Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malaisie) - La Cour dit que la souveraineté sur les îles de Ligitan et Sipadan appartient à la Malaisie

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102-20021217-PRE-01-00-EN
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Number (Press Release, Order, etc)
2002/39
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COUR INTERNATIONALE DE ruSTICE
Palais de la Paix, 2517 KJ La Haye. Tél:+31 (0)70 302 23 23. Télégr.:Intercourt,

La Haye. Télécopie:+31 (0)70 364 99 28. Télex:32323. Adresse électronique:
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Communiquéde presse
Non officiel

N° 2002/39
Le 17décembre2002

Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan
Undonésie/Malaisie)

La Cour dit gue la souveraineté sur les îles de Ligitan et Sipadan appartient à la Malaisie

LA HAYE, le 17décembre2002. La Cour internationale de Justice (CIJ), organejudiciaire
principal de l'Organisation des Nations Unies, a rendu ce jour son arrêten l'affaire de la
SouverainetésurPulau Ligitan et Pulau Sipadan(Indonésie/Malaisie).

Dans son arrêt,qui est définitif,sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour dit,
par seize voix contre une, que «la souverainetésur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan appartieàt
la Malaisie». Ligitan et Sipadan sont deux îles de dimensions trèsréduitessituéesdans la mer de

Célèbes,au large de la côte nord-est de 1'îlede Bornéo.

Raisonnement de la Cour

La Cour commence par rappeler le contexte historique complexe dans lequel s'inscrit le
différendqui oppose les Parties. Elle se penche ensuite sur les titres invoquéspar celles-ci.
L'Indonésie soutient à titre principal que sa souveraineté sur les îles se fonde sur un titre
conventionnel, la convention de 1891 entre la Grande-Bretagne et les Pays-Bas. En effet,
l'Indonésieestime que ladite convention fixait comme ligne de partage entre les possessions

britanniques et néerlandaisesdans la zone oùse trouvent Ligitan et Sipadan le parallèle4° 10' de
latitude nord. Les îles en litige étantsituéesau sud de ce parallèle, «[i]l en découle[rait]qu'en
vertu de la convention le titre sur ces îles appartenaitaux Pays-Bas et qu'il appartient aujourd'hui
l'Indonésie». La Malaisie, quant à elle, fait observer que la convention de 1891, appréciéedans
son ensemble, montre àl'évidenceque, par cette convention, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas
entendaient exclusivement préciserla frontièreentre leurs possessions terrestres respectives dans
les îles de Bornéoet de Sebatik, la ligne de délimitations'arrêtantau point le plus oriental de cette
dernière.

Ayant examinéla convention de 1891, la Cour dit que celle-ci, lue dans son contexte et
lumière de son objet et de son but, ne peut pas êtreinterprétéecomme établissantune ligne de
partage de la souverainetésur des îles situéesau laràel'est de l'île de Sebatik, et que de ce fait
cette convention ne constitue pas un titre sur lequel 1'Indonésiepourrait fonder sa prétentionsur
Ligitan et Sipadan. La Cour précise que cette conclusion est confortéetant par les travaux
préparatoiresque par la conduite ultérieuredes partiàsladite convention. La Cour estime par
ailleurs que l'examen du matériaucartographique soumis en l'espècepar les Parties ne saurait
contredire cette conclusion. - 2-

Une fois rejetée cette argumentation de l'Indonésie,la Cour passe à l'examen des autres
titres sur lesquels l'Indonésieet la Malaisie affirment pouvoir fonder leur souverainetésur les îles

de Ligitan et Sipadan. La Cour recherche si 1'Indonésieou la Malaisie sont devenues détentrices
d'un titre sur ces îles par voie de succession. A cet égard,la Cour commence par constater que, si
les Parties soutiennent toutes deux que les îles de Ligitan et Sipadan n'ont pas constituédes terrae
nullius pendant la périodepertinente aux fins de la présenteaffaire, elles le font sur la base de

raisonnements diamétralementopposés,chacune d'entre elles prétendantdisposer d'un titre sur ces
îles. Elle ne retient pas la thèsede 1'Indonésieselon laquelle celle-ci aurait conservéle titre sur ces
îles en tant que successeur des Pays-Bas, qui l'auraient eux-mêmesacquis par le biais de contrats
conclus avec le sultan du Bouloungan, détenteuroriginaire du titre. Elle ne retient pas davantage la

thèse de la Malaisie selon laquelle celle-ci aurait acquis la souverainetésur les îles de Ligitan et
Sipadan à la suite d'une sériede transmissions alléguéesdu titre détenuà l'origine par l'ancien
souverain, le sultan de Sulu, titre qui serait passé,successivement, à l'Espagne, aux Etats-Unis, à la

Grande-Bretagne -pour le compte de l'Etat du Nord-Bornéo-, au Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, et finalement à la Malaisie.

Ayant déterminéqu'aucune des deux Parties ne détientun titre conventionnel sur Ligitan et

Sipadan, la Cour examine ensuite la question de savoir si l'Indonésieou la Malaisie pourraient
avoir un titre sur les îles en litige en vertu des effectivitésqu'elles ont invoquées. A ce propos, la
Cour recherche si les prétentionsde souverainetédes Parties se fondent sur des activitésmontrant
un exercice continu et effectif d'autoritésur les îles, c'est-à-dire l'intention et la volontéd'agir en

qualitéde souverain.

L'Indonésieinvoque à cet égardune présencecontinue de la marine néerlandaise et de la
marine indonésienneaux alentours de Ligitan et Sipadan. Elle ajoute que les eaux baignant les îles

sont traditionnellement utiliséespar des pêcheursindonésiens. En ce qui concerne le premier de
ces arguments, les faits retenus en l'espèce,de l'avis de la Cour, <<npermettent [pas] de conclure
que les autorités maritimes concernées considéraient Ligitan et Sipadan, ainsi que les eaux
environnantes, comme relevant de la souverainetédes Pays-Bas ou de l'Indonésie». Quant au

second argument, la Cour estime que «les activités de personnes privées ne sauraient être
considéréescomme des effectivitéssi elles ne se fondent pas sur une réglementationofficielle ou
ne se déroulentpas sous le contrôle de l'autoritépublique».

Ayant rejeté les arguments de l'Indonésie fondés sur ses effectivités, la Cour passe à
1'examen des effectivitésinvoquéespar la Malaisie. Pour preuve de son administration effective
des îles, la Malaisie cite notamment les mesures prises par les autoritésdu Nord-Bornéo pour
réglementeret limiter le ramassage des Œufs de tortues sur Ligitan et Sipadan, activitéqui revêtait

à l'époqueune certaine importance économiquedans la région. Elle s'appuie sur l'ordonnance
de 1917 sur la protection des tortues et soutient que cette ordonnance «a étéappliquéeau moins
jusque dans les années cinquante» dans la zone des deux îles en litige. Elle invoque par ailleurs le
fait que les autoritésde la colonie du Nord-Bornéoont construit un phare sur Sipadan en 1962 et un

autre sur Ligitan en 1963, que ceux-ci existent toujours et qu'ils sont entretenus par les autorités
malaisiennes depuis son indépendance. La Cour relève que, «si les activitésinvoquées par la
Malaisie ... sont modestes en nombre, elles présententun caractèrevariéet comprennent des actes
législatifs,administratifs et quasi judiciaires. Elles couvrent une périodeconsidérableet présentent

une structure révélantl'intention d'exercer des fonctions étatiquesà l'égarddes deux îles, dans le
contexte de 1'administration d'un ensemble plus vaste d'îles». La Cour indique en outre que, «à
l'époqueoù ces activitésont étémenées,ni l'Indonésieni son prédécesseur,les Pays-Bas, n'ont
jamais expriméde désaccordni élevé de protestation>>. - 3 -

La Cour conclut, sur la base des effectivitésmentionnéesci-dessus, que «la souverainetésur
Pulau Ligitan et Pulau Sipadan appartientà la Malaisie».

Composition de la Cour

La Cour était composée comme suit : M. Guillaume, président; M. Shi, vice-président;

MM. Oda, Ranjeva, Herczegh, Fleischhauer, Koroma, Vereshchetin, Mme Higgins,
MM. Parra-Aranguren, Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh, Buergenthal et Elaraby, juges;
MM. Weeramantry et Franck, juges ad hoc; M. Couvreur, greffier.

M. le juge Oda joint une déclaration à l'arrêt;M. le juge ad hoc Franck joint à l'arrêt
l'exposéde son opinion dissidente.

Un résuméplus complet de l'arrêtsera ultérieurementfourni dans le communiquéde presse
2002/39bis. Le texte intégralde l'arrêt,e la déclarationde M. le juge Oda et de l'opinion de M. le
juge ad hoc Franck, ainsi que les communiquésde presse, sont disponibles sur le site Internet de la
Cour (www.icj-cij.org).

Départementde 1'information :

M. Arthur Th. Witteveen, premier secrétairede la Cour(+ 31 70 302 23 36)
Mme Laurence Blairon et M. Boris Heim, attachésd'information(+ 31 70 302 23 37)
Adresse de courrier électronique: [email protected]

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