Opinion individuelle de M. Oda (traduction)

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084-19950630-JUD-01-01-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. ODA

[Traduction]

1. J'ai votépour l'arrêt parceque je partage l'opinion de la Cour
selon laquelle la requêteintroduite par le Portugal contre l'Australie le
22 février1991devrait êtrerejetéedu fait que la Cour n'est pas compé-
tente pour en connaître.

Cependant, je ne puis souscrire à l'argumentation que la Cour a déve-
loppéepour motiver cette conclusion, à savoir que:
«[la Cour] ne saurait, en l'espèce, exercerla compétence qu'elle tient
des déclarations faitespar lesParties conformémentau paragraphe 2
de l'article 36 de son Statut car, pour se prononcer sur les demandes

du Portugal, elle devrait statuerà titre préalable sur la licéitédu
comportement de l'Indonésieen l'absence du consentement de cet
Etatn (arrêt,par. 35; les italiques sont de moi).
Lorsqu'elle fait étatdu «consentement» de l'Indonésie, laCour semble
ne pas savoir elle-mêmeavec certitude ce que ce «consentement» aurait

signifié.Aurait-il signifiéque, pour que la Cour exerce sa compétence,il
aurait fallu que l'Indonésie intervienneau procès, ou cela voulait-il dire
qu'il aurait fallu que l'Indonésie acceptesa juridiction en application du
paragraphe 2 de l'article 36 du Statut?
Je crois, pour ma part, que la requêtedu Portugal aurait dû êtrerejetée
au seul motif que cet Etat n'avait pas qualité pour introduire contre
l'Australie la présente instance relativeau plateau continental dans la
mer de Timor.

2. D'une part, dans sa requêtele Portugal a définile différend comme
«port[ant] sur l'opposabilità l'Australie:

a) des devoirs et délégation de pouvoirsdu Portugal en tant que
puissance administrante du Territoire du Timor oriental; et
b) du droit du peuple du Timor oriental à disposer de lui-même,
ainsi que des droitsy attenants (droitàl'intégrité et l'unité ter-
ritoriale et souveraineté permanente sur ses richesses et ses res-
sources naturelles))) (requête,par.1).

D'autre part, l'Australie, qui ne considéraitpas que le Portugal avait des
pouvoirs sur le territoire du Timor oriental à la fin des annéesquatre-
vingt, auniquement étéaccuséepar le Portugal dans la requêtede ce der-
nier de s'êtrelivrée (([aux] agissements [qui] se concrétisent par la négociation et la
conclusion, par l'Australie, avec un Etat tiers [l'Indonésie], d'un
accord portant sur l'exploration et1'exploitationduplateau continen-
tal dans la zone du «Timor Gap»,ainsi quepar la négociation,pour-
suivieà cejour, avec ce mêmeEtat tiers [l'Indonésie], de la déli-
mitation de ce mêmeplateau)) (requête,par. 2; les italiques sont de
moi).

3. Les griefs que le Portugal aurait pu formuler de ce fait ne sauraient
avoir traità l'«opposabilité» à quelque Etat que ce soit «des devoirs et
délégation de pouvoirsdu Portugal en tant que puissance administrante
du Territoire du Timor oriental)) ou «[du] droit du peuple du Timor
orientalà disposer de lui-même,ainsique desdroitsy attenants)) (requête,
par. 1). Les griefs ne sauraient porter que sur le titre auquel le Portugal
prétend - en sa qualitéde puissance administrante ou sur une autre base
- à l'endroit du Territoire du Timor oriental et, corrélativement, à

l'endroit de la zone du plateau continental qui chevaucherait celle de
l'Australie. A cet égard,1'Etatdemandeur a mal définile différenddans
sa requête;il semble en effet avoir méconnu la différence entre, d'une
part, l'opposabilitéà un autre Etat des droits et devoirs du Portugal
comme puissance administrante ou des droits du peuple du Timor orien-
tal et, d'autre part, la questionplusfondamentale de savoir si lePortugal
est bien 1'Etatayant qualitépour faire valoir ces droits et devoirs.
Le Portugal soutient notamment, en ce qui concerne l'alinéab) de la
citation reproduite au paragraphe 2 ci-dessus, que le droit du peuple du
Timor oriental à disposer de lui-mêmeainsique les droits y attenants que
la Charte des Nations Unies garantit à un peuple qui est encore sous

l'autoritéd'un Etat colonial ou d'une puissance administrante de terri-
toires non autonomes doivent êtrerespectéspar l'ensemblede la commu-
nauté internationale, quelleque soit l'autoritédela puissancesouslaquelle
ce peuple peut êtreplacé. L'Australie n'apas contesté«le droit du peuple
du Timor oriental à disposer de lui-même,ainsi que les droits y atte-
nants)). Le droit de ce peuple à disposer de lui-même etles autres droits
y attenants ne sauraient êtremis en question - et ne sont pas mis en
question dans la présente affaire.
La présente affairea traituniquement au titre sur leplateau continental
que le Portugal prétend posséder entant qu'Etat côtier. On ne saurait
trop le souligner.

4. Qu'a donc fait concrètement l'Australie au Portugal ou au peuple
du Timor oriental? Il est essentiel de relever que, dans le secteur du

«Timor Gap», l'Australie n'apas fait valoir de revendication nouvelle à
l'égardd'une zone de fonds marins qui empiéterait sur le secteur d'un
Etat ou du peuple du Territoire du Timor oriental, et qu'elle n'a acquis ni
d'un Etat, ni de ce peuple, aucune autre zone de fonds marins (voir cro-
quis ci-aprèsp. 109). N.B. : Le secteur doublement hachuré désigne l'emplacementde la zone de
coopération définiepar le traité de 1989et donne aussi une idée générale du
cTimor Gap ». En fait, aucun Etat ou peuple ne peut contester le titre originel de
l'Australie sur le plateau continental dans le ((Timor Gap». Selon les
règles du droit international contemporain, l'Australie a ipso jure des
droits sur son propre plateau continental dans la partie méridionalede la
mer de Timor tandis que, simultanément, 1'Etatqui jouit de la souverai-

netéterritoriale sur le Timor oriental et fait facà l'Australieà une dis-
tance d'environ 250 milles marins est titulaire des droits sur le plateau
continental au large de ses propres côtes dans la partieseptentrionale du
((Timor Gap» (voir les hachures verticales sur le croquis). L'étenduede
chacun des plateaux continentaux est déterminéenon par la géographie,
mais par la notion juridique de plateau continental.
Les plateaux continentaux sur lesquels les deux Etats ont des droits se
chevauchent ainsi vers le milieu du ((Timor Gap». Conformément aux
cas envisagésau paragraphe 1de l'article 6 de la convention de 1958sur
le plateau continental et au paragraphe 1de l'article 83 de la convention
des Nations Unies de 1982 sur le droit de la mer, l'Australie aurait dû

négocier avec 1'Etat côtier lui faisant face sur l'autre rive de la mer de
Timor (1'Etat X indiqué sur le croquis), ce qu'elle a effectivement fait
pour ce qui est du chevauchement des plateaux continentaux.
5. Il convient maintenant de récapituler les événementsqui se sont
produits depuis les années soixante-dix s'agissantde la délimitation du
plateau continental dans les zones pertinentes.
En application de l'accord ((établissantcertaines lignes délimitant les
fonds marins» (Nations Unies, Recueil des traités, vol. 974, p. 317),
l'Australie et l'Indonésieont tracé,le 18mai 1971,une ligne de délimita-
tion dans la mer d'Arafura à l'est du méridien 133"23' est, c'est-à-dire
dans la région situéeentre l'Australie, d'une part, et l'Irian occidental et
l'île Aru (territoires indonésiens dont le premier se trouve sur l'île de

Nouvelle-Guinée), d'autre part. En application de l'accord ((instituant
certaines lignes délimitant les fonds marins dans la zone des mers de
Timor et d'Arafura, complétant l'accord du 18 mai 1971 (avec carte)»
(Nations Unies, Recueil des traités, vol. 974, p. 327) (N.B. : la carte
marine jointe à cet accord est reproduite à la page 111 de la présente
opinion), ces deux gouvernements ont défini, le9 octobre 1972,d'autres
lignes de délimitation à l'ouest du méridien133"23' est, jusqu'au méri-
dien 127"56' est dans la région des mersde Timor et d'Arafura située
entre l'Australie, d'une part, et les îles Tanimbar (territoire indonésien),
d'autre part. Une autre ligne a été tracée d'esetn ouest àpartir du méri-
dien 126"est. Toutefois, ce dernier accord laisse, entre ces deux lignes au

large de la côte du ((Timor portugais)) (ainsi dénommé surune carte
jointe à l'accord), un intervalle de près de 120milles marins communé-
ment appeléle ((Timor Gap ».
Le Portugal n'a cependant pas cherché à l'époque à négocier avec
l'Australie la délimitation du plateau continental dans la zone ainsi
laisséeen suspens - à son avantage - par l'accord de 1972entre 1'Indo-
nésieet l'Australie. Incontestablement, la question se pose de savoir si le
Portugal estimait alors être unEtat côtierjouissant de la souverainetésur TIMOR ORIENTAL (OP. IND. ODA)

CARTE ANNEXÉE À L'ACCORD DU9 OCTOBRE 1972la partie orientale de l'îlede Timor (le Timor oriental) et s'ilpensait pou-
voir effectivement revendiquer quelque droit à l'égarddu plateau conti-
nental dans le «Timor Gap».
Au lieu de diviser le secteur en traçant une frontière, comme dans les
accords susmentionnés conclus en 1971et 1972 avec l'Indonésie, 1'Aus-
tralie a accepté,dans le traitéde 1989avec l'Indonésie ((relatifà la zone
de coopération établie dans un secteur situé entre la province indo-

nésiennedu Timor oriental et l'Australie septentrionale)), d'établir une
«zone de coopération)).Le contenu du traitéde 1989 - ce que 1'Austra-
lie et 1'Etat lui faisant face (1'EtatX indiquésur le croquis) ont l'un et
l'autre acquis et cédédans le secteur du «Timor Gap» - ne saurait être
contestéétant donné que le traitéprocède du consentement mutuel des
Etats concernés.
6. L'Indonésiesemble avoir revendiqué depuisles années soixante-dix
le statut d7Etat côtier au titre du Territoire du Timor oriental, qu'elle
considère comme l'une de ses provinces (comme je l'explique au para-
graphe 13 ci-après),et, à ce titre, elle a tenu avec 1'Etatlui faisant face,
l'Australie, des négociationssur les zones de leurs plateaux continentaux

respectifs qui se chevauchent. Sur cette base, l'Australie a conclu en 1989
un traité avec l'Indonésie devant resteren vigueur pour une première
période dequarante ans puis pendant des périodessuccessivesde vingt
ans à moins que les deux Etats n'en conviennent autrement (art. 33)
(requête, annexe2 (texte du traitéannexé à la loi de 1990sur lespétroles)).
Si le Portugal avait revendiquéle statut d'Etat côtier en sa qualité de
puissanceadministrante du Territoirenon autonome ou sur une autre base,
et ainsi revendiquéle titre correspondant sur le plateau continental de la
partie septentrionale du «Timor Gap» s'étendantvers le sud à partir de
la côte du Timor oriental, il aurait pu, et dû, introduire une instance rela-
tive à ce titre contre l'Indonésie,qui avait fait valoir une revendication
analogue. Ce n'estqu'à l'encontre del'Indonésieque le Portugal aurait dû

contester les titres rivaux relatifs au plateau continental de la partie sep-
tentrionale du «Timor Gap» (voir les hachures verticales sur le croquis).
Un différendaurait pu porter sur la question de savoir qui, de l'Indo-
nésieou du Portugal, était 1'Etatcôtier établi surle Territoire du Timor
oriental et, de ce fait, titulaire des droits sur le plateau continental qui
s'étend en directiondu sud à partir de la côte du Territoire du Timor
oriental, rejoignant ainsi le plateau continental de l'Australie au milieu
du «Timor Gap». C'est là le différendau sujet duquel le Portugal aurait
pu introduire une instance au fond contre l'Indonésie. Toutefois, aucune
question relative aux fonds marins du ((Timor Gap» ne pourrait former
l'objet d'un différendentre le Portugal et l'Australie tant qu'il n'apas été

établique le Portugal a le statut d7Etat côtier titulaire des droits sur le
plateau continental correspondant (autrement dit, il faudrait que le Por-
tugal soit désigné comme 1'EtatX indiquésur le croquis).
7. SilePortugal était17Etatcôtier pouvant revendiquer des droits sur le
plateau continental dans le «Timor Gap» (voir leshachures verticalessur
le croquis), le traité que l'Australie a conclu avec l'Indonésieen 1989aurait certainement été nul et non avenu d'embléeS.i,en revanche,1'Indo-
nésieétait1'Etatcôtier et avait donc des droits sur la zone pertinente du
plateau continental (voir leshachures verticalessur lecroquis), le Portugal
n'étaittout simplementpas habilité à introduire la présente instance.Pour
l'être,il faudrait qu'il soitEtatcôtier faisant facà l'Australie.
Afinde connaître de la requêteintroduite contre l'Australie relativement
au plateau continental dans le((Timor Gap», ou plus précisémend tans le
secteur dit «zone de coopération)) que l'Australierevendique en partie, la
Cour doit, à titre préliminaire,acquérirla certitude que le Portugal a qua-
litépour agir en l'espèceen tant qu'Etat côtier pouvant revendiquer- en

1991,annéedu dépôt de la requête - des droits sur le plateau continental
dans la mer de Timor (voir 1'EtatX indiquésur le croquis).
Je le répète, une questionsur laquelle le Portugal aurait pu introduire
une instance aurait étécellede sespropres droits sur leplateau continental
au large de la côte du Timor oriental, mais le différend n'auraits pu se
rapporter au pouvoir de l'Australie de conclure un traitéavec l'Indonésie.

8. Le présentarrêtparaît à mon avis se fonder dans une large mesure
sur le précédent de l'affaide l'Ormonétairepris a Rome en 1943 (1954).
Or celui-ci ne me semble pas pertinent en l'espèce,car la Cour a dit en
1954 qu7«[elxaminerau fond de telles questions)) (lesquellesconcernaient

le caractèrelicite ou illicitede certains actes de l'Albanie vis-à-visde l7Ita-
lie) dans une instance introduite par l'Italie contre la France, entre autres
défendeurs, ((seraittrancher un différendentre l'Italie et l'Albanie» et
que «[la] Cour ne [pouvait] trancher ce différendsans le consentement de
l'Albanie» (C.Z. Jecueil 1954, p. 32). Dans l'affaire précité«les inté-
rêtsjuridiques de l'Albanie [auraient]non seulement [étét]ouchéspar une
décision [de la Cour], mais [auraient constitué] l'objet même de ladite
décision))(ibid.).
La présente affaireest d'une tout autre nature. Le différend neporte
pas sur la question de savoir si l'Indonésie,Etat tiers, était habilitéeen
principe à conclure un traitéavec l'Australie. En réalité, l'objt êmede
toute l'affaire tient uniquementàla question de savoir qui du Portugal ou
de l'lndonésieavait, en tant qu7Etat faisant faceà l'Australie, des droits
sur le plateau continental dans la régiondu ((Timor Gap». Cette ques-

tion aurait pu constituer l'objet d'un différendentre le Portugal et 1'Indo-
nésie,mais cen'est pas une question sur laquelle le Portugal et l'Australie
pourraient s'opposer à l'Indonésieen tant qu'Etat ayant «un intérêt
d'ordre juridique ..en cause».

9. Le Timor oriental s'esttrouvésous le contrôle du Portugal à partir
du XVIe siècle,et la constitution portugaise de 1933déclaraitque le ter-
ritoire du Portugal comprenait le Timor oriental en Océanie. Après laguerre, le Timor oriental a conservéle statut de territoire portugais
d'outre-mer, àla différencede l'Indonésiequi a obtenu sonindépendance
des Pays-Bas. Il est incontestable qu'avant 1974le Portugal exerçait sa
souverainetésurleTimor oriental, quiétait l'unede sesprovinces d'outre-
mer, et qu'en sa qualitéd'Etat côtier le Portugal aurait eu des droits sur
le plateau continental dans les zones de fonds marins au large du Timor
oriental, dans la mer de Timor.
10. Par ailleurs,la Charte des Nations Unies contient une ((déclaration
relative auxterritoires non autonomes))(chap.XI), aux termes de laquelle

les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsa-
bilitéd'administrer des territoires coloniaux acceptent comme une mis-
sion sacréel'obligationde favoriserla prospéritédeshabitants decesterri-
toires et, cette fin, de communiquer régulièrementau Secrétaire général
des renseignements statistiques et autres de nature technique concernant
ces territoires. Le Portugal n'a jamais communiqué régulièrement des
renseignements sur ses colonies éparpilléesdans le monde entier et n'a
pas paru avoir reconnu à ces colonies le statut de territoires non auto-
nomes conformémentau droit des Nations Unies.
En 1960,l'Assembléegénérale des Nations Unies, après avoir formulé
la ((déclaration sur la décolonisation» proclamant le droit de tous les
peuples à disposer d'eux-mêmes(résolution 1514 (XV)), a adopté une
résolutionvisant expressémentle Portugal, dans laquelle le Timor orien-
tal étaitqualifié deterritoire non autonome au sens du chapitre XI de la

Charte et où le Portugal étaitprié decommuniquer au Secrétaire général
des renseignements sur le Timor oriental, entre autres territoires non
autonomes placéssous son administration (résolution 1542(XV)).
11. Entre 1961 et 1973,l'Assemblée généralae engagéle Portugal à
maintes reprisesà respecter la politique de décolonisationde l7Organisa-
tion des Nations Unies et a continué à condamner la politique coloniale
du Portugal et le refus persistant de celui-ci d'appliquer la politique de
l'organisation. En 1963,le Conseil de sécurita quant à lui déplorél'atti-
tude du Gouvernement portugais et ses violations répétées des principes
de la Charte, et il a invitéle Portugal appliquer d'urgence la politique
de décolonisation (résolutions180 (1963) et 183 (1963)). En 1965, le
Conseil de sécuritéa de nouveau adoptéune résolution dans laquelle il
déplorait la carence du Gouvernement portugais à se conformer aux
résolutions antérieuresde l'Assembléegénérale et du Conseil de sécurité

(résolution 218 (1965)). En 1972, le Conseil de sécuritéa de nouveau
condamnéle refus persistant du Portugal d'appliquer lesrésolutionsanté-
rieures (résolutions312 (1972)et 322 (1972)).
Le Portugal n'a pris aucune mesure pour assumer les obligations et
les responsabilitésd'une autorité administrante sur ces territoires, qui
auraient dû être traitéscomme des territoires non autonomes au sens où
l'Organisation des Nations Unies l'entendait, et il a continuéles consi-
dérersimplement comme ses provinces d'outre-mer. 12. Suiteà la ((révolution des Œillets)) en avril 1974, un nouveau
régimea étéinstauréau Portugal. La «loi du 27juillet 1974», promul-
guéepar le Conseil d'Etat, a revisél'ancienne constitution portugaise et
reconnu le droità l'autodétermination - età l'indépendance - des ter-
ritoires d'outre-mer sous administration portugaise. Le nouveau gouver-
nement portugais a organiséen mai 1975 à Dili et en juin 197à Macao
des conférencessur la décolonisationauxquelles il a invitéles représen-

tants de plusieurs mouvements politiques du Timor oriental. La «loi du
17juillet1975))relativeà la décolonisationdu Timor oriental, àlaquelle
ont abouti ces conférences, visaitmettre un terme en octobre 1978 à la
souverainetédu Portugal sur le Timor oriental.
Quant à l'Indonésie, quine paraît pas avoir cherchéauparavant à
annexer le Timor oriental à son propre territoire et qui avait maintenu
des relations amicales avec le Portugal, elle semble avoir commencé à
envisager cette annexion dans les annéessoixante-dix.En juillet 1975,le
président de l'Indonésiea affirmé quele Timor oriental n'était pas en
mesure d'accéder àl'indépendance.Le 11 août 1975,la formation poli-
tique UDT, qui partageait le point de vue du Gouvernement indonésien,
a organiséun coup d'Etat. L'administration locale du Timor oriental n'a

reçu aucune assistance effectivedu Portugal; sonpersonnel s'ests'installé
dans l'île'Atauro, au nord de Timor, en août 1975,et a quitté cetteîle,
et donc la région, en décembre dela mêmeannée.Le Portugal a décliné
l'invitation du mouvement politique FRETILIN à regagner le Timor
oriental et l'Indonésiea amorcédes préparatifs en vue d'une invasion
militaireà grande échelledu Territoire. C'est ainsi qu'a pris fin la domi-
nation portugaise au Timor oriental.
13. Le 28 novembre 1975, le FRETILIN a déclaré l'indépendance
complètedu Territoire et l'instauration de la République démocratique
du Timor oriental. De leur côté, d'autres partis politiques,commeUDT
et I'APODETI, qui estimaient qu'il serait difficilepour le Timor oriental

de maintenir son indépendance, étaient favorables à une annexion par
l'Indonésie et,le0 novembre 1975,lesreprésentantsde cesmouvements
ont fait une déclaration proclamant la séparation du Territoire d'avecle
Portugal et son incorporation àl'Indonésie.
Au début dedécembre1975,l'Indonésiea envoyé à Dili une arméede
dix mille hommes. Le 17 décembre1975,les partis pro-indonésiens ont
proclamél'établissementd'un gouvernement provisoire du Timor orien-
talà Dili. Répondant àun prétendu appeldu peuple du Timor oriental,
l'Indonésiea adopté,le 15juillet 1976,une loi portant annexion, que le
président del'Indonésiea signéele 17juillet 1976.Le Timor oriental est
ainsi devenu la vingt-septièmeprovince de l'Indonésie.Les autoritéspor-
tugaises, qui avaient déjàquittél'île, nesontjamais retournéesau Timor

oriental depuis lors.

14. Depuis 1974,date à laquelle le nouveau régimeportugais a modifié
la politique colonialedu pays, l'Assembléegénéralea continué d'adopterdes résolutions relativeà l'application de la déclarationsur la décoloni-
sation. Dans sa résolution de1974,l'Assembléegénérale a accueilli avec
satisfaction la décisiondu nouveau gouvernement portugais d'accepter
les principes d'autodéterminationet d'indépendanceet leur stricte appli-
cation à tous les peuples sous domination coloniale portugaise; elle a
d'autre part demandéau Portugal de continuer à agir en vue de l'adop-
tion des mesures nécessairespour assurer la pleine application de la
«déclaration surla décolonisation»(résolution3294 (XXIX)).
En 1975, l'Assembléegénéralea adopté pour la première fois une
résolution concernantle Timor oriental, dans laquelle elle demandait au

Portugal, en sa qualité de puissanceadministrante,decontinuer de n'épar-
gner aucun effort pour trouver une solution par des voies pacifiquesau
moyen d'entretiens entre le Gouvernement portugais et les partis politi-
ques représentantlepeuple du Timor portugais; par ailleurs,elledéplorait
vivementl'intervention militairedesforcesarméesindonésienneestdeman-
dait au Gouvernement indonésiendecesser devioler l'intégrité territoriale
du Timor portugais et de retirer sans délaisesforces arméesdu Territoire,
afin de permettre au peuple du Territoire d'exercerlibrement son droit
l'autodéterminationet à l'indépendance (résolution3485 (XXX)).
Suite à cette résolutionde l'Assembléegénéralel,e Conseil de sécurité,
le 22 décembre1975,a déploré l'intervention des forces armées de1'Indo-
nésieau Timor oriental, a regrettéque le Gouvernement portugais ne se
fut pas pleinement acquitté des responsabilités quilui incombaient en
tant que puissance administrante du Territoire aux termes du chapitre XI

de la Charte, a demandéau Gouvernement indonésien de retirer sans
délaitoutes sesforces du Territoire et a demandéau Gouvernement por-
tugais, en tant que puissance administrante, de coopérer pleinement avec
l'organisation des Nations Unies afin de permettre au peuple du Timor
oriental d'exercer librement son droit à l'autodétermination (résolu-
tion 384 (1975)).Quelques mois plus tard, le 22 avril 1976,le Conseil de
sécuritéa de nouveau adoptéune résolution,dans laquelle il ne faisait
pas mention de la responsabilitédu Portugal en tant que puissanceadmi-
nistrante du Timor oriental et ne traitait que de l'intervention militaire de
l'Indonésiedans ce Territoire (résolution389 (1976)).
15. Dans une résolution de 1976, l'Assembléegénérale, suivant la
mêmedémarche que celle adoptée l'année précédentea, défendu les
droits du peuple du Timor oriental et critiquévivementl'action de'Indo-
nésie(résolution31/53).Il y a toutefois lieu de noter que la prétention de
l'Indonésie à intégrer le Timor oriental à son territoire a étérejetée

uniquement afin de défendreles droits du peuple du Timor oriental et
non pour protégerles droits et obligations de 1'Etat portugais relative-
ment au Timor oriental ou le statut du Portugal en tant que puissance
administrante. En 1977, l'Assembléegénéralea adopté une résolution
analogue à celle de l'année précédente (résolutio32134); leGouverne-
ment portugais n'y étaitaucunement mentionné.
En 1978, l'Assembléegénéralea renoncé à rejeter la prétention de
l'Indonésie selon laquellele Timor oriental avait été intégréson terri-toire. Dans sa résolution de 1978, elle ne demandait plus le retrait des

troupes indonésiennesdu Timor oriental, tout en réaffirmantledroit inalié-
nable du peuple du Timor oriental à disposer de lui-mêmeet à l'indé-
pendance, ainsi que la légitimitéde salutte pour réaliserce droit (résolu-
tion 33/39).Depuis lors, l'Assembléegénéralen'apas modifiésa position,
c'est-à-dire qu'elle s'est surtout intéresséeaux secours à apporter au
peuple du Timor oriental (voir résolutions 34/40, 35/27et 36/50).
16. En 1980,l'Assembléegénéralea accueilli avec satisfaction l'initia-
tive diplomatique prise par le Gouvernement portugais pour trouver une
solution globale au problème du Timor oriental et a indiquéqu'elleavait
entendu les déclarations du représentant du Portugal (en sa qualité de
puissance administrante), du représentant de l'Indonésie,de divers péti-
tionnaires du Timor oriental, de représentants d'organisations non gou-
vernementales et du représentant du FRETILIN (résolution35/27).

En 1982,l'Assembléegénéralea ,prèsavoir entendu les déclarations des
représentants du Portugal, de l'Indonésie etdu FRETILIN ainsi que de
diverses organisations, a priéle Secrétaire général d'entamer des consul-
tations avectoutes lesparties directement intéresséeen vue de rechercher
les moyens permettant de parvenir à un règlement global du problème
(résolution37/30). Les consultations ainsi demandéesdans la résolution
de 1982n'ont pas encore portéleurs fruits.
Depuis 1983, l'Assembléegénéralea inscrit la ((Question du Timor
oriental))à l'ordre du jour de chacune de ses sessions. Toutefois, sur la
recommandation du Bureau, elle a depuis lors toujours renvoyé l'examen
de cette question à sa session suivante. On peut dire que la question du
Timor oriental a étémise en sommeil depuis 1983.

17. Le Portugal, qui étaitdisposéà accorder l'indépendanceau peuple

du Timor oriental dans le cadre de la nouvelle constitution de 1974,n'a
exercéaucune autoritésur le Territoire depuis que l'administration locale
a été forcée dqeuitter le Timor oriental en 1975,en raison des désordres
survenus dans l'île.Depuis 1974,le Portugal n'a fourni ni renseignements
ni données statistiques, comme laCharte des Nations Unies et la ((décla-
ration sur la décolonisation» de 1960lui en faisaient obligation. Depuis
1976,l'organisation des Nations Unies, lorsqu'elle s'est occupéedu pro-
blèmedu Timor oriental, n'ajamais dit que le Portugal avait le droit et le
devoir d'administrer cette région commeun territoire non autonome.
L'Indonésieexerce son autorité sur le Territoire depuis presque vingt
ans maintenant. Les Nations Unies n'ont pas approuvé l'annexion du
Timor oriental par l'Indonésie. Cependant, le rejet de la prétention de
l'Indonésieselon laquelle le Timor oriental devrait êtreintégré à son

territoire a disparudans la résolution de1978 et le retrait de l'arméeindo-
nésiennen'aplus étédemandé. Le fait est que l'Assembléegénérales'est
intéresséedavantage à l'aide humanitaire qu'au mode d'administration
du Territoire.
18. L'incident survenu en 1991au cimetière de Santa Cruz à Dili, au
Timor oriental, était cepoint de vue d'une gravité extrêmeL .a questionde savoir si le droit du peuple du Timor oriental à disposer de lui-même
a été dûment respectépar l'Indonésiepourrait êtresoulevéedans le cadre
d'autres procédures devant la Cour ou au sein d'autres instances de
l'organisation des Nations Unies.
Mêmesi l'intervention militaire de l'Indonésie au Timor oriental et
l'intégration decelui-ci à l'Indonésieau milieu des années soixante-dix
n'ont pas été approuvéep sar l'organisation des Nations Unies, il n'y a eu
aucune raison de considérer que, depuis la fin des années soixante-dix et

jusqu'à cejour, lePortugal est restéinvesti des droits et desresponsabilités
d'une puissance administrante à l'égarddu Territoire non autonome du
Timor oriental. Dans la communauté internationale, peu d7Etats ont
considérédans le passé récent ou considèrent à l'heure actuelle le Portu-
gal comme un Etat présent au Timor oriental ou soutiendraient que le
Portugal peut, à ce titre, revendiquer des droits sur le plateau continental
au large du Timor oriental.

19. Indépendamment du statut du Timor oriental - qui reste en sus-
pens aux yeux de l'organisation des Nations Unies - et indépendam-
ment du droit du peuple du Timor oriental à l'autodétermination, garanti
par la Charte des Nations Unies, il est manifeste que le Portugal n'est pas
considéré - du moins depuis le début des années quatre-vingt - comme
un Etat côtier faisant face à l'Australie et qu'en 1991,au moment où le
Portugal a déposé sa requête au Greffe de la Cour, il n'exerçait aucune
autorité sur la régiondu Timor oriental, au large de laquelle le plateau
continental s'étend versle sud dans la mer de Timor.

20. Il s'ensuit que le Portugal n'apas qualitépour agir en tant qu'Etat
demandeur en cette instance relative au plateau continental qui s'étend
vers le sud dans la mer de Timor à partir de la côte du Timor oriental
dans le ((Timor Gap)). Pour ce seul motif, la Cour n'est pas compétente
à mon avis pour connaître dela requêtedu Portugal, qui doit être rejetée.

(Signé) ShigeruODA.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE ODA

1. 1voted in favour of the Judgrnent because 1agreed with the Court
that the Application brought by Portugal against Australia on 22 Febru-
ary 1991should be dismissed, as the Court lacksjurisdiction to entertain

it.
However, 1 am unable to subscribe to the reason given by the Court
for this finding, that is, that
"[the Court] cannot, in this case, exercise the jurisdiction it has by
virtue of the declarations made by the Parties under Article 36,para-
graph 2, of its Statüte because, in order to decide the claims of Por-
tugal, it would have to rule, as a prerequisite, on the lawfulness of

Indonesia's conduct in the absence of that State's consent" (Judg-
ment, para. 35; emphasis added.)
When it refers to the "consent" of Indonesia the Court itself seemsto be
uncertain as to what this "consent" of Indonesia would have meant.
Would it have meant that, in order for the Court to exercise its jurisdic-
tion, Indonesia would have had to have intervened in these proceedings
or would it have meant that Indonesia would have h.adto have accepted

that jurisdiction under Article 36 (2) of the Statute?
For my part, 1 believe that the Court cannot adjudicate upon the
Application of Portugal for the sole reason that Portugal lacked locus
standi to bring against Australia this particular case concerning the con-
tinental shelf in the Timor Sea.

2. Portugal, in its Application, definedthe dispute, on the one hand, as

"relate[d] to the opposability to Australia
(a) of the duties of, and delegation of authority to, Portugal as the
administering Power of the Territory of East Timor; and

(b) of the right of the people of East Timor to self-determination,
and the related rights (right to territorial integrity and unity
and permanent sovereigntyover natural wealth and resources)"
(Application, para. 1).
On the other hand, Australia, which did not regard Portugal as having
authority over the Territory of East Timor in the late 1980s, has only
been accused by Portugal in its Application of having engaged in OPINION INDIVIDUELLE DE M. ODA

[Traduction]

1. J'ai votépour l'arrêt parceque je partage l'opinion de la Cour
selon laquelle la requêteintroduite par le Portugal contre l'Australie le
22 février1991devrait êtrerejetéedu fait que la Cour n'est pas compé-
tente pour en connaître.

Cependant, je ne puis souscrire à l'argumentation que la Cour a déve-
loppéepour motiver cette conclusion, à savoir que:
«[la Cour] ne saurait, en l'espèce, exercerla compétence qu'elle tient
des déclarations faitespar lesParties conformémentau paragraphe 2
de l'article 36 de son Statut car, pour se prononcer sur les demandes

du Portugal, elle devrait statuerà titre préalable sur la licéitédu
comportement de l'Indonésieen l'absence du consentement de cet
Etatn (arrêt,par. 35; les italiques sont de moi).
Lorsqu'elle fait étatdu «consentement» de l'Indonésie, laCour semble
ne pas savoir elle-mêmeavec certitude ce que ce «consentement» aurait

signifié.Aurait-il signifiéque, pour que la Cour exerce sa compétence,il
aurait fallu que l'Indonésie intervienneau procès, ou cela voulait-il dire
qu'il aurait fallu que l'Indonésie acceptesa juridiction en application du
paragraphe 2 de l'article 36 du Statut?
Je crois, pour ma part, que la requêtedu Portugal aurait dû êtrerejetée
au seul motif que cet Etat n'avait pas qualité pour introduire contre
l'Australie la présente instance relativeau plateau continental dans la
mer de Timor.

2. D'une part, dans sa requêtele Portugal a définile différend comme
«port[ant] sur l'opposabilità l'Australie:

a) des devoirs et délégation de pouvoirsdu Portugal en tant que
puissance administrante du Territoire du Timor oriental; et
b) du droit du peuple du Timor oriental à disposer de lui-même,
ainsi que des droitsy attenants (droitàl'intégrité et l'unité ter-
ritoriale et souveraineté permanente sur ses richesses et ses res-
sources naturelles))) (requête,par.1).

D'autre part, l'Australie, qui ne considéraitpas que le Portugal avait des
pouvoirs sur le territoire du Timor oriental à la fin des annéesquatre-
vingt, auniquement étéaccuséepar le Portugal dans la requêtede ce der-
nier de s'êtrelivrée "[the]activities... [which]have taken the form of the negotiation and

conclusionby Australia with a third State [Indonesia]of an agreement
relating to the explorationand exploitation of the continentalshelf in
the aveuof the 'TimorGap'and the negotiation, currentlyinprogress,
of the delimitation ofthat same shelfwith that same thirdState [Indo-
nesia]" (Application, para. 2; emphasis added).

3. If there had been anything for Portugal to complain about this
would not have been "the opposability" to any State of either "the duties

of, and delegation of authority to, Portugal as the administering Power
of the Territory of East Timor", or "the right of the people of East Timor
to self-determination, and the related rights" (Application, para. 1).Any
complaint could only have related to Portugal's alleged title, whether as
an administering Power or otherwise, to the Territory of East Timor
together with the corresponding title to the area of continental shelf
which would overlap with that of Australia. In this respect Portugal, in
its Application, has given an incorrect definition of the dispute and seems
to have overlooked the difference between the opposability to any State
of its rights and duties as the administering Power or of the rights of the
people of East Timor and the more basic question of whether Portugal is
the State entitled to assert these rights and duties.

In particular Portugal contends, with regard to subparagraph (b) in
the quotation in paragraph 2 above, that the right of the people of East
Timor to self-determination and the related rights guaranteed by the
United Nations Charter to a people still under the control of a colonial
State or of an administering Power for non-self-governing territories
should be respected by the whole international community under which-
ever authority and control that people may be placed. Australia has not
challenged the "right of the people of East Timor to self-determination,
and the related rights". The right of that people to self-determination and
other related rights cannot be made an issue - and is not an issue - of
the present case.

The present case relates solely to the title to the continental shelf which
Portugal claims to possess as a coastal State. This point cannot be over-

emphasized.

4. What, then, did Australia actually do to Portugal or the people of
East Timor? It is essential to note that, in the area of the "Timor Gap",

Australia has not asserted a new claim to any seabed area intruding into
the area of any State or of the people of the Territory of East Timor, nor
has it acquired any new seabed area from any State or from that people
(see sketch-map on page 109). (([aux] agissements [qui] se concrétisent par la négociation et la
conclusion, par l'Australie, avec un Etat tiers [l'Indonésie], d'un
accord portant sur l'exploration et1'exploitationduplateau continen-
tal dans la zone du «Timor Gap»,ainsi quepar la négociation,pour-
suivieà cejour, avec ce mêmeEtat tiers [l'Indonésie], de la déli-
mitation de ce mêmeplateau)) (requête,par. 2; les italiques sont de
moi).

3. Les griefs que le Portugal aurait pu formuler de ce fait ne sauraient
avoir traità l'«opposabilité» à quelque Etat que ce soit «des devoirs et
délégation de pouvoirsdu Portugal en tant que puissance administrante
du Territoire du Timor oriental)) ou «[du] droit du peuple du Timor
orientalà disposer de lui-même,ainsique desdroitsy attenants)) (requête,
par. 1). Les griefs ne sauraient porter que sur le titre auquel le Portugal
prétend - en sa qualitéde puissance administrante ou sur une autre base
- à l'endroit du Territoire du Timor oriental et, corrélativement, à

l'endroit de la zone du plateau continental qui chevaucherait celle de
l'Australie. A cet égard,1'Etatdemandeur a mal définile différenddans
sa requête;il semble en effet avoir méconnu la différence entre, d'une
part, l'opposabilitéà un autre Etat des droits et devoirs du Portugal
comme puissance administrante ou des droits du peuple du Timor orien-
tal et, d'autre part, la questionplusfondamentale de savoir si lePortugal
est bien 1'Etatayant qualitépour faire valoir ces droits et devoirs.
Le Portugal soutient notamment, en ce qui concerne l'alinéab) de la
citation reproduite au paragraphe 2 ci-dessus, que le droit du peuple du
Timor oriental à disposer de lui-mêmeainsique les droits y attenants que
la Charte des Nations Unies garantit à un peuple qui est encore sous

l'autoritéd'un Etat colonial ou d'une puissance administrante de terri-
toires non autonomes doivent êtrerespectéspar l'ensemblede la commu-
nauté internationale, quelleque soit l'autoritédela puissancesouslaquelle
ce peuple peut êtreplacé. L'Australie n'apas contesté«le droit du peuple
du Timor oriental à disposer de lui-même,ainsi que les droits y atte-
nants)). Le droit de ce peuple à disposer de lui-même etles autres droits
y attenants ne sauraient êtremis en question - et ne sont pas mis en
question dans la présente affaire.
La présente affairea traituniquement au titre sur leplateau continental
que le Portugal prétend posséder entant qu'Etat côtier. On ne saurait
trop le souligner.

4. Qu'a donc fait concrètement l'Australie au Portugal ou au peuple
du Timor oriental? Il est essentiel de relever que, dans le secteur du

«Timor Gap», l'Australie n'apas fait valoir de revendication nouvelle à
l'égardd'une zone de fonds marins qui empiéterait sur le secteur d'un
Etat ou du peuple du Territoire du Timor oriental, et qu'elle n'a acquis ni
d'un Etat, ni de ce peuple, aucune autre zone de fonds marins (voir cro-
quis ci-aprèsp. 109). ISLANDOF TIMOR

N.B.: The area with cross-hatching shows the location of the Zone of
Cooperation under the 1989 Treaty and also gives a general idea of the
"Timor Gap".

23 N.B. : Le secteur doublement hachuré désigne l'emplacementde la zone de
coopération définiepar le traité de 1989et donne aussi une idée générale du
cTimor Gap ». In fact, Australia's original title to the continental shelf in the "Timor
Gap" cannot be challenged at al1by any State or by any people. Under
the contemporary rules of international law, Australia is entitled ipsojure
to its own continental shelf in the southern part of the Timor Sea - but
at the same time a State which has territorial sovereignty over East
Timor, and which lies opposite to Australia at a distance of roughly 250
nautical miles, has the title with respect to the continental shelf off its
coast in the northern part of the "Timor Gap" (see sketch-map: vertical
hatching). How far each continental shelf extends is determined not in
geographical terms but by the legal concept of the continental shelf.

The continental shelves to which both States are thus entitled overlap

somewhere in the middle of the "Timor Gap". Just as in the cases con-
templated by Article 6 (1) of the 1958 Convention on the Continental
Shelfand by Article 83 (1) of the 1982United Nations Convention on the
Law of the Sea, Australia should have negotiated with the coastal State
lying opposite to it across the Timor Sea (see sketch-map: State X as
indicated therein) and did indeed negotiate with that State with respect to
the overlapping continental shelves.
5. A recital of the events which have taken place since the 1970s in
relation to the delimitation of the continental shelf in the relevant areas
can usefully be given at this stage.
Pursuant to the Agreement "establishing certain seabed boundaries"
(United Nations, Treaty Series, Vol. 974, p. 307), Australia and Indo-
nesia drew a lineof delimitationeast of longitude 133"23'E in the Arafura
Sea on 18 May 1971
- in the area between Australia, on the one hand,
and West Irian (Indonesian territory on the island of New Guinea) and
Aru Island (Indonesian territory), on the other. On 9 October 1972the
same two Governments, acting under the Agreement "establishing cer-
tain seabed boundaries in the area of the Timor and Arafura seas, sup-
plementary to the Agreement of 18 May 1971" (United Nations, Treaty
Series, Vol. 974, p. 319) (N.B. the Chart attached to this Agreement is
reproduced on page 111 of this opinion), defined other lines of delimita-
tion west of longitude 133"23'E extending to longitude 127"56'E in the
area of the Timor and Arafura seas between Australia, on the one hand,
and the Tanimbar Islands (Indonesian territory), on the other. Another
line was drawn westward from longitude 126"00' E. This latter agree-
ment, however,left open a gap of nearly 120nautical miles between these
two lines off the coast of "Portuguese Timor" (as it is called on a chart

attached to the Agreement), which was comrnonly known as the "Timor
Gap".

At that time Portugal did not, however, attempt to negotiate with
Australia on the delimitation of the continental shelf in the area thus
left open for Portugal's benefit by the 1972Agreement between Indonesia
and Australia. This certainly leads one to question whether Portugal did,
at that time, deem itself to be in the position of a coastal State withov- En fait, aucun Etat ou peuple ne peut contester le titre originel de
l'Australie sur le plateau continental dans le ((Timor Gap». Selon les
règles du droit international contemporain, l'Australie a ipso jure des
droits sur son propre plateau continental dans la partie méridionalede la
mer de Timor tandis que, simultanément, 1'Etatqui jouit de la souverai-

netéterritoriale sur le Timor oriental et fait facà l'Australieà une dis-
tance d'environ 250 milles marins est titulaire des droits sur le plateau
continental au large de ses propres côtes dans la partieseptentrionale du
((Timor Gap» (voir les hachures verticales sur le croquis). L'étenduede
chacun des plateaux continentaux est déterminéenon par la géographie,
mais par la notion juridique de plateau continental.
Les plateaux continentaux sur lesquels les deux Etats ont des droits se
chevauchent ainsi vers le milieu du ((Timor Gap». Conformément aux
cas envisagésau paragraphe 1de l'article 6 de la convention de 1958sur
le plateau continental et au paragraphe 1de l'article 83 de la convention
des Nations Unies de 1982 sur le droit de la mer, l'Australie aurait dû

négocier avec 1'Etat côtier lui faisant face sur l'autre rive de la mer de
Timor (1'Etat X indiqué sur le croquis), ce qu'elle a effectivement fait
pour ce qui est du chevauchement des plateaux continentaux.
5. Il convient maintenant de récapituler les événementsqui se sont
produits depuis les années soixante-dix s'agissantde la délimitation du
plateau continental dans les zones pertinentes.
En application de l'accord ((établissantcertaines lignes délimitant les
fonds marins» (Nations Unies, Recueil des traités, vol. 974, p. 317),
l'Australie et l'Indonésieont tracé,le 18mai 1971,une ligne de délimita-
tion dans la mer d'Arafura à l'est du méridien 133"23' est, c'est-à-dire
dans la région situéeentre l'Australie, d'une part, et l'Irian occidental et
l'île Aru (territoires indonésiens dont le premier se trouve sur l'île de

Nouvelle-Guinée), d'autre part. En application de l'accord ((instituant
certaines lignes délimitant les fonds marins dans la zone des mers de
Timor et d'Arafura, complétant l'accord du 18 mai 1971 (avec carte)»
(Nations Unies, Recueil des traités, vol. 974, p. 327) (N.B. : la carte
marine jointe à cet accord est reproduite à la page 111 de la présente
opinion), ces deux gouvernements ont défini, le9 octobre 1972,d'autres
lignes de délimitation à l'ouest du méridien133"23' est, jusqu'au méri-
dien 127"56' est dans la région des mersde Timor et d'Arafura située
entre l'Australie, d'une part, et les îles Tanimbar (territoire indonésien),
d'autre part. Une autre ligne a été tracée d'esetn ouest àpartir du méri-
dien 126"est. Toutefois, ce dernier accord laisse, entre ces deux lignes au

large de la côte du ((Timor portugais)) (ainsi dénommé surune carte
jointe à l'accord), un intervalle de près de 120milles marins communé-
ment appeléle ((Timor Gap ».
Le Portugal n'a cependant pas cherché à l'époque à négocier avec
l'Australie la délimitation du plateau continental dans la zone ainsi
laisséeen suspens - à son avantage - par l'accord de 1972entre 1'Indo-
nésieet l'Australie. Incontestablement, la question se pose de savoir si le
Portugal estimait alors être unEtat côtierjouissant de la souverainetésur TIMOR ORIENTAL (OP. IND. ODA)

CARTE ANNEXÉE À L'ACCORD DU9 OCTOBRE 1972ereignty over the eastern part of the island of Timor (East Timor) and
whether it in fact thought that it could claim a title to the continental
shelf in the "Timor Gap".
Instead of dividing the area by drawing a boundary, as in the case of
the 1971and 1972Agreements with Indonesia as explained above, Aus-
tralia agreed in the 1989Treaty with Indonesia "on the Zone of Coopera-
tion in an area between the Indonesian Province of East Timor and
northern Australia" to constitute a "Zone of Cooperation". The content
of the 1989Treaty - what was gained and lost in the "Timor Gap" both
by Australia and by the State lying opposite to it (see sketch-map: State
X as indicated therein) - cannot be disputed, as the Treaty was drawn
up with the consent of the States concerned.

6. Indonesia had apparently claimed since the 1970s the status of a
coastal State for the Territory of East Timor, considered to be one of its
provinces (as explained in paragraph 13 below), and, as such, had nego-
tiated with the opposite State, Australia, on the overlapping part of their
respective continental shelves.On that basis, Australia concluded in 1989
a treaty with Indonesia which would remain in force for an initial 40-year
term and successiveterms of 20 years unless the two States agreed other-
wise (Art. 33) (Application, Ann. 2, text of the Treaty annexed to the
PetroleumAct, 1990).IfPortugal had claimedthe status of a coastal State,
whether as administering Power of the non-self-governing Territory or
otherwise, and had thus claimed the corresponding title to the continen-
tal shelf in the northern part of the "Timor Gap" extending southward
from the coast of East Timor, then Portugal could and should have ini-
tiated a dispute over that title with Indonesia which had made a similar

claim. The party with which Portugal should have engaged in a dispute
over the conflicting titles to the continental shelf in the northern part of
the "Timor Gap" (see sketch-map: vertical hatching) could only have
been Indonesia.

A dispute could have turned on which of the two States, Indonesia or
Portugal, was a coastal State located on the Territory of East Timor and
thus was entitled to the continental shelf extending southwards from the
coast of the Territory of East Timor, thus meeting the continental shelfof
Australia in the middle of the "Timor Gap". This is the dispute in rela-
tion to which Portugal could have instituted proceedings against Indo-
nesia on the merits. However, any issue concerning the seabed area of the
"Timor Gap" could not have been the subject-matter of a dispute between
Portugal and Australia unless and until such time as Portugal had been
established as having the status of the coastal State entitled to thecorre-

sponding continental shelf (in other words, Portugal would have to be
designated as State X, see sketch-map).
7. If Portugal was the coastal State with a claim to the continental
shelf in the "Timor Gap" (see sketch-map: vertical hatching), then the
Treaty which Australia concluded with Indonesia in 1989would certainlyla partie orientale de l'îlede Timor (le Timor oriental) et s'ilpensait pou-
voir effectivement revendiquer quelque droit à l'égarddu plateau conti-
nental dans le «Timor Gap».
Au lieu de diviser le secteur en traçant une frontière, comme dans les
accords susmentionnés conclus en 1971et 1972 avec l'Indonésie, 1'Aus-
tralie a accepté,dans le traitéde 1989avec l'Indonésie ((relatifà la zone
de coopération établie dans un secteur situé entre la province indo-

nésiennedu Timor oriental et l'Australie septentrionale)), d'établir une
«zone de coopération)).Le contenu du traitéde 1989 - ce que 1'Austra-
lie et 1'Etat lui faisant face (1'EtatX indiquésur le croquis) ont l'un et
l'autre acquis et cédédans le secteur du «Timor Gap» - ne saurait être
contestéétant donné que le traitéprocède du consentement mutuel des
Etats concernés.
6. L'Indonésiesemble avoir revendiqué depuisles années soixante-dix
le statut d7Etat côtier au titre du Territoire du Timor oriental, qu'elle
considère comme l'une de ses provinces (comme je l'explique au para-
graphe 13 ci-après),et, à ce titre, elle a tenu avec 1'Etatlui faisant face,
l'Australie, des négociationssur les zones de leurs plateaux continentaux

respectifs qui se chevauchent. Sur cette base, l'Australie a conclu en 1989
un traité avec l'Indonésie devant resteren vigueur pour une première
période dequarante ans puis pendant des périodessuccessivesde vingt
ans à moins que les deux Etats n'en conviennent autrement (art. 33)
(requête, annexe2 (texte du traitéannexé à la loi de 1990sur lespétroles)).
Si le Portugal avait revendiquéle statut d'Etat côtier en sa qualité de
puissanceadministrante du Territoirenon autonome ou sur une autre base,
et ainsi revendiquéle titre correspondant sur le plateau continental de la
partie septentrionale du «Timor Gap» s'étendantvers le sud à partir de
la côte du Timor oriental, il aurait pu, et dû, introduire une instance rela-
tive à ce titre contre l'Indonésie,qui avait fait valoir une revendication
analogue. Ce n'estqu'à l'encontre del'Indonésieque le Portugal aurait dû

contester les titres rivaux relatifs au plateau continental de la partie sep-
tentrionale du «Timor Gap» (voir les hachures verticales sur le croquis).
Un différendaurait pu porter sur la question de savoir qui, de l'Indo-
nésieou du Portugal, était 1'Etatcôtier établi surle Territoire du Timor
oriental et, de ce fait, titulaire des droits sur le plateau continental qui
s'étend en directiondu sud à partir de la côte du Territoire du Timor
oriental, rejoignant ainsi le plateau continental de l'Australie au milieu
du «Timor Gap». C'est là le différendau sujet duquel le Portugal aurait
pu introduire une instance au fond contre l'Indonésie. Toutefois, aucune
question relative aux fonds marins du ((Timor Gap» ne pourrait former
l'objet d'un différendentre le Portugal et l'Australie tant qu'il n'apas été

établique le Portugal a le statut d7Etat côtier titulaire des droits sur le
plateau continental correspondant (autrement dit, il faudrait que le Por-
tugal soit désigné comme 1'EtatX indiquésur le croquis).
7. SilePortugal était17Etatcôtier pouvant revendiquer des droits sur le
plateau continental dans le «Timor Gap» (voir leshachures verticalessur
le croquis), le traité que l'Australie a conclu avec l'Indonésieen 1989have been nul1and void from the outset. Alternatively, if Indonesia was
the coastal State, and thus had a right over the relevant area of the con-
tinental shelf (see sketch-map: vertical hatching), then Portugal quite
simply had no right to bring this case. In order to do so, Portugal would
have had to have been a coastal State lying opposite to Australia.

In order to entertain the Application against Australia with respect to
the continental shelf in the "Timor Gap" or, more specifically,the area
called the "Zone of Cooperation" which Australia claims in part, the
Court needs to be convinced, as a preliminary issue, of the standing of
Portugal in this case as being a coastal State with a claim to the conti-
nental shelf in the Timor Sea as of 1991,the year of the Application (see
sketch-map: State X as indicated therein).
As 1repeat, an issue on which Portugal could have initiated a dispute
would have been its own entitlement to the continental shelf offthe coast
of East Timor, but could not have related to the competence of Australia
to conclude a treaty with Indonesia.

8. The present Judgrnent, in my view, seems to rely heavily on the
jurisprudence of the case concerning Monetary Gold Removed from
Rome in 1943 (1954). That case does not seem to be relevant to the
present case as the Court found in 1954that "[tlo go into the merits of
[questions which relate to the lawful or unlawful character of certain
actions of Albania vis-à-vis Italy]" in a case brought by Italy against

France, among other CO-Respondents,"would be to decide a dispute
between Italy and Albania" and that "[tlhe Court cannot decide such a
dispute without the consent of Albania" (I.C.J. Reports 1954,p. 32). In
that case "Albania's legal interests would not only be affected by a deci-
sion [of the Court], but would form the very subject-matter of the deci-
sion" (ibid.).
The present case is quite different in nature. The dispute does not
relate to whether Indonesia, the third State, was entitled in principle to
conclude a treaty with Australia, but rather the subject-matter of the
whole case relates solely to the question of whether Portugal or Indo-
nesia, as a State lying opposite to Australia, was entitled to the continen-
tal shelf in the "Timor Gap". This could have been the subject of a
dispute between Portugal and Indonesia, but cannot be a matter in which
Portugal and Australia can be seen to be in dispute with Indonesia as a
State with "an interest of a legal nature which may be affected".

9. East Timor was under Portuguese control from the sixteenth cen-
tury onwards and the Constitution of Portugal of 1933 stated that the
territory of Portugal comprised East Timor in Oceania. East Timor keptaurait certainement été nul et non avenu d'embléeS.i,en revanche,1'Indo-
nésieétait1'Etatcôtier et avait donc des droits sur la zone pertinente du
plateau continental (voir leshachures verticalessur lecroquis), le Portugal
n'étaittout simplementpas habilité à introduire la présente instance.Pour
l'être,il faudrait qu'il soitEtatcôtier faisant facà l'Australie.
Afinde connaître de la requêteintroduite contre l'Australie relativement
au plateau continental dans le((Timor Gap», ou plus précisémend tans le
secteur dit «zone de coopération)) que l'Australierevendique en partie, la
Cour doit, à titre préliminaire,acquérirla certitude que le Portugal a qua-
litépour agir en l'espèceen tant qu'Etat côtier pouvant revendiquer- en

1991,annéedu dépôt de la requête - des droits sur le plateau continental
dans la mer de Timor (voir 1'EtatX indiquésur le croquis).
Je le répète, une questionsur laquelle le Portugal aurait pu introduire
une instance aurait étécellede sespropres droits sur leplateau continental
au large de la côte du Timor oriental, mais le différend n'auraits pu se
rapporter au pouvoir de l'Australie de conclure un traitéavec l'Indonésie.

8. Le présentarrêtparaît à mon avis se fonder dans une large mesure
sur le précédent de l'affaide l'Ormonétairepris a Rome en 1943 (1954).
Or celui-ci ne me semble pas pertinent en l'espèce,car la Cour a dit en
1954 qu7«[elxaminerau fond de telles questions)) (lesquellesconcernaient

le caractèrelicite ou illicitede certains actes de l'Albanie vis-à-visde l7Ita-
lie) dans une instance introduite par l'Italie contre la France, entre autres
défendeurs, ((seraittrancher un différendentre l'Italie et l'Albanie» et
que «[la] Cour ne [pouvait] trancher ce différendsans le consentement de
l'Albanie» (C.Z. Jecueil 1954, p. 32). Dans l'affaire précité«les inté-
rêtsjuridiques de l'Albanie [auraient]non seulement [étét]ouchéspar une
décision [de la Cour], mais [auraient constitué] l'objet même de ladite
décision))(ibid.).
La présente affaireest d'une tout autre nature. Le différend neporte
pas sur la question de savoir si l'Indonésie,Etat tiers, était habilitéeen
principe à conclure un traitéavec l'Australie. En réalité, l'objt êmede
toute l'affaire tient uniquementàla question de savoir qui du Portugal ou
de l'lndonésieavait, en tant qu7Etat faisant faceà l'Australie, des droits
sur le plateau continental dans la régiondu ((Timor Gap». Cette ques-

tion aurait pu constituer l'objet d'un différendentre le Portugal et 1'Indo-
nésie,mais cen'est pas une question sur laquelle le Portugal et l'Australie
pourraient s'opposer à l'Indonésieen tant qu'Etat ayant «un intérêt
d'ordre juridique ..en cause».

9. Le Timor oriental s'esttrouvésous le contrôle du Portugal à partir
du XVIe siècle,et la constitution portugaise de 1933déclaraitque le ter-
ritoire du Portugal comprenait le Timor oriental en Océanie. Après lathe status of an overseas territory of Portugal even after the war, in con-
trast to Indonesia which gained its independence from the Netherlands.
There is no doubt that, prior to 1974,Portugal had sovereigntyover East

Timor as one of its own overseas provinces and that Portugal, as the
coastal State, would have had a right to the continental shelf in the sea-
bed areas off the Coastof East Timor in the Timor Sea.

10. On the other hand, the United Nations Charter contains a "decla-
ration regarding non-self-governing territories" (Chap. XI) under which
Member States which have or assume responsibilities for the administra-
tion of the colonial territories, accept as a sacred trust the obligation to
promote the well-being of the inhabitants of these territories and, to this
end, to transmit regularly to the Secretary-General statistical and other
information of a technical nature relating to the territories. Portugal
never supplied regular information on its own coloniesscattered through-
out the world and was not seen to have acknowledged that those colonies
had the status of non-self-governingterritories under the United Nations
system.
In 1960the United Nations General Assembly, after having made the
"Declaration on Decolonization" proclaiming the right of al1peoples to

self-determination (resolution 1514(XV)), adopted a resolution addressed
in particular to Portugal in which it considered East Timor to be a non-
self-governingterritory within the meaning of Chapter XI of the Charter
and requested Portugal to transmit to the Secretary-General information
on East Timor, among other non-self-governing territories under Portu-
guese control (resolution 1542(XV)).
11. Between 1961and 1973the General Assembly repeatedly appealed
to Portugal to comply with the decolonization policy of the United
Nations and continued to condemn Portugal's colonialpolicy and its per-
sistentrefusa1to carry out that United Nations policy. In 1963the Secu-
rity Council for its part deprecated the attitudes of the Portuguese Gov-
ernment and its repeated violations of the principles of the Charter,
urgently calling upon Portugal to implement the decolonization policy
(resolutions 180 (1963)and 183 (1963)), and in 1965once again passed a
resolution deploring Portugal's failure to comply with the previous Gen-
eral Assembly and Security Council resolutions (resolution 218 (1965)).
In 1972,the Security Council repeated its condemnation of the persistent

refusa1of Portugal to implement the earlier resolutions (resolutions 312
(1972) and 322 (1972)).

Portugal did not take any steps to assume the duties and responsibili-
ties of a governing authority in relation to those territories which should
have been treated as non-self-governingterritories in accordance with the
United Nations concept, and continued to regard them merely as its
overseas provinces.guerre, le Timor oriental a conservéle statut de territoire portugais
d'outre-mer, àla différencede l'Indonésiequi a obtenu sonindépendance
des Pays-Bas. Il est incontestable qu'avant 1974le Portugal exerçait sa
souverainetésurleTimor oriental, quiétait l'unede sesprovinces d'outre-
mer, et qu'en sa qualitéd'Etat côtier le Portugal aurait eu des droits sur
le plateau continental dans les zones de fonds marins au large du Timor
oriental, dans la mer de Timor.
10. Par ailleurs,la Charte des Nations Unies contient une ((déclaration
relative auxterritoires non autonomes))(chap.XI), aux termes de laquelle

les Membres des Nations Unies qui ont ou qui assument la responsa-
bilitéd'administrer des territoires coloniaux acceptent comme une mis-
sion sacréel'obligationde favoriserla prospéritédeshabitants decesterri-
toires et, cette fin, de communiquer régulièrementau Secrétaire général
des renseignements statistiques et autres de nature technique concernant
ces territoires. Le Portugal n'a jamais communiqué régulièrement des
renseignements sur ses colonies éparpilléesdans le monde entier et n'a
pas paru avoir reconnu à ces colonies le statut de territoires non auto-
nomes conformémentau droit des Nations Unies.
En 1960,l'Assembléegénérale des Nations Unies, après avoir formulé
la ((déclaration sur la décolonisation» proclamant le droit de tous les
peuples à disposer d'eux-mêmes(résolution 1514 (XV)), a adopté une
résolutionvisant expressémentle Portugal, dans laquelle le Timor orien-
tal étaitqualifié deterritoire non autonome au sens du chapitre XI de la

Charte et où le Portugal étaitprié decommuniquer au Secrétaire général
des renseignements sur le Timor oriental, entre autres territoires non
autonomes placéssous son administration (résolution 1542(XV)).
11. Entre 1961 et 1973,l'Assemblée généralae engagéle Portugal à
maintes reprisesà respecter la politique de décolonisationde l7Organisa-
tion des Nations Unies et a continué à condamner la politique coloniale
du Portugal et le refus persistant de celui-ci d'appliquer la politique de
l'organisation. En 1963,le Conseil de sécurita quant à lui déplorél'atti-
tude du Gouvernement portugais et ses violations répétées des principes
de la Charte, et il a invitéle Portugal appliquer d'urgence la politique
de décolonisation (résolutions180 (1963) et 183 (1963)). En 1965, le
Conseil de sécuritéa de nouveau adoptéune résolution dans laquelle il
déplorait la carence du Gouvernement portugais à se conformer aux
résolutions antérieuresde l'Assembléegénérale et du Conseil de sécurité

(résolution 218 (1965)). En 1972, le Conseil de sécuritéa de nouveau
condamnéle refus persistant du Portugal d'appliquer lesrésolutionsanté-
rieures (résolutions312 (1972)et 322 (1972)).
Le Portugal n'a pris aucune mesure pour assumer les obligations et
les responsabilitésd'une autorité administrante sur ces territoires, qui
auraient dû être traitéscomme des territoires non autonomes au sens où
l'Organisation des Nations Unies l'entendait, et il a continuéles consi-
dérersimplement comme ses provinces d'outre-mer. 12. Following the "Carnation Revolution" in April 1974,the Govern-
ment in Portugal was replaced by a new régime.The "Law of 27 July
1974", promulgated by the Council of State, revised the old Portuguese
Constitution and acknowledgedthe right to self-determination - includ-
ing independence - of the territories under Portuguese administration.
The new Government of Portugal convened conferences on decoloniza-
tion in May 1975in Dili and in June 1975in Macao, to which it invited
the representatives of several East Timorese political groups. The "Law
of 17 July 1975" relating to the decolonization of East Timor, which
resulted from those conferences, was intended to put an end to the sov-
ereignty of Portugal over East Timor in October 1978.
On the other hand Indonesia, which seems not to have sought pre-

viously to annex East Timor to its own territory and had maintained
friendly relations with Portugal, appears to have begun considering the
annexation of East Timor in the 1970s.In July 1975, the President of
Indonesia asserted that East Timor would not be competent to attain its
independence. The political group UDT, which supported the approach
of the Indonesian Government, organized a coup d'étaton 11 August
1975.The local government in East Timor did not receive any effective
assistance from Portugal itself; its members left in August 1975for the
island of Atauro north of Timor and, in December 1975,moved away
from that island and thus left the area. Portugal did not accept the
request of the FRETILIN group to return to East Timor and Indonesia
began to prepare for a large-scale military invasion of the Territory.
These developments marked the end of Portuguese rule in East Timor.

13. On 28 November 1975 FRETILIN declared the full independence
of the Territory and the establishment of the Democratic Republic of
East Timor. On the other hand, some other political parties, such as
UDT and APODETI, which considered that it would be difficultfor East
Timor to maintain its independence, werewillingto be annexed by Indo-
nesia and on 30November 1975the representatives of those groupsmade
a declaration of the separation of the Territory from Portugal and its
incorporation into Indonesia.
In early December 1975Indonesia sent an army of 10,000mento Dili.
On 17December 1975,the pro-Indonesian parties declared the establish-
ment of a provisional government of East Timor in Dili. Responding to
an alleged appeal from the people of East Timor, Indonesia passed a law
on 15 July 1976providing for annexation, which the President of Indo-
nesia signedon 17July 1976.East Timor was thus giventhe status of the
twenty-seventh province of Indonesia. The Portuguese authorities, which
had already left the island, havenever returned to East Timor since that

time.

14. As from the year 1974,which was marked by the change in Por-
tuguese colonial policy under the newrégime, the GeneralAssemblycon- 12. Suiteà la ((révolution des Œillets)) en avril 1974, un nouveau
régimea étéinstauréau Portugal. La «loi du 27juillet 1974», promul-
guéepar le Conseil d'Etat, a revisél'ancienne constitution portugaise et
reconnu le droità l'autodétermination - età l'indépendance - des ter-
ritoires d'outre-mer sous administration portugaise. Le nouveau gouver-
nement portugais a organiséen mai 1975 à Dili et en juin 197à Macao
des conférencessur la décolonisationauxquelles il a invitéles représen-

tants de plusieurs mouvements politiques du Timor oriental. La «loi du
17juillet1975))relativeà la décolonisationdu Timor oriental, àlaquelle
ont abouti ces conférences, visaitmettre un terme en octobre 1978 à la
souverainetédu Portugal sur le Timor oriental.
Quant à l'Indonésie, quine paraît pas avoir cherchéauparavant à
annexer le Timor oriental à son propre territoire et qui avait maintenu
des relations amicales avec le Portugal, elle semble avoir commencé à
envisager cette annexion dans les annéessoixante-dix.En juillet 1975,le
président de l'Indonésiea affirmé quele Timor oriental n'était pas en
mesure d'accéder àl'indépendance.Le 11 août 1975,la formation poli-
tique UDT, qui partageait le point de vue du Gouvernement indonésien,
a organiséun coup d'Etat. L'administration locale du Timor oriental n'a

reçu aucune assistance effectivedu Portugal; sonpersonnel s'ests'installé
dans l'île'Atauro, au nord de Timor, en août 1975,et a quitté cetteîle,
et donc la région, en décembre dela mêmeannée.Le Portugal a décliné
l'invitation du mouvement politique FRETILIN à regagner le Timor
oriental et l'Indonésiea amorcédes préparatifs en vue d'une invasion
militaireà grande échelledu Territoire. C'est ainsi qu'a pris fin la domi-
nation portugaise au Timor oriental.
13. Le 28 novembre 1975, le FRETILIN a déclaré l'indépendance
complètedu Territoire et l'instauration de la République démocratique
du Timor oriental. De leur côté, d'autres partis politiques,commeUDT
et I'APODETI, qui estimaient qu'il serait difficilepour le Timor oriental

de maintenir son indépendance, étaient favorables à une annexion par
l'Indonésie et,le0 novembre 1975,lesreprésentantsde cesmouvements
ont fait une déclaration proclamant la séparation du Territoire d'avecle
Portugal et son incorporation àl'Indonésie.
Au début dedécembre1975,l'Indonésiea envoyé à Dili une arméede
dix mille hommes. Le 17 décembre1975,les partis pro-indonésiens ont
proclamél'établissementd'un gouvernement provisoire du Timor orien-
talà Dili. Répondant àun prétendu appeldu peuple du Timor oriental,
l'Indonésiea adopté,le 15juillet 1976,une loi portant annexion, que le
président del'Indonésiea signéele 17juillet 1976.Le Timor oriental est
ainsi devenu la vingt-septièmeprovince de l'Indonésie.Les autoritéspor-
tugaises, qui avaient déjàquittél'île, nesontjamais retournéesau Timor

oriental depuis lors.

14. Depuis 1974,date à laquelle le nouveau régimeportugais a modifié
la politique colonialedu pays, l'Assembléegénéralea continué d'adoptertinued to adopt successiveresolutions on the implementation of the Dec-
laration on Decolonization. In its 1974resolution, the General Assembly
welcomed the acceptance by the new Government of Portugal of the
principleof self-determinationand independenceand itsunqualified appli-
cability to al1the peoples under Portuguese colonial domination, calling
upon Portugal to pursue the necessary steps to ensure the full implemen-
tation of the "Declaration on Decolonization" (resolution 3294(XXIX)).

In 1975the General Assembly, for the first time, adopted a resolution
relating to East Timor in which it called upon Portugal as the adminis-
tering Power to continue to make everyeffort to find a solution by peace-
ful means through talks between the Government of Portugal and the
political parties representing the people of Portuguese Timor; strongly
deplored the military intervention of the armed forces of Indonesia, and

called upon Indonesia to desist from further violation of the territorial
integrity of Portuguese Timor and to withdraw without delay its armed
forces from the Territory in order to enable the people of the Territory
freely to exercise their right to self-determination and independence
(resolution 3485 (XXX)).
Further to that General Assembly resolution, the Security Council, on
22 December 1975, deplored the intervention of the armed forces of
Indonesia in East Timor, regretting that the Government of Portugal
was not discharging fully its responsibilities as administering Power in
the Territory under Chapter XI of the Charter, called upon Indonesia to
withdraw al1its forces fromthe Territory without delay, and called upon
Portugal as administering Power to CO-operatefully with the United
Nations so as to enable the people of East Timor to exercise freelytheir
right to self-determination (resolution 384 (1975)). Several months
later, on 22 April 1976,the Security Council once again passed a resolu-
tion in which it did not refer to the responsibility of Portugal as the

administering Power of East Timor but was only concerned with the
military intervention of Indonesia in that Territory (resolution 389
(1976)).

15. In a resolution of 1976,the General Assembly,followingthe same
approach as the one adopted in the previous year, upheld the rights of
the people of East Timor and strongly criticized the action of Indonesia
(resolution 31/53). It should be noted, however, that Indonesia's claim
that East Timor should be integrated into its territory wasrejectedsolely
in order to uphold the rights of the people of East Timor but not to pro-
tect the rights and duties of the state of Portugal in relation to East
Timor or the status of Portugal as the administering Power. In 1977the
General Assembly kept to the outline of the previous year's resolution
(resolution 32/34); the Government of Portugal did not feature in this
resolution at all.

In 1978the General Assembly desistedfrom its rejection of Indonesia's
claim that East Timor had been integrated.The 1978resolution made nodes résolutions relativeà l'application de la déclarationsur la décoloni-
sation. Dans sa résolution de1974,l'Assembléegénérale a accueilli avec
satisfaction la décisiondu nouveau gouvernement portugais d'accepter
les principes d'autodéterminationet d'indépendanceet leur stricte appli-
cation à tous les peuples sous domination coloniale portugaise; elle a
d'autre part demandéau Portugal de continuer à agir en vue de l'adop-
tion des mesures nécessairespour assurer la pleine application de la
«déclaration surla décolonisation»(résolution3294 (XXIX)).
En 1975, l'Assembléegénéralea adopté pour la première fois une
résolution concernantle Timor oriental, dans laquelle elle demandait au

Portugal, en sa qualité de puissanceadministrante,decontinuer de n'épar-
gner aucun effort pour trouver une solution par des voies pacifiquesau
moyen d'entretiens entre le Gouvernement portugais et les partis politi-
ques représentantlepeuple du Timor portugais; par ailleurs,elledéplorait
vivementl'intervention militairedesforcesarméesindonésienneestdeman-
dait au Gouvernement indonésiendecesser devioler l'intégrité territoriale
du Timor portugais et de retirer sans délaisesforces arméesdu Territoire,
afin de permettre au peuple du Territoire d'exercerlibrement son droit
l'autodéterminationet à l'indépendance (résolution3485 (XXX)).
Suite à cette résolutionde l'Assembléegénéralel,e Conseil de sécurité,
le 22 décembre1975,a déploré l'intervention des forces armées de1'Indo-
nésieau Timor oriental, a regrettéque le Gouvernement portugais ne se
fut pas pleinement acquitté des responsabilités quilui incombaient en
tant que puissance administrante du Territoire aux termes du chapitre XI

de la Charte, a demandéau Gouvernement indonésien de retirer sans
délaitoutes sesforces du Territoire et a demandéau Gouvernement por-
tugais, en tant que puissance administrante, de coopérer pleinement avec
l'organisation des Nations Unies afin de permettre au peuple du Timor
oriental d'exercer librement son droit à l'autodétermination (résolu-
tion 384 (1975)).Quelques mois plus tard, le 22 avril 1976,le Conseil de
sécuritéa de nouveau adoptéune résolution,dans laquelle il ne faisait
pas mention de la responsabilitédu Portugal en tant que puissanceadmi-
nistrante du Timor oriental et ne traitait que de l'intervention militaire de
l'Indonésiedans ce Territoire (résolution389 (1976)).
15. Dans une résolution de 1976, l'Assembléegénérale, suivant la
mêmedémarche que celle adoptée l'année précédentea, défendu les
droits du peuple du Timor oriental et critiquévivementl'action de'Indo-
nésie(résolution31/53).Il y a toutefois lieu de noter que la prétention de
l'Indonésie à intégrer le Timor oriental à son territoire a étérejetée

uniquement afin de défendreles droits du peuple du Timor oriental et
non pour protégerles droits et obligations de 1'Etat portugais relative-
ment au Timor oriental ou le statut du Portugal en tant que puissance
administrante. En 1977, l'Assembléegénéralea adopté une résolution
analogue à celle de l'année précédente (résolutio32134); leGouverne-
ment portugais n'y étaitaucunement mentionné.
En 1978, l'Assembléegénéralea renoncé à rejeter la prétention de
l'Indonésie selon laquellele Timor oriental avait été intégréson terri-request for the withdrawal of the Indonesian military from East Timor,
but emphasized the inalienable right of the people of East Timor to self-
determination and independence, and the legitimacy of their struggle to
exercisethat right (resolution 33/39).Sincethen the position of the Gen-

eral Assembly has remained the same; that is, the emphasis has been
upon the relief of the people of East Timor (see resolutions 34/40, 35/27
and 36/50).
16. In 1980the General Assembly welcomedthe diplomatic initiative
taken by the Government of Portugal with a viewto findinga comprehen-
sivesolution to the problem of East Timor, and indicated that the General
Assembly had heard the statements of the representative of Portugal (as
the administering Power), the representative of Indonesia, various East
Timorese petitioners and representatives of non-governmental organiza-
tions, as wellas the representative of FRETILIN (resolution 35/27).
In 1982the General Assembly,after having heard the statements of the
representatives of Portugal, Indonesia, FRETILIN and others, requested
the Secretary-General to initiate consultations with al1 parties directly
concerned with a view to exploring avenues for achieving a comprehen-
sive settlement of the problem (resolution 37/30). The consultations
thus requested in the 1982 resolution have not yet yielded any fruitful
result.
The General Assembly has included an item on the "Question of East

Timor" on the agenda of every session since 1983. However, on the
recommendation of the General Committee, the General Assembly has
deferred consideration of the item of East Timor to the subsequent ses-
sion ever since that time. The question of East Timor may be said to be
a subject which has been shelved since 1983.
17. Portugal, which was willingto grant independence to the people of
East Timor under the new Constitution of 1974,has not exercised any
authority over the Territory ever since the local authority was forced to
leave East Timor in 1975on account of the turmoil in the island. Portu-
gal has not, since 1974,supplied any information or statistics as required
under the United Nations Charter and under the 1960"Declaration on
Decolonization". The United Nations, when dealing with the problem of
East Timor since 1976,has never indicated that Portugal should have the
right and the duty to administer this area as a non-self-governing terri-
tory.
The authority of Indonesia has been exercised in the Territory for
nearly 20 years since that time. The United Nations has not given its
approval to the annexation of East Timor by Indonesia. However the
rejection ofIndonesiaS claim that East Timor should be integrated into

its territory disappearedfrom the 1978 resolution and the demandfor the
withdrawal of the Indonesian army ceased to be made. The fact is that the
interest of the General Assembly wasdirected more to humanitarian aid
than to the form of administration of the Territory.
18. The incident which took place in 1991at the Santa Cruz Cemetery
in Dili in East Timor was extremely serious from this very standpoint.toire. Dans sa résolution de 1978, elle ne demandait plus le retrait des

troupes indonésiennesdu Timor oriental, tout en réaffirmantledroit inalié-
nable du peuple du Timor oriental à disposer de lui-mêmeet à l'indé-
pendance, ainsi que la légitimitéde salutte pour réaliserce droit (résolu-
tion 33/39).Depuis lors, l'Assembléegénéralen'apas modifiésa position,
c'est-à-dire qu'elle s'est surtout intéresséeaux secours à apporter au
peuple du Timor oriental (voir résolutions 34/40, 35/27et 36/50).
16. En 1980,l'Assembléegénéralea accueilli avec satisfaction l'initia-
tive diplomatique prise par le Gouvernement portugais pour trouver une
solution globale au problème du Timor oriental et a indiquéqu'elleavait
entendu les déclarations du représentant du Portugal (en sa qualité de
puissance administrante), du représentant de l'Indonésie,de divers péti-
tionnaires du Timor oriental, de représentants d'organisations non gou-
vernementales et du représentant du FRETILIN (résolution35/27).

En 1982,l'Assembléegénéralea ,prèsavoir entendu les déclarations des
représentants du Portugal, de l'Indonésie etdu FRETILIN ainsi que de
diverses organisations, a priéle Secrétaire général d'entamer des consul-
tations avectoutes lesparties directement intéresséeen vue de rechercher
les moyens permettant de parvenir à un règlement global du problème
(résolution37/30). Les consultations ainsi demandéesdans la résolution
de 1982n'ont pas encore portéleurs fruits.
Depuis 1983, l'Assembléegénéralea inscrit la ((Question du Timor
oriental))à l'ordre du jour de chacune de ses sessions. Toutefois, sur la
recommandation du Bureau, elle a depuis lors toujours renvoyé l'examen
de cette question à sa session suivante. On peut dire que la question du
Timor oriental a étémise en sommeil depuis 1983.

17. Le Portugal, qui étaitdisposéà accorder l'indépendanceau peuple

du Timor oriental dans le cadre de la nouvelle constitution de 1974,n'a
exercéaucune autoritésur le Territoire depuis que l'administration locale
a été forcée dqeuitter le Timor oriental en 1975,en raison des désordres
survenus dans l'île.Depuis 1974,le Portugal n'a fourni ni renseignements
ni données statistiques, comme laCharte des Nations Unies et la ((décla-
ration sur la décolonisation» de 1960lui en faisaient obligation. Depuis
1976,l'organisation des Nations Unies, lorsqu'elle s'est occupéedu pro-
blèmedu Timor oriental, n'ajamais dit que le Portugal avait le droit et le
devoir d'administrer cette région commeun territoire non autonome.
L'Indonésieexerce son autorité sur le Territoire depuis presque vingt
ans maintenant. Les Nations Unies n'ont pas approuvé l'annexion du
Timor oriental par l'Indonésie. Cependant, le rejet de la prétention de
l'Indonésieselon laquelle le Timor oriental devrait êtreintégré à son

territoire a disparudans la résolution de1978 et le retrait de l'arméeindo-
nésiennen'aplus étédemandé. Le fait est que l'Assembléegénérales'est
intéresséedavantage à l'aide humanitaire qu'au mode d'administration
du Territoire.
18. L'incident survenu en 1991au cimetière de Santa Cruz à Dili, au
Timor oriental, était cepoint de vue d'une gravité extrêmeL .a questionWhether the right of the people of East Timor to self-determination has

been duly respected by Indonesia may well be questioned in some other
proceedings before the Court or in the different fora of the United
Nations.
While the military intervention of Indonesia in East Timor and the
integration of East Timor into Indonesia in the mid-1970s were not
approved by the United Nations, there has not been any reason to
assume that Portugal has, sincethe late 1970sand up to the present time,
been entrusted with the rights and responsibilities of an administering
Power for the non-self-governing Territory of East Timor. Few States in
the international community have in the recent past regarded, or at

present regard, Portugal as a State located in East Timor or would main-
tain that as such it may lay claim to the continental shelf off the coast of
East Timor.

19. Irrespective of the status of East Timor - which is still in abey-
ance according to the United Nations - and irrespective of the rights of

the people of East Timor to self-determination guaranteed by the United
Nations Charter, it is clear that Portugal has not been considered - at
least since the early 1980s - to be a coastal State lying opposite to
Australia and that in 1991,when Portugal's Application was filed in the
Registry of the Court, it did not have any authority over the region of
East Timor, from the coast of which the continental shelf extends south-
wards in the Timor Sea.
20. It follows that Portugal lacks standing as an Applicant State in this
proceeding which relates to the continental shelf extending southward
into the Timor Sea from the coast of East Timor in the "Timor Gap".

For this reason alone, the Court does not, in my view, have jurisdiction
to entertain the Application of Portugal and the Application must be dis-
missed.

(Signed) Shigeru ODA.de savoir si le droit du peuple du Timor oriental à disposer de lui-même
a été dûment respectépar l'Indonésiepourrait êtresoulevéedans le cadre
d'autres procédures devant la Cour ou au sein d'autres instances de
l'organisation des Nations Unies.
Mêmesi l'intervention militaire de l'Indonésie au Timor oriental et
l'intégration decelui-ci à l'Indonésieau milieu des années soixante-dix
n'ont pas été approuvéep sar l'organisation des Nations Unies, il n'y a eu
aucune raison de considérer que, depuis la fin des années soixante-dix et

jusqu'à cejour, lePortugal est restéinvesti des droits et desresponsabilités
d'une puissance administrante à l'égarddu Territoire non autonome du
Timor oriental. Dans la communauté internationale, peu d7Etats ont
considérédans le passé récent ou considèrent à l'heure actuelle le Portu-
gal comme un Etat présent au Timor oriental ou soutiendraient que le
Portugal peut, à ce titre, revendiquer des droits sur le plateau continental
au large du Timor oriental.

19. Indépendamment du statut du Timor oriental - qui reste en sus-
pens aux yeux de l'organisation des Nations Unies - et indépendam-
ment du droit du peuple du Timor oriental à l'autodétermination, garanti
par la Charte des Nations Unies, il est manifeste que le Portugal n'est pas
considéré - du moins depuis le début des années quatre-vingt - comme
un Etat côtier faisant face à l'Australie et qu'en 1991,au moment où le
Portugal a déposé sa requête au Greffe de la Cour, il n'exerçait aucune
autorité sur la régiondu Timor oriental, au large de laquelle le plateau
continental s'étend versle sud dans la mer de Timor.

20. Il s'ensuit que le Portugal n'apas qualitépour agir en tant qu'Etat
demandeur en cette instance relative au plateau continental qui s'étend
vers le sud dans la mer de Timor à partir de la côte du Timor oriental
dans le ((Timor Gap)). Pour ce seul motif, la Cour n'est pas compétente
à mon avis pour connaître dela requêtedu Portugal, qui doit être rejetée.

(Signé) ShigeruODA.

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Document Long Title

Opinion individuelle de M. Oda (traduction)

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