Résumé de l'avis consultatif du 13 juillet 1954

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2125
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Number (Press Release, Order, etc)
1954/2
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Résumés des arrêts, avis consultatifs et ordonnances de la Cour
internationale de Justice
Document non officiel

EFFETDE JUGEMENTSDU TRIBUNAL ADMINISTRATIF
IlEs NATIONSUNIES ACCORDANT INDEMNITÉS

Avis cc~nsultatid fui13juillet 1954

Ida question relativeà l'effet des jugements du tri- éluciderla question: un exposé écritet un exposéoral
burial administratif des Nations Unies accordant in- ont égalementétéprésentés enson nom.
dernnitéavait étésoumise à la Cour, pour avis consul-
tatif, par l'Assemblée générale des NationsUnies qui, A la première question, la Cour a répondu quel'As-
le9'décembre1953.avait à cette finadoptélarésolution sembléegénéralen'apas ledroit, pour une raison quel-
ci-après : conque,derefuserd'exécuter unjugement du Tribunal
administratif des Nations Unies accordant une indem-
nité à un fonctionnaire des Nations Unies à l'enga-
"Considérant que tians son rapport (.A!2534)le gement duquel il a étémis fin sans I'assentiment de
Secrétairegénéraa l demandél'ouvertureti'uncrédit l'intéressé.Comme la réponse à la première question
supplémentairede 179 420dollars pour le versement est négative,la Cour n'a pas à examiner la seconde.
cles indemnités accordéespar le Tribunal adminis- L'avis de la Cour a étédonné par 9 voix contre 3 :
tratif des Nations Unies dans onze affaires (affaire l'exposé de l'opinion des trois juges dissidents
riu26 et affaires no'3à 46), (M. Alvarez, M. Hackworth, M. Levi Carneiro) est
joint à l'avis. D'autre part, un juge non dissident
"Considérantque, dans son vingt-quatrièmerap- (M. Winiarski), tout en votant pour I'avis, y a joint
port à l'Assemblée générale(huitième session) l'exposéde son opinion individuelle.
[A/2580], le Comitéconsultatif pour les questions
sidministratives et butigétaires a donné son assen-
timent à l'ouverture de ce crédit.
"Considérantcependant qu'au cours du.débatque Dans son avis, la Cour analyse d'abord la première
la Cinquième Commissiona consacré àcette ouver- desquestions quiluiestposée. Cettequestion,générale
ture du crédit d'importantes questionsjuridiques ont et abstraite, est de portée étroitementlimitée.Sion en
iitésoulevées,
comparelestermes avec ceux du statut du tribunal, on
"Décidede soumet1:re à la Cour interniitionale de voit qu'ellese réfèreseulementà desjugements rendus
Justice, pour avis coilsultatif, les questions juridi- par le tribunal dans les limites de sa compétence sta-
ques ci-après : tutaire. D'autre part,lressort desdocuments soumis à
la Cour que la question a en vue seulement les juge-
"1) Vulestatut du Tribunal administratifdes Na- ments rendus par un tribunal régulièrementconstitué.
tions Unies et tous autres instruments et textes per- Enfin, ellea trait seulementdesjugements renduspar
tinents, l'Assemblée gériéralea-t-elle leiroit, pour le tribunal en faveur de fonctionnaires l'engagement
ilne raison quelconque, de refuser d'exécuter unju- desquels il a étémis fin sans I'assentiment des inté-
gement du tribunal ai:cordant une indemnité à un ressés.
fonctionnaire des Nations Unies à 1'e:ngagement La réponse à donner à la question- laquelle n'im-
duquel il a été mis fin sans l'assentiment de l'in- plique pas l'examen des jugements qui ont étéI'oc-
t.éressé? casion de lademanded'avis - dépenddesdispositions
"2) Si la Courrépond parl'affirmative à la ques- du statut du tribunal, ainsi que du Statut et du Règle-
tion 1, quels sont les principaux motifs sur lesquels mentdu personnel.Examinant cestextes, laCour cons-
l'Assemblée générale peut se fonder pour exercer tate que le statut du tribunal emploie une terminologie
légitimementce droit ?" judiciaire : "statuer sur les requêtes", "tribunal",
"jugements". Ce sont aussi des dispositions essen-
:La Cour avait donnt5 aux Membres des Nations tiellement judiciaires qu'il contient, lorsqu'il énonce
Unies ainsi qu'à l'organisation internationale du Tra- que, "en cas de contestation touchant sa compétence,
vail l'occasion de lui soumettre leurs vues en cette le tribunal décide" et queles jugements sont définitifs
affaire. Des exposés écritsluiont étprésentésau nom et sans appel". II s'ensuit que le tribunal est institué
de cette organisation ainsi que de la France, de la comme un corps indépendant et véritablement judi-
Suède.des Pays-Bas. de laGrèce,du Royaume-Uni de ciaire, prononçant des jugements définitifs et sans
Grande-Bretagne et d'1r:landedu Nord, des Etats-Unis appel dans le cadre limitéde sesfonctions. Le pouvoir
d'Amérique. des Philippines,du Mexique. cluChili, de qui luiest conféréd'ordonner l'annulationde décisions
l'Iraq. de la Républiquedela Chine. du Gueitemala,de prisespar leSecrétairegénérad lesNations Unies - le
la Turquie et de I'Equateur. Au cours d'audiences te- plus haut fonctionnaire de l'organisation- confirme
nues à cet effet,desexposésorauxont été présentésau son caractère judiciaire: un tel pouvoir pourrait dif-
nom des Etats-Unis, di: la France, de la Grèce. du ficilement avoir étéaccordé àun organe consultatif ou
Royaume-Uni et des Pays-Bas. subordonné;
..
:D'autrepart, leSecrétairegénéradlesNations Unies ~à tour remarque alors que. suivant un principe de
av.aittransmisà laCourlesdocuments pouv:antservir à droit bien établiet généralementreconnu,unjugement rendupar un pareil corpsjudiciaire est chose jugée eta A l'appui de la thèse selon laquelle l'Assembléegé-
forceobligatoireentre lesparties au différend.Quifaut- néraleseraitfondée à refuserd'exécuter desjugements
ilconsidérercomme partiesliéespar lejugement ?Les du tribunal, certains arguments ont étéavancés. La
contrats d'engagement fournissent la réponse. Ils sont Cour y répond dans la seconde partie de son avis.
conclusentre lefonctionnaireintéressé etle Secrétaire
généralen sa qualité de plus haut fonctionnaire de On a dit que l'Assemblée générale n'auraitpas le
l'organisation des Nations Unies et agissant pour le pouvoir, en droit, de créer un tribunal compétentpour
compte de celle-ci comme son représentant. Le Se- reridre desjugements qui lieraient les Nations Unies.
crétairegénéral engagela responsabilitéjuridique de Mais, en l'absence de dispositions expresses dans la
l'organisation, personnejuridique pour le compte de Charte. ilressort de cet acte mêmeque le pouvoir dont
laquelle il agit. S'il met fin au contrat d'engagement il s'agit y est nécessairementimpliqué.En effet, il est
sans l'assentiment du fonctionnaire, et si cette mesure essentielpour assurer le bonfonctionnement du Secré-
conduit à un différend soumis autribunal administra- tariat et pour donner effetà cette considération domi-
tif, les parties au différenddevant le tribunal sont le narite qu'est la nécessité d'assurerles plus hautes qua-
fonctionnaire intéresséet l'organisation des Nations litésde travail, de compétence et d'intégrité.
Unies, représentée par le Secrétaire général; et ces On a dit aussi que l'Assembléegénéralene pourrait
parties seront liéespar le jugement du tribunal. Ce instituer un tribunal qui rende des décisions obliga-
jugement. définitif, sans appel, non susceptible de ré- toires pour elle-même.Mais c'est à elle seule qu'il
vision, a force obligatoire pour l'organisation des Na- appartient de déterminerla nature et la portée précises.
tionsUnies, comme étantlapersonnejuridique respon- des mesures par lesquelles elle peut exercer son pou-
sabledel'exécutionrégulièreducontrat d'engagement. voirde créerun tribunal, et cela mêmesice pouvoir est
L'Organisation étant tenue en droit d'exécuter le ju- implicite. D'autre part, a-t-on dit encore, le pouvoir
gement et de verser l'indemnitéaccordéeau fonction- exercéde la sorte serait incompatible avec le pouvoir
naire, il s'ensuit que l'Assemblée générale, l'un des budgétairequi lui est réservé.Mais un pouvoir bud-
organes des Nations Unies, doit êtreliéede même. gétairen'estpas absolu. Quand certaines dépenses ré-
Cette conclusion est confirmée parle texte mêmedu sultent d'obligations, l'Assemblée généralen'a pas
statut du tribunal, duquel il ressort que le versement d'alternative :elle doit faire honneur à ses engage-
d'une indemnitéaccordéepar le tribunal est uneobliga- ments, et les jugements du tribunal appartiennent à
tion desNations Unies dansleurensemble - ou, lecas cette catégorie.
échéant, del'institution spécialisée intéressée.
Ona ditenfinque lepouvoir implicitede l'Assemblée
La Courrelèveensuite que si, de propos délibéré,le générale decréeruntribunaln'irait pasjusqu'à permet-
statut du tribunal ne prévoitni révisionni appel (alors tre au tribunal d'intervenir dans des matières qui se-
que tel eût bien pu êtrele cas),ilne s'ensuit pas que le raient du domaine du Secrétaire général. Mais,aux
tribunal ne puisse réviserlui-mêmeunjugement. dans terrnes de la Charte, l'Assemblée généralepeut à tout
des circonstances particulières. lorsque des faits nou- moinent limiter ou contrôlerlespouvoirs du Secrétaire
veaux d'importance décisiveont étédécouverts. II l'a généralen matière de personnel. Elle a autoriséI'in-
d'ailleurs déjàfait, etune telle action est conformeaux tervention du tribunal encette matière,dansles limites
principes généralement posés dansles statuts et lois de la compétence qu'ellelui a conféré. Donc, enagis-
concernant les tribunaux. santdans ces limites, le tribunaln'intervient nullement
dans l'exercice d'un pouvoir que le Secrétairegénéral
Mais l'Assembléegénéraleelle-mêmeaurait-elle le tiendrait de laCharte, parce quelespouvoirsjuridiques
droit de refuser d'exécuter les jugements dans cer- du Secrétairegénéralenmatièrede personnel ont déjà
taines circonstances exceptionnelleshors du cadre de étélimités à cet égardpar l'Assemblée générale.
la question telle que la Cour l'a définie plus haut : D'autre part, le fait que le tribunal est un organe
jugements dépassant la compétence du tribunal ou subsidiaire, secondaire ou subordonnéest sans impor-
autre vice ? Il s'agitd'un tribunal situédansle système tance. Ce qui compte, c'est l'intention de l'Assemblée
juridique organisédes Nations Unies et traitant exclu- génkralequand ellel'acréé :et, cequ'elleavoulu,c'est
sivement dedifférendsinternesentre lesfonctionnaires créerun corpsjudiciaire.
et l'organisation :dans ces conditions, la Cour estime Quant à ceque l'ona appeléleprécédentétablp iar la
qu'en l'absencede dispositionsexpresses à cet effet les Sociétédes Nationsen 1946.la Cour ne peut leretenir.
jugements ne peuvent êtrereviséspar un corps autre En effet, les circonstances d'alors, d'ailleurs très par-
que le tribunal lui-même.L'Assemblée générale peut ticulières,sonttout autres que lescirconstancesactuel-
toujours pour l'avenir amender le statut du tribunal et les; il y a absence complète d'identité entre les deux
instituer une procédure de révision : en tous cas, de situations.
l'avis de la Cour. elle ne pourrait guère s'en charger
elle-même,étant donné sa composition et sa fonction Amenéeainsi à répondrepar lanégative à lapremière
et alors surtout que l'une des parties aux différendsest des questions de l'Assembléegénérale, laCour cons-
l'organisation elle-même. tate que la seconde question ne se pose pas.

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