Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda) - La Cour dit que l'Ouganda a violé le principe du non-recours à la force dans les relations internationales e

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10521
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2005/26
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

Palais de la Paix, Carnegieplein 2, 2517 KJ La Haye, Pays-Bas
Tél : +31 (0)70 302 2323 Télécopie : +31 (0)70 364 9928
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Communiqué de presse
Non officiel

o
N 2005/26
Le 19 décembre 2005

Activités armées sur le territoire du Congo
(République démocratique du Congo c. Ouganda)

La Cour dit que l’Ouganda a violé le principe du non-recours à la force dans les relations
internationales et le principe de non-intervention; qu’il a violé les obligations lui
incombant en vertu du droit international relatif aux droits de l’hom
me et
du droit international humanitaire; et qu’il a violé d’autres obligations

lui incombant, en vertu du droit international, envers
la République démocratique du Congo

La Cour dit aussi que la République démocratique du Congo a violé les obligations lui

incombant, en vertu de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques
de 1961, envers la République de l’Ouganda

LA HAYE, le 19 décembre 2005. La Cour internationale de Justice (CIJ), organe judiciaire

principal de l’Organisation des NationsUnies, a rendu ce jour son arrêt en l’affaire des Activités
armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda).

Dans son arrêt, qui est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour

1) Par seize voix contre une,

Dit que la République de l’Ouganda, en se livrant à des actions militaires à l’encontre de la
République démocratique du Congo sur le territoire de celle-ci, en occupant l’Ituri et en soutenant
activement, sur les plans militaire, logistique, économique et financier, des forces irrégulières qui

opéraient sur le territoire congolais, a violé le principe du non-recours à la force dans les relations
internationales et le principe de non-intervention;

POUR : M. Shi, président ; M. Ranjeva, vice-président; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh,

Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka, Abraham, juges ; M. Verhoeven,
juge ad hoc;

CONTRE : M. Kateka, juge ad hoc; - 2 -

2) A l’unanimité,

Déclare recevable la demande de la République démocratique du Congo selon laquelle la
République de l’Ouganda a, au cours des hostilités entre les forces armées ougandaises et
rwandaises à Kisangani, violé les obligations lui in combant en vertu du droit international relatif
aux droits de l’homme et du droit international humanitaire;

3) Par seize voix contre une,

Dit que, par le comportement de ses forces armées, qui ont commis des meurtres et des actes

de torture et autres formes de traitement inhumain à l’encontre de la population civile congolaise,
ont détruit des villages et des bâ timents civils, ont manqué d’établir une distinction entre cibles
civiles et cibles militaires et de protéger la popuation civile lors d’affr ontements avec d’autres
combattants, ont entraîné des enfants-soldats, ont incité au conflit ethnique et ont manqué de

prendre des mesures visant à y mettre un terme, et pour n’avoir pas, en tant que puissance
occupante, pris de mesures visant à respecter et à faire respecter les droits de l’homme et le droit
international humanitaire dans le district de l’ Ituri, la République de l’Ouganda a violé les
obligations lui incombant en vertu du droit interna tional relatif aux droits de l’homme et du droit

international humanitaire;

P OUR : M. Shi, président ; M. Ranjeva, vice-président ; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh,

Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka, Abraham, juges ; M. Verhoeven,
juge ad hoc;

CONTRE : M. Kateka, juge ad hoc;

4) Par seize voix contre une,

Dit que, par les actes de pillage et d’expl oitation des ressources naturelles congolaises
commis par des membres des forces armées ougandaises sur le territoire de la République

démocratique du Congo, et par son manquement aux obligations lui incombant, en tant que
puissance occupante dans le district de l’Ituri, d’em pêcher les actes de pillage et d’exploitation des
ressources naturelles congolaises, la République de l’Ouganda a violé les obligations qui sont les

siennes, en vertu du droit international, envers la République démocratique du Congo;

POUR : M. Shi, président ; M. Ranjeva, vice-président ; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh,

Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka, Abraham, juges ; M. Verhoeven,
juge ad hoc;

CONTRE : M. Kateka, juge ad hoc;

5) A l’unanimité,

Dit que la République de l’Ouga nda a l’obligation, envers la République démocratique du
Congo, de réparer le préjudice causé;

6) A l’unanimité,

Décide que, au cas où les Parties ne pourraient se mettre d’accord à ce sujet, la question de la

réparation due à la République dé mocratique du Congo sera réglée par la Cour, et réserve à cet
effet la suite de la procédure;

7) Par quinze voix contre deux, - 3 -

Dit que la République de l’Ouganda ne s’est pas conformée à l’ordonnance en indication de
mesures conservatoires rendue par la Cour le 1 juillet 2000;

POUR : M. Shi, président ; M. Ranjeva, vice-président ; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Rezek, Al-Khasawneh, Buergenthal,

Elaraby, Owada, Simma, Tomka, Abraham, juges; M. Verhoeven, juge ad hoc;

CONTRE : M. Kooijmans, juge; M. Kateka, juge ad hoc;

8) A l’unanimité,

Rejette les exceptions de la République démocratique du Congo à la recevabilité de la
première demande reconventionnelle présentée par la République de l’Ouganda;

9) Par quatorze voix contre trois,

Dit que la première demande reconventionnelle présentée par la République de l’Ouganda ne
peut être retenue;

POUR : M. Shi, président ; M. Ranjeva, vice-président ; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Rezek, Al-Khasawneh, Buergenthal,

Elaraby, Owada, Simma, Abraham, juges; M. Verhoeven, juge ad hoc;

CONTRE : MM. Kooijmans, Tomka, juges; M. Kateka, juge ad hoc;

10) A l’unanimité,

Rejette l’exception de la République démocratique du Congo à la recevabilité du volet de la
deuxième demande reconventionnelle présentée par la République de l’Ouganda concernant la

violation de la convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques;

11) Par seize voix contre une,

Retient l’exception de la République démocratique du Congo à la recevabilité du volet de la
deuxième demande reconventionnelle présentée par la République de l’O uganda concernant les
mauvais traitements infligés le 20 août 1998 à des personnes autres que des diplomates ougandais à
l’aéroport international de Ndjili;

POUR : M. Shi, président; M. Ranjeva, vice-président ; MM. Koroma, Vereshchetin,
Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh,
Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka, Abraham, juges ; M. Verhoeven,

juge ad hoc;

CONTRE : M. Kateka, juge ad hoc;

12) A l’unanimité,

Dit que, par le comportement de ses forces armées, qui ont attaqué l’ambassade de
l’Ouganda à Kinshasa et soumis à de mauvais tr aitements des diplomates et d’autres personnes

dans les locaux de l’ambassade, ainsi que des diplomates ougandais à l’aéroport international de
Ndjili, et pour n’avoir pas assuré à l’ambas sade et aux diplomates ougandais une protection
efficace ni empêché la saisie d’ archives et de biens ougandais dans les locaux de l’ambassade de

l’Ouganda, la République démocratique du Congo a violé les obligations lui incombant, en vertu de
la convention de Vienne sur les relations dipl omatiques de 1961, envers la République de
l’Ouganda; - 4 -

13) A l’unanimité,

Dit que la République démocratique du Congo a l’obligation, envers la République de
l’Ouganda, de réparer le préjudice causé;

14) A l’unanimité,

Décide que, au cas où les Parties ne pourraient se mettre d’accord à ce sujet, la question de la
réparation due à la République de l’Ouganda sera réglée par la Cour, et réserve à cet effet la suite
de la procédure.

Raisonnement de la Cour

⎯ Premier chef de conclusions de la RDC : l’emploi de la force contre la RDC

Ayant examiné le dossier qui lui a été soumis, la Cour estime qu’il en ressort clairement que,
avant le mois d’août 1998, la RDC ne s’est p as opposée à la présence ni aux activités des troupes
ougandaises dans la zone frontalière de l’est du pays. Elle note cependant que, lors du sommet de
Victoria Falls, la RDC a accusé l’Ouganda et le Rwa nda d’avoir envahi son territoire. Ainsi, tout

consentement antérieur de la RDC à la présence de troupes ougandaises sur son territoire a été
retiré, au plus tard, le 8 août 1998, date de la clôture du sommet.

La Cour déclare qu’elle ne peut tenir pour établi à suffisance que l’Ouganda a participé à

l’attaque contre Kitona (localité située à l’ouest de la RDC, à quelque 1800kilomètres de la
frontière ougandaise) le 4août1998. Elle a cependant déterminé que l’Ouganda avait pris un
certain nombre de localités dans l’est de la RDC et dans d’autres zones de ce pays entre août 1998

et début juillet 1999.

La Cour conclut que l’accord de Lusaka, les plans de désengagement de Kampala et de
Harare et l’accord de Luanda n’emportaient pas (hormis l’exception limitée relative à la région

frontalière des monts Ruwenzori contenue dans l’accord de Luanda) un consentement de la RDC à
la présence de troupes ougandaises sur son territoire à compter du mois de juillet1999 qui aurait
validé cette présence en droit. La Cour observe que l’accord de Lusaka avait seulement établi un
modus operandi pour les parties en fixant un cadre pour le retrait ordonné de toutes les forces

étrangères de RDC.

La Cour ne retient pas l’affirmation de l’Ouganda selon laquelle ses activités militaires
menées du début du mois d’août 1998 au mois de juillet 1999 peuvent se justifier en tant qu’actes

de légitime défense.

La Cour conclut que l’Ouganda a violé la souve raineté ainsi que l’intégrité territoriale de la
RDC. Les actes de l’Ouganda ont également cons titué une ingérence dans les affaires intérieures

de la RDC et dans la guerre civile qui y faisait rage. L’intervention militaire illicite de l’Ouganda a
été d’une ampleur et d’une durée telles que la Cour la considère comme une violation grave de
l’interdiction de l’emploi de la force énoncée au paragraphe4 de l’artic le2 de la Charte des
NationsUnies. La Cour déclare cependant qu’il n’existe aucun élément de preuve crédible à

l’appui de l’allégation de la RDC selon laquelle le Mouvement de libération du Congo (MLC), un
mouvement rebelle dirigé par M. Bemba, aurait été créé et contrôlé par l’Ouganda

⎯ La question de l’occupation de guerre

La Cour examine ensuite la question de savoir si l’Ouganda était ou non une puissance
occupante dans les parties du territoire congolais où ses troupes é
taient présentes à l’époque
pertinente. La Cour observera que, selon le droit international coutumier, un territoire est considéré

comme occupé lorsqu’il se trouve placé de fait s ous l’autorité de l’armée ennemie, et que - 5 -

l’occupation ne s’étend qu’au territoire où cette autorité est établie et en mesure de s’exercer. Dans
la présente espèce, la Cour dispose d’éléments de preuve suffisants de ce que l’Ouganda avait

établi et exerçait son autorité en Ituri (une nouvelle province créée en juin 1999) en tant que
puissance occupante. Par conséquent, la Cour estime que la responsabilité de l’Ouganda est
engagée à raison à la fois de tout acte de ses forces armées contraire à ses obligations
internationales et du défaut de la vigilance requi se pour prévenir les violations des droits de

l’homme et du droit international humanitaire par d’autres acteurs présents sur le territoire occupé,
en ce compris les groupes rebelles agissant pour leur propre compte. Elle relève également que
l’Ouganda est responsable de l’ensemble des actes et omissions de ses forces armées sur le
territoire de la RDC qui violent les obligations lui incombant en vertu des règles pertinentes et

applicables à la situation de l’espèce du droit intern ational relatif aux droits de l’homme et du droit
international humanitaire.

⎯ Deuxième chef de conclusions de la RDC: les violations du droit international relatif aux

droits de l’homme et du droit international humanitaire

Au vu du dossier, la Cour considère qu’il existe des éléments de preuve crédibles suffisants
pour conclure que les forces armées ougandaises ont, au cours de leur intervention militaire,

commis des meurtres ainsi que des actes de torture et autres formes de traitement inhumain à
l’encontre de la population civile, qu’elles ont détr uit des villages et des bâ timents civils, qu’elles
ont manqué d’établir une distinction entre cibles civiles et militaires et de protéger la population

civile lors d’affrontements avec d’autres combattant s, qu’elles ont incité au conflit ethnique et ont
manqué de prendre des mesures visant à mettre un terme à celui-ci, qu’elles ont été impliquées
dans l’entraînement d’enfants-soldats et qu’ell es n’ont pris aucune mesure visant à assurer le
respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire en Ituri.

La Cour conclut que ces actes sont manifestement contraires aux obligations découlant du
règlement de La Haye de1907, obligations qui, en tant qu’elles relèvent du droit international
coutumier, s’imposent aux Parties. Ces actes sont également contraires à un certain nombre

d’instruments relatifs au droit international humanitaire et au droit international des droits de
l’homme, auxquels l’Ouganda et la RDC sont tous deux parties.

La Cour conclut dès lors que l’Ouganda est in ternationalement responsable des violations du

droit international relatif aux droits de l’homme et du droit international humanitaire qui ont été
commises par les UPDF et leurs membres sur le territoire congolais, ainsi que de ses manquements
aux obligations lui incombant en tant que puissance occupante de l’Ituri pour ce qui concerne les
violations du droit international relatif aux droits de l’homme et du droit international humanitaire

dans le territoire occupé.

Enfin, la Cour précise que, si elle s’est prononcée sur les violations du droit international
relatif aux droits de l’homme et du droit in ternational humanitaire commises par les forces

militaires ougandaises sur le territoire congolais, el le observe cependant que les actes commis par
les diverses parties à ce conflit complexe que connaît la RDC ont contribué aux immenses
souffrances de la population congolaise. La Cour est profondément consciente que de nombreuses
atrocités ont été commises au cours du conflit. Les parties à celui-ci ont toutes le devoir de

soutenir le processus de paix en RDC ainsi que d’autres plans de paix dans la région des
Grands Lacs, afin que le respect des droits de l’homme y soit garanti.

⎯ Troisième chef de conclusions de la RDC : l’e xploitation illégale de ressources naturelles et la

question de l’imputabilité à l’Ouganda

Ayant examiné le dossier de l’affaire, la Cour conclut qu’elle ne dispose pas d’éléments de
preuve crédibles permettant d’établir qu’exis tait une politique gouvernem entale de l’Ouganda

visant à l’exploitation de ressources naturelles de la RDC, ou que cet Etat ait entrepris son
intervention militaire dans le dessein d’obtenir un accès aux ressources congolaises. La Cour - 6 -

estime cependant détenir des preuves abondantes et convaincantes pour conclure que des officiers
et des soldats des UPDF, parmi lesquels les officiers les plus haut gradés, ont participé au pillage et

à l’exploitation des ressources naturelles de la RDC et que les autorités militaires n’ont pris aucune
mesure pour mettre un terme à ces activités.

La Cour conclut que l’Ouga nda a engagé sa responsabilité in ternationale à raison des actes

de pillage et d’exploitation des ressources na turelles de la RDC commis par des membres
des UPDF sur le territoire de la RDC, de la viol ation de son devoir de vigilance s’agissant de ces
actes et du manquement aux obligations lui incomban t en tant que puissance occupante en Ituri, en
vertu de l’article43 du règlement de LaHaye de1907, quant à l’en semble des actes de pillage et

d’exploitation des ressources naturelles commis dans le territoire occupé.

⎯ Quatrième chef de conclusions de la RDC: le s conséquences juridiques de la violation par
l’Ouganda de ses obligations internationales

La Cour n’estime pas établi que l’Ouganda, après le retrait de ses soldats du territoire de
laRDC en juin2003, a continué à commettre les faits internationalement illicites, comme l’a
allégué laRDC. La Cour conclu t par conséquent qu’il ne peut être fait droit à la demande de

laRDC tendant à ce que l’Ouganda cesse immédiatem ent tout «fait internationalement illicite qui
se poursuit de façon continue».

En ce qui concerne la demande de la RDC tendant à ce que l’Ouganda fournisse des

garanties et assurances spécifiques de non-répé tition des faits illicites dénoncés, la Cour se réfère
aux obligations souscrites par celui-ci dans le cadre de l’accord tripartite relatif à la sécurité dans la
région des Grands Lacs, signé le 26 octobre 2004 par la RDC, le Rwanda et l’Ouganda, et conclut
qu’elles satisfont à la demande de la RDC. La Cour attend et exige des Parties qu’elles se

conforment aux obligations qui leur incombent en vertu de cet accord et du droit international
général.

Enfin, compte tenu de la nature des faits internationalement illicites dont l’Ouganda a été

reconnu responsable, la Cour considère que ces fa its ont entraîné un préjudice pour la RDC, ainsi
que pour des personnes présentes sur son territoire. Elle déclare en conséquence que l’Ouganda est
tenu de réparer le préjudice causé. La Cour juge appropriée la demande de la RDC tendant à ce
que la nature, les formes et le montant de la réparation qui lui est due soient, à défaut d’accord

entre les Parties, déterminés par la Cour dans une phase ultérieure de la procédure.

⎯ Cinquième chef de conclusions de la RDC: resp ect de l’ordonnance de la Cour en indication

de mesures conservatoires.

La Cour examine la question de savoir si l’Ouganda s’est conformé à son ordonnance en
indication de mesures conservatoires du 1 ejuillet2000. Elle déclare que la RDC n’a présenté

aucun élément de preuve précis démontrant que l’Ouganda aurait, après juillet2000, commis des
actes en violation des dispositions de l’ordonnance. La Cour fait toutefois observer que, dans son
arrêt, elle a conclu que l’Ouganda était responsable d es actes contraires au droit international
humanitaire et au droit international relatif aux droits de l’homme commis jusqu’au 2juin2003.

La Cour conclut donc que l’Ouganda ne s’est pas conformé aux dispositions de son ordonnance.

Elle note en outre que les mesures c onservatoires indiquées dans son ordonnance
s’adressaient aux deux Parties. Sa constatation du non-respect de l’ordonnance par l’Ouganda est

sans préjudice de la question de savoir si la RDC a également manqué de se conformer aux
mesures conservatoires indiquées. - 7 -

⎯ Les demandes reconventionnelles

La Cour déclare tout d’abord que la RDC est en droit de contester la recevabilité des
demandes reconventionnelles de l’Ouganda.

Dans sa première demande reconventionnelle, l’Ouganda affirme que, depuis 1994, il a été la

cible d’opérations militaires et d’autres activités déstabilisatrices menées par des groupes armés
hostiles basés en RDC, qui étaient soit s outenus soit tolérés par les Gouvernements congolais
successifs. Pour réfuter la première demande r econventionnelle de l’Ouganda, la RDC scinde en
trois la période couverte par celle-ci, ce qui corre spond à trois situations distinctes sur les plans

factuel et juridiqu: a) la période antérieure à l’arrivée au pouvoir du présid
ent
Laurent-DésiréKabila, en mai1997; b) la période comprise entre l’arrivée au pouvoir du
président Kabila et le 2 août 1998, date du début de l’attaque militaire ougandaise; et c) la période
postérieure au 2août1998. La RDC soutient que, en ce qui concerne sa prétendue implication

dans les attaques armées contre l’Ouganda durant la première période, la demande ougandaise est
irrecevable au motif que l’Ouganda a renoncé à son droit d’invoquer la responsabilité
internationale de la RDC (qui était à l’époque le Zaïre) à propos des actes qui remontent à cette
période; à titre subsidiaire, elle déclare que ce tte demande est dépourvue de fondement. La RDC

affirme par ailleurs que, s’agissant de la deuxième période, la demande n’est pas fondée en fait et
que, concernant la troisième, elle ne l’est ni en fait, ni en droit.

S’agissant de la question de la recevab ilité de ce premier volet de la demande

reconventionnelle, la Cour relève que rien, dans le comportement de l’Ouganda, ne peut être
considéré comme impliquant une renonciation sans équivoque de celui-ci à son droit de présenter
une demande reconventionnelle pour ce qui concerne les événements intervenus sous le

régimeMobutu. S’agissant du fond de ce volet de la demande reconventionnelle, la Cour estime
que l’Ouganda n’a pas produit de preuves suffisantes démontrant que le Zaïre fournissait un soutien
politique et militaire aux mouvements rebelles antiougandais. En ce qui concerne la
deuxièmepériode, la Cour déclar e que l’Ouganda n’a pas fourni de preuves convaincantes d’un

réel soutien de la RDC aux groupes rebelles an tiougandais. Elle note que , pendant cette période,
la RDC agissait en fait de concert avec l’Ouganda co ntre les rebelles et non en leur faveur. En ce
qui concerne la troisième période , la Cour considère qu’aucune action militaire entreprise par
laRDC contre l’Ouganda au cours de cette période ne pourrait être considérée comme illicite, du

fait qu’elle serait justifiée au titre de la légitime dé fense. En outre, la C our a déjà conclu que la
participation alléguée des troupes régulières de laRDC à des attaques menées par des rebelles
antiougandais contre les UPDF ainsi que le soutien prétendument fourni aux insurgés antiougandais
pendant cette période ne sauraient être considérés comme établis. Elle rejette donc la première

demande reconventionnelle dans son intégralité.

Dans sa deuxième demande reconventionnelle, l’Ouganda soutient que les forces armées
congolaises ont attaqué les locaux de son ambassade, qu’elles ont confisqué des biens appartenant

au gouvernement, au personnel diplomatique et à des ressortissants ougandais, et qu’elles ont
infligé des mauvais traitements au personnel dipl omatique et à d’autres ressortissants ougandais
présents dans les locaux de la mission et à l’aéroport international de Ndjili.

Examinant les exceptions de la RDC à la recevabilité de cette demande reconventionnelle, la
Cour déclare que son ordonnance du 29 novembre 2001 n’empêchait pas l’Ouganda d’invoquer la
convention de Vienne sur les relations diploma tiques, la formulation de cette ordonnance étant
suffisamment générale pour inclure des demandes fondées sur la convention. Elle fait en outre

observer que l’objet du volet de la demande reconve ntionnelle qui a trait à des mauvais traitements
infligés à d’autres personnes présentes dans les locaux de l’ambassade tombe sous le coup de
l’article22 de la convention de Vienne, et déclare ce volet recevable. La Cour indique toutefois
que le volet relatif aux mauvais traitements qui, à l’aéroport international de Ndjili, ont été infligés

à des personnes ne jouissant pas du statut diplomat ique, alors que celles-ci tentaient de quitter le - 8 -

pays, est fondé sur la protection diplomatique et que, en l’absence d’éléments de preuve concernant
la nationalité ougandaise des personnes en question, ce volet de la demande reconventionnelle est

irrecevable.

S’agissant du bien-fondé de cette demande r econventionnelle, la Cour estime qu’il existe
suffisamment d’éléments de preuve attestant que des attaques ont eu lieu contre l’ambassade et que

des mauvais traitements ont été infligés à des diplomates ougandais dans les locaux de l’ambassade
et à l’aéroport international de Ndjili. Elle conclut que, ce faisant, la RDC a manqué aux
obligations qui étaient les siennes en vertu des ar ticles 22 et 29 de la convention de Vienne sur les
relations diplomatiques. La Cour déclare en outre que la saisie de biens et d’archives de

l’ambassade ougandaise était contraire aux dis positions du droit international des relations
diplomatiques. Elle relève cependant que, à défaut d’accord entre les Parties, ce ne serait que lors
d’une phase ultérieure de la procédure qu’il co nviendrait d’apporter des éléments de preuve
établissant les circonstances particulières de ces violations, les dommages précis subis par

l’Ouganda et l’étendue de la réparation à laquelle il a droit.

Composition de la Cour

La Cour était composée comme suit: M. Shi, président ; M. Ranjeva,vice-président ;
MMK . oroma, Vereshchetin, Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek,
Al-Khasawneh, Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka et Abraham, juges ; MM. Verhoeven

et Kateka, juges ad hoc; M. Couvreur, greffier.

M. le juge Koroma a joint une déclaration à l’arrêt de la Cour; MM. les juges
Parra-Aranguren, Kooijmans, Elaraby et Simma on t joint à l’arrêt les exposés de leur opinion

individuelle; M. le juge Tomka et M. le juge ad hoc Verhoeven ont joint des déclarations à l’arrêt;
M. le juge ad hoc Kateka a joint à l’arrêt l’exposé de son opinion dissidente.

___________

o
Un résumé de l’arrêt est fourni dans le document intitulé «Résumé n 2005/3» auquel sont
annexés les résumés des déclaration et opinions qui y sont jointes. Le présent communiqué de
presse, le résumé de l’arrêt, ainsi que le texte intégral de celui-ci figurent également sur le site

Internet de la Cour sous les rubriques «Rôle» et «Décisions» (www.icj-cij.org).

___________

Département de l’information :

Mme Laurence Blairon, chef du département de l’information (+ 31 70 302 23 36)
MM. Boris Heim et Maxime Schouppe, attachés d’information (+ 31 70 302 23 37)

Adresse de courrier électronique : [email protected]

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- La Cour dit que l'Ouganda a violé le principe du non-recours à la force dans les relations internationales et le principe de non-intervention; qu'il a violé les obligations lui incombant en vertu du droit international relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire; et qu'il a violé d'autres obligations lui incombant, en vertu du droit international, envers la République démocratique du Congo - La Cour dit aussi que la République démocratique du Congo a violé les obligations lui incombant, en vertu de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961, envers la République de l'Ouganda

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