Opinion dissidente de M. Padilla Nervo, juge (traduction)

Document Number
056-19730202-JUD-01-03-EN
Parent Document Number
056-19730202-JUD-01-00-EN
Document File
Bilingual Document File

OPINION DISSIDENTE DE M. PADILLA NERVO

[Traduction]

Je ne suis pas en mesure de souscrire à l'arrêtde la Cour dans la
présenteprocédure.
Je ne puis pas approuver la méthodeet le raisonnement suivis par la
Cour pour écarter et rejeter un peu rapidement les objections et les
arguments opposés à sa compétencepour connaître de la requêteau
fond.
En formulant des assertions par trop dogmatiques et formalistes, la
Cour risque de donner l'impression qu'elle a surtout eu le souci de
rechercher la justification juridique d'une prémisse déjà admise de
caractère quelque peu axiomatique.
Certes, il n'en est rien, mais mon avis les objections élevées n'ont
pas été réfutée de façon convaincante.

L'exposéde principes généraux et l'invocationde la pratique établie
de la Cour concernant certaines questions mises enjeu par des décisions
antérieuresne fournissent pas nécessairementune solution valable pour
le problème qui se pose dans l'affaire actuelle, qui présente descarac-
téristiques exceptionnelleset des particularitéstoutfait inédites,et où
la question de la compétenceet la question de fond sont mutuellement
liéesà plusieurs points de vue.
Tous ces élémentsétaient d'ailleurs présentsdans l'affaire relative
à la Compétenceen matière de pêcheries, mesures conservatoires, ordon-
nance du 17 août 1972. Les opinions que j'avais expriméesalors de-
meurent valables.
Dans la présenteprocédure, un arrêta étéprononcé concernant un

Etat qui refuse de reconnaître la compétencede la Cour, qui n'est pas
partieà cette procédureet dont les droits souverains sont compromis.

Il n'est pas établi que la prétention de la République d'Islande à
étendresa compétence enmatière de pêcheries jusqu'à50 millesmarins
autour de ses côtes soit contraire au droit international.
La Cour invoque surtout pour fonder sa compétence l'échange de
notes du 19juillet 1961, accord qui, d'après la République d'Islande, a
entièrement atteint son but et son objet, dont elle considère que les
dispositions ne sont plus applicables et sont donc devenues caduques.

Le ministre des Affaires étrangères d'Islandea envoyéau Greffier,
le 27 juin 1972, une lettre au sujet du dépôt, intervenu le juin 1972,

d'une requêtepar laquelle le Gouvernement de la Républiquefédérale
d'Allemagne introduisait une instance contre l'Islande. A cette lettre étaient joints plusieurs documents concernant l'origine
et l'extinction de l'accord du 19juillet 1961, ainsi quele changement
de circonstances résultant de l'exploitation toujours croissante des res-

sources de la pêchedans les mers entourant l'Islande)).
La lettre mentionne le différend avecla République fédérale,qui
s'opposaità la limite de pêchede 12milles établiepar leGouvernement
islandais en 1958,et se réfère l'échangede notes de 1961.
L'Islande déclareque ((l'échangede notes de 1961est intervenu dans
des circonstances extrêmementdifficiles)).
Au paragraphe 5 dela requête introductived'instancede la République
fédérale,il-est question:

((d'incidents où étaient impliqués, d'une part, des navires
garde-côtes islandais et, de l'autre des naviresde pêchebritanniques
et des bâtiments de la marine royale du Royaume-Uni chargésde la
protection des pêcheries.
Il ressort des déclarationsci-dessusque de tellescirconstances n'étaient
pas des plus favorables pour négocieret conclure l'accord de 1961.
Le ministre des Affaires étrangères d'Islande indique enoutre:

((L'accordréglantle différenddont il s'agissaitet par conséquent
la possibilité d'une instancedevant la Cour(àlaquelle le Gouverne-
ment islandais s'est constamment opposé pour les différendscon-
cernant l'étenduede sa compétenceexclusiveen matièredepêcheries)
n'avaient pas un caractère permanent. En particulier on ne saurait
considérer commepermanent un engagement de se soumettre au
règlement judiciaire. Rien dans cette situation ni dans une règle
générale du droit international contemporain nejustifierait une autre

manière de voir.

L'accord enregistrédans l'échangede notes de 1961 ayant pris
fin, la Cour ne pouvait se fonder sur son Statut le 5juin 1972pour
exercer sa compétencedans l'affaireviséepar la République fédérale.

Considérant que les intérêtsvitaux du peuple islandais sont en
jeu, le Gouvernement islandais porte respectueusement à la con-
naissance delaCour qu'iln'estpas disposé à luiattribuer compétence
dans une affaire qui concernerait l'étendue des pêcheries islandaises,
en particulier dans l'instance que le Gouvernement de la République
fédérale d'Allemagne a voulu introduire le 5juin 1972.))

L'échange de notesdu 19juillet 1961 sur lequel la requêtefonde la
compétencede la Cour mentionne la résolutiondu Parlement islandais
du 5mai 1959,aux termes de laquelle ((ilconvient de s'efforcerd'obtenir))
la reconnaissance des droits de pêche de l'Islandesur l'ensemble du
plateau continental.
Dans la note du 19 juillet 1961, il est dit que «Le Gouvernementislandais continuera de s'employer à mettre en æuvre la résolution de
1'Althingen date du 5 mai 1959relative à l'élargissementde la juridiction
sur les pêcheriesautour de l'Islande ..»(lesitaliques sont de nous).
Quand l'Islande affirme que son plateau continental doit être considéré
comme une partie du pays lui-même, ellepeut s'appuyer surlaconvention
relative à cette question, signéeà Genèvele 29 avril 1958.
Dans son arrêtdu 20 février 1969,la Cour a énoncé:

((la plus fondamentale de toutes les règles de droit relatives au
plateau continental et qui est consacréepar l'article2 de la Conven-
tion de Genève de 1958 ..:les droits de 1'Etat riverain concernant
la zone de plateau continental qui constitue un prolongement
naturel de son territoire sous la mer existent ipsofacto et ab initio
en vertu de la souveraineté de 1'Etat sur ce territoire et par une
extension de cette souveraineté sous la forme de l'exercice de droits
souverains aux fins de l'exploration du lit de la mer et de l'exploita-
tion de ses ressources naturelles. Il y alà un droit inhérent. Point
n'est besoin pour l'exercerde suivreun processusjuridique particulier
ni d'accomplir des actesjuridiques spéciaux.Son existence peut être
constatée, comme cela a étéfait par de nombreux Etats, mais elle
ne suppose aucun acte constitutif. Qui plus est, ce droit est indé-
pendant de son exercice ((effectif)).Pour reprendre le terme de la

Convention de Genève, il est ((exclusif))en ce sens que, si un Etat
riverain choisit de ne pas cxplorer ou de ne pas exploiter les zones
de plateau continental lui revenant, cela ne concerne que lui et nul
ne peut le faire sans son consentement exprès.))(C.I.J. Recueil 1969,
p. 22, par. 19).
Le Gouvernement islandais, dans les renseignements et les documents
envoyés à la Cour, donne des raisons et des explications bien motivées

de son droit souverain d'étendre sa compétenceen matière de pêcheries
à la totalité de la zone du plateau continental.
Depuis toujours les pêcheries côtières de l'Islande constituent le
fondement mêmede l'économiedu pays.
Les pêcheriescôtièressont indispensables àl'économieislandaise; sans
elles, le pays n'aurait pas étéhabitable.
L'Islande est situéesur une plate-forme ou plateau continental, dont
les contours sont concentriques à ceux du pays lui-même. Cesterrasses
sous-marines peu profondes présentent des conditions idéalespour les
zones de frai et d'alevinage dont la préservation et l'utilisation sont
indispensables à la vie du pays. Il est de plus en plus généralementadmis
que les pêcheriescôtières dépendent des conditions particulières existant
dans leszones littorales, lesquelles fournissent l'environnement nécessaire
aux réservesde poisson. Cet environnement fait partie intégrante des
ressources naturelles du pays riverain.

Le plateau continental est en réalitél'assise sur laquelle le pays repose
et il doit être considércomme une partie du pays lui-même. Les intérêts vitauxdu peuple islandais sont donc en jeu. Ils doivent
êtreprotégés.
La position prioritaire de1'Etat côtier a toujours été reconnue grâce
au système des limitesde pêche.Dans le passé, ces limitesont été souvent
établiessans que l'on tienne aucun compte des intérêtde 1'Etatriverain.
Elles doivent plutôt leur originà l'influenceprépondérantedes nations
pratiquant la pêchelointaine, qui souhaitaient pêcher aussiprès que
possible des côtes des autres nations et, souvent, ravageaient une zone
avant de passer à une autre.
Dans un systèmede développementprogressif du droit international,
la question de la limite de pêche exclusidoit êtreréexaminéedu point
de vue de la protection et de l'utilisation des ressources côtières in-
dépendamment d'autres considérations qui portent sur l'étendue dela

mer territoriale. La communauté internationale reconnaît de plus en plus
que les ressources de la pêchecôtière doivent êtreconsidéréescomme un
élémentdes ressources naturelles de 1'Etat riverain. La situation parti-
culière des pays qui sont tributaires avant tout des pêcheriescôtières
a étéadmise, d'une manière générale,lors des deux conférences de
Genève de1958et 1960.Depuis lors cetteidéea étémaintes foie sxprimée,
que ce soit dans la législation de divers pays ou dans d'importantes
déclarations politiques. L'évolutionse fait résolument dans cette direc-
tion.
Rappelant les raisons qui l'avaient amené à adopter une nouvelle
réglementationsur l'exclusivitéde sa compétenceen matièrede pêcheries
dans la zone du plateau continental, le Gouvernement islandais a déclaré
ce qui suit:

((Dans l'aide-mémoiredu 31 août 1971,il était indiqué:((envue
de renforcer les mesures de protection essentielles pour la pré-
servation des intérêts vitauxdu peuple islandais dans les mers qui
entourent ses côtes, le Gouvernement islandais considère comme
essentiel d'étendresa zone de compétenceexclusivesur les pêcheries
autour des côtes de manière à inclure les espaces marins situés
au-dessus du plateau continental)). Il était ajoutéque, de l'avis
du Gouvernement islandais, l'objet et le but des dispositions de
l'échangede notes de 1961visant le recours au règlementjudiciaire

dans certains cas avaient été entièrementatteints. En conséquence,
le Gouvernement islandais considère que les dispositions des notes
échangées ne sont plus applicables et sont donc devenues caduques.))
(Aide-mémoire du Gouvernement islandais en date du 24 février
1972,annexe H à la requête dela République fédérale.)
((Au cours des dix annéesécoulées, leGouvernement de la Ré-
publique fédérale abénéficié de la politique du Gouvernement
islandais tendant suspendre pour une durée raisonnableet équitable
tout nouvel élargissement des limitesde la juridiction exclusive
sur les zones de pêche.Etant donné l'évolution scientifique et
économique qui s'est produite (et notamment la menace toujours plus grande d'une orientation des activitésde pêche intensives vers
la zone islandaise) la poursuite de cette politique du Gouvernement

islandais a des conséquences excessivementlourdes et inacceptables
etelleporte préjudiceà la conservation des ressources de la mer dont
dépend la subsistance de la population islandaise.)) (Les italiques
sont de nous.) (Aide-mémoiredu Gouvernement islandais en date
du 31août 1971,annexe D à la requête dela Républiquefédérale.)
Non seulement l'Islande mais encore bien d'autres pays riverains dans

toutes les régionsdu monde connaissent par expbience les effets néfastes
de la menace toujours plus grande d'une intensification de la pêcheprès
de leur littoral que font peser des flottilles étrangères deux de pêche
munis, comme les chalutiers modernes de la Républiquefédérale d'Alle-
magne, d'un équipement techniquecomplexe. Les progrès techniques
réalisésdans cedomaine setraduisent par un changementdecirconstances
qui peut modifier radicalement la situation antérieure.
L'accord que constitue l'échangede notes du 19juillet 1961envisageait
déjàque la République d'Islande étendrait la limite de sa compétence
sur les pêcheriesau-delà de 12 milles.
S'il avait étécontraire au droit international d'envisager une telle ex-
tension, le Royaume-Uni et la République fédéraled'Allemagne n'au-
raientpas acceptél'insertiond'une déclaration dece genre dans l'échange
de notes officiel.
Cet échangede notes contient la reconnaissance implicite du droit de

l'Islande d'étendre sacompétenceen matière de pêcheries.
Ayant reconnu l'importance exceptionnelle des pêcheries côtières pour
l'économie islandaise,la République fédérale d'Allemagnea acceptéles
propositions formulées par le Gouvernement islandais et notamment
cellequi figureau paragraphe 5 où il est dit:(LeGouvernement islandais
continuera de s'employer à mettre en Œuvrela résolutionde I7Althingen
date du 5 mai 1959 relative à l'élargissementde la juridiction sur les
pêcheriesautour de l'Islande» (les italiques sont de nous); d'après cette
résolution, l'Islande doit s'efforcer d'obtenir la reconnaissance de ses
droits sur toute la zone du plateau continental, conformément à la loi de
1948 concernant la conservation scientifique des pêcheriesdu plateau
continental.
La Républiquefédérale n'apas objectéque ces droits n'existaient pas;
elle a acceptéla proposition dont la contrepartie était l'obligation pour

l'Islande de notifier six moisl'avance toute mesure tendant à étendre sa
juridiction sur les pêcheries.
A supposer qu'un différend survienneen la matière, cela ne concer-
nerait pas la reconnaissance déjà admise implicitement du droit de
l'Islandeà étendre sacompétenceen matièrede pêcheries.
Pour les Etats riverains, les ressources biologiques de la mer au-dessus
de leur plateau continental et dans la zone de pêchecontiguë àleur mer
territoriale sont une richesse essentielle.
Le développement progressifdu droit international suppose la recon- naissance de la notion de mer patrimoniale qui s'étend depuisles eaux
territoriales jusqu'à une certaine distance, fixéepar 1'Etat riverain inté-
ressédans l'exercice de ses droits souverains, en vue de protéger les
ressources dont dépendent son développementéconomiqueet la subsis-
tance de sa population.
Cette notion n'est pas nouvelle. Elle a trouvéexpression dans nombre
de déclarations par lesquelles les gouvernements ont proclamé, comme
des élémentsde leur politique maritime internationale, leur souveraineté
et leur compétenceexclusiveen matière depêcheriessur les eaux adjacen-

tes àleurscôtes.
Neuf Etats ont fixéà 200 milles marins à partir de leur littoral la zone
de leur compétenceexclusive sur les pêcheries.Il y a vingt ans que cer-
tains appliquent une réglementation en ce sens, depuis que la ((déclara-
tion de Santiago)) a étésignéepar les Gouvernements du Chili, de
1'Equateur et du Pérou en août 1952.
Le texte des notes du 19juillet 1961 est susceptible d'interprétations
différentes ence qui touche sa durée d'application, sonobjet et les obli-
gations qu'il impose.
On ne saurait prétendre quelaclausecompromissoirea un caractèreper-
manent ou oblige l'Islande à fixer de façon définitivela limite de sa
juridiction sur les pêcheries 12milles.
Si l'objetet le but de la disposition prévoyantle recours au règlement

judiciaire ont été pleinementatteints et ont valablement pris fin, cette
disposition n'offre plus aucune base sur laquelle fonder la compétence
de la Cour - et à mon avis c'est lecas.
Il y a beaucoup d'arguments et de raisons valables qui militent en
faveur de la thèseislandaise selon laquelle l'échangede notes est devenu
caduc.
Depuis que cet échangede notes a éténégocié, unchangement fonda-
mental de circonstances est intervenu et de nouvelles règleset normes de
droit international coutumier sont apparues et se sont développées,qui
permettent aux Etats riverains d'étendreleur juridiction en matière de
pêcheriessur les eaux qui recouvrent leur plateau continental.
A l'heure actuelle (et ce depuis les deux conférencessur le droit de la
mer), il est universellenient entendu que tout Etat riverain a le droit de

porter la limite de ses eaux territorialesà une distance de 12 milles.
Beaucoup d'Etats ont adoptécette limite, y compris la République fédé-
rale d'Allemagne. L'Islande ne saurait être juridiquement tenue de
payer le prix ou la contrepartie de la reconnaissance de son propre droit.
Qui plus est, en matière de droits de pêche exclusifsou préférentielsdans
les eaux situéesau-delà de la mer territoriale, beaucoupd7Etatsd'Améri-
que ont revendiqué une extension de leur juridiction jusqu'à 200 milles
marins à partir de leurs côtes. Dans d'autres régions, plusieursEtats ont
émisdes revendications analogues et de nouvelles normes ont étéadop-
tées à cet égard. Le Sénégal,par une loi en date du 19 avril 1972, a
déclaré étendre sa juridiction jusqu'à une distance de 110milles marins
au-delà de la limitede sa mer territoriale. D'autres exemples de normes nouvelles apparaissent dans les conclu-
sions et recommandations du Séminaire régional desEtats africains sur
ledroit dela mer, qui comprennent lesdispositions suivantes:
((LesParticipants

Recommandent aux Etats africains d'étendre leur souveraineté
sur toutesles ressources de la haute mer adjacentà leur mer terri-
toriale dans le cadre d'une zone économique à établiret qui com-
prendra au moins le plateau continental;
Invitent tous les Etats africains défendrele principe de cette
extension de souverainetéà la prochaine Conférenceinternationale

sur le droit de la mer.))
Le paragraphe 5 de l'échangede notes déclarait que l'Islande conti-
nuerait de s'employer àmettre en Œuvrela résolutionde 1'Althing.L'ac-
ceptation de cette déclarationrevenaitàreconnaître implicitement qu'en
agissant éventuellement ainsil'Islande ne se rendrait coupable d'aucune
violation dudroit international.

L'intérêtqu'a le Gouvernement islandais à chercher à faire recon-
naître ses droits sur une zone de pêcherecouvrant l'ensembledu plateau
continental est nécessairementun intérêtcontinu et permanent car il
touche sa propre souveraineté;c'est un intérêtqui sera fortifiéchaque
jour par la volonté et la déterminationdu peuple d'Islande et qui durera
aussi longtemps que le pays lui-même.La prétention de l'Islande à des
droits de ~êcheexclusifs sur toute la zone du ~lateau continental est
affirmée q;ant à son but, son intention et son ob;:etdepuis 1959et cette
prétention a été reconnue dans l'échangede notes de 1961.A mon avis,
on ne saurait nier le droit de'Islande de chercherà mettre en Œuvrela
résolutionde I'Althing.
Je ne peux donc souscrire à l'affirmation qui figure dans l'arrêtselon

laquelle le droit de la Républiquefédérale d'Allemagnede contester une
telle extension devait durer ((aussi longtemps que l'Islande pourrait
chercher à mettre en Œuvrela résolution deI1Althing».
La conséquencede cette affirmation semblerait être(en théorie)que le
droit de la Républiquefédéraled'invoquer la compétencede laCour en la
matière devait durer àperpétuité, sansqu'il y aità prendre en considé-
ration un changement fondamental des circonstances, l'apparition de
nouvellesnormes de droit coutumier ou d'autres facteurs portant atteinte
en faitàla validitéde la prétendue((clausecompromissoire».
Le 29 septembre 1972le ministre des Affaires étrangères d'Islande a
déclarédevant l'Assembléegénéraledes Nations Unies lors du débat
général,à propos de la procédureengagéepar le Royaume-Uni:

«Mon gouvernement estime que l'absence de compétence est
évidentepuisque son consentementn'existaitplus lorsqu'on acherché
à obtenir une action de la Cour.)) (Cf. art. 34 de la convention de
Vienne sur le droit des traités.)(Les italiques sont de nous.) On peut donc conclure que beaucoup de changements fondamentaux
sont intervenus dans les circonstances qui existaient en 1961 quand
l'échangede notes a eu lieu, et que c'està bon droit que l'Islande a in-
voquécet argument pour soutenir que l'accord n'estplus en vigueur.
Au cours des dernières décennies,de profondes mutations se sont
produites dans les domaines politique, social, économique et technique.
La nécessitéd'établirun juste équilibreentre les nations puissantes et
faibles,entrelespays industrielset ceuxquisont en voiededéveloppement,
sefaitchaque jour plus urgente.
La lutte pour la libertéet l'autodétermination des peuples dépendants
a été couronnée ds euccès.De nombreux Etats récemment créé aspportent
maintenant desfaçons devoir, desforceset despossibilitésde coopération
nouvelles à la communautédes nations.

Les efforts déployéspour revendiquer leurs droits souverains sur les
ressourcesnaturellesquileur appartiennent sont le commun dénominateur
des Etats côtiers de par le monde.
Les vieillespratiques et les situations inéquitablesdites traditionnelles
sont déjàrévolueset vont bientôt disparaître. Le besoin et la volonté
d'éliminerles injustes privilègesobtenus par la supérioritéaffirméede la
force s'imposent chaque jour davantage. Ces faits ont crééde nouvelles
circonstances qui entraînentà leur tour d'autres changements.
Les règlescoutumièresqui se fontjour sur les problèmesde la mer ont
trouvé leur expression dans de nombreuses proclamations politiques,
dans des déclarations de gouvernements,dans les lois et règlements mis
en Œuvrepar les Etats côtiers dans de nombreuses régionsdu monde en
vue de revendiquer leurs droits souverains et leur juridiction non seule-

ment sur leur mer territoriale mais sur les eaux recouvrant leur plateau
continental.
D'importantes déclarations de principes ont étéfaites au sein de
conférencesinternationales régionaleset le développementprogressif du
droit de la mer s'entrouve accéléré.
Les concepts et les idéesauxquels l'adoption de ces principes a donné
une nouvelle forme prévalaient déjà parmiles juristes et les hommes
d7Etat d'Amériqueil y a plus de vingt ans. Ces principes s'appliquent
aussi à la situation des autres Etats côtiers dans les autres continents
et l'Islande nesaurait en êtreexclue.
La conférence spéciald eespays de la région desCaraïbesa formulé une
déclaration de principes; je cite certains d'entre eux parce qu'ils ont
rapport aux points en question:

((Rappelant: Que les Conférences internationales américaines
réuniesà Bogota en 1948et à Caracas en 1954ont reconnu que les
populations des Amériques dépendent de leursressources naturelles
comme moyen de subsistance et ont proclaméle droit de protéger,
conserver et développerces richesses, comme d'en assurer l'utili-
sation et lajouissance,

Qu'en 1956 ont étéadoptés les Principes de Mexico sur lerégimejuridique de la mer, qui ont été admiscomme((l'expressionde
la conscience juridique du Continent et comme applicables par les
Etats américains))et qui ont établiles bases de l'évolutiondu droit
dela mer qui a abouti, la mêmeannée,lors dela Conférence spéciale
de la capitale dominicaine, à l'énonciation de conceptsqui ont été
reconnus par la Conférence desNations Unies sur le droit de la mer,
à Genève, en1958.

Considérant: ..Quelesressources renouvelables et non renouvela-
bles de la mer contribuent à élever le niveaude vie des pays en voie
de développement, ainsi qu'àstimuler et accélérer leurs progrès;

Que lesdites ressources ne sont pas inépuisables,car les espèces
vivantes peuvent se raréfieret même s'éteindre commseuite à une
exploitation irrationnelle ouà la pollution;...

Formule la déclaration deprincipes ci-après :
Mer territoriale....La largeur de cette zone et la manièredont elle
est délimitéedoivent faire l'objet d'un accord international, de pré-
férencede portéeuniverselle. Tout Etat a, entre-temps, le droit de
fixer la largeur de sa mer territoriale jusqu'à une limitede 12 milles
marins àpartir de la ligne de base applicabl...

Mer patrimoniale. L'Etat riverain exerce des droits de souve-
raineté sur les ressources naturelles, renouvelables et non renouve-
lables, qui se trouvent dans les eaux, sur le lit et dans le sous-sol,
d'une zone adjacente à la mer territoriale, dénomméemer patri-
moniale.
L'Etat riveraina ledevoir de promouvoir et le droit deréglementer
les recherches scientifiquesdans la mer patrimoniale, comme celui
d'adopter les mesures nécessairespour éviterla pollution du milieu
marin et pour assurersa souverainetésur les ressources.

La largeur de la mer patrimoniale doit faire l'objet d'un accord
international, de préférencede portée universelle. La somme de
cette zone et de la mer territoriale, compte tenu des circonstances
géographiques, ne doit pas être supérieureau total à 200 milles

marins ...
Plateau continental.L'Etat riverain exercedes droits souverains sur
leplateau continentalaux finsdel'exploration decelui-cietdel'exploi-
tation des ressources naturelles qui s'ytrouvent.
Le plateau continental comprend le lit de la mer et le sous-sol des
régions sous-marinesadjacentes aux côtes, mais situéesau-delà de
la mer territoriale, jusqu'à une profondeur de 200 mètresou davan-
tage jusqu'au point où la profondeur des eaux surjacentes permet
l'exploitation des ressourcesnaturellesdesdites régions.
En outre, les Etats participant à la présente Conférence émettent COMPÉTENCEPÊCHERIES (OP. DISS. PADILL.4NERVO) 90

l'avisquelesdélégationslatino-américaineasu Comité desutilisations
pacifiques du fond des mers et des océansdes Nations Unies de-
vraient préconiser uneétuderelativeà l'utilitéeà l'opportunité de
fixerpour le plateau des limites extérieures précises,compte tenu de
la limite extérieurede l'émersioncontinentale.
Dans la partie du plateau continental couverte par la mer patri-
moniale, le régimejuridique prévupour ladite mer est applicable.
En ce qui concerne la partie non couverte par la mer patrimoniale,
le régimeétablipar le droit international pour le plateau continental
est applicable.)) (Lesitaliques sont de nous.)

L'obligation de négocier estun principe de droit international général.
La Républiquefédérale d'Allemagne et l'Islande ont acceptéde négocier
en vue deparvenir à un accord par des moyens pacifiques. Beaucoup d'of-
fres raisonnables ont étéfaites par l'Islande au cours des négociations.
Que la République fédéraleait voulu obtenir plus de concessions et
qu'elle ait interrompu unilatéralement le processus de négociation en
introduisant une instance devant la Cour, cela ne signifie pas qu'un

accord par voie de négociation était impossible et que tous les efforts
dans ce sens devaient être abandonnés.
La République fédérale d'Allemagnea communiqué à la Cour des
renseignements sur les propositions faites par l'Islande pendant les
négociations relatives un accord provisoire.
La Républiquefédérale n'a élevéà l'époqueaucune objection quant au
droit de l'Islande d'exercersa juridiction sur les zones de pêche situées
en deçà de la limite des50 milles. Elle ne conteste pas le droit qu'avait
l'Islande d'imposer desrestrictions et de fixer les conditions dans les-
quelles les navires immatriculés dans la République fédéralepouvaient
être autorisésàpêcherdans les eaux revendiquéespar l'Islande enappli-
cation de la résolution de'hlthing.

Lorsqu'elle a examiné la première proposition concrète faite par
l'Islande au cours des négociations,la Républiquefédérale n'pas allégué
que la prétention del'Islande d'étendre sazone dejuridiction au-delà de
la limite des2millesétaitcontraire audroit international. LaRépublique
fédéralea protesté contre la nature des restrictions proposées et l'effet
qu'elles pouvaient avoir sur les prises de poisson effectuéespar ses
navires. L'Islande a proposé que l'arrangement s'applique jusqu'à la
fin de1973.A ce propos, la République fédéralea dit à la Cour que les
restrictions proposéespar l'Islande ((entraîneraient, par leurs effetscom-
binés, uneréduction radicale du volume des prises annuelles des navires
de pêchede la République fédérale d'Allemagne à environ 20 pour
cent seulement du chiffre annuel actuel)).

Au lieu de poursuivre les négociations, la République fédérale,en
soumettant sa requête à la Cour et en demandant des mesures conser-
vatoires, escomptait que l'Islande se soumettraàtses exigencesdans des
circonstances aussi difficiles que celles qui existaient lorsque l'échangede notes du 19 juillet 1961 a mis fin à l'opposition de la République
fédérale àla limite de pêchede 12milles.
Le fait mêmede négocierun arrangement qui permette au Royaume-
Uni et à la Républiquefédérale d'Allemagnede pêcherdans certaines
parties de la zone de 50 milles relevant de la juridiction de l'Islande en
matière de pêcheriesconstitue une reconnaissance explicite du droit de
l'Islande d'élargirles limites de sa zone de pêcheet une reconnaissance
implicite que cet élargissementn'estpas contraireau droit international;
en effet, le droit d'agir ainsi existe ou n'existe pas, mais ne saurait faire
l'objet de négociations bilatérales.Si cet élargissementconstitue une
violation de la libertéde la haute mer, le consentement de la République
fédérale nepeut rendre légalun acte illégal;sonconsentementne peut non
plus déterminer quelle étenduede la haute mer l'Islande peut revendi-

quer - 12 milles marins en 1961 et 50 milles marins à présent, pour
autant que la République fédéraledonne son consentement et qu'un
accord bilatéral soit concluà cet effet.
L'assertion selon laquelle l'échangede notes de 1961 est intervenu
dans des circonstances extrêmementdifficilesn'est pas contestée(para-
graphe 5 de la requêtede la Républiquefédérale d'Allemagne)L . a Cour
ne doit pas négligerce fait et n'a pas besoin de demander des preuves
écritesétablissantla nature de la force qui a été utilisée nsious quelle
forme et de quelle manière elle l'a été (article52 de la convention de
Vienne sur le droit des traités).
Une grande puissance dispose de bien des moyens pour utiliser la force
et exercer une pression sur une petite nation, ne serait-ce qu'en insistant
par voie diplomatique pour faire admettre et accepter ses vues. Les pro-
fesseurs,juristes et diplomates qui sont au fait des relations internationa-
les et de la politique étrangèresavent bien que certaines(notes))remises
par le gouvernement d'une grande puissance au gouvernement d'une

petite nation peuvent avoir le mêmeobjet et le mêmeeffet que l'utili-
sation ou la menace de la force.
Il y a des pressions morales et politiques qui ne peuvent êtreétablies
au moyen de preuves dites documentaires mais dont l'existence est en
fait incontestable et qui ont, au cours de l'histoire, aboutis traitéset
conventions dont on prétendqu'ils ont été conclus librement et sont sou-
mis au principepacta sunt servanda.

(Signé) Luis PADILLA NERVO.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE PADILLA NERVO

1cannot concur in the Judgment of the Court in the present proceed-
ings.
1 am unable to agree wiih the manner and reasoning through which
the Cowt easily disposed of and rejected the objections and arguments
raised against itsjurisdiction todeal with the merits of the Application.

The Court might give the impression by the development of too
dogmatic and formalistic assertions that its main concern has been the
search for juridical foundations to justify a previously admitted premise
of somewhat axiomatic character.
That of course is not the case, but, in my view, the objections raised
have not been answered convincingly.
The formulation of general principles and the invocation of a settled
practice of the Court regarding certain issues in former decisions, do not

necessarily solve the problem in a case like the present one, which has
exceptional characteristics and very special features, and where juris-
diction and merits are interdependent from severalpoints of view.

Al1 these circumstances were in fact apparent in the Fisheries Juris-
diction case, Interim Protection, Order of 17 August 1972. The views 1
then expressed are still valid now.

In the present proceedings ajudgment is given regarding a State which
denies its consent to jurisdiction of the Court, which is not a party to
such proceedings, and whose rights as a sovereign State are placed in
jeopardy .
The claim of the Republic of Icelând to extend its fisheriesjurisdiction
to a zone of 50 nautical miles around Iceland, has not been proved to be
contrary to international law.

The Court relies mainly as a source of itsjurisdiction on the Exchange
of Notes of 19 July 1961, an agreement which the Republic of Iceland
contends has fully achieved its purpose and object, and the provisions
of which it considers no longer to be applicable and, consequently,
terminated.
The Minister for Foreign Affairs of Iceland sent to the Registrar on
27 June 1972a letter regarding the fling on 5June 1972ofan Application
by the Government of the Federal Republic of Germany, instituting
proceedings against Iceland. OPINION DISSIDENTE DE M. PADILLA NERVO

[Traduction]

Je ne suis pas en mesure de souscrire à l'arrêtde la Cour dans la
présenteprocédure.
Je ne puis pas approuver la méthodeet le raisonnement suivis par la
Cour pour écarter et rejeter un peu rapidement les objections et les
arguments opposés à sa compétencepour connaître de la requêteau
fond.
En formulant des assertions par trop dogmatiques et formalistes, la
Cour risque de donner l'impression qu'elle a surtout eu le souci de
rechercher la justification juridique d'une prémisse déjà admise de
caractère quelque peu axiomatique.
Certes, il n'en est rien, mais mon avis les objections élevées n'ont
pas été réfutée de façon convaincante.

L'exposéde principes généraux et l'invocationde la pratique établie
de la Cour concernant certaines questions mises enjeu par des décisions
antérieuresne fournissent pas nécessairementune solution valable pour
le problème qui se pose dans l'affaire actuelle, qui présente descarac-
téristiques exceptionnelleset des particularitéstoutfait inédites,et où
la question de la compétenceet la question de fond sont mutuellement
liéesà plusieurs points de vue.
Tous ces élémentsétaient d'ailleurs présentsdans l'affaire relative
à la Compétenceen matière de pêcheries, mesures conservatoires, ordon-
nance du 17 août 1972. Les opinions que j'avais expriméesalors de-
meurent valables.
Dans la présenteprocédure, un arrêta étéprononcé concernant un

Etat qui refuse de reconnaître la compétencede la Cour, qui n'est pas
partieà cette procédureet dont les droits souverains sont compromis.

Il n'est pas établi que la prétention de la République d'Islande à
étendresa compétence enmatière de pêcheries jusqu'à50 millesmarins
autour de ses côtes soit contraire au droit international.
La Cour invoque surtout pour fonder sa compétence l'échange de
notes du 19juillet 1961, accord qui, d'après la République d'Islande, a
entièrement atteint son but et son objet, dont elle considère que les
dispositions ne sont plus applicables et sont donc devenues caduques.

Le ministre des Affaires étrangères d'Islandea envoyéau Greffier,
le 27 juin 1972, une lettre au sujet du dépôt, intervenu le juin 1972,

d'une requêtepar laquelle le Gouvernement de la Républiquefédérale
d'Allemagne introduisait une instance contre l'Islande. With that letter were sent several documents dealing with the back-
ground and termination of the agreement of 19 July 1961, and "with
the changed circumstances resulting from the ever-increasing exploitation
of the fishery resources in theseas surrounding Iceland".
The letter refers to the dispute with the Federal Republic who opposed
the 12-mile fishery limit established by the Icelandic Government in
1958,and to the 1961 Exchange of Notes.
Iceland states that "the 1961 Exchange of Notes took place under
extremely difficult circumstances".
Paragraph 5 of the Application by the Federal Republic instituting
proceedings refers to-

". .. incidents involving, on the one hand, Icelandic coastguard
vessels and, on the other hand, British fishing vessels and fisheries
protection vessels of the Royal Navy of the United Kingdom".

It appears from the above-quoted statements, that such circumstances

were not the most appropriate to negotiate and conclude the 1961
Agreement. The Foreign Minister of Iceland further indicates:
"The agreement by which that dispute was settled, and conse-
quently the possibility of such recourse to the Court (to which the
Government of Iceland was consistently opposed as far as concerns
disputes over the extent of its exclusive fisheriesjurisdiction), was
not of a permanent nature. In particular, an undertaking for judicial
settlement cannot be considered to be of a permanent nature. There
is nothing in that situation, or in any general rule of contemporary
international law, to justify any other view.

After the termination of the agreement recorded in the Exchange
of Notes of 1961, there was on 5 June 1972 no basis under the
Statute for the Court to exercise jurisdiction in the case to which
the Government of the Federal Republic refers.
The Government of Iceland, considering that the vital interests
of the people of Iceland are involved, respectfully informs the Court
that it is not willing to conferjurisdiction on the Court in any case
involving the extent of the fishery limits of Iceland, and specifically
in the case sought to be instituted by the Government of the Federal
Republic of Germany on 5 June 1972."

The Exchange of Notes on which the Application founds the juris-
diction of the Court, dated 19July 1961,makes reference to the Resolu-
tion of the Parliament of Iceland of 5 May 1959,which declared that a
recognition of the rights of Iceland to fisheries limits extending to the
wholecontinentalshelf "should be sought".
In the Note of 19 July 1961it is stated that: "The Icelandic Govern- A cette lettre étaient joints plusieurs documents concernant l'origine
et l'extinction de l'accord du 19juillet 1961, ainsi quele changement
de circonstances résultant de l'exploitation toujours croissante des res-

sources de la pêchedans les mers entourant l'Islande)).
La lettre mentionne le différend avecla République fédérale,qui
s'opposaità la limite de pêchede 12milles établiepar leGouvernement
islandais en 1958,et se réfère l'échangede notes de 1961.
L'Islande déclareque ((l'échangede notes de 1961est intervenu dans
des circonstances extrêmementdifficiles)).
Au paragraphe 5 dela requête introductived'instancede la République
fédérale,il-est question:

((d'incidents où étaient impliqués, d'une part, des navires
garde-côtes islandais et, de l'autre des naviresde pêchebritanniques
et des bâtiments de la marine royale du Royaume-Uni chargésde la
protection des pêcheries.
Il ressort des déclarationsci-dessusque de tellescirconstances n'étaient
pas des plus favorables pour négocieret conclure l'accord de 1961.
Le ministre des Affaires étrangères d'Islande indique enoutre:

((L'accordréglantle différenddont il s'agissaitet par conséquent
la possibilité d'une instancedevant la Cour(àlaquelle le Gouverne-
ment islandais s'est constamment opposé pour les différendscon-
cernant l'étenduede sa compétenceexclusiveen matièredepêcheries)
n'avaient pas un caractère permanent. En particulier on ne saurait
considérer commepermanent un engagement de se soumettre au
règlement judiciaire. Rien dans cette situation ni dans une règle
générale du droit international contemporain nejustifierait une autre

manière de voir.

L'accord enregistrédans l'échangede notes de 1961 ayant pris
fin, la Cour ne pouvait se fonder sur son Statut le 5juin 1972pour
exercer sa compétencedans l'affaireviséepar la République fédérale.

Considérant que les intérêtsvitaux du peuple islandais sont en
jeu, le Gouvernement islandais porte respectueusement à la con-
naissance delaCour qu'iln'estpas disposé à luiattribuer compétence
dans une affaire qui concernerait l'étendue des pêcheries islandaises,
en particulier dans l'instance que le Gouvernement de la République
fédérale d'Allemagne a voulu introduire le 5juin 1972.))

L'échange de notesdu 19juillet 1961 sur lequel la requêtefonde la
compétencede la Cour mentionne la résolutiondu Parlement islandais
du 5mai 1959,aux termes de laquelle ((ilconvient de s'efforcerd'obtenir))
la reconnaissance des droits de pêche de l'Islandesur l'ensemble du
plateau continental.
Dans la note du 19 juillet 1961, il est dit que «Le Gouvernementment shall continue to work for the implementation of the Althing
Resolution of 5 May 1959 regarding the extension of the fishery juris-
diction of Iceland . .." (italics added).
The claim of Iceland that its continental shelfmust be considered to be
a part of thecountry itself,has support in the Convention on this subject,
done at Geneva on 29 April 1958.
This Court, in its Judgment of 20 February 1969,stated:

". .. the most fundamental of al1the rules of law relating to the
continental shelf,enshrined in Article 2 of the 1958Geneva Conven-
tion, .. .namely that the rights of the coastal Statein respect of the
area of continental shelf that constitutes a natural prolongation of
its land territory into and under the sea exist ipsofacto and ab initio,
by virtue of its sovereignty over the land, and as an extension of it
in an exercise of sovereign rights for the purpose of exploring the
seabed and exploiting its natural resources. In short, there is here
an inherent right. In order to exerciseit, no speciallegalprocesshas
to be gone through, nor have any special legal acts to be performed.
Its existence can be declared (and many States have done this) but
does not need to be constituted. Furthermore the right does not
depend on its being exercised. To echo the language of the Geneva
Convention, it is 'exclusive'in the sense that if the coastal State
does not choose to explore or exploit the areas of shelfappertaining
else may do so without its
to it, that is its own affair, but no one
express consent." (I.C.J. Reports 1969, p. 22, para. 19.)

The Government of Iceland in its information and documents sent
to the Court, has given well-founded reasons and explanations of its
sovereignright to extend its fisheriesjurisdiction to the entire continental
shelf area.
The coastal fisheriesin Iceland have alwaysbeen the foundation of the

country's economy.
The coastal fisheries are the conditio sine qua non for the Icelandic
economy; without them the country would not have been habitable.
Iceland rests on a platform or continental shelf whose outlines follow
those of the country itself. In these shallow underwater terraces, ideal
conditions are found for spawning areas and nursery grounds upon
whose preservation and utilization the livelihood of the nation depends.
It is increasingly being recognized that coastal fisheries are based on
the special conditions prevailing in the coastal areas which provide the
necessary environment for the fishstocks. This environment is an integral
part of the natural resources of the coastal State.

Thc continental shelfis really the platform of the country and must be
considered to be a part of the country itself.islandais continuera de s'employer à mettre en æuvre la résolution de
1'Althingen date du 5 mai 1959relative à l'élargissementde la juridiction
sur les pêcheriesautour de l'Islande ..»(lesitaliques sont de nous).
Quand l'Islande affirme que son plateau continental doit être considéré
comme une partie du pays lui-même, ellepeut s'appuyer surlaconvention
relative à cette question, signéeà Genèvele 29 avril 1958.
Dans son arrêtdu 20 février 1969,la Cour a énoncé:

((la plus fondamentale de toutes les règles de droit relatives au
plateau continental et qui est consacréepar l'article2 de la Conven-
tion de Genève de 1958 ..:les droits de 1'Etat riverain concernant
la zone de plateau continental qui constitue un prolongement
naturel de son territoire sous la mer existent ipsofacto et ab initio
en vertu de la souveraineté de 1'Etat sur ce territoire et par une
extension de cette souveraineté sous la forme de l'exercice de droits
souverains aux fins de l'exploration du lit de la mer et de l'exploita-
tion de ses ressources naturelles. Il y alà un droit inhérent. Point
n'est besoin pour l'exercerde suivreun processusjuridique particulier
ni d'accomplir des actesjuridiques spéciaux.Son existence peut être
constatée, comme cela a étéfait par de nombreux Etats, mais elle
ne suppose aucun acte constitutif. Qui plus est, ce droit est indé-
pendant de son exercice ((effectif)).Pour reprendre le terme de la

Convention de Genève, il est ((exclusif))en ce sens que, si un Etat
riverain choisit de ne pas cxplorer ou de ne pas exploiter les zones
de plateau continental lui revenant, cela ne concerne que lui et nul
ne peut le faire sans son consentement exprès.))(C.I.J. Recueil 1969,
p. 22, par. 19).
Le Gouvernement islandais, dans les renseignements et les documents
envoyés à la Cour, donne des raisons et des explications bien motivées

de son droit souverain d'étendre sa compétenceen matière de pêcheries
à la totalité de la zone du plateau continental.
Depuis toujours les pêcheries côtières de l'Islande constituent le
fondement mêmede l'économiedu pays.
Les pêcheriescôtièressont indispensables àl'économieislandaise; sans
elles, le pays n'aurait pas étéhabitable.
L'Islande est situéesur une plate-forme ou plateau continental, dont
les contours sont concentriques à ceux du pays lui-même. Cesterrasses
sous-marines peu profondes présentent des conditions idéalespour les
zones de frai et d'alevinage dont la préservation et l'utilisation sont
indispensables à la vie du pays. Il est de plus en plus généralementadmis
que les pêcheriescôtières dépendent des conditions particulières existant
dans leszones littorales, lesquelles fournissent l'environnement nécessaire
aux réservesde poisson. Cet environnement fait partie intégrante des
ressources naturelles du pays riverain.

Le plateau continental est en réalitél'assise sur laquelle le pays repose
et il doit être considércomme une partie du pays lui-même. The vital interests of the Icelandic people are therefore at stake. They
must be protected.
The priority position of the coastal State has then always been recog-
nized through the system of fishery limits. In the past these limits have
to a great extent not been established with any regard to the interests
of the coastal State. They owe their origin rather to the preponderant
influence of distant water fishery nations, who wished to fish as close as
possible to the shores of other nations, frequently destroying one area
and then proceeding to another.
In a system of progressive development of international law the
question of fishery limits has to be reconsidered in terms of the protection
and utilization of coastal resources regardless of other considerations

which apply to the extent of the territorial sea. The international com-
munity has increasingly recognized that the coastal fishery resources
are to be considered as a part of the natural resources of the coastal
State. The special situation of countries who are ovenvhelmingly de-
pendent on coastal fisheries, was generally recognized at both Geneva
Conferences in 1958 and 1960. Since then this view has found frequent
expression both in the legislation of various countries and in important
political statements. The courje of events is decidedly progressing in
this direction.

Reiterating the considerations which led the Government of Iceland
to issue new regulations relating to exclusive fisheriesjurisdiction in the
continental shelf area, it stated thefollowing:

"In the aide-mémoire of 31 August 1971 it was intimated that
'in order to strengthen the measures of protection essential to
safeguard the vital interests of the Icelandic People in the seassur-
rounding its coasts, the Government of Iceland now finds it essential
to extend further the zone of exclusive fisheriesjurisdiction around
its coasts to include the areas of sea covering the continental shelf'.
It was further stated that in the opinion of the Icelandic Govern-
ment, the object and purpose of the provisions in the 1961Exchange
of Notes for recourse to judicial settlement in certain eventualities
have been fully achieved. The Government of Iceland, therefore,
considers the provisions of the Notes exchanged no longer to be
applicable and consequently terminated." (Government of Iceland7s
aide-mémoireof 24 February 1972,Annex H to Application of the
Federal Republic).
"In the period of ten years which has elapsed, the Government
of the Federal Republic enjoyed the benefit of the Icelandic Govern-

ment's policy to the effect that further extension of the limits of
exclusive fisheries jurisdiction would be placed in abeyance for a
reasonable and equitable period.Continuation of that policy by the
Icelandic Government, in the light of intervening scientific and Les intérêts vitauxdu peuple islandais sont donc en jeu. Ils doivent
êtreprotégés.
La position prioritaire de1'Etat côtier a toujours été reconnue grâce
au système des limitesde pêche.Dans le passé, ces limitesont été souvent
établiessans que l'on tienne aucun compte des intérêtde 1'Etatriverain.
Elles doivent plutôt leur originà l'influenceprépondérantedes nations
pratiquant la pêchelointaine, qui souhaitaient pêcher aussiprès que
possible des côtes des autres nations et, souvent, ravageaient une zone
avant de passer à une autre.
Dans un systèmede développementprogressif du droit international,
la question de la limite de pêche exclusidoit êtreréexaminéedu point
de vue de la protection et de l'utilisation des ressources côtières in-
dépendamment d'autres considérations qui portent sur l'étendue dela

mer territoriale. La communauté internationale reconnaît de plus en plus
que les ressources de la pêchecôtière doivent êtreconsidéréescomme un
élémentdes ressources naturelles de 1'Etat riverain. La situation parti-
culière des pays qui sont tributaires avant tout des pêcheriescôtières
a étéadmise, d'une manière générale,lors des deux conférences de
Genève de1958et 1960.Depuis lors cetteidéea étémaintes foie sxprimée,
que ce soit dans la législation de divers pays ou dans d'importantes
déclarations politiques. L'évolutionse fait résolument dans cette direc-
tion.
Rappelant les raisons qui l'avaient amené à adopter une nouvelle
réglementationsur l'exclusivitéde sa compétenceen matièrede pêcheries
dans la zone du plateau continental, le Gouvernement islandais a déclaré
ce qui suit:

((Dans l'aide-mémoiredu 31 août 1971,il était indiqué:((envue
de renforcer les mesures de protection essentielles pour la pré-
servation des intérêts vitauxdu peuple islandais dans les mers qui
entourent ses côtes, le Gouvernement islandais considère comme
essentiel d'étendresa zone de compétenceexclusivesur les pêcheries
autour des côtes de manière à inclure les espaces marins situés
au-dessus du plateau continental)). Il était ajoutéque, de l'avis
du Gouvernement islandais, l'objet et le but des dispositions de
l'échangede notes de 1961visant le recours au règlementjudiciaire

dans certains cas avaient été entièrementatteints. En conséquence,
le Gouvernement islandais considère que les dispositions des notes
échangées ne sont plus applicables et sont donc devenues caduques.))
(Aide-mémoire du Gouvernement islandais en date du 24 février
1972,annexe H à la requête dela République fédérale.)
((Au cours des dix annéesécoulées, leGouvernement de la Ré-
publique fédérale abénéficié de la politique du Gouvernement
islandais tendant suspendre pour une durée raisonnableet équitable
tout nouvel élargissement des limitesde la juridiction exclusive
sur les zones de pêche.Etant donné l'évolution scientifique et
économique qui s'est produite (et notamment la menace toujours economic evolution (including the ever greater threat of increased
diversion of highly developed fishing effort to the Icelandic area)
has become excessivelyonerous and inacceptable, and is harmful
to the maintenance of the resources of the sea on which the livelihood
of the Icelandic people depends." (Italics added.) (Government of
Iceland's aide-mémoire of 31August 1971,Annex D to Application
of the Federal Republic.)

Not only Iceland but many coastal States in al1regions of the world
know by experience the harmful effects of the ever greater threat of
highly developed fishing effort near their shores, by foreign fishing
fleets equipped-like the modern trawlers of the Federal Republic of
Germany-with sophisticated technical gear.Technical progress in this
fieldimplies a change of circumstances which may fundamentally change
the former situation.

In the Exchange of Notes of 19 July 1961, the agreement already
envisaged the prospect that the Republic of Iceland would extend the
fisheriesjurisdiction beyond the 12-milelimit.
If it is contrary to international law to envisage such extension, the
United Kingdom and the Federal Republic of Germany would not
have accepted the inclusion of such state~nentin the forma1 Exchange
of Notes.
There is insuch Exchange of Notes an implicit recognition of the right
of Iceland to extend its fisheriesjurisdiction.
The Federal Republic of Germany, in view of its recognition of the
exceptional importance of coastal fisheries to the Icelandic economy,
acceptedthe proposals put fonvard bythe Government of Iceland, among
them, the proposa1 contained in paragraph 5, which states that "the
Government of Iceland shall continue to work for the inzplementation
of the Althing Resolution of 5 May 1959,regarding the extension of the
fishery jurisdiction of Iceland" (italics added), which declares that a

recognition of its rights to the whole continental shelf should be sought,
as provided in the Law concerning the Scientific Conservation of the
Continental Shelf Fisheries of 1948.

The Federal Republic did not object to the existence of such rights;
it accepted the proposa1which contained ascounterpart or consideration
the obligation of Iceland to give sixmonths' notice of any such extension.

If a dispute did arise in respect ofsuch extension, it would not affect
the previous implicit recognition of Iceland's right to extend its fisheries
jurisdiction.
The most essential asset of coastal States is to be found in the living
resources of the sea covering their continental shelf and in the fishing
zone contiguous to their territorialsea.
The progressive development of international law entails the recogni- plus grande d'une orientation des activitésde pêche intensives vers
la zone islandaise) la poursuite de cette politique du Gouvernement

islandais a des conséquences excessivementlourdes et inacceptables
etelleporte préjudiceà la conservation des ressources de la mer dont
dépend la subsistance de la population islandaise.)) (Les italiques
sont de nous.) (Aide-mémoiredu Gouvernement islandais en date
du 31août 1971,annexe D à la requête dela Républiquefédérale.)
Non seulement l'Islande mais encore bien d'autres pays riverains dans

toutes les régionsdu monde connaissent par expbience les effets néfastes
de la menace toujours plus grande d'une intensification de la pêcheprès
de leur littoral que font peser des flottilles étrangères deux de pêche
munis, comme les chalutiers modernes de la Républiquefédérale d'Alle-
magne, d'un équipement techniquecomplexe. Les progrès techniques
réalisésdans cedomaine setraduisent par un changementdecirconstances
qui peut modifier radicalement la situation antérieure.
L'accord que constitue l'échangede notes du 19juillet 1961envisageait
déjàque la République d'Islande étendrait la limite de sa compétence
sur les pêcheriesau-delà de 12 milles.
S'il avait étécontraire au droit international d'envisager une telle ex-
tension, le Royaume-Uni et la République fédéraled'Allemagne n'au-
raientpas acceptél'insertiond'une déclaration dece genre dans l'échange
de notes officiel.
Cet échangede notes contient la reconnaissance implicite du droit de

l'Islande d'étendre sacompétenceen matière de pêcheries.
Ayant reconnu l'importance exceptionnelle des pêcheries côtières pour
l'économie islandaise,la République fédérale d'Allemagnea acceptéles
propositions formulées par le Gouvernement islandais et notamment
cellequi figureau paragraphe 5 où il est dit:(LeGouvernement islandais
continuera de s'employer à mettre en Œuvrela résolutionde I7Althingen
date du 5 mai 1959 relative à l'élargissementde la juridiction sur les
pêcheriesautour de l'Islande» (les italiques sont de nous); d'après cette
résolution, l'Islande doit s'efforcer d'obtenir la reconnaissance de ses
droits sur toute la zone du plateau continental, conformément à la loi de
1948 concernant la conservation scientifique des pêcheriesdu plateau
continental.
La Républiquefédérale n'apas objectéque ces droits n'existaient pas;
elle a acceptéla proposition dont la contrepartie était l'obligation pour

l'Islande de notifier six moisl'avance toute mesure tendant à étendre sa
juridiction sur les pêcheries.
A supposer qu'un différend survienneen la matière, cela ne concer-
nerait pas la reconnaissance déjà admise implicitement du droit de
l'Islandeà étendre sacompétenceen matièrede pêcheries.
Pour les Etats riverains, les ressources biologiques de la mer au-dessus
de leur plateau continental et dans la zone de pêchecontiguë àleur mer
territoriale sont une richesse essentielle.
Le développement progressifdu droit international suppose la recon-tion of the concept of the patrimonial sea, which extends from the
territorial waters to a distance fixed by the coastal State concerned,
in exercise of its sovereign rights, for the purpose of protecting the
resources on which its economic development and the livelihood of its
people depends.
This concept is not a new one. It has found expression in declarations
by many governments proclaiming as their international maritime policy,
their sovereignty and exclusive fisheriesjurisdiction over the sea con-

tiguous to their shores.

There are nine States which have adopted a distance of 200 nautical
miles from their shores as their exclusive fisheries jurisdiction. Some
of them have enacted and enforced regulations to that effect since20years
ago, when the "Santiago ~eclaration" was signed by the Governments
of Chile, Ecuador and Peru in August 1952.
The text of the Notes dated 19 July 1961 is susceptible of different
interpretations as regards its duration, its purpose, and the obligations
it contains.
The compromissory clause cannot be said to be of a permanent nature,
or one binding Iceland for ever to freeze its fisheriesjurisdiction to the
12-milelimit.
If the object and purpose of the provision to recourse to judicial
settlement has been fully achieved and validly terminated, there would
be no basis in that provision for the jurisdiction of the Court-and that
is in my opinion the case.

There are many valid,a~dments and reasons in favour of the Icelandic
thesis to the effect that the Exchange of Notes has lapsed.

Since the Exchange of Notes was negotiated, a fundamental change of
circumstances has taken place, and new customary international rules
and norms have emerged and developed, permitting coastal States to
claim fisheries jurisdiction over the waters covering their continental
shelves.
At the present time (and since the two Conferences on the Law of
the Sea took place) it has been a universal understanding that any coastal
State has the right to extend to a distance of 12 miles its territorial
waters. Many States have adopted that limit, including the Federal
Republic of Germany. Iceland could not be legallybound to pay the price
or quid pro quo for the recognition of its own right. But it is more im-
portant that with respect to exclusive or preferential rights regarding
fisheries in waters beyond the territorial sea, many States in America

have claimed jurisdiction to a distance of 200 nautical miles from their
shores. In other regions several States have made similar claims and
new norms have been adopted in that respect. Senegal, by a law dated
19 April 1972, claimed jurisdiction to a distance of 110 nautical miles
beyond the limit of its territorial sea. naissance de la notion de mer patrimoniale qui s'étend depuisles eaux
territoriales jusqu'à une certaine distance, fixéepar 1'Etat riverain inté-
ressédans l'exercice de ses droits souverains, en vue de protéger les
ressources dont dépendent son développementéconomiqueet la subsis-
tance de sa population.
Cette notion n'est pas nouvelle. Elle a trouvéexpression dans nombre
de déclarations par lesquelles les gouvernements ont proclamé, comme
des élémentsde leur politique maritime internationale, leur souveraineté
et leur compétenceexclusiveen matière depêcheriessur les eaux adjacen-

tes àleurscôtes.
Neuf Etats ont fixéà 200 milles marins à partir de leur littoral la zone
de leur compétenceexclusive sur les pêcheries.Il y a vingt ans que cer-
tains appliquent une réglementation en ce sens, depuis que la ((déclara-
tion de Santiago)) a étésignéepar les Gouvernements du Chili, de
1'Equateur et du Pérou en août 1952.
Le texte des notes du 19juillet 1961 est susceptible d'interprétations
différentes ence qui touche sa durée d'application, sonobjet et les obli-
gations qu'il impose.
On ne saurait prétendre quelaclausecompromissoirea un caractèreper-
manent ou oblige l'Islande à fixer de façon définitivela limite de sa
juridiction sur les pêcheries 12milles.
Si l'objetet le but de la disposition prévoyantle recours au règlement

judiciaire ont été pleinementatteints et ont valablement pris fin, cette
disposition n'offre plus aucune base sur laquelle fonder la compétence
de la Cour - et à mon avis c'est lecas.
Il y a beaucoup d'arguments et de raisons valables qui militent en
faveur de la thèseislandaise selon laquelle l'échangede notes est devenu
caduc.
Depuis que cet échangede notes a éténégocié, unchangement fonda-
mental de circonstances est intervenu et de nouvelles règleset normes de
droit international coutumier sont apparues et se sont développées,qui
permettent aux Etats riverains d'étendreleur juridiction en matière de
pêcheriessur les eaux qui recouvrent leur plateau continental.
A l'heure actuelle (et ce depuis les deux conférencessur le droit de la
mer), il est universellenient entendu que tout Etat riverain a le droit de

porter la limite de ses eaux territorialesà une distance de 12 milles.
Beaucoup d'Etats ont adoptécette limite, y compris la République fédé-
rale d'Allemagne. L'Islande ne saurait être juridiquement tenue de
payer le prix ou la contrepartie de la reconnaissance de son propre droit.
Qui plus est, en matière de droits de pêche exclusifsou préférentielsdans
les eaux situéesau-delà de la mer territoriale, beaucoupd7Etatsd'Améri-
que ont revendiqué une extension de leur juridiction jusqu'à 200 milles
marins à partir de leurs côtes. Dans d'autres régions, plusieursEtats ont
émisdes revendications analogues et de nouvelles normes ont étéadop-
tées à cet égard. Le Sénégal,par une loi en date du 19 avril 1972, a
déclaré étendre sa juridiction jusqu'à une distance de 110milles marins
au-delà de la limitede sa mer territoriale. Other instances regarding the emerging of new norms may be found in
the Conclusions and Recommendations of the African States' Regional
Seminar on the Law of the Sea, among which is the following:

"The Participants: Recommend to African States to extend their

sovereignty over al1the resources of the high sea adjacent to their
Territorial Sea within an economic zone to be established and which
will include at least the continental shelf.
Cal1 upon al1 African States to uphold the principle of this
extension at the next International Conference on the Law of
the Sea."
In paragraph 5 of the Exchange of Notes it was stated that Iceland
will go on working for the implementation of the Althing Resolution.

The admission of such a statement meant an implicit recognition that
if and when Iceland were to do so, no violation of international law
would take place.
The interest of the Government of Iceland in seeking the recogni-
tion of its rights to fisheriesimits extending to the whole continental
shelf is a continuous and permanent interest as affecting its own
sovereignty and is an interest which will be fortified each day by the will
and resolve of the people of Iceland and will endure for ever as the
country itself. The aim, the intention and thepurpose of Iceland's claim
to exclusivefisheryrights over itsentire continental shelf area was asser-
ted since 1959 and in the 1961 Exchange of Notes such a claim was
recognizedto exist.In my view Iceland's right to seek the implementation
of the Althing Resolution cannot be denied.

1 cannot subscribe therefore to the assertion in the Judgment that the

right of the Federal Republic of Germany to challenge such an extension
would last "so long as Iceland might seek to implement the Althing
Resolution".
The consequence appears to be (theoretically) that the right of the
Federal Republic to invoke the Court's jurisdiction in this matter would
last for ever, regardless of fundamental changes of circumstances, the
emerging of new customary norms, and other factors which challenge the
actual validity of the so-called "compromissory clause".

On 29 September 1972, in the general debate cf the United Nations
General Assembly, the Foreign Minister of Iceland said, with reference
to the proceedings instituted by the United Kingdom:

"My Government's view is that the absence of jurisdiction is
manifest since its consent no longer existed when the proceedings
were sought to be instituted" (italics added) (Art. 34, Vienna
Convention). D'autres exemples de normes nouvelles apparaissent dans les conclu-
sions et recommandations du Séminaire régional desEtats africains sur
ledroit dela mer, qui comprennent lesdispositions suivantes:
((LesParticipants

Recommandent aux Etats africains d'étendre leur souveraineté
sur toutesles ressources de la haute mer adjacentà leur mer terri-
toriale dans le cadre d'une zone économique à établiret qui com-
prendra au moins le plateau continental;
Invitent tous les Etats africains défendrele principe de cette
extension de souverainetéà la prochaine Conférenceinternationale

sur le droit de la mer.))
Le paragraphe 5 de l'échangede notes déclarait que l'Islande conti-
nuerait de s'employer àmettre en Œuvrela résolutionde 1'Althing.L'ac-
ceptation de cette déclarationrevenaitàreconnaître implicitement qu'en
agissant éventuellement ainsil'Islande ne se rendrait coupable d'aucune
violation dudroit international.

L'intérêtqu'a le Gouvernement islandais à chercher à faire recon-
naître ses droits sur une zone de pêcherecouvrant l'ensembledu plateau
continental est nécessairementun intérêtcontinu et permanent car il
touche sa propre souveraineté;c'est un intérêtqui sera fortifiéchaque
jour par la volonté et la déterminationdu peuple d'Islande et qui durera
aussi longtemps que le pays lui-même.La prétention de l'Islande à des
droits de ~êcheexclusifs sur toute la zone du ~lateau continental est
affirmée q;ant à son but, son intention et son ob;:etdepuis 1959et cette
prétention a été reconnue dans l'échangede notes de 1961.A mon avis,
on ne saurait nier le droit de'Islande de chercherà mettre en Œuvrela
résolutionde I'Althing.
Je ne peux donc souscrire à l'affirmation qui figure dans l'arrêtselon

laquelle le droit de la Républiquefédérale d'Allemagnede contester une
telle extension devait durer ((aussi longtemps que l'Islande pourrait
chercher à mettre en Œuvrela résolution deI1Althing».
La conséquencede cette affirmation semblerait être(en théorie)que le
droit de la Républiquefédéraled'invoquer la compétencede laCour en la
matière devait durer àperpétuité, sansqu'il y aità prendre en considé-
ration un changement fondamental des circonstances, l'apparition de
nouvellesnormes de droit coutumier ou d'autres facteurs portant atteinte
en faitàla validitéde la prétendue((clausecompromissoire».
Le 29 septembre 1972le ministre des Affaires étrangères d'Islande a
déclarédevant l'Assembléegénéraledes Nations Unies lors du débat
général,à propos de la procédureengagéepar le Royaume-Uni:

«Mon gouvernement estime que l'absence de compétence est
évidentepuisque son consentementn'existaitplus lorsqu'on acherché
à obtenir une action de la Cour.)) (Cf. art. 34 de la convention de
Vienne sur le droit des traités.)(Les italiques sont de nous.) It may be concluded, therefore, that the circumstances existingin 1961
when the Exchange of Notes took place, have changed in many funda-
mental respects, which Iceland has validly invoked to sustain that the
agreement is no longer in force.
In the last decades great changes have taken place in the political,
social, economic and technical fields. The need to strike a fair balance
between strong and weak nations, between industrial countries and those
in the course of development, is each d,aymore urgent.

The struggle for freedom and self-determination of dependent peoples
has been successful. Many new States are now giving fresh views, force

and CO-operationto the community of nations.

The struggle to assert their sovereign rights over the natural resources
belonging to them, is a common denominator among the coastal States
the world over.
Old practices and unfair so-called traditional situations have already
ended or will soon disappear. The need and the will to liquidate the
unjust privileges obtained through the assertion of superior strength,
is each day more pressing. These facts have created new circumstances
producing new changes.
Emerging customary laws on the problems of the sea have found
expression in many political statements, in declarations of governments,
in laws and regulations implemented by coastal States in many parts of
the world, for the purpose of asserting their sovereign rights and juris-
diction not only over their territorial sea but over the waters covering
their continental shelves.

In international regional conferences, important declarations of
principles were proclaimed, which advance the progressive development
of the law of the sea.
The concepts and ideas which found new expression in the adoption
of such principles were prevalent among jurists and statesmen in America
more than two decades ago. Those principles apply to the situation of
other coastal States in other continents as well, and Iceland could not
be excluded.
The Specialized Conference of the Caribbean Countries formulated a
Declaration of Principles; some of them are quoted below because of
their relevance to the points in issue:

"Recallin Tghat the International American Conferences held
in Bogota in 1948, and in Caracas in 1954, recognized that the
peoples of the Americas depend on the natural resources as a means
of subsistence, and proclaimed the right to protect, conserve and
develop those resources, as well as the right to ensure their use and
utilization.
That the 'Principles of Mexico on the Legal Régime ofthe Sea' On peut donc conclure que beaucoup de changements fondamentaux
sont intervenus dans les circonstances qui existaient en 1961 quand
l'échangede notes a eu lieu, et que c'està bon droit que l'Islande a in-
voquécet argument pour soutenir que l'accord n'estplus en vigueur.
Au cours des dernières décennies,de profondes mutations se sont
produites dans les domaines politique, social, économique et technique.
La nécessitéd'établirun juste équilibreentre les nations puissantes et
faibles,entrelespays industrielset ceuxquisont en voiededéveloppement,
sefaitchaque jour plus urgente.
La lutte pour la libertéet l'autodétermination des peuples dépendants
a été couronnée ds euccès.De nombreux Etats récemment créé aspportent
maintenant desfaçons devoir, desforceset despossibilitésde coopération
nouvelles à la communautédes nations.

Les efforts déployéspour revendiquer leurs droits souverains sur les
ressourcesnaturellesquileur appartiennent sont le commun dénominateur
des Etats côtiers de par le monde.
Les vieillespratiques et les situations inéquitablesdites traditionnelles
sont déjàrévolueset vont bientôt disparaître. Le besoin et la volonté
d'éliminerles injustes privilègesobtenus par la supérioritéaffirméede la
force s'imposent chaque jour davantage. Ces faits ont crééde nouvelles
circonstances qui entraînentà leur tour d'autres changements.
Les règlescoutumièresqui se fontjour sur les problèmesde la mer ont
trouvé leur expression dans de nombreuses proclamations politiques,
dans des déclarations de gouvernements,dans les lois et règlements mis
en Œuvrepar les Etats côtiers dans de nombreuses régionsdu monde en
vue de revendiquer leurs droits souverains et leur juridiction non seule-

ment sur leur mer territoriale mais sur les eaux recouvrant leur plateau
continental.
D'importantes déclarations de principes ont étéfaites au sein de
conférencesinternationales régionaleset le développementprogressif du
droit de la mer s'entrouve accéléré.
Les concepts et les idéesauxquels l'adoption de ces principes a donné
une nouvelle forme prévalaient déjà parmiles juristes et les hommes
d7Etat d'Amériqueil y a plus de vingt ans. Ces principes s'appliquent
aussi à la situation des autres Etats côtiers dans les autres continents
et l'Islande nesaurait en êtreexclue.
La conférence spéciald eespays de la région desCaraïbesa formulé une
déclaration de principes; je cite certains d'entre eux parce qu'ils ont
rapport aux points en question:

((Rappelant: Que les Conférences internationales américaines
réuniesà Bogota en 1948et à Caracas en 1954ont reconnu que les
populations des Amériques dépendent de leursressources naturelles
comme moyen de subsistance et ont proclaméle droit de protéger,
conserver et développerces richesses, comme d'en assurer l'utili-
sation et lajouissance,

Qu'en 1956 ont étéadoptés les Principes de Mexico sur lewhich were adopted in 1956 and which were recognized 'as the
expression of the juridical conscience of the Continent and as
applicable, by the American States', established the basis for the
evolution of the Law of the Sea which culminated, that year, with
the annunciation by the SpecializedConference in the Capital of the
Dominican Republic, of concepts which deserved endorsement by
the United Nations Conference on the Law of the Sea, Geneva,
1958.
Considering: . . . That the renewable and non-renewable
resources of the sea contribute to improve the standard of living
of the developing countries and to stimulate and accelerate their
progress;
That such resources are not inexhaustible since even the living
species may be depleted or extinguished as a consequence of irra-

tional exploitation or pollution; ...
Formulate the following Declaration of Principles:
Territorial Sea ... nie breadth of the territorial sea and the
manner of its delimitation should be the subject of an international
agreement, preferably of a worldwide scope. In the meantime, each
State has the right to establish the breadth of its territorial sea
up to a limit of 12nautical miles to be measured from the applicable
baseline ...
Patrimonial Sea. The coastal State has sovereign rights over
the renewable and non-renewable natural resources, which are found
in the waters, in the seabed and in the subsoil of an area adjacent

to the territorial seaalled the patrimonial sea.

The coastal State has the duty to promote and the right to
regulate the conduct of scientific research within the patrimonial
sea, as well as the right to adopt the necessary measures to prevent
marine pollution and to ensure its sovereignty overthe resources of
the area.
The breadth of this zone should be the subject of an international
agreement, preferably of a worldwide scope. The whole of the area
of both the territorial sea and the patrimonial sea, taking into
account geographic circumstances, should not exceed a maximum
of 200 nai~lic~i! iles. ..
Continental Shelf. The coastal State exercises over the conti-
nental shelf sovereign rights for the purpose of exploring it and
exploiting its natural resources.
The continental shelf includes the sea-bed and subsoil of the
submarine areas adjacent to the Coast, but outside the area of the
territorial sea, to a depth of 200 metres or, beyond that limit, to
where the depth of the supejacent waters admits the exploitation
of the natural resources of the said areas.
In addition, the States participating in this Conference considerrégimejuridique de la mer, qui ont été admiscomme((l'expressionde
la conscience juridique du Continent et comme applicables par les
Etats américains))et qui ont établiles bases de l'évolutiondu droit
dela mer qui a abouti, la mêmeannée,lors dela Conférence spéciale
de la capitale dominicaine, à l'énonciation de conceptsqui ont été
reconnus par la Conférence desNations Unies sur le droit de la mer,
à Genève, en1958.

Considérant: ..Quelesressources renouvelables et non renouvela-
bles de la mer contribuent à élever le niveaude vie des pays en voie
de développement, ainsi qu'àstimuler et accélérer leurs progrès;

Que lesdites ressources ne sont pas inépuisables,car les espèces
vivantes peuvent se raréfieret même s'éteindre commseuite à une
exploitation irrationnelle ouà la pollution;...

Formule la déclaration deprincipes ci-après :
Mer territoriale....La largeur de cette zone et la manièredont elle
est délimitéedoivent faire l'objet d'un accord international, de pré-
férencede portéeuniverselle. Tout Etat a, entre-temps, le droit de
fixer la largeur de sa mer territoriale jusqu'à une limitede 12 milles
marins àpartir de la ligne de base applicabl...

Mer patrimoniale. L'Etat riverain exerce des droits de souve-
raineté sur les ressources naturelles, renouvelables et non renouve-
lables, qui se trouvent dans les eaux, sur le lit et dans le sous-sol,
d'une zone adjacente à la mer territoriale, dénomméemer patri-
moniale.
L'Etat riveraina ledevoir de promouvoir et le droit deréglementer
les recherches scientifiquesdans la mer patrimoniale, comme celui
d'adopter les mesures nécessairespour éviterla pollution du milieu
marin et pour assurersa souverainetésur les ressources.

La largeur de la mer patrimoniale doit faire l'objet d'un accord
international, de préférencede portée universelle. La somme de
cette zone et de la mer territoriale, compte tenu des circonstances
géographiques, ne doit pas être supérieureau total à 200 milles

marins ...
Plateau continental.L'Etat riverain exercedes droits souverains sur
leplateau continentalaux finsdel'exploration decelui-cietdel'exploi-
tation des ressources naturelles qui s'ytrouvent.
Le plateau continental comprend le lit de la mer et le sous-sol des
régions sous-marinesadjacentes aux côtes, mais situéesau-delà de
la mer territoriale, jusqu'à une profondeur de 200 mètresou davan-
tage jusqu'au point où la profondeur des eaux surjacentes permet
l'exploitation des ressourcesnaturellesdesdites régions.
En outre, les Etats participant à la présente Conférence émettent that the Latin American Delegations in the Committee on the Sea-
bed and Ocean Floor of the United Nations should promote a study
concerning the advisability and timing for the establishment of
precise outer limits of the continental shelf taking into account the
outer limits of the continental rise.
In that part of the continental shelf covered by the patrimonial
sea the legal régime providedfor this area shall apply. With respect
to the part beyond the patrimonial sea, the régime establishedfor the
continental shelf by International Law'shall apply." (Italics added.)

The obligation to negotiate is a principle of general international law.
The Federal Republic of Germany and Iceland agreed to negotiate with
the aim of arriving atan agreement by peaceful means. There were many
reasonable offers by Iceland during the negotiations. If the Federal
Republic wanted more concessions and unilaterally stopped the negotia-
ting process, by instituting proceedings before the Court, that does not
mean that agreement by negotiation was impossible and that al1efforts
in that direction should be abandoned.

The Federal Republic of Germany sent to the Court information
regarding the proposals made by Iceland during their negotiations for
a provisional agreement.
No objection was then made by the Federal Republic to the right of
Iceland to exercisejurisdiction over fishing areas inside the 50-milelimit.
The Federal Republic does not dispute the right of Iceland to impose
restrictions and to establish conditions according to which vessels
registered in the Federal Republic could be permitted to fish in the
waters claimed by Iceland in implementation of the Althing's Resolution.

In examining the first specific Icelandic proposa1 made in the course
of negotiations, the Federal Republic did not argue that it was contrary
to international law to claimjurisdiction over waters beyond the 12-mile
limit. The Federal Republic objected to the nature of the proposed
restrictions and their effectson the German vessels'catchof fish. Iceland
proposed that the arrangement should run until the end of 1973.In this

respect the Federal Republic informed the Court that the restrictions
proposed by Iceland "would in their combination result in a drastic
reduction of the amount of annual catches of fishing vessels of the
Fedcral Republic of Germany to approximately only 20 per cent. of the
actual annual catches".

Instead of continuing negotiaticn, the Federal Republic by its Applica-
tion to the Court and by requesting measures of protection expected
Iceland to give way to its demands in circumstances as difficult as those
which prevailed when the Exchange of Notes of 19 July 1961 put an COMPÉTENCEPÊCHERIES (OP. DISS. PADILL.4NERVO) 90

l'avisquelesdélégationslatino-américaineasu Comité desutilisations
pacifiques du fond des mers et des océansdes Nations Unies de-
vraient préconiser uneétuderelativeà l'utilitéeà l'opportunité de
fixerpour le plateau des limites extérieures précises,compte tenu de
la limite extérieurede l'émersioncontinentale.
Dans la partie du plateau continental couverte par la mer patri-
moniale, le régimejuridique prévupour ladite mer est applicable.
En ce qui concerne la partie non couverte par la mer patrimoniale,
le régimeétablipar le droit international pour le plateau continental
est applicable.)) (Lesitaliques sont de nous.)

L'obligation de négocier estun principe de droit international général.
La Républiquefédérale d'Allemagne et l'Islande ont acceptéde négocier
en vue deparvenir à un accord par des moyens pacifiques. Beaucoup d'of-
fres raisonnables ont étéfaites par l'Islande au cours des négociations.
Que la République fédéraleait voulu obtenir plus de concessions et
qu'elle ait interrompu unilatéralement le processus de négociation en
introduisant une instance devant la Cour, cela ne signifie pas qu'un

accord par voie de négociation était impossible et que tous les efforts
dans ce sens devaient être abandonnés.
La République fédérale d'Allemagnea communiqué à la Cour des
renseignements sur les propositions faites par l'Islande pendant les
négociations relatives un accord provisoire.
La Républiquefédérale n'a élevéà l'époqueaucune objection quant au
droit de l'Islande d'exercersa juridiction sur les zones de pêche situées
en deçà de la limite des50 milles. Elle ne conteste pas le droit qu'avait
l'Islande d'imposer desrestrictions et de fixer les conditions dans les-
quelles les navires immatriculés dans la République fédéralepouvaient
être autorisésàpêcherdans les eaux revendiquéespar l'Islande enappli-
cation de la résolution de'hlthing.

Lorsqu'elle a examiné la première proposition concrète faite par
l'Islande au cours des négociations,la Républiquefédérale n'pas allégué
que la prétention del'Islande d'étendre sazone dejuridiction au-delà de
la limite des2millesétaitcontraire audroit international. LaRépublique
fédéralea protesté contre la nature des restrictions proposées et l'effet
qu'elles pouvaient avoir sur les prises de poisson effectuéespar ses
navires. L'Islande a proposé que l'arrangement s'applique jusqu'à la
fin de1973.A ce propos, la République fédéralea dit à la Cour que les
restrictions proposéespar l'Islande ((entraîneraient, par leurs effetscom-
binés, uneréduction radicale du volume des prises annuelles des navires
de pêchede la République fédérale d'Allemagne à environ 20 pour
cent seulement du chiffre annuel actuel)).

Au lieu de poursuivre les négociations, la République fédérale,en
soumettant sa requête à la Cour et en demandant des mesures conser-
vatoires, escomptait que l'Islande se soumettraàtses exigencesdans des
circonstances aussi difficiles que celles qui existaient lorsque l'échange end to the opposition of the Federal Republic to the 12-mile fishery
limit.
The very fact of negotiating an arrangement which will allow the
United Kingdom andthe Federal Republic of Germany to fish in certain
areas within the 50-mile zone of Iceland's fishery jurisdiction, is an
explicit recognition of the right of Iceland to extend its fishery limit and
is an implicit admission that suchextension is not contrary to international
law,because the right to do it either exists or does not exist, but cannot be
the subject of bilateral negotiation. Ifuch extension was encroachment
on the freedom of the high seas, the consent of the Federal Republic
of Germany cannot make legal an illegalact, nor can its consentdetermine
what extension of the so-called "high seas" Iceland may take-12
nautical miles in 1961 and 50 nautical miles now, provided that the
Federal Republic gives its consent and a bilateral agreement is concluded

to that effect.

The assertion that the 1961 Exchange of Notes took place under
extremely difficu1.tcircumstances is not denied (para. 5 of the Application
of the Federal Republic of Germany). The Court should not overlook
that fact, and does not need to request documentary evidence as to the
kind, shape and manner of force which was used (Art. 52, Vienna
Convention on the Law of Treaties).

A big power can use force and pressure against a small nation in
many ways, even by the very fact of diplomatically insisting in having
its view recognized and accepted. It is well known by professors, jurists
and diplomats acquainted with international relations and foreign poli-
cies, that certain "Notes" delivered by the government of a strong power
to the government of a small nation, may have the same purpose and
the same effect as the use or threat of force.

There are moral and political pressures which cannot be proved by
the so-called documentary evidence, but which are in fact indisputably

real and which have, in history, given rise to treaties and conventions
claimed to be freely concluded and subjected to the principle of pacta
sunt servanda.

(Signed) Luis PADILLA NERVO.de notes du 19 juillet 1961 a mis fin à l'opposition de la République
fédérale àla limite de pêchede 12milles.
Le fait mêmede négocierun arrangement qui permette au Royaume-
Uni et à la Républiquefédérale d'Allemagnede pêcherdans certaines
parties de la zone de 50 milles relevant de la juridiction de l'Islande en
matière de pêcheriesconstitue une reconnaissance explicite du droit de
l'Islande d'élargirles limites de sa zone de pêcheet une reconnaissance
implicite que cet élargissementn'estpas contraireau droit international;
en effet, le droit d'agir ainsi existe ou n'existe pas, mais ne saurait faire
l'objet de négociations bilatérales.Si cet élargissementconstitue une
violation de la libertéde la haute mer, le consentement de la République
fédérale nepeut rendre légalun acte illégal;sonconsentementne peut non
plus déterminer quelle étenduede la haute mer l'Islande peut revendi-

quer - 12 milles marins en 1961 et 50 milles marins à présent, pour
autant que la République fédéraledonne son consentement et qu'un
accord bilatéral soit concluà cet effet.
L'assertion selon laquelle l'échangede notes de 1961 est intervenu
dans des circonstances extrêmementdifficilesn'est pas contestée(para-
graphe 5 de la requêtede la Républiquefédérale d'Allemagne)L . a Cour
ne doit pas négligerce fait et n'a pas besoin de demander des preuves
écritesétablissantla nature de la force qui a été utilisée nsious quelle
forme et de quelle manière elle l'a été (article52 de la convention de
Vienne sur le droit des traités).
Une grande puissance dispose de bien des moyens pour utiliser la force
et exercer une pression sur une petite nation, ne serait-ce qu'en insistant
par voie diplomatique pour faire admettre et accepter ses vues. Les pro-
fesseurs,juristes et diplomates qui sont au fait des relations internationa-
les et de la politique étrangèresavent bien que certaines(notes))remises
par le gouvernement d'une grande puissance au gouvernement d'une

petite nation peuvent avoir le mêmeobjet et le mêmeeffet que l'utili-
sation ou la menace de la force.
Il y a des pressions morales et politiques qui ne peuvent êtreétablies
au moyen de preuves dites documentaires mais dont l'existence est en
fait incontestable et qui ont, au cours de l'histoire, aboutis traitéset
conventions dont on prétendqu'ils ont été conclus librement et sont sou-
mis au principepacta sunt servanda.

(Signé) Luis PADILLA NERVO.

Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. Padilla Nervo, juge (traduction)

Links