Résumés des arrêts, avis consultatifs et ordonnances de la Cour
internationale de Justice
Document non officiel
AFFAIRE RELATIVE AUPERSONNELDIPLOMATIQUE
ET CONSUILAIRE DESÉTATS-UNISA TEHERAN
Arrêd tu 24 mal1980
Dans son arrêtdans l'affaire du personnel diploma- libérationimmédiatedesotages, reconnaître aux mem-
tiqueet consulairedes Etats-Unis à Téhéran, la Coura bres du personneldiplomatiqueetconsulairedesEtats-
décidt : 1)que l'Iran a violéet continue de violer des Unis la protection et les immunitésauxquelles ils ont
obligationsdont ilest tenuenverslesEtats-Unis; 2)que droit, enparticulier l'immunité l'égardde touteforme
ces violationsengagent saresponsabilitt; 3)queleGou- de juridiction criminelle, leur donner les moyens de
vernement iranien doit assurer la libérationimmédiate quitter l'Iran, faire poursuivre par les autorités com-
des ressortissants des Etats-Unis dttenus en otages et pétentes iraniennes ou extrader aux Etats-Unis les
restituer les locaux de l'ambassade; 4)qu'aucun mem- personnes responsables des infractions commises, et
bre du personnel diplomatique et consulairedes Etats- verser aux Etats-Unis une réparation dont la Cour dé-
Unis ne peut êtreretenu en Iran pour y êtretraduit en terminera ultérieurement le montant.
justice ou citécomme témoin;5)que l'Iran est tenu de
rtparer le préjudicecaust aux Etats-Unis; et 6)queles L'Iran n'a prisaucunepart àl'instance. Il n'adéposé
formes de cette réparation seront rtglées par la Cour aucune pièce écrite, ne s'est pas fait représenteà la
au cas où les deux Etats ne pourraient se mettre d'ac- procédureoraleet aucuneconclusionn'a été présentée
cord àce sujet.(Pour letexte complet dudispositif, voir en son nom. Toutefois son attitude a étédéfiniedans
l'annexe.) deux lettres adressées à la Cour par son ministre des
affairesétrangèresles9décembre1979et 16mars 1980.
Cesdécisionsont étt?adoptées àdelargesmajorités : Il y soutient entreautres que la Cour ne peut ni ne doit
points 1et 2 : 13voixcontre 2;points 3et 4 :unanimité; se saisir de l'affaire.
point 5 :12voix contre 3; point 6:14voix contre une.
(Pour le nom des votants, voir l'annexe.) E-rposédes faits (paragraphes 11 à 32)
Il est regrettable que l'Iran ne se soit pas prtsenté
pour dtvelopper ses arguments. La non-participation
Une opinion individuelle a étt jointe à l'arrêt par de cet Etat à la procédure entraîne l'application de
M. Lachs qui a voté contrele point 5du dispositif. Des l'Article53du Statut en vertu duquel laCourdoit, avant
opinionsdissidentesont étéjointesàl'arrêt parM. Mo- de se prononcer, s'assurer notamment que les con-
rozov, qui a votécontre lespoints l, 2,5 et 6, ainsi queclusions du demandeur sont fondées en fait.
par M. Tarazi qui a voté contre les points 1, 2 et 5.
A cet égard,la Cour constate qu'elle dispose, dans
les documents présentés par les Etats-Unis, d'une
masse de renseignements de sources diverses, y com-
pris de nombreuses déclarations officielles des auto-
Procéduresdevant la Cour (paragraphes 1 à 10) rités iraniennes et américaines, qui sont parfaitement
Dans son arrêt,la Cour rappelleque l'instance a tté concordants quant aux principaux faits et qui ont été
introduiteparlesEtats-Uniscontrel'Iran, le29novem- communiqués à l'Iran sans que celui-ci y oppose la
bre 1979. L'affaire avait pour origine la situation de moindre dénégation.En conséquencela Cour est con-
l'ambassade des Etats-Unis à Téhéran etde leurs con- vaincue que les allégations de fait sur lesquelles re-
sulats à Tabriz et à Chiraz, ainsi que la prise et la posent les demandes des Etats-Unis sont fondées.
détentionen otages de membres du personnel diplo- Recevabilité (paragraphes 33 à 44)
matique et consulaire des Etats-Unis àTéhéran et de
deux autres ressortissants des Etats-Unis. Le deman- La Cour doit aussi, conformément à l'Article 53 du
deur ayant prié la Cour d'indiquer des mesures con- Statut et en vertu d'unejurisprudence constante, exa-
servatoires, celle-ci a, par ordonnance du 15décembre miner d'office toute question préliminairede receva-
1979,indiqué àl'unanimité, en attendant son arrêtdt- bilité oude compétence.
finitif, des mesures conservatoires demandant la res-
titution immédiatede l'ambassade et la libération des La Cour dit, sur la recevabilité, que les considéra-
otages (voir communiquéde presse no8011). tionsavancéespar l'Iran dans ses deuxlettresprécitées
ne fontapparaître aucun motifqui obligeraitàconclure
La procédure s'est poursuivie conformément au que la Cour ne peut ni ne doit se saisirde l'affaire. Elle
Statut et au Règlementde la Cour. Les Etats-Unis ont ajoute qu'elle ne voit aucune incompatibilitéentre la
déposéun mémoire,etdes audiences publiques ont eu poursuited'une procéduredevantlaCouret laconstitu-
lieu du 18au 20 mars 1980.A l'issue de celles-ci, les tion par le Secrétaire générale l'ONU, avec l'accord
Etats-Unis ont déposé des conclusions finales dans des deux Etats, d'une commission chargée d'entre-
lesquelles ils prient la Cour de dire etjuger notamment prendre une mission d'ttablissement des faits en Iran
que l'Iran a violéses obligationsjuridiques internatio- en vue d'entendre les griefs del'Iran et de permettre
nales à l'égarddes Etats-Unis et qu'il doit assurer la une solution rapide de la crise entre les deux pays.Compétence(paragraphes 45 à 55) p1:otectionaccordte aux consulats de Tabriz et Chiraz
D~:~ quatre instruments invoquéspar les Etats-Unis constitue laviolationdeplusieurs autres dispositions de
comme base de la compétence de la Cour pour con- la Convention de 1963.
naître de leurs réclamaiions,la Cour constate que les La Cour est amenée à conclure que, le 4 novembre
trois premiers,à savoir les protocoles de signature fa- 1979,les autoritts iraniennesétaient pleinement cons-
cultative accompagnantles conventions de Vienne de cientesdes obligations queleur imposaient lesconven-
1961sur les relations diplomatiques et de 1963sur les tions en vigueur, qu'elles savaient que des mesures
re1at:ionsconsulaires,et letraitéd'amiti, e commerce urgentes deleurpart s'imposaient, qu'elles disposaient
et de droits consulairesde 1955entre les Etats-Unis et des moyens de s'acquitter de ces obligationset qu'elles
l'Iran, peuventen effet servir defondementà l'exercice ointtotalement manqut d'y conformer leur conduite.
de sa compétence en l'espèce. b) Les tvénements postérieursau 4 novembre 1979
En1ce qui concerne le quatrième, àsavoir la Conven- (paragraphes 69 à 79)
tionde 1973surlapréventionetlarépressiondesinfrac-
tions contre les personnes jouissant d'une protection La seconde phase des tvtnements qui motivent les
internationale, y compris :lesagents diplomatiques, la rticlamations des Etats-Unis comprend toute la série
Courn'estime pas nécessairederechercher dans l'arrêt des faits qui se sont dtroults après l'occupation de
si l'suticle 13 de cetinstiniment peut servir de fon- l'.ambassade par les militants. Alors que le Gouver-
dement à l'exercice de sa compétence pour connaître nement iranien avait le devoir de prendre toutes les
des demandes formuléespar les Etats-Unis ail titre de diispositionsappropriées pour mettre fin aux atteintes
cette convention. infligéesà l'inviolabilitédes locaux et du personnel
dl: l'ambassade et proposer la réparationdu préjudice
Fonds. Imputabilité à l'Ira.ndes comportemeiits incri- siibi, il n'a rien fait de semblable. De nombreuses
minéset violationspar l'Iran de certaines obligations ailtoritésiraniennesont immédiatementmanifestéleur
(paragraphes 56 à 94) approbation. L'ayatollah Khomeini en particulier a
La.Courdoit enfin s'assu.rerauxtermes del'iirticle53 p:roclamé que1'Etatiranienapportait sacautiontant à la
du Statut que les conclusions du demandeur sont fon- prise de l'ambassade qu'à la détention des otages. Il a
dées en droit. A cette fin, elle recherche dans quelle qualifiélapremiere de "centre d'espionnage", ila dé-
mesure les comportements incriminés peuvent être cl.aréqueles secondsresteraient (sauf quelquesexcep-
cons.idéréscomme juridiquement imputables à 1'Etat tions) "en état d'arrestation" jusqu'à ce que les Etats-
iraniizn(par opposition aux occupants de l'ambassade) Unis aientlivrél'ancienChahet ses biens àl'Iran et ila
et s'ils sont compatibles ou non avec les obligations interdit toute négociationaveclesEtats-Unis àce sujet.
incombant àl'Iran en vertu destraités envigut:urou de Ciesorganes de 1'Etatiranien ayant approuvé les faits
toute:autre règlede droit internationaléventuellement incriminéset décidéde les laisser durer afin de faire
applicable. pression sur les Etats-Unis, ces faits ont pris le carac-
t2:red'actes de 1'Etat iranien. Les militants sont de-
a) Les événementsdu 4 novembre 1979(paragra- vmenud ses agents de 1'Etatiraniendont les actes enga-
phes 56 à68) gent sa responsabilité internationale. La situation n'a
L~première des événementsdonnant lieuaux Passensiblêmentévolué aucoursdes sixmoisécoulés :
réclamationsdes Etats-Uniis recouvre l'attaque armée de la Cour du l5 décembre 1979a été
perpl!tréele 4 novembre 1979contre des rtjetéepubliquement et l'ayatollah a dit queles otages
E~~~~-up ~ar~des étudianlsmusulmans partisans dela rt:steraient détenus tant que le nouveau parlement ira-
politi.quede l'Imam (appel,%les militants dans.l'arrêt), nien n'aurait pas leur
l'invasiondeslocaux de l'ambassade, laprise e:notages La décision des autorités iraniennesde continuer à
des personnes qui s'y trouvaient, la saisie de ses biens soumettre les locaux de l'ambassade des Etats-Unis à
et de: ses archives et le c.omportement des ;autorites une occupation et àdetenir les membres de sonperson-
iraniennes devant ces 6vé:nements. ne1en otages a entraîné des manquements répétés et
niultiplesauxConventions de Vienneet ajoutéd'autres
La Courfaitobserver que le comportement des mili- violationsà celles qui avaient été lors de la
tants ne pourrait êtredirectement imputable à 1'Etat ,,rise de l~~~b~~~(~co dn~vention de viennede 1961,
iranien que s'ilétait avérqu'ils agissaientalors effec- airticles22, 24, 25, 26, 27et 29; convention de vienne
tivernent pour son compte. Or lesélémentsd'informa- de 1963,article 33 (entre autres); traitéde 1955,arti-
tion dont elle dispose ne permettent pas de l'établir c:,eI~(4)).
avec le degréde certitude nécessaire. Toutefois 1'Etat En Cequiconcerne lechargéd'affaireset deux autres
iranien, qui avait, en tant qu'Etat accréditaire,l'obliganiembres de la mission des Etats-Unis qui se trouvent
tien ,deprendre des mesurt;sappropriéespour protéger tiu ministere des affaires étrangeres d'Iran depuis le
l'amibassade, rien fait pour prévenirl'at,:aque ou 4 novembre 1979,la Cour constate que les autorités
l'em:pêched r'aboutir, nipour contraindre les iraniennes leur ont retiré la protection et les moyens
à év;3cuerles locaux et à libérerles (zette né~eSSaireS pour qu'ils puissent quitter le ministere en
rencl=contraste avec le comportement des ,autorités toute sécurité. La Courestimedoncqu'à leur égardily
iraniennes à la épocluedans plusieurs situations a violation des articles 26à 29 de la Convention de
similaires, où elles ont les mesures vienne de 1961.
Elle constitue, selon la Cour, une violation grave et
manifeste des obligations dont l'Iran est tenàl'égard Notant enoutre quediversesautoritésiraniennesont
des Etats-Unis en vertu des articles 22(2), 24, 25, 26, nienacédefairejuger certains desotagespar untribunal
27 el:29 de la Convention1de Vienne de 1961sur les ou de les obliger à témoigner,la Cour estime que, si
relations diplomatiques,des articles 5 et 36de la Con- cletteintention se traduisait dans les faits, cela consti-
ventiionde Vienne de 1963sur lesrelations coi~sulaires tuerait une violation de l'article 31 de la mêmecon-
et de l'article II (4) du traitéde 1955. L'absence de vention.
139 C) Existence éventuelle de circonstances spéciales Par ces motifs, la Cour rend la décisiondontle texte
(paragraphes 80 à 89) complet est reproduit ci-dessous :
La Cour croit devoir examiner la question de savoir
si le comportement de l'Iran pourrait êtrejustifiépar Dispositif de l'arrêt
l'existence de circonstances spéciales. Le ministre des
affaires étrangères d'Iran a eneffet allégué, dansses La Cour*,
deux lettres susmentionnées, des agissements crimi- 1. Par treize voix' contre deux2,
nels de la part des Etats-Unis en Iran. La Cour consi-
dèreque, même sices agissementspouvaient êtrecon- Décideque, par le comportement mis en évidence
sidéréscomme établis, ils ne constitueraient pas un par la Cour dans le présentarrêt,la République isla-
moyen de défenseopposableaux demandesdes Etats- mique d'Iran a violé à plusieurs égards et continue de
Unis car le droit diplomatiquepermet notamment de violer des obligations dont elle est tenue envers les
rompre les relations diplomatiques ou de déclarerper- Etats-Unis d'Amériqueen vertu de conventionsinter-
sona non grata lesmembres de missions diplomatiques nationales en vigueur entre les deux pays ainsique de
ou consulairesexerçant des activités illicites. La Cour règlesde droitinternationalgénéralconsacréesparune
conclutque l'Iranarecouru à lacontrainte contre l'am- loilgue pratique;
bassade des Etats-Unis et son personnel au lieu d'em- 2. Par treize voix' contre deux2,
ployerles moyens normaux et efficaces qui étaient à sa
disposition. Décidequeles violations de ces obligationsengagent
la responsabilité de la République islamique d'Iran
6) Responsabilité internationale (paragraphes 90 envers les Etats-Unis d'Amériqueselon le droit inter-
à 92) national;
La Cour constate que les violations successives et 3. A l'unamimité,
continues par l'Iran des obligations qui lui incombent Décideque le Gouvernement de la Républiqueisla-
au titre des Conventions de Vienne de 1961et de 1963, mique d'Iran doit prendre immédiatementtoutes me-
du traité de 1955et des règles du droit international sures pour remédier à la situation qui résultedes évé-
générae lngagentla responsabilitédel'Iran àl'égarddes nements du 4 novembre 1979et de leurs suites, et à
Etats-Unis. Ilenrésulteque1'Etatiranienal'obligation cette fin:
de réparer le préjudice causé aux Etats-Unis. Toute-
fois, les violations persistant, les formes et le montant a) Doit faire cesser immédiatement ladétentionilli-
de laréparationne peuvent êtredkterminks àladate du cite du chargéd'affaires, d'autresmembres du person-
présentarrêt. nel diplomatiqueet consulaire des Etats-Unis et d'au-
tres ressortissants des Etats-Unis détenus enotagesen
En mêmetemps, la Courestimeessentiel de réitkrer Ir;in, et doit assurer la libérationimmkdiate de toutes
solennellement les observations qu'elle avait prksen- ces personnes sans exception et les remettre à la puis-
tées dans son ordonnance du 15 décembre 1979sur sanceprotectrice(article 45delaConvention de Vienne
l'importance des principes du droit international rkgis- de 1961sur les relations diplomatiques);
sant les relations diplomatiques et consulaires. Après 6) Doitassurer à toutes lespersonnes enquestionles
avoir soulignéque l'affaire présente une gravitépar- moyens, notamment les moyens de transport, qui leur
ticulière parce qu'en l'occurrence ce ne sont pas seu- sont nécessaires pour pouvoir quitter le territoire
lement des individus ou des groupes d'individus qui iranien;
ont agit au méprisde l'inviolabilitk d'une ambassade
ktrangèremais le gouvernement de 1'Etataccréditaire C) Doit remettre immédiatement à la puissance pro-
lui-même,elleattire l'attention delacommunautéinter- tectrice les locaux, biens, archives et documents de
nationale tout entière sur le danger peut-être irrépara- l'ambassade des Etats-Unis à Téhéran etde leurs con-
ble d'kvénements commeceuxdont elle est saisie.Ces sulats en Iran;
kvénementsne peuvent que saper à la base un édifice 4. A l'unanimité,
juridique patiemment construit et dont la sauvegarde
est essentielle pour la sécurité etle bien-êtrede la Décidequ'aucun membre dupersonneldiplomatique
communautéinternationale. et consulaire des Etats-Unis ne peut êtreretenu enIran
e) Opérationdes Etats-Unis enIran les 24et 25avril afin d'être soumis à une forme quelconque de pro-
1980(paragraphes 93 et 94) cédurejudiciaire ou d'y participeren qualitkdetémoin;
5. Par douze voix3contre trois4,
A propos de l'opération déclenchée en Iran par des
unitésmilitaires américainesles 24 et 25 avril 1980,la Décideque le Gouvernement de la République isla-
Cour ne peut manquer d'exprimer le souci qu'elle lui mique d'Iran est tenu envers le Gouvernement des
inspire. Elle croit devoir faire observer qu'uneopkra- Etats-Unis d'Amérique de l'obligation de réparer le
tion entreprise dans ces circonstances, pendant que la
Cour délibérait surle présentarrêt,quelsqu'en soient --
lesmotifs, est de natureà nuire au respect du règlement M. Elias, vice-président; MM. Forster, Gros, Lachs, Morozov,
judiciaire danslesrelationsinternationales. Néanmoins NagendraSingh,Ruda,Mosler,Tarazi, Oda,Ago, El-Enan,ette-
la question de la légalitéde cette opérationne saurait Camara,Baxter,juges.
influer sur sonappréciationdu comportement de l'Iran 'Sir HumphreyWaldock,président; M. Elias, vice-président;
depuis le4novembre 1979.Les conclusionsauxquelles MM.Forster, Gros,Lachs, NagendraSingh,Ruda,Mosler,Oda,
elle est parvenue ne sont donc pas modifiéesdufait de Ag'MM.Morozovet Tarazi,juges.ter,juges.
l'opération. 'Sir Humphrey.Waldeck,président; M. Elias, vice-prksident;
MM.Forster,Gros,NagendraSingh,Ruda,Mosler,Oda,Ago, El-
Enan, Sette-Camara, aster,juges.
MM.Lachs, Morozovet Tarazi,juges.préjudicecausk àcelui-ci par les évenementsdu 4 no- EItats-Unisd'avoirs iraniens très importants ainsi que
vembre 1979et leurs suites; l'intention, clairement exprimée le 7 avril 1980par le
6. Par quatorze voix5contre une6, PrésidentdesEtats-Unis, d'utiliser éventuellementces
D6cide que les formeset le montant de cette répara- avoirsconformément àdesdécisionsquiseraientprises
tion seront régléspar la Cour, au cas où les parties ne par les Etats-Unis eux-mêmesdans le cadre interne;
pourraient semettred'accord àce sujet, et réservà cet cela signifie que les Etats-Unis étaient à la fois juge
effet la suite de la procédure. et partie. Selon M. Morozov, la situation, marquéepar
les actes des Etats-Unis, qui existait pendant que la
Résumédes opinionsjointes à l'arrêt Cour poursuivait ses délibérationsjudiciairesen l'es-
pècene connaîtaucunprécédent dans toute l'adminis-
tration de lajustice internationale,aussi bien devant la
M. Lachs indique qu'i.1a voté contre la première Cour que devant toute instance judiciaire internatio-
partiie du paragraphe 5 du dispositif car il l'estimait nale. Les Etats-Unis ayant causé à l'Iran de graves
inutile. Unefoisla responsabilitéétablie,toutela ques- prkjudices ont perdu sur le plan juridique comme sur
tion de la rkparationaurait dû êtrelaisséepour la suite le plan moral le droit d'attendre des rkparations de
de la prockdure, y comprislesformeset le montant de l'Iran, contrairement à ce qu'indiquent les paragra-
cette réparation. comme il est déjàdit dans l'arrêt. phes 2, 5 et 6du dispositif. M. Morozov constate aussi
L'opinion souligne l'i~~.iportancde l'arrêi:pour le que certains paragraphes des motifs décriventles cir-
droit diplomatique et l'essentiel est consacrk iila ques- constances de l'affaire d'une manièreinexacte et ten-
tion delasolutionpratique dudifferendentre lesparties dancieuse.
par des moyens diplomatiques. Une fois les (luestions Il considère que, sans prkjudice de la compétence
de droit éclairées par l'arrêt, les partidevraient agir exclusivedu Conseilde skcurité,laCour,d'un point de
rapidement et faire le maximum d'efforts pouirdissiper vue strictementjuridique, aurait pu attirer l'attention
la tensionet la méfiance;pour cela, une initiai~iéma- surlefaitincontestablequel'Article 51delaChartedes
nant d'un tierspourrait êtreimportante. M. Lachsenvi- Nations Unies prkvoyant le droit de légitimedkfense,
sage un rôle particulier pour le Secrétaire gtinéralde article auquel les Etats-Unis d'Amérique se refèrent
1'Or;ganisationdes Nations Unies àcet égardet l'action au sujetdes événementsdes24et 25avril, ne peut être
d'une commission spécialeou d'un organe spécialde invoquéque "dans le cas où un Membre des Nations
médiation.Vu la gravitéde la situation, une solution IJnies est l'objet d'une agression armée"; or il n'y a
s'impose d'urgence. aucunepreuvequelesEtats-Unisaient été l'objetd'une
agression armée.
M. Morozov souligne aussi qu'ilaurait falluindiquer
dans l'arrêt d'unemanièreou d'une autre que le r5gle-
Dians son opinion dissidente, M. Morozoii indique ment du diffkrendentre lesEtats-Uniset la République
que le paragraphe 1du dispositif de l'arrêtest rédigkde i:;lamiqued'Iran doitêtreobtenuexclusivement par des
telle manière qu'il nese limite pas à la question de la nloyens pacifiques.
violation des conventions de Vienne de 1961et 1963
mais s'applique aussi, si on le combine avec certains
paragraphes des motifs, à.la question des prétendues
violations du traité d'amitié, de commerceet de droits M. Tarazia votk en faveurdes paragraphes 3et 4 du
consulaires de 1955entre l'Iran et les Etats-,Unis; ce dispositifdel'arrêt parcequ'ilconsidèrequela saisiede
traitlé,estime-t-il, ne don.ne pas aux parties. le droit l'ambassade et la prise en otagesdespersonnes qui s'y
inconditionnel d'invoquer lajuridiction obligatoire de trouvaient constituaient un acte accompli en violation
la Cour et,en l'occurrence, laCour n'a pas cornpétence des dispositionsdes conventions de Vienne de 1961et
pour examiner les violations allkguées. 1963sur les relations diplomatiqueset consulaires.
EII outre, M. Morozov fait observer que les Etats-
Unis ont commis,pendant la périodedu délibéré nom- Par contre, M. Tarazi s'est vu dans l'obligation de
bred'actes illicitespouraboutir àl'invasion militairedu voter contre le paragraphe 1 du dispositif parce qu'il
territoire de la République islamiqued'Iran, et qu'ils considèrequeseuleslesconventions de Viennede 1961
ont donc perdu le droit d'invoquer le traité dans leurs et 1963accordent àlaCour lacompétencede statuer sur
relations avec l'Iran. l'instance.
Ilakgalementvotécontrelesparagraphes2et 5parce
M.Morozov a votécontrelesparagraphes2,5 et 6du que, de son point de vue, la Cour ne pouvait, au stade
dispositif car il a noté qu'une série d'actes avaientté actuel de la prockdure et vu les circonstances qui ont
commis par les Etats-Uriis contre l'Iran pendant la accompagnécelle-ci, statuer sur la responsabilitk du
duré:edu dklibéré;il a noté en particulierle gel par les Gouvernement de la République islamiqued'Iran.
Par contre, M. Tarazi a votéen faveur du paragra-
S.ir Hurnphrey WaldockprésidentM. Elias,victm-président;phe 6 parce qu'il estimeque les réparations, au cas où
MM. Forster. Gros, Lachs, Nagendra Singh, Ruda, Mosler, Tarazi,sseraient dues, devraient êtredéterminées et fixkes
Oda, Ago, El-Enan, Sette-Carniira, Baxter,. par la Cour internationaledeJustice; elles ne sauraient
Ni. MO~OZO ju,e. fiairel'objetd'instances devant lesjuridictionsinternes.
Résumé de l'arrêt du 24 mai 1980