Souveraineté sur certaines parcelles frontalières - Arrêt

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12619
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Number (Press Release, Order, etc)
1959/33
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Les renseignements suivants émanant du Greffe de la Cour interna-

tionale de Justice sont nUs à la disposition de la presse:

Aujourdfhui 20 juin 1959, la Cour, internationale de Justice a rendu
son arrêt en l'affaire relative à la souveraineté sur certaines parcel-
les frontalières, soumise à la Cour par la Belgique et par les Pays-Bas
en vertu d'un compromis intervenu entre ces ddux gouvernements le 7 mars
1957.

Par ce compromis, -la Cour était invitee à déterminer si la souverai-
neté sur les. parcelles cadastrales, connues de 1836 à 1843 sous les
numéros 91. et 92, Section A, Zondereygen, appartenait au Royaume de
Belgique ou au Royaume des Pays-Bas. Par dixvoix contre quatre, elle
dit que la souveraineté sur ces parcelles appartient à la Selgique,

Sir e ers chLauterpacht a joint à 1' arrêt une déclaration expliquant

les raisons pour lesquelles il avait voté en faveur d'un arrgt déter-
minant que la souversineté sur les parcelles litigieuses appartenait
aux Pays-Bas. M. Spiropoulos a également joint à l'arrêt une décla-
ration expliquant qu'ayant à choisir entre deux hypothèses .conduisant
à des résultats opposés, il croyait devoir donner la préférence à llhy-
pothèse qui lui paraissait la moins spéculative, c'est-à-dire, à son
avis, celle des Pays-Bas. MN. Armand-Ugon et Moreno-Quintana, se pré-
valant des dispositions de l'article 57 du Statut, ont joint à l'arrêt
~llGxposé de leur opinion dissidente.
.. ....

Dans son arrêt, la Cour constate qulil,axi.ste dans la région nord de
la ville belge de Turnhout un certain nombre dlenclaves formée's par la

communebelge de Baerle-Duc et par la commune néerlandaise de Baarle-
Nassau. Le tarritoirs de la première est fait d'une série de parcelles
dont un grand nombre sont enclavées dans la commune de Baarle-Nassau.
Plusieurs portions de la coma de Saerle-Duc sont isolées, non seule-
ment du territoirs principal de la Belgique mais encore l'une de llautrv.

A la suite de tentatives pour déterminer les limites entre les deux
communes et les frontières entre les deux pays, un procès-verbal dit
~~Procés-verbal communalI1a été établi par les autorités des d eux commu-
nes entre 1836 at 184.l. Un exemplaire de ce procès-verbal a été produit
par les Pays-Bas. Sous 12.rubrique llScction A, dite Zonderey--en", il
énonce :

Illes parcelles 78 à 111 inclus appartiennent à la commune de
Baarle-Nassau11.

D'autre part, b la, suita de la séparation entre les Pais-Bas et .
,. Belgique en. 1839, une Commission mixte de délimilation avait été chargée
de déterminer les limites des possessions des 'deux Ehats . Un Traité de
limites, intervenu entre eux en 1842 et entré en,vigueur en 1843, pro-
clamait* dans son a rticle U, que

, "le statu quo sera maintenu, tant à llégard des villages de
Baarle-Nassau (Pays- as) et Baerle-Duc (~elgi~ue), que par
rapport aux chemins qui les traversentu. Le travail de la Codssion mixte de délimitation aboutit au texte de
la Convention de délimitation du 8 août 1843, ratifiée le 3 octobre 1843.
Le Procès-verbal descriptif de la frontière ann2xé à cette Convention
indique en son article 90 comment il est procédé lorsque la détermina-
tion de la frontière arrive au territoire des communes de Baarle-Nassau
et de Baerle-Duc et expose que les commissaires démarcateurs ont décidé
que le Frocès-verbal communal de 18U, "coi~statant les parcelles dont

se composent les communes de Baerle-Duc et de Baarle-Nassau, est trans-
crit mot à mot dans le présent articlett.

Or, dans la partie du Procès-verbal' descriptif de 1843 qui reprend le
Procès-verbal comrnunal de 1241, on lit t

IlLes parcelles nos 78 à 90 inclus appartiennent à la. commune de
Baarle-Nassau.
Les parcelles nos 9l et 92 appartiennent à Baerle-Duc.
Les parcelles nos 93 à Ill inclus appartiennent à Baarle-Nassaun.

ih outre, le plan spéciai annexé à la Convention de délimitation indi-
que les parceiies litigieuses comme appartenant à la Belgique.

Le Gouvernement belge invoque les termes du Procès-verbal communal,
tels quiils figurent au Procès-verbal descriptif, pour soutenir que les
parcelles 91 et 92 ont été reconnues commeappartenant à la commune de
Baerle-Duc et que la souveraineté sur ces parcelles appartiznt à la
Belgique.

Le Gouvernement néerlandais, de son côté, soutient que la Convention
de 1843 nla rien fait de plus que de reconnaître lie~stence du -tatu
quo, sans le définir. Ce statu quo doit &re déterminé conformément
au Procès-verbal communal, en vertu de quoi la souveraineté sur les
parcelles litigieuses a été reconnue commeappartenant aux Pays-Bas.

Subsidiairement, le Gouvernement néerlandais soutient que, m&me si
la Convention de délimitation a entendu statuer sur la souveraineté, la

disposition qui vise les pa.rcelles litigieuses était entachée d erreur.
La simple comparaison entre les termes du aocès-verbadescriptif et
ceux du Procès-verbal communal le démontrô.

Très subsidiaire~nt, le Gouverneii~a~t néerlandais soutient que s'il
devait être décidé que la Convantion de dilimitation a fixé la souve-
raineté sur les parcelles litigieuses et n'est pas entachée d'erreur,
les actes de souveraineté accomplis par lui depuis 1843 sur ces parcelles 8
ont déplacé le titre juridique résultant de la Convention et établi la
souveraineté des Pays-Bes .

Dans son arrêt, la Cour examine succe,csivement ces trois moyens.

Pour répond= à la première question: la Convention de 1843 a-t-elle
déterminé elle-meme la souveraineté sur les parcelles ou s'est-elle

bornée à un renvoi au statu quo,'.la Cour examine les travaux de la Com-
irission de délimitlation constatés par les procès-verbaux. De cet exama,, r'
il r essort qu'à dater du 4 septembre 1841, le travail de d élunitation .
si est poursuivi sur la.ba se du maintiùn du statu quo et qu'à 1z séance
du 4.avril 1843, la Commission mixte da délimitation a adopté le texte
diun article qui prescrivait, dans les termes figurant au Procès-verbal
descriptif, la transcription mot à mot du Procès-verbal comrminal. Ce
faisant, la Cormnission mixte a attribué les parcelles litigieuses à la .
Belgique.

La Cour .... La Cour as% dlavis que la compétence de la. Comnisslon mixte de dglimi-
tation pour d-epartager 1~5 deux covmuncsne faitaucun doute. Cch r6-
sulte de l'article 6 du Traite entra les Pnys-Bas et la Belgique, conclu
à Londres le 19 avril 1839, où il est dit:

... le sdiies limitrs slrront tracées, conformément à ces mêmes
articles, par des comrriissaires démrcütrurs belges et hollandais,
qui se rgunixont 1s plus t8t possible .; .,tl,

l et cela est confirmé pzr le prearnbule de la Convention de délimite%ion
de 1843.

Toute intcrpr6tation qui f2r~it tenir La Convention de délimitation

commelaissant an suspens et aband~~snt k me appréciation 'ultériew'e
du statu jpo la détekLnation de liappartenanc àellunou IrauLre Etat
dzs pa~cellcs litigieuses, serait incompatible avec liintention corne
des partiesainsi indiquée.

Sur lc pramier moyen, la Cour conclut que la Convention a effectivc-
mnt fix5 ccliu dzs deux Bats auquex ap~?rtenaivnt les diffgrtmtes par-
celles des deuxcornunes et quz, diaprès ses termes,il a et4 decidé que
le.esparcelles lit igicuse s appart znsientà la Belgique ,

l -t
+ +

.
Sur le second moyen tire de l'.~rreur la Cour expose dans son arrêt
que csttethèse p~ut être énoncée de la mnièrz suivantet le Procès-
verbal descriptif de LEE43 a enonce que le Procés-verba clommunal de 18.41
constatant les pzrcelles dont se composent les communes de Baerle-Duc et
.de Betrlc-Nussau serait transcrit lIriiàt motit dans llnrticle90cdu
Froces-v=rbal descriptif. Or,lû comparaison entre l'exemplair du
Proc &-verbal o~-in.z;nrJ ~roduip2r Les Pcys-Sas et le Procès-verbal
descriptif r$v&le que 1C przrnier nfa pus et& trsnscrit mot à mot, puis-
que le Procès-verba descriptif attribue les parcelles 91 et 92 à la
Belgique, alors que ledit exemplaire du Procè s-verbal communal les
attribue à Szarle-IiTes sau.

l
L3. COUT i?stirns que 13 simple cornparsison des deuk doçum-znts ne dé-
montrepas Ilexistaric dime erreur. Pour feire cette démonstration,
t les Puys-Bas doivent 6t~~blir que 12 Commis sion mixte de delimitetion
entendait reprendre au Procès-verbal desdriptif , nnnexe à Ir Convention
de 1843 et faisant partic? de celle-ci, la teAe du Proces-verbal contenu
dans liexemp1,-.i produitpar les Pnj-+Bas, '

Ta Cour rrrppcllq eue ln tSche de la Commission mi&e était essentiel-
lsment d'e d &finir le stztu quo,

De lTem3rnen des documents produits sur les travaux de la ComrrLssion
mixte dv d6llrrktation et des correspondar-ces qui s'y rapportent, la
Cour tire 12 conclusion que les deux ~xernpl?~ir dausProcss-verbal com-
mal aux mains des Commissions néerlendaise et belge étaient en can-

tradiction quant à lleppartenmce 5 telle ou tellecomme des parcolles
litigieuses. Elle estime que les hypothèses prgsen tes par les Pays-Bas
pou expliquer cornment 1'sxemplaire du Procès-verba lorniunal aux mbs
de la Commission néerlandais se présent~it avec la redastion qFrel'on
ratrouve dans le Procès-verbal descriptif ne r6ussisson tas A démontrer
llerreur,

Les Pays-Bas ..., Les Pays-Bas ayant soutenu quiils n'avaientpas besoin de démontrer
11origine de l'erreurpuisque la simple comparaison des deux dacumznts
montrait .suffisammen quiune erraur avait &G cornfise, la Cour répbnd
quliLnlest pzs possible de trancher k question sur cette base étroite
et qu'ella doitv4rifier quelle étaitl'intentio nes pürties dieprès
les dispositions dtun trait&, à la lumière des circonstancas. Elle
constate quien avril 1843, l.s deux codssions étatent en passcsslon
d~exemplaire du Procès-vsrbal corniunal depuis 1843. La diffdrence quant
5 lrattributio des parcelleç 91 at 92 entrs ces exemplaires était connue
des deux commissions et a clû fairelf objet fisdiscussions entre elles.
Dzns les plans parceaires établis pour fuira partie de la Convention
de délimitation, il étaitclairement montri, etdime façon qui ne pouvait

échapper à liattantion, quz 1~s prcelles eppartenaizn& t 12 Belgique.
Au surplus, li:r61e de la Conmission n'était pas celui d'un simgle co-
piste,'sa &he étaitde vérifiar quel étaitle statu quo, A sa 22Sème
sémce elle a attribuS la souveraineté sur les parcclles litigicpses à
la Belgique. Cette d6cision a trouvé son e,upression dans la Convention

De l'avisde la Cour, en dehors de LI simple compari?ison entre le texte
du Proces-verbal descriptif ct celuidu Procès-verba clommunal produit par
les Pays-Bas, tous les efforts pour démortrer et expliquer IlerreuralL6-
guée reposent sur des hypothèses qui ne sont pas plaùsibles et qui ne sont
pas etayées par des przuvcs suffisantes. Za,Cour estime qufil est Btabli
5 sa satisfaction qulil niy a pas eu dlerreur et que la validite et la

force obligatoire des dispositions de la Convention àe 18.43 se r apportant
aux parcelles litigieuses n'en sont pas affectees,

Ie dernier moyen avancé par les Pays-Bas est que les actes de souve-
raineté accomplis par eux depuis 1843 ont établi leur souveraineté sur
les parcelles. la question qui se pose à la Cour est donc de savoir si
la Belgique a perdu cette souveraineté faute cdtavoir exerc& ses droits
et pour avoir acquiescé à des actes de souvereineté prétendbent exercés
par Les Pays-Bas à différent es reprises depuis 18&3.

la Cour rappelle diffkrents actes accomplis par la Belgique et quj_
montrent qurelle nla jmis abandonné sa souveraine6 t: oublication de
cartes d'Bat-Phjar, inscription des parcellesau cadastre, inscription
diactesde mutation au cadastre de Baerle-Duc en 1896 et 1904. En .:
revanche, Ics Pays-Bas font état de l'inscriptio aux r eglstres de
Baarle-Nassa de plusieus mutations foncières se rapportant aux par-
celles, de lrrinscriptio dnlactes de 1!&ta£civilau registre de cette
commune. C'est en juillet 19U quiunsenqu6le officielle belge a amené
La direcheur du cadastre d !Anvers faire szvoir su ministre des Fi-
nancesde Belgique qu'iljugaait n6cessairie, que la question f'ûtsoase
au ministère deç Affaires étrangères de Belgique. La, première guerre
mondiale survintalors. En août 1921, le ministre de Belgique & La
Haye a.attiré 11attention du Gouvernemen.t n6erlandais sur le fait que
--lesdeux parcelles litigieuses appartena~t à i3aerle-Duc figuraient dans

12s,documznts cadastrau dxes deux Etat 3. C 'est en 1922 que les auto-
rites néerlandaises ont,pour la première fois, ?retendu que 12 Proces-
; verbalcommunal de 1841avait kt4 reproduit de maniére inexacte dans le
Psacès-verbal descriptif de lg43 et que les parcelles 91 et 92 apparte-
naient aux Pays-Bas. r6tmbm 1 incorporation des parcelle s au cadastre
nherlandais, la transcription des mutations foncieres sur les registres
néerlandais et 11inscription des actes de Il état-civil au registre
communa le Baarlc-Nassau, les Pays-Bas invoquent la perception de
3fimpGt .foncie1- néerlandais surle s deux parcelles sans résistanceau

protestation ..,,protestztion de P. part de la Belgique. Ilsinmquent également une
procédure intentée en 1851 pzr la camrr!unede Baerle-Duc devant un
tribunal de Sreda et divers autros ~ctes qui constitiisraient 11exercice
de la souveraine 6tn6srlandaiss sur las parcelles, sans oppcsitionde
le part de la Selgique,

I2 Cour constate que dans -me largs ineswre il. s'agit là diactes coir-
rants at di?m czractère administratif qui sant la conséquence de l'ins-
cription pzr les Pays-B3s dus parcelles litigieuses à leur cadastre,
contrairen~nt à la Convzntian de d4limitation. Ils sont insuffisants
pour déplacer 12 souversin~ dtbelge établi2 par cotte Convention.

L3.Cour noteen outre que, dans une convention non ratifiée entre
les deux aats ~~emontant ?i1892, la Belgique cox+isuntait A céder aux
Pzys-Bas les deu pnrcelles litigieuses. Sans douke cef,te con:jenl;lon

non rakifiée nla crée ni droits ni oLligations, niais ses tarniss montrent
qu1 cette époque la Belgiqua af'firnlsit sa souverainet 6 sur les deux ,
parcelles et qua les Pays-Bas ce l'ignoraient pas. Ni en 1832 ni à
aucune 6poc;u.e depuis lors les Pays-Sas n 1ont rejeté lss assertions
belgzs de souveraineté, juso,ulzu jour aù le differend siest élevé entre
12s deux mats en 1322. La Cour constate que la souverainet6 de la
Balgjquo ét~blio en 1543 sur les parcelles litigieuses ns si est pas
étsinte ,

Ciest pour ces motifs que la Caur arrivs 2 la conclusion qui a kt6

.énoncee plus haut,

Ia Haye, le 20 juin 1959,

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Souveraineté sur certaines parcelles frontalières - Arrêt

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