Requête introductive d'instance

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168-20170508-APP-01-00-EN
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
REQUÊTE
INTRODUCTIVE D’INSTANCE
déposée au Greffe de la Cour le 8 mai 2017
Affaire relative à la convention de Vienne sur les relations consulaires
(Inde c. Pakistan)
Le 8 mai 2017
TABLE DES MATIÈRES
Page
I. INTRODUCTION ............................................................................................................................... 2
II. LES FAITS ...................................................................................................................................... 3
III. COMPÉTENCE DE LA COUR ........................................................................................................... 6
IV. LA CONVENTION DE VIENNE ........................................................................................................ 7
V. LES DEMANDES DE L’INDE .......................................................................................................... 10
VI.MESURES DEMANDÉES ............................................................................................................... 12
___________
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A Monsieur Philippe Couvreur, greffier de la Cour internationale de Justice.
Au nom de la République de l’Inde, et conformément au paragraphe 1 de l’article 40 du
Statut de la Cour internationale de Justice (ci-après la «Cour») et à l’article 38 de son Règlement,
lus conjointement avec l’article premier du protocole de signature facultative concernant le
règlement obligatoire des différends fait à Vienne le 24 avril 1963, j’ai l’honneur de soumettre la
présente requête introductive d’instance contre la République islamique du Pakistan, en raison de
graves violations de la convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963 (ci-après la
«convention de Vienne») commises par cet Etat dans le cadre de la détention et du procès d’un
ressortissant indien, M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, qui ont abouti à la condamnation à mort de
l’intéressé le 10 avril 2017. Le présent différend a trait à l’interprétation et à l’application de la
convention de Vienne et, ainsi que le prévoit l’article premier du protocole susmentionné, relève de
la compétence obligatoire de la Cour.
J’ai également l’honneur de présenter une demande urgente en indication de mesures
conservatoires, conformément à l’article 41 du Statut de la Cour et aux articles 73, 74 et 75 de son
Règlement. Par cette demande, l’Inde sollicite la prescription immédiate de certaines mesures, le
sort de son ressortissant, qui a été jugé par un tribunal militaire et condamné à mort, étant incertain
en raison d’un manque d’informations et d’un déni continu du droit de l’Inde de communiquer avec
lui par l’entremise de ses autorités consulaires. La présente instance a donc trait à la violation de la
convention de Vienne dans le cadre de l’arrestation et du procès de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav,
ressortissant indien. Bien que la possibilité d’interjeter appel soit formellement prévue, l’Inde
redoute qu’il ne s’agisse là que d’un simulacre, à l’image du procès de l’intéressé dont le
déroulement a été expéditif, et que cette voie de recours ne se trouve épuisée rapidement,
M. Jadhav risquant alors d’être exécuté sommairement. La présente instance constitue par
conséquent l’unique recours juridique permettant à l’Inde de défendre les intérêts de son
ressortissant.
I. INTRODUCTION
1. Il apparaît que les autorités pakistanaises ont arrêté, détenu, jugé, déclaré coupable et
condamné à mort un ressortissant indien, M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, lequel reste détenu au
Pakistan. En dépit des multiples demandes que l’Inde a présentées à cet effet à partir du mois de
mars 2016, les autorités pakistanaises compétentes ne l’ont pas autorisée à entrer en
communication avec son ressortissant par l’entremise de ses autorités consulaires. Le Pakistan a
donc gravement manqué aux obligations que lui imposent les litt. a), b) et c) du paragraphe 1 de
l’article 36 de la convention de Vienne de 1963.
2. Ces violations ont empêché l’Inde d’exercer les droits qu’elle tient de cet instrument,
privant par ailleurs son ressortissant de la protection que celui-ci lui reconnaît et enfreignant les
droits qu’il lui confère. L’Inde introduit la présente requête en son nom propre afin qu’il soit porté
remède à la violation de ses droits, ainsi qu’au nom de son ressortissant, qui a subi un grave
préjudice et a été condamné à mort à l’issue d’un procès au cours duquel il a été délibérément et
sciemment privé des droits qui sont les siens en vertu du litt. b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la
convention de Vienne.
3. La Cour a jugé que la règle relative à l’épuisement des voies de recours internes ne trouve
pas à s’appliquer lorsqu’un Etat invoque une violation directe de ses droits. En pareil cas, l’Etat
concerné n’est pas tenu d’attendre que son ressortissant lésé ait fait usage de toutes les procédures
internes sans obtenir gain de cause. L’épuisement des voies de recours internes n’est pas non plus
une condition obligatoire si l’Etat défendeur lui-même a manqué d’informer l’intéressé des recours
disponibles, conformément aux obligations que lui impose le droit international (affaire relative au
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Mandat d’arrêt ; affaire LaGrand citée in The Statute of the International Court of Justice — A
commentary, Zimmerman, Tomuschat et Oellers-Frahm (sous la dir. de), 2005, page 648). Au vu
de ce qui précède, l’Inde est donc fondée à soumettre la présente requête à la Cour.
II. LES FAITS
4. M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, ressortissant indien, aurait été arrêté le 3 mars 2016.
5. L’Inde a été avisée de cette prétendue arrestation le 25 mars 2016, lorsque le secrétaire
d’Etat aux affaires étrangères du Pakistan en a fait état auprès du haut-commissaire indien à
Islamabad. Le jour même, elle a demandé à pouvoir entrer en communication au plus vite avec
M. Jadhav par l’entremise de ses autorités consulaires.
6. N’ayant reçu aucune réponse, l’Inde a réitéré sa demande le 30 mars 2016, puis à treize
autres reprises : les 6 mai 2016, 10 juin 2016, 11 juillet 2016, 26 juillet 2016, 22 août 2016,
3 novembre 2016, 19 décembre 2016, 3 février 2017, 3 mars 2017, 31 mars 2017, 10 avril 2017,
14 avril 2017 et 19 avril 2017 (annexe 1). Toutes ces demandes sont restées lettre morte.
7. Le 23 janvier 2017, soit près d’un an après la première demande de l’Inde tendant à ce que
ses autorités consulaires puissent entrer en communication avec son ressortissant, le Pakistan a
adressé à celle-ci une demande d’assistance (annexe 2) dans le cadre d’une enquête engagée sous la
référence «FIR no 6 de 2016». Au sens du code de procédure pénale pakistanais, le «FIR», pour
First Information Report, désigne le procès-verbal établi lors du dépôt initial d’une plainte à la
police. Le document en question portait sur la plainte pénale déposée, apparemment le 8 avril 2016,
contre le ressortissant indien. Il est important de relever que la lettre du Pakistan précisait que ledit
document avait été déposé contre «un ressortissant indien», confirmant ainsi la nationalité de
l’intéressé.
8. Il n’y avait par conséquent aucune contestation ni aucun doute en ce qui concerne la
nationalité de la personne arrêtée, laquelle faisait l’objet d’un procès, qui plus est devant un
tribunal militaire. Le Pakistan a donc, de toute évidence, manqué à l’obligation internationale que
lui impose l’article 36 de la convention de Vienne de permettre à l’Inde de communiquer avec son
ressortissant par l’entremise de ses autorités consulaires. A n’en pas douter, il a également
méconnu le droit de M. Jadhav de solliciter et d’obtenir de communiquer avec ces mêmes autorités.
9. Le 3 février 2017, l’Inde a officiellement protesté contre le déni persistant de son droit de
communiquer avec son ressortissant, alors même que le Pakistan avait reconnu la nationalité
indienne de celui-ci. La demande d’assistance du Pakistan mentionnée au paragraphe 7 faisait par
ailleurs référence à de prétendus aveux de l’intéressé, qui constituaient le fondement des
accusations portées à son encontre  ou, à tout le moins, un élément important des charges
retenues contre lui. L’Inde a donc exprimé ses préoccupations quant à la sécurité de son
ressortissant, précisant que,
«compte tenu, notamment, du caractère forcé des prétendus aveux de l’intéressé, le
traitement dont celui-ci fai[sait] l’objet dans le cadre de sa détention au Pakistan
soul[evait] des inquiétudes grandissantes, les circonstances de sa présence au Pakistan
demeurant par ailleurs inexpliquées».
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10. Le 3 mars 2017, l’Inde a rappelé au Pakistan ses démarches successives, y compris celle
du 3 février 2017, et demandé de nouveau à entrer en communication avec son ressortissant par
l’entremise de ses autorités consulaires.
11. Dans une note verbale datée du 21 mars 2017 (annexe 3), le Pakistan lui a indiqué que
«la possibilité de communiquer par l’entremise de ses autorités consulaires [avec
M. Jadhav] … ser[ait] étudiée à la lumière de la suite qu’elle donner[ait] à la demande d’assistance
aux fins d’enquête et de célérité de la justice formulée par le Pakistan».
12. Les faits relatifs à la présente affaire exposés ci-dessus, et notamment la note verbale du
21 mars 2017, démontrent que le Pakistan a manqué de manière flagrante aux obligations que lui
impose la convention de Vienne, qui ne prévoit aucune exception au droit d’un Etat de
communiquer avec ses ressortissants par l’entremise de ses autorités consulaires énoncé à
l’article 36. Le seul fait de subordonner ce droit à l’octroi de l’assistance aux fins d’enquête
sollicitée par le Pakistan constitue une violation grave de la convention de Vienne.
13. L’Inde a répondu à cette note verbale le 31 mars 2017, soulignant que «le fait d’être
autorisée à communiquer avec M. Jadhav par l’entremise de ses autorités consulaires [était] une
condition préalable essentielle pour établir les faits et comprendre les circonstances de la présence
de l’intéressé au Pakistan».
L’Inde disposait d’informations selon lesquelles M. Jadhav aurait été enlevé en Iran, où il se
livrait à des activités commerciales après avoir pris sa retraite de la marine indienne ; le Pakistan a
affirmé qu’il avait été arrêté au Baloutchistan. Ces éléments demandaient à être vérifiés, ce qui
supposait avant tout que l’Inde puisse communiquer avec l’intéressé.
14. Dans un communiqué de presse du 10 avril 2017, le bureau de relations publiques de
l’armée pakistanaise a déclaré ce qui suit au sujet de M. Jadhav :
«L’espion a été jugé par une cour martiale générale en application de la loi sur
l’armée pakistanaise, et condamné à mort. Le général Qamar Javed Bajwa, chef
d’état-major de l’armée, a confirmé ce jour cette condamnation à mort prononcée par
la cour martiale générale.» (Annexe 4.)
15. Le 10 avril 2017, l’Inde a reçu une nouvelle note verbale du ministère des affaires
étrangères du Pakistan, indiquant que la possibilité, pour ses autorités consulaires, d’entrer en
communication avec l’intéressé serait étudiée à la lumière de la suite qu’elle donnerait à la
demande d’assistance aux fins d’enquête du Pakistan (annexe 5).
16. L’Inde a répondu à cette note verbale le même jour, précisant que cette proposition, déjà
formulée, intervenait alors que la condamnation à mort de son ressortissant avait été confirmée
 information qui avait été donnée lors d’un point de presse. Estimant que cela «soulign[ait] que
la procédure et le prétendu procès devant une cour martiale pakistanaise n’étaient qu’un
simulacre», l’Inde a rappelé que, en dépit de ses demandes répétées, ses autorités consulaires
n’avaient pas été autorisées à entrer en communication avec l’intéressé.
17. Le 14 avril 2017, un conseiller pour les affaires étrangères auprès du premier ministre du
Pakistan a fait une déclaration à la presse (annexe 6). Les éléments suivants ressortent de cette
déclaration :
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a) Après la prétendue arrestation de M. Jadhav, un «enregistrement vidéo des aveux» de
l’intéressé a été réalisé le 25 mars 2016. Le document FIR n’a cependant été établi que le
8 avril 2016.
b) L’accusé a été interrogé en mai 2016, ses aveux ayant été recueillis en présence d’un magistrat
au mois de juillet 2016.
c) La cour martiale a consigné le résumé des éléments de preuve le 24 septembre 2016, et a jugé
l’accusé lors de quatre audiences, dont la dernière s’est tenue le 12 février 2017.
d) L’accusé «a eu la possibilité de poser des questions aux témoins» qui ont été entendus, et «un
officier supérieur, juriste qualifié, a été commis pour assurer sa défense pendant toute la durée
du procès».
18. Au vu de cette déclaration, la dernière audience en l’affaire a eu lieu le 12 février 2017. Il
est donc évident que, à la date du 21 mars 2017, même le droit conditionnel de communiquer avec
l’accusé par l’entremise des autorités consulaires indiennes [qui aurait dû être accordé dès après
l’arrestation et au cours du procès], tel que proposé par le Pakistan, était devenu vain, puisque le
procès était terminé.
19. Selon l’Inde, ces éléments établissent sans l’ombre d’un doute que, en conduisant ce
procès sans informer l’accusé des droits que lui confère la convention de Vienne ni donner aux
autorités consulaires indiennes la possibilité de communiquer avec lui, le Pakistan a adopté un
comportement qui constitue une grave violation de ladite convention.
Au cours d’une conférence de presse donnée le 17 avril 2017, le porte-parole du
Gouvernement pakistanais a indiqué que le ressortissant indien ne remplissait pas les conditions
requises pour pouvoir communiquer avec ses autorités consulaires, et que ce droit ne lui serait pas
accordé (annexe 7). Il apparaît donc clairement que les dispositions de la convention de Vienne ont
été violées et que le comportement persistant du Pakistan demeure contraire à ces dispositions.
20. Le 19 avril, l’Inde a de nouveau adressé une note verbale au Pakistan [par l’entremise de
son haut-commissariat à New Delhi] (voir annexe 1), dans laquelle elle demandait à obtenir copie
de l’acte d’accusation, des procès-verbaux relatifs à l’enquête, du résumé des éléments de preuves
et de la décision. En plus de solliciter (une nouvelle fois) le droit de communiquer avec l’accusé
par l’entremise de ses autorités consulaires, l’Inde demandait au Pakistan de :
a) la laisser prendre part à la procédure d’appel ;
b) faciliter la désignation d’un avocat de la défense, ainsi que la communication avec le
haut-commissariat de l’Inde à Islamabad ;
c) fournir des copies certifiées conformes des rapports médicaux de l’intéressé ;
d) délivrer des visas aux membres de la famille de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav pour qu’ils
puissent se rendre au Pakistan.
21. Afin d’exercer les recours en justice — si limités soient-ils  auxquels la loi sur l’armée
pakistanaise de 1952 ouvre droit, les parents de M. Jadhav ont, le 25 avril 2017, déposé une
demande de visas auprès de l’administration pakistanaise. Cette demande a été présentée par
l’intermédiaire du ministère des affaires étrangères de l’Union indienne. A ce jour, elle est restée
sans réponse.
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22. La famille de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav a formé un appel en vertu de l’article 133B
de la loi sur l’armée pakistanaise de 1952, et introduit un recours auprès du Gouvernement du
Pakistan en vertu de l’article 131 de cette même loi. Cet appel et ce recours ont été remis par le
haut-commissaire indien à Islamabad au secrétaire d’Etat aux affaires étrangères du Pakistan lors
d’une réunion tenue le 26 avril 2017, au cours de laquelle les représentants de l’Inde ont une fois
encore demandé que les autorités consulaires indiennes soient autorisées à communiquer avec
M. Jadhav (voir annexe 1). L’appel a été formé sur la base d’informations publiquement
accessibles, le Pakistan n’ayant fourni aucun élément concernant les charges retenues contre
l’intéressé, les éléments de preuve ou le verdict. Sans possibilité de communiquer avec l’accusé et
d’accéder à toutes ces informations, la décision rendue ne saurait être efficacement contestée et le
droit même de faire appel semble, à l’image du procès, n’être qu’un simulacre.
23. Par lettre du 27 avril 2017 adressée au conseiller pour les affaires étrangères auprès du
premier ministre du Pakistan (annexe 8), la ministre des affaires étrangères de l’Inde a, une
nouvelle fois, demandé à se voir communiquer des copies certifiées conformes de l’acte
d’accusation établi contre M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, des procès-verbaux relatifs à l’enquête,
du résumé des éléments de preuve versés au dossier, du jugement, de l’acte de désignation de
l’avocat de la défense et des informations relatives à ce dernier, ainsi que du rapport médical
concernant M. Jadhav ; elle a par ailleurs réitéré la demande de visas introduite par les parents de
M. Jadhav. La ministre a prié le conseiller d’intervenir personnellement dans cette affaire. Sa lettre
n’a reçu aucune réponse.
24. En conséquence, l’Inde fait valoir que la violation de droits conventionnels est établie en
la présente espèce, et en appelle à la Cour pour obtenir les remèdes appropriés, y compris par voie
de restitution.
III. COMPÉTENCE DE LA COUR
25. Le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de la Cour confère à celle-ci compétence pour
connaître de «tous les cas spécialement prévus … dans les traités et conventions en vigueur».
26. L’Inde et le Pakistan sont Membres de l’Organisation des Nations Unies et donc,
ipso facto, parties au Statut de la Cour. Ils sont également parties à la convention de Vienne sur les
relations consulaires et à son protocole de signature facultative concernant le règlement obligatoire
des différends. Les deux Etats ont accepté la convention et le protocole de signature facultative
sans aucune réserve.
27. L’article premier du protocole de signature facultative est ainsi libellé :
«Les différends relatifs à l’interprétation ou à l’application de la Convention
relèvent de la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice et peuvent
en conséquence être portés devant la Cour par une requête de toute partie au différend
qui sera elle-même partie au présent Protocole.»
28. L’Inde introduit la présente instance contre le Pakistan pour violation de la convention de
Vienne sur les relations consulaires en fondant la compétence de la Cour sur le paragraphe 1 de
l’article 36 de son Statut et l’article premier du protocole de signature facultative concernant le
règlement obligatoire des différends.
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29. L’Inde et le Pakistan ont également accepté la juridiction obligatoire de la Cour en vertu
du paragraphe 2 de l’article 36 de son Statut au moyen de déclarations par lesquelles ils
«reconna[issent] comme obligatoire de plein droit et sans convention spéciale, à l’égard de tout
autre Etat acceptant la même obligation, la[dite] juridiction…» sur les différends juridiques portant
notamment sur l’interprétation des traités ou des points de droit international.
30. En la présente espèce, l’Inde fonde toutefois la compétence de la Cour sur le
paragraphe 1 de l’article 36 du Statut, qui précise que cette compétence est expressément prévue
par certains traités et conventions. En pareils cas, les déclarations faites en vertu du paragraphe 2 de
l’article 36 ou toute réserve qui y serait formulée sont inapplicables.
31. Cette question n’est désormais plus res integra. Dans l’affaire relative à des Actions
armées frontalières et transfrontalières (Nicaragua c. Honduras), la Cour est parvenue à la
conclusion que le pacte de Bogotá lui conférait compétence indépendamment des déclarations
d’acceptation de sa juridiction obligatoire qui pouvaient avoir été faites en vertu du paragraphe 2 de
l’article 36 (arrêt, C.I.J. Recueil 1988, par. 41).
32. Dans l’affaire de l’Appel concernant la compétence du Conseil de l’OACI (Inde
c. Pakistan), outre qu’il contestait la compétence de la Cour au titre de l’article 84 de la convention
de Chicago et de la section 2 de l’article II de l’accord de transit (dénommés «clauses
juridictionnelles des Traités»), le Pakistan invoquait la réserve dont l’Inde avait assorti sa
déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour en vertu du paragraphe 2 de
l’article 36. La Cour avait conclu que
«les objections à [s]a juridiction … ne sauraient être retenues, qu’elles se fondent sur
la prétendue inapplicabilité des Traités en tant que tels ou sur celle de leurs clauses
juridictionnelles. La Cour ayant donc compétence en vertu de ces clauses et par suite
(voir paragraphes 14-16) en vertu de l’article 36, paragraphe 1, et de l’article 37 de
son Statut, il est sans pertinence d’examiner les objections visant d’autres fondements
possibles de sa compétence.» (Arrêt, C.I.J. Recueil 1972, par. 25.)
33. Dans l’affaire LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique), la Cour a admis  étant
donné qu’il ne s’agissait pas d’une question dont elle était saisie  que la République fédérale
d’Allemagne, dans la requête qu’elle avait présentée pour violation de la convention de Vienne,
avait fondé sa compétence sur le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut et l’article premier du
protocole de signature facultative (arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 466). De la même manière, dans
l’affaire Avena (Mexique c. Etats-Unis d’Amérique), la Cour a relevé dans son arrêt que le Mexique
avait fondé sa compétence sur le paragraphe premier de l’article 36 du Statut et sur l’article premier
du protocole de signature facultative (arrêt, C.I.J. Recueil 2004, p. 12). La compétence de la Cour
pour connaître de réclamations formulées à raison de violations de la convention de Vienne ne fait
donc aucun doute.
IV. LA CONVENTION DE VIENNE
34. L’article 36 de la convention de Vienne a été négocié et adopté par les Etats afin d’établir
notamment, dans le cadre d’une convention internationale sur les relations consulaires, des normes
de conduite régissant, en particulier, la communication avec les ressortissants de l’Etat d’envoi,
dans le souci de contribuer au développement de relations amicales entre les nations. L’article 36
de la convention confère expressément, aux alinéas a) et c) de son paragraphe 1, des droits aux
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Etats ; il confère également des droits à leurs ressortissants qui sont arrêtés, placés en détention ou
en instance de jugement dans un autre Etat.
35. La Cour a interprété les dispositions de l’article 36 de la convention de Vienne pour la
première fois dans l’affaire Lagrand. Elle l’a fait en ces termes :
«Le paragraphe 1 de l’article 36 institue un régime dont les divers éléments sont
interdépendants et qui est conçu pour faciliter la mise en oeuvre du système de
protection consulaire. Le principe de base régissant la protection consulaire est énoncé
dès l’abord : le droit de communication et d’accès (alinéa a) du paragraphe 1 de
l’article 36). La disposition suivante précise les modalités selon lesquelles doit
s’effectuer la notification consulaire (alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36). Enfin,
l’alinéa c) du paragraphe 1 de l’article 36 énonce les mesures que les agents
consulaires peuvent prendre pour fournir leur assistance aux ressortissants de leur pays
détenus dans l’Etat de résidence.» (LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique),
arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 492, par. 74.)
36. Dans l’affaire Avena, la Cour a de nouveau été appelée à interpréter l’article 36. Elle a
jugé que
«[l’]alinéa [b) de son paragraphe 1] cont[enait] trois éléments distincts mais liés entre
eux : le droit de l’intéressé d’être informé sans retard des droits qui lui sont reconnus
par ledit alinéa ; le droit du poste consulaire de recevoir sans retard notification de la
mise en détention de l’intéressé, si ce dernier en fait la demande ; et l’obligation de
l’Etat de résidence de transmettre sans retard toute communication adressée au poste
consulaire par la personne détenue» (Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 43, par. 61).
37. Les faits exposés dans la section précédente permettent d’établir que le Pakistan a
manqué d’informer l’accusé de ses droits. Le comportement du Pakistan, notamment en ce que
celui-ci a pu donner à entendre que le ressortissant indien n’avait aucun droit, permet également
d’établir que l’intéressé s’est vu dénier celui de communiquer avec ses autorités consulaires que lui
garantit l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention.
38. L’Inde a été informée fort tardivement du placement en détention de son ressortissant, et
n’a eu de cesse, dès lors, d’entrer en contact avec lui par l’entremise de ses autorités consulaires.
Ce n’est qu’à un stade très avancé  après que le procès eut pris fin  que le Pakistan a accepté, à
une condition : que l’Inde commence par l’autoriser à enquêter sur son territoire. Cette condition
constitue une violation de la convention de Vienne. De surcroît, elle a été formulée alors que le
procès était déjà achevé.
39. Il ressort clairement des faits, lesquels sont en l’espèce incontestables, que le Pakistan a
dénié à l’Inde les droits consulaires que lui garantissent les alinéas a) et c) du paragraphe 1 de
l’article 36 de la convention de Vienne.
40. Les droits conférés par l’article 36 de la convention de Vienne sont sacro-saints. Ces
droits sont en outre opposables, ainsi que l’a constaté la Cour au paragraphe 40 de son arrêt en
l’affaire Avena :
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«[T]oute violation des droits que l’individu tient de l’article 36 risque
d’entraîner une violation des droits de 1’Etat d'envoi et … toute violation des droits de
ce dernier risque de conduire à une violation des droits de l’individu.»
Sur cette base, la Cour a estimé que l’Etat d’envoi (en l’occurrence le Mexique) pouvait soumettre
une demande en son nom propre et la prier de statuer sur la violation des droits dont il soutenait
avoir été victime à la fois directement et à travers la violation des droits individuels conférés à ses
ressortissants.
41. Lorsqu’il y a violation d’un droit reconnu par la convention, il est du pouvoir et du
ressort de la Cour d’apporter le remède approprié, y compris sous forme de restitution.
42. Comme cela est expliqué plus en détail dans la section intitulée «Mesures demandées»,
en l’espèce, la Cour aurait la compétence requise pour infirmer la condamnation du ressortissant
indien, et les faits de l’affaire commandent qu’elle le fasse. Une autre solution consisterait pour la
Cour, en guise de restitution, à prescrire au Pakistan de prendre les mesures nécessaires pour que
cette condamnation soit infirmée. La Cour peut également prescrire au Pakistan de procéder à une
nouvelle enquête, une fois rendue possible la communication entre le ressortissant indien et ses
autorités consulaires, et lui enjoindre en outre, compte tenu des circonstances de l’affaire, de veiller
à ce que l’intéressé soit jugé par des juridictions de droit commun.
43. Lors d’une conférence de presse accordée le 20 avril 2017 (annexe 9), le Pakistan a fait
référence à un accord bilatéral sur la communication des autorités consulaires avec les
ressortissants de l’Etat d’envoi conclu en 2008 avec l’Inde (annexe 10), en indiquant que cet accord
régissait entièrement la question entre les deux pays.
44. Cet argument est infondé au regard tant des dispositions expresses de la convention de
Vienne que des termes mêmes de cet accord bilatéral signé le 21 mai 2008.
45. Dans cet instrument, conclu afin de «renforcer l’objectif consistant à garantir un
traitement humain aux ressortissants de chacun des deux Etats en cas d’arrestation, de détention ou
d’emprisonnement sur le territoire de l’autre», l’Inde et le Pakistan sont convenus de certaines
mesures, notamment de libérer et de rapatrier les intéressés un mois au plus tard après expiration de
leur peine et confirmation de leur nationalité. Les signataires reconnaissaient que, en cas
d’arrestation, de détention ou de condamnation pour des motifs politiques ou relatifs à la sécurité,
chacun d’eux pourrait examiner l’affaire au fond et, dans les circonstances spéciales requérant de
faire preuve de compassion et d’humanité, exercer son pouvoir discrétionnaire, en tant que permis
par ses lois et règlements, pour autoriser une libération et un rapatriement anticipés. L’Inde ne
demande pas le renforcement des dispositions de cet accord et ne fonde pas davantage sa demande
sur des droits ou obligations qui en découleraient.
46. La demande de l’Inde est uniquement fondée sur la convention de Vienne. L’article 73
de cet instrument reconnaît qu’il peut exister d’autres accords internationaux en vigueur dans les
rapports entre les parties et qu’aucune disposition de la convention «ne saurait empêcher les Etats
de conclure des accords internationaux confirmant, complétant ou développant ses dispositions, ou
étendant leur champ d’application».
47. L’existence d’un accord bilatéral, dont certaines dispositions peuvent sembler compléter
ou développer celles de la convention de Vienne, n’a donc pas à entrer en considération lorsqu’un
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Etat entend faire valoir les droits garantis par la convention en matière de communication de ses
autorités consulaires avec ses ressortissants. L’article 41 de la convention de Vienne sur le droit des
traités va du reste dans le même sens, qui reconnaît le principe selon lequel deux ou plusieurs
parties peuvent modifier les termes d’un traité pour autant qu’une telle modification soit possible
ou, à tout le moins, ne soit pas interdite en vertu de celui-ci, et qu’elle ne porte pas sur une
disposition à laquelle il ne peut être dérogé sans qu’il y ait incompatibilité avec la réalisation
effective de l’objet et du but du traité pris dans son ensemble.
48. La convention de Vienne crée pour les Etats d’envoi et leurs ressortissants des droits
exprès en matière de communication par l’entremise des autorités consulaires, et crée à la charge
des Etats de résidence qui arrêtent, placent en détention ou jugent et condamnent les ressortissants
d’autres Etats parties des obligations correspondantes. Les traités bilatéraux qui créeraient des
obligations ne peuvent que compléter les dispositions de la convention de Vienne et ne sauraient
modifier ces droits ni les obligations correspondantes, qui participent de la réalisation de l’objet et
du but de l’article 36 de cet instrument.
V. LES DEMANDES DE L’INDE
49. Le Gouvernement indien affirme que le Pakistan, au regard de l’article 36 de la
convention de Vienne, avait envers l’Inde, qui est partie à cette convention, l’obligation juridique
internationale de respecter les droits relatifs à la communication entre un ressortissant et ses
autorités consulaires garantis aux alinéas a) et c) du paragraphe 1 dudit article. Le Pakistan était
aussi tenu, au regard du droit international et de la convention de Vienne, ainsi que prévu en son
article 36, paragraphe 1 b), d’informer le ressortissant indien de ses droits.
50. En dépit des demandes répétées que l’Inde ne s’est pas fait faute de lui adresser, le
Pakistan a eu l’aplomb de refuser à ses autorités consulaires et à son ressortissant la possibilité de
communiquer jusqu’en mars 2017 — à un moment où le procès avait déjà pris fin. Ce procès, dans
le cadre duquel les droits prévus par la convention de Vienne ont été violés, est vicié, et il l’est
d’autant plus qu’il ne s’est pas déroulé sous le régime du droit général applicable aux procédures
pénales devant des tribunaux réguliers, mais a été confié à une cour martiale. Les procès relevant
de telles juridictions, en vertu de la loi qui leur est applicable, sont forcément sommaires. Et il est
incontestable que des aveux obtenus alors que l’accusé se trouvait en détention au Pakistan ont été
pris en compte dans le cadre de son procès — lesquels aveux ont été consignés après que l’Inde eut
cherché à entrer en contact avec son ressortissant par l’entremise de ses autorités consulaires.
51. Conformément à l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention de Vienne,
le Pakistan a, envers le ressortissant indien, l’obligation juridique internationale de lui permettre de
communiquer avec ses autorités consulaires, et de lui garantir le droit de recevoir de l’Inde une
assistance dans le cadre de la procédure dont il continue de faire l’objet.
52. Le Pakistan refuse toujours de permettre la communication entre le ressortissant indien et
les autorités consulaires. L’Inde ignore même si M. Jadhav a fait appel et, le cas échéant, si cet
appel a déjà été entendu. Le Pakistan refuse obstinément de partager toute information relative à
l’accusé.
53. Le procès s’est déroulé sous le régime de la loi militaire pakistanaise de 1952. L’accusé,
ressort-il de la déclaration du 14 avril 2017, a été jugé par une cour martiale générale. Celle-ci, si
elle applique les mêmes règles d’administration de la preuve que les juridictions pénales, se
- 11 -
compose de trois officiers de l’armée. Conformément à l’article 105, elle rend sa décision à la
majorité absolue, et toute condamnation à mort est décidée à l’unanimité.
54. L’article 84 de la loi militaire pakistanaise de 1952 confère le pouvoir de convoquer une
telle cour martiale à un officier ainsi habilité par ordre du Gouvernement fédéral ou du chef d’étatmajor
de l’armée. C’est ce même officier, ou une autorité supérieure, qui confirme la condamnation
à mort prononcée par cette instance. Les seules informations dont on dispose en l’espèce quant à
l’état de la situation sont celles qui ont été fournies par le conseiller auprès du premier ministre du
Pakistan dans la déclaration qu’il a faite à la presse, à savoir que l’accusé a été jugé par une cour
martiale générale au titre de l’article 59 de la loi militaire pakistanaise de 1952. L’article en
question étend l’application de la loi militaire à des individus ayant commis une «infraction civile»
au Pakistan ou ailleurs. Aucune indication n’était donnée sur l’officier ayant convoqué la cour
martiale ni celui ayant «endossé» la condamnation prononcée le 10 avril 2017.
55. L’article 131 prévoit la possibilité d’un recours auprès du Gouvernement fédéral. En
vertu de l’article 133 B, la cour d’appel est constituée — s’agissant des condamnations à mort
prononcées après 1992 et lorsque l’appel concerne, comme c’est le cas en l’espèce, la décision
d’une cour martiale générale — du chef d’état-major de l’armée ou d’un ou plusieurs officiers
désignés par lui à cet effet, et elle est présidée par un officier ayant au moins le rang de général de
brigade. L’arrêt de la cour d’appel est définitif et ne peut être contesté devant aucune instance
judiciaire ou autre autorité.
56. La mère de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav a formé un appel en vertu de l’article 133 B de
la loi de 1952 sur l’armée pakistanaise et introduit un recours auprès du Gouvernement fédéral du
Pakistan en vertu de l’article 131 de cette même loi. Cet appel et ce recours ont été remis au
Gouvernement pakistanais par le Haut-commissaire de l’Inde à Islamabad le 26 avril 2017.
57. En l’espèce, l’Inde soutient que même si la possibilité d’interjeter appel est prévue par la
loi, cette voie de recours n’est qu’illusoire, notamment pour les raisons suivantes :
a) La condamnation à mort a été confirmée par le chef d’état-major de l’armée. Interjeter appel
devant un tribunal présidé soit par le chef d’état-major de l’armée lui-même, soit par des
officiers qui lui seraient subordonnés, reviendrait à saisir César contre César. Un article de
presse paru le 18 avril 2017 dans le Dawn indiquait qu’une procédure d’appel était en cours et
que la juridiction saisie serait présidée par un général deux étoiles. Le porte-parole interrogé
aurait affirmé qu’il ne voyait aucune chance de voir le verdict annulé.
b) Le conseiller pour les affaires étrangères auprès du premier ministre, dans la déclaration publiée
le 14 avril 2017 (voir annexe 6), a affirmé que,
«de part et d’autre de l’échiquier politique, tous sont unanimes pour dire que la
décision, prise au terme d’une procédure équitable et eu égard à des preuves
accablantes, de condamner à la peine capitale un espion étranger qui ne se contentait
pas de se livrer à des activités subversives sur le sol pakistanais, mais promouvait de
fait le terrorisme, [était] justifiée. Par ailleurs, la nation dans son ensemble est
résolument unie face à toute menace contre la sécurité du Pakistan.»
Le porte-parole officiel du Gouvernement a indiqué, lors d’une conférence de presse donnée le
17 avril 2017, que la procédure se poursuivrait conformément à la loi, avec saisine de la cour
d’appel  sans préciser si un appel avait d’ores et déjà été interjeté. Et d’ajouter : «Kulbhushan
a été condamné sur la base d’éléments de preuve incontestables ; si la décision devait être mise
- 12 -
en cause devant une quelconque instance, l’armée pakistanaise userait en conséquence de tous
les moyens dont elle dispose pour la défendre.» (Annexe 7.)
c) Dans une affaire ayant tant prêté à controverse, il est plus que légitime de craindre que la cour
d’appel présidée par un général deux étoiles (placé sous la responsabilité hiérarchique du chef
d’état-major de l’armée qui a confirmé la condamnation à mort) n’agira pas de manière
indépendante, équitable et impartiale, en se conformant aux normes garantes de la régularité de
la procédure reconnues en droit international. L’on ne saurait avoir foi ou confiance dans une
telle voie de recours, tout particulièrement compte tenu des faits et des circonstances de la
présente affaire.
d) En outre, alors que le Gouvernement du Pakistan a publiquement exposé la position mentionnée
ci-dessus, ce serait pécher par excès de crédulité que de penser qu’une cour d’appel constituée
en vertu de la loi militaire pakistanaise de 1952 serait suffisamment indépendante et hermétique
aux pressions pour pouvoir constituer une voie de recours réelle et efficace.
e) Même dans le cadre de la procédure d’appel, le Pakistan a clairement refusé de permettre au
ressortissant et aux autorités consulaires de l’Inde de communiquer.
f) Il ressort d’informations parues dans la presse pakistanaise [Dawn, 15 avril 2017 (annexe 11)]
que le barreau de la High Court de Lahore a adopté une résolution, le 14 avril 2017, par laquelle
il mettait en garde les avocats qui seraient tentés d’assurer la défense de l’accusé «Kulbhushan
Jadhav, espion indien», et menaçait de radiation le ou les avocats qui interjetteraient
effectivement appel en son nom devant un tribunal militaire. Il est donc plus que probable que,
même en appel, M. Jadhav ne soit pas en mesure de se prévaloir de l’assistance d’un avocat. Le
Pakistan n’a pas répondu à la demande de l’Inde visant à faciliter la commission d’un avocat de
la défense.
VI.MESURES DEMANDÉES
58. L’Inde soutient que la note verbale du 21 mars 2017 emporte reconnaissance de la
violation de la convention de Vienne incriminée ; le Pakistan y déclare pour la première fois qu’il
envisagera de permettre la communication entre le ressortissant indien et ses autorités consulaires
en fonction de la suite que l’Inde réservera à sa demande d’entraide aux fins d’enquête, ce qu’il a
réitéré dans sa note verbale du 10 avril 2017. Lors de la conférence de presse du 17 avril 2017, le
porte-parole officiel du gouvernement a réaffirmé la position du Pakistan déniant au ressortissant
indien le droit de communiquer avec ses autorités consulaires.
59. L’Inde est d’avis que la Cour a le pouvoir de prendre toutes les mesures et de donner
toutes les instructions qui se révéleraient nécessaires : ainsi qu’il a été dit en l’affaire Avena,
«[c]’est un principe de droit international que la violation d’un engagement entraîne l’obligation de
réparer dans une forme adéquate (Usine de Chorzów, compétence, 1927, C.P.J.I. série A no 9,
p. 21)» (C.I.J. Recueil 2004, p. 59, par. 119). La Cour a également déclaré dans cette affaire que
lorsque, en acceptant les obligations prescrites par la convention de Vienne, les parties à cet
instrument avaient pris des engagements en ce qui concerne le comportement de leurs juridictions
internes à l’égard des ressortissants des autres parties, elle avait compétence pour examiner le
comportement et les actes de ces juridictions au regard du droit international pour établir s’il y avait
eu violation de la convention (ibid., par. 28). L’Inde soutient en conséquence qu’il est du pouvoir et
du ressort de la Cour d’indiquer des mesures adaptées aux faits de la présente espèce, afin de veiller
à ce que la condamnation à mort, qui a été prononcée par un tribunal militaire au mépris total des
droits consulaires énoncés à l’article 36 de la convention de Vienne ainsi que des garanties d’une
procédure régulière, soit considérée comme non avenue. La Cour pourrait parvenir à ce résultat en
- 13 -
prescrivant au Pakistan de prendre des mesures pour annuler la décision, de s’abstenir de donner
effet à cette condamnation et de libérer sans délai le ressortissant indien qui en fait l’objet.
60. Dans ces circonstances, l’Inde demande :
1) que la condamnation à mort prononcée à l’encontre de l’accusé soit immédiatement suspendue ;
2) que lui soit accordée restitutio in integrum, sous la forme d’une déclaration constatant que la
condamnation à laquelle est parvenu le tribunal militaire au mépris total des droits énoncés à
l’article 36 de la convention de Vienne, notamment en son paragraphe 1 b), et des droits
humains élémentaires de tout accusé, auxquels il convient également de donner effet ainsi
qu’exigé à l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, est
contraire au droit international et aux dispositions de la convention de Vienne ;
3) qu’il soit prescrit au Pakistan de ne pas donner effet à la condamnation prononcée par le
tribunal militaire et de prendre les mesures qui pourraient être prévues par le droit pakistanais
pour annuler la décision de ce tribunal ;
4) que cette décision, dans le cas où le Pakistan ne serait pas en mesure de l’annuler, soit déclarée
illicite en tant que contraire au droit international et aux droits conventionnels, et qu’injonction
soit faite au Pakistan de s’abstenir de violer la convention de Vienne sur les relations
consulaires et le droit international en donnant d’une quelconque façon effet à la condamnation,
ainsi que de libérer sans délai le ressortissant indien qui en fait l’objet.
61. La République de l’Inde se réserve le droit de modifier ou de compléter à tout moment la
requête et prie la Cour d’indiquer des mesures conservatoires, ainsi qu’il est exposé dans la
demande distincte qu’elle a déposée à cet effet en même temps que la présente requête.
Le 8 mai 2017.
Le Joint Secretary du ministère des affaires
étrangères de la République de l’Inde,
(Signé) M. Deepak MITTAL.
___________

Bilingual Content

INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
APPLICATION
INSTITUTING PROCEEDINGS
filed in the Registry of the Court
on 8 May 2017
JADHAV CASE
(INDIA v. PAKISTAN)
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
REQUÊTE
INTRODUCTIVE D’INSTANCE
enregistrée au Greffe de la Cour
le 8 mai 2017
AFFAIRE JADHAV
(INDE c. PAKISTAN)
2
2017
General List
No. 168
APPLICATION INSTITUTING PROCEEDINGS
table of contents
Page
I. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
II. Facts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
III. Jurisdiction of the Court . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
IV. The Vienna Convention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14
V. The claims of India . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
VI. Relief . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
List of Annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
3
2017
Rôle général
no 168
REQUÊTE INTRODUCTIVE D’INSTANCE
[Traduction]
table des matières
Page
I. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
II. Les faits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
III. Compétence de la Cour . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
IV. La convention de Vienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
V. Les demandes de l’Inde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
VI. Mesures demandées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
Liste des annexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
4
On behalf of the Republic of India, and in accordance with Article 40, paragraph
1, of the Statute of the International Court of Justice (hereinafter “Court”)
and Article 38 of the Rules of the Court, read along with Article 1 of the Optional
Protocol concerning the Compulsory Settlement of Disputes done at Vienna on
24 April 1963, I respectfully submit this Application instituting proceedings on
behalf of and in the name of the Republic of India against the Islamic Republic of
Pakistan for egregious violations of the Vienna Convention on Consular Relations,
1963 (the “Vienna Convention”) by Pakistan in the matter of the detention
and trial of an Indian national, Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav which has resulted
finally on 10 April 2017 in a death sentence being awarded to the said Indian
national. The dispute being raised arises out of the interpretation and the application
of the 1963 Vienna Convention on Consular Relations and lies within the
compulsory jurisdiction of this Court as provided in Article 1 of the Optional Protocol
Concerning the Compulsory Settlement of Disputes.
I am also enclosing a request for urgent provisional measures pursuant to Article
41 of the Statute of the Court and Articles 73, 74 and 75 of the Rules of Court.
The request for provisional measures seeks immediate orders as the Indian national
who was tried by a military court has been sentenced to death, and his fate is uncertain
due to lack of information and continued denial of consular access. The present
proceedings relate to the violation of the Vienna Convention in relation to the
arrest and trial of the Indian national Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav. India
apprehends that although an appellate remedy is ostensibly available, it may be
quickly exhausted in the same farcical manner in which his trial has been rushed
through, and he could be executed summarily. India has no other legal recourse by
which it could secure the interests of this Indian national except by way of the
present proceedings.
I. Introduction
1. The authorities of Pakistan allegedly arrested, detained, tried, convicted and
sentenced to death an Indian national Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav, and he is
currently under a death sentence being held in Pakistan. The competent authorities
of Pakistan, despite repeated requests by India beginning March 2016 have not
granted consular access. Pakistan has, thus, been in egregious violation of its obligations
under subarticles (a) (b) and (c) of Article 36, paragraph 1, of the 1963
Vienna Convention.
2. These violations have prevented India from exercising its rights under the
Vienna Convention and have also deprived the Indian national of the protection
accorded under the Vienna Convention and violated his rights under the Vienna
Convention. This Application is being brought by India on its own behalf to seek
relief in relation to violation of its rights, as well as on behalf of its citizen who has
been seriously prejudiced and now faces a death sentence, in a process that deliberately
and consciously denied to him the rights under Article 36 (1) (b) of the
Vienna Convention.
3. The ICJ has held that the rule on exhaustion of local remedies is not applicable
when a State invokes direct violation of its rights. In such cases, the State is not
bound to wait until domestic proceedings have been completed by its injured
national. Nor is the exhaustion of local remedies a compulsory requirement if the
respondent State itself has failed to inform the person concerned about available
5
Au nom de la République de l’Inde, et conformément au paragraphe 1 de l’article
40 du Statut de la Cour internationale de Justice (ci-
après, la « Cour ») et à
l’article 38 de son Règlement, lus conjointement avec l’article premier du protocole
de signature facultative concernant le règlement obligatoire des différends fait à
Vienne le 24 avril 1963, j’ai l’honneur de soumettre la présente requête introductive
d’instance contre la République islamique du Pakistan, en raison de graves violations
de la convention de Vienne sur les relations consulaires de 1963 (ci‑après, la
« convention de Vienne ») commises par cet Etat dans le cadre de la détention et du
procès d’un ressortissant indien, M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, qui ont abouti à
la condamnation à mort de l’intéressé le 10 avril 2017. Le présent différend a trait
à l’interprétation et à l’application de la convention de Vienne et, ainsi que le prévoit
l’article premier du protocole susmentionné, relève de la compétence obligatoire
de la Cour.
J’ai également l’honneur de présenter une demande urgente en indication de
mesures conservatoires, conformément à l’article 41 du Statut de la Cour et aux
articles 73, 74 et 75 de son Règlement. Par cette demande, l’Inde sollicite la prescription
immédiate de certaines mesures, le sort de son ressortissant, qui a été jugé par un
tribunal militaire et condamné à mort, étant incertain en raison d’un manque d’informations
et d’un déni continu du droit de l’Inde de communiquer avec lui par
l’entremise de ses autorités consulaires. La présente instance a donc trait à la violation
de la convention de Vienne dans le cadre de l’arrestation et du procès de
M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, ressortissant indien. Bien que la possibilité d’interjeter
appel soit formellement prévue, l’Inde redoute qu’il ne s’agisse là que d’un simulacre,
à l’image du procès de l’intéressé dont le déroulement a été expéditif, et que
cette voie de recours ne se trouve épuisée rapidement, M. Jadhav risquant alors
d’être exécuté sommairement. La présente instance constitue par conséquent l’unique
recours juridique permettant à l’Inde de défendre les intérêts de son ressortissant.
I. Introduction
1. Il apparaît que les autorités pakistanaises ont arrêté, détenu, jugé, déclaré
coupable et condamné à mort un ressortissant indien, M. Kulbhushan Sudhir Jadhav,
lequel reste détenu au Pakistan. En dépit des multiples demandes que l’Inde a
présentées à cet effet à partir du mois de mars 2016, les autorités pakistanaises
compétentes ne l’ont pas autorisée à entrer en communication avec son ressortissant
par l’entremise de ses autorités consulaires. Le Pakistan a donc gravement
manqué aux obligations que lui imposent les litt. a), b) et c) du paragraphe 1 de
l’article 36 de la convention de Vienne de 1963.
2. Ces violations ont empêché l’Inde d’exercer les droits qu’elle tient de cet instrument,
privant par ailleurs son ressortissant de la protection que celui‑ci lui
reconnaît et enfreignant les droits qu’il lui confère. L’Inde introduit la présente
requête en son nom propre afin qu’il soit porté remède à la violation de ses droits,
ainsi qu’au nom de son ressortissant, qui a subi un grave préjudice et a été
condamné à mort à l’issue d’un procès au cours duquel il a été délibérément et
sciemment privé des droits qui sont les siens en vertu du litt. b) du paragraphe 1 de
l’article 36 de la convention de Vienne.
3. La Cour a jugé que la règle relative à l’épuisement des voies de recours
internes ne trouve pas à s’appliquer lorsqu’un Etat invoque une violation directe
de ses droits. En pareil cas, l’Etat concerné n’est pas tenu d’attendre que son ressortissant
lésé ait fait usage de toutes les procédures internes sans obtenir gain de
cause. L’épuisement des voies de recours internes n’est pas non plus une condition
6
remedies in consonance with its obligations under international law (Arrest Warrants
case; LaGrand case quoted in The Statute of the International Court of Justice
— A Commentary, edited by Zimmermann, Tomuschat and Oellers-Frahm,
2005, p. 648). In view of the above, India is competent to bring this Application
before the Court.
II. Facts
4. An Indian national (Kulbhushan Sudhir Jadhav) was allegedly arrested on
3 March 2016.
5. On 25 March 2016, India was informed of this alleged arrest when the Foreign
Secretary, Pakistan raised the matter with the Indian High Commissioner in
Islamabad. On that very day, India sought consular access to the said individual at
the earliest.
6. The request did not evoke any response. Thus, on 30 March 2016, India sent
a reminder reiterating its request for consular access to the individual at the earliest.
Thirteen more reminders were sent by India on 6 May 2016, 10 June 2016,
11 July 2016, 26 July 2016, 22 August 2016, 3 November 2016, 19 December 2016,
3 February 2017, 3 March 2017, 31 March 2017, 10 April 2017, 14 April 2017 and
19 April 2017 (Annex 1). All these requests fell on deaf ears.
7. Almost a year after India’s first request for consular access, on 23 January
2017 India received a request (Annex 2) from Pakistan for assistance in investigation
of what was described as “FIR No. 6 of 2016”. Under the Pakistan Code of
Criminal Procedure, the expression “FIR” is used as an acronym for the first information
report which is registered after the police comes to know of the commission
of a crime. This was the criminal complaint that was registered against the Indian
national apparently on 8 April 2016. What is significant is that this letter acknowledged
that this “FIR” had been registered against “an Indian national”, hence
confirming the nationality of the individual.
8. Thus, the nationality of the arrested person, who was undergoing trial and
that too in a military court was not in dispute or doubt. The international obligation
to allow consular access under Article 36 of the Vienna Convention had
admittedly been breached by Pakistan. It is obvious that even the right of Mr. Jadhav
to seek and obtain consular access had been breached by Pakistan.
9. On 3 February 2017 India protested through a demarche against the continued
denial of consular access despite the fact that his Indian nationality had been
affirmed by Pakistan. The letter from Pakistan seeking assistance referred to in
paragraph 7 above also established that there was a purported confession by him
which was the basis or at least a significant part of the case against him. India,
therefore, raised the concern of his safety pointing out that “questions about his
treatment in Pakistan’s custody continue to mount, given especially his coerced
purported confession, and the circumstances of his presence in Pakistan remain
unexplained”.
10. On 3 March 2017 India reminded Pakistan of its various requests including
its demarche of 3 February 2017 and again requested consular access.
7
obligatoire si l’Etat défendeur lui-
même a manqué d’informer l’intéressé des
recours disponibles, conformément aux obligations que lui impose le droit international
(affaire relative au Mandat d’arrêt ; affaire LaGrand citée dans The
Statute
of the International Court of Justice — A Commentary (sous la direction de
Zimmermann, Tomuschat et Oellers-Frahm, 2005, p. 648)). Au vu de ce qui précède,
l’Inde est donc fondée à soumettre la présente requête à la Cour.
II. Les faits
4. M. Kulbhushan Sudhir Jadhav, ressortissant indien, aurait été arrêté le
3 mars 2016.
5. L’Inde a été avisée de cette prétendue arrestation le 25 mars 2016, lorsque le secrétaire
d’Etat aux affaires étrangères du Pakistan en a fait état auprès du haut-commissaire
indien à Islamabad. Le jour même, elle a demandé à pouvoir entrer en communication
au plus vite avec M. Jadhav par l’entremise de ses autorités consulaires.
6. N’ayant reçu aucune réponse, l’Inde a réitéré sa demande le 30 mars 2016,
puis à treize autres reprises : les 6 mai 2016, 10 juin 2016, 11 juillet 2016, 26 juillet
2016, 22 août 2016, 3 novembre 2016, 19 décembre 2016, 3 février 2017, 3 mars
2017, 31 mars 2017, 10 avril 2017, 14 avril 2017 et 19 avril 2017 (annexe 1). Toutes
ces demandes sont restées lettre morte.
7. Le 23 janvier 2017, soit près d’un an après la première demande de l’Inde
tendant à ce que ses autorités consulaires puissent entrer en communication avec
son ressortissant, le Pakistan a adressé à celle‑ci une demande d’assistance
(annexe 2) dans le cadre d’une enquête engagée sous la référence « FIR no 6 de
2016 ». Au sens du code de procédure pénale pakistanais, le « FIR », pour First
Information Report, désigne le procès-verbal
établi lors du dépôt initial d’une
plainte à la police. Le document en question portait sur la plainte pénale déposée,
apparemment le 8 avril 2016, contre le ressortissant indien. Il est important de relever
que la lettre du Pakistan précisait que ledit document avait été déposé contre
« un ressortissant indien », confirmant ainsi la nationalité de l’intéressé.
8. Il n’y avait par conséquent aucune contestation ni aucun doute en ce qui
concerne la nationalité de la personne arrêtée, laquelle faisait l’objet d’un procès,
qui plus est devant un tribunal militaire. Le Pakistan a donc, de toute évidence,
manqué à l’obligation internationale que lui impose l’article 36 de la convention de
Vienne de permettre à l’Inde de communiquer avec son ressortissant par l’entremise
de ses autorités consulaires. A n’en pas douter, il a également méconnu le droit de
M. Jadhav de solliciter et d’obtenir de communiquer avec ces mêmes autorités.
9. Le 3 février 2017, l’Inde a officiellement protesté contre le déni persistant de
son droit de communiquer avec son ressortissant, alors même que le Pakistan avait
reconnu la nationalité indienne de celui-
ci. La demande d’assistance du Pakistan
mentionnée au paragraphe 7 faisait par ailleurs référence à de prétendus aveux de
l’intéressé, qui constituaient le fondement des accusations portées à son
encontre — ou, à tout le moins, un élément important des charges retenues contre
lui. L’Inde a donc exprimé ses préoccupations quant à la sécurité de son ressortissant,
précisant que, « compte tenu, notamment, du caractère forcé des prétendus
aveux de l’intéressé, le traitement dont celui-
ci fai[sait] l’objet dans le cadre de sa
détention au Pakistan soul[evait] des inquiétudes grandissantes, les circonstances
de sa présence au Pakistan demeurant par ailleurs inexpliquées ».
10. Le 3 mars 2017, l’Inde a rappelé au Pakistan ses démarches successives, y
compris celle du 3 février 2017, et demandé de nouveau à entrer en communication
avec son ressortissant par l’entremise de ses autorités consulaires.
8
11. India received another Note Verbale dated 21 March 2017 (Annex 3) from
Pakistan. In this, Pakistan stated that “the case for the consular access to the
Indian national . . . shall be considered in the light of [the] Indian side’s response to
Pakistan’s request for assistance in investigation process and early dispensation
of justice”.
12. The foregoing facts of the case including the Note Verbale of 21 March
2017 establishes that Pakistan had been acting in brazen violation of its
obligations
under the Vienna Convention, as this Convention does not include any
exceptions in respect of consular access rights recognized in Article 36. The linking
of assistance in the investigation process to the grant of consular access was by
itself a serious violation of the Vienna Convention.
13. India responded to this Note Verbale on 31 March 2017 pointing out that,
“consular access to Mr. Jadhav would be an essential prerequisite in order to verify
the facts and understand the circumstances of his presence in Pakistan”. India had
information that he had been kidnapped from Iran, where he was carrying on business
after retiring from the Indian Navy, and was then shown to have been arrested
in Balochistan. These matters required verification, the first step for which would
be consular access.
14. A press release issued by Inter Services Public Relations on 10 April 2017,
regarding Mr. Jadhav conveyed that “The spy has been tried through Field
General
Court Martial (FGCM) under Pakistan Army Act and awarded death
sentence. Today COAS, General Qamar Javed Bajwa has confirmed his death
sentence
awarded by FGCM.” (Annex 4.)
15. India received on 10 April 2017 yet another Note Verbale from the Ministry
of Foreign Affairs, Islamabad conveying that consular access shall be considered
in the light of India’s response to Pakistan’s request (Annex 5) for assistance
in the investigation process.
16. India responded to this on 10 April 2017 itself pointing out that this offer
was being reiterated after the death sentence had been confirmed — the information
of which was given in a press briefing by Pakistan. India stated that this offer
“underlines the farcical nature of the proceedings and so-called
trial by a Pakistan
military court martial”. India pointed out that despite its repeated requests, consular
access had not been allowed.
17. A press statement was made by the Adviser to the Prime Minister of Pakistan
on Foreign Affairs on 14 April 2017 (Annex 6). This press statement establishes
the following facts:
(a) After his alleged arrest, a “confessional video statement” was recorded on
25 March 2016. The FIR was, however, registered only on 8 April 2016.
(b) The accused was interrogated in May 2016, and in July 2016, a confessional
statement by the accused was recorded before a magistrate.
(c) The Court Martial recorded the summary of evidence on 24 September 2016,
and in four proceedings culminating on 12 February 2017, the trial was over.
(d) In the course of the trial, the accused “was allowed to ask questions from the
witnesses”, and “a law qualified field officer was provided to defend him
throughout the court proceedings”.
9
11. Dans une note verbale datée du 21 mars 2017 (annexe 3), le Pakistan lui a
indiqué que « la possibilité de communiquer par l’entremise de ses autorités consulaires
[avec M. Jadhav] … ser[ait] étudiée à la lumière de la suite qu’elle donner[ait]
à la demande d’assistance aux fins d’enquête et de célérité de la justice formulée par
le Pakistan ».
12. Les faits relatifs à la présente affaire exposés ci‑dessus, et notamment la note
verbale du 21 mars 2017, démontrent que le Pakistan a manqué de manière flagrante
aux obligations que lui impose la convention de Vienne, qui ne prévoit
aucune exception au droit d’un Etat de communiquer avec ses ressortissants par
l’entremise de ses autorités consulaires énoncé à l’article 36. Le seul fait de subordonner
ce droit à l’octroi de l’assistance aux fins d’enquête sollicitée par le Pakistan
constitue une violation grave de la convention de Vienne.
13. L’Inde a répondu à cette note verbale le 31 mars 2017, soulignant que « le
fait d’être autorisée à communiquer avec M. Jadhav par l’entremise de ses autorités
consulaires [était] une condition préalable essentielle pour établir les faits et
comprendre les circonstances de la présence de l’intéressé au Pakistan ». L’Inde
disposait d’informations selon lesquelles M. Jadhav aurait été enlevé en Iran, où il
se livrait à des activités commerciales après avoir pris sa retraite de la marine
indienne ; le Pakistan a affirmé qu’il avait été arrêté au Baloutchistan. Ces éléments
demandaient à être vérifiés, ce qui supposait avant tout que l’Inde puisse communiquer
avec l’intéressé.
14. Dans un communiqué de presse du 10 avril 2017, le bureau de relations
publiques de l’armée pakistanaise a déclaré ce qui suit au sujet de M. Jadhav :
« L’espion a été jugé par une cour martiale générale en application de la loi sur
l’armée pakistanaise, et condamné à mort. Le général Qamar Javed Bajwa, chef
d’état‑major de l’armée, a confirmé ce jour cette condamnation à mort prononcée
par la cour martiale générale. » (Annexe 4.)
15. Le 10 avril 2017, l’Inde a reçu une nouvelle note verbale du ministère des
affaires étrangères du Pakistan, indiquant que la possibilité, pour ses autorités consulaires,
d’entrer en communication avec l’intéressé serait étudiée à la lumière de la suite
qu’elle donnerait à la demande d’assistance aux fins d’enquête du Pakistan (annexe 5).
16. L’Inde a répondu à cette note verbale le même jour, précisant que cette proposition,
déjà formulée, intervenait alors que la condamnation à mort de son ressortissant
avait été confirmée — information qui avait été donnée lors d’un point
de presse. Estimant que cela « soulign[ait] que la procédure et le prétendu procès
devant une cour martiale pakistanaise n’étaient qu’un simulacre », l’Inde a rappelé
que, en dépit de ses demandes répétées, ses autorités consulaires n’avaient pas été
autorisées à entrer en communication avec l’intéressé.
17. Le 14 avril 2017, un conseiller pour les affaires étrangères auprès du premier
ministre du Pakistan a fait une déclaration à la presse (annexe 6). Les éléments
suivants ressortent de cette déclaration :
a) Après la prétendue arrestation de M. Jadhav, un « enregistrement vidéo des
aveux » de l’intéressé a été réalisé le 25 mars 2016. Le document FIR n’a cependant
été établi que le 8 avril 2016.
b) L’accusé a été interrogé en mai 2016, ses aveux ayant été recueillis en présence
d’un magistrat au mois de juillet 2016.
c) La cour martiale a consigné le résumé des éléments de preuve le 24 septembre
2016, et a jugé l’accusé lors de quatre audiences, dont la dernière s’est
tenue le 12 février 2017.
d) L’accusé « a eu la possibilité de poser des questions aux témoins » qui ont été
entendus, et « un officier supérieur, juriste qualifié, a été commis pour assurer sa
défense pendant toute la durée du procès ».
10
18. The last proceeding in the case was, as per this statement, on 12 February
2017. It is obvious that by 21 March 2017, even the conditional consular access [to
be granted post arrest, and in the course of the trial] that was offered by Pakistan
had in any event became meaningless as the trial stood concluded.
19. India states that these facts establish beyond any shadow of doubt that in
conducting the trial without informing the accused of his rights under the Vienna
Convention and granting consular access to India, Pakistan has conducted itself in
a manner that constitutes an egregious violation of the Vienna Convention.
In a briefing on 17 April 2017, on behalf of the Government of Pakistan, the
authorized spokesperson said that the Indian national is not eligible for consular
access nor will he be granted consular access (Annex 7). It is clear, that the provisions
of the Vienna Convention have been violated, and the ongoing conduct of
Pakistan continues to be in defiance of the provisions of the Convention.
20. On 19 April, India yet again handed over a Note Verbale (see Annex 1) to
Pakistan [through its High Commission in New Delhi] seeking copies of the charge
sheet, proceedings of the Court of Inquiry, the summary of evidence and the
judgment.
In addition to seeking [once again] consular access, it also asked
Pakistan
to:
(a) share the procedure for the appeal;
(b) facilitate the appointment of a defence lawyer, and facilitate the contact with
the High Commission of India in Islamabad;
(c) provide certified copies of medical reports;
(d) issue visas to the family of Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav to visit Pakistan.
21. In order to pursue legal remedies available under the Pakistan Army Act
1952, howsoever circumscribed they may prove to be, the parents of Mr. Jadhav
applied for Pakistani visas on 25 April 2017. This application was made through
the offices of the Ministry of External Affairs of the Union of India. No response
on these applications has been received by them to date.
22. The family of Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav has filed an appeal under
Section
133 B and a petition to the Federal Government of Pakistan under Section
131 of the Pakistan Army Act 1952. The appeal and the petition were handed
over by the Indian High Commissioner in Islamabad to Pakistan’s Foreign Secretary
in Islamabad on 26 April 2017. During this meeting, the representatives of
India once again sought consular access to Mr. Jadhav (see Annex 1). This appeal
has been filed based on information available in public domain, as no particulars
of the charges, the evidence or the verdict have been provided by Pakistan. Without
consular access and the access to all this information, there can be no effective
appeal and even the right to appeal would be as farcical as the trial.
23. The External Affairs Minister of India wrote a letter to the Adviser to the
Pakistan Prime Minister on Foreign Affairs on 27 April 2017 (Annex 8) in which
she reiterated the requests for certified copies of the chargesheet
against
Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav, proceedings of the Court of Inquiry, the sum-
11
18. Au vu de cette déclaration, la dernière audience en l’affaire a eu lieu le
12 février 2017. Il est donc évident que, à la date du 21 mars 2017, même le droit
conditionnel de communiquer avec l’accusé par l’entremise des autorités consulaires
indiennes [qui aurait dû être accordé dès après l’arrestation et au cours du
procès], tel que proposé par le Pakistan, était devenu vain, puisque le procès était
terminé.
19. Selon l’Inde, ces éléments établissent sans l’ombre d’un doute que, en
conduisant ce procès sans informer l’accusé des droits que lui confère la convention
de Vienne ni donner aux autorités consulaires indiennes la possibilité de communiquer
avec lui, le Pakistan a adopté un comportement qui constitue une grave
violation de ladite convention.
Au cours d’une conférence de presse donnée le 17 avril 2017, le porte‑parole du
Gouvernement pakistanais a indiqué que le ressortissant indien ne remplissait pas
les conditions requises pour pouvoir communiquer avec ses autorités consulaires,
et que ce droit ne lui serait pas accordé (annexe 7). Il apparaît donc clairement que
les dispositions de la convention de Vienne ont été violées et que le comportement
persistant du Pakistan demeure contraire à ces dispositions.
20. Le 19 avril, l’Inde a de nouveau adressé une note verbale au Pakistan [par
l’entremise de son haut‑commissariat à New Delhi] (voir annexe 1), dans laquelle
elle demandait à obtenir copie de l’acte d’accusation, des procès-verbaux
relatifs à
l’enquête, du résumé des élément de preuve et de la décision. En plus de solliciter
(une nouvelle fois) le droit de communiquer avec l’accusé par l’entremise de ses
autorités consulaires, l’Inde demandait au Pakistan de :
a) la laisser prendre part à la procédure d’appel ;
b) faciliter la désignation d’un avocat de la défense, ainsi que la communication
avec le haut‑commissariat de l’Inde à Islamabad ;
c) fournir des copies certifiées conformes des rapports médicaux de l’intéressé ;
d) délivrer des visas aux membres de la famille de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav
pour qu’ils puissent se rendre au Pakistan.
21. Afin d’exercer les recours en justice — si limités soient‑ils — auxquels la loi
sur l’armée pakistanaise de 1952 ouvre droit, les parents de M. Jadhav ont, le
25 avril 2017, déposé une demande de visas auprès de l’administration pakistanaise.
Cette demande a été présentée par l’intermédiaire du ministère des affaires
étrangères de l’Union indienne. A ce jour, elle est restée sans réponse.
22. La famille de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav a formé un appel en vertu
de l’article 133 B de la loi sur l’armée pakistanaise de 1952, et introduit un
recours auprès du Gouvernement du Pakistan en vertu de l’article 131 de cette
même loi. Cet appel et ce recours ont été remis par le haut-commissaire
indien à
Islamabad au secrétaire d’Etat aux affaires étrangères du Pakistan lors d’une
réunion
tenue le 26 avril 2017, au cours de laquelle les représentants de l’Inde
ont une fois encore demandé que les autorités consulaires indiennes soient autorisées
à communiquer avec M. Jadhav (voir annexe 1). L’appel a été formé sur la
base d’informations publiquement accessibles, le Pakistan n’ayant fourni aucun
élément concernant les charges retenues contre l’intéressé, les éléments de
preuve ou le verdict. Sans possibilité de communiquer avec l’accusé et d’accéder à
toutes ces informations, la décision rendue ne saurait être efficacement contestée
et le droit même de faire appel semble, à l’image du procès, n’être qu’un
simulacre.
23. Par lettre du 27 avril 2017 adressée au conseiller pour les affaires étrangères
auprès du premier ministre du Pakistan (annexe 8), la ministre des affaires étrangères
de l’Inde a, une nouvelle fois, demandé à se voir communiquer des copies
certifiées conformes de l’acte d’accusation établi contre M. Kulbhushan
12
mary of evidence in the case, the judgment, appointment of a defence lawyer and
his contact details and a certified copy of the medical report of Mr. Jadhav. She
also reiterated the request for the visa for the parents of Mr. Jadhav. She sought
the personal intervention of the Adviser in the matter. No response has been
received to this missive.
24. India, therefore, submits that a case is made out of violation of treaty rights
and India therefore seeks to apply to this Court for appropriate relief including by
way of restitution.
III. Jurisdiction of the Court
25. Article 36 (1) of the Statute of the Court confers upon this Court the jurisdiction
to decide “all matters specially provided for . . . in treaties and conventions
in force”.
26. India and Pakistan are Members of the United Nations and thus ipso facto
parties to the Statute of the International Court of Justice. They are also parties to
the Vienna Convention on Consular Relations and its Optional Protocol concerning
Compulsory Settlement of Disputes. Both States have accepted the Convention
and the Optional Protocol without any reservation.
27. Article I of the Optional Protocol provides that,
“Disputes arising out of the interpretation or application of the Convention
shall lie within the compulsory jurisdiction of the International Court of Justice
and may accordingly be brought before the Court by an application made
by any party to the dispute being a Party to the present Protocol.”
28. India brings this case against Pakistan before the Court for violation of the
Vienna Convention on Consular Relations based on the jurisdiction of the Court
under Article 36, paragraph 1, of the Statute of the Court and Article I of the
Optional Protocol on Compulsory Settlement of Disputes.
29. Both India and Pakistan have also accepted the compulsory jurisdiction of
the Court under paragraph 2 of Article 36 of the Statute subject to declarations in
which “they recognize as compulsory ipso facto and without special agreement, in
relation to any other State accepting the same obligation, the jurisdiction of the
Court . . .” in legal disputes relating to, amongst other things, interpretation of
treaties or questions of international law.
30. However, India is invoking the jurisdiction of the Court under paragraph 1
of Article 36 where treaties or conventions especially provide for the jurisdiction of
the Court. In such cases, the declarations made by the parties under paragraph 2
of Article 36 — or any reservations in such declarations are not applicable.
31. This issue is no longer res integra. In the case concerning Border and Transborder
Armed Actions (Nicaragua v. Honduras), this Court came to the conclusion
that the Pact of Bogota created jurisdiction independent of the declarations of
compulsory jurisdiction as may have been made under Article 36, paragraph 2
(I.C.J. Reports 1988, p. 88, para. 41).
32. In the Appeal Relating to the Jurisdiction of the ICAO Council (India v.
Pakistan), apart from questioning the competence of the Court under Article 84 of
the Chicago Convention and Article II, Section 2, of the Transit Agreement (called
13
Sudhir
Jadhav,
des procès-verbaux
relatifs à l’enquête, du résumé des éléments de
preuve versés au dossier, du jugement, de l’acte de désignation de l’avocat de la
défense et des informations relatives à ce dernier, ainsi que du rapport médical
concernant M. Jadhav ; elle a par ailleurs réitéré la demande de visas introduite par
les parents de M. Jadhav. La ministre a prié le conseiller d’intervenir personnellement
dans cette affaire. Sa lettre n’a reçu aucune réponse.
24. En conséquence, l’Inde fait valoir que la violation de droits conventionnels
est établie en la présente espèce, et en appelle à la Cour pour obtenir les remèdes
appropriés, y compris par voie de restitution.
III. Compétence de la Cour
25. Le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut de la Cour confère à celle‑ci compétence
pour connaître de « tous les cas spécialement prévus … dans les traités et
conventions en vigueur ».
26. L’Inde et le Pakistan sont Membres de l’Organisation des Nations Unies
et donc, ipso facto, parties au Statut de la Cour. Ils sont également parties à
la convention de Vienne sur les relations consulaires et à son protocole de signature
facultative concernant le règlement obligatoire des différends. Les deux Etats
ont accepté la convention et le protocole de signature facultative sans aucune
réserve.
27. L’article premier du protocole de signature facultative est ainsi libellé :
« Les différends relatifs à l’interprétation ou à l’application de la Convention
relèvent de la compétence obligatoire de la Cour internationale de Justice
et peuvent en conséquence être portés devant la Cour par une requête de toute
partie au différend qui sera elle-même partie au présent Protocole. »
28. L’Inde introduit la présente instance contre le Pakistan pour violation de
la convention de Vienne sur les relations consulaires en fondant la compétence
de la Cour sur le paragraphe 1 de l’article 36 de son Statut et l’article premier
du protocole
de signature facultative concernant le règlement obligatoire des
différends.
29. L’Inde et le Pakistan ont également accepté la juridiction obligatoire de la
Cour en vertu du paragraphe 2 de l’article 36 de son Statut au moyen de déclarations
par lesquelles ils « reconna[issent] comme obligatoire de plein droit et sans
convention spéciale, à l’égard de tout autre Etat acceptant la même obligation,
la[dite] juridiction… » sur les différends juridiques portant notamment sur l’interprétation
des traités ou des points de droit international.
30. En la présente espèce, l’Inde fonde toutefois la compétence de la Cour sur le
paragraphe 1 de l’article 36 du Statut, qui précise que cette compétence est expressément
prévue par certains traités et conventions. En pareils cas, les déclarations
faites en vertu du paragraphe 2 de l’article 36 ou toute réserve qui y serait formulée
sont inapplicables.
31. Cette question n’est désormais plus res integra. Dans l’affaire relative à des
Actions armées frontalières et transfrontalières (Nicaragua c. Honduras), la Cour
est parvenue à la conclusion que le pacte de Bogotá lui conférait compétence indépendamment
des déclarations d’acceptation de sa juridiction obligatoire qui pouvaient
avoir été faites en vertu du paragraphe 2 de l’article 36 (C.I.J. Recueil 1988,
p. 88, par. 41).
32. Dans l’affaire de l’Appel concernant la compétence du Conseil de l’OACI (Inde
c. Pakistan), outre qu’il contestait la compétence de la Cour au titre de l’article 84
de la convention de Chicago et de la section 2 de l’article II de l’accord de transit
14
“the jurisdictional clauses of the Treaties”), Pakistan also relied on India’s reservation
to her acceptance of the Court’s compulsory jurisdiction under paragraph 2 of
Article 36. The Court held that:
“the various objections made to the competence of the Court cannot be sustained,
whether they are based on the alleged inapplicability of the Treaties as
such, or of their jurisdictional clauses. Since therefore the Court is invested
with jurisdiction under those clauses and, in consequence (see paragraphs
14-16 above), under Article 36, paragraph 1, and under Article 37, of
its Statute, it becomes irrelevant to consider the objections to other possible
bases of jurisdiction.” (I.C.J. Reports 1972, p. 60, para. 25.)
33. In the LaGrand case (Germany v. United States of America) (Judgment,
I.C.J. Reports 2001, p. 466), this Court accepted — as it was not a matter put in
issue — that the application filed by the Federal Republic of Germany for violation
of the Vienna Convention was based on the jurisdiction of the Court under
Article 36, paragraph 1, of the Statute of the Court and on Article I of the Optional
Protocol. Similarly, in the Avena case (Mexico v. United States of America) (Judgment,
I.C.J. Reports 2004 (I), p. 12), this Court noted in its judgment that Mexico
based the jurisdiction of the Court on Article 36, paragraph 1, of the Statute of the
Court and on Article I of the Optional Protocol concerning the compulsory settlement
of disputes. The jurisdiction of this Court to entertain applications for relief
in cases of breach of the Vienna Convention thus is not in doubt.
IV. The Vienna Convention
34. Article 36 of the Vienna Convention was negotiated and adopted by the
States, to set up amongst other things standards of conduct through an International
Convention on Consular Relations, particularly concerning communication
and contact with nationals of the Sending State which would contribute to the
development of friendly relations amongst nations. Article 36 of the Convention
specifically confers rights upon the States under subarticles (a) and (c) of Article
36, paragraph 1, and confers rights upon nationals of States, arrested, detained
or put on trial in another State.
35. The provisions of Article 36 of the Vienna Convention were first interpreted
by this Court in the LaGrand case. This Court held,
“Article 36, paragraph 1, establishes an interrelated régime designed to
facilitate the implementation of the system of consular protection. It begins
with the basic principles governing consular protection; the right of communication
and access (Art. 36, para. 1 (a)). This clause is followed by the provision
which spells out the modalities of consular notification (Art. 36,
para. 1 (b)). Finally Article 36, paragraph 1 (c), sets out the measures consular
officers may take in rendering consular assistance to their nationals
in the custody of the receiving State.”) (Judgment, I.C.J. Reports 2001,
p. 492, para. 74.)
36. In the Avena case, this Court was again called upon to interpret Article
36. It held that
“Article 36, paragraph 1 (b), contains three separate but interrelated elements:
the right of the individual concerned to be informed without delay of
15
(dénommés « clauses juridictionnelles des Traités »), le Pakistan invoquait la réserve
dont l’Inde avait assorti sa déclaration d’acceptation de la juridiction obligatoire de
la Cour en vertu du paragraphe 2 de l’article 36. La Cour avait conclu que
« les objections à [s]a juridiction … ne sauraient être retenues, qu’elles se
fondent sur la prétendue inapplicabilité des Traités en tant que tels ou sur celle
de leurs clauses juridictionnelles. La Cour ayant donc compétence en vertu de
ces clauses et par suite (voir paragraphes 14‑16) en vertu de l’article 36, paragraphe
1, et de l’article 37 de son Statut, il est sans pertinence d’examiner
les objections visant d’autres fondements possibles de sa compétence. »
(C.I.J. Recueil 1972, p. 60, par. 25.)
33. Dans l’affaire LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique) (arrêt, C.I.J.
Recueil 2001, p. 466), la Cour a admis — étant donné qu’il ne s’agissait pas d’une
question dont elle était saisie — que la République fédérale d’Allemagne, dans la
requête qu’elle avait présentée pour violation de la convention de Vienne, avait
fondé sa compétence sur le paragraphe 1 de l’article 36 du Statut et l’article premier
du protocole de signature facultative. De la même manière, dans l’affaire
Avena (Mexique c. Etats-Unis d’Amérique) (arrêt, C.I.J. Recueil 2004 (I),
p. 12), la Cour a relevé dans son arrêt que le Mexique avait fondé sa compétence
sur le paragraphe premier de l’article 36 du Statut et sur l’article premier du protocole
de signature facultative. La compétence de la Cour pour connaître de réclamations
formulées à raison de violations de la convention de Vienne ne fait donc
aucun doute.
IV. La convention de Vienne
34. L’article 36 de la convention de Vienne a été négocié et adopté par les Etats
afin d’établir notamment, dans le cadre d’une convention internationale sur les
relations consulaires, des normes de conduite régissant, en particulier, la communication
avec les ressortissants de l’Etat d’envoi, dans le souci de contribuer au
développement de relations amicales entre les nations. L’article 36 de la convention
confère expressément, aux alinéas a) et c) de son paragraphe 1, des droits aux
Etats ; il confère également des droits à leurs ressortissants qui sont arrêtés, placés
en détention ou en instance de jugement dans un autre Etat.
35. La Cour a interprété les dispositions de l’article 36 de la convention de
Vienne pour la première fois dans l’affaire LaGrand. Elle l’a fait en ces termes :
« Le paragraphe 1 de l’article 36 institue un régime dont les divers éléments
sont interdépendants et qui est conçu pour faciliter la mise en oeuvre du système
de protection consulaire. Le principe de base régissant la protection
consulaire est énoncé dès l’abord : le droit de communication et d’accès (alinéa
a) du paragraphe 1 de l’article 36). La disposition suivante précise les
modalités selon lesquelles doit s’effectuer la notification consulaire (alinéa b)
du paragraphe 1 de l’article 36). Enfin, l’alinéa c) du paragraphe 1 de l’article
36 énonce les mesures que les agents consulaires peuvent prendre pour
fournir leur assistance aux ressortissants de leur pays détenus dans l’Etat de
résidence. » (Arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 492, par. 74.)
36. Dans l’affaire Avena, la Cour a de nouveau été appelée à interpréter l’article
36. Elle a jugé que
« [l’]alinéa [b) de son paragraphe 1] cont[enait] trois éléments distincts mais
liés entre eux : le droit de l’intéressé d’être informé sans retard des droits qui
16
his rights under Article 36, paragraph 1 (b); the right of the consular post to
be notified without delay of the individual’s detention, if he so requests; and
the obligation of the receiving State to forward without delay any communication
addressed to the consular post by the detained person.” (Judgment,
I.C.J. Reports 2004 (I), p. 43, para. 61.)
37. The facts narrated in the previous section establish that Pakistan had failed
to inform the accused of his rights. The conduct of Pakistan, including at one time
a suggestion that the Indian national was not entitled to any rights, also establishes
that the accused was denied his consular access rights under Article 36, paragraph
1 (b), of the Convention.
38. India was informed of the detention of the Indian national much after his
detention. India sought consular access incessantly. Considerably late in the day —
after the trial had been concluded — Pakistan put a condition that India first
accedes to its request for investigation in India. Such a condition is in violation of
the Vienna Convention. Even this conditional offer came at a time when the trial
had already been concluded.
39. It is obvious from the facts, which are in the present case indisputable, that
Pakistan has denied India consular rights under Article 36, paragraph 1 (a) and
(c), of the Vienna Convention.
40. The rights conferred by Article 36 of the Vienna Convention are sacrosanct.
These rights are also enforceable as held by this Court in the Avena case in paragraph
40, that “violations of the rights of the individual under Article 36 may
entail a violation of the rights of the sending State, and that violation of the rights
of the latter may entail a violation of the rights of the individual”. On this basis,
this Court held that the sending State (in that case Mexico) could submit a claim in
its own name and request the Court to rule on the violation of rights which it
claimed to have suffered both directly and through the violation of the individual
rights conferred on Mexican nationals.
41. Where there is a violation of a right under the Convention, this Court would
have the power and the jurisdiction to provide suitable relief including a relief by
way of restitution.
42. As explained in greater detail in the section under relief, in the present case,
this Court would have the jurisdiction to, and the facts of the case demand that this
Court does, set aside the conviction of the Indian national. Alternatively, this
Court may, as a measure of restitution, direct Pakistan to take such steps as may
be necessary to set aside the conviction of the accused Indian national. This Court
may also direct a fresh investigation, after consular access is provided, and in the
circumstances of this case also direct Pakistan to conduct the trial under their ordinary
judicial system.
43. Pakistan has, in a press briefing on 20 April 2017 (Annex 9), referred to a
bilateral agreement on consular access between India and Pakistan, concluded in
2008 (Annex 10) and suggested that the matter of consular access between the two
countries is exhaustively dealt with in this bilateral agreement.
44. This argument lacks merit both because of the express provisions of the
Vienna Convention, as well as the plain language of the Agreement on Consular
Access signed between the two countries on 21 May 2008.
45. In the Agreement, which was entered into for “furthering the objective of
humane treatment of nationals of either country arrested detained or imprisoned
17
lui sont reconnus par ledit alinéa ; le droit du poste consulaire de recevoir sans
retard notification de la mise en détention de l’intéressé, si ce dernier en fait la
demande ; et l’obligation de l’Etat de résidence de transmettre sans retard
toute communication adressée au poste consulaire par la personne détenue »
(arrêt, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 43, par. 61).
37. Les faits exposés dans la section précédente permettent d’établir que le
Pakistan a manqué d’informer l’accusé de ses droits. Le comportement du Pakistan,
notamment en ce que celui‑ci a pu donner à entendre que le ressortissant
indien n’avait aucun droit, permet également d’établir que l’intéressé s’est vu
dénier celui de communiquer avec ses autorités consulaires que lui garantit l’alinéa
b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention.
38. L’Inde a été informée fort tardivement du placement en détention de son
ressortissant, et n’a eu de cesse, dès lors, d’entrer en contact avec lui par l’entremise
de ses autorités consulaires. Ce n’est qu’à un stade très avancé — après que le procès
eut pris fin — que le Pakistan a accepté, à une condition : que l’Inde commence
par l’autoriser à enquêter sur son territoire. Cette condition constitue une violation
de la convention de Vienne. De surcroît, elle a été formulée alors que le procès était
déjà achevé.
39. Il ressort clairement des faits, lesquels sont en l’espèce incontestables, que le
Pakistan a dénié à l’Inde les droits consulaires que lui garantissent les alinéas a) et
c) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention de Vienne.
40. Les droits conférés par l’article 36 de la convention de Vienne sont sacro-saints.
Ces droits sont en outre opposables, ainsi que l’a constaté la Cour au paragraphe
40 de son arrêt en l’affaire Avena : « [T]oute violation des droits que l’individu
tient de l’article 36 risque d’entraîner une violation des droits de 1’Etat d’envoi
et … toute violation des droits de ce dernier risque de conduire à une violation des
droits de l’individu. » Sur cette base, la Cour a estimé que l’Etat d’envoi (en l’occurrence
le Mexique) pouvait soumettre une demande en son nom propre et la prier de
statuer sur la violation des droits dont il soutenait avoir été victime à la fois directement
et à travers la violation des droits individuels conférés à ses ressortissants.
41. Lorsqu’il y a violation d’un droit reconnu par la convention, il est du pouvoir
et du ressort de la Cour d’apporter le remède approprié, y compris sous forme
de restitution.
42. Comme cela est expliqué plus en détail dans la section intitulée « Mesures
demandées », en l’espèce, la Cour aurait la compétence requise pour infirmer la
condamnation du ressortissant indien, et les faits de l’affaire commandent qu’elle
le fasse. Une autre solution consisterait pour la Cour, en guise de restitution, à
prescrire au Pakistan de prendre les mesures nécessaires pour que cette condamnation
soit infirmée. La Cour peut également prescrire au Pakistan de procéder à une
nouvelle enquête, une fois rendue possible la communication entre le ressortissant
indien et ses autorités consulaires, et lui enjoindre en outre, compte tenu des circonstances
de l’affaire, de veiller à ce que l’intéressé soit jugé par des juridictions de
droit commun.
43. Lors d’une conférence de presse accordée le 20 avril 2017 (annexe 9), le Pakistan
a fait référence à un accord bilatéral sur la communication des autorités consulaires
avec les ressortissants de l’Etat d’envoi conclu en 2008 avec l’Inde (annexe 10),
en indiquant que cet accord régissait entièrement la question entre les deux pays.
44. Cet argument est infondé au regard tant des dispositions expresses de la
convention de Vienne que des termes mêmes de cet accord bilatéral signé le
21 mai 2008.
45. Dans cet instrument, conclu afin de « renforcer l’objectif consistant à garantir
un traitement humain aux ressortissants de chacun des deux Etats en cas d’ar-
18
in the other country”, the two signatory States, India and Pakistan, agreed to certain
measures. They included release and repatriation of persons within one month
of confirmation of their national status and completion of sentences. The Agreement
recognized that in case of arrest, detention or sentence made on political or
security grounds, each side may examine the case on its own merits, and that in
special cases which call for or require compassionate and humanitarian considerations,
each side may exercise its discretion subject to its laws and regulations to
allow early release and repatriation of persons. India is not seeking reinforcement
of this Agreement nor is it basing its claim on any rights or obligations under it.
46. India’s claim is based solely upon the Vienna Convention. Article 73 of the
Vienna Convention recognizes that there may be other international agreements in
force as between the parties, and that nothing in the Convention “shall preclude
States from concluding international agreements confirming or supplementing or
extending or amplifying the provisions thereof”.
47. The existence of a bilateral agreement, some of the provisions of which may
appear to supplement or amplify the provisions of the Vienna Convention is thus
irrelevant to an assertion of rights of consular access under the Vienna Convention.
This is also consistent with Article 41 of the Vienna Convention on the Law
of Treaties which recognizes the principle that two or more parties could modify
the terms of the Treaty as long as the Treaty permits such modification or at least
does not prohibit such modification, and that any such modification cannot relate
to a provision, the derogation from which is incompatible with the effective execution
of the object and purpose of the Treaty as a whole.
48. The Vienna Convention creates specific rights in favour of States and in
favour of the nationals of Sending States in relation to consular access — and creates
corresponding obligations upon Receiving States that arrest, detain or try and
sentence nationals of other Member States. Bilateral treaties which create obligations
can only supplement the provisions of the Vienna Convention and cannot
modify these rights and corresponding obligations which form the object and purpose
of Article 36 of the Vienna Convention.
V. The Claims of India
49. The Government of India claims that under Article 36 of the Vienna Convention,
Pakistan was under an international legal obligation to India, a party to
the Convention, to comply with the rights of consular access under sub-paragraphs
(a) and (c) of paragraph 1 of Article 36. Pakistan was also under an
obligation under international law and the Vienna Convention to inform the
Indian national of his rights under paragraph (b) of Article 36 (1).
50. Despite persistent and repeated requests by India, Pakistan has brazenly
refused consular access until March 2017 — by which time the trial was concluded.
This trial has been concluded in violation of the rights under the Vienna Convention
and stands vitiated. That is more so for the reason that the trial has been
conducted not in accordance with the general law applicable to criminal trials in
the regular courts, but has been conducted by way of a military Court Martial.
19
restation, de détention ou d’emprisonnement sur le territoire de l’autre », l’Inde et
le Pakistan sont convenus de certaines mesures, notamment de libérer et de rapatrier
les intéressés un mois au plus tard après expiration de leur peine et confirmation
de leur nationalité. Les signataires reconnaissaient que, en cas d’arrestation,
de détention ou de condamnation pour des motifs politiques ou relatifs à la sécurité,
chacun d’eux pourrait examiner l’affaire au fond et, dans les circonstances
spéciales requérant de faire preuve de compassion et d’humanité, exercer son pouvoir
discrétionnaire, en tant que permis par ses lois et règlements, pour autoriser
une libération et un rapatriement anticipés. L’Inde ne demande pas le renforcement
des dispositions de cet accord et ne fonde pas davantage sa demande sur des
droits ou obligations qui en découleraient.
46. La demande de l’Inde est uniquement fondée sur la convention de Vienne.
L’article 73 de cet instrument reconnaît qu’il peut exister d’autres accords internationaux
en vigueur dans les rapports entre les parties et qu’aucune disposition de la
convention « ne saurait empêcher les Etats de conclure des accords internationaux
confirmant, complétant ou développant ses dispositions, ou étendant leur champ
d’application ».
47. L’existence d’un accord bilatéral, dont certaines dispositions peuvent sembler
compléter ou développer celles de la convention de Vienne, n’a donc pas à
entrer en considération lorsqu’un Etat entend faire valoir les droits garantis par la
convention en matière de communication de ses autorités consulaires avec ses ressortissants.
L’article 41 de la convention de Vienne sur le droit des traités va du
reste dans le même sens, qui reconnaît le principe selon lequel deux ou plusieurs
parties peuvent modifier les termes d’un traité pour autant qu’une telle modification
soit possible ou, à tout le moins, ne soit pas interdite en vertu de celui‑ci, et
qu’elle ne porte pas sur une disposition à laquelle il ne peut être dérogé sans qu’il y
ait incompatibilité avec la réalisation effective de l’objet et du but du traité pris
dans son ensemble.
48. La convention de Vienne crée pour les Etats d’envoi et leurs ressortissants
des droits exprès en matière de communication par l’entremise des autorités consulaires,
et crée à la charge des Etats de résidence qui arrêtent, placent en détention
ou jugent et condamnent les ressortissants d’autres Etats parties des obligations
correspondantes. Les traités bilatéraux qui créeraient des obligations ne peuvent
que compléter les dispositions de la convention de Vienne et ne sauraient modifier
ces droits ni les obligations correspondantes, qui participent de la réalisation de
l’objet et du but de l’article 36 de cet instrument.
V. Les demandes de l’Inde
49. Le Gouvernement indien affirme que le Pakistan, au regard de l’article 36 de
la convention de Vienne, avait envers l’Inde, qui est partie à cette convention,
l’obligation juridique internationale de respecter les droits relatifs à la communication
entre un ressortissant et ses autorités consulaires garantis aux alinéas a) et c)
du paragraphe 1 dudit article. Le Pakistan était aussi tenu, au regard du droit
international et de la convention de Vienne, ainsi que prévu en son article 36, paragraphe
1 b), d’informer le ressortissant indien de ses droits.
50. En dépit des demandes répétées que l’Inde ne s’est pas fait faute de lui adresser,
le Pakistan a eu l’aplomb de refuser à ses autorités consulaires et à son ressortissant
la possibilité de communiquer jusqu’en mars 2017 — à un moment où le
procès avait déjà pris fin. Ce procès, dans le cadre duquel les droits prévus par la
convention de Vienne ont été violés, est vicié, et il l’est d’autant plus qu’il ne s’est
pas déroulé sous le régime du droit général applicable aux procédures pénales
20
These trials under the law applicable to them are summary in nature. And indisputably,
a confession by the accused while in Pakistani custody has been taken into
account in the course of the trial — which confession was recorded after India had
sought consular access.
51. Pursuant to Article 36, subparagraph 1 (b), of the Vienna Convention,
Pakistan is under the international legal obligation to the Indian national to allow
him consular access and also the right to receive assistance from India in the
ongoing
proceedings.
52. Pakistan continues to deny consular access to the Indian national. It is not
even known whether an appeal has been filed by Mr. Jadhav, and if filed has
already been heard. Pakistan steadfastly refuses to share any information about
the accused.
53. The trial had been conducted under the Pakistan Army Act, 1952. The
accused, it appears from the statement of 14 April 2017, was tried by a Field General
Court Martial. While the rules of evidence are the same as those prevalent in
criminal courts, the personnel who manned the Court Martial are three military
officers. The decision of the Court Martial, under Section 105, is by an absolute
majority of votes, and in the event a death sentence is to be awarded it has to be
unanimous.
54. Section 84 of the Pakistan Army Act, 1952, confers the power to convene a
Field General Court Martial upon an officer empowered in this behalf by an order
of the Federal Government or of the Chief of Army Staff. The confirmation of a
death sentence awarded in a Field General Court Martial is by the convening
officer or by an authority superior to him. The only information available in the
present case as to the state of play, is what was in the press statement by the Adviser
to the Prime Minister of Pakistan which said that the accused was tried by a
Field General Court Martial under Section 59 of the Pakistan Army Act, 1952.
Section 59 extends the Army Act in its application to persons who in or beyond
Pakistan commit any “civil offence”. It did not state the designation of the convening
officer or the officer who “endorsed” the sentence on 10 April 2017.
55. A petition to the Federal Government is provided under Section 131. Under
Section 133 B, the Court of Appeal is to consist, in cases of award of death sentence
after 1992, of the Chief of Army Staff or one or more of the officers designated
by him in this behalf and presided by an officer not below the rank of Brigadier
in the case of a Field General Court Martial as in this case. The decision of the
Court of Appeal is final and cannot be called in question before any court or other
authority.
56. The mother of Mr. Kulbhushan Sudhir Jadhav filed an appeal under Section
133 B and a petition to the Federal Government of Pakistan under Section 131
of the Pakistan Army Act, 1952. The appeal and the petition here handed over to
the Pakistan Government by the Indian High Commissioner in Islamabad on
26 April 2017.
57. In the present case, India submits that even if, an appeal is available under
the Statute, it is an illusory remedy. Some of the circumstances that establish that
this remedy is worthless in the present case are as follows:
(a) The death sentence stands confirmed by the Chief of Army Staff. An appeal
before a tribunal presided over by him or officers’ junior to him would be an
appeal from Caesar to Caesar. A news report of 18 April 2017 in the Dawn
states that an appeal process is under way and the appellate tribunal would be
21
devant des tribunaux réguliers, mais a été confié à une cour martiale. Les procès
relevant de telles juridictions, en vertu de la loi qui leur est applicable, sont forcément
sommaires. Et il est incontestable que des aveux obtenus alors que l’accusé se
trouvait en détention au Pakistan ont été pris en compte dans le cadre de son procès
— lesquels aveux ont été consignés après que l’Inde eut cherché à entrer en
contact avec son ressortissant par l’entremise de ses autorités consulaires.
51. Conformément à l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36 de la convention
de Vienne, le Pakistan a, envers le ressortissant indien, l’obligation juridique internationale
de lui permettre de communiquer avec ses autorités consulaires, et de lui
garantir le droit de recevoir de l’Inde une assistance dans le cadre de la procédure
dont il continue de faire l’objet.
52. Le Pakistan refuse toujours de permettre la communication entre le ressortissant
indien et les autorités consulaires. L’Inde ignore même si M. Jadhav a fait
appel et, le cas échéant, si cet appel a déjà été entendu. Le Pakistan refuse obstinément
de partager toute information relative à l’accusé.
53. Le procès s’est déroulé sous le régime de la loi militaire pakistanaise de 1952.
L’accusé, ressort-il de la déclaration du 14 avril 2017, a été jugé par une cour martiale
générale. Celle‑ci, si elle applique les mêmes règles d’administration de la
preuve que les juridictions pénales, se compose de trois officiers de l’armée. Conformément
à l’article 105, elle rend sa décision à la majorité absolue, et toute condamnation
à mort est décidée à l’unanimité.
54. L’article 84 de la loi militaire pakistanaise de 1952 confère le pouvoir de
convoquer une telle cour martiale à un officier ainsi habilité par ordre du Gouvernement
fédéral ou du chef d’état-major de l’armée. C’est ce même officier, ou une
autorité supérieure, qui confirme la condamnation à mort prononcée par cette instance.
Les seules informations dont on dispose en l’espèce quant à l’état de la situation
sont celles qui ont été fournies par le conseiller auprès du premier ministre du
Pakistan dans la déclaration qu’il a faite à la presse, à savoir que l’accusé a été jugé
par une cour martiale générale au titre de l’article 59 de la loi militaire pakistanaise
de 1952. L’article en question étend l’application de la loi militaire à des individus
ayant commis une « infraction civile » au Pakistan ou ailleurs. Aucune indication
n’était donnée sur l’officier ayant convoqué la cour martiale ni celui ayant
« endossé » la condamnation prononcée le 10 avril 2017.
55. L’article 131 prévoit la possibilité d’un recours auprès du Gouvernement fédéral.
En vertu de l’article 133 B, la cour d’appel est constituée — s’agissant des condamnations
à mort prononcées après 1992 et lorsque l’appel concerne, comme c’est le cas
en l’espèce, la décision d’une cour martiale générale — du chef d’état-major de l’armée
ou d’un ou plusieurs officiers désignés par lui à cet effet, et elle est présidée par un
officier ayant au moins le rang de général de brigade. L’arrêt de la cour d’appel est
final et ne peut être contesté devant aucune instance judiciaire ou autre autorité.
56. La mère de M. Kulbhushan Sudhir Jadhav a formé un appel en vertu de
l’article 133 B de la loi de 1952 sur l’armée pakistanaise et introduit un recours
auprès du Gouvernement fédéral du Pakistan en vertu de l’article 131 de cette
même loi. Cet appel et ce recours ont été remis au Gouvernement pakistanais par
le haut‑commissaire de l’Inde à Islamabad le 26 avril 2017.
57. En l’espèce, l’Inde soutient que, même si la possibilité d’interjeter appel est
prévue par la loi, cette voie de recours n’est qu’illusoire, notamment pour les raisons
suivantes :
a) La condamnation à mort a été confirmée par le chef d’état-major de l’armée.
Interjeter appel devant un tribunal présidé soit par le chef d’état-major de l’armée
lui-
même, soit par des officiers qui lui seraient subordonnés, reviendrait à
saisir César contre César. Un article de presse paru le 18 avril 2017 dans le
22
constituted headed by a two-star general. The spokesperson is quoted as having
said that he did not see any chance of the verdict being overturned.
(b) The Adviser to the Prime Minister on Foreign Affairs issued a statement on
14 April 2017 (see Annex 6) in which he asserted that
“all political parties are unanimous that the award of death penalty after
due process and overwhelming evidence to a foreign spy, who was not only
carrying out subversive activities in Pakistan but actually promoting terrorism,
is the correct decision. Second, the whole nation is solidly united
against any threat to Pakistan’s security.”
The official spokesperson for the Government in a press briefing on 17 April
2017 mentioned that the process will move ahead as per law and will go to the
appellate court — it did not clarify whether an appeal had already been filed.
He added “Kulbhushan was sentenced on undeniable evidence, if questioned
on any form, the Pakistan Army will defend their case with all the resources in
light of the undeniable evidence.” (See Annex 7.)
(c) In a case that has created so much controversy, there is more than a reasonable
apprehension that the Court of Appeal presided over by a two-star general of
the Army [who is subordinate to the Chief of Army Staff who has confirmed
the death sentence] — will not act independently, fairly and impartially to the
standards of due process recognized in international law. There can be no faith
or confidence in such a remedy, particularly in the facts and circumstances of
the present case.
(d) Further, when the Government of Pakistan has publicly taken such a position,
it defies credulity to believe that a Court of Appeal constituted under the Pakistan
Army Act, 1952 will be so independent and free from pressures so as to
constitute a real and effective remedy.
(e) Even in the course of the appeal, Pakistan has clearly refused consular
access.
(f) A news report [Dawn, 15 April 2017] (Annex 11) in Pakistan newspapers suggests
that the Lahore High Court Bar Association passed a resolution on
14 April 2017 warning lawyers against accepting the brief of convicted “Indian
spy Kulbhushan Jadhav”. The news report suggested that the Bar Association
had decided to cancel the membership of the lawyer(s) found pursuing an
appeal on behalf of this convict in a military court. Thus in all likelihood, even
in appeal Mr. Jadhav will not be able to avail of the assistance of a lawyer.
Pakistan has not responded to India’s request to facilitate the appointment of
a defence lawyer.
VI. Relief
58. India submits that the breach of the Vienna Convention is admitted in the
Note Verbale by Pakistan on 21 March 2017, which for the first time stated that
Pakistan would consider consular access depending on India’s response to the
request for assistance in the investigation. It reiterated this position in its Note
Verbale of 10 April 2017. The press briefing by the official spokesperson of the
23
Dawn indiquait qu’une procédure d’appel était en cours et que la juridiction
saisie serait présidée par un général deux étoiles. Le porte‑parole interrogé
aurait affirmé qu’il ne voyait aucune chance de voir le verdict annulé.
b) Le conseiller pour les affaires étrangères auprès du premier ministre, dans la
déclaration publiée le 14 avril 2017 (annexe 6), a affirmé que,
« de part et d’autre de l’échiquier politique, tous concourent à dire que la
décision, prise au terme d’une procédure équitable et eu égard à des preuves
accablantes, de condamner à la peine capitale un espion étranger qui ne se
contentait pas de se livrer à des activités subversives sur le sol pakistanais,
mais promouvait de fait le terrorisme, [était] justifiée. Par ailleurs, la nation
dans son ensemble est résolument unie face à toute menace contre la sécurité
du Pakistan. »
Le porte-parole
officiel du Gouvernement a indiqué, lors d’une conférence de
presse donnée le 17 avril 2017, que la procédure se poursuivrait conformément
à la loi, avec saisine de la cour d’appel — sans préciser si un appel avait d’ores
et déjà été interjeté. Et d’ajouter : « Kulbhushan a été condamné sur la base
d’éléments de preuve incontestables ; si la décision devait être mise en cause
devant une quelconque instance, l’armée pakistanaise userait en conséquence
de tous les moyens dont elle dispose pour la défendre. » (Annexe 7.)
c) Dans une affaire ayant tant prêté à controverse, il est plus que légitime de
craindre que la cour d’appel présidée par un général deux étoiles (placé sous la
responsabilité hiérarchique du chef d’état-major de l’armée qui a confirmé la
condamnation à mort) n’agira pas de manière indépendante, équitable et
impartiale, en se conformant aux normes garantes de la régularité de la procédure
reconnues en droit international. L’on ne saurait avoir foi ou confiance
dans une telle voie de recours, tout particulièrement compte tenu des faits et des
circonstances de la présente affaire.
d) En outre, alors que le Gouvernement du Pakistan a publiquement exposé la
position mentionnée ci‑dessus, ce serait pécher par excès de crédulité que de
penser qu’une cour d’appel constituée en vertu de la loi militaire pakistanaise de
1952 serait suffisamment indépendante et hermétique aux pressions pour pouvoir
constituer une voie de recours réelle et efficace.
e) Même dans le cadre de la procédure d’appel, le Pakistan a clairement refusé de
permettre au ressortissant et aux autorités consulaires de l’Inde de communiquer.
f) Il ressort d’informations parues dans la presse pakistanaise [Dawn, 15 avril
2017 (annexe 11)] que le barreau de la High Court de Lahore a adopté une résolution,
le 14 avril 2017, par laquelle il mettait en garde les avocats qui seraient
tentés d’assurer la défense de l’accusé « Kulbhushan Jadhav, espion indien », et
menaçait de radiation le ou les avocats qui interjetteraient effectivement appel
en son nom devant un tribunal militaire. Il est donc plus que probable que,
même en appel, M. Jadhav ne soit pas en mesure de se prévaloir de l’assistance
d’un avocat. Le Pakistan n’a pas répondu à la demande de l’Inde visant à faciliter
la commission d’un avocat de la défense.
VI. Mesures demandées
58. L’Inde soutient que la note verbale du 21 mars 2017 emporte reconnaissance
de la violation de la convention de Vienne incriminée ; le Pakistan y déclare pour la
première fois qu’il envisagera de permettre la communication entre le ressortissant
indien et ses autorités consulaires en fonction de la suite que l’Inde réservera à sa
demande d’entraide aux fins d’enquête, ce qu’il a réitéré dans sa note verbale du
24
Government, on 17 April 2017, again asserted the Pakistan position that the
Indian national was not entitled to consular access.
59. India submits that this Court has the power to take all such steps and issue
all such directions as may be necessary, for as held in the Avena case, “it is a principle
of international law that the breach of an engagement involves an obligation
to make reparation in an adequate form (Factory at Chorzow, Jurisdiction, Judgment
No. 8, 1927, P.C.I.J., Series A, No. 9, p. 21)” (I.C.J. Reports 2004 (I), p. 59,
para. 119).
This Court also held that where obligations accepted by the parties to the Vienna
Convention include commitments as to the conduct of their municipal courts in
relation to nationals of other parties, this Court had jurisdiction to examine the
conduct of the municipal courts and the actions of such courts in the light of international
law to ascertain whether there had been any breaches of the Convention
(ibid., p. 30, para. 28). India, therefore, submits that this Court has the power and
the jurisdiction to mould the relief, to the facts of the present case, to ensure that
this death sentence which has been awarded by a military court, in brazen defiance
of the consular rights under Article 36 of the Vienna Convention and due process
set at nought. This could be achieved by directing Pakistan — to take steps to
annul the decision, and to direct Pakistan not to act on this sentence and conviction,
and to direct the release of the convicted Indian national forthwith.
60. In the circumstances, India seeks the following reliefs:
(1) A relief by way of immediate suspension of the sentence of death awarded to
the accused.
(2) A relief by way of restitution in integrum by declaring that the sentence of the
military court arrived at, in brazen defiance of the Vienna Convention rights
under Article 36, particularly Article 36, paragraph 1 (b), and in defiance of
elementary human rights of an accused which are also to be given effect as
mandated under Article 14 of the 1966 International Covenant on Civil and
Political Rights, is violative of international law and the provisions of the
Vienna Convention; and
(3) Restraining Pakistan from giving effect to the sentence awarded by the military
court, and directing it to take steps to annul the decision of the military
court as may be available to it under the law in Pakistan.
(4) If Pakistan is unable to annul the decision, then this Court to declare the decision
illegal being violative of international law and treaty rights and restrain
Pakistan from acting in violation of the Vienna Convention and international
law by giving effect to the sentence or the conviction in any manner, and
directing it to release the convicted Indian national forthwith.
61. The Republic of India reserves its right to amend or supplement this
Application
anytime in future and requests the Court to indicate provisional measures
of protection as set forth in the separate request filed along with this Application.
8 May 2017.
(Signed) Dr. Deepak Mittal,
Joint Secretary,
Ministry of External Affairs,
Government of India.
25
10 avril 2017. Lors de la conférence de presse du 17 avril 2017, le porte‑parole
officiel du gouvernement a réaffirmé la position du Pakistan déniant au ressortissant
indien le droit de communiquer avec ses autorités consulaires.
59. L’Inde est d’avis que la Cour a le pouvoir de prendre toutes les mesures et de
donner toutes les instructions qui se révéleraient nécessaires : ainsi qu’il a été dit en
l’affaire Avena, « [c]’est un principe de droit international que la violation d’un
engagement entraîne l’obligation de réparer dans une forme adéquate (Usine de
Chorzów, compétence, arrêt no 8, 1927, C.P.J.I. série A no 9, p. 21) » (C.I.J.
Recueil 2004 (I), p. 59, par. 119).
La Cour a également déclaré dans cette affaire que, lorsque, en acceptant les
obligations prescrites par la convention de Vienne, les parties à cet instrument
avaient pris des engagements en ce qui concerne le comportement de leurs juridictions
internes à l’égard des ressortissants des autres parties, elle avait compétence
pour examiner le comportement et les actes de ces juridictions au regard du droit
international pour établir s’il y avait eu violation de la convention (ibid., p. 30,
par. 28). L’Inde soutient en conséquence qu’il est du pouvoir et du ressort de la
Cour d’indiquer des mesures adaptées aux faits de la présente espèce, afin de veiller
à ce que la condamnation à mort, qui a été prononcée par un tribunal militaire au
mépris total des droits consulaires énoncés à l’article 36 de la convention de Vienne
ainsi que des garanties d’une procédure régulière, soit considérée comme non
avenue.
La Cour pourrait parvenir à ce résultat en prescrivant au Pakistan de
prendre des mesures pour annuler la décision, de s’abstenir de donner effet à cette
condamnation et de libérer sans délai le ressortissant indien qui en fait l’objet.
60. Dans ces circonstances, l’Inde demande :
1) que la condamnation à mort prononcée à l’encontre de l’accusé soit immédiatement
suspendue ;
2) que lui soit accordée restitutio in integrum, sous la forme d’une déclaration
constatant que la condamnation à laquelle est parvenu le tribunal militaire au
mépris total des droits énoncés à l’article 36 de la convention de Vienne, notamment
en son paragraphe 1 b), et des droits humains élémentaires de tout accusé,
auxquels il convient également de donner effet ainsi qu’exigé à l’article 14 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966, est contraire au
droit international et aux dispositions de la convention de Vienne ;
3) qu’il soit prescrit au Pakistan de ne pas donner effet à la condamnation prononcée
par le tribunal militaire et de prendre les mesures qui pourraient être prévues
par le droit pakistanais pour annuler la décision de ce tribunal ;
4) que cette décision, dans le cas où le Pakistan ne serait pas en mesure de l’annuler,
soit déclarée illicite en tant que contraire au droit international et aux droits
conventionnels, et qu’injonction soit faite au Pakistan de s’abstenir de violer la
convention de Vienne sur les relations consulaires et le droit international en
donnant d’une quelconque façon effet à la condamnation, ainsi que de libérer
sans délai le ressortissant indien qui en fait l’objet.
61. La République de l’Inde se réserve le droit de modifier ou de compléter à
tout moment la requête et prie la Cour d’indiquer des mesures conservatoires, ainsi
qu’il est exposé dans la demande distincte qu’elle a déposée à cet effet en même
temps que la présente requête.
Le 8 mai 2017.
Le Joint Secretary
du ministère des affaires étrangères
du Gouvernement de l’Inde,
(Signé) M. Deepak Mittal.
26
1
LIST OF ANNEXES*
Annex 1. Notes Verbale issued by India on 25 March 2016, 30 March 2016,
6 May 2016, 10 June 2016, 11 July 2016, 26 July 2016, 22 August 2016,
3 November 2016, 19 December 2016, 3 February 2017, 3 March 2017,
31 March 2017, 10 April 2017, 14 April 2017, 19 April 2017 and
26 April 2017.
Annex 2. Note Verbale issued by Pakistan on 23 January 2017 (without attachment).
Annex 3. Note Verbale issued by Pakistan on 21 March 2017.
Annex 4. Press release issued by Inter Services Public Relations on 10 April 2017.
Annex 5. Note Verbale issued by Pakistan on 10 April 2017.
Annex 6. Press statement made by the Adviser to the Prime Minister of Pakistan
on 14 April 2017.
Annex 7. Briefing by authorized spokesperson of the Government of Pakistan on
17 April 2017.
Annex 8. Letter from EAM to Adviser to the Pakistan Prime Minister on Foreign
Affairs on 27 April 2017.
Annex 9. Press briefing of Government of Pakistan on 20 April 2017.
Annex 10. India Pakistan Agreement on Consular Access of 21 May 2008.
Annex 11. Copy of news report in Dawn of 15 April 2017.
* Annexes not reproduced in print version, but available in electronic version on the
Court’s website (http://www.icj-cij.org, under “cases”).
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1
LISTE DES ANNEXES*
[Traduction]
Annexe 1. Notes verbales de l’Inde en date des 25 mars 2016, 30 mars 2016, 6 mai
2016, 10 juin 2016, 11 juillet 2016, 26 juillet 2016, 22 août 2016,
3 novembre 2016, 19 décembre 2016, 3 février 2017, 3 mars 2017,
31 mars 2017, 10 avril 2017, 14 avril 2017, 19 avril 2017 et 26 avril
2017.
Annexe 2. Note verbale du Pakistan en date du 23 janvier 2017 (sans pièce
jointe).
Annexe 3. Note verbale du Pakistan en date du 21 mars 2017.
Annexe 4. Communiqué de presse du bureau des relations publiques de l’armée
pakistanaise en date du 10 avril 2017.
Annexe 5. Note verbale du Pakistan en date du 10 avril 2017.
Annexe 6. Déclaration à la presse du conseiller pour les affaires étrangères auprès
du premier ministre du Pakistan en date du 14 avril 2017.
Annexe 7. Conférence de presse du porte-parole
du Gouvernement pakistanais
en date du 17 avril 2017.
Annexe 8. Lettre en date du 27 avril 2017 adressée au conseiller pour les affaires
étrangères auprès du premier ministre du Pakistan par le ministre des
affaires étrangères de l’Inde.
Annexe 9. Conférence de presse du Gouvernement du Pakistan en date du
20 avril 2017.
Annexe 10. Accord du 21 mai 2008 entre l’Inde et le Pakistan sur la communication
des autorités consulaires avec les ressortissants de l’Etat d’envoi.
Annexe 11. Article de presse paru le 15 avril 2017 dans le journal Dawn.
* Annexes non reproduites en version papier, mais disponibles en version électronique
sur le site Internet de la Cour (http://www.icj-cij.org, onglet « affaires »).
IMPRIMÉ EN FRANCE – PRINTED IN FRANCE

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