COURINTERNATIONALE DEJUSTICE
AFFAIRE DELAFRONTlERETERRESTRE ET MARITIME
ENTRELEAMEROUNETLE NIGE'IA
.
MEMOIRE
DE LAREPUBLIQUEDUCAMEROUN
LIVRE 1
16Mars 1995 COUR INTERNATIONALEDE JUSTICE
AFFAIDE LFRONTIERETERRETMARITIME
ENTRELECAMEROUNNIGERIA
l
MEMOIRE
1 DE LAREPUBLIQUE DU CAMEROUN
LIVRE 1
16Mar1995 SIGLES ET ABREVIATIONS
ANNUAIRES -RECUEILS - REVUES
1
A.F.D.I. : Annuaire francaisde droit international
A.J.I.L. : Amencan Journal of InternationalLaw
Ann.C.D.I. : Annuaire de la Commission duDroit International
B.Y.B.I.L. : British Yearbookof InternationalLaw
J.O.R.F. : Journal Officielde la Ré~ubliaueFrancaise
R.C.A.D.I. : Recueildes Coursde l'Académiede Droit International Haye.
Rec. : Recueildes arrêts de la C.I.J.la
R.S.A. : Recueildes SentencesarbitralesdesNationsUnies
n ORGANISATIONS INTERNATIONALESET SIGLES DIVERS
A.E.F. : Afrique équatorialefrançaise
A.O.F. : Afrique occidentalefrançaise
B.E.T. : Borkou, Ennedi, Tibesti
C.B.L.T. : Commissiondu Bassindu Lac Tchad
C.D.I. : Commissiondu Droit international
C.I.J. : Cour internationalede Justice
C.P.A. : Cour permanented'arbitrage
C.P.J.I. : Cour permanentede Justiceinternationale ..
G.N.N. : Gardes nationauxnomades
O.N.U. : Organisationdes NationsUnies
O.U.A. : Organisationde l'UnitéAfricaine
S.d.N. : Société des NationsSCHEMADUMEMOIREChapitre1.
- Introduction
lère ~artie - LA FRONTIERECAMEROUNO-NIGERIANE
Chapitre2.
- Présentation généra dela frontière -la délimitationconventionnelle
- Introduction
- La délimitationde la frontièreterrestre
- La confirmation de la frontière lacustre
- La fixation partiellede la frontière maritime
Chapitre 3.
- La confirmationdestitres conventionnels
- Introduction
- L'acceptationexpresse de la frontièrepar la Grande-
Bretagne et le Nigeria
- Les "effectivités"
- La reconnaissance internationaledela frontière
- La cartographie
- Conclusion - Utipossidetisjuris et date critique
Chapitre4.
-
Le tracéde lafrontièreterrestre
- Les différentssecteursde la frontière
- La frontière septentrionale,du Lac Tchad au Mont
Kombon
- Du Mont Kombon à la borne 64
- De la borne 64 à la Cross River
- De la Cross River à la mer - L'appartenancede la
péninsule deBakassiau CamerounChapitre 5.
- Le tracéde la frontièremaritime
- Introduction -Les deux secteurs frontaliers
- De la côte au point G
- Audelà du point G
2ème~artie -LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE DU NIGERIA
Chapitre 6.
- Les faitsinternationalement illicitesattribuablesau Nigeria
- Introduction
- Les incursions nigérianes
- Les obligationsinternationales violéespar le Nigeria
- La responsabilité du Nigeria ces faits
internationalementillicites
Chapitre7.
- Les conséquences de la responsabilitéinternationald euNigeria
- Introduction
-
L'obligation de mettre immédiatement fin aux
violationsde ses obligations internationalespar le
Nigeria
- L'obligationpour le Nigeria de réparerles préjudices
causés àla Républiquedu Cameroun et à ses
ressortissants
- Les garantiesde non-violationà l'avenir
Chapitre 8
- Conclusion
CONCLUSIONSDE LA REPUBLIQUEDU CAMEROUN CHAPITRE 1.
INTRODUCTION GENERALESECTION 1. LA REQUETE DU CAMEROUNET L'OBJET DU
DIFFEREND
1.01 L.e29 mai 1994, la République du Cameroun adéposéau
Greffe de la Cour internationalede Justice une requête introductive d'ieontrec
la Républiquefédéraledu Nigeria. Conformément aux dispositionsde l'article 38 du
Règlement de la Cour, cette Requête indiquaitl'objet du différend, contenaitun
exposésuccinct des faits et des moyens dedroit invoquéset énonçaitla nature précise
de la demande.
1.02 Elle trouvait sonorigine immédiatedans les graves incidents
frontaliers de la fin de l'annéeet du début de l'anné1994,qui ontculminéavec
l'invasion, dans la nuit du 18 au 19 février 1994 d'une partie de la péninsule
camerounaise de Bakassi par l'armée nigériane. Toutefois, bienqu'ils fussent
particulièrement graves, ces incidents sont loin d'êtreis;lils ont étéle point
d'orgue d'une longue période de tensionsqui ont marquéles relationsentre les deux
pays depuis le milieu des années1960 et qui sont devenues particulièrement aiguës
depuis l'année1981, durant laquelle les troupes nigérianes avaient vioe anière
flagrante l'intégritétonale du Cameroundans la mêmerégionde la péninsulede
Bakassi.
1.O3 Ces faits ont conduit la Républiquedu Cameroun à saisir
immédiatement l'Organe central du Mécanismede l'O.U.A. pour la prévention,la
gestion et le règlementdes conflits et le Conseil de des Nations Unies. Faceà
l'attitude purement dilatoiredu Nigeria devant cesdeux instances(v. infra pa-s.1.27
1.29) et compte tenu de la persistance duconflit, qui envenime depuis plusd'un quart
de siècleles relations entre les deux pays, le Cameroun a portéle différenddevant la
Cour, ce dont les membres du Conseil de sécuritése sont félicités (AnnexM.C.
359).
1.04 Conformément aux termes mêmes dela requête, celle-ci
portait "essentiellementsur la question dela souverainetésur la presqu'îlede Bakassi"
(Requêteintroductived'instance, p.4), mais cette questionest étroitementliée,en fait
et en droit,à celle de la délimitation dela frontièremaritime entre les deux pays,demeurée inachevée et dont le Nigena a mêmeremis en cause le tracé dansla zone
qui avait fait l'objet d'un accord en 1975.
1.O5 Afin de régler complètementle différendet de mettre un
point final aux appétitstemtoriaux du Nigena, le Cameroun a donc demandé à la
Cour
i) de confirmer la souveraineté camerounaisesur la presqu'île de Bakass;
"de procéder au prolongement du tracé de sa frontière maritime avec la
ii)
République fédérald eu Nigeria jusqu'à la limite des zones maritimes que le
droit intemationalplace sous leurjuridiction respectiv;"
iii) de constater que la responsabilitédu Nigeria est engagéedu fait de la violation
des frontièrescamerounaises, del'usage de la force contre le Cameroun et de
l'occupation d'une partie de son temtoire et d'en tirer les conséquences
juridiques(ibid,p.14).
1.O6 Dans un premier temps, la République duCameroun avait
cm pouvoir limiter le différendsoumisà la Cour au litige portant sur la péninsule de
Bakassi et à la délimitationmaritime, car seule cette zone avait fait l'objet d'une
revendication formelle de la part du Nigeria qui n'y reconnaissait plus la frontière
existante résultant, d'unepart, de l'Accord anglo-allemanddu 11 mars 1913 (Annexe
M.C. 82) et, d'autre part, en ce qui concerne la délimitationmaritime inachevée, de
la Déclarationde Maroua du ler juin 1975(AnnexeM.C. 251).
1.O7 Un élémenn touveau tout àfait inattendu a cependant conduit
la République du Cameroun àétendrela portéeinitialede sa requête.
1.08 Les incidentsn'ont, en réalité, pasessédepuis pratiquement
l'indépendancedes deux pays, en 1960, tout au long de leur frontière commune.
Toutefois, ceux-ci, pour regrettables qu'ils fussent, n'avaient pas revêle caractère
de gravitéde ceux qui ont opposéles forces camerounaises et nigérianesdans la
péninsulede Bakassi, en particulier en 1981et en 1993-1994et, surtout, en dehors de
cette zone, le Nigeria n'avait jamais tenté de justifierses interventions en territoire
camerounaispar la remiseen cause de la frontière existante.
1.O9 Cette retenue relative a cessélorsque, en réponse à une
nouvelle note de protestation camerounaise (Annexe M.C. 355) contre l'occupation "civile" de Kontcha et militaire de Darak, localités situées respectivement danlsa
.provincecamerounaise de l'Adamaouaet dans la région duLac Tchad, le Nigeria a
affirmédans une note en date du 14 avril 1994, sa souverainetésurDarak qui, selon
lui, aurait"alwaysbeen part and parce1of Wulgo Districtof Ngala LocalGovernent
area of Bomo State of Nigeria and which has since time imrnemorial been
administeredas such.. ." (AnnexeM.C. 355).
1.10 Le Gouvernement camerounais a alors pris conscience que
cette revendication temtonale, s'ajoutant à celle sur la péninsule de Bakassi,
s'intégrait dansun plan systématiquede remise en cause des frontièresexistantespar
le Nigeria, dont les nombreuses interventionsen territoire camerounaisne sontque les
manifestationsconcrètes.
1.11 L'appartenance, tant dela péninsulede Bakassique de Darak
au Cameroun ne peut en effet faire le moindre doute :elle résulteà l'évidence, dans
le premier cas, de l'Accord anglo-allemandprécité(par. 1.06) du 11 mars 1913 et,
dans le second, de l'Accord franco-britannique(dit "DéclarationMILNERISIMON")
du 10juillet 1919 (Annexe M.C. 107) précisé par 1'Echangede notes franco-anglais
du 9 janvier 1931 approuvant la "Déclaration THOMSONIMARCHAND"(Annexe
M.C. 157). Or ces instruments, consacréspar la Sociétédes Nations àl'occasionde
l'octroi etde la supervision des mandatsfrançais et britannique sur le Cameroun puis
par les Nations Unies aprèsla transformation de ceux-ci en temtoires sous tutelle,
constituent les titres documentaires sur lesquels est fondéela délimitationde la
frontière camerouno-nigériane.En les récusant,c'est donc cette délimitation dans son
ensemble que le Nigeria a remiseen cause.
1.12 Dans ces circonstances, le Cameroun a estiméqu'il était
impératifet urgent d'introduire une requête additionnelleétendantla portéede sa
requêteoriginaire en date du 29 mars 1994.C'est ce qu'il afait le 6juin 1994.
1.13 Tout en notant que "[clet aspect du différend porte
essentiellement sur la question de la souverainetésur une partie du temtoire
camerounais dans la zone du Lac Tchad", la République du Cameroun y relève que
celui-ci porte dorénavant "sur le tracé de la frontière entre" "elle-mêmeet la
République du Nigeria duLac Tchad à la mer". "Ce faisant, le Gouvernement de la Républiquefédérale
du Nigena conteste, une fois de plus, la frontière établie
de longue date entre les deux pays et qui a fait
récemment l'objet de précision dans un cadre
multilatéral"(Requêtep ,.76).
(Cette dernière précisionconcerne la position adoptéeau sein de la Commission du
Bassin du Lac Tchad (C.B.L.T.), organisation intemationaledont le Cameroun et le
Nigeria sont membres).
1.14 Aprèsavoir exposé lesfaits et les moyens de droit invoqués
par la Républiquedu Cameroun, celle-ci a priéla Cour
i) de confirmer la souveraineté camerounaise surla parcelle litigieuse dans la
zone du Lac Tchad ;
ii) "de bien vouloir préciserdéfinitivementla frontière entre elleet la République
fédéraledu Nigeria du Lac Tchad àla mer" ;
iii) de constater que le Nigena a manqué à ses engagements internationaux et
engagéde ce fait sa responsabilitéintemationale, et d'en tirer lesconséquences
juridiques (ibid, p.84).
1.15 La République du Cameroun priait en outre
respectueusementla Cour dejoindre sa requête additionnelle qui élargissait "l'objetdu
différend" l'opposant à la Républiquefédérale du Nigeria (ibid, p.76), à la requête
initiale "et d'examiner l'ensembleen une seule et mêmeinstance" (ibid, p.80). Cette
demande est justifiée par l'unitéprofonde du différend quitient, comme cela est
exposé ci-dessus (pars. 1.10 et 1.11) aux visées expansionnistes duNigeria, que
traduisent, au plan juridique, la remise en cause de l'ensemble de la délimitation
frontalièreet, dans les faits, le "gngnotage temtorial" plus ou moins insidieux auquel
se livre ce pays tout au long de la frontière.
1.16 Dans son ordonnance du 16 juin 1994, la Cour a constaté
que, lors de la réunion du 14janvierentre le Présidentet les représentantsdes Parties,
"l'agent de la République fédérale dN uigeria a indiqué
que son gouvernement ne voyait pas d'objection àce que
la requête additionnelle soit traitée comme un
amendement à la requête initiale,de sorte que la Cour
puisse examiner l'ensemble en une seule et même
instance" ;et elle a préciséqu'elle ne voyait pas, pour sa part, "d'objectiàn ce qu'il soit
procédé ainsi"(p.3).
1.17 D'accord parties, et avec l'approbation de la Cour, il
convient donc biende considérerque la Républiquedu Camerouna soumis à la Haute
Juridiction un différend uniquedont l'objet estdéfini,cumulativement, par la requête
introductive d'instance du29 mars 1994et par la requadditionnelledu 6juin.
1.18 La Cour est compétentepour connaître de ce différend
puisque le Nigeria et le Cameroun ont tous deux acceptéjuridiction obligatoirede
la Cour, de plein droit et sans convention spéciale,et àacettefm la déclaration
facultative prévue au paragraphe2 de l'article36 du Statutde la Cour.
SECTION2. LES TENTATIVES POUR REGLER LE DIFFEREND
ETLEURECHEC
1.19 Tout en maintenant fermementses positions sur le fond, le
Cameroun s'est constammentemployé à rechercher une solution satisfaisante au
différendtant au plan bilatéralque dans des cadresmultilatérIRxNigeria, pour sa
part, s'est dérobé à toutes les tentatives faites pour régler le différend mais,
contrastant avec la brutalitédu recours la force sur le terrain, il a pratiqué une
tactique de faux-semblantset de fuite qu'illustrede manièreparticulièrementnette son
attitudà la suitede la grave crise dela fm de l'année1993et du débutde 1994.
1.20 Malgré l'extrêmgeravitédes événementsl,e Cameroun a fait
preuve de la plus grande retenuà la suite de l'invasiond'une partie de la péninsule
de Bakassi par les troupes nigérianesen décembre1993 et janvier-février 1994 (v.
supra, par.l.02).
1.21 Dès le4 janvier 1994, le Ministèredes Relations extérieures
a, dans une note verbale adressàel'Ambassadede la Républiquefédéraledu Nigeria
à Yaoundé,dénoncé"l'acte de guerre" ("theact ofwar") constituépar le survol, le
ler janvier 1994, du territoire camerounais parun hélicopttransportant les Chefs
d'état-major nigériansde l'infanterie, de la marine et de l'aviation et l'Inspecteur
général dela police, le stationnementde nombreux soldatsnigériansà Jabane et lacampagnedes autorités deCalabarannonçantcette occupation.
"In this light, the Government of Cameroon strongly
protests against this military invasionof its temtory and
demands that the Nigerian Government irnmediately
begins withdrawingal1troops involvedin this operation.
"The Cameroon Govemment will not accept that the
Federal Republicof Nigeria with whom she has excellent
neighbourly relations uses forces to occupy her
territory."
Néanmoins,la noteajoutait :
"The Government of Cameroon counts on the
cooperation of the Federal Republic of Nigeria in
considering the extreme gravity of this situation that
senously threatens peace in the sub-regionand that could
jeopardise al1the efforts that have been madein recent
years to establish brotherly relations between the two
countries" (AnnexeM.C. 328).
1.22 Pour toute réponse, et alors que des pourparlers
diplomatiques avaient étéentamés,le Nigeria fit débarquer, dansla nuit du 18 au 19
février, destroupes nombreuses à Akwa, localité située danlsa péninsulede Bakassi,
sur la rive droite de la rivière Akwayafé, à sept kilomètres de la sous-préfecture
d'Issangele et, simultanément, des soldats nigériansattaquaient des unités
camerounaises à Idabato.
1.23 Dès le 19 février, le PrésidentBIYA adressa au Général
ABACHA, Chef de 1'Etatnigérian,un message d'apaisementpar lequel il l'exhortait
à "persévérerdans l'intensification des efforts de négociationsdéjàen cours pour
trouver une solutionjuste et équitableet conformeau droit international ycompris par
voie juridictiomelle" (AnnexeM.C. 337). Face à la persistancede l'occupation de la
péninsulede Bakassiet constatantl'inutilité desnégociationsbilatérales, le Cameroun
décidade saisir simultanémentl'O.U.A. etles NationsUnies, le 28 février1994.
1.24 A l'O.U.A. deux procéduresfurent suivies parallèlement.
D'une part, les Présidentségyptien, Président en exercice de l'organisation, et
togolais s'efforcèrentde promouvoir un règlement politique dulitige. D'autre part,
l'organe central du Mécanismepour la prévention,la gestion et le règlement des
conflits, réuni ensessionextraordinairele 11mars 1994, "..underscored the importanceof achieving a peaceful
settlement based on the charters of the United Nations
and OAU. It reaffmed its attachmentto respect of the
principle of the inviolability of frontiers inherited from
the colonial period. It alsoreaffmed its attachment to
respect of the sovereignty, territorial integrity and
independenceof al1States.
"The Central Organ called upon the parties to exercise
restraint and to take appropriate measures to restore
confidence, includingthe considerationof the withdrawal
of troops and continuation of dialogue" (Annexe M.C.
354).
1.25 Aux Nations Unies, le Conseil de sécuriténe donna pas
immédiatementsuite à la demande du Cameroun en vue d'une réunionurgente du
Conseil (Annexe M.C. 342), renouveléele 20 avril (AnnexeM.C. 360). Mais, le 29
avril, le Président de cet organe adressa des lettres identiques aux Représentants
permanents du Cameroun et du Nigeria auprès de 1'O.N.U. Il y indiquait que les
membres du Conseil avaient pris note du communiqué publié par l'Organe centraldu
Mécanisme de l'O.U.A. et se félicitaient de la saisine de la C.I.J. ; qu'ils
accueillaient avec satisfaction l'initiative prise par le Président en exercice de
l'O.U.A. et les autres efforts de médiation ; et qu'ils demandaient au Secrétaire
générad l es Nations Unies, agissanten consultation avec celuide l'O.U.A., de suivre
la situationet d'offrir ses bonsoffices (AnnexeM.C. 359).
1.26 Ces efforts étaient condamnés à rester sans lendemain et le
sont en effet restésjusqu'à la date de rédactiondu présentMémoire,du fait du refus
de coopérationdu Nigeria. Tout en proclamantpro fom leur volonté dedialogue,
les autorités nigérianes entendent eneffet confiner celui-ci à un cadre purement
bilatéral qui, pour maintes raisons (v. infrp aar.1.32), n'est, à l'évidence, pas
susceptible de permettre la solution du litige. Cette attitude dilatoire d'obstruction
s'est manifestée tantàl'O.U.A. qu'auxNationsUnies.
1.27 La lettre adresséele 4 mars 1994par le Chargéd'affaires
a.i. du Nigeria auprès des Nations Unies au Présidentdu Conseil de sécuritéest
particulièrement significativà cet égard :aprèsavoir donnéla version nigériane des
événementset esquisséune réponse à l'argumentation camerounaise (v. infrp aar.
1.65) il conclut:
" ... mon gouvernement prépare activement les
pourparlers au sommetque leschefs d'Etatdes deux pays
se sont engagésàentamer. "
En conséquence, mon gouvernement espère que le
Conseil de sécurité encouragera cette initiative de
règlement bilatéral du différend, conformément à
l'Article 33 i) de la Charte des Nations Unies. Mon
gouvernementespèreégalementque le Conseil exhortera
toutes les tierces parties à éviter toute action qui
risquerait d'internationaliser ou d'aggraver la situation"
(AnnexeM.C. 344).
Ceci constitue un refusàpeine voilé desoffres intemationales de bons offices et de
médiation.
1.28 De même, lors de la réunion de la première session
extraordinaire de l'Organe central de l'O.U.A., le 11 mars 1994, la représentante
nigérianeaccusa leCameroun d'avoir internationaliséle conflit et exprima le souhait
que cet Organe se désaisisse du dossier au prétexte que des négociationsdirectes
permettraient "de débloquerla situation" (AnnexeM.C. 349).
1.29 Sur ce point en tout cas, la positionnigériane témoigne d'une
belle constance puisque, dès le 21 février, le Ministre nigérian des Affaires
étrangères,M.BABA GANA KINGIBE, avait, selonune dépêche dle 'Agence France
Presse, "déploréla décisionannoncéedimanche par Yaoundéde porter la querelle
frontalière entreles deux pays devant le Conseil de Sécurides Nations Unies et la
Cour internationale de Justice dLa Haye (...)Aucun de ces organismes ne saurait
imposer au Nigeria une solution contraire à sa volonté" a-t-il conclu(Annexe M.C.
344). Et la note du 20 avril 1994 adresséepar l'Ambassadede ce pays au Royaume-
Uni au Foreign Office et à l'ensemble des missions diplomatiques accréditées à
Londres, qui fait le point sur la position nigériane(v. infra par. 1.65) se termine par
un plaidoyer en faveur d'un règlement exclusivement bilatéral "even though Our
Cameroonian brothers have attempted to internationalise the conflict by inviting
French troops and pressing its illegitimate claim over Nigeria'sBakassi Peninsula
(Idombi) through the U.N. and the Intemational Court of Justice", ce qui serait la
marque d'une "confrontationalposture by Cameroon" (AnnexeM.C. 341).
1.30 Cette tactique du Nigeria est,à vrai dire, en tous points
semblable à celle de ce pays depuis les trente années quedure le conflit frontalier ~
l
camerouno-nigérian : refus de toute interventiond'un tie;acceptation apparente de
négociations diplomatiquesbilatérales; manoeuvres dilatoires pour en retarder au
maximum l'aboutissement ; remise en cause des résultats acquis aprsuelques mois
ou quelques années.1.31 Sans qu'il soit nécessaire dedresser un panorama exhaustif
de ces faux-fuyants, on peut en donner quelquesexemples :
l'un desplus caractéristiquesa trait auxnégociationsrelativeà la délimitation
i)
de la frontière maritime entre les deux pays, dont le détail sera exposé
ultérieurement(v. chapitre 2, section4 et chapitre 5, section 1). Il suffit à ce
stade de souligner qu'elles s'étalèrent surinq ans et furent particulièrement
difficiles mais que, de compromis en compromis, le Cameroun accepta une
ligne fort désavantageuse pourlui, entérinée par la "Déclarationde Maroua"
signéele ler juin 1975 par les Chefs d'Etat camerounais et nigérian. On
comprend dèslors la surprise des autorités camerounaises lorsque, lors de la
réunion de Yaoundé des 27-30 août 1991, le Major général Ike S.O.
NWACHUKWU, Ministre des Affaires extérieures duNigeria, a souligné que
cette Déclaration,qui constitue cependant un accord international conclu au
plus haut niveauentre les deux Etats,
"n'a pas été ratifiée par le Nigeria et que, par
conséquent, elle ne constitue pas pour [la partie
nigériane]un instxumentlégal" (AnnexeM.C. 312, p.3).
De même,à la suite des graves incidentsqui eurent lieu en mai 1981 dans la
ii)
péninsulede Bakassi (Annexe M.C. 380, pp.111-113), l'attitude agressive du
Nigeria a contrastéavec les gestes d'apaisement du Cameroun :alors que le
premier saisissait l'O.U.A. mais refusait la constitution d'une commissionde
médiation constituée par cinq Etatsafricains (Annexes M.C. 261 et 262), le
Cameroun se refusait à toute déclaration publique susceptibled'entraver la
recherche d'une solution pacifique, manifestait sonentière disponibilité pour
participerà tout mode de règlementqui pourrait êtreenvisagéet adoptait une
position conciliante, alors même que sa souveraineté territoriale était
gravement violée. La lettre adressée dèsle 23 mai 1981 par le Président
AHIDJO au Présidentnigérian SHAGARI,en porte clairement témoignage ;le
Chef de 1'Etat camerounais y fait part une nouvelle fois de "l'entière
disponibilité" de son Gouvemement à procéder, avec le Gouvemement
nigérian
"à des consultations régulières destinée s promouvoir
des relations pacifiques et de bon voisinage entre nos
Populations respectives, dans le respect des frontières
légalement établieset dans l'esprit de la fraternité
africaine" (AnnexeM.C. 259; v. aussi les AnnexesM.C.
261, 262 et 380).iii) Un autre exempletrèssignificatif des atermoiementsnigérians estfoumi par le
manque d'empressement du Nigeria à se rallier aux conclusionsdes experts de
la C.B.L.T. en ce qui conceme la frontièrelacustre entre les deux Etatsdans
le Lac Tchad (v.infr ch,apitre 2, section3 et chapitre 3, sectio:2bien que
les experts nigérianseussent donnéleur accord au tracéretenu unanimement
par la Commission chargéede l'abomement de la frontière, ils ont, dans un
premier temps, fait valoir diverses arguties de nature technique et juridique
pour refuser d'apposer leur signatureau bas du document pourtant signépar
les délégationdes trois autres Etats (AnnexesM.C. 310et M.C. 312)ce qui a
retardéde quatre ans la signature de cet important document (AnnexeM.C.
352). Son approbation par le Chef de 1'Etat nigériann'a pas empêché le
Nigeria de maintenir son occupation de nombreuxvillages et îles camerounais
dans la région du Lac Tchad et de procéder à de nouvelles Mitrations
(Annexes M.C. 364, 365 et 377) et de revendiquer la souveraineté surDarak
et sa région (vsupra, par.l.09).
1.32 Ces précédents,dont les exemples ci-dessus ne donnent
qu'un échantillontrès incompletet partiel, suffisentcependantà établirqu'il eût été
vain pour le Cameroun de renoncer à la saisine d'organes tiers impartiaux, et en
particulier de la Cour internationale de Justice, au profit d'une recherche
exclusivement bilatéraled'une solution au grave différendfrontalier entre les deux
pays : ils montrent qu'une solution négociéesur un plan bilatéral est hautement
improbable et que si, par impossible, il en intervenait une, le Nigeria selon toute
vraisemblance la remettrait en causeà la première occasion, procheou lointaine. Un
arrêtde la Cour mondiale mettra définitivementla République duCameroun à l'abri
de telles déconvenues.
1.33 Au demeurant, celle-ci tient à souligner que les autorités
camerounaisesn'ont, en aucune manière, refusé,parallèlement,les contactsbilatéraux
proposésavec une insistance suspectepar la partie nigériane.La seule exception a été
constituée par le refus du Président BIYA, qui s'est toujours déclarédisposé à
rencontrer le généralABACHA en dehors du Nigeria, de se rendre à Abuja pour y
rencontrer le Chef de 1'Etatnigérian:il ne pouvaitêtrequestionde se rendre dans la
capitale de 1'Etatdont les troupes occupaientune portion du temtoire national et qui
se refusait- et se refuse toujour- à en ordonner le retrait (Annexe M.C. 348). Au
surplus, il n'est pas sans intérête relever que, démentantdans les faits l'intention
affichéedu Nigeria de réglerle différend surune base bilatérale,le Chef de 1'Etatnigériana renoncé à se rendre au Sommet prévu pour le18 juillet 1994 avec le
Présidentde la Républiquedu Cameroun sous l'égidedu Togo en faisant savoir la
veille que l'imminence du Sommet de la Communautééconomique des Etats
d'Afrique de l'Ouest rendait cette rencontre impossible (AnnexeM.C. 366) (d'autres
dépêched se presse expliquent le refus nigérianpar les troubles sociaux au Nige-ia
Annexe M.C. 367). Cet épisodeconfie, s'il en était besoin,le scepticismede la
République duCameroun quant à la volonténigérianede régler pacifiquementle
différend, fût-ce sur unebasebilatérale.
1.34 On peut du reste voir dans le refus du Nigeria de se prêter,
de bonne foi,à la recherche d'un tel règlement,la violationdu principebien établidu
droit international, tant universel qu'africain, qu'il est,comme la Courappelé,
"... indispensable de respecter dans le monde
d'aujourd'hui: celui qui veut que les parties à un
différend dont la persistance risquerait de mettre en
danger le maintien de la paix et de la sécurité
internationales, s'efforcent d'y trouver une solutionpar
des moyens pacifiques. Consacrépar l'article 33 de la
Charte des Nations Unies, qui indique d'autre part
plusieurs moyens pacifiques auxquels il estpossible de
faire appel, ce principe a égalementle caractèred'une
règle de droit international coutumier" (C.I.J., arrêtdu
27 juin 1986, affaire des Activités militaires et
paramilitaires auNicaragua et contrecelui-ci, Rec.,
p.145 -v. aussi les articles In, paragraphe4, XIX de
la Charte de l'Unitéafricaine).
Et, pour s'acquitter de cette obligation, il ne suffit pas que les Parties en litige s'y
disent disposées,il faut égalementqu'elles s'yprêtent effectivemett, en particulier,
qu'elles se comportent "detelle sorte que la négociationait un sens" (C.I.J., arrêtdu
20 février 1969, affairedu Plateau continentale la merdu nord,Rec. 1969, p.47).
La République duCameroun est au regret de constaterque tel ne paraît pas êtrel'état
d'esprit de la République fédéradeu Nigeria.
1.35 Le Cameroun est, en revanche, fermement convaincu que
l'arrêtde la Cour mettra un point fmlà un différendextrêmement préoccupand t,ont
la persistance, du fait, en particulier, de l'occupation continue de plusieursportions
du territoire camerounais par les troupes nigérianes, estde nature à menacer
gravement la paix et la sécuritéinternationales. Il tient au surplàs rappeler, en
réponse aux critiques expriméesparle Nigeria (v. supra,par.1.29) que "le recours à un règlement judiciaire des différends
juridiques,particulièrement le renvoi à la Cour
internationale de Justice, ne devrait pas être considéré
comme un acte d'inimitié entre Etats" (Déclaratide
Manille sur le règlement pacifique des différends
internationaux, résolution37/10 de l'Assembléegénérale
des Nations Unies, 15 novembre 1982, Annexe, sect.2,
par.8).
C'est dans cetesprit que la RépubliqueduCamerouna saisila Cour.
SECTION 3. LES ENJEUX DU LITIGE - UN DIFFEREND
COMPLEXE
1.36 Pour êtreunique (v. supra, pars. 1.15-1.17), le différend
soumis à la Cour n'en est pas moins complexe. Cette complexité tient aucontexte
géographique et historique dans lequel il s'est développéet cristallisé(§.1à, et
l'attitude inconséquenteet négativeadoptéepar la Partie nigériane(s;il en est
résultéun grand nombre de problèmes juridiques diversifiés, mais étroitement
imbriquéset qui sont soumis ensemblà la Cour afin d'abouàiun règlementglobal
et définitif du litige(s.3).
5 1. Le contexte~éomaohiaue et historiaue
A. - Les Parties au différend
1.37 ies Parties au différend présentent quelqsaractéristiques
communes : situéssur la côte occidentale de l'Afrique, les deux Etats sont, l'un et
l'autre, composés de régiontrès diversesau point de vue géographique, ethnique,
économiqueou climatique. A d'autres points de vue cependant, le contraste est
frappant entre l'un et l'autre.
1.38 Considéré comme le "géant del'Afriqueu, le Nigeria compte
une population d'environ 120 millions d'habitants sur un peu moins de 924.000kilomètres2. Face à son grand voisin, le Cameroun apparaît au contraire, par
comparaison, comme sous-peupléavec ses douze millions d'habitantsrépartis surun
peu plus de 475.000km2.
1.39 Au plan économique,les deux Etats sont dotésde ressources
naturelles non négligeables, et l'un et l'autre exploitent des gisements
d'hydrocarbures. Cependant, alorsque le Cameroun exploite cette richesse,d'ailleurs
limitée(environ55 millions de tonnes de réserves prouvéeset une production annuelle
qui avoisine en moyenne 8 millions de tonnes depuisune dizaine d'années) avec
prudence, le Nigeria, profitant de ses quelque 2.500 millions de tonnesde réserves,
pratique depuis plus d'un quart de siècle une politiquede développement presque
entièrementfondéesur le pétroleet est aujourd'hui gravement touché par la crise
économique.Malgré uneproduction supérieure à 100 millions de tonnesde brut par
an, les revenus du pays ont considérablement chuté, tandis qule a baisse des revenus
pétroliers affecte drastiquement les réserves de change (dont ils fournissent
traditionnellement plus de 90 %) et le budget (auquel ils contribuent pour environ
80 %).
1.40 Un point important mérited'êtresouligné : bien que le
Cameroun compte plusieurs bassins sédimentaires susceptibles de recéler des
hydrocarbures, le seul bassin actuellement producteur debrut, d'une superficie de
7.000 kilomètres carrés environ, se trouveau large de la péninsulede Bakassi, objet
des convoitises du Nigeria ; l'un des principaux champs de pétrole mis en
exploitation dans cette région (le champde BiboundiIAdanga)est d'ailleurs situé de
part et d'autre de la frontièremaritime entre les deuxpays. Il n'estpas sans intérêdte
noter en outre que des traces d'hydrocarbures ont égalementétédécelées dans
l'extrêmenord du pays, jusque dansle Lac Tchad lui-même. La corrélation entrela
localisation de ces gisements, actuels oupotentiels, et celle des incursions nigérianes
lesplus graves, est trop étroitepour être fortuite.
1.41 Au surplus, d'autres éléments économiques accentuent sans
aucun doute l'attrait queprésentent cesrégionsaux yeux du Nigeria. Les eaux qui
baignent la péninsule deBakassi sont extrêmementpoissonneuses et la pêche y est
l'activitéprincipale des populations. Quant au Lac Tchad, ilest en voie d'assèchement
1 Des accumulationset des indicesd'hydrocarburesont égait tmis en évidence dans le
bassin de Douaia/Kribi-Campo, égaiement en partie off-sho;emais la production
commercialen'y estpas encore économiquement réalisable.rapideet les eaux dulac sesont pratiquementretiréesdu Nigeria, dont les populations
setrouvent, de ce fait, privées deleursressources halieutiques traditionnelles.
B. - Lafrontièrecamerouno-nigériane
1.42 Longue d'environ 1650 kilomètres,la frontière terrestre
entre le Cameroun et le Nigeria résulte des vicissitudes de l'histoire coloniale
mouvementée dela région qui a opposé l'Allemagne, la Grande-Bretagneet la
France. La relation préciseen sera faite dans les chapitres suivants du présent
Mémoire.Il suffità ce staded'enrappeler lestrès grandeslignes.
1.43 Celles-cisuffisent montrer que,commela quasi-totalité des
frontières africaines, celle qui sépare le Cameroud nu Nigeria a été"drawn by
Europeans for European convenience" (J.R.V. PRESCOTT, "TheEvolution of
Nigeria's Boundaries",The Nieerian Geogra~hicalJournal 1958-1959,nol, p.101 -
AnnexeM.C. 214).
1.44 A la findu dix-neuvième sièclel,a Grande-Bretagne avait
établison emprisesur la totalité des côtes l'actuel Nigeria,tandis quele 15juillet
1884, l'Allemagne proclamait son"protectorat" sur le "Kamerun" qu'elle allait
administreren réalitécommeune colonie pure et simplejusqu'à la première guerre
mondiale. La conférence de Berlinreconnut cestitres coloniauxen 1885,et, la même
année, par l'arrangemendte Londresd'avril-juin 1885,les deux Etatsreconnaissaient
réciproquement leursphèred'influencerespective dansla région (Annexe M.C. 2).
La limite entrecelles-ci étafiée, dans sa partie méridionalàla rive droite du Rio
delRey, dont lesPartiesconstatèrent rapidemenqtu'il ne s'agissaitpas d'une rivi;re
ceci les conduisià fixer provisoirementla ligne de démarcationen fonctiond'une
ligne droite partant du même Rio del Rey mais considéré, à juste titre cette fois,
comme une simple échancrurede la côte et rejoignant la délimitation précédenltee
long de la Cross Riverjusqu'à un pointmarqué"Rapids" sur la carte de l'Amirauté
britannique(Accordde Berlindu ler juillet 1890 -AnnexeM.C. 10). Cette ligne fut
prolongée parun nouvel accord du15 novembre 1893jusqu'au Lac Tchad (Annexe
M.C. 15). à son tour remplacépar un traitéanglo-allemandplus précis conclule 19
mars 1906(AnnexeM.C. 37).
1.45 A la suitede négociations rendues difficipsar les exigences allemandes d'obtenir la garantie de la libertéde navigatsur la Cross River et qui
s'étirèrent sur quatreans,l'Allemagne et la Grande-Bretagneconclurent, en 1913,
deux traités importantsrespectivementle 11 mars et le 12 avr;lle premier, concluà
Londres est relatifà "l'établissement dla frontièreentre le Nigeria et le Cameroun,
de Yola à la mer" et couvre de ce fait 1.084 kilomètresde frontière (AnnexeM.C.
82) ; le second, signéà Obokum par les représentants allemand (H. DETZNER) et
britannique (W.V. NUGENT) est à la fois plus préci- il s'agit d'un accord de
démarcation - et moins completpuisqu'il ne concerne que la section allant de Yola à
la Cross River (AnnexeM.C. 86).
1.46 Ainsi,à la veillede la premièreguerre mondiale, la frontière
entre la colonie britannique du Nigeria (Colony and Protectorate of Nigeria) et le
"protectorat" allemand du Camerounse trouvait intégralementdélimitée, et avait été
abornéesur environ la moitié desa longueur.
1.47 Après l'éclatement des hostilitél s, France et la Grande-
Bretagne s'emparèrentdu Camerounallemanden 1915et, l'annéesuivante, se mirent
d'accord sur un partage provisoire de part et d'autre d'une ligne dite
"PICOTISTRACHEY", adoptée à Londres le 23 février 1916 (v. carte 34) et
confimée par un échange delettres des 3-4 mars 1916 (Annexe M.C.96). Sur cette
base les Britanniques et les Français négocièrent untracé définitif après que
l'Allemagneeut renoncé à toutes ses possessions colonialespar le Traitéde Versailles
du 10 juillet 1919. Il résulta deces négociationsla "DéclarationMILNERISIMON"
du 10 juillet 1919 (Annexe M.C. 107) qui fixait la frontière entre la partie du
Cameroun dont le mandat fut confié à la France par la Société des Nationsle 20
juillet 1922et celle qui revinta Grande-Bretagne.
1.48 Cette ligneest demeuréeinchangéejusqu'àla fin des tutelles
française et britannique (qui avaient pris la suite des mandats en 1946). Elle fut
cependant précisée par 1'Echangede notes franco-anglais du 9 janvier1931 (Annexe
M.C. 157), approuvant la DéclarationTHOMSONIMARCHAND qui précisait la
délimitationde la frontièredu point triple sur le Lac Tchad à la mer (Annexe M.C.
157).
1.49 Telle était la situation frontalière lorsque s'est posée la
question de la décolonisationdu Nigeria, qui accédaàl'indépendancele ler octobre
1960 dans les frontières quiétaient les sienneà cette date et qu'avaient consacrées
plusieurs Orders in Council britanniques, notamment en 1922 et 1946, et la"Proclamation" nigériane de 1954, et du Cameroun sous tutelle française et
britannique.
1.50 L'accession à l'indépendancedu Camerounfrançais ne posait
pas de problèmes particuliers. Elle eut lieu le ler janvier 1960, dans le cadre des
frontièreshéritéesde la colonisation.
1.51 La décolonisation du Cameroun britannique posait des
problèmes plus difficiles. Avec l'autorisation de la Société des Nations puis des
Nations Unies, il avait été administré comme une partie du Nigeria, mais en
conservant un statut international distinct sous le contrôle successif de ces deux
organisations. Au surplus, du point de vue administratif, les Britanniques avaient
divisé le territoireen deux zones, administréel'une, le Cameroun septentrional, avec
la province septentrionale du Nigeria et l'autre, le Cameroun méridional, avec la
province orientale. De plus, à la suite de la Proclamation précitéede 1954, le
Cameroun méridional britannique était devenu uneentité distincte au sein de la
Fédération nigériane.
1.52 Conformément aux directives des Nations Unies, le
Royaume-Uni organisa des scrutins d'autodéterminationséparés dans les deux parties
du Cameroun relevant de sa tutelle. A la suite de deux referendumsorganisésen 1959
et en 1961, les populations du Cameroun septentrional se prononcèrenten faveur du
rattachement au ~i~eria'. Au contraire, à la forte majorité de 233.571 voix contre
97.741, le Cameroun méridional choisitd'unir son destin à la Républiquedu
Cameroun.
1.53 Conformément au principe de l'uti possideris juris, le
rattachement des deux parties de l'ancien Cameroun britannique au Nigeria d'une
part, au Cameroun d'autre part, s'est effectué dans le cadre des frontièrescoloniales
existant au moment de la décolonisationsoit respectivement le ler juin et le ler
octobre 1961.
1.54 La situationfrontalièrequi en est résultéest la suivant:
2
Le Camerouna protesté contrlea manièredont le Royaume-Uni s'était acqutteésa
puissanceadministraet introduitunerequête conre paysdevantla Courqui, parson
arrêdtu 2 décembre1963 a "dit qu'ellene peut StaNerau fond sur la demande dela
Républiqufeédéraleu Cameroun"(Rec. 1963, p.38). La Républieu Camerountientà
préciser expressémqut'ellea accecettedécisionet n'entendpasla remettreen càuse
l'occasion delapréseeffaire.- du point triple sur le Lac Tchad, jusqu'à l'extrémité méridionale du Cameroun
septentrional, la frontière camerouno-nigériane suitla ligne f~éepar la Déclaration
franco-britannique de 1919 et précisée par la DéclarationTHOMSONIMARCHAND
confirmée par1'Echangede lettres du 9janvier 1931(v. supra pars.1.47-1.48) ;
- elle suit ensuite la limite administrativequi séparait leCameroun septentrional du
Cameroun méridional britannique et qui résulte de diverses décisions internes
britanniques (v.supra par. 1.51) ;
- pour rejoindre enfin, jusqu'à lamer, le tracérésultantdes accords anglo-allemands
des 11mars et 12avril 1913(v. supra par.1.45).
1.55 Cette délimitation n'aétémodifiéepar aucunaccord entre les
deux pays depuis leur indépendance. La frontière enrésultant s'impose donc à eux de
façonjuridiquement obligatoire.
1.56 Il n'en est pas allé de mêmes'agissant de leur frontière
maritime.
1.57 Celle-ci n'avait fait l'objet que d'une délimitation
embryonnaire par le Traitéanglo-allemand du 11 mars 1913, sur une distancede trois
mille marins dans l'estuaire de I'Akwayafé(AnnexeM.C. 82, articles XXi et XXiI).
Assez rapidement aprèsles indépendances,les deux Etats évoquèrent la question du
tracé précisde cette ligne et de sa prolongation, mais les discussions actives ne
commencèrent réellementqu'en 1970, sur la base des Conventionsde Genèvesur le
droit de la mer auxquelles lesdeux Etats étaientparties. Le détail deces négociations
sera relaté ci-aprèsdans les chapitres 2 (section 4) et 5 (section 2) du présent
Mémoire.Il suffit de dire ici qu'elles aboutirent,le ler juin 1975àla Déclaration de
Maroua, signéepar le Présidentde la Républiquedu Camerounet le Chef de 1'Etatdu
Nigeria, par laquelle les deuxEtats se sont mis d'accord surune ligne tracéejusqu'à
un point G situé à environ 17 milles marins du point d'aboutissement dela frontière
terrestre. Cette ligne conventionnelle aété remise encause par la partie nigérianeen
1991 (v. supra, par.l.31).
1.58 Au-delà du point G, la frontière n'a, à ce jour, pu faire
l'objet d'un accord, et conformément aux règles lesmieux établies du droit
contemporain de la délimitationmaritime, consacréespar la Convention des Nations
Unies sur le droit de la mer à laquelle le Cameroun et le Nigeria sont parties, cette
délimitation doit aboutir à une solution équitable, tenant compte de toutes lescirconstancespertinentes.
1.59 A cet égard, lasituation géographique respectivedes deux
Etats revêtune grande importance. L'un et l'autre sont riverains du vaste Golfe de
Gu- ;mais, alors que le Nigeriabénéficie d'un large accèsà la mer et du fait de la
configuration largement convexe de sa côte, le Cameroun, au contraire est
doublement désavantagép ,ar la concavité desa côte- il est situéau fond de la baie du
Biafra - et la présence,à quelques milles, de la grande île de Bioko, placée sousla
juridiction de la Guinée équatorialeet, plus au large, de 1'Etatarchipel de Sao Tome
et Principe.
1.60 Au demeurant, en dépitde l'indétemiinationpartielle de la
frontièremaritime entre les deux pays, leurfrontière communeest, sans aucun doute,
l'une des plus précisément déterminé d'Afrique. En ce qui concerne son secteur
lacustre et terrestre elle a fait l'objet de traités internationauxet de descriptions
administratives exceptionnellementprécise,qui couvrent l'intégralité de sa longueur ;
au surplus, une partie non négligeable de cette frontière a fait l'objet d'une
démarcation sur le terrain. Et la délimitation maritime elle-mêmep ,our partielle
qu'elle soit, constitueun exemple - dont il faut souligner le caractère exceptionnel,
particulièrement sur le continentafricain-
"of a maritime boundary delimitationby an agreement in
which the two parties attempted to achieve equitable
results by addressing specificcontroversies arising from
resource, geographical, and geomorphological
considerations" (Andronico O. ADEDE, "Cameroun-
Nigeria" in Jonathan 1. CHARNEY and Lewis M.
ALEXANDER, InternationalMaritime Boundaries, vol.
1,Nijhoff, Dordrecht, 1993, p.843).
8 2. Le comoortement de la Partie nigériane
1.61 De nombreux facteurs expliquent, sans nullement les
justifier, les visées expansionnistesnigérianeqsui se traduisent par la remise en cause,
à la fois "sur le terrain" et en paroles, des frontièreshéride la colonisation:
- la très grandeinstabilité politique du pays,
- la forte pression démographique et le contraste frappant de densitéde la population
entre les deux Etats (v. supra, par.1.38),- la grave crise économique que subitle Nigeria depuis la frn des années1980 (v.
supra, par. 1.39),
- l'attrait des ressources naturelles, surtouthalieutiqueset pétrolières,particulièrement
dans la régiondu Lac Tchad et au large de la péninsulede Bakassi (v. supra pars.
1.40-1.41).
- la présence depopulations nigérianesdans plusieurs zones frontalièreset parfois
mêmenettement à l'intérieurdu pays, résultantde la politique traditionnellement
accueillante pratiquée parle Cameroun,
- la confusion qu'a pu créer dans l'esprit de certaines populations de l'ancien
Cameroun méridional britannique l'administrationdu territoire depuis le Nigeria
durant la périodecoloniale (v. supra, par. 1.51),
- comme partout ailleurs en Afrique, le caractère passablement arbitraire des
frontières héritées dela colonisation, dont le tracé résultebien davantage de
l'équilibre desforces entre les puissances colonialesque de la prise en compte des
réalités humaineest géographiqueslocales(v. supra, pars. 1.44-1.43, et
- la division qui en est résultentre des groupeshumainstraditionnellementunis par
des liens ethniques, culturels, religieux, sociauxou politiques.
1.62 Encore convient-il de ne pas exagérer l'importancede ce
dernier facteur, d'ailleurs dépourvu de toute pertinencedès lors qu'il s'agit de
déterminer les frontières existant au moment de la décolonisationet non de les
redessiner idéalement surla base de la situation précoloniale.Telle est la fonction
même duprincipe fondamentalde I'utipossiderisjuris :
"C'est le besoin vital de stabilitépour survivre, se
développer et consolider progressivement leur
indépendance danstous les domaines qui a amené les
Etats africains à consentir au respect des frontières
coloniales, età en tenir compte dans l'interprétationdu
principe de l'autodéterminationdes peuples" (C.I.J.,
arrêt du 22 décembre 1986, Affaire du D13érend
frontalier, Rec. 1986,p.567).
1.63 Au demeurant, dans le cas présent, deux éléments peuvent
être relevés. D'une partl,es colonisateurs, qu'ilssoientallemand, anglaisou français,
n'ont pas étéaussi totalement indifférentsaux limites socio-politiqueset ethniques
traditionnelles qu'ils ont pu'êtredans d'autresparties de l'Afrique, et les frontièresinitialement envisagées ont,dans certains cas, étéréaménagée psour tenir compte de
ces facteurs. D'autre part et surtout, dans certains secteurs, l'imbrication ethnique
était- et demeure - telle qu'elle défietoute tentative de "démarcation ethnique". Ceci
est tout particulièrementvraidans le sud, y compris dans le secteur de la péninsulede
Bakassi ; comme on l'a écrit :
" ..The complexityof linguistic patternand the diversity
of origin are perhaps without parallel in any African
temtory. In a situation such as this, any question of
ethnic demarcation is both difficult and meaningless"
(J.C. ANENE, The International Boundariesof Nieeria
1885-1960, Ibadan History Series, Longman, Londres,
1970,p.59).
1.64
Pour l'essentiel, la thèsenigériane, tellequ'elle a étérendue
publique à plusieurs reprises, semble néanmoinsreposer sur des considérations
ethniques, qui paraissentprima facie erronées en fait et sont,en tout cas, dépourvues
de toute pertinence au point devuejuridique.
1.65 Telle est, très clairement, l'orientationde l'argumentation
mise en avant par le Nigeria à l'appui de l'invasion dela péninsulede Bakassi en
1993-1994. Ainsi, dans sa lettre précitée(v. supra par.1.27) du 4 mars 1994 au
Présidentdu Conseil de sécuritél,e Chargé d'affaires nigérianpar intérim écriva :it
"...la presqu'îlede Bakassia une populationcomposée à
plus de 90 % de Nigérians, appartenant auxgroupes
Ibidio et Efk. Ces populations nigérianes ont
périodiquementété les victimesd'atrocitéscommises par
les gendarmeset les soldats camerounais.C'est ainsi que
6 incidents graves onteu lieu en 1991, 6 en 1992 et 13
en 1993"(AnnexeM.C. 344).
La même thèse a été développée ep trécisée dans l'importanteNote que l'Ambassade
du Nigeria à Londres a fait parvenir le 20 avril 1994 au Foreign Office et aux
Missions diplomatiques accréditées au Royaume-Uni, quciontient, à la connaissance
de la République du Cameroun,l'exposé le plus complet et le plus officiel de
l'argumentation nigériane(Annexe M.C. 341). Il y est exposéavec force détailsla
situationethnique supposée aux débutd se la colonisationet affirmé:
"Itis therefore inconceivablethat Cameroon should lay
claim to Bakassi with90 %Efk and Efut population that
had remainedand is administered as Nigerianterritory" ;
et expliquéque : "This is because the entire area, Bakassi Peninsula
(Idombi) included, has historically been under the
jurisdiction of the Obongof Calabar.. ."
Ainsi,
"la condamnation de la colonisation qui serait venue
diviser artificiellementles ~o~ulationshabitant le long de
la frontièrecommune[et] . A -
"la référence constante à l'empire de Yola qui couvrirait
l'espace allantde Yola à Ngaoundéré,Tibati, Maroua,
Guider, Bogo"
ont d'ailleurs étédes leitmotivsdes participants nigériansau Séminaire-ateliersur la
coopération transfrontalièreCameroun-Nigeriaqui s'est tenu à Yola au mois de mai
1992 (AnnexeM.C.319). Ceci tend àmontrer quel'argument "ethniqueprécolonial",
loin d'êtrelimité à la péninsulede Bakassi, constitue au moins l'un des fondements
majeurs de la contestationnigérianede l'ensemble dela frontière.
1.66 Dans les faits, la "protection" des "populations nigérianes"
apparaît du reste comme le prétextele plus fréquemment invoqué pour "justifier" les
incursions des forces armées oude police du Nigeria en temtoire camerounais (outre
la lettre précitée, par..65, du Chargé d'affaires p.i. de la Mission permanente du
Nigeria auprès de 1'O.N.U. et la note précitée,ibid, de l'Ambassade nigériane à
Londres, v.par exemple, l'AnnexeM.C. 257).
1.67 Encore la présence de ces prétendues "populations
nigérianes" est-elle loin d'être toujours ancienne. Comme l'a fait remarquer le
Ministèredes Relations extérieurescamerounais dansla note de protestation adressée
à l'Ambassadedu Nigeria à Yaoundéle ll'avril 1994,
"les autorités camerounaises ont constaté que, par le
passé, l'occupation militaire nigériane de temtoires
camerounais suivait généralement l'occupation illégale de
certaines parties de ces temtoires par des citoyens
nigérians. L'occupationmilitaire deDarak et de certaines
parties de la péninsulede Bakassien sont des exemples"
(Annexe -traductiondu Greffe dela Cour).
1.68 La "séquence - type" des incidentsest la suivante:
- ler temps :infiltrationsde "civils"nigérians;
- 2ème temps :intervention des forces militaires ou de police nigérianes,supposéesles "protéger" contrede "mauvaistraitements" dontils auraientété l'objet; et
- 3ème temps : établissementd'une administration civile et multiplication des
manifestationsextérieuresde la "souveraineté".
1.69 ïes exemplesen sontnombreux :
- construction d'écoles (à Jabane dans la péninsule deBakassi en 1992 ou dans la
subdivision de Fm-Awa, dans laprovince du nord-ouest,en 1994 - Annexes M.C.
361 et 370) ;
- établissementde postes de police ou de bases militaires comme à Kontcha, dans le
départementde Faro et Déo(Annexe M.C. 346) ou, à nouveau à Jabane (Annexe
M.C. 331);
- lever solennel du drapeau nigérianen remplacement du drapeau camerounais, par
exemple à Jabane (Annexes M.C. 306 et M.C. 308) ou dans les îlescamerounaisesdu
Lac Tchad (AnnexeM.C. 282) ;
le tout en territoire camerounaiset accompagné parfois d'actesde provocation comme
ces plaques trouvées égalemen t Jabane au mois de mai 1993et portant l'inscription:
"Welcome to Aba Clan Akpabuyo Local Govemment Area - Cross River State -
Federal Republicof Nigeria" (AnnexeM.C. 325)
1.70 Ces voies de fait ne sauraient, bien évidemmententraîner un
quelconquechangementdans l'appartenanceterritorialedes régionsfrontalières qui en
sont l'objet. 11s'agit purement et simplementdes violations de la souveraineté etde
l'intégritétemtoriales du Cameroun et, quand bien mêmeil en résulterait une
occupation durable, celle-ci ne saurait prévaloirsur les titres documentaires solides
dont il peut se prévaloirconformémentau principe du respectdes frontièreshéritées
de la colonisation. Comme l'a fait remarquer la Chambrede la Cour dans l'affaire du
Dtfférend frontalier en 1986, l'utipossiderisjuris
"...est constituéde différents élément s.epremier, mis
en relief par le génitif latinjuris, accorde au titre
juridique la prééminencesur la possession effective
comme base de la souveraineté"(Arrêtdu 22 décembre
1986,Rec. 1986,p.566).
1.71 Tous ces incidents, qui feront l'objet d'un exposé plus
détaillé dansle chapitre 6 du présent Mémoire s'inscrivent,à l'évidencedans un planconcertéde remise en cause systématiquede la frontière, inspiré d'abord par les
convoitises nigérianes surla péninsule deBakassi ; les discussions sur les moyensà
utiliser pour s'approprier celle-ci se poursuivent au Nigeria depuis de nombreuses
années commeen témoignepar exemple une étude détaillé ed'ailleurs entièrement
favorable à la thèse camerounaise -effectuéepar l'AttorneyGeneral (Ministre de la
Justice) d'alors, Teslirn OlawaleELIAS, futur Président dela Cour, à la demande du
Ministèredes Affaires étrangèresen 1972(AnnexeM.C. 350).
1.72 La République du Cameroun ignore dans quelles
circonstances cetteconsultation a étédonnée.En revanche, au milieu des années
1980, le Gouvernement militaire fédérac lréaun "Groupe de travail spécialsur le
Tchad et le Cameroun" qui réunitune vastedocumentationsur la frontièremaritime et
terrestre en vue d'étudierles moyens de la remettre en question. Il semble qu'à cette
occasion deux lignes s'opposèrent.D'un côté leMinistère dela Justice et certains
experts estimèrent, conformément à l'opinion du Juge ELIAS de 1972 (v. supra,
par.l.71), sur la base de raisonnementsfortement argumentés queles titres juridiques
du Cameroun étaient incontestables et que le Nigeria ne pourrait acquérir la
souverainetésur la péninsulede Bakassi et la zone maritime que la Déclarationde
Maroua reconnaissait au Cameroun quepar un traitéet à condition que celui-ci soit
dédommagé pour sa "magnanimité"(v. les Annexes M.C. 275 et M.C. 279). De
l'autre côté, le Directeurdes Renseignementsmilitaires, appuyépar d'autres experts,
plaidait pour une remise en cause des frontièresexistanteset, notammentde "l'odieux
accord de 1913" (Annexe M.C. 276, p.4) et de l'Accord de Maroua de 1975 en
avançant des arguments àla fois juridiques et non juridiques et envisageantune large
palette de "solutions", sans exclure le recoursà la guerre "en tous cas en dernier
ressort"(ibi d.11 ).
1.73 C'est, àl'évidence, cedernier point de vue qui a triomphéet
qui inspire l'actiondes autorités nigériane,ui tententdejustifier le fait accompli sur
le terrain par l'usage de la force par des argutiesjuridiquesqui ne peuventemporter la
conviction :
- arguments tirésde considérations ethniquesou historiques (v. supra, pars. 1.65 -
1.67),
- contestation de la valeur juridique des accords germano-britanniquesde 1913 (v.
not. les AnnexesM.C. 341, 344et 374),- et de la validité du referendumde 1961(AnnexeM.C. 341) ;etc.
- remise en cause de la Déclarationde Maroua(ibid. et AnnexeM.C. 358).
1.74 De l'avis de la République du Cameroun, il n'est pas
opportun de réfuter cesallégationsen tant que telles, le simple exposédes faits suffit
à en établir l'inconsistancejuridique.
SECTION 4. PLAN DU MEMOIRE
1.75 Le litige soumisà la Cour porte sur un grand nombre de
problèmes juridiques diversifiés mais étroitement imbriquéset qui doivent être
tranchésensemble afin d'aboutir àun règlement globalet définitifdu différend.
1.76 Celui-ci comportedeux branches. 11se présente, d'une part,
comme un confit frontalier, dont le règlementse traduira par la confimation de la
délimitationde la frontière entre les deux pays; il appartienà cet égard à la Cour
"d'arrêterune solution stable et définitive"(C.I.J., arrètdu 15juin 1962, Affaire du
Temple de PréahVihéar,Rec. 1962, p.34) compromise par le comportement du
Nigeria. La saisine de la Cour constitue d'autre part une action en responsabilité,
puisqu'elle est appeléeà se prononcer sur lesfaits intemationalementillicites commis
par le Nigeria - qui ont constituéla manifestation sur le terrain de son refus des
frontièresexistantes- et sur la réparationdes préjudicesqui en sont résultéspour le
Cameroun.
1.77 Quant au différendfrontalier lui-même,il se décompose à
son tour en deux litiges complémentaires mais distinct;l'un porte sur la délimitation
de la frontière maritime, l'autre surla frontière terrestre, les différentssegments de
l'une comme de l'autre (v. supra pars. 1.54 et 1.57 - 1.58) posant à leur tour des
problèmesjuridiques distincts.
1.78 Afin de simplifier autantque faire se peut la présentationde
son argumentation, la République du Cameroun l'organiseraselon le plan suivant:
- une première partie présenterala frontière camerouno-nigéria neelle comportera
cinq chapitresportant respectivement sur la présentationgénéralede la frontièreet, plus particulièrementsur sa
délimitation conventionnelle (chapitre 2),
. la confimation destitresconventionnels(chapitre 3),
le tracéde la frontièreterrestre(chapitre4) ;
. le tracéde la frontièremaritime(chapitre5) ;
- dans une seconde partie seront abordé les problèmes lié àsla responsabilité
intemutionaledu Nigeria ; les deux chapitres qui la composentseront consacrés à
l'étude
desfaits internationalementillicitesattribuablesau Nigeria(chapitre 6) et
des conséquences qui en découlent (chapitre 7)
Un chapitre8 présenteraune conclusion récapitulative. lère PART 1E
LA FRONTIERE
CAMEROUN0 -NIGERIANEPRESENTATIONGENERALEDE LAFRONTIERE
LADELIMITATION CONVENTIONNELLESECTION 1. INTRODUCTION
2.01 Contrairement à ce qui s'est produit dans de nombreuses
parties de l'Afrique, la frontière entre le Cameroun et le Nigeria a étédéfinie,pour
l'essentiel, par des instruments conventionnels précisconclus entre les puissances
coloniales concernées,l'Allemagne et la Grande-Bretagne dansun premier temps,
cette dernièreet la France dans un second temps. Seul un bref tronçonde la frontière
terrestre entre les deux pays - celle qui séparaitle Cameroun septentrional du
Cameroun méridionalsous mandat puissous tutellebritannique - a été défini par des
décisions unilatéralesde la Puissance administrante. Mais, dans tous les cas,ces
délimitationsd'une part, ont fait l'objet d'approbations internationaleIaSociété
des Nations d'abord, par les Nations Unies ensuite, et, d'autre part, ont été
confiées et complétéespar des accords conclusdirectemententre le Camerounet le
Nigeria après leurindépendance.
2.02 11en va ainsi tout particulièrement dela frontièrelacustre sur
le Lac Tchad et de la frontièremaritime entre les deuxEtats, étantentendu cependant
que le tracéde cette dernièren'a pu faire l'objet que d'accords partiels quin'opèrent
pas une délimitationcomplètedes zones maritimesrelevant delajuridiction respective
du Camerounet du Nigeria.
2.03 Dans le présent chapitre la République du Cameroun
procédera à une présentation généraldee la frontière entrele Camerounet le Nigeria
en insistant tout particulièrement surles instrumentsconventionnelsqui l'ont f~éeet
sur l'évolution de cetracé conventionnel.A cette fin, elle analysera successivementla
délimitationde la frontière terrestre (section 2), la confirmation de la frontière
lacustre dans le cadre de la Commissiondu Bassindu Lac Tchad(C.B.L.T.) (section
3) et la fixation conventionnellepartiellede la frontièremaritime(section4).SECTION 2. LA DELIMITATION DE LA FRONTIERE
TERRESTRE
61. Etude générale de la frontière terrestre entre le
Cameroun et le Nigeria
2.04 La présente section analyse les instrumeconventionnelset
l'évolutiondu régimefrontalier entre le Cameroun et le Nigeria en distinguant trois
phases :
a) la périodeentre 1885 et le déclenchementde la première guerre mondiale,
lorsque le Cameroun étaitun protectorat allemandet le Nigeria en partie une
colonie britannique (lacolonie de Lagos)et en partie un protectorat britannique
(le "Oil Rivers Protectorate", rebaptiséen 1893 "Niger Coast Protectorate" et
qui a intégren 1899, les acquisitionsterritoriales de la RoyalNiger Company
dans le sud, puis à nouveau rebaptiséen 1900 "Protectorate of Southem
Nigeria") ;l'ensemble des possessions britanniques dans le sud du Nigeria
s'est appelé, entre 1906 et 1914, "Colony and Protectorate of Southem
Nigeria", et a étéréuni, le ler janvier 1914, à la Colonie du Nigeria
Septentrionalpour former un temtoire britannique uniqueappelé "Colonyand
Protectorateof Nigeria";
b) la période entre 1919et 1960,lorsquele Cameroun, aprèsavoir étéoccupépar
les forces britanniqueset françaisesau cours de la Première Guerre mondiale,
fut administré par la Grande-Bretagne et la France en vertu de mandats
octroyéspar la Sociétédes Nations età partir de 1946, en vertu d'accords de
tutelle approuvéspar leConseil de Tutelle des Nations Uni;s
la période débutanetn 1960, lorsque le Cameroun et le Nigeria accédèrentà
c)
1'indépendance.
2.05 Pendant les deux premières périodes, desaccords ont été
conclus entre les puissancesalors habilitéeseprésenterrespectivementle Cameroun
et le Nigeria au sein de la communautéinternationale, qui visaient à définir,à
délimiter et à aborner ce qui est maintenant la frontière entre le Cameroun et le
Nigeria. A. - LesTraités anglo-allemands de 1885à 1914
2.06 Le 12juillet 1884, l'empirealemandobtintun protectorat sur
la régiondu Cameroun qui marqua l'aboutissement d'une période d'intense rivalité
entre les ambitionscommercialeset territorialesbritanniqueset allemandesdans la
région littoralevers I'estde l'île de Lagos, occpar la Grande-Bretagne dès 1861
en vue d'appuyerles effortsbritanniquesvisant àéliminerle commercedes esclaves.
11 ne fait pas de doute que, avant 1880, I'infiuence britannique se faisait plus
fortement sentir sura bandecôtièreallantde Freetownjusqu'auCameroun que celle
de toute autrepuissance européenne. Commel'a écritun histori:n
"Looking at the present-day political map of West
Africa, with the French-speaking African countries
dominating the scene, it is not easy to imagine that
between 1807 and 1880 Britain was the only colonial
power exercising almost unquestionedcontrol along the
West Coast, from Freetown to the Cameroons". (J.C.
ANENE, The International Boundariesof Nigeria 1885-
1960 L.ongman,Londres1970,p. 27).
2.07 11 faut souligner aussi que d'autres pays européens,
notamment l'Allemagne et la France, établissaient progressivemenlteur puissance
commerciale etpolitiquedanscertaineszonesde l'Afriqueoccidentale dansles années
précédanc te qu'ona appeléle "scramble " de l'Afriqueà partir de 1885. Ami, en
1860, la premièremaison de commerce allemande fut établie sur l'estuairedu
Cameroun, etles négociants allemandsse montrèrentàpartir de cemomentlà de plus
en plus actifs sur la bande côtière camerounaise. Les fonctionnaires et les
commerçantsbritanniquesse trouvantdans le protectoratde Oil Rivers s'inquiétèrent
de cette activité etdès 1883, exercèrentde fortes pressions pour convaincre le
Gouvernementbritannique de mener une politique plua sctive et déterminéeans le
temtoire s'étendantà I'estde la colonie de Lagos.Au début de l'année884, c'était
chose faite, et leconsul HEWETT futchargéde retourner àOil Riverset de conclure
discrètementles traitésnécessairesavec les chefs de clan locaux, pours'assurer le
contrôle du littoral jusqu'à Douala. Mais les Britanniquesarrivèrent trop tard. Ils
avaientété devancéspar le Dr. NACHTIGAL, consul général alleman qu,i réussitau
débutjuillet 1884à concluredes traités deprotectoratavecdeux des plusimportants
chefs tribaux de la bande littorale du Cameroun, quelques jours seulement avant
l'amvéedu consulbritannique : "The local rulers [in the Cameroons coastal strip]
requested forma1British protection on various occasions
and, in 1884, the British Consul was instmcted to offer
forma1 protection to certain of these rulers. However,
Germany, whose interest in the area was by now
considerable, succeeded in concludiig a treaty of
protection with two of the most importantrulers just five
days before the British Consul arrived on the sarne
mission." (C.I.J., Affaire du Camerounseptentrional,
Mémoires,plaidoiries et documents, 1965, pp. 94-95 ;
extrait de l'annexe Ii du contre-mémoiredu Royaume-
Uni).
2.08 A la suitede ces développements,l'Empire allemand adressa
le 15 octobre 1884 une circulaire aux principales puissances européenneset aux Etats-
Unis n,otifiant aux Etats concernésque l'Allemagne s'était assuré la protection de
certaines régionsde la côte occidentaleafricaine
"This has been effected in virtue of Treaties which have
been in part concluded by Dr. Nachtigal, the Consul-
General dispatched to West Africa, with independent
Chiefs, and partly invirtue of applicationsfor protection
made by Imperia1 subjects, who have acquired certain
tracts by covenantswith independentChiefs."
2.09 La mêmecirculaire poursuit en indiquant l'étendue des
territoires passantsous la protection allemand:
"Accordingly,the Togo tract, with the harbours of Lome
and Bageida, the districts of Bimbia, with the Isle of
Nicol, Cameroons, Malimba, to its northem extremity,
Little Batanga, Plantation and Criby, on the Slave
Coast ...have been placed under the protection of His
Majesty the Emperor. This has been notifiedby hoisting
the Imperia1military standard and planting frontier poles,
and the engagement at the same tirne announced that al1
demonstrable existing rights are to be respected."'
(Annexe M.C. 1; souligné par la République du
Cameroun).
1
Lettre du Baron von PLESSEN au Comte GRANVILLEdu 15 octobre 1884, reproduit in
HERTSLET, Mau of Africa bv Treary, 1909, Vol. Il, p. 693. HERTSLET était
bibliothécaireau ForeignOfJicedurant cette période.II s'est plus particulièéement intéress
la teneurdes accords frontaliers enAfriqueet a publié plusieureséditides successive
of Africa bv Treaty, compilationd'instmmentsconventionnelsconcernantla détermination
des frontières enAfrique. La nature semi-officiellede la "Carte d'Afrique d'HERTSLET
selon les Traités"est renforcéepar le fait quele premier volume desUnitedKigdom Treaty
-enes officielles ne datequede 1892. En 1908déjà, leForeignOfficeavaitpris contact avec
le Ministèreallemanddes Affairesétrangèrde savoir s'il soulevait des obàeceions
quel'onpublie dans le certains accordsconcemamla frontière entrele Camerounet
le Nigeria.1 2.10 La Grande-Bretagne dutà contre coeur s'incliner devant ce
fait accompli et entama peu aprèsdes négociationsavec l'Allemagne pour fvter une
ligne de démarcationprovisoire entreles sphèresd'influence britannique et allemande
sur le littoralunt peu dans l'intérieurdes terres, vers l'est de la colonie de Lagoset
du protectorat de Oil Rivers.
1. Les accords entre la Grande-Bretagneet l'Allemagnerelatifs
àleurs sphèresd'influence respectives dans certainesparties
de l'Afrique, des 29 avril-16juin 1885
2.11 Par ces accords, la Grande-Bretagne s'engageai:
Protectorates, or interfere with the extension of German
influencesin that part of the coast of the Gulf of Guinea,
or in the interior districts to the east of the following
line: that is, on the coast, the right river bank of the Rio
del Rey entering the sea between 8'42' and 8"46'
longitude east of Greenwich ; in the interior a line
following theright river bank of the Rio del Rey from
the said mouth to its source, thence striking direct to the
left river bank of the Old Calabar or Cross River, and
terminating after crossing that nver at the point about
9"8' of longitude east of Greenwich, marked "Rapids"
on the EnglishAdrniraltyChart."
2.12 En contrepartie, l'Allemagne s'engageait par les mêmes
accords :
"...not to make acquisitions, accept Protectorates, or
interfere with the extension of British influence in the
coast of the Gulf of Guinea lying between theright nver
bank of the mouth of the Rio del Rey, as above
described, and the British Colony of Lagos; nor in the
interior to the Westof the line traced in the preceding
paragraph." (HERTSLET, op. citn.. 1, pp. 868-870 ;
AnnexeM.C. 2).
2.13 Par un autre paragraphe des mêmes accords les deux
puissances s'engageaient à renoncer à tout protectorat déjà établidans les limites
octroyées à l'autre partie, exception faitede la colonie de Victoria, AmbasBay, qui
demeurerait une possession britannique; maisune lettre d'accompagnementécrite par
le comte GRANVILLE a limitéla portéede cette dispositionen précisantque, si le
Gouvernement allemand parvenait à conclure un accord satisfaisant avec les
missionnaires de Ambas Bay (où une colonie de missionnaires baptistes avait étéfondée, dontla Grande-Bretagne avait revendiqué la souverainetéle 19juillet 1884),
le Gouvernement britannique serait prêt à accepter qu'elle soit intégréedans les
territoires devant être placés,onformémentaux accords, sous protectorat allemand.
Pour compléterle tableau, on peut noter que Victoria,Ambas Bay, passa en territoire
allemand le 28 mars 1887. (HERTSLET, op. cit, n. 1, p. 2, p. 871, note de bas de
page, AnnexeM.C. 2).
2.14 Pendant toute la période précédan t Conférencede Berlin
sur l'Afrique Occidentale, 1884-1885, et au-delà, des agents de la Royal Niger
Company(britannique) avaient activement tentéde pénétrerà l'intérieurde ce qui
devait devenir par la suite le Nigeria, le long du fleuve Niger et de la Bénoué. ela
eut un profond retentissement surla démarcation desfrontièresdu futur Nigeria:
"The Atlantic littoral wasonly part of the struggle for a
compact temtory. A gLace at any map of Nigeria will
show the strategic positionoccupiedby the Rivers Niger
and Benue. The exclusiveBritishcontrol of the navigable
portions of these rivers was destinedto play as decisive a
role in the evolutionof Nigeria's internationalboundaries
as the termini of the Atlantic littoral." (J.C. ANENE,
op. cit.par. 2.06, p. 35).
2.15 Les activités commerciales françaises se poursuivirent
activement sur le cours inférieurdu Niger et de la Bénoué au début desannées1880,
sous la direction du Commandant MATTEI. Mais la défense des intérêts
commerciaux et autres intérêtb sritanniques sur ces deux rivières étaitassuméepar
Taubman GOLDIE qui, aprèsavoir fusionné lesquatre compagnies britanniques en
conflit sur le cours inférieurdu Niger en prévisiond'une guerre commerciale avecla
compagnie française, f~t par racheter les intérêts de celle-ci à la veille de la
Conférencede Berlin en 1884. La domination britannique sur le Niger avait été
renforcée par un ensemble de traitésconclus par les agents de la Royal Niger
Companyavec de petits chefs de clan, le long du cours inférieurdu Niger et de la
rivière Bénoué.D'autres agents de la compagnie réussirent à conclure des traités
décisifsavec les potentats indigènesexerçant leur contrôle sur Bussa et Yola ; ces
traités devaientjouer un rôle dans la formation des colonies du Nigeria et du
Cameroun.
2.16 La Grande-Bretagne avait, non sans quelque suffisance,
supposéque le Gouvernement allemand ne chercherait pas à étendrevers l'intérieur
l'influence allemande sur la côte du Cameroun ; mais il devint vite évidentque telle
étaitjustement l'intention du Gouvernementallemand. Cela amena à la conclusion dela seconde série d'instruments conventionnels entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne, visant à fmer les limites des sphères d'influence britannique et
allemande au Nigeriaet au Cameroun respectivement.
2. La Convention entre l'Allemagne et la Grande-Bretagne
complémentaire à celle d'avril-juin 1885 et relative aux
sphères d'influence dansle Golfe de Guinée, signée à
Londres, du 27 juillet a2aoat 1886.
2.17 Le Gouvernement allemandavait insistépour repousser vers
l'intérieur des terres ligne de démarcationprovisoire entre les sphèresd'influence
respectives mentionnées dansles accords de 1885. Mais c'est seulement lorsque les
agents de laRoyalNiger Company eurent conclu un traité deprotectorat avec le chef
de la régionde Yola que la Grande-Bretagneaccepta d'entamer desnégociations dans
ce but. En conséquence, une note envoyéele 27 juillet 1886 par le comte de
ROSEBERY au comte HATZFELDT, aprèsavoir fait référence à la ligne définie
dans les accords de 1885 et qui se terminait, aprèsavoir traverséla Old Calabar ou
Cross River, au point situà 9'8' de longitudeest de Greenwich, marqué" Rapids "
sur la carte anglaised'amirauté,poursuiva:t
"The German Govenunenthave proposed an extension of
the line into the interior. Her Majesty's Govement
have accepted the proposal. The suggestions of Her
Majesty's Govemment as to the direction which the
extended line should take, and as to its limitation, have
been adoptedby the German Govemment.
"1have, consequently, now formally to state that Her
Majesty's Govemment are prepared, on receiving the
assent of the German Govemment, to agree to an
extended line of demarcation which, starting from the
point on the left river-bank of the Old Calabar or Cross
River, where the original line terminated, shall be
continued diagonallyto such a point on the nght bank of
the River Benue to the east of, and close to, Yola, as
may be found on examination tobe practically suitedfor
the demarcation of a boundary." (HERTSLET, op. ci?.
n. 1, pp. 880-881;AnnexeM.C. 5).
Dans sa réponsedu 2 août, le comteHATZFELDTacceptaitcette proposition.
2.18 Il convient de noter que cette ligne ne constimait encore
qu'une ligne de partition provisoire entre les sphères d'influence et que le point
terminal des accords (supplémentaires)de 1886n'était padéterminé.2.19
Ces mesures prises à Londres coïncidaientavec la poursuite
des explorations du littoral au voisinage du Rio del Rey ; et bientôt, un fait
extrêmementembarrassant apparut. Les accords de 1885 et 1886 reposaient sur la
suppositionque le Rio del Rey était une rivière importante quriemontait sur un grand
nombre de kilomètres à l'intérieurdu Cameroun. Les Britanniqueset les Allemands
qui avaient négociéces deux accords s'étaient en fait basés sur les données
topographiques portées sur deux cartes qui (de façon erronée) exagéraient
l'importancedu Rio del Rey. 11s'agissait de:
1. "La Côte occidentalede l'Afrique, Feuille XIX,
du Cap Formoso à Femando Po, relevéepar le Capitaine
W.F OWEN en 1826(mise à jour en 1881)" ;et
2. "Karte von Ober-Guinea(West-Afrika, bearbeitet
und gezeichnetvon L.FRIEDRICHSEN, 1883)".
2.20 11apparaissaitclairement,à la suite de la visite de la région
côtière dans laquelle se trouvait le Rio del Rey effectuéeen 1887 par JOHNSTON,
Vice-Consul, quecette supposition étaiterronée.Enjanvier 1886déjà,l'ambassadeur
d'Allemagne à Londres avait fait part à Lord SALISBURY d'une rumeur selon
laquelle le Rio del Rey n'était pas aussi important qu'on l'avait supposé,et,
s'informant auprès du Gouvernement britanniquesur les sources du Rio del Rey, il
écrivait:
"A Report had been receivedby the German Govemment
from the Imperia1Govemor at the Cameroons, stating
that it appeared doubtful whether theRio del Rey is an
independent river, or merely one of the outlets forming
the Calabar delta. In the latter case there would, he
observed, be no source from which to draw the line of
demarcation ...." (Lord SALISBURY à Sir E. MALET,
le 23janvier 1886 ;AnnexeM.C. 4).
2.21 C'est à la suite de cela que JOHNSTON entreprit son
expéditiondans la régiondu Rio del Rey, dont il rendit compte en détail à Lord
SALISBURY le 14 juillet 1887. Le rapport de JOHNSTON confirmait sans le
moindre doute que le Rio del Rey n'était en fait qu'unpetit affluent qui allait mourir
dans la mangrove, au nord de la péninsule deBakassi ; "The Riodel Rey is in fact whatmaybe termeda "huge
unnecessary estuary", which serves as a common
receptaclefor a great numberof creeksthat are, most of
them, little more than the escapes to the overflow of
neighbouringrivers. The only Streamwhich has anynght
to beconsideredthe me Rio delRey is the River Ndian"
;(AnnexeM.C. 6,p. 76).
2.22 Au contraire, le rapport de JOHNSTON établissait avec
autantde certitudeque1'Akwayafé étaitune voie d'eau importante:
"The Akwayafé or, perhaps more comctly, the
AkpayaféRiver, was entirely unlaiown to Europeans
beforemy recentjourney. The exactlocalityof its source
1 was not able to determine, although 1 followed.the
course of theStreamon foot for a distanceof 10 miles
beyondthe lastrapids"(AnnexeM.C. 6, p.75).
2.23 h Gouvernementallemandfut bientôtconvaincude ce fait
fâcheux, qui futdûment consigné à l'ArticleTV (2) du TraitéAnglo-Allemanddu ler
juillet 1890,relatiàl'Afriqueet àI'Heligoland.
3. Le Traitéconclu entre les Gouvernementsbritannioue et
allemand, relatif l'Afrique et à 1'Heligoland; ~erh ler
juillet 1890.
2.24 L'articleIV, paragraphe2, de ce traitédispose:
"It having ben proved to the satisfactionof the two
Powers that no river existson the Gulf of Guinea
correspondingwith that marked on maps as the Rio del
Rey, to whichreference was made inthe Agreementof
1885, a provisional line of dernanxtion is adopted
between the German sphere in the Cameroons and the
adjoiningBritishsphere, which, startingfromtheheadof
the Rio del Rey Creek, goes direct to the point, about
9"8' of east longitude, marked "Rapids"in the British
soulignépar la République du Camerounci;AnnexeM.C. 903
10). "The negotiations, conductedfor the mostpart in Berlin,
went on interminentlyfrom 1888to 1902. In the first
place the illusion embodied in the 1885 provisional
miles long had toabetreplaced by somethingmore real.ty
Lord Salisbury...made the preliminan, suggestion tothe
GermanAmbassadorin London, Count Leyden, that the
River Ndian was "a suitable boundary from an
ethnological and commercial point of view ...".The
German delegates [to that boundary conference]
completely ignored Lord Salisbury'semphasis on the
ethnological aspectsof the question.s for commercial
considerations,theadvantagesclaimedby the Britishfor
the River Ndian equally applied tothe River Akpayafe.
The result was a deadlock in the 1888 negotiatins....
The Germans [insinuatedlthat the provisionalboundary
of 1885had been inspireciby considerationsof the river
systems, not by the extent of the Efik empire nor by
ethnology. They therefore concluded that since Britain
had acquired the Cross River esw, the logical and
equitable thing was for theGermans to take control of
the next river systembeginning with the mouth of the
Akpayafe." (J.C.ANENE, op. ci. par. 2.06, pp. 78-
79).
2.25 Cela expliquepourquoi l'articlIV, paragraphe2, du Traité
anglo-allemandde 1890vise à gagner dutemps. La Grande-Bretagneet l'Allemagne
s'accordaientà penser que l'hypothèsedont onétaitparti pour tracer la ligneen 1885
(selon laquelle le Rio del Rey était unerivièreimportante présenttne " source")
était erronée,mais elles n'étaientpas encore d'accord surla solution définitivà
adopter.
2.26 Une autre disposition du Traité anglo-allemand de1890
mérite l'attention.Des agents de la Royal Niger Company s'étaientemployés à
rechercher des opportunités commercialed sans des zones s'étendant aunord de la
Benoué,à l'exception deYola, dont le Lamido (sultan) avait refusd'autoriser cette
compagnie à faire du commerce surtoute l'étenduede sontemtoire. La RoyalNiger
Company avait en effet établi unemaisonde commerceà Garoua, sur la rive nord de
la Benoué,à 130 lan (80 milles) à l'est de Yola. 11était donc nécessaire de
règlementer,ne serait-ce que d'unemanière générale l,s activités commercialeses
deux puissances(la Grande-Bretagneet l'Allemagne)dans larégioncomprise entrela
Benouéet le Lac Tchad. En conséquence,l'article V du Traitéanglo-allemandde
1890énonce : "It is agreedthat no Treatyor Agreement,madeby or on
behalf of either Power to theorth of the River Benué,
shall interferewith thefree passageofodsof the other
Power, withoutpaymentof transitdues, to and from the
shoresof Lake Chad.
"AI1Treatiesmade interritoriesinterveningbenveenthe
Benuéand Lake Chad shall be notifiedby one Power to
the other."(HERTSLET, op. cit., n1, pp. 903-904 ;
AnnexeM. C. 10).
2.27 Le commentaireapportépar un historiensurl'évolutiode la
frontière Nigeria-Cameroun dans cett disposition spécifiquesemble entièrement
justifié:
"The agreement undoubtedlyforeshadowedan Anglo-
German intention todraw a boundarythroughthe region
stretchingfrom Yola to Lake Chad ..."(J.C. ANENE,
op. cit., pa2.06. 1,p. 119).
2.28 Un événemenu t ltérieurimportant dans la fmation de la
frontière terrestreentre les sphèresd'influencebritanniqueet allemandeau Nigeriaet
au Cameroun respectivement, fut précipitépar l'interventionde la France. Le
Gouvernement françaiss'étaitquelque peu alarmé du Traitaénglo-allemandde 1890
du fait que l'articleV faisait vaguement référenela région situéau sud du Lac
Tchad, dans laquelle la France prétendaitavoiun intérêtU. n traitéanglo-français
conclu en 1890 avait établila ligne Say-Barroua séparant sphèresd'intluenceen
Afrique occidentalede la France et de la Grande-Bretagne respectiveme;mais les
points de vue de la France et de la Grande-Bretagneétaientinconciliables au niveau
de l'application de cette ligne aux régionsde l'Adamaoua et de Yola. Le
Gouvernement français, considéran qtu'il étaitlibre d'établirun protectoratdans les
régionsde la Benouéet de l'Adamaoua, encouragea officieusementle Lieutenant
MIZON à mener une expéditiondans la régionde la Benoué.Cette expéditionfut
financée par un " groupe colonial" comprenant des journalistes et d'autres
personnalitéssoutenant l'expansionnisme françaisen Afrique occidentale. Lors de
cettepremièreexpédition,MIZON serendità Yola, où il reçut unaccueilfavorable
du Lamido et obtint l'autorisationde faire du commerce.IIse rendit ensuitedans
l'Adamaouaet rentra à Paris où il fut accueillien héros.On parla beaucoupdans la
pressefrançaisede la nécesside consoliderlesgainsde la Francepar l'établissement
d'unprotectorat françaissur l'Adamaoua.
2.29 Lorsque, en 1892, la nouvellepantintà Londreset à Berlin
que le Lieutenant MIZON étaie tn train de préparerune deuxième missiondans larégion de la Benoué, qui devaitêtrefinancéepar des patriotes français et des
compagnies coloniales,la sonnetted'alarme commença à retentir.La Royal Niger
Company tenta en vain de persuaderle Gouvernementbritanniqueque la mission du
LieutenantMIZON avaitun caractère politiqueet menaçait lespositions britanniques
sur la Benoué ;etun contingentaxmé des forcesde laRoyalNigerCompany escorta
la seconde expéditiode MIZON quiremontaitla Benoué. Mais MIZON en fit trop et
se retrouva bientôt brouilléavec son propre gouvernement pour avoiétécomplice
d'une chasse aux esclaves et l'avoir soutenue,menéepar I'Emir de Mwi (sur la
moyenneBenoué) dansun villagepaïen.2
2.30 Les Allemands s'étaienatutant alarmésque les Britanniques
des activitésdeMIZONsur la BénouéL . es tentatives allemandesde pénétrer dans
l'Adamaouadepuisla côte n'avaient pasétécouronnées de succès,et les ambitionsde
la France dansla régionmenaçaientl'autorité établielrs Allemands.
2.31 Ami, la politique audacieuse de la France sur le cours
moyen de la Bénoué eut comme conséquence de rapprocher les gouvernements
britannique et allemand.11s'ensuiviten 1893la négociationprécipide deux traités
anglo-allemands,le premier relatifau Rio del Rey et le second relatif à Yola et au
prolongementdu tracéde la frontièrejusqu'auLacTchad.
4.ix Traité concluentre la Grande-Bretagneet l'Allemagne
relatifau Riodel Rey, sur la côte occidentaleafricaine, signé
àBerlin,le 14avril 1893.
2.32 Ce traité avaitpour objet principal de détexminerle point
représentant"l'originedu Rio del Rey ",point de départde la lignede démarcation
provisoire entreles sphèresd'influence allemanet britanniquàlaquelleil était fait
référence à l'article IV (2) du Traitéanglo-allemand de1890. L'article Ier de ce
traité, signé 14avril 1893,prévoiten conséquence:
2 Unwmpte-renduplusdetaildesdeuxexpéditioseMIZON surlaBtnou st donndans
J.C.ANENE, op.cit .,r.2.06,p. 119-124. "That the pointnamed in section 2, Article IV, of the
Anglo-GermanAgreementof 1stJuly, 1890, asthe head
or upper endof the Riodel Rey Creek shalbe the point
at the north-westend of the Islandying to the Westof
Oron, where the two waterways, named Unifian and
Ikankan, on the GermanAdmi~altyChart of 1889-90,
meet." (HERTSLET,op. cil.-n. 1, p. 910: AnnexeM.C.
14).
L'articleIdu même traitéprévoitencor:
"Fromthis upper end of the Rio del Rey to the sea, that
is to say, to the promontormarked West Huk on the
abovementionedchart, the rightbank of the Riodel Rey
waterway shallbe the boundarybetween the Oil Rivers
Protectorate and the Colony of the Cameroons."
(HERTSLET,ibid.)
2.34 Par ailleursce traitécomprend unedisposition interdisant
l'établissemente maisonsde commerce sur la rive droitedu Rio del Rey et dans la
péninsulede Bakassi.Ainsi, l'artiiieInonceque :
"The German Colonial Administration engages not to
allow any trade-settiements to existor be erected onthe
right bank of the Rio del Rey Creek or waterway. In
like manner the Administration of the Oil Rivers
Protectorateengagesnotto allowany trade-settiementsto
exist ore erected onthe westernbank of the Backasay
(Bakassey) Peninsula from the fust creek below
Archibong's (Arsibon's)illage tothe sea, andeastwards
from this bank to the Rio del Rey waterway."
(HERTSLET,ibid., pp. 910-911,AnnexeM.C. 14).
2.35 Un extraitde la carte de l'amirauté allemee 1889-90sur
laquelle figurent le point mentionà l'article 1 de ce traitéet le tracéde la ligne
mentionné àl'articliia étépubliédans HERTSLET(CarteM3). 5. Le Traité concluentre la Grande-Bretagneet l'Allemagne,
relatif auxfrontièresen Afrique, l15novembre 1893.
2.36 Comme on l'a déjà vu, c'est la prétentionde la France à
faire valoir ses droits à exercer une influencesur la régionde la Bénoué et de
l'Adamaouaqui, paradoxalement, poussales Gouvernements britanniqueet allemand
à entamer précipitamment des négociations pour parachever les accords
supplémentairesde 1886 et pour prolonger la ligne frontièrevers le nord, jusqu'au
Lac Tchad. L'articleIer du Traitéde Berlin du5 novembre 1893 énonce que:
"The ....Agreementof 1886 having stipulatedthat the
point where the boundary shallreach the River Benue
shallbe fixed to such a point to the east of and close to
Yola as may be found on examination tobe practically
suitedfor the demarcationof a boundary, that pointshall
befmedas fo1lows:-
"Theboundary, drawn fromthe point on the right bank
of the Old Calabar or Cross River, about 9'8' of
longitude east of Greenwich, marked "Rapids"in the '
EnglishAdmiilty Chan referred toin the ...Agreement
of 1885, shall followa straightline directed towardsthe
centre ofthe presenttown of Yola.
"From that centre a measuring line shallbe drawn to a
point on the left bank of the River Benueve kilometres
belowthe centreof the main mouth of River Faro; from
the latter point the circumferenceof a circle, the centre
of which is that of the present town of Yola, and the
radius ofwhich is the aforesaidmeasuringline, shall be
described,south of the Benue, continuing till it shall
meet the straight lie drawn from the Old Calabar or
Cross River. The boundary, deflectingfrom thatstraight
line at this point of intersection, shall follow the
circumferenceof the circle till it shall amiveat the point
where the circumferencereaches the Benue. This point
on the Benueshall henceforthbe acceptedas the point to
the east of, and close to, Yola, mentioned in the
Agreement of 1886." (HERTSLET, op. ci?. n. 1, p.
913: AnnexeM.C. 15).2.37 L'article II du Traité du 15 novembre 1893 prolonge la
démarcationprovisoire de la frontièrevers le nord,jusqu'au Lac Tchad:
"The boundary determined in the preceding Article shall
be continued northward asfo1lows:-
"A line shallbe drawn from the point on the left bank of
the River Benuefmed in that Article, which, crossing the
river, shali go direct to the point where the 13thdegree
of longitude east of Greenwich is intersectedby the 10th
degree of north latitude. From that point it shall godirect
to a point on the southem shore of Lake Chad, situated
35 minutes east of the mendian of the centre of the town
of Kuka, this being the distance between the mendian of
Kuka and the 14th mendian east of Greenwich measured
on the map [by Kiepert] published in the German
Kolonial Atlas of 1892, (les mots entre crochets étaient
omis par accident dans le texte anglais de l'accord: v.
HERTSLET, op.cit., n. 1, pp.913-914, note de bas de
page; Annexe M.C. 15).
"In the event of future surveys showing that a point so
fxed assignsto the Britishsphere a less proportionof the
southem shore of Lake Chad than is shown in the
aforesaid map, a new terminal point making good such
deficiency, and as faraspossible in accordancewith that
at present indicated, shallbe fmed as soon as possibleby
mutual agreement. Until such agreementis &ved at, the
point on the southem shore of Lake Chad, situated
35 minuteseast of the meridian of the centre of the town
of Kuka, shall be the terminal point" (HERTSLET, op.
cit.,n.1, p. 914 ;Annexe M.C. 15).
2.38 Les termes utilisésdans le dernier paragraphe de l'articlIi
témoignentde la précipitationdans laquelle le Traité du 15 novembre 1893 fut
négocié et conclu. Cette précipitation se trouve confirméepar l'articlIII du même
traitéqui énonce:
"Any part of the line of demarcation traced in this
Agreement, and in the preceding Agreements above
quoted, shall be subject to rectification by agreement
betweenthe two Powers." (Ibid.).
2.39 L'article IV du traité confirme et en fait élargit les
dispositionsdes précédents accords visantà déterminerla ligne de séparation entreles
sphères d'influence britannique et allemande dans cette partie de l'Afrique
occidentale: "Theterritoriesto the Westof the boundaryline traced in
the present Agreement, and in the preceding above-
quotedAgreements,shallfa11withinthe British sphereof
influence,hoseto the eastof the lie shallfa11withinthe
Germansphereof interest." (ibid.).
2.40 L'articleIV intègreune éventuelle restrictiànla disposition
ci-dessusen énonçantexpressémenq tue l'influenceallemandedans sesrelations avec
la Grande-Bretagne ne s'étendrpaasvers l'estau-delàdu bassin dela rivière Shari,et
que le Darfour, le Kordofan et Bahr-el-Ghazal,tels qu'ils figurentsur la carte de
Justus PERTHES d'octobre1891, seront exclus de la sphère d'influence allemande
mêmesi des cours d'eau dérivés de la rivièreSharidevaient s'y trouver.Enfin,par
l'article V du Traitédu 15 novembre1893, sous letitre "Principede non-ingérence
de chacune despuissancesdans la sphèred'influencede l'autre" les deux puissances
s'engagent à respecter, en ce qui concerneleurs sphères respectives,le principe de
non-ingérence dans la sphèred'influencede l'autrepuissancecommecela était prévu
dans les précédents accordmsentionnéscidessus.
2.41 HERTSLET publia avecce Traité anglo-allemand du 15
novembre 1893, une carte explicative surlaquellefigurait la frontièreentre les deux
pays d'Afriqueoccidentale.Une copiede cettecarteexplicative est reproduitedans le
présent Mémoire (carte M4). Une note jointeà cettecarte explicative indiquequ'elle
a été préparé par the Ordnance Survey in Southamptonet que "the Geographical
detail on this map was taken from Kiepert'sKolonialAtlas", visé à l'article II du
traité lui-même. Il est intéressantde comparer cette cartà la carte de l'amirauté
allemande de 1889-90, dont un extrait, qui illustre le Traitanglo-allemanddu 14
avril 1893, est reproduitdansle présent Mémoir(ecarteM3). Sur la carte utiliséepar
HERTSLET pour illustrer le Traité du 15 novembre1893, la rivière Aqua Jafe - qui
figure de façon trèsnette et sous ce nom sur la carte M4 plus ancienne-n'apparaît
pas.
2.42 Il n'est peut-êpeas inutile,àce stade, d'évaluerles progrès
réalisés,à la fi de l'année1893, dans lafmationd'une ligne délimitanltes sphères
d'influence respectives dela Grande-Bretagne etde l'Allemagnedans les territoires
donnant sur le Golfe de Guinée. La tentative initialede délimitation d'une frontière
(en 1885-1886)visaità déterminer un point situsur le littoral atlantique,qui pourrait
êtreaccepté parla Grande-Bretagneet l'Allemagnecomme point de départd'une
lignede démarcation définitive entrles deux sphèresd'influence,età prolonger cette
ligne jusqu'à Yola. Mais les deux puissances n'avaient, à cette époque, qu'uneconnaissance très approximativede la géographiede cette région. Et c'est seulement
lorsque JOHNSTON (qui devait devenir ensuite Sir Harry), le nouvel agent
britannique du protectorat de Oil Rivers, poussa plus loin l'exploration du réseau
fluvial de la zone frontalière en1887-88 que l'on s'avisaque le Rio del Rey n'était
pas, comme on l'avait d'abord pensé,une grande rivière,et ne pouvait donc convenir
pour servir de point de départ à une frontière définitiv(v. pars. 2.19-2.21). Mais
cela n'affecta pas immédiatementle tracé de la ligne séparant les deux sphères
d'influence. L'hypothèseerronée selonlaquelle le Rio del Rey étaitune importante
rivière fut consignéeà l'article IV, paragraphe2, du Traité anglo-allemand de 1890,
mais les deux gouvernementsne purent àce moment-là semettre d'accordsur le point
représentant "l'origine du Riodel Rey" au sens de cette disposition. A la reprise des
négociations,les Allemands se rabattirent sur le Traité de 1885relatif à la frontière
provisoire :
"Whether or not the Rio del Rey was a river, it was
undoubtedly a body of water, and the head of the estuary
was as good a boundary point as the source of the river
that did not exist" (J.C.ANENE, op. cit.,gar 2.06,
pp.81-83).
2.43 Tel était l'argument des Allemands. Les négociateurs
britanniques, d'abord réticents, finirentpar se laisser convaincre par Sir Claude
MACDONALD (commissaire et consul général) que le territoire faisant l'objet du
litige étaitune bande de morne marécage, sans aucunevaleur. Ami, pendant les
négociations précédanlta conclusiondu Traitéanglo-allemanddu 14 avril 1893, la
délégation britannique se rendiatupoint de vue des Allemands :
"A point at the upper end of the Rio del Reyestuary was
without much argument selected as the terminus. Thus,
for the time being, the settlement of the Rio del Rey
portion of the provisionalboundary, in the words of [the
report from TRENCHto ROSEBERYof 15April, 18931
finally disposesof the Akpayafecontroversy." (Zbid.).
2.44 On remarquera sur la carte explicative sur laquelle figure la
frontièrefméepar le Traitéanglo-allemanddu 15 novembre 1893 (Carte M4) que la
ligne de démarcation provisoireallant de l'origine du cours d'eau Rio del Rey
jusqu'aux " Rapids " de la Cross River, de là jusqu'au point situé à l'est et à
proximité de Yola et de là jusqu'au Lac Tchad était principalementune ligne
géométrique, tracés eans tenir compte des caractéristiques physiqusu terrain et sans
tenir compte non plus des allégeancesdes ethnies peuplantles territoires traversésparcette ligne. Cela est typique de nombreusesfrontièrescolonialestracées en Afriqueà
cette époque-là.Selonune étude générald ee l'évolutiondes frontièresdu Niger:a
"During the 1885-1890 period it will be seen that the
boundaries were entirely geometric in character, and
gaps existed between the coastal and inland sections of
the boundaries. By 1900 the boundaries had become
complete, largely by the additional use of further
geometric boundaries. Demarcation was however
beginning and the result of this is seen in the way the
Lagos-Dahomey boundaryhad been related tohuman and
physical features. The demarcation of the remainder of
the boundaries was completed pnor to the fust world
war..It will be seen tha...the Anglo-Gennan boundary
was related to physical features, mainiy rivers. This is
largely due to environmental differences. ...In the
Cameroons area relief is more prominent and there are
more perennial rivers. It will be noticed that the Anglo-
French boundary in the Cameroons which is still
undemarcated is delirnited largely by reference to
physical features. The geometric boundaryform survives
only in Lake Chad, where it is probably the most
appropriate." (J.R.V PRESCOTT, " The Evolution of
Nigeria's Boundaries ",2 Nieerian Geoera~hicalJournal
1959,p. 91 ;AnnexeM.C. 214).
2.45 Ceci dit, il est clair que la ligne résultantdu Traitéanglo-
allemand du 15 novembre 1893, suivait pour l'essentielun tracé géométrique, ême
si elle fut modifiéepar la suite pour tenir comptede caractéristiquesphysiquesdont la
position géographiqueavait étdéterminée par des étudesplus poussées.
2.46 Revenons maintenant à l'exposé chronologique des
instrumentsconventionnels ayant trait l'historique dela frontière telle qu'elle existe
aujourd'hui entre la République du Camerounet le Nigeria. On se souviendra que
l'article II du Traitéanglo-allemand d15 novembre 1893 avait fait référenàedes
"étudesultérieures" et que l'articleIII de ce mêmetraitéenvisageait expressément
l'éventualitde "rectifications"de la ligne de démarcationdéfuiiepar le traité.
2.47 L'un des points non résolus dansle Traitédu 14 avril1893
étaitle tracéde la ligne au nord del'estuairedu Rio del ReLa question se posait de
savoir si les tribus Ekoi, qui se retrouvaient des deux côtés de la ligne de
démarcation, devaientêtreséparéesE . n fait, ce n'est qu1896 que les négociations
officielles concernant cette section de la ligne de démarcation furent entamées.
L'objectif de la Grande- Bretagne,tout au moins celui déclapar Sir Ralph MOOR,
alors consul générablritannique de la région, étte préserver l'unitéethnique Ekoiet de sauvegarder les marchés dec sommerçantsEfik exerçant leur activité dans les
environs de Calabar. Au contraire, les Allemands,s'ils se souciaientpeu de savoir
quelles tribus Ekoi devaient rester du côtéallemand de la frontière, étaient bien
décidés à mettre fin aux caravanesEfk qui détournaientvers Calabarle commerce de
la zone frontalière. Leacquisitions allemandessur la côte ne serviraiànrien si cela
devait continuer. Dans l'espoir de résoudre ce problèm Leo,rd SALISBURYproposa
une étudeanglo-allemandeconjointe dans la zone concernéepour déterminerla
répartition exactedes groupesethniques.En conséquence,le CapitaineCLOSE et le
Lieutenant VonBESSERpartirent, à la fin de l'année1895, pour réaliser une étude
des territoires Ekoi entre les " Rapids " de la Cross River et la côte. Les premiers
résultatsde cette étudeconjointesemblèrentappuyer lesarguments britanniques basés
sur l'unitéEkoi et les intérêts commerciaux d cosmmerçantsEfik. Mais, au fur et à
mesure que l'étudeavançait, de nouveaux faitsse dégagèrent,brossant un tableau
beaucoup pluscomplexe. Ily avaittoutune marqueteriede villages Ekoiet non-Ekoi
dans la zone frontalière,et il ne semblaitpas queles chefsEkoi eussentreçu de mbut
de ces villages.
2.48 CLOSE et Von BESSER recommandèrent quelques
rectifications du tracde la frontièrede façonà tenir compte desrésultatsde l'étude
conjointe, mais cela se seraittraduit par une ligne en zig-zag et aurait, de l'avis de
certains fonctionnairesbritanniques, entraînémalgrétout la division de groupes
ethniques. Cependant,un accordlocalprovisoire dut êtrc eonclule 12décembre1900
entre Sir R. MOOR, Haut Commissairedu NigeriaMéridional et vonPU-ER,
Gouverneur du Cameroun,en raisond'incohérences grossière esxistantentre lescartes
allemande et britannique sur lesquelles figurait la ligne de démarcation ; ces
incohérences concernaienn totammentle point d'aboutissementsur la Cross River du
tracéde 1885. Celles-ciayantété misee sn évidence, d'autreétudesfurent entreprises
par les deux Gouvernementsdans la zone située entre la Cross River et la mer, qui
aboutirent à la conclusiondu TraitéMOOR-PUTTKAMER,Ie 16 avril 1901, qui
arrêtaiun nouveau tracé de la frontière entrele protectorat duNigeriaMéridionalet
la Colonie du Cameroun.Une copie manuscritede ce Traité du16 avril 1901 est
reproduite à l'AnnexeM.C. 23. Il est d'une importanceconsidérable parce que c'est
la première foisqu'il est reconnuque la frontière commence surI'Akwayafém , ettant
ainsi la péninsulede Bakassi en temtoire allemand. Le manuscrit du traité étant
difficilement lisible, la Républiquedu Cameroun reproduit ici les principales
dispositions relativàslapartie littoralede la frontière. Selon l'artiIle I "In lieu of the existingboundary line as between theRio
del Rey andthe rapids of the Cross River determined by
agreements of :
29th April -10thJune 1885
27th July -2nd August 1886
1stJuly 1890
15thNovember 1893
the boundary as given in following Articles is agreed to
and proposed for considerationof the Britishand German
Govemments."
2.49 L'articleIiéinonce ensuite:
"In lieu of the boundaryline commencing in the Riodel
Rey at the point as given in the maps "West Pt." and
"West Huk" respectively, it should commence at the
South West Point of Bakasi Peninsula marked "Bakasi
Head" and follow the West Coast line of the Peninsula
until Bakasi Point at the mouth of the Akpa-JyaféRiver
is reached,thence it shall follow the centre of that river
as far as the Urifiace Creek on the left bank of the said
river, in such manner as to throw the Bakasi Peninsula
and the area between the Peninsula and the Creek,
formerly in Britishtemtory, into the GermanColony of
Cameroon, provided that the effect of the engagemenin
Article IIi of the Agreement of 14th April 1893
(mentioned in Article II herein)shallbe observeci,and no
trade settlementsbe allowedto exist or be erected."
2.50 On constatera ainsi que ce traité,qui avait notammentpour
effet d'annuler les accords provisoiresdu 12 décembre1900, reconnaît explicitement
que le fait de faire partir la frontièresur la RivièreAkwayaféa pour effet de faire
passer la péninsulede Bakassi en temtoire allemand. On constatera égalementque
l'articlIIiconfie la validitéde l'article III du Traitédu 14 avril 1893supra
par. 2.34).
2.51 Le TraitéMOOR-PUTTKAMER du 16 avril 1901 ne réussit
cependantpas àemporter l'approbation desdeux gouvernements. D'aprèsles archives
dont dispose la République du Cameroun, il semblerait que le Gouvernement
britannique était prt l'approuver. En mars 1902, l'ambassadeurde Grande-Bretagne
à Berlin fut chargé d'informer le Gouvernement allemand que le TraitéMOOR-
PUTTKAMER du 16 avril 1901 paraissait acceptable au Gouvernement britannique.
Mais le Gouvernement allemand, qui mit longtemps à répondre, donnafinalement
(dans une note adresséele 13 novembre 1902 à l'ambassade de Grande-Bretagne à
Berlin par le Baron von RICHTHOFEN) une réponsenégative. Une copied'une traduction en anglais de cette mêmenote figureàl'Annexe 19. On constatera que les
Allemands considéraient quele TraitéMOOR-PUTTKAMER du 16 avril 1901 ne
réalisaitpas une division suffisamment équitable destemtoires s'étendant entrela
péninsule deBakassi et les rapides de la Cross River. La modification du point
terminal de la frontière sur la Cross River constitueraitun avantage plus important
pour les Britanniques que celui qu'obtiendraientles Allemands par "...the increase
of territory that would faIl to Germany by the Agreement in the lower course of the
Akwayafe by the acquisition of the economically little valuable Bakasi Peninsula"
(note du 13novembre 1902adresséepar le Baron vonRICHTHOFEN àl'Ambassade
de Grande-Bretagne à Berlin ; Annexe M.C. 28). En tout état de cause, le
Gouvernementallemand ne pouvait accepterla limitation de sa souveraineté résultant
du maintien en vigueur de l'article ïii du Traitédu 14 avril 1893. Le Baron von
i. NCHTHOFEN fit alors une contre-proposition qui nefut toutefois pas acceptéepar
les Britanniques, en partie parce qu'elle demandait au Gouvernement britannique
d'accorder une liberté totalede navigation sur la Cross River. Par la suite, d'autres
tentatives faites en 1904 pour parvenir à un compromis échouèrent. L'important,
toutefois,à propos de ce TraitéMOOR-PUTTKAMERdu 16 avril 1901 qui n'entra
jamais en vigueur, est que tant les fonctionnaires britanniques du Nigeria Méridional
de l'époqueque le Gouvernement britannique à Londres étaientprêts à reconnaître
que, du fait des nouvelles données géographiques donotn disposaitsur le Rio del Rey
et les autres réseaux fluviaux débouchan dtans le delta du Calabar, il convenait de
tracer la frontière avec le Cameroun allemand de façon à laisser la péninsulede
Bakassien territoire allemand.
6. frontière entre leCamerounet le Nigeria Méridionalsignéen
avril1906.
2.52 Ce protocole (Pièce Jointe no 5 au compte rendu du
Capitaine WOODROFFE du 7 janvier 1907 ; Annexe M.C. 39) fut signépar le
Capitaine WOODROFFE, représentant britannique à la Commission de délimitation
et le Capitaine HERRMANN, le représentantallemand, après que, comme il est
indiquédans le préambule, les signataires eurent "travelled over andsurveyed the
boundary district in question" (qui, comme letexte mêmedu protocole l'indique, est
la régionsituéeentre la côte et le pilier frontalier no 7 entre les rivièresOkon et Oyi,
au nord de la Cross River). Il conserve le schémadu Traité avorté MOOR-PUTTKAMER du 16 avril 1901,en adoptant comme point de départ de la frontière
l'embouchure de 1'Akwayafé (Akpa Yafe) au point central de la ligne joignant King
Point et BakasiPoint. L'article 1du Protocolepour:uit
"The boundary then followsththal oweteeAkwayafe
River (known also in the upper reaches as the
Akpakorum River) to the junction of the Ebe and
Akpakorum Rivers, in such a way that the Mangrove
Islands, near Ikang, are divided as shown on the
adjoining map, and the two small Mangrove Islands
north of Archibong and Ikang, respectively, fa11on the
English side."
2.53 L'article 2 énonceque:
"In ail cases where a riveror Streamfom the boundary,
the thalweg shall the boundary-line."
2.54 L'article 3 concernele statutdes piliers frontaliers (bornes de
frontière:
"The pillars and other objects put up by the
Commissioners to mark the boundary are to form the
political boundary, even if later, through more accurate
determination of the positions, their geographical
positions are altered."
2.55 L'article 4 du protocole dispose poursa part
"Should the Mangrove Islands in the estuary of the
Akwayafe River change their positions, and the deepest
channel take another course, thanew division of the
islands and a chart of the new deepest channel shall be
made."
2.56 Enfin, l'article 5 du protocole, qui concerne leshabitants de
la zone frontalière, prévoitque, dèsque les Gouvernements allemandet britannique
seront parvenusà un accord sur la délimitationde la frontière,les indigènes dontla
nationalitéaura changé enraison de la rectificationdu tracéde la frontièredisposeront
d'un délaide six mois pour passer, en emportant leurs biens, de l'autre côtéde la
frontièresi tel est leur désir. Lestribus àproximitéde la ligne de démarcation
ont été avertiesde laprobable rectificationde la frontière.
2.57 Une note du 23 mai 1907,adresséepar Frank LASCELLES
de l'ambassade britanniquà Berlinà von MÜHLBERGdu Ministère allemand des
Affaires étrangères,donne acte de l'acceptationpar le Gouvernementbritannique dela ligne de démarcationdéfuiiedans le protocole HERRMANN-WOODROFFE,et
apporte quatre modifications mineures visant à harmoniser le texte avec la carte
jointe. Cette note s'enquiert également desintentionsdu Gouvernement allemanden
ce qui concerne l'acceptation par celui-ci de la frontière délimieans le protocole
HERRMANN-WOODROFFE. Une note du 2 juillet 1907, rédigéeen réponsepar
von MÜHLBERG, du Ministère allemand des Affaires étrangères,indique que le
Gouvernement allemand, s'il ne voit aucun inconvénientaux modifications très
mineures proposées par lapartie britannique, n'a pas été enmesure d'approuver la
ligne de démarcation définiedans le protocole HERRMANN-WOODROFFE, pour
les raisonssuivantes:
i) La description de la frontièrecontenue dans leprotocole n'est pas vraiment
complète "as the Commissioners could not agree conceming the line of the
Anglo-German boundary from the confluence of the Akwayafe with the Old
Calabar or Cross River southwardsasfar as the open sea, so thatthe boundary
Westof the Bakassi Peninsula is still undefme...it seemstherefore desirable
to make this point quite clear and in such a manner that, on the one hand the
fishing rights of the native populationof the BakassiPeninsula in the Cross
estuary are quite decided and on the other hand the free use of the Cross
estuary from the sea to the mouthof the Akwayafeis assuredfora navigation
purposes to both nations in the samemanner" (AnnexeM.C. 43).
ii) Le tracé de la frontière ne peut en aucun cas êtreacceptéen l'absence de
dispositions relatives la libre navigation sur la Cross River intégréeà un
accord international.
iii) 11conviendraitde modifier le paragraphe4 du protocole.
iv) 11conviendraitd'abroger l'articl3 du Traitéanglo-allemanddu 14avril 1893.
2.58 Cette réponse négative entraîna de nouveaux échanges de
vues entre les gouvernements britanniqueet allemand pendanttoute la fm de l'année
1907et en 1908, puis en 1909lorsque de nouvelles propositionsfurent présentéespar
les deux gouvernements pour tenter de surmonterces difficultés, notamment ausujet
de la délimitatioà l'embouchurede la rivièreAkwayafé,quis'avéra êtrle a question
la plus délicate. Une proposition soumise par le Gouvernement britannique au
Gouvernement allemand à la fm du mois de juillet 1909, en vue de résoudre ceproblème, réussit à débloquerla situation et entraîna la signature du Traitéanglo-
allemand du 6octobre 1909(non ratifié - v. infra,par. 2.75).
7. Le Traité anglo-allemand du 19 mars 1906, relatif à la
frontièreséparantles territoires britanniques et allemands de
Yola au Lac Tchad
2.59 On se souviendra que le Traité anglo-allemand du 15
novembre 1893(v. supra,pars. 2.36 à 2.40) avaitétéconcluen toute hâte, comme le
confient en effet les termes de ses articles II et III. En 1903, la Grande-Bretagneet
l'Allemagne avaient convenu de nommer des commissaires (responsables de la
Commission de Délimitation)qui auraient pour tâche de procéder à une étude
trigonométriqueet topographiquede la zone autourde Yola et d'étendre ensuite cette
étude à toute la ligne entre Yola et le Lac Tchad. Une description détailléedes
travaux de cette Commission de délimitation a ensuite été faite par le Colonel du
Génie LouisJACKSON, responsable britannique dela Commission. Il définit ainsila
tâche de la commission :
"The task of the Yola Chad Bounda~yCommission was
to survey and delimit the AngloIGeman boundary from
Yola to Lake Chad. For this purpose it was necessaryto
fucthe latitude and longitude of Yola, and to carry it up
by triangulationto the southem shore of the lake and to
Kukawa. " (L. JACKSON "The Anglo-GennanBoundary
Expedition in Nigeria", Geoaravhical Joumal no 26,
Royal Geographical Society,1905, p. 28).
2.60 JACKSON explique qu'il a quittél'Angleterre le 17janvier
1903 avec le responsable allemand de la Commission (le CapitaineGLAUNING) et
que, après avoiratteint Yola le 4 avril, la Commissionpassa quatre moiàtravaillerà
la triangulation du secteur de Yola. Il leur fallut passer un mois de àlYola pour
enregistrer tous les résultatset réorganiserles porteurs avant que la Commission ne
traverse la Bénouéet se déplace versle nord le ler septembre. L'étudefut poursuivie
rapidement à travers les collines en dépit du mauvais temps, mais un retard
considérablefut pris dans la plaine du Bornou, où il fallutse tailler un chemin à
travers l'épaisse végétatiop nour réaliser la triangulation. A la fin de l'année,
toutefois, l'expéditionavait atteint Kukaw; et vers la mi-février1904, la tâche était
achevée surla rive du Lac Tchad (L. JACKSON, op. cit., par. 2.59, p. 31).2.61 L'article1 du traitéde 1906 (AnnexeM.C. 37) confirme le
tracéde la frontièredans le secteur de Yola tel qu'il avait étéaccepté parles deux
responsables de la Commission dans un protocole signéle 10 août 1903 et qui est
annexéau traité,avec deux exceptionstoutefois :
la longitudedu centre de Yola sera12" 29' 30" ;
(1)
(2) au nord de la jonction du Mao Hesso et du cours principal de la rivièreFaro,
la frontièrese poursuivra le long de la lignemédiane dela rivièreFaro jusqu'à
ce qu'elle rencontre la Bénoué, es tuivra alors la ligne médianede la Bénoué
jusquà l'embouchurede la rivière =el.
2.62 Les articles II à W incorporent ensuite une description
détailléede la frontièrede l'embouchurede la rivièreTieljusqu'à un pointsitué surle
Lac Tchad. Il y eut un différendde dernièreminute (en mars 1906) au sujet du point
septentrional d'aboutissementde la frontièresur le Lac Tchad, mais on put parvenir
rapidement à un compromis par lequel l'Allemagne se verrait attribuer Dikoa et la
zone alentour, et la Grande-Bretagnerecevrait Uba plus au sud. Le différendtournait
autour de la signification du mot "rive" tel qu'il apparaissaidans le Traité de 1893,
qui désignait le repère moven des hautes eaux (comme le prétendaient les
Britanniques) ou le point que les eaux ne dépassentgénéralement pas (comme le
prétendaientlesAllemands).
2.63 L'articleVI11énonce :
"It is agreed that the boundary as above defined shall be
marked out as soon as possible, exceptalong the courses
of rivers, in a permanent manner, with posts or
othenvise."
2.64 L'article VI11accorde de plus aux personnes chargéesde la
démarcationde la frontièreune certaine marge de manoeuvre :
"In cases where the boundary is not marked by a river,
and where special local circumstancesmake it desirable
not to follow the straight line they are authorised to Vary
it by mutual agreement to the extent of not more than
lkm., measuredat right anglesto the line".
2.65 Ces modificationsdu tracédoivent apparaître clairement sur
les plans, et faire l'objet d'un rapport;elles ne sont considérées comme définitives
qu'aprèsavoir été ratifiéep sar les deux gouvernements.2.66 L'article IX autorise les fonctionnaires des deux
gouvernementssur place à déterminerd'uncommun accordet sur la basede l'équité à
qui reviennentles îles sur les rivières, cesdécisions tlles aussi être ratifiées par
les deux gouvernements.
2.67 L'article énonceque, lorsquela frontièreestconstituéepar
des rivières,les populations des deuxrives auront les mêmedroits de navigation et
de pêche ; et l'articXI stipule que chaque foisqu'un territoirepasse, en vertu du
traité,de la juridiction d'unepuissanàecelle de l'autrepuissance, les occupants de
ce temtoire seront en droitde choisirlibrementde quelcôtéde la frontière ilsveulent
résider,et ils disposerontd'un déliuffisantpour faire leursrécoltes et les emporter
avec euxavecle restede leurs biens.
2.68 LR Traitédu 19 mars 1906 fut dûment ratifiépar les deux
gouvernements (voir l'échangede lettres du 16 juillet 1906 entre WHITEHEAD
[ambassadede Grande- Bretagne à Berlin] et von TSCHIRSCHKYdu ministèredes
Affaires étrangères allemandr,eproduitesen annexeIIIau traité).On remarquera que
ce traité délimite une "frontière définitive" entreles territoires allemands et
britanniques,de Yola au Lac Tchad.11n'estplus questiond'une lignede démarcation
des sphèresd'influence allemandeet britannique.
8. L'Echangede notes anglo-allemand,du 22 févrierau 5 mars
1909, confiant les protocoles définissantles frontières
entre(1) Goregeet le Lac Tchad (12février1907)et (2)Uba
et Maio Tiel(11mars 1907)
2.69 Ces deux protocoles des12 févrieret 11 mars 1907ont été
manifestement rédigé en vue de l'application darticlesIII,IX et XI du Traitédu
19 mars 1906. Ilssont reproduitsà l'AnnexeM.C. 52, ainsique 1'Echangede notes
de couverture dans la version publiée dansle Consolidated Treatv Series. Le
Protocole du 12 février 1907donne acteque, après qu'eurentété étudiéesde façon
détailléeles circonstanceslocales, il n'a pasjugénécessairede modifier la ligne
droite définiedans le Traitédu 19 mars 1906; que, ence qui concerne la rivière
Yedseram, les îles situéesau nord du Malmatari ont étédéclarées britanniques et
celles situéesau sud, allemandes;et que, dans les temtoires passantd'une juridiction
à une autre, les habitants disposaientd'un délai dedeux mois pour effectuer leurs
récolteset s'installerde l'autre côtéde la frontière.Le Protocole du 11 mars 1907établitnotamment que Vango Manyo et Tara se trouvent en territoire allemand et
Banyoen temtoire britannique.
2.70 Une commission de délimitation anglo-allemande fut
constituéeen 1907pour délimiterla frontièreentre le Nigeria et le Cameroun de Yola
à la Cross River. La délégationbritannique étaitdirigéepar le Major WHITLOCK et
la délégationallemande par le Major HAERING, qui fut ensuite remplacé par
l'oberleutnant Von STEPHANi. Un compte-rendu des travaux de cette Commission
de Délimitationfut ensuite publiépar le Major WHITLOCK,qui note:
"The boundary-line south of Yola approximatelyfollows
the circumference of a circle whose radius is 29 miles,
and it was at the point where this circle cuts the line
joining the centre of Yola with the centre of the Cross
River rapids that the work of the Commission started.
The boundary-line mns generally in a south-westerly
direction to the Cross River and is about 320 miles in
length." (G.F.A WHITLOCK, "The Yola-Cross River
BoundaryCommission, Southern Nigeria. " Geogra~hical
Journal no 36, Royal Geographical Society, Londres
1910,p. 426).
2.71 Vers la fin de son compte-rendu, le Major WHITLOCK
observe que :
"The British and German Commissions met at Bashu,
and after comparing maps and results agreed on a
provisional boundary,signing the protocol on April 16,
1909." (G.F.A WHITLOCK, op. cit., par. 2.70, p.
437).
2.72 Certaines des difficultés rencontrées sont exposéedsans une
annexejointe au compte-rendudu Major WHITLOCK :
"The detail of the country was filled in by plane-tabling,
the presence of very large quantities of iron in the hills
and their neighbourhood rendering the compass very
umeiiabie, except for road-sketches between fixed
points. The mean variation of the compass along the
boundary-line is 1lo8'W ....At Bashu, the end of the
line to be surveyed, where there was a boundary pillar
fmed by Captain Woodroffe, the British calculations
differed from those of the Germans by 0".37 lat. and
2".22 long."(G.F.A WHITLOCK, op. cit. par 2.70, p.
438).
2.73 Le Protocole signé à Bashu le 16 avril 1909 ne fut jamais
ratifié officiellementpar les deux gouvernementsdu fait que, sur la fin des travaux dela commission de délimitationYola-Cross River(enjanvier 1909), les gouvernements
britannique et allemand étaient tombésd'accord sur le principe qu'une frontière
"naturelle" de Yola à la Cross River serait préférableà une ligne droite. Le
responsable allemand de la Commission (Von STEPHANI) avait cependanttoute
latitude de déciders'fi étaitpossible de délimiterpendantfinde la saison sèche une
frontière "naturelle" qui serait provisoirement etimmédiatemeobligatoire. Il décida
clairement que cela n'étaitpas possible. Son point de vue est explicitédans une lettre
adressée par le Ministère desColonies au Ministère des Affairesétrangères,le 2
septembre 1909,qui expose entre autres :
"Sir Edward Grey wiil recollectthat the commissioners
were authorisedto select a boundaryon the give-and-take
principle, utilising natural features as far as possible. In
submitting the accompanying protocol [the Bashu
protocol], Lieutenant-Colonel Whitlock, the British
commissioner, has explained that Lieutenant Von
Stephani was not prepared to cany out this arrangement
on the spot, and the commissioners therefore agreed to
the provisional straight line boundary described in the
protocol, leaving the question of a "natural" boundary
for the consideration of their respective
Governments".(AnnexeM.C. 54).
2.74 Le Protocole de Bashudevait de toute façon être rapidement
dépassé par le Traitéanglo-allemandrelatifàla frontièreentreYola et la mer, conclu
à Londres le 6 octobre 1909, qui fait l'objet des développemeci-après.
2.75 Le Traitéanglo-allemandsigné à Londres le 6 octobre 1909
(Annexe M.C. 55) comporte une description de la frontièrede Yola à la mer, et était
assorti de cartes paraphéesle même jour par les délégués britanniqueest allemands.
Pour le secteur de Yolaà la Cross River, une frontière"naturelle"vient se substituer
au tracé rectilignedéfini dans le Protocole de Bashu. Plus important encore,
cependant, le traité signéle 6 octobre 1909 intégraitl'arrangement qui avait été
négocié par ailleurs entre le Gouvernement britanniqueet le Gouvernement allemand
au sujet de la délimitationà I'embouchure dela rivière Akwayafé(v. supra. par.
2.58). Cet arrangement se dégageait de plusieurs échanges quaivaient eu lieu entre
les deux gouvernementsen 1908et 1909. Une partiedu problèmeétaitliée à la dérive
de bancs de sable à I'embouchure dela rivière. Toutefois, le Traitédu 6 octobre
1909, bien que ratifié parle Gouvernement britanniquele 13décembre1909, ne reçut
pas l'aval du Gouvernement allemand, très probablement parcequ'il ne comportait
aucune dispositionsur la réglementationde la navigationsur la Cross River, questionà laquelle le Gouvernementallemand attachaitla plus grandeimportance(v. le rapport
de DETZNER citéinfia., par. 2.77).
9. Le Traitéanglo-allemand relatif (1) à la délimitation dela
frontière entre leNigeria et le Cameroun, de Yola la mer;
et (2)à la réglementationde la navigation surla Cross River,
conclu à Londresle 11mars 1913.
2.76 Ce traité, comme certains des traités anglo-allemands
précédentsanalysés ci-dessus, fut précédé d'uneautre étude et d'une autre
démarcation partielle. L'étude elta démarcation partiellefut limitéeau secteur Yola-
Cross River, puisque les deux gouvernements avaientadmis que le secteur s'étendant
de la Cross Riverà la mer avait déjaétédélimité par la CommissionHERRMANN-
WOODROFFE en 1905-1906. Ami, dans une lettre du 10juillet 1912 adresséepar
le Ministère des Coloniesau Ministère desAffaires étrangères, il est précis: que
"The Director of Military Operations points out that it
should be understood by the British and German
Govemments that the boundary to be demarcatedis that
between Yola and the Cross River only, as the portion
between the Cross River andthe sea was marked with
boundary pillars by Captain Woodroffe'sCommissionin
1905-1906" (AnnexeM.C. 74).
2.77 Là encore, des comptes-rendusdes travaux dela Commission
de Délimitationde la frontièreanglo-allemandeen 1912-13ont été publiés tantpar le
responsable britannique (le Capitaine W.V NUGENT) que par le responsable
allemand (I'Oberleutnant Hermann DETZNER). L'étudeet la démarcationpartielle
concernentplus particulièrementle Traitéanglo-allemanddu 12avril 1913, relatàfla
démarcationde la frontièrede Yola à la Cross River (voirinfia les pars. 2.81-2.84 et
2.94) mais ces deux comptes-rendussontbrièvementanalysésici. Le compte-rendude
DETZNER situe le contexte dans lequel les deux gouvernements ont décidé
d'effectuer une nouvelleétude etune nouvelle démarcationpartielle de cette partie de
la frontièreallant de Yolàla mer : " Entre 1907et 1909, la Commissionde délimitationde
la frontièreYola-CrossRiver a étudiéla longue ligne
droite allant delaorne 17 à la Cross River.Sur la base
de cette étude, desnégociationont eu lieuà Londresen
1909 sur le choix d'une ligne naturelle pouvant faire
office de frontière. Bien qu'à ce moment là, les deux
parties aientéjàété entièrementd'accordsur le tracé de
la ligne de démarcation,ce n'est que le 11 mars 1913
que le traitéput êtresigné à Londres, du fait que, du
côté allemand,on attachait unegrande importance à ce
que soient incluses dans ce traité des dispositions
relatives la libre navigationsur la Cross River, et cette
partiedu traiténe pouvaitêtre élaboréfecilementet sans
la participationdes gouvernementsrespectifs. Les deux
gouvernementsavaient déjàdécidéen 1912, lorsqu'il
sembla qu'on était parvenu à un accord sur la libre
navigation, de commencer la démarcation (de la
frontière)au ler octobre, de façonà pouvoir profiter de
la périodela plus favorablede l'année" (H. DETZNER
" Die nigerische Grenze von Kamenin zwischen Yola
und dem-cross-~luss " Mitteiluneen ausden Deutschen
Schutzeebieten,No 26, 1913, p. 317, traducion de la
République du Cameroun ; AnnexeM.C. 84) (3.
3
"In den Jahren 1907bis 1909vermassdYola-Cross-schnellen-Gren ziexnge,ition
gerade Lie vom Pfeiler 17binim Crossfluss. Auf Gmd dieser Vermessungenfanden
noch im Jahre 1909 in London Verhandlungen über die Wahl einer natürlichen Linie
angepassten Grenze statt. Obgleich über die Grenzfiihrung schon damals volles
Einvemehmenerzielt wurde, konntedas Abkommendoch ers1am Min 1913 in London
unterzeichnetwerden, da deutscherseitsWert darauf gelegt wurde, die Bestimmungen über
die freie Schiffahn auf dem Cross-Fluss in den Venrag aufninehemen, und dieser Teil des
Abkommens nicht so glan und nicht ohne Mitwirkung der beteiligten Gouvernements
erledigt werden konnte. Immerhin beschlossendie beiderseitigen Regierungenbereits 1912,
als die Ubereinkunftüber die freie Schiffahrîin sicherer Aussicht stand, am 1. Oktober mit
der Vermarkungnibeginnen,damitdie günstigeJahreszeitausgenutztwerdenkonne".2.78 Le compte-rendude NUGENTapporte d'autresdétails sur le
contexte :
"The section of the boundary between Nigeria and the
Kameruns which wasdemarcatedby an Anglo-German
Commissionduring the winter of 1912-13, is that which
lies between the villageof Bayare, 30 miles south-west
of Yola, and the customs station of Obokum, on the
Cross River. The total lengthof this frontier, measured
frompost to post, is360miles. Itis partlynatural,partly
artificial, and liesfor the most part in wild mountainous
country, crossing the long spurs which run north and
Westfrom the central plateau of the Kameruns,into the
fertile plains of Nigeria..The area though which the
boundary-line runs was surveyed by the Commission
under Colonel Whitlock,R.E., between 1907 and 1909
(V. Supra, par. 2.70). Having been a member of that
Commission, 1 was sentout again in August, 1912, to
mark the boundaryon the ground, the line having been
previously settled approximatelyon the map, at a
conference between the British and German
Govemments." (W.V. NUGENT, "The Geographical
Results of the Nigeria-KameninBoundaryDemarcation
Commission of 1912-13," Geogra~hicalJournal n043,
1914.pp. 630-31 ;AnnexeM.C. 95).
Il est fait ici probablement référenàel'accord conclule 6 octobre 1909, que, comme
nous l'avons vu, DETZNERconfie.
2.79 DETZNER et NUGENT font tousdeux étatde l'esprit de
coopérationqui a présidé à l'ensembledes travaux dela commissionde délimitation.
Ainsi DETZNER note :
"For a period of seven months, both Commissioners
worked together, without having to contend with
differences of a material or persona1nature, except on
one occasion; at any time, both parties were ready to
reach a mutual understandimg, .. and no mistrust
harnpered the joint effort, which after a harmonious
beginning, was pursued and completedharmoniously."
(H.DETZNER, op. cit.gar. 2.77, p. 330 traductionde
la République du Cameroun ;AnnexeM.C. 84). (4)
4 "Uber siebenMonatehattendie beidenKomrnissionnisammengearbeitet,ohneauchnur
ein einziges Mal mit Differenzensachlicher oderpersenlicherArt kanifmüssen ;
jederzeit waren beide Abteilungenbereini gegenseitiger Unterstütmg... und kein
MisstraueveruigenedasgemeinsameWerk,daseinenharmonischenAnfanggenommen,in
steterArbeitharmonisdurchgeführtndabgeschlossen wurde".2.80 NUGENT confirme l'atmosphèreamicale dans laquelle s'est
effectuée la démarcatiode cettepartie de la frontière
"On April 4, 1913, the two Commissions reached
Obokum, the British customs station on the upper Cross
river, a picturesque riverside village surrounded by
watecfails. The last pillar was placed at a bend of the
river, about 2%miles above this place. On April 12, the
maps and agreement were signed and the two parties
separated, after having worked together for morthansix
months without a single pointof difference. The whole
demarcation had been carcied out on the give-and-take
principle, within the limits laid down, neither side
gainingor losingany appreciableamount of temtory...It
is hoped that this demarcationwill be final, and that this,
the least-known and most mountainous frontier in West
now permanently established." (W.V.NUGENT, op. cit. is
par. 2.78, p. 64; Annexe M.C. 95).
2.81 Les articles 1 à XV du Traitédu 11 mars 1913 (Annexe
M.C. 82), décrivent etdélimitentla mêmeportion de la frontièreNigeria-Cameroun
(de Yola à la Cross River) que celle délimitéeaux paragraphes 1 à 21 (premier
paragraphe) du Traitédu 12 avril 1913 signéà Obokum par NUGENT et DETZNER
(Annexe M.C. 86). Le Professeur BROWNLIE qui semble douter de la validité du
Traité NUGENT-DETZNERdu 12 avril 1913, en reproduit néanmoinsle texte,
accompagné du commentaire suivan t
"The instrument did not receive publicationin the
&& but at the same tirne it seems to have been
accepted as applicable by the two Govemments." (1.
BROWNLIE, Afcican Boundaries, C. HURST and Co,
Londres, 1979, p. 561, v. suprapar. 2.77).
2.82 L'auteurprécise également:
"Whilstthis instrumentwas not an international treaty in
form it was made in circurnstances in which the two
Govemments were legally bound to accept the
delimitation providedthe Commissionersacted withinthe
scopeof their authority." (op.cit. par. 2.81, p. 556).
2.83 Les hésitationsdu Professeur BROWNLiE, si elles sont
compréhensibles,sont sans fondement réel. Le TraitéNUGENT-DETZNER du 12
avril 1913 intervient chronologiquement aprèsle Traitédu 11 mars 1913, et, de ce
fait, dans la mesure où des incohérencesexisteraient entre ces deux traités
(incohérencesqui ne pourraient concerner que la portion de frontière délimitéeansles articlesà1XV du Traitédu 11mars 1913et démarquée aux paragraphes 1 à21 du
Traitédu 12 avril 1913), le dernier en date de ces traitésprévaudrait,tout au moàns
défautde preuve que les responsables britanniqueet allemand de la Commission
avaient, en concluant le Traitédu 12 avril 1913, dépassle cadre de leurs fonctions.
11n'existe, àla connaissance du Cameroun, aucune preuvedans ce sens. Le référence
faite par le Professeur BROWNLIE au fait que les deux gouvernements étaient
légalementtenus d'accepter la délimitationde NUGENT-DETZNER repose à bon
droit sur le contenu de l'articleXXVIII du Traitédu 11mars 1913,qui énonce:
" In marking out the boundary the representativesof the
two Govemments shall have the power, subject to
subsequent approval by the two Govemments, to make
minor deflections from the boundary herein laid down,
such deflections not to exceed 1 114miles (2 kilom.) in
cases where it is considereddesirable, iner that farms
shall not be separated from the villages to which they
belong."
2.84 Encore une fois, à la connaissance du Cameroun, iln'a pas
été suggéré que ld aémarcationtelle qu'elle a étéréalisépar le Traitédu 12 avril
1913, venait de quelque façon que ce soit en violation de cette disposition. Sur ce
point, il reste seulemenàajouter que, pour des raisons qui seront mises plus loin en
évidence (v. infra par. 2.125), seule la portion de frontière situéeentre la rivière
Gamana et la Cross River est maintenant déterminée parles paragraphes 13 à 21 du
TraitéNUGENT-DETZNER du 12 avril 1913 (voir International Boundarv Studv,
(1.B.S)no 92 (révisée) du 21 novembre 1974établipar le @%ce of the Geographer,
Départementd'Etat, p. 19 ; AnnexeM.C. 245).
2.85 Les articles XVI et XVII du Traité du 11 mars 1913
délimitent le tracé d'une autre partiede la frontière, allant du point en amont
d'Obokum visé à l'article XV (ainsi que dans le compte-rendu de NUGENT) au
thalweg de la rivière Akpakomm (connue dans son cours inférieursous le nom
d'Akwayafé)(voir infrapars. 4.379 et 4.392-4.394).
2.86 Comme on le verra, la frontière ainsidécrite pourle secteur
compris entre le point en amontd'Obokumet le thalwegde la rivièreAkpakomm est
pratiquement identiqueà la frontièrecorrespondantau mêmesecteur décriteà l'article
1du Protocole de la Commission de délimitation dela frontière entrele Camerounet
le Nigeria Méridional (le ProtocoleHERRMANN-WOODROFFE) signéau mois
d'avril 1906 (bien que la ligne décrite dans le Protocole HERRMANN-
WOODROFFE monte de la côte vers le nord et ne descende pas, comme dans leTraitédu 11 mars 1913, de l'intérieurvers le sud en direction de la côte, v. pars.
supra2.69-2.70). On le verra aussi, les articleàXXIXdu Traité du11mars 1913,
sont pratiquement identiques aux articlesà129 du Traité (nonratifié)du 6 octobre
1909(Annexe M.C .55).
2.87 Les articleXVIII à XXI du Traitédu11 mars 1913méritent
d'être intégralement cités, parce qu'ils f~ent le tracé de la frontière entre le
Cameroun et le Nigeria dansla régionde la péninsulede Bakassi:
"XVIII. Thence it follows the thalweg of the Akpakorum
(Akwayafe) River, dividing the Mangrove Islands near
Ikang in the way shown on the aforesaid map T.S.G.S.
2240, sheet 2. It then follows the thalweg of the
Akwayafe as far as a straight line joining Bakasi Point
and King Point.
XIX. Should the thalweg of the Lower Akwayafe,
upstream from the line Bakasi Point-King Point, change
its position in such a way as to affect the relative
positions of the thalwegand the MangroveIslands, a new
adjustmentof the boundaryshallbemade, on the basis of
the new positions, as determined by a map to be made
for the purpose.
XX. Should the lower course of the Akwayafeso change
its mouthas to transfer it to the Rio del Rey, it is agreed
that the area now known as the Bakasi Peuinsula shall
still remain Germantemtory. The same conditionapplies
to any portion of temtory now agreed to as being British,
which may be cut off in a similarway.
XXI. From the centre of the navigable channelon a line
joining Bakasi Point and King Point, the boundary shall
follow the centre of the navigable channel of the
Akwayafe River as far as the 3-mile limit of temtorial
jurisdiction. For the purpose of defking this boundary,
the navigable charnel of the Akwayafe River shall be
considered to lie wholly to the east of the navigable
channel of the Cross and CalabarRivers."
2.88 ks termes de l'article XX méritentd'êtreexaminésde près.
Ils confirment que, probablementen conséquence duTraitéMOOR-PUTTKAMERdu
16 avril 1901 qui n'a jamais vu le jour, du protocole HERRMANN-WOODROFFE
d'avril 1906et du Traitéanglo-allemand(non ratifié)du 6 octobre 1909, la péninsule
de Bakassiavait été reconnue pendantplusieursannées avant1913comme relevant de
la juridiction allemande. Autrement dit, le déplacementde la frontière de la rive
droite du Rio del Rey (telle qu'elle est définie parle Traitédu14 avril 1893) au
thalweg du cours inférieurde 1'Akwayafé (telle qu'elle est définie parle ProtocoleHERRMANN-WOODROFFE) est maintenant considérécomme définitif ; et la
péninsule de Bakassi doit demeurer allemande, mêmesi le cours inférieur de
1'Akwayafé devait être modifet déboucherdans le Rio del Rey.
2.89 Il convientd'ajouter que l'artiXXU énonce que :
"XXII. The 3-mile limit shall, as regards the mouth of
the estuary [of the AkwayafeRiver], be taken as a line 3
nautical miles seaward of a linejoining Sandy Point and
Tom Shot Point".
2.90 L'articleXXIII confie que rien dans le traité n'empêche
les navires britanniques ou allemands, de quelqutype que ce soit, d'emprunter le
cours le plus approprié entrela haute mer et la rivièreAkwayaféni de naviguersur
cette rivièreen ayant droit au mêmtraitement. Les dispositionsdes articles XXIV et
XXV ont trait au marquage, au dragage et au balisage des chenaux navigablesdes
rivières concernéesLe Gouvernementbritannique assume laresponsabilité (laisséà
son appréciation) de leur miseen oeuvre sur la nvière Cross River et la Calabar
River, à partir de la limite de 3 milles vers l'intérieurdes ter:pour la rivière
Akwayafé, le marquage, lebalisage ou le dragage nécessitent l'accord des deux
gouvernements et l'un des deux, ou les deux, peuvent les réaliser. Enfin,l'article
XXX confime les cartes signéespar les déléguéb sritanniques et allemands le 6
octobre 1909 (date de signature du Traitéanglo-allemand (nonratifié) de 1909)et
énonce qu'elles doiventêtre " ... regarded as foming an integral part of the
Agreement". En raison de l'importance ainsi accordée à ces cartes, elles sont
reproduites dans l'Annexecartographiquedu présent Mémoire.
2.91 En résumé,le Traitéanglo-allemand du 11 mars 1913 fut
conçu pour combler le vide créépar le fait que ni le Protocole HERRMANN-
WOODROFFE d'avril 1906, ni le Traité conclu à Londres le 6 octobre 1909,
n'avaient été officiellementcceptéspar les deux gouvernements, pour les raisons
exposéesaux paragraphes 2.57 et 2.75 cidessus. Cela est confié par les travaux
préparatoires au Traité d11mars 1913. Son texte fut en fait négocde façonun peu
nonchalante, pendant les années1911 et 1912, en s'attachant surtoutaux nouvelles
dispositions relativàsla réglementationde la navigationet du commerce de transit
sur la Cross Riveràinclure dans le Traité.En ce qui concernela frontière terrestre de
Yola à la mer, les deux gouvernements se contentèrent de reprendre presque
intégralement les dispositions du Traité (non ratifié) du 6 octobre 1909. En
particulier, les articles XVIàIXXVI du Traitéanglo-allemand du 11 mars 1913reprennent mot pour mot les paragraphes 18 à 26 de celui du 6 octobre 1909, à
l'exception d'une phrase ajoutée,"et de naviguer sur cette rivière en jouissant du
même traitement" à l'article XXIII du Traitéde 1913. Cela est expliqué dansune
note de la mêmeépoque (du24 juin 1912) adresséepar le Ministère des Affaires
étrangèresau Directeur des opérations militairesàLondres:
"Brigadier Generai Wilson will observe that the
agreement is, except for certain verbal alterations,
identicai with the unratified agreement of 1909. As
regards the question of the maps to be attached to the
agreement, it has been arranged by pnvate
communicationwith the GennanEmbassy that the maps
should not be re-signed, but that those attached to the
agreement of 1909 should be attached to the present
agreement and should be held to form an integral part
thereof.An article making this provision has accordingly
been added to the English version of the draft.." (FO
3671275de 1912,AnnexeM.C. 72).
2.92 Plus important encore, on parle du Traitéanglo-ailemanddu
11 mars 1913 comme d'un traité concernant notamment "ladélimitation de la
frontière entre le Nigeria et le Cameroun, de Yolaà la mer." Il n'est plus question
d'une ligne de démarcation,ni mêmede séparationde sphères d'influence, comme
c'étaitle cas dans les Accords anglo-allemandsde 1885 et 1886 et dans l'article IV,
paragraphe 2, du Traitéanglo-allemand de 1890relatif à l'Afrique età I'Heligoland.
Il s'agit bien d'une frontière entre le Nigeria et le Cameroun. A cet égard,on peut
rappeler que, dans la récenteaffaire du DifférendTem'torial (Jamahiriyaarabe
libyenne/Tchad),la Cour a dû examiner des argumentsbaséssur la distinctionentre la
délimitationde sphères d'influenceet la délimitationd'une frontière. Dans son arrêt
du 3 février1994, la Cour énonçaitnotamment :
" La fmation d'une frontièredépendde la volonté des
Etats souverains directement intéressés.en n'empêche
les parties de déciderd'un communaccord de considérer
une certaine ligne comme une frontière, quel qu'ait été
son statut antérieur. S'il s'agissaitdéjàd'une frontière,
celle-ci est purement et simplement confirmée. S'il ne
s'agissaitpas d'une frontière, leconsentement des parties
à la " reconnaître " comme telle confereà la ligne une
force juridique qui lui faisait auparavantdéfaut"(C.I.J.,
Rec. 1994,p. 23).
2.93 A la lumière de ces principes, la Cour n'aura, dans la
présenteaffaire, aucune difficultà conclure que, dès mars 1913, ce qui avait peut-
êtreétéinitialement (en 1885 et 1886) une ligne de partage des sphères d'influenceallemande et britannique au Cameroun et dans le "Oil Rivers Protectorate", s'était
transformée sous l'impulsion des deux Etats en une frontière territoriale entre le
Cameroun et le Nigeria, de Yola à la mer.La frontièreterritoriale entre le Cameroun
et le Nigeria de Yola au LacTchad avait déjàété fixéepar 1'Echangede notesanglo-
allemand du 22 févrierau 5 mars 1909, confmant les deux protocoles des 12février
1907et 11 mars 1907(v. suprapar. 2.69 ).
10.Le Protocole anglo-allemand relatif à l'abomement de la
frontièreanglo-allemandeentre le Nigeria et le Cameroun,
de Yola àla Cross River, signà Obokumle 12avril 1913.
2.94 11s'agit de l'Accord NUGENT-DETZNER. Il a déjàété
analyséen détaildans le cadre de la discussiondu Traité du11 mars 1913 ci-dessus.
Il convient seulement d'ajouterque Su Edward GREY(alors Ministre britannique des
Affaires étrangères) etLICHNOWSKY(ambassadeurd'Allemagne à Londres), par un
échangede notes du 6 juillet 1914, confumèrentl'acceptationpar leur Gouvernement
respectif du tracé dela frontièredéfinidans le protocolesigàObokum ainsi que les
cartes annexées. Une copiede la traduction de la note adresséele 6 juillet 1914 par
l'ambassadeur d'Allemagne à Londres à SirE. GREY, en réponse à celle rédigéepar
ce dernierà la mêmedate faisant savoir queles Britanniquesacceptaientle protocole
d'obokum est reproduite enAnnexeM.C. 93, ainsi qu'une copie d'une lettreadressée
le 30 juillet 1914 par le ministèredes Colonies au ministèredes Affaires étrangères,
acceptant que le protocole d'Obokum et les cartes annexéessoient publiésdans le
Consolidated Treatv Series.Le fait que ces instrumentsn'aient pas épubliésen tout
état decause tient exclusivement aufait que la premièreguerre mondiale éclata cinq
jours plus tard.
11.Conclusionsur la situationen 1914
2.95 Cette longue série d'accordset de traitésconclus entre la
Grande-Bretagne et l'Allemagne entre 1885 et 1913 témoigne dusoin apporté à la
délimitationet à l'abomement des territoiresdu Cameroun allemandet du Nigeria.
Comme cela est expliquéci-dessus,une ligne dedémarcationinitialeentre les sphères
d'influence se changea rapidement en une frontière entre desterritoires sur lesquels
les Gouvernements allemand et britannique revendiquaient et exerçaient
respectivement des droits souverains. Il n'est pas besoin de souligner les énormesdifficultés auxquelles se heurtèrent les négociateurs des accord csoncemant la
frontière. Dans lesannées1880 et 1890, l'Afrique occidentale était pratiquement
inconnuedes Européens. La bande côtièreavait bien entendu étéen partie explorée
par des négociants européens et par le personnel de la Marine et d'autres
fonctionnaires chargésde mettre fm au commerce des esclaves ; mais même
l'informationdisponiblepour ceuxquidéclaraient connaître certaines régions côtières
étaitplutôt nidientaire, comme en témoignel'erreur commise en 1885 par le
Gouvernementbritanniquecomme parle Gouvernement allemandsur la nature et le
cours du Rio del Rey. Il ne faut pas oublier non plusque lestechniques d'étudede
terrain étaient encorerelativement primitives autoumant du vingtièmesiècle ; que,
dansun pays d'épaisse végétation,il fallaitse frayerun passagà travers celle-ci pour
procéder à la triangulation ; et que, de ce fait, les calculs effectués parles
topographes britanniqueset allemandsdifféraientparfois. JACKSONl'admet, en ce
qui concerne les travaux de l'expédition anglo-allemande de 1903-1904 chargéede
l'étudede la frontière entreYolaet le Lac Tchad:
"Theresult of the triangulationscamed up from Yolaby
the British and German commissioners differed at
Kukawa by 11 seconds of latitude and longitude." (1.
JACKSON, op.cit. par. 2.59, p. 438).
2.96 WKITLOCK constate égalementcertains écartsdans des
mesures relevées aucours des travaux de la Commission de Délimitationde la
frontièreYola-CrossRiver, entre1907et 1909 :
"Thedetail of the countrywas füled in by plane-tabling,
the presence of very largequantitiesof iron in the hills
and their neighbourhood rendering the compass very
u~eiiabie, except for road-sketches between fîed
points. This mean variation of the compass alongthe
boundary - line is 11.O8W.(variationbetween9 "5and
1.5")..
AtBashu,the endof the lineto be surveyed,wherethere
was a boundary pillar fîed by Captain Woodroffe, the
British calculations differfrom thoseof the Germanby
0".37 lat. and 2".22 long." (G.F.A WHITLOCK, op.
cit.gar. 2.70, p. 438).
2.97 Ces légers écarts entrlees Britanniqueset les Allemands sur
les calculs de triangulation ou les autres mesures effectuées lors destravaux de
différentescommissions de délimitation ne modifienten rien, dans un sens oudans
l'autre, la validité de toutaccord, quel qu'il soit, passésuite aux travaux deces
commissions. LRs écartsont étésoigneusement notéspar les commissaires auxfrontières eux-mêmeset donc communiqués aux deuxgouvernements. De plus,
certains des écarts ont disparu par la suite, quand des progrès technologiquesont
permis une harmonisation ou une approximationplus précisedes calculs britanniques
et allemandsdans le cadre des travaux de commissionsde délimitationultérieurs.
2.98 Il est également essentiel, quand on se penche sur la
consolidationprogressive de la frontièreentre le Cameroun et le Nigeria résultantde
cette sériede traitésconclus entre 1885 et 1913, de garder à l'esprit le sage conseil
donnépar un géographe :
"It must be stressed that boundaq negotiationsshould be
traced on the maps availableto the negotiators, for many
of the decisions would be inexplicable by reference to
modem maps." (J.R.VPRESCOTT,The Geogra~hv of
Frontiers and Boundaries, 1965, p. 62).
B. - Les Traités anglo-françaisde 1919et 1931et les autres
instrumentsconclus avantl'indépendance
2.99 En août 1914, la guerre éclataentre l'Allemagne d'une part,
la Grande-Bretagne et la France d'autre part. La guerre s'étenditrapidement aux
possessionscoloniales des puissanceseuropéennes en Afrique ; et dèsfévrier1916, le
Cameroun avait été envahipar les forces britanniqueset françaises:
"Because the declaration of war in 1914 by European
surrounded by Britishand French colonies, was subjected
to early attack. The Allied plan of campaignwas simple.
First, the ports of Tiko and Douala together with the
capital Buea were to be captured in order to prevent the
further provisioning of German forces and to disorganise
administration. Then the German territory was to be
invaded from a number of directions so that the German
troops would haveas large a defensivefront as possible. "The plan was successfuland the fightingended after 16
months inFebxuary1916; theallied forces weremainly
French and British with a small Belgian contingent.
Douala, Tio and Bueawere occupiedby an army which
proceeded to advance noah and east. Further invasions
tookplaceby Britishtroopsfrom Yolathroughthe Benue
valley, and from Ikom along the Crossriver.. .French
invasions were conductedfrom Fort Lamy and alongthe
Songa valley from French Equatorial Africa." (J.R.V.
PRESCOTT, " The Evolutionof the Anglo-FrenchInter-
Cameroons ~oundary ",Nigerian ~eogbhical Journal,
no 5, 1962,p. 103, AnnexeM.C. 230).
2.100 A la suite de la conquête franco-anglaise du Cameroun
allemand (Kamerun),des accordsdurentêtrerapidement passés en vue d'administrer
le territoire nouvellementoccupé.En 1916, les Britanniquesse sentirenten position
d'inférioritpour négocier avec les Françaiasu sujet du Cameroun du fait qu'à ce
moment là, la Grande-Bretagne détenait à elle seule tout le Sud-Ouest africain
allemand (la Namibied'aujourd'hui)et étaiten passe d'envahir l'Afrique orientale
allemande (devenuepar la suite le Tanganyika).La Grande-Bretagneétaitégalement
en possession de toutes les colonies allemandes dansle Pacifique, au sud de
l'équateur. Le 23 février 1916,des fonctionnaires britanniqueset français se
rencontrèrent à Londres et convinrent d'une ligne provisoire qui séparerait
l'administration britanniqueet françaisedes CameroonsLa ligne fut tracéesur une
carte à petite échelleet fut connue sous le nom de " Ligne PICOT " (ou parfois
"LignePICOT-STRACHEY ") d'après lenom du délégué français qui parapha cette
carte ainsi que celui du délégué anglais, STRACHED Ya.ns unelettre du 28 février
1916 à l'Ambassadeur de France à Londres (CAMBON), Sir Edward GREY
(Ministre des Affaires étrangèresritannique)soulignaqu'il étaitsouhaitable, pour
des raisonsd'ordreadministratif,de s'assurerquele temtoire de 1'Emirdu Bornoune
soit plus divisé, etdemandaen conséquenceau Gouvernement françaisd'accepterque
la portiondu Bomou s'étendant à l'estde la frontièrenigériane(tellequ'elleétaittrès
sommairement représenté pear la ligne briséesur la carte paraphéepar PICOT) soit
administréeparle Gouvernementbritannique.
2.101 Celaentraîna l'échangede lettresnglo-françaisdes 3-4 mars
1916 (Annexe M.C. 96). Dans sa lettre du 3 mars 1916 à Sir Edward GREY,
CAMBONindiquaitque le Gouvernementfrançaisacceptait lesfrontières tracées sur
la carte signéele 23 février parSTRACHEYet PICOT,avecles réservessuivantes :
"1. L'arrangement conclu aura un caractère
temporairecomme tout ce qui serait fait pour les autres
colonies allemandesoccupéespar lesAlliés. 2. Les forces anglaises de terre et de mer auront le
droit pendant toute la duréede la présenteguerre, de se
servir du port de Duala, si elles le jugentutile.
3. Si la question de la cession de Dualaà une tierce
puissance se pose entre la signature de la paix et
l'arrangement définitif concemant le Cameroun, le
Gouvernement britannique aura un droit de préemption
sur ce port.
4. Les détails relatifs au retrait des troupes et de
l'administration anglaises des temtoires qui rentreront
dans la sphère française, comme la répartition des
prisonniers faits et des taxes perçues par les Autorités
franco-anglaises feront l'objet d'une entente entre les
généraux anglaiset français.
5. Les sociétés anglaises existan t Duala pourront
continuer leurs opérationsmais le Gouvernementfrançais
ne sera pas tenu d'admettre la validité deconcessions
privilégiées ouaffermages de durée dans le cas où
l'autorité militaireBritannique en aurait consenti depuis
le débutde la guerre ".
2.102 La lettre poursui:
" Dans ces conditions le Gouvernementde la République
admet que le territoire de Bornou compris dans les
limites du Cameroun rentre sous l'administration
britanniqueet soit annexé (au) Nigeria.11admeten outre
que les lignes tracéessur la carte établiepar les délégués
anglais et français pourront êtrelégèrement modifiées de
manière à éviter le partage de villages, de champs
appartenant à certaines tribus, de plantations etc. En
particulier, la partie de cette ligne frontière la plus
proche de la mer sera tracéede telle manière qu'elle
évitera d'en interdire l'accèaux plantationsetc. situées
sur les pentes duMont Cameroun. "
2.103 Dans sa réponse du4 mars à CAMBON, Lord CREWE
indiquait que le Gouvernement britannique acceptait cet arrangement, avec les
réservesprécisées.Par la suite toutefois, le 11 mai 1916, CAMBON revint sur
l'acceptation par la France de l'annexion par le Nigeria du Bornou ex-allemand, en
expliquant que celle-ci, dans sa lettre du 3 mars 1916, allait à l'encontre de ses
instructions.
2.104 A la suite de cet échangede lettres des 3 et 4 mars 1916, la
Grande-Bretagne obtint ce que les Britanniques pensaient alors êtrela totalité du
Bornou ex-allemand, pourle restant de la guerre ;elle obtintégalement unebande de
territoire étroite, triangulaire, dont labase était constear une portion de la côteentre la péninsulede Bakassiet Tiko et le sommet à quelqueskilomètresau sud de
Yola. (v. J.R.V. PRESCOIT, op. cit.par. 2.99, p. 104,AnnexeM.C. 230).
2.105
Les négociationsrelatives à la frontière entre la Grande-
Bretagneet la France au sujet de la divisiondu Cameroun commencèrene tn 1918et
s'achevèrenten 1919, date à laquelle fut arrêtée la frontière entre les secteurs
britannique et français de l'ancien Cameroun allemand. Les négociationsfurent
compliquées par quatre éléments:
i) La ligne PICOT avait ététracéeen 1916 à Londres sur une carte à petite
échelle,l'échellede la carte ne permettantpas desuivre tous les détailsde la
frontière, et les descriptionsde la frontièrene suffisant pas à résoudreles
difficultésen raison de leur imprécision.Les difficultésainsi rencontrées
furentexacerbées par le fait que STRACHEYs'était apparemmenatppuyésur
ses souvenirs pour tracer sur la carte, à la demande de PICOT qui ne
connaissait pas la géographiede cette région,le contour approximatifdu
Bornouallemand.La ligne PICOT apparaît surla figure 1 de l'AnnexeM.C.
230 (p. 105).
ii) La Grande-Bretagneet la France poursuivaientdes objectifs différents.La
France souhaitait s'assurer Garoua (sur la Bénoué).Pour des raisons
économiquesbarce que laconstruction d'unevoie ferréeau nord de Garoua
jusqu'au Lac Tchad interfèrerait avecle commerce du nord-est nigérian
passant traditionnellement par Kano),la Grande-Bretagne s'yopposait. La
Grande-Bretagne, d'autre part, désirait toujours réunir (en territoire
britannique) des groupesethniques dont les Britanniques pensaient qu'ils
avaientété séparép sar la frontièreanglo-allemande.
iii) Le destindu Camerounn'était que l'une desinnombrablesquestions enattente
d'une solution aprèsla guerre, en 1919-20 ;et on pouvait espérerqu'une
concessionfaite dans une zonepouvait apporterune compensation dansune
autrezone.
iv) Les cartes existant l'époque n'étaiep nts suffisammentexacteset détaillées.
Ces complicationssontanalysées plusen détail dans PRESCOTT, op. cil.,par. 2.99,
pp. 104-106 (AnnexeM.C. 230 ; V. aussi J.R.V PRESCOTT, The Geoera~hvof
frontiersand boundaries,1965,p. 60). 1. La DéclarationMILNERISIMONdu 10juillet 1919
2.106 Cette Déclarationfut signéerespectivementpar le Secrétaire
d'Etat aux Colonies britanniques et le Ministre français des Colonies quelques jours
après la signature du Traité de Versailles le 28 juin 1919, en vertu duquel
l'Allemagne renonçait, en faveur des Alliéset des puissances associées,à tous ses
droits sur ses possessions outremer, y compris le Cameroun (article 119). La
Déclaration détermine la frontièreséparant lesterritoires du Cameroun placéssous
l'autoritéde leurs gouvernements respectifs. ne fait aucun doute que la Déclaration
MILNER-SIMON du 10 juillet 1919 constitue un accord international entre la
Grande-Bretagne et la France. 11 s'agit cependant d'un accord international
inextricablement liéà l'octroi ultérieur, dansle cadre de la Société des Nations, de
mandats à la Grande-Bretagne et à la France concernant les secteurs britanniqueet
français du Cameroun (v. infrp ars. 2.111 et 2.112). De ce fait, il semble que la
publication de la DéclarationMILNER-SIMONait étéquelquepeu retardée,tout au
moins en Grande-Bretagne. Mais elle fut finalement renduepublique conjointementà
la publication du mandat britannique surle Cameroun, confuméau nom du Conseil
de la Sociétédes Nations le 20juillet 1922.
2.107 La description dela frontièreindique qu'elle commencà la
jonction des trois anciennes frontières britannique,françaiseet allemandesituée sur le
Lac Tchad, c'est-à-dire au point de latitude 13' 05'N et de longitude
approximativement 14' 05'E de Greenwich. Ce point triple est déterminépar une
série d'accords, dont laplupart n'ont pas étéétudiés jusqu'ici.Aucun des accords
anglo-allemandsanalysésjusqu'ici n'est pertinent, hormis, dans une certaine mesure,
le Traitéanglo-allemand du 19mars 1906(concemant la délimitationde Yola au Lac
Tchad) qui, à l'article VII, vise la frontière qui suit la ligne de la concession
allemande, en ligne droite, jusqu'à son intersectionavec le méridienà 35' est de
Kukawa :
" Thence it shallfollowsthat meridian northward "
2.108 En ne précisant aucuneSiite septentrionaleà la frontièr(à
la différencedu Traitéanglo-allemanddu 15 novembre 1893, qui prenait pour point
terminal de la frontièreun point situé surla rive méridionaledu Lac Tchad), le Traité
du 19 mars 1906 semble avoir envisagéque la frontière sepoursuivait dans le lac,
avecun point d'aboutissement(encore indéterminél)e long du méridiensituéà 35' est
de Kukawa. Des accords franco-anglaisdans les annéesqui ont précédéla déclarationde la premièreguerre mondialeont aidé à établirce qui devait devenir le point triple
sur le Lac Tchad. Ami, le Traitéfranco-anglaisdu 14juin 1898, fut le premier à
avoir expressément envisagé une frontièrepassant par le Lac Tchad lui-même (à
l'articleIV); cene frontièredans le Lac Tchadfut confirmée et préciséepar le Traité
anglo-françaisdu 8 avril 1904. Mais c'est l'article premierde la Convention anglo-
françaisede Londresdu 29 mai 1906 qui instauraeffectivementun " triple point de
jonction " sur le Lac Tchad, quand on le lit en conjonction avecle Traitéanglo-
allemand du 19 mars 1906. Un échangede lettres franco-anglaisapporta plus de
précisions, entrele 17 mai et le ler juillet 1911, en confirmantun protocole du 19
février1910. Ce point triplefut spécifiquement accepté parl'Allemagneen vertu de
la Convention franco-allemandesur la frontière entre le Congo français et le
Cameroun allemand signée à Berlin le 18 avril 1908. Les conséquencesjuridiques de
tous ces accords relatifsà l'établissementdu point triple sur le Lac Tchad sont
analysées de façonplus détaillée aux paragraph4 e.98 à4.106 ci-dessous. Mais c'est
bien entendu la description faitedans la DéclarationMILNER-SIMON dupoint de
jonction des anciennes frontières britanniquefrançaiseet allemandesitué sur leLac
Tchad, de 13"05' de latitude nord et d'à peu près 14" 05' de longitude est de
Greenwichqui représente maintenan e pointniple.
2.109 Lord MILNER, dansune dépêcha edresséeau Gouverneur
du Nigeria le 19 septembre 1919, résume lesgains et les pertes de chacune des
parties:
"In the negotiationsthe French laid great stress on the
necessity,from their point of view, of theirtainingthe
whole of the road which runs from Bare via Chang and
Bagam to Fumban, and thence via Banyo, Dodo,
Koncha, Laro and Charnba to Garua, and thence via
Mania and Mora to Kusseri...Dln existing
circumstances. and having regard to considerations
comected with other uarts of the Peace arrangements.1
did notfeel able to opposethe French claim to the road
..." (Annexe M.C. 108, le passage soulignépar la
République duCameroun confirme le point 3 des
complicationsdiscutéec sidessus).2.110 Lord MILNER décrit en cestermes lesavantagesobtenuspar
les Britanniques:
"... the whole of German Bornu (Le. the country which
was subject to the Shehuof Dikwabefore the war). ..and
the north and north-western parts of the emirate of
Manciara,including some hi11country, which may be of
use later on... Further south we obtain the whole of the
dismcts of Gude, Yafada, Uro Gela, Billa Kilba, Paka
Buu, Meiha, Holma, Zurnmu, and the whole of Malabu
with the exception of Gerete ..; thus reuniting the
districts which were divided by the Anglo-German
boundary in this area...".(Ibid. p.156).
2.111 Les alliéset les puissances associées sontconvenus dans le
Traité de Versailles que les Gouvernements de France et de Grande-Bretagne
devraient faire une recommandation commune à la Société des Nations quantà
l'avenir du Cameroun. Cette recommandation franco-anglaise fut qu'un mandat
(conformément à l'article 22 duPacte) soit conferà la Grande-Bretagnesur la partie
du temtoire du Cameroun s'étendant à l'ouest de la ligne déterminée parla
DéclarationMILNER-SIMON du 10juillet 1919,et qu'un mandat correspondant soit
conféré à la France sur la partie du temtoire du Cameroun s'étendantà l'est de cette
ligne. Cette recommandationfut acceptéepar le Conseilde la Société des Nations.
2. Le MandatBritanniquesur le Cameroun
2.112 L'article premier dumandatbritanniquesur le Camerounqui
fut entérinéau nom du Conseil de la Société des Nationsle 20 juillet 1922, définitle
temtoire couvert par le mandat :
"les temtoires dont Sa Majesté Britannique assume
l'administration sous le régimedu mandat comprennent
la partie du Cameroun qui est situéeà l'ouest dela ligne
fucéedans la Déclarationsignéele 10juillet 1919, dont
une copieest ci-annexée.
"Cette ligne pourra, toutefois, êtrelégèrement modifiée
par accord intervenant entre le Gouvernement de Sa
Majesté Britannique et le Gouvernement de la
Républiquefrançaise,sur les pointsoù, soit dans l'intérêt
des habitants, soit par suite de l'inexactitudede la carte
Moisel au 1 : 300.000, annexée à la Déclaration,
l'examen des lieux ferait reconnaître comme indésirable
de s'en tenir exactementà la ligne indiquée. "La délimitation surle terrain de ces frontières sera
effectuée CO ormément aux dispositions de la dite
Déclaration.&f
"LR rapport final de la commission mixte donnera la
descriptionexacte de la frontièretelle que celle-ci aura
étédéterminée sur le terrain; les cartes signéespar les
commissaires seront jointes au rapport.Ce document,
avec ses annexes, sera étable in triple exemplaire ;l'un
des originaux sera déposé dans les archivesde la Société
des Nations, le deuxième sera conservépar le
Gouvemementde Sa Majesté Britannique et le troisième
par le Gouvemement dela République."
Le fait que l'article premierdu Mandat sur le Cameroun britanniquedéfinisse le
temtoire sur lequel le mandatest conféré comme "...la partie du Camerounqui est
située à l'ouestde la.... " ligne MILNER-SIMONest déterminant quana tu statutde
cette ligne, puisqu'ilreprésenteune reconnaissancepar lacommunauté internationale
sous la forme qui était alors la sienne(la Société des Nations)du droit de la Grande-
Bretagne à soumettre le temtoire ainsi définiau régimedes mandats. On peut noter
que le second alinéade l'article premiera étéinséré à la demande de la future
puissance mandataire, du fait que les fonctionnaires britanniques avaiend te bonnes
raisonsde douterde l'exactitudede la cartede MOISELau 11300 000 viséeà l'article
5 L'anicle 2 de la Déclaration MILNER-SIMON avait prévu:ue
" (1) II est entenduqu'au momentde la détermination sur le terrainde la frontière, lorsque
l'indication deslignesnaturellesàsuivre ne sera pasmendansla présente description,
les commissaires des deux gouvernements devmnt s'attacher, autant que possible,
déterminerle tracépar des accidents naturels de terrain (cours d'eau, lignesde faite ou
crêtes). Ilssauraientchanger, toutefois, l'attribution dementionnésàl'article 1.
"Les commissaireschargésde I'abornementseront, d'autre part,auàoapporter au tracé
de la frontière les modificationslégèresqui apparaîtraientnécessairesen vue d* éviterde
séparer les villagesde leurs terrains de cul;ces déviations devrontétre indiquées
clairement sur des canes spécialeset soumisesl'approbation des deux gouvernements
intéressés. outefois, en attendant qu'elles soientapprouvées, elletrovisoirement
valableset par suiterespectées.
"(2)En ce qui concerneles routes désigsl'article 1, les seulesqui puissentêtreprises en
considérationpourl'établissement dlea frontière sontcelles sur la cane ci-jointe.
"(3)Quandla ligne frontièresuitun cours d'eau,c'estla lignemédianequi formela limite.
"(4)Il est entenduquesi les habitants fixde la frontière exprimaient, dansun délaide
six mois à partir de l'achèvementdes opérations d'abornementsur place, l'intention de
s'établir dans lesrégions placéessous l'autoritéfrançaise, ou inversementdans les régions
placéessous l'autorité britanniaucun empêchemennte serait apporàéla réalisationde
ce désir, etil leur serait accordé leiécessairepour enlever les récoltes surpied et,
d'unefaçongénérale, pour emportertous lebsiens dont ils sont les propriétaireslégitimes."3 de la DéclarationMILNER-SIMON, notammentdans le nord, comme la suite des
évènementsdevait leconfiumer(v. infra.pars. 2.113 à2.117).
2.113 Lorsque lesdéléguéssur placeeurent commencé,au débutde
l'année 1920, à procéder à l'abomement sur le terrain prévu à l'article 2 de la
Déclaration MILNER-SIMON,quelques difficultés seprésentèrent. Deux problèmes
majeurs devaient être résolus.Le premier venait de la rédaction de l'alinéa 7de
l'article premier de la Déclaration, qui vise la " chute d'eau entre le bassin du
Yedseram à l'ouest et les bassins de la Mudukwa et de la Bénoàél'est".Dans un
rapport adressé parle Gouverneur du Nigeria au Ministèredes Colonies (Colonial
OfJice)le 11février 1922,on peut lir:
"There is no apparently defmed watershed, which is
common to the basins of the Mudukwa and the
Yedseram, or to the basins of the Mudukwa and the
Benué.The region in question is a region of isolated
groups of massifs and the Mudukwa and Yegoa (both
Chad affluents) rise at a point some 40 or 50 miles from
the nearest Benué tributaries, with many transverse
valleys in between."
2.114 Le second problème majeur qui se posait à propos de la
démarcationau nord de la Bénoué concernait la description de l'alinéa5 de l'article
premier de la DéclarationMILNER-SIMON, quiénonçait :
"(5) Du point, où s'interrompt la rivière Amjumba, à
l'entréedu marécage, par uneligne traversant ce marais
et rejoignant le cours d'eau qui paraît êtrela suite de la
rivière Amjumba et qui, en amont, porte les noms de
Serahadja, Goluwa (Golouva) et Mudukwa
(Moudoukva), le village de Uagisa devant rester à la
Grande-Bretagne."
2.115 Il étaitrelativement aiséde suivre cene description sur la
carte de MOISEL. Mais "...when thelocal French and British officers visited the
area they discovered that none of the names in the
description was known locally, and it was impossibleto
agree which river was the continuation of the Amjumba.
In an effort to solvethe problem, the officers...carried
out some researchinto the names of local rivers. These
enquiries revealed the followingfacts. Fust, there was a
swamp called Umm Jumba, but no river of that name ;
second, Serahadjawas the name of a village headman in
the Keraua valley ;third, that Mudukwawas a corruption
of Moldoko, a town in the Keraua valley ; fourth, that
Galuwa was a corruption of Gawaa, the pagan word for
river in the Keraua valley ...This information seemed
clearly to establish the Keraua river as that intendedby
the description, and the fact that it tumed westwards
before rea hing the Umm Jumba swamp was
discounted"f
2.116 On peutremarqueren passant que la descriptionde l'alinéa5
de l'article premier de la DéclarationMILNER-SIMONfut du reste modifiéedans les
alinéas 10 et 18 de la Déclaration THOMSON-MARCHAND confiée par
1'Echangede notes franco-anglaisdu 9janvier 1931 (voir infr paar. 2.118) pour tenir
compte des erreurs de la carteMOISEL.
2.117 Ce furent les principales difficultés rencontréesdans
l'application de la Déclaration MILNER-SIMONen ce qui concernait la fixation
d'une frontièreau nord de la BénouéM . ais deux problèmesse posaient aussi en ce
qui concemait le tracéexact de la frontièreau sud de la BénouéP .remièrement,là où
la nouvelle frontièrerejoignaitla rivière Mungo,il y avait uneplantation de tabac qui
avait étéauparavant divisée parla ligne PICOT, mais qui étaitmaintenant divisée
d'une autre manière. ie Gouvernementnigérian suggéraiu tne autre ligne qui aurait
fait passer le plus gros de la plantation en temtoire français, mais cette suggestion ne
fut pas acceptée.Deuxièmement,on avait découvert quel'un des chefs en territoire
français était séparé dela plupart de ses sujets dans la partie sud de Bamenda qui
restait britannique. Une modification de la ligne fut proposée defaçon à réunir le
groupe en temtoire français, et cette modificationfut acceptée.
2.118 En conséquencede ces difficultéset d'autres encore qui se
firent jour dans les années 1920, dans l'application de la DéclarationMILNER-
6 J.R.V PRESCOTT. op. cit.par. 2.99,p. 116 (Annexe M.C. 230). Prescott s'inspire
manifestement de la documentation contemporaine, notamment du pli envopar le
gouverneurpar intérim du Nigau ministre des Coloniesleoii1921 et du plienvoyé
par le gouverneurdu Nigeria au ministredes Colo11févrie1922,tous deux figurant
pp.193 et205respectivement.SIMON, le gouverneur du Nigeria et le Gouverneur duCameroun français décidèrent
d'un commun accord en 1930 du texte d'une nouvelle déclaration précisantla
frontière entre les Cameroun français et britannique. La DéclarationTHOMSON-
MARCHAND, "qui résultedes accords des 29 décembre1929 et 31 janvier 1930"
(Décretdu 25 août 1937, J.O.R.F., 1937)a étéformellementconsacréepar1'Echange
de notes du 9janvier 1931.
3. L'Echange de Notes franco-anglais du 9 janvier 1931,
approuvant la Déclaration de THOMSON-MARCHAND
définissantla frontière entre le Cameroun britannique et
français.
2.119 Cet Echange de notes (Annexe M.C. 157) commence avec
une note adresséepar de FLEURIAU, ambassadeur de France à Londres, à Arthur
HENDERSON, alors Ministre britannique des Affaires étrangères, dans laquellele
premier transmet le texte de la déclarationsignéeen 1930 par le gouverneur du
Nigeria (THOMSON) et le haut commissaire dela zone du Cameroun sous mandat
français (MARCHAND). La notede l'ambassadeur françaispoursui:
" Votre Excellencea sans doute reçu le texte de la même
déclarationet elle a certainement observé'il ne s'agit
là que d'une étudepréliminaire.Celle-ci est destinéà
donner à la description de la ligne que devra suivre la
Commissionde Délimitationplus de précision quene l'a
fait la DéclarationMILNER-SIMONde 1919.
Quoi qu'il en soit la première déclaratvisée ci-dessus
définit en substance la frontière dont il s'agit et le
Gouvernement de la République a l'honneur de
confirmer, par la présente note, l'agrémetui luia été
implicitement donné. Si une pareille confmation est
faite par le Gouvernement de Sa Majesté dans le
Royaume-Uni, la délimitation définitive pourra être
entreprisepar la missionprévueàcet effet par l'Article 1
du mandat. "2.120 La note en réponse d'Arthur HENDERSON énonce
notamment :
"His Majesty's Governent agree that this Declaration
is, as you point out, not the product of a boundary
commission constituted for thepurpose of carrying out
the provisions of Article 1 of the Mandate, but only the
result of a preliminary survey conducted in order to
determine more exactly than was done in the Milner-
Simon Declaration of 1919 the line ultimately to be
followed by the boundary commission ; that, none the
less, the Declaration does in substance define the
frontier; and that it is therefore desirable that the
agreement embodied therein shall be confiied by the
two Governmentsin order that the actual delimitation of
the boundary may then be entrusted to a boundary
commission, appointed for the purpose in accordance
with the provisionsof Article 1of the Mandate."
2.121 La note en réponseénonceensuite que le Gouvernement de
Sa Gracieuse Majesté "similarly confii thisagreement" et est d'accord avec le
Gouvernementfrançais pour dire que la délimitationpeut maintenant être confe la
Commission de Délimitation envisagée à cet effet par l'article 1 du mandat.
L'Echange de notes du 9 janvier 1931 fut publiédans la United Kingdom Treatv
m, comme Traiténo 34 (1931). Cela suffit en soi pour témoignerdu point de vue
adopté à cette époque par le Gouvernement britannique, que la Déclaration
THOMSON-MARCHAND,en raison de sa confimation par 1'Echangede notes, était
devenue un accord internationalentre les deux gouvernements. 11reste à ajoutex,
abunriante cautela, que le Foreign Wce avait déjà, en juillet 1930, porté la
DéclarationTHOMSON-MARCHANDdevantle Parlement (note du 15juillet 1930 à
l'ambassadeurde France, AnnexeM.C. 153).
2.122 On observera que la DéclarationTHOMSON-MARCHAND
décrit la ligne allant du Lac Tchad à l'Océan Atlantique en 138 paragraphes
numérotés. La ligne commence (commela lignedécritedans la Déclaration MILNER-
SIMON de 1919) à lajonction des trois anciennesfrontièresbritannique, française et
allemande, au point situà13"05'de latitudenord et environ 14" 05' de longitudeest
de Greenwich sur le Lac Tchad; et elle rejoint l'OcéanAtlantique aprèsavoir suivi la
rivière Mungo sur une certaine distance, au point entre Bueaet Douala qui est précisé
dans la Déclaration MILNER-SIMON. La ligne tracée dans la Déclaration
THOMSON-MARCHAND précisela ligne décritedans la Déclaration MILNER-
SIMON. En particulier, les descriptions données à certains des alinéas de la
DéclarationMILNER-SIMON (notamment lesalinéas 5et 7) sont remplacéespar des descriptions plus détailléet plus exactes reflétant deplus récentesexplorations et
1
une étude des toponymes. La Déclaration THOMSON-MARCHAND prend plus de
distance que la DéclarationMILNER-SIMON à l'égardde la carte de MOISEL au
11300 000. Ainsi, à l'alinéa 10 de la DéclarationTHOMSON-MARCHAND, se
trouve une référence à " ...un certain nombre de cuvettes (désignées soule nom de
Amjumba sur la carte MOISEL). .."; à l'alinéa18 référenceest faite à " ...une
rivière venant de l'ouest et connue par les habitantsKiridis sous le nomde Kohom
(désignésur la carte MOISEL sous le nom de Gatagule) ..." ; à l'alinéa25, une
référence à " ...la ligne erronée departage des eaux (entre Mukta (anglais) et Muti
(français) indiquéepar la carte MOISELétant adoptée.. " et,àl'alinéa28, référence
est faite au "..cours du Tsikakiri, tel qu'il existe réellementet non ainsi qu'il est
portésur la carte MOISEL . . On remarquera que les commentaires relatifs aux
inexactitudes de la carte de Moisel ont surtout trait aux descriptions de la frontière
dans la partie septentrionaledela ligne.
2.123 En fait, on n'avança guère sur la voie d'une démarcation
détaillée dela frontière pendant les années1930, en dépitde la mention, dans
I'Echange de notes du 9 janvier 1931, que " la démarcation définitive " pouvait
maintenant êtreconfiée à la Commission de délimitationenvisagée à cet effet par
I l'article ler du Mandat. A la suite d'une démarchefaite en mars 1931 par
l'ambassadeur de France à Londres, pour savoir quand le travail d'abornement
commencerait, le Ministère des Affaires étrangères britannique indiqua à
l'ambassadeur de France que l'on avait demandé auGouverneur du Nigeria par
intérim,par mesure d'économie,s'il serait possible que des fonctionnairestravaillant
l au Nigeria forment la section britanniquede la Commission de délimitationde la
frontière, et suggéra qu'une propositiosemblablesoit adresséeau Haut Commissaire
français au Cameroun. Le Ministèredes Affaires étrangères britannique suggéra aussi
que si l'onjugeait possiblede trouver le personnel de la Commissionde Délimitation
parmi des fonctionnaires alors en poste en Afrique occidentale, on pouvait laisser le
soin au Haut Commissaire français et au Gouverneur du Nigeria par intérim de
s'entendre entreeux sur la compositionde la Commissionde délimitationet sur la
date à laquelle elle devrait commencer ses travaux. En mars 1932, le Gouverneur du
Nigeria fit savoir que, comme les autorités françaisesavaient jugé impossiblede se
mettre au travail pendant la saison sèche commençantu mois de décembre précédent,
il s'était mis d'accord avec le Haut Commissaire français pour reporter le travail
d'abornement au mois de décembre1932. Mais en septembre 1932, l'ambassadeur
1 français àLondres proposa que le travail d'abornement soit encorerepousséau moisde décembre 1934, proposition acceptéepar le gouvernement britannique. Par la
suite, ce n'est que lorsque la Commission Permanente des Mandats eut, en 1935,
attiré l'attentionsur le fait qu'il étaitsouhaitable de procéderà l'abornement de la
frontière que lesdeux gouvernementsfurent amenés à prendre des mesures. 11fallut
quelques mois en 1937 pour que les deux gouvernements parviennent à un accord à
propos des instructions officielles qui devaient êtredonnéesaux déléguéfsrançais et
britannique de la Commission de délimitationde la frontière, mais il fut finalement
convenu que la tâchede démarcation commenceraitle ler décembre1937. Une copie
de la dépêche du ministère des Colonies (25 novembre 1937) au Gouverneur du
Nigeria, couvrant les instructions donnéau délégué britanniqudee la commissionse
trouve à l'Annexe M.C. 175. Il n'est pas inutilede noter qu'il avait déjconvenu
en 1931que, lorsque la tâche de démarcationseraitentreprise, elle devrait partirde la
côte et remonter sans intemption vers le nord, pour éviter la perte de temps
provoquée parles opérationsde transfert d'une section de la frontièàune autre et
pour faciliter la numérotationet le marquage des piliers frontaliers (voir lettre du 8
juillet 1931 du gouverneur du Nigeriaau Haut Commissaire du Cameroun français à
l'Annexe M.C. 160, contenantdes propositions quifurent dûment acceptéesle 6 août
1931par le Haut Commissairefrançais).
2.124 Le rapport annuel du Gouvernement britannique à
l'Assembléegénérale des Nations Uniespour l'année1951 donne plus de détails sur
le travail d'abornement réellement réalentre 1937et 1939(v. infra, par. 2.127). Il
convient cependant degarder à l'esprit que la frontière entreles Cameroun françaiset
britannique, de la côte au Mont Kombon, dans les années1930 (et en fait jusqu'en
1961) ne fait vas vartie de la frontière telle qu'elle seprésenteaujourd'hui entre le
Cameroun et le Nigeria.
2.125 Au cours de la périodesituéeentre 1922 et 1960, certaines
dispositions législatives internes britannont été adoptéesd,ont certaines, quoique
au départn'étantpas conçues pour la description de frontières internationales, ont,
depuis les événementd se 1961, étéreconnues comme formant partie intégrantede la
frontièreinternationale actuelle séparte Nigeria du Cameroundans sa totalité.Cela
s'applique plusparticulièrementau secteurde la frontièreinternationale situéeentre le
Mont Kombon et la borne frontièreno 64 sur la River Gamana, cette borne frontière
étant située sul'anciennefrontièreanglo-allemandeet repérée aux paragraphes12 et
13 du Protocole NUGENT-DETZNER signé à Obokum le 12 avril 1913. La
description de ce secteurqui fait aujourd'huipartie d'une frontièreinternationale a étéconçue au départdans le cadre du marquagede la ligne de divisionentre le Cameroun
septentrional et le Cameroun méridional (à l'époque administrés sous mandat
britannique) et figure dans la deuxième annexe du Nigeria (Protectorate and
Cameroons) Order in Council de 1946 avec une orientation est-ouest à partir de la
borne frontalièreno 64, vers la GamanaRiver jusqu'au Mont Kombon (v. infra pars.
2.143 (2) à2.144)
4. L'Accord de tutelledu 13décembre1946
2.126 Cet accord eut pour effet de transformer le temtoire du
Cameroun sous mandat britannique en temtoire sous tutelle, en vertu du régimede
tutelle des Nations Unies, mais iln'a pas affectéles frontièresentre lestemtoires sous
tutelle britannique et française au Cameroun, non plus que la façon dont la Grande-
Bretagne a continuéd'administrer le territoire sous tutelle britannique, comme faisant
partie du Nigeria. Elle lesa au contraire confirmées.
2.127 Les rapports annuels du Gouvernement britannique devant
l'Assemblée géneraledes Nations Unies sur l'administrationdu Cameroun soustutelle
du Royaume-Uni confient ce qui a étédit plus haut à propos de la frontière entre
les temtoires britanniques et français sous mandat (puis sous tutelle) au Cameroun.
Ainsi, le paragraphe 84 du rapport annuel du Gouvernementbritannique pour l'année
1951 (similaire à cet égardà ce qui est énoncé dans les paragraphes correspondants
des rapports annuels de 1949et 1950) énonce :
"84 ...The boundary between the French and United
Kingdom Tnisteeship temtories throughout the
Cameroons is based on the line described in the Milner-
Simon declaration of 1919 and shown on the map
published with it (Moisel, scale 1:300,000). In the
northern areas, particularly, the Milner-Simon line for
the most part followed the indications of streams and
water-sheds appearing on that map: it has since been
proved that the map is inaccurate for the mountain and
river systems of the less accessible regions and, in
consequence, there are sections in which neither the
mapped line nor its verbal description tallies with the
actual terrain. In the early years of the French and
British Mandatory Administrations, a number of minor
adjustments of the frontier were found necessary and
were effected. "By 1930 the work had been canied so far that the
Governorswere able to agreeupona Protocoldescribing
almostthe whole lengthof the portionthusprovisionally
defmed. This protocol was ratified as a "prelimii
study" by the British and French Govenunentsin 1931
and formed thebasis for afina lelimitationby the joint
French and BritishBoundaryCommissionwhich began
work in December, 1937.The Commissioncontinuedits
work until 22nd April, 1938, when the wet season
brought its activities to a temporary stop.It reassembled
on 23rd November, 1938,and continuedthe delimitation
of the frontier until May. By the end of the second
season the section of the frontier delirnitedhad reached
fromthe Coastto MountManengubain KumbaDivision,
a distance of some 135 miles. The outbreak of war
preventedthereassemblyof the Commission inthe 1939-
40 dry seasonand it hasnotmet since."
2.128 Ce passage tend à confier ce qui est dit ci-dessus @ars.
2.113 à 2.117 et 2.122)à propos de certainsdes problèmesrencontrésdu fait d'une
confianceexcessiveen la descriptiondonnéedansla DéclaratioMILNER-SIMONet
en la carte MOISEL. Toutefois, la plupart des inexactitudesprésentes danscette
déclaration et sur cette carte ont étécorrigéesdans la Déclaration ultérieure
THOMSON-MARCHAND confirmée par 1'Echangede notesanglo-françaisde 1931.
2.129 Pendant les années 1950 d,es pressions anti-colonialistes se
développèrene tn Afriqueet aux Nations Unieet des mesuresfurent prises de ce fait
pour amener les temtoires sous tutelle du Cameroun britannique et français à
1'indépendance.
5. Les modalitésde l'indépendance des temtoires sous tutelle
duCamerounbritanniqueet français
2.130 La partie du Cameroun quiavait étéun territoire soustutelle
de l'administrationfrançaise devint1'Etatindépendant duCameroun le ler janvier
1960, avec des frontièreshéritéesdes divers accords analysésci-dessus, entre la
Grande-Bretagneet l'Allemagne d'unepart, la Grande-Bretagneet la France d'autre
part. A compterde la date deson indépendancel,e ler janvier 1960, la frontièreentre
le nouvel Etat indépendant du Cameroun et la partie du Cameroun qui constituait
encore un temtoire sous tutelle sous administrationbritannique (mais administrée
comme faisant partie du Nigeria) était constituée palra ligne décrite dansla
DéclarationTHOMSON-MARCHANDconfirmée par1'Echangede notes anglo-français du 9janvier 1931. Cette ligne, on s'en souviendra,partait du point triple sur
le Lac Tchad et rejoignait la meà un point situéentre Bueaet Douala. Mais tout cela
allait changer à la suite d'événementsui allaient affecterla partie du Cameroun qui
constituaitencore un temtoire soustutelle britannique.
2.131 Dans l'accord de tutelle concernantle temtoire du Cameroun
sous administration britannique, la Grande-Bretagnes'était engagée à accorder aux
habitants des secteurs septentrionalet méridional dutemtoire la possibilitéd'exprimer
leurs propres souhaits au sujet de leur avenir. Dans un mémorandum du30juin 1958
au Conseil de tutelle des Nations Unies,alors que des préparatifs étaient déjà engagés
pour accorder l'indépendance à la Fédération du Nigeria,la Grande-Bretagne
recommanda de consulter les habitants du temtoire, du fait qu'il était nécessaide
prendre des dispositions quant à la future administration dutemtoire sous tutelLe.
mémorandumexpliquait que quand le Gouvernement britannique abandonneraitses
pouvoirs administratifs dans la Fédération du Nigeria, ile lui serait plus possible
d'administrer le Cameroun comme faisant partie du Nigeria, conformément aux
termes de l'Accord de tutelle, qui énonçaitque l'autoritéadrninistrante revenait
uniquement au Royaume-Uniet disposait que le Cameroun serait administré comme
faisant partie du territoire nigérian.Camerounavait été administrécomme faisant
partie du Nigeria, ce qui était "The only practical method of administration" - la
partie septentrionale du Cameroun (britannique) étant rattachéeau Nigeria
septentrionalet la partie méridionaledu Cameroun (britannique)à la région orientale
du Nigeria et devenant, après 1954, une entitédistincte au seinde la Fédérationdu
Nigeria.
2.132 La résolution1350 (XIII) de l'Assemblée Générale d1 u3
mars 1959 recommandait que l'autorité administrante (la Grande-Bretagne), en
collaboration avec une commission des NationsUnies aux plébiscites,organise, sous
la supervision de celles-ci, des plébiscitesindépendantsdans les parties septentrionale
et méridionale du temtoire sous tutelle du Cameroun. La même résolution
recommandait, en ce qui concernaitle Cameroun septentrional, deposer les questions
suivantes aux populations de cette zon: "(a) Désirez-vousque le Cameroun septentrional fasse
partie de la région du Nord du Nigeria lorsque la
Fédérationnigérienne accèderaàl'indépendance ?
"(b) Préférez-vous que l'avenir du Cameroun
septentrionalsoit déciplus tard ?"
2.133 Le 7 novembre 1959, les populations du Cameroun
septentrional votèrenten faveur d'un report de la décisionconcernant l'avenir du
Cameroun (70 546 contre 42 788). En conséquence,l'Assembléegénérale, après
avoir pris acte de ce résultat, recommanda dans la résolution 1473 (XIV) que
l'autoritéadmiistrante, en collaboration avec la Commission des plébiscites des
Nations Unies, organise un autre plébisciteau Cameroun septentrional, sous le
contrôle des Nations Unies,qui porterait sur lesquestions suivantes:
Désirez-vousaccéder à l'indépendanceen vous
unissantà la RépubliqueCamerounaise ?
"(b) Désirez-vousaccéder à l'indépendanceen vous
unissantà la Fédération nigérienne indépendan?"e
2.134 En ce qui concerne le Cameroun méridional, l'Assemblée
générale avaitdéjà,par la résolution1352 (XIV )u 16 octobre 1959, recommandé
que les deux questions devant êtsoumisesau plébiscitesoient:
"(a) Désirez-vousaccéder à l'indépendanceen vous
unissantà la Fédération nigérienne indépendan?te
"(b) Désirez-vousaccéder à l'indépendanceen vous
unissantà la Républiquecamerounaiseindépendante ? "
2.135 Le plébiscitese déroulanormalement dans les deux parties
du Cameroun sous tutelle britanniquele 11 février 1961.Le Cameroun septentrional
se déterminaen faveur de l'union avec la Fédératiodu Nigeria (146 296 pour, 97
659 contre) ; et le Cameroun méridional choisit de s'unir à la République
indépendantedu Cameroun(233 571pour, 97 741 contre).
2.136 L'Assembléegénérale,dans sa résolution1608 (XV) du 21
avril 1961, entérinales résultatsdu plébisciteet décidaque l'Accord de tutelle du 13
décembre1946, relatif au Cameroun britannique devait êtreabrogéconformément à
l'article 76(b) de la Charte des Nations Unies et en accord avec l'autorité
administrantede la façon suivante: "(a) En ce qui concerne le Cameroun septentrional, le
ler juin 1961, au moment où le Cameroun septentrional
s'uniraà la Fédérationde Nigeria en tant que province
séparée de la régiondu nord dela Nigeria ;
"@) En ce qui concerne le Cameroun méridional,le
ler octobre 1961, au momentoù le Camerounméridional
s'uniraà la Républiquedu Cameroun.. . "
6. L'affaire du Cameroun septentrional devant la Cour
internationale de Justice (arrêt,2 décembre 1963 - Rec.
1963,~. 15).
2.137 Pour compléter ce tableau des événement à l'époque de
l'accessionà l'indépendancede la République du Camerounet de la Fédération du
Nigeria, on se souviendra que, le 30 mai 1961, le Cameroun introduisitune requête
auprèsdu Greffier de la Cour à l'encontre du Royaume-Uni demandant à la Cour de
dire et juger que, dans l'application de l'accord de tutelle pour le temtoire du
Cameroun sous administration britannique, le Royaume-Uni avait failli, en ce qui
concernait le Camerounseptentrional, àcertainesobligationsdécoulant directementou
indirectement de cet accord. Pour fonder la compétencede la Cour, le Cameroun
s'appuyait sur l'article 19de l'accord detutellLe Cameroun se plaignait notamment
de ce que le Royaume-Uni, en tant qu'autoritéadministrante, n'ait pas pris les
mesures nécessairespour respecter une recommandation de l'Assemblée générale dans
la résolution1473(XIV)d'entreprendre sansdélaila séparationde l'administrationdu
Cameroun septentrional d'avec celledu Nigeria et d'achever ce processus au ler
octobre 1960 ; il estimait égalementque les conditions de l'établissementdes listes
électorales avaientétéinterprétéesde façon discriminatoire et que des actions ou
omissions des autorités localesde tutelle pendant la périodeprécédanlte plébisciteet
pendant les électionselles-mêmes avaiena tltéré lecours normal de la consultation
électoraleetavaient eu des conséquencescontrairesà l'accordde tutelle.
2.138 Dans le fond, le Cameroun alléguaitque l'administrationdu
Cameroun septentrional par le Royaume-Uni comme faisant partie intégrantedu
Nigeria avait compromisin@e I'exercice par les populations du territoire sous tutelle
de leur droità l'autodétermination.La Cour, dans son arrêt, citele passage suivant
tiréd'un discoursd'un Conseil du Cameroun : " La République duCameroun pense en effet que, en
administrant le Camerounseptentrional commeelle l'a
fait, l'autoritéadmiistrante a crédes conditionstelles
que la tutelle a abouti au rattachementdu Cameroun
septentrional à un Etat autre que la République du
Cameroun. " (C.I.J, arrêt,2 décembre1963,Rec. 1963,
p. 31).
Lesgriefsdu Camerounportaientsur des pointsde grande importance.
2.139 Le Royaume-Uni, cependant, contesta la compétencede la
Cour, en faisant valoir notamment qu'aucun différend relevan dte l'article 19 de
I'accordde tutellen'était porté devantCaourou, subsidiairement,qu'il n'y avait pas
de différend porté devanlta Cour sur lequel la Cour était en droitde statuer.Le
Royaume-Uni plaidaque, à la lumièrede l'abrogationpar l'Assemblée généraledes
Nations Unies de I'accord de tutelleentre le Royaume-Uniet le Cameroun, le
différend formulé par le Cameroun concernait les Nations Unies et non I'ex-
Puissanceadministrante.La Cour le suivitsurce point:
" Quels qu'aient étles motifsde l'Assembléegénérale
lorsqu'ellea formuléles conclusions contenues dansces
paragraphes, qu'elleait agi ou non entièrement sur le
plan politique et sans que la Cour estime nécessaire
d'examinerici sil'Assemblée générale a fondséon action
sur une interprétation exactde I'accordde tutelle, il ne
fait pas de doute -et ce point n'est pas contesté-que la
résolution a eu uneffet juridiqueéfitif. Le plébiscite
n'a pas étédéclarénulet nonavenu, maisau contraire, il
a été pris acte deses résultats etl'Assemblégénéralea
décidé que l'accordde tutelle prendraitfin le ler juin
1961 en ce qui concernele Camerounseptentrional."
(Zbid.,p. 32).
2.140 Le Cameroun ne demandait pas à la Cour d'invalider le
plébisciteni d'invalider la réuniondu Cameroun septentrional avecle Nigeria
résultantde ce plébiscite.De ce fait, la majorité dela Cour (par 10 voix contre 5),
tout en manifestant une certaine compréhensionl'égarddes griefsdu Cameroun, eut
le sentiment qu'elle ne pouvait pas, dans l'exercicede ses fonctions judiciaires, se
lancer dans l'examendu fondde l'affaire:
"La Cour constate queles limites qui sont celles desa
fonction judiciaire ne lui permettent pas d'accueillir,
pour en décideravec autoritéde chose jugéeentre la
République du Cameroun et le Royaume-Uni, les
demandes qui lui ont étéadresséespar la requêtedont
elle a été saisie.Tout arrêt qu'elle pourrait prononcer
seraitsansobjet." (Zbid.,~.38).2.141 L'extrait suivant del'arrêttémoignede la sympathie de la
Cour pour la thèsecamerounaise :
"La proximité géographique de la République du
Cameroun et de l'ancien temtoire sous tutelle du
Cameroun septentrional, ainsi que le degré d'affuiité
entre les populations de ces deux régions,ont amenéla
Républiquedu Cameroun à se préoccuper attentivement
de l'évolutionde l'ancientemtoire sous tutelle. La Cour
ne saurait méconnaîtrece fait incontestable que,si le
plébiscite du Cameroun septentrional n'avait pas été
favorable à l'union avec la Fédérationdu Nigeria, il
aurait étéfavorable à l'union avec la Républiquedu
Cameroun. Les questions arrêtées parl'Assemblée
générale n'offraientpas d'autre choix et aucune autre
solutionn'a étdiscutéeà l'époque." (Ibid.,pp. 28-29).
2.142 Au demeurant, l'arrêt rendu en 1963 par la Cour ne
concernait en rien la frontière entre le Nigeria et le Cameroun telle qu'elle s'était
dégagée du processusde décolonisation, y compris la réunion du Cameroun
septentrional avec le Nigeria et du Cameroun méridional avecla République du
Cameroun. Et I'arrêtde la Cour ne s'étaitpas plus prononcéau fond sur les griefà
l'encontre du Royaume-Uni invoquéspar le Cameroun dans sa Requête à la Cour et
dans son Mémoire. J.x Cameroun ne cherche pas, dans la procédure actuelle, à
revenir sur l'une quelconquedes questionssoulevéesdans la précédentaffaire contre
le Royaume Uni en 1961: il vise simplementI'arrêtrendu par la Cour en 1963, dans
l'affaire relativeaCameroun septentriona lomme étantun précédent démontran lt
mécontentement du Cameroun à cette époque devant certains aspects de
l'administration par le Royaume-Uni du temtoire sous tutelle du Cameroun sous
administrationbritannique.
C. - La frontière entre le Camerounet le Nigeria à .partirdu
ler octobre1961
2.143 L'effet des modalitésd'indépendance pourle Cameroun britannique fut de
transférerà la Républiquedu Cameroun nouvellement indépendantele Cameroun
méridional qui avaitété,jusqu'en 1954, administrécomme faisant partiede la région
orientale du Nigeria, et depuis cette annéelà, comme une entitéindépendante dansla
Fédération du Nigeria. En conséquence, cequi avait étjusqu'au ler octobre 1961la
frontière terrestre entre la Républiquedu Camerounet le Cameroun méridionalsoustutelle britannique, cessaitde l'êtrLa frontière terrestre entrela Républiquedu
Camerounet la nouvelleFédération du Nigeriafut, à compterdu ler octobre 1961,
représentée paurne ligne allant du nord au sud et comprenantles quatre secteurs
suivants:
i) Du point triple sur le Lac Tchad, cetteligne suit le tracé aden 1919 et
précisé dansla Déclaration THOMSON-MARCHAND confiée par
1'Echangede notes franco-anglais du 9 janvier 1931(Annexe M.C. 157),
jusqu'au "pic assez proéminent"barfois appelé " Mont Kombon ") visé à
l'alinéa60 de la DéclaratiTHOMSON-MARCHAND.
ii) De ce point (le MontKombon),le tracé aboutià la bornefrontalière64 sur la
rivière Gamana,cette borne qui faisait déjàpartie de l'ancienne frontière
anglo-allemande et avait étéidentifiéeaux paragraphes 12 et 13 de la
descriptiondonnéedans l'AccordNUGENT-DETZNERsigné à Obokumle 12
avril 1913(AnnexeM.C. 86). La descriptionde ce secteurde la frontièrese
trouvedans la secondeAnnexe à I'Orderin Councildu 2 août 1946,prévoyant
l'administration du protectorat du Nigeria et du Cameroun sous mandat
britannique,dans laquelleelle est faite ensens inverse, c'estààpartir de
la borne64jusqu'auMontKombon(Annexe M.C.248, p. 18).
iii) De laborne 64 sur la rivièreGamanavers l'ouestjusqu'à la borne no 114 sur
la Cross River, la lignede frontièreestdélimiear le Traitéanglo-allemand
du 11 mars 1913 avec les précisionsdomees par les paragraphes 13à 21 de
l'Accord NUGENT-DETZNER signé à Obokum le 12 avril 1913 (Annexe
M.C. 86).
iv) De la Cross River (borne no 114)jusqu'à la mer, la ligne de frontière est
délimitée parles paragraphes XVI à XXII du Traitéanglo-allemanddu 11
mars 1913(AnnexeM.C. 82).
2.144 11convient de noter que la ligne de frontière du second
secteur est la ligne qui avait précédemment sépalreéCameroun septentrionaldu
Cameroun méridionallorsqu'ils formaient tous deux le temtoire sous tutelle du
Cameroun,sous administration britannique.
2.145 L'alignementque nous venonsde décrire est confirmé par
Internationaloundaw Studv, no 92 (révisé), 21 novembre1974,publiépar l'Ofiice
of the Geographer,du Départemend t 'Etatdes Etats-Unis (AnnexM.C. 248).SECTION 3. LA CONFIRMATION DE LAFRONTIERELACUSTRE
2.146 La section de la frontière entrele Camerounet le Nigeria
dans le Lac Tchad est longue de 61,7 Km environ. Sa délimitation précise a té
établie,en mêmetemps que l'ensemble des frontièreisnternationalesdans le lac, sur
la base des traités et accordssignésentre les anciennespuissancescoloniales. Cette
frontièrea fait ensuite l'objetd'une démarcation concrètlerterrain parun bureau
d'études, l'Institt éographiqueNational-France Internationa(lIGN-FIà partir des
travaux d'expertsreprésentantles quatre Etats membres dela Commission du Bassin
du Lac Tchad (C.B.L.T) riverainsdu lac (Cameroun,Nigeria,Niger, Tchad)et sous
le contrôle de ces experts.
2.147 La C.B.L.T. est un organismeintergouvernementalcréé par
la Convention de Fort-Lamy du 22 mai 1964 révisée à plusieurs reprises. Elle
comprend cinq Etats membres, dont quatre membres fondateurs(Cameroun, Niger,
Nigeria et Tchad) auxquels s'est rajoutée la RépubliqueCentrafricaine dont
l'admissiona étéprononcée parle VIIIOSommetdes chefsd'Etatsde l'organisation
en mars 1994 à Abuja (Nigeria). L'objectif principalmembresde la C.B.L.T. est
de coordonneret d'intensifierleur coopération aiiue leurs efforts pourla mise en
valeurdu Bassindu Tchad.
La présidence de la Commission est assurée à tour de rôle, suivant l'ordre
alphabétiquedes Etats (en Français), pour une duréed'un an, par chaque Etat
membreen la personnede l'un de ses Commissaires,et le secrétariest placé soula
responsabilitéd'un Secrétaireexécutif quiassure le fonctionnement effectif de
l'organisation. C'est sous lasupervisionde cedernierqu'aété réallaedémarcation
des frontièresinternationales dansle LacTchad.
2.148 Avant de faire un exposé précis dla frontière démarquée
telle qu'elle résudes travauxd'experts etdes instrumentsjuridiquessur lesquels ils
se sont appuyés, le Camerounprésenteral'historique de la délimitationet de la
démarcationdes frontièresdans le lac ainsi que les différentes phasses travaux
techniquesjusqu'à leur aboutissemeninal. 8 1. Histoire de la délimitation
2.149 Comme le Cameroun va le démontrer([email protected],
section 2 pars. 3.53 - 3.54), le Nigeria a reconnu, dans son principe, les frontières
internationales dansle Lac Tchadétabliesavant son indépendance,et la questionde la
déterminationdeces frontièreslacustres n'avaitjamais été abordée avantles incidents
frontaliers survenus dansle lac entre le Nigeria et le Tchadd'avriàjuin 1983.
2.150 A la suite de ces incidents, les Chefs d'Etat des pays
membres de la C.B.L.T. ont donnéleur approbation à une proposition visant à la
convocation, dèsque possible, d'uneréunion dela Commission au niveauministériel,
en vue de la mise sur pied d'un comité technique conjoint chargé de la délimitation
des frontièresinternationales entre les quatre Etats qui se partagent le Lac Tchad (v.
LCBC :Report of the extraordinary session, Lagos, 21 st-23rd July 1983, Lagos,
27ht July 1983) à savoir, le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchad.
2.151 A cette fin,une session extraordinaire de la C.B.L.T. s'est
réuniedu 21 au 23 juillet 1983 à Lagos, avec la participation des Commissaires du
Cameroun, du Nigeria et du Tchad, à l'exception de ceux du Niger empêchésD . eux
sous-commissions techniques ontétécrééesau cours de cette session :une Sous-
commissionchargéede la délimitation desfrontièresetune Sous-commissionchargée
de la sécurité.
2.152 Cette réunionextraordinairea recommandéentre autres :
- au SecrétaireExécutifde collecter et transmettre dansles meilleurs délaisà tous les
Etats, tous les documentshistoriqueset autres documentsayant pour rôle de suivre et
de contrôler les travaux qui serontconfiésàun bureau internationald'études ;
- qu'une réuniond'experts nationaux soit convoquée avantla fin de l'année 1983en
vue d'arrêter lemandat d'étudesdes travaux de photographie aérienne et de
cartographie àréaliserpar une entreprise ;
- que la détermination provisoiredes deux points triples et des points intermédiaires
ainsi que le thalweg de l'embouchure de Komadougou-Yobé, duChari et l'El-Beid
soit entreprise en attendant la fin des travaux de cartographie afin de matérialiser sur
le terrain le tracédes frontières(AnnexeM.C. 271).2.153 Les documents historiques relatifs à la délimitation des
frontières dansle lac ont étéretrouvéset envoyés aux Etatspar le Secrétaire exécutif
de la Commission. Ces documents, consistant en des traitéset accords entre les
anciennes puissances coloniales (v. infrap ,ar. 2.176) ont étéretenus comme
documentsde travail par la Sous-commissionchargée de la délimitation desfrontières
au cours de sa réunion tenuele 17 novembre 1984 à Lagos. En s'appuyant sur ces
documents, la Sous-commission a essayé de déterminer - en faisant en cas
d'imprécisionou de lacune les commentaires appropriés - les coordonnéesdes points
suivants :
1) Tripoint Nigeria-Niger-Tchad ;
2) Tripoint Cameroun-Nigeria-Tchad ;
3) BipointCameroun-Tchad ;
4) Embouchurede la Komadougou-Yobé ;
5) et 6) Embouchure d'el-Beidet Chari ;
7) Point de la frontièrà l'extrême nord de la frontièrenigéro-tchadiennedans le Lac
Tchad.
2.154 Après discussions,la Sous-Commissiona recommandéque
tous les pays membresadoptent, au niveaude la zone, un système deréférenceunique
en matièrede géodésie. Il s'agit de l'ellipsoïde Clarke 1880, projectio:Universal
Transverse Mercator (UTM), origine 15" longitude est, Faisceau 33. En ce qui
concerne la déterminationdes coordonnées, il a étérecommandél'utilisation du
système de1'AfricanDoppler Suweys (ADOS).
2.155 S'agissantde la méthodologie,la Sous-commissiona eu à se
prononcer sur les spécifications relatives à la démarcation proprementdite des
frontières,la photographie aériennede la zone, l'établissement d'unecartographie, et
la levéetopographique.
2.156 Pour la démarcation,les experts ont convenu à l'unanimité
que les travaux soient entrepris par une société expérimentée daln 'sbservation et le
calcul des étudespar satellite à l'aide du système Dopplerou par un systèmede
positionnementd'ensemble. Ilsont estimépar ailleurs qu'il était nécessaire de tracer
les lignes frontalièresdansle lac de telle sorte qu'unebalise soit visiblertir d'une
autre. La distance entre deux balisesétaitfixéeà 5 km, mais cecidevait dépendrede
la visibilité dansle lac et sur toutes lesîles le long de la frontière.2.157 La Sous-commission a défd globalement la zone à
photographiercomme se trouvant entre le parallèlede latitude 12"à 14'30'N et
13'30'E de la longitude deGreenwich. Cettezone couvreune superficiede 61.000
la112environ et représentela même zone que celle couverte par les photographies
mosaïquesde ADOS en 1973. Les nomes des Nations Uniesseront exigées pour le
contrôle de la qualité des photographies aériennes. il a cepenaté admisqu'au
regard du contexte, on exigeraune distancefocale fde mm2 et l'échelle1150000e
(sansnuage).
2.158 En ce qui concerne la cartographie (échelle1150000e)les
experts ont convenu qu'elle devrase conformer dans la mesure du possible aux
normes de toute bonne carte en couleurs, en ce qui concerne particulièrementla
région autourdu Lac Tchad.La durée prévue pour l'établissement ea cartographie
a étéfucéeàdeux ans.
2.159 Le contrôle destravaux devaitêtreassurépar une équipe de
contrôle qui, en collaborationavec lebureau d'études choisi, devait avoir poutrâche
de participeà la connaissance dela région, contrôlerle balisagetout au long dela
frontière, ainsique les opérationsde topographieet de cartographie. Cetteéquipe
devait comporterdeux experts de chaqueEtat membre, etdevait avoir égalementen
charge l'élaborationdes documents de contrat et de la recommandation de
l'adjudication.Elle devait se réunir avantet après chaquephase des travaux, et les
dépensesafférentes à son activitédevaient êtreincorporées dans l'enveloppe du
contrat afin d'éviterque la participation effective d'unEtat màmson travail ne
soit compromiseparles problèmesd'ordrematérieletfinancier(AnnexeM.C. 271).
2.160 Conformémen t l'unedes recommandationsdela réunion de
novembre 1984 à Lagos, l'équipede contrôle de la délimitades frontières etdes
travaux topographiquess'est réuniàMaroua, au Cameroun, du 17 au 19 décembre
1984, pour élaborerles spécifications des traàaentreprendre, en l'occurrence,la
démarcation des frontièresl,a topographie,et la cartographie au000edu bassin
conventio~el de la C.B.L.T.(v. Rapport sur l'étatd'avancementdu projet de la
délimitationdes frontièreset de la sécuritére Lac Tchad, CBLTICM-30109).Les
spécificationsainélaborées on sterviau secrétarde la C.B.L.T. pourentreprendre
des démarches auprès de certains organismes susceptiblesde donner une assistance
aux paysmembres dans cedomaine.2.161 Le coût des travaux de démarcation, considéré comme
priorité par lesEtats, a étéévaluéau cours de deux réunionsd'experts tenues
respectivement à Maroua, du 5 au 9 octobre 1986, et à N'Djamenaen septembre
1987. Le Ive Sommet des Chefs d'Etatde la C.B.L.T. en a arrêtéle montantainsi
que sa répartition entreEtats membres en novembre1987. C'est au cours du même
Sommetqu'un appeld'offrerestreint, pour l'exécutioconcrète dela démarcatiodes
frontièresen cause, a étélancé.Le Secrétaireexécutif dela CBLTa consultéà ce
sujetdeux sociétés spécialisées, considécémemeles mieux indiquéep sour ce type
de travail, à savoir I'IGN en France et DOS en Angleterre. A l'issue du
dépouillement, le2 avril 1988, des offres proposéespar ces deux sociétés,IGN
France International fut déclaréadjudicataireLe contrat pour la réalisation des
travaux fut signéle 26 mai 1988, l'ordre de service fut notàfIGN FI le 13juin
1988.le coût des travauxrrêtéà 159millionsde CFA.
2.162 Auparavant,une autre réuniond'experts s'étaittenuedu 2 au
5 mars 1988 à N'Djamenaafin, d'unepart, de compléterle cahier des spécifications
techniques, notamment les clauses du contrat à passer avec l'entrepriseappelàe
exécuter les travaux, d'autre part, de procéderà la reconnaissancedes bipoints
terrestres (embouchuresde la Komadougou-Yobéd ,e l'El-Beid,du Chari, le carrefour
desdeux pistesentre le Nigeret le Tchad).
2.163 Ce premier exercice a révélé dunsaccordentrele Nigeriaet
le Camerouna propos de l'embouchurede l'El-Bied.Lorsde la sessionextraordinaire
de la C.B.L.T. sur la démarcationdes frontières tenueles ler et 2 août 1988à
Maiduguri, au Nigeria, les Commissairesont demandéau Secrétaireexécutif de
convoquer une réunion d'expertsnationauxdont l'objectif princisera defaire des
recommandations précisessur le bipointentre lesdeuxpays. Cetteréunions'esttenue
effectivement en septembre 1988 à N'Djamena, et les experts ont proposé des
coordonnéesprécises(v. infra par. 2.182) pour la déterminationde ce bipoint
(Annexe M.C. 286). Ces coordonnées ont étéapprouvéesau cours de la 36esession
de la C.B.L.T. parla Résolutiono 2 (v.infr aar. 2.185).
2.164 Une fois ces précisionsacquises, les travaux ont commencé
sur le terrain. Ils se sont déroulen trois campagnes d'abomementen décembre
1988, de janvierà juin 1989 et de décembre 1989 à février 1990(v. infa,pars.
2.190 -2.204). Au 12février1990,toutesles bomes étaientplacéesavecla précision
souhaitée,c'est-à-direau centimètre pr, t le document techniqueput êtresigné parles experts nationaux et le Secrétaire exécutifle 14 février 1990 à N'Djamena
(Annexe M.C. 292)
2.165 Les Chefs d'Etat de la C.B.L.T., réunisdu 12 au 15 février
1990 à Yaoundé pour le We Sommet de l'organisation, ont été informéd se
l'achèvementdes travaux sur le terrain, les 7 bornes principales et 68 intermédiaires
ayant étéconstruites. Ils ont chargéles Commissairesd'apprêtertous les documents
nécessairesà la clôture de l'opération(notammentle rapport final, le procès-verbal de
bornage, les fiches signalétiques,et le schémad'implantation) dans délaide trois
mois et leur ont donné"mandat de les signer au nom de leur pays" (Annexe M.C.
293).
2.166 A la lumière decette décision, le Secrétairexécutif dela
C.B.L.T. a organiséuneultimeréunion desexperts nationaux chargés ducontrôle des
travaux de démarcation,du 26 au 29 juin 1990 à N'Djamena. Au cours de cette
réunion, les experts ontapprouvétous les documents présentés par I'IGN FI, les
trouvant tous corrects. Mais au moment d'apposer les signatures, les experts du
Nigeria ont arguéde ce qu'ils n'auraient pasreçu mandat de signer, ignorant ainsi,
volontairement la recommandation précitédees chefs d'Etat lors du VIIe Sommet (v.
supra 2.165) ; d'autre part, ils ont prétendu queles travaux n'étaientpas achevés,
sous prétexte que certaines bornes n'étaient pasencore numérotées, etles bornes
erronées non encorecomplètementdétruites.
2.167 Les trois autres délégations (duNiger, du Tchad et du
Cameroun), "ont estiméque les travaux étaient achevés à 100 % et (que) la non-
numérotationdu point II-III.1 et la non destruction de la borne II-IV.1 n'influencent
pas la qualitétechnique de l'ensembledes travaux dans la mesure où les documents
sont conformes aux spécifications techniquesdu contrat passéavec IGN" (Annexe
M.C. 310). Elles ont par conséquentsigné leprocès-verbalde bornage.LR Secrétaire
exécutif s'est engagé,séancetenante, à conduire les démarchesnécessairespour
obtenir la signature du Nigeria avant laprochaine réuniondes Commissaires de la
C.B.L.T..
2.168 Afind'aplanir la difficultéinattenduecréépar le Nigeria, le
Secrétaireexécutifde la C.B.L.T. a organisé,du 5 au 21 juillet 1990, une mission
pour exécuterles travaux recommandéspar lesexperts nationaux,à savoir:- la numérotation des bornes intermédiaire1s3,14,15,16,18 de traverse 1-11;la borne
1de la ligne II-III;
- la numérotation convenable des bornesI,IV,V,Vi et III-VI.1 ;
- la destruction des bornes erronées1-IV.2,III-VI.3 et II-V.1.
2.169 Cette initiative du Secrétaireexécutif dela Commission n'a
cependantpas connuun plein succèsen raison de l'inaccessibilité dlea zoneautour du
point II (TripointSud), laquellen'a pas permis la numérotation dela borne 11-111..t
la destructionde la borne II-V.1.
2.170 Devant cette situation, leWe Sommet des Chefs d'Etat de
la C.B.L.T., tenu à Yaoundéle 14 février 1990,a demandéqu'une réunion des
Commissaires ait lieu au mois d'août 1990afin d'examiner le dossier. Cette réunion
n'ayant pas eu lieu, le dossier a étéinscrit à l'ordre du jour de la 39e session
budgétairede la Commission qui s'est tenue du 20 au 31 novembre 1990 à Abuja, au
Nigeria.
2.171 La session, par sa Résolutionno 10, a dû renvoyer les
experts nationaux sur le terrain pour la numérotationde la borne 11-111.1et la
destruction de la borne II-V.1. Fort de cette instruction, le Secrétaireexécutifa invité
les experts nationaux en juin 1991 à finaliser les travaux. La délégationigériane a
subordonné sa participation à cette mission à la présence d'un représentant de
l'entreprise IGN FI.
2.172 A la 40e session de la Commissiontenue du 6 au 14janvier
1992 à Niamey, au Niger, la délégationnigérianeaannoncésa volonté departiciper à
la finalisation des travaux demandéset de signer le procès-verbalde bomage. Cette
déclarationa réconforté les trois autres délégatiost un calendrier des travaux a été
établiimmédiatementen fonctiondes conditionsclimatiquesde la région.
2.173 Une première descente sur le terrain a étéorganiséeen
février et s'est soldéepar un échec, en raison de la faible hauteur d'eau et de
l'exubérance dela végétation qui a entravéla circulationde l'équipedansla zone.
2.174 Une seconde descente sur le terrain, à l'initiative de
l'entrepreneur, IGN FI, a étéorganiséedu 17 au 28 juillet 1992. Cette mission a
connu un succès total,car les experts ont pu atteindreles deuxobjectifs visàssavoirnuméroterla borne11-111.e 1t détruirela bonneII-V.1. Un expert put alors noterdans
soncompterendu de mission :
"Ami, au soir du 24 juillet 1992, la joie se lit sur les
visagesde toute l'équipeet le rapportdefin des travaux
est signéle 28 juillet 1992 à N'Djamena" (v. Compte
rendu de la missionde Démarcation des frontières entre
le Cameroun, le Niger, le Nigeria et le Tchaddans le
Lac Tchad 1988-1992,fait le 21 août 1992par T.TAM,
membre du Grouped'experts nationaux du Cameroun,
ayantparticipéà touteslesphasesde cette démarcation).
2.175 AuVIIIe Sommetdes Chefsd'Etatet de Gouvernementde la
C.B.L.T. tenu du 23 au 24 mars 1994 à Abuja, au Nigeria, sous la présidence
effectivedu Chefd'Etat Nigérian,le GénéraS laniABACHA,le mémorandum relatif
à la démarcationdes frontièresdansle lac faisaitétatde l'achèvement desravaux de
matérialisatiodesfrontièressur le terrain. Le document techniqyeafférent,dûment
signé par lesexperts et le Secrétaire exécuti(fvsupra par. 2.174), a étéprésenté
pour approbationaux Chefsd'Eut. Il y estd'ailleursdemandéque les administrations
centrales et locales de chaque pays se chargent de "mobiliser et éduquerles
populations locales concernant cestravaux" (Annexe M.C. 351). Le Sommet a
examinéle rapportet, "aprèsune courte discussion,les Chefsd'Etat l'approuvent et
félicitent ceux qont exécuté letravaux"(Zbid).
82. Les basesiuridiauesdela démarcation
A. - Lesdocumentsjuridiquesde base
2.176 La réunionde la Sous-commissionchargéede la délimitation
des frontières dans le Tchad, tenue à Lagos en novembre 1984, a examinéles
documentsjuridiques relatifsaux dites frontières quele Secrétaireexécutifavaient
rassemblés etmis à la disposition des experts nationaux conformément à une
recommandationde la VIIe Sessionextraordinairede la C.B.L.T. de juillet 1983.
Après discussions et échanges devues à ce sujet, la Sous-Commission a retenu
comme documentsde travail, les textes suivant:
"- Accord entre la Grande-Bretagneet la France
concernant lespossessionsbritanniques et françaisesà
l'estdu Niger, signéàLondresle 29 mai 1906 ; - Convention pour préciser lesfrontières entre le
Camerounet le Congo français, signé àBerlin le 18avril
1906 ;
- Accord entre le Royaume-Uniet la France sur la
délimitation des frontières entre les possessions
britanniques et françaises à l'Est du Niger, signé à
Londres le 19février1910 ;
- Echange de notes entre les Gouvernements deSa
Majestédu Royaume Uni et de la France concernant la
frontièreentre le Cameroun françaiset britannique fait à
Londres le 9janvier 1931"(AnnexeM.C. 271p.3).
2.177 En s'appuyant sur les documents ci-dessus cités, la Sous-
commission a défini,entre autres, lespoints suivants desfrontièresdu Cameroun avec
ses voisins dans le Lac Tchad :
"2. TripointCameroun -Nigeria - Tchad
Latitude: 13"05'Nord
Longitude : 14"05'Est
3. BipointCameroun -Tchad
Latitude: 13"05'Nord
Longitude : 14"28'Est
5 et 6 Embouchure d'El-Beidet du Chari.
Les textes en notre possession [i.e. des experts] nous
permettent de localiser les embouchures, maisaucune
COO~~OM~~ ne peut êtreindiquéen(Annexe 1pp. 3-4).
B. - La détermination dubipoint Cameroun-Nigeria.
2.178 Il restait doncà déterminerles coordonnéesde ce bipoint
entre le Nigeria et le Cameroun à l'embouchure d'El-Biedet du Chari. Lors de la
session extraordinaire de la C.B.L.T. sur la démarcation desfrontières tenue à
Maiduguri, au Nigeria, les ler et 2 août 1988, les Commissaires ont demandé au
Secrétaireexécutifde la C.B.L.T. de convoquer une réunion des experts nationaux
dont l'objectif principalsera de faire des recommandationsprécises aux Commissaires
sur ledit bipoint.2.179 Conformément à la décisiondes Commissaires, les experts
des Etats membres se sont réunisau siègede la Commission à N'Djamena les 15et 16
septembre 1988 pour discuter du problème. Les documentsutilisés à cette occasion
sont :1'Echangede notes du 9 janvier 1931entre les gouvernements britannique et
français (Treaty Series no 34 (1931)), et la carte pour illustrer la déclarationfranco-
britannique définissantla frontièredu Cameroun(au 111000000e)jointe.
2.180 Selonles experts, il résultede ces documentsque
"... La frontière commence à partir de la jonction des
trois vieilles frontières britannique, française et
allemande à un point dans le Lac situé entre lalatitude
13" 05' Nord et environ la longitude 14" 05' à l'Est de
Greenwich. A partir de là, la frontièrea été déterminée
comme suit :
(2) Sur une ligne droite jusqu'à l'embouchure de
1'Ebeji.."(AnnexeM.C. 286. p.2).
2.181 La déterminationdes coordonnéesdéfinitivesapprouvéespar
les experts des quatre pays concernéspar la délimitationdes frontières dans lelac n'a
pas été aisée, etn'a pu êtreacquisequ'à l'issue de discussions techniquesserrées.En
effet, le Cameroun revendiquaitlescoordoméessuivantes :
- Longitude :14 O 11' 48"E. latitude : 12" 31' 12"N
et le Nigeria :
- Longitude :14" 13' 22" E. latitude : 12" 31' 12" N.
Il semble que ces différentes revendications soientle résultatde la division de la
rivièreEbeji en deux branchesd'eau lorsqu'elles'approchedu Lac.
2.182 Les experts nationaux ont procédé à l'établissement à
l'échellede l'embouchurede la rivièreEbeji (El-Beid)comme cela figure sur la carte
jointe au Traitéde 1931. Les valeurs géographiques obtenuesen graphiquant sur
ladite carte sont:
- Longitude : 14" 12'11", 7 E
- Latitude : 12' 32'17", 4 NCes valeurs sont considérées pales expertscomme lescoordonnéesgéographiques les
plus probablesde l'embouchurede la rivière Ebejitelle qu'elleseprésentaiten 1931.
2.183 Les valeurs sus-mentionnéesont été reportées surla carte de
la C.B.L.T., édition1978, à l'échelle1/50OOOe (le Nigeria et le Cameroun)CHAD-
WULCO S/W KOUSSERi parce que les deux branches de l'estuaire figurenttrès
nettement sur la carte dresséeà une échelle vingtfois plus grandeque cellejointe au
Traité. Ce sont ces valeurs que les experts ont recommandéaux Commissaires
d'adopter comme coordonnées du bipoint entre le Nigeria et le Cameroun (Annexe
M.C. 286, p.3).
2.184 11ressort d'ailleursdu Rapportde la Sous-commissionGénie
Civil et Télécommunicationr selatif à la démarcationdes frontières internationales
dans le Lac Tchad que :
"Les délégués nigériae ntscamerounaisont convenuque
la recommandation signéepar les experts à N'Djamena
reste valable et doit êtreprésentéeaux Commissaires
pour examen"(AnnexeM.C. 287, p.102).
2.185 Cette recommandation aété approuvéepar les Commissaires
à la 36e sessionde la C.B.L.T. qui s'esttenue àMaroua, Cameroun,du 30 novembre
au ler décembre 1988.
La résolutionno 2 relativeau bipoint Cameroun-Nigeriaest libelléeainsi qu'il suit
"Considérant l'unanimité des experts nationaus xur la
méthodologie,les documentset les cartes utilisées pour
la détermination des coordonnées,
- Les Commissairesapprouvent la recommandation
des experts sur le bipoint entre le Cameroun et le
Nigeria, à savoi:
Longitude 14"12'11", 7E
Latitude12°32'17", 4N" " (AnnexeM.C. 287, p.22).
2.186 L'accord auquel sont ainsi parvenus les experts puis les
Commissaires, et par suite les Etats membres de la C.B.L.T., complète lestraités
coloniauxprécités (v.supra par. 2.176) et les cartes qyisont annexées, l'ensemble
formant la base juridique de la délimitationet de la démarcation desfrontières
internationalesdu Camerounet du Nigeriadans le Lac Tchad. 83. Les travauxtechniauesde démarcation
2.187 Un marché no C.B.L.T.188 passéaprès l'appel d'offre
restreint du 31 mars 1988a étéconcluentre l'entrepriseIGN France Internationalet
la C.B.L.T. représentée par sonSecrétaire exécutif (Annex Me.C. 284). Ce contrat
d'une durée de quatre mois, approuvéle 25 mai 1988 et enregistàéN'Djamenale 6
juin 1988, avait pour obje:
"i) la délimitationdes frontières entre lestemtoires
des Etats du Cameroun, du Niger, du Nigeria et du
Tchaddans le LacTchad ;
ii) les travauxde géodésideans la zone" (art. ler du
contrat).
2.188 Ces travaux se sont déroulés sous le strict contrôle des
experts nationauxconformément àl'article9 paragraphe1 du contrat qui stipuleq:e
"L'entreprise a pour missiond'assurer l'exécution des
travauxsousle contrôle deshuit expertset conformément
aux règleset normesen vigueur".
2.189 En vue de faciliter ce contrôle, l'entrepreneur devait
communiquer "tousles mois, un état d'avancemend tes travaux en 10 exemplairesà
l'Ingénieurde contrôle". C'est direque tous les quatreEtats concernéspar la
délimitationdes frontièresinternationales dansle Lac Tchad ont, non seulementsuivi
régulièrement ledéroulement des travaux de démarcation à travers les rapportsdu
Secrétaireexécutifet de la Sous-commissionde démarcation des frontières aux
différentes sessionsde la C.B.L.T., mais encore qu'ils en ont assuré le contrôle
technique à travers leurs expertsnationauxqui ont éprésentsà toutes les phases de
la démarcation.
2.190 Les travaux techniquesde démarcation se sont déroulés en
trois phases et ont étsupervisés"au fil desours"(AnnexeM.C. 294, p.74) par des
experts requisà cette fi, à savoi:pour le Cameroun,M. Daniel NCHAMUKONG
SAMA ; pour le Niger, M. MAHAMANLAMINOU ; pour le Nigeria, M.T.A
ABIODUN ;pour le Tchad, M. NOKOURCHOUGUY. A. - Phase 1 :de mi-juin 1988à mi-septembre 1988
2.191 Aussitôt aprèsavoir reçu notificationde la lettre commande
le 13 juin 1988, IGN FI, aux côtés duquel sontrestésles experts nationaux "pour
apprécier letravail effectuéainsi que les difficultésrencontréesW(ibida, démarréles
travaux ; des réunions (unequinzaine) ontétémensuellement tenues ausiègede la
C.B.L.T., avec comme documentde travail le rapport mensuelde l'entrepreneur, afin
de statuer objectivement sur l'avancementdes travaux. IGN FI a donc travaillésous
les directives de spécialistes représentathacun son pays, mais qui ontsu former en
l'occurrence un groupe soudé, épargnépar les dissensions et décidant de tout
ensemble. La note de présentation des travauxde démarcationprésentée à la 38e
sessionde la C.B.L.T. souligne en effet :
"Les positions arrêtéedse façon unanime a l'issuede ces
rencontres par les Experts, avaient valeur d'instructiàn
l'Entrepreneuru(ibid).
2.192 Deux problèmes épineux one tntravéla progression nomale
des travaux au cours de cette première phase : la déterminationdu bipoint V
(Cameroun-Nigeria) et du bipoint VI (Cameroun-Tchad). La sollicitation par les
experts, de l'intervention des Commissairesde la C.B.L.T. (Maiduguri, juillet 1988
et Maroua, décembre 1988) aentraînéun arrêtdes travaux de mi-septembre 1988 à
fin janvier 1989. A la date d'arrêtdu chantier, quatre bornes principales et sept
bornes intermédiairesavaient étéconstruites(ibid. p.75).
B. - Phase II: du 29 janvier 1989 au30juin 1989
2.193 Les travaux ont repris le 29 janvier 1989 aprèsla définition
par les Experts des bipoints litigieuxet leur approbationpar les Commissaires de la
C.B.L.T.. La construction de ces bipoints a fait l'objet d'unavenant no 1 au marché
initial conclut sous le no C.B.L.T./M/OS et notifiéle ler mars 1989à l'entrepreneur
(Annexe M.C. 284). En dépit des difficultés rencontréespar cette deuxième
campagne de démarcationen raison de l'intensité despluies au cours de la saison des
pluies 1988, les trois bornes principalesrestant(III,V, VI) ont étéconstruites ainsi
que toutes les bornes intermédiaires,àl'exception desdeux bornessur la traverse II-
III (Cameroun-Tchad) inaccessibles. On a relevé seulement une erreur dansl'implantation de quatre bornes intermédiaires (1-IV. 2, II-V. 1, II-V.2, III-VI. 3),
mais la rectification devaitêtreeffectuéeà partir du 27 novembre 1989.
2.194 Ami donc, au 30 juin 1989, date d'arrêtdu chantier, les 7
bornes principales étaientconstruites ainsi que les 66 bornes intermédiaires,ce qui
représentait98,5 %du total dutravail de terrain àréaliser (AnnexeM.C. 294, p.75).
C. - Phase ïiï : décembre 1989 - février1990 et travaux
complémentallejsusqu'en1992.
2.195 Cette phase a étéla plus difficile particulièrementen raison
des discussions suscitéespar les objections du Nigeria, mêmesur des points déjà
acquis aussibien au niveaudes expertsquedes Commissaires.
2.196 Dès ledépart,les travaux de cette phase ont étégênés par
l'état deslieux. L'accèsaux zones de bornage étaitrendu difficile, par la croissance
de la végétation pour la traverse II-III, et par la faible profondeur de l'eau pour les
traversesII-V et 1-IV (v. Rapportde la réunion des Experts chargés de ladémarcation
des frontièresdes Etats membres de la C.B.L.T., N'Djamena, le 29.12.1989, p.2;
supra 2.173).
2.197 Les travaux se sontnéanmoinspoursuivis et, à l'issue de la
mission du 5 au 21juillet 1990 :
- toutes les bornesauxiliairesmal ancréesétaient renforcées;
- les points GlobalPositioningsystem (GPS) des bornes intermédiaires de la ligneI-
IV étaientrenforcés,les points GPS des bornes intermédiairesvérifiés, et ceuxqui
étaientmal furésont été renforcés ;
- l'ancienneborne no 3 de III-IVétaitdétruite ;
- les travaux étaientexécutéà s 100 % sur la ligne1-IV ;
- les six bornes intermédiaires construiteen 1988étaient toutes numérotée :s13, 14,
15, 16, 17 et 18, de mêmeque la borne principaleII, V et IV (Annexe M.C. 303,
pp.2-3). 2.198 La délégationdu Nigeria s'est abstenue dans un premier
temps de signer le Procès-verbal de bornage dressàl'issuede ces différentstravaux.
Elle a soutenu que les travaux n'étaient pas entièrement achevés tnte la borne II-
111.1n'avait pas éténumérotée - la numérotationfaite par la C.B.L.T. étantjugéepar
elle de qualité inférieur- , la borne II-V.l qui étaitmal implantée,détruite, les
points GPS et Aziiuth des lignesI-IIet II-Vstabilisés,et deuxpoints GPS de la ligne
I-IIrétablis(AnnexeM.C. 305, p.89 ;et suprapar. 2.171).
2.199 Au cours de cette 39e session de la C.B.L.T. les
Commissaires avaient ordonnéaux experts nationaux, par la Résolutionno 10, de
procéder à la numérotationde la borne 11-111.pendant la périodeallant de décembre
1990 àjanvier 1991et àla destruction dela borne erronéeII-V.1 en mai-juin 1991. Il
était prévuqu'une sessionextraordinaire de la Commission serait convoquéeen vue
de la signature des documentsafférentsàces travauxdèsqu'ils seraientterminés.
2.200 LRs experts nationauxse sont réunià cet effet du 26 au 28
juin 1991 à N'Djamena, en vue d'arrêterles modalités pratiques relatives à
l'exécutionde la Résolutionno 10. Mais le consensussur les travauxà effectuer n'a
pu se dégager. Seulesles délégations du Cameroun d,u Niger et du Tchad ont signéle
rapport du 18juin 1991.
2.201 Toutefois, au cours de la réunionde la Sous-commission
chargéede la démarcation desfrontières quis'est tenue du 6 au 12janvier 1992 à
Niamey, au Niger, la délégation nigérianedaéclaré qu'ell:
"a changé d'avis parrapport à sa position priseà la
réunionde juin 1991 tenue à N'Djamena et qu'elle est
disposéeà finaliser les travauxprescrits par la résolution
no 10 et à signer le procès-verbal de bornage des
frontières internationales dans le Lac Tchad. Elle
souhaite que le SecrétaireExécutifmette à sa disposition
une photocopie certifiée des versions française et
anglaise, aux fins de les comparer" (Annexe M.C. 316,
pp. 61-62; etsupr aar. 2.172)
2.202 Le Nigeria a proposé ensuite que l'exécution des travaux
qu'elle réclamaitait lieu le 27 janvier ou le 3 février1992pour la premièrephase, et
aux mois de mai-juin pour la deuxièmephase. Sa proposition est acceptéepar les
autres délégués.
En juillet 1992, l'entrepreneur et les experts ayant menà
2.203
bien ces tâches, un rapport sur les travaux accomplis a étésoumis au Secrétaireexécutif, ettous les experts des quatre Etats membres ont signé alorsle procès-verbal
de bornage desfrontières.
2.204 A l'issue de l'ensembledes opérationsde délimitation etdes
travaux de démarcationdes frontières internationales dansle Lac Tchad, la frontière
entre le Cameroun et le Nigeria est celle définie dansle Procès-Verbalfinal du 14
février 1990 (Annexe M.C. 292). Son tracéest examinéci-après au chapitre 4,
section 2 du présentmémoire.
8 4. La confirmationdes travaux des experts ~ar les Chefs
d9EtatdesDavsmembresdela C.B.L.T.
2.205 Le Procès-verbal de bornage est signé à la fois par les
experts nationaux et le Secrétaire exécutifde la C.B.L.T.. Il y a là un double
fondement à I'opposabiIitde ce document aux Etats concernés parla démarcation des
frontières internationales dans le Lac Tchad. D'une part, en effet, le Secrétaire
exécutif agissant pourle compte de la C.B.L.T. et ayant reçu mandat des Etats
membres de cette organisation, ces Etats sont liés,au moins indirectement, par les
actes passés par l'organisation.D'autre part, chaque Etat membre s'est engagé
directementet individuellementàtravers la signature duProcès-Verbalde bornage par
ses experts, les experts nationaux ayant agi en l'occurrence au nom de leurs pays
respectifs. Ils introduisentle Procès-verbalde bornage en ces te:mes
"Nous, soussignés,
Experts des Etats membres de la C.B.L.T., (Cameroun,
Niger, Nigeria et Tchad), dûment désignépsar nos Etats
pour la supervision et le contrôle des travaux de
démarcation de nos frontières conformément à la
résolutionno 2 de nos gouvernements àleur 6e Sommet
tenu à N'Djamena les 28 et 29 octobre 1987, avons
procédé du 13 juin 1988au 12février1990 à l'exécution
des travaux de délimitation et de bornage des dites
frontières et soumettons à l'approbation des
Gouvernements respectifs, la description (suivante) des
frontières que nous avons bornéesn(AnnexeM.C. 292,
p.1 ; souligné parla République duCameroun).
2.206 Au VIIe Sommet de la C.B.L.T. tenu à Yaoundédu 13 au
14 février 1990,les Chefs d'Etat membres de l'organisation avaient explicitement
donné mandataux Commissaires de signer "au nom de leur pays", (Annexe M.C.293, p.3) les documentsafférentsaux travauxde démarcation,compte tenude ce que
le rapport relatià la démarcationdes frontièresdéclaraitque :
"Au 11 février 1990,les travaux sur le terrain relatifs à
la démarcation des frontières ontétéachevés" (Ibid,
p.32).
2.207 Au VIIIe Sommetde la C.B.L.T. tenu à Abuja, du 21 au 23
mars 1994, les Chefs d'Etat, "considérantquela matérialisation desfrontières a été
entièrement achevée et que le document technique a étésignépar les experts
nationaux et le Secrétaire Exécutif",ont adopté,dans une décisionno 5 relative à la
démarcation de frontière :
"- d'approuver ledocument techniquede la démarcation
des frontières internationalesdes Etats membres dans le
Lac Tchad comme présenté par les Experts Nationauxet
le SecrétariatExécutifde C.B.L.T. ;
-que chaque pays adopte le document conformément à
sespropres lois ;
-que le document soitsignéau plus tard lors du prochain
Sommetde la Commission ;
-de donner des instructions aux administrationslocales
des Etats membres pour qu'elles mènentdes actions de
sensibilisationen direction des populationsriveraines du
Lac Tchad pour le respect des frontièreset notamment
des droits, obligationset privilèges quis'y attachen;
-ont félicité les Commissaires, les ExpertN s ationaux, le
SecrétaireExécutifet I'entrepreneurIGN France pour le
travail accompli"(AnnexeM.C. 351. p.13).
2.208 Les termes de cette importantedécision sont repris dans le
communiquéfil du Sommetqui déclare :
"Concernantla démarcationdes frontièresdans le lac, les
Chefs d'Etat ont notéque les travaux se sont achevésde
manière satisfaisante. Ilsont approuvéle document qui
leur a étprésenté.Chaque Etat devral'adopter selon les
lois et règlementsen vigueur et le signer au plus tard au
prochain Sommet de la Commission. Ils ont félicité les
Commissaires, les experts nationaux, le Secrétaire
exécutifet I'entrepreneurIGN France International pour
le travailaccompli" (AnnexeM.C. 352).
2.209 Ce communiquéfinal précisepar ailleurs que "le prochain
Sommet se tiendra au Tchad en 1995". Autrement dit, et sans préjugerde la dateprécise(en l'occurrencedujour et du mois)àlaquellese tiendrace IXe Sommet dela
Commission, il y a lieu d'affirmer qu'entoute hypothèse,les formalités internes
d'approbation du document final fmant définitivementle tracé des frontières
internationalesdans le Lac Tchad - plus particulièrementde la frontière entre le
Nigeria et le Cameroun - et les démarquant concrètemen stur le terrain auront été
accompliespar chaque Etat concernéau plus tard au 31 décembre 1995I.lne s'agit
plus d'une facultépour ces Etats mais d'une obligation juridique fondéseur un
engagement solennelpris par chacun d'eux.
2.210 En conclusion, la frontière entre leCamerounet le Nigeria
dans le LacTchad n'est donc pasàétablir:elle existe. Elleest définiejuridiquement
et est matérialisée se terrain. Elle est internationalementreconnue,notammentpar
les autres Etats membresde la C.B.L.T. qui ont pris part
à sa définition eà sa
démarcation,ainsi que l'atteste l'engagement pris par chacund'eux à travers le
Communiquéfinal du VIne Sommetdes Chefs d'Etat précitéL . e Nigeria nesaurait
par conséquentrevenir sur son consentementdonné à plusieurs reprises,de Sommet
en Sommet, à travers l'approbation desdocumentsjuridiques de base servant à la
délimitation deIa frontièrelitigieuseainsi que du procès-verbalet autres documents
techniquesde bornage, approbation matérialisée formellempnatr la signaturede ses
expertset sesCommissaires,et entérinéear sonChefd'Eut en personne.
SECTION4. LA FlXATION PARTIELLE DE LA FRONTIERE
MARITIME
2.211 La section 2 du présent Chapitre comporte un examen
approfondi des différentsinstruments conventionnels adoptésntre 1885 et 1960
délimitantla frontière terrestreséparantle Camerounactuel et le Nigeria. Cette liste
d'instmments conventionnels comprend desaccords internationauxpassésentre la
Grande-Bretagneet I'Ailemagnede 1885 à 1914 et entre la Grande-Bretagneet la
France de 1919jusqu'àl'accessionà l'indépendanceu Camerounet du Nigeria.
2.212 Le Traitéanglo-allemanden date du 11 mars 1913 précisait
le tracéde la frontièreséparantle Cameroundu Nigeria de Yolajusqu'à la mer et
contenait des dispositions réglementlt navigationsur la Cross River. Les articles
XVIII à XXI du Traitédu 11 mars 1913 (v. supra 2.87) précisentle tracéde lafrontière dans larégionde la péninsulede Bakassi et de l'estuaire de la rivière
Akwayafé. L'article XVIII précisequ'il suit le thalwegde 1'Akwayafé "as far as a
straightlinejoining BakassiPoint and KingPoint". Ensuite, l'articXXI énonceque
"from the centre of the navigablechannel on a line joiningBakassiPoint and King
Point" le tracéde la frontière suit le centre du chenal navigable de la rivière
Akwayafésur la limitedes trois millesde juridictionterritoriale(en 1913, la limiteà
trois milles des eaux territorialesétait généralement accepLe'.rticlXXI dispose
aussi que, auxfinsde définitiondu tracéde la frontière, "thenavigablechanneiof the
AkwayaféRiver shallbe consideredto lie whollyto theeast of the navigablechannel
of the Cross and CalabarRivers". EIU~I~ larticle XXiI énonceque "the three-mile
limit shall, as regards the mouth of the estuary [de la rivièreAkwayafésemble-t-il],
be taken as a line 3 nautical miles seawardof a line joining Sandy Point and Tom
Shot Point."
2.213 Ainsi, en 1913 un accord entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne fmait le tracéde la frontièremaritime dansl'estuaireoù se rejoignentles
rivières Crosset Akwayafé. La frontièreavait été tracdans les eaux de l'estuaire
vers le large à la distance maximum correspondant à ce qui, selon l'opinion
commune, constituaitla limiteextérieuredeseauxterritoriales l'époque.
2.214 A la suite de l'accession du Cameroun et du Nigeria à
l'indépendance en 1960 respectivement,les gouvernements desdeux nouveauxEtats
se sont attachés à perfectionner et, quand nécessaire,à préciser plus avantleurs
frontières terrestre etmaritimes. Ence qui concernela frontière maritimeentre les
deux Etats, lepointde départ devait êtr'embouchurede la rivièreAkwayafé et, plus
précisément, le centre du chenal navigable de la rivière Akwayafésur une ligne
reliant BakassiPoint etKingPoint. Cela est confirméd'ailleurs dansla noteno 570
en date du 27 mars 1962 adressée parle Ministredes Affairesétrangères nigéria n
l'Ambassadedu Cameroun à Lagos, à laquelle étaitjointe une carte représentant
l'estuairede la rivière Cross. Le paragraphe2 de la note est rédigé cosuit:
"As shown on the map the boundaryfollows the lower
courses of the Akpa-Yaferiver, where there appears to
be no uncertainty, and then cut into the Cross River
estuary".
Le textede cettenoteet la cartejointe figurent enAnnexe. La~rernière Déclaration deYaoundé du 14 août 1970
5 1.
2.215 La Commission frontalière conjointe Nigeria-Cameroun a
tenu une réunion importante à Yaoundédu 12 au 14 août 1970. 11en est résultéla
premièreDéclarationde Yaoundé signép ear les responsables dechaque délégation, El
Hadji B. MALABUpour le Nigeria et M. J. G. NGOH pour le Cameroun. Il est
difficile de considérercette premièreDéclarationde Yaoundé(voir le texte en Annexe
M.C. 240) comme instrument conventionnel en soi dans la mesure où les deux
signataires précisent clairementdans le texte qu'ils "... ont décidé de faire les
recommandations suivantesàleurs gouvernementsrespectifs".
2.216 La principale recommandation consiste à effectuer la
délimitationdes frontièresentreles deuxpays entrois étapes:
"(a) la délimitationde la frontièremaritim;
(b) la délimitationde la frontière terrest;telle que
définie parle Protocole anglo-allemandsigné à Obokum
le 12avril 1913et confuméepar l'accordanglo-allemand
de Londres "concemant1) le tracéde la frontièreentre le
Nigeria et le Cameroun de Yola à la mer ; 2) la
Réglementationde la navigation sur la Cross River et
l'échangede lettres entre les gouvernementsbritannique
et allemanddu 6 juillet 191;
(c) la délimitationdu reste de la frontièreterrestre"
Il est évident quela référence faite à l'accord anglo-allemand de Londres vise le
Traitéanglo-allemanddu 11mars 1913.
2.217 La deuxième recommandationcontenue dans la première
Déclaration de Yaoundéindiquait que "la délimitationde la frontière devrait être
effectuéeconformémentaux Conventionsde Genève de 1958sur le Droit de la Mer et
conformément auxbornes et repèresfrontaliers définisdans l'Accord anglo-allemand
de Londres "du 11mars 1913". La troisièmerecommandationétaitla suivante :
"3. Qu'à la fin de chacune des étapesénumérées ci-
dessus, un traitéséparésoit signépar les deux pays afin
de donner une portéelégale à la frontièreainsi délimitée
et fucéesur le terrain".
2.218 La quatrième recommandationindiquait que les experts des
deux pays devraient commencer dèsque possible leurs travaux sur la délimitationdela frontière maritimeet que ces travaux dedélimitationdevraientêtreterminés au plus
tard le 30 septembre 1970.
La deuxièmeDéclaration de Yaoundé IIdu 4 avril 1971
82.
2.219 Cette deuxième Déclaration a été signé pear M. R.O.
COKER pour le Nigeria et parM. J. C. NGOH pour le Cameroun, chefs de leurs
délégationsrespectives lors d'une autre réunion de la Commission frontalière
conjointe Nigeria Cameroun tenue à Yaoundéentre le 26 mars et le 4 avril 1971.
Cette deuxièmeDéclaration(le texte, avec la carte de l'Amirautébritanniqueno 3433
qui y est jointe, figurent en Annexe M.C. 242), lue à l'aide de la carte jointe,
constituela preuve manifested'un accord internationalpasséentre les Chefs d'Etat (et
par conséquent opposable aux deux Etats)en ce qui concerne le tracédes eaux
territoriales allantjusqu'à lalimitedes trois milles àpartir de la ligne reliantles points
Sandy et Tom Shot. Les deux dispositions essentielles sont constituéespar les
instmctions suivantes communiquées par lesdeux Chefsd'Etat àla Commission :
"1") Les deux Chefs d'Etat sont d'accord pour
considérercomme frontièrela ligne de compromisqu'ils
ont tracéd'un commun accord sur la carte no 3433 de
l'amirauté britannique jusqu'àla limite de 3 milles
marins de la lignejoignant les points Sandyet Tom Shot
conformémentau traité anglo-allemand de1913. Les
deux Chefs d'Etat ont porté leur signature sur ladite
carte.
2") L'applicationdes Conventions deGenèvesur le droit
de la mer de 1958 pour la démarcation du restede la
frontière maritime.
2.220 Il est ensuite noté l'accord de la Commission frontalière
conjointe selon lequel, pour mettre en oeuvre la deuxième de ces instructions, il est
convenu qu'elle seréunisseà nouveau à Lagos dans un délai d'unmois à une date à
notifieràla Délégationdu Camerounpar les voies diplomatiques.
2.221 Il ressort clairement que les deux Chefs d'Eut, par
l'apposition de leurs signatures sur la "ligne de compromis" tracéesur la carte de
l'Amirautébritanniqueno 3433 engageaientleurs Etats respectifssur la ligne telle que
tracée sur cette carte. L'article7(2) de la Convention de Vienne sur le Droit des
Traitésde 1969dispose expressément : "2. En vertu de leurs fonctionset sans avoirà produire
de pleins pouvoirs, sont considérés comm représentant
leur Etat:
(a) Les Chefs d'Etat, les Chefs de gouvernementet les
Ministres des Affaires étrangèrep sour tous les actes
relatifsla conclusiond'un traité; ..".
2.222 La Cour a eu l'occasion d'examiner récemmentl'importance
de cette règle lors de son arrêten date du 1 juillet 1994, dans l'Affaire de la
Délimitation Maritime et des Questions Tem'toriales entre Qatar et Bahrein
(Compétence et Recevabilité).Danscetteaffaire, l'unedes questionsde fond étaitla
valeur et l'effet juridique desminutes de Doha en date du25 décembre1990,
signéesparles Ministres des Affaires étrangère du Qatar et de Bahrein. Aprèsavoir
estiméque les minutes"énumèrenltes engagementsauxquelsontconsentilesparties",
"créantainsi des droits et des obligations en droit international applicablesaux
parties", la Cour examine ensuite la thèseprésentée par Bahrein selon laquell le
Ministre des Affaires étrangèredse Bahreinn'avait jamais eul'intentionde conclure
un accord de ce genre et que, au demeurant, il lui était constitutionnellement
impossiblede signer un accord international prenant effeà la signature. La Cour a
rejeté fermement cette thèsede Bahrein:
"La Cour n'estime pas nécessaird ee s'interrogersur ce
qu'ont pu être lesintentions du ministre des affaires
étrangèresde Bahrein, comme d'ailleurs celles du
ministre desaffaires étrangèresdu Qatar. En effet, les
deux Ministres ont signé un texte consignant des
engagements acceptép sar leurs gouvernements,et dont
certains devaient recevoirimmédiatementapplication.
Ayant signéun tel texte, le ministre des Affaires
étrangèresde Bahrein ne saurait soutenir ultérieurement
qu'il n'entendait souscrire qu'à une "déclaration
consignant une entente politique", et non à un accord
international" (C.I.J. arrêtdu ler juillet 1994, Rec.
1994, pp. 121-122).
2.223 Par conséquent,il n'existeaucundoute quant àla validitéde
la "ligne de compromis"signéepar les deux Chefsd'Etat, telle qu'elleest enregistrée
sur la carte no 3433 de l'amirautébritannique jointeà la deuxièmeDéclarationde
Yaoundé.
2.224 Le Camerounne prétend pas que la deuxièmeDéclarationde
Yaoundé (aussiconnue sousle nom de Déclarationde Yaoundé)constitueen soi un
traité entreles deux Etats. On pourrait certainements'interroger sur lespouvoirs des
deux signataires (h4. NGOH et M. COKER) à représenter respectivementleCamerounet le Nigeria aux finsd'exprimer leconsentementdesdeux Etats à êtreliés
par un traité.11n'y a pas de preuve quel'un ou l'autre des signataires aientdisposé
des pleins pouvoirs nécessairesà la conclusion d'un traité. Le Cameroun prétend
cependant que la deuxième Déclaration de Yaoundé constitue une preuve de
l'existenced'un accord international passéaliundeentre les deux Chefs d'Etat du fait
de l'apposition de leurs signatures sur l'exemplaire de la carte de l'Amirauté
britannique no 3433 qui présentela "lignede compromis" sur laquelleils sesont mis
d'accord et qui va jusqu'à la limite des trois milles traàpartir de la ligne reliant
les points Sandyet Tom Shot. C'est la présencedessignaturesdes deux Chefs d'Etat
apposéessur la carte qui apporte la preuve du caractèreexécutoirede la ligne tracée
en raison des pouvoirs spécifiquede représentation desChefsd'Etat.
2.225 11faut ajouter à ceci que l'intervention de dernière minute
des deux Chefs d'Etat s'est avérée nécessaire pou arrriveà ce résultat. Lors des
débatsde la Commissionfrontalière conjointedu 26 mars au 4 avril, la délégationdu
Nigeria avait estimé quele "chenalnavigable", dans le sens du Traitéanglo-allemand
de 1913, correspondaità la ligne suivant les fondsles plus profonds de la voie d'eau,
sansprendre en compte les autres risques liéà la navigation, alors que la délégation
du Cameroun étaitd'avis quele "chenal navigable", dans le sensdu Traitéde 1913,
étaitle chenal présentantla plus grande sécuritépour la navigation vers l'amont et
l'aval de la rivière, c'est-à-dire le chenal indiquépar les bouéesdes cartes de
l'Amirauté. La conséquence decette différenced'analyse estque les lignes tracées par
chacune des délégations sur les cartes de 1'Amuautébritanniqueno 3433 et 6245 (les
deux cartes ayant étchoisies commebase de travail)jusqu'à la limite des trois milles
présententdes divergences considérables. Aucun compromis ne semblait possible. Ce
n'est qu'enraison de la présencedes deux Chefs d'Etatà Yaoundéle 4 avril 1971 (le
Chef d'Etat nigérian étaietn visite officielle au Cameroun) que l'on a pu se mettre
d'accord surla "ligne de compromis" allantjusqu'à la limite des trois milles et partant
de la ligne reliant lespoints Sandyet Tom Shot et qu'elle a enregistrée sur la carte
de l'Amirautébritanniqueno 3433 signéepar les deux Chefs d'Etat.
83. La Déclaration de Lagos du 21 iuin 1971 (Annexe M.C.
243)
2.226 Cette déclaration aétéélaborée par la réunion ultérieurede
la Commission frontalière conjointeprévuepar la deuxième Déclaration de Yaoundédu 4 avril 1971(v. suipapar. 2.219). Les Chefsdes délégations dCuamerounet du
Nigeria étaientà nouveau MM. NGOH et COKER. La Commission a tracé la limite
des eaux temtoriales ayant fait l'objet d'un accord entre les deux Chefs d'Etat le4
avril 1971 sur la carte de l'Amirautébritanniqueno 3433, celleutiliséepar les deux
Chefs d'Etat le 4 avril 1971. La Commission anotéque la carte de l'Amirauténo
3433 ne couvrait pas les limites extrêmedes eaux temtoriales du Cameroun et du
Nigeria. La Commission aestimé qu'iln'y avait pas de zone contiguëet accepté que
la délimitationde la limitedu plateau continental,en accord avecla Conventionde
Genèvesur le Plateau Continental, soit poursuivieultérieurementLa Commissiona
ensuite marqué sonaccordsur les coordonnées géographiqud ee 20 pointsportés sur
la carte de l'Amirautébritannique n03433, le point 1 étant situéà 08O30'4.4"de
longitude et 4'40'28" de latitude et le point 12 (point extrêmede la "ligne de
compromis"consigné dans la Déclarationde Yaoundé iidu 4 avril 1971)à08"24'38"
de longitude et 4'31'26" de latitude. 11a étéconsignédans la Déclaration quela
délégationdu Cameroun conservaitla carte onginale de 1'Amirautébritannique
portant les signaturesdes deux Chefs d'Etatet celles des Chefs de délégation mais
qu'une photocopiede cette carte maritime avait étfaite pour être conservée par le
Nigeria. Les recommandations suivanted se la Commissionont aussiété notées dans
la Déclaration:
"(a) adopter ultérieuremenune carte marine adéquate
permettantde délimiterle reste de la frontièrede la mer
temtoriale ainsi que la frontière sur le plateau
continental. En attendant chaque délégation cherchera
une cartemarine adéquate avantla prochaine réunion;"
(b) attirer l'attentiondes Chefs d'Etatdu Camerounet du
Nigeria pour une actionà prendre au cas où les plateaux
continentaux du Nigeria,du Camerounet de la Guinée
équatorialeauraienutn pointcommun. "
2.227 La Commission a approuvé le report une date ultérieurede
la rédaction d'un traité sur la frontière maritime, qui serait élaboré aprè las
délimitationde l'ensemblede la frontièremaritime.
2.228 La teneur de cette Déclaratiode Lagos du21 juin 1971est
telle qu'elle semble n'êtrequ'un simple procès-verbaldes conclusions dela réunion
de la Commission frontalière conjointtenue à Lagosentre le 14 et le 21juin 1971.
Elle représente uneétape supplémentaire dans la déterminationde la frontière
maritime. La Déclaration de Kano de 1974
$ 4.
2.229 La ligne séparant leseaux territoriales du Nigeria et du
Cameroun de l'embouchurede la rivière Akwayafé vers le largejusqu'à la limite des
trois milles tracée partir d'une ligne reliant le point Sandyau point Tom Shot a été
retenue comme la "ligne de compromis" figurant sur l'exemplaire de la carte de
l'Amirauténo 3433. Cependant, au cours des années1960 et au débutdes années
1970, il y a eu un nombre croissant d'indications de la présenced'importantes
réserves d'hydrocarburesdans les fonds marins au large du Rio del Rey et des
estuaires des rivières Cross,Calabaret Akwayafé.C'est pourquoi le tracé précde la
frontière maritime entreles eaux territoriales et les plateaux continentaux du Nigeria
et du Cameroun est devenuune questionde grande importancecommeen attestent les
difficultés rencontrées pour arrivern accord entre les représentants desdeux Etats
sur la "ligne de compromis" allant jusqu'à larite des eaux temtoriales des trois
milles (v. supra par. 2.225).
2.230 La tension croissante entre les deux Etats s'est traduite par
une séried'incidents, y compris des incursions de navires battant pavillon nigérian
dans les eaux temtoriales du Cameroun au large de la péninsule de Bakassi. Des
détails sur certainsde ces incidents remontantà 1970figurent ci-dessousau chapi6re
de la partiII.Au débutdes années1970, des travaux de prospection ont été effectués
par des compagnies pétrolièresayant obtenu des concessions du Nigeria et du
Cameroun pour les fonds marins dans les eaux temtoriales du Nigeria et du
Cameroun au large de la péninsule deBakassi. Les deux gouvernements ont protesté
contre la violation de leur frontièremaritime. Des étudesont aussi étéeffectuées sur
le plateau continentaldu Camerounet du Nigeria et, dans la mesure où les deux Etats
ne sont pas encore d'accord surune frontièrepour le plateaucontinental, ces activités
ont suscité aussides contestationsfréquentesdes deux parties.
2.231 La tension accrue entre les deux Etats suscitéepar les
activitésde prospection pétrolière en merau large de la péninsulede Bakassi s'est
exacerbée lorsdu quadnipiement des prix du pétrole en1973. Cela a amené à la
conclusion de la Déclarationde Kano le ler septembre 1974 (Annexe M.C. 246).
Elle a étésignéepar les Chefs d'Etat du Nigeria et du Cameround'alors (le Général
GOWON et le PrésidentAHIDJO) à l'occasion d'une visite officielle du Président
AHIDJO dans la ville nigériane deKano. La Déclaration établiu tn corridor de deux
kilomètresde chaque côtéde la lignereliant la bouéede la passe auxbouéesno 1, 2et 3 portéessur la carte no 3433 comme correspondant à une zone où toutes les
activités de prospection d'hydrocarbures seraient interdites. 11 s'agissait de toute
évidence d'une mesure temporaire visant à apaiser les tensions dans l'attente de
négociations sur une limite permanente audelà du point 12 de la "ligne de
compromis" à laquelle la DéclarationNGOHICOKERdu 4 avril 1971 fait allusion ;
sa duréen'est cependantpas précisée.
8 5. DéclarationdeMarouadu ler iuin 1975
2.232 La déclarationde Maroua a été lefruit d'une autre réunion
entre le GénéralGOWONet le PrésidentAHIDJOtenue à Maroua du 30 mai au ler
juin 1975 la Déclarationde Maroua (voir le texte en Annexe M.C. 251 avec la carte
jointe) a étendu lafrontière maritimeentre le Cameroun et le Nigeria du point 12
situéà 08'24'38" de longitudeest et M031'26"de latitudenord à un nouveau point G
situéà 08"22'19"de longitudeest et et 04"17'00"de latitude nord, qui fut porté sur
la carte de l'Amirautébritanniqueno 3433.
2.233 Le texte donne les coordonnées géographiques pourtous les
points intermédiairesA à F inclus mais il est difficilement compréhensiblesans
référence àla carte où figure la ligneainsiétendue.
2.234 Deux points se sont cependant intéressants dansle texte
mêmede la Déclarationde Maroua. Le premier concernel'admissiondans le texte du
fait que le point de départpoint 12) est "situéà l'extrémide la ligne de frontière
maritime adoptée parles deux Chefsd'Etat le 4 avril 1971." 11s'agit clairementde la
réaffirmationde la frontière deseaux temtoriales tracéepar les deuxChefs d'Etat sur
la carte à laquelle fait référencela Déclaration deYAOUNDE II du 4 avril 1971.
Cela confie cette frontièreen s'assurant que son pointextrêmeconstitue le point de
départde délimitationde la frontièremaritime au large du point 12. Le deuxième
point intéressant est le faitque la lignefaisant l'objetd'un accord dans la Déclaration
de Maroua au delà du point 12 se dirige immédiatementplein ouest, ce qui est
clairement défavorableau Cameroun :
"A partir du point 1...la ligne frontièrese dirige vers
l'ouest en suivant une ligne parallèlà la ligne droite
reliant Tom Shot Pointet SandyPointjusqu'à un point A
...à une distance detrois milles decette dernière. "2.235
Pourquoi ce changement de direction bmsque et marquéde
la ligne du point 12 au point A ? La réponsese trouve dans le libellédu dernier
paragraphe de la Déclarationde Maroua :
"Les deux Chefs d'Etat ont réaffirméde plus leur
engagement en matière de libertéet de sécuritéde la
navigation sur la rivièreCalabar / Cross pour les navires
des deux pays tel que défini parles conventionset traités
internationaux.
2.236 Les citationsde l'analysedu Dr ADEDE de la Déclarationde
Maroua dans Maritime Boundanes (v. Chapitre 5 pars. 5.83 - 5.84) confîirmentqu'au
moins un des motifs de l'angle brutal vers l'ouest de la ligne au-delà du point 12
correspondait au désir expressdu Nigeria de jouir d'un accèsentièrementlibre, par
les eaux nigérianes,pour les navires désireuxde relâcherdans les ports nigériansde
l'estuaire de la rivièrealabar / Cross. Il ne fait cependant aucun doute que cette
dérogationmarquéeau principe d'équidistancedans la délimitationde la frontière
entre le point 12et le point G étaitdéfavorableau Cameroun.
2.237 Fidèle à ses engagements internationaux le Cameroun
considère toutefoisque la Déclarationde Maroua, signée parles deux Chefsd'Etat,
constitue un instrument conventionnel valide opposable auxdeux Etats et applicabàe
la date de sa signature. Les deuxChefs dYEtatavaient la claire intention de conclure
des accords déterminantle tracéde la ligne de frontière maritimedu point 12 au Point
G. Le fait qu'un instrument formeldénommé Déclarationpuisse constituer un traité
est prouvéà l'évidence parla pratique des Etats. On peut en trouver des exemples
anciens dans la Déclarationde Paris de 1856 et dans la Déclarationde Saint
Petersbourg de 1868. La Déclaration conjointede la Chine et du Royaume-Uni sur
Hong-Kong de 1984en est un exempleplus récent. La Cour elle-même a admis dans
une affaire fort récente (Afjpairede la DélimitationMaritime et des Questions
Territoriales en Qator et Bahrein) que la dénomination donnée à un instrument
internationalne détermine passa qualificationou non de trai:é
"La Cour observera en premier lieu qu'un accord
international peut prendre des formes variées et se
présentersous des dénominationsdiverses". (C.I.J. Rec.
1994,p. 120).
2.238 Dans ce casprécis,il s'agissaitde savoir si les minutesd'une
réunionministérielle reprenantdes engagements auxquels ontconsenti les Ministres
des Affaires étrangèresde deux Etats pouvaientconstituerun accord internationalet laCour a estiméque c'était lecas. La Cour n'aura en conséquence aucune difficultéà
conclure que la Déclarationde Maroua est un traitéopposable au Nigeria et au
Camerounen ce qui concernela partiede leur frontièremaritimequi y est définie. Il
va sans dire que, pour les raisons développéeasu paragraphe2.236 ci-dessus, le fait
que le Camerounait acceptéet continueàaccepterla lignedéfinie dansla Déclaration
de Maroua n'impliqueen rien que le Cameroun considéreraic tomme équitable toute
prolongation directe decette ligne vers le large (v. Chapitre 5 pars. 5.82 et 5.-7
5.89).
2.239 Le Camerounest conscientde ce que le Gouvernementdu
Nigeria conteste depuisquelques années la validitéjuridique de la Déclarationde
Maroua. Le Gouvernement du Nigeria avance commearguments les éléments
suivants, qui ont étéprésentéslors de différentesréunions de la Commission
frontalièreconjointeou d'experts desdeuxEtats :
(a) le Général OWON,le Chef d'Etatnigérianàla date
de signature de la Déclarationde Maroua, n'était pas
constitutionnellementautorisé engagerle Nigeria sur la
lignefrontièretracéedanscettedéclaration,
(b) au demeurant, la Déclarationaurait dû êtreratifiée
par le Nigeria conformémentau droit constihitionnel
nigérian.
2.240 Le Cameroun considère que ces arguments ne sont pas
fondéset sont sans valeur aucune. Le Cameroun adéjàeu l'occasion(v. suprapar.
2.221) de citer l'article7, par.2.a de la Conventionde Viennesur le Droitdes Traités
(lui-même déclaratoired'une règle préexistantdeu droit international) qui accorde
notammentaux Chefsd'Etatdes pouvoirs"en vertude leurs fonctionset sansavoir à
produire de pleins pouvoirs"de représenterleur Etat "aux fins d'effectuertous actes
relatifs à la conclusion d'un traité...". En conséquence,les signataires de la
Déclarationde Maroua,(le Généra GlOWONpour le Nigeriaet le Président AHIDJO
pour le Cameroun), dûment reconnusChefs d'Etatde leurs pays respectifsen 1975,
étaient pleinement compétentspour exprimer le consentement de 1'Etat qu'ils
représentaientà une extensionde la délimitationde la frontièremaritimedu point 12
au pointG. Le textede la Déclaration de Maroua témoigne clairemenq tu'elle devait,
dans l'esprit dessignataires, constituerun instrument conventionnelopposable aux
deux Etats. Les différentspoints figurant surle tracéde la ligne frontière sont
précisément identifiépasr les coordonnéegséographiqueset la ligne entière esttracée
sur la carte del'Amirauténo 3433 figuranten Annexe à la Déclaration. 11n'y a pasd'obscuriténi d'ambiguïté surl'objet de l'accord entre les deux Chefs d'Etat à
Maroua en 1975.
2.241 11reste àexaminer l'argument que peut présentelre Nigeria
selon lequel la Déclarationde Maroua est invalide parce qu'elle n'a pas étératifiée
par leNigeria. Il y a trois réponsesdéterminantesàce genre d'argument :
i) La Déclarationne contient aucune disposition précisantqu'elle a étéconclue
sous réservede ratification, ce qui implique clairement que la ratification
n'étaitpas nécessaire. Si leChef d'Etat du Nigeria avait souhaités'assurerque
la Déclarationétaictonclue sous réservede ratificationde la part du Nigeria, il
aurait dû insister pour faire inclure une clause effet dans le texte.
ii) Dans l'Affairede laDélimitation Maritimeet des QuestionsTemales entre
Qatar et Bahrein, la Cour a examinéet rejetécatégoriquementun argument
pratiquement identique avancépar le Bahrein. La Cour décritcet argumenten
référence à une déclaration de la déposition du Ministre des Affaires
Etrangèresde Bahrein :
"Le Ministre ajouteque selon la Constitutionde Bahrein,
les "traités relatifs au temtoire de 1'Etat ne peuvent
entrer en vigueur qu'après avoir étéeffectivement
adoptéscommedes lois. "
Il indique qu'il n'aurait dès lors pas eu qualité pour
signer un accord international prenant effet à la
signature. Conscient de cette situation, il aurait étéprêt
à souscrire à une déclaration consignant une entente
politique, mais non à un accord juridiquement
contraignant" (C.J., arrêtdu ler juillet 1994, Rec.
1994, p. 121,par. 26).
2.242 La Cour, comme cela est indiqué précédemment, raejeté
catégoriquementce type d'argument. Le passage précité est immédiatement suivipar
le passage de l'arrêt dela Cour citéau par. 2.222, démontrantque la Cour n'a
absolumentpas été convaincuepar la thèsede Bahrein sur cepoint.
2.243 11resteà ajouter que ladoctrineest au demeurantopposéeau
type d'argument avancépar le Nigeria. La Cour se souviendra de ce que, lors de la
formulation finale des projets d'articles sur le droit des traités, la Commission du
Droit international a du examinerles relationsentre les dispositions duprojet d'article
qui devaient devenir l'article 7 de la Convention de Vienne et celles qui devaient
devenir l'article 46 (traitant des dispositions du droit national en matière decompétencepour conclure les traités)La Commissiona, en particulier, examinéle
futur article7 par.2.a) de la Conventionde Viennecréaitune présomptionabsolue de
ce qu'en droitinternational les personnes désignées comm tietulaires de fonctions
publiques (Chef d'Eut, Chef de gouvernementet Ministre des Affaires étrangères)
sont, de par leurs fonctions, habiliàéeffectuerles actesspécifisans êtretenues
d'apporterla preuvede leurspleins pouvoirs,nonobstantle fait que, en droit national,
elles ne sont pas habilitéeà le faire.La présomptionsemble être absolue. La
Commission,dans son commentaireà propos del'actuelarticle 46 de la Convention
de Vienne, a clairementrejetéla doctrine selon laquellela législation nationale
limitant les pouvoirs des organesd'Etat en matièrede conclusionde mités pourrait
rendre nul tout accord surun traitéau plan internationalsans considérationd'une
limitationconstitutionnel:e
2.244 11n'y a pas d'autreaccordentre les parties, que ce soit pour
étendre la frontière maritimvers le large au-delà du poiGt ou pour modifier le
tracéde la lignedu point 12au poinG, résultant dla Déclaratiode Maroua.
SECTION 5. UNE FRONTIERE FERMEMENT ETABLIE
2.245 L'examen de l'histoire générale def srontières entre le
Cameroun et le Nigeria laisseapparaître que l'ensembledes frontières terrestreet
lacustre, ainsi qu'une partie de la frontière maritime entre les deux Etats sont
fermement établies,en tant qu'elles reposent sur des bases juridiques sûres et
incontestables.
2.246 Cette frontière est en effet la résultanted'un ensemble
d'instrumentsjuridiques pertinents allantdes accords anglo-allemandsconclus entre
1885 et 1914, en passant par les traitésanglo-françaisconclus entre 1916 et 1960,
jusqu'à des accordsplus récentsconclus directemententre le Camerounet le Nigeria
après leuraccessionàla souverainetinternationale.
2.247 Les différentsinstrumentsjuridiques concernéspeuvent être
répartisen trois groupe:1 O-les instruments anglo-allemandsconclus de 1885jusqu'avant la premièreguerre
mondiale (1914)
2"- les instruments anglo-français conclus à partir de la première guerre mondiale
(1914)jusque avant l'accession àl'indépendance du Camerounet du Nigeria.
3"- Les instruments conclus directement entre le Cameroun et le Nigeria devenus
indépendants.
8 1 Les instruments anplo-allemands conclus de 1885
jusau7avant la ~remiere guerre mondiale
2.248 Ils correspondent au "déblayage" juridique de cette
délimitationet traduisent bien souventune connaissanceinsuffisantedu terrain à cette
phase. Ce sont :
- les accords anglo-allemands des 20 avril au 16 juin 1885 relatifs à leurs sphères
d'influence dans certaines parties de l'Afrique, complétés parla Conventionentre les
deux Etats relative aux sphères d'influence dansle Golfe de Guinéedes 27 juillet au 2
août 1890(v. supra pars. 2.24 -2.31) ;
- le Traitéanglo-allemandrelatif au Rio del Rey du 14avril 1893(v. supra pars. 2.32
- 2.35) ;
- le Traitéanglo-allemand de Berlin du 15 novembre 1893 (v. supra pars. 2.36 -
2.41) ;
- le Traité anglo-allemand du 19 mars 1906 relatif à la frontière britannique et
allemandede Yola au Lac Tchad (v. supra pars. 2.59 - 2.68)
- le Protocole de la commission anglo-allemandede délimitationfrontalière entre le
Camerounet le Nigeria signéen avril 1906(v. supra, pars. 2.52 -2.58) ;
- 1'Echangede notes anglo-allemand du28 févrierau 5 mars 1909, confient les
protocoles définissantles frontièresentre Gorege et le LacTchad (12 février 1907)et
entre Ubr et Mayo Tiel (11 mars 1907)(v. supra,pars. 2.69 - 2.75). 82 Les instruments anelo-francais conclus à ~artir de la
première mierre mondiale (1914) iusau'avant l'accession
à l'indéoendancedu Cameroun et du Nigeria
2.249
Ils viennent souventconfier et surtout préciser les accords
du premier groupe. Il s'agit de :
- l'Accordanglo-françaisdu 23 février 1916(v. suprapar. 2.100) ;
- 1'Echange de lettres anglo-français du 314 mars 1916. (v. supra pars. 2.101 -
2.104);
- la Déclaration deMILNERISIMONdu 10 juillet 1919 (v. supra, pars. 2.106 -
2.111) ;
- l'Accord anglo-français de 1930 connu sous l'appellation "Déclaration
THOMSONIMARCHAND(v. supra,par. 2.118) ;
- 1'Echangede notes anglo-français du9 janvier 1931, approuvant la Déclaration
THOMSONIMARCHAND définissantla frontière camerouno-nigériane (v. supra,
pars. 2.119 - 2.123) ;
- le Traitéanglo-allemandrelatif à la délimitationde la frontièrecamerouno-nigériane
en date du 11 mars 1913et complété par le protocoleanglo-allemanddu 12avril 1913
relatifà I'abomement dela frontièreanglo-allemandeentre le Nigeria et le Cameroun
de Yola à la Cross River (v.0 supra,pars. 2.76 et ss, 2.94, également pars.2.212 -
2.213) ;
- deux instruments législatifsbritanniques intemes reconnus depuis comme faisant
partie intégrante desinstrumentsjuridiques délimitantla frontière internationaleentre
le Cameroun et le Nigeria. Il s'agitd'une part du décret-loidu Protectorat du Nigeria
de 1922 (sous sa forme amendée), et du décret-loi duCameroun sous mandat
britannique de 1923 (sous sa forme amendée),et, d'autre part, du décret-loisur le
Nigeria (Protectorat et Camerounde 1946 (State Regulationand Order 1946n01352)
(v. supra,par. 2.125) ;
- s'y ajoute le Nieeria (Constitution)Order in Council 1954(11'1146)qui reprend et
confirme les frontières délimitéespar les Traités anglo-allemandsde 1913 et laDéclaration franco-britannique de juillet 1919 et 1'Echange de lettres entre les
Gouvernementsdu Royaume-Uniet de la France dejanvier 1931.
83. Les instruments camerouno-nigériansconclus entre les
deux Etats devenusindéoendants
2.250 Ils ne sont pas moins nombreux et témoignentde l'intensité
du processus qui a abouti à la délimitationde la frontièremaritime entre les deux pays
jusqu'au pointG. Ce sont :
- la première Déclarationde Yaoundédu 14 août 1970 (v. supra, pars. 2.215 -
2.218);
- la deuxième Déclarationde Yaoundé du 14 avril 1971 (plus connue sous
l'appellation DéclarationNGOHlCOKER (v. supra,pars. 2.219 - 2.225);
- la Déclarationde Lagosdu 21juin 1971(v. supra, pars. 2.226- 2.228) ;
- la Déclarationde Kano de 1974(v. supra, pars. 2.229- 2.231) ;
- la Déclarationde Maroua dejuin 1975(v. supra pars. 2.232-2.244).
2.251 Ce catalogue d'instruments témoigneincontestablement du
soin apportéà la délimitationde la frontière entre le Cameroun et le Nigeria. Les
grandes puissances s'en sont préoccupées depuis 1885. Aprèsles indépendances,le
Cameroun et le Nigeria se sont atteléà la parfaire.
5 4. Portée du orocessus
2.252 L'enchaînement de ces instruments juridiques et leur
succession dans le temps montrent bien que la délimitation decette frontièrea étun
processus continu, dans lequel chaque nouvelle étape est venueconfirmer ou
conforter, préciseret consolider les étapesprécédentes. Le nombre particulièrement
élevé desaccords bilatéraux entre puissances admiistrantes pendant la période
coloniale, consistant en des documents de forme variée (traitéesn forme classique,
accord en forme simplifiéenotammentles déclarations,échangesde lettres), traduit àl'évidencela minutie avec laquelle chaque secteur de cette frontière a été défine it
approuvé parles parties.
2.253 S'y ajoutent les accords de Mandat et de Tutelle qui ont
placéla délimitationd'unepartie importante de cette frontièresous les auspices des
instancesinternationales.
2.254 La progression en plusieurs étapes, dela délimitationd'une
partie de la frontièremaritime entre les deux Etats postérieurement à l'indépendance
témoignedu mêmesouci de parvenir à une délimitation négociéee ,t en tout cas
acceptableet acceptéeparles deuxparties.
2.255 En définitive,peu de délimitationsde frontières africaines
auront fait l'objet de tant d'attention et de soins que celles séparant le Camerounet le
Nigeria. La délimitationde cette frontièreapparaît en effet comme la résultantedes
longues et attentives négociations,d'une part, entre les grandes puissances opérant
soussurveillance internationale,d'autre part, entre les parties en cause.
2.256 En cela, cette déliitation est conforme au droit
international, et la frontière qui en est résultéeest reconnue par la communauté
internationale (v. infra ,hapitre 3 section 4 notamment). Elle correspond aux
caractéristiques quele droit international attache aux frontières : elle est complète7
(notammentpour la partie terrestre) ; elle est stables.
7
Voir notammentC.P.J.I. Avis conrultatijn012, le 21 novembre1925, sériB, p.208,
NationsUnies,R.S.A., vol.XII1,p.307, par;égalemenCt .P.J.I. SérieB n08, p.32, Avis
n08, C.P.J.I., SéBin"12,p.20.
8 Voir notammentC.I.J., Souverainesur certainesparcelles frontali, rrêdtu 20 juin
1959,Rec. 1959,pp. 209 et ;Affairede la Sentencearbitralerenduepar le roid'Espagne
le 23 décembre1906, Arrêdtu 18 novembre1960, Rec., 1960, pp. 192 et;sAffairedu
Templede PréahVihéar1,5juin 1960,Rec. 1960,p.32. CHAPITRE3
LACONFIRMATION DESTITRESCONVENTIONNELSSECTION 1. INTRODUCTION
3.01 11résultedes développementsprécédents que, da sasquasi-
totalité, la frontière camerouno-nigérianeest délimitée de façon précisepar des
accords conclus entre les puissances coloniales, selon les cas, l'Allemagne et la
Grande-Bretagneou celle-ciet la France, et, que pourun segment relativementlimité
(v. suprapars.2.125 et2.143-2.144), elle résulte des limites administratientre les
deux Parties du Cameroun sousmandat puissous tutelle britannique.11s'agit là de
titres frontaliers particulièrement clairs, établis sur des preuves documentaires
indiscutables.
3.02 De tels titres suffisent, comme la Cour l'a rappelé
récemment, à établirl'existenceet le tracéde la frontière litigieuse(v., en ce qui
concerne le titre conventionnel, l'arrêtdu 3 février 1994,rendu dans I'affaire du
Dzfférend frontalier, Rec.1994,pp.6 et S., not. p.38 et, en ce quiconcernele titre
fondé surles décisions législativeosu administratives internàun territoire colonial
unique, les arrêts de22 décembre 1986a , ffaire du Différendfrontalier,Rec. 1986,
pp.586-587 et du 11 septembre 1992, affaire du Différendfrontalier terrestre,
insulaireetmaritime,Rec. 1992,pp.389 et 398-399).
3.03 Des titres présentantcette nature l'emportent sur toute
prétention contrairequi pourrait êtrefondée surla conquêteou la possession
insidieuse d'un temtoire, fût-elle durable titulus estjusta causa possidendiquod
nostrumest (v. R.Y. JENNINGS,TheAcquisitionof Tem'toryinInternationalLaw,
Manchester U.P., 1963, p.5). En revanche, les titres documentairespeuvent se
trouver confirméset consolidés par diversesformes de reconnaissances émanan dtes
Etatsen litigeou despuissancescoloniales auxquellesils ontsuccédé.
3.04 Comme l'a préciséla Cour dans l'affaire du Dzfférend
territorialntrela Libyeet le Tchad,
"Reconnaîtreune frontière,c'est avant tout "accepter"
cette frontière, c'est-à-dire tirer les conséquences
juridiquesde sonexistence,la respecteret renoncer à la
contester pourl'avenir(..) "Une telle reconnaissancepeut revêtirdiverses formes,
ainsi que l'attestent les conventions et la jurisprudence
internationale(Rec1 .994 ,p.22 et 23).
3.05 En la présente espèce, les diverses formes de
"reconnaissances", au sens très large du terme, dont a fait l'objet la frontière
carnerouno-nigérianen'ont pas, comme dans l'affaire tranchéepar la Cour en4,
eu pour effet de conférer"àla ligne une force juridique qui lui faisait auparavant
défaut"(ibid, p. 23). Elles témoignentseulementde la conviction des Etats intéressés
ou de la communauté internationale, qla frontière existe et qu'elleest bien situéelà
où les titres documentaires,et d'abord lestraités,la fixent.
3.06 Du Lac Tchad au Mont Kombon, de tels actes de
reconnaissance sont nombreux. Ils ont été effectuéspalres puissancescolodanses
un cadre multilatéral,au sein de la Sociédes Nations puis de l'organisation des
Nations Unies. Les travaux de la Commission Permanente des mandats puis du
Conseil de tutelle ont donnélieua reconnaissancedela frontière entrele Cameroun
et les Etats voisins. Les puissances coloniales ont bilatéralement reconnucene
frontièrà de nombreuses reprises.Au momentde l'indépendance, les deuEtats ont
à leur tour confirméla ligne frontalière,qui a encoreconnue au sein des Nations
Unies et par elles. Peu de frontières internationales ont étéconfiées aussi
explicitement et aussi fréquemmentpar des actes de reconnaissance.
3.07 Entre le Mont Kombon et la borne 64, la frontière résulte
d'un acte unilatéralde la puissanceadrninistrante britannique, mais agissantsous le
contrôle de la Commission Permanentedes mandats de la Société desNations, puis
du Conseil de tutelle de l'organisation des Nations UnieLa frontière est donc
confirmée parune reconnaissance internationale dece statut.
3.08 De la borne 64 à la mer, la frontière résultedes traités
conclus entre l'Allemagneet le Royaume-Unien1913 et confiés par la suite. Cene
frontièrea fait l'objetd'un bornage1905-190 (6e laCross Riveà la mer) puis en
1912-191 3de la borne 64 à la Cross River), ce qui représente un élément de
reconnaissance indiscutable. Maàpartir de1916 et jusqu'e1958, la frontière perd
son caractère de délimitation entre territoires relevant de puissances souveraines
différentes. Les actes de reconnaissance étatique sont dès lors plus rares. En
revanche, la reconnaissance internationale par la Commission Permanente des
Mandats puis le Conseil de tutelle est renouvàplusieurs reprises. En tout étatde
cause, le pouvoir discrétionnairede la puissance administrante est limitépar leprincipe de l'intangibilité territorialedes territoires sous mandat puis sous tutelle
puisque, comme la République duCameroun le précisera(v. section 4, infra a,
Grande-Bretagne et la France ne faisaient qu'exercer la souveraineté sur le
Cameroun, sans pour autant la détenirEnfin, depuis leur indépendance,les deux
Parties ont eu l'occasion de reconnaître formellement la frontière terrestrejusqu'à
l'embouchurede 1'Akwayafé.
3.09 De la côte jusqu'au point G, la frontière est définie par
l'accord entre les deux Parties résultantdu Traitéallemanddu 11 mars 1913 et
des Déclarationsde Yaoundéde 1971 et de Marouade 1975.
3.10 Au-delàdu point G, dansles espacesmaritimes, on ne relève
pas d'acte de reconnaissance à ce jour. Les conclusions de la République du
Cameroun s'appuient sur d'autres considérationsqui sont précispar ailleurs (v.
infra c,apitr5, sectio3).
3.11 Partout ailleurs. la confiationdes titres documentaires
tient
- àl'acceptation expressede la frontièrepar les parties concernéeset, en particulier,
par la Grande-Bretagneet par le Nigeria (section
- aux "effectivités",c'est-à-dire au "comportementdes autorités administraàives
l'époque coloniale"(C.I.J., apréc. du 11septembre 1992 ,ar.3.02, Rec. p398)
et depuis les indépendances,jusqu'à la date critique constituéepar les premières
atteinteàl'intégrité territodu Camerounpar le Nigeria (sectio3);
-à l'attitude constanteet dépourvued'ambiguïté, desautorités decontrôle du mandat
puis de la tutelle (secti;et)
- àune documentation cartographique abondante et d'une remarquable homogénéité
(section5).SECTION 2. L'ACCEPTATION EXPRESSD EE LA FRONTIERE
PARLA GRANDEBRETAGNEET LE NIGERIA
Selon la définitiondu Professeur Erik SUY,
"La reconnaissance est une manifestation de volonté
unilatéralepar laquelle un sujet de droit constate une
situation donnéeet exprime la volontéde la considérer
comme étantconforme au droit" (Les actes juridiques
unilatérauxen droit internationalpublic,L.G.D.J.,
Paris, 1962,p. 190).
En matièrefrontalière,la reconnaissance
"1-1doit s'analyser en un engagement de ne point
compliquer des relations par un contentieux temtorial
dont la solution commanderait éventuellement la
conclusion d'un nouveau tracé de frontières" (Joe
VERHOEVEN, Lu reconnaissance internationadans
la pratique contemporaine,Pédone, Paris, 1975, p.
318).
Il s'agit donc d'un acte exprimantle consentemàêtreengagé vis-à-visd'un fait,
d'une qualification, d'une frontière.
3.13 Ces élémentsde définition permettent de mieuxdélimiterce
que le Cameroun entend par "reconnaissanceexpresse". L'expression exclut les
accords internationaux quicréent, modifientou complètent uneligne frontalière, mais
recouvre toute confirmation explicitepar un Etat de la ligne existante, que ce soit par
l'intermédiaired'un acte interne portée internationale, comme une législation
frontalièreou une carte officielle, ou par l'intermédiaired'un acte spécifiquement
international, commeune déclarationunilatérale,même émise dasn cadre bilatéral,
ou encore au sein d'une organisation internationale (v. infra, section 4)La
République du Cameroun relèvera ainsi un grand nombre d'actes confirmatifs qui,
dans leur ensemble, forment un comportement du Royaume-Uniet du Nigeria qui
s'assimileune reconnaissance.
3.14 La frontière a fait l'objet de confirmations multiples
répondant àces critères. En particulier, tant le Royaume-Uni($1) que le Nigeria lui-
même($2) ont procédéà de nombreuses reprisesà des actes de confirmations
expresses. Dans ces conditions, les revendications récentes du Niae peuventêtreprises en compte par la Cour, puisqu'ellessont juridiquement inopposablàsla
République du Cameroun($3).
81. Lesconfirmations expresses opéré pesrleRovaume-Uni
3.15 Un examen de l'attitude britannique démontre une
reconnaissance constante et renouvelée de la frontière établieen 1913 avec
l'Allemagne et en 1919 avec la France. Les instruments l'établissantsontlégion.
L'application de la DéclarationMILNER-SLMONa donnél'occasion au Royaume-
Uni comme à la France de confirmeràplusieurs reprises le tracé quien résulLa.
Déclarationdes Gouverneurs, consacréedans 1'Echangede lettres de 1931, peut
s'analyser en une confirmation de ce tracé. L'administration britannique, par ses
actes et son comportement, a confmé la frontière tant avant qu'aprèsla seconde
guerre mondiale.
A. - L'applicationdela Déclaration MILNER-SIMON
3.16 La défuiitionde la frontière par Lord MILNER et Henri
SIMON confirmait la division du Cameroun allemand entre les Britanniqueset les
Français. 11restait cependantà faire consacrer cette division par la communauté
internationale. Dèsla fin de 1919,la France et la Grande-Bretagnedéclarèr:nt
"Aux termes de la décision prise par leConseil suprême
des Alliés, le 7 mai 1919, la France et la Grande-
Bretagne ont reçu mission de se mettre d'accord sur le
statutà donner au Togo et au Cameroun, et dont elles
recommanderaientl'adoption à la Sociétédes Nations.
A cet effet, elles ont f~é, d'abord, les limites des
territoires qui devaient êtreplacés dans leurs zones
respectiveset cette mesure préparatoirea fait l'objet des
déclarations ci-annexées,ignéesà Londres le 10juillet
1919 -]
En conséquence,les soussignés dûmentautorisés à cet
effet, soumettenà l'agrément des Principales Puissances
alliéeset associées lesdispositions suivantes arrêtées de
concert entre leurs Gouvernements.
ARTICLEPREMIER La France et la Grande-Bretagne acceptent d'assumer,
sous le régimedu mandat, l'administrationdes territoires
qui faisaient antérieurement partie du Togo et du
Cameroun, étant entendu que les régions situées
respectivement à l'ouest et à l'est de la ligne de
démarcationfiée par l'article ler des déclarations
franco-anglaises,ci-annexéesendaredu 10juillet 1919,
seraient administrées, les premières, par le
Gouvernement britannique et, les secondes, par le
Gouvernementde la République.
Lu délimitationsur le terrain de ces frontières serait
effectuéeconformémena t ux clauses inséréedsans les
dites déclarations" (Souligné par la République du
Cameroun; AnnexeM.C. 110).
3.17 Au-delà de l'engagement relatif au statut de mandat
applicable aux deux anciennes colonies allemandes,cette déclarationcontient deux
reconnaissances parallèles expresses de la frontière établieans la Déclaration
MILNER-SIMON. Celle-ci est donc, dès l'origine, considérépar les autorités
britanniques comme l'instrument de référence pour déterminelra frontière de la
nouvelle entité.
3.18 Il restait cependant à matérialisercette ligne sur le terrain.
Dans cette perspective, le courrier diplomatique échangéentre les autorités
britanniques et françaisesen vue de l'applicationde la ligne MILNER-SIMON donna
lieuà des confimations multipleset répétées des premièresmme des secondes.
3.19 Dès le 18 août 1920, l'Administrateuren Chef des Colonies
FOURNIER, délégué par le Commissaire de la Républiquefrançaise au Cameroun
rencontre H.C. DUNCAN, District qfficer in Charge, Délégué du Gouverneur du
Royaume-Uni au Nigeria. Le compte rendu deleur rencontre mentionne:
"Les soussignés ont l'honneurde vous rendre compte
qu'ils se sont rencontréà Bagam le 15 août 1920 à
l'effet de déterminerprovisoirementla nouvellefrontière
définieparl'article 1de in Conventiondu IOjuillet 1919
et de procéderdans la zone relevant de la Division de
Bamenda à la remise au Gouvernement français des
territoires qui lui reviennent en exécution de la
Convention mentionnée ci-dessus" (Souligné par la
Républiquedu Cameroun; AnnexeM.C. 112).
Le texte signale ensuite que "5. La prise de possession par le gouvernement
français des territoires cédéspar le gouvernement
britannique dans la zone relevant de Bamenda a été
effectuée l15 août 1920".
3.20 Cet exemple est loin d'êtreisolé. Ami, selon un procès
verbal du 12novembre 1920
"Les soussignés:
W.D.K. MAIR, District officier II de l'Administration
de la division de Kontsena,délégude M. le Gouverneur
anglaisde la Nigéria;
M. PITION louis, Capitaine Commandant de la
Circonscription de Garoua, délégué de Monsieur le
Commissairede la Républiquefrançaise du Cameroun;
En exécutionde la déclarationfranco-britannique du10
juillet 1919 et des instructions respectivesdu Gouverneur
français du Cameroun;
Ont procédé,du 30 octobre au 12 novembre 1920, à la
remise des temtoires des services, ainsi qu'à la fixation
provisoire de la frontière, entre lesdeux Gouvernements,
àpartir de la Bénouéau nordjusqu'à I'Hosséré Dutscain
Bertua, limite sud du Sultanat de Kontsena" (Souligné
par la République duCameroun; AnnexeM.C. 113).
On peut encore lire que
"Bienque les deux Commissairesne soient pas munis de
pouvoirs leur permettant d'apporter une modification à
un point defrontièrebien déterminé,il leur a sembléque
l'esprit de la déclaration franco-anglaisede 1919 avait
pour but, du côté français, d'assurer en entier à la
France la possessionde la route de BaàéFort Lamy".
On ne saurait manifester plus clairementsa conviction que la Déclarationde 1919est
l'instrumentde référence pour établle tracéde la frontière.
3.21 Dès le lendemain de sa proclamation, les autorités
britanniques confï~~nentque la Déclaration MILNER-SIMONdoit êtreappliquéesur
le terrain, et procèdent effectivementà sa mise en oeuvre. Cette conviction sera
constamment celle des autorités britanniques. Lorsqu'elles proposentà leurs
homologues français des rectifications ou aménagementsdu tracé, elles le font
toujours par référenceà la Déclaration MILNER-SIMON, considéréecomme
d'application et obligatoire. C'est dans ce contexte que les deux puissancesadministrantes adoptenun nouvel instrumentdont on peut déduirela confiation la
plus éclatantede la frontièrede 1919.
B. - La Déclaration THOMSON-MARCHAND et 19Echange
de notes de 1931, en tant que confition bilatérale de
la ligne de 1919
3.22 A bien des égards, la Déclaration THOMSON-
MARCHAND contient des précisionspar rapport à la ligne de 1919, et elle est
analysée en ce sens dans la section du présent chapitre consacréeaux accords
internationaux. Mais on y trouve en mêmetemps une confirmation de la ligne de
1919.
3.23 Cet élément ressorttrès clairementde'Echangede lettresde
1931 qui est constituéde deux confirmationsparallèlesde la DéclarationMILNER-
SIMON. Ainsi, l'ambassadeur deFleuriau écrivàtArthur Henderson au sujet dela
Déclarationde 1930que
"Votre Excellencea sans doute reçu le texte de la même
déclarationet elle a certainementobservé qu'ilne s'agit
là qu'une étudepréliminaire. Celle-ci est destinée à
donner à la descriptionde la ligne quedevra suivre la
commissionde délimitationplus deprécisionsque ne l'a
fait la déclaratiMilner-Simonde 1919. [ 1" (Souligné
par la Républiquedu Cameroun; AnnexeMTC. 157),
et que, si la Grande-Bretagneen accepteles termes,
"[-]la délimitation définitive poua tre entreprisepar
la mission prévueàcet effet par l'Article 1du mandat".
HENDERSON réponditque :
"[-] His Majesty's Government agree that this
Declaration is, as you point out, not the product of a
boundary commission constituted for the purpose of
carrying out the provisions of Article 1 of the Mandate,
but only the result of a preliminary survey conduct in
order to determinemore exactiy than was done in the
Milner-SimonDeclarationof 1919 the line ultirnateiyto
befollowed by the boundarycommission [-1" (Souligné
par la RépubliqueduCameroun).Le Royaume-Uni comme la France confient donc que la frontièreest déterminée
sur base de la ligne de 1919, et mêmequ'il s'agit d'une obligationen vertu du
Mandat. Les puissances administrantesne peuvent en effet modifier les frontièresdes
temtoires sous mandat sans l'accordde la Société des Nations. Commlee relevait le
juge Mc Nair dans son opinion individuelledans l'affaire du Statutinternationaldu
sud-ouest africain,"[-] le mandataire n'acquiertqu'un titre limitésur le temtoire qui
lui est confiéet- ]la mesurede ses pouvoirs estfournie par ce qui est nécessaireaux
fins de l'exécutiondu Mandat" (C.I.J. , ec.1950, p. 150).
3.24 La contrainte posée par le principe de l'intangibilité
temtoriale des temtoires sous mandat etexplicitéepar les textes des mandatsfrançais
et britanniques sur le Cameroun permet de préciserla naturejuridique de 1'Echange
de lettres du 9 janvier 1931 : il s'agit d'une interprétationauthentiquede la
déclarationMILNER-SIMON du 10janvier 1919. Les signataires prennent soin de
préciserque la déclarationdes deux gouverneurs n'est qu'une "étudepréliminaire"
destinée à donner plus de précision à la ligne frontière et valant directive pour la
commission de délimitationchargée deI'abomement de la frontière. Cet "accord
ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l'interprétation dutraité ou de
l'applicationde ses dispositions" au sensde l'article 31 par. 3a) de la Convention de
Vienne de 1969 sur le droit des traités s'impose dansle cadre de la régle générale
d'interprétation du traité. Ici, la confirmation officielle s'intègre au statut
conventionnel dela ligne frontière.
C. - L'administration britannique du Nigeria et du Cameroun
occidental
3.25 La Déclaration des Gouverneurs précisan etncore la frontière
entre les parties britanniques et françaises du Cameroun, il ne restait plus qu'à
compléterla matérialisationde la ligne. C'est ce qui fut entrepris dans les années
1930, jusqu'aux débutsde la deuxièmeguerre mondiale, comme la République du
Cameroun l'expose par ailleurs(v. infrachapitre 3, section 4, par.3.211 et chapitre
4, section 2, pars. 4.76-4.82). Après1945, les deux puissances administrantes des
territoires devenus sous tutelle ne poursuivirent plus les négociations surla précision
du tracé,qui fut consacréunefois de plus par les accords de tutelle(v. infrachapitre
3, section 4). Mais, dans le cadre de l'administrationdu Nigeria et du Camerounoccidental, le Royaume-Uni adoptera des actes impliquant reconnaissance de la
frontière.
3.26
Ainsi, la dissolution de la Sociédes Nations au débutde
l'année 1946 rendait nécessaire I'édictne dispositionsprécisantl'administrationdu
Cameroun sous mandat britannique. L'Order in Council providing for the
administrationof the Nigeria Protectorateand Cameroon underBritish Mandatedu 2
août 1946 révoquales actes précédents et réaffirmacertains principes en matière
territoriale intéressants pour notre propos(Annexe M.181).
3.27 En ce qui conceme la frontièreavec le Nigeria, l'arti4,e2
prévoitque :
'!TheCameroons under British Mandateconsists of that
part of the territories known as Cameroons in respect of
which His Majesty accepted the aforesaid Mandate,
namely that part thereof which lies to the West of the
boundary defined by the Franco-British Declarationof
July 10, 1919, and more exactly defined in the
declaration made by the Governor of the Colony and
Protectorateof Nigeria and the Governorof the French
Cameroons which wm confinned by and exchunge of
notes between His Majesry'sGovernementin the United
Kingdom and the French Govenunent of January 9,
1931" (Souligné parla République duCameroun).
Le Royaume-Unidéfinitbien le Cameroun britannique par référence à la Convention
franco-britanniquedu 10juillet1919, la Déclarationdes Gouverneurs,et l'échangede
lettres d9 janvier 1931 approuvant cettedernière. On ne peut contester le caractère
exprèsde cette reconnaissanceunilatérale.
3.28 Un autre passage de I'Orderdu 2 août 1946 est pertinentà
ce sujet. Il s'agit de la description de la frontièreadministrative entre le Cameroun
du nord et le Cameroun du sud qui, à la suitedes résultatsdes plébiscites, deviendra
une frontièreinternational:
"THE SECOND SCHEDULE
The line dividing thenorthem and southem portions of
the Cameroonsunder BritishMandate. From boundary post 64 on the old Anglo-Gemn
frontier the line follows the RivGamana upstream to
the point where it isjoined by the River Sama; thenceup
the River Sama to the point where it divides into two;
thence a straight line to the highest point of Tosso
Mountain; then in a straight lie eastwards to a point on
the main Kentu-Bamendaroad where it is crossed by an
unnamedtributary of the River Akbang(Heboro onsheet
E of Moisel's map on Scale 1/300,000)- the said point
being marked by a cairn, thence down the stream to its
junction with the river Akbang; then the River Akbang
to its junction with the River Donga; then the River
Donga to its junction with the River Mburi; then the
River Mburi southwardsto itsjunction with an unnamed
stream about one mile north of the point where the new
Kumbo-Banyo road crosses the River Mburi at Nyan
(aliasNton), the said point being about four miles south-
east by east of Muwe; thence along this unnamed stream
on a general tme bearing of 120" for one and a half
miles to its source at a point on the new Kumbo-Banyo
road, near the source of the River Mfi; thence on a true
bearing of 100" for three and five-sixths miles along the
crest of the mountains to the prominent peak which
marks the Franco-British frontier"(Souligné par la
République duCameroun).
Cet acte confie ainsi que la frontièreministratives'étendentre la frontièreanglo-
allemande et la frontière franco-britannique. Ces dernières sont donc reconnues
comme marquant respectivement les limites ouest et est du Cameroun britannique.
Par ailleurs, I'acte du2 août 1946 se réfèreà la Carte MOISEL pour préciserune
localisation. Cette carte est dès lors reconnue comme un instrument généralde
délimitation de référence, comptetenu des limites présentéespar les cartes de
l'époque.
3.29 Un autre exemple de confimation est l'acte intitulé The
Northern Region, WesternRegion and Easternregion (Definitionof Boundaries)
Proclamtion, 1954. Cet acte administratif du 30 septembre 1954 contient une
description détailléde l'ensemble des frontièresdu Nigeria (AnnexeM.C. 202). Il
fait suità I'actede 1946 mais, àla différencede ce dernier, il est édicté alorsleue
Cameroun se trouve sous le régimede tutelle. Comme pour la périodedu mandat, il
est évident que les autoritésbritanniques ne pouvaient modifier unilatéralement
l'étendue du territoirecamerounais.
3.30 La description du secteur M de la frontière de la Région
nord se termine d'ailleurs par une référence expressela frontièreanglo-allemande,
délimitéejusqu'en 1913 : "[-]thence upstream along the median line of this river
on a bearing of 204"for a distanceof 3 miles4,620 feet
to Boundary Post 100 on the old Anglo-Gemn Frontier
which is situated at the confluence of the Rivers Ameri
and N'diri" (Soulignépar la République duCameroun).
3.31 Le secteur O de la frontière de la Région nord reprend
presque mot la description de la ligne administrativeséparantle Cameroundu nord du
cameroundu sud contenue dansI'Order du 2 août 1946. On y retrouve donc :
- une référenceà la carte MOISEL, sheet E,
- une référenceàla frontièrefranco-britannique.
Les autorités britanniques confient donc une fois de plus l'instrument
cartographique de référencedes titres conventionnels du cameroun, ainsi que la
pertinencede la ligne franco-britanniquede 1919-1931.
3.32 Par ailleurs, cette description, par son caractère répétitif,
constitue une reconnaissance supplémentaire dela ligne joignant les anciennes
frontières anglo-allemandesetfranco-britanniques.
3.33 On peut enfin mentionner les nombreuses cartes éditées par
les autorités britanniques, qui reconnaissent le tracé de la DéclarationMILNER-
SIMON ou des Accords de 1913. La République duCameroun reviendra plus
longuement sur le caractère probatoire des cartesdans la présenteaffaire à l'occasion
du chapitre qui leur est consacré(v. infra, Chapitre 3, section 5). Il suffit de
constater à ce stade que plusieurs de ces cartes sont annexées à des accords
internationaux, viséspar le texte et signéespar les négociateurs. Elles s'intègrent
I'i~~~trumentumdont elles font partie. D'autres émanentd'organismes officiels et
constituentdes éléments de reconnaissance internationale. C'est le cas,en particulier,
des cartes publiées parles servicesofficiels britanniques ouigerians. Ce l'est tout
autant des cartes publiées parles organismes internationauxchargésde la surveillance
du mandat ou de la tutelle, que ces cartes émanentde la puissance administranteou
des services mêmesde l'organisation internationale. L'absence de contestations de
telles cartes renforce le statut de la frontière quit indiquée. Enfin, l'abondance
des cartes privées peut ajouter un élémentde notoriété supplémentair e la ligne
frontière.
3.34 On notera encore l'indication, surla carte officielle annexée
à l'Accord MILNER-SIMON du 10juillet 1919et signéepar les deux négociateurs,
de la frontièreanglo-allemanderésultant des accordsde 1913 (Annexe C 2). L'objet
de l'accord MILNER-SIMONn'était certespas de consacrer l'ancienne frontièreentre le Nigeria et le Cameroun allemand.
Mais l'utilisation sans réserve de
l'ancienne ligne frontière n'estpas neutre. A tout le moins, elle confirme que, pour
la Grande-Bretagne, l'ancienne frontièreétaitbien celle résultant des accordsde 1913
et constitue un élémentde confirmation de la situation juridique antérieure à la
déclarationdu 10juillet 1919.
3.35 Tous ces instruments sont les manifestations d'une solide
conviction du Royaume-Uni que les frontièresdu Cameroun ont étédéfinitivement
délimitéespar les Conventions conclues avec l'Allemagne et la France. Cette
conviction est aussi attestéepar plusieurs documents du ColonialqSFceet du Foreign
Opce. Dans une correspondance de mailjuin 1961 (Annexe M.C. 119), les
fonctionnaires britanniques ont manifestéleur opinion que les résultatsdu plébiscite
au Cameroun ne pouvaient entraînerune fixation ou une redéfinitiond'une frontière
entre les temtoires devenus parties intégrantesdu Cameroun et du Nigeria, mais
seulement une identification du tracé qui,en droit, existait déjà,et s'imposait aux
deux Etats. Cette correspondanceest un élément de plus montran lt reconnaissance
par le Royaume-Unide la frontièreconventionnelle.
3.36 Finalement, l'ensemble des actes confiatifs forment un
comportement impliquant reconnaissanceexpresse de la frontière. Il faut d'ailleurs
relever, comme la République du Cameroun le préciseradansla section suivante, que
les régimes du mandat et de la tutelle ne permettaient pas aux puissances
administrantesde modifier l'étendueterritoriale de la souverainetédu Cameroun.
52. Les confirmations exoresses ooérées oar le Nigeria
3.37 Dès son accession à l'indépendance,le Nigeria a eu de
nombreuses occasions de remettre en cause la frontière établià l'époque coloniale
par le Royaume-Uni avec l'Allemagne, d'une part, et la France, d'autre part. Sa
frontièreest le séparantdu Cameroun couvre plus de 1600 kilomètresallant du Lac
Tchad jusqu'à la mer. Les deux nouveaux Etats ont étéconfrontés à de fréquents
problèmes de coopérationtransfrontières, à l'occasion de problèmes divers, et ont
dans cette optique poursuivi des négociationspratiquement sans interruption de
l'indépendance ànosjours.3.38 Endépit decesmultiplesoccasions,le Nigerian'a nullement
contestéles frontièreshéritéese la colonisation. Bienau contraire,un examen des
relations bilatérales montrqu'il a confirméexpressément ces frontièresà plusieurs
reprises. Les exemples sont, comme dans le cas des confirmationsbritanniques,
nombreux, et il suffm àla République du Camerounde relever les plus significatifs
d'entre eux. 11faut à cet égard releverque, au contrairede la périodecoloniale, la
délimitation conventionnelle aétéexceptionnellepuisqu'elle n'a concerné après
l'indépendance que certains secteur dse la frontière,situés essentiellement danla
région maritime. Encore faut-il ajouterque les accords pertinents n'ont fait que
compléterles accords de 1913, sans les remettre en cause. Tant dans ce cas
particulier que pour les autres segments frontaliers, le Nigeria a confié les
frontièresexistantes.La confirmation expressede la frontière étaberend doncune
importance touteparticulièredansla périodepostérieureàl'indépendance.
3.39 Les négociations entrle Camerounet le Nigeria en matière
frontalière ont porté soitur l'ensemblede la frontièresoit, le plus souvent, sur un
secteur particulier. Chronologiquement, ellesont portéd'abord sur la frontière
terrestre, ensuite sur la frontièremaritime, et enfin sur la frontièrelacustre. Dans
chacunde ces cas, le Nigeriaa confié la continuité de la frontièrecoloniale.
A.- Les conilmations découlantdes négociationsportant sur
lafrontièreterrestre
3.40 Dès les années1960, les autoritésdu Cameroun et du
Nigeria se sont réuniesrégulièremenp tour régler certainequestionsrelativesà leur
frontière terrestreLa frontière estdélitée par référenc e des pointsdécritsavec
plus ou moins d'exactitude dans leconventionsanglo-allemandesau sud, franco-
britanniquesau nord, ou dans les actes administratifsbritanniquespertinents pour le
secteurallantde la borne64 au MontKombon. Leschangements dedénomination ou
de topographieet les altérationsde toutenaturerendentdifficilesla matérialisationsur
le terrain d'une ligne suffisamment précisepour prévenirtoute contestation. Si la
démarcation aétéopéréedans certaines régions,notamment dans le sud, durant
l'époque colonialee,lle reste encorelargementàfaire, notammentdans le nord, où le
travail de démarcationa été interrompu parla deuxièmeguerre mondiale (v. infra,
chapitre4, section2). C'est doncessentiellementpour des problèmesde démarcation
que les autorités nigérianeest camerounaisesse sont rencontrées dèsles lendemainsde l'indépendance. Les opérationsde matérialisation ontrepris, et, très logiquement,
les deux Etats ont pris pour base la délimitationet les démarcationseffectuées à
l'époque coloniale.
3.41 La démarcationfait suite aux négociationsvisant à résoudre
un conflit entre deux communautés situées de pare tt d'autre de la frontière. Les
Danare, au Nigeria, et les Boudam, au Cameroun, se sont en effet opposésen 1964
sur l'emplacement exact de la ligne séparant lesdeux Etats. Pour mettre fin à ce
litige, les délégationsnationaleserencontrent, en octobre 1964, puistout au longdes
années 1965 et 1966. La régionest difficilement praticable, les opérations de
démarcation laborieuses etcoûteuses. On décide cependant deles mettre en oeuvre
et, d'avril 1966àjanvier 1967, deuxmilles et demi sontdémarquép sar une ligne qui
sépareles villages Danare et oud dam Le. chefs de ces villages participenà une
réunion organisée par lesautoritésdes deux pays, qui consacre les résultatsdes
travaux.
3.42 Tout au long de ceux-ci, on a fait référencaux conventions
Ainsi, un fonctionnaire nigerian impliqué dans les travaux
de l'époquecofoniale.
précise-t-ià ses supérieurs qu'ilprend pour base les bornes existantesle long de la
frontière franco-britannique, ou encore qu'il utilise les vieilles bornes anglo-
allemandes (Annexe M.C. 233). Le rapport final de la délégation mixtesur la
démarcationde ce secteur (AnnexeM.C. 234) mentionneplus précisément que
"(a) Old Boundary pillars (1912-1913) No 109, 110,
111, 112 and 113 were visitedand identified [-] straight
lines about 40 feet wide (20 feet each sideof straightline
joining two boundary pillars) were cleared joining the
old boundary pillars 110, 111, 112 and 113 a total
distance of about 2 112miles [-]".
Les équipes envoyées sur place ont donc eu pour tâche de "restaurer" la démarcation
opérée à l'époque coloniale.Pour la suitedes travaux, le rapport mixte se place dans
la mêmeoptique :
"[-] It is suggestedthat the startingpoints on resumption
will be Pillar Nos. 113to 114".
Il s'agit bien, et seulement, de poursuivre les travaux effectuéeplusieurs dizaines
d'annéesplus tôt par les puissances administrantes.
3.43 La démarcationde l'ensemble de la frontière terrestre est
malheureusement interrompue par la guerre du Biafra. Mais I'intemption de cestravaux n'a jamais étédue à une contestation quelconquede la ligne par l'une ou
l'autre partie. Ainsi, lors d'une réunion d'une Commission mixte tenue à los
(Nigeria) du ler au 4 novembre 1978,
"[à] cause du nombre important d'incidents, il a été
reconnu la nécessitéde matérialiser cettefrontière. En
ce qui concerne la frontière terrestre, plusieurs traités
existent et une commission d'experts des deux pays
devra se réunir pour reconnaître,délimiteret borner la
dite frontière là où il n'y a pas de limite naturelle"
(AnnexeM.C. 253).
La mêmedémarche a été adoptée plus récemme ln, des discussionsbilatéralesde
Abuja, du 16 au 20 décembre1991. IR compte-rendu mentionne, à propos de la
frontière terrestre,que
"Après avoir rappelé tous les textes coloniaux de
délimitationde la frontière terrestre,la partie nigeriane a
relevé qu'ilexiste de nombreuseslacunesdans ces textes
:lacunes qui ne permettent plus aujourd'hui deprocéder
normalement au bornage de la frontière. Pour illustrer
ce propos, la partie nigeriane a relevé que ces textes
situentdans beaucoup de cas la frontière et sur une
longue portion entre des cases de passage et des
plantations;ces points de repèreretenus dans les accords
de 1913 n'existent plus aujourd'hui et créent desvides
importants dansla délimitationde la frontière. Cesvides
sont exploités par des populations frontalières qui
déterminent elles-mêmels a frontière entre le Nigeria et
le Cameroun. Cette situationest susceptiblede créerdes
problèmes frontaliers qui auraient pu être évités"
(AnnexeM.C. 315).
C'est sur base de ce constatqu'est créun Comitéde dix experts par pays, ce comité
ayant pour mission :
"- l'inventaire de tous les accords, traitéset documents
permettant la délimitationde la frontièreterrestre;
-l'examen conjointde ces documents pouren déceler les
vides et lacunes signalésplus haut;
- l'élaboration d'unaccord permettant la matérialisation
de la frontière terrestre" (ibid.).
3.44 LRs autorités nigerianes n'ont donc jamais contesté la
frontière terrestre établieà l'époque coloniale lors de l'une des nombreuses
discussions qui ont eu lieuà ce sujet depuisplus de 30 ans. Il ressort des rapports
que ces frontières ontétéexpressément reconnues,seul ledegréde précisiondu tracéétantmis en cause. Les controverses n'ont en effet touchéque la démarcation, et
n'ont jamais infiié la délimitation conventionnelle. Bien au contraire, les traités
pertinents ont étconfirmés,notamment les accords anglo-allemandsde 1913.
B.- Lesconfirmationsdécouland t esnégociations portans tur
le sud de la frontièreterrestre et sur la frontière
maritime
3.45 Si les premières années postérieuresà l'indépendanceont
fourni l'occasion au Cameroun et au Nigeria de négocierau sujet de la frontière
terrestre dans son ensemble, les années1970 marquent le débutde négociations
soutenues portant sur la frontière maritimeséparant lesdeux Etats. L'attitude des
Nigerians est constante à partir de cette date. Au lendemain de l'indépendance,le
Nigeria semblaitprivilégierune ligne médianequi ne correspondpas aux instruments
coloniaux (Note n0570 du 27 mars 1962; AnnexeM.C. 229, v. chapitre 5, section2,
par.5.17). Mais ces instruments seront confumésà plusieurs reprises par la suiàe,
partir de 1970. La confimation prendra la forme de diverses déclarations,qui
aboutirontà l'Accordbilatéralde Maroua en 1975.
3.46 Si les discussionsse sont développéàpartir de 1970 sur la
zone maritime, c'est en raison des ambitions des Nigerians portant sur les richesses
naturelles qui y ont édécouvertes.Au lendemain del'indépendance, cette partiede
la frontièrene donne lieuà aucun problèmesimilaire à ceux observésplus au nord.
La note n0570 envoyée à l'Ambassade du Cameroun à Lagos par le Ministère
nigeriandes Affaires étrangèrele 27 mars 1962,à laquelleest annexéeune carte, est
sans ambiguitésur ce point. Si elle contient une délimitation maritime par référence
à une ligne médiane incompatibleavec l'Accord du 11 mars 1913, son paragraphe 2
consacre cet instrument en réaffiant implicitement l'appartenancede la presqu'île
de Bakassi :
"Comme le montre la carte, la frontière suit le cours
inférieurdu fleuve Akwa-Yafe, cours sur lequel il ne
pèse aucune incertitude, et se prolonge ensuite dans
l'estuaire de la Cross River[J" (cité dansl'Annexe
M.C. 229).
Le Ministre reconnaît ainsi expressémentla description de la ligne contenue dans le
traitédu 11mars 1913.3.47 Ce traité fait ensuite l'objet d'une confirmation expresse
dans la "Déclarationde Yaounde", adoptée parla Commission mixte frontalière
Cameroun-Nigeria réunie àYaoundédu 12 au 14 août 1970(AnnexeM.C. 240) avec
pour tâche de préciserle tracéfrontalier:
" [-1 Beingappointedby their respective Govemmentsto
examine matters relating to the delimitation of the
precise boundarybetween Nigeria and Cameroon; [-]
Mindful of the desire expressed by both parties to
develop the friendly relations andstrengthenthem in al1
fields on the basis of mutual respect for national
sovereignty and the principle of non-interference by
either party in the intemal affairs of the other;
Desirous therefore of delimiting in a definitive and
lasting manner their land and maritime boundaries in
accordance with the spirit of the Charter of the
OrganisationFor African Unity, the Resolutionof Heads
of State and Govemmentof the OrganisationFor African
Unity on boundaries inherited from Colonial Pwers, the
Charter of the United Nations;
Have resolved to make the following recommendations
to their respective Govemments :
1. That the delimitation of the boundaries between the
two Countriesbe camed out in three stages :
(a) the delimitationof the maritime boundary;
(b) the delimitation of the land boundary as defned in
the Anglo-Gem Protocol signed ut Abokum on the
18th April 1913 and confrmed by the London Anglo-
Gennan agreement 'respecting (1) The senlement of
FrontierbetweenNigeria and Kamerunfrom Yolato the
sea and (2) the Regulation of navigation on the Cross
River: and the exchange of leners between the British
and GermanGovemmentson the 6thJuly 1914;
(c) the delimitationof the rest of the land boundary.
2. That the delimitation of the maritime boundary be
carciedout in accordance with boundary marks and posts
defned in the Anglo-Gennan London Agreement
'respecting1) Thesenlementof Frontier between Nigeria
and Kamerun from Yola to the sea and (2) the
Regulation of navigation on the CrossRiver' (Souligné
par la République duCameroun).Les termes soulignés, quifont suite àune référence exprese la Résolutiondu Caire
de 1964, indiquent à suffisance une confîîation de la frontière établià l'époque
coloniale (v.nfra,chapitre4, section5).
3.48 Celle-ci continue d'être au centre des travaux de la
Commission mixte. Lors de la réunion de Lagos du 15 au 23 octobre 1970, le
délégué nigerian, COKER, soumet en premier lieu à l'ordre du jour l'"Examen du
traitédu 11 mars 1913 (paragraphes 18-30)et [la] définitionde la frontière entre le
5èmedegréde latitude nord et la mer -1" (Annexe 70). Lors des discussions, on
s'accorde àprendre comme base de travail une carte sur laquelle on trace la ligne du
traitédu 11 mars 1913. Celui-ci est donc reconnu expressément commecadre de la
solutiondu différend.
3.49 La Commission mYfte Nigéro-camerounaise a réitéré
semblableconfirmationlors de sa réunionàYaoundedu 26 mars au 4 avril 1971. La
"DeuxièmeDéclarationde Yaounde" (AnnexeM.C. 242) mentionneen effet que
"[-14; Le 4 avril 1971, la Commission a reçu des
deux Chefs d'Etat, après consultation des deux Chefsde
Délégations, les instructions suivan:es
1O)Les deux Chefs d'Etat sont d'accordpour considérer
comme frontière laligne de compromis qu'ils ont tracée
d'un commun accord sur la carte n03433de l'Amirauté
britannique jusqu'à la limite de 3 milles marins de la
ligne joignant les points SANDY et TOMSHOT
conformémena tu traité anglo-allemandde 1913. Les
deux Chefs d'Etat ont porté leur signature sur ladite
carte.
L'application des Conventions de Genève sur le
droit de la Mer de 1958pour la démarcation du restede
la frontière maritime" (Soulignépar la République du
Cameroun).
Ainsi, les chefs d'Etat du Nigeria et du Cameroun, tout en précisant uneportion de
leur frontière maritime, tiennent se référerà la Convention anglo-allemande de
1913. Au-delàde l'importancede la précisionsur le tracé,la déclarationde Yaoundé
II contient une confirmation supplémentaire dela frontière conventionnellement
établieà l'époquecoloniale.
La "Commission mixte chargée dela délimitation de la
3.50
frontièreNigena/CamerounUse réunit à Lagos (Nigeria) du 14 au 21 Juin 1971. La"Déclaration de Lagos"qui en est issue (AnnexeM.C. 243) contient une autre
reconnaissance expresse:
"La Commission atracé lafrontièresur la carte marine
No 3433, cette carte est celle ayant servi en avril 1971
auxdeux Chefs d'Etatpour la délimitatiode la frontière
jusqu'à la limitedes trois millemarins de la juridiction
temtorialerelle qu'ellea étédéfiniepar la Convernion
anglo-allemande de 1903 [sic]. La limite extrêmdee la
frontière tracée surla carte est situéeà 17,7 miiles
marins de la ligne joignant Sandy Point à Tom Shot
Point, maisà 14,3 milles marins de la lignejoignant la
laisse des basses mersdes points extrêmesdes côtes du
Nigeriaet du Cameroun à la sortiede l'estuaire. La carte
marine adoptéeNO3433n'atteintpas la limite des eaux
temtoriales" (Soulignpar la République duCameroun).
Les autoritésnigérianes reconnaissenutne fois de plus lapertinencede la frontière
conventionnellede l'époque colonialem, êmesi une erreur matérielle atransfomé la
Conventionanglo-allemandede 1913, évoquée dans les Déclarations précédenteesn,
Conventionanglo-allemande"de 1903".
3.51 La République du Cameroua ndéjà exposé le résultatsde la
Déclaration deMaroua du ler juin 1975au sujet de la précisiondu tracéde la
frontière maritime (AnnexeM.C. 251). Un extrait de la déclaration contientpar
ailleursun élémend te conîïmation qu'il convient derappeleràce stade:
"[-1 Les deux Chefs d'Etat ont tenu à rappeler que la
lignedéfinieci-dessusne devrait porteraucuneentrave à
la libertéet àla sécuride la navigation pour lnavires
des deux Etats dans le chenal CALABARICROSS
RIVER telles que définiepar les rrairéet conventions
inremarionaux " (Souligné par la République du
Cameroun).
Si les termes manquent peut-êtrequelque peu de précisionquant aux conventions
visées,ils doiventêtreinterprétéasu regard des autres Déclarations ayant précé aé
déclaration de Maroua.Ils confirment l'existencedu statut conventionnelde la
frontière.
Les négociationsqui ontporté surla zone méridionalede la
3.52
frontière ont donné lieu à plusieurs accordsdont l'interprétationest fondamentale
pour la définitiondu tracé actuel. Parallèlementl,a République duCameroun
souligne que les deux Parties ont constammentpris pour base, et confirmé, les
dispositions conventionnellede l'époquecoloniale. C. - Les confirmations découlantdes négociationsportant sur
la frontière lacustre
3.53 Le Cameroun et leNigerian'ontque tardivementfait porter
leurs discussionssur le secteur lacustrede leur frontièrecommune. Constitd'une
seule ligne droite, celle-ci nese prêtait pasmêmes difficultés de matérialisation
que son prolongementvers le sud. Par ailleurs,aucunerichessenaturelle susceptible
d'exciter les convoitisesdu Nigena n'a étdécouvertedansla région. Cependantl ,e
phénomène d'assèchement du LacTchad, combinéaveclapression démographique au
Nigeria suscitentdesproblèmes territoriadans l'ensemble dela zonelacustre. Plus
précisémend tes pêcheursnigerians profitent de cet assèchementpour investir des
zones autrefois recouvertes, pour fonderdes localitésvoire occuper des villages
existants. C'estun conflit entre le Nigeria et le Tchad, dans le courant de l'année
1983, qui amena lesEtats limitrophesà se pencher surcette question, dansle cadre
de la Commissiondu Bassindu Lac Tchad(C.B.L.T.)., et à reconnaîtreles frontières
établiesà l'époquecoloniale (v. supra, chapitre 2, section 3 et particulièrement
pars.2.149-2.150).
3.54 Le principe dela reconnaissance des frontières e'époque
coloniale est consacrédès la premièreConférence auniveau deschefs d'Etat et de
Gouvernementdes Etatsdu bassin du Lac Tchad tenueavant même la créationde la
C.B.L.T., les 20 et 21 décembre1962, à Fort-Lamy. Selon L.O. AGORO("The
Establishmentof the Chad Basin Commission",1.C.L.Q., vol. XV, 1966, p. 542,
note 7), alorsen posteau Ministère delajustice au Nigena,
"TheConference agreed, interalia, as follow:
(a) to recognizethe existing national boundarion the
Lake [-]" (AnnexeM.C. 235).
Dans son ouvragede référencel,e professeur IanBROWNLIEreprend l'information
à son compte,en évoquantla reconnaissance des"internationalboundaries existingon
the lake" (Afncan Boundaries, C. Hurst and Co., London, 1975,p. 584) (Annexe
M.C. 254). Il semble doncque le Nigeria ait dèsl'originereconnu dansson principe
le maintien desfrontièreslacustresétabliesavant sonindépendance.
3.55 C'est toujours sur la base des conventionsde l'époque
colonialeque la C.B.L.T. a tenu les réunionsdont l'histoireet les résultattéjàd
étéexposés(v. supra, Chapitre2, section3).3.56. Parexemple, lorsde la réunionde Lagos, du 21 au 23juillet
1983, les délégationsdistribuent les textes d'accords de l'époquecoloniale. Le
Secrétariatde la C.B.L.T. est chargéde les collecter, de les trier et de ks diffuser
auprès des Etats membres, accompagnés des documents et cartes y annexés.
L'optique estdonc bien d'appliquer les traitésexistants, comme le relèvele rapport
de la réunion:
"Il ne s'agit pas,pour les Commissaires, de revenir sur
le tracédes frontières sur le Lac tel que décritdans les
textes historiques, mais de s'en servir sur le terrain
commedocuments faisant scientifiquement autoritéet sur
lesquelsil sedégageun consensus" (AnnexeM.C. 267).
3.57 De même, lors de la Cinquième Conférencedes chefs
d'Etats de la C.B.L.T. qui s'est tenue à Lagos du 25 au 29 avril 1985, les Chefs
d'Etat des autres Etats-membresadoptent un Communiqué final selon lequel
"The Heads of State notedwith satisfactionthe mesures
to be taken by the Commission to fmd permanent
solutions to theissuesof border demarcationand security
on Lake Chad, and to this effect instmcted the
Commissiontointensifyits efforts" (AnnexeM.C. 273).
Cette confirmation de la pertinence des mesures prises recouvre à l'évidencela
sélection etla présentationdes accords de l'époquecoloniale applicables. Le rapport
du délégué nigéria ànla Conférenceprécisa einsi que
"From 12-16 November, 1984, the experts on border
demarcation and secunty on Lake Chad from the four
Member States met in Lagos and agreed on the basic
legal documents for future work"" (Annexe M.C. 274,
P. 9).
La pertinence de 1'Echangede lettres franco-britanniquede 1931 a donc également
fait l'objet d'unereconnaissancepar les quatre Chefs d'Etat.
3.58 Lorsque les experts ont adopté le rapport précisant les
coordonnées de l'embouchure du fleuve Ebeji, ils ont procédé à une nouvelle
confirmation de la frontière conventiomelle de l'époquecoloniale (Annexe M.C.
289). ie passage pertinent estle suivan: "2.2.DOCUMENTSUTILISES :
(a)Traités SérieNso 34 (1931): Echangede notesentre
leGouvernementde Sa Majestédu Royaume-Uni etle
Gouvernement fiançais relativesà lafrontière entreles
territoires du Cameroun britannique et français,
Londres, 9janvier 1931.
(b) La Carte pour illustrer ladéclarationfranco-
britanniquedéfinissantla frontière du Cameroun (I/l
O00000),jointe.
LI
4. RECOMMANDATION
La Commissiond'expertsrecommandeque les valeurs
- Longitude :14"12'11", 7 E
- Latitude 12"32'17", 4N
obtenues en graphiquant sur laartejointe au Traitéde
1931 soient adoptéescomme l'embouchurede la rivière
EBEn (EL-BEID) à l'époque" (Souligné par la
Républiquedu Cameroun).
La désignationde coordonnées précises, dontles conséquences seront analysées
ultérieurement,ne s'opèrequ'en application du Traitéfranco-britanniquede 1931, et
de la carte jointe, qui sont donc reconnu expressément comme instrumentsde
référence. Cescoordonnées seront adoptées formellementpar les Ministres
commissaires des Etats-membres lors dela 36èmesession de la C.B.L.T. qui s'est
tenue à Maroua, les ler et 2 décembre1988 (v. supra, Chapitre 2, section 3, par.
2.185).
Le Rapport I.G.N. du 14 février 1990,qui consigne les
3.59
résultatsfinals de ces travaux (Annexe M.C. 292), se réfère aussi auxfrontières
conventionnellesde l'époquecoloniale.
3.60 De manière générale,le Rapport vise expressémentces
frontières commeinstrumentsde référence :
"1.1. Consistancedestravaux
Les travaux ont consisté reconstituer fidèlementsur le
terrainles indicationsdéfinissant le tracé dfersontières
inter-Etats,contenuesdans les Accords, lesTraités,les
Echanges deNotes, les Conventionset les cartes en
vigueur"(Soulignépar laRépubliqueduCameroun).De même, les experts, après avod iécritla localisation desbornes, ajouten:
"Letout étantconformeaux textes et cartesen vigueuret
à l'emplacementdes bornesfrontièressur le terrain [-]".
Le but de la démarcation estbien de préciserles frontièresdéjàexistantesdans les
instrumentsnotamment de l'époquc eoloniale.
3.61 La description de I'abornement confirme cette
reconnaissanced'ordre très générae ln citant expressément des traité dse l'époque
coloniale. Ainsi, pourla frontièrelacustre entre le Nigeria et le Tchad, le Rapport
mentionneque :
"Cette section de la frontièrea été reconstituée sl uer
terrainconformément aux indications :
1- de l'Accordentre leRoyaume-Uniet la France surla
délimitation des frontières entre lespossessions
britanniques et françaises à l'est du Niger, signé à
Londres, le 19 février1910 (article 1, quatre derniers
paragraphes).
2- l'échangede Notes entre les Gouvernementsde Sa
Majesté duRoyaume-Uni et la France relatif à la
frontière entre leszones britanniques et françaises du
Temtoire du Mandat duCameroun,en date du 9 janvier
1931".
Ce passage contient une reconnaissancede deux instruments, dont ledétailsur le
tracé sera analysé ultérieurement, pertinen ptsur la frontièrenigéro-camerounaise
puisque le premiercontient une définitiodnu pointtriple àl'intérieurdu lac (v.infia,
Chapitre 4, section 2), et que le second est la Convention de référence pour
l'ensemblede la frontièrenord.
3.62 La démarcationde la frontière lacustre Niger-Nigeriaest
précédée d'un perécision méthodologiqu semilaire:
"Cette section de la frontière a été reconstituée
conformément aux indications de l'Accord entre le
Royaume-Uni et la France sur la délimitation des
frontières entreles possessions britanniqueet françaises
à l'est du Niger, signéà Londres le 19 février 1910
(article1, septderniersparagraphes)".
Les mêmes remarques quc eelles formulées pourla frontière entre leNigeria et le
Tchad valent, mutatis mutandis.3.63 Le passage correspondantpour la frontièreNiger-Tchad est
le suivant:
"Cette section de la frontière a été reconstituée
conformémentauxindications :
1- de l'Accord entre le Royaume-Uniet la France sur la
délimitation des frontières entre les possessions
britanniques et françaises à l'est du Niger, signé à
Londres, le 19 février 1910 (article1, quatre derniers
paragraphes), en ce qui concerne la définitiondu tripoint
1(Niger-Nigeria-Tchad) -]".
Le mêmeinstrumentcolonial, pertinent par ailleurspour le point triple II (Cameroun-
Nigeria-Tchad), fait l'objetd'une reconnaissanceexpresse.
La partie du rapport consacréeàla frontièrelacustre entre le
3.64
Cameroun et le Tchad dispose quant à elle:
"Cette frontière qui comporte deux tronçons, a été
reconstituée conformément aux indications:
1- de la Conventionpour préciser lesfrontièresentre le
Cameroun et leCongo français, signé à Berlin, te 18
avril 1908(article ler, paragraphK).
2- du rapport des Experts nationaux datéde Maroua-
Cameroun le ler décembre 1988, définissant les
coordonnéesgéographiquesde l'embouchure du Chari
dans le Lac Tchad. Coordonnéesapprouvéespar les
Commissaires dans leur résolutionNo 3 relative à la
démarcation des frontièresdans le Lac Tchad lors des
travaux de la36" session de la Commissiondu Bassindu
Lac Tchad réunie à Maroua-Cameroun du ler au 2
décembre 1988.
2- de l'échange deNotes entre les Gouvernements deSa
Majesté du Royaume-Uni et la France relatif à la
frontière entre les zones britanniques et françaises du
Territoire du Mandat du Cameroun, en date de Londres
du 9janvier 1931".
Le premier instrument cité ne concerne pas directement la frontière camerouno-
nigériane,mais n'y est pas totalement étrangerpuisqu'il renvoie à la Convention
franco-britannique précitéede 1910 pour la déterminationdu point triple (v.infia,
Chapitre4, section 2). L'importancedu troisième instrumentcitépour la frontièreen
cause a déjà été soulignée. Dans les deux cas, on retrouve une reconnaissance
expressedes Conventions dedélimitationde l'époque coloniale.3.65
Enfin, pour ce qui concerne directementla frontière lacustre
Cameroun-Nigeria, le rapportfaitla précisiopréliminairequi sui:
"Cette section de frontière a été reconstituée
conformément auxindications ;
1-de l'échangede Notesentre les Gouvernementsde Sa
Majesté du Royaume-Uni et la France relatif à la
frontière entreles zones britanniqueset françaises du
Temtoire du Mandatdu Cameroun,en date de Londres
du 9janvier 1931.
2- du rapport de la réunion des Experts relativeà la
déterminationdes coordonnéesde I'embouchured'El-
Beid (Ebeji), tenue les 15 et 16 septembre 1988 à
N'Djaména-Tchad. Les coordonnées de l'embouchure
d'El-Beid (Ebeji) définies par les Experts ont été
approuvéespar les CommissairesNationaux dans leur
résolutionN02 relative à la démarcationdes frontières
dans le Lac Tchad lors des travaux dela 36èmesession
de la Commission du Bassin du Lac Tchad réunie à
Maroua-Cameroun duler au 2 décembre1988".
Ainsi, le rapport fait mention des instruments lesplus complets pour la frontière
nord, dontla reconnaissance opéré en 1988par lesCommissaires nationaux.
3.66 Ce rapport de 1990 est intéressant à plus d'un titre.
Confrontés à la matérialisatiodes bornesdans la région duLac Tchad, les experts
ont constammentestimé devoirmettreen oeuvreles Conventions pertinentesconclues
par l'Allemagne, la Franceet le Royaume-Uni. Les nombreux renvois à ces
instruments constituent autantde reconnaissancesexpresses. Le rapporta finalement
étéapprouvé expressémenp tar le Nigeria (v. supra, chapitre 2, section 3, pars.
2.207-2.208).
3.67 Les travaux de la C.B.L.T. ont donc donnélieu à de
multiples confirmations de la frontière conventionnelle. Dans l'ensemble, elles
traduisentbien une reconnaissancede cette frontièrepar leNigeria.
3.68 A cet égard,il faut relever que les réticences initialesdu
Nigeria àratifier les résultatsde la localisationne témoignaient acontestationde
la frontière conventionnelle,mais étaientdues à de tout autres motifs, ce qui montre
bien la persistancede la conviction du Nigeria.3.69 Le Procès-verbal de la réunion conjointe des experts
nigerians et camerounais sur les problèmesfrontaliers tenusà Abuja du 15 au 19
décembre1991(AnnexeM.C. 3 13)est révélateurur ce point.
3.70 Tout d'abord, aux représentants camerounaisqui proposaient
l'élaboration d'un traitéréglant toutes les questions frontalières pendantes, les
représentants nigeriansrépondentqu'il faudrait au préalable régler les points 2
(frontière terrestre)et 3 (frontièremaritime) del'ordre dujour. L'extrait pertinentdu
Procès-verbal estle suivan:
"2)Questionsfrontalières
i) Frontièredu Lac Tchad.
ii) Frontièreterrestre.
iii) Frontièremaritime
4)i) Elaboration d'un traitésur la délimitation dela
frontièreNigeriaICameroundu Lac Tchad àla mer.
La partie nigeriane a acceptél'insertion dece point à
l'ordre du jour, mais les deux Parties ont convenu qu'il
serait prématuréde discuter de l'élaborationd'un projet
de traité lorsde cette sessiànmoins quel'on am've à
des conclusions sur les points 2 et 3 qui pennenent
l'élaborationdudit projet de traité"(Soulignépar la
Républiquedu Cameroun)".
3.71 A contrario, la délégation nigériann ee mentionne pas le
point 1, précisément consacré à la frontière du Lac Tchad. Cette phase de la
discussionmontre déjà quela frontièrelacustrene donnait lieuaucune opposition de
la part du Nigeria.
3.72. Ce constat est conf~mé par la phase des discussions
consacrées directementau Lac Tchad, au cours de laquellene sont évoquéq sue des
problèmespurement techniques :
"1)Ouestions frontalières
i) Frontièredans le Lac Tchad En réponse à la question de savoir si les experts du
Nigeria travaillant sur la démarcation et le levé
topographiquedans la région duLac Tchad avaient signé
le rapport technique tel que la partie nigeriane l'avait
promis lors de la réunion tenueàYaoundeen août 1991,
la délégationigerianea déclaréque :
-Ilexistedeux poteaux télégraphiquels'un situéàSuwa
au Tchad et l'autreà Kaokiri au Niger, dont la nature et
les caractéristiques selon les populations locales
représentent des repères frontaliers laissés par les
puissances coloniales. Des clarifications s'avèrent
nécessairesà ce sujet; toutefois, a préciséla partie
nigeriane, la présencede cespoteaux n'a heureusement
aucune incidence surla lignede démarcation actuelle.
- La borne (II-V.l) enfouie dans la frontière
sur la frontière CamerodTchadrrédoit être numérotée,)
Commission du bassin du Lac Tchad (CBLT) lors de la
leur réunion tenueà Abuja en novembre 1990. A ce
jour aucune de ces missionsn'a étéeffectuée"(Souligné
par la Républiquedu Cameroun).
3.73 LRs propos dela partie nigerianene concernent nullement la
localisationdes bornes. Cette localisationn'estdoncpas contestée.
3.74. Le procès-verbal se poursuit par l'exposéde la délégation
camerounaise qui mentionne les tentatives de bomage qui ont échouéen raison de
l'absencedes délégués nigerianest conclut que
"1-]selon les vérificatiofaites de septembre 198à ce
jour, aucune anomalien'a étérelevéesur la précisiondes
travaux de démarcation. Enconséquenceles travaux
consistant au déterrement d'uneborne sur la frontière
CamerodNigena et la numérotationd'un autre sur la
frontière CameroudTchad ne peuvent pas avoir une
infiuencesur la qualitédes travaux effectjusqu'ici".
La réponsede la délégation nigeriane est loin de contredire les propos des délégués
camerounais :
- La délégation nigeriane a regretté l'abseces
experts nigerians au cours de la première réunionde
Ndjamena qui, selon elle, étaitdue aux problèmesde
délais de convocation très courts, et à la non-
disponibilitédu personnel impliquédans la démarcation
et le levéde la frontière. Cecinedevraitdonc enaucun
cas être interprétc éomme une preuve de mauvaise
volonté du Nigeriquant à l'exécutiodu travail. La délégationnigeriane a proposéque tout devrait être
mis en oeuvre pour la réalisation des travaux
susmentionnésdans les meilleurs délais. Elle a par
ailleurs indiqué que les bornes devraient être bien
numérotées pour faciliter leur identification,et pour être
conforme àla réglementation du Nigeriaen la matière.
Afin d'améliorerla qualité du travail effectu, Nigeria
s'est engagéà entreprendrela stabilisation desrepères et
des points GPS à ses propres frais" (Soulignépar la
République du Cameroun).
Cet extrait montre encore l'absence de contestation concernant la localisation des
bornes.
3.75 La partie du Procès-verbal relativà la frontièrelacustre se
termine en ce sens :
Les deux délégations ontconvenu de prendre
contact avec la CBLTpour demander l'achèvement dans
les meilleurs délais des travaux restants, Le., la
destruction et la numérotation des bornes concernéeLa
stabilisationdes points GPSet des autres pointspourrait
être entreprise simultanément avantjuin 1992 afin
d'améliorerla qualité du travail. Toutefoceci ne devra
pas retarder la signature du rapport technique de
démarcationparles experts nigerians".
3.76 Les questions soulevéesne concernent à aucun moment une
imprécisionou une contestation surles coordonnéesgéographiqued ses points formant
la ligne. La démarcationd'I.G.N. est donc implicitement acceptée dès 1991, avant
de l'être expressémentpar la suite, paes expertsnationaux,puis par les chefs d'Etat
en 1994 (v. supra, chapitre 2, section3, pars. 2.207-2.208).
3.77 En conclusion, on constate que la frontière entre le
Cameroun et le Nigeria, établie à l'époquecoloniale par l'Allemagne et la Grande-
Bretagne, la France et la Grande-Bretagneet, pour un secteurlimité,par la Grande-
Bretagne seule, a fait l'objet de multiplesreconnaissances parles Etats concernés. Le
titre conventionneldu Camerouna constammentété pris comme baselors des travaux
de démarcation, entrela France et la Grande-Bretagned'abord, entrele Cameroun et
le Nigeria ensuite.
3.78 Pour la période antérieure à l'indépendance, ces
reconnaissancesont essentiellementtraità la frontière franco-britannique,la frontière
germano-britannique n'étantévoquée qu'incidemmenI t.l n'y arien d'étonnanà celaL'ancienne ligne établie avec l'Allemagn n'a représentéune frontière intemationale
que quelquesannées,jusqu'à la première guerre mondiale. Depuilsors et l'adoption
de la lignePICOT-STRACHEY,cetteanciennefrontièredevientune limite intérieure
aux possessionsbritanniques. Dans ces circonstances, les Etats en cause ne sont
évidemmenp tas amenés à la reconnaîtrecommefrontière,encoreque tout élémend te
reconnaissancene soitpas absent, commele montrela carte annexéeà la Déclaration
MILNER-SIMONqui reproduit letracéde 1913.
3.79 En tout étatde cause, dèsle lendemainde son indépendance
et des résultatsdu plébiscite,le Nigeria reconnaîtraà plusieurs reprises tantôt la
frontière établipar la France et la Grande-Bretagne, tantôtla frontière établipar
l'Allemagne avecla Grande-Bretagne. Ces reconnaissances sont effectuéesdès les
lendemainsde l'indépendance pour la frontière terrestre,se sontpoursuivieslors des
discussions portantsur la zone maritime puissur la zonelacustre. La plupart des
cartes nigérianes, qui seronanalyséesen mêmetemps que l'ensembledu matériau
cartographique (v. infra, chapitre 3, sectioS), représented'ailleurs deséléments
supplémentaired se reconnaissanceexpresse.
3.80 Les élémentc sonfîtifs concernent donc l'ensemblede la
frontièreactuelle. Envisagésdans leur ensemble,ils démontrentune reconnaissance
expressede la part du Nigeria dutitre conventionneldu Cameroun.
3.81 Ce n'estquerécemment queles Nigeriansont remisen cause
la frontière coloniale,revenant par là sur leurs multiplesconfirmations. Dans un
premier temps, ils ont contestéla valeur de la Déclarationde Maroua. Les
déclarations récentes,parfois assorties de cartes reprenant une ligne frontière
alternative, portant tant sur la presqu'île deBakassique sur la zone lacustre, et en
particulierla localitéde Darrak, ne peuvent s'interpréterque comme des remises en
cause de la reconnaissancede la frontièrecoloniale. Il importe de déterminerles
effetsjuridiquesde ce retournement completde lapositiondu Nigeria. Effets iuridiaues des actes confirmatifs
5 3.
3.82 La doctrine s'est fréquemmentprononcéesur les effets à
donner àdes actes constituantune reconnaissanceexpresse. Les écritssont nombreux,
et divergent sur certains aspects. Mais ils sont unanimes à conférer à la
reconnaissanceun effet juridique assimilablà un engagement dene plus remettre en
cause l'objet de la reconnaissance, que celui-ci soit une frontière ou une autre
situation, et ce au détrimentdu ou de ses destinataires. Ami, comme le soulignent
les professeursJean COMBACAUet Serge SUR,
"[-] par la reconnaissance, 1'Etatdéclare déclare qu'une
situation existà ses yeux et il ne peut plus désormais
s'en dédire; qu'elleexiste ou non objectivement, la
situation lui est dèslors opposable sielle ne l'étaitdéjà
pas par elle-même" (Droit international public,
Montchrestien, Pans, 1993,p. 280).
John FISHER WILLIAMS relevait lui aussi dans son cours à l'Académiede droit
internationalde 1933que
"On donne à la reconnaissance une fonction qui
ressemble à celle de 'I'estoppel' (empêchemen et) droit
anglais :quand un Etat a reconnu une prétention,il est
empêché (estopped) de la contester" ("La doctrine de la
reconnaissance en droit international et ses
développements récents", R.C.A.D. I.,1933-11,tome 44,
p. 210).
L'auteur citaitl'opinion du professeur ANZILOTTI,pour qui,
"La reconnaissance peutproduire en droit international
un effet semblable à celui de la prescription en droit
privé" (ibid., p. 210, citant Anzilotti, Cours de droit
international, RecueilSirey, Paris, 1929).
Le parallèle avec l'institution de l'estoppel (voy. encore Eric SUY, Les actes
juridiques unilatéraux en droit international public, op.cit., p. 208) ou de la
forclusion (G. VENTURINI, "La portée et leseffets juridiques des attitudes et des
actes unilatéraux desEtats", R.C.A.D.I., 1964-11,tome 112, p. 395) ressort de la
doctrine. On peut encore mentionner Georg SCHWARZENBERGER, qui précise
que However weak a titie may be, and irrespectiveof any
other critenon, recognitionestops the State which has
recognized the title from contesting its validity at any
future time" (A.J.I.L., 1957, p. 316; voy. encore DE
VISSCHER, Charles, Problèmes d'interprétation
judiciaire en droit international public, Paris, Pedone,
1963,p. 191).
Les nuances existant entre la reconnaissance, l'acquiescement, I'estoppel ou la
forclusion n'ontpas de conséquence poulra présenteinstance. Danstous les cas, l'on
s'accorde àconsidérer que l'auteurne peut se contredireau détriment d'autrui(v. Joe
VERHOEVEN, Lu reconnaissance intemutionale dans la pratique contemporaine,
Pédone,Paris, 1975,p. 810).
3.83 Ces considérations pragmatiqueo snt étéconsacrées parla
jurisprudence, quia admis que la reconnaissancepouvait constituer un titre, tantôt
confiatif, tantôt autonome. Dans I'affaire duStatut juridique du Groenland
oriental, la Courpermanentede Justiceinternationalea déclaréque:
"[-] en acceptant comme obligatoire pour elle ces
accords bilatéraux ou plurilatéraux, la Norvège a
réaffirmé le faitue tout le Groenland estreconnu par
elle comme danois, réaffirmation qui exclut une
contestation dela souveraineté danoise sulr'ensembledu
Groenland et, par conséquent,une occupation d'une
partiede ce temtoire" (SérieB,n053,pp. 68-69).
Dans I'affaire du Temple de Préah Vihéar,la Cour a basé son arrêt sur la
circonstanceque
"Les deux Parties ont, par leur conduite, reconnu la
ligneet, par là même, ellesonteffectivement convenues
de la considérercommeétantla frontière"(C.I.J., arrêt
du 15juin 1962,Rec. 1962,p. 33).
Dans l'affairedu Droit de passage en territoire indien (fond),lejuge FERNANDES
se prononceen ce sens :
"La reconnaissance dela souveraineté d'un Etat sur un
certain territoire est un acte plein de conséquences
juridiques. Pour lui, cettesouverainetest admisedans
l'ordre juridiqueinternational,et les Etatsdont il émane
s'engagent à respecter toutes lesattributions que cet
ordre juridique confèreà la souverainet[-]" (Op.diss.,
Rec. 1960,p. 138).
De même, le juge ALFAROa explicitement rejeté toutc eontroversedoctrinale stérile
sur la qualificationd'acquiescemend'estoppeloud'autresdénominations voisines : "[-]l'effet juridique de ce principe est toujours le même
: la partie qui, par sa reconnaissance, sa représentation,
sa déclaration,sa conduite ou son silence, a maintenu
une attitude manifestement contraire au droit qu'elle
prétend revendiquerdevant un tribunal est irrecevableà
réclamer ce droit (venire contrafactumproprium non
valet)" (C.I.J., Affaire du Temple de PréahVihéar,
op.indiv., Rec. 1962, p. 40).
3.84 Le Nigeria ne peut donc plus, comme il le fait aujourd'hui,
contester une frontière internationale qu'il a confiée à plusieurs reprises, sans
ambiguitéet danstoute son étendue.En tout étatde causece retournementne pourrait
produire aucun effet juridique préjudiciable à la Républiquedu Cameroun. Les
remises en cause nigerianes de la frontière coloniale sont donc frappées
d'inopposabilité, etne doiventtout simplementpas êtreprises en comptepar la Cour.
3.85 D'une part, les reconnaissances émisesforment, combinées
avec les reconnaissances britanniques,une pratique constante dansl'interprétation des
conventionspertinentes, principalement cellesde1913et de 1919.Dans la mesure où
la France puis le Cameroun ont également reconnula ligne frontièredéfinie dansces
conventions, l'ensemblede ces acceptationsest assimilablà une
"[ ]pratique ultérieurement suivie dans l'applicatidu
tra'ipar les parties par laquelle estétablie l'accord des
partiesà l'égardde l'interprétationdu traité" (Article31
$ 3 b) de la Convention de Vienne sur le droit des
traités).
Dans cette perspective, les reconnaissances représententun moyen principal
d'interprétation, etconfirment le titre conventionneldu Cameroun.
3.86 D'autre part, ces reconnaissances constituenà elles seules
un titre valable, indépendamment dustatut antérieur des textes conventionnels
auxquels elles renvoient. Comme la Cour l'a soulignédans l'affaire du Différend
territorialJamahilyalibyenne/Tchad),
"La fucation d'une frontièredépend dela volontédes Etats intéressés.
Rien n'empêche les parties de déciderd'un commun accord deconsidérer
une certaine ligne comme une frontièrequel qu'ait étson statutantérieur.
S'il s'agissait déjàd'une frontière, celle-ci est purement et simplement
confirmée. S'il ne s'agissait pasd'une frontière, le consentement des
parties à la 'reconnaître' comme telle confere à la ligne une force
juridique qui lui faisaitauparavant défaut"(C.I.J., arrêtdu 3 février1994,
Rec. 1994, par. 45, p. 23).Ainsi, à supposermême que lestraitésanglo-allemandsou franco-britanniquessoient
formellementdépourvus de validité ou n'aiep nts fié,à l'époquede leur conclusion,
une frontière-ce quin'est évidemment pas le cas-, les reconnaissancesdu Nigeria et
du Cameroun, qui considèrentla ligne quien résultecommereprésentant la frontière,
suffisentà leur conférervalablementcette qualité.
3.87 Les .effets juridiques des reconnaissances expresses sont
certes adaptésauxdifférentssegmentsde la frontière :
- Du Lac Tchad au MontKombon, les actes de reconnaissancesont multiples. La
lignefrontalièrea étéconfiée à de nombreusesreprises, eton peut en déduire à la
foisune confiation de titre, etun titre autonome;
- Du Mont Kombon à la borne64, les reconnaissancesne se greffentplus sur un titre
conventionnelexistant,mais constituentà elles seules untitre, les actesadministratifs
britanniques définissant unefrontièreadministrative quidevient, conformément au
principede l'utipossidetisjuris, une frontièreinternationaleaprèsles indépendances;
- De la borne 64 à l'embouchure de I'Akwayafé,les actes de reconnaissances
confirmentla lignede 1913et créentune situation d'estoppel;
- De I'embouchurede 1'Akwayafé jusqu'au point G, l'ensembledes déclarations et
accords conclus entre leNigeria et le Cameroun ne constitue pasla reconnaissance
d'une frontièredéterminée auparavan de manièreconventionnelle,mais déterminela
frontière entreles deuxParties. Nous sortons ici du cadre dela reconnaissancepour
entrer dans celui des accords internationaux. Néanmoins,dans la mesure où ces
accords font partirla ligne frontièrede l'embouchurede I'Akwayafé,ils constituent
par là-même une reconnaissance conventionned le point de départde la frontière
établiepar l'Accord du 11mars 1913.
3.88 Le Nigeria a émis son consentement à de nombreuses
reprises sur le tracéde la frontièreavec le Cameroun. 11a ainsi conforté le titre
colonialqui, conformémena tu principede I'utipossidetisjuris, suffàtsatisfaireles
revendications camerounaises.Ses retournementsde position sont inopposables à la
République du Cameroun. - --- --
l
SECTION3. LES "EFFECTrVITES"
8 1. Généralités
3.89 Les effectivités sont les preuves d'administration et de
contrôle suffisantespour déterminerlequel entre deux Etats impliquésdansun conflit
frontalierjustifie le mieux ses prétentionsde souverainetéen cas d'absencede preuves
de titresjuridiques en forme de traitésou d'autresactesécritsde naturejuridique.
3.90 Ainsi, dans l'affaire des Miquiers et des Ecréhous,la Cour
a fondéune partie de son arrêtsur le fait "que des autorités britanniques,durant la
plus grande partie du XIXèmesiècleet aux XXèmesiècle,ont exercédes fonctions
étatiques à l'égardde ce groupe [des Ecréhous]"(C.I.J., arrêt,17 novembre 1953,
Rec. 1953, p. 47). Mais la situationen cause n'avait rienen commun aveccelle de la
présenteespèce. Les îlots des Minquierset des Ecréhous avaient une longue histoire,
mais une histoire assez confuse. Il ne bénéficiaienp tas de frontièresétablies sousla
supervision de l'organisation des Nations Unieset reconnues explicitement par la
communautéinternationaleet par les deux Etatsen cause.
3.91 Dans l'affaire du Dzflérend frontalier insulaire etmaritime,
(C.I.J., arrêt11 septembre 1992, El SalvadorIHonduras ; Nicaragua (intervenant)
Rec. 1992), la Cour a donnéde précieuses indicationssur l'utilisation correcte des
"effectivités" dansles affaires de déterminationde la souverainetésur un territoire.
Après avoir décrit la"documentation considérable"présentée par le Honduras, "qui
montre que le Honduras peut aussi s'appuyer sur des arguments d'ordre humain...
que diverses autoritésdu Honduras, soit d'ordre judiciaire, soit d'un autre type, ont
exercé et exercent leursfonctions dans ces zones" (ibid. pp. 397-98) la Chambre a
pris dans cette affaire la position la plus nette sur l'étenduede l'idée'effectivités"
dans le droit international contemporain. Le Gouvernement d'El Salvador avait
présenté à la Chambre des preuves détailléed s'"effectivités"sur l'île de Meanguera,
dans le Golfe de Fonseca.
3.92 Ces preuves étaienten forme de documentscertifiésdéposé
devant la Chambre, et comprenant : (i) les nominationsdejuges de paix ;
(ii) les nominationsetlou instructionsmilitaires ;
(iii) la délivrancede licences ;
(iv) la tenue d'élections ;
(v) la fiscalité;
(vi) les recensementsnationaux ;
(vii) le registre de naissanceset décès ;
(viii) le cadastre ;
(ix les procéduresciviles ;
(x) les procédures pénales ;
(xi) les actes de disposition de biens immobiliers passés
devant l'administration ;
(xii) les servicespostaux ;
(xiii) les ouvragespublics ;
(xiv) les servicesde santépublique ;et
(xv) l'éducation.
(ibid., par. 359, pp. 572-74)
3.93 La décisionde la Chambre dans cette affaire est sans doute
la prise de position la plus fermement établie surla question des "effectivités", sur
leur portéeen cas de concurrence avec des titres juridiques dans le cadre de l'uti
possidetis juris, et sur leur valeur juridique. Il s'agit là assurément d'un précédent
"incontournable".
3.94 Toutefois, comme l'a dit la Chambre de la Cour dans
l'affaire du Différend frontalier (Burkina Faso/Mali), le rôle joué par les
"effectivités""est complexe", et lesChambresde la Cour ont eu, dans leurs arrêts de
1992 et de 1986, "à peser soigneusement leur valeur juridique dans chaque cas
d'espèces"(C.I.J, arrêt,22 décembre1986, Rec.. p. 554).
3.95 Dans l'affaire Burkina Faso/Mali, la Chambre a précisé
notamment "la relation juridique qui existe entre "les effectivités"et les titres servantde base à la mise en oeuvredu principe d'utipossidetis" (ibid. p. 586). Elle distingue
à cet égard "plusieurséventualités":
- Premièrehypothèse :"Dan se cas où le fait correspond
exactement au droit, où une administration effective
s'ajoute à l'utipossidetisjuris, 1'"effectivin'intervient
en réalitéque pour confier l'exercice dudroit néd'un
titrejuridique" (ibid., p. 586-87).
- Deuxième hypothèse : "Dans le cas où le fait ne
correspond pas au droit, où le temtoire objet du
différendest administréeffectivementpar un Etat autre
que celui qui possède le titre juridique, il y a lieu de
préférer le titulaire du titre" (ibid. p. 587).
- Troisième hypothèse : Là "...où I"'effectivitéUne
coexiste avec aucun titre juridique, elle doit
inévitablementêtre priseen considération"(ibid.).
- Quatrième hypothèseenfin : " ... Le cas où le titre
juridique n'est pas de nature à faire apparaître de façon
précise l'étendueterritoriale sur laquelle il porte. Les
"effectivités"peuvent alors jouer un rôle essentiel pour
indiquer comment le titre est interprété danla pratique"
(ibid.).
3.96 La situation du Camerounle long de sa frontièreavec le
Nigeria relevait indiscutablement dela premièrehypothèsejusqu'à la "date critique"
constituéepar les premières atteintes nigérianes l'intégrité territorieu Cameroun,
et depuis lors, elle corresponden partià la deuxièmehypothèse.
3.97 Dans l'une et l'autre de ces deux hypothèses, la Cour
consacre sans ambiguïtéaucune la primautédu titre juridique. C'est pourquoi, la
Républiquedu Cameroun ne fait étatdes "effectivités"dans la présente affairequ'à
titre subsidiaire. Elles ne sont évoquéeen effet que comme un moyen auxiliaire au
soutien des titres conventionnelset des autres titres documentairesdont le Cameroun
se prévaut àtitre principal.
3.98 Pour un Etat souverain à l'abri des frontières
internationalement délimitéeset reconnues, les "effectivités" sont constituéed s'un
faisceau de faits quotidiens, traduisant la mise en oeuvre des dispositions
constitutionnelles et administratives ainsi que l'exécution desactes d'administration
qui paraissentaller de soi et ne sont généralementxaminéesque si la souverainetéest
mise en question par des revendications temtoriales, des incursions voire une
occupationpar les forces arméeset l'administrationd'un Etat étranger.Cene constatationgénérale vautpour la frontièreentre le Camerounet le Nigeria.
3.99 L'expérience latino-américaine a inspirla distinction entre
"effectivités" "coloniales" et "effectivités" "post-coloniales". Cene distinction
pourrait s'appliquer également, dans biendes cas, en Afrique, et dans une certaine
mesure àla présente espèce.
52. Les"effectivitésc "oloniales
3.100 ies territoires situés de part et d'autre de la frontière
internationale actuelle entre le Nigeria et le Cameroun ont changéde mainsà trois
reprises dans la partie méridionale connue sous l'appellation de "Southern
Cameroons" sous l'administrationbritannique-passant de l'Allemagneau Royaume-
Uni et de celui-ci au Cameroun indépendant - età deux reprises dans la partie
septentrionale qui est passée de l'Allemagne au Royaume-Uni, avant d'être
incorporéeau Nigeria à la suitedu plébiscitede 1961.
3.101 Cette "valse" territoriale ne permet pas d'établirla preuve
d'une administration effectiveet continue des temtoires frontaliers du Cameroun par
une seule et mêmepuissance coloniale à laquelle le Cameroun aurait succédé en
accédant à la souveraineté internationale. Néanmoins, l'étude des ittsdes actes des
Puissances qui se sont succédédans l'Administration de ce qui constitue l'actuel
Cameroun établit de façon indiscutable que chacune de ces anciennes Puissances
administrantes a exercé la plupart des activités que la Cour a considérées dans
l'affairEl Salvador/Hondura somme étantla preuve des "effectivités" exercées par
El Salvadorsurl'île deMeanguera. (v.supra par 3.91).
3.102 Déjàl'Allemagne avait manifesté, durantson "protectorat"
sur le "Kamerun"u ,ne présenceeffective dans les zonesfrontalièresavec la colonie
britannique du Nigeria commel'attestentdes missions exploratoireset d'identification
sur le terrain du tracéde la frontièresupra Chapitre 2, section2). Rappelons dans
cet ordre d'idéesque l'une des capitales d"Kamerun" allemandfut la ville de Buea,
situéeau Cameroun méridional.
3.103 De même,il n'est pas douteux que la Grande Bretagne et la
France ont posé, dansle cadre du Mandat et de la Tutelle exercés par chacuned'elles
respectivement sur l'ancien Cameroun méridionalet l'ancien Camerounoriental, desactes d'administration constitutifsde la preuve de leurs "effectivités" sur cesparties
du temtoire camerounais. Ces "effectivités" colonialesbritanniquet françaiseont été
suffisamment établiesdans le cadre de la description de la frontière à l'issue des
régimes du Mandat et de la Tutelle (v. infra Chapitre 3 section 4). Il suffit
simplement de rappeler que les deux Puissances administrantes ont exercé leurs
pouvoirs respectifs sous la surveillance des instances compétentesde la Sociétédes
Nations et de l'organisation des Nations Unies. Lorsmêmeque la partie méridionale
du Cameroun britannique, le "Southem Cameroons", fut administré conjointement
avec le Nigeria, elle demeurait distinctede la colonie britanniquedu Nigeria et faisait
l'objet de rapports annuels au Conseil deTutelle des Nations Unies(v. infra, chapitre
3, section4).
3.104 Les "effectivités" coloniales dans les anciens Cameroun
britannique et français n'ont doncpas besoin d'êtredémontrées outre mesure :res
ipsa loquirur.
83. Les "effectivités"~ost-coloniales
3.105 Dans le cadre définipar la frontièretelle qu'elle est établie
par les instrumentsjuridiques internationaux, le territoire du Camerounest diviséen
provinces administratives, départements, arrondissements et districts. Ces unités
administratives dont certaines couvrent les régions frontalières avele Nigeria sont
placéesrespectivement sousl'autorité desgouverneurs, préfets,sous-préfetset chefs
de district. Les cartes administratives annexémontrant les départementsfrontaliers,
illustrent ce quadrillage administratif du territoire camerounais ainsi que d'autres
"effectivités" directement liéeàl'organisationadministrativele long de la frontière,
notamment les postes de police, de douane, les brigades de gendarmerie qui
contrôlent la circulation des personnes et des biens entre les deux pays et dont on
dénombreune quarantaineau total.
3.106 L'écartmoyen entre deux postes de douane serait donc de
quarante kilomètres s'ils étaient quidistants. réalitél,es postes sont situpresque
exclusivementle long des routeset des pistes, et bien souventles trois administrations
coexistentdans la mêmelocalité.De trèslongues portions dela frontièrene sontdonc
pas gardées, ce principalement en raison des difficultésd'ordre naturel (sites
tourmentés, végétation tropicale particulièrementabondante dans certaines zones,marécages, etc...). La circulation des populations frontalières appartenant le plus
souvent aux mêmes ethnies des deux côtésde la frontière n'enest que plus fluide et
d'autant plus difficiàemaîtriser. Elle se fait presque librement, au grédes affinités
culturelles, des transhumances, du commerce transfrontalier et des fêtes
traditionnelles. Il en est ainsi du reste partout en Afrique où les frontièreshdeitées
la colonisation, confortées par la résolution de l'OUA de 1964 ne constituent
nullement un obstacle réelaux mouvementsdes personneset des bêtes.
3.107 L'organisation administrative du Cameroun conforte ses
"effectivités" sur son temtoire, et en I'occurrence sur ses régionsfrontalières. 11
s'agit en effet d'une administrationdéconcentréee l'Eut, présentedirectementpar le
biais de divers services extérieurs aux services centraux : services médicaux
(hôpitaux, dispensaires, centres de santé), structures d'encadrement agricole
(délégations départementales, d'arrondissement, postes agricoles et postes
phytosanitaires), services d'éducation(inspections de l'enseignement primaire et
secondaire, établissements scolaires), administrations fiscales, services postaux,
douaniers, domaniaux, miniers.
3.108 Par ailleurs, l'organisationjudiciaire du pays, avec une Cour
d'Appel par province, un Tribunalde grande instanceau niveau des départements,un
tribunal de première instance et un t~ibunalcoutumier par arrondissement, permet
d'assurer une administration de la justice effective sur l'ensemble du temtoire,y
compris dans les circonscriptionsadministrativesfrontalières.
3.109 A cette présence administrative, policière, douanièreet
judiciaire continue, et aux activitéssociales et de promotion du développementdans
ces zones, s'ajoutent des opérations de puissance publique ponctuelles ou
intermittentes tels que le recensementdes populationset les opérations électorsuiq
constituent des preuves évidentesde l'exercice par le Cameroun de sa souveraineté
sur ces parties de sonterritoire.
3.110 La Républiquedu Cameroun procédera à un exposéplus
détailléde ces différentséléments constitutifs de ses "effectivités"dans les zones
frontalièresconcernéessuivant un découpagecorrespondant aux différentssecteurs de
la frontière litigieuse, ainsi que dans la péninsulede Bakassi (v. infia, Chapitre 4,
sections 2à 5). On constate au demeurantque ces "effectivités"se doublent, de façon
générale,d'une reconnaissance internationalede la frontièreen cause.SECTION 4. LA RECONNAISSANCE INTERNATIONALE DE LA
FRONTIERE
a 1. Le svstème demandat
3.111 L'Allemagne a renoncé à tous ses droits et titres sur ses
possessions d'outremer,y compris, naturellement, le Cameroun,au profit des grandes
Puissances Alliéeset associées, conformément auxrticles 118et 119 du Traitéde
Versailles de 1919.
3.112 Il a étconvenuque le Royaume-Uni etla France (qui avait
occupéle territoire après le débutde la première guerre mondiale) feraient une
recommandation concertée à la Sociétédes Nations ence qui concerne le sort des
concessions. Cette recommandation apris la forme d'une proposition selon laquelle
on confierait au Royaume-Uniun mandat conformément à l'article 22 du Pactede la
Sociétédes Nations pour la partie du Cameroun situéel'ouest dela ligne adoptée
par la DéclarationMILNER-SIMONdu 10juillet 1919,et à la France pour la partie
du Cameroun située à l'est de cette mêmeligne (AnnexeM.C. 107). Le fait que la
Déclarationde 1919, qui défullssaitles limites du territoire, étaitun tléestc
prouvé à l'évidencepar le fait que, dans une Note aux puissances mandataires
approuvée par leConseilde la Sociétdes Nationsle 2 octobre 1921,le Présidentde
cet organe a écr:t
"le Conseil, conformément à la recommandation
concertée présentéepar les Gouvernements de la
Républiquefrançaise et le Gouvernementde Sa Majesté
l'application dusystèmede mandatsà ces territoiras
confirme en ~rirÏcipe les déclarationssignéesvar l&
représentantsdes Gouvernementsfrancaiset britamiaue.
le 10 iuillet 1919. concernant les sphères resoectives
destinéesàêtreplacées sousl'autorité de chacde ces
deux gouvernements (J.O.S.d.N, II, 1921, p. 1121,
Annexe M.C. 121, souligné par la République du
Cameroun). -
3.113 Les dispositions des mandats tels qu'approuvés par le
Conseil de la Sociédes Nations ontétépréciséesans des instrumentsen date du 20
juillet 1922 (AnnexeM.C. 127). Il est importantde soulignerles traits fondamentauxdu systèmedes mandats. L'article22 du Pacte déclare que,en ce qui concernede tels
territoires, le concept de "missionsacréede civilisation"devait s'appliquer et être mis
en oeuvre par des Etatsdésignés comme mandatairespar et au nom de la Société des
Nations. Le niveau de pouvoir, de contrôle et d'administratioà exercer par de tels
mandataires devait êtredéfini expressémend tans chaque cas par le Conseil de la
Société. L'élémec nltéétaitque la souverainetén'étaitpas transféréeà la puissance
mandataire. Commel'a déclaré la Cour à propos du Sud Ouest Africain :
"Il ressort des termes de ce Mandat, ainsi que des
dispositions de l'article 22 du Pacte et des principes qui
y sont énoncés, quela création de cette nouvelle
institution internationale n'impliquait ni cession de
temtoire ni transfert de souveraineté ... les règles
internationales régissantle Mandat constituaientpour le
Territoireun statut international reconnu par tous les
Membres de la Sociétédes Nations", (C.I.J., avis
consultatif, 11 juillet 1950, affaire du Statut
internationaldu Sud-ouest africain, Rec., 1950, p.
132).
3.114 Le Juge Mc NAIRa traitéla question sans détoursdans son
Opinion individuelle dans l'affaire dutatutinternationaldu Sud-ouestafncain. 11a
notéque :
"La souveraineté surun temtoire sous mandat est en
suspem... Ce qui importe, lorsque l'on examine cette
nouvelle institution, ce n'est pas où se trouve la
souveraineté,mais bien quels sont les droits et devoirs
du mandataire à l'égardde la régionou du territoire
administrépar lui. La réponse à cette question dépend
des accords internationaux, par lesquels a été créé le
régime,et des règlesde droit que ces accords attirent.
L'essence de cette réponse est que le mandataire
n'acquiert qu'un titre limitésur le temtoire qui lui est
confiéet que la mesure de sespouvoirs est fournie par ce
qui est nécessaireaux fins de l'exécution duMandat",
(C.I.J., avis consultatif, Il juillet 1950, affaire du Statut
intenzationaldu Sud-ouestafncain, Rec., 1950, p. 150.
Voir aussiQ. WRIGHT,Mandates under the League of
Nations. University of Chicago Press, Chicago, 1930,
pp. 319-339).
3.115 Quelle que soit l'attribution de compétencesen matière de
souveraineté, etce n'est pas la question qui se pose en l'occurrence, ce qu'il faut
souligner, c'est que les pouvoirs de la puissance mandataire étaient fondés sur
l'accord de mandat. La C.I.J. a caractériscet accord comme étant "en faitet en
droit un engagement international ayantle caractère d'un traiou d'une convention"(C.I.J., arrêt,21 décembre1962, affaire du Sud-ouestafncain,Rec., 1962, p. 330).
En cette qualité, ilavait un caractère contraignantet pour la puissancemandataire et
pour la Sociétédes Nations. Il en découleaussi que la puissance mandataire ne
pouvait pas modifier par une action unilatéralele statut international du territoire
concerné(C.I.J., avis consultatif, Il juillet 1950, affaire du Statutinternationaldu
Sud-ouestafncain,Rec., 1950,p. 141).
3.116 Cela a étésoulignépar les dispositions des accords de
mandats eux-mêmes,puisque l'article 11 des deux accords, ( pour le Cameroun
britannique d'une part, et pour le Cameroun français d'autre part) énonce
expressémentet sans ambiguïtéque "toute modificationapportée auxdispositions du
présentmandat devra êtreapprouvée au préalable par le Conseil de la Sociétédes
Nations". Toute modification juridiquement valable du statut du territoire sous
mandat aurait nécessité l'approbation duConseil de la Société des Nations, dansla
mesure où de telles modificationsn'étaientas autoriséesdans l'accordde mandat.
A. - Lanaturedesmandats
3.117 L'article 9 de chacun des deux mandats énonce que la
puissance mandataire aura pleins pouvoirs d'administrationet de législationsur les
contréesfaisant l'objet des deux mandats et que "ces contrées seront administrées
selon la législation de la Puissance mandataire comme partie intégrante de son
territoire et sousservedes dispositions quiprécèdent".Il préciseen outre:
"La Puissance mandataireest, en conséquence, autorisée
à appliquer aux régions soumises au mandat sa
législationsous réservedes modificationsexigées par les
conditions localeseà constituerces territoires en unions
ou fédérations douanièresf ,iscales ou administratives
avec les temtoires avoisinants relevant de sa propre
souverainetéou placés soussoncontrôle, à conditionaue
les mesures adoptées à ces fins ne portent vas atteinte
aux dispositions du présent mandat" (soulignépar la
RépubliqueduCameroun).
3.118 En d'autres termes, les accords de mandats permettent
l'administration des régionsconcernéesconjointement avec les territoires voisins,
dans le cadre et sous réservedes dispositionsgénérales desaccords de mandat. Par
conséquent,le pouvoir d'établir l'administration dCamerounbritannique à partir de
la colonie du Nigeria découlede l'accordde mandat quilui pose des limites claires.3.119 Des commentaires du SecrétairedYEtataux colonies au
Gouverneur du Nigeria, dans une lettre du 14 novembre 1922 montrent que c'était
bien le cas et que la Grande-Bretagnel'entendait ainsi. Dcette lettre, il est précisé
que le territoire du Cameroun se distribue naturellemetn trois zones(k Bomou,
l'Adamaoua et la partie sud avec le Mont Cameroun et les régions Bamenda).
L'article 9 de l'accordde mandat est citémot à mot et il est suggéré queles deux
anciennes zonessoientassimilées aux provinces nord du Nigeria. Mais ilest déclaré
précisément (au paragraphe 5 de la lettre) que "...of course...they would remain
subject tothe restrictionsirnposedby the termsof the Mandate".
3.120 La Commission Permanente des Mandats a étécréée
conformément à l'article 22 du Pacte comme organe consultatif duConseil de la
Société desNations. Elle s'est intéresséd ee près au statut constitutionnel des
temtoires sous mandat. Par exemple, lors de sa deuxième session.Elle a souligné
que :
"Dans son premier rapport du mois d'octobre 1921, la
Commission Permanente des mandats avait attiré
l'attentiondu Conseilsur la dispositiondes mandats aux
termes delaquelleune Puissance mandataireest autorisée
à incorporerun territoire sous mandat, au point de vue
douanier,à sespossessionsavoisinantes".
3.121 La questiona été reprise au cours des annéessuivantes.En
1923, par exemple, on a notéque le systèmed'administrationmis en place au
Cameroun britannique avait entraînéune division du temtoire en trois unités
administratives.La Commissionafait valoirque :
"According to the terms of the mandate, the British
Government was at liberty to join the territory of the
Cameroonsto Nigeriain orderto makeit an integralpart
of the colonyfrom the administrative pointof view. But
it was important that the authors of the report should
take care that as aresult of the union of the districts of
the mandatedtemtory with the neighbouring districtsof
Nigeria, the task of supervision by the Mandates
Commissionwas not made too difficult." (Commission
Permanente desMandats, Procès-verbal,3èmesession,
p.43).
3.122 Plus tard au cours de la même session, il a ésoulignéque,
en dépit du faitque le temtoire ait édiviséen trois parties administratives,"as the
Mandates Commission was concernedt ,here was only a singletemtory, namely, thetenitory under mandate.. " (Zbid.,p. 154). Lors de l'examen du rapport britannique
pour 1923l'année suivante,le présidentde la Commission adéclaré :
"Du moment que le Traitéde Versailles a laissé à divers
égardsaux Puissances mandatairesune certaine latitude
dans l'exercice de leur mandat, la Commission doit
veiller à ce que les administrations coloniales ne se
laissent pas entraîner à la tendance naturelle qui les
pousserait à faire usage des pouvoirs qui leur ont été
donnéspour assimilerun pays sous mandat àune colonie
de pleine souveraineté. " (Commission Permanente des
Mandats, Procès-verbal,Sesession, p. 17).
Il a soulignéque,
"Il désire donner pleinement satisfaction à l'opinion
publique elle-mêmeet établir bien clairement que le
mandat impliqueun ensemble d'obligations qui limitent
la souverainetéde la Puissance mandataire, et non pas
une annexion déguisée. "(Ibid., p. 18).
3.123 Certes, cette position a été clairemenatcceptéeet appliquée
par le Gouvernement britannique. Dans le British Cameroons Order in Councilde
1923, il est noté que, endivisant le temtoire en deux parties, nord et sud, les deux
zones seraient administrées "asif thev formed Dartof " des provinces septentrionales
et méridionales du Nigeria (Annexe M.C. 130, soulignépar la Républiquedu
Cameroun). Le rapport britannique surle Camerounpour 1924souligne :
"While the mandated areais administered, in accordance
with Article 9 of the Mandate, as thoughit formed an
integralpart of Nigeria, this administrative arrangement
implies neither fusion nor incorporation.The position is,
therefore in strict accord with the letter and the spirit of
the Mandate". (Souligné dansl'original, Annexe M.C.
137).
Le rapport pour 1925a noté :
"The mandated area falls, as stated in previous reports,
into two main divisions : -
(1) The Cameroons Province,and
(2) the Northern Cameroons,
administed respectively as thoughthey were parts of the
Southern and Northern Provinces of the Protectorate of
Nigeria." (Soulignépar la République du Cameroun,
Annexe M.C. 144, p.9).3.124 Leschosessontdoncclaires. Lesaccordsde mandat pourles
Camerounfrançais etbritanniqueautorisaientlespuissancesmandataires àadministrer
les temtoires commepartie intégrante despossessionsavoisinantes, sous réservque,
conformémentaux termes de l'article 9 des accords pourchacun des temtoires "les
mesures adoptéesà ces fins ne portent pas atteinte aux dispositions du présent
mandat". Seulsles Britanniques onteu recoursà cette dispositionet, quand ilsl'ont
fait, il a étéfermementrappelé qu'une tellaedministration conjointene portait pas
atteinte, et ne pouvaitpasporter atteinteau statutdu territoiresousmandat, tant dans
la législation nationa(l'Orderin Councilde 1923)quepar unedéclarationexpresse
à la Sociétdes Nations .
3.125 Une autre preuve de l'attention portéepar la Commission
Permanente des Mandats à cette question se trouve dans un rapport du journal
Coumer Colonialen date du 20 avril 1934danslequelil est dit que la nominationde
M. REPIQUETau poste de Commissairepour le Cameroun français pouvait faire
penser que le Camerounserait rattaché à l'Afriqueéquatorialefrançaise, que cela a
suffià susciterune question surle sujet, poséeau représentafrançais. Ce dernier a
déclaréà la CommissionPermanentedes Mandatsque le Gouvernementfrançais n'en
avait nullementl'intention(Commission Permanente des Mandats, procès-verbal,25e
session,p. 67).
3.126 La questionde fondpeutse résumersimplement. Le système
de mandat aété crée ét il a fonctionen se fondantsur le fait que les temtoires sous
mandatétaient différentdsesautres temtoires et quece statutdevait êtremaintenuen
l'état. Comme cela est expliquédans une étude détaillé du système des mandats
publiée parla Société des Nations en avril 1945, en liaison avec les travaux de la
Commission PermanentedesMandatsde la Société,
"Theminutesand observationsof the Commissionshow
that its efforts havebeendirectedtowardstheachievment
ofthree mainobjects,whichcorrespondtoothis aims set
forth in Article22 of the Covenant,that isto s:y
..3. The preservationof the legal status, integrityand
entity. (The Mandates sistem, Société des Nations,ional
Genève, 1945,pp. 50-51, AnnexeM.C. 179). B.- La consistance territoriale des mandats
1. L'article ler des accords demandat
3.127 Lors de la constitution des territoires sous mandat, un des
éléments cléétait,de toute évidence, leur définitionritoriale. Ce fait est confié
par l'examen du mémoire soumis parle Secrétairegénérad l e la Société dNations
le 30 juillet 1920 intitulé "Lesobligations incombanà la Sociétédes Nations aux
Termes de l'Article XXII du Pacte (Mandats)". Le paragraphe 2 de ce document
énonceque :
"L'observation des dispositions de l'ArticleXXII et
l'institution d'un système effectif de Mandats sous
l'autorité dela Société, impliquent les mesures suivantes:
...(b) 11 faut délimiter lesfrontières des temtoires
confiés aux diverses Puissances Mandataires" (Société
des Nations, Document de l'Assemblée 161, 1920,
Annexe M.C. 116).
3.128 L'article ler de chacun des deux accords de mandat
britannique et français concernantl'ancien Camerounallemanddéfinissait de manière
expresse et précise libelléedans les mêmes termesla frontière entre les deux
territoires.a ligne frontière entreles Cameroun britanniqueet français a définie
comme étant "la ligne fixéedans la Déclarationsignéele 10juillet 1919". En outre
et afin de préciser clairementla situation, le texte de cette Déclaration a été
expressémentjointen annexe aux deux accords de mandatet l'article ler des accords
l'a repris. Par conséquent, lestermesde la Déclarationavec sa définition territoriale
ont été repris asein des termes des accords même. Comme la Courl'a elle-même
souligné récemment, quand un traitédéfinitune frontièrepar l'incorporation d'autres
instnunents, le statut de ces derniers (quelles que puissent avoir étéla situation
auparavant) est assimilà celui du traitélui-même(C.I.J., arrêt du3 février 1994,
affaire du Dzfférendrontali eec. 1994, p. 23). La Cour poursuit en nota:t
"toute autre lecture de ces textes serait contàal'un
des principes fondamentaux d'interprétation des traités,
constamment admis dans lajurispmdence internationale,
celui de l'effet utile".(Ibid.25).3.129 L'article ler des accords de mandat confere aussi aux
mandataires le pouvoir de modifier la frontière dans les limites précisées dansla
Déclarationannexéeaux accordsde mandat. Cette dispositionénonceque :
"Cette ligne pourra, toutefois, êtrelégèrement modifiée
par accord intervenant entre le Gouvernement de Sa
Majesté Britannique et le Gouvernement de la
République française surles points où, soit dans l'intérêt
des habitants, soit par suitede l'inexactitudede la carte
Moisel au 1:300 OOOème,annexée à la Déclaration,
l'examen des lieux ferait reconnaîtrecomme indésirable
de s'en tenir exactement à la ligne indiquée. La
délimitation surle terrain de ces frontières sera effectuée
conformémentaux dispositionsde la dite Déclaration".
3.130 Une Déclaration conjointedes Gouverneurs des Cameroun
britannique et français, approuvéepar unEchange de notes entre les gouvernements
des deux pays le 9janvier 1931, a définila frontièreplus en détailque ce qu'avait fait
la Déclarationde 1919 (v. supra, pars. 3.22-3.24). La Déclaration, ainsiapprouvée,
était définiecomme une étudepréliminaire"destinée à donner à la description de la
ligne que devra suivrela Commission deDélimitationplusde précision quene l'a fait
la Déclaration MILNER-SIMON de 1919", mêmesi, en fait, elle "définit en
substancela frontièredont il s'agit" (AnnexeM.C. 157).
3.131 Cette Déclarationdevait, manifestement, êtresuivie par une
démaracation effectuée par une commission frontalière, conformément aux
dispositions de l'article ler des accords de mandace qui ne s'est cependantjamais
fait de manière exhaustive. Il est toutefois intéressantde noter à ce stade les
instructionsà la Commission frontalière anglo-française, convenuesentre les deux
gouvernements en 1937. Elles stipulaient au paragraphe 6 que "the Boundary
Commission shallproceed to establishthe whole of the boundary described in article
1 of the Appendixto the Mandate", de la Déclarationde 1919jointe en annexe aux
accords de mandat et, au paragraphe 11, que "In demarcating the boundary strict
regard should be paid to the provisions of Article 2 (l), (2) and (3) of the Appendix
to the Mandate". Ces dernières dispositions énonçaientque les caractéristiques
naturelles pouvaient êtreutiliséessous réservede ne pas modifier l'attribution des
villages citésdans l'article ler de la Déclarationde 1919, de ne prendre en compte
que les routes figurant sur la carte annexàela Déclarationde 1919et que, là où la
frontière suitun cours d'eau, elle en suive la ligne médiane. II fallait aussi prendre
en compte l'accordde 1931.3.132 Ceci confie (v.supra par.2.122 et infia par.4.73) que la
description de la ligne de 1919par I'accord consacrépar 1'Echangede notes de 1931
correspondaità une analyseplus détaillée de cette ligne, conformémentà l'article ler
des accords de mandat et nécessairement délimitp éar lui. Cela est confié par les
termes des instructions de la Commission frontalière de 1937. En outre, cette
interprétation est étayéepar l'article1 de I'accord de tutelle relatif au Cameroun
britannique, qui définit l'applicationde I'accordà la partie du Cameroun située à
l'ouest de la ligne de la Déclarationde 1919 "et déterminéde'une façon plus précise
dans la Déclarationfaite par le Gouvemeurde la Colonieet du Protectorat du Nigeria
et le Gouverneur du Camerounsous mandat français, et confiée par 1'Echangede
notes" du 9janvier 1931.
3.133 Puisque la définitionde la frontière entreles deuxterritoires
du Cameroun figurait dans les accords de mandat, il est manifeste que lesfrontières
en questionétaientreconnues auplan internationalpar la Société des Nations. Il faut
aussi ajouter que les Etats-Unis, quoique n'étantpas partie au Traitéde Versailles,
"acquiesced in the establishment of the mandate system, including theapproval of
mandate instnunents"" (Written Statement of the United States, C.I.J., mémoires,
plaidoiries et documents, Il juillet 1950, affaire du Statutinternational du Sud-ouest
africain, Rec., 1950, p. 93) et de fait ont concluun traitéavec le Royaume-Unile 10
février 1925 dans lequel les termes du mandat sur le Cameroun britannique étaient
expressément incorporés, y compris la définition temtoriale dans l'article ler
(AnnexeM.C. 138).
3.134 Exception faite des modifications limitéesautorisées par
l'article ler des accordsde mandat, la définitionde la frontière entreles territoires du
Cameroun ne pouvait êtremodifiéeque par les parties concernées avecl'approbation
expresse du Conseil de la Société.Cela n'a jamais étéle cas. Il en découle quela
définitionde la frontière, établieau plan internationalpar l'article ler comme étant
celle fixéepar la DéclarationMILNER-SIMON de 1919, n'a jamais été modifiée,
puisqu'elle n'est précisée qu par la déclaration approuvédeans 1'Echangede notes
anglo-françaisde 1931. 2. La CommissionPermanentedes Mandats
3.135 La Commission Permanente des mandats, tout en ne
déployantpas la mêmeactivitéet la même minutieque le Conseil de Tutelle des
Nations Unies, crééplus tard et jouissant de pouvoirs constitutionnelsdifférents,a
cependant constamment suivila question frontalièreentre les Cameroun britanniqueet
français.
3.136 Lors de sa troisième session en 1923, après l'audition du
Rapport sur le Cameroun britannique, la Commissiona rédigé une recommandation
dans les termes suivants:
"The Permanent MandatesCommission,
Considering that, according to the report on the British
Cameroons, the frontier between the Britishand French
mandated temtories has in certain places divided tribal
areas;
That this situation, if the complaints are justified, would
be contrary to the interestsof the nati:es
Recommendsthat theCouncil should, before considering
any measures destined to obviate the above -mentioned
disadvantages, requestthe French Governmentto collect
information and to make known its views on the
subject."
3.137 On a fait valoir, au sein de la Commissionque
"we have not done so with any idea of enlarging the
territory either of Great Britain or of France, but we
have occupied ourselves solely with the interests of the
natives and asked whether it is possible, by a
readjustment of frontier, for the temtory belonging to
the different tribes not to be intersectedby the boundary
line."
3.138 Le Présidentde la Commissiona continué à traiter de cette
question avec les représentants françaiset britannique. Le représentantbritannique,
M. ORMSBY-GORE, a noté que son Gouvernement avait constaté qu'aucune
modification importante à la ligne MILNER-SIMON n'étaitenvisagée maisqu'il
"would be glad if a few quite minor adjustments could be adopted by mutual and
local consent." le représentantfrançais, M. DUCHENE, a déclaré que cette formule
étaitconforme aux vues du Gouvernement français "which was of the opinion thatminor adjustrnentsof the frontier for the Cameroonsand also for Togoland were both
possible and desirable." (CommissionPermanente des Mandats, quatrième session).
3.139 Le représentant français a noté ultérieurement dans les
Commentaires sur les Observations de la Commission concernant les rapports sur
l'administration des territoiresdu Camerounet du Togo que :
"As early as 1921 the French Govemment informed the
British Govemment that it was prepared to consider the
possibility of makingcertain rectificationsin the frontier-
lines descnbed in the Franco-British Declarations of
1919. In 1922 the local administrations of French
Togoland and the Cameroons received the necessary
general instructions to enable them, in conjunction with
the neighbouring British authorities, to lay the
foundations of an agreement on al1 the points to be
considered possible frontier rectificationsand questions
bound up with the deliiitation of the frontier-line."
3.140 La Commission a adoptéune résolutionquelques semaines
plus tard en août 1924qui décide, ence qui concernela frontièreentre les Cameroun
françaiset britanniqueet entre le Togo françaiset britannique:
"(a) To express its gratitude to the French Govrement
for the readiness with which it has given effect to the
Council's resolutionof last year.
"(b) In conformity with the Commission's
recomrnendation, to request the Britsh Govemmentto
communicate to the Council its views on the subjects."
(AnnexeM.C. 135).
3.141 Dans son rapport sur les travaux de la sixième session, la
Commission, sous le titre "Frontièresentre les Cameroun français et britannique et
entre le Togo français et le Togo britannique" afait la déclaration suiva:te
"The Commission takes note of the information given in
the reports on the territories under French mandate and
of the statements of the accredited representative of
France to the effect that discussionsare now takiig place
with a view to possible rectifications of the frontiers
between the French and British Cameroons and French
and British Togoland."
Lors de la réunion de la Commission du 27 juin 1925
3.142
consacrée à l'examen du rapport sur le Cameroun français de 1924, le représentant
français a déclaréque des instructions simultanées avaientétédonnées aux
représentantsfrançais et britannique pour entreprendre des négociations surdesrectifications frontalièresjugées possibles et utiles et que ces négociations avaient
démarré (Annexe M.C. 140). Cela a étéconfirmé parle représentant britannique
quand on lui a posé laquestion de la créationd'une Commission frontalièrefranco-
britannique pour délimiterla frontière. Lors de sa réunion du11 novembre 1926, la
Commission a demandé des informationssupplémentairessur la "délimitation" [en
fait la démarcation]de la frontière et a reçu une réponse dureprésentant britannique
selon laquelle il y avait eu une réuniondes responsables dedistrictsdes deux côtésde
la frontièrequi marquait la frontièrede cairns dans les zones où in'y avait pas de
différend. Des recommandations pour les zones suscitant des différends seraient
soumises aux gouvernements respectifs et, en temps utile, une commission serait
créée pour procéde rla démaracationdéfinitivede la frontière(AnnexeM.C. 146).
3.143 Dans le rapport sur le Cameroun britannique pour l'année
1925, il a étnotéprécisément que :
"Negociations were opened in 1925 between the
Govemments of Nigeria and the French Cameroonswith
a view to coming to an agreement as to the adjustments
required in the frontier between the British and French
Cameroons. British and French Officers in charge of the
areas adjoining the frontier have been instructedto meet
and discuss the requirements in each section. They will
then draw up procès-verbauxfor submission to the
respective Govemments. If and when an agreement is
reached between the local Govemments, the
rectifications proposed will be submitted to the
Governments of France and Great Britain."(Annexe
M.C. 145).
3.144 Lors des discussions de 1927 du rapport sur le Cameroun
britannique pour l'année 1926,le représentantbritannique a notéque la frontière
n'avait pasfait l'objet d'une démarcation formele ais il a déclaque cela ne posait
pas de problèmegrave. Cela a amenéle Président à faire référencà des discussions
antérieuresportant sur les problèmesdes tribus divisées(v. supra,par.3.137), ce sur
quoi le représentantbritannique a répondu qu'il y avait certaines questions que
l'administration britannique avaitvoulu poser en 1919 mais que "à la suite des
ajustements qui se sont automatiquementeffectuésau cours des dix dernières années
et par le simple effet du temps, l'Administration britannique a conclu qu'il était
préférablede ne pas insister sur cesestions".(AnnexeM.C. 147).
3.145 Cela n'a pas satisfait la Commission et il a éténotéque la
position du représentantfrançais avait éque "ily aura de légers remaniements,afinde respecter les groupes ethniques, conformément auxdésirsde la Commission" et
que cette réponsen'était pascohérenteavec l'approche du représentantbritannique
(Ibid.; p.72).
3.146 Le rapport de la Commissionsur les travaux dela douzième
sessiona conclu cependantque :
"The Commission notedthe declarationof the accredited
representative of the British Government that, by
common agreement, no important modifications of the
frontiers between the spheres of the Cameroons and
Togoland under British and French Mandate respectively
are now considered necessary, and that the work of
delimitation is being carried out with the minor
rectifications which such an operationentails. When the
work has been completed, the Commission would be
glad to receive a map showing the final
delimination."(AnnexeM.C. 148).
3.147 La question semblaitainsi avoir trouvésa solution sansplus
d'embarras. Le rapport de la Commission au Conseil de la Sociétédes Nations
soumis le 5 mars 1928dit :
"On more than one occasion in the past the Commission
and the Council have interested themselves in the
problem of frontiers between the mandated temtories,
because, in certain cases, it appeared that the original
lines of demarcation divided tribes which according to
traditional native organisationformed a unit. It appeared
at one time that this criticism appliedto certain parts of
the frontiers between the CameroonsunderFrenchand
British mandateand TogolandunderFrench andBritish
mandate, and 1am sure that the Council willbe glad to
note that, according to the declaration of the British
Under-Secretary of State for the Colonies, it has now
been found, by agreement with the French authorities,
that no important modifications of these frontiers are
considered necessary."(Soulignédans l'original, Annexe
M.C. 150).
3.148 Cette attentionconstante accordéeaux questionsfrontalières,
qui s'est manifestée lorsdes premières années de supervisionpar la Commission
Permanente des Mandats, a persistédurant les annéesqui ont suivi. En 1928, par
exemple, le Présidentde la Commission a posé desquestionsau représentantfrançais
sur des passages du rapport annuel pour l'année1926 sur les provinces du nord du
Nigeria concernantla frontièrecamerounaisefranco-britanniquequi indiquaientque la
frontièreinternationale sud de Beloue n'étaitpas clairement définieet qu'un accordavait étésignéentre le Résident, accompagnédu représentant dudistrict de Dikwa, et
l'administrateurde Maroua. Le représentantfrançais a déclaré qu'il ne s'agissait pas
d'une affaire de modification maisd'interprétationet que les commissairesdes deux
pays avaient tracé la frontiède manière à éviterde couperun village de son groupe
ethniqued'appartenance.
3.149 La Commission a aussi manifestéson intérêten ce qui
concerne la séparationdu district de Kentu du Gashaka et son incorporation dans la
province de Benoué, cequi a suscité un échangede vues avec le représentant
britanniqueen 1933(AnnexeM.C. 164). La questiona étéévoquée ànouveau lors de
l'examen du rapport sur le Cameroun britannique le 4 juin 1937, quand le
représentant britannique a noté qu'il taitconvaincu que "on verrait qu'il n'y avait
pas eu de modification de la frontièredu territoire sous mandat mais qu'une petite
tnbu ou une petite communauté avaitété transférée d'un côtéà l'autre de la frontière
afin de réunirles deux parties de la tribu" (Annexe M.C. 170). Ce commentaire
apparemment hésitantn'a pas convaincu la Commission et, dans son rapport au
Conseil en 1937, elle écriva:t
"Accordiig to the annual report, a certain number of
hamlets in the Gashakadistrict in the territory have been
transferred to the Benue Province of Nigeria. The
Commissionwould be glad to receive an assurance that,
despite the use of the word "transfer", this operation has
not resulted in any change in the status of the district or
of its inhabitants."(AnnexeM.C. 171).
3.150 La Commission s'estaussi penchéesur d'autres aspectsde la
responsabilité despuissances mandataires concernant les questions frontalières. Par
exemple, lors de la vingt cinquième session dela Commission, le représentant
français s'est vu interrogésur le report du processus de "délimitation"du fait de
problèmesfinanciers. Il a réponduque, alors que son gouvernement avait constitué
une mission pour effectuer la délimitation,le Gouvernement de la Grande-Bretagne
avait décidé de repoussel'opérationdu fait de contraintesbudgétaires. A ce sujet, le
Président "attirel'attentiondu représentant accrédité sur l'obligqui découlepour
les puissances mandataires, del'article premierdu mandat, de délimiter surle terrain
les frontièresdes deuxCameroun".
3.151 La question est restée d'actualitles annéessuivantes. En
1935, on a fait valoir de manièreénergique, au sein de la Commission, qu'il était
difficile de comprendre comment desmotifs financiers pouvaientjustifier un reportdes travaux. Un membre a souligné avecforce au représentant britanniqueque "cette
questionde la délimitationde la frontière constitueune obligation internationaledont
l'exécutionincombe àla Puissance mandataireet non pas au territoire". On a rappelé
au représentantque quinze années s'étaient écoulées deplu aisécision d'yprocéder.
3.152 Dans son rapport au Conseil lors de cette session, la
Commission a notédans ses observationssur le Cameroun britannique que :
"The Commission has taken note of the statement in the
annual report, confïmed by the accredited represatitive,
to the effect that lack of necessary staff has hitherto
prevented the demarcation of the frontier between the
Cameroons under British mandate and the Cameroons
under French mandate. It must onceagain draw attention
to the fact that thedelimitationof the frontier is provided
for in the first article of the mandate, as also in the
Franco-British declaration thereto annexed (pages 94,
165-166, 177)."(AnnexeM.C. 166).
3.153 Et, au sujet du Camerounfrançais, la Commission a déclaré
que :
"The Commission notes the declarationby the accredited
representative to the effect that the mandatoryPower is
ready to proceed to the delimitation of the western
frontier of the temtory. It would point out that this
delimitation is provided for by Article 1of the mandate
and by Article 2 of the Franco-British Declaration
annexedthereto (pages94, 137, 165-166)."(Ibid., p. 4).
3.154 Dans son rapport au Conseillors de sa 30e sessionen 1936,
la Commission a noté,de manièreconcise, que, pour le Camerounbritannique, "the
mandatory Power is prepared to proceed shortly to the demarcationon the ground of
the eastern frontier of the mandatedterritory" (AnnexeM.C. 168). Le rapport sur le
Cameroun britannique pour l'année1937relèveque les travaux de "délimitation"de
la frontière entreles Camerounbritanniqueet français ont débuté en décembre.
3.155 Lors de sa 37e session en décembre1939, alors mêmeque
la deuxièmeguerre mondiale avaitéclatél ,a Commissiona continué à s'intéresseà la
question frontalière. Un membre de la Commission, lors des discussions sur le
rapport sur le Cameroun français pour l'année 1938,a fait remarquer que, "for the
past twenty years, the Commissionhad been followingthe efforts made to demarcate
the frontiers, taking as full account as possible of the rights and interests of the
natives."(AnnexeM.C. 177,p.96).3.156 Lors de cette mêmeréunion, lePrésident a présenté quelques
commentaires importants qui sontun témoignagede grande valeur sur les objectifset
les travaux de la Commissionen la matière. Ils sont cmciaux et doivent êtrescnté
extenso. Ila déclarque :
"it must be remembered that it was the Commission's
businessto watchover the observanceof the terms of the
mandates by the mandatoryPowers. Now the present
frontier between those parts of the Cameroons thatwere
respectively under French and British mandate, and
which some thoughtto be defective, had been fmed in a
Franco-British declaration which, having been annexed
to the mandateinstniments, must be regarded as forming
an integral part of them. Both these instruments
stipulated in Article 1 that the line of demarcation
defined in the declaration might be "slightly" modified
modification appeared desirable in the interests of the
inhabitantsor became necessaryowing to the inaccuracy
of the map availableat that the.
It was oniy by adducing one or other of these reasons
that the Commissionmight recommenda modificationof
the existing frontier. Even so, it should refrain from
presenting suggestions involving anything more than a
"slight" modification of the line of demarcation laid
down in the declaration amexed to the mandates."
(Zbi ,p..99).
3.157 Le Président a conclu en soulignantque, si le bien-être des
habitants pouvait, sous le mandat, justifier une modificationde la frontière,
"It was necessary, however, that thepurpose in view
should not be attainable oniy through a substantial
modificationof the frontier, the generalcourse of which
must be regarded as having been finally fmed by the
Franco-British declaration(Zbid p.,9).
3.158 Il apparaît donc à l'évidence que l'instiet la gestion du
système des mandats représentaientune reconnaissance au plan international de la
plus haute importance, non seulement pour les territoires sous mandat des deux
Cameroun en qualitéd'entitésdistinctes, jouissant d'un statut international différent
de celui des autres territoires mais aussi pour leurs configurations temtoriales
respectiveset donc pour leurs frontières. $2. Les accords detutelle
A. - Le régime de tutelle
1. Généralités
3.159 LR régimedes mandatsa, de fait, cesséd'opérerau début de
la seconde guerre mondiale. La Commission Permanente des Mandats a tenu sa
dernière session en décembre1939 et les activitésdu Conseil de la Sociétédes
Nations se sont en réalité interrompueau mêmemoment, sans avoir examinéles
rapports définitifs,ni même pénultièmeds, la CommissionPermanentedes Mandats.
Les rapports relatifs auxemtoires sous mandat n'ont depuislors plus paru (hormis
quelques rapports provenant de certains mandats C au cours de la période 1939-
1941). h 18 avril 1946, l'Assembléede la Sociétédes Nations a officiellement
dissous la Sociétéet adoptéune résolution relativeau régimede mandat. Celle-ci
reconnaissait la cessation des fonctions de la Société desNations ayant trait aux
territoires sous mandat lors de la dissolution de cette dernière tout en précisant
cependant que "les chapitres XI, XII et XII1 de la Charte des Nations Unies
perpétuent les principes correspondantà ceux déclaréà l'article 22 du Pacte de la
Sociétédes Nations."
3.160 Comme l'indiquait la Cour en 1962, des débats prolongés
ont eu lieu tanà L'Assemblée généralequ'au Premier Comitéavant l'adoption dela
résolution du 18 avril 1946 en vue d'assurer la poursuite des mandats. Dans ce
contexte, tous les mandataires ont fait des déclarations quànleurs intentions de
poursuivre l'administration destemtoires dont ils étaientresponsables conformément
aux principes des mandatsexistants,(C.I.J., arrêt,21 décembre1962, affaire du Sud-
OuestAfricain, Rec.,1962,p. 339).
3.161 En d'autres termes, il n'y avait aucune lacunequant à la
naturejuridique des territoires sous mandat. Mês'ilyavaitun hiatusconcernantle
systèmede mise en oeuvre au plan international, les règlesde fond régissant les
territoires restaient en place. Ceci ressort clairement des termes de la Charte et des
positions adoptéespar la Cour. La dissolution de la Sociétédes Nations n'a pasentraînéla disparition des normes applicables et a simplement marquéla fin d'un
régimeparticulier d'application internationalede ces règles.A titre d'illustration, on
peut citer la circulaire émanant duministèredes Colonies britannique en date du 3
mars 1948jointe au texte de la loi de 1947portant sur les territoires sous mandat et
soustutelle qui indiquaitque
"when the League of Nations came to an end the
mandatory powers voluntarily declared to the League
their intention to continue for the the being
administeringmandatedtemtones in accordance withthe
mandate until other arrangements had been agreed with
the United Nations" (AnnexeM.C. 184).
La loi elle-même prévoya itl'article 1, par.1, que
"the operation of an enactment in relation to any
temtory-
(a) shall, while the territory is a trust temtory under the
sole administrationof anygovemment, be the sarne as if
a mandate of the League of Nations in respect of the
territory werebeing exercisedby that govemment;
(b) shall not, except by virtue of the foregoing
paragraph, be affectedby reason-
(i) of the temtory becominga trust temtory; or
(ii) of any change in the authority responsible for
administering the temtory which takes place on its
becominga trust temtory or while it is a trust territory.
This subsectionshall be deemedto have had effect from
the thirteenth day of December, nineteen hundred and
forty-six (beingthe day on which thefust trust territones
were established)"' .
L'article 1, par.3 de la loi énonçaitque
"Where any enactment (whetherpassed or made before
or after the terminationof the Leagueof Nations), refers
in whatever terms to mandated temtories or any
description of mandated temtones, mandates of the
League shall not for the purposes of that enactment be
deemed to have come to an end with the termination of
the League.
1
Y compris,bienentendu,les accordsde tutelle serapportanxamerounbritanniqueet
français. This subsectionshall be deemed to have had effect from
the dateof the terminationof the League."
3.162 Le principe de l'intégritéterritoriale des temtoires sous
mandat faisait partie des règlesqui ont continuéde régirles temtoires sous mandat
jusqu'à l'établissement du nouveau régime de tutelle fondé sur des accords
particuliers. Comme nous l'avons vu (v. suprapars 3.128-3.129), les accords de
mandat comportaient une clause définissant l'étendue temtoriale du temtoire sous
mandat concernéet celle-ci s'appliquait certainementaux Cameroun britannique et
français. Par conséquent, à la veille de l'établissement desnouveaux accords de
tutelle, la configurationterritoriale des temtoires des Cameroun restait fméeet sans
changement.
3.163 L'essencedu régimede tutelle institué par les NationUnies
figure au chapitrXII de la Charte, le chapitrXII1traitant de la constitutionet de la
nature du Conseil de tutelle. ies caractéristiques essentiellesdu nouveau régime
peuvent se résumercomme suit. L'article 75 de la Charte indique que les Nations
Unies devaient établirun régime internationalde tutelle pour I'administrationet la
surveillance des territoires qui pouvaient en relever par des accords individuels
ultérieurs. L'article76 énonceles objectifsfondamentauxdu régime.
3.164 L'article 79, disposition fondamentale, précisait queles
modalités d'applicationde la tutelle pour chaque territoire en question, y compris
toute modification ou tout amendement, devaient êtreconvenus par les Etats
directement intéressés, ycompris la Puissance mandataire, et approuvés par
l'Assemblée générale, assisté ear le Conseil de tutelle conformément aux
dispositionsde l'article 85. En d'autrestermes, lorsqu'unaccord detutelle avait placé
un territoire précissous le régimede tutelle et avait été approuvpar l'Assemblée
générale, lestermes de cet accord ne pouvaient êtremodifiés ou amendés sans
l'accord exprèset formel de l'Assemblée.Ceci comprenait évidemmenlta questionde
la définition temtoriale du temtoire sous tutelle concerné. Aucune Partie ou
puissance ne pouvait apporter un quelconque changement à cette définition sans
l'approbationde l'Assembléegénérale.
3.165 Le mécanismede supervision du système de tutelle fut
renforcé par rapportàcelui qui existaitsous le systèmedes mandats. Alorsque, sous
le régime des mandats, la Commission Permanente des Mandats étaitun organe
annexe du Conseil de la Sociétédes Nations composéd'experts examinant les
rapports annuels des puissances mandataireset conseillantledit Conseil, le Conseil detutelle fut établi comme organe principal des Nations Unies et composé de
représentantsgouvernementaux. Il avait aussi le pouvoir de procéderà des visites
périodiques dansles temtoires soustutelle (v. les articles 86 et 87 de la Charte).
3.166 Il est inutile d'entrer dans le débat théorique spoint de
savoir qui dispose de la souverainetésur les territoires sous mandat et tutelle (v. par
exemple F SAYRE "Legal Problems Arising from the United Nations Trusteeship
System", A.J.I.L., 1948, p. 268 ; etQ WRIGHT, Mandates under the Leaeue of
Nations, University of ChicagoPress, Chicago, 1930, pp. 319-339). Il suffit de citer
la formule déterminantedu JugeMcNAIRdans son opinion individuelle dansl'affaire
du StatutinternationalduSud-OuestAfricainoù il indiquaitque
"le régime des mandats (ainsi que les "principes
correspondants" du régime internationalde tutelle) est
une nouvelle institution-un nouveau rapport entre le
qui les représenteà l'extérieur, d'autre partgou-euneent
nouvelle sorte de gouvemement international qui ne
rentre pas dans lavieille conceptionde la souverainetéet
qui lui est étranger.La doctrine de la souveraineténe
s'applique pas au nouveau régime.La souverainetésur
un territoire sous mandat est en suspem... Ce qui
importe, lorsquel'on examine cette nouvelle institution,
ce n'est pas où se trouve la souveraineté, maisbien quels
sont les droits et devoirs du mandatairà l'égardde la
région ou dutemtoire administrépar lui. La réponse à
cette question dépenddes accords internationaux, par
lesquels a été créle régime, etdes règlesde droit que
ces accords attirent. L'essence decette réponse estque le
mandataire n'acquiertqu'un titre limité sur letemtoire
qui lui est confiéet que la mesure de ses pouvoirs est
fournie par ce qui est nécessaire aufinsde l'exécution
du mandat". (CI.., avis consultatif, 11 juillet 1950,
affaire du Statut internationaldu Sud-Ouest Afncain,
Rec., 1950,p. 150).
Le mêmeraisonnementpeut êtresuivipour ce qui est des territoires sous tutelle.
3.167 Aux fins de la présente affaire, le point fondamental à
souligner est le fait que les autorités chargées dl'administration n'avaient pas le
droit de changer unilatéralement le statut du territoire ou d'en modifier
unilatéralement laconfiguration.Dans lecas du régimede tutelle (comme danscelui
du régimede mandat), des règlesinternationales strictes déterminaientet limitaient
l'exercice de l'autoritéde la puissancede tutelle. Ce pouvoir était lié parles termes
de la Charte des Nations Unies etceux de l'accord de tutelle relatif au territoire enI question, et donnait compétence à l'Assembléegénéraleen matière de contrôle
général.Comme cela est souligné dansOPPENHEIM's InternationalLaw,
"itis fundamental that trust territories do not form part
of the temtory of the states entrusted with their
administration. For this reason the trustee state cannot
cede or otherwise alter the status of trust temtory except
with the approval of the United Nations in which the
residuary sovereigntymust be considered to be vested".
(Sir Robert JENNINGS et Sir Arthur WATTS (eds.)
OPPENHEIM's InternationalLaw, Longman, Londres,
9èmeédition, 1992,p. 316.)
Les règles s'imposantà la puissanceadmiistrante mettaient l'accent surle bien-être
des habitants et les autres questions précisémetnoncées à l'article 76 de la Charte
et, comme le soulignait nettement et àjuste titre ROUSSEAU "il va de soi que le
respect de l'intégrité territoriale figuratarmi les obligations de la Puissance
administrante", (Ch. ROUSSEAU, DroitInternational Public, Paris, Sirey 1974, t.
11,p. 408).
3.168 Le régimede tutelle établi parde la Charte des Nations
Unies a étémis en applicationpar la signature d'accordsde tutelle particuliers. Aux
termes de l'article 81 de la Charte, les accords de tutelle devaient comprendre les
modalitésd'administration du territoire. Ces accords suivaientun schémaclassique,
contenant invariablement desdispositions selon lesquelles la puissanceadministrante
gouvernerait le temtoire à la lumière des principes énoncés à l'article 76 de la
Charte, des dispositionsde coopérationavecles organesconcernésdes NationsUnies,
et des dispositions selon lesquellesla puissance administrante aurait la charge de la
paix, de l'ordre, de la bonne administration et de la défense duterritoire. Un
ensemble de dispositions généralesy figuraient, notamment une définition des
frontières des territoires, la désignation del'instance administrante,la procédurede
modification de l'accord et la procédurede règlement de litiges entre l'instance
administrante et un autre membre des Nations Unies quant à l'interprétatioOU
l'application des dispositions de l'accord (v. par exemple Ré~ertoirede la ~ratiaue
suivie Darles organes des Nations Unies,vol. IV, New York, 1955, p. 212, Annexe
M.C. 203).
3.169 ies accords de tutelle ont clairement étéacceptés comme
étantdes accords internationaux. La Cour avait énoncéprécisémentd,ans l'affaire du
Cameroun septentrional, qu'"il existe un différend relatif à l'inteprétation et
l'application d'un traitél'accordde tutelle" (C.I.J., arrêt,2 décembre1963, affairedu Camerounseprentrio~l, Rec., 1963, p. 37). Cette conclusion est confortéepar
une référence analogue à la situation concernant les mandats, dans laquelle le Juge
McNAIR a estimédans son opinion individuelleque "on ne saurait douter, en effet,
que le Mandat, dans lequel sont incorporées des obligations internationales,
appartienne à la catégoriedes traitésou conventions" (C.J., avis consultatif, 11
juillet 1950, affaire du Statut internationaldu Sud-OuestAfncain, Rec., 1950, p.
158)tandis que la Cour déclarait sans ambiguïtéque "le Mandat est en fait et en droit
un engagement international ayant le caractère d'un traitéou d'une convention"
(C.I.J., arrêt,1 décembre1962, affairedu Sud-OuestAfncain, Rec., 1962, p. 330 ;
v. aussi C.I.J., Avis Consultatif, 21 juin 1971, affaire des Conséquencesjuridiques
pour les Etarsde la présencecontinuede I'Afnquedu Sud en Namibie, Rec., 1971,
p.32).
3.170 Deux dispositions figurant dansles accords de tutelle doivent
êtretout particulièrementrelevéescar elles pourraient laisserpenser, a priori, que la
puissance administrante avait plus de pouvoir quantà la dispositionde tout ou partie
du temtoire en question que ce n'étaitréellementle cas. La première dispose que,
comme le précise l'article5 (b) de l'accord de tutelle de 1946 pour le territoire du
Cameroun sous l'administration du Royaume-Uni (Annexe M. C. 182), l'autorité
chargéede l'administration "sera autoriséeà faire entrer le Territoire dans une union
ou fédérationdouanière, fiscale ou administrative constituée avecles territoires
adjacents placéssous sa souverainetéou sa régie".Cette disposition figure dans sept
des huit premiers accords de tuteile approuvés.Une opposition s'est manifestée à
cette formulation lors des débats dela première session du Sous-comité 1 de la
quatrième commissionde l'Assembléegénérale.Mais il convient de noter que la
disposition en question précisaitensuite qu'une telle union ne pouvait intervenir que
"lorsque ces mesures ne sont pas incompatibles avec lesobjectifs fondamentauxdu
régime internationalde tutelle" et avec les'termes de l'accord particulier (ibid.).
Toutefois il a étéconvenu qu'une mise au point étaitnécessaire.Une déclaration a
donc été rédigée par les puissancesmandataireset approuvéepar le sous-comitédans
les termes suivant: "the delegations of States submitting the trusteeship
agreements for the approval of the General Assembly,
wish to give assurance that they do not consider the
terms of the Articles.. . [concerning their nght to
constitute the Trut Temtones admiistered by them into
customs, fiscal or administrative unions or federations
with adjacent Temtories under their sovereignty or
control] as giving powers to the AdministeringAuthority
to establishany form of political association between the
Txust Temtones respectively administered by them and
adjacent Temtories which would involve annexation of
effect of extinguishingtheir status as Trust Temtories".
(Annexe M. C. 203).
Cette déclarationa étéapprouvéepar le Sous-comitépour insertion dans le rapport du
Rapporteur et, comme conclut le Ré~ertoirede la ~ratiaue suivie Darles organes des
NationsUnies,
"The General Assembly approved the draft Trusteeship
Agreements upon the assurances thus given by the
Admistering Powers" (ibid.).
3.171 L'attitudedes Nations Uniesenvers de telles unions a encore
étéprécisée au cours des années suivantes. L'Assemblég eénéralea notammentadopté
une sériede résolutions,(224 (iII)du 18 novembre 1948 ;326 (IV) du 15 novembre
1949 ;563 (Vi) du 18janvier 1952et 649 (VII)du 20 décembre1952)dont on peut
déduireles principes suivants:
- Premièrement, les accords de tutelle n'autorisaient aucune forme d'association
politique qui entraînerait l'annexion, d'une quelconque manière, du territoire sous
tutelle.
- Deuxièmement, des mesures d'union douanière, fiscale ou administrative ne
devaient en aucune façon entraver la libre évolutionde chaque territoire sous tutelle
vers l'autonomieou l'indépendance.
- Les puissances administrantes devaient faire part au Conseil de tutelle de toute
informationconcernant le fonctionnementde telles unions.
- Les puissances administrantes devaientprendre en considérationles désirslibrement
expriméspar les habitants concernésavant l'établissementou l'extension de telles
unionset le Conseil de tutelledevaitexaminer soigneusementdetellesunions.- Le fait que ces unions devaient faire l'objetd'un examen attentif de la part des
Nations Unies ressort aussi de la pratique pour ce qui est du Cameroun britannique
(v.infra pars. 3.197-3.203).
3.172 L'attitude adoptée concernant une seconde disposition
commune à la presque totalitédes accords de tutelle témoigne d'une approche
similaire. Celle-ci, énoncépar l'article 5(a) de l'accord de tutelle de 1946 pour le
territoire du Cameroun sous administration du Royaume-Uni (Annexe M.C. 203),
consiste en ce que l'autoritéchargéede l'administration
"aura pleins pouvoirs de législation,d'administration et
de juridiction sur le temtoire et l'administrera
conformément à sa propre législation, comme partie
intégrantedeson temtoire."
Même si cettedisposition comportait aussi la réserveselon laquelle elle devait être
soumise aux "dispositionsde la Charte des Nations Unies et decet accord", les mots
"comme partie intégrante"ont cependant suscité unecertaine inquiétudeau cours des
premières annéesdu régimede tutelle. Le Sous-comitéde la QuatrièmeCommission
de l'Assembléegénérale desNations Unies a fini par approuver une proposition
visantà inclure dans le rapport du Rapporteurune déclarationselon laquelle les mots
en question figuraient dans les projets d'accords de tutelle uniquementà titre de
commodité administrativeet sans préjudicede la souverainetédes territoires sous
tutelle. Les tentatives menéesà la QuatrièmeCommission et par la suite lors des
sessions plénièresde l'Assembléegénérale pour supprimer ces mots des accords de
tutelle ont échoué.Les puissances administrantes ont cependant indiquéclairement
que la portée de ces dispositions ne devait pas êtreexagéréeet qu'elles tenaient
uniquement à des soucis de commoditéadministrative, qu'elles ne devaient pas être
interprétées comme accordanlte pouvoir de réduirele statut politique des territoires
sous tutelle et qu'elles ne sous-entendaientpas la souverainetédes autoritéschargées
de l'administration concernant le territoire en question. Le Royaume-Uni, par
exemple, a déclaréexpressémentque
annexion et il avait été nécessaire d'utiliser cette
expression du Mandat, étant donnéles conditions
particulières de ce territoire"à savoir le Cameroun
britanniqueet le Togoadministrésensembleavecla Gold
Coast ;v. aussiL. GOODRICHet E.HAMBR0, Charte
des Nations Unies, Londres, London Institute of World
Affairs, 2ndEd., pp. 423-424.)Les représentantsde la France et de la Belgique ont aussi précisé que "les mots
'comme partie intégrante' sontnécessaires pourfaciliter l'administration et ne
signifient pas que les Gouvernementsde la France et de la Belgiquesoient autorisésà
réduire l'individualité politique dsemtoires sous tutelle" (ibid. par. 3). En fait,
SAYRE conclut que
"Inview of the debates whichtook placeduringthe First
Session of the Assembly and of the way the clause has
been interpretedin practice in the actual administration
of the trust temtories it would seem as if the phrase in
question confers upon the administering powers no
substantive rights or powers which they would not
possess in its absence" (F. SAYRE, "Legal Problems
Arising from the United Nations Trusteeship System",
A.J.I.L., 1948, p. 286).
3.173 Il est ainsi manifeste que rien de ce qui est énondans les
accords de tutelle ne portait atteinte ou ne diminuait d'une quelconquemanière
l'essence de l'accord de tutelle si bien que la puissancenistranteétaitstrictement
astreinte quant au statut juridique et à la définitiontemtonale existante du temtoire
concerné. Toute allusionà une compétence quelconque qu'auraiptu avoir la puissance
administrante quant à la modification unilatéraledu statut du temtoire sous tutelle
était clairement rejetéà la fois par les organesconcernés desNations Unieset, en
fait, par les puissancesadministranteselles-mêmes.
2. Les Accordsconcernant lesTemtoires du Cameroun
3.174 Le 9 février 1946, l'Assemblée généralea adopté la
résolution9 (1) selon laquelle il étaitdemandé à tous les Etats administrant des
territoires sous mandat de soumettre des accords de tutelle pour approbatioLe 13
décembre1946 étaitadoptéela résolution63 (1)de l'Assembléegénérale approuvant
huit accords de tutelle. Ceux des territoiresdes Camerounbritannique et français en
faisaient partie et avaient étéadoptésdans le premier cas par 41 voix contre 6 et 5
abstentionsetdans le second cas par 41 voix contre 5 et 6 abstentions(AnnexM.C.
180).
3.175 L'article 1 de l'accord de tutelle pour le territoire du
Cameroun sous administration française(AnnexeM.C. 182), énonçaitque "le territoire auquel s'applique le présent Accordde
tutelle comprend la partie du Cameroun qui est situéà
l'est de la ligne fucée par la Déclaration franco-
britannique du 10juillet 1919".
L'article 1 de I'accordde tutelle pour le temtoire du Cameroun sous administration
du Royaume-Uni (AnnexeM.C. 203), énonçaitque
"le temtoire auquel cet accord s'applique comprend la
partie du Cameroun qui se trouve à l'ouest de la
frontièredéfiniepar la Déclarationfranco-britanniquedu
10 juillet 1919 et déterminéed'une façon plus précise
dans la Déclarationfaite par le Gouverneur de la Colonie
et du Protectorat du Nigeria et le Gouverneur du
Cameroun sous mandat français et confumée par
l'échangede Notes qui a eu lieu le 9 janvier 1931 entre
le Gouvernementde Sa Majestépour le Royaume-Uniet
le Gouvernement français. Cette ligne peut cependant
êtrelégèrement modifiéd e'un commun accord entre le
Gouvernement de Sa Majestépour le Royaume-Uniet le
Gouvernement de la République françaisesi l'examen
des lieux montre qu'une telle modification est
souhaitabledansl'intérê tes habitants".
3.176 Cette disposition a été expliquée lors du débat de la
QuatrièmeCommission de l'Assemblée générad le 1946et la Commission a décidé
d'inclure danssonrapport lesobservationssuivantes:
"les représentantsde la France et du Royaume-Uni, en
réponse à une question poséepar le représentant de
l'Union Soviétique, ont expliqué que l'article 1 du
mandat britannique sur le Cameroun et l'article 2 de
I'accord signéle 19juillet 1919 par les Gouvernements
français et britannique permettent d'apporterde légères
modifications à la frontière du Cameroun sous
administration britannique et du Cameroun sous
administration française, de manière à empêcher les
villagesfrontaliersd'êtreséparés des terrasultivéspar
leurs habitants" (Assembléegénéraledes Nations Unies,
Rapportde la Quatrième Commission,A1258,par. 2).
Il faut remarquer, en ce qui concernela dernièrephrase de l'article ler de l'accord de
tutelle du Royaume-Uni, qu'aucune modification,même"légère",n'a en fait été
apportéeau coursde la validité des accords detutelle.
3.177 L'article 3 de l'accord de tutelle du Royaume-Uniprévoyait
que les autorités chargéesde l'administration s'engageaient "à administrer le
Temtoire de manière àréaliser lesfins essentielles duRégimeinternationalde tutelle
énoncées à l'Article 76 de la Charte des Nations Unies", mêmesi l'article 18 "le territoire auquel s'applique le présent Accordde
tutelle comprend la partie du Cameroun qui est situéà
l'est de la ligne fucée par la Déclaration franco-
britannique du 10juillet 1919".
L'article 1 de I'accordde tutelle pour le temtoire du Cameroun sous administration
du Royaume-Uni (AnnexeM.C. 203), énonçaitque
"le temtoire auquel cet accord s'applique comprend la
partie du Cameroun qui se trouve à l'ouest de la
frontièredéfiniepar la Déclarationfranco-britanniquedu
10 juillet 1919 et déterminéed'une façon plus précise
dans la Déclarationfaite par le Gouverneur de la Colonie
et du Protectorat du Nigeria et le Gouverneur du
Cameroun sous mandat français et confumée par
l'échangede Notes qui a eu lieu le 9 janvier 1931 entre
le Gouvernementde Sa Majestépour le Royaume-Uniet
le Gouvernement français. Cette ligne peut cependant
êtrelégèrement modifiéd e'un commun accord entre le
Gouvernement de Sa Majestépour le Royaume-Uniet le
Gouvernement de la République françaisesi l'examen
des lieux montre qu'une telle modification est
souhaitabledansl'intérê tes habitants".
3.176 Cette disposition a été expliquée lors du débat de la
QuatrièmeCommission de l'Assemblée générad le 1946et la Commission a décidé
d'inclure danssonrapport lesobservationssuivantes:
"les représentantsde la France et du Royaume-Uni, en
réponse à une question poséepar le représentant de
l'Union Soviétique, ont expliqué que l'article 1 du
mandat britannique sur le Cameroun et l'article 2 de
I'accord signéle 19juillet 1919 par les Gouvernements
français et britannique permettent d'apporterde légères
modifications à la frontière du Cameroun sous
administration britannique et du Cameroun sous
administration française, de manière à empêcher les
villagesfrontaliersd'êtreséparés des terrasultivéspar
leurs habitants" (Assembléegénéraledes Nations Unies,
Rapportde la Quatrième Commission,A1258,par. 2).
Il faut remarquer, en ce qui concernela dernièrephrase de l'article ler de l'accord de
tutelle du Royaume-Uni, qu'aucune modification,même"légère",n'a en fait été
apportéeau coursde la validité des accords detutelle.
3.177 L'article 3 de l'accord de tutelle du Royaume-Uniprévoyait
que les autorités chargéesde l'administration s'engageaient "à administrer le
Temtoire de manière àréaliser lesfins essentielles duRégimeinternationalde tutelle
énoncées à l'Article 76 de la Charte des Nations Unies", mêmesi l'article 18affirmait que "les termes du présent Accordne pourront êtremodifiés ou amendés
que conformément à l'article 79 et aux Articles83 ou 85, selonle cas ,de Ia Charte
des Nations Unies".
3.178 Les points fondamentaux devant être soulignés sont les
suivants :
- premièrement, les temtoires du Cameroun respectivement sous administration
britannique et française étaientterritonalement définis ;
- deuxièmement,les puissances adrninistrantess'engageaient à exercer leurs fonctions
selon les termes du régime international de tutelle et troisièmement ;
- aucun changement ne devait être apporté aux accords de tutelle sans I'accord de
l'Assembléegénérale.
Ainsi, l'interdiction faiteaux autorités administrantes de modifier unilatéralementle
statut, la composition ou la définitiondes temtoires concernés étaitclairement
énoncéedans les accords de tutelle et approuvéeen tant que telle par l'Assemblée
générale. L'impossibilité de modifier unilatéralementle statut ou la configuration du
territoire découlaitdonc de deux sources :pour commencer, de la nature mêmedu
régimede tutelle énoncé dans la Charte des Nations Unies (convention multilatérale
obligatoire) qui délimitaitde manièrecontraignante les compétencesdes puissances
administrantes une fois qu'un territoire particulier était placésous tutelle, et
deuxièmement del'énoncéexplicite des accords eux-mêmesqui précisaitqu'aucun
amendement ou modification de ceux-ci (y compris, bien entendu, la définition
territoriale) ne pouvaientêtreapportés sans I'accord de l'Assembléegénérale.
3.179 Le fait que tel étaitbien le cas ressortclairementde l'avis du
Conseiller juridique des Nations Unies donnéle 2 octobre 1959 en réponseaux
questions relatives à ce que serait la situationdu Camerounméridionalsi le plébiscite
de novembre 1959dans le Cameroun septentrional donnait unemajoritéen faveur de
l'intégrationau Nigeria. 11s'agissaitnotammentde savoir si le Camerounméridional
continuerait d'êtreadministrésous le régimede tutelle par un amendement de
I'accord de tutelle. Le Conseillerjuridique a déclaré que ce serait possible mais, ce
2 L'article~3 de ~~~Cha rtedes Nations Unies ré ci sue les fonctionsdes NationsUnies
concernantdes temtoiresstratégiquessoustutelle devaient treexercéeparle Conseilde
sécurité(aulieudel'Assemblég eénéraleI)l.nes'appliqupasà cettefin.faisant, il a affirmé clairementque des changements dans l'administration ou une
modificationtemtoriale d'un temtoire sous tutelle ne pouvaient être apportésue par
un amendement à I'accordde tutelle qui serait compatible avecla Charte des Nations
Unies. En d'autres termes,les mêmes conditions,àsavoir :
"a proposal approvedby the GeneralAssemblyby a two-
thirds majority, apply to amendrnents to existing
agreements as well as to the approval of a new
trusteeshipagreement" (AnnexeM.C. 215).
Le principal cadre d'examen desconditionsdansles différentstemtoires soustutelle a
étéexpliquéparun délégué auprè dsu Conseil de tutelle qui soulignaque
"the relationshipwith France was in the nature of an
administrativeassociation, as defined by the Tmsteeship
agreement, which could not be altered unilaterally or
without the approvalof the GeneralAssembly".
3.180 Commecela a été indiquéci-dessus (v. suprapar 3.169), il a
été admis que les accords de tutelle constituaientdes engagements obligatoires ayant
un caractère objectif. Ceci a étéprécisément accepté par le Royaume-Uni dans le
contexte de la situation du Cameroun, lors des audiencesdans l'affaire du Cameroun
septentrionalen 1963. Sir John HOBSON (alors Attorney General dugouvernement
britannique) a déclaréque "dans l'esprit du Royaume-Uni, I'accord de tutelle
approuvépar l'Assembléegénérale le13 décembre1946 constituait un traitéou une
conventionentre le Royaume-Unid'une part et les Nations Uniesde l'autre", (C.I.J.,
Mémoires, plaidoiries etdocuments, affaire du CamerounSeptentrional, 1963,pp.
274 et 279). Dans son opinion individuelle surcette affaire, le Juge FITZMAURICE
déclaraitque "la conclusion de I'accordde tutelle s'est faite par intégrationdans une
résolution del'Assembléedes Nations Unies ; et il a étécommunément admisau
cours de toute la présenteaffaire que les seules entités qui fussent officiellement
partiesà cet accord étaient les autorités chargéede l'administration d'une part et
l'organisation des Nations Unies représentée par l'Assembléegénéralede l'autre
(C.I.J., arrêtdu 2 décembre1963, affaire du CamerounSeptentrional, Rec., 1963, p.
113).
3.181 L'acceptation de l'accord de tutelle en tant que traité
international obligatoire entre la puissanceministranteet les Nations Unies apour
conséquenced'engager les deux Parties sur ce qui y est énoncé.La toute première
dispositionfigurant dans les accordsrelatifs aux Cameroun avait traàla délimitation
très claire des territoires concernés. On ne peut imaginer forme plus nette dereconnaissance internationale des frontières des territoires. Comme le note
BROWNLIE, par exemple, dans le contexte de la souveraineté territoriale,
"recognition may take the form of a unilateral expressdeclaration, or may occur in
treaty provisions." (Ian BRONWLIE, Princioles of Public International Law,
Clarendon Press, Oxford, 4èmeed., 1990, p. 160. v. aussi Joe VERHOEVEN,
reconnaissanceinternationaledans lavratiaue contemvoraine, Paris,Pédone1975, pp.
311-336).
3.182 Comme l'a soulignéla Cour, " 'définir'un territoire signifie
définir ses frontières"(C.I.J., arrêt,3 février1994, affaireDifféren Tderritorial
(Jamahiriya Arabe Libyenne/Tchad), Rec., 1994, p. 26), mêmesi "une frontière
établie partraité acquiertainsi une permanenceque le traitélui-mêmene connaît pas
nécessairement"(ibid. p. 37).
3.183 La compétencepour apporter des modifications (y compris
des modifications temtonales)à de tels accords ne pouvait revenir qu'à la puissance
administrantede concert avecàl'Assembléegénérale.
3.184 La nature du régimeinternationalde tutelleet des accords de
tutelle était telleque la définitiontemtonale énoncéedans I'accord de tutelle en
question constituait non seulement une obligation juridique pour la puissance
adrninistrante mais aussi une détermination contraignantepour la communauté
internationale dans son ensemble. L'approbation de I'accord concerné par
l'Assembléegénéraleconformément aux articles79 et 85 de la Charte des Nations
Unies incluait évidemment l'élément fondamental de la définitionterritoriale. La
reconnaissance et I'applicationdes termes de l'accord s'étendait cet élémentlui
aussi nécessaire.En conséquence,les définitionstemtoriales adoptées du tempsdes
mandats ont perduré jusqu'à leurconfirmation par les accords de tutelle et par la
suite. ks accords de tutelle constituaient des actes obligatoires qui non seulement
déterminaientla délimitationtemtonale des territoires afinsdes accords de tutelle
conformément à la Charte des Nations Unies mais constituaient égalemdes traités
relatifs aux frontières lesquels, selon les règles du droit international, ont un effet
dispositif et créent ainsi un régime objectif. Seulun accord entre la puissance
administrante et l'Assembléegénéralepouvait modifier la définition territoriale
approuvée par l'Assembléegénéraleconformément à la Charte des Nations Unies
régissant desterritoires sous tutelle internationaleet les termes des accords de tutelle
eux-mêmes. B. - La pratique au cours de la périodede tutelle
1. Conditions générales
3.185 Il ressort clairementd'une analyse dela pratique au cours de
la période de tutelle que la nature des relations entre la colonie et le protectorat
britanniques du Nigeria et le temtoire sous tutelle du Cameroun britannique avec
lesquels ce dernier étaitadministré faisaitl'objet d'un examen attentif et constant.
Même s'ilscomprenaient les raisons de l'administration conjointedu Cameroun
britannique avec les régions particulièresdu Nigeria, les organes concernés des
Nations Unies évitaient scrupuleusementque cette administration conjointene puisse
affecter et en fait n'affecte le statut du Cameroun britannique en tant que territoire
sous tutelle. Ce temtoire sous tutelle n'est pas devenu partie intégrantedu Nigeria et
aucun procédé détournn é 'a pu modifier son caractère juridique de territoire sous
tutelle ni ne l'a assimiléau statut d'alors ou ultérieurdu Nigeria. Un tel processus
aurait rendu vide le conceptmêmede temtoire soustutelle.
3.186 Le rôle du Conseil de tutelle en particulier était actifet
révélateur. Des questions importantes étaient soulevées et débattues et les
représentants despuissances admiistrantes ont maintes fois fait l'objet de questions
pressantes. Comme le faisait remarquer le représentantde l'Indeen 1955
"le Conseil est en droit d'attendre, il a même ledevoir
d'exiger que toute discussion soit axéesur les principes
de la Charte, sur l'accord de tutelle, sur ses propres
résolutionssur celles de l'Assembléegénérale,sur les
recommandationsdes missions de visite et sur celles des
institutionsspécialisées telles que l'UNESCO et
l'organisation mondiale de la santé"(Documentsofficiels
du Conseil de tutelle, 1955, 568ème réunion, p. 32,
AnnexeM.C. 204).
3.187 Conformément au régime de tutelle, les puissances
administrantes soumettaient des rapports annuels au Conseil de tutelle qui les
examinait de manière approfondie lors de débats oraux et par des questions et
réponses écrites. Dans le premier cas, le scénario invariable consistaiten une
déclaration du représentant spécial de la puissance administrante du territoire
concerné sur laquelle il était interrogésur des points précis relatifs aux
développements politique, économique et socialet un débatplus généras'en suivait.La QuatrièmeCommission de l'Assemblée générad les Nations Unies examinait à
son tour les questions de tutelle comme le faisaàtl'occasion l'Assembléeplénière
elle-même. Quantaux pétitions, ellesétaient communiquéea su Conseil de tutelle et
examinéespardes comitésappropriés,bien qu'il faille noterque le Conseil avaitpour
pratique de prendre en considérationles communicationsrelatives au statut présent ou
futur des territoires sous tutelle lors de l'examen annueldes conditions existantdans
les territoires sous tutelle concernés(Documentsoflicielsdu Conseilde tutelle, 1956,
TIL.671, p.1, Annexe M.C. 206). Un certain nombre de missions de visite des
Nations Unies se rendaient en outre dans les temtoires sous tutelle et faisaient leur
compte rendu.
3.188 Cette pratique abondante atteste d'un examen attentif et
critique.Il n'est ni possible ni nécessaire de procédeà une analyse détailléede
l'intensité etde l'ampleur decet examen nid'en donner de nombreux exemples. Il
suffit de dire ici qu'il étaitétenduet approfondi. Tous lesaspectsde l'exercice par les
puissances admiistrantes de leurs compétencesdans les territoires soustutelle, depuis
les questionsde statut et de souverainetéjusqu'aux questions économiques, socetles
éducatives, étaient examinés avec soiU.ne série d'observations sera fnéanmoins
pour établir queles obligations essentielles des puissancesadmiistrantes selon les
termes des accords de tutelle (qui étaient,évidemment,définissur le plan territorial)
étaient soumisesàun examen constant. 2. La question"constiptionnelle"
a) Cameroun britannique
1 OLes rapports britanniques
3.189 Le Royaume-Uni a chaque annéefait un rapport sur son
administrationdu territoire soustutelledu Cameroun. Cesrapports étaient completset
comprenaient une déclarationquant au statut du temtoire. A titre d'exemple, le
rapport pour 1954préciseque
"the basis of the administration of the temtory in
international constitutional law is the Tmsteeship
Agreement approved by theGeneral Assembly of the
United Nations and dated at New York the 13th
December 1946"(AnnexeM.C. 200).
Certains rapports indiquaientque
"in accordance with Article 5 (a) of the Tmsteeship
Agreement the administration of the Trust Temtory is
integrated with that of the adjoining Temtory of
Nigeria" (ibid. p.11).
Des déclarationssimilaires figurent dansbeaucoup d'autres rapports(celui de 1948,
HMSO, Colonial no 244, p.3, Annexe M.C. 186 ; Rapport de 1955, HMSO,
Colonial no 325, p.18, et dans le rapport de 1958, HMSO, Colonial no 341, p.18,
AnnexeM.C. 209).3.190 La nature des liens institutionnels entre les régions du
Cameroun britannique et les régionsdu Nigeria a changéau cours de la tutelle. Ces
changements ont toujours été décrits dans les rapports.Le rapport de 1948 précise
que
"The territory is divided into four parts. Beginningat the
extreme south there is the Cameroons Province, a self-
contained unit in charge of a Resident with provincial
Headquarters at Buea.. . This area is administered as
though it formed a province of the Eastem Provinces of
Nigeria and is divided into four administrative
divisions..Immediately to the north of the Cameroons
Province is the small Tigon-Ndoro Kent area
admiistered as though it formed part of the Wukari
Division of Benue Province, one of the Northern
Provinces of Nigeria. Continuing north are the areas of
trust territory admiistered as though they formedpart of
the Adamawa (Emirate) Division with headquarters at
Yola, which is in the Protectorate of Nigeria outside
trust temtory; and Dikwa Division with headquartersin
Bama admiistered as though it formed a division of
Bomu Province of the Northem Provincesof Nigeria."
Ce rapport poursuit en déclarant que
"In recognition of the specialposition of the Cameroons
as a trust territory, an administrative reorganisation was
approved during the year, in the fulfilrnent of which a
Commissioner of the Cameroonsis to be appointed. He
will be responsible to the Chief Comrnissionerof the
Eastern Provinces of Nigeria for the administration of
the part of the Trust Temtory included in the Eastern
Provinces. This area, the present Cameroons Province,
is to be divided intotwo provinces, each in charge of a
Resident. The area at present administered as portionsof
Benue, Adamawa and Bomu Provinces of the Northem
Region will be travelled by the Commissioner who will
be well informedon the wholeof the Trust temtory".
3.191 Le rapport de 1955 indiquait qu'en 1949, le commissaire
avait éténomméavec des responsabilitésparticulières quant à l'administration du
Cameroun méridionalet aux affaires de tutelle dans tout le territoire. Du fait de la
constitution de1954, un gouvernement du Cameroun méridionala étéconstituéen
tant qu'entitédistincte de celui de la région orientale du Nigeria, tandis que le
Cameroun septentrionalcontinuaitd'êtreadministré commefaisantpartie de la région
septentrionale du Nigeria. Ces arrangements, qui étaient détaillés dansle
(Constitution)Order in Council du Nigeria de 1954, étaientprésentésde manière
détailléedans le rapport d1954 (op. cit., pp12-15). 2" Les débatsaux Nations Uniesàpropos des rapports
3.192 L'une des questions importantesà laquelle l'admiistration
britannique du Cameroun s'est trouvéeimmanquablementconfrontéeau fil des ans a
concernéla division du Cameroun britannique et son gouvernement respectivement
depuis les régions septentrionaleet orientale du Nigeria. Mais c'étaitune question
débattue ouvertement et en fait acceptéepar le Conseil de tutelle. Il avait, par
exemple, étédemandéen 1949dansune questionécriteau représentantdu Royaume-
Uni au Conseil de tutelle quelles étaient les raisons des divisions territoriales du
Cameroun. La réponseindiquait que
"les divisions territoriales du Cameroun sont établies
pour des raisons de commodité administrative, qui
tiennent elles-mêmes comptedes affuiitésethniques. Les
Kanuri de la régionsoumise à l'autoritéde 1'Emir de
Dikwa sont, par exemple, parents des Kanuri du Bornu
nigérien,et les Fulani du temtoire soustutelle placé sous
la même administrationque laprovince d'Adamawa ont,
depuis l'établissementdu protectorat britannique sur la
Nigériaseptentrionale,étésoumis àl'autoritédu Lamido
d'Adamawa. oui réside à Yola. dans la Nigéria"
(~ocuments'ofJicielsdu conseil dé Tutelle, 1949: pp.
71-72, Tl2471Rev.1).
3.193 En réalité,le Royaume-Unia pris soin d'expliquer devant le
Conseil comment fonctionnait l'administration des deux parties respectives du
territoire sous tutelledu Cameroun britannique. En 1952, par exemple, lors de débats
devant le Conseil de tutelle, le représentantspécialbritannique a indiquédans sa
réponse à une question particulière quele commissairedu Cameroun exerçait sousun
double mandat. Même si ce hauf tonctionnaire relevaitdu gouverneurdu Nigeria pour
toutes les questions concernant l'application de l'accord de tutelle dans toutes les
parties du Cameroun sous tutelle britannique, il était aussi responsable de
l'administration des deux provinces du Cameroun méridional administrécomme
faisant partie de la région orientaledu Nigeria envers le lieutenant-gouverneur de
cette région. Par conséquent, pour ce qui était du Cameroun septentrional, ses
attributions étaient d'une natureassez différentedu fait qu'il n'exerçait aucune
fonction administrative directe. (Documents officielsdu Conseilde tutelle, 1952,
443èmeréunion,Annexe M.C. 199).
3.194 Ces questions ont aussi étésoulevéesdans le cadre des
pétitions auprèdu Conseil. A titre d'exemple, le Kamerun United NationalCongress
a contestéen 1952 les arrangements existant entre le Cameroun britannique et leNigeria. Par sa résolution621 (XI) du 22 juillet 1952, (Documentsoflciels du
Conseil de tutelle, 1952, p. 142-144, Annexe M.C. 199), le Conseil de Tutelle a
répétéses commentairesexprimés dans le rapport du Comitépermanent surles unions
administrativessur le Camerounsous administrationbritannique acceptantles accords
administratifs existants (Documentsoflciels du Conseilde tutelle, 1952, annexes,
doc. Tl1022 et con 1, AnnexeM.C. 199).
3.195 Les changements constitutionnels proposéset mis en
application ont aussi étéétroitement surveilléspar le Conseil de tutelle. Lors de
l'examen des conditions applicablesau Cameroun britanniquede 1954, par exemple,
référencea étéfaite aux nouvelles dispositions constitutionnelles du Nigeria qui
entrainaient d'inévitables répercussions sur le Cameroun. Un représentant a
commentédéfavorablementle fait que mêmesi le Cameroun méridional devait
devenir un territoire fédéralayant ses propres organes législatifet exécutif, le
Cameroun septentrional resterait rattaché au Nigeria septentrional (Documents
oflciels du Conseilde tutelle,954, 490e réunion,p. 53) ;un autre a estimé que le
sud bénéficiaitd'un traitement privilégié(ibid. p. 54)ie rapport du Comitéde
rédaction a cependant préciséque "le Conseil, prenant acte des modifications
envisagéesen ce qui concerne la structure politique du Temtoire sous tutelle, à
l'occasion de la révisionde la Constitution de la Nigériaet du Cameroun, félicite
l'Autoritéadministrante du progrès politique accomplidans le Territoire sous tutelle
au cours de la période considérée.("Documentsoflciels du Conseilde tutelle, 1954,
annexes, p. 26. Il faut remarquer que les commentaires sur les changementsprécis
suggérée sn 1954ont été reportéjssqu'à l'obtention deplus amples renseignements).
Le Royaume-Uni a présenté le5 janvier 1955 au Conseil de tutelle tous les détails
relatifs aux changements constitutionnelsde 1954. Une nouvelleconstitution fédérale
pour le Nigeria et le Cameroun est entréeen vigueur le ler octobre 1954; elle
prévoyait un gouvemement distinct pour le Cameroun méridional avec une
compétencerégionaleau sein de la Fédération du Nigeriat ,andis que le Cameroun
septentrional se voyait garantir une représentation à la Chambre fédéraledes
représentants.Le gouvemementde Sa Majesté conservaitle pouvoir de s'acquitterde
ses responsabilités enversles Nations Unies dans le cadre de l'accord de tutelle
(Documentsoficiels du Conseil de tutelle, 1955, annexes, doc. Tl1147 add. 1,
AnnexeM.C. 204).
3.196 Le Conseil de tutelle s'est dès l'originemontrépréoccupé
par la question des unions administratives et notamment de l'administration duCameroun britannique conjointement avec le Nigeria. Cette pratique des autorités
chargéesde I'admiistration a fait l'objetd'un examen constantet parfois de critiques
de la part des membres du Conseilpratiquement pendanttoute la périodede tutelle.11
est pourtant absolument manifeste que nila puissance admiistrante ni aucun autre
membre du Conseil ni en fait des Nations Unies n'ont considéré quede telles
modalitésd'administration conjointe modifiaient le statut du temtoire sous tutelle ou
constituaient un motif de son intégration dansle Nigeria. Cela est constamment
demeuréun arrangement de commoditédicté pardes considérationséconomiqueset
géographiques.
3.197 Le Conseil de tutelle a adoptéla résolution81 (IV) le 27
janvier 1949 par laquelle il établissaitun Comitépour les unions administratives
composéde six membres du Conseil afin d'assister le Conseil dans les "questions
relatives aux unions ou fédérationsdouanières, fiscales ou administratives et aux
services communs concernantles temtoires sous tutelle". Le Comitédevaitétablirles
grandes lignes des différentsaspects du problème "enportant particulièrement son
attention sur les élémentde fait quipermettraient au Conseild'appréciersi les unions
déjàconstituées OU envisagéessont compatibles avec les dispositionsde la Charte et
les termes des Accordsde tutelle" (AnnexeM.C. 187). Dans sa résolution109(V) du
18juillet 1949, le Conseil indiquaitque
"l'Assembléegénérale a approuvé les Accords de tutelle
sur l'assurance donnéepar les puissances chargéesde
l'administration qu'elles ne considèrent pas les termes
des articles pertinents des Accords de tutelle comme
"autorisant les Autorités chargéesde l'administrationà
établir une forme quelconque d'association politique
entre les Temtoires sous tutelle qu'elles administrent
respectivement, d'une part, et les territoires avoisinants,
d'autre part, qui entraînerait l'annexion desTerritoires
soustutelle sous quelqueforme que ce soit ou qui aurait
pour effet d'effacer leur statut de Temtoire sous tutelle"
et décidait de poursuivre l'examen de la question
(Annexe M.C. 188, v. aussi les résolutions129 (VI),
420 (X) et 645 (XII) du Conseil de tutelle).
3.198 La question de l'union administrative avec le Nigeria a aussi
été évoquée dans des pétitions.En réponse,le Conseil a adoptéla résolution168(VI)
le 3 avril 1950dans laquelle il décidait d'informerles pétitionnairesde la poursuite de
l'étudede la question dans le cadre de l'examendes rapports annuelssur le Cameroun
britannique et à propos de la question générale des unions administratives. ans le
contexte de cette dernière, la résolution326 (IV) du 15 novembre 1949 (AnnexeM.C. 189) adoptéepar l'Assemblée généraa vait demandé auConseild'achever son
enquête surles unions administratives touchantdes territoires sous tutelle. Notamment
à propos du Cameroun sous administrationbritannique, il a été notéque le paragraphe
1 (d) de la résolution326 (IV) de l'Assembléegénérale,qui se référait au caractère
souhaitable de l'établissement danschaque temtoire sous tutelle d'un organe
délibérant distinctayant son siègedans le territoire et de la suppression de tout type
d'action législativeémanantde tout autreorgane délibérans tiégeantdansun temtoire
non autonome, était "inapplicable".Le Conseil précisait qu'il"feelsthat the existing
arrangements are not disadvantageous to the Territory, but that they deserve
neverthelessthe constant attentionof the Council."
3.199 Il a éténotéen 1949, lors de la premièreannéed'examen
par le Conseil des rapports émanantdes temtoires du Cameroun, que mêmesi une
telle union administrative entre un territoire sous tutelle et un temtoire limitrophe
pouvait être établiei,l était primordialque les objectifs fondamentaux de la Charte
des Nations Unies et notamment l'article 76 de celle-ci ne soient pas transgresséset
que les autorités chargéesde l'administrationn'exercentpas leur droit d'établissement
d'une telle union d'une manièrepouvant êtrepréjudiciable à l'intégritépolitique du
territoire sous tutelle. Il a indiquédansun documentpréparé par le Secrétariat que
"les représentants des Autorités chargéesde l'administration affirment que ces
conditions sont remplieset que l'on devrait accepter les assurancesqu'ils ontdonnées
à maintes reprises à cet égard"(Tl231, 1949, para. I(2)). Le représentant britannique
avait en fait insistésur ce point en annonçant que les arrangements existants étaient
alors en vigueur depuis quelquesvingt ans et que "si le Conseil ale droit d'étudierles
rapports qui existent entre le Camerounet la Nigéna.. .et de s'assurerque les clauses
de l'alinéa a)de l'article 5 sont observées,cette questionn'a rienà voir avec celledes
unions administratives" (Documents officielsdu Conseilde tutelle, 1949, p. 398). En
effet, lors d'une session ultérieure du Conseil, le représentant britanniqueavait
clairement indiqué que
"the Administering Authority had repeatedly stated that
it would preserve the Trust Temtory of the Cameroons
~ ~a --=;~~teen--~-~in accordance with the terms of the
Trusteeship ~~reekent" (Documentsonciels du Conseil
de Tutelle, 1950,p.333).
3.200 Il ressort nettementde tout cela quebien que l'administration
du Cameroun britannique fût exercéedepuis le Nigeria, le Royaume-Uniétait tout à
fait conscient du statut séparédes deux temtoires. Par exemple, lors de l'examendesrapports britanniques de 1949 et 1950 par le Conseil de tutelle en 1951, le général
GIBBONS (représentantspécial pourle Cameroun sous administration britannique)
avait insisté sur le faitque lesrecettes excédentdu temtoire pour lesannées 1949
et 1950 n'iraient pas au Nigeria en remboursementdes précédentes subventions mais
seraient verséesà un fonds spécialde développementdu Cameroun pour financer
l'équipementet compléterles dépensescourantes du temtoire par les deux régions
nigérianes concernéesafin que le taux relatif d'expansion dans les moitiés
septentrionaleet méridionaledu temtoire puisse êtrerégulde manièreà ce que l'on
puisse en conclureque
"lestatut distinct duTemtoire soustutelle est pleinement
reconnu et respecté par l'Autorité chargée de
l'administration".
11était aussiprécisé que
"S'il est vrai que l'Autoritéchargéede I'admiistration
envisage d'assurer l'évolution progressive des
autochtonesdu Temtoire vers la capacità s'administrer
eux-mêmesen collaboration avec leurs voisins de la
Nigéria,cette mesure [l'entréeen vigueur dela nouvelle
constitution nigériane de 19501 n'entraîne aucune
modification du statut du Territoire sous tutelle.
L'Autoritéchargéede l'administration entend continuer
à reconnaître effectivement ce statut" (Documents
ofJiciels du Conseil de tutelle, 1951, pp. 132-133,
Annexe M.C. 198).
Dans son rapport, le Conseil faisait allusion à l'établissement de la nouvelle
constitutionet notait qu'elleconstituait
"un progrès fondamentalet prend acte du fait qu'elle
contient des dispositions qui assurent expressémentla
représentation du Territoire sous tutelleà l'Eastern
Council of Ministers,à la Northem House of Chiefs, à
la Chambre centrale des représentantset au Central
Council of Ministerset qu'il serapossibàla population
d'êtrereprésentéeà la Northem House of Assembly. 11
exprime l'espoir que l'Autorité chargée de
l'administration n'épargneaucun effort pour expliquer
aux habitants l'importance des élections auxquellesils
pourront prendre part et la procéduàesuivreà cet effet
et qu'elle prendra des précautions spécialespour
s'assurer que les intérêsu Nigeria ne l'emportent pas
sur ceux du Temtoire sous tutelle." (Annexe M.C. 198,
p.41)3.201 En d'autres termes, le Conseil acceptaitune nouvellefois la
poursuite du processus d'administrationdu temtoire sous tutelle en tant que partie du
Nigeria tout en reconnaissant que les autorités faisaientla distinction entre les deux
temtoires dans les nouvelles dispositions constitutionnelles pour le Nigeria
comprenant le Cameroun et en soulignant la nécessité de maintenir unetelle
distinction.
3.202 Cene question a aussi été posée en 1952 devant le Comité
permanent pour les unions administratives. Il a étépris note du commentaire du
Conseil énoncé plus haut et le rapport du Comité permanent établissale nombre des
membres des conseils mentionnés. La conclusion étaitla suivant:
"Considérant que les instructions royales du 27
novembre 1951 adressées au Gouverneurde la Nigéria
stipulent notamment que le Gouverneur refusera
d'approuver tout projet de loi dont les dispositions lui
paraîtront incompatibles avec les obligations qui
incombent à Sa Majesté britanniqueen vertu d'un traité
ou d'un autre accord international,y compris l'Accord
de tutelle, le Comité permanent est d'avis que cette
partiedesditesinstructions protègecomme ilconvientles
intérêtdses habitants du Temtoire sous tutelle en ce qui
concerne la nouvelle Constitution.Toutefois, le Comité
permanent estime qu'en raison dustatut particulier du
Temtoire sous tutelle en matièrede droit international,
le Conseil de tutelle doit exercer une surveillance
constante sur l'application pratique des nouvelles
dispositions (Documents oficiels du Conseil de tutelle,
1952, Annexes,p. 12, AnnexeM.C. 199).
3.203 La question a aussiété traitéepar les différentes missionsde
visite des Nations Unies qui ont examiné lasituation. La mission de visite dans les
temtoires sous tutelle d'Afrique occidentalede 1950rendait compte des dispositions
administratives pour les deux parties du Cameroun britannique et présentait une
analyse complète desavantages pratiqueset des inconvénients dece système(Tl798,
p. 12-18, Annexe M.C. 196). Elle concluaitque, tout en laissantau Conseil de tutelle
le soin d'évaluer leprincipe d'une telle associationadmiistrative, "elle pense que la
différenceaccuséequi existeentre le nord et le sud, avec les contrastes que présentent
ces deux régionsdu point de vue de la civilisation, de la religion, de la race, de la
langue et du genre de vie en général, nerenforce pas la thèseselon laquelle ces
régions devraient êtreentièrement séparées q,uantà leur administration, desdistricts
auxquels elles sont actuellement intégrées"(ibid. p.20). Les nouvelles dispositions
constitutionnelles introduites en 1951 ont étémentionnéesdans le rapport de lamission de visite des Nations Unies dans les territoires sous tutelle d'Afrique
occidentalede 1952 (T11109,pp. 6-7), et les dispositionsprises à la suite de la
constitutionde 1954 ont figuré dansle rapport de la mission de visite des Nations
Uniesde 1955(T11239,pp. 10-12). La mission de visitedes NationsUnies de1958a
examinéde manière assez détaillée les "particularitésdu territoire" en indiquant
l'évolutionconstitutionnelledu Nigeriaet les répercussioque celle-ci avaiteuessur
les deux parties du Camerouncomme basede ses recommandationspour l'avenirdu
territoire" (Tl1440, pp. 5-7 et 12-16).
b) Le Camerounfrançais
3.204 Les questions concernantle Cameroun français sur le plan
constitutionnel étaient légèrementdifférentes, encore queles développement
politiques, sociauxet économiques aienstuscitéle mêmevif intérêt. En 1949, lors
d'un débatsur le rapportannuelconcernantle Camerounfrançais, de trèsnombreuses
questionsfurentposéesau représentant de la puissanceadministrante quantàla nature
de l'Union française et aux répercussionsde l'intégrationdu Cameroun dans ce
régimesur la nature de la souverainetésur le temtoire sous tutelle (T1277,Annexe
M.C. 192). Ce thèmes'estpoursuivi lorsdes annéessuivantes. La missionde visite
des Nations Unies dans les temtoires sous tutelle d'Afrique occidentale de 1950
mentionnaitla situation mais s'estimaitdans l'incapacitéde faire des commentaires
pour ce qui étaitdes questionsconstitutionnelles fondamentales(T1798,pp. 50-51,
Annexe M.C. 196). La mission de visite de 1952 adoptait la mêmeattitude, ne
s'estimant "pasen mesure de dire sur cette questionplus que les observationsdéjà
formuléespar le Conseil de tutelle" (qui lui-mêmese "considéraitincompétent pour
porter un jugement sur les principes de droit constitutionnelsur lesquels pourraient
reposer les accords intervenus entre le Cameroun et l'Union française"), et se
contentait donc "d'attirer l'attention du Conseil et de son Comitépermanent des
Unions administratives surles commentaires formulés par certains éléments de la
population intéressésur la question." (Tl1110,p.12).
3.205 En 1951, le Conseil a fait allusàola question enindiquant
que même si "the association of the Territory with the French Union
is not without its benefits, nevertheless, [it] considers
that the Administering Authority should preserve the
separate status of the Territory with a view to the
achievement of the objectives of the International
Trusteeship System". (Documentsofficielsdu Conseilde
tutelle, 1951, Annexes,p. 42, AnnexeM.C. 198).
En d'autres termes, le Conseil acceptaitla validitéde l'association tout en mettanten
garde les autoritésfrançaises contre la disparition du caractère distinctifdu statut de
tutelle.ks représentants françaisont, en fait, pris soin de maintenir le statut distinct
du territoire sous tutelle.WATIERa, par exemple, notéen 1952que
"ilest exact que le statut des Camerounaisest déterminé
par l'Accord de tutelle, qui représente leur charte
constitutive" (Documentsoffàcielsdu Conseilde tutelle,
1952, 447e réunion,p. 8, AnnexeM.C. 198).
Les critiques ont cependant perduré.En 1954, le délégué de l'Inde a soulignéle
contraste entre le régime selonlequel le Cameroun méridional britannique devait
rester séparé avecla situation du Cameroun français où "le Cameroun sous
administrationfrançaise est devenupartie intégrantede l'Union française en vertu de
la constitution de 1946. Le Gouvernement français a donc modifiéle statut du
Territoire sous tutelle dont il a fait un Temtoire associé, alors quel'Accord de tutelle
ne lui en donnait aucunement le droit" (Documentsofficielsdu Conseil de tutelle,
1954, 494e réunion,p. 99, Annexe M.C. 200). Le représentantfrançais a répondu à
ceci et à d'autres commentaires similaires, en expliquant que les dispositions de la
constitution française concernant les territoires d'outremer s'appliquaient aux
territoires sous tutelle uniquementdans la mesure où elles n'étaientpas incompatibles
avec la Charte et les accords de tutelle (ibid., 496e réunion,p. 113). Le rapport du
Comité de rédaction indiquait en 1954 dansle contexte des relations entre le
Cameroun français et l'Union française, qu'il "exprime sa conviction que ces
relations continueront d'êtreconformes aux termes de l'Accord de tutelle et aux
dispositionsde la Charte" (Documents officielsdu Conseilde tutelle, 1954, Annexes,
p. 29). Le représentant françaisa, en fait, déclaré pla suite "some of the representatives on the Council had
expressed concern because the French Constitution
made no mention of the status of the Trust Temtories
within the French Union. Ashe understood it, theeffect
of that silence was that the Trust Temtories were not
bound by the Constitution but were govemed by the
relevant texts, ie. by the United NationsCharter and the
Trusteeship Agreement which were sufficiently clear to
need no amplification" (Tnrsreeship Council offcial
Records, 1956,p.327, AnnexeM.C. 206).
3.206 Le systèmefrançais a changéen 1956àla suite de l'adoption
de la loi-cadre du 23 juin 1956 visant à réformerles institutionscamerounaises dans
le cadre de l'accord de tutelle et des électionsau suffrage directont euàlla fin de
cette annéeen vue d'établirune forme d'autonomie(Documents officielsdu Conseil
de tutelle, 1957, p. 63). Celle-ci futcomplétéear le décret57-501 du 16 avril 1957
précisantle statut du Cameroun (ibid. Annexes, pp. 43-49, doc. T11314).
3. La question des frontières
3.207 La question des frontières préoccupaitparticulièrement le
Conseil de tutelle dans des cas comme le Cameroun britanniqueoù était établie une
union administrative. La résolution(293 VII) du Conseil de tutelle du17juillet 1950
est particulièrement importanteet prévoyaitau paragraphe 7 (c) que parmi les
mesures de sauvegarde jugées nécessaires concernan es territoires sous tutelle en
général et expressément portées à l'attention des autorités chargées de
l'administration, il convenaiten particulierque
"les autoritéschargéesde l'administrationpoursuivent le
maintien des frontières,du statut distinct et de l'identité
des temtoires sous nitelle participant à des unions
administratives".
Dans son rapport sur le Cameroun britannique de 1952, le Comitépermanent des
unions administrativesprécisait que
"En ce qui concerne l'alinéa7,c de la résolution293
(VII) du Conseil de tutelle relatif au maintien des
limites, du statut individuel et de la personnalité
distincte, le Comité permanent constate qu'il n'existe
aucun renseignement permettant de conclure que les
limites du Territoire sous tutelle n'ont pas été
maintenues" (Documents oflciels du Conseil de tutelle,
1952, Annexes, p. 11, doc. Tl1022 et corr. 1, Annexe
M.C. 199). a) Lesfrontièresenm les Camerounbritanniqueet français
3.208 Il serait totalement erroné deprésumerque la définition
territoriale destemtoires soustutelle éune questionignoréeou minimisée.En fait,
dès la première session de travail, l'attention de la Quatrième Commission de
l'Assembléegénérale (compétenteen matièrede tutelle)a étéattiréesurla question
des frontières.L'article ler de l'Accord deTutellede 1946(telqu'il afdement été
approuvé) prévoyaiq tue la frontièreentre les temtoires sous tutelle des Cameroun
britannique et français telle qu'elle avait étédéfiniedans la Déclarationfranco-
britanniquedu 10juillet 1919et préciséedans la déclarationfaite par le gouverneur
de la colonieet du protectoratdu Nigeriaet du gouverneurdu Camerounsous mandat
français, confiée par 1'Echangede notes entre les gouvernements britanniqueet
françaisdu 9janvier 1931,
"peut cependantétrelégèremenm t odifiéed'un commun
accord par le gouvernement de Sa Majesté pourle
Royaume-Uni et le Gouvernement de la République
française si l'examen des lieux montre qu'une telle
modificationest souhaitabledans l'intérdtes habitants"
(AnnexeM.C. 157).
3.209 En réponse à l'inquiétude exprimée, par exemple, pl aer
représentant soviétique quanutx termesde I'articleler, le représent ritannique a
clairement indiqué quedes changementsimportants étaient exclus palr'énoncéde la
disposition et que "toute modificationde frontière, effectuéedans l'intérêt des
habitants, sera évidemment portéeà l'attentiondu Conseilde tutelle"(GAOR, 4e
Comité, 1946, Partie1, p. 109). Le délégué français précisait que "pour mettees
choses au clair, il suffit de lire l'article premierdu mandatet l'article2 de l'accord
du 10 juillet 1919 passé entre les gouvernementsfrançais et britannique, qui
permettent de procéderàde légères modificationdse frontièrede manièràéviterque
des villages frontalierssoient sépase leurs champs"(ibid.).Le délégué soviétique
s'est déclaré satisfait l'explication françaiseet le Comité aadoptéle texte de
I'article ler "avec la réserve quela déclaration française la nature des légères
modifications de frontièrementionnéesàl'articlepremier du projet d'accord pourle
Cameroun sous mandat britannique, figurera en substance dans le rapport du
Rapporteur" (ibid., pp. 110).
3.210 En d'autres termes, il étaitclairementétablique seulesde
légères modificationsouvaientêtreapportées à la frontièreacceptée etdéfinie entre
les Cameroun français et britanniqueet que de telles modifications paressence nepouvaientêtreapportéesque dansle but de réunirdes villageset des champs. Toute
autremodificationdevraitêtresoumiseau Conseilde tutelle lui-même. 11ressort donc
que la question temtoriale faisait, dès le début,l'objet d'un examen international
attentif.
3.211 La question desfrontièresdes temtoires sous tutelle a été
traitéedans les rapports despuissancesadministrantes.Atitred'exemple,le rapport
britannique de 1948 décrivaitde manière détaillélee temtoire du Cameroun sous
administrationbritannique.11précisait que
"the Temtory of the Cameroonsunder United Kingdom
Trusteeship liesbetween 4" and 12'30' north latitude
and between 8'30' and 14'50' east longitude(op. cit.,
p. 1, AnnexeM.C. 186).
Le rapportpour l'année1949déclaraitplusparticulièrementque
"Theboundarybetween theFrench and United Kigdom
Trusteeship temtories throughout the Cameroons is
based on the line-described in the MILNER/SIMON
declaration of 1919 and shownon the map published
with it (MOISEL, scale 1:300.000). In the northem
areas, particularly, the MILNER-SIMONline for the
most part followedthe indicationsof streamsand in the
hi11country, watersheds, appearing on that map: the
latter, however,as since proved highly conjectural in
regard to themountain and river systems of the less
accessible regions, and in consequence, there are
sectionsinwhichneither the mappedline nor its verbal
descriptionallieswiththe actualterrain. In the early years of the French and British mandatory
administrations, anumber of minor adjustmentsof the
frontier were found necessary and were effected. The
procedure adoptedwasfor the localofficersof the work
out jointly a provisionalfrontieronthe doubtfulSections,
recording their agreements in procès-verbaux for the
ratification of their respective Governments.eir task
wasnot easy. Althougbthe onlyadjuments withintheir
purview were those required for fucing recognizable
boundaries where the MENER-SIMON line could not
be located and for avoidiig the severance of integral
villagesor hamiets, some of which had not existed or
where unlmown when themap was in compilation.By
1930 the word had beencanied so far that the two
Governorswere ableto agreeupona Protocoldescribing
alrnostthe wholeportionsthus provisionallydefinedand
embodyingthe procès-verbaux which hadbeenapproved
in the precediig period. Thisrotocol was ratified in a
'preliminary study' by the British and French
Governmentsin 1931andformedthe secondarybasis for
a final delimitation by the joint French and British
boundary commission whichbegan work in December
1937.
The commission continued the delimitation of the
frontier until22nd April 1938, when the wet season
brought its activitiesto a temporaxystop. It reassembled
on 23rd November 1938and continued thedelimitation
of the frontier until May when its activities were
intermptedby the invalidhg and subsequentdeathof the
Head of the French Commission,Mr. RenéDUGAST,
Administrateuren Chef.By the endof the second season
the section of the frontier delimited and covered by
procès-verbaux had reached from the Coast to the
vicinity of Mount Manenguba in Kumba Division, a
distance of some 135 miles. The outbreak of war
preventedthe reassemblyof the commission in the 1939-
40 dry season." (Rapport pour l'année1949, HMSO
1950,p.12,AnnexeM.C. 196).
3.212 Desrapports ultérieurrésumaient ceetxposéen ajoutant que
"les frontières internationadu temtoire sont marquéesau dos de la carte (Rapport
de 1950, op. cit. p. 18). Les cartes concernéesindiquentclairementla péninsulede
Bakassi dans le temtoire du Camerounbritannique.(AnnexeM.C. 383). En fait, si
l'on examine les cartes reproduites dans tousles rapports britanniques,on constate
que Bakassise trouve immanquablementdans le Cameroun britannique.Ceci ne fait
absolument aucundoute (se reporter, par exemple, aux cartesdu Cameroun sous
tutelle du Royaume-Unien date de 1954, 1956, 1958 et 1959avec des corrections
mineures en 1960, Annexe M.C. 383). Il en va de mêmeaussi des cartes figurant
dans les rapports duministère desColoniesà proposdu Nigeria.Les cartes de 1949,1952 et 1955, par exemple, indiquantles frontièresdu Nigeria et du Cameroun
britannique, placent nettementla péninsulede Bakassidans ce dernier (voir Annexe
383). Cela démontreque les Britanniquesqui exerçaientl'autoritédes deux côtésde
la ligne, d'un côtéen tant que puissance de tutelle, de l'autre comme puissance
coloniale, étaient bienconscients de l'endroit où se situait exactement la ligne
frontière.
3.213 La nature artificielledes frontièresdes deux temtoires sous
tutelle attirait l'attesurcelles-ciLe rapportde la missionde visite des Nations
Unies dans les temtoires sous tutelle d'Afrique occidentalede 1950 précisaitque
l'éveilde la prise de conscience politique etl'existencede contrôlesdouaniers et des
changesentre lesdeux temtoires qui avaienà un certainmomentété sousune seule
administration donnaientlieu un "problèmede frontièrenet à certaines suggestions
d'unification (Tl798, pp. 18-20, et 55-67).Dans sa réponse à ce rapport, le
Royaume-Uni a fait observerque
"the question of the boundary betweenthe temtones
under British and French Trusteeshipis so far as the
United Kingdom is concemed govemedby article 1 of
the Trusteeship Agreementfor the British Cameroons.
This articlellows minor modificationof the boundary
by mutual agreement between theGovernments of
France andtheUnited Kingdom(ibid. p.115).
3.214 Cette formulation a étélargement reprise, notamment en
1950en réponse à une question surla possibilitéde l'unification des deuxtemtoires
du Cameroun,lorsquele représentant spécial du Royaume-U andiéclaré que
"The AdrninisteringAuthority observecithat, so far as
the United Kingdomwas concemed, the questionof the
boundary between the Cameroons under British
administration and the Cameroons under French
administration was govemed by article 1 of the
Trusteeship Agreement for the Temtory of the
Carneroonsunder Britishadministration,whichprovided
for minor boundary adjustmentsby mutual agreement
between the Govemements of France and the United
Kingdom." (Documentsojïciels du Conseilde tutelle,
1950,p. 337).
3.215 La mission de visite des Nations Unies de 1955 a aussi
évoqué la questionfrontalièrens son rapportmais en précisantqu'il ne semblaity
avoir aucun problème particulier(Tl1239, p. 16, Annexe M.C. 205). Le problème
futànouveausoumis à I'attention des organes NationsUniesàplusieursreprises.Par exemplelors de l'examendes conditions existant auCameroun françaisen 1954,
le représentantfrançais a relevéque "la frontière entreles deux zones confiées
respectivement àl'administrationde laFranc eede la Grande-Bretagnea été établie
par une commissionde délimitationqui s'est efforcée de se fonder surdes critères
géographiques,en tenant comptenéanmoins,lorsquecela lui paraissaitlégitime,des
frontières ethniques"(Documentsoficiels du Conseilde tutelle, 1954,496e réunion,
p. 117).
b) La frontièreentre leCameroun méridionaelt le Nigeria
3.216 La frontièreentre leCamerounméridional et le Nigeria aété
particulièrement évoqué au cours des débats surle développement économiquedu
territoire. 11fut par exemple constque
"since a small part of the revenue was denved from
custornsdues paid at ports outsidethe Trust Temtory in
respect of goods which had crossed the boundary
betweenthe TrustTemtory andNigeriaproper"
tandis que
"the Administrationwas giving senous consideration to
whether it should restrict immigration into Trust
Temtory from other parts of West Africa, and in
panicular from Nigeria." (ibid.p. 366).
Ceci constitue une reconnaissance évidentede l'existenced'une frontière entrele
temtoire sous tutelle administré parles Britanniqueset la colonie britanniquedu
Nigeriaen dépitdu contrôleadministratifdu premier exercé depuisa seconde.
c) La frontièreentreles Camerounseptentrionalet méridional
3.217 La frontière interne entre les Cameroun septentrionalet
méridionalest néede la nécessité d'assurer la bonne administrationdu Cameroun
britanniquede la manièrela plus efficacepossiblecomme "une partie intégrantedu
Nigeria (v. infra chapitre 4, section3). La frontière entreles deux moitiésdu
temtoire soustutelle aété établiearune législationbritannique inteet figuraitsur
les cartes soumisesà la Société des ationset aux NationsUnies dans le cadre des
rapportsbritanniquessur le temtoire.3.218 Le fait qu'historiquement une seule proposition de
modificationde la frontièresemble avoirété fait, ontre quecette frontière (qui,
bienentendu, est devenueune partie de la frontière entrele Nigeria et le Cameroun)
était acceptée. ans une lettre en date du 12 février 1958 adresséeà Sir John
MACPHERSONdu ministère desColonies, M. C.G. EASTWOOD(lui aussi du
ministèredes Colonies)indiquait, alorsqu'il se trouvaitau bureau duGouverneurde
la Région occidentalà Ibadan au Nigeria, que lministresdu Cameroun méridional
avaient évoquéavec lui la possibilité devoir le Camerounméridionalabsorber une
petite partie du tenitoire adminiàtpartir de la provincede la Benopeupléepar
les Mbembe. Il était préciéue lesministrespouvaient,s'ils le souhaitaient, aborder
cette questionavec lamissionde visite (AnnexeM.C. 208).
3.219 Dans son rapport sur le Cameroun sous administrationdu
Royaume-Uni,la missionde visitedes Nations Uniesdans les temtoires sous tutelle
d'Afrique occidentale de 1958 a en fait examinéla situation dans les régions
frontalièresentreles Camerounseptentrionalet méridional. El'a faidans le cadre
de réclamations relativeà deux zones particulières.La première était celledes
districts de Tigon-Ndoro-Kentuadministrésavec la province de la Benouéde la
région septentrionalet la seconde étaitle plateau de Mambiila admiistré comme
faisantpartie de la sectiond'Adamaouaméridionale dutemtoire. Pour ce qui est de
la première zone,il était indiqué qu'elle ava itté transférdee la province du
Cameroundans le sud, à la divisionde Gashakadansla provinced'Adamaouadans le
nord en 1926 après quele résidentpar intérimde la première province eutsoutenu
que le changementétaitsouhaitable étantdonnéque la zone ne pouvait plusêtre
administréede manière satisfaisantà partir de Bamendaet en raison des affinités
tribales qui étaientplus marquéesavec le nord qu'avec le sud. La zone a été
transféréede la province d'Adamaouaà celle de la Benoué,elle aussi situéedans le
Cameroun septentrional. en 1937.Pour ce quiest de Mambilla, les membres de la
missionont reçu une requêtede vingt villages demandantle retrait de ces villages du
Cameroun septentrional et leur rattachement au Cameroun méridional(T11440,
Annexe1, p. 51). La mission concluait que ces questions devaiftire l'objetd'un
examen plus approfondi(ibid.. pp. 6 et 29). Il ressort de ceci que la réde la
frontièreexistanteentre lesdeuxparties dutemtoire soustutelieétait accep, ême
s'il était suggééuede légères modifications auraint êtieenvisagées.
3.220 Laquestion aétéabordéelors d'une réunionau ministèredes
Colonies britanniquele 17février1959entre Sir John MACPHERSON,des hautsfonctionnaires du ministére des Colonies, le ministre chargédes Affaires du
Camerounseptentrional,le secrétairepermanentauprèsdu ministreet du commissaire
aux affaires du Cameroun. Sir John MACPHERSON demanda aux visiteurs
d'analyserla recommandationde la missionvisantà étudierle désirmanifestépar la
population locale de transférerl'administrationde parties des districts de Tigoron,
Ndoro et Kentu au Cameroun méridional.M. Abdulahi DAN BURAM JADA,
ministrechargé des Affairesdu Camerounseptentrional,fit remarquer qu'iln'y avait
aucunepreuve d'untel désir,tandis quele Commissaire auxaffairesdu Cameroun,à
qui incombaitla charge globale de l'administrationdu Camerounméridionalet des
affaires de tutelle du Cameroun egénéral ,oulignait le fait qu'aucunedemande
n'avait étfaite par le gouvernementdu Cameroun méridionapourune quelconque
partie de cette zone et que M. FONCHA(dirigeant duKamerunNationalDemocratic
Party et Premier Ministredu Cameroun méridionl partir de février1959)et le Dr.
ENDELEY (dirigeantde la coalition d'oppositiondu KamerunNationalCongresset
du Kamerun People's Party) convenaient tous deux qu' "aucune modification de
frontière ne doit être apportevant le plébiscitedans le Cameroun méridional"
(AnnexeM.C. 208).
3.221 La question a étéprésentéepeu après à la Quatrième
Commission. Le déléguéchinoisa demandél'avis deMM. FONCHAet ENDELEY
et celui de Malam ABDULAHI (ministre chargédes Affaires du Cameroun
septentrionalau gouvernementde la régionseptentrionaledu Nigeria)à propos de la
suggestion,faitdansle rapportde la missionde visitedes NationsUnies, quantàun
réaménagement éventue dle la frontière (GAOR, 13e session, 4e comité, 848e
réunion,p. 564). L. FONCHA (alorsmembre de la délégation du Royaume-Uni
auprèsde la Quatrième Commission) réponduen disantque
"thawas a matter to be takenup after the plebiscitefor
at thepresent stage it might confusethe people of the
areasconcerned"(ibid.. 849eréunion,p568).
Le ministreMalamABDUWII (membre luiaussi dela délégatiod nu Royaume-Uni)
indiquaitque "Up to the tirne of the arriva1 of the Mission, the
Regional Goverurnent had never received any
communicationon the matterand no onefrom its sideof
the border had expressed such a wish for it. The
communicationsin questionhad beensentto the Mission
when it had ken in the Southem Cameroons. The
communications concerning the Mambiia District had
come from threevillage chiefswho lived veryclose to
the Southem Cameroons boundary. They could not be
considered to speak for the people of Mambila as a
whole. The claimto Tigon, Ndoro and Kentu Districts
had ken made verbaiiy to the Mission and related to
only a small portion of the Tigon District closeto the
Southem Camerwns boundary, which wasinhabitedby
Mbembes,and not to the wholeof the three districtsof
BenueProvince thatlay withinthe TrustTemtory.
"Moreover,at the meetingof the ConsulativeCornmittee
for the Notthem Cameroonswith the Visiting Mission,
the representative of the Mambila tribe had told the
Mission that the people of the area wished to remain
with the Northem Region.. .Accordingly,the Northem
RegionalGoverment had nogood reasonto believe that
those claims reflectedthe wishesof the majority of the
facie case for a change in the existing boundaries.a
Moreover itwould bewrongto try to ascertainthe views
of those peoplesbefore the futurepolitical status of the
Southem Cameroonshad been determined, because the
inhabitantsof the districts concemedshould laiow fust
how mattersstoodin the South"(ibid. 850eréunion, pp.
571-577).
3.222 Dans sa déclaration à la Quatrième Commission le 5
décembre1959 analysant lesrésultatsdu plébiscitedans le Cameroun septentrional,
Sir Andrew COHEN précisaitque la populationde la régionde Tigon, Ndoro et
Kentuavaitémisun vote presque unanime en faveurdu statuquo et que
"in this are... nght in the south of the Northem
Cameroonsthe people have their own Native Authority
whichtheyare entirely satisfie."1 3.223 Aucuneautremesuren'a donc étéprise aprèsquela question
eut étélonguementdébattue.Aucunesuggestionde nouvelexamende modificationde
frontièren'a étfaite et l'affaire estrestée enlEntd'autrestermes, la frontière
existantentre les Camerounseptentrionalet méridionétéréaffumée.
5 3. La fi destutelles
A. -
La positiondesNations Unies
1. Généralités
3.224 Bien que la Charte des Nations Unies elle-mêmene
comporteaucune dispositionspéciale concernanlta tenninaisondes accordsde tutelle
(et il convientégalementde noterqu'aucun des accode tutellequiont succédaux
accords de mandat ne comportait de dispositions spécifiquesrelatives à sa
terminaison), on peut déduiredes dispositionsde la Charte et des accordsde tutelle
eux-mêmes qu'on ne pouvait aboutià leurterminaison quepar une action commune.
L'article 79 dispose que toute modificationou amendementdes conditions de la
tutelledevait êtacceptéd'uncommunaccordpar lesEtatsdirectementconcernése ,t
approuvépar l'Assemblée généralen vernide l'artic85,et il ne peut être question
qu'unemodificationaussi fondamentaleet capitale des dispositionsdes accorla que
terminaison d'une tutellepuisse êtreobtenue par la seule action de l'autorité
administranteagissant unilatéralemi.eJugeWellington KOO fit remarqueàjuste
titre dans une opinion individuelle, que puisque l'Assemblée générala e, ec
l'assistancedu Conseil de Tutelle exerçaitles fonctionsde surveillancedes Nations
Unies à l'égard deterritoires soustutelle, et que puisqueces fonctionscomportaient
l'approbation desdispositions des accordsde tutelle ainsique de leurmodificationou
amendement, "il vasans due qu'ellesenglobentaussi la fonctionconsisàamettre
fin aux accords avec le concours des autoritésadministrantesintéress(C.I.J.,
affaire dCamerounseptentrional,Rec. 1963,p.57).
3.225 Il peut, évidemmentêtresoutenu que le fondement de la
validitéde la dénonciation des accose tutelle peut recherchédansun principegénéral. Le Juge READ a énoncé dans son opinion individuellejointe à l'avis dela
Cour du 11 juillet 1950 que, "toute situation juridique, ou systèmede rapports
juridiques, peutprendrefin par le consentementde toutes les personnesdont lesdroits
et intérêtjuridiques peuvent être affectéspar cette fin" (C.I.J., affaire du Statut
internationaldu Sud-OuestAfricain,Rec., 1950,p.167), et il ne fait pas de douteque
les parties ayantdes intérêts juridiqudéterminantsdans les territoires sous tutelle
sont les autoritésadministrantesd'une part et lesNations Unies agissantpar le biais
de l'Assemblée généra dlautre part,étant naturellement entenuu'il faut gardeà
l'esprit les objectifs fondamentauxdu systèmde tutelleen vernide l'article76 de la
Charte des Nations Unies qui incluent la promotion du progrès politique,
économique,social et éducatifdes habitants et leur développement progressif vers
l'autonomie ou l'indépendance.Quoi qu'il en soit, la pratique internationale est
parfaitementcohérente lorsqu'ellereconnaît lavaliditéde la dénonciation d'accords
de tutelle effectuée parla résolution del'Assemblégénérale approuvan t décision
de l'autoritéadministrantede mettrefin àla relationde tutelle.
3.226 La question fut clairement abordéear laCour dans l'affaire
du Camerounseptentrional.La Cour s'est référéà e la résolution1608 (XV) de
l'Assemblée adoptéele 21 avril 1961 (AnnexeM.C. 227) qui approuvait lesrésultats
des référendums qui se sont déroulés au Cameroun septentrion etlau Cameroun
méridional, et qui"dispose ... qu'il sera mis fin à l'Accord de Tutelle du 13
décembre 1946relatif au Cameroun sous administration du Royaume-Uni"et
déclarait "qu'il ne fait pas de doute....que la résolution a euun effet juridique
définitif"et que "l'extinctionde l'accord de tutelle a étéun effet juridique des
conclusions ... de la résolution 1608(XV)" (C.I.J. affaire du Cameroun
septentrional,Rec. 1963, pp.32et 37). Cetteconclusion aété reprise par la Coprlus
récemment, dans lecadre de la discussionde la nature de la résolution2347(MII)
de l'Assemblée Générad lu, 19 décembre1967, mettant fin à l'accord de tutelle
relatif à Nauru.La Cour a déclaré qu' "une telle résolution a eu un"effet juridique
définitif"(C.I.J., affaire du Camerounseptentrional, Rec.1963,p. 32). Par voie de
conséquence l'accord de tutell" ea pris finà cette date et "n'est plusen vigueur"
(ibid., p. 37, et C.I.J., affaire de cenainesterresà phospharesà Nauru,exceptions
préliminaires,Rec., 1992,p. 251).
3.227 De plus, il apparaît qu'enpratique, il a été finà tousles
accords de tutelle (non stratégiques)ar résolution de l'Assemblé générale faisant
suite à la demandede l'autoritéadmiistrante (voir par exemple les résolutio1044 (Xi), Togo britannique ; 1349 (Xiii),Cameroun français ; 1416 (XIV), Togo
français; 14180, Somalie ; 1608 (XV) Cameroun britannique ; 1626 (XVI)
Samoa Occidental ; 1642(XW), Tanganyika ;1746(XW), RuandaBurundi ; 2347
0, Nauru ;3248 (XIX), NouvelleGuinée ) nsi, ilest toàtfaitmanifesteque
la méthode juridiquementcorrecte de dénonciationdes accords de tutelle exige
l'approbation par l'Assemblée générd alene demande en ce sens de l'autorité
administrarite. C'estcetterésolution qui établite façon définitiveune situation
juridique nouvelle.
2. La dénonciationdes tutellesurle Cameroun
a) Le Cameroun Français
3.228 Le Cameroun français a acquisson indépendance de façon
relativement simple. Suite aux modificaticonstitutionnellesinternesrésultantde la
loi-cadre du 23 juin 1956, l'Autoritéadmiinistrantea proposéque l'Assemblée
générale demanda eu Conseilde Tutelle qu'il prenne toutesles mesuresappropriées
pour permettre au Cameroun de devenir indépendantle ler janvier 1960. En
conséquence,l'Assemblée générale a adoptla résolution1281(Xiii) le 5 décembre
1958,par laquelleelle décidaitde reprendresa treizième sessionle 20 février1959,
afin d'envisager exclusivementla question des deuxtemtoires du Cameroun, et la
résolution1282 (XIII)dans laquelle elle prenaitnote qu'une missionde visite était
actuellement dansles territoires, et demandait auConseil de Tutelled'examinerson
rapport lors de sa prochainesession etde le transmettre avec ses observaet ses
recommandations àl'Assemblée générale lordse la reprise de sa session.La mission
de visite a relevé poursa part que la population souhaitait sonindépendaleele'
janvier 1960(Documentsmcieis du Conseilde Tutelle,1959,p. 84).
3.229 Le Conseil de Tutelle,dans sa résolution1925 (XXIII) a
appuyéle rapport de la mission d'observation, selon lequel le temtoire devrait
devenir indépendantle ler janvier 1960,et la résolution1349(XII) de l'Assemblée
Générale décidait quel'accord de tutelle approuvéle 13 décembre1946 cesserait
d'êtreen vigueur le ler janvier 1960.La République duCamerounest de ce fait
devenueun Etat indépendant,àcettedateet avec les frontièresqui étaient siennesà l'origine de la tutelle et étaientdemeuréesinchangéespar la suite, jusqu'à
l'indépendance.
b) Le Cameroun britannique
3.230 En ce qui concernele Cameroun britannique, la situation
était plus complexe. Le territoire avait étédivisé en deux parties, la partie
septentrionaleétaitadministrée avele Nigeriaseptentrional,et la partie méridionale
avec la régionorientale du Nigeria. Les raisons de cette organisationavaient été
expliquées etconsacrées depuisles premiers jours du mandat (v. supra paragraphe
3.123) et avaientétéacceptées tant ar la CommissionPermanentedes Mandatsque
par les Nations Unies comme étand tes pratiquesvalables (v. supra les paragraphes
3.123 et 3.192-3.194). Une fois la décisionprise selon laquelle le Nigeria
parviendraità l'indépendancele 1 octobre 1960,la questionde l'avenirdu Cameroun
souttutelle britannique devint critique.
3.231
11fut demandéen 1958 à la mission de visite des Nations
Unies d'étudier lesmodalités suivant lesquellls populationpourrait êtreconsultée
sur son avenir (résolutiondu Conseilde Tutelle 1907m), 28 juillet 1958),et la
missionconclut queles souhaitsdesdeux parties duCameroun britannique devraient
êtreconstatés séparémen Ot.n fit remarquer quelespointsde vue de la population
concernant le Cameroun septentrional étaienctlairs, car, comme le présidentde la
missionde visitedes NationsUniesde 1958le relevait devantle Conseilde Tutelle,
"nearlyal1the personsquestioned considered thattheir futuwas linkedto thatof the
Northem Region of Nigeria" (Documentsqfficiels du Conseilde Tutelle, 1959, p.
77). Le rapportde cettemission lui-même ava ctncluqu'
"elle croit que la vie des populationsdu Nord dans leur
ensemble est manifestement, pourautant que cet avis
puisse êtreindiquépour le moment et dans un avenir
prévisible,qu'il faut que leur régiondevienne à titre
définitifune partie dela régiondu Nord dela Fédération
nigérienne lorsquela Nigéria deviendrandépendante.La
recommandationde la Missionest donc la suivante :si
l'Assembléegénérale accepte cette unioncomme base
pour la levéede la tutelle, il ne sera pas nécessairede
procéder à aucune nouvelleconsultation" (Tl1440, p.
34,).En ce qui concerne le Cameroun méridional, la missionestimait qu'unréférendum
pourrait êtrenécessairepuisque les résultatsdes élections du 24janvier 1959 à la
Chambredes Représentants du Camerounméridional"cannot be regarded asdecisive
as far as the futureof the SouthemCameroonsis concerned"(T11440,p. 38).
3.232 Quoi qu'ilen soit,l'Assemblée générale arecommandé dans
sa résolution1350 (XIIi) du 13 mars 1959 (Annexe M.C. 213), que des mesures
soient prises par l'autoritéadministranteen collaboration avecle Commissairedes
Nations Uniesaux plébiscites,afm d'organisersous contrôledes NationsUnies, des
référendums distincts dans les phes septentrionaleset méridionalesdu Cameroun
britannique.Elle a recommandé paa rilleursqu'ilsoit proposà la populationdu nord
de voter soit pour l'intégrationde cette région dansle Nigeria Septentrional lorsque
ce pays deviendrait indépendant, soit pourle report de cette décision. Un
mémorandumpréparé par le SecrétaireGénérad les Nations Unies, ayantpour titre
"The future of the Trust Temtory of the Cameroons under United Kingdom
Administration :organizationof the plebiscitein the Southem part of the Temtory"
(AIC.41418,5 octobre 1959), présentaitun résumé des questions soulevées suiteà
198pétitionsreçues, àproposde l'avenirdu temtoire. Lespréoccupations principales
se regroupent en plusieurs catégories distinctes.La première était relative aux
questionsconcrètesà poser dans le référendum proposé,et la majorité écrasantdees
pétitions présentaite façon variéele choix essentielentre rejoindre un Nigeria
indépendant ou rejoindreun Cameroun indépendant. Certaines pétitions suggéraliaent
poursuitede la tutelle du Royaume-Uni comme choix possible(ibid., pp. 1-4). Cette
propositionétaitlargement minoritaire.La secondecatégoriede préoccupations était
relativeà la liste électoraleet aux conditions pour êtreélecteur.Les suggestions
allaient du maintien de la liste électorale actuelle (c'est-à-dire celle utilorse ld
électionsde 1959 à la Chambre desReprésentants du Cameroun méridional), en la
révisantafm de la mettre àjour souscontrôle desNationsUnies, à la mise en place
d'une listecomplètement nouvelle. Certains pétitionnaires estimaie qute seuls les
"indigènesdu Cameroun méridional" devaient être autorisés à voter, d'autresqu'il
seraitimpossiblede distinguer dans cette populatio,es Nigérianset les Camerounais
français (ibid., pp. 4-5). Certainessuggestions évoquaietn vote tribal. Une seule
pétition proposaitla révision des frontièrafin de satisfaireles souhaitsde chaque
tribu (ibid., p.5).
3.233 Il apparaît manifestement de ce document soumis à la
Quatrième Commission qu'une grande diversid te questionsdéterminantes fut portéeà l'attention desNations Unies d'une manièreucide et clairLa nature duchoix à
faire constituait, naturellement,le coeurdu sujet,maisles questions reàla liste
électoraleet donc les critèresélectorauxet l'organisation des opérations électorales
posaient devant la QuatrièmeCommission le problème du cadre temtorial de
l'opérationdu référendumA . ucun pétitionnaire,aucun représentant,aucun Etat n'a
soulevéla question des frontièresactuelles du Cameroun méridional. Celles-ci
n'étaientpas en cause.
3.234 Les préparatifsdu référendum et sa mise en oeuvre ont été
présentésdans le rapport du Commissaire des Nations Unies aux plébiscites
(T11491lCon.l). Le Commissaire concluaitqu'il constataitque le référendum avait
étéorganiséet menéavecefficacitéet impartialité, conformémen àtla législationet
aux règlements promulgués à cet effet. Lesrésultatsont montré que62 pour cent de
l'ensemble des suffrages s'étaienptrononcésen faveur d'un ajournement de la
décision (ibi,pp. 32-33).La résolution1473(XIV)de l'Assemblée générale prenait
note des opinionsdu Commissaire,et recommandaitqu'unréférendum ultérieur soit
tenu dans le nord et qu'il soit demanàéla populationde choisir entre rejoindrela
Républiquedu Camerounou la Fédération du Nigeria. Ce mêmechoix fut proposé
par la résolution1352 (XIV) de l'Assembléegénéraleà la populationdu Cameroun
méridional.L'Assemblée recommandait égalemen qtue lesmesures nécessairessoient
prises pour décentraliserles structures gouvernementalesdans le nord, et séparer
l'administration localedu Cameroun septentrionalde celledu Nigeria. Le octobre
1960, le Nigeria est devenu indépendanet des Orders in Council mirent en place
une Constitutionpour le Cameroun méridional,et fournirent le cadre juridique de
l'administrationduCamerounseptentrionalcommeentitédistincte.
3.235 Les référendums se sont déroulésle 11 février 1961 au
Cameroun méridional, etles 11et 12 février1961au Cameroun septenmonal. Dans
le premier temtoire, la majorité s'estprononcée pourrejoindre la Républiquedu
Cameroun,et dans le second,en faveurdu rattachementau Nigeria.Dans sonrapport
au Conseil de Tutelle (T11556)du 3 avril 1961, le Commissaire concluait queles
populations tantdu Camerounméridionalque du Camerounseptentrionalavaient eu
la possibilitéd'exprimer leurssouhaitslibrementet dans le secret, et qu'ellesavaient
été bien informéesdes choixqui seposaientelles. Par la résolution 21(S-XI),du
10 avril 1961 du Conseil de Tutelle, le rapport en prit note et fut adressé à
l'AssembléegénéraleC . elle- ci adopta parla suite la résolution1608 (XV) du 21
avril 1961 (Annexe M.C. 227), par laquelle elle approuvait les résultats desréférendumsc,onsidérait que les populationsdes deuxpartiesdu temtoire soustutelle
avaient librementet en secret exprimé leuvolontéà l'égardde leur avenir respectif
conformément aux résolution1 s352 (rov) et 1473 0, et déclaraitqu'il devrait
étreimmédiatemend t onnésuite aux décisions prisepar ces populationsà travers un
processus démocratiqus eousle contrôledes Nations Unies.
3.236 En vertu de cette résolution,l'Assembléedécidaitque les
référenduma syantétéorganisésséparémen atvec des résultdifférents,il devaitêtre
mis fm à l'accord de tutelle de la façon suivante: Le Cameroun septentrional
adhéreraità la Fédération duNigeria le ler juin 1961, pendant que le Cameroun
méridionalrejoindrait la République duCameroun le ler octobre 1961. L'effet
juridique de cette résolutioétéévoqué cidessus (par.3.226). 11suffitde répéter ici
quela résolution aétéreconnuecommeayantun effetjuridiquedéfintif.
3.237 11 est important à ce stade de noter la signification de
l'abandondu processusde tutelleà l'égarddu Cameroun britannique dans le contexte
de la reconnaissance internationale desfrontières.Les opérationsde préparation et
d'organisation du référendumimpliquaientqu'il étaitnécessairede s'assurer des
zones qui étaient comprisesdans les phes septentrionale et méridionaledu
Cameroun britannique, afin de rendre possible Je mécanismedu scmtin. Par
conséquent,des circonscriptions électorales furedéfines ;elles sont décritesavec
précisiondansle rapport du Commissairedes NationsUniesauxplébiscitesdu 3 avril
1961 aux pages 21-22 pour le Cameroun méridional(Annexe M.C. 255), et aux
pages 52-53 pour le Cameroun septent~ional.De plus, le Southem Cameroons
PlebisciteOrder de 1960 (Annexe M.C. 223), adoptait une division similaire en
circonscriptions. Onpeut constater que la circonscription Victona Sud-Ouest se
compose du clan Bakolle, des groupes des villages Bambuka, Bota, Bimbia et
Victoria ;que laCirconscriptionVictoriaSud-Est secomposedu clan Mungo et des
groupesdu villageTiko ;que la CirconscriptionVictoria Nord-Ouestse composedes
groupes desvillages Buea, Bonjongoet Mutengene,et que laCirconscriptionVictona
Nord-Est se composedu clan Balonget des groupesdes villagesMuea et Lysoka. De
la carte jointe au rapport du Commissair(mars 1961, voir carte M.48), il apparaît
manifestementque la circonscription électorale Victoaud-Ouestinclutla péninsule
de Bakassi. C'est unepreuve déterminantede ce que la péninsulea étéreconnue par
les ~at'ionsUnies commefaisant partie du Camerounméridionalau moment critique
où elles mettaientle dispositifen place.3.238 11est également important de souligner qcet aménagement
du découpageélectoral se fondait surune pratique existantdans le temtoire sous
tutelle. En ce qui concerne la Chambre des Représentants duamerounméridional
par exemple, la liste de répartitiondes siègesdes représentantsfigurant dans le
rappon de la mission de visite des Nations Unies de 1958, montre que la
circonscriptionVictoriaétaitdiviséeen circonscriptionsd'attributionsde siègespour
les mandats du Nord, du Sud et Indigène pour 1957-58 (lesdéputés étant
respectivement MM ENDELEY, MOTOMBY-WOLETAet le Chef MANGA-
WILLIAMS);elle étaitdiviséeen circonscriptions distinctepour le Nord-Ouest, le
Nord-Est, le Sud-Estet le Sud-Ouest, pour les électionse959(T11440,p. 15). Le
tableau des résultatsdes électionsgénéralsour la Chambredes Représentantsdu
Camerounméridional qui sesont tenuesle 24janvier 1959, publidans le rappon de
la mission, montrele nombre d'électeurs inscritsour les diverses circonscriptions
d'attributionsde sièges, cellede Victoria Sud-Outomportant 5769 électeurs,dont
3 198avaienteffectivement participau vote(ibid.p. 40).
3.239 Cette reconnaissance temtoriale par le Commissaire des
Nations Uniesau plébiscitesfût approuvéedans les mêmes termep sar la résolution
1608 (XV) de l'AssembléeGénérale (AnnexeM.C. 227), qui acceptaitles résultats
des référendumsdans les deuxpartiesdu temtoire, et poursuivaitla réorganisadeon
ces zones. Aucuneprotestationn'a étéélevéepar un Etat, quel qu'ilsoit, quaàtla
définitiontemtoriale de ces territoiresdu Cameroun septentrionalet du Cameroun
méridional.Le Nigeria n'anullementprétenduau momentdes plébiscites ou aucours
des périodes précédentes ou suivantes, que la répartition temtoriale des
circonscriptions électoralétait défectueusen ceci qu'elle intégrait des pardues
temtoire nigérian.
B. - La positiondu Nigeria
1. Les Temtoires du Nigeria et du Cameroun : les
modifications constitutionnelles
3.240 Aprèste plébiscitequi s'est déroulé e7 novembre1959au
Cameroun septentrional,par lequel il fut décidéde reporter la décisionrelativà
l'avenirdu temtoire, et en raison de l'imminence de l'indépendance du Nigeriaroctobre 1960). un processus de séparation entre l'administratnu territoire sous
tutelle et le Nigeriaétémis en oeuvre. Il avait égalemetour but de faciliter les
opérationsdu second tourduplébiscite qui devase dérouler en1961.
3.241 En vertu duNorthemCameroons (Administrari'oOn)derin
Council de 1960,de nouvellesdispositionsadministrativont étmises en place pour
prendre effetà compter de l'indépendancedu Nigeriale ler octobre 1960(Annexe
M.C. 222). Ces mesures comportaientla nominationd'un Administrateurpour le
Cameroun septentrional. Pour le Cameroun méridional,le SouthemCameroons
(Consirufion) Orderin Council de 1960a prévu une nouvelle constitutionpour le
temtoire, mettant en place un Commissairepour le Cameroun méridionalet une
Chambre des Représentants (AnnexeM.C. 221). Les deuxarrêtés comportaien des
sections interprétatives concernantles définitions respectives du Cameroun
septentrionalet du Cameroun méridional. e premier étaitdécritcomme la partie du
Cameroun défmiedans la section 2 du (ConstitutionO) rderin Councilde 1954,
comprise dans la région septentrionadu Nigeria telle qu'instidans la section3
de I'Order, et le secondcomme la partie du Cameroundéfiniedans la section2 de
1'Order de 1954, comprise dans le Cameroun méridional tellequ'institudans la
section3 de cet Order.
3.242. La section 2 de 1'Orderde 1954définissaitle Cameroun
comme :
"The Cameroons under United Kingdom Trusteeship,
which consistof that part of the territorieslaiownas the
Cameroons to which the Trusteeship Agreement
approvedby the General Assemblyof the UnitedNations
on therhirteenthday of December, 1946,relates,namely
that part thereof that liesto the Westof the boundary
defmed by the Franco-British Declarationof the tenth
day of July, 1919, and more exactly defined in the
declaration made by the Govemor of the Colony and
Protectorateof Nigeria and the Govemor of the French
Cameroonsthat was confied by an exchangeof notes
between His Majesty's Government in the United
Kingdom and the French Government dated theninth
day of January, 1931"(AnnexeM.C. 202).
3.243 La section 3 de l'Order de 1954 précisait quela région
septentrionale du Nigeria comportait le temtoire définiau paragraphe 1 de la
DeuxièmeAnnexe de 1'Order. Ce paragraphe définissait la région septentrionale
comme "thoseparts of the Protectorateand the Cameroonsthat, immediatelybefore
the commencementof this Order, were comprisedin the formerNothem Region". Lasection3 de 1'Orderde 1954 précisaitque le Camerounméridional comportaitle
temtoire définidans le paragraphe4 de la Deuxième Annexe de1'Order. Ce
paragraphe définisste Camerounméridionalwmme "that part of the Cameroons
that,immediatelybefore the commencementof this Order, was comprised in the
former EasternRegion"La dated'entréeen vigueurde I'Orderd1954 étaitdonnée
comme le ler octobre 1954.La hoclamation de 1954 (The Northern Region,
Western Region and EasternRegion (definitionof Boundaries)est entréeen vigueur
le 30 septembre1954, elles définissait,par conséquent,les frontières concernées
immédiatement avant l'entren vigueur de I'Order de1954.La Proclamationde
1954 énonçait dans sonPréambuleque "itisexpedientto define the boundaries of
each Region in a single Proclamation,but withoutvaryingthe same"sebornait
donc à décrireles frontièresexistaLaefrontière entrele Cameroun septentrional
et le Camerounméridional demeure telle qu'eétéréaffirméeans la secti2nde
1'Orderde 1954(Annexe M.C. 202).
3.244 La frontièreorientaledu Camerounméridional(qui devint la
frontièreinternationaleCamerounINigeriaaprès l'intégne ce temtoire dans le
Cameroun)est décritecommela frontièreorientaledu Nigeria, ainsidéf:"from
the seathe boundary followsthe navigablechannelof the River Akpa-Yafe, thence
followsthalwegof the aforesaidRiver Akpa-Yafeupstreamto its confluence withthe
Rivers Akpa-Korumand Eben. La frontière septentriondu Cameroun méridional
(qui devint la frontièreinternationale entrela Rédu Camerounet le Nigeria
dans ce secteur) faitl'objet d'unedescriptionplus détailahapitre4,section
4,par.4.246).
2. L'accordNigéro-Britannique
3.245 Le processusqui a marquéla fin de la tutelle du Cameroun
britannique, à savoir les plébiscites appar l'Assemblégénéraledes Nations
Unies, a étparachevéde manièreformelle parun échange delettresentre l'autorité
adminisiranted'une part, et les deuxEtats dans lesquelsles Cameroun britanniques
devaientêtreincorporés d'aupart.
3.246 Le 29 mai 1961 e Haut Commissairepour le Royaume-Uni
auprèsde la Fédératiodu Nigeria écrivitau Premier Ministrede la Fédéraduon
Nigeria. Cette lettre se réftpécifiquement au plébisciqui s'étaitdérouauCameroun septentrional les 11 et 12 février1961, aboutissant à une majorité de
suffrages favorablesà la réunion avecle Nigeria, et à la résolution1608 (XV) de
l'Assembléegénérale des Nations Unies (AnnexeM.C. 227). Cette lettre rappelait
égalementles discussionstenues à Londres en mai 1960 avec les représentantsdu
Gouvernement nigérian, quifaisait référenceaux conditions dans lesqueiles le
Camerounseptentrionalferait partie duNigeria. Le Gouvernementdu Royaume-Uni
y donnait son accord pour que le Gouvernementnigérianaccueille le Cameroun
septentrionaldans la Fédératiodu Nigeria et incorporecetemtoire dans le Nigeria
septentrional, etpour que les amendements nécessaires de la Constitution de la
Fédération et du Nigeria septentrionalsoienteffectués.II fut egaiementprévuque le
nouveau systèmed'administration locale introduitu Cameroun septentrionalle ler
juillet 1960demeureraiten placeaprès l'incorporatide ce temtoire dansle Nigeria.
3.247 Cette lettre faisait remarquerplus loin que, "in accordance
with paragraph 4(a) ofResolution1608(XV) of the FifieenthSessionof the General
Assemblyof the UnitedNationsthe Governmentof the UnitedKingdomwill regard
the Northern Cameroons asbeing part of the temtoxy of the Federationof Nigeria
with effect from 1st June 1961". Le Paragraphe 4 (a) de la résolution1608 (XV)
(AnnexeM.C. 227) précisait :
"L'Assemblée Génér ..le4.Décid que, les plébiscites
ayant eu lieu séparément ave dces résultatsdifférents,
l'Accord de tutelle du 13 décembre 1946 relatifau
Cameroun sous administration du RoyaumeUni prendra
fin, conformémentà l'alinéab de l'article 76 de la
Charte des Nations Unies et en accord avec l'Autorité
admiistrante, danslesconditions suivante:
(a) En ce qui concernele Cameroun septentrional,le le'
juin 1961, au moment où le Cameroun septenuional
s'uniraà la Fédérationdu Nigeriaen tant que province
séparéd ee la Région Nord dela Nigéria".
3.248 Ce paragraphe de la résolution1608 ON) décidaitqu'il
serait misfinà l'accordde tutelle par l'opératd'uniondu Cameroun septentrional
au Nigeria. La référence à la fois à la Charte des Nations Unies età l'accord de
tutelleest fondamentale.
La lettredu HautCommissairedu Royaume-Uniconcluait en
3.249
demandantque le Nigeriaconfirmeque les interprétationjsointes étaientcorrectes, et
que la réponse du Nigeria confiant les interprétations"shall constilute an
agreement".3.250 La réponse,le 29 mai 1961, du Premier Ministre de la
Fédération du Nigeriaau HautCommissairedu Royaume-Unireproduisaitla lettredu
Haut Commissaireet ajoutaitce qui suit:
"1have pleasurein confuming that theseunderstandings
of the Government of the United Kingdom are correct
and that the Government of the Federation of Nigeria
agree that your Note and this reply confirming these
understandingsshallwnstitute an agreementn.
3.251 Ainsi, cet échangede lettres du 29 mai 1961entre le Haut
Commissairedu Royaume-Uni au Nigeria et le hemier Ministrede la Fédérationdu
Nigeria étaitexpressémentreconnu par les deux parties commeconstituantun traité
ayant force obligatoire.Ce traitéenglobediversengagementsjuridiques.
- premièrement, quele Cameroun septentrional rejoindrailta régionseptentrionaledu
Nigeria, et serait admis,de ce fait,s la Fédératiodnu Nigeria,
- deuxièmement, que des modifications législativsécessairesdevraientêtreadoptées
au Nigeria pour donner effetàcetteadmission,et
- troisièmement, quele systèmed'administrationlocale mis en place au Cameroun
septentrionaldevrait êtreconservé.Mais l'accord incorporeégalement une référence
expresseaux résultatsdu plébisciteau Cameroun septentrional,et enregistreainsi la
reconnaissancede sa validitéàla foispar les NationsUnieset par le Nigeria. Celle-ci
incluait manifestementle cadre territorial dans lequel le plébiscite s'est dér, eéd
sorte qu'aucunedes Partiesne pouvaitprétendrecontesterles conséquencedsu scrutin
ou la validitéou le statutdu cadreterritorialdans lequelil s'étaitdéroulé.
3.252 L'accord fait égalementexpressémentréférence (et cec i
deux reprises) à la résolution1608 ON) de l'AssembléeGénérale. On peut en
déduirel'acceptationde certaines obligations. Premièrementl,a reconnaissancepar
les deux Gouvernementsde l'approbation officielledu plébiscite par l'Assemblée
générale et par suite, la confition que les conditions (notamment lesconditions
territoriales) danslesquellesle plébiscites'étaitdéroulé, qiueses résultats, étaient
acceptéset reconnus par les deux gouvernements.Deuxièmement, les termes de la
résolution 1608 (XV) étaient confiés. Les dispositions ainsi manifestement
confiées avaient trait non seulementà la validitéet aux résultatsdu plébiscite,
mais également à la validitéde la résiliationde l'accordde tutelle. Puisque l'accord
de tutelle comportaitdans son articl1 (AnnexeM.C. 182) une définitionterritorialedu temtoire soustutelle, quin'avait pasmodifiéede la seule façonpossible,c'est-
àdire avec le consentement exprèsde l'Assemblégénéralee,t puisquela résiliation
de cet accord ne pouvaitse produire en dehorsdu cadre temtoriai expressément
retenu, il s'ensuit inexorablementet manifestementque la résoluti1608 (XV)
confirmaitet consacraitce cadre temtorial. Par conséquent, l'incorporation expresse
et la reconnaissancedans l'accordentre le Nigeriaet le Royaume-U29 mai 1961
de cette résolution,ne pouvaientêtreconsidérées quecomme une reconnaissance
évidente etsansambiguïté parles deuxEtatsde la définitiontemtoriale du temtoire
du Camerounseptentrional.
3.253 On peut par conséquent conclure que l'accord, en
incorporant la résolutio1608 ON) (Anuexe M.C. 227) confiit la définition
temtoriale du Cameroun septentrional,àla foisen entérinle plébiscitequi s'était
déroulédans le cadre de la définitiontemtoriale du Cameroun,telle qu'acceptée,et
en proclamantla résiliationde l'accordde tutelle, lequel accord définissait clairement
et expressémentles frontièresdu Cameroun telqu'administrépar le Royaume-Uni.
Le Nigeria, de ce fait, en concluantl'accordbilatéral contratun29dmai 1961,
reconnaissait la défdtion existante du temtoire du Cameroun septenmonal, et
confumait que la frontièreentre lui et la Républiquedu Cameroun devaitêtrela
frontière entrele Cameroun septentrionalet la Républiquedu Cameroun(succédant
au Camerounfrançais) tellequ'elleexistaitavantle le' 1961.
C. - L'acquiescement nigérian-Généralités
3.254 11va de soi que l'Accorddu29 mai 1961 ne concernaitpas
expressémentle Cameroun méridional,bien que la frontièreentre le Cameroun
septentrionalet le Camerounméridionay aiété nécessairemenitncluse. Néanmoins,
l'acquiescement nigériae,t de ce fait la reconnaissance dela naturedu temtoire sous
tutelle de façon généraleest indiscutable. Comme cela a étéexpliqué assez
longuement ci-dessus, les deux parties du Cameroun britannique avaient été
administréesconjointementavecdes parties distinctesdu Nigeria depuis le débutdu
mandat. Les organes administrantsdu Nigeria ne pouvaientpas, par conséquent,
ignorer la nature des dispositions constitutionnellesconceniant les temtoires du
Cameroun, ni la définitiontemtoriale de ces temtoires. En fait, les dispositions
essentiellesde la législation relau Nigerialui-même seréféraienatu Cameroun
et, par exemple, les Orders de1946, 1954 et 1960 définissaient effectivemetechamp d'application des temtoiressous tutelle (v.supra pars. 3.241 à 3.243). Par
conséquentles autoritésnigérianesconcernéesà cette époqueétaientévidemment
averties desdispositions constitutionnesn vigueuret de la définitiontemtoriale du
Cameroun, quiétaitexplicitéesdans la Constitutiondu Nigeria lui-même.
3.255 11est tout aussi inconcevableque les autorités nigérian,s
la fois avant et aprèsl'indépendance duNigeria, pendant la périodeportant sur les
deux vaguesde plébiscite (1959-61)aient pu ignorer les tennes des plébiscites,qui
proposaient le choix de l'incorporatidans le Nigeria indépendant, respectivement
aux habitantsdu Cameroun septentrionalet du Cameroun méridional. Du reste, au
cours de cette période, les délégués camerounais assistaient aux discussions
constitutionnellesavec les autorités britannien mêmetemps que leurs collègues
nigérians. Comme SirAndrew COHEN le notait à la QuatrièmeCommissionde
l'Assemblée généra lle15novembredurant les discussions surle rapportdu Conseil
de Tutelle,
"La Conférence constitutionnellee la Nigériaqui s'est
tenue à Londres en septembre et octobre 1958pour
traiter de la questionde l'indépendande la Nigériaest
l'aboutissement d'une série de remarquables
consultations qui ont eu lieu entre les Ministres du
Royaume-Uniet les représentants de tous les secteursde
l'opinion de la Nigéria et du Cameroun sous
administration britannique. Toules partis du Cameroun
méridional quiont obtenu des sièges aux dernières
élections ...étaient représenté às la Conférence ; le
Cameroun septentrional était représentépar deux
camerounais du Nord et par des délégués dep sartis
politiquesdontl'activités'exerceans la régiondu Nord
de la Nigéria et dans la partie septentrionale, du
Territoire sous tutelleGAOR, 4eme Comité,803eme
réunion, 1958, p.319).
3.256 Plus encore, le Nigeria est devenu indépendantle le'
octobre 1960 et a été admis aux Nations Uniesle 7 octobre de cette mêmeannée
(résolution1492(XV)de l'Assemblée générale)L.e Nigeriaprit une part active aux
débatsdes Nations Unies concernanl te Cameroun,et il adressaune lettre le 12 avril
1961 au Présidentde la Quatrième Commission. Dans cette lettre, comportant un
mémorandum exposantla position de son pays à propos du Cameroun, le
Représentant permanend tu Nigeria attiraitl'attention surle fait:q"Nigeriais an
interestedparty in the questionof the Tmst Temtory of the Cameroonsunder United
Kigdom administration". LR mémorandum jointprésentait l'histoiredu Cameroun
depuis le siècledernierIlattiraitl'attentionsur le fait qu'aprèsle plébiscitede 1959 1 au Cameroun septentrionalet la résolution1473 0 de l'Assembléegénérale
préconisantune séparationdel'administrationdu Cameroun septentrionaldu Nigeria,
cette partie du temtoire sous tutelle était entièrement séparée des Provindces
Bornou et d'Adamawa du Nigeria Septentrional, et constituait une province
indépendanteavec sa propre administration provincia. ertainescritiquesfaitespar
le Cameroun à l'égard deceprocessusétaientécartéesc,ependantque le Nigeria lui-
mêmecritiquait la conduite du Gouvernement duCameroun méridionaldurant la
périodeprécédantle plébiscite. Le mémorandumrappelait sans ambiguïtéque le
l Nigena avait expliqué auxhabitants du Cameroun septentrionalet du Cameroun
méridionalles conditions auxquelles l'admissionà la Fédératiodu Nigeria serait
l possibledans le cas d'un vote favoraàlcette optionau plébisci,et concluaitque
les Nations Unies devaient soutenirles décisions priseles populationsdes deux
l partiesdu temtoire sous tutelle(A/C.4/481).
3.257 En d'autrestermes,le Nigeriaa manifesté uintérêt constant
pour les événements camerounais avanp,ndantet aprèslesplébiscitede 1961.Ilne
peut prétendrpar la suitene pasavoirétpleinementinforméde la situation.
3.258 Le Nigeria était,naturellementmembre à part entièrede
l'AssembléeGénérale lorsque la résolutionfondamentale,la résolution1608 (XV),
fut adoptéele 21 avril 1961. Aucoursdesdiscussions quiont conduàtl'adoptionde
cette résolution, ledéléguénigériana fait un discours en séancepleinière de
l'Assembléegénéralele 21 avril 1961, dans lequel il déclara:t"Nigeria bas no
quarrel with the Cameroons and the Cameroonsbas no querrel with Nigeria". Il
déclaraaussi que "Nigeria has no territorial ambitions. Nigeriadoes not want to
dorninateanybody. Nigeriais preparedto figindefenceof the nghts, privilegesand
temtorial integrity of its sister nations whetherstrongor...Nigeria tomorrow
will undertake to come to the defence of the Republicof Cameroun if anybody
éme
attempts to interfere with her temtorial integrity or sovereignty" (GAOR, 15
Session,Pleinière, p. 466, Annexe M.C. 227). Une défenseplus éclatantede la
situation territoriale telle qu'elle àxla lumière des résultasu plébiscite et
telle qu'elle étaiten conséquence reflétlers de l'adoption de la résolutionde
résiliation ce jourpeut difficilementeimaginée. Le Nigena, loin d'affirmer des
prétentionsterritoriales ou d'exprimerune quelconqueinsatisfactionau sujet de la
situation temtoriale résultantdu processus duplébiscite, l'approuau contraire
1 vigoureusement.3.259 La résolution 1608(XV) ,l faut le rappeler, disposaitque
l'accord de hitellerelatifauCameroun britannique"prendrafin", ece qui concerne
le Cameroun septentrional lorsqu'il s'unira au Nigeria, et en ce qui concerne le
Cameroun méridional lorsde son adhésion auCameroun (Annexe M.C.227). 11
s'agissaitd'unerésolution impérativLe Nigeria a voten faveur decetterésolution.
Il ne s'y est pas opposé,il ne s'estmêpas abstenu.Aucuneprotestation relativà
la définition internatioe'aété enregistrée,et aucunehésitatini crainten'ontété
exprimées. Le Nigeria ne pouvaitavoir aucundoute quant à la définitiontemtoriale
des temtoires du Camerounpuisque ceuxci avaient étéprésentés sul ra carte des
Nations Unies figurant les circonscriptions électorales, qui faisait clairement
apparaître lapéninsulede Bakassicommeune partiede la circonscriptionde Victoria
Sud-Ouest.Aucuneprotestationn'avaitété émiseet le plébiscite se déroula, il ltu
rappeler, en février 1961, c'est-à-dire nettemeaprès que le Nigeria fût devenu
indépendanett ait étadmiscommemembre desNationsUnies.
3.260 Le Nigeriaa continuéde participerde prèsaux événements,
particulièrementau momentdes plébiscites. Ainsil,e rapporten datedu 25mars 1961
de M. WYN-HARRIS,Administrateur britanniqueau Cameroun septentrional,sur le
plébisciteau Cameroun septentrional, relevaque le Gouvernement de la région
septentrionaledu Nigeria avaitautoriséAlhaji MohamedBASHAR(le Ministre du
Gouvernement Local dans la région septentrionale)à s'absenter pour continueà
organiser les partis qui faisaientcampagnedans le Cameroun septentrional en faveur
de l'incorporationavecle Nigeria (AnnexeM.C. 225).
3.261 Le Nigeria fût en fait associéétroitement parle Royaume-
Uni au processus au cours de cette période déterminante. Un exposé préparélepar
Colonial qfiice pour les réunionsdes Premiers Ministresdu Commonwealth, et
adresséau Foreign qfiicele 7mars 1961le démontre. L'exposé nolt'eimportance de
l'association continue du Nigeria à I'administrationdu Cameroun méridionalet
déclarait que: "We have in fact ken assured by the Prime Minister
through the United Kingdom High Commissioner in
Lagos that we can rely on the continuation of this
Nigerian help until the terminationof Trusteeship.It is
not impossible if Ministers here decide that we shall
continue to give aid tothe Federal CamerounRepublic
after thetwo territoriare joined togetherthat we may
wish to continue to use certain Nigerian personnel on
tenns to be agreed. We would hope that the Nigerians
would see thesense of this and bewillingto leus such
assistanceasmay berequired".
L'exposése référaitégaiement à la question des biens nigériansau Cameroun
méridionalen déclarantque "Sir Abubakar [the Nigerian Prime Minister] has on
occasionindicatedthat he regardsNigeriaas havinga claimon us in respect of their
investments,etc. anddevelopmentworkin theSouthernCameroonsduringtheperiod
whenit was administeredasp& of Nigeria".
L'exposéconcluten déclarantque, "We have every intentionof maintainingthe most
inthte contactswith Nigeria in relation tothe futureof the Southern Cameroonsand
he may be assured ofthis at ail times"(AnnexeM.C. 226).
3.262 La conclusions s'impose : le Nigeria, sous administration
britannique, en tant que pays indépendant,a épleinementet constamment informé
des caractéristiquesconstitutionnelleset temtonales des temtoires du Cameroun
britannique, lorsque les décisionscialesquant à l'avenirde ces territoiresoété
prises.
3.263 11est constanten droit que, face une situation donnée,il
est nécessaire d'élever une protestation afm d'éviter qu'onen déduise un
acquiescement, et que, à l'inverse, si aucune protestation n'est élevée,on peut
légitimementconclure au consentement à la situationen question. Comme l'écrilte
ProfesseurBROWNLIE, "acquiescence hasthe sameeffect asrecognition,but arises
from conduct, the absence of protest when this might reasonablybe expected"0.
BROWNLIE,Princi~lesof Public International Law, ClarendonPress, Oxford,4 éme
ed. 1990,p.160).
3.264 La Cour a examinélesconséquencej suridiques de l'absence
de protestatiodans un certainnombred'affaires.Dans l'affaire dPêcherie snglo-
Norvégiennes .ar exemple, eile remarquaque la méthodenorvégienne de dessin des
lignesde base droites appliquée"d'unefaçon suivieet constant.. n'ont soulevéde
la part des Etatsétrangersaucuneopposition"et cette "toléragénéralea" rendu lesprincipes norvégiensde délimitation"opposablesà tous les Etats".La position du
Royaume-Unien particulierfut examinéeet la Cour fit valoirque, "la notoriédes
faits, la tolérance générle la communauté intemationale,la positionde la Grande-
Bretagne dans la mer du Nord, son intérêt propr eans la question, son abstention
prolongée, permettraient en tout cas à la Norvège d'opposer son système au
Royaume-Uni"(C.I.J., arrêt du 12décembre1951,Rec., 1951,pp. 138-139).
3.265 La questionde l'acquiescementpar absence de protestation
fut également discutépear la Cour dans l'affaire relativeau Droit de passage en
tem'toire indien. Elle releva que lors de l'occupationde l'Me, les Britanniques
avaient traverséun certain nombre de villages tenus par le Portugal. La Cour
poursuivait,
"les Portugais se présentèrent comme souverains des
villages. Les Britanniquess'abstinrentde prétendreeux-
mêmes à la souverainetéen qualitéde successeursdes
Mahrattes, mais ils ne reconnurent pas non plus
expressémentla souverainetédu Portugal. L'autorité
mise en question.Ainsi lasouverainetédu Portugal surs
les villages fut-ellereconnuepar les Britanniquesen fait
et par implication, elle le fut ensuite tacitement par
l'Inde" (C.I.J. affaire relativeau Droit de passage en
tem'toire indien,fond,rrêt,Rec, 1960,p.39).
3.266 Pour que l'acquiescement entraîne des conséquences
juridiques, ilest essentiel que1'Etatqui aurait à supporter l'obligation pouvanten
résulter soiten position de protester s'ille souhaiLe.concept d'acquiescement,
commela Courl'a déclaré" ,supposele libre exercicede la volonté"(C.I.J. affairedu
Dlfférendfrontalier,rrêt,22 décembre 1986R , ec., 1986,p.597).
3.267 Dans l'affaire du Nicaragua, la Cour s'est prononcéesur
"l'acquiescement constant" du Nicaragua par diverses affumations publiques,
notammentcelle contenue dans l'Annuairede lo C.I.J., au fait qu'il étaitlié par
l'acceptationde la compétence obligatoee la Cour conformément à l'article 36(2)
du Statut, même si son acceptation de cette dernière étaitimparfaite. Ces
acquiescements par le silence, a jugé la Cour, "constituentun mode valable de
manifestationde sa volontéde reconnaîtrela compétenceobligatoire de la Cour au
titre de l'article 36,2 du Statut" (C.I.J., affaire des Activités militaireset
paramilitairesau Nicaragua etcontre celui-ci, arrêtdu 26 novembre 1984, Rec.,
1984,pp.411-413).3.268 La situation nigérianeentre parfaitementdans ce cadrLe
Nigeriaavaitmanifestementune connaissanceprécisedes développementstouchanatu
Cameroun durant les périodesconcernées(spécialement entre 1959et 1%1), et à
aucun moment il n'a fait état d'une quelconque opposition aux frontières du
Cameroun figurant dans les instruments internationaux et réaffumées dans la
législatiobritannique(cettedernièreétant évidemmendéterminantedans la question
de la frontière entrele Cameroun septentrionalet le Cameroun méridionaAucune
protestation, inquikiudnimêmeaucunehésitation ne furent exprimées, auprèdes
autoritésadministrantesbritanniques ou auprèsde la mission de visite des Nations
Unies en 1958 ou du Commissaire des Nations Unies auxplébicites, ou de
l'Assembléegénérale des Nations Unies, soit avant soitau momentde la résolution
cxucialedu 21 avril 1961.Au contraire, le discoursdu délégéu Nigeria lors de la
session plénièrede l'Assembléegénérale prononcé le jour mêmede l'adoption de
cette résolutionplaide en faveur du droit à l'intégritemtoriale du Cameroun
(v.supra par. 3.258).
3.269 La question des frontièresdu Nigeria avecle Cameroun
résultantde la résiliation de lautelle du Cameroun, étaitun sujesur lequel on
devait s'attendreà ce que le Nigeria proteste s'il n'étaitpas satisfait. Il n'étaitpas
possibleque sanégligenceà agir ainsi soitdue à un manqued'information.Elle était
uniquementdue au fait qu'à cemoment, iln'éprouvait palse moindredoute, n'avait
pas la moindre oppositionà l'égardde la situationterritorialOn doit,a tout le
moins, considérerque le Nigeria aacquiescà cettesituationtemtoriale. 11est même
évident que le Nigeria alla bien au-delà d'un simple acquiescement. 11 a
manifestement acceptéla nouvelle situation temtoriale et constitutionneiie par
l'échangede lettres du 29 mai 1961dont il est questioncidessus, qu'il a reconnu
comme constituantun accord juridiquement obligatoirIl est évidentque le Nigeria
confimit les dispositionstemtonales prises durantla période concerné.1ne peut
pas maintenant renversersa position. On ne peut pas souffler le chaud au moment
diterrninant, pour ensuite souffler soudainement le froid après plus de quatre
décennies.Comme le notait la Cour dans l'affaire duTemplede PréahVihéaren
1962"l'absencede contestationpar la Thaïlande delcarte "française"signifiaitque
la Thailande "en raison de sa conduite" ne pouvait maintenantcontester sa validité
notammentparce qu'elle avait profitde "l'avantage d'une frontière stabcomme
conséquence de son acquiescement (C.I.J., affaireTemplede PréahVihéar,arrêt
du 15juin 1962, Rec.,1962,p.32).3.270 Les accords de mandat et de tutelle étaientdes accords
internationaux contraignants.En outre, ils ontcréé des régee frontière objectifs.
Bien que leur fonctiondominante était d'établirntypeparticulier de régimesur le
temtoire contrôléau plan international,""définir" untemtoire signifie définirses
frontières"(C.I.J., affaire du Différetem'torial,arrêtdu 3 février1994, Rec.,
1994, p. 26), et la frontière entre leCameroun britanniqueet le Camerounfrançais
étaiten fait manifestementdéfie. Commela Cour l'a souligné, "une fois convenue,
la frontière demeure, car toute autre approche priverait d'effet le principe
fondamentalde lastabilitédes frontières"et "unefrontière étabpar traitéacquiert
ainsiune permanenceque le traitélui-même ne connaîtpas nécessairement"(ibid.p.
37). Ce régimefrontalier objectif n'est pas immuableet intangible, mais ilpeut
uniquementêtremodifié par consentementE .t, dans la périodede pré-indépendance,
ce consentementne pouvait êtredonné parles puissancesadmiistrantes que si elles
agissaient avecle consentement exprèsde la Sociétdes Nationsou de l'Assemblée
générale.
3.271 Le processus derésiliationde l'accordde tutelle démontrait
de deux façons particulièresla défition de frontière. En ce qui concerne le
Cameroun français,le processusde résiliationde l'accordde tutellepar la résolution
de l'Assemblée générale marquait l'acceptation internatiod nalefrontièresde ce
temtoire, dans le cas présent,la frontière entrela République duCameroun et le
Cameroun septentrional administré pale Royaume-Uni. Le temtoire ne pouvait pas
parvenir à l'indépendance, horstatut detemtoire sous tutelle, avec une superficie
différentede celle qui étaitexpressémentfuréedans l'accord de tutelle, sans
modification formelle à cet effet, acceptéepar les puissances admiistrantes et
approuvée par l'Assemblée générale.
3.272 La situatioà l'égarddu Cameroun britanniqueétait unpeu
plus compliquée. L'Assemblée génée rlle-même (l'instance autorisen vertu de
l'Article85 de la Charteà agir au nomde l'organisationen matièrede tutelle), dans
la résolution1350(XIii), prit la décision queles plébiscites devat tre organisés,
et ceci séparémentdans les deuxtemtoires du Camerounbritannique septentrionalet
du Cameroun britannique méridional.Ces plébiscites devaientsoumettre aux
populations concernéesles questions poséespar l'Assembléegénéraledans les
résolutions1352 (XIV) et 1473 o. Les résultatsde ces plébiscites furent
"approuvés" parl'Assemblée généraldeans la résolution1608(XV), par laquelleelle
"décida"la manièrepréciseselonlaquelleles accordsde tutelle devaientprendre fin,c'est-à-direpar l'adhésion duCameroun septentrional au Nigeria,et l'adhésiondu
Cameroun méridional à la Républiquedu Cameroun.Cette résolutionconcernantla
résiliationd'accord de tutelle a écaractérisé ear la Cour commeayant "uneffet
juridique définitif'(C.I.J., affaireCamerounseptentrional, arrêtdu 2 décembre
1963,Rec. 1963, pp.32 et37), décisionconfiée récemment(C.I.J., arrêtdu 26
juin 1992,affaire decertainesterresàphosphates à Naum,exceptions préliminaires,
Rec,, 1992, p.251).
3.273 Cet effet définitifincluait les dimensions territoriales du
Cameroun septentrionalet du Camerounméndional. Le processusd'organisationdes
plébiscites sous contrôle des Nations Unies comportait la définition des
circonscriptions électorales,qui naturellementaffiient la définitiontemtoriale
respective du Cameroun septentrional et du Cameroun méridional. De cette
expérience il apparaît onne peut plusmanifeste que,par exemple, la péninsulede
Bakassiétaitconsidérée comme faisap ntartie dce derniertemtoire, formantcomme
c'étaitle cas une partie de la circonscriptionélectorale du Victoria du sud-ot.(sv
supra par. 3.237). De plus, la résolution quimettaifuià l'accordde tutelle avec
effet juridique ne pouvait statuer ainsi ques les limitestemtoriales acceptéesdu
Camerounseptentrionalet du Cameroun méridiona(ltemtoires issusde la divisiondu
Cameroun britanniquepar le Royaume-Uni,au su et avec l'approbationde la Société
des Nationset des NationsUnies).
3.274 Le long processusde plébiscite avaiatttirél'attentionsur le
problèmede l'avenir du Cameroun britanniqueet les discussionsau Conseil de
tutelleetà l'Assemblée généralej,ointes avec les rapportsdesmissionsd'observation
des NationsUnieset du Commissairedes NationsUniesauxplébiscites accompagnés
de cartes décrivant clairemenles frontièresen jeu, garantissaientqu'aucunEtat ne
pouvait ignorer ce qui se passait et ce qui étaitenvisagé.Aucun Etat n'a protesté
contre les frontièresproclamées.Aucun Etat de façon généralep ,as plus que le
Nigeriaen particulier. Il est, naturellement,instnictifde noterqu'à aucunmoment, le
Royaume-Uni n'a soulevéla question des frontières au cours de l'affaire du
Camerounseptentrional devant la Cour, et que le Nigeria n'a fait part à aucun
moment au cours de cette périoded'une quelconque oppositionaux frontières de
l'ancien Camerounseptentrional,ou bien sûrde l'ancien Cameroun méndional, et
n'estencore moinsintervenu devantla Cour pour évoquec res sujets.
3.275 En fait, non seulementle Nigeria n'apas protesté, maisen
réalité il a formellementnfmnéles dispositionsprises. Dansson accorddu 29 mai1961 avec le Royaume-Uni, le Nigeria a formellement accepté qule e Cameroun
septentrionaladhéreraitconformément à la résolution1608ON) à la Fédérationdu
Nigeria. Ceci impliquait inévitablementne acceptationnon déguiséeet spécifique
des frontièresdu Cameroun septentrionalteiles que définiespar la puissance
administrariteet les Nations Unies, correspondantà toutes lesfrontièresde l'ancien
Cameroun britannique,à l'exception des frontièreoccidentaleset du sud-ouest du
Camerounméridional,qui étaient acceptées implicitemee nt vertu de la décisioà
caractèreimpératif contenuedans la résolution1608 0, ajoutée à l'absence de
touteprotestation aux présentsar le Nigeria.
3.276 On peut par conséquent conclure que la frontière entrela
Cameroun britannique et le Cameroun fraqw était reconnue sur le plan
internationalen 1922 et confîée en 1946. La frontière entrela Républiquedu
Cameroun etle Cameroun britannique étaip tar ailieursreconnueen 1959.En 1961,
la frontière entrela Républiqdu Camerounincorporantle Cameroun méridional et
le Nigeria incorporantle Cameroun septentrional étaitéterminée avec plein effet
juridique. Cette frontièrene peut êtremodifiée qu'avele consentement des deux
Etaü concernés,et d'aucuneautrefaçon.
SECTION 5. LA CARTOGRAPHIE
3.277 Le matériaucartographique permettant de déterminer,de
préciserou de confier la ligne frontière entrele Cameroun et le Nigeria est
particulièrement abondantdans la présenteaffaire. Certaines cartes illustrentla
frontière septentriona, otammentlacustre. D'autresillustrentla partie méridionale
de la frontière, de Yola à la mer. D'autres encore concernent exclusivementla
frontière maritime,de l'embouchurede 1'AkwaYafejusqu'au point G. Enfin, bon
nombre de cartes reproduisent l'ensemblede la frontièreséparantle Cameroun du
Nigeria.
3.278 A ce stadede la procédure,la Républiquedu Cameroun ne
se livrera pas un commentairecarte par cartede l'important matériaudisponible.
On se contenteraici de présenter lescartes pertinendans leur ensemble. Après
avoir brosséles caractéristiqgénéraledsu matériaucartographique,la République
du Cameroundistinguera lescartes d'origineconventionnelledes autres cartes. 81. Les caractéristiques eénérales du matériau
cartoma~hiaue
3.279. On peut dégager trois caractéristiques généraleq sui
confèrent aux cartesuneimportance particulièredans le présentdifférendet qui le
distinguent d'autres casans lesquels lescartes n'ontjouéqu'un rôle marginal. Il
s'agit:
- de la concordanceet de la constancedestracésqui y sont reproduits;
- de la diversitédesauteurs descartes;
- de la diversité desstatutsjuridiques attasces cartes.
A.- Concordance et constance destracésreproduits
3.280 L'enseignementle plus remarquable d'un examen des cartes
les plus diverses notre dispositionest assurément que,à l'exceptionde trois cartes
éditéesrécemmentau Nigeria, elles appuient toutesla ligne frontalière revendiquée
par la Républiquedu Cameroun.
3.281 11fautbien entenduinterpréterlescartesen tenantcomptedu
facteur temporel. Ainsi, les cartes antérieuresà 1913 sont de peu d'utilité,
puisqu'elles illustrent une frontière qui, sauf pour le cas particulier du segment
adjacentà la régionde Yola, a étémodifiéepar la suite. 11convient doncd'écarter
toutes les cartes de cette époquequi décriventla frontière méridionale, plaçant
l'extrémité dela frontière terrestrele long du Rio Del Rey. De même,les cartes
postérieuresà 1916 sont, en principe, inadéquatepour illustrer la frontièreanglo-
allemande qui a perdu son statut internationalavec l'occupation du Cameroun
allemandet la transformationdu temtoire en mandatde la S.d.N. puis entutelle de
1'O.N.U. Seules peuvent êtreretenues pour cettepériode les illustrations des
frontièresadministrativesrespectéespar la puissanceadministranteet quià la suite
du plébiscite,deviendrontles frontièresactuellesausud de la borne64.
3.282 Par ailleurs, le facteur temporel permetaussi d'apprécierle
degré deprécision descartes présentéee sn tenant compte desconnaissanceset des
progrès techniques de l'époque. Ami, les cartes MOISEL, de bonne qualitéau
moment de leur confection, ont longtemps constituéles instrumentsde référence.
L'écoulementdu temps a cependantrévélé un certain nombre d'inexactitudeset lanécessité d'aménagements, vod ieerectifications mineures,qui ont assurésdans
les textes des accords internationaux(comme1'Echangede notes franco-britannique
de 1931pour la frontièreseptentrionale),en même tempqsu'ilsétaient reproduisur
les cartes contemporaines.La plupart des légères divergencde tracé s'expliquent
ainsipar une simpleamélioratiode la qualitétechniquedescartes.
3.283 Moyennant ces principes d'interprétation, l'ensembld eu
matériaucartographiqueest favorableau Cameroun. Il n'existe pasde cartesportant
une ligne alternative, commepar exemple dans I'afîaire dDiffére tnrditorial où
plusieurs cartes italiennes et mêmeinternationales reprenaientla ligne du Traité
Laval-Mussolinicomme alternative à laligne franco-britanniquede 1898-1919. La
seuleexceptionestconstituéepar certainesarteséditéespalre Nigeria, quiplacentla
presqu'île deBakassien temtoire nigérian,en prenant pour lignefrontièrele Rio del
Rey. Ces cartes, publiéestrès récemment,contredisent d'autres cartes éditées
précédemmenp tar cet Etat, qui illustrent bienle titre conventionneldu Cameroun
dans cette région (Accordsnglo-allemandsde 1913). On peut cependantdue que,
jusqu'aux années 1990, l'ensemble des cartes présentait une concordance
remarquable.
B. - Diversitédesauteurs descartes
3.284 Les cartes appuyant la revendicationde la Républiquedu
Cameroun n'ontpas seulementété émisespar le Nigeria, qui en contesteaujourd'hui
les enseignements, ellesl'ontaussié:é
- par la Républiqudu Camerounelle-même;
- par le Royaume-Uni,puissance coloniale du Nigeria et admiinistrantede l'ancien
temtoire sousmandat puis soustutelledu Cameroun britannique;
- par la France, ancienne puissanceadrninistrantedu Cameroun;
- par l'Allemagne, anciennpuissancecolonialedu Cameroun;
- par des Etats tiers, soitde la région,commele Tchad, soiten dehors de la région,
comme lesEtats-Unis;- par desorganisations internationalesintéresséco,mmela Sociétédes Nations p,uis
par I'O.N.U., dans lecadre de la surveillancedes accordsde mandatpuisde tutelle;
- par des institutionsprivées.
3.285 Cette caractéristiqest remarquableen ce qu'elle révèllee
consensus sur le tracéde la frontière,qui dépassede loin la position des deux Etats
parties. Il est le fait tant des Etats directement intéressést,out particulièrement
attentifsà la précisiondu tracé,que des parties neutres quin'ont aucun intérê t
favoriser l'une ou l'autre prétention,et qui sont pourtant unanimes à reprendre la
lignefrontièrerevendiquée parle Cameroun.
C. - Diversitédesstatutsjuridiques attachésaux cartes
3.286 Cette troisième caractéristiquedécouledirectement de la
précédente. La statut juridique d'une cartedépenden effet en premier lieu de
l'identitéde son ou de ses auteurs. Elle est aussi fonction de l'interprétation de
l'intention de l'auteur de la carte. Sans entrer dans le détail del'abondante
jurisprudence internationalequi s'est développéesur le sujet, on peut rappeler les
hypothèsesles plus largement admises.
3.287 La carte peut d'abord êtrel'expressionde la volonté des
parties concernées.Il peut en effetapparaîtreque les parties contractantesàun traité
ont mieux expriméleurs intentionsdans la carte dressée pourl'occasionque dansle
texte mêmedu traité. Dans cette hypothèse,en cas de contradictionentre la ligne
décritepar le texte et celle portée surla carte, la secondeprévaudra(C.I.J., arrêtdu
15 juin 1962, Affaire du Templede PréahVihéar, Rec. 1962). Une situation
semblable se présentelorsque la carte, bien que n'ayantpas étannexéeinitialement
au traitéfait l'objet d'une reconnaissanceformelle par la suite. Le Professeur
BROWNLIEl'a d'ailleursrelevé:
"
The evidence of recognition and acquiescence by
conduct may take the form of absenceof protest or any
other reservationof nghts, admissionsby ministersand
law officers, the publication of oficial maps, the
alignment,and administrative practicein rnatters otax
collection, customsenforcementand the like". (AfBcan
Boundaries, C. Hurst and Co., London, 1979. p.16;
soulignépar la Républiquedu Cameroun)ïe droit internationaln'est pasformaliste. 11admet doncqu'une cartepuisse étrel'un
des moyens par lesquelsles partiesexpriment leurconsentemeàtêtre lié.
3.288 Lorsqu'unecarte est officiellementannexéà un traité, elle
présentele caractèred'uninstrumentum au même titre que les autres dispositionsdu
traité. Ceci ne signifiepas quecartel'emportera surles autres éléments permettant
de définir l'intentiondes parties.Mais cecaractèreofficiel lui donne une valeur
probatoire particulière,ans la mesure où elle est souvent plus précise qu'une
descriptiontextuelle.
3.289 En revanche, lorsquela carte est émiseen relation avecle
traité, maissansy êtreofficiellementannexée,elle ne peut êtreutilisée quecomme
matériau d'interprétationu texte. Si ellea éémisedans le cadrede l'exécutiondu
traité,elle peut démontrerune "pratique ultérieurement suivdans l'applicationdu
traitépar laquelleest établil'accorddespartiesà l'égardde l'interprétdu traité"
(article 31 $ 3b) de la Conventionde Vienne de 1969surle droit des traités). Si la
carte a étéutiliséedans la préparationdu traité,elle peut êtreconsidèrecomme
relevantde la catégoriedestravaux préparatoire,t priseen compteàce titrecomme
moyen complémentaire d'interprétation (articlede la même Convention).
3.290 Enfin, les cartes publiées par des Etats tiers ou des
organismes privéscontribuentà la reconnaissancegénéralede l'alignementet à son
caractèrenotoireet public.
3.291 Dansle cas de la frontière séparle Cameroundu Nigeria,
il est remarquable de relever que le matériaucartographiquepeut êtreclassé dans
tout lescatégoriesdégagées palrajurisprudence internationale. Comme onle verra
dans le détailci-dessous,les cartes sont tantôtassimilablesau textedes traités,tantôt
utilisables commedes moyensd'interprétation, tantôt équivalentàsdes élémentdse
reconnaissance, tantôtreprésentendes éléments probatoires généraux.C'est cequi
fait la richessede ce matériauen l'espèce. Plus particulièremenlta, circonstance que
les cartes soient ou non annexées aux accordpsertinents est fondamentale,dans la
mesure où cela leur confere une valeur juridique assimilableà leur texte. La
Républiquedu Camerounprésenteradonc le matériaucartographiqueen fonctionde
ce critère. # 2. Les "cartes conventionnelles1'
3.292 La République duCameroun reprendra l'ensemble des
conventionsqui permettentde définirla frontièreactuelle, etdéterminerale rôle et le
statut exact des cartes dans chacune d'entre elles, avant de déterminer les
conséquencesjuridiquesqu'ilimportedetuer de ce fait.
A. - Les carte dsans lesconventionsdélimitant ou coxûiiant
la frontière
1. L'Accord anglo-allemanddu 19mars 1906
3.293 Comme onle montrera dansla partie consacréau tracé(v.
inza, chapitre4, section2), l'Accordde 1906continuà êtrepertinentpour un court
segment frontalier situé aux alentoursde Yola, puisque la DéclaratiMILNER-
SIMON, instrument de référence pour la partie septentrionalede la frontière, y
renvoie pour la descriptionde quelques anciebomes anglo-allemandes.
3.294 Or, l'Accord du 19 mars 1906 renvoie à plusieurs cartes
pour la déterminationdu tracéfrontalier qui forme l'objet duconsentement de
l'Allemagneet de la Grande-Bretagne. Le statutde ces cartesressort du préambule
de l'Accord:
"The Undersigned, being appointed by their respective
Govemements to consider and fu a definite boundary
between theGermanand the Britishtemtories from Yola
to LakeChad, in accordancewiththe agreementbetween
GreatBritainandGermanyof the 15thNovember,1893,
and thesurveys of the BoundaryCommissionsof 1903
U have, subject to the approval of the said
Govemements, detem'ned rhe boundory as described
below, und as uèlinearedon the accompaying maps,
being those prepared by the German and British
Commissioners" (Souligné par la République du
Cameroun).
L'accordmentionneen effet I'existencede quatrecartesqyisont annexées:
"ANNEX II(a), (b), (c), a(d). 4 Maps attachedhereto"
Ces cartes forment bien l'objet del'accord entreles deuxats parties, comme en
témoignentles termes soulignés.
3.295 La carte qui permetde localiser lesbornes auxquelles ilest
fait référence dans la DéclarationMILNER-SMON possède donc un statut
conventionnelidentiqueautexte quien décritla localisation.
2. L'Accordanglo-allemand du 11mars1913
3.296 Ce traité estl'instrument conventionnle référence poulra
délimitation de la frontière dans la région de la Cross River, et il prévoit
expressémentla localisationde Bakassidu côtécamerounaisde la ligne (v. supra,
chapitre2,section2 etinfr ahapitre4, secti5).
Le traitécomprendune description textuelle détailldee la
3.297
frontièredans ses articles1XXIX. Mais l'articlXXX complètela délimitationen
précisant que
"The maps signedby the Britishand Gem delegates
on the 6th October, 1909, are hereby confixmed, and
regardedas formingan integralpart of the Agreement".
LRs cartes sontd'ailleursexpressément annexées aaité.Par ailleurs, la description
textuelle renvoiàplusieurs reprisàsdescartes, sansles identifier précisément, mais
qui correspondentd'évidence aux cartes annexées.
3.298 Lescartespermettantde localiser cette partiede la frontière,
si elles n'ontdans un premier temps fait l'objet que d'un accordau niveau des
délégués sur le terrain, ont acquiun statut conventionnelpar leur intégrationà
l'Accorddu 11mars 1913.
3. L'Accordanglo-allemanddu 12avril1913
3.299 On sait que cet instrumentcomplètele précédent par une
définitionplus détaillde la partie de la frontière entreYola et la Cross River, etqu'il possède doncla mêmevaleur pourla déterminationde la frontière actuelle(v.
supra,chapitre2, section 2).
3.300 Le résultatde la démarcation fait l'obte 21 articles qui
précisentles articles1XV de l'Accorddu 11 mars 1913. Une foisde plus, l'accord
s'opèreégalement surbased'unmatériaucartographique. Le préambule prévoitainsi
que
"The Undersigned, Captain W .V. Nugent,
Comrnissioner of His Britannic Majesty, and
OberleutnantH. Detzner, Commissionerof His Majesty
the Gennan Emperor, being appointed by theu
respective Govemementsto mark out a defuiiteboundary
between Nigeria and the Cameroonsfrom Yola to the
Cross River, inaccordancewith the Agreementof the
6th October, 1909, have agreed to adopthe boundary
shown onthe accompanying mapin 8 sheets,subjectto
the subsequentapprovaloftheirGovemements.
A detaiied description of thboundarly ine is given
below LI" (Soulignépar la République Cameroun).
L'objet même de l'accord auquel lesdeux représentants sont parvesorte sur la
carte. Le texte ne fait en réalqu'illustrerle tracé cartographiq,t a donc un
statut mineur par rapport à la carte elle-même.C'est ce que disposeexpressément
l'article21 du traité
"In case the above descriptionof the boundarydoes not
accompanying the presentAgreement, andon whichaare
regarded as fonning an integral part thereof, it is
expresslynderstoodthatthe positionof the boundaryas
shown onthe maps shalldecideany dispute".
3.301 La carte accompagnant le traité est ainsi expressément
intégréeà l'instrument, et acquiert mêmeune valeur conventionnellesupérieureau
texte.
4. L'Echangede lettres franco-britannides 34 mars 1916
3.302 La ligne STRACHEY-PICOTest la premiérequi ait partagé
le Cameroun français et le Cameroun britannique et qui, moyennant les
aménagements apportés pa a DéclarationMILNER-SIMON,deviendrala frontière
intemationaleàla suitedu rattachementduCameroun septentrionalau Nigeria.3.303 Ici aussi, c'estune carte qui sera l'objetmèmede l'Accord
entre Paul CAMBON et Sir Edward GREY. La lettre du premier au second
mentionneen effet:
"[J Le Gouvernement de la République accepte les
limitesqui ont ététracéessur lacarte signéear M.
Stracheyet M. GeorgesPicot dans la réunion du 23
févrierU" (Soulignéparla Républiqudu Cameroun).
C'est surbase de cetteproposition queSir Edward GREYformulera l'accord du
Gouvernement britannique.
3.304 La carte de la ligneSTRACHEY-PICOT, dansla mesureoù
elle est encorepertinentepour le tracéde la frontière actuelle,possèdedonc un statut
conventionnel.
5.La DéclarationMILNER-SIMONdu 10 janvier 1919
3.305 Cette déclaratiest l'instrumentconventionnelde référence
pour la partie septentrionalede la frontiLeetracé qui enrésultene sera plus
fondamentalement modifié,et reste valable, du pointtriple avec le Tchad jusqu'au
Mont Kombon.
3.306 Le texte de l'accord fait référene deux reprisesà des
élémentcsartographiques. Ce texselit eneffe:
"Lessoussignés:
Le vicomteMILNER, Secrétaire d'Etatdu Ministèredes
Coloniesde la Grande-Bretagne,
M. Henry SIMON, Ministre des Colonies de la
République française,
sont tombés d'accord pourdéterminer la frontière
séparant lestemtoires du Cameroun respectivement
placés sous l'autoride leurs gouvernements, ainsi
qu'elle est tracéesurla carte Moisel au1/300,000
annexée à la présentedéclararionet défmiepar la
description également-ci-jo(n nnexeM.C. 107).
L'articl3 de la descriptionjointeàl'accord preuesq
"1. La carte qui a serpour décrirla frontièreest la
carteoiselau 11300,00 s0voir: FeuilleA4. Tschad :éditéele ler décembre1912;
FeuilleB4. Kusseri :éditéele ler août 1912;
FeuilleB3. Dikoa :éditéele ler janvier 1913;
FeuilleC3. Mubi :éditée le15décembre 1912;
FeuilleD3. Gama :éditéele 15mai 1912;
FeuilleE3 Ngaundere : éditéle 15 octobre1912;
FeuilieE2. Banjo : éditéele ler janvier 1913;
FeuilleF2. Fumban : éditéele ler mai 1913;
FeuilleFI. Ossidinge :éditélee ler janvier 1912;
FeuilleG1. Buea :éditéele ler août 1911.
2. A titre d'indicationune carte du Cameroun au
112,000,000est attachéeà la présente descriptiode la
frontière(Soulignépar la Républiquedu Cameroun).
Ces termesamènent à distingue:
- une carte au 1/2,000,000 attachéeà la description textuel"à titre d'indication",
qui ne possède pas une valeuronventionnelle,maisest vraisemblablementdestinée à
donner une vued'ensemblede la frontièrefranco-britannique;
- une carte MOISELau 11300,000composéede dix feuilletsqui, au contraire de la
précédente, forme l'objetde l'accord et permet de déterminerle tracé secteurpar
secteur. Cene carte a donc un statut conventionnel similaireau texte de la
description,ety est annexée amême titre quece texte.
3.307 La cartede la DéclarationMILNER-SIMONconstituedonc
un instrument de référence pourla déterminationdu tracé de la frontière
septentrionale actuelle.a circonstanceque l'Accordde mandat nereproduitque le
texte et non la carte qui, selon le JournalofficieldeaSociété des Nations, n'est
"annexéequ'à ladéclarationoriginale", n'affectepas cettevaleur. C'est d'ailleurs
sur base de la carte MOISEL que les représentants françaiset britanniques
poursuivront la délimitationde la ligne, qui visera à en comger les quelques
inexactitudes. 6. L'Echangede lettres franco-britanniqdu 9janvier 1931
3.308 L'Accorddu 9 janvier 1931 s'inscritdans cette perspective,
puisqu'il portesurune Déclarationdes gouverneursvisant elle-même à fournir une
descriptiondétailléee la frontièredéfindans la Déclaration MILNER-SIMON.
3.309 Aucunemention cartographiquen'est faitedans l'échangede
lettres lui-même. Par contre, la DéclarationTHOMSON-MARCHANDannexée
prévoit quesesdeux signataires:
"Cl sont tombésd'accord pour déterminerla frontière
separant les temtoires du Cameroun respectivement
placés sousl'autorité de leurs gouvernements aimi
qu'elle esttracéesur la cartejoinàecette déclaratioet
définiepar la descriptionégalementci-jointe" (Souligné
par la République duCameroun).
L'expression est similairecellede la Déclaration MILNER-SIMON et, mêmesi les
précisions relativesl'identification exade la cartejointe sont absentes, ily a lieu
de conférerà cette dernièreun statutconventionnel identiqàceluide la description
textuelle.
3.310 La carte annexéeà la Déclaratiode 1930constituedonc un
instment de référence qui complèlta e carte MOISELpour la partie septentrionale
de la frontière. Ici encore, lesaccords de tutelle s'y réferentindirectement, même
s'ilsne la reproduisentpas.
7. La deuxièmeDéclaration de Yaoundé du 4 avril 1971
3.311 La deuxième Déclaration de Yaoundé concerne
exclusivementla frontièremaritime, et ce jusqu'àla limitede trois milles marins de
la limitedesjuridictionstemtoriales du Camerounet du Nigeria. Elle représenteun
instrumentde référence pouc re segment frontalier.
3.312 Or, les deux chefsd'Etatont fait porter leur accosur une
carte, comme il ressortde l'extraitsuiv:nt
"Le 4 avril 1971, la Commissiona reçu des deuxChefs
d'Eut, après consultation des deux Chefs de
Délégations l,esnstmctionssuivantes: 1O) LesdeuxChefsd'Etatsont d'accordpour considérer
commefrontière la lignede compromisqu'ilsonttracée
d'uncommunaccordsur la cane NO3433de l'Amirauté
britanniquejusqu'à la limitedes troismilmarin de la
ligne joignant les points SANDY et TOMSHOT
conformémentau mité anglo-allemandde 1913. Les
deux Chefs d'Etatontporté leur signatusurladitcarte
[-lu(Souligné parla Républiqudu Cameroun).
La carte NO3433 a incontestablementun statut conventionnel, puisqueseul ce
documentpermetde déterminerle contenude l'accord.
3.313 La carte NO3433 serad'ailleursutiliséecomme instrument
de base par la Commission mixtequi s'est réunià Lagosdu 14 au 21 juin 1971, et
qui a prolongéla ligne de délimitationjusqu'au point 20. Elle servira aussi de
document de base à la Déclaration deKano établissant uncouloir où les activités
pétrolièressont interdites, puisque les deux chefs d'Etat se réferentaux bouées
défuiiessurladite carte. En tout état decaucettecartconstitue donc le document
de référence jusqu'au point .
8. La Déclarationde Marouadu ler juin 1975
3.314 La Déclarationde Maroua est le seulaccordintemtional qui
permette de déterminerla frontièremaritime des Etats entre le point 12 mentionné
dans la déclarationde YaoundIIet le "pointG".
3.315 Or, ce point estdéfinà nouveaupar une désignationsur la
carte N03433,commeen témoignel'extraitsuivant :
"ies deux Chefs d'Etat du Nigeria et du Cameroun se
sontmis d'accordpour prolonger le tracé dela frontière
maritime entreles deux pays dupoint 12au point, sur
la carte manne n03433 annexée à la présente
déclaration"(Soulignpar la Républiquedu Cameroun).
De même,la descriptiondu derniersegmentde la frontière,u pointF au pointG, se
lit:
"De ce point F la frontière maritimese dirige au Sud
suivant uneparallèleau méridien08" 25' 00" jusqu'au
pointG de longitude8' 22' 19"E et de latitude4' 17'
00" ainsiqu'ilest indiquésur la cartemarinen03433"
(Souligné parla Républiqudu Cameroun)".Ici encore, c'est la carte 11'3433qui permet de déterminerla portéeexacte de
l'accord,même si lescoordonnées reproduitedans le texte complètenlt'information.
3.316 Cettecarte pennet donc de déterminerl'ensemblede la ligne
frontièremaritime du point 1 au point 20, et du point A au poinG, et possèdeun
statutconventionnelau même titre quelesdéclarationde Yaounde IIet deMaroua.
3.317 En définitive, un examen des principaux instruments
conventionnels pertinents pourla détermiuationde la frontière actuelledémontre le
rôle primordialdu matériaucartographiquedans laprésenteaffaire. Nousavonsainsi
relevé que, pourchacun d'entre eux, unecarte étaitannexéequi avait une valeur
égaleou même supérieure autexte (Accorddu 12avril 1913). Cette circonstanceest
assurément peu communedans les litiges frontaliers. 11importe doncd'endéterminer
les conséquencejsuridiques.
B. - Les conséquence juridiques
3.318 La jurisprudence internationale faitla différenceentre des
cartes annexées à des conventions,et des cartes éditées en dehors de tout cadre
conventionnel. La Chambre l'a très clairement indiquédans l'affaire dDifférend
frontalier:
"En matièrede délimitationde frontièresou de conflit
territorial international,leses ne sont quede simples
indications,plus ou moinsexactes selonlescas:ellesne
existence-un titretemtonai, c'est-à-direun documentleur
auquel le droit international confere une valeur
intrinsèque aux fins de l'établissementdes droits
territoriaux. Certes, dans quelques cas, les cartes
peuvent acquérirune telle valeur juridique mais cette
valeur ne découlepas alors de leur seules qualités
intrinsèques: elle résultede ce que les cartesont été
intégrée psarmi les élémentsui constituentl'expression
de la volontde I'Etatoudes Etatsconcernés.Ainsien
va-t-il,par exemple, lorsqueles cartessontannexées à
un texte oflciel dont elles font parties intégrantes"
(C.I.J.,Rec. 1986, $ 54, p. 582; souligné parla
République du Cameroun).
De même, dansl'affairedel'llede Palmas, l'arbitrMax HUBERconsidère que "Entoutcas unecartene donnequ'une simpleindication
-et encore très indirecte- et, moins qu'ellene soit
annexée à un instrumenjturidique, elle n'a la valeur
d'un instrument de cette nature, [ ] " (Receuildes
Sentencesarbit~k~, vol. ii,p. 853 ;traduit et souligné
par la Républiqudu Cameroun).
L'affai rrative à la Souveraineté sur certaines parcelles frontalière fsurnit
également unprécédent intéressant. Les parcelles relevantde la souverainetéde la
Belgique figuraient sur des cartes incorporéàsla Conventionde délimitationdu 8
août 1843; et c'estnotamment surcettebasequela Cour a constatéla souverainetéde
la Belgique. Dans un article consacréà cette affaireM. Guenter WEISSBERG
souligne que
"In accordance with Article 3 of the Convention, the
descriptive minute, the detailed survey maps and the
topographical maps [-] prepared and signed by the
comrnissionners,remained 'Annexeci'to the Convention
and had 'the same force and effect as though they were
inserted in their enti.ety'"("Maps as Evidence in
International Boundary Disputes : A Reappraisal",
A.J.Z.L.,1963,p. 788).
Ainsi, une cartepeut constituerun titre temtoriallle seule, nonpar sa seule qualité
de carte, maisparcequeles Etatsen ont acceptéle tracé.
3.319 Telle est égalementla position de la doctrine qui s'est
penchéesur la pratique internationale.Dans son étudesur les cartes dans les
questions de frontières,M. Sakeus AKWEENDAfait égalementcette distinction
entre deuxtypesde cartes :
"In somecasesmaps are expressly made an integralpart
of the textto whichthey areattached, whereas inothers
they are merely referred to or mentionedas instruments
consultedby the negociators. In the former case the map
employed should be completely identified in the text,
and a mere mention is insuficient. Further, it is only
the former whichmay be saidto assumethe characterof
primary or original evidence"("The Legal Significance
of Maps in Boundary questions :a Reappraisal with
particular Emphasison Namibia" , B.Y.B.Z. .,1989, p.
209).
Le critèretrès stricténoncpar l'auteur, qui exige plus qu'uns'impimeentionpour
pouvoir conférerà la carte le statutde titre conventionnel,est parfaitement remplien
l'espèce puisqueles parties ont expressément annexléa carte, ou considéré qu'ellefaisait partie intégrantedu traité,ou mêmequ'elleavait la prééminence sulre texte.
Dansde telles hypothèses,SANDIFERrelèveque
"a map of this characterwill take preferenceover many
other maps that may be introduceasevidenceand will
beaccepted asthe best source collateralto the text of the
treaty itself for the determination of the boundary"
(Evidencebefore Intemationaltribunal, Charlottesville,
Univ. Pressof Virginia1975 p. 230).
11 y a donc bien entendu lieu depréférerles cartes intégrées aux instnunents
conventionnelsà toutautredocumentcartographique.
3.320 IIest vraique les exemplesjurisprudentielsoù les partiesont
intégréà une convention frontalièune carte précisantle tracésont peu nombreux.
Cela ne fait que soulignerle caractèreexceptionnelde la présenteaffaire, où fa Cour
disposede plusieurs élémentsui se complètentpour déterminerla frontièEn.tout
état de cause,la jurisprudence considère ql'établissemende cartes constitueun
moyen comme un autre de définirle contenu d'un accord frontalier. Comme le
soulignela Courdans l'affaireduDifférentem'tooriol,
"Les parties auraientpu indiquer les frontières enen
précisant littéralemlt tracéou en portant celui-ci sur
une carte, titre d'illustratioàotout autretitre; elles
auraient pu faire l'un et l'autre1" (C.I.J., Recueil
1994, 51, p.25).
C'estprécisémend tanscettedernière hypothèsel,a plus favorableàune détermination
de la lignedépourvue d'ambiguïté, qse trouveaujourd'huila Cour.
3.321 La carte s'étanvu conférerun statut conventionnelsuit
évidemmentie sort de la conventioà laquelleelle est intégr,t est soumiàetous
les principes qui régissentle droit des traités.particulier, le choix des cartes
pertinentes s'opéreraen fonction des maximes lex posterior derogarpriori et lex
specialis derogargenerali. Ainsi, les cartes annexàel'accord anglo-allemandde
1906 ont évidemmentune valeur moindre que la carteMOISEL annexéeà la
déclarationMILNER-SIMON, qui elle-même aune valeur moindre que la carte
annexéeà la déclarationfranco-britanniqueacceptéedans l'échangede lettres 10
janvier 1931. En ce sens, dans l'affaire du Templede PréahVihéar,la Cour a
considéréque l'accord surune carte supplantaitle texted'un traité parceque lacarte
avait fait l'objetd'uneacceptationpostériau texte. Par ailleurs, la carte433est évidemmentl'instrumentde référence poulre secteurparticulierqu'elle recouvre,
et a la préférencàcet égardsurune cart àplus largeéchelle.
3.322 En définitive, la présencedans le différend Cameroun-
Nigeria de nombreusescartes possédant un statut conventionnel présenun double
avantage. D'abord, elies se révèlentêtreles meilleurs documents qui permettent
d'illustrer trac éxact de la frontièreentre les deux pays. A ce titre, elles feront
l'objetd'une attentiontouteaxticulièrdans le chapitredu présentmémoireconsacré
au détaildu tracé. Ensuite, elles représentent juridiquemlt meilleurepreuve de
l'acceptation par la Nigéria dela ligne frontalière que cet Etatremet en cause
actuellement. A cet égard, leprincipepacta suntservandadoit s'appliqueravec la
même rigueur que lorsqu'ilportsurun texte. De mêmel,e principe d'interprétation
dégagé par la Cour à plusieurs reprisesau sujet de dispositions textuelles peutêtre,
mutatis mutandis, appliquéaux cartes qui font partie intégrantedes traités de
frontières:
"il est naturel que tout article destinéà fmer une
frontière soit, si possible, interde telle sorte que,
par son application intégrale,une frontière précise,
complète et définitive soit obtenue" (C.P.J.I.,
Znterprétm'onde l'article3, paragraphe2, du traité de
Lausanne, Série B n012, p. 20; reproduit dans C.I.J.,
Affaire du Dzfférendtemkorial, Recueil1994, 47, p.
24).
Nul doute que l'abondantmatériaucartographique permette dans la présenteespèce
d'arriver àun tel résultat.
5 3. Les autres cartes
3.323 Par "autrescartes", il faut entendreles cartes et croquis qui
ne sont pas intégrédirectementou indirectementà un instrumentunjiuridique. Ces
documents ne constituent en aucun cas un titre juridique. Comme le précise M.
SakeusAKWEENDA encitantlesproposde Newcombe :
"Maps, when they have no conventional or statutory
signifieance, shoulbe regarded merely as representing
the opinions of thepersons who consmictedthem, [-]
(B.Y.B.Z.L.,1989, p.215).Dans cette mesure, les cartes peuvent néanmoiné s treprises en considératioà titre
probatoire. Dans I'arrét relatif à l'affaire duDifférenà frontalier, insulaireer
maririme, la Cour, renvoyantà l'arrêtde la Chambrede 1986 (Burkina FasolMali),
déclare :
" 'la valeur juridiquedes cartes reste limitée à celle
d'une preuve concordante quc ionforteune conclusion à
laquelle le juge est parvenu par d'autres moyens,
indépendantsdes cartes, (C.I.J., Rec. 1986, 56, p.
583)'"( C.I.J.,Rec. 1992, 316,p. 550)
C'esten qualitédepreuves concordantesque seront examinée lss cartessoumises.
3.324 Les cartes en question constituent néanmoinusn élémend te
preuve à l'appui destitresjuridiques avancéspar ailleurs. Elles illustrentla volonté
initiale, la pratique constanteet la convictiongénérale tates parties que des tiers
quant au tracé de la ligne frontière. Les cartes les plus récentes précisenlta
délimitation surle terrain. Les cartes plus anciennes ou à plus grandeéchelle
confîent l'occupation dela ligne frontière parles intéressés, autorpsbliques ou
personnes privées.
3.325 Or la première caractéristiqudeu matériau cartographique
très diversque la République du Cameroun apu rassemblerest sa cohérence.Toutes
les cartes publiées depuis1914pour la frontière méridionale, depui1 s919et 1931
pour la frontièreseptentrionale, portentla mêmeligne frontière, à trois exceptions
près.
3.326 La Cour est donc dans une situation très différentede
I'affaireduDifférendfrontalier où la Chambreavaitconstaté :
"La documentation cartographique a pris dans cette
affaire des proportionsassez inusitéesau point de créer
un double paradoxe : d'une part la Chambre a devant
elle une masseconsidérable de cartes, croquiset dessins
pour une région dite pourtant en partie inconnue et
d'autre oart aucun tracé frontalier indiscutabne mut
êtredégagé de cet important matériau cartographiqûe".
(C.I.J.,Rec. 1986, 58, p. 584)
Ici, un "tracé frontalierindiscutable"se dégagede "cet
importantmatériaucartographique".
3.327 Pour reprendre trois secteurs qui ont donné lieu à des
incidentsau cours des dernièresannées(Darrak, Kontcha, la presqu'île de Bakassi),toutes les cartes disponibles, qu'ellesémanentdu Nigeria, du Camerounou de pays
ou d'organisations tierces placent les deuxpremières localitéssur le territoire
camerounais et confument ainsi la frontièredélimitésar les accords internationaux
invoquéspar la Républiquedu Cameroun. Seulestrois cartes placentla péninsulede
Bakassisous souveraineté nigeriane.
3.328 On se trouve dans une situation où, pour reprendre les
termes de la C.P.J.I.,
" It is me that the maps andtheir tables of explanatory
signs cannot be regarded as conclusive proof,
independentlyof the text of the treaties and decisions;
but in the present case they confum in a singuiarly
convincing manner the conclusions drawn from the
documentsand from a legal analysisof them; and they
are certainly not contradicted by any document."
(C.P.J.I., avis consultatifdu décembre 1923, Affaire
de Jawom'na, SérieBN08, p. 33).
On peut encore citer, dans le même sens, la constatation faitepar la Commission
judiciairdans l'affairede lFrontièreduLabrador (1927) :
"The maps here reffered to, even when issued or
accepted by departmentsof the Canadian Governemnt,
cannot be treated as admissions bindiig on that
Government; for even if such admission could be
effectively made, the departments concernedare not
shown to.have had anyauthorityto make it. Butthe fact
thatthrough a long seriesof years, and until the present
dispute arose, al1 the maps issued in Canada either
supported or were consistent with the claim now put
the construction put upon the Orders in Council and
statutesby personsof authorityandby the generalpublic
in theDominion" (D.L.R 192,7,p.427).
La Républiquedu Cameroun ne prétendpas que les cartes non conventionnellesont
crééune situation d'acquiescementpar le Nigeria. Mais elle constate que ces
éléments de preuve établissent "the consttuctby persons of authority and by the
general public", de la frontière entrele Camerounet le Nigeria telle qu'elle résulte
desaccordspertinents.
3.329 A ce stade de la procédure,la République duCameroun se
limiteraa un choix de cartes pour confier ses dires. Elle se réserve le droitde
présenterun ensembleplus completde cartessi le Nigeriacontestecesffirmations. A. - Cartes éditéespar les Etats intéressés au règlement
territorial
3.330 Il s'agit de cartes éditédans les puissancescoloniales, les
Etats mandatairesou les parties au présentdifférend. Dressées dans le cadre de
l'exercicede la souverainetéterritoriale, ces cartes présententun intétarticulier,
puisqu'elles reflètenles vues et traduisent les comportementsdes Etatsintéressés.
En revanche, ellessont a prion suspectesde partialité,chaquepartie défendant ses
intérêts.Mais lorsqueles lignesfrontièrescouicident,les cartes éditées prenneutne
valeurprobatoire d'autantplus convaincante.
3.331 Or c'est le cas pour les cartes éditées dans les deux
puissancesmandataires,la France et le Royaume-Uni, de1919à 1945. Onne relève
aucune divergenceentre les lignes frontièrestracéesurles cartes d'origine française
ou britannique(cartesM.7, M.8, et Annexe383, carte M.34). Les seulesdifférences
peuvent tenirà l'échelle utilisou auxprogrèsde la cartographie.En particulier, les
deux localitésde Darrak et Kontcha sonttoujours considéréec somme relevant du
temtoire du Camerounsous mandatfrançais, cependantque lapéninsulede Bakassi
fait systématiquemenptartie du Camerounsousmandatbritanniqueet non du Nigeria.
3.332 La mêmeconstatationpeut êtrefaite pour les cartes éditées
pendant l'administration sous tutelle (1946-1960). Les cartes éditéessont plus
précises.Les frontièrescoüicidenttoujours (carte M.9,Annexe383, carteM.39).
3.333 On accordera une attention particulièreaux cartes publiées
depuis les indépendancespar les services géographiquesdes anciennes puissances
coloniales, puis administrantes. Les services géographiquessuivent toujours avec
attentionla situationsur le terrain, mais n'ontplus aucuneraisond'êtresuspectésde
partialité.
3.334 Ami l'Institut Géographique nationaf lrançais produit une
carte du Camerounau 11500.000'(Annexe ïï).Laqualitédu travailde ce service a
été reconnupar la Chambredans l'affairedu Différendfrontalie r
"[-1 les cartes de 1'IGN offrent les garanties de la
précision technique ainsique de l'autoritéofficielle,
puisqu'ellesontété dressées parun organismeimpartial
directement liés aux autorités administrativesde
l'époque" (C.I.J., Rec.1986, Cj61 et $ 62, pp. 585-
586).Au demeurant, les deux Partiesau présentconflit ont eu l'occasiode manifester leur
confiance à l'InstitutGéographique Nationalp,uisqu'ellesont confiéà cet organisme
le soinde borner la frontièredans leLac Tchad à l'occasion des travaux engagé par
la Commissiondu Bassindu Lac Tchad (AnnexeM.C. 292) (v. supra, chapitre 2,
section3).
3.335 Lescartes allemandes à partir de 1914, britanniquesà partir
de 1960, présententles mêmes caractéristiques de compétenected'impartialité.Elles
reprennent toutesla même ligne frontière,laissantnotammentau CamerounDarrak,
Kontchaet Bakassi.
3.336 Les cartes éditéesdans la République du Cameroun
reprennent lemême tracéfrontalieravec uneconstance qui soulignela cohérenceet la
convictionde la République du Cameroun(carteM.11et Annexe383, cartesM.80 et
M.82).
3.337 Les cartes nigerianesposent des problèmesparticuliers que
l'on examineradansle paragraphe4.
B. - Cartes éditéedsans des Etats tiers
3.338 Les cartes présentéep sar les Etats tiers, sans présenterde
caractère probatoiredirect, participentde la notoriété internationale générdalela
ligne frontière. Elles reprennenttoutesla ligne frontièredéfenduepar le Cameroun.
Ainsi à titre d'illustration,on consultera deux cartes soviétdse 1985et 1989, et
quelques cartesroutières récentessuisseset autrichie~es (carte M.12 et Annexe383,
cartesM.88, M.91 et M.92). Plusieurscartestechniquesaméricaines oné t tépubliées
entre 1967et 1988, notammentauxfinsde navigationmaritime. Elles laissent toutes
la péninsulede Bakassiau Cameroun (carteM.13 et Annexe 383, cartes M.87 et
M.89). On signalera en particulier le croquis publié auxEtats-Unis par "The
Geographer" (carte M.14 et Annexe 383, cartes M.73b et M.73~). Le professeur
BROWNLIEfait ainsi observer :crm ou1cuireou*
,,mm
U. 01w-*
A
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.-- ,--."..-.--- - B
--- ; 1 , --.--- ..
1 "- IraW.,.a,.> " Various categoriesof evidencemay overlap. Thus then
geographer of United States Department of State
publishes material (InternationalBoundaryStudies) ,
which is both official in provenance, since he is an
authorised govemrnentagency, and also export evidence
in ternis of its technical provenance (Afncan
boundaries,op.cir., p.5; soulignépar la Républiquedu
Cameroun).
Cette source impartiale estdonc d'un intérêp tarticulier pour notre affaire. Or elle
confie la frontière internationalegénéralemenrteconnue.
C. - Cartes reproduites par des organisations internationales
3.339 Les organisationsinternationalesconstituent par excellencele
cadre de la reconnaissance internationale,au sens le plus généraldu terme. Les
débatsqui s'y déroulentpermettent aux unset aux autres de prendre position, avecles
conséquences que cela comporte. Or, du fait du. statut internationlu territoire
camerounais, placé d'abordsous mandat, puis sous tutelle internationale, plusieurs
cartes ont étédressées, soit parles puissances adrninistrantesà destination de la
S.d.N., puis de l'O.N.U., soit directement sous la responsabilitéde 1'O.N.U. (carte
M. 15).
3.340 On accordera une attention particulière aux cartes dresséàs
la veille des indépendances ettémoignentainsi de la consistance territoriale de
l'"entitévplacée sous administrationinternationale:témoignagedécisifau regard de
la date critique et pour l'application du principe de I'utipossidetis; mais encore,
reconnaissance internationale de l'exactesouverainetéterritoriale des nouveaux Etats
(carte M.16a et Annexe383, carte M.48).
3.341 Les cartes dresséespar 1'O.N.U. àl'occasion desplebiscites
au nord et au sud Cameroun donnentla représentationexactede l'assiette territoriale
des temtoires sous Nteiie. Ces cartes, établies par l'organisatiointernationaleavec
la collaboration des deuxpuissancesadministrantes,n'ont été contestée nsi lors de la
proclamation des résultats du plebiscite, ni lors de la procédure introduite
ultérieurement devantla Cour internationale de Justice. Ellesincluent clairement
Darrak, Kontcha et la presqu'ile de Bakassi dans le territoire de la République du
Cameroun (cartesM.16b et Annexe383, carte M.49)..
RESU1.T OF Il FEBRUARY 1961 PLEBlSClTE IN SOUTHERN CAMEROONS
lofes Cast for I'utt~r Cnst /or
I'!r1,iscite Bistricl FIlx'.ST .Al. TF:/x'.Y:l7'll.lSl<CO:VD (11,Tt.'!x'.\'~l-Il'fi;
(Frrlerat~or~ of .Y;<?ri:i) (t?t~/111!~1if.Car~~t~rcjun)
1. I'IC 7'0H1.4 :outh- West 2,552 .?7.56
2. South- Ens t 1..329 4,670
3. .Vorth- Wcs 1 4,744 4.205
4. .Vor(h- kas t 3.2RI 9.31
5. 1.4: .Varth- !:as 1 9.460 11.901
6. .Verth- West 14,73,5 55.5
7. South- East 6,105 12.827
8. South- West 2,424 2,227
9 4 FR: Wrs t 2,03 9 8.505
1O. .Yorlh 5.432 0.410
68.5 8.175
Il. South
12. Ras t 1,694 10.1 77
13. A 4 : .\orth 8.073 18, 8.3"
14. East 1,822 17.856
15. Central Wesr 1.230 18.027
16. Cer~tral East 52 9 18.1 93
17. Wes t 467 16.142
18. SOUth 220 19.420
19. WU.w .\orth 1.485 7.312
20. Central 3,644 3.211
21. Eas~ 1.518 13,'1:33
22. Wes t 2.137 3.449
23. .\KA MBE: !Vort,h 5,962 1.917
14. East .3.645 5,896
25. Central 5,059 4.180
26. South 7,051 2, *21
TO T.41. 97,741 2.3.7.?71
kt21 nilrnl~r of rrgisler.rf1 vur*.rs: i49.652
701al niinit~r ri! valicl votes cac;!: 331,312
i hl 3.342 On noteraune carte produite devantla Cour internationalede
Justice en 1962 dansl'affairedu Camerounseptentnoml. Elle exprime les vuesde la
puissance administrante aprèslevéede la tutelle internationale et dansle cadre d'une
procédurejuridictionnelle.Elle confirme les thèsesdu Cameroun quantau tracéde la
ligne frontière(Annexe383, cane 51).
Le Ni~eria et lescartes
9 4-
3.343 Le comportement du Nigeria au sujet des cartes frontières
présenteun intérêt particulier.
3.344 La République duCameroun n'a relevéaucune protestation
émisepar le Nigeria depuis 1960au sujet des nombreusescartes éditées soit dans le
Cameroun, soit dans les Etats tiers,àce sujet. Une telle absencede réactiontraduit
la conviction, chez lesautorités nigerianes,que la ligne frontièreportéesur les cartes
en question était exactement reproduite. Sans constituer un acquiescement à
proprement parler, le silencedu Nigeria contribue de manièreimportante à établirla
notoriété d'uneligne frontièreincontestée.
3.345 Les cartes éditées au Nigeria, parfoispar des autorités
nigerianes,constituentdes élémentd se preuveplus importants.
3.346 Ces cartes sont d'origine très diverse.Les unes sont des
cartes privées,notammentroutières. Ellesindiquent toutes,jusqu'à unedate récente,
la ligne frontière décrite dansles conclusions de la Républiquedu Cameroun (v. ci-
après)et placent toutes les troispoints de Darrak, Kontcha et Bakassi en territoire
camerounais(Annexe383, carte M.60).
3.347 Les cartes éditées parles services officielsnigerians ont une
qualité probatoire spécifiqueR. eflétant lesvues tant deservices géographiquesque
des servicestechniques concernés,ces cartes confient la souverainetécamerounaise
sur Darrak, Kontcha et Bakassi. Elles confortent la frontièreinternationale reconnue
(carte M.17 et Annexe383, cartesM.55, M.57 et M.71).
3.348 Le cas spécialdes cartes ou atlas scolairesmérite mention.
Ces canes, dressées sousl'autorité del'administrationscolaire nigeriane, enseignent
aux jeunes habitantsde la régionfrontièreleurs droits et devoirs de citoyens. Elles - L- ---","
....-W.-*,.,,:--.. rsyj
Du--.* .k . \i -
.- - . .,% ---S..
-4 --*
II -,C.-. . ..
.--rangent clairement Bakassi en territoire camerounais (Annexes383, cartes M.81, 84
et M.86).
3.349 La Républiquedu Cameroun n'a relevéque trois cartes se
prononçant en sens inverse : une carte routièreprivée;une carte de 1'Etatde Cross
River; une cane administrativedu Nigeria.
3.350 La carte routière est récente : 199? (Annexe 383, carte
M.93a et M.93b). Elle a certainementreprisles indicationsde la carte administrative.
3.351 La carte intitulée "CrossRiver State"date de 1991 (Annexe
383, carte M.90). Elle a sans doute été dressée d'aprè ls carte administrative que
nousallons maintenant examiner.
3.352 La carte intitulée "AdministrativeMap of Nigeria" trace la
ligne frontière le long du Rio del Rey et attribue ainsi la péninsulede Bakassi au
Nigeria (carte M.18a).
3.353 Elle comprend, non une réserve(ou "disclaimer") mais un
avertissement intitulé"BoundaryNote" :
"Boundariesas shownon this map are approxirnate.Any
additional information relating to any sector of the
boundaries should be forwarded to the surveyor general
of the Federation Lagos, Nigeria".
La carte est "Drawn and reproduced by Federal Suwey, Lagos". Ils'agit donc
d'une carte officielle, établie par des autorités cartographiques fédéradlusNigeria
(cartouchecarte M. 18b).
3.354 On fera observer que cette carte récenten'a guère devaleur
probatoire. Elle a été dressée aprè que le contentieuxterritorial relatifa péninsule
de Bakassi se soit développé. Postérieure à la date critique, elle n'a pas contribàé
fixer l'état du droiten matière territoriale, Mais encore, postérieàrla naissancedu
litige, elle a été dresséeendant une périodesuspecte. Elle relèvede ce que la Cour
a appelé "les mesures qui auraient été rises en vue d'améliorerla position en droit dela partie intéressée" (C.I.J., Affaire des Minquiers etdes Ecrehous,Rec. 1953, pp.
59-60) et ne saurait doncêtreprise en considération.
3.355 On peut se demander si cette 10ème éditionde la carte
administrativedu Nigeria n'a pas été dressé pour les besoinsde la cause. Il s'agit en
effet d'une sériede cartes éditéesd'abord par les autoritésbritanniquesd tumpsde la
colonisation, puis par les autoritésnigerianes. Or la 3èmeédition, datant de 1956,la
4èmeédition,datant de 1960et la 7ème édition datant de 1972, placent la péninsule
de Bakassi en temtoire camerounais. La Républiquedu Cameroun n'a pas retrouvé
les autres éditionsde cette carte. Mais tout laissesupposerune continuitésur trente
années, rompue parla 1Oème éditionen 1991(cartesM.19, M.20 et M.21).
3.356 Considéréd eans sonensemble, la série de cartesdressées par
le service cartographique fédéralde Lagos indique donc un revirement très récent
dans la positiondes autorités nigerianes.Ce revirementne peut évidemment conforter
les thèses nigerianes. Bien au contraire, soulignant une rupture dans les positions
cartographiques nigerianes, il confie que les autoritésnigerianes, jusqu'au début
des années1990, étaient persuadéeq sue la frontière internationalelaissaitBakassà la
Républiquedu Cameroun.
3.357 La jurisprudence internationale reconnait une valeur
probatoire certaine à un matériau cartographique cohérens tur toute la période
critique. Ainsi, dans l'affaire deTaba, le tribunalarbitral obseràeplusieurs reprises
la concordance de toutes les cartes produites pendantla période critique(de 1906 à
1982)pour conforter ses conclusions.Ami, le tribunalnote :
1
"the rneasure in question was takeaview to improving the legal posofthe Party
concerned"."Several maps produced from1915show pillars at the
Egyptian locations, especially the 1915British map and
the maps of the survey of Egypt of 1926and 1935-1938.
dating from 1906 through the entire periode of thenal
Britishmandate over Palestineup to82,on which the
boundary line of 1906is indicated (approximatively25
maps), show the same direction and shapeof this line as
does the line formed by the existing pillars. Slight
differences which can be obse~ed may easely be
explained by the inexactnessof several maps. No maps
made before 1982 shows a line similar to the one
correspondingto Israëls loca~ifor pillars 85, and
8T'(BounduryDispute concerningthe Tubaarea, Sept.
29, 1988,I.L.M .,l. XXVII,n06, nov. 1988,5 198,
pp. 1477-1478; souligné par la République du
Cameroun; cf. auss$ 195,p. 1476et 3 207, pp. 1480-
1481).Le tribunalarbitraldans l'affairCanal deBeagle observe:
"Where there is a defmite preponderance on the one
side-particularlyif it is a rnarked preponderance-
and while of course every map must be assessedon its
maps, relevantfor the particular case, tell the same
story-especiallywhere someof them emanatefrom the
oppositeParty, or from third countr-ecannot but be
considerable, either as indicationsofral or at lest
widespreadrepute or belief, or else as confiatoof
conclusions reached, as in the present case,
independentlyofthemaps" (Sentencedu 18 avril1977,
I.L.M., 1978 ,139).
3.358 La Républiquedu Camerounconstateque toutes les cartes,
sans exception, dressées parou dans les anciennes puissances coloniales ou
adminisuantesconfient la frontièreconventionnelle exposeans ses conclusions.
Elle constateque toutes lescarsan,sxception,dresséesparou dans des Etats tiers
ou dansle cadredesorganisationsconfient laditefrontière.Elleconstate quetoutes
les cartes, sansexception, drespar ou dansle Nigeriajusqu'à la fin des a80ées
confient laditefrontière. Elledemandeàla Courde prendreen comptecette
"1-1preuve concordantequi conforte une conclusioà
laquelle le juge est parvenu par d'autres moyens"
(C.I.J., Affaire dufférendrontalier,Rec1986, 56,
p. 38).
SECTION 6. "UT1POSSIDETIS JURIS"ET DATE CRITIQUE
3.359 La genèsedu titre du Camerounsur les territoires inscrits
dans ses frontièresa été précide manièreclaire et incontestabledans le présent
chapitre edans le chapitreprécédent de e émoire.11n'est ici nullement question
d'une frontière impréciou litigieuse. Les frontièresontamplement reconnues
par les deux Parties, et cette reconnaisaétéeà la foisexplicite et implicite.La
délimitationde la frontière a étéclairementfixéepar des titres documentaires
incontestablesqui s'imposentàl'unecommeà l'autredesPartiesau différend.3.360 Le principede l'ai possiderisjuris est tellementconnuqu'il
est inutile de le présenteren détail dans ce mémoire.Il vise à la sécurité,la
prévisibiiitet l'immuabilité deslimites du territoire telies qu'elles existaientau
momentde l'accession à l'indépendance.
3.361 L'acceptation générale de l'uti possideris juris est
indiscutableLe ProfesseurBROWNLIEécritque:
" ... the general principle, that pre-independence
boundariesof former colonial administrativedivisions1
subject to the same sovereign remain in being, is in
accordancewith good policy and basbeen adopted by
governmentsand tribunalsconcernedwith boundariesin
Asia and Africa." (BROWNLE, Princivles of Public
InternationalLaw (éd.&me, Oxford 1990),p. 135).
3.362 Selon les termes de la neuvième édition du traité
d'OPPENHEIM :
"Thisdoctrineineffectconfiatesboundary and territorial
questions by assuming as a governing principle that
boundariesmust be as theywere in lawat the declaration
of independence." (OPPENHEIM'S international Law
(Jenningset Wattséditeurs,9èmeéd., 1992). vol. 1,$
235, p. 669).
OPPENHEIM déclareen outre que la doctrine d'uti
possidetis "...aptly enshrines the vital principles of
stabilityof state boundaries."bid.,p.670).
A. - L'inviolabiittdes frontièrespost-coloniales
3.363 L'arrètde 1986 de la Chambrede la Cour, dansl'affairedu
Différendfrontalier, traite plus explicitementde l'un'possidetis que toute autre
décisionjuridictionnelle récente,(C.I.J. arrêt du22 décembre 1986, affaire du
Dirérendfrontalier, Rec. 1986).L'arrêtabordait par ailleursle problème particulier
de l'extension du principe, qui s'appliquait traditionnellement à d'anciennes
délimitations administrativesnternes, "relevanttoutes de la mêmesouveraineté,"à
des indépendancesacquise sl'égardd'empirescoloniauxdifférents.3.364 L'arrêt énonça lits fondementsoriginairesdeI'possideris
juris:
" ...sous son aspect essentielceprincipe vise, avant
tout, à assurer le respect des limitestemtoriaies au
moment de l'accession Iil'indépendance. Ces limites
temtoriales pouvaientn'êtreque des délimitationsentre
divisions administrativesou colonies, relevant toutesde
la même souveraineté. Dans cette hypothèse,
l'application du principe d'upossidetisemportait la
transformation de limites administrativesen frontières
internationalesproprementdites.Ibid.p. 566).
3.365 La Chambre, dans l'affairede 1992 du Différendfrontalier
terrestre, insulaireet maritimetrai auéssi largementde la genèsede la docuine.
(Diflérendfrontalier terrestre. insuiaire et maritim(El Salvador/Honduras ;
Nicaragua(intervenant))R, ec., 199pp. 386-388).
B. - L"W possidetisafricain"
3.366 Il restà savoir ce que signifie exactemeutipossidetiset
quelles sontles modalités d'applicatdu principe. La doctrine, telle qu'elle est
appaxueà l'origine s'appliquaitàl'ancien Empire espagnol d'Amérique centeltedu
sud qui avait, évidemment, comportérelativementpeu de frontièresinternationales
avant son éclatemenett I'indépendance consécutvees Etatsd'Amériquelatine. Elle
est donc néedans le contextede délimitations administratives internes rede la
mêmesouveraineté. Le mêmeconcept devait cependant êtreutilisé dans des
circonstances où existaient plusieurs souveraine-éscomme c'était lecas dans
l'Afriquecoloniale.
3.367 La situation entre le Cameroun et le Nigeria en 1960
présentaitcependantdes particularités marquéesl:e Nigeria était devenu indépendant;
le Camerounavait accédé àl'indépendanceen s'émancipantde la tutelle française.
Le Cameroun septentrionalet le Cameroun méridionalsont restéssous la tutelle
britanniquejusqu'à juin et octobre961, quand ils ontétérattachésaux nouveaux
Etats indépendantsdu Nigeriaet du Cameroun. La situation pouvait difficilement
êtreconsidérée comme identique auxmodèleslatino-américains classiques de I'uri
possiderisjuris.3.368 Dans l'affaire du Différefrontalier la Cour a analyséce
que l'on pouvait qualifier d'extension naturelou d'évolutionde la doctrine "uti
possidetis latino-américain-"laquelle étaità l'origine naturellementlimitéeà son
application aux frontières entre de nouveaux Etats ayant récemmentaccédé à
l'indépendance d'unepuissancecolonialeou impériale souverainecommun eà savoir
l'Espagne.
3.369 En 1986 la Chambre a été tout à fait explicidans son
raisonnement :
"Les limites territoriales donil s'agit d'assurer le
respect peuvent également résulter de frontières
internationales ayant forméséparationentre la colonie
d'un Etat et la colonie d'un autreEta.....ou entre le
temtoire d'une colonieet celui d'unEtat indépendant u
d'un Etat soumis à protectorat mais ayant conservésa
personnalité internationale."CI., arrêt du 22
décembre 1986, affaire du Différendfrontalier, Rec.
1986 ,. 566).
La Chambre areconnu le besoin de formuler "une règlede
3.370
portée générale"lorsqu'ellea déclaque :
"Il faut voir, dans le respect par les nouveaux Etats
africains des limites administratives et des frontières
établiespar les puissancescoloniales,non pasune simple
pratique qui aurait contribuéà la formation graduelle
d'un principe de droit international coutumier dontla
valeur serait limitéeau continent africain comme elle
l'auraittéauparavant à l'Amériquehispanique, mais
bgénérale. (Ibid., 565).rique d'une règlede portée
3.371 Cette règle aétéconsacréeen 1964 lorsque l'Assembléedes
Chefs d'Etat et de gouvernementde l'Organisationde l'Unitéafricaine, tenue au
Caire, a adoptéla "résolutiodu Caire" dont lepassagepertinentest rédiainsi:
"Considérantque les problèmes frontaliers sont un
facteurgraveet permanentde désaccord,...
"Considéranten outre que les frontières des Etats
africains, au jour de leur indépendance, constittneu
réalité tangible. "2. Déclaresolennellementque tous les Etatsmembres
s'engagentà respecter les frontièresexistantau moment
où ils ontaccédé l'indépendance . '
3.372 La signification de cette résolutionne pouvait étre plus
claire.La Chambre de la Cour dans l'affaire Burkina Faro/Mali a décrit cette
évolutiondela manièresuivante :
"A cet égard aussi, par conséquentl,es nombreuses
affirmations solennelles relativesà I'intangibiiitédes
frontièresqui existaient au moment de l'accession des
Etats africains à l'indépendance, émanant tantôt
d'organes de l'organisation de l'Unitéafricaine elle-
même,ont manifestementune valeur déclaratoireet non
pas constitutive: elles reconnaissentet confirment un
principe existantet ne préconisenpas la formation d'un
principe nouveauou l'extension à l'Afriqued'une regle
seulementappliquéej,usque là, dans un autrecontinent."
(C.I. ar.ê,tdu 22 décembre1986,affairedu D~fférend
frontalier, Rec. 1986,p. 566).
3.373 Faisant particulièrement allusiànla résolutiondu Caire, la
Chambreajoutait que :
"La Charte de l'organisationde l'Unitéafricainen'a pas
négligé le principe deI'utipossidetis, mais elle ne l'a
qu'indirectement évoqué en son article 3 aux termes
duquel les Etats membres affirment solennellementle
principe du respect de la souverainetéet de l'intégrité
temtoriale de chaque Etat. Mais dès la première
conférence au sommet qui suivit la création de
l'organisation de l'unité africaine,les Chefs d'Etat
africains, par leur résoluti(AGHIRés.16(1)),adoptée
au Caire enjuillet1964,tinrent à préciseret à renforcer
le principede I'uripossidetisjuris qui n'apparaissaitque
de façon implicitedans la charte de leur organisation."
(Ibid..
3.374 Dansl'introductionde son AfricanBoundaries,le professeur
BROWNLIEénonçaitclairementles relations entre les formes latino-américaineet
africaine del'utipossidetisjur:s
2
LesreprésentantuNigeriaet, bienentendu,Camerounontvotésansréserve efaveur
decetterésolution. "Theobjectof the Cairo resolutionwasrealisticenough:
decolonization was not to be the occasion for new
sourcesof doubt and controversy. This policy doesnot
and cannot avoid al1disputes. Thus when the colonial
alignmentwas obscure, or remainedundemarcated, the
inheritorswouldfacethe sameboundaryproblems --but
no more. The principle formulated inthe 1964 O.A.U.
resolution is by no means novel. In the nineteenth
century the new states of LatiJi Amenca adopted the
principleof uti possidetisuris."
3.375 Les différends séculaires restaient des différends sécula ires
l'objectif généraél taitd'en éviter denouveaux. Dans le cas présent, l'applicabilité
du principe est manifeste. Au momentdes indépendanceso , u tout au moinslors de
la dernière dévolutiondu temtoire sous tutelle anciennement sous administration
britannique, ni le Camerounni le Nigena n'alléguaientl'existenced'un quelconque
différendde "délimitation" ou de "frontière"entrele Camerounetle Nigeria.
3.376 Le seul différendexposéle fut dans le cadre de la requête
déposéepar le Cameroun en 1961 contre le Royaume-Uni aux fins de faire
reconnaître que l'administration britanniquedu Cameroun septentrional avait été
insatisfaisanteou inadéquatepour diverses raisons,et que lesrésultatsdu plébiscitde
1961 en avaient été affectés. Cette requêteé atérejetéein Iiminelitis par la Cour,
(C.I.J., arrêt, 2 décembre1963, Affaire du Camerounseprentnonal,Exceptions
préliminaires, Rec. 1963, pp. 24-26), non pour des questionsde fond mais pour des
motifs d'irrecevabilité, car"tout arrêtqu'elle [auraitpu] prononcer [aurait étés]ans
objet." (Ibid., p. 38).
3.377 L'acceptationpar le Camerounde l'arrêt de la Courde 1963
du Cameroun septentrionai lndiqueclairement quel'affaire est close. Le Cameroun
n'a pas réitérésa réclamation et a étélié parl'arrêt dla Cour pendantplusde trente
ans. Si le Cameroun contestait toujoursle transfert de l'ancien Cameroun
septentrional au Nigeria, ce serait le Cameroun qui chercherait à agrandir son
temtoire vers l'ouest etnon le Nigena qui chercheraità étendreson temtoire à l'est.
Tel n'estpas le cas.
3
BROWNLIE,African Boudaries (1979), pp. 11-12. Le professeur BROWNLIE
poursuivai:"Thishadanelementessentiallysimi10rtheprincipleof theCairoresolution
in thatthe successorStatesto the SpanishEmpirewerepresumedto possesstheparcelsof
temtoxy representedby theformeradminisuativedivisionsof that Empire.... The
experienceithinLatinAmericaandAsia abundanllyconfimisboththegoodsenseof the
principleandiu inevitablelimitations: it doesnoterasethe existingagendaof disputes."
Ibid.p. 12(notnirbasde lapageomise).1 6 2. La "datecntiaue"
3.378 La doctrinede la "datecritique" fait partie des théoriesqui
ont fait l'objetde plusieursinterprétationsdifférentElle peut signifier querien ne
peut plus êtrepris en compte après cettedate. Plus généralemente ,lie peut être
utilisée"as the critical momentor cntical period in relation to a particular dispute"
(OPPENHEIM'SIntemational Law, vol. 1,5 273, p. 711).
3.379 Cependant aux fins de la présenteaffaire, sa signification est
simple. Sa fonctionest cellequ'avait présentéterès6loquemmentle Juge Su Gerald
FITZMAURICE dans sa plaidone oraledans l'affaire des Minquierset Ecréhous,
(C.I.J., arrêt,17 novembre 1953,Affairedes Minquierset EcréhourR , ec., 1953, p.
47), dans laquellils'estprononcéainsi :
" ...the theory of the cntical date involves... that,
whatever was the position at the date detennined to be
the criticaldate, suchis stillthepositionnow. Whatever
were the nghts of the Parties then, those are still the
nghts of the Parties now. If one of them stiü had
sovereignty, it has it now, or is deemedto have it. If
neither had it, then it now ..The whole point, the
whole raisond'êtreo,f the criticaldatemleis, ieffect,
that tirne is deemed to stop at that date. Nothing that
happensafterwards canoperateto changethe situationas
it then existed. Whateverthe situationwas, it is deemed
in law still to exist; and the nghts of the Partiare
dam 1edbyOPPENHEIM'S International Law, $ 273,64, cité
pp.710-11). '
3.380 Le conceptde la fixationdu temps parladoctrinede la "date
critique" a donc une fonctionpresque analogue à l'applicationdu principe de I'uti
possidetis.La Chambrea précisé dans l'AffaireBurkinaFaso/Malique:
"le droit internatio-aet par conséquentle principede
I'uripossideris- est applicableau nouvel Etat (entant
qu'Etat) non pas avec effet rétroactif mais
immédiatemene tt dèsce moment-là. Il lui est applicable
existantà,ce'moment-là.'àLe'principe de I'utipossidetisal
gèle letitre temtonal ;iiarrêtela montre sans lui faire
remonter le temps." (C.I.J.,arrêtdu 2 décembre1986,
affairedu D~fférendfrontalieRr,ec. 1986,p. 568).
3.381 Le processus mène donc à ce que la Chambre a appelé
"l'instantanétemtonal' à la date critique", "la "photographiedu temtoirà"la datecritique." (ibidDans l'affaire de 1992 duDifférendfrontalierterrestre, insulaireet
maritime(ElSalvador/Honduras ;Nicaragua(intervenant))u , ne autre Chambrede la
Cour a traitéde la questionde la "date critique" dans son rapport avec la règlede
l'mipossidetisjuris. Rec. 1992,p. 40").
3.382 La seuledatepouvantservirde "datecritique"aux finsde la
frontière camemuno-nigériane dans son ensemble est la dernièredate possible à
laquelleont étéfuréesles relationsjuridiques entre lesdeuxEtats: la àalaquellele
temps est supposé "s'arrêter." Cette date n'étaitpas celle de l'indépendance du
Cameroun ni du Nigeria. Celieci ne concernaitqu'une partiede la frontière.
3.383 La date doit donc êtrela plus tardive des deux dates
auxquelles les deux Parties distinctes des anciens Cameroun septentrional et
méridionalont étérespectivement rattachées auNigeriaet au Cameroun. Etant déjà
des Etats indépendants,ces derniersonetn fait acqu-par une forme très particulière
d'acquisition temtoriale - des temtoires administrésauparavant dans le cadre
d'accords de tutelle (et avant cela, de mandatLe fait que le Nigeria ait acquis le
Cameroun septentrional leler juin 1961 et le Camerounle Camerounméridionalle
ler octobre 1961compliqueencorela question -mais seulementpour un court laps de
temps. La frontière unitaire etcomplèteentre le Camerounet le Nigeria n'a existé
qu'à partir de la plus récente de cdeux dates. Toutefois,ces deux opérations ont
fait partied'un seulet même processus.
3.384 Le ler octobre 1961est donc la seule date qui ait mis un
terme au processus collectif de décolonisationet d'autodétermination, et ui donc
peut être considéré comme la "date critique" aux finsde déterminerles frontières
dans cene affaireen liaisonavec leprincipeutipossideris.
5 3. Une frontièreterrestre fermement établieet maritime
partiellementétablie
3.385 Il en résulte quesi le Nigeria conteste la validité dela
frontière terrestre entre leCamerounet lui-même, il esttenude respecterla situation
juridique existant au moment précisoù la frontière a été constituéc eomme une
frontière totale. Or il ne s'estrien produit depuisle ler octobre 1961qui ait modifié
ou invalidéle titre valablereconnudu Cameroun sur sontemtoire - titre qui n'a pasétésimplement reconnu par touslesEtats,y comprisle Nigeria, mais qui a aussi été
précisémentconfié par la cessationdes accordsde Nteiie, décidpar les Nations
Unies à cettedate précise.
3.386 La frontière maritimevers le large a auété délimitée par
une action des plushautesautoritésde chaqueEtat, quiont conunuaccorden 1975.
Cette frontière estelle aussi incontestaLeereste de la frontiè-pour les zones
économiques exclusives et le plateau continental des deuxEta-sreste à déliter
entre eux. CHAPITRE4
LE TRACEDE LA FRONTIERETERRESTRE SECTION 1. LES DlFFERENTS SECTEURS DE LA FRONTIERE
4.01 Dans la section 2 du chapitre 2 du présent Mémoire,la
Républiquedu Cameroun a décrit l'histoirecomplexe de la délimitationdes 1650
kilomètresde frontièreterrestre entre le Camerounet le Nigeria.
4.02 Cene complexité tient avant tout à l'histoire coloniale
compliquéede la région quis'est traduite par un double éclatement : de l'ancien
"Kamemn"allemand d'abord, entre la France et la Grande-Bretagneau sortir de la
première guerre mondiale ;de l'ancien Cameroun britannique ensuite, dontla partie
méridionalea rejoint la Républiquedu Cameroun en 1961 tandis que sa partie
septentrionale était rattachéeu Nigeria.
4.03 Cette double partition a des conséquences directes surla
nature mêmede la frontière actuelle entrele Cameroun et le Nigeria qui résulte de
l'addition de secteurs délimités à des époques différentes et selon des procédés
juridiques divers.
4.04 A cet égard,l'affaireen examen se présente sousun jourtrès
différentdes divers différends frontaliersou temtoriaux que la Cour a étéappelée à
trancher au cours des dernières annéesA . insi dans les affairesdu Dlfférendfrontalier
entre le Burkina Faso et la Républiquedu Mali ou du D~~érendfronfalietrerrestre,
insulaireou maritimeentre El Salvador et le Honduras, la Cour s'est prononcée sur
des litiges mettant aux prises des Etats nésde l'éclatement des Empirescoloniaux
français ou espagnol, dans lesquels elle a dû déterminerles nouvelles frontières
internationales "par application du principe généralementaccepté (...) de l'uti
possidetis juris en vertu duquel les frontières devaient correspondre auxlimites
administratives coloniales" (arrêtdu 11 septembre 1992, affaire du Dgfférend
frontalier terrestre, insulaireet maritime, Rec.1992, p. 380 ; v. aussi l'arrêtdu 22
décembre 1986, affaire du Différendfrontalier, Rec. 1986, pp. 564-565). Au
contraire, dans l'affaire du Différendterritorial, le différendentre les Parties avait
"pour toile de fond une longue et complexe histoire d'activités consulaires,
diplomatiqueset administratives" (arrêd t u 3 février 1994,Rec. 1994, p. 17) mais la
Libye et le Tchad avaient toujours appartenu à des empires coloniaux distinctset laCour a pu considérer que leur différend était "réglé de manière concluante p lar"
Traité franco-libyendu 10août 1955(ibid., p. 38).
4.05 La présente affaire s'apparenàel'un ou l'autrede ces cas de
figure suivantle secteur frontalier qui esten cause.
4.06 Dans le sud, c'est-à-dire en ce qui concerne tout le secteur
frontalier allantde la meràla confluence de la rivièreGamana avec un petit affluent
qui prend sa source dans les montagnes Wanya, la Sama, lieu marqué parla borne no
64 implantéeen 1913, le mandat puis la tutelle britanniques n'ont constituéqu'une
parenthèse avantle retour du Cameroun méridional à la Républiquedu Cameroun en
1961.
4.07 Au contraire, dans le nord, depuis le point triple avec le
Tchad dans le Lac Tchad, jusqu'au Mont Kombon, la situation est inverse. La
partition de 1916, reconnue en 1919 consacrée parla S.d.N. en 1922 a perduréet
n'est plus remise en cause aujourd'hui. Le rattachement de l'ancien Cameroun
septentrional britannique au Nigeria est un fait acquis. En conséquence,la frontière
résultedes accords franco-britanniquesde 1919et 1931(qui, sur un bref segment, ont
confirméla limite anglo-allemande antérieure).
4.08 Dans les deux hypothèsesévoquées ci-dessus (pars. 4.06 et
4.07), le titre territorial des deux Etats est fondé essentiellementur des accords
internationaux passés à des époques différentes par les anciennes puissances
coloniales, qui ont été confirmés par divera sctes de reconnaissance et par les
effectivitéssur le terrain.
4.09 A l'inverse, le secteur frontalier intermédiaire,celui qui est
situéentre la borne no 64 et le Mont Kombon, reflète ladélimitationinterne, décidée
par le Grande-Bretagne avec l'accord dela Société des Nations puis des Nations
Unies, afin de séparerle Cameroun septentrional d'une part du Cameroun méridional
d'autre part, ces deux parties du territoire sousmandatbritannique étant rattachés
deux provinces différentesdu Nigeria et administréesde manière distincte.
4.10 Les trois segments de la frontière, dont la fixation a
correspondu à des circonstances historiques très différentes, seront analysés
séparément dansle présent chapitre. En outre, étantdonné la contestation
particulièrement virulente parle Nigeria de la portion la plus méridionalede la
frontière et l'intensitédu différend concernant l'appartenancede la péninsule deBakassi, il a paru opportunde consacrer desdéveloppementsdistinctsau secteur allant
de la bome no 64 à la Cross River d'une partetà celui allant de celle-àila mer,
d'autre part.
4.11 Seront doncanalysésen quatresections,du nord au sud :
- le secteur de la frontière allantdu point triple sur le Lac Tchad auMont Kombon
(section2),
- celui qui va du Mont Kombon à la borne64 (section3)
- puis le segment allant dela bome 64 àla Cross River (section 4)
- enfin celui qui va de la Cross Riverà la mer et qui établit l'appartenance dla
péninsule deBakassiau Cameroun(section5).
SECTION2. LA FRONTIERE SEPTENTRIONALE, DU LAC
TCHADAUMONTKOMBON
4.12 Une partie essentielle du différendfrontalier concerne la
frontière septentrionale du Lac Tchad au Mont Kombonqui marque la limite nord-
ouest du Cameroun et nord-est du Nigeria.
4.13 Depuis février 1987,on assistà une série d'arraisonnements
de navires camerounais ou d'actes d'occupation d'îlescamerounaisespar les forces
nigérianes(v. "Chronologie des incidentset violationsdu territoire camerounais par
les autoritéset les troupes nigerianes",MINDEF/100, pp. 4-5. et infia, chapitre
6, section 2). En particulier, lesîles Darrak sont occupées novembre 1987.
4.14 Par ailleurs, lesincidentsfrontaliersse sont multipliés toutle
long de la frontière terrestre septentri(v. infra, chapitre6, section2).
4.15 Les autoritésnigerianes ont traduit en revendicationd'ordre
juridique ces voies de fait jusqu'alors non accompagnéesde prétention territoriale
expresse. En réponse à une note verbale envoyéepar le Ministre des relations
extérieures du Camerounle 11 avril 1994 (No771CFIDIPLIDIISDAFlA0, AnnexeM.C. 355 à la Requête additionnelle), l'ambassadeur nigérianu Cameroun affirme
que :
"It is both unforninate and unacceptable that Darrak
which has always been partand parcel of Wulgo District
of Ngala local Govemment area of Bomo State of
Nigeria and which has since the immemorial been
administrated as such, is now being claimed as part of
Cameroontemtory" (14 avril 1994,note N073/114/Vol.
VI194,AnnexeM.C. 356).
Darrak étantsituéenettement à l'est de la frontière établie parla Convention franco-
britannique de 1919, cette affirmation ne peut s'interpréter que comene remise en
cause de la frontièreeptentrionalequi y est décrite.
4.16 La partie de la frontière descendant duLac Tchad vers le sud
jusqu'au Mont Kombonest pourtant une frontièreconventiomellement établiepar la
France et la Grande-Bretagnedepuis la première guerre mondiale. Le plebiscite de
1961 ayant abouti à une intégration du Cameroun septentrional dansle Nigeria, la
frontière partageant l'ancienne colonie allemandedu Cameroun en une partie
administrée parla France et l'autre par le Royaume-Uni est en effet devenue une
frontière internationale(vsupra,Chapitre 2, section2).
4.17 Les titres successifs du Cameroun pour cette partie de la
frontière sontd'origine conventionnelle. Ils ont déjàétéexposés dansle deuxième
chapitre du présent mémoire.Il s'agit essentiellementd:
- l'Accord PICOT-STRACHEY (Echange de notes des 3-4 mars 1916) (AnnexeM.C.
96);
- la Déclaration MILNER-SIMON du 10juillet 1919(AnnexeM.C. 107);
- la Déclaration THOMSON-MARCHAND (Echange de notes du 9 janvier 1931)
(Annexe M.C. 157).
La Républiquedu Cameroun pourra donc dans les lignesqui
4.18
suivent se consacrer plus spécifiquement ausegmentde la frontière septentrionaleen
renvoyant pour l'analyse juridique des instruments pertinenau chapitre précédent.
Après avoir brosséàgrands traits les caractères généraux de cerontière,et rappelé
l'histoire desa délimitati(5 l), le Cameroun exposera, dansun deuxièmetemps, le
détail du tracé, du Lac Tchad (frontière lacustre)au Mont Kombon (frontièreterrestre)( 2). Le Cameroun démontrera ainsi quela délimitationest à la fois
complète, définitive,t suffisamment précise.
â1. Présentation ~énérale de la frontière se~tentrional-Une
délimitationcom~lèteet définitive
4.19 Avant d'exposeren détailI'évolutionhistorique qui amenéà
une délimitation complèteet définitive dela frontièreen cause, le Cameroun brossera
les caractéristiques généraee la délimitation.
A. - Caractères généraux dedélimitation
4.20 La partie septentrionale dela frontière entrele Cameroun et
le Nigeriaprésente des caractéristiques remarquable. a délimitationconventionnelle
a étéle fruit d'une longueet attentive négociationdela part despuissancescoloniales,
opérée sous surveillance internationale, et confiéexpressément à de nombreuses
reprises par les partiesen cause. C'est dire si les revendicationsactuelles du Nigeria
sont dénuéedse tout fondementjuridique.
1. Une frontière dontla délimitationa été longuementnégociée
4.21 Il est peu de frontière africaine dontla délimitationait fait
l'objet de tant d'attentionde la part des parties que celles séparantle Cameroun du
Nigeria entre le Lac Tchadet le Mont Kombon.
4.22 La négociationde cette délimitation n'a pratiquementpas
cessé entrele début des hostilitésen 1914 et la conclusion en 1931 de l'accord
FLEURIAU-HENDERSON. Cette période d'une quinzaine d'années, ponctuée p lar
conclusion de trois accords internationauxen bonne et due forme, a permis de
préciser la délimitationà plusieurs reprises et en tenant compte de toutes les
observations.
4.23 On ne reviendra pas sur le caractère d'instruments
internationaux obligatoires que constirnent les trois traités (Echange de notesCAMBON-GREYdes 3 et 4 mars 1916; DéclarationMILNER-SIMONdu 10juillet
1919; Echange de notes FLEURIAU-HENDERSON du 9 janvier 1931). Onse
bornera à souligner que chacun de ces accords, loin d'être encontradiction avec
l'accord précédene tt de constituer une révision de la délimitation antérieure, a
cherché à préciser cettedernière, compte tenu de l'insuffisance des cartesalors
utilisées oudes erreurs géographiques outopographiques. En d'autres termes, la
délimitation internationale par trois accords internationaux dist espacés dansle
temps a eu pour effet, nonpas de remettre en cause les accords politiques passés dès
1916 entre la France et la Grande-Bretagne, mais d'en préciserle tracé et d'en
éliminer les incertitudes.
4.24 Aussi bien les gouvernements que les parlements et les
administrations ont eu largement le loisir, au niveau central comme au niveau local,
de parfaire un tracé quiposait des problèmes économiquess,ociauxet géographiques,
mais qui a étédélimité suivant les règles du droit internaalblic de l'époque.
2. Une délimitation établisoussurveillance internationale
4.25 La négociation franco-britanniquen'a pas seulement été
longue et détaillée; elle a ausiu lieu sous surveillance internationale.Si l'accord
PICOT-STRACHEY a été directementnégocié entre puissances coloniales
belligérantes,la déclaration MILNER-SIMON s'inscrit danl se cadre d'ensemble des
négociations de Versailles et la miseen place desmandats internationaux.
4.26 Dès la fin de la guerre, Lord MILNER et Henry SIMON
rendirent compteau Conseil suprême de l'avancementde leurs négociations.
4.27 A partir de 1920, la négociationentre les deux parties pour
préciserla délimitation MILNER-SIMONfut conduite dans le cadre des institutions
établiespar la Sociétédes Nations pour l'administration des mandats internationaux.
La question de la délimitation dela frontière entre mandat britannique et mandat
français dans le Cameroun fut régulièrement évoquée à la Commission permanente
des mandats et donna lieu aux explicationset vérifications nécessaires(v. supra,
chapitre 3, section4).
4.28
Cette surveillance continuaà êtreexercée aprèsla mise au
point de la déclaration Graeme THOMSON-MARCHAND etsa consécration parl'échangede notes de 1931. La Commissionpermanente des Mandatsde la S.d.N.,
puis le Conseil de Tutelle des Nations Unies, suivirent l'application de l'accord de
1931, s'inquiétèrent des retards pris dans la procédure d'abornement et
accompagnèrentla délimitation jusqu'à l'indépendanc respective des deuxparties au
présentlitige.
4.29 La délimitation conventionnelle de la frontière divisant
l'ancienne colonie allemandedu Cameroun a donc été l'objet d'une attention toute
particulièrede la communauté internationale, les deux Puissances mandatairesn'ont
agi que sous son étroite surveillance.
3. Une frontièrereconnuepar les deux partiesàde nombreuses
reprises
4.30 La délimitation de la frontière n'a pas seulement été
conventionnellementétablie sous surveillancinternationale;elle a aussi fait l'objetde
reconnaissances ultérieures par lespuissances mandataires, puis par les deux Etats
devenus indépendants.
4.31 De longues négociationsde la frontière entre1914 et 1931
furent déjà l'occasion pour les deux puissances coloniales de confirmer
progressivement la ligne frontière et de reconnaître,tout au long des négociations,
l'existence de la délimitation, puis de l'entérirfficiellementpar des instmments
internationaux formels.
4.32 Après 1931, la France et la Grande-Bretagne eurent à
plusieurs reprises l'occasion de confier la délimitation, notamment devant la
Commission permanente des Mandatset le Conseilde Tutelle, et dans le cadre des
tentativesde procédures d'abornementqui ne furent pas menéeà leur terme pour des
raisons que l'on verra. Notons dès maintenant qu'à aucun moment les deux
puissancescolonialesne contestèrentla validité desdélimitationssuccessives.
4.33 La ligne frontière futreconnue non seulement par les deux
parties, mais encore parla communauté international, uisquel'accord conférant des
mandats respectivement àla France etàla Grande-Bretagnesur le Camerounse réfère
explicitement pour la délimitationà la Déclaration MILNER-SIMON. Les deux
accords de tutelle conclus en 1946, eux, font référence à la ligne GraemeTHOMSON-MARCHAND entérinée pa1 r'Echangede notes d9 janvie1931. Il y a
donc consécration parla communautéinternationale, par des actesde reconnaissance
explicite, de la délimitation intervenueentre les parties hapitre3,csection
4,par.3.275).
4.34 Cette consécration fut confirmée après l'indépendaces
deux partiesàde nombreuses reprises. La délimitation intemationalene fit l'objet
d'aucune protestation dela part du Nigeria, soit devant l'organisation des Nations
Unies, soit devantla Cour Internationale de Justice, aloque les modalitésde
l'administration parla Grande-Bretagnedu Cameroun septentrionalet l'organisation
du référendum firent l'odte critiquesde la part de la République du Cameroun.
4.35 Depuisles indépendances, les partiesàoplusieurs reprises
négocié sur des questions frontalières ssmais remettre en cause la frontière
septentrionale entre le Lac Tchad et le Mont Kombon. Il faut attendre la note du
gouvernement nigérian du 14 avril 1994 (Annexe M.C. 356) contestant la
souverainetéde la Républiquedu Cameroun sur Darrak pour trouver une remiseen
cause formelle de la ligne déterminéeen dernière instance par la Déclaration
THOMSON-MARCHAND.
B. - Historiquedela délimitation
4.36 Comme cela est rappelé ci-dessus, la délimitation
conventionnelle s'est développen trois temps: en 1916 avec la ligne PICOT-
STRACHEY, en 1919 avec la ligne MILNER-SIMON, et en 1931 avec la ligne
THOMSON-MARCHAND.
1.La lignePICOT-STRACHEY
a) Négociationde la ligne
4.37 La négociationde la ligne PICOT-STRACHEY est liéà la
conduite des opérationsde gueràpartir de1914(sur les étapes dela conclusion de
l'accord PICOT-STRACHEY décrites ci-dessous, vl.e mémorandum African (Ouest)numéro 1054 intitulé "Memorandumon the Correspondance and Negociations
resulting in the Provisional Administrative Divisionof the Cameroons on 1st april
1916"; AnnexeM.C. 103).
4.38 Dès l'ouverture des hostilités,il appamt aux états-majors
français et britannique que les opérations militairesle Cameroun ne pouvaient
pas êtreconduites uniquement avec les forces disponiblessur place.II fut donc
décidéd'organiser un corps expéditionnairecomposéde troupes françaises stationnées
à Dakar et de troupes britanniques stationnotammentau Sierra Leone. Lecorps
expéditionnaire fut plasous la direction du génél OBELL. Il obtint la reddition
de Douala le 27 septembre 1914 et prit position dans le Cameroun méridional.
Parallèlement,les troupes britanniques attaquèrent les forces allau Cameroun
à partir du Nigeria cependant que les troupes françaises de l'Afrique équatoriale
française investirent le Cameroun en venant du Tchad et de l'Afrique Equatoriale
française. Les troupes britanniques opérantsous l'autorité du ColonelCUNLIFFE
prirent Garoua le10juin 1915 tandis que les troupes françaises dansle secteur sous
l'autorité du ColonelRISSET, se dirigèrent versle sud et parvinrenà la rivière
Sanaga à l'automne1915.
4.39 Dèsle 29 septembre 1914,le Secrétaired'Etat aux colonies
HARCOURT demanda au gouverneur du Nigeria, Sir Frederick LUGARD, son
opinion sur l'éventuel partagedu Cameroun. LUGARD, par courrierdu 8 octobre
1914, proposa de laisser à la France la partie du Camerounse trouvàl'est de la
rivière Sanaga jusqu'à hauteur de Ngaoundéré,puis d'une ligne droite entre
Ngaoundéré et le Lac Tchad.
4.40 La ligne de partage proposée divisaitapproximativement le
Cameroun allemanden deux parts égales,laissant l'essentiel du "Camerounutile", y
compris le port de Douala, au Royaume-Uni. En conséquence,Sir Edward GREY,
Secrétaire aForeig Onnce, fitransmettre par l'ambassade britanniqàeParis une
proposition d'administration provisoire du Camero,haque administration militaire
se chargeant respectivementdu territoire sousson contrôle.
4.41 Par coumer du 14 décembre 1914, le Ministre français des
Affaires étrangères,DELCASSE,refusa cette propositionen considérant qu'elle serait
d'une application difficile surle terrain à mesure queles forces alliéesavanceraient
dans le Cameroun et proposaà la place "une sorte de condominium qui serait placéjusqu'à la répartition définitdesdits territoires" sous l'autoritédu commandanten
chef allié,le général britannique DOBELL.
4.42 L'administration conjointedu Cameroun par les deux parties
belligéranteseut lieu plus ou moins sur ces bases pendant une année, non sans
frictions et tensions. A Douala, le général françaisERICH contesta l'absence
de parité dans l'administration la zone sous I'autoritédu générl OBELL. Dans
le nord, le général CUNLIFFE s'élèva contre les méthodes françaises
d'administration des zones libérées.Les tensions locales s'exacerbèrent avecla
reddition des forces allemandesà Mora en janvier 1916 et l'évacuation totale du
Camerounpar l'Allemagne.
4.43 L'ambassadeur de France à Londres, Paul CAMBON,
proposa le 5 janvier 1916de substituàrla situationde fait sous I'autoritédu général
DOBELL un condominium rigoureusement paritaire administré par deux
commissaires à pouvoirs égaux.Le Secrétaired'Etat britannique aux colonies,Bonar
LAW, refusa la proposition en considérant quela formuledu condominiumn'étaitpas
applicable sur le terrain. Cependant, le gouvernement français déclarale 12 février
1916qu'il ne reconnaissaitplus lespouvoirs confiésau général DOBELLpar les deux
gouvernements pourla duréedes hostilités.
4.44 Les deux gouvernements décidèrentalors d'engager la
négociationsur une ligne de partage. Rendez-vousfut pris pour le23 févrieravec
l'ambassadede France à Londresen la personne du diplomate GeorgesPICOT.
4.45 Entretemps, le cabinet de guerre britannique, dans une
réunion le 22 février 1916 au matin, décida d'abandonner Douala à la France
(Memorandum, 11 janvier 1917, p. 12; Annexe M.C. 104). La décision fut
communiquée lorsd'une réunion inter-services qui a lieuau ministèredes coloniàs
Londres le 22 février après-midi. Les représentandtsuForeig OnfJiceannoncèrent
que le cabinet de guerre avait décide céder l'ensembledu Cameroun à la France.
La réunionentre représentantsdes divers services intéressésfut alors suspendue,
n'ayant plus de raison d'être et les représentants britanniques, STRACHEY et
OLIPHANT furent mandatés pour accepter les propositions du gouvernement français
transmises parPICOT sans pinailler("to abstain fromany haggling").
4.46 Cette décision du cabinet de guerre britanniquedoit étre
replacée dansle contexte d'ensemble. Les Britanniques avaient en effet lancédesopérationsen Afrique de l'Est en direction des possessions allemandesdans cette
région sans y associer les forces françaises basées à Madagascar. Par ailleurs,
l'Union Sud africaine s'était emparédeu Sud-Ouest africain allemand.Le cabinet de
Londres estima indispensable, pourdes raisons d'équité danlse partage de l'ancien
empire colonial allemand, defaire des concessionsmajeures à la France en Afrique
Occidentale, au Togo comme au Cameroun. C'est donc en fonction de ces
considérationsplus générales qu'ifut décidéde faire droit à l'essentiel desdemandes
françaises.
4.47 Le négociateur britanniqueSTRACHEY a laissé de la
discussion avec PICOT un compte rendu très vivant. D'après luiP ,ICOT n'avait
aucune idéea priori précisedu tracéde la ligne frontièreproposé. Il insistait
seulement sur les deux points de départ (près deVictoria dans le sud) et d'arrivée
(près deYola dans le nord).
4.48 Au cours de la discussion, PICOT traça une ligne
approximative entre les deux points mentionnésavec un crayon bleu. STRACHEY
obtint un déplacement dela ligne de quelques kilomètresà l'est afin de conserverla
seule route qui relie le nord au sud et cherchà suivre autant que faire se peut les
divisions administratives allemandes.
4.49 Georges PICOT considéra qu'une certaine souplesse devait
êtrelaissée aux négociateurs locaux pourvter les limitesprécises entreles deux zones
en cause, notamment afinde ne pas couper en deux les plantations d'hévéa danls e
sud.
4.50 STRACHEY observa que la ligne de partage ne se
prolongeait pas au nord de Yola. Il insista sur la nécesde ne pas diviser l'émirat
de Bomou qui devait rester sous administration britannique. PICOT reconnut la
validitéde l'argument, maisse raidit en revanche quanà un déplacementde la ligne
frontière entre le Bomou et Yola (les régions de Mandara et de Garoua).
STRACHEY ajoute que PICOTne connaissait rien à la situation au-delà de Yola,et
considérait queson gouvernementne pouvait pas renoncer à Garoua et à la région de
Mandara. II conclut sa note en insistant sur l'importanced'une liberté laissée aux
négociateurs surle terrain pour préciserla ligne et en soulignant qu'ils'agit d'une
"procédure ridicule" que de définia frontière par un large traitde craie sur une carte
à une telle échelle sansen prévoir l'applicasur le terrain.4.51 Le Secrétaired'Etat aux colonies Bonar LAW conclut par
note du 26 février 1916, en acceptant les résultats de la négociation PICOT-
STRACHEY sous réserve quela régiondu Bomou allemand, approximativement
indiquée par la ligne bleu pointillée indiquéesur la carte, relevât de l'autorité
britannique. 11ajouta que les lignes indiquéessur la carte devaient étreconsidérées
comme indiquanten gros la limite et devaient pouvoir être modifiées afin'éviterla
partition de villages, de plantations,etc.
4.52 Le résultatde la négociation est consigné dans l'échangde
lettres des 3 et 4 mars 1916,qui se borne pour l'essenàirenvoyer à la carte signée
par les deux négociateurs (Annexe M.C.97). L'original de cette carte n'a pas été
trouvé dansles archives diplomatiquesde Londres ou de Paris. Par lettre du 11 mai
1916, l'ambassadeur PaulCAMBON demanda une légère modification du texte en
supprimant les mots "et soit annexéeà la Nigeria", mais ne conteste pas les droits
britanniques surle Bomou allemand (Annexe M.C. 99).
b) L'application dela ligne
4.53 Négociée dans des conditionshâtivesdues aux contraintesdu
temps de guerre etdéfinied'une manièreapproximative parun trait grossier portésur
une carte à petite échelle,la ligne PICOT-STRACHEY n'en demeure pas moinsla
délimitation debasede la frontière entrele Camerounet le Nigeria.
4.54 Malgré les conditions deson adoption, la ligne de 1916 ne
fut plus remise en cause fondamentalement. Le partage des agglomérationset des
territoires alors opéne changea pluspour l'essentiel. En revanche,il était important
de porter remède à son caractèreapproximatifet de la préciser.C'est ce que les deux
parties entreprirent de faireau lendemainde la signature par les deux négociateurs de
la carte PICOT et de 1'Echangede lettres entre Paul CAMBONet Lord GREY les 3
et 4 mars 1916. La Républiquedu Cameroun n'a pas retrouvé l'originalde la carte
PICOT dans les archives britanniqueset françaises. Toutefois, un croquis britannique
établi en 1916 et précisant les demandes supplémentaires britanniques donne
l'indication approximativedu tracéde la ligne PICOT-STRACHEY(v. carte M.6 et
Annexe 383, carte M.31).
4.55 Dès le6 mars 1916, soit le surlendemain de l'échangede
lettres, une note interne aForeign Once soulignait les problèmes d'applicationdel'accord dans les Monts Manenguba. La note souligne que lacarte utilisée par
PICOT était uneréductionau 112.000.000de la carteOISELau 1/300.000et qu'un
crayon gras bleu sur une carte de cette échellene pouvait pas préciserla ligne
frontière.
4.56 Le 31 mars 1916, le Secrétaire aux coloniesBonar LAW
envoya une lettre circulaire dans laquelleil décritsur le terrain la ligne PICOT-
STRACHEY tout en soulignant son caractère provisoire. La principale difficulté
porte sur le Bomou (Annexe M.C. 98). Dans l'esprit du ministère anglais des
colonies, il n'y avait pas de ligne frontière déterminéls Bomou : le pointillé
portésur la carte PICOT-STRACHEY nevoulaitrien due !Maisles autorités locales
prirent néanmoinsen compte le tracé en pointillé portésur la carte par les
négociateurs. Le gouverneur du Nigeria LUGARD envoyaune série d'observations
et de propositionsàBonar LAW fondées surla ligne PICOT-STRACHEY. Cette
correspondance provoquala fureur du Coloni alBce contre Lugard (AnnexeM.C.
105). STRACHEY, lui-mêmenégociateur del'accord de 1916, estima que le
gouverneur du Nigeria aurait dû s'abstenir d'envoyer ces proposisAnnexeM.C.
100).
4.57 Le 8 août 1916, le ministère des Affaires étrangères
britannique souligna auprès de l'ambassadde France que la frontièredu Bomou
n'était indiquée sur aucune carte et deptuvoir être tracée par les administrateurs
locaux sans difficulté (AnneM.C. 101). L'ambassadeur,Paul CAMBON, répondit
le 16 octobre 1916 que la question devaitêtrerégléeaprès avoir effectué les
recherches nécessaires dans les archivetue la décision définitive devrait être prise
au moment où un règlement définitif pourrait intervenir, c'est-à-dire ldse la
conclusion du traité paix (AnnexeM.C. 102).
2. La ligneMILNER-SIMON
a) La négociationde la ligne
4.58 Le Conseil suprémedes alliés netrancha pas le sort du
Camerounet se contenta de préciser,proposdu Togo et du Camerounque "[-] la France et la Grande-Bretagne établiront de
concert leurs futurs statuts qu'elles recommanderont à la
Liguedes Nations"(AnnexeM.C. 114).
4.59 Lors de l'ouverture dela négociation MILNER-SIMON,la
Grande-Bretagneavaitpour objectifs :
- de récupérerle Bornou oriental dont elle prétendaitavoir étéexclue par la ligne
PICOT en pointillé;
- de réunifierles temtoires des tribus se trouvantau sud du Bomou;
- de récupérer Garoua et, ce faisant, de maintenir son monopolesur la navigation sur
la Bénoué;
- d'assurer l'"intégrité territoriale" des trse trouvant sous la suzeraineté deI'Emir
de Yola:
- la Grande-Bretagneétait prêt àecéderTschang moyennantcompensationset,
- souhaitaitque larivière Mungo soitla frontièrejusqu'àla mer.
4.60 La France, de son côté, avait pour objectifslors de la
négociationMILNER-SIMON :
- de conserver la part du Bomou qui lui étaitanribuée par la ligne PICOT-
STRACHEYmoyennantquelquesconcessionsau nordde la Bénoué;
- le maintien de Garoua en souveraineté française afind'assurer la liberté de
navigation dela France surla Bénoué;
- la souverainetésur la principale route commerciale dela côte vers le nord-ouest, y
compris lespoints depassagede Tschang,Konchaet Lara;
- la possession des plantationsde Misselele sur la rive gauche de la rivière Mungo
(MemorandumC.O. du 20juillet 1917;AnnexeM.C. 104).
4.61 Lors de la négociation, les Britanniques élargirent
sensiblementle périmètre du Bornou allemand indiqué sur laligne briséesur la carte
PICOT-STRACHEY. Ils obtinrent surtout l'essentiel de l'émirat dM e andara, au sud
du Bomou, mais durent renoncer à obtenir Garouaet donc à établir un monopole sur
la partie navigablede la rivièreBénoué. L'essentie dles gains françaisse trouve plus1 CROQUIS DES FRONTIÈRES CAMEROUN -NIGERIA
NIGERau sud, avec Fonchia et surtout la régionde Tschang (AnnexeM.C. 108). On
observera que du fait de la modificationultérieure dela frontière internationale entre
le Mont Kombon et la mer, la ligne MILNER-SIMONtelle qu'elle est aujourd'hui
définieenregistre pour l'essentielles gainsbritanniques dansla négociationde 1919.
4.62 Surtout, l'accord MILNER-SIMON comprend une
description détaillée dla frontièredu Lac Tchad jusqu'à la mer, ce que l'accord
PICOT-STRACHEY ne précisaitpas. Désormais, les partiesne modifieront plus la
ligne frontière,saufpour corriger les erreurs matérielles.
b) L'application dela ligne
4.63 L'application de la ligne PICOT-STRACHEY posait des
problèmes politiques importantet supposaitune renégociation des limitdu Bomou
allemand et des compensations éventuellesau sud. L'application de la ligne
MILNER-SIMON ne pose pas le mêmetype de problèmes. Les difficultésqui
résultent deson applicationsur leterrain sont liées, d'unepart, au statut du territoire
sous mandatet, d'autre partà l'imperfection dela carte utilisée.
4.64 La Déclaration MILNER-SIMONne mit pas fin aux
oppositions d'intérêts entre France et Grande-Bretagne touchant le régime du
Cameroun. La France continuait d'être réticente quan àt l'application du statut de
mandat au territoire du Camerounen raison des contraintesque cela pouvait apporter.
La Grande-Bretagne, de son côté, insistaitau contraire pour l'applicationdu régime
du mandat, y compris les garantiesen matièrede liberté commercialet de respect de
la propriété privée qu'elle compta bten inclure dans le texte du mandat. Un
contentieux s'élevaentre les deux parties touchant le régimemonétaire, les droits de
douane, le respect des contrats et en particulier des concessions de service public
accordées sous administrationmilitaire anglaise.
4.65 En attendant la solution de ces problèmes, la Grande-
Bretagne hésita à appliquer sur le terrain la ligne MILNER-SIMONet se garda de
transmettreà la Société des Nationla carte annexée à la Déclarationdu 10 juillet
1919 (AnnexeM.C. 109).
4.66 Les principales difficultés d'applicade la ligne MILNER-
SIMON tenaient aux incorrections de la carte MOISEL utilisée par les deuxnégociateurs. II s'agit ici de la carte au 11300.000,et non pas de la réductionau
1/2.000.000 utilisée par PICOTpour tracer approximativementla délimitationen
1916. Mais la carte allemande MOISEL éditée entre1911 et 1913, si elle étaitde
bonne qualité pour l'époquep,osait néanmoinsquelques problèmes.Une grosseerreur
de cartographie existaittouchant letracé dela rivièreTsikakiri. Le tracé setrouvait
déportéde 15km à l'est sur une longueur de30km environ. Le confluent avec le
Mayo Tiel ne se situepas prèsdes villagesde Luga mais àquelques25km en aval au
sud-ouest. On relèved'autres difficultés d'identificatidans les secteurs de Umm
Jummbaet des collinesde Mandara.
4.67 S'agissant de difficulttouchant le tracégéographique, elles
pouvaient êtrerectifiéespar des négociationstechniques, ce fut l'objet de l'accord
THOMSON-MARCHAND. C'estce que soulignale ministrefrançaisdes colonies le
19 février1921lorsqu'ilproposaau ministre des Affaires étrangères lemodifications
souhaitablesà l'accordMILNER-SIMON (AnnexeM.C. 117). En réponse,le 29 mai
1921, l'ambassadeur du Royaume-Uni à Paris fit valoir au ministère des Affaires
étrangèresque la plupart des ajustements'souhaités pouvaient être réglés par
commissionmixte sitôt lesmandatsattribués(AnnexesM.C. 119, 120, 121, 8).
4.68 En fin de compte, le problème principal étaitde fser la
procédure de révision d'unemanière suffisamment souple pour procéder à un
"nettoyage" de la ligne MILNER-SIMON. Ce fut l'objet dela formulation proposée
pour le texte mêmedes mandatsrespectifs de la France et de la Grande-Bretagne sur
le Cameroun. L'article ler des mandats, évoquantla ligne de 1919, préciseen effet
que :
"[-] Cene ligne pourra, toutefois, être légèrement
modifiéepar accord intervenant entre le Gouvernement
de Sa Majestébritannique et le Gouvernement de la
République française, sur lespoints où soit dans l'intérêt
des habitants, soit par suitede l'inexactitudede la carte
Moisel au 1 : 300.000, annexée à la Déclaration,
l'examen deslieux ferait reconnaître comme indésirable
de s'en tenir exactemenà la ligne indiqué-1" (Annexe
M.C. 127).
4.69 La formulation laissait suffisammentde latitude aux parties
pour les ajustementsnécessaires.Elle faisait échoau texte mêmede la Déclaration
MILNER-SIMON qui énonçaitcertains principes devant présider à l'abomement.
Son article 2 prévoyaiten effet qu: "1. II est entenduqu'aumomentde la détermination sur
le terrain de la frontière,lorsque l'indication deslignes
naturelles à suivre ne sera pas mentionnée dans la
présente description, les commissaires des deux
gouvernements devront s'attacher, autant que possiblà,
déterminerce tracé pardes accidentsna~rels de terrain
(cours d'eau, ligne de faite ou crêtes). Ilsne sauraient
changer, toutefois, l'attributiondes villagesionnés à
l'article 1.
Les commissaires chargésde l'abornement seront,
d'autre part, autorisàsapporter au tracéde la frontière
les modifications légères qui apparaîtraientnécessaese
vue d'éviter de séparelres villages de leurs terrains de
culture; ces déviations devront êtrndiquéesclairement
sur des cartes spéciales etsoumises à l'approbation des
deux gouvernements intéressés [ ] (Souligné par la
Républiquedu Cameroun)(AnnexeM.C. 107).
C'est dansce contexte que doiventêtreenvisagéesles précisions apportées palra ligne
THOMSON-MARCHAND.
3. La ligneTHOMSON-MARCHAND
a) La négociationde la ligne
4.70 Dès la signature de l'accord MILNER-SIMON,les deux
gouvernements donnèrent instructionaux autorités locales d'entreren contact pour
appliquer sur le terrain la ligne délimitéepar la Déclarationdu 10 juillet 1919
(Annexes M.C. 118, 125, 124). Les administrateurs locaux établirent une séridee
procès-verbaux couvrant l'ensemblede la frontière entre lesdeux temtoires sous
mandat (v. par exemple, pour le secteur duLac Tchad à Yola, Annexe M.C. 118).
Ces travaux de démarcation furent conduitssur instructions et sous surveillance du
gouverneur général du Nigeria et du Commissairede la Républiquedu Cameroun (v.
la circulaire MARCHANDdu 13 septembre 1923, Annexe M.C. 134 et, pour une
application, par exemple, le télégrammeMARCHAND du 29 décembre 1925au sujet
de la démarcationdans le secteur de Dchang, Annexe M.C. 143). Dans l'esprit des
deux gouverneurs, les procès-verbaux établis entre fonctionnaires des deux
gouvernements avaient pour destination l'établissementd'un "protocole d'ensemble
envoyéad referendumen Europe; puis, après approbation parles gouvernements
métropolitains, abornement définitif" (noe ARCHANDdu 13octobre 1925au chefde la circonscription de N'Gaouindiré,Annexe M.C. 151). L'ensemble desprocès-
verbaux fut intégré dans la Déclaration THOMSON-MARCHAND du 29 décembre
1929 et 31 janvier 1930 (v. par exemple, Annexe M.C. 154 pour le secteur de
N'Kongsomba).
4.71 La délimitation est beaucoup plus précieue celle convenue
entre Lord MILNERet Henry SIMON. Les principaleserreurs de la carte MOISEL
sont rectifiées,mêmes'il n'y a pas vraimentde modificationspar rapportàla ligne de
1919.
4.72 L'Echangede notes FLEURIAU-HENDERSONdu 9 janvier
1931 qui reprend à son compte la ligne GraemeTHOMSON-MARCHANDprécise
son statut par rapporàla ligneMILNER-SIMON :
"Votre Excellencea sans doute reçu le texte de la même
déclarationet elle a certainement0bSe~équ'il ne s'agit
là qu'une étude préliminaire. Celle-ci est destinàe
donner à la description de la ligne que devra suivre la
commissionde délimitation plusde précisionsque ne l'a
fait la déclarationMILNER-SIMONde 1919.
Quoi qu'il en soit la première déclarativiséeci-dessus
défuiit en substance la frontière dont il s'agit et le
gouvernement dela République a l'honneurde confirmer
par la présente note l'agrément qui lui a été
implicitement donné. Si une pareille confirmation est
faite par le gouvernement de Sa Majesté dans le
Royaume-Uni, la délimitation définitive pourra être
entreprise par la mission prévàecet effet par l'article 1
du mandat [-1"(AnnexeM.C. 157).
4.73 11s'agissaitdonc dans l'esprit des deux gouvernementsd'une
précision dela ligne MILNER-SIMON, et non d'une dérogation par rappor t cette
ligne. Cette précision devait être appliquée puare commission de délimitation,la
notion de "délimitation"devanêt tre plutôt entendue dale sens d'une "démarcation",
comme on le verra.
4.74 Comme le dit fort bien I'Order in Councilbritannique du 2
août 1946en son article4, paragraphe 2 : "The Cameroons under British Mandate consists ofthat
part of the territories known as Cameroonsin respect of
which His Majesty accepted the aforesaid Mandate,
namely that part thereof which lies to the Westof the
boundary defined by the Franco-BritishDeclaration of
July 10, 1919, and more exactly dejïned in the
declaration made by the Governor of the Colony and
Protectorate of Nigeria and the Governorof the French
Cameroons which was conjïnned by and exchange of
notes betweenHis Majesty's Governementin the United
Kingdom and the French Governmentof January 9,
1931" (Souligné par la République du Cameroun)
(AnnexeM.C. 181).
Les rédacteurs deI'Order in Councilont bien saisi la progression des instmments
juridiques :la DéclarationMILNER-SIMON "définit"la frontière; la Déclaration
THOMSON-MARCHANDconfirméeen 1931la "définitplus précisément".
b) L'applicationde la ligne
4.75 Les services administratifssemblentavoir considéré l'accord
THOMSON-MARCHANDcomme une simple précision administrativene nécessitant
pas une procédure solennelleen raison de l'absence de modifications dela ligne
frontière. Le gouvernementbritannique décida néanmoind se solliciter l'autorisation
de ratification parlementaire et déposa leprojet sur le bureau des Chambres.
L'Echange de notes se trouva ainsi donc autoriséepar une procédure parlementaire
solennelle (AnnexeM.C. 152).
c) La démarcationdela frontière
4.76 Les parties ne tardèrent pàsse préoccuper de procédeàr la
démarcationde la frontière conformément à la ligne définie"en substance" par la
Déclaration THOMSON-MARCHAND.Dèsle 10 novembre 1930, le ministère des
affaires étrangères demandà l'ambassadeurde France àLondres de s'enquérir de la
constitution de la Commission mixte prévue à l'article 1du mandat (Annexe M.C.
156).
4.77 Le 4 mars 1931, le gouvernementfrançais communiquaau
gouvernement britannique le nom de RenéDUGAST pour présiderla Commissionfrançaiseet suggéra que les travauxcommencentsans tarder, en profitant de la saison
sèche(AnnexeM.C. 158).
4.78 Cependant, pour des raisons budgétaireset d'accord entre les
parties, les travaux furent reporàéla fin 1932(AnnexeM.C. 161), puis à la fin de
1934(AnnexesM.C. 162et 163), puis de nouveauen 1936(AnnexeM.C. 169).
4.79 En attendant, les administrateurs locaux continuèrent à
maintenir des contacts et à signer des procès-verbauxau sujet de la ligne frontière.
Cependant, Paul MARCHAND précisa à plusieurs reprises que ces documents
devaient êtreconsidéréscomme ayant un "caractère purement provisoire" et"ne
pouvanten rien engager l'avenir" puisqu'unecommissionmixte de délimitation devait
êtredésignée dans un proche avenir (v., par exemple, note MARCHAND du 10
septembre 1930 au chef de circonscription de Garoua,Annexe M.C. 155 et, dans le
mêmesens, note du 22 mai 1931 du résident britannique de la province de
1'Adamawa;AnnexeM.C. 159).
4.80 La procédurefut engagéeen 1937 avec la désignationde
J.G.C. ALLEN comme président dela Commission britannique (AnnexeM.C. 172),
cependant que la Commission française étaitinstituéepar décretdu 25 août 1937
(Annexe M.C. 173). Le gouvernement français remplaça,en 1939, RenéDUGAST
par Georges VERGES(AnnexeM.C. 172). Les deux parties se mirent d'accord sur
les instructions relatiàel'abomement(AnnexeM.C. 174).
4.81 L'analyse des instructionsrévèleque la mission avait pour
strict objet la démarcationde la frontietnon sa délimitation. Il s'agissait bien de
poser des bornes tous les deux kilomètres sur la frontière terrestre, tous les dix
kilomètressur la frontière fluviale(alinéa7). Une carte au 1/100.000èmedevait être
annexéeau procès-verbal montrantune bandede temtoire d'une largeur de 10à 20
kilomètres de chaquecôtéde la frontière(alinéa16). Les parties considéraient donc
que la Déclaration THOMSON-MARCHAND précisait de manière adéqula ateligne
frontière arrêtée plr mandatet ses annexes(alinéa11).
4.82 Les travaux de démarcation furent interrompusdu fait de la
seconde guerre mondiale. Maisnous disposonsd'un protocole n0ll du 18 mai 1940
signé par les deux Commissaires(Annexe M.C. 178). 92 bornes-frontières furent
posées,dont les 27 premièresinspectéespar les deux Commissaires. Le tracéde la
frontière est décrtn détail dansle procès-verbaljusqu'à hauteurdu villagede Poala,dans la chaîne de Manengua. Mais, comme les travaux de bornage commencèrent à
la côte, ils n'atteignirent pas leMont Kombon etne concernèrentpas la portion de
frontière internationale aujourd'hui décritepar la Déclaration THOMSON-
MARCHAND (Prescott, "The Evolution of the Anglo-French Boundary in the
Cameroons", p. 118, fait étatde 15 milles de frontièresbornéesdans le nord de
l'Adamaoua en 1934, mais le procès-verbal de 1940 ne mentionne pas cette
délimitationpartielle).
4.83 11 ne semble pas que les puissances administrantesaient
repris la procédure de bornage aprèsla guerre entre les territoires sous tutelle. Dans
une lettre adressé auChef du ServiceGéographiquede 1'A.E.F. et du Cameroun le 4
mars 1957, R. SALLAT, Chef de l'Annexe du Service GéographiqueA.E.F.
Cameroun, fait état deses recherches documentaires relatives à la frontière entrele
Cameroun français et le Cameroun britannique, et ne mentionne aucun instmment
postérieurà la guerre. Aprèsavoir citéles Déclarationsde 1919 etde 1930, R. Sallat
cite:
"3") Accord~rovisoireintervenule 29 janvier 1934entre
le Lieutenant DAVID et MonsieurD.F.H. MAC-BRIDE
et concernant une rédactionplus précisedes articles21 et
22 de la Déclarationdu 31janvier 1930 [-1.
4") Protocole noll signéle 18 mai 1940 à Buéaentre
l'Administrateur en chef VERGESet J.C.C. ALLEN et
donnant l'état d'avancement des travaux de la
Commission franco-britannique de délimitation de
frontièreau moment où ces travaux ontété interrompus à
la fin de la campagne 1938-1939 [-]Notre copie est par
ailleurs incomplète. Il nous manque letexte concernant
la délimitation entreles bornes 53 et 88 (pages 13, 14 et
15).
5") Deux registres originaux de bornes frontièresn09 à
47 (Registre nO1)et n048 à 85 (registre n02) mises en
place par la Commissionprécédemmenn tommée.
Ces registres sont signés VERGES et ALLEN; ils
donnent l'état signalétique et les coordonnées
astronomiquesdes bornes".
La lettre mentionne ensuite des "Documents cartographiques britanniques, parmi
lesquels :
"The Anglo-French Boundaryin the Cameroons - Sheets
1et 2;
Echelle 100.000; Observations :
l
- Levés de la Commission Franco-Britannique de
délimitationen1937-1939(Bornes 1 à 85)
- Dessinéset Publiés parle Suwey Department- Lagos-
1941".
4.84 Depuis l'indépendancedu Nigeria et du Cameroun, la
frontière terrestre n'a fait l'objet que d'une démarcationpartielleà l'occasion
d'incidents de frontières dans les années 1960. Cependant, les opérations de
matérialisationvisantà compléterle bornage entamé à l'époquecoloniale, ont été
interrompues lors de la guerre du Biafra, et n'ont pas été reprises parla suite. En
revanche, la frontièrelacustre a bornéedu point triplejusqu'à l'embouchure dela
rivièreEbeji, commeon le verra dans le détail ci-dessous.
4.85 La démarcationd'une frontièrelongueet variéecomme celle
qui sépare leCamerounet le Nigeria du Mont Kombonjusqu'au Lac Tchad n'est pas
une mince affaire. Mais on notera que les parties n'ontaucun momentcontestéla
délimitationeffectuéeen 1919 et précisée en 1931. Au contraire, en se référant
constamment aux deux déclarations comme aux termes du mandat dans leurs
entreprises de démarcation, ellesont largement confuméet reconnu à de multiples
reprises la frontière conventionnelle.
8 2. Le tracé~ar secteurs- Une délimitationorécise
4.86 La délimitationde la frontière septentrionale concerneen
réalitédeux secteurs présentant decaractéristiques différentes.Le secteur lacustre
est constituépar la frontièrequi s'étendl'intérieurdu Lac Tchad, du point triple
Cameroun-Nigeria-Tchadjusqu'au premier point de la frontière terrestre surles rives
du lac. Le secteur terrestre s'étendde ce dernier point jusqu'au Mont Kombon, qui
marque le débutde l'ancienne frontière administrative qui séparait le Cameroun
britanniqueseptentrionalet le Cameroun britanniqueméridional.
4.87 Chacun de ces deux secteurs sera analysé successivement.
Le Cameroun ne s'attachera plus aux détails historiquesdes négociationsmais
reprendra l'ensembledes instruments pertinents poury décelerles précisionspropres
à chacunde ces deux secteurs. A. - La frontière lacustre
4.88 Les revendicationsdu Nigeriaportent notammentsur Darrak,
situéeà l'intérieur duLac Tchaddans sa partie sud-est. Ellesremettentdoncen cause
en premier lieu lesecteur lacustrede la frontière septentrionale.
4.89 Semblable prétentionapparaît totalement incompatibleavec
les règles classiques du droit internationalen matièrede différend frontaliEn.
effet, la revendication d'une souveraineté nigériane sur Danak se heurte à la
délimitatioiidu segment frontalier en cause qui place clairement les îles en territoire
camerounais.
4.90 La premier point délimité la frontière lacustre estle point
triple avec le Tchad, déterminédès avant la première guerre mondiale par la
combinaison de plusieurs conventions (a).La frontière lacustre dans son ensemble
sera délimitée avec précision dans les Conventions conclues apaspremièreguerre
mondiale 0). Cette délimitation fera encore l'objet de précisions ultérieurànt
l'indépendance (c).
1. Les conventions antérieuresla première guerre mondiale-
Détermination dupoint triple
4.91 Un certain nombre de Conventions conclues entre les
Puissances coloniales intéressées concernela frontière lacustre. Le Cameroun
analysera d'abord celles concluesentre l'Allemagneet la Grande-Bretagne, les deux
puissancescolonialesconcernéespar le segmentnord de la frontière actuelle, puis les
conventions conclues entre la Grande-Bretagne et la France, et entre celle-ci et
l'Allemagne.
a) Les conventions anglo-allemandes - Désignation d'un
méridien à l'intérieurdu lac sans détermination du point
triple
4.92 Les conventions anglo-allemandes de 1885 à 1913 ne
concernaient évidemment pas l'actuel segmenn tord de la frontière camerouno-
nigeriane, mais une ligne plus à l'ouest. Le seul point frontalier susceptibled'appartenirà la ligne lacustreactuelle est le point sàtl'intérieurdu Lac Tchad, à
l'extrême nord du segment, c'est-à-direle pointtriple actuel.
4.93 Mais les conventionsanglo-allemandesrestent muettes sur la
déterminationd'un point triple, et ne localisent précisément, pour certaines'entre
elles seulement, que le point extrême dela frontière terrestreituésur la rive. La
seulemention d'une frontière lacustreest assez vaguepuisqu'elle désigne un méridien
sans en préciser le point extrême. Le Cameroun reprendra une à une ces
Conventions, dont la plupart ont déjà été largement commentéesdans le deuxième
chapitredu présentmémoire.
4.94 La Convention du ler juillet 1890 contient une première
mention du Lac Tchad en son art. V, mais sans viser à déterminerla frontière
lacustre:
"It is agreed that noTreaty or Agreement,made by or on
behalf of either Power to the north of the River Bénoué,
shallinterfere with the freepassageof goodsof the Other
Power, without paymentof transit due to andfrom the
shoresofLakeChad.
Al1Treaties made in tenitories intervening between the
Bénoué and Lake Chad shallbe notifiedby one power to
the other" (Souligné parla Républiquedu Cameroun)
(Annexe M.C. 10).
Cet extrait ne concerne pas une délimitation frontalière t e désigneen tout étatde
causeaucun point sur lesbords ou, afortiori,àl'intérieurdu Lac.
4.95 La Convention du 15 novembre 1893 contient la première
délimitation qui s'étende jusqu'au lac son articleI:
"A line shallbe drawn from the point on the left bank of
the River Bénoué fixed in that Article [l'Article1 de la
Convention], which, crossing theriver, shall go direct to
the point where the 13th degree of longitude east of
Greenwich is intersected by the 10th degree of north
latitude. From thatpoint it shall go direct to a point on
the southem shore of Lake Chad, situated 35 minutes
east of the meridianof the centre of the town of Kuka,
this being thedistance between themeridianof Kuka and
the 14th meridian east of Greenwich measured on the
map publishedin the German 'Kolonialatlas'of 1892. In the event of future surveys showing that a point so
fixed assigns tothe British sphere aless proportionof the
southem shore of Lake Chad than is shown in the
aforesaid map, a new terminal point making good such
deficiency, and as far as possible in accordance withthat
at present indicated, shallbe fmed as soonas possibleby
mutual agreement. Untilsuchagreementis amved at the
point of the southem shore of Lake Chad situated 35
minutes eastof the mendianof the centreof the town of
Kuka shall be the terminal point" (Souligné par la
Républiquedu Cameroun) (AnnexeM.C. 15).
L'extrait ne concerne que le point le plus au nord de la frontière terrestre. Onne peut
cependant en tirer aucun élément de délimitation d le frontièreà l'intérieurdu Lac
(v. Philippe PONDAVEN,Les lacs-frontières,Pedone, Paris, 1972,p. 34).
4.96 L'Accord du 19 mars 1906 définitla frontière deYola au
Lac Tchad en application de la Convention du 15 novembre 1893. On y trouve une
première mentiond'une frontière lacustre anglo-allemandeen son Article VI1ainsi
rédigé :
"The boundary then follows the line of the Gennan claim
[reproduite dansune carte annexée] in a straight luntil
it intersects the meridian 35' eastof Kukawa, whichwas
marked by the BoundaryCommissionby two posts above
high-water mark. Thenceit shall follow thatmendian
norlhward"(Soulignépar la Républiquedu Cameroun)
(AnnexeM.C. 37).
L'Allemagne obtientdonc pour la première foisune délimitation à l'intérieurdu lac
(Haritini DIPLA, "Le tracé dela limite sur les lacs internationaux",A.S.D.I., 1980,
p.24). La frontière lacustre est constituée parle méridiensitué à 35' à l'est de
Kukawa. Mais on ne connaît pas l'extrémité nord de cettefrontière. L'une descanes
annexées (cartea), qui représente l'extrémitéord de la frontière, setermine par une
ligne à l'intérieur du lac, mais celle-ci ne rejoint aucune autre frontièrepour
constituer un point triple (v. croquisnol). Celui-ci doit étre situé sulre méridien,
puisqu'il constitueen mêmetemps la frontièrelacustre entre la France et la Grande-
Bretagne en vertu de la Convention du 14juin 1898 confirméeen 1904 (v. infraet
croquis n02). Mais on ne connaît pas son degré delatitude.
4.97 Il apparaît donc que les conventions anglo-allemandes
contiennent une délimitation progressive dela frontière de la mer jusqu'au lac, et
établissentune frontière lacustre mais sansen déterminerla limite constituantle point
triple avec lespossessions françaises. Croquisno 1
GREAT BRlTAlN AND GERMANY.
ANNEX 1Ialothe Agreement ofMaroh IO, 1908. Sliect ,.
iri#nabarfiwwMa#4we+.,.-.,.-
n r*rrduhrri inairm
- - - - -- -..
Soila ofmipINo.30)in 4:lurPouah.4 milsto 14'14 ii~o!i#S.
Accorddu 19Mars 1906
Source:HERSLET, the Map of Africa by Treaty,
3rd editiovol.III, Cass. London, 1967 b) Les conventions anglo-françaasvan1914 -Détermination
dupointtriple
4.98 La Conventionanglo-françaisedu14juin 1898 déterminant
les limites de sphères d'influence des deux puissances contient la première
délimitation dela frontièreà l'intérieurdu Lac Tchad en son article IV. Celui-ci
désigneen effet une ligàl'est duNiger, quiest décritede la manière su:vante
"[-]then due north untitregains the 14th parallel of
north latitude;eneastwardsdong thisparalleasfar as
its intersection withthe meridii passingeast of the
centre of the town of Kuka, and then this meridian
southwarduntilits intersectionwiththesouthernshoreof
Lake Chad" (Soulignépar la Républiquedu Cameroun)
(AnnexeM.C. 21).
Ainsi, la France et la Grande-Bretagne ételturs sphères d'influence respectives
sur tout le Lac Tchad, ladoubleligne droite séparanlte lac en deuxjusqu'aupointsur
la rive sud mentionnà l'articIIde la Conventionanglo-allemandeprécitédu 15
novembre 1893 .a Conventionde 1898reprendsur ce point les résultatsdes travaux
d'une Commission mixtede délimitatiocrééear l'Accordde Londresdu 15 janvier
1896. Cette ligne représela premièredélimitaticonventionnelleà l'intérieur du
lac, et csansenvisagerlaquestiondupointmple avecl'Allemagne(v. croquin02).
4.99 La Convention anglo-françaisedu 8 avril1904 précisela
lignedu 14juin1898. Concernantle LacTchad,l'articlVm prévoit qu:
"[ ]The boundary will then follow the thalwegof the
sardriver [KomadougouOuobé] to LakeChad.
Thence it will follow the degree of latitude passing
through the thalwegof the mouth of the said river up to
its intersectionwith theidianrunning 35'east of the
centre of the townofKouka, and willthenfollow this
meridiansourhwardsuntil itintersectsthe sourhemshore
Cameroun)(AnnexeM.C.oul29). par la République du
Si la ligne coupant le lac d'est enouest est abaisséevers le sud, la ligne reste
identique du nord au sud. La Convention prévoitcependant des possibilités
d'aménagement de lafrontière lacus:reI Croquis no 2
Conventiondu 14Juin 1898
Sourc:PONDAVENPhilippe,les Lacs-Frontières.
Pedone, Pans,72 "It is further agreedthat, on Lake Chad, the frontierlie
shall, if necessaxy,be modifiedsoas to assure toFrance
a communication through open water at al1 seasons
between her possessionson the north-westand those on
the south-eastof the Lake,and a portionof the surfaceof
the open watersof the Lake at leastproportionateto that
assigned to her by the Map foming Annex 2 of the
Conventionof the 14thJune, 1898".
Cette disposition tend equilibrer dans lefutu une répartitiondes eaux défavorable
à la France qui voit toujours la partie qui lui est attribuée pratiquement coené
deux parla ligne lacustre.
4.100 La Conventionde Londres du 29 mai 1906remédieà cette
configurationparticulièreen modifiantsubstantiellementla frontière lacustreen son
Article1 infine:
"A partir de l'embouchurede la Komadougou-Yobé dans
le Lac Tchad, la frontière suivra vers I'eslte parallèlede
latitude, passant par le thalweg de l'embouchurede la
dite rivièrejusqu'au pointde ce parallèle situéà une
distancede 35 landu centre du villagede Bosso. De ce
point eiie se dirigera en ligne droite sur le point
d'intersectiondu 13èmeparallèlede latitude nordavecle
méridien quipasse à 35' à l'est du centre de la ville de
Kouaoua,méridienvisédansles Conventionsdu 14Juin,
1898,et du 8 Avril, 1904"(AnnexeM.C. 40).
Cette disposition est importante plus d'un titre. D'une part, la frontièrelacustre
n'estplus constituéede deux lignes droitesà angle droit mais de lignes obliques.
D'autrepart, cette frontièrene s'étendplusjusqu'aux rives sud du lac, mais s'arrête
au 13èmedegréde latitude nord là où la ligne obliquecroise le méridien quiformait
l'ancienne frontièrelacustre (v. croquis n03). Ce point devientun point triple si on
combine la Convention avecla Convention anglo-allemandedu 19 mars 1906qui
prévoyait quela frontièrelacustreentre ces deux puissances s'étendaiters le nord,
sansmentionnerde limite.
4.101 Par un Echangede lettres des 17 mai et ler juillet 1911, la
France et la Grande-Bretagneont acceptéla démarcation consignéedans le Protocole
de Londresdu 19 février1910,et opérée sur base de la Conventiondu 29 mai 1906.
Pour la frontière lacustre,celui-ciprevoitq:e
"The mouth of the KomaduguYobehas been markedby
an iron telegraphpole, cementedat the base, situatedin
13'42'29" north latitude,8,250 metreseast of thecentre
of the villageofBosso.l Croquisno3
Conventionde Londresdu29 Mai 1906
Sourçc: PONDAVENPhilippeOp.cit., From this point the frontier follows the parallel of
13"42'29" north latitudefor a distanceof 26,700 metres
to the point on that parallel 35 kilom. from the centre of
Bosso.
An iron telegraph pole, set in cement, is erected on an
island situated approximatively 1,150 metres bearing
325" from this point.
From this point the frontier follows a straight line
bearing 144" 34'. distance 96,062 metres to the point
where the 13th parallel of north latitude intersects the
meridian35'eastof the centreof Kukawa.
The centre of Kukawais in 12"55'35.5" north latitude.
The centre of Bosso is in 13'41'59" north latitude,
O015'11" Westof Kukawa" (Souligné par la République
du Cameroun)(AnnexeM.C. 59).
La démarcation confirme doncla localisation du point triple contenue dans la
Conventiondu 29 mai 1906.
4.102 Les Conventions anglo-françaisesont abouti à la première
désignationde ce qui deviendra le point triple actuel. Non précisédans les
Conventions franco-britannique du 14 juin 1898 et du 14 avril 1904, et dans la
Convention anglo-allemande du 19 mars 1906, il est placé pour lapremière foisà
l'intérieurdu lac dans l'article 1de la Conventiondu 29 mai 1906, confirmée parle
Protocole de démarcationdu 19 février1910.
c) Les conventions franco-allemandes avant 1914 -
Confirmationdu point triple
4.103 La "Convention du 5 mars 1894 pour la Délimitation des
colonies du Congo Français et du Cameroun et dessphères d'influence françaiseet
allemande dans la région du LacTchad" détermine lafrontière entrele Cameroun et
le Tchad actuels. Le point situé leplus au nord est situé surles rives du Lac Tchad,
l'articleprévoyant quela frontière :
"[-]suivrace parallèle[1O0]jusqu'à sa rencontre avec le
Chari (voir Annexe, paragraphe 3), enfin le cours du
Charijusqu'au Lac Tchad(voir Annexe,paragraphe5)".Le paragraphe 5de l'Annexe prévoit que
"Dans le cas où le Chari, depuis Goulfei jusqu'à son
embouchure dans le Tchad, se diviserait en plusieurs
bras, la frontièresuivrait la principale branchenavigable
jusqu'à sonentrée dansle Tchad,aveccette réserveque,
pour que ce tracé soitdéfuiitif,la différence delongitude
entre lepoint ainsianeintpar lafrontière surla rivesud
du Tchad et Kouka, pris comme point fme, sera un
degré.
Dans le cas où des observations ultérieures, dûment
vérifiées, démontreraien qtue l'écart de longitude entre
Kouka et la dite embouchure differe de 5 minutes de
degréde plus ou de moins, de celui qui vient d'être
indiqué, il y aurait lieu, par une entente amiable, de
modifier le tracé de cette partie dela frontière de
manière que deuxpays conservent, au point de vue de
l'accèsau Tchad,et des territoires qui leur sontreconnus
dans cette région, des avantages équivalentsà ceux qui
leur sont assurés parle tracéporté surla carte annexéeau
présent protocole" (Souligné parla République du
Cameroun) (AnnexeM.C. 17).
A l'instar dela Convention anglo-allemandedu 15 novembre 1893 (v. supra, par.
4.95), la Convention franco-allemande du 5 mars 1894 ne fait pas remonter la
frontière jusqu'àl'intérieurdu Lac. Ellene prévoitque des garanties assurant l'accès
au lac, mais rien quantàune délimitationà l'intérieur deeaux.
4.104 La première délimitationlacustre entre l'Allemagne et la
France est contenue dans la Convention pour ~réciserla frontière entre le Congo
francais et le Cameroun, signée àBerlin le 18 avril 1908. Son article1(k) décriten
effet une lignedans les eaux du Tchad :
"De l'embouchure dela branche principalenavigabledu
Chari dans le Tchad, telle qu'elle est déterminée danla
carte annexéeau présent protocole,la frontière atteint
l'intersection du méridien12"8' est de Paris (14"28' est
Greenwich) avecle parallèle13'05' de latitude nord,suit
ensuite vers l'ouest ce parallèle jusqu'à la frontière
franco-anglaise (Conventionfranco-anglaise du29 mai,
1906). " (Souligné par la République du Cameroun)
(AnnexeM.C. 50).
Les termes soulignés montrent quela limite occidentaledela frontière lacustre franco-
allemande estle point qui recoupe la frontièrelacustrefranco-britanniquede 1906 la
latitudede 13"05' nord. Croquis no 4
ConventiondeBerlindu18 Avril1908
Source : PONDAVEN Philippe, Op.cil.,4.105 Ce point, expressémens titué une latitude13'- nord, ne
correspondpasexactement à l'extrêmelimitesudde la lignede 1906,puisque celle-ci
s'étendjusqu'au point situéà l'intersectiondu -parallèle de latitude nord (v.
croquis n04). La localisationde 1908précisela positionde l'Allemagneau sujet du
point triple, cet Etat n'ayantjusqu'alorsreconnuexpressément qle méridien,sans
plus de précision(convention du 19 mars 1906). Sa qualitéde point triple est
déf~tivementétablie.
4.106 L'étatde la frontière lacustreà la veille de la première
guerre mondialeest le suivant. Unpoint triple a éétablidans la Conventiondu 29
mai 1906, a été confirmédans le hotocole de démarcationdu 1910, et acceptépar
l'Allemagne dans la Conventiondu 9 avril 1908moyennant une nuance de 05' de
latitude. Des frontières lacustresaboutissaàt ce point ontété décritesentre la
France et l'Angleterre, entre la France et l'Allemagne, et entre l'Allemagne et
l'Angleterre(v. croquisn05).
2. Les conventions postérieuresla premièreguerre mondiale -
Modificationde la frontièrelacustàepartir du point triple
4.107 La frontièrelacustreentre le Camerounet le Nigeria actuels
est déterminée sans ambiguïtédans la Déclaration franco-britanniqueu 10 juillet
1919. Loind'êtreremiseen cause parla suite, elle sera confirmédans les Accords
de Mandat,dans la Conventionde 1931et dans les accordsde nitelle.
a) La DéclarationMiLNER-SIMON du10juillet 1919
4.108 L'article ler de la "Description de la frontière franco-
britanniquetracéesur lacarteMOISELdu Cameroun à l'échelle 11300,000" annexée
à la déclaratiMiLNER-SIMONdisposeque :
"La frontière partira du point de rencontre des trois
anciennes frontières britanniques, françaises et
allemandes situé dans le Lac Tchad par 13'05' de
latitudeNord et approximativement14'05' de longitude
est de Greenwich.
De là, la frontièreseradéterminéee la façon suivante Croquisno 5
NIGERIA
y
Frontièresactuelles
Source:Officeof te Geographer,Depanmentof State,
Internationl oundaryStudie- Chad-NigeriaBoundary,no 90,
Washington1969 1. Par une ligne droite jusqu'à l'embouchurede 1'Ebeji
[-]" (AnnexeM.C. 107).
On peut tirer deux enseignementsde cet article.
4.109 D'une part, le point triple établipar la combinaison de la
Convention anglo-allemandedu 19 mars 1906, de la Convention franco-britannique
du 29 mai 1906et de la Conventionfranco-allemandedu 9 avril 1908est confirmé.
4.110 La localisation en latitude reprend les coordonnées de
l'article Ik) de la Conventiondu 9 avril 1908 (13'05' nord)et non cellesde l'article 1
de la conventiondu 19mars 1906(13" nord).
4.111 La localisation en longitude consiste seulemenà remplacer
la mention du méridienà 35 minutes à l'est de Kuka, ou Kukawa (Conventionsdu 15
novembre 1893 et du 14 juin 1898) par une expression plus précise : 14"05' de
longitude est de Greenwich.
Cette localisation met finà tout doute sur la précisiondu point triple dont les
coordonnées exactes sont connues, tanten latitudequ'en longitude.
4.112 D'autre part, le point terminal frontière lacustre sur la
rive sud est déplacé vel'est. 11passe dupoint sur la rive sud situé surle méridàen
35 minutes à l'est deKuka, ou Kukawa (article II de la Conventiondu 15 novembre
1893) à l'embouchuredu fleuve Ebeji. Cette modificationexplique l'emploidu futur
(la frontière "partira") qui contraste avec le point triple qui se maintient à
l'intersection destrois anciennesfrontières.
4.113 La Déclaration MILNER-SIMO Nonstituedonc l'instrument
conventionnelde référence pourla frontièrelacustre. Elle seraonfiée et précisée
par la suite, sansjamais êtreremise en cause.
b) L'Echangede lettres du 9janvier 1931
4.114 L'Echange de lettres du 9 janvier 1931 renvoie lui-même à
deux instruments. En effet, les parties y "confienl'agrément implicitedomé à la
Déclaration franco-britanniquedu 31 janvier 1930. Par ailleurs, elles reconnaissant
implicitementque la DéclarationMILNER-SIMON de 1919contientune délimitation
de la frontière.4.115 La Déclarationde1930 ,nnexéeà 1'Echangede lettres, est
signée par Graeme THOMSON, Gouverneur de la colonie et du protectorat de
Nigeria, et Paul MARCHAND, Commissaire de la Républiquedu Cameroun placé
sous mandat français, lesquels, selon les termes de la Déclaration ppour lats
frontière lacustre,
"[-]sont tombésd'accord pour déterminerla frontière
séparant les Territoires du Camerounrespectivement
placés sous l'autoritéde leurs Gouvernements ainsi
qu'elleest tracéesur la cartejointette déclarationet
défullepar la descriptionégalemti-join:e
La frontière part du point de rencontre des trois
anciennes frontières britanniques, françaiseset
allemandes situé dans le Lac Tchad par 13"05' de
latitude Nord et approximativement'05 'e longitude
est de Greenwich.
De là, la frontièreest détermee la façonsuivan:e
2. Par une ligne droite jusqu'à l'embouchure de
I'EBEDJI -1" (AnnexeM.C. 157).
4.116 La frontière lacustreest délimitée exactemte la même
manièreque dans la DéclarationMILNER-SIMON,si l'on excepte l'utilisation du
présent,qui s'expliquepar lecaractèrepurementconfimatif de la description.
4.117 Le deuxième instrument auquel renvoie expressément
1'Echangede lettres de 1931 est la DéclarationMILNER-SIMON de 1919, déjà
commentée.
4.118 ies deuxpoints qui formentla frontièrelacustre actuelle ont
donc été défindiès 1919. Ils n'ontjamais étéremis en causepar la suite, et feront
seulement l'objetde précisionssupplémentaisprèsl'indépendancdu Nigeriaet du
Cameroun.
3. les précisions apportéesà la frontière lacustre après
1'indépendance
4.119 Comme laRépublique duCameroun l'a déjàdémontré,le
Nigeria a confirmél'ensemblede la frontière,y-compris sa partie lacustre, après
l'indépendance,notamment dansle cadre des travaux de la C.B.L.T. Plusieurs desinstruments pertinents apportent par ailleursdes précisionssur la définition exactede
la frontièrelacustre.
a) La Résolutionn02 relative à la démarcation des frontières
dans le Lac Tchaddu 2 décembre1988
4.120 Les Commissaires nationaux du Nigeria, du Cameroun, du
Tchad et du Niger ont adopté,le 2 décembre1988, une Résolution n02 relativea la
démarcationdesfrontières dans le Lac Tchad,lors des travaux de la 36èmesession
réunie à Maroua (Cameroun), les 1 et 2 décembre1988 (Annexe M.C. 288) . Dans
cette résolution,
"Considérant l'unanimitédes experts nationaux sur la
méthodologie,les documentset les cartes utiliséspour la
détermination des coordonnées;
- Les Commissairesentérinentla recommandation sur le
bi-point entre le Camerounet le Nigeria, dont les valeurs
sont :
Longitude 14' 12' 11" ,7E
Latitude12" 32' 17" ,4N."
4.121 Les commissairesentérinent ainsi lesconclusionsdu Rapport
de la réuniond'expelts relative à la recherche technique visanà t déterminer
l'embouchurede la rivièreEbeji dans le Lac Tchad @i-pointentrele Nigeria et le
Cameroun) tenueles 15 et 16 septembre1988 à N'Djamena,Tchad(Annexe M.C.
286). Dans la mesure où elles ont étéacceptéespar son représentant,les conclusions
de ce rapport sont opposablesau Nigeria (v. supra,chapitre 2, section2, par. 2.185).
4.122 Ce rapport contient une délimitationpréciseet définitivede
la frontière lacustre entre le Cameroun et le Nigeria, délimitationbaséesur une
méthodologieet des documentsaujourd'huiinvoquéspar la République duCameroun.
Il prévoiten effet:
"2.3. DEFINITION
' .La frontièrecommence à partir du jonction [sic]des
fois vieilles frontières britannique, française et
allemande à un point dans le Lac situéentre la latitude
13"05' Nord et environ la longitude 14'05' à l'est de
Greenwich. A partir de là, la frontièrea été déterminée
comme" suit : (2) sur une ligne droite jusqu'à l'embouchurede 1'Ebeji
2.4. METHODOLOGIE
Les experts ont procédé à l'établissementà l'échellede
l'embouchure de la rivièreEBETI(El-Beid) comme cela
figure sur la carte jointe au Traité, 2.2 @) ci-dessus
[savoir le Traitéde 19311. Les valeurs obtenues sont:
- Longitude : 14"12'11", 7 E, Latitude 12"32'17", 4N.
Ces valeurs sont considéréescomme les coordonnées
géographiquesles plus probables de l'embouchure de la
rivière Ebeji(El-Beid)comme cela aété en 1931.
Ces coordonnées sont différentes dc ee que revendiquent
le Cameroun (longitude : 14"11'48"E, latitude :
12"31'20"N) et le Nigeria (longitude : 14"13'22"E,
latitude: 12"31'12"N). Ces différentesrevendications
semblent êtrele résultat de la division de la rivière
(Ebeji) en deux canaux d'eau lorsqu'elle s'approche du
lac. Les trois valeurs sus-mentionnéesont été reportées
1150la000rt(le NIGERIA et le CAMEROUN) CHAD- à l'échelle
WULGO SIW KOUSSERI parce que ces deux canaux
figurent trèsnettementsur la carte 20 fois plus large que
cellejointe auTraité.(Annexée)
3. OBSERVATIONS !
!
Les experts ont remarquéque :
l
(a) L'échelle utilisépeour la carte jointe au Traité est
trop petite.
(b) La carte utilisée est une photocopet non l'original.
4. RECOMMANDATION
La Commissiond'expertsrecommandeque les valeurs
- Longitude : 14"12'11", 7 E
- Latitude 12"32'17", 4N
obtenues en graphiquant sur la carte jointe au Traitéde
1931 soient adoptéescomme l'embouchure de la rivière
EBEJi (EL-BEID)àl'époque".
4.123 Deux remarques méritent d'être formuléesà ce sujet.
l
4.124 D'une part, ce document atteint un très haut degré de
précision permettantde délimiteravec certitude la frontière lacustreen traçant uneligne droiteà partir du point triple siàul'intérieurdu lac, jusqu'au premier point de
la frontière terrestreidentifié parles cordonnées suivant:longitude : 14°12'11", 7
E, et latitude 12"32'17", 4N.
4.125 D'autre part, la nécessitéd'une démarcation s'estposée à
cause de la division du fleuve Ebeji en deux branches, division qui rendait incertaine
la localisation du point terrestre de la frontière lacustre.s experts ont choisi de
désignerle point qui constituait l'embouchureau moment de la conclusion du Traité
de 1931. Ainsi, ils ont considéré qu'il ne fallait pas tenir compte des variations de
cours dues à l'assèchementdu Lac Tchad. Celui-cine peut donc en aucune manière
provoquer une modificationde la frontière, qu'elle soitlacustreou terrestre.
4.126 Cette méthode est parfaitement conforme au droit
international général. S'ilestdifficile de dégagerune règle coutumièreen l'absence
de règlement conventionnel, personne ne conteste que, dans les cas où la nature peut
entraîner des modifications d'une ligne frontalière (modification d'un cours d'eau,
assèchement, -), le droit international permet aux parties d'opérerun choix entre
l'adaptation de la ligne frontalièreaux changementsnaturels et le maintien de la ligne
en dépitde l'influence quepeuvent avoir ces changements (v. LuciusCAFLISCH,
"Règles générales des cours d'eau internationaux",R.C.A.D.I., 1989-VII, tome 219,
pp. 80-92). C'est trèsclairementen faveur de cette deuxièmebranchede l'alternative
qu'ont tranché les Etats membres de la C.B.L.T., y compris le Nigeria. C'est en
effet sans tenir compte des conséquencesde I'assèchementque s'est effectuée toutela
procédure de déterminationexacte des coordonnéesdes points décrits dans les
conventions de l'époquecoloniale, ainsi que toutesles opérationsd'abomement.
4.127 Quant à la matérialisation des pointsqui forment la ligne
frontière, les Etats ont dans un premier temps tardà effectuer les travaux, pour des
raisons financières (v. Réunion dela C.B.L.T. à Lagos, 22 au 25 avril 1985,
Rapport, p. 84; Annexe M.C. 272). La démarcationaété effectuée parle placement
de bornes de 1988 à 1990par I.G.N.-France international(marché n°CBLTIM02188,
approuvé le 26mai 1988). b) Les précisions découlantdes travaux d'I.G.N.-France
international
4.128 Pour ce qui concernela frontièrelacustre Cameroun-Nigeria,
le rapport final d'I.G.N. de 1990mentionne les coordonnéesexactes des deux points
de la ligne 1919-1931matérialisés pares bornes:
-pour le point triple, longitude 14"04'59"9999et latitude 13"05'00'0001;une borne
y a étéimplantéedu 14 au 20 juillet 1988 en présence desexperts des quatre Etats
membres (Annexe M.C. 285);
- pour le point double, longitude 14"12'11"7005et latitude 12"32'17"4013suivant
l'azimut 186,4506gr. observéde la borne matérialisantle point triple.
4.129 Par ailleurs, 13bornes intermédiairesont éconstruites dont
les coordonnées sontdécritesavecle mêmedegréde précision. k passagedu rapport
est le suivan:
"La borne II-V-1 typeD, de longitude 14"05'29"5545
et de latitude 13"02'45"9210, se trouve àune distance
de 4215, 47 m. et un azimut de 186, 4508 gr. de la
borne principaleII;
La borne II-V-2 typeD, de longitude 14"05'58"1774 et
de latitude 13"00'36"0193, se trouve à une distance de
8299, 55 m etun azimut de 186, 4508 gr de la borne
principale II.
La borne II-V-3type D, de longitude 14"06'27"5781 et
de latitude 12"58'22"5636,se trouve àune distance de
12495, 36 m et un azimut de 186, 4504 gr de la borne
principale II.
La borne JI-V-4type D, de longitude 14"06'57"0319 et
de latitude 12"56'08"8135, se trouve à une distance de
principale II. un azimut de 186, 4506 gr de la borne
La borne II-V-5typeD, de longitude 14°07'32"0445 et
de latitude 12"53'29"7765,se trouve à une distance de
21700, 31 m et un azimut de 186, 4505 gr de la borne
principale II.
La borne II-V-6 typD, de longitude 14"08'07"2166 et
de latitude 12"50'49"9395, se trouveà une distance de
26725, 34 m et un azimut de 186, 4507 gr de la borne
principaleII. La borne II-V-7type D, de longitude14"08'42"0293 et
de latitude 12"48'11"6915,se trouve à une distance de
31700, 38 m et un azimut de 186, 4507 gr de la borne
principaleII.
La bome II-V-8type D, de longitude 14"09'16"2318 et
de latitude 12'45'36"1475, se trouve à une distance de
36590, 32 m et un azimut de 186, 4508 gr de la borne
principaleII.
La borne Ii-V-9 typeD, de longitude 14"09'51"9713 et
de latitude 12°42'53"6018, se trouve à une distance de
41700, 40 m et un azimut de 186, 4505 gr de la borne
principaleII.
La borne II-V-IOtype D, de longitude14°10'21"2616et
de latitude 12"40'40"3244, se trouve à une distance de
45890, 27 m et un azimut de 186, 4504 gr de la borne
principaleII.
La borne II-V-11type D, de longitude 14°10'47"8833et
de latitude 12"38'39"1249,se trouve à une distance de
49700, 37 m et un azimut de 186, 4506 gr de la borne
principaleII.
La bome II-V-12type D, de longitude14"11'15"8286et
de latitude 12"36'31"8833,se trouve à une distance de
53700, 40 m et un azimut de 186, 4507 gr de la bome
principaleII.
La borne II-V-13type D, de longitude 14°11'41"1850et
de latitude 12'34'36"4112, se trouve à une distance de
57330, 43 m et un azimut de 186, 4506 gr de la borne
principaleii"
4.130 Cette description met finà toute possibilité decontroverse
concernant la démarcationde la frontièrelacustre:le degré maximal deprécisionest
atteint. 11faut par ailleurs rappeler que le rapport de 1990 a ultérieurementété
accepté par leNigeria (v. supra,chapitre2, section3, par. 2.207).
4.131 Sur le plan du droit intemational, il n'existe doncplus à
l'heure actuelleaucun problème dedélimitationou de démarcationdans le Lac Tchad.
La frontière lacustrea été noseulementdéfinie avecune précisioncroissante, depuis
le siècle dernierjusqu'en 1990, mais a aussi matérialisépear des bornes poséessur
le terrain. B. - La frontière terrestre
4.132 Le secteur terrestre de la frontière septentrionale présente
moins de particularités que le secteur lacustre, dans la mesure où l'ensemble des
instrumentsprésentéde manière générale concernent essentiellement cetteie lad
frontière.Il ne sera donc plus nécessaire,commepour la régiondu lac, de reprendre
un à un les instruments pour y vérifierleur applicabilité. De même,les éldeents
reconnaissanceet l'exposéde la démarcation concernent,en premier lieu, le secteur
terrestre, et ne seront donc plus àce stade.
4.133 Par ailleurs, cette partie de la frontière terrestre a été
délimitéede manière complète pourla première fois en 1919. L'ensemble des
conventions antérieuresà la première guerre mondiale n'est donc pas pertineàt,
l'exceptionde la Convention anglo-allemanded1906pour le segment de la frontière
proche de Yola (v. cidessous). C'est essentiellement partir des Déclarations
franco-britannique d10 juillet1919 et de 1'Echangede lettres d9 janvier1931
qu'on peut reconstituun tracéavectoute la précisionrequise.
1. La Déclarationdu10 juille1919
4.134 Le texte de la DéclarationMILNER-SIMON permet déjà
d'établirun tracé précisde la frontière, septentrionale notammentLe passage
pertinent est le suiv:nt
"Les soussigné:
Le vicomte MILNER, Secrétaire d'Etat du
Ministèredes Coloniesde la Grande-Bretagne,
M. Henry SIMON, Ministre des Colonies de la
Républiquefrançaise,
sont tombés d'accord pour déterminer la frontière
séparant les territoires du Cameroun respectivement
placés sous l'autorité de leurs gouvernements, ainsi
qu'elle est tracée sur la carte Moisel au11300,000
annexée à la présente déclaration et définie par la
descriptionégalementci-jointe" (AnneM.C.107).
Le tracé résultdonc d'une descriptionen toutes lettres, et de la reproduction sur une
carte.4.135 La descriptionjointe permeà elle seule l'établissemd'un
tracé sur l'entièrde ce qui forme aujourd'hui la frontière septentrionale.
4.136 Son article ler comprendune énumératiode 42 points, dont
le premier est décrdans un préambule,et les41 suivants sont numérotés de manière
continue. Pour le secteur terrestre de l'actuelle frontière septentrionale,les points
pertinents portent les numéros2 à23La description est précisémenlta suiva:te
"2. De cette embouchure [du fleuve Ebeji], par le
cours de la rivièreEbeji, qui porte en amontles noms de
Lewejil, Labejed, Ngalaren, Lebeit et Ngada, jusqu'au
confluentdes rivièresKaliaet Lebaiit;
3. Du confluentdes rivièresNgada, Kalia et kbaiit,
par les cours de la rivière Kalia ou Ame jusqu'à son
confluentavec la rivièreDorma ou Kutelaha(Koutelaha);
4. Du confluent des rivières Kalia et Dorma ou
Kutelaha, par le cours de cette dernière rivière, qui porte
en amont le nom d'Amjumba(Amyoumba), le village de
Woma (Voma) et ses dépendances devantrester à la
France;
5. Du point, où s'interrompt la rivière Amjumbaà
l'entréedu marécage,par une ligne traversant ce marais
et rejoignant le cours d'eau qui paraît êtrela suite de la
rivière Amjumba et qui, en amont, porte les noms de
Serahadja, Goluwa (Golouva) et Mudukwa
(Moudoukva), le village de Uagisa devant rester à la
Grande-Bretagne;
6. Par le cours de cette dernièrenvièrejusqu'à son
contluent avec la rivièreGatagule (Gatagoule);
7. De ce confluent, par une ligne vers le sud-ouest
gagnant la ligne de partage des eaux entre le bassin de
Yedseram, àl'ouest, etles bassinsde la Mudukwaet de
la Benue (Benoue), à l'est; puis, par cette ligne de
partage des eaux, jusqu'au montMulia (Moulia);
8. Du mont Mulikia jusqu'à la source du Tsikakiri,
par une ligne à déterminer sur le terrain, de façonà
laisser le villagede Dumo (Doumo),àla France;
9. Par le Tsikakirijusqu'à son confluent avec le Mao
Tiel, prèsdu groupe de villages deLuga (Louga);
10. Par le cours du Mao Tiel jusqu'à son confluent
avec la rivièreBénoué (Benoue);
11. Par le cours de la Bénoué,n amont, jusqu'à son
confluentavec le Faro;12. Par le cours duFarojusqu'àl'embouchurede son
bras, le Mao Hesso, situéà peu prèsà 4 kilomètressud
de Chikito;
13. Par le cours du Mao Hessojusqu'à la borne n06
de l'ancienne frontière germano-britannique;
14. Par l'alignementpartant decette ancienneborne
n06et qui, passantpar la bornen07, aboutitàl'ancienne
bornen08;
15. De cette borne 8, par une ligne versle sud-ouest
gagnant la ligne de partage deseaux de la Bénouéa ,u
nord-ouest,et du Faro, au sud-est,qu'ellesuivra jusqu'à
un point situésurl'HossereBanglanget qui se trouve à
environ 1 km. au sudde la source du Mao Kordo;
16. De ce dernier point, au confluetu MaoNgonga
et du Mao Deo, parune ligne à déterminersur le terrain,
de façon à laisserà la France le village de Laro, ainsi
que laroute de BareàFort-Lamy;
17. Par le Mao Deo jusqu'à son confluentavec le
Tiba;
18. Par la Tiba, qui, en amont, porte les noms de
Tibsatou Tussat (Toussa),jusqu'auconfluentd'un cours
d'eau venant de l'ouestet situé environ 12 kilomètres
au sud-ouestdeKontscha (Kontcha);
19. Par une lignepartantde ce point,ce dirigeantvers
le sud-ouest et gagnant le sommet du Dutschi-Djombi
(Doutchi-Djombi);
20. De ce sommet,par la lignede partage deseaux
entre les bassin du Tarba,à l'ouest, et du Mao Deo, à
l'est, jusqu'enun point sur les TchapeBerge(montagnes
de Tchape) à2 km. environ au nord-ouest dela Tchape
Pass @asse ou col du Tchape), qui est situéeà la cote
1541;
21. De ce point, par une ligne gagnant les Gorulde
Berge (montagnes de Goroulde),de façon à laisser la
routede Bare à Fort-Lamyàenviron 2 kilomètres à I'est;
22. Des Gomlde Berge, par la ligne de partagedes
eauxentre la Gamgamet la Jim,les bassinsde la Bénoué
et de la Sanaga, etde laKokurnbahunet 1'Ardo(Ntuli),
jusqu'à I'HossereJadji(Yadyi);
23. De ce point, par une lignegagnantla sourcede la
rivièreMafu (Mafou);
[-1.4.137 L'article 2 de la descriptionannexéecontientdeux précisions
intéressantes:
2. En ce qui concerne les routes désignées à l'article 1,
les seules qui puissent êtreprises en considération pour
l'établissementde la frontièresont celles indiquéessur la
carte ci-jointe.
3. Quant la ligne frontièresuit un cours d'eau, c'est la
ligne médiane quifome la limite [-1"
4.138 La description textuelle permet indiscutablement de
déterminer l'accorddes parties sur une ligne frontièrecomplètes'étendantdu Lac
Tchad à la mer. Cette description, qui sera complétée par la suite, reste le texte de
référence, etsupplante toutes les conventions antérieures pourla partie septentrionale
de la frontière terrestre.
4.139 Il faut cependantrelever un élémend te continuité, qui ressort
du texte des points 13 à 15 de la déclaration,lesquelsmentionnent "la borne n06 de
l'ancienne frontièregermano-britannique"@oint13), puis l'"ancienneborne n06", "la
bome n07" et "l'ancienne bome n08" (point 14) et "cette bornen08" @oint 15). Ce
segment frontalier constitue la seule partie de la frontière franco-britanniquequi
reprend des repèresde l'ancienne frontièreanglo-allemande. Plusparticulièrement,la
mention des anciennes bornes n06 à 8 renvoie à une description contenue dans le
protocole anglo-allemand du 10 août 1903 de délimitationde l'arc de Yola, valable
dans la mesure où il a étéconsacrédans l'Accord anglo-allemanddu 19 mars 1906
relatif à la frontière entreYola et le Lac Tchad (vsupra,chapitre 2, section 2, pars.
2.59-2.68 ;Annexe M.C. 36). Le passagefaisant état de bornesnumérotées de 6 à 8
est le suivant:
"1-] 3. The line then follows the median line of the
Faro up-strearn, as far as the junction of the Mao Hesso
with the main Stream;and aftenvards the median line of
the Mao Hesso, as far as post, N06, on the left bank of
the Mao Hesso, about 3kilom. north-west of Beka. It
then runs from the medianline of the river at right angles
to its course, to NO6post. 4. From N06 post the line runs straight to a
conspicuousrock, on a slighterninenceon the road from
Gurin to Karin. This rock has a boundarymark (N07)
"D 1 B" (Deutsch-British)cut into it. From this rock it
runs straight toa post, N08, fd on the road at the
entranceto the pass throughthe Karinhills, north of the
villageofKarin".
Cette descriptioncomplète utilementla Déclarationde 1919 pour la localisation des
anciennes bornes auxquelles ilst faitréférence.
4.140 Quant à la carte dont il est question tantdans le texte de la
DéclarationMILNER-SIMONque dans l'article 2par. 2 de la descnption jointe, elle
n'estpas reproduitedans leJournaloficiel de la Sociétédes Nations, qui se contente
de préciserdans une double annotation que "Cette carte n'a étéannexéequ'à la
déclarationoriginale"(AnnexeM.C. 127).
4.141 L'article3 de la descriptionfournitcependant deplus amples
informationssur l'identificationet le statut exact du matériacartographique. On
peuten effet y lire qu:
"1. La carte qui a servipour décrirela frontière estla
carteMOISELau 11300,000, savoir :
FeuilleA4. Tschad : éditéele ler décembre1912;
FeuilleB4. Kusseri :éditéele ler août 1912;
FeuilleB3. Dikoa : éditéele ler janvier 1913;
l
FeuilleC3. Mubi :éditéele 15décembre1912; 1
FeuilleD3. Gama :éditéele 15mai 1912;
Feuille E3Ngaundere :éditélee 15octobre 1912;
Feuille E2.Banjo :éditée leler janvier 1913;
FeuilleF2. Fumban : éditéele ler mai 1913;
FeuilleFI. Ossidinge :éditéele ler janvier 1912;
FeuilleG1. Buea :éditée ller août 1911
2. A titre d'indication, une carte du Cameroun au
112,000,000 est attachéeà la présentedescnption de la
frontière(Soulignépar la République du Cameroun).4.142 Ainsi, la carteMOISEL a servi pour &&r& la frontière.
Autrementdit, les 10 cartes utiliséesont seràrepérer etdésignerdes noms de lieux,
de villages, de rivières, derout;s
4.143 Signée par Lord MILNER et Henry SIMON, la carte
annexéeporte deux lignes frontières : la frontière anglo-allemande de 1913; la
frontièredécritedansla Déclarationdu 10juillet 1919.
4.144 On n'insisterapas sur la frontièrede 1913portéesur la carte.
Celle-ci décrit avec unecertaine précisionla frontièreoccidentale duCameroun sous
mandat britannique et constitue donc un élémendt e reconnaissanceinternationale de
cettefrontièrejusqu'à la born64 (v. infra, chapitre4, section4 et section 5).
4.145 En revanche, la ligne tracéesur la carte au 1/300.000' du
Mont Kombon jusqu'au Lac Tchadconstitue la reproduction cartographique de la
description donnée dansla Déclarationdu 10 juillet 1919. Elle fait partie de
I'instrumentumde 1919 mêmesi elle n'est pas annexée autexte du mandat, mais à
celui de la déclarationproprementdite.
4.146 La Déclarationde 1919 fait aussi référence à une carte au
1/2.000.000', plus largement diffusée pour des raisonsde commodité. Mais cette
carte, selon les termes de la déclaration même,n'a qu'une valeur indicative,
contrairementà la carte MOISEL au 1/300.000'.
4.147 Au demeurant, on ne relève pas de différence entre la
Déclaration de 1919 et la carte annexée. Les difficultés d'application de la
DéclarationMILNER-SIMON tiennent auxincertitudes de la carte MOISEL et à
l'insuffisante connaissance en 1919 de la situation sur le terrain, ce qui se conçoit
aisément.
2. L'Echangede lettres du 9 janvier 1931
4.148 L'Echange de lettres du 9 janvier 1931entre FLEURIAU et
HENDERSON permet de préciser encorele tracéde la ligne terrestre. Comme le
Cameroun l'a déjà souligné,1'Echange de lettres consacre l'accord sur une
Déclarationdes Gouverneurs Graeme THOMSON et Paul MARCHAND des 29
décembreet 31janvier 1930(AnnexeM.C. 157).4.149 Plus exactement, FLEURIAU considère que cette
Déclaration
"est destinéeà donner à la descriptionde la ligne que
devra suivre la Commission de délimitationplus de
précision que ne l'a fait la Déclaration MILNER-
SIMON, de 1919",
et ajouteque:
"Quoi qu'il en soit, la première Déclarationviséeci-
dessusdéf~t en substancela frontière dont il s'att le
Gouvernement de la République a l'honneur de
confier, par la présentenote, l'agrément qui luiété
implicitementdonné".
4.150 HENDERSONadmetquantàlui quecetteDéclaration
"[is]only the result of a preliminarysurvey in order to
determine more exactlythan was done in the MILNER-
SIMONof 1919the line ultimatelyto be followedby the
boundarycommisçion [-]none the less, the Declaration
doesin substancedefmethe frontier",
pour répondreà son homologuefrançais
"[-] 1 have the homour in reply to inform your
excellency hereby that His Majesty's Government
similarlyconformthisagreement".
4.151 Il y a donc bien lieu de se reporter à la Déclaration
THOMSON-MARCHAND poud réterminerle tracé.
4.152 Le textede cetteDéclaratiocommence commesuit :
"Lessoussignés :
Sir GRAEME THOMSON,C.G.M.G. K.C.D.,
Gouverneurde la colonieet du protectoratde NIGERIA,
et le
GouverneurPaul MARCHAND, Commissaire de
la Républiquedu Camerounplacésousmandatfrançais,
sont tombés d'accord pour déterminer la frontière
séparant les Territoires du Cameroun respectivement
placés sous l'autorité de leurs Gouvernements ainsi
qu'elle esttracée surla cartejointecette déclaratiet
définiepar la descriptionégalemenci-jointe-ln.Le texteest pratiquement semblablà celuide la Déclaration MILNER-SIMON.11 y
a donc lieu ici ausside se référeàune description textuelleeà une reproduction
cartographique.
4.153 La description textuelle qui suit directement le passage
précitécomprendune énumératiod ne 139pointsdont le premier est désigndans un
préambuleet les 138 suivants numérotés dfeaçon continue à partir du numéro2.
Pour le secteur terrestre de l'actuelle frontièreseptentrionale, les points pertinents
portent lesnuméros3 à 60. La descriptionest précisément suivante:
"3. De cette embouchure [du fleuve Ebedji]par le
coursde la rivière Ebedjiquiporteen amont lesnomsde
Lewejil, Labejed, Ngalarem, Lebeitet Ngada, jusqu'au
confluentdes rivièresaliaet Lebaiit.
4. Du confluent desrivières Ngada,Kalia, et Lebaiit
par le cours de la rivièreKalia ou Arne jusqu'à son
confluent avecla rivière DonnaouKoutelaha.
5. Du confluent des rivièresKalia et Donna ou
Koutalaha,par le cours de cettedernièrerivière jusqu'à
un point situéau sud du village de Segage où elle
rencontre un marécagequi s'étend dans la direction du
sud.
6. De ce point, par une ligne idéale passantau
milieude ce marécage jusqu'aupointoù elle rencontrela
piste deegageaumarais SALE.
7. Puis elle suit cette pistejusqu'à un point sàtué
environun kilomètreset demiau nordduditmarais.
8. Ensuiteelle passeàenvironun kilomètreàl'ouest
du marais jusqu'àun point situé environ un kilomètre
et demi ausud du marais, sur la piste menantau village
de Gourgourou.
9. Elle suit cette piste jusqu'à un point situéà
environ deux kilomètresau nord-est du village de
Gourgourou, traverse un marécage à environ un
kilomètre aunord de ce village jusqu'à un point siàué
environ deux kilomètres à l'ouest, sur la piste
Gourgourou Ferfati,laissant ainsila Franceles villages
de SALE, MADAet GOURGOUROU.
10. De ce point elle suit la piste, rencontrant un
certain nombre de cuvettes (désignéessous le nom de
AMJUMBAsur la carte Moisel),jusqu'enun point situé
à environun kilomètredu villagede Ferfati, pénèdans
un marais situéà 500 mètresau nord de ce villagequi
reste dansla zonefrançaise.11. De la frontière s'inflécht l'ouest, sud-ouest et
sud pour atteindrele lit d'une rivièrebien marquéepuis
suit le lit de cette rivièredam une direction sud-ouest
jusqu'à un grand marais désigné sou ls nom de UMM
JUMBA (AMJüMBA) laissant dans la zone britannique
lesvillagesde GaladimaJidda, Abu Kharaza ,t Ulba.
12. Puis elle suit la ligne médianede ce marais, et,
franchit le lit d'un misseau qui se perd à plusieurs
reprises dans le marais jusqu'à une cuvette nommée
DLTUILABA et un confiuent avec une autre ligne de
marais se dirigeant plus au sud dans la direction du
rocherde WASA.
13. Ensuite continuant, elle rencontre le lit d'une
rivière mieux marquéeà travers les maraisde Kuludjiaet
Kodojusqu'à un marais nommé Agzabam.
14. Ensuite traversantce maraisà l'endroit où il est
rejointpar une rivièrepassantpar levoisinage du village
de Liti (Liani) jusqu'à un confluent situà environ
deuxkilomètresau nord-ouest de cevillage.
15. Ensuite suivantla piste LimantiWabisei (Uagissa)
jusqu'àun ruisseausituéàenvironun kilomètre à l'estde
Waisei et divisant les villages de Bangimami et de
Imchideen laissant levillagede Djarandiouaàla France.
16. Suivant ce ruisseaujusqu'à un marais situé à
environ troiskilomètreà l'ouest de Wabisei.
17. Ensuitepassantà travers ce maraisjusqu'au point
où il rencontrela rivière Kolofaet suivantensuite cette
rivièrejusqu'à son confluentavec la rivière Gwanjeou
Keraua.
18. Ensuite suivant la rivière Kerauajusqu'à son
conîluent, dans la montagne, avecune rivière venant de
l'ouestet connuepar leshabitantsKiidis sousle nom de
Kohom (désignée sur la carteMoisel sous le nom de
Gatagule) coupant en deux le village de Keraua et
séparant leseuxvillagesde Ishigasja.
19. Ensuitela frontièrepartant dece confluentatteint
le sommet de la montagne NGOSIdans la directiondu
sud-ouestdonnépar le cours du Kohom (Gatagule)qui
est pris comme frontière naturelle, de son confiuent
jusqu'à sa source dansles monts Ngosi, les villages de
Matagumet de Hidjie étantattribués à la France et les
quartiersde Uleddeet de Laherre, au nord de Kohom, à
l'Angleterre. Les quartiers de Tchidoui (Hiduwe) situés
au sudde Kohomsontattribués àla France. 20. Ensuite elle est déterminée par une ligne ayant
une directionsud-ouestet qui suit la crêtedu massif du
Ngosi laissantà la France les quartiers deNgosi situés
sur les pentes orientales et'Angleterreceux situés sur
le versantouest,jusqu'à un point situéentrela sourcede
la rivièreZimmunkamet la source dela rivièreDevurua;
la ligne de partage des eaux ainsidéfinelaissele village
de Bugelta à l'Angleterre et le village de Tuni à la
France.
21. Ensuiteelle s'infléchiau sud-sud-ouestlaissantle
villagede Dile en zone anglaise,celuide Libamen zone
française pour atteindrela collinedeatakam.
22. De là elle se dirige directemenà l'ouestjusqu'à
un point au sud du village de Wisik où elle s'infléchit
dans la direction du sud en empruntant la ligne de
partage des eaux et franchitMabas, sur le côtéfrançais,
puis quitteWula, sur le côté anglais,et continue dansla
direction du sud, limitéepar des cultures à l'est de la
lignede partage des eaux.
23. Ensuite, franchissant Humunsi sur le coté
français, ellepasse entre les montagnesdeJe1et Kamale
Mogode, en zone française,et suit la lignedepartagedes
eaux.
24. Passant Hurnsiki, la frontière traverse le Mont
Kuli, laissantàla France les terres cultivéde la vallée
à l'ouestdu village.
25. Ensuite elle continue vers le sud entre Mukta
(anglais) et Muti (français), la ligne erronée de partage
des eaux indiquéepar la carte Moisel étantadoptée,
laissant Bourhaet Dihi en zone française, Madogoba,
Gamdiraen zone anglaise, Bugelaou Bukula,Madoudji,
Kadanahanga en zone française, Ouda Tua, et
Tsambourga en zone anglaise et Buka sur le côté
français.
26. Puis la frontière passe par le mont Mulikia
(appeléaussi Lourougoua) .
27. Du sommet du mont Mulikia elle atteintla source
du TsikakicilaissantKocha à l'Angleterreet Dumo à la
France, puis elle longeune lignejalonnéeprovisoirement
par quatre bornes par MM. VEREKERet PITION en
septembre 1920.
28. Puis elle suit le cours du Tsikakuitel qu'il existe
réellementet non ainsi qu'ilest porté surla carteoisel
jusqu'à son confluentavecla rivièreTiel.
29. Puis elle est définie par lecours du Mayo Tiel
jusqu'à son confluentavecla Benoué.30. Puis par la Benoué, en amont, jusqu'à son
confluentavec leFARO.
31. Puis le Faro jusqu'à l'embouchured'une de ses
branches, le Mao Hesso, située à environ quatre
kilomètresau sud deChikito.
32. Puis par le cours du Mao Hessojusqu'à la borne
n06 de l'anciennefrontièreAnglaiseAllemande;
33. Puispar uneligne partantdu repèren06et passant
pa~le repèren07pourfinr au n08.
34. De ce repèren08, placésur la rive gauche du
Mao Youwai, petitcours d'eauvenantde l'ouest pour se
jeter dansle Faro, par unelignedroiteorientéesud-ouest
qui atteint le sommet du mont Wammi, pic élevé,au
nord d'une chaîne de montagnes qui s'étendvers les
Atlantikas et qui est située I'est de l'ancienneborne
frontièrenolO.
35. Puis par la ligne de partage des eaux Mao Warà
l'ouestet du MayoFaro àI'estpour rejoindre les monts
Atlantikas, delà par la ligne de partage des eaux de la
Benoué au nord-ouese tt du Faro au sud-est jusqu'aupic
du sud des monts Atlantikas enun point situé à deux
kilomètresau nordde la sourcede la rivière Mali.
36. De ce pic, par la rivièreSassiri, laissantKobi en
zone françaiseet KobiLeindeen zoneanglaise,Tebouet
Tachoà la France,jusqu'à son confluent avecle premier
ruisseauvenant de la chaîne des Balakossa(ce confluent
touche la piste Kobodji Mapeo). De ce ruisseau la
frontière se dirige vers le sud laissant Uru Belo à
l'Angleterreet Nananouaàla France.
37. Ensuite elle rejoint l'ancienne frontière aux
environsde Lapaoen temtoire françaiset suit la lignede
partage des eauxde la chaîne desBalakossajusqu'à un
point situéà l'ouest de la source de Labidje ou Kadam
rivière qui sejette dans la Mayo Deo d'une part, etla
rivièreSampee quisejette dansla rivièreBaleo,au nord-
ouest, d'autrepart.
38. De ce point la frontièresuit la ligne de partage
des eauxentre la rivièreBaleoet la rivièremberouen
empruntantla ligne de faite desmonts Tschapeujusqu'à
un point situé à deux kilomètresau sud au nord de
Noumberou, s'infléchissantà la hauteurde ce village qui
est en Nigeria puis empruntantune vallée nord-est, puis
sud-est, qui franchitla chaîne desBanglangenvironun
kilomètrede la sourcede la rivièreKordo.39. De ce point elle est déterminéepar une ligne
droite allant dans la direction du confiuent dela Ngomba
et du Deo jusqu'au moment où elle atteint la rivière
Kolob.
40. Puis une ligne parallèlà la route de Fort-Lamy-
Baréen se maintenant à une distance de deux kilomètres
de cette route qui se trouve toujours en territoire
français.
41. Puis par une ligne parallèle et distante de deux
kilomètres à l'ouest de cette route qui est
approximativement celle marquéeFaulbom janvier 1908
sur la carte Moisel jusqu'au point sur le Mayo Tipsal
(Tiba, Tibsat, ou Tussa sur la carte Moisel) à environ
deux kilomètres ausud-ouestdu point où le Mayo Tipsal
est traverséparla piste.
42. Puis par le Mayo Tipsal en amont de son
confiuent avec le Mayo Maîu qui vient de l'ouestjusqu'à
un point situé environ douze kilomètres ausud-ouest de
Kontscha.
43. Puis par la ligne droite passant au sud-ouest du
plus haut pic des Hosere Jongbi(Dutschi, Djombi de la
carte Moisel).
44. Puis par la ligne de partage des eaux entre le
bassin de la MaioTaraba àl'ouest et celui de Mayo Deo
à l'est jusqu'au second, en partant du nord, des quatre
pics des montsBakari Be (Dutschi-n-Bertouasur la carte
Moisel). Ces quatre pics s'étagentdu nord au sud
parallèlementet à environ trois kilomètreàl'ouestde la
route de Bare-Fort-Lamy .
45. De ce second pic coule le Mayo Tapare dans la
direction de l'est, ce dernier forme la limite de Kontcha
et de Dodeo; c'est àce pic que le Mayo Tapare prend sa
source qui est exactement à deux milles du gîte d'étape
de Mayo Tapare. Ami déterminée la frontièrelaisse les
villagesde Mafouet de Kountien zone française.
46. Continuant à suivre la ligne de partage des eaux
entre le Mayo Tapare et le Mayo Deo ou de leurs
affluents, la frontièrepassepar les deux pics suivants des
monts BakariBe (direction nord-sud) puis les trois pics
des monts N'Yamboli,puis les deux pics desmontsMaio
Badji et monts Lainga. Ce groupe de montagnes,
Nyamboli, Maio Badjiet Laiiga est orientésud-ouestet
forme ce qu'on appelle la chaîne des Bapai. En amère
des bapai se trouve le Sapbe Kanuyel, en territoire
britannique.47. Ensuite elle traverse la dépressionqui unit les
Bapai à l'imposant massif du Genderou, de cette
dépression la frontière monte jusqu'au sommet du
premier pic des Genderou(connu sous le nom de mont
Joro Gotelou Jagam, puispar les quatre pics desSangoji
jusqu'auSapbeM'Bailadji. Ce dernier groupede monts
forme la ligne departage des eaux entre la Tarabaet le
Yirn.
48. Puis elle atteint le mont Lowul qui se trouve à
environ deuxkilomètresde la route Banyo-Kotcha(route
de Fort-Lamy). Du sommet de la passe du Genderou
l'azimutdu mont Lowul est 296. De ce sommet situéà
trois milles et demi dugîte d'étape,qui se trouve et qui
est situé entreun pic des monts M'Bailadji l'ouest)et
une colline moins élevéeappeléeHosere Burutol, (à
l'est) le mont M'Bailadji està l'azimut 45 et le mont
Burutolàl'azimut185.
49. La frontière estensuite déterminée par uligne
qui franchit la Mayo Yi en un point situéà environ
quatre kilomètres à l'ouest du chiffre 1200 (chiffre
indiquantla hauteuren mètresd'une montagnede forme
coniquesur la carteoiselsection E 2)jusqu'à un pic de
forme conique, le mont Golungel, au pied duquel (en
zone française) se trouve une source natronnéebien
connue des pasteurs.
Du gîte d'étapede compagnieMassa situésur la piste
Kontcha-Banyo(routede Fort-Lamy)on aperçoit lemont
Golungebsous l'azimut 228. Du même point le mont
Lowulest àl'azimut 11. Le Lahoréde Banarese trouve
en territoirebritannique.
50. Le mont Golungelest le premier pic de la chaîne
des Gorulde ou Golurde qui comprend six pics. La
frontière les suit jusqu'à un petit mont du nom de
Bolsumbre laissantle Lahoré de Bolsumbre en zone
anglaise. De Mayo Lelwal, (ancien Yakuba), gite
d'étape, on aperçoitle mont Golungelazimut 356, le
mont Bolsumbre azimut 302. Le mont Bolsumbre,mont
le plus rapprochéde la route Kontcha-Banyo,se trouve
plusde deux kilomètres de celle-ci.
51. La frontière sepoursuit par la chaîne des Ngetti
qui elle-même formlea ligne de partagedes eaux entrela
Gamgamet le Yim (et la Taraba)et qui se termiàune
haute montagne plate qui, du gite d'étapede Mayo
Lelwalestà l'azimut248.
52. Ensuite elle franchit un haut plateau sillonné de
collineset qui formela lignede partagedes eaux entre la
Gamgamà l'ouest (zoneanglaise)et le Mayo Dupbé à
l'est (zone française)et le Mayo Banyà l'ouest (zone
française);cesdeuxrivièresvontsejeter dans lernpti.La zone traversée par la frontière est entièrement
inhabitéesur environcinq milles des deux côtes,et sur
un parcours de plus de treize milles. De plus elle est
difficilement franchissable en saison des pluies.La
région estconstituéepar un plateau assez bas et désolé;
s'engageant d'abord danlsa direction dusud la frontière
s'infléchit rusquementau sud-ouestet serpenteparmiun
chaos de petits monts formant ungroupe de montagnes
appelédans le pays Hosere Nyamneri Sapbe Bnokni,
Sapbe Pelmali, Sapbe Wade, Sapbe Gallal, Sapbe
Sirgou.
53. Sapbe Sirgou, COMU par les indigènes sousle
nom de Yajin et dénommée d'une manièreassez libre
GotelBergesur la carte Moisel, sectioE 2, constituela
dernièrepartie de la ligne deartage des eaux entrela
Gamgamet le MayoBanyo. La piste Banyo-Gatschaka-
Ibi monteau travers desSapbeSirguet coupela frontière
au sommetde la passe située à six milles au nord-ouest
du gîte d'étapede Gandua(dernier gîte d'étapesur cette
route enzone française).
54. Puis la frontièreatteint un point ausud-ouestdes
SapbeSirgu, à deux kilomètresau nord de la lettre'i'du
mot Tukobisur la carteMoisel, sectioE 2. Cepoint se
trouve sur la ligne de partage des eaux communeà un
groupe de trois rivières Mayo Gatschaka(anglaise) le
Mayo Donga (ou Kari) anglaise et le Mayo Terarn
(française).
55. Puis elle est déterminépar une ligne allant au
sud traversant la piste Banyo Kuma à deux milles à
l'ouest de la colline marquée1,630 mètres surla carte
MoiselSection E 2.
56. Ensuiteelle s'infléchàtl'est suivant la ligne de
partage des eaux entre la Mayo Donga (ou Kari) et la
Teram puis prend la directiondu sud-est au travers des
monts Ntem laissant leLahoréde Sabn, dans le district
de Gatchaka,en zone anglaise,puis du sud-sud-ouestau
travers successivement descrêtesdes monts N'dangani,
Kewal, Wajuru, et Bangaro qui se trouve en dernier à
l'ouest-nord-ouest duvillage de Bangaro en un point,
formant vallée, qui jointla partie la plus occidentale des
crêtesparallèles qui forment les monts Bangaro aux
cimes plusélevéedses SapbeMaplus à l'ouest.Cette haute vallée constitla lignede partage des eaux
entre les sources desMayoMai N'Gu (français) qui se
jette dansle Taramàsix milles deBanyo,et la source du
Maio Kemmequi estune des branchesdu Mayo Donga.
Le Mayo Kemme a été relevé sur u parcours de six
milles depuis sa source, alors qu'il coule dans la
direction du village païen de Kabri. La haute vallée
susmentionnéeest située à quatre milles de Bangaro et
sur la piste de Banyoà Kabri. Ami le rocher escarpé
que forme lemont Tongbauest entemtoire français.
57. De cette haute valléla frontière suitla ligne de
partage des eauxjusqu'un pic proéminent,le seconddu
groupe des Sapbe Ma. Ce pic est à l'azimut 215
lorsqu'on se trouveau point susmentionné où la route
Banyo Kabri coupela ligne de partage des eauxentre
N'Gum (français)et laKemme(anglais).
58. Ensuite la ligne de partage deseaux que suit la
frontière secontinuedans la direction du sud-ouesten
passantpar lespics du SapbeMa, des montsJin (en face
desquels se dresse une aiguille en forme de dent,
rocheuse ettrès proéminente appelée ausGsin et qui est
visible de plusieurs kilomètres stu nord, de l'est ou
du sud, cette aiguilleest en temtoire français, des monts
Maio Dalle et Gesumi. En face des monts Gesurnise
trouve une chaîne qui leur est parallèle mais moins
élevéec,e sontles monts Ribao. Ces derniers dominent
le gîte d'étapede mêmenom qui en est proche, (en
territoire français).
59. La frontière se poursuit au travers des monts
Gerumi suivant la ligne de partage des eaux entre le
cours supérieurdes rivièresDonga vers le nord, Kwi
vers le sud (zone française)Mabe vers le sud (zone
française). Le cours supérieur de cedernières rivières
sort entre lesmonts Chemo,Lu, Am et Songkourongqui
s'échelonnentet forment le contrefort des Gesumi,en
arrière d'eux, au nord-ouest-nord du village de
Songkorong.
Ce village se trouve sur la route de Banyo-Kumbo-
Bamanda, et les monts Gesumiportent aussi le nom de
Hosere Hambere dans la région.
60. Puis elle suit la ligne de partage des eaux au
travers des monts Gesumi ou Hambere, au nord des
sourcesdes MayoKombe, Gur et Malamjusqu'à un pic
assez proéminentqui està l'azimut 17 en se plaçant sur
un tumulus de pierresde huit pieds de hauts élele 15
septembre 1920surle côtésudde la pisteBanyo Kumba-
Bamenda à environun milledu gîted'étapede N'Yorong
et huit milleset demidu village deSonkorong.4.154 La Déclarationne contient plus de précisions semblable s
celles existantdans l'article2 de la Déclarationde 1919(lignemédianedes fleuveset
référence àla carte jointe pour lesroutes). Cependant, étandonnéque celle-làne
fait queprécisercelle-ci,onpeut considéreque l'article2 rested'application.
4.155 Enfin, la mentionde la carteMOISELdans une disposition
séparée a disparu en 1930, mêmes'il ressortde la descriptionreproduite quela
double référenceà une carte servantàdécrireet une autrà tracer la frontiè"àtitre
d'indication"a subsisté.
4.156 La Déclarationde 1930 comprend unecarte au 1:300 000,
qui permetde déterminer lalignefrontièreavec davantagede précisionet d'exactitude
que la carte MOISELannexée à la Déclaratiode 1919.
4.157 Si on procède à une comparaison des lignesde 1930et de
1919, on constate qu'elles ne sont pas contradictoires, mais que la premièreest
beaucoup plusfine que la seconde. Cela s'explique évidemmee nt premier lieu par
le nombre de points localisésavec précisionqui formentle tracéfrontali:on passe
de 22 à 58 pointspour le secteur terrestrede la frontièreseptentrionale.
4.158 LR report desdeuxlignesfrontièressur la carteMOISELfait
apparaître leur concordancemêmesi, du fait de l'imprécisiontopographiquede la
carteMOISEL, les cartesne sont pas exactement superposables .esidentificationsde
lieux opérées en 1930 proviennentd'ailleurs soit de la carte MOISEL, comme en
1919, soit de la carte britanniquejointe à la Déclaration,ceci expliquantles légères
nuancesde tracé.
4.159 Il existetoutefois quelqueslégèrdifférencesentre les deux
lignes.
4.160 La première résulted'une grave erreur de topographiedans
la carte MOISELutilisée pourdécrirela ligne de 1919. La descriptionannexéeà la
DéclarationMILNER-SIMONprévoiten effetquela frontièrese dirige
"9. Par le Tsikakirijusqu'à son confluentavec le Mao
Tiel, prèsdu groupede villagesde Luga(Louga);
10. Par le coursdu Mao Tieljusqu'à son confluentavec
la rivièreBénoué(Benoue)".Or, le tracédu Tsikakiri,depuissa sourcejusqu'à sonconfluentavecle Mao Tiel, est
erroné : en réalité,il ne confiue pas près des villagesde Luga, mais quelque 25
kilomètresplus en aval, au sud-ouest.La lignede 1919fait donc passer le Tsikakiri
prèsde 15kilomètrestrop à l'est, sur une longueurd'environ30 kilomètres.
4.161 La lignede 1930rectifie cetteerreur en remplaçant lespoints
9 et 10par les textesplus adéquats des poins8 et 2:
"28. Puis elle [la frontière] suitle cours de Tsikariri tel
carteMoiseljusqu'àsonconfluentavecla rivièreTiel;é surla
29. Puis elle est défuie par le cours du Mayo Tiel
jusqu'à sonconfluentavec laBénoué".
4.162 La deuxièmedifférence entreles deux lignes est beaucoup
moins spectaculaire.
4.163 Le textede 1919évoqueen sonpoint 15
"[-]une ligne vers le sud-ouest gagnant la ligne de
partage des eaux de la Bénouéa ,u nord-ouest, et du
Faro, au sud-est,qu'ellesuivrausqu'àun point situésur
1'HossereBanglanget qui setrouve à 1 km. au sud de la
sourcedu MaoKordo" .
alors que,pour le même secteur dela frontière,la Déclaratide 1930mentionne
"[J la rivièreSassiri, laissant Kobien zone française et Kobi Loinde en
zone anglaise,Tebouet Tsoho à la France,jusqu'à son confluent avec le
premier misseauvenantde la chaîne deBalaicossa[-1.
4.164 Le reportde ces descriptions sur une carte fait appareneru
différence mineurede tracé entreles points 15et 16 de la Déclarationde 1919, et les
points35 et 39 de la Déclaratiode 1930.
4.165 Il faut encorementionnerdeux problèmes survenus lorsde
l'applicationde la lignede 1919.
4.166 Le premiervientde la rédaction du poin7t de la Déclaration
MILNER-SIMON, qui vise "la chute d'eau entre le bassin du Yedseràml'ouest et
les bassins de Mudukwa et de la Bénoué à l'est". Dans un rapport adressé par le
Gouverneurdu Nigeria au Coloni affice,le 11février1922, on peut lire, "Il n'existe pas de chute d'eau, apparemment définie,
communeaux bassinsde la Mudukwaet du Yedseramou
aux bassins de la Mudukwaet de la Bénoué. La région
viséeest une région présentantdes groupes isolésde
massifset le Mudukwaet le Yegoa(toutesdeux affluents
du Tchad) s'élèventjusqu'àun point situéà quelque 40
ou 50 milles des affluentsles plus prochesde la Bénoué,
avec de nombreuses valléestransversalesentre les deux"
(v. chapitre 2, section2, par. 2.113).
4.167 Le second problème qui s'est posé à propos de la
démarcationau nord de la Bénoué concernela description du poin5 de la Déclaration
MILNER-SIMON, que l'onpeut rappeler ici :
5. Du point, où s'interrompt la rivièreAmjumba, à
l'entréedu marécage,par une ligne traversant ce marais
et rejoignant le cours d'eau qui parait être lasuite de la
rivière Amjumba et qui, en amont, porte les noms de
Serahadja, Goluwa (Golouva) et Mudukwa
(Moudoukva), le village de Uagisa devant rester à la
Grande-Bretagne;
Il était relativementaide suivre cette descriptionsur la carte MOISEL, mais
"
lorsque les fonctionnaires françaiset britanniques sur
place visitèrentcette zone, ils découvrirentqu'aucun des
noms figurant dans cette description n'était connu
localement, et qu'il était impossible de se mettre
d'accord sur la rivière qui étaitla continuation de
1'Amjumba. Dans un effort pour résoudrele problème,
les fonctionnaires effectuèrentdes recherches sur les
noms des rivières locales. Ces recherches révélèrles
faits suivants. Tout d'abord, il existait un marécage
appelé Umm Jumba, mais aucunerivièreportant ce nom;
deuxièmement, Serahadjaétait le nom d'un chef de
village dans la vallée du Keraua; troisièmement, que
Mudukwa étaitune déformationde Moldoko, une ville
de la valléedu Keraua; quatrièmement,que Galuwaétait
la déformationde Gawaa, le mot signifiant 'rivière'dans
la valléedu Keraua Ces informations semblaientétablir
clairement que la %ère Keraua étaitcelle qui était
décrite, eton ne tint pas compte du fait qu'elle obliquait
vers l'ouest avant d'amver à Umm Jumba"
(PRESCOTT, J.R.V., "The Evolution of the Anglo-
French Inter-Cameroons Boundary", Nigerian
Geographical Journal, 1962, p. 116; Annexe M.C.
230).
4.168 Ces considérationsexpliquentque les libellés des points10 et
18 de la DéclarationTHOMSON-MARCHANDaient étéadaptéset remplacent le
point 5 de la DéclarationMILNER-SIMON.4.169 Par ailleurs, commela Déclarationde 1919, letexte de 1930
renvoie à d'anciens repèresde la frontièreanglo-allemande. Les points n032 à 34
mentionnent ainsi "laborne n06 de l'anciennefrontièreAnglaise Allemande" (point
32), le "repèren06", le "repèren07" et le "n08"(point33) ainsi que le "repèren08"
et "l'ancienneborne frontièrenolO" (point 34). Il y a donc lieu de se référerau
même instrument,le protocoledu 10août 1903,dans la mesure où ilest consacrépar
l'Accordanglo-allemanddu 19mars 1906défdssant la frontitre entre Yola et le Lac
Tchad. ie texte définissant des borns06 à 8 a déjàété reproduit, eitl suffit d'y
renvoyer pour l'interprétationdes points 32 et3 de la Déclarationde 1930. Le
Protocolefait d'autre partétatd'uneborne no10en sonarticle6 : "From NO9post it
runs south-south-west,in straightlinesdefîed by three posts, NolO, 11, and 1[-1"
(AnnexeM.C. 38).
4.170 La Déclarationde 1930permet doncd'établit avectoute la
précision requisele tracéde la frontière septentrionale. Il est ainsi possible de
reporter cetracésur des cartesrécentesde la région.
4.171 Il n'est certes pas toujours aisd'identifier tousles noms
citéspar la Déclarationde 1930. Par exemple, sur les cartes I.G.N. plus récentes
(1955 à 1975),des villagesont disparuou se sontdéplacésd ,es pistes ont également
disparu. Par ailleurs, les graphiesdes noms citéssoit en allemand(carte MOISEL
utilisée),soit en anglais (carte annexée)different des noms transcrits sur les cartes
françaisesI.G.N. De même,sur les cartesI.G.N. du Cameroun, la partie situéeau
Nigerian'est pas,ou est très succinctement, cartographiée.
4.172 Malgréces réels problèmes, oa nrriveà suivre le tracéde la
frontièresur les cartes contemporainestrèsprécises,au :200.000, en accordavecle
texte.
4.173 Dansune étudeconsacrée àla frontière entrele Camerounet
le Nigeria, le Départementd'Etat des Etats-Unisd'Amériquereproduit d'ailleurs la
descriptionreproduitedans1'Echangede lettresde 1931jusqu'au 60èmepoint comme
la référence poul ra déterminationde la frontièreseptentrionale actuelle.es trois
cartes annexéesillustrent la matérialisatde ces points surle terrain, et confirment
sansambiguïtéle titre conventionnel dela Républiquedu Cameroun(v. cartes2 et 3,
ZnrernationalBoundary Study ,N092, The Geographer;Annexe M.C. 248). On
relèvera que l'étude ne mentionneaucun problèmede délimitationou mêmede
démarcation qui soistusceptiblede remettre en causele tracédécritci-dessus.4.174 En conclusion, les revendications nigérianes sur la partie
septentrionale de la frontière sont totalement dénuées de fondemen uridique. Ce
segment frontalier a en effet fait l'objetd'une délimitationdéfinitive lorsde l'époque
coloniale, opérée sous surveillanceinternationaleet dont les négociations soutenues
ont étéponcniéespar trois conventionsen bonne et due forme. Le Cameroun et le
Nigeria, une fois indépendant, onteux-mêmes reconnu cette délimitation qui fournit
un tracéprécis tant dans la zone lacustre où la démarcation aabouti à un degré
maximal de précisionde la ligne, que dans la zone terrestre où le tracépeut être
désignéavec toute la précision requise grâce à la combinaison de la description
détailléede 1930 et du matériaucartographique conventionnelet contemporain.
83. Les"effectivités" camerounaises dansla zone du Lac
Tchad auMont Kombon
4.175 Les "effectivités camerounaisedans cette zone sont attestées
par l'existence d'un certain nombre de structures administratives et autres services
publics, notamment les infrastructures scolaires et sanitaires, les services de sécurité,
de la douane et d'encadrementagricole.
A. - Structures administrativee st actes d'administration
4.176 La portion de la frontière allant du Lac Tchad au Mont
Kombon s'étirele long des provinces camerounaisesde l'Extrême-Nord,du Nord et
de l'Adamaoua, trois provinces néesdu redécoupage administratifde l'ancienne
province du Nord par un décretprésidentiel de 1983. Elle sépare du Nigeria : les
départementsdu Logone et Chan (chef lieu : Koussen), du Mayo - Sava (chef lieu:
Mora) et de Mayo-Tsanaga (chef lieu : Mokolo) dans l'Extrême-Nord ; les
départementsdu Mayo-Louti (chef lieu :Guider), de la Bénoué (chef lieu:Garoua),
et du Faro (chef lie:Poli) dans le Nord; puis lesdépartementsde Faro-et-Deo (chef
lieu: Tignère) etde Mayo-Banyo(cheflieu :Banyo)dans l'Adamaoua.
4.177 Le décretno 81151 0u 4 décembre 1981 portant créationde
districts au Cameroun en créaitquatre les zones concernées,dont deux dans la zone = Rouhprincipale
O sw+Prckcciin
0 Chef-deOirtiia
. Village.pesberie
@ Colld'Enselpnemeni
EROUN
LOGONETCHMI
NIGERIA- FmntBninternationale
.......L.mL deOLpartement
- Route principale
wteaure
0 Chel.iieudeDistrid
. Yiilaoe
+ Gendarmerie
O sa~6Nationale
9 me deDouane
CentnrnC6ical
0 @ EmleCollège
Départemen fsntaliers
danslaProvince
deI'EXTRÊME-NORD
-----0km.... ...UrnitsdaDCparlement
= Rouprincipale
@ Sous-PrCIectun
0 Chef-ueOiid
O SüreNationale
danslaProvincedu Lac Tchad (Fotokol et Hile Aiifa) et deux autres dans les zones frontalièresdu
Nord et de 1'Adamona.
4.178 Au terme de l'article5 de ce décret,le district de Fotokol est
limité :
"- au nord par le Lac Tchad.
- à l'Est par une ligne partant de l'embouchurede la
rivièreMuschem et empruntant soncours pour atteindre
la frontièredu Nigeriaau niveaudu villageMagam.
- à I'Ouest et au Sudpar la frontièredu Nigeria suivant
le fleuve El Baid.
Son ressort territorial s'étendnotammentsur les villages
Fotokol, Muromen et les quartiers environnants."
4.179 L'article8 délimiteceluide Hile Alifa
"-au Nord et àI'Ouestpar le LacTchad.
- à l'Est par une ligne orientéeNord-Sud passantpar le
village de Nagala Kabir jusqu'à son intersection avec le
fleuve Serbéouel.
- au Sud et au Sud-Ouest par le cours du fleuve
Serbéoueljusqu'à son embouchure.
Son ressort territorial s'étendnotammentsur les villages
Hile, Alifa-Aboussoumiet Dole."
4.180 Le districtde Kolofata, situédans l'arrondissementde Mora,
départementde Hargui-Wandala, dans la provincedu Nord est, au terme de l'article
10du mêmedécret, limité :
"- au Nord et à I'Ouestpar leNigeria.
- à l'Est par le cours du Mayo Ngesowéjusqu'à son
intersectionavec lalimite de I'arrondissement deKoza.
- au Sud par I'arrondissementde Koza.
Son ressort territorial s'étend notammens tur les cantons
Kolofata et Kerewa".
4.181 Enfin, conformément à l'article 12, le district de Mayo-
Baléo,situédans l'arrondissement estdépartement deFaro et Déo,dans la province
de l'Adamaoua, est limité : Tignère. "- au Nord par l'arrondissementde Poli, de la frontière
avec leNigeriajusqu'auvillageGappi.
- à l'Est, à partir du village Gapi, par le cours inférieur
de Mayo-Nolti jusqu'à son confluent avec le Mayo-
Sodérien amontdu villageJoumSoli.
- à l'Ouestpar la frontièreavecle Nigeria.
- au Sud par une ligne droite orientéeNord-EstiSud-
Ouest jusqu'à l'intersectiavec le Mao-Lidi, puisde ce
pont le cours inférieurdu Maoy-Lidi jusqu'à son
confluent avec le Mayo-Déo,de ce confluentune ligne
droite orientéeEst-Ouestjusqu'à l'intersectionavec la
frontièredu Nigeria.
Son ressort territorial s'étend notammenstur le lamidat
de Kontchaet lescantons Alme, Mayo-Leo,Gadjiwenet
Dodeo".
4.182 Les codesgéographiquesnationauxcorrespondant à chacun
de ces districtssont indiquàsl'article 19du même décr( et nnexeM.C. 263).
4.183 Ces circonscriptions administratives sont effectivement
administréespardesfonctionnaires camerounais nommé par lesautoritéscompétentes
de 1'Etat.Ainsi, et pour neciter quedes actesrécents,lesdécretsno 921011, 921318,
931398,931738lPMlCAB du Premier Ministre, respectivement des 10janvier et 25
septembre 1992, 29 avril et 9 décembre1992 portant nominationdes préfets,
notamment, entre autres, ceuxdes départements du Logoneet Chari (Kousseri)et de
Mayo-Sava(Mora) dans l'Extrême Nord ;du Faro (Poli) dansle Nord ; du Faro et
Déo (Tignèred )ans l'Adamaoua ; les décretsno 911113, 921214, 921317, 93139 et
931739lPMlCABdu Premier Ministre respectivementdes 29 novembre 1991, 24 et
25 septembre 1992,29 avril et 9 décembre 1993 portant nomination des sous-préfets
nomment enmême temps ceux des arrondissementsde Makari (dans la zone du Lac
Tchad), Kolofata, Mayo-Baléo,Fotokol ; les arrêtésno 196, 191, 204 et
045lPMlCAB du Premier Ministre du28 mars 1991, 4 et 25 septembre 1992 et29
avril 1993 portant nominationdes Adjoints préfectoraux en nomment également à
Guider, Banyo, Bourrha, Koza, Beka, Molilo, Poli, Mora, Tignère ;les arrêténso
218, 143, 192et 128lPMlCABdu Premier Ministredu 8 avril et 21 novembre 1992,
4 septembre 1992, 9 décembre 1993, portant nomination des Adjoints
d'Arrondissementsen nomment à Makari, Kousseri, Poli, Banyo, Kolofata, Waza,
Mayo-Baléo,Bourrha, Mayo-Oula,Makolo, Mora, Guider (AnnexesM.C. 314, 324,
327).4.184 En outre, le décretno 821456du 20 septembre 1982fxant le
nombre de conseillersmunicipauxpar communevise, entre autres, les communesdes
circonscriptions administratives frontalièresde Tignère (30 conseillers), Poli (45),
Bourrha (25), Koza (45), Mayo-Oulo (40), Banyo (45), Bankim (25), Mora (45),
Tokombere (35), Kolofata (25), ainsi que celles situéesdans la zone du Lac Tchad
notammentMakari (45) et LogoneBimi (30)(V. ibid).
B. - Servicesde police
4.185 L'exercice de la souveraineté camerounaise dansces zones
frontalières du Nigeria s'appuie sur les services de police, en I'occurence les
commissariatsspéciauxet les commissariats assumant les missionsémi-imigration,les
postes frontièreset les postes antennes de la SûretéNationale. On dénombreainsi,
dans la province de l'Extrême-Nord : les postes frontières sûreténationale de
Blangoua(créé en 1981)Fotokol (1966),Dabanga(1981),les commissariats spéciaux
d'Anchide(1976),de Kerawa (1978)et de Boukala(1975) ;dans le Nord :les postes
frontières sûreténationalede Dourbeye, les commissariats spéciaux de Gashiga (1975)
et de Poli (1982) ;dans l'Adamaoua :lescommissariats spéciaux de Banyo (1982) et
de Mayo-Darle (1975)(AnnexeM.C. 263).
C. - Servicesde douane
4.186 II existe en territoire camerounais, de nombreuses unitésde
douane sur cette portion de la frontière, en raison de l'importance des échanges
commerciauxentre les deux pays. Onen dénombredixneuf au total, réparties comme
suit : Extrême-Nord : postes de douane de Fotokol, Mblame, Bourrha, bureau
principal de Limani, brigade de Limani, bureaux secondaires de Kolofata, de
Bondoula et de Koza ; Nord : postes de douane de Djatoumi, de Tchamba, de
Dembo, de Bardake, de Bascheo, de Tchamba, de Dembo, de Bardake, de Bascheo,
bureaux de Demsa, de Touroua, de Dourbeye ;Adamaoua : poste de douane d'Am,
bureau de Banyoet de Mayo-Darlé. D. -Etablissements scolaires
4.187 Le Cameroundispose le longde cettepartie de sa frontière
avec le Nigeria, de plusieursécoles primaires,dont la plupart sontconfessionnelleset
plus particulièrement catholiques. Ainsi, peut-on citer, à titre illustratif, dans
l'arrondissement deMokolo, département du Mayo-Tsanaga,les écolescatholiques
suivantes appartenantà la province ecclésiastiqude Carona :écolesprimaires Sir
Djingliya, Ouro Tada, Mekolo Mboua, Rhumzu, Udkia ; dans l'arrondissementde
Koza relevant de la mêmeprovince ecclésiastiquel ,es écolesprimaires Galdala et
Kilda ; dans les arrondissementsde Mayo-Baleoet de Banyodans l'Adamaoua,les
écoles catholiquesd'Alne, d'Attaet de Banyoet l'écoleprotestantede Ganatu.
4.188 Il impotte de relever que ces écolessont non seulement
autorisées parle gouvernement,maisqu'ellesreçoivent dessubventions de cedernier
conformément à sa politique de soutien aux établissementsprivés, laïcs et
confessiomels, qui sont complémentaires aux efforts de scolarisationde 1'Etat. Par
ailleurs, leur personnelest compospresque exclusivementde Camerounais(V. ibid).
4.189 En ce qui concerne les établissementsd'enseignement
secondaire, on mentionnera dans l'Extrême-Nord : les Collèges d'Enseignement
secondaire (C.E.S.) qui sont des établissementspublics d'enseignement généra dle
Makari (crééen 1975), Fotokol (1992), Hile Alifa (1992), de Goulfey (1989),
logoone Birni (1983), Waza (199l), Kolofata, (1983), Tokombere(1992), Bourrha
(1991), Koza (1981), Mokolo (1991), Hina (1992) ;dans le Nord :les C.E.S. de
Beka (1992),Lam (1992), Mayo Ou10(1981), Touboro (1989) ; dans l'Adamaoua :
les C.E.S. de Mayo-Baleo(1991), Galim Tignère(1992), Djohong (1990), Belel
(1990)et lecollègeprivélaïcde Mayo-Banyo (Annexe M.C. 379).
4.190 Desétablissements d'enseignemen ttchnique et professionnel
existent égalementdans la plupart de ces localités frontalières. insi, les sections
artisanalesrurales (SAR) de Mokolo et de Koza dans l'Extrême-Nore dt de Banyo
dans l'Adamaoua ; les collèges d'enseignementtechnique industriel et commercial
(CETIC)de Mokoloet de Mora dansl'Extrême-Nordd ,e Banyodans 1'Adamona(V.
ibid).
4.191 Des personnels enseignants et administratifs, tous
fonctionnairesou agents de 1'Etatcamerounais,sont affectés dansces établissements
par les autorités administratives camerounaises compétenteset font l'objet demutations en cas de besoin, suivant les règles et pratiques en vigueur dans
l'administration camerounaise(V.ibid).
E. - Servicesdesanté
4.192 La couverture sanitaire de cette section de la frontière est
assuréeà partir des formations hospitalièresimplantées dansles localitésde Bourrha,
Waza, Mokolo, Koza, Kolofata et Fotokol dans l'ExtrêmeNord ;Beka et Mayo-Ou10
dans le Nord ; Banyo et Mayo Baléodans l'Adamaoua. Leur fonctionnement est
supportéfinancièrementparle budget de 1'Etatcamerounaiset plus précisémenctelui
du Ministère de la Santé, et des médecins camerounais y sont effectivement en
service.
F. - Structuresd'encadrement agricole
4.193 Elles sont constituées des délégations provinciales installées
dans la capitale provinciale auxpostes de police phytosanitaires implantésdans
les petites localités, en passant par les délégations départementales'agriculture
(DDA), les délégationsd'arrondissement de l'agriculture (DDA) et les postes
agricoles (PA). Ainsi, dans l'Extrême-Nordtrouve-t-on des DDA dans le Logone
Berni, le Mayo-Sava et le Mayo Tsanaga, des DAA, dans les arrondissementsde
Kousseri, Fotokol, Waza, Hile Halifa, Logone Birni, Mora, Kolofata, Mayo-
Moskota, Koza, Mogode, Boumha, des P.A. dans les mêmeslocalitéssauf à Logone
Birni, et des PPP àKousseri et Mora;dans le Nord des DDAdans le Faro, le Mayo-
Louti et le Benoué,des DAA dans les arrondissements de Beka,Mayo-Oulo, Guider,
Bashéro,Dembo, Demsa, Touroua, Garoua, des PA dans les localitésdu mêmenom
età Wangai, Malkoga et Tchamba, un PPP àDourbaye ;dans l'Adamaoua,des DDA
dans le Faro et Déo et le Mayo-Banyo, des DDA dans les arrondissements de
Tignère, Bankim et Banyo, des PA à Kontcha, Atta, Somie, Banyo, et des PPP à
Kontcha, Atta etTikar. --
SECTION 3. DUMONT KOMBON A LA BORNE 64
8 1. Les circonscriotions administratives internes au
Cameroun britanniaue
4.194 La frontière internationaledu Mont Kombon à la borne
frontalière64' suit l'ancienne division intérieurdu Cameroun britannique en
Camerounseptentrionalet Camerounméridional.
4.195 Dans la note d'introductionde l'Office Colonial au rapport
du Royaume-Uni à la CommissionPermanentedes Mandatsde la Société des Nations
intituléeRe~ortson the BritishS~hereof the Cameroons, 1922 ,lest indiquéque le
territoire étaitadministré parle gouvernementde Sa Majesté au Nigeria et que le
protectorat du Nigeria était divisé,our des raisons administrativesen provinces
septentrionaleet méridionaleLa note poursui:
"In the circumstances, it has been found convenient
similarly to divide the temtory in the Cameroonswhich
is now under the administration of the Nigerian
Govenunentinto a Northemanda Southem half, each of
which has been added for administrativepurposesto the
group of provinces to which it geographicallybelongs
.... the area comprising the Northern portion of the
Cameroons temtory under British administration has
been again subdivided into two portions-of which the
more northerly is administeredby the Residentof the
Nigerian Provinceof Bomu andthe more southerlyby
the Residentof the Nigerian Provinceof Yola - it has
been found most convenient to treat the part of the
Cameroonswhich is attachedto the Southern Provinces
as a separateprovincialentit."
4.196 Aussi le rapport est-ilcomposéde deux parties (ibid. p.3).
La partie sud des Camerounbritanniquesa étdéclaréc eommeétantlimitée
1 Le Départemendt'Etatdes USA, Internatl oundarvSNdv N0.9-Cameroon-Nieeria
Boundarv,1972, défitepointcommesitué"onthenorthbankof theGamanaatabout7"
02' 30"N. and 10' 09' E. Itis apillarof theKameruaoundarydemarcatiseries
of April 12, 1913, whichis numberedconsecutivelysouthwardfromthe Yola arc",p. 18,
n.2.CarnerooniNigeriaboundaryPoint 64 to Mount Kombon "onthe north, in aboutLat.7 [C'est-à-dire7" de latitude]
bv the Mun Provinceof Nigeriaandthe remainderof the
~iitish sphere now attachezto the Nigerian Provinceof
Yola" (ibid.p.47).
4.197 Dans ses observations sur ce rapport, la Commission
Permanentedes Mandats lors de sa troisièmesession a inscrit la phrase "the same
observationsas for the Bntish Togoland(mutarismutandis)". Le commentaire relève
pour ce derniertemtoire que:
"The Commissionfullyrecognisesthatthe incorporation
of Togoland with the Gold Coast is necessitated by
circumstancesand is in no way an infringementof the
Mandate. It gives nse, however, to a very senous
difficultyas regardsthe work of the Commission,which
has to give its opinion on the administration of the
temtory on the basis of the annual report. In order to
overcome this difficulty,the Commissionshould have at
would therefore bedoglad if the next report contained as
clear and completea statementas possibleregardingthe
organisationof the administrationof Togoland, together
with the pertinent orciinances of the Gold Coast."
(CommissionPermanente des Mandats, Compte-rendus
de la troisième session, 1923,A.19,1923.VI, p.318,
AnnexeM.C. 132).
4.198 Dans son rapport sur sa cinquième session,en 1924, la
Commission, en prenant note de l'administration du temtoire sous mandat
conjointementavec leprotectoratdu Nigena, a faitvaloirque :
"In view of the geographicalconfigurationof these two
territories and the ethnical composition of their
populationsthe Commissionis fully prepared to admit
that the measures adopted by the Mandatory Powm eray
be thebest calculated toensure good admiistration and
consequently the well-beingof the population" (citéen
annexeIII à la répliquedu Royaume-Unisur l'affairedu
Camerounseptentrional,C.I.J., Mémoires, plaidoiries et
documents, affaire du Cameroun septentrional, Rec.,
1963,p. 99).
4.199 Cette acceptationde la division des Camerounbritanniques
en deux territoires administrer conjointementavecles régionsadjacentes duNigena
s'est aussi reflétée danla pratique du Conseil des Tutelles desNations Unies. En
d'autres termes,la situationpréexistante a perdurLa premièreMissionde visitedes
NationsUniesdanslestemtoires soustutelleen Afrique a noté en 1950qul ees "conditions between thenorth and south are so different
&to require separatediscussionof the two parts of the
TrustTemtory" (T/798, p.10, AnnexeM.C. 126).
4.200 Le représentantspécial britannique pour les Cameroun
britanniquesa déclarépae rxempleau Conseil des tutellesen 1951 :
"a distinctionshouldbe drawnbetweenthe southemhalf
of the Trust Temtory and the northern half. The two
provinces whichcomposedthe southemhalf had retained
their individualityandhadnot been subject to complete
integration.The northem half on the other hand did not
fom a naturalentity, but waspm of social unitswhich
were centred outside the Trust Tenitory. That state of
affairs had not beencreated outsidethe Trust Temtory.
That state of affairs had not been created by the
Administering Authority buthad existed when it had
assumed the tnisteeshipn (Trusteeship Council Official
Records, 1951, p.132, AnnexeM.C. 198).
4.201 Le rapportde la missionde visite desNations Uniesde 1958
dans lestemtoires soustutelledel'Afriquede l'Ouesta concluen ce qui concerneles
Cameroun sousadministration britannique :
"it is convincedthat a realistic appraisalof the present
situation of the Trust Tenitory, as well as a realist
approach to the questionof its future, require that the
Temtory shouldnot be regarded asan entity, but should
be considered in terms of two parts and two groups of
peoples, northem and southem, whose history and
developmenthave taken distinctlydifferent courses and
between whom there nowexist profound differences both
in administrativesystems and in political attitudesand
loyalties"Tl1440,p.29).
4.202 La délimitationde la frontière entrece qui étaitdevenu le
Cameroun méridionae lt le Camerounseptenmonala été fixéepar I'Orderin Council
de 1923 sur les Cameroun britanniques(AnnexeM.C. 130). Dans le préambule,
lYOrderénumèreles dispositions de l'accord de mandat autorisal et mandataireà
administrer le territoirecomme partie intégrante uien, sousréservedes dispositions
du mandat et de faire des Cameroun britanniques une unionou une fédération
douanière, fiscaleou administrative avec lesterritoiresadjacents sousla souveraineté
ou sous le contrôle de la Grande-Bretagne,sous réserveque les mesures adoptées à
cette fin ne portentpas atteinteauxtermesdu mandatlui-mêmeL . 'Orderprécisait que
les parties desCameroun britanniques situéeaunord de la lignedécritedansle relevé
annexéétaientsoumisesaux dispositions dumandatpour êtreadministrées comme si
elles faisaientpartie des provincesdu nord duprotectorat du Nigeria, tandis quelesparties des Camerounbritanniques situées au sud decette ligne étaientsoumisesaux
dispositions du mandat pour êtreadministréescomme si elles faisaient partiedes
provincesdu sud du protectoratdu Nigeria.Le relevjoint à1'Order inCouncildécrit
la lignede divisioncommesuit :
"1. From a point onthe oldAnglo-Gennanfrontier in
approxirnately lat.7"34'3OVN. southwards along the
'"Bezirks-grenze'to itsjunctionwiththe River Donga.
2. Thencethe River Don~auustreamto its iunction
MAMBILA.e &bal bound& bêtween KA~ and
3. Thence the tribal boundary between KAKAand
MAMBILAto the point where it meets the parallel of
latitude'30'N.
4. Thence following the parallel of latitude 6'30'
eashvardsto the pointwhere it meets theFranco-British
frontier"
4.203 Une légère modificatiod ne la ligne fut décidée en 196t se
traduisit par le transfert desdistrictsde Tigon, Ndora et de Kentu de la province du
Cameroun du sud vers la Division Gashakade la province Adamawarelevant de la
partie septentrionale(T11440,p. 51).
4.204 La ligne frontièrea édéfiniede manièreplus détaillée dans
le NIGERIA(Prorectorateand Cameroons)Orderin Councilde 1946qui énonce dans
la section 6(1) que,
"the portions of the Cameroons which lie to the
northward, and the portionsof the Cameroonswhich lie
this Order shall, subjectto the provisionsof the aforesaid
Mandateor to the provisionsof anyterms of T~steeship
which may hereafterbe approvedby the United Nations,
be adrninisteredas if they formed part of the Northem
Provinces of the Protectorate [of Nigeria] and of the
Southem Provinces of the Protectorate respectively"
(AnnexeM.C. 181)
4.205 La ligne divisantles partiesnord et sud du Cameroun sous
mandat britannique a été décritd eans la deuxième Annexejointe à l'Order de la
manièresuivante : "From boundary post 64 on the old Anglo-German
frontier the line follows the River Gamana upstream to
the point whereit isjoinedby the RiverSama;thenceup
the River Sama to the point where it divides into two;
thence a straight line to the highest point of Tosso
Mountain; thence a straightline eastwardsto a point on
the main Kentu-Bamendaroad where it is crossedby an
unnamed tributaryof theRiverAkbang(Heboroon Sheet
E of Moisel's map on Scale 11300.000) -the said point
being marked by a cairn; thence down the stream to its
junction with the River Akbang; thence the River
Akbangto itsjunction with the RiverDonga; thence the
RiverDonga to itsjunction with theRiver Mburi; thence
the River Mburi southwards to its junction with an
unnamedstreamabout onemile northof the point where
the new Kurnbo-Banyoroad crosses theRiver Mburi at
Nyan (aliasNton), the saidpoint being about four miles
south-eastby east of Muwe; thence along this unnamed
stream on a generaltme bearing of 120" for one and a
half miles to its sourceat a point on the new Kurnbo-
Banyoroad, near the sourceof the River Mfi; thenceon
a true bearing of 100" for three and five-sixths miles
along the crest of the mountainsto the prominent peak
whichmarks the Franco-Britishfrontier.
4.206 Le 13 décembre 1946, l'Assemblée générale N dations
Unies a approuvéles accordsde tutelle avecle Royaume Uniet la France pourleurs
territoires respectifsau Cameroun(v.supra,chapitre3, section4, par. 3.174).
4.207 La définitionde la frontièreentre le Cameroun septentrional
et méridional figurantdans le relevéjoint à 1'Order in Council de 1946 a été
réaffirmée dans la proclamationde 1954 sur la région nord,la région ouestet la
régionest, portant définitiodes frontières(L.N. 126de 1954),(AnnexeM.C. 202).
Selonla premièreannexe, partie III,secteur Ode cettedéclaration2, la frontièresud
de la régionnord (y comprisle Cameroun septentrional) suitprécisémen la définition
figurant dans 1'Orderin Councilde 1946. Cette délimitation aété réaffirméedans le
Nigeria Order in Council (Constitution)de 1954 et dans le Northem Cameroons
Order in Council (Administration) ainsi quedans le Southem CameroonsOrder in
Council (Constitution)l'un et l'autre de 1960, qui tous se réfèrentà la définition
territoriale figurant dans la proclamationde 1954. Cette définitionde la limite
administrativeentre les deux territoires a persisté jusàe que les accordsde tutelle
prennentfin, modifiantleur naturejuridique.
2 Le secteurN s'arràela "Boundzyost64 situatedon therightbankof theRiverGamana"
et le secteurOcommence avec"ThefollowingtheRiverGamanaupstreametc..4.208 Cela est démontré par l'historiqudeu projet de la légère
modification de la frontière entre le Cameroun septentrional et le Cameroun
méridional (Cepoint estexaminéen détailci-dessus; v. suprachapitre 3, section4,
pars. 3.219-3.230). Des suggestions oétéfaitespour étudierle transfert d'unepetite
partie du nord vers le sud, et notéesdans le rapport de la mission de visite des
Nations Uniesde 1958. La questiona étédiscutée auBritishColonialWce et par
les dirigeants du Cameroun septentrionalet du Cameroun méridional devantle
quatrièmecomité. Riende plus n'a transpiréce quifait que, en évoquantla question
sansengager d'action, lafrontière aéréaffirmée.
5 2. La transformation de ces iimites en frontières
internationales(1961)
4.209 La division des Cameroun britanniques en Cameroun
septentrionalet Camerounméridionala étémaintenue commecadre des plébiscites
des NationsUnies, tenus en 1959et 1961 (v. aussisuprachapitre3, section4, pars.
3.230-3.239). Les plébiscites,qui ont eu lieu séparémat Camerounseptentrional
et au Camerounméridional suiteaux résolutions1350(XIII)de l'Assemblée générale
du 13 mars 1959, (sur le plébisciteau Cameroun septentrionalde 1959), 1352 (XIV)
du 16 octobre 1959, (sur le plébisciteau Cameroun méridionalde 1961) et 1473
(XIV) du 12 décembre1959, (sur le deuxièmeplébiscitedu Camerounseptentrional,
tenu en 1961), ont étéeffectués dansle cadre temtonal délimité par l'Order in
Councilde 1946. La description desdistricts,pour levotedu plébisciteau Cameroun
méridional, figurantdansle rapportdu Commissairedes NationsUnies aux plébiscites
(Tl1556, 3 avril 1961, pp. 58-59, reflète ceux figurant dans l'annexe joinàela
décisionrelative au plébiscitepour le Cameroun méridionalde 1960, et cela,
naturellement, reflètela définitionterritoriale du Cameroun méridional jusqu'àla
ligne de 1946. L'approbationdu processusplébiscitaire, qintégraitnécessairement
le cadre temtorial dans lequel il avait eu lieu, par la résolution1608 (XV) de
l'Assemblée générale en dad te 21 avril 1961, (Annexe M.C. 227) a conduit
l'Assembléeà mettre un terme à l'accordde tutelle. Conformémenatux termes de la
résolution,cela s'est traduit parl'uniondu Cameroun septentrionalau Nigeriaet du
Camerounméridional à la République duCameroun. Ceprocessusa doncpurementet
simplementconsacréle contexte temtorial existant et, de ce fait, l'ancienne limiteadministrative interne estdevenue partie intégrantea frontière internationaleentre
le Camerounet le Nigeria.
4.210 Le fait queles lignes administratives intedes possessions
européennesd'outre-mep ruissentêtretransforméesen frontièresinternationalesesten
tous points conforme à la pratique internationaleet au droit des gens. Comme l'a
déclaréla Cour :
"il faut voir,dans le respect par les nouveaux Etats
africains des limites administratives et des frontières
établies parles puissancescoloniales,nonpasune simple
pratique qui aurait contribuéà la formation graduelle
d'un principe de droit international coutumierdont la
valeur serait limitéeau continent africaincomme elle
l'aurait étéauparavant à l'Amérique hispanique, mais
bien l'application enAfrique d'une règle de portée
générale" (C.I.., arrêdu 22 décembre1986,affaire du
D~férendfronalier,Rec. 1986,p. 565).
4.211 Ami, en dépitdu fait que l'affairedu Dtflérend frontalier
concernaitune frontière quià l'origine, étutne ligne administrativeinterne, la Cour
a souligné que le principe d'intangibiées frontièreshéritése l'èrecoloniale
"constitueun principe général,logiquement lié au
phénomène de l'accession l'indépendanceo, ù qu'il se
manifeste. Son but évident est d'éviter que
l'indépendance etla stabilité desnouveaux Etats ne
soient misesen danger par des luttes fratricidesnéesde
la contestation desfrontières la suite du retrait de la
puissance adrninistrante"(ibid.).
4.212 De plus, il faut souligner que le Nigeria a reconnu
expressémentla frontière entre les Cameroun septentrionalet méridionaldans
l'échangede lettres du 29 mai 1961entre le Haut Commissairedu Royaume-Uni au
Nigeria et le Premier Ministre de la Fédération nigériane, échan deelettres qui
constitueun accord internationalcommeles signatairesle précisentexpressément.La
lettre du premier détaillait l'interpréque donnaitle gouvernement duRoyaume-
Uni à l'intégrationdu Cameroun septentrional dansla Fédérationdu Nigeria et
précisait les actionécessaires pouramenderles constitutionsde la Fédération etu
Nigeriaseptentrionaldansce sens. La lettreprécise égalemenque "In accordance with paragraph 4 (a)of Resolution1608
(XV) of the Fifteenth Session ofthe General Assembly
of the United Nations the Government of the United
Kingdomwill regard the Northem Cameroons as being
part of the temtory of the Federation of Nigeria with
effect from 1stJune, 1961."
ie paragraphe 4 (a)de la résolution1608(XV)(AnnexeM.C. 227)dispose :
"L'Assembléegénéral .e... décideque les plébiscites
ayant eu lieu séparémena tvec des résultatsdifférents,
l'Accord de Tutelle du 13 décembre 1946 relatifau
Camerounsous administrationdu Royaume-Uniprendra
fin, conformémentà l'alinéa bde l'article 76 de la
Charte des Nations Unies et en accord avec l'Autorité
administrantedans les conditions suivantes: (a) En ce
qui concerne le Cameroun septentrional,le ler juin
1961,au momentoù le Cameroun septentrional s'unira à
la Fédératiodne Nigeria,en tant que province séparédee
la Régiondu Norddela Nigeria".
4. 213 La réponse dupremier ministre nigérian reprend le texte de
la lettredu Haut Commissaireet ajoute:
"1have pleasure in confirmingthat these understandings
of the Governmentof the United Kingdom are correct
and that the Government of the Federation of Nigeria
agree that your Note and this reply confîming these
understandingsshall constitute an agreement" (v. supra
lèrepartie, chapitre3, section4, par. 3.250).
4.214 En acceptant l'incorporationdu Cameroun septentrional,le
Nigeria s'est fondé sules frontièresdu territoire d'alors quiavaientédéterminées
par l'Assemblée généraleN. emodutquodnonMet. ie Royaume-Uni nepouvaitpas
transférer (surla base de la résiliationpar les NationsUnies de la tutelle après le
plébiscite)au Nigeriaplus que ce qui constituait réellemenlta partie du Cameroun
septentrionaldu Cameroun britanniqueet il n'en a pas transféré moinnson plus.Le
Nigeria a donc hérité des frontièresterritoriales du Cameroun septentrional telles
qu'elles existaiedéjà.
4.215 De plus, le Nigeria n'a jamais élevéde protestations à
l'encontredes frontièresdu Cameroun septentrionalet n'a jamaisnon plus suggéréde
quelque manièrequece soitqu'iln'étaitpas satisfait de la définition territorialede ce
territoire.Il a donc, par son attitude,reconnu lesfrontières existantes,y compris
celle séparantle Cameroun septentrionaldu Cameroun méridional. Les "effectivités"camerounaises dans la zone du Mont
$3.
Kombon à la borne 64
4.216 Cette sectionde la frontièreterrestre entrele Cameroun et le
Nigeria longe les départementsde Menchum (chef-lieu : Wum) et de Donga-
Mantuung (chef-lieu:Nkambe)dansla provincecamerounaise duNord-Ouest,et une
petite partie du départementde Mayo-Banyodans la province de l'Adamaoua. Elle
correspond à la division administrative de l'ancien Cameroun britanniqueen
l "Northem Cameroom" et "Southern Cameroons" ,t va de l'anciennefrontièreanglo-
allemande située sulra rivièreGamana,jusqu'à 1'Etatdu MontKombon.
4.217 La présence effectivede l'administration camerounaisele
long de cette section de la frontière peut être établie à partir des unités
administratives,de douane, de police et de gendarmerie, desinfrastructuresscolaires
1 et sanitaires ainsiquedes structuresd'encadrement agriimplantéesdans la zone.
1 A. - Structures administratives et actes d'administration
4.218 LRs deux départements dans cette sectionde la frontière,la
Menchum et le Donga-Mantung, sont placéssous l'autoritédes préfets dont les
derniers en date ont éténommés,en mêmetemps que d'autres, par un décret
présidentielno 931398du 29 avril 1993 (Annexe M.C. 324). Ces départements
comprennent, parrapport à la sectionde la frontière concernéel,es arrondissements
frontaliers de Wum et FUN-Awadans la Mentchum, de Nkambe, Nwa, Ako dans le
Donga-Mantung.L'acte administratifle plus récent portantominationdes autorités
administratives (sous-préfets)dans ces circonscriptions temtoriales est le décret
n093/399du Premier Ministreen datedu 29 avril 1993(AnnexeM.C. 324).
4.219 Ces autorités administrativese signalentpar leur présence
effectivesur le terrainconsistanten des visitesde prise de contact,star de celle
du Préfetde Donga-Mantungdans l'arrondissementde Nwa en septembre 1994et de
celle que le Gouverneurde la province du Nord-Ouesta effectuéedans les mêmes
zones àla suite desincidents signalà Yang, unelocalitéde cet arrondissement.Ces
incidentsavaientd'ailleurssuscitéun échange de correspondancentre le Sous-préfet
de Nwa, M. Augustine AWA FONKA, et le Chairman of the Sardaum Local- Frnntiinternaiionale Gendarmerie
........LimbdeDeparlement O Siifel6Naiionrls
Rootprincipale 9 Portsde Douane
R(fectvn Cenmm6dic.l
a Sous-Mlertun O@@ Ecol-CollLge:Lycée
O Chef-ldeDiad
villafie
Départemen frsntaliers
danslesProvinces
duNORD-OUEST
etdel'ADAMAOUA
50kmGovemmentArea Gernbu (Taraba State)du Nigeria, M. Saidu A. ATOSCHI, au sujet
du marché frontalierde Yang (AnnexeM.C. 368).
4.220 En outre, parmi les actes d'administration de la zone
frontalière concernée,il y a lieu deciàetitre illustratif, le décretdu 20 septembre
1982 futant le nombre des conseillers municipaux, qui fute égalementceux des
communes de Nkambe (43, Nwa (40), Akweto (30) et de Wum (45), ainsi que leurs
codes géographiques(Annexe M.C. 266). S'y ajoutent lesactes de désignation des
chefs traditionnels. Ont été aiomméspar le Gouvernementcamerounais, à la date
du 15 décembre1988, 13chefs depremier degréet un chef de second degrédans des
villages de l'arrondissement de Wum, dans la Menchum, 3 chefs de second degré
dans des villages de l'ancien arrondissement du Donga-Mantung, 9 chefs de second
degrédans le distrid'Ako, 10chefsde seconddegrédans l'arrondissementde Nwa.
B. - Services de policetde gendarmerie
4.221 On note la présence des servicesde la sûreté nationale
camerounaise jusque dans lesunitésadministratives les plus proches de la frontière
avec le Nigeria. Ainsi, il existe deux postesfrontièresde la sûreténaàEssimbi
et à Esu dans la Menchum, et deux autres à Ako et à Sabongaxi dans le Donga-
Mantung, ainsi que des antennes de la sûreté nationale à Berabe et Sabongari
rattachéesau commissariat spécialde Nkambe. De plus, il existe dans ce dernier
département,deux commissariatsspéciauxà Nwa et à Dumbo servant aussi comme
postesfrontièresde la sûreténationaledansces localités.
4.222 Parallèlement, celles-ci sont dotées de brigades de
gendame rattachéesaux divisions de la Gendarmerie nationale de Nkambe et de
wum.
C. - Services de douane
4.223 L'ensemblede la province du Nord-Ouest compte12 postes
et brigades de douane dont sont situésdans le secteur de la frontièreallant du Mont
Kombon àla borne 64. Il s'agit des postes de douane d'Abagnshie, Isu, de Dumbo,
Wum, Berabe, Essimbi, Sabongan, Nkambe, Nwa. --
D. - Etablissementsscolaires
4.224 La densité des établissementsscolaires dans la zone
concernéeest relativementélevéeP . our l'enseignementprivé,laïc et confessionnel,
on compte :au niveauprimaire, notammentla "CatholicSchool"et la "CBCSchool"
de Nwa, la "CBC School" de Gom, la "CBC School" de Mbem ; au niveau
secondaire le "Jumbo Comprehensive College" de Mbem-Nwa, et le "Mbem
Technical Industrialand Commercial College"de Nwa.
4.225 En cequi concerneles établissements d'enseignemen public,
il existe:dans le domainede l'enseignementgénérall,es C.E.S. de Furu-Awa (créé
en 1987),de Wum (1992), d'Ako(1992), et un lycée àNwa (1986) ;dansle domaine
de l'enseignement technique les S.A.R. de Nkambe, de Nwa,de Wum, et le CETIC
de Nkambe.
E. - Structures d'encadrement agricole
4.226 Il existe des délégationsépartementales d'agriculture DDA
dansla Menchumet le Donga-Mantung. La première (DDA) recouvre les délégations
d'arrondissement del'agriculturede Furu-Awaet de MenchumValley, et les postes
agricoles de Gayama, Sambari et Furu-Awa ; la seconde recouvre les délégations
d'arrondissementet l'agriculture de Nwa, Ako et Misaje, les postes agricoles de
Sabongari, Nje, Ntong,Kwaja, Lus, Abongshie, Sabongida,et le poste de police
phytosanitairede Nwa. § 4. Le tracé
4.227 ie tracéde la frontièredu Mont Kombon à la borne 64 peut
doncêtredécrit comme suit :
From the prominentpeak which marksthe Franco-British
frontier along the crest of the mountains on a true
bearing of 100" for three and five-sixthsmiles to a point
which is the source of an unnameci stream on the new
Kumbo-Banyo road near the source of the River Mfi ;
thence along the unnamed stream from its source on a
general true bearing of 120" for one anda half mile;to
a point which marks thejunction of this stream with the
River Mburi about one mile north of the point where the
new Kumbo-Banyo road crosses the River Mburi at
Nyam (aliusNton), thesaidpoint being about four miles
south-eastby east of Muwe ; thencenorthwards along the
River Mburi to its junction with the River Akbang ;
thence along the River Akbang to its junction with an
unnamed tributary of the River Akbang ; thence up this
stream to a point on the main Kentu-Bamenda road
where it is crossed by the River Sama (Heboro on Sheet
E of Moisel's map on scale1/400 OOO),the said point
being markedby a cairn ;thencealongthe River Sama in
a straight line westwards to the highest point of Tosso
Mountain; thence in a straightline to the point where the
River divides into two; thence down the River Sama to
the point where it isjoined by the River Gamana;thence
dong the River Gamana downstreamto boundarypost 64
on the old Anglo-Geman frontier.
SECTION 4. DE LABRONE64ALACROSSRIVER
5 1. Les accordsgermano-britanniaues
4.228 Les traitésde protectorat conclus entre l'Allemagne et les
chefs indigènesen 1884 et 1885 (AnnexeM.C. 1) ne se prononçaient pasclairement
sur leur sphère d'applicationtemtoriale. On n'y trouve que des référencesassez
vagues et généralesaux régionsque les chefs indigènes voulaientet pouvaient lier par
leurs signatures. Etant données les conditions technologiques del'époque, on
comprend d'ailleurs fort bien ce manque de précision.Les populations indigènesconnaissaient bien sûr leur pays. Mais elles ne disposaient pas encore des
connaissances géométriques nécessaire psour exprimer dans un langage scientifique
moderne l'étenduedes terres où elles vivaientet qu'ellesdominaient. Il est clair aussi
qu'à l'époque lesdélimitationsne se faisaient pas encorede façon mathématiqueavec
des lignes de partage nettes. De toute façon, ces premiers traitésne constituentpoint
des bases appropriéespour définirle tracéde la frontière actuelle.
4.229 Comme il a été exposé ci-dessus, l'Allemagne et la Grande-
Bretagne ont commencé dèsl'année 1885 à délimiter leurs sphères d'influence
respectives. Successivement,ces lignes sont devenues de vraies frontières, séparant
deux temtoires coloniaux distincts.
4.230 Pour le secteur compris entre la born64 sur la rive nord de
la rivièreGamanaet l'endroitmarqué"Rapids" sur la Cross River lesinstrumentsqui
encore à L'heureactuelle défuissentla frontière terrestre sont les deuxtraitésentre le
Royaume-Uni et l'Allemagne du 11 mars1913 "respecting(1) the Settlement of the
Frontier benveen Nigeria and the Cameroons from Yola to the sea; and (2) the
Regulation of Navigation on the Cross River" et du 12 avril 1913 "concerning the
Demarcation of the Anglo-German Boundary between Nigeria and the Cameroons
from Yola to the Cross River". Aucun des actes pris avant ou après la date de la
conclusion de ces accords n'a affectéla force juridiquement obligatoire de leurs
dispositions. Ce sont ces traités seuls qui portent réglementationde toutes les
questionsjuridiques litigieusePar ailleurs, le tracétel qu'il résultede ces accords a
été confirmé àmaintes reprises par des actesde reconnaissance impliciteset expresses
(v. suprachapitre 3, section2).
4.231 Aucun doute n'est permis en ce qui concerne la validité
parfaite de l'accord du11mars 1913(v. supra chapitre 2, section 2). Un mois après
l'accord de délimitationdu 11 mars 1913, un protocole sur la démarcationde la
frontière entre le Nigeria et le Cameroun a étéconclu (du 12 avril 1913, Annexe
M.C. 86).
4.232 Le protocole du 12 avril 1913 a eu comme finalité d'arrêter
juridiquement les travaux de démarcationeffectuésdepuisle début dumois d'octobre
1912 par la commission germano-britanique composée, du côté allemand, de
I'Oberleutnant Hermann DETZNER, et, du côté britannique, de Captain W.V.
NUGENT. Cet accordest pertinent auxfins de la présentesectionen ce qui concerne
ses points 13 à 21, qui traitent de la frontière depuis la rivière Gamana jusqu'à laCross River. A première vue, ilpeutparaître étrangeque l'accordde démarcationne
mentionnedans son préambule que l'accord du 6 octobre 1909 et seprésentedonc
exclusivement commeun instrumentde mise en oeuvre de cet accord antérieur.Il
aurait éténaturelde faire référence égalemeàtl'accorddu 11 mars 1913,qui avait
précédé l'accord de démarcationde quelques semaines seulement. Maison se
tromperait si l'on voulait croire que l'action des deux gouvernements n'étapas
coordonnée,la maingauche nesachantce que faisaitla main droite. Il résultede ce
qui précède que les deux opérationsse chevauchaient.L'expéditionde démarcation
avait commencée à un moment où l'on croyait encore quele projet d'accord du 6
octobre 1909recevrait l'approbationofficielleàsavoir au débutoctobre 1912. On
s'efforçait donà cettedate de mettre en oeuvre l'accorddu 6 octobre 1909. Selon
toute probabilité, l'expédition, si trouvait loin des réseaux de communicationn
terre inexplorée,ne savait simplement pas qu'entre-teme projet d'accordde 1909
avait étésigné avec certaines modifications quitoutes ne concernaient que la
navigation sur la Cross River. Pour le reste, l'accord du 11 mars 1913 est
matériellement identiqueu projet d'accordantérieur. Dèsors, il importepeu que le
préambule contiennueneréférence qui n'ep stasentièrementpertinente.
4.233 Par ailleurs, les officiers chargés de la démarcation se
rendaient parfaitement comptde cette situation.L'OberleutnantHermannDETZNER
s'est exprimécomme suit dans un article publiéen 1913 peu de temps après
I'achèvement du travailde bornage:
"Bien que déjà à l'époque(c'est-à-direen 1909) on ait
réussià se mettre pleinement d'accord sulre tracéde la
frontière, l'accordn'a puêtresignéque le 11mars 1913
à Londres parceque la partie allemandetenaità inclure
dans l'accord les dispositions concernantla libertéde
navigation sur la rivière Cross et que cette partie de
l'accordne pouvaitpas êtretraitéei aisémentet nonpas
sansl'interventiondes deuxgouvernementsintéressés. "Néanmoins,les deux gouvernements décidèrentdéjàen
1912, quand un accord surla libre navigation se dessinait
de façon concrète, de commencer la démarcationle le
octobre pour pouvoir bénéficierde la saison propice" 5
(traductionde la Républiquedu Cameroun).
4.234 Ces constatationsont étépleinement confîîées par Captain
W. V. NUGENT, l'officier responsable du côté britannique. Dans un article qui
reflète le pointde vue britannique, il éc:it
"The area through which the boundary line runs was
surveyed by the Commission under Colonel Whitlock,
R.E., between 1907and 1909. Having been a memberof
that Commission, 1 was sent out in August, 1912, to
mark the boundary on the ground, the line having been
previously settled approximatively on the map, at a
conference between the British and German
Govenunents" ("The Geographical Results of the
Nigeria-KamerunBoundarvDemarcation Commission of
1912-13", The Geoera~hical Journal, London, Vol 43
(1914), p. 630 (631)).
4.235 Par ailleurs,lorsqu'on compare les deux textes, on se rend
compte que le tracéde la frontièrey est décritde la mêmemanière. La différence
principale provient du fait que la Commissionde démarcationavait reçu le mandatde
se fonder sur les caractéristiquesnaturellesdu paysagePar conséquent,la description
contenue dans l'accord du 12 avril 1913 est plus détaillée.En outre, il va sans die
que, le bornage ayant été achevé l, précisiondes indicationsen était facilitée.
4.236 Il faut enfin noter que, dans certains endroits, les deux chefs
de délégation ont délibérémen dtérogé aux dispositiondse l'accord de 1909. Dans le
journal où il consignait les événements de mars 1913, I'Oberleutnant DETZNER
explique que prèsde la borne 91, en direction sud-ouest, le tracé aétémodifiépour
éviterune division de deux grandesmbus, les Ituruba et les Olitti. On y l:t
3 "Obgleichüber die Grenzfühningschon damals (scil. en 1909)volles Einvernehmenerzielt
wurde, k0Mte das Abkommendoch eram 11. Mk 1913in Londonuntemichnet werden,
da deutscherseitsWen darauf gelegt wurde, die Bestimmungenüber die freie Schiffahnauf
dem Cross-FluB in den Verîrag aufmehmen, und nicht ohne Mitwirkung der beteiligten
Gouvernements erledigt werden konnte. lmmerhin beschlossen die beiderseitigen
Regierungenbereits 191aldie Übereinkunftüber die freie Schiffahnin sichererAussicht
stand, am 1. Oktober mit der Vennarkunni begi~en, damit die günstige Jahreszeit
ausgenum werden konnte", "Die nigerischeGreuze von &menin nuischen Yola und dem
Cmss-FluB". Mitteilungen aus den deutschen Schutz~ebietein, Berlin. Vol. 26 (1913),
p.317. "En continuant la démarcationde la frontière au sud-
ouest de la borne 91 au point de jonction des rivière
Megner et Moan, d'où la frontière devait suivre la
dernière rivière surune courte distance en direction de
l'amont pour ensuite rejoindre la rivièreAnube en ligne
directe, les commissaires ont dérogéau tracé de la
frontière tel qu'il avait étéconvenu : La ligne de
frontière en ligne directe du Moan à l'Anube, comme
elle aurait du êtretracée selonle protocole, divisait deux
grandes tribus, les Ituniba et les Olitti, en deux grandes
tribus, les Ituruba et les Olitti, en deux parties de telle
manière que dans le cas de la dernière la très grande
majoritéen territoire allemand. Tant le chef du district
(Bezirksamtmann d'ossidinge que le chef du district
(Distriktschef) d'Obodu avaient adresséà la commission
la demande, en partie oralement, en partie par écrit,
visant à démarquer la frontière dans la mesure du
possible en maintenant les frontières entre les tribus.
Pour ces raisons le tracé suivant fut convenu et
démarqué: De la borne 91 au point de jonction
Megner et Moan la frontière suit la dernière rivière
jusqu'à l'embouchure de la rivière Thi-(Masene) à
environ 850 m au nord duvillage de Habe qui appartient
à la grande tribu des Agare (Bekenso); Habe restera
allemand.
De là, la frontièrecourt en ligne directejusqunà point
à la rivièreMekamon où celle-ci fait un tournant vers le
nord; ensuite la frontière, en passant par le point de
triangulation 2341 et point de repère aisément
identifiable, atteint le point de jonction des deux rivières
Ami (Anube) et Mahane (Ndiri), pour suivre la
premièrejusqu'à sa source.
Avec ce tracé dela frontièreon a abouti à maintenir les
frontièresdes tribus indigènesàtréduirela frontièredes
tribus indigènesetàréduirela frontière enligne direcà
la moitiéde la longueur antérieure.
Du côtéallemand on n'a pas cédé de territoire habité ou
cultivé, alors que le village de Ngale avec tous ses
villages secondaires sont tombés dans le territoires
allemand" (AnnexeM.C. 84).
4.237 En effet, aux points 9 et 10de l'accorddu 11 mars 1913 -et
de mêmedans le projet d'accord de 1909 -il est stipuléqu'aprèsla jonction de la
rivièreMaquari avec la rivièreMomo/Moan/Morn, la frontièresuit le thalweg de la
Momo et que, depuisun point situéàenviron 1,6 km à l'est dupoint trigonométrique
2490, elle constitue une ligne directe jusqu'à la rivière Anyola/Anube, qu'elle
rencontreà environ 4 km au nord d'Atscho/Atteri. L'accorddu 12avril 1913traite de
ce segment de la frontièredans les points 1à 18, sa démarcation se concrétisedansles bornes 91 à 100. Les notes de M. DETZNER montrent qu'il n'y a pas identie,
mais bien divergence. Mais, sommetoute, on a voulu rester fidèle à la frontièredéjà
fkée. Le but étaitsimplement de s'écarterd'une ligne mathématique,inadaptéedont
le maintien n'aurait réponduni aux donnéestopographiquesni aux donnéesethniques
de la régionen question.
4.238 Bien que les deux accords du 11 mars et du 12 avril 1913
forment un tout, il est donc clair que selonla règlede la lexpostenor l'accord du 12
avril 1913 l'emporte sur l'accord du 13 mars 1913. Comme il a étéexposé,des
divergences existent. Mais les deux gouvernementsen étaient conscients.Ils tenaient
tous les deux à fixer une frontièrequi faciliterait l'administration de leurs temtoires
coloniaux.
4.239 Le préambule de l'accord du 12 avril 1913 prévoit
l'approbation des deux gouvernementsconcernés.Cene approbation a été donnée. Le
6 juillet 1914 à Londres, l'échange desinstruments a eu lieu (v. supra chapitre 2,
section 2, par. 2.94). Les notes correspondantesse trouventdans les archives tant du
Foreign OfJice que de 1'AuswiWigesAmt, le Ministère des Affaires étrangères
allemand.
4.240 En Allemagne, lesformalités constitutionnelles requisesont
été respectées.Au sein de l'Office Impérialdes Colonies, on s'étaitdéjàdemandé en
ce qui concerne l'accord de délimitationdu 11 mars 1913 s'il fallait s'assurer du
consentement des assembléeslégislatives,du Reichstag et du Bundesrat. On avait
répondupar la négative. L'exécutié f taitd'avis que c'était une matièrelevant de la
compétence de l'Empereur. En 1912, une loi avait étéadoptée selon laquelle
l'acquisition ou la cession d'une colonie ("Schutzgebiet") en tout ou en partie avait
besoin de l'approbation parlementaire4.Mais il est expliqué dansun mémoire du19
4 Loi portantmodificationde la Loi surles territoirescoloniaux,du 16 juillet 1912, Reichs-
Gesetzblatt 1912, p. 4: " Pour l'acquisitionet la cession d'untemtoire colonial
(Schutzgebiet)ou de partied'un tel territoire,une loi de l'Empireest nécessaire.Cette
dispositionnes'appliquepas auxrectifidefrontièr(AnnexeM.C. 75).avril 1913 (Annexe M.C. 91)' qu'il ne s'agissaitpas au sens propre des ternes d'un
tel acte, mais seulement de l'adaptationd'une frontièreconvenueaux caractéristiques
du terrain traversé par la frontière, donc d'une simple rectification que la loi
exemptait expressément dela nécessitéd'une intervention du pouvoir législatif.
Partant, il s'imposait quela conclusion de I'accord de démarcation tombait sousla
compétence del'Empereur, qui était,en principe, investi du pouvoir colonial6.Il est
clair que le mêmeraisonnement valait pour un accord dont le seul but était de
démarquerla frontièreconvenue auparavant.
4.241 Notons, par ailleurs, que même une erreur dans les
procéduresconstitutionnelles internesn'aurait pas affectéla pleine validitédes deux
accords. En principe, la non-observation des règles constitutionnellesest sans
pertinence sur le plan international. Seulement un vice grave et manifeste pourrait
avoir cette conséquence.En ce qui concerne les deux accords, personnedans le passé
n'ajamais contestéleur régularitéA . u contraire, ils ont toujours étreconnuscomme
les instrumentspertinentspour la fixationde la frontière.
4.242 En plus, toute la pratique postérieure avantla guerre s'est
baséesur le tracéarrêté par l'accord du12 avril 1913.11est vrai que cette périodene
fut pas longue. Mais il n'existepas le moindre indice qui serait capable desuggérer
que la frontière entre leCamerounet le Nigeria ait été miseen doute.
5 Lettre du Secrétaired'Etat de l'Office Impérialdes Colonies au Secrétaired'Rat du
Ministère des Affaires étrangères,Politisches Archiv des Auswanigen Amts R 14854:
"L'accord sur la frontièree le Cameroun et le Nigeria,signéle 11du mois précéptar
l'ambassadeurimpérialà Londres, le prince LICHNOWSKY, etSir Edward GREY n'est
qu'une miseen oeuvre desaccordsdes 29 avril17mai 18851juillet12août 1886, ler juillet
1890 (an ..2). 14 avril 1893et 15 novembre 1893. Leslignes de frontièrey fixées sont
restéespertinentes égaiement dansle présentaccord. Toutes les dérogationsaux lignes
directes primitives n'ont étéeffectuéesque sous l'aspect d'une meilleureadaptationde la
frontièràdesrepèresnanirelsdu terrain. 11ne s'agitdoncpas d'acquisitionou de cessionde
parties d'un territoire colonial ("Schutzgebiet"),mais d'unerectificationde la frontière qui
ne requien pas l'autorisationdu Reichstae (chambredes dépu)t du Bundesrat(Conseil
fédérai).
Pour ma pan je n'ai pas d'objections contreune publication de I'accord. Je prie son
Excellence de bienvouloir donner son consentementà la publication, que nous avons
l'intentionde faire, dansle "DeutschesKoloniaiblatt"officiel".
6 V. Philippe ZORN, Das Staatsrechtdes Deutschen Reiches, Vol.1, deuxièmeed. 1895,
Berlin, 1. GUTTENTAG, pp. 569-570 ; Gwrg MEYER, Lehrbuch des deutschen
Staatsrechtes,sixièmed. par GerhardANSCHÜTS, Leipzig, Duncker & Humblot, 1905,
pp. 486-487 ;Paul LABAND, Deutsches Reichsstaatsrecht, sixièmed.. Tübingen, l.C.B
Mohr(Paul Siebeck), 1912. pp.207-208.4.243 En août 1914, la premièreguerre mondiale éclata. Dècse
moment-là, la frontière officiellene jouait plus aucun r6le.Le conflitarmé a
également englobé les temtoires coloniaux,et, on le sait, lestroupes allemandesont
dû se rendre assezvite.
4.244 Tous les actes édictés par la Grande-Bretagne dans
l'administration du Cameroun méridionalcomme temtoire mandataire de 1922
jusqu'à la dissolutionde la Sociédes Nations aprèsla deuxièmeguerre mondiale
confument le statutjuridiquede la frontière occidentalCameroun méridional. La
Grande-Bretagne n'étaitpas investie d'un pouvoir de décision sur le statut du
Cameroun méridional.Sa mission étaitd'administrer letemtoire pour le bien de la
population. Mais elle ne pouvait pas se délierunilatéralementdes limitations
matérielleset territoriales trèsrigoureusesde sa compétence. Sa pratidevait se
tenir dans le cadrejuridiquedu MandatLe Gouvernementbritannique n'avait aucune
autorité pour modifiede quelquemanièreque ce soitla situationjuridiquefixéedans
le Mandat.
4.245 Il n'y a d'ailleurs aucunindice qui permettraitde conclure
que la Grande-Bretagne aen effet voulu changer le tracéde la frontièretel qu'il
résultaitdes deux accords pertinents de191La puissancemandatairen'a pas essayé
de se défaire deslimitationsque lui avait imple Mandat. Commele précisela CIJ
dans son arrêtdu 2 décembre1963 (C.I.J., arrêt,2 décembre1963, affaire du
Cameroun septentrional, Exceptions préliminaires,Rec. 1963, p. 15 (21)), le
Cameroun méridional a étadministréjusqu'en 1939dans le cadredu Nigeria du Sud
comme une province distincte, celle du Cameroun. Par la suite, il a été lié
administrativementen tant que province distincte aprovinces de l'est du Nigeria.
Son identitén'a donc pas été affectée. Ainsli, situationjuridique formelle et la
situationde fait se trouvaienten parfaite harmoLae.pratique britanniqueconfie
pleinement le caractèrepertinent de la frontièrf& par la Grande-Bretagneet
l'Allemagne.
4.246 Sousle régime de Tutelle instauéar les Nations Unies, le
même respect par la Grande-Bretagne deses engagements internationauxpeut être
observé. L'acte lplus révélateuà cet égardest la NorthenRegion, WesternRegion
and Eastern Region (Defuiitionof Boundaries)Proclamation,1954. Il en résulte que
le Gouvernementde la Grande-Bretagnea conservéle Camerounméridionalcomme
une entité administrativeindividualisée.Le Cameroun méridionaly est mentionné
comme une collectivitétemtoriale avec des frontièrespropres, formant ainsi unterritoirà statut spécial.En comparant lesaccords germano-britanniquesdu 11 mars
et du 12 avril 1913et la descriptiondonnéepar la Proclamationde 1954, on constate
qu'on a en effet voulu resterentièrement fidàlla frontière traditionnelleet qu'il ne
s'est agi que de mettre à jour et préciser le tracé de la ligne de démarcation.
L'instrument de 1951donne d'abordune description de la partie nord du morceau de
frontière entre la borne 64 et la Cross River. Cette description figure dans la partie
"Boundariesof the Northern Region", secteur N, depuis la born100 prèsdu village
de Kotile en direction nord-est. Ensuite, l'instrument de 1951 définitla frontière
depuis la mer jusqu'à la borne 100 encore en direction nord-est (Boundariesof the
Eastern Region, Part.1). L'objectif semble avoétéde décrire la frontièreexistante
dans un instnunent moderne, aisémenatccessible. Mêmela lecture la plus attentive ne
découvreaucune trace d'une volontéde faire passer sous lerégime nigérian commun
certaines parcellesdu temtoire soumisesàla tutelle
4.247 Est remarquable, surtout et avant tout, le fait que la
Proclamation de 1954 se rétëre délibérémen atux bornes que la Commission mixte
germano-britanniqueavaitposéesen 191211913.Toute la défuiitionde la frontièrefait
donc apparaître une volontéde s'en tenir aux dispositionsde l'accord de démarcation
du 12 avril 1913. Le seul élémenn touveau sont les angles qu'on a introduits pour
donner plus de précisionà une frontière qui n'étaitpas facilà retrouver dans la
nature.
4.248 Mêmesi la Grande-Bretagne avaitvoulu introduire certaines
modifications pour des raisons de commodité, sesactes n'auraient pas eu d'effet
juridique. Comme auparavantsous lerégimedu Mandat, ses pouvoirs étaientlimités.
Notamment elle n'étaitpas en mesure de porter atteinte au statut du territoire sous
tutelle qu'elle avait reçu comme un "trust" de la communauté internationale,
représentéepar l'Assembléegénéraledes Nations Unies.
4.249 Depuis 1961, aucun accord supplémentairen'a étéconclu
entre les deux pays au sujet dela frontière.u'à l'époquela plus récente,les deux
parties ont considéré qu'aucundoute n'étaitpermis en ce qui concerne le caractère
définitifde la délimitation opédeans le passéen 1913. L'obligation des deux parties
de ne pas porter atteinàela frontièreexistantedériveégalement duprincipe de l'uti
posside juiks tel qu'il se dégage dela RésolutionA.H.G/Res. 16 (1) sur le respect
des frontières héritéesde la colonisation, adoptée auCaire le 21 juillet 1964 par
l'organisation de l'Unité Africaine. Tant le Cameroun que le Nigeria étaient
représentés dans cetteconférenceet ont ainsi reconnu le caractère inviolable desfrontières fixéespar les puissancescoloniales. II s'agit là d'un pilier de tout le
systèmerégionalafricain. Quiconquecontesteraitque les frontièresayant existéau
momentde l'accessionàl'indépendance s'imposen àtlui, mettraiten dangerla paix et
la sécuritéinternationalessur le continent africain. Aucun argument de caractère
ethnique, historique ou politique ne sauraitjustifier des revendicationstemtoriales.
Cela ne veut pas due que les nations africaines soient sous le joug d'une rigidité
insupportable. Mais toute modificatiode frontière,toutéchangede temtoire requiert
une base consensuelle. Des changements sont possibles, mais ils demandent le
consentementdes Etats intéressésC . 'est la voie conventionnelle seulequi permet le
transfert d'une parcellede temtoire si les parties concernestiment d'un commun
accord qu'il convientde modifierla ligne-frontièrepour des raisons d'opportunité.Il
va presque sansdue que dans de telles situationsla pratiqueappliqueune règleselon
laquellelesparcelles échangéesdoivent ê étealesen étendueet valeur.
Les "effectivités"camerounaises dans la zone de la Borne
82.
64 à la Cross River
4.250 Cette sectionde la frontièrecorrespond à une portion des
limites extérieures desprovincesdu Nord-Ouestet du Sud-Ouest.Les "effectivités"
camerounaises se manifestentdans les régionsqui la bordentessentiellemenà travers
les mêmes éléments dégagés d lassecteursfrontaliersprécédents.
A. - Structures administratives et actes d'administration
La frontière dela borne 64à la Cross River longe,dans le
4.251
Nord-Ouest, le départementde la Menchum,et plus précisémenltes arrondissements
de Furu-Awa et de la Menchum Valley ; dans le Sud-ouest, le départementde la
Manyu (chef-lieu:Mamfé),et plus particulièrement les arrondissementsd'Akwayaet
d'Eyumojock. L'article 6 du décretn081/520 du 4 décembre1981 portant création
des districts fixaitcomme suit leslimitesdu districtde Fum-Awa, érdepuislors en
arrondissement:
"- au nord et à l'ouest parla RépubliqueFédéraledu
Nigeria.
- àl'estpar le département e Donga-Mantung. - au sud par la rivière Ketsino et au sud-est par
l'arrondissementde Fundong.
-à l'ouest parla RépubliqueFédérale uigeria.
Son ressorttemtonal s'étendnotmment sur les villages
Biando 1, Biondo Ii,Luto, Furu-Bana, Akuni, Kpep,
Nsar, Badji, Lubo et Furu-Awa."
4.252 Des autorités administratives sontnomméeàla têtede ces
unités administrativesetsont renouvelées lorsque lesautoritéscompétentesl'estiment
nécessaire.Ainsi, un nouveau Sous-préfeta-t-il éténommé dansl'arrondissement
d'Akwayapar le décretn093/399 du 29 avril 1993portant nominationde sous-préfets
(Annexe M.C. 324), d'autres ayant éténommésà Eyumojock, FUN-Awa et à
Menchum Valley, respectivementpar les décretsnos 911113du 29 novembre 1991,
921284 du 4 septembre 1992 (Annexe M.C. 314), 931730 du 9 décembre 1993
(Annexe M.C. 327). Ces autorités administrent effectivement leurs unités
admiistatives, notammenten faisant régulièremetes descentessur le terrain et des
rapportsàla hiérarchiesur la situationàla frontière, commeen témoignepar exemple
celui que le sous-préfetde FUN-Awaa adresséau Préfetde la Menchum à Wum, le
22 février 1993, au sujet du renforcement de la coopération frontalière entrele
Camerounet le Nigeria.
4.253 Par ailleurs, le décretn082/456 du 20 septembre 1982 fixant
le nombre des conseillers municipauxpar commune, détermineégalementceux des
communes rurales frontalièresd'Maya (25) et d'Eyurnojock (15) (Annexe M.C.
266).
B.- Servicesde policeet degendarmerie
4.254 En dehors des services de la sûreténationale existant aux
chef-lieux des départementset des arrondissements et dont on en trouàeWum,
Mamfé, Furu-Awa, Akwaya, Eyumojok, il existe des postes frontièresde la sûreté
nationale dans cette zone, notammenà Essu (crééen 1973) et Ekok (1975). De
même,il existe des brigades de gendarmerie dansle ressort territorial de chacun des
départementset arrondissements précités.- Frontitreinternationale
....... .mite0sOCpanemenl
-- Roule principale
a Sous-Préleaure
0 Chel.ldeDisIrin
Village
Gendarmerie
O SiretéNalionale
PosiedeDouane
Centremédical
Ecol.Collt-LvcCe
0
duNORD-OUEST
etduSUD-OUEST C. - Services de douane
4.255 On dénombre quelques unités de douanedans la zone
considéréel:e poste de douane dessu, les bureauxprincipauxde douane d'Ekok, de
Lobe, le bureau secondairede douaned'Ofu.
, D. - Etabiissements scolaires
1 4.256 Il existe dans cette zone plusieurs établissementsprimaires
dont certains sont confessionnels. Il en est ainsi notamment du "Catholic School"
d'Akwaya, de l'école primaired7Amassi.L'Etat camerounaisy apar ailleurs implanté
plusieurs établissements d'enseignement secondaire généretltechnique. Ainsi, les
C.E.S. de Funi-Awa (créé en1987), de Kembong (1992) dans l'arrondissement
d'Eyumojock, d'maya (1993), le lycéed'Eyumojock,la S.A.R. d'maya.
4.257 Comme dansla plupart des établissementsd'enseignement du
Cameroun, tous les enseignants en service dans ces établissemepublics sont des
fonctionnairescamerounaispayéspar le Gouvernementdu Cameroun.
1 E.- Services de Santé
4.258 Il existe diverses formations sanitaires dans la zone
considérée. Leur importance estfonction de l'importance hiérarchique des unités
administratives auxquelles elles appartiennent: hôpital départementaà Mamfé,
hôpitaux d'arrondissemenà Akwaya et Eyumojock, centres de santé développédsans
les districts et dispensairesdans les villages.
F.- Structures d'encadrement agricole
l
4.259 Il existe une délégation départementaleleagriculture de la
Manyu, à Mamfé, deuxdélégations d'arrondissement de l'agriculturàeAkwaya et
I Eyumojock, deux postes agricoles dans ces deux localitéset un poste de police
phytosanitairà Ekok. S'y ajoutentles délégations d'arrondissemedt'agriculture deFuru-Awa et de la MenchumValley donton a vu que leur ressort temtorial s'étenden
partieàla zone frontalièreallant de la Borneàla Cross River.
G. - Coiiectede l'impôt
4.260 Les incidents survenus dans la localitéde Mbelogo située
dans le village de Furu-Awa révèlentque ce sont les autorités camerounaises,
traditionnelles et étatiquesqui assurent la collecte de l'impôt dans cette zone, cette
activité étant,on le sait, une des fonctionsrégaliennesd'uneUat souverain.
4.261 Comme le rappelle Chief Jonathan TEMPE du village de
Funi-Awa dans une correspondance du 5 octobre 1994 au Préfetde Wum (Annexe
M.C. 373, Mbelogo qui dépendde son villageest une localité camerounaise,peuplée
de gens originaires de Misong, Marshi et Kushen que les populations de Furu-Awa
ont acceptéd'accueillir et d'installer surleurs terres. Ces migrants avaient toujours
payéleurs impôts au chef de Furu-Awa et le faisaient encore sous le chef Kaigama.
Mais aprèsune certainepériode,les gensde Mbelogo
"decided willfully to pay their taxes to Nigeria for
economic reasons e.g. to buy their goods without
problems..."(ibi )d.
4.262 Ce refus de payer l'impôt aux autorités camerounaises s'est
traduit dans les années1980par la séquestrationdu chef de Lebo qui accompagnait
une équipede collecteursd'impôtsvenuede Wum.
4.263 LR chef de Furu-Awa suggère au Préfet de Wum de
convoquer dans l'arrondissementde Fugom une réunion deschefs de Misong, Marshi
et Kushen afin de régler ce problèmeconcernant des Camerounais vivant sur le
territoire camerounais, mais s'acquittant deleurs obligations fiscales auNigeria, en
les sommant
"to either choose to pay their taxes to the Cameroon
Govervemmentor [to] leave the area and move deep into
Nigeria or back to their various homes in Cameroon"
(ibid.) H. - Activitéscadastrales
4.264 De nombreux actes portant constitution des commissions
pour le choix des sites de construction d'infrastructures publiques, l'évaluanesd
desuutions de propriétés privéesn vue de l'indemnisation, oule bornage de tenains,
ont été pris par les autorités administratives compétentesdes différentes
circonscriptionsadministrativesde la zone.
4.265 Ainsi, les arrêtés duPréfet de la Manyu nommant les
membres de commissions d'inspection, de sélectionet d'acquisitiond'un site pour la
construction du service de la SûreténationaàeOtu (27 mars 1981) ; des services du
ministère des posteset télécommunicatione st ceux du ministèrede l'élevageet des
industries animalesà Akwaya (3 mars 1984) ;d'un bureau de poste à Akwaya (25
novembre 1982) ; des postes de la sùreténationaàeEkok et Akwaya (17 Novembre
1982) ;d'un établissementpublicd'enseignementsecondaire à Eyumodjock (24juillet
1982) ; des services du ministère del'Agricultureà Akwaya et Eyumojock (8 juin
1982) ; d'un centre de santé développé à Eyumojock (6 janvier 1982) ; d'un
commissariat spécialà Eyumojock (27 mai 1983) ;des services du ministère de la
santéà Mamfé,Fonem et Akwaya ;d'un poste agricoleà Eyumojock (15 novembre
1983) ;pour le bornage d'un terrain de la communeniraie d'Eyumojockà Nfumi (14
juillet 1983; pour la construction d'un marché à Ekok (2 novembre 1993) ; d'une
sous-préfecnueet une résidence du Sous-préfet, un hôpital, une sous-inspection de
l'éducation et la résideneu sous-inspecteur, un poste agricole, uneécolepubliqueet
la section artisanale rurale (S.A.R.) d'maya,un bureau de poste, le Centre de santé
de Bayandu, les services des ministèresde l'Environnement et des forêts,de la
Jeunesse et des Sports, des Affaires Sociales etde la condition féminànMamféet
Akwaya (10 octobre 1994). On signaleplusieurs réunionset descentes sur le terrain
de ces commissions.
1 4.266 Par ailleurs, une commission d'évaluationdes dommages
subis par les populations locales lors de la construction par la SociétéNationale
d'Electricité(SONEL) de la ligne de tension de 30KVentre les villages de Mkpot et
d'Ekok a été désignée pu ar arrêtépréfectoral du27janvier 1994.
4.267 Enfin, la créationpar les pouvoirs publics camerounais du
parc national deKorup depuis 1986doit êtrementionnée.Cet important gisement de
bio diversité dont la commissionde création avaitétéinstituée dès1982par un arrêtépréfectoraldu 12 février, couvre environ125.000 hectares dansle départementdu
Ndian. Une procédurede déclassementpartiel de la Réservedes Eyumojock et du
classement compensatoire du trianà l'Estde cePar cst en cours afin de satisfarie
les besoinsdes populationsde ladite région.
4.268 ks cartes originales de la Commissionde démarcationde
191211913sont annexéesau présent Mémoire (Annex Me.C. 383). Il n'existe aucune
carte postérieures'écartanttracéconvenu dans l'accorddu12 avril 1913. Toute la
pratiques'est fondée,aufpeut-êtrpour desincidentsqui ont été caractéréomme
tels, sur les dispositionsde cet accorPar conséquent, iln'y auraiteu aucune
justification pourun cartographede changer lesdonnéjuridiques arrêtées 1913.
Cette règle logique a d'ailleurs ésuivie sans exception. Toutes lescartes sont
identiques.Le tracén'a étéplongédans le doute que récemmentdu fait que, sans
aucunejustification visible, le Gouvernement nigériadéclaréque les accords de
1913ne lieraientpas son pays.
8 4. Le tracé
4.269 En ce qui concernele tracé,nousrenvoyonsauxdeux Traités
du 11 mars et du 12 avril 1913. Ce dernier accord, notamment, défint la frontière
telle qu'elle avaitdémarqués eur le terraLa.description verbales'accompagne,
répétons-led,e huit cartes (toutes annexées au prntémoire,AnnexeM.C. 383).
Ces trois élémentsans leur ensemble- le bomage, la description, les ca-tsont
sans aucun doute susceptiblesde permettre une identificationexacte du tracé.Seule
est nécessairela bonne volontédu côté nigérian pourreconstituerune démarcation
matériellelà où, au cours des décennies depuisl'achèvementde l'expéditionde
191211913,les manifestations concrètde la frontière se sont,ou bien perdues, ou
ontété détruitesou altérées.
4.270 Dans un premier secteur comprisentre les bornes64 et 86,
allant de la rivière Gamanajusqu'à la rivière Wom,la frontière court toujoursen
ligne directe entre les différentes bornes.Celles-ci devraientêtrerecherchuns dans effort commun au cas où quelquesunes auraient disparu au fil des annéeLa carte
GSGS 2700 de 1913, annexée à l'Accord de démarcationdu 12 avril, indique--leur
emplacement exact. On notera que contrairement à l'accord du 11mars 1913, bien
qu'entre les bornesposéespar elle la Commission de démarcationait toujours opté
pour un tracé rectiligne, le secteur dans son intégralité n'est rectiligne
qu'approximativement.En effet, la Commissionatenu compte dela topographiede la
régiontraversée.
Ainsi,
-la borne 66 se trouve au sommetde l'éperonle plus occidentalde Hos Ningua,
-la borne 69 est situéesur l'éperonorientald'une grande colline isolée,
-la bome 73 est érigée sur une collbasse constituantun repère proéminent.
1 4.271 Plus en direction sud-ouest,
1 -la borne 76 a étplacée au sommetd'une hautechaîne de montagne,
-la borne 77 se trouve au sommet d'unehaute colline prèsde Little Lutu,
1
1 -la borne 79 est située au sommet d'une chaînede montagne au nord de la vallée
l
l Katséna.
4.272 Après le passage de la rivière Katséna,où des bornes se
trouvent tant sur la rive nord (81) et sud (82), la frontièrecontinue en ligne directe
jusqu'au point trigonométrique 1627,où la borne 83 a étéérigée.Finalement, la
rivièreWom est atteinte avec la borne 87, situàenviron 800 m au nord du point
trigonométrique 1278.
4.273 De ce point, la frontière suitle thalweg de la rivière Wom
jusqu'au poteau 88 construità l'endroit ou confiuent les rivières Womet Imba
(Metchum), puis elle suit le thalweg de la rivièreImba en amont jusqu'au pointde
jonction de cette rivière avec un affluent appeléla rivière Mazan (borne 89). Elle
coïncide avec le thalweg de cette dernière rivièrejusqu'à la borne 90 près de la
source. Ensuite, la ligne de partage des eaux est traverséepour rejoindre la rivière
Awa. Puis la frontière suitle thalweg de la rivièreAwa jusqu'à sa jonction avec la
rivièreMaquari (aujourd'hui Mukara).Elle atteint le poteau 91 au confluent de cette
rivière etde la rivière Moan.4.274 Ensuite, la frontièrecoïncide avec le thalweg de la rivière
Moanjusqu'à laborne 92 au point de jonction avec larivière Ihi.C'est ici queles
modifications indiquées ci-dessus sontintervenues. Pour cette raison, nous
reproduisonsle texteintégral des point17et 18de l'accorddu 12avril 1919 :
"17. A partir du poteau 92 la frontièrepasse en ligne
droite par les poteaux3 sur la route Iturubu-Habe,94
au sommet d'une collineplate situéeà 1 mille 314 (2,s
km) au sudouestdu poteau92, lespoteaux92 et 95 étant
surune arête à 1 mille 314 (2,s km) au sud ouest du
poteau 94, jusqu'au poteau 96, point où la rivière
Mokamon(Nkwam)s'orientevers le nord et est rejointe
par son afluent venantdel'Est.La frontièrecontinueen
ligne droite jusqu'au poteau7 au sommetd'une haute
colline, de situation trigonométrique1, et passepar le
poteau 98 sur la route Maiatura-Nd* (en allemand
Ndile), le poteau 98 A sur la route Maiatura Ngale,
poteau 99 sur la route Maiatura-Aningay(en allemand
Aninge), le poteau 100 au confiuentdesrivièreAmi et
Mahana.
18. A partir du poteau 100 la frontière suitle thalwegde
la nvière Amui en remontant jusqu'à sa source
occidentale, traversela ligne de partagedes eaux, puis
suit le thalweg de la rivière Magbé,en passant par le
poteau 101 où la route Aliketti (en allemand Aligetti)
Okwa traverse cette rivièrejusqu'au poteau102 à la
jonction de la rivière Magbéet de la rivière Oyi (en
allemand Oji).
4.275 Le prochain secteurde la frontière ade nouveauété tracéen
grande partie en ligne directe. De la borne 102, en passant par la borne 103, la
frontière atteintle point le plus éled'une grande collineà deux sommets.De là,
elle va en ligne directe, en passant par la borne 10à, la borne 105 sur la rivière
Anebiràl'endroitoù la routeObonyi-Bashutraversecette nvière.
A partir de la borne 105 la frontièresuit le thalwegde la rivière Anebirjusqu'à la
borne 106 sur sa rive gauche. Les bornes 107 et 108 suiventà de courtes distances.
ensuite, le tracéest de nouveaurectiligneentre lesdifférentes borsusqu'à la borne
114sur la rive nordde la CrossRiver.
4.276
En 1965et 1966ont débuté les travauxde la démarcation de
la frontière terrestre entreDanare (Nigeria) et Boudan (Cameroun) suite à des
affrontements entre villageois nigérians et camerounais dus à des différends
frontaliers. Les représentantsdu Nigeria et du Cameroun avaientcertes recommandé
en 1965 que, en liaison avec la démarcationde la frontièreDanarelBoudan(d'une
longueur d'environ 105 milles), la frontièred'Obokum à Bashu (d'une longueur d'environ 20 milles) soit rétablie.Un rapport sur la première étapede l'étude dela
frontièreigeriaICameroun en date de mai 1966 note que les anciennes bornes
frontalières (de 1912-1913) 109, 110, 111, 112 et 113 avaient étérepéréeset
identifiéeset que des lignes droites d'environ quarantepieds avaientétédégagées sur
les lignes reliant les bornes 110, 111, 112 et 113, soit une distance d'environ 2,5
milles. Les travaux devaient reprendre le 10 janvier 1967. Le rapport contenait
différentes recommandations en matière de financement, de main d'oeuvre,
d'entretien du dégagementdes lignes et d'utilisationde méthodesde contrôle aérien.
Le Cameroun n'a malheureusement pas étéen mesure de trouver trace de compte-
rendus ultérieurs d'avancement en ce qui concerne le renouvellement de la
démarcationdu secteurokumBashu.
SECTION 5. DE LA CROSS RWER A LA MER -
L'APPARTENANCE DE LA PENINSULE DE BAKASSI
AU CAMEROUN
1 81. L'Accord germano-britanniaue de 1913
1 A. - Introduction
4.277 Commela Républiquedu Camerounl'a déjàexposéen détail
(V. supra le Chapitre 2, section2), une tentativepour établirpar un traitéla frontière
entre le Nigeria et le Cameroun dans son tronçon le plus méridional,et pour, du
mêmecoup, résoudre la question spécifiquede l'appartenance temtoriale de la
péninsulede Bakassi, avait déjàété enten 1885. Le choàxcette époquedu
Rio del Rey comme point de départsud de la ligne deséparationentreles possessions
coloniales de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne s'était rapidementrévélé
impraticable car il est vite apparu que ce choix reposait sur les cartes erronnées
l utilisées par les parties contractantes enLa note du 14 décembre 1885
(Commander OLDHAM to the Secretaryto the Admiralty) estexplicite su: ce point
"...the Govemor told hirnthat he had been on an exploringexpeditionup the Rio delRey, and that it was not a river, but only a creearmrof the sea..."(AnnexeM.C.
3, v. égalementsupra 2.14). C'est ainsique le Gouverneur allemand duCameroun, le
Baron von SODEN pouvait déjàaffirmer catégoriquement dans une note du 12juillet
1888adresséeau Consul britanniquedans 1'01dCalabar, HEWETT, que:
"You know as well as 1that there is no Rio del Rey, at
least no sources of such a river; thus our Governments
must either agree upon another frontiee.g. a degree of
latitude, or they must leave it to us to baptize one of the
numerous creeks as Rio del Rey, and to fu< the sources
of the said creek, or at least a spot where thesources are
supposedto be." (AnnexeM.C. 7).
4.278 C'est pourquoi, la même année, des propositions concrètes
pour un nouveau règlement dela question de la frontière furent faites par les deux
parties :tandis que les Britanniques donnaient la préferenceà l'embouchure de la
Ndian River, c'est l'embouchure de1'Akwayafé River qui fut proposéepar la partie
allemande comme point de départdu tracéde la frontièrevers l'intérieur des terres.
(V. pour les propositions, la lettre du Marquis de SALISBURY adressée à Sir E.
MALET le 2 novembre 1888; Annexe M.C. 9). La position allemande dans les
négociations est reproduite dans le "Memorandum [allemand] relating to the
Settlement of the Anglo-German Frontier on the Rio del Rey (West Africa)" du 4
novembre 1890 (AnnexeM.C. 12). Les négociationssont résumées également par le
Major MACDONALD (British Commissionerfor the West Coast of Africa) le 24
septembre 1890 dans le "Report of the Negotiations respecting a Boundary Lie
between the Gennan Colony ofthe Cameroons and the BritishProtectorate of the Oil
Rivers" (AnnexeM.C. 11).
4.279 Jusqu'à la conclusion du Traité du ler juillet 1890, les
parties ne purent cependant pas s'entendre sur le tracéde la frontièreà proximité
immédiate dela côte, de sorte que ce fut un point situéau nord de la péninsulede
Bakassi qui fut choisi comme le point de départle plus méridionalde la frontière,
entre leurs possessions coloniales respectives. La position exacte de ce point fut
ensuite préciséepar l'article 1 du Traitédu 14 avril 1893. Ce point valut dèslors
comme
"le point de départ[le plus méridional] dela frontière
temtoriale, d'après le traitégermano-britannique du 14
avril 1893" (traduction dela Républiquedu Cameroun) '
7
"Anfangspunkter deutsch-britisLandesgrenzenach dem Abkommenvom 14.April
1893".Ceci est le texte de l'indication portée sur la carte "Das Deuîsch-Englische
Grenzgebiet zwischen Rio del Rey und Cross-River, hauptsachlich nach den
Aufnahmen des Premierleutnants von BESSER, konstruirt und gezeichnet von Dr.
Richard KIEPERT und Max MOISEL" (publiée dans les "Communiqués des
protectorats allemands" [Mitteilungen aus den deutschen Schutzgebieten], vol. IX
(1898), p.177). Cette carte est par la suite citéecomme"La Carte BESSER". Dansle
même sens, par exemple,on peut égalementnoter la lettre adresséele 27 mai 1895
par Sir C. MACDONALD (Commissioner and Consul-General) au Comte de
KIMBERLEY, et qui décrivaitce point comme"one end [à savoir l'extrémitésud] of
the provisional line" (AnnexeM.C. 20).
4.280 Provisoirement, la côte fut soumise à l'administration
allemande. A l'inverse, le restede la péninsulede Bakassirelevait de l'administration
britannique (articleIIdu Traité).A ce propos, il suffitd'attirer l'attention sur le fait
que, pour la période1906/1912encore, ce tronçon de frontièreapparaît - àjuste titre
- dans le Memorandum officiel du Foreign Wce sous le qualificatif de : "still
unsettled boundaries" (V. le "Memorandum respecting thestill unsettled Boundaries
between Britishand Foreign Territoryin Africa" (AnnexeM.C. 48) ;v. aussi Annexe
M.C. 53). Cette mesure qui avaitpour but en particulierun contrôle douaniereffectif,
établissait
"for administrativepurposes a local limeof demarcation,
as far as the vicinity of the Coastwas concernedn. (Ven
ce sens le communiquéde JENISCH du 12 décembre
1894 ;AnnexeM.C. 18).
4.281 Cependant, la péninsuledans sa totalitéfut parallèlement
déclaréeêtreun "no-man's land" économique(article III du Traité ;V. aussi J. F.
PRESCOTT, Geoera~hicalProblems associatedwith the Delimitationof the Nigeria -
Kamerun Boundarv, 1885 - 1916, Ibadan University Research Notes, No. 12 of
February 1959 (extracted by B.K. SIMO, June 1959), p. 2 ;Annexe M.C. 214 :
"This created the area as a "no-man's land" and provided a safeguard against
boundary friction through overlappingcommercial interests").
4.282 Malgréles nouvelles négociations entreprises peu après dans
le but d'établirdéfinitivementle tracéde la frontière dansce secteur, la situation
juridique incertaine en ce qui concernait l'appartenance territorialede la péninsulede
Bakassi dura encore vingt ans et le problème nefut résoludéfinitivementen droit que
par le Traité germano-britanniquedu 11 mars 1913. En fxant la frontière sanséquivoque, ce traitéattribua la péninsulede Bakasàl'Allemagne. Toutefois, depuis
1901, les autoritéslocales britanniques et allemandes au Nigeria et au Cameroun
étaient convenues que la frontière devait atteindre la côte l'embouchure de la
frontière Akwayafé, ce qui laisserait la péninsule de Bakassi aux mains des
Allemands.
4.283 En se référanà ce traité,J. PRESCOTTégalement,relève à
juste titre qu:
"...when the boundary was finally demarcated and
described, it had been shifted from the eastern bank of
the Bakassi peninsula to the west. Thus the Rio del Rey
disappeared from the boundary defuiition and was
replaced by the Aqua Jafe." (Ibid., p. 2.)
B.- Le Traitégermano-britanniquede 11 mars 1913: un
réglemenjturidiquedéfmitif
4.284 La distance d'environ 140 milles (Indication numériquede
Sir E. HERTSLET, The M~Dof Africa bv Treaty, 3èmeédition1909, Vol. 1,XLVI)
de l'extrémitésud de la frontière entrele Cameroun et le Nigeria, depuis la Cross
River jusqu'à la mer, a fait l'objet d'un tracéfrontalier juridiquement definitif le 11
mars 1913du fait de 1'
"Agreement between Great Britain and Germany
respecting (1) the Settlement of the Frontier between
Nigeria and the Cameroons, from Yola to the Sea, and
(2) the Regulationof Navigationon the Cross River".
4.285 Peu après, unaccord de démarcationfut concluà Obokum le
12 avril 1913entre l'Allemagneet la Grande-Bretagne.Il faut néanmoinssouligner ici
que ce second traiténe présenteaucune pertinence quant au tracéde la frontièreau
sud de la Cross River, puisqu'il concerne seulementla démarcationde la frontièreau
nord de celle-ci (jusqu'à Yola), et ne concerne donc en aucune manièrele tronçon de
frontière dont il est question ici. En particulier l'Accord du 12 avril 1913 ne
comprend aucune disposition en ce qui concerne l'appartenance territoriale de la
péninsulede Bakassi.
4.286 Le Traitédu 11 mars entra en vigueur le jour mêmede sa
signatureàLondres par les plénipotentiairesdes Gouvernementscontractants, GRAY, Secrétaired'Etat britannique auxAffairesétrangères,et le Prince LICHNOWSKY,
ambassadeur d'Allemagne à Londres (V. Ian BROWNLTE,African Boundaries
(1979), p. 556: "Theinstnimententeredintoforce immediately.").
4.287 Il fut ensuitepubliéle 15mai 1913 -commetous les accords
internationauxrelatifs auxpossessionscolonialesallemandes - dans la partie officielle
du recueil colonialallemand (DeutschesKolonialblatt,Vol. 24 (1913), No. 10, pp.
430 ss ;AnnexeM.C. 91). Cette publicationest le recueil off~cielédité par l'Office
colonial allemand du Reich sur les protectorats (allemands)en Afrique et dans le
Pacifique. En Grande-Bretagne,le Traitéfut également publié dans le Treatv Series
britannique (V. Treatv Senes 1913, No. 13 ; Annexe M.C. 82). La question de
l'opportunitéd'une telle publicationfut discutée en détaie lt rencontra une réponse
expressémentaffirmative (pour d'autres publications,v. par ex. dans 106 B.F.S.P.
782; Martens, N.R.G. (3e Sér.),190et Cd. 7056).
4.288 En Allemagneon se posa la question de la nécessité d'un
agrémentdu Reichstaget du Bundesratpour que le traitésoit valideen droit interne.
Il y fut fuialementrépondu parla négative,parce qu'untel agrément, selon la loi du
16juillet 1912 (Reichsgesetzblat(JournalOfficieldu Reich) 1912(Nr. 45), p. 443 ;
Annexe M.C. 80), étaitseulement nécessaire lors de l'acquisitionou de la cession
d'une possession coloniale, mais il ne l'étaitpas pour une simple rectificationde
frontière, or c'étaitbien de cela dontil s'agissait iciselon l'opinion de l'Office
Colonial du Reichconsultésur cettequestionpar le Ministèredes Affairesétrangères
(V. la demandedu Ministèredes Affairesétrangères du 4 avril 1913(AnnexeM.C.
85) et la réponsede l'Office Colonialdu Reich du19avnl 1913 ;AnnexeM.C. 87).
4.289 Selon la conceptionde tous les intéressésc ,e traité fixait
juridiquement, de façon définitiveet obligatoire, le secteur sudde la frontière entre
les possessions allemandesau Cameroun etbritanniquesau Nigeria. C'est ainsi qu'il
l est affumédansle recueil colonialallemand duler mai 1913que:
1
"le règlementde la frontièreentre le Cameroun et le
Nigeria se trouve par là définitivemenét tabli." (Annexe
M.C. 91 ;traductionde la République du Cameroun,les
caractèresen italiques corres ondent à des caractères
espacésdansle texte original).8
8 "DieGrenzregulieningnvischenKameninund Nigerienist damitendgültigerledigt".4.290 La frontière telle qu'ellefméedans ce traité n'apas été
modifiéejusqu'à nosjour- du moins pas le segmentde frontière dontil est question
ici. Ainsi, c'àjuste titre que le ProfeIanuBROWNLIEconstateen 1979 dans
son inventaire des frontières en Afrique,que, en ce qui concerne ce segment:
"(iv) Cross Riveruthwards to the sea
This part of theundary dependsupon paragraphs XVI
to XXII of the Anglo-German Agreement of March11,
1913 ...(AfricanBoundaries,op.ci?,..556).
4.291 Des mesures ont en outre aussitôt étéprises du côté
britannique pour la mise en pratique des règles, égalementinclusesdans le traité, sur
la libertéde navigation sur la Cross River. Ami le Gouverneur du Nigeria Sud
pouvait-il annoncer, dans une note adresséedurant I1913 au Sous Secrétaire
d'Etat au Foreign qSTceque:
"steps had been taken to bring the procedure of the
Customs Department into line with the Anglo-German
Agreement of the11thof March, 1913. "AnnexeM.C.
90).
C. - Les préliminairesuTraité
4.292 Pour établir le texte de la première partie du traité
("Settlement of the Frontier between Nigeria and theCameroons, from Yola to the
Sea"), les Parties contractantes pouvaient avoir recoursimportants travaux
préliminairesremontant loindans le temps.
4.293 Bien que des négociationsentre l'Allemagne et la Grande-
Bretagne sur l'établissement déffe la frontièredans la régionde la péninsule de
Bakassi, ainsi qu'au nord de celle-ci jusqu'à laCross River, se fussent poursuivies
depuis1888 (V. par exemple les documents reproduits dan8811575 N3o.144 ss
de I'été1888 ; Annexe M.C. 8),elles ne s'intensifièrentqu'au début duXXème
siècle.Pour un aperçu rapide du déroulement des négociationse900et 1906il
est utile de se référerau "Memorandum [britannique] respecting Boundariesbetween
British and Foreign Temtory in Africa" de fé1906r(AnnexeM.C. 36)ainsi que
pour la périod1906-191 2u,"Memorandum respecting thestillunsettled Boundaries
between Britishand Foreign Territory in Africa". 4.294 Trois projets de traitéétaient aucentre de ces négocation:
le traité MOOlUPUTTKAMER de 1901 (Annexe M.C. 23), le protocole
HERRMANNIWOODROFFE de 1906 (Annexe M.C. 39), ainsi que le projet du
Traitéde Londres de 1909(AnnexeM.C. 55).
4.295 Comme le Cameroun l'a déjà exposé en détail(v. supra,
pars. 2.86-2.88), le tracéde la frontière, telqu'il défd par les articles 1àXVIII
du Traitédu 11 mars 1913, est conforme, pour l'essentiel, aux propositionsfaites par
les commissaires membres de la Commission germano-britanniquedes frontières. Il
s'agissait des propositions faites par le Capitaine en retraite HERRMANN pour
l'Allemagne et le Capitaine WOODROFFE pour la Grande-Bretagne, suite à leur
voyage d'inspection durant'l'hiver 190511906.Le Secrétaired'Etat aux Colonies,
HARCOURT, pouvait également répondreà juste titre dans une lettre du 14
novembre 1912 à la demande de BOYLE, Gouverneur britannique à titre provisoire
du Nigeria Sud, :"1have the honour to inform you that it has been agreed by both
Govements to accept the boundary defmedby the 1905-06Commission." (Annexe
M.C. 78). Le tracé de la frontière ainsi proposé par les deux commissaires
HERRMANN et WOODROFFE en 1906 a étéfvrédans un protocole signépar eux
en avril1906, ainsi que dans unecarte annexée.
l 4.296 L'étapesuivantede la négociationporta sur le point de savoir
si le contenu de ce protocole aurait pu, directement et sans subir davantage de
modifications matérielles,servir d'objàtun traité.Il en résultequ- excepté surdes
questions de détail-il n'y avait pas de divergencesfondamentalesentre l'Allemagne
et la Grande-Bretagne sur le tracé de la frontière fvré par HERRMANN et
WOODROFFE. En particulier, l'appartenance de la péninsule deBakassi dans son
ensemble aux possessions allemandes du Cameroun (V. le point 1 du protocole
HERRMANIWWOODROFFE) n'a étécritiquée d'aucune façon ni par la partie
allemande ni par la partie britannique. Elle ne fut pas non plus remise en quesLzon.
Directeur britannique des opérations militaires(Topographical Section GeneralStaff,
War Office), dont le point de vue a été demandé sur le tracéde la frontière, déclare
catégoriquement,dans une note du 8 août 1907, adresséeau Sous Secrétaired'Etat
aux Colonies, après avoir proposéde prolonger la ligne frontière versle sud, depuis
la ligne BakassiPoint-King Point, par une droite de 3 milles delong,
"(6) Al1 coastal territory to the south and east of the
boundary line as above defmed, including the whole of
the Bakasi peninsula, shall be transfemed to Germany."
(Annexe M. C. 45).4.297 S'ajoutentà cette note des copies des cartes T.S.G.S. No.
1764 et 2240, qui non seulementprolongent la ligne frontière vers la mer, mais
représententaussi l'ensembledu tracéde la frontièreterrestretel qu'ilfmépar le
protocoleHERRMANNIWOODROFFE.
4.298 La même unanimité avait dé rjàgnéquelques annéesplus
tôt, lors de la discussion relativeau projet de traité proposé palre Haut Commissaire
britannique du Sud Nigeria, MOOR, et le Gouverneur allemanddu Cameroun, von
PUTTKAMER, projet datantdu 16 avril 1901(v. supra,par. 2.48). Onpeut noter
également à ce propos le communiquéde l'administration coloniale allemande à
l'occasion de la séancedu Conseil Colonial (Kolonialrath) des21 et 22 novembre
1901 :
"Des négociationsont étéouvertes avec la Grande-
Bretagne pour établirdéfinitivementla frontière Nord-
Ouest depuis la côte jusqu'aux rapides de la Cross
River."(AnnexsM.C. 25). (Traductionde la République
du Cameroun)
4.299 L'articleIIdu projet de traité précavaitdéjà, dela même
façon, attribuéentièrementla péninsule Bakassiàl'Allemagne:
"In lieu of the boundaryline commencingin the Rio del
Rey at the point as given in the maps "West Pt." &
"West Huk" respectively, it should commence at the
South West Point of Bakasi Peninsula marked "Bakasi
Head" and follow the West Coast line of the Peninsula
until BakasiPoint at themouth of the Akpa-JyafeRiver
is reached, thence it shallfollow thecentre of that river
as far as the Urifian Creek on the lebank of the said
river, in such manner as to throw the Bakasi Peninsula
and the area between the Peninsula and the Creek,
formerly in British temtory, into the German Colonyof
Cameroon ...(AnnexeM.C. 23).
4.300 On peut donc die sans hésitationque depuis 1901, les
gouvernements intéressésconsidéraientl'un et l'autre que le fleuve Akwayafé
représentaitla frontière et, en conséquence,que la péninsulede Bakassi revenaià
l'Allemagne. C'est ce qu'exprimep , ar exemple, la note duForeignOflce du 16
septembre 1901(AnnexeM.C. 24). Déjà,la propositionde la Commissionfrontalière
germano-britanniquede 1895(AnnexeM.C. 20) a étéinterprétée dans ce sens par
9 "Wegen endgültiger Festsetmg der Nordwestgrenze von der Küsni den Gross-
Schnellensindmit EnglandVerhandlungeneingeleitet". certains, notamment par le "Memorandumby Mr. FARNELL respectingthe Frontier
between Southem Nigeria and Kamerun" :
"Their proposal ...also allotted to Germany the Bakasi
Peninsula at the mouth of the Rio del Rey, and carried
the frontier along the West coast of the peninsula."
(Annexe M.C .27).
4.301 En reproduisant exactement lespositionsdes deux parties sur
cette question, von MUHLBERG, Se~rétaire~d'Eta atllemand auxAffaires étrangères,
pouvait affirmer dès juillet 1905, par référence à une note reçue auparavant de
l WHITEHEAD, Chargéd'affaires britannique,
"The Imperial Govemment acknowledge, it is true, that
no difference of opinion prevails between the two
Govemments concerning the course of the future
boundary from the coast to the Cross River." (No. 4 de
la note du 17juillet 190; AnnexeM.C. 33).
4.302 La ligne frontière arrêtée par le protocole
HERRMANNIWOODROFFE reflétait aussil'accord desparties, de telle sorte que,
dès mai 1907, le Gouvernementbritanniquepouvait faire part au Ministèreallemand
des Affaires étrangères qu'ilavait l'honneur:
".., under instructions from Sir Edward GREY, to
inform Your Excellency that His Majesty'sGovemment
are now prepared to accept the boundary line as laid
down in the Protocol signed by Captain WOODROFFE
Commissioners." (AnnexeM.C. 41).h and Geman
4.303 Le fait que ni en 1901ni en 1906un traiténe put finalement
êtreformellement conclu ne tient donc pas à des divergences fondamentales de
conception sur le tracé de la frontière.Ceci tient bien davantage, dansles deuxcaà,
l'interdépendance absolue qu'a établi le Gouvernement allemandentre le règlement
de la question de la frontièred'une part, et l'établissementd'un régime delibertéde
la navigation sur la Cross River d'autre part. Le rapport No. 810111du Gouverneur
allemand du Cameroun du 29 juillet 1911 adresséau Secrétaired'Etat de l'Office
Imperial des Colonies (Annexe M.C. 64) parle expressément(p. 2) du "traitésur la
navigation et ... (du) traité sur la frontière qui lui est indissolublement lié."
(traductionde la Républiquedu Cameroun). l0
10
"DasSchiffahrtsabkornmunddamitdasmitihm in [junctibildendeGrenzabkommen"4.304 La partie britannique reconnut expressément cette
interdépendance,comme l'explicite par exempleune note du ColonialOflce adressée
au ForeignOffice le 22 août 1907:
"5.It will be seen from the correspondence between the
Foreign Office, the Gennan Governrnent and this
Department, ending with the Foreign Office letter of the
3rd of October 1905,that it.has been agreed that the final
boundary agreement shallGclude provisionsunder which
(1) German vessels navigating the Cross River shall not
be restricted to any special duties or restrictions, or be
vessels, and (2) the principles regulating the passage of
goods in transit on the river, to and from the Cameroons,
shall be embodied." (AnnexeM.C. 46. V. dans le même
sens la note du 23 mai 1907 adressée auMinistère des
Affaires étrangèresallemand ; AnnexeM.C. 41).
4.305 Toutefois, en ce qui concerne cette dernière question, le
protocole d'avril 1906dispose simplementdansson alinéa6 que:
"the free navigationon the Cross River ..is to be settled
by His Majesty'sand the Impenal Govemments."
4.306 Etant donnéela mauvaise infrastructure routière, la mise en
valeur de l'amère-pays dela colonie allemande par voie de terre, la garantie d'une
totale liberté d'actiondes civils et des militaires, ainsi qu'en particulier la possibilité
d'importer et d'exporter des marchandisesen franchise de droits de douane par cette
voie d'eau, étaienten effet d'une importance essentielle pour les Allemands, de telle
sorte qu'il leur étaitimpossible desongerà conclureun traité avant quecette question
ne fût réglée d'unefaçon acceptable.
4.307 La note du Secrétaired'Etat de l'Office Colonialdu Reich
adresséeau Secrétaired'Etat aux Affaires étrangères le Il janvier 1910est bien en ce
sens: "Pour l'informationque nous avons l'honneurde donner
à votre Excellence, je fais encore remarquer que
l'administration colonialest fermement décidée, depuis
plus d'une décennie, à n'accepter un règlement
contractuel des frontièresentre le Cameroun et le
Nigeria, & le Gouvernementbritannique acceptede
se lier simultanément sur la liberté denavigationsur la
Cross River, dans la mesure où celalui est possiblesans
qu'il soitporté atteinte ses droits souverains.En raison
de l'état desinfrastructuresau nord-ouest duCameroun,
l'administration coloniale se voit dans l'obligation de
prescrire de telles démarches.Bien qu'il ne puisse faire
de doute que le Gouvernement britannique connaisse ce
point de vue de l'administration coloniale enraison de
l'importance des échanges d'instruments et des
négociations orales quoint eu lieuà ce propos depuisde
longues années déjà,celui-ci essaie toujoursà nouveau
de nous amener à ratifier le traité de frontière sans
réglementation contractuelle simultané de la navigation
sur la Cross River, réclamation qune peut êtresatisfaite
de notre côtéen manière."(AnnexflM.C. 58)
(traductionde la Républiquedu Cameroun).
1 4.308 La position allemandepar rapport à cette questionne s'était
en effet pas modifiée depuisle débutdu siècle. Ceciest illustrépar le fait que
l'accord conclule 14 avril 1901 par MOORet von PUTTKAMER, quise limitait à
établirune ligne frontière,n'avaitpas étratifiépar l'Allemagne.La non ratification
tient au fait que la garantie de la libre navigationsur la Cross River, n'avaitpas été
donnée, à l'inverse dece qui était accepté poue réseau fluviale la Congo Riveret
du Niger, parl'Actegénérad le la Conférence de Berlin du27 février1885et qui était
le but principaldes négociationpour la partie allemande(Martens, N.R.G., 2. Série
10, pp. 199ss.; pp. 420 ss.:ChapitresIV et V de l'Actegénérad le la Conférencede
Berlin. V. aussà ce proposCO 520121368du 13août 1899,AnnexeM.C. 22).
11
"Zurgemligen InformationEuererExzellenzbemerkeichnoch, dassdie Kolo~aiverwaitung
seit mehr ais einem Jahrztest entschlossenist, auf eine venragRegelung der
Grenzennuischen Kamerunund Nigerianur einnigehen, wenndie englischeRegiening
es Übemimmt,sichgleichzeitighinsichtlichder freienSchiffahnauf dem Cross-Fluss.soweit
ihr das ohne direkte Schadigungihrer eigenen Hoheitsrechtemmglbinden. Nach
Lage der Verkehrsverhaltnissein Nordwest-Kamerunist der Kolonialvenvaltungein solches
Vorgehen unabweisbar vorgeschrieben. Trotzdem der englischen Regiemng dieser
Standpunkt der Kolonialvenvaltungdurch den in dieser Angelegenheit bereits erfolgIen
langjahrigen und umfangreichen Schriftwechsel undei zahlreichen mündlichen
Verhandlungengenau bekanntsein muss, versuchtsie es immerwieder, uns mr Ratifikation
desGrenzabkommensohne gleichzeitigevenragsmsigRegelung der Schiffahn auf dem
Cross-Flussm bewegen,ein Verlangen,dem diesseitsunteBedingungFolgegegeben
werdenkann".4.309 11aurait en effet étépolitiquement fort peu habile pour
l'Allemagne d'approuver un accord de frontièresans un règlement concomitantde la
question de la navigation sur la Cross River, étant donnéque le règlement dela
frontière de1890, formellementencore valable,lui donnait -à l'inverse dunouveau
traité de frontièqui prévoyaitun partagede l'ensemble dufleuvele long du thalweg
dans la mesure où il représentaitla frontière- un atout décisifdans les pourparlers
avec la Grande-Bretagne.En effet, la ligne droite tiréeà l'époquepour délimiterles
possessions coloniales britanniqueet allemandesdepuisla côtejusqu'à la CrossRiver
coupait en effet le fleuve dans toute sa largeur, moins d'un kilomètreen aval de
l'affluent de1'AwaRiver pour n'aneindre à nouveaule fleuve que deuxkilomètresen
aval, àla hauteurdes rapidesde la Cross River.Dansce secteur, l'entièredomination
sur le fieuve et ses rives revenaiàl'Allemagneseule, commedevaient d'ailleurs le
reconnaîtreles Britanniques.
"The chief difficultyresultingfrom the Treaty defintion
was that a small piece of temtory on the right bank of
the Cross River, where the Awa-ArtekanRiver flows
intoit, wasby that definitiongivento Germany,thatpart
of the Cross River being thus entirely in German
temtory ."
4.310 Le mêmepoint de vue apparaît dans le "Memorandumby
MI. FARNELL respecting the Frontier between Southem Nigeria and Kamenin"
(AnnexeM.C. 27):
"Nothing was known at the time of the course of the
CrossRiver, and it wasprobably thought that thestraight
frontier-lineould cut the river once only. As a fact it
cuts the river three times at least, and therefore gives
both banks to the Germans along a few miles of the
river's course.
4.311 Le "Memorandum [britannique]respecting the Boundaries
between British and Foreign Territory in Africa" de février 1906 décritainsi la
position allemandedans les négociations:
"Theabandonmentof Germany's exclusive possessioo nf
the loop of the Cross River to be conditional on the
'regulationby Treaty of the navigationof that river.."'
(AnnexeM.C. 36).
4.312 En fait, la menacede l'installation d'un barrage douanier
allemandsur la Cross River, qui paralyseraitle commerce surla partie britanniquedu fleuve en amont, constituait un fort moyen de pression pour l'Allemagne. Les
Britanniqueségalement, virentce danger:
"Under the arrangementwhich left one loopof the Cross
River entirely in Gexman temtory, it would have been
possible for that power to prevent Britishtrafic reaching
This upper loop is very small compared with the coursey.
of the river in British temtor..but it is an important
bit of the river." (AnnexeM.C. 27).
4.313 Ceci explique le refus du Gouvernement allemand de
conclure un traitéde frontière qui l'aurait pdu contrôle sur cette part-emême
1 petite- deh Cross River, sans pour autant quela libertéde navigation sur ce fleuve
ne lui fût garantie par la Grande-Bretagne. Ceci ressort également du Memorandum
de FARNELL (BritishForeign Wce) du 26 décembre1902 :
"Germany surrenders her exclusive loop of the Cross
River on condition that the Cross River remains open to
her navigation.." (AnnexeM.C. 27).
4.314 Le consentement du gouvernement allemand à un
arrangement définitif sur la question de la frontière, qui était de la plus haute
importance pour les Britanniques pour des raisons économiques, dépendaid tonc
entièrementde la questionde savoir
"if His BritannicMajesty'sGovernmentwere at the sanie
the ready to consent to the regulation by treaty of the
navigationof the Cross Riversomewhat in the sense of a
britannique d'une note du Baron von RICHTHOFEN duction
13 novembre 1902 adressée au Gouvernement
britannique).
4.315 A cela s'ajoutèrent d'une part des questions insuffisamment
éclaircies, selon l'opinion des Allemands, par le protocole HERRMANNI
WOODROFFE, et liéesau tracéexact de la frontièredans l'embouchure du fleuve
Akwayafé,considéré comme fleuve-frontière,et d'autre part la revendicationviàant
supprimer l'interdiction figurant dans l'artIIIde l'Accord du 14 avril 1893 de
créerdes comptoirsdans la péninsule deBakassi.
4.316 Lors de négociationsqui durèrent de 1907 à 1909 ces
!
demièresquestions ont cependant pu êtreréglées conformémen at x vues allemandes,
finalement considéréescomme acceptablespar les Britanniques.Ainsi, la description
de la frontière contenue dansle texte du projet de traité du6 octobre 1909 (sàgnéLondres par von DANCKELMANN, von KUHLMANN et von STEPHANI
(Allemagne)ainsi que par JILLEY, STRACHEY,CLOSE et WHITLOCK, Grande-
Bretagne), qui se référailui-même a des cartes annexées,étaitsusceptiblede faire
l'objet d'un accord entre ledeux parties. L'Allemagne partageaiten effet avec la
Grande-Bretagne, lors desnégociationssurle Traité du11mars 1913, l'opinion selon
laquelle:
"Both the English and German texts of the new
agreementshould followthe wordingof the agreementof
October 6th, 1909, except where the necessityfor
amendment has been admitted by both govemments."
(V. la note du Sous-Secrétaird'Etat (Coloni mcle)
adresséeau Sous-Secrétairde'Etat,(Foreignmce) le 11
mars 1912 ;AnnexeM.C. 67).
4.317 Comme le montraient les négociations,des modifications
substantiellesapportéesau tracéde la frontièren'étaient cepenctonsidéréecsomme
nécessairespar aucune desdeuxparties.
4.318 Malgrél'accord total désormais trouvsur la délimitationde
la frontièredans sa partie sud, levernementallemandrefusa à nouveau deratifier
le projet de traitédu 6 octobre 1909car il ne contenaittoujours aucune disposition
quant au règlementde la question de la libre navigationsur la Cross River. A ce
propos le Gouverneur allemand,le Dr. SEITZ, releva dans une lettre en date du 4
juin 1910que :
"Au sujet du protocole relatif aux négociation dse
frontières tenues à Londres du ler au 6 octobre de
l'année dernière,les délégués allemands insistent
expressément surle fait qu'un règlementcontractuelde
la question de la frontière ne peut aboutir sans un
règlement défuiitifde la question dela libre navigation
sur la CrossRiver." (AnnexeM.C. 60) (Traductionde la
République du Cameroun 12.
4.319 Cette interdépendance est aussi souligné par DETZNER,
lorsqu'il explique, en se reféràl'accorddu 6 octobre1909que :
12 "Ausweislichdes Protokolls über die Grenzverhandlungenin Londonvom 1. bis 6. October
vorigen Jahres ist seitens der deutschen Delegienen ausdriicklich betont, dass eine
venragsmàssige Regelung der Greuze nur msammen mit einer endgiiltigen Regelung der
freienchiffahn auf demCrossflusserfolgenkonne". ""...Bien qu'à ce moment-là, lesdeuxparties aient déjà
été entièremend t'accord sur le tracé de la ligne de
démarcation, cen'est quele 11 mars 1913 que le traité
put êtresigné à Londres, du fait que, du côtéallemand,
on attachait une grande importance à ce que soient
inclusesdans ce traitédes dispositonsrelatives la libre
navigationsur la CrossRiver, et cettepartie du traiténe
pouvait êtreélaborée facilement et sansla participation
des gouvernements respectifs." (Traduction de la
République du Cameroun ; H. DETZNER, Die
nigensche Grenze von KarneninzwischenYolaund dem
Cross-Fluss, Mitteilungen aus den Deutlshen
Schutzgebieten26 (1913), 317 ;AnnexeM.C. 84).
4.320 Ce ne fut qu'après denouvelles et longues négociations,
presque entièrementconsacrées à cette question,qu'un accordput êtreobtenu à ce
propos ; il trouva son expression dansle Traitédu 11 mars 1913. La question
égalementdiscutée,de savoir si un régime correspondant à celui de la Cross River
devait êtremis en place pour 1'Akwayafé (v. la IIèmepartie du Traitédu 11 mars
1913) fut repoussée commesurabondante par les Britanniques sur le fondement
suivant :
"The boundary between Southem Nigeria and the
Cameroons near the sea follows the midstream of the
Akwayafe. Being thus divided equally between the two
countries, the river should be declared open, if suca
declaration is necessary,for the vesselsof both nations.
Mr. HARCOURT [Sous-Secrétaire d'Etat (Colonial
OfJice)]sees no real occasion, however, for such a
declaration atal], inasmuchas the boundary Agreement
provides (Article 23): "Nothing in this agreementshall
prevent British or Gexmanvessels, whether publicor
private, from using the rnost convenient course between
the open sea and the AkwayafeRiver", which implies
that both powerscanmakeuse of the River. If, however,
the German Goverment would prefer that the point
should be made the subject of a specificstipulation,he
would suggestthat the most convenient wayof doingthis
would be to add to Article 23 of the Boundary
agreement, the followingwords: "and from navigating
that river without any differential treatment whatever".
(Annexe M.C. 63).
1
13 "Obgleichüber die Grenzführungschondamals volles Eivemehmen erzielt wurde, konnte
das Abkommen doch erst am 11. M2rz 1913 in London unterzeichnet werden, da
deutscherseitsWen darauf gelegtwurde, die Bestimmungenüber die freie Schiffahrtauf dern
Cross-Flussin dennrag aufmehmen, und dieserTeil desAbkommensnicht so glatt und
nicht ohne Mitwirkungder beteiligten Gouversrledigtwerdenkonnte".Après l'approbation du Gouvernement allemand, cette proposition devint ensuite
partie intégrantedu traité.
4.321 Comme on l'a dit, les deux parties considéraient,dès avant
la conclusionde celui-ci, que la frontièrecouraitconformémentau consensusquant au
fond qui existait entre ellesau moins depuis 1906, et que, pour cette raison, l'accord
du 11 mars 1913 n'étaitque la confiition formelle du tracéde la frontière déjà
reconnu depuis longtempspar les deuxparties.
4.322 On ne peut expliquer autrement par exemple la mise en
oeuvre, avant mêmel'entréeen vigueur du traité, d'une démarcation longueet
coûteuse (expédition NUGENTIDETZNER)du secteur de la frontière Cross River-
Yola également fié formellementpar le traité.
4.323 Le fait que la péninsulede Bakassi était traitéepar les
autorités britanniques elles-mêmes, dans les faits, comme partie intégrante du
Cameroun allemand avant mêmela conclusionde cet accord, ressort aussi d'une carte
qui, d'après lamention y figurant, a étéoriginairement établiepar 1' "Intelligence
Division, War Office" en avril 1903, puis a subi des additionset corrections jusqu'à
trouver sa version définitiveen février 1909 (reproduit dans HERTSLET, op. ci?,.
entre les pages 156 et 157). Le tracéqui y figure met sans équivoquela péninsulede
Bakassi du côtéallemand de la frontièreet ne reprend pas la droite Rio del Rey -
Cross River, ligne de séparationentre les possessionscoloniales de l'Allemagne et la
Grande-Bretagneencore formellement valable, et qui avait étdéfiniedans les accords
de 1890t1893. Seloncette carte, en particulier, la frontièrese situe dans la proximité
immédiatede la localité d'Okuri, qui se trouve au bord de 1'Awa River. Cela
correspond précisément aux dispositions du Protocole de
HERRMANNIWOODROFFEd'avril 1906. Non seulementil s'agit, en raison de son
établissement parle War Office, d'une carte officielle et qui,à ce titre lie 1'Etat
britannique, mais en outre elle fut publiée dansle recueil de traitésquasi officiel
d'HERTSLETsi bien que l'on doit lui attacherune importance particulière(V. supra,
chapitre 3, sectio5 ;v. aussi AnnexeM.C. 49).
4.324 De plus, les cartes allemandes montrent souvent, dès avant
1913, le tracéde la frontière nonplus commeune droite, mais bien comme suivant
une ligne conformeaux dispositionsdu traitéqui ne fut pourtant formellement conclu
qu'en mars 1913. La péninsulede Bakassi était fréquemmentprésentée surces
représentations cartographiques antérieuràs 1913comme faisant partie intégrante de la colonie allemande du Cameroun (v. par exemple la carte: "Die Regenmesz-
Stationen in Kamerun 1911", publiée dans les "Communiquésdes protectorats
allemands", Mitteilungenaus den deutschen Schutzgebieten,Vol. 25, 1912).
4.325. On peut aussi noter que les Britanniques se servirent en
novembre 1914 précisémentde cette carte pour illustrer leurs propositions d'un
partage du Camerounentre la Grande-Bretagneet la France. (AnnexeM.C. 94).
4.326 Dans le mêmeesprit, on peut mentionner que longtemps
avant la conclusiondu traité de frontièredéfinitif, la nordéepar lafrontière,au
sud de la Cross River, se trouvait sous le contrôle effectif de I'admiistration
allemande. Le Haut Commissairebritannique, EGERTON, devait le reconnaître dès
1904, lorsqu'il indiquaàson Gouvernement, dansun rapport du 8juillet:
"The Gerrnan Govenunent are extremely activeal1along
our boundary. They are endeavouring to establish
effective control and administration right up to Our
boundary while we, with the exception of a native
boundary and know little or nothing about that portion of
the Protectorate or whatoes on there. The Germansalso
have trading stationsneaOUI boundary " (AnnexeM.C.
30).
l
i D. - Caracteristiquesgénéralesdu traité
4.327 Quant à la forme, le traitérègle les questions de frontière
dans sa première partie dansses articles à XXX, tandis qu'il aborde celles de la
libertéde navigation sur la Cross River dans sa deuxièmepartie dans des articles de
nouveau numérotés de 1 à VII.Cette architectureinhabituellemontre déjàqu'il s'agit
ici d'un "packagedeal" portant en fait sur deux questions nettementdistinctes.
I 4.328 Quant au fond, le contenu dela première partiedu traitéqui
i seule nous intéresseici, se présentecomme retranscrivant presque mot pour mot
l'accord du 6 octobre 1909 dans son ensemble. Mêmel'ordre des articles est resté
l inchangé. En cequi concerne le projet de traitédiscuté dansle courant de l'a~ée
1912,par exemple, les Britanniques pouvaientaffirmeàjuste titre q:e "It is observed that the draft Boundary Agreement
follows the lines of the Agreement drawn up by the
British andGennan Delegateson October6th 1909, and
that the wordingof Articles 2, 4, 9, 13 and 16 has
slightly been modifiedso that the English and German
versions correspond moreaccurately." (Lettre de Sir
Edward GREY (Brirish Foreign Oflce) adressée à
I'ambassadeur allemand à Londres, le Comte
METTERNICH le 16 avril 1912 (Annexe M.C. 69)
correspondantau projet du 18 mars 1912 (Annexe68).
V. également dansce sens l'avis du Directeur des
opérationsmilitaires britannique du 30 janvier 1912 ;
AnnexeM.C. 66).
4.329 Lescartes paraphéespar les signatairesdu Traitéde 1909ont
également été reprisdee cet accordtelles quelles, sans modification. L'incorporation
de ces cartes a nécessité deuxutres modificationsd'ordre purement rédactionne l
des termes de l'Accord de 1909, du fait qu'il ne pouvait désormais plus simplement
êtrerenvoyé aux "accompanying maps", mais il devait être fait étate l'accord
précédent. La note rédigéele 28 mai 1912 par I'ambassadeurallemand, le Comte
METTERNICH,en constitueun bon exemple :
"The modifications which the German Govemment
consider desirable in order to secure a closer agreement
behveenthe text and the maps have been marked in red
ink in the accompanyingcopy of the drafi agreement."
(Traduction anglaisetiréede CO 520117452du 6 juin
1912 ;AnnexeM.C. 70).
4.330 Ces propositions de modifications ont été acceptées
immédiatemene tt sans réservepar la partie britannique,commeen témoignela note
du Foreign Wce du 22 juin 1912 adressée à I'ambassadeurallemand, le Baron
MarschallvonBEBERSTEIN:
"On the 28th.'ultimo Count METTERNICHwas good
enoughto forwardto me the proposed German version of
the Draft Agreementfor the settlementof the Frontier
betweenNigeriaand the Cameroons,and 1have nowthe
honour to inform your Excellency that HisMajesty's
Government agree to the wordingproposed." (Annexe
M.C. 71).
4.331 Pour réaliser cette adaptation rédactionnelle,d'une part
l'article II du Traitédu 11mars 1913 renvoieaux cartes "signedby the German and
British delegates at London on the 6th October 1909", et d'autre part la première
partie du traitéa écomplétép ear un articlXXX et dernier, quidisposeque: "The maps signed by the British and German delegates
on the 6th October, 1909, are hereby confmed, and
regardedas fodg an integralpart of the Agreement."
4.332 Grâce à cette référencepréciseaux cartes, il est devenu
possiblede remplacer la formuleriginellecontinuellementemployée "accompanying
maps" par la formule "aforesaidmaps" et ainsi, en mêmetemps, de renoncer à un
lien "physique"entre le texteet cartesparce quecela "..owingto their size..is
physicallyimpossible." (Note du Colonialqfficeadresséà von KUHLMANN le27
1 novembre1912 ; AnnexeM.C. 79).
4.333 La ligne frontièrese basepour l'essentielànouveausur celle
démarquée par HERRMANN et WOODROFFE en 190511906, telle qu'elle fut
établiedans le protocole d'avril1906. Toutefois,en ce quiconcernela ligne frontière
dans la proximitéimmédiatede la mer, l'Accorddu 6 octobre 1909contient quelques
précisions par rapport audispositionsde ce protocole, précisiqui cependant ne
modifientpas le tracé générdae la frontière.Il ne faisaiten particulier aucundoute
que la péninsulede Bakassidans son ensemble devaittomber définitivement soula
juridiction allemande.
4.334 Comme dans d'autres secteursde Lafrontière,le but de la
l délimitation effectuéen mars 1913 était, ici également,de modifier la ligne
frontière,tracéà l'origineau moyend'un simple
l
"blue pencil and a rule" ("d'une règle etd'un crayon".
Expressionde Su Claude MAC DONALD,qui ajouéun
rôle déterminant dansla délimitation originelle dla
frontièredans les années188011890, The Geoerauhical
Journal, XLiII January to June 1914, p. 649, Annexe
M.C. 95).
4.335 De sorte que "a completeor partial substitutionof a natural
boundary for the artificialoundary-line ..." pourrait êtreeffectuée, commele
dispose l'Article XWIi du traitédu 12 décembre1902 pour l'établissement de la
commission communede frontière ayantpour objet la mesure et le bornage de la
frontière depuisYolajusqu'auLacTchad.
4.336 Commecela sera démontré en detail ci-après(V. inpa pars.
4.363-4.396), ce but a pu êtreatteintpar la délimitatila frontièresituéeau sud
de la Cross Riverd'unefaçonexemplaire dansle Traitédu 11 mars 1913, la frontière
suivantau norddiverscoursd'eau,puisdans sa section médianep,ourl'essentiel,unecrêtede montagne, pour suivre enfin dans sa sectionla plus méridànouveau la
barrière naturelledes fleuvesjusqu'à la mer.
4.337 Le principe fondamental, en s'éloignantde la ligne droite
initialement retenue, était que les importants déplacementsde frontière faits au
détriment de l'une des parties seraient compensésailleurs. Par cet échange de
territoires letu quo temtorial devait êtremaintenu dansla mesure des possibilités.
Ce principe du do ut des est appliqué ici, de telle sorte, en particulier, qu'au
rattachement de la péninsulede Bakassiau Cameroun allemanddevait correspondre, à
un autre endroit de la frontière, une compensation temtonale pour le côté
britannique. Une telle compensationentraînait d'abord que la frontièreau nord de la
péninsulede Bakassi(environà partir du cinquième parallèle) obliquaile nord-
est et courait, par la suite, en grande partie,àtl'est de la ligne droite de la
frontière originelle. Ensuite,répondant aux revendications britaen vue d'un
gain de temtoires d'une plus grande importanceencore, le tracéde la frontièreretenu
au nord de la Cross River s'éloignait dela ligne droite originelle, au détrimentde la
partie allemande.
4.338 Le "Protocole sur les négociations defrontières tenuàs
Londres du ler au 6 octobre 1909" établi par les négociateurs allemandsvon
DANCKELMANN et von STEPHANI (Annexe M.C. 56)contientà ce propos les
indicationsnumériques suivant:s
"En ce qui concerne le temtoir730 kilomètrescarrés
ont étécédés à l'Angleterre par ce traité, tandis que
l'Allemagne recouvrai628 kilomètrescarrés." (Chiffre
5,par.4, traductionde la Républiquedu Cameroun)l4
4.339 Une analyse plus précise du déplacement defrontière
effectuépar le Traitédu 11 mars 1913 montre que la partie allemande-dans la
perspective qui étaitla sienne'époque- avait fait de larges concessionw ade
l'importance économique desterrains concernéspar l'échange. Tanqu'au sud elle
gagnait pour l'essentiel, abstraction faite de la pêcheried'Archibong, des fôrets de
mangrove quasiment inhabitées,elle perdait, du fait du nouveau tracéde la frontière
vers le nord, d'importantes terres fertileset arables ainsi qu'un nombre élevéde
localitésplus ou moins importantes comme Old Ndebiji (qui comptait déjà1000
habitants en1895 , . l'indicationfigurant"LarCarte BESSER"), I'Abongsituéau
14 "An Areal werdendurch dies Abkommen730 Quadratkiloan Englandabgetreten,
wahrendDeutschland628 Quadratk'ierrückerhalt".sud de celle-ci, ou encore les localités situsurla rive ouest (ou dans la proximité
immédiatede celle-ci) de Nkami, Obeb, Ojuk ou Nkakpoyo. Il n'est donc pas
étonnant qu'aussibien les Allemands que les Britanniquesont, dèsla discussion du
projet MOOR/PU?TKAMER, eu le sentiment que la ligne frontière était trop
désavantageusepour l'Allemagne. Ainsi par exemple le Baron von RICHTHOFEN
écrivit-il le13novembre 1902 à BUCHANAN(Msh Colonial mce) que :
"In the opinion of the Impenal Government, the
agreement reached between the Impenal Govemor of
Cameroons and the High Commissionerof South Nigeria
respecting a boundary between the Protectorates of
Cameroons and South Nigeria would not divide evenly
enough between the Bakassi Peninsula and the rapids of
the Cross River, compared with the now existing
boundary as regards its area and its economicvalue. By
taking the River Artekan[qui sera plus tard désignée
comme Awa River] as the boundary, the temtory that
would fa11to Great Britain in accordancewith the above-
mentioned agreement in comparison with the present-
boundary-line would amount to considerably more than
the inctease of temtory that would fa11to Gennany by
the agreement in the lower course of the Akwayafé,by
the acquisition of the economicallylittle valuableBakassi
Peninsula."(AnnexeM.C. 26).
4.340 Dans le mêmesens, le Foreign C@ce britannique affirmait
égalementque :
"A considerable bit of temtory given by the MOOR-
PUTTKAMER Agreement to Great Britain is to be
restored to Germany on the ground that the territory
received by Germany is less valuable than that received
by Great Britain." (Memorandum de FARNELL du 26
décembre1902 ;AnnexeM.C. 27).
4.341 Tout compte fait, l'Allemagneaccepta néanmoins le tracéde
la frontière, qui n'étaitpas vraiment temtorialement avantageux pour elle, parce
qu'elle obtenait en contrepartie une frontière qui se basait sur dese~naturelles
(en particulier sur des cours d'eau). En témoignedéjàla note précitédu Baron von
RICHTHOFEN (AnnexeM.C. 26) :
"... the Imperia1 Governent proposes the following
frontier-lime,which does not materially deviate from the
above-mentioned agreement" (c'est-à-dire l'Accord de
MOOR-PUTTKAMER de1901).4.342 Par ailieurs ce tracé pacifiait par là même lasituation
frontalièreet donnaità l'Allemagnela garantie, pour elle si importante, de la liberté
de navigationsur la Cross River :
"...Si l'on inclutla concession de la libre navigation sur
la Cross River dans la compensation, il semble alors
qu'un juste équilibre ait étrouvépar les deux parties"
(Protocole DANCKELMANNISTEPHANIdu 6 octobre
1909Anne~~5M.C.56) (Traductionde la République du
Cameroun) .
8 2. L'im~ortancedela carteT.S.G.S. 2240 (feuilles 1 et 21
4.343 La carte T.S.G.S. 2240 revêtitune importance particulière
lors de l'établissement contractuelu tracéde la frontière entre la Cross River et la
mer par le traité du11 mars 1913. Cette carte comprend les feuilles 1 (tronçon nord)
et 2 (tronçon sud). Tant la carte originale signéequ'une version simplifiéequi est
publiée avec le texte du traité dans la Treaty Series 1913, NO. 13 se trouvent
représentée par lecroquis page suivante.
A. - Origineet caractères générad uxla carte
4.344 La carte T.S.G.S. ("Topographical Service of the General
Staff") 2240 d'octobre 1906(v. la mentionau bas des deux feuilles de la carte) a pour
titre "Map of Boundarybetween Southem Nigeria and Kamerunsuet a été établie par
les deux membres britanniques de l'expédition 1905-1906, le Captaine A.J.
WOODROFFE, R.E. et le Lieutenant J.G. HEARSON,R.E..
Quant au lieu età la datede leur achèvementtechnique, les deux feuilles de la carte
portent en bas, dans le coindroit, la remarque suivant:
Southampton, 1906". at the Ordnance Survey Office,
15 "Wird das Zugestandnis der freien Schiffahrt auf dem Crossfluss mit in diese
Kompensationeneingerechnet,so scheinteh gerechterAusgleichfürbeideTeile gefunden
wordenN sein".4.345 Le fond topographiqueainsi que les inscriptionsde la carte, à
l'échelle de1:100.000, sont réduitspour l'essentiel, aux environs immédiats dela
frontière,et font ainsi clairement apparaîtrequ'elle avait étéétablie sur labase des
observations directes et des mesures des deux commissaires aux frontières eux-
mêmes.Cette carte satisfait ainsimêmeles critèrestrèsrigoureux de MaxHUBER,
qui expliquait en avril 1928, dans le célèbre arbitragde l'lle des Palmes que les
indicationsd'une carte
"are only of value whenthere is reason to thinkthat the
cartographerhas not merely referred to already existing
maps - as seems very often the case - but that he has
based his decisionon informationcarefullycollectedfor
the purpose." (R.S.A.vol.II,p. 852).
Ceciest sansaucun doutele cas avecla carte dontil estquestion ici.
4.346 La carte est quadrillé;les degrésde latitudeet de longitude
y sont écartés de5' lesuns des autres. La ligne frontièredélimitée témarquép ear
I'expéditionHERRMANNIWOODROFFEest marquéepar une ligne "point-trait"
clairementreconnaissable, ainsi qu'encomplémenp t ar les indicationsde position des
poteaux-frontière plantés lorse l'expédition (triangsoirs).
4.347 Les deux feuilles de la cartese recouvrent - environ entre
S025'30" et 5O23'30". Dans cette zone le fond de la carte et la ligne frontièresont
représentédse façonidentique surlesdeuxfeuillesde la carte.
B. - L'incorporation dela carte dansle traitéet soneffet
CommeVOICUle souligneàjuste titre
"le rattachement d'un instrument ... à un traité
international est un aspect technique." (De
l'intemrétation authentique des traités internationaux,
Paris, Pédone1968,p. 168).
Un tel rassemblementde différentsdocuments pourformer un ensemblecontractuel
peut se faire de différentes manières.e Juge Mc NAIRexplique à ce propos dans
sonopiniondissidentejointe à l'arrêt e la Cour dansl'AffaireAmbarielos: "Souvent, l'intention d'incorporationdans un traité d'un
document de ce genre est expressémentdémontrée par
une clause écrite, aux termes de laquelle le document
doit faire partie intégrante du traité ; ou bien,
alternativement, cette intention peut êtredéduite dela
nature juridique du document et de son rapport avec le
traité." (CU, arrêt duler juillet 1952, Rec., 1952, p.
60).
4.349 Dans le cas présent, l'incorporation de la carte T.S.G.S.
2240 relève de la première modalitécitéepar Lord McNAIR, puisqu'une clause
expresse d'incorporation est inséréedans l'articleXXX du traité, quimentionne la
carte en question. Par l'introduction de cette disposition, tout doute est écartésur le
point de savoir si, mêmesans que les cartes soient à nouveau signées, celles-ci
pouvaient cependant constituerpartie intégrantedu traité.Ceci est en effet clairement
établi par la note du Sous-Secrétaired'Etat aux Affaires étrangères adressé au
Directeur des Opérationsmilitairesle 24juin 1912, dans lequelce dernier est informé
sur l'état desnégocitationsavec l'Allemagne(AnnexeM.C. 72) :
"As regards the question of maps to be attached to the
Agreement it has been arranged by private-
communicationwith the Gennan Ernbassy that the maps
should not be re-signed, but that those attached to the
agreement of 1909 should be attached to the present
agreement and should be held to form an integral part
thereof. An article making this provision has accordiigly
been addedto the ..text."
4.350 A cela s'ajoute une incorporation implicite de la carte au
traité puisque le texte du traité lui-mêmese réfère à plusieurs reprises à des
indicationsde ladite carte (V. les articles XIII,XVI, XVIIXVIII).
4.351 Comme le contenu d'unecarte devenuepartie intégranted'un
traitépar incorporation représente l'expresside la volontédes Etats concernés, dans
ce cas précis, selon l'opinion unanime, il se voit attribuer lui-mêmeune valeur
juridique obligatoire(V. supra, chapitr3, section5). C.- Les effetsjuridiquesdela carte
1O L'équivalence de tous lesélémentd su traité
4.352 En vue d'apprécier l'importance juridiqud ee la carte
T.S.G.S. 2240 pour l'interprétation du Traitédu 11 mars 1913, il faut, en l'absence
de clause contractuelle contraire,partir d'aborddu principe d'équivalence matérielle
de tous les élémentds'untraité.
4.353 Le commentairede la Commissiondu droit international sur
l'article7 du projet d'articlessur le droit des traités seprononcenettementdans ce
sens:
"Que le préambule fassepartie du traité aux fins
d'interpretation,il n'y asur ce point aucun douteet tout
commentaire est superflu; c'est aussi le cas pour les
documents dont ilest dit expressémenq t u'ils constituent
des annexes autraités." (Annuairede la Commissiondu
droit international,1966,vol. II, p. 241).
4.354 En se référana tu rapporteur spécialde la CD1 sur le droit
des traitésSir HumphreyWALDOCK,PaulREUTERexpose égalemenq tue:
"... si certains engagementsconventionnelsfont partie
d'un traitéils sont soumis,saufdispositionscontrairesou
indicationsdifférentes,au même régime juridique quele
traitélui-même .." ("Traitéset transactions.Réflexions
sur l'identification de certains engagements
conventionnels"in Etudesen l'honneurde ~obeco Arro,
Giuffrè,Milan, 1987, vol. 1, p. 401).
4.355 C'estpourquoile ProfesseurSuzanneBASTIDpeut constater
à raison que :
"des annexes ...ont la mêmevaleur juridique que le
traité ..." (Les traités dans la vie internationale,
Economica,Pans, 1985,p. 38).
2" Lafonctionconcrètede la carteT.S.G.S. 2240 dans le Traité
du 11mars 19134.356 La carte T.S.G.S. 2240 contient des indications essentie-les
contenues par elle seule - sur le tracéde la frontière. Ainsi l'articlXVIII, par
exemple, dispose que lafixationde la frontièredans 1'AkwayaféRiver, dans la région
d'Ikang doit êtreopéréeen
"...dividing the MangroveIslands near Ikang in the way
shown onthe aforesaid mapT.S.G.S. 2240, sheet 2."
4.357 L'emploi de la ligne dessinée sur la carte est ainsi
absolument indispensablepour la déterminationdu tracé conventionnelde la frontière
dans ce secteur. C'est pourquoila carte seule incarne pour certains segmentsde la
frontière l'accord desparties contractantsur son tracé.Ainsi sa fonction dépasse-t-
elle largement la simpleillustrationdu texte du traité.
Concernantd'autres segmentsen revanche, le contenu de la
4.358
carte et celui du texte se renforcent cumulativement. C'est le cas pour les articles
wI, XVi, XVII. Commeon n'a pu l'écrire :
"there is no mle to that effect and it would be
unreasonable if there were, for words are as susceptible
to error as maps." (OPPENHEIM'S International Law,
op. ci? .o,l. 1, p. 663).
4.359 Puisqu'une règle généraldee hiérarchieentre le contenu du
texte et celui d'une carte ne peut êtreétablie, il convient surce point de suivre
l'opinion de Sir Gerald FITZMAURICE, qui, dans son opinion individuelle dans
l'Affaire du Templede PréahVihéar expose :
"Cette questiondoit toujours dépendre del'interprétation
du règlement conventionnel, considéré dans son
ensemble, à la lumièredes circonstancesqui ont conduit
à son établissement. (CU, arrêtdu 15juin 1962, Rec.,
1962, p. 65).
4.360 Cependant, comme en l'espèce les indications
cartographiques et textuelles du traitéconcordent entièrement, iln'est pas nécessaire
d'approfondir davantage cette question qui ne revêtd'importance qu'en cas de
divergences. En effet,à ce propos, la Cour permanente de Justiceinternationale a
considérédans un cas semblable, dans son avis consultatif du 6 décembre 1923
concernant la délimitation de la frontière polono-tchécoslovaque (affaire de
Jawonina), que-.-.- TRK delahonlibrc
dumile du11Man1913
- Montagnes
Potea~Iiontiirc
* HERRWNfflOOOROFF1905-1906
NUGENTDEiZNE1912-1913
.
lasalit&
- Roules
5 EKONG
- "...dans le cas présentelles [les cartes] confirmentde
manière singulièrement convaincante les conclusions
tirées desdocumentset de leuranalysejuridique ;et elles
ne trouvent certainement de contradiction dans aucun
texte."(SérieB., no 8, p. 33);
et la Cour, pour la déterminationdu tracéde la frontière,a utilisétant la ligne
dessinée surla carte que le texte conventionnel.
4.361 C'est pourquoi,en résumé,il faut constater que, dans la
mesure où le texte du traitéconcernantle tracéde la frontièrese réfèreexclusivement
au contenu de la carte, celle-ci incarne l'accord des parties contractantes. En
revanche, dansla mesure où aussibien le textedu traitéque la carte contiennentdes
indications sur certains segments de frontière, leurscontenus sont en principe à
consultercumulativement.Commeen l'espèce,des divergencesmatérielles n'existent
nullement,l'établissemend t 'une hiérarchie entres figurationscartographiqueset les
énoncés textueld su traité n'estpasnécessaire.
4.362 La frontière s'étendant depulis Cross Riverjusqu'à la mer
est définiepar les articlXVI à XIX du Traitéanglo-allemand du11mars 1913. Le
contenu de la carte TSGS2240 (Feuilles1 et 2) qui est incorporée dansle traitépar
l'article XXX et à laquellele texte du traitése réfèrà plusieurs reprises, constitue
partie intégrantde la fmationde la frontière.
4.363 Lorsque les versions anglaise et allemande du traité
orthographient certainesdénominations géographiques (montagnfels e,uves, localités)
de manière différente,ceci résulte uniquement des systèmesde translitérationdes
usages linguistiques locaux,utiliséspar les deux Etatset divergeantparfois dans le
détail. A noter par exemple, les décisionsprises par la Commission d'experts
instaurée à l'instigation du Conseil des Colonies (Kolonialrat) par le Ministère
allemand des Affaires étrangères concernan" tL'uniformisationde l'orthographe et
l'orthophonie desnoms géographiques dans les protectorats allemands"(Einheitliche
Schreib- und Sprechweise der geographischen Namen in den deutschen
Schutzgebieten).En effet, après l'agrémend tu Chancelierdu Reich et publication
16 Pourl'illustratdel'exposci-après.oir lecroquisenfacedecettepage.dans le recueil colonialallemand, le respect de ces décisionsdevenait obligatoirepour
l'administration. (V. aussi la décisionX, ibid., p. 40;V. également lesindications
sur la carte anglaisede 1904 inclusedans l'AnnexeM.C. 32).
3.364 Selon l'article XV dudit traité,la ligne-frontière venant du
nord-ouest rejoint la Cross River à un méandre du fleuve à environ 2,5 milles (4
kilomètres)en aval du village dlObokum. A cet endroit, la commission germano-
britanniquedes frontières, dirigéepar leLieutenant allemandHermann DETZNER et
le Capitaine britannique W.V. NUGENT, a plantédébut avril 1913, surla rive nord
(droite) du fleuve le poteau-frontière 114, qui représentele point de démarcationle
plus méridionalde la frontière s'étendant entrYola et la Cross River. Les travaux de
démarcationde cette expédition furentachevés le12 avril 1913. Comme le montre
clairement le télégrammede NUGENT adressé au Sous-Secrétaired'Etat aux
Colonies: "Demarcation completed twelfth April" (Annexe M.C. 87). La mesure
barométriquede la hauteur opérée par le LieutenantDETZNER le 6 avril 1913 à midi
à cet endroit donnaitun résultat arrondide 38 mètresau-dessusdu niveau de la mer
(DETZNER, op. ci? ,p. 332).
4.365 La ligne frontalièrenaturelle convenue depuis ce point de
départ suitd'abord le thalweg de la Cross River vers l'av-len passant d'abord àcôté
de la localitédlObokum située surla rive droite, puis par le "Center of Rapids" -
jusqu'à son confluentavec1'AwaRiver :
"...the boundary follows the thalweg of the Cross River
to its junction with the River Awa (Aua) ..." (Article
XVI du traité).
4.366
Cette rivièresejette immédiatement en aval des rapides dans
la Cross River et est identiqueau cours d'eau nomméparfois fleuve Artekan et parfois
fleuve Nssakpe sur les cartes duXIXèmesiècle(V. par exemplela "Carte BESSER").
Peu de kilomètres en amont de l'embouchure de1' Awa River se trouve, dans la
proximité immédiate dc eelle-ci du côté camerounais,une localitédésignéejadis aussi
bien par le nom dW'Ekok"que par celui de "Nssakpe (Nsakpe)"et qui porte, sur des
travaux cartographiquesmodernes. le plus souventle nom d'"Ekokn .
4.367 Alors que le texte du Protocole de 1906 ne prévoyaitpas
d'établissementexact du tracéde la frontièredans les zones des cours d'eau, le Traité
de 1913 contient désormais à ce propos tout au long de son texte une référenceau
"thalweg", et suit ainsi un principe retenu jadis comme aujourd'hui par le droit coutumier. Cettefvtation généralisée uthalweg"comme frontière étaicependant
déjàexpressémentnotéesur la carte TSGS 2240 feuille1, élaborée au cours de
l'expédition HERRMANNIWOODROFFEpar les commissaires aux frontières
WOODROFFEet HEARSON, commesuit :
"In every case where the boundary follows a river, its
thalwegformstheboundaryline."
4.368 Comme cette carte est devenue septans plus tard partie
1 intégrante duTraité du 11 mars 1913, les contenus textuel et cartographique
concordentdésormaisexpressément àcet égard.
L'AwaRivercourt du sud versle nord. Plus précisémenl,a
4.369
situation géographique tat e la sourceque de l'embouchurede cet affluent gauche
de la Cross River peutêtrelocalisée enle point de 8" 50' et le point de8" 51' de
longitudeest.
4.370 Le tracéde la frontièresuit ensuitele thalweg de ce cours
d'eaujusqu'à sa sourc:
l
"...thence follows thethalwegof the Awa (Aua) River
to a large cairn ofnesat its source." (ArticleXVI du
traité).
4.371 Pour la localisation exacte dela position de ce gros tas de
pierres, le texte du traiténe se limite cependant pasdication "sourcede 1'Awa
River", maispréciseen outresaposition géographiqear l'indicationsuiva:te
"about latitude5' 23' 05"north, longitude8" 50' 11"
east"
1 4.372 Par cette indication, le Traitédu 11 mars 1913reprend la
mesuredéjà faiteen1906parHERRMANNet WOODROFFE:
I
"...to a large cairn of stones on the sourceof the Awa
River whichhasbeenagreed uponby us Lat. 5" 23' 05"
N. Long. 8' 50' 11"E." (Protocoled'avril 1906,no. 1,
alinéa3).
4.373 La mesureexacte donnaità cet endroit selon les "Noteson
the surveyof the Boundary"le résultat suivant:
"5" 23' 04,69"N, 8"50' 10.94"E",qui a ensuite été arrondi à des secondes entières. Ces notes constituent partie
intégrantedu rapport que le Commissaire britannique auxfrontières WOODROFFE
transmit auColonial Once le 7 janvier 1907(AnnexeM.C. 34). Les autres points de
la frontière furent établisde la mêmanière.
4.374 Enfin, l'articlXVI renvoie également pourla fmation de ce
point de démarcationau contenu dela première feuillede la carte T.S.G.S. 2240 qui
figurait parmi les cartes authentifiéesle 6 octobre 19à9Londres et incorporéesau
traitédu 11mars1913par son article XXX.
4.375 La représentationcartographiquemontre la source de 1'Awa
River à une distance d'à peine 500 mètres enligne droite à l'ouest dusommet du
Mont Osu-Awade, 3320 pieds d'altitude. Selon les "Notes" mentionnéescidessus,
l'expéditionWOODROFFEIHERRMANNa égalementcalculél'altitude par rapport
au niveau de la mer de tous les points pertinents de la frontière. C'est le cas en
particulier pour celle de tous les sommets de montagnes,et ceci, plus précisément, en
"Height in Feet above High-water Mark, Calabar". La liste complètede toutes ces
mesures figure dans l'AnnexeM.C. 34, no 1, piècesjointes no 3 et 4.
4.376 Cette mesure donna pour la source de 1'Awa River un
résultatde 2336, qui a aussi étéinscrit sur la carte même"Source of R. Awa 2336
feet".
4.377 Ces indications sont égalementconfirméespar les 6 courbes
de niveau dessinéesentre la source et le sommet, lesquelles, d'après lesinscriptions
de la carte, furent espacéesde 150 "pieds d'altitude"les unes des autres ("Form-lines
150'Interval ").
4.378 Selon l'article XVII, aprèsavoir quittéla frontièrenaturelle
de 1'AwaRiver au point décritci-dessus, la lignede délimitationpasse du nord au sud
par trois sommets de montagne, coupant également uneroute qui lie des villages du
côtéanglais de la frontière au côté allemand.Dans cette section, quatre droites,
tracées commesuit, définissentla frontièreà partir du gros tas de pierres sitàéla
source de 1'AwaRiver et dont la positionest définieparl'articleprécédent,
(1) "in a straight line to the highestpoint of boundary
mountain (3547)"
(2) "thence in a straight line to a pillar on the road
Nkum-Abong" (3) "thence in a straight line to the highest point of
the mountain Ojum Ojum, asshown on map T.S.G.S.
2240, sheet2"
(4) "thencein a straight line to thehighest point of
the mountain Mongum"
4.379 Depuis ce point de repèrejusqu'au thalwegde 1'Akpakom
River trois droites supplémentairessont tracées, partant dela montagne Mongum
d'abord
(5) "in a straight line to a pillar on the road from
Ekongdup-Abongabout 1 mile (1,6kilometres) north-
Westof Ekongdup(Ekongdub)"
(6) "thence to a pillar on the bank of the River
Akpakorum about 213rds of a mile (1 kilometres)
downstream from the point wherethe Ekonako-Ekong
road crossestheAkpakorum"
(7) "and thenceby the shortestline to the thalwegof
the River Akpakorum, knownin its lowerreaches as the
Akwayafé (Akwayafé)"
4.380 Comme la carte du traité,T.S.G.S. 2240 l'indique sur sa
feuille2, la ligne frontière se poursuitdepuisl'extrde (2) (RouteAbong-Nkuru)
sans modification de sa directionjusqu'au Mont OjumOjum (extrémité de (3)), de
sorte que toute la frontière entrela "BoundaryMountain"et le Mont Ojum Ojum se
défit en fait nonpas par deux, mais paruneseule ligne.
4.381 Aprèsavoir suivi ces droites, la frontièrerejointouveau
un coursd'eau, qui marquela frontièrejusqu'àla mer.
4.382 Déjà le protocole HERRMANNfWOODROFFEde 1906
constataien ce qui concernele sommet qui représentele point fuialde la première
droite (d'une longueur d'environ6,5 kilomètres),queson "narne"est "unknown".En
1913également, aucunnom n'étaitencoreconnu à cettemontagne,en tout cas en ce
quiconcernelesparties contractantes,etelle aétsimplementdésigné pear le textedu
traité comme "boundary mountain". Il s'agit d'unemontagne, dont la position
géographiquese sinieselonla mesured'HERRMANNet WOODROFFEfméedans le
protocole d'avril 1906à
"Lat.5" 19'33"N. et Long. 8'49' 37"E."
I4.383 Si le texte du Traitédu 11 mars 1913renonce à reprendre
ces mesures, il localise cependant laditemontagne d'une façon aussi précisepar
l'indicationde sa hauteur (3547pieds) telle qu'elleest fucéesur la carte de référence
T.S.G.S. 2240, feuille2. Les coordonnées de cette montagne correspondent selonla
description de lacartedu protocoleHERRMANNIWOODROFFEde 1906 qui fait
partie intégrantedu trait- dans la mesure où l'échellepermet de le vérifie- à la
positiondétérminé par HERRMANNet WOODROFFE.
4.384 L'extrémité de la deuxièmedroite, longue d'environ 2,s
kilomètres,peut êtreégalement localisée sanambiguité :la route citée dansle texte
du traitépart de la localité camerounaiee Nkuru, situéepour sa part à environ six
kilomètresde la frontière,et se poursuit en directiondu nord-estjusqu'à la localité
nigérianed'Abong,qui à son tour se trouveàenviron8,5 kilomètresde la frontière.
Malgréles orthographes enpartie divergentes(Abungau lieu de Abonget Ngum au
lieu de Nkuru. V. par exemplela carte du Nigeria à l'échellede 1:500.000, feuille
15, 3èmeed. 1953 ; Annexe M.C. 383), les villagesliéspar la routeà laquelle se
réfère le traise laissent identifiersansaucundoute.
4.385 De même, la position du poteau-frontière plantsur cette
route par HERRMANNet WOODROFFE ne peut fairede doute: étantdonnéque -
comme cela a déjàétémentionné - la ligne droite de la frontière venant de la
Boundary Mountain est tracée sans changement de direction jusqu'au MontOjum
Ojum, la position exacte de ce poteau-frontière à localiserau point d'intersection
entre cette droite etla routeAbon-Nguru.
4.386 Les extrémitésdes deux droites suivantes sont encore
constituées pardes sommetsde montagne, quicette fois-ci portent des noms,ceux
d'Ojum Ojum et de Mongum. Pour déterminer laposition géographiquede ces
montagnes,HERRMANNet WOODROFFEavaient également déjàpris des mesures,
dont le résultat étle suivant:
Lat. 5" 17' 04" N. und Long. 8" 48' 40" E. (Ojum
Ojum)
Lat. 5" 15'54" N. und Long. 8" 48' 44" E. (Mongum)
4.387 Ici encore le texte du Traitédu 11 mars 1913 renonce à
indiquer les coordonnées des montagnes nommées, parq ce'elles pouvaient être
identifiéesavec précisionen se référantà la carte en Annexe M.C.383 (T.S.G.S.
2240 feuille2). 4.388 De plus, les informations supplémentaires suivantes
ressortent de la carte du traitésur le tracéde la frontièredans c: depuis le
poteau-frontière plantésur la route Abong-Ngurujusqu'au Mont Ojum-Ojurn,haut de
3175pieds, on compteenviron 2,2 kilomètres.Ce derniàson tour esàun peu plus
de 2 kilomètresau nord du Mont Mongum, haut de 2721 pieds. Le terrain entre les
deux montagnes, coupé par la frontière, descend jusqu'à environ 1300 pieds
d'altitude.
4.389 Les extrémités desdeux dernières droites sont fméespar
référenceà deux des poteaux plantéspar l'expéditionHERRMANN/WOODROFFE
en 1906. Il ressort de la carte T.S.G.S. 2240, feuille 2 que la première des deux
droites est longue d'environ kilomètres(Mont Mongum -route EkongdupIAbong)
1 et la deuxième, dont l'extrémiest constituée parle bord de 1'Akpakom River,
d'environ cinq kilomètres.
l
4.390 La descriptionde leur position exacte chaque fois faite,
l dans le texte de l'accord, par référenceosition précise.
Il s'en suit que le premier poteau-frontière se situnà
4.391
endroit précisde la route Ekongdup-Abong(à 1,6 kilomètresau nord-ouest de la
localité camerounaised'Ekongdup), et la deuxièmeau contraire àsune distance
d'un kilomètreen aval sur la rive du fleuve, là où la route Ekonako-Ekong franchit
1'Akpakorum.Puisque la ligne frontièrevenant du nord se rapproche ici de ce fleuve
qui court vers le sud-ouest, et qu'elle doit ensuite êten ligne droite vers le
thalweg de l'Akpakom, ce dernier poteau-frontière doitnécesssairementse trouver
1 sur la rive droite du fleuve.
4.392 Partant du point qui vient d'être di,ù la frontièrevenant
du nord rejoint le thalweg deAkpakonun River, l'article XVIII fme finalement le
I
tracéde la frontière qui suitdésormaisle seul thalweg de Akpakorum(Akwayafé),de
la manière suivan:e
' "Thence it follows the thalweg of the Akpakorum
(Akwayafé)River, dividiig the Mangrove Islands near
Ikang in the way shown on the aforesaid mapT.S.G.S.
2240, sheet 2. It then follows the thalweg of the
Akwayaféas far as a straight line joining Bakasi point
and Kingpoint."
Comme on le sait, les cours d'eau servantde frontièredans
4.393
ce secteur ne forment qu'un seul et mêmefleuve qui s'appelleAkpakorum en amontet Akwayaféen aval. La "Carte BESSER", établit, à partir des images du
Premierleutnantvon BESSERde l'année1895,la lignelinguistiqueun peu ausud de
l'affluentde l'ikpanRive:
"Depuis [cAkpa-iyefe ou Ifiang." (Traduction de la
République du Cameroun). l7
4.394 Les atlas plus modernes, en revanche, tendeàtfixer cette
ligne un peuplusau nord, environdonc àl'affluent de1'EbeRiver.
4.395 La seule fonctionde la disposition suivante(articleXIX) est
de conserver le thalwegcommelignefrontière,même en cas de changementde lit du
fleuve par rapport aux îles situées dans le cours d'eau et dont l'appartenance
temtonale selon la carte en annexe était partagée entrlee Nigeria et le Cameroun.
Cette dispositionillustreainsil'intention despartiescontractantesde garantiren toutes
circonstances,par la délimitationde la frontière, queles deux parties jouissentde la
libre navigationsur 1'Akwayafé.
"Shouldthe thalweg of the Lower Akwayafé,upstream
from the line Bakasi Point - King Point, change its
position in such a way as to affect the relative positions
of the thalweg and the Mangrove Islands, a new
adjustmentof the boundaryshallbe made, on the basisof
the new positions, as determinedby a map to be made
for thepurpose."
Un tel changement du thalweg de 1'Akwayafé n'a pas eu lieu jusqu'àaujourd'hui,de
sorte qu'une adaptationde la nature de la frontièredans le sens de cette disposition
n'a pas éténécessaire.
4.396 L'articlXX traite également dela possibilitéd'un futur
changementdu lit de 1'Akwayafé en aval et,à ce propos, nelaisse pas le moindre
doute, qu'un changement du tracé de la frontière tel qu'il étaitfmé
conventionnellement dansl'article XVIII, ne puisse intervenir en aucun cas, sauf
l'exceptionprévue àl'articleXIX.
17
"VonhieranwirdderStromvon den Eingeborenkpa-iyefoderIfianggenannt" "Shouldthe lower courseof the Akwayaféso change its
mouth as to transfer it to the Rio del Rey, it is agreed
that the area now known as the Bakasi Peninsula shall
stillremainGennan territory. The sarneconditionapplies
to anyportionof temtoxynowagreed to asbeingBritish,
whichmaybe cut off in a similarway."
Cette disposition confirmeà nouveau l'appartenancedéfinitivede la péninsulede
Bakassiau Cameroun.(Surl'importancede cettedisposition,v. supra,par. 2.88).
l
4.397 En ce qui concerne l'extrémitsud de la lignefrontière, une
précision par rapportau protocole HERRMANN/WOODROFFEd'avril 1906 a été
insérée dans I'article XVIIà l'instancede l'administration dela marine allemande,
l
commec'étaitdéjàle cas dansl'article correspondandt u Traitédu6 octobre 1909.Ce
protocole avait encoredans son article 1 défini lepoint où la frontière terrestre se
transformeen fronti5remaritime commesuit:
1
"Theboundary linebeginsat the mouthof the Akwayafé
(AkpaIyfee)Riverat themiddlepointof the linejoining
KingPoint and BakasiPoint."
4.398 Par la formule nouvelle del'article XVIII (phrase 2), il est
clairement établi quepour déterminerce point de la frontièreon n'a passongé à
couperen deux partieségalesla droite entreces deuxpoints, maisqu'àcet endroit la
frontière devait suivrele thalwegde 1'Akwayafé:
I
"It then follows the thalwegof the Akwayaféasfar ara
straight linejoining Bakasi point and King Point."
(Souligné palra République du Cameroun).
4.399 Dans une note interne d'août 1904, le Gouvernement
britannique avait déjàaffirmé,au sujet de cette question de terminologie, et par
référence aux négociationsen courssurla frontière,que:
governentg aon the subject of this boundary, it isn
preferablethat the word "thalweg"shouldbe used as the
equivalent of the same word used in Baron von
RICHTHOFEN'Snote. The expression"mid-charnel"is
liable to be confused with the "mediumfilum aquae",
which is in manycasesquitedistinctfromthe "thalweg".
(AnnexeM.C. 31).
1 4.400 La continuationde cette lignejusqu'à la mer est régiepar les
articlesXXIet XXII, et sera discutée dasa sectionsuivante.4.401 Le Traitédu 11mars 1913comprendpar là une délimitation
complètede la frontière s'étendant depuis la Cross River jusqu'à la mer et qui,
comme cela aété démontrén ,e laisseplaneraucundoute sur son tracé.
4.402 Il incombait cependant a l'expédition
HERRMANNIWOODROFFE non seulement d'élaborer une proposition de
délimitationde la future frontière, mais aussi de s'occuper de la démarcationdu
tronçon de frontière dela mer à la CrossRive- par anticipation,en quelquesorteà
un traità venir entre les gouvernementsintéressés.e tracéde la frontièretel qu'il a
étéétabliet concrétisé par des poteaux-frontièa re-delà de la Cross River a été
intégrédans les travaux de démarcationpar l'expéditiongermano-britanniqueYola-
Cross River de 191211913.L'extrémité nord fut constitupar le poteau-frontièreNo.
7 "On the RoadAbo-Ekoessem" .
4.403 Il ressort d'unenote au bas dela premièrementiontextuelle
d'untel poteau-frontièreaupoint 1du Protocoleque
"The pillars markhg the boundary are of cement,
pyramidal in shape, with a base of about one metre
squareanda littleover onemetre in height."
4.404 Le commissaireallemandde l'expéditionYola-CrossRiver,
DETZNER, rapportequelquesannées plus tard en 1913,àpropos despoteaux plantés
pour marquer la frontièrepar l'expéditiode HERRMANNet de WOODROFFE en
1906, qu'ils ont été "bienconservéset faciles à tro~ver"'~ (traduction par la
République du Cameroun) .
4.405 De même,les cartes établies à une date plus récente, telles
que la "Nigeria. Sheet 15Third Edition 1953, Publishedby Survey Dept. Lagos,
Nigeria (1000164918-53)"(Annexe M.C. 383)situent non seulement les poteaux-
frontière de l'expéditionNUGENTIDETZNERen 191211913, maiségalementla
position des poteaux-frontièredéjà plantés en 190511906par HERRMANN et
WOODROFFE entrela CrossRiver et la mer. En l'espèce,ceux-cisont marqués par
quatre triangles noirs distinctement reconnaissables. Ceisndicationssont confi~rnées
par le CapitaineWOODROFFE, qui dans son "Report on Anglo-GermanBoundary
Commission, 1905-1906, betweenSouthem Nigeria and Kamerunsu parle de
l'établissemendt e quatrepoteaux-frontière, etplus précisément de cairn of Stones
18 "nochwohlerhaltenund leichtauffindba(Op.rit.p. 329). at the source of the Awa, and cementpillars on the Akpakom river, the Ekongdup-
Abong road, and the Abong-Nkururoad." (AnnexeM.C. 34).
4.406 En effet, l'Allemagne comme la Grande-Bretagne
considéraientla tâche de démarcationdecette sectionde frontièrecommeachevéepar
le travail de HERRMANNIWOODROFFE.C'est pourquoi la décisiondu 13juillet
1907, qui nomme le Major G.F.A. WHITLOCK Commissaire britannique aux
frontières,écritainsi l'ampleurspatialedes travauàeffectuer:
l
"...the Anglo-Germanfrontier from the neighbourhood
of Yola to the point near theCross River upto whichthe
boundary from the sea has already been demarcated."
(Annexe M.C. 44. V. déjà les deux lettres dans le
documentCO 520114925du 24 mai 1907 ;AnnexeM.C.
42).
4.407 En confirmant expressémentcette position, l'expédition
frontière de l'année190711908 -Major G.F.A. WHITLOCK (Grande-Bretagne)et
Major HAERINGpuis OberleutnantvonSTEPHANI(Allemagne) -avait l'instruction
formelle de nepas modifierle tracéde frontière'HERRMANNet WOODROFFE :
"That portion of the line which has alreadybeen marked
by the Commissioner of 1905106is not to bealtered."
(Yola - Cross - River Boundary : TechnicalInstructions
for Major G.F.A. WHITLOCK, RoyalEngineers. Sur le
travail de la Commission v. la relatiotrèsdétailléede
WHITLOCK, The Yola-Cross River Boundary
Commission, Southern Nigeria, The Geomauhical
Journal XXXVI, July to December 1910, pp. 426s ;
Annexe M.C. 61).
4.408 Il est donc purement logiqueque l'indication suivante surla
section de frontière dont il est questionse trouve dans la huitièmecolonne de la
douzième planched'un tableau d'ensemble queSir E.HERTSLETa rédigé en 1909 à
propos de la situation aux frontières despossessions coloniales britanniques en
Afrique (Mau of Africa bv Treaty, op. ci? v,ol. 1, xlvii: "Marked on Ground:
I 1906".
1 4.409 Cene indication aétécorroboréepar la carte en annexe qui
désignecette sectionde frontièrede"surveyed"par un trait rouge ininterrompu (surle
1 caractère quasi-officielde cette publication et de la carte y contenusupra,par.
4.323).4.410 La raison pour laquellela démarcationde la frontière se
limite à ce tronçon ressort clairement d'une noteen date du ler juillet 1912 du
Directeurbritannique des Opérationsmilitaireqs,ui affir:e
".. that the portionof the boundaryto be demarcatedis
that between Yola and the Cross River only, as the
portionbetweenthe Cross River and the Seawas rnarked
with boundary pillars by Captain WOODROFFE's
Commissionin 1905-1906." (Annexe M.C. 73).
4.411 Conformément à cette position, le BritisForeig n ffice
constata égalementdans une note du 16 juillet 1912 adressée à l'ambassadeur
allemand àLondres,le BaronMarschallvonBIEBERSTEIN,que:
"It is of course understoodthat the boundary to be
demarcated is that between Yola andthe Cross River
only, as theportionbetween theCrossRiver and the Sea
was marked with boundary pillars by the Commission
whichoperatedin 1905-06." (AnnexeM.C. 76).
4.412 Dans sa réponsedu 16 aoCit1912, l'ambassade allemande
confirmace pointde vueau nomdu gouvernementallemand :
"The Imperia1Govemmentagree with the view of the
British Govemment that the delimitation should only
extend to the sectionfrom Yola to the Cross River, as
the southem section is already furnished with posts."
(AnnexeM.C. 77).
4.413 Le recueil colonial allemands'y réfère aussi lorsqu'il
affirme, le ler mai 1913, après avoirmentionnéla conclusion des travaux de la
commissionDETZNERINUGENTdans lesecteurYola -Cross River,que :
"Tant le segment Yola - Lac Tchad que le segment
Rapides de la Cross River - Côte avaient déjàété
démarqués auparavant. ". Deutsches Kolonialblatt 24
(1913), p. 404 (Annexe M.C. 91) (traduction de la
République du~arneroun)'~
4.414 Par ailleurs, le fait que sur l'ensemblede ce segment seuls
quatre repérages artificielsaient été établis,'empêchepas que la frontière soit
suffisammentdémarquée.
19
"Die Ahsteckungder StredenYola-Tschadsee und Gross-Schnellen-Küste ishtereits früher
durchgefiümworden".4.415 Ence sens,le Gouvernementbritannique, dans une notedu 2
décembre1908 adresséeau Gouvernementallemand,et se référan t l'établissement
du segmentde frontièreYola -Cross River,constatatrèsexplicitementque:
"The selection of natural features such as streams and
rivershas manyadvantages, notthe leastof whichis that
far fewer boundarypillars arerequired." (Lettre de Sir
E. GOSCHENadressé àvon SCHOEN ;AnnexeM.C.
51).
4.416 DemêmeJ ,ONESsouligneàjuste titre queseules les
"Boundaries not naturally marked are usually made
visibleby theerectionof Stones,signs, beacons, pillars,
or monuments."(Handbook on Boundm-Making,
Johnson Reprint,NewYorkILondon,1971,p. 210).
4.417 Commeon l'adéjà exposél,e tronçonde frontièredont il est
question ici est également,dans sa majeure partie, naturelet forméde trois cours
d'eau (la Cross River, 1'AwaRiver au nord et 1'AlrpakodAkwayafé River au sud)
ainsique de trois sommets montagneux dans sapartiemédiane.EntrelesrivièresAwa
et Akpakorum, auxseuls endroitsoù, par exception,le repéragede la frontièren'était
pas naturel, une démarcation étantécessairet fut établiepar des bornes-frontièet
autres dispositifs semblables.En conséquence,aucun besoin d'un abornement plus
completne s'estfait sentir. Telleétaitégalemenl'opiniondes deux commissairesaux
frontièresHERRMANNet WOODROFFE,qui étaient d'accord su le faitque,
"toaccuratelydelimitfust thoseportionsof the boundary
that are open to discussion,viz. from Ekong to the
source of the Awa River ...postponingthe Akpakorum
and Awa River until afterwards..as the delimitationof
theserivers willbe entirelya matterof surve.." (Note
de WOODROFFEau ColoniW al ce de Londresdu 20
j29 mars 1906 ;AnnexeM.C. 35).prit acteen l'approuvantle
4.418 En se référant enfiaussiexpressément dans le Traitédu 11
mars 1913 aux poteaux-frontièreplantéspar HERRMANNet WOODROFFElors de
leur expéditionde 1906, les parties elles-mêmesxprimentde façon catégorique leur
acceptationde cette démarcationE. llesconfient également la constatationdéjà faite
sousle chiffre 3 duProtocole d'avril1906selonlaquelle "The pillas and other objects [c'est-à-direconcrètement
le gros tas de pierresla sourcede 1'AwaRiver] put up
by the Commissionersto mark the boundaryare to form
the political boundary, even if later, through more
accurate determination of the positions, their
geographical positionsare altered." (AnnM.C. 34).
4.419 L'expéditionHERRMANNIWOODROFFEen 1906 a ainsi
également opéru ne démarcation détailléde la sectionde frontière entrela meret la
Cross River. Pour ces raisons, l'artXXWI, quitraite de la démarcatifuturede
la frontière etqui correspond aussi littéralemànla disposition correspondantedu
traitédu 6 octobre 1909, ne se réfère,correctementinterprété, qtronçonentre la
Cross River et Yola. Cette disposition constituaitainsi la base juridique de
l'expédition de démarcation DETZNERINUGENT durant l'hiver 191211913,
expédition dépêché ee,quelquesorte, d'une façonanticipée, par lesgouvernements
intéressédsans l'attented'une proche conclusdu traité.Par ailleurs, au moment de
la conclusiondu Traitédu 11 mars 1913, la dispositiongardait égalementtout son
sens, car siàce moment-là lestravaux de démarcation dansce tronçon étaientbien
avancés,ils n'étaientcependant pasterminés.
8 4. Les "effectivités" camerounaises dans la oéninsule de
Bakassi
A. - Remarques générales
4.420 Bakassi est incontestablement la partie du territoire
camerounaisoù la République Fédérad lu Nigeria prétendtrouver dans les origines
ethniquesd'une partiede la population,la preuve de l'appartenancede la péninsàle
son territoire. En effet comme le Cameroun l'a rappelé(v. supra chapitre 1, pars.
1.65 et 1.73) le gouvernementnigérianallègue,aussi bien dans le documentofficiel
qu'il a adresséau ForeignOficebritanniqueainsiqu'aux instances diplomatiques des
Etats membres du Commonwealth.Que dans l'exposéde son représentant devant
l'Organe Centralpour la préventionet le règlementdes différends de l'O.U.A.,que
la populationde Bakassiest composéeà 90%de Nigérians d'origineEfik et Ibiobo, et
que la péninsule aétet demeure sousl'autoritéde 1'Obonde Calabar. PRESQU'IL DEEBAKASSI
+++++Froninternationale
O Sous-Pdertun4.221 Ces allégationsne résistent pasen droit, notamment au
principe de l'utipossidetisjuris, comme leCamerounl'a démontré amplemen dtans
ce Mémoire.De plus, elles sont démenties par les faits, dans lamesure oùce n'est
pas l'importance d'unepopulation ethnique donnée sur utnemtoire quelconquequi
détermine la souverainetésur ce temtoire, mais l'exercice effectif de cette
souveraineté.
4.422 11convient du reste de souligner, d'abord, quela zone des
pêcheriesoù l'on trouve une fortepopulation étrangère estune zone marécageuse
dominée par les mangroves, d'accès difficile, e htabitable une partie de l'année
seulement ;par conséquent,les pêcheries y sont essentiellemepnrtécaires,la pêche
qui y est l'activité principaledes populations étant saisonnière. Ensuite, les
populations étrangèresde Bakassi ne sont pas seulementd'origine nigérian; on y
trouve aussi des Béninois, des Equato-guinéens, de shanéenset mêmedes
populationsnon côtières commeles Tchadiens. Enfin on,estimeà environ 3 millions
(soit un quart de la population camerounaise !)le nombre de Nigérians résidant
légalementou illégalementau Cameroun. Leur concentrationest extrêmement
importante dans certaines grandesvilles et autres localités camerounaisest,elles que
Bamenda, Kumba, Douala, Yaoundéetc., où ils représentent un pourcentage assez
élevé de la population. Si la présence,mêmenombreuse, de populationsétrangères
devait signifier souverainetéde leur pays d'origine sur le temtoire d'accueil, alors
c'estpresquela totalité du Camerounqu'ilfaudraitattribuerau Nigeria.
4.423 Cela n'est concevableni en droitnid'aucun autre point de
vue, et le Cameroun, terre d'accueil,ne saurait accepter desouffririnjustementd'une
politique d'ouverture aux étrangecsonformeàla tradition africainede fraternité aussi
bien qu'aux principesde bon voisinage, des relations amicalest de la coopération
entre les Etats promus par l'AssembléGénérale deN s ations Uniesnotammentdans
sa résolutio2625 (XXV).
4.424 Au demeurant, si Bakassiétait untemtoire nigérian etsi les
autoritésdu Nigeria étaient convaincues de son appartenance à leur pays, elles
n'auraient pas besoin de délivrer despasseports aux ressortissants nigériqsui y
séjournentpériodiquemenp t our se livràlapêche (AnnexeM.C. 249).
4.425 Il faut rappelerquebien avantl'accession duCameroun etdu
Nigeria à l'indépendanceen 1960, la Gazetterof Place Nameson Mau of Nigeria de
1949,établie parle Director of SurveysNigeria et diffusée eautres par le CrownAgentsfor the Coloniesà Londres,plaçait, sansobservationparticulière,Bakassidans
le "Cameroons"(AnnexeM.C. 195,p.40).
4.426 Plus récemment, lors du débat qu'a déchaîndaens la presse
et l'opinion nigériane,en 1994, l'invasion de Bakassi par les forces arméesdu
Nigeria, un Professeur de cartographie de l'université de Lagos, M. Jonathan
EKPENYONG, originaire lui-mêmed'Akwa Ibon, Etat du sud-est du Nigeria
limitrophe de Bakassi, a déclaré que la confusion linguistique ne fait pas de la
péninsuleun temtoire nigérian.Dans cette déclaration dont n passage est cité par
l'hebdomadairenigérian AfricanConcord du7 mars 1994,il affme :
"Both the Efikand Ibiobopeopleare fishermenand as a
result, they will alawayssettlein variousplaces. After a
long time, they may want to.lay claim to suchplaces but
that does not confer legitimacyon them. Fishing in a
particulartemtory does not giveownership rightsto the
fishermen" (p.21)
Selon lui, dit lejournal,
"Bakassiis clearlyin Camerooniantemtory"
En déployanston armée àJabane et dans d'autreslocalitésde
4.427
la péninsule,le Nigeriaprétend protéger ses ressortissants soit-ntnacéspar les
gendarmes camerounais.Autrementdit, l'invasionnigérianedevrait êtreconsidérée
comme un acte d'intervention -sommetoute illégal auregard du droit international
contemporain - en temtoire étranger,et non pas comme un acte de souverainetéde
1'Etat du Nigeria sur son propre temtoire. Ce disant, les autoritésnigérianes
admettent elles-mêmesi,mplicitement,agir en temtoire étranger, et,s'agissantde
Bakassi.nécessairemene tn temtoire camerounais.
4.428 A Bakassi, commeailleurs, la République duCameroun
exerce sa souverainetde façoncontinue, et l'exercice decette souverainen'a été,
soit perturbée, soitinterrompue dans certaines parties de la péninsuleque depuis
l'invasion et l'occupationde cette partie du temtoire camerounaispar les troupes
nigérianes.
4.429 Les élément se preuve des "effectivités" camerounaidans
cette zone sont nombreuses et variées, portant aussi bien sur la présence
administrativede 1'Etatcamerounaisque sur l'existencede certains services publics,ainsi que l'exercice de certaines fonctions régaliennes de 1'Etat telles que
l'administrationde la Justice et la collectede l'impôt.
B.- Structures administrativeset actes d'administration
4.430 Bakassi se situe dans le départementdu Ndian (chef-lieu:
Mudemba), dans la province du Sud-ouest Cameroun. Le ressort territorial dce
département a étéfucépar le décretdu 30 août 1968 qui l'a créé,et les trois
arrondissements qui le composaient alors avaient étédéfuiis par les décrets
no691DF1581du 29 décembre 1969 pour Ekondo Titi et Mudemba, et le décret
n005/DF/217 du 24 mai 1965 pour Bamuso. Depuis, un district a été cre Jabane,
transféré ensuiteà Idabato, puis Issangele, Kombo Itindi et Idabato ont été ériàs
leur tour en arrondissements.
4.431 Le Dictionnairedes villages de la NdianNillage Dictionary
of Ndian Division publié par l'organisme français de la recherche outre-mer,
l'O.R.S.T.O.M., en juin 1973 (Annexe M.C. 244) a établiune liste précise et
détailléedes villages relevant de chacunde ces arrondissements.
4.432 Comme partout ailleurs dans le pays, l'Etat camerounais
nomme et mute régulièrement des autoritéd sans ces circonscriptions administratives.
C'est ce qu'illustrent les décretsno91/113 du 29 novembre 1991, 921284 du 4
septembre 1992, 921317du 25 septembre 1992,931730du 9 décembre1993nommant
des Sous-préfets respectivement-et entre autres - à Issangele et Kombo Itindi,
Idabato, Isangele, Bamuso ; et les arrêtés n0143 du29 novembre 1991, 192 du 4
septembre 1992 et 128du 9 décembre 1993nommantdes adjoints d'arrondissement,
respectivement - et entre autre- à Mudemba, Issangeleet Bamuso (Annexe M.C.
314). Pour Idabato par exemple, 8 chefs dedistrictet 2 sous-préfetsy ontnommés
de 1973 à 1992.
4.433 L'exercice de la souveraineté camerounaisedans ces zones
est effective et est largement reconnue aussi bien par les communautésd'origine
nigériane résidant au Cameroun que par les autorités nigérianes étatiques et
traditionnelles, notamment celles des zones frontalières avec le Cameroun. Le
Visitor's Book, District Office d'Idabato datédu ler juillet 1976 signale des visites
fréquentes des responsablesdes différentsservicespublics camerounaiset quelquefoisaussi des autorités consulaires nigérianesdans cette circonscnption (Annexe M.C.
265).
4.434 La reconnaissanceet le respect des autorités administratives
camerounaises ayant juridiction sur Bakassi, par les populations d'origine nigériane
séjournantdans la péninsule,sont attestéspar une abondantedocumentation faite de
correspondances et de demandes d'agrémentde certaines activités adressées par ces
populations aux autoritéscamerounaises compétentes. Il en est ainsi notamment des
nombreuses demandes adressées au chef de district (aujourd'hui Sous-préfet)
d'Idabato en vue d'obtenir l'autorisation de faire la pêcheà moteur dans son
arrondissement, (ancien district) de mener des activités de transport dans la
circonscnption, notammententreJabaneet Idabato.
4.435 De même, leschefs des communautés implantées dans la
péninsuleet sur lesquels les autoritésadministrativescamerounaises s'appuient pour
administrer la zone, écriventfréquemmentauxdites autorités,soit pour solliciter leur
bienveillance ou une intervention, en reconnaissant dans tous les cas leur autorité.
Ainsi, par exemple, dans un memorandum de 1993 adresséau Chef de District
d'Idabato et intitulé "Denialoffalse allegaiion of misconductagainst indigenes of
OkopediFishingPon", trois chefs dece district écrivent :
"Before we proceed to state our case permit us to state
the followingpromises, namely:
Fust, we want to thank the Cameroon authority for the
cooperationgiven us tocany on our fishingand business
generallyat Idabato.
Second, indigenes of Okopedi Fishing port, Idabato
hereby pledge to support the Cameroon authority to
maintainplace and order in Idabato".
4.436 Sollicitant une pose fiscale de l'autorité administrative,la
CommunautéOkobo écrivaitle 2 décembre1965au Sous-préfetde Bakolle, en ces
termes:
"Su, we are eamestly beg you to stop [the tax payment]
for the period of two or three months so that we be able
to makefishing and finishour tax."
4.437 Une note d'informationpar laquelle les services de police de
Mbongo rendent comptede la célébration du 22èmeanniversairede l'indépendancedu
Nigeria par les Nigériansde cette région relèveque dans son allocution prononcéedevant quelque 3000 de ses compatriotes, le Secrétairedu Nigenan Unionde Mbonge
a parlé, entre autres:
"of cordial relations existing between Ourtwo countries
and implored Nigerian citizens resident here to be loyal
to us their hosts and be law abiding".
4.438 Dans le mêmeordre d'idées, il y a lieu de mentionner la
lettre du 5 juillet 1966 adressée par la communautéIne Udo au Sous-Préfetde
Bamusooù s'exprimentà la fois les doléances,les excuseset la volontéde soumission
à l'autorité. Aprèla formule de politessed'usage, la lettre se poursuit:
"(1) If something happens to council does not tell us in
time or to show us away [sic]to do it.
(2) Our vowing here isonly for fishing. AboutOurcause
people we want you to help us. That tax should not
trouble Our canoe boys. About the running is not Our
people. We take them from them [sic] parent to come
and staywith us for a short timeand go back.
(3) We al1 are Nigeria [sic] coming to stay here in
Cameroon."
4.439 Les autorités administratives de Bakassi sont également
reconnues et respectéespar les autoritésdu Nigeria saufbien évidemmentpendantles
périodes d'hostilitde cepays à l'égarddu Cameroun. La visitedu Consul Générad l u
Nigeria dans la péninsuleen 1981 est illustrativà cet égard. Pour s'y rendre, le
Consul Général demanda formellement l'autorisationdes autoritéscamerounaises par
une lettre n°CBA/C.19 du 29 décembre 1981,et reçut une réponsefavorable desdites
autoritésle 31 décembre suivant.Seloncette réponse,
"2- The itinerary be extended to include the towns of
Jabane, KomboAbdimo and Archibong" .
4.440 Après la visite, leConsul Général adressle 12 février 1982
aux autoritéscamerounaises unelettre de remerciementsqui débutepar:
"1wishto register my personalappreciationand gratitude
for the empathy you showed towardsme during Ourjoint
tour of Ndian Division" (AnnexeM.C. 265).
4.441 Est éclairanteégalement l'interventiofaite par His Highness
Etubon Kelvin Ibok ASUKWO, chef de la communautéOkobo dans 1'Etatd'Akwa
Ibom au Nigeria, auprèsdu Sous-préfetd'Idabatoen faveur despêcheurs nigériand se
son clan installà IdabatoFishingPort. Sa lettre datéedu 26 avril 1991 exhortant leSous-préfetà régler aumieuxune situation résultantd'un incendie survenu danscette
pêcheriese termine en ces termes:
"We solicit your kind CO-operation. Thankds very
immensely" .
4.442 Des collectivitéslocales municipales existentdans la zone de
Bakassi, et le décretdu 20 septembre 1982fixant le nombre de conseillersmunicipaux
par commune en attribuait également aux communesmrales de Bamuso(25), Ekondo
Titi(25), Mudemba(20) et Issangele(15). (AnnexeM.C. 266).
4.443 Lors du dernier recensement généralde la population
camerounaise DEMO 87, les opérationsde recensement avaientétémenéesde façon
systématique dansle département duNdian, commed'ailleurs dans tout le reste du
pays. Les résultatsde ce recensement affichaient une populationtotale de 87.435
habitants pour ce département,dont 17.558 pour Bamuso, 38.246 pour Ekondo Titi,
4.517 pour Issangele, 3.761 pour Kornbo-Itindi, 796 pour Kombo Abedimo, 3.250
pour Idabato et 19.307pour Mudemba.
C. - Servicesdepolicedela gendarmerie et de la douane
4.444 Il en existe, conformémentau régime dudéploiement des
services publics, et plus précisément des servicesde sécuritésur le territoire
camerounais, au chef-lieu du département (Mudemba) et aux chef-lieux des
arrondissements (Bamuso, Idabato, Ekondo Titi, Mundemba, Kombo Itindi). Au
niveau des districts, comme celui dlIdabato, il existe seulement une unité de
gendarmerie.
4.445 Quant aux services de douane, les unitésopérant dans la
péninsule sontbasées àMbongue et Idenau où il existe des bureaux secondaires de
douane, età Bamusooù il existeun postede douane
D. - Administration fiscale
Le pouvoir de leverl'impôt a été detout temps considéré
4.446
comme une des principales manifestationsde la souveraineté sur un temtoire. IIconstitue en l'occurrence une despreuves évidentdes "effectivités" camerounaises
dans la péninsulede Bakassi.
4.447 Les populationsde la péninsule, qu'elles soiedte souche
camerounaiseou d'origine nigériane, s'acquittedte leurs impôtset patentes auprès
des autorités camerounaises, ainsique l'attestent des titres de patentes établis
Idabato par l'inspecteur desimpôtsde Mundemba, pourdes personnes domiciliée s
Daimond1 et exerçant des activitésde pêche.Au besoin, ils solliciteront,commeon
l'avu (v.supra 4.17), la compréhensiode l'autoritéadministrativepour différer le
paiementde l'impôtou accorderune pausefiscale.
4.448 Le rôle des impôts collectés dans diverses pêcheries,
notamment celles d'Idabato1, IdabatII,Jabane1,Jabane II,Naurnsi Wan, Komboa
Mpungu, Forisane,Komboa Ngonja, Kombo a Monjo,Komboa Jane, Ine Akarika,
Kombo a Kiase, Kombo Abediio, Kombo a Billa, s'élevaient,pour l'exercice
budgétaire1980-1982 à 9.450.000 FCFA (AnnexeM.C. 255).
4.449 Les autoritésadministrativess'appuientpour la collecte de
ces impôts sur les chefs des communautés concernées.S'agissanten particulier de
l'impôt forfaitaire (par capitati, es ticketsde ces impôts sontremis aux chefsen
questionafm qu'ils les vendentaux contribuables. Ilsdoivent ensuitereverser le fruit
de la collecteà l'autoritéadministrative compétenet reçoiventen contrepartieun
pourcentagede l'impôt collecté.
E. - Administrationdela Justice
4.450 Bien avant l'indépendance, la compétence temtoriale
d'aucune juridiction nigérianene s'étendaitsur Bakassi. Bienau contraire, un
ressortissantnigériaayantun contentieuxavecun autochtone dela pêcheridlIdombi
où il avait séjourncomme pêcheure ,t qui avait saisi en 1952 lesautoritésde Uyo
Dismct dans la Province de Calabar au Nigeria, se vit conseiller des'adresser aux
autorités camerounaisesà Victoria. L'affairefut portéefuialementdevant la Bakolle
Native Court.
4.451 Les Native Courrqui existaientdans d'autres localide la
zone telle que Bamusoont survécu à l'indépendanceavant d'êtreremplacéespar lesCustomrj Court (ibid.) Comme dans chaque chef-lieu de département,il existe au
moins un Tribunal de première instanceMundemba.
F. - Autres services publics
4.452 11existe des centres de santéà Issangele, Kombo Abedimo,
Idabato et Jabane, dont les dotations fuiancièressont régulièremenitnscrites au budget
du Ministèrede la Santé.
4.453 Des établissements scolaires construits par 1'Etat
camerounais, tant du niveau primaire que du niveau secondaire, existent également
dans la péninsule. On mentionnera à titre illustratif, pour le niveau primaire: le
Catholic School de Mundemba, le CatholicSchoold'Ekondo-Titi, l'école primaire de
Bamuso ; pour le niveau secondaire: le lycéede Mundemba (crééen 1975), les
C.E.S. d'Issangele (1992) et de Bamuso (1992) dans le domaine de l'enseignement
général, etla S.A.R. de Mundembapour I'enseignement technique (laS.A.R. créée à
Bamuso s'étant avéré non viable).
4.454 Enfin, l'encadrement des agriculteursde cette zone est assuré
par des services étoffés.11 existe en effet une délégation départementale de
l'agriculturà Mundemba, des délégations d'arrondissemenà t Idabato, Issangele et
Mundemba, et des postes agricoles dansles mêmeslocalitésauxquelles s'ajoutent un
peu plus au nord de la péninsuleceux d'AkpassangKorup, Bombage, Meangwe II et
Mundemba.
4.455 La frontièreentre le Camerounet le Nigeria depuis la Cross
River jusqu'à la mer fut délimit-comme celaressort àsuffisancede ce qui précède
- par le Traitégermano-britannique du 11 mars 1913 d'une manièrejuridiquement
obligatoire. Toutefois, avant mêmecette date eà,vrai dire, depuis la conclusion de
l'Accord MOOR/PUTTKAMERde 1901, les autoritésbritanniqueset allemandes du
Nigeria oriental et du Cameroun étaientl'une etl'autred'avis que lafrontièreentre le
Cameroun et le Nigeria devrait commencer àla cote,à l'embouchurede l'Akwayafé,
laissant ainsi la péninsulede Bakassi à l'AllemagnLe Traitéanglo-allemand du 11
mars 1913 se réfère,tant par sa descriptiontextuelledu tracéde la frontière, que par
l'incorporation de la carte TSGS No. 2240 (feuilles 1 et 2), aux travaux de
l'expédition frontalière gennano-britannique (HERRMANNIWOODROFFE) desannées1905l1906.Les travaux effectués parcette commissionont été considérés tant
par la partie britannique que par la partie allemande comme une démarcation
suffisante et complètede la frontièreentre la Cross River et la mer.
4.456 Ainsi ce segment de frontière à fait l'objeà la fois d'une
délimitationconventionnelle et d'une démarcationsur le terrain, l'une et l'autre
juridiquement obligatoiresjusqu'à aujourd'hui. CHAPITRE5
LETRACEDELA FRONTIEREMA- SECTION 1. LES DEUXSECTEURS FRONTALIERS
5.01 A l'alinéf) de la section V desa Requêteintroductive
d'instance,la Républiqdu Camerouna priéla Cour
"f)Afind'évitelasurvenancede toutdifférendntre les
deux Etatsrelativemenà leurfrontièremaritim(..)de
proceder au prolongement du trac ée sa frontière
maritimeavec laRépublique fédbraldu Nigérijusqu'à
la limite des wnes maritimesque le droit international
placesous leur juridictrespective"p14).
1 5.02 Cette demande met clairement en évidence l'une des
particularitde la pI.esenteaffairecequi concernela délimitatide la frontière
maritime: celle-cin'a éeffectuéquepartiellementpar uneséried'accordsadoptés
enue 1913 et 1975,jusqu'à un "pointG" situéàune distance d'enviro17 milles
I marins à partir de l'embouchurede I'Akwayafé. udelà, les Parties n'ont se
met&ed'accord surla délimitation dzones maritimessur lesquelles ellesexercent
leurjuidiction respective.
5.O3 Le Cameroun et le Nigeria ktant tous deux partieà la
Conventiondes Nations Unies sur le droit dlamer du 10 décembre 1982 dont
l'articlefixeà 12millesmarin msesurésàpartir deslignes debase, la largeurde la
mer temtoriale, cesEtatsnesauraient préteeorénavan tune mertemtorialeplus
étendue, quellesqu'aient pu êtreleurs prétentiantérieures.Dèslors, la partie
délimitéee leur frontièremaritime correspàl'intégralde I'ktenduede leurmer
territorialerespectiveet s'étendlégèratudelà, jusqu'aupoint G définicidessus
(par.5.02).
i
Audelà, les deux Etatsont et exercent,conformémentux
5.04
dispositionsdes artic56et77de la Convention,desdroitssouverainsurleurzone
économique exclusiveet leurplateau continentarlespectifs,maisla délide ceson
espacesdemeure f,uted'accordenne eux, imiétermi&.Ceae situationest d'autant
plus préoccupantque, d'unepan, la wne estriche en ressources halieutiet en
hydrocarbureset que, d'autre part,le Nigeria tentede s'en approprierindûmentune
portionexcessive,faisantpeserainsiunemenacegravesurla paix et la sécude larégion.C'est cequi aconduitle Cameroun à formulerla demandeexposée ci-dessus
bar. 5.01).
5.05 II convient dedécrireprécisémelt tracéde la délimitation
partielleentre les deux zones maritimslacéessous leur juridiction respecsure
laquelle lesParties sont parvenuàun accord(section2). avant dedécrirece que
devrait êtrla solution équitaàllaquellilconvientd'aboutiraudelà de cetteligne
(section3). étant entendu que,pour des raisons qui seront rappelées ci-après
bar. 5.107).la Requête de la Républiquedu Cameroun n'opère pas de distinction
entre la délimitatide la ou des zoneséconomiqueesxclusivesd'une part etdu ou
desplateauxcontineluauxdes Partiesd'autrepart.
SECTION 2. DE LACOTE AU POINT G
5.06 L'histoirede ladélimitatde la frontièremaritime séparant
les zones camerounaises et nigérianesremonte à l'époquecoloniale, comme
l'ensemblede l'histoirefrontalièredecesdeuxpays.
5.07 C'esten 1885en effetques'échangèren tspremières lettres
officiellespar lesquelleslespuissancescoloniales sesontaccoàdfixerle pointde
la côteà partir duqueldevraient êtiréesles lignesfrontières, terrestreau nord, et
maritimeau sud. Ce premier accordsouffraitcependantd'un "vicecachénbien vite
découvert:le reliefgéographiququi, sur les cartes encore imprécise l'époque,
justifiait le point retenu, en l'occurrsupposéfleuveRio Del Rey, n'a jamais
existé (v.supra pars2.19 - 2.21).Le pari perdu des négociateurs britanniques et
allemandsde 1885 ne porta toutefois paà conséquence,car les deux puissances
coloniales trouvèrenà Londres, en1913, à s'entendredéfinitivementur un autre
point dontelles s'étaient cettfeois assse la réalidu support géographiqueLe
Trait dé Londres de 1913 a égalementétél'occasionde jeter les bases de la
délimitation deeauxterritorialesdeleurspossessionsrespectives.
5.08 Après les indépendancesl,e Cameroun et le Nigeria ont
vouluparfaire leurs frontièrcommunes,notammentmaritimes,et le Traitéanglo-
allemandde 1913leura servidepointde départ.5.09 ELI1970. les deux Etats créèrentune Commissimixte
chargéede l'étudedu problème frontières.En avril .nepremière portide
frontiere fut adoptée directptar les chefsd'Eut. Quàla secondeportion,
c'est en juin971qu'un premiertrac ut effectuépar les chefs des délégations
camerounaiseet nigérianila Commissionmixte M.ais par la suite,lors d'une
réuniontenueàMarouaen 1975 un autretracui fut substit,ar leschefsd'Eut
eux-mêmes.
5.10 Lesdéveloppementssuivant.rappelcesdifférentétapes
en précisant quefut la genèse dutrae la frontièremaritime(BEnsuite, le
traceéxact de lafrontièremaritime déjàdélitée sera indiqué,en donnant les
coordonuéeséographiquese tousles pointspeaiwnts ($2).
01. 1
pointG
5.11 Le tracdée lafrontièremaritime. de la au point G,
repose sur desbasesconventionnellesl'histoires'étendsurprèsd'un siècle (v.
suprachap.2, section4). Sonépermetd'affmer aveccertitude
-que l'ancrage"terrestre"de la frontièremaritimàsl'embouchuredu fleuve
Akwayafe,au point de rencontrede la lignedroitejoignant "Bakasà"bgint"
Point"et ducentredu chenalnavigable de1'Akw(a);é
-quede cepointau "point12"a frontièresuitla lignedecompromisadopttepar les
plus hautes instagouvementaies quien ont authentiferactsurla carte3433
de l'amiraubritanuiq0);
-que du "point12au "pointG",la frontière sutracdécritdansla Déclaration
de Marouaclôturantla reacoau sommetdemai-juin1975(c).
A. - L'ancra grrestredelafrontièmaritMe
5:12 C'est le Traité de Londres du 11 mars 1913sur
l'établissemete la frontiéreentrele Nigeriaet le Camerounet la régnementatiod la navigatiosur la Cross River, dont le textedécritla frontièrecamerouno-nigériane
du nord au sud pour la faire aboutisurla côte, qui fixe l'ancrage terrestre dela
frontière maritimeàl'embouchurede l'Akwayfé,siluéeàl'intersectiondu thalwegde
cetterivièreet d'une
"straight line joining Bakassi point and King point"
(Traitéde Londresdu 11mars 1913,art.m).
5.13 Ce point, quepar commodité on peut appelerle "point1",
n'a jamais fait l'objetde contestation depuis1913.Bien aucontrsarvaleur aété
constamment réaffmée, aussi bien durant l'épcque coloniale que depuis les
indépendances.
5.14 Sans doute peut-onobserverqu'audébutdes années1970,il
y a eu des "accrochages"concernant la frontière maritime. Mais celan'a jamais
entrainéla moindre incertitude quantà la futation du point d'aboutissementde la
frontière terrestr- et donc du point de départ de la frontière maritime - à
l'embouchurede 1'AkwayaféB . ien au contraire, à chacunedes rencontres entre les
dirigeants camerounaisetnigériansconsacréesaux frontièresmaritimes, les points
acquis de longue date ont toujouktérédfiiés, et en particulierle point de départ
de la frontière. C'est ce quiressort parexempled'une lettredu Directeurdu centre de
l'I.G.N. du Cameroun à son homologuefrançais, du 9 juillet 1970(Annexe M.C.
238).L'auteurde la lettreinforme son destinatairedansle courantdu mois d'août
1970,le Nigeria et le Camerounont "prévud'étudier, préciser puisde matérialiser
si possiblela frontièremaritidepuisl'embouchure de iarivièreAkpaWafe"(ibid.,
soulignépar le Cameroun).
C'est d'ailleursprécisémecte que les deux paysont fait, et
5.15
qui a menéen avril1971 A la délimitation d'un premier tronne frontièremaritime
entre le point 1 et le point 12 (v. la Déclarationde "YaoundéUndu 4 avril 1971,
AnnexeM.C. 242et infrb), puisenjuin 1975àl'adoptiond'un secondtronçon, du
, point 12 au pointG (v. la DéclarationdMam du ler juin 1975,Annexe M.C.
251;et infraC). Aucunaccordn'est venucontredirecet acquisdepuislors. B. - De l'embouchuredeI'Akwayafé aupoint 12
5.16 En plusde fvtersonpointdedépart,le Traitéde Londresde
1913est le premierinsaurnentconventionnelàjeter lesbases de la séparatides
merstemtorialesdu Camerounetdu Nigeria.Son articleXXI stipule que
"from the centre of the navigable channel n a line
follow the centre of the navigable channel of thel
Akwayafe river as far as 3 miles limit of territorial
jusrisdiction.For thepurposeof definingthis boundary,
thenavigable channelof the Akwayaferiver shall be
considered to lie wholly tothe east of the navigable
channelof theCrossandCalabarRivers".
Il estprécisàl'articleXW quela lignedebaseconsidéréceommele point dedépart
du calcul de la largeurde la mertemtorialefuàé3 millesmarinsest celle quirelie
lesextrémité se l'estuairede 1'Akwayaf.esparties s'accordet lad15fuWc: mme
"a linejoiningSandypointandTomShotPoint".
5.17 Le tracé exact de cette ligne ne fut pas entrepris
immédiatemena tprès lesindépendancesC . 'est mêmeau contraireune toute autre
ligne, la lignemédianeéparantes deuxtemtoiresmaritimes,qui, desindépendances
jusqu'au débutdes années 1970, avait fait l'objetd'un consensàsl'initiativedu
Nigeria. En effet, dans la note n570 du 27mars 1962 adressépar le Ministère
nigérian desAffairesétrangéresux autorités camerounais(s nnexeM.C. 229),le
Ministre nigérian indiqa,vec assurance, quencernantla délimitatien question:
"as shown on the map the boundaryfollowsthe lower
courseof the Akwayaferiver, wherethereappearsto be
The Nigerian Federal Suwey have drawn an arbitrary
line from point "A" to point "B"whichis consideredto
bethe correctboundar" (ibid.).
La ligne reliant les poiAtset B reportésur les cartesjointesaveretardà cene
note,dans la noteno631 (v. note631duMinistère des Affairestrangèresu 8 avril
1962, et cartes jointes, Annexe M.C.229). est visiblemenÛa& en suivant la
méthode de l'équidistance (voicarteM.24).
5.18 Quoi qu'il en soit, les autodes deuxpaysdécidèrend te
mener de façon plusapprofondieet compl&te les travauxde délimitationde leursterritoires maritimesrespectifs. A cet effet, ils ont chargéune Commissionmixte
d'étudier
"les problèmes relatiàsla délimitationde la frontière
exacte entre le Nigena et leCameroun"(v. Déclaration
de "Yaoundé 1"du 14août 1970,AnnexeM.C. 240).
5.19 La Commission, composée d'une délégatioc namerounaise
dirigée parM. J.C . GOH, Inspecteur fédérd al l'administratiopour le Cameroun
occidental, et d'une délégatinigérianeconduitepar M. El Hadj Bello MALABU,
Ambassadeur du Nigena en RépubliqueFédérale du Cameroun, tint sa première
réunionà Yaoundédu 12au 14 août 1970.A l'issuede cettesession, elle décidade
fairedans sa Déclaratiofde les recommandationssuivantes:
"1. Que ladélimitation dfrontières entre lesdeux pays
se fasse entrois étapes
a) ladélimitatiode la frontièremaritime
b) la délimitatide la frontière terres(....)
c) la délimitatidu reste dela frontièreterrestre.
2. Que la délimitatiode la frontièremaritime s'effectue
conformément aux conventions de Genèd vee1958sur le
droit de la mer et conformément aux bornes etpoteaux
définis dans l'accord anglo-allemand deLondres
concernant le tracéde la frontière entre leNigeria et le
Cameroun de Yola à la mer et la règlementationde la
navigationsur la Cross River.
3. Qu'à la fui de chacune des étapesénumérées ci-
dessus,un traité séparé soit signér les deux pays afin
de do~er une portéelégaleà la frontière ainsidélimitée
et fixéesur leerrain.
4. Que les deux pays désignentle plus rapidement
possible des expertspour commencerles travaux sur la
délimitationde la frontière maritimeéroamerounaise
à partirde cartesà la plus grandeéchelleexistantence
moment conformesaux normes fixées par la convention
de Genèvede 1958,et que ces travaux de délimitation
soientachevés auplustardle 30septembre1970.
6. Que pendant la duréedes travaux entrepris, afin de
mettre en oeuvre lesprécédentes recommandationl s,s
deux gouvernements prennenttoutesmesuresnécessaires
pour consolider les relations amicaleset fraternelles
existantes"flbid.).5.20
Il n'est pasans intérêdte relever qu'à titre depositionde
départ du Cameroun, la Sous-Commission techniquecamerounaise chargéede
préparer la réunion de Yaoundé avait proposé de revendiquleer bénéficede
l'application dela Conventionde Genèvesur le droit de la mer (v. le compte-rendu
de la réuniondu 13juillet 1970dela sous-commissiontechnique, par J. LARIVE,
Annexe M.C. 239). Le tracé:envisagéétaitdonc tel "quetous ses points soient,
chacun, à égale distance des pointsles plus rapprochés des lignede bases droites
nigérianeset camerounaises. Le point de départétantle milieu de la droitejoignant
lesPointesKinget Bakassi à l'entréede la rivièreAkwayaféet lepoint d'arrivéeétant
le point triple sitàéégaledistancedu point le plus rapprochéde chacun des trois
Etats" (Ibid., p. 2 et v. aussicarte no 6245reproduite ci-après). Cetteidéeétait
non seulement fondée sur la Conventionde Genèvesur le droit de la mer, maisaussi
sur la position nigériane de1962surce qui devaitêtreconsidéré commle a "correct
boundary" ,à savoirla lignemédiane(voirsupra,par. 5.17).
5.21 Mais évidemment, tenic rette positioneut éne pas tirer les
conséquencesdu traité de 1913, ce qui n'avait jamaisété dans les intentions
camerounaises.
5.22 C'est donc surla base du double principed'une délimitation
fondéesur les dispositionsdu Traitéde 1913et de la Conventionde Genèvede 1958
sur le droit de la mer que la Commissionreprit sestravaàl'occasiond'uneseconde
sessiontenuedu 15au 25 octobre 1970 àLagos.
5.23 Son tout premier objectif, délimiterla premièrepartie de la
frontièrema,ritimedont le principe avait étéposépar le Traitéde 1913, nécessitait
qu'à titre préliminairesoit trouvéun accord sur des cartes de travail. Dès le 17
octobre, la Commissiondonna mandatàune sous-commission d'expertspour menerà
bien latache de défmirles cartes les plus appropriées.Quelquesjours plus tard, sur
propositionde cette sous-commission,la Commissionput formellementrete~ deux
cartes de travail, celles de l'amirauté britannino 1860 et 6245 (v. rapport de
S.M.L ENDELEY,AnnexeM.C. 241,pp. 1-5).Dansla pratique,c'est la seconde de
cescartes,plusprécise, quis'avérala plusutilisée.
5.24 De là, un accord fut rapidementtrouvépour confumer un
premier tronçonde frontière.Comme le rapport d'un desparticipantsaux travaux,
S.M. L. ENDELEY, l'indique,la "lignetracée par lesNigérianscoïncideaveccelle tracée
par la délégation camerounaise jusqu'au poio nt le
fleuve Akwa Yafe se jene dans l'estuaire dela Cross
River, tel qu'il estdéfh dans le protocole de 1913"
(Ibid., p6).
5.25 Ce n'estqu'audelà de l'estuaire, considércomme délimité
par "une ligne droitejoignant "Tom Shot point", situésur le temtoire nigérian à
"Sandy point" situé sur le temtoire camerounais" (Ibid., p. 7), que les positions
divergèrent,notammenten raisonde difficultésd'interprétation des articles pertinents
du Traitéde Londres de 1913 @id., p. 7).Le problème résultaisturtoutde l'article
XXI, selon lequella frontièredevait suivrele centredu chenalnavigablede la rivière
Akwayafé.lequel devrait en tout étatde cause êtreconsidéré comme se trouvant
totalementà l'est du chenalnavigablede la CrossIcalabar rivers. Il y avaitdonc une
double questionà résoudre:il fallait non seulement localiserle chenal navigable de
I'Akwayafé, mais aussi tracer la frontière. Le 22 octobre, la sous-commission
d'expertsà qui avait étéconfiéecene mission présenta "lacarte marine no 6245 sur
laquelle les frontières et laligne suivant le thaont été tracées("Ibid., p8). Le
premier problème était ainsi résolu p,uisque les parties avaient localile chenal
navigable. En revanche, chaquepartie soutenait un tracéfrontalier différent. Après
quelques tentativespour rapprocherles points de vue, la Commissionconsidéraque
les arguments avancés parchaque délégation étaient irréconcilia( bIeisd., 8), de
sorte que le communiquéfinal rédigé à lafui de la réunionne put que se borner a
indiquer que chaque délégationavatirtacésaproprefrontièresur la carteno6245.
5.26 Le soir du 22 octobre, la délégationnigérianeemporta la
carte qui avait étéprésentée par la sous-commissiond'experts. La Républiquedu
Camerounne l'a, depuis lors,jamaisrevue (Ibid., p.8).maisil resteen sa possession
un exemplairede la carte 6245 sur laquellele chenalnavigablede 1'Akwayafé tel que
défd par les expertsce 22 octobre estfiguré, eton peuty voir quele tracéproposé
par les deux partiesest très similaire(voircarteM.22). Il est donc clairque si, ce
jour là, aucun consensus surla frontièreaudelà de l'estuaire dela Cross Riverne fut
atteint, on s'étaau moinsaccordé sur le tracédu thalwegde I'Akwayafé.
5.27 La Commissionmixtetint sa troisième sessioà Yaoundédu
26 mars au 4 avril 1971. Ce fut l'occasionpour la délégatinigérianede produire à
titre de nouvel instniment la carte n3433 de l'amirautébritannique.La démarche
étaitsans doute singulière,maisles représentants camerounais ne'y opposèrentpas,
tout en faisant observer que la datede la dernièremiàejour de cene carte,1964, larendait forcémentmoinsfiable quela cart6245 réviséen 1970(v. rapport surla
réunionde Yaoundé ;AnnexeM.C. 245,p. 3).Elle observa égalemetue la carte
no 6245 présentaitplus d'informations quantaux profondeurs, ce qui en faisait un
outil mieux adapàéla miseenévidence devoies denavigation.
5.28 A un sous-comité technique composé au sein de la
Commission, fut confiée la mission primordiale de tracàrnouveau de façon
convaincantele chenalnavigabledeAkwayaféD . euxpositionsfurentdéfenduDu.
côtécamerounais, ilfut soutenuqu'ausensdu traité,le chenal pertinent
"isthe channelbestsuitedfor safetyof navigationup and
down the river; the channel which consequently
contitutes a necessary and safe track of navigation of
internationalutility, and therefore that which bas been
markedby buoysin AdrniraltyCharts(Ibid p.4).
5.29 De leurcôté,lesexpertsnigériconsidéraientue
"the navigable channel within the contextof 1913
protocol, is that traced by a line which follows the
deepestsoundingalongthe waterway, withoutregard for
othernavigationalzards"(Ibid.).
De là, s'ensuivit un échangede vuessanslendemain, aussibien en commission
plénière qu'ensous-comitéet, final i,fut décidd'ajourner la réunionjusqu'au
mois suivant(Ibid., 5-8).
5.30 ie4 avril, avant se séparer, lesdélégatisntreprirent
de rédigerla Déclarationconcluantleur troisième session.C'est alors que les chefs
dYEtatdes deux pays, réundans la capitale camerounaisele mjour, profitèrent
de l'occasion qui leurétaitdonnéefaire avancerleschoses,en revoyantle travail
accomplipar la Commission,en consultationavecleschefsde délégation.
5.31 De façon assez inattendue, la question fut rapidement
tranchée, comme en attestenlta carte3433 de l'amirautébritanniquequ'ils ont
paraphéeet la déclarationsolennelleque la Commissionmixte rédigea justeaprès.
Déclarationprend actede ce queles chefsd'Etatse sont mis
"d'accord pour considérercomme frontièrela ligne de
compromis qu'ilsont tracéed'un communaccord sur la
carte3433 de l'amirautébritannique". (Déclarationde
"Yaoundé II", opcit., AnnexeM.C.242).5.32 Cette "lignede compromis", qui courtdu point 1 au point
12,est plutôt en faveur duNigeria, si on la àla lignemédianeque ce pays
considéraitdepu1962 comme la"correctboundary"(v. supra p5.17) .n coup
d'oeil à la carte au croquis reproduit page suivàs'en assurer,et ceci est
encore plus frappantsi l'on observele croquisrepta ligne reliantle 13int
au poin20 (v. par5.38)L.edécrochement vers l'ouesa lignecourantdu point
12 au point20 est particulièrementnet, comme si ses auteurs avaient décidéde
regagner, au sud du po12,le terrainconcéàl'ouest par la lde compromis.
C'est d'ailleurs l'expliqu'il convient de donner de cet carrle tracédu
point12 au poin20 est, quaàtlui, neutre: il résulted'une applicationstricte des
principes poséspar la Conventionde Genève1958,de sorte qu'il départdee
façon égalitairezones respectivesaudelà de la lignede compromis.
5.33 On peut aussi observer que la ligne de compromis aboutit
bien à l'est du tracédu chenal navigablede I'sur lequel lesparties s'étaient
misesd'accorden octobr1971(v. suprpar.5.24).
5.34 C'estdonc sur la based'un compromisfavorableau Nigeria
que le premier tronçon de la frontière maritime fut ftwé,embouchure de
I'Akwayaféjusqu'au poin12. 11n'a pas étémodifiédepuis. En revanche, une
Déclarationde la Commission mixtechargéede la délimde la frontière siégeant
à Lagos du 14 au21 juin 1971,signéepar MM. NGOH et COKER, et dont la
République duCameroun analyse les termes ci-dessous , ars5.37- 5.40),
préciseles coordonnéesd'un nombre depoints suffisantpour permettrede retracer
cene "ligne de compromis" sur n'importequelcartedes lieusans besoin de
consulter la carte3433de l'amirauté britanniqu(ev. La Déclarationde Lagos du
21 jui1971 A,nnexeM.C. 243).
5.35 Cescoordonnées sont les suivantes
Point1:Long. 8"30'44".Lat.4"40' 28"
Point2:Long. 8".30'00". Lat4"40' 00"
Point3:Long. 8".28'50".Lat.4"39' 00"
Point4:Long. 8".27'52".Lat.4" 38'00"
Point5:Long. 8".27'09",Lat.4"37' 00"Point 6: Long. 8" 26' 36", Lat. 4' 36' 00"
Point 7: Long. 8" 26' 03", Lat. 4" 00"
Point 8: Long. 8" 25' 42", La4" 34' 18"
Point 9: Long.8" 25' 35", Lat. 4" 300"
Point 10:Long. 8" 25' 08", Lat. 4" 300"
Point 11:Long. 8" 24' 47". Lat. 4" 300"
Point 12:Long. 8" 24' 38", Lat. 4" 31' 26"
C. - Dupoint12aupointG
5.36 Trois étapes successives ont pennis d'arriver à une
délimitationfmle des zones maritimes respectivesdu point 12 au point G. La
première résultedes travaux de la Commissionmixte de juin 1971(1); la seconde
résultede la décisionprise à Kano en septembre 1974 (2); enfin, la délimitation
définitivea étéadoptéemoins d'un an plus tard, lors du sommetde Marouade juin
1975(3).
1. LaDéclaration de la Commissionmixte dejuin 1971
5.37 Bien entendu, la délimitationde la frontière maritime
jusqu'au point12n'avaitétéqu'une étapeM. aisl'intervention directedes chefsd'Etat
et la rapiditéavec laquelleils avaientrésolules questionspendanteseut pour effet de
stimulerla Commissionmixte. C'est ainsiqu'àpeine deux moisaprès l'adoptide la
ligne de compromis, elle était en mesure de proposer le tracé d'un tronçon
supplémentaire.C'est ce qui ressort de la Déclarationde juin 1971 clôturant sa
quatrièmesession (Zbid).
5.38 Cette Déclaration, dûment signpeour le Nigeria parR.O.
COKER, Directeur des "Federal surveys etpour le Cameroun par J.C. NGOH,
Inspecteur fédéralde l'administration pour le Cameroun occidental, officialise
l'accord des déléguésur le tracé reporté sulra carte qui avait déjàservi au tracéducompromis d'avril1971 .uivent lescoordonnées d'uvingtainede points, auxquels
sont attribués deschiffresdeà20, permettantde retracer l'ensemblede la ligne, du
point 1à l'embouchurede 1'Akwayafé jusqu'aupoint 20,17,7milles marins plus au
sud (voir croquispagesuivante).
5.39 Par ailleurs, la Commissionconfia mandàtun sous-comité
technique de procéderà la visite et à l'inspectionde la frontière maritime, et de
soumettre des propositions pour son balisage lors de la quatrièmesession de la
Commission,programmée pour octobre.
5.40 Auxyeux des Commissaires,ceci n'était toutefois qpure
formalité: déjàl,eurs préoccupatisetournaientvers la questionde la délimitation
du plateau continentaIl leur fallait pour cela d'autres carteset, pour s'assurer les
moyens de travaillerefficacement lorsdes prochaines réunils recommandèrentà
leurs gouvernementsd'
"a) adopter ultérieurementune carte marine adéquate
permettantde délimiterle reste de la frontière de la mer
temtoriale ainsi que la frontière sur le plateau
continental. En attendant chaquedélégation cherchera
une carte marineadéquate avanlta prochaine réunion;
b) attirer l'attention des chefs du Camerounet du
Nigeria pour une actionprendre au cas où les plateaux
continentauxdu Nigeria, du Camerounet de la Guinée
équatoriale auraitn pointcommun" (Ibid).
5.41 Le sous-comité techniqe enaà bien sesopérationspendant
une périodes'étalantde juillàtnovembre 1971. La Commissionse réunit quant à
elle plus tard que prévu,en mai1972. Ce fit l'occasion choisiepar la délégation
nigériane pour remettren question l'accordde jui1971 ,n mettant en avant que
l'article 12 de la Convention deGenèvesur la mer territoriale et la zone contigiie
n'avait pas pleinement étérespecté,et que les détails topographiqudu terrain
n'avaientpas suffisammentété pren compte.Toutétaitdonc àrefaire.
5.42 Cette fois-là l'entrevue des chefs d'Etat n'arrangea pas les
choses. Les deux chefs d'Etat, le Président AHIDJOet le Général GOWON, se
rencontrèrenten effet en aoû1972 à Garoua, mais sur la question de la frontière
maritime, ce ne futqueour cbnstaterleurmésententLe Chefde I'Etatcamerounais
s'en tenait strictemeàtl'accordde1971 . l'inverse, le Général GOWONo ,utre
qu'il lui déniaittout caractère contraignant, en dénonçailte contenu comme
inacceptable.5.43 La situation continuaà s'enliser, de sorte qu'aucun accord
n'avait été trouvéà l'été 1974c ,ependant qu'un problèmemajeur nécessitait un
traitement rapide, celuide l'exploitationpétrolière.Les hydrocarburesdans les
sous-solsà seulement quelques encablures des côtes faisaient en effet l'objet de
convoitises renouvelées depuisle quadruplementdu prix du pétroleen 1973. Un
incident eût fort bien puse produire, comme ce fut le cas à la même époque
notammententre la Grèce et laTurquieou un peu plus tard entre la Libyeet Malte et
compromettre les relationsde bon voisinage entretenuespar les deux Etats.Ces
tensions ont dans les deux casdébouchsurune saisinedu Conseilde Sécuritet sur
un contentieuxjudiciaire devantCU (v. learrê tss 19dhmbre 1978, affairedu
Ploteaucontinentalde lamerEgée, Rec., p.3, et 3 juin 1985, affaire Piuteau
continental(Zibye/Malte), ec.p. 13).
5.44 Une nouvellerencontre entre le PrésidentAHIDJO et le
GénéraG l OWON fut donc organisée du 30 août au ler septembre1974, en vue de
trouverune solution.
5.45 De leur côté, les nigérians avaient soigneuseprt parce
sommetlors d'une réunion à laquelle participaient plusdes plus hautes autorités
du pays. Avait étédéfinieune véritablestratégiede remise en cause de l'accord de
juin 1971, autourdu principe quetouttracébaséexclusivementsur lTraitéde 1913,
ou sur la Convention de Genève de1958 devrait a priori êtrerejeté. Devrait en
revanche être plaidée l'idée queseul un compromis pourrait produire un tracé
acceptable, à l'image dece qui s'étaitdéjàpasséen avril 1971.En fait, la partie
nigérianeétaitlogique avec elle-mêmepuisqu'elleavait obtenun tracé favorablà
ses intérêtesn 1971, elle espérait en obru moinsautanten 1974.
5.46 Quant à lui, le Cameroun entendaittoujours se prévaloirde
l'accorddejuin 1971, position qu'ilconsidércommela seuleconformeau droit.
2. La Déclarationde Kanodu ler septembre1974
5.47 Finalement, à ce stade, on se contenta d'une solution
temporaire consistantà geler les prétentions respectien garantissantune zone
tampon interditede prospectionpétrolière aux deux pays.5.48 Au terne de leur rencontrede Kano,le PrésidentAHIDJOet
le GénéraG l OWONdéclarèrens tolennellement,le ler septembre1974,
"interdit de toute activité de prospectpétrolière,un
couloir de deux kilomètresde part et d'autrede la ligne
joignant la bouéed'attemssagefairwayaux bouéesno 1,
2, 3 existantsur la carte 3433".Déclaratiode Kano du
ler septembre1974,(AnnexeM.C. 246).
A noter que les bouéesdont il estfait mention sont cellesqui balisentle chenalde la
CrosslCalabarRivers(voir carte3433)
5.49 D'une certaine manièrel,a zone tampon est favorable aux
intérêts nigérian s,isqu'ellese situe pour l'essentàel'est dutracérésultantde la
ligneadoptée en applicationde la Conventionde Genèvepar la Commissionmixteen
juin 1971.De sorte qu'ellegêne beaucoup plus C leamerounque le Nigeria.Celadit,
il n'est pasindifférentquela zonesedéfinisse comme un couloidre part et d'autredu
chenalde la CrosslCalabarRivers : c'estlàle témoignage dela convictiondes parties
que ce chenal est la cléde la frontière maritime, quine peut s'en trouver très
éloignée.
5.50 Cette solution ne pouvait évidemmenê t treque temporaire,
pour des raisons économiques évidentes. ïe Cameroun n'avait en tout cas pas
l'intention de s'en contenter.D'ailleurs, lors d'une réunion interne à la partie
camerounaiseen date du 12 septembre1974et tenue sous laprésidence du Ministre
des Mineset de I'Energie,H. N. ELANGWE,il fut fermementrappeléque:
"la déclarationde Kanoest une mesure qui estdestinéeà
sauvegarder les relations de bon voisinage que nous
entretenonsavec leNigeria, mais qu'en ce qui concerne
la déterminationde la frontière maritime,problèmenon
encore résolu,l'appel à l'arbitragedans le cadre de
l'ONU n'étaitpas complètementexclu" (P.-V .e la
réuniondu 14 septembre 1974 "sur la déclarationde
Kano relative aux recherchespétrolièreaux environs de
la frontière maritime",AnnexeM.C. 247,p. 3).
5.51. Il a donctoujours ététout à fait clair que l'arrangementde
Kano n'avait ni pour but de fmer un régimedurable, ni pour objet de délimiterla
frontièremaritime. L'accord de Maroua de juin 1975 allait de toute façon régler
définitivementla question. 3. L'Accordde Marouadu ler juin 1975
5.52 Moins d'un anaprès l'arrangementde Kano, une réunionau
sommet fut organiséeà Maroua, en mai-juin 1975.Ce fut un sucunsaccord fut
trouvésur le tracédéfintif de la frontière maritimedu point 12 au pointLe.
Communiquéconjoint rédigé à l'issue dcetteréunionet signépar le Président
AHIDJOet le GénéraG l OWONexprimed'ailleursbien la qualitéde l'accord auquel
lesdeux Etatsétaientparvenus,en insistantqueles signataires
"se sont mis entièrement d'accsur le tracé~récisde
la frontière maritime". (Communiqué conjointdu ler
juin 1975, publiéà l'issue de la visite officielle du
GénéraG l OWON à Maroua du30 mai au let juin 1975,
Cameroun).. 250. Soulignépar la Républiquedu
5.53 L'accord en question doit être lu en conjonction avec
l'échangede lettresdes deuxchefsEtaten date des 12juin et 17juillet, dans lequel
le Président HAHIDJO et le Générai OWONs'accordentpour comger une erreur
matérielle bénign(v. l'échangede lettres des 12 juin et 17juillet 1975, Annexe
M.C. 251.On peut observer quela réponsenigérianeà la lettre camerounaise était
adresséeau Camerounà un moment où le général urtala MOHAMMEDavait déjà
succédéaugénéraG l OWON àla têtde 1'Etatnigérian).
5.54 L'accord de Maroua apour objectif explicite de prolonger
"le tracé dela frontièremaritime entre les deuxpays du point 12 au point.
Déclaratiode Marouadu ler juin, AnnexeM.C. 251).
En pratique, est défini tout d'abordle point de départdu
5.55
tracé, qui, fortlogiquement,est le
"point 12de longitud8" 24'38"E et de latitude4" 31'
26" N, situéàla limite de la frontièremaritimeadoptée
par lesdeux chefs'Etatle 4 avril 197(Ibid).
Puisc'est autour dehuit autrespointsauxquelssont attribulettres de l'alphabet
quela lignede prolongementest tracée. Leurs coordonsontles suivantes
PointA: Long. 8" 24'24"E; Lat. 4" 31'30"N
Point Al: Long.8"24' 24"E; Lat.4" 31'20" NPoint B (coordonnéestelles que comgéespar les annexes):Long.8"24' 10" E; Lat.
4" 26'32" N
PointC: Long. 8" 23' 42" E; Lat.4"23' 28" N
Point D: Long. 8"22' 41" E; Lat.4" 20'00" N
Point E: Long.8" 22' 17"E; Lat.4" 19' 32"N
Point F: Long.8" 22' 19"E; Lat. 8"22' 19" N
Point G: Long.8"22' 19 E;Lat. 4" 17'00" N
Le tracé sedécritde la façon suivante (les coordonnéedses points ne sont pasà
nouveaureproduitespour plusde clarté):
"du point 12(..),la frontièremaritimesedirigeen ligne
droite vers l'ouest le long d'une parallèle la ligne
joignant les pointsTomShotet Sandyet située3 milles
marinsde cette lignejusqu'aupoint (...).
De ce point A la frontière se dirige en ligne droite
jusqu'au pointAl (...)situéà un kilomèw de la bouée
no 3à l'est.
La frontièremaritime suit lamêmelignejusqu'au point
B (...)situéà un kilomètre à I'est dela bouéeno 2.
Ensuitedu pointB la frontièremaritimese diige au sud
en passantpar le pointCI...situéàun kilomètre àI'est
de ia bouéeno 1j~s~u'au'~&t D (...où elle rencontre
le parallèle 20' 00".
Du point D la frontièremaritimse dirige vers le sud-
ouest jusqu'au point E (...qui est situéà cinq cent
cinquante (550) mètresde la droite joignant la bouée
Fairway àla bouéeno 1.
Du pointE, la frontièremaritimese dirigevers le sud-est
jusqu'au point F(...)situéàun kilomètre à I'est de la
bouéeFairway .
De ce point F la frontièremaritime se dirige au sud
suivant une parallèleau méridien8" 25' 00" jusqu'au
point G(...)ainsi qu'il estindiqué surla cartemarineno
3433".
5.56 La réunion de Maroua fut un succès parcequ'elle a abouài
un total accorsur le tracé précs'un important tronçode frontièremaritime. Cela
dit, il faut observer quece tronçon de frontièremaritime s'avune nouvelle foissurtout à l'avantage de la partie nigériane, puisque, comme la carte no IV
confectionnéeparla République du Camerounle laisseapparaître, la ligne entérinée
relève davantage deI'espnt de la ligne de compromisd'avril 1971que de celui de la
ligne d'équidistance proposée plrs commissairesNGOH et COKERen juin 1971
(voir croquispagesuivante).
5.57 La raisonen est que les autoritéscamerounaisesn'ont pasété
insensibles auxargumentsnigérians déjàxpriméslorsde la réunionde Kano..Aussi,
leur ont-elles fait uneconcessionimportanteafm de faciliterl'accèsdes navires aux
ports nigériansde cette zone sans passer par les eaux territorialesdu Cameroun, ce
qui aurait été le casi le cheval de CrossIcalabar rivers avait étéplacédu côté
camerounaisen application dela ligned'équidistance.
5.58 Il est donc indéniable qule Cameroun afait constamment
preuve de compréhensionvis-à-vis du Nigeria lors des différentesphases de la
délimitationde leur frontièremaritime jusqu'au poinG, en tenant compte, à un
moment où le nouveau droit de la mer ne l'avait point encore consacréau plan
conventionnel, d'unecirconstance spécialinvoquéepar son voisin. Ce faisant, il
avait précédéla Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982,
notammenten ce qui concernelesprincipesposéspar l'article15de cette Convention.
Les deuxEtats sontpartiesàcetteConvention.
5.59 Les concessionsfaites au Nigeria par leCamerounen 1975
apparaîssentde façon évidente surlcarte3433. On observeen effet facilement que
tous lespoints listésdans la Déclarationde Marouase trouvent largemànI'est des
bouées marquanl te chenaldu Calabar:Al esà un kilomètreàl'est dela bouéeno 3;
B est àun kilomètreà I'estde la bouéene 2; C est àun kilomètàl'est de la bouée
no 1: E est à 550 mètresà I'est de la ligne joignant les bouéesno 1 et la bouée
fairway; F est à un kilometre à I'est de la bouéeFairway; et G est dans le
prolongementdesautres points.
5160 Aucun accord postérieurau ler juin 1975 n'a modifiéle
tracé adoptàMaroua du point12au point G.Mapshowingpoints 1-12+12-20and12-G Le tracéde la frontièremaritimeaue le Camerounet le
8 2.
Nieena ont déià délimité
5.61 En déf~tive, deux instruments conventionnels futent
obligatoirementla frontièredélimitantles possessionsmaritimesdu Camerounet du
Nigeria, selon une ligne que I'on peut considérercomme équitable,si I'on tient
compte des circonstances particulièresde la zone à délimiter.11 s'agit de la
Déclaration deYaoundé du 4 avril 1971,et de la Déclaratide Marouadu ler juin
1975.Decesinstruments, ilressort queletracéfrontalier, reproduit sulre croquisci-
après confectionnépar la Républiquedu Cameroun, relie les points dont les
coordonnées suivent:
Point 1:Long.8" 30' 44";Lat. 4" 40'28"
Point2: Long.8". 30'00"; Lat. 4" 40'00"
Point 3: Long.8". 28' 50"; Lat.4" 39'00"
Point4: Long.8". 27' 52"; Lat. 4" 38'00"
Point5: Long.8". 27' 09"; Lat. 4" 37'00"
Point6: Long.8" 26' 36";Lat. 4" 36'00"
Point7: Long.8" 26' 03";Lat.4" 35'00"
Point 8:Long.8" 25' 42"; Lat4" 34' 18"
Point9: Long.8" 25' 35"; Lat. 4" 34'00"
Point 10:Long.8" 25'08"; Lat. 4" 33'00"
Point 11:Long.8" 24' 47"; Lat. 4" 32'00"
Point 12:Long.8" 24' 38"; Lat. 4" 31'26"
PointA: Long.8" 24'24" E;Lat. 4" 31'30" N
PointAl: Long. 8" 24' 24"E; Lat.4" 31'20" N PointB (coordonnéestelles que corrigéespar les chefs d'Etat nigérianet camerounais
dans l'échange de lettdes 12juin et17juille1975):Long. 8" 24' 10" E; Lat. 4'
26' 32"N
PointC: Long. 8"23' 42" E;Lat.4' 23' 28"N
PointD: Long. 8" 22' 41" E; La4" 20' 00" N
PointE: Long. 8" 22'17"E, Lat. 4"19'32"N
PointF: Long. 22' 19"E; Lat.8" 22'19" N
Point G: Long. 8O22'19" E; Lat4' 17'00" N
5.62 L'ensemblede l'histoirede la délimitationentre le 1etnt
le point G est visible sur la carte 3433 de l'amirautébritannique qui a servi de
support aux différents tra. lle est reproduite ci-contre (carteM.23).
1 SECTION 3. AU-DELADU POINT G
5.63 A partir du poinG en direction du large, toute délimitation
entre le Cameroun et le Nigeria doit prendre en compte une série de facteurs
beaucoup plus nombreux queceuxnécessaires la délimitationdes frontières deseaux
territoriales entre les deux Etats. Ces facteurs incluentune grande variété d'éléments
géographiquesetjuridiques.
5.64 La situation géographiqgénéraleest illustréepar le croquis
représentépagesuivante.
l
5.65 Les éléments géographiqueàs prendre en compte sont au
1 nombre de sept, de caractère particulier, troisétantde nature plus génésont. Ils
décrits ci-dessousdansles pa5.97- 5.99de ce Mémoire. La SituationGéographique Générale
I
-
GolfedeGuinee
Cameroun
(GuineeEquatoriale)
L --- --- - .
OcLan Atlantique
\5.66 A l'exception dela délimitationdécidéepar la Déclaration de
Maroua du ler juin 1975' qui concerneessentiellementles eaux temtoriales, il n'y a
pas eu d'autre délimitationentre le Camerounet le Nigeria. L'affaire est maintenant
portée devantla Cour par une requêteprésentée en vue de la délimitation duplateau
continental et de la zone économiqueexclusive entre ces deux Etats. Ceci est
l'occasion d'aboutirà une telle délimitation conformémen atux principes de l'équité,
une délimitation quidoit en toutes circonstancesconstituer "une solutionéquitable"au
sensdes articles 74 et 83 de la Conventiondes NationsUnies surle droit de la mer de
1982~et conformément à lajurisprudence dela Cour. C'est surcette recherched'une
délimitation équitableque se fonde l'argumentation du Cameroun relative à la
frontière maritimeau-delàdu point G.
5 1. Les ~rinci~es iuridiaues aoolicables
5.67 II convient, en premier lieu, de rappeler brièvement les
principesjuridiques applicablesàla délimitationmaritime.
A. - L'obligation dedébiter
5.68 L'obligation derechercherune délimitationpar voie d'accord
est apparue en premier lieu dans la Conventionde Genèvesur le droit de la mer
concernant le Plateau continental de 1958 qui énoncedans son article 6 que "les
frontières duplateau continental appartenantà [des] Etats [faceà face ou adjacents]
1 Pour le texte intégralde la Déclarationde Maroua. voirl'AnnexeM.C. 251, et aussi (pour
les commentaireset une carte illustrarive)le Rappon frontalier no 4-1, pages 841-48 du
volume 1 de I'imponant travail en deux volumes publié s1us les auspicesde la
Société américaide Droit international, internationalmaritime boundaries, publiépar
Jonathan 1. Chamey et Lewis M. Alexander (Nijhoff. 1991) (ci-après nommé
"INTERNATIONAL MARITIMEBOUNDARIES"), annexé à ce Mémoirecomme Annexe
M.C. 251.(Ce rappon indiqueégalemtue la Déclaratde Maroua a aussiécitée dans
The lawof the s:maritimeboundarvagreements(1970-84).United Nations1987,p. 97.)
2
La Conventiondes Nations Unies surle Droit de la Mer de 1982. citéedans ce Mémoire
comme "la Conventionsur le droit de la mer." 'la Conde Montego Bay," ou "la
Conventionde 1982."doivent êtredéterminées par un accord passé entreeux," mais poursuit en précisant
que "En l'absenced'un accord et sauf si une autre ligne frontière est justifiée par des
circonstances particulières,la frontiè. .. "doit être,soit la ligne médiane (dansle
cas d'Etats dont les côtes se font face), soit "détermiear l'applicationdu principe
d'équidistance" (danlse cas d'Etatsayant des côtes adjacentes).
5.69 Il n'est pas nécessairede revenir ici sur l'histoire de
l'applicationdu principe d'équidistance.La règles'est assouplieet son applicabilité
s'est réduite aucours des années. Comme on le verra ci-après, les tribunauxs'en
servent habituellement pour donnerun "point de départ" àune ligne provisoire, une
première étape du processus de délimitation à modifier et ajuster ultérieurementen
conformité avec les principes équitables pour amver à un résultat équitable. La
prédominanceou la primauté de l'équidistance en qualité de"principe" plutôt que de
"méthode" s'est érodée au cou drss décennies, etla Convention surle droit de la mer
de 1982,récemment entrée en vigueur, lui adonnéle coup de grâce.
5.70 Dans la Convention sur le droit de la mer de 1982, la
rédaction du paragraphe1 de l'article 74 relatià la zone économique exclusiveest,
mutatis mutandis, identique à celui du paragraphe 1 de l'article 83 sur le plateau
continental. Chacun fait référenc e l'importance de l'accorden vue d'aboutir à une
délimitation:
"La délimitation. . . .. entre Etats dont les côtes sont
adjacentesou se font face est effectupar voied'accord
conformémentau droit international tel qu'il est viséà
l'article 38 du Statut de la Cour international de justice,
afin d'aboutiràune solution équitable." (Souligné palra
Républiquedu Cameroun.)
5.71 Ces articles poursuivent, dansle paragraphe 2, en énonçant,
dans des termes identiques que"Si aucun accordne peut êtreobtenu dans un laps de
temps raisonnable, les Etats concernés auront recoursaux procédures prévues danlsa
partie XV" (c'est-à-dire les articles279-299 relatifs au règlement des différends).
Comme cela est précisé ci-dessusdanls a section(2) du présentMémoire, (V. chapitre
4, section 2, ci-dessus),les Parties au présent différont tenu quantité de réunions
et de négociationsen vue de rechercher une solution à leurs problèmes de frontières
maritimes. Ces réunions onteu lieu entre 1971 et 1975 mais n'ont pas permis de
parvenir à un accord sur les frontières maritimesau delà des limites des eaux
territoriales.5.72 C'est ce qui a conduitle Cameroun à saisir la Cour de ce
différend, conformémena tux directives figurantdans les articles74, paragrap2,et
83, paragraphe 2, précitése la Conventionsur le droit de la mer de 1982.
B. - Les principesdedéiiitation
5.73 La Cour fondera naturellement son arrêt surles sources du
droit internationalénumérée àsl'article 38,paragraphe1,du Statut, et d'abord surles
"conventions internationales .. . .qu'elles soient généralesu particulières,posant
des règles expressémenrteconnuespar les Etats en litige " (alia)).
5.74 Quelle convention peut être applicableen la matière ?
L'article 6de la Conventionde Genèvede 1958ne s'applique pas en l'occurrence :
en dépit du faitque le Nigeria soit partià la Conventionde Genèvesur le Plateau
continental de 1958 (28 avril 1971), le Cameroun ne l'est pas. Par conséquentla
position des Parties vis-à-vis de cette convention est exactement la m@meque les
positions respectives des Pays-Bas et du Danemark d'une part, et de la République
Fédérale d'Allemagne d'autrp ean, dans l'affaireduPlateauContinentad le la Mer du
Nord de 1969. (C.I.J., arrêt,20 février 1969,affaire duPlateau Continenta dle la
Mer du Nord, Rec. 1969). Dans la présente affaire, leseul accord international
applicable est la Convention de 1982. Le Nigeria l'a ratifiéele 14 aoiit 1986 et le
Cameroun l'a ratifiéele 19 novembre 1985. Elle estentrée envigueur en novembre
1994.
5.75 En règle générale,les principes de droit coutumier
internationalen matière de délimitatiopeuvent êtreexpriméspar une formule simple
selon laquelle toute délimitation doit se faireconformémentà des principes afin de
parvenir à un résultatéquitable sansqu'il existeune méthode unique etimpérative de
détermination de frontières maritimes. A cet effet, les Parties (ou la Cour) doivent
prendre en compte toutesles circonstancespertinenteset veiller ce que les résultats
d'une délimitationne soient pas disproportionnés en terme de rapport entre les
longueursde côte et les zonesmaritimesconcernées.
5.76 Le principe selon lequell'équidistancen'est pas un principe
contraignanten droit coutumier internationala 6téclairement énoncé à l'occasion de
la première affaire de délimitationportée devantla Cour, l'affaire du Plateaucontinental de la Mer du Nord. (Ibid.). Dans cette affaire, la Cour a clairement
souligné l'importance desprincipes équitablesdans les questions de délimitation
maritime. Ce principe a étéconstamment mis en oeuvre dans les nombreuses
affaires ultérieures de délimitationmaritime(.C.I.J., arrêt,24 février 1982, affairedu
Plateau Continental(Tunisie/Jamahiriya arabe libyenne),Rec. 1982; C.I.J., arrêt,
12 octobre 1984, affaire dela Délimitationde lafrontière maritimedans la régiondu
golfe du Maine, Rec.1984; C.I.J., arrêt, 3juin1985, affairedu Plateau Continental
(Jamahinyaarabe libyenne/Malte), Rec. 1985; C.I.J., arrêt,11 septembre 1992,
affaire du Drfférenfrontalier, terrestre, insulaireet maritime(EiSalvador/Honduras
; Nicaragua (intervenant)),Rec. 1992; C.I.J., arrêt,14 juin 1993, affaire de la
Délimitationmaritime dans la région située entre le Groenlae ntdJan Mayen, Rec.
1993). Il en est alléde mêmedes arbitrages rendus en la matière.(Arbitrageentre la
République Française et lR eoyaume Uni en matièrede la Délimitationdu Plateau
Continental,décisionsde la Cour d'Arbitrage du 30 juin 1977et du 14 mars 1978,
Londres, HMSO Misc. no 15(1978), Cmnd. 7438; Décisionde la Cour d'Arbitrage
du 14 février1985dans l'affairede la Délimitationde la Frontière Maritime entre la
Guinée etla Guinée Bissau,texte anglaisà 25 1~~252 (1986); Décisionde la Cour
d'Arbitrage du 10 juin 1992 dans l'affaire de la Délimitationdes Zones Maritimes
entrele Canadaet la France,texte anglais à 31 ILM 1145(1992).
5.77 Toutefois, en ce qui concerne la méthodeapplicable, il
ressort clairement de la pratique des Etats qu'il n'existe pas une méthodeunique de
délimitationmaritime considéréc eommeobligatoirepar les Etats ; ceux-ci sont libres
d'appliquer toute une sériede méthodesdifférentes dumoment qu'ils arrivent à des
résultats perçuscomme équitables.(V. Internationalmaritimeboundanes, volume 1 à
pp. xlii-xlvi).
5.78 ies principes juridiques régulièrement adoptép sar la Cour
depuis l'affaire du plateau continentalde la Mer du Nord ont eu pour effet de
souligner l'importance d'une approche souple, prenant en compte toutes les
circonstances pertinentes, afm d'arriverà un résultatéquitable,et de l'absence de
toute règle rigide qui impliqueraitle recours exclusià une méthodede délimitation
particulière (comme par exemple la méthodede l'équidistance). La règle de base
développée parla jurispmdence est donc comparable, dans ses effets, au libellé des
article 74 et 83 de la Conventionde 1982 :on y parle de "solutionéquitable"obtenue
"sur la base du droit international". C'est ce quereflètela pratiquedes Etats. 5 2. Aonlication en l'esnèce
5.79 La divergence des prétentionsdu Camerounet du Nigeria en
ce qui concerne la largeur de leurs eaux territoriales ne pose pas problème. Le
Nigeria revendique des eaux territorialessur une largeur de30 milles marins et le
Cameroun sur 50 milles . Ce conflit potentiel a étannulépar l'entréeen vigueur
ultérieurede la Convention de 1982et son article 3, dénuéd'ambiguïté, restreint les
eaux territorialesdes signatairesouzemilles marins.
5.80 La Déclaration de Maroua a spécifié clairementune frontière
des eaux territorialesentre les PartieLa ligne de Maroua s'arrêteau point "G", ce
qui implique, en fait, l'acceptation par lesdeux Etats d'une largeur de leur mer
territoriale de 12 milles marins et ce dès 1975. En revanche il échoàtla Cour de
délimiterla direction dela frontière maritimeau delà du point G.
5.81 La demande de délimitation figurant dans la requête
introductive d'instance du Camerounne pourrait pas êtreplus nette. Le paragraphe
20 (f) de la requête déposéle19avril 1994précise :
"Afind'éviterla survenance de tout différend entreles
deux Etats relativement à leur frontière maritime, la
République du Cameroun priela Cour de procéderau
prolongement du tracé desa frontière maritime avecla
République Fédérald eu Nigeria jusqu'à la limite des
zones maritimesque ledroit internationalplace sous leur
juridiction respective." (Reauète iniroductive d'instance
du 29 mars 1994,par. 20, f).
En faisant référenceà "des zones maritimes que le droit international placesous leur
juridiction respective", la requne fait pas la distinction entre leseaux territoriales,
la ou les zones économiques,ou le ou les plateaux continentauxdesParties.
5.82 La situation géographique aétédécrite demanièregénérale
et illustréepar la figureo 4-1ci-dessus. Un des premiers problèmesauxquels la
Cour aura à faire face pour amver à une solution équitablepour la délimitation est
que la "ligne de Maroua", établie parla Déclarationde Maroua du ler juin 1975 et
qui relie le point 12 (8" 24' 38E de longitudeet4" 31' 26"N de latitude)au point
G (8" 22' 19" E de longitudeet 4" 17'00" N de latitude)en huit étapes,n'est ni une
ligne fondéesur l'application dela méthode d'équidistanc eiune ligne qui peut être
prolongée plus avant dans lezonesmaritimes des Parties.5.83 Selon l'analysedM. AndronicoADEDE dans International
maritime boundaries, la Déclaration deMaroua a étépour partie motivéepar des
considérations liéàsla "freedom and security of navigation in the CalabarICross
River Channelof ships of the two parties." LesParties ont également prisen compte
"[the] existence of oil and the livingresources aroundthe estuaries of Ri."del Rey
La délimitationde Maroua a été décritceomme "an example of a maritime boundary
delimitation by an agreementin which the two parties attempted to achieve equitable
results by addressing specific controversiesarising from resource, geographical,and
geomorphologicalconsideration".
5.84 Le croa ueirsduit dans International maritime boundaries
à la suite de la page 844 et le commentaire no 4-1 lui-même montre clairement
comment la ligne de Marouaest située plusieurs màll'est d'une ligne équidistante
constmite vers le large à partir de l'extrémité dela frontière terrestre dans
l'embouchure de la rivièreAkwayafé(identifiàetort sur ce croquis commela "Rio
del Rey"). Elle désavantagedonc le Cameroun. Elle est aussà un azimut ou un
angle très différentde l'angle de la ligne d'équidistance,et, égàlcet égard,
elle est désavantageupour leCameroun.
5.85 Ce croa usteprodui? page suivante.
5.86 A cet égardla Républiquedu Cameroun tienà préciserqu'il
n'entre nullement dans sesprétentionsde demander une révisionde la frontière
définiejusqu'au point G par la Déclarationde Maroua. Tout au contraire: le
Cameroun (à la différencedu Nigeria) respecte ses engagements internationaux
précisés dansla Déclarationde Maroua et ne demandepas à la Cour de les modifier
ou de les remanier. L'International maritime boundaries a reprisla délimitation de
Maroua dans le rapport numéro4-1 sans indication de contestation de la pan du
Nigeria.
5.87 La Déclaration de Maroua est examinéede façon plus
détaillédans précédente sectio, aisun point supplémentairen'enméritepas moins
un rapide examen ici. Il doit êtrebien compris que si les Parties sont tombées
d'accord en 1975sur une solutionéquitablepour la délimitationlimitéede leurs eaux
3 Reproduitavec l'autorisationde I'AmericanSocietyofLaw.(La publication en
deux volumes deinternationalmasitirneboundaries, dontsont extraitesles reproductions,est
éditépar Maninus Nijhoff Publishers,P.O. Box 1263, 3300 AD Dordrecht, PaysBaset le
KluwerAcademic Publishers G, .O. Box3à2la même adresse.)territoriales, celane signifiaitpas du tout qu'une telledevait étreprolongée dans
les autres zones maritimes. Le Cameroun ne peut absolument pas envisager une
extension de la ligne de Maroua dans la même direction généralau-delàdu point G.
Les "circonstances spéciales" quiont justifiéla compréhension dontil a fait preàve
l'égard du Nigeriane se retrouventnullementau delà du point terminal de cetteligne
("Point G"). Dès lors, un infléchissement notablede la direction de la ligne de
délimitation versle sud-ouest s'imposeau delà du Point G, tant par rappàrla ligne
de Maroua que par rapport àla ligne d'équidistance.
5.88 Cela est vrai pour deux raisons liées. La première est la
suivante: le simple fait que la ligne de Maroua ait fait l'objet d'un accord entre les
Points 12 et G en 1975 pour la délimitation des eauxtemtoriales ne signifie pas
qu'une ligne similaire, quelle qu'elle soit,puisse ou doive fait l'objetd'un accord
pour d'autres zones maritimes. Le fait que certains éléments, mentionnés ci-dessus,
devaient logiquementétrepris en compte à courte distancede la côte ne signifie pas
qu'ils doivent l'êtrepour des distancesplus importantes. Celava pratiquement de soi
quand il s'agit d'un chenal de navigation. Il existe de grandes différencesentre les
délimitations des eaux territoriales et les délimitatdu plateau continental et des
zones économiques exclusives ;les premièresne doivent en rien avoir un caractère
dominant sur les dernièresni en préjuger. C'est l'objet même de l'institution de
différenteszoneset de ptise en compted'élémentdsifférentspour leur délimitation.
5.89 En second lieu, ne serait-ce que parce que la ligne de
Maroua a favoriséle Nigeria aux dépensdu Cameroun, elle peut être considérée
comme une concession du Camerounau Nigeria. Le faitde continuer la ligne dans la
mêmedirection sans ajustement ou variation ultérieure reviendrait à imposer une
concession globale, indéfiniedans l'espace,u Camerounen faveur du Nigeria et, en
l'absence d'accord, cela serait assurément toutà fait inéquitablet reviendraità
imposer au Cameroun un inconvénient supplémentaireP .our êtreéquitable, tout
prolongement supplémentaire dela mêmefrontière maritime au delàdu Point G doit,
au contraire, se traduire en "compensation"par une concessiondu Nigeria en faveur
du Cameroun.
5.90 Un coup d'oeil sur la carte montre que la situation
géographique constituée palra Baie de Biafra combine certaines despires anomalies
géographiques examinées dans les affaires de délimitation maritidoent la Cour a eu
à connaître. Le Cameroun se voit confrontéau mêmeproblèmede côte fortement
concave que la RépubliqueFédérale d'Allemagne en 1969. A cet effet, il estinstructif d'étudierla carte n"3 reproduiàela page 15 de l'anétde 1969rendu dans
l'affaire dulateau continentad lela Mer du Nord; la carte est tournéede telle sorte
que le nord se trouve à gauche, faisant ainsi ressortir, dansla zone situéeentre les
pointsA, B, E, D, et C, une ressemblancesurprenanteavecla présente situation (voir
croquis ci-dessous):5.91 Il est aussi instructifde se pencher à nouveau sur les croquis
reproduits à la page. 16 de l'arrêt de1969 précitée, qui font ressortirles effets
inéquitablesde.l'applicationd'une lignede frontière équidistante dans une situation de
ce genre :5.92 Le Tribunal d'arbitraga e eu à connaîtred'un problème
similaireen 1977 dans 1'affaire dela Merd'Iroise. Le Tribunaln'aaccordé qu'un
effet limitéauxIles Anglo-normandep souréviter d'aboutirà un résultaitnéquitable.
4
(Arbitrage, par.201-203, pp. 95-96). Ceprocédé est illustci-dessous:
4
VoirInternational maribeundaries.Rapportno 9-3(a),pp. 1735et S.; crp.1746
(croquisreproduitavec l'autorne1'AmericanSociewof Internatiolaw).5.93 La questionde 1' "amputation"a été plus récemment abordée
dans l'arbitrage relatif à St. Pierre et Miquelon entre le Canada et la France, où les
îles menaçaient de priver d'accès à la haute mer les côtes de Terre Neuve. La
question a étérésoluepar la création d'un étroic touloir direction sud, illustréeci-
dessous5 :
5
VoirInternationl aritime boundarR,apponn' 1-2(a),pp. 387 et seq.; Addendàla
p. 401 (reproduavecautorisatide1'AmericanSocietyof InternatiLaw). 5.94 Les arguments avancés parle Tribunal arbitral en faveur de
la configuration inhabituelle du "couloir" vers la mer orientévers le sud des iles
étaientque :
"II n'existe pas de motifs pour faire valoir que [la]
projection frontalede SaintPierre et Miquelondans cette
zone doit s'arrêterà la limite de 12 milles des eaux
territorial.s. . D'autre pan, une telle projection vers
l le large ne doit pas empiéterou couper une projection
frontale parallèle dessegments adjacentsde la côte sud
juin 1992 dans l'affaire de la Délimiwion des Zones10
l Maritimes entrele Canada etla France,texte anglaisà
31 ILM 1145(1992), par. 70, p. 1170).
1 Le Tribunal poursui:
"Aux fin s'obtention de ce résultat,la projection direction sud doit
êtremesurée à la largeur de l'ouverturecôtièredes îles françaisesvers
le sud."(Ibid par. 71, p. 1170).
1 5.95 La notion d' "amputation" et ses relations avec un résultat
équitable en matièrede délimitation a été traitée datsute une séried'affaires de
( délimitation maritime.La situation géographique dela Baie du Biafra combine les
inconvénientsde la ligne côtière concave allemandeen Mer du Nord avec la position
des îles Anglo-normandes. Du fait de la présencesimultanéede toutes ces anomalies
et difficultés géographiques dans la présente affaire, toute solution équitable
correspondant aux exigencesde la nouvelle Conventionsur le droit de la mer ne peut
êtrebaséesur une méthodeunique.
5.96 Au bénéfice de ces remarques, il convient de définirla zone
pertinente en vue de la délimitation. Il s'agit d'unezone situéeau-ddeàla limite
des 200 milles marins des lignesde base partir desquelleson mesure la largeur des
eaux territoriales par rapport aux côtes continentales. La zone ne peut exclure les
éléments géographiquesdonnéspar la nature,y compris le fait de la présencede l'île
1 de Biokoet, plus au large, celle des îles de SaoToméet de Principe. La zoneest celle
indiquéesur le croquispage suivante.
1
5.97 Un coup d'oeil sur ce croquis suffit pour voir qu'il existe
plusieurs facteurs géographiquescaractéristiques de la zone que la Cour doit La Zone Pertinàla Délimitation
--------
----
----____----
(Limited200milles marins)certainement prendre en compte pour arriver à une solution équitable entre le
Cameroun et le Nigeria. Sept présententun caractèrespécifique,et trois sont de
nature plus générale.
Les facteurs spécifiquessont :
5.98
i) La concavité frappantede la ligne côtièreautour du delta du Niger, avec un
"décalage"ou une "bosse" de 90" sur la ligne côtièrecommençant à l'est de
Lagos et se terminant pratiquement au point frontière terrestre avec le
Cameroun.
ii) La localisation précisedu point frontière entre le Nigeria et le Cameroun
exactement à l'emplacement duchangementde direction de la côte nigériane,
et l'orientationnord-est/sud-ouestde l'embouchurede la rivièreAkwayafé qui
s'éloigneainside la masseterrestre du Camer'oun.
iii) Le changement de direction tout aussi frappant de la ligne côtière africaine
juste à l'est de la frontière NigeriatCameroun, entraînant une concavité
marquéede la côtecamerounaise quiforme pratiquementun angle droit.
iv) La présenceimmédiateet dominantede la grande îlede Bioko à seulementune
douzainede milles marinsau large de la côtedu Cameroun.
v) Le fait que la côte du Cameroun, avec cet angle d'environ 90°, amplifie ou
"prolonge" l'effet "amputation" de l'ile Bioko sur les zones maritimes qui,
sinon, seraient camerounaiseset qui s'étendraienten direction sud-ouest dans
la Baiede Biafra.
vi) La présenceplus au large de l'archipel formédes îles de Sao Tomé et
Principe, et, en particulier, de l'ile de Principe. Il est notable que les trois
îles, Sao Tomé, Principeet Bioko, sont pratiquement alignéesen ligne droite
dansune duection sud-ouest nord-est à un azimutde 45 O. Leur configuration
pourrait difficilementêtreplus désavantageusepourle Cameroun.
vii) Le fait que la lignecôtière continueà tourner sur son axe lelong de la rive du
Rio Muni, en Guinéeéquatoriale,la partie terrestre du territoire de cet Etat,
ajoutant ainsi un élémentsupplémentairequi réduitles droits maritimes du
Cameroun.5.99 Les facteursplus généraux sont :
viii) Le fait que globalement, le segmententier de la côte de l'Afrique del'Ouest
donnant sur la Baie de Biafra (et, plus loin, surle Golfe de Guinée), à partir
de la BrassRiver au Nigeria à l'ouestjusqu'à Port Gentildansle sud, peut être
décrit comme un demi-cercle ouune hémisphère pratiquementparfaite.
ix) Le fait que la côte camerounaise surla Baie du Biafraest virtuellement à l'axe
central de ce demi-cercle ou hémisphère, situation qun ie pourrait êtreplus
défavorable.
X) Le fait que les trois îles fassent écran bloquant lescôtes maritimes de tous les
Etats cotiersde la région saufle Nigeria.
5.100 La situation de la régionoù seuls deux des nombreux Etats
côtiers concernésont réaliséune délimitation ou ont cherché à le faire est donc
complexe. Néanmoins, rien n'empêchle a Cour de résoudrele différend.Quel effet
peut avoir l'absence des tierces partiesconcernéesdans la présente affaire, notamment
la Guinée équatoriale et Sao Toméet Principe ? Aucune délimitation dans cette
affaire ne peut les affecter. Toute décision seraitres interalios acta pour les autres
Etats. Cela est confirmépar une longue séried'arrêtsde la cour6, et résultede
l'article 59de son Statut.
5.501 S'agissant d'une délimitation poulraquelle il n'y a pas de
délimitations antérieures, ni de points triples arrêtés d'un commun accord, la Cour
peut-elle "arriver àune solution équitable" dans une zone si complexe et si dense au
plan géographiqueen l'absence d'interventionde la Guinéeéquatorialeet de Sao
Toméet Principe ?
5.102 L'affaire Tunisie/Libyeconstitue un exemple dans lequel la
Cour s'est prononcée surune situation comparable :
6 Voir par eremple: C.I.J., arrêt.14 avril 1991, affaire du Plateau Conrinenrai
Ijr,nisie/Jamahiriarabelibyenne),requétà lafin d'inrenzenri,ec. 1981.p. 19.par.
33 ;C.I.J..arrët,24 févr1982,affaireduPlateauContinental(Tunisie/Jamahiriyaarabe
libyenne)Rec. 1982,p. 91. par. 130,p.94, par. 133(C)(3)(disposi;iC.I.J., arrët,21
mars1984,affaireduPlateauconrinenral(Jamahiriyaarabe libyenne/Malre),equéteàla
fin d'inrervenri, ec. 1984,p. 26. par.;et C.I.J., arrêt3.j1985,affaireduPlareau
conrinental(Jamahiriyarabelibyenne/Malte).Rec. 1985,p. 25, par.21) "II est en outre légitime de partirde l'hypothèse quela
totalité de cette région serait partagée paurne ligne de
délimitationentrela Tunisieet la Libye ;en effet, s'il est
droits que d'autres Etats pourraient fairevaloir dans la
surfaces en chiffres absolus, mais des proportions. des
vrai'dire, s'il n'était psossiblede fonder des calculsde
proportionnalitésur des hypothèsessemblables, on voit
mal comment deux Etats pourraient tomberd'accord sur
l'équité d'une délimitation bilatérale tq ant toutes les
autresdélimitationsn'auraientpas été menées à bien dans
la même région". (C.I.J.,arrêt,24 février 1982,affaire
du Plateau continental (Tunisie/Jamahiriya arabe
libyenne), Rec.1982, p. 91, par. 130).
5.103 Cette dernièrephrase est particulièrement importante. II est
évident quela plupart des quelque 130traitésde frontière maritimesexistants (V.
International maritime boundaries,volume1aux pp. xlii-xlvi), n'auraient jamaisvu le
jour s'il n'avait pas étépossible pour les Etats concernésde faire au plan bilatéral,
précisémenc te que la Cour suggère, c'esà due de tomber d'accord surune frontière
maritime deux et deux sansque la participation de tous les Etats potentiellement
impliqués dansla zoneen questionsoit un préalable nécessaire.
5.104 Dansla présente affaire aucunélémenn t'interdiàla Cour de
déterminerles droits respectifsdu Cameroun et du Nigeria sanspréjudice desdroits,
quels qu'ils soient, de la Guinéeéquatoriale ou de SaoToméet Principe. En
revanche, les particularités géographiqued se la présente affaire ainsi que les
exigences posées par les article74 et 83 de la Convention sur le droit de la mer font
que la Cour ne peut éviterde prendre en considération l'existenceet la situation
géographiquede ces Etats, faitsqui peuvent avoir une influencesur ce que la solution
équitable devrait êtreen la présente espèce.
5.105 La solutiondu problème parla Cour doitêtreéquitable. Elle
ne sauraitl'êtresi elle ne prend pas en comptel'impact deces données surla situation
des Parties.
5.106 Loin d'essayer de "refairela nature", une délimitationfondée
sur des principes équitables, devrait,comme la Cour l'a souligné maintes fois,
prendre en compte toutes les situations pertinentesde la zone, et le résultat devrait
comporter un degré raisonnablede proportionnalité entreles zones de plateau et la
longueur des côtes concernées. De telles délimitations devraientaussi refléter et
corriger toute distorsion telle que l'effet deblocage ou d'"amputationMde toute îlesituée prèsdes côtes (Bioko), et de tenir compte de manière adéquate desîles plus
éloignées.
6 3. La ligneen général
5.107 Jx Cameroun a demandé à " ...la Cour de procéderau
prolongement du tracé desa frontière maritime avecla République fédérald eu
Nigeriajusqu'à la limite des zonesmaritimes que le droit internationalplace sous leur
juridiction respective." (Reauête introductive d'instaneu 29 mars 1994, par. 20,
f). Par cette demande, la Requête vise une frontière maritime unique qui délimitera
tant les plateaux continentaux que leszones économiques exclusivesrespectives des
Parties. C'est de cette manièrequ'avait procédé la Chambre de la Cour en 1984 en
retenant une ligne unique de délimitation des zones maritimesans l'affaire duGolfe
du Maine. (C.I.J., arrêt12 octobre 1984, affaire de la Délimitatiode la frontière
maritimedans la région du golfeduMaine, Rec. 1984).La Chambre y a brièvement
examinéla légalité de la questionposéedans le compromis: " Quel est le tracéde la
frontière maritimeuniquedivisant le plateau continentalet les zones de pêch...? "
(Ibid.,p. 253.). Elle a concluque la demande était parfaitement approprié(" ...le
droit international ne comporte certes pasde règles quis'y opposent." Ibid., 267.
V. aussi pp. 326-37). Neuf ans plus tard, la mêmequestion s'est posée à nouveau
dans l'affaireJan Mayen, (C.I.J. arrêt, 14 juin 1993, affaire de la Délimitation
maritimedans la région située entre le Groenland Jaet Mayen, Rec. 1993). mais
cette fois dans le contexte d'une affaire portée devantla Cour par une requête
unilatérale fondée sur déclarations facultatives (ce qui correspond précisémeàtla
situationdans la présente espèce).La Cour n'a pas hésitéà rendre sa décision surla
demande du Danemark et à adopter une ligne unique pour délimiter à la fois les
plateaux continentauxet les zones économiques exclusives des Parties.(Ibid.,pp57-
59).
5.108 Quel devrait être lepoint de départ dela lign? Ce point
doit êtrele Point "G" établi parla Déclaration de Maroua et nonpas un point
quelconque sur la ligne d'équidistanceentre les côtes des Parties.Cela n'aurait pu
êtreenvisagé sila Déclaration de Maroua n'avait pas étéadoptée par les Partieset ne
les liait pas.5.109 II faudra tenir comptede cette divergence quandla Cour
devra évaluer le caractère équitabledu résultat danscette affaire. Il ne serait
qu'équitableque le Nigeriadonne compensationau Cameroun pouravoir fait cette
concession initialepour tenir compte desintérêtn sigérians enajustantle tracéde la
ligne au delà du Point "G". En d'autres termes : le Nigeria ne peut espérer
revendiquer l'avantage d'unaccord favorableavec le Cameroun sans "rendre la
pareille" au Cameroun dans une zone où l'élément qu liavaitjustifié,l'accèsaux
couloirs de navigation, ne présenteplus de pertinenceparticulière. C'est donc au
Point "G" que la délimitation doit commencer.
5.110 La lignede délimitation équitabdloit refléterle changement
de directionnord-sudde la côtedu Camerounsur environ quarantemilles le longdu
9èmeméridienest. Cette ligne doit aussi refléter la concavité marqud éeela ligne
côtièredu Camerounqui débute àpeu dedistancedu point frontière. A cette fin, la
Cour peut s'appuyersur son expérience dans l'affaire dulateau Continentalde la
Mer du Nord, où le paragraphe 8 de l'arrêténoncel'effet inéquitabled'une telle
conf~gurationcôtière :
"Dans le cas d'une côte concave ou rentrante , . .
l'application de la méthodede l'équidistancetend à
infléchirles lignesde délimitativers la concavité.Par
suite, quand deuxlignes d'équidistancesont tracéesà
partir d'une côte très concave, elles se rencontrent
inévitablement à une distance relativementfaible de la
côte ; la zone du plateau continentalqu'elles encadrent
prend donc la forme d'une sortede triangle au sommet
dirigévers le large, ce qui... "ampute"1'Etatriverain
des zones de plateau continental situéea su dehors du
triangle." (C.I.J.,c. 1969,p. 17).
(Ceproblèmeest illustrépar lecroquis reproduitsous lepar. 5.90 ci-dessus.)
5.111 Une ligne de délimitation équitabld eoit aussi refléterles
différencesde longueurdes côtesrespectives convergeant sur la zonede délimitation.
S'ily a une différence,il faut qu'ellesoitéquitablementrise encompteen ajustantla
ligne de délimitation demanièreà avoir un degréraisonnablede proportionnalité,
comme dans les affairesdu Go@ duMaineetLibye/Malte.Dans l'affaire duGolfedu
Maine, la Chambre aprocédé à l'ajustement dela lignemédianeprovisoireau début
du deuxième segmentpour tenir compte des différencesde longueur des côtes
riveraines de la zone de délimitation. (C.I.J.,arrêt,12 octobre 1984, affaire dela
Défimitarion de la Frontière Maritimdeans la Régiondu GolfeduMaine, Rec. 1984,
pp. 334-337, et spécialementp. 336). Dansl'affaireLibye/Malte, la Cour est arrivéeà des résultats similaireset a ajustéla ligne médianeprovisoire entre les deux Etatsen
conséquence. (C.I.J. Affaire du Plateau Continental (Jamahiriya arabe
libyenne/Malte),Rec. 1985, pp. 51-53).
5.112 Ces ajustements ont été effectués conformémen atux
exigences de la "proportionnalité," principereconnu pour la première fois dans
l'affaire du Plateau Continentadle la MerduNord :
"Un dernier élément à prendre en considération estle
rapport raisonnable qu'une délimitation effectuée selon
des principes équitablesdevrait faire apparaître entre
l'étenduedu plateau continental relevant des Etats in-
téresséset la longueurde leurs côtes; on mesureraitces
côtes d'après leur direction générale afid n'établir
l'équilibre nécessaireentre les Etats ayant des côtes
droites et les Etats ayantdes côtes fortement concaves ou
convexes ou afin de ramener des côtes très irrégulières
des proportions plus exactes." (C.I.J., arrêt20 février
1969, affaire du PlateauContinentalde la MerduNord,
Rec. 1969, p. 52).
5.113 Le test de proportionnalitéa, par la suite, été appliqué lr
Cour dans les affaires Tunisie/Libye,(C.I.J., arrêt, 24 février 1982, affaire du
Plateau Continental(Tunisie/Jamahirya arabe libyenne),Rec. 1982, pp. 75-76, p.
91) ; GolfeduMaine,(C.I.J., arrêt, 12octobre 1984, affairede laDélimitation de la
Frontière Maritimd eans la Régiondu GolfeduMaine, Rec. 1984, p.246 ;p. 323).
LibyelMalte, (Affaire du Plateau Continental(Jamahinyaarabe libyenne/Malte),
Rec. 1985, pp. 43-46; pp. 53-55, pars.) et JanMayen (C.I.J., arrêt, 14 juin 1993,
affaire de la Délimitation Maritime dans R légionSituéeentre le Groenland etJan
Mayen, Rec. 1993, pp. 67-69, pars.66-69. Les termes du paragraphe 185 de l'arrêt
de la Chambre dansl'affaire du GolfeduMaineont été citéest pleinement approuvés
par la Cour dans l'affaire JanMayen (à p. 68,par. 66, citant l'arrêt relafu Golfe
duMaine p. 323).
5.114 La ligne doit aussi prendre en compte la présence dela
grande île de Bioko, non pas pour établir des droits du Cameroun par rapport à la
Guinée équatoriale (ce qui serait impossible en raison de la non-participation de cet
Etat aux débats), mais plutôt pour refléter l'existendee cette grande île en tant que
fait géographique, aux dépend su Cameroun, dansune zone qui devrait être partagée
équitablemententre tous les Etats de la zone. Tout comme le droit de la mer
moderne, pleinement applicabledu fait de la ratification dela Convention d1982 par
les Parties, exige une "solution équitable"et pas uniquement une"ligne équitable",une situation comme celle de la présente affairenécessiteun équilibragecollectif des
équités, desavantages et des inconvénientsentre les différentsEtats du littoral de la
Baiede Biafra.
5.115 11se trouveque la premièreaffaire de délimitation maritime
dont aità connaitre la Cour, aprèsl'entrée envigueurde la Conventionsur le droit de
la mer en 1994, concerne unezone trèscomplexe, un espacemarin semi-clos, où les
Etats côtiers occupent des positions géographiques présentantes avantages et des
inconvénientsfort divers. Dans cette situation, où le Cameroun est désavantagé non
seulement par un changement de direction de la ligne côtière, mais aussi par une
forme concave générale trèpsrononcéede sa côte, il connaît en outre l'inconvénient
supplémentairedû à la présenced'une grande île directement devant sescôtes, située
précisémend tans l'axe du changementde directionde la côte; en outre son accèsaux
ressources océaniquesest entravé par la présencd e'un petit Etat archipel plus au
large. C'est là une situation d'unecomplexité unique etqui, comme cela est exposé
ci-dessus, réunitles élémentles plus défavorablesde toutes lesaffaires de frontières
maritimes. Dans tous les cas de figure, c'est le Cameroun qui est 1'Etat côtier
désavantagé.
5.116 Le premier segment d'une délimitationéquitable devrait
commencerau Point G de la lignede Maroua,puis aller rejoindre, le plus directement
possible, la ligne d'équidistanceentre le Nigeriaet le Cameroun. Cela permettraitde
rétablir l'équilibre entrlees deux côtes, déjà compropar la ligne de la Déclaration
de Maroua, aux dépens duCameroun. Ce point est indiquépar le Point "H" sur le
croquis qui se trouve page suivante.
5.117 De ce Point H, la ligne de délimitationdoit changer de
direction pour réfléchir l'orientatgénéralede la régionet les relations des façades
maritimes pertinentes des Parties.mesure que la ligneprogresse vers le large, elle
doit refléterle fait que, en premier lieu, la Baie de Bomy et, en second lieu, la
grande Baie du Bénin, comprennent toutes les façadesmaritimes directement
concernéesdu Cameroun et du Nigeria. La côte nigériane pertinente suune ligne
presque ouest-est s'étendantd'Akasso (latitude 4'20'N et longitude 6"E) à Bonny
(latitude 4"27'N et longitude 7'10'E) qui se trouvàl'est presqu'au miliede cene
côte entre Akassoet le point frontaliernigéro-camerounais.
5.118 La façade maritime du Cameroun est donc composéede ces
deux segments presque droitset formant un angle net. La première s'étenddu pointLa PremièreÉtaped'une LigneÉquitablefrontalier nigéro-camerounaijusqu'à Londji; la deuxièmes'étendde Londjijusqu'au
point frontalier camerouno-guinéen. Les étendues respectivesde ces secteurs des
côtes pertinentes peuvent èue facilement calculéesen fonction des différentes baies
considérées.
5.119 Si l'on considèrela carte générade la régiondans laquelle
cette délimitation doit prendre place, onconstateque l'aire totale pertinentese divise
logiquementen trois "zones" différentes. Lescôtes africainesentre AkassolBrasset
Cap LopezlPort Gentil (au Gabon) semblent avoirétémordues par une échancmre
énorme,qui contient les '"baies" de Bomy et du Biafraet une grande partie des eaux
de la section orientale du Golfede Guinée. Si l'on avancede la côte vers lelarge, en
partant du point frontalier nigéro-camerounais, onconstate immédiatementqu'une
première zone est forméepar la section de l'échancmrela plus proche des &tes,
bornéeau sud-ouest vers le large par une ligne droite imaginaire allantde Bonny
(Nigeria) au nord-ouest (au latitude 4'27' N et longitude 7" 10' E) à Campo
(Cameroun) au sud-est (latitude 2" 22'N et longitude7" 10' E). Il faut noter que
I'ilede Biokoest presque entièrementencastrédanscettepremièrezone.
5.120 La deuxième zone pertinente se trouve plus au large
directementà côtéde la première (quivientd'êtrdécrite). Prolongeantla précédente
vers le sud-ouest et pour une distanceà peu prèségale, cettedeuxième zoneest
également bornée parla ligneBonnyICampo(décrite dansle paragrapheprécédente )t
par une ligne droite allant du villaged'Akasso (Nigeria)au nord-ouest (latitude4"20'
N et longitude6" E) àGabo San Juan (Guinéeéquatonale)au sud-est (latitud1°8' N
et longitude 9'23' E). Cette configuration englobe la vaste baie qui baigne
l'ensembledes côtes des deux Parties. Elle inclut égalementla façade maritimede la
Guinée équatoriale,résultat inévitablede cette progression logique qui reflète
l'orientation générale dezones maritimes dans lesquelles la délimitation doitêtre
faite. En effectuant les calculs nécessairespour prendre en compte la longueur
respectivedes côtes des Parties, il convient, dansce secteur, de déduire préalablement
l'incidence dela côte non-pertinentedela Guinéeéquatonale.
5.121 La troisième étapen'est pas strictement nécessaireà la
délimitation, mais confirme l'équité usultatobtenu. Elle prenden considérationla
très vaste échancmredes côtes africaines dans la région,d'une manièrecomplèteet
logique. Cette troisièmezône est enfermée entrela lignejoignant Akas(ànouveau)
au nord-ouest,à Cap Lopez prèsde Port Gentil (Gabon)au sud-est (latitude0'37' S
et longitude 8"43' E). On peut noterque I'ilede Principejouxtecette dernière ligne.Pour effectuer les calculs de proportionnalité entreles côtes respectives des deux
Parties, il convient cene fois de déduire l'incidence de celles,et de la Guinée
équatoriale,et du Gabon.)
5.122 Ayant ainsi procédé par étapeet en fonction des différentes
zones pertinentes dans lesquelles la délimitation doitêtreeffectuée,il convient de
constmire une ligne partant du PoinH ci-dessus mentionné. On peut,à cet égard,
suivre la méthode employée par la Chambre de la Cour dans l'affairedu Golfe du
Maine. Le deuxième segmentde la délimitation a procédé d'un point établien
fonctiond'un ajustementproportionnel:
"La proportion entre les longueurs des façades côtières
des Etats Unis et du Canada dans le golfe du Maine...
est ainsi de1,38 à 1. De l'avis de la Chambre, cette
proportion devrait entrer en ligne de compte pour
déterminerla position du deuxième segmentde la ligne
de délimitation.(Ibid.).
5.123 Dans la présente espèce,la Cour pourra procéder par
analogie. Cetteforme d'ajustement est certainementla méthodela plus rationnelleet
la plus équilibrée,t la plus susceptibled'aboutirun résultat équitabl, ans cette
région à la configuration exceptionellement complexe et dans laquelle un cumul
extraordinaire d'éléments géographiques défavorables contrib ue défavoriser
sévèremenlte Camerounpar rapport àsesvoisins.
5.124 S'agissant de la première zone, le calcul des longueurs
respectives des côtes pertinentesdes Parties se faisant àacette étape,permet de
déterminer un "point proportionnel"se trouvant approximativementau Point "1"sur
le croquis ci-dessous.
5.125 Si on fait un calcul similaire dans la deuxième zone, le
"point proportionnelnen découlantse trouve approximativementau Point "J"sur le
croquis ci-dessous.(Un chiffre approprié,correspondaàtla longueurde la côte non-
pertinentede la Guinée équatoriale,étédéduitdu calcul.)
5.126 Enfin, dans la troisièmezone, un calcul similaire permet de
fixer le "point proportionnel" en découlant approximativementau Point "K" sur le
croquis. (Un chiffre approprié, correspondaàtla longueurdes côtes non-pertinentes
de la Guinée équatoriale tu Gabon, a été dédud itu calcul.)5.127 La ligne de délimitation entreles espaces maritimes des
Parties passe donc par les points "G" - "Ku, fixés en fonctiondes longueurs
respectives des façades maritimesdes Parties donnant sur leszones pertinentes. Cette
ligne de délimitation se poursuitvers le large "jusqu'à la limite des zones maritimes
que le droit international place sous leur juridiction respective," comme ceci est
spécifié dansla Requête introductive'instancede la Républiquedu Cameroun. Ces
points, et le tracé générale la ligne de délimitationproposée, apparaissentsur le
croquis page suivante.
5.128 Si une ligne de délimitationalternativese suggère,baséesur
les mêmesprincipes de proportionnalitéet d'équité,la Républiquedu Cameroun se
réserve le droitde l'expliqueret de la préciseren temps utile.
54. Conclusions
5.129 Cette délimitationpeut êtreutilisée pourdéterminerla fois
les zones économiquesexclusivesrespectivesdes Parties eaccordavec l'article74 de
la Convention sur le droit de la mer, et les plateaux continentaux conformémtux
dispositionsde l'article 83 de laditeConvention. Ce serait ainsiune ligne "double"et
les éIéments d'équité qusi'appliquent à l'une devraient s'appliquàrl'autre car il
n'existe d'éléments particulieqsui concerneraient exclusivementune zone maritime
et non l'autre.
5.130 Le tracésuggéré pourla délimitation répond à huit points
essentielspour une "solutionéquitable".
5.131 Premièrement, la ligne de délimitation proposée n'paas à
prendre en compte les circonstancesparticulièresqui ont conduità l'acceptationpar le
Cameroun de la ligne de Maroua, circonstancesqui ne présentent aucune pertinence
pour la délimitationdu plateau continentalet de la zone économiqueexclusive.
5.132 Demièmemenrl ,a ligne réaliseun compromis rationnelentre
l'effet de la ligde Maroua et la reprise de ce qui résulteraitde l'application dela
méthode d'équidistance.
5.133 Troisièmement,cette ligne fait appel à des mesures
correctives successives, mesures qui reflètentla disparitédes longueurs des façadesl La Délimitation Équitablemaritimes concernées surles différentes zonesintéressées palra délimitation:la Baie
de Bonny àproximitéde la côte, la grande Baie du Biafraun peu plus loindes côtes,
et les plus vastesétenduesmaritimesdu Golfe de Guinée etde l'Océan Atlantiqup elus
au large.
5.134 Quatrièmementl,a ligne proposéeest la représentationd'un
résultat équitable danla mesure où elle réaliseune proportionnalité raisonnablentre
les deux Etatsconcernés :
"... le rapport raisonnable...entre l'étenduedes zones
de plateau continental relevant de 1'Etatriverain et la
longueur de son littoral mesurée suivant la direction
générale de celui-ci, compte tenu à cettefin des effets
actuelsou éventuelsdetoute autre délimitationdu plateau
continental effectuée entre Etats limitrophes dans la
mêmerégion."(C.I.J., arrêt, 20 février1969, affairedu
Plateau Continentad le la Merdu Nord, Rec.1969, p.
54, para. 101 (D) (3) (dispositifl.
5.135 Cinquièmement, suivant les termes employéspar la Cour
dans l'affaire duPlateau dela MerduNord, la ligne de délimitationproposée"tient
compte" d'autres titrespotentiels de façon générale, mais ne préjugeen rien le
résultatdes négociationsou délimitationspotentielles entre chacune des Parties au
présent différend d'unepart et la Guinéeéquatorialeou Sao Tomé etPrincipe d'autre
part, dans la mesure où elle ne reconnaît leur présence que pouren déduireque le
Cameroun subit de forts préjudicesgéographiquesdu fait de leur présence, par
rapport au Nigeria et que ces circonstances doivent être généralement priseen s
compte lors dela recherched'une solutionéquitable entrele Nigeriaet le Cameroun.
5.136 Sixièmement,la ligne proposée éviteau maximum une
"amputation" mais sans jamais s'éloigner d'unecombinaison d'objectifs et de
méthodesde délimitationéquitables. Celadonnerait au Camerounun accèsmodeste
mais réel aux ressources océaniques,évitant un excès de pénalisationdue à la
configuration concave de la côte et à la présence desîles au large ainsi qu'à la
combinaisondeces deux éléments.
5.137 Septièmement,la ligne proposée n'est en aucune façon
inéquitableou injuste pour le Nigeria, qui continueà jouir d'un accès important aux
vastes étendues océaniqueasu large de ces côtes en raison de la forme convexede sa
ligne côtièreà l'ouest d'Akasso. Dans les zones correspondant au Cameroun et auNigeria, la ligne de délimitationproposéesuit une ligne ordonnéesans adopter de
méthode excentriqueou déséquilibré en faveurdu Cameroun.
5.138 Enfin, et huitièmement: cette délimitation proposée
représente un résultat juset équitable tantpour le Cameroun que pour le Nigeria,
tout en préservant entièrement les droits des Etats tieet voisins par rapport au
différend. En tant que tel, c'est là le résultatle plus équitable quipuisse êtretrouvé
dans cette situation de ligne côtière compet difficile et comptetenu de la diversité
des intérêtsn présence.
5.139 En conclusion, la délimitation proposée parle Cameroun
permet une solution équitable entrele Cameroun et le Nigeria et ainsi devrait être
adoptéedans la présenteespèce. 2bme PARTIE
LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE
DU NIGERIA CHAPITRE 6
LES FAITSINTERNATIONALEMENI LLICITES
ATTIUBUABLESAUNIGERIA SECTION 1. INTRODUCTION
l 6.01 La Républiquefédéraledu Nigeriane se contente pas d'une
contestation formellede la frontière qui laséparedu Cameroun. Elle se livre, au
surplusà &versesactivitéscontrairesau droit international galinsi qu'à divers
instrumentsjuridiquesinternationaux auxquels elle est partie.
1 6.02 En effet, en dehors de la remise en cause soudained'une
frontière terrestredéfiniepar des instrumentsjuridiquesd'unevalidité incettestable
de la partie de la frontièremaritime délie'accordparties avecle Cameroun,le
l Nigeria ignore sur le terrain cette frontière vieille de plus de quatre vingt5 ans,
notammentpour sapartieterrestre.
6.03 Concrètement,cette remiseen cause dela frontièrecommune
entre les deuxEtatsse traduitpar des incursions répétforcesarméesnigérianes
en plusieurspointsde cettefrontiérelonguede prèsde 1700. Ces incursions, qui
s'accompagnentgénéralement de violencessr lespersonneset de pillages desbiens,
ont pris quelquefois une ampleur considélt ont failàdeuxreprises,en 1981 et
en 1994, dégénérer eun conflit armégénéraliéntre lesdeuxEtatsEn tout étatde
cause, elles ont entraîàéces deux occasions, une confrontation sérentre les
forcesarmées des deux pays.
1 6.04 Si, dans le passé, ces incursions étaient suivies, quelque
temps après,du retrait des éléments dle'annéenigériane, se sonttransformées,
i depuis 1987dansla zone camerounaise du Lac Tchad, depus989 àKontcha dansla
province de I'Adamoua et depuis 1994 dans la péninsulede Bakassi, en une
1 occupation civile etmilitairecontinue. L'atteinteouverainetdu Cameroun par
le Nigeria s'accompagne donc désormais, l'atteiàtl'intégritéson territoireau
1
moyendu recoursàla forcearmée.
l
6.05 C'est l'ensemblede ces acteset vexationsqui constituentles
faits intemationalementillicites imputables auNigeria et quà l'origine de la
1
responsabilitinternationalede ce pàyl'égard du Cameroun.i SECTION 2. LESINCURSIONS NIGERIANES
$ 1. Présentation des orovinces concernées et tvooloeie des
incidents
A. - Les provinces concernées
6.06 La pression nigériane sur la frontière camerounaiseest
ressentiesur l'ensembledes 1600km de frontièrecommuns auxdeux pays, depuisle
Lac Tchad aunord et jusqu'à l'OcéanAtlantiqueau sud. Elle s'est intensifiée depuis
la fi des années1980et a atteintson paroxysmeen 1994.
6.07 La majorité des incidents se trouve concentd'eune partà
I'extrémeNord dela frontièredans la régiondu LacTchad, et d'autre part, dans la
région de lapresqu'île de Bakassi, province du Sud-Ouest, en bordure de l'océan
Atlantique.
6.08 11est néanmoinsindiscutable que les territoires, théâtres
d'incursionsnigérianes,sontpartie intégrande la Républiquedu Cameroun,comme
le démontresans ambiguïté le tracé desfrontièresintemationalementreconnuesentre
les deux pays, les effectivités colonst post-colonialeset notammentl'insertion de
ces territoiresdansle découpageadministratfu Cameroun.
B. - Typologie desincidents
6.09 Les nombreuses incursions nigérianes sur le temtoire
camerounais ontrevêtudes aspectstrès durs, lesagressionset occupationsmilitaires
nigérianes prennentle plus souvent un tour spectaculaire, de nombreux autres
incidentsimputables auxforces nigérianrevêtenutne formeplusdiscrète.
6.10 Le Nigeria a ainsi tentéde déstabiliserle Cameroun en
multipliant les violations deses eaux etde son intégrité temtortn déstabilisant
ses structures administratives. Des troubles ont étéfomentéspar les populations LOCALISATION
DESDÉPARTEMEN ETSVILLAGES
oùont euieu.lesincuniosigérianes
enterritoicamerounais
1.RiodelRey -Tikoro 9. Lac Tchad
10. Kontcha
2.Jabane-Idabato-Akwa
KombJ oanea Il. Koiofata
3. Akwayat-ëRiodelRey 12. ManduYrang
4.Jabane 13.Mbelogo
5. Kombo Abedimo 14.Mbelogo
6. Jabane
.- 7. Kombo Abedimo
8. ArchibanAkwa) Zone d'occupatiinériane
50 lOOkm
O-- PRESQU'IL DEEBAKASSI
LOCALISATID OENSINCURSION NIGÉRIANES
+++++ FmMihi~ma<iouale
O smis+mechlre
O Ch#-lie0dedMd
-2 Viiiags mcris
O COII*EnrcignesD
< _*.-
NIGERIA nigérianes vivat ans les zonesfrontalièrescontre l'administration camer. eaiseD
plus, des fonctionnaireset parfois mémede simples citoyens camerounaisont été
physiquement enlevés par des élémedntsla police oude l'armée nigériasur le
territoire mémedu Camerounet retenusprisonniersau Nigeria.
6.11 11 serait fastidieux de proposer une liste exhaustive des
incidents frontaliersimputablesau Nigeria, tant ils sont réguliers deptinqvingc
ans. On en retiendra quelques uns des plus significatifs pour les besoins de la
démonstration. Ils feront l'objetd'une analyse dans chaque province frontalière
concernée.
52. La ~rovincedusud-ouest
A. - Les incursions militaires nigériesrla presqu'îlede
Bakassi
6.12 Depuisdes années,la régionde la presqu'îlede Bakassi est
le théâtred'incursions nigérianes grast répétéeL.es richesses de cette région,
dont les eaux regorgentde poissonset le sous-solde pétroleet de gaz, expliquent sa
convoitise parle voisinnigérian.
1. L'incursionmilitaire nigérdu 16mai 1981
l
1 613 Une patrouille militairede la marine nigérianea violéle
territoire camerounais en pénédtans la péninsde Bakassijusqu'auRio del Rey,
où elle a ouvertle feu surune embarcationde la manne camerounaise.
a) Lescirconstancesde l'incursion
l 6.14 La note de renseignementsn0037/PR/VA.77adresséepar les
servicesde renseignementscamerounaiau Préfetet au Gouverneurde la Provincedu
Sud-Ouest narre en détailles circonstancesde cet incidentqui aàl'époqueuntrès fort retentissementdans les relations entre le Camerounet le Nigeria (Annexe
M.C. 260).
6.15 Le 15mai 1981,un élément des forcesavaleset terrestres
camerounaisesbaséà Idabato(dans le département du Ndian)t dirigé parle Second
Maître MAHAMAT, a quittésa base pour une mission à l'embouchure du Riodel
Rey. A bord de I'embarcationsetrouvaient cinqautresmilitaires.
6.16 Dans la matinée du16 mai 1981, l'élémenctamerounaisa
repérédeux embarcationsà moteur. Arrivésà portéede voix, les intrus ont fait des
sommationsen anglais: "Halte là, haut les mainsLa scène se déroulantans les
eaux temtoriales camerounaises, les membres de la patrouille camerounaise ont
répondu aux sommations par d'autres sommations identiques adresséesaux
agresseurs. Ceux-ci se sont alors approchés,révétinsi leur qualitéde militaires
nigérians. Ilsont heurtél'embarcation camerounaet ont immédiatemenot uvert le
feu. Une balle a atteint le matelot TEMWA au pied droit;en Iégitimedéfense,
l'équipagecamerounais a alors riposet mis hors de combatcinq Nigérians. Les
occupantsde la seconde embarcation nigérian, ui avaient entre-tempsmis piàd
terre, onàleur tour ouvert lefeu sur les Camerounais.A courtde munitions,ceux-ci
durent gagnerla rive. Les Nigériont alorsquittéle lieude l'affrontement.
6.17 L'enquête devait révéqlre les militaires nigériansavaient
passéla nuit à Tioro, sur la rivière Ndian, loànl'intérieurde la presqu'île de
Bakassien territoirecamerounais.
6.18 Selon le rapport sus-visé, cet incident, quoique d'une
exceptionnellegravitapparaîtloin d'être isolé.
6.19 11est ainsiprécidansla note de renseignements préc:eé
"Lesmilitaires nigériont l'habitudede les [lesmarins
camerounais] attaqueren territoire camerounais, de les
enlever etde lesmolester.
b) Lesprotestations camerounaises
6.20 L'incursionnigériane du16 mai 1981 a été un échec.En
effet, les seules victàmdéplorersont toutes nigériase5morts, alors quel'on ne
dénombreque desblessésdanslesrangs camerounais). 6.21 Cespertesont fourniunprétexte aux autorsigérianafin
d'en faire une exploitation politique et notamment en tentant d'en attribuer la
responsabilité au Cameroun.
6.22 Néanmoins,la responsabiliténigérianeest indiscutable, ce
qu'attestepar exempleunedépêcee 1'A.F.P.du8juillet 1981,où l'onpeut:lire
"la fusillade quiavaitfait cinq mortsnigérian et
plusieurs blessésdu côtécamerounais s'était produite
dans les eaux maritimes du Cameroun, au large de
l'embouchuredu Rio del Rey, dansl'extrêmsud-ouest
du pays." (Annexe M.C. 262)
1 6.23 Les autorités camerounaises ot'ailleurs, dès le 18 mai
1981, surlendemainde ['incident,et durant les mois de mai et juin, multipliéles
protestationsdiplomatiquesadressées au gouverntigérian.
l
1 6.24 Ainsi, le 15juin 1981, le Ministère des Afétrangères
camerounaisfaisait-il connaîtrepar une note verbale au Gouvernementnigérian les
1 conclusionsde la commissiond'enquêcamerounaisesur l'incident (AnnexeM.C.
261).
l
6.25 Aprèsavoir rappeléque le lieu de l'accrochagtituéàs
l'embouchurede la rivière RiodelRey, donc sanscontestation possibledans les eaux
l temtoriales camerounaises,le rapportconque lesforcesnigérianesont ouvert le
feu en premier, entraînant une réactiond'auto-défensecamerounaise. Enfin, il
souligne que les forces nigérianesont passéla nuit précédant I'affstnsemen
l'autorisationet à l'insu des autorités camerounaisd,am le département du
Ndian. Le ministre camerounais réitèredonc ses protestations au gouvernement
nigérian et rappellequ'il ne s'agitpas du premier incident imputable aux Nigérians
dans la région.
I 6.26 Cet incident aurait pu conduire à une situation de
belligéranceouverte entreles deuxEtats Conscientd'êtson droit en ripostant
1 et avanttoutsoucieux d'évquele Nigeriane tire prétextede cet affrontementpour
1 l'étendre, la République duCameroun offrit immédiatementd'indemniser les
victimes.
6.27 Cet incidentest longtempsrestéle plus gravedans larégion.
Il a cependantétélargementsurpasséen gravitépar les agissements nsepuisnd
le débutde I'année1994. 2. L'incursionmilitaire nigériadejanvier/février1994
6.28 Début janvier 1994, les forces armées nigérianes mettent
exécutionun plan minutieusementpréparé depuis la fui de l'année précédentv,isant
à prendre possessiomanumilita d ela presqu'île deBakassi.
a) Les faits
6.29 Une analyse précisedu déroulement dela crise de 1994 est
possible grâce aux nombreux documents administratifs camerounais relatifs à cet
événement.
- Janvier 1994
6.30 Le Commissaire spécial de Mundemba rend compte par
message du 05 janvier 1994, de la situation dans son secteur. Il apparaît que dans la
journée du 28 décembre 1993, trois bateaux de guerre nigériansont patrouillé en
permanence à proximitédu village de Jabane (arrondissementd'Idabato), dans la
presqu'île de Bakassi. Ces bateaux avaieàleur bordplus de 1000hommes en tenue.
Une patrouille d'observation a étéinstalléedans l'île de Daimon, tandis qu'un
élément du Génie s'employaità préparerle débarquementdu gros de la troupe dans le
port de Jabane (Annexe M.C. 329). Un messageconfidentiel adresséau chef d'Eut-
Major des armées camerounaisesa préciséensuite la chronologie des incidents de
frontière provoqués par leNigeria. Il y estrelevédes préparatifs militaires nigérians
comprenant notamment des infiltrationsen temtoire camerounais dès le21 décembre
1993(AnnexeM.C. 362).
6.31 Le chef du poste frontière d'Idabato précise le 7 janvier
1994, que les Nigérians ontdébarqué à Jabane le 3 janvier 1994 et que dès le à
llHOOdu matin, ils ont occupél'île de Daimon, où ils ont hisséleur drapeau. Ayant
fait de mêmeà Jabane, ils se sont ensuite mis en marche vers Idabato, après avoir
déployé de l'armemenltourd sur le temtoire envahi (Annexe M.C. 331). Dès lors,
des renforts ne cesseront de venir appuyer les troupes nigérianesdéjà sur place,
comme en aneste une note d'information desServicesde Renseignementscamerounais
(AnnexeM.C. 332).6.32 Le 5 janvier 1994, les forces nigérianes se déployaient
massivementjusqu'à Akwa. Les forces camerounaises prenaientleurs dispositions
pour défendre leur temtoire national et contenir la progression de l'envahisseur
nigérian.La situationne devaitplusévoluersignificativementavantla mi-février.
6.33 Le 6 janvier 1994, Radio France Internationalchiffre500
le nombre de soldatsnigériansoccupant les îles camerounaisse la région (Annexe
M.C. 334)
- Février1994
6.34 Dans la nuit du 18 au 19 février1994, l'armée nigériane
lancé une véritableaction de guerre contre les troupes camerounaisesstationnées
d'unepart à Idabato, et d'autre pàrKomboJanea. 11résulte dedifférentsmessages
émanantdes chefsde postesfrontièreque ces attaques amphibiesont étérepoussées,
occasionnantdes pertes significativescôténigérianet au moiun mort et un blessé
du côtécamerounais. La semaine suivante a étémarquéepar des reconnaissances
aériennesnigérianes au-dessusde lazone (AnnexeM.C. 339).
b) Les suites diplomatiques données l'incursion nigériane par
le Cameroun
- Janvier 1994
6.35 Soucieuxde ne pas répondre aveuglémen àtla provocation,
le gouvernement camerounais a réagi avec fermeté surle terrain, mais avec
modération surle plan diplomatique.Ainsi, une dépêch e.F.P. du 7 janvier 1994,
souligne-t-elle q:e
"l'occupationde deux îles camerounaises du GolfeDe
Guinéepar des troupes nigérianes est considérépaer le
Cameroun pour l'heure comme un dépassementde
frontière et noncomme un geste d'hostilité'."(Annexe
M.C. 334)
6.36 Cependant, malgré cette attitude conciliante, legouvernementnigérianne retirait pas ses troupeset justifiait leur présence parla
volonté de protéger ses populations, qui auraient été menacées par 1'Etat
Camerounais.
- Février1994
6.37 Devantle blocage de la situation et confrontaux violentes
attaquesmilitaires nigériansu 18 février1994,la République du Cameroundécidait
de saisir le Conseil de sécuritédes Nations Unies, ainsi que l'organe central du
mécanismede l'organisation de l'UnitéAfricaine (O.U.A.) pourla prévention,la
gestion et lerèglement desconflits.
1" L'action du Cameroun devanlt'O.U.A.
6.38 L'organe centralde règlementdes différendsa été créa éu
sein de l'O.U.A. à l'occasiondu Sommet du Caire en 1989. Il a été saisi parle
Camerounde l'agressionnigériane surla presqu'îlede Bakassi.
6.39 Son Excellence MonsieurMOUSSA, Ministre des Affaires
étrangèresde la RépubliqueArabe d'Egypteassuraitla présidencedudit organe pour
l'année1994. A la requêtedu Cameroun, il a demandéau Secrétaire Généra dle
l'O.U.A. d'en organiser laréunionurgente. Dansun messageadresséau Ministre des
Affaires extérieurecamerounais Léopold OYONOle 17 mars 1994, Son Excellence
Monsieur MOUSSA souligne l'importance pourl'O.U.A. de voir les forces
nigérianes se retirerde la Péninsulede Bakassi:
"During the talks, Egypt put its pressure on the
importanceof the withdrawalofthe Nigerianforces from
BakassiPeninsulaas the way to reach afinal settlement.
Egypt willcontinuepressuringonthe matter."
6.40 L'organe central du mécanisme de l'O.U.A. pour la
prévention,la gestion et la résolution des conflits a rendu ple 24 mars 1994un
communiquéoù, aprèss'être félicité d'avo é ré officiellement saisi uonflit, il a
réaffirmé les grands principes régissant lesifférends frontaliersen Afrique, ainsi
qu'enatteste l'extrait suiva:t "It (l'organe central de l'O.U.A.) reaffumed its
attachment to the respect of the principle of the
inviolability of frontiers inherited from the colonial
period. It also reaffirmed itstachmentto the respectof
sovereignty,territorial integrity and independenceof al1
States."(AnnexeM.C. 354)
2" L'action du Cameroun devant le Conseil de sécuritédes
NationsUnies.
6.41 Par une lettre en date du 28 février 1994 adresséeau
Président du Conseil de sécurité desNations Unies, le Ministre des Affaires
étrangères du Camerounlui demandait desaisir d'urgence leConseildu dossierde la
presqu'île deBakassi(AnnexeM.C. 342).
6.42 Le 4 mars 1994, le chargéd'affaires par intérimde la
Mission Permanentedu Nigeria auprès de 1'O.N.U. adressaità son tour un coumer
au Présidentdu Conseilde sécuritéC . ecourrier confiniait les fai:s
"Le 31 décembre1993, un détachement del'armée
nigériane aétéenvoyé (...) dans la presqu'ile(...)de
Bakassi".(AnnexeM.C. 344)
6.43 II est intéressantde constater que, dans ce coumer, le
Nigeria regrettait la saisine par le Cameroun desorganismesinternationaux :Conseil
de sécuritédes NationsUnies, Organisationde l'UnionAfricaine,Cour internationale
de Justice.
6.44 Le 28 mars 1994, le représentant permanent dC uameroun à
1'O.N.U.demandaitpar lettreau Présidentdu Conseilde sécurité qule e communiqué
sus-mentionnéde l'O.U.A. soit considéré comme un document du Conseilde
sécurité.(AnnexM e .C. 354)
6.45 Le 29 avril 1994, le Présidentdu Conseilde sécurité, Collin
KEATING, faisait parveniraux représentants permanents duCamerounet du Nigeria
auprès de 1'O.N.U. une lettre identique dans laquelle le Présidentexprime la
satisfaction du Conseil de sécuritéde voir les organismes internationaux saisisdu
différendrelatif à la presqu'île de Bakassi (Conseilde sécurité,O.U.A., Cour
internationale de Justice). Ce communiqué représentu ene satisfaction pour le
Cameroun, qui a saisi ces différents organismese ,t dont la bonne foi est ainsi
soulignée (Annexe M.C. 359).6.46 Entre-temps, le 29 mars 1994, le Cameroun avait
officiellement saisila Cour internationalede Justice deHaye du mêmelitige, en
dépit des réticencesigérianes.
B. - La violation deseauxterritoriales camerounaisesparles
naviresmilitaires nigérians
6.47 Les incursions de la marine nigériane dans leseaux
temtonales camerounaises aulargede la presqu'îlede Bakassisontincessantesdepuis
la fin des années1960.
6.48 Ne se limitant pas croiser dans les eauxcamerounaises, les
navires nigérians allaiejusqu'à pousser leurs incursions dansles multiples brasde
mer qui sillonnentla presqu'île.
6.49 Ce comportement de la flotte nigériane s'est révétlré ès
préjudiciableà la République duCameroun. En effet, la présence de ces navires
battant pavillon nigérian crée roubledans l'espritdes populationsde la presqu'île
sur l'autoritécompétentesur ces lieux, les forces nigérianesembarquéessur les
navires procédant à des tracasseriescontre des populations. Des brutalitésfurent
signaléesà l'occasion decesopérations.
6.50 La fréquenceet la régularitéde tels incidents rendent
impossible une énumération exhaustive. Quelques exemples significatifs claireront
cependantla Cour sur leurpermanenceet leur gravité.
- Selonune dépêchA e.F.P. du ler juillet 1970:
"des incidentsse sont produits récemmenetn mer entre
marins pêcheurs camerounais et navires de guerre
camerounaises, selon une lettre de protestation des
armateursde pêche de Douala." (AnnexeM.C. 237).
- Une note de la Délégation Généralela dGendarmerieNationaleau Ministred'Etat
chargé des ForcesArmées à Yaoundé,en date du 18juillet 1984, évoque le pillage
des piroguiers dans les eaux temtonales camerounaisespar des agents de douanes
nigérians: "Dans la journéedu 16 juin 1984, une patrouille de
douaniers nigérians s'est introduite dans nos eaux
dans une crique aux environs de Rio del Rey. Chaque
pirogue voguant vers le Camerounétaitminutieusement
contrôlée, et les voyageurs contraintsotiser une
somme de 1000 Nairas avant d'êtrelibérés."(Annexe
M.C. 270).
6.51 Ce rapport précise les actesde vandalismeperpétsans
les eaux territoriales par les agents nigérians sontgénéralementimputés aux
l "gendarmescamerounais"parlapropagande nigériane.
l
De telles affirmations permettautNigeria de tirer un
1 6.52
double bénéficede ces opérations clandestines,en sapant l'autoritéégitime
camerounaisetout en se donnant unprétexteaux yeux de l'opinion pourrevendiquer
le territoire.
-Le 17 décembre1985, le Secrétaid'Etat àla SécurIntérieurerédigeune note
1 relative à la violation des eauxtemtoriales camerounaises.Il y était fàet référenc
1 un message du 2 décembre1985 en provenance de la Sous-Préfecturede Kombo
Abedimo. Ce message indiquait qu'une enquête diligentée auprès des pêders
InnuaMba, révélait qu:
"Les douaneset la policemaritime nigérse livraient
régulièrement à des patrouilles dans nos eaux
temtoriales." (AnnexeM.C. 277).
1 -Le commandantde la deuxièmerégion militaidu Cameroun adressait,le 25 juillet
1986, un compte-renduau Ministrede la Défense camerounais.eoteest relative
1 à la violation des eauxterritorialespar trois bâtimentsmilitairesnigériansle 27 juin
1 1986 :
"Lors d'une reconnaissanceaérienne en vue de la
vérificationde certaines informations, effecture pal
commandantde la 2ème région militaiet commandant
de la base aérienne,il resson effectivement que trois
bâtimentsde guerrenigériansontéde passagedansnos
eauxtemtoriales le.6.86. Reconnaissance effectuée,la confirmation nous a été
donnée parla société pétrolièP ECTEN, implantéeau
Cameroun. L'inspectionvisuellefaite permet d'affirmer
que ladite patrouille nigérianeétait passée en plein
dispositifdu champ pétrolier camerounae it qu'elle s'est
dirigéevers le cap 230" en laissanàsa gaucheles plate-
formes TOTAL et PECTEN. Selon les témoignages
recueillis, il ressort que de telles manoeuvres sont
courantesdans lazone. "
6.53 Lanoteconclut :
"II serait souhaitable qu'uneaction conjointe entre les
autoritésnigérianeset camerounaises soitfaite, pour que
les militaires nigérians soient sensibilissur le droit
international qu'ilsemblent perdre de vue. Faute de
quoi, les mêmes incidentd se 1982 risqueraient de se
répéter" (AnnexeM..C. 280).
- Par une note adresséeà Monsieurle Président dela Républiqueen date du 27 août
1991, le Ministre délégué à la Présidencechargéde la Défenserend compted'une
mission en mer des forces navales camerounaises au large de Jabane, dans la
presqu'îlede Bakassi :
"Il ressort de cette missionque deux coqueslégèresde
type Raiders, peintesen vert arméeset ayant chacuneun
équipagede six hommes en tenue, ont appareilléde
Jabane à l'approche dela mission.Prisesen chasseàtitre
dissuasif, elles ont étéreconduites sans contact ni
accrochage vers la frontière maritime."(Annexe M.C.
311).
6.54 Ce dernier incidentillustre l'absencede tout scrupulede la
part des militaires nigérians qui n'onjtamais hésitéà mettre pied sur le territoire
camerounaisdans la presqu'îlede Bakassi.Certains portsde pêche ond t'ailleurs été
l'objetd'uneoccupationrégulière par les militaires nigérians.
C. - L'occupationdecertainespêcheriecsamerounaisesparles
Nigérians.
6.55 Les patrouilles maritimes nigérianed sans la presqu'île de
Bakassi ont permis un débarquementdans certaines pêcheries. La pèchene la plus
visée par les militaires nigérians estsans aucun doute celle de Jabane, située à
l'extrémité sud-oued ste la presqu'île deBakassi,au nord du district d'Idabato, dansl'arrondissement de Issanguele. Les différentesvisites nigérianes à ce village
camerounaisse sontpeu àpeutransformées en une véritablemprise.
6.56 Dès 1981, une note de renseignementsdu 16 avril 1981
faisait étatde la présencede militaires nigéridans le dismct d'Idabato, et ce, au
moment oùd'importantsindices de présence pétrolifèr au large de Jabanevenaient
d'êtredétecté(sAnnexeM.C. 258)
- Le 15mars 1984, une note confidentielle rédigàel'attentiondu Chefd7Etat-Major
des Armées Camerounaisec sonfime la présencede patrouillesillégald'élémentd se
la police nigériaàeJabane, sur le temtoire camerounai:
"Sur les faits présentet confirmés aprèsrecoupement
demandé : il y a bien des preuves fondéessur les
nigérianeàsJabane."esde quelques élémentsde la police
Cettenote précise, comme d'autres, que certainsxactionsprêtée sar le Nigeria aux
gendarmes camerounais sont imputables à des éléments nigérianis nfiltrés au
Cameroun.
- Le 29 septembre1990, un messagedu chefdu postefrontièrede Idabato, révèle que
les patrouillesnigérianescommencentà fairepreuved'audace àJabane :
"Honour inform you Captain Ndzomo Ferdinand in
charge of Cameroon Navy Detachment Idabato, visited
Jabane fishing port on 21.9.90- stop. He revealed that
the chief of Jabane was visited and he confiied that
Nigerian police andNavy visits Jabane and even spend
nights there for duty in Cameroon temto~y matters -
stop." (AnnexeM.C. 304).
6.57 Peu de temps après, la marine nigériane franchitune
nouvelle étape vers l'occupation effectivdee Jabane et de ses environs. Le 10
décembre 1990, émanantdu Préfet dudépartement de Ndian, un messageest adressé
au Centre de la Direction Généradee la SécuriNationale àYaoundé :
"Un bataillon armémarine nigériane a occupé Jabane
drapeaunigérianaprèsavoir déposé celuopiu Camerounél-
stop. Commandement decette armée demandeau nôtre
de ne pas s'approcher-stopet fin."(AnnexeM.C. 306).
6.58 Trois jours plus tard, le 13 décembre,un messageémanant
de la mêmeautorité (le Préfe dtu départementde Ndian),d'une importanceextrêmepuisqu'envoyésous le régime"flash", c'est-à-dire immédiat,apporte les précisions
suivantes :
"Marins nigériansont descendu drapeau camerounais à
Jabane - stop. Ont hissédrapeau nigériandans même
localit- stop. Ont stationnun bateau deguerre nigérian
avec un effectif de plusieurs bataillons - stop. Ils
déclarents'y êtreinstallésdéfinitivement - stop. Ont
envoyé message au détachement de la marine
camerounaiseà Idabato - stop- demandant à nos marins
de ne pas s'approcherà Jabane - stop. Très urgent-stop
etfin.(AnnexeM.C. 307)
- Une note à l'attentiondu C.M.R. précise
"Dans la journée du27 avril 91, le poste frontière de
Idabato a étéinforméde la présencedu drapeauet d'une
pancarte nigériane fixée par la commune nigérianede
MBO dans le port de pêchede Jabane, en territoire
camerounais. Immédiatement,le héfet a ordonnéune
descente sur les lieux, en compagnie du chef de poste
frontière de la SûretéNationale, du Commandant dela
compagnie de gendarmerie et de quelques gendarmes et
policiers armés.Deux bateaux de la gendarmerie, ainsi
que le hors-bord de la police, ont étéaffrétpour cette
mission. Chemin faisant, la délégation camerounaise a
tiré deux balles en l'air. Arrivée sur les lieux, la
délégation a aperçuun navire nigérian qui s'éloignait,
avec àson bord cinq officiersnigérians.
Constat fait, le Préfet a ordonné quele drapeau
camerounais soit hissésur ces lieux. La cérémonie s'est
déroulée au rythme des honneurs militaires présentés par
le détachement arméde la compagnie de gendarmerie
locale"
6.59 La fermetéde la réaction des autorités camerounaises a ainsi
démontré l'intentionde celles-ci de continuàrexercer leur indiscutable souveraineté
sur cette localité,en dépit des difficultés logistiquelàila densitéde la végétation
autour du port de Jabane, parfois inaccessibàcertaines périodesde l'année.
- Malgré les réactions camerounaises,les éléments nigérians continuaient leurs
incursions à Jabane. Ami, une note d'information du 29 octobre 1992, émanantdu
poste frontièrede Idabato, confirme les éléments compris dans un de ses précédents
messages :
"Occasionalclandestine visit to the area by the Nigerian
military- and immigrationofficers."6.60 Le message donne ensuite des précisions extrêmement
explicites sur les tentatives nigérianesd'établir uneeffectivitéclandàsJabane :
"conceming the clandestine visits to the area by the
Nigerian forces, they continue to do so. A new
developmenthas however been noticed being the planting
of two non fvted sign boards in the area.
The first of them whichisat the entrancerads :
WELCOMETO ABANACLAN
AKAPABUYOLOCALGOVEFWMENT AREA
FEDERAL REPUBLICOF NIGERIA
It is blue in colour, and the letters in white. The second
is in the middle of the town and where Ourremoved flag
was formerly planted. This area shows signs of a recent
fue disaster.
Another is nunoured to be planted at the Beach, and
what is actually written on it as not being cross checked
yet, this would be repercuted immediatelyit is done.
On the 27th of October 1992, the above officers as usual
visited thearea, but this time did not land. They later left
and took the creek in the direction of Isanguele sub-
Division."
Loin de se contenter de brûler les panneauxde signalisationet le drapeaucamerounais
et de déployerles leurs à la place, les forces nigérianesont ensuite bâti une écàle
Jabane, ainsi qu'en attestela note d'un chef de poste frontièrede la province du Sud-
Ouest en date du 18décembre1992relative àla situationàla pêcherie de Jabane :
"L'écoleprimaire communautaire, ouverteet dirigée par
la communauté natalede Jabane, reçoit les subventions
d'Akapabuyolocal govement, de la communede I'Etat
d'Akwa-bom au Nigeria - stop. Construite en matériaux
provisoires, se transforme déjàen matériaux définitif-
stop. Enseignants sont tous originairesdu Nigeri-stop.
Situation reste sous surveillanc-stop et fui."(Annexe
M.C. 322).
6.61 Le chef du postefrontièrepense que la situationqu'il a ainsi
décrite devrait être portàela connaissancedes plus hautesautoritésde 1'Etat.
6.62 Devant l'importance croissantede ces incursionsnigérianeà
Jabane, le gouvernement camerounais a adressé différentms essagesde protestationau
gouvernementnigérian. Envoici deux exemples :- Message diplomatique adresséle 5 mai 1993 par le Ministère des Relations
extérieuresde la République du Cameroun à l'Ambassadede la RépubliqueFédérale
du Nigeria àYaoundé :
"Un certain nombre de villages camerounaisde la
presqu'île de Bakassi accordent l'hospitalité à une
nombreuse population d'originenigériane quiy vit en
paix, auxcôtésde leurs frèrescamerounais.
C'est certainementcette situation qui afait croireces
populations qu'elles se trouvaient en terre nigériane,
encouragéesen cela par certains responsablesde leurs
communautés.Tel est précisémenl te cas du village
camerounaisde Jabane, où la communauté nigériane a
même construituneécoleprimaire.
Toutefois, une récente descente des autorités
camerounaisesdansce village a permis de ramener deux
plaques implantéesà Jabaneet sur lesquelleson pouvait
lire:"Welcome toABANACLAN AKPABWO local
govenunent area - Cross RiverState - Federal Republic
of Nigeria".
Le gouvemement camerounais proteste énergiquement
auprès du gouvemement nigéria contre l'implantationde
cesplaques entemtoire camerounais,étantdonnéque cet
acte est de nature à porter gravement préjudice aux
relations traditionnelles de bon voisinage et de
coopération qui lient le Cameroun et le Nigeria."
(AnnexeM.C. 325).
- Message adressé le23 juin 1993 par le Ministre des Affaires Extérieuresdu
Cameroun à l'Ambassade duNigeria à Yaoundéqui, après avoirrappelédeux notes
de protestation diplomatiques précédented ses 5 et 18 mai 1993, réitère les
protestationscamerounaisesdevant lesagissementsnigérians :
"- The settlement of Nigerians in Jabane is not only
increasingon a daily basis, but thisinflux is going at a
speed that tantamounts to a disguised annexation of
Cameroon temtory as testifiedby the severalattempts to
hoist the Nigerianflag on this territory andthe changein
the name of that locality from Jabane to Abane by
Nigerians. In line with this, Nigerians living in the
Cameroonian villageof Jabane preventeda team sent by
the Cameroon govenunent to build a hospital in that
locality. This hostile attitude may have undesirable
consequenceson the traditional hospitalityenjoyed by
Nigerians livingin thategion.
- Furthemore, according to recent issues of Nigerian
maps, the Bakassi peninsula is part and parce1 of
Nigerian territory.- Finally, it has been observedof recent, that there has
been a deploymentof Nigerian militaryforces along the
Cameroon-Nigeria border, without the Cameroon
governent being duly informed in Iine with traditional
courtesy existingbetweentwo brotherlyand neighbourly
countries.
Once more the governent of Cameroon is protesting
vigorouslyagainsttheaforementioned actsand deeds and
declaresthefollowing :
- Contrary to Nigerian allegationscontained notably in
the Embassy's noteno85/114/vol.V193of 2.4.93, the
Bakassipeninsula, whichis part of Cameroon'sterritory,
has never constituted a zone of dispute between
CameroonandNigeria.
- The Cameroon governent reaffî as is well
stipulated in the minutesof the ABUJA discussionsof
December 1991between theCameroonianand Nigerian
delegations on border matters, that there is no border
conflictbetweenCameroonand Nigeria.
- In this light, Cameroon is expressingher surprise on
these unfriendly acts quoted above, notably from a
neighbourly, brotherlyand friendly countryand more so
afterthe holdingof thetram-bordercooperation worshop
that tookplace inYolain May 1992.
Notwithstandiingthe serious acts mentioned above, the
Republic of Cameroon, faithful to her traditional and
firm willingnessto maintainwiththeRepublicof Nigeria
excellentfriendly andcooperative relationswould like to
go beyondthis legitimate protest andmake the following
constructive proposal:
The Republic of Cameroon proposes that a joint
commission led by the Cameroonian and Nigerian
Ministers of Foreign Affairs and comprising govemors
of the Cross River State (Nigeria) and South-Westand
littoral provincesof Cameroonpay a visitto the Bakassi
peninsulanotablyat Jabane in orderto:
1. Reassurethe Nigerian nationalsstayingin the Bakassi
peninsula that they are living in Camerooniantemtory
and willcontinue to enjoyCameroon's hospitality.
2. Ask these brotherly Nigerian nationals togo about
their activitiesin Bakassiithin the strict respect of the
authorityandlawsof Cameroon. 3. Ask the Cameroon law enforcement agentsto avoid
taking any action that could harm the interests of
Nigerian nationals livingin thatregion as well as al1
fom of activities that could bother these Nigerian
nationals.
The Ministryof External Relations requests tEmbassy
to convey this protest note as well as the observations
and proposais to the appropriate Nigerianauthoritiesand
in return communicateto the Ministrythe reactionof the
saidauthorities.
The Ministry of External Relationsof the Republicof
Cameroon thanks the Embassyof theFederalRepublicof
Nigeria in Yaounde for its kind cooperation on this
matterandavailsitselfof thisopportunityto renewto the
Embassy, the assurancesof its highest consideration."
(AnnexeM.C. 326).
6.63 La fermeté etl'esprit d'ouvertde ces notesde protestation
démontrent sans ambiguïté l'importanc que le Cameroun accorde au respectde sa
souveraineté, ainsi que sabonne volontépour mettre en oeuvre toutes les solutions
pacifiquesafin de réglerle différendavec leNigeria.
D. - Les enlèvements et séquestrations d'autorités et de
citoyens camerounais dans la régionpar lesforces armées
nigérianes
6.64 Au cours de leurs incursions surle temtoire camerounaisde
la presqu'île de Bakassi, les différentesforces nigér(armée,police ou douane),
ont parfoiscommis desactes trèsgraves.
6.65 Des représentants del'autoritécamerounaise ont ainsi été
enlevéset emmenésde force au Nigeria,où ils ont été séquestrétparfois maltraités.
Du matérieladministratif et militaire camerounais a également éc tonfisqué.ks
incidentsde ce typene sont pasrares;il estpermisd'endonnertrois exemples.
1. L'enlèvement de MonsieuS rimon ESABE, chef de district
de Idabato, et des membresde sa délégation le 21 janvier
1981 à Kombo Abedimo.
Deux notes desServicesde Renseignementscamerounaisdudistrict d'Idabato apportent aux autoritésde Yaoundé lprécisionssuivantessur les
circonstancesdel'incidentdu 21janvier 1981 :
6.67 A cettedate, le chef dedistrictde Idabato,accompagnéd'un
inspecteurde police, de quatre fusiliersmarins, de trois élémese l'arméede terre
et de deux civils, avait entrepris unetoumée d'inspection desêcheriesrelevant de
son unitéadministrative. Cettetouméeavait un double objectif: d'abord annoncer
l'arrivéedu Préfet, ensuiterecouvrer l'impôt.
6.68 Lejour prévu,le chefde districtet sonentourageont entamé
lespremièresvisitessans incident.
6.69 Arrivés à Kombo Abedimo, le groupe s'est trouvé entouré
par une vingtainede soldatsnigérianslourdementamés, qui ont débarqué de quatre
pirogues à moteur. Les détailsde l'incidentont éténarréspar l'une des victimes et
sontrapportés ainsi dans lnotesprécitées :
"L'ordrea étédonné à nos militairesde ne pasagir et de
garder le calme. Les soldatsnigériansleur ont crié 'haut
les mains' et ils ont exécut. cesmots. ils ont réussi
récupérer l'armement des fusiliers marins et des
militaires camerounais.Toute la bandey compns le chef
de Districta étdépouillée et molestée.
Constatant que la situation s'aggravait déjà, le
responsable des militaires nigérians, le Lieutenant
D.O.ALONGE a ordonnéla dispersion de toute la
population. Une cinquième pirogue ayané t galementdes
militairesàbord a accepté.
Les Camerounais ont ététous embarqués dansune
pirogue à moteur pour Ikang. Avant de lever l'ancre, le
Lieutenant D.O.ALONGE avait laissé entendrequ'ils
attendaientune moindreréplique de la part des militaires
camerounaispourouvrir le feu.
Les otages ont tous passéla nuit du 21 au 22 janvier
1981au poste de police de Ikang au Nigeria, où ils ont
étébien traités. En dehors du Chef de District et de
l'Inspecteurde police, tousles militairesontormi dans
une même cellule.
Ils ont passé lanuitdu 22 au23 janvier 1981au campde
l'arméemais toujours à Ikang.
Le 23 janvier, ils étaienttous acheminés verCalabar à
bord d'un camion militaire,les yeux bandés.Dans cette
ville, ils ont édébarquéd se postede policeen poste de
policemais sanssubirde sévices. Du 23 au 29 janvier 1981, ces camerounaisenlevésne
recevaient comme nourriture et d'ailleurs après
revendications, qu'unlatde tapiocaàchacunaprèsdeux
jours.
Le 29 janvier 1981, ils ont étémisà la dispositiondu
Consul Camerounais à Calabar qui les a acheminés le
lendemain vers Ekok d'oùla policecamerounaiseles a
conduitsà Marnfé.C'est le Préfet de la place qui les a
fait voyager jusqu'àBuea où ils ont étlogéset nourris
dansl'ancienhôteldes députés."
6.70 Les militaires nigérianont confisquéun certain nombre
d'armes etde matériel appartenantl'autoritéadministrative camerounai:e
"Toutes les armes et munitions que portaient nos
militairesont étconfisquées"
"Des sommes d'argent, les tickets d'impôts que
possédaientle chef de District et de nombreux autres
effets personnelsleur ont étéarrachés."(Annexe M.C.
257).
6.71 Cette voie defait, d'une gravité extrême, n'esptas restée
isolée.
2. Arrestation de trois policiers camerounais par la marine
nigérianele6mars 1990 à Jabane
6.72 Le 6 mars 1990, trois policiers camerounais et leurs
chauffeurs, en mission officiellà Jabane, dans la presqu'île de Bakassi, ont été
arrêtés par lma arine nigérianeet séquestréau Nigeria, dans un premier temps à
Calabar,puis àLagos, la capitale.
6.73 Les multiples échangesde notes et télex (note de
l'Ambassadedu Cameroun à Lagosdu 27 avril 1990,Note de la SûretéNationaledu
14 mai 1990, note n043/DGSN/IG.2,messagedu 7 mai 1990, message duMinistre
des Relations Extérieurs au Délégué Généraà la SécuritNationaledu 2 mai 1990,
message du Chef d'Etat Major de la Présidence auMinistre de l'Administration
Territoriale du 18 avril 1990,télex du Ministre dI'Admiistration Territoriale au
Ministre des Relations Extérieures du20 mars 1990 relatifs à ce grave incident,
permettent de reconstituerles circonstances de l'agressdont ont été victimesles
fonctionnairesde police Ndi ABANG,Che EPHRAIM,et Martin FOKOAOM, ainsitemtoire nigérian provoqueles protestations les plusénergiquesdu Ministre des
Affaires extérieurecamerounais(AnnexeM.C. 357).
B. - Les enlèvements et séquestrations d'autorités et de
citoyenscamerounais dans la région par les forces armées
nigérianes
6.88 Parmi les multiples vexations subiespar la population
camerounaise dansla provincede l'extrême nord depuis le débutde l'occupationen
mai 1987, le rapport au Chefd'Etat-Majordes Armées précité relèp ver exemple, à
la date du 13 mai 1989, l'arraisonnementet la confiscationd'une embarcation des
Services de PêcheCamerounaisà Blangouadans le Lac Tchad, par des militaires
nigérians.
6.89 En tout étatde cause, lesreprésentantsde l'administration
camerounaise quin'ontpas été molestésre ançonnés en 1987o , nt dûfuir versile-
Alifadevant lestroupes nigérianes.
54. Les autres répionsfrontalières
A. - L'occupation deTypsan par le Nigeria
1. Les faits
6.90 Si les visées annexionnistes nigéripesrtent principalement
sur la presqu'île de Bakassi et la régiondu Lac Tchad, elles se sont également
concrétisées par desincursions surle temtoire camerounais à de nombreuxautres
pointsde la frontièreentrelesdeuxEtats.
6.91 Ainsi le Nigeria occupe-t-il une partie du territoire
camerounais près de Kontcha, dans le départementde Faro et Deo situédans la
Provincede l'Adamaoua,au centredu pays. "Le 27 novembre 1980,une fois de plus, huit militaires
nigériansen tenue treillis (type gendarmerie)et armés,
ontfait irruptiondansle village'Archibong.
Non seulementils ont rassemblé les populatione st tenu
des séances detravail, ils se sontpermis demolester ces
dernièreset se sont mis à poursuivre un garde-chasse
camerounaisqui se trouvaitdans les environs. En moins
de deuxmois, cetacteest le deuxièmedu genre perpétré
sur notre sol par des élémentsarmés nigérians, et
constitue une violation flagrantede notre intégrité
territoriale.(AnnexeM.C. 256).
6.77 La gravité, la variétéet la fréquence des incursions
nigérianes sur letemtoire camerounais dela presqu'îlede Bakassidémontrentsans
ambiguïtéla volontéd'annexionde cette partie du temtoire camerounais par I'Etat
Nigérian. Le voisin occidentaldu Cameroun n'a d'ailleurs pas attendu l'invasion
militaire de 1994 pourconsidérerce temtoire comme annexé, puisque dè1 s992, les
nouvelles cartes administrativeséditéespar le Nigeria fmaient unilatéralementla
frontière dansle Rio del Rey en remplacementde l'actuelkwayafé,avec pour effet
de situer lapresqu'îlede Bakassiau Nigeria(Réf.: Mapof Nigeria showingthe thirty
states-third Edition.Producedandprintedby B.A.C.L -Kaduna).
6.78 Malgré les difficultésd'accèscette régionfort marécageuse
et à la végétation très dense, le Cameroun a toujours entendu faire prévaloirsa
souverainetésurla presqu'îlede Bakassi, qui a toujours éarfaitementintégrédeans
le maillage administratif du pays.
83. La Provincedel'extrêmn eord
6.79 La Province de l'extrêmenord est la régionla plus au nord
du temtoire camerounais ; il s'agitd'uneétroitebande deterre situéeentre le Nigeria
à l'ouestet le Tchadàl'estet quidébouche dansle LacTchad.
6.80 Depuis quelquesannées,le Nigeriatente d'y empiétersur la
souverainetécamerounaise et ses forces arméesmultiplient les incursions sur le
territoire camerounais. A. - L'invasion et l'occupation nigérianes surles terres
camerounaisesde la région du Lac Tchaddepuisle 2 mai
1987
1. Les faits
6.81 En février1987, les villages camerounais au borddu Lac
Tchad ont été envahis par des populations nigérianesrméesde machettes. Trois
Camerounaisont étéenlevéspuis torturés parles autorités nigérianes a,insi que le
rapporteune notedestinéeau Chef d'Eut-Major des Armées et relativeaux incidents
de frontière provoqués par le Nigeria sur toute la frontièredepuis le Lac Tchad
jusqu'à la presqu'îlede Bakassi.
6.82 Cette occupation "civile" aésuivieà partir du 2 mai 1987,
d'une occupationmilitaire et administrativede nombreuses localitdu département
de Logoneet du Chari, dans la Provincede l'extrême norddu Cameroun,au bord du
Lac Tchad. Un rapport trèsdétaillet confidentiel,établi le29 août 1à8l'intention
du Ministre déléguéà la Présidencede la Républiquechargéde la Défense par1'Etat
Major de la Gendarmerie Nationale, analyse avec précision les raisons,
principalement économiquesq , ui ont conduitle Nigerià se saisir de ces temtoires
camerounais (AnnexeL.C. 283).
En effet, les eaux duLacTchadse sontpratiquementretirées
6.83
de la partie nigérianedu lac. CetEut a donc favorun déplacemend te la population
des pêcheursdu nord vers le nord du Cameroun, où les conditions aquatiquee st
halieutiquessontmeilleures, avant "d'entérinecenemigrationde population parune
occupation militaire. L'espoirde trouver du pétrole n'est probablement asn plus
étrangerà l'agression nigériane. = Routerincipale
@ sons-nakrtun
0 Chef-ldeDisifid
. 'iillaoe.pkherla
EROUN
LOGONnEcnmi
NIGERIA6.â4 La liste des treize villages camerounais occupéest la
suivante:
-Balgaram
-Kafouram
-KassaouaMaria
-Naga
-GoreSaguir
-GoreKendi
-Tchaika
Dansces villages,les drapeauxcamerounaisontété brûlés.Certains Camerounais ont
étéemprisonnéset détenus auNigeria, où ils ont dù verser une rançonéquivalente
1000 Nairas pour êtrelibérés. Parmlies forces militaires nigérsrrivéesdans la
zone du Lac Tchad, les servicesde renseignements camerounais ont identifiéles
troupesdu 21èmebataillon blindénigérian,baséhabituellemenà Maiduguri, dans le
norddu Nigeria, non loinde la frontièreavec leCameroun.
6.85 Le rapport souligne que les habitants camerounais ont
souvent étémaltraités, et certains ont ébligésde se réfugierdans la localitéde
Hile-Alifaet les villagesavoisinants.
6.86 Cettemême sourcesoulignequ'unefoisencore, et sans autre
précision,le Nigeria a attribué l'agressionaux"gendarmes camerounais". Il est
important de noter que nombre des exactions reprochées aux"gendarmes
camerounais" sont en réalitéle fait de militaires nigérians, etalimentent une
information officielletendancieusedu Nigeriatant auprès desa populationqu'auprès
des organisationsinternationales.
2. Lesprotestationscamerounaises
6.87 La Républiquedu Cameroun a adressé denombreuses
protestationsaugouvernementde Lagos. Celles-cisontjusqu'à ce jour restéessans
effet. A titre d'exemple,la note de protestationdu 21 avril 1994concernela ville de
Darak,qui est situéà 35 km de la frontièrenigéro-camerounaise internationalement
reconnueet qui a toujours faitpartie intégrantCameroun. Sonoccupationdepuis
1987et les allégations diplomatiques nigérianes selon lesquellesaraitsituéeentemtoire nigérian provoqueles protestations les plusénergiquesdu Ministre des
Affaires extérieurecamerounais(AnnexeM.C. 357).
B. - Les enlèvements et séquestrations d'autorités et de
citoyenscamerounais dans la région par les forces armées
nigérianes
6.88 Parmi les multiples vexations subiespar la population
camerounaise dansla provincede l'extrême nord depuis le débutde l'occupationen
mai 1987, le rapport au Chefd'Etat-Majordes Armées précité relèp ver exemple, à
la date du 13 mai 1989, l'arraisonnementet la confiscationd'une embarcation des
Services de PêcheCamerounaisà Blangouadans le Lac Tchad, par des militaires
nigérians.
6.89 En tout étatde cause, lesreprésentantsde l'administration
camerounaise quin'ontpas été molestésre ançonnés en 1987o , nt dûfuir versile-
Alifadevant lestroupes nigérianes.
54. Les autres répionsfrontalières
A. - L'occupation deTypsan par le Nigeria
1. Les faits
6.90 Si les visées annexionnistes nigéripesrtent principalement
sur la presqu'île de Bakassi et la régiondu Lac Tchad, elles se sont également
concrétisées par desincursions surle temtoire camerounais à de nombreuxautres
pointsde la frontièreentrelesdeuxEtats.
6.91 Ainsi le Nigeria occupe-t-il une partie du territoire
camerounais près de Kontcha, dans le départementde Faro et Deo situédans la
Provincede l'Adamaoua,au centredu pays.6.92 Il émanede différentes notes transmises palres servicesde
renseignements camerounais au Gouvemeur de la Province de l'Adamaoua (en
particulier la note 10mars 94),quela frontièreCameroun-NigeriaàKontchaa été
ramenée à Typsan par l'arméenigériane,qui y a établiun poste de contrôle
frontalier
"Honneurporter à votreconnaissanceque infiltrationdes
populations nigérianesans notre unitéà Kontcha est
précisément matérialisée ipmaplantationde leur poste
de police émi-immigration au lieu-dit TYPSAN en
territoirecamerounais."(AnnexeM.C. 347).
6.93 La frontièreréelle, matérialisée par eserres laissées par
les Allemands, se situeau contraiàeplusieurs kilomètreà l'ouest de Kontcha(v.
supra Chapitre4,section2).
6.94 Le Gouverneur de la Province de l'Adamaoua a aussitht
rendu compte de la situation au Vice-PremierMinistre chargéde l'administration
territoriaàeYaoundé dansunenotedu 24 mars 1994:
"Jeme dois de vousrendre comptede la constructionen
1994 par le Nigeriad'uncommissariatémi-immigratioàn
6,5km à l'intérieurdu temtoire camerounais dans le
hameau TYPSAN du villageKontchaoù s'est installéun
groupe de trente Nigérians,commandéspar un chef
traditionnelNigérian.
Pourtant, la frontièàece niveau avaitétématérialisée
par des tasde pierres pendant la colonisation allemande
et ne devrait par conséquent souffrir d'aucune
contestationsi toutes les parties étaientdene foi."
(AnnexeM.C. 353).
2. Les protestationsdiplomatiques camerounaises
6.95 Cettenouvelleatteintenigérianeà la souveraineterritoriale
camerounaise se trouve dénoncée pa rne note de protestation du12 avril1994,
remisepar le Ministredes Affairesextérieurescamerounas {'Ambassade du Nigeria
à Yaoundé :
"Nigerian nationals have occupied the Cameroonian
localiryknownasKontcha(Faro and Deodivision)in the
Adamaouaprovinceof Carneroon. The Cameroonian authoritieshave obsewed that in the
past, Nigerian milirary occupation of Cameroonian
temtory generally followed the illegal occupation of
parts of her territory by Nigerianizens. The Nigerian
military occupation of Darak and parts of the Bakassi
peninsulaare casesin point.
Bythis note, the Cameroongovemmentreaffums in very
clear terms that Kontcha ispart and parce1of Cameroon
temtory and vigorously protests against the illegal
occupation of parts ofCameroon territory by Nigerian
nationals and militaries. Furthennore, the Cameroon
govemment invites the appropriate Nigerianauthonties
to recallhose NigeriansillegallyoccupyingKontchaand
desist from al1 acts that seak to occupy parts of
Cameroontemtory." (AnnexeM.C. 355)
B - Les enlèvements et séquestrationsd'autorités et de
citoyenscamerounais par lesforcesarmées nigérianes.
1. Enlèvementd'un citoyen camerounaispar trois policiers
nigériansà Kolofatale 29 mai 1989
6.96 Un incident aéclatéprès dela localitéde Kolofata, dans le
départementde Mayo-Sava, situéau sud de la Province de l'extrêmenord et fort
éloignéde la zonelitigieusedu Lac Tchad(environ150km).
6.97 Un ressortissant camerounais,Monsieur Ali ALHADGI
ABDURAMAN a étéinterpellépar trois policiers nigériansqui n'ont pu être
identifiés. Ces fonctionnaires étrangers ont emparésde la personne du citoyen
camerounaissur le temtoire camerounais,et l'ont conduit de force au commissariat
nigériande Banki,de l'autre côtde la frontière.
6.98 Selonun messageradiodu sous-préfet de Kolofatean datedu
30 mai 1989, les fonctionnairesnigériansauraientagidans lecadred'uneenquêtsur
un trafic de véhicules automobiles volés, achetéar le citoyen camerounaisà un
Nigérian,au Nigeria. Arrêté palra police de son pays, le citoyen nigérianaurait
conduitla policenigérianeau domicilede l'acheteurcamerounaisà Kolofata,du côté
camerounaisde la frontière(AnnexeM.C. 290).
6.99 Cet incident aurait pu avoir des conséquencestrès gravespuisque, enreprésaillesà l'actionde la policenigériane et après le dére celle-ci,
la population camerounaisede Kolofata a tenté des'en prendreà certains Nigérians
vivantsur place.La situationauraitpu dégénérer.
2. L'arrestationde quatre citoyens camerounaispar la police
nigériane à Mandur Yang (arrondissement de Nwa,
département Donga Mantung,province du Nord-Ouest)
6.100 Le 12 août 1992, un message du Chefde Service Provincial
de la SûretéNationale dela Province du Nord-Ouest, rendcompte d'un incident
survenu le6 juille1992 :
"Quatre compatriotes du villagefrontalier de Mandur
le 6 juillet92,talorsqu'ilscultivaientleurs champs"ia
6.101 Après intervention du sous-préfetde Nwa auprès des
autoritésnigérianes compétentes, les Camerounais o éntté libérés, après six jdes
détention arbitraireau Nigeria. Le sous-préfetconclut son rapport par les mots
suivants:
"Les intéressés ont regaglétemtoire camerounais sans
incidents, maisl'on redoute la réaction des populations
camerounaises." (AnnexeM.C. 320).
6.102 Ces diverses exactions imputablesaux forces de police
nigérianessur le temtoire camerounais, ont donc pour effet de perturber les
populations.Cene déstabilisation est d'autant plus réelee certainesdes exactions
sont attribuées parla propagandenigériane,aux "gendarmescamerounais",avecpour
objectif de susciter des troubles entre lespopulations nigériaet camerounaises,
étroitementmêlées de pae rtt d'autrede la frontière,et dejustifier alors l'intervention
des forcesannéesnigérianes.
C. - Les autresincidents
6.103 LRs efforts de déstabilisationdu Nigeria sur les différents
pointsde la frontièreen temtoire camerounais sontillustrésparles incidentssurvenus
dans la localitéde Mbelogo,à FUN-Awadans ledépartement de la Menchum, danslaprovince du Nord-Ouest.
1. Arrestation d'un agent recenseur nigérianà Mbelogo le 26
janvier 1994
6.104 Le sous-préfet de Fm-Awa rend compte au Préfet du
départementde la Menchum, dans un message du 21 janvier 1994, de l'arrestation
d'un agent recenseur nigérian dans le village frontalier de Mbelogo. Celui-ci,
Monsieur Garba MAKERI,agissait avec la complicitéd'un citoyen camerounais du
nom de Elias NGONG. Le fonctionnaire nigérian transportaitun registre récapitulatif
des impôts, où figurait le nom de citoyens camerounais résidant Mbelogo (Annexe
M.C. 335).
6.105 Le sous-préfetpréciseque le village de Mbelogo est l'objet
d'une convoitise constantedu Nigeria, et qu'à la suite de cet incident, de nombreux
citoyens camerounais l'ont évacué,de crainte d'une confrontation arméedans la
région.
6.106 Dans un second message en date du 26 janvier 1994, le
mêmesous-préfetde Fm-Awa propose son analyse au gouverneurde la province du
Nord-Ouest :
"Cette arrestation laisse apparaître l'ambition
hégémonique denotre voisin de l'ouest, qui veut, à
l'instar de ce qu'il a fait récemment au sud-ouest,
occuper le territoire camerounais et prétendreaprèscoup
qu'il s'agit d'une erreur de ses agents des forces de
l'ordre. Conscient de cette éventualet comme l'atteste
le renforcement de l'effectif des troupes nigérianes
installées récemment à Tosso, village nigérian situéà
35 minutes de marche de Furu-Awa, j'ai demandé au
sous-préfetd'ordonner la libérationde l'agent nigérian
pour ne pasdonner un prétexteà ses troupes, qui peuvent
à tout moment attaquer Furu-Awa, localité enclavée et
sans capacité de riposte appropriée." (Annexe M.C.
336).
6.107 La stratégiede déstabilisationnigériane danscette région
devait trouver une nouvelleillustrationen septembre 1994. 2. Les incidentsdu 26 septembre1994àMbelogo
6.108 Le 27 septembre 1994, un message en provenance du
gouverneurde la province du Nord-Ouest, rend compteau Vice Premier Ministredu
Cameroun d'un très grave incident. Deuxgendarmes camerounaisen patrouille à
Mbelogo avaient intercepté deux militaire nigérians setrouvant illégalemenstur le
territoirecamerounais.Aprèslesavoir arrêtés, legsendarmes camerounais ont été pris
àpartie par la foule, molestet menottés, cependanqtueleurs armes etmunitionsont
été volées(AnnexeM.C. 371). Le rapport sur cetincident duchef de la brigade de
gendarmeriede FUN-Awa, le maréchal desLogis Patrick NYUYDINETALA, est
sanséquivoque(rapportdu 2 octobre1994) :
"le 26 septembre 1994, le Maréchal des logis
MASSANGO Paul, était désigné régulièremen dte
semice de patrouilledans le secteur5 avec le gendarme
major Ngomdandi MANRETOING. (...)Conformément
aux ordres, ces éléments devaient marquer utn emps
d'arrêdtansle villageMbelogo. (...)
C'est ainsiqu'aux environs de 7 heures du matin, ces
militaires, de passagedans le village indiquéci-dessus,
aperçoivent deux éléments d ferce migration duNigeria
en train de perpétrer desactes d'extorsionet pillages aux
paisibles citoyens Camerounaisde passage. Après un
accrochage sanctionné ensuitp ear un échangede coups
de poing, ces deux éléments nigérians fure mntîtrisés et
menottés. (..) Ils (lesgendarmes)prennentle chemindu
retour vers FUN-Awaoù, sans faire trois kilomètres,ils
tombent dansune embuscade et sont assaillis par la
populationde Tossoappeléeen renfort.
Une foule d'approximativement une cinquantaine de
personnes armées de gourdins, machette et fusils de
chasse, sont tombéessur les éléments.Ils les ont
molestés, désarmé etsconduits devantle chef de Tosso
commeJésusdevantPonce Pilate,et puis, sanstarder, ils
furent amenés àMobi, où se trouve le commissariat de
police. (...)Pendant ce temps, une forte patrouillede
vigilance et de contrôle étaitinstauréedans le but de
veillerà ce qu'aucun individune traversepour alerter la
brigade de cet incident, car toute personne ayant
l'intentionde traverser sur FUN-Awaétaitinterpellée et
gardée pendanu tn temps." (AnnexeM.C. 372).
6.109 L'armementde la patrouille (un fusil d'assaut, un chargeur
de 20 cartouches,un pistoletmitrailleuretdeuxchargeursde 20 cartouches, ainsique
deuxpairesde menottes)n'apasété rendupar lesNigérians.SECTION3. LES OBLIGATIONS INTERNATIONALE WSOLEES
PAR LENIGERIA
81. L'interdictiondurecoursà laforce
6.110 Le déploiementet l'ampleur des incursions nigérianes ainsi
que des activitésau sein de la République duCameroun ont étélargement démontrés
dans la section précédente. 11resàreprendre en détaille degrédes violations du
droit international du fait de ces actions et leurs conséquences juridiques. On verra
qu'en fait les actions nigérianes ont vdifférentesrègles juridiques, tant parce
qu'elles constituent autant de recoàrla force que par l'occupation par la force
d'une partiedu territoire du Camerounqui en est résultée.
A. - La violationdu principede l'interdictiondu recourà la
forcearmée en droitinternational
6.111 Le droit international comprend toute une série de règles
étroitementliées dontla fonction collectiveest de protégerla survie mêmedes Etats.
L'importance de cette fonction dans le systèmeinternational va sans;dcomme
Henkin l'a écrit"Theprincipal developmentin international lawin ouristhe law
of the United Nations Charter outlawing the use of force in international "elations
(L. HENKIN, How Nations Behave, Colombia UniversityPress, New York, 2 ème
édition, 1979,p. 135). L'interdiction du recoàrla force vis-à-vis des Etats est
préciséeet complétéepar des règles précises relatives l'agression,à la. non-
interventionet à la protectionde la souverainetéétatique.
6.112 Le principe fondamentalest fermement établi.11est exprimé
par l'article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations Unies, mais il apparaît dans
d'autres instruments universels et régionaux (notammentdans la Charte de l'Unité
africaine) et il est également copar le droit coutumier international. L'article 2,
paragraphe 4, énonce que "tesmembres del'organisations'abstiennent,dans leurs
relations internationales, de recourira menace ou à
l'emploide la force, soit contre l'intétemtoriale ou
l'indépendance politiquee tout Etat, soit de toute autre
manièreincompatible avecles buts des Nations Unies"
(voir aussi le paragraphe ler de la résolution3314
(XXIX) de l'Assembléegénéraled,u 14décembre1974).
6.113 11n'est pas nécessairedans le contexte quinous intéredee
débattredu sens àdonner au mot "force" nide déterminersi cela inclutla contrainte
économique et politiqueLe fait que l'expressionrecouvreessentiellementle recours
à la force arméeest clair, univoque,et celaconstituele fondementmêmde la société
internationale contemporaine. Il n'est donc pas nécessaireici de dépasser cette
définitionreconnue. Assurément, laRépublique duCameroun est victime d'un
recours évidentet flagrantla force armépar un Etat voisincontresa souveraineté.
6.114 La sphère d'application del'article2, paragraphe 4, est
clairement indiquée. Il interditla menaceet l'emploide la force "contre l'intégrité
temtoriale ou l'indépendance politiqudee tout Etat, [ou] de toute autre manière
incompatible avec les buts des Nations Unies". La mple expression du champ
d'applicationde l'interdictionne peut êtreminimiséeLa force ne peut êtreutilisée
contre l'intégritérritorialedes Etats. Lesfrontières internatisontsacro-saintes
et sontl'expressionde la souverainetet de l'égalité Etats.Ces mêmes principes
sous-tendentla protectionde1'indépendance.p o liEtaqs.eLa Cour elle-même
a fait référenceau "principedu respect de la souveraineté des Etatqui, en droit
international,est étroitementliéceluide la prohibitionde l'emploide la forceàet
celui de la non-intervention" (C.I.J., arrêt,27 juin 1986, affaire des Activités
militaireset paramilitairesau Nicaraguaet contrecelui-ci, Rec. 1986, p. 111De
plus, la prohibitionrecouvrela menaceou l'emploide la force de tout autre manière
incompatible avec les buts des Nations Unies. De tels buts comprennent, dans
l'article 1 (1) de la Ch:rte
"Maintenirla paix et la sécurité internatioetlàcette
fm :prendre desmesurescollectivesefficaces envue de
prévenir et d'écartles menacesà la paix et de réprimer
tout acte d'agression ou autre rupture de la paix, et
réaliser,par des moyenspacifiques, conformémena tux
principes de la justice et du droit international,
l'ajustement ou le règlement de différends ou de
menertàounerupNrede lapaix;".rnational, susceptibles de
Il faut aussi souligner que, dans le cadre de la poursuite des objectifs del'organisation,l'ONU et les Etats membres sont tenus, conformémen àt l'artic2,
d'agir conformémen t toute une sériede principes, notammentcelui de l'égalité
souverainedesmembres del'organisation (article2, paragraphe1).
6.115 Ainsila prohibition figuranà l'article2, paragraphe4, de la
Charte est large et étendueen ce qui concernel'emploide la force dans les relations
internationales ou inter-étatiques. Elle ne peut êtrelimitée à des tentatives de
modifier les dimensions temtoriales ou l'autoritépolitique d'un Etat, quoique
l'interdictionde tellestentatives constituele noyaumêmdu principe.
6.116 De plus, il faut noter que le concept de souveraineté
temtoriale et d'intégritterritoriale dépassele cadre du temtoire terrestre de 1'Etat.
Reprenant pour l'essentielles dispositionsdes articles 1 et 2 de la Convention de
Genèvesur la mer temtoriale de 1958,l'article2, paragraphe1de la Convention sur
le droit de la mer dispose
"la souveraineté d'unEtat côtier s'étend,au delà de son territoire terrestreet de ses
eaux intérieureset, dans le cas d'un Etatarchipel, de ses eaux d'archipel,à une
ceinture maritimeappelée mer territoriale"; et l'article2 paragraphe2 disposeque "la
souverainetés'étend à l'espace aérienau dessusde la mer temtoriale ainsi qu'à ses
fondset son sous-sols".
6.117 La Cour l'a soulignéen 1986quandelle a déclaré que
"le concept juridiquefondamental dela souveraineté des Etats en droit international
coutumier, consacrénotamment par l'article 2, paragraphe 1, de la Charte des
Nations Unies, s'étend aue aux intérieures eà la mer territorialede tout Etat, ainsi
qu'à l'espace aérieanu dessusde son territoire". Pour cequi est de l'espace aérien
surjacent, la convention deChicagode 1944relative àl'aviation civile internationale
(article premier)reprend le principe établide la souveraineté complètet exclusive
d'un Etat sur l'espaceatmosphériqueau dessus deson territoire. Cette convention, se
conjuguantavec laconventionde Genèvede 1958sur la mer territoriale, préciseque
la souverainetéde 1'Etatriverain s'étenà la mer territorialeeà l'espaceaérienau
dessusde celle-ci,commele fait aussila Convention surle droit de la mer adoptéele
19décembre1982. 11est hors de doutepour la Cour que ces prescriptionsdu droit
conventionnelne font que 3correspondre à des convictionsqui, depuis longtemps,
sontbien établiesen droit internationalcoutumier" (CJ.,arrêt,27juin 1986,affaire
des Activitésmilitaireset paramilitairesau Nicaraguaet contrecelui-ci, Rec., 1986,6.118 LaCour internationale amême relevé que
"lesreprésentantsdesEtatsle mentionnent[leprincipede
la prohibitionde l'emploide la forceexpriméà l'article
2, paragraphe41souventcommeétantnon seulement un
principe dedroit international coutumier, mencoreun
principe fondamentalou essentiel de ce droit" (C.I.J.,
arrêt,27 juin 1986, affaire des Activitésmilitaires et
paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci, Rec.,
1986, p. 100. Voir aussi l'affaire de la Barcelona
arrêt,5février 1970,Rec. 1970,p. 32).ited, C.I.J.,
Le PrésidentSINGH, dansson Opinionindividuelle,souligne quela Cour
"a fait oeuvreméritoire ensoulignant quele principe du
non-emploi de la force relevait du jus cogens et qu'il
étaitau coeur des efforts déployés par l'humanitéour
promouvoir la paixdans un mondedéchiré par les luttes
(Ibid., p. 153, v.aussi l'opinion du Juge SETTE-
CAMARA ;Zbid.,p 199).
6.119 Il s'ensuit qu'ily a peu de doutes que le principe
fondamental de l'interdiction durecoursà la force contre des Etats constitueune
norme internationaled'une importance exceptionnellet peut être considércoemme
une normeimpérative du droit international géné(iuscogens).
6.120 Les activités du Nigeria, présentées dansla section
précédentet,émoignent d'un recours persistanà la force arméepar ce pays contre
l'intégrittemtoriale du Cameroun. Il est inutile de répéter dls présente section
les faits déjà présenmsaisil est bonde soulignerles incidentsles plus notables. On
peut se référer la cartejointe présentantles endroitsoù des incursions violentes ont
eu lieu(plan1sousle par. 6.05).
6.121 Les départementsde Logoneet Chari, dans la Province de
l'Extrême Nord du Cameroun, au borddu Lac Tchad, ont été envahe it occupéspar
les troupes nigérianàsdaterdu 2 mai 1987,ces forces comprenantapparemment des
soldatsdu 21èmebataillon blindé nigérian.Douze villagescamerounais ontété pris
et des citoyens camerounaisont été maltraités (v.supra, pars. 6.81 - 6.87 et le
rapport du 29 août 1987, AnnexeM.C. 283). Dans la péninsulede Bakassi à partir
des derniers jours de décembre1993, une série d'incidents éa galementprovoqué
rapidement une.crise importante.L'infiltrationnigériane le temtoire camerounais1. RiodelRey-Tikoro 9.LacTchad
2.Jaban eIdabat-Akwa 10.Kontcha
KombJ oanea 11.Kolofata
:.......:.:.:.:
8.Archibon(gkwa) Zone d'occupat iinériane
-- 50 100kma débuté le21 décembre1993 et le 28 décembre1993, trois navires de guerre
nigérians ayantà bord un millier d'hommesont commencéà patrouiller à proximité
du village de Jabane sur la péninsulede Bakassi. Ces troupes ont débarqué le 3
janvier 1994 à Jabane et ont occupél'île de Daimon où elles ont hisséle drapeau
nigérian.II a étésignalé qu'environ500 soldats nigériantenaient cesdeux îles (voir
le Sumrnan,of World Broadcasts dela BBCen datedu 7janvier 1994,AnnexeM.C.
330). De là, ils se sontrendus avecdes équipements lourds à Idabatooù ils ont reçu
des renforts.Le 5 janvier, les forces d'invasion nigériase sontdéployée s Akwa.
Au cours de la nuit du 18 au 19 février,les forces nigérianesont lancéune action
militaire contre les soldats camerounais stationnéà Idabato et à Kombo Janca (v.
supra partie2, chapitre 6, section 2, par. 6.34 et les documentquiy sont cités).Il
va sans dire que le Cameroun a élevé des protestations vigoureuseset entrepris des
efforts diplomatiques pouramver à une solution (Zbid., pars. 6.35 - 6.45). Les
forcesnigérianessontaussientrées surle territoirecamerounais,au centredu pays, au
débutde 1994et ont occupéla régionde Kontchadansle département de Faro et Deo
situé dansla province del'Adamaoua(Ibid., section3).
Par ces actionset par le recouàsla force armée,le Nigeria
6.122
a violéde manière explicite, flagrante, et systématiquel'intégrittemtonale du
Cameroun. Il est aussi évidentque les activitésnigérianesont violél'interdictionde
recours àla force par leursactiondans leseauxterritorialeset leseaux intérieurdu
Cameroun. Comme on l'a vu (v. supra, pars. 6.116 - 6.117), le concept de
souverainetétemtoriale s'étend à la mer temtoriale et aux eaux intérieurede 1'Etat
côtier.
6.123 Le principe interdisantla menace ou l'emploi de la force
contre l'intégrité territoriall'tindépendancpolitiqued'un autreEtats'appliqueaux
eaux territoriales de tels Etats, autant qu'à la partie terrestre du territoire des Etats.
Commele soulignel'article301 de la Conventionsurle droitde la mer de 1982
"dans l'exercicede leurs droitset de leursdevoirsdansle
cadre de la présente convention,les Etats doivent
s'abstenirde toute menaceou de tout emploi de la force
contre l'intégrittemtonale ou l'indépendance politique
de tout Etat ou de toute action incompatible avec les
principes de droit internationalrepris dansla Charte des
Nations Unies."
6.124 Ce principe constitueune disposition généralde'application
large et énonce à nouveauune normeclaire, a savoir que les règlesinterdisant lerecours à la force continuent d'êtreapplicablesen corrélation avec les séries de
normes particulièresassociéesau droit de la mer (v. aussG. KINLEY, "TheLaw of
Self-Defence, Contemporaxy NavalOperations,et la Conventiondes Nations Unies
sur le droit de la mer" in la Conventiondes NationsUnies sur le droit de la mer :
Effets et Mise en Oeuvre, ed. E.D. BROWNet R.R. CHURCHILL,ed. Université
de Hawaii, Honolulu, 1987, p. 10et R-J DUPUYet D. VIGNES,Traitédu Nouveau
droit de la mer, Economica,Paris, 1985,chapitre21).
6.125 11va de soi que la mer temtoriale, en tant que telle, est
soumiseàdes règlesen partie différentes de cellesapplicableà l'espaceterrestre. Tel
est en particulier le cas du droit de passage inoffensif dontbénéficientes navires
étrangers;mais le passage doit êtreinoffensif. L'article 14, paragraphe 4, de la
Conventionde Genèvesur la mer temtoriale etla zonecontiguë de 1958 dispose que
le
"passageest inoffensif tantqu'il ne porte pas préjudiàe
la paix, au bon ordreouà la sécuritde 1'Etatcôtier"
alors que l'article19 de la Convention surle Droit de la Mer de 1982 élargitce
principeen indiquant précisément qu le
"passage d'unnavire étranger doiêt treconsidéré comme
portant préjudiceà la paix, au bon ordre oà la sécurité
d'un Etat côtier si, lors de son passage dans la mer
temtoriale, il s'engage dansl'unedes activités suivantes
(a) toute menace ou emploi de la force contre la
souveraineté,l'intégritétemtonale ou l'indépendance
politique de 1'Etat côtier ou violation de toute autre
manière des principesde droit international consignés
dans la charte desNationsUnies :
(b) tout exercice ou entraînement avec des armes
quellesqu'ellessoient;
(c) tout acte visant à collecter des informations
préjudiciablesàla défenseou à la sécuritde I'Etatcôtier
(d) tout acte de propagande visantla défenseou la
sécuritéde SEtatcôtier ;. . .
(0 lancement, débarquement ouembarquement de
matériel militaire. "
Lesactivitésnigérianessont clairementen infractionavec cesdispositions. 11est évidentqu'ily a eu violation systématiquedeeaux temtoriales du
Camerounpar des navires nigérians officiels (marine, douaneset police) depuis lfin
des années1960. Cela est amplementdémontré par l'étudedes incidents reprise ci-
dessus (v. supra. pars. 6.48-6.54). Ces incidents incluentle meurtre du propriétaire
français d'un chalutier par des soldatsnigériansen 1968, l'arraisonnement debateaux
de pèche camerounaispar des vaisseauxde guerre nigériansen 1970 et l'imposition
de taxes financières sur des canoës se rendant au Cameroun par des douaniers
nigérians établis dansune crique de la région du Rio del Rey, faits constatés
expressémentpar la DélégationGénérale dela Gendarmerie Nationale au ministre
d'Etat chargé des Forces Armées à Yaoundéle 18juillet 1984. L'un des incidents les
plus graves s'est produitle 16 mai 1981 avec l'attaquepar deux navires de la marine
nigériane d'un patrouilleurcamerounais, qui a entraînéun échangede coups de feu
occasionnant la mort de 5 nigérians et a eu lieu dans les eaux temtoriales
camerounaises à l'embouchure du Rio del Rey ; il s'agit du premier engagement
sérieuxdans les eaux territoriales du Cameroun (Ibid., pars. 6.14 - 6.17). Comme
autre exemple, le Bulletin Mensuelde Renseignements demars 1984 (Annexe M.C.
269) marqué "secret"àl'origine, traite de deux incidentsprécis. Le premier a eu lieu
le 11 mars par l'intrusion d'élémentsdes forces de l'ordre du Nigeria dans la grande
pêcherie camerounaised'Ahana, situéeà proximitéde Sandy Point. Le deuxième a
eu lieu le 19 mars, quand les militaires nigérians ont pousséleur patrouille jusque
dans le Rio del Rey.
6.127 Incontestablement, une étude approfondie auprès des
pêcheursd'Imua Mba mentionnéedans une communicationde la sous-préfecturede
Kombo Abdimo du 2 décembre1985(Ibid., par. 6.52), et évoquée dans une note du
Secrétaired7Etat à la SécuritIntérieuredatéedu 17décembre1985(Ibid.) a souligné
que les douanes et la police maritime nigérianes otffectuédes patrouilles régulières
dans les eaux territoriales camerounaises. De telles activitéset patrouilles régulières
sur une périodesi longue constituentclairementune violationde l'intégrité territoriale
du Cameroun et ne peuvent en aucun cas êtreassimiléesau simple exercice du droit
de passage inoffensifàtravers la mer temtoriale, en dépitdes dénégationsigérianes.
6.128 La Cour a souligné dansl'affaire des Activités militaireset
paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci que des activités hostilespar un Etat
étrangerdans les eaux intérieures et sur lamer territoriale (dansce cas, le dépôt de
mines) violaient "l'obligation pour tout Etat de respecter la souverainetétemtoriale
des autres" (CIJ, arrêt, 27 juin 1986, affaire des Activités militairesetparamilitaires auNicaraguaet contrecelui-ci, Rec., 1986,p. 111)."11est en tout cas
certain [a ajouté laCour] que les entraves apportées à la navigation affectentla
souverainetéde 1'Etatcôtier sur ses eaux intérieure,insique le droit de libre accès
dont peuventbénéficielres navires étrangers"(Ibid., pp. 111-112). En conséquence,
il est clair que le Nigeria a violéla souverainetétemtonale du Cameroun par son
activitéconstantedans les eaux intérieureset la mertemtonale de ce demier durant
une périodede temps significativeet peut incontestablementavoir aussi porté atteinte
au droit delibre accès desnavires étrangers.
6.129 On peut en conclure quele Nigeria, par ses actions menées
contre l'intégrittemtoriale du Camerounsur terre et sur la mer temtonale qui se
sont traduites, de manièreflagrante par le recourà la force armée, a violéun des
principes essentiels du droit international. 11s'agit en soid'une infraction sérieuse
d'autant plus que cette normen'est pas une norme isolée. Elle est étroitement làée
d'autres normesfondamentales qui renforcentsa position centrale dans le système
juridique intemational.
B. - ViolationduPrincipede non-intervention
6.130 Le Nigeria a aussi,par ses activiarmées, violéle principe
juridique international denon-interventionIl n'y a aucundoute quant à l'existence
ou au statut de ce principe (v. par exempleOPPENHEIM'sInternational Law, Sir
Robert JENNINGSet SirArthur WATTS,edsLondres, Longman,9e éd., 1992,pp.
427-434 et N.A. OUCHAKOV,
"La compétence internedes Etats et la non-interventiondans le droit international
contemporain",R.C.A.D.I., 19741,Vol. ? p. 1).La Cour a déclaré clairemenqtue
"le principe de non-interventionmet en jeu le droit de
tout Etat souverain de conduire ses affaires sans
ingérenceextérieure ;bien queles exemplesd'atteinte au
principe ne soient pas rares, la Cour estime qu'il fait
partie intégrante du droit international coutumier"
(CI.., arrêt, 27 juin 1986, affaires des Activités
militaireset paramilitaires au Nicaraguaet contrecelui-
ci, Rec.,1986,p. 106et voir aussip. 126).
6.131 La Cour a reconnu en 1949 les questions essentiellesde
politique liéesau maintiende la validitéet de l'efficdu principe. Elle a soulignéclairementdans l'affaireduDétroitde Corfouque
"le prétendu droit d'intervention ne peut être
envisagé...que comme la manifestationd'une politique
de force qui, dans le passé,a donnélieu aux abus les
plus graves et qui ne saurait, quelles que soientles
déficiences présentes de l'organisation internationale,
trouver aucune place dans le droit international.
L'interventionest peut-êtrmoins acceptableencore dans
la forme particulièrequ'elle présenteraitici, puisque,
réservée parla nature des choses aux Etats les plus
puissants, elle pourrait aisément conduire à fausser
l'admiistration de la justice internationaleelle-même",
(C.I.J., arrêt,avril 1949, affaire duDétrode Corfou,
Rec., 1949, p. 35).
6.132 Le principe a étémentionnédans plusieurs résolutions des
Nations Unies. Dans la Déclaration surI'inadmissibilitéde l'intervention dansles
affaires intérieures desEtats et la protection de leur indépendanceet de leur
souveraineté,(Assemblée généraler,ésolution2131 (M) du 2 décembre1965), il est
préciséclairement qu'
"aucun Etat n'a le droit d'intervenir, directement ou
indirectement,pour quelque raison quece soit, dans les
affaires internes ou externes de tout autre Etat. Par
conséquent, des interventionsrméeset toute autreforme
d'ingérence ou detentativede menacecontrela personne
de I'Etat ou contre ses élémentsolitiques,économiques
et culturels, sont condamnées"(voir aussi l'article 3 du
Projet de Déclarationde la Commission du Droit
internationalsur les Droits et les Devoirsdes Etats de
1949).
Cette dispositionest reprisepour l'essentiel dansla Déclaration relativprincipes
du droit internationaltouchantles relationsamicaleset la coopérationentre les Etats,
(Assemblée généraler,ésolution2625 (XXV) 24 octobre 1970)et dans la Déclaration
sur la valorisationde l'efficacitédu principe d'interdictionde reàola menaceou
à l'emploi de la force dans les relations internationales,(Assembléegénérale,
résolution42/22 (18novembre1987)).
6.133 Le principe est aussi inscrit dansles instruments régionaux.
L'articleIIIde la Charte de l'UnitéAfricainede 1963, par exemple, à laquelle le
Nigeria et le Camerounsont tousdeuxparties, énonceles principesde l'organisation
tels que l'égalitsouverainede tous les Etats membres,la non ingérencedans les
affaires intérieuresdes Etats et le respect de la souverainetéet de l'intégrité
territoriale de chaque Etat (v. aussi l'art18lde la Charte de l'organisation desEtats Américains).Les actions du Nigeria sont clairement incompatible avec ses
obligationsdécoulantde ce traitérégional.
6.134 On a définiune intervention illégale comme"forcible or
dictatorial interferenceby a state in the affairs of another state,calculatedto impose
certain conduct or consequenceson that other state" (OPPENHEIM'sInternational
-aw, op.cir., p. 430). L'essencedu principede non interventionest le suiva:t
"il interdit à tout Etat ou groupe d'Etats d'intervenir
directementou indirectement dans les affairesintérieures
ou extérieures d'un autre Etat. L'intervention interdite
doit donc porter surdes matièresà propos desquellesle
principe de souveraineté desEtats permet à chacun
d'entre euxde se déciderlibrement" (C.I.J., arrêt, 27
juin 1986, affaires des Activités militaires et
paramilitaires au Nicaragua etcontre celui-ci,Rec.,
1986,p. 108).
6.135 Celaest certes très étroitement luconceptde l'exercicede
la souveraineté d'Etat comme principe d'intégritétemtoriale. Toute ingérence
extérieure surle territoire d'un Etat par un autre Etat constitue nécessairemutne
intervention illégaleLa Cour souligne que
"l'intervention estillicite lors. . . .elle utilise des
moyens de contrainte. Cet élément de contrainte,
constitutif de l'intervention prohibée etformant son
essence même, estparticulièrementévidentdans le cas
d'une interventionutilisant la force, soit sous la forme
directe d'une action militasoit souscelle, indirecte,du
soutienà des activitéarméessubversivesou terroristesà
l'intérieurd'unautre Etat"(Ibid.).
6.136 Les activitésmilitaires nigérianes sur le temtoire du
Camerounconstituent sansaucundoute uneviolationdu principe denon-intervention.
De tellesactivitésrecouvrent (en dehors des actions quiconstitueraienten tout état de
causedes infractions aux règles interdisalt recourà la force arméementionnées ci-
dessus) la gammedes actions nigérianea syantprécédé l'attaque arméseur Bakassifin
1993. On a notépar exemplela présencede soldatsnigérians à Idabatoau printemps
1981, l'existence illégaee patrouillesnigérianes éténotée à nouveauen mars 1983
ainsi qu'en septembreet décembre1990, au printemps 1991, d'octobre à décembre
1992, au printempset en été1993 (v supra, pars. 6.16 et 6.56 - 6.62). De telles
actions semblents'êtreintensifiéesavecles annéeset, à un momentdonné, elles ont,
sans aucundoute, au planjuridique, basculé del'interventionillicitevers l'emploide
la force armée.6.137 Le passage illégalde la frontière paun grand nombre de
civilsarmés demachettesen février 1987,actionqui a été suivierapidementpar une
occupation militaire nigériane, estun autre exemple (v.supra,pars. 6.81 -6.82).
Il n'y a aucun doute que l'invasionnigériane initiale pardes civils armésconstitueen
soi une violation de la règlede non-intervention. Comme la Cour l'a noté,cette
conduite est contraireà la règlede non-intervention dansla mesure où elle vise à
influencer le choix souverain d'un autreEtat membre en utilisant des méthodes
coercitives directes ou indirectesLe soutien du Nigeria à des activitésarmées
subversivesau Cameroun,est manifesteen l'occurrence.
6.138 D'autresincidents représentenatussiune intervention illégale
du Nigeria. Par exemplel'enlèvementde représentants officiels du gouvememen nt
peut être considéréque comme une ingérencepar la force dans les activités
souverainesd'un autre Etat. Cela s'estprésenté à plusieursreprises. Le 21 janvier
1981, M. SimonESABE, chef dudistrict d'Idabato, lors d'une tournéed'inspection
des pêcheriesde la zone en compagnied'autresreprésentants du gouvememen ett de
l'armée,a étéenlevépar un groupe d'une vingtaine de soldats nigérians à Kombo
Abedio et emmenéen bateau à moteur à Ikang au Nigeria. Ils ont étéfinalement
remisau consuldu Cameroun à Calabar,Nigeria, le29janvier (v. supra,pars. 6.66-
6.71). Le 6 mars 1990, trois agents de la force publique camerounaiset leurs
chauffeurs en mission officielle Jabane ont étécapturéspar la marine nigérianeet
emmenéstout d'abord à Calabarpuis à Lagos, Nigeria. Ce n'est que le 2 mai 1990
qu'ils ont enfin été relâché(v. supra,pars. 6.72 - 6.74). En avril 1990, le sous-
préfetde KomboAbedimo,dans lapresqu'île de Bakassi,a été enlevé au cou dr'sune
visiteofficielle etn'a été libqueplusieurs joursaprès (v.supra,par. 6.75). Il faut
ajouter aussi la capture de matérielsofficiels camerounais.Par exemple, le 13 mai
1987, une embarcation des Services de Pêchecamerounaise a été arraisonnéeet
confisquée parlestroupes nigérianessurle Lac Tchad(v. supra,par. 6.88).
6.139 Il est ainsi patent queles activités militaires nigéesr le
territoire camerounais onta nouveauvioléle principe de non-intervention du droit
coutumierinternational. C. -
Violation du principe du respect de la souveraineté de
I'Etat
6.140 Le devoir de respecter la souveraineté desautres Etats est
étroitement liéaux principes de l'interdiction de recours à la force et de la non-
intervention. Il a été dque
"Sovereignty is supreme authority, which on the
international plane means not legal authority over al1
other Statesbut rather legal authoritywhich not in law
dependent on any other earthly authonty. Sovereignty in
the strict and narrowest sense of the term implies,
therefore, independenceal1round, withinand without the
borders of the country" OPPENHEIM's International
&, op. cit., p 122).
6.141 La Cour a soulignéqu'il est de "l'obligation de tout Etat de
respecter la souverainetéterritoriale des autres" (C.I.J., arrêt,27 juin 1986, affaire
des Activitésmilitairesetparamilitairesau Nicaragua et contrecelui-ci. Rec.,1986,
p. Il), comme la Cour l'avait expliqué précédemmen" t,entre Etats indépendants,le
respect de la souverainetéterritoriale est l'une des bases essentielles des rapports
internationaux" (C.IJ.,arrêt,9 avril 1949, affaire du Détroitde Coqou, Rec., 1949,
p.35).
6.142 La violation de cette obligation se heurte aux principes
essentiels de la vie internationalepuisqu'elleméconnaîtl'égalisouveraine des Etats
et le droit de tous les Etaàsmanifester et exercer librement les qualitéset atmbuts
inhérentsà leur existence souverainepropre. Par conséquent, l'emploide la force par
le Nigeria contre l'intégritétemtoriale du Cameroun constitue non seulement un
violent affrontàla souveraineté de ce dernier mais aussi untransgression sérieuse et
grave au regard du principe général du droit international protégeantla souveraineté
de tous les Etats.
6.143 On peut ajouteraux éléments susmentionné lscomportement
des troupes nigérianes constituant une insulte flagrante à la souveraineté du
Cameroun. 11 s'agit de l'acte présentant une très grande importance symbolique
effectuépar lestroupes nigérianes, consistanà amener lescouleurs du Cameroun et à
hisser le drapeau nigérian. Cet acte en lui-mêmereprésenteun affront direct à la
souverainetédu Cameroun. Le 10 décembre1990, par exemple, un message du
Préfetdu départementde Ndian adresséau Centre de la Direction Généralede laSécurité Nationaleà Yaoundé arévélé qu'un bataillon armé dlea marine nigériane
avait occupé Jabaneet avait hisséle drapeau nigérianaprès avoiramenéle drapeau
camerounais (v. supra, pars. 6.56 - 6.60). Ce lever du drapeau nigérian aété
renouvelé à Jabane par les nigérians le27 avril 1991, et, en octobre 1992, des
responsablesnigérians ontapposédeux panneauxdans la zone, dont l'un portait la
mention "Bienvenueà Abana Clan :Zone du GouvernementLocal d'tücapabuyo ;
Républiquefédéraledu Nigeria" (Zbid.).De plus, quand les forces nigérianesont
débarqué à Jabanele 3 janvier 1994, l'unedespremièreschosesqu'elles ont faites fût
d'occuperl'îlede Daimonet de hisser leurdrapeau(v. supra,par. 6.31).
L'occuoationmilitaireet sesconséauences
82.
6.144 Au delàdes aspects illicites présenpsr les activitarmées
du Nigeria contrele territoire camerounais, des questions surgissmmédiatement,
notamment cellede la qualificationde la situationrésultantde l'emploiillicite de la
force ayantplacéle territoirecamerounaissouscontrôlephysiquedu Nigeria.On peut
faire trois propositions.D'abord qu'unetelle occupation armée dans ces circonstances
est en soi contraireau droit internation;deuxièmementqu'unetelle occupationne
peut en soi constituerun titre sur le temtoire et, troisièmement, qu'aucunaction
d'affirmation d'un titre (que ce soit par annexion formelleou par extension de la
juridiction intérieure),prise surla base d'unetelle occupation, nepeut être reconnue
commelégitimeet valable.
6.145 Il seraiàl'évidenceillogiqueet injustequele recoursillicite
à la force ait pour conséquencun résultatlégitimeaprèsque le recoursà la force a
permis d'obtenir le contrôledu temtoire. La déclaration relative auprincipes du
droit internationaltouchant lesrelations amicaleset la coopérationentre les Etats a
énoncé en termes toutà fait catégoriques que
"le territoire d'un Etatne doit pas êtrel'objet d'une
occupation militairesuite à l'emploi de la force en
infraction avecles dispositionsde la Charte"(Assemblée
généraler,ésolution625 (XXV)24 octobre 1970).
6.146 Ce principe aété réaffirm dansla résolution dl'Assemblée
générale 2949 (XXVJI), du 8 décembre 1972, alors que la Déclarationsur la
valorisationde l'efficacitédu principe de non-recouàsla menaceou àl'usagede la
force dansles relations internationales dispose dans son a10ique "ni l'acquisitionde temtoire résultantde la menace ou
du recours à la force ni l'occupation de temtoire
résultantde la menace ou du recours à la force en
infraction au droit international ne seront reconnus
comme acquisitionou occupation légales"(Assemblée
générale, résolution/22, 18novembre1987).
6.147 L'occupation militaire dans ces circonstances signifie
simplement que l'étape initialee prise illégaledu temtoire par la force a étésuivie
par une possessionet un contrôle continuavec l'intention de conservation, même
uniquement temporaire(v. OPPENHEIM'sInternationalLaw, op.cit., p. 434, United
StatesArmvFieldManual, 1956, par. 352 citédansle Digest dedroit internationalde
M. WHITEMAN, Départemend t'Etat, WashingtonDC, 1968, vol. X, p. 540-541,
v. aussi article42 du règlement annexà la ConventionIV de La Haye de 1907, qui
énoncequ'"un temtoireest considéré commo eccupéquandil est effectivement placé
sousl'autoritéde l'arméeennemie").
6.148 L'importancedu principe d'interdiction de l'emploi de la
force contre l'intégritemtonale et l'indépendance politique des Etats, qualité de
règledu droit coutumieret de principe de la Charte, son caractèrede norme dejus
cogens, a inéluctablemenp tour conséquence que la persistancede la situationcréée
par l'emploiillégalde la force soitelleaussinécessairemenitllégale.
6.149 Cette situationillicite fondée surun acte illicitene peut pas
être créateur d'utitrejuridique. Ainsique l'aécritle JugeJENNINGS
"to brand as illegal the use of force against the
"territorialintegrity"of a state, and yet at thethe
to recognisea rape of another'stemtoty by illegal force
as beingitselfa root of legaltitle to the sovereigntyover
it,s surelyto riskbnnging thelawinto contempt"(R.Y.
JENNINGS, The Acauisition of Territon, in
International Law, Manchester University Press,
Manchester, 1963, p. 54).
Cela n'est pas uniquementdu fait de la maximeex injuriajus non oritur, mais aussi
et surtout parce que cela amèneraità reconnaître qu'un "internationalrime of the
first order" peut êtreutilisé commtitre sur le territoirepuisque "itsperpetrationhas
been attended withsuccess"(Zbid.).
6.150 La pratique internationaleest du reste claire sur ce point.
Par exemple, l'article11 de la Conventionde Montevideosur les droits et devoirs des
Etats de 1933, imposel'obligationde ne pas reconnaître des acquisitionstemtorialesou des avantages spécifiques obtenus parla force et cette disposition a été ear la
Cour dans son arrêtdans l'affaire duNicaragua (C.I.J., arrêt,27 juin 1986, affaire
des Activités militairestparamilitairesauNicaraguaet contrecelui-ci,Rec., 1986,
p. 100). L'article 11du projet de déclaratiosurlesdroits et devoirsdes Etats adopté
par la Commission du Droit international en 1949 réaffme l'obligation de non-
reconnaissance de toute acquisition temtoriaie parun Etat agissant en infractioà
l'interdiction de lamenace ou de l'emploide la force (Annuairede la Commissiondu
Droit international, 1949, p. 228). La Déclarationrelative aux principes du droit
international touchant les relationsamicalessouligneque
"le territoire d'un Etat ne peut faire l'objet d'une
acquisition par un autre Etat à la suite du recourà la
menace ou à l'emploi de la force. Nulle acquisition
temtoriale obtenue parla menace ou l'emploide la force
ne sera reconnue comme légale"(Assembléegénérale,
résolution2625 (XXV)(24 octobre 1970)),
tandis que l'article 5, paragraphe 3, de la défuition de l'agression adoptée par
I'Assembléegénérale en 1974réaffme l'essentielde cette proposition,
"aucune acquisitiontemtorialeni aucun avantagespécial
résultant d'une agressionne sont licites ni ne seront
reconnus comme tels." (Assembléegénérale, résolution
3314 (XXIX), définitionde l'agression, (14 décembre
1974) et v. aussi l'article 10 de la Déclarationsur la
valorisation de l'efficacitédu principe de non-recours à
la menace ou à l'emploi de la force dans les relations
internationales(Assembléegénéraler,ésolution42/22, 18
novembre 1987)).
6.151 Ce principe a aussi étéappliquéà des situations spécifiques.
En particulier, la résolution242 du Conseilde sécuridu 24 octobre 1967,résolution
embryonnaire, souligne "le caractère inadmissiblede l'acquisitionde territoires par la
guerre" tandis que dans la résolution7 (1981) du Conseilde sécuritéde 1981, il est
noté que "l'acquisition d'un territoire par la force est inadmissible".Dans la
déclaration662 (1990) du Conseilen date du 9 août 1990 il est dit que "l'annexion
du Koweït par l'Iraq ne pouvait sous aucune formeet sous aucun prétexte avoirune
valeurjuridique et elle est considércomme nulle et non avenue". De surcroît, tous
les Etats, les organisations internationaleset les institutionsspécistaientappelés
à "ne pas reconnaître cette annexion età s'abstenir de toute action ou opération
pouvant êtreinterprétéecomme une reconnaissance indirecte de l'annexion". Les
Etats tiers ont donc un devoir de ne pas accepter ni reconnaître toute suggestion
d'acquisition ou revendication d'acquisitionde droits sur un territoire dans de tellescirconstances, qu'uneannexion formelleaitétéproclamée ou non.
6.152 Même s'ie lst reconnuque l'occupation militaien violation
du droit internationalest en soi illégalque l'utilisationde la force en soi ne peut
généred re droits, de telles situations,quandelles se présentent,ne sontpas totalement
ignoréesdu droit international. Toutau contrairun ensemblede règlesjuridiques a
été élaboréprécisément afin de venir en aide aux victimesde conflitsarmés. Dans le
cadre de ces règles(qui constituentle droit des conflits armés intemationaux), les
Etats qui occupent militairement tout ou partiedu temtoire d'un autre Etat
(occupationde guerre) sont liéspar une séried'obligations. Celles-ci sot noncées
principalement par les Conventionsde La Haye de 1907 et par les Conventionsde
Genèvede 1949 (de concert avec deux nouveauxprotocoles de 1977). Comme le
Tribunal militairedes Etats-Unisl'a soulignédans Znre List (Jugementdes otages),
"intemtional law makesno distinctionbetweena lawfuland an unlawfuloccupantin
dealing with the respectiveduties of occupantan population in occupied temtory"
(A, 1948, p. 637), puisque l'objectifestla protectiondes civils.
6.153 Cependant, l'essence de ces règles dans les circonstances
présentes est que,quels que soient lesdroitset les devoirs de l'occupanten situation
d'occupation temporaire,la souveraineté demeuraeux mainsde 1'Etatdépossédé 11 a
étésoulignédans l'arbitrage relatif auxefresofromanesque "quels quesoient les
effets de l'occupation d'untemtoire par l'adversaireavant le rétablissementde la
paix, il est certain qu'à elle seule l'occupationne pouvait opérer juridiquementle
transfert de souveraineté"(R.S.A., t. 1, 1948, p. 555 et voir aussi I'affmation
implicitede l'affairedu PhareFranco-Hellénique C,P.J.Z., ser. AIB, no 62, pp. 19
et 25). Cette approche est renforcéepar l'article 43 des règles annexéesà la
Convention IV de la Haye de 1907 qui énonceque la puissance occupantedoit
respecter les loisen vigueudanslepays "saufen casd'impossibilitéabsolue".
6.154 La doctrine est égalemenctlaire en ce sens.Mc DOUGAL
et FELICIANOécrivent que"fundamental inthe law of belligerentoccupationis the
limitation thaan occupationis not regarded as havingacquired "sovereignty"over
the temtory brought under its effective control " (M. MacDOUGAL et
F.FELICIAN0, LawandMinimumWorldPublicOrder, Yale UniversityPress, New
Haven, 1961, p. 752. Dans le mêmesens, v. G. von GLAHN, The Occu~ationof
Enemv Territom, Minneapolis,1957, p. 33 ;Ch. ROUSSEAU,Le Droit des conflits
&, Pédone, Paris,1983, pp. 136-41 ; A.McNAIR et A.WATTS, The Leeal
Effects of War, Cambridge University Press, Cambridge, 1966, p. 368 et E.BENVENISTI, The International Law of Ocuvation, Princeton University Press,
Princeton, 1993,p. 5).
6.155 Il est indéniableque les forces militaires nigérianes ontnon
seulement conquis certainespositions temtoriales au Camerounmais qu'elles s'y sont
maintenues. Elles ont occupétoute une série de lieux sur le temtoire national
camerounais. L'occupation de la région de Jabane dans la péninsulede Bakassi doit
faire l'objet d'une mention particuiière ainsi que l'occupation de 12 villages des
départementsde Logone et de Chari dans la province de l'extrêmeNord du Cameroun
au bord du Lac Tchad et l'occupationde la zone de Kontcha dans le départementde
Faro et Deo situédans la province de 1'Adamaoua(v. supra,pars. 6.90 -6.95). Les
zones occupéespar les nigérianssont repéréessur la cartejointe (plan 2).
On peut donc conclure que, non seulementle Nigeria a violé
6.156
toute une série de règles juridiques par son recours à la force en violation de
l'intégrittemtoriale du Cameroun, mais qu'il a de plus enfreint d'autres règles par
son occupation continue du temtoire du Cameroun sans qu'une telle occupation
néanmoins luiconfêrele moindredroit sur le temtoire en question. Tout au contraire,
cela impose auxEtats tiers l'obligationde ne pas reconnaître de telles acquisitions ou
prétentions territoriales.
83. L'atteinte à I'intémitéterritorialdu Cameroun
6.157 Le respect de l'intégritétemtoriale compte parmi les
principes les plus élémentairdu droit internationaltant traditionnelque moderne. En
grande partie, ce principe s'identifieà l'interdiction durecours à la force, tel qu'il est
énoncé parla Charte des Nations Unies dans son article 2, paragraphe 4. Mais il va
encore beaucoup plus loin. Mêmedes formes d'ingérence quin'atteindraient pas le
degréde gravité nécessairepour qualifier un comportementétatiquede recours à la
force peuvent êtrefrappéesd'illicéitéE. st absolumentinterdit, sans réserveaucune,
tout exercice de puissance publique sur le territoire d'un autre Etat. Mais des actes
commis par un Etat à l'intérieurde ses frontièrespeuvent également aboutiràune
violation de l'intégrité territore'un autre Etat dèslors qu'ils ont des effets extra-
territoriaux. C'est l'égalsouveraine quiest ici en jeu. Une expression moderne de
cette filiation se trouve dans la célèbre résolution2625 (XXV) de l'Assemblée
générale des Nations Unies de 1970,que la Cour internationalede Justice a reconnuecomme reproduisant fidèlementle droit coutumier en vigueur (C.I.J., 27 juin 1986,
Activités militairstparamilitairesau Nicaraguaet contrecelui-ci, Rec. 1986, p. 14)
. Il y est précisé dale cadre du principe de l'égasouveraine desEtats que
"(d) l'intégritétemtoriale et l'indépendance politidee
1'Etatsont inviolables".
Ceci veut dire que les Etats sont obligés de s'abstenir detout acte matériel qui
empièterait sur letemtoired'unautre Etat.
6.158 Un exemple récentdu principe de la souverainetétemtoriale
a étéfourni par la lettre du Foreign and Commonweath Office britannique du 10
février 1993dans laquelle l'attentionde toutes les missionsdiplomatiquesétrangèàes
Londres est attiréesur l'interdictionde mener des enquêtofficiellesde quelque type
que ce soit sans autorisation préalable duGouvernementbritannique (v. TheBritish
Year Book of IntenuitionalLmv 64 1993, p. 600). Cet Exemple est d'autant plus
instructif que la conduite d'une activitéd'investigationen terre étrangèrene comporte
aucun élémentde contrainte. Les agents concernésse bornent normalement à la
simple observation de faits qui leur semblent pertinents. Nonobstantcette limitation,
le seul fait que l'activitéen question soit destiàéservir des objectifs officiels la
rend internationalementillicite.
6.159 Mêmesi un Etat croit avoir des revendications temtoriales
légitimes,il ne peut s'affranchir de l'obligationde respecter les frontières existantes.
11est notammentinterdit de changer la situationtemtoriale par la forLa.résolution
2625 (XXV) de l'Assembléegénérale des Nations Unies dit expressémentque des
prétentions territoriales ne changent rien au caractère absolu de l'interdiction de
recourir à la force.
"Tout Etat a le devoir de s'abstenir de recou~ à la
menace ou à l'emploi de la force pour violer les
frontières internationales existantes d'un autre Etat ou
comme moyen de règlement des différends
internationaux, y compris les différendsterritoriauxet les
questions relativesau frontièresdes Etats".
C'est ainsi que, dans le différend opposantle Royaume-Uni à l'Argentine en ce qui
concerne les îles Malouines, les Conseil de sécuridemanda, par sa résolution 502
(1982), le retrait immédiat de toutes lesforces argentines des îles. Mêmesi
l'Argentine avait pu s'appuyer sur certains éléments juridiques justifiant
matériellementsa demande, ces éléments n'étaien ptas considéréscomme pouvantjustifier le recouàla force. Plusrécemment,la Cour internationalede Justice, par
son ordonnance du 10 janvier 1986 dans l'affaire ddiffér eindtalier (Burkina
FasolMali) (Rec.,p.3.) a clairementmanifestéque les seulsmoyensadmissiblespour
résoudreun conflit entre deuxEtatssur l'appartenance d'une certeone à l'une ou
l'autre de ces Etats sont les méthodes pacifiquest,elles que les énonce, notamment,
l'article33 de la Charte desNations Unies.
6.160 Dans la presqu'îlede Bakassi,la souverainetémtoriale du
Camerouna étéenfreintepar le Nigeria. Malheureusementc ,ette situation déplorable
continuejusqu'à cejour. Les détails concrde l'action duNigerià Bakassiont été
exposés àla section 1 du présent chapi.l en ressortqu'ilne s'agit pasde la part du
Nigeria dequelqueserreurs ou maladresses, bienau contraire.Non seulement pardes
déclarations officielles, mencore par des actesmatériels,le Nigeria a manifesté
qu'il considèreBakassicommefaisant partie intégranteeonterritoire.
6.161 Selon le journal The Guardiandu 12 février 1994 (annexe
M.C. 338), le Ministre des Affaires étrangères nigérianM, . BABA GANA
KINGIBE, a "réaffumé" (sic !) "Nigeria'sclaim to the disputedarea" (c'est-à-dire
Bakassi).Dans le même sens, lejournal Dailv Sketch du 2 mars 1994(annexeM.C.
343) informeses lecteursen premièrepagesur la prisede position duChef de I'Etat,
le Général ABACHA ",thedisputedBakasiPeninsulais part andparcel of Nigena". 11
n'est point nécessairee continuer la liste de pareilles déclarationrrosser un
tableau complet; leMitre des Affaires étrangèreest le Chefde 1'Etatse prononçant
dans le mêmesens, il s'agit bel et bien d'une positionofficielle duGouvernement
nigérian.
6.162 Ceci est d'autantplusclairque lesmotsse sontaccompagnés
par des faits concrets. En effet, une opération miliétésoigneusementplanifiée
contre Bakassi, comme l'a avoué trèsouvertementla presse nigériane elle-même.
Après beaucoup d'incidents antérieurs,une attaque massive a étélancéecontre
Bakassile 3janvier 1994.Le Nigena y a employé aumoins500, probablement1.000
hommes pour pénétrer parla force dans le territoire camerounais à Bakassi.
L'hebdomadaire The Sundav Magazine du 23 janvier 1994 a commentécette
incursiond'un ton triomphant.a descriptionselit commesuit: "OnMonday, January 3, a combinedoperation of a 500
- strong Nigeriantroopsdrawnfromthe Navy, armyand
mobilepolice, landed in Abana and plantedthe Nigerian
flag.They alsotookInua Afa and streakedinto Diamond
Town in Atabong, andplanted flags. Diamond town is
where asizeablepopulationlive permanentlyat Atabong.
No news of exchangeof fue-anns were reported, as the
Nigerianforcestook Akwa Ine Itung. There, they halted
the advanceand dug into trenches,becausejust across a
small creek was the Ibiong Itan Itung settlementwhere
Camerounmadeher militarybase".
11ressorttrèsclairementde ce reportage qu'ils'agitbel et biend'uneattaque ouverte,
soigneusementpréparée et exécutée.
6.163 La fiertémanifestéepar les Nigériansen ce qui concerne
leurs exploitsmilitaires agresàiBakassirésulte égalemen dt'un reportage pourune
éditionde 1'AfricanConcord du7 mars 1994 (AnnexeM.C. 345). Ce reportage, dont
l'auteur esun certa intienceAKPAN, décritde façon circonstanciéela prise de
possessionde Bakassipar l'Arméenigériane. LR journaliste le précisesans ambages
qu'un bataillon additionnelde soldatsnigérians aété envoyà Bakassile 18 février
1994 "toend the Camerounianagressionon thePeninsulaonceand for all".
6.164 Tous ces actes agressifs montrent que le Nigeria conteste
l'appartenancede Bakassiau Cameroun et qu'ilest prêtà mettre en oeuvre tous les
moyens, y comprisla force militaire,pour réaliserses objectifs expansionnistes.Une
violationplus grave de l'intégritemtoriale du Cameroun n'est guère imaginable.
L'illicéides opérations nigériancherchantàs'emparerde Bakassiest d'autant plus
manifeste quele Nigeria ne peut invoquer aucunejustification quilui permettrait de
mettreen doutela frontièretelle qu'ellea fméeen 1913.
6.165 Une situation analogue s'est développéedans la régiondu
Lac Tchad, commecela a été expliquéci-dessus dansla sectio1. De grandes parties
du temtoire camerounais ontétéoccupéestout d'abord pardes civils nigérians, mais
aprèsun certaintemps ceux-ciont étésuivispar l'arméeet la police nigérianes. Dece
fait, le Nigeria a cherché à s'installer en tant que pouvoir étatique en terre
camerounaise. Mêmele souci de "protéger"ses nationaux ne pouvait foumir au
Nigeria aucune justificationpour implanter des structures administratives sur un
territoire qui n'était pas le sien. Au contraire, il aurait incombé au Nigeria
d'empêcherses ressortissants d'envahir des terrescamerounaises. Au lieu de
s'acquitter de cette obligation, le Nigeria a encouraet promu l'immigration et
l'invasionillégales. Des drapeaxamerounaisont été brûlés. D'autrpart,même lesrésidentscamerounais ont été forcés dequitter leurs villagespour se réfugierdans des
endroits en dehors de la zone d'occupation.Mêmesi les armes n'ont pas été utilisées
par les forces de police militaires nigérianes,il est patent qu'il s'agit d'unegrave
atteinteà l'intégrité territoridu Cameroun. Pratiquement, le Cameroun a été privé
de la jouissance effective d'une partieconsidérablede son territoire aux bords du Lac
Tchad. Cette privation continuejusqu'à l'heureactuelle.
6.166 Il est reconnu aujourd'hui qu'un acte intemationalement
illicite est constituéde deux élémentsla violationd'une obligation internationale, par
un comportement qui peut êtreatmbuéà1'Etat.Il est évidentque ces deux conditions
se trouvent réuniesen l'occurrence. L'opération contrB e akassis'insère dansun plan
d'ensemble conçu part le Gouvernementnigérian. C'estune opérationmilitaire qui
jouit de l'approbation des plus hauts niveaux du pouvoir exécutif nigérian.
L'obligation qui a étéenfreinte au détriment du Cameroun est le principe de
I'intégrité territoria, rincipe que leNigeria étaittenu de respecter scmpuleusement
et inconditionnellement.
6.167 Il convient de soulignerque le seul fait pour le Nigeria de
s'écarterde la ligne de conduite prescrite par le principe de l'intégrtemtoriale du
Cameroun constitue un fait internationalement illiciLe. projet de la CD1 sur la
responsabilitéinternationale, adoptéen première lectureen 1980, spécifie à ce sujet
(article 20):
"Il y a violation par un Etat d'une obligation
internationale le requérantd'adopter un comportement
spécifiquedéterminé lorsquele comportementde cet Etat
n'est pas conforme à celui requis de lui par cette
obligation." (Annuaire dela CDI, 1980, Vol.11,Partie 2,
p.51).
6.168 Mêmesi l'on estime que la due diligenceest un élément
inhérent àtoute violation d'uneobligationintemationale, il ne fait pas de doute que le
Nigeria n'a jamais agi de bonne foi en occupant le temtoire camerounais. Le
Cameroun ne connaît pas une seule circonstanceoù le Nigeria aurait tout au moins
essayéde justifier ses revendicationsterritorialespar une argumentationjuridique. Le
Nigeria s'est borné à agir en ne prêtantni lamoindre attention aux raisons avancées
par le Cameroun, raisons pourtant simpleset claires: la frontièrea étdéfinitivement
fixée parles accords conclus du temps dela colonisation. Un Gouvernement qui se
refuse systématiquement à prendre en considération des arguments juridiques
pertinents s'élève contreles règlesde la bonnefoi les plus élémentaires.l ne peut sesoustraireau reproched'avoircommis un acteinternationalementillicite.
SECTION4. LA RESPONSABILiTEDU NIGERIA PAR CES FAITS
INTERNATIONALEMENT ILLICITES
6.169 11a étémontrécidessus que le Nigeria a violéune série
d'obligations internationalqui toutes revêtentne importance primordialedans le
systèmejuridiqueinternationald'aujourd'huiàsavoir :
- I'interdiction de recourir à la forcey compris I'interdictionde l'occupation
militaire,
- l'obligationde respecterl'intégtemtoriale du Cameroun,
- et l'obligationde réglerpacifiquement lesdifférendsinternationaux.
Implicitement,ces constatationsse basenturla prémisse queles faits pertinents sont
attribuablesau Nigeriaet que le Nigeria nepeut invoquerdes circonstances excluant
I'illicéit. ans les passages quisuivent,nousallonsmontrer plusen détailqu'en effet
ces conditionsse trouvent réunies.
8 1. AttributionauNigeria
6.170 Selon le projet d'articlessur la responsabilité internationale,
adopté parla Commissiondu droit international(CDI) en premièrelecture en 1980
(Annuairede la CD11980, Vol.11,deuxièmepartie, pp. 23-25), la responsabilitde
I'Etatprésupposeen premier lieu que1'Etatlui-même ait agi par ses propres organes
ou que lesfaits pertinents puissent êtreattribuàsdes personnes qui ont de facto
exercéla puissancepublique de i'Etat sans avoir formellementreçu le mandatd'agir
de la sorte (articles 5-8). Chacun des faits décritsdans la section 5.1 ci-dessus
requiert, en principe, uneanalyse individuelle.Mais il y a également des phénomènes
généraux où il apparaît manifesteet incontestableque des organes de 1'Etatnigérian
sont ou bien Lesauteurs des incidents en question ou qu'ils ont approuvédes
événements qui, à leur source, n'étaientque des actespris et mis en oeuvre par desparticuliers.
6.171 En ce qui concernela presqu'île de Bakassi, aucun doute
n'est permisen ce qui concerne l'attaquemenéeen janvierlfévrier1994. C'est 1'Etat
nigérian lui-même s,e servant de ses forces armées,qui a mis en exécutionun plan
tendantà gagner cene partie du territoire camerounamanumilita rie.éléments
très forts ontétenvoyésà Bakassi.Même la pressenigériane aouvertementreconnu
que des unités régulières de l'armée nigérianeont étéutilisées à cette fin
annexionniste.L'ampleur del'opération, qui a impliqué plus500 et probablement
environ 1.000 soldats, faitclairement apparaître qus'estpoint agi d'un excèsde
zèlede la part de certainesunitéséchappaau contrôledu pouvoir central. Mêmesi
un tel égarementne changeaiten rien les faitset ne pouvaitaltérerla conclusionque
l'opérationcontre Bakassi est attribuabàe1'Etatnigérian,il importe de se rendre
compte quec'est le poids entier de I'Etatnigérianqui appuiel'occupationillégalede
Bakassi, situation illicitequi continuejusqu'àcejour.
6.172 Par ailleurs, l'occupationde Bakassi a concrétidans les
faits les déclarationsdes plus hauts agents de 1'Etatnigérian.Tant le Ministre des
Affaires étrangères, r. BABAGANAKINGIBE, que leChef de I'Etat, le Général
ABACHA, ont publiquementmanifestéque Bakassi appartenait au Nigeria (v. ci-
dessus par. 6.161). Bien qu'on se demandesur quelle baseces opinions ont pu se
former, il est presque logique,du point de vue nigérian,de s'assurer parla force
l'emprise sur unerégion qu'on prétend faip artie intégrantedu territoire national
nigérian.il existe donc une parfaite concordanceentre l'opération militaet les
points de vue qui ont étéarticulésau niveau le plus élevéde la hiérarchie
gouvernementale nigérianeL. 'occupationde Bakassiconstitue uneopération quia été
conçue, décidéeet miseen oeuvre sousla pleineresponsabilde i'Etat nigérian.
6.173 L'invasionde grandes parties duterritoire camerounais au
nord du pays aux environsdu Lac Tchad estdécriteet analyséeci-desso aus pars.
6.81 - 6.87. Selon ce récit,l'invasion acommencen février1987. Des populations
nigérianesamvèrent avec des machettes et finirent par expulser la population
camerounaise locale. 11est indéniableque le fait pour un particulier, et mêmeun
groupe de particuliers, de violer des rèdu droit international,voire les règles les
plus élémentairescomme le principe de l'intégritéterritoriale, n'engagepoint la
responsabilitéde 1'Etat. Mais le Nigeria n'est pas reste un spectateur passif ou
débordé. Les civils ont étésuivispar des unitésmilitaires. Ainsi,la "conquête" par
les particuliersa éendosséeet consolidépar des organesde 1'Etatnigérian,qui ontcherché àfairediparaître toute tracede l'appartenance légee ces villages occupés.
Ainsi, le drapeaucamerounais aété brûlépartout. Les habitants ont du se réfugier
dans des contréesà l'intérieurdu temtoire camerounais.11en résultedonc que, au
nord comme dansla presqu'île de Bakassi, il s'agitd'une opération quia reçu le
blanc-seingde l'approbationofficielle. Dans ces conditions, l'occupation des treize
villagesde :Farancia, Ndiguili, Katikime1etII,Darak1et ïï, Balgaram, Kafouram,
KassaouaMaria, Naga, Gore Saguir,GoreKendi,Tchaika,est attribuableau Nigeria.
Rappelonsdans ce contexte le passagede l'arrêtde la Cour internationalede Justice
dans l'affaire des otages américains à Téhéran où il est préciséque des actes
délictuelscommis par des particuliers peuvent êtreimputés à l'autorité étatique
compétentedèslors qu'elle se refuse à y mettrefin ou qu'elle les entérine par son
consentement.Ony lit que, de cefait,
"l'occupationcontinue de l'ambassade et la détention
persistante des otages ont prle caractèred'actes dudit
Etat. Les militants, auteurs de l'invasionet geôliers des
otages, sont alors devenus des organes de'Etatiranien
dont les actes engagent la responsabilité
internationale"(C.I.J., arrêt,24 mai 1980, affaire du
Personneldiplomatique et consulairedes Etats-Unis à
Téhéran R,ec.1980, p. 3 (35)).
6.174 11convient de noter, dans cet ordre d'idées, qude même
qu'en ce qui concerne Bakassi,le pouvoir central du Nigeria a eu une parfaite
connaissance detous les événements. Ici encorei,l serait faux de parler d'incidents
frontaliersdûs seulementau manquede disciplinede certaines autorités locales. Par
de multiples protestationsque le Cameroun a adressé par la voie diplomatique au
Gouvernement nigérian,celui-ci aétépleinement informésur tous les incidents avec
leursconséquences néfaste pour lesrelationsentre lesdeux pays. Enrestant passif, le
Gouvernement central du Nigeria a implicitement donné son appui aux
développements qui ont aboutià une annexiondefacto d'uneportion considérable du
territoire camerounais. C'est donc égalementen raison de la passivité de son
Gouvernementcentralque la responsabilité du Nigeriae trouve engagée.
52. L'absence de circonstances excluant l'illicéité
6.175 En principe, le régime dela responsabilitéinternationale
connaît certainescirconstances susceptiblesde justifier un actequi, pris isolément,
constitueraittout simplementun acte internationalementillicite. Ces circonstances,quidans le projet de la Commissiondu droit internationals'additionnentdans une liste
assez longue (articles29à 34), sont pourtant d'une applicabilité exceptionnee.ui
plus est, elles ne sauraientaucun casjustifier l'annexion,par la force, deparcelles
de territoire d'un Etat voisin.temtoire de chaqueEtat estprotégé par le principe
de l'intégrité territorieinsi que par l'interdictiondu recoàrla force. Ces règles
sont toutes deux des principes dejus cogens. Aucunedérogation n'yest permise.
L'invasion du territoire d'unEtat voisinest et reste illicite, quels quesoientles faits
quien constituentla toile de fond.
6.176 Une seule brècheest battue dans le caractère absolu de
l'inviolabilité dutemtoire national.Par son consentement,un Etat peut toujours
permettre aux autorités d'un autreEtat d'y exercer des actes officiels. Mais il est
superfiu de consacrerun long débat à cette hypothèse.Le Camerounn'a pas donné
sonconsentement aux incursions nigérianese,t ne le donnera jamais.Les invasions du
territoire camerounaisont eu lieu contre la volontédu Gouvernementcamerounais.
De multiples protestationsont étéélevées à ce sujet.Le Cameroun a toujours fait
clairement apparaître qu'il n'est pas prêà se plier aux demandes nigérianes. La
présente procédure elle-mêc monstitueuneautremanifestation decettevolontéferme
de s'opposerà toute atteinteauterritok camerounais.
6.177 A l'article 30, le projet de la CD1 mentionne les contre-
mesures. Cependant, on voit mal quels faits le Nigeria pourrait invoquer pour
prétendrequ'ildisposed'un droitde prendredescontre-mesures.
6.178 En premier lieu, les contre-mesuresrequièrent que1'Etat
contre qui elles sont dirigéesait commis, pour sa part, un acte internationalement
illicite. Le Cameroun a toujoursrespectétoutes ses obligatienvers le Nigeria. Sa
conduite n'a jamais enfreint l'une quelconque des règlesdu droit internationalau
détrimentde son voisin occidental.Le Cameroun s'estlaisséguider par le souci de
régler tous lesdifférends l'opposatu Nigeria de façopacifique.
D'autre part, les contre-mesuresà titre de justification, se
6.179
heurteraient au principe de l'inviolabides frontièresainsi qu'au principedunon-
recours à la force. Ces deux principes appartiennentaux garantiesminimumassurant
l'ordre public dansla communauté internationaleI.ls ont doncle caractèrede normes
dejus cogens, qui demandentun respect absolu et nepermettent aucunedérogation.
Bienque les travaux actuelsde la CD1sur la codificationdu droit des contre-mesures
aient buté sur beaucoupd'obstacles, il n'y a eu aucune controverse quant àl'interdiction des contre-mesuresqui ne seraient pas en harmonie avec des règles
rentrant dansla catégoriedujus cogens. C'est ainsique leRapporteurspécialde la
CDI, G. ARANGIO-RUIZ,a proposéde formuler la règle pertinentesur la licéité
des contre-mesurescommesuit (Article 14) :
"1. Un Etatlésé nedoit pas recourirà titre de contre-
mesure :
a) à la menace ouà l'emploide la force [enviolation
des dispositions duparagraphe 4 de l'Article 2 de la
Charte desNationsUnies] ;
b) à un comportementqui :
iii) est contraireà une norme impérativedu droit
internationalgénéral"(Rapport dela CD1 à l'Assemblée
généralesur les travaux de sa quarante-quatrième
session,Annuairede IaCD1 1992, Vol. II, deuxième
partie, p.33).
Ces propositionsont reçuun accueil entièrement positif.Le rapport de la quarante-
quatrième sessionde 1992note que "tous lesmembres"de la CD1se sont accordés à
penserque la restrictionlaplus importanteau recoursauxcontre-mesures découlaidte
l'interdiction d'employerla force (op.cit., p. 34 par. 227), interdiction déjà énoncée
dans la Déclarationsur les relationsamicales(résolution2625(XXV) de l'Assemblée
Générale de 1970, commentairerelatif auprincipe de non-recoursà la force, al. 6).
L'unanimitéla plus complètea donc régné à ce sujet. En ce qui concerne
I'interdiction figuraàtl'alinéab), iii, le rapport fait ressortir que sa nécétaité
contestéeau motif que les règles de jus cogens sont, par définition, "desrègles
auxquelles onne sauraitdéroger"(op.cit.,p.36 par. 240).
6.180 Dans son arrêtau fond concernant le différend entrele
Nicaragua et les Etats-Unis, la Cour internationalede Justice a également précisé
qu'un droit de prendre des contre-mesures impliquant l'usage de la force était
"inconnudu droit international applicable"(C.I.J., arrêt,27 juin 1986, affaire des
Activités militairetparamilitairesau Nicaragua etcontrecelui-ci, Rec. 1986, p. 14
(128par.252)).
"An injured State shall not resort, by way of
countermeasure, to:
(a) the threat or use of force as prohibited by the
Charterof theUnited Nations ; (e) Any other conduct in contravention of a
preremptory nom of general internationallaw" (Req-
of the InternationalLaw Commissionon the workof its
fortv-sixth sessions, GeneralAssemblyOffcial Records,
Suppl.No 10 (a/49/10),p.366.).
6.181 Dans ces conditions, il est naturel que les membres de la
CD1 n'aient pas eu de difficultéspour se mettre d'accord sur un texte.La règle
adaptée suit de trèprèsles propositionsdu Rapporteur spécial. Elle reconnaît esle
normes dejus cogensconstituentunebarrièreinfranchissablemême pour l'actiond'un
Etat qui aurait étéviolédans ses droits. L'article 14 dont le titre est "Prohibited
countermeasures"précise :
6.182 Il va sans dire que le Nigeria ne peut pas invoquerla force
majeure. Même en faisant abstractionde la questionde savoirsi les propositionsde la
CD1 tendent vraiment à reconnaître de façon généralece critère de justification
(articl31 du projet précité),n peutconstater queles conditionsde I'applicabildeé
cette règle ne se trouvent pas réunies.11est vrai que le Nigeria a vécude très
sérieusescrises internes dansles dernièresdécennies.Toutefois,ces crisesn'ontràen
voir avec ses relationsextérieureLe Nigeria a toujoursétécapablede contrôler ses
frontières.Au contraire, l'occupation d'importantes partsu temtoire camerounais
montre que le Nigeria possèdeune sttucture gouvernementale -et surtout militai-e
qui fonctionne extrêmemen btien et qui est capable, malheureusement,de lancer des
attaquescontre desEtatsvoisinscomme leCameroun.
6.183 La situationd'extrêmedétresse,reconnuepar la CD1comme
circonstanceexcluantl'illicéit(articl32 de sonprojet), n'a aucun rapport avec les
relations entre le Nigeria et le Cameroun. Nile Nigeria, ni l'un quelconquede ses
organes ou de ses fonctionnaires,n'a agisous lapression de faits lui ôtant sa pleine
liberté d'action.II est donc inutile de consacrerà cet argument de plus amples
considérations.
6.184 L'étatde nécessité (Articl3 e3 du projet de la CDI) est
égalementune hypothèse fort éloignéee la situationréelledu Nigeria. Toutd'abord,
on peut se demandersi l'ouvertureassezlibérale quela CD1fait à ce titre justificatif
reflètefidèlementles règlesdu droit coutumier actuellementen vigueur. Renvoyons,
par exemple, à l'analysedu professeurJean SALMONqui répondtrèsnettementpar
la négative (Les circonstances excluant l'illicéité, dan: Karl ZEMANEKlJeanSALMON, Res~onsabilité internationale, Pedone, Pari1987, p. 89 (154-164 I)).
n'y a aucun doute que le critère-clef d'"intérêt esseest beaucouptrop vague et
se prêteàtoutes sortesd'abus. Quoiqu'ilen soit, le fait pourun Etatde convoiterles
richesses naturellesde son voisinne constituepasun "intérêt essent",ême s'il y a
une certaine pressiondémographique. D'autre part, il faudrait que 1'Etatconcerné
puisse se prévaloirde l'existenced'un"périlgrave et immiient". Aucun danger de
cette sorte n'a menacéle Nigena. De plus, selonle principede la proportionnalité,
l'action entreprise devrait avoir été "leseul moyen" pour sauvegarder l'intérêt
essentiel concerné.L'occupationd'une pattie du temtoired'un Etat voisin ne peut
jamais êtrele seul moyenpour sortird'une situationde détresse. Ceciest fuialement
confirmé par le fait qu'ici encoreespectle plus complet desnormesdejus cogens
s'impose.Celles-ci constituentle cadrecontraignant desrelations internatio;ales
normes impératives perdraientleur caractèremêmesi elles devaientcéderdevant la
primautéd'un intérên tationalaussipressant qu'il soit.Si une atteinteest portéeaux
règlesdejus cogens, toutl'échafaudagede l'ordre international s'écro.'existence
concrètedes Etatsavec leurs temtoires et leurspopulationsest la donnéede base du
droit international quidoitjouir d'une immunitéparfaiàel'égardde toute tentative
de restriction ou d'empiètement.De toute façon, le soi-disant étatde détresse ne
sauraitjustifier l'attaqueportéepar le Nigena contre leCameroun.
6.185 Finalement, le projet de la CD1 mentionne la légitime
défense comme titrejustificatif (artic34). Aucun doute n'est permis ence qui
concerne ce renvoià l'articl51 de la Chartedes Nations Unies. Les dispositionsde
la Charte constituentaujourd'huun droit internationalement applica. e Cameroun
ainsi que le Nigeria sont tous lesdeux membresde l'organisationuniverselle depuis
une longuedate. Par ailleurs,comme laCour internationalede Justice l'a reconnu
dans son arrêtau fond dansle différendentre le Nicaraguaet les Etats-Unis,le droit
de légitimedéfensen'a pas seulementune base conventionnelle, mais se trouve
également ancré dans le droit coutumier(C.I.J.,arrêt,27 juin 1986, affaire des
Activités militairestaramilitairesau Nicaraguaet contre celui-ci,Rec1986, p.14
(102-103)).Mais l'applicationde l'artic51de la Charte desNationsUniesen faveur
du Nigeria retournerait de fond en comble les faits tels qu'ils sont présentsen
l'occurrence.Commeil a été démontrc ',st le Nigena qui a envahipar sesforces le
territoire camerounaisde Bakassi,dans le nord dupays, les forcesarméesnigérianes
ont occupéune autrepartie duterritoirecamerounais dansles environsdu LacTchad.
Jamais les troupes camerounaises n'ontfranchi la frontièreséparantle Cameroundu
Nigeria. Le Cameroun n'a jamais eu de revendications territoriales à l'égardduNigeria;
6.186 Soulignons, finalement, qu'une violation momentanéepar
erreur de la frontièreexistante,de la part de certainsagentsisolés,due au fait que le
tracé ne peut patsoujoursêtre facilemenitdentifiéen touslieuxn'auraitsu engendrer
I'applicabilide l'article51.Le Camerouna toujoursinsistésur le caractère définitif
de la frontièrearrêtéet démarquée en 1913. Il n'a jamais contestécene frontière, et
avec la présente action il cherchà faire constaterune fois pour toutes queles deux
accords de 1913 sont encore aujourd'huiles instrumentspertinents. Tout le système
gouvernementaldu Camerounjusqu'à l'échelonle plus bas s'esttoujoursconformé à
ce dispositif. Qui plus est, le Cameroun a toujours étdisposéà régler tout litige
concernantdes questions frontalièrepar les voiesénoncée às l'article33 de la Charte
des Nations Unies. Toute suggestion tendant à insinuer que le Nigeria pourrait
invoquer à l'égarddu Camerounles droits de l'article51 de la Charte des Nations
Uniesmanqueraitdonc totalementd'appuidans les faits. CHAPITRE7
LESCONSEQUENCES DE LARESPONSABILITE
INTERNATIONALE DU NIGERIASECTION 1. INTRODUCTION
7.01 Il ressort du chapitre précédent la RépubliqueFédérale
du Nigeria a multiplié,au cours des deux dernières décennies, deen tout point
contraires au droit international et aux relations de bon voisinage, notamment les
incursions en temtoire camerounais, les incidents aux frontières intemationalement
reconnues entre les deux pays, les exactions sur les autoritésistratives et les
éléments des forces de sécurcamerounaises, lesatteintàsl'intégriphysique des
ressortissants camerounaisàeleurs biens, l'occupation desparties du temtoire de la
Républiquedu Cameroun(v. supra,chapitre6,section 1).
7.02 Ces faits intemationalement illicites constituent
indiscutablement, comme le Cameroun l'a montr(v. suprchapitre 6 section 2), des
violations par le Nigeria de ses obligations internationales. Ils engagent par
conséquentla responsabilitéinternationalede cet.
7.03 Cette responsabilité internationaleinduit plusieurs
conséquencesau regard du droitntemational généra. 1incombe en effet au Nigeria
l'obligation de faire cesser immédiatement les violations de ses obligations
internationales, de donneà la Républiquedu Cameroun des garanties que ces
violations ne se répéterontpasà l'avenir et de réparer les nombreux et graves
préjudicesque ses actes ont causéau Cameroun, à ses ressortissantsainsi qu'à leurs
biens.
SECTION 2. L'OBLIGATION DEMETTREIMMEDIATEMENT FIN
AUX VIOLATIONS DE SES OBLIGATIONS
INTERNATIONALES PAR LENIGERIA
Avant d'indiquer en quoi consiste concrètementune telle
7.04
obligation dans la présente espèce,le Cameroun procèderad'aboàdun exposédu
principe même decette obligation telle qu'elle est aujourd'hui établie en droitinternational.
7.05 Le droit international reconnaît aujourd'hui l'existence de la
cessation du fait internationalementillicite comme une obligationspécifique,distincte
de la restitution en naturLa Commission dudroit international(C.D.I.) des Nations
Unies a clairement identifiécette obligation qui ressort de la pratique des Etats et de
lajurispxudenceinternationale.
7.06 A la véritél,a cessation semble avoirétéconfondue dans une
certaine mesure avec la restitution en nature ou restitutioin integrum.De plus, elle a
été,de façon inexplicable, limitée aux seuls casde libération des personneset de
restitution des objets. On ne peut nier, certes, que la cessation soit étroitementàiée
la restitutio. Elle en constitue en quelque sorte le point de départ. Mais elle s'en
distingue, et ce principalement pour deux raisons :d'une part, elle ne relèvepas,
comme la restitutio,de la règle "secondaire" qui ne devient applicable qu'aprèsla
survenance du fait illicite, mais bien de l'application de la règle "primaire" qui
impose à chaque Etat de respecter ses obligations internationale; d'autre part, elle
vise à mettre un terme à l'illicite -nonpas (nécessairement)à ses conséquences-à
interrompre la violationdu droit internationalqui est en cours et par suite le préjudice
qui en résulte,lorsqu'il a un caractèrecontinu. L'article 6 du projet d'articles contenu
dans le rapport préliminairede M. ARANGIO-RUIZ, etintitulé "Cessationd'un fait
intemationalement illicità caractèrecontinu" dispose :
"Tout Etat dont l'acte ou l'omission constitueun fait
intemationalementillicite[à] [ayantun] caractère continu
est, sans préjudice de la responsabilité qu'il adéjà
encouru, tenu de l'obligation de cesser cet acte ou cene
omission" (V. huort vréliiinaire sur la res~onsabilité
des Etats, par M. Gaetano ARANGIO-RUIZ, rapporteur
s~écial.Annuaire de la C.D.I.. 1988. vol.11. DOC.
Âl~~.4/416 et Add. 1, par. 132, p. 42). A. - Uneobligation"primaire " ..
7.O7 L'obligation qui incombe à 1'Etat auteur d'un fait
internationalementillicite d'y metfinne résultepas d'une autre règle que cellequi
crée I'obligation d'agir conformément au droit international. C'est cette règle
"primaire" dont le comportement illicite antérieur constitue uneviolation qui impose
la cessation de cette dernière.Comme l'a écritle Rapporteur spécialC.D.I., M.
ARANGIO-RUIZ,
"l'obligation de faire cesser le comportement illicite ne
relèvepas de la responsabilité internatidécoulantde
la régledite "secondaire". L'Etat ayant un comportement
illicite est tenu d'y metfinen vertu de la mêmerègle
lui imposant l'obligationinitiale à laquelle contrevient le
fait illici(Ibid par. 54, p.19).
7.08 C'est donc l'obligationde se conformer à une obligation
(règle "primaire") quicomporte en même temps I'obligatiode cesser toute violation
d'elle-même.Autrement dit, I'obligation de se conformer et I'obligation de faire
cesser la violation sont deux aspects d'une mêmerègle initiale.L'Etat auteur de la
violation continue se doit par conséquentd'êtreinconditionnellement soumis à
l'obligation primaire sans mêmequ'il soit besoin que1'Etatléen exige le respect.
C'est en cela, précisément,que la cessation est différentede la restitution qui, elle,
est nécessairementrequise par 1'Etatlé. ommel'écritencore M. ARANGIO-RUIZ
"Aucune des difficultés susceptibles d'entraver ou
d'empécherla restitution en nature ne saurait affecter
I'obligation de faire cesser le comportement illicite"
(Ibid., par.57, p. 20).
B. - ...'appliquantà uneviolationcontinue
7.09 L'obligation de faire cesser un comportement illicitene se
conçoit que pour les faits illicites ayant une continuitédans le temps, et s'applique
dans les cas d'omission comme dans les cas d'action fautive. Cette notion de fait
internationalement illicite avait été débatteu sein de la C.D.I. qui, dans le
commentaire de l'article 18 de la première partie du projet d'articles sur laresponsabilitédes Etats, avait expliquéqu'il conviendrait d'établir unedistinction
entre le fait continu et le fait instantanéà effets durables. L'exemple choisi pour
illustrer ce dernier étaitl'"acte de confiscation", tiréde l'arrêtrendu par la C.P.J.I.
en 1938 dans l'affaire des Phosphates du Maroc. Mais en réexaminantla question
dans son septièmerapport, M. AG0 soutenait l'idéeque le fait illicite de 1'Etatne
prenait pas fin avec la confiscation. Selon lui, on se trouvait en l'espèce,en présence
d'une situation législativecontraire aux engagements intemationaux du pays l'ayant
crééeet qui, tout en ayant débuté avantla date critique, continuait d'exister après
cette date et de constituerune situation qui restait aussi actuelle qu'internationalement
illicite" (Annuaire de la C.D.I., 1978, vol. II (Ière partie), Doc. AICM.41307 et
Add. 1et 2, p.40).
7.10 Cette position rejoignait l'opinion individuelle du Juge
CHENG TIEN-HSI, mais aussi le point de vue du Juge VAN EYSINGA exprimés
dans la même affaire.Le Rapporteur spécialM. ARANGIO-RUIZrallie du reste ces
points de vue, sur la base des définitions que TRIEPELet M. AG0 donnent à la
notion de fait illicite continu, affumant àcet égard q:e
"le fait illicite dure aussi longtemps que la mesure [de
confiscation] n'est pas rapportée" (Annuaire de la
C.D.I., 1988, op.citp.37, p.14).
11préciseplus loin que :
"L'obligation de faire cesser le comportement illicite
n'est concevable que pour les faits illicites s'étendant
dans le temps, parce que ceux-ci ne cessent pas au
moment mêmeoù débutela violation ou tout de suite
après."
L'obligation de cessationne doit doncse rapporter
"qu'aux Etats dont le comportement constitue
précisémenu tn fait illicite de caractèrepersistant." (Ibid,
par. 56, p.20).
7.12 La continuitédu fait illicitepeut du resteêtreenvisagéesous
trois angles différents. D'abord, il peut s'agir, comme on l'a relevé, "d'un fait
unique, mais qui s'étaledans la durée" (v. PM DUPUY, "Le fait générateurde la
responsabilité internationale desEtats", RCADZ,1984, V, t.188, p.45). Ensuite, il
peut s'agir d'un "fait composé"qui, comme le fait unique, s'étale dans le temps,
mais, à l'inverse du fait unique continu, "est constituénon pas d'un, mais de plusieurs
agissements de mêmenature, et ayant le mêmeobjet" (ibid), ainsi qu'il ressort del'affaire delaBarcelonaTraction (v. C.I.J.,Rec. 1970, p.18). Enfin, il peut s'agir
d'un "fait illicite complexe" quiest réal, 'après laC.D.I.,lorsqu'il "ressortd'un
ensemble d'actions ou d'omissions émanantd'un mêmeorgane ou d'organes
différentsayanttrait àune seuleet même affaire. C'estprécisémenptar l'ensemble de
ces actions ou omissionsque l'infraction complexeest réalisée(v. Annuair de la
C.D.Z., 1976, II,deuxièmepartie, p.87).
7.13 Tels sont indéniablement les caractéristiques des
comportementset activitésillicites de la République Fédérale du Nigeriare auard
des faits exposés auchapitre précédenC.ar, si dans certains cas ily a persistancede
l'illicéiteinitiale, dansd'autres la continuitéde l'illidans le temps résultede
l'accumulationou de la successiond'unesérie d'actescontrairesau droit international
poséspar 1'Etaten cause.
82. La mise en oeuvre du orinci~e en I'esoèce
7.14 Au regard de ce qui précède,la République du Nigeria est
tenue de mettre immédiatement fin à ceux de ses actes illicitesqui se poursuiventen
temtoire camerounaisainsiqu'auxfrontièresentre lesdeuxpays;
En particulier,
A. - Le Nigeria doit cesser sans délai l'occupation illégaleet
continue des parties du territoire camerounais.
7.15 Il doiten êtrainsinotamment :
a) dans la péninsulede Bakassi, départementdu Ndian, où les forces armées
nigérianes occupentdepuis janvier 1994 les localitésde Jabane, de Daimond et
d'Idabatoet y ont hissé leur drapea,t depuisfévrier1994 leslocalitéd'Akwa1, II,
il ltIV dans l'arrondissemend'Issanguele;
b) dans la province de l'Adamaoua, où le Nigeria occupe depuisjuillet 1991 la
localitéde Kontchaet a installéun postede contrôleEmi-ImmigrationàTipsan ;
C)dans la zonecamerounaisedu Lac Tchad,provincede l'Extrême-Nordo ,ù l'arméenigérianea investi depuis 1987 18 villages (Kafouram, Ndiguili, Ki-farangua,
Saguir, Mourdass, Core Talgoudoum,Hile Tandaigui, Tchika, Naga, Roroya, Hile
Wanzarn, Katikime 1, Katikime ii, Core Tchandi, Hd, Amtohoubouniba,
Karnouna, Hile Katchou) et plusieurs îles (Abachaka,Nimeri, Kiziiwadji, Kassua
Waria, Fia, Karakaya)camerounaises(AnnexeM.C. 377).
7.16 La cessation de ces atteinteà l'intégritétemtonale du
Cameroun doit se traduire parle retrait immédiatet sansconditiondes troupes etdes
élémentsde l'Administration nigérianedu temtoire camerounais. Il s'agit d'une
exigence conforme à la fois à l'obligationde cessation del'illicite dont leprincipe a
étéexposéci-dessus, et à la pratique internationale respectueusedes principes
gouvemant les relationspacifiques et amicales entre les Etats. C'est fort de ces
principes que la diplomatie égyptienne,dans son effort de médiationentre les deux
Parties au conflit, a essayéde persuaderle Nigeriade retirer ses troupes du temtoire
camerounais, et plusprécisément dBeakassi. Dans unelettre du 17 mars 1994, datée
du Caire et transmise aux autorités camerounaisepsar l'Ambassadeurd'Egypte à
Yaoundé,le Ministre desAffairesétrangèredslEgypte,M. AmrMOUSSA,informait
son homologue camerounaisde la teneur de ses discussions avecle Ministre des
Affaires Etrangèresdu Nigeriaau sujetde Bakass:
"A. During the talks, Egypt put its pressure on the
importanceof the withdrawalof the Nigerainforces from
Bakassipeninsulaas the way to reach a finalsettlement.
Egyptwill continuepressuringonthe matter."
B. - Le Nigeria doitmettre immédiatemenf tm aux atteintes
répétées et persistantàslasouveraineté du Cameroun
7.17
Cette atteintela souverainetédu Cameroun se manifeste,
d'une part, par les violationsrépétéedse la frontière internationalement reconnue
entre les deuxpays, notamment à la faveur des incursions des troupes nigérianeesn
temtoire camerounais en divers points le long de cene frontièr;d'autre part,à
travers le recours par leNigeria à la force armée contrautorités administratives,
les forces de sécurité tes ressortissants camerounàil'intérieurde leur temtoire
national.
7.18 En effet, on dénombreentre 1977 et 1994, plus d'une
cinquantainede ces incursionsdes forces armées nigériaes territoire camerounais,d'enlèvements et d'acheminement au Nigeria des autorités administratives, des
élémentd ses forcesde sécuriet des citoyens camerounais, d'exactiosommisessur
ces personnes (Annexe M.C. 363). S'y ajoutent les nombreux cas de violation
d'espaces aérienscamerounais telsque le survol à très basse altitude de localités
camerounaises(cas par ex. du survol de Kontcha, le 17.3.1987 à 10h30. (Annexe
M.C. 281), les patrouillesrépétdses bâtimentsde guerreet autresnavires nigérians
dans les eauxtemtoriales du Camerounde 1977à 1994.
7.19 En outre, lesactes de sabotageperpétrés les élémentdses
forces spéciales nigérianes infiltres territoire camerounais et les attaquesdes
populations camerounaises pardes ressortissants nigériansappuyéspar les forces
armées nigérianes se poursuivenAt.insi, a-t-on notél,e 29 avril 1993, une attaquedes
populations camerounaisesà Kontchapar des individus armésde fusils de guerre,
vêtusde la tenue de combat de l'armée nigériane e,t identifiéscomme étantdes
nigérians; en avril 1994, l'infiltration desagents de renseignementsde l'armée
nigérianeen territoire camerounais,notamment à Tignere, départementdu Faro et
Deo dans laprovincede l'Adamaoua(v. supra, chapitre6, section1pars. 6.91 s).
C. - Le Nigeria doit cesser immédiatementl'exploitation des
ressourcesnaturellesdu Cameroun
7.20 Cette exigence concernetoutes les ressources naturelles
situéesdans les partiesdu territoirecamerounais sousoccupation nigériane. vise
notammentl'exploitationdu quartz dansle villageAmbo à Bawarodans la province
du Nord-Ouest, dontle site est gardépar des Nigériansarmésqui en interdisent
l'accèsaux camerounais,ainsique desressourcesforestièresde la mêmelocalité. D. - Le Nigeria doit mettre fin immédiatement aux
manoeuvres et manipulations sur les populations, les
chefferies traditionneiles et la dénominatiodes lodi
en territoire camerounais
7.21 Cetteexigence concernenotamment lacréationde toute pièce
de nouveaux villages dans les zones occupéessuivie du transfert massif des
populations d'origine nigériandans les localitésainsi créées commeen témoigne,
pour la zone de Bakassi, un message-télexdu Gouverneur de la province
camerounaise du Sud-Ouest au Vice-Premier Ministre chargé de l'Administration
Temtoriale, en date du 4 mars 1994. Elle viseégalementla pratique, par l'occupant
nigérian,de la désignationde chefs traditionnelsparmi les populationsd'origine
nigérianedans certaines localitcamerounaisestelles queIdabato, KomboAbedimo,
KomboItindi.
7.22 Le Camerounprie la Cour d'ordonneret de s'assurer de la
mise en oeuvre effective, par le Nigeria, de cette obligation de cesser son
comportementilliciteà l'égardde la République du Camerouent de sesressortissants,
dans l'intérêdte la paixet de la sécurientre les deux Etatsainsi que dans la sous-
région. La Cour dispose à cet égard desmoyensjuridiques, car comme l'a écritle
Rapporteur spécial, M. ARANGIO-RUIZ, dans son rapport préliminaire surla
responsabilitédes Etats,
"Le fait qu'il n'a pas donné suiteà une demande de
cessation,niune injonctiondansce sens, émanand t'un
organe international compétent, tendrait justifier le
recours à des mesures immédiates -personnelleo su
institutionnelles-contreEtatauteur" (v. op. cit., par.
60,p.21).
I SECTION 3. L'OBLIGATION POUR LE NIGERIA DE REPARER
LES PRWUDICES CAUSES A LA REPUBLIQUE DU
CAMEROUNET A SES RESSORTISSANTS
7.23 L'obligation de réparer toutmanquement au droit est la
caractéristiquede la responsabilité.Elle en est mêmel'essence, car il n'y a deresponsabilité que parce que celui qui a enfreint une obligationjuridique doit en
répondre. C'est donc l'obligation de réparer qui donne sens à la notion de
responsabilité; elle est inhérentà toute règlede droit, et présente,comme on l'a
écrit,"un caractèred'automaticité"(v. NGUYEN,QUOCDinh, P. DAILLIERet A.
PELLET, Droit international~ubiic, 5è éd. Paris, L.G.D.J., 1994, p. 767). La
C.P.J.I. en rappelait déjàle principe dansson arrrendudansi'affaue de L'Usine de
Chorzowen ces termes :
"La Cour constate que c'est un principe de droit
international, voireune conceptiongénérale dduroit, que
toute violation d'unengagement comportel'obligationde
réparer"(C.P.J.I., Série, no 17, arrêtdu 13septembre
1928,p. 29).
7.24 Il s'agit bien d'une obligationet non pas d'une faculté.
L'Etat auteurdu fait illicite n'estpas libre de réparerou de ne pas répa;eil ne lui
est pasdom6 de réparer àtitre gracieux.
7.25 Comme le précisaitla C.P.J.I. dans l'affaire deL'Usinede
Chorzow précitée:
"Leprincipe essentiel, qui découlede la notion même
d'acte iIlicite et qui semble se dégagerde la pratique
internationale,notamment de la jurisprudence des
tribunaux arbitraux, que la réparationdoit, autant que
possible, effacer toutes les conséquences l'acte illicite
et rétablir l'état qui auraitraisemblablementexistési
ledit acte n'avait pas étcommis. Restitutionen nature
ou, si elle n'est possible, paiementd'une somme
correspondant à la valeur qu'aurait la restitution en
nature".(Zbid.p. 47).
En outre, la réparationpeut prendre la forme d'une satisfaction.Chacun de ces
modes, restitutio in integnrm, indemnisationet satisfaction, est appropriée enla
présente espèce pour réparer descatégories particulièredse préjudices, matérielsu
moraux, subispar le Camerounlui-même oupar sesressortissants.
La restitutiin inte~rum
8 1.
7.26 Commele prévoitl'article7 de la deuxième partiedu projet
d'article dela C.D.I. sur la responsabildes Etats, "L'Etat lésé esetn droit d'obtenir de 1'Etatqui a commis
un fait internationalement illicitela restitution en nature,
c'est-à-dire le rétablissement dela situation qui existait
avant que le fait illicite ne soit comm."..
7.27 Il résultedu célèbredictum précité dela Cour permanente
que cette restitutioin infegrumconstitue la modalité de principe dela réparationdans
l'ordre juridique international.
Et plus récemment,dans l'affaire Taaco-Colasiatic, l'arbitre a affirmé que
"la restitutioin integrumconstitue..la sanction normale
de l'inexécution d'obligationscontractuelles" (sentence
du 19 janvier 1977, Journal du Droit International,
(TDI),1977, p. 350).
7.28 En conséquence, la République fédérale du Nigerid aoit
reconstruire les infrastructureset autres équipements publicset privésque ses troupes
ont détruit lorsde l'invasionde certaines parties du temtoire camerounaiset pendant
leur séjourdans ces zones. La liste complètede ces infrastructures et équipements
sera produite une fois que les troupes nigérianesse seront retiréesdes zones qu'elles
occupent et qu'il sera possiblàla partie camerounaise de descendre surle terrain afin
de détermineravec précisionl'étenduedes dommages causés surson temtoire. Par
ailleurs, le Nigeria doit restituer les armes et les munitions ainsi que tous les
équipementsque ses forces arméesont arrachésaux autorités administrativeset aux
forces de sécurité camerounaisesenlevées à diverses occasions en temtoire
camerounais par des éléments de l'armée nigérianen ,otamment dans la péninsule de
Bakassi, à Kontchaet dans la régiondu Lac Tchad. 11doit égalementrestituer tous les
objets et les biens publics ou privésque ses autorités civilesont pu prendre au
Cameroun ou à des Camerounais. Cette exigence est conforme à la jurispmdence de
la Cour qui, dans l'affaire du Templede PréahVihéara ,vait décidé que
"La Thaïlande est tenue de restituer au Cambodge tous
objets des catégories spécifiéesdans la cinquième
conclusion du Cambodge qui [...]auraient pu étre
enlevés du temple ou de la zone du temple par les
autorités thaïlandaisesn. (CIJ,Rec: 1962, arrêtdu 5 juin
1962,p. 37).
7.29 De même, leNigeria doit annuler tout actejuridique existant
dans son ordonnancement juridique ou dans celui de ses Etats fédérésp , ortant
rattachement au Nigeria d'une partie du territoire camerounais ou consistant en un
acte d'administration ou de puissance publique dontle champ d'application rationeloci s'étendraià une partie dudit temtoire. Il est en effet admis, notamment dansla
doctrine et la jurisprudence internationales,que si l'acte illicite est unacte juridique,
la restitutioin integnunconsiste dans son annulation, indépendammentde sa nature,
mémes'il s'agit, comme dans l'affaire Marrini(Sentencedu 3 mai 1930, v. R.S.A.,
vol.Ii, p. 975 et 3), d'une décisionde justice. Dans l'affaire du Statutjuridique du
Groenland oriental,la C.PJ.I.avait décidé
"que la déclaration d'occupation promulguée par le
Gouvernementnorvégienen date du 10juillet 1931,ainsi
que toutes mesures prises à cet égard par ce même
gouvernement, constituent une infraction à l'état
juridique existant, et par conséquent, sontillégaleset non
valables"(C.P.J.I., sérieAJB no 53, arrêtdu 5 avril
1933, p. 75).
7.30 Cette déclaration d'illégalet de non-validitécorrespond à
ce que plusieurs auteurs appellent la restitution juridique. Celle-ci s'impose en
l'espèce, car le Nigeria est tenu de mettxeun terme
à son "agressionjuridique", et
notamment cartographique, en retirant de la circulation et en tout cas de la vente, les
cartes sur lesquellesil "annexe" des partiesdu temtoire camerounaisafin de restaurer
la situationjuridique qui existait avantson occupation.
92- La réaaration oar éauivalence - l'indemnisation
7.31 La restitutioin integmm, qui est une restitution en nature,
n'estpas possible dans tous les cas. Elle se heurte parfoise impossibilitéfactuelle
ou matérielle.La C.P.J.I. l'a reconnuégalementdansl'affairede 1'Usinede Chonow
en affirmant que
"c'est un principe de droit international quela réparation
d'un dommage peut consister en une indemnité"(ibid.,
p. 27- v. aussip. 47, citéesupra,par. 7.25).
La C.D.I. a affiié à son tour très clairementle principe dans l'arti8,eparagrape
1, de la deuxième partiede son projet d'articles surla responsabilitédes Etats, adopté
en premièrelectureen 1993 :
"1'Etatléséest en droit d'obtenir de 1'Etatquacommis
un fait intemationalementillicite une indemnisationpour
le dommagecausépar ce fait si, et dans la mesure où, le
dommagen'estpas réparé par la restitutionen nature".7.32 De fait, la réparationpar indemnisationse révèlen pratique
comme le mode le plus courant de la réparation.Vue l'ampleur despréjudices
pouvant résulterdes actes de guerre et de l'occupationtemtonale, l'essentiel des
préjudices matérielssubispar le Cameroun doivent assurément, êtr eéparés par cette
voie.
7.33 Dans le paragraphe 2 del'article 8 précité deson projet, la
C.D.I. précise que
"...l'indemnisationcouvre tout dommage susceptible
d'évaluationéconomique subipar 1'Etat léséet peut
comprendredes intérêtest, les caséchéant, lemanque à
gagner".
Cette formule concise couvre à la fois les dommages immédiats subis par I'Etat et
ceux causés à ses ressortissants, et dans cette seconde catégorie, aussibien les
préjudices matérielqsueles préjudicesmorauxqui, conformément à une pratique età
une jurisprudence aujourd'huiunanimes, sont susceptibles d'indemnisation (v. le
Rapport de la C.D.I. sur les travauxde la 45èmesession, assembléegénéraleD , oc.
off., 48èmesession,supplt.no 10, A148110,p. 189).
A. - L'indemnisation despréjudicei smmédiats subisparle
Cameroun
7.34 Il s'agit des dommages subis par 1'Etat camerounais lui-
même ou par ses démembrements, collectivitétsemtoriales, établissementset
entreprises publics, etc.
7.35 Sans que cette liste soit exhaustive, relèvent de cette
catégorie :
- les destructionsdu matériel militaire ou de bâtiments publidurant les incursions
nigérianesou dansleszonesoccupées ;
- les dommagescausésaux équipements publicset, en particulier, aux routes, par les
opérations militairesy comprisceuxqui résultentde leur utilisationintensivepar les
convois militaires;- les pertes et le manque à gagner subisdu fait de la suspensionou de l'abandonde
nombreuses activités économiques notamment en matière d'exploration et
d'exploitationdes hydrocarbures,de pêcheries (tant maritime qsue dansle Lac Tchad)
et d'agricultureet l'élevage;
- les pertes des recettes d'exportatiet le coût accrudes importations;
- et, plus généralement, le préjudice causé au potentiel de développement du
Cameroun, du fait à la fois des pertes économiques directes évoquées ci-dessoue st
desdépenses exceptionnellesentraînéespa lreffortde défenseimposé à la République
du Camerounpar la pression militaireentretenuepar sonpuissant voisin.
7.36 Etant donnéesles circonstaoces de l'espèce, il n'est pas
possible de détaillerces dommagesdans le cadre du présent Mémoire et, moins
encore, de procéder à une évaluation en particulier du fait que les faits
internationalement illicitesdu Nigeriase poursuivent.A plusieursreprises, la Cour a
admis des demandes "tendant à ce que la nature et le montantde la réparation (...)
soientdéterminéd sans une phaseultérieurede la procédure", après la déclaration par
elle de la responsabilitéde 1'Etatauteur des manquements (C.I.J.,arrêtdu 27 juin
1986, affairedesActivitésmilitaireset paramilitairesauNicaraguaet contrecelui-ci,
Rec. 1986, p. 142 ;v. aussi lesarrêtsdu 25juillet 1974, affairede la Compétence en
matière de pêcheries(R.F.A. c. Islande), Rec. 1974, pp. 204-205 ;et du 24 mai
1980, affairedu Personneldiplomatiqueet consulaire des Etats-Unisd Téhéra nRec.
1980 p. 45). Dans cette dernière affaire,la Cour a constatél'obligationde 1'Etat
iraniende réparerle préjudicecauséauxEtats-Unis,mais ellea ajouté :
"Toutefois, les violations des obligations del'Iran
persistant, les formes et le montant de la réparationne
peuvent être déterminés àla datedu présentarrêt"(ibid.,
p. 42).
11en va de même s'agissantdu Nigeria danslaprésenteespèce.
7.37 Il suffit donc de constater en l'espèce que lespréjudices
mentionnés à titre d'exemples ci-dessus(par. 7.35) sontindemnisables.Ceci ne fait
aucundoute.
7.38 Si l'indemnisation dudamnumemergens(perte subie) n'a
jamais fait l'objetde contestation,il n'enest pastoujours allé mêmed , ansle passé,
en ce qui concerne le lucrumcessans(gain manqué). Toutefois,il ne fait plus dedoute, aujourd'hui,que celui-ci doive faire l'objetd'une réparationpar équivalence.
Commel'a dit, dès1902,l'Arbitre T.M.C. ASSERdans la sentencerelative au Cape
Home Pigeon,
"le principe généradlu droit civil d'aprèslequel les
dommages-intérêd tsoivent contenir une indemniténon
seulement pourle dommagequ'ona souffert, maisaussi
auxr llitigesdinternationaux et e(...)lepour apouvoirle
l'appliquer,il n'estpas nécessaire qle montant dugain
dont on a été privé puisseêtrefié avec certitude, mais
(...)il suffit de démontrerque dans l'ordre naturel des
choses on aurait pu faireun gain dont on se voit privé
par le fait quio~e lieu à la réclamation"(sentencedu
29 novembre 1902. R.G.D.I.P. 1903. docts.. D. 4 :
v.aussipar ex. c.P.'J.I., Usinede ~honow, séri;~, no
17 et la position de la C.D.I., Rapportpréc.ar. 7.33,
pp. 197-203).
7.39 D'unefaçonplus générale,
"Doiventêtreconsidéréc somme conséquences de I'acte
dommageable et doivent par conséquentêtrepris en
considération pour l'appréciation de l'étendue de
l'obligationde réparer,tous les faits qui sont reliés
I'acteoriginairepar un lien de causà effet, en d'autres
termes tous les faits desquelon peut remonter jusqu'à
l'acte primitif par une chaîne ne présentant aucune
solutionde continuité".(J.PERSONNAZ, La réparation
du oréiudiceen droit international, Paris, Sirey 1939,p.
136).
Et, comme l'a précisé aommission du Droitinternational,
"Le lien de causalité doit (...)être présuménon
seulement lorsqu'on est en présenced'une relation de
"causalitéimmédiate",mais aussi chaquefois que le
dommage est lié à I'acte illicite par une chaîne
d'événementsqui, pour longue qu'elle soit, est
ininterrompue" (Rapporp tréc.,p. 186).
7.40 Il ne fait aucun doute que l'ensemble des dommages
énuméréc si-dessus (par. 7.35) a causéun préjudicegrave et direct à l'économie
nationale du Cameroun qui doitdèslors en êtreindemnisé,au même titre quede ceux
qui se trouventàl'originede la "chaînedesévénements". B. - Les préjudicessubis par lesressortissants camerounais
7.41 Quelle que soit leur nature matérielleou morale, les
préjudices subis par lesressortissants camerounaiset leurs biens, qu'il s'agisse
d'agents publics ou des personnes privées par suite des faits intemationalement
illicitesdu Nigeriaou qui lui sont attribuables,doivent égalemenftaire l'objetd'une
indemnisationdans toutela mesureoù la restitutioinintegrrserévèlerait impossible
(v. supra.par.7.27).
7.42 Résumantl'un des points relatifs à l'indemnisation du
préjudicedansla sentence rendueen 1923dansl'affaireduLusitania(sentence duler
novembre 1923,R.S.A. vol. II , otammentpp. 25 et 5), M. ARANGIO-RUIZ écrit
danssondeuxièmerapport surla responsabilité desEtats :
"selon lui[Le. le surarbitre], le droit international donne
le droit d'obtenir réparation porne souffrancemorale,
une blessure d'ordre affectif, ou une humiliation, une
honte, le déshonneur, la perted'uneposition sociale,une
atteinte au crédit ouà la réputation"(Annuairede la
C.D.I., 1989, vol. II, Ière partie, doc. AlCN 41SER
A11989lAdd.1(Part l), p.4).
En effet, pour le surarbitre, "une indemnisation raisonnable pouruffrance morale
ou la commotion, s'ily a lieu[...]"(sentence,op. cit.p. 25) est nécessaire, parce
que de telspréjudicessontdes dommagestrèsréels ; et
"le seul fait qu'ils sont dificàlmesurer ou à estimer
en valeurs monétaires nees rend pasmoinsréelset n'est
pas une raison qui puisse empêcheu rne victime d'être
indemnisée sous la formede dommageset intéréts("ibid.
p.33).
7.43 La jurispnidence intemationale estconstanàecet égard,les
tribunaux internationaux n'ayant jamais manqud'accorderune indemnité pécuniaire
au titre de la réparationde préjudicemoral, Iorsqu'ils l'ont estimé nécessaire.
L'illustrent bien, les affairesChevreau(sentencedu 9 juin 1931(Francec. Royaume-
UN), R.S.A., vol.II,p. 1113et 5), Cage (sentence rendueen 1903,R.S.A., vol.X,
p. 597 et5),Hérifiersde Jean Maninat(sentence du31juillet 1905,R.S.A., Vol. X,
p. 55 et s), etplus récemmenlt'affairGrimm (sentence du18février 1983 (I.L.R.),
vol. 71, p. 650 et s).
7.44 La RépubliqueFédéraledu Nigeria est donc tenue deréparer,en vertu de cene règlebien établieen droit international,le préjudice moral
souffert par les fonctionnaires civilset les éléments desforces de sécurité
camerounaises : enlevésen temtoire camerounaisalors qu'ilsétaient dansl'exercice
de leurs fonctions, ilsont été amenés au Nigeroiù ils ont subide la torture et des
humiliationsde toutes sortes.11s'agit notamment, dchef de Districtd'Idabatoavec
sept militaires etun Inspecteur de Policeen janvie1981, du collecteurd'impôt du
village Libo (districtde Turawa)M. ABKEHSimon, en juillet 1984, du sous-préfet
de Kombo-Abedinoainsique sa suiteen avril 1990. Cene réparation doit s'étendre
leurs familles qui ontété durement affectép esr ces actes inhumainscontraires au
respect des droits de la personne humaine, et dont certains en ont gardé des
traumatismes.
7.45 Elle s'étenégalement aux familles des nombreuses victimes
militaires et civiles mortesou blessées,sàla suite des actes debnitalitédes forces
arméesnigérianeslors de leurs multiples incursionsen territoire camerounais,ou
opérantcommetroupes d'occupation, soit àla suite des affrontementsentreLesdeux
armées dansle cadre d'unconflit anné danslequel le Nigeriatente depuis des années
-en particulieren1981 et en1994- d'entrainerle Cameroun.
7.46 Le Nigeria doitréparer en outrele préjudicemoral causaux
particuliers, ressortissants camerounais, ayant subfait de ses forces armées etde
sespopulations des exactionet humiliationsde toutessortessur leur propre territoire.
Il s'agit, notamment, des interpellations decitoyens camerounaispar les forces de
sécuriténigérianesen temtoire camerounais, comme cefut le cas le 6juillet1992à
Ayang-Nwa, dans la province camerounaise du Nord-Ouest, où cinC qamerounais
(dont quatrehommeset unefemme)furent interpellés par la policenigériane(Annexe
M.C. 320). Il s'agit égalementdes actes de contrainte exercés parles agents de
l'administration et les éléments del'armée du Nigeria sur les populations
camerounaises aux postes de douane ou d'émi-immigration installé en territoire
camerounaisou lors des opérations de collecte illégaled'impôt ou de recensement
clandestindes populations dans certaines localités camerounaeosntalières. $3. La réoaration du ~réiudice moral causé à I'Etat du
Cameroun
7.47 Comme les personnes, particuliers et agents publics,1'Etat
subit lui aussi des dommages extrapatrimoniaux en conséquence d'un fait
internationalement illicite. Ce dommage immatérielexiste, selon ANZILLOTTI, du
"seul fait qu'un Etat voit un de ses droits méconnupar un autre Etat [...]" (D.
ANZILLOTTI, Cours de droit international, traduction française de G. GIDEL,
Pans, Sirey, 1929, p. 493-494). Comme on l'a dit précédemmentl ,a jurispmdence
internationale et la pratique diplomatiqueoffrenun éventail important de cas dans
lesquels le préjudice moralde 1'Etatlésétrouve réparation.Il s'agit, en l'occurrence,
des modes spécifiques deréparationque l'on désignesousle nom de "satisfaction".
7.48 Le Cameroun priela Cour de bien vouloir souligner de façon
explicite les violations répétéepsar le Nigeria de ses obligations internationales
rappeléesau chapitre 6, section2 du présentMémoire.Car, la première forme de
satisfaction en droit internationalest bien la reconnaissance solennellede l'ilducéité
comportementde 1'Etatoffenseur. C'est ce qui se dégagedes sentences renduespar le
mbunal arbitral dans les affaires duCarthage et du Manibou. En considérant dans
cette dedere affaire que "[...] pour le cas où une Puissance aurait manqué à ses
obligations, soit générales, soit spécialesv ,is-à-vis d'une autre Puissance, la
constatation de ce fait, surtout dansune sentencearbitrale, constitue déjà une sanction
sérieuse"(sentencesdu 6 mai 1913 (France cIItalie),Rec., vol. XI, p. 449 eS. et p.
463 et S. respectivement), le tribunal reconnaissaiten effatcontrario, le caractère
réparatoirede la constatation formelle des faits internationalement illicitesde 1'Etat
auteur des manquements.
7.49 Mais dans la présenteaffaire, il ne s'agit pas seulement de
manquements à des règles du droit international, dont des règles fondamentaleset
impérativestelles que l'interdiction du recours à la force et d'autres obligations
exposéesau chapitre 6. Le Nigeria a poséun certain nombre d'actes et affichéun
comportementqui portent atteinte à l'honneur, ladignitéet le prestige du Cameroun.
Il en est ainsi de l'enlèvementet de la torture des autorités administrativeset des
agents des forces de l'ordre qui symbolisent l'autoritéde 1'Etatcamerounais, de la
profanation de l'emblèmedu pays, notamment l'autodafé dudrapeau, symbolede la
souverainetéde 1'Etatet de l'honneurdu pays, objet de la fierténationaleauquel tous
les citoyens camerounaissont attachés sentimentalement. 7.50 Une telleoffense appelleune autreforme deréparationou de
satisfaction: les excuses du Gouvernementnigérian.Cene forme de réparationdu
préjudice moralest du reste admisepar la jurispmdenceinternationaledont la célèbre
affaire du linAlone constituela meilleure illustratiDans cette affairerelatiàeun
navire canadien, appartenant à des Américains, coulé par les garde-côtesdes Etats-
Unis, l'instance arbitralea affirméque:
"le fait,[...],que les garde-côtes des Etats-Unis aient
couléle navire était,commeon l'a déjà indiqué, un acte
illicite. Les commissaires estiment que les Etats-Unis
doivent reconnaître formellement l'illégalide cet acte,
et présenter desexcusesau Gouvernementcanadien de Sa
Majesté"(sentence du 30juin 1933et du 5 janvier 1935
(Canada cl Etats-Unis d'Amérique),R.S.A.,vol. III, p.
1618).
l SECTION4. LES GARANTIES DENON-VIOLATIONA L'AVENIR
7.51 Le litige frontalier entre le Cameroun et le Nigeria a
commencé, comme le Cameroun l'a montré, (v. supra, chapitre 1) peu après
l'accessiondes deux pays à l'indépendancee , t s'est poursuivie constamment depuis
lors avec une intensité variableen fonction des chefsd'Etat successifs duNigeria,
évoluantau grédes problèmes internes dece pays. Le Cameroun n'a cesséde
rechercher, depuisune trentaine d'années,une solution pacifiquà ce problèmeavec
les gouvernementsqui se sont succédéa su pouvoirà Lagos, notammentdans le cadre
des commissions mixtesentre les deuxpays etdes commissionsad hoc consacrées à
la question. Mais les arrangementsauxquels sontparvenus les deux Etats ont été
constamment remis en cause par la partie nigériane, maintenana tinsi un étatde
tension quasipermanente à la frontière entreles deux pays. Cettesituationa entraîné
de nombreux accrochages entreles forces desécurité des deuxpays en divers points
de leur frontière commune.Bien plusgrave, elle a dégénéréà deuxreprises, en 1981
et en 1994,en des affrontementsdirectsde grande ampleurentrelesdeux armées.
l
7.52 C'est pourquoila République du Cameroue nntend préserver
définitivement l'avenirde ces actes contrairesau droit international,et qui lui sont,
comme elle l'a montré, hautement préjudiciables. A cene fin, elle demande des
garanties de non répétitiodes faits illicitesdu Nigeria, notammentla non-violationdes règleset principes relatiàsl'interdictiondu recours à la force, au respect de la
souverainetédes Etats, à la non-agression, à la non-intervention, au respect de
l'intégrittemtonale. En demandantces garanties, le Cameroun necherche pas à
obtenir une réparationsupplémentaire ;il demande auNigeria des assurancespour
l'avenir, "car il estime quele retour à la situationnormalepréexistantene le protège
pas de manièresatisfaisante"(v. G. ARANGIO-RUIZ,Deuxièmerapport, 1989, Vol.
iI ,nnuairede la C.D.I., 1993,p. 47, par. 149).
7.53 Ce principe de garantie de non-répétition de l'illicite est
largementconsacrépar la jurisprudenceet la doctrine. L'avant-projetd'articlesde la
C.D.I. révisé sul ra responsabilides Etats à raison des dommages causés sur son
territoire la personneou auxbiensétrangers,présenté par F.V GARCIAAMADOR
dans son sixièmerapport, prévoit au paragraphe 2 de l'article 27 (intitulétrès
significativement: "Mesures visant à empêcherque l'acte dommageablene se
reproduise") que
"...] 1'Etatdont l'étrangest ressortissant adroit, sans
préjudice dela réparationdue àraisondu dommagesubi
par l'étranger, ce que1'Etatdéfendeur prennetoutesles
mesures requises pour éviter queles faits analogues à
ceux qui lui sont imputésne se reproduisenà nouveau"
(v. Doc AlCN.41134et Add. 1additif).
Cene règles'applique, a forlion, aux activités illid'un Etat contre un autre Etat
ou sur le territoire de ce dernier.
7.54 En s'abstenant d'indiquer telles mesureàs prendre par le
Nigeria pour éviterque ne se reproduise à l'avenir son comportementillicite, le
Camerounentend astreindrecet Etat à uneobligation derésultat,l'essentielétant pour
lui d'obtenir une "assuranceformelleque de tels faits ne se reproduiraient pas"(v.
Deuxièmerapport de M. ARANGIO-RUIZ,op. cil., p. 48, par. 153), et non pas
seulement tel comportement (obligation de comportement)qui pourrait d'ailleurs
s'avérerinefficace.
7.55 Toutefois, le Cameroun demandespécialement,et sans
pré~udicede cette obligationgénéralede résultat, l'abrogation palre Nigeriade tous
les actes juridiques internesde 1'EtatFédéral commdee ses entitésfédérées, portant
sur une portion du territoire camerounais,ses populations et sesbiens, l'invalidation
et le retrait de toutesles cartes officiellescomportant untracéfrontalierempiétant sur
le territoire camerounais,la renonciationofficiàtoute revendicationsurune partiedudit temtoire, la reconnaissance solennelle desfrontières entre lesdeux Etats telles
qu'elles résultentdes instrumentsjuridiques pertinents.
7.56 La Cour trouverait, sur ce point, un précédentdans la
sentence arbitrale rendue dans l'affaire de la Fonderie du Trail (Trail SmelteLe.
Tribunal arbitral y avait indiquédes mesures spécifiqdesnatur àe
"prévenir efficacement des émissions importantesde
fumée aux Etats-Unis à l'avenir" (V. Nations Unies,
Rec., vol.III,p. 1934).
7.57 Au demeurant, dans plusieurs autres affaires la demande de
garanties est-elle alléesouvent plus loin, 1'EtatIdemandant à 1'Etatresponsable :
soit des assurances qu'il respecteraàtl'avenir tel ou tel droit déterminéde 1'Etat
offenséou qu'il reconnaîtrait l'existence d'unesituation donnéeen faveur de 1'Etat
Iésé(affaire du Mekong(France clSiam) 1893, affaire du bureaude poste de l'Empire
Onoman, 1901, affaire du Constitution, 1907, affaire de l'Arménie,1895) ;soit de
donner des instructions précisesà ces agents (affairede I'Allianca, affaires du Henog
et du Bundesrath, affaire du Jova) ; soit d'adopter une certaine ligne de conduite
(affaire des Boxers en Chine, affaire de l'attentat de Sakai au Japon).(v. les
référencesde ces affaires dans le deuxième rapportdeM. ARANGIO-RUIZ, op. cit,
p. 49, notes no 370à 378). CHAPITRE8
CONCLUSIONGENERALE DUMEMOIRE8.01 Dans la premièrepartie du présentmémoire,le Cameroun a
apportéla démonstrationde l'existenced'une frontière lacustre, terrestre et maritime
entre le Cameroun et le Nigeria qui s'étendsans interruption du "point triple"
Nigeria-Tchad-Cameroun situédans le Lac Tchad, jusqu'au point G à l'entréedes
voies d'accèsaux rivièresCalabar, Cross et AkwayaféLa frontièreterrestre se fonde
sur toute une séried'instruments conventionnels dont plusieursdatent de la période
1885 - 1914, quand le Nigeria étaitune colonie britannique et l"Kamemn" une
colonie allemande.
8.02 Le chapitre 2 présente uneétudegénérale,en suivant un
ordre chronologique approximatif, des différents instruments conventionnels
pertinents pour la déterminationde la frontièrelacustre, terrestre et maritime actuelle
séparant le Nigeria du Cameroun. Seule une analyse approfondie des différentes
étapesen matière de délimitationet de démarcationde la frontière, couvrant une
période de plus de 100 années permetde comprendrela manièredont la frontièreest
arrivéeà sadéterminationdéfinitiveParmi lesaccords anglo-allemandsconclus entre
1885et 1914, seuls deux sont encorepertinentspour la déterminationd'une partie de
la frontière terrestre entre les deux Etats suite au plébiscite de1961, quand le
Cameroun méridional sousadministration britannique a décidé,par son vote, de
rejoindre le Cameroun et que le Cameroun septentrional a votéen faveur de son
rattachement au Nigeria.Le premier est le Traité anglo-allemand du11 mars 1913.
Les articlesXVI à XXII de ce traitédéterminenttoujours le tracéde la frontière
terrestre et maritime Nigeria-Camerounpour le secteurentre la Cross River (depuis la
borne no 114) et une ligne situéeà 3 milles nautiques au large d'une ligne reliant
Sandy Point à Tom Shot Point. Toutefois la frontièremaritime au large de la ligne
reliant Sandy Point et Tom Shot Point a étélégèrement modifiée pal ra "ligne de
compromis" acceptéepar les Chefsd'Etat nigérianet camerounais, ainsi qu'il ressort
de la deuxième DéclarationdeYaoundédu 4 avril 1971. Le deuxième estle Protocole
signé à Obokum le 12 avril 1913 (et acceptépar les deux gouvernementsle6juillet
1914), dont les paragraphes 13à 21 précisentle tracéde la frontièreterrestre entre la
Gamana River et la Cross River.
8.03 L'histoire complexe du Cameroun actuel durant la période
précédant l'indépendanceaeu une influencesur la déterminationde la partie terrestre
de la frontière entre les deux Etats. Au cours des périodesdu mandat et de la tutelle
(de 1922 à 1960), la partie du Cameroun administréparla Grande-Bretagnesous les
systèmesde mandat et de tutelle a étédiviséeen deux, le Cameroun septentrionalétantadministré (à dater de 1954) comme s'il faisait partiede la région norddu
Nigeria et le Camerounméridional étan dt'abord administré comme s'il faisait partie
des provinces méridionaledu Nigeria,ensuite, comme une partiede la régionest du
Nigériaet, ultérieurement,commeune entitéautonome.C'est la ligne qui, au cours
des périodesde mandatet de tutelle,a séparle Camerounseptentrionaldu Cameroun
méridional(tous deux sous administration britannique)qui constitue la frontière
actuelle dans le secteur entre la GamanaRiver (à la borne frontalièreno 64 de
l'ancienne frontièreanglo-allemande dontla démarcationest faite par le Protocole
d'Obokumle 12avril 1913) et leMont Kombon. Le tracé dansce secteur est décrit
dans la deuxièmeannexe au Nigeria Order in Council de 1946 (Protectorat et
Cameroun) etest maintenant intégrédansla frontière internationentre le Nigeriaet
le Cameroundont ilfaitpartie.
8.04 On se souviendra que l'ancienne colonie allemandedu
Kamexuna étéconquise par les forces britanniqueset françaises au cours de la
première guerremondiale pourêtreensuite diviséeen Cameroun britannique(ensuite
sous-divisée en Cameroun septentrionalet en Camerounméridional)et en Cameroun
français, tous deux soumis par la suite aux systèmes de mandatde la Société des
Nations puis de tutelle des Nations Unies respectivement.Suite au plébisciteau
Cameroun septentrionalde 1961, c'est la frontière entrece qui étaitle Cameroun
septentrionalsous administrationbritanniqueet ce qui étaitle Cameroun françaisau
cours de la périodedes mandats et des tutelles, (constituéepar la Déclaration
MILNER-SIMON du10 juillet 1919,définieplus précisémend tans la Déclaration
THOMSONIMARCHANDde 1930, entérinép ear 1'Echangede notes franco-anglais
du 9 janvier 1931) qui correspond à la frontière terrestre actuelle entrele Mont
Kombonet lesrivesdu Lac Tchad.
8.05 La frontièrelacustredans le Lac Tchadentre le Nigeriaet le
Cameroun, etplus précisémen le "point triple" entrele Nigeria, le Cameroun et le
Tchad, est principalementle produitd'une sériede traités franco-anglais (en ddue
14juin 1898,du 8 avril 1904etdu 29 mai 1906)qui ont été examinésen liaisonavec
le Traitéanglo-allemand du19 mars 1906et la Conventionfranco-allemandedu 18
avril 1908. Ce sont cependant les travaux beaucoup plus récentsde la C.B.L.T.,
analysésà la section3 du chapitre2, qui ont permisde confier et de définiravec
précisionle tracéde la frontièrelacustredans le Lac Tchad entre le Nigeria et le
Camerounjusqu'aupoint situésur les rives du Lac Tchad représentant l'extrémitée
la frontière terrestre. 8.06 Une frontièremaritime partielle a déjàététablie suiàedes
négociationsdirectes entre leNigeriaet le Cameroun. Elleva du centrede la ligne qui
relie Sandy Point et Tom Shot Point vers le large jusqu'auPointG. 11s'agit là du
résultat, d'une pan de la deuxièmeDéclarationde Yaoundédu 4 avril 1971 qui,
comme on l'a notéprécédemment, a déterminéune "ligne de compromis", acceptable
par les deux Chefsd'Etat, et qui relie le centre de la ligne entre SandyPoint et Tom
ShotPoint avec le Point 12 vers le large, ainsi quecelui de la Déclarationde Maroua
du ler juin 1975, confiant la deuxième Déclaration de Yaoundé q,ui prend le Point
12 comme point de départ pour ladélimitationde la frontièremaritime endirection du
largejusqu'au PointG.
La frontière lacustre et terrestre et une partie de la frontièremaritime séparant le
1
l Nigeria du Cameroun ont donc étédéterminées par une longue série d'instruments
conventionnels qui ont opéréla délimitation et,quand nécessaire,la démarcationde
1 sections particulièresde cette frontièreallant du "point tripleq'sur le Lac Tchad au
( Point G au largedes embouchuresdes rivièresCalabar, Crosset Akwayafé.
'
Le Cameroun, dans la section 2 du chapitre 2, s'est attelé à monter de manière
l irréfutableque la frontiéreterrestre, entre le Lac Tchad et lamer, pour laquelle des
éléments de preuves irréfutables ont soumis, a étéreconnue expressément par tous
les gouvemements intéressés, ycompris les gouvemements du Royaume-Uniet du
Nigeria.Le fait que le Royaume-Uniait expressémentreconnucene frontièreterrestre
est conîiié par de nombreux élémentd se preuve, y compris:
i) des actions entreprises pour la mise en oeuvre de la Déclaration
MILNEWSMON du 10 juillet 1919, définie plus précisémentdans la
Déclaration THOMSONIMARCHAND consacrée par 1'Echange de notes
franco-britanniquedu 9 janvier 193;
l ii) des mesures législativestelles que le Nigeria (Protectorate and Cameroons)
i
Order in Council de 1946(article4, par. 2, annexe 2), et les proclamationsde
1 1954 sur la région nord, la région ouest et la région est (définition de
1 frontières;
l
l iii) différentes cartes publiées par des sources britanniques officielles et
officieuses.
1
8.07 Le fait que le Nigeria, depuis son accession à
l'indépendance,a également reconnu expressémenlta frontière revendiquéepar leCameroun, est confié par de nombreux élémentd se preuve. Ils comprennent
notamment : la note no 570 du 27 mars 1962, du Ministère nigérian deA s ffaires
étrangères,constatant que la frontière suit le cours de la rivière Akwayafé,
reconnaissant parlà la descriptionde la ligne frontalière figurant dse Traitéanglo-
allemanddu 11 mars 1913, le libelléde la première Déclaration de Yaoundé du14
août 1970, recommandant spécifiquemen lt délimitatiode la frontièretemestre"telle
que définie" dans le Protocoleanglo-allemand, signéà Obokumle 18 avril 1913 et le
Traitéanglo-allemanddu 11 mars 1913, ou encore, la deuxièmeDéclaration de
Yaoundédu 4 avril 1971, où il est fait référencea,u point 1,à la limite des 3 milles
nautiques de la ligne reliant Sandy et Tom Shot Points "conformémentau Traité
anglo-allemandde 1913".Il est également rappelé expresséme patr les deux Chefs
d'Etatdans la Déclaration de Marouaque la lignetracée :
"...ne devrait porter aucune entrave à la libertéetà la
sécuritéde la navigationpour les naviresdes deux Etats
dansle chenalde CalabarICrossRiverstellesau. dé~-es
par les traités etconventions internationaux." (souligné
par la Républiquedu Cameroun).
8.08 En ce qui concernela frontièrelacustredansle Lac Tchad, la
Conférenceau Sommetdes Chefsd'Etat et de Gouvernementdu Basindu Lac Tchad
(comprenant le Nigeria) est tombée d'accord les 20 et 21 décembre1962 "pour
reconnaître les frontièresinternationales existantes surle lac." Parmi les documents
de référence utilisés plaersexperts, réunis danle cadrede la C.B.L.T. en novembre
1984 pour poursuivrela tâche de démarcation desfrontières sur leLac Tchad, se
trouve aussi l'échangede notes anglo-françaisdu 9 janvier 1931. Les experts ont
recommandédes coordonnées précises portées su lr carte jointe en annexe à
l'échangede notes de1931 pour l'identificationde l'embouchurede la rivièreEbeji
telle qu'elle existaità l'époque.Cette recommandation comporte manifestement
reconnaissancede l'échange de notesde 1931et de la carteannexée.
8.09 Il serait possible de citer de nombreux procès-verbaux de
réunions dansle cadre de la C.B.L.T. témoignant d'une reconnaissanc expresse par
le Nigeriad'instrumentsconventionnels, antérieurs àl'indépendancec ,onclusentre les
puissances coloniales.
8.10 La frontièreexistanteentre le Nigeria et le Cameroun, telle
que précisée pal re Cameroun, a non seulementétéreconnue expressémenp t ar le
Royaume-Uniet le Nigeria, elle l'a été également parla communautéinternationale
dans son ensemble. On se souviendra à cet égardque la Société des Nations asupervisé l'exercice par ledeux puissancesmandataires (la Grande-Bretagneet la
France) de leurs responsabilités,dans le cadre des mandats qui leur avaient été
conférés, sur les Cameroubnritanniqueet français, etqueles Nations Uniesont, pour
leur part, superviséle processuspar lequel les peuples dutemtoire sous tutelle du
Cameroun sous administration britannique ont exercé leur droit à l'auto-
détermination.
8.11 Une analyse détailléedes développementsintervenus aux
Cameroun français etbritannique aucours des périodessous mandat et sous tutelle
figuredans la section4 du chapitre3. 11ressortde toute évidencecetteanalyse que
la supervision exercée par Conseil desTutelles etpar différentesmissions de visite
s'est étendue à l'ensemble du temtoire sous tutelle dans le cadre des frontières
existantes; En outre, le processus de supervision a égalementpris en compte la
division opéréepar les autorités britanniqusntre le Camerounseptentrionalet le
Cameroun méridionap lour motifs administratifs.
8.12 Les plébiscitesséparésde 1961 au Cameroun septentrional
d'une part, et au Cameroun méridional d'autre part, correspondent à une
reconnaissance explicite de cette situation par la puissance administrante et par
l'Assemblée générad es NationsUnies. Les résultatsde ces plébiscitséparéssont
bien connus. Le Cameroun septentrional a décidp éar son vote de s'unir à la
Fédération du Nigeriaet le Camerounméridionalde rejoindrele Cameroun. Mais il
est clair que c'était leCameroun septentrionalà l'intérieurde ses frontièresde
territoire sous tutelle du Cameroun sous administration britanniaue, qui,
conformément àcetterésolution1608(xv) du 21 avril 1961de l'Assemblée générale,
a rejoint la Fédérationdu Nigeria le ler juin 1961, tout comme il s'agissait du
Camerounméridional àl'intérieurde ses frontières d'alorssa aualitéde temtoire
sous tutelle du Camerounsousadministrationbritanniaue qui, conformément à cette
résolutionde l'Assembléegénérale, a rejoinlta Républiquedu Cameroun le ler
octobre 1961. Il s'ensuit que les dispositions selon lesquellesle Cameroun
septentrionaa rejoint le Nigeria, et le Camerounméridional a rejoinlte Cameroun,
étaient telles qu'elles impliquaient la reconnaissance par la communauté
internationale, danssonensemble,desfrontièresterritorialesqui en découlent.
8.13 La section 5 du chapitre 3 montre sans équivoqueque, à
l'exceptiond'une ou deux cartes nigérianersécentes,toutes les cartes dela région
frontalière entrele Nigeria et le Camerounmontrent que la frontière suitle tracé
indiquépar le Cameroun. L'élémend te preuve cartographiqueest irréfutable etconcerne toutes les catégoriesde cartes, y compris les cartes britanniques et
nigérianes,et, plus important, descartes jouissant d'un statut spécifique dansles
accords frontaliersauxquelselles sontannexées.
8.14 Dans le chapitre 4, le Cameroun a décritet analysé,de
manière détaillée, le traée la frontière lacustreet terrestre entre le Nigeria et le
Cameroun. La section 2 est consacrée à la frontière lacustre de celui-ciàtla
frontière terrestredu Lac Tchadau MontKombon.
8.15 Les éléments de preuve concernant la frontière lacustre,
revendiquéepar leCameroun, sonttrèssolides. Dès1962, il a étconvenu, lorsde la
Conférence desChefs d'Etat et de gouvernement du Bassin du Lac Tchad, de
reconnaître les frontièresnationales existantesdm le lac. Ces frontières, entre le
Cameroun et le Nigeria, découlentau départ des effetscombinésd'une série
d'accords, conclus au cours de la période "coloniale" ela Grande-Bretagneet la
France, la Grande-Bretagneet l'Allemagneet la France et l'Allemagne, qui ont
déterminé un point triple au Lac Tchadentre les trois Etats que sontaujourd'hui le
Nigeria, le Tchad et le Cameroun. De toute évidence, la Déclaration
MILNERISIMONdu 10juillet 1919a donné la définition direcde cepoint tripleen
le prenant comme point de départ du tracé de la frontière entre les secteurs
britanniqueet français du Camerounqui devaitêtreconstituépeu aprèsen territoires
sous mandat. Les premiers mots de l'article 1 de la Déclaration MILNER-SIMON
énoncent :
"La frontière partira du point de rencontre des trois
anciennesfrontières britannique, française etallemande
placé dm le Tchad par 13"05' de latitude nord et
approximativement 14"05' de longitude est de
Greenwich. "
La DéclarationTHOMSON-MARCHAND,entérinée pa1 r'Echangede notes franco-
anglaisdu 9janvier 1931do~e exactementla même description(en remplaçantpar le
mot "part" le mot "partira") du point de départde la ligne frontiLee.Nigeria a
participéà la réuniond'expertstenue les 15 et 16 septembre 1988, organisée pour
étudier lesméthodes nécessairpsour déterminer l'embouchuree la rivière Ebeji, les
experts étanttombésd'accord surles coordonnées géographiques les plus probables
pour l'embouchurede la rivière Ebeji de1931.Le Nigeria a participé égalementla
réunion des Commissaires camerounais, nigérians, tchadiens et nigériensde la
C.B.L.T. qui, le 2 décembre1988, ont adopté une résolution appuyaletrapport de
la réunion d'experts de15et 16 septembre1988. En outre, il a particàptoutes lesphases des travaux des experts en vue de la démarcasur le terraindes frontières
internationalesdansle lac.
8.16 Les coordonnées précises tant du point triple
(Nigeria/Carneroun danschlaL ac Tchad que du "point double" entre le
Cameroun et le Nigeria ont fait l'objet d'un accord entre les experts des Etats
membresde la CBLT, et 13 balisesfrontalièresintermédiaiont étconstruites dont
les coordonnéesont étédéterminéea svec le mêmedegré deprécision. Les seules
questionsen suspens sontd'ordrepurement techniqueet ont traitconservationeà
l'entretiendes balisesfrontalièresetnonpas àleurposition.
Il n'existe donc aucun fondement, quel qu'il soit, aux revendicationsnigérianes
portant sur des îlescamerounaisesduLac TchadtellesqueDarak.
De tout cela, il ressortque le Nigeriaa acceptéle tracéde la
8.17
frontièrelacustre dansle Lac Tchad. Dans le passé,ila eu des différendssur le
uacéprécisde cette frontièrelacustreàproximité de l'embouchee la rivièreEbeji,
qui se sépareen deux bras à l'approche du lac, bras qui ont ététouchéspar
l'assèchement du lac. Mai'accordobtenuentre les experts desEtatsmembresde la
C.B.L.T. sur le tracé précis des frontières dans le lac et approuvépar les
Commissaireset le Secrétaireexécutifde la C.B.L.T. puisentérinéra Conférence
des Chefsd'Etaten 1994à Abujaau Nigeria, metfin àtoutecontroverseréelle.
8.18 La frontière terrestredu Lac Tchad au Mont Kombon est
déterminéepalra Déclaration MILNER-SIMON du 10juillet 1919,et lesdescriptions
qui y figurent sont précisées plavant sous les points à 60 de la déclaration
THOMSON-MARCHAND,entérinée par1'Echangede notes franco-anglaisdu 9
janvier 1931. La DéclarationMILNER-SIMONdécrivaitle tracéde la frontièreen
utilisant des mots, en se fondant sur la carte MOISàLl'échelle des1:300 000,
utilisée comme fondement de ces descriptions. Malheureusement,comme les
événements ultérieursl'ont montré,la carte MOISEL à l'échelle des1:300 000,
quoique techniquement fort avancéepar rapport aux dates de préparationdes
différentes feuilles(1911à 1913), contenait plusieurs inexact;es exemples en
sontdonnésdans l'analysede la DéclaratioMILNER-SIMONfaite dans les sections
2 et 4 du chapitre 3 ainsi que dans la sectio2 du chapitre 4. Ceci explique
l'adoptionde la Déclaration THOMSON-MARCHANb Deaucoup plus préciseque
celle de 1919, comme le prouve le fait que la description en 41 points de la
Déclaration MILNER-SIMON de 1919est convertieendescriptionen 138pointsdansla DéclarationTHOMSON-MARCHAND. Quoiqu'unp eartie de la frontièreentre le
Lac Tchad et le Mont Kombon restesans démarcation,cela ne modifie en rien la
conclusionselon laquelle elle a étédélimitée avecle niveau deprécision nécessaire
par la DéclarationMILNER-SIMON du10 juillet 1919, reprise plus en détail aux
points 3 à 60 de la DéclarationTHOMSON-MARCHAND, telle entériné pear
1'Echangede notes franco-anglaisdu 9janvier 1931.
8.19 La section3 du chapitre4 analyseplusen détaille tracéde la
frontièredans le secteur allant du Mont Kombon à la borne frontière64. Dans ce
secteur, la frontièreactuelleentre le Nigena et le Camerounsuit la ligne de division
entre le Camerounseptentrionalet le Camerounméridionalquand tous deux étaient
sousadministrationbritannique durantles périodesde mandatet de tutelle (de 192à
1961). Ladéfinitioneffectivede cetteligne a étéa,u départ,effectuée conformément
à l'annexe British CameroonsOrder in Council 1923,cette ligne ayantétédécidéede
la borne frontalière64 au Mont Kombon, c'est-à-dire dans le sens inverse. Cette
descriptiona été précisée plusavant dans la deuxième annexe Nigeria (Protectorate
and Cameroons) Order in Council 1946 (maistoujours dansle sensopposé),et c'est
ce tracé quiest devenula frontièreactuelle entrele Camerounet le Nigeria, du fait de
l'incorporationdu Camerounseptentrional dansle Nigeriaet du Cameroun méridional
dansle Cameroun, suiteauxplébiscites de 1961. Le fait quela Grande-Bretagneet le
Nigeria ont pleinement acceptéen 1961 l'incorporationdu Cameroun septentrional
dans le Nigeria (qui ne pouvait se faire que sur la base des limites territoriales du
Camerounseptentrionalde 1961)est confié par l'échange de lettresdu 29 mai 1961
entre le Haut Commissairedu Royaume-Uniau Nigeria et le Premier Ministrede
l'époquede la Fédération du Nigena. Iy l a doncbieneu reconnaissanceexpresse, et
par le gouvernement nigérianet par le gouvernement britannique,de cette partiede la
frontièrecamerouno-nigérianet,elle qu'elleavaitétdéfinieà l'originedansles textes
législatifs internes britanniques.
8.20 La section4 du chapitre4 analyseplusen détaille tracéde la
frontière dela borne frontalière64à la Cross River. Dans ce secteur, les premiers
essais de délimitationconcertée entreles possessions britanniques et allemandes
n'avaient pas étécouronnésde succès. Unplein accorda pu êtreobtenu sur la
délimitationdu secteur allantde Yolaà la CrossRiver avantle Traité anglo-allemand
du 11 mars 1913. Le traitéanglo-allemand (nonratifié)du 6 octobre 1909comprenait
une description écritede la frontière constituée "naturafeature" entre Yola et la
Cross River, sur la base d'une étudeentreprise par la Commissionfrontalière vonSTEPHANI-WHITLOCK entre1907 et le début de 1909,accompagnéedes cartes
ayant fait l'objet d'un accord. Ccestraité(non ratifié)de 1909qui aépris pour
base de la délimitationentre la borne frontière64 et la Crossriver, la description de
la frontière qu'ilcontenait ayantétéincorporéedans le Traitéanglo-allemanddu
mars 1913,et les cartesretenuespour êtjointes autraité(non ratifde 1909ayant
étéannexées sans modificatioàl'Accorddu 11mars 1913.
8.21 Avant la négociationdu Traitéanglo-allemanddu 11 mars
1913, une commission de démarcation frontalière(la commission NUGENT-
DETZNER) avaitétéenvoyéeen Afrique pour faireune démarcation plus précisede
la partie de la frontièresituéeentre un àquelque30 milles ausud ouestde Yola
et Obokum sur la Cross River, ce secteur ayant déjàété étudéar la Commission
frontalière Yola-Cross River entre 1907 et 1909. La Commission NUGENT-
DETZNER a teminé ses travaux le 12 avril 1913, par la signature du protocole
d'obokum. Les points 13à 21 du Protocoled'Obokumdonnent unedescription écrite
de la frontièrà partir de la borne frontalièreno 64 sur la GamanaRiverjusqu'à la
borneno 114sur la Cross Riverjuste en amontd'obokum. Le ProtocoledlObokuma
étéapprouvéformellementpar les deux gouvernementsle 6 juillet 1914, et la
frontière actuelle entrele Nigeriaet le Camerounsur le secteur allantde la borne no
64 à la Cross Riverest déterminéear le ProtocoledlObokumdu 12 avril 1913, qui
précisele tracé arrété lr Traité anglo-allemand 11mars 1913.
8.22 La section 5 du chapitre 4 analyse en détail la frontièreà
partir de la CrossRiverjusqu'àla mer. C'est cettepartie dela frontièrequi détermine
l'appartenancede la péninsule deBakassi au Cameroun. Les éléments de preuves
fournis par leCameroun danscette sectionde sonMémoKe sontirréfutables. Ils font
ressortir quela frontièreactuelleentre le Camerounet le Nigeriadébouchesur la côte
à l'embouchure dela rivièreAkwayaféet que les dispositionsdes articles XVIIà
XXI du Traitéanglo-allemanddu 11 mars 1913continuentàdéteminerle tracéde la
frontière. C'estcet accordqui, en dernièreanalyse, établit définitile fait que
la péninsulede Bakassiappartient auCameroun. Cependant les élémend tse preuve
historiqueque le Cameroun a présentdsanscettesectionparticulièrede son mémoire
démontrentsans équivoqueque, longtemps avant la conclusion du Traité anglo-
allemand du11mars 1913,lesresponsables britanniqueset allemands étaiet'accord
pour estimerque lafrontièreanglo-allemandedevaitatteindrela meà l'embouchure
de 1'Akwayafé River, et donc que lapéninsule deBakassirevenait à l'Allemagneet
non plus à la Grande-Bretagne. Cet accord et éjàenregistré dale traitéMOOR-PUTTKAMER de 1901qui, n'a cependant pas reçul'approbation définitive des deux
gouvernements. Au demeurant, on peut supposer que certainespersonnes qui habitent
actuellement la péninsulede Bakassi et qui sont d'origine nigériane,peuvent avoir
l'impression, totalement erronée,que la péninsulede Bakassi appartenait au Nigeria,
parce que, au cours de la période allantde 1922 à 1960, la péninsulede Bakassi,
faisant partie du Camerounbritannique durant lesriode se mandat et de tutelle, a
étéadministréecomme sielle faisait partiedu Nigeria.
8.23 La frontière maritimeest, pour sa part, traitéeau chapitre 5
qui tient compte du fait qu'à la date de rédactiondu présentMémoire,la frontière
maritime entre le Cameroun et le Nigeria n'est que partiellement délimLa Cour
est donc priéede constater le tracéde la partie de la frontière maritime quiétédéjà
délimitée et dedéterminerle tracéde la partie de la frontière maritime quin'a pas
encore étéfixée par accordentre lesdeux Etats.
8.24 La section 2 du chapitre 5 traite du tracé de la frontière
maritime à partir de la côte jusqu'au point G. Il s'agit d'une partie de la frontière
maritime qui a déjàétédélimitéeL. e point de départdoit êtreconsidécomme étant
"le centre du chenal navigablesur la ligne reliant Bakassi Pointet King Point", auquel
se réfère l'artiXXI du Traitéanglo-allemand du11 mars 1913. Mais l'articlXXI
poursuit en énonçant quela frontièredoit suivre le centre du chenal navigable de la
rivière Akwayaféjusqu'à la limite des 3 milles de juridiction temtoriale, ce chenal
navigable étant considércomme situé entièrement à l'est du chenal navigable de la
Cross River et de la Calabar River, et l'arXXlIeénonceque la limite des3 milles,
commence à une ligne reliant Sandy Point et Tom Shot Point. Pour des motifs
évidents, ces dispositions du Traitéanglo-allemand du 11 mars 1913 n'ont suscité
aucune difficultéusqu'à l'incorporation du Cameroun méridionaldans le Cameroun
en 1961, quand la frontière entre leNigeria et le Camerounentre la Cross River et la
mer est revenueà une lignedéterminée parce traité.
8.25 Au cours de la période qui a suivi l'accession à
l'indépendancedu Cameroun et du Nigeria, aucune divergencede vue n'est apparue.
Le Nigeria a confirmé,dans ses notesno 570 et 631 du 27 mars et du 8 avril 1962,
que la frontière maritime suivait le cours inférieur de la rivière Akwayafé se
prolongeait dans l'estuaire de la Cross River. Le tracéactuel de la frontière maritime
vers le point fxéà l'articlXW du Traitéanglo-allemand du 11 mars 1913, etau
delà, restaiàdéterminer,dans la mesure où il n'avaitjamais étéindiquéprécisément
sur une carte maritime avec des coordonnées ayantfait l'objet d'un accord, mais laposition nigérianen 1962 semblaitêtrque, pource secteur, il fallait adopterla ligne
médiane.
8.26 Suiteà une recommandationde la première Déclaration de
Yaoundédu 14 août 1970, des négociations oné t té entamée entre les experts du
Camerounet du Nigeriasur letracéprécisde la frontièremaritime allantdu centrede
la ligne Bakassi Poinà King Point au-delàde la limite des 3 milles. Au début, des
difficultésse sont fait jour pour amveàun accord sur les cartes devantservir de
documentsde travail mais elles ontfmlement été résolues. Cependan a, cours des
négociations ultérieures,de sérieusesdivergences d'opinion sont apparues sur
l'interprétation préciBe donner aux références faites au "chenal navigable" de
1'Akwayafé River dans les dispositionspertinentesdu Traitédu Il mars 1913. Ce
n'est que la présencà Yaoundé,le 4 avril 1971,des Chefs d'Etat du Nigeria et du
Cameroun d'alors, quia permis d'arriverà un accord sur la "lignede compromis",
tracéesur un exemplairede la carte de l'Amirautébritanniqueno 3433, sur laquelle
les deux Chefs d'Etat ont apposéleur signature.La "ligne de compromis", ayant
ainsi étéapprouvéepar les deux Chefs d'Etat le 4 avril 1971et enregistrée dansla
deuxième déclaration de Yaoundéde cette date, constitue,une délimitation dela
frontière maritimevers le Point 12;cette ligne, qui a fait l'objetd'un accord, est
opposable au Camerouncommeau Nigeria.
8.27 L'extensionde la frontière maritimedu Point 12au Point
a pu se faire suiàeune autre réunionentre les Chefsd'Etat camerounaiset nigérian
(le PrésidentAhidjoet le Général owon)àMarouadu 30 mai au ler juin 1975.Il en
est issu la DéclarationMaroua. La ligne adoptée dansette Déclaratide Maroua
était nettement défavorablaeu Camerounpuisqu'ellepartait plein ouesà partir du
Point 12 vers le PointA pour répondreau désirdu Nigeriaque les naviressouhaitant
accéder auxports nigériansde l'estuaire dela CalabarlCrossRiveraient un libre accès
à ceux-ci. Bienquele Gouvernementnigérian ait, depuiquelquesannées, contestéla
validitéde la Déclarationde Maroua, le Cameroun est fermementd'avis que les
arguments avancés par le Nigeriasur ce point sont, en droit, entièrementnon fondés
et sans substance.
8.28 Sur la base de tous les éléments de fait et de droit
mentionnés, le Cameroun demande à la Cour de déclarer que le tracé a frontière
lacustre, terrestreet maritime entrele Camerounet le Nigeàpartir du pointtriple,
dans le Lac Tchad, jusqu'au pointG tel qu'ilest déterminé palra Déclarationde
Maroua, est celui que fixent, sans la moindre ambiguïtéles titres documentairesinvoquéspar le Cameroun.
8.29 Il restà déterminerla frontière maritime entre le Cameroun
et le Nigeria au largedu Point nonobstant lesessais effectuàspartir de 1971par les
représentants des deux Etats pour délimiter une frontière maritime complexe,
conformémentaux exigences de la principale recommandationfaite dans la première
Déclarationde Yaoundé du 14 août 1970. Tout ce que les deux Etats ont réussi à
obtenir, par des négociationsdirectes, estun accord sur le tracéde leur frontière
maritimejusqu'au PointG. Dans la section 3 du chapitre 5, le Cameroun a cherchéà
présenterune analyse objective des problèmes liésà la déterminationd'une frontière
maritime entre le Camerounet le Nigeriaaudelà large du Point G.
8.30 ie Camerounest pleinementconscient de la complexitéet de
la difficulté de la tâche demandée à la Cour, consistant à délimiter la frontière
maritime au-delà du Point G. A cet égard,le Cameroun doit attirer l'attention de la
Cour sur les désavantages graves dont il souffredans ce contexte, en raison de la
présence, juste devantla côte camerounaise, de l'île de Bioko d'une taille assez
importante, et en raison de la présence,plus au large, des îles de Principe et de Sao
Tomé. La présencede ces îles au large de la côte du Cameroun (surtout celle de
Bioko) a pour effet de masquer la projection en direction du large du territoire
terrestre du Cameroun. L'inconvénientgéographique dontsouffre le Cameroun en
raison de la présencede ces îles au large est amplifié parl'orientation générde la
ligne côtière, dans la zone où doit se faire la délimitation,celle-ci subit en effet un
brusque changement de direction juste à l'est de la frontière Nigeria-Cameroun,
occasionnantune nette concavitéde la côte. Cela donne une situation assez semblable
à celle de la République fédérale d'Allemagne danl'affairedu Plateau continentale
la Merdu nord. En tenant compte de ces motifs et du fait que la ligne allant du Point
12 au Point G s'éloigne(aux dépensévidentsdu Cameroun) de la ligne médianepour
donner un accèssans entrave au Nigeria auxports des Calabar et Cross, le Cameroun
soutient fermement qu'une solution équitablene peut êtretrouvée entre leCameroun
et le Nigeria que par un rééquilibrage entreles parties au-delà du Point G, et en
essayant de construire une ligne qui représente un degré raisonnable de
proportionnalité entre les longueurs de côte des Etats concernés dans la zone
pertinente. Les détails sur la manière dont le Cameroun suggère d'atteindre ces
objectifs généraux sont précisés dalassection3 du chapitre 5.
8.31 La partie 2 du Mémoire duCameroun est consacrée à la
responsabilité internationaledu Nigeria. Elle est composéede deux grands chapitre:le chapitr6, traitantdes actes illicitesau plan internationalattribuablesau Nigeria, et
le chapitre 7 qui analyse les conséquencesde la responsabilitéinternationale du
Nigeria.
8.32 La section2 du chapitre6 préciseles faits et les éléments de
preuves connus du Cameroun relatives aux incursions nigérianee sn temtoire
camerounais. Cela va de l'occupationmilitairecontinued'une partie de la péninsule
de Bakassi depuis janvier 1994, jusqu'à de très nombreux incidents individuels
consistant,par exemple, en l'arrestationou l'enlèvement,en temtoire camerounais,
de fonctionnairesou de civilscamerounais.Ces incidentsont été regroupés selolns
provinces camerounaises où ils ont étécommis et décrits dans un ordre
chronologique. Comme la Couraurapu s'enrendrecompte, le grosde ces incursions
nigérianesillicites ont eu lieu sur la péninsule deBakassiet dans la régiondu Lac
Tchad maisilsne se limitent pasàces deux zones.Un incident sérieux,vec violation
du fait de la marine nigériane,du territoire camerounaisà l'embouchuredu Rio del
Rey, s'est produit le 16 mai 1981, suscitant toute une sériede protestations du
ministèredes Affaires étrangèresu Cameroun. Cependant,la gravitéde cet incident
a étélargement dépassép ear les événements de décemb1 re93 à février 1994,quand
les forces nigérianesont lancé touteune séried'attaques armées contre les forces
camerounaisesà Jabane, en occupantL'îlecamerounaisede Daimon, et qu'elles se
sont avancées vers Idabatoen provoquant d'autresconflits armés avec lesforces
camerounaises. A cela s'ajoutentdes violations continuelles des eauxtemtoriales
camerounaisespar les forcesnavales nigérianesproximitéde la péninsule deBakassi
depuis la fin des années 1960. Ellesont quelquefoisétéaccompagnées d'actes de
vandalismeet de pillage. La police et les unités navalnigérianes ont effectude
fréquentesincursionset des occupations temporairede pêcheries camerounaises tels
que Jabane, sans l'autorisation des autorités camerounaises.De telles activités
clandestines ontéténotéesen 1984et, ànouveau, à plusieurs reprises, entre 1990et
1992. De plus amples détailsde ces incursions camerounaises illégalessur le
territoire camerounais figurentàla section2 du chapi6.e
8.33 Lesincursions arméedsesforces nigérianeset les autresactes
illégauxdirigés contreles citoyens camerounaisne se sont pas limités à la seule
péninsulede Bakassi. Dans la régiondu Lac Tchad, des civils nigérians arméo snt
occupé une vingtaine de villages camerounais depuis l'assèchement des eaux Ldac
Tchadvers la fin des années1980, leur invasionayantreçu ensuitel'appuides forces
armées nigérianes. Le Cameroun a adresséde nombreuses protestations auGouvemement nigérian àpropos de ces incursionsen territoire camerounais.11a, en
particulier, protesté aénergie contrel'occupationpar des forces nigérianes civiles
et militaires de Darak, localitéque le Nigeria considère commé etant situéen
temtoire nigérianalors qu'il se troàvl'intériedu temtoire camerounaisàenviron
35 kilomètres,de la frontièrereconnueau plan internationalqui séparele Cameroun
du Nigeria dans cene zone. Les Nigériansoccupent par ailleurs Typsan dans la
localitéde Kontchasituéedansla province camerounaisedel'Adamaoua.
8.34 Des détailsde toutes ces activités totalemitlicites, faites
avec la participationou les encouragementsactifs des forces civiles ou militaires
nigérianessont reprises à la section 2 du chapitre 6. Elles témoignentd'une
campagneconcertée, organisée et encouragépar le Gouvemementnigérian,et visant
à déstabiliser l'autocamerounaisesurun temtoire incontestablemencamerounais.
8.35 Le reste du chapitr6 préciseles obligationsinternationales
violéespar le Nigeria suiàeces activités illégasinterdiction dela menaceou du
recours à la force, occupationillégalede temtoire appartenàun autre Etat, non-
intervention, intégritemtoriale et non respect dela souveraineté duCameroun. 11
n'y a aucun doute sur le fait que des actes officiels nigériansont amenéà des
violations directes et durables, s'étalant sur plusieurs annéesd,e ces règles
fondamentalesde droit internationalLe chapitre6 concluten montrantque les faits
internationalementillicites, dont seplaintle Cameroun,sontibuablesau Nigeria et
que, dans le cadre du droit de la responsabilitéde l'Eut, il n'existe aucune
circonstancequipermettraitd'enexclureI'illicéité.
8.36 Enfin ,e chapitre 7 détaille les conséquences de la
responsabilité internationaledu Nigeria conformémentaux principes de droit
international reconnusen la matière. De telles conséquences incluent,omme le
démontre le Cameroundans ce chapitre, l'obligation demettre immédiatementun
terme aux infractionsau droit international, y comprisle prompt retraitdes forces
militaires et du personnel administratifnigériansdu territoire camerounais occupé
illégalement.Cela comprendaussi le devoir du Nigeriade réparer les conséquences
dommageablesdécoulantde sa responsabilité internationale. Cameroun examinela
naturede ce devoir comme unequestionde principe,maisprie la Cour de l'autoriser
à soumettre ultérieurement uneévaluation précispeour les dommagesmatériels et
moraux qui lui ont étéoccasionnésainsi qu'à ses ressortissants du fait des faits
internationalementillicitesattribuablesau Nigeria.8.37 Le Camerouna conscience dece que l'affaire qu'ilsoumet à
la Cour dans le présentmémoire anécessité unl eongue exposition.II s'agit d'une
affaire complexequi porte sur l'histoirede la frontière lacustre,terrestreet maritime
séparant leCameroun du Nigeria, sur plus de cent années, période au cours de
laquelle de nombreuses modificationssont intervenuesdans le statut destemtoires de
part ou d'autre dela frontièreactuelleLa frontière terrestre estlongueet vu son
tracése modifier suite à la défaitede l'Allemagnelors de premièreguerre mondiale,
puis à nouveau en 1961, lors de l'intégrationdu Cameroun septentrionaldans la
Fédération du Nigeria, eqtuandle Cameroun méridionae lst devenupartie intégrante
de la Républiquedu Cameroun.De plus, la frontièremaritimen'estdélimitéq eu'en
partie, ce qui amène la Cour à examiner la demande du Cameroun visant la
délimitationde la frontièremaritimeentre leCamerounet le Nigeria au delàdu Point
G, en directiondu large, vers la limite deszones maritimes quele droit international
place sous la juridiction des deuxpartieEnfin, le Cameroun a estimé nécessaire de
soumettre à la Cour, au moinsà titre d'exemples, desdétailssur les nombreuxcas de
violationsdu temtoire camerounais commis parles forces armées nigérianes op uar
d'autres autoritésnigérianesau cours des quelquestrente années passées. Ce faits
justifient la thèsedu Cameroun selon laquellele Nigeria a une responsabilau plan
international envers le Cameroun pour ces comportements contrairesau droit
international.CONCLUSIONSDELAREPUBLIQUEDUCAMEROUN9.1 La Républiquedu Cameroun a l'honneurde conclure à ce
qu'ilplaiseà la Cour internationalede Justicede die etjuger:
a) Que la frontièrelacustre et terrestre entre le Camerounet le Nigeria suit le
tracé suivant:
-du point de longitude 14' 04' 59" 9999 à l'est de Greenwichet de latitude
de 13"05' 00" 0001, nord, ellepasseensuite parle point situéà 14' 12' 11"
7 de longitudeest et 12'32 17"4 de latitude nor;
-de ce point, elle suit le trfmé par la Déclaration franco-britanniqueu 10
juillet 1919, tel que précisé par les alinéas 3 à 60 de la Déclaration
THOMSON/MARCHANDconfiée par 1'Echangede lettres du 9 janvier
1931, jusqu'au "pic assez proéminent"décrit par cettedernière dispositionet
connu sousle nom usuel de "MonK t ombon";
-du Mont Kombon,la frontièrese dirige ensuite versla "borne64" visée au
paragraphe 12de l'Accordgermano-britanniqued'Obokumdu 12avril 1913et
suit, dans ce secteur, le tracédécrità la section6 (1) du Nigeria (Proteciorate
and Carneroom)Order in Councilbritanniquedu 2 août 1946 ;
- de la "borne 64" elle suit le tracé décrit palres paragraphes 13 à 21 de
l'Accordd'obokurn du 12 avril 1913jusqu'à la borne 114sur la Cross River;
-de ce point, jusqu'à l'intersection dela ligne droitejoignant BakasPoint à
King Point et du centre du chenal navigable del'Akwayafé,la frontièreest
déterminée palresparagraphes16 à21 de l'Accordgermano-britannique du 11
mars 1913.
b) Que, dèslors, notamment,la souveraineté sur la presqu'île deBakassid'une
part et sur la parcelle litigieuseoccupéepar le Nigeria dansla zone du Lac
Tchadd'autre part,en particulier surDaraket sarégion, estcamerounaise.c) Que la limite des zones maritimesrelevantrespectivementde la Républiquedu
Cameroun et de la Républiquefédérale du Nigena suit le tracé suivant:
- de l'intersection de la ligne droite joignant BakassiPointà King Point et du
centre du chenal navigable de 1'Akwayafé jusqu'au "point12", cette limite est
déterminée par la"ligne de compromis reportéesur la carte de l'amirauté
britannique no 3343 par les Chefs d'Etat des deux pays le 4 avril 1971
(Déclarationde Yaoundé)et, de ce "point 12" jusqu'au "point G" par la
Déclaration signée àMaroua le ler juin 1975 ;
- du point G, cette limite s'intléchitensuite vers le sud-ouestdans la direction
indiquée par les points G.H.I.J.K. représentés sur le croquis figurant à la page
[?] du présent Mémoire et qui répondà l'exigence d'unesolution équitable,
jusqu'à la limite extérieuredes zones maritimes quele droit internationalplace
sous lajuridiction respective des deuxParties.
d) Qu'en contestant les tracésde la frontièredéfinie ci-dessussub litreras a) et c),
la Républiquefédérale du Nigeria a violéet viole le principe fondamental du
respect des frontièreshéritées de la colonisation(uripossidetisjuris) ainsi que
ses engagementsjuridiques relativement à la démarcation desfrontièresdans le
Lac Tchad et à la délimitationterrestre et maritime.
Qu'en utilisant la force contre la République duCameroun, et, en particulier,
e)
en occupant militairement des parcelles du temtoire camerounais dans la zone
du Lac Tchad et la péninsulecamerounaise de Bakassi, en procédant à des
incursions répétées ,nt civiles que militaires,tout le long de la frontièreentre
les deux pays, la République fédérale du Nigeria a violé et viole ses
obligationsen vertu du droit international conventionnelet coutumier.
f) Que la République fédérald eu Nigena a le devoir exprèsde mettre fin à sa
présence tant civile que militaire sur le territoire camerounais et, en
particulier, d'évacuersans délais et sans conditions ses troupes de la zone
occupéedu Lac Tchad et de la péninsulecamerounaise de Bakassi et de
s'abstenirde tels faits àl'aveni;
g) Que la responsabilitéde la Républiquefédérale du Nigeria est engagéepar les
faits internationalementillicites exposés ci-dessuset précisés dans le corpsdu
présentMémoire. Qu'en conséquence,une réparationest due par la Républiquefédéraledu
h)
Nigeria à la République du Cameroun poulres prejudicesmatérielset moraux
subispar celle-ci selondesmodalità fmerpar la Cour.
9.2 La République du Cameroun aen outre l'honneurde prier la
Cour de bien vouloirl'autorisàrprésenterune évaluatiodu montantde l'indemnité
qui lui est due en réparation despréjudices qu'elle a esn conséquencedes faits
intemationalement illicitesattribuaàlla Républiquefédéraldu Nigeria, dansune
phase ultérieurde la procédure.
9.3 Les présentes conclusionsont soumisessousréservede tous
élémentsde fait et de droit et de toutes preuves qui viendraient êtresoumis
ultérieure-ment;la République du Cameroun se réservele droit de les compléterou
de les amender le cas échéant,conformémentaux dispositions du Statutet du
Règlementde la Cour.
Le 16mars 1995,
DoualaMOUTOME
Agentdela Républiqu eu Cameroun TABLE DESMATERES
Sigleset abréviations...................................................
.P...3...........
......................................................
.................
Schéma du Mémoire P. 5
1 CHAPITRE 1 ..INTRODUCTION ..........................................P...9...........
Section1. La requête duCamerounet l'objet du Différend .................11..
Section2. Lestentatives pour réglerle différendet leur éc.............p.15
Section3. Lesenjeux du litig.Un différendcomplexe ..................p. 22
5 1.Le contexte géographiqueet historique.......................p.22
A .- Les parties au différend..............................p22
B .- La frontièrecamerouno-nigériane......................p. 24
5 2.Le comportementde la Partie nigériane........................p28
Section4. Plandu mémoire .............................................p34...
.k PARTIE .
LA FRONHERE CAMEROUNO-MGERIANE .......................p...37...
CHAPITRE 2..PRESENTATIONGENERALE DE LAFRONTJERE .
LADELIMITATIONCONVENTIONNELLE ..............p. 39
Section1 .Introduction...............................................p..41..........
Section2 .La délimitationde la frontièreterrestre......................p421. Etude générale de la frontière terrestre entre le
Cameroun et le Nigeria .........................................42.
A. -Les Traitésanglo-allemands de 1885à 1914.. ...........p. 43
1. Les accords entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne relatifs à leurs sphères d'influence
respectives dans certaines parties de l'Afrique, des
29 avril-16juin 1885......................................45...p.
2. La Convention entre l'Allemagne et la Grande-
Bretagne complémentaire à celle d'avril-juin 1885
et relatives aux sphères d'influence dans le Golfe
de Guinée, signée à Londres, du 27 juillet au 2
août 1886.................................................47......
3. Le Traité conclu entre les Gouvernements
britannique et allemand, relatif à l'Afrique et à
l'Héligoland; Berlin ler juillet 189...................p. 53
4. Le Traité conclu entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne relatif au Rio del Rey, sur la côte
occidentale africaine, signéà Berlin, le 14 avril
1893......................................................56.........
5. Le Traité conclu entre la Grande-Bretagne et
l'Allemagne, relatif aux frontièresen Afrique, le
15novembre 1893 ......................................p.58
6. Le Protocole de la Commission de délimitation
de la frontière entre le Cameroun et le Nigeria
méridional signéen avril 1906............................p69
7. Le Traité anglo-allemand du 19 mars 1906,
relatif à la frontière séparant les temtoues
britanniques et allemands de Yola
au Lac Tchad ...........................................p.72.
8. L'Echange de notes anglo-allemand, du 22
févrierau 5 mars 1909, confiant les protocoles
définissantles frontièresentre (1) Gorege et le Lac
Tchad (12 février 1907) et (2) Uba et Maio Tiel
(11 mars 1907) ........................................p. 74.....
9. Le Traité anglo-allemand relatif (1) à la
délimitationde la frontière entre le Nigeria et le
réglementationde la navigation sur la Cross River,
conclu à Londres le Il mars 1913 .......................p.77
10. Le Protocole anglo-allemand relatif à
l'abomement de la frontièreanglo-allemandeentre
le Nigeria et le Cameroun, de Yola à la Cross
River, signéà Obokum le 12avril 1913.......................85 11.Conclusion surla situationen1914................p...85
B .. Les Traités anglo-français de 1919 et 1931 et les
autres instruments conclus avant l'indépendance............p. 87
1.La DéclarationMILNEWSIMON du 10 juillet
1919...............................................p 91............
2 .Le MandatBritanniquesur le Cameroun ...............p93
3.L'Echangede Notesfranco-anglaisdu 9 janvier
1931. approuvant la Déclarationde THOMSON-
MARCHAND définissant la frontière entre le
Camerounbritannique et français......................p. 97
4.L'Accordde tutelledu 13 décembre1946 ...........p..101
5.Les modalitésde l'indépendance des territoires
sous tutelle du Cameroun britannique et
français...........................................p 102.........
6. L'affaire duCamerounseptentnoml devant la
Cour internationalede Justice (arrêt.2 décembre
1963 .Rec. 1963.p .15).............................p........
partir du ler octobre1961e................................p..107....
Section 3.La confmation de la frontière lacustre.....................p..109.
81. Histoire de la délimitation.................................p 110......
.......................p..116.
82 .Les basesjuridiques de la démarcation
A ..Les documentsjuridiques de base .....................p 116. .
B ..La déterminationdu bipoint
Cameroun.Nigetia .................................p 117...... .
53 .Les travaux techniques de démarcation ......................p..120.
mi-septembre: 1988-.......................................p 121........ .
B ..Phase II:du 29 janvier 1989 au 30juin 1989 ..........p 121
C .. Phase UI :décembre 1989 .février 1990 et travaux
complémentairesjusqu'en 1992 ...........................p 122....
d'Etat despays membres de la C.B.L.T.ex.........................p..124.. Section 4 La fixation partielle de la frontière maritime..............p..126
5 1.La première Déclarationde Yaoundé
du 14 août 1970 ..................................................128........
5 2.La deuxièmeDéclarationde Yaoundé IJ
du 4 avril 197....................................................129........
5 3.La Déclarationde Lagos du 21juin 1971(Annexe) ...........p..131
§ 4.La Déclarationde Kano de 1974 .............................p 133....
5 5.La Déclarationde Maroua du ler juin 1975 ..................p.134
Section 5 Une frontière fermement établie.............................p 138.....
5 1. Les instruments anglo-allemands conclus de 1885
jusqu'avant la premièreguerre mondiale ........................p..139...
2. Les instruments anglo-français conclus à partir de la
l'indépendance du Cameroun et du Nigeriaa......................p..140..
§ 3. Les instruments camerouno-nigérians conclus entre les
deux Etats devenus indépendants.................................p.141.....
5 4.Portéedu processus .........................................p 141........
CHAPITRE 3. . LA CONFIRMATION DES TITRES
CONVENTIONNELS .....................................................
p.143.............
Section 1. Introduction................................................p.145...........
Section 2 . L'ac.ept.tion expresse de la frontière par la Grande-
Bretagne et le Nigeria.................................................p 148............
§ 1.Les confimations expressesopérées par
le Royaume-Uni ................................................p.149...........
A .. L'application de la Déclaration
MILNER-SIMON ........................................p.149........ B . . La Déclaration THOMSON-MARCHAND et
1'Echangede notes de 1931.en tant que confmation
bilatéralede la ligne d1919.................................152...
C . . L'administration britannique du Nigeria et du
Cameroun occidental ....................................p..153....... .
52 .Les confimations expressesopéréep sar le Nigeri...........p..157
portant sur la frontièreterrestre...........................158..
B . . Les confmations découlant des négociations
porta.. sur le sud de la frontière terrestre et sur la
frontiere maritime.......................................p 161........
C . . Les confmations découlant des négociations
portant sur la frontièrelacustre.........................p..165...
53 .Effetsjuridiques des actesconîiiatifs......................p..175.
...........................................................
Section3 .Les "effectivités" p 179
41. Généralités................................................p..179...........
52. Les "effectivitécoloniales.................................p..182......
43. Les "effectivitépost-coloniales............................p..183....
Section4 .La reco~aissance internationale de la frontière.............p..185
......................................p..185.......
51 .Lesystème demandat
A ..La nature desmandats ...............................p..187....
B .-La consistanceterritoriale desmandats................p 191
1 L'article ler des accords de mandat.............p 191
2 .La CommissionPermanentedesMandats ...........p 194.
52 .Les accords de tutelie.....................................p 201........
A .-Le régimede tutelle .................................p..201......
1 Généralités.....................................p 201........
2. Les Accords concernant les Territoires du
Cameroun .........................................p 209.........
..............214
B .-La pratique au cours de la périodede tutelle 1.Conditionsgénérale s.................................214.
2 .La question"constitutionnelle......................p.216
a) Cameroun britannique .......................p .16.
1" Lesrapportsbritanniques ....................p .16
2' Les débatsaux Nations-Unies à propos
des rapports...................................p .18....
b) LR Cameroun français .......................p.224.
3 .La questiondes frontières..........................p..226.
a) Les frontières entre les Cameroun
britanniqueet français.........................p..229.
b) La frontière entre le Cameroun
méridional et le Nigeri........................p..233
c) La frontière entre les Cameroun
septentrionalet méridiona......................p..233
5 3.La fin des tutelles............................................p..237......
A.. La position desNations Unies ..........................p..237.
1.Generalites........................................p..237.....
2 .La dénonciation des tutellessur
le Cameroun .........................................p..239.....
a) LR Cameroun français .......................p..239
b) Le Camerounbritannique ....................p .40
B.. La position du Nigeria .................................p..244...
1.Les Territoiresdu Nigeriaet du Cameroun : les
modificationsconstitutionnelles.......................p..244
2 .L'accordnigéro-britannique ........................p .46.
C.. L'acquiescementnigérian . Généralité .s...............p..249
Section 5. La cartographie ...............................................p..258.......
5 1. Les caractéristiques générales du matériau
cartographique ...................................................p..259........
A ..Concordance et constance destracés
reproduits .................................................p..259........
B ..Diversitédes auteurs des cartes ........................p..260. C .. Diversitédes statutsjuridiques
attachésaux cartes..........................................261......
82 .Les "cartes conventionnelles.................................p.263....
A . . Les cartes dans les conventions délimitant ou
confiant la frontiere...................................p..263.....
1.L'Accordanglo-allemand
du 19mars 1906 ...................................p..263......
2.L'Accordanglo-allemand
du 11mars 1913 ....................................p.264......
3.L'Accordanglo-allemand
du 12avril 1913....................................p..264.....
4.L'Echangede lettres franco-britannique
des3-4 mars 1916 ..................................p..265.....
du 10janvier 1919..................................p..266.....
6.L'Echangede lettres franco-britannique
du 9janvier 1931...................................p..268.....
7.La deuxième Déclaration dYe aoundé
du 4 avril 197.....................................p..268......
8.La Déclarationde Maroua
du ler jui1975 ....................................p..269......
B ..Les conséquencej suridiques ..........................p..270...
$3 .Les autres carte............................................p..273........
territoria................................................p..276..........
B ..Cartes éditéesdanslesEtatstiers .....................p..283.
C . . Cartes reproduites par des organisations
internationales...........................................p..293........
64 .Le Nigeriaet lescartes......................................p..301......
Section6 ."Uh'possi urisiset date critiqu..........................p..321...
8 1.Le principe utipossideti....................................p..322......
A .. L'inviolabilitdesfrontièrespost-coloniales...........p..322
B ..L'"un'possidetsafricain" ..............................p.323... § 2.La "date critique" ..............................................327......
§ 3. Une frontiere terrestre fermement établieet maritime
partiellement établi.................................................328......
CHAPITRE4 .. LE TRACEDELA FRONTIERE TERRESTRE ...............p 331.
Section 1.Les différentssecteursde la frontière..........................p.333..
Kombonn ........................................................
.......p.335...
4 1.Présentationgénérale de la frontière septentrional. Une
délimitationcomplèteet définitive .................................p.337...
A.. Caractèresgénéraux de délimitation ...................p.337.
1. Une frontière dont la délimitation a été
longuement négociée .................................p.337....
2 . Une déiiinitation établie sous surveillance
internationale........................................p.338......
3 .Une frontière reconnuepar les deux parties àde
nombreusesreprises ..................................p.339....
B.. Historique de la délimitation...........................p..340.
1.La ligne PICOT-STRACHEY ......................p..340
a) Négociationde la ligne......................p..340
b) L'applicationde la lign.....................p..344
2 .La ligne MILNER-SIMON .........................p..347
a) La négociationde la ligne...................p..347
b) L'applicationde la lign.....................p..350
3 .La ligne THOMSON-MARCHAND ................p..352
a) La négociationde la ligne...................p..352
b) L'applicationde la ligne....................p..354
c) La démarcationde la frontière...............p..354
5 2.Le tracépar secteurs .Unedélimitation précis.e ...............p..357
..
A ..La frontiere lacustre ..................................p..358.... mondialen.Déterminationidupoint tripl...............p.358
a) Les conventions anglo-allemandes .
Désignationd'un méridien à l'intérieurdu
lac san séterminationdu pointtriple..........p..358
b) Les conventions anglo-françaises avant
1914. Déterminationdu pointtriple............p.363
c) Les conventions franco-allemandes avant
1914 . Confimation du pointtriple.............p.371
guerre mondialeon. Modification de la frontière
lacustre partirdu point trip........................p.375..
a) La DéclarationMILNERISIMONdu 10
juillet 1919..................................p.375......
b) L'Fkhangede lettres
du 9janvier 1931 .............................p.379....
3. Les précisions a..........................................
après l'indépendance p.380
a) La résolution no 2 relative à la
démarcationdes frontières dans le Lac
Tchaddu 2 décembre1988 ....................p.381.
b) Les précisions découlantdes travaux
d'I.G.N..France international................p..384
B .. La frontière terrestre.......................................p.386.......
........................
1.La Déclarationdu 10juillet 1919 p .386
2.L'Echangede lettresdu 9janvier 1931 ..............p.391
5 3 .Les "effectivités"camerounaises dans la zone du
Lac Tchad au Mont Kombon .............................p..405....
A.. Stmctures administratives et actes d'administration............405
B.. Servicesde police............................................p.411........
.. ....................................................... .
C Servicesde douane p 411
D.. Etablissements scolaires.....................................p 412......
E.. Services de santé............................................p 413........
F.. Structures d'encadrement agricole ...........................p 413... .
..............................p.414....
Section 3.Du Mont Kombon à la borne 64 § 1. Les circonscriptions administratives internes au
Cameroun britannique ............................................414........
5 2. La transformation de ces limites en frontières
internationales (1961..........................................p..420........
8 3. Les "effectivités" camerounaisesdans la zone du Mont
Kombon à la borne 64 .........................................p..423........
A . . Stnictures administratives et actes
d'administration.........................................p..423........
B ..Servicesdepoliceet de gendarmerie ..................p..425
C ..Servicesde douane ..................................p..425......
D ..Etablisements scolaires..............................p..426....
E ..Structures d'encadrementagricole ...................p..426.
84. Le tracé...................................................p .27.............
Section4 .De la borne 64 àla CrossRiver ..............................p..427...
1. Les accordsgermano-britanniques ..........................p .27....
§2 .Les "effectivités"camerounaisesdans la zone dela borne
64à la Cross River ...............................................436.........
d'administration.........................................p..436........
B ..Servicesdepoliceet de gendarmerie ........................ .
C ..Services dedouane ..................................p 439.......
D ..Etablissementsscolaires..............................p..439....
E ..Servicesde santé ....................................p..439.......
F ..Structures d'encadrement agricole....................p..439.
G .. Collecte del'impôt..................................p..440......
H .. Activitéscadastrale.................................p..441.....
53 .La cartographie............................................p..442.........
54 .Le tracé...................................................p 442.............
Section 5 . De la Cross River à la mer . l'appartenance de la
péninsuleBakassiau Cameroun...........................................p 445..... 51. L'accord germano-britannique de 1913.....................p..445..
A ..Introduction.......................................p..445.........
B. .Le Traitégermano-britannique de 11mars 1913 :
un règlementjuridique définit..........................p..448....
C ..Les préiiminairesau Traité.........................p..450....
D.. Caractérisîiquesgénéraledsu Traité.................p..461.
52. L'importance de la carte T.S.G.S. 2240
(feuiil1set2) ...............................................p..466.............
A ..Origineet caractèresgénéraux de la cart............p..466
B. . L'incorporation de la carte dans le traité et son
effet..................................................p.468...............
C ..Les effetsjuridiques de la carte...................p..470..
1" L'équivalence dtouslesélément du
trait..............................................470...........
2" La fonction concrètde la carteTSGS 2240
dansle Trai tué11mars1913 ......................p..470..
.....................................................................
§3. Le tracé p.473
5 4. Les "effectivités"camerounaises dans la péninsulede
Bakassi ...................................................
.p..486.............
A.. Remarques générales ...............................p.486.......
B. . Structures administratives et actes
d'administration.......................................p.490..........
C. . Services de police de la gendarmerie et de la
douane ................................................p..493.............
..............................p..493......
D.. Administrationfde
E.. Administrationde laJustice.........................p..494....
F.. Autres servicespublics.............................p..495......
CHAPITRE5 .. LE TRACE DE LA FRONTIEREMARITLME ...............p..497
Section1 .Lesdeux secteursfrontaliers...............................p..499......Section2 .Dela côteau point G ........................................p.500........
pointG ........................................................
..501...........
A ..L'ancrage maritimede la frontière maritime ...........p 501
B ..Del'embouchure deI'Akwayafé au point 12 ...........p.503
C .. Du point 12au point G .................................516....
1.ia Déclarationde la Commission mixte de juin
1971...............................................p.516..........
2.ia Déclarationde Kano
du ler septembre1974...............................p.519....
3.L'Accord deMarouadu ler juin 1975..............p.521
§ 2.Le tracé dela frontièremaritime que le Cameroun et le
Nigeriaont déjàdélimité ........................................p.525........
Section3 .Au-delàdu point G ..........................................p.529........
§ 1.Les principesjuridiques applicable..........................p.531...
A .- L'obligationde déliter .............................p 531....
B ..Lesprincipesde déümitation ..........................p.533...
§2 .Applicationenl'espèce ......................................p.535.......
§ 3.La Ligneen généra ..........................................p.548........
5 4.Conclusions ................................................p.555........... PARTm .LARESPONSABILITE INTERNATIONALE
DUMGERIA .......................................................
................
CHAPITRE 6 . LES FAITS INTERNATIONALEMENT ILLICITES
ATTRIBUABLESAUNIGERIA .............................................p 561..........
................................................................
l Section 1. Introduction p.563
I Section 2.Lesincursions nigérianes ....................................p 564.......
incidents......................................................
p.564.............
A .. Les provincesconcernées .............................p.564....
B .. Typologiedes incidents...............................p.564.....
5 2.La provincedu sud-ouest ....................................p.567......
A . . Les incursions militaires nigérianes sur la
presqu'île deBakassi .....................................p.567.......
1.L'incursionmilitairenigériane
du 16mai 1981 .....................................p.567.......
.............p.567
b) Les protestations camerounaises...........p 568
2. L'incursion militainigériandejanvier/févner
1994 ..............................................p.570...........
a) Les faits.................................p.570......
l'incursion nigériaear le Cameroun ..........p.571
1 L'actiondu Cameroundevant
1'O.U.A .....................................p 572....... .
2" L'actiondu Cameroundevant le Conseil
de sécurité des NatioUsnies....................... .
B. .La violation des eaux territoriales camerounaises
par lesnaviresmiiitairesnigérians........................p.574...
C. .L'occupation decertaines pêcheries camerounaises
par lesNigerians.........................................p 576......... D. -Les enlèvementset séquestrationsd'autoritéset de
citoyens camerounais dans la région par les forces
armées nigérianes .............................................p. 582
1. L'enlèvement de MonsieurSimonESABE,chef
de dismct de Idabato,et des membresde sa
délégatiol e 21janvier 1981 à
Kombo Abedimo ........................................p. 582
marine nigériane tle 6 mars 1990 càJabanea................p. 584
3. L'enlèvement du Sous-Préfet camerounais
Kombo Abedimoen avril 1990 ...........................p.585
E. -Autres incidents dansla région ..........................p. 585
§ 3. La Province de l'Extrêmenord.. ................................p. 586
A. -L'invasion et l'occupation nigérianessur les terres
camerouu~ de la régiondu Lac Tchad depuis le 2
mai 1987 .......................................................p. 587
1. Lesfaits............................... ..............p. 587...
2. Lesprotestationscamerounaises.. .....................p. 589
B. -Les enlèvementset séquestrations d'autoritéset de
citoyens camerounais dans la région par les forces
arméesnigérianes .............................................p. 590
§ 4. Les autres régionsfrontalières ...................................p. 590
A. -L'occupation de Typsan par le Nigeria ..................p. 590
1. Lesfaits....................................... ......p..590
2. Lesprotestations diplomatiques
camerounaises ..........................................p. 591
B. -Les enlèvementset séquestrationsd'autoritéset de
ci. ,.ns camerounais par lesforces armées
mgerianes .....................................................p. 592
1. Enlèvementd'un citoyen camerounais par trois
policiers nigériansàKolofatale 29 mai 1989 ...........p. 592
2. L'arrestation dequatre citoyens camerounaispar
la police nigérianeà MandurYang (arrondissement
de Nwa, département Donga Mantung,provincedu
Nord-Ouest) ............................................p..593
C. - Les autres incidents. ........................ ............p. 593 1. Arrestationd'un agent recenseur nigérianà
Mbelogo
le26janvier 1994..................................p.594.......
2. Les incidents du 26 septembre 1994
àMbelogo .........................................p.595.........
Section3. Lesobligationsinternationales violépar leNigeria...........p.596
5 1.L'interdiction du recourà la force...........................596...
A. . La violation du principe de l'interdiction du
recours àla forcarmée en droit international...........p 596.
B.. Violationdu principe de non-interventio.............p.604
C.. Violationdu principe du respect de la souveraineté
de 1'Etat...............................................p.608............
§ 2.L'occupationmilitaire etsesconséquences ...................p.609.
5 3.L'atteinteà l'intégriterritoriale du Cameroun..............p.613
Section 4. La responsabilité du Nigeria par ces faits
intemationalement illicites..........................................p.618...........
5 1.Attribution au Nigeria.....................................p.618........
5 2.L'absencede circonstancesexcluantI'illicéité...............p.620
1
CHAPITRE 7 ..LES CONSEQUENCESDE LA RESPONSABILITE
l INTERNATIONALE DU NIGERIA .................................p.627......
l Section1. Introduction...............................................p.629............
Section2 .L'obligation demettre immédiatementfm aux violations
de sesobligationsinternationales par le Nigeria......................p.629...
5 1.Le principe................................................p.630............
A.. Uneobligation"primaire" ............................p.631....
B.....s'appliquantà une violationcontinue...............p 631
5 2.La mise enoeuvre du principe del'espèce...................p.633. A. - Le Nigeria doit cesser sans délai l'occupation
illégale et continue des parties du temtoire
camerounais ................................................633.......
B. - Le Nigeria doit mettre immédiatement fin aux
atteintes répétéeest persistantes la souveraineté du
Cameroun ................................................p. 634.........
C. - Le Nigeria doit cesser immédiatement
l'exploitation des ressources naturelles
du Cameroun ...............................................635......
D. - Le Nigeria doit mettre fm immédiatement aux
chefferies traditionnellesset lalesdénomination dess
localitésen temtoire camerounais..........................p. 636.
Section 3. L'obligation pour le Nigeria de réparer les préjudices
causés à la Républiquedu Cameroun et à sesressortissants ..............p. 636
§ 2. La réparation par équivalence-l'indemnisation
..............p. 639
A. - L'indemnisation des préjudices immédiats subis
par le Cameroun .........................................p. 640.......
B. - Les préjudices subis par les ressortissants
camerounais ..............................................p. 643........
8 3. La réparation du préjudice moral causé à I'Etat du
Cameroun .......................................................................
Section 4. Les garanties de non-violation à l'aven......................p. 649.
CHAPITRE 8. CONCLUSION ................................................p. 649.........
CONCLUSIONS DE LA REPUBLIQUEDU CAMEROUN .....................p. 667
Mémoire de la République du Cameroun