Opinion dissidente de M. Weeramantry (traduction)

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089-19920414-ORD-01-07-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. WEERAMANTRY

[Traduction]

Commelerequiert l'article74,paragraphe 1,du Règlementdela Cour,
prioritéa été donnée à la présentedemande en indication de mesures
conservatoiressurtouteslesautresaffairespendantes. Lesplaidoiries ont

été achevéesle 28 mars 1992.Troisjours plus tard, alors que l'affaire en
étaitau stade desdélibérationsl,e Conseil de sécuritadoptéla résolu-
tion 748 (1992).La résolution748(1992)portait sur des questionsimpor-
tantes alors en suspens devant la Cour et l'incidence de cette résolution
sur les questions dont laCour est saisiecompte parmi lespoints de droit
discutésdans la présente opinion.
Sansdéterminerde façon catégorique quelestl'effetjuridique de cette
résolution,dont la Libyecontestelavalidité,nous devons,austade actuel
delaprocédure, quiatrait àl'indicationdemesuresconservatoires,partir
du principe qu'elle estvalable. L'article 25 de la Charte des Nations
Unies, qui oblige les Membres de l'organisationàaccepter et appliquer
les décisionsdu Conseil, doit donc être considéréprimafacie, comme
applicable à cette résolution. En arrivantà de telles conclusions, je
m'associeauxopinions delamajoritédelaCour mais,avectout lerespect

queje dois àcelle-ci,je ne peux souscriàel'opinion que cetterésolution
rend inappropriée l'indication de mesures conservatoires. Les raisons
d'envisager ainsi l'affaire sont exposéesdans la présente opiniondissi-
dente. Elle traite d'importantes questions de droit qui ont été débattues
assezen détail devantnous et dontla portéedépasse l'affaire en causeau
point de semblermériterun examenquelque peu développé.
Je limiterai mes observations à deux questions qui ont fait l'objet
d'argumentations assez longues devant nous, celle de la compétenceet
celledes rapports entre la Cour et le Conseilde sécuri. esfaits essen-
tiels et les principales thèses des Parties sont exposés assez clairement
dans l'ordonnance de la Courpour que je n'aiepas àlesrépéterici.

L'article14,paragraphe 1,delaconventiondeMontréalestlabasedela
compétencequ'a laCour de connaître de la requête.Il stipule un délaide
sixmois à compterdelademande d'arbitragependant lequel,silesparties
ne parviennent pas àse mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage,
l'une quelconqued'entreellespeut soumettreun différendàlaCour inter-
nationale.
Lesdéfendeurs ont soutenu quelesconditionspréalablesde la compé-
tence dela Cour n'ontpas étéremplies,faisantvaloirqu'il n'existepas de({différend»au sensdel'article 14,paragraphe 1,etque,detoute manière,
le délaide sixmois stipulén'estpas expiré.
A cestadede la procédure,il ne convientpas d'attribuer un sensétroit
ou restrictif au terme ({différend Il me semble établi,à premièrevue,
qu'il existeun différendsubstantielentrelesParties, car la Libyesefonde
surlarèglededroitinternational coutumier aut dedereautjudicarecomme
étantle principe directeur qui l'habilitejuger ses propres citoyens en
l'absencedetraitéd'extradition, tandis queledéfendeurréclamelaremise

des deux suspects. La Libye déclare qu'ellelesjugera et elle a invité le
défendeur àenvoyerdes représentantset des hommes de loi observerle
procès, arguantqu'elles'acquitte ainsides obligationsdont elle esttenue
envertu du traité.Ledéfendeurexigequelessuspectssoientjugésdevant
sesproprestribunaux. LaLibyefaitvaloirquesondroitinterneluiinterdit
delivrersescitoyenspour qu'ilssoientjugésailleurset quelaréclamation
du défendeurconstitueun empiétementsursasouveraineté.Ledéfendeur
nie qu'ily ait là une excusevalable pour ne pas livrerlesintéressés.Tout
celamesembleconstituerun différendtoutaumoinsprimafacie,etdonc à
satisfaireàl'une des conditions préalablesde l'article 14,paragraphe 1.
L'autre allégationdu défendeur, qui a plusde poids, est que la lettre
dans laquellela Libyeamentionné l'arbitragepour lapremièrefoisporte
la datedu 18janvier et que la présente instance a étéintroduite le 3mars,
bien avant que six mois ne se fussent écoulésIl soutient donc que l'une

desconditionspréalables essentiellespour demander àla Cour d'exercer
sa compétencen'apas été remplieT . ellepeut effectivementêtrela situa-
tion en droit.
Il y a pourtant une autre façon de voir qui est plausible et assurément
défendable. C'est que,quand une partie a indiquéd'avance qu'elle ne
s'estimera pas tenue par la médiation oula négociation et insistepour
faire respecter une période d'attenteàtitre de condition préalablepour
porter l'affaire devantla Cour internationale, elle risque de déjouerles
buts d'unetelleclause.Ilressort du dossierquinous a étéprésentq éueles
Etats-Unis ont déclaréau Conseil de sécuritéqu'il ne s'agissaitpas ici
d'une question de divergence d'opinion ou de démarche pouvant faire
l'objetde médiation ou êtrneégociée (S/PV.3033,21janvier 1982,p. 7) et
que le Conseil ne devait pas se laisser égarerpar les efforts entrepris du
côtélibyen pour tenter de faire de cette question de paix et de sécurité

internationales une question dedivergencesbilatérales(ibid.).End'autres
termes, l'argument développé devant nous était celudie la répudiation
anticipéed'une obligationconsensuelle.
La question de droit dont nous sommes saisis estla suivante: si, dans
une affairehypothétique,l'une despartiesrefusedenégocier,cettemême
partie peut-elle insister pour subordonner à l'écoulementdu délaide
sixmoisla facultédeporter l'affaire devant laCour? Unetelleinsistance
nemanquerait pas dedresserun obstaclesurlavoied'unepartie quicher-
cheraità obtenir satisfactiondevant la Cour. La disposition dont il s'agit
peut êtrealorsinterprétée ecnesensquetoutepartie alafacultéderecou-
rirà d'autres procéduresque la conciliation pendant cedélaide sixmois. CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 162

Interpréter ainsiune telle disposition risquerait fort d'allerencontre
desbuts et principes qui l'inspirent, comme M. Ago l'adéclaréde façon
convaincante dans son opinion individuelle lors de la phase des excep-
tions préliminaires en l'affaire desActivités militaires etparamilitaireasu
Nicaragua etcontrecelui-ci:

«je suisconvaincu que lerecourspréalable àdesnégociationsdiplo-
matiques ne peut pas constituer une exigence absolue à remplir,
même lorsqu'ilestévidentque l'état desrelationsentre lesparties est

tel qu'il estillusoire de s'attendrece que de telles négociations
aboutissent à un résultat positifet qu'il serait injustifiéde retarder
par cebiaisl'ouverture d'une procédure arbitraleoujudiciaire quand
la possibilitédu recours celle-cia étéprévu» (C.I.J. Recueil1984,
p. 515-516,par. 4).

Le principe général énoncé dans ce passage peut être formulé plus
nettementencore dans lecasd'undélaid'attente spécifié,te qlue celuiqui
est stipulé dans la conventionde Montréal. L'onpeut raisonnablement
soutenir qu'il nesertrien depermettre à unepartie qui a refuséla conci-
liation d'invoquer,pour demander lerejetd'unerequête,l'inexécutiod ne
procédures qu'elle a elle-mêmerejetées.L'on mettrait ainsi celle-ci,
pendant un certaintemps, à l'abridetoute procéduredeconciliation etde
toute procédure judiciaire en la laissant libre de poursuivre d'autres
procédures non conciliatoires,tandisque la partie adverseresteraittenue
d'attendre, sansassistanceni recours.
Une telle lecture de l'article s'accorde aussi aveclesprincipes d'inter-
prétationqui soulignentquelesdispositionsd'un traité doiventêtreinter-

prétéesde manière àne pas priver d'effet son objet et son but. Sans un
examenplus approfondi, on ne saurait conclure que l'unou l'autrede ces
points devuedoit l'emporter.Ilyabeaucoup àdireenfaveurdel'un etde
l'autreet,danslasituationactuelle,nouspouvonsseulementretenir quele
point devueselonlequel ledélaide sixmoisde l'article 14,paragraphe 1,
ne constituepas une interdiction absolue est au moins défendable.
Lesconsidérantsdel'ordonnance delaCourdans lesaffairesdes Essais
nucléairesrenforcentaussicette attitude provisoiàel'égardde la compé-
tence:

«13. Considérant que, lorsqu'elleest saisie d'une demande en
indication de mesuresconservatoires, la Cour n'a pas besoin, avant
d'indiquer ces mesures, de s'assurer de façon concluante de sa
compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'elle ne doit cepen-
dantpas indiquer de telles mesures si lesdispositionsinvoquéespar
le demandeur ne se présententpas comme constituant, prima facie,

une base surlaquelle la compétencede la Cour pourrait êtrefondée;
.............................
17. Considérantque les éléments soumis à la Cour l'amènent à
conclure, au stade actuel de la procédure,que les dispositions invo- CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 163

quéespar le demandeur se présentent comme constituant, prima
facie, une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait être
fondée; et qu'en conséquence laCour se propose d'examiner la
demande en indication de mesures conservatoiresprésentéepar le
demandeur »(C.I.J. Recueil1973,p. 101et 102).

Appliquant lemême raisonnement,je dirais quelescirconstancesinvo-
quéespar ledemandeur seprésententcommeconstituant,primafacie,une
base sur laquellela compétencede la Cour pourrait être fondée.
Au cas où il apparaîtrait, après la question de ces mesures conserva-
toires,lors d'une phase ultérieure oude la procéduresur le fond, que la
Cour n'estpas compétente,lesmesuresconservatoirescesseraientimmé-
diatement de produire effet.
Une fois admisecetteconclusion en ce qui concerne la compétencede

laCour envertu del'article 14delaconventionde Montréal,laprincipale
questionqui sepose ensuite estcelledesavoirsilesrésolutions731(1992)
et 748(1992)du Conseil de sécurité font obstacleàl'examende l'affaire
par la Cour. Cette question est examinée dans la section suivantede la
présente opinion.

Lapertinence des questionsportéesdevant la Cour

Plus peut-être qu'aucuneautre dans le passé, la présente affairea
soulevécertaines questionsquine manquent ni d'importance ni d'intérêt
à propos des fonctions respectives de la Cour et du Conseil de sécurité.
Ces questionsse sont posées sans ambagesdevant la Cour, lors desplai-
doiries orales, dans le contexte de la résolution731 (1992).La relation
entre cesdeux organes arevêtuplusd'importance encore aprèsla clôture
des audiences,avecl'adoption de la résolution748(1992).
Lesdeux Parties qui comparaissent devant nous ont soulevéexpressé-
ment des questions relatives aux rapports entre la Cour et le Conseil de
sécurité.

LeconseildelaLibye,M.Suy,aditavecinsistancequelarésolution731
(1992)«fait fi de toute la procédure des règlementsjuridiques et paci-
fiques des différends prévuedans la convention de Montréal » et que la
Libye est donc fondée àsoumettre à la Cour internationale les aspects
juridiques de la question que le Conseil de sécuritéa négligsaudience
publique du 26mars 1992(matin),CR92/2, p.61).Ilasoutenu encore que
le droit de la Libye d'exercer sa compétence en matière pénalesur ses
propres ressortissants estun droit fondamental issude la souverainetéde
17Etat, n droit qui ne souffre pas de dérogation.
L'agent des Etats-Unis, M. Williamson, a déclaré,ce qui constituait
l'une de ses quatre thèses fondamentales, «que les demandes libyennes
doivent être rejetéesparceque le Conseil de sécuritéest saiside laes- CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 16)4

tion ets'enoccupe »(audiencepublique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 16).
Le conseil des Etats-Unis a soutenu que la Cour doit examiner si son
action risque d'entrer en conflit avecles mesuresque le Conseil de sécu-
ritéaadoptéesou envisageactuellement(ibid.,p.67)et,tout enconcédant
que la Cour et le Conseil de sécurité peuvent légitimementexercerleurs
fonctions respectives simultanément à l'égardde la mêmeaffaire, il a
soutenu que ni la Charte ni la pratique de la Cour n'offrent de base
permettant d'entraverl'exercicepar leConseildesaresponsabilitéprinci-

pale du maintien de la paix et de la sécurité internationales(ibid.,p. 36).
Ilyavaitlàune invitation,présentéesanséquivoqu elaCour, àexami-
ner la questiondes rapports entre la Cour et leConseilde sécuridans le
contexte de la résolution731 (1992). Il convient de noter que la Cour
n'avait pas devant elle la résolution748 (1992)lors des plaidoiries, mais
celle-ci a revêtupar la suite encore plus d'importance que la résolu-
tion 731(1992).
Pour apprécierune demande en indication de mesures conservatoires
dans le contexte de la résolution731(1992)et des arguments développés
devantnous, laCour devaitnécessairementexaminerla questionde droit
consistantà savoir quelle était,le cas échéant, l'incidesur sa compé-
tence dela décisionprisepar leConseilde sécuritédans sarésolution731
(1992).Des considérationssemblabless'appliquent maintenant àla réso-
lution 748 (1992).

Les rapports entre le Conseil de sécuritéet la Cour, ainsi fermement
enracinés dansles exposésjuridiques présentés àla Cour, appellent un
certain examen préliminaire,de la manière qui convientà une demande
demesuresconservatoires. Iln'estpas nécessairede statuer defaçon défi-
nitive sur cesquestions importantesau stade des mesures conservatoires
et,àl'évidenceo, n netentepas icidelefaire.Ils'agitplutôt d'esquisserles
contoursgénéraux duproblèmeafinde replacerla demandeen indication
de mesuresconservatoires dans la perspective du régimejuridique établi
par la Charte des Nations Unies. L'analyse présentée sous les intitulés
suivantsdeladiscussionestessentielle,car elleestdirectementen rapport
avecla demande enindication demesuresconservatoiresdontla Cour est
maintenant saisieetaveclesmoyensinvoquésensenscontraire surlabase
de la structure organisationnelledes Nations Unies.
Il n'en sembleque plus important de formuler detelles considérations

étantdonnéqu'ellesn'ont jamais eujusqu'iciune actualitéaussidirecteet
immédiatedans lajurisprudence delaCour etquela Cour aeul'avantage
d'entendre présentercesquestionspar deséquipesdespécialistesdudroit
international très éminentset expérimentés.
De plus, la Cour, en tant qu'organe judiciaire saisi d'une demandeen
indication de mesures conservatoires, était l'instanceappropriée pour
examinerl'incidencejuridique de la résolution731(1992)du Conseil de
sécuritésur ses décisions. On soutenait d'une part que le fait que le
Conseil de sécurité était saisdie la question empêchaitla Cour de faire
droità cettedemande,tandis que,d'autre part, larésolutionétaitcritiquée
pour ne pas tenir compte de certaines considérationsd'ordre juridique CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 1)5

que le Conseil de sécurité était censémenttenu d'envisager. C'étaient la
par excellencedes questions de droit que la Cour devait immanquable-
mentanalyseravant derechercher s'ilfallaitindiquer desmesuresconser-
vatoires.

Observationsgénérales

Créép sarla même Chartepour remplirencommun lesbuts etprincipes
des Nations Unies, le Conseil de sécurité et laCour sont complémen-
taires,et chacun remplit le rôleparticulier qui lui est assignépar l'instru-
ment commun qui leur a donnénaissance. Tous deux doivent la même
loyautéau mêmeinstrument qui estsource de leurspouvoirs et qui pres-
crit leurs buts. Comme les branches de 1'Etaten droit interne, telles que
l'exécutif etljeudiciaire, ilsremplissentleur missionpour lebiencommun
du systèmeplus vaste dont ilsfont partie.
Dans lesystèmedesNations Unies,lasphèredecompétencedechacun
de cesorganes estdéfiniepar laCharte, tout commedans l'ordre national
elle peut être définiepar la constitution. Toutefois,à la différencede
nombreux systèmesnationaux dans lesquelslejudiciaire peut exercer un
contrôle sur les actes de l'exécutifen soumettant cesactes aux critèresde

la légalitéconstitutionnelle,dans le systèmedes Nations Unies, la Cour
internationale de Justice n'est pas investie du pouvoir de contrôle ou
d'appel souventdévoluauxjuridictionslesplusélevéea suseind'un cadre
national (voirl'avisconsultatifrendu par laCourinternationale deJustice
dans l'affaire des Conséquencejsuridiques pour les Etats de la présence
continuede lilfrique duSudenNamibie(Sud-Ouestafricain)nonobstantla
résolution276(1970)du ConseildesécuritéC , .Z.J.Recueil1971,p. 16).En
mêmetemps, la Cour estl'organe judiciaire principal des Nations Unies
ayant pour tâche, entre autres, de régler,conformémentau droit interna-
tional, lesdifférendsqui lui sont soumis(article8du Statut de la Cour).
Ilya lieuderemarqueraussi une différenceimportante entrelepartage
des pouvoirs dans les systèmesnationaux et la répartition des pouvoirs
entre les organes principaux des Nations Unies, puisqu'il n'existepas,
entre lesorganismesetinstitutionsdesNations Unies, lemême rigoureux

principe deséparation despouvoirsqueceluiquel'ontrouveparfois dans
les systèmesnationaux. Comme la Cour l'a remarquédans l'affaire des
Activitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci,les
notions internes de séparation des pouvoirs «ne s'appliquent pas aux
relations entre institutions internationales chargées de régler desdiffé-
rends ))(C.Z.J.Recueil1984,p. 433, par. 92). Il n'existépas non plus de
structuration hiérarchique des organes des Nations Unies (Rosenne, The
Lawand Practiceof the International Court ofJustice,2eéd.rev., p. 70),
chaque organeprincipal étantpar interpares (ibid.,p. 71).
En tant qu'organe judiciaire, la Cour a périodiquement pour tâche
d'examineretdejuger sousl'anglestrictementjuridique desquestionsqui
peuvent en même temps fairel'objet d'une décisionde caractèreexécutif
ou politique émanant d'unautre organe principal des Nations Unies. La CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 166

Cour, de par sa nature et sa constitution, applique au cas dont elle est
saisieles notions, les critères et les méthodesde la procédure judiciaire,
que les autres organes des Nations Unies ne sont naturellement pas
obligésd'appliquer. Les notions qu'elle utilisesont des notions juridi-
ques,lecritèrequ'elleapplique estceluidelalégalitée,tsesméthodessont
celles de l'administration des preuves au sensjuridique. Ses critèresde
validité etles fondements de ses décisionsne sont naturellement pas les
mêmesque ceux qui s'appliqueraient devant un organe politique ou

exécutifdes Nations Unies.
Toutefois, tous ces organes, quels qu'ils soient, ont ceci en commun
qu'ilsexercentpareillementleur autoritéenvertu de la Charte et confor-
mément à ses dispositions. Il ne saurait jamais vraiment être question
d'une opposition entreun organe et un autre, mais plutôt d'une soumis-
sioncommune detous lesorganes àla Charte. L'interprétation desdispo-
sitions de la Charte est essentiellement une question de droit, et des
questions de droit de ce genre peuvent, quand les circonstances s'y
prêtent, êtreportées devantC laour pour qu'elle lestranche par une déci-
siondejustice. Lorsqu'ilenestainsi,la Cour agitentantque gardienne de
la Charte et du droit international car, sur la scène internationale, il
n'existepas d'organe plusélevé qui soitchargéde fonctionsjudiciaires et
de statuer sur des questions d'interprétation et d'application du droit
international.Ancrée àla Charte enparticulier etdans ledroitinternatio-

nal engénéral,la Cour connaît desquestionsjuridiques qui sontlégitime-
ment portées devant elle; le faitque sa décisionjudiciaire, fondée surle
droit, puisse avoir des conséquences politiquesn'estpas un élément qui
doive l'empêcherde remplir sa fonction en vertu de la Charte des
Nations Unies et du Statut de la Cour.
Pour la Cour, régler lesdifférends etles autres questions qui lui sont
régulièrementsoumisesen statuant conformémentau droit international
tel qu'elle l'applique et l'interprète constituesa fonction judiciaire et sa
raison d'être. Danssonanalysedesrapports entrelesprincipaux organes,
M. Rosenne conclutque cequi setrouve au cŒurde cesrapports estque
«la volontéde l'organistion estmanifestéepar lesactions de cesorganes
dans les domaines de compétence desquelssetrouve une question parti-
culière»(Rosenne,op. citp.69).Cequirelèvedelafonctionjudiciaire est

le domaine de compétencepropre de la Cour. S'ilarrive que ces consé-
quences politiques résultent d'une décisionjudiciaire, cela n'estpas de
nature à la soustraire àcettesphèrede compétence.Desorte que, aussi :

tandisque latâche de la Cour estlimitéeàexercerdesfonctions de
caractèrejuridique, son pouvoir d'action et de décisionn'estsoumis
àaucune limitation découlantdu fait que le différend quiest porté
devant ellepourrait aussi entrer dans le domaine de compétencede
quelque autre organe.Si lemaintien dela paix et dela sécuritéinter-
nationales estconsidérécomme la fonctionprimordiale delYOrgani-
sation des Nations Unies dans son ensemble (ycompris la Cour), la
Charte neconfèrepasde compétenceexclusive à un organeprincipal CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 167

unique. Mêmele fait que le Conseil de sécurité aau premier chef la
responsabilitédu maintien delapaixet dela sécuritéinternationales
en vertu de l'article 24 de la Charte ne suffit paslui donner une
compétenceexclusive sur ces questions ..Il n'existe donc aucune
autoritéexpresse dans la Charte ou dans le Statut pour fonder la
proposition de M.Alvarezau sujetde l'affairede l'dnglo-Iranian Oil
Co.lorsqu'il avanceque,siune affairesoumise à la Cour vientmena-
cerla paix du monde, leConseil de sécuritépeuts'ensaisir etmettre
finà la compétencede la Cour.»(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

Il est intéressantde relever que cette citation développe l'idée selon
laquelle la Cour peut examiner une question qui est de la compétence
d'un autre organemêmelorsque cette question est inscrite à l'ordre du
jour de ce dernier (ibid.,note 1).
Il découlede la nature différentede ces deux organes qu'il existe de
nombreuxfacteursqui relèventd'une décisionpolitiqueetdont un organe
politique peut s'occuper et s'occuperamais dont un organejudiciaire ne
peut s'occuper et ne s'occuperait pas.Il convient, dans ce contexte, de
citerla remarque de Kelsen:

«LeConseildesécuritéelt'Assemblée générale,dans lamesureoù
ilssont,euxaussi,compétentspour réglerdesdifférends,ne sontque
des organes quasi judiciaires de l'organisation des Nations Unies.
Tel est le casmême si l'onaccepte l'interprétation selon laquelleles
recommandations faites par le Conseil de sécuritpour le règlement
de différendsenvertu des articles31,38 ou 39sont,comme lesdéci-
sions du Conseilprises en vertu de l'article25,obligatoires pour les
parties. Le Conseil de sécurité, ainsi qu'onl'a fait remarquer, n'est

pas un organe judiciaire, car ses membres ne sont pas indépen-
dants.~ (Hans Kelsen, The Law of the United Nations, 1950,
p. 476-477.)

L'autonomiedela Cour

Les Etats-Unis ont soutenu que les organes de l'organisation des
Nations Unies devraient, dans toute la mesure du possible, coopérerles
uns aveclesautres pour mettre en Œuvre,en commun, lesprincipes etles
buts des Nations Unies. A ce sujet, les Etats-Unis ont citéle passage
suivant de l'opinion individuellede M. Tarazi, dans l'affaire du Plateau
continentaldela merEgée:

«Eneffet,s'ilestvraietcertainquela Cour estun organejudiciaire
indépendant ..iln'enestpas moinsvraiqu'elle faitpartie intégrante
des Nations Unies...
Celaétant,laprésenteCourt,out enmaintenant sonindépendance
ne doit pas négliger de prendre en considération cette vérité
première,à savoirqu'elle faitpartie intégrantede l'ONU. La Charte
dont la genèsehistorique marque une étapenouvelle dans l'histoire offredesdifférencesessentiellespar rapport aux dispositions de son
devancier, le Pacte de la SdN. Ces différences étaient duesà une
situation nouvelleà laquelle ont fait face les Etats et les peuples en
raison des suites de la seconde guerre mondiale et des développe-
mentsqui l'ont précédéo eu enont précipitéle déclenchement.
Il n'est pas nécessaireici de passer en revue ces différences. On
pourrait pourtant secontenterd'affirmer qu'en vertude laCharte le
Conseil de sécurité assume une responsabilité essentielleen vuedu
maintien dela paix et de la sécurit. aCour devrait collaborer,siles

circonstancesl'exigent,àcette Œuvrefondamentale. »(C.Z.J.Recueil
1976,opinion individuelle, p. 33 (les italiques sont de moi), ciàée
l'audience publique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 69-70.)
Cet exposé queM. Tarazi fait du rôle de la Cour dégage clairement
certainsprincipes essentiels:

1) La Cour est un organe indépendant de l'organisation des Nations
Uniesetdoitconserversonindépendance.
2) LaCour estun organejudiciaire.
3) LaCourfaitpartie intégrantedel'organisation desNations Unies.
4) En vertu de la Charte, le Conseil de sécurité assumela responsabilité
essentielledumaintiendelapaix etdelasécurité.
5) La Cour devrait collaborer avec le Conseil de sécurità la réalisation
decettemissionsilescirconstancesl'exigent.

Il ressort clairement de l'examen de ces principes que la Cour doià
tout moment conserver son indépendance dans l'accomplissement des
fonctions que la Charte lui confie en tant qu'organe judiciaire principal
des Nations Unies. Il est clair aussi que, dans bien des cas, le fait de
s'acquitterde cesfonctions indépendantesconduira la Cour àun résultat
qui seraenparfaite harmonie avec lesconclusionsdu Conseilde sécurité.
Mais ilne découlenullementde cespropositions que la Cour, lorsqu'elle
est régulièrementsaisied'un différendjuridique, doive coopérer avecle
Conseil de sécuritéjusqu'au poind te cesserd'exercer sonjugement indé-
pendant sur lesquestionsde droit dont elleestlégitimentsaisie.M.Tarazi
avait àcŒurde prévoir cette possibilité;il a mis soigneusement l'accent
sur l'indépendancede la Cour et a nuancé la formule,la collaboration
étant souhaitable«si les circonstances l'exigent». Lejuge de la question
de savoir si les circonstances l'exigent estassurément la Cour, exerçant

sonjugement entoute indépendance.
De plus, il y a lieu de relever que, s'agissantde la Cour, on ne trouve
aucune disposition du genre de l'article 12de laCharte qui stipule qu'en
ce qui concerne l'Assembléegénérale,tant que le Conseil de sécurité
remplit,à l'égard d'un différend odu'une situation quelconque, lesfonc-
tions qui lui sont attribuéespar la Charte, l'Assembléegénéralene doit
faireaucune recommandation surcedifférendou cettesituation » àmoins
que le Conseil de sécuriténe le lui demande. Dans le mécanismede la
Charte, la Cour internationale de Justice ne doit pas être limitéde la
mêmefaçondans son action. CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 169

Nul ne peut contesterque, lorsque le Conseil de sécurité examinune
situation ayantdesincidencesdirectessurl'affaire portéedevantla Cour,
celle-cidoit examinersisesdécisionsrisqueraientd'entrerenconflitavec
les mesuresque le Conseil de sécurité a prisesou envisagedeprendre et,
lorsque les circonstancesle permettent,doit chercherrenforcer l'action
du Conseil.
Il en est certainement ainsi, mais l'action du Conseil de sécun'est
que l'une des circonstancesque la Cour doit prendre en considérationet
cela ne met nullement un point finaà la question. Puisque la Cour et le

Conseilde sécuritépeuventexercerrégulièrementleursfonctionsrespec-
tives en ce qui concerne une situation ou un différend international,
chacun doit, dans l'exercice du pouvoir qui lui est indubitablement
conféré,exercerentouteindépendancesonjugement conformément àla
Charte. Il s'ensuitqu'iln'yaura pas toujours de totale coïncidence dans
leurappréciationd'unesituationdonnée.Spécialementlorsqueintervien-
nent desquestionsd'interprétation juridique, laCourtendratout naturel-
lement à protégerjalousement son indépendancede jugement, faute de
quoi ellemanquerait aux préceptesde la Charte.

Exercicecoordonné despouvoirs

Dans lepassé,ils'esteffectivementtrouvédescasoù lamêmequestion
a dû être examinée àla fois par le Conseil de sécuret par la Cour. On

peut mentionner les affairessuivantes,où tant la compétencede la Cour
que celledu Conseilde sécuritéont étéinvoquée dsansune seuleetmême
affaire: Plateau continentalde la mer Egée,mesures conservatoires
(C.I.J. Recueil1976,p. 3); Personneldiplomatiqueet consulairedes Etats-
Unis à Téhéran ,esuresconservatoires(C.I.J. Recueil1979,p. 7), et Acti-
vités militaires et paramilitaisu Nicaragua etcontre celui-ci,mesures
conservatoiresC.I.J. Recueil1984,p. 169).
Toutefois, dans toutes ces affaires, la Cour et le Conseil étaientsaisis
par lamême partie, celle-cicherchantbtenirdecesorganesdifférentsle
remèdeapproprié à lanature etàlafonction dechacund'eux. End'autres
termes,la partie quilesavaitsaisischerchaitesutiliserdefaçoncomplé-
mentaire.
En l'espèce,laCour etleConseilont été approchéspar lesdeuxparties

que le différend oppose,chacune faisant valoir des moyens correspon-
dant à sa propre position. Et c'estcette situation qui donne une impor-
tance particulièreàla présente affaire.
Il y a lieu de relever, dans la dernière des trois affaires citées, le
commentairefait par laCour enréponse àl'argumentation desEtats-Unis
selon laquelle elle ne devait pas accepter de connaître de la demandedu
Nicaragua parce que la demande de mesures conservatoires était iden-
tique aux demandesque cet Etat avaitformuléesetqui avaientété rejetées
par leConseil de sécurité. a Cour afaitobserverque lefait qu'une ques-
tionsoitsoumiseauConseildesécuriténedoip tas empêcher laCour d'enconnaître, les deux procédures pouvant être menéesparallèlement (Acti-
vitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, C.Z.J.
Recueil1984,p. 433,par. 93).
Dans l'affaire relativeau PersonneldiplomatiqueetconsulairedesEtats-
Unisà Téhéran , Cour a notéque :

«il ne sembleêtrevenu à l'espritd'aucun membredu Conseil qu'ily
eût ou pût y avoir rien d'irrégulier dansl'exercicesimultanépar la
Cour et par le Conseil de sécuritéde leurs fonctions respectives.Le
fait n'est d'ailleurs pas surprenant. (C.Z.J.Recueil 1980, p. 21,
par. 40.)

Le rôle de la Cour a étédéfini defaçon plus claire encore lorsque la
Cour a observé :
«Alors que l'article 12 de la Charte interdit expressément à
l'Assembléegénéralede faire une recommandation au sujet d'un

différend ou d'une situationàl'égarddesquelsle Conseilremplitses
fonctions, ni la Charte ni le Statut n'apportent de restriction sem-
blableà l'exercicedes fonctions de la Cour. Les raisons en sont évi-
dentes: c'est à la Cour, organe judiciaire principal des Nations
Unies,qu'ilappartientde résoudretoute questionjuridique pouvant
opposer desparties àun différend;et la résolutionde ces questions
juridiques par la Cour peut jouer un rôle important et parfois
déterminant dansle règlementpacifique du différend. »(Zbid.,p. 22,
par. 40; voir aussi Activitmilitairesetparamilitaires au Nicaragua
et contrecelui-ci,C.Z.J.Recueil1984,p. 433-434,par. 93.)

Lespouvoirsdu Conseildesécurité

Ce qui nous est dit des pouvoirs que le Conseil de sécurité aexercés
lorsqu'il aadoptéla résolution731(1992)appelle un bref examen de ces
pouvoirs d'un point devue strictementjuridique.
La plénitude des pouvoirs que la Charte des Nations Unies confère
au Conseil de sécurité couvre des secteurs d'action internationale très
divers.
En vertu de l'article 24, le Conseil a la responsabilité principale du
maintien de la paix et de la sécurité internationaleset il est mandatépar
tous les Etats Membres pour agir en leur nom àcet égard.Auxtermes de

l'article 25,tous les Membres conviennent d'accepter et d'appliquer ses
décisions.
Le chapitre VIconfie au Conseil des pouvoirs et des responsabilités à
l'égarddu règlement des différends,et le chapitre VI1 lui donne des
pouvoirstrèsparticuliers dèslorsqu'ilconstate l'existenced'une menace
contrelapaix,d'une rupture delapaix ou d'un acted'agression.Unetelle
constatation relèveentièrementde son appréciation.
Pourinterprétercesdispositions,ilfauttenircompteen même tempsdel'article103dela Charte, quidispose qu'encasde conflitentre lesobliga-
tions des Membres des Nations Unies envertu de la Charte et leurs obli-
gations en vertu detout autre accord international lespremièresprévau-
dront. Puisquelesdécisionsdu Conseil de sécuritédoiventêtreacceptées
etappliquéespar touslesEtatsMembres,l'article 103confèreauxobliga-
tions ainsi crééesla priorité sur lesobligations découlantde tout autre
accord.

Toutcelareprésentevraimentun pouvoir énormeet ledroitinternatio-
nal, tel qu'il estincorporédans la Charte, oblige tous les Etatsrecon-
naître ce pouvoir età agir conformément aux directivesquien émanent.
Est-ceà dire que le Conseil de sécuritexercesesdiversesattributions
sansaucune limitation,oubien est-iltenu d'agirdansun cadrecirconscrit
par un ensemblede normes ou deprincipes?
L'article24lui-mêmesignaleimmédiatemenlt'existenced'un tel cadre
lorsqu'ildispose,dans sonparagraphe 2,que,dans l'accomplissementdes
obligationsque luiimposele paragraphe 1du mêmearticle,leConseil de
sécurité«agit conformément aux butset principes des Nations Unies B.
L'obligation est impérativeet les limites sont clairement marquées.Le

préambule de la Charte souligne notamment que les peuples des
Nations Unies sont résolus àcréerles conditions nécessairesau respect
des obligations néesdes traitéset autres sources du droit international.
Il est dàtl'article 1,paragraphe 1,de la Charte que l'un des buts des
Nations Unies estde

((réaliser,par des moyens pacifiques, conformément aux principes
de lajustice et du droitinternational, l'ajustement ou lerèglementde
différendsou de situations, de caractère international, susceptibles
de mener à une rupture de la paix».

Les travauxpréparatoires

Laréalité etl'importance de ceslimitesressortent destravaux prépara-
toires de la Charte. Ceux-ci montrent que les préoccupations évoquées
ci-dessusfiguraientbien parmi lesconsidérationsquiontabouti à l'adop-
tion, sous leur forme actuelle, des articles qui confèrent sespouvoirs au
Conseil de sécurité.
Lors de la conférence des Nations Uniessur l'organisation internatio-
nale (San Francisco),au comité2de la commission III, qui examinaitles
projets de dispositions de la Charte concernant le Conseil de sécuritél,e

19 mai 1945,la Belgique - anticipant, en quelque sorte, le problème
mêmequi est soulevémaintenantpar l'argumentde la Libyeselonlequel
larésolution 731(1992)du Conseildesécurité porte atteinte àdescompo-
santes essentielles de la souverainet- a présentéun projet d'amende-
ment.
Pour citer leprocès-verbalde la commission :

a Le délégué de la Belgiquedéclareque si,commecelaparaît être le cas, le droit pour le Conseil de sécuritéde «recommander» im-
plique la possibilitéqu'un Membre de l'organisation soit obligé
d'abandonnerundroit garantipositivementpar ledroitinternational
comme étantun droit essentiel d'Etat indépendant, la délégation
belgeinsistepour présentersonamendement au comité.Lebut decet
amendement estd'accorder à un Etat qui estpartie àun différend,et
qui estime qu'une recommandation du Conseil de sécuritéporte

atteinteàsesdroitsessentiels,ledroit deréclamerun avisconsultatif
de la Cour internationale de Justice sur ce point: si la Cour estime
que ces droits sont violésou menacés,le Conseil de sécurité sera
invitéàexaminerla question ànouveau ou àsoumettre le différend
pour décision à l'Assembléegénérale. Cet amendementn'a, en
aucune façon, pour but de restreindre les pouvoirs légitimesdu
Conseil de sécurité.
Il serait, cependant, opportun de renforcer la base juridique des
décisionsdu Conseil de sécurité. » (Documentsde la conférence des
Nations Unies surl'organisation internationale,San Francisco, 1945,
vol.XII, p. 52-53.)

Ledélégué de l'Uniondes Républiquessocialistessoviétiqueso , pposé
à cetamendement,a déclaré :«Il ne devraitexister dans l'esprit des délé-
guésaucun doute surlesintentions du Conseil de sécurité dene porter en
aucune façon atteinte aux droits d'un Etat souverain.» (Zbid.,p. 53.)En
outre :

«Le déléguédes Etats-Unis soulignel'importance de la prescrip-
tion en vertu de laquelle l'action du Conseil de sécurit, n cas de
différendconstituantune menacepour lapaix, aura lieu «en confor-
mitéavec les buts et principes de l'organisation)).l se reporte au
paragraphe 1du chapitre 1modifiépar lesgouvernementsinvitants,
qui stipulequel'un desbuts del'organisation estderéaliserlerègle-
ment des différendspar des moyens pacifiques «en tenant dûment

compte desprincipes de lajustice et du droit international(doc. 2.
G/29, p. 1).Il n'interprète pas,pour sapart, lespropositions comme
empêchantun Etat quelconque defaireappelentout tempsàlaCour
internationale de Justice pour toute question qui pourrait norma-
lement être soumise à cette dernière. Dans l'ensemble, il ne pense
pas qu'il y ait intérêà accepter l'amendement belge, notamment
parce qu'ilestconvaincuqueleConseildesécurité esttenu d'agir con-
formément aux principes de la justice et du droit international.»
(Zbid.)

Ledélégué de la France, tout en considérant avecbeaucoup de sympa-
thie les idées contenuesdans l'amendement belge, a exprimé des doutes
sursonefficacitéeta ditque lesous-comitéderédaction ((devraits'effor-
cer d'introduire dans le texte les garanties les plus complètes que le
Conseil de sécurité accomplirasa tâche conformémentau droit et àla
justice»(ibid.,p.54). CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 173

Le délégué de la Colombie a appuyé chaleureusement l'amendement
belge.
Le 22mai 1945,le délégué du Royaume-Uni a déclaré qu'à sonavis
l'adoption de l'amendement belge nuirait aux chances de succès de
l'Organisation.Il a fait valoir que la procédure proposéepar l'amende-
ment entraînerait un retard dans des circonstances où la promptitude
d'action du Conseil de sécurité était extrêmement souhaitabl(e Docu-
mentsde la conférencedesNations Uniessur l'organisation internationale,
San Francisco, 1945,vol.XII, p. 68).

Le délégué de l'Afrique du Sud a soutenu le mêmepoint de vue, en
soulignantl'importance del'actedefoiqu'accomplissaientlespetitsEtats
en acceptant le paragraphe 4 (ibid., p.69). Le délégde la République
socialiste soviétiquede Biélorussiea lui aussi combattu l'amendement
belge (ibid.).
Ledélégué delaBelgiquea demandéalorsune réponseplusprécise àla
question qu'il avait déjà posée,savoir si le terme recommander)), au
chapitre VIII, section, du projet (correspondant au chapitre VI1de la
Charte des Nations Unies), comportait des obligations pour des Etats
partiesà un litigeou s'ilsignifiaitseulementqueleConseiloffrait un avis
pouvant ou non êtreaccepté (ibid.).
Le délégué des Etats-Uniss'est déclaréd'accord avec celui du
Royaume-Uni et a préciséqu'il avait voulu montrer clairement que la

section A n'envisageait aucune mesure de contrainte ou de sanction
(ibid.).
Ledélégué de la Belgiqueadéclaréalorsque,puisqu'il étaitclairement
entendu qu'une recommandation faitepar leConseilsousla section Adu
chapitreVI11n'entraînait aucun effet obligatoire, il acceptait de retirer
l'amendementde son pays. Le Présidenta acceptéceretrait (ibid.).
Un débatanalogue a eu lieu en mêmetemps au sein d'un autre comité
de la commission III (le comité qui s'occupaitde l'organisation etde la
procédure).Le24mai 1945, ledélégué dela Norvègeadéclaré cequisuit :

«Le Conseil de sécurité a étinvesti de pouvoirs énormes etles
propositions deDumbarton Oaksont fixépeudelimites àleur exer-
cice. Leschapitres sur lesbuts et lesprincipes ne contiennent pas de
telles règles, l'exception du principe de l'égalité souveraine des
Etats.Il[ledélégué dela Norvège]estimequ'on devraitformulerune
règlefondamentale de conduite qui servirait de frein au Conseil de
sécuritéetdegarantiecontrelapratique par celui-cid'une((politique
de compensation ».Quels que soient lessacrifices que le Conseil de
sécurité pourraitexiger d'une nation, ils ne devraient pas êtrede
nature à diminuer la confiance de cette nation dans son avenir.»

(Documents de la conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,San Francisco, 1945,vol.XI, p. 385.)
Je cite leprocès-verbal

«Le représentant du Royaume-Uni s'oppose à l'amendement CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY) 174

norvégien;il fait remarquer que son but est déjà atteintpar lesprin-
cipes amendésdu chapitre 1,qui stipulent que l'organisation doit
((réaliserpar desmoyenspacifiques et entenant comptedesprincipes
delajusticeet dudroit internationall,'ajustement oule règleme..»,
etc. A son avis, l'amendement norvégien nefournit pas un moyen
désirablede réglerla question; il estimeen effetinopportun de limi-
ter l'actiondu Conseil,ainsiqu'on lepropose enfait,lorsque celui-ci
agit contre une nation violant le droit.»(Documentsde la conférence

des Nations Uniessur l'organisationinternationale,San Francisco,
1945,vol.XI, p. 385.)
L'amendementnorvégiena été rejetéau motifque desrevisionsappor-
tées enmêmetemps aux chapitres liminaires de la Charte feraient réfé-
rence à des normes telles que le droit international et la justice.
(Ruth B.Russell,A Historyof the UnitedNationsCharter:ne Roleof the
UnitedStates 1940-1945,1958,p. 665.)
Cesdébats rappellent utilement dans quelsenslespouvoirsdu Conseil
ont été compriset acceptés lors de la rédaction de la Charte des
Nations Unies. Lespouvoirs du Conseilsont subordonnés aux articles 1

et 2 et en particulier aux garanties de conformitéavecle droit internatio-
nal qui setrouvent dans cesarticles.
Ilimportede considéreraussilagenèsedel'article 1,quidéfinitlesbuts
et lesprincipes des Nations Unies.
Les propositions de Dumbarton Oaks énonçaientces buts dans les
termes suivants:
«1. Maintenir la paix et la sécurité internationales;àecette fin
prendre des mesurescollectivesefficacesen vuedepréveniret élimi-
ner les dangers qui menacent la paix, réprimer les actes d'agression
ou autres atteintes portées la paix, et préparer ou réaliserpar des
moyens pacifiques le règlement des différends internationaux qui

risquent d'entraîner larupture de la paix.
2. Développerles relations amicalesentre les nations et prendre
toutes autres mesurespropres àconsolider la paix du monde.
3. Réaliserune coopération internationale envuede résoudreles
problèmeshumanitairesinternationaux telsque ceuxd'ordre écono-
mique et social.
4. Coordonner et centraliser les efforts des nations en vue de
parvenirà cesfins communes.»(Ibid.,p. 1019.)
Onremarquera que lesmots((conformémentauxprincipesdelajustice
etdu droitinternational»quifigurent dans la Charte ne setrouvaient pas

dans ces propositions. Sice membre de phrase a été ajouté au projet de
Dumbarton Oaks ce fut, en grande partie, pour apaiser les craintes qui
avaient étéexpriméesau sujet des énormes pouvoirs dont jouirait le
Conseil de sécurité.Comme RuthRussell l'adit dans son traitésur l'his-
toire de la Chart:
«Cependant, à commencerpar lesChinois à Dumbarton Oaks,de
nombreuses délégationsseplaignirentde ce que lespropositions ne CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 175

semblaient,àcet égard, faireaucune place aux normes de lajustice
ou du droit internationaA.San Francisco, par conséquent, confor-
mément àl'accordintervenu à Dumbarton Oaks, les quatre grands
ont adoptéofficiellementl'amendement chinois tendant à préciser
que le règlementpacifique des différends devait être réaliséen
prenant dûment en considération les principes de la justice et du
droit international.p.cit.,p. 656.)

La genèsede la Charte des Nations Unies confirme donc que la pléni-
tude despouvoirs du Conseildesécuritéa étéclairementlimitéepar lefait
que ces pouvoirs doivent êtreexercésconformément aux principes bien

établisdu droitinternational. estvraiquecettelimitationdoitêtreinter-
prétéedefaçonrestrictiveetnevaut quepour lesprincipes etobjectifsqui
figurent au chapitre 1de la Char:e

«LeSecrétairegénéraldesNationU s nies,dansune déclarationdu
10janvier 1947,a rappelé ce principe en ces termes: «les seules
restrictions sont lesprincipes et lesbuts fondamentaux qui figurent
au chapitre le' de la Charte.)) (Cot et Pellet, La Charte des
Nations Unies,eéd.,1991,p. 462-463.)

La restriction n'en existepas moins et elleconstitue un principe de droit
importantpour l'interprétationde la Charte des Nations Unies.
Il faut tenir compte de cette nette limitation pour interpréterl'obliga-
tion qui s'imposeàla Cour,entant que l'un des organes principaux des
Nations Unies,de«coopérer àla réalisationdesfins de l'organisation et
des'efforcerdedonner effetauxdécisionsdesautresorganesprincipaux,
et de ne pas produire de résultats qui les rendraient inopérantes))
(1.S.Rosenne, TheLawand PracticeoftheIntemational Court, p. 70).

LeschapitresVIet VIIdela Charte

Alalumièredecesobservationsrelatives à lanature detoute résolution
adoptéeparleConseildesécurité autitredu chapitre VI,ilestclairqu'une
telle résolution n'imposepas d'obligation contraignante. Les fonctions

exercéespar leConseildesécurité autitredu chapitre VIontfaitl'objetde
la remarque suivante de sirGerald Fitzmaurice
«dans le cadre de ce chapitre, ces fonctions n'ont pas de caractère

coercitif.Correctementinterprétée,llesn'autorisent probablement
pas le Conseilàfaireplus que des recommandationsenvue du règle-
ment d'undifférend quelconque. »(Fitzmaurice, «The Foundations
ofthe Authority of International Lawand the Problems of Enforce-
ment»,ModemLaw Review,1958,vol. 19,p. 5; les italiques sont de
moi.)

Cette conclusion découle à la fois des travaux préparatoires de la
Charte,du textemêmede celle-cietdu libelléde la résolution.Paronsé-quent, lefait que leConseil de sécuritéaitdoptéla résolution731(1992)
n'empêchaitpas la Cour d'examiner la requête qui lui était adressée.

De surcroît,quellesqu'aient pu êtreles mesuresprévuespar la résolu-
tion, ilfallait, en vertu de l'article24,paragraphe 2,de la Charte, qu'elles
fussentconformes audroit international. IIn'appartient pasà cette Cour
deréformerune résolutiondu Conseildesécurité,mais il estdelacompé-
tence dela Cour, etc'estmême safonction essentielle,de statuer surtoute

question dont elleestrégulièrementsaisieconformémenatu droitinterna-
tional. Par conséquent, laCour devra dire quel est le droit qui est appli-
cable en l'espèce et ellen'a pas às'écarterde cette voie par l'effetd'une
résolutionadoptéeenvertu du chapitre VI.
Cependant, dès lors que l'on entre dans le champ d'application du
chapitre VII,leschosessontbiendifférentes,carlorsqu'ils'agitde consta-
ter l'existenced'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou
d'un acted'agression, leConseiljouit d'une totale liberté d'appréciation.
Il sembleque c'estle Conseil, et lui seul, qui estjuge de l'existenced'un
étatde choses qui entraîne la mise en application du chapitre VII. Cette
décisionest prise par le Conseil de sécurité en faisant intervenir son
propre jugement etdans l'exercicedu pouvoirtotalement discrétionnaire
qui lui estconférépar l'article39.Une fois que le Conseil s'estprononcé

sur cepoint, laporte estouverte aux diversesdécisionsqu'ilpeut prendre
en vertu de ce chapitre.
Ainsi,une questionquifait l'objetd'une décisionvalabledu Conseilde
sécurité en vertu du chapitreVI1n'estpas,primafacie, de celles dont la
Cour puissevalablementconnaître.

La résolution731(1992)

Dans sa résolution731(1992),le Conseil de sécurité se déclare grave-
mentpréoccupépar leterrorisme international etlesagissementsillicites
dirigéscontre l'aviationcivileinternationale.l réaffirme sesrésolutions
antérieuresdemandant àtous les Etats de coopérerpour empêchertoute
ingérencedans lesliaisonsaériennescivilesettouslesactesdeterrorisme;

etilrappelle qu'ilacondamnéladestructionduvolPan Am 103etqueson
président aappelétous les Etatsà apporter leur aideafin que lesrespon-
sablesde cet acte criminelsoientarrêtéestjugés.
Danscetterésolution,leConseildéplorevivementlefaitqueleGouver-
nementlibyenn'aitpasrépondueffectivementaux demandes,antérieure-
mentprésentéesparlesGouvernements dela France, du Royaume-Uniet
des Etats-Unis, de coopérer pleinementpour l'établissement des respon-
sabilitésdansles actes terroristes concernant les vols 103de la Panm
et772de1'UTA.Ildemande instammentauxautorités libyennesd'appor-
ter immédiatementune réponse complète et effectiveces demandes, et
décidede rester saiside la question.
La résolutionne contient aucune décisionadressée à d'autres parties,maisseulementladécision«de restersaisidelaquestion ».Ellen'indique
pas davantage, par sestermes,commeiladvientd'habitude dans lesréso-
lutions adoptéesenvertu du chapitre VII, qu'elleait étéadoptée envertu
du chapitre VII. Il doit donc être clairque la résolution731(1992),celle
que la Cour avaitàprendre en considérationau moment des plaidoiries,
ne faisait nullement obstacle à l'examen, par la Cour, des questions
portées devantelle. Les observations et exhortations de la résolution ne
présentaientpas un caractèreobligatoireen droit.

La résolution748(1992)

Il est clair, en revanche,que la résolution 748(1992)a été adoptée en
vertu du chapitreVI1etelleledéclareentermes exprès.Aladifférencede
la résolution731 (1992),elle contientune sériede décisionsadresséesau
Gouvernement libyen et à tous les Etats.
L'article 25 de la Charte, aux termes duquel tous les Membres de
l'Organisation conviennentd'accepter et d'appliquer toutes les décisions
du Conseil de sécuritéconformément àlaCharte, impose àtous lesEtats
l'obligationjuridiquement contraignante de se conformer aux décisions
du Conseil de sécurité.L'article25 est renforcépar l'article 103, sibien
quemême encasdeconflitaveclesobligationsissuesdetoutautreaccord,
lesobligations envertu del'article 25prévaudront.
Sansprendre parti defaçondéfinitivesurcettequestionau stadeactuel,

celuidesmesuresconservatoires,j'estimequelarésolution748(1992)doit
être considéréceomme obligatoire pour la Libye, comme pour tous les
pays,envertu del'article25delaCharte desNations Uniesetque,d'après
l'article 103,lesobligationsqu'elledéfinitdoiventprévaloirsur cellesqui
découlentdetoutautreaccordinternational. Plusprécisément, celasigni-
fiequela Libyeestprimafacieliéepar lesdispositionsdecetterésolution,
mêmesiellesentrent en conflit aveclesdroits qu'elleinvoque envertu de
la convention de Montréal. Acet égard,je suisd'accord avecleraisonne-
ment de la majoritéde la Cour.
Cependant, je le dirai avec respect, il n'en résulte pasnécessairement
quelecaractèreobligatoirede larésolution748(1992)rendeinappropriée
une indication de mesures conservatoires par la Cour. J'arrive à cette
conclusion à l'issued'un examen attentif de toutes les dispositionsde la
résolution748(1992). Lapossibilitésubsisteapparemment pour la Cour,
toutenrespectantpleinementlarésolution 748(1992)dans sonintégralité,

dedéfinirpropriomotuune mesure appropriéequinesoitaucunementen
conflit avecla résolution748(1992)ou avecl'article25ou l'article 103de
la Charte.
Il ressort de l'analyse de la résolution748 (1992) que le Conseil s'y
déclaregravementpréoccupé de ceque leGouvernement libyenn'aitpas
encoredonnéune réponsecomplèteet effectiveauxdemandes de laréso-
lution 731(1992)etqu'ellecontient d'énergiquescondamnationsduterro-
rismeinternational. Dans cetterésolution,leConseilconstate,envertu de CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 17)8

l'article39delaCharte, l'existenced'unemenacecontre lapaix etlasécu-
rité internationales et décidede prendre certaines mesures en vertu de
l'article41delaCharte. A ladatedu 15avril 1992,tous lesEtatssonttenus
d'adopter certaines mesures indiquéesdans la résolution. Ces mesures
incluent dessanctionsdiplomatiquesetd'autres sanctions de diverstypes
en matière de trafic aérienet d'armements. Toutes ces mesures sont au
nombre de cellesprévuespar l'article41,qui traite des mesures n'impli-
quant pas l'emploide la force, et le Conseil n'estpas allé au-delàde cet
article.

La conventiondeMontréal

L'article 14,paragraphe 1,de la convention de Montréalest rédigé en
termes impératifset exige que tout différend concernant l'interprétation
ou l'applicationdelaconventionsoit soumisà l'arbitrageconformément à
sesdispositions. L'article,on lerelève,nementionnepas quel'interpréta-
tion, mais la dépasseet pénètredans le domaine de la manièredont le
traitéestou devrait êtreappliqué.
La convention de Montréal fait partie d'une réaction internationale
concertée devantle problème du terrorisme, qui revêt,depuis quelques
dizaines d'années, l'importanced'un problème international de pre-
mierplan. Plusieursconventionsdistinctesexprimentlaréponseréfléchie
de la communauté internationale au terrorisme international et plu-
sieurs d'entre elles incluent des dispositions semblableselles de l'ar-

ticle 14,y compris la faculté de saisir la Cour internationale en dernier
ressort.
Il afallu environtrenteannéesd'efforts internationauxpour assembler
l'édificede cetteréactioninternationale,sion remonte la conventionde
Tokyode 1963relativeaux infractionssurvenant àbord des aéronefs.La
plupart de ces conventionsont étératifiéesar plus de cent Etats. Selon
l'étude deI'UNITAR, TheUnitedNationsand theMaintenanceofInterna-
tional Peaceand Security,1987(voir p.418), àl'époqueoù celle-cia été
rédigée,centtrente-deuxEtatsétaientparties àlaconvention relativeaux
infractions et à certains autres actes survenantà bord des aéronefs
(convention de Tokyo de 1969);cent vingt-sept Etats étaient partiesa
conventionpourla répressiondelacapture illicited'aéronefs(convention
de La Haye de 1971);et cent vingt-huit Etats étaientpartiàla conven-
tion pour la répressiond'actesillicitesdirigéscontrela sécuritl'avia-

tion civile(conventionde Montréalde 1973).
Parmilesconventionsqui comprennentune clauseprévoyantlafaculté
desaisirlaCourlorsque ledifférendentrelespartiesnepeut êtreréglé par
voie de négociation,on peut citer la convention de 1963relative aux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(conventionde Tokyo),article 24; la convention de 1971pour la répres-
siondelacapture illicited'aéronefs(conventiondeLaHaye),article 12;la
convention de 1973sur la prévention et la répression des infractionscontrelespersonnesjouissant d'une protection internationale, ycompris
lesagentsdiplomatiques(convention de NewYork),article 13 ;laconven-

tion internationale de 1979contre la prise d'otages, article.
En réalité, ce systèmr eemonte, dans la pratique internationale, au
temps de la Société desNations: alors, la convention de 1937pour la
préventionetlarépressiondu terrorismeprévoyait àsonarticle 20queles
différendsrelatifsàl'interprétation ouàl'applicationdela conventionqui
nepourraient êtrerésolup sar lavoiediplomatique seraientportés devant
la Cour permanente de Justice internationale (voir Richard B. Lillich,
TransnationalTerrorism: Conventions and Commentary,1982,p. 175).
De trèsnombreux précédents internationaux invitend t onc àtraiter de
cesinfractions dans le cadre d'un systèmemultilatéralordonnéde négo-
ciationset, en définitive,de règlementjudiciaire.
LaCour,en saqualitéd'organejudiciaire quiapplique le droitinterna-
tional, ne saurait manquer de relever,à ce stade de son examen, que la
résolution73 1(1992)du Conseil de sécuriténe mentionnepasla conven-
tion de Montréal,ni le systèmeconventionnel multilatéral édifié pour
s'opposerau terrorisme international.

Un autre aspect de la convention de Montréalest qu'ellene porte pas
atteinte au principe de droit international coutumier aut dedereautjudi-
care. Toutefois, chaque Etat contractant, s'il n'extrade pas l'auteur
présuméd'une infraction,a l'obligation rigoureusd ee soumettrel'affaire
à ses autorités compétentes pour l'exercicede l'action pénale(art. 7). Le
principe aut dedereautjudicare estun aspectimportant delasouveraineté
de 1'Etatsur sesressortissants et lecaractèrebien établide ceprincipe en
droit international coutumierressort clairement de l'exposé suivant:

«L'emploi trèsrépandude la formule ((poursuivreou extrader n,
qu'elle figure expressément dansle texte, qu'elle soit expriméepar
l'obligation d'extrader, ou qu'elle soit sous-entendue dans l'obli-
gation d'exercer des poursuites ou de qualifier l'acte d'infraction,
ainsi que le nombre des signataires de cesnombreuses conventions,
attestent de l'existence de ce principe généraldu jus cogens.»
(M. Cherif Bassiouni, International Extradition: UnitedStates Law
and Practice,1987,p. 22.)
De mêmequ'elle ne mentionnepas la convention de Montréal,la réso-

lution 731(1992)netientpas davantagecompte de ceprincipe bien établi
du droit international.

Conclusion

Cette affaire très difficile, qui résulted'un incident si révoltantpour
la communauté mondialeet qui fait l'objet d'une condamnation si uni-
verselle, doit êtreabordéesous des points de vue aussi nombreux que
possible.
M.Lachs,dansl'affairedelaMerEgéea , commentéencestermeslacom-
plémentarité de toutes les instances auxquellesles Etats peuvent recourir: CONVENTIONDEMONTRÉALDE 1971 (OP.DISS. WEERAMANTRY) 180

«Le caractère souvent inhabituel des problèmes que doivent
affronter les Etats de nosjours oblige àutiliser leplus d'instruments
età se réserver leplus de voiespossible pour résoudreles questions
complexes et souvent multidimensionnelles qui se posent.))
(C.I.J. Recueil1978,opinion individuelle, p. 52.)

Dans cecontexte,ila insistésurlerôledelaCour entant qu'institutionau
service du règlementpacifique des différends.En l'espèce,un appel a

étéadressé à la Courpour qu'elle exercesesfonctions dans lecadre d'en-
semble du systèmedes Nations Unies, afin d'ouvrir une autre voie de
règlement. M. Lachs a misle doigt sur l'undes rôles principaux que peut
jouer la Cour lorsqu'il a déclaré:«Ainsi peut-on espérer empêcher un
différendde s'aggraver etde dégénére ern conflit.»(Ibid.)
On discerne dans ce passage le rôle que la Cour peut jouer en l'occur-
rence. Elle est saisie d'un différend,elle est prima facie compétente,il
s'instaureune situationd'escaladedetensionsetl'une desparties sollicite
sesbons offices afinde préserverlesdroitsqu'elle invoquejusqu'à ceque
la Courait statuéà leur sujet de façon définitive.
La Cour ne semettra pas dans une situation de conflit avec le Conseil
de sécurité lorsque cet organea déjàexercé sespouvoirs d'une manière
qui impose des obligations à tous les Membres de l'organisation des

Nations Unies. Toutefois, dans les domaines auxquels ne s'appliquent
pas les décisions obligatoires prises par le Conseil en vertu du cha-
pitre VII, la Cour estlibre d'user deson influenceet de son autoritépour
servirlesfinsde la paix internationale, dont ellesepréoccupeautant que
tout autre organe des Nations Unies. Promouvoirla paix et la sauvegar-
der, ce n'est paslà la réserve exclusived'un seul organe, mais le but
commun detous. La Coura lepouvoir de rendre uneordonnance proprio
motu etn'estpas obligéede s'entenir auxtermes dans lesquelsl'auteur de
la demande a exercéson recours. Rien n'empêche laCour de tenter
d'atteindrecebut commun delapaix enprenant desmesuresqui,selon les
termes de M. Lachs,laissent «espérerempêcherun différendde s'aggra-
ver et de dégénéreren conflit.
Unjuge illustreafaitobserverjadis que lesloisnegardent pas lesilence
au milieu du fracas des armes.A notre époque,nous avons aussibesoin

d'affirmer quelesloisnesontpasprivéesdu pouvoir d'empêcher lefracas
des armes. Tout l'édificedu droit de l'organisation des Nations Unies
s'appuie sur la notion de la paix et de la prévention des conflits.S'il
lieu, si le risque d'un conflit menace des droits contestés devant elle, la
Cour n'estpas privéedu pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires
pour sauvegardercesdroits enempêchantl'escaladedu différendetpeut-
êtrele recours à la force. Cela relèverait entièrementde sa mission et
s'accorderait en totalité avec les butset principes de l'Organisation des
Nations Unies etdu droit international. Particulièrementen périodesde
tensions, alors que les signaux de danger lancent partout des éclairs,la
Cour, semble-t-il,devraitréagirdefaçon positive enprenant lesmesures
qui relèventdesacompétence.SilaCour a compétencepour protégerdesdroits qui font l'objet d'une action en suspens- et cela està mon avis
indubitable - une ordonnance interdisant de porter atteinte à cesdroits

par un conflitdoitaussi releverde sacompétence.Sil'on veutque ledroit
international sedéveloppeetservelacausedelapaixcommeilestcenséle
faire, la Cour ne peut se dérober devantune telle responsabilitéquand
l'occasionde l'assumer seprésente.
J'indiquerais proprio motu des mesures conservatoires à l'égard des
deux Parties pour empêcherl'aggravationoul'extension du différend qui
pourrait résulterde l'emploide la force par l'uneou l'autre d'entreelles.
De telles mesuresn'entreraient en conflit avecaucune décisionadoptée
par leConseilde sécuritéenvertudu chapitre VII,ni avecaucune obliga-
tion issue de l'article 25, ni avec le principe qui sous-tend l'article 103.
Ainsi,la voie qui mèneau règlementpacifique du différend pouvait-elle
être sauvegardéeavanq tue les Parties ne setrouvent sur des chemins où

elles seront engagées sans retour. Une telle décision serait fondée sur
l'article41 du Statut de la Cour, ainsi que sur les articles74 et 75 du
Règlement.

(Signé)Christopher Gregory WEERAMANTRY.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE WEERAMANTRY

This application for provisional measures was, as required by
Article 74 (1) of the Rules of Court, given priority over al1other cases

pending before the Court. The oral submissions were concluded on
28 March 1992.Three days later, when the casewas at the stage of delib-
erations, resolution 748 (1992) was adopted by the Security Council.
Resolution 748 (1992) covered matters of importance which were sub
judicebeforetheCourtandthe impact ofthat resolution upon the matters
before the Court is among the legal questions discussed in this opinion.

Withoutdeterminingdefinitively the legaleffectofthat resolution, the
validity of which is disputed by Libya, we must at the present stage of
provisional measures act upon the basis of its validity. Article5 of the
United Nations Charter, requiring Members of the United Nations to
accept and carry out decisions of the Council, must then be regarded as
prima facieapplicable to that resolution. In reaching these conclusions,1
agreewiththe viewsofthe majority ofthe Court but 1respectfullydissent
fromtheviewthatthat resolution renders itinappropriate fortheCourt to
issue provisional measures. The reasons for this view are set out in this
dissentingopinion. It deals with important questions of lawcanvassedat
somelengthbefore us which are of a significancereaching so far beyond
the immediate case as, in my opinion, to merit some extended examina-

tion.

Twomatters argued at somelengthbefore us, to which 1shall confine
my observations, are the question of jurisdiction and the relationship
betweenthis Court andthe SecurityCouncil.Themain assertions of fact
andthebasiccontentions ofthe Partiesaresufficientlyset outinthe Order
ofthe Courtand 1need not recapitulate them here.

Article 14 (1) of the Montreal Convention is the foundation of the
Court's jurisdiction toentertain thisapplication. It stipulates a six-month
period from the date of request for arbitration within whichifparties are
unable to agree on the organization of the arbitration, any one of them
may refer a dispute to the International Court.

The Respondents have contended that the pre-conditions to the juris-

diction ofthis Court have not been satisfied inasmuch asthere isno "dis- OPINION DISSIDENTE DE M. WEERAMANTRY

[Traduction]

Commelerequiert l'article74,paragraphe 1,du Règlementdela Cour,
prioritéa été donnée à la présentedemande en indication de mesures
conservatoiressurtouteslesautresaffairespendantes. Lesplaidoiries ont

été achevéesle 28 mars 1992.Troisjours plus tard, alors que l'affaire en
étaitau stade desdélibérationsl,e Conseil de sécuritadoptéla résolu-
tion 748 (1992).La résolution748(1992)portait sur des questionsimpor-
tantes alors en suspens devant la Cour et l'incidence de cette résolution
sur les questions dont laCour est saisiecompte parmi lespoints de droit
discutésdans la présente opinion.
Sansdéterminerde façon catégorique quelestl'effetjuridique de cette
résolution,dont la Libyecontestelavalidité,nous devons,austade actuel
delaprocédure, quiatrait àl'indicationdemesuresconservatoires,partir
du principe qu'elle estvalable. L'article 25 de la Charte des Nations
Unies, qui oblige les Membres de l'organisationàaccepter et appliquer
les décisionsdu Conseil, doit donc être considéréprimafacie, comme
applicable à cette résolution. En arrivantà de telles conclusions, je
m'associeauxopinions delamajoritédelaCour mais,avectout lerespect

queje dois àcelle-ci,je ne peux souscriàel'opinion que cetterésolution
rend inappropriée l'indication de mesures conservatoires. Les raisons
d'envisager ainsi l'affaire sont exposéesdans la présente opiniondissi-
dente. Elle traite d'importantes questions de droit qui ont été débattues
assezen détail devantnous et dontla portéedépasse l'affaire en causeau
point de semblermériterun examenquelque peu développé.
Je limiterai mes observations à deux questions qui ont fait l'objet
d'argumentations assez longues devant nous, celle de la compétenceet
celledes rapports entre la Cour et le Conseilde sécuri. esfaits essen-
tiels et les principales thèses des Parties sont exposés assez clairement
dans l'ordonnance de la Courpour que je n'aiepas àlesrépéterici.

L'article14,paragraphe 1,delaconventiondeMontréalestlabasedela
compétencequ'a laCour de connaître de la requête.Il stipule un délaide
sixmois à compterdelademande d'arbitragependant lequel,silesparties
ne parviennent pas àse mettre d'accord sur l'organisation de l'arbitrage,
l'une quelconqued'entreellespeut soumettreun différendàlaCour inter-
nationale.
Lesdéfendeurs ont soutenu quelesconditionspréalablesde la compé-
tence dela Cour n'ontpas étéremplies,faisantvaloirqu'il n'existepas depute" withinthe meaning ofArticle 14(1)andthat,in anyevent,the stipu-
lated six-month period has not elapsed.
Atthe present stage of proceedings it isinappropriate to givea narrow
or restrictivemeaning to the word "dispute". 1am satisfied prima facie
that there is a substantial dispute between the Parties, for Libya relieson
the ruleofcustomaryinternational law,autdedereautjudicare,asthe gov-

erningprinciple whichentitlesitto tryitsowncitizensinthe absenceofan
extradition treaty, while the Respondent demands the surrender of the
two suspects. Libya declares that it will try them and has invited the
Respondent to send its officiaisand lawyersto observe the trial, arguing
that it isthus satisfyingitsobligations under the Treaty.The Respondent
demands thatthe suspectsbe tried in its own courts. Libya contends that
itsdomesticlawforbidsthe surrender ofitscitizensfortrial elsewhereand
that the Respondent's demand is an infringement of its sovereignty.The
Respondent denies that this is a valid excuse for not surrendering them.
Al1of this in my view amounts prima facie at any rate to a dispute, thus
satisfyingone ofthe prerequisites of Article 14(1).

The Respondent's further contention, which is amore substantial one,
is that the letter in which Libya first mentioned arbitration was dated
18January and thiscasewasinstituted on 3March,wellbefore sixmonths
had elapsed. It contends therefore that an essential prerequisite to the
invocationoftheCourt's jurisdiction hasnotbeensatisfied.Thismaywell
be a correctstatement ofthe legalposition.

Atthe sametime,there isanother viewthat isplausible and iscertainly
arguable. That is, that where a party has in anticipation indicated that it
willnot consider itselfbound by mediation or negotiation, the insistence
by that party on a waiting period specified as a prerequisite before the
matter is taken to the International Court could defeat the purposes of
such aprovision. Material hasbeen placedbefore us to the effectthatthe
United Stateshad stated to the SecurityCouncil that this wasnot a differ-
ence of approach that could be mediated or negotiated (S/PV.3033,
21January 1982,p.7)and thatthe SecurityCouncil mustnotbe distracted
by Libyanattempts to convert this issue of international peace and secu-
rity into one of bilateral differences (ibid.).In other words, the argument
placedbefore us wasone ofanticipatory repudiation ofaconsensualobli-
gation.

The question of lawbefore us is this:if,in a hypothetical case,a party
refusesnegotiation, can suchparty insistonthe six-monthperiod ofdelay
before the matter is brought to this Court? Such insistence can wellbe a
roadblock in the path of a party seeking relieffrom this Court. The pro-
vision can then be construed to mean that a party is free to use other

methodsthan conciliationduring this six-monthperiod. Such a construc-
tion could well be a negation of the purposes and principles of such a
provision, as was cogently stated by Judge Ago in his separate opinion({différend»au sensdel'article 14,paragraphe 1,etque,detoute manière,
le délaide sixmois stipulén'estpas expiré.
A cestadede la procédure,il ne convientpas d'attribuer un sensétroit
ou restrictif au terme ({différend Il me semble établi,à premièrevue,
qu'il existeun différendsubstantielentrelesParties, car la Libyesefonde
surlarèglededroitinternational coutumier aut dedereautjudicarecomme
étantle principe directeur qui l'habilitejuger ses propres citoyens en
l'absencedetraitéd'extradition, tandis queledéfendeurréclamelaremise

des deux suspects. La Libye déclare qu'ellelesjugera et elle a invité le
défendeur àenvoyerdes représentantset des hommes de loi observerle
procès, arguantqu'elles'acquitte ainsides obligationsdont elle esttenue
envertu du traité.Ledéfendeurexigequelessuspectssoientjugésdevant
sesproprestribunaux. LaLibyefaitvaloirquesondroitinterneluiinterdit
delivrersescitoyenspour qu'ilssoientjugésailleurset quelaréclamation
du défendeurconstitueun empiétementsursasouveraineté.Ledéfendeur
nie qu'ily ait là une excusevalable pour ne pas livrerlesintéressés.Tout
celamesembleconstituerun différendtoutaumoinsprimafacie,etdonc à
satisfaireàl'une des conditions préalablesde l'article 14,paragraphe 1.
L'autre allégationdu défendeur, qui a plusde poids, est que la lettre
dans laquellela Libyeamentionné l'arbitragepour lapremièrefoisporte
la datedu 18janvier et que la présente instance a étéintroduite le 3mars,
bien avant que six mois ne se fussent écoulésIl soutient donc que l'une

desconditionspréalables essentiellespour demander àla Cour d'exercer
sa compétencen'apas été remplieT . ellepeut effectivementêtrela situa-
tion en droit.
Il y a pourtant une autre façon de voir qui est plausible et assurément
défendable. C'est que,quand une partie a indiquéd'avance qu'elle ne
s'estimera pas tenue par la médiation oula négociation et insistepour
faire respecter une période d'attenteàtitre de condition préalablepour
porter l'affaire devantla Cour internationale, elle risque de déjouerles
buts d'unetelleclause.Ilressort du dossierquinous a étéprésentq éueles
Etats-Unis ont déclaréau Conseil de sécuritéqu'il ne s'agissaitpas ici
d'une question de divergence d'opinion ou de démarche pouvant faire
l'objetde médiation ou êtrneégociée (S/PV.3033,21janvier 1982,p. 7) et
que le Conseil ne devait pas se laisser égarerpar les efforts entrepris du
côtélibyen pour tenter de faire de cette question de paix et de sécurité

internationales une question dedivergencesbilatérales(ibid.).End'autres
termes, l'argument développé devant nous était celudie la répudiation
anticipéed'une obligationconsensuelle.
La question de droit dont nous sommes saisis estla suivante: si, dans
une affairehypothétique,l'une despartiesrefusedenégocier,cettemême
partie peut-elle insister pour subordonner à l'écoulementdu délaide
sixmoisla facultédeporter l'affaire devant laCour? Unetelleinsistance
nemanquerait pas dedresserun obstaclesurlavoied'unepartie quicher-
cheraità obtenir satisfactiondevant la Cour. La disposition dont il s'agit
peut êtrealorsinterprétée ecnesensquetoutepartie alafacultéderecou-
rirà d'autres procéduresque la conciliation pendant cedélaide sixmois. 162 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

in the PreliminaryObjections phase of the case conceming Militaryand
ParamilitaryActivitiesinandagainst Nicaragua :

"1am in fact convinced that prior resort to diplomatic negotiations
cannot constitute anabsolute requirement,tobe satisfied evenwhen
the hopelessness of expecting any negotiations to succeed is clear
from the state of relations between the parties, and there is no war-
rant for using it as a ground for delaying the opening of arbitral or
judicial proceedings when provision for recourse to them exists."
(I.C.J. Reports1984,pp. 515-516,para. 4.)

Thegeneralprinciple set outinthat passagecanbe evenmorepointedly
formulated in the context of a specified waiting period such as is stipu-
lated inthe Montreal Convention. It can be plausiblyargued that there is
no purpose in allowing a party who has repudiated conciliation to argue
forthe rejection of an application ongrounds ofitsnon-compliance with
procedureswhich ithasitselfrejected.Aperiod offreedomfrom concilia-

tory and judicial processeswould thus be givento theparty repudiating,
leavingitatlibertyto pursue other non-conciliatoryprocedures, while its
opponent is required to stand by without help or remedy.

Sucha construction ofthe Articlefitsalsowithintheories ofinterpreta-
tion which emphasizethat treatyprovisions must be so interpreted as not
to render nugatory theirobject and purpose. One cannot without further
consideration conclude whether one or the other view should prevail.
Theyboth have much to be said for them and we are in a situation where
we can only Saythat the viewthat the six-month period in Article14 (1)
does not constitute an absolute prohibition is at least an arguable one.

Therecitalsin the Court's Order inthe NuclearTestscasesalsobearout
this provisional approach to jurisdiction

"13. Whereas on a request for provisional measures the Court

need not,beforeindicatingthem,finally satisfyitselfthat ithasjuris-
diction on the merits of the case, and yet ought not to indicate such
measures unless the provisions invoked by the Applicant appear,
prima facie,to afford a basis on which thejurisdiction ofthe Court
mightbe founded;

.............................

17. Whereas the material submitted to the Court leads it to the
conclusion, at the present stage of the proceedings, that theprovi- CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971 (OP. DISS. WEERAMANTRY) 162

Interpréter ainsiune telle disposition risquerait fort d'allerencontre
desbuts et principes qui l'inspirent, comme M. Ago l'adéclaréde façon
convaincante dans son opinion individuelle lors de la phase des excep-
tions préliminaires en l'affaire desActivités militaires etparamilitaireasu
Nicaragua etcontrecelui-ci:

«je suisconvaincu que lerecourspréalable àdesnégociationsdiplo-
matiques ne peut pas constituer une exigence absolue à remplir,
même lorsqu'ilestévidentque l'état desrelationsentre lesparties est

tel qu'il estillusoire de s'attendrece que de telles négociations
aboutissent à un résultat positifet qu'il serait injustifiéde retarder
par cebiaisl'ouverture d'une procédure arbitraleoujudiciaire quand
la possibilitédu recours celle-cia étéprévu» (C.I.J. Recueil1984,
p. 515-516,par. 4).

Le principe général énoncé dans ce passage peut être formulé plus
nettementencore dans lecasd'undélaid'attente spécifié,te qlue celuiqui
est stipulé dans la conventionde Montréal. L'onpeut raisonnablement
soutenir qu'il nesertrien depermettre à unepartie qui a refuséla conci-
liation d'invoquer,pour demander lerejetd'unerequête,l'inexécutiod ne
procédures qu'elle a elle-mêmerejetées.L'on mettrait ainsi celle-ci,
pendant un certaintemps, à l'abridetoute procéduredeconciliation etde
toute procédure judiciaire en la laissant libre de poursuivre d'autres
procédures non conciliatoires,tandisque la partie adverseresteraittenue
d'attendre, sansassistanceni recours.
Une telle lecture de l'article s'accorde aussi aveclesprincipes d'inter-
prétationqui soulignentquelesdispositionsd'un traité doiventêtreinter-

prétéesde manière àne pas priver d'effet son objet et son but. Sans un
examenplus approfondi, on ne saurait conclure que l'unou l'autrede ces
points devuedoit l'emporter.Ilyabeaucoup àdireenfaveurdel'un etde
l'autreet,danslasituationactuelle,nouspouvonsseulementretenir quele
point devueselonlequel ledélaide sixmoisde l'article 14,paragraphe 1,
ne constituepas une interdiction absolue est au moins défendable.
Lesconsidérantsdel'ordonnance delaCourdans lesaffairesdes Essais
nucléairesrenforcentaussicette attitude provisoiàel'égardde la compé-
tence:

«13. Considérant que, lorsqu'elleest saisie d'une demande en
indication de mesuresconservatoires, la Cour n'a pas besoin, avant
d'indiquer ces mesures, de s'assurer de façon concluante de sa
compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'elle ne doit cepen-
dantpas indiquer de telles mesures si lesdispositionsinvoquéespar
le demandeur ne se présententpas comme constituant, prima facie,

une base surlaquelle la compétencede la Cour pourrait êtrefondée;
.............................
17. Considérantque les éléments soumis à la Cour l'amènent à
conclure, au stade actuel de la procédure,que les dispositions invo- 163 1971 MONTREALCONVENTION (DISSO.P.WEERAMANTRY)

sionsinvokedbythe Applicantappear,prima facie,to afforda basis
on which the jurisdiction of the Court might be founded; and
whereas the Court will accordingly proceed to examinethe Appli-
cant'srequest for the indication of interim measures of protection;"
(I.C.J.Reports1973,pp. 101,102).

Applyingthis reasoning, 1would hold that the circumstances invoked
bythe Applicantappear,prima facie, to afforda basis on whichthe juris-
diction ofthe Court mightbe founded.
If,afterthe issueofuchprovisionalmeasures,itappears ata laterstage
oratthe stageofconsideration ofthemeritsthat the Court hasnojurisdic-
tion, then the provisional measures would immediately cease to have
effect.
Granted this conclusion in regard to the Court's jurisdiction under
Article 14ofthe Montreal Convention,the nextmajorquestion iswhether
SecurityCouncilresolutions 73 1(1992)and 748(1992)present obstacles
to the Court's consideration of this matter. This question receivesatten-
tion in the next section of this opinion.

RelevancetotheMattersbeforetheCourt

This case has raised as perhaps no case has done in the past, certain

questions of importance and interest concerningthe respectivefunctions
of this Court and the Security Council. These matters arose squarely
beforethe Court atthestage oforalsubmissionsinconsequence ofresolu-
tion 731(1992).Thisrelationshiphas assumedevenmoreimportance sub-
sequent to the close of the oral argument, with the adoption of resolu-
tion 748(1992).
Issues relative to the relationship between the Court and the Security
Council were specificallyraised byboth Partiesbefore us.

Counselfor Libya,ProfessorSuy,urgedthatresolution 731(1992)"flies
in the face of the whole of the procedure for the peaceful settlement of
disputesprovidedfor in the Montreal Convention" and hencethat Libya
was entitled to submitto the International Court the legal aspects of the
question which wereneglected by the SecurityCouncil(Public Sittingof
26 March 1992(morning), CR 92/2, p. 61). He argued further that the

right ofLibyato exerciseitscriminaljurisdiction over itsownsubjectsisa
fundamental right derived fromthe sovereigntyofthe State,a right which
cannotbe derogatedfrom.
The Agent for the United States, Mr. Williamson, stated as one of his
four basic contentions"that the Libyan requests [tothe Court]should be
denied because the Security Council is actively seised with the issue" CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 163

quéespar le demandeur se présentent comme constituant, prima
facie, une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait être
fondée; et qu'en conséquence laCour se propose d'examiner la
demande en indication de mesures conservatoiresprésentéepar le
demandeur »(C.I.J. Recueil1973,p. 101et 102).

Appliquant lemême raisonnement,je dirais quelescirconstancesinvo-
quéespar ledemandeur seprésententcommeconstituant,primafacie,une
base sur laquellela compétencede la Cour pourrait être fondée.
Au cas où il apparaîtrait, après la question de ces mesures conserva-
toires,lors d'une phase ultérieure oude la procéduresur le fond, que la
Cour n'estpas compétente,lesmesuresconservatoirescesseraientimmé-
diatement de produire effet.
Une fois admisecetteconclusion en ce qui concerne la compétencede

laCour envertu del'article 14delaconventionde Montréal,laprincipale
questionqui sepose ensuite estcelledesavoirsilesrésolutions731(1992)
et 748(1992)du Conseil de sécurité font obstacleàl'examende l'affaire
par la Cour. Cette question est examinée dans la section suivantede la
présente opinion.

Lapertinence des questionsportéesdevant la Cour

Plus peut-être qu'aucuneautre dans le passé, la présente affairea
soulevécertaines questionsquine manquent ni d'importance ni d'intérêt
à propos des fonctions respectives de la Cour et du Conseil de sécurité.
Ces questionsse sont posées sans ambagesdevant la Cour, lors desplai-
doiries orales, dans le contexte de la résolution731 (1992).La relation
entre cesdeux organes arevêtuplusd'importance encore aprèsla clôture
des audiences,avecl'adoption de la résolution748(1992).
Lesdeux Parties qui comparaissent devant nous ont soulevéexpressé-
ment des questions relatives aux rapports entre la Cour et le Conseil de
sécurité.

LeconseildelaLibye,M.Suy,aditavecinsistancequelarésolution731
(1992)«fait fi de toute la procédure des règlementsjuridiques et paci-
fiques des différends prévuedans la convention de Montréal » et que la
Libye est donc fondée àsoumettre à la Cour internationale les aspects
juridiques de la question que le Conseil de sécuritéa négligsaudience
publique du 26mars 1992(matin),CR92/2, p.61).Ilasoutenu encore que
le droit de la Libye d'exercer sa compétence en matière pénalesur ses
propres ressortissants estun droit fondamental issude la souverainetéde
17Etat, n droit qui ne souffre pas de dérogation.
L'agent des Etats-Unis, M. Williamson, a déclaré,ce qui constituait
l'une de ses quatre thèses fondamentales, «que les demandes libyennes
doivent être rejetéesparceque le Conseil de sécuritéest saiside laes- 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS. OPWEERAMANTRY)
164

(PublicSittingof27March 1992,CR 92/4, p. 16).Counsel forthe United
States submitted that the Court ought to examine whether its actions
would conflictwithactions whichthe Councilhas taken or isconsidering
(ibid., p.7), and, while conceding that the Court and the Council may
properly exercisetheir respectivefunctions simultaneously in regard to
the samematter, submitted that neithertheCharternorthe practice ofthe
Court provides a basis for interfering with the exercisebythe Council of
its primary responsibility for maintaining international peace andsecu-
rity (ibid.,p.36).
Here, unequivocally presented to the Court, was an invitation to
address the issue of the relationship between Court and Council in the
contextofresolution731(1992).Resolution748(1992),beitnoted,wasnot

before the Courtat the stage of argument but later assumed evengreater
importance than resolution 731(1992).

In consideringan application forprovisionalmeasures inthe contextof
resolution 731(1992)and inthe context ofthe argumentsaddressed to us,
the Court was under the necessity of considering the legal issue of the
impact, if any,upon the Court's jurisdiction ofthe action ofthe Security
Council in adopting resolution 73 1(1992).Similar considerations now
apply to resolution 748 (1992).

The relationship between the Security Council and the Court, thus
firmly embedded within the legal arguments addressed to the Court,
requiressomepreliminaryconsideration, inthe manner appropriate to an
application for provisionalrelief.Definitivefindings on these important

matters are not necessary at the stage of provisional measures and, of
course,are not attemptedhere.What issoughtrather isto outlinethe gen-
eral contours of the problem so that the application for provisional mea-
surescanbe seenagainstthe legalbackground provided bytheCharter of
the United Nations. Theanalysisin the ensuingsubheads ofdiscussionis
essentialasbeingdirectlyrelevant to the application forprovisional mea-
sures which is now before the Court and to the objectionsraised thereto
on the basis ofthe organizationalstructure ofthe United Nations.

It seemsal1the more important to setthem down having regard to the
fact that these considerations have never before in the jurisprudence of
the Court ariseninthisdirectand immediatewayand havingregard tothe
advantage the Court has had ofa presentation before it onthese issuesby
teams of extremelyeminent and experienced international lawyers.

The Court as a judicial body seised of an application for provisional
measures was moreover the appropriate forum for examining the legal
impact on itsdeterminations, of SecurityCouncilresolution 731(1992).It
was contended, on the one hand, that the fact of the Security Council
being seised of the matter prevented the Court from granting the relief
sought,while,onthe other hand,that resolutionwasimpugnedasneglect-
ingcertain legalconsiderations whichthe SecurityCouncil was allegedly CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 16)4

tion ets'enoccupe »(audiencepublique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 16).
Le conseil des Etats-Unis a soutenu que la Cour doit examiner si son
action risque d'entrer en conflit avecles mesuresque le Conseil de sécu-
ritéaadoptéesou envisageactuellement(ibid.,p.67)et,tout enconcédant
que la Cour et le Conseil de sécurité peuvent légitimementexercerleurs
fonctions respectives simultanément à l'égardde la mêmeaffaire, il a
soutenu que ni la Charte ni la pratique de la Cour n'offrent de base
permettant d'entraverl'exercicepar leConseildesaresponsabilitéprinci-

pale du maintien de la paix et de la sécurité internationales(ibid.,p. 36).
Ilyavaitlàune invitation,présentéesanséquivoqu elaCour, àexami-
ner la questiondes rapports entre la Cour et leConseilde sécuridans le
contexte de la résolution731 (1992). Il convient de noter que la Cour
n'avait pas devant elle la résolution748 (1992)lors des plaidoiries, mais
celle-ci a revêtupar la suite encore plus d'importance que la résolu-
tion 731(1992).
Pour apprécierune demande en indication de mesures conservatoires
dans le contexte de la résolution731(1992)et des arguments développés
devantnous, laCour devaitnécessairementexaminerla questionde droit
consistantà savoir quelle était,le cas échéant, l'incidesur sa compé-
tence dela décisionprisepar leConseilde sécuritédans sarésolution731
(1992).Des considérationssemblabless'appliquent maintenant àla réso-
lution 748 (1992).

Les rapports entre le Conseil de sécuritéet la Cour, ainsi fermement
enracinés dansles exposésjuridiques présentés àla Cour, appellent un
certain examen préliminaire,de la manière qui convientà une demande
demesuresconservatoires. Iln'estpas nécessairede statuer defaçon défi-
nitive sur cesquestions importantesau stade des mesures conservatoires
et,àl'évidenceo, n netentepas icidelefaire.Ils'agitplutôt d'esquisserles
contoursgénéraux duproblèmeafinde replacerla demandeen indication
de mesuresconservatoires dans la perspective du régimejuridique établi
par la Charte des Nations Unies. L'analyse présentée sous les intitulés
suivantsdeladiscussionestessentielle,car elleestdirectementen rapport
avecla demande enindication demesuresconservatoiresdontla Cour est
maintenant saisieetaveclesmoyensinvoquésensenscontraire surlabase
de la structure organisationnelledes Nations Unies.
Il n'en sembleque plus important de formuler detelles considérations

étantdonnéqu'ellesn'ont jamais eujusqu'iciune actualitéaussidirecteet
immédiatedans lajurisprudence delaCour etquela Cour aeul'avantage
d'entendre présentercesquestionspar deséquipesdespécialistesdudroit
international très éminentset expérimentés.
De plus, la Cour, en tant qu'organe judiciaire saisi d'une demandeen
indication de mesures conservatoires, était l'instanceappropriée pour
examinerl'incidencejuridique de la résolution731(1992)du Conseil de
sécuritésur ses décisions. On soutenait d'une part que le fait que le
Conseil de sécurité était saisdie la question empêchaitla Cour de faire
droità cettedemande,tandis que,d'autre part, larésolutionétaitcritiquée
pour ne pas tenir compte de certaines considérationsd'ordre juridique 165 1971 MONTREALCONVENTION (DISS. OP.WEERAMANTRY)

bound to consider. These werepre-eminentlyquestions of law whichthe
Court wasbound to examineasaprerequisite to considering whetherpro-
visionalmeasureswereto be issued.

GeneralObservations

Created by the same Charter to fulfil in common the Purposes and
Principles of the United Nations,the SecurityCouncil and the Court are
complementaryto eachother,eachperformingthe special role allottedto
it by their commoninstrument of creation. Both owe loyalty aliketo the
same instrument which provides their authority and prescribes their
goals. Aswith the great branches of government within a domesticjuris-

diction suchasthe executiveand thejudiciary, theyperformtheir mission
forthe common benefit ofthe greater systemof whichthey are a part.
In the United Nations system,the sphere of each ofthese bodiesislaid
downinthe Charter, aswithina domesticjurisdiction it maybelaid down
in a constitution. However, unlike in many domestic systems where the
judicial arm may sit in reviewoverthe actions of the executiveam, sub-
jecting those acts to the test of legality under the Constitution, in the
United Nations system the International Court of Justice is not vested
with the reviewor appellatejurisdiction often givento the highest courts
within a domesticframework (see AdvisoryOpinion ofthe International
Court in Legal ConsequencesforStatesoftheContinuedPresence of South
Africa in Namibia (South West Africa) notwithstanding SecuritC youncil
Resolution 276(1970),I.C.J.Reports1971,p. 16).Atthe sametime,it isthe
principaljudicial organ oftheUnitedNations,charged withthetask, inter
alia,ofdecidinginaccordance withinternational lawsuch disputesasare

submittedto it (Art. 38ofthe Statute ofthe Court).

An important difference must also be noted between the division of
powers in municipal systemsand the distribution of powers between the
principal organs ofthe United Nations,forthere isnot amongthe United
Nations organizationsthe same strict principle of separation of powers
one sometimesfinds in municipal systems. Asthis Court observed in the
caseconcerning MilitalyandParamilitalyActivitiesinandagainst Nicara-
gua, municipal law concepts of separation of powers "are not applicable
to the relationsamonginternational institutionsforthe settlement of dis-
putes" (I.C.J.Reports 1984,p. 433,para. 92). Nor is there a hierarchical
arrangement ofthe organs ofthe United Nations (Rosenne, TheLaw and
PracticeoftheInternational Court of Justice,nd rev.ed.,p. 70),and each
principal organ ispar interpares(ibid.,p. 71).

As a judicial organ, it will be the Court's duty from time to time to
examine and determinefrom a strictly legalpoint of viewrnatters which
mayatthe sametimebethe subject ofdeterminationfrom an executiveor
politicalpoint of viewby another principal organ ofthe United Nations. CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 1)5

que le Conseil de sécurité était censémenttenu d'envisager. C'étaient la
par excellencedes questions de droit que la Cour devait immanquable-
mentanalyseravant derechercher s'ilfallaitindiquer desmesuresconser-
vatoires.

Observationsgénérales

Créép sarla même Chartepour remplirencommun lesbuts etprincipes
des Nations Unies, le Conseil de sécurité et laCour sont complémen-
taires,et chacun remplit le rôleparticulier qui lui est assignépar l'instru-
ment commun qui leur a donnénaissance. Tous deux doivent la même
loyautéau mêmeinstrument qui estsource de leurspouvoirs et qui pres-
crit leurs buts. Comme les branches de 1'Etaten droit interne, telles que
l'exécutif etljeudiciaire, ilsremplissentleur missionpour lebiencommun
du systèmeplus vaste dont ilsfont partie.
Dans lesystèmedesNations Unies,lasphèredecompétencedechacun
de cesorganes estdéfiniepar laCharte, tout commedans l'ordre national
elle peut être définiepar la constitution. Toutefois,à la différencede
nombreux systèmesnationaux dans lesquelslejudiciaire peut exercer un
contrôle sur les actes de l'exécutifen soumettant cesactes aux critèresde

la légalitéconstitutionnelle,dans le systèmedes Nations Unies, la Cour
internationale de Justice n'est pas investie du pouvoir de contrôle ou
d'appel souventdévoluauxjuridictionslesplusélevéea suseind'un cadre
national (voirl'avisconsultatifrendu par laCourinternationale deJustice
dans l'affaire des Conséquencejsuridiques pour les Etats de la présence
continuede lilfrique duSudenNamibie(Sud-Ouestafricain)nonobstantla
résolution276(1970)du ConseildesécuritéC , .Z.J.Recueil1971,p. 16).En
mêmetemps, la Cour estl'organe judiciaire principal des Nations Unies
ayant pour tâche, entre autres, de régler,conformémentau droit interna-
tional, lesdifférendsqui lui sont soumis(article8du Statut de la Cour).
Ilya lieuderemarqueraussi une différenceimportante entrelepartage
des pouvoirs dans les systèmesnationaux et la répartition des pouvoirs
entre les organes principaux des Nations Unies, puisqu'il n'existepas,
entre lesorganismesetinstitutionsdesNations Unies, lemême rigoureux

principe deséparation despouvoirsqueceluiquel'ontrouveparfois dans
les systèmesnationaux. Comme la Cour l'a remarquédans l'affaire des
Activitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci,les
notions internes de séparation des pouvoirs «ne s'appliquent pas aux
relations entre institutions internationales chargées de régler desdiffé-
rends ))(C.Z.J.Recueil1984,p. 433, par. 92). Il n'existépas non plus de
structuration hiérarchique des organes des Nations Unies (Rosenne, The
Lawand Practiceof the International Court ofJustice,2eéd.rev., p. 70),
chaque organeprincipal étantpar interpares (ibid.,p. 71).
En tant qu'organe judiciaire, la Cour a périodiquement pour tâche
d'examineretdejuger sousl'anglestrictementjuridique desquestionsqui
peuvent en même temps fairel'objet d'une décisionde caractèreexécutif
ou politique émanant d'unautre organe principal des Nations Unies. La166 1971 MONTREALCONVENTION (DISS .P. WEERAMANTRY)

The Court by virtue of its nature and constitution applies to thematter

before it the concepts,the criteria and the methodology of the judicial
process which other organs of the United Nations are naturally not
obliged to do. The conceptsit uses arejuridical concepts, itscriteria are
standards of legality, itsmethod is that of legaloof. Its tests of validity
and the bases of itsdecisionsare naturallynot the same asthey would be
beforea political or executiveorgan ofthe United Nations.

Yet thismuch they have in common - that al1organs alike exercise
theirauthority under and interms ofthe Charter.There can nevertrulybe
a question of opposition of one organ to another but rather a common
subjection of al1organstothe Charter. Theinterpretation of Charter pro-
visions is primarily amatter of law, and such questions of law may in
appropriate circumstances comebeforethe Court forjudicial determina-

tion. Whenthis does occur,the Court actsasguardian ofthe Charterand
ofinternational lawfor,intheinternational arena,there isno higherbody
chargedwithjudicialfunctions and withthedetermination ofquestionsof
interpretation and application of international law. Anchored to the
Charter in particular and to international law in general,the Court con-
siderssuchlegalmattersasareproperlybroughtbefore itand thefactthat
itsjudicialdecision based uponthe lawmay have politicalconsequences
is not a factor that would deflect it from dischargingits dutiesder the
Charter ofthe United Nations and the Statute ofthe Court.

The judicial function in resolving disputes and other matters duly
referred to it and in deciding in accordance with international law as

applied and interpreted by the Court is the Court's function and very
raison d'êtreD.r. Rosenne'sanalysisof the relationship betweenthe prin-
cipal organs concludes that what lies at the heart of their relationship is
that "the will of the Organization is made manifest by the actions of
those organs within whose sphere of competence a particular matter
lies" (Rosenne, op. cit., p. 69). What pertains to the judicial function
is the proper sphere of competence of the Court. The circumstance that
political results flow from a judicial decision is not one that takes it
out ofthat sphere of competence. So also :

"whilethe Court's taskislimitedto functions of a legalcharacter,its
power ofactionand decisionissubjecttono limitationderivingfrom
thefactthat thedisputebeforeit mightalsobewithinthecompetence
of some other organ. If the maintenance of international peace and

securitybe regardedasthe major function of the United Nations as
a whole (including the Court), the Charter confers no exclusive
competence upon any one principal organ. Even the fact that the
SecurityCouncilhas primary responsibility for the maintenance of CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 166

Cour, de par sa nature et sa constitution, applique au cas dont elle est
saisieles notions, les critères et les méthodesde la procédure judiciaire,
que les autres organes des Nations Unies ne sont naturellement pas
obligésd'appliquer. Les notions qu'elle utilisesont des notions juridi-
ques,lecritèrequ'elleapplique estceluidelalégalitée,tsesméthodessont
celles de l'administration des preuves au sensjuridique. Ses critèresde
validité etles fondements de ses décisionsne sont naturellement pas les
mêmesque ceux qui s'appliqueraient devant un organe politique ou

exécutifdes Nations Unies.
Toutefois, tous ces organes, quels qu'ils soient, ont ceci en commun
qu'ilsexercentpareillementleur autoritéenvertu de la Charte et confor-
mément à ses dispositions. Il ne saurait jamais vraiment être question
d'une opposition entreun organe et un autre, mais plutôt d'une soumis-
sioncommune detous lesorganes àla Charte. L'interprétation desdispo-
sitions de la Charte est essentiellement une question de droit, et des
questions de droit de ce genre peuvent, quand les circonstances s'y
prêtent, êtreportées devantC laour pour qu'elle lestranche par une déci-
siondejustice. Lorsqu'ilenestainsi,la Cour agitentantque gardienne de
la Charte et du droit international car, sur la scène internationale, il
n'existepas d'organe plusélevé qui soitchargéde fonctionsjudiciaires et
de statuer sur des questions d'interprétation et d'application du droit
international.Ancrée àla Charte enparticulier etdans ledroitinternatio-

nal engénéral,la Cour connaît desquestionsjuridiques qui sontlégitime-
ment portées devant elle; le faitque sa décisionjudiciaire, fondée surle
droit, puisse avoir des conséquences politiquesn'estpas un élément qui
doive l'empêcherde remplir sa fonction en vertu de la Charte des
Nations Unies et du Statut de la Cour.
Pour la Cour, régler lesdifférends etles autres questions qui lui sont
régulièrementsoumisesen statuant conformémentau droit international
tel qu'elle l'applique et l'interprète constituesa fonction judiciaire et sa
raison d'être. Danssonanalysedesrapports entrelesprincipaux organes,
M. Rosenne conclutque cequi setrouve au cŒurde cesrapports estque
«la volontéde l'organistion estmanifestéepar lesactions de cesorganes
dans les domaines de compétence desquelssetrouve une question parti-
culière»(Rosenne,op. citp.69).Cequirelèvedelafonctionjudiciaire est

le domaine de compétencepropre de la Cour. S'ilarrive que ces consé-
quences politiques résultent d'une décisionjudiciaire, cela n'estpas de
nature à la soustraire àcettesphèrede compétence.Desorte que, aussi :

tandisque latâche de la Cour estlimitéeàexercerdesfonctions de
caractèrejuridique, son pouvoir d'action et de décisionn'estsoumis
àaucune limitation découlantdu fait que le différend quiest porté
devant ellepourrait aussi entrer dans le domaine de compétencede
quelque autre organe.Si lemaintien dela paix et dela sécuritéinter-
nationales estconsidérécomme la fonctionprimordiale delYOrgani-
sation des Nations Unies dans son ensemble (ycompris la Cour), la
Charte neconfèrepasde compétenceexclusive à un organeprincipal international peace and security under Article 24 of the Charter is
not sufficient to giveit exclusivecompetence over these matters. ...
There isthus no express authorityinthe Charteror inthe Statute for
the proposition advanced by Judge Alvarezin the Anglo-Zranian Oil
Co.case to the effect that, if a case submitted to the Court should
constitute a threat to world peace, the Security Council may seise
itselfofthe caseand thereby put an end to the Court'sjurisdiction."
(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

It isinterestingto notethat thiscitation extendstheproposition that the
Court may consideramatterwithinthe competenceofanotherorgan even
to the casewherea matter isonthe agenda ofanother organ (ibid.,note 1).

It follows from the different nature of the two organs that there are
many factors relevant to a political decision which a politicalorgan can
and would take notice of, but which ajudicial organ cannot and would
not. It is apposite in thiscontext to cite Kelsen'sobservatio:

"The SecurityCouncil and theGeneral Assembly,insofar asthey,
too,arecompetent to settledisputes,are onlyquasi-judicialorgans of
the United Nations.This istrue evenifthe interpretation isaccepted
that recommendationsmade by the SecurityCouncil for the settle-
ment of disputes under Articles 31,38 or 39 are, as decisions of the
Councilinaccordance withArticle 25,binding upon theparties. The
SecurityCouncil,as pointed out, is not ajudicial organ because its
members arenotindependent." (Hans Kelsen, The Law ofthe United
Nations, 1950,pp. 476-477.)

TheCourt'sAutonomy

The United States submitted that the organs of the United Nations
should act as far as possiblein CO-operationwith each other in common
furtherance of the principles and purposes of the United Nations. The
United Statescitedinthiscontextthe separate opinion ofJudgeTarazi, in
the AegeanSea ContinentalShelfcase, reading as follows:

"For it is true and certain that the Court is an independent and
judicial organ ... it is no less true that it is an integral part of the
United Nations ...
That being so, the present Court, while maintaining its indepen-
dence, should not fail to take into consideration this basic truth,
namelythat it isan integralpart ofthe United Nations.TheCharter,
whose genesismarked a new stage in the course of history, features CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 167

unique. Mêmele fait que le Conseil de sécurité aau premier chef la
responsabilitédu maintien delapaixet dela sécuritéinternationales
en vertu de l'article 24 de la Charte ne suffit paslui donner une
compétenceexclusive sur ces questions ..Il n'existe donc aucune
autoritéexpresse dans la Charte ou dans le Statut pour fonder la
proposition de M.Alvarezau sujetde l'affairede l'dnglo-Iranian Oil
Co.lorsqu'il avanceque,siune affairesoumise à la Cour vientmena-
cerla paix du monde, leConseil de sécuritépeuts'ensaisir etmettre
finà la compétencede la Cour.»(Rosenne, op.cit.,p. 73.)

Il est intéressantde relever que cette citation développe l'idée selon
laquelle la Cour peut examiner une question qui est de la compétence
d'un autre organemêmelorsque cette question est inscrite à l'ordre du
jour de ce dernier (ibid.,note 1).
Il découlede la nature différentede ces deux organes qu'il existe de
nombreuxfacteursqui relèventd'une décisionpolitiqueetdont un organe
politique peut s'occuper et s'occuperamais dont un organejudiciaire ne
peut s'occuper et ne s'occuperait pas.Il convient, dans ce contexte, de
citerla remarque de Kelsen:

«LeConseildesécuritéelt'Assemblée générale,dans lamesureoù
ilssont,euxaussi,compétentspour réglerdesdifférends,ne sontque
des organes quasi judiciaires de l'organisation des Nations Unies.
Tel est le casmême si l'onaccepte l'interprétation selon laquelleles
recommandations faites par le Conseil de sécuritpour le règlement
de différendsenvertu des articles31,38 ou 39sont,comme lesdéci-
sions du Conseilprises en vertu de l'article25,obligatoires pour les
parties. Le Conseil de sécurité, ainsi qu'onl'a fait remarquer, n'est

pas un organe judiciaire, car ses membres ne sont pas indépen-
dants.~ (Hans Kelsen, The Law of the United Nations, 1950,
p. 476-477.)

L'autonomiedela Cour

Les Etats-Unis ont soutenu que les organes de l'organisation des
Nations Unies devraient, dans toute la mesure du possible, coopérerles
uns aveclesautres pour mettre en Œuvre,en commun, lesprincipes etles
buts des Nations Unies. A ce sujet, les Etats-Unis ont citéle passage
suivant de l'opinion individuellede M. Tarazi, dans l'affaire du Plateau
continentaldela merEgée:

«Eneffet,s'ilestvraietcertainquela Cour estun organejudiciaire
indépendant ..iln'enestpas moinsvraiqu'elle faitpartie intégrante
des Nations Unies...
Celaétant,laprésenteCourt,out enmaintenant sonindépendance
ne doit pas négliger de prendre en considération cette vérité
première,à savoirqu'elle faitpartie intégrantede l'ONU. La Charte
dont la genèsehistorique marque une étapenouvelle dans l'histoire 168 1971 MONTREALCONVENTION (DISS. OP. WEERAMANTRY)

some essential differences in comparison with the provisions of its
predecessor, the Covenant of the League of Nations. Those differ-
encesweredue to the new situation which Statesand peoples had to

faceonaccount ofthe consequencesofthe SecondWorld Warand of
the developmentswhichpreceded ortriggeredits outbreak.
There is no necessity here to consider these differencesin detail.
One may content oneself with the affirmation that, by virtue of the
Charter,the SecurityCouncilbears an essentialresponsibilityforthe
maintenanceofpeace and security.TheCourt, ifthe circumstances so
require, oughtto collaborateintheaccomplishmentofthisfundamental
mission." (I.C.J. Reports 1976, separate opinion, p. 33 (emphasis
added), citedin PublicSittingof27March 1992,CR 92/4, pp. 69-70.)
This exposition by Judge Tarazi of the role of the Court sets out with

clarity certain centralprinciple:
(1) The Court isanindependent organ ofthe United Nations and should
maintain itsindependence.
(2) TheCourt isajudicial organ.
(3) TheCourt isan integralpart ofthe United Nations.
(4) Under the Charter, the SecurityCouncilbears essentialresponsibility
forthe maintenance ofpeaceand security.
(5) The Court ought to collaborate with the Security Council in the
accomplishmentofthismissionifcircumstancessorequire.

Itisclearfrom aconsideration of theserequisitesthatthe Court mustat
al1timespreserveitsindependence in performing the functions whichthe
Charter has committed to it as the United Nations' principal judicial
organ. It is clear also that in many an instance the performance ofhose
independent functions willlead the Courtto a result intotal consonance
with the conclusions ofthe SecurityCouncil. But it by no means follows
from these propositions that the Court when properly seised of a legal
dispute should CO-operatewith the Security Council to the extent of
desisting from exercising its independent judgment on matters of law
properlybefore it.Judge Taraziwasanxiousto provide forthispossibility
bythe carefulinsertion ofthe stresson the Court's independence and the
provisoreferringto the desirabilityofcollaboration "ifthe circumstances
so require". The judge of the question whether the circumstances so
require is surely the Court in the exercise of its independent judgment.

It is to be noted, moreover,that, in the case of the Court, there is no
provision similar~toArticle 12oftheCharter whichprovides,inregard to
the General Assembly,that, while the Security Council is exercising in
respectofanydispute orsituationthe functionsassignedto itbytheChar-
ter, the General Assembly "shall not make any recommendation with
regard to that dispute or situation" unless the Security Council so
requests. It is part of the scheme of the Charter that the International
Court isnot similarlyrestrained. offredesdifférencesessentiellespar rapport aux dispositions de son
devancier, le Pacte de la SdN. Ces différences étaient duesà une
situation nouvelleà laquelle ont fait face les Etats et les peuples en
raison des suites de la seconde guerre mondiale et des développe-
mentsqui l'ont précédéo eu enont précipitéle déclenchement.
Il n'est pas nécessaireici de passer en revue ces différences. On
pourrait pourtant secontenterd'affirmer qu'en vertude laCharte le
Conseil de sécurité assume une responsabilité essentielleen vuedu
maintien dela paix et de la sécurit. aCour devrait collaborer,siles

circonstancesl'exigent,àcette Œuvrefondamentale. »(C.Z.J.Recueil
1976,opinion individuelle, p. 33 (les italiques sont de moi), ciàée
l'audience publique du 27mars 1992,CR 92/4, p. 69-70.)
Cet exposé queM. Tarazi fait du rôle de la Cour dégage clairement
certainsprincipes essentiels:

1) La Cour est un organe indépendant de l'organisation des Nations
Uniesetdoitconserversonindépendance.
2) LaCour estun organejudiciaire.
3) LaCourfaitpartie intégrantedel'organisation desNations Unies.
4) En vertu de la Charte, le Conseil de sécurité assumela responsabilité
essentielledumaintiendelapaix etdelasécurité.
5) La Cour devrait collaborer avec le Conseil de sécurità la réalisation
decettemissionsilescirconstancesl'exigent.

Il ressort clairement de l'examen de ces principes que la Cour doià
tout moment conserver son indépendance dans l'accomplissement des
fonctions que la Charte lui confie en tant qu'organe judiciaire principal
des Nations Unies. Il est clair aussi que, dans bien des cas, le fait de
s'acquitterde cesfonctions indépendantesconduira la Cour àun résultat
qui seraenparfaite harmonie avec lesconclusionsdu Conseilde sécurité.
Mais ilne découlenullementde cespropositions que la Cour, lorsqu'elle
est régulièrementsaisied'un différendjuridique, doive coopérer avecle
Conseil de sécuritéjusqu'au poind te cesserd'exercer sonjugement indé-
pendant sur lesquestionsde droit dont elleestlégitimentsaisie.M.Tarazi
avait àcŒurde prévoir cette possibilité;il a mis soigneusement l'accent
sur l'indépendancede la Cour et a nuancé la formule,la collaboration
étant souhaitable«si les circonstances l'exigent». Lejuge de la question
de savoir si les circonstances l'exigent estassurément la Cour, exerçant

sonjugement entoute indépendance.
De plus, il y a lieu de relever que, s'agissantde la Cour, on ne trouve
aucune disposition du genre de l'article 12de laCharte qui stipule qu'en
ce qui concerne l'Assembléegénérale,tant que le Conseil de sécurité
remplit,à l'égard d'un différend odu'une situation quelconque, lesfonc-
tions qui lui sont attribuéespar la Charte, l'Assembléegénéralene doit
faireaucune recommandation surcedifférendou cettesituation » àmoins
que le Conseil de sécuriténe le lui demande. Dans le mécanismede la
Charte, la Cour internationale de Justice ne doit pas être limitéde la
mêmefaçondans son action. Theproposition is unexceptionable that where the SecurityCouncil is
addressing a situation with direct implications for the matter brought
before the Court, the Court should examine whether its actions would
conflictwiththe actionsthat the SecurityCouncilhas taken orisconsider-
ing and, where the circumstancespermit, should seek to reinforce the
actions ofthe Council.
This is undoubtedly so, but the fact of SecurityCouncil action isonly
one ofthe circumstancesthe Court wouldtake into account and is byno
meansconclusive.Sincethe Court and the SecurityCouncil mayproperly
exercisetheir respectivefunctions with regardto an international dispute
or situation, each must in the exercise of the undoubted authority con-
ferred on it exercise its independent judgment in accordance with the
Charter. It follows that their assessment of a given situation will not
always be in complete coincidence. Especially where matters of legal

interpretationare involved,theCourt willnaturally zealouslypreserve its
independence ofjudgment,forto do anylesswould not be a proper com-
pliance with the requirements of the Charter.

Co-ordinateExercise of Powers

Therehaveindeed beenprior instanceswherethe samematterhascome
up for consideration before both the Security Council and the Court.
Mentionmaybe made in this connectionof the followingcaseswherethe
jurisdiction of both the Court and the Security Council was invoked in
one and the samematter: AegeanSea ContinentalShelJ;Znterimhtection
(Z.C.J.Reports1976,p. 3); UnitedStates Diplomatieand ConsularStaffin
Tehran, ProvisionalMeasures (I.C.J. Reports 1979, p. 7); Military and
Paramilitary Activitiesin and against Nicaragua,ProvisionalMeasures

(Z.C.J.Reports 1984,p. 169).
In al1these cases,however,theCourtandthe Councilwereapproached
by the sameparty, seekingbefore these differentorgansthe relief appro-
priate to the nature and function of each. In other words the party
approaching these organs was seeking to use them in a complementary
manner.
Inthepresent case,the Courtand theCouncilhavebeenapproached by
opposite parties to the dispute, each claiming a form of relief consistent
withitsownposition. It isthissituation whichgivesspecialimportanceto
the current case.
It is ofrelevanceto note, in the last ofthe three cases cited,the Court's
observation made in response to the United States' argument that the
Court should not consider Nicaragua's request because that request for
interim measures was identical with its requests which were rejected by
the Security Council.The Court observed that the fact that a matter is
beforethe SecurityCouncilshouldnotpreventitfrombeingdealt withby

the Court and that both proceedings could be pursuedparipassu (Military CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 169

Nul ne peut contesterque, lorsque le Conseil de sécurité examinune
situation ayantdesincidencesdirectessurl'affaire portéedevantla Cour,
celle-cidoit examinersisesdécisionsrisqueraientd'entrerenconflitavec
les mesuresque le Conseil de sécurité a prisesou envisagedeprendre et,
lorsque les circonstancesle permettent,doit chercherrenforcer l'action
du Conseil.
Il en est certainement ainsi, mais l'action du Conseil de sécun'est
que l'une des circonstancesque la Cour doit prendre en considérationet
cela ne met nullement un point finaà la question. Puisque la Cour et le

Conseilde sécuritépeuventexercerrégulièrementleursfonctionsrespec-
tives en ce qui concerne une situation ou un différend international,
chacun doit, dans l'exercice du pouvoir qui lui est indubitablement
conféré,exercerentouteindépendancesonjugement conformément àla
Charte. Il s'ensuitqu'iln'yaura pas toujours de totale coïncidence dans
leurappréciationd'unesituationdonnée.Spécialementlorsqueintervien-
nent desquestionsd'interprétation juridique, laCourtendratout naturel-
lement à protégerjalousement son indépendancede jugement, faute de
quoi ellemanquerait aux préceptesde la Charte.

Exercicecoordonné despouvoirs

Dans lepassé,ils'esteffectivementtrouvédescasoù lamêmequestion
a dû être examinée àla fois par le Conseil de sécuret par la Cour. On

peut mentionner les affairessuivantes,où tant la compétencede la Cour
que celledu Conseilde sécuritéont étéinvoquée dsansune seuleetmême
affaire: Plateau continentalde la mer Egée,mesures conservatoires
(C.I.J. Recueil1976,p. 3); Personneldiplomatiqueet consulairedes Etats-
Unis à Téhéran ,esuresconservatoires(C.I.J. Recueil1979,p. 7), et Acti-
vités militaires et paramilitaisu Nicaragua etcontre celui-ci,mesures
conservatoiresC.I.J. Recueil1984,p. 169).
Toutefois, dans toutes ces affaires, la Cour et le Conseil étaientsaisis
par lamême partie, celle-cicherchantbtenirdecesorganesdifférentsle
remèdeapproprié à lanature etàlafonction dechacund'eux. End'autres
termes,la partie quilesavaitsaisischerchaitesutiliserdefaçoncomplé-
mentaire.
En l'espèce,laCour etleConseilont été approchéspar lesdeuxparties

que le différend oppose,chacune faisant valoir des moyens correspon-
dant à sa propre position. Et c'estcette situation qui donne une impor-
tance particulièreàla présente affaire.
Il y a lieu de relever, dans la dernière des trois affaires citées, le
commentairefait par laCour enréponse àl'argumentation desEtats-Unis
selon laquelle elle ne devait pas accepter de connaître de la demandedu
Nicaragua parce que la demande de mesures conservatoires était iden-
tique aux demandesque cet Etat avaitformuléesetqui avaientété rejetées
par leConseil de sécurité. a Cour afaitobserverque lefait qu'une ques-
tionsoitsoumiseauConseildesécuriténedoip tas empêcher laCour d'en 170 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

and PararnilitaryActivitiesinand against Nicaragua,Z.C.J.Reports 1984,
p. 433,para. 93).

In the UnitedStates Diplomatic andConsularStaff in Tehrancase,the
Court observed that :
"it doesnot seemto haveoccurredtoany memberofthe Councilthat
there wasorcouldbe anythingirregularinthe simultaneous exercise

of their respectivefunctions by the Court and the SecurityCouncil.
Nor isthere inthisanycausefor surprise." (Z.C.J.Reports1980,p.21,
para. 40.)
The role ofthe Court wasmade evenclearerwhen the Court observed :

"Whereas Article 12of the Charter expresslyforbids the General
Assemblyto make any recommendation with regard to a dispute or
situation while the Security Council is exercising its functions in
respect of that dispute or situation, no such restriction is placed on

the functioning ofthe Court byanyprovision ofeithertheCharter or
the Statute ofthe Court.The reasons are clear. Itisforthe Court,the
principal judicial organ of the United Nations, to resolve any legal
questionsthat maybeinissuebetweenpartiestothe dispute;and the
resolution ofsuchlegalquestionsbytheCourt maybe an important,
and sometimesdecisive,factor in promotingthe peacefulsettlement
of the dispute." (Zbid.,p. 22, para. 40; see alsoMilitaryand Para-
military Activitiesin and against Nicaragua,Z.C.J. Reports 1984,
pp. 433-434,para. 93.)

me PowersoftheSecurityCouncil

The submissionbefore us relating to the exercise of SecurityCouncil
powers in adopting resolution 73 1(1992)callsfor a brief examination of
those powers from a strictly legalpoint of view.
Theplenitude ofpowers with whichthe Charter ofthe United Nations
investsthe SecurityCouncil straddles a wide variety of areas of interna-
tional action.
It is charged under Article 24 with the primary responsibility for the
maintenance of internationalpeace and securityand has a mandate from

al1Member Statesto act on their behalf in this regard. ByArticle 25,al1
Members agreeto accept and carry out its decisions.

Chapter VI entrusts it with powers and responsibilities in regard to
settlementofdisputes, and Chapter VI1givesitveryspecialpowerswhen
it determinesthe existenceof anythreat to the peace, breach ofthe peace
or act of aggression. Such determination is a matter entirely within its
discretion.
With these provisions should be read Article 103of the Charter whichconnaître, les deux procédures pouvant être menéesparallèlement (Acti-
vitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, C.Z.J.
Recueil1984,p. 433,par. 93).
Dans l'affaire relativeau PersonneldiplomatiqueetconsulairedesEtats-
Unisà Téhéran , Cour a notéque :

«il ne sembleêtrevenu à l'espritd'aucun membredu Conseil qu'ily
eût ou pût y avoir rien d'irrégulier dansl'exercicesimultanépar la
Cour et par le Conseil de sécuritéde leurs fonctions respectives.Le
fait n'est d'ailleurs pas surprenant. (C.Z.J.Recueil 1980, p. 21,
par. 40.)

Le rôle de la Cour a étédéfini defaçon plus claire encore lorsque la
Cour a observé :
«Alors que l'article 12 de la Charte interdit expressément à
l'Assembléegénéralede faire une recommandation au sujet d'un

différend ou d'une situationàl'égarddesquelsle Conseilremplitses
fonctions, ni la Charte ni le Statut n'apportent de restriction sem-
blableà l'exercicedes fonctions de la Cour. Les raisons en sont évi-
dentes: c'est à la Cour, organe judiciaire principal des Nations
Unies,qu'ilappartientde résoudretoute questionjuridique pouvant
opposer desparties àun différend;et la résolutionde ces questions
juridiques par la Cour peut jouer un rôle important et parfois
déterminant dansle règlementpacifique du différend. »(Zbid.,p. 22,
par. 40; voir aussi Activitmilitairesetparamilitaires au Nicaragua
et contrecelui-ci,C.Z.J.Recueil1984,p. 433-434,par. 93.)

Lespouvoirsdu Conseildesécurité

Ce qui nous est dit des pouvoirs que le Conseil de sécurité aexercés
lorsqu'il aadoptéla résolution731(1992)appelle un bref examen de ces
pouvoirs d'un point devue strictementjuridique.
La plénitude des pouvoirs que la Charte des Nations Unies confère
au Conseil de sécurité couvre des secteurs d'action internationale très
divers.
En vertu de l'article 24, le Conseil a la responsabilité principale du
maintien de la paix et de la sécurité internationaleset il est mandatépar
tous les Etats Membres pour agir en leur nom àcet égard.Auxtermes de

l'article 25,tous les Membres conviennent d'accepter et d'appliquer ses
décisions.
Le chapitre VIconfie au Conseil des pouvoirs et des responsabilités à
l'égarddu règlement des différends,et le chapitre VI1 lui donne des
pouvoirstrèsparticuliers dèslorsqu'ilconstate l'existenced'une menace
contrelapaix,d'une rupture delapaix ou d'un acted'agression.Unetelle
constatation relèveentièrementde son appréciation.
Pourinterprétercesdispositions,ilfauttenircompteen même tempsdeStatesthat in the event of a conflict between the obligations of the Mem-
bers ofthe United Nations under the Charterand their obligations under

any international agreement, their obligations under the Charter shall
prevail. Seeing that Security Council decisions are to be accepted and
carried out by al1Member States, the obligations thus created are given
priority by Article 103over obligationsunder any other agreement.

Al1this amounts to enormous power indeed and international law as
embodied inthe Charter requires al1Statesto recognizethispowerand act
according to the directions issuingfromit.
But does this mean that the SecurityCouncil discharges itsvariegated
functionsfree of al1limitations, or isthere a circumscribingboundary of
noms orprinciples withinwhichitsresponsibilitiesaretobedischarged?
Article 24itselfoffersus an immediatesignpost to such a circumscrib-
ingboundary when itprovides in Article24 (2)that the SecurityCouncil,
in dischargingitsduties under Article24(l), "shallact in accordance with
the Purposes and Principles of the United Nations". Theduty is impera-

tiveand the limitsarecategoricallystated.The Preamblestressesinteralia
the determination ofthe peoples ofthe UnitedNations to establishcondi-
tions under which respect for the obligations arising from treaties and
other sources of international lawcan be maintained.
Article 1(1)setsout as one of the Purposes ofthe United Nations that
it is

"to bring about bypeaceful means, and in conformity withthe prin-
ciples of justice and international law, adjustment or settlement of
international disputes or situations which might lead to a breach of
the peace".

TravauxPréparatoires

That suchlimitationsarereal and important appears when one consid-
ersthe travauxpréparatoiresleadingto the adoption ofthe Charter. They
are herereferred to forthe purpose ofshowingthatthe concernsoutlined
above wereindeed a factorleading tothe adoption in itspresent form of
the articles givingthe SecurityCouncil its powers.
In Committee2 of Commission III which was dealing, at the United
Nations Conference on International Organization,San Francisco, with
the draft provisions of the Charter relating to the SecurityCouncil, on
19May 1945,Belgium - as if in anticipation of the very problem now
presented by the Libyan argument that the Security Council resolu-
tion 731(1992)infringed on essentialsof Statesovereignty - presenteda
proposed amendment to the draft.

To quote fromthe Commission records :
"The Delegateof Belgiumstatedthat if,asappeared tobethe case,l'article103dela Charte, quidispose qu'encasde conflitentre lesobliga-
tions des Membres des Nations Unies envertu de la Charte et leurs obli-
gations en vertu detout autre accord international lespremièresprévau-
dront. Puisquelesdécisionsdu Conseil de sécuritédoiventêtreacceptées
etappliquéespar touslesEtatsMembres,l'article 103confèreauxobliga-
tions ainsi crééesla priorité sur lesobligations découlantde tout autre
accord.

Toutcelareprésentevraimentun pouvoir énormeet ledroitinternatio-
nal, tel qu'il estincorporédans la Charte, oblige tous les Etatsrecon-
naître ce pouvoir età agir conformément aux directivesquien émanent.
Est-ceà dire que le Conseil de sécuritexercesesdiversesattributions
sansaucune limitation,oubien est-iltenu d'agirdansun cadrecirconscrit
par un ensemblede normes ou deprincipes?
L'article24lui-mêmesignaleimmédiatemenlt'existenced'un tel cadre
lorsqu'ildispose,dans sonparagraphe 2,que,dans l'accomplissementdes
obligationsque luiimposele paragraphe 1du mêmearticle,leConseil de
sécurité«agit conformément aux butset principes des Nations Unies B.
L'obligation est impérativeet les limites sont clairement marquées.Le

préambule de la Charte souligne notamment que les peuples des
Nations Unies sont résolus àcréerles conditions nécessairesau respect
des obligations néesdes traitéset autres sources du droit international.
Il est dàtl'article 1,paragraphe 1,de la Charte que l'un des buts des
Nations Unies estde

((réaliser,par des moyens pacifiques, conformément aux principes
de lajustice et du droitinternational, l'ajustement ou lerèglementde
différendsou de situations, de caractère international, susceptibles
de mener à une rupture de la paix».

Les travauxpréparatoires

Laréalité etl'importance de ceslimitesressortent destravaux prépara-
toires de la Charte. Ceux-ci montrent que les préoccupations évoquées
ci-dessusfiguraientbien parmi lesconsidérationsquiontabouti à l'adop-
tion, sous leur forme actuelle, des articles qui confèrent sespouvoirs au
Conseil de sécurité.
Lors de la conférence des Nations Uniessur l'organisation internatio-
nale (San Francisco),au comité2de la commission III, qui examinaitles
projets de dispositions de la Charte concernant le Conseil de sécuritél,e

19 mai 1945,la Belgique - anticipant, en quelque sorte, le problème
mêmequi est soulevémaintenantpar l'argumentde la Libyeselonlequel
larésolution 731(1992)du Conseildesécurité porte atteinte àdescompo-
santes essentielles de la souverainet- a présentéun projet d'amende-
ment.
Pour citer leprocès-verbalde la commission :

a Le délégué de la Belgiquedéclareque si,commecelaparaît être the power of the SecurityCouncil to 'recommend' ('recommander')

involvedthe possibilitythat a Member ofthe Organization mightbe
obligedto abandon aright granted to it bypositiveinternational law
as an essentialright of statehood, the Delegation of Belgiumwished
formallyto present itsamendment to the Committee.Thepurpose of
the amendment was, in case a party to a dispute considered that a
recommendation of the SecurityCouncil infringed on its essential
rights,to allowthe state to request an advisory opinion on the ques-
tion by the International Court of Justice. If the Court found such
rightstobeinfringed orthreatened, then the SecurityCouncil would
berequiredeither to reconsiderthe questionor to referthe dispute to
the General Assemblyfora decision. It wasnot in any sensethe pur-
pose ofthisamendmentto limitthe legitimatepowers ofthe Security
Council. It would, however,be desirableto strengthenthejuridical
basis of the decisions of the Security Council." (Documentsof the
UnitedNations Conferenceon International Organization,San Fran-
cisco, 1945,Vol.XII, pp. 48-49.)

The Delegate of the Union of SovietSocialist Republics opposed the
amendment stating : "There should be no question in the minds of any
Delegatesthatthe SecurityCouncil mightwishin any wayto infringethe
rights of a sovereignstate" (ibid.,p. 49).Moreover:

"The Delegateofthe United Statesemphasizedthe importance of
the requirement that the action of the Security Council in dealing
witha dispute involvingathreat tothe peacebetaken 'inaccordance
withthe purposes and principles ofthe Organization'. Hereferredto
Chapter 1,paragraph 1,asamended bythe sponsoring governments,
which Statesthat one of the purposes of the Organization isto bring
about the peacefulsettlement of disputes 'withdue regard for prin-
ciplesofjusticeand international law'(Doc.2,G/29, p. 1).He did not
interpret the Proposalsas preventing anystate from appealing to the

International Court ofJusticeatany timeon any matter whichmight
properly go beforethe Court. On the whole,he did not consider the
acceptance of the BelgianAmendment advisable,particularly since
hebelievedthatthe SecurityCouncil wasbound to actin accordance
withthe principles ofjustice and international law." (Ibid.)

TheDelegateof France, whileviewingwithgreatsympathythe ideas in
the Belgian amendment, expressed doubt about its efficiency and sug-
gested that the sub-committeeon drafting "should endeavor to givethe
most completeguarantees possible that the SecurityCouncilaccomplish
itstask accordingto law andjustice" (ibid.,p. 50). le cas, le droit pour le Conseil de sécuritéde «recommander» im-
plique la possibilitéqu'un Membre de l'organisation soit obligé
d'abandonnerundroit garantipositivementpar ledroitinternational
comme étantun droit essentiel d'Etat indépendant, la délégation
belgeinsistepour présentersonamendement au comité.Lebut decet
amendement estd'accorder à un Etat qui estpartie àun différend,et
qui estime qu'une recommandation du Conseil de sécuritéporte

atteinteàsesdroitsessentiels,ledroit deréclamerun avisconsultatif
de la Cour internationale de Justice sur ce point: si la Cour estime
que ces droits sont violésou menacés,le Conseil de sécurité sera
invitéàexaminerla question ànouveau ou àsoumettre le différend
pour décision à l'Assembléegénérale. Cet amendementn'a, en
aucune façon, pour but de restreindre les pouvoirs légitimesdu
Conseil de sécurité.
Il serait, cependant, opportun de renforcer la base juridique des
décisionsdu Conseil de sécurité. » (Documentsde la conférence des
Nations Unies surl'organisation internationale,San Francisco, 1945,
vol.XII, p. 52-53.)

Ledélégué de l'Uniondes Républiquessocialistessoviétiqueso , pposé
à cetamendement,a déclaré :«Il ne devraitexister dans l'esprit des délé-
guésaucun doute surlesintentions du Conseil de sécurité dene porter en
aucune façon atteinte aux droits d'un Etat souverain.» (Zbid.,p. 53.)En
outre :

«Le déléguédes Etats-Unis soulignel'importance de la prescrip-
tion en vertu de laquelle l'action du Conseil de sécurit, n cas de
différendconstituantune menacepour lapaix, aura lieu «en confor-
mitéavec les buts et principes de l'organisation)).l se reporte au
paragraphe 1du chapitre 1modifiépar lesgouvernementsinvitants,
qui stipulequel'un desbuts del'organisation estderéaliserlerègle-
ment des différendspar des moyens pacifiques «en tenant dûment

compte desprincipes de lajustice et du droit international(doc. 2.
G/29, p. 1).Il n'interprète pas,pour sapart, lespropositions comme
empêchantun Etat quelconque defaireappelentout tempsàlaCour
internationale de Justice pour toute question qui pourrait norma-
lement être soumise à cette dernière. Dans l'ensemble, il ne pense
pas qu'il y ait intérêà accepter l'amendement belge, notamment
parce qu'ilestconvaincuqueleConseildesécurité esttenu d'agir con-
formément aux principes de la justice et du droit international.»
(Zbid.)

Ledélégué de la France, tout en considérant avecbeaucoup de sympa-
thie les idées contenuesdans l'amendement belge, a exprimé des doutes
sursonefficacitéeta ditque lesous-comitéderédaction ((devraits'effor-
cer d'introduire dans le texte les garanties les plus complètes que le
Conseil de sécurité accomplirasa tâche conformémentau droit et àla
justice»(ibid.,p.54). The Delegate of Colombia expressed his warmsupport of the Belgian
amendment.
On 22 May 1945,the Delegate of the United Kingdom stated that he
thought the adoption of the Belgianamendmentwould be prejudicial to
the success of the Organization.He submitted that the procedures pro-
posed bytheamendmentwouldcause delayatatimewhenprompt action
by the Security Council was most desirable (Documents of the United
Nations Conferenceon International Organization,San Francisco, 1945,
Vol.XII, p. 65).
TheDelegate of South Africa supported thisposition,emphasizingthe
importance ofthe act of faith the small Statesweremaking in the accept-
ance ofparagraph 4 (ibid.,p.66).The Delegateofthe Byelomssian Soviet

SocialistRepublic also opposed the Belgianamendment (ibid.).

The Delegate of Belgiumthen requested a more precise answer to his
previouslyposed questionas to whether the term "recommend in Chap-
ter VIII, Section A, of the draft (corresponding to Chapter VI1 of the
United Nations Charter) entailed obligationsfor States,parties to a dis-
pute, orwhether itmeant onlythat the Council wasoffering advicewhich
might or might not be accepted (ibid.).
The Delegate ofthe United States expressed agreement with the views
ofthe Delegateofthe United Kingdom and said hehad intendedto make
it clear that in Section no compulsion or enforcement was envisaged
(ibid.).
The Delegate of Belgium stated that since it now was clearly under-
stood that a recommendation made by the Council under Section A of
Chapter VI11didnot possess obligatoryeffect,he wishedto withdrawthe
Belgianamendment.Thewithdrawalwasacceptedbythe Chairman (ibid.).

In another committee of Commission III (the Cornmitteedealing with
Structures and Procedures)similar discussions were taking place at the
sametime. TheDelegatefor Nonvay obsemed on 24May 1945 :
"The SecurityCouncil wasvestedwithenormous powers andlittle
restraint was placed upon their exercise by the Dumbarton Oaks
Proposals. The chapters on Purposes and Principles offered no such

mles, withthe exception ofthe principle ofthe sovereignequality of
States.He felt that a basic rule of conduct must be formulated as a
restraint onthe SecurityCouncil and asaguarantee that itwouldnot
resortto a'politiquedecompensation'. Whateversacrificesthe Secu-
rity Council mightrequire ofa nation shouldnot be ofsuch a nature
as to impair the confidence of that nation in its future." (Documents
of the United Nations Conference on International Organization,
SanFrancisco, 1945,Vol.XI, p. 378.)

1quote fromthe record :

"The RepresentativeoftheUnited Kingdom,inopposingthe Nor- CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 173

Le délégué de la Colombie a appuyé chaleureusement l'amendement
belge.
Le 22mai 1945,le délégué du Royaume-Uni a déclaré qu'à sonavis
l'adoption de l'amendement belge nuirait aux chances de succès de
l'Organisation.Il a fait valoir que la procédure proposéepar l'amende-
ment entraînerait un retard dans des circonstances où la promptitude
d'action du Conseil de sécurité était extrêmement souhaitabl(e Docu-
mentsde la conférencedesNations Uniessur l'organisation internationale,
San Francisco, 1945,vol.XII, p. 68).

Le délégué de l'Afrique du Sud a soutenu le mêmepoint de vue, en
soulignantl'importance del'actedefoiqu'accomplissaientlespetitsEtats
en acceptant le paragraphe 4 (ibid., p.69). Le délégde la République
socialiste soviétiquede Biélorussiea lui aussi combattu l'amendement
belge (ibid.).
Ledélégué delaBelgiquea demandéalorsune réponseplusprécise àla
question qu'il avait déjà posée,savoir si le terme recommander)), au
chapitre VIII, section, du projet (correspondant au chapitre VI1de la
Charte des Nations Unies), comportait des obligations pour des Etats
partiesà un litigeou s'ilsignifiaitseulementqueleConseiloffrait un avis
pouvant ou non êtreaccepté (ibid.).
Le délégué des Etats-Uniss'est déclaréd'accord avec celui du
Royaume-Uni et a préciséqu'il avait voulu montrer clairement que la

section A n'envisageait aucune mesure de contrainte ou de sanction
(ibid.).
Ledélégué de la Belgiqueadéclaréalorsque,puisqu'il étaitclairement
entendu qu'une recommandation faitepar leConseilsousla section Adu
chapitreVI11n'entraînait aucun effet obligatoire, il acceptait de retirer
l'amendementde son pays. Le Présidenta acceptéceretrait (ibid.).
Un débatanalogue a eu lieu en mêmetemps au sein d'un autre comité
de la commission III (le comité qui s'occupaitde l'organisation etde la
procédure).Le24mai 1945, ledélégué dela Norvègeadéclaré cequisuit :

«Le Conseil de sécurité a étinvesti de pouvoirs énormes etles
propositions deDumbarton Oaksont fixépeudelimites àleur exer-
cice. Leschapitres sur lesbuts et lesprincipes ne contiennent pas de
telles règles, l'exception du principe de l'égalité souveraine des
Etats.Il[ledélégué dela Norvège]estimequ'on devraitformulerune
règlefondamentale de conduite qui servirait de frein au Conseil de
sécuritéetdegarantiecontrelapratique par celui-cid'une((politique
de compensation ».Quels que soient lessacrifices que le Conseil de
sécurité pourraitexiger d'une nation, ils ne devraient pas êtrede
nature à diminuer la confiance de cette nation dans son avenir.»

(Documents de la conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,San Francisco, 1945,vol.XI, p. 385.)
Je cite leprocès-verbal

«Le représentant du Royaume-Uni s'oppose à l'amendement174 1971 MONTREALCONVENTION (DISS O.P. WEERAMANTRY)

wegian amendment,pointed out that itspurpose was already served
by the amended principles in Chapter 1,where it was stipulated that
theOrganizationwasto 'bringabout bypeaceful means,andwithdue
regardforprinciplesofjustice and international law, adjustment or
settlement ...'etc. In his opinion, the Norwegian amendment
was not a desirable way of statingthe case because he considered it
inadvisable to limit the Council in its actions, as was in effecto-
posed, when it was dealing with a lawbreaker." (Documentsof the
UnitedNationsConferenceon InternationalOrganization,San Fran-
cisco, 1945,Vol.XI, p. 378.)

The Norwegian amendment was rejected on the ground that the con-
current revisions of the introductory chapters would provide for such
standards as international law and justice (Ruth B. Russell,A Historyof
theUnitedNationsCharter: ne RoleoftheUnitedStates 1940-1945.1958,
p. 665).
Thesediscussionsareusefulreminders ofthe senseinwhichthevowers
ofthe Council wereunderstood and adopted inthedrafting of theUnited
Nations Charter. Thepowers ofthe Councilaresubjectto Articles 1and 2
and, inparticular, tothe guaranteestheyprovide ofconformitywithinter-
national law.
It is important to note also the genesis of Article 1which sets out the
Purposes and Principles ofthe United Nations.
The Dumbarton OaksProposals setout these Purposes asfollows :

"1. To maintain international peace and security ;and to that end
to take effectivecollectivemeasures forthe prevention and removal
of threats to the peace and the suppression of acts of aggression or
other breaches of the peace, and to bring about by peaceful means
adjustment orsettlementofinternational disputes whichmayleadto
a breach ofthe peace;
2. To developfriendly relations among nations and to take other
appropriate measuresto strengthenuniversal peace;
3. To achieveinternational cooperation in the solution ofinterna-
tional economic,social and other humanitarian problems ;and

4. Toafford a center for harmonizingthe actions ofnations in the

achievementof these common ends." (Zbid.,p. 1019.)
It willbe noticed thatthe phrase "in conformitywith principles ofjus-
ticeand international law"which appearsintheCharter wasabsentfrom
these proposals. Theaddition ofthis phrase to the Dumbarton Oaksdraft
was due in no small measure to the fears expressed regarding the enor-
mous powers that would be enjoyed by the Security Council. As
Ruth Russell observesin her treatise on the history ofthe Charter:

"Beginning with the Chinese at Dumbarton Oaks, however,
numerous complaints wereheardthatthe Proposals apparently pro- CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (OP. DISSWEERAMANTRY) 174

norvégien;il fait remarquer que son but est déjà atteintpar lesprin-
cipes amendésdu chapitre 1,qui stipulent que l'organisation doit
((réaliserpar desmoyenspacifiques et entenant comptedesprincipes
delajusticeet dudroit internationall,'ajustement oule règleme..»,
etc. A son avis, l'amendement norvégien nefournit pas un moyen
désirablede réglerla question; il estimeen effetinopportun de limi-
ter l'actiondu Conseil,ainsiqu'on lepropose enfait,lorsque celui-ci
agit contre une nation violant le droit.»(Documentsde la conférence

des Nations Uniessur l'organisationinternationale,San Francisco,
1945,vol.XI, p. 385.)
L'amendementnorvégiena été rejetéau motifque desrevisionsappor-
tées enmêmetemps aux chapitres liminaires de la Charte feraient réfé-
rence à des normes telles que le droit international et la justice.
(Ruth B.Russell,A Historyof the UnitedNationsCharter:ne Roleof the
UnitedStates 1940-1945,1958,p. 665.)
Cesdébats rappellent utilement dans quelsenslespouvoirsdu Conseil
ont été compriset acceptés lors de la rédaction de la Charte des
Nations Unies. Lespouvoirs du Conseilsont subordonnés aux articles 1

et 2 et en particulier aux garanties de conformitéavecle droit internatio-
nal qui setrouvent dans cesarticles.
Ilimportede considéreraussilagenèsedel'article 1,quidéfinitlesbuts
et lesprincipes des Nations Unies.
Les propositions de Dumbarton Oaks énonçaientces buts dans les
termes suivants:
«1. Maintenir la paix et la sécurité internationales;àecette fin
prendre des mesurescollectivesefficacesen vuedepréveniret élimi-
ner les dangers qui menacent la paix, réprimer les actes d'agression
ou autres atteintes portées la paix, et préparer ou réaliserpar des
moyens pacifiques le règlement des différends internationaux qui

risquent d'entraîner larupture de la paix.
2. Développerles relations amicalesentre les nations et prendre
toutes autres mesurespropres àconsolider la paix du monde.
3. Réaliserune coopération internationale envuede résoudreles
problèmeshumanitairesinternationaux telsque ceuxd'ordre écono-
mique et social.
4. Coordonner et centraliser les efforts des nations en vue de
parvenirà cesfins communes.»(Ibid.,p. 1019.)
Onremarquera que lesmots((conformémentauxprincipesdelajustice
etdu droitinternational»quifigurent dans la Charte ne setrouvaient pas

dans ces propositions. Sice membre de phrase a été ajouté au projet de
Dumbarton Oaks ce fut, en grande partie, pour apaiser les craintes qui
avaient étéexpriméesau sujet des énormes pouvoirs dont jouirait le
Conseil de sécurité.Comme RuthRussell l'adit dans son traitésur l'his-
toire de la Chart:
«Cependant, à commencerpar lesChinois à Dumbarton Oaks,de
nombreuses délégationsseplaignirentde ce que lespropositions ne 175 1971 MONTREALCONVENTION (DISS .P.WEERAMANTRY)

videdforno standards ofjustice orofinternational lawinconnection
with thispurpose. At San Francisco,therefore, in accordance with
the agreement made at Dumbarton Oaks, the Big Four officially
adopted the Chinese amendment to add that peaceful settlement of
disputes must be brought about 'with due regard for principles of
justice and international law'."p.cit.,p. 656.)

Thehistory of the United Nations Charter thus corroboratesthe view
that a clearlimitation on theplenitude ofthe SecurityCouncil's powersis
that those powers must be exercised in accordance with the well-estab-
lished principles of international law. It is true this limitation must be
restrictivelyinterpreted and isconfined onlyto the principles andjects
which appear in Chapter 1of the Charter:

"Le Secrétairegénéra dlesNations Unies,dansune déclarationdu
10janvier 1947,a rappeléce principe en ces termes: 'lesseules res-
trictions sont les principes et lesbuts fondamentaux qui figurent au
chapitre le'de la Charte'." (Cot and Pellet, La Charte des Nations
Unies,2nd ed., 1991,pp. 462-463.)

Therestrictionnevertheless existsand constitutes an important principle
of lawin the interpretation ofthe United Nations Charter.
Theobligation oftheCourt, asoneoftheprincipal organs ofthe United
Nations, to "CO-operatein the attainment ofthe aims ofthe Organization
and striveto giveeffecttothe decisionsofotherprincipal organs, and not
achieve results which would render them nugatory" (1.S. Rosenne, The
Law and Practiceof the International Court, p. 70) should be read in the

light ofthis clearlimitation.

ChaptersVIand 1'1oftheCharter

In the light ofthese observations regarding the nature of a Security
Councilresolution under Chapter VI,itbecomesclearthat such a resolu-
tion does not impose a binding obligation. As Sir Gerald Fitzmaurice

observed of SecurityCouncilfunctions under Chapter VI :

"under thisChapter, these functionsarenot of an enforcement char-

acter. It is doubtful whether, on a proper reading ofthese functions,
theyenabletheCouncil to do morethan make recommendationswith
aviewto the settlement ofanydispute." (Fitzmaurice, "The Founda-
tions of the Authority of International Law and the Problems of
Enforcement", 1958,19ModernLaw Review,p. 1,at p. 5; emphasis
added.)

The travaux préparatoiresof the Charter, the Charter itself and the
wording of the resolutional1point to this conclusion.Consequentlythe CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY) 175

semblaient,àcet égard, faireaucune place aux normes de lajustice
ou du droit internationaA.San Francisco, par conséquent, confor-
mément àl'accordintervenu à Dumbarton Oaks, les quatre grands
ont adoptéofficiellementl'amendement chinois tendant à préciser
que le règlementpacifique des différends devait être réaliséen
prenant dûment en considération les principes de la justice et du
droit international.p.cit.,p. 656.)

La genèsede la Charte des Nations Unies confirme donc que la pléni-
tude despouvoirs du Conseildesécuritéa étéclairementlimitéepar lefait
que ces pouvoirs doivent êtreexercésconformément aux principes bien

établisdu droitinternational. estvraiquecettelimitationdoitêtreinter-
prétéedefaçonrestrictiveetnevaut quepour lesprincipes etobjectifsqui
figurent au chapitre 1de la Char:e

«LeSecrétairegénéraldesNationU s nies,dansune déclarationdu
10janvier 1947,a rappelé ce principe en ces termes: «les seules
restrictions sont lesprincipes et lesbuts fondamentaux qui figurent
au chapitre le' de la Charte.)) (Cot et Pellet, La Charte des
Nations Unies,eéd.,1991,p. 462-463.)

La restriction n'en existepas moins et elleconstitue un principe de droit
importantpour l'interprétationde la Charte des Nations Unies.
Il faut tenir compte de cette nette limitation pour interpréterl'obliga-
tion qui s'imposeàla Cour,entant que l'un des organes principaux des
Nations Unies,de«coopérer àla réalisationdesfins de l'organisation et
des'efforcerdedonner effetauxdécisionsdesautresorganesprincipaux,
et de ne pas produire de résultats qui les rendraient inopérantes))
(1.S.Rosenne, TheLawand PracticeoftheIntemational Court, p. 70).

LeschapitresVIet VIIdela Charte

Alalumièredecesobservationsrelatives à lanature detoute résolution
adoptéeparleConseildesécurité autitredu chapitre VI,ilestclairqu'une
telle résolution n'imposepas d'obligation contraignante. Les fonctions

exercéespar leConseildesécurité autitredu chapitre VIontfaitl'objetde
la remarque suivante de sirGerald Fitzmaurice
«dans le cadre de ce chapitre, ces fonctions n'ont pas de caractère

coercitif.Correctementinterprétée,llesn'autorisent probablement
pas le Conseilàfaireplus que des recommandationsenvue du règle-
ment d'undifférend quelconque. »(Fitzmaurice, «The Foundations
ofthe Authority of International Lawand the Problems of Enforce-
ment»,ModemLaw Review,1958,vol. 19,p. 5; les italiques sont de
moi.)

Cette conclusion découle à la fois des travaux préparatoires de la
Charte,du textemêmede celle-cietdu libelléde la résolution.Paronsé-fact that resolution 731(1992)had been adopted by the SecurityCouncil
was not an impediment to the consideration by the Court of the applica-
tion made to it.
Moreover, whatever the resolution purported to do was required by
Article24(2)ofthe Charter to be inaccordance with international law.It
is not for this Court to sitin reviewon a givenresolution of the Security

Councilbut it is within the competence of the Court and indeed its very
function to determineany matters properly brought before it in accord-
ancewithinternational law.Consequently,the Court willdeterminewhat
the lawisthat isapplicable to the caseinhandand would notbedeflected
fromthiscourse by a resolution under Chapter VI.

However,onceweenterthesphere ofChapter VII,the mattertakesona
different complexion,for the determination under Article 39 of the exist-
enceofanythreat to the peace, breach ofthepeace or act ofaggression,is
one entirelywithinthe discretion ofthe Council. It would appearthat the
Council and no other is the judge of the existence of the state of affairs
which brings Chapter VI1into operation. That decision is taken by the
SecurityCouncil initsownjudgment and inthe exerciseofthefull discre-
tion givento itbyArticle39.Oncetaken,the door isopened tothe various
decisionsthe Council may make under that Chapter.

Thus, any matter which isthe subject of a valid SecurityCouncil deci-
sionunder Chapter VI1doesnotappear,prima facie,to beonewithwhich

the Court can properly deal.

Resolution731(1992)

Resolution 731 (1992) expresses the Security Council's deep concern
with international terrorism and the illegal activities directed against
international civilaviation. It reaffirms previous resolutions callingupon
al1Statesto CO-operatein preventing interference with civilairtravel and
al1actsofterrorism, recallsitscondemnation ofthedestruction ofPan Am
flight 103and the President'scal1on al1States to assist in apprehension
and prosecution of those responsibleforthis criminal act.

Theresolution stronglydeplored the fact that the Libyan Government
had not responded effectivelyto earlier requests made by the Govern-
ments of France, the United Kingdom, and the United States to co-
operate fully in establishing responsibility for the terrorist acts involved
inthe two airdisastersinvolvingPan Am flight 103and UTAflight772.It
urgedthe LibyanGovernment immediatelyto provide a full and effective

response to those requests, and decided to remain seised of the matter.

Thereisno decisionintheresolutionaddressed to otherpartiesbut onlyquent, lefait que leConseil de sécuritéaitdoptéla résolution731(1992)
n'empêchaitpas la Cour d'examiner la requête qui lui était adressée.

De surcroît,quellesqu'aient pu êtreles mesuresprévuespar la résolu-
tion, ilfallait, en vertu de l'article24,paragraphe 2,de la Charte, qu'elles
fussentconformes audroit international. IIn'appartient pasà cette Cour
deréformerune résolutiondu Conseildesécurité,mais il estdelacompé-
tence dela Cour, etc'estmême safonction essentielle,de statuer surtoute

question dont elleestrégulièrementsaisieconformémenatu droitinterna-
tional. Par conséquent, laCour devra dire quel est le droit qui est appli-
cable en l'espèce et ellen'a pas às'écarterde cette voie par l'effetd'une
résolutionadoptéeenvertu du chapitre VI.
Cependant, dès lors que l'on entre dans le champ d'application du
chapitre VII,leschosessontbiendifférentes,carlorsqu'ils'agitde consta-
ter l'existenced'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou
d'un acted'agression, leConseiljouit d'une totale liberté d'appréciation.
Il sembleque c'estle Conseil, et lui seul, qui estjuge de l'existenced'un
étatde choses qui entraîne la mise en application du chapitre VII. Cette
décisionest prise par le Conseil de sécurité en faisant intervenir son
propre jugement etdans l'exercicedu pouvoirtotalement discrétionnaire
qui lui estconférépar l'article39.Une fois que le Conseil s'estprononcé

sur cepoint, laporte estouverte aux diversesdécisionsqu'ilpeut prendre
en vertu de ce chapitre.
Ainsi,une questionquifait l'objetd'une décisionvalabledu Conseilde
sécurité en vertu du chapitreVI1n'estpas,primafacie, de celles dont la
Cour puissevalablementconnaître.

La résolution731(1992)

Dans sa résolution731(1992),le Conseil de sécurité se déclare grave-
mentpréoccupépar leterrorisme international etlesagissementsillicites
dirigéscontre l'aviationcivileinternationale.l réaffirme sesrésolutions
antérieuresdemandant àtous les Etats de coopérerpour empêchertoute
ingérencedans lesliaisonsaériennescivilesettouslesactesdeterrorisme;

etilrappelle qu'ilacondamnéladestructionduvolPan Am 103etqueson
président aappelétous les Etatsà apporter leur aideafin que lesrespon-
sablesde cet acte criminelsoientarrêtéestjugés.
Danscetterésolution,leConseildéplorevivementlefaitqueleGouver-
nementlibyenn'aitpasrépondueffectivementaux demandes,antérieure-
mentprésentéesparlesGouvernements dela France, du Royaume-Uniet
des Etats-Unis, de coopérer pleinementpour l'établissement des respon-
sabilitésdansles actes terroristes concernant les vols 103de la Panm
et772de1'UTA.Ildemande instammentauxautorités libyennesd'appor-
ter immédiatementune réponse complète et effectiveces demandes, et
décidede rester saiside la question.
La résolutionne contient aucune décisionadressée à d'autres parties,a decision "to remain seizedofthe matter". Nor isthere anyindication on
the face of the resolution, as there usually is in resolutionsder Chap-
ter VII, indicating that the resolution has been adopted under Chap-

ter VII. It willbe cleartherefore that resolution 731(1992)which was the
resolutionbefore the Courtat the hearing ofthe oral argument did not in
any waybar the consideration by the Court of the matters before it. The
observations and exhortations it contained were not of a legallybinding
nature.

Resolution748(1992)

Resolution 748(1992),by way ofcontrast, is clearlya resolution under
Chapter VI1and sayssoon its face.That resolutioncontains,unlike reso-
lution 731(1992),a series of decisionsaddressed to the Libyan Govern-
ment andto al1States.
Article 25 of the Charter, under which al1 Members of the United
Nations agreeto accept and carryout al1decisionsofthe SecurityCouncil
in accordance with the Charter imposes a binding legal obligation on al1
Statesof compliance with decisionsof the SecurityCouncil. Article 25is
reinforcedby Article 103sothat eveninthe eventofaconflictwithobliga-
tions under any other agreement, the obligations under Article 25 shall

prevail.
Withoutexpressingdefinitive viewson the matter atthisstageofprovi-
sionalmeasures,1takethe viewthat resolution 748(1992)must betreated
asbinding on Libyaason al1countriesinterms ofArticle25ofthe United
Nations Charter and that, in terms of Article 103,the obligations it lays
down prevail over the obligations flowing from any other international
agreement. In specificterms,this meansthat Libyais,prima facie,bound
by the provisions of that resolution even if they should conflict with the
rights Libya claims under the Montreal Convention. In this respect, 1am
in agreement withthe viewofthe majority ofthe Court.

However,in my respectful view,it does not necessarilyfollow thatthe
binding nature of resolution 748 (1992) renders it inappropriate for the
Courtto indicate provisionalmeasures. 1arrive at this conclusionafter a
careful penisal of al1the provisions of resolution 748 (1992).There still
seemstoberoom,whilepreservingfullrespect forresolution 748(1992)in
al1its integrity, for the Court to frame an appropriate measure proprio
motu which in no way contradicts resolution 748 (1992),Article 25 or

Article 103ofthe Charter.

An analysis of resolution 748 (1992)showsthat it expresses deep con-
cernwiththe failureofthe LibyanGovernment toprovide afulland effec-
tive response to the request in resolution 731(1992)and contains strong
condemnations ofinternational terrorism. It determines,under Article39
oftheCharter, theexistenceofathreat to international peace and securitymaisseulementladécision«de restersaisidelaquestion ».Ellen'indique
pas davantage, par sestermes,commeiladvientd'habitude dans lesréso-
lutions adoptéesenvertu du chapitre VII, qu'elleait étéadoptée envertu
du chapitre VII. Il doit donc être clairque la résolution731(1992),celle
que la Cour avaitàprendre en considérationau moment des plaidoiries,
ne faisait nullement obstacle à l'examen, par la Cour, des questions
portées devantelle. Les observations et exhortations de la résolution ne
présentaientpas un caractèreobligatoireen droit.

La résolution748(1992)

Il est clair, en revanche,que la résolution 748(1992)a été adoptée en
vertu du chapitreVI1etelleledéclareentermes exprès.Aladifférencede
la résolution731 (1992),elle contientune sériede décisionsadresséesau
Gouvernement libyen et à tous les Etats.
L'article 25 de la Charte, aux termes duquel tous les Membres de
l'Organisation conviennentd'accepter et d'appliquer toutes les décisions
du Conseil de sécuritéconformément àlaCharte, impose àtous lesEtats
l'obligationjuridiquement contraignante de se conformer aux décisions
du Conseil de sécurité.L'article25 est renforcépar l'article 103, sibien
quemême encasdeconflitaveclesobligationsissuesdetoutautreaccord,
lesobligations envertu del'article 25prévaudront.
Sansprendre parti defaçondéfinitivesurcettequestionau stadeactuel,

celuidesmesuresconservatoires,j'estimequelarésolution748(1992)doit
être considéréceomme obligatoire pour la Libye, comme pour tous les
pays,envertu del'article25delaCharte desNations Uniesetque,d'après
l'article 103,lesobligationsqu'elledéfinitdoiventprévaloirsur cellesqui
découlentdetoutautreaccordinternational. Plusprécisément, celasigni-
fiequela Libyeestprimafacieliéepar lesdispositionsdecetterésolution,
mêmesiellesentrent en conflit aveclesdroits qu'elleinvoque envertu de
la convention de Montréal. Acet égard,je suisd'accord avecleraisonne-
ment de la majoritéde la Cour.
Cependant, je le dirai avec respect, il n'en résulte pasnécessairement
quelecaractèreobligatoirede larésolution748(1992)rendeinappropriée
une indication de mesures conservatoires par la Cour. J'arrive à cette
conclusion à l'issued'un examen attentif de toutes les dispositionsde la
résolution748(1992). Lapossibilitésubsisteapparemment pour la Cour,
toutenrespectantpleinementlarésolution 748(1992)dans sonintégralité,

dedéfinirpropriomotuune mesure appropriéequinesoitaucunementen
conflit avecla résolution748(1992)ou avecl'article25ou l'article 103de
la Charte.
Il ressort de l'analyse de la résolution748 (1992) que le Conseil s'y
déclaregravementpréoccupé de ceque leGouvernement libyenn'aitpas
encoredonnéune réponsecomplèteet effectiveauxdemandes de laréso-
lution 731(1992)etqu'ellecontient d'énergiquescondamnationsduterro-
rismeinternational. Dans cetterésolution,leConseilconstate,envertu de 178 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS. OP.WEERAMANTRY)

and decides to take certain actions under Article 41 of the Charter. Al1
Statesare required on 15April 1992to adopt certain measuresset out in
the resolution.These measures include diplomatic sanctions and other

sanctions of various sorts relating to aircraft and weapons. They are al1
measures under Article 41 which deals with measures not involvingthe
use offorce,and the Council has not moved beyond that Article.

TheMontrealConvention

Article 14 (1) of the Montreal Convention is drafted in imperative
terms,requiringanydisputeconcerning the interpretationor applicationof
the Conventiontobesubmitted to arbitration according to itsterms.Itwill
be noted that the section refers not merely to interpretation but goes

further into the area of the manner in which that treaty is applied or to
be applied.
The Montreal Convention ispart ofa concerted international response
to the problem of terrorism, which has assumed importance in recent
decades as a major international problem. Several separate conventions
represent the international community'sconsidered response to interna-
tional terrorism and several of them embody provisions similar to those
contained in Article 14,with eventual resort to the International Court.

Ithastaken around thirty yearsofmultilateraleffort toput togetherthis
structure of international response, if onegoes back to the 1963Tokyo
Convention on Offences Committed on Board Aircraft. Most of these
conventionshavebeenratified byoveronehundred States.The UNITAR

study, TheUnitedNationsand theMaintenance ofInternationalPeaceand
Security, 1987 (see p. 418), notes that, as at the time of that study,
132nations wereparties to the Convention on Offencesand Certain Acts
Committed on Board Aircraft (1969 Tokyo Convention); 127 nations
wereparties tothe Convention forthe SuppressionofUnlawfulSeizure of
Aircraft (1971Hague Convention); and 128nations were parties to the
Convention for the Suppression of Unlawful Acts Against the Safety of
CivilianAviation (1973 Montreal Convention).

Among the Conventions that contain a clause providing for resort to
this Court wherethedispute betweenparties cannot be settledby negotia-
tion arethe Convention on Offencesand Certain Other ActsCommitted
on BoardAircraft 1963(TokyoConvention) - Article24;the Convention
on the Suppression ofUnlawful SeizureofAircraft 1971(HagueConven-

tion)- Article 12;the Convention onthe Prevention and Punishment of
CrimesAgainst Internationally Protected Persons, Including Diplomatic CONVENTION DE MONTRÉALDE 1971(OP. DISS.WEERAMANTRY 17)8

l'article39delaCharte, l'existenced'unemenacecontre lapaix etlasécu-
rité internationales et décidede prendre certaines mesures en vertu de
l'article41delaCharte. A ladatedu 15avril 1992,tous lesEtatssonttenus
d'adopter certaines mesures indiquéesdans la résolution. Ces mesures
incluent dessanctionsdiplomatiquesetd'autres sanctions de diverstypes
en matière de trafic aérienet d'armements. Toutes ces mesures sont au
nombre de cellesprévuespar l'article41,qui traite des mesures n'impli-
quant pas l'emploide la force, et le Conseil n'estpas allé au-delàde cet
article.

La conventiondeMontréal

L'article 14,paragraphe 1,de la convention de Montréalest rédigé en
termes impératifset exige que tout différend concernant l'interprétation
ou l'applicationdelaconventionsoit soumisà l'arbitrageconformément à
sesdispositions. L'article,on lerelève,nementionnepas quel'interpréta-
tion, mais la dépasseet pénètredans le domaine de la manièredont le
traitéestou devrait êtreappliqué.
La convention de Montréal fait partie d'une réaction internationale
concertée devantle problème du terrorisme, qui revêt,depuis quelques
dizaines d'années, l'importanced'un problème international de pre-
mierplan. Plusieursconventionsdistinctesexprimentlaréponseréfléchie
de la communauté internationale au terrorisme international et plu-
sieurs d'entre elles incluent des dispositions semblableselles de l'ar-

ticle 14,y compris la faculté de saisir la Cour internationale en dernier
ressort.
Il afallu environtrenteannéesd'efforts internationauxpour assembler
l'édificede cetteréactioninternationale,sion remonte la conventionde
Tokyode 1963relativeaux infractionssurvenant àbord des aéronefs.La
plupart de ces conventionsont étératifiéesar plus de cent Etats. Selon
l'étude deI'UNITAR, TheUnitedNationsand theMaintenanceofInterna-
tional Peaceand Security,1987(voir p.418), àl'époqueoù celle-cia été
rédigée,centtrente-deuxEtatsétaientparties àlaconvention relativeaux
infractions et à certains autres actes survenantà bord des aéronefs
(convention de Tokyo de 1969);cent vingt-sept Etats étaient partiesa
conventionpourla répressiondelacapture illicited'aéronefs(convention
de La Haye de 1971);et cent vingt-huit Etats étaientpartiàla conven-
tion pour la répressiond'actesillicitesdirigéscontrela sécuritl'avia-

tion civile(conventionde Montréalde 1973).
Parmilesconventionsqui comprennentune clauseprévoyantlafaculté
desaisirlaCourlorsque ledifférendentrelespartiesnepeut êtreréglé par
voie de négociation,on peut citer la convention de 1963relative aux
infractions età certains autres actes survenant à bord des aéronefs
(conventionde Tokyo),article 24; la convention de 1971pour la répres-
siondelacapture illicited'aéronefs(conventiondeLaHaye),article 12;la
convention de 1973sur la prévention et la répression des infractions179 1971 MONTREALCONVENTION (DISS O.P.WEERAMANTRY)

Agents 1973(New York Convention) - Article 13; the International
Convention Againstthe Taking of Hostages 1979 - Article 16.

Indeed, this pattern can be traced back in international practice to the
days ofthe Leagueof Nations whenthe 1937Conventionforthe Preven-
tion and Punishment ofTerrorism, byArticle 20,referred disputesonthe
interpretation orapplication ofthe Convention whichcouldnotbe solved
bydiplomatic meansto the Permanent Court ofInternationalJustice (see
Richard B. Lillich, Transnational Terrorism: Conventionsand Comrnen-
tary, 1982,p. 175).
Thereis thus a vastbody ofinternational support for dealing withsuch
offences within an ordered multilateralstructure of negotiation and ulti-

matejudicial settlement.
The Court asa judicial bodyadministeringinternational lawcannot at
this stageof itsenquiriesfailto note that SecurityCouncilresolution 731
(1992)makes no mention of the Montreal Convention or of the multi-
lateral treaty structurebuilt up to counterinternationalterrorism.

Anotheraspect ofthe Montreal Convention isthat it does not interfere
with the principle of customaryinternational law aut dedereautjudicare.
EachContractingState ishoweverplaced under astrictobligation,where
it does not extradite an allegedoffender,to submitthe caseto the compe-
tent authoritiesforprosecution (Art.7).Theprinciple aut dedereautjudi-
careis animportant facetofa State'ssovereigntyoveritsnationals and the

well-establishednature ofthisprinciple in customaryinternational law is
evident fromthe followingdescription :
"The widespreaduse ofthe formula'prosecute or extradite' either
specificallystated, explicitlystatedin a duty to extradite,or implicit
inthe duty to prosecute orcriminalize,and thenumber ofsignatories
to these numerous conventions, attests to the existing generaljus
cogensprinciple." (M. Cherif Bassiouni, International Extradition:

UnitedStates Lawand Practice,1987,p. 22.)

Aswith itsfailure to considerthe Montreal Convention,soalso resolu-
tion 731(1992)failsto considerthis well-establishedprinciple of interna-
tional law.

Conclusion

Thisverydifficult case,arising froman incident sorevoltingtothe glo-
bal community and so universally condemned, needs to be approached
from asmany angles aspossible.

Judge Lachs,intheAegeanSeacase,remarkedonthecomplementarity
of al1the fora to which Statesmayresort :contrelespersonnesjouissant d'une protection internationale, ycompris
lesagentsdiplomatiques(convention de NewYork),article 13 ;laconven-

tion internationale de 1979contre la prise d'otages, article.
En réalité, ce systèmr eemonte, dans la pratique internationale, au
temps de la Société desNations: alors, la convention de 1937pour la
préventionetlarépressiondu terrorismeprévoyait àsonarticle 20queles
différendsrelatifsàl'interprétation ouàl'applicationdela conventionqui
nepourraient êtrerésolup sar lavoiediplomatique seraientportés devant
la Cour permanente de Justice internationale (voir Richard B. Lillich,
TransnationalTerrorism: Conventions and Commentary,1982,p. 175).
De trèsnombreux précédents internationaux invitend t onc àtraiter de
cesinfractions dans le cadre d'un systèmemultilatéralordonnéde négo-
ciationset, en définitive,de règlementjudiciaire.
LaCour,en saqualitéd'organejudiciaire quiapplique le droitinterna-
tional, ne saurait manquer de relever,à ce stade de son examen, que la
résolution73 1(1992)du Conseil de sécuriténe mentionnepasla conven-
tion de Montréal,ni le systèmeconventionnel multilatéral édifié pour
s'opposerau terrorisme international.

Un autre aspect de la convention de Montréalest qu'ellene porte pas
atteinte au principe de droit international coutumier aut dedereautjudi-
care. Toutefois, chaque Etat contractant, s'il n'extrade pas l'auteur
présuméd'une infraction,a l'obligation rigoureusd ee soumettrel'affaire
à ses autorités compétentes pour l'exercicede l'action pénale(art. 7). Le
principe aut dedereautjudicare estun aspectimportant delasouveraineté
de 1'Etatsur sesressortissants et lecaractèrebien établide ceprincipe en
droit international coutumierressort clairement de l'exposé suivant:

«L'emploi trèsrépandude la formule ((poursuivreou extrader n,
qu'elle figure expressément dansle texte, qu'elle soit expriméepar
l'obligation d'extrader, ou qu'elle soit sous-entendue dans l'obli-
gation d'exercer des poursuites ou de qualifier l'acte d'infraction,
ainsi que le nombre des signataires de cesnombreuses conventions,
attestent de l'existence de ce principe généraldu jus cogens.»
(M. Cherif Bassiouni, International Extradition: UnitedStates Law
and Practice,1987,p. 22.)
De mêmequ'elle ne mentionnepas la convention de Montréal,la réso-

lution 731(1992)netientpas davantagecompte de ceprincipe bien établi
du droit international.

Conclusion

Cette affaire très difficile, qui résulted'un incident si révoltantpour
la communauté mondialeet qui fait l'objet d'une condamnation si uni-
verselle, doit êtreabordéesous des points de vue aussi nombreux que
possible.
M.Lachs,dansl'affairedelaMerEgéea , commentéencestermeslacom-
plémentarité de toutes les instances auxquellesles Etats peuvent recourir: 180 1971 MONTREAL CONVENTION (DISS .P.WEERAMANTRY)

"The frequently unorthodox nature of the problems facingStates
today requires as many tools to be used and as many avenues to be
opened as possible, in order to resolve the intricate and frequently
multi-dimensional issues involved." (I.C.J. Reports 1978,separate
opinion, p. 52.)

He stressed in this context the role of the Court as an institution serving
the peacefulresolution ofdisputes. Inthepresentcase,anappeal hasbeen
addressed to this Courtto use its functions inthe overallUnited Nations
scheme, for the purpose of opening up another avenue towards settle-
ment.Judge Lachsput hisfingerupon oneofthe principal rolesthe Court

may play when he said, "In this way it may be possible to prevent the
aggravation of a dispute,its degeneration intoa conflict"(ibid.).
Oneseesin thispassage a keyto the rolethe Court can playinthismat-
ter. It is seised of a dispute, it possesses prima faciejurisdiction, a situa-
tion of escalatingtensions is developingand the Court's good officesare
soughtbyone Partywith a viewto preserving suchrights asit claimsuntil
their final determination by the Court.
This Court willnot place itself in a position of confrontation with the
Security Council where that organ has already exercisedits powers in a
manner which placesobligations upon al1United Nations Members.But
in areasnot coveredbyitsbindingdecisionsunder Chapter VII,the Court
is freeto use itsinfluence and authority to servetheurposes of interna-
tional peace inwhichithasas much an interestasanyorgan ofthe United
Nations. The furtherance and preservation ofpeace are not the exclusive

preserveofone organbutthe commongoal ofall.The Court haspowerto
make an order propriomotuand isnot limitedto the terms in which relief
hasbeensought bythepetitioner.There isno impediment whichprevents
the Court from pursuing that common goal of peace by taking action
which inJudge Lachs'words maymake it "possible to prevent the aggra-
vation of a dispute, its degeneration into conflict".

Agreatjudge onceobserved thatthe lawsarenot silentamidstthe clash
ofarms.In Ourageweneedalsoto assertthatthe lawsarenot powerlessto
prevent the clash of arms.The entire law of the United Nations has been
built up around the notion of peace and the prevention of conflict.The
Court,in an appropriate case,wherepossibleconflictthreatensrights that
arebeinglitigatedbeforeit, isnot powerlesstoissueprovisionalmeasures

conservingthose rightsbyrestraining an escalation ofthe dispute and the
possibleresort to force.That wouldbe entirelywithin itsmandate and in
total conformity with thePurposes and Principles of the United Nations
and international law.Particularly whensituations are tense,with danger
signalsflashingal1around, itseemsthat thisCourt should make apositive
responsewith suchmeasuresasarewithinitsjurisdiction. Ifthe conserva-
tion of rights which are subjudice comes within the jurisdiction of the
Court, as 1have no doubt it does, an order restraining damage to those CONVENTIONDEMONTRÉALDE 1971 (OP.DISS. WEERAMANTRY) 180

«Le caractère souvent inhabituel des problèmes que doivent
affronter les Etats de nosjours oblige àutiliser leplus d'instruments
età se réserver leplus de voiespossible pour résoudreles questions
complexes et souvent multidimensionnelles qui se posent.))
(C.I.J. Recueil1978,opinion individuelle, p. 52.)

Dans cecontexte,ila insistésurlerôledelaCour entant qu'institutionau
service du règlementpacifique des différends.En l'espèce,un appel a

étéadressé à la Courpour qu'elle exercesesfonctions dans lecadre d'en-
semble du systèmedes Nations Unies, afin d'ouvrir une autre voie de
règlement. M. Lachs a misle doigt sur l'undes rôles principaux que peut
jouer la Cour lorsqu'il a déclaré:«Ainsi peut-on espérer empêcher un
différendde s'aggraver etde dégénére ern conflit.»(Ibid.)
On discerne dans ce passage le rôle que la Cour peut jouer en l'occur-
rence. Elle est saisie d'un différend,elle est prima facie compétente,il
s'instaureune situationd'escaladedetensionsetl'une desparties sollicite
sesbons offices afinde préserverlesdroitsqu'elle invoquejusqu'à ceque
la Courait statuéà leur sujet de façon définitive.
La Cour ne semettra pas dans une situation de conflit avec le Conseil
de sécurité lorsque cet organea déjàexercé sespouvoirs d'une manière
qui impose des obligations à tous les Membres de l'organisation des

Nations Unies. Toutefois, dans les domaines auxquels ne s'appliquent
pas les décisions obligatoires prises par le Conseil en vertu du cha-
pitre VII, la Cour estlibre d'user deson influenceet de son autoritépour
servirlesfinsde la paix internationale, dont ellesepréoccupeautant que
tout autre organe des Nations Unies. Promouvoirla paix et la sauvegar-
der, ce n'est paslà la réserve exclusived'un seul organe, mais le but
commun detous. La Coura lepouvoir de rendre uneordonnance proprio
motu etn'estpas obligéede s'entenir auxtermes dans lesquelsl'auteur de
la demande a exercéson recours. Rien n'empêche laCour de tenter
d'atteindrecebut commun delapaix enprenant desmesuresqui,selon les
termes de M. Lachs,laissent «espérerempêcherun différendde s'aggra-
ver et de dégénéreren conflit.
Unjuge illustreafaitobserverjadis que lesloisnegardent pas lesilence
au milieu du fracas des armes.A notre époque,nous avons aussibesoin

d'affirmer quelesloisnesontpasprivéesdu pouvoir d'empêcher lefracas
des armes. Tout l'édificedu droit de l'organisation des Nations Unies
s'appuie sur la notion de la paix et de la prévention des conflits.S'il
lieu, si le risque d'un conflit menace des droits contestés devant elle, la
Cour n'estpas privéedu pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires
pour sauvegardercesdroits enempêchantl'escaladedu différendetpeut-
êtrele recours à la force. Cela relèverait entièrementde sa mission et
s'accorderait en totalité avec les butset principes de l'Organisation des
Nations Unies etdu droit international. Particulièrementen périodesde
tensions, alors que les signaux de danger lancent partout des éclairs,la
Cour, semble-t-il,devraitréagirdefaçon positive enprenant lesmesures
qui relèventdesacompétence.SilaCour a compétencepour protégerdesrightsthrough conflict must also lie withinthat province. If international
lawisto growand servethe cause of peace as it ismeant to do, the Court
cannot avoidthat responsibility in an appropriate case.

1wouldindicateprovisionalmeasurespropriomotuagainstboth Parties
preventing such aggravationor extension ofthe dispute as mightresult in
the use of force by either or both Parties.ch measures do not conflict
with any decision the SecurityCouncilhas made under Chapter VII,nor
withanyobligationarising under Article25,nor withtheprinciple under-
lying Article 103.The way towards a peaceful resolution of the dispute
may thus be preserved before the Parties find themselves on paths from
which there may be no return. This action is based on Article 41 of the
Statute ofthe Court and Articles73,74 and 75ofthe Rules of Court.

(Signed)Christopher Gregory WEERAMANTRY.droits qui font l'objet d'une action en suspens- et cela està mon avis
indubitable - une ordonnance interdisant de porter atteinte à cesdroits

par un conflitdoitaussi releverde sacompétence.Sil'on veutque ledroit
international sedéveloppeetservelacausedelapaixcommeilestcenséle
faire, la Cour ne peut se dérober devantune telle responsabilitéquand
l'occasionde l'assumer seprésente.
J'indiquerais proprio motu des mesures conservatoires à l'égard des
deux Parties pour empêcherl'aggravationoul'extension du différend qui
pourrait résulterde l'emploide la force par l'uneou l'autre d'entreelles.
De telles mesuresn'entreraient en conflit avecaucune décisionadoptée
par leConseilde sécuritéenvertudu chapitre VII,ni avecaucune obliga-
tion issue de l'article 25, ni avec le principe qui sous-tend l'article 103.
Ainsi,la voie qui mèneau règlementpacifique du différend pouvait-elle
être sauvegardéeavanq tue les Parties ne setrouvent sur des chemins où

elles seront engagées sans retour. Une telle décision serait fondée sur
l'article41 du Statut de la Cour, ainsi que sur les articles74 et 75 du
Règlement.

(Signé)Christopher Gregory WEERAMANTRY.

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Opinion dissidente de M. Weeramantry (traduction)

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