Observations écrites de l'Australie sur la déclaration d'intervention de la Nouvelle-Zélande

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148-20121218-WRI-01-00-EN
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Note: Cette traduction a été établie par le Greffe à des fins internes et n’a aucun caractère officiel
Chasse à la baleine dans l’Antarctique (Australie c. Japon)
OBSERVATIONS ÉCRITES DE L’AUSTRALIE SUR LA DÉCLARATION D’INTERVENTION
DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE
18 décembre 2012
1. Le 20 novembre 2012, la Nouvelle-Zélande, invoquant l’article 63 du Statut de la Cour
(ci-après le «Statut»), a déposé une déclaration d’intervention (ci-après la «déclaration de la
Nouvelle-Zélande»)1 en la présente affaire. Dans une lettre datée du même jour, le greffier de la
Cour, agissant conformément à l’article 83 du Règlement de la Cour (ci-après le «Règlement») a
transmis une copie certifiée conforme de ladite déclaration à l’agent de l’Australie et fixé au
21 décembre 2012, à 17 heures, l’expiration du délai pour le dépôt par les Gouvernements
australien et japonais d’observations écrites sur la déclaration de la Nouvelle-Zélande.
2. Les observations du Gouvernement australien sur la déclaration de la Nouvelle-Zélande
sont exposées ci-après. En résumé, l’Australie estime que la déclaration satisfait aux dispositions
de l’article 63 du Statut ainsi qu’à celles des articles applicables du Règlement, et qu’elle est
recevable.
3. La faculté d’intervenir prévue à l’article 63 du Statut s’exerce de plein droit2. L’Australie
fait observer que, si elle est convaincue que la Nouvelle-Zélande a rempli les conditions prévues
pour l’exercice du droit d’intervention au titre de l’article 63 de Statut et de l’article 82 du
Règlement, «la Cour est tenue de déclarer l’intervention recevable, et n’a aucun pouvoir
discrétionnaire en la matière» [Traduction du Greffe.]3
Les conditions d’application de l’article 63
4. Les conditions qui doivent être remplies pour l’exercice du droit d’intervention prévu à
l’article 63 sont énoncées par celui-ci, ainsi qu’à l’article 82 du Règlement, dont voici le libellé :
1. Un Etat qui désire se prévaloir du droit d’intervention que lui confère
l’article 63 du Statut dépose à cet effet une déclaration, signée comme il est indiqué à
l’article 38, paragraphe 3, du présent Règlement. Cette déclaration est déposée le plus
tôt possible avant la date fixée pour l’ouverture de la procédure orale. Toutefois, dans
1 Déclaration d’intervention déposée par le Gouvernement néo-zélandais en vertu de l’article 63 du Statut de la
Cour, signée par l’agent désigné du Gouvernement néo-zélandais, Mme Penelope Ridings.
2 Statut de la Cour internationale de Justice, article 63, par. 2 ; Haya de la Torre (Colombie/Pérou), arrêt,
C.I.J. Recueil 1951, p. 76 ; Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), requête à fin d’intervention, arrêt,
C.I.J. Recueil 1981, p. 13, par. 21 ; Différend territorial et maritime (Nicaragua c. Colombie), requête à fin d'intervention
du Gouvernement du Honduras, arrêt du 4 mai 2011, par. 35.
3 G. Fitzmaurice, «The Law and Procedure of the International Court of Justice, 1951-4: Questions of
Jurisdiction, Competence and Procedure», 1958, British Year Book of International Law, vol. 34, p. 127. Abordant
spécifiquement l’article 63, l’auteur exprime l’opinion suivante (p. 127) :
Même si la faculté d’intervenir au titre de cet article s’exerce de plein droit, à condition que les
critères qui y sont énoncés soient remplis, il revient naturellement à la Cour de décider si tel est le
cas. … Ainsi, c’est à la Cour de dire s’il est question de l’interprétation d’une convention, si la convention
en cause est visée par la disposition, si l’Etat intervenant est partie à cette dernière, et ainsi de suite. Si
ces conditions sont réunies, la Cour est tenue de déclarer l’intervention recevable, et n’a aucun pouvoir
discrétionnaire en la matière… [Traduction du Greffe.]
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des circonstances exceptionnelles, la Cour peut connaître d’une déclaration présentée
ultérieurement.
2. La déclaration indique le nom de l’agent. Elle précise l’affaire et la
convention qu’elle concerne et contient :
a) des renseignements spécifiant sur quelle base l’Etat déclarant se considère comme
partie à la convention ;
c) un exposé de l’interprétation qu’il donne de ces dispositions ;
d) un bordereau des documents à l’appui, qui sont annexés.
3. Une telle déclaration peut être déposée par un Etat qui se considère comme
partie à la convention dont l’interprétation est en cause mais n’a pas reçu la
notification prévue à l’article 63 du Statut.
5. L’Australie estime que la déclaration de la Nouvelle-Zélande répond à toutes les
exigences devant être remplies pour l’exercice du droit d’intervenir au titre de l’article 63 du Statut.
6. S’agissant des modalités de temps énoncées au premier paragraphe de l’article 82 du
Règlement, elle fait valoir que la déclaration d’intervention au titre de l’article 63 est présentée
dans les délais si elle est déposée avant l’ouverture de la procédure orale. Or la déclaration de la
Nouvelle-Zélande a été déposée «le plus tôt possible» et bien avant «l’ouverture de la procédure
orale».
7. Concernant le paragraphe 2 b) de l’article 82 du Règlement, l’interprétation de la
convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine (ci-après la
«convention»)4, à laquelle la Nouvelle-Zélande est partie, et notamment de son article VIII, est de
toute évidence un élément clef de la présente affaire. Il ne fait aucun doute que la déclaration de la
Nouvelle-Zélande «a réellement trait à ce qui est l’objet de l’instance en cours»5. En effet, la
convention est «non pas incidemment évoquée ou citée, mais en jeu»6 dans l’affaire opposant
l’Australie et le Japon. En conséquence, «il n’y a pas de raison pour que les Etats tiers [en
l’espèce, la Nouvelle-Zélande] ne puissent intervenir au sujet de l’interprétation de cette
disposition»7. De plus, la teneur et les détails de l’exposé de l’interprétation des dispositions en
cause contenu dans la déclaration de la Nouvelle-Zélande satisfont, selon l’Australie, aux exigences
prévues à l’article 82, alinéa 2 c) du Règlement. Dans l’hypothèse où la Cour confirmait le droit de
la Nouvelle-Zélande d’intervenir au titre de l’article 63, l’Australie présentera, à l’occasion des
audiences sur le fond, ses observations sur l’interprétation de la convention donnée par la
4 Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine, Washington, 2 décembre 1946,
Nations Unies, Recueil des traités, vol. 161, p. 74 (entrée en vigueur le 10 novembre 1948).
5 Haya de la Torre (Colombie/Pérou), arrêt, C.I.J. Recueil 1951, p. 76.
6 Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
déclaration d’intervention de la République d’El Salvador, ordonnance, C.I.J. Recueil 1984, p. 239 (opinion dissidente
du juge Schwebel).
7 Ibid. (l’ajout entre crochets est de l’Australie).
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Nouvelle-Zélande, lorsqu’elle aura reçu les observations écrites que celle-ci aura éventuellement
formulées au titre de l’article 86 du Règlement8.
Statut de la Nouvelle-Zélande en qualité d’intervenant
8. Les présentes observations abordent une autre question soulevée dans la déclaration de la
Nouvelle-Zélande : sa qualité d’intervenant, à supposer que la Cour déclare son intervention
recevable. Dans sa déclaration d’intervention, la Nouvelle-Zélande précise qu’elle ne souhaite pas
se constituer partie à l’instance9, ce dont l’Australie prend dûment acte.
9. Selon ses propres termes, la Nouvelle-Zélande limite son intervention à la question
d’interprétation qui fait l’objet de l’espèce, tout en s’abstenant de former une intervention générale
en l’affaire10. Il est évident qu’elle ne cherche pas à «à s'étendre sur d'autres aspects»11 du
différend entre l’Australie et le Japon. Compte tenu de la portée et des conséquences limitées de
l’intervention au titre de l’article 63, c’est à bon droit que l’Etat intervenant n’est pas considéré
comme partie à l’affaire12.
Conclusion
10. L’Australie estime que la déclaration d’intervention déposée par la Nouvelle-Zélande au
titre de l’article 63 du Statut de la Cour est recevable.
___________
8 Dans sa lettre adressée à la Cour en date du 10 octobre 2012, l’agent du Japon affirme que «les observations
[supplémentaires] formulées par la Nouvelle-Zélande pourraient en substance équivaloir à un second tour de procédure
écrite de la part du demandeur», ce qui est à la fois présomptueux et inexact. En tant qu’Etat souverain devant la Cour,
l’Australie formulera ses propres arguments. Par ailleurs, comme il est expliqué au paragraphe 9 ci-après, la déclaration
de la Nouvelle-Zélande présentée en vertu de l’article 63 du Statut se limite à une question d’interprétation.
9 Déclaration de la Nouvelle-Zélande, par. 9 et 35.
10 Ibid., par. 7.
11 Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/Honduras), requête à fin d'intervention du
Gouvernement du Nicaragua, arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 116, par. 58.
12 C’est ce que confirme l’opinion individuelle du juge Oda dans l’affaire du Plateau continental
(Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne), requête à fin d'intervention du Gouvernement de la République de Malte,
C.I.J. Recueil 1981, p. 28, par. 11 :
Pour l’application de l’article 63, aucun lien juridictionnel n’est apparemment requis entre 1’Etat
demandant à intervenir et les Etats parties au litige primitif. L’Etat tiers peut participer à l’instance, mais
non «en qualité de partie» et sur un pied d’égalité avec les autres parties à l’instance, parce que l’objet de
son intervention n’est pas nécessairement lié aux prétentions des parties originaires. L’Etat tiers participe
à l'instance, mais non en qualité de demandeur ou défendeur, ni même de demandeur indépendant.
Voir aussi C. Chinkin, commentaire de l’article 63, in A. Zimmerman, C. Tomuschat, K. Oellers-Frahm
(dir. publ.), The Statute of The International Court of Justice: A Commentary, OUP, 2006, p. 1385.

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