Statut international du Sud-Ouest africain - Avis consultatif de la Cour du 11 juillet 1950

Document Number
11947
Document Type
Number (Press Release, Order, etc)
1950/30
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-Communiaué 50/3Q .
Non officiel

Les renseignement suivants émanant du Greffe de la Courinternationale
de Justice ont &té mis officieusement à la disposition de La presse :

. La cour internationale de Justice a:prononcé aujourdlhui, 11 juillet 1950,
son avis consultatif sur le statutinternationa lu Sud-ouest africain, question
que 11Assemblée générale des Nations Unies luiavait soumise par résolutio nu
6 décembre 1949,

A ltunanimitl éa Cour a dit que le Sud-ouest africain est un territoire
soumisau Mandatinternationa lssumé par Lj,Union sud-africain Lee 17 décembre
1920;

par douze voix contre deux, que l'Unionsud-africain continue à &tre
soumise aux obligations internat ionales rksultant du Mandat et notamment A celles
de présenter un rapport et de transmettre les pétitions des habitants de ce
territ~ire, lesfonctions de centrsle devant&tre exercées parlesNations Unies
et la référence h la Courgermanente.dJ eustice internationale devant être rem-
placée par la référence A la Cour internatnonale de Justice, conformément 8
l'article 7 du mandat et à l'articl e7 du Statut da la Cour;

* à 1lunanimite que les disposition du chapitre XII de la Charte slippli-
quent au territoird eu sud-ouest africain, en ce sens qu'elles fournissenlt e
moyen de placer le territoire sous le régime de tutelle;

par huit voix contre six que la Charte n'impose pas à lfUnion sud-africabe
lfobligatioj nuridique de placerle territoire sous le régime de tutelle ;

enfin,A llunanimi t, que 1QUnm sud-africain egissant seulen lest pas
compétente pourmodifier le Statutinternationa du territoir et que cette
compétence appartient à IlUnion sud-africaine agissant avec le consentement des
Mations Unies ,
O
O O

Les circonstances danslesquelles la Cour a ét6amenée à se pronrncer sont
les suivantes :

Le Territoire du siid-ouest africain était lime des possessionsallemandes
d'outre-mer pour lesquelles liAllemagnee ,n vertu de ltarticle 119 du traité de
Versailles, avait r~noncé & tous sesdroitset titres en faveur des principales
Puissances alliées et associbes, Après la guerre de 1914-18, cc Territoire avait
et é placé sous Piandatconféré 5 l'Unionsud-africaine. Celle-ci devaitavoir
pleins pouvoirs diadministratio etn de'législation sur le Territoire, qui serait
administré corn partie intégrante de 1'Union, LE Gouvernemen dc 1 Unlon devait
exercer une fonction diadmlnietratiio nternationale au nom de la Sociéte des
Nations aux fins de favoriser le bien-@tre et le développement des habitants.

A la suite de la deuxiame guerre mondiale, liUnion sud-africaine p,rétendant
que le mandatavait pris fin, a sollicité la reconnaissance par les NationsUnies
de ltincorporatio du Territoir e l'Union sud-africaine,

Les Nations Unies+efusèrent leur accord à cette incorporation et invit èrent
l'Union sud-africaine à placer le Territoire sous le r6gime de tutelle, conformé-
ment aux dispositions du chapitre MI de la Charte,

LfUnionsud-africains ey '6tant réfusée, c testdans .cesconditions que, Le
6 décembre 1949, 1iAssemblée générale des Mations Unies a adopt é larésolution
suivante :

L'Assemblé eéngrale,

Rappelant ses résolution6 s5 (1)du U décembre1946,, U1 (11) du ter
novembre 19.4 9t 227 '(III)du 26 novembre 1948,relatives auTerritoire du Sud-
Ouest Africain,

Considérant ... Considéranq tuiilest souhaitable que LiAssemblég eénéraleobtienne, pour
poursuivrl etexamen de cette question, un avis consultatis furlesaspects
juridiques qu'elleprésente,

1. Décide de soumettre lesqkstionssuivantes à la Cour internationale de
Justice en la priant de domer un avisconsultatif qui sera transmis à ItiAssemblée
g&n&rale avant sa cinquième session ordinaire si possible s
1 .
I -'!Quelest le statut internationa du Territoire du Sud-Ouest Africain, et

quelles sontlesobligationi snternational eesIlUnion Sud-Africaine qui en
~ d6coulent, et notament ;

"a) LfUnion Sud-Africain aet-elle encore des obligations internationale es
vertu du Mandat pour le Sud-Ouest Africain et, si c est lecas,quelles aont-
~ elles ?

"b)Les dispositions du Chapitre XII de la Charte sont-elles applicables au
Territoire du Sud-Ouest Africain et, dans liaffirmative ,e quelle faqon le
sont-elles 3

"c) LtUnion Sud-Africain aet-elle compétence pour modifier le statut int
national du Territoir eu Sud-Ouest Africain ou, dans le cas'diune réponsa
négative, qui a compétence pour détermine rt modifier le statutinternational
du Territoire

2, Charge le Secretaire général de transmettrl ea présente résolutio n îa
Courinternationale de Justice, conformément à l'article 65 du Statut de la Cour,
et d'y joindre toutdocument pouvant servir à glucider la question.

Le Secrétaire géneral joindra notamment le texte de f tarticle 22 du Pacte

de la Société des Nat ion; le texte du Mandat pourle Sud-Ouest Afrlcain allemand,
confirmé par le Conseil de la Sociét6 des Nations le 17 décembre 1920; lesdocu-
mentspertinents concernanl tesobjectifs et les fonctions du Régime des Mandats;
le texLe de la résolution surla question des Mandats, adoptée par La Sociét6 des
Nations le 18avrfl1946; le tede des articles 77 et 80 de la Charteainsique
des renseignements sur les debats auxquels ces articles ontdonné lieu à la
Conférence de SanFrancisco et B 1lAssemblég énérale; le rapport de la Quatrième
Commissioe nt les documents officiels, y compris les annexes, se rapportant A
liexamen de la,question du Sud-Ouest Africain lors de la quatrième session de
1'Assemblée

0 O
Par sonavis de ce jour,la Cour a examiné toutdiabardla question'de la
continuatio du mandat conféré par les principaleP suissances alliées et associées
Sa Majestébritannique, pour être exercé en son n6m par le gouvernement de
l'Union de l'Afriquedu sud sur Le Territoire du sud-ouesa tfricain. La Cour a
déclaré gus la Société des Nations niétait pas un bandanttiau sens où ce terme
est employe dans la législation interne de certains Etats, Le Mandat niavaitde
commun que le nom avec les notions d'ailleurs diverses de mandat en droit interne,
Le caractèree ssentielleme *interna Lonal des fonctions de 1'Union ressort du
fait que llexercica de ces fonctions étaitsoumis à la surveillanc du Conseil
de la Sacléte des Nations et à l'obligatio ne présenterdes rapports annuels,
ainsi que du fait que tous Ics membres de le.Société des Nations pouvaient sou.
mettre A la Courperman.nte de Justice 'internationatl oet différend avec le
gouvernement de 11Unionrelatif A 1'interprétatio onu
sltions du Mandat, . . 1 applica.io. des dispo-

Les obligations internationales assumees par 1iUnion sud-africain etaient

de deux sortes : les unes concernaien directement lfadmsnlstrati unterritoire
et correspondaient 3 la mission sacr&e ddccivilisatio mnentionnee l'article 22
du Pacte; les autres avaient traitau mécanisme de mise en oeuvre,étaient étroi-
tement liées à la surveillance et aux fonctions de coritrBlede la Sociétg des
Nations, Ellescorrespondaien aux "garanties pour1 accompli sement de cette
miasionl\

Les ii,a-'
i.e obligations du premier groupe représenten ie ssence même de la mission
sacrée de civilisation. A tous égards leur raisondietre et leur objet pridtff
demeurent. Leur exécution ne dépendant pas de l'existencd ee la Société des
Nations, elles ne pouvaient devenir caduquespour la seule raisonque11organe
de surveillanc aeait cessé d'exister. Cette manière de volr est confirmé ear
liarticl8 e0,paragraphe premier, de la Chartequi~aintient les droits des Etats
et des peuples et les dispositions des actes internationau xn vigueur jusqulà ce
que Lesterritoires dont il siagit soient places sous le rkgime de'tutelle. Au
surplus la résolutibd ne la Société des Nations du 18 avril 1946 relativement au

territoires sobs mandat a dit que Les fonctions de la Société des Nations rela-
tivement à ces territoires prendraient fin;elle nia pas dit que les mndats eux-
meme s prendraient fin.

Par cette résolutio1 n1Assenrbld éeela Sociét6 desNations a manifesté sa
convictioq nuelesmandatscontinueraien diexister jusqui& ce que Ildenouveau
arrangemen sH soient pris et 1i Union sud-africaine, dans plusieurs déclar&tions
faitesA la Sociét4 des Nations auss bien quiauxNationsUnies avaitreconnuque
le s obligations découlant pour elle du $hndat continuaien t1exister après la
disparition de la Société des Nations. la Cour constate quesi l'interprétation
d'instrument suridiques donnée par les parties [email protected] sas conclu~nte
pour en déteminer .le sens, elle jouitnémgoins diunegrande valeur probante.
.quandcette interprétation contient fa reconnaissanc ear Pfune des parties de
ses obligations en vertu diuninstrument.

Quant au second groupe d'obligations L,a Courconstate que des doutes peuvent
. naftre du fait que les fonctions de surveillac de la Société des Nations sur les
territoires sous Hmdat non placés sous le nouveau régime de tutelle nlontéténi

transférées expressémena tux Nations Unies, ni assumtres expressémen tar cette
organisation. Néanmoins l'obligatio nour un Etat mandataire de se preter une
surveillance internationale et de soumettre des rapports tient une place importante
dans le système des Eiandats. La Cour estime qu'on ne peut guère admettre que
, Ifobligatiod ne se soumettre & surveillanc aitdisparu pour la simpleraisan
que lforgane de contrôle a cesse diexister, alors que les ~ations Unies offrent
un nouvel organe internationa clargé de fonctions analogues encore quenon
identiqu .

Ces considérations sont confhmées par le paragraphe 1 de liarticle 80 de la
Charte qui garantit non seulemen tes droits des Etats mais aussi ceux des peuples
des territoires sousmandâtjusqufau momentoh ser0ri-L conclus des accords de
tutelle. La comp&tenc ee ItAssemblé eénkrale des Nations Unies pour exercer ce
contrBle et pour recevoir et examiner des rapports se déduit des termes généraux
de llarticl1 e0 de la Charte qui liautorise 6 discuter toutes questions au affaires
rentrant dansle cadre de la Charte et à formuler sur ces questions ou affaires
des recommandatio usx PIembres desNations Unies. Au surplus, la résolution de
1iAssemblé de la Société desNations du 18 avril 19.46présuppose que lesfonctions

de surveillance xercées par la Sociét6 des Nations seraient reprises par les
NationsUnies .

Quant au droit de petition\ qui nfétait mentionné ni dansle abt teni dans'
les dispositions du Slandat, il a été organisé par le Conseil de la SociEt4 des
Nations. La,Cour est diavisque le droitainsi acquis par les habitants du sud-
ouzst africain est maintenu par le paragraphe premier de ltarticl8 e0 de la
Charte, tel que ce texte a ét6 interprété ci-dessus. La Cour est ddnc d'avis
que les pétitions doivent être transMses par leGouvernemend te l'Union à llbssem-
blee générale des Nations Uniesqui, est en droit dien connaiftre,

En conséquence l,e Sud-ouest africain doit toujours etre considéré commeun
territoire tenu eh vertu du Mandat du 17 décembre 1920. Le degré de surveillance
A exercer parlibssemblég egnérale ne saurait depasser celui qui était appliqué
sous ke régime des Mandats. Les mêmes observations s'appliquen aux rapports
annuels et aux pétitions.

En raison de 11article 37 du Statut de la Cour internationale de Juatice
et de l'articl e0, paragraphe premier de la Charte, la Courestime que la
compétence accordGe par 11article 7 du Mandat d. laCour perinanente de Justice
internationa lst encore en vigueur et quien conaéqusnce , fUnionsud-africaine

esttenue de reconnaftre comme obligatoire la juridictio de la Cour dans les
termes.pr4vu psr ces dispositions,
Sur .,. Vi.
-.Iç- 3 ( .

Sur la questton l%b'tla Cour a rependu que lesdispositions du Chapitre XIE
étaient applicables au-territoire du Sud-ouest africain en ce sens quielles
fournissent le moyen de placer le territoire sous le régime de tutelle.

., Sur la deuxième partie de la question, concernant la façon dont ce chapitre
est applicable au territoire, ,laCour a réponduque les dispositiond su chapitre

en question ni5mposaien tas $ l'Union sud-africaine liobligation de placer le
territoire sous le régime de tutelle par le mayeh d'un accord de tutelle. Cette
opinion se fonde sur les termespermissifs des articles 75 et 77 de la Charte.
Ces articles se réfgrent & un llaccordll qui supposele consentement des partie8
intéressées, Le fait que llarticle 77 envisage le placement l%ollontaireff de .
certains territoires sous le régime de tutelle nia pas pour effet de crger une
obligation dleffectuer c?.placement en ce qui concerne les autres territoires
visésà Ilarticle, Le mot "voluntairementfi employé 2 propos des territoires de
la catégorie c) visés 11article 77 s'expliqup ear un excès de prudence et par
le desir de donner dea assurance se libre initiative auxEtate possédant de
telsterritoires.
.. .
: La Cour a estimé que si liartiols 80, paragraph e, avait eu ltintention
de créer une obligatio nour IiEtat mandataire de négocier .et,de conclure un
accord, cette intention eQt itté exprimée en termes positifs. Elle a estimé
e
également que cet article ni avait pas davantage pour effet de créer une obliga-
,<.tiondientamer des négociatjons en vue de conclure un accord de tutelle car cette
disposition se réfgre expressémen àtun retard ou un ajournement .'dela nggocia-
tion et de la,conclusianl~ et non aux négociations seule^,^.:bu surplus elle ne se
réfère. pas seulment aux territoires sous Mandat mais aussi Bd'autrest, erri-
toires que les t.erritoires sous mandat. Enfin la.simple obligasion. de:nggocier
ne garantit pas en elle-mgme la conclusion d'accords do tutelle. . Il est vrai
que la Charte nra prévu et réglé qu'unseulrégime, le régime î.ntemationaL de
Tutelle. S'iL.est permis de conclure qu'ons'attendai t ce quedles PliiSsânces
mandataires suivent. la voie normale tracée par la Char.te : clest $ dire conclure
des accords de tuterile, la Cour. ne saurait déduire de ces considération gséné-
rales une obligation juridique pour les Etats mandataires de conclure ou de
négocier des accords da tutelle. 11 ne lui appartient pas de se prononcer sur

les devoirs politiques ou morauxque ces considérations~.peuV enrrtber,

&fin surla question lac'!,la Cour a estimé que liUnioa n!est pas compé-
tente pour modifier unilatéralement le Statut international du Territoire.
, Elle rappelle que le procédé normal pour modifier le Statut est de placer le
territoire soue le régime de tutelle au moyen dtm accord conclu confornément @
aux disposition du chapitre XII de la Charte,

L'article 7 du 8ïandat exigeait pour en madifier les dispositions ltautori-
sationdu Conseil de la Société des Nations; Selon la réponse donnée par La
Cour à la questionIlfitl,ce pouvoir de surveillance appartient mafntenant à
l'Assemblé eénérale des Nations Unies. Les articles 79 et 85 de la Charte
exigeant Ilapprobatio ne l1Assemblée générale pour le s accords de tutelle
permettent d'appliquer par analogie la meme procédure à une madification du
Statut international du territoire sous mandat dont liob jet ne serait pas de
la placer sou^ regime international de tutelle,

L'Union sud-africaine elle-memc a estimé devoir soumettr.,a ujugementfl

de ItAssemblé eknérale, en tant Itqu!organe in%ernational, cornp6tentI1, le
projet d~incorporatio du territoire & ItUnion. Elle a de cette manière
reconnu la compétence de llAssemblé ge érale en la matière. Sur la base de
ces considération s,Cour a étéamenée à conclure que la compétence pour
détermine rt modifier le Statutinternationa lu territoir appart%ent 5
1'Union sud-africain agissant avec le consentement de s Nations Unie S.

O
O O '. . .

Sir Arnold McNair et M. Read ont joint B l'avis ite&osé de leurs
opinions individuelle s,

MM, Alvarez .,. . NTi. Alvarez,De Visscher et Krylov se sontpr£.valus du droit que leur
confére l'articl e7 du Statut et ont joint 4 ltavis lrexpose de leurs
opinions dissidentes.

Le vice-présiden at déclaré ne pouvoir se rallier à l'avis de la
Coursur la réponse à donner à la questionrlbfr,Selonluila Charte imposait
à 1lUnion sud-africain l!obligatlo ne plazer le Territoire sousTutelle.
A ce point de vue comn-là celui de l'économie générale des textes, il se
rallie à 1'opinion dissidente expriméepar M. De Visscher .

Les juges Zoricic et Badawi Pacha déclarent ne pouvoir se rallier
la repense donnée par la Cour à la deuxième partie de la question lfbtet
-
déclarent partagersur ce point'les vues exprimées dans 11opinion de
E. De Visscher .

Liavis de la Cour a ét6prononce en audience publique. Des exposés
orauxont été présent 6sau nom du Secrétaire genéral des Nations Unies par
la Secrétaire général adjoint chargé du département juridique et au nom
des gouvernements des Philippines et de l'Union sud-africaine.

La Haye le 11 juillet 1950

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Statut international du Sud-Ouest africain - Avis consultatif de la Cour du 11 juillet 1950

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