CR 2004/13
International Court Cour internationale
of Justice de Justice
THE HAGUE LA HAYE
YEAR 2004
Public sitting
held on Tuesday 20 April 2004, at 12.10 p.m., at the Peace Palace,
President Shi presiding,
in the case concerning the Legality of Use of Force
(Serbia and Montenegro v. Italy)
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VERBATIM RECORD
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ANNÉE 2004
Audience publique
tenue le mardi 20 avril 2004, à 12 h 10 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de M. Shi, président,
en l’affaire relative à la Licéité de l’emploi de la force
(Serbie et Monténégro c. Italie)
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COMPTE RENDU
____________________ - 2 -
Present: President Shi
Vice-President Ranjeva
Judges Guillaume
Koroma
Vereshchetin
Higgins
Parra-Aranguren
Kooijmans
Rezek
Al-Khasawneh
Buergenthal
Elaraby
Owada
Tomka
Judge ad hoc Kreća
Registrar Couvreur
- 3 -
Présents : Shi, président
M. Ranjeva, vice-président
MM. Guillaume
Koroma
Vereshchetin
Mme Higgins
MM. Parra-Aranguren
Kooijmans
Rezek
Al-Khasawneh
Buergenthal
Elaraby
Owada
Tomka, juges
M. Kreća, juge ad hoc
M. Couvreur, greffier
- 4 -
The Government of Serbia and Montenegro is represented by:
Mr. Tibor Varady, S.J.D. (Harvard), Chief Legal Adviser at the Ministry of Foreign Affairs of
Serbia and Montenegro, Professor of Law at the Central European University, Budapest and
Emory University, Atlanta;
as Agent, Counsel and Advocate;
Mr. Vladimir Djerić, LL.M. (Michigan), Adviser to the Minister for Foreign Affairs of Serbia and
Montenegro,
as Co-agent, Counsel and Advocate;
Mr. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., Chichele Professor of Public International Law (Emeritus),
University of Oxford, Member of the International Law Commission, member of the English
Bar, member of the Institut de droit international,
as Counsel and Advocate;
Mr. Slavoljub Carić, Counsellor, Embassy of Serbia and Montenegro, The Hague,
Mr. Saša Obradović, First Secretary, Embassy of Serbia and Montenegro, The Hague,
Mr. Vladimir Cvetković, Third Secretary, International Law Department, Ministry of Foreign
Affairs of Serbia and Montenegro,
Ms Marijana Santrač,
Ms Dina Dobrković,
as Assistants;
Mr. Vladimir Srećković, Ministry of Foreign Affairs,
as Technical Assistant.
The Government of the Italian Republic is represented by:
Mr. Ivo Braguglia, Head of the Diplomatic Legal and Treaties Department, Ministry of Foreign
Affairs,
as Agent;
Mr. Umberto Leanza, Professor at the Faculty of Law, University of Rome “Tor Vergata”,
as Co-Agent;
Mr. Luigi Sico, Professor at the Faculty of Law, University of Naples “Federico II”,
Mr. Luigi Daniele, Professor at the Faculty of Law, University of Rome “Tor Vergata”,
Ms Ida Caracciolo, Professor at the Faculty of Law, University of Naples II,
as Counsel; - 5 -
Ms Valeria Santori, Doctor and international law research supervisor,
as Assistant. - 6 -
Le Gouvernement de la Serbie et Monténégro est représenté par :
M. Tibor Varady, S.J.D. (Harvard), conseiller juridique principal au ministère des affaires
étrangères de la Serbie et Monténégro, professeur de droit à l’Université d’Europe centrale de
Budapest et à l’Université Emory d’Atlanta,
comme agent, conseil et avocat;
M. Vladimir Djerić, LL.M. (Michigan), conseiller du ministre des affaires étrangères de la Serbie et
Monténégro,
comme coagent, conseil et avocat;
M. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., professeur émérite de droit international public à
l’Université d’Oxford, ancien titulaire de la chaire Chichele, membre de la Commission du droit
international, membre du barreau d’Angleterre, membre de l’Institut de droit international,
comme conseil et avocat;
M. Slavoljub Carić, conseiller à l’ambassade de Serbie et Monténégro à La Haye,
M. Saša Obradović, premier secrétaire à l’ambassade de Serbie et Monténégro à La Haye,
M. Vladimir Cvetković, troisième secrétaire, département de droit international, ministère des
affaires étrangères de Serbie et Monténégro,
Mme Marijana Santrač, LL.B. M.A. (Université d’Europe centrale),
Mme Dina Dobrković, LL.B.,
comme assistants;
M. Vladimir Srećković, ministère des affaires étrangères de Serbie et Monténégro,
comme assistant technique.
Le Gouvernement de la République italienne est représenté par :
M. Ivo Maria Braguglia, chef du service du contentieux diplomatique et des traités du ministère des
affaires étrangères,
comme agent;
M. Umberto Leanza, professeur à la faculté de droit de l’Université de Rome «Tor Vergata»,
comme coagent;
M. Luigi Sico, professeur à la faculté de droit de l’Université de Naples «Federico II»,
M. Luigi Daniele, professeur à la faculté de droit de l’Université de Rome «Tor Vergata»,
Mme Ida Caracciolo, professeur à la faculté de droit de l’Université de Naples II,
comme conseils; - 7 -
Mme Valeria Santori, docteur de recherche en droit international,
comme assistante. - 8 -
The PRESIDENT: I give the floor to Mr. Ivo Braguglia, Agent of Italy.
M. BRAGUGLIA :
Schéma des argumentations juridiques
1. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, c’est pour moi un grand
honneur de prendre la parole, en tant qu’agent du Gouvernement de la République italienne dans
cette audience consacrée à l’examen des exceptions préliminaires que mon gouvernement a
soulevées, aux termes de l’article 79 du Règlement de la Cour, dans l’affaire relative à la Licéité de
l’emploi de la force armée introduite par la requête de la République fédérale de Yougoslavie du
29 avril 1999.
2. Je précise que la dénomination abrégée de Serbie et Monténégro sera la seule à être
utilisée dans la suite de l’exposé du Gouvernement italien, alors même que la plus grande partie des
faits ou actions auxquels on fera référence a été accomplie à une époque où une telle dénomination
n’avait pas encore été adoptée par l’Etat requérant.
3. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, qu’il me soit consenti
d’esquisser brièvement la structure et le contenu de l’exposé oral du Gouvernement italien qui sera
compléter aujourd’hui par MM. les professeurs Leanza et Daniele.
4. Au préalable, l’Italie tient à souligner qu’elle partage la plupart des arguments qui ont été
développés par les agents et les conseils des autres Etats défendeurs et que, de ce chef, elle entend
se concentrer sur des aspects qui n’ont pas entièrement été traités jusqu’à maintenant.
5. Tout d’abord, l’Italie se réfère aux exceptions préliminaires qu’elle a soulevées dans son
mémoire du 3 juillet 2000. En effet, l’Italie estime que tous les arguments qu’elle a développés
dans ce document devraient être retenus par la Cour, à plus forte raison après les observations
écrites de la Serbie et Monténégro du 18 décembre 2002 et la lettre de son agent du
28 février 2003.
6. Toutefois, des remarques et des observations supplémentaires paraissent nécessaires pour
tenir compte du changement radical d’attitude manifesté par la Serbie et Monténégro dans les
documents ci-dessus mentionnés. - 9 -
7. En premier lieu, de l’avis du Gouvernement italien, les faits relatés par la Serbie et
Monténégro dans ces deux documents sont d’une nature telle que le bien-fondé des exceptions
préliminaires relatives au défaut de compétence ratione personarum et ratione materiae de la Cour
ne fait plus de doute. L’exposé oral du Gouvernement italien sera donc tout d’abord consacré à
l’examen du défaut de compétence de la Cour.
8. Cet examen sera articulé de manière à souligner, en particulier, la spécificité et
l’autonomie juridique de la présente affaire par rapport à toute autre affaire inscrite, à l’heure
actuelle, au rôle de la Cour, à laquelle la Serbie et Monténégro participerait en tant que partie
défenderesse. M. Leanza, qui, avec votre permission, prendra la parole après moi, développera ces
lignes d’argumentation.
9. Deuxièmement, l’Italie entend se concentrer et attirer l’attention de la Cour sur les effets
juridiques découlant, dans la présente affaire, des observations présentées par la Serbie et
Monténégro à la suite des exceptions préliminaires de l’Italie.
10. Le Gouvernement italien avoue son étonnement face à l’attitude tout à fait inhabituelle
dont la Serbie et Monténégro a fait preuve dans ses observations. On est forcé de remarquer que,
même à ne pas vouloir considérer ces observations comme l’expression d’un désistement implicite
— ce que le gouvernement requérant n’admet pas —, la Serbie et Monténégro ne s’est pas donné la
peine de contester, de la moindre manière, les exceptions préliminaires présentées par l’Italie.
11. Au contraire, la Serbie et Monténégro s’est limitée à attirer l’attention de la Cour sur des
faits — notamment son admission aux Nations Unies et son adhésion à la convention sur le
génocide, assortie d’une réserve à l’article IX — qui ont l’effet évident — et peut-être, même
l’intention — de renforcer les exceptions préliminaires de l’Italie à propos du défaut de compétence
de la Cour.
12. Cette attitude contradictoire révèle, de l’avis du Gouvernement italien, qu’en réalité tout
différend entre la Serbie et Monténégro et l’Italie a disparu et que, par voie de conséquence, les
conditions pour l’exercice des hautes fonctions juridictionnelles de la Cour ne sont pas remplies en
l’espèce. Cette partie de l’argumentation du Gouvernement italien sera exposée par M. Daniele.
Monsieur le président, je vous prie maintenant de donner la parole à M. Leanza et je vous remercie. - 10 -
The PRESIDENT: Thank you, Mr. Braguglia. I now give the floor to Professor Leanza.
M. LEANZA :
Réitération des exceptions préliminaires n 1 et n 4 o
13. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, j’ai l’honneur de
consacrer mon exposé aux quatre exceptions préliminaires déjà soulevées par écrit, que l’Italie
maintient et confirme dans leur totalité. Tout d’abord, le Gouvernement italien se permet de
réitérer les exceptions préliminaires n 1 et n 4.
o
14. Quant à l’exception préliminaire n 1 sur la non-recevabilité du onzième chef des
conclusions de la Serbie et Monténégro, cette exception devrait être retenue dans son intégrité. En
effet, dans le onzième chef de ses conclusions la Serbie et Monténégro conteste à l’Italie des actes,
lesquels compte tenu du temps et des lieux où ils auraient été commis, ainsi que de leur contenu
et de leurs auteurs sont tout à fait différents des actes faisant l’objet de la requête de la Serbie et
Monténégro et ne relèvent, partant, pas du même différend. Il est dès lors évident que, par le
onzième chef des conclusions, la Serbie et Monténégro vise à réaliser une extension inadmissible
de l’objet de la requête.
15. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, par rapport à
o
l’exception n 4, l’Italie rappelle les moyens qu’elle a employés dans son mémoire visant à prouver
l’irrecevabilité des conclusions de la Serbie et Monténégro dans leur ensemble.
16. Même à supposer que la Cour devait conclure en faveur de sa compétence dans cette
affaire ce que l’Italie ne croit pas la Cour ne pourrait pas rendre son arrêt au fond. En effet,
considéré que la série d’affaires introduites par la Serbie et Monténégro ne concerne qu’un petit
nombre d’Etats membres de l’OTAN, la Cour se trouverait à juger de faits ayant été commis aussi
et surtout par plusieurs autres Etats qui ne sont pas parties à la présente affaire, mais dont la
position serait inévitablement préjugée par une décision de la Cour.
17. En outre, même si tous les Etats qui ont participé à l’action de l’OTAN en Yougoslavie
étaient soumis au jugement de la Cour, l’optique selon laquelle la reconstitution des faits devrait
être tentée serait sans nul doute déterminée par le titre de juridiction retenu pour chaque procédure.
Il s’ensuit que les mêmes faits seraient évalués par la Cour parfois à la lumière de la convention sur - 11 -
le génocide, parfois sous l’angle de l’interdiction du recours à la force armée. De cette façon
l’action évidemment une et bien solide dans sa conception et son exécution risque d’être
perçue par la Cour comme ébranlée, même morcelée et donc de ne pas faire l’objet d’une
connaissance vraie et fiable. Or, ceci s’avérerait être une cause de non-recevabilité dont la Cour ne
pourra pas se passer.
Réitération de l’exception préliminaire n 2 à la lumière
des observations de la Serbie et Monténégro
18. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, je passe maintenant à
o
examiner l’exception préliminaire n 2 relative au défaut de juridiction ratione personarum de la
Cour.
19. Tout en renvoyant aux argumentations déjà développées dans les exceptions
préliminaires, le Gouvernement italien voudrait soumettre à l’attention de la Cour quelques
considérations suggérées par les faits que la Serbie et Monténégro décrit, dans ses observations du
28 février 2003, comme des «faits récemment découverts, survenus après que les plaidoiries
précédentes avaient été déposées».
20. L’admission de la Serbie et Monténégro à l’ONU à partir du 1 novembre 2000 prouve
de façon désormais incontestable que tout comme l’Italie l’avait soutenu dans la deuxième de
ses exceptions préliminaires cet Etat n’était pas partie au Statut de la Cour au moment du dépôt
de la requête, c’est-à-dire le 29 avril 1999.
21. A cette date-là, la Serbie et Monténégro, en tant qu’Etat non membre des Nations Unies,
n’était pas partie au Statut aux termes de l’article 93, paragraphe 1, de la Charte des Nations Unies,
ni n’avait-elle jamais demandé à devenir partie au Statut aux termes du paragraphe 2 de l’article
précité, en tant qu’Etat non membre de l’ONU. De ce fait, la Serbie et Monténégro n’avait pas le
droit d’ester en justice devant la Cour aux termes de l’article 35, paragraphe 1, du Statut.
22. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, la question reste de
savoir si la Cour pourrait néanmoins se considérer compétente ratione personarum en vertu du
paragraphe 2 de l’article 35, du fait que la Serbie et Monténégro serait partie d’un «traité en
vigueur» prévoyant la compétence de la Cour. - 12 -
23. Dans sa deuxième exception préliminaire, le Gouvernement italien a développé d’amples
argumentations sur cette question. En particulier, l’Italie a soutenu que la seule présence d’une
clause d’attribution de compétence dans un traité en vigueur entre deux Etats, dont l’Etat requérant
n’est pas en même temps partie au Statut, ne saurait conférer à cet Etat le droit d’ester devant la
Cour, à moins que ce même Etat ne se conforme aux conditions établies par le Conseil de sécurité,
dans sa résolution n 9 du 15 octobre 1946. Ce que la Serbie et Monténégro n’a pas fait, ni ne
prétend avoir jamais fait.
24. Cependant, la question ainsi résumée n’a désormais plus d’intérêt dans l’affaire qui nous
occupe à présent, dès lors que la Serbie et Monténégro comme elle l’a rappelé dans ses
observations a adressé au Secrétaire général de l’ONU, en sa qualité de dépositaire, une
notification d’adhésion à la convention sur le génocide, portant la date du 6 mars 2001. Cette
notification, par ailleurs, était accompagnée d’une réserve relative à l’article IX, excluant toute
compétence obligatoire de la Cour.
25. Dans ses observations, la Serbie et Monténégro a justifié la notification d’adhésion
comme il suit : elle
«n’a pas continué la personnalité juridique et le statut de partie aux traités de
l’ancienne Yougoslavie et, ainsi, plus spécialement, elle n’était pas liée par la
convention sur le génocide avant d’y avoir accédé (avec une réserve à propos de
l’article IX) en mars 2001».
26. A la lumière des intentions manifestées par la Serbie et Monténégro, la notification
d’adhésion dont la nature d’acte unilatéral est bien établie ne peut ne pas impliquer que,
selon la Serbie et Monténégro, même la convention n’était pas, au moment du dépôt de la requête,
un «traité en vigueur» entre les Parties à l’instance, aux termes de l’article 35, paragraphe 2, du
Statut. Partant, selon l’Etat requérant, la convention sur le génocide ne saurait constituer une base
sur laquelle la Cour pourrait fonder sa compétence ratione personarum vis-à-vis de la Serbie et
Monténégro.
27. On ne peut non plus soutenir, du point de vue de la Serbie et Monténégro, que
l’article IX a acquis la nature de «traité en vigueur» entre les Parties après le dépôt de la requête, de
sorte que le défaut initial de compétence aurait été comblé au moment où la Cour est appelée à
statuer sur les exceptions préliminaires. - 13 -
28. A une telle conclusion s’oppose la réserve que la Serbie et Monténégro a formulée à
l’article IX de la convention sur le génocide, réserve qui exclut toute compétence obligatoire de la
Cour. De cette manière, et sans que l’on doive se pencher sur la question de savoir quelle serait la
valeur d’une telle réserve, la Serbie et Monténégro confirme d’une manière implicite mais très
claire qu’elle ne considère pas la Cour compétente ratione personarum en cette affaire.
29. C’est une conclusion vers laquelle la Serbie et Monténégro, sans le dire ouvertement,
aboutit inévitablement. La Serbie et Monténégro tout en étant parfaitement convaincue que la
Cour n’a pas, pour les raisons indiquées, de compétence ratione personarum ne le dit pas de
façon explicite, peut-être pour un souci de cohérence. D’ailleurs, s’agissant d’une position
partagée par l’Etat défendeur et par l’Etat requérant, il serait difficile pour la Cour de ne pas en
tenir compte.
o
Réitération de l’exception préliminaire n 3 à la lumière des observations
de la Serbie et Monténégro
30. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, en ce qui concerne
l’exception préliminaire n o3, les opinions exprimées par la Serbie et Monténégro démontrent
clairement sa profonde conviction que la Cour n’a pas non plus de compétence ratione materiae.
31. La Serbie et Monténégro, en effet, avoue qu’elle n’était pas liée par la convention sur le
génocide avant mars 2001. En d’autres mots, selon le gouvernement requérant, la convention, et
notamment son article IX, n’était en vigueur dans les relations entre la Serbie et Monténégro et
l’Italie, ni à l’époque où les faits qui font l’objet de la requête se sont déroulés, ni au moment du
dépôt de la requête.
32. Toujours selon l’opinion de la Serbie et Monténégro, la notification d’adhésion à la
convention en mars 2001 n’aurait pas eu l’effet d’attribuer à posteriori une compétence ratione
materiae à la Cour. Comme je viens de dire à propos de l’exception préliminaire n o2, à une telle
conclusion s’oppose la réserve que la Serbie et Monténégro a formulée à propos de l’article IX de
la convention, réserve qui, si elle vaut pour l’avenir, doit être censée opérer même pour le passé.
33. Il s’ensuit que, en ce qui concerne la compétence ratione materiae, la Serbie et
Monténégro aussi s’est ralliée sinon aux argumentations développées par l’Italie à l’appui de sa
troisième exception préliminaire tout au moins aux conclusions que le Gouvernement italien en - 14 -
tire. La Serbie et Monténégro, désormais, considère tout comme l’Italie que la convention
sur le génocide ne constitue pas une base sur laquelle la compétence ratione materiae de la Cour
pourrait se fonder. Ce qui correspond, d’ailleurs, aux conclusions que la Cour avait déduites, bien
que prima facie, dans son ordonnance sur les mesures conservatoires du 2 juin 1999.
34. A la lumière de tout ce qui précède, le Gouvernement italien demande à la Cour
d’imprimer un sceau définitif à sa déclaration provisoire et donc de prononcer son incompétence au
titre de l’article IX de la convention sur le génocide par rapport au différend entre la Serbie et
Monténégro et l’Italie.
Spécificité et autonomie juridique de la présente affaire par rapport à tout autre différend
devant la Cour concernant la Serbie et Monténégro en tant que partie défenderesse
35. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, l’Italie se permet de
souligner que les considérations que l’on vient de développer sur l’incompétence ratione materiae
ne seraient pas affectées par l’arrêt de la Cour du 3 février 2003 sur la demande en revision de
l’arrêt rendu dans l’affaire entre Bosnie-Herzégovine et Yougoslavie. De l’avis du Gouvernement
italien, il y a plusieurs raisons pour conclure que, dans la présente affaire, la Cour ne devrait pas se
tenir à ce précédent.
36. En premier lieu, il s’agissait d’un arrêt rendu aux termes de l’article 61 du Statut sur une
demande en revision. La Cour était appelée, non pas à trancher directement de questions juridiques
telles que les questions de compétence et de recevabilité soumises à l’examen de la Cour dans la
présente affaire mais seulement à dire si oui ou non la partie demanderesse en revision avait
prouvé l’existence «d’un fait de nature à exercer une influence décisive et qui, avant le prononcé de
l’arrêt, était inconnu de la Cour et de la partie qui demande la revision».
37. En second lieu, dans l’arrêt précité la Cour a évité de prendre une position définitive sur
la question de savoir si la Serbie et Monténégro est effectivement devenue partie à la convention
sur le génocide dès son accès à l’indépendance à la suite de la dissolution de l’ancienne République
fédérative socialiste de Yougoslavie. En effet, la Cour a plus simplement refusé d’admettre que la
situation de la Serbie et Monténégro par rapport à la convention pouvait avoir été modifiée par la
résolution de l’Assemblée générale d’admission à l’ONU, ou par la lettre du conseil juridique de - 15 -
l’ONU du 8 décembre 2000, demandant à la Serbie et Monténégro d’accomplir les formalités
conventionnelles pour perfectionner son adhésion à la convention sur le génocide.
38. En dernier lieu, alors que dans l’affaire qui l’opposait à la Bosnie-Herzégovine, la Serbie
et Monténégro agissait en tant que partie défenderesse et que son intérêt était d’obtenir que la Cour
se déclare incompétente, dans la présente affaire les positions sont renversées et on s’attendrait à ce
que la Serbie et Monténégro vise plutôt à convaincre la Cour qu’elle est bien compétente.
39. En effet, la position de la Serbie et Monténégro par rapport au moment à partir duquel la
convention sur le génocide aurait commencé à produire ses effets juridiques à son égard ne
s’analyse pas comme une simple tactique défensive. Au contraire, la Serbie et Monténégro
exprime une réelle conviction : elle ne se considère pas partie à la convention avant mars 2001. Il
serait bien difficile pour la Cour de ne pas tenir compte de la conviction manifestée par la Serbie et
Monténégro, s’agissant de l’Etat requérant et non pas de l’Etat défendeur.
40. En conclusion, selon l’opinion du Gouvernement italien, la Cour est libre de décider
comme elle le voudra à propos de la deuxième et de la troisième exception préliminaire de l’Italie.
Cependant, la Cour ne devrait pas ignorer que, désormais, ces deux exceptions correspondent à
l’attitude de la Serbie et Monténégro par rapport à la convention sur le génocide.
41. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, de l’avis du
Gouvernement italien, si la Cour devait décider de ne pas tenir compte de la position assumée par
la Serbie et Monténégro à propos de sa situation par rapport à la convention sur le génocide, elle
pourrait être appelée à se prononcer, au préalable, sur deux des questions parmi les plus débattues
du droit contemporain des traités.
42. La première consiste à établir selon quelles modalités et à partir de quel moment un Etat
résultant de la dissolution d’un Etat prédécesseur devient partie aux traités multilatéraux par
lesquels l’Etat prédécesseur était lié. La deuxième question a pour objet la valeur juridique d’une
réserve formulée par un Etat après qu’il est devenu partie au traité international dont il s’agit.
43. Il s’agit là de deux questions très délicates, dont la solution exigerait un débat approfondi
qui se prêterait mal à être développé à ce stade de la procédure, limité à l’examen des exceptions
préliminaires. D’après le Gouvernement italien, toutefois, la Cour pourrait et même devrait éviter
de se poser de telles questions. - 16 -
44. En effet, les observations formulées par la Serbie et Monténégro par rapport aux
exceptions préliminaires ainsi que la lettre de son agent du 28 février 2003 soulèvent une question
que la Cour est appelée à examiner de façon préliminaire, avant toute question concernant sa propre
compétence ou la recevabilité de la requête. Pour développer l’argumentation sur cet aspect, je
vous demande, Monsieur le président, de m’autoriser à laisser la parole à M. Daniele.
The PRESIDENT: Thank you, Professor Leanza. I now give the floor to
Professor Luigi Daniele.
M. DANIELE :
Défaut de l’objet du différend
45. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, comme M. Leanza
vient de l’indiquer, je vais m’occuper d’une seule question. Mais il s’agit bien d’une question très
importante à laquelle le Gouvernement italien attache une grande importance; une question que le
Gouvernement italien estime être une question tout à fait préalable, qui demande à être examinée in
limine litis, c’est-à-dire avant de se pencher sur les questions de compétence et de recevabilité que
cette affaire soulève. La question est la suivante : Peut-on considérer sérieusement qu’il existe à
l’heure actuelle entre la Serbie et Monténégro, d’une part, et l’Italie, d’autre part, un différend aux
termes de l’article 38, paragraphe 1, du Statut ? Et ce différend, à supposer qu’il existe, a-t-il
encore un objet ?
46. Selon un principe bien établi dans la jurisprudence de la Cour, afin que celle-ci puisse
exercer ses fonctions juridictionnelles, il faut qu’il y ait un différend entre les Parties à l’instance.
47. Pour se limiter aux précédents les plus célèbres, je cite d’abord l’arrêt du
21 décembre 1962 relatif aux exceptions préliminaires, dans les affaires du Sud-Ouest africain
(Ethiopie c. Afrique du Sud; Libéria c. Afrique du Sud, exceptions préliminaires,
C.I.J. Recueil 1962, p. 319, par. 328). Ici la Cour a reconnu que l’existence d’un différend
constitue une question revêtant un caractère véritablement préalable, de sorte que la Cour doit
l’examiner avant même d’aborder les questions concernant sa compétence et la recevabilité de la
requête. C’est en application de ce principe que la Cour, avant d’examiner les exceptions - 17 -
préliminaires que l’Afrique du Sud a soulevé à propos de sa compétence, a estimé qu’il était
«nécessaire de trancher une question préliminaire touchant l’existence du différend qui fait l’objet
de la requête».
48. Ce principe a été réaffirmé à l’occasion des affaires des Essais nucléaires entre
l’Australie et la Nouvelle Zélande, d’une part, et la France, de l’autre. Dans les arrêts du
20 décembre 1974 (C.I.J. Recueil 1974, p. 253 et 260, par. 24, et p. 457 et 463, par. 24), la Cour a
statué qu’elle devait
«examiner d’abord une question qu’elle estime essentiellement préliminaire, à savoir
l’existence d’un différend, car abstraction faite de la circonstance que la Cour ait ou
pas une compétence en la matière, la solution de cette question pourrait exercer une
influence décisive sur la suite de l’instance».
49. La jurisprudence de la Cour est aussi très claire en ce qui concerne la nécessité que le
différend existe non seulement lors du dépôt de la requête, mais aussi au moment du prononcé de
l’arrêt. Dans l’arrêt du 2 décembre 1963 (affaire du Cameroun septentrional (Cameroun
c. Royaume-Uni), exceptions préliminaires, C.I.J. Recueil 1963, p. 15, par. 33-34), après avoir
rappelé que «la fonction de la Cour est de dire le droit», elle a statué qu’«elle ne peut rendre
d’arrêts qu’à l’occasion de cas concrets, dans lesquels il existe, au moment du jugement un litige
réel impliquant un conflit d’intérêts juridiques entre les Parties».
50. Le principe dont il est question ici a été réaffirmé par plusieurs décisions, même récentes.
Je me limiterai à mentionner l’arrêt du 14 février 2002, dans l’affaire relative au Mandat d’arrêt du
11 avril 2000 (République démocratique du Congo c. Belgique) (par. 32). La Cour a eu l’occasion
de rappeler dans cet arrêt que, selon sa jurisprudence, «des événements postérieurs à l’introduction
d’une requête pouvaient priver celle-ci de son objet, de telle sorte qu’il n’y avait plus lieu pour la
Cour de statuer sur cette requête».
51. La jurisprudence de la Cour montre aussi clairement que la disparition de l’objet du
différend pourrait dépendre d’événements relevant de la conduite des parties ou de l’une d’entre
elles. Dans les arrêts sur les affaires relatives aux Essais nucléaires (Australie c. France)
(Nouvelle-Zélande c. France) précités, la Cour — après avoir interprété les déclarations des
autorités françaises comme comportant un engagement de ne plus procéder à des essais nucléaires
dans l’atmosphère du Pacifique Sud, en a déduit que «l’object du demandeur a été effectivement - 18 -
atteint» (par. 52 et 55) et que «la demande ayant manifestement perdu son objet, il n’y a rien à
juger» (par. 59 et 62).
52. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, de l’avis du
Gouvernement italien, cette jurisprudence que je viens d’évoquer revêt une importance décisive
dans la présente affaire.
53. L’Italie n’entend pas contester que, au moment où la requête a été déposée, un véritable
différend opposait la Serbie et Monténégro à l’Italie. Ce différend concernait des aspects de la
participation de l’Italie à l’action de l’OTAN dénommée «Allied Force».
54. Selon la Serbie et Monténégro, pendant cette action, des actes de génocide sur son
territoire et contre sa population auraient été commis. Toujours selon la Serbie et Monténégro,
l’Italie, par sa participation à cette action, aurait enfreint les droits dont la Serbie et Monténégro
était titulaire en tant que partie à la convention sur le génocide. D’où la compétence de la Cour aux
termes de l’article IX de la convention.
55. Pour sa part, le Gouvernement italien a toujours rejeté avec toute détermination les
allégations de la Serbie et Monténégro, aussi bien au stade de la procédure pour l’indication des
mesures conservatoires, que par la suite, en soulevant les exceptions préliminaires sur lesquelles la
Cour est appelée à se prononcer à présent. En particulier, je m’en réfère à la troisième exception
préliminaire, par laquelle comme M. Leanza vient de le rappeler l’Italie a soutenu que les
faits faisant l’objet de la requête de la Serbie et Monténégro ne constituaient absolument pas des
actes de génocide et, de ce fait, ne rentrent pas dans la compétence de la Cour au sens de
l’article IX de la convention sur le génocide.
56. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, la question est
maintenant de savoir si un différend oppose la Serbie et Monténégro à l’Italie à l’heure actuelle
― c’est-à-dire au moment où la Cour est appelée à se prononcer sur les exceptions préliminaires ―
ou si, depuis le dépôt de la requête, le différend a cessé d’exister ou son objet a disparu.
57. Or, le point de vue que la Serbie et Monténégro qui vient d’être exprimé, une première
fois, dans ses observations écrites en réponse aux exceptions préliminaires de l’Italie et qu’elle a
confirmé, une deuxième fois, dans la lettre du 28 février 2003 de son agent, prouve ― de l’avis du - 19 -
Gouvernement italien ― que le différend qui constituait l’objet de la requête de la Serbie et
Monténégro a bien disparu et n’existe plus.
58. En effet, dans ces deux documents, la Serbie et Monténégro a changé de façon radicale
son attitude par rapport à la convention sur le génocide. Qu’il nous soit permis de rappeler ici que,
dans le cadre de cette affaire, la convention sur le génocide constitue le véritable noyau central, à
partir duquel l’affaire tout entière se développe. D’une part, comme la Cour l’a dit dans
l’ordonnance du 2 juin 1999 sur les mesures conservatoires (par. 28 et suiv.), l’article IX de la
convention est la seule base juridique éventuellement possible sur laquelle la compétence de la
Cour pourrait se fonder. D’autre part, du moment que la compétence de la Cour est rattachée au
seul article IX de la convention, la Serbie et Monténégro ne saurait contester à l’Italie, dans la
présente affaire, autre chose que la violation des droits que la Serbie et Monténégro prétend
pouvoir tirer de la même convention.
59. Or, la Serbie et Monténégro soutient maintenant qu’elle n’est devenue partie à la
convention qu’en vertu de sa notification d’adhésion, en mars 2001. Cette affirmation, réitérée par
deux fois, en des termes presque identiques, implique nécessairement et par conséquent deux
conclusions. En premier lieu, selon l’opinion actuelle de la Serbie et Monténégro, elle n’était partie
à la convention ni à l’époque où les faits faisant l’objet de la requête se sont déroulés (à savoir entre
le 24 mars et le 10 juin 1999, date où l’action de l’OTAN a pris fin), ni, évidemment, à la date du
dépôt de la requête, c’est-à-dire le 29 avril 1999. En deuxième lieu, et par voie de conséquence, la
Serbie et Monténégro admet qu’avant 2001 elle n’était titulaire d’aucun droit ou intérêt juridique
découlant de la convention. Elle ne pouvait de ce fait invoquer aucun droit ou intérêt fondé sur
cette même source que l’Italie, en participant à l’action de l’OTAN, aurait pu violer et qui
pourraient dès lors relever de la compétence de la Cour aux termes de l’article IX de la convention.
60. La nouvelle position assumée par la Serbie et Monténégro à propos de son adhésion à la
convention interprétée selon le principe de la bonne foi, principe qui doit toujours régir les
relations entre Etats, surtout lorsqu’ils sont parties à une affaire devant la Cour peut avoir une
seule signification possible : bien que de façon implicite, la Serbie et Monténégro reconnaît qu’elle
ne possède aucun intérêt juridique relevant de la convention dont elle pourrait se prévaloir vis-à-vis - 20 -
de l’Italie et dont la violation pourrait relever de la compétence de la Cour en vertu de l’article IX
de la convention.
61. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, force est, partant, de
constater qu’à ce stade de la procédure le différend a bel et bien disparu. Non seulement la Serbie
et Monténégro, tout comme l’Italie, estime que la Cour n’a pas de compétence. Mais encore et
surtout, la Serbie et Monténégro, tout comme l’Italie, estime qu’il n’est pas question, dans cette
affaire, d’un quelconque intérêt juridique découlant de la convention dont la Serbie et Monténégro
pourrait faire valoir la violation.
En d’autres mots, il ne s’agit pas seulement d’une situation où, comme plusieurs Etats
défendeurs l’ont déjà soutenu hier et ce matin, les deux Parties à l’instance tombent finalement
d’accord sur la question de compétence et considèrent désormais qu’à cette question la Cour doit
répondre par la négative. Ici, c’est l’objet même de la requête, l’objet même des questions au fond
soulevées dans la requête, c’est-à-dire le droit conventionnel de la Serbie et Monténégro que l’Italie
aurait lésé. Ce même droit conventionnel, selon l’opinion actuelle de l’Etat requérant, n’existait
pas et, par la force de la logique, ne pouvait pas être lésé par l’Italie ni, à vrai dire, par n’importe
quel autre Etat ayant participé à l’action de l’OTAN.
62. Il est vrai que la Serbie et Monténégro parvient à cette conclusion parce qu’elle ne se
considère pas liée par la convention avant mars 2001, alors que l’Italie a toujours déclaré, avec
toute détermination, n’avoir jamais commis aucune violation de la convention. Cette différence
d’argumentation n’enlève rien à la constatation que, de par la nouvelle position assumée par la
Serbie et Monténégro, tout conflit d’intérêt juridique avec la République italienne a disparu.
63. Certes, la Serbie et Monténégro n’a pas pris une position explicite à cet égard. Dans ses
observations présentées à la suite des exceptions préliminaires, cet Etat s’est limité à affirmer qu’il
n’est devenu partie à la convention qu’en mars 2001, et a demandé à la Cour de se prononcer sur sa
compétence, en tenant compte d’une telle circonstance. Toutefois, comme la Cour l’a reconnu
dans les arrêts relatifs aux affaires des Essais nucléaires (par. 29 et 30), «c’est … le devoir de la
Cour de circonscrire le véritable problème en cause et de préciser l’objet de la demande». Et la
Cour d’ajouter qu’«il n’a jamais été contesté que la Cour est en droit et qu’elle a même le pouvoir - 21 -
d’interpréter les conclusions des parties», ceci étant «l’une des attributions de la fonction
judiciaire».
64. Dans la présente affaire, il appartient sans aucun doute à la Cour d’interpréter le contenu
des observations présentées par la Serbie et Monténégro à la suite des exceptions préliminaires,
ainsi que celui de la lettre du 28 février 2003 de son agent. De l’avis du Gouvernement italien, la
Cour devrait considérer les propos contenus dans ces documents, sinon comme un désistement
implicite — ce que, on l’a vu, la Serbie et Monténégro n’admet pas — tout au moins comme une
admission qu’il n’y a plus un conflit d’intérêts juridiques entre les Parties. Désormais, la décision
que la Cour rendrait sur cette affaire trancherait des questions tout à fait éloignées de la réalité,
comme c’était le cas des questions qui se posaient dans l’affaire du Cameroun septentrional
(p. 33), ou bien des questions qui resteraient dans l’abstrait, comme c’était le cas des questions qui
s’étaient posées dans l’affaire des Essais nucléaires (par. 59, 62).
Conclusions
65. Monsieur le président, Madame et Messieurs les juges de la Cour, pour les raisons qui
viennent d’être exposées, le Gouvernement italien demande à la Cour de dire qu’il n’y a pas lieu à
statuer sur la requête de la Serbie et Monténégro, du moment que le différend entre la Serbie et
Monténégro et l’Italie n’existe plus ou que son objet a disparu. Pour le reste, et à titre subsidiaire,
l’Italie s’en réfère aux conclusions contenues dans ses observations préliminaires. Ainsi se termine
l’exposé du Gouvernement italien et je vous remercie de votre attention.
The PRESIDENT: Thank you, Professor Daniele. This concludes the first round of oral
statements of Italy.
The Court will resume tomorrow morning at 10 o'clock when it will hear the first round of
oral statements of Serbia and Montenegro.
The sitting is now closed.
The Court rose at 1 p.m.
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Audience publique tenue le mardi 20 avril 2004, à 12 h 10, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Shi, président