COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
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Communiqué de presse
Non officiel
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N 2008/28
Le 11 septembre 2008
Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes
de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie)
Fin des audiences publiques sur la demande de la Géorgie en indication
de mesures conservatoires
LA HAYE, le 11 septembre 2008. Les audiences publiques sur la demande en indication de
mesures conservatoires présentée par la Géorgie devant la Cour internationale de Justice (CIJ) en
l’affaire relative à l’Applicati on de la convention internationalsur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie) se sont achevées hier.
Le 12août2008, la Géorgie avait déposé sa re quête introductive d’instance contre la Russie
pour violations de la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (voir
communiqué de pressen o2008/23). Elle avait présenté sa demande en indication de mesures
conservatoires le 14 août suivant (voir communiqué de presse n 2008/24).
Deux tours d’audiences publiques consacrées à la demande se sont tenus du lundi8 au
mercredi 10 septembre 2008 au Palais de la Paix à La Haye, siège de la Cour. Durant les audiences,
la délégation de la Géorgie éta it conduite par Mme Tina Burjaliani, premier vice-ministre de la
justice, et S.Exc. Mme Maia Panjikidze, ambassadeur de Géorgie auprès des Pays-Bas, agents. La
délégation de la Fédération de Russie était conduite par M. Roman Kolodkin, directeur du
département des affaires juridiques du ministère des affaires étrangères de la Fédération de Russie,
et S. Exc. M. Kirill Gevorgian, ambassadeur de la Fédération de Russie auprès des Pays-Bas, agents.
La décision de la Cour sera rendue au cours d’une séance publique dont la date sera annoncée
ultérieurement.
A l’audience, la Géorgie a développé son argumentation à l’appui de sa demande en
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indication de mesures conservatoires du 14août2008 (voir communiqué de pressen 2008/24), et
de sa demande modifiée du 25 août 2008.
A l’issue du deuxième tour d’observations oral es de la Géorgie, MmeBurjaliani, agent de
cette dernière, a exposé comme suit les mesures conservatoires demandées par cet Etat:
«La Géorgie prie…respectueusement la Cour, dans l’attente de sa décision sur le fond de
l’affaire, d’indiquer d’urgence les mesures cons ervatoires suivantes, aux fins d’éviter qu’un
préjudice irréparable ne soit porté aux droits queles personnes de souche géorgienne tiennent des
articles 2 et 5 de la convention internationale sur la discrimination raciale : - 2 -
a) la Fédération de Russie prendra toutes les mesures nécessaires pour fair e en sorte qu’aucune
personne de souche géorgienne ni aucune autre personne ne soit soumise à des actes de
discrimination raciale, sous forme d’actes de vi olence ou de contrainte, à savoir, notamment:
meurtre ou menace de meurtre, atteinte ou menace d’atteinte à l’intégr ité physique, détention
illicite et prise d’otages, destruction ou pillage de biens et tout autre acte accompli dans le
dessein d’obtenir le départ des personnes visées de leurs foyers ou de leurs villages en Ossétie
du Sud, en Abkhazie ou dans les régions géorgiennes adjacentes ;
b) la Fédération de Russie prendra toutes les me sures nécessaires pour empê cher que des groupes
ou des individus ne se livrent à l’encontre de personnes de souche géorgienne à des actes de
discrimination raciale, sous forme d’actes de contrainte, à savoir, notamment: meurtre ou
menace de meurtre, atteinte ou menace d’atteinte à l’intégrité physique, détention illicite et prise
d’otages, destruction ou pillage de biens et autres actes accomplis dans le dessein d’obtenir le
départ des personnes visées de leurs foyers ou de leurs villages en Ossétie du Sud, en Abkhazie
ou dans les régions géorgiennes adjacentes ;
c) la Fédération de Russie s’abstiendra de prendr e toute mesure pouvant compromettre le droit des
personnes de souche géorgienne de participer pleinement et sans discrimination aux affaires
publiques de l’Ossétie du Sud, de l’Abkhazie ou des régions géorgiennes adjacentes.
La Géorgie prie en outre la Cour d’indiquer d’urgence les mesures conservatoires suivantes,
dans l’attente de sa décision sur le fond de l’affaire, aux fins d’empêcher qu’un préjudice irréparable
ne soit porté au droit au retour que les personnes de souche géorgienne tiennent de l’article 5 de la
convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale :
d) la Fédération de Russie s’abstiendra de prendre ou de soutenir toute mesure qui aurait pour effet
de priver les personnes de souche géorgienne ou toutes autres personnes expulsées d’Ossétie du
Sud, d’Abkhazie et de régions adjacentes en ra ison de leur appartenance ethnique ou de leur
nationalité de l’exercice de leur droit de retourner dans leurs foyers d’origine ;
e) la Fédération de Russie s’abstiendra de prendre toute mesure, ou de soutenir toute mesure prise
par quelque groupe ou individu que ce soit, qui en traverait ou empêcherait l’exercice du droit
des personnes de souche géorgi enne ou de toutes autres personnes expulsées d’Ossétie du Sud,
d’Abkhazie et de régions adjacentes en raison de leur appartenance ethnique ou de leur
nationalité de retourner dans ces régions ;
f) la Fédération de Russie s’abstiendra d’adopter toute mesure qui porterait préjudice au droit des
personnes de souche géorgienne de participer pleinement et sans discrimination aux affaires
publiques après leur retour en Ossétie du Sud, en Abkhazie et dans les régions adjacentes.»
A ces conclusions telles que présentées dans sa demande en indication de mesures
conservatoires modifiée en date du 25août, la Gé orgie en a ajouté une autre, ainsi libellée: «la
Fédération de Russie s’abstiendra d’entraver, et elle permettra et facilitera, la distribution de l’aide
humanitaire à toutes les personnes se trouvant dans les territoires qu’elle contrôle, indépendamment
de leur appartenance ethnique».
A l’audience, la Russie a exposé à la Cour que les mesures conservatoires sollicitées par la
Géorgie ne devaient pas être indiquées; la Russie lui a demandé «de rayer du rôle l’affaire
introduite par la République de Géorgie le 12 août 2008».
A l’issue du second tour d’observations orales de la Fédération de Russie, M. Kolodkin, agent
de cette dernière, a résumé comme suit la position de son gouvernement : - 3 -
«Premièrement: le différend sur lequel le demandeur a aujourd’hui entendu s’exprimer
devant la Cour n’est manifestement pas un différe nd concernant la conven tion de1965. Si un tel
différend existait, il concernerait l’em ploi de la force, le droit humanitaire, l’intégrité territorial
e,
mais en aucune façon la discrimination raciale.
Deuxièmement : même si le présent différend concernait la convention de 1965, les violations
alléguées de cette convention ne sauraient relever des dispositions de celle-ci, ne serait-ce que parce
que les articles 2 et 5 de la convention n’ont pas d’application extraterritoriale.
Troisièmement: même si de telles violations s’étaient produites, elles ne sauraient, même
prima facie, être attribuables à la Russie, qui n’a jamais exercé et n’exerce pas aujourd’hui, sur les
territoires concernés, un contrôle tel que le seuil fixé puisse être franchi.
Quatrièmement : même si la c onvention de 1965 pouvait entrer ici en jeu, ce qui, je le répète,
n’est pas le cas, les critères de procédure prévus à l’article22 de cette conve ntion de1965 ne sont
pas remplis. Aucune preuve que le demandeur a it, avant de saisir votre Cour, proposé de négocier
ou de recourir au mécanisme constitué par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale
n’a été produite ni n’aurait pu l’être.
Cinquièmement: compte tenu de ces arguments, la Cour est manifestement incompétente
pour connaître de l’affaire.
Sixièmement: la Cour dût-elle, malgré tout, se déclarer compétente prima facie pour
connaître du différend, nous affirmons que le demandeur a manqué de démontrer qu’étaient remplis
les critères essentiels à l’indication de mesures cons ervatoires. Aucun élément de preuve crédible
n’a été produit attestant l’existence d’un risque imminent de dommage irréparable ou d’une
quelconque urgence. Les circonstances de l’espèce n’exigent absolument aucune mesure, compte
tenu, notamment, de la procédure de règlement après conflit qui se déroule actuellement. D’autre
part, les mesures demandées ne tiennent aucun comp te de cet élément clef qui ne saurait pourtant
passer inaperçu, à savoir que les événements d’août 2008 sont le résultat d’un emploi de la force par
la Géorgie.
Enfin: les mesures conservatoires telles qu’elles ont été formulées dans les demandes ne
sauraient être indiquées puisqu’elles imposeraient à la Russie des obligations dont celle-ci n’est pas
en mesure de s’acquitter. La Fédération de Russi e n’exerce pas de contrôle effectif vis-à-vis de
l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie ni d’aucune région adjacente de la Géorgie. Les actes des organes
de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie ou de tout autre groupe ou individu privé ne sauraient être
attribués à la Fédération de Russie. Ces mesures, si elles étaient indiquées, préjugeraient de l’issue
de l’affaire.»
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Les comptes rendus des audiences tenues du 8 au 10septembre 2008 figurent sur le site
Internet de la Cour (www.icj-cij.org).
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Département de l’information :
Mme Laurence Blairon, secrétaire de la Cour, chef du département (+31 (0)70 302 2336)
MM. Boris Heim et Maxime Schouppe, attachés d’information (+31 (0)70 302 2337)
Mme Joanne Moore, attachée d’information adjointe (+31 (0)70 302 2394)
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- Fin des audiences publiques sur la demande de la Géorgie en indication de mesures conservatoires
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