Avena et autres ressortissants mexicains (Mexique c. Etats-Unis d'Amérique) - La Cour conclut que les Etats-Unis d'Amérique ont manqué aux obligations leur incombant à l'égard de M. Avena, de cinquant

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128-20040331-PRE-01-00-EN
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2004/16
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COUR INTERNATIONALE DE ruSTICE
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Communiquéde presse
Non officiel

~ 2004/16
Le 31 mars 2004

Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique c. Etats-Unis d'Amérique)

La Cour conclut que les Etats-Unis d'Amérique ont manqué aux obligations leur incombant à
l'égard de M. Avena, de cinquante autres ressortissants mexicains et du Mexique,
en vertu de la convention de Vienne sur les relations consulaires

LA HAYE, le 31 mars 2004. La Cour internationale de Justice (CIJ), organe judiciaire
principal des Nations Unies, arendu aujourd'hui son arrêten l'affaire Avena et autres ressortissants
mexicains (Mexique c. Etats-Unis d'Amérique).

Dans son arrêt,qui est définitif,sans recours et obligatoire pour les Parties, la Cour, en ce qui
concerne le fond du différend,

«par quatorze voix contre une, dit que, en n'informant pas sans retard, lors de leur détention,
les cinquante et un ressortissants mexicains visésau point 1) du paragraphe 106 ci-dessus des
droits qui sont les leurs en vertul'alinéhldu paragraphe 1 de l'article 36 de la convention
de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril1963, les Etats-Unis d'Amériqueont violé
les obligations leur incombant en vertu dudit alinéa;

- par quatorze voix contre une, dit que, en ne notifiant pas sans retard au poste consulaire
mexicain appropriéla détentiondes quarante-neuf ressortissants mexicains visésau point 2) du
paragraphe 106 ci-dessus et en privant ainsi les Etats-Unis du Mexique du droit de rendre en
temps utile aux intéressésl'assistance prévuepar la convention, les Etats-Unis d'Amériqueont
violéles obligations leur incombant en vertu de l'alhlédu paragraphe 1 de l'article 36;

par quatorze voix contre une, dit que, en ce qui concerne les quarante-neuf ressortissants

mexicains visésau point 3) du paragraphe 106 ci-dessus, les Etats-Unis d'Amériqueont privé
les Etats-Unis du Mexique du droit, en temps utile, de communiquer avec ces ressortissants et
de se rendre auprèsd'eux lorsqu'ils sont en détention,et ont de ce fait violéles obligations leur
incombant en vertu des alinéaruet 0 du paragraphe 1de l'article 36 de la convention;

- par quatorze voix contre une, dit que, en ce qui concerne les trente-quatre ressortissants
mexicains visésau point 4) du paragraphe 106 ci-dessus, les Etats-Unis d'Amériqueont privé
les Etats-Unis du Mexique du droit de pourvoir en temps utileà la représentationen justice
desdits ressortissants, et onte ce fait violé les obligations leur incombant en vertu de

l'alinéa0 du paragraphe 1 de l'article 36 de la convention; - 2-

par quatorze voix contre une, dit que, en ne permettant pas le réexamenet la revision, au regard
des droits définisdans la convention, du verdict de culpabilité renduet de la peine prononcée à
l'encontre de M. César Roberto Fierro Reyna, M. Roberto Moreno Ramos et M. Osvaldo

Torres Aguilera, une fois qu'il avait étéétablique les intéressésétaientvictimes des violations
viséesau point 4) ci-dessus, les Etats-Unis d'Amériqueont violéles obligations leur incombant
en vertudu paragraphe 2 de l'article 36 de la convention;

par quatorze voix contre une, dit que, pour fournir la réparation appropriée en l'espèce, les
Etats-Unis d'Amérique sont tenus d'assurer, par les moyens de leur choix, le réexamenet la
revision des verdicts de culpabilité rendus et des peines prononcées contre les ressortissants
mexicains visésaux points 4), 5), 6) et 7) ci-dessus, en tenant compte à la fois de la violation

des droits prévus par 1'article 36 de la convention et des paragraphes 138 à 141 du présent
arrêt;

à l'unanimité,prend acte de l'engagement pris par les Etats-Unis d'Amériqued'assurer la mise

en Œuvre des mesures spécifiques adoptées en exécution de leurs obligations en vertu de
l'alinéahl du paragraphe 1 de l'article 36 de la convention de Vienne; et dit que cet
engagement doit êtreconsidérécomme satisfaisant à la demande des Etats-Unis du Mexique
visant à obtenir des garanties et assurances de non-répétition;

à 1'unanimité,dit que, si des ressortissants mexicains devaient néanmoinsêtrecondamnésà une
peine sévèresans que les droits qu'ils tiennentde l'alinéa hldu paragraphe 1 de l'article 36 de
la convention aient étérespectés,les Etats-Unis d'Amériquedevront, en mettant en Œuvreles

moyens de leur choix, assurer le réexamenet la revision du verdict de culpabilitéet de la peine,
de façon à accorder tout le poids voulu à la violation des droits prévuspar la convention, en
tenant compte des paragraphes 138 à 141 du présentarrêt.»

Raisonnement de la Cour

Dans son arrêt,la Cour commence par retracer le déroulementde 1'affaire. Elle rappelle que,

le 9janvier 2003, le Mexique a introduit une instance contre les Etats-Unis d'Amériqueen raison
d'un différendrelatif à des violations alléguéesdes articles 5 et 36 de la convention de Vienne sur
les relations consulaires du 24 avril 1963, concernant le traitement appliquéà un certain nombre de
ressortissants mexicains qui ont étéjugés, déclaréscoupables et condamnés à mort à la suite de

procédurespénalesqui se sont dérouléesaux Etats-Unis. La requêteinitiale visait cinquante-quatre
ressortissants mexicains se trouvant dans ce cas, mais, le Mexique ayant modifiéultérieurementses
demandes, cinquante-deux personnes seulement sont maintenant concernées. Le 9 janvier 2003, le
Mexique a aussi soumis à la Cour une demande en indication de mesures conservatoires, pour

qu'elle ordonne en particulier aux Etats-Unis de prendre toutes les mesures nécessairespour faire
en sorte qu'aucun ressortissant mexicain ne soit exécutéavant que la Cour ne rende sa décision
définitive. La Cour rappelle que, le 5 février2003, elle a adoptéà l'unanimité une ordonnance
relative à 1'indication de mesures conservatoires, où elle dit notamment que «[l]es Etats-Unis

d'Amériqueprendront toute mesure pour que MM. CésarRoberto Fierro Reyna, Roberto Moreno
Ramos et Osvaldo Torres Aguilera ne soient pas exécutéstant que l'arrêtdéfinitifen la présente
instance n'aura pas étérendu».

exceptions à la
La Cour examine ensuite quatre exceptions à sa compétence, et cinq
recevabilité des demandes du Mexique, qu'avaient soulevées les Etats-Unis. Elle rejette ces
exceptions après avoir rejeté l'objection que le Mexique avait opposée à la recevabilité des
exceptions des Etats-Unis.

Statuant sur le fond de l'affaire, la Cour commence par examiner la question de savoir si les
cinquante-deux individus concernésavaient exclusivement la nationalité mexicaine ou si certains
d'entre eux avaient aussi la nationalitédes Etats-Unis, comme l'affirme cet Etat. Concluant que les - 3 -

Etats-Unis n'ont pas apporté la preuve de cette affirmation, la Cour dit que les Etats-Unis avaient

effectivement des obligations (d'information consulaire) en vertu de l'alinéahl du paragraphe 1 de
l'article 36, de la convention de Vienne à l'égarddes cinquante-deux ressortissants mexicains.

La Cour examine ensuite la question de la signification qu'il convient de donner à

l'expression «sans retard», employéeà l'alinéa hl du paragraphe 1 de l'article 36. Elle dit qu'il y a
obligation de donner l'information consulaire au moment où il est constaté que la personne arrêtée
est un ressortissant étrangerou lorsqu'il existe des raisons de penseru'il s'agit probablement d'un
ressortissant étranger, mais considère que, à la lumière notamment des travaux préparatoires de la
convention, 1'expression «sans retard» ne doit pas nécessairement êtrecomprise comme signifiant

«immédiatement après l'arrestation». La Cour conclut alors que, compte tenu de cette
interprétation, les Etats-Unis n'en ont pas moins violé,dans tous les cas sauf un, leur obligation de
donner l'information consulaire.

La Cour prend ensuite note de l'interdépendance des trois alinéas .ê:)_,et_ç)_u paragraphe 1
de 1'article 36 de la convention de Vienne et dit que, dans quarante-neuf cas, les Etats-Unis ont
également violé 1'obligation qui leur incombe en vertu de 1'alinéa ru_ de permettre aux
fonctionnaires consulaires mexicains de communiquer avec leurs ressortissants et de se rendre

auprès d'eux; elle dit, par ailleurs, que, dans trente-quatre cas, les Etats-Unis ont aussi violé
1'obligation qui leur incombe de permettre aux fonctionnaires consulaires mexicains de pourvoir à
la représentation en justice de leurs ressortissants.

La Cour examine alors la conclusion du Mexique relative au paragraphe 2 de l'article 36,

dans laquelle il affirme que les Etats-Unis ont violéles obligations qui leur incombent en vertu de
ce paragraphe en ne permettant pas un «réexamenet une revision véritables et effectifs des verdicts
de culpabilité et des peines entachées d'une violation du paragraphe 1 de 1'article 36», notamment
du fait de l'application de la doctrine de la carence procédurale. La Cour commence par noter que

la règlede la carence procédurale n'a pas étéreviséedepuis qu'elle a appelél'attention, dans l'arrêt
rendu en l'affaire LaGrand, sur les problèmes auxquels son application pourrait donner lieu pour
les défendeursqui tentent d'invoquer des violations de la convention de Vienne dans les procédures
d'appel. Elle dit que, dans trois cas, les Etats-Unis ont violéle paragraphe 2 de 1'article 36, mais

que le recours judiciaire demeure possible dans quarante-neuf cas.

Abordant les conséquences juridiques des violations établies plus haut et des mesures
juridiques à envisager, la Cour relève que le Mexique demande réparation sous la forme de la
«restitutio in integrum», c'est-à-dire de l'annulation partielle ou totale des verdicts de culpabilitéet

des peines, qui constitue <<nécessairementle seul mode de réparation». Citant la décisionrendue
par sa devancière, la Cour permanente de Justice internationale, dans l'affaire relative à l'Usine de
Chorz6w, la Cour souligne que, en droit international, pour remédier à la violation d'une
obligation, il faut prescrire une «réparation dans une forme adéquate». Conformément à l'arrêt

qu'elle a rendu en l'affaire LaGrand, la Cour dit que, en l'espèce, la réparation adéquate des
violations de l'article 36 doit êtrele réexamenet la revision du verdict de culpabilité et de la peine
prononcéspar les tribunaux des Etats-Unis à l'encontre des ressortissants mexicains.

La Cour considère que le choix des moyens de réexamen et de revision doit revenir aux
Etats-Unis, mais que, pour la mise en Œuvre de ces procédures, il y a lieu de tenir compte de la
violation des droits reconnus par la convention de Vienne.

La Cour traite ensuite du rôle des recours en grâce. Après avoir dit que c'est la procédure

judiciaire qui est adaptée à la tâche du réexamenet de la revision, elle déclareque la procédurede
recours en grâce, telle qu'elle est pratiquéeactuellement dans le cadre du système de justice pénale
des Etats-Unis, ne peut suffire à elle seule à cette fin, bien que des procédures appropriées de
recours en grâce puissent compléterle réexamenet la revision judiciaires. -4-

Enfin, concernant la cessation des actes illicites commis par les Etats-Unis, demandéepar le
Mexique, la Cour ne trouve aucune preuve d'une pratique récurrenteet continue de violation par
les Etats-Unis de l'article 36 de la convention de Vienne. S'agissant de la demande de garanties et

d'assurances de non-répétition,la Cour reconnaît l'action menéepar les Etats-Unis pour favoriser
le respect des obligations qui leur incombent en vertu de la convention de Vienne et considèreque
cet engagement pris par les Etats-Unis répond à la demande du Mexique.

A la fin de son raisonnement, la Cour souligne que, en l'espèce, elle s'est référée aux
questions de principe à partir de l'application générale de la convention de Vienne. Elle fait
observer que, mêmesi la présenteinstance ne concerne que des Mexicains, on ne saurait déduire
que les conclusions de cet arrêtsont inapplicables à d'autres ressortissants étrangers se trouvant
dans les mêmesconditions aux Etats-Unis.

Enfin, la Cour fait valoir que l'ordonnance du 5 février 2003 relative à l'indication de
mesures conservatoires, mentionnée plus haut, ne produit ses effets, comme le prévoient ses
termes, ainsi que 1'article1 du Statut de la Cour, que pour autant que 1'arrêtdéfinitifn'a pas été

rendu, et elle souligne que les obligations des Etats-Unisà cet égardsont, à compter de la date du
présent arrêt,remplacées par celles qui sont énoncéesdans celui-ci. Elle fait observer que, à
1'égard (entre autres) des trois personnes visées dans 1'ordonnance, les Etats-Unis ont violéle
paragraphe 1 de l'article 36 de la convention de Vienne; et que, en outre, à l'égardde ces trois

seules personnes, les Etats-Unis ont aussi violéle paragraphe 2 de 1'article 36. Le réexamenet la
revision du verdict de culpabilité et de la peine requis par le paragraphe 2 de l'article 36, qui
constituent le remède appropriéen cas de violation du paragraphe 1 de l'article 36, n'ont pas été
effectués. La Cour considère que, s'agissant des cas de ces trois personnes, il revient aux

Etats-Unis de trouver un remède approprié qui soit de la nature du réexamen et de la revision,
conformémentaux critères indiquésdans le présentarrêt.

Composition de la Cour

La Chambre était composée comme suit : le juge Shi, président; le juge
Ranjeva, vice-président; les juges Guillaume, Koroma, Vereshchetin, Higgins, Parra-Aranguren,

Kooijmans, Rezek, Al-Khasawneh, Buergenthal, Elaraby, Owada et Tomka; le juge
ad hoc Sepulveda; M. Couvreur, greffier.

Le juge Shi, président et le juge Ranjeva, vice-président,joignent des déclarations à l'arrêt

de la Cour; les juges Vereshchetin, Parra-Aranguren et Tomka, ainsi que le juge ad hoc Sepulveda,
yjoignent des opinions individuelles.

Un résuméde l'arrêtest fourni dans le document intitulé«Résumén° 2004/1» auquel sont
annexésles résumésdes déclarations et opinions qui y sont jointes. Le présent communiquéde

presse, le résuméde l'arrêt,ainsi que le texte intégralde celui-ci figurent également sur le site
Internetde la Cour sous les rubriques «Rôle» et «Décisions»(www.icj-cij.org).

Départementde l'information:
M. Arthur Th. Witteveen, premier secrétairede la Cour(+ 31 70 302 23 36)
Mme Laurence Blairon et M. Boris Heim, attachésd'information(+ 31 70 302 23 37)

Adresse de courrier électronique: [email protected]

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