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5
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InternationalCourt Cour internationale
of Justice de Justice
Public si tting
held on Wednesday 22 ûctober 1997, at 10 a.m., at the Peace Palace,
Vice-President W&ramantry, Acting Ei-esident, presiding
in the case concerning Questions of Interpretation and Application of the
1971 mtreal Convention arising fraai the Aeriai Incident at Lockerbie
(Libyan Azab Jamahiriya v. United Kingdcnn)
and
in the case concernUng Questions of Interpretation and Application of the
1971 Mhtreal Convention arising fran the Aeriai Incident at Lockerbie
(ïdbpn Arab Jamahiriya v. United States of America)
Preliminary Objections
ANNEE 1997
Audience publique
tenue le mercredi 22 octobre 1997, à 10 heures, au Palais de la Paur,
sous la présidence de M. mtry, vice-président,
faisant fonction de président
en l'affaire relative à Questians d'interprétation et d'application de la
convention de Montréal de 1971 résul tant de 1 'incident aérien de
Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c. Royume-Uni)
en 1 'affaire relative à Questions d'interprétation et d'am1icatio.n de la
convention de Montréal de 1971 résultant de 1 'incident aérien de
Lockerbie (Jamahiriya arabe libyenne c. Etats-LTnis dlÀmérique)
Brceptians pré1 iminaires
CoMP'IE RENDUPresent: Vice-PresidentWeeramantryA,ctingPresident
President Schwebel
Judges Cda
Bedjaoui
Gui1lame
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Korm
Vereshchetin
Rezek
Judgesad hoc SirRobertJennings
El-Kosheri
Registrar Valencia-OspinaPrésents : M. Weeramantryv,ice-président ,aisant fonctiode
présidenten l'affaire
M. Schwebel,présidentde la Cour
MM. Oda
Bedjaoui
Guillaume
Ranjeva
Herczegh
Shi
Fleischhauer
Korm
Vereshchetin
Rezek,juges
Sir RobertJennings
M. El-Kosheri,juges ad hoc
M. Valenc.ia-Ospin greffierThe &vemment of the LibyanArab Jamahiriyais representedby:
H. E. Mr. HamedAhrnedElhouderi,Ambassador,Secretary of the People's
Officeof theGreatSocialist People's LibyanArab Jamahiriya to
the Netherlands,
as Agent;
Mr. MohamedA. Aljady,
Mr.Abdulhamid Raeid,
as Counsel;
Mr.Abdelrazeg El-Murtadi Suleiman,Professorof PublicInternational
Law,Facultyof Law,University of Benghazi,
Mr. IanBrownlie, C.B.E.,Q.C.,F.B.A.,Chichele Professorof Public
InternationaLlaw,University of Oxford,
Mr.JeanSalmon,Professor of Law emeritus, Universi librede
Bruxelles,
Mr. Eric Suy,Professor of InternationaLlaw,Catholic Universityof
Louvain (K.U.Leuven),
Mr.EricDavid,Professor of Law,Universitélibrede Bruxelles,
as Counseland Advocates;
Mr. NicolasAngelet,Principal Assistant, Facult of Law,Catholic
Universityof Louvain (K.U.Leuven),
Mrs.BarbaraDelcourt, Assistant, Facultoyf Social,Political and
EconcPniScciences,Universitélibrede Bruxelles;ResearchFellow,
Centreof InternationaL law and Institutof European Studies,
Université libre de Bruxelles,
Mr.MohamedAwad,
as Advisers.
The Gwerrmrentof the üni teKingciun of GreaBritain and
l&rthe.zIreland is representedby:
SirFranklin BermanK.C.M.G.,Q.C.,Legalmiser to the Foreign
and CommonwealtOhffice,
as Agent and Counsel;
TheRightHonourable the Lord Hardi e.C.,TheLordAdvocate
forScotland,Le Gomemement de la Jamahiriyaarabe libyenne sera représentpar :
S. Exc.M. HamedAhmedElhouderi, ambassadeur, secrétairedu bureau
populaire de la GrandeJamahiriyaarabe libyenn populaire socialiste
aux Pays-Bas,
cm agent;
M. Mohamed A.Aljady,
M. AbdulhamidRaied,
cme conseils;
M. AbdelrazegEl-Murtadi Suleiman,professeur dd eroitintemational
public à la facultéde droit del'universitd ée Benghazi,
M. Ian Brownlie,C.B.E.,Q.C., F.B.A., professeurde droitinternational
public,titulaire de la chaireChichele à l'universitdé'Oxford,
M. Jean Salmon,professeur émérite dedroit à l'universitléibrede
Bruxelles,
M. Eric Suy,professeur de droitinternationa l l'université catholique
de Louvain(K.U.Leuven) ,
M. EricDavid,professeur de droità l'universitl éibre deBruxelles,
canane conseilet avocats;
M. NicolasAngelet, premier assistan àtla facultéde droit de
l'universitécatholique de Louvai (K.U.Leuven),
MmeBarbaraDelcourt, assistanteà la faculté dessciences sociales,
politiqueset économiques de l'Universitléibrede Bruxelles,
collaboratrice scientifia quCentre de droitintemational et
à l'Institutd'études.européennd esl'universitl éibrede Bruxelles,
M. Mohamed Awad,
canane cons11ers.
Le Gouwmement du Royaume-Uni sera représentpar :
SirFranklinBerman,K.C.M.G., Q.C.,conseiller juridiquedu Foreign
and CommonwealtOhffice,
came agent et conseil;
le trèshonorable LordHardie,Q.C.,procureur générald'Ecosse,ProfessorChristopherGreenwood,Barrister,Professorof International
Lawat the London Schooolf Economics,
Mr. DanielBethlehem,Barrister, London Scho oflEconomics,
as Counsel;
Mr. Anthony AustC.M.G.,
asDeputy Agent;
Mr. PatrickLaydenT.D.,
Mr. Nom McFadyen,
Ms SarahMoore,
Ms Swan Hulton,
asAdvisers,
Ms MargaretMcKie,
as secretary.
me Gmmmment of the United Statesof America is representby:
Mr. DavidR. Andrews, LegaAldviser,U.S.Department of State,
as Agent;
Mr. MichaelJ. Matheson,PrincipalDeputyLegalAdviser,
U.S.Department of State,
as Co-Agent;
Mr. JohnR. Crook,AçsistantLegalAdviser,U.S.Department of State,
Mr. SeanD. Murphy,Counselorfor LegalMfairs, U.S. Embassy,TheHague,
Mr. OscarSchachter,Professorat the ColumbiUaniversitySchoolof Law,
Ms ElisabethZoller,Professorat the Universitoyf ParisII,
as CounselandAchrocates;
Mr. JohnJ. Kim,Officeof the Legal Adviser,Departmentof State,
Mr. BrianMurtagh,U.S.Department of Justice,
asCounsel.M. ChristopherGreenwood, Barrister,professeurde droit international
à la LondonSchoolc~f Econmics,
M. DanielBethlehem,Edrrister, LondonSchoolof Economics,
carmeconseils;
M. AnthonyAust, C.M.G.,
cme agentadjoint ;
M. Patrick Layden,T.D.,
M. Norman McFadyen,
Mme SarahMoore,
Mne Susan Hulton,
camneconseil1ers,
Mme MargaretMcKie,
cm secrétaire.
Le Go-ement des Etats-UnisdfAnaériquesera représentépar :
M. DavidR. Andrews,conseiller juridiquedu départementdtEtat
des Etats-Unis,
carm7agent;
M. MichaelJ. Matheson, conseillerjuridique adjoint principal
du départementdtEtatdes Etats-Unis,
M. JohnR. Crook,conseiller juridiqu adjointdu département dlEtat
des Etats-Unis,
M. Sean D.Murphy,conseiller chargd ées affaires juridique s
1 ambassadedes Etats-Unis aux Pays-Bas,
M. OscarSchachter, professeur àla facultéde droit del'Université
de Columbia,
Mme ElisabethZoller,professeur à l'université de ParisII,
came conseilset avocats;
M. John J. Kim,du bureaudu conseiller juridique du départementd1Etat
des Etats-Unis,
M. BrianMurtagh,du département de la justicedes Etats-Unis,
canneconseils. - 8-
The ACTING PRESIDENT: Please be seated. The Court meets this morning to hear the
second round of oral submissionsof Libya inthe cases conceming QuestionsofInterpretationand
Applicationof the 1971 MontrealConventionarisingffom theAerialIncidentutLockerbie(Libyan
ArabJamahiriyav. UnitedKingdom)and QuestionsofInterpretationandApplicationof the 1971
Montreal Conventionarisingj-om the Aerial Incidentat Lockerbie (Libyan ArabJamahiriyav.
UnitedStatesof America). 1cal1first on the Agent of Libyato make his submissions.
M. ELHOUDERI : Monsieur le Président, Messieurs dela Cour. Lundi matin, le
Royaume-Uni et les Etats-Unis ont eu l'opportunitéde répondreaux arguments développés par la
Libye concernant la compétencede la Cour et la recevabilité dela requête. Au terme de cette
crC
réplique,il apparaît que les points de désaccordont diminuémais demeurent sur des points
importants. La Libye se concentrera sur des questions de droit qu'elleestime fondamentales.
D'uncertain pointde vue, les défendeursnous ontpermis d'épargned res minutes précieuses
en ne soufflant mot ducontexte politique, pourtantbien utile, pour interpréterle comportement de
ces Etats dans des circonstances particulièrement dramatiques, préférandtévelopperde manière
souvent académique despoints de droit qui ne soulèventpas de problèmeparticulier'.Ils ont ainsi
dénigré en une phraseles thèseset les doutes répercutépar les médiasinternationaux àl'encontre
de leurs versions des faits2.
Sur un seul point la Libye rejoint le Royaume-Uni :«the Court is in a position to make its
V
own contribution to facilitating the trial of the accused by removing artificial obstacles placed in
the way~~. La Libye n'ajamais demandé autre chose. Elle se félicite en outre de cette
reconnaissance quasiexplicite des effets concrets qui pourraient découler darrêt dela Couren
l'espèce.
'Voirparexemple lesconsiderationsliéesa l'article79 duRèdéveloppéepsarsirFranklinBerman,Oral
Submissionsof the UnitedKingdom,Monday20 October1997,CR97/22, p. 10-11.
'DavidR. Andrews,OralSubmissionsof theUnitedStatesof America,Monday20 October1997, CR97/23, p. 8,
par.1.3.
3SirFranklinBerman,CR97/22, p. 12.
LUK/LUS/CR97/24 -9-
Pour lereste,les défendeurspersisteàdonnerune interprétationtendancieusevoireerronée
des positions de laLibye. Les conseils qui prendront la paràma suite s'attacherontdèslorà
préciser la teneur exacte des demandes adresséesà la Cour afin de dissiper des malentendus
entretenus par les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
Le professeur Jean Salmon fera quelques mises au point d'ordre général;
Le professeurEric Davidtraitera de la compétencede la Cour au regardde la convention de
Montréal;
Le professeur Eric Suy abordera certains aspects liés recevabilité dela requête;
Le professeurIanBrownlie aborderad'autres aspectsconcernantlarecevabilité,ainsi que la
pertinence de la question liàela menace de recourià la force.
Monsieur le Président, jereprendrai la parole pourexposàrla Cour les conclusions de la
Libye en i'espèce.Puis-je maintenant, Monsieur le Président,vous demanderd'appelerla barre
le professeur Jean Salmon?
The ACTING PRESIDENT: Thank you very much. 1 give the floor now to
Professor Salmon.
M. SALMON :
Quelquesmises aupoint de caractère général
Monsieurleprésident, Messieursde la Cour, mon propos,à ce stadede l'instance,est de me
borner àtrois mises au point de caractère général. - 10-
1. La question du for dans les plaidoiries des défendeurs
2.1.Les défendeursontsoutenu l'unet l'autre(Sir Franklin Berman1et M.John Crook2)que
la Libye prétendaitque son territoire serait le for exclusif où devrait se tenir le procès desdeux
accusés; quece for était fixé à I'exclusionde tout autre. Il est inexactque ceci soit la position de
la Libye.
2.2.La Libyesait parfaitementque ledroit internationalgénérae lt la conventionde Montréal
n'excluent aucunfor pourvu que les tribunaux de 1'Etaten question aient une compétenceprévue
par leur droit interne. La Libye n'ajamais contestéque lestribunaux d'Ecosseou des Etats-Unis
avaient chacun un titre à traiter des infractions supposéessur la base soit de la compétence
territoriale, en ce qui concerne le Royaume-Uni,soit la compétence personnellepassive ou la loi W
du pavillon,encequi concerneles Etats-Unis. Laconventionde Montréalrespectecettepossibilité.
2.3. Mais la question n'estpas là. La question qui estau cŒurde cette affaire est celle de
savoir à quelles conditions les accuséspeuvent êtretraduits ou jugés devant lestribunaux des
défendeurs.
Plusieurs hypothèsespeuvent êtreenvisagées,disonsdes hypothèsesthéoriques :
Premièrehypothèse :lesaccuséssontjugés inabsentia. Cette façondeprocéderest courante
dans le droit pénalde nombreuxEtats. Elle n'estpas contraireau droit international,elle pourrait
êtreenvisagée,n'étaitque lesdroitsanglo-saxonsne connaissentgénéralement pals aprocédure par
défautou par contumace; c'estle cas des défendeurs.
Deuxièmehypothèse :les Etats-Unisou le Royaume-Uniobtiennentde laLibye l'extradition
des suspects. C'estici qu'intervientetjoue le droit de laLibye dejuger ou d'extrader (aut dedere
aut judicare).
'"Libyahas brought before this Court the propositionthat the MontrealConvention givesLibyathe legal right
unilaterally to insist thatthe trial must be held inLibya to the exclusion ofal1other venues." (Audience publiquedu
20 octobreCR/ 97/22,p. 9).
2"anallegedexclusiveLibyan right to choose whether to 'extraditeor prosecute"' (audiencepubliquedu 20 octobre,
CR/97/23, p. 11, par 2.4). - 11 -
Cettepossibilitéde choix est consacréepar la conventionde Montréalqui lie les défendeurs.
La Libye a, dèsl'origine,indiquéqu'ellechoisissait la secondeoption (judicare)parce que sa loi
interne ne prévoyaitpas l'extradition deses nationaux.
Certes, lorsque les décisions731 et 748 du Conseil de sécuritél'ontinvité à trouver une
réponseaux demandesdes défendeurs, le Gouvernementlibyen- commecela avait étéannoncé
par son agent devant la Cour en 1992'- a poséla questionau Congrèsdu peuple. Ce dernier
s'est exprimé parune résolution qui a été transmisa eu Secrétairegénéral des Nations Unies le
29 juin 19924et qui se trouve d'ailleurs dans les annexes du mémoirelibyen et également à
l'annexe58 des objections préliminairesdu Royaume-Uni. Le Congrès du peuple, dans sa
résolution,n'a pas donné sonaval à une modification du code pénalou du code d'instruction
criminelle libyen; en revanche, il fit savoir qu'il n'avaitpas d'objectionse que le procès puisse
se tenir par l'intermédiairdes Nations Unies devant un tribunaljuste et impartialsur lequel on se
mettrait d'accord.
Et c'estici,Monsieur le Président,Messieursdela Cour,que la questiondu procès équitable
est apparuecomme la clé de tout le problème. SirFranklin Berman lereconnaissait endes termes
excellents :
"It is common groundthat any trial must be fair and must be seento be fair :
fair of courseto the accusedbut fair also, so we Say,to the interestsof the victims and
their families, to the States affected and to the wider international interest."'
La Libyeet la majoritéau moins dela communautéinternationaleestiment queles tribunaux
britanniques et américainsne répondent pas à cette condition. Nous n'espérions pas pouvoir en
convaincrerapidement lesdéfendeurs,tantces questionssontliées à despréjugéc sulturels,pas plus
3Audiencepubliquedu26 mars1992(CR9212, p. 20).
4
"8.Réitérasotn attachemeaudroit pénaelà la procéduree laJamahiriyal,e Congrés
généra dlupeuplene s'opposepaàce quele Comitédes Sept,crtéparla Ligue desEtatsarabes,ou
l'organisationdesNationsUnies effectueuneenquêteet portel'affairetn tribunajlusteet
impartial qui aktéchoisid'uncommunaccord."(Doc ONU,SI24209du30juin 1992, annexe154
aumémoire libyendu20 dtcembre 1993,aussireproduitauvolumeII,annexe58 desobjections
préliminairdsuRoyaume-Uni.) - 12-
que nous ne pourrions les convaincrequ'unjuge libyen pourraitêtreimpartial. Il seraitdonc vain
de poursuivre ce débat.
Ce qui estessentiel dans tout ceci, c'estnon pas quea Libyeait undroitexciusifàjuger les
suspects, mais bien que les défendeurs n'ontpas le droit de forcer la Libye à accepter une
«livraison» contraire à la convention de Montréalou au droit commun
extradition ou une
international qui respecte le consentement et l'égalisouverainedes Etats.
J'en viens maintenant à la troisième hypothèsepour obtenir la présencedes suspects au
procès :c'estsimple, les suspectssont enlevéset conduits de force devant lejuge des défendeurs.
Si un tel acte est peu probable de la part du Royaume-Uni, on sait que les Etats-Unis y ont eu
recours à plusieurs reprises et, selon eux, sans qu'il yait là rien d'ilàileur avis: les affaires 'Cr*
Alvarez Machainou Noriega en sont des exemples. Des relations séculaires avecle Mexique
émaillentles recueils américains depratique. Une grande partie de la doctrine scientifique aux
Etats-Unis, aussi bien que la Libye, sont d'unavis contraire. LeGouvernementlibyenn'ajamais
étésûr que les Etats-Unis ne tenteraient pas, unjour, une opérationde force de ce style sur leur
territoire.
Quatrième hypothèse :obtenir du Conseil de sécurité qu'ildécidecette extradition.
Alors là, le premierpointà soulignerest que laLibye ne conteste évidemment pas,commeil a été
prétendu,le droit d'unEtat Membre des Nations Unies de saisir le Conseil de sécuritéc,'est une
évidence; cequ'ilconteste c'estque I'onprocède à une telle saisine dans le but de trouver une v
justificationà posteriori à la violation des droits souverains d'unEtat Membre, qu'iltient de la
convention de Montréalet de son droit au règlement pacifique d'une contestation juridique
bilatérale.
2.4. Le second pointque la Libye soutient - etje renvoie aux exposéspasséset futurs de
M. Suy sur cette question - le second point, c'est que les défendeursn'ont pas réussi leur
manoeuvre. Si I'onprocède àune interprétationcorrecte destextes, on aboutià la conclusionque
I
le Conseil n'apas endosséla demande des défendeurs. - 13 -
II. La pertinence du droit international général
2.5. Le second point, le deuxième point que je souhaiterais maintenant aborder est la
prétentiondesdéfendeursquelaLibye soulèvedesquestionsde droitinternationalgénéraq luin'ont
rien àvoir avec l'application de la convention de Montréal.
On commencera par remarquer que ce droit qu'il dénàela Libye, le défendeurne se prive
pas de l'exploiteà leur profit. En effet, pourtenter d'échappàrleurs obligations en vertu de la
convention de Montréal,les défendeursinvoquent deux exceptions tiréesdu droit international
général :
1. d'unepart, la libertéqu'ils auraientdu choix du for. Je viens de m'enexpliquer; et
2. deuxièmement,les soi-disants commandements du Conseil desécurité.
2.6. Monsieur le Président,Messieurs de la Cour, ildoit être clairque si les défendeurs
invoquentdes règlesdu droit internationalpour écarterla conventionde Montréal,et qu'auxyeux
desdéfendeurs laCour est compétentepour connaître de ces règles commemoyens de défense,le
demandeurpeut àson tour invoquer les règles dedroit internationalqui font obstàcce que ces
défenses soient retenues parla Cour.
2.7. C'estbien dans cet esprit que la Libye a montré l'importanceprincipe du règlement
pacifique des différendsà la fois comme partie intégrante dela procédure del'article 14 de la
convention de Montréalet comme préliminaireobligé à toute forme d'exécutionforcée des
«demandes» des défendeursou de leur prétendudroit au choix du for.
2.8. Les violationsdu droit internationalpar des menaceset par le non-respect des règlesde
la responsabilité internationale illustrentde même lavolonté d'écarter la convention de Montréal.
C'esttoujours dans cet esprit que la Libyea montréque le principe d'un procèsimpartial est un
prérequisà toute forme de «livraison» des suspects (décidémencte mot passe difficilement mes
lèvres). Elle ne croit pas qu'uneseule des résolutionsdu Conseil ait jamais invitéla Libye à
exécuter uneaction qui s'avérerait,dans les circonstances de l'espèce,contraireà ce principe
fondamental. - 14-
2.9. C'esttoujours dans cet esprit, afin de montrer qu'elle exécutaitles décisionsdu Conseil
en ses divers points, que la Libye a exposéles conditions dans lesquellesà sa recommandation,
les avocats des suspects,étaient disposéà accepter différentesformulesde procèséquitables qui
étaientproposéep sarplusieurs organisationsinternationalesenvuederégler leconflitbilatéralentre
la Libye et les défendeurs.
2.10. L'utilisationde ces moyenspar la Libye, ne revient pas((marchanderavec le Conseil
de sécurité)s)ije traduiscorrectementl'expressionutiliséeparsir Franklinrman((dobargainwith
the Security C~uncil)))~, ais au contraire de montrer que l'actionde la Libye est conforme aux
décisions duConseil et que l'exceptiond'irrecevabilitéavancép ear les défendeurs,fondéesur un
prétenduconflit avec les décisionsduConseilde sécuritée ,st sans fondement et ne peut doncêtre *rrr
retenue par la Cour.
III. La question de la distinction entre exception préliminaire et fond de I'affaire
2.11.Par unetroisièmeobservationla Libye souhaiteraitfairepart à la Courde son malaise
devant la manièredont les défendeursrecourent au fond pour traiter d'exceptionspréliminaires.
Pour traiter de l'exception d'incompétenclees défendeurs,s'appuyantsur le précédent des
Plates-formespétrolières, insistepour que l'onentre dans les faits de la cause afinde s'assurerde
l'existenceréelled'undifférend. La Libye estime ce procédé légitime puisqu'ildoitpermettreà la
Cour d'appréciersiprimafacie ily a bien unréel conflitd'opinions;ladéterminationde savoirqui
a raison sur les interprétationsproposées étanrtenvoyéeau fond, si la Cour estimequ'untel conflit *
existe et qu'elleest donc bien compétente.
Toutefois l'extensionde cette pratiqueaux problèmesd'irrecevabilitéqui,n l'occurrenceici,
concernent pratiquementtout le reste de I'affaireest plus problématique.
2.12.Au coursde la procédureécriteetorale,la Libyea eu l'occasionde déterminerune série
d'hypothèsesen ce qui concerne les relationsentre la convention deMontréalet lesrésolutionsdu
Conseil de sécurité.Le professeur Suy y reviendra encore tout à l'heure. Aux yeuxde la Libye
6Audiencepubliqudu 20 octobre (CR97/22, p. 9).
LUWLUSICR 97/24 - 15-
danslaplupart deceshypothèses,iln'ya aucunconflitpossibleentre les deuxtermes de larelation.
Ceci devrait suffireà faire écarter les exceptions d'irrecevabides défendeursfondéessur un
prétenduconflit et une primautédes résolutionsdu Conseil qui n'aévidemmentpas à s'appliquer
s'iln'ya pas de conflit. Dans une hypothèseparticulière, la Libyeenvisage la possibilité d'une
contradictionsurunpoint limité,mais doitdansce cas setraduirepar une inopposabilitélaLibye,
en vue de respecter la Charte des Nations Unies elle-même.
Toutes ces questions,Monsieur lePrésident,Messieursde laCour, sontindiscutablementdes
questions de fond.
2.13. On peutcomprendrelesoucidutribunal de céans,qui sereflètedansl'article79de son
Règlement,que lerôle de la Cour soit déchargé au plutsôt d'affaires quimanifestementsont hors
de sa compétenceou sont affectéesd'uneparticularité susceptible deruiner sans discussion leur
recevabilité. Si tel n'estpas le cas, si les questions de fond sont complexes,on comprendraitmal
que la Cour les déclare irrecevablesou les tranche au fond - comme il lui est demandépar
M. Matheson7 - avant que le débatau fond ait eu lieu dans des conditions normales.
Or en l'espècequ'enest-il? Les défendeursontpu bénéficied res vues de la Libye au fond
par sonmémoire déposé le 20 décembre1993. Il y aura bientôt quatre ans. Ils ont eu le temps de
l'étudier. La Libye attend toujours leur contre-mémoirepour connaître une réponse détaillée
l'ensemblede l'argumentation qu'ellea déployée.Le débat,s'ilétaitnormal, pourrait d'ailleurs
mêmese poursuivre par une réplique etune duplique. Si les défendeurspeuvent demander à la
Cour de déciderdufond aprèsune procédureaussi sommaireque reste-t-il duprincipe de l'égalité
des parties? Une telle approche n'est-elle pas incompatible avec le concept d'une bonne
administrationde lajustice? Nous sommespersuadés quela Cour sera attentive à ces questions
graves qui dépassentde loin le cadre de la présente instance.
Je remercie la Cour de sa bienveillanteattention.
'VoirCR 97/23, p. 29, par. 4.12.
LUWLUSICR97/24 - 16-
Je vous prie, Monsieur le Président,si vous le voulez bien, de donner maintenant la parole
àM. le professeur David pour continuer les exposésde la Libye.
The ACTING PRESIDENT: Thank you, Professor Salmon. Professor David,please.
M. DAVID :Merci Monsieur le Président.
LA COMPETENCEDE LA COUR
3.1. Monsieur le Président, Messieursde la Cour, il m'appartient d'examiner à nouveau la
compétencede la Cour à connaîtredu présent différendconformément à l'article14,paragraphe 1,
de laconvention de Montréal.
W'
Eu égard auxcontraintesdetemps, la Libye ne répondraqu'aux principauxargumentsde ses
adversaires; lefaitde passersoussilencecertainesde leursréponsesquid'ailleursparfoisdéforment
ou interprètent de travers les arguments de la Libye n'implique évidemment pas que la Libye
reconnaisse la pertinence oulavaliditéde ces réponsesen dehors des casoù elle a pu constaterun
certain rapprochement des points de vue.
En réalitép,ourtout ce quiconcernelacompétencedela Cour,laLibye maintient l'ensemble
de sonargumentation et elle demande respectueusement à la Cour de bien vouloir tenir compteà
lafois de son mémoiresur le fond, deses observationsécrites surles exceptionset des plaidoiries
orales de la semaine passée.
3.2. Pour le présentexposé,je suivrai un plan analogueà celui de l'exposédu premiertour. rir
Je confirmerai donc, et développeraipour autant que de besoin, lesquatre points suivants:
primo : il existe entre les défendeurset la Libye un différend quirelève de laconvention de
Montréal(1);
secondo : les défendeursnepeuvent agir de manière à empêcherla Libye d'exercerles droits que
luiconfere la convention de Montréal (II);
tertio: la saisine du Conseil de sécuritpar les défendeursne fait pas disparaître le différend
relatif la convention de Montréal(III); et - 17-
quatro : la Cour peut connaîtrenon seulementdes plaintes de la Libye relativesà la convention
de Montréal mais égalemend te celles qui y sont directement liées(IV).
Abordons si vous le voulez bien successivementces différentpoints.
1. Il existe entre les défendeurset la Libye un différendqui relèvede la convention de
Montréal
3.3. Monsieur le Président, Messieurs de lCour, pour contesterce point, les défendeursse
sont référésà certainesdispositionsde la conventionde Montréal. Nousallons donc lessuivre sur
ce terrain.
Les Etats-Unis, par lavoix de M. Crook, se sont étonnés d'entendrlea Libye invoquer,«for
the first time», selon eux, l'articlepremier de la convention de Montréal',un étonnementque ne
semble pas partager le Royaume-Uni, et pour cause puisque la Libye s'étaitdéjà référée, tantôt
implicitement?,tantôt explicitemenf, à cette disposition dans son mémoireécrit.
3.4. Le professeur Greenwood, pourle Royaume-Uni, ne conteste d'ailleurs pasque «the
charges, ifproved,woulddisclosean offencefallingwithin Article 1~~.Cette formulationreste au
demeurant ambiguë car, si nous comprenons bien le professeur Greenwood, elle tend à suggérer
qu'iln'estpasencoredémontré qu'unattentat auraitétécommissur levol Pan Am 103 ..Quoi qu'il
en soit, le Royaume-Uni reconnaîtaussi que la convention de Montréal a établiun mécanisme
applicable à ce type d'acte terroriste5 tandis que les Etats-Unis invoquent mêmecertaines
dispositions de la convention leurprofit, pourrépétertantôt sulrabasede l'article5,paragraphe 3,
que la conventionde Montréalautoriseles Etats-Unis à poursuivredessuspectsselonleurspropres
'CR97/23, p. 11-14,par. 2.4-2.12.
2~vlémoirdeu 20 décembre1993,p. 79, par. 4.1.
3~bid.,p. 80, par. 4.3.
4
CR 97/22, p. 18,par. 2.7.
'Ibid., par. 2.8.
LUK/LUS/CR 97/24 - 18 -
lois6,tantôt sur la base de l'article11,qu'ils ont rempli leur obligation d'assistancejudiciaire en
transmettant à la Libye l'acte d'accusation7.
La Libye reconnaît en effet que l'article5, paragraphe3, permet aux Etats-Unis de se
prévaloirde leur loi nationale pour poursuivre pénalement dep sersonnes soupçonnées d'avoir
commis des actes viséspar la convention. En revanche, elle estime que l'entraidejudiciaire en
matière pénale visée à l'article11 ne se limitepas simplement à envoyer un acte d'accusationqui
n'est étayé par aucune preuve matérielle.
3.5. Mais, au-delà des questions propres à l'uneou l'autredisposition de la convention, la
Libye voudrait souligner que, contrairement a ce que prétendle professeur Greenwood, elle
considère, elle aussi,que est un ((systèmequi doit êtreconsidéré comme un tout»*.
C'est d'ailleursexactementce que la Libyeveut dire lorsqu'elleparle d'«ordonnancementde
la sociétéinternati~nale»~,et lorsqu'elle reconnaît que la convention de Montréaln'est pas
nécessairement «le seul instrument applicable àla présenteaffaire))''.
C'est pourcela que la Libye constate que le droit international contient certaines règlesde
structure comme celles que l'on peutdéduirede la lex specialis, de la lex posterior, ou de
l'article33 de la Charte,desrèglesqui fontobstacle àune saisineimmédiatedu Conseilde sécurité
sans passer par les instruments adéquats.
Lex specialishx posterior et article 33; considérons à nouveau ces deux points car ils
confirment que la Libye reconnaît le caractère intégré du droit international.
6~~ 97/23, p. 12,par. 2.7-2.9.
'~bid.,. 14,par. 2.14-2.15.
8CR 97/22, p. 18,par. 2.10.
9CR 97/20, p. 46, par. 4.18.
''~bid.,p. 49, par. 4.23.
LUK/LUS/CR 97/24 - 19-
3.6. Le Royaume-Unin'aévoqué la lexspecialis et la lexposterior que pour se référàses
conclusionsprécédentes1'tandiq sue lesEtats-Unisontrépété l'incompatibilid tecet argument(sur
la lex posterior ou la lex specialis) au regard de I'article30, paragraphe 1, de la convention de
Vienne sur le droit destraités':!ui, dans le cas de traitéssuccessifsportant sur la mêmematière,
consacre la lexposterior, mais sous réservede l'article 103 dela Charte.
Cet argument n'apporte rien aumoyen des défendeurs. L'article 30,paragraphe 1, de la
conventionde Vienne, en réservantlecasde l'article 103,répète simplemenu tnerèglequelaLibye
n'ajamais contestée,la primautéde la Chartesur toute autre conventionen cas de conflit entre les
obligations de l'uneet de l'autre. En l'espèce,la Libye considèrequ'il n'ya pas de conflit entre
I'article 103et la conventiondeMontréalainsi que lemontreronttout à l'heureles professeurs Suy
et Brownlie.
Répétonsque laconventionde Montréalest une lexspecialiset une Iexposteriorpar rapport
à la Charte; or ce que laLibye reprocheaux défendeurs, c'estd'avoirtentéd'obtenirdu Conseilde
sécuritéqu'il ne laisse aucune chance à la convention de produire ses effets. L'article 103
s'appliqueraitsans doutes'ilétait apparà l'autopsiequela Libye nejouait pas correctementlejeu,
mais cette preuve n'ajamais été rapportée.
3.7. L'article33 confirme àla fois l'idéede la lexspecialis/posterioret la vision libyennede
l'intégrationdu droit international.
Pour la Libye, il est erroné devoir dans l'article33 une disposition dont les effets se
limiteraientauxaffairesrelevantduchapitre VIcommel'ontsoutenules défendeursau premiertour
des plaidoiries. La Libye a montréque cette disposition n'étaiten réalitqu'undéveloppement de
l'article,paragraphe 313,dontilseraittoutaussiabsurdede limiter leseffets auchapitrepremier de
la Charte. Les défendeursn'ontpas répondu à cet argument.
"~rofesseurGreenwood,CR97/22, p. 22, par. 2.20.
12
Mr.Crooke,CR97/23, p. 20, par. 2.32.
13~nce sens,Chr.Tomuschat, ansTheCharter ofU.N.a Commentary,ed.by. Br. Simma,New York,Oxford
Univ. Press,1994, p. 506et les références. - 20 -
Le Royaume-Unia seulementobservéquelaCharteconférait àtout Etat undroit illimité(«an
unrestricted right)))de demander au Conseil de sécuritd'agirsur la base du chapitre VI1lorsqu'il
estimait qu'unesituationmenaçait la paix et la sécurité internationast que la décision prisepar
le Conseil relevait de ses pouvoirs discrétionnairesI4.
3.8. Ces prétentions se concilientmal avec l'obligation générale poun Etat «de remplir de
bonne foi lesobligationsassuméesconformément à la Charte desNations Unies))(les italiquessont
de moi), obligationénoncée dans la Déclarationde l'Assemblée générale sur les principes de droit
international touchant les relations amicales et la coopérationentre lestsls;ces prétentions se
concilient mal aussi avec le devoir des Etats, reconnu dans la mêmeDéclaration, «d'agirtant
conjointement qu'individuellementen coopérationavec l'ONU,conformémentaux dispositions W
pertinentes de la Charte»16(les italiques sont de moi). L'article33, paragraphe 1, fait bien sûr
partie des dispositionspertinentesde la Charte,et en applicationdesprincipes de coopérationet de
bonne foi que je viens de citer, cet article limite le droit des Etats de saisir sans restriction le
Conseil de sécurité.
3.9. Plus précisément,des commentateursautorisésdle aCharte- ainsi, Goodrich, Hambro
et Simons - ont écrit que dansle cas d'un conflittel celui viséà l'article33, les parties «are
expected to make a real eflort to reach an agreedsolution before coming to the Council))et que
«[t]he real intent of Article 33 was to establish an obligationto be fulfilled by the partiesprior to
their enlisting the Council'sassistance»''(les italiquessont de moi). Dans le mêmesens, un autre
w
auteur a écrità propos des mots ((avanttout», que
14Professeur Greenwood, CR97/22, p. 23, par. 2.24.
1A/Rks. 2625, 24 octobre 1970, 7' pri1"al.,
"lbid., 4' principe, 2' al.,d).
"L.M. Goodrich,E.Hambro and A.P. Simons,Charterofthe UnitedNationsCommentaryand Documents,
New YorkLondon, Columbia Univ. Press, 1969, p. 260-261. «jrst ofail, it is incumbentuponthe partiesthemselves to take remedial action; inthe
case of a failure oftheir efforts,the proceduresof ChapterVI - or of ChapterVI1-
become applicable))" (les italiques sontde moi).
Le moinsqu'onpuissedire est qu'on nevoitpas trèsbienen quoi les défendeursontconsenti
de réelseflortspour résoudre,conformément à laconvention de Montréalet conformément àce que
leur demandait la Libye, le différend telqu'il s'estmanifestéen 1991-1992.
3.10. Au-delà de ces réponsesparticulièresà des argumentsparticuliers de nos adversaires,
je souhaiteinsisterà nouveausurce quej'aiappelé«l'ordonnancementde lasociété internationale)),
ordonnancementqui n'estfinalementrien d'autrequ'une sortede division internationaledu travail
entre les règles,entre les acteursétatiqueset entreles institutions.s'agitd'unfait dontl'article33
et les idéesde lex specialis et lex posterior sont l'expression. En voici quelques exemples
significatifs.
Un premier exemple est tirédu préambulede la conventionde Montréal1 elle-mêmeo ,ù les
parties considèrent que «dans le but de prévenir»les actes de violence contre la sécuritéde
l'aviation civile internationale,il est urgent de prévoir des mesures appropriéesen vue de la
punition de leurs auteurs));cette disposition,pas plus d'ailleursque la convention, n'auraitde sens
si le Conseil desécurité devaiitntervenir chaquefois qu'un actede violence visé parlaconvention
se produirait quelque part.
La doctrine a relevéque cette convention, comme d'autres du même genre, devait remplir
certaines fonctionsprécises,et notamment comblerles lacunes destraités d'extraditionlg.Ce n'est
évidemmentpas au Conseil de sécurité des'occuperdes problèmesd'extradition;la convention
occupe donc une place spécifiquedansl'ensembledu droit international, et à priori le Conseil de
sécurité n'apas à la priver de cette place.
Un autre exemple significatifde l'ordonnancementdudroit international résidedans le fait
qu'aujourd'huiencore l'oncontinue à élaborerdes conventions du mêmegenre que la convention
''voir Tomuschat,loc. cp.506.
"G. Guillaume«Terrorismeetdroit international)),R1989,vol. III,356.
LUWLUSICR 97/24 - 22 -
de Montréal et portant sur des objetsvoisins. C'est le cas de l'actuel projet de convention
internationale pour la répressiond'attentatsterroristes'explosifO. Or, quelle serait l'utilité d'un
tel instrument si de toute façon, il suffisait de prétendre que les faits visésmenacent la paix et la
sécurité internationalepour qu'ilsoientipsofacto traitéspar le Conseil de sécurité?
Un troisièmeexemple est tiréde la pratique mêmedu Conseil de sécurité.Cette pratique,
dont les décisions prises dans ledrame de Lockerbie ne sont que de malheureuses exceptions,
confirmetout cequi précèdeen matièrede décentralisationet de divisioninternationaledestâches.
En fait, chaque fois qu'iléchet, leConseil de sécuritrenvoie aux instrumentspertinents. Nous y
avions déjàfait allusion à propos des décisionsdu Conseil de sécurité dans l'affairede l'attentat
contre le président Moubarakoù le Conseil demandait l'applicationde laconvention d'extradition 'V
Ethiopie-Soudanz1;cet exempleauquel les défendeursn'ontpasjugéutilede répondre,cetexemple
est loin d'êtreisolé.
Regardonspar exemplece qu'afait leConseilde sécuritédans l'affairedes otagesaméricains
à Téhéran en1979 :le conseil commence par réaffirmerle 4 décembre1979
«l'obligationsolennellequ'onttous les Etats partieà la Conventionde Vienne surles
relations diplomatiques de 1961 et à la Convention de Vienne sur les relations
consulairesde 1963derespecterl'inviolabilité dupersonneldiplomatiqueetdeslocaux
de ses missions»22.
Puis, le31décembre,leconseilenvisage l'adoption de«mesuresefficaces conformément aux
articles 39 et 41de la Charte))si l'Irann'appliquepas larésolutionprécédenainsique l'ordonnance
quiavait été prisepar la Courdeux semainesplus tôe3. Un projet de résolutionportantcesmesures "d
est enfin soumis au Conseil le 13janvier 1980, mais il n'est pas adoptéen raison du veto d'un
membre permanent.
'ODOC.ONU NC.6/52/WG.l/CW.45/Rev. 2, 2 octobre1997.
2CR97/20, p. 45, par.4.15.
22~iRés4.57, 4 décemb1979,préambule, dernicrnsidérant.
23~/Rés4.61, 31 décembr.979,par.2-6.
LUK/LUS/CR 97/24 -23 -
Voilà une séquence d'évenementsquiillustreparfaitement tant les exigences de l'article33
que celles de la lex specialis el:de la lexposterior:d'abordrenvoi à la convention normalement
applicable,icilesconventionsde 1961et de 1963,puisconstatationpar leConseilde l'inapplication
de ces conventions, et enfin adoption ou tentative d'adopterdes mesures coercitives contre 1'Etat
défaillant.
Les articulationset interactionsdestribunauxpénauxinternationauxetde la Courelle-même
avec le Conseil de sécurité participent de lamême phil~sophie~~.Je ne m'yétendraipas ici.
*
3.11. Monsieur le Président, Messieursde la Cour, ce qui précèdemontre qu'àpartir du
moment où le différend relèvede la convention de Montréal, celle-ci doits'appliqueret les efforts
vains de nos contradicteurs pour s'yopposer confirment largement l'existence d'un différensd ur
l'application de laconvention.
Nous allons passer à présentau deuxième argumentselon lequel lesdéfendeursne peuvent
agirde manière à empêcherla Libyed'exercerlesdroitsque luiconfêrela conventionde Montréal.
II. Les défendeursne peuvent agirde manière à empêcher la Libye d'exercer les droits que
lui confèrela convention de Montréal
3.12.Les défendeurssesont vivement insurgés contre lathèse de laLibyeselon laquelle leur
recours au Conseilde sécurité enla présenteespèceviolerait la conventionde Montréal : pour le
professeur Greenwood, «that contention is quite simply nonsense»25,et M. Crook adjure la Cour
«In the strongest terms .. . not to accept that position.»26 Dans les deux cas, nos savants
contradicteurs estiment que la thèse libyenne est totalement incompatible avec les droits
fondamentauxdes Etats au regard de la Charte.
24~églemendt u TPIY et du TPIart59 B et 61 E; Charte des Nations Unies,art. 94, par. 2.
"CR 97/22, p. 21, pa2.17.
2 6 ~97/23, p. 14,par.2.13.
LUKLUS/CR 97/24 - 24 -
3.13. Monsieur le Président,Messieursde la Cour, nouscommencerons parobserverque ce
n'estpas le recours au Conseilde sécuritéen soi qui est considéré palraLibye comme uneatteinte
àla convention de Montréal : c'est uniquementle recoursau Conseil de sécurité auxjîns depriver
la convention de Moniréalde ses efJets.
Une telle utilisation par 1'Etatd'unecompétencequipeut, à premièrevue, sembler absolue,
est bel et bien constitutive d'une violation de laconvention combinée,comme on vient de le
rappeler, avec la règle del'article33, paragraphe 1, dela Charteet lesprincipesde la lexspecialis
et de la lexposterior.
3.14. De manièreplus généralei,l est bien connu en droit internationalcomme en droit tout
court,que l'exercice d'une compétence f,ût-elle discrétionnaire,doit toujoursresteraisonnableet Ur
de bonnefoi. La jurisprudence internationale a consacréi'exigence du raisonnable dans les
domaines les plus variés;citons pêle-mêle : réglementationdes droits de pêchede ressortissants
étrangers2',application d'uneloi interne sur l'éducation prote~trice~~r,etrait ou dénonciationd'un
instrumentne contenantpas de clause de durée29r,espectd'un((délairaisonnable))entre les faits et
le dépôtd'unerequête3'e ,tc.
Exemple plus proche de la présenteaffaire, il a été considérp éar la Courpermanenteque la
conditiondesnégociationsdiplomatiques, commepréalable à lasoumissiond'undifférend à laCour,
rendait irrecevable
«une démarche aussi sérieuse que l'assignation d'unautre Etat devant la Cour, sans
avoir auparavant, dans une mesure raisonnable, tâchéd'établirclairement qu'il s'agit
d'une différencede vues qui ne peut être dissipée autrement»31.
27~êcheriedse l'Atlantiquenord, RGDIP,1912,p. 452.
28~pplicationde la conventionde 1902pour régler la tutelle,C.I.J.Recueil1958, p. 91 et 99.
29~nterprétatiodne l'accorddu 25 mars 1954 entrel'OMSet I'Egypte,C.I.J.Recueil 1980,p. 96 par. 49;Activités
militaireset paramilitairesau Nicaragua etcontrecelui-ci, C.I.J.Recueil1984, p. 419-420par. 63.
30Certaines teràephosphatesàNauru,C.I.J.Recueil1992, p. 254-255,par. 31-32.
usine de ChorzOw,C.P.J.I. série Ano 13, p. 10-11;ce dicturnestreprisdans i'affairede la Demandeen revisionet
en interprétationde l'atu 24février 1982,C.I.J.Recueil 1985,p. 218, par.46; voiraussi Plateau continental
(Royaume-UnUFrance)R ,SA,XVIII,p. 359, par 12. - 25 -
Cette citation pourrait facilement s'appliquermutatis mutandis à la saisine du Conseil de
sécurité parles défendeursau regard de l'article 33 de la Charte.
3.15. Si pour des questions de caractère aussilimité,le comportementde 1'Etatdoit évaluer
à l'aune du raisonnableet de la bonne foi, il doità fortiori en aller de mêmepour un acte aussi
lourd de conséquenceque la saisine du Conseil de sécurité à propos d'une situation présentée
comme menaçant la paix et la sécurité internationalesau regard de la Charte. Comme l'aécrit à
juste titre un conseil des Etats-Unis dans un ouvrage bien connu, et dont chacun reconnaîtra
aisément l'auteur :
«Lorsqulilest appeléà déterminerles critèresde référence par rapport auxquels
les Etats doivent exercer les droits qu'ils tiennentd'unengagement conventionnel, le
juge ou l'arbitreaccolent souvent deux expressions : «raisonnable» et ((bonnefoi».
L'Etatdoit, en général, exécuter les obligationosu les droits qui découlentd'untraité
qu'il a conclu, de manière raisonnable et debonne foi.» 32
La Libye ne dit rien d'autre :la saisine du Conseil de sécuritépar le Royaume-Uniet les
Etats-Unis aux fins d'empêcherla Libye de pouvoir obtenir l'applicationde la convention de
Montréalviole cette obligation de bonnefoi qui s'attacheautant àl'applicationde cette convention
(la convention de Montréal)qu'àl'application de la Chartedes Nations Unies.
3.16. Les défendeursne partagent évidemmentpas ce point de vue, preuve s'ilen fallait
encore, qu'il existeun différend surl'applicationde la convention de Montréal ...
*
3.17. Nous pouvons à present passer à notre troisièmeargument :la saisine du Conseil de
sécurité parles défendeursne faitpas disparaître le différendrelatif la convention de Montréal.
III. La saisine du Conseil de sécurité par les défendeurs ne fait pas disparaître le différend
relatifà la convention de Montréal
3.18. Contre vents et marées,les défendeursmaintiennentnepas avoir de différend avec la
Libye à propos de la convention de M~ntréal~~ P.our le Royaume-Uni,M. Greenwood répèteque
32~oller,E., La bonnefoi en droit internationalpublic, Paris,Pédone,1978,p. 87 no 78.
33~rof.Greenwood,CR 97/22, p. 15,p2.2-2.3; r. Crook,CR 97/23,p. 15, par. 2.16.
LUWLUSICR97/24 -26 -
mêmes'ily avait différend -quod non, selon lui -,la requête libyenneserait irrecevable eu égard
autraitementde l'affaire parleConseilde sécurité3L 4.a Libyeavait longuementdéveloppéce point
la semaine passée,en se fondant notamment sur l'affaire du Camerounseptentrional (1963); elle
citait aussi les affaires du Personnel diplomatique et consulaire à Téhéran (1980) et de Timor
oriental (1995)~'. Les défendeursn'ontpas contestéla pertinence de ces précédents et n'ont rien
dit de neuf dans leur réponse delundi à ce sujet.
Il est donc inutile pour la Libyede répéterce qu'ellea déjàdit.
3.19.Un pointtoutefois :M. Crook a rappelé queles Etats-Unisavaienttransmis àla Libye
l'acte d'accusation dessuspects et que cette transmission satisfaisait pleinement lesexigences de
l'article 11,paragraphe 1, de la c~nvention~~.Ceci appelle trois remarques :
Primo : M. Crook affirme que la convention ne s'appliquepas3',juste après avoir affirméque
les Etats-Unis s'étaientconformés à l'article 11, paragraphe 1; les Etats-Unis
reconnaîtraient-ilsquand même l'application de la convention ?
Secondo : L'article 11, paragraphe 1, requiert que les ~Etats contractants s'accordent l'entraide
judiciaire laplus largepossible» (les italiques sont de moi); peut-on vraiment soutenir
que l'envoid'unsimple exposéd'allégationsquin'estétayé paraucunepièce correspond
à ((l'entraijudiciaire la pluslargepossible)? Même si lesrèglesaméricainesrelatives
à la confidentialitéde certainespiècespourraient éventuellemenjtustifier leur rétention,
il ne semble pasadmissibleque tout le dossierde preuve soitsoustraità l'Etatrequérant.
Tertio : Ces questions de preuve sont d'autant plus essentielles pour la Libye que le
Gouvernement de Malte ainsi que la compagnie Air Malta, contrairement aux
défendeurs,n'ontpas hésité à collaborer avec le Gouvernementlibyen pour les besoins
34~rofG.reenwood,CR97/22, p. 15, par.2.3.
3 5 ~97/20, p. 52-55.
3 6 ~97/23, p. 14, par.2.14-2.15.
37~bidp. 15,par.2.16.
LUWLUSICR97/24 - 27 -
de l'enquêtei;ls ont ainsi informéla Libye qu'ilsn'avaientpu trouver aucun élément
propre à soutenir l'allégatioqu'un bagagenon accompagnéaurait quitté Malte par Air
Malta à la date indiquéedans l'acted'accusation3*.Ces faits ont été confirmé psar un
ancien chef de la sûreté des BritishAirways qui a menéune enquête indépendant e
Malte en tant que témoin expert dans une affaire civile devant les tribunaux
britanniques, affaire pour laquelle ces faits étaiepertinent^^^.
3.20.Cesdiscussionsrelatives àlaportéedel'article 11,paragraphe 1,commecellesrelatives
à la portéedes articles 5, paragraphes 2 et 3, 7 et 8, paragraphe 3, révèlent unefois de plus et in
concreto l'existence d'undifférendsurl'interprétationet l'application dela conventionde Montréal.
La Libye ne peut en effet que constater que quand on répètead nauseam, d'uncôtéqu'une
convention s'applique,de l'autrequ'elle ne s'appliquepas, il devient difficile de soutenir qu'iln'y
a pas de différendsur l'applicationde la convention;dans l'arrêd te 1996enl'affairedu Génocide,
la Cour constate que les parties soutiennent «des points de vue radicalement opposés))sur une
question «qui relèveclairement du fond»40ou encore que les parties «sont en désaccord quantau
sens et à la portéejuridique de plusieurs... disposition^»^ '.n'ena pas fallu davantagepour que
la Cour reconnaissequ'ilexistait bien un différendentre la Bosnie-Herzégovineet la Yougoslavie
sur l'application de laconventionde 1948. Cesattendussonttransposables à peuprèsmotpour mot
à la présenteespèce.
3.21.Nouspouvonsenfin abordernotre dernierpoint :la Cour peutconnaîtrenon seulement
des plaintes de la Libye relativesà l'application de laconvention de Montréal mais égalemend te
celles qui y sont directement liées.
38Mémoirleibyendu20 décembre1993,p. 15.
3qoir la vidéosoumiseparla Libyàla Cour:TheMaltesedouble Cross;voir aussil'émissde télévision
diffuséele14 octobre1997 surBBC ScotlandProgram:Silenceover Lockerbie.
40C.~.Recueil 1996,arrêt,par.31.
4'Ibid.,par.33.
LUK,LUS/CR 97/24IV. La Cour peut connaître non seulement des plaintes de la Libye relatives à l'application
de la convention de Montréal mais égalementde celles qui y sont directement liées
3.22. Le Royaume-Unia contestéque la Cour pût connaître de cette partie de la demande
libyenne :pour le professeur Greenwood, il est touà fait faux de prétendreque lajuridiction de
la Cour puisse s'étendre à des violations du droit international sur la base d'une clause
compromissoire dans une conventionen raison de la connexitéde ces violationsavec le différend
relatifà cette convention4'.
3.23.MonsieurlePrésident,Messieursde la Cour,cetteexceptionprocèded'unevision étroite
de la compétencede la Cour, unevision qui necorrespondd'ailleurs nullement à sajurisprudence.
C'estainsi quedans l'affairerelativà laCompétenceen matièredepêcheries (1974), laCour
w
a considéré quela clause compromissoire qui lui donnait compétencepour connaître de
l'élargissementunilatéralpalr'Islandede sajuridiction sur les pêcheries l'autoitussi connaître
des désaccords des partiesconcernantleurs droits sur les ressources halieutiques.La Cour estimait
quele différenddevait«êtreconsidéré soustous ses aspects))et qu'elledevaittenircomptede «tous
les éléments pertinents pourrendre la justice entre lesrties»43.
La Libye estime qu'ildoit en aller de mêmedans la présenteespèce :rien que le différend
portant sur l'applicationde la convention de Montréal, maisaussi tout le différend, ence compris
laquestionde l'opposabilitédesrésolutionsduConseilde sécuritéC . 'est l'intmêt mede lajustice
qui l'exige.
3.24. Monsieur le Président,Messieursde la Cour, aux termes de cet exposéj, ne peuxque
répéter qu'ilne suffit pas de prétendreque le drame de Lockerbie constitueune menace contre la
paix et la sécurité internationales pourqu'il échappeau droit normalement applicable de la
convention de Montréal;il faut encore montrer qu'ilen va bien ainsi, et cette preuve n'apas été
rapportée.
42C~97/22, p. 16, p2.5.
43~.~.Recueil 1974, p. 21-22, par.47-48.
LUWLUSICR 97/24 - 29 -
La Libye constatetoutefois que certains points unissent lesParties et notammentun amour
communpourMagritte :celapermet àlaLibyed'espérer que lerespectdesréalitésjuridiques finira
par l'emportersur toute autre considération.
Je voudrais direune fois de plus,Monsieur lePrésident,Messieursde la Cour,que cela a été
unhonneurpour moide défendre les intérêtsd eLibye devant laCour etje remerciecelle-ci pour
la qualitéde son attention.
TheACTING PRESIDENT: Thankyou, ProfessorDavid. Wewill adjoum now andresume
in 15 minutes.
L'audience est suspendudee II h 15 à II h 30.
The ACTING PRESIDENT: Please be seated.1now give the floor to Professor Suy.
M. SUY :
L'incidencedes résolutions731, 748et 883 du Conseil de sécuriîé
Monsieur le Président, Messieurs dela Cour.
Je répondrai brièvemenauxplaidoiriesduRoyaume-UnietdesEtats-Unislundidernier,pour
autant qu'ellesont traàtmon exposé de vendredi. La Course souviendra quej'ai montréque la
recevabilitéde la requêtelibyenne peut êtreconçue de trois façons différentes.
4.1. Les défendeursn'ont pascontestéla première possibilità,savoir que la Cour pourrait
se prononcer utilement sans prendre en compte les résolutionsdu Conseil de sécurité.
J'aborde donc immédiatementla deuxième possibilité, qui est le pouvoir de la Cour
d'interpréter lesrésolutionsen tenant compte des limites aux pouvoirs du Conseil de sécurené
vertu de la Charte.
Les défendeursfont valoirà tort que la position de la Libye sur ce point serait incohérente.
La Libye a déjàrelevé lasemaine dernièreque ses observations sur les exceptions préliminaires
doiventêtrelues encombinaisonaveclemémoire libyen,auquelellesrenvoient systématiquement. -30 -
En effet, dans son mémoirede 1993,la Libye a montréque lesrésolutionsn'exigent pasque
la Libye livre les accusés aux défendeurs. La Libye s'est prévalueà cet égarddu texte des
résolutionset des autres documents pertinents du Conseil.
Elle a fait valoir que s'ilen était autrement,les résolutionsseraient contrairesarte.
Cette constatationrenforce l'interprétationretenue par la Libye, mais fondeégalementune thèse
subsidiaire,qui est une troisièmepossibilitéde concevoir la recevabilité de la ibyennee:au
cas où le Conseil exigerait sans équivoqueque la Libye livre les accusésaux défendeurs, ses
résolutions seraient dans cette mesure - inopposables à la Libye.
Dans leurs exceptions préliminaires,les défendeurs ontsoigneusement évité de suivre ce
raisonnementen échelons. Ils sesont bornésà afJirmerque le Conseil exigeque la Libye livre les +
accusés.
Il étaitdoncentièrementlogiqueque laLibye, danssesexceptionspréliminaires,econcentre
sur cette hypothèse,pour dire que s'ilen est ainsi, les décisionssont contrairesharte.
Afin d'enfaciliter la lecture, les observationslibyennesn'ontpas systématiquementle
caractère hypothétiquede cette violationde la Charte. Mais ceci ne pouvaittromper que ceux qui
voulaient se laissertromper. En abordant l'incidencedesrésolutions du Conseill,a Libye a précisé
qu'elle suivraitsurce point l'argumentationdévelopppar les défendeurs(Libyec. Royaume-Uni,
p. 84; Libyec. Etats-Unis,p. 74). Elle a ensuiterenvoyésystématiquemet son mémoire- pour
dire, par exemple,que «la Libye a déjàfait valoir dans son mémoireque le Conseil de sécurité a
1
violé les droitsélémentairesde la Libeundueprocess oflaw)). En consultantle mémoirelibyen
sur ce point, les défendeursontdû constaterimmédiatementque la positionlibyenneest en réalité
plus nuancée- dans le mémoire,il n'estjamais dit, tel quel,que leConseilviole effectivementles
droits de la Libye.
Je ne crois donc pas nécessaire d'aborderles conséquencesjuridiques de la prétendue
incohérencedans la position libyenne. Je ne m'étendraipas sur le fait que la position de la Libye,
qui n'est pas membre du Conseil,ne déterminepas l'interprétatides résolutions. Detoute - 31 -
évidence,les défendeurs onttenté d'échapper patr ous les moyens à la thèse libyenne relativà
l'interprétationdes résolutions.
4.2. De fait, les défendeurssemblent bien, sur ce point, dans une position très difficile.
Analysons rapidementce qu'ils ontrépondu à l'analysede la Libye.
Le Royaume-Uni reconnaît le pouvoir de la Cour d'interpréterles résolutions (CR97/22,
p. 26, par. 3.6), et n'apas contestéqueles résolutionsdoiventêtreinterprétéese façon àgarantir
leur conformitéavec la Charte.
Il contestel'interprétation libyeenseréféranu tniquementau rapportduSecrétairegénéral
du 3 mars 1992. Or, dans ce rapport, le Secrétairegénéraldit qu'il a transmis les exigences
anglo-américaines à la Libye, il fait part au Conseildes propositions libyennes,et conclut qu'ily
a une certaine évolutiondans la position de la Libye, dont le Conseil pourrait vouloirtenir compte
en décidantde sa ligne de conduite. Ceci nefait que conforter l'interprétatiode la Libye.
Monsieur Crook(CR 97/23, p. 10et suiv.) a, quant à lui, insisté sur le caractère obligatoire
des résolutions,mais évitela question véritable,celle deaportée de ces obligations. 11souligne
quedans la résolution748, le Conseildécideque la Libye doit se conformer(«mustcomply now»)
- mais il ne nous ditpasà quoi. Nous avons montrévendredi dernierqu'ilne s'agitaucunement
de se conformer aux demandes des défendeurs. Tout estdans le renvoi à la résolution731.
L'analyse libyenne dutextedes résolutions,qui est biensûr primordiale,est donc inaffectée.
Il n'en vapas différemmentde latentativede M. Crookde désamorcerl'analyselibyennedes
déclarations faitespar les membres du Conseil. S'agissant dela résolution748, M. Crook s'est
prévalude la déclarationde trois membres, dont les Etats-Unis eux-mêmes.Il ne s'agitpas là du
point de vue de la majoritédu Conseil. Le Cap-Vert, dont la déclarationest invoquéepar
M. Crook, a formuléun grand nombre d'objections,dont celle que :
«the constitutionof Cape Verde does not allow the extradition of Ourown nationals.
Therefore it becomes difficultfor usto endorsemeasuresthat couldrun counterto that
constitutional principle of ours»SW.3063, p. 46; les italiques sont de moi).
Selon le Cap-Vert, les mesures du Conseil pourraient violer le principe de non-extraditiondes
nationaux. Ellesne lesviolent doncpas nécessairement.Cecisignifiequelarésolution748n'exige -32 -
pas nécessairementdela Libyequ'elle livresesnationauxaux défendeurs.Si leCap-Vert souligne
qu'elle pourraitnéanmoins aboutir à ce résultat, c'estbien sûr parce que, une fois les mesures
coercitives adoptées,la Libye et le Conseil de sécurité tout entier sont la merci des défendeurs
et de leur intransigeance.
La Hongrie, également sollicitée par M. Crook, n'a rien ditqui contredisel'interprétatiode
la Libye :elle ne dit pas que la Libye doit livrer les accusés auxdéfendeurs,mais qu'elle doit
répondre aux demandes contenuesdans la résolution731 (SPV.3063, p. 76). La Libye a déjà
analysé le sens réel de cettformule. La Hongrie seréfèreaussi aux efforts du Secrétairegénéral
de l'ONUet de la Ligue arabe (p. 76), dont nous connaissons les propositions.
Je voudrais encore ajouter la déclaration de l'Autriche, quai votépour la résolution748 : U V
((Austria,as a party to al1relevant instruments against terrorism, believes that
action taken by the Council in this field should be guided bythe principlesenshrined
in these conventions.)) (SPV.3063, p. 77.)
Il en va de même de la résolutio8 n83. Ici aussi, les Etats-Unisse prévalent desdéclarations
de trois membres seulement. La déclarationde la France (S/PV.3312,p. 42 et suiv.) ne contredit
en rien sa position trèsnette dans l'affaire soudanaise,quej'ai citée vendredi.
Le Venezuela,égalementappelé à larescoussepar M. Crook,n'arien ditquipuisse conforter
la thèse des défendeurs,bien au contraire :
«We appeal to al1the parties involvedin this problemto continueto demonstratethe
spirit of compromisethey have shown so far in the quest for a solution in harmony with the
spirit and purpose of the various resolutions adopted by the Council on this-subject.~ rir
(SPV.33 12, p. 62.)
C'estbien à tort, enfin, que les Etats-Unis se prévalentdu fait que les sanctions contre la
Libye ont été maintenuesdepuis (M. Andrews, CR 97/23,p. 9). Le Conseil n'apas renouveléles
sanctions; son président a seulementdéclaré qu'iln'yavait pas de consensus pour procéder à leur
levée.Elles ont été maintenuesen raisonde l'opposition constantedes défendeurs à leur levée.Le
fait que la compositionduConseilait été modifiéedepuis1992,est donctout à faitsans pertinence. a
4.3. Yenviens donc à mon prochainpoint, qui concerne lespouvoirs du Conseil en vertu du
chapitre VI1de la Charte. - 33-
Les défendeurspassent entièrement sous silence la distinction entre l'action policière du
Conseil de sécurité, etson activité visantà réglerle fond d'undifférendou d'une situation.
Ceci est manifeste dans Fanalyse de M. Greenwood sur l'administration de la preuve
(CR 97/22, p. 22, par. 2.19). Je n'yreviendrai pas.
Il en va de mêmede la position britannique quant au pouvoir du Conseil d'imposerde
nouvelles obligations aux Etats Membres. Laréponsede lord Hardie (CR97/22, p. 30) déforme
la thèse libyenne, quia pourtant étéexposéeclairement dans le mémoirelibyen (p. 193et suiv.).
IIest évident,Monsieur le Présïdent, Messieurs de la Cour, que le Conseilpeut créerde nouvelles
obligations, et suspendrel'applicationd'untraité,lorsqu'ilénoncedes mesures coercitives,comme
un embargo commercial. Une autre questionest toutefois de savoir, ce quele Conseilpeut mettre
enŒuvreau moyende ces mesurescoercitives. Et c'estprécisément sur ce point, et sur ce point
seulement, que la Libye affirme:- et elle I'aamplementmontrédans ses piècesécrites- que le
Conseil ne peut pas imposer auxEtats Membresde nouvelles obligations pour réglerle fond d'un
différendou d'unesituation.
Les résolutionsadoptéesdansd'autresaffaires,que lordHardiea invoquéeslundidernier,sont
donctoutes sans pertinence. Il s'agitlà, soit demesures policièreset provisoires, soit des mesures
de coercition à mettre en Œuvrepar tous les Etats Membres (les mesures d'embargonotamment).
Bien plus pertinente, pourla questionqui nous occupe,est la pratiquedu Conseil de sécurité
concernant la frontièreentre l'Iraq et le Koweït. En effet, il s'agissait là de réglerle fond du
différend entre ces Etats. Or, quelle a été rapprochedu Conseil de sécurité sur ce point ?
Lors de l'acceptation dela résolution687 (1991), le représentant britannique adéclaré :
«The resolution is not attempting to settle the boundary between these two
countries; thatwas donebythe 1963Agreement betweenthem. . .Wehave no desire
and no intention of overtuming the principle that it is for the parties in question to
negotiate and reach agreement as was done in this case in 1932 and 1963.))
(SlPV.2981, p. 113 .)
Et, le représentantaméricaina fait valoir que
«the United States does not seek, nor will it support, a new role for the Security
Council as the body that determines internationalboundaries. Border disputes are issues to be negotiated directly between States and resolved through other pacific
means of settlement available, as set out in Chapter VI of the Charter.))(Loc. cit.,
p. 86.)
D'autresmembres du Conseil ont fait des déclarationsanalogues, déniant auConseil de
sécuritéle pouvoir de fixer une nouvelle frontière (voirpar exemple la Chine, loc. cit., p. 96, et
l'Inde,loc. cit.,p. 78). Et ce principea été consacrp,ar la suite, dans le troisième considérted
la résolution773 (1992) :
((Rappelantà ce proposqu'àtravers le processusde démarcation,la Commission
de démarcation de la frontièrene procède à aucune réattributionde territoire entrele
Koweïtet l'Iraq, maismèneseulementa bien, pour la premièrefois, latâchetechnique
nécessaire à la démarcation des coordonnées précised se la frontière définie dansle
procès-verbald'accord entre l'Etatdu Koweït et la République d'Ira q.»
Ceci montrebien que le Conseil ne peut pas, envertu du chapitre VI1de la Charte, imposer j
aux Etats Membres de nouvellesobligationspour réglerle fond d'undifférendou réglementerune
situation.
On n'échappepas à cette constatation en se prévalantde l'article103 de la Charte. La
primautéétabliepar cet article 103présupposeune obligation établieconformément à la Charte.
II présupposedonc, dans la présenteespèce,une décisiondu Conseil de sécurité respectant les
limites que la Charte lui impose.
4.4. J'enviens maintenant àl'affirmationdes défendeurs, selonlaquellelaLibye demanderait
a la Cour de substituer sa propre appréciation subjectivà celle du Conseil de sécurité.
Il n'enest rien. La Libye soutientque, dans la mesure où ilexigerait la livraisondes accusés
v
aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni, le Conseil violerait les limites à ses pouvoirs prévuspar la
Charte. Ces limitations sontjuridiques, et peuvent par conséquent fairel'objet d'une appréciation
objective par la Cour
Il envademêmede lathèsedéveloppéedans lesobservationslibyennes(Libyec. Etats-Unis,
p. 93 et suiv.; Libyec. Royaume-Uni,p. 84 et suiv.), selon laquelle la menace contre la paix qui
aurait étéconstatée par leConseil de sécuritépour fonder une demande - hypothétique- de
livraison des accusésaux défendeurs,constituerait un détournementdepouvoir. - 35 -
Citons tout d'abord la très remarquable analyse de Mme Zoller sur le détournement de
pouvoirdans le droitdesorganisationsinternationales. Toutcomme MM. Fawcettet Amerasinghe,
dont les analyses ont étécitées dans lemémoire libyen(p. 223 et suiv.), Mme Zoller admet que
l'interdiction dudétoumement depouvoir s'appliqueen droit des organisations internationales.
Mme Zoller - etje cite un extrait de son ouvrage qui figureà la page 225 du mémoire libyen :
«dans la détermination de cette illicéité,aucun élément subjectifn'entre en
considération. Il s'agitde rechercher l'adéquation, compatibilité entrele but de la
compétenceexercée (résultat final) e lt but et l'objetdutraitéconstitutif.)). Zoller,
La bonnefoi en droit internationalpublic, 1977,p. 197.)
Cette analyse s'applique entièrement àla thèselibyenne. Dans la mesure où la constatation
d'unemenace contrelapaix fonderaitl'exigenceque la Libyelivre les accusésauxdéfendeurs,cette
constatation constituerait un excès, ouun détournementde pouvoir.
Le pouvoir du Conseil de sécuritéde constater une ((menacecontre la paix» est, vous le
savez, largement discrétionnaire, maisil n'est pas illimitet ne peut pas être exercé d'une façon
arbitraire. Le Tribunal pour l'ex-Yougoslaviel'asoulignéen rappelant qu'envertu de l'article24
de laCharte, le Conseildoit exercer ses pouvoirs conformémena tux Buts et Principes de laCharte
(voir la citation dans les observationsLibyec. Royaume-Uni,p. 86).
Par conséquent,s'ilest vrai que la Cour ne peut pas substituer son appréciationsubjectiveà
celle du Conseil de sécurité, cecin'empêche pas la Cour de contrôler, sur une base et sur une
appréciationobjectivesdes faits et du droit, l'excèsou le détoumementde pouvoir qui pourrait
entacher une qualification de «menace contre la paix».
Or, dans l'hypothèsesusmentionnée,la qualification de ((menace contre la paix)) de la
résolution748 constituerait très manifestementun excèsou un détournementde pouvoir.
Selon son sens usuel, le mot «menace»vise un événemenf tutur. Le Conseil ne peut donc
pas, tant d'années aprèsl'attentatde Lockerbie, constater une «menace» en se référant à ce seul
attentat.
La question est alors de savoir quel élément supplémentaire justifie la qualification de
«menace». Plus précisémentq , ue s'est-ilpasséentre les résolutions731 et 748 justifiant cette
qualification? - 36 -
La menace contre la paix résulterait-elledu refus de la Libye de livrer les accusés aux
défendeurs ? Ceci constituerait un excès de pouvoir manifeste. Mêmesi la qualification de
l'article39 étaitjustifiée,le Conseilne pourrait décider,en vertu du chapitre VI1de la Charte,que
la Libye doit livrer les suspects aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni. On ne voit pas très bien
comment le refus de la Libye de satisfaire une exigencecontraire àla Charte pourrait constituer
une menace contre la paix !
Le fait que la Libye n'apas satisfait aux demandesanglo-américainesde «révéler lesnoms
detous les coupables))oude «livrer les dispositifs d'horlogerie restan, e peut pas plusjustifier
laqualificationde «menace». En effet, cette exigenceprésupposelaculpabilitédela Libye,qui n'a
pas été démontrée. W
Il faut donc, Monsieur le Président, se rendrà l'évidence. Dansla mesure où le Conseil
auraiteu recours àla qualificationde «menace contrela paix))pour fonder l'exigence- toujours
hypothétiquej,e vous demande pardon de le répéter adnauseam- que la Libye livre les accusés
aux défendeurs, ce recoursau chapitre VI1ne pourrait servir qu'àempêcher laCour d'exercer sa
fonctionjudiciaire, et cela au seul profit des intérêts indivses défendeurs. LeConseilaurait
commisalors un détournementde pouvoir. Il faut interpréter les résolutions açon àéviter cette
conclusion.
4.5. J'enviens enfinàla tentative du Royaume-Unide distinguerle contrôlejudiciaire de la
validitéprocédurale des résolutionsd, u contrôle de leur validitématérielle.
Je vous ai montré vendredique cette distinctionétaitet est sans fondementdèslors que les
pouvoirs du Conseil sont limités tantationemateriaeque par des règlesprocédurales.
C'esten vain que lord Hardie a tentéde réfutercette thèse(CR 97/22,p. 26, par. 3.5). Son
argumentationmontre que les deux limites aux pouvoirsdu Conseil- les limites procéduraleset
matérielles- sont indissociablementliées.
Lord Hardie cite d'abord l'exemplede la déclarationdu présidentdu Conseil en date du
20juin 1972relativeauterrorismedirigécontrelesaéronefscivils. LordHardie remarquequecette
déclaration- il s'agit d'une déclarationprincipes, d'ordre général, u'iapas traiàune affaire - 37 -
particulière- il remarque que cette déclarationest en réalitéune «décision». Lord Hardie
poursuit
«If a questionwere to arise aboutthe statusof this act- whether, for example,
it arnountedto a «decision» of the Council for the purposes of Articles 25 and 48 of
the Charter - the United Kingdomacceptsthat this would be a matter into whichthe
Court could, and should, inquire.))
Mais il s'agit icid'une question relative aux pouvoirs substantiels du Conseil ! Il s'agit
notamment de savoir si le Conseil peut adopter des décisions législatives,qui imposent des
obligations à tous ses Etats membres, en dehors du contexte d'uneaffaire particulière.
Cette questionest parfaitementcomparable à celle soulevéeicipar la Libye, quiest de savoir
dans quelle mesure les résolutïonsdu Conseil dans l'affairelibyenne, dont certains paragraphes
portent l'intituléde «décision», peuvent avoirdes effets obligatoires pour la Libye.
Lord Hardieadmet aussi que la Cour peutvérifier si unedécisiona été adoptéela a majorité
requise,ou encore, si elle a été adoptéeenvertu du chapitreVI1ou VI de la Charte. Cette question
est également indissociablede celle despouvoirssubstantielsdu Conseilen vertu de ces différents
chapitres. Je me réfêrseur ce point aux observationslibyennes (Libyec. Royaume-Uni,p. 106et
Libye c. Etats-Unis, p. 88).
Lord Hardie fait valoir enfin que «The power of substantive review is not contemplatedby
the Charter)). Si ceci signifie que ce pouvoirn'estpas expressémentinscrit dansla Charte, il en va
de mêmepour le pouvoir de la Courde vérifierla validité procédurale des résolution dsu Conseil.
L'argumentest donc sans fondement, et je vous ai montrévendredi, en me référantaux travaux
préparatoires dela Charte, quelle signification ilconvient d'attribuerà ce silence de la Charte.
4.6. La Libye s'est ainsi prévaluedu texte de la Charte, de la volontéde ses auteurs, de la
pratiquerécentedu Conseilde sécuritée ,t du point de vue exprimépar différentescomposantesde
la communauté internationale.
Monsieur le Président, Messieursde la Cour, on ne peut pas perdre de vue, non plus, le
contextepolitique dans lequel se déroulel'actiondu Conseil de sécurité depuis la fin de la guerre
froide. C'est cette nouvelle situation qui a mené le Secrétaire général de l'époque, - 38 -
M. Boutros Boutros-Ghali, à soulever en 1994, lors d'une cérémonie à Madrid, les questions
fondamentales suivantes
«this new situation of the Security Council prompts one to raise or repeat new legal
questions,such as the following:Doesunanimityamongthe permanentmembers give
the Council unlimited powers? How far may the Council extend its competence? 1s
it the only body entitled to interpret its powers? Are its actions exempt from any
monitoring? These are very complex legal questions whichare in no way academic,
for they have a direct bearing on the ways in which decision-making power is
exercised at the global level.)) (Communiqué de presse SG/SM/94/53 du
20 avril 1994.)
Cesparoles d'ungrand spécialistedu droit des organisationsinternationalessont révélatrices
destendances nouvelles qui se dessinentdepuis quelquesannéesà propos du fonctionnementde la
communauté internationale.
v
Je conclus, Monsieur le Président, parun argument avancépar l'agentdu Royaume-Uni,
sir FranklinBerman,qui afait valoir que la continuationde laprésente procédeorterait atteinte
à l'intégritde la Charte.
Il n'enserait rien, naturellement, au cas où la Cour se prononcerait sur l'interprétationet
l'applicationde la convention de Montréalsans prendre en compte les résolutions duConseil.
Mais il n'enirait pas différemment au casoù la Cour interpréteraitles résolutionsau regard
de la Charte, ou les déclarerait inopposablesla Libye. Il est en effet clair que c'est latentative
des Etats-Unis et du Royaume-Uni d'utiliser le Conseil de sécuritépour servir leurs intérêts
individuels qui porte atteintel'intégride la Charte.
*
L'effortdes défendeursdeplaider le fond de l'affaire afinde conclàrl'irrecevabilide la
requêtelibyenne montre bien que la question de la recevabilitémérited'êtrjeointe au fond. En
outre, il ne saurait échappera la Courque cette approchedes défendeursestuneatteinte aux droits
de la partie libyenne qui n'ajamais eu l'occasionde prendre connaissance de ces arguments dans
un mémoire écrit puisqu'inl'yen a pas eu.
MonsieurlePrésident,Messieurs lesJuges,je vousremerciepourvotrebienveillanteattention
et je vous prie de bien vouloir passer maintenant la parole à mon éminentcollègue, le
professeur Ian Brownlie. -39 -
The ACTING PRESIDENT: Thank you, Professor Suy. Professor Brownlie will now
address the Court. Professor Brownlie, please.
Mr. BROWNLIE: Thank you, Mr. President. 1shall begin with a synthesis of the issues
relating to admissibility. The:claimant State relies upon the provisions of a valid multilateral
convention. The Respondent States plead that there are circumstances which provide a legal
justification for the non-application of certain provisionsof that convention in relation to Libya.
That is an issue of merits. Alternatively, they plead that the Charter provisions support a
subject-matter immunity for the Security Council when it adopts a resolution under Chapter VII.
But, in my submission,this argument has the same ultimate purpose, that is, to seek to use the
Charter provisions to justi@ the non-application of theMontreal Convention in these cases.
The subject-matterimmunityargumentissimplyasecond-lineargument. First, itis saidthat
the breaches ofthe Convention arejustified by the Charter (including Article 103). Secondly, it
is saidthat, in any case, the issue of substancecannotbe exarninedby the Court because the same
Charter provisions prevent thisi.
In the light of this analysis, 1shall make a provisional reviewof the legal issues which are
clearly exarninable as issues of merits even in the presence of "binding" resolutions of the
Security Council adopted by virtue of Chapter VII.
And, before 1start my provisional review, itwill be helpful if1explain why the provisions
of Article 103donot, for presentpurposes, presentan ab initioandde jure veto of the legal issues.
Article 103of course provides that the obligationsof the Charter "shall prevail" in case of
a conflict with obligationsunder any other internationalagreement.
The essence of the Libyan argument can be expressed with Article 103 in mind.
First: The nature of the dispute involves an attempt by the Respondent States to invoke
SecurityCouncilresolutionsas a legaljustification for non-applicationof the MontrealConvention
in the present cases. -40 -
It will not do to argue that it is only the justiciability of the question which is at issue,
because the Respondent States have relied very heavilyupon Article 103,which is evidently a
substantive and not a procedural provision.
Duringthe first roundtheUnited Kingdomteam invokedArticle 103on five occasions: first ,
by Sir FranklinBerman (CR 97/16, p. 16,para. 1.6); onthree occasionsby Professor Greenwood
(CR 97/16, p. 64,para 4.27; CR 97/16,p. 74,para. 4.56; CR 97116, p. 76, para.4.64); and once
also by Lord Hardie (CR 97117, pp. 18-19, paras. 5.37-38).
The United States invoked Article 103in the first round on nine occasions: Mr.Crook on
five occasions(CR 97118,p. 32, para. 3.3; CR 97/19, p. 9, para. 3.25; CR 97/19,p. 10,para. 3.2;
CR 97/19, p. 11,para. 3.35; CR 97/19, p. 12,para. 3.38); Professor Schachteronce (CR 97/19, W
p. 31, para. 4.18);Mr. Matheson once (CR 97/19, p. 46, para. 6.3); and Mr. Andrews twice
(CR 97/19, p. 52, para 7.2; CR 97/19, p. 54, para. 7.5) and of course further reference to
Article 103occurred in the second round.
Mt- President, giventhis insistence upon the relevance of Article 103by Ouropponents, it
is necessary to emphasize, once more, that this Article is concerned with substantive questions.
It has nothingto do with the power of organs or withjusticiability.
Secondly: The Security Council resolutions and the related documentas. evidence may or
may not provide conclusive evidence of Charter obligations which are in conflict with the
Montreal Convention. The determinationof that question involvesthe careful examination ofthe w
terms of the resolutionsand the circumstancesin which they were adopted and the significanceof
this process has been explained by my learned colleague, Professor Suy, inthe first round.
Thirdly:In the same general context,there may be conduct of the RespondentStateswhich
has no connection whatsoever with the resolutions, which antedates the resolutions, and which
involves serious breaches of Charter obligations.
As 1 indicated in the course of the first round argument, the bilateral threats of force
emanating from the senior officiais of the Respondent States fa11outside the arnbit of the
resolutions. Theyinvolvebreaches of the Principles of the UnitedNations Charter, and therefore - 41 -
constitute violationsof a valid multilateralConventionwhich cannotbe validated by relianceupon
Article 103.
Because the use of threats of force to induce Libya to accept the non-application of the
Montreal Convention cannot be justified by referenceto Article 103.
Fourthiy: There are substantialgrounds for theview that a fair trial is not possible either in
Scotland or in the United States. The relevant considerationshave been set forth in the Libyan
Memorial (pp. 133-144,paras 5.56-5.82).
In respectable sourcesthe right to a fair trial is consideredto be a fundamentaln right.
This was the view of the Institut de droit international,as expressedin a resolution adopted at the
Cambridge session in 1983 (Libyan Memorial, p. 133, para. 5.53).
Mr.President, itis generally accepted that the fundamentalprinciples of human rights form
part of the Principles of the United Nations Charter. Authority supportingthat view includesthe
NamibiaAdvisory Opinion of this Court (1 C.J Reports 1971, p. 57); the TehranHostages case
(I.C.J Reports,1980,p. 42); and also the very relevant passagesin the United States restatement,
the Third, the volume on Foreign RelationsLaw of the UnitedStates, 1987 (para. 701, comment
(4).
The ambit of the Security Council resolutions and also the provisions of the Montreal
Conventionareto be determinedby reference to the principlesof the Charter. And, Mr. President,
the principles of the Charter are not confined to the content of Chapter VII.
And, at this point it is necessary to retum to the provisions of Article 103 of the Charter.
This refers to the obligations of the Charter in relation to those of other international
agreements.
Then there is Article 24 which requires the Security Council "to act in accordance with the
Purposesand Principlesofthe IJnited Nations"; andthen Article 25,whichrequiresMember States
to carry out decisions ofthe Security Council "in accordance with the present Charter".
In this context, Mr.President, Article 103does not provide a solution. Instead, it presents
the problem,that is toSaythat ireferenceto the principlesof the UnitedNations involvestwo forms - 42 -
of Charter-based obligations, the provisions of Articles 24 and 25, on the one hand, and the
fundamental principles of human rights, on the other hand.
This alignmentof Charter-basedobligationsindicatesthat,inthecircumstancesofthe present
cases, resort to Article103 does not produce a single outcome or ready-made prioritization of
obligations.
Mr. President, 1now refer to the subject of the threats of force.
In my first round speech1explainedthe relevance of the threats of forceto the substantive
issues of law concerningthe MontrealConvention. If Mr. Xmakes a contractwithMr. Yandthen,
at some laterjuncture, Mr. X threatens force in order to prevent Mr. Y from exercising an option
he has by virtue of the contract, that, in my submission, is a breach of the contract. Mr. X's V
conduct may involve also a tort, a non-contractual responsibility but,even if it does, it remainsa
breach of contract.
Thus,whenon Mondaymy learnedopponent, Professor Greenwood, complainedthat Libya
had failed to identi% "the act by which the Convention was écartée", thatis the answer to his
question. And the United Kingdom and the United States hardly assist the Court by their
peremptory dismissal of Libya's evidence relating to threats of force. Let us look for a moment
at the nature of the evidence.
First, the evidence consists of direct quotations from seniorofficiais in answer to direct
questions.
The answers were provided by the United States Department of State in the person of
Mr. Boucher; President Bush; Mr. Cheney,the SecretaryofDefense; Mr. Douglas Hogg,Minister
of State, Foreign CommonwealthOffice; Vice-President Quayle; and the spokeswomanof the
Foreign CommonwealthOffice in London.
The sources in which these high profile figures were quoted were as follows:
(a) The United States Federal NewsServicereporting a StateDepartment briefing;
(b) A teleconference address by President Bush to SouthernNewspapers Association;
(c) A report of an NBC interviewon the programme: Meetthe Press; (4 The official record of Parliamentary proceedings in the United Kingdom;
(e) The Middle EastEconomicDigest; and lastly,
&l TheScotsmannewspaper.
1s it suggested that these varied sources invented the questions and answers? How is the
consistency of the phraseologyto be explained? Were the officials perhaps telepathic?
It is astriking fact that the threats continued evenafter resolution 748 had been adopted on
31 March 1992. On 2nd April Mr. Pickering, the United States representative to the
United Nations, was reported by the WashingtonPost as having respondedto an enquiry as to
whether further action was contemplatedby saying that "it'snot possiblefor us to rule in or rule
out any particular action" (WashingtonPost, 3 April 1992,p. A24, col. 3).
And so, on 2 April 1992, an Arnerican officiai was still employingthe menacing formula
which had first appeared in the record when the Department of State briefingwas delivered on
14November 1991,four months earlier
ThedistinguishedAgent ofthe United Kingdomhas referredto thesestatementsmadeon the
record by various officials as "ambiguous public utterances"(CR 97/22, p. 14).
But, MI-.President,the arnbiguitywas a perfectlymeasured ambiguity and,inthe lightof the
Libyan experience, it involveda spectrum of actions which includedthe use of very considerable
force against Libyan cities, withoutwarning, at 2 a.m. in the morning.
The impact whichthe carefully reiterated statementsmade can be illustratedby reference to
the opinion of the Economics Correspondent of the London Times in the issue dated
21 March 1992.
"Thepoundandsharesendedtheweekalmostexactlywheretheystarted,despite
a week full of mainly gloomyeconomic indicators.
After figures that showed annual inflation in February dropping below the
German rate for the first time in almost 25 years, sterling yesterday stood at
DM2.8619 at the officia1Bank of England close, almost half a pfennig up on its
Thursday finish. It began the week at DM 2.8572.
The week's gyrations left the pound a$ 1.7007yesterday, down more than a
cent from the previous c.lose. Sterling's trade-weighted indexwas steady on 89.8,
precisely where itstarted the week. The dollar's strength was the main feature of foreign exchange markets yesterday. The American currency moved ahead after
reports that President Bush was discussing Iraq with his chiefs of staff. Fears of
military action in the Gulf, or against Libya, drove investors into the dollar, the
traditional safe haven.
Although Britain's annual inflation held steady at 4.1 per cent in February,
slightly disappointingthe City, foreign exchange dealers shrugged off the data. The
pound was mainly helped by the softer mark, sentiment for which had also been hit
by further strike action by Germanbank workers."
In his report, referring to the previous week's economic indicators, the Economics
Correspondent, Mr. Colin Narbroughstates that: "Fears of military action in the Gulf, or against
Libya,drove investors into the dollar,thetraditional safehaven". And so, M.. President,itwasnot
only Libya which wasaware of the situation in March 1992, but other constituenciesas well.
And so, in conclusion,on the evidenceof fact, the public statementsinvokedas evidenceof 'J
threatsof forcewere produced onthe record,with the specificpurpose of "sendingsignals"thatthe
United States, inparticular, was preparedto use force against Libya, if it thoughtfit, to obtain its
policy objectives.
Against this background it is strange indeed to hear Our opponents refer to "Libya's
disgracefül and unsubstantiated allegations of threats of force. .." (see Professor Greenwood,
CR 97/22, p. 17,para. 2.5).
Mr.President, the legal framework should also be appreciated. The Nuclear Testscase
establishesthat the intention ofa Governmentmay be derived from statements madeby ministers
andthe Head of Stateto the media. Such statements constitute public declarationsby individuals
IJ
acting in their officiai roles.
In conclusion it must be pointed out that the threats of force against Libya are not
unfortunatelyonly a part ofthe history ofthis case. As Professor El-Murtadi Suleimanhas shown
inthe first round,the United Stateshas threatened to use nuclear weapons againstthe installations
at Tarhunah as recently as April last year (CR 97/20, p. 15, para. 2.10).
1 can now move on to a different subject-matter the argument of the United States that a
decision of the Court on the merits in these cases would be moot or sansobjet.
Inthe firstround Mr. Crookmountedthe argument,citingthe NorthernCameroonscase,and - 45 -
the NucIearTestscase (CR 97\19, pp. 23-24, paras.3.82-3.86). The argumentalso figured in the
speeches of Mr. Matheson and Mr. Andrews in the second round (see Mr.Matheson, CR 97/19,
p. 47,para. 6.5; Mr. Matheson,CR 97/22,p. 28,para. 4.11; Mr. Matheson,CR 97/22, pp. 30-31,
paras. 4.18-4.20; and Mr. Andrews, CR 97/22, pp. 33-34, para. 5.5).
Mt-.President,the mootness argument is seriously flawed at two levels.
First, the argument is no morethan a reformulation ofthe argumentwhich, in effect, claims
thatjudicial examinationof the:decisions of political organs is excluded or, at any rate, limitedin
various ways.
Secondly,theargumentis contradictedbythe realitiesofthesecases. 1havealready stressed
that the bilateral threats of force have not beenvalidated by SecurityCouncilresolutions, andhus
there is a temporal dimensionto the violations of the Montreal Convention. One of the issuesto
be looked at at the merits. In other words, even if the resolutions could precludeviolations of any
kind, which is hardly the case, they would not do so in relation to the period before
31 March 1992.
In this context, there is .noevidence that the resolutions are permanent and dispositive in
effect. Resolutions may be changed, sanctions may be lifted, political assessments may be
modified.
There is no mootnesshere and no parallelseither politicallyor legally with the situations in
the Northem Cameroonscase or the NuclearTestscases.
1tum, finally,to the generalissue of theexaminabilityof thedecisionsofthe political organs
of the United Nations. In this context the United States has complained (in the person of
Mr. Matheson) that in the first round 1 did not cite "any case in which the Court had annulled a
decision of the Council or asserted the right to do son (CR 97/23, p. 27, para. 4.4).
Mr. President,here and elsewhere my opponentsmissthe point. In each of the cases which
1 cited in the first round the C:ourtdid not proceed by reference to any version of provisional
examinability or principle of limitation of thejudicialunction. The decision in the Naurucase
provides a useful example. 'ïhis concerned a General Assembly resolution establishing the - 46 -
independenceofthe RepublicofNauru. Theresolution wasdispositiveand bindingin effect. And
yet the Court in that case had absolutely no inhibition, no difficulty, in construingthe resolution
l
and in assessing its legal consequences. In the Admissionscase the same process was applied to
a whole class of resolutions of the Security Council.
And so it is in this context that myleamed opponents have objected to the invocation of
cases involving advisory opinions. They have complained that this is to ignore the distinction
between the contentious and advisory jurisdictions (see Professor Zoller, CR 97/19, pp.41-42,
para. 5.11; Lord Hardie, CR 97/22, p. 28, para 3.10; and Mr. Matheson, CR 97/23, p. 27,
paras 4.4-4.7).
Thedifferencebetweenthetwo formsofjurisdiction is not,of course,the issueinthis debate. 1
The relevant point is that, mutatis mutandis,when the Court is exercising its advisory opinion
competence, it makes determinations conceming the legal consequences of the actions of the
political organs.
TheCourtdoesnot standaside althoughithas a powerto do so. Issues of admissibilitymay
be invoked bythe Court in relation to the exercise of its advisory opinion competence, giventhat
the Court has a certain discretion in relation tothe provisions of Article 65 of theatute.
But in the cases 1 have cited in the first round the Court did not stand aside.
In completing my remarks on this issue1would point out that my leamed opponentshave
not attempted to contradict the views of Sir Gerald Fitzmaurice on the importance and legal
*
character of advisory opinions.
At the end of the day the Court does not avoid making legal assessmentsof the actions of
political organs,whether withinits contentiousjurisdiction or in relationto its competenceto give
advisory opinions. %
Theattitudeof the Court is exemplified bythe following passage fromitsAdvisory Opinion
in the Admissionscase:
"Thepoliticalcharacterof an organcannot releaseit fromthe observanceof the
treaty provisions established by the Charter when they constitute limitations on its
powers or criteria for its judgment. To ascertain whether an organ has freedom of
choicefor itsdecisions,referencemustbemade totheterms of its constitution. Inthis case, the limits of this freedomare fixed by Article 4 and allowfor a wide liberty of
appreciation. There is therefore no conflict between the functions of the political
organs,on the one hand, andthe exhaustivecharacter of the prescribed conditions,on
the other.
It has been sought to base on the political responsibilities assumed by the
Security Council,in virtue of Article 24 of the Charter, an argumentjustiQing the
necessity for according .tothe Security Council as well as to the General Assembly
complete freedom of appreciationin connexionwith the admissionof new Members.
But Article 24, owing to the very general nature of its terms, cannot, in the absence
of any provision,affectthe specialrules for admissionwhich emerge fromArticle 4."
(I.C.J.Reports 1947-1948,p. 57, at p. 64.)
And so Mr.President,Membersof the Court, thereare no signsofjudicial inhibitionin that
Advisory Opinion. 1have now reached my conclusions.
The first is that there Ksno legal limitation placed upon the finction of the Court in
exarniningthe legal consequencesof resolutions of the political organs. Moreover, no such legal
limitation has been recognized in the practice of this Court.
The secondconclusion isthat there are majorissuesof merits - 1have illustrateda number
of them - on the agenda, and that these are in no sense preliminary.
Andin this context, the operation of Article 103 does not assist the Respondent States in
seeking to impose a principle of subject-matterimmunity upon the Court.
And my third conclusion.is that the claims of Libya are in no sense moot (sans objet).
That concludes my argumentsin the second round,Mr.President. 1would ask you to give
the floor to the Agent of the Libyan Arab Jamahiriya. Thank you.
TheACTINGPRESIDENT: Thankyou, Professor Brownlie. The Agent of Libya nowhas
the floor.
M. ELHOUDERI : Monsieur le Président,Messieurs de la Cour.
A lafin de nosplaidoiries,et conformément auparagraphe 2 de l'article60du Règlementde
la Cour, la Libye confirme qu'elle prie laCour de bien vouloir dire et juger :
- que les exceptions préliminaires présentées pa lr Royaume-Uniet les Etats-Unis doiventêtre
rejetéeset qu'enconséquence
a) la Cour est compétentepour statuer sur la requête libyenne; -48 -
b) cette requête est recevable;
- que la procédure doitêtrepoursuiviequant au fond du différend.
a
Un texte signécontenant ces conclusions sera communiquàla Cour.
Monsieur le président,je saisis cette occasion pour vous remercier, ainsi que lesmembres i
éminents decette Cour, pour la patience et l'attentionque vous avez bien voulu porànos
plaidoiries. Je remercie égalementle Greffe pour sonassistance précieuse durantle déroulement
de l'affaire. Je saisis cette occasion pour souhaiter un prompt rétablissement pourle juge
Kooijmans.
Monsieur le Président,Messieurs dela Cour, nous quittons aujourd'hui cettesalle confiants
que la Cour arrivera une décisionjuste et équitable;nous l'enremerciànl'avance.
Merci Monsieur le Président.
The ACTING PRESIDENT: Thankyou, AmbassadorElhouderi. The Court takes note of
the Final Submissions that you have read out on behalf of the Libyan Arab Jamahiriya in the
two cases. There are two Judges who would liketo ask questions of the Parties. 1give the floor
first to Judge Schwebel.
Judge SCHWEBEL: Thankyou. This is a questionfor Libya on which any observations of
the UnitedKingdom and the United Statesare invited as well.
Professor Suy argued today that the holding of the Security Council in resolution 748 t-at
Libya's failure to respondto the Council'sprevious resolutionconstituted a threat to international
peace and security is a holding that isvires and adétournemendte pouvoir. Does this mean
that it is the position of Libya that the Court may substitute itsjudgment as to what constitutes a
threat to the peace for theision of the Security Council as to what constitutes a threat to the
peace?
The ACTING PRESIDENT: Thank you, Judge Schwebel. 1 give the floor now to
Judge Koroma who would like to put a question tol1Parties. - 49 -
Judge KOROMA: Thank you Mr.Acting President. This is a question to al1the Parties
before the Court.
Ithasbeen contended duringtheseproceedingsthatthe Courtmay undertakejudicialscrutiny
of SecurityCouncil resolutions,includingthoseimmediatelyrelevantto thematterbeforethe Court.
To what extent, if at all, may such scrutiny pass on the validity of those resolutions,or may such
scrutinyhave the effect of passing on the validity of those resolutions for al1purposes?
1appreciate that the Parties have addressedthese questions in their pleadingsbut it may be
enlightening for the Parties to draw together and state their ultimate conclusions. Thank you,
Mr.Acting President.
The ACTING PRESIDENT: Thank you,Judge Koroma. This brings us to the end of this
seriesof hearings. The Courtwould be gratefulto the Parties ifthey could providethe Court with
answersto the questions now posed within two weeks. Copies ofthe questionswill be provided
to the Parties.
1would liketo expressmyheartfeltthankstothe Agents,counsel andadvocatesof al1Parties
for the valuable assistancethey have givento the Court in the accomplishmentof itstask. As well
as for the courtesy and CO-operationthey have displayed throughout these proceedings. In
accordancewith the usual practice, 1would askthe Agents to remain at the disposa1of the Court
for any further informationwhich it might need and,subject to this, 1now declare closedthe oral
proceedings on Preliminary Objections in the cases concerning Questionsof Interpretation and
Applicationof the 1971MontrealConventionarisingfiom theAerial Incidentat Lockerbie (Libyan
ArabJamahiriyav. UnitedKingdom)and Questionsof Interpretation andApplicationof the1971
Montreal Convention arising j?om the Aerial Incident at Lockerbie (Libyan Arab
Jamahiriya v. UnitedStatesofAmerica). The Courtwill nowwithdraw to deliberate. The Agents
of the Parties will be notified in due course of the date when the Court will deliver itsjudgments.
There being no other matters before it today, the Court will nowrise.
TheCourt roseat 12.35p. m.
Audience publique tenue le mercredi 22 octobre 1997, à 10 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de M. Weeramantry, vice-président, faisant fonction de président