Opinion dissidente de M. Parra-Aranguren (traduction)

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098-19991213-JUD-01-08-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. PARRA-ARANGUREN

/ Truduction]

L'accord anglo-allemand de 1890 - Interprétationsdivergentes du traitéde
1890chez les Parties- La conduitesuivieultérieuremene tn tant que règled'inter-
prétationdes traités - La pratique suivie ultérieuremen ptar les Parties dans
I'upplicutionde l'accordde 1890 - Le mandat exercésur le Sud-Ouest africain
(Namibie) - Les é1émentd.repreirvepertitzentsprésentésà la Cour - Le rapport
du capitaine H. V. Eason (1912) - Le rapport conjoint de1948 (Trollope-Red-
man,)et l'échange de correspondanceentre 1948 et 1951 - Le rapport deM. R. R.
Renriv (1965i - Les témoinsappeléspar laNamibie - Les moyensprésentép sar
le Botswana -- Les cartes - Les photographies aériennes e lts imagespar satel-
lite-- L'utilisationpaisible etnotoire de l'îlede KasikililSedudupar les membres
de la tribudes Masubiaoriginaires delapartie orientaledu Caprivi - Conclusion.

1. En 1884, l'Allemagne a proclamé l'établissementd'un protectorat

sur la côte, au sud de l'enclave de Walvis Bay de la colonie du Cap et,
quelques années plus tard, avant 1890, a étendu ses prétentions territo-
riales sur le sud-ouest de l'Afrique, sans toutefois établir systématique-
ment d'administration effective sur le terrain. Le Royaume-Uni a décidé
d'accepter ces prétentions territoriales de l'Allemagne sur le sud-ouest de

l'Afrique, alors que, pourtant, ce territoire relevait pour elle de la sphère
d'influence naturelle de la Grande-Bretagne.
2. La seule zone en litige étaitle Ngamiland, au nord du Bechuana-
land britannique, territoire qui n'avait été affecté à aucune des deux puis-
sances, lequel s'étendaitdu 20"au 24"degré de longitude. Les discussions
ont été entaméee sn 1886mais ce n'est qu'en 1890, après la démissiondu

chancelier allemand Otto von Bismarck, que le nouveau chancelier, le
généralGeorg Leo Von Caprivi et son ministre des affaires étrangères,le
baron Marschall, ont accéléréles discussions diplomatiques avec la
Grande-Bretagne au sujet de l'Afrique.
3. Le traité anglo-allemand relatif à l'Afrique et à I'Heligoland a été

signé à Berlin, en langues anglaise et allemande, le 1" juin 1890,par sir
Edward Baldwin Malet, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire
de Sa Majestébritannique; sir Henry Percy Anderson, chef du départe-
ment africain du Foreign Office de Sa Majesté; le chancelier de l'empire
allemand, le généralLeo Von Caprivi et le conseiller privédu ministère
allemand des affaires étrangères, le Dr. Friedrich Richard Krauel. La

signature du traitéa coïncidé avec ladéclaration en ordre du Conseil du
30 juin 1890 par laquelle la Grande-Bretagne étendait sa juridiction au
Botswana septentrional. LE DE KASIKILI/SEDU (DP. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1209

4. Mis à part la question de l'îled'Heligoland, les Britanniques s'inté-
ressaient àcette régiond'Afrique pour établirleur contrôle sur la région
situéeentre le lac Ngami, à quelque 350 kilomètres au sud et a l'ouest de
l'îlede Kasikili, et les chutes Victoria, afin de pouvoir protégerles prin-
cipales voies commerciales allant d'Afrique du Sud au centre du conti-
nent contre tout empiètement de la part des Allemands et des Portugais;
tandis que les Allemands, de leur côté, voulaient obtenir la reconnais-

sance d'une sphère d'influence allemande s'étendant vers l'est, qui leur
donnerait accèsau Zambèze. Toutefois, comme lord Salisbury l'a dit àsir
Edwin B. Malet, ambassadeur de Grande-Bretagne à Berlin, dans sa
lettre du 14juin 1890,
«Les caractéristiques de ce pays sont trèsmal connues et la situa-

tion exacte du lac Ngami est très incertaine.(Mémoiredu Botswana,
annexes, vol. II, annexe 7, p. 37.)

5. Dans le discours qu'il prononce à la chambre des lords le 10juillet
1890,lord Salisbury parle des aspirations de l'Allemagne enAfrique, pré-

cisant que pour l'Allemagne, la conclusion de l'accord estsubordonnée a
une condition :
«tout au nord de ce territoire du Damaraland, les Allemands
devraient avoir le long de la frontière portugaise une bande de ter-
ritoire qui leur donne un accès directau Zambèze ..C'est la dernière

route au monde que le commerce peut emprunter. C'est là que tous
les affluents du Chobe et du Zambèze ont leur source; elle traverse
un pays très peu praticable et ne conduit qu'aux possessions portu-
gaises.>)

6. Dans le mêmediscours, lord Salisbury dit égalementa la Chambre
des lords que les Britanniques cherchent à établirleur contrôle sur le lac
Ngami, mais il formule pourtant les observations suivantes:
«Je pense que les capacités de raisonnement s'émoussent à l'exa-
men constant des cartes ..Nous nous sommes furieusement battus

pour un lac dont je crains de ne pas pouvoir prononcer correctement
le nom - je pense qu'il s'agit du lac Ngami - la seule difficulté
étantque nous ne savons pas ou il est. Nous ne pouvons pas déter-
miner sa position à 100miles près,certainement pas à 60 miles près,
et de grands doutes pèsentsur sa nature même:est-ce un lac ou sim-
plement un lit dejoncs?)) (Mémoire dela Namibie, annexes, vol. IV,
annexe 31, p. 137.

7. Les objectifs précitésde l'Allemagne et de la Grande-Bretagne ex-
pliquent le libellé del'article III du traité anglo-allemand de 1890:

((Dans le Sud-Ouest africain, la sphère d'influence réservée a
l'Allemagne est délimitée comme suit : LE DE KASIKILI/SEDU(D OP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1210

2. A l'est, par une ligne qui part du point d'intersection susmen-
tionné [entrele 20" degréde longitude est et une ligne qui part de

l'embouchure du fleuveOrangeet suit vers l'amont la rive nord de ce
fleuve]et suit le 20' degréde longitude est jusqu'à son intersection
avec le 22' parallèlede latitudesud, suit ce parallèlevers l'estjusqu'à
son intersection avec le1' degré de longitude est; puis suit ce méri-
dien vers le nord jusqu'à son intersection avec le 18'parallèlede lati-
tude sud; suit ce parallèle versI'estjusqu'au Chobe, et suit le centre
du chenal principal de ce fleuvejusqu'à son confluent avec le Zam-
bèze.où elle s'arrête.

Il est entendu qu'en vertu de cet arrangement, l'Allemagne a libre
accèsau Zambèze depuis son protectorat par une bande de territoire
qui en aucun point ne doit avoir une largeur inférieureà 20 miles

anglais.
La sphère d'influence réservée la Grande-Bretagne est bornée à
l'ouest et au nord-ouest par la ligne susmentionnée.Ellecomprend le
lac Ngami.
Le cours de la frontière décriteci-dessus est tracé d'une façon
généraled'après une carte établieofficiellement pour le Gouverne-
ment britannique en 1889. »

En outre, l'article VI du traité dispose:
((Toutes les lignes de démarcation fixéesaux artic1às IV pour-
ront êtrerectifiéespar voie d'accord entre les deux puissances en
fonction des nécessités locales.

L'article VI1ajoute:
((Chacune des deux puissances s'engage à ne pas empiétersur la

sphèred'influenceattribuée à l'autre par lesartic1àsIVdu présent
traité. Aucune des deux puissances ne procédera à des acquisitions,
ne conclura de traités, n'accepterade droits souverains ni de protec-
torats ni ne gênera l'extensionde l'influencede l'autre dans la sphère
de celle-ci.
Il est entendu qu'aucune personne physique ou morale de l'une ou
de l'autre puissance ne peut exercer de droits souverains dans une
sphère attribuée à l'autre sans le consentement de cette dernière.))
(Mémoiredu Botswana, annexes, vol. II,annexe 12,p. 206-207,209-
210.)

II. LESINTERPRÉTATIONS DIVERGENTES QUE LES PARTIES
DONNENT DU TRAITÉ DE 1890

8. La Namibie interprète l'accord anglo-allemand de 1890comme suit:

«- Le traité avait pour objet et but de répartir les sphères
d'influencede l'Allemagneet de la Grande-Bretagne en Afrique LE DE KASIKILI/SEDU (DU. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1211

et d'établirà cette fin, lorsque cela étaitpossible, des frontières
solides, stables et visibles entre ces deux Etats. Sur le tronçon
du cours du Chobe en cause en l'espèce, la rivesud de la rivière
(y compris la rive droite du chenal sudà proximité de I'îlede
Kasikili) est forméepar l'arêtedu Chobe, qui est un escarpe-
ment d'une cinquantaine de mètres de haut, stable et bien
visible, représentésur la carte utilisée par les négociateurs,
alors que le chenal nord se trouve au milieu de la plainenon-
datio; du Zambèze et est submergéet invisible pendant près

de six mois chaque année.
- Le sens ordinaire du mot «chenal» d'un cours d'eau est celui
d'un conduit où s'écoulentles eaux de celui-ci et les mots(the-
na1principal»visent dans leur sens ordinaire lechenal qui trans-
porte la fraction la plus importante des eaux du cours d'eau.
- 11ressort des caractéristiques topographiques, hydrologiques et
géomorphologiques du Chobe et de la plaine d'inondation du
Zambèze que le chenal sud déplacenon pas simplement la plus
grande partie, mais la quasi-totalité des eaux de la rivière à

proximité del'îlede Kasikili, alors que l'écoulementlongitudi-
nal des eaux dans le chenal nord est quasi inexistant et que
celui-ci n'est guère plus qu'un chenal résiduel de la plaine
d'inondation du Zambèze. ))
Par suite, la Namibie conclut:

«Tous les élémentsd'interprétation tendent donc vers une seule et
unique conclusion: le chenal sud est le chenal principal du Chobe
autour de l'îlede Kasikili. Partant, le traitéattribue I'îlea la Nami-
bie.))(Mémoire de la Namibie, vol. 1,p. 58, par. 162-163.)

9. Le Botswana n'accepte pas la conclusion de la Namibie. A son avis,

«le chenal principal du Chobe au voisinage de I'île de Kasikilil
Sedudu est le chenal nord et ouest, la position du Gouvernement du
Botswana se fondant essentiellement sur le critèrede la navigabilité.
En l'absence d'éléments de preuve contraires, il faut présumer que
c'était aussi le chenal principal au moment de la conclusion de
l'accord anglo-allemand.))

Toutefois, le Botswana adopte aussi une position subsidiaire qui est
que
((conformément à l'objet et au but de l'accord, le chenal principal est

àtout moment donné constituépar la voie navigable et qu'en consé-
quence. actuellement, le chenal nord et ouest est lechenal principal))
(mémoiredu Botswana, vol. 1, p. 52, par. 116-117).

10.Par conséquent, le Botswana et la Namibie ne donnent pas le

même sens a l'article III, paragraphe 2 du traitéanglo-allemand de 1890.
Le traitélui-même nedonne pas de définitionde l'expression «centre du LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1212

chenal principal (der Thuhveg des Hauptlaufes) du Chobe», et aucune
autre de ses dispositions ne donne implicitement d'indication utile aux
fins de cette définition.Par suite, conformément au droit international
coutumier tel que l'exprime l'article31 de la convention de Vienne sur le
droit des traités adoptée le 23 mai 1969, la Cour doit déterminer «de
bonne foi» le sens de ladite expression, compte tenu des règlesd'inter-
prétation définiespar la convention (Plates-formes pétrolières (Répu-
blique islumique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique), exception prélimi-
nairc, arrêt,C.I.J. Recueil 1966 (II), p. 812, par. 23).

III. LA CONDUITE ULTÉRIEUREMENT SUIVIE EN TANT QUE RÈGLE D'INTER-
PRÉTATION DES TRAITÉS

11. En énonçant une règle générale d'interprétation, la convention de
Vienne de 1969 sur le droit des traitésdispose à l'article 31, paragraphe
3 b), qu'il doit êtretenu compte en mêmetemps que du contexte «de

toute pratique ultérieurement suivie dans l'application du traité par
laquelle est établi l'accord des partiesa l'égardde I'interprétation du
traité)).
12. La Commission du droit international a admis que «[l]a force pro-
bante de la pratique ultérieure estgénéralement reconnue)),parce que
ladite pratique montre comment l'intention des parties a étémise en
Œuvre. En outre, la jurisprudence des tribunaux internationaux et tout
particuliérementde la Cour mondiale interprète trèsvolontiers les traités
par référence àla pratique ultérieurementsuivie (Annuaire de lu Commis-
sion du droit international, 1964,vol. II, p. 60).
13. C'est ainsique la Cour permanente de justice internationale, dans

l'avis qu'elle a rendu sur laompétencede l'OIT pour la réglementation
internationale des conditions du tru\mil des personnes employées dans
l'ugriculture, dit ce:i
«Si une équivoqueavaitexisté,la Cour,en vue d'arriver à établirle
sens véritabledu texte, aurait pu examiner la manière dont le Traité
a été appliqué. [Avis consultut$ 1922, C.P.J.I. sérieB no2, p. 38.)

14. De même,dans l'affaire du Détroit de Corfou, la Cour actuelle a
dit ceci:

((11ressort de l'attitude ultérieuredes Parties que leur intention,
lorsqu'elles ont conclu le compromis, n'étaitpas d'empêcher laCour
de fixerle montant de l'indemnité. »(C.I.J. Recueil 1949, p. 25.)

15. Comme ellel'indique au paragraphe 50de l'arrêt,la Cour, dans les

décisions qu'ellea adoptéespar la suite, a confirmé quelleimportance il
convient d'accorder àla pratique ultérieurepour interpréter un traité.
16. La conduite ultérieurement suivie peut êtreutile soit pour établir
que les parties s'entendent sur I'interprétationdu traité,soit pour éclairer
leur intention initiale.l est possible que la conduite des parties déroge LE DE KASIKILI/SEDU DP. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1213

aux dispositions du traité,montrant qu'il n'est pastenu compte du sens
normal et ordinaire des termes utilisés.En pareil cas,il peut se faire que
la limite qui sépare'interpr4tationdu traitéde sa modijication par la pra-
tique ultérieure tendea s'effacer)), bien qu'il s'agissede deux processus
tout à fait distincts. De l'avis de la Commission du droit international,
c'est exactement ce qui s'est produit dans l'affaire duTemple de Préah
Vihéar,dans laquelle la pratique ultérieure desparties n'étaitpas compa-
tible avec le sens naturel et ordinaire des termes du traité. La Commission
a donc conclu que la pratique ultérieure en l'occurrence avait eu pour
effet de modifier le traitéAnnuaire de la Co~nmissiondu droit interna-
tional,1964,vol. II, p. 61).
17. La pratique d'un Etat déterminé peut avoirun poids particulier

quand elle a trait a l'exécutiond'une obligation qui concerne spéciale-
ment ledit Etat, comme la Cour le dit elle-mêmedans l'avis qu'elle a
rendu sur le Statut itzternational du Sud-Ouest africain (C.I.J. Recueil
1950, p. 135-136).Toutefois, pour que la conduite ultérieure puisse servir
à interpréterdes traités bilatéraux,il faut que les deux parties souscrivent
ensemble àladite conduite. L'accord peut s'exprimer par une action posi-
tive conjointe ou parallèle, mais il peut aussi êtreconstatédans l'activité
de I'une des parties seulement dès lors que l'autre partie donne son
consentement ou n'émetpas d'objection. Comme la Commission du droit
international le fait observer, il suffit que cette autre partie accepte la pra-
tique en question (Documents ofjciels de la conférencedes Nations Unies
sur le droit des traité- première et seconde sessions: documents de la
conf6rence (1968-1969), p. 42, par. 15).

18. L'importance que revêtle silence de I'une des parties quand il
s'agit d'établirquelle conduite adoptent ultérieurement les parties à un
traité bilatéral a étéreconnue tout récemmentlors de l'arbitrage rendu
dans l'affaire duCanal de Beagle, quand il est dit ceci:

«la Cour ne peut pas accepter la thèse suivant laquelle la conduite
ultérieure,y compris des actes de juridiction, ne peut pas avoir de
valeur probante en tant que mode d'interprétation subsidiaire sauf si
ellefait l'objet d'un «accord» déclaréou reconnu formellement entre
les Parties. Les dispositions de la convention de Vienne ne précisent
pas les modalités suivant lesquelles l'«accord» peut se manifester.
Dans le cadre de la présente affaire,les actes dejuridiction n'étaient

pas censés créerune source de titre qui fût indépendante des dispo-
sitions du traité; ces actes ne pouvaient pas non plus êtreconsidérés
comme contraires à ces dispositions tel que le Chili les comprenait.
Les élémentsde preuve confortent l'idéeque ces actes étaient no-
toires et bien connus de l'Argentine et qu'ils nepouvaient procéder
que du traité. Dans ces conditions, le silence de l'Argentine auto-
riseà déduire que les actes en question tendent à confirmer une
interprétation du sens du traité qui est indépendante des actes de
juridiction eux-mêmes. » (International Laiv Reports, vol. 52, p. 224,
par. 169.)[Traduction du Greffe. /IV. LA PRATIQUE ULTERIEURE DES PARTIES DANS L'APPLICAT~ON DE L'AC-

CORD ANGLO-ALLEMAND DE 1890

19. La Namibie soutient que la conduite ultérieurement suivie par les
partiesà l'accord anglo-allemand de 1890 démontreque I'îlede Kasikili
fait partie de la Namibie. Elle se fondeà cet égardsur
«[le]contrôleet ...l'utilisation de I'îlede Kasikili par les Masubia du
Caprivi, l'exercicede la juridiction sur I'îlepar les autorités gouver-
nant la [Namibie] et le silence gardé par le Botswana et ses prédé-
cesseurs pendant près d'un siècleen pleine connaissance de cause))

(mémoire dela Namibie, vol. 1, p. 60, par. 166).
20. Au cours de la procédure orale, la Namibie a insistésur «la pré-
sence constante des Masubia sur le terrain pendant le régimecolonial, à
laquelle il faut ajouter l'acceptation de la situation par les prédécesseurs
du Botswana)) (CR99110, p. 27, par. 21 (Chayes)). Pour la Namibie, les
Masubia du Caprivi oriental ont occupél'îledepuis 1890jusqu'au milieu
des années soixanteau moins. Depuis l'époqueou ils sont arrivéspour la

première fois en 1909, les représentants officiels allemands et leurs suc-
cesseurs ont intégréles institutions locales des Masubia dans la structure
mêmedu régimecolonial, et s'en sont servi comme d'instruments de leur
suzeraineté;et les activités qu'ilsmenaient étaient placéessous l'autorité
des autochtones Masubia - c'est-à-dire leur chef, skuta et lesindunas,
ou représentants locaux. Tous ces faits étaient parfaitement connus des
autorités du Bechuanaland installées juste de l'autre côté du fleuve à
Kasane, mais elles n'ont formulé aucune objection ni protestation, tout
au moins jusqu'en 1948. Cette interactivité permet à la Namibie
de conclure que les parties s'accordaientà considérer quele traité,quand
on l'interprétait correctement, attribuait I'île de Kasikili la Namibie
(CR99111, p. 41, par. 6 (Chayes)).

21. A ce sujet, le Botswana fait observer ceci:
«La thèse développée par la Namibie sur la base de la conduite
ultérieure des parties repose sur des fondements extrêmement peu
solides du point de vue aussi bien conceptuel que factuel. L'assise
conceptuelle est faible parce que «la conduite ultérieure)) invoquée
par la Namibie est en véritéun argument reposant sur la prescrip-
tion acquisitive. La conduite ultérieure,qui est liée un instrument

juridique existant, s'oppose A la prescription, qui a pour objet de
défaireet de remplacer un titre préexistant.(Répliquedu Botswana,
vol.1, p. 55, par. 157.)
22. Pourtant, la Namibie dit trèsclairement dans son mémoireque la
conduite ultérieuredes parties au traitéanglo-allemand de 1890

«est pertinente dans la présente controverse pour trois raisons dis-
tinctes. En premier lieu, ellecorrobore l'interprétation du traitéEn
deuxième lieu,elle constitue un deuxièmefondement totalement dis-
tinct de la revendication de la Namibie en vertu des doctrinesoncer- ▯ LDE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1215

nant l'acquisition de territoires par prescription, acquiescement et
reconnaissance. En dernier lieu, la conduite des parties montre que

la Namibie étaiten possession deI'îlà l'époqueoù il a été misfin au
régimecolonial, fait qui est pertinent pour l'application du principe
de l'utipossidetis.Mémoire dela Namibie, vol. 1,p. 60, par. 165.)
23. En outre, au cours de la procédure orale, la Namibie a souligné
que «sa thèse principale estque son titre est d'origine conventionnelle»,

et qu'elle n'avance l'argument «de la prescription ...qu'à titre subsi-
diaire» et que
«l'objet mêmede la facultéde plaider une thèse puis uneautreà titre
subsidiaire est que chacune des thèses doit êtreconsidéréepour ce
qu'elle vaut et quel'on ne peut tirer aucune conclusionà l'encontre

d'une thèse au seul motif qu'une thèse divergente a égalementété
plaidée» (CR 99110, p. 24, par. 10(Chayes)).
24. Par suite, la Cour doit examiner en premier lieu la demande prin-
cipale présentéepar la Namibie, c'est-à-dire qu'elle doit examiner la

conduite ultérieurement suivie pour interpréter l'accord anglo-allemand
de 1890; et ce n'est que si cette demande principale de la Namibie
n'aboutit pas que la Cour devra examiner les demandes subsidiaires,fon-
dées sur la prescription, l'acquiescement et la reconnaissance, que la
Namibie présentepour démontrer que l'îlede Kasikili lui appartient.

V. LE MANDAT RELATIF AU SUD-OUES ATFRICAIN (NAMIBIE)

25. A la suite de l'ouverture des hostilités,lors de la première guerre
mondiale, le Caprivi oriental a étoccupéen septembre 1914par la police

paramilitaire de Rhodésie du Sud qui n'a rencontréaucune résistance.Le
capitaine Eason a été nommé le 6 novembre 1914 commissaire spécial
pour la bande de Caprivi et a pris ses fonctions le 20 novembreSchuck-
mannsburg. Comme il est indiquédans le rapport du commissaire rési-
dent pour l'administration de la bande de Caprivi pendant la période
allant de 1914au 31 mars 1922, «on ne voulait pas exercer l'autoritéplus
fortement ni sur une plus grande étendue qu'il n'était absolumentindis-
pensable))(mémoire de la Namibie, vol. IV, annexe 52, p. 203).
26. Aux termes de l'article 119 du traité de paix signéà Versailles le
28juin 1919,l'Allemagne a renoncé en faveur des principales Puissances

alliéeset associéesà tous ses droits sur ses possessions d'outre-mer, y
compris le Sud-Ouest africain allemand.
27. L'article 22, paragraphe 1 du Pacte de la Société desNations dis-
pose :
((Les principes suivants s'appliquent aux colonies et territoires

qui,à la suite de la guerre, ont cesséd'être sousla souverainetédes
Etats qui les gouvernaient précédemment etqui sont habitéspar des
peuples non encore capables de se diriger eux-mêmesdans les condi- I'LDE KASIKILI/SEDU DO. DISS.PARRA-ARANGUREN)1216

tions particulièrement difficilesdu mondemoderne. Le bien-être etle
développement deces peuples forment une mission sacréede civilisa-
tion, et il convient d'incorporer dans le présentPacte des garanties
pour l'accomplissement de cette mission. »

28. Le paragraphe 2 du mêmearticle 22 ajoute:
((La meilleure méthode deréaliserpratiquement ce principe est de
confier la tutelle de ces peuples aux nations développéesqui, en rai-
son de leurs ressources, de leur expérienceou de leur position géo-

graphique, sont le mieux à mêmed'assumer cette responsabilité, et
qui consentent a l'accepter; elles exerceraient cette tutelle en qualité
de mandataires et au nom de la Société. »
29. Et le paragraphe 6 du mêmearticle 22 du Pacte de la Société des
Nations précisele régime desmandats en indiquant que

«des territoires tels que le Sud-Ouest africain et certaines îles du
Pacifique austral..par suite de la faible densité de leur population,
de leur superficie restreinte, de leur éloignement descentres de civi-
lisation, de leur contiguïté géographiqueau territoire du mandataire
ou d'autres circonstances ne sauraient êtremieux administrés que
sous les lois du mandataire, comme une partie intégrante de son ter-
ritoire, sous réserve desgaranties prévues plushaut dans l'intérte
la population indigène.)

30. En outre, l'article 22 prévoit que le mandataire doit envoyer au
Conseil un rapport annuel concernant les territoires dont il a la charge
(par. 7); qu'une commission permanente sera chargée de recevoir et
d'examiner les rapports annuels des mandataires et de donner au Conseil
son avis sur toutes questions relativesl'exécution desmandats (par.9);
et que

«Si le degréd'autorité, de contrôle ou d'administrationà exercer
par le mandataire n'a pas fait l'objet d'une convention antérieure
entre les Membres de la Société,il sera expressémentstatué sur ces
points par le Conseil.» (Par. 8.)

31. Les principales Puissances alliéeset associéesont accepté qu'un
mandat sur le territoire de l'ancien protectorat allemand du Sud-Ouest
soit confiéà Sa Majestébritannique et exercé enson nom par le gouver-
nement de l'Union sud-africaine. Sa Majesté britannique a acceptépour
le gouvernement de l'Union sud-africaine et en son nom ledit mandat
et s'est engagée à l'exercer pour le compte de la Société desNations
conformément aux dispositions arrêtéespar le Conseil de la Sociétéle
17 décembre 1920, lesquelles ont confirméune décision priseantérieu-
rement le 7 mai 1919.

32. Aux termes du mandat sur le Sud-Ouest africain, il fallait deman-
der à la Société desNations son consentement pour pouvoir modifier ses
dispositions (art. 7, par. 1); et le pouvoir de l'Union sud-africaine était
définià l'article 2 comme suit: ((Le mandataire aura pleins pobvoirs d'administration et de Iégis-
lation sur le territoire faisant l'objet du mandat. Ce territoire sera
administré selon la Iégislationdu mandataire comme partie inté-
grante de son territoire. Le mandataire est en conséquenceautorisé
appliquer aux régions soumisesau mandat la Iégislationde l'Union
de l'Afrique du Sud, sous réservedes modifications nécessitéespar
les conditions locales.
Le mandataire accroîtra par tous les moyens en son pouvoir, le

bien-être matérielt moral ainsi que le progrès social des habitants
du territoire soumis au présentmandat.))(Société desNations,Jour-
nalofJicie jnvier-février 1921,p. 89.)
33. Jusqu'au 31 décembre1920,la bande de Caprivi a étéadministrée
comme si elle faisait facto partie du protectorat du Bechuanaland sou-
mis à la loi martiale. Dans la partie orientale du Caprivi, ce régimede la

loi martiale a pris fin sous l'effetde la proclamation du gouverneur géné-
ral no 12 de 1922et de la proclamation du Haut Commissaire no 23 de
1922,qui a placéla bande de Caprivi sous l'autorité civile du protectorat
rétroactivement à compter du 1"'janvier 1922 (mémoiredu Botswana,
annexes, vol.III, annexe 19, p. 257).
34. L'Union sud-africaine a continuéd'exercer son mandat sur le Sud-
Ouest africain après la dissolution de la Société desNations, alors que
l'on s'attendait pourtanàce que les territoires sous mandat qui n'étaient
pas devenus indépendants soient placés sous le régime de tutelle des
Nations Unies. Parmi les puissances mandataires, l'Union sud-africaine
fut la seule refuser d'opérerce transfert pour le territoire du Sud-Ouest
africain, parce qu'à son avis le mandat étaitdésormaiscaduc. Par suite,

l'Union sud-africaine non seulement a refuséde s'acquitter de ses obliga-
tions en vertu du Pacte et du Mandat mais a égalementinvoquéla situa-
tion particulière du territoire sous mandat pour l'annexer son propre
territoire. C'estpourquoi l'Assemblée générale dNsations Unies a décidé
de demander à la Coiir un avis consultatif sur la question.

35. Dans l'avis consultatif qu'elle a rendu le 11juin 1950, la Cour a
déclaréque la création de l'institution du mandat

((n'impliquait ni cession de territoire ni transfert de souveraàneté
l'union sud-africaine. Le gouvernement de l'Union devait exercer
une fonction d'administration internationale au nom de la Société
des Nations aux fins de favoriser le bien-êtreet le développementdes
habitants. (C.1.J. Recuei 1950, p. 132.)

36. La Cour ajoutait que
a) «l'Union sud-africaine continueà êtresoumise aux obligations inter-
nationales énoncéesà l'article 22du Pacte de la Société Nations et
au Mandat pour le Sud-Ouest africain)) (ibid., p. 143);

6) «l'Assembléegénérale desNations Unies est fondéeen droit à exercer
les fonctions de surveillance qu'exerçait précédemment la Société des ▯ LEDE KASIK~LI/SEDU (DPUDISS.PARRA-ARANGUREN)1218

Nations en ce qui concerne l'administration du territoire et que
l'Union sud-africaine a l'obligation de se prêterà la surveillance de
l'Assembléegénérale etde lui soumettre des rapports annuels» (C.I.J.
Recueil 1950, p. 137) ;
c) ((11est évidentque l'Union n'est pas compétente pour modifier uni-
latéralement le statut international du territoire ou l'une quelconque
de ces règles internationales)), comme il «ressort de l'article 7 du

Mandat, qui dispose expressémentque l'autorisation du Conseil de la
Société desNations est nécessairepour modifier les dispositions du
Mandat)) (ibid., p. 141);
et que

d) «l'Union sud-africaine agissant seule n'est pas compétente pour mo-
difier le statut international du territoire du Sud-Ouest africain et
que la compétencepour déterminer et modifier ce statut appartient
à l'union sud-africaine agissant avec le consentement des Nations
Unies» (ibid., p. 144).

37. L'Assemblée généraldees Nations Unies a mis fin au mandat de
l'Union sud-africaine sur le Sud-Ouest africain par sa résolution 2145
(XXI) de 1966; et elle a confiéau Conseil de sécurité l'administrationdu
Sud-Ouest africain portant désormaisle nouveau nom de Namibie par sa
résolution2248 (S-V) de 1967.En outre, l'Afrique du Sud refusant de se
retirer du territoire, le Conseil de sécurité a déclarque sa présence en
Namibie (Sud-Ouest africain)était illicitedans sa résolution 176de 1970;
cette illicéia étéconfirméepar la Cour dans l'avis consultatif qu'elle a
rendu le 26janvier 1971sur les Conséquencesjuridiques pourles Etuts de
laprésencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain)
nonobstant lu résolution276 (1970) du Conseil de sécurité(C.I.J. Recueil

1971, p. 58, par. 113)(voir le paragraphe 69 de l'arrêt).
38. La position juridique de l'Union sud-africaine est demeurée
inchangéependant tout le temps que son mandat sur le Sud-Ouest afri-
cain a existé. Sespouvoirs sur le territoire étaientexclusivement des pou-
voirs administratifs et législatifs;etUnion devait les exercer afin d'«ac-
croîtr[e], par tous les moyens en son pouvoir, le bien-être matériel et
moral ainsi que le progrès social des habitants)).l n'entrait pas dans les
pouvoirs conférésau mandataire de procéder à des actes de disposition
du territoire, et l'Union sud-africaine, par conséquent, ne pouvait pas
procéder à de tels actes.
39. Les autorités britanniques ont compris que telle étaitla situation
juridique en 1949,quand elles ont examinéla possibilitéde conclure un

accord au sujet de l'îlede Kasikili avec'Union sud-africaine en sa qualité
de puissance mandataire pour le Sud-Ouest africain. M. G. H. Baxter
(bureau des relations du Commonwealth) examine alors la proposition
formuléepar l'union sud-africaine qui vise à situer la frontière dans le
chenal sud du Chobe, étant entendu que les habitants et les autorités du LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1219

protectorat du Bechuanaland se verraient garantir la possibilitéd'utiliser
le chenal nord pour la navigation (lettre datée du 14 octobre 1948 et
adresséeau cabinet du haut commissaire à Pretoria, mémoirede la Nami-
bie, vol.IV, annexe 63, p. 280; mémoiredu Botswana, annexes, vol. III,

annexe 23).
40. Dans le rapport qu'il adresse le 20 octobre 1949 à sir Evelyn
Baring, au commissaire pour le Basutoland, le protectorat duBechuana-
land et le Swaziland, M. Baxter formule des observations sur l'aspect
international de la question:

((l'aspect international.. dépend enmajeure partie de la question
de savoir si lemandat est toujours considérécommeétant envigueur.
Le gouvernement de l'Union est d'avis que le mandat est arrivé à
expiration. [Ce rapport de M. Baxter a été établin 1950avant que
la Cour ait rendu son avis consultatif sur la question.] Or, ce point
de vue n'est pas universellement partagé par les autres gouverne-
ments et la situation, au regard du droit international, semble com-
plexe. Le mandat est limité,par le préambule et son article 1, au
territoire qui constituait l'ancien protectorat allemand du Sud-Ouest
africain. En vertu de I'articleI d'un accord conclu en 1900 avec
l'Allemagne, la frontière a éfixéeà l'époque comme passantpar la
ligne médiane di1cours principal de la rivière et, comme il s'avère
êtrele cas aujourd'hui, le cours principal se situait concrètement au
nord de l'île en question, le territoire sous mandat ne comprenant
donc pas ladite île. En vertu de I'articleu mandat, aucune modi-

fication n'est réalisablesans le consentement du Conseil deSociété
des Nations. Dans la mesure ou le mandat est toujours en vigueur,
on pourrait en conclure qu'il convient donc d'en référàrun organe
des Nations Unies ou bien qu'il est impossible de procéder à la
moindre rectification de frontière. Certes, il est possible que per-
sonne n'émetted'objection au sein des Nations Unies, puisque la
proposition consiste en un accroissement territorial et non pas en
une réduction, mais l'éventualitéd'une objection ne peut être igno-
rée.))(Mémoiredu Botswana, vol. III, annexes, annexe 28, p. 288.)

Et M. G. H. Baxter ajoute:

((L'article VI de l'accord de 1900 dispose que «les lignes de
démarcation fixéesaux articles 1 à IV pourront êtrerectifiéespar
voie d'accord entre les deux puissances en fonction des nécessités
locales)). On pourrait donc dire que cette disposition autorise
aujourd'hui à modifier la frontière tant aux fins du droit internatio-
nal que du droit interne par voie d'accord entre le Gouvernement du
Royaume-Uni et le gouvernement de l'Union qui est en l'occurrence
le successeur du Gouvernement allemand. Mais il est peu probable
que l'argument soit valable car la rectification reviendraitdifier
ce qui est en fait la frontière de l'ancien protectorat allemand. Entre
ces deux gouvernements, I'article VI est probablement encore en
LDE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1220

vigueur, mais nous nous trouvons ici en présence d'un texte(le man-
dat) qui intéressed'autres parties.émoiredu Botswana, vol. III,
annexes, annexe 28, p. 290-291.)
41. Compte tenu des considérationsci-dessus, le cabinet du haut com-

missaire à Pretoria a conclu qu'il ((vaudrait mieux ne soulever aucun
lièvre))(lettre adresséele 19 novembre 1949 par le haut commissaire à
Pretoria à V. F. Ellenberger, mémoiredu Botswana, vol. III, annexe 29,
p. 296). Le hautcomn~issaire,sir Evelyn Baring, a donc décidéde ne pas
conclure d'accord formel et il a expliquédans une lettre datéedu 10mai
1951 à M. Forsyth, du département des affaires extérieures del'Union
sud-africaine. que la question semblait «de nature à créerde multiples
con~plicationsjuridiques de caractère international dont la solution sou-
lèverait des difficultéshors de proportion avec l'importance de'affaire))
(mémoiredela Namibie, vol. IV,annexe 69,p. 294; mémoiredu Botswana,
annexes, vol.III,annexe 30, p. 298; CR9917, p. 12(Brownlie)).
42. Par suite, une fois confirmée lacréation de l'institution du mandat
par le Conseil de la Société dNations en 1920, l'Union sud-africaine ne

pouvait pas de sa propre initiative modifier le territoire du Sud-Ouest
africain tel qu'il avait étédéterminépar la conduite ultérieurement suivie
des partiesà I'accord anglo-allemand de 1890.
43. C'est pourquoi 1914représentela dernièredate à prendreen consi-
dération pour la détermination de la conduite ultérieure des parties,
l'Allemagne et laGrande-Bretagne, en ce qui concerne l'interprétation de
l'articleIIde I'accord anglo-allemand de 1890.En fait, aucune conduite
ultérieure nepeut exister de la part de l'Allemagne au-delà de septembre
1914, date à laquelle la partie orientale du Caprivi a été occupépar la
Rhodésiedu Sud. Tant que le mandat étaiten vigueur, l'union sud-afri-
caine n'avait pas conlpétenceni pour conclure expressément unaccord
quelconque destiné à délimiter lafrontière internationale du Sud-Ouest

africain ni pour modifier la conduite ultérieurement suivieen ce qui
concerne l'interprétation de l'articleII de l'accord anglo-allemand de
1890.Par suite, àmon sens, il convient de déterminer cetteconduite ulté-
rieure des parties aux fins de l'interprétation deI'accord anglo-allemand
sur la base de la situation qui a existéjusqu'en septembre 1914.

VI. ELÉMENT SE PREUVE PERTINENTS PRÉSENTÉS À LA COUR

44. Dans l'arrêtqu'elle a rendu le 26 novembre 1984,la Cour a dit que
«c'est en définitiveau plaideur qui chercheétablirun fait qu'incombe la
charge de la preuve))(Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua
et contre celui-ci (Nicarugua c. Etats-Unis d'Amérique), compétence et
recevabilité, arrêt,C.I.J. Recuei1984, p. 437, par. 101;voir également
Différend frontalier (Burkina FasolRépublique du Mali), C.I.J. Recueil
1986, p. 587, par. 65).
45. C'est pourquoi la Cour doit examiner en l'espèceles élémentsque
la Namibie a présentés à la Cour pour appuyer sa thèse qui est que la CLE DE KASIKILI/SEDUDU (OP. DISS. PARRA-ARANCUREN) 1221

pratique ultérieurement suivie par les partiesà l'accord anglo-allemand
de 1890démontre que, pour elles, le chenal sud du Chobe étaitle «chenal
principal)) visé l'article III dudit accord; et que, par conséquent,I'îlede
Kasikili faisait partie de la Namibie. Dans ces conditions, les faits qui
indiquent quelle a étéla pratique ultérieurement suiviepar les parties, tels
que la Namibie les présente,sont les suivants:

«1) l'occupation et l'utilisation continues, publiques et notoires du
territoire en question durant une longue période; 2) l'exercicede la
souveraineté surce territoire et) le défautpour l'autre partie, ayant
connaissance de ces faits, d'élever desobjections ou protestations ou
de faire valoir ses droits)) (mémoire de la Namibie, vol. 1, p. 66,
par. 180).

46. Les élémentsde preuve à examiner sont les suivants:

A. Le rapport du capitaine H. V. Eason (1912)

47. Un échange de communications a lieu entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne au début du siècle,qui porte sur la moitié occidentale de la
démarcation sud établiepar le traitéanglo-allemand de 1890.Le 14jan-
vier 1911, le secrétaired'Etat aux colonies, lord Harcourt, a donné pour
instruction au haut commissaire du protectorat du Bechuanaland de
recueillir «toutes les informations disponibles auprès de sources locales
pour étayerl'idéeque le chenal nord est le chenal principal)) du Chobe
aux alentours de l'île de Kasikili (mémoire de la Namibie, vol. IV,
annexe 44, p. 170).
48. C'est cette dépêchequi est à l'origine du rapport du capitaine
H. V. Eason, lequel est datédu 5 août 1912,dans lequel l'auteur dit ceci:

«A 2 miles [3,20kilomètres] enamont des rapides, on trouve I'île
de Kissikiri.Là, j'estime que c'est sans aucun doute le chenal nord
qui doit être considérécommlee chenal principal. A l'extrémité occi-
dentale de I'île,en cette périodede l'année,le chenal nord est large
de plus de 100 pieds [30,50 mètres] et sa profondeur est de 8 pieds
[2,40mètres], etle chenal sud a une largeur d'environ 40 pieds [12,20
mètres] et uneprofondeur de 4 pieds [1,20mètre]. Cechenal sud est

principalement un bras mort et, s'ily a du courant, celui-ci s'écoule
vers le nord. Les autochtones qui viventà Kasika, en territoire alle-
mand, y pratiquent actuellement la culture.))(Mémoire de la Nami-
bie, vol.IV, annexe 47, p. 177.)

49. Bien que le capitaine Eason ait déclaréque c'étaitle chenal nord
«qui [devait] être considéré commlee chenal principal)), il a reconnu que
les ((autochtones qui vivent à Kasika, en territoire allemand, y prati-
qu[aient] actuellement la culture)), et il voulait ainsi parler de l'île de
Kasikili. B LEDE KASIKILI/SEDU DP. DISS.PARRA-ARANGUREN)1222

B. Le rapport conjoint de 1948 (Trollope-Redman)et l'échange
de correspondance entre 1948et 1951

50. La Cour analyse en détail,aux paragraphes 56 à 61 de l'arrêt,le
rapport conjoint de 1948établipar L. F. W. Trollope et Noel W. Red-
man, ainsi que les antécédents dece rapport et la correspondance qui a
suivi entre 1948et 1951.Il n'ya donc pas lieu de reproduire ici lesextraits
pertinents.A mon sens, ces documents établissent

a) que les Masubia de la partie orientale du Caprivi étaient la seule
tribu qui utilisait'île pour la cultiver non seulement jusqu'en 1914,
c'est-à-dire jusqu'à la date critiqueprendre en compte aux fins de
l'interprétation de l'accord anglo-allemand de 1890, mais aussi
jusqu'en 1947,date à laquelle le différendfrontalier est né entreles

Parties;
b) qu'au cours de cette même période, nlies tribus du Bechuanaland ni
lesautorités du protectorat du Bechuanaland n'ont jamais formuléde
plainte au sujet de cette utilisation de l'île;
C) que les tribus du protectorat du Bechuanaland n'ont jamais exploité
l'île ni des fins agricoles nà d'autres fins quelconques; et
d) que les tribus du Bechuanaland et les autorités du protectorat du
Bechuanaland pouvaient utiliser sans la moindre contestation le che-
nal nord du Chobe autour de l'îlede Kasikili.

Ces conclusions sont du reste acceptéesdans l'arrêt, oùl'on peut lire
ceci:

«De l'ensemble de la documentation administrative et diploma-
tique mentionnée ci-dessus, la Cour, pour sa part, retiendra les élé-
ments suivants: 1)jusqu'en 1947,aucune divergence de vues n'avait
surgi entre, d'une part, la puissance administrant la bande de Caprivi

et, d'autre part, le Bechuanaland au sujet de la frontière dans la
régionde l'îlede KasikililSedudu; 2) il semble que, compte tenu des
cartes alors disponibles, la frontière étaitjusquesupposéese situer
dans le chenal sud du Chobe ..» (Par. 62.)

C. Le rapport de M. R. R. Renew (1965)

51. Répondant à une demande de renseignements concernant l'île de

Kasikili qui émanaitdu ministère destravaux publics, R. R. Renew, car-
tographe généraldu protectorat du Bechuanaland a établi son rapport le
10 octobre 1965. M. Renew rappelle tout d'abord:

«L'île de Kasikili est devenue l'objet d'un litige en1947quand, à
cette date, le commissaire indigène de l'est de la bande de Caprivi
aurait contestéle droit du Bechuanaland àutiliser le bras principal
de la rivièreChobe, le long du côténord de l'île, comme voie navi-
gable.» (Mémoire du Botswana, vol. III, annexe 36, p. 321.) LE DE KASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN)1223

Puis, après avoir analysé l'échange de correspondance Trollope-
Dickinson (1948-195l), M. Renew formule la conclusion suivante: «Il
semble donc que, si nous voulons maintenant utiliser l'île, nous n'avons
pas d'autre choix que de rouvrir la question.))Et il ajoute:

«Je pense que les arguments par lesquels l'Afrique du Sud prétend
posséder cetteîle sont très faibles.Le fait que nous n'en ayons pas
fait usage et que nous ayons autorisé les membres des tribus du
Caprivi à l'utiliser n'estpas vraiment assimilableà la prescription;
cela veut plutôt dire que nous avons toléréque la population du
Caprivi utilise I'ile alors qu'il était mal commode pour nous de

l'utiliserous-mémes.» (Mémoire du Botswana, annexes, vol. III,
annexe 36, p. 325.)
52. En somme, les faits énoncéspar M. R. R. Renew dans son rapport
coïncident avec les conclusions déjàformuléesdans la présenteopinion

(voir le paragraphe 50 ci-dessus).

D. Les témoins produits par la Namibie

53. Les déclarations entendues en mai et juin 1994 de la bouche des
témoinsproduits par la Namibie pour déposerdevant l'équipetechnique
conjointe d'experts confirmentque seuls les Masubia de la partie orientale
du Caprivi utilisaient I'îlede Kasikili pour y pratiquer des cultures; que,
jamais, des individus relevant du protectorat du Bechuanaland n'avaient
utilisé I'î; ue l'autorisation d'utiliserI'îlen'ajamais demandée qu'aux
autoritésdes Masubia ou jamais obtenue qu'auprès desdites autorités; et

que lesautorités britanniques étaient l'époqueau courant de cesactivités.
54. Le Botswana soutient qu'il n'est pas possible de retenir ces décla-
rations a cause des contradictions qui sontapparues lors du contre-inter-
rogatoire des témoins. En particulier, le Botswana souligne que le chef
Moraliswani, quand on lui a demandéquand il a étémis fin aux labours
sur I'îlede Kasikili, a réponduceci:

«C'était en1937, à ce moment-là, beaucoup d'éléphantsentraient
au Capriviet, quand lesgens labouraient, ilsconstataient que les élé-
phants détruisaient leurschamps, et c'estalors qu'ilsdécidaientde se
déplaceret de s'installer de l'autre côté,ici, au Caprivi.(Mémoire
de la Namibie, annexes, vol. III, annexe 2, p. 209.)

Le Botswana en tire par conséquentla conclusion que l'îlea cesséd'être
cultivéeen 1937(contre-mémoiredu Botswana, vol. 1, p. 205, par. 468).
55. Toutefois, comme nous l'avons dit, la conduite ultérieurementsui-
vie par les parties ne doit êtreexaminéeaux fins de l'interprétation de
l'accord anglo-allemand de 1890que jusqu'en 1914(voir la section V de
la présente opinion). Par conséquent,quand le Botswana dit que I'îlede
Kasikili n'a étécultivéeque jusqu'en 1937,son argument n'a aucune per-
tinence. Du reste, mêmesi les témoinsde la Namibie se contredisent par-
fois quand il s'agit de détails,ils disent essentiellement la mêmechose et ÎLE DEKASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN)1224

c'est pourquoi,a mon avis, il faut tenir leurs déclarations pour des témoi-
gnages valables. Par suite, l'objection qui est ainsi formulée par le
Botswana ne peut pas être retenue.
56. En outre, le Botswana plaide que les dépositions de témoinsne
seraient pertinentes que si elles devaient éclairersoit les intentions réelles
des parties à l'accord anglo-allemand de 1890 soit le sens ordinaire à
l'époqueconsidérée(c'est-à-dire 1890)du membre de phrase: «le centre

du chenal principal [du fleuve]))qui figure a l'article III dudit traité.Par
suite, pour le Botswana, les dépositionsrelatives des activités alléguées
sur I'île, qui tendraientrapporter la preuve d'une conduite ultérieure-
ment suivie, ne présentent aucune pertinence en droit quand il s'agit de
déterminer la frontière entre la Namibie et le Botswana sur la base de
l'accord anglo-allemand de 1890 (contre-mémoire du Botswana, p. 203,
par. 461; CR99112, p. 10-11 (Tafa)).
57. La commission mixte d'experts techniques a été constituée ala
suite du communiquépubliéle 24 mai 1992par le présidentdu Botswana,
le président de la Namibie et le président du Zimbabwe (mémoire du
Botswana, vol. III, annexes, annexe 55, p. 413-415); et le mémorandum
d'accord relatif au mandat de l'équipequi aétésignépar la Namibie et le
Botswana le 23 décembre1992autorise expressémentles dépositions ver-
bales. L'article 7,paragraphe 1, du mémorandum d'accord se lit comme
suit:

«Dans l'exécutionde ses fonctions, l'équipeaura le pouvoir
.............................
f) d'entendre sans préjudice destraités de 1890et 1892tout témoi-
gnage oral émanant de toute personne compétenteau Botswana
et en Namibie ou dans n'importe quel autre pays que l'équipe

jugera nécessairepour lui permettre de statuer sur le différend
relatifà I'île de Kasikili/Sedudu.» (Mémoire du Botswana,
annexes, vol.III, annexe 57, p. 433-434.)
58. On peut donc dire que le mandat de 1992 n'obligeait pas les
témoins à montrer exclusivement quelles étaientles intentions réellesdes
parties a l'accord anglo-allemand de 1890 ou quel étaitle sens ordinaire
des termes «le centre du chenal principal du fleuve)) a l'époque consi-
dérée (1890), comme le soutient le Botswana. Les dépositions de témoins

ont étédéclarées recevables en généracl,aque fois qu'elles sejustifiaient,
pour établir des faits intéressant le différend frontalier dont fait l'objet
l'îledeKasikiliISedudu. La Namibie a par conséquent appelédes témoins
pour établirquelle a étéla conduite ultérieurement suivie par les parties
qui est un moyen d'interpréterl'accord anglo-allemand de 1890. Pour la
mêmeraison, le Botswana a présenté lesdéclarations de ses témoins
comme étantde bons élémentsde preuve, sur lesquels il s'estappuyépour
contredire la conduite ultérieurement suivie telle que la formulait la
Namibie et prouver que les Masubia de la partie orientale du Caprivi
n'étaientpas les seuls a utiliser I'îlede Kasikili. Par suite,on sens,
cette objection du Botswana ne peut pas êtreretenue. ▯ LDE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1225

E. EEments de preuve présentéspar leBotswana

59. 1) Le Botswana a présenté desdéclarations écritessous serment
des personnes ci-après: a) Dominic Diau (déclarationdatée du 6 octobre
1997) ;Brian Egner (déclarationdatée du 19septembre 1997); Peter Gor-
don Hepburn (déclarationdatéedu 6 août 1997);Timothy Neville Liver-
sedge (déclarationdatéedu 30 octobre 1997)et Michael Slogrove (décla-
ration datée du 8 juillet 1997) (contre-mémoire du Botswana, annexes
47-51); etb) Botsweletse Kingsley Sebele (déclarationdu 14août 1998);
Michael Slogrove (déclarationdatéedu 24 août 1998); et Simon Adolph

Hirschfield (déclaration du 25 août 1998)(répliquedu Botswana, vol. 1,
annexes 20-22).
60. Les déclarations sous serment ci-dessus se limitentà des faits qui
ont eu lieu entre 1977 et 1979; 1959et 1962; 1962et 1970; 1969-1970et
1972-1978respectivement (contre-mémoiredu Botswana, annexes 47-51);
et des faits qui ont eu lieu entre octobre 1971et avril 1975; entre972-
1978 et 1971 -1995 (réplique du Botswana, annexes 20-22). Par consé-
quent, à mon sens, ces faits ne sont pas utiles pour établir la conduite
ultérieurementsuivie par lespartiesà l'accord anglo-allemand de 1890en
1914,qui est la date critique; ni même en1947,qui est la date àlaquelle
le différenda surgi pour la première foisentre les Parties (voir section
ci-dessus de la présente opinion).
61. 2) Le commissaire de district de Kasane, M. Noel Redman, dans

la lettre de couverture du 26 janvier 1948(par. 5), annonçant le rapport
conjoint établi par lui-mêmeet par M. Trollope, donne au secrétairedu
gouvernement (Maefeking) les indications ci-après :
((Depuis que le rapport ci-joint a étéétabli,j'ai reçu de nouvelles
informations de la part d'un habitant de l'île,d'aprèslequel, en 1924,
un chef caprivi appelé Liswaninyana aurait demandé au capitaine

Neale [sic: Nellie], le magistrat résidentà Kasane, l'autorisation
pour les membres de sa tribu de cultiver I'îleet d'y faire paître du
bétail. L'autorisation a bien entendu étéaccordée verbalement et il
n'a pas été signd'accord écrit. A l'époque,les bŒufsdu gouverne-
ment paissaient sur l'îlemais ils ont évacués en 1925.Avant 1924,
toujours d'après le mêmeinformateur, il y avait une famille caprivi
qui pratiquait la culture sur l'îlemais sans autorisation.Mémoire
du Botswana, annexes, vol. III, annexe 22, p. 265; CR 9917,p. 23-24
(Brownlie).)

62. Toutefois, ces renseignements complémentaires rapportés par
M. Redman portent sur des actes qui sont postérieurs à 1914,la date cri-
tique servant à déterminerla conduite ultérieurement suivie par les par-
ties aux fins d'interpréter l'accord anglo-allemand de 1890. En outre, le
témoignage que M. Redman rapporte ne fournit qu'une preuve par
ouï-dire. En outre, comme la Namibie le fait observer:

«en 1924, le capitaine Neale avait un rôle double. Il étaià la fois
commissaire de districtà Kasane, pour le protectorat du Bechuana- % LDEE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1226

land, et administrateur du Caprivi oriental en vertu du mandat de la
Société desNations sur le Sud-Ouest africain. Dans ces conditions,
mêmes'il avait autorisé Liswaninvana à cultiver l'île. cette mesure
n'aurait pas nécessairementprouvé quele protectorat contrôlait l'île.
Etant donnéle double rôle ainsi imparti au capitaine Neale, il n'est
pas possible d'apprécier correctement l'autorisation qu'il aurait

donnéed'utiliser I'îlede Kasikili sans établird'abord s'ilagissait en
qualité d'administrateur du Caprivi oriental ou en qualité d'admini-
strateur du district deKasane dans le protectorat du Bechuana-
land.)) (Réplique dela Namibie, p. 108,par. 244.)

63. 3) Le Botswana s'appuie sur le fait que ce n'est pas avant le
6 mars 1992que la Namibie commence à se plaindre que ses habitants
soient dans l'impossibilité d'utiliserI'îlede Kasikili, bien qu'ils aient mis
finà cette utilisation en 1937d'aprèslesdéclarationsdu chef Moraliswani
ou en 1958comme certains témoins de la Namibie l'ont affirmé(CR 9917,
p. 25 (Brownlie)). Or, la date critique servanà établir la conduite ulté-
rieure des parties est 1914. Les faits en question, par conséquent, qui se

situent tous après cette date, sont dénués de pertinencedu fait de l'exis-
tence du mandat sur le Sud-Ouest africain.
64. 4) D'aprèsle Botswana, aucun groupe n'avait l'exclusivité de l'uti-
lisation de l'île des fins agricoles car, dans les annéesquarante, sept
familles de migrants Barotse vivaient dans la régionde Sedudu, le terme
Batoka étantle nom local du Chobe pour les personnes originaires de ce
qui fait actuellement partie de la Zambie, et ces familles cultivaient des
champs situéssur l'île. Le Botswana soutient que le fait est prouvépar les
rapports annuels sur le Chobe qui sont jointsà sa réplique(annexes 7 et
8) (répliquedu Botswana, p. 45, par. 125;annexes, annexes 7 et 8, p.14-
20, 21-22; CR 9917,p. 25 (Brownlie)). En outre, le Botswana souligne que
l'un des témoins, Keorapetse Mokhiwa, un paysan âgé de 70 ans, a
déclaréque ((leschamps étaienttrès petits, parceque lesgens labouraient

à la main, avec des charrues à bras» (CR9918, p. 13, par. 4.5 (Fox)).
65. Cette thèse n'esttoutefois par pertinente en soi, parce qu'elleporte
sur des faits postérieurs 1914,c'est-à-dire postérieurà la date critique
pour la détermination de la conduite ultérieurement suivie par les Parties
aux fins de l'interprétation del'articleI de l'accord anglo-allemand de
1890. En outre, Sedudu est un nom qui désignenon seulement I'îlede
Kasikili mais également la valléede Sedudu sur le territoire botswanais
que longe le fleuve Chobe. Par conséquent, à supposer mêmeque les
familles dont il est question fussent installées ettravaillàieSedudu)),
il n'a pasété prouvé que «Sedudu» dans ce cas précis désigneI'île de
Kasikili.
66. 5) Dans ses plaidoiries, le Botswana a soulignépar ailleurs que

l'échangede lettres entreMM. Trollope et Dickinson (1948-1951)a servi
à maintenir le statu quo.Or, à mon sens, le statu quo est favorableà la
position qu'adopte la Namibie au sujet de la conduite ultérieurement sui-
vie par les Parties (voir le paragraphe0 ci-dessus). LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1227

67. 6) Le Botswana rappelle que les autorités britanniques ont créé en
1960la réserveanimalièredu Chobe, dont la limite septentrionale corres-
pond à la frontièreinternationale entre le protectorat du Bechuanaland et

le Sud-Ouest africain. C'est pourquoi, de l'avis du Botswana, I'îlen'est
plus cultivéedepuis 1960et, bien entendu, en fait, la culture a quasi cer-
tainement pris fin bien des annéesauparavant (CR9917, p. 27 (Brown-
lie)). Toutefois, là encore, l'argument n'est pas pertinent puisque la date
critique servanta établirla conduite ultérieurement suivie par les parties
à l'accord anglo-allemand de 1890 est 1914. Du reste, comme le fait
observer la Namibie, la loi portant création decette réserveanimalièreen
1960 mentionne la carte GSGS 3915 établie en 1933 par le War Office
britannique, laquelle indique que c'est le chenal sud qui sert de frontière
internationale (CR 9911,p. 40, par. 64 (Chayes)).
68. 7) Le Botswana fait observer qu'à l'occasion de la visite que le
présidentdu Botswana a envisagéede faire dans le voisinage de I'île en
1972,M. Slogrove a déclaré:

«Le débarquement sur l'île d'un escadron en armes de la police
militaire botswanaise en août 1972 pendant la visite des présidents,
escadron qui étaitcensé fouillerl'île par mesure de sécurité, aren-
forcéma conviction que I'îleétaitconsidéréecomme appartenant au
territoire botswanais.(Répliquedu Botswana, annexes, annexe 10,

p. 25;CR9917, p. 28 (Brownlie).)
Lesdeux dépositionssous serment de M. Slogrove ont déjà étéétudiées
et jugéesnon pertinentes parce qu'elles portent sur des faits postérieurs
à 1914, qui est la date critique à considérer pour déterminer la

conduite ultérieure des parties afin d'interpréterI'accord anglo-allemand
de 1890.
69. 8) Pour la mêmeraison, la réunion de délégationsdes Parties à
Katima Mulilo en 1981,I'accord finalement conclu àPretoria en 1984et
la note du Botswana adressée àl'Afrique du Sud en date du 22 octobre
1986,dont le Botswana a fait état (CR 9917,p. 28 (Brownlie)), sont sans
pertinence quand il s'agit d'établir quelle ala conduite ultérieure des
partiesà I'accord anglo-allemand de 1890.
70. 9) Le Botswana rappelle en outre qu'une dizaine de ses témoins
ont dit dans leurs dépositions avoir régulièrementconduit du bétail
depuis Maun jusqu'au ferry de Kazungula dans les annéestrente et qua-
rante; et qu'ils faisaient paître du bétail sur I'île de Kasikili918,
p. 76 (Fox)). Or, ces activitéssont elles aussi sans pertinence quand il
s'agit de déterminer la conduite ultérieure des Parties en 1914,qui est la
date critiqueà retenirà cette fin.

F. Les cartes

71. Comme la date critique est 1914, toutes les cartes établies posté-

rieurement à cette date sont sans pertinence quand on veut interpréter ILE DEKASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN) 1228

l'accord anglo-allemand de 1890sous l'anglede la conduite ultérieuredes

parties. Les seules cartes qu'il faut examiner sont par conséquentles sui-
vantes :
72. 1) La carte ID 776 de 1889 établiepar le ministère de la guerre
britannique qui est évoquéedans l'accord anglo-allemand de 1890 et la
carte de la Zambézie méridionale (de1891).Toutefois, ni l'une ni l'autre
de ces deux cartes ne présente lamoindre utilitéparce qu'il n'y figure
aucun signe de frontière le long du Chobe.
73. 2) La carte Kriegskurte au 11800000 (qui date de 1904)porte une
mention «île de Sulumbu», mais, comme la Namibie le fait observer, «les
reproductions de cette carte dans l'atlas du Botswana (cartes 4 et 5), sur
lesquelles le Botswana semble s'appuyer pour faire ses analyses sont de
très mauvaise qualité,et ne sont pas deux cartes mais deux copies d'une

même carte)) (CR9914, p. 56 (Rushworth)). Le Botswana a accepté ces
critiques et reconnu que«[]]acarte porte quelques caractéristiques qui ne
sont pas conformes aujourd'hui avec les caractères géographiques
connus)) (répliquedu Botswana, p. 71, par. 206). Et le Botswana n'a pas
mêmeévoqué laditecarte lors de ses plaidoiries (CR 99/14, p. 27 (Fox)).
Cette carte est doncà mon sens sans pertinence.
74. La curte de Seinerau 11.500000 (qui date de 1909)montre I'îlede
Kasikili, mêmesicelle-ciest appelée«île de Sulumbu)). Toutefois, comme
la Namibie l'admet, la légendede la carte ne précisepas comment les
frontières internationales sont indiquées)}(CR 9914,p.43 (Rushworth)).
Cettecarte est donc sans pertinence quand on cherche à détermineroù se
situe la frontièrà la hauteur de I'îlede Kasikili.

75. La carre de Streitu'olf (de 1910) qui est établie au 11200000
indique l'île de Kasikili sous le nom de «Kassikiri». Elle est toutefois
sans pertinence car elle ne signale aucune frontière, comme la Namibie
le fait elle-même observer(CR9914, p. 44 (Rushworth)).
76. La curte de Von Frunkenbrrg de 1912,établieau 11100000, montre
I'îlede Kasikili,à encore sous le nom de «Kassikiri». Le mot allemand
«Flussurm» apparaît au-dessus du chenal sud et le Botswana en déduit
que le chenal sud n'est pas le ((chenal principal)) mais un bras annexe du
Chobe. Quoi qu'il en soit, le Botswana a soutenu qu'il nese fondait pas
sur les cartes, parce qu'elles ne donnent pas de renseignements exacts et
ne sont pas cohérentes (répliquedu Botswana, p. 99, par. 258). En outre,
ladite carte n'indique pas les frontières internationales entre les deux

pays. J'estime par conséquentqu'elle est sans pertinence.
77. Il faut donc constater qu'aucune des cartes qui ont étésoumises à
la Cour ne peut servir à établir quelle a étéla conduite ultérieure des
Parties aux fins d'interpréterl'accord anglo-allemand de 1890,la date cri-
tique à respecter aux fins d'établir ladite conduite étant 1914. Il n'y a
donc pas lieu,à mon sens, d'examiner desquestions ayant trait aux prin-
cipes cartographiques applicables àl'établissementde cartes ni d'exami-
ner les conditions auxquelles les cartes doivent répondre pour produire
des effets juridiques, ni de voir quelle importance elles revêtentpour la
solution de différendsd'ordre juridique. LE DE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1229

G. Photographies aérienneset images par satellite

78. Les photographies aériennes et les imagespar satellite soumises à
la Cour ne contiennent aucune indication permettant de détermineroù se

situe la frontière entre les Parties hauteur de l'îlede Kasikili, mêmesi
ces images peuvent êtreutiles quand on veut établir si I'îlede Kasikili
étaitoccupéeou cultivée. Mais elles sont de toute façon sans pertinence
parce qu'elles ont été prisesaprès 1914,qui est la date critique quand on
veut considérerquelle a été laconduite ultérieuredes Parties pour inter-
préter l'accord anglo-allemand de 1890. En outre, des photographies
aériennesou des images par satellite ne permettent pas d'établir sioccu-
pation éventuellede I'îlede Kasikili étaitle fait des Masubia de la partie
orientale du Caprivi ou bien le fait des autochtones ou des autorités du
protectorat du Bechuanaland.

H. L'utilisation paisible et notoire de I'île de KasikililSedudu
par des membres de la tribu des Masubiu originaires de la partie
orientale du Caprivi

79. Le Gouvernement allemand a mis pour la première fois en place
une présence administrative dans la partie orientale de la bande de
Caprivi en février 1909.Comme la Namibie le dit elle-même, «le Caprivi
oriental constituait auparavant, si l'on se place dans la perspective des
Etats coloniaux européens, un «no man's land» situépour l'essentiel en
marge des lois» (mémoirede la Namibie, vol. 1,p. 88, par. 222).
80. Le gouverneur allemand a Windhoek, Bruno von Schuckmann,
prend le 16octobre 1908une ordonnance interdisant l'accèsdu territoire

à tous les Européens qui n'étaientpas munis d'un permis officiel,«jetant
ainsi les bases juridiques de l'exercicede l'autorité administrativedans la
région)).En mêmetemps, il nomme le capitaine Kurt Streitwolf résident
impérialau Caprivi et, a la tête d'un contingent dequatre officiers mili-
taires allemands et de 14policiers africains, Streitwolf se rend alors dans
la bande de Caprivi le 25 janvier 1909. Quelques jours plus tard, le
3 février,le capitaine Streitwolf atteint la rive sud du Zambèzeen face de
Sesheke et il y crée une nouvelle localité qu'il appeSchuckmannsburg
où il établitson quartier général.
81. La Namibie ajoute que le 4 mai 1909le capitaine Streitwolf a mis
en place a Schuckmannsburg un notable, Chikamatondo, «en qualitéde
chef Masubia, répondant devant lui du gouvernement de la région)),l'île
de Kasikili relevant ((manifestement de sa juridiction». C'est de cette

façon que l'Allemagne a établiun régimed'«administration indirecte)) et
les chefs indigènes ont fait partie intégrante des rouages de ce régime.
C'est ainsi que, conclut la Namibie, l'Allemagne a administré le Caprivi
oriental par l'intermédiairede Chikamatondo et de l'organisation tribale
des Masubia (mémoire de la Namibie, p. 88-93, par. 222-232).
82. La Namibie soutient que le même régime d'«administration indi-
recte)) a persistéaprès la mise en place du mandat sur le territoire duSud-Ouest africain. Le gouverneur généralde l'Union sud-africaine a
déléguélaresponsabilité du Caprivi au haut commissaire britannique

pour l'Afrique du Sud, la délégationde pouvoir prenant effet le 1" jan-
vier 1921(mémoirede la Namibie, vol. V, annexe 93, p. 5-8), et le haut
commissaire a exercéson autorité par l'intermédiairedu Drotectorat du
Bechuanaland (mémoire du Botswana, annexes, vol. III, annexe 19,
p. 257).
83. L'administration fut britannique jusqu'en 1929, puis elle a été
assumée directement par l'Union sud-africaine (mémoire de la Namibie,
vol. V, annexe 94, p. 9-11 ; mémoire du Botswana, annexes, vol. III,
annexe 20.,.. 259-260).Au coursde cette ~ériode.lesadministrateurs bri-
tanniques des colonies faisaient égalementappel'aux autorités tradition-
nelles des Masubia pour leur confier des tâches importantes, notamment
l'administration de la justice. Le fait est prouvépar les rapports transmis
par les fonctionnaires du Bechuanaland en leur qualité de déléguéd se
l'Afrique du Sud. C'est ainsi, par exemple, que tous leurs rapports pour
les années 1927, 1928et 1929comprennent le paragraphe ci-après :

((Chaque village est dotéde son Induna ou chef traditionnel qui
est habilité rendre la iustice conformément à la loi et a la coutume
indigènesau bénéfice de ses fidèles.11est généralementaidépar des
anciens. En l'absence d'accord. ou bien si ledemandeur ou le défen-
deur n'est pas satisfait, le litige est porté devant le Kgotla du chef.
Le Kgotla ou tribunal du chef est la juridiction suprêmeet ses

arrêts sontdéfinitifs la réserve prèsqu'il est possible, sous l'effetde
la proclamation no 1 de 1919.de faire appel des décisionsdes chefs
indigènesdans le protectorat du Bechuanaland, en premièreinstance
devant un tribunal composédu commissaire adjoint ou du magistrat
du district et du chef, et, au cas où ils ne tomberaient pas d'accord, le
commissaire résident se prononce en dernier ressort sur le litige.
Quand lesmembres d'unetribu sont sanctionnéspar leurs propres tri-
bunaux, la peine consiste généralement à préleverune ou plusieurs
têtes de bétail. es bêtes confisquéedseviennent la propriétéexclusive
du chef, mais ce dernier peut faire don d'une partie du bétail a ses
conseillers. (Rapport du gouvernement del'Unionsud-ufricuine sur le
Sud-Ouest africain pour I'unnée1927, contre-mémoiredu Botswana,
annexe 11, p. 123;rapport du gouvernement de l'Union sud-africuine
sur le Sud-Ouest africuin pour I'annPe 1928, contre-mémoire du
Botswana, annexe 12, p. 108; rupport (lu gouvernement de l'Union

sud-ufricuine sur le Sud-Ouest ufricain pour 1'annt.e1929, par. 458-
459, contre-mémoiredu Botswana, annexe 13, p. 69, par. 459-460.)
84. Le Botswana dit qu'«il n'est pas plausible de donner a entendre
que le titre pourrait découlerdes activités agricoles desasubia)); qu'«il
n'existe tout simplement aucune preuve que le régimed'administration
indirecte donnait compétence auxchefs du Caprivi de faire ou défairedes
frontières internationales));et le Botswana rappelle les dispositions de

l'articleVI1 de l'accord anglo-allemand de 1890: ▯ LDE KASIKILI/SEDUDU (OP. DISS. PARRA-ARANGUREN) 1231

«Les deux puissances s'engagent à ne pas intervenir dans une

sphère d'influence attribuée à l'autre puissance en vertu des ar-
ticle1 à IV. Chaque puissance s'interdit, a l'intérieurde la sphère
d'influence de l'autre puissance, de procéderà des acquisitions, de
conclure des traités,d'accepter desdroits souverains ou des protec-
torats ou de contrarier l'expansion de l'influence de l'autre puis-
sance.
11est entendu qu'aucune personne physique ou morale de l'une ou
de l'autre puissance ne peut exercer de droits souverains dans une
sphère attribuée à l'autre puissance, sans le consentement de cette
dernière.

Par conséquent, le Botswana conclut que l'occupation de l'îlede Kasikili
par les Masubia du Caprivi oriental ne peut pas créeren faveur de la
Namibie un titre quelconque sur l'île de Kasikili (contre-mémoire du
Botswana, vol. 1,p. 12, par. 23).
85. Le Botswana dit néanmoins:

«Le Gouvernement botswanais est disposé àreconnaître que, tant
dans le territoire sous administration allemande que dans le protec-
torat du Bechuanaland, l'autorité des chefs traditionnels était sou-
mise a l'approbation du pouvoir colonial. Les chefs devenaient ainsi
en un certain sens des agents de l'administration coloniale des deux

côtésdu Chobe. Mais rien ne prouve et il n'a été présenté aucune
preuve démontrant que 1e.schefs uvuient lepozrvoirde sr livreà des
uctivité;,.suscrptihles de donner naissanc13un titre. Une telle pro-
positionserait aussi singulièrementétrange tant du point de vuejuri-
dique que du point de vue historique.)) (Contre-mémoire du
Botswana, p. 278, par. 685.)

86. Mais la Namibie ne prétend pas quel'Allemagne se livrait sur l'île
de Kasikilià des activités susceptiblesde donner naissance a un titre par
I'intermédiaire de l'organisation tribale des Masubia. De l'avis de la
Namibie, le titre demeurait lemême, c'était celuqiui figurait dans I'accord
anglo-allemand de 1890.Toutefois, la délimitationde la frontière opérée
a l'articleI1n'étaitpas claire et réclamaitune interprétation. C'est pour-
quoi la Namibie s'appuie sur la conduite ultérieure des Parties afin
d'interpréterletitre existant, c'est-à-dire I'accordanglo-allemand de 1890;
il n'a pas été créée titre nouveau, le titre existant aconfirmé etinter-
prétépar la conduite ultérieure desParties.

87. Les élémentsde preuve présentéspar la Namibie montrent que
l'Allemagne a administré la partie orientale de la bande de Caprivi par
I'intermédiaire des chefsMasubia et de leur régimetribal. Ces chefs exer-
çaient des fonctions judiciaires et avaient le pouvoir de rendre des arrêts.
Les actes positifs témoignant de l'exercice deleur juridiction sur l'îlede
Kasikili étaientassez fréquents,sil'on pense qu'ils intervenaient dans des
régions peu peuplées et très éloignées dceesntres de civilisation, ce qui est
la définitiondu territoire du Sud-Ouest africain donnéà l'article22,para- LE DE KASIKILI/SEDU(D OP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1232

graphe 6du Pacte de la Société desNations (voir paragraphe 27 ci-des-
sus). Les autoritésdu Bechuanaland n'ont jamais contesté ces actes juri-
dictionnels. C'est pourquoi,a mon sens, les chefs autochtones étaientdes
agents de l'administration coloniale et leursactes représentent la conduite

ultérieure des Parties aux fins de l'interprétation de I'accord anglo-
allemand de 1890.

VII. CONCLUSION

88. Lesconsidérations quifont l'objet des sections précédentes m'amè-
nent a conclure que les Masubia du Caprivi oriental étaient les seuls
membres de tribu à occuper I'île de KasikiliISedudu, tout au moins
jusqu'en 1914;que cette occupation de I'îleétait paisible et notoire; et
que le Botswana lui-mêmea admis que leurs chefs ((étaientdevenus en un
certainsens des agents de l'administration coloniale» (voir paragraphe 85
ci-dessus). J'estime par conséquent que la pratique ultérieurement suivie

par l'Allemagne et la Grande-Bretagne procédait de l'idéepartagée par
lesdeux pays que I'îledeKasikiliISedudu faisait partie du Sud-Ouest afri-
cain allemand et que le chenal sud du fleuveChobe étaitle ((chenal prin-
cipal)) viséa l'article III, paragraphe 2 de l'accord anglo-allemand de
1890.Il ne fut pas possible aux parties au traité d'adopter une conduite
ultérieurependant la premièreguerre mondiale, les troupes britanniques
exerçant de facto leur contrôle sur le Sud-Ouest africain. En 1920, la
Société desNations a confirmé lacréation du mandat sur le Sud-Ouest
africain. Tant que ce mandat a été en vigueursur le Sud-Ouest africain
(Namibie), aucune des parties a l'accord anglo-allemand de 1890n'avait
compétence pour reconnaître, que ce fût par accord exprès ou par leur
conduite ultérieure,que ledit((chenal principa» du Chobe était le chenal

nord et non le chenal sud, car cette interprétation nouvelle aurait repré-
sentéune modification du territoire sous mandat. Par suite, I'interpréta-
tion initiale a été conservet c'estpourquoi, a mon sens, l'îlede Kasikilil
Sedudu fait partie intégrante de la Namibie et c'est le chenal sud du
Chobe qui est le «chenal principal)) viséà l'article III, paragraphe 2 de
l'accord anglo-allemand de 1890.

(Signt.) Gonzalo PARRA-ARANGUREN.

Bilingual Content

DISSENTING OPINION OF JUDGE PARRA-ARANGUREN

The Anglo-German Agreement of1890 - The Parties' dijfering interpreta-
tions of the 1890 Treaty - Subsequent practice as a rule of treuty interpreta-
tion - Subsequent practice of the Parties in the applicationof the 1890 Agree-
ment - The Mandate for South West Africa (Numibia) - Relevant evidencr
suhmitted to the Court - Cuptain H. V. Euson's Report (1912) - Joint
Report of 1948 (Trollope-Redmun) und Exchange of Lerters between 1948 and

1951 - Mr. R. R. Renew's Report (1965) - Witnesses calledby Namibi~r -
Evidencepresented by Bots,vana - Maps - Aerial photogruphs and satellite
images - Peacefuland public useof KasikililSedudu Island hy Masubia Tribes-
menfrom Eastern Caprivi - Conclusion.

1. In 1884Germany proclaimed a Protectorate over the Coastsouth of
the Cape Colony's enclave at Walvis Bay and some years later, before
1890, expanded its territorial claims in South West Africa, without

systematically establishing an effective administration on the ground.
The United Kingdom decided to accept Germany's territorial claims in
South West Africa, even though it regarded this territory as lying within
Britain's natural sphere of influence.

2. The only area in dispute was Ngamiland, north of British Bechuana-
land, a territory assigned to neither power and extending from the 20th
to the 24th degree of longitude. Discussions began in 1886but it was only
in 1890 after the resignation of the German Chancellor Otto von Bis-

marck that the new Chancellor, General Georg Leo Von Caprivi and his
Foreign Minister, Baron Marschall, accelerated diplomatic discussions
with Britain over Africa.

3. The Anglo-German Agreement relating to Africa und Heligoland

was signed in Berlin, in English and in German, on 1 June 1890by Sir
Edward Baldwin Malet, Her Britannic Majesty's Ambassador Extraordi-
nary and Plenipotentiary; Sir Henry Percy Anderson, Chief of the Afri-
can Department of Her Majesty's Foreign Office; the Chancellor of the
German Empire, General Leo Von Caprivi, and the Privy Councillor in

the German Foreign Office,Dr. Friedrich Richard Krauel. The signature
of the Treaty coincided with the declaration of British jurisdiction over
Northern Botswana by Order-in-Council of 30 June 1890. OPINION DISSIDENTE DE M. PARRA-ARANGUREN

/ Truduction]

L'accord anglo-allemand de 1890 - Interprétationsdivergentes du traitéde
1890chez les Parties- La conduitesuivieultérieuremene tn tant que règled'inter-
prétationdes traités - La pratique suivie ultérieuremen ptar les Parties dans
I'upplicutionde l'accordde 1890 - Le mandat exercésur le Sud-Ouest africain
(Namibie) - Les é1émentd.repreirvepertitzentsprésentésà la Cour - Le rapport
du capitaine H. V. Eason (1912) - Le rapport conjoint de1948 (Trollope-Red-
man,)et l'échange de correspondanceentre 1948 et 1951 - Le rapport deM. R. R.
Renriv (1965i - Les témoinsappeléspar laNamibie - Les moyensprésentép sar
le Botswana -- Les cartes - Les photographies aériennes e lts imagespar satel-
lite-- L'utilisationpaisible etnotoire de l'îlede KasikililSedudupar les membres
de la tribudes Masubiaoriginaires delapartie orientaledu Caprivi - Conclusion.

1. En 1884, l'Allemagne a proclamé l'établissementd'un protectorat

sur la côte, au sud de l'enclave de Walvis Bay de la colonie du Cap et,
quelques années plus tard, avant 1890, a étendu ses prétentions territo-
riales sur le sud-ouest de l'Afrique, sans toutefois établir systématique-
ment d'administration effective sur le terrain. Le Royaume-Uni a décidé
d'accepter ces prétentions territoriales de l'Allemagne sur le sud-ouest de

l'Afrique, alors que, pourtant, ce territoire relevait pour elle de la sphère
d'influence naturelle de la Grande-Bretagne.
2. La seule zone en litige étaitle Ngamiland, au nord du Bechuana-
land britannique, territoire qui n'avait été affecté à aucune des deux puis-
sances, lequel s'étendaitdu 20"au 24"degré de longitude. Les discussions
ont été entaméee sn 1886mais ce n'est qu'en 1890, après la démissiondu

chancelier allemand Otto von Bismarck, que le nouveau chancelier, le
généralGeorg Leo Von Caprivi et son ministre des affaires étrangères,le
baron Marschall, ont accéléréles discussions diplomatiques avec la
Grande-Bretagne au sujet de l'Afrique.
3. Le traité anglo-allemand relatif à l'Afrique et à I'Heligoland a été

signé à Berlin, en langues anglaise et allemande, le 1" juin 1890,par sir
Edward Baldwin Malet, ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire
de Sa Majestébritannique; sir Henry Percy Anderson, chef du départe-
ment africain du Foreign Office de Sa Majesté; le chancelier de l'empire
allemand, le généralLeo Von Caprivi et le conseiller privédu ministère
allemand des affaires étrangères, le Dr. Friedrich Richard Krauel. La

signature du traitéa coïncidé avec ladéclaration en ordre du Conseil du
30 juin 1890 par laquelle la Grande-Bretagne étendait sa juridiction au
Botswana septentrional.1209 KAS~KILI/SEDU ILAUND (DISS .P. PARRA-ARANGUREN)

4. Excluding the question of the Island of Heligoland, the British
interest in this part of Africa was in controlling the area between Lake
Ngami, some 350 kilometres to the south and west of Kasikili Island and
the Victoria Falls, inorder to protect the main trade routes from South
Africa to the centre of the continent from encroachments by the Germans
and Portuguese; while the Germans wanted to obtain the recognition of
a German sphere of influence extending eastward, providing them access
to the Zambezi. However, as Lord Salisbury informed Sir Edwin B.
Malet, British Ambassador in Berlin, in his letter of 14 June 1890,

"The character of this country is very imperfectly known, and the
very position of Lake Ngami has been the subject of considerable
uncertainty." (Memorial of Botswana. Annexes, Vol. II, Ann. 7,
p.37.)

5. Lord Salisbury, in his speech to the House of Lords on 10 July
1890, referred to German aspirations in Africa, making clear that for
Germany the conclusion of the agreement was subject to the condition
that

"at the very north of this Damaraland territory they should have a
strip of territory going along the Portuguese border, and giving them
direct access to the River Zambesi. ..it is the last route in the world
by which trade can pass. It is at the head of the waters of al1
the affluents of the Chobe and the Zambesi, over an impracticable
country, and leading only into the Portuguese possessions."

6. On the same occasion Lord Salisbury also informed the House of
Lords of the British interest in controlling Lake Ngami, even though he
made the following comments:
"1 think that the constant study of maps is apt to disturb men's
reasoning powers .. .We have had a fierce confiict over the posses-
sion of a lake whose name 1am afraid 1cannot pronounce correctly
- 1 think it is Lake Ngami - our only difficulty being that we

do not know where it is. We cannot determine its position within
100miles, certainly not within 60 miles, and there are great doubts
whether it is a lake at all, or only a bed of rushes." (Memorial of
Namibia, Annexes, Vol. IV, Ann. 31, p. 137.)

7. The above-mentioned aims pursued by Germany and Great Britain
explain the terms in which Article III of the 1890Anglo-German Agree-

ment is drawn:
"In South-West Africa the sphere in which the exercise of influ-
ence is reserved to Germany is bounded: LE DE KASIKILI/SEDU (DP. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1209

4. Mis à part la question de l'îled'Heligoland, les Britanniques s'inté-
ressaient àcette régiond'Afrique pour établirleur contrôle sur la région
situéeentre le lac Ngami, à quelque 350 kilomètres au sud et a l'ouest de
l'îlede Kasikili, et les chutes Victoria, afin de pouvoir protégerles prin-
cipales voies commerciales allant d'Afrique du Sud au centre du conti-
nent contre tout empiètement de la part des Allemands et des Portugais;
tandis que les Allemands, de leur côté, voulaient obtenir la reconnais-

sance d'une sphère d'influence allemande s'étendant vers l'est, qui leur
donnerait accèsau Zambèze. Toutefois, comme lord Salisbury l'a dit àsir
Edwin B. Malet, ambassadeur de Grande-Bretagne à Berlin, dans sa
lettre du 14juin 1890,
«Les caractéristiques de ce pays sont trèsmal connues et la situa-

tion exacte du lac Ngami est très incertaine.(Mémoiredu Botswana,
annexes, vol. II, annexe 7, p. 37.)

5. Dans le discours qu'il prononce à la chambre des lords le 10juillet
1890,lord Salisbury parle des aspirations de l'Allemagne enAfrique, pré-

cisant que pour l'Allemagne, la conclusion de l'accord estsubordonnée a
une condition :
«tout au nord de ce territoire du Damaraland, les Allemands
devraient avoir le long de la frontière portugaise une bande de ter-
ritoire qui leur donne un accès directau Zambèze ..C'est la dernière

route au monde que le commerce peut emprunter. C'est là que tous
les affluents du Chobe et du Zambèze ont leur source; elle traverse
un pays très peu praticable et ne conduit qu'aux possessions portu-
gaises.>)

6. Dans le mêmediscours, lord Salisbury dit égalementa la Chambre
des lords que les Britanniques cherchent à établirleur contrôle sur le lac
Ngami, mais il formule pourtant les observations suivantes:
«Je pense que les capacités de raisonnement s'émoussent à l'exa-
men constant des cartes ..Nous nous sommes furieusement battus

pour un lac dont je crains de ne pas pouvoir prononcer correctement
le nom - je pense qu'il s'agit du lac Ngami - la seule difficulté
étantque nous ne savons pas ou il est. Nous ne pouvons pas déter-
miner sa position à 100miles près,certainement pas à 60 miles près,
et de grands doutes pèsentsur sa nature même:est-ce un lac ou sim-
plement un lit dejoncs?)) (Mémoire dela Namibie, annexes, vol. IV,
annexe 31, p. 137.

7. Les objectifs précitésde l'Allemagne et de la Grande-Bretagne ex-
pliquent le libellé del'article III du traité anglo-allemand de 1890:

((Dans le Sud-Ouest africain, la sphère d'influence réservée a
l'Allemagne est délimitée comme suit :1210 KASIKILI/SEDU DLAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

2. To the east by a line commencing at the above-named point

[the point of intersection by the 20th degree of east longitude of a
line commencing at the mouth of the Orange River, and ascending
its north bank], and following the 20th degree of east longitude to
the point of its intersection by the 22nd parallel ofth latitude, it
runs eastward along that parallel to the point of its intersection by
the 21st degree of east longitude,ence it follows that degree north-
ward to the point of its intersection by the 18thparallel ofth lati-
tude, it runs eastward along that paralleltill it reaches the River
Chobe; and descends the centre of the main channel of that river to
its junction with the Zambesi, where it terminates.
It is understood thatunder this arrangement Germany shall have
free access from her Protectorate to the Zambesi bya strip of terri-
tory which shall at no point be less than 20 English miles in width.

The sphere in which the exercise of influences reserved to Great
Britain is bounded to the West and north-west by the above-
mentioned line. It includes Lake Ngami.
The course of theabove boundary is traced in general accordance
with a Map officiallyprepared for the British Government in1889."

Furthermore, Article VI provides :
"Al1 the lines of demarcation traced in Articles1 to IV shall be
subject to rectification by agreement between the two Powers, in
accordance with local requirements."

ArticleVI1 adds:
"The two Powers engage that neither will interfere with any

sphere of influence assigned to the other by Articles 1 to IV. One
Power willnot in the sphere of the other make acquisitions,nclude
Treaties, accept sovereign rights or Protectorates, nor hinder the
extension of influence of the other.

It is understood that no Companies nor individuals subject to one
Power can exercise sovereign rights in a sphere assigned to the other,
except with the assent of the latter." (Memorial of Botswana,
Annexes, Vol. II, Ann. 12,pp. 206-207, 209-210.)

II. THEPARTIESD 'IFFERING INTERPRETATIO ONSTHE 1890TREATY

8. Namibia interprets the 1890Anglo-German Agreement as follows :

"- The object and purpose of the Treaty was to divide the spheres
of influence of Germany and Great Britain in Africa and to this LE DE KASIKILI/SEDU(D OP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1210

2. A l'est, par une ligne qui part du point d'intersection susmen-
tionné [entrele 20" degréde longitude est et une ligne qui part de

l'embouchure du fleuveOrangeet suit vers l'amont la rive nord de ce
fleuve]et suit le 20' degréde longitude est jusqu'à son intersection
avec le 22' parallèlede latitudesud, suit ce parallèlevers l'estjusqu'à
son intersection avec le1' degré de longitude est; puis suit ce méri-
dien vers le nord jusqu'à son intersection avec le 18'parallèlede lati-
tude sud; suit ce parallèle versI'estjusqu'au Chobe, et suit le centre
du chenal principal de ce fleuvejusqu'à son confluent avec le Zam-
bèze.où elle s'arrête.

Il est entendu qu'en vertu de cet arrangement, l'Allemagne a libre
accèsau Zambèze depuis son protectorat par une bande de territoire
qui en aucun point ne doit avoir une largeur inférieureà 20 miles

anglais.
La sphère d'influence réservée la Grande-Bretagne est bornée à
l'ouest et au nord-ouest par la ligne susmentionnée.Ellecomprend le
lac Ngami.
Le cours de la frontière décriteci-dessus est tracé d'une façon
généraled'après une carte établieofficiellement pour le Gouverne-
ment britannique en 1889. »

En outre, l'article VI du traité dispose:
((Toutes les lignes de démarcation fixéesaux artic1às IV pour-
ront êtrerectifiéespar voie d'accord entre les deux puissances en
fonction des nécessités locales.

L'article VI1ajoute:
((Chacune des deux puissances s'engage à ne pas empiétersur la

sphèred'influenceattribuée à l'autre par lesartic1àsIVdu présent
traité. Aucune des deux puissances ne procédera à des acquisitions,
ne conclura de traités, n'accepterade droits souverains ni de protec-
torats ni ne gênera l'extensionde l'influencede l'autre dans la sphère
de celle-ci.
Il est entendu qu'aucune personne physique ou morale de l'une ou
de l'autre puissance ne peut exercer de droits souverains dans une
sphère attribuée à l'autre sans le consentement de cette dernière.))
(Mémoiredu Botswana, annexes, vol. II,annexe 12,p. 206-207,209-
210.)

II. LESINTERPRÉTATIONS DIVERGENTES QUE LES PARTIES
DONNENT DU TRAITÉ DE 1890

8. La Namibie interprète l'accord anglo-allemand de 1890comme suit:

«- Le traité avait pour objet et but de répartir les sphères
d'influencede l'Allemagneet de la Grande-Bretagne en Afrique end to establish, where possible, firm, stable and visible bound-
aries between them. In the stretch of the Chobe River of con-
Cern in this case, the south bank of the River (including the
right bank of the southern channel in the vicinity of Kasikili
Island), is established by the Chobe Ridge, a stable and clearly
visible escarpment some 50 metres high, so depicted on the
map used by the negotiators, while the northern channel is in
the midst of the floodplain of the Zambezi River and is inun-
dated and invisible for nearly half of each year.

The ordinary meaning of the 'channel' of a river is a conduit
through which the water of the river Aows, and the ordinary

meaning of the 'main channel' is the channel that carries the
major part of the flow of the river.
The topographie, hydrological and geomorphologic character-
istics of the Chobe River and the Zambezi flood~lain establish
that the southern channel carries not only the major portion,
but substantially al1of the flow of the River in the vicinity of
Kasikili Island, while the northern channel has almost no
longitudinal flow and is little more than a relict channel of
the Zambezi floodplain".

Consequently, Namibia concludes
"Al1the elements of interpretation converge on a single result: the
southern channel is the main channel of the Chobe River around
Kasikili Island. The Treaty therefore attributes the Island to
Namibia." (Memorial of Namibia, Vol. 1,p. 58, paras. 162-163.)

9. Botswana does not accept the conclusion of Namibia. In itsopinion,
"the main channel of the Chobe in the vicinity of KasikiliISedudu
Island is the northern and western channel, the principal criterion on
which this assessrnent is based being that of navigability. In the
absence of evidence to the contrary, the presumption must be that
this was also the main channel at the time of the conclusion of the
Anglo-German Agreement".

However, as alternative position Botswana accepts

"that, in accordance with the object and purpose of the Agreement,

the main channel is constituted by the navigable channel at any
given time, and that at present the northern and western channel is
the main channel on this basis" (Memorial of Botswana, Vol. 1,
p. 52, paras. 116-117).
10. Therefore, Botswana and Namibia are not in agreement as to the
meaning of Article III, paragraph 2, of the 1890Anglo-German Treaty.
The Treaty itselfdoes not include a definition of the expression "the centre LE DE KASIKILI/SEDU (DU. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1211

et d'établirà cette fin, lorsque cela étaitpossible, des frontières
solides, stables et visibles entre ces deux Etats. Sur le tronçon
du cours du Chobe en cause en l'espèce, la rivesud de la rivière
(y compris la rive droite du chenal sudà proximité de I'îlede
Kasikili) est forméepar l'arêtedu Chobe, qui est un escarpe-
ment d'une cinquantaine de mètres de haut, stable et bien
visible, représentésur la carte utilisée par les négociateurs,
alors que le chenal nord se trouve au milieu de la plainenon-
datio; du Zambèze et est submergéet invisible pendant près

de six mois chaque année.
- Le sens ordinaire du mot «chenal» d'un cours d'eau est celui
d'un conduit où s'écoulentles eaux de celui-ci et les mots(the-
na1principal»visent dans leur sens ordinaire lechenal qui trans-
porte la fraction la plus importante des eaux du cours d'eau.
- 11ressort des caractéristiques topographiques, hydrologiques et
géomorphologiques du Chobe et de la plaine d'inondation du
Zambèze que le chenal sud déplacenon pas simplement la plus
grande partie, mais la quasi-totalité des eaux de la rivière à

proximité del'îlede Kasikili, alors que l'écoulementlongitudi-
nal des eaux dans le chenal nord est quasi inexistant et que
celui-ci n'est guère plus qu'un chenal résiduel de la plaine
d'inondation du Zambèze. ))
Par suite, la Namibie conclut:

«Tous les élémentsd'interprétation tendent donc vers une seule et
unique conclusion: le chenal sud est le chenal principal du Chobe
autour de l'îlede Kasikili. Partant, le traitéattribue I'îlea la Nami-
bie.))(Mémoire de la Namibie, vol. 1,p. 58, par. 162-163.)

9. Le Botswana n'accepte pas la conclusion de la Namibie. A son avis,

«le chenal principal du Chobe au voisinage de I'île de Kasikilil
Sedudu est le chenal nord et ouest, la position du Gouvernement du
Botswana se fondant essentiellement sur le critèrede la navigabilité.
En l'absence d'éléments de preuve contraires, il faut présumer que
c'était aussi le chenal principal au moment de la conclusion de
l'accord anglo-allemand.))

Toutefois, le Botswana adopte aussi une position subsidiaire qui est
que
((conformément à l'objet et au but de l'accord, le chenal principal est

àtout moment donné constituépar la voie navigable et qu'en consé-
quence. actuellement, le chenal nord et ouest est lechenal principal))
(mémoiredu Botswana, vol. 1, p. 52, par. 116-117).

10.Par conséquent, le Botswana et la Namibie ne donnent pas le

même sens a l'article III, paragraphe 2 du traitéanglo-allemand de 1890.
Le traitélui-même nedonne pas de définitionde l'expression «centre du1212 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISS. P.PARRA-ARANGUREN)

of the main channel (der Thalweg des Hauptlaufes) of the Chobe River",
nos do any other of its provisions provide by implication guidelines that
might be useful for this purpose. Consequently, according to customary

international law as expressed in Article 31 of the Vienna Convention on
the Law of Treaties of 23 May 1969,the Court has to determine theean-
ing of such expression "in good faith", taking into account the rules of
interpretation provided by the ConventionOil Platforms (Islamic Repub-
lic of Iran v. United States of Americu), Prelcminary Objection, Judg-
ment, I.C.J. Reports1966 (II), p. 812, para. 23.)

III. SUBSEQUEP NTACTIC ES ARULE OF TREATY INTERPRETATION

Il. As a general rule of interpretation, Art3c1,paragraph 3 (b), of
the 1969Vienna Convention on the Law of Treaties provides that account
shall be taken, together with the context, of "any subsequent practice in
the application of the treaty which establishes the agreement of the
parties regarding its interpretation".

12. The International Law Commission has acknowledged that "[tlhe
probative value of subsequent practice is well recognized", because it
shows how the intention of the parties has been put into effect.More-
over, the interpretation of treaties by reference to subsequent practice is

well established in the jurisprudence of international tribunals and, more
especially, of the World Court(Yearbook of the InternationcrlLaw Com-
mission, 1964,Vol. II, p. 59).
13.Thus the Permanent Court of International Justice, in its Opinion
on the Competence of the IL0 in Regard to International Regulation of
the Conditions of Labour of Persons Employed in Agriculture. stated:

"If there were any ambiguity, the Court might, for therpose of

arriving at the true meaning,consider the action which has been
taken under the Treaty." (1922, P.C.I.J., Series B, No. 2, p. 39.)
14. Similarly, this Court, in the Corfu Channel case found that

"The subsequent attitude of the Parties shows that it wasnot their
intention, byentering into the Special Agreement, to preclude the
Court from fixingthe amount of the compensation." (I.C.J.Reports
1949, p. 25.)
15.Later pronouncements of this Court have confirmed the impor-

tance of subsequent practice for the interpretation of a Treaty, as is indi-
cated in paragraph 50 of the Judgment.
16. Subsequent practicecan be relevant either as a means of establish-
ing the parties' agreement to the Treaty's interpretation or in order to
shed light on their original intentions. It is possible that the conduct of LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1212

chenal principal (der Thuhveg des Hauptlaufes) du Chobe», et aucune
autre de ses dispositions ne donne implicitement d'indication utile aux
fins de cette définition.Par suite, conformément au droit international
coutumier tel que l'exprime l'article31 de la convention de Vienne sur le
droit des traités adoptée le 23 mai 1969, la Cour doit déterminer «de
bonne foi» le sens de ladite expression, compte tenu des règlesd'inter-
prétation définiespar la convention (Plates-formes pétrolières (Répu-
blique islumique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique), exception prélimi-
nairc, arrêt,C.I.J. Recueil 1966 (II), p. 812, par. 23).

III. LA CONDUITE ULTÉRIEUREMENT SUIVIE EN TANT QUE RÈGLE D'INTER-
PRÉTATION DES TRAITÉS

11. En énonçant une règle générale d'interprétation, la convention de
Vienne de 1969 sur le droit des traitésdispose à l'article 31, paragraphe
3 b), qu'il doit êtretenu compte en mêmetemps que du contexte «de

toute pratique ultérieurement suivie dans l'application du traité par
laquelle est établi l'accord des partiesa l'égardde I'interprétation du
traité)).
12. La Commission du droit international a admis que «[l]a force pro-
bante de la pratique ultérieure estgénéralement reconnue)),parce que
ladite pratique montre comment l'intention des parties a étémise en
Œuvre. En outre, la jurisprudence des tribunaux internationaux et tout
particuliérementde la Cour mondiale interprète trèsvolontiers les traités
par référence àla pratique ultérieurementsuivie (Annuaire de lu Commis-
sion du droit international, 1964,vol. II, p. 60).
13. C'est ainsique la Cour permanente de justice internationale, dans

l'avis qu'elle a rendu sur laompétencede l'OIT pour la réglementation
internationale des conditions du tru\mil des personnes employées dans
l'ugriculture, dit ce:i
«Si une équivoqueavaitexisté,la Cour,en vue d'arriver à établirle
sens véritabledu texte, aurait pu examiner la manière dont le Traité
a été appliqué. [Avis consultut$ 1922, C.P.J.I. sérieB no2, p. 38.)

14. De même,dans l'affaire du Détroit de Corfou, la Cour actuelle a
dit ceci:

((11ressort de l'attitude ultérieuredes Parties que leur intention,
lorsqu'elles ont conclu le compromis, n'étaitpas d'empêcher laCour
de fixerle montant de l'indemnité. »(C.I.J. Recueil 1949, p. 25.)

15. Comme ellel'indique au paragraphe 50de l'arrêt,la Cour, dans les

décisions qu'ellea adoptéespar la suite, a confirmé quelleimportance il
convient d'accorder àla pratique ultérieurepour interpréter un traité.
16. La conduite ultérieurement suivie peut êtreutile soit pour établir
que les parties s'entendent sur I'interprétationdu traité,soit pour éclairer
leur intention initiale.l est possible que la conduite des parties déroge1213 KASIKILI/SEDU IDUAND (DISS .P.PARRA-ARANGUREN)

the parties rnay have been at variance with the provisions of the Treaty,
showing disregard for the natural and ordinary meaning of its terms. In

such cases, "there rnay be a blurring of the line between the interpretation
and the amendment of a treaty by subsequent practice", even though
these two processes are legally quite distinct. In the opinion of the Inter-
national Law Commission this was exactly what happened in the Temple
of Preah Vihearcase, where the line of action taken by the parties was
not reconcilable with the natural and ordinary meaning of the terms of
the Treaty. The Commission therefore concluded that the effect of sub-
sequent practice on that occasion was to amend the Treaty ( Yearbook of
the International Law Commission, 1964,Vol. II, p. 60).
17. The practice of an individual State rnay have special cogency when
it relates to the performance of an obligation whichparticularly concerns
that State, as was stated by the Court in its Opinion on theInternational
Status of South West Africa (I.C.J. Reports 1950, pp. 135-136). How-

ever, subsequent practice as ameans of interpretation of bilateral treaties
requires the agreement of both parties. Such agreement rnay be expressed
through their joint or parallel positive activity, but it rnay also becer-
tained from the activity of only one of the parties, where there isassent or
lack of objection by the other party. As is remarked by the International
Law Commission, it is sufficient that the other party accepts that practice
(United Nations Conference on the LUIVof Treuties - First and Second
Sessions: Documents of the Conference (3968-1969), p. 42, para. 15).

18. The importance of the silenceof one party in determining the sub-
sequent practice of the parties to a bilateral treaty was admitted very
recently in theBeagle Channelarbitration case, where it was stated:

"the Court cannot accept the contention that no subsequent con-
duct, including acts of jurisdiction,can have probative value as a
subsidiary method of interpretation unless representing a formally
stated or acknowledged 'agreement' between the Parties. The terms
of the Vienna Convention do not specify the ways in which 'agree-
ment' rnay be manifested. In the context of the present case the acts
ofjurisdiction were not intended to establish a source of title inde-
pendent to the terms of the Treaty; nor could they be considered as
being in contradiction of those terms as understood by Chile. The
evidence supports the view that they were public and well-known to
Argentina, and that they could only derive from the Treaty. Under

these circumstances the silence of Argentina permits the inference
that the acts tended to confirm an interpretation of the meaning of
the Treaty independent of the acts ofjurisdiction themselves."(Inter-
national LUWReports, Vol. 52, p. 224, para. 169.) LE DE KASIKILI/SEDU DP. DISS.PARRA-ARANGUREN) 1213

aux dispositions du traité,montrant qu'il n'est pastenu compte du sens
normal et ordinaire des termes utilisés.En pareil cas,il peut se faire que
la limite qui sépare'interpr4tationdu traitéde sa modijication par la pra-
tique ultérieure tendea s'effacer)), bien qu'il s'agissede deux processus
tout à fait distincts. De l'avis de la Commission du droit international,
c'est exactement ce qui s'est produit dans l'affaire duTemple de Préah
Vihéar,dans laquelle la pratique ultérieure desparties n'étaitpas compa-
tible avec le sens naturel et ordinaire des termes du traité. La Commission
a donc conclu que la pratique ultérieure en l'occurrence avait eu pour
effet de modifier le traitéAnnuaire de la Co~nmissiondu droit interna-
tional,1964,vol. II, p. 61).
17. La pratique d'un Etat déterminé peut avoirun poids particulier

quand elle a trait a l'exécutiond'une obligation qui concerne spéciale-
ment ledit Etat, comme la Cour le dit elle-mêmedans l'avis qu'elle a
rendu sur le Statut itzternational du Sud-Ouest africain (C.I.J. Recueil
1950, p. 135-136).Toutefois, pour que la conduite ultérieure puisse servir
à interpréterdes traités bilatéraux,il faut que les deux parties souscrivent
ensemble àladite conduite. L'accord peut s'exprimer par une action posi-
tive conjointe ou parallèle, mais il peut aussi êtreconstatédans l'activité
de I'une des parties seulement dès lors que l'autre partie donne son
consentement ou n'émetpas d'objection. Comme la Commission du droit
international le fait observer, il suffit que cette autre partie accepte la pra-
tique en question (Documents ofjciels de la conférencedes Nations Unies
sur le droit des traité- première et seconde sessions: documents de la
conf6rence (1968-1969), p. 42, par. 15).

18. L'importance que revêtle silence de I'une des parties quand il
s'agit d'établirquelle conduite adoptent ultérieurement les parties à un
traité bilatéral a étéreconnue tout récemmentlors de l'arbitrage rendu
dans l'affaire duCanal de Beagle, quand il est dit ceci:

«la Cour ne peut pas accepter la thèse suivant laquelle la conduite
ultérieure,y compris des actes de juridiction, ne peut pas avoir de
valeur probante en tant que mode d'interprétation subsidiaire sauf si
ellefait l'objet d'un «accord» déclaréou reconnu formellement entre
les Parties. Les dispositions de la convention de Vienne ne précisent
pas les modalités suivant lesquelles l'«accord» peut se manifester.
Dans le cadre de la présente affaire,les actes dejuridiction n'étaient

pas censés créerune source de titre qui fût indépendante des dispo-
sitions du traité; ces actes ne pouvaient pas non plus êtreconsidérés
comme contraires à ces dispositions tel que le Chili les comprenait.
Les élémentsde preuve confortent l'idéeque ces actes étaient no-
toires et bien connus de l'Argentine et qu'ils nepouvaient procéder
que du traité. Dans ces conditions, le silence de l'Argentine auto-
riseà déduire que les actes en question tendent à confirmer une
interprétation du sens du traité qui est indépendante des actes de
juridiction eux-mêmes. » (International Laiv Reports, vol. 52, p. 224,
par. 169.)[Traduction du Greffe. /1214 KASIKILI/SEDU DLAND (DISS. P.PARRA-ARANGUREN)

IV. SUBSEQUEN PRACTIC EF THE PARTIES IN THE APPLICATIO OF THE
1890ANGLO-GERMA AGREEMENT

19. Namibia maintains that the subsequent conduct of the parties to
the 1890Anglo-German Agreement demonstrates that Kasikili Island is
part of Namibia. It bases its contention upon
"The control and use of Kasikili Island by the Masubia of Caprivi,

the exercise ofjurisdiction over the Island by the Namibian govern-
ing authorities, and the silence by Botswana and its predecessors
persisting for almost a century with full knowledge of the facts."
(Memorial of Namibia, Vol. 1.p. 60, para. 166.)
20. During the oral pleadings Namibia insisted on "continued pres-
ence of the Masubia on the ground under colonial rule plus the accept-

ance of the situation by Botswana's predecessors" (CR99110, p. 27,
para. 21 (Chayes)). In its opinion, the Masubia people of the Eastern
Caprivi occupied the Island from 1890 to at least until the mid-1960s.
Then, from the time the German officials first arrived in 1909, they and
their successors incorporated the local institutions of the Masubia into
the structure of colonial governance, using them as instruments for
implementing their suzerainty; and the activities carried on by them were
under the rule of the indigenous Masubia authorities- the chief, his
kuta and the indunas, or local representatives. All these facts were well
known to the Bechuanaland authorities just across the river in Kasane,
but they made no objection or protest, at least until 1948. From this

interactive pattern, Namibia concludes, itan be seen that the parties
were in agreement that the Treaty, properly interpreted, attributed
Kasikili Island to Namibia (CR 9911, p. 41, para. 6 (Chayes)).

21. In this respect Botswana observes that

"The Namibian argument based upon subsequent conduct of the
parties rests upon extraordinarily weak foundations, both inep-
tual and in factual terms. The conceptual foundations are weak
because in truth, the 'subsequent conduct' argument of Namibia is
an argument grounded in acquisitive prescription.us, subsequent
conduct, which relates to an existinggal instrument, is opposed to
prescription, thepurpose of which is to destroy and to supplant a
pre-existing title." (Reply of Botswana, Vol.. 55, para. 157.)

22. However, Namibia states very clearly in its Memorial that the sub-
sequent conduct of the parties to the 1890Anglo-German Agreement
"is relevant to the present controversy in three distinct ways. In

the first place, it corroborates the interpretaof the Treaty. ..
Second, it gives rise to a second and entirely independent basis for
Namibia's claim under the doctrines concerning acquisition of terri-IV. LA PRATIQUE ULTERIEURE DES PARTIES DANS L'APPLICAT~ON DE L'AC-

CORD ANGLO-ALLEMAND DE 1890

19. La Namibie soutient que la conduite ultérieurement suivie par les
partiesà l'accord anglo-allemand de 1890 démontreque I'îlede Kasikili
fait partie de la Namibie. Elle se fondeà cet égardsur
«[le]contrôleet ...l'utilisation de I'îlede Kasikili par les Masubia du
Caprivi, l'exercicede la juridiction sur I'îlepar les autorités gouver-
nant la [Namibie] et le silence gardé par le Botswana et ses prédé-
cesseurs pendant près d'un siècleen pleine connaissance de cause))

(mémoire dela Namibie, vol. 1, p. 60, par. 166).
20. Au cours de la procédure orale, la Namibie a insistésur «la pré-
sence constante des Masubia sur le terrain pendant le régimecolonial, à
laquelle il faut ajouter l'acceptation de la situation par les prédécesseurs
du Botswana)) (CR99110, p. 27, par. 21 (Chayes)). Pour la Namibie, les
Masubia du Caprivi oriental ont occupél'îledepuis 1890jusqu'au milieu
des années soixanteau moins. Depuis l'époqueou ils sont arrivéspour la

première fois en 1909, les représentants officiels allemands et leurs suc-
cesseurs ont intégréles institutions locales des Masubia dans la structure
mêmedu régimecolonial, et s'en sont servi comme d'instruments de leur
suzeraineté;et les activités qu'ilsmenaient étaient placéessous l'autorité
des autochtones Masubia - c'est-à-dire leur chef, skuta et lesindunas,
ou représentants locaux. Tous ces faits étaient parfaitement connus des
autorités du Bechuanaland installées juste de l'autre côté du fleuve à
Kasane, mais elles n'ont formulé aucune objection ni protestation, tout
au moins jusqu'en 1948. Cette interactivité permet à la Namibie
de conclure que les parties s'accordaientà considérer quele traité,quand
on l'interprétait correctement, attribuait I'île de Kasikili la Namibie
(CR99111, p. 41, par. 6 (Chayes)).

21. A ce sujet, le Botswana fait observer ceci:
«La thèse développée par la Namibie sur la base de la conduite
ultérieure des parties repose sur des fondements extrêmement peu
solides du point de vue aussi bien conceptuel que factuel. L'assise
conceptuelle est faible parce que «la conduite ultérieure)) invoquée
par la Namibie est en véritéun argument reposant sur la prescrip-
tion acquisitive. La conduite ultérieure,qui est liée un instrument

juridique existant, s'oppose A la prescription, qui a pour objet de
défaireet de remplacer un titre préexistant.(Répliquedu Botswana,
vol.1, p. 55, par. 157.)
22. Pourtant, la Namibie dit trèsclairement dans son mémoireque la
conduite ultérieuredes parties au traitéanglo-allemand de 1890

«est pertinente dans la présente controverse pour trois raisons dis-
tinctes. En premier lieu, ellecorrobore l'interprétation du traitéEn
deuxième lieu,elle constitue un deuxièmefondement totalement dis-
tinct de la revendication de la Namibie en vertu des doctrinesoncer-1215 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISS . P. PARRA-ARANGUREN)

tory by prescription, acquiescence and recognition. Finally, the con-
duct of the parties shows that Namibia was in possession of the

Island at the time of termination of colonialule, a fact that is per-
tinent to the application of the principle ofi possidetis." (Memo-
rial of Namibia, Vol. 1, p. 60, para. 165.)
23. Furthermore, in its oral pleadings Namibia stressed that "its pri-
mary claim is that its title is treaty based"; that its claim "of prescription
is asserted in the alternative"; and that

"the very meaning of the ability to plead in the alternative is that
each claim is to be considered in its own right, and no inference is to
be taken against one claim because an inconsistent claim has been
pleaded" (CR99110, p. 24, para. 10(Chayes)).

24. Consequently, the Court has to examine in the first place the pri-
mary claim presented by Namibia, i.e., subsequent practice as a means
of interpretation of the 1890 Anglo-German Agreement; and only if
Namibia's primary claim fails will the Court have to examine the alter-
native claims, based upon prescription, acquiescence and recognition,
presented by Namibia to demonstrate its ownership of Kasikili Island.

25. Following the outbreak of the First World War, the Eastern
Caprivi was occupied in September 1914 without resistance by para-
military police from Southern Rhodesia. Captain Eason was appointed
Special Commissioner for the Caprivi Zipfel on 6 November 1914 and
took up his duties at Schuckmannsburg on 20 November. As stated in
the Resident Commissioner's Report on the Administration of the Caprivi
Zipfel during the period 1914to 31 March 1922,"It was not desired that
authority should be asserted to a greaterxtent or over a wider area than

was absolutely essential." (Memorial of Namibia, Ann. 52, p. 203.)

26. By Article 119 of the Treaty of Peace signed at Versailles on
28 June 1919.Germany renounced in favour of the Principal Allied and
Associated Powers al1her rights over her overseas possessions, including
therein German South West Africa.
27. Article 22, paragraph 1, of the League of Nations Covenant pro-
vided that:

"To those colonies and territories which as a consequence of the
late war have ceased to be under the sovereignty of the States which
formerly governed them and which are inhabited by peoples not yet
able to stand by themselves under the strenuous conditions of the ▯ LDE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1215

nant l'acquisition de territoires par prescription, acquiescement et
reconnaissance. En dernier lieu, la conduite des parties montre que

la Namibie étaiten possession deI'îlà l'époqueoù il a été misfin au
régimecolonial, fait qui est pertinent pour l'application du principe
de l'utipossidetis.Mémoire dela Namibie, vol. 1,p. 60, par. 165.)
23. En outre, au cours de la procédure orale, la Namibie a souligné
que «sa thèse principale estque son titre est d'origine conventionnelle»,

et qu'elle n'avance l'argument «de la prescription ...qu'à titre subsi-
diaire» et que
«l'objet mêmede la facultéde plaider une thèse puis uneautreà titre
subsidiaire est que chacune des thèses doit êtreconsidéréepour ce
qu'elle vaut et quel'on ne peut tirer aucune conclusionà l'encontre

d'une thèse au seul motif qu'une thèse divergente a égalementété
plaidée» (CR 99110, p. 24, par. 10(Chayes)).
24. Par suite, la Cour doit examiner en premier lieu la demande prin-
cipale présentéepar la Namibie, c'est-à-dire qu'elle doit examiner la

conduite ultérieurement suivie pour interpréter l'accord anglo-allemand
de 1890; et ce n'est que si cette demande principale de la Namibie
n'aboutit pas que la Cour devra examiner les demandes subsidiaires,fon-
dées sur la prescription, l'acquiescement et la reconnaissance, que la
Namibie présentepour démontrer que l'îlede Kasikili lui appartient.

V. LE MANDAT RELATIF AU SUD-OUES ATFRICAIN (NAMIBIE)

25. A la suite de l'ouverture des hostilités,lors de la première guerre
mondiale, le Caprivi oriental a étoccupéen septembre 1914par la police

paramilitaire de Rhodésie du Sud qui n'a rencontréaucune résistance.Le
capitaine Eason a été nommé le 6 novembre 1914 commissaire spécial
pour la bande de Caprivi et a pris ses fonctions le 20 novembreSchuck-
mannsburg. Comme il est indiquédans le rapport du commissaire rési-
dent pour l'administration de la bande de Caprivi pendant la période
allant de 1914au 31 mars 1922, «on ne voulait pas exercer l'autoritéplus
fortement ni sur une plus grande étendue qu'il n'était absolumentindis-
pensable))(mémoire de la Namibie, vol. IV, annexe 52, p. 203).
26. Aux termes de l'article 119 du traité de paix signéà Versailles le
28juin 1919,l'Allemagne a renoncé en faveur des principales Puissances

alliéeset associéesà tous ses droits sur ses possessions d'outre-mer, y
compris le Sud-Ouest africain allemand.
27. L'article 22, paragraphe 1 du Pacte de la Société desNations dis-
pose :
((Les principes suivants s'appliquent aux colonies et territoires

qui,à la suite de la guerre, ont cesséd'être sousla souverainetédes
Etats qui les gouvernaient précédemment etqui sont habitéspar des
peuples non encore capables de se diriger eux-mêmesdans les condi- modern world, there should be applied the principle that the well-
being and development of such peoples form a sacred trust of civi-
lisation and that securities for the performance of this trust should
be embodied in this Covenant."
28. Paragraph 2 of the same Article 22 added that:

"The best method of giving practical effect to this principle is that
the tutelage ofsuch peoples should be entrusted to advanced nations
who by reason of their resources, their experience or theireographi-
cal position can best undertake this responsibility, and who are will-
ing to accept it, and that this tutelage should be exercisedby them as
Mandatories on behalf of the League."

29. Article 22, paragraph 6, of the League of Nations Covenant
supplemented the mandate's system by providing that
"territories, such as South-West Africa and certain of the South
Pacific Islands, which, owing to the sparseness of their population,
or their small size, or their remoteness from the centres of civilisa-
tion, or their geographical contiguity to the territory of theanda-

tory, and other circumstances, can be best administered under the
laws of the Mandatory as integral portions of its territory, subject to
the safeguards above mentioned in the interests of the indigenous
population".
30. Furthermore, Article 22 provided that the Mandatory shall render
to the Council of the League of Nations an annual report in reference to
the territory committed to its charge (para. 7); that a permanent Com-
mission shall beconstituted to receiveand examine the annual reports of
the Mandatories and to advise the Council on al1matters relating to the
observance of the mandates (para. 9); and that

"The degree of authority, control, or administration to be exer-
cised by the Mandatory shall, if not previously agreed upon by the
Members of the League, be explicitly defined in each case by the
Council." (Para. 8.)

31. The Principal Allied and Associated Powers agreed that a Man-
date over the territory which formerly constituted the German Protector-
ate of South West Africa should be conferred upon His Britannic
Majesty, to be exercised on his behalf by the Government of the Union
of South Africa. His Britannic Majesty, for and on behalf of the Govern-
ment of the Union of South Africa, agreed to accept the Mandate and
undertook to exercise it on behalf of the League ofNations in accordance
with the terms defined by its Council on 17 December 1920, which con-
firmed a prior decision taken on 7 May 1919.
32. According to the terms of South West Africa's mandate, the con-
sent of the League of Nations was required for the modification of its
provisions (Art. 7, para. 1); and the authority of the Union of South
Africa was defined by Article 2 as follows: I'LDE KASIKILI/SEDU DO. DISS.PARRA-ARANGUREN)1216

tions particulièrement difficilesdu mondemoderne. Le bien-être etle
développement deces peuples forment une mission sacréede civilisa-
tion, et il convient d'incorporer dans le présentPacte des garanties
pour l'accomplissement de cette mission. »

28. Le paragraphe 2 du mêmearticle 22 ajoute:
((La meilleure méthode deréaliserpratiquement ce principe est de
confier la tutelle de ces peuples aux nations développéesqui, en rai-
son de leurs ressources, de leur expérienceou de leur position géo-

graphique, sont le mieux à mêmed'assumer cette responsabilité, et
qui consentent a l'accepter; elles exerceraient cette tutelle en qualité
de mandataires et au nom de la Société. »
29. Et le paragraphe 6 du mêmearticle 22 du Pacte de la Société des
Nations précisele régime desmandats en indiquant que

«des territoires tels que le Sud-Ouest africain et certaines îles du
Pacifique austral..par suite de la faible densité de leur population,
de leur superficie restreinte, de leur éloignement descentres de civi-
lisation, de leur contiguïté géographiqueau territoire du mandataire
ou d'autres circonstances ne sauraient êtremieux administrés que
sous les lois du mandataire, comme une partie intégrante de son ter-
ritoire, sous réserve desgaranties prévues plushaut dans l'intérte
la population indigène.)

30. En outre, l'article 22 prévoit que le mandataire doit envoyer au
Conseil un rapport annuel concernant les territoires dont il a la charge
(par. 7); qu'une commission permanente sera chargée de recevoir et
d'examiner les rapports annuels des mandataires et de donner au Conseil
son avis sur toutes questions relativesl'exécution desmandats (par.9);
et que

«Si le degréd'autorité, de contrôle ou d'administrationà exercer
par le mandataire n'a pas fait l'objet d'une convention antérieure
entre les Membres de la Société,il sera expressémentstatué sur ces
points par le Conseil.» (Par. 8.)

31. Les principales Puissances alliéeset associéesont accepté qu'un
mandat sur le territoire de l'ancien protectorat allemand du Sud-Ouest
soit confiéà Sa Majestébritannique et exercé enson nom par le gouver-
nement de l'Union sud-africaine. Sa Majesté britannique a acceptépour
le gouvernement de l'Union sud-africaine et en son nom ledit mandat
et s'est engagée à l'exercer pour le compte de la Société desNations
conformément aux dispositions arrêtéespar le Conseil de la Sociétéle
17 décembre 1920, lesquelles ont confirméune décision priseantérieu-
rement le 7 mai 1919.

32. Aux termes du mandat sur le Sud-Ouest africain, il fallait deman-
der à la Société desNations son consentement pour pouvoir modifier ses
dispositions (art. 7, par. 1); et le pouvoir de l'Union sud-africaine était
définià l'article 2 comme suit:1217 KASIKILI/SEDU DLUAND (DISS .P. PARRA-ARANGUREN)

"The Mandatory shall have full power of administration and
legislation over the territory subject to the present Mandate as an
integral portion of the Union of South Africa, and may apply the
laws of the Union of South Africa to the territory, subject touch
local modifications as circumstances may require.

The Mandatory shall promote to the utmost the material and
moral well-being and the social progress of the inhabitants of the

territory subject to the present Mandate."League of Nations. Ofj-
cial Journal, January-Februaïy 1921, p. 89.)
33. Until 31 December 1920the Strip was ruled as a defacto part of
the Bechuanaland Protectorate under martial law. Martial law in the
Eastern Caprivi was ended by the Governor General's Proclamation

No. 12of 1922and High Commissioner's Proclamation No. 23 of 1922,
which placed the Strip under civilian Protectorate authority retroactively
from 1 January 1922 (Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III,
Ann. 19, p. 257.)

34. The Mandate of the Union of South Africa over South West
Africa continued after the dissolution of the League of Nations, even
though it was expected that the mandated territories, which had not
become independent, should be placed under the trusteeship system of
the United Nations. Notwithstanding, among the mandatory powers,
only the Union of South Africa refused to do this in respect to theerri-
tory of South West Africa, because in its opinion the mandate had

lapsed. As a result, the Union of South Africa not only refused to comply
with its obligations under the Covenant and the Mandate but also
invoked the special position of the mandated territory as a reason for
making it a part of its territory. For this reason the General Assembly of
the United Nations decided to request an Advisory Opinion from the
Court on the matter.
35. The Court stated in its Advisory Opinion of 11June 1950that the
creation of the Mandate:

"did not involve any cession of territory or transfer of sovereignty to
the Union of South Africa. The Union Government was to exercise
an international function of administration on behalf of the League,
with theobject of promoting the well-being and development of the
inhabitants."(1.C.J. Reports 1950, p. 132.)

36. Furthermore, the Court added that
(a) "the Union of South Africa continues to have the international obli-
gations stated in Article 22 of the Covenant of the League of
Nations and in the Mandate for South-West Africa" (ibid., p. 143);

(6) "the General Assembly of the United Nations is legally qualified to
exercisethe supervisory functions previously exercised bythe League ((Le mandataire aura pleins pobvoirs d'administration et de Iégis-
lation sur le territoire faisant l'objet du mandat. Ce territoire sera
administré selon la Iégislationdu mandataire comme partie inté-
grante de son territoire. Le mandataire est en conséquenceautorisé
appliquer aux régions soumisesau mandat la Iégislationde l'Union
de l'Afrique du Sud, sous réservedes modifications nécessitéespar
les conditions locales.
Le mandataire accroîtra par tous les moyens en son pouvoir, le

bien-être matérielt moral ainsi que le progrès social des habitants
du territoire soumis au présentmandat.))(Société desNations,Jour-
nalofJicie jnvier-février 1921,p. 89.)
33. Jusqu'au 31 décembre1920,la bande de Caprivi a étéadministrée
comme si elle faisait facto partie du protectorat du Bechuanaland sou-
mis à la loi martiale. Dans la partie orientale du Caprivi, ce régimede la

loi martiale a pris fin sous l'effetde la proclamation du gouverneur géné-
ral no 12 de 1922et de la proclamation du Haut Commissaire no 23 de
1922,qui a placéla bande de Caprivi sous l'autorité civile du protectorat
rétroactivement à compter du 1"'janvier 1922 (mémoiredu Botswana,
annexes, vol.III, annexe 19, p. 257).
34. L'Union sud-africaine a continuéd'exercer son mandat sur le Sud-
Ouest africain après la dissolution de la Société desNations, alors que
l'on s'attendait pourtanàce que les territoires sous mandat qui n'étaient
pas devenus indépendants soient placés sous le régime de tutelle des
Nations Unies. Parmi les puissances mandataires, l'Union sud-africaine
fut la seule refuser d'opérerce transfert pour le territoire du Sud-Ouest
africain, parce qu'à son avis le mandat étaitdésormaiscaduc. Par suite,

l'Union sud-africaine non seulement a refuséde s'acquitter de ses obliga-
tions en vertu du Pacte et du Mandat mais a égalementinvoquéla situa-
tion particulière du territoire sous mandat pour l'annexer son propre
territoire. C'estpourquoi l'Assemblée générale dNsations Unies a décidé
de demander à la Coiir un avis consultatif sur la question.

35. Dans l'avis consultatif qu'elle a rendu le 11juin 1950, la Cour a
déclaréque la création de l'institution du mandat

((n'impliquait ni cession de territoire ni transfert de souveraàneté
l'union sud-africaine. Le gouvernement de l'Union devait exercer
une fonction d'administration internationale au nom de la Société
des Nations aux fins de favoriser le bien-êtreet le développementdes
habitants. (C.1.J. Recuei 1950, p. 132.)

36. La Cour ajoutait que
a) «l'Union sud-africaine continueà êtresoumise aux obligations inter-
nationales énoncéesà l'article 22du Pacte de la Société Nations et
au Mandat pour le Sud-Ouest africain)) (ibid., p. 143);

6) «l'Assembléegénérale desNations Unies est fondéeen droit à exercer
les fonctions de surveillance qu'exerçait précédemment la Société des of Nations with regard to the administration of the Territory, and
that the Union of South Africa is under an obligation to submit to
supervision and control of the General Assembly and to render
annual reports to it" (I.C.J. Reports 1950, p. 137);
(c) "It is clear that the Union has no competence to modify unilaterally
the international status of the Territory or any ofhese international
rules", as "is shown by Article 7 of the Mandate, which expressly
provides that the consent of the Council of the League of Nations is
required for any modification of the terms of the Mandate" (ibid,
p. 141);

and
(d) "that the Union of South Africa acting alone has not the compe-
tence to modify the international status of the Territory of South-
West Africa, and that the competence to determine and modify the
international status of the Territory rests with the Union of South
Africa acting with the consent of the United Nations" (ibid.,

p. 144).

37. The Union of South Africa's mandate over South West Africa was
terminated by United Nations General Assembly resolution 2145 (XXI)
of 1966; and its resolution 2248 (S-V) of 1967entrusted the administra-
tion of South West Africa, with the new name of Namibia, to the Secu-
rity Council. Furthermore, due to its refusal to withdraw from the terri-
tory, Security Council resolution 176 of 1970 declared South Africa's
presence in Namibia (South West Africa) illegal; that illegality was con-
firmed by the Court in its Advisory Opinion of 26 January 1971on the
Legal Consequencesfor States of the Continued Presenceof South Africa
in Namibia (South West Africu) notivithstunding Security Council reso-
lution 276 (1970) (1.C.J. Reports 1971, p. 58, para. 113)(seepara. 69 of
the Judgment).
38. The legal position of the Union of South Africa did not change
during the existence of its mandate over South West Africa. The powers
of the Union of South Africa over the territory of South West Africa
were only administrative and legislative; they had to be exercisedto "pro-
mote to the utmost the material and moral well-being and the social
progress of the inhabitants". Acts of disposition of the territory of the
mandate were outside the powers conferred on the Mandatory. There-

fore, the Union of South Africa could not undertake such acts.

39. The British authorities acknowledged this legal situation in 1949,
when examining the possibility of entering into an agreement with the
Union of South Africa, as Mandatory Power for South West Africa,
regarding Kasikili Island. Mr. G. H. Baxter, Commonwealth Relations
Office, examined the proposal made by the Union of South West Africa
to set the boundary in the southern channel of the Chobe River, guaran-
teeing the use of the northern channel for navigation by the inhabitants ▯ LEDE KASIK~LI/SEDU (DPUDISS.PARRA-ARANGUREN)1218

Nations en ce qui concerne l'administration du territoire et que
l'Union sud-africaine a l'obligation de se prêterà la surveillance de
l'Assembléegénérale etde lui soumettre des rapports annuels» (C.I.J.
Recueil 1950, p. 137) ;
c) ((11est évidentque l'Union n'est pas compétente pour modifier uni-
latéralement le statut international du territoire ou l'une quelconque
de ces règles internationales)), comme il «ressort de l'article 7 du

Mandat, qui dispose expressémentque l'autorisation du Conseil de la
Société desNations est nécessairepour modifier les dispositions du
Mandat)) (ibid., p. 141);
et que

d) «l'Union sud-africaine agissant seule n'est pas compétente pour mo-
difier le statut international du territoire du Sud-Ouest africain et
que la compétencepour déterminer et modifier ce statut appartient
à l'union sud-africaine agissant avec le consentement des Nations
Unies» (ibid., p. 144).

37. L'Assemblée généraldees Nations Unies a mis fin au mandat de
l'Union sud-africaine sur le Sud-Ouest africain par sa résolution 2145
(XXI) de 1966; et elle a confiéau Conseil de sécurité l'administrationdu
Sud-Ouest africain portant désormaisle nouveau nom de Namibie par sa
résolution2248 (S-V) de 1967.En outre, l'Afrique du Sud refusant de se
retirer du territoire, le Conseil de sécurité a déclarque sa présence en
Namibie (Sud-Ouest africain)était illicitedans sa résolution 176de 1970;
cette illicéia étéconfirméepar la Cour dans l'avis consultatif qu'elle a
rendu le 26janvier 1971sur les Conséquencesjuridiques pourles Etuts de
laprésencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest africain)
nonobstant lu résolution276 (1970) du Conseil de sécurité(C.I.J. Recueil

1971, p. 58, par. 113)(voir le paragraphe 69 de l'arrêt).
38. La position juridique de l'Union sud-africaine est demeurée
inchangéependant tout le temps que son mandat sur le Sud-Ouest afri-
cain a existé. Sespouvoirs sur le territoire étaientexclusivement des pou-
voirs administratifs et législatifs;etUnion devait les exercer afin d'«ac-
croîtr[e], par tous les moyens en son pouvoir, le bien-être matériel et
moral ainsi que le progrès social des habitants)).l n'entrait pas dans les
pouvoirs conférésau mandataire de procéder à des actes de disposition
du territoire, et l'Union sud-africaine, par conséquent, ne pouvait pas
procéder à de tels actes.
39. Les autorités britanniques ont compris que telle étaitla situation
juridique en 1949,quand elles ont examinéla possibilitéde conclure un

accord au sujet de l'îlede Kasikili avec'Union sud-africaine en sa qualité
de puissance mandataire pour le Sud-Ouest africain. M. G. H. Baxter
(bureau des relations du Commonwealth) examine alors la proposition
formuléepar l'union sud-africaine qui vise à situer la frontière dans le
chenal sud du Chobe, étant entendu que les habitants et les autorités du1219 KASIKILI/SEDU ILAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

and authorities of the Bechuanaland Protectorate (Letter of 14October
1948 to the High Commissioner's Office in Pretoria, Memorial of
Namibia, Vol. IV, Ann. 63, p. 280; Memorial of Botswana, Annexes,
Vol. III, Ann. 23).

40. Mr. Baxter's Report of 20 October 1949 to Sir Evelyn Baring,
High Commissioner for Basutoland, the Bechuanaland Protectorate and

Swaziland, commented on the international aspect of the matter in the
following terms :
"This is governed largely by the question whether the mandate is
still regarded as effective. It is understood that the viewof the Union

Government is that the mandate has expired. [Mr. Baxter's Report
was prepared in 1950before the Court gave its Advisory Opinion on
thematter.] This view, however, is not universally shared by other
Governments and the position under International Law seems to be
obscure. The mandate is limited, by the preamble and Article 1, to
the territory which formerly constituted the Gerrnan Protectorate of
South West Africa. Bv Article III of an Agr"ement made in 1900
with Germany, the boundary at this point was fixedat the centre of
the main channel of the river and if, as now appears to be the case,
the main channel was at al1material times on the north side of the
island in question, the mandated territory did not include the island.
Under Article 7 of the Mandate no modification could be made

without the consent of the Council of the League of Nations. In so
far as the mandate is still operative, this might be interpreted as
referring to some organ of the United Nations or as making any
adjustment impossible. No doubt it is unlikely that anyone would
raise any objection in the United Nations, especially as the proposa1
is to add to the territory and not in any way to reduce its area, but
the possibility cannot be entirely ignored." (Memorial of Botswana,
Vol. III, Annexes, Ann. 28, p. 288.)

Furthermore Mr. G. H. Baxter added the following observations:

"Article VI of the Agreement of 1900provides that 'the lines of
demarcation traced in Articles to IV shall be subject to rectification
by agreement between the two Powers, in accordance with local
requirements'. It might be argued that this now operates to permit
the boundary to be varied, for the purposes of both international
and municipal law, by agreement between the United Kingdom
Government and the Government of the Union as successor of the
German Government.It is, however, doubtful whether the argument
would be Sound, since rectification would alter what is in fact, the

boundary of the former German Protectorate. As between these two
Governments, Article VI is probably still effective, but we are LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1219

protectorat du Bechuanaland se verraient garantir la possibilitéd'utiliser
le chenal nord pour la navigation (lettre datée du 14 octobre 1948 et
adresséeau cabinet du haut commissaire à Pretoria, mémoirede la Nami-
bie, vol.IV, annexe 63, p. 280; mémoiredu Botswana, annexes, vol. III,

annexe 23).
40. Dans le rapport qu'il adresse le 20 octobre 1949 à sir Evelyn
Baring, au commissaire pour le Basutoland, le protectorat duBechuana-
land et le Swaziland, M. Baxter formule des observations sur l'aspect
international de la question:

((l'aspect international.. dépend enmajeure partie de la question
de savoir si lemandat est toujours considérécommeétant envigueur.
Le gouvernement de l'Union est d'avis que le mandat est arrivé à
expiration. [Ce rapport de M. Baxter a été établin 1950avant que
la Cour ait rendu son avis consultatif sur la question.] Or, ce point
de vue n'est pas universellement partagé par les autres gouverne-
ments et la situation, au regard du droit international, semble com-
plexe. Le mandat est limité,par le préambule et son article 1, au
territoire qui constituait l'ancien protectorat allemand du Sud-Ouest
africain. En vertu de I'articleI d'un accord conclu en 1900 avec
l'Allemagne, la frontière a éfixéeà l'époque comme passantpar la
ligne médiane di1cours principal de la rivière et, comme il s'avère
êtrele cas aujourd'hui, le cours principal se situait concrètement au
nord de l'île en question, le territoire sous mandat ne comprenant
donc pas ladite île. En vertu de I'articleu mandat, aucune modi-

fication n'est réalisablesans le consentement du Conseil deSociété
des Nations. Dans la mesure ou le mandat est toujours en vigueur,
on pourrait en conclure qu'il convient donc d'en référàrun organe
des Nations Unies ou bien qu'il est impossible de procéder à la
moindre rectification de frontière. Certes, il est possible que per-
sonne n'émetted'objection au sein des Nations Unies, puisque la
proposition consiste en un accroissement territorial et non pas en
une réduction, mais l'éventualitéd'une objection ne peut être igno-
rée.))(Mémoiredu Botswana, vol. III, annexes, annexe 28, p. 288.)

Et M. G. H. Baxter ajoute:

((L'article VI de l'accord de 1900 dispose que «les lignes de
démarcation fixéesaux articles 1 à IV pourront êtrerectifiéespar
voie d'accord entre les deux puissances en fonction des nécessités
locales)). On pourrait donc dire que cette disposition autorise
aujourd'hui à modifier la frontière tant aux fins du droit internatio-
nal que du droit interne par voie d'accord entre le Gouvernement du
Royaume-Uni et le gouvernement de l'Union qui est en l'occurrence
le successeur du Gouvernement allemand. Mais il est peu probable
que l'argument soit valable car la rectification reviendraitdifier
ce qui est en fait la frontière de l'ancien protectorat allemand. Entre
ces deux gouvernements, I'article VI est probablement encore en here concerned with a document (theMandate) in which others are
interested." (Memorial of Botswana, Vol. III, Annexes, Ann. 28,
pp. 290-291 .)

41. Taking into account these considerations, the High Commission-
er's Office,Pretoria, concluded that "it would seem desirable to let sleep-
ing dogs lie" (19 November 1949 Letter of High Commissioner, Pretoria,
to V. F. Ellenberger, Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III, Ann. 29,
p. 296). Therefore, the High Commissioner, Sir Evelyn Baring, took the
decision not to enter into a formal agreement, and his letter of 10 May
1951 explained to Mr. Forsyth of the South African Department of
External Affairs, that thematter was "beset by legal complications of an
international nature, the solution of which would entail difficulties dis-
proportionate to the importance of the matter at issue" (Memorial of

Namibia, Vol. IV, Ann. 69, p. 294; Memorial of Botswana, Annexes,
Vol. III, Ann. 30, p. 298;CR99/7, p. 12(Brownlie)).
42. Consequently, after the confirmation of the creation of the man-
date by the Council of the League of Nations in 1920, the Union of
South Africa could not dispose by its own actions of the territory of
South West Africa, as it had been determined by the subsequent practice
of the parties to the 1890Anglo-German Agreement.
43. For this reason, 1914 is the latest date to be taken into account for
the determination of the subsequent practice of the parties, Germany and
Great Britain, in regard to the interpretation of Article III of the 1890
Anglo-German Agreement. In fact, no subsequent practice could exist on
the part of Germany after September 1914when the Eastern Caprivi was
occupied by Southern Rhodesia. During the existence of the mandate the
Union of South Africa had no cornpetence either to enter into any
express agreement to delimit the international boundary of South West

Africa orto modify the prevailing subsequent practice with regard to the
interpretation of Article III of the 1890Anglo-German Agreement. Con-
sequently, in my opinion, the subsequent practice of the parties for the
purpose of interpreting the Anglo-German Agreement should be deter-
mined on the basis of the situation existing up to September 1914.

VI. RELEVAN ETVIDENC SUBMITTED TO THE COURT

44. The Court stated in its Judgment of 26 November 1984that "it is
the litigant seeking to establish a fact who bears the burden of proving it"
(Military and Paramilitarj~Activities in and against Nicaragua (Nicara-
gua v. United States of America), Jurisdiction and Admissibility, Judg-
ment, 1.CJ. Reports 1984, p. 437, para. 101 ;cf. also Frontier Dispute
(Burkina FasolRepublic of Mali), 1C.J. Reports 1986, p. 587, para. 65).

45. For this reason the Court has to examine in the present case the
evidence presented by Namibia to support its contention that the subse-
LDE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1220

vigueur, mais nous nous trouvons ici en présence d'un texte(le man-
dat) qui intéressed'autres parties.émoiredu Botswana, vol. III,
annexes, annexe 28, p. 290-291.)
41. Compte tenu des considérationsci-dessus, le cabinet du haut com-

missaire à Pretoria a conclu qu'il ((vaudrait mieux ne soulever aucun
lièvre))(lettre adresséele 19 novembre 1949 par le haut commissaire à
Pretoria à V. F. Ellenberger, mémoiredu Botswana, vol. III, annexe 29,
p. 296). Le hautcomn~issaire,sir Evelyn Baring, a donc décidéde ne pas
conclure d'accord formel et il a expliquédans une lettre datéedu 10mai
1951 à M. Forsyth, du département des affaires extérieures del'Union
sud-africaine. que la question semblait «de nature à créerde multiples
con~plicationsjuridiques de caractère international dont la solution sou-
lèverait des difficultéshors de proportion avec l'importance de'affaire))
(mémoiredela Namibie, vol. IV,annexe 69,p. 294; mémoiredu Botswana,
annexes, vol.III,annexe 30, p. 298; CR9917, p. 12(Brownlie)).
42. Par suite, une fois confirmée lacréation de l'institution du mandat
par le Conseil de la Société dNations en 1920, l'Union sud-africaine ne

pouvait pas de sa propre initiative modifier le territoire du Sud-Ouest
africain tel qu'il avait étédéterminépar la conduite ultérieurement suivie
des partiesà I'accord anglo-allemand de 1890.
43. C'est pourquoi 1914représentela dernièredate à prendreen consi-
dération pour la détermination de la conduite ultérieure des parties,
l'Allemagne et laGrande-Bretagne, en ce qui concerne l'interprétation de
l'articleIIde I'accord anglo-allemand de 1890.En fait, aucune conduite
ultérieure nepeut exister de la part de l'Allemagne au-delà de septembre
1914, date à laquelle la partie orientale du Caprivi a été occupépar la
Rhodésiedu Sud. Tant que le mandat étaiten vigueur, l'union sud-afri-
caine n'avait pas conlpétenceni pour conclure expressément unaccord
quelconque destiné à délimiter lafrontière internationale du Sud-Ouest

africain ni pour modifier la conduite ultérieurement suivieen ce qui
concerne l'interprétation de l'articleII de l'accord anglo-allemand de
1890.Par suite, àmon sens, il convient de déterminer cetteconduite ulté-
rieure des parties aux fins de l'interprétation deI'accord anglo-allemand
sur la base de la situation qui a existéjusqu'en septembre 1914.

VI. ELÉMENT SE PREUVE PERTINENTS PRÉSENTÉS À LA COUR

44. Dans l'arrêtqu'elle a rendu le 26 novembre 1984,la Cour a dit que
«c'est en définitiveau plaideur qui chercheétablirun fait qu'incombe la
charge de la preuve))(Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua
et contre celui-ci (Nicarugua c. Etats-Unis d'Amérique), compétence et
recevabilité, arrêt,C.I.J. Recuei1984, p. 437, par. 101;voir également
Différend frontalier (Burkina FasolRépublique du Mali), C.I.J. Recueil
1986, p. 587, par. 65).
45. C'est pourquoi la Cour doit examiner en l'espèceles élémentsque
la Namibie a présentés à la Cour pour appuyer sa thèse qui est que la1221 KASIKILI/SEDU ILAND (DISSO. PPARRA-ARANGUREN)

quent practice of the parties to the 1890 Anglo-German Agreement
demonstrates that they considered the southern channel of the Chobe
River as the "main channel" referred to in Article III of that Agreement;
and that, therefore Kasikili Island was part of Namibia. Thus the facts
indicative of the subsequent practice of the parties alleged by Namibia
are:

"(1) continuous, open and notorious occupation and use of the ter-
ritory in question over a long period of time; (2) exercise of sover-
eignty in the territory; and(3) failure of the other Party, having
knowledge of these facts, to object, protest or assert its rights"
(Memorial of Namibia, Vol. 1, p. 66, para. 180).

46. The evidence to be examined is the following:

A. Captain H. V. Eason's Report (1912)

47. An exchange of communications took place between Great Britain
and Germany at the beginning of the century, dealing with the western
half of the southern boundary line established by the 1890 Anglo-
German Treaty. On 14 January 191 1 Lord Harcourt, the Secretary of
State of the Colonial Office, instructed the High Commissioner of the
Bechuanaland Protectorate to gather "al1 available information from
local sources in support of the view that the north channel is the main
channel" of the Chobe river around Kasikili Island (Memorial of
Namibia, Vol. IV, Ann. 44, p. 170).
48. This despatch led toCaptain H. V. Eason's Report, dated 5August
1912,where he States:

"Two miles above the rapids lies Kissikiri Island. Here 1consider
that undoubtedly the North should be claimed as the main channel.

At the Western end of the island the North Channel at this period of
the yearis over one hundred feet wideand eight feet deep, the South
Channel about forty feet wide and four feet deep. The South Chan-
nel is merely a back water, what current there is goes round the
North. The natives living at Kasika in German territory are at
present growing crops on it." (Memorial of Namibia, Vol. IV,
Ann. 47, p. 177.)

49. Even though Captain Eason stated that the northern channel
"should be claimed as the main channel", he acknowledged that "the
natives living atasika in German territory are at present growing crops
on it", meaning Kasikili Island. CLE DE KASIKILI/SEDUDU (OP. DISS. PARRA-ARANCUREN) 1221

pratique ultérieurement suivie par les partiesà l'accord anglo-allemand
de 1890démontre que, pour elles, le chenal sud du Chobe étaitle «chenal
principal)) visé l'article III dudit accord; et que, par conséquent,I'îlede
Kasikili faisait partie de la Namibie. Dans ces conditions, les faits qui
indiquent quelle a étéla pratique ultérieurement suiviepar les parties, tels
que la Namibie les présente,sont les suivants:

«1) l'occupation et l'utilisation continues, publiques et notoires du
territoire en question durant une longue période; 2) l'exercicede la
souveraineté surce territoire et) le défautpour l'autre partie, ayant
connaissance de ces faits, d'élever desobjections ou protestations ou
de faire valoir ses droits)) (mémoire de la Namibie, vol. 1, p. 66,
par. 180).

46. Les élémentsde preuve à examiner sont les suivants:

A. Le rapport du capitaine H. V. Eason (1912)

47. Un échange de communications a lieu entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne au début du siècle,qui porte sur la moitié occidentale de la
démarcation sud établiepar le traitéanglo-allemand de 1890.Le 14jan-
vier 1911, le secrétaired'Etat aux colonies, lord Harcourt, a donné pour
instruction au haut commissaire du protectorat du Bechuanaland de
recueillir «toutes les informations disponibles auprès de sources locales
pour étayerl'idéeque le chenal nord est le chenal principal)) du Chobe
aux alentours de l'île de Kasikili (mémoire de la Namibie, vol. IV,
annexe 44, p. 170).
48. C'est cette dépêchequi est à l'origine du rapport du capitaine
H. V. Eason, lequel est datédu 5 août 1912,dans lequel l'auteur dit ceci:

«A 2 miles [3,20kilomètres] enamont des rapides, on trouve I'île
de Kissikiri.Là, j'estime que c'est sans aucun doute le chenal nord
qui doit être considérécommlee chenal principal. A l'extrémité occi-
dentale de I'île,en cette périodede l'année,le chenal nord est large
de plus de 100 pieds [30,50 mètres] et sa profondeur est de 8 pieds
[2,40mètres], etle chenal sud a une largeur d'environ 40 pieds [12,20
mètres] et uneprofondeur de 4 pieds [1,20mètre]. Cechenal sud est

principalement un bras mort et, s'ily a du courant, celui-ci s'écoule
vers le nord. Les autochtones qui viventà Kasika, en territoire alle-
mand, y pratiquent actuellement la culture.))(Mémoire de la Nami-
bie, vol.IV, annexe 47, p. 177.)

49. Bien que le capitaine Eason ait déclaréque c'étaitle chenal nord
«qui [devait] être considéré commlee chenal principal)), il a reconnu que
les ((autochtones qui vivent à Kasika, en territoire allemand, y prati-
qu[aient] actuellement la culture)), et il voulait ainsi parler de l'île de
Kasikili.1222 KASIKILI/SEDU DLAND (DISS .P. PARKA-ARANGUREN)

B. Joint Report of 1948 (Trollope-Redman) and Exchange of Letters
between 1948 and 1951

50. The 1948Joint Report prepared by L. F. W. Trollope and Noel W.
Redman, as well as its antecedents and the correspondence that followed
between 1948and 1951,are comprehensively reviewed in paragraphs 56
to 61 of the Judgment. The relevant extracts need not therefore be repro-
duced here. In my opinion those documents demonstrate:

(a) that the Masubia of the Eastern Caprivi were the only tribesmen
who used the Island for cultivation not only until 1914,.e., the criti-

cal date for the purpose of interpreting the 1890 Anglo-German
Agreement, but also until 1947 when the border dispute arose
between the Parties;

(b) that during the same period neither the Bechuanaland tribesmen nor
the Bechuanaland Protectorate authorities ever complained about
that use;
,c, that the Bechuanaland Protectorate tribesmen had never used the
Island either for cultivation or for other purposes; and
ld) that the Bechuanaland tribesmen and Bechuanaland Protectorate
authorities enjoyed undisputed use of the northern channel of the

Chobe River around Kasikili Island.
These conclusions are accepted in the Judgment, where it is stated:

"From the various administrative and diplomatic documents

referred to above, the Court, for its part, observes the following:
(1) prior to 1947 no differences had arisen between Bechuanaland
and the power administering the Caprivi Strip with regard to the
boundary in the area of KasikiliISedudu Island; (2) it appears that,
on the basis of the maps available at the time, the boundary had
untilthen been supposed to be located in the southern channel of
the Chobe . .."(Para. 62.)

C. Mr. R. R. Renew's Report (1965)

51. In response to a request for information about Kasikili Island
from the Department of Public Works, Mr. R. R. Renew, Surveyor-
General of the Bechuanaland Protectorate, prepared hisreport of 10 Octo-
ber 1965.In the first place Mr. Renew recalled:

"Kasikili island became the subject of a dispute in 1947when the
Native Commissioner of the eastern Caprivi Strip was alleged to
have challenged Bechuanaland's right to the use of the main channel
of the Chobe River along the north side of the island, as a water-
way." (Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III, Ann. 36, p. 321.) B LEDE KASIKILI/SEDU DP. DISS.PARRA-ARANGUREN)1222

B. Le rapport conjoint de 1948 (Trollope-Redman)et l'échange
de correspondance entre 1948et 1951

50. La Cour analyse en détail,aux paragraphes 56 à 61 de l'arrêt,le
rapport conjoint de 1948établipar L. F. W. Trollope et Noel W. Red-
man, ainsi que les antécédents dece rapport et la correspondance qui a
suivi entre 1948et 1951.Il n'ya donc pas lieu de reproduire ici lesextraits
pertinents.A mon sens, ces documents établissent

a) que les Masubia de la partie orientale du Caprivi étaient la seule
tribu qui utilisait'île pour la cultiver non seulement jusqu'en 1914,
c'est-à-dire jusqu'à la date critiqueprendre en compte aux fins de
l'interprétation de l'accord anglo-allemand de 1890, mais aussi
jusqu'en 1947,date à laquelle le différendfrontalier est né entreles

Parties;
b) qu'au cours de cette même période, nlies tribus du Bechuanaland ni
lesautorités du protectorat du Bechuanaland n'ont jamais formuléde
plainte au sujet de cette utilisation de l'île;
C) que les tribus du protectorat du Bechuanaland n'ont jamais exploité
l'île ni des fins agricoles nà d'autres fins quelconques; et
d) que les tribus du Bechuanaland et les autorités du protectorat du
Bechuanaland pouvaient utiliser sans la moindre contestation le che-
nal nord du Chobe autour de l'îlede Kasikili.

Ces conclusions sont du reste acceptéesdans l'arrêt, oùl'on peut lire
ceci:

«De l'ensemble de la documentation administrative et diploma-
tique mentionnée ci-dessus, la Cour, pour sa part, retiendra les élé-
ments suivants: 1)jusqu'en 1947,aucune divergence de vues n'avait
surgi entre, d'une part, la puissance administrant la bande de Caprivi

et, d'autre part, le Bechuanaland au sujet de la frontière dans la
régionde l'îlede KasikililSedudu; 2) il semble que, compte tenu des
cartes alors disponibles, la frontière étaitjusquesupposéese situer
dans le chenal sud du Chobe ..» (Par. 62.)

C. Le rapport de M. R. R. Renew (1965)

51. Répondant à une demande de renseignements concernant l'île de

Kasikili qui émanaitdu ministère destravaux publics, R. R. Renew, car-
tographe généraldu protectorat du Bechuanaland a établi son rapport le
10 octobre 1965. M. Renew rappelle tout d'abord:

«L'île de Kasikili est devenue l'objet d'un litige en1947quand, à
cette date, le commissaire indigène de l'est de la bande de Caprivi
aurait contestéle droit du Bechuanaland àutiliser le bras principal
de la rivièreChobe, le long du côténord de l'île, comme voie navi-
gable.» (Mémoire du Botswana, vol. III, annexe 36, p. 321.)1223 KASIKILI/SEDU ILAND (DISS. OP.PARRA-ARANGUREN)

Then, after reviewingthe Trollope-Dickinson exchange of letters (1948-
1951), Mr. Renew concluded that "It appears, therefore, that if we now
wish to use the island we have no alternative but to re-open thetter".
Furthermore he added:

"1think that the South African case for possession of this islandis
very weak. The fact that we did not use it, and allowed the Caprivi
tribesmen to use it,does not amount to prescription so much as
tolerating its use by the Caprivi people while it wasinconvenient for
us to use it." (Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III, Ann. 36,
p. 325.)

52. Thus, the facts stated by Mr. R. R. Renew in his Report coincide
with the conclusions already reached in this opinion (see para. 50
above).

D. Witnesses called by Namibin

53. The statements in May and June 1994 by Namibia's witnesses
before the Joint TechnicalTeam of Experts confirm that only the Masu-

bia of the Eastern Caprivi used Kasikili Island for ploughing; thatno one
from the Bechuanaland Protectorate had ever used the Island; that
permission to use the Island was only ever sought or obtained from the
Masubia authorities; and that these activities were known at the time
to the British authorities.

54. Botswana maintains that those statements cannot be accepted
because of the contradictions that emerged when the witnesses were
cross-examined. In particular it stresses that Chief Moraliswani, when
asked about the date people stopped ploughing on Kasikili Island,
answered :

"That was in 1937when now a lot of elephants were now entering
Caprivi and then when people were ploughing it was found that
those elephants were destroying their fields,it's when they decidedto
move and come to the other side here in Caprivi." (Memorial of
Namibia, Annexes, Vol. III, Ann. 2, p. 209.)

Therefore Botswana concludes that the cultivation of the Island ceased in
1937(Counter-Memorial of Botswana, Vol. 1.p. 205, para. 468).
55. However, as stated before, the subsequent practice of the parties
for purposes of interpreting the 1890Anglo-German Agreement has to
be examined only until 1914 (see Section V of this opinion). Therefore,
Botswana's contention that cultivation of Kasikili Island took place only
until 1937is irrelevant. Besides, even though Namibia's witnessessome-
times contradict themselves in details, the bulk of their statements is con-
sistent and for this reason, in my opinion, the statements should be LE DE KASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN)1223

Puis, après avoir analysé l'échange de correspondance Trollope-
Dickinson (1948-195l), M. Renew formule la conclusion suivante: «Il
semble donc que, si nous voulons maintenant utiliser l'île, nous n'avons
pas d'autre choix que de rouvrir la question.))Et il ajoute:

«Je pense que les arguments par lesquels l'Afrique du Sud prétend
posséder cetteîle sont très faibles.Le fait que nous n'en ayons pas
fait usage et que nous ayons autorisé les membres des tribus du
Caprivi à l'utiliser n'estpas vraiment assimilableà la prescription;
cela veut plutôt dire que nous avons toléréque la population du
Caprivi utilise I'ile alors qu'il était mal commode pour nous de

l'utiliserous-mémes.» (Mémoire du Botswana, annexes, vol. III,
annexe 36, p. 325.)
52. En somme, les faits énoncéspar M. R. R. Renew dans son rapport
coïncident avec les conclusions déjàformuléesdans la présenteopinion

(voir le paragraphe 50 ci-dessus).

D. Les témoins produits par la Namibie

53. Les déclarations entendues en mai et juin 1994 de la bouche des
témoinsproduits par la Namibie pour déposerdevant l'équipetechnique
conjointe d'experts confirmentque seuls les Masubia de la partie orientale
du Caprivi utilisaient I'îlede Kasikili pour y pratiquer des cultures; que,
jamais, des individus relevant du protectorat du Bechuanaland n'avaient
utilisé I'î; ue l'autorisation d'utiliserI'îlen'ajamais demandée qu'aux
autoritésdes Masubia ou jamais obtenue qu'auprès desdites autorités; et

que lesautorités britanniques étaient l'époqueau courant de cesactivités.
54. Le Botswana soutient qu'il n'est pas possible de retenir ces décla-
rations a cause des contradictions qui sontapparues lors du contre-inter-
rogatoire des témoins. En particulier, le Botswana souligne que le chef
Moraliswani, quand on lui a demandéquand il a étémis fin aux labours
sur I'îlede Kasikili, a réponduceci:

«C'était en1937, à ce moment-là, beaucoup d'éléphantsentraient
au Capriviet, quand lesgens labouraient, ilsconstataient que les élé-
phants détruisaient leurschamps, et c'estalors qu'ilsdécidaientde se
déplaceret de s'installer de l'autre côté,ici, au Caprivi.(Mémoire
de la Namibie, annexes, vol. III, annexe 2, p. 209.)

Le Botswana en tire par conséquentla conclusion que l'îlea cesséd'être
cultivéeen 1937(contre-mémoiredu Botswana, vol. 1, p. 205, par. 468).
55. Toutefois, comme nous l'avons dit, la conduite ultérieurementsui-
vie par les parties ne doit êtreexaminéeaux fins de l'interprétation de
l'accord anglo-allemand de 1890que jusqu'en 1914(voir la section V de
la présente opinion). Par conséquent,quand le Botswana dit que I'îlede
Kasikili n'a étécultivéeque jusqu'en 1937,son argument n'a aucune per-
tinence. Du reste, mêmesi les témoinsde la Namibie se contredisent par-
fois quand il s'agit de détails,ils disent essentiellement la mêmechose et1224 KASIKILI/SEDU IDUAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

accepted as valid evidence. Consequently, this objection by Botswana
cannot be upheld.

56. Additionally, Botswana contends that extraneous oral evidence
would only be relevant if it were intended to shed some light on either the
actual intentions of the parties to the 1890Anglo-German Agreement or
on the ordinary meaning at the material time (1890) of the phrase "the
centre of the main channel of [the] river" included in its Article III.
sequently, in Botswana's view extraneous oral evidence of alleged activi-
ties on the Island as evidence of subsequent practice is of no legal
relevance for purposes of determining the boundary between Namibia
and Botswana on the basis of the Anglo-German Agreement of 1890
(Counter-Memorial of Botswana, p. 203, para. 461 ; CR99112, pp. 10-11
(Tafa)).
57. The Joint Team of Technical Experts was created as a consequence

of the Communiqué issued on 24 May 1992 by the President of Bot-
swana, the President of Namibia and the President of Zimbabwe (Memo-
rial of Botswana, Vol. III, Annexes, Ann. 55, pp. 413-415); and the
Memorandum of Understanding regarding its terms of reference, signed
by Namibia and Botswana on 23 December 1992, expressly permits the
taking of oral evidence. Thus, Article 7, paragraph 1, of the Memoran-
dum of Understanding provides that
"In the execution ofits functions, the Team shall have authority to:

.............................
(f) hear, without prejudice to the 1890and 1892Treaties, any oral
evidence from any competent person in Botswana and Namibia
or from any other country which the Team may consider neces-
sary to enable it to arrive at a decision on the KasikiliISedudu
Island dispute." (Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III,
Ann. 57, pp. 433-434.)

58. Consequently the 1992terms of reference did not restrict witness
testimony to the demonstration of the actual intentions of parties to the
1890Anglo-German Agreement, or of the ordinary meaning of the words
"the centre of the main channel of the river" at the material time (1890),
as Botswana claims. Witness evidence was declared admissible in general
terms, whenever appropriate, to demonstrate facts relevant to theound-
ary dispute over KasikiliISedudu Island. Therefore Namibia called wit-
nesses to demonstrate the subsequent conduct of the parties as a means
of interpretation of the 1890 Anglo-German Agreement. For the same
reason Botswana presented and relied upon the statements of its wit-
nesses as good evidence to contradict the subsequent practice asserted by
Namibia and to prove that the Masubia from the Eastern Caprivi Zipfel
were not the only persons who used Kasikili Island. Consequently, in my
opinion, this objection of Botswana cannot be upheld. ÎLE DEKASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN)1224

c'est pourquoi,a mon avis, il faut tenir leurs déclarations pour des témoi-
gnages valables. Par suite, l'objection qui est ainsi formulée par le
Botswana ne peut pas être retenue.
56. En outre, le Botswana plaide que les dépositions de témoinsne
seraient pertinentes que si elles devaient éclairersoit les intentions réelles
des parties à l'accord anglo-allemand de 1890 soit le sens ordinaire à
l'époqueconsidérée(c'est-à-dire 1890)du membre de phrase: «le centre

du chenal principal [du fleuve]))qui figure a l'article III dudit traité.Par
suite, pour le Botswana, les dépositionsrelatives des activités alléguées
sur I'île, qui tendraientrapporter la preuve d'une conduite ultérieure-
ment suivie, ne présentent aucune pertinence en droit quand il s'agit de
déterminer la frontière entre la Namibie et le Botswana sur la base de
l'accord anglo-allemand de 1890 (contre-mémoire du Botswana, p. 203,
par. 461; CR99112, p. 10-11 (Tafa)).
57. La commission mixte d'experts techniques a été constituée ala
suite du communiquépubliéle 24 mai 1992par le présidentdu Botswana,
le président de la Namibie et le président du Zimbabwe (mémoire du
Botswana, vol. III, annexes, annexe 55, p. 413-415); et le mémorandum
d'accord relatif au mandat de l'équipequi aétésignépar la Namibie et le
Botswana le 23 décembre1992autorise expressémentles dépositions ver-
bales. L'article 7,paragraphe 1, du mémorandum d'accord se lit comme
suit:

«Dans l'exécutionde ses fonctions, l'équipeaura le pouvoir
.............................
f) d'entendre sans préjudice destraités de 1890et 1892tout témoi-
gnage oral émanant de toute personne compétenteau Botswana
et en Namibie ou dans n'importe quel autre pays que l'équipe

jugera nécessairepour lui permettre de statuer sur le différend
relatifà I'île de Kasikili/Sedudu.» (Mémoire du Botswana,
annexes, vol.III, annexe 57, p. 433-434.)
58. On peut donc dire que le mandat de 1992 n'obligeait pas les
témoins à montrer exclusivement quelles étaientles intentions réellesdes
parties a l'accord anglo-allemand de 1890 ou quel étaitle sens ordinaire
des termes «le centre du chenal principal du fleuve)) a l'époque consi-
dérée (1890), comme le soutient le Botswana. Les dépositions de témoins

ont étédéclarées recevables en généracl,aque fois qu'elles sejustifiaient,
pour établir des faits intéressant le différend frontalier dont fait l'objet
l'îledeKasikiliISedudu. La Namibie a par conséquent appelédes témoins
pour établirquelle a étéla conduite ultérieurement suivie par les parties
qui est un moyen d'interpréterl'accord anglo-allemand de 1890. Pour la
mêmeraison, le Botswana a présenté lesdéclarations de ses témoins
comme étantde bons élémentsde preuve, sur lesquels il s'estappuyépour
contredire la conduite ultérieurement suivie telle que la formulait la
Namibie et prouver que les Masubia de la partie orientale du Caprivi
n'étaientpas les seuls a utiliser I'îlede Kasikili. Par suite,on sens,
cette objection du Botswana ne peut pas êtreretenue.1225 KASIKILI/SEDU ISUAND (DISS . P.PARRA-ARANGUREN)

E. Evidence presented by Bots,vana

59. (1) Botswana presented affidavits by the following persons:
(a) Dominic Diau (dated 6 October 1997); Brian Egner (dated 19 Sep-
tember 1997); Peter Gordon Hepburn (dated 6 August 1997); Timothy
Neville Liversedge(dated 30October 1997);and Michael Slogrove(dated
8July 1997)(Counter-Memorial of Botswana, Anns. 47-51); and (6) Bot-
sweletse Kingsley Sebele (dated 14 August 1998) ; Michael Slogrove
(dated 24 August 1998);and Simon Adolph Hirschfield (dated 25 August
1998)(Reply of Botswana, Vol. 1,Anns. 20-22).

60. The statements embodied in the above-mentioned affidavits limit
themselves to facts that took place between 1977 and 1979; 1959 and
1962; 1962 and 1970; 1969 and 1970 and 1972 and 1978, respectively
(Counter-Memorial of Botswana, Anns. 47-51); and between October
1971and April 1975 ;1972and 1978and 1971 and 1995(Reply of Bot-
swana, Anns. 20-22). Therefore, in my opinion, they are not relevant to
the subsequent practice of the parties to the 1890Anglo-German Agree-
ment in 1914, which is the critical date; nor even in 1947when the dis-
pute arose for the first time between the Parties (see Section V of this
opinion).

61. (2) Mr. Noel Redman, the District Commissioner at Kasane, in
the cover letter of 26 January 1948(para. 5), attaching his and Mr. Trol-
lope's Joint Report, reported to the Government Secretary (Maefeking)
the following:
"Since the attached report was prepared 1 have received further
information from an inhabitant of the Island that in 1924a Caprivi
Chief named Liswaninyana applied to Captain Neale (sicNellie), the

Resident Magistrate at Kasane, for permission for his people to
plough on the Island and graze cattle there. This was evidently
granted verbally and no written agreement is known. At this time
~overnment Oxen weregrazing on the Island but they were removed
in 1925. Before 1924the same informant told me that there was one
Caprivi family ploughing there but they had no authority to do so."
(Memorial of Botswana, Annexes, Vol.III, Ann. 22, p. 265; CR 9917,
pp. 23-24 (Brownlie).)

62. However, the additional information reported by Mr. Redman
refersto acts which occurred after 1914,the critical date for determining
the subsequent practice of the parties in order to interpret the 1890
Anglo-German Agreement. Moreover, the witness testimony reported by
Mr. Redman was merely hearsay. Furthermore, as Namibia observes,

"in 1924 Captain Neale had a dual role. He was both District Com-
missioner for Kasane in the Bechuanaland Protectorate and admin- ▯ LDE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1225

E. EEments de preuve présentéspar leBotswana

59. 1) Le Botswana a présenté desdéclarations écritessous serment
des personnes ci-après: a) Dominic Diau (déclarationdatée du 6 octobre
1997) ;Brian Egner (déclarationdatée du 19septembre 1997); Peter Gor-
don Hepburn (déclarationdatéedu 6 août 1997);Timothy Neville Liver-
sedge (déclarationdatéedu 30 octobre 1997)et Michael Slogrove (décla-
ration datée du 8 juillet 1997) (contre-mémoire du Botswana, annexes
47-51); etb) Botsweletse Kingsley Sebele (déclarationdu 14août 1998);
Michael Slogrove (déclarationdatéedu 24 août 1998); et Simon Adolph

Hirschfield (déclaration du 25 août 1998)(répliquedu Botswana, vol. 1,
annexes 20-22).
60. Les déclarations sous serment ci-dessus se limitentà des faits qui
ont eu lieu entre 1977 et 1979; 1959et 1962; 1962et 1970; 1969-1970et
1972-1978respectivement (contre-mémoiredu Botswana, annexes 47-51);
et des faits qui ont eu lieu entre octobre 1971et avril 1975; entre972-
1978 et 1971 -1995 (réplique du Botswana, annexes 20-22). Par consé-
quent, à mon sens, ces faits ne sont pas utiles pour établir la conduite
ultérieurementsuivie par lespartiesà l'accord anglo-allemand de 1890en
1914,qui est la date critique; ni même en1947,qui est la date àlaquelle
le différenda surgi pour la première foisentre les Parties (voir section
ci-dessus de la présente opinion).
61. 2) Le commissaire de district de Kasane, M. Noel Redman, dans

la lettre de couverture du 26 janvier 1948(par. 5), annonçant le rapport
conjoint établi par lui-mêmeet par M. Trollope, donne au secrétairedu
gouvernement (Maefeking) les indications ci-après :
((Depuis que le rapport ci-joint a étéétabli,j'ai reçu de nouvelles
informations de la part d'un habitant de l'île,d'aprèslequel, en 1924,
un chef caprivi appelé Liswaninyana aurait demandé au capitaine

Neale [sic: Nellie], le magistrat résidentà Kasane, l'autorisation
pour les membres de sa tribu de cultiver I'îleet d'y faire paître du
bétail. L'autorisation a bien entendu étéaccordée verbalement et il
n'a pas été signd'accord écrit. A l'époque,les bŒufsdu gouverne-
ment paissaient sur l'îlemais ils ont évacués en 1925.Avant 1924,
toujours d'après le mêmeinformateur, il y avait une famille caprivi
qui pratiquait la culture sur l'îlemais sans autorisation.Mémoire
du Botswana, annexes, vol. III, annexe 22, p. 265; CR 9917,p. 23-24
(Brownlie).)

62. Toutefois, ces renseignements complémentaires rapportés par
M. Redman portent sur des actes qui sont postérieurs à 1914,la date cri-
tique servant à déterminerla conduite ultérieurement suivie par les par-
ties aux fins d'interpréter l'accord anglo-allemand de 1890. En outre, le
témoignage que M. Redman rapporte ne fournit qu'une preuve par
ouï-dire. En outre, comme la Namibie le fait observer:

«en 1924, le capitaine Neale avait un rôle double. Il étaià la fois
commissaire de districtà Kasane, pour le protectorat du Bechuana-1226 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

istrator of the Eastern Capriviunder the League of Nations Man-
date for South-West Africa.Thus, evenifhehadauthorized Liswanin-
yana to cultivate on the Island, this action would not necessarily
prove that the Protectorate exercised control over the Island. Given
Captain's Neale's dual functions, his alleged authorization to use
Kasikili Island cannot be properly assessed without first determining
whether he was acting as administrator of the Eastern Caprivi or
as administrator of the Bechuanaland Protectorate's District of
Kasane." (Reply of Namibia, p. 108,para. 244.)

63. (3) Botswana relies on the fact that it was not until 6 March 1992
that Namibia made any representation complaining about its people
being unable to use Kasikili Island, notwithstanding that they ceased to
do so in 1937,according to the statements made by Chief Moraliswani,
or in 1958 as some of Namibia's witnesses testified (CR9917, p. 25
(Brownlie)). However, 1914 is the critical date for determining the sub-
sequent practice of the Parties. Therefore these facts, which took place
afterwards are irrelevant because of the existence of the mandate over
South West Africa.
64. (4) According to Botswana, no group had exclusive use of the
Island for farmingpurposes because in the 1940ssevenfamiliesof Barotse
migrants lived in theSedudu area, the term Batoka being the local Chobe
name for people coming from what is now part of Zambia, and worked
fieldson the Island. Botswana maintains that this facts evidenced by the

Chobe annual reports attached to Botswana's Reply (Anns. 7 and 8).
(Reply of Botswana, p. 45, para. 125; Annexes, Anns. 7 and 8, pp. 14-20,
21-22 ;CR 9917,p. 25 ( Brownlie)). Furthermore, Botswana stresses that
one of the witnesses, Keorapetse Mokhiwa, a 70 year-old peasant, said
"fields were very small because people used to plough with hand, these
hand ploughs" (CR9918, p. 13, para. 4.5 (Fox)).

65. However, this contention is not relevantper se,because it refers to
facts which occurred after 1914,the critical date for the determination of
the subsequent practice of the Parties for the purpose of interpreting
Article III of the 1890Anglo-German Agreement. Furthennore, Sedudu
is a name identifying not only Kasikili Island but also Sedudu Valley on
the Botswana side of the River Chobe. Therefore, even admitting that
those families were living and working in "Sedudu", it has not been
demonstrated that "Sedudu" in this specific case meant Kasikili Island.

66. (5) In its oral pleadings Botswana stressed that the exchange of
letters between Messrs. Trollope and Dickinson (1948-1951)maintained
the status quo ante.However, in my opinion, the status quo antefavours
Namibia's position as to the subsequent practice of the Parties (see
para. 50 above). % LDEE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1226

land, et administrateur du Caprivi oriental en vertu du mandat de la
Société desNations sur le Sud-Ouest africain. Dans ces conditions,
mêmes'il avait autorisé Liswaninvana à cultiver l'île. cette mesure
n'aurait pas nécessairementprouvé quele protectorat contrôlait l'île.
Etant donnéle double rôle ainsi imparti au capitaine Neale, il n'est
pas possible d'apprécier correctement l'autorisation qu'il aurait

donnéed'utiliser I'îlede Kasikili sans établird'abord s'ilagissait en
qualité d'administrateur du Caprivi oriental ou en qualité d'admini-
strateur du district deKasane dans le protectorat du Bechuana-
land.)) (Réplique dela Namibie, p. 108,par. 244.)

63. 3) Le Botswana s'appuie sur le fait que ce n'est pas avant le
6 mars 1992que la Namibie commence à se plaindre que ses habitants
soient dans l'impossibilité d'utiliserI'îlede Kasikili, bien qu'ils aient mis
finà cette utilisation en 1937d'aprèslesdéclarationsdu chef Moraliswani
ou en 1958comme certains témoins de la Namibie l'ont affirmé(CR 9917,
p. 25 (Brownlie)). Or, la date critique servanà établir la conduite ulté-
rieure des parties est 1914. Les faits en question, par conséquent, qui se

situent tous après cette date, sont dénués de pertinencedu fait de l'exis-
tence du mandat sur le Sud-Ouest africain.
64. 4) D'aprèsle Botswana, aucun groupe n'avait l'exclusivité de l'uti-
lisation de l'île des fins agricoles car, dans les annéesquarante, sept
familles de migrants Barotse vivaient dans la régionde Sedudu, le terme
Batoka étantle nom local du Chobe pour les personnes originaires de ce
qui fait actuellement partie de la Zambie, et ces familles cultivaient des
champs situéssur l'île. Le Botswana soutient que le fait est prouvépar les
rapports annuels sur le Chobe qui sont jointsà sa réplique(annexes 7 et
8) (répliquedu Botswana, p. 45, par. 125;annexes, annexes 7 et 8, p.14-
20, 21-22; CR 9917,p. 25 (Brownlie)). En outre, le Botswana souligne que
l'un des témoins, Keorapetse Mokhiwa, un paysan âgé de 70 ans, a
déclaréque ((leschamps étaienttrès petits, parceque lesgens labouraient

à la main, avec des charrues à bras» (CR9918, p. 13, par. 4.5 (Fox)).
65. Cette thèse n'esttoutefois par pertinente en soi, parce qu'elleporte
sur des faits postérieurs 1914,c'est-à-dire postérieurà la date critique
pour la détermination de la conduite ultérieurement suivie par les Parties
aux fins de l'interprétation del'articleI de l'accord anglo-allemand de
1890. En outre, Sedudu est un nom qui désignenon seulement I'îlede
Kasikili mais également la valléede Sedudu sur le territoire botswanais
que longe le fleuve Chobe. Par conséquent, à supposer mêmeque les
familles dont il est question fussent installées ettravaillàieSedudu)),
il n'a pasété prouvé que «Sedudu» dans ce cas précis désigneI'île de
Kasikili.
66. 5) Dans ses plaidoiries, le Botswana a soulignépar ailleurs que

l'échangede lettres entreMM. Trollope et Dickinson (1948-1951)a servi
à maintenir le statu quo.Or, à mon sens, le statu quo est favorableà la
position qu'adopte la Namibie au sujet de la conduite ultérieurement sui-
vie par les Parties (voir le paragraphe0 ci-dessus).1227 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISS. P.PARRA-ARANGUREN)

67. (6) Botswana recalls the establishment by the British authoritiesof
the Chobe Game Reserve in 1960,its northern delimitation correspond-
ing with the international boundary between the Bechuanaland Protec-
torate and South West Africa. For this reason, in the opinion of Bot-
swana, no cultivation has taken place on the Island since 1960 and, of
course, in fact it had almost certainly ceased many years before (CR 9917,
p. 27 (Brownlie)). However, this argument is not relevantbecause 1914is

the critical date for determining the subsequent practice of the parties to
the 1890Anglo-German Agreement. Besides,as pointed out by Namibia,
the Act creating the Chobe Game Reserve in 1960 refers to the 1933
British War OfficeGSGS 3915Map, which indicates the southern channel
as the international boundary (CR 9911,p. 40, para. 64 (Chayes)).

68. (7) Botswana points out that, on the occasion of the planned
visit of the President of Botswana to the vicinity of the Island in 1972,
Mr. Slogrove stated :

"The landing on this Island of a fully armed squad of the Bot-
swana P.M.U. in August, 1972, during the Presidents visit for the
purpose of searching it as a security measure strengthened my con-
viction that this Island was regarded as Botswana Territory." (Reply
of Botswana, Annexes, Ann. 10, p. 25; CR9917, p. 28 (Brownlie)).

The two affidavits by Mr. Slogrove have already been examined and
considered irrelevant because they refer to facts posterior to 1914, which
is the critical date for determining the subsequent practice of the parties
as a means of interpretation of the 1890Anglo-German Agreement.

69. (8) For the same reason, the meeting of delegations of the Parties
at Katima Mulilo in 1981,the eventual Pretoria Agreement of 1984and
the Botswana Note to South Africa dated 22 October 1986,referred to by
Botswana (CR 9917,p. 28 (Brownlie)), are irrelevant for the purpose of
demonstrating the subsequent practice of the parties to the 1890Anglo-
German Agreement.
70. (9) Botswana also recalls that some ten of its witnesses gave evi-
dence that they had been engaged in trekking cattle from Maun to the
ferry at Kazungula in the 1930sand 1940s;and that they grazed cattle on
Kasikili Island(CR9918, p. 26 (Fox)). However, those activities are also
irrelevant to a determination of the subsequent practice of the Parties in
1914,which is the critical date for that purpose.

17 Maps

71. Since the critical date is 1914, al1maps prepared afterwards are
irrelevant to an interpretation of the 1890Anglo-German Agreement by LE DE KASIKILI/SEDU(D OUP.DISS.PARRA-ARANGUREN)1227

67. 6) Le Botswana rappelle que les autorités britanniques ont créé en
1960la réserveanimalièredu Chobe, dont la limite septentrionale corres-
pond à la frontièreinternationale entre le protectorat du Bechuanaland et

le Sud-Ouest africain. C'est pourquoi, de l'avis du Botswana, I'îlen'est
plus cultivéedepuis 1960et, bien entendu, en fait, la culture a quasi cer-
tainement pris fin bien des annéesauparavant (CR9917, p. 27 (Brown-
lie)). Toutefois, là encore, l'argument n'est pas pertinent puisque la date
critique servanta établirla conduite ultérieurement suivie par les parties
à l'accord anglo-allemand de 1890 est 1914. Du reste, comme le fait
observer la Namibie, la loi portant création decette réserveanimalièreen
1960 mentionne la carte GSGS 3915 établie en 1933 par le War Office
britannique, laquelle indique que c'est le chenal sud qui sert de frontière
internationale (CR 9911,p. 40, par. 64 (Chayes)).
68. 7) Le Botswana fait observer qu'à l'occasion de la visite que le
présidentdu Botswana a envisagéede faire dans le voisinage de I'île en
1972,M. Slogrove a déclaré:

«Le débarquement sur l'île d'un escadron en armes de la police
militaire botswanaise en août 1972 pendant la visite des présidents,
escadron qui étaitcensé fouillerl'île par mesure de sécurité, aren-
forcéma conviction que I'îleétaitconsidéréecomme appartenant au
territoire botswanais.(Répliquedu Botswana, annexes, annexe 10,

p. 25;CR9917, p. 28 (Brownlie).)
Lesdeux dépositionssous serment de M. Slogrove ont déjà étéétudiées
et jugéesnon pertinentes parce qu'elles portent sur des faits postérieurs
à 1914, qui est la date critique à considérer pour déterminer la

conduite ultérieure des parties afin d'interpréterI'accord anglo-allemand
de 1890.
69. 8) Pour la mêmeraison, la réunion de délégationsdes Parties à
Katima Mulilo en 1981,I'accord finalement conclu àPretoria en 1984et
la note du Botswana adressée àl'Afrique du Sud en date du 22 octobre
1986,dont le Botswana a fait état (CR 9917,p. 28 (Brownlie)), sont sans
pertinence quand il s'agit d'établir quelle ala conduite ultérieure des
partiesà I'accord anglo-allemand de 1890.
70. 9) Le Botswana rappelle en outre qu'une dizaine de ses témoins
ont dit dans leurs dépositions avoir régulièrementconduit du bétail
depuis Maun jusqu'au ferry de Kazungula dans les annéestrente et qua-
rante; et qu'ils faisaient paître du bétail sur I'île de Kasikili918,
p. 76 (Fox)). Or, ces activitéssont elles aussi sans pertinence quand il
s'agit de déterminer la conduite ultérieure des Parties en 1914,qui est la
date critiqueà retenirà cette fin.

F. Les cartes

71. Comme la date critique est 1914, toutes les cartes établies posté-

rieurement à cette date sont sans pertinence quand on veut interpréter1228 KASIKILI/SEDU DLAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

reference to the subsequent practice of the parties. Therefore the only
maps that need to be examined are the following.

72. (1) The ID 776 Map (1889) made by the British War Office,
referred to in the 1890 Anglo-German Agreement, and the Map of
Southern Zambezia (1891). However, neither is of any use because no
boundary symbol appears along the Chobe River.

73. (2) The Kriegskurte 1:800,000 (1904) has a label indicating
"Sulumbu's Island". However, as Namibia remarks, "the reproductions
of this map in the Botswana Atlas (maps 4 and 5), on which Botswana
seems to rely for analysis, are extremely poor and are not two maps but
two copies of one map" (CR 9914,p. 56(Rushworth)). Botswana accepted
those criticisms and acknowledged that "[tlhe map depicts some features
which are now not in conformity with the known geographical features"
(Reply of Botswana, p. 71, para. 206). The map was not even mentioned
by Botswana in its oral pleadings (CR99114, p. 27 (Fox)). Therefore, in
my opinion, it is irrelevant.

74. Seiner's Map 1:500,000 (1909)shows Kasikili Island, even though
labelled "Sulumbu's Island". However, as Namibia acknowledges, the
key to the map "does not say how international boundaries are por-
trayed" (CR9914, p. 43 (Rushworth)). Therefore it is irrelevant for the
purpose of determining the boundary line at Kasikili Island.

75. Streitwolfs Mup 1:200,000 (1910) depicts Kasikili Island under
the name "Kassikiri". However, it is irrelevant since no boundaries are
shown, as Namibia points out (CR 9914,p. 44 (Rushworth)).

76. Von Frankenberg's Mup 1 :100,000 (1912)shows Kasikili Island,
again under the name "Kassikiri". The German word "Flussurm" appears
above the southern channel and because of that Botswana concludes that
the southern channel is not the "main channel" but a "side branch" of

the Chobe River. Notwithstanding, Botswana has maintained that its
case "is not based on maps, by reason of their lack ofccurate informa-
tion and their inconsistency" (Reply of Botswana, p. 99, para. 258).
Moreover, the map does not show the international boundaries between
the two countries. For this reason, in my opinion, its irrelevant.
77. Hence none of the relevant maps which were submitted to the
Court can serve to demonstrate the subsequent practice of the Parties for
the purpose of interpreting the 1890Anglo-German Agreement, bearing
in mind that 1914 is the critical date for such demonstration. Conse-
quently, in my opinion, it is not necessary to consider any questions
relating to theartographic principles governing the preparation of maps
or the conditions which maps must satisfy in order to produce legal
consequences, or theirimportance in the resolution of legal disputes. ILE DEKASIKILI/SEDU DOU. DISSPARRA-ARANGUREN) 1228

l'accord anglo-allemand de 1890sous l'anglede la conduite ultérieuredes

parties. Les seules cartes qu'il faut examiner sont par conséquentles sui-
vantes :
72. 1) La carte ID 776 de 1889 établiepar le ministère de la guerre
britannique qui est évoquéedans l'accord anglo-allemand de 1890 et la
carte de la Zambézie méridionale (de1891).Toutefois, ni l'une ni l'autre
de ces deux cartes ne présente lamoindre utilitéparce qu'il n'y figure
aucun signe de frontière le long du Chobe.
73. 2) La carte Kriegskurte au 11800000 (qui date de 1904)porte une
mention «île de Sulumbu», mais, comme la Namibie le fait observer, «les
reproductions de cette carte dans l'atlas du Botswana (cartes 4 et 5), sur
lesquelles le Botswana semble s'appuyer pour faire ses analyses sont de
très mauvaise qualité,et ne sont pas deux cartes mais deux copies d'une

même carte)) (CR9914, p. 56 (Rushworth)). Le Botswana a accepté ces
critiques et reconnu que«[]]acarte porte quelques caractéristiques qui ne
sont pas conformes aujourd'hui avec les caractères géographiques
connus)) (répliquedu Botswana, p. 71, par. 206). Et le Botswana n'a pas
mêmeévoqué laditecarte lors de ses plaidoiries (CR 99/14, p. 27 (Fox)).
Cette carte est doncà mon sens sans pertinence.
74. La curte de Seinerau 11.500000 (qui date de 1909)montre I'îlede
Kasikili, mêmesicelle-ciest appelée«île de Sulumbu)). Toutefois, comme
la Namibie l'admet, la légendede la carte ne précisepas comment les
frontières internationales sont indiquées)}(CR 9914,p.43 (Rushworth)).
Cettecarte est donc sans pertinence quand on cherche à détermineroù se
situe la frontièrà la hauteur de I'îlede Kasikili.

75. La carre de Streitu'olf (de 1910) qui est établie au 11200000
indique l'île de Kasikili sous le nom de «Kassikiri». Elle est toutefois
sans pertinence car elle ne signale aucune frontière, comme la Namibie
le fait elle-même observer(CR9914, p. 44 (Rushworth)).
76. La curte de Von Frunkenbrrg de 1912,établieau 11100000, montre
I'îlede Kasikili,à encore sous le nom de «Kassikiri». Le mot allemand
«Flussurm» apparaît au-dessus du chenal sud et le Botswana en déduit
que le chenal sud n'est pas le ((chenal principal)) mais un bras annexe du
Chobe. Quoi qu'il en soit, le Botswana a soutenu qu'il nese fondait pas
sur les cartes, parce qu'elles ne donnent pas de renseignements exacts et
ne sont pas cohérentes (répliquedu Botswana, p. 99, par. 258). En outre,
ladite carte n'indique pas les frontières internationales entre les deux

pays. J'estime par conséquentqu'elle est sans pertinence.
77. Il faut donc constater qu'aucune des cartes qui ont étésoumises à
la Cour ne peut servir à établir quelle a étéla conduite ultérieure des
Parties aux fins d'interpréterl'accord anglo-allemand de 1890,la date cri-
tique à respecter aux fins d'établir ladite conduite étant 1914. Il n'y a
donc pas lieu,à mon sens, d'examiner desquestions ayant trait aux prin-
cipes cartographiques applicables àl'établissementde cartes ni d'exami-
ner les conditions auxquelles les cartes doivent répondre pour produire
des effets juridiques, ni de voir quelle importance elles revêtentpour la
solution de différendsd'ordre juridique.1229 KASIKILI/SEDU DLAND (DISSO. P.PARRA-ARANGUREN)

G. Aerial Photographs andSatellite Images

78. The aerial photographs and satellite images submitted to the Court
do not contain any indication which would enable it to determine the
boundary between the Parties at Kasikili Island, even though they may

have relevance in relation to the question whether Kasikili Island was
occupied or cultivated. However, they are irrelevantbecause they were
taken after 1914, the critical date as regards the subsequent practice of
the Parties forpurposes of interpreting the 1890Anglo-German Agree-
ment. Moreover, aerial photographs or satellite imagescannot determine
whether any occupation of Kasikili Island was carried out by Masubia
people of the Eastern Caprivi or by natives or authorities of thehua-
naland Protectorate.

H. Peaceful and Public Useof KasikililSedudu Island by Masubia
Tribesmenfrom Eastern Caprivi

79. The German Government first established an administrative pres-
ence in the Eastern Caprivi in February 1909. As Namibia acknow-
ledged, "Until then, from the European colonial perspective, the Eastern
Caprivi was 'a no-man's land', essentiallyutside the law" (Memorial of
Namibia, Vol. 1,p. 88, para. 222).

80. The German Governor in Windhoek, Bruno von Schuckmann,
issued an ordinance on 16October 1908closing the territory toal1Euro-
peans without an officialpermit, "thus laying the legal basis for the exer-
cise of administrative authority in the region". At the same time he
appointed Hauptmann Kurt Streitwolf as Imperia] Resident of the Caprivi
who, at the head of a contingent of four German military officers and
14African policemen, entered the Strip on 25 January 1909.Some days

later, on 3 February, Hauptmann Streitwolf reached the southern bank
of the Zambezi, opposite Sesheke, and established a new town, named
Schuckmannsburg, where he set up his headquarters.

81. Namibia adds that on 4 May 1909Hauptmann Streitwolf installed
Chikamatondo at Schuckmannsburg "as the Masubia Chief, responsible
to him for the governance of the area", Kasikili Island being "clearly
within his jurisdiction". Thus Germany established the method of "indi-
rectrule" and the native chiefs were constituted as an integral part of the
machinery of the German administration. For this reason, Namibia con-
cludes, the German rule of the Eastern Caprivi was carried out through
Chikamatondo and the Masubia tribal organization (Memorial of
Namibia, pp. 88-93, paras. 222-232).
82. Namibia maintains that the same method of "indirect rule" per-
sisted after the creation of the mandate over the territory of South West LE DE KASIKILI/SEDU (DU.DISS.PARRA-ARANGUREN)1229

G. Photographies aérienneset images par satellite

78. Les photographies aériennes et les imagespar satellite soumises à
la Cour ne contiennent aucune indication permettant de détermineroù se

situe la frontière entre les Parties hauteur de l'îlede Kasikili, mêmesi
ces images peuvent êtreutiles quand on veut établir si I'îlede Kasikili
étaitoccupéeou cultivée. Mais elles sont de toute façon sans pertinence
parce qu'elles ont été prisesaprès 1914,qui est la date critique quand on
veut considérerquelle a été laconduite ultérieuredes Parties pour inter-
préter l'accord anglo-allemand de 1890. En outre, des photographies
aériennesou des images par satellite ne permettent pas d'établir sioccu-
pation éventuellede I'îlede Kasikili étaitle fait des Masubia de la partie
orientale du Caprivi ou bien le fait des autochtones ou des autorités du
protectorat du Bechuanaland.

H. L'utilisation paisible et notoire de I'île de KasikililSedudu
par des membres de la tribu des Masubiu originaires de la partie
orientale du Caprivi

79. Le Gouvernement allemand a mis pour la première fois en place
une présence administrative dans la partie orientale de la bande de
Caprivi en février 1909.Comme la Namibie le dit elle-même, «le Caprivi
oriental constituait auparavant, si l'on se place dans la perspective des
Etats coloniaux européens, un «no man's land» situépour l'essentiel en
marge des lois» (mémoirede la Namibie, vol. 1,p. 88, par. 222).
80. Le gouverneur allemand a Windhoek, Bruno von Schuckmann,
prend le 16octobre 1908une ordonnance interdisant l'accèsdu territoire

à tous les Européens qui n'étaientpas munis d'un permis officiel,«jetant
ainsi les bases juridiques de l'exercicede l'autorité administrativedans la
région)).En mêmetemps, il nomme le capitaine Kurt Streitwolf résident
impérialau Caprivi et, a la tête d'un contingent dequatre officiers mili-
taires allemands et de 14policiers africains, Streitwolf se rend alors dans
la bande de Caprivi le 25 janvier 1909. Quelques jours plus tard, le
3 février,le capitaine Streitwolf atteint la rive sud du Zambèzeen face de
Sesheke et il y crée une nouvelle localité qu'il appeSchuckmannsburg
où il établitson quartier général.
81. La Namibie ajoute que le 4 mai 1909le capitaine Streitwolf a mis
en place a Schuckmannsburg un notable, Chikamatondo, «en qualitéde
chef Masubia, répondant devant lui du gouvernement de la région)),l'île
de Kasikili relevant ((manifestement de sa juridiction». C'est de cette

façon que l'Allemagne a établiun régimed'«administration indirecte)) et
les chefs indigènes ont fait partie intégrante des rouages de ce régime.
C'est ainsi que, conclut la Namibie, l'Allemagne a administré le Caprivi
oriental par l'intermédiairede Chikamatondo et de l'organisation tribale
des Masubia (mémoire de la Namibie, p. 88-93, par. 222-232).
82. La Namibie soutient que le même régime d'«administration indi-
recte)) a persistéaprès la mise en place du mandat sur le territoire du1230 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISSO.P.PARRA-ARANGUREN)

Africa. The Governor-General of the Union of South Africa delegated
responsibility for the Caprivi to the British High Commissioner for South
Africa, with effect from 1 January 1921(Mernorial of Namibia, Vol. V,
Ann. 93, pp. 5-8),who exercised hisauthority through the Bechuanaland
Protectorate (Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III,Ann. 19,p. 257).

83. The British Administration lasted until 1929, when it was taken
over directly by the Union of South Africa (Mernorial of Namibia,
Vol. V, Ann. 94, pp. 9-1 1; Memorial of Botswana, Annexes, Vol. III,
Ann. 20, pp. 259-260.) During that period, British colonial officers also
relied on the traditional authorities of the Masubia to carry out impor-
tant governmental functions, such as administration of justice. This fact
is evidenced by the reports written by Bechuanaland officiaisacting as
delegates of South Africa. Thus, al1their Reports for the years 1927,1928
and 1929 include the following paragraph:

"Each village has its Induna or Headman who has authority to
adjudicate according to Native Law and Custom amongst his fol-
lowers. He is generally assisted by the older men. If they do not
agree or if the plaintiff or defendant is not satisfied, then the case it
taken to the Chiefs Kgotla.
The Chief s Kgotla or Court is the principal one and itsjudgrnents

are final except that provision is made under Proclamation No. 1of
1919for appeals against thejudgments of native chiefsin the Bechua-
naland Protectorate, in the first instance to a Court composed of the
Assistant Commissioner or Maeistrate of the district and of the
chief, and in the event of their&agreeing, then the Resident Com-
missioner decides the matter in disoute. When members of a tribe
are punished by their own courts the penalty is usually one or more
head of cattle. The fines become the sole property of the chief,
although he may give some of the cattle to his councillors." (Report
of the Government of the Union of South Africa on South- West
Africafor the Year 1927, Counter-Memorial of Botswana, Ann. II,
p. 123; Report of the Government of the Uizionof South Africu on
South- West Africa for the Ycm 1928, Counter-Memorial of Bot-

swana, Ann. 12, p. 108; Report of the Government of the Union of
Soutlz Africa on South- West Africa for the Year 1929, paras. 458-
459,Counter-Memorial of Botswana, Ann. 13,p. 69,paras. 459-460.)

84. Botswana maintains that "it is implausible to suggest that the title
could be generated by the agricultural activities of the Basubia"; that

"there is simply no evidence that indirect rule conferred cornpetence upon
the Caprivi chiefs to make or unrnake international boundaries"; and
that ArticleVI1 of the 1890Anglo-German Agreement provides that:Sud-Ouest africain. Le gouverneur généralde l'Union sud-africaine a
déléguélaresponsabilité du Caprivi au haut commissaire britannique

pour l'Afrique du Sud, la délégationde pouvoir prenant effet le 1" jan-
vier 1921(mémoirede la Namibie, vol. V, annexe 93, p. 5-8), et le haut
commissaire a exercéson autorité par l'intermédiairedu Drotectorat du
Bechuanaland (mémoire du Botswana, annexes, vol. III, annexe 19,
p. 257).
83. L'administration fut britannique jusqu'en 1929, puis elle a été
assumée directement par l'Union sud-africaine (mémoire de la Namibie,
vol. V, annexe 94, p. 9-11 ; mémoire du Botswana, annexes, vol. III,
annexe 20.,.. 259-260).Au coursde cette ~ériode.lesadministrateurs bri-
tanniques des colonies faisaient égalementappel'aux autorités tradition-
nelles des Masubia pour leur confier des tâches importantes, notamment
l'administration de la justice. Le fait est prouvépar les rapports transmis
par les fonctionnaires du Bechuanaland en leur qualité de déléguéd se
l'Afrique du Sud. C'est ainsi, par exemple, que tous leurs rapports pour
les années 1927, 1928et 1929comprennent le paragraphe ci-après :

((Chaque village est dotéde son Induna ou chef traditionnel qui
est habilité rendre la iustice conformément à la loi et a la coutume
indigènesau bénéfice de ses fidèles.11est généralementaidépar des
anciens. En l'absence d'accord. ou bien si ledemandeur ou le défen-
deur n'est pas satisfait, le litige est porté devant le Kgotla du chef.
Le Kgotla ou tribunal du chef est la juridiction suprêmeet ses

arrêts sontdéfinitifs la réserve prèsqu'il est possible, sous l'effetde
la proclamation no 1 de 1919.de faire appel des décisionsdes chefs
indigènesdans le protectorat du Bechuanaland, en premièreinstance
devant un tribunal composédu commissaire adjoint ou du magistrat
du district et du chef, et, au cas où ils ne tomberaient pas d'accord, le
commissaire résident se prononce en dernier ressort sur le litige.
Quand lesmembres d'unetribu sont sanctionnéspar leurs propres tri-
bunaux, la peine consiste généralement à préleverune ou plusieurs
têtes de bétail. es bêtes confisquéedseviennent la propriétéexclusive
du chef, mais ce dernier peut faire don d'une partie du bétail a ses
conseillers. (Rapport du gouvernement del'Unionsud-ufricuine sur le
Sud-Ouest africain pour I'unnée1927, contre-mémoiredu Botswana,
annexe 11, p. 123;rapport du gouvernement de l'Union sud-africuine
sur le Sud-Ouest africuin pour I'annPe 1928, contre-mémoire du
Botswana, annexe 12, p. 108; rupport (lu gouvernement de l'Union

sud-ufricuine sur le Sud-Ouest ufricain pour 1'annt.e1929, par. 458-
459, contre-mémoiredu Botswana, annexe 13, p. 69, par. 459-460.)
84. Le Botswana dit qu'«il n'est pas plausible de donner a entendre
que le titre pourrait découlerdes activités agricoles desasubia)); qu'«il
n'existe tout simplement aucune preuve que le régimed'administration
indirecte donnait compétence auxchefs du Caprivi de faire ou défairedes
frontières internationales));et le Botswana rappelle les dispositions de

l'articleVI1 de l'accord anglo-allemand de 1890:1231 KASIKILI/SEDU IDLAND (DISSO.P.PARRA-ARANGUREN)

"The two Powers engage that neither will interfere with any
sphere of influence assigned to the other by Articles 1 to IV. One

Power will not, in the sphere of the other, make acquisitions,con-
clude treaties, accept sovereign rights or protectorates, nor hinder
the extensions of influence of the other.

It is understood that no Companies nor individuals subject to one
Power can exercise sovereign rights in a sphere assigned to the other,
except with the assent of the latter."

Therefore Botswana concludes that occupation of Kasikili Island by the
Masubia of the Eastern Caprivi cannot create any Namibian title to
Kasikili Island (Counter-Memorial of Botswana, Vol. 1,p. 12,para. 23.)

85. Nevertheless, Botswana admits:

"The Government of Botswana is willing to accept that, both in
German-controlled territory and in Bechuanaland Protectorate, the
authority of the traditional chiefs was subjected to a process of colo-
nial approval. The chiefsthus became in acertain sensragents of the
colonial administration on both sides of the River Chobe. But there
is no evidence, and no evidence is offered, to the effect the chiefs

had uuthority to engage in title-generuting uctivities.Both legally
and historically this would be eccentric." (Counter-Memorial of Bot-
swana, p. 278, para. 685.)

86. However, Namibia does not claim that Germany was engaged in
title-creating activities on Kasikili Island through the Masubia tribal
organization. In the opinion of Namibia the title remained thesame, the
1890 Anglo-German Agreement. However, the boundary delimitation
made by its Article III was not clear and needed interpretation. There-
fore, Namibia relies on the subsequent practice of the Parties in order to
interpret the existing title,., the 1890 Anglo-German Agreement; no
new title was created, the existing title was confirmed and interpreted by
subsequent practice.

87. The evidence presented by Namibia demonstrates that Germany

administered the Eastern Caprivi Zipfel through the Masubia Chiefs and
their tribal organization. They exercised judicial functions and had
authority to render judgments. Their positive acts of exercise ofurisdic-
tion over Kasikili Island were frequent enough, taking into account that
they were undertaken in areas sparsely populated and very remote from
the centres of civilization, as the territory of South West Africa was
described in Article 22, paragraph 6, of the League of Nations Covenant ▯ LDE KASIKILI/SEDUDU (OP. DISS. PARRA-ARANGUREN) 1231

«Les deux puissances s'engagent à ne pas intervenir dans une

sphère d'influence attribuée à l'autre puissance en vertu des ar-
ticle1 à IV. Chaque puissance s'interdit, a l'intérieurde la sphère
d'influence de l'autre puissance, de procéderà des acquisitions, de
conclure des traités,d'accepter desdroits souverains ou des protec-
torats ou de contrarier l'expansion de l'influence de l'autre puis-
sance.
11est entendu qu'aucune personne physique ou morale de l'une ou
de l'autre puissance ne peut exercer de droits souverains dans une
sphère attribuée à l'autre puissance, sans le consentement de cette
dernière.

Par conséquent, le Botswana conclut que l'occupation de l'îlede Kasikili
par les Masubia du Caprivi oriental ne peut pas créeren faveur de la
Namibie un titre quelconque sur l'île de Kasikili (contre-mémoire du
Botswana, vol. 1,p. 12, par. 23).
85. Le Botswana dit néanmoins:

«Le Gouvernement botswanais est disposé àreconnaître que, tant
dans le territoire sous administration allemande que dans le protec-
torat du Bechuanaland, l'autorité des chefs traditionnels était sou-
mise a l'approbation du pouvoir colonial. Les chefs devenaient ainsi
en un certain sens des agents de l'administration coloniale des deux

côtésdu Chobe. Mais rien ne prouve et il n'a été présenté aucune
preuve démontrant que 1e.schefs uvuient lepozrvoirde sr livreà des
uctivité;,.suscrptihles de donner naissanc13un titre. Une telle pro-
positionserait aussi singulièrementétrange tant du point de vuejuri-
dique que du point de vue historique.)) (Contre-mémoire du
Botswana, p. 278, par. 685.)

86. Mais la Namibie ne prétend pas quel'Allemagne se livrait sur l'île
de Kasikilià des activités susceptiblesde donner naissance a un titre par
I'intermédiaire de l'organisation tribale des Masubia. De l'avis de la
Namibie, le titre demeurait lemême, c'était celuqiui figurait dans I'accord
anglo-allemand de 1890.Toutefois, la délimitationde la frontière opérée
a l'articleI1n'étaitpas claire et réclamaitune interprétation. C'est pour-
quoi la Namibie s'appuie sur la conduite ultérieure des Parties afin
d'interpréterletitre existant, c'est-à-dire I'accordanglo-allemand de 1890;
il n'a pas été créée titre nouveau, le titre existant aconfirmé etinter-
prétépar la conduite ultérieure desParties.

87. Les élémentsde preuve présentéspar la Namibie montrent que
l'Allemagne a administré la partie orientale de la bande de Caprivi par
I'intermédiaire des chefsMasubia et de leur régimetribal. Ces chefs exer-
çaient des fonctions judiciaires et avaient le pouvoir de rendre des arrêts.
Les actes positifs témoignant de l'exercice deleur juridiction sur l'îlede
Kasikili étaientassez fréquents,sil'on pense qu'ils intervenaient dans des
régions peu peuplées et très éloignées dceesntres de civilisation, ce qui est
la définitiondu territoire du Sud-Ouest africain donnéà l'article22,para-(see para. 27 above). The Bechuanaland authorities never challenged
such jurisdictional acts. For this reason, in my opinion, the Chiefs were
agents of the colonial administration and their acts represent thesubse-
quent practice of the Parties for purposes of the interpretation of the

1890Anglo-German Agreement.

VII. CONCLUSION

88. The considerations set out in the foregoing sections lead to the
conclusion that the Masubia of the Eastern Caprivi were the only tribes-
men who occupied KasikiliISedudu Island, at least until 1914; that their
occupation of KasikiliISedudu Island was peaceful and public; and that
even Botswana acknowledged that their chiefs "became in ucertain sense
agents of the colonial administration" (see para. 85 above). Therefore, in
my opinion, the subsequent practice of Germany and Great Britain
reflected their understanding thatKasikililSedudu Island formed part of
German South West Africa and that the southern channel of the Chobe
River was the "main channel" referred to in Article III, paragraph 2, of

the 1890Anglo-German Agreement. No subsequent practice ofthe parties
to the Treaty was possible during the First World War when British
troops exercised de facto control over South West Africa. In 1920 the
League of Nations confirmed the establishment of the Mandate over
South West Africa. During the existence of the Mandate over South
West Africa (Namibia) neither of the Parties to the 1890Anglo-German
Agreement had competence to recognize, either by express agreement or
by subsequent practice, that the aforementioned "main channel" of the
Chobe ~iver was the northern channel and not the southern channel,
since this new interpretation would have represented a modification of
the territory submitted to the Mandate. Consequently, the originalnder-
standing was maintained and for this reason, in my opinion, Kasikilil
Sedudu Island forms part of Namibia and the southern channel of the
Chobe River is the "main channel" referred to in Article III, paragraph,
of the 1890Anglo-German Agreement.

(Signed) Gonzalo PARRA-ARANGUREN. LE DE KASIKILI/SEDU(D OP.DISS.PARRA-ARANGUREN) 1232

graphe 6du Pacte de la Société desNations (voir paragraphe 27 ci-des-
sus). Les autoritésdu Bechuanaland n'ont jamais contesté ces actes juri-
dictionnels. C'est pourquoi,a mon sens, les chefs autochtones étaientdes
agents de l'administration coloniale et leursactes représentent la conduite

ultérieure des Parties aux fins de l'interprétation de I'accord anglo-
allemand de 1890.

VII. CONCLUSION

88. Lesconsidérations quifont l'objet des sections précédentes m'amè-
nent a conclure que les Masubia du Caprivi oriental étaient les seuls
membres de tribu à occuper I'île de KasikiliISedudu, tout au moins
jusqu'en 1914;que cette occupation de I'îleétait paisible et notoire; et
que le Botswana lui-mêmea admis que leurs chefs ((étaientdevenus en un
certainsens des agents de l'administration coloniale» (voir paragraphe 85
ci-dessus). J'estime par conséquent que la pratique ultérieurement suivie

par l'Allemagne et la Grande-Bretagne procédait de l'idéepartagée par
lesdeux pays que I'îledeKasikiliISedudu faisait partie du Sud-Ouest afri-
cain allemand et que le chenal sud du fleuveChobe étaitle ((chenal prin-
cipal)) viséa l'article III, paragraphe 2 de l'accord anglo-allemand de
1890.Il ne fut pas possible aux parties au traité d'adopter une conduite
ultérieurependant la premièreguerre mondiale, les troupes britanniques
exerçant de facto leur contrôle sur le Sud-Ouest africain. En 1920, la
Société desNations a confirmé lacréation du mandat sur le Sud-Ouest
africain. Tant que ce mandat a été en vigueursur le Sud-Ouest africain
(Namibie), aucune des parties a l'accord anglo-allemand de 1890n'avait
compétence pour reconnaître, que ce fût par accord exprès ou par leur
conduite ultérieure,que ledit((chenal principa» du Chobe était le chenal

nord et non le chenal sud, car cette interprétation nouvelle aurait repré-
sentéune modification du territoire sous mandat. Par suite, I'interpréta-
tion initiale a été conservet c'estpourquoi, a mon sens, l'îlede Kasikilil
Sedudu fait partie intégrante de la Namibie et c'est le chenal sud du
Chobe qui est le «chenal principal)) viséà l'article III, paragraphe 2 de
l'accord anglo-allemand de 1890.

(Signt.) Gonzalo PARRA-ARANGUREN.

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Opinion dissidente de M. Parra-Aranguren (traduction)

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