Questions posées par des membres de la Cour au terme de l'audience tenue le 16 mars 2012 : réponses ou compléments de réponse du Gouvernement sénégalais aux questions posées aux deux Parties par MM. l

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COURiNTERNATiONAlEDEJUSTICE

Affaire

relativà des«Questionsconcernant l'obligation

de poursuivre ou d'extrader>>

Réponses écritescomplémentairesdu Gouvernement du Sénégal

auxquestions poséespar lesJugesàl'issuede la séancede
plaidoiries du 16 mars2012

présentées

par

M. CheikhTîdianeTHIAM,

Ambassadeur, Agentdu Sénégal

1MonsüeQ,iH ei!'lliiésii!tvesdlamesMessîeuli'sles membres dè ija lC©YtrieGouvernement de

la RépubliquediuSénégalà , travers son Agentprèslacour, a l'honneur de faire parvenir, ci­
après,à la Haute juridictionles complémentsde réponseou réponsesà certaines questions

poséespar d'honorablesjuges de laCour.

Enconclusionde la réponsefournie par l'Agentdu Sénégallorsde l'audiencepubliquedu 21

mars 2012(CU,CR2012/7,parag. 7),ilconvient de rappeler que pour leSénégall,esvictimes

doivent avoir possédé la nationalité belge au moment de la commission du fait

dommageable (parag. 6). Ainsi,la jurisprudence internationale n'admet pas une rupture de

ce liende nationalitéqui doit fonder la compétencede la Belgiqueen l'occurrence.Dansle
cas d'espèce, ils'agit du moment où les prétenduesvictimestchàdîennes, qui obtiendront

ultérieurement la nationalitébelge,ont subilesfaits dommageables.

Autrementdit, la base juridique sur laquelledevrait s'appuyerla Belgiquepour invoquerune

prétendue responsabilitéinternationale du Sénégalen vertu de la Convention contre la

torture est le lien juridique de rattachement des victimes à l'Etatbelge. C'estpourtant un

« principebienétablidelajurisprudenceinternationale » (S.A. Affairedesbiensbritanniques

au Maroc espagnol (Espagne c. Royaume Uni}, 1er mai 1925 R1clamationn* XXXVI,

Benchiton, R.S.A., Il,p. 706) que le droit quifonde l'actionde la Belgiquedoit bénéficiedrès

son origine aux victimes au nom desquelles la Belgiquesollicite l'extraditionpour ensuite
invoquer la responsabilitédu SénégalI .lfaudrait, dèslors,tenir compte de la date critique

qui est le moment où le préjudicea étécauséauxvictimestchadiennes. (Courpermanente

de Justiceinternationale, Affairedu Chemindefer Panevezys-Saldutiskis (Estoniec. Lituanie)

(fond),28février1939,SérieA/8 n*16, p.17).

Ilressort de ce qui précèdeque la Belgiquen'apas qualitépour invoquer la responsabilité

internationale du Sénégae ln raison du manquement allégué de ce dernier à son obligation
1
de soumettre le cas de H. Habré à ses autoritéscompétentes pour lexercice de l'action

pénale,à moinsqu'ilne l'extrade.

Onpeut au demeurant s'étonnerdoublement du mutismede la Belgiquedans ce domaine.

2D'abord, du ·fait que la BelgiOJuen'ait pas jugé utile de devoir donner une réponse

conséquentelors de l'audience oraledu lundi 19 mars 2012, nià titre princüpat ni même à
titre provisoireà une question aussi importante que cruciale poséepar l'honorable juge
Abraham.

Ensuite, que l'Etat beige n'ait nullement envisagé, alors qu'il s'est continuel!ement
considérécomme compétent, en raison de la compétence personnelle passive, de juger

Monsieur H. HABREpar défaut, c'est-à-dire par contumace, s'il s'appuie toujours sur le
critèredu lien de nationalité(cf.Affaire Ely OuldDAH, officier mauritanien poursuivi par la

France, jugé par contumace et qui a attaqué la décision rendue à son encontre devant la
Cour Européennedes Droits de l'Homme- requête n"'1314/03- qui a rejeté son pourvoi:
17 mars 2009; Voir également l'Affaire SENOUSSIR , esponsablelibyen).

Il - Commentaires a4:1Jdlitionnielatîfsà la Questiolïïpeséepar le·JygeGilEENWOIOO

Les éléments de commentaire fournis à la Cour, relativement à la question posée à la
Belgique par l'Honorable Juge,lors de l'audience du 21 mars 2012 (CU,CR 2012/7, parag. 9

à32),pourraient êtreconfortés et complétésainsi qu'il suit.

Laréférencefaite davantage auxConventions de Genève du 12 août 1949 qu'aux Protocoles

additionnelsdu 8 juin1977, à travers l'évocation, paleJuge, descrimes de guerre et crimes
contre I'Humanité 1eut êtreconsidéréecomme renvoyant aux règles de droit coutumier
qui ontfait l'objet de codification danscesinstruments internationaux conventionnels.

C'estsous ce rapport que, de l'avis du Gouvernement sénégalaisa , u vu des développements

qui ont précédé,dans sa plaidoirie sus visée,les arguments de la Belgique ne permettent
pas d'établir, non seulement une quelconque violation des dispositions de la Convention
contre la torture, mais, encore moins d'obligations coutumières internationales (Cf,

Conclusionsfinales du Gouvernement du SénégalC , U,CR 2012/7, point2)).

Ill- Question poséepar Madame le JugeDONOGHUE

Réponse

Les développements récents en matière de répression de crimes graves du droit

international autorisentà penser que l'interdiction de la torture appartient à une catégorie

d'obligations devant s'imposerà tous les Etats (Procureur cj Furundzija, Jugement, TPIY).De

même,les obligations incombant au Sénégae l n vertu du paragraphe 1 de l'article 7 de la

Convention contre la torture, corolaire nécessairede l'obligation primaire sus mentionnée

(et leur complément indispensable) serait de mêmenature. Le Sénégal,conscient de cet

état de fait, n'a pas voulu s'écarter de cette voie. Il ne nie pas, au demeurant, que

l'obligation prévue à ladite convention puisse s'appliquer aux infractions prétendument

commises avant le 26 juin 1987, date d'entrée en vigueur, pour le Sénégal,de la

Convention.

3 Toutefois, le Gouvernement sénégalaisconteste à la Belgique le droit d'invoquer la

responsabilitédu Sénégal(sur la base de cette convention) pour des faits qui seraient

antérieursau 25juillet1999, date d'entréeen vigueurde laConvention,pour la Belgique,et

ce, pourlesraisonssuivantes:

Silanorme en question est de nature àcréerdes obligationsquis'imposent àtous les Etats~
c'està dire des obligationserga omnes, il n'en demeure pas moins qu'elle appartient à la

catégoriedes obligations erga omnes divisibles.Cestypes d'obligationssont ceux qui lient

un Étatàtous lesautres Etats de laCommunautéinternationale de façon disjointe. LesEtats

peuvent y dérogerpar accord. Encas de violation, seul l'Etatlésédans son droit peut en

demander la sanction. Or, la Belgiquene pouvait se prévaloirdu statut d'Etat lésé, en se

fondant sur ladite convention, pour des faits antérieursà 1999. Cette obligationexiste mais

n'est pas due à la Belgique. L'obligationn'est due à la Belgiquequ'à partir de la date à
laquelleelle a ratifiéla Convention,donc à partir de 1999. LaConventionne pourrait donc

s'appliquer que pour les faits postérieurs à 1999. Les dispositions pertinentes de la

conventionde Viennesur le droit des traitéssont sans appel à cet égard.Aussi,larticle 28

de cette Conventiondispose-t-ilce quisuit: (à moins qu'une intention différente ne ressorte

du traitéou ne soit par ailleurs établie,les dispositions d'un tneilient pas une partie en

ce qui concerne un acteou fait antérieurà la date d'entréeen vigueur de ce traitéau regard

de cette partie ou une situation qui avaitséd'existerà cette date».

C'estun lieucommun de dire que lajurisprudence internationale a longtemps abondédans

ce sens. Qu'il nous plaise de mentionner l'affaire Ambatielos, dans laquelle la Cour a

reconnu qu'<< iJ ne peuty avoir de rétroactivitéque s'il existe une clause ou une raison

particulièrequi appelleà une interprétationrétroactive}(CIJ,AffaireAmbatielos (exceptions

préliminaires),1er Juillet1952). Dansson arrêtdu 24 Mars1999,îe comitéjudiciairede la

Chambredes lords avait estiméque le principede non immuniténe pouvait s'appliquerà
l'exPrésidentPinochet pour des faits extradables qu'à partir du moment où le Parlement

britannique a ratifiéet inclus, dans le code pénalbritannique, la Convention contre fa

torture soit, en décembre1988.

4Pour toutes ces raisons, le Sénégalestime que l'obligationen cause n'existe pas dans ses

relations avec la Belgique aussü longtemps que cette dernière n'était pas Partie à la
conventioncontre latorture.

Réponse
Il convient de répondre que, conformémentà sa Déclaration,le Sénégalest en droit de

réclamerqu'un autre mode de règlement que celui imposépar ta Belgique puisse être

recherché,et d'uncommun accord.

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Questions posées par des membres de la Cour au terme de l'audience tenue le 16 mars 2012 : réponses ou compléments de réponse du Gouvernement sénégalais aux questions posées aux deux Parties par MM. les juges Abraham, Keith et Mme la juge Donoghue, et commentaires additionnels dudit Gouvernement sur la question posée à la Belgique par M. le juge Greenwood

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