aux moyens
d’action dont disposent les syndicats. Elle a tenu à préciser que:
«Ces principes tirés de la jurisprudence des deux organes sont d’une pertinence directe pour l’interprétation des
dispositions de la loi ainsi que de la Constitution.»
Selon la Cour, la reconnaissance de moyens d’action aux syndicats minoritaires apparaissait plus conforme à la
«jurisprudence» des deux organes de contrôle de l’OIT. En outre, selon elle cette interprétation présentait l’intérêt
de ne pas restreindre des droits protégés par la Constitution.
La Cour a alors considéré que l’interprétation du Code du travail adoptée par le Tribunal du travail était plausible
mais qu’elle ne prenait pas assez en compte les orientations du droit international:
«Il [le Tribunal] ne prend pas assez en compte les considérations émanant de la discussion sur les conventions de
l’OIT (...), et en particulier, [son interprétation de la loi] n’empêche pas la restriction des droits constitutionnels. La
question à laquelle nous devons répondre est de savoir si la loi peut être interprétée d’une façon qui évite de
restreindre les droits constitutionnels.»
Par conséquent, la Cour constitutionnelle a recherché une interprétation de la loi limitant les atteintes portées aux
droits constitutionnels. Elle a estimé que les syndicats minoritaires pouvaient chercher à se voir reconnaître des
droits par la négociation collective. Pour la Cour:
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«Une meilleure lecture est de voir la section 20 comme une confirmation expresse des droits internationalement
reconnus des syndicats minoritaires de chercher, à travers les techniques de la négociation collective, à profiter de
l’accès au lieu de travail, de la reconnaissance du délégué d’usine aussi bien que d’autres facilités
organisationnelles.»
La Cour a alors estimé que lorsque des employeurs et des syndicats avaient le droit de négocier sur un sujet, la
présomption naturelle était que ces derniers disposaient également du droit de grève sur le même thème.
La Cour constitutionnelle d’Afrique du Sud a ainsi reconnu que les syndicats minoritaires pouvaient chercher à se
voir reconnaître certains droits à travers la négociation collective et, qu’en cas d’échec de cette dernière, ils avaient
le droit de faire grève.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) de
l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
Commission d’experts pour l’application des conventions et des recommandations de l’OIT; Comité de la liberté
syndicale de l’OIT.
La Cour constitutionnelle a également nommé, sans les utiliser, la convention (n° 135) de l’OIT concernant les
représentants des travailleurs, 1971, et la convention (n° 154) de l’OIT sur la négociation collective, 1981. L’Afrique
du Sud n’a pas ratifié ces conventions.
Section 20 du chapitre 3 sur la négociation collective, partie À du Code du travail: «Rien dans cette partie ne fait
obstacle à la conclusion d’accords collectifs qui réglementent les droits organisationnels.»
Texte intégral de la décision
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Document no 329
Cour constitutionnelle du Pérou, Juan José Gorriti
et plus de cinq mille citoyens c. Congrès national, affaire
n° 008-2005-PI/TC (2005)

Cour constitutionnelle, Juan José Gorriti et plus de cinq mille citoyens c. Congrès national, 12 août
2005, affaire n° 008-2005-PI/TC
Constitution du Pérou
Article 3
L’énumération des droits établis à ce chapitre ne porte pas préjudice aux autres droits garantis par la
Constitution, ni à ceux de nature analogue ou basés sur la dignité de l’être humain ou sur les principes de
souveraineté du peuple, de l’État démocratique de droit et de la forme républicaine de gouvernement.
Article 55
Les traités ratifiés par l’État et en vigueur font partie du droit national.
Article 56
Les traités doivent être approuvés par le Congrès avant leur ratification par le Président de la République,
chaque fois qu’ils traitent des matières suivantes:
1. Droits de la personne; 2. Souveraineté, frontières ou intégrité de l’État; 3. Défense nationale; 4. Obligations
financières de l’État.
Article 57, paragraphe 2
Lorsque le traité affecte des dispositions constitutionnelles, il doit être approuvé par le biais de la même
procédure régissant la réforme de la Constitution, avant d’être ratifié par le Président de la République.
Disposition finale transitoire n° 4
Les normes relatives aux droits et libertés que la Constitution reconnaît sont interprétées en conformité avec
la Déclaration universelle des droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux traitant des
mêmes matières ratifiés par le Pérou.
Loi Péruvienne sur les procédures du travail (n ° 29497 de 2010)
Disposition supplémentaire n° 10
En vertu de la quatrième disposition finale et transitoire de la Constitution politique du Pérou, les droits
sociaux, individuels et collectifs doivent être interprétés en conformité avec la Déclaration universelle des
droits de l’homme et avec les traités et accords internationaux en la matière ratifiés par le Pérou, sans
préjudice de la consultation des avis des organes de contrôle de l’Organisation internationale du Travail (OIT)
et des opinions ou décisions adoptés par les tribunaux internationaux constitués selon des traités auxquels le
Pérou est partie.
Pays:
PÉROU
Sujet:
Droit de grève , Liberté syndicale , Négociation collective
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés1
Liberté syndicale/ Négociation collective/ Droit de grève/ Résolution directe du litige sur le fondement du droit
international
Dans cette action en inconstitutionnalité contre la loi n° 28175 «loi-cadre de la fonction publique», les requérants
alléguèrent que ladite loi contrevenait à la Constitution péruvienne, dans la mesure où son article 15 n’énumérait
pas, parmi les droits des fonctionnaires publics, les droits syndical, de négociation collective et de grève. Pour sa
défense, le Congrès national allégua que le fait que la loi n’énumérait pas ces droits ne signifiait pas qu’elle les
ignorait, étant donné que ces droits sont reconnus dans la Constitution et les conventions internationales.
La Cour conclut qu’il n’existait pas de violation des normes constitutionnelles. Aux yeux de la Cour, les droits
reconnus par la loi n° 28175 n’étaient pas exhaustifs et n’impliquaient pas l’ignorance des droits reconnus dans
d’autres dispositions légales. Pour étayer ses arguments, la Cour se fonda sur des normes nationales et
internationales, notamment la convention n° 87 de l’OIT, lesquelles font partie, aux termes de la Constitution, de
l’ordre juridique. À cet égard, la Cour signala que:
«De même, conformément à la quatrième disposition finale et transitoire de la norme suprême, les traités
internationaux en matière de droits de l’homme devront être appliqués pour l’interprétation des droits et libertés
consacrés par la Constitution en matière de travail. En effet, les droits du travail des fonctionnaires mentionnés par
les requérants devront être interprétés conformément aux dispositions de l’article 9 de la convention n° 87 sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical et de l’article 8 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels, (…) entre autres.»
Dans le cas spécifique du droit de négociation collective, la Cour signala que ledit droit était soumis à des limites,
ce qui est reconnu par la convention n° 151 de l’OIT. Dans le cas péruvien, la négociation collective de l’État avec
les fonctionnaires publics était limitée pour des raisons budgétaires:
«L’article 7 de ladite convention (n° 151) stipule que des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si
nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de
procédures permettant la négociation des conditions d'emploi entre les autorités publiques intéressées et les
organisations d'agents publics (…). En effet, dans les conditions nationales auxquelles la convention n° 151 fait
référence, la Constitution établit certaines normes liées au budget public (…). Pour cette raison, dans le cas des
négociations collectives des fonctionnaires publics, elles devront s’effectuer en tenant compte de la limite
constitutionnelle qu’impose un budget équilibré et équitable.»
En conclusion, sur la base de la convention n° 87 de l’OIT, la Cour détermina que la loi permettait l’exercice des
droits d’association, de grève et de négociation collective aux fonctionnaires publics; bien que le droit de
négociation soit soumis à des limites constitutionnelles, lesquelles étaient conformes aux dispositions de la
convention n° 151 de l’OIT.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 151) de
l’OIT sur les relations du travail dans la fonction publique, 1978.
Page 33 de la décision.
Page 35 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 330
Cour d’appel de Bobo-Dioulasso, Chambre sociale, MM.
Karama et Bakouan c. la société industrielle du
Faso (SIFA), n° 035 (2006)

Cour d'appel de Bobo-Dioulasso Chambre sociale, M.M. Karama et Bakouan c. la société industrielle
du Faso (SIFA), 5 juillet 2006, n° 035
Constitution du Burkina Faso
Article 151
Les traités et accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à
celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie.
Pays:
BURKINA FASO
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traité ratifié; travaux des organes de contrôle internationaux
Grève générale/ Légalité de la grève/ Référence à la convention n° 87 de l'OIT/ Interprétation des dispositions du
droit national à la lumière de la convention n° 87 de l'OIT et du drit international
À l'initiative de plusieurs centrales syndicales du Burkina-Faso, un préavis de grève de 48 heures des travailleurs
du secteur public et du secteur privé avait été déposé auprès du Chef de l'État et du Directeur général de l'Emploi,
du travail et de la sécurité sociale en vue d'une grève sur toute l'étendue du territoire national. Bien que le préavis
ait été notifié à leur employeur, deux travailleurs du secteur privé avaient été licenciés pour avoir participé à cette
grève.
Le tribunal du travail de Bobo-Dioulasso ayant déclaré les licenciements légitimes, ces travailleurs ont saisi la Cour
d'appel devant laquelle ils ont fait valoir que la grève dans le secteur privé était une grève de solidarité qui tirait sa
légalité de la grève du secteur public dont elle était solidaire. L'employeur a prétendu au contraire que les
dispositions du code du travail prohibaient dans le secteur privé toute grève qui ne s'inscrivait pas dans le cadre de
l'entreprise et, qu'en l'espèce, la grève, qui était mue par des motifs extérieurs à l'entreprise, était illicite.
La Cour d'appel, après avoir constaté que la grève était une grève générale nationale concernant tous les secteurs
et comprenant un certain nombre de revendications liées aux salaires, aux impôts et aux droits des travailleurs,
s'est référée à la convention n° 87 de l'OIT. Expliquant le fondement de son raisonnement, elle a rappelé, d'une
part, que :
«Le principe de l'interprétation conforme permet de présumer que le législateur n'a pas violé ou ne veut pas violer
l'esprit des traités internationaux qu'il a ratifiés »,
d'autre part :
«Que le juge a la possibilité de se référer auxdits instruments internationaux et aux commentaires des experts en
cas de contradictions, insuffisances, lacunes ou recul par rapport à l'avancée préconisée dans les traités ».
Faisant application de ces principes, la Cour d'appel a considéré que la grève, qui était une grève générale fondée
sur des intérêts professionnels et économiques et visant la recherche de solutions à des questions de politiques
sociales, était légitime et licite conformément aux affirmations du Comité de la liberté syndicale du Conseil
d'Administration du Bureau International du Travail dans le Recueil de décisions et de principes.
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Elle a ensuite jugé que, bien que le législateur national n'ait pas expressément prévu de mécanisme de
déclenchement de grève dans ce cas de figure, la grève ainsi déclenchée dans le secteur privé tirait sa légalité de
celle déclenchée dans le secteur public en conformité avec la loi nationale. Pour conforter cette analyse, elle s'est
référée à nouveau aux affirmations du comité de la liberté syndicale du Conseil d'Administration du BIT en
relevant, qu'en l'espèce, aucune juridiction ni aucun organe indépendant de l'Administration partie concernée à la
grève n'avait été saisi pour apprécier sa légalité ou son illégalité.
Interprétant ainsi les dispositions du droit national en matière de grève à la lumière de la convention ° 87 de l'OIT et
du Recueil du Comité de la Liberté syndicale, la Cour d'appel a ainsi jugé la grève légitime et légale et a déclaré
abusif le licenciement de chacun des demandeurs.
Convention (n°87) de l'OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT.
BIT : La liberté syndicale, Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil
d'Administration du BIT, quatrième édition (révisée), (Genève, 1996), paragraphe 494. Dans la version actualisée
dudit Recueil (cinquième édition (révisée), 2006) voir paragraphe 543.
Op. cit.., paragraphes 522 et suivants. Dans la version actualisée dudit Recueil (cinquième édition (révisée),
2006) voir paragraphes 628 et suivants.
Texte intégral de la décision
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Document no 331
Tribunal arbitral, Fiji Electricity et Allied Workers Union c.
Fiji Electricity Authority, FJAT 62; FJAT Award 24 (2006)

Tribunal arbitral des Fidji, Fiji Electricity et Allied Workers Union c. Fiji Electricity Authority, 9 mai
2006, [2006] FJAT 62; FJAT Award 24 of 2006
Pays:
FIDJI
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés; travaux des organes de contrôle internationaux
Considération du paiement d’une prime à certains travailleurs en échange d’un accord « ni grève, ni fermeture
patronale »/ Considération du droit de grève dans le droit national et international/ Interprétation du droit national à
la lumière du droit international
Cette affaire découle d’un litige entre le Fiji Electricity and Allied Workers Union et la Fiji Electricity Authority sur le
registre des doléances 2004 du syndicat pour la signature d’une convention collective et d’autres questions liées
au travail. Les demandes en suspens du syndicat, consignées dans le registre des doléances et sur lesquelles le
tribunal arbitral était appelé à statuer, portaient sur les jours fériés, le travail en pauses et une prime de 200 dollars
fidjiens.
Seule la considération par le tribunal de la troisième demande fit l’objet d’une référence au droit international. La
troisième demande portait sur le fait que l’autorité versait une prime annuelle de 200 dollars fidjiens aux
« travailleurs payés à l’heure » effectuant des travaux de nature électrique et affiliés à l’Electrical Trade Union
(« ETU »). Ces travailleurs étaient couverts par une convention collective distincte, qui contenait une clause
prévoyant le paiement de la prime chaque année en échange de la conclusion d’un accord « ni grève ni fermeture
patronale ».
Le Fiji Electricity and Allied Workers Union argua que les travailleurs qu’il représentait effectuaient un travail
similaire à ceux affiliés à l’ETU. Il demanda l’inclusion dans la convention collective signée entre les parties une
clause prévoyant le paiement de la prime de 200 dollars fidjiens chaque année. La convention collective proposée
ne contenait pas de référence à un accord « ni grève ni fermeture patronale ». L’autorité rejeta cette demande.
Dans ce contexte, le tribunal nota que la section 33 de la Constitution des Fidji octroyait aux travailleurs le droit de
créer et d’adhérer au syndicat de leur choix et le droit de s’organiser et de négocier collectivement. Il nota
également que la liberté syndicale et le droit de négociation collective faisaient l’objet des conventions n 87 et 98
de l’OIT, que les Fidji avaient ratifiées respectivement en 2002 et 1974.
Le tribunal statua en ces termes:
« Bien que le droit de grève ne soit pas spécifiquement mentionné dans sa Constitution ni reconnu par les
conventions n 87 et 98, les organes de contrôle de l’OIT ont publié quelques lignes directrices sur le sujet. Il est
désormais accepté que le droit de grève est un des moyens essentiels à la disposition des travailleurs et de leurs
organisations pour la promotion et la protection de leurs intérêts économiques et sociaux. » (Commission
d’experts, Observations générales 1983, paragraphes 200 et 205).
Le tribunal ajouta que, par conséquent, il était accepté que le droit de grève est un droit étendu aux travailleurs en
vertu de la section 33 de la Constitution, et que la même section énumérait certaines circonstances dans
lesquelles une loi pouvait limiter le droit de grève.
Le tribunal nota encore:
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« Les travailleurs affiliés à l’ETU sont actifs dans la prestation de services dans le secteur de l’électricité. En vertu
de la législation, ce secteur est considéré comme un service essentiel, classification acceptée par les normes de
l’OIT. Par conséquent, le droit de grève de ces travailleurs est limité par la législation et, plus généralement, les
restrictions sont conformes aux normes de l’OIT. Le tribunal ne peut donc recommander un accord contraignant
pour un groupe de travailleurs dont le droit de grève est déjà limité, en particulier quand ce droit est abandonné
pour à peine 200 dollars par an.
Le tribunal décide donc que la prime de 200 dollars doit également être versée aux travailleurs affiliés au syndicat
et dont la convention collective contient une clause démontrant un engagement en faveur d’une approche
raisonnable de l’exercice du droit de grève. »
Le tribunal ordonna le paiement de la prime aux travailleurs affiliés à la Fiji Electricity and Allied Workers Union,
avec effet rétroactif à partir de 2003.
L’utilisation des commentaires de la Commission d’experts de l’OIT a aidé le tribunal à définir les droits
constitutionnels des travailleurs que sont la liberté syndicale et la négociation collective, comme incluant le droit
qualifié de grève.
Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949.
Pages 3-4 de la décision.
Le tribunal déclara que ces restrictions sont fixées par la loi sur les litiges professionnels (Trade Disputes Act Cap
97).
Page 4 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 332
Cour constitutionnelle de Colombie, décision C-858/08
(2008)

Cour constitutionnelle, 3 septembre 2008, décision C-858/08
Constitution nationale de Colombie
Article 53
(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).
Article 93, paragraphe 1
Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et
interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.
Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur
les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.
Pays:
COLOMBIE
Sujet:
Droit de grève , Liberté syndicale
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traité ratifié; travaux des organes de contrôle internationaux
Liberté syndicale/ Droit de grève/ Légitimité et droit de grève/ Limites du droit de grève/ Revendications défendues
par la grève/ Grève politique/ Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Une action publique pour inconstitutionnalité a été entamée à l’encontre des articles 429 et 450 du Code du travail
qui conféraient à la grève une finalité économique et professionnelle, et qui établissaient qu’elle serait illégale si
elle poursuit d’autres objectifs. Les normes partiellement incriminées du Code du travail violeraient Constitution
nationale ainsi que les différents instruments internationaux puisqu’elles empêchent de façon discriminatoire et
irraisonnable les travailleurs membres de syndicats, de fédérations et de confédérations de mener des grèves pour
des motifs d’autre nature, oubliant que la Constitution ne fait aucune distinction en la matière qui pourrait être
pertinente pour adopter cette position.
Pour éclaircir la question juridique de cette affaire, la Cour a fait référence à la portée et à la signification de la
garantie constitutionnelle du droit de grève au sein du système juridique colombien. La cour a présenté les
conclusions suivantes:
« […] Les constituants ont bien défini les contours de la garantie du droit de grève, notamment son caractère
relatif, lorsque son exercice est conditionné au champ d’application des lois qui le régissent; ces dernières
devraient, au moment de le développer, tenir compte de son caractère éminemment professionnel, collectif,
universel et pacifique, et surtout du fait que son objectif est avant tout de défendre les intérêts économicoprofessionnels
des travailleurs. »
Par la suite, la Cour a tenté de déterminer quelles étaient les revendications défendues par la grève garanties par
les principes établis par le Comité de la liberté syndicale et la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations de l’OIT. La Cour s’est référée aux commentaires du Comité à propos du droit de
grève, en le définissant comme un corollaire découlant du droit syndical protégé par la Convention de l’OIT n° 87,
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en tant que l’un des droits fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations, « uniquement dans la mesure
où il constitue une façon de promouvoir et de défendre leurs intérêts économiques et sociaux ». Elle a en outre
rappelé que:
« […] Le Comité de la liberté syndicale a estimé que « les grèves purement politiques [...] ne tombent pas dans le
champ d’application des principes de la liberté syndicale ». Tout en indiquant que « ce n’est que dans la mesure où
elles prendront soin de ne pas conférer à leurs revendications professionnelles un caractère nettement politique
que les organisations pourront légitimement prétendre à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à leurs activités ». […]
Toutefois, selon ce même Comité, les travailleurs et leurs organisations doivent pouvoir manifester le cas échéant
leur mécontentement sur des questions économiques et sociales touchant aux intérêts de leurs membres, […]
[mais leur] action doit se limiter toutefois à l’expression d’une protestation sans viser à troubler la tranquillité
publique.
[…] De la même façon, la Commission a estimé que les organisations chargées de défendre les intérêts socioéconomiques
et professionnels des travailleurs devraient, en principe, pouvoir utiliser la grève pour appuyer leur
position dans la recherche de solutions aux problèmes posés par les grandes orientations de politique économique
et sociale qui ont des répercussions immédiates pour leurs membres et, plus généralement, pour les travailleurs,
notamment en matière d’emploi, de protection sociale et de niveau de vie. »
A la lumière des observations de la Commission d’Experts et du Comité de la liberté syndicale de l’OIT, la Cour a
conclu que ces articles mis en cause, interprétés de manière stricte, ne violaient pas le texte de la Constitution.
Finalement, elle a décidé de déclarer les dispositions constitutionnelles, mais en conditionnant son interprétation
au fait que les objectifs de la grève (économiques et professionnels) n’excluent pas la grève liée à l’expression de
positions sur des politiques sociales, économiques ou sectorielles qui influent directement sur l’exercice de
l’activité, de la profession, de l’occupation ou du poste correspondant.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT; Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations de l’OIT.
Paragraphe 5 de la décision.
Paragraphe 4 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 333
Haute Cour de Lobatse, Botswana Public Employees’
Union et autres c. ministère du Travail et des Affaires
intérieures et autres, MAHLB-000674-11 (2012)

Haute Cour de Lobatse, Botswana Public Employees’ Union et autres c. Ministère du Travail et des
Affaires intérieures et autres, MAHLB-000674-11, 9 août 2012
Pays:
BOTSWANA
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés; jurisprudence étrangère
Droit de grève/ Services essentiels /Interprétation du droit national à la lumière du droit international
Des syndicats enregistrés représentant différentes catégories de travailleurs du secteur public demandèrent
l’invalidation de l’article 49 de la loi sur les différends du commerce (Trade Disputes Act, « TDA ») et de
l’amendement de l’annexe de cette loi, introduit au moyen de l’instrument statutaire n° 57 de 2011 (« SI 57 ») par le
ministre du Travail et des Affaires intérieures, qui établit la liste des services essentiels. Par cette modification, la
liste des services essentiels avait été étendue de manière à inclure les services vétérinaires, les services de taille,
de tri et de vente de diamants et les services d’enseignement.
La Cour entendit la position des requérants selon laquelle l’article 49 de la TDA était inconstitutionnelle parce que
la Constitution attribue le pouvoir de légiférer au Parlement et aborda les trois arguments concernant la nullité du
SI 57 avancés par les requérants. Tout d’abord, les requérants soutenaient que le SI 57 était « ultra vires de
l’article 49 de la TDA, parce que, selon une interprétation correcte, cet article ne permet pas au ministre de publier
un ordre - comme il l’a fait -, qui est incompatible avec les obligations du Botswana vis-à-vis de l’OIT ».
La Cour observa que « [d]ans ce pays, les tribunaux adoptent la position que les dispositions constitutionnelles et
législatives doivent être interprétées de manière à respecter le droit international».
La Cour nota ensuite que le Botswana avait ratifié les conventions n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical et n° 98 sur le droit d’organisation et de négociation collective, et que la Commission d’experts pour
l'application des conventions et recommandations (CEACR), interprétant ces conventions, avait défini les services
essentiels « dans le but de limiter le droit de grève » comme étant « les services dont l’interruption mettrait en
danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l' ensemble ou dans une partie de la population».
En outre, elle fit remarquer que « les opinions des experts sont généralement considérées comme une source de
droit international du travail »
et que la CEACR avait également adressé une observation au gouvernement du Botswana dans laquelle elle
exprimait l’avis que « les nouvelles catégories ajoutées à la liste ne constituent pas des services essentiels au
sens strict du terme » et demandait la modification de cette liste. À la lumière de ce qui précède, la Cour conclut
que l’article 49, en supposant sa validité constitutionnelle, devait être interprété comme n’autorisant pas un ministre
à adopter un instrument statutaire qui contrevient aux obligations incombant au Botswana en vertu du droit
international. Par conséquent, le SI 57 était invalide.
La Cour examina ensuite si l’argument selon lequel la liste des services essentiels violait l’article 13 de la
Constitution, qui garantit la liberté d’association, mais qui permet aussi des limites raisonnablement justifiables
dans une société démocratique. La Cour observa que, n’étant pas certaine qu’en vertu de l’article 13 la liberté
d'association englobait le droit de grève, « il incombe à cette juridiction (…) d’interpréter cet article d’une manière
compatible avec le droit international »
et nota que « dans le droit international, le droit à la liberté d'association englobe le droit de grève.»
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En outre, « le droit international ne considère pas l’interdiction de la grève pour protéger les intérêts économiques
comme une limitation raisonnablement justifiable dans une société démocratique », qui était la justification avancée
pour la plupart des catégories supplémentaires de services essentiels, et que « la Commission d’experts de l’OIT
(…) semble considérer qu’il est raisonnablement justifiable dans une société démocratique de ne restreindre le
droit de grève que dans une mesure qui réponde à la définition de " services essentiels " ». Par conséquent, le SI
57 était inconstitutionnel.
Enfin, la Cour étudia l’affirmation des requérants selon laquelle ils pouvaient légitimement s’attendre à ce que le
gouvernement prenne des décisions qui soient compatibles avec les obligations internationales du Botswana. À cet
égard, la Cour estima que « le fait de signer [des conventions de l’OIT] a donné lieu à l’attente que les membres de
l’exécutif ne pourraient agir d’une manière qui contredit la lettre et l’esprit de ces conventions, à moins qu’ils (les
requérants) n’aient eu la possibilité de faire valoir le contraire. » Par conséquent, la promulgation de la SI 57 fut
déclarée nulle.
Se basant sur les Conventions N 87 et 98 sur les observations de la Commission d’experts de l’OIT, la Cour
décida que le SI 57, qui étendait la liste des services essentiels, était invalide et nul et sans effet.
Convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; Convention (n° 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949.
Afrique du Sud, Australie, États-Unis, Royaume-Uni. La Cour fit également référence à l’affaire Attorney-General
c. Dow, 3 juillet 1992, BLR 119 (CA).
Paragraphe 28.4 de la décision.
Paragraphe 192 de la décision.
BIT, Liberté syndicale et négociation collective, Étude d’ensemble de la Commission d’experts pour l’application
des conventions et recommandations, Conférence internationale du Travail, 81 session, Genève, 1994, Rapport
III(4B), paragraphe 159.
Paragraphe 223 de la décision, qui fait également référence à une conclusion identique dans l’affaire Botswana
Railways c. Botswana Railways Train Crew Union, affaire n° CA CACLB -042-09.
Paragraphe 249 de la décision.
Paragraphe 250 de la décision.
Paragraphe 252 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 334
Tribunal supérieur du travail, Zavascki Roberto Antonio c.
Companhia Minuano de Alimentos, Brasilia (2012)

Tribunal supérieur du travail, Zavascki Roberto Antonio c. Companhia Minuano de Alimentos,
Brasilia, 15 février 2012, affaire n° TST-RR-77200-27.2007.5.12.0019
Constitution du Brésil
Article 5
1. Les normes définissent les droits et garanties fondamentales sont d’application immédiate.
2. Les droits et garanties exprimés dans cette Constitution n’excluent pas d’autres droits découlant du régime
et des principes adoptés par ce texte ou procédant des traités internationaux dont la République fédérale du
Brésil est partie.
3. Les traités et conventions internationales sur les droits de la personne qui sont approuvés par chaque
chambre du Congrès National, en deux tours, par les trois cinquièmes des votes des membres de chaque
chambre équivaudront à des amendements constitutionnels.
Pays:
BRÉSIL
Sujet:
Droit de grève , Liberté syndicale
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés
Liberté syndicale/ Pratique antisyndicale/ Réintégration dans le poste de travail/ Résolution directe du litige sur le
fondement du droit international
Dans cette affaire, la juridiction inférieure avait condamné le défendeur à payer une indemnité pour pratiques
antisyndicales discriminatoires, étant démontré que le licenciement était la conséquence de l’adhésion des
travailleurs à un arrêt de travail en avril 2007. Si l’employeur ne les avait pas tous licenciés, il en avait choisi
quelques-uns pour servir d’exemple à ceux qui auraient prétendu faire grève à l’avenir.
Le tribunal jugea sans valeur l’argument de l’employeur selon lequel le travailleur avait refusé d’effectuer certaines
tâches, parce que l’absence au travail est inhérente à la grève et que le comportement de l’employeur ne pouvait
être toléré, en ce sens qu’il constituait une violation du principe de la liberté syndicale et de libre exercice de la
grève.
Le tribunal conclut que l’application effectuée par la juridiction inférieure constituait une observation complète du
principe de liberté syndicale et de non-discrimination, conformément à l’article 1 de la convention n° 98 de l’OIT,
étant donné que tous les travailleurs doivent être protégés contre les actes discriminatoires qui violent la liberté
syndicale, mais aussi contre les actes liés à leur participation à des actions de revendication
Citant l’article 1 de la convention n° 111 de l’OIT, qui stipule que: « 1. Aux fins de la présente convention, le terme
discrimination comprend: (a) toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la
religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale, qui a pour effet de détruire ou d’altérer
l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de profession; (b) toute autre distinction, exclusion ou
préférence ayant pour effet de détruire ou d’altérer l’égalité de chances ou de traitement en matière d’emploi ou de
profession, qui pourra être spécifiée par le Membre intéressé après consultation des organisations représentatives
d’employeurs et de travailleurs, s’il en existe, et d’autres organismes appropriés », le tribunal déclara que dans un
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État démocratique de droit, fondé sur des valeurs constitutionnelles de liberté et de reconnaissance du travail
comme un droit fondamental, qui garantit l’exercice du droit de grève, il y a lieu de sanctionner les actes mettant en
danger le mouvement de grève et soumettant les participants à une discrimination.
Concluant que le licenciement du travailleur, conséquence de sa participation à des événements liés à la grève,
constituait une pratique discriminatoire en violation des règlements d’ordre public (loi n° 7783/89 et loi 9.029/95),
des traités internationaux (conventions n 98 et 111 de l’OIT) et des règles constitutionnelles (articles 3, 5 et 9), le
tribunal ordonna la réintégration du travailleur dans sa fonction et doubla l’indemnisation à verser depuis la date du
licenciement.
Convention (n° 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949; convention (n° 111) sur la
discrimination (emploi et profession), 1958; Convention américaine relative aux droits de l’homme (« Pacte de San
José »).
Texte intégral de la décision
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Document no 335
Cour suprême de justice de Colombie, Chambre du
travail, Carbones de la Jagua S.A. c. Sindicato Nacional de
Trabajadores de la Industria Minera Petroquímica y
Agrocombustible y Energética (SINTRAMIENERGÉTICA),
affaire n° 57731 (2013)

Cour suprême de justice, Chambre du travail, Carbones de la Jagua S.A. c. Sindicato Nacional de
Trabajadores de la Industria Minera Petroquímica y Agrocombustible y Energética
(SINTRAMIENERGÉTICA), 10 avril 2013, affaire n° 57731
Constitution nationale de Colombie
Article 53
(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).
Article 93, paragraphe 1
Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et
interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.
Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur
les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.
Pays:
COLOMBIE
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés ; travaux des organes de contrôle internationaux
Droit de grève/ Exercice du droit de grève limité aux actions de grève pacifique/ Recours à la violence/ Négociation
collective/ Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Le plaignant a entamé une poursuite judiciaire demandant à la Cour de juger comme illégal l’arrêt de travail initié
par le syndicat, avançant que ce dernier avait utilisé la violence lors de la cessation du travail et, de fait, violé
l’interdiction du recours à la violence ainsi que le prévoit l’article 450 f) du Code du travail. Le plaignant a expliqué
qu’au terme de la négociation collective, qui n’avait abouti à aucun accord direct entre le syndicat et la société, le
syndicat avait déclenché une grève hors de la présence des autorités du travail et avait eu recours à la violence
pour bloquer l’entrée de l’entreprise et empêcher l’exécution des tâches essentielles au bon fonctionnement de
celle-ci. Le syndicat a nié avoir eu recours à la violence, mais a reconnu avoir barré la route pour empêcher que la
grève ne soit entravée par la société.
La Cour suprême de justice s’est référée aux dispositions de la législation nationale et à la jurisprudence, indiquant
que le droit de grève faisait partie intégrante du système constitutionnel du droit collectif au travail renforcé par les
conventions n 87 et 98 de l’OIT qui s’inscrivent dans le bloc de constitutionnalité. Toutefois, conformément au
champ d’application du droit de grève établi par la jurisprudence de la Cour constitutionnelle, ce dernier ne
constitue ni un droit fondamental dans la mesure où son application est soumise à une réglementation, ni un droit
absolu – mais bien un droit relatif – étant donné qu’il est sujet à des restrictions telles que sa pratique pacifique.
La Cour s’est ensuite référée aux recommandations du Comité de la liberté syndicale relatives aux piquets de
grève dans le recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du
BIT. À cet égard, la Cour a observé que :
« En effet, la législation nationale s’appuie sur les principes et recommandations du Comité de la liberté syndicale
du BIT et, plus particulièrement, sur les recommandations consacrées dans les paragraphes 649, 650 et 651
relatifs aux piquets de grève qui stipulent qu’une grève ne se justifie que si elle revêt un caractère pacifique (649)
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os
et si les travailleurs se limitent à inciter de manière pacifique les non-grévistes à ne pas rejoindre leur poste de
travail (651), interdisant, de fait, toute action dont le but est de "troubler l’ordre public et de menacer les travailleurs
qui poursuivraient leurs occupations" (650) ou toute action qui "s’accompagne de violences ou d’entraves à la
liberté du travail par contrainte exercée sur les non-grévistes" (651), tandis que le paragraphe 667 indique
clairement que " les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui
constituent des actions de caractère délictueux" ».
En outre, la Cours a considéré que:
(…) Le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT énonce dans les paragraphes 324 et 325
de son 323 rapport que "l’occupation de plantations par des travailleurs et d’autres personnes (…) est contraire à
l’article 8 de la convention n° 87" ».
Compte tenu de ce qui précède, la Cour a estimé que, à la lumière de la Constitution, de la jurisprudence et des
recommandations du Comité de la liberté syndicale du BIT, il n’y avait aucune « définition ouverte » de la grève qui
autorise l’occupation du lieu de travail et encore moins le recours à la violence. Par conséquent, la Cour a jugé que
la grève, objet du présent litige, était illégale.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; convention (n° 98) de
l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
Comité de la liberté syndicale.
Article 450. ACTIONS DE CARACTÈRE DÉLICTUEUX ET SANCTIONS. 1. L’arrêt de travail est illégal dans les
cas suivants (…) f) Lorsque la grève perd son caractère pacifique.
Rapport du Comité de la liberté syndicale (n° 323) G 279/8, 279 session de novembre 2000, cas n° 2021.
Texte intégral de la décision
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Document no 336
Cour suprême de justice de Colombie, Chambre du
travail, CBI Colombiana S.A. c. Unión Sindical Obrera de
la Industria del Petróleo (USO), affaire n° 59420 (2013)

Cour suprême de justice, Chambre du travail, CBI Colombiana S.A. c. Unión Sindical Obrera de la
Industria del Petróleo (USO), 10 avril 2013, affaire n° 59420
Constitution nationale de Colombie
Article 53
(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).
Article 93, paragraphe 1
Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et
interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.
Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur
les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.
Pays:
COLOMBIE
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Traité ratifié
Droit de grève/ Légalité de la grève/ Exercice du droit limité aux actions de grève pacifique/ Négociation collective/
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Le litige émane de l’entreprise CBI Colombia S.A. qui a demandé que la grève déclenchée par ses employés à la
raffinerie de Carthagène soit jugée comme illégale. Selon le demandeur, la grève avait été initiée par les membres
de l’Unión Sindical Obrera de la Industria del Petróleo (USO) dans le but d’obtenir des primes extralégales.
L’entreprise a affirmé que les grévistes avaient eu recours à la violence lors de l’arrêt du travail et que la grève
avait été menée avant même que les négociations n’aient été épuisées, comme le prévoit pourtant la loi. L’USO a
affirmé que l’action de grève avait été initiée non pas par elle, mais bien par les employés et que le syndicat était
essentiellement intervenu en tant que médiateur.
Sur la base de témoignages, de documents et autres éléments de preuve, la Cour a estimé que le syndicat avait
été impliqué dans la cessation de travail et qu’il était, par conséquent, nécessaire de déterminer si la grève était
légale ou non. La Cour a commencé par procéder à l’analyse en différenciant l’action de grève déclenchée dans le
cadre d’une négociation collective après l’épuisement des négociations directes de l’action de grève déclenchée en
raison du non-respect par l’employeur des obligations d’emploi. La grève en question appartient à cette seconde
catégorie puisque il n’y avait aucune procédure de règlement visant l’atteinte d’un accord. La Cour a ensuite
indiqué que la grève était légitime si elle respectait les exigences légales en vigueur et si elle revêtait un caractère
pacifique conformément aux dispositions du Code du travail et de la convention n° 87 de l’OIT :
« Les arrêts de travail sont considérés comme légitimes lorsqu’ils sont conformes à la loi et se déroulent de
manière pacifique. Dans la même lignée, l’article 8.1 de la convention n° 87 de l’OIT stipule que : "Dans l'exercice
des droits qui leur sont reconnus par la présente convention, les travailleurs, les employeurs et leurs organisations
respectives sont tenus, à l'instar des autres personnes ou collectivités organisées, de respecter la légalité." »
1
Après avoir précisé que le droit international et la convention n° 87 de l’OIT exigeaient toutes deux le respect de la
loi lors d’un arrêt de travail, la Cour a examiné, en vertu du Code du travail, les conditions qui devaient être réunies
avant que l’action de grève ne puisse débuter. La Cour a conclu que la bonne procédure n’avait pas été appliquée
et que, en outre, il y avait eu recours à la violence. Compte tenu de ce qui précède, a Cour a estimé que la grève
était illégale.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Texte intégral de la décision
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Document no 337
Conseil constitutionnel du Sénégal, affaire n° 2/C/2013
(2013)

Conseil constitutionnel, 17 juillet 2013, affaire n° 2/C/2013
Pays:
SÉNÉGAL
Sujet:
Liberté syndicale , Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Traité ratifié; travaux des organes de contrôle internationaux
Participation à une réunion publique en rapport avec des activités syndicale/ Personnel de l’inspection des
douanes/ Référence au droit international pour renforcer une décision fondée sur le droit national
Un inspecteur des douanes avait introduit un recours en annulation pour excès de pouvoir contre une décision
administrative sanctionnant sa participation à une réunion publique en rapport avec des activités de nature
syndicale. A l’appui de sa requête, il avait soulevé l’exception d’inconstitutionnalité de la loi relative au statut du
personnel des Douanes qui déniait à ces agents la liberté syndicale et le droit de grève. La chambre administrative
de la Cour Suprême, chargée de trancher le litige, avait donc sursis à statuer et avait saisi le Conseil
constitutionnel afin que ce dernier se prononçât sur la constitutionnalité de la loi incriminée.
Procédant à l’analyse de l’articles 8 de la Constitution, qui garantit les libertés civiles et politiques, notamment les
libertés d’association, de réunion et de manifestation, ainsi que les libertés syndicales, et de l’article 25 de la
Constitution, qui consacre le droit de grève, le Conseil constitutionnel souligna néanmoins que ces libertés et droits
n’étaient pas absolus et « qu’en disposant qu’ils s’exercent dans le cadre prévu par la loi, le constituant a[vait]
entendu affirmer que le droit de grève ainsi que la liberté syndicale [avaient] des limites résultant de la nécessaire
conciliation entre la défense des intérêts professionnels dont la grève [était] un moyen et la préservation de l’intérêt
général auquel la grève [pouvait] porter atteinte ».
Le Conseil constitutionnel poursuivit en s’appuyant sur l’article 8, alinéa 2 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels qui, selon lui, « se situ[ait] dans cette perspective » en autorisant les restrictions
légales à l’exercice du droit de grève s’agissant des membres des forces armées, de la police ou de la fonction
publique. Pour étayer son raisonnement, il se fonda également sur les travaux du Comité de la liberté syndicale
de l'OIT. Plus précisément, le Conseil cita le 336 rapport du Comité dans lequel ce dernier avait reconnu, à
l’égard des fonctionnaires de l’administration et du pouvoir judiciaire, que le droit de recourir à la grève « [pouvait]
faire l’objet de restrictions, telles que la suspension ou l’interdiction ». Le Conseil se référa également au 304
rapport du Comité par lequel le Comité avait précisé que « l’interdiction du droit de grève aux travailleurs des
douanes, fonctionnaires exerçant des fonctions d’autorité au nom de l’Etat, n’[était] pas contraire aux principes de
la liberté syndicale ».
Considérant dès lors que « le personnel des Douanes, corps paramilitaire, assur[ait] une mission de service public
qui ne [pouvait] s’accommoder d’interruption volontaire de nature à mettre en péril le fonctionnement de l’Etat [et]
que l’intérêt général [était] donc à même de justifier l’interdiction par le législateur du droit de grève et du droit
syndical au personnel des douanes », le Conseil constitutionnel décida que la loi mise en cause par le requérant
n’était pas contraire à la Constitution.
Dans cet arrêt, le Conseil constitutionnel affirme donc que ni la liberté syndicale ni le droit de grève n’ont une
portée absolue, sur la base des dispositions de la Constitution dont il renforce la justification par une référence au
Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ainsi qu’aux travaux du Comité de la liberté
syndicale de l’OIT.
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Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 16 décembre 1966.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT.
Considérant n° 9.
Considérant n° 10.
Considérant n° 11.
Considérant n° 12.
Considérant n° 14.
Texte intégral de la décision
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Document no 338
Tribunal industriel du Kenya, Universities Academic
Staff Union c. Maseno University, affaire n° 814’N’ (2013)

Tribunal industriel du Kenya, Universities Academic Staff Union c. Maseno University, 18 septembre
2013, affaire n° 814'N' de 2009
Constitution du Kenya (2010)
Article 2
(5) Les règles générales de droit international font partie du droit national du Kenya.
(6) Tout traité ou convention ratifié par le Kenya fait partie du droit national du Kenya en vertu de la présente
Constitution.
Pays:
KENYA
Sujet:
Licenciement , Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international , Création par le juge d’un principe inspiré du
droit international
Type d’instruments utilisés:
Traité non ratifié; travaux des organes de contrôle internationaux
Licenciement/ Droit de grève/ Protection contre la discrimination antisyndicale/ Résolution directe du litige sur le
fondement du droit international
Dans cette affaire, le demandeur, Universities Academic Staff Union, représentant cinq de ses membres, a allégué
que l’université, la partie défenderesse, avait illégalement et injustement mis fin aux contrats des cinq travailleurs
en question. En octobre 2006, le syndicat avait déclenché une grève. Le syndicat a jugé que le comité disciplinaire
a démis de leur fonction ces travailleurs, invoquant leur participation à la grève comme justification. Dans son
plaidoyer, l’université a fait valoir que la grève avait été considérée comme illégale par les autorités judiciaires
compétentes et que les participants à cette grève avait reçu l’ordre de reprendre le travail immédiatement. C’est
pourquoi les travailleurs ayant refusé de reprendre le travail ont été licenciés.
Après avoir examiné les faits présentés, le Tribunal industriel du Kenya en a conclu que les cinq travailleurs
avaient été congédiés en raison de leur participation aux activités précédant la grève et à la grève elle-même. En
ce qui concerne les travailleurs Mary Goretti Kiriaga et Billy G. Ng’ong’ah, le licenciement avait été, en outre,
motivé par leur fonction de responsable syndical.
Le Tribunal a mis en lumière les dispositions légales applicables dans cette affaire, notant qu’au moment des faits,
la législation nationale du travail n’était pas aboutie: « Il n’empêche que le Kenya est membre de l’OIT et qu’il est
censé respecter ses obligations internationales notamment le respect des normes internationales de travail .» Le
Tribunal a souligné l’importance de protéger les membres des syndicats contre tout acte de discrimination
antisyndicale et, plus particulièrement, contre toute cessation de relation de travail sur la base d’une affiliation
syndicale ou d’une participation à des activités syndicales. À cet égard, le Tribunal s’est référé à la convention n°
158 de l’OIT sur le licenciement, 1982, et à l’étude d’ensemble de la Commission d’experts de l’OIT sur la
protection contre le licenciement injustifié, dans laquelle ce dernier indique que :
« La nécessité de fonder le licenciement sur un motif valable constitue la pierre angulaire des dispositions de la
convention. L’adoption de ce principe enlève à l’employeur la latitude de mettre fin unilatéralement à une relation
de travail à durée indéterminée moyennant un préavis ou une indemnité en tenant lieu».
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L’article 5 de la convention n° 158 de l’OIT stipule que: « Ne constituent pas des motifs valables de licenciement,
notamment: a) l’affiliation syndicale ou la participation à des activités syndicales en dehors des heures de travail
ou, avec le consentement de l’employeur, durant les heures de travail; b) le fait de solliciter, d’exercer ou d’avoir
exercé un mandat de représentation des travailleurs (…)
La protection contre les actes de discrimination antisyndicale, notamment le licenciement pour de telles activités,
est particulièrement nécessaire en ce qui concerne les dirigeants et délégués syndicaux, étant donné que, pour
pouvoir remplir leurs fonctions librement et en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne
subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent ou de leurs activités syndicales (…) ».
Le Tribunal a ensuite indiqué que le professeur K. Inyani J. Simala ne s’était pas vu offrir la possibilité de se
défendre et qu’il était approprié de se référer à la convention n° 158 de l’OIT à cet égard:
« Un travailleur ne devra pas être licencié pour des motifs liés à sa conduite ou à son travail avant qu’on ne lui ait
offert la possibilité de se défendre contre les allégations formulées, à moins que l’on ne puisse pas
raisonnablement attendre de l’employeur qu’il lui offre cette possibilité ».
Afin de déterminer la réparation qui doit être accordée aux cinq travailleurs, le Tribunal s’est référé au recueil de
décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, qui indique au paragraphe 837 que:
« Nul ne devrait faire l’objet de discrimination antisyndicale en raison de ses activités syndicales légitimes, et la
possibilité d’être réintégré dans leur poste de travail devrait être ouverte aux personnes qui ont été l’objet de
discrimination antisyndicale ».
En conclusion, et sur la base de la convention n° 158 de l’OIT et des principes énoncés par le Commission
d’experts de l’OIT, le Tribunal a statué que la résiliation desdits contrats de travail était illégale et injustifiée.
Compte tenu de ce qui précède et des recommandations du Comité de la liberté syndicale du BIT, le Tribunal a
estimé que la réintégration des travailleurs était la meilleure forme de compensation; cependant, en raison de la
longue période qui s’est écoulée entre les licenciements et le jugement, il a ordonné le versement d’une indemnité.
Convention (n°158) de l’OIT sur le licenciement, 1982.
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT; Comité de la liberté
syndicale de l’OIT.
Page 38 de la décision.
OIT : Étude d’ensemble sur la protection contre le licenciement injustifié du Commission d’experts pour
l’application des conventions et recommandations.
Pages 39 et 40 de la décision.
Page 43 de la décision.
OIT: La liberté syndicale, Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil
d’administration du BIT, cinquième édition révisée, 2006.
Texte intégral de la décision
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Document no 339
Cour suprême de justice de Colombie, R. y R. asociados
S.A. c. Union nationale des travailleurs de l’industrie de
transformation du caoutchouc, matière plastique, le
polyéthylène, le polyuréthane, les parties synthétiques
et dérivés, affaire n° 59413 (2014)

Cour suprême de justice, R. y R. asociados S.A. c. Union nationale des travailleurs de l'industrie de
transformation du caoutchouc, matière plastique, le polyéthylène, le polyuréthane, les parties
synthétiques et dérivés, 27 août 2014, affaire n° 59413
Constitution nationale de Colombie
Article 53
(...) Les conventions internationales du travail, dûment ratifiées, font partie de la législation nationale (…).
Article 93, paragraphe 1
Les traités et conventions internationaux, ratifiés par le Congrès, reconnaissant les droits de l’homme et
interdisant leur limitation lors des états d’exception, prévalent dans l’ordonnancement juridique interne.
Les droits et devoirs consacrés dans cette Charte s’interprètent conformément aux traités internationaux sur
les droits de l’homme ratifiés par la Colombie.
Pays:
COLOMBIE
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Travaux des organes de contrôle internationaux
Cessation d’activité/ Grève/ Référence au droit international pour renforcer une décision fondée sur le droit national
En appel, l’entreprise demanda que la grève organisée par le syndicat soit déclarée illégale, car les conditions
légales nécessaires à sa déclaration n’avaient pas été respectées. L’entreprise allégua qu’elle était en processus
de liquidation mais qu’elle payait dûment les salaires, et qu’elle n’avait toutefois pas pu payer les cotisations
sociales dues.
Pour sa défense, le syndicat affirma qu’il ne s’agissait pas d’une grève dans le cadre d’un conflit collectif de travail
sinon d’une cessation d’activité imputable à l’employeur pour non-paiement des cotisations sociales.
La Cour suprême signala que la législation colombienne reconnaissait quatre modalités de cessation d’activité
parmi lesquelles celle découlant du non-respect par l’employeur de ses obligations en termes d’emploi et de
sécurité sociale. La Cour souligna par ailleurs que toute cessation d’activité devait respecter une obligation
générale, à savoir de se dérouler de manière ordonnée et pacifique. À ce sujet, la Cour signala:
«Le Comité de la liberté syndicale de l’OIT a systématiquement affirmé que l’exercice légitime de la liberté
syndicale ne tolère pas d’excès dans l’exercice du droit de grève, comme par exemple des actes criminels.»
Aux yeux de la Cour, les conditions nécessaires à la déclaration de cessation d’activité n’étaient pas un
endossement du non-respect des obligations des employeurs, mais une garantie du droit de défense de
l’employeur qui, dans le cas contraire, n’aurait pas le droit d’invalider le non-respect ou de chercher des solutions
pour remplir les obligations qui lui incombent. La Cour signala que le Comité de la liberté syndicale avait signalé à
ce sujet que:
«L’obligation de donner un préavis à l’employeur ou à son organisation avant de déclencher une grève peut être
considérée comme admissible.»
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Comme le syndicat n’a pas démontré avoir respecté les conditions légales à la déclaration de la cessation
d’activité, la Cour, se fondant sur les travaux du Comité de la liberté syndicale pour soutenir sa décision, prononça
l’illégalité de la cessation d’activité.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT.
Page 20 de la décision.
Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du BIT, 2006,
paragraphe 552.
Texte intégral de la décision
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Document no 340
Tribunal du travail du Nigéria, Aero Contractors Co.
of Nigeria Limited c. National Association of Aircrafts
Pilots and Engineers, Air Transport Senior Staff
Association of Nigeria et National Union of
Air Transport Employees, affaire n° NICN/
LA/120/2013 (2014)

Tribunal national du travail du Nigeria, Aero Contractors Co. of Nigeria Limited c. National Association
of Aircrafts Pilots and Engineers, Air Transport Senior Staff Association of Nigeria et National Union of
Air Transport Employees, 4 février 2014, affaire nº NICN/LA/120/2013
Constitution de la République fédérale du Nigeria
Article 12, paragraphe 1
Aucun traité entre la Fédération et tout autre pays n’aura force de loi tant qu’il n’aura pas été incorporé sous
forme de loi par l’Assemblée nationale.
Constitution de la République fédérale du Nigeria (troisième révision) de 2010
254 C- (1)
Nonobstant les dispositions des articles 251, 257, 272 et toute autre disposition contenue dans la présente
Constitution, et en addition à toute autre juridiction qui aurait pu lui être conférée par un acte de l’Assemblée
nationale, le Tribunal national du travail exercera la juridiction exclusive et aura la primauté sur les autres
cours en matière civile (…)
(h) liées ou attenant à l’application ou l’interprétation des normes internationales du travail;
(2) nonobstant toute mention contraire dans la présente Constitution, le Tribunal national du travail détient la
juridiction et le pouvoir de connaître de toute affaire liée ou attenant à l’application des conventions, traités ou
protocoles internationaux ratifiés par le Nigeria et concernant le travail, l’emploi, le lieu de travail, les relations
professionnelles ou des sujets connexes.
Pays:
NIGERIA
Sujet:
Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Résolution directe du litige sur le fondement du droit international
Type d’instruments utilisés:
Travaux des organes de contrôle internationaux
Droit de grève/ Services essentiels/ Transport aérien/ Résolution directe du litige sur le fondement du droit
international
La société Aero Contractors Co. of Nigeria Limited, qui se consacrait au transport de passagers et de
marchandises, demanda au Tribunal industriel du Nigeria de déterminer si les membres des syndicats National
Association of Aircrafts Pilots and Engineers, Air Transport Senior Staff Association of Nigeria et National Union of
Air Transport Employees avaient le droit d'appeler à la grève et de faire grève. La société fit valoir que,
conformément à la Loi sur les syndicats de 2004, le transport de passagers et de marchandises était un service
essentiel et que les droits des membres des syndicats défendeurs étaient donc restreints par cette même loi.
Dans leur défense, les syndicats soutinrent que conformément au Comité de la liberté syndicale de l'OIT,
l'interdiction de grève dans un service essentiel n'était acceptable que lorsqu'il existait un risque imminent pour la
vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble ou dans une partie de la population, et que ces critères
n'étaient pas réunis dans cette affaire.
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Les syndicats considérèrent également que l'interdiction de grève enfreignait les droits d'association et de
négociation collective, en contradiction avec les dispositions des Conventions n 87 et n 98 de l'OIT. La société
contesta l'application de ces conventions au motif qu'en l'absence d'une loi introduisant les dites conventions dans
le système juridique national, celles-ci n'avaient pas force de loi.
Dans son analyse, le Tribunal a conclu que, contrairement à ce qu'avait déclaré la Société, la section 245C de la
Constitution lui conférait les compétences et les pouvoirs d'appliquer n'importe quelle convention internationale
ratifiée par le Nigeria.
Ensuite, le Tribunal s’est référé aux observations du Comité de la liberté syndicale de l’OIT et a observé que:
« Conformément aux orientations du Comité de la liberté syndicale inscrites dans le Recueil de décisions et de
principes du-dit organisme, quatrième édition, paragraphe 131, page 29, « Le droit de grève et celui d’organiser
des réunions syndicales sont des éléments essentiels du droit syndical » ».
Afin de déterminer si le transport aérien est un service essentiel, le Tribunal s'est référé aux travaux de la
Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT, en notant que:
« … la Commission d’experts définit comme services essentiels ceux « dont l’interruption risquerait de mettre en
danger la vie, la sécurité ou la santé de la personne dans l’ensemble ou dans une partie de la population ».
.... Ces services sont: Le secteur hospitalier, les services d’électricité, les services d’approvisionnement en eau, les
services téléphoniques et les services de contrôle du trafic aérien...La Commission considère au contraire, de
façon générale, que les services suivants ne sont pas des services essentiels et que l'interdiction de grève ne s'y
applique pas: La réparation aéronautique... les transports en général » .
En interprétant la loi sur les syndicats à la lumière des travaux de la Commission d'experts et du Comité de la
liberté syndicale de l’OIT, le Tribunal a conclu que les membres des syndicats défenseurs avaient le droit de faire
grève puisqu'ils ne fournissaient pas de services essentiels. Toutefois, si un membre remplissait des fonctions de
contrôle du trafic aérien, l'interdiction de grève s'appliquerait à lui.
Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations de l'OIT ; Comité de la liberté
syndicale de l'OIT.
Page 18 de la décision.
Page 19 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 341
Tribunal du travail d’Afrique du Sud, Chamber of Mines of
South Africa c. Association of Mineworkers of South
Africa, National Union of Mineworkers,
United Association of South Africa, affaire n° J99/14
(2014)

Tribunal du travail d’Afrique du Sud, Chamber of mines of South Africa c. Association of mineworkers
of SA, National union of mineworkers, United association of SA, 23 juin 2014, affaire n° J99/14
Pays:
AFRIQUE DU SUD
Sujet:
Droit de grève , Négociation collective
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Instrument non soumis à ratification; travaux des organes de contrôle internationaux
Négociation collective/ Droit de grève/ Travailleurs non syndiqués/ Lieu de travail/ Référence au droit international
pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Dans cette affaire, la Cour a statué sur le recours formé par l’Association of Mineworkers of SA(Association des
mineurs d’Afrique du Sud) contre la décision du Tribunal de première instance, qui a tranché en faveur de la
Chamber of Mines of South Africa(Chambre des mines d’Afrique du Sud). Le jugement rendu en première instance
a déclaré valide l’extension de la convention collective signée entre la Chamber of Mines, le National Union of
Mineworkers (Syndicat national des mineurs) etl’United Association of SA(Association unie d’Afrique du Sud) aux
travailleurs non membres de ces organisations. La décision a été prise conformément aux dispositions de l’article
23 (1) d) de la loi relative aux relations de travail qui ont été interprétées comme signifiant que chaque société
minière constituait un lieu de travail. L’Association des mineursvoulait que la décision de la Cour reconnaisse
qu’étant donné qu’on trouvaitune représentation majoritaire dans cinq mines, un nouveau processus de
négociation pouvait être engagé avec la Chambre, à condition que chaque mine représente un lieu de travail
indépendant. Par ailleurs, l’Association des mineurs a demandé que la définition du lieu de travail consacrée à
l’article 23 de la loi relative aux relations de travail soit déclarée inconstitutionnelle puisqu’elle constituait une
restriction injustifiée au droit de grève en refusant aux travailleurs qui étaient membres d’un syndicat et couverts
par la convention collective la possibilité d’exercer ce droit.
La Cour a jugé que la définition du lieu de travail consacrée à l’article 23 de la loi était claire et non absurde,
abusive ou encore incongrue et, par conséquent, a rejeté la demande principale de l’Association des mineurs. Par
rapport à la deuxième demande, la Cour a considéré que, conformément à l’article 23 de la loi relative aux
relations de travail, le droit de grève était, par sa nature, sujet à des restrictions; cependant, il s’agissait dans cette
affaire de déterminer si les restrictions prévues par la définition du lieu de travail étaient justes et raisonnables. La
Cour a jugé que cette limitation trouvait son origine dans une décision politique du législateur d’adopter un modèle
précis de négociation collective sur le lieu de travail et que puisqu’il s’agissait d’une décision majoritaire, elle devait
être considérée comme légitime. La Cour a ensuite souligné qu’étant donné que la restriction au droit de grève
devait, lorsque cela était possible, être conforme aux normes nationales et internationales, la restriction qui faisait
l’objet du procès était juste. À cet égard, la Cour a observé que:
« La Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations et le Comité de la
liberté syndicaleont interprété les conventions n 87 et 98 en vue d’inclure le droit de grève [...] les deux
[organes]acceptent comme point de départ le fait que le droit de grève n’est pas absolu et qu’il peut être limité
voire interdit dans certaines circonstances.
Selon le paragraphe 142 de l’Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales concernant les droits au travail
à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable qui a été présenté
pendant laConférence internationale du Travail en 2012 : "[…] Si les grèves sont interdites pendant la durée de
validité des conventions collectives, cette restriction doit être compensée par le droit de recourir à une procédure
d’arbitrage, impartiale et rapide, des griefs individuels ou collectifs concernant l’interprétation ou l’application des
conventions."»
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Ensuite, la Cour a indiqué, par rapport à l’extension des conventions collectives, que:
« En ce qui concerne plus particulièrement l’extension des conventions collectives, larecommandation n° 91 de
l’OIT sur les conventions collectives, 1951, prévoit à l’article 4 que "les dispositions d'une convention collective
devraient être applicables à tous les travailleurs des catégories intéressées employés dans les établissements
visés par la convention collective, à moins que la convention collective en question ne prévoie expressément le
contraire". Dans son commentaire sur la recommandation n° 91, la commission d’experts a déclaré au paragraphe
n° 245 de l’étude d’ensemble que "l’extension des conventions collectives n’est pas contraire au principe de la
négociation collective volontaire et n’enfreint pas la convention n° 98."»
Compte tenu de ce qui précède, la Cour a conclu que la restriction au droit de grève prévue par la définition du lieu
de travail consacrée à l’article 23 de la loi relative aux relations de travail n’était pas inconstitutionnelle et que la
restriction susmentionnée était compatible avec le principe de liberté syndicale défini par la commission d’experts
et le Comité de la liberté syndicale de l’OIT. La Cour a, par conséquent, rejeté la demande de l’Association des
mineurs.
Recommandation (n° 91) de l’OIT sur les conventions collectives, 1951.
Commission d’experts de l’OIT pour l’application des conventions et recommandations; Comité de la liberté
syndicale de l’OIT.
Pages 29 et 30 de la décision.
Pages 30 et 31 de la décision.
Texte intégral de la décision
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Document no 342
Cour Suprême du Canada, Saskatchewan Federation
of Labour c. Saskatchewan, affaire n° 2015 CSC 4 (2015)

Cour Suprême du Canada, Saskatchewan Federation of Labour c. Saskatchewan, 30 janvier 2015,
2015 CSC 4
Pays:
CANADA
Sujet:
Négociation collective , Droit de grève
Type d’utilisation du droit international:
Référence au droit international pour renforcer une solution fondée sur le droit national
Type d’instruments utilisés:
Traités ratifiés; travaux des organes de contrôle internationaux
Charte canadienne des droits et libertés/ Droit de grève/ Droit à la négociation collective/ Loi limitant l’exercice du
droit de grève des salariés qui assurent des services essentiels/ Référence au droit international pour renforcer
une solution fondée sur le droit national
Un pourvoi en appel a été déposé devant la Cour suprême du Canada, dans lequel les appelants contestent la
constitutionnalité de deux lois adoptées par le gouvernement de la Saskatchewan. Selon les appelants, la Public
Service Essential Services Act, S.S. 2008 c. P-42.2 (ci-après la PSESA) et la Trade Union Amendment Act, 2008,
portent atteinte à l’article 2(d) de la Charte canadienne des droits et libertés portant sur la liberté d’association.
La PSESA définit un régime législatif interdisant l’exercice du droit de grève des salariés du secteur public qui
assurent des services essentiels, de sorte que ces salariés doivent continuer d’exercer leurs fonctions
conformément aux conditions établies par la convention collective, sans que soit prévu un mécanisme véritable
pour dénouer l’impasse des négociations collectives. La Trade Union Amendment Act, 2008 modifie le processus
de certification syndicale par l’accroissement du pourcentage d’appui requis de la part des salariés et par la
réduction de la période d’obtention par écrit de cet appui. Elle modifie également les règles sur les communications
de l’employeur avec ses salariés.
Si la Cour Suprême écarte rapidement la question juridique relative à la constitutionnalité de la Trade Union
Amendment Act, 2008, en indiquant que cette loi « ne contrevient pas à l’article 2(d) », s’agissant de la PSESA, la
Cour est confrontée à la question juridique de déterminer si la liberté d’association garantie dans l’article 2 (d) de la
Charte protège le droit de grève et, dans l’affirmative, d’examiner si l’interdiction faite aux salariés assurant des
services essentiels de prendre part à une grève entrave substantiellement le droit à un processus véritable de
négociation collective.
La Cour apporte un changement de grande importance à sa jurisprudence puisqu’elle reconnaît pour la première
fois que « le droit de grève jouit de la protection constitutionnelle en raison de sa fonction cruciale dans le cadre
d’un processus véritable de négociation collective ».
Pour étayer son argumentaire, la Cour s’appuie notamment sur l’adhésion du Canada à des instruments
internationaux reconnaissan le droit de grève ainsi que sur d’autres sources de droit international. Elle fait
notamment référence à l’article 8, paragraphe 1(d), du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux
et culturel, à l’article 45 de la Charte de l’Organisation des Etats américains ainsi qu’à la convention n° 87 de l’OIT
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical.
A cet égard, elle relève que « bien que la convention n° 87 ne renvoie pas expressément au droit de grève, les
organismes de contrôle de l’application de l’OIT, dont le Comité de la liberté syndicale et la Commission d’experts
pour l’application des conventions et recommandations, reconnaissent que le droit de grève est indissociable du
droit de regroupement en syndicat que protège la convention ». Se référant au recueil de décision et de principes
du Comité de la liberté syndicale, elle ajoute que « même si, à strictement parler, elles n’ont pas d’effet obligatoire,
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les décisions du Comité de la liberté syndicale ont une force persuasive considérable et elles ont été citées avec
approbation et largement reprises à l’échelle mondiale par les cours de justice, les tribunaux administratifs et
d’autres décideurs, y compris [la] Cour [Suprême du Canada] ».
La Cour se fonde également sur le consensus dégagé à l’échelle internationale en ce qui concerne la nécessité du
droit de grève pour une négociation collective véritable en citant notamment la jurisprudence de la Cour
européenne des droits de l’homme.
De ces éléments, la Cour Suprême en déduit « qu’un processus véritable de négociation collective exige que les
salariés puissent participer à un arrêt collectif du travail aux fins de la détermination de leurs conditions de travail
par une convention collective. La faculté de cesser collectivement le travail pendant la négociation d’une
convention collective constitue donc – et a toujours constitué – le minimum irréductible de la liberté d’association
dans les relations de travail au Canada.»
Elle poursuit son examen en analysant l’atteinte portée à la liberté d’association garantie par la Charte canadienne
des droits et libertés. A cet égard, la Cour estime que l’interdiction que fait la PSESA aux salariés désignés de
prendre part à une grève aux fins de la négociation de leurs conditions de travail entrave substantiellement le droit
à un processus véritable de négociation collective, si bien qu’il y a atteinte à la liberté garantie par la Charte.
A ce stade, la question décisive, selon la Cour, est celle de savoir si les moyens retenus par l’Etat portent atteinte
le moins possible ou non aux droits constitutionnels. Analysant les dispositions de la PSESA, la Cour constate que
« le pouvoir unilatéral de l’employeur public de décider que des services essentiels seront assurés durant un arrêt
de travail et de déterminer la manière dont ils le seront, à l’exclusion de tout mécanisme de contrôle approprié,
sans compter l’absence d’un mécanisme véritable de règlement des différends, justifient la conclusion selon
laquelle la PSESA porte atteinte plus qu’il n’est nécessaire aux droits constitutionnels en cause.» La Cour
Suprême déclare donc inconstitutionnelle la loi PSESA de 2008 en renforçant son raisonnement sur la base des
traités internationaux ratifiés, y compris la convention n° 87, et des travaux du Comité de la liberté syndicale de
l’OIT.
Convention (n° 87) de l’OIT sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, 1966; Charte de l’Organisation des Etats américains.
Comité de la liberté syndicale de l’OIT; Commission d'Experts sur l'application des conventions et
recommendations de l'OIT.
La Cour suprême du Canada rejette l’appel visant la Trade Union Amendment Act, 2008, ( voir paragraphe 8) en
indiquant que « Les modifications qu’elle apporte au processus d’accréditation ou de désaccréditation d’un agent
négociateur, ainsi qu’aux règles applicables aux communications de l’employeur avec ses salariés, n’entravent pas
de manière substantielle la liberté d’association» (voir paragraphe 21).
Paragraphe 51.
Paragraphes 65-67.
Paragraphe 67.
Paragraphes 68-69.
Paragraphe 71.
Page 10.
Paragraphe 15.
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Volume 5 - Documents 235-342

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