Différend territorial et maritime entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragua c. Honduras) - La Cour dit que le Honduras a la souveraineté sur Bobel Cay, Savanna Cay, Port Ro

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14053
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2007/23
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

Palais de la Paix, Carnegieplein 2, 2517 KJ La Haye, Pays-Bas
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Communiqué de presse
Non officiel

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N 2007/23

Le 8 octobre 2007

Différend territorial et maritime entre le Nicaragua et le Honduras
dans la mer des Caraïbes (Nicaragua c. Honduras)

La Cour dit que le Honduras a la souveraineté sur Bobel Cay, Savanna Cay, Port Royal Cay

et South Cay ; et trace une frontière maritime unique
entre le Nicaragua et le Honduras

LA HAYE, le 8 octobre 2007. La Cour interna tionale de Justice (CIJ), organe judiciaire

principal des Nations Unies, a rendu aujourd’hui son arrêt en l’affaire du Différend territorial et
maritime entre le Nicaragua et le Honduras dans la mer des Caraïbes (Nicaragua c. Honduras).

Dans son arrêt, qui est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour

⎯ dit à l’unanimité que le Honduras a la souverain eté sur Bobel Cay, Savanna Cay, Port Royal
Cay et South Cay ;

⎯ décide par quinze voix contre deux que le point de départ de la frontière maritime unique qui
sépare la mer territoriale, leplateau continental et les zon es économiques exclusives de la

République du Nicaragua et de la République du Honduras sera le point de coordonnées
15° 00' 52" de latitude nord et 83° 05' 58" de longitude ouest ;

⎯ décide par quatorze voix contre trois que, à partir de ce point de départ, la ligne de délimitation

suit la bissectrice jusqu’à ce qu’elle rejoigne la limite extéri eure de la mer territoriale de
12millesmarins de Bobel Cay. Elle s’infléchit alors vers le sud pour suivre le pourtour de
cette mer territoriale jusqu’à ce qu’elle renc ontre la ligne médiane de la zone de
chevauchement des mers territoriales de Bobel Cay, Port Royal Cay et South Cay (Honduras)
et d’Edinburgh Cay (Nicaragua). La ligne de délimitation se poursuit ensuite le long de cette

ligne médiane jusqu’à sa jonction avec la mer territoriale de South Cay, laquelle, pour
l’essentiel, n’empiète pas sur la mer territoriale d’EdinburghCay. La ligne suit alors, en
direction du nord, le pourtour de la mer terr itoriale de 12milles marins de South Cay jusqu’à
ce qu’elle rencontre de nouveau la bissectrice. A partir de ce point, elle se poursuit selon
l’azimut de cette dernière jusqu’à atteindre lzone dans laquelle pourraient être en cause les

droits de certains Etats tiers ;

⎯ dit par seize voix contre une que les Parties devr ont négocier de bonne foi en vue de convenir
du tracé de la ligne de délimitation de la partie de la mer territoriale située entre le point

terminal de la frontière terrestre établi par la sentence arbitrale de 1906 et le point de départ de
la frontière maritime unique fixé par la Cour. - 2 -

Raisonnement de la Cour

La Cour expose en premier lieu l’objet du différe nd. Elle relève que le Nicaragua l’a priée
de déterminer le tracé d’une frontière maritime unique entre les mers territoriales, les portions de
plateau continental et les zones économiques excl usives relevant respectivement du Nicaragua et

du Honduras dans la mer des Caraïbes. Le Nicara gua soutient que cette frontière maritime n’a
jamais été délimitée. Le Honduras, pour sa part, affi rme qu’il existe déjà dans la mer des Caraïbes
une frontière traditionnellement reconnue entr e les espaces maritimes du Honduras et du
Nicaragua, située le long du 15 eparallèle, qui tire son origine du principe de l’uti possidetis juris

(selon lequel les frontières héritées de la colonisation doivent être respectées). Le Honduras prie la
Cour de confirmer cette frontière maritime. La C our note encore qu’à l’audience, le Nicaragua l’a
spécifiquement priée de trancher la question de la souveraineté sur les îles situées dans la zone en
litige, au nord du 15 eparallèle. Bien que cette demande soit formellement nouvelle, la Cour la

considère comme recevable car inhérente à la demande initiale. A l’audience, ee Honduras l’a
également priée de dire qu’il a la souveraineté sur les î
les situées au nord du 15 parallèle.

La Cour se penche sur la nature juridique des formations maritimes dans la zone en litige.

Elle note que Bobel Cay, Savanna Cay, Port Royal Cay et South Cay restent découvertes à marée
haute et qu’elles relèvent donc de la définition d es îles figurant à l’article 121 de la convention des
Nations Unies sur le droit de la mer de 1982. N’ ayant pas reçu d’informa tions suffisantes sur les

autres formations maritimes, la Cour dit ne pouvoir se prononcer que sur les quatre îles
susmentionnées.

S’agissant de la souveraineté sur les quatre îles, la Cour souligne que le principe de l’uti

possidetis juris s’applique indubitablement à la délimitati on territoriale entre le Nicaragua et le
Honduras, tous deux anciennes provinces coloniales esp agnoles, et qu’il peut aussi s’appliquer aux
possessions territoriales situées au large des côtes et aux espaces maritimes. Toutefois, dans le cas
présent, il doit être démontré que la Couronne esp agnole avait attribué les îles en litige à l’une ou

l’autre de ses provinces coloniales. Les Parties n’ayant pas apporté de preuves indiquant
clairement si ces îles avaient été attribuées, avan t l’indépendance ou au moment de celle-ci, à la
province coloniale du Nicaragua ou à celle du Honduras, et n’ayant pas davantage pu convaincre la

Cour de l’existence d’effectivités coloniales (définies comme le comportement des autorités
administratives en tant que preuve de l’exercice effectif de compétences territoriales dans la région
pendant la période coloniale), la Cour conclu t qu’il n’a pas été établi que le Honduras ou le
Nicaragua possédait un titre sur ces îles en vertu de l’uti pos
sidetis.

La Cour s’attache alors à rechercher d’éventuelles effectivités postcoloniales. Après examen
des éléments de preuve présentés par les Parties, la Cour observe que plusieurs effectivités
invoquées par le Honduras «constituent une manifesta tion modeste mais réelle d’autorité sur les

quatre îles». Ainsi le Honduras a-t-il démontré avoir appliqué et fait respecter sur les îles son droit
pénal et son droit civil, sa réglementation de l’ immigration, sa réglementation de l’activité des
bateaux de pêche et des constructions, et avoir usé de son autorité en matière de travaux publics.

La Cour en conclut que le Honduras a la souvera ineté sur les îles de BobelCay, SavannaCay,
Port Royal Cay et South Cay.

S’agissant de la délimitation des zones maritime s entre les deux Etats, la Cour indique qu’il
e
n’existe de frontière établie le long du 15 parallèle ni sur la base de l’uti possidetis juris , ni sur la
base d’un accord tacite entre les Parties. Elle doit donc tracer elle-même cette frontière.

La Cour relève que, compte tenu de la configuration géogra phique du cap Gracias a Dios

(une projection territoriale très convexe touchant à un littoral concave de part et d’autre, qui
constitue le point de jonction entre les façades côtiè res des deux Etats) et du caractère instable de
l’embouchure du fleuve Coco (point terminal de la frontière terrestre), il ne lui est pas possible
d’appliquer la méthode de l’équidistance, même pou r la délimitation de la mer territoriale. Elle

décide donc de recourir à une bissectrice, c’est-à -dire une ligne qui divise en deux parts égales - 3 -

l’angle formé par des lignes représentant la direction générale des côtes. Pour tracer sa bissectrice,
la Cour identifie comme côtes pertinentes la façade hondurienne allant du cap Gracias a Dios

jusqu’à PuntaPatuca et la façade nicaraguayenne allant du cap Gracias a Dios jusqu’à Wouhnta.
La bissectrice en résultant a un azimut de 70° 14' 41,25".

Ayant accordé une mer territoriale d’une la rgeur de 12milles aux îles de BobelCay,

Savanna Cay, Port Royal Cay et South Cay (Honduras) , la Cour ajuste le tracé de sa ligne pour en
tenir compte et résout la question du chevauchemen t entre les mers territoriales de ces îles et celle
de l’île d’Edinburgh Cay (Nicaragua) par le tracé d’une ligne médiane.

Amenée à identifier le point de départ de la frontière maritime entre le Nicaragua et le
Honduras, la Cour décide, compte tenu du fait que le cap Gracias a Dios ne cesse d’avancer vers
l’est en raison des dépôts sédimentaires du fleuve Coco, de fixer ce point à 3milles marins sur la
bissectrice décrite ci-dessus, au large du point identifié en 1962 par une commission mixte de

démarcation comme étant, à l’époque, le point term inal de la frontière terrestre à l’embouchure du
fleuve Coco.

L’emplacement de l’embouchure étant incertain, la Cour charge les Parties de négocier de

bonne foi en vue de convenir du tracé d’une ligne reliant le point terminal actuel de la frontière
terrestre au point de départ de la frontière maritime à présent établie par la Cour.

S’agissant du point terminal de la frontière ma ritime, la Cour déclare que la ligne qu’elle a

tracée se prolonge jusqu’à atteindre la zone dans laquelle pourraient être en cause les droits de
certains Etats tiers.

Composition de la Cour

La Cour était composée comme suit: MmeHiggins, président ; M. Al-Khasawneh,
vice-président ; MM.Ranjeva, Shi, Koroma, Parra-Ara nguren, Buergenthal, Owada, Simma,
Tomka, Abraham, Keith, Sepúlveda -Amor, Bennouna, Skotnikov, juges ; MM. Torres Bernárdez,

Gaja, juges ad hoc ; M. Couvreur, greffier.

MM. les juges Ranjeva et Koroma ont joint à l’ arrêt l’exposé de leur opinion individuelle;
M. le juge Parra-Aranguren a joint une déclaration à l’arrêt ; M. le juge ad hoc Torres Bernárdez a

joint l’exposé de son opinion dissidente ; M. le juge ad hoc Gaja a joint une déclaration.

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Un résumé de l’arrêt est fourni dans le document intitulé «Résumé n 2007/4», auquel sont
annexés les résumés des déclarations et des opinions qui y sont jointes. Le présent communiqué de

presse, le résumé de l’arrêt, ainsi que le texte in tégral de celui-ci figurent également sur le site
Internet de la Cour (www.icj-cij.org) sous les rubriques «Espace Presse» et «Affaires».
___________

Département de l’information :

Mme Laurence Blairon, secrétaire de la Cour, chef du département (+31 (0)70 302 2336)

MM. Boris Heim et Maxime Schouppe, attachés d’information (+31 (0)70 302 2337)
Mme Joanne Moore, attachée d’information adjointe (+31 (0)70 302 2394)

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