COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES
AFFAIRE RELATIVE A DES QUESTIONS
D'INTERPRÉTATION ET D'APPLICATION
DE LA CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971
RÉSULTANT DE L'INCIDENT AÉRIEN
DE LOCKERBIE
(JAMAHIRIYA ARABE LIBYENNE c. ÉTATS-UNIS
D'AMÉRIQUE)
EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES
INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS
CASE CONCERNING QUESTIONS OF
INTERPRETATION AND APPLICATION OF
THE 1971MONTREAL CONVENTION ARISING
FROM THE AERIAL INCIDENT
AT LOCKERBIE
(LIBYAN ARAB JAMAHIRIv.UNITED STATES
OF AMERICA)
PRELIMINARY OBJECTIONS
JUDGMENT OF 27 FEBRUARY1998 Mode officielde citation:
Questions d'interprétationet d'application dela convention de Montréal
de 1971 résultant de l'incidentaériende Lockerbie (Jamahiriya arabe
libyenne c.Etas- Unisd'Amérique),exceptions préliminaires,arrêt,C.I.J.
Recueil 1998,p. 115
Officia1citation:
Questionsof Interpretation and Application of the 1971Montreal Conven-
tion arisingfrom the Aerial Incidentat Lockerbie (Libyan Arab Jamahiriya
v. United States of America), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J.
Reports 1998, p.115
No devente:
ISSN 0074-4441 Sales number
ISBN 92-1-070762-1 COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
1998 ANNÉE 1998
27 février
Rôle général
no89 27 février1998
AFFAIRE RELATIVE À DES QUESTIONS
D'INTERPRÉTATION ET D'APPLICATION
DE LA CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971
RÉSULTANT DE L'INCIDENT AÉRIEN
DE LOCKERBIE
EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES
Exception d'incompétence- Convention deMontréal du23 septembre 1971
- Traitéen vigueur entre les Partie- Paragraphe 1 de l'article 14 de la
convention.
Motifs d'incompétence invoquélors delaphase de la procédurerelative aux
mesures conservatoires - Arguments repris à titre incident dans la présente
phase de laprocédure - Négociations- Demande d'arbitrage - Délaide six
mois pour saisir laCour.
Allégationd'inexistence de tout différendjuridique concernant l'interpréta-
tion ou l'applicationde la convention deMontréal Différendde nature géné-
rale sur lerégimejuridique applicable la destruction de l'appareil dela Pan
Am au-dessusde Lockerbie - Différendsspécifiquesconcernantl'interprétation
et l'application de l'articlede la convention, lu conjointement avec sesar-
ticles, 5, 6 et 8, ainsi que l'interprétationet l'applicationde l'article II de la
convention.
Allégationselon laquelle iln'appartiendraitàala Courde seprononcer sur
la licéité dactions engagéespar ledéfendeuren vued'obtenir lalivraison des
deux auteursprésumés de l'infraction Compétence dela Courpour juger de
la licéité de actions dans la mesure où elles seraientcontraires aux disposi-
tions de la convention de Montréal.
Résolutions748 (1992) et 883 (1993) du Conseilde sécurité - Adoption 116 CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971 (ARRÊT)
aprèsle dépôtde la requête - Appréciationde lacompétence à la date d'intro-
duction de la requête.
Exception d'irrecevabilité- Allégation selon laquelllee différend entreles
Parties serait régi ar les résolutions748 (1992) et 883 (1993) du Conseil de
sécuritéet nonpar la convention deMontréal - Appréciationde la recevabilité
a la date d'introductionde la requête Adoption des résolutions après le dépôt
de la requête.
Exception de non-lieu - Allégationselon laquelle iln'y aurait plus laesta-
tuer sur les demandesformuléespar le demandeur car les résolutions 748
(1992) et 883 (1993) du Conseil de sécurité les auraient privdestout obje-
Paragraphe1 de l'article 79du Règlement de la Cour - Exception ((prélimi-
naire))- Modalitésde présentation - Paragraphe 7 de l'article 79 duRègle-
ment - Revisionde 1972 - Exception «non exclusivement))préliminaire com-
portant «à lafois des aspectspréliminaireset des aspectsdefond))- Droits au
fond constituant l'objetmêmed'une décision sur l'exception.
Demande présentée àtitre subsidiaireet tendanà ce que la Cour«rés[olve]
l'affaireaufond dèsmaintenant)) - En soulevantdes exceptionspréliminaires,
le défendeurafait un choixprocéduraldont l'effet est, selon lestermes exprès
du paragraphe 3 de l'article79, de suspendre la procédursur lefond.
Fixation des délaispour la suite dleaprocédure.
Présents: M. WEERAMANTv Rice,-présidentf,aisant fonction deprésident en
l'affaire;. SCHWEBE pré,sident dela Cour;MM. ODA,BEDJAOUI,
GUILLAUMR E, NJEVA H,ERCZEGHS ,HI, FLEISCHHAUE KRO,ROMA,
VERESHCHETIPN A,RRA-ARANGUREN, KOOIJMANS R,EZEK,juges;
M. EL-KOSHER ju, e ad hoc; M. VALENCIA-OSPIgN reff,ier.
En l'affaire relativeà des questions d'interprétation et d'application dela
convention de Montréal de1971résultant de l'incident aérien de Lockerbie,
entre
la Grande Jamahiriya arabe libyennepopulaire et socialiste,
représentée par
S. Exc. M. Hamed Ahmed Elhouderi, ambassadeur, secrétairedu bureau
populaire de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste
aux Pays-Bas,
comme agent;
M. Mohamed A. Aljady,
M. Abdulhamid Raeid,
comme conseils ;
M. AbdelrazegEl-Murtadi Suleiman,professeurde droit international public
à la faculté dedroit de l'universitéde Benghazi,
M. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., professeur de droit international
public, titulaire de la chairechele à l'université d'Oxford,117 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
M. Jean Salmon, professeur éméritededroit à l'université librede Bruxelles,
M. Eric Suy, professeur de droit international à l'universitécatholique de
Louvain (K.U. Leuven),
M. Eric David, professeur de droit à l'Université libre deBruxelles,
comme conseils et avocats;
M. Nicolas Angelet, premier assistant à la facultéde droit de l'université
catholique de Louvain (K.U. Leuven),
MmeBarbara Delcourt, assistante à la facultédes sciencessociales,politiques
et économiques de l'université libre de Bruxelles, collaboratrice scienti-
fique au centre de droit international et à l'institut d'études européennes
de l'universitélibre de Bruxelles,
M. Mohamed Awad,
comme conseillers,
les Etats-Unis d'Amérique, '
représentéspar
M. David R. Andrews, conseillerjuridique du départementd'Etat des Etats-
Unis,
comme agent;
M. Michael J. Matheson, conseillerjuridique adjoint principal du départe-
ment d'Etat des Etats-Unis,
comme coagent ;
M. John R. Crook, conseiller juridique adjoint du département d'Etat des
Etats-Unis,
M. Sean D. Murphy, conseiller chargé des affairesjuridiques à l'ambassade
des Etats-Unis aux Pays-Bas,
M. Oscar Schachter, professeur à la faculté dedroit de l'universitéColum-
bia,
MmeElisabeth Zoller, professeur à l'universitéde Paris II,
comme conseils et avocats;
M. John J. Kim, du bureau du conseillerjuridique du départementd'Etat des
Etats-Unis,
M. Brian Murtagh, du département de lajustice des Etats-Unis,
comme conseils.
ainsi composée,
après délibére én chambre du conseil,
rend l'arrêt suivant:
1. Le 3mars 1992,le Gouvernement de la Grande Jamahiriya arabe libyenne
populaire et socialiste(dénomméeci-après la «Libye») a déposéau Greffe de la
Cour une requête introductive d'instancecontre le Gouvernement des Etats-
Unis d'Amérique (dénommés ci-aprèle ss ((Etats-Unis))) au sujet d'un «diffé-
rend entre la Libye et les Etats-Unis concernant l'interprétation ou l'applica-
tion de la convention de Montréal))du 23 septembre 1971pour la répressiond'actes illicitesdirigéscontre la sécuride l'aviation civile(dénommée ci-après
la ((conventionde Montréal))). Dans la requête,il était faitréférence à la des-
truction le 21 décembre1988, au-dessus de Lockerbie (Ecosse), de l'appareil
qui assurait levol 103dela Pan Am, ainsiqu'aux accusationsprononcéesen no-
vembre 1991 par un Grand Jury des Etats-Unis contre deux ressortissants
libyens soupçonnésd'avoir fait placer à bord de l'appareil une bombe qui, en
explosant, l'aurait détruit. La requête invoquaitcomme base de compétence
le paragraphe 1de l'article 14de la convention de Montréal.
2. Conformémentau paragraphe 2 de l'article40 du Statut, la requêtea été
immédiatementcommuniquéeau Gouvernement des Etats-Unis par le greffier;
conformément au paragraphe 3 de cet article, tous les Etats admis à ester
devant la Cour ont été informéd se la requête.
3. Conformémentau paragraphe 3 de l'article 69 du Règlement,le greffiera
adresséau secrétairegénérad le l'organisation de l'aviationcivileinternationale
la notification prévueau paragraphe 3 de l'article 34 du Statut.
Conformémentà l'article 43 du Règlement,le greffier a en outre adresséla
notification prévue au paragraphe 1 de l'article 63du Statut a tous les Etats
qui, sur la base de renseignements obtenus des gouvernements dépositaires,
sont apparus comme étantparties à la convention de Montréal.
4. La Cour ne comptant pas sur le siègede juge de nationalitélibyenne, la
Libye s'estprévaluedu droit que lui confèrele paragraphe 2 de l'article 31 du
Statut de procéderàla désignationd'unjuge adhoc pour siégeren l'affaire :elle
a désigné à cet effet M. Ahmed Sadek El-Kosheri.
5. Le 3 mars 1992,dèsaprèsle dépôt desa requête,la Libye a présenté une
demande en indication de mesures conservatoires en vertu de l'article 41 du
Statut.
Par ordonnance en date du 14 avril 1992,la Cour, après avoir entendu les
Parties, a dit que les circonstancesde l'espècen'étaient pas de natureà exiger
l'exercicede son pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires.
6. Par ordonnance du 19juin 1992,la Cour, compte tenu des demandes des
Parties, a fixéau 20 décembre1993la date d'expiration du délaipour le dépôt
du mémoirede la Libye et au 20juin 1995la date d'expiration du délaipour le
dépôtdu contre-mémoiredes Etats-Unis.
La Libye a dûment déposé sonmémoiredans le délaiainsi prescrit.
7. Dans ledélaifixépour le dépôt deleur contre-mémoire,lesEtats-Unis ont
déposé desexceptions préliminairesà la compétencede la Cour et à la receva-
bilitéde la requête.
En conséquence,par ordonnance du 22 septembre 1995,la Cour, constatant
qu'en vertu des dispositions du paragraphe 3 de l'article 79 du Règlementla
procédure sur le fond était suspendue, a fixéau 22 décembre 1995 la date
d'expiration du délaidans lequel la Libye pourrait présenter un exposé écrit
contenant ses observations et conclusions sur les exceptions préliminaires.
La Libye a déposéun tel exposédans le délai ainsi prescrit,et l'affaire s'est
trouvéeen étatpour ce qui est des exceptions préliminaires.
8. Par lettre en date du 19 février1996,le greffier,conformémentau para-
graphe 3 de l'article 34 du Statut, a communiquéles pièces dela procédure
écriteau secrétairegénéralde l'organisation de l'aviation civileinternationale
et a précisée,n se référantau paragraphe 2 de l'article 69 du Règlement,que, si
l'organisation souhaitait présenterà la Cour des observations écrites,celles-ci
ne devraient porter, au stade considéréq, ue sur les questions de compétenceet
de recevabilité.
Par lettre du 26juin 1996,le secrétaire généra dle l'organisation de l'aviation 119 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
civile internationale a fait savoir à la Cour que l'organisation «n'a[vait] pas
d'observations à faire pour le moment» mais désirait être tenue informéd ee
l'évolution de l'affaire,afin d'êtreen mesure de déterminers'ilconviendrait de
présenterdes observations à un stade ultérieur.
9. Le président de laCour, étantressortissant de l'une des Parties à l'affaire,
ne pouvait pas, en vertu du paragraphe 1de l'article 32 du Règlement,exercer
la présidenceaux fins de la présenteespèce.Il a donc incombéau vice-prési-
dent, conformémentau paragraphe 1de l'article 13du Règlement,d'assurer la
présidence enl'affaire.
10. Conformémentau paragraphe 2 de l'article 53 du Règlement, la Cour a
décidé de rendreaccessiblesau public, à l'ouverture de la procédure orale,les
exceptionspréliminairesdes Etats-Unis et l'exposéécritcontenant les observa-
tions et conclusionsde la Libye sur ces exceptions,ainsi que les documents qui
étaient jointsà ces pièces.
11. Des audiencespubliques ont été tenuesentre le 13et le 22 octobre 1997,
au cours desquelles ont été entendusen leurs plaidoiries et réponses:
Pour les Etats-Unis: M. David Andrews,
M. Sean D. Murphy,
M. John R. Crook,
M. Oscar Schachter,
MmeElisabeth Zoller,
M. Michael J.Matheson.
Pour la Libye: S. Exc. M. Hamed Ahmed Elhouderi,
M. Abdelrazeg El-Murtadi Suleiman,
M. Jean Salmon,
M. Eric David,
M. Eric Suy,
M. Ian Brownlie.
A l'audience, des membres de la Cour ont poséaux Parties des questions,
auxquelles il a été répondupar écrit, après la clôture de la procédure orale.
12. Dans la requête,les demandes ci-après ont été formuléep sar la Libye:
«En conséquence,tout en se réservantle droit de compléter etmodifier
s'ily a lieu la présente conclusionen cours de procédure, laLibye prie la
Cour de dire et juger:
a) que la Libye a satisfait pleinement à toutes sesobligations au regard de
la convention de Montréal;
b) que les Etats-Unis ont violé,et continuent de violer, leurs obligations
juridiques envers la Libyestipuléesaux articles5,paragraphes 2 et3,7,
8, paragraphe 2, et 11de la convention de Montréal;
c) que les Etats-Unis sont juridiquement tenus de mettre fin et de renon-
cer immédiatementà ces violations et à toute forme de recours à la
force ou à la menace contre la Libye, y compris la menace de recourir
à la force contre la Libye, ainsi qu'à toute violation de la souveraineté,
de l'intégrité territoriale et de l'indépendance politique daibye.»
13. Dans la procédure écrite,les conclusions ci-aprèsont étéprésentéespar
les Parties:120 CONVENTIONDE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
Au nom du Gouvernement libyen,
dans le mémoire:
«Par cesmotifs, et tout en se réservantle droit de compléter etmodifier
s'ily a lieu lesprésentesconclusionsen cours de procédure, laLibye prie la
Cour de dire et juger:
a) que la convention de Montréals'applique au présent litige;
b) que la Libye a pleinement satisfait àtoutes sesobligations au regard de
la convention de Montréalet est fondéeàexercerla compétencepénale
prévuepar cette convention;
c) que les Etats-Unis ont violé,et continuent de violer, leurs obligations
juridiques envers la Libye stipuléesà l'article 5, paragraphes 2 et 3, à
l'article 7, à l'article 8, paragraphe 3,àel'article 11de la convention
de Montréal;
d) que les Etats-Unis sont juridiquement tenus de respecter le droit de la
Libye à ce que cette convention ne soit pas écartéepar des moyens qui
seraient au demeurant en contradiction avec les principes de la Charte
des Nations Unies et du droit international général de caractèreimpé-
ratif qui prohibent l'utilisation de la force et la violation de la souve-
raineté, de l'intégrité territoriale, dle'égasouveraine des Etats et de
leur indépendance politique. »
Au nom du Gouvernement desEtats-Unis,
dans les exceptionspréliminaires :
«Les Etats-Unis d'Amérique prient laCour d'accueillirles exceptions à
la compétence de laCour qu'ils ont présentées et dedéclinerde connaître
de l'affaire.»
Au nom du Gouvernement libyen,
dans l'exposéécrit contenantses observations et conclusions sur les exceptions
préliminaires :
«Par ces motifs, et tout en se réservantle droit de compléterou modi-
fier, s'ily a lieu, les présentes conclusionsen cours de procédure, laLibye
prie la Cour de dire etluger:
- que les exceptions préliminaires présentéep sar les Etats-Unis doivent
êtrerejetéeset qu'en conséquence :
a) la Cour est compétentepour statuer sur la requêtelibyenne,
b) cette requête est recevable;
- que la procéduredoit être poursuiviequant au fond du différend.»
14. Dans la procédure orale,les conclusions ci-après ont été présentée par
les Parties :
Au nom du Gouvernement desEtats-Unis,
à l'audience du 20 octobre 1997:
«Les Etats-Unis d'Amérique prient laCour d'accueillirles exceptions à
la compétencede laCour qu'ils ont présentées et dedéclinerde connaître
de l'affaire relative à des Questionsd'interprétationet d'application dela
convention deMontréalde 1971 résultant de l'incident aérie de Lockerbie
(Jamahiriya arabe libyennec. Etats-Unis d'Amérique).»Au nom du Gouvernementlibyen,
à l'audiencedu 22 octobre 1997:
«La Jamahiriya arabe libyenne prie laCour de bien vouloir direet
juger :
- que les exceptions préliminairepsrésentéep sar ..les Etats-Unis doi-
ventêtrerejetées eq tu'enconséquence :
a) la Cour est compétente pourstatuer sur la requête libyenne,
b) cette requêteest recevable;
- que la procéduredoit être poursuiviq euant au fond du différend» .
15. Dans le dernier étatde leur argumentation en l'espèce,les Etats-
Unis ont soulevétrois exceptions :la premièrevisant la compétence dela
Cour, la deuxièmeportant sur la recevabilitéde la requête etla troisième
alléguantqu'il n'y a plus lieu à statuer sur les demandes de la Libye car
elles auraient étéprivées detout objet. Selon les Etats-Unis, chacune de
ces exceptions revêt «un caractère authentiquement préliminaire)). En
outre, les Etats-Unis ont fait valoir à titre subsidiaire que, si la Cour se
déclarait néanmoins compétente et décidaid t'exercer sa compétence,elle
pourrait et devrait ((résoudrel'affaire au fond dèsmaintenant)) en déci-
dant, à titre préliminaire,qu'il ne peut être donné suite auxmesures sol-
licitéespar la Libye.
16. La Cour examinera en premier lieu l'exception soulevéepar les
Etats-Unis concernant sa compétence.
17. La Libye soutient que la Cour est compétentesur la base du para-
graphe 1 de l'article 14 de la convention de Montréal, quidispose que:
«Tout différendentre des Etats contractants concernant l'inter-
prétationou l'application de la présente convention qui ne peut pas
êtreréglépar voie de négociation est soumis à l'arbitrage,à la
demande de l'un d'entreeux. Si,dans les sixmois qui suivent la date
de la demande d'arbitrage, lesParties ne parviennent pas à semettre
d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre
ellespeut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice,
en déposant une requête conformémena tu Statut de la Cour. ))
18. Les Parties conviennent que la convention de Montréal est en
vigueur entre elles et qu'elle l'étaitdéjà, aussibien lors de la destruction
de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie,le 21 décembre1988,
qu'au moment du dépôt de la requêtel,e 3mars 1992.Toutefois, ledéfen-
deur conteste la compétencede la Cour au motif que, selon lui, il n'a pas
été satisfait,en l'espèce,à toutes les exigencesénoncées au paragraphe 1
de l'article 14de la convention de Montréal. 122 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
19. Les Etats-Unis contestent la compétencede la Cour en alléguant
principalement que la Libye n'a pas établi, premièrement, qu'ilexiste
un différendjuridique entre les Parties et, deuxièmement,qu'un tel diffé-
rend concernerait l'interprétation ou l'application de la convention de
Montréal et entrerait par suite dans les prévisionsdu paragraphe 1 de
l'article 14de cette convention.
Toutefois, à l'audience,les Etats-Unis se sont aussi référéà,.titreinci-
dent, aux arguments qu'ils avaient avancés, lors de la phase de la procé-
dure relative aux mesures conservatoires, sur le point de savoir si le dif-
férend qui, d'aprèsla Libye, existerait entre les Parties ne pouvait se
réglerpar voie de négociation, si la Libye avait présenté unedemande
d'arbitrage en bonne et due forme et si elle avait respectéle délai desix
mois prescrit par le paragraphe 1de l'article 14de la convention.
20. La Cour relèvequ'en l'espècele défendeur a toujours soutenu que
la destruction de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie n'avait
suscitéentre les Parties aucun différendconcernant l'interprétation ou
l'application de la convention de Montréal et que, de ce fait, il n'y avait,
de l'avisdu défendeur, aucune question à réglerpar voie de négociation
conformément à la convention; elle constate que la proposition d'arbi-
trage contenue dans la lettre que le secrétairelibyen du comitépopulaire
de liaison avec l'étranger etde coopération internationale a adresséele
18janvier 1992au secrétaire d'Etat desEtats-Unis est restéesansréponse;
et elle note en particulier que le défendeur a clairement expriméson
intention de ne pas accepter d'arbitrage- sousquelqueformeque ce soit
- lorsqu'il a présentéevt igoureusement soutenu la résolution731(1992)
que le Conseil de sécuritéa adoptée trois jours plus tard, le 21 janvier
1992.
En conséquence,de l'avis de la Cour, le différendqui existerait entre
les Parties ne pouvait ni êtreréglépar voie de négociationni être soumis
à l'arbitrage en application de la convention de Montréal, et le refus du
défendeur de prendre part à un arbitrage pour réglerce différend exo-
nérait laLibye de toute obligation, aux termes du paragraphe 1 de l'ar-
ticle 14de la convention, d'observer un délaide six mois àcompter de la
demande d'arbitrage avant de saisir la Cour.
21. Comme les Parties l'ont rappelé, la Cour permanente de Justice
internationale a affirmé dès1924 qu'«un différend estun désaccord sur
un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposition de thèses
juridiques ou d'intérêts entre deux personnes)) (Concessions Mavrom-
matis en Palestine, 1924, C.P.J.I. sérieA no2, p. 11).La Cour actuellea
pour sa part souligné,dans son arrêtdu 30juin 1995en l'affaire relative
au Timor oriental (Portugal c. Australie), ce qui suit:
«Pour établirl'existenced'un différend:«Il faut démontrer que la
réclamationde l'une desparties seheurte à l'opposition manifeste de
l'autre))(Sud-Ouest africain, exceptions préliminaires,arrêt,C.I.J. Recueil 1962,p. 328); par ailleurs, «l'existenced'un différendinter-
national demande à être établie objectivement)()Interprétationdes
traitésdepaix conclus avec la Bulgarie, laHongrie et la Roumanie,
premièrephase, avis consultat$ C.I.J. Recueil 1950,p. 74).» (C.I.J.
Recueil 1995,p. 100.)
22. Dans sa requêteet son mémoire,la Libye a soutenu que la conven-
tion de Montréal est le seul instrument applicable à la destruction de
l'appareil de la Pan Am au-dessusde Lockerbiepour lesmotifs suivants:
a) le défendeur et laLibye sont liéspar la convention de Montréal, qui
est en vigueur entre les Parties;
b) cetteconvention est spécifiquementdestinée à prévenirce type d'actes
(troisièmeparagraphe du préambule);
c) lesactesimputés aux ressortissantslibyens sont viséspar l'article pre-
mier de la convention de Montréal;
d) «le systèmedela convention de Montréal est,par rapport au système
de la Charte des Nations Unies, à la fois une lex posterior et une lex
specialis; il en résulteque, pour les questions qui relèventde cette
convention, celle-ci doita priori l'emporter sur les systèmesprévus
par la Charte));
e) il n'existe aucune autre convention relative au droit pénal internatio-
nal en vigueur qui soit applicable à ces questions dans les rapports
entre la Libye et les Etats-Unis.
23. Les Etats-Unis ne nient pas que, comme tels, les faits de la cause
puissent entrer dans les prévisionsde la convention de Montréal. Toute-
fois, ils soulignentqu'en l'espèce,dèsque la Libye a invoqué la conven-
tion de Montréal, ils ont fait valoir que celle-cin'était pasen jeu car la
question à réglern'avait pas trait à des ((divergencesbilatérales))mais
«étaitcelle d'une menace à la paix età la sécuritéinternationales résul-
tant d'un terrorisme parrainépar un Etab.
24. Ainsi, les Parties s'opposent sur la question de savoir si la destruc-
tion de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie est régiepar la
convention de Montréal. Il existe donc un différendentre les Parties sur
le régimejuridique applicable àcet événementU . n tel différendconcerne,
de l'avisde la Cour, l'interprétation et l'application de la convention de
Montréal,et, conformémentau paragraphe 1de l'article 14de la conven-
tion, il appartient la Cour de le trancher.
25. En outre, dans sa requête et sonmémoire,la Libye, a l'appui des
conclusions reproduites, respectivement, aux paragraphes 12 (alinéas a)
et b)) et 13 (alinéasb) et c)) ci-dessus, a en particulier soulignéles six
points suivants:a) les actes qui ont entraîné la destruction de l'appareil de la Pan Am
au-dessus de Lockerbie constituent l'une des infractions viséespar
l'article premier de la convention de Montréal et celle-ci doit partant
s'appliquer àces faits;
b) la Libye s'estacquittéede l'obligation que lui impose le paragraphe 2
de l'article 5 de la convention de Montréal d'établirsa compétenceà
l'égard des auteursprésumés de la destruction de l'aéronefet ellea le
droit d'exercerla compétenceainsi établie;
c) elle a exercésa compétence à l'égarddes deux auteurs présumés de
l'infraction en vertu de son code pénal et le défendeurne devrait pas
entraver l'exercicede cette compétence;
d) elle a exercéles droits qu'elle tient de l'article 6 de la convention de
Montréal en prenant toutes les mesures nécessairespour assurer la
présencedes deux auteurs présumésde l'infraction, en procédant à
des enquêtespréliminaires, enavisant les Etats intéresséset en leur
indiquant qu'elleentendait exercer sa compétence,mais le défendeur
tente, selon elle,par ses actions et sesmenaces, d'empêcherl'applica-
tion de la convention;
e) la Libye ayant décidé de ne pas extrader lesdeux auteurs présumés de
l'infraction, l'article 7 de la convention de Montréal lui confère le
droit de les déférer ses autorités compétentesauxfins d'engagerdes
poursuites pénalesconformémentau droit libyen;
f) econventionde Montréal, de ne pas extrader lesdeuxauteurs présumésa
de l'infraction car il s'agit de ressortissants libyens et la Constitution
libyenne n'autorise pas leur extradition.
26. Le défendeur conteste que la convention de Montréal confère à la
Libye les droits qu'elle entend ainsi faire valoir. Il prétend en outre
qu'aucune des dispositions auxquelles la Libye se réfère n'imposed'obli-
gation aux Etats-Unis. Enfin, il rappelle qu'il n'ajamais invoqué lui-
mêmela convention de Montréal et observe que rien, dans cette conven-
tion, ne l'empêchaitde demander la livraison des auteurs présumésde
l'infraction en dehors du cadre de ladite convention.
27. L'articlepremier de la conventionde Montréal disposece qui suit:
«1. Commet une infraction pénaletoute personne qui illicitement
et intentionnellement:
a) accomplit un acte de violence à l'encontre d'une personne se
trouvant à bord d'un aéronefen vol, si cet acte est de natureà
compromettre la sécurité de cet aéronef;
b) détruit un aéronefen serviceou cause à un tel aéronefdes dom-
mages qui le rendent inapte au vol ou qui sont de naturà com-
promettre sa sécuritéen vol;
c) place ou fait placer sur un aéronefen service,par quelque moyen
que ce soit, un dispositif ou des substances propres à détruire
ledit aéronef ouà lui causer des dommagesqui le rendent inapte au vol ou qui sont de nature à compromettre sa sécuritéen
vol ;
d) détruitou endommage des installationsou services de navigation
aérienneouen perturbe le fonctionnement, sil'un decesactes est
de nature à compromettre la sécurité d'aéronefe sn vol;
e) communique une information qu'elle sait êtrefausse et, de ce
fait, compromet la sécuritéd'un aéronefen vol.
2. Commet également uneinfraction pénaletoute personne qui:
a) tente de commettre l'une des infractions énumérées au para-
graphe 1 du présentarticle;
b) est le complice dela personne qui commet ou tente de commettre
l'une de ces infractions.
L'article 5 est ainsi conçu:
«1. Tout Etat contractant prend lesmesures nécessairespour éta-
blir sa compétenceaux fins de connaître des infractionsdans les cas
suivants :
a) si l'infraction est commise sur le territoire de cet Etat;
b) si l'infraction est commise à l'encontre ou à bord d'un aéronef
immatriculédans cet Etat;
c) si l'aéronef à bord duquel l'infraction est commise atterrit sur
son territoire avec l'auteur présuméde l'infraction se trouvant
encore à bord;
d) si l'infraction est commise à l'encontre ou a bord d'un aéronef
donnéen location sans équipage à une personne qui a le siège
principal de son exploitation ou, à défaut,sa résidenceperma-
nente dans ledit Etat.
2. Tout Etat contractant prend égalementles mesures nécessaires
pour établirsa compétence auxfins de connaître des infractions pré-
vues aux alinéas a), b) et c) du paragraphe 1 de l'article premier,
ainsi qu'au paragraphe 2 du mêmearticle, pour autant que ce der-
nier paragraphe concerne lesdites infractions,dans le cas où l'auteur
présuméde l'une d'ellesse trouve sur son territoire et où ledit Etat
ne l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des Etats visés
au paragraphe 1du présent article.
3. La présente convention n'écarte aucune compétence pénale
exercéeconformémentaux lois nationales. »
Pour sa part, l'article 6 porte:
(1. S'il estimeque lescirconstances lejustifient, tout Etat contrac-
tant sur le territoire duquel setrouvel'auteur ou l'auteur présumde
l'infraction assure la détention de cette personne ou prend toutes
mesures nécessairespour assurer sa présence.Cette détention et ces
mesures doivent êtreconformes à la législationdudit Etat; elles ne
peuvent être maintenues que pendant le délainécessaireà l'engage-
ment de poursuites pénalesou d'une procédure d'extradition. 2. Ledit Etat procède immédiatement à une enquêtepréliminaire
en vue d'établirles faits.
3. Toute personne détenueen application du paragraphe 1du pré-
sent article peut communiquer immédiatementavec le plus proche
représentantqualifiéde 1'Etatdont ellea la nationalité;toutes facilités
lui sont accordéesà cette fin.
4. Lorsqu'un Etat a mis une personne en détention conformé-
ment aux dispositions du présentarticle, il avise immédiatementde
cette détention,ainsi que des circonstances qui la justifient, les Etats
mentionnésau paragraphe 1 de l'article 5, 1'Etat dont la personne
détenue a la nationalité et, s'il le juge opportun, tous autres Etats
intéressés.L'Etat qui procède à l'enquête préliminairveiséeau pa-
ragraphe 2 du présent article en communique rapidement les
conclusions auxdits Etats et leur indique s'ilentend exercer sa com-
pétence.»
L'article 7 est libellédans les termes suivants:
«L7Etat contractant sur le territoire duquel l'auteur présuméde
l'une desinfractions est découvert,s'iln'extrade pas ce dernier, sou-
met l'affaire, sansaucune exception et que l'infraction ait ou non été
commise sur son territoire, a ses autoritéscompétentespour l'exer-
cice de l'action pénale.Ces autorités prennent leur décisiondans les
mêmesconditions que pour toute infraction de droit commun de
caractère grave conformémentaux lois de cet Etat. »
Enfin, aux termes de l'article 8:
((1. Les infractions sont de plein droit comprises comme cas
d'extradition dans tout traité d'extradition conclu entre Etats
contractants. Les Etats contractants s'engagent à comprendre les
infractions comme cas d'extradition dans tout traité d'extraditionà
conclure entre eux.
2. Si un Etat contractant qui subordonne l'extradition à l'exis-
tence d'un traitéest saisi d'une demande d'extradition par un autre
Etat contractant avec lequel il n'est pas liépar un traité d'extradi-
tion, il a la latitude de considérer la présente conventioncomme
constituant la base juridique de l'extradition en ce qui concerne les
infractions.L'extradition est subordonnéeaux autres conditions pré-
vues par le droit de1'Etatrequis.
3. Les Etats contractants qui ne subordonnent pas l'extraditionà
l'existence d'un traité reconnaissent les infractions comme cas
d'extradition entre eux dans les conditions prévuespar le droit de
1'Etatrequis.»
4. Entre Etats contractants, les infractions sont considérées aux
fins d'extradition comme ayant été commisetsant au lieu de leur per-
pétration que sur le territoire des Etats tenus d'établir leurcompé-
tence en vertu des alinéas), c) et d) du paragraphe 1 de l'article5.» 28. Au vu des positions expriméespar les Parties, la Cour constate
qu'il existe entre elles non seulement un différend denature généraletel
que définiau paragraphe 24 ci-dessus,mais aussi un différendspécifique
qui concerne l'interprétationet l'application de l'article7 - lu conjoin-
tement avec l'article 1,l'article, l'article 6 et l'artic-e 8de la conven-
tion de Montréal; conformémentau paragraphe 1 de l'article 14 de la
convention, il appartient à la Cour de trancher ce différend.
29. Par ailleurs, la Libye a soutenu, dans sa requête et son mémoire,
que, dès lors qu'elleavait entamé son enquêtejudiciaire à l'égarddes
deux auteurs présumés de l'infraction, le défendeurétaittenu, aux termes
du paragraphe 1de l'article 11de la convention de Montréal,de remettre
aux autorités libyennes tous les éléments de preuveen sa possession
concernant l'infraction en cause.Or, de l'avisde la Libye, les Etats-Unis
ne se sont pas dûment acquittés de cette obligation puisqu'ils«n'ont
fourni aucune information)).
30. A ce propos, les Etats-Unis reconnaissent que «[l']articleII consti-
tue la seuledisposition,parmi cellesénumérée dsans les griefs dela Libye,
qui pourrait mettre une obligation quelconque à la charge d'un Etat
autre que la Libye)). Toutefois, ils prétendent que ((l'obligationexpri-
mée àl'article11a un caractèretrèsgénéral)) e,t qu'ilsont ((satisfà[cette]
obligation générale)) I.ls exposent cet égardque, «[l]e21 novembre 1991,
les Etats-Unis ont transmis à la Libye, par l'entremisedu Gouvernement
belge, des copies de l'acte d'accusationdes deux Libyens par le Grand
Jury)). Ils soutiennent également que ((l'article11 préservele droit des
Etats-Unis, en vertu de leur législation,de refuser de divulguerdes détails
supplémentairesde l'enquête,notamment des éléments de preuve éma-
nant de sources confidentielles».Les Etats-Unis observent au demeurant
ce qui suit:
«D'un point de vue pratique, il est difficilede comprendre com-
ment la Cour peut définird'autres formes spécifiquesd'entraide
devant êtreaccordées en vertude l'article 11.La solution consistant
pour la Cour à essayer d'introduire dans l'article 11des éléments de
détailconcernant le niveau d'assistance requis - par exemple la
communication des dépositions des témoinsou d'autres informa-
tions- serait tout simplement inapplicable et risquerait d'empêcher
toute coopérationdans un domaine que les rédacteursde la conven-
tion de Montréalse sont délibérémenatbstenus de réglementer. ))
31. L'article 11de la convention de Montréalest ainsi libellé:
«1. Les Etats contractants s'accordent l'entraide judiciaire la plus
large possible dans toute procédure pénale relativeaux infractions.
Dans tous les cas, la loi applicable pour l'exécutiond'une demande
d'entraide est celle de'Etatrequis.
2. Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 du présent ar- ticlen'affectent pas lesobligationsdécoulant desdispositionsde tout
autre traité de caractère bilatéral ou multilatéral quirégitou régira,
en tout ou en partie, le domaine de l'entraide judiciaire en matière
pénale.»
32. Considérant les positions des Parties quant aux obligations
imposéespar l'article 11de la convention de Montréal, la Cour conclut
qu'il existe égalemententre elles un différendqui concerne l'interpréta-
tion et l'application de cette disposition; conformément au paragraphe 1
de l'article 14 de la convention, il appartientà la Cour de trancher ce
différend.
33. La Libye, dans le dernier étatde ses conclusions,demande enfin à
la Cour de juger que
«les Etats-Unis sont juridiquement tenus de respecter le droit de la
Libye à ce que [la convention de Montréal] ne soit pas écartéepar
des moyens qui seraient au demeurant en contradiction aveclesprin-
cipes de la Charte des Nations Unies et du droit international géné-
ral de caractère impératifui prohibent l'utilisation de la force et la
violation de la souveraineté, de l'intégritéterritoriale, de l'égalité
souverainedes Etats et de leur indépendance politique)).
34. Les Etats-Unis soutiennent qu'il n'appartient pas à la Cour, sur la
base du paragraphe 1de l'article 14de la convention de Montréal, dese
prononcer sur la licéitédes actions, au demeurant conformes au droit
international, engagéespar le défendeuren vue d'obtenir la livraison des
deux auteurs présumésde l'infraction. Ils en déduisent que la Cour n'a
pas compétencepour connaître des conclusions présentéessur ce point
par la Libye.
35. La Cour ne saurait accueillir l'argumentation ainsi formulée.Illui
appartient en effet dejuger, sur la base du paragraphe 1 de l'article 14de
la convention de Montréal, de la licéité desactions critiquées par la
Libye, dans la mesure où ces actions seraient contraires aux dispositions
de la convention de Montréal.
36. Dans l'instance, les Etats-Unis ont cependant affirméque, quand
bien mêmela convention de Montréal conférerait à la Libye les droits
qu'ellerevendique, ceux-ci nepourraient êtreexercésen l'espèce,au motif
qu'ils auraient étésupplantéspar les résolutions748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécuritéqui,en vertu des articles 25 et 103de la Charte des
Nations Unies, prévalent sur tous droits et obligations crééspar la
convention de Montréal. Le défendeur a aussi avancé que,du fait de
l'adoption de ces résolutions, le seul différendqui existerait désormais
opposerait la Libye au Conseil de sécurité;or il s'agirait là,l'évidence,d'un différendqui n'entrerait pas dans les prévisionsdu paragraphe 1 de
l'article 14de la convention de Montréal etdont la Cour ne pourrait dès
lors connaître.
37. La Cour ne saurait accueillir cette argumentation. Les résolu-
tions 748(1992)et 883(1993)du Conseil de sécurité ont en effetété adop-
téesaprèsle dépôt de la requêtel,e 3mars 1992.Or, conformément à une
jurisprudence constante, si la Cour était compétente à cettedate, ellel'est
demeurée; l'intervention ultérieure des résolutionssusvisées nesaurait
affecter une compétencedéjà établie(voir Nottebohm, exceptionprélimi-
naire, arrêt, C.I.J. Recueil 1953, p. 122; Droit de passage enterritoire
indien, exceptions préliminaires,arrêt, C.1.J. Recueil 1957, p. 142).
38. Au vu de ce qui précède,la Cour conclut que l'exception d'incom-
pétence tiréepar les Etats-Unis de l'absence alléguéede différendentre
les Parties concernant l'interprétation ou l'application de la convention
de Montréal doit êtrerejetée,et qu'ellea compétencepour connaître des
différends qui opposent la Libye aux Etats-Unis en ce qui concerne
l'interprétation ou l'applicationdes dispositions de cette convention.
39. La Cour passera maintenant à l'examen de l'exception desEtats-
Unis selon laquelle la requêtelibyenne n'est pas recevable.
40. Les Etats-Unis soulignent que les mesures auxquelles s'oppose la
Libye sont cellesprises par le Conseil de sécuritéaux termes des résolu-
tions 731 (1992), 748 (1992)et 883 (1993):
a) déterminant que le défaut, de lapart de la Libye, de répondreplei-
nement et efficacementaux requêteslui demandant de livrer les deux
accusés,en vue de leurjugement aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni,
constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales;
b) décidant que le Gouvernement libyen doit se conformer à ces re-
quêtes ;
c) imposant des sanctionséconomiqueset d'autres mesures pour obliger
la Libye à se conformer auxdites requêtes.
Selon les Etats-Unis, la Libye se serait efforcée, en saisissantla Cour,
de ((défairelesdécisionsdu Conseil)).Ils observentque, mêmesi la Libye
pouvait présenter des demandes valables en vertu de la convention de
Montréal, celles-ci seraient «supplantées» par les décisionsapplicables
prises par le Conseilde sécurité envertu du chapitre VI1de la Charte, qui
imposent des obligations différentes. Lesdites décisionasuraient ainsiéta-
bli les règlesrégissantle différendentre la Libye et les Etats-Unis; ces
règles- et non pas la convention de Montréal - définiraientles obli-130 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
gations des Parties; et lesprétentionslibyennesfondéessur la convention
seraient donc irrecevables. Les Etats-Unis font en outre valoir que, si la
Cour devait
((affirmer[sa] compétencepour examiner au fond, par voie d'excep-
tion, la validitédesésoIutions731 (1992),748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécurité, larequêtede la Libye devraitnéanmoinsêtre
rejetéeau stade des exceptions préliminaires,parce que cetterequête
n'est pas recevable)).
41. La Libye soutient pour sa part qu'il ressort des termes mêmes
des résolutions 731 (1992), 748 (1992)et 883 (1993) que le Conseil de
sécuritén'ajamais exigéqu'elle livreses nationaux aux Etats-Unis ou au
Royaume-Uni; à l'audience, elle a indiqué que telle étaitbien toujours
«la thèse principalede la Libye)).Elle ajoute qu'il convient pour la Cour
d'interpréter lesdites résolutions«en conformité avec la Charte, qui
détermineleur validité))et que la Charte interdit au Conseil d'obliger
la Libye à livrer ses nationaux aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni. Et
la Libye de conclure que sa requêteest recevable «en ce que la Cour
peut utilement se prononcer sur l'interprétation et l'application de la
convention de Montréal ..indépendammentdes effetsjuridiques desréso-
lutions 748 (1992)et 883 (1993))).
La Libye observe au demeurant que les arguments des Etats-Unis
fondéssur les dispositionsde la Charte soulèventdes problèmes qui ne
présententpas un caractère exclusivementpréliminaire, maisrelèventdu
fond du différend.Elle fait valoir, en particulier,quela questionde l'effet
des résolutionsdu Conseil de sécuritén'a pas un caractèreexclusivement
préliminaire,dans la mesure où lesrésolutionsconsidérées sont invoquées
par les Etats-Unis pour écarter l'application de la convention de Mon-
tréal,et alors mêmeque la Libye est fondée à contester que ces résolu-
tions lui soient opposables.
42. La Libye appelle en outre l'attention de la Cour sur le principe
selon lequel «[l]a date critiquà retenir pour déterminer la recevabilité
d'une requêteest celle de son dépôt)) (Actions armées frontalièreset
transfrontalières (Nicaragua c. Honduras), compétenceet recevabilité,
arrêt,C.I.J. Recueil 1988,p. 95, par. 66).Elle observeà cet égard quesa
requête aétéintroduite le 3 mars 1992;que les résolutions748 (1992)et
883 (1993) du Conseil de sécuritéont étéadoptéesles 31 mars 1992et
11 novembre 1993 respectivement; et que la résolution 731 (1992) du
21janvier 1992n'a pas étéadoptéeen vertu du chapitre VI1de la Charte
des Nations Unies et ne constituait qu'une simple recommandation. En
conséquence,la Libye soutient que sa requêteest en tout étatde cause
recevable.
43. De l'avisde la Cour, il y a lieu de retenir cette dernière conclusion
de la Libye. La date du 3 mars 1992 à laquelle la Libye a déposésa
requêteest en effet la seule date pertinente aux fins d'apprécier larece-
vabilitéde celle-ci.Les résolutions48 (1992)et 883(1993)du Conseil de
sécuriténe sauraient êtreprises en considération à cet égard dès lors131 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
qu'ellesont été adoptéeà s une date ultérieure.Quantà la résolution731
(1992)du Conseilde sécuritéa ,doptée avantle dépôtde la requête,ellene
saurait constituer un obstaclejuridiqueà la recevabilitéde celle-cicar il
s'agissait d'unesimple recommandation sans effet contraignant, comme
le reconnaissent d'ailleursles Etats-Unis eux-mêmes. a requêtelibyenne
ne saurait par suite êtredéclarée irrecevabpour ces motifs.
44. Au vu de ce qui précède,la Cour conclut qu'il y a lieu de rejeter
l'exception d'irrecevabilité tirpar les Etats-Unis des résolutions748
(1992)et 883 (1993)du Conseil de sécurité, etque la requêtede la Libye
est recevable.
45. La Cour se penchera à présentsur la troisième exceptionsoulevée
par les Etats-Unis. Selon cette exception, il n'yaurait plus lieuatuer
sur les demandes de la Libye car les résolutions748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécuritéles auraient privéesde tout objet; tout arrêtque la
Cour pourrait rendre sur lesdites demandes serait désormaiscondamné à
être dépourvu d'effetpratique.
La Cour a déjàreconnu àplusieurs reprises par le passéque des évé-
nements postérieurs à l'introduction d'une requêtepeuvent «prive[r]
ensuitela requêtede son objet))(Actions arméesfrontalièreset transfron-
talières(Nicaragua c. Honduras), compétenceet recevabilité,arrêt,C.I.J.
Recueil 1988, p. 95, par. 66) et «qu'il n'y a dèslors pas liàustatuer))
(Essais nucléaires (Australie c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974,
p. 272, par. 62) (cf.amerounseptentrional, arrêt,C.I.J. Recueil 1963,
p. 38).
Ainsi formulée, l'exceptiondu défendeurseprésentecommeune excep-
tion de non-lieu et doit êtreexaminéedans le cadre de cette jurispru-
dence.
46. La Cour doit s'assurer qu'une telle exception entre bien dans les
prévisionsde l'article79du Règlement,invoquépar le défendeur. Cetar-
ticle vise, en son paragraphe 1,[t]oute exception à la compétencede la
Cour ou à la recevabilitéde la requêteou toute autre exception))(lesita-
liques sont de la Cour); son champ d'application ratione materiae n'est
donc pas limité auxseulesexceptions d'incompétenceou d'irrecevabilité.
Mais, pour être couvertepar l'article 79, une exception doit en outre
revêtirun caractère ((préliminaire)).Le paragraphe 1 de l'article 79 du
Règlement qualifie de «préliminaire» une exception «sur laquelle le
défendeurdemande une décisionavant que la procédure surle fond se
poursuive ».Il ne fait pas de doute que, d'un point de vue formel, l'excep-
tion icienvisagéesatisfasse cettecondition. La Cour relèveraau demeu-
rant que le défendeur cherche,en l'occurrence, faire prévaloirla préten-
tion selon laquelle les décisionsdu Conseil de sécuriténe pourraient
donner lieu à aucun recours contentieux devant la Cour, alors même
qu'ellesstatueraient sur des droits que le demandeur prétend tirer d'un
texte conventionnel,ou pour le moins qu'ellesaffecteraient directementceux-ci; et que le défendeurentend ainsi écarterd'embléetout examen
par la Cour des demandes introduites par le demandeur et mettre immé-
diatement fin à la procédure engagéepar celui-ci. Dans la mesure où
I'exceptionde non-lieu soulevéepar les Etats-Unis a effectivement pour
objet d'empêcherin limine tout examen de l'affaire au fond, où son
«effet, si elle étaitretenue par la Cour, serait de mettre finà la procé-
dure)) et où«il conviendrait,par conséquent,pour la Cour de s'[en]occu-
per avant d'aborder le fond» (Chemin de fer Panevezys-Saldutiskis,
arrêt,1939, C.P.J.Z. sérieAIB no 76, p. 16)'cette exception possèdeun
caractère préliminaire etentre bien dans les prévisionsde l'article 79 du
Règlement.
Il est par ailleurs constant que ladite exception a été formulear écrit
dans le délaifixépour le dépôtdu contre-mémoire eta de ce fait été pré-
sentéeselon les modalitésprescrites à l'article 79.
47. La Libye ne conteste aucun de ces points. Elle ne soutient nulle-
ment que l'exception ainsi tiréepar les Etats-Unis des résolutions 748
(1992) et 883 (1993)du Conseil de sécurité serait une exceptionde fond
qui n'entrerait pas dans lesprévisionsde l'article79du Règlement;et elle
ne prétendpas davantage que cette exception n'aurait pas étéintroduite
de manièreappropriée.Ce que la Libye soutient, c'est que ladite excep-
tion - comme l'exception d'irrecevabilitésoulevéepar les Etats-Unis, et
pour les mêmes motifs (voir paragraphe 41 ci-dessus)- relève dela caté-
gorie de celles que le paragraphe 7 de l'article 79 du Règlementqualifie
d'exceptions «nYa[yant]pas dans les circonstances de l'espèceun carac-
tèreexclusivement préliminaire ».
Les Etats-Unis considèrent au contraire que l'exception en cause
possèdeun ((caractèreexclusivementpréliminaire»au sensde cette même
disposition; ils font notamment valoir, à l'appui de leur thèse,que cette
exception n'exigepas «de se prononcer sur les faits contestésou d'exa-
miner des éléments de preuve».
C'est donc sur la question du caractère «exclusivement» ou «non
exclusivement» préliminaire de l'exception ici envisagéeque les Parties
s'opposent et que la Cour doit à présentse prononcer.
48. La formulation qui apparaît aujourd'hui au paragraphe 7 de l'ar-
ticle 79 du Règlementa étéadoptée par la Cour en 1972.La Cour a eu
l'occasion d'en examinerla portée dans les arrêtsqu'elle a rendus, en
l'affaire des Activitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci, le 26 novembre 1984 (compétenceet recevabilité,arrêt, C.I. J.
Recueil 1984, p. 425-426) et le 26 juin 1986Vond, arrêt,C.I.J. Recueil
1986, p. 29-31), respectivement. Comme la Cour l'a rappelé dans le
second de ces arrêts,
«[d]ans le Règlement remontant a 1936 (qui sur ce point repre-
nait une pratique elle-mêmeantérieure),la Cour avait la facultéde 133 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
joindre une exception au fond ((lorsque les intérêts de la bonne
administration de la justice lui en [faisait] un devoir))Chemin de
fer Panevezys-Saldutiskis, C.P.J.I. série AIB no 75, p. 56) et en
particulier lorsque en statuant sur les exceptions elle risquaitoit
de trancher des questionsqui appartiennent au fond de l'affaire, soit
d'en préjuger lasolution» (ibid.) (C.I.J. Recueil 1986, p. 29-30,
par. 39).
Toutefois, l'exercicede cette faculté présentait un danger,
«à savoirque la Cour ne seprononce en définitiveque sur la base de
l'exception préliminaire, etcela après avoir imposé auxparties un
débatexhaustif sur le fond ...ce qui [étaitbien] arrivé dansles faits
(Barcelona Traction,Light and Power Company,Limited, deuxième
phase, C.I.J. Recueil 1970, p. 3). Pour certains, on ne faisait ainsi
queprolonger inutilement une procédurelongue et coûteuse. »(Ibid.,
p. 30, par. 39.)
La Cour s'était alorstrouvéedevant le choix suivant:
«reviserle Règlementde manière à exclure...toute jonction au fond,
ce qui aurait obligé se prononcer sur toutes les exceptions au stade
préliminaire,ou rechercher une solution plus souple)) (ibid., p. 30,
par. 40).
La solution retenue en 1972avait finalement consisténon pas à exclure
toute facultéd'examend'une exceptionpréliminaireau fond, mais àlimi-
ter l'exercicede cette faculté,en en précisant plusstrictement les condi-
tions. Et la Cour de conclure, à propos de la nouvelle disposition alors
adoptée :
«Elle présentedonc un avantage certain: en qualifiant certaines
exceptions de préliminaires,elle montre bien que, lorsqu'elles pré-
sentent exclusivement ce caractère, les exceptions doivent êtretran-
chéessans délai, maisque, dans le cas contraire, et notamment lors-
que ce caractère n'est pas exclusif puisqu'elles comportentà la fois
des aspects préliminaireset des aspects de fond, elles devront être
régléesau stade du fond. Ce procédé tendd'autre part à décourager
toute prolongation inutile de la procédure au stade de la compé-
tence.))(Ibid., p. 31, par. 41.)
49. La Cour doit donc rechercher en l'espècesi l'exception des Etats-
Unis ici considéréecomporte ou non «à la fois des aspects préliminaires
et des aspects de fond».
Cette exception s'attache àde multiples aspects du litige. En soutenant
que les résolutions 748 (1992)et 883 (1993)du Conseil de sécuritéont
privé les demandes de la Libye de tout objet, les Etats-Unis tentent
d'obtenir de la Cour une décisionde non-lieu qui mettrait immédiate-
ment fin à l'instance. Or, en sollicitant une telle décision,les Etats-Unis
en sollicitent, en réali,u moins deux autres, que le prononcé d'un non-
lieu postulerait nécessairement:d'une part une décisionétablissant queles droits revendiquéspar la Libye aux termes de la convention de
Montréal sontincompatibles avec les obligationsdécoulant pour elledes
résolutionsdu Conseil de sécurité;et d'autre part une décisionfaisant
prévaloirces obligations sur ces droits par le jeu des articles 25 et 103
de la Charte.
Il ne fait dèslors pas de doute pour la Cour que les droits de la Libye
au fond seraient non seulementtouchéspar une décisionde non-lieu ren-
due à ce stade de la procédure,mais constitueraient, à maints égards,
l'objet mêmede cette décision. L'exceptionsoulevéepar les Etats-Unis
sur ce point a le caractère d'une défenseau fond. De l'avisde la Cour,
cette exceptionfait bien plusqu'«eMleurerdes sujetsappartenant au fond
de l'affaire))(Certains intérêts allemands en Haute-Silésie polonaise,
compétence, arrêt no6, 1925, C.P.J.I. sérieA no6, p. 15) ;elleest «inex-
tricablement liée» àcelui-ci(Barcelona Traction, Light and Power Com-
pany, Limited, exceptionspréliminaires, arrêt, CJ.I..Recueil1964,p. 46).
La Cour relèvera d'ailleursque les Etats-Unis ont eux-mêmesabordé
de nombreux problèmesde fond dans leurs écritures et leurs plaidoiriesà
ce stade et qu'ils ont soulignéque ces problèmesavaient fait l'objet de
débatsexhaustifs devant la Cour; ce gouvernement a ainsi implicitement
reconnu l'existenceentre l'exception soulevée et le fond du litige d'une
((connexité ..intime)) (Barcelona Traction, Light and Power Company,
Limited, exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1964, p. 46, et
référence àPajzs, Csaky, Esterhazy, ordonnancedu23 mai 1936, C.P.J.I.
série AIE no66, p. 9).
Si la Cour devait statuer sur cette exception, elle statuerait donc
immanquablementsur le fond; or, en invoquant le bénéfice des disposi-
tions de l'article79 du Règlement,le défendeur amis en Œuvre unepro-
cédurequi vise précisément à empêcherla Cour de ce faire.
La Cour conclutde cequi précèdeque l'exceptiondes Etats-Unis selon
laquelle il n'y aurait plus lieu statuer sur les demandes libyennes car
elles auraient étéprivéesde tout objet n'a pas un ((caractèreexclusive-
ment préliminaire))au sens de cet article.
50. Ayant établisacompétenceet conclu à la recevabilitéde la requête,
la Cour pourra connaître de cette exceptiondans le cadre de son examen
de l'affaire au fond.
51. Enfin. lesEtats-Unis ont sollicitéde la Courà titre subsidiaire. au
cas où, en dépit deleurs exceptions, celle-cise déclarerait compétenteet
jugerait la requêterecevable,qu'elle«rés[olve]l'affaireau fond dès main-
tenant)) en décidant, à titre préliminaire, qu'ilne peut être donné suite
aux mesures demandéespar la Libye.
Comme la Cour l'a déjàrappelé,c'est ledéfendeurqui a entendu invo-
quer en l'espècele bénéficedes dispositionsde l'article79 du Règlement.
En soulevant des exceptions préliminaires,il a fait un choix procéduraldont l'effetest, selon les termes exprèsdu paragraphe 3 de l'article 79, de
suspendre la procéduresur le fond. La Cour ne saurait par suite faire
droit àla demande des Etats-Unis.
52. Conformémentau paragraphe 7 de l'article 79 du Règlement, les
délaispour la suite de la procédure seront fixésultérieurement par la
Cour.
53. Par ces motifs,
1)a) Par treize voix contre deux,
Rejette l'exception d'incompétence tirpear lesEtats-Unis de l'absence
alléguéede différend entre les Parties concernant l'interprétation ou
l'application de la convention de Montréaldu 23 septembre 1971 ;
POUR : . Weeramantry, vice-président,faisant fonction de présidenetn
l'affaire;MM.Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva,Herczegh,Shi,Fleischhauer,
Koroma, Vereshchetin, Parra-Aranguren, Kooijmans,Rezek, juges;
M. El-Kosheri,jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;M. Oda, juge;
b) Par treize voix contre deux,
Dit qu'elle a compétence,sur la base du paragraphe 1de l'article 14de
la convention de Montréaldu 23 septembre 1971,pour connaître des dif-
férendsqui opposent la Libye aux Etats-Unis en ce qui concerne l'inter-
prétation ou l'application des dispositions de cette convention;
POUR: M. Weeramantry, vice-président,faisant fonction de présidenetn
l'affaireM. Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva,Herczegh,Shi,Fleischhauer,
Koroma, Vereshchetin, Parra-Aranguren, Kooijmans,Re~k, juges;
M. El-Kosheri,jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;M. Oda, juge;
2) a) Par douze voix contre trois,
Rejette l'exception d'irrecevabilité tirépear les Etats-Unis des résolu-
tions748 (1992)et 883 (1993)du Conseil de sécurité;
POUR: M. Weeramantry, vice-président,faisant fonction de président en
l'affaire;MM.Bedjaoui, GuillaumeR, anjeva,Shi,Fleischhauer,Koroma,
Vereshchetin,Parra-Aranguren, Kooijmans, ezek,juges; M.El-Kosheri,
jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;MM. Oda, Herczegh,juges; b) Par douze voix contre trois,
Dit que la requête déposépear la Libye le 3 mars 1992est recevable;
POUR:M. Weeramantry, vice-présidentf,aisant fonction de présidenten
l'affaire;MM. Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva, Shi,Fleischhar,oroma,
Vereshchetin,Parra-Aranguren,Kooijmans,Rezek,juges; M. El-Kosheri,
juge ad hoc;
CONTRM E:. Schwebel,présidentde la Cour; MM. Oda,Herczegh,jug;s
3) Par dix voix contre cinq,
Déclareque l'exception desEtats-Unis, selon laquelleil n'y aurait plus
lieuà statuer sur les demandes de la Libye car les résolutions748 (1992)
et 883(1993)du Conseil de sécuritles auraient privéesdetout objet, n'a
pas, dans les circonstances de l'espèce,un caractère exclusivement préli-
minaire.
POUR: M. Weeramantry, vice-présidentf,aisant fonction de présidenten
l'affaire; MM. Bedjaoui, Ranjeva, Shi,Koroma, Vereshchetin,Parra-
Aranguren, Kooijmans,Rezek,juges; M. El-Kosheri,juge ad hoc;
CONTRM E:.chwebe1,présidednt la Cour;MM.Oda, Guillaume,Herczegh,
Fleischhauer,juges.
Fait en français et en anglais, le texte français faisant foi, au Palais de
la Paix,à La Haye, le vingt-sept févriermil neuf cent quatre-vingt-dix-
huit, en trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives de
la Cour et les autres seront transmis respectivement au Gouvernement
de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste et au
Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique.
Le vice-président,
(Signé) Christopher G. WEERAMANTRY.
Le greffier,
(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA.
MM. BEDJAOUR I,ANJEVA et KOROMA j,ges, joignent une déclaration
commune à l'arrêt;MM. GUILLAUMeE t FLEISCHHAUE Rg,es,joignent
une déclaration commune àI'~~~~~@%..HERczEjG uHe,, joint une décla-
rationà l'arrêt.
MM. KOOIJMAN et REZEKj,uges,ijoignenà l'arrêtles exposésde leur
opinion individuelle.
25 M. SCHWEBE pr, sidentde la Cour, et M. ODA,juge, joignent àl'arrêt
les exposésde leur opinion dissidente.
(Paraphé) C.G.W.
(Paraphé) E.V.O.
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
RECUEIL DES ARRÊTS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES
AFFAIRE RELATIVE A DES QUESTIONS
D'INTERPRÉTATION ET D'APPLICATION
DE LA CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971
RÉSULTANT DE L'INCIDENT AÉRIEN
DE LOCKERBIE
(JAMAHIRIYA ARABE LIBYENNE c. ÉTATS-UNIS
D'AMÉRIQUE)
EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES
INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS
CASE CONCERNING QUESTIONS OF
INTERPRETATION AND APPLICATION OF
THE 1971MONTREAL CONVENTION ARISING
FROM THE AERIAL INCIDENT
AT LOCKERBIE
(LIBYAN ARAB JAMAHIRIv.UNITED STATES
OF AMERICA)
PRELIMINARY OBJECTIONS
JUDGMENT OF 27 FEBRUARY1998 Mode officielde citation:
Questions d'interprétationet d'application dela convention de Montréal
de 1971 résultant de l'incidentaériende Lockerbie (Jamahiriya arabe
libyenne c.Etas- Unisd'Amérique),exceptions préliminaires,arrêt,C.I.J.
Recueil 1998,p. 115
Officia1citation:
Questionsof Interpretation and Application of the 1971Montreal Conven-
tion arisingfrom the Aerial Incidentat Lockerbie (Libyan Arab Jamahiriya
v. United States of America), Preliminary Objections, Judgment, I.C.J.
Reports 1998, p.115
No devente:
ISSN 0074-4441 Sales number
ISBN 92-1-070762-1 COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
1998 ANNÉE 1998
27 février
Rôle général
no89 27 février1998
AFFAIRE RELATIVE À DES QUESTIONS
D'INTERPRÉTATION ET D'APPLICATION
DE LA CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971
RÉSULTANT DE L'INCIDENT AÉRIEN
DE LOCKERBIE
EXCEPTIONS PRÉLIMINAIRES
Exception d'incompétence- Convention deMontréal du23 septembre 1971
- Traitéen vigueur entre les Partie- Paragraphe 1 de l'article 14 de la
convention.
Motifs d'incompétence invoquélors delaphase de la procédurerelative aux
mesures conservatoires - Arguments repris à titre incident dans la présente
phase de laprocédure - Négociations- Demande d'arbitrage - Délaide six
mois pour saisir laCour.
Allégationd'inexistence de tout différendjuridique concernant l'interpréta-
tion ou l'applicationde la convention deMontréal Différendde nature géné-
rale sur lerégimejuridique applicable la destruction de l'appareil dela Pan
Am au-dessusde Lockerbie - Différendsspécifiquesconcernantl'interprétation
et l'application de l'articlede la convention, lu conjointement avec sesar-
ticles, 5, 6 et 8, ainsi que l'interprétationet l'applicationde l'article II de la
convention.
Allégationselon laquelle iln'appartiendraitàala Courde seprononcer sur
la licéité dactions engagéespar ledéfendeuren vued'obtenir lalivraison des
deux auteursprésumés de l'infraction Compétence dela Courpour juger de
la licéité de actions dans la mesure où elles seraientcontraires aux disposi-
tions de la convention de Montréal.
Résolutions748 (1992) et 883 (1993) du Conseilde sécurité - Adoption INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE
YEAR 1998 1998
27 February
GeneralList
27 February1998 No. 89
CASE CONCERNING QUESTIONS OF
INTERPRETATION AND APPLICATION OF
THE 1971 MONTREAL CONVENTION ARISING
FROM THE AERIAL INCIDENT
AT LOCKERBIE
(LIBYAN ARAB JAMAHIRIYA v. UNITED STATES
OF AMERICA)
PRELIMINARY OBJECTIONS
Objection to jurisdicti-n Montreal Convention of 23 September 1971 -
Treaty inforce between the Partie- Article 14,paragraph 1, of the Conven-
tion.
Groundsfor lack ofjurisdiction invoked in theprovisional measurespha-e
Arguments repeated inpassing in thepresent phase of theproceedin-s Nego-
tiations -Request for arbitratio- Six-month period before the Court can be
seised.
Contention that no legal dispute exists concerning the interpretation and
application of theontreal Convention - Dispute of a general nature as to the
legal régime applicableto the destruction of the PanAm aircraft overLockerbie
- Specijîc disputes concerning the interpretationand application of Article 7 of
the Convention, read in conjunction with Articles 5, 6 and 8, and the inter-
pretation and application of Article II of the Convention.
Contention that it is notfor the Court to decide on the lawfulness of actions
instituted by the Respondent tocure the surrenderof the twoallegedoffenders
- Jurisdiction of the Courtto decideon the lawfulnessof those actions insofar
as they would be at variance with the provisions of thereal Convention.
Security Council resolutions 748 (1992) and 883 (1993)- Adoption after 116 CONVENTIONDE MONTRÉALDE 1971 (ARRÊT)
aprèsle dépôtde la requête - Appréciationde lacompétence à la date d'intro-
duction de la requête.
Exception d'irrecevabilité- Allégation selon laquelllee différend entreles
Parties serait régi ar les résolutions748 (1992) et 883 (1993) du Conseil de
sécuritéet nonpar la convention deMontréal - Appréciationde la recevabilité
a la date d'introductionde la requête Adoption des résolutions après le dépôt
de la requête.
Exception de non-lieu - Allégationselon laquelle iln'y aurait plus laesta-
tuer sur les demandesformuléespar le demandeur car les résolutions 748
(1992) et 883 (1993) du Conseil de sécurité les auraient privdestout obje-
Paragraphe1 de l'article 79du Règlement de la Cour - Exception ((prélimi-
naire))- Modalitésde présentation - Paragraphe 7 de l'article 79 duRègle-
ment - Revisionde 1972 - Exception «non exclusivement))préliminaire com-
portant «à lafois des aspectspréliminaireset des aspectsdefond))- Droits au
fond constituant l'objetmêmed'une décision sur l'exception.
Demande présentée àtitre subsidiaireet tendanà ce que la Cour«rés[olve]
l'affaireaufond dèsmaintenant)) - En soulevantdes exceptionspréliminaires,
le défendeurafait un choixprocéduraldont l'effet est, selon lestermes exprès
du paragraphe 3 de l'article79, de suspendre la procédursur lefond.
Fixation des délaispour la suite dleaprocédure.
Présents: M. WEERAMANTv Rice,-présidentf,aisant fonction deprésident en
l'affaire;. SCHWEBE pré,sident dela Cour;MM. ODA,BEDJAOUI,
GUILLAUMR E, NJEVA H,ERCZEGHS ,HI, FLEISCHHAUE KRO,ROMA,
VERESHCHETIPN A,RRA-ARANGUREN, KOOIJMANS R,EZEK,juges;
M. EL-KOSHER ju, e ad hoc; M. VALENCIA-OSPIgN reff,ier.
En l'affaire relativeà des questions d'interprétation et d'application dela
convention de Montréal de1971résultant de l'incident aérien de Lockerbie,
entre
la Grande Jamahiriya arabe libyennepopulaire et socialiste,
représentée par
S. Exc. M. Hamed Ahmed Elhouderi, ambassadeur, secrétairedu bureau
populaire de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste
aux Pays-Bas,
comme agent;
M. Mohamed A. Aljady,
M. Abdulhamid Raeid,
comme conseils ;
M. AbdelrazegEl-Murtadi Suleiman,professeurde droit international public
à la faculté dedroit de l'universitéde Benghazi,
M. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., professeur de droit international
public, titulaire de la chairechele à l'université d'Oxford,jîling of the Applicatio- Jurisdictionto be determinedut the date ofjîling of
the Application.
Objectionto admissibility- Contention that the dispute betweenthe Parties
isgovernedby Security Council resolutions 748(1992) and883 (1993) andnot
the Montreal Convention - Admissibility to be determinedut the date offiling
of the Application - Adoption of the resolutionsafter thejîling of the Applica-
tion.
Objectionthat there isno groundfor proceedingtojudgment on themerits -
Contention that the Applicant's claims have becomemoot because Security
Council resolutions 748(1992) and 883 (1993) have renderedthem without
object - Article 79, paragraph 1, of the Rules of Court - "Preliminary"
Objection - Formal conditionsfor presentation - Article 79,paragraph 7, of
the Rules of Court - 1972 Revision - Objection which is "not exclusively"
preliminary containing"bothpreliminary aspectsand other aspects relatingto
the merits" - Rights on the merits constituting the verysubject-matter of a
decisionon the objection.
Requestsubmitted in the alternativethat the Court should "resolve thecasein
substancenow" - By raisingpreliminary objections, the Respondent has made
a procedural choice theeffect of which, accordingto the express terms of
Article 79,paragraph3, is to suspend the proceedings on the merits.
Fixing of time-limits for theurther proceedings.
JUDGMENT
Present: Vice-PresidentWEERAMANTA Rcti,ng President;PresidentSCHWEBEL;
Judges ODA, BEDJAOUIG , UILLAUMR E,ANJEVA,HERCZEGHS,HI,
FLEISCHHAUER K,OROMA, VERESHCHETIN P,ARRA-ARANGUREN,
KOOIJMAN RSE,ZEK;Judge ad hoc EL-KOSHERR I;egistrar VALENCIA-
OSPINA.
In the case concerning questions of interpretation and application of the
1971Montreal Convention arising from the aerial incident at Lockerbie,
between
the Great Socialist People's LibyanArab Jamahiriya,
represented by
H.E. Mr. Hamed Ahmed Elhouderi, Ambassador, Secretary of the People's
Office of the Great Socialist People's Libyan Arab Jamahiriya to the
Netherlands,
as Agent;
Mr. Mohamed A. Aljady,
Mr. Abdulharnid Raeid,
as Counsel;
Mr. Abdelrazeg El-Murtadi Suleiman, Professor of Public International
Law, Faculty of Law, University of Benghazi,
Mr. Ian Brownlie,C.B.E., Q.C., F.B.A., ChicheleProfessor of Public Inter-
national Law, University of Oxford,117 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
M. Jean Salmon, professeur éméritededroit à l'université librede Bruxelles,
M. Eric Suy, professeur de droit international à l'universitécatholique de
Louvain (K.U. Leuven),
M. Eric David, professeur de droit à l'Université libre deBruxelles,
comme conseils et avocats;
M. Nicolas Angelet, premier assistant à la facultéde droit de l'université
catholique de Louvain (K.U. Leuven),
MmeBarbara Delcourt, assistante à la facultédes sciencessociales,politiques
et économiques de l'université libre de Bruxelles, collaboratrice scienti-
fique au centre de droit international et à l'institut d'études européennes
de l'universitélibre de Bruxelles,
M. Mohamed Awad,
comme conseillers,
les Etats-Unis d'Amérique, '
représentéspar
M. David R. Andrews, conseillerjuridique du départementd'Etat des Etats-
Unis,
comme agent;
M. Michael J. Matheson, conseillerjuridique adjoint principal du départe-
ment d'Etat des Etats-Unis,
comme coagent ;
M. John R. Crook, conseiller juridique adjoint du département d'Etat des
Etats-Unis,
M. Sean D. Murphy, conseiller chargé des affairesjuridiques à l'ambassade
des Etats-Unis aux Pays-Bas,
M. Oscar Schachter, professeur à la faculté dedroit de l'universitéColum-
bia,
MmeElisabeth Zoller, professeur à l'universitéde Paris II,
comme conseils et avocats;
M. John J. Kim, du bureau du conseillerjuridique du départementd'Etat des
Etats-Unis,
M. Brian Murtagh, du département de lajustice des Etats-Unis,
comme conseils.
ainsi composée,
après délibére én chambre du conseil,
rend l'arrêt suivant:
1. Le 3mars 1992,le Gouvernement de la Grande Jamahiriya arabe libyenne
populaire et socialiste(dénomméeci-après la «Libye») a déposéau Greffe de la
Cour une requête introductive d'instancecontre le Gouvernement des Etats-
Unis d'Amérique (dénommés ci-aprèle ss ((Etats-Unis))) au sujet d'un «diffé-
rend entre la Libye et les Etats-Unis concernant l'interprétation ou l'applica-
tion de la convention de Montréal))du 23 septembre 1971pour la répression Mr. Jean Salmon, Professor of Law emeritus, Université libre deBruxelles,
Mr. Eric Suy, Professor of International Law, Catholic University of Lou-
vain (K.U. Leuven),
Mr. Eric David, Professor of Law, Université libre deBruxelles,
as Counsel and Advocates; 1
Mr. Nicolas Angelet, Principal Assistant, Faculty of Law, Catholic Univer-
sity of Louvain (K.U. Leuven),
Mrs. Barbara Delcourt, Assistant, Faculty of Social,Political and Economic
Sciences, Université libre de Bruxelles; Research Fellow, Centre of
International Law and Institute of European Studies, Université libre de
Bruxelles,
Mr. Mohamed Awad,
as Advisers.
and
the United States of America,
represented by
Mr. David R. Andrews, Legal Adviser, United States Department of State,
as Agent;
Mr. Michael J. Matheson, Principal Deputy Legal Adviser, United States
Department of State,
as Co-Agent;
Mr. John R. Crook, Assistant Legal Adviser, United States Department of
State,
Mr. Sean D. Murph-,-Counsellor for Legal Affairs, United States Embassy,
The Hague,
Mr. Oscar Schachter, Professor at the Columbia University School of Law,
Ms Elisabeth Zoller, Professor at the University of Paris II,
as Counsel and Advocates;
Mr. John J. Kim, Officeof the Legal Adviser, United States Department of
State,
Mr. Brian Murtagh, United States Department of Justice,
as Counsel.
composed as above,
after deliberation,
delivers thefollowing Judgment:
1.On 3 March 1992,the Government of the Great Socialist People'sLibyan
Arab Jamahiriya (hereinafter called "Libya") filedin the Registry of the Court
an Application instituting proceedings against the Government of the United
States of America (hereinafter called "the United States") in respect of a "dis-
pute. .. between Libya and the United States over the interpretation or
application of the Montreal Convention7'of 23 September 1971for the Sup-d'actes illicitesdirigéscontre la sécuride l'aviation civile(dénommée ci-après
la ((conventionde Montréal))). Dans la requête,il était faitréférence à la des-
truction le 21 décembre1988, au-dessus de Lockerbie (Ecosse), de l'appareil
qui assurait levol 103dela Pan Am, ainsiqu'aux accusationsprononcéesen no-
vembre 1991 par un Grand Jury des Etats-Unis contre deux ressortissants
libyens soupçonnésd'avoir fait placer à bord de l'appareil une bombe qui, en
explosant, l'aurait détruit. La requête invoquaitcomme base de compétence
le paragraphe 1de l'article 14de la convention de Montréal.
2. Conformémentau paragraphe 2 de l'article40 du Statut, la requêtea été
immédiatementcommuniquéeau Gouvernement des Etats-Unis par le greffier;
conformément au paragraphe 3 de cet article, tous les Etats admis à ester
devant la Cour ont été informéd se la requête.
3. Conformémentau paragraphe 3 de l'article 69 du Règlement,le greffiera
adresséau secrétairegénérad le l'organisation de l'aviationcivileinternationale
la notification prévueau paragraphe 3 de l'article 34 du Statut.
Conformémentà l'article 43 du Règlement,le greffier a en outre adresséla
notification prévue au paragraphe 1 de l'article 63du Statut a tous les Etats
qui, sur la base de renseignements obtenus des gouvernements dépositaires,
sont apparus comme étantparties à la convention de Montréal.
4. La Cour ne comptant pas sur le siègede juge de nationalitélibyenne, la
Libye s'estprévaluedu droit que lui confèrele paragraphe 2 de l'article 31 du
Statut de procéderàla désignationd'unjuge adhoc pour siégeren l'affaire :elle
a désigné à cet effet M. Ahmed Sadek El-Kosheri.
5. Le 3 mars 1992,dèsaprèsle dépôt desa requête,la Libye a présenté une
demande en indication de mesures conservatoires en vertu de l'article 41 du
Statut.
Par ordonnance en date du 14 avril 1992,la Cour, après avoir entendu les
Parties, a dit que les circonstancesde l'espècen'étaient pas de natureà exiger
l'exercicede son pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires.
6. Par ordonnance du 19juin 1992,la Cour, compte tenu des demandes des
Parties, a fixéau 20 décembre1993la date d'expiration du délaipour le dépôt
du mémoirede la Libye et au 20juin 1995la date d'expiration du délaipour le
dépôtdu contre-mémoiredes Etats-Unis.
La Libye a dûment déposé sonmémoiredans le délaiainsi prescrit.
7. Dans ledélaifixépour le dépôt deleur contre-mémoire,lesEtats-Unis ont
déposé desexceptions préliminairesà la compétencede la Cour et à la receva-
bilitéde la requête.
En conséquence,par ordonnance du 22 septembre 1995,la Cour, constatant
qu'en vertu des dispositions du paragraphe 3 de l'article 79 du Règlementla
procédure sur le fond était suspendue, a fixéau 22 décembre 1995 la date
d'expiration du délaidans lequel la Libye pourrait présenter un exposé écrit
contenant ses observations et conclusions sur les exceptions préliminaires.
La Libye a déposéun tel exposédans le délai ainsi prescrit,et l'affaire s'est
trouvéeen étatpour ce qui est des exceptions préliminaires.
8. Par lettre en date du 19 février1996,le greffier,conformémentau para-
graphe 3 de l'article 34 du Statut, a communiquéles pièces dela procédure
écriteau secrétairegénéralde l'organisation de l'aviation civileinternationale
et a précisée,n se référantau paragraphe 2 de l'article 69 du Règlement,que, si
l'organisation souhaitait présenterà la Cour des observations écrites,celles-ci
ne devraient porter, au stade considéréq, ue sur les questions de compétenceet
de recevabilité.
Par lettre du 26juin 1996,le secrétaire généra dle l'organisation de l'aviationpression of Unlawful Acts against the Safety of Civil Aviation (hereinafter
called "the Montreal Convention"). The Application referred to the destruc-
tion, on 21 December 1988,over Lockerbie (Scotland), of the aircraft on Pan
Am flight 103,and to charges brought by a Grand Jury of the United States
in November 1991against two Libyan nationals suspected of having caused a
bomb to be placed aboard the aircraft, which bomb had exploded causing the
aeroplane to crash. The Application invoked as the basis for jurisdiction
Article 14,paragraph 1, of the Montreal Convention.
2. Pursuant to Article 40, paragraph 2, of the Statute, the Application was
immediately communicated to the Government of the United States by the
Registrar; pursuant to paragraph 3 of that Article, al1States entitled to appear
before the Court were notified of the Application.
3. Pursuant to Article 69, paragraph 3, of the Rules of Court, the Registrar
addressed to the Secretary General of the International CivilAviation Organi-
zation the notification provided for in Article 34, paragraph 3, of the Statute.
Pursuant to Article 43 of the Rules of Court, the Registrar also addressedthe
notification provided for in Article 63, paragraph 1, of the Statute to al1those
States which, on the basis of information obtained from the depositary Gov-
ernments, appeared to be parties to the Montreal Convention.
4. Sincethe Court included upon the Bench no judge of Libyan nationality,
Libya exercisedits right under Article 31,paragraph 2, of the Statute to choose
a judge ad hoc to sit in the case: it chose Mr. Ahmed Sadek El-Kosheri to do
SO.
5. On 3 March 1992,irnrnediatelyafter the filing of its Application, Libya
submitted a request for the indication of provisional measuresunder Article41
of the Statute.
Byan Order dated 14April 1992,the Court, after hearing the Parties, found
that the circumstancesof the casewerenot such as to require the exerciseof its
power to indicate provisional measures.
6. By an order of 19June 1992,the Court, having regard to the requests of
the Parties,fixed20 December 1993as the time-limitfor the filingby Libya of
a Memorial and 20 June 1995 as the time-limit for the filing by the United
States of a Counter-Memorial.
Libya duly filed its Memorial within the prescribed time-limit.
7. Within the time-limit fixed for the filing of its Counter-Memorial, the
United States filedPreliminary Objections to the jurisdiction of the Court and
the admissibility of the Application.
Accordingly, by an Order of 22 September 1995,the Court, noting that by
virtue of Article 79, paragraph 3, ofthe Rules of Court the proceedingson the
merits were suspended, fixed 22December 1995as the time-limit withinwhich
Libya mightpresent a written statement of its observationsand submissionson
the preliminary objections.
Libya filed such a statement within the time-limit so fixed, and the case
became ready for hearing in respect of the preliminary objections.
8. By a letter dated 19February 1996,the Registrar, pursuant to Article 34,
paragraph 3, of the Statute, communicated copies of the written pleadings to
the Secretary General of the International Civil Aviation Organization and,
referring to Article 69, paragraph 2, ofthe Rules of Court, specifiedthat, if the
Organization wished to present written observations to the Court they should
be limited, at that stage, to questions ofjurisdiction and admissibility.
By a letter of 26 June 1996,the Secretary General of the International Civil 119 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
civile internationale a fait savoir à la Cour que l'organisation «n'a[vait] pas
d'observations à faire pour le moment» mais désirait être tenue informéd ee
l'évolution de l'affaire,afin d'êtreen mesure de déterminers'ilconviendrait de
présenterdes observations à un stade ultérieur.
9. Le président de laCour, étantressortissant de l'une des Parties à l'affaire,
ne pouvait pas, en vertu du paragraphe 1de l'article 32 du Règlement,exercer
la présidenceaux fins de la présenteespèce.Il a donc incombéau vice-prési-
dent, conformémentau paragraphe 1de l'article 13du Règlement,d'assurer la
présidence enl'affaire.
10. Conformémentau paragraphe 2 de l'article 53 du Règlement, la Cour a
décidé de rendreaccessiblesau public, à l'ouverture de la procédure orale,les
exceptionspréliminairesdes Etats-Unis et l'exposéécritcontenant les observa-
tions et conclusionsde la Libye sur ces exceptions,ainsi que les documents qui
étaient jointsà ces pièces.
11. Des audiencespubliques ont été tenuesentre le 13et le 22 octobre 1997,
au cours desquelles ont été entendusen leurs plaidoiries et réponses:
Pour les Etats-Unis: M. David Andrews,
M. Sean D. Murphy,
M. John R. Crook,
M. Oscar Schachter,
MmeElisabeth Zoller,
M. Michael J.Matheson.
Pour la Libye: S. Exc. M. Hamed Ahmed Elhouderi,
M. Abdelrazeg El-Murtadi Suleiman,
M. Jean Salmon,
M. Eric David,
M. Eric Suy,
M. Ian Brownlie.
A l'audience, des membres de la Cour ont poséaux Parties des questions,
auxquelles il a été répondupar écrit, après la clôture de la procédure orale.
12. Dans la requête,les demandes ci-après ont été formuléep sar la Libye:
«En conséquence,tout en se réservantle droit de compléter etmodifier
s'ily a lieu la présente conclusionen cours de procédure, laLibye prie la
Cour de dire et juger:
a) que la Libye a satisfait pleinement à toutes sesobligations au regard de
la convention de Montréal;
b) que les Etats-Unis ont violé,et continuent de violer, leurs obligations
juridiques envers la Libyestipuléesaux articles5,paragraphes 2 et3,7,
8, paragraphe 2, et 11de la convention de Montréal;
c) que les Etats-Unis sont juridiquement tenus de mettre fin et de renon-
cer immédiatementà ces violations et à toute forme de recours à la
force ou à la menace contre la Libye, y compris la menace de recourir
à la force contre la Libye, ainsi qu'à toute violation de la souveraineté,
de l'intégrité territoriale et de l'indépendance politique daibye.»
13. Dans la procédure écrite,les conclusions ci-aprèsont étéprésentéespar
les Parties:Aviation Organization informed the Court that the Organization "ha[d] no
observations to make for the moment" but wished to remain informed about
the progress of the case, in order to be able to determine whether it would be
appropriate to submit observations later.
9. The President of the Court, being a national of one of the Parties to the
case, was unable, by virtue of Article 32,paragraph 1,of the Rules of Court, to
exercisethe functions of the presidency in respect of the present case. It there-
fore fell to the Vice-President, in accordance with Article 13, paragraph 1, of
the Rules of Court, to exercisethe functions of the presidency in the case.
10. In accordance with Article 53, paragraph 2, of its Rules, the Court
decided to make accessible to the public, on the opening of the oral proceed-
ings, the Preliminary Objections of the United States and the written statement
containing the observations and submissionsof Libya on the objections,as well
as the documents annexed to those pleadings.
11. Public sittings were held between 13and 22 October 1997,at which the
Court heard the oral arguments and replies of:
For the United States: Mr. David Andrews,
Mr. Sean D. Murphy,
Mr. John R. Crook,
Mr. Oscar Schachter,
Ms Elisabeth Zoller,
Mr. Michael J. Matheson.
For Libya: H.E. Mr. Hamed Ahmed Elhouderi,
Mr. Abdelrazeg El-Murtadi Suleiman,
Mr. Jean Salmon,
Mr. Eric David,
Mr. Eric Suy,
Mr. Ian Brownlie.
At the hearings, Members of the Court put questions to the Parties, who
answered in writing after the close of the oral proceedings.
12. In the Application, the following requests were made by Libya:
"Accordingly, while reserving the right to supplement and amend this
submission as appropriate in the course of further proceedings, Libya
requests the Court to adjudge and declare as follows :
(a) that Libya has fully complied with al1 of its obligations under the
Montreal Convention;
(b) that the United States has breached, and is continuing to breach, its
legalobligations to Libya under Articles 5(2),5 (3), 7, 8 (2)and 11of
the Montreal Convention; and
(c) that the United States is under a legal obligation imrnediatelyto cease
and desist from such breaches and from the use of any and al1force
or threats against Libya, including the threat of force against Libya,
and from al1violations of the sovereignty,territorial integrity, and the
political independence of Libya."
13. In the written proceedings,the following submissions were presented by
the Parties:120 CONVENTIONDE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
Au nom du Gouvernement libyen,
dans le mémoire:
«Par cesmotifs, et tout en se réservantle droit de compléter etmodifier
s'ily a lieu lesprésentesconclusionsen cours de procédure, laLibye prie la
Cour de dire et juger:
a) que la convention de Montréals'applique au présent litige;
b) que la Libye a pleinement satisfait àtoutes sesobligations au regard de
la convention de Montréalet est fondéeàexercerla compétencepénale
prévuepar cette convention;
c) que les Etats-Unis ont violé,et continuent de violer, leurs obligations
juridiques envers la Libye stipuléesà l'article 5, paragraphes 2 et 3, à
l'article 7, à l'article 8, paragraphe 3,àel'article 11de la convention
de Montréal;
d) que les Etats-Unis sont juridiquement tenus de respecter le droit de la
Libye à ce que cette convention ne soit pas écartéepar des moyens qui
seraient au demeurant en contradiction avec les principes de la Charte
des Nations Unies et du droit international général de caractèreimpé-
ratif qui prohibent l'utilisation de la force et la violation de la souve-
raineté, de l'intégrité territoriale, dle'égasouveraine des Etats et de
leur indépendance politique. »
Au nom du Gouvernement desEtats-Unis,
dans les exceptionspréliminaires :
«Les Etats-Unis d'Amérique prient laCour d'accueillirles exceptions à
la compétence de laCour qu'ils ont présentées et dedéclinerde connaître
de l'affaire.»
Au nom du Gouvernement libyen,
dans l'exposéécrit contenantses observations et conclusions sur les exceptions
préliminaires :
«Par ces motifs, et tout en se réservantle droit de compléterou modi-
fier, s'ily a lieu, les présentes conclusionsen cours de procédure, laLibye
prie la Cour de dire etluger:
- que les exceptions préliminaires présentéep sar les Etats-Unis doivent
êtrerejetéeset qu'en conséquence :
a) la Cour est compétentepour statuer sur la requêtelibyenne,
b) cette requête est recevable;
- que la procéduredoit être poursuiviequant au fond du différend.»
14. Dans la procédure orale,les conclusions ci-après ont été présentée par
les Parties :
Au nom du Gouvernement desEtats-Unis,
à l'audience du 20 octobre 1997:
«Les Etats-Unis d'Amérique prient laCour d'accueillirles exceptions à
la compétencede laCour qu'ils ont présentées et dedéclinerde connaître
de l'affaire relative à des Questionsd'interprétationet d'application dela
convention deMontréalde 1971 résultant de l'incident aérie de Lockerbie
(Jamahiriya arabe libyennec. Etats-Unis d'Amérique).» 1971 MONTREAL CONVENTION (JUDGMENT)
On behalf of the Government ofLibya,
in the Memorial:
"For these reasons, while reserving the right to supplement and amend
these submissions as appropriate in the course of further proceedings,
Libya requests the Court to adjudge and declare as follows :
(a) that the Montreal Convention is applicable to this dispute;
(6) that Libya has fully complied with al1 of its obligations under the
Montreal Convention and isjustified in exercisingthe criminal juris-
diction provided for by that Convention;
(c) that the United States has breached, and is continuing to breach,
its legal obligations to Libya under Article 5, paragraphs 2 and 3,
Article 7, Article 8, paragraph 3, and Article 11 of the Montreal
Convention;
(d) that the United States is under a legal obligation to respect Libya's
right not to have the Convention set aside by means which would in
any case be at variance with the principles of the United Nations
Charter and with the mandatory rules of general international law
prohibiting the use of force and the violation of the sovereignty, ter-
ritorial integrity, sovereign equality and political independence of
States."
On behalfof the Governmentof the UnitedStates,
in the Preliminary Objections :
"The United States of America requests that the Court uphold the
objections of the United States to thejurisdiction of the Court and decline
to entertain the case."
On behalf of the Government ofLibya,
in the written statement of its observations and submissions on the preliminary
objections :
"For these reasons, and reservingthe right to complement or modify the
present submissions in the course of the proceedings if necessary, Libya
requests the Court to adjudge and declare:
- that the preliminary objections raised by the United States must be
rejected and that, as a consequence:
(a) the Court has jurisdiction to entertain the Application of Libya,
(b) that the Application is admissible;
- that the Court should proceed to the merits."
14. In the oral proceedings, the following submissionswere presented by the
Parties :
On behalf of the Governmentof the UnitedStates,
at the hearing on 20 October 1997:
"The United States of America requests that the Court uphold the
objections of the United States to thejurisdiction of the Court and decline
to entertain the case concerning Questionsof Interpretation and Applica-
tion of the 1971 Montreal Conventionarisingfrom the Aerial Incidentut
Lockerbie (Libyan Arab Jamahiriya v. UnitedStates of America) ."Au nom du Gouvernementlibyen,
à l'audiencedu 22 octobre 1997:
«La Jamahiriya arabe libyenne prie laCour de bien vouloir direet
juger :
- que les exceptions préliminairepsrésentéep sar ..les Etats-Unis doi-
ventêtrerejetées eq tu'enconséquence :
a) la Cour est compétente pourstatuer sur la requête libyenne,
b) cette requêteest recevable;
- que la procéduredoit être poursuiviq euant au fond du différend» .
15. Dans le dernier étatde leur argumentation en l'espèce,les Etats-
Unis ont soulevétrois exceptions :la premièrevisant la compétence dela
Cour, la deuxièmeportant sur la recevabilitéde la requête etla troisième
alléguantqu'il n'y a plus lieu à statuer sur les demandes de la Libye car
elles auraient étéprivées detout objet. Selon les Etats-Unis, chacune de
ces exceptions revêt «un caractère authentiquement préliminaire)). En
outre, les Etats-Unis ont fait valoir à titre subsidiaire que, si la Cour se
déclarait néanmoins compétente et décidaid t'exercer sa compétence,elle
pourrait et devrait ((résoudrel'affaire au fond dèsmaintenant)) en déci-
dant, à titre préliminaire,qu'il ne peut être donné suite auxmesures sol-
licitéespar la Libye.
16. La Cour examinera en premier lieu l'exception soulevéepar les
Etats-Unis concernant sa compétence.
17. La Libye soutient que la Cour est compétentesur la base du para-
graphe 1 de l'article 14 de la convention de Montréal, quidispose que:
«Tout différendentre des Etats contractants concernant l'inter-
prétationou l'application de la présente convention qui ne peut pas
êtreréglépar voie de négociation est soumis à l'arbitrage,à la
demande de l'un d'entreeux. Si,dans les sixmois qui suivent la date
de la demande d'arbitrage, lesParties ne parviennent pas à semettre
d'accord sur l'organisation de l'arbitrage, l'une quelconque d'entre
ellespeut soumettre le différend à la Cour internationale de Justice,
en déposant une requête conformémena tu Statut de la Cour. ))
18. Les Parties conviennent que la convention de Montréal est en
vigueur entre elles et qu'elle l'étaitdéjà, aussibien lors de la destruction
de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie,le 21 décembre1988,
qu'au moment du dépôt de la requêtel,e 3mars 1992.Toutefois, ledéfen-
deur conteste la compétencede la Cour au motif que, selon lui, il n'a pas
été satisfait,en l'espèce,à toutes les exigencesénoncées au paragraphe 1
de l'article 14de la convention de Montréal.On behalfof the Government ofLibya:
at the hearing on 22 October 1997:
"The LibyanArabJamahiriya requeststheCourtto adjudgeanddeclare :
- that the preliminary objectionsraisedby . . the United Statesmust be
rejectedand that, as a consequence:
(a) the Court has jurisdictionto entertain the Applicationof Libya,
(b) that the Applicationis admissible;
- that the Court shouldproceedto the merits."
15. In its most recent arguments in the present case, the United States
raised three objections: the first to the Court's jurisdiction, the second to
the admissibility of the Application and the third alleging that the Libyan
claims had become moot as having been rendered without object. For the
United States, each of these objections is "genuinely preliminary in char-
acter". The United States contended moreover, in the alternative, that,
should the Court nonetheless hold that it had jurisdiction and decide to
exercise that jurisdiction, it could and should "resolve the case in sub-
stance ~OW" by deciding, as a preliminary matter, that the relief sought
by Libya is precluded.
16. The Court will first consider the objection raised by the United
States to itsjurisdiction.
17. Libya submits that the Court has jurisdiction on the basis of
Article 14,paragraph 1,of the Montreal Convention, which provides that:
"Any dispute between two or more Contracting Statesconcerning
the interpretation or application of this Convention which cannot be
settled through negotiation, shall, at the request of one of them, be
submitted to arbitration. If within six months of the date of the
request for arbitration the Parties are unable to agree on the organi-
zation of the arbitration, any one of those Parties may refer the dis-
pute to the International Court of Justice by request in conformity
with the Statute of the Court."
18. TheParties agree that the Montreal Convention is in force between
them and that it was already in force both at the time of the destruction
of the Pan Am aircraft over Lockerbie, on 21 December 1988,and at the
time of filingof the Application, on 3 March 1992.However, the Respon-
dent contests the jurisdiction of the Court because, in its submission, al1
the requisites laid down in Article 14,paragraph 1, of the Montreal Con-
vention have not been complied with in the present case. 122 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971 (ARRÊT)
19. Les Etats-Unis contestent la compétencede la Cour en alléguant
principalement que la Libye n'a pas établi, premièrement, qu'ilexiste
un différendjuridique entre les Parties et, deuxièmement,qu'un tel diffé-
rend concernerait l'interprétation ou l'application de la convention de
Montréal et entrerait par suite dans les prévisionsdu paragraphe 1 de
l'article 14de cette convention.
Toutefois, à l'audience,les Etats-Unis se sont aussi référéà,.titreinci-
dent, aux arguments qu'ils avaient avancés, lors de la phase de la procé-
dure relative aux mesures conservatoires, sur le point de savoir si le dif-
férend qui, d'aprèsla Libye, existerait entre les Parties ne pouvait se
réglerpar voie de négociation, si la Libye avait présenté unedemande
d'arbitrage en bonne et due forme et si elle avait respectéle délai desix
mois prescrit par le paragraphe 1de l'article 14de la convention.
20. La Cour relèvequ'en l'espècele défendeur a toujours soutenu que
la destruction de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie n'avait
suscitéentre les Parties aucun différendconcernant l'interprétation ou
l'application de la convention de Montréal et que, de ce fait, il n'y avait,
de l'avisdu défendeur, aucune question à réglerpar voie de négociation
conformément à la convention; elle constate que la proposition d'arbi-
trage contenue dans la lettre que le secrétairelibyen du comitépopulaire
de liaison avec l'étranger etde coopération internationale a adresséele
18janvier 1992au secrétaire d'Etat desEtats-Unis est restéesansréponse;
et elle note en particulier que le défendeur a clairement expriméson
intention de ne pas accepter d'arbitrage- sousquelqueformeque ce soit
- lorsqu'il a présentéevt igoureusement soutenu la résolution731(1992)
que le Conseil de sécuritéa adoptée trois jours plus tard, le 21 janvier
1992.
En conséquence,de l'avis de la Cour, le différendqui existerait entre
les Parties ne pouvait ni êtreréglépar voie de négociationni être soumis
à l'arbitrage en application de la convention de Montréal, et le refus du
défendeur de prendre part à un arbitrage pour réglerce différend exo-
nérait laLibye de toute obligation, aux termes du paragraphe 1 de l'ar-
ticle 14de la convention, d'observer un délaide six mois àcompter de la
demande d'arbitrage avant de saisir la Cour.
21. Comme les Parties l'ont rappelé, la Cour permanente de Justice
internationale a affirmé dès1924 qu'«un différend estun désaccord sur
un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposition de thèses
juridiques ou d'intérêts entre deux personnes)) (Concessions Mavrom-
matis en Palestine, 1924, C.P.J.I. sérieA no2, p. 11).La Cour actuellea
pour sa part souligné,dans son arrêtdu 30juin 1995en l'affaire relative
au Timor oriental (Portugal c. Australie), ce qui suit:
«Pour établirl'existenced'un différend:«Il faut démontrer que la
réclamationde l'une desparties seheurte à l'opposition manifeste de
l'autre))(Sud-Ouest africain, exceptions préliminaires,arrêt,C.I.J. 19. The United States contests thejurisdiction of the Court mainly on
the basis of Libya's failure to show, firstly, that there exists a legal dis-
pute between the Parties, and, secondly, that such dispute, if any, con-
cerns the interpretation or application of the Montreal Convention and
falls as a result within the terms of Article14,paragraph 1,of that Con-
vention.
However, at the hearings, the United States also made reference, in
passing, to the arguments it had advanced, in the provisional measures
phase of the proceedings, as to whether the dispute that, in the opinion of
Libya, existsbetween the Parties could be settled by negotiation, whether
Libya had made a proper request for arbitration and whether it had
respected the six-month period required by Article 14, paragraph 1, of
the Convention.
20. The Court observes that in the present case, the Respondent has
always maintained that the destruction of the Pan Am aircraft over
Lockerbie did not give rise to any dispute between the Parties regarding
the interpretation or application of the Montreal Convention and that,
for that reason, in the Respondent's view,there was nothing to be settled
by negotiation under the Convention; the Court notes that the arbitra-
tion proposa1 contained in the letter sent on 18 January 1992 by the
Libyan Secretary of the People's Committee for Foreign Liaison and
International Co-operation to the Secretary of State of the United States
met with no answer; and it notes, in particular, that the Respondent
clearly expressed its intention not to accept arbitration - in whatever
form - when presenting and strongly supporting resolution 731 (1992)
adopted by the Security Council three days later, on 21 January 1992.
Consequently, in the opinion of the Court the alleged dispute between
the Partiescould not be settled by negotiation or submitted to arbitration
under the Montreal Convention, and the refusa1of the Respondent to
enter into arbitration to resolve that dispute absolved Libya from any
obligation under Article 14,paragraph 1,of the Convention to observe a
six-monthperiod starting from the request for arbitration, before seising
the Court.
21. As recalled by the Parties, the Permanent Court of International
Justicestated in 1924that "A dispute is a disagreement on a point of law
or fact, a conflict of legal views or of interests between two persons"
(Mavrommatis Palestine Concessions, 1924, P.C.I.J., Series A, No. 2,
p. 11).The present Court for its part, in its Judgment of 30 June 1995in
the case concerning East Timor (Portugal v. Australia) emphasized the
following :
"In order to establishthe existenceof a dispute, 'Itmust be shown
that the claim of one party ispositivelyopposed by the other' (South
West Africa, Preliminary Objections,Judgment, I.C.J. Reports 1962, Recueil 1962,p. 328); par ailleurs, «l'existenced'un différendinter-
national demande à être établie objectivement)()Interprétationdes
traitésdepaix conclus avec la Bulgarie, laHongrie et la Roumanie,
premièrephase, avis consultat$ C.I.J. Recueil 1950,p. 74).» (C.I.J.
Recueil 1995,p. 100.)
22. Dans sa requêteet son mémoire,la Libye a soutenu que la conven-
tion de Montréal est le seul instrument applicable à la destruction de
l'appareil de la Pan Am au-dessusde Lockerbiepour lesmotifs suivants:
a) le défendeur et laLibye sont liéspar la convention de Montréal, qui
est en vigueur entre les Parties;
b) cetteconvention est spécifiquementdestinée à prévenirce type d'actes
(troisièmeparagraphe du préambule);
c) lesactesimputés aux ressortissantslibyens sont viséspar l'article pre-
mier de la convention de Montréal;
d) «le systèmedela convention de Montréal est,par rapport au système
de la Charte des Nations Unies, à la fois une lex posterior et une lex
specialis; il en résulteque, pour les questions qui relèventde cette
convention, celle-ci doita priori l'emporter sur les systèmesprévus
par la Charte));
e) il n'existe aucune autre convention relative au droit pénal internatio-
nal en vigueur qui soit applicable à ces questions dans les rapports
entre la Libye et les Etats-Unis.
23. Les Etats-Unis ne nient pas que, comme tels, les faits de la cause
puissent entrer dans les prévisionsde la convention de Montréal. Toute-
fois, ils soulignentqu'en l'espèce,dèsque la Libye a invoqué la conven-
tion de Montréal, ils ont fait valoir que celle-cin'était pasen jeu car la
question à réglern'avait pas trait à des ((divergencesbilatérales))mais
«étaitcelle d'une menace à la paix età la sécuritéinternationales résul-
tant d'un terrorisme parrainépar un Etab.
24. Ainsi, les Parties s'opposent sur la question de savoir si la destruc-
tion de l'appareil de la Pan Am au-dessus de Lockerbie est régiepar la
convention de Montréal. Il existe donc un différendentre les Parties sur
le régimejuridique applicable àcet événementU . n tel différendconcerne,
de l'avisde la Cour, l'interprétation et l'application de la convention de
Montréal,et, conformémentau paragraphe 1de l'article 14de la conven-
tion, il appartient la Cour de le trancher.
25. En outre, dans sa requête et sonmémoire,la Libye, a l'appui des
conclusions reproduites, respectivement, aux paragraphes 12 (alinéas a)
et b)) et 13 (alinéasb) et c)) ci-dessus, a en particulier soulignéles six
points suivants: p. 328); and further, 'Whether there existsan international dispute is
a matter for objective determination' (Interpretation of Peace Trea-
ties with Bulgaria, Hungary and Romania, First Phase, Advisory
Opinion,I. C.J. Reports 1950, p. 74)." (1.C.J. Reports 1995, p. 100.)
22. In its Application and Memorial, Libya maintained that the
Montreal Conventionwasthe onlyinstrument applicableto the destruction
of the Pan Am aircraft over Lockerbie,for the followingreasons:
(a) the Respondent and Libya are bound by the Montreal Convention
which is in force between the Parties;
(b) the Montreal Convention is specifically aimed at preventing that
type of action (third paragraph of the Preamble);
(c) the actions ascribed to the Libyan nationals are covered by Article 1
of the Montreal Convention;
(d) "the system of the Montreal Convention, as compared to the system
of the Charter, is both a lex posterior and a lex specialis; conse-
quently, for matters covered by that Convention, it must a priori
take precedence over the systems for which the Charter provides";
and
(e) there is no other convention concerning international criminal law
in force which is applicable to these issues in the relations between
Libya and the United States.
23. The United States does not deny that, as such, the facts of the case
could fa11within the terms of the Montreal Convention. However, it
emphasizes that, in the present case, from the time Libya invoked the
Montreal Convention, the United Stateshas claimed that it was not rele-
vant because it was not a question of "bilateral differences" but one of "a
threat to international peace and security resulting from State-sponsored
terrorism".
24. Consequently, the Parties differ on the question whether the
destruction of the Pan Am aircraft over Lockerbie is governed by the
Montreal Convention. A dispute thus exists between the Parties as to the
legal régimeapplicable to this event. Such a dispute, in the view of the
Court, concerns the interpretation and application of the Montreal Con-
vention, and, in accordance with Article 14,paragraph 1,of the Conven-
tion, falls to be decided by the Court.
25. Furthermore, in its Application and Memorial, Libya stressed the
followingsix points, in particular in support of the submissions setforth,
respectively, in paragraph 12 (subparagraphs (a) and (b)) and para-
graph 13 (subparagraphs (b) and (c)), above:a) les actes qui ont entraîné la destruction de l'appareil de la Pan Am
au-dessus de Lockerbie constituent l'une des infractions viséespar
l'article premier de la convention de Montréal et celle-ci doit partant
s'appliquer àces faits;
b) la Libye s'estacquittéede l'obligation que lui impose le paragraphe 2
de l'article 5 de la convention de Montréal d'établirsa compétenceà
l'égard des auteursprésumés de la destruction de l'aéronefet ellea le
droit d'exercerla compétenceainsi établie;
c) elle a exercésa compétence à l'égarddes deux auteurs présumés de
l'infraction en vertu de son code pénal et le défendeurne devrait pas
entraver l'exercicede cette compétence;
d) elle a exercéles droits qu'elle tient de l'article 6 de la convention de
Montréal en prenant toutes les mesures nécessairespour assurer la
présencedes deux auteurs présumésde l'infraction, en procédant à
des enquêtespréliminaires, enavisant les Etats intéresséset en leur
indiquant qu'elleentendait exercer sa compétence,mais le défendeur
tente, selon elle,par ses actions et sesmenaces, d'empêcherl'applica-
tion de la convention;
e) la Libye ayant décidé de ne pas extrader lesdeux auteurs présumés de
l'infraction, l'article 7 de la convention de Montréal lui confère le
droit de les déférer ses autorités compétentesauxfins d'engagerdes
poursuites pénalesconformémentau droit libyen;
f) econventionde Montréal, de ne pas extrader lesdeuxauteurs présumésa
de l'infraction car il s'agit de ressortissants libyens et la Constitution
libyenne n'autorise pas leur extradition.
26. Le défendeur conteste que la convention de Montréal confère à la
Libye les droits qu'elle entend ainsi faire valoir. Il prétend en outre
qu'aucune des dispositions auxquelles la Libye se réfère n'imposed'obli-
gation aux Etats-Unis. Enfin, il rappelle qu'il n'ajamais invoqué lui-
mêmela convention de Montréal et observe que rien, dans cette conven-
tion, ne l'empêchaitde demander la livraison des auteurs présumésde
l'infraction en dehors du cadre de ladite convention.
27. L'articlepremier de la conventionde Montréal disposece qui suit:
«1. Commet une infraction pénaletoute personne qui illicitement
et intentionnellement:
a) accomplit un acte de violence à l'encontre d'une personne se
trouvant à bord d'un aéronefen vol, si cet acte est de natureà
compromettre la sécurité de cet aéronef;
b) détruit un aéronefen serviceou cause à un tel aéronefdes dom-
mages qui le rendent inapte au vol ou qui sont de naturà com-
promettre sa sécuritéen vol;
c) place ou fait placer sur un aéronefen service,par quelque moyen
que ce soit, un dispositif ou des substances propres à détruire
ledit aéronef ouà lui causer des dommagesqui le rendent inapte(a) the actions which brought about the destruction of the Pan Am
aircraft over Lockerbie constitute one of the offences covered by
Article 1 of the Montreal Convention and therefore the Montreal
Convention must be applied to those facts;
(b) Libya has complied with the obligation imposed by Article 5, para-
graph 2, of the Montreal Convention of establishingitsjurisdiction
over the alleged offenders in the destruction of the aircraft, and it
has the right to exercisethe jurisdiction so established;
(c) Libya has exerciseditsjurisdiction over the two allegedoffenderson
the basis of its Penal Code, and the Respondent should not interfere
with the exerciseof that jurisdiction;
(d) Libya has exercisedthe rightsconferred by Article6 of the Montreal
Convention by taking al1necessarymeasures to ensure the presence
of the two alleged offenders, making preliminary enquiries, notify-
ing the States concerned and indicating that it intended to exercise
jurisdiction, but according to Libya the Respondent, by its actions
and threats, is attempting, according to Libya, to prevent the appli-
cation of the Convention;
(e) Libya having decided not to extradite the two alleged offenders,
Article 7 of the Montreal Convention gives it the right to submit
them to its competent authorities for the purpose of prosecution in
accordance with Libyan law; and
(f) on the basis of Article 8, paragraph 3, of the Montreal Convention,
it has the right not to extradite the two alleged offenders because
they are Libyan nationals and the Libyan Constitution does not per-
mit their extradition.
26. The Respondent disputes that the Montreal Convention confers
on Libya the rights it claimsto enjoy.It contends, moreover, that none of
the provisions referred to by Libya imposes obligations on the United
States.Finally, it recallsthat iteveritselfinvokedthe Montreal Conven-
tion, and observes that nothing in that Convention prevented it from
requesting the surrender of the two allegedoffenders outside the frame-
work of the Convention.
27. Article 1 of the Montreal Convention provides as follows:
"1. Any person commits an offenceif he unlawfullyand intention-
ally:
(a) performs an act of violence against a person on board an air-
craft in flight if that act is likely to endanger the safety of that
aircraft; or
(b) destroys an aircraft in serviceor causes damage to such an air-
craft which renders it incapable of flight or which is likely to
endanger its safety in flight; or
(c) places or causes to be placed on an aircraft in service,by any
means whatsoever, a device or substance which is likely to
destroy that aircraft, or to cause damage to it which renders it au vol ou qui sont de nature à compromettre sa sécuritéen
vol ;
d) détruitou endommage des installationsou services de navigation
aérienneouen perturbe le fonctionnement, sil'un decesactes est
de nature à compromettre la sécurité d'aéronefe sn vol;
e) communique une information qu'elle sait êtrefausse et, de ce
fait, compromet la sécuritéd'un aéronefen vol.
2. Commet également uneinfraction pénaletoute personne qui:
a) tente de commettre l'une des infractions énumérées au para-
graphe 1 du présentarticle;
b) est le complice dela personne qui commet ou tente de commettre
l'une de ces infractions.
L'article 5 est ainsi conçu:
«1. Tout Etat contractant prend lesmesures nécessairespour éta-
blir sa compétenceaux fins de connaître des infractionsdans les cas
suivants :
a) si l'infraction est commise sur le territoire de cet Etat;
b) si l'infraction est commise à l'encontre ou à bord d'un aéronef
immatriculédans cet Etat;
c) si l'aéronef à bord duquel l'infraction est commise atterrit sur
son territoire avec l'auteur présuméde l'infraction se trouvant
encore à bord;
d) si l'infraction est commise à l'encontre ou a bord d'un aéronef
donnéen location sans équipage à une personne qui a le siège
principal de son exploitation ou, à défaut,sa résidenceperma-
nente dans ledit Etat.
2. Tout Etat contractant prend égalementles mesures nécessaires
pour établirsa compétence auxfins de connaître des infractions pré-
vues aux alinéas a), b) et c) du paragraphe 1 de l'article premier,
ainsi qu'au paragraphe 2 du mêmearticle, pour autant que ce der-
nier paragraphe concerne lesdites infractions,dans le cas où l'auteur
présuméde l'une d'ellesse trouve sur son territoire et où ledit Etat
ne l'extrade pas conformément à l'article 8 vers l'un des Etats visés
au paragraphe 1du présent article.
3. La présente convention n'écarte aucune compétence pénale
exercéeconformémentaux lois nationales. »
Pour sa part, l'article 6 porte:
(1. S'il estimeque lescirconstances lejustifient, tout Etat contrac-
tant sur le territoire duquel setrouvel'auteur ou l'auteur présumde
l'infraction assure la détention de cette personne ou prend toutes
mesures nécessairespour assurer sa présence.Cette détention et ces
mesures doivent êtreconformes à la législationdudit Etat; elles ne
peuvent être maintenues que pendant le délainécessaireà l'engage-
ment de poursuites pénalesou d'une procédure d'extradition. incapable of flight, or to cause damage to it which is likely to
endanger its safety in flight; or
(d) destroys or damages air navigation facilities or interferes with
their operation, if anysuch act is likely to endanger the safety
of aircraft in flight; or
(e) communicatesinformation which he knows to be false, thereby
endangering the safety of an aircraft in flight.
2. Any person also commits an offence if he:
(a) attempts to commit any of the offences mentioned in para-
graph 1 of this Article; or
(b) is an accomplice of a person who commits or attempts to com-
mit any such offence."
Article 5 provides:
"1. Each Contracting State shall take such measures as may be
necessary to establishitsjurisdiction over the offencesin the follow-
ing cases:
(a) when the offence is committed in the territory of that State;
(b) when the offence is committed against or on board an aircraft
registered in that State;
(c) when the aircraft on board which the offence is committed
lands in its territory with the allegedoffender still on board;
(d) when the offence is committed against or on board an aircraft
leased without crew to a lessee who has his principal place of
business or, if the lesseehas no such place of business, his per-
manent residence, in that State.
2. Each Contracting State shall likewise take such measures as
may be necessary to establish itsjurisdiction over the offencesmen-
tioned in Article 1, paragraph 1 (a), (b) and (c), and in Article 1,
paragraph 2, in so far as that paragraph relates to those offences,in
the case where the alleged offender is present in its territory and it
does not extradite him pursuant to Article 8 to any of the States
mentioned in paragraph 1 of this Article.
3. This Convention does not exclude any criminal jurisdiction
exercised in accordance with national law."
Article 6, for its part, states:
"1. Upon being satisfied that the circumstances so warrant, any
Contracting State in the territory of which the offender or the
alleged offender is present, shall take him into custody or take other
measures to ensure his presence. The custody and other measures
shall be as provided in the law of that State but may only be con-
tinued for such time as is necessary to enable any criminal or extra-
dition proceedings to be instituted. 2. Ledit Etat procède immédiatement à une enquêtepréliminaire
en vue d'établirles faits.
3. Toute personne détenueen application du paragraphe 1du pré-
sent article peut communiquer immédiatementavec le plus proche
représentantqualifiéde 1'Etatdont ellea la nationalité;toutes facilités
lui sont accordéesà cette fin.
4. Lorsqu'un Etat a mis une personne en détention conformé-
ment aux dispositions du présentarticle, il avise immédiatementde
cette détention,ainsi que des circonstances qui la justifient, les Etats
mentionnésau paragraphe 1 de l'article 5, 1'Etat dont la personne
détenue a la nationalité et, s'il le juge opportun, tous autres Etats
intéressés.L'Etat qui procède à l'enquête préliminairveiséeau pa-
ragraphe 2 du présent article en communique rapidement les
conclusions auxdits Etats et leur indique s'ilentend exercer sa com-
pétence.»
L'article 7 est libellédans les termes suivants:
«L7Etat contractant sur le territoire duquel l'auteur présuméde
l'une desinfractions est découvert,s'iln'extrade pas ce dernier, sou-
met l'affaire, sansaucune exception et que l'infraction ait ou non été
commise sur son territoire, a ses autoritéscompétentespour l'exer-
cice de l'action pénale.Ces autorités prennent leur décisiondans les
mêmesconditions que pour toute infraction de droit commun de
caractère grave conformémentaux lois de cet Etat. »
Enfin, aux termes de l'article 8:
((1. Les infractions sont de plein droit comprises comme cas
d'extradition dans tout traité d'extradition conclu entre Etats
contractants. Les Etats contractants s'engagent à comprendre les
infractions comme cas d'extradition dans tout traité d'extraditionà
conclure entre eux.
2. Si un Etat contractant qui subordonne l'extradition à l'exis-
tence d'un traitéest saisi d'une demande d'extradition par un autre
Etat contractant avec lequel il n'est pas liépar un traité d'extradi-
tion, il a la latitude de considérer la présente conventioncomme
constituant la base juridique de l'extradition en ce qui concerne les
infractions.L'extradition est subordonnéeaux autres conditions pré-
vues par le droit de1'Etatrequis.
3. Les Etats contractants qui ne subordonnent pas l'extraditionà
l'existence d'un traité reconnaissent les infractions comme cas
d'extradition entre eux dans les conditions prévuespar le droit de
1'Etatrequis.»
4. Entre Etats contractants, les infractions sont considérées aux
fins d'extradition comme ayant été commisetsant au lieu de leur per-
pétration que sur le territoire des Etats tenus d'établir leurcompé-
tence en vertu des alinéas), c) et d) du paragraphe 1 de l'article5.» 2. Such State shall immediately make a preliminary enquiry into
the facts.
3. Any person in custody pursuant to paragraph 1 of this Ar-
ticle shall be assisted in communicating immediately with the nearest
appropriate representative of the State of which he is a national.
4. When a State, pursuant to this Article,has taken a person into
custody, it shall immediately notify the States mentioned in Ar-
ticle 5, paragraph 1, the State of nationality of the detained person
and, if it considers it advisable,any other interested State of the fact
that such person is in custody and of the circumstances which war-
rant his detention. The State which makes the preliminary enquiry
contemplated in paragraph 2 of this Article shallpromptly report its
findings to the said States and shall indicate whether it intends to
exercisejurisdiction."
Article 7 is worded in the following terms:
"The Contracting State in the territory of which the alleged
offender is found shall, if it does not extradite him, be obliged, with-
out exception whatsoever and whether or not the offence was com-
mitted in its territory, to submit the case to its competent authorities
for the purpose of prosecution. Those authorities shall take their
decisionin the samemanner as in the case of any ordinary offenceof
a serious nature under the law of that State."
Finally, in the words of Article 8:
"1. The offences shall be deemed to be included as extraditable
offences in any extradition treaty existing between Contracting
States.Contracting Statesundertake to include the offencesas extra-
ditable offencesin every extradition treaty to be concluded between
them.
2. If a Contracting State which makes extradition conditional on
the existence of a treaty receives a request for extradition from
another Contracting State with which it has no extradition treaty, it
may at its option consider this Convention as the legal basis for
extradition in respect of the offences. Extradition shall be subject to
the other conditions provided by the law of the requested State.
3. Contracting States which do not make extradition conditional
on the existence of a treaty shall recognize the offences as extra-
ditable offences between themselves subject to the conditions pro-
vided by the law of the requested state.
4. Each of the offences shall be treated, for the purpose of extra-
dition between Contracting States, as if it had been committed not
only in the place in which it occurred but also in the territories of
the States required to establish their jurisdiction in accordance with
Article 5, paragraph 1 (b), (c) and (d) ." 28. Au vu des positions expriméespar les Parties, la Cour constate
qu'il existe entre elles non seulement un différend denature généraletel
que définiau paragraphe 24 ci-dessus,mais aussi un différendspécifique
qui concerne l'interprétationet l'application de l'article7 - lu conjoin-
tement avec l'article 1,l'article, l'article 6 et l'artic-e 8de la conven-
tion de Montréal; conformémentau paragraphe 1 de l'article 14 de la
convention, il appartient à la Cour de trancher ce différend.
29. Par ailleurs, la Libye a soutenu, dans sa requête et son mémoire,
que, dès lors qu'elleavait entamé son enquêtejudiciaire à l'égarddes
deux auteurs présumés de l'infraction, le défendeurétaittenu, aux termes
du paragraphe 1de l'article 11de la convention de Montréal,de remettre
aux autorités libyennes tous les éléments de preuveen sa possession
concernant l'infraction en cause.Or, de l'avisde la Libye, les Etats-Unis
ne se sont pas dûment acquittés de cette obligation puisqu'ils«n'ont
fourni aucune information)).
30. A ce propos, les Etats-Unis reconnaissent que «[l']articleII consti-
tue la seuledisposition,parmi cellesénumérée dsans les griefs dela Libye,
qui pourrait mettre une obligation quelconque à la charge d'un Etat
autre que la Libye)). Toutefois, ils prétendent que ((l'obligationexpri-
mée àl'article11a un caractèretrèsgénéral)) e,t qu'ilsont ((satisfà[cette]
obligation générale)) I.ls exposent cet égardque, «[l]e21 novembre 1991,
les Etats-Unis ont transmis à la Libye, par l'entremisedu Gouvernement
belge, des copies de l'acte d'accusationdes deux Libyens par le Grand
Jury)). Ils soutiennent également que ((l'article11 préservele droit des
Etats-Unis, en vertu de leur législation,de refuser de divulguerdes détails
supplémentairesde l'enquête,notamment des éléments de preuve éma-
nant de sources confidentielles».Les Etats-Unis observent au demeurant
ce qui suit:
«D'un point de vue pratique, il est difficilede comprendre com-
ment la Cour peut définird'autres formes spécifiquesd'entraide
devant êtreaccordées en vertude l'article 11.La solution consistant
pour la Cour à essayer d'introduire dans l'article 11des éléments de
détailconcernant le niveau d'assistance requis - par exemple la
communication des dépositions des témoinsou d'autres informa-
tions- serait tout simplement inapplicable et risquerait d'empêcher
toute coopérationdans un domaine que les rédacteursde la conven-
tion de Montréalse sont délibérémenatbstenus de réglementer. ))
31. L'article 11de la convention de Montréalest ainsi libellé:
«1. Les Etats contractants s'accordent l'entraide judiciaire la plus
large possible dans toute procédure pénale relativeaux infractions.
Dans tous les cas, la loi applicable pour l'exécutiond'une demande
d'entraide est celle de'Etatrequis.
2. Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 du présent ar- 28. In viewof the positions put forward by the Parties, the Court finds
that there exists betweenthem not only a dispute of a general nature, as
definedin paragraph 24 above, but also a specificdispute which concerns
the interpretation and application of Article 7 - read in conjunction
with Article 1,Article 5, Article 6 and Article 8- of the Montreal Con-
vention, and which, in accordance with Article 14, paragraph 1, of the
Convention, falls to be decided by the Court.
29. Moreover, Libya maintained in its Application and Memorial
that, once it had commenced its judicial investigation of the two alleged
offenders, the Respondent was, according to Article 11,paragraph 1, of
the Montreal Convention, under an obligation to hand over to the
Libyan authorities al1the evidencein its possession regardingthe offence.
In Libya's opinion, this obligation was not duly complied with, because
the United States "has supplied no information".
30. In this regard, the United States acknowledges that "Article 11is
the only provision, among those listed in Libya's complaint, that argu-
ably addressesany obligation of any State other than Libya". However,
it claims that "the obligation expressed in Article 11 is very general in
nature" and that it had "satisfied [this] general obligation". It states in
this connection that "on 21 November 1991, the United States trans-
mitted to Libya through the authorities of the Government of Belgium
copiesof the grandjury indictment of the two Libyans". It also maintains
that "Article 11 preserves the right of the United States, under United
States law, to refuse todiscloseadditional details regardingthe investiga-
tion, such as evidence derived from confidential sources". The United
States, in addition, makes the following observation:
"As a practical matter, it is difficult to see how the Court can
define specificforms of additional assistance that must be provided
under Article 11. For the Court to try to inject into Article 11spe-
cificity as to the level of assistance that is required - such as the
provision of witness statements or other information - would
simplybe unworkable and could inhibit CO-operationin an area that
the drafters of the Montreal Convention deliberately did not seek
to regulate."
31. Article 11 of the Montreal Convention is worded as follows:
"1. Contracting States shall afford one another the greatest meas-
ure of assistance in connection with criminal proceedings brought in
respect of the offences.The law of the State requested shall apply in
al1cases.
2. The provisions of paragraph 1 of this Article shall not affect ticlen'affectent pas lesobligationsdécoulant desdispositionsde tout
autre traité de caractère bilatéral ou multilatéral quirégitou régira,
en tout ou en partie, le domaine de l'entraide judiciaire en matière
pénale.»
32. Considérant les positions des Parties quant aux obligations
imposéespar l'article 11de la convention de Montréal, la Cour conclut
qu'il existe égalemententre elles un différendqui concerne l'interpréta-
tion et l'application de cette disposition; conformément au paragraphe 1
de l'article 14 de la convention, il appartientà la Cour de trancher ce
différend.
33. La Libye, dans le dernier étatde ses conclusions,demande enfin à
la Cour de juger que
«les Etats-Unis sont juridiquement tenus de respecter le droit de la
Libye à ce que [la convention de Montréal] ne soit pas écartéepar
des moyens qui seraient au demeurant en contradiction aveclesprin-
cipes de la Charte des Nations Unies et du droit international géné-
ral de caractère impératifui prohibent l'utilisation de la force et la
violation de la souveraineté, de l'intégritéterritoriale, de l'égalité
souverainedes Etats et de leur indépendance politique)).
34. Les Etats-Unis soutiennent qu'il n'appartient pas à la Cour, sur la
base du paragraphe 1de l'article 14de la convention de Montréal, dese
prononcer sur la licéitédes actions, au demeurant conformes au droit
international, engagéespar le défendeuren vue d'obtenir la livraison des
deux auteurs présumésde l'infraction. Ils en déduisent que la Cour n'a
pas compétencepour connaître des conclusions présentéessur ce point
par la Libye.
35. La Cour ne saurait accueillir l'argumentation ainsi formulée.Illui
appartient en effet dejuger, sur la base du paragraphe 1 de l'article 14de
la convention de Montréal, de la licéité desactions critiquées par la
Libye, dans la mesure où ces actions seraient contraires aux dispositions
de la convention de Montréal.
36. Dans l'instance, les Etats-Unis ont cependant affirméque, quand
bien mêmela convention de Montréal conférerait à la Libye les droits
qu'ellerevendique, ceux-ci nepourraient êtreexercésen l'espèce,au motif
qu'ils auraient étésupplantéspar les résolutions748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécuritéqui,en vertu des articles 25 et 103de la Charte des
Nations Unies, prévalent sur tous droits et obligations crééspar la
convention de Montréal. Le défendeur a aussi avancé que,du fait de
l'adoption de ces résolutions, le seul différendqui existerait désormais
opposerait la Libye au Conseil de sécurité;or il s'agirait là,l'évidence, obligations under any other treaty, bilateral or multilateral, which
governs or will govern, in whole or in part, mutual assistance in
criminal matters."
32. Having taken account of the positions of the Parties as to the
duties imposed by Article Il of the Montreal Convention, the Court con-
cludes that there equally exists between them a dispute which concerns
the interpretation and application of that provision, and which,in accord-
ance with Article 14,paragraph 1,of the Convention, falls to be decided
by the Court.
33. Libya, in the latest version of its submissions, finally asks the
Court to find that
"the United States is under a legal obligation to respect Libya's right
not to have the [Montreal] Convention set aside by means which
would in any case be at variance with the principles of the United
Nations Charter and with the mandatory rules of general interna-
tional law prohibiting the use of force and the violation of the sov-
ereignty, territorial integrity, sovereign equality and political inde-
pendence of States".
34. The United States maintains that it is not for the Court, on the
basis of Article 14,paragraph 1, of the Montreal Convention, to decide
on the lawfulness of actions which are in any event in confonnity with
international law, and which wereinstituted by the Respondent to secure
the surrender of the two allegedoffenders. It concludes from this that the
Court lacks jurisdiction to hear the submissions presented on this point
by Libya.
35. The Court cannot uphold the line of argument thus formulated.
Indeed, it is for the Court to decide, on the basis of Article 14, para-
graph 1, of the Montreal Convention, on the lawfulness of the actions
criticized by Libya, in so far as those actions would be contrary to the
provisions of the Montreal Convention.
36. In the present case, the United Stateshas contended, however, that
even if the Montreal Convention did confer on Libya the rights it claims,
those rights could not be exercisedin this case because they were super-
seded by Security Council resolutions 748 (1992)and 883 (1993)which,
by virtue of Articles 25 and 103of the United Nations Charter, have pri-
ority over al1rights and obligations arising out of the Montreal Conven-
tion. The Respondent has also argued that, because of the adoption of
those resolutions, the only dispute which existed from that point on was
between Libya and the SecurityCouncil; this, clearly, would not be a dis-d'un différendqui n'entrerait pas dans les prévisionsdu paragraphe 1 de
l'article 14de la convention de Montréal etdont la Cour ne pourrait dès
lors connaître.
37. La Cour ne saurait accueillir cette argumentation. Les résolu-
tions 748(1992)et 883(1993)du Conseil de sécurité ont en effetété adop-
téesaprèsle dépôt de la requêtel,e 3mars 1992.Or, conformément à une
jurisprudence constante, si la Cour était compétente à cettedate, ellel'est
demeurée; l'intervention ultérieure des résolutionssusvisées nesaurait
affecter une compétencedéjà établie(voir Nottebohm, exceptionprélimi-
naire, arrêt, C.I.J. Recueil 1953, p. 122; Droit de passage enterritoire
indien, exceptions préliminaires,arrêt, C.1.J. Recueil 1957, p. 142).
38. Au vu de ce qui précède,la Cour conclut que l'exception d'incom-
pétence tiréepar les Etats-Unis de l'absence alléguéede différendentre
les Parties concernant l'interprétation ou l'application de la convention
de Montréal doit êtrerejetée,et qu'ellea compétencepour connaître des
différends qui opposent la Libye aux Etats-Unis en ce qui concerne
l'interprétation ou l'applicationdes dispositions de cette convention.
39. La Cour passera maintenant à l'examen de l'exception desEtats-
Unis selon laquelle la requêtelibyenne n'est pas recevable.
40. Les Etats-Unis soulignent que les mesures auxquelles s'oppose la
Libye sont cellesprises par le Conseil de sécuritéaux termes des résolu-
tions 731 (1992), 748 (1992)et 883 (1993):
a) déterminant que le défaut, de lapart de la Libye, de répondreplei-
nement et efficacementaux requêteslui demandant de livrer les deux
accusés,en vue de leurjugement aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni,
constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales;
b) décidant que le Gouvernement libyen doit se conformer à ces re-
quêtes ;
c) imposant des sanctionséconomiqueset d'autres mesures pour obliger
la Libye à se conformer auxdites requêtes.
Selon les Etats-Unis, la Libye se serait efforcée, en saisissantla Cour,
de ((défairelesdécisionsdu Conseil)).Ils observentque, mêmesi la Libye
pouvait présenter des demandes valables en vertu de la convention de
Montréal, celles-ci seraient «supplantées» par les décisionsapplicables
prises par le Conseilde sécurité envertu du chapitre VI1de la Charte, qui
imposent des obligations différentes. Lesdites décisionasuraient ainsiéta-
bli les règlesrégissantle différendentre la Libye et les Etats-Unis; ces
règles- et non pas la convention de Montréal - définiraientles obli-pute falling within the terms of Article 14,paragraph 1, of the Montreal
Convention and thus not one which the Court could entertain.
37. The Court cannot uphold this line of argument. Security Council
resolutions 748(1992)and 883(1993)werein fact adopted after the filing
of the Application on 3 March 1992.In accordance with its established
jurisprudence, if the Court had jurisdiction on that date, it continues to
do so; the subsequent coming into existence of the above-mentioned
resolutions cannot affect itsjurisdiction once established (cf.Nottebohm,
Preliminary Objection,Judgment, I.C.J. Reports 1953, p. 122; Right of
Passage overIndian Territory, Preliminary Objections,Judgment, I.C.J.
Reports 1957, p. 142).
38. In the light of the foregoing, the Court concludes that the objec-
tion to jurisdiction raised by the United States on the basis of the alleged
absence of a dispute between the Parties concerningthe interpretation or
application of the Montreal Convention must be rejected, and that the
Court hasjurisdiction to hear the disputes between Libya and the United
States as to the interpretation or application of the provisions of that
Convention.
39. The Court will now turn to consider the objection of the United
States according to which the Libyan Application is not admissible.
40. The United States emphasizes that the measures which Libya
opposes are those taken by the Security Council under resolutions 731
(1992),748 (1992)and 883 (1993):
(a) determining that Libya's failure to respond fully and effectivelyto
the requests that Libya surrender the two accused for trial in the
United States or the United Kingdom constitutes a threat to inter-
national peace and security ;
(b) deciding that the Government of Libya must comply with those
requests; and
(c) imposing economic sanctions and other measures to compel Libya
to comply with those requests.
According to the United States, by seising the Court, Libya was
endeavouring to "undo the Council'sactions". The United States argues
that, evenif Libya could make valid claimsunder the Montreal Conven-
tion, these are "superseded" by the relevant decisions of the Security
Council under Chapter VI1of the Charter, which impose different obli-
gations. The said decisionsthus establish the rules governingthe dispute
between Libya and the United States. Those rules - and not the
Montreal Convention - define the obligations of the Parties; and the130 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
gations des Parties; et lesprétentionslibyennesfondéessur la convention
seraient donc irrecevables. Les Etats-Unis font en outre valoir que, si la
Cour devait
((affirmer[sa] compétencepour examiner au fond, par voie d'excep-
tion, la validitédesésoIutions731 (1992),748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécurité, larequêtede la Libye devraitnéanmoinsêtre
rejetéeau stade des exceptions préliminaires,parce que cetterequête
n'est pas recevable)).
41. La Libye soutient pour sa part qu'il ressort des termes mêmes
des résolutions 731 (1992), 748 (1992)et 883 (1993) que le Conseil de
sécuritén'ajamais exigéqu'elle livreses nationaux aux Etats-Unis ou au
Royaume-Uni; à l'audience, elle a indiqué que telle étaitbien toujours
«la thèse principalede la Libye)).Elle ajoute qu'il convient pour la Cour
d'interpréter lesdites résolutions«en conformité avec la Charte, qui
détermineleur validité))et que la Charte interdit au Conseil d'obliger
la Libye à livrer ses nationaux aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni. Et
la Libye de conclure que sa requêteest recevable «en ce que la Cour
peut utilement se prononcer sur l'interprétation et l'application de la
convention de Montréal ..indépendammentdes effetsjuridiques desréso-
lutions 748 (1992)et 883 (1993))).
La Libye observe au demeurant que les arguments des Etats-Unis
fondéssur les dispositionsde la Charte soulèventdes problèmes qui ne
présententpas un caractère exclusivementpréliminaire, maisrelèventdu
fond du différend.Elle fait valoir, en particulier,quela questionde l'effet
des résolutionsdu Conseil de sécuritén'a pas un caractèreexclusivement
préliminaire,dans la mesure où lesrésolutionsconsidérées sont invoquées
par les Etats-Unis pour écarter l'application de la convention de Mon-
tréal,et alors mêmeque la Libye est fondée à contester que ces résolu-
tions lui soient opposables.
42. La Libye appelle en outre l'attention de la Cour sur le principe
selon lequel «[l]a date critiquà retenir pour déterminer la recevabilité
d'une requêteest celle de son dépôt)) (Actions armées frontalièreset
transfrontalières (Nicaragua c. Honduras), compétenceet recevabilité,
arrêt,C.I.J. Recueil 1988,p. 95, par. 66).Elle observeà cet égard quesa
requête aétéintroduite le 3 mars 1992;que les résolutions748 (1992)et
883 (1993) du Conseil de sécuritéont étéadoptéesles 31 mars 1992et
11 novembre 1993 respectivement; et que la résolution 731 (1992) du
21janvier 1992n'a pas étéadoptéeen vertu du chapitre VI1de la Charte
des Nations Unies et ne constituait qu'une simple recommandation. En
conséquence,la Libye soutient que sa requêteest en tout étatde cause
recevable.
43. De l'avisde la Cour, il y a lieu de retenir cette dernière conclusion
de la Libye. La date du 3 mars 1992 à laquelle la Libye a déposésa
requêteest en effet la seule date pertinente aux fins d'apprécier larece-
vabilitéde celle-ci.Les résolutions48 (1992)et 883(1993)du Conseil de
sécuriténe sauraient êtreprises en considération à cet égard dès lorsclaims of Libya based on the Convention are therefore inadmissible.The
United States further contends that if the Court should see fit to
"assert [its]jurisdiction to examine on the merits, by way of objec-
tion, the validity of Security Council resolutions 731 (1992), 748
(1992)and 883 (1993),the Libyan Application should nonetheless be
dismissedat the preliminaryobjectionsstage becauseit is not admis-
sible".
41. For its part, Libya argues that it is clear from the actual terms of
resolutions 731 (1992),748(1992)and 883(1993)that the SecurityCoun-
cil has never required it to surrender its nationals to the United States or
the United Kingdom; it stated at the hearing that this remained "Libya's
principal argument". It added that the Court must interpret those reso-
lutions "in accordance with the Charter, which determined their valid-
ity", and that the Charter prohibited the Councilfrom requiring Libya to
hand over its nationals to the United States or the United Kingdom.
Libya concludesthat its Application is admissible"as the Court can use-
fully rule on the interpretation and application of the Montreal Conven-
tion . . independently of the legal effects of resolutions 748 (1992)and
883 (1993)".
Libya also observes that the arguments of the United States based on
the provisions of the Charter raise problems which do not possess an
exclusivelypreliminary character, but appertain to the merits of the dis-
pute. It argues, in particular, that the question of the effect of theecu-
rity Council resolutions is not of an exclusivelypreliminary character,
inasmuch as the resolutions under consideration are relied upon by the
United States in order to overcomethe application of the Montreal Con-
vention, and sinceLibya isjustified indisputing that these resolutions are
opposable to it.
42. Libya furthermore draws the Court's attention to the principle
that "[tlhe critical date for determiningthe admissibility ofan application
is the date on which it is filed" (Border and Transborder Armed Actions
(Nicaragua v. Honduras), Jurisdiction andAdmissibility, 1C.J. Reports
1988,p. 95,para. 66).It points out in this connection that its Application
was filed on 3 March 1992;that Security Council resolutions 748 (1992)
and 883(1993)were adopted on 31 March 1992and 11November 1993,
respectively; and that resolution 731 (1992)of 21 January 1992was not
adopted under Chapter VI1of the United Nations Charter and was only
a mere recommendation. Consequently, Libya argues, its Application is
admissiblein any event.
43. In the view of the Court, this last submission of Libya must be
upheld. The date, 3 March 1992,on which Libya filedits Application, is
in fact the only relevant date for determining the admissibility of the
Application. Security Council resolutions 748(1992)and 883(1993)can-
not be taken into consideration in this regard, sincethey wereadopted at131 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
qu'ellesont été adoptéeà s une date ultérieure.Quantà la résolution731
(1992)du Conseilde sécuritéa ,doptée avantle dépôtde la requête,ellene
saurait constituer un obstaclejuridiqueà la recevabilitéde celle-cicar il
s'agissait d'unesimple recommandation sans effet contraignant, comme
le reconnaissent d'ailleursles Etats-Unis eux-mêmes. a requêtelibyenne
ne saurait par suite êtredéclarée irrecevabpour ces motifs.
44. Au vu de ce qui précède,la Cour conclut qu'il y a lieu de rejeter
l'exception d'irrecevabilité tirpar les Etats-Unis des résolutions748
(1992)et 883 (1993)du Conseil de sécurité, etque la requêtede la Libye
est recevable.
45. La Cour se penchera à présentsur la troisième exceptionsoulevée
par les Etats-Unis. Selon cette exception, il n'yaurait plus lieuatuer
sur les demandes de la Libye car les résolutions748 (1992)et 883 (1993)
du Conseil de sécuritéles auraient privéesde tout objet; tout arrêtque la
Cour pourrait rendre sur lesdites demandes serait désormaiscondamné à
être dépourvu d'effetpratique.
La Cour a déjàreconnu àplusieurs reprises par le passéque des évé-
nements postérieurs à l'introduction d'une requêtepeuvent «prive[r]
ensuitela requêtede son objet))(Actions arméesfrontalièreset transfron-
talières(Nicaragua c. Honduras), compétenceet recevabilité,arrêt,C.I.J.
Recueil 1988, p. 95, par. 66) et «qu'il n'y a dèslors pas liàustatuer))
(Essais nucléaires (Australie c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 1974,
p. 272, par. 62) (cf.amerounseptentrional, arrêt,C.I.J. Recueil 1963,
p. 38).
Ainsi formulée, l'exceptiondu défendeurseprésentecommeune excep-
tion de non-lieu et doit êtreexaminéedans le cadre de cette jurispru-
dence.
46. La Cour doit s'assurer qu'une telle exception entre bien dans les
prévisionsde l'article79du Règlement,invoquépar le défendeur. Cetar-
ticle vise, en son paragraphe 1,[t]oute exception à la compétencede la
Cour ou à la recevabilitéde la requêteou toute autre exception))(lesita-
liques sont de la Cour); son champ d'application ratione materiae n'est
donc pas limité auxseulesexceptions d'incompétenceou d'irrecevabilité.
Mais, pour être couvertepar l'article 79, une exception doit en outre
revêtirun caractère ((préliminaire)).Le paragraphe 1 de l'article 79 du
Règlement qualifie de «préliminaire» une exception «sur laquelle le
défendeurdemande une décisionavant que la procédure surle fond se
poursuive ».Il ne fait pas de doute que, d'un point de vue formel, l'excep-
tion icienvisagéesatisfasse cettecondition. La Cour relèveraau demeu-
rant que le défendeur cherche,en l'occurrence, faire prévaloirla préten-
tion selon laquelle les décisionsdu Conseil de sécuriténe pourraient
donner lieu à aucun recours contentieux devant la Cour, alors même
qu'ellesstatueraient sur des droits que le demandeur prétend tirer d'un
texte conventionnel,ou pour le moins qu'ellesaffecteraient directementa later date. As to SecurityCouncilresolution 731(1992),adopted before
the filingof the Application, it could not form a legal impediment to the
admissibilityof the latterbecauseit was a mere recommendation without
binding effect, as was recognizedmoreover by the United States. Conse-
quently, Libya's Application cannot be held inadmissible on these
grounds.
44. In the light of the foregoing, the Court concludes that the objec-
tion to admissibility derivedby the United States from Security Council
resolutions 748 (1992)and 883 (1993)must be rejected, and that Libya's
Application is admissible.
45. The Court will now consider the third objection raised by the
United States. According to that objection, Libya's claimshave become
moot because Security Council resolutions 748 (1992)and 883 (1993)
have rendered them without object ;anyjudgment whichthe Court rnight
deliver on the said claims would thenceforth be devoid of practical pur-
pose.
The Court has already acknowledged,on severaloccasions in the past,
that events subsequent to the filing of an application may "render an
application without object" (Border and Transborder Arrned Actions
(Nicaragua v. Honduras), Jurisdiction and Adrnissibility, Judgment,
I.C.J. Reports 1988, p. 95, para. 66) and "therefore the Court is not
called upon to give a decision thereon" (Nuclear Tests (Australia
v. France), Judgment,I.C.J. Reports 1974,p. 272,para. 62)(cf.Northern
Carneroons,Judgment, I.C.J. Reports 1963,p. 38).
Thus formulated, the Respondent's objection isthat there is no ground
for proceeding to judgment on the merits, which objectionmust be exam-
ined within the framework of this jurisprudence.
46. The Court must satisfy itself that such an objection does indeed
fa11within the provisions of Article 79 of the Rules, relied upon by the
Respondent. In paragraph 1,this Article refersto "Any objection . ..to
the jurisdiction of the Court or to the admissibility of the application,
or other objection" (emphasis added); its field of application ratione
materiae is thus not limitedsolelyto objectionsregardingjurisdiction and
admissibility. However,if it is to be covered by Article 79, an objection
must also possessa "preliminary" character. Paragraph 1 of Article 79 of
the Rules of Court characterizesas "preliminary" an objection "the deci-
sion upon which is requested before any further proceedings". There can
be no doubt that the objection envisagedhere formally meetsthis condi-
tion. The Court would also recall that, in this instance,the Respondent is
advancing the argument that the decisions of the Security Council could
not form the subject of any contentious proceedings before the Court,
since they allegedly determine the rights which the Applicant claims to
derive from a treaty text, or at least that they directly affectthose rights;
and that the Respondent thus aims to preclude at the outset any consid-ceux-ci; et que le défendeurentend ainsi écarterd'embléetout examen
par la Cour des demandes introduites par le demandeur et mettre immé-
diatement fin à la procédure engagéepar celui-ci. Dans la mesure où
I'exceptionde non-lieu soulevéepar les Etats-Unis a effectivement pour
objet d'empêcherin limine tout examen de l'affaire au fond, où son
«effet, si elle étaitretenue par la Cour, serait de mettre finà la procé-
dure)) et où«il conviendrait,par conséquent,pour la Cour de s'[en]occu-
per avant d'aborder le fond» (Chemin de fer Panevezys-Saldutiskis,
arrêt,1939, C.P.J.Z. sérieAIB no 76, p. 16)'cette exception possèdeun
caractère préliminaire etentre bien dans les prévisionsde l'article 79 du
Règlement.
Il est par ailleurs constant que ladite exception a été formulear écrit
dans le délaifixépour le dépôtdu contre-mémoire eta de ce fait été pré-
sentéeselon les modalitésprescrites à l'article 79.
47. La Libye ne conteste aucun de ces points. Elle ne soutient nulle-
ment que l'exception ainsi tiréepar les Etats-Unis des résolutions 748
(1992) et 883 (1993)du Conseil de sécurité serait une exceptionde fond
qui n'entrerait pas dans lesprévisionsde l'article79du Règlement;et elle
ne prétendpas davantage que cette exception n'aurait pas étéintroduite
de manièreappropriée.Ce que la Libye soutient, c'est que ladite excep-
tion - comme l'exception d'irrecevabilitésoulevéepar les Etats-Unis, et
pour les mêmes motifs (voir paragraphe 41 ci-dessus)- relève dela caté-
gorie de celles que le paragraphe 7 de l'article 79 du Règlementqualifie
d'exceptions «nYa[yant]pas dans les circonstances de l'espèceun carac-
tèreexclusivement préliminaire ».
Les Etats-Unis considèrent au contraire que l'exception en cause
possèdeun ((caractèreexclusivementpréliminaire»au sensde cette même
disposition; ils font notamment valoir, à l'appui de leur thèse,que cette
exception n'exigepas «de se prononcer sur les faits contestésou d'exa-
miner des éléments de preuve».
C'est donc sur la question du caractère «exclusivement» ou «non
exclusivement» préliminaire de l'exception ici envisagéeque les Parties
s'opposent et que la Cour doit à présentse prononcer.
48. La formulation qui apparaît aujourd'hui au paragraphe 7 de l'ar-
ticle 79 du Règlementa étéadoptée par la Cour en 1972.La Cour a eu
l'occasion d'en examinerla portée dans les arrêtsqu'elle a rendus, en
l'affaire des Activitésmilitaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci, le 26 novembre 1984 (compétenceet recevabilité,arrêt, C.I. J.
Recueil 1984, p. 425-426) et le 26 juin 1986Vond, arrêt,C.I.J. Recueil
1986, p. 29-31), respectivement. Comme la Cour l'a rappelé dans le
second de ces arrêts,
«[d]ans le Règlement remontant a 1936 (qui sur ce point repre-
nait une pratique elle-mêmeantérieure),la Cour avait la facultédeeration by the Court of the claims submitted by the Applicant and imme-
diately terminate the proceedings brought by it. In so far as the purpose
of the objection raised by the United States that there is no ground for
proceeding to jüdgment on the merits is, effectively,to prevent, in limine,
any consideration of the case on the merits, so that its "effect [would]be,
if the objection is upheld, to interrupt further proceedings in the case",
and "it [would] therefore be appropriate for the Court to deal with [it]
before enquiring into the merits" (Panevezys-Saldutiskis Railway, Judg-
ment, 1939, P.C. 1.J., Series AIB, No. 76, p. 16),this objection possesses
a preliminary character and does indeed fa11within the provisions of
Article 79 of the Rules of Court.
Moreover it is incontrovertible that the objection concerned was sub-
mitted in writing within the time-limit fixedfor the filingof the Counter-
Memorial, and was thus submitted in accordance with the forma1condi-
tions laid down in Article 79.
47. Libya does not dispute any of these points. It does not contend
that the objection thus derived by the United Statesfrom Secürity Coun-
cil resolutions 748 (1992)and 883 (1993) is an objection on the merits,
which does not fa11within the provisions of Article 79 of the Rules of
Court; nor does it claim that the objection was not properly submitted.
What Libya contends is that this objection - like the objection of inad-
missibilityraised by the United States, and for the samereasons (seepara-
graph 41 above) - falls within the category of those which Article 79,
paragraph 7, of the Rules of Court characterizesas objections "not pos-
sessting], in the circümstances of the case, an exclusively preliminary
character".
On the contrary, the United States considers that the objection con-
cerned possessesan "exclusively preliminarycharacter" within the mean-
ing of that provision. It contends, in particular, in support of this argu-
ment, that this objection does not require "the resolution of disputed
facts or the consideration of evidence".
Thus it is solely on the question of the "exclusively" or "non-exclu-
sively" preliminary character of the objection under consideration that
the Parties are divided and on which the Court must now make a deter-
mination.
48. The present wording of Article 79, paragraph 7, of the Rules of
Court was adopted by the Court in 1972.The Court has had occasion to
examineits precise scope and significancein the Judgrnents it deliveredin
the case concerning Military and Paramilitary Activities in and against
Nicaragua (Nicaragua v. United States of America), on 26 November
1984 (Jurisdiction and Admissibility, Judgment, 1.C.J. Reports 1984,
pp. 425-426) and on 26 June 1986 (Merits, Judgment, 1C.J. Reports
1986, pp. 29-31),respectively.As the Court pointed out in the second of
those Judgments,
"Under the Rules of Court dating back to 1936 (which on this
point reflected still earlierpractice), the Court had the power to join 133 CONVENTION DE MONTRÉAL DE 1971(ARRÊT)
joindre une exception au fond ((lorsque les intérêts de la bonne
administration de la justice lui en [faisait] un devoir))Chemin de
fer Panevezys-Saldutiskis, C.P.J.I. série AIB no 75, p. 56) et en
particulier lorsque en statuant sur les exceptions elle risquaitoit
de trancher des questionsqui appartiennent au fond de l'affaire, soit
d'en préjuger lasolution» (ibid.) (C.I.J. Recueil 1986, p. 29-30,
par. 39).
Toutefois, l'exercicede cette faculté présentait un danger,
«à savoirque la Cour ne seprononce en définitiveque sur la base de
l'exception préliminaire, etcela après avoir imposé auxparties un
débatexhaustif sur le fond ...ce qui [étaitbien] arrivé dansles faits
(Barcelona Traction,Light and Power Company,Limited, deuxième
phase, C.I.J. Recueil 1970, p. 3). Pour certains, on ne faisait ainsi
queprolonger inutilement une procédurelongue et coûteuse. »(Ibid.,
p. 30, par. 39.)
La Cour s'était alorstrouvéedevant le choix suivant:
«reviserle Règlementde manière à exclure...toute jonction au fond,
ce qui aurait obligé se prononcer sur toutes les exceptions au stade
préliminaire,ou rechercher une solution plus souple)) (ibid., p. 30,
par. 40).
La solution retenue en 1972avait finalement consisténon pas à exclure
toute facultéd'examend'une exceptionpréliminaireau fond, mais àlimi-
ter l'exercicede cette faculté,en en précisant plusstrictement les condi-
tions. Et la Cour de conclure, à propos de la nouvelle disposition alors
adoptée :
«Elle présentedonc un avantage certain: en qualifiant certaines
exceptions de préliminaires,elle montre bien que, lorsqu'elles pré-
sentent exclusivement ce caractère, les exceptions doivent êtretran-
chéessans délai, maisque, dans le cas contraire, et notamment lors-
que ce caractère n'est pas exclusif puisqu'elles comportentà la fois
des aspects préliminaireset des aspects de fond, elles devront être
régléesau stade du fond. Ce procédé tendd'autre part à décourager
toute prolongation inutile de la procédure au stade de la compé-
tence.))(Ibid., p. 31, par. 41.)
49. La Cour doit donc rechercher en l'espècesi l'exception des Etats-
Unis ici considéréecomporte ou non «à la fois des aspects préliminaires
et des aspects de fond».
Cette exception s'attache àde multiples aspects du litige. En soutenant
que les résolutions 748 (1992)et 883 (1993)du Conseil de sécuritéont
privé les demandes de la Libye de tout objet, les Etats-Unis tentent
d'obtenir de la Cour une décisionde non-lieu qui mettrait immédiate-
ment fin à l'instance. Or, en sollicitant une telle décision,les Etats-Unis
en sollicitent, en réali,u moins deux autres, que le prononcé d'un non-
lieu postulerait nécessairement:d'une part une décisionétablissant que an objection to the merits 'wheneverthe interests of the good admin-
istration of justice require it' (Panevezys-Saldutiskis Railway,
P.C.I.J., Series AIB, No. 75, p. 56),and in particular where the
Court, if it were to decide on the objection, 'would run the risk of
adjudicating on questions which appertain to the merits of the case
or of prejudging their solution' (ibid.)"(I.C.J. Reports 1986,pp. 29-
30, para. 39.)
However, the exerciseof that power carried a risk,
"namely that the Court would ultimately decide the case on the
preliminary objection, after requiring the parties to fully plead the
merits - and this did in fact occur (Barcelona Traction, Light
and Power Company, Limited, Second Phase, 1C.J. Reports 1970,
p. 3).The result wasregarded in somequarters as an unnecessarypro-
longation of an expensive and time-consuming procedure." (Zbid.,
p. 30,para. 39.)
The Court was then faced with the following choice:
"to revisethe Rules so as to exclude .. .the possibility ofjoinder to
the merits, so that every objection would have to be resolved at the
preliminary stage, or to seek a solution which would be more flex-
ible" (ibid., p. 30, para. 40).
The solution adopted in 1972was ultimately not to excludethe power to
examine a preliminary objection in the merits phase, but to limit the exer-
cise of that power, by laying down the conditions more strictly. The
Court concluded, in relation to the new provision thus adopted:
"It thus presents one clear advantage: that it qualifies certain
objections as preliminary, making it quite clear that when they are
exclusively of that character they will have to be decided upon
immediately, but if they arenot, especiallywhen the character of the
objections is not exclusivelypreliminary because they contain both
preliminary aspects and other aspects relating to the merits, they will
have to be dealt with at the stage of the merits. This approach also
tends to discourage the unnecessary prolongation of proceedings at
the jurisdictional stage." (Ibid., p. 31, para. 41.)
49. The Court must therefore ascertain whether, in the present case,
the United States objection considered here contains "both preliminary
aspects and other aspects relating to the merits" or not.
That objection relates to many aspects of the dispute. By maintaining
that Security Council resolutions 748 (1992) and 883 (1993) have ren-
dered the Libyan claims without object, the United States seeksto obtain
from the Court a decision not to proceed to judgment on the merits,
which would immediately terminate the proceedings. However, by
requesting such a decision, the United States is requesting, in reality, at
least two others which the decision not to proceed to judgment on theles droits revendiquéspar la Libye aux termes de la convention de
Montréal sontincompatibles avec les obligationsdécoulant pour elledes
résolutionsdu Conseil de sécurité;et d'autre part une décisionfaisant
prévaloirces obligations sur ces droits par le jeu des articles 25 et 103
de la Charte.
Il ne fait dèslors pas de doute pour la Cour que les droits de la Libye
au fond seraient non seulementtouchéspar une décisionde non-lieu ren-
due à ce stade de la procédure,mais constitueraient, à maints égards,
l'objet mêmede cette décision. L'exceptionsoulevéepar les Etats-Unis
sur ce point a le caractère d'une défenseau fond. De l'avisde la Cour,
cette exceptionfait bien plusqu'«eMleurerdes sujetsappartenant au fond
de l'affaire))(Certains intérêts allemands en Haute-Silésie polonaise,
compétence, arrêt no6, 1925, C.P.J.I. sérieA no6, p. 15) ;elleest «inex-
tricablement liée» àcelui-ci(Barcelona Traction, Light and Power Com-
pany, Limited, exceptionspréliminaires, arrêt, CJ.I..Recueil1964,p. 46).
La Cour relèvera d'ailleursque les Etats-Unis ont eux-mêmesabordé
de nombreux problèmesde fond dans leurs écritures et leurs plaidoiriesà
ce stade et qu'ils ont soulignéque ces problèmesavaient fait l'objet de
débatsexhaustifs devant la Cour; ce gouvernement a ainsi implicitement
reconnu l'existenceentre l'exception soulevée et le fond du litige d'une
((connexité ..intime)) (Barcelona Traction, Light and Power Company,
Limited, exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 1964, p. 46, et
référence àPajzs, Csaky, Esterhazy, ordonnancedu23 mai 1936, C.P.J.I.
série AIE no66, p. 9).
Si la Cour devait statuer sur cette exception, elle statuerait donc
immanquablementsur le fond; or, en invoquant le bénéfice des disposi-
tions de l'article79 du Règlement,le défendeur amis en Œuvre unepro-
cédurequi vise précisément à empêcherla Cour de ce faire.
La Cour conclutde cequi précèdeque l'exceptiondes Etats-Unis selon
laquelle il n'y aurait plus lieu statuer sur les demandes libyennes car
elles auraient étéprivéesde tout objet n'a pas un ((caractèreexclusive-
ment préliminaire))au sens de cet article.
50. Ayant établisacompétenceet conclu à la recevabilitéde la requête,
la Cour pourra connaître de cette exceptiondans le cadre de son examen
de l'affaire au fond.
51. Enfin. lesEtats-Unis ont sollicitéde la Courà titre subsidiaire. au
cas où, en dépit deleurs exceptions, celle-cise déclarerait compétenteet
jugerait la requêterecevable,qu'elle«rés[olve]l'affaireau fond dès main-
tenant)) en décidant, à titre préliminaire, qu'ilne peut être donné suite
aux mesures demandéespar la Libye.
Comme la Cour l'a déjàrappelé,c'est ledéfendeurqui a entendu invo-
quer en l'espècele bénéficedes dispositionsde l'article79 du Règlement.
En soulevant des exceptions préliminaires,il a fait un choix procéduralmerits would necessarilypostulate : on the one hand a decisionestablish-
ing that the rights claimed by Libya under the Montreal Convention are
incompatible with its obligations under the Security Council resolutions;
and, on the other hand, a decision that those obligations prevail over
those rights by virtue of Articles 25 and 103 ofthe Charter.
The Court therefore has no doubt that Libya's rights on the merits
would not only be affected by a decision not to proceed to judgment on
the merits, at this stagein the proceedings,but would constitute, in many
respects, the verysubject-matter of that decision.The objection raisedby
the United States on that point has the character of a defence on the
merits. In the view of the court, this objection does much more than
"touch[ing] upon subjects belonging to the merits of the case" (Certain
GermanInterests in Polish Upper Silesia, Jurisdiction, JudgmentNo. 6,
1925,P.C.I.J., Series A, No. 6, p. 15);it is "inextricably interwoven" with
the merits (Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited,
Preliminary Objections,Judgment, I.C.J. Reports 1964, p. 46).
The Court notes furthermore that the United States itself broached
many substantiveproblems in its written and oral pleadingsin this phase,
and pointed out that those problems had been the subject of exhaustive
exchanges before the Court; the United States Government thus impli-
citly acknowledged that the objection raised and the merits of the case
were "closely interconnected" (Barcelona Traction, Light and Power
Company, Limited, Preliminary Objections, Judgment, I.C.J. Reports
1964, p. 46, and the referenceto Pajzs, Csaky, Esterhazy, P.C.I.J., Series
AIB, No. 66, p. 9).
If the Court were to rule on that objection, it would therefore inevi-
tably be ruling on the merits; in relyingon the provisions of Article 79 of
the Rules of Court, the Respondent has set in motion a procedure
the precise aim of which is to prevent the Court from so doing.
The Court concludes from the foregoing that the objection of the
United States according to which the Libyan claims have becomemoot
as having been rendered without object does not have "an exclusively
preliminary character" within the meaning of that Article.
50. Having establisheditsjurisdiction and concluded that the Applica-
tion is admissible,the Court will be able to consider this objection when
it reaches the merits of the case.
51. Lastly,the United Statesrequestedthe Court, in the alternative, in
the event that, notwithstanding the United States' objections, it should
declare that it has jurisdiction and deem the Application admissible, to
"resolvethe casein substance now" by deciding,as a preliminary matter,
that the relief sought by Libya is precluded.
As the Court has already indicated, it is the Respondent which sought
to rely, in this case, on the provisions of Article 79 of theles. By rais-
ing preliminary objections, it has made a procedural choice the effect ofdont l'effetest, selon les termes exprèsdu paragraphe 3 de l'article 79, de
suspendre la procéduresur le fond. La Cour ne saurait par suite faire
droit àla demande des Etats-Unis.
52. Conformémentau paragraphe 7 de l'article 79 du Règlement, les
délaispour la suite de la procédure seront fixésultérieurement par la
Cour.
53. Par ces motifs,
1)a) Par treize voix contre deux,
Rejette l'exception d'incompétence tirpear lesEtats-Unis de l'absence
alléguéede différend entre les Parties concernant l'interprétation ou
l'application de la convention de Montréaldu 23 septembre 1971 ;
POUR : . Weeramantry, vice-président,faisant fonction de présidenetn
l'affaire;MM.Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva,Herczegh,Shi,Fleischhauer,
Koroma, Vereshchetin, Parra-Aranguren, Kooijmans,Rezek, juges;
M. El-Kosheri,jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;M. Oda, juge;
b) Par treize voix contre deux,
Dit qu'elle a compétence,sur la base du paragraphe 1de l'article 14de
la convention de Montréaldu 23 septembre 1971,pour connaître des dif-
férendsqui opposent la Libye aux Etats-Unis en ce qui concerne l'inter-
prétation ou l'application des dispositions de cette convention;
POUR: M. Weeramantry, vice-président,faisant fonction de présidenetn
l'affaireM. Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva,Herczegh,Shi,Fleischhauer,
Koroma, Vereshchetin, Parra-Aranguren, Kooijmans,Re~k, juges;
M. El-Kosheri,jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;M. Oda, juge;
2) a) Par douze voix contre trois,
Rejette l'exception d'irrecevabilité tirépear les Etats-Unis des résolu-
tions748 (1992)et 883 (1993)du Conseil de sécurité;
POUR: M. Weeramantry, vice-président,faisant fonction de président en
l'affaire;MM.Bedjaoui, GuillaumeR, anjeva,Shi,Fleischhauer,Koroma,
Vereshchetin,Parra-Aranguren, Kooijmans, ezek,juges; M.El-Kosheri,
jugead hoc;
CONTRE: M. Schwebel,présidentde la Cour;MM. Oda, Herczegh,juges;which, according to the express terms of Article 79, paragraph 3, is to
suspend the proceedings on the merits. The Court cannot therefore
uphold the claim of the United States.
52. In accordance with Article 79, paragraph 7, of the Rules of Court,
time-limits for the further proceedings shall be fixedsubsequently by the
Court.
53. For these reasons,
(1) (a) By thirteen votes to two,
Rejects the objection to jurisdiction raised by the United States on the
basis of the alleged absence of a dispute between the Parties concerning
the interpretation or application of the Montreal Convention of 23 Sep-
tember 1971 ;
IN FAVOUR : Vice-PresidentWeeramantry, Acting President; Judges Bedjaoui,
Guillaume, Ranjeva,Herczegh, Shi,Fleischhauer,Koroma,Vereshchetin,
Parra-Aranguren,Kooijmans,Rezek; Judge ad hoc El-Kosheri;
AGAINST : President Schwebel ;Judge Oda ;
(b) By thirteen votes to two,
Findsthat it hasjurisdiction, on the basis ofArticle 14,paragraph 1,of
the Montreal Convention of 23 September 1971, to hear the disputes
between Libya and the United States as to the interpretation or applica-
tion of the provisions of that Convention;
IN FAVOUR : Vice-PresidentWeerarnantry, Acting President ;Judges Bedjaoui,
Guillaume, Ranjeva,Herczegh, Shi,Fleischhauer,Koroma,Vereshchetin,
Parra-Aranguren,Kooijmans,Rezek ; Judgead hoc El-Kosheri ;
AGAINST : President Schwebel ; Judge Oda ;
(2) (a) By twelve votes to three,
Rejects the objection to admissibility derived by the United States
from Security Council resolutions 748 (1992) and 883 (1993);
IN FAVOUR : Vice-PresidentWeeramantry, Acting President; Judges Bedjaoui,
Guillaume, Ranjeva, Shi, FleischhauerK , oroma, Vereshchetin,Parra-
Aranguren,Kooijmans,Rezek ; Judge ad hoc El-Kosheri ;
AGAINST :President Schwebe lJudges Oda, Herczegh; b) Par douze voix contre trois,
Dit que la requête déposépear la Libye le 3 mars 1992est recevable;
POUR:M. Weeramantry, vice-présidentf,aisant fonction de présidenten
l'affaire;MM. Bedjaoui,Guillaume,Ranjeva, Shi,Fleischhar,oroma,
Vereshchetin,Parra-Aranguren,Kooijmans,Rezek,juges; M. El-Kosheri,
juge ad hoc;
CONTRM E:. Schwebel,présidentde la Cour; MM. Oda,Herczegh,jug;s
3) Par dix voix contre cinq,
Déclareque l'exception desEtats-Unis, selon laquelleil n'y aurait plus
lieuà statuer sur les demandes de la Libye car les résolutions748 (1992)
et 883(1993)du Conseil de sécuritles auraient privéesdetout objet, n'a
pas, dans les circonstances de l'espèce,un caractère exclusivement préli-
minaire.
POUR: M. Weeramantry, vice-présidentf,aisant fonction de présidenten
l'affaire; MM. Bedjaoui, Ranjeva, Shi,Koroma, Vereshchetin,Parra-
Aranguren, Kooijmans,Rezek,juges; M. El-Kosheri,juge ad hoc;
CONTRM E:.chwebe1,présidednt la Cour;MM.Oda, Guillaume,Herczegh,
Fleischhauer,juges.
Fait en français et en anglais, le texte français faisant foi, au Palais de
la Paix,à La Haye, le vingt-sept févriermil neuf cent quatre-vingt-dix-
huit, en trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives de
la Cour et les autres seront transmis respectivement au Gouvernement
de la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste et au
Gouvernement des Etats-Unis d'Amérique.
Le vice-président,
(Signé) Christopher G. WEERAMANTRY.
Le greffier,
(Signé) Eduardo VALENCIA-OSPINA.
MM. BEDJAOUR I,ANJEVA et KOROMA j,ges, joignent une déclaration
commune à l'arrêt;MM. GUILLAUMeE t FLEISCHHAUE Rg,es,joignent
une déclaration commune àI'~~~~~@%..HERczEjG uHe,, joint une décla-
rationà l'arrêt.
MM. KOOIJMAN et REZEKj,uges,ijoignenà l'arrêtles exposésde leur
opinion individuelle.
25 (b) By twelve votes to three,
Finds that the Application filedby Libya on 3 March 1992is admissible;
IN FAVOUR : Vice-PresideWeeramantry, Acting President; JudgeBedjaoui,
Guillaume, Ranjeva, Shi, Fleischhauer,Koroma, Vereshchetin, Parra-
Aranguren, Kooijmans,Rezek; Judge ad hocEl-Kosheri;
AGAINST :PresidentSchwebel ; JudgesOda, Herczegh;
(3) By ten votes to five,
Declares that the objection raised by the United States according to
which the claims of Libya became moot because Security Council reso-
lutions 748 (1992) and 883 (1993) rendered them without object, does
not, in the circumstances of the case, have an exclusively preliminary
character.
IN FAVOUR :Vice-PresidenWeeramantry, Acting President; JudgeBedjaoui,
Ranjeva, Shi, Koroma, Vereshchetin, Parra-Aranguren, Kooijmans,
Rezek; Judge ad hocEl-Kosheri;
AGAINST : President Schwebel ; Judges Oda, Guillaume, Herczegh,
Fleischhauer.
Done in French and in English, the French text being authoritative, at
the Peace Palace, The Hague, this twenty-seventh day of February, one
thousand nine hundred and ninety-eight, in three copies, one of which
will be placed in the archives of the Court and the others transmitted to
the Government of the Great Socialist People's Libyan Arab Jamahiriya
and the Government of the United States of America, respectively.
(Signed) Christopher G. WEERAMANTRY,
Vice-President.
(Signed) Eduardo VALENCIA-OSPINA,
Registrar.
Judges BEDJAOUI, RANJEVA and KOROMA append ajoint declaration to
theJudgment of the Court; Judges GUILLAUM and FLEISCHHAUa Eppend
a joint declaration to the Judgment of the Court; Judge HERCZEGH
appends a declaration to the Judgment of the Court.
Judges KOOIJMANaS nd REZEKappend separate opinions to the Judg-
ment of the Court.
25 M. SCHWEBE pr, sidentde la Cour, et M. ODA,juge, joignent àl'arrêt
les exposésde leur opinion dissidente.
(Paraphé) C.G.W.
(Paraphé) E.V.O. President SCHWEBE anLd Judge ODAappend dissenting opinions to the
Judgment of the Court.
(Initialled) C.G.W.
(Znitialled)E.V.O.
Exceptions préliminaires
Arrêt du 27 février 1998