Opinion individuelle de M. Shahabuddeen (traduction)

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091-19960711-JUD-01-04-EN
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091-19960711-JUD-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. SHAHABUDDEEN

[TraductionJ

Je souhaite expliquer mon vote en faveur de l'arrêtdela Cour sur deux
points,à savoir la succession aux traitéset leforum prorogatum.

Du fait de la démarcheadoptée parla Cour dans son arrêt,il n'estpas
nécessaired'examiner si la Bosnie-Herzégovineétait partie à la conven-
tion sur le génocideà compter de la date de son accession à l'indépen-

dance. Toutefois, comme ce point a étédébattuen détailet qu'il retient
dans une certaine mesure l'attention, je me propose d'en dire un mot.
Les arguments générauxconcernant la succession aux traitéspeuvent
êtrelaissésde côtéen faveur d'une approche reposant sur les caractéris-
tiques particulières de la convention sur le génocide.Dans l'affaire des
Réserves à la conventionpour la préventionet la répressiondu crime de
génocide, la Cour a de mêmeconsidéré que la ((réponse[aux]questions))
qui se posent «doit êtrecherchéedans les traits particuliers que présente
la convention sur le génocide))C.I.J. Recueil 1951, p. 23). Le fait que la
convention sur legénocideprévoyait qu'ellpeuisse cesserd'êtreenvigueur
ou dénoncée n'affectepas le caractère particulier que lui a reconnu la
Cour. Celle-ci a fait observer ce qui suit:

«Les origines de la convention révèlent l'intention desNations
Unies de condamner et de réprimerle génocide comme «crime de
droit des gens» impliquant le refus du droitl'existencede groupes
humains entiers, refus qui bouleverse la consciencehumaine, inflige
de grandes pertesà l'humanité, etqui est contrairà la foisà la loi
morale età l'esprit et auxfinsdes Nations Unies (résolution96 (1)de
l'Assembléegénérale,11décembre1946).Cette conception entraîne
une première conséquence:les principes qui sont à la base de la

convention sont des principes reconnus par les nations civilisées
comme obligeant les Etats même endehors de tout lien convention-
nel. Une deuxièmeconséquenceest le caractèreuniversel à la fois de
la condamnation du génocide etde la coopérationnécessaire«pour
libérer l'humanitéd'un fléau aussi odieux(préambulede la conven-
tion). La convention sur le génocidea donc été vouluetant par
l'Assembléegénéraleque par les parties contractantes comme une
convention de portéenettement universelle.))(Ibid.)

Ainsi, l'universalité dela convention concerne tant lesprincipes sur les-
quels ellerepose que«la coopérationnécessaire«pour libérer l'humanitéd'un fléau aussiodieux)). A l'évidence,la coopération ne peut être uni-
verselle si la participation ne l'est pas. La Cour l'a reconnu lorsqu'elle a
relevé «le caractère nettement universel des Nations Unies sous les aus-

pices desquelles la convention a étéconclue et la très large participation
que l'article XI de la convention a entendu organiser)) (C.I.J. Recueil
1951, p. 21). Dans un passage célèbre,elle a déclaré:

«Les fins d'une telle conventiondoivent égalementêtre reconnues.
La Convention a été manifestement adoptée dans un but purement
humain et civilisateur. On ne peut mêmepas concevoir une conven-

tion qui offriraàtun plus haut degrécedoublecaractère, puisqu'elle
vise d'une partà sauvegarder l'existence même de certains groupes
humains, d'autre part à confirmer et à sanctionner les principes de
morale les plus élémentaires.Dans une telle convention, les Etats
contractants n'ont pas d'intérêtspropres; ils ont seulement, tous et
chacun, un intérêt commun,celui de préserverles fins supérieures
qui sont la raison d'êtrede la convention. Il en résulteque l'on ne
saurait, pour une convention de ce type, parler d'avantages ou de
désavantagesindividuelsdes Etats, non plus que d'un exact équilibre
contractuelà maintenir entre les droits et les charges. La considéra-
tion des fins supérieuresdela convention est, en vertu de la volonté
commune des parties, le fondement et la mesure de toutes les dispo-
sitions qu'elle renferme. (Ibid., p. 23.)

Elle a ajouté:

((L'objet et le but de la Convention sur le génocideimpliquent
chez l'Assembléegénéraleet chez les Etats qui l'ont adoptée l'inten-
tion d'y voir participer le plus grand nombre possible d'Etats.»
(Ibid., p. 24.)

Si les arguments de la Yougoslavie sont fondés,ils introduisent d'une
manière ou d'une autre, pour un Etat successeur comme la Bosnie-Her-
zégovine,une interruption inévitablede la protection que la convention
sur le génocideaccordait auparavant à tous les «groupes humains)) qui
vivaient dans l'ex-République fédérativesocialiste de Yougoslavie.
L'interruption pourrait durer de longs jours pendant lesquels, à toutes
fins utiles, on n'entendrait plus parler de cette protection. On voit mal
comment l'inévitabilitéd'une telle interruption de la protection pourrait
être compatibleavec une convention qui vise ((d'une part à sauvegarder
l'existence même de certainsgroupeshumains, d'autre part à confirmer et
à sanctionner les principes de morale les plus élémentaires)).

J'estime quel'objet et le but de la convention sur le génocide obligent
les partiesà la respecter de manière à éviter unetelle interruption de la

protection qu'elle offre. La convention ne peut être interprétée comme
signifiant qu'une partie, tenue aux termes de la convention d'appliquer
les dispositions juridictionnelles de celle-ci pour protéger des ((groupeshumains)) habitant une régiondonnée, peutse considérercomme libérée
de ces dispositionsà l'égardd'un Etat successeur au motif que la région
en cause fait maintenant partie du territoire de cet Etat; une tellepartie
continuerait d'êtreliéepar cesdispositions l'égard d'autres partiesen ce
qui concerne les mêmes((groupeshumains)) mais en serait contre toute
logique libéréeà l'égard de1'Etatsuccesseur sur le territoire duquel elle

commettrait des violations de la convention.

Pour atteindre son objectif et son but, la convention devrait être inter-
prétée comme impliquant l'expression d'un engagementunilatéral de cha-
cune de ses parties de traiter les Etats successeurs, compter de leur
accession àl'indépendance,comme la continuation de 1'Etatprédécesseur
en tant que partieà la convention. Le lien consensuel nécessaireest par-
fait lorsque1'Etatsuccesseurdécidede se prévaloir decet engagement en
se considérant comme partie au traité. 11n'est pas contesté que d'une
manière ou d'une autre la Yougoslavie est partie à la convention. Elle
doit donc êtreconsidérée commeliéepar un engagement unilatéral de
traiter la Bosnie-Herzégovine(en tant qu'Etat successeur) comme ayant

été partieà la conventionà compter de la date de son accession à l'indé-
pendance.
On pourrait dire que cette approche pose aux parties existantes des
problèmes de rétroactivité etles laisse dans l'incertitude quant au statut
des Etats successeursdans la mesure où un certain temps peut s'écouler,
à compter de leur accession à l'indépendance, avant que la position
exacte de ces derniers ne soit connue. On peut, pour répondreà cela, se
reporter àla jurisprudence de la Cour dans l'affaire du Droit depassage
sur territoire indien:s problèmesen question résultent du régimede la
conventionsur legénocideque les partiesà celle-ciont acceptélorsqu'elles
l'ont acceptée.Puisque la Yougoslavie se considèrepartie à la conven-

tion, elle est liéepar ce régime. Elledoit donc considérerla Bosnie-Her-
zégovinecomme partie à la convention à compter de la date àlaquelle
cettedernièrea accédé à l'indépendance,quellesque soient les éventuelles
difficultés.
La conclusionqui précède estconfortéepar une autre considération: la
Cour serait fondée à accepter l'opinion qui prévaut généralement ,
savoir que la Yougoslavie elle-même n'espt as la continuation de la per-
sonnalité internationale de l'ex-République fédérativeocialiste de You-
goslavie mais est un nouvel Etat et donc un Etat successeur. Si, comme
nul ne le conteste, la Yougoslavie est fondéeeconsidérer commeayant
toujours été partie la convention, il en va de même,par analogie, de la
Bosnie-Herzégovine.

S'agissant du problème plus large de la successiond7Etats aux traités
relatifsaux droits de l'homme,je ne suispas persuadé qu'ilfaille,aux fins
de la présenteaffaire, faire une distinction trop nette entre la conventionsur le génocide (et en particulier ses dispositionsjuridictionnelles), consi-
dérée comme un texte visant à prévenir et réprimerles comportements
portant atteinteà l'intégritde certains ((groupeshumains)), et les traités
relatifs aux droits de l'homme stricto sensu: fondamentalement, tous
concernent les droits de la personne humaine - dans le cas de la conven-
tion sur le génocide,certains des droits de l'homme lesplus importants de
tous. La convention a son origine dans ((l'intention desNations Unies de
condamner et de réprimer le génocide comme «un crime de droit des
gens)) impliquant le refus du droit à l'existence de groupes humains
entiers));l'«objet » de la convention est donc de ((sauvegarder l'existence

mêmede certains groupes humains)). Cet objet ne pourrait êtreréalisé s'il
n'impliquait la préservationdu droit a la vie dans certaines circonstances,
au stade ultime par le biais des dispositionsjuridictionnelles de la conven-
tion. Un auteur, non sans raison, a décrit la convention comme «le pre-
mier instrument relatif aux droits de l'homme adopté par les Nations
Unies)) (Matthew Lippman, «The Drafting of the 1948 Convention on
the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide)), Boston Uni-
versity International Law Journal, 1985, vol. 3, p. 1).
Dire qu'un traité est un traité relatif aux droits de l'homme fournit
certesun fondement possible,mais n'indique pas nécessairementun méca-
nisme juridique précispermettant de considérerqu'un Etat successeur y
succèdeautomatiquement en respectant le caractère consensuel des rela-

tions conventionnelles.Il est possible de découvrir un tel mécanismejuri-
dique dans l'argument susmentionné,et en affirmantplus généralemenq tue
l'objet etle but de tels traités,ompris le désir d'éviteles interruptions
dans leur application, permettent de les interpréter comme l'expression
d'un engagementunilatéral desEtats qui y sont parties de traiter les Etats
successeurs comme des parties avec effet à compter de la date de leur
accession à l'indépendance. Comme indiquéci-dessus, le lien consensuel
est parfait lorsque'Etatsuccesseur se prévautde cet engagement en déci-
dant de se considérer commepartie au traité.

Cela pourrait fournir une réponse à la question de savoir si la succes-

sion aux traités relatifs aux droits de l'homme en général estautoma-
tique. Je n'ai toutefois pas l'intention d'exprimer une opinion préciseà
ce stade sur cette question complexe et très controversée. L'interpréta-
tion susvisée suffità mon avis à répondre à la question dans le cas de
la convention sur le génocidecompte tenu des traits spécifiquesde cet
instrument particulier.

La Cour a considéré à juste titre qu'étant donnéles circonstances de

l'espècecette doctrine ne lui permet pas de fonder sa compétence sur
d'autres bases que celles prévues à l'article IX de la convention sur le
génocide.Quant àsa compétenceen vertu de cette disposition,j'approuve la position que je pense la Cour a prise, à savoir que l'applicabilité de
cette doctrine n'a pasà êtreexaminée. Le conseilde la Bosnie-Herzégo-
vine a déclaré- àmon avis àjuste titre- que la question qui sepose au
sujet de cette disposition n'est pas une question de forum prorogatum,
mais celle de savoir si la Yougoslavie a acquiescé à l'opinion selon
laquelle cette disposition est applicable. Il y a une différenceentre accep-

ter la juridiction prévuepar la clause attributive de compétenced'un
traitéétantentendu que la clause elle-même ne s'appliquepas et acquies-
cerà la conclusion selon laquelle la clause attributive de compétenceelle-
même s'applique.Dans le premier cas, l'acceptation estle seul fondement
de la compétence,dans le second, elle ne l'est pas, car il s'agit seulement
d'une admissionque le traités'applique. Cette dernière position estcelle
qu'à mon avis a prise le conseil de la Bosnie-Herzégovine(voirCR 9618,
p. 75-76, 79-80, 81-82,etCR96/11, p. 52).
En outre, j'approuve ce queje crois êtreaussi une position prise par le
conseil de la Bosnie-Herzégovine, à savoir que la doctrine duforum pro-
rogatum n'intervient pas lorsque la compétencequi en découleraitexiste
déjàen vertu d'un titre de compétenceapplicable; par hypothèse, on ne

peut invoquer cette doctrine que lorsque la compétenceen question ferait
autrement défaut (CR9618, p. 82). En l'espèce,la Cour ayant jugéque
l'article IX de la convention sur le génocide s'appliqueen tant que dis-
position conventionnelle liant les parties, il n'est ni nécessaireni justifié
de recourirà la doctrine en question pour fonder la compétence prévue
par cette disposition.
Les positions ainsi prises par le conseil de la Bosnie-Herzégovinesont
confortéespar le fait qu'au paragraphe 34 de son ordonnance du 13sep-
tembre 1993la Cour a considéré que la question du forum prorogatum ne
se posait pas en ce qui concerne l'article IX de la convention; elle
conserve la mêmeposition au paragraphe 40 de l'arrêtrendu cejour. La
position de la Cour correspond bien à la manièredont les arguments ont

été formuléd surant les deux précédentes phasesde l'affaire, à savoir les
1"'et 2 avril 1993et les 25et 26 août 1993.(Pour le stade auquel - vers
la fin de la seconde phase de l'affaire - et les circonstances dans les-
quelles la question du forum prorogatum a étésoulevéepour la première
fois,voir C.I.J. Recueil 1993,p. 416-420,opinion individuellede M. Lau-
terpacht, juge ad hoc.)
Par comparaison, on peut noter que dans l'affaire du Détroitde Cor-
fou l'argument duforum prorogatum a été formulé sans perdre de temps
par le Royaume-Uni tant dans ses écrituresque dans ses plaidoiries
(voirC.I.J. Recueil 1947-1948,p. 26et suiv., et C.I.J. Mémoires, Détroit
de Corfou, p. 15-18,en particulier le paragraphe 9 g), p. 18,et vol. III,

p. 36, 56 et suiv., 66 et 69). Dans l'affaire de l'dnglo-Iranian Oil Co., le
Royaume-Uni a de mêmepris l'initiative, et l'a prise immédiatement,
mêmesi ses arguments n'ont pas été acceptés (voir C.I.J. Recueil 1952,
p. 112-114,et C.I.J. Mémoires,Anglo-Iranian Oil Co., p. 517-518, 540,
544, 553-556, 594, 626, 630et suiv.). L'immédiatetéde la réaction est
importante lorsque l'on appréciela position des parties; le forum proro-gatum repose en dernière analysesur les mêmesfondements consensuels
que la compétencede la Cour.
Ces considérations soutiennentce que je crois êtrela position adoptée
par la Cour,a savoir que la Bosnie-Herzégovinen'invoquepas - à mon

avisà juste tit-e leforum prorogatum en ce qui concerne l'articleIX de
la convention sur le génocide.

(SignéM )ohamed SHAHABUDDEEN.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE SHAHABUDDEEN

1would like to explain my support for the judgment of the Court on
two points, namely, treaty succession and forum prorogatum.

The course taken by the Court in itsjudgment makes it unnecessary to
consider whether Bosnia and Herzegovina was a party to the Genocide
Convention as from the date of its independence. However, as this point
was closelyargued and is the subject of some attention, 1propose to say

a word on it.
1 think that the more general arguments as to succession to treaties
may be put aside in favour of an approach based on the special charac-
teristics of the Genocide Convention. In the case of the Reservations to
the Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Geno-
cide, the Court likewiseconsidered that the "solution of [the]problems"
which arose there "must be found in the special characteristics of the
Genocide Convention" (I.C.J. Reports 1951, p. 23). The fact that the
GenocideConvention provided for the possibility of cessation or denun-
ciation did not affect its special character as found by the Court. It
observed :

"The origins of the Convention show that it was the intention of
the United Nations to condemn and punish genocide as 'a crime
under international law' involving a denial of the right of existence
of entire human groups, a denial which shocks the conscience of
mankind and results in great losses to humanity, and which is con-
trary to moral law and to the spirit and aims of the United Nations
(Resolution 96 (1)of the General Assembly, December 1lth, 1946).
The first consequence arising from this conception is that the prin-
ciplesunderlyingthe Convention are principles which are recognized
by civilizednations as binding on States, even without any conven-
tional obligation. A second consequence is the universal character
both of the condemnation of genocide and of the CO-operation
required 'in order to liberate mankind from such an odious
scourge' (Preamble to the Convention). The Genocide Convention
was therefore intended by the General Assembly and by the con-
tracting parties to be definitelyuniversal in scope." (Ibid.)

Thus, the universality of the Convention attached both to the prin-
ciples underlying the Convention and to "the CO-operationrequired 'in OPINION INDIVIDUELLE DE M. SHAHABUDDEEN

[TraductionJ

Je souhaite expliquer mon vote en faveur de l'arrêtdela Cour sur deux
points,à savoir la succession aux traitéset leforum prorogatum.

Du fait de la démarcheadoptée parla Cour dans son arrêt,il n'estpas
nécessaired'examiner si la Bosnie-Herzégovineétait partie à la conven-
tion sur le génocideà compter de la date de son accession à l'indépen-

dance. Toutefois, comme ce point a étédébattuen détailet qu'il retient
dans une certaine mesure l'attention, je me propose d'en dire un mot.
Les arguments générauxconcernant la succession aux traitéspeuvent
êtrelaissésde côtéen faveur d'une approche reposant sur les caractéris-
tiques particulières de la convention sur le génocide.Dans l'affaire des
Réserves à la conventionpour la préventionet la répressiondu crime de
génocide, la Cour a de mêmeconsidéré que la ((réponse[aux]questions))
qui se posent «doit êtrecherchéedans les traits particuliers que présente
la convention sur le génocide))C.I.J. Recueil 1951, p. 23). Le fait que la
convention sur legénocideprévoyait qu'ellpeuisse cesserd'êtreenvigueur
ou dénoncée n'affectepas le caractère particulier que lui a reconnu la
Cour. Celle-ci a fait observer ce qui suit:

«Les origines de la convention révèlent l'intention desNations
Unies de condamner et de réprimerle génocide comme «crime de
droit des gens» impliquant le refus du droitl'existencede groupes
humains entiers, refus qui bouleverse la consciencehumaine, inflige
de grandes pertesà l'humanité, etqui est contrairà la foisà la loi
morale età l'esprit et auxfinsdes Nations Unies (résolution96 (1)de
l'Assembléegénérale,11décembre1946).Cette conception entraîne
une première conséquence:les principes qui sont à la base de la

convention sont des principes reconnus par les nations civilisées
comme obligeant les Etats même endehors de tout lien convention-
nel. Une deuxièmeconséquenceest le caractèreuniversel à la fois de
la condamnation du génocide etde la coopérationnécessaire«pour
libérer l'humanitéd'un fléau aussi odieux(préambulede la conven-
tion). La convention sur le génocidea donc été vouluetant par
l'Assembléegénéraleque par les parties contractantes comme une
convention de portéenettement universelle.))(Ibid.)

Ainsi, l'universalité dela convention concerne tant lesprincipes sur les-
quels ellerepose que«la coopérationnécessaire«pour libérer l'humanitéorder to liberate mankind from such an odious scourge"'. Obviously,
universality as regards CO-operation could not be achieved without
universality of participation. The Court recognized this when it noted

"the clearly universal character of the United Nations under whose
auspices the Convention was concluded, and the verywide degree of par-
ticipation envisaged by Article XI of the Convention" (1.C.J. Reports
1951, p. 21). In a famous passage, it said:
"The objects of such a convention must also be considered. The
Convention was manifestly adopted for a purely humanitarian and
civilizingpurpose. It is indeed difficultto imagine a convention that
might have this dual character to a greater degree, sinceits object on
the one hand is to safeguard the very existence of certain human

groups and on the other to confirm and endorse the most elementary
principles of morality. In such a convention the contracting States
do not have any interests of their own; they merely have, one and
all, a common interest, namely, the accomplishment of those high
purposes which are the raison d'êtreof the convention. Conse-
quently, in a convention of this type one cannot speak of individual
advantages or disadvantages to States, or of the maintenance of a
perfect contractual balance between rights and duties.The high ideals
which inspired the Convention provide, by virtue of the common
will of the parties, the foundation and measure of al1its provisions."
(Ibid., p. 23.)

It added :
"The object and purpose of the Genocide Convention imply that
it was the intention of the GeneralAssemblvand of the States which
adopted it that as many States as possible should participate."(Ibid.,
p. 24.)

If the arguments of Yugoslavia are correct, they lead in one way or
another, so far as a successor State such as Bosnia and Herzegovina is
concerned, to the introduction of an inescapable time-gap in the protec-
tion which the Genocide Convention previously afforded to al1 of the
"human groups" comprised in the former Socialist Federal Republic of
Yugoslavia. There could be many long and single days during such a
time-gap when, for al1practical purposes, that protection is no longer
heard of. It is difficultto appreciate how the inevitability of such a break
in protection could be consistent with a Convention the object of which
was "on the one hand . . .to safeguard the very existence of certain
human groups and on the other to confirm and endorse the most elemen-
tary principles of morality".

1 think that the object and purpose of the Genocide Convention
required parties to observe it in such a way as to avoid the creation of
such a break in the protection which it afforded. The Convention could
not be read as meaning that a Party, which wasbound under the Conven-
tion to apply itsjurisdictional provisions for theprotection of thehumand'un fléau aussiodieux)). A l'évidence,la coopération ne peut être uni-
verselle si la participation ne l'est pas. La Cour l'a reconnu lorsqu'elle a
relevé «le caractère nettement universel des Nations Unies sous les aus-

pices desquelles la convention a étéconclue et la très large participation
que l'article XI de la convention a entendu organiser)) (C.I.J. Recueil
1951, p. 21). Dans un passage célèbre,elle a déclaré:

«Les fins d'une telle conventiondoivent égalementêtre reconnues.
La Convention a été manifestement adoptée dans un but purement
humain et civilisateur. On ne peut mêmepas concevoir une conven-

tion qui offriraàtun plus haut degrécedoublecaractère, puisqu'elle
vise d'une partà sauvegarder l'existence même de certains groupes
humains, d'autre part à confirmer et à sanctionner les principes de
morale les plus élémentaires.Dans une telle convention, les Etats
contractants n'ont pas d'intérêtspropres; ils ont seulement, tous et
chacun, un intérêt commun,celui de préserverles fins supérieures
qui sont la raison d'êtrede la convention. Il en résulteque l'on ne
saurait, pour une convention de ce type, parler d'avantages ou de
désavantagesindividuelsdes Etats, non plus que d'un exact équilibre
contractuelà maintenir entre les droits et les charges. La considéra-
tion des fins supérieuresdela convention est, en vertu de la volonté
commune des parties, le fondement et la mesure de toutes les dispo-
sitions qu'elle renferme. (Ibid., p. 23.)

Elle a ajouté:

((L'objet et le but de la Convention sur le génocideimpliquent
chez l'Assembléegénéraleet chez les Etats qui l'ont adoptée l'inten-
tion d'y voir participer le plus grand nombre possible d'Etats.»
(Ibid., p. 24.)

Si les arguments de la Yougoslavie sont fondés,ils introduisent d'une
manière ou d'une autre, pour un Etat successeur comme la Bosnie-Her-
zégovine,une interruption inévitablede la protection que la convention
sur le génocideaccordait auparavant à tous les «groupes humains)) qui
vivaient dans l'ex-République fédérativesocialiste de Yougoslavie.
L'interruption pourrait durer de longs jours pendant lesquels, à toutes
fins utiles, on n'entendrait plus parler de cette protection. On voit mal
comment l'inévitabilitéd'une telle interruption de la protection pourrait
être compatibleavec une convention qui vise ((d'une part à sauvegarder
l'existence même de certainsgroupeshumains, d'autre part à confirmer et
à sanctionner les principes de morale les plus élémentaires)).

J'estime quel'objet et le but de la convention sur le génocide obligent
les partiesà la respecter de manière à éviter unetelle interruption de la

protection qu'elle offre. La convention ne peut être interprétée comme
signifiant qu'une partie, tenue aux termes de la convention d'appliquer
les dispositions juridictionnelles de celle-ci pour protéger des ((groupesgroups" inhabiting a given area, was allowed to regard itself as liberated
from those provisions in relation to a successor State by reason of the

fact that that particular area was now comprised within the territory of
the successor State; such a party would continue to be bound by those
provisions in relation to other parties in respect of the same "human
groups" while being inconsistently free in relation to the successor State
within whose territory breaches of the Convention are allegedly being
perpetrated by it.
To effectuateits object and purpose, the Convention would fa11to be
construed as implying the expression of a unilateral undertaking by each
party to the Convention to treat successor States as continuing as from
independence any status which the predecessor State had as a party to
the Convention. The necessary consensual bond is completed when the
successor State decides to avail itself of the undertaking by regarding
itselfas a party to the treaty. It isnot in dispute that, one way or another,
Yugoslavia is a party to the Convention. Yugoslavia has therefore to be
regarded as bound by a unilateral undertaking to treat Bosnia and Herze-

govina (beinga successorState)as having been a party to the Convention
as from the date of its independence.

It may be said that this approach presents existing parties with prob-
lems of retroactivity and uncertainty of status of successorStates in so far
as the preciseposition taken by the latter may not emergeuntil sometime
after the dates of their independence. The answer is, 1think, provided by
recourse to the jurisprudence of the Court in the Right of Passage over
Indian Territory case :the problems in question would be the result of the
scheme of the Genocide Convention which parties to the Convention
accepted when they accepted the Convention. SinceYugoslavia considers
itselfa party to the Convention, it is bound by the scheme.Consequently,
it has to regard Bosnia and Herzegovinaas a party to the Convention as
from the date of its independence irrespective of possible difficulties.

The foregoingconclusion is reinforced by the following consideration.
The Court would be correct in accepting the generally prevailing view
that even Yugoslavia is not a continuation of the international personal-
ity of the previous Socialist Federal Republic of Yugoslavia but is a new
State and therefore itself a successor State. If, as no one disputes,ugo-
slavia is correct in regarding itself as having always been a party to the
Convention, this by parity of reasoning applies equally to the case of
Bosnia and Herzegovina.

Touching on the wider problem concerningState successionto human
rights treaties, 1 am not persuaded, for present purposes, to draw too
sharp a distinction between the Genocide Convention (and in particularhumains)) habitant une régiondonnée, peutse considérercomme libérée
de ces dispositionsà l'égardd'un Etat successeur au motif que la région
en cause fait maintenant partie du territoire de cet Etat; une tellepartie
continuerait d'êtreliéepar cesdispositions l'égard d'autres partiesen ce
qui concerne les mêmes((groupeshumains)) mais en serait contre toute
logique libéréeà l'égard de1'Etatsuccesseur sur le territoire duquel elle

commettrait des violations de la convention.

Pour atteindre son objectif et son but, la convention devrait être inter-
prétée comme impliquant l'expression d'un engagementunilatéral de cha-
cune de ses parties de traiter les Etats successeurs, compter de leur
accession àl'indépendance,comme la continuation de 1'Etatprédécesseur
en tant que partieà la convention. Le lien consensuel nécessaireest par-
fait lorsque1'Etatsuccesseurdécidede se prévaloir decet engagement en
se considérant comme partie au traité. 11n'est pas contesté que d'une
manière ou d'une autre la Yougoslavie est partie à la convention. Elle
doit donc êtreconsidérée commeliéepar un engagement unilatéral de
traiter la Bosnie-Herzégovine(en tant qu'Etat successeur) comme ayant

été partieà la conventionà compter de la date de son accession à l'indé-
pendance.
On pourrait dire que cette approche pose aux parties existantes des
problèmes de rétroactivité etles laisse dans l'incertitude quant au statut
des Etats successeursdans la mesure où un certain temps peut s'écouler,
à compter de leur accession à l'indépendance, avant que la position
exacte de ces derniers ne soit connue. On peut, pour répondreà cela, se
reporter àla jurisprudence de la Cour dans l'affaire du Droit depassage
sur territoire indien:s problèmesen question résultent du régimede la
conventionsur legénocideque les partiesà celle-ciont acceptélorsqu'elles
l'ont acceptée.Puisque la Yougoslavie se considèrepartie à la conven-

tion, elle est liéepar ce régime. Elledoit donc considérerla Bosnie-Her-
zégovinecomme partie à la convention à compter de la date àlaquelle
cettedernièrea accédé à l'indépendance,quellesque soient les éventuelles
difficultés.
La conclusionqui précède estconfortéepar une autre considération: la
Cour serait fondée à accepter l'opinion qui prévaut généralement ,
savoir que la Yougoslavie elle-même n'espt as la continuation de la per-
sonnalité internationale de l'ex-République fédérativeocialiste de You-
goslavie mais est un nouvel Etat et donc un Etat successeur. Si, comme
nul ne le conteste, la Yougoslavie est fondéeeconsidérer commeayant
toujours été partie la convention, il en va de même,par analogie, de la
Bosnie-Herzégovine.

S'agissant du problème plus large de la successiond7Etats aux traités
relatifsaux droits de l'homme,je ne suispas persuadé qu'ilfaille,aux fins
de la présenteaffaire, faire une distinction trop nette entre la conventionitsjurisdictional provisions) considered as a measure intended to prevent
and punish conduct detrimental to the integrity of certain "human
groups" and human rights treaties stricto sensu: basically they are al1
concerned with the rights of the human being - in the case of the Geno-
cide Convention, with some of the most important human rights of al].
The origins of the Convention lay in "the intention of the United Nations
to condemn and punish genocide as 'a crime under international law'
involving a denial of the right of existenceof entire human groups" ;con-
sequently, the "object" of the Convention was to "safeguard the very

existence of certain human groups". That object could not be achieved
unless it included the safeguarding of the right to life in certaincircum-
stances, ultimately through the jurisdictional provisions of the Conven-
tion. One writer, not unreasonably, described the Convention as "the first
human rights instrument adopted by the United Nations" (Matthew
Lippman, "The Drafting of the 1948Convention on the Prevention and
Punishment of the Crime of Genocide", Boston University International
Law Journal, 1985,Vol. 3, p. 1).

But to say that a treaty is a human rights treaty, while providing a
possible foundation, does not necessarily indicate a precise juridical
mechanism for treating it as being automatically succeeded to by a suc-
cessor State consistently with the consensualcharacter of treaty relation-
ships. It is possible that such ajuridical mechanism is furnished by draw-

ing on the above-mentioned argument and proposing more generallythat
the effectuation of the object and purpose of such treaties, inclusive of
the desideratum of avoidingoperational gaps, willsupporta construction
being placed upon them to the effect that they constitute the expression
of a unilateral undertaking by existingparties to treat successor Statesas
parties with effect from the date of emergence into independence. As
suggested above, the consensual bond is completed when the successor
State avails itself of the undertaking by deciding to regard itself as a
party to the treaty.
This could provide an answer to the question whether there is auto-
matic successionin the case of human rights treaties in general. However,
1do not propose to express a definite opinion at this point on this com-
plex and much disputed question.The construction referred to suffices,in
my view, to answer the question in the case of the GenocideConvention
in the light of the specificfeatures of this particular instrument.

The Court has correctly held that, in the circumstances of the case, this
doctrine does not enablejurisdiction to be founded on bases additional to
that provided by Article IX of the Genocide Convention. As to jurisdic-
tion under that provision, I agree with the Court in taking the position,sur le génocide (et en particulier ses dispositionsjuridictionnelles), consi-
dérée comme un texte visant à prévenir et réprimerles comportements
portant atteinteà l'intégritde certains ((groupeshumains)), et les traités
relatifs aux droits de l'homme stricto sensu: fondamentalement, tous
concernent les droits de la personne humaine - dans le cas de la conven-
tion sur le génocide,certains des droits de l'homme lesplus importants de
tous. La convention a son origine dans ((l'intention desNations Unies de
condamner et de réprimer le génocide comme «un crime de droit des
gens)) impliquant le refus du droit à l'existence de groupes humains
entiers));l'«objet » de la convention est donc de ((sauvegarder l'existence

mêmede certains groupes humains)). Cet objet ne pourrait êtreréalisé s'il
n'impliquait la préservationdu droit a la vie dans certaines circonstances,
au stade ultime par le biais des dispositionsjuridictionnelles de la conven-
tion. Un auteur, non sans raison, a décrit la convention comme «le pre-
mier instrument relatif aux droits de l'homme adopté par les Nations
Unies)) (Matthew Lippman, «The Drafting of the 1948 Convention on
the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide)), Boston Uni-
versity International Law Journal, 1985, vol. 3, p. 1).
Dire qu'un traité est un traité relatif aux droits de l'homme fournit
certesun fondement possible,mais n'indique pas nécessairementun méca-
nisme juridique précispermettant de considérerqu'un Etat successeur y
succèdeautomatiquement en respectant le caractère consensuel des rela-

tions conventionnelles.Il est possible de découvrir un tel mécanismejuri-
dique dans l'argument susmentionné,et en affirmantplus généralemenq tue
l'objet etle but de tels traités,ompris le désir d'éviteles interruptions
dans leur application, permettent de les interpréter comme l'expression
d'un engagementunilatéral desEtats qui y sont parties de traiter les Etats
successeurs comme des parties avec effet à compter de la date de leur
accession à l'indépendance. Comme indiquéci-dessus, le lien consensuel
est parfait lorsque'Etatsuccesseur se prévautde cet engagement en déci-
dant de se considérer commepartie au traité.

Cela pourrait fournir une réponse à la question de savoir si la succes-

sion aux traités relatifs aux droits de l'homme en général estautoma-
tique. Je n'ai toutefois pas l'intention d'exprimer une opinion préciseà
ce stade sur cette question complexe et très controversée. L'interpréta-
tion susvisée suffità mon avis à répondre à la question dans le cas de
la convention sur le génocidecompte tenu des traits spécifiquesde cet
instrument particulier.

La Cour a considéré à juste titre qu'étant donnéles circonstances de

l'espècecette doctrine ne lui permet pas de fonder sa compétence sur
d'autres bases que celles prévues à l'article IX de la convention sur le
génocide.Quant àsa compétenceen vertu de cette disposition,j'approuve638 APPLICATION OF GENOCIDE CONVENTION (SEPO. P.SHAHABUDDEEN)

as 1think it has, that the question of the applicability of the doctrine need
not be considered. Counsel for Bosnia and Herzegovina submitted -
rightly, 1think - that the question which arose in the case of that provi-
sion was not one of forum prorogatum, but one as to whether Yugoslavia
had acquiesced in the view that that provision was applicable. There is a
distinction between acceptance of the jurisdiction provided for by the
jurisdictional provision of a treaty on the basis that the provision itself
does not apply and acceptance of the proposition that the jurisdictional
provision itself applies. In the first case, the acceptance is the only basis
of jurisdiction; in the second case, it is not, being merely an admission
that the treaty applies. The latter is how1understood the position taken
by counsel for Bosnia and Herzegovina (see CR9618, pp. 75-76, 79-80,

81-82,and CR 96111, p. 52).

Moreover, 1agree with what 1understood to be also the position taken
by counsel for Bosnia and Herzegovina, that is to Say,that the doctrine
of forum prorogatum does not come into play where the samejurisdiction
existsunder an applicable title ofjurisdiction; ex hypothesi, the doctrine
may be imported only where the jurisdiction in question does not other-
wise exist (CR9618, p. 82). In this case, the Court having found that
Article IX of the Genocide Convention applies as a treaty provision
between the parties, there is neither need nor basis for having recourse to
the doctrine in question in order to attract the jurisdiction provided

for under that provision.
The positions so taken by counsel for Bosnia and Herzegovina accord
with the fact that, in paragraph 34 of its Order of 13September 1993,the
Court did not understand that a question of forum prorogatum had been
raised in respect of Article IX of the Convention; that understanding is
retained in paragraph 40 of today's Judgment. The Court's understand-
ing is consistent with the course of the arguments during both of the two
previous phases of the case, namely, those of 1-2April 1993and those of
25-26 August 1993.(For the stage at which - towards the end of the
second phase of the case - and for the circumstances in which the
question of forum prorogatum was first raised, see I.C.J. Reports 1993,
pp. 416-420, separate opinion of Judge ad hoc Lauterpacht.)

By way of comparison, it may be observed that in the Corfu Channel
case the plea offorum prorogatum was raised, without loss of time, by the
United Kingdom both in its written observations and in its oral argu-
ments (see I.C.J. Reports 1947-1948, pp. 26ff. ; and I.C.J. Pleadings,
Corfu Channel, Vol. II, pp. 15-18,particularly para. 9 (g) at p. 18,and
Vol. III, pp. 36, 56 ff., 66 and 69). In the case of theAnglo-Iranian Oil
Co., the initiative was likewise taken, and taken immediately, by the
United Kingdom, even though itscontentions werenot upheld (see1. C.J.
Reports 1952, pp. 112-114,and 1. C.J. Pleadings, Anglo-Iranian Oil Co.,
pp. 517-518, 540, 544, 553-556, 5946 ,26,630ff.). Immediacy of response
is important in appraising the understanding of the parties; forum pro- la position que je pense la Cour a prise, à savoir que l'applicabilité de
cette doctrine n'a pasà êtreexaminée. Le conseilde la Bosnie-Herzégo-
vine a déclaré- àmon avis àjuste titre- que la question qui sepose au
sujet de cette disposition n'est pas une question de forum prorogatum,
mais celle de savoir si la Yougoslavie a acquiescé à l'opinion selon
laquelle cette disposition est applicable. Il y a une différenceentre accep-

ter la juridiction prévuepar la clause attributive de compétenced'un
traitéétantentendu que la clause elle-même ne s'appliquepas et acquies-
cerà la conclusion selon laquelle la clause attributive de compétenceelle-
même s'applique.Dans le premier cas, l'acceptation estle seul fondement
de la compétence,dans le second, elle ne l'est pas, car il s'agit seulement
d'une admissionque le traités'applique. Cette dernière position estcelle
qu'à mon avis a prise le conseil de la Bosnie-Herzégovine(voirCR 9618,
p. 75-76, 79-80, 81-82,etCR96/11, p. 52).
En outre, j'approuve ce queje crois êtreaussi une position prise par le
conseil de la Bosnie-Herzégovine, à savoir que la doctrine duforum pro-
rogatum n'intervient pas lorsque la compétencequi en découleraitexiste
déjàen vertu d'un titre de compétenceapplicable; par hypothèse, on ne

peut invoquer cette doctrine que lorsque la compétenceen question ferait
autrement défaut (CR9618, p. 82). En l'espèce,la Cour ayant jugéque
l'article IX de la convention sur le génocide s'appliqueen tant que dis-
position conventionnelle liant les parties, il n'est ni nécessaireni justifié
de recourirà la doctrine en question pour fonder la compétence prévue
par cette disposition.
Les positions ainsi prises par le conseil de la Bosnie-Herzégovinesont
confortéespar le fait qu'au paragraphe 34 de son ordonnance du 13sep-
tembre 1993la Cour a considéré que la question du forum prorogatum ne
se posait pas en ce qui concerne l'article IX de la convention; elle
conserve la mêmeposition au paragraphe 40 de l'arrêtrendu cejour. La
position de la Cour correspond bien à la manièredont les arguments ont

été formuléd surant les deux précédentes phasesde l'affaire, à savoir les
1"'et 2 avril 1993et les 25et 26 août 1993.(Pour le stade auquel - vers
la fin de la seconde phase de l'affaire - et les circonstances dans les-
quelles la question du forum prorogatum a étésoulevéepour la première
fois,voir C.I.J. Recueil 1993,p. 416-420,opinion individuellede M. Lau-
terpacht, juge ad hoc.)
Par comparaison, on peut noter que dans l'affaire du Détroitde Cor-
fou l'argument duforum prorogatum a été formulé sans perdre de temps
par le Royaume-Uni tant dans ses écrituresque dans ses plaidoiries
(voirC.I.J. Recueil 1947-1948,p. 26et suiv., et C.I.J. Mémoires, Détroit
de Corfou, p. 15-18,en particulier le paragraphe 9 g), p. 18,et vol. III,

p. 36, 56 et suiv., 66 et 69). Dans l'affaire de l'dnglo-Iranian Oil Co., le
Royaume-Uni a de mêmepris l'initiative, et l'a prise immédiatement,
mêmesi ses arguments n'ont pas été acceptés (voir C.I.J. Recueil 1952,
p. 112-114,et C.I.J. Mémoires,Anglo-Iranian Oil Co., p. 517-518, 540,
544, 553-556, 594, 626, 630et suiv.). L'immédiatetéde la réaction est
importante lorsque l'on appréciela position des parties; le forum proro-rogatum rests ultimately on the same consensual foundations which
underpin the jurisdiction of the Court.
These considerations support what 1believeto be the position taken by

the Court, that is to Say,that Bosnia and Herzegovina is not relying -
and correctly, 1think - onforum prorogatum in relation to Article IX of
the Genocide Convention.

(Signed) Mohamed SHAHABUDDEEN.gatum repose en dernière analysesur les mêmesfondements consensuels
que la compétencede la Cour.
Ces considérations soutiennentce que je crois êtrela position adoptée
par la Cour,a savoir que la Bosnie-Herzégovinen'invoquepas - à mon

avisà juste tit-e leforum prorogatum en ce qui concerne l'articleIX de
la convention sur le génocide.

(SignéM )ohamed SHAHABUDDEEN.

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de M. Shahabuddeen (traduction)

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