Plates-formes pétrolières (République islamique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique) - Décision de la Cour

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090-20031106-PRE-01-00-EN
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2003/38
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COURINTERNATIONALE DEJUSTICE
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Communiqué depresse

Non officiel

N° 2003/38
Le 6 novembre 2003

Plates-formes pétrolières
(Républiqueislamique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique)

Décisionde la Cour

LA HAYE, le 6 novembre 2003. La Cour internationale de Justice (CIJ), organe judiciaire
principal de l'Organisation des Nations Unies, a rendu aujourd'hui son arrêten l'affaire des
Plates-formes pétrolières(Républiqueislamique d'IranEtats-Unis d'Amérique).

Dans son arrêt,qui est définitif, sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour dit

d'abord, par quatorze voix contre deux, quees actions menéespar les Etats-Unis d'Amérique
contre les plates-formes pétrolièresiraniennes letobre 1987 et le 18 avril 1988 ne sauraient
êtrejustifiées en tant que mesures nécessaires à la protection des intérêtsvitaux des Etats-Unis
d'Amérique sur le plan de la sécuritéen vertu de l'alinédu paragraphe 1 de l'article XX du
traitéd'amitié,de commerce et de droits consulaires de 1955 entre les Etats-Unis d'Amériqueet
l'Iran, tel qu'interprétéa lumière du droit international relatif à l'emploi de la force», mais
«qu'elle ne saurait cependant accueillir la conclusion de la République islamique d'Iran selon

laquelle ces actions constituent une violation par les Etats-Unis d'Amérique des obligations que
leur impose le paragraphe 1 de l'article X dudit traité,relativesertéde commerce entre les
territoires des parties, et qu'en conséquence elle ne saurait davantage accueillir la demande en
réparationprésentéepar la RépubliqueislamiqueIran».

La Cour dit ensuite, par quinze voix contre une, que «la demande reconventionnelle des
Etats-Unis d'Amériqueconcernant la violation par la Républiqueislamique d'Iran des obligations

que lui impose le paragraphe 1e l'article X du traitéde 1955 susvisé,relatives à la libertéde
commerce et de navigation entre les territoires des parties, ne saurait êtreaccueillie; et qu'en
conséquence elle ne saurait davantage accueillir la demande reconventionnelle en réparation
présentéepar les Etats-UnisAmérique».

Raisonnement de la Cour

Dans son arrêt,la Cour, aprèsavoir rappeléla procédureen l'espèce, observe qu'elle a pour

tâche de déterminer s'il y a eu ou non violation du traité d'amitié, de commerce et de droits
consulaires signéen1955 entre les Etats-Unis et l'Iran, et d'en tirer les conséquencesappropriées
au vu des conclusions des Parties.

L'Iran allègue que les Etats-Unis ont violéla libertéde commerce entre les territoires des
Parties, telle que garantie parraité,en attaquant et détruisanttrois installations de production
pétrolièreoffshore, propriétéde la compagnie nationale iranienne des pétroleset exploitéespar elle

à des fins commerciales, les 19 octobre 1987 et 18 avril 1988. Il demande réparationdu préjudice
ainsi causé. Quant aux Etats-Unis, ils affirment, dans une demande reconventionnelle, que c'est -2-

l'Iran qui a violéle traitéde 1955 en attaquant des navires dans le Golfe et en menant d'autres

actions militaires dangereuseset nuisibles pour le commerce et la navigation entre les Etats-Unis et
l'Iran. lls demandent égalementréparation du préjudicesubi.

La Cour commence par examiner si les actions menéespar les forces navales américaines
contre les installations pétrolièresiraniennes étaientjustifiées,au regard du traitéde 1955, en tant
que mesures nécessaires à la protection des intérêtsitaux des Etats-Unis sur le plan de la sécurité
(alinéailldu paragraphe 1de l'articleXX du traité). La Cour indique qu'il échetd'interpréter cette

clause du traité à la lumière des règlespertinentes du droit international. Elle en infèreque les
Etats-Unis ne pouvaient recourir à l'emploi de la force au titre de ladite clause que dans l'exercice
de leur droit de légitimedéfense. La Cour ajoute que les Etats-Unis ne pouvaient exercer ce droit
que s'ils avaient étévictimes d'une agression arméede l'Iran et elle préciseque, dans ce cas, leurs
actions devaient êtrenécessaireset proportionnées à l'agression arméesubie. Ayant procédé à un
examen minutieux des éléments de preuve fournis par les Parties, la Cour estime que les Etats-Unis
n'ont pas réussi àdémontrerque ces différentesconditions étaientsatisfaites en l'espèceet elle en

conclut que ceux-ci ne pouvaient dès lors pas se prévaloir des dispositions de l'alinéaill du
paragraphe 1de l'articleXX du traitéde 1955.

La Cour s'interroge ensuite sur la question de savoir si les Etats-Unis, en détruisantles
plates-formes, ont entravéle fonctionnementnormal de celles-ci, empêchantainsi l'Iran dejouir de
la libertéde commerce «entre les territoires des deux Hautes Parties contractantes» telle que
garantie par le traitéde1955(articleX, paragraphe 1). Elle conclut qu'en ce qui concerne l'attaque

du 19 octobre 1987, les plates-formes de Reshadat et de Resalat étaienten réparationet hors
d'usage, et qu'il n'y avait donc à ce moment-là aucun commerce de pétrolebrut, issu de ces
plates-formes, entre l'Iran et les Etats-Unis. Selon la Cour, l'attaque desdites plates-formes ne peut
donc êtreconsidéréecomme ayant portéatteinte à la liberté de commerce entre les territoires des
deux Etats. La Cour parvient à la mêmeconclusion s'agissant des attaques menéescontre les
plates-formes de Salman et Nasr le 18 avril1988, car tout commerce de pétrolebrut entre l'Iran et
les Etats-Unis étaitalors suspendu du fait d'un embargo imposépar un Executive Order adoptéle

29 octobre 1987 par les autoritésaméricaines. Compte tenu de ce qui précède,la Cour dit que les
Etats-Unis n'ont pas violé les obligations qui étaientles leurs à l'égardde l'Iran au titre de
l'articleX, paragraphe 1,du traitéde 1955etrejette la demande en réparationde l'Iran.

Concernant la demande reconventionnelle des Etats-Unis, la Cour, après avoir rejetéles
exceptions d'incompétenceet d'irrecevabilitésoulevéespar l'Iran, examine si les incidents que les
Etats-Unis attribuent àl'Iran ont portéatteinte à la libertéde commerce ou de navigation entre les

territoires desarties garantie par l'articleX, paragraphe 1 du traitéde 1955. Elle dit qu'aucun des
navires dont les Etats-Unis allèguentqu'ils auraient étendommagéspar des attaques iraniennes ne
se livrait au commerce ou à la navigation entre les territoires des deux Etats. Elle ne retient pas
davantage l'argument plus général des Etats-Unis selon lequel les actions de l'Iran auraient rendu
le golfe Persique périlleux,estimant qu'il ressort des élémentqui lui ont étsoumis qu'il n'y a pas
eu, à l'époque,une entrave effective au commerce et à la navigation entre les territoires de l'Iran et
des Etats-Unis. La Cour rejette en conséquencela demande reconventionnelle en réparationdes

Etats-Unis.

Composition de la Cour

La Cour était composée comme suit : M. Shi, président; M. Ranjeva, vice-président;

MM. Guillaume, Koroma, Vereshchetin, Mme Higgins, MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek,
Al-Khasawneh, Buergenthal, Elaraby, Owada, Simma, Tomka, juges; M. Rigaux, juge ad hoc;
M. Couvreur, greffier. -3-

M. le juge Ranjeva, vice-président,et M. le juge Koroma joignent des déclarationsà l'arrêt;
Mme le juge Higgins et MM. les juges Parra-Aranguren et Kooijmans joignent à l'arrêtles exposés

de leur opinion individuelle; M. le juge Al-Khasawneh joint à l'arrêtl'exposé de son opinion
dissidente; M. le juge Buergenthal joint à l'arrêtl'exposéde son opinion individuelle; M. le juge
Elaraby joint àl'arrêtl'exposéde son opinion dissidente; MM. les juges Owada et Simma et M. le
juge ad hoc Rigauxjoignent àl'arrêtles exposésde leur opinion individuelle.

Un résuméde l'arrêtest fourni dans le document intitulé <<Résumn é° 200312», auquel est
annexéun résumédes déclarationset des opinions. Le présentcommuniquéde presse, le résumé
de l'arrêt,ainsi que le texte intégralde celui-ci figurent égalementsur le site Internet de la Cour

sous les rubriques<<Rôle» et «Décisions»(www.icj-cij.org).

Départementde l'information :
M. Arthur Th. Witteveen, premier secrétairede la Cour (+ 31 70 302 23 36)
Mme Laurence Blairon et M. Boris Heim, attachésd'information(+ 31 70 302 23 37)

Adresse de courrier électronique: [email protected]

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