Déclaration de M. le juge Tomka

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DÉCLARATION DE M. LE JUGE TOMKA
La Cour et les conflits armés  Mission de la Cour dans la présente phase de l’affaire  Montant accordé à titre d’indemnisation ne reflétant pas l’ampleur des dommages subis par la RDC du fait des graves violations du droit international commises par l’Ouganda.
Article 56 du Statut de la Cour  Défaut de motivation en ce qui concerne les montants des indemnités accordées par la Cour.
Paiement de l’indemnité par versements annuels sur une période de cinq ans  Intérêts moratoires  Date à partir de laquelle les intérêts moratoires courent  Valeur de l’indemnité accordée réduite à une peau de chagrin.
Frais de procédure  Article 64 du Statut de la Cour  Violation par l’Ouganda d’importantes obligations de droit international  Non-respect par l’Ouganda de l’ordonnance en indication de mesures conservatoires du 1er juillet 2000  Nécessité pour la RDC de faire valoir ses droits devant la Cour  Longue période de litige actif  Point de savoir si la Cour aurait dû user de son pouvoir discrétionnaire pour ordonner à l’Ouganda de supporter les frais raisonnablement encourus par la RDC pour assurer sa représentation devant la Cour.
1. Dans l’une de mes opinions, j’ai exprimé l’avis que «[l]a justice est généralement impuissante à mettre un terme aux guerres» et que les organes judiciaires «ne peuvent en général que remédier [ex post] aux conséquences juridiques des guerres, à condition toutefois qu’ils aient compétence pour connaître de l’affaire en question» (Application de la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), opinion individuelle du juge Tomka, p. 312, par. 3).
2. La Cour n’a pas été en mesure d’empêcher l’immixtion de l’Ouganda dans le conflit armé sur le territoire de la RDC malgré son ordonnance du 1er juillet 2000 indiquant à l’unanimité certaines mesures conservatoires. En particulier, la Cour avait ordonné que
«[l]es deux Parties d[evai]ent, immédiatement, prévenir et s’abstenir de tout acte, et en particulier de toute action armée, qui risquerait de porter atteinte aux droits de l’autre Partie au regard de tout arrêt que la Cour pourrait rendre en l’affaire, ou qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend porté devant elle ou d’en rendre la solution plus difficile» (Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), mesures conservatoires, ordonnance du 1er juillet 2000, C.I.J. Recueil 2000, p. 129, par. 47, point 1) du dispositif).
La Cour avait par ailleurs ordonné que
«[l]es deux Parties d[evai]ent, immédiatement, prendre toutes mesures nécessaires pour assurer, dans la zone de conflit, le plein respect des droits fondamentaux de l’homme, ainsi que des règles applicables du droit humanitaire» (ibid., p. 129, par. 47, point 3) du dispositif).
3. Avant même qu’elle ne détermine sans équivoque que ses «ordonnances indiquant des mesures conservatoires au titre de l’article 41 [du Statut] ont un caractère obligatoire» (LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 506, par. 109), la Cour a dit que
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«[l]orsqu[’elle] conclut que la situation exige l’adoption de mesures de ce genre, il incombe à chaque partie de prendre sérieusement en considération les indications ainsi données et de ne pas fonder sa conduite uniquement sur ce qu’elle croit être ses droits». (Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 144, par. 289).
Et de souligner :
«Il en va particulièrement ainsi dans une situation de conflit armé où aucune réparation ne peut effacer les conséquences d’un comportement que la Cour jugerait avoir été contraire au droit international.» (Ibid.)
4. Dans son arrêt sur le fond, rendu le 19 décembre 2005, la Cour a conclu que l’Ouganda
«1) ... en se livrant à des actions militaires à l’encontre de la République démocratique du Congo sur le territoire de celle-ci, en occupant l’Ituri et en soutenant activement, sur les plans militaire, logistique, économique et financier, des forces irrégulières qui opéraient sur le territoire congolais, a[vait] violé le principe du non-recours à la force dans les relations internationales et le principe de non-intervention ;
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3) ... par le comportement de ses forces armées, qui [avaient] commis des meurtres et des actes de torture et autres formes de traitement inhumain à l’encontre de la population civile congolaise, [avaient] détruit des villages et des bâtiments civils, [avaient] manqué d’établir une distinction entre cibles civiles et cibles militaires et de protéger la population civile lors d’affrontements avec d’autres combattants, [avaient] entraîné des enfants-soldats, [avaient] incité au conflit ethnique et [avaient] manqué de prendre des mesures visant à y mettre un terme, et pour n’avoir pas, en tant que puissance occupante, pris de mesures visant à respecter et à faire respecter les droits de l’homme et le droit international humanitaire dans le district de l’Ituri, la République de l’Ouganda a[vait] violé les obligations lui incombant en vertu du droit international relatif aux droits de l’homme et du droit international humanitaire ;
4) ... par les actes de pillage et d’exploitation des ressources naturelles congolaises commis par des membres des forces armées ougandaises sur le territoire de la République démocratique du Congo, et par son manquement aux obligations lui incombant, en tant que puissance occupante dans le district de l’Ituri, d’empêcher les actes de pillage et d’exploitation des ressources naturelles congolaises, la République de l’Ouganda a[vait] violé les obligations qui [étaient] les siennes, en vertu du droit international, envers la République démocratique du Congo» (Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 280-281, par. 345, points 1), 3) et 4) du dispositif).
5. La Cour a également dit que «l’Ouganda ne s’[était] pas conformé[] à l’ordonnance en indication de mesures conservatoires rendue par la Cour le 1er juillet 2000» (ibid., p. 281, par. 345, point 7) du dispositif).
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6. Le non-respect par l’Ouganda de l’ordonnance en indication de mesures conservatoires a entraîné de lourdes pertes en vies humaines, de graves préjudices corporels, des déplacements de populations, d’importants dommages matériels ainsi que le pillage et l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC.
7. Il incombait à la Cour, dans la présente phase de l’affaire, de «remédier [ex post] aux conséquences juridiques» du recours illicite à la force par l’Ouganda et de son intervention illicite en RDC, ainsi qu’à celles découlant d’autres violations graves des obligations lui incombant en vertu du droit international mentionnées plus haut. Je doute que la Cour ait complètement réussi à remplir sa mission. Le montant accordé à titre d’indemnisation, notamment pour les dommages causés aux personnes et les dommages matériels, ne reflète pas, à mon avis, l’ampleur des dommages subis par la RDC et sa population pendant près de cinq années d’activités militaires illégales menées par l’Ouganda. Le montant accordé à titre d’indemnisation ne correspond guère à l’ampleur des souffrances et des pertes engendrées du fait de la violation, par l’Ouganda, de la règle fondamentale du droit international interdisant le recours à la force dans les relations internationales et des graves violations des obligations lui incombant en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.
8. En tant que membre de la Cour, je me suis trouvé devant un dilemme. N’étant pas convaincu que les montants d’indemnité fixés par la Cour effacent, autant que possible, toutes les conséquences des actes illicites de l’Ouganda, devais-je voter contre le point 1) du dispositif ? Ces montants faisant en définitive partie du montant global, bien plus important, de l’indemnité que la RDC est certainement en droit d’attendre pour retrouver la totalité de ce qu’elle a perdu, je n’ai pas cru devoir voter contre ce point.
9. Le paragraphe 1 de l’article 56 du Statut oblige la Cour à motiver son arrêt. Les motifs exposés dans celui-ci devraient permettre au lecteur de saisir le raisonnement par lequel la Cour est parvenue à ses conclusions. Je doute qu’un lecteur puisse saisir, sur la base des présents motifs, comment la Cour est parvenue aux indemnités fixées pour chacun des chefs de dommages. Bien qu’elle n’hésite pas à critiquer les rapports du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sur la mission de l’ONU en République démocratique du Congo ainsi que le rapport présenté par les experts qu’elle a désignés, notamment en ce qui concerne leurs méthodes, au final la Cour elle-même n’explicite aucune méthode précise par laquelle elle est parvenue au montant accordé à titre d’indemnisation, se contentant de répéter qu’
«elle peut, dans les circonstances très particulières de la présente affaire, adjuger une indemnisation sous la forme d’une somme globale, dans la limite des possibilités offertes par les éléments de preuve et compte tenu de considérations d’équité» (arrêt, paragraphes 166, 181, 193, 206, 225, 258 et 365).
Ces mots récités comme une incantation ne satisfont guère à l’exigence que l’arrêt de la Cour soit motivé.
10. J’ai voté contre la décision de la Cour d’ordonner que l’indemnité due par l’Ouganda soit acquittée en cinq versements sur une période de cinq ans. La Cour a fixé le montant de l’indemnité au moment de rendre son arrêt en disant que «pour déterminer la somme due au titre de chaque chef de dommages, elle a tenu compte du passage du temps» (arrêt, paragraphe 401). Pour cette raison, elle a considéré qu’il n’était pas nécessaire d’accorder des intérêts compensatoires. Lorsqu’elle a fixé les intérêts moratoires à un taux de 6 %, elle a décidé que ces intérêts courraient à compter du jour suivant celui où la somme aurait dû être acquittée (arrêt, paragraphe 406). Cette décision, cependant, ne tient pas compte du fait qu’avec le passage du temps, la valeur réelle de l’indemnité accordée, et
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de celle restant à acquitter par versements annuels, diminuera sous l’effet de l’inflation et de la baisse du pouvoir d’achat du dollar des Etats-Unis. En supposant que l’inflation au cours de cette période de cinq ans sera d’environ 6 % (soit le taux d’intérêt déterminé par la Cour), la valeur réelle de l’indemnité accordée diminuera considérablement (la perte pouvant s’élever jusqu’à 39 000 000 dollars des Etats-Unis). Bien qu’il eût été loisible à la RDC et à l’Ouganda de convenir des modalités d’un éventuel paiement échelonné de l’indemnité, la décision de la Cour
 qui réduit la valeur de l’indemnité accordée à une peau de chagrin  n’est pas, à mon avis, équitable envers la requérante.
11. A mon grand regret, je ne peux souscrire à la décision de la majorité de rejeter la demande de la RDC tendant à ce que l’Ouganda rembourse les frais qu’elle a encourus dans le cadre de la présente affaire. Il est vrai que l’article 64 du Statut de la Cour dispose que «[s]’il n’en est autrement décidé par la Cour, chaque partie supporte ses frais de procédure». Le Statut donne donc à la Cour le pouvoir d’ordonner le remboursement des dépens «lorsqu’elle est appelée à le faire, à charge de procéder à un examen minutieux des circonstances propres à l’espèce» (Certaines activités menées par le Nicaragua dans la région frontalière (Costa Rica c. Nicaragua) et Construction d’une route au Costa Rica le long du fleuve San Juan (Nicaragua c. Costa Rica), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (II), déclaration commune de MM. les juges Tomka et Greenwood, Mme la juge Sebutinde et M. le juge ad hoc Dugard, p. 754, par. 2). La RDC, victime d’un usage illicite de la force, dont une partie du territoire a été occupée pendant une longue période et dont la population a souffert, a dû demander la protection de la Cour et faire valoir ses droits devant elle. Le défendeur a été jugé être en violation d’importantes obligations de droit international. En outre, la Cour a dit dans son arrêt de 2005 que l’Ouganda ne s’était pas conformé à l’ordonnance en indication de mesures conservatoires qu’elle avait rendue le 1er juillet 2000. Lors des négociations sur les réparations, l’Ouganda a d’abord proposé de verser la somme de 25 500 000 dollars des Etats-Unis, avant de porter son offre à 37 028 368 dollars des Etats-Unis. La RDC n’a eu d’autre choix que de se tourner à nouveau vers la Cour. La longue période de litige actif de l’affaire devant la Cour entre 1999 et 2005, puis entre 2015 et 2021, a certainement entraîné des frais considérables pour la RDC. Ceux-ci dépassent assurément de loin le montant réclamé par l’Ouganda dans sa demande reconventionnelle, soit moins d’un million de dollars des Etats-Unis, la renonciation par lui étant invoquée par la Cour afin de justifier son refus «de déroger ... à la règle générale» (arrêt, paragraphe 396), et ce, alors même que la RDC ne contestait pas cette demande dans son contre-mémoire sur les réparations (p. 8, par. 2.03). Tous ces éléments justifiaient que la Cour fasse droit à la demande. Pourtant, à mon grand regret, la Cour n’a même pas souhaité recevoir la liste définitive des frais de la RDC après la clôture des débats.
12. La présente affaire n’a rien d’une affaire ordinaire portant sur un différend en matière de délimitation maritime ou sur l’interprétation d’un traité, où la Cour fournit un service aux deux parties. En l’espèce, comme il est dit au point 1) du dispositif de l’arrêt de 2005, l’Ouganda s’est livré illégalement à des activités militaires à l’encontre de la RDC sur le territoire de celle-ci, a occupé l’un de ses districts et a soutenu activement, sur les plans militaire, logistique, économique et financier, des forces irrégulières qui opéraient sur le territoire congolais. La RDC et sa population ont subi d’importants dommages. S’il y a bien une affaire qui commandait le remboursement des frais raisonnablement engagés par la requérante pour assurer sa représentation devant la Cour, il s’agit de l’espèce. Malheureusement, le membre de phrase «[s]’il n’en est autrement décidé par la Cour» de l’article 64 du Statut reste ici lettre morte.
(Signé) Peter TOMKA.
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DÉCLARATION DE M. LE JUGE TOMKA
[Texte original en français]
La Cour et les conflits armés — Mission de la Cour dans la présente phase de
l’affaire — Montant accordé à titre d’indemnisation ne reflétant pas l’ampleur des
dommages subis par la RDC du fait des graves violations du droit international
commises par l’Ouganda.
Article 56 du Statut de la Cour — Défaut de motivation en ce qui concerne les
montants des indemnités accordées par la Cour.
Paiement de l’indemnité par versements annuels sur une période de cinq ans —
Intérêts moratoires — Date à partir de laquelle les intérêts moratoires courent —
Valeur de l’indemnité accordée réduite à une peau de chagrin.
Frais de procédure — Article 64 du Statut de la Cour — Violation par l’Ouganda
d’importantes obligations de droit international — Non-respect
par l’Ouganda de
l’ordonnance en indication de mesures conservatoires du 1er juillet 2000 —
Nécessité pour la RDC de faire valoir ses droits devant la Cour — Longue période
de litige actif — Point de savoir si la Cour aurait dû user de son pouvoir
discrétionnaire pour ordonner à l’Ouganda de supporter les frais raisonnablement
encourus par la RDC pour assurer sa représentation devant la Cour.
1. Dans l’une de mes opinions, j’ai exprimé l’avis que « [l]a justice est
généralement impuissante à mettre un terme aux guerres » et que les
organes judiciaires « ne peuvent en général que remédier [ex post] aux
conséquences juridiques des guerres, à condition toutefois qu’ils aient
compétence pour connaître de l’affaire en question » (Application de la
convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine
c. Serbie-et-Monténégro),
arrêt, C.I.J. Recueil 2007 (I), opinion
individuelle de M. le juge Tomka, p. 312, par. 3).
2. La Cour n’a pas été en mesure d’empêcher l’immixtion de l’Ouganda
dans le conflit armé sur le territoire de la RDC malgré son ordonnance du
1er juillet 2000 indiquant à l’unanimité certaines mesures conservatoires.
En particulier, la Cour avait ordonné que
« [l]es deux Parties d[evai]ent, immédiatement, prévenir et s’abstenir de
tout acte, et en particulier de toute action armée, qui risquerait de porter
atteinte aux droits de l’autre Partie au regard de tout arrêt que la
Cour pourrait rendre en l’affaire, ou qui risquerait d’aggraver ou
d’étendre le différend porté devant elle ou d’en rendre la solution plus
difficile » (Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique
du Congo c. Ouganda), mesures conservatoires, ordonnance du
1er juillet 2000, C.I.J. Recueil 2000, p. 129, par. 47, point 1) du dispositif).
La Cour avait par ailleurs ordonné que
« [l]es deux Parties d[evai]ent, immédiatement, prendre toutes mesures
nécessaires pour assurer, dans la zone de conflit, le plein respect des
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DECLARATION OF JUDGE TOMKA
[Original English Text]
The Court and armed conflicts — Task of the Court in the present phase of the
proceedings — Compensation awarded not commensurate with extent of damage
suffered by the DRC as a result of Uganda’s serious violations of international
law.
Article 56 of the Statute of the Court — Insufficiency of reasons provided by
the Court for the amounts awarded.
Payment of compensation by instalments over five-year period — Post‑judgment
interest — Date from which post‑judgment interest accrues — Failure to protect
value of compensation awarded.
Costs — Article 64 of the Statute of the Court — Uganda found to have
breached important international law obligations — Violation by Uganda of the
Order on provisional measures of 1 July 2000 — Necessity for the DRC to
vindicate its rights before the Court — Long period of active litigation — Whether
the Court should have exercised its discretion to order Uganda to pay the DRC’s
reasonable costs of legal representation.
1. In one of my opinions I expressed the view that “[t]he courts are
usually powerless to stop wars” and that they “usually can only sort out
ex post the legal consequences of the wars provided they have jurisdiction
over the particular case” (Application of the Convention on the Prevention
and Punishment of the Crime of Genocide (Bosnia and Herzegovina v.
Serbia
and Montenegro), Judgment, I.C.J. Reports 2007 (I), separate
opinion of Judge Tomka, p. 312, para. 3).
2. The Court was not able to stop the involvement of Uganda in the
armed conflict in the territory of the DRC despite its Order of 1 July 2000
unanimously indicating certain provisional measures. In particular, the
Court ordered that
“[b]oth Parties must, forthwith, prevent and refrain from any action,
and in particular any armed action, which might prejudice the rights
of the other Party in respect of whatever judgment the Court may
render in the case, or which might aggravate or extend the dispute
before the Court or make it more difficult to resolve” (Armed Activities
on the Territory of the Congo (Democratic Republic of the Congo v.
Uganda), Provisional Measures, Order of 1 July 2000, I.C.J. Reports
2000, p. 129, para. 47 (1)).
The Court further ordered that
“[b]oth Parties must, forthwith, take all measures necessary to ensure
full respect within the zone of conflict for fundamental human rights
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droits fondamentaux de l’homme, ainsi que des règles applicables du
droit humanitaire » (C.I.J. Recueil 2000, p. 129, par. 47, point 3) du
dispositif).
3. Avant même qu’elle ne détermine sans équivoque que ses « ordonnances
indiquant des mesures conservatoires au titre de l’article 41 [du Statut]
ont un caractère obligatoire » (LaGrand (Allemagne c. Etats‑Unis
d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 506, par. 109), la Cour a dit que,
« [l]orsqu[’elle] conclut que la situation exige l’adoption de mesures
de ce genre, il incombe à chaque partie de prendre sérieusement en
considération les indications ainsi données et de ne pas fonder sa
conduite uniquement sur ce qu’elle croit être ses droits » (Activités
militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-
ci (Nicaragua
c. Etats-Unis d’Amérique), fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986,
p. 144, par. 289).
Et de souligner : « Il en va particulièrement ainsi dans une situation de
conflit armé où aucune réparation ne peut effacer les conséquences d’un
comportement que la Cour jugerait avoir été contraire au droit international.
» (Ibid.)
4. Dans son arrêt sur le fond, rendu le 19 décembre 2005, la Cour a
conclu que l’Ouganda
« 1) … en se livrant à des actions militaires à l’encontre de la République
démocratique du Congo sur le territoire de celle-
ci, en occupant
l’Ituri et en soutenant activement, sur les plans militaire,
logistique, économique et financier, des forces irrégulières qui
opéraient
sur le territoire congolais, a[vait] violé le principe du non-recours
à la force dans les relations internationales et le principe de
non-intervention
;
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3) … par le comportement de ses forces armées, qui [avaie]nt commis
des meurtres et des actes de torture et autres formes de traitement
inhumain à l’encontre de la population civile congolaise,
[avaie]nt détruit des villages et des bâtiments civils, [avaie]nt manqué
d’établir une distinction entre cibles civiles et cibles militaires et de
protéger la population civile lors d’affrontements avec d’autres combattants,
[avaie]nt entraîné des enfants-soldats,
[avaie]nt incité au
conflit ethnique et [avaie]nt manqué de prendre des mesures visant à
y mettre un terme, et pour n’avoir pas, en tant que puissance occupante,
pris de mesures visant à respecter et à faire respecter les droits
de l’homme et le droit international humanitaire dans le district de
l’Ituri, la République de l’Ouganda a[vait] violé les obligations lui
incombant en vertu du droit international relatif aux droits de
l’homme et du droit international humanitaire ;
4) … par les actes de pillage et d’exploitation des ressources naturelles
congolaises commis par des membres des forces armées ougan-
armed activities (decl. tomka) 141
132
and for the applicable provisions of humanitarian law” (I.C.J. Reports
2000, p. 129, para. 47 (3)).
3. Even before the Court authoritatively determined that its “orders on
provisional measures under Article 41 [of the Statute] have binding effect”
(LaGrand (Germany v. United States of America), Judgment, I.C.J. Reports
2001, p. 506, para. 109), it stated that
“[w]hen the Court finds that the situation requires that measures of
this kind should be taken, it is incumbent on each party to take the
Court’s indications seriously into account, and not to direct its conduct
solely by reference to what it believes to be its rights” (Military
and Paramilitary Activities in and against Nicaragua (Nicaragua v.
United States of America), Merits, Judgment, I.C.J. Reports 1986,
p. 144, para. 289).
And the Court emphasized: “Particularly is this so in a situation of armed
conflict where no reparation can efface the results of conduct which the
Court may rule to have been contrary to international law.” (Ibid.)
4. In its Judgment on the merits, rendered on 19 December 2005, the
Court found that Uganda
“(1) . . . by engaging in military activities against the Democratic
Republic of the Congo on the latter’s territory, by occupying Ituri
and by actively extending military, logistic, economic and financial
support to irregular forces having operated on the territory of the
DRC, violated the principle of non-use of force in international relations
and the principle of non-intervention;
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(3) . . . by the conduct of its armed forces, which committed acts
of killing, torture and other forms of inhumane treatment of the Congolese
civilian population, destroyed villages and civilian buildings,
failed to distinguish between civilian and military targets and to protect
the civilian population in fighting with other combatants, trained
child soldiers, incited ethnic conflict and failed to take measures to
put an end to such conflict; as well as by its failure, as an occupying
Power, to take measures to respect and ensure respect for human
rights and international humanitarian law in Ituri district, violated its
obligations under international human rights law and international
humanitarian law;
(4) . . . by acts of looting, plundering and exploitation of Congolese
natural resources committed by members of the Ugandan armed
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daises sur le territoire de la République démocratique du Congo, et par
son manquement aux obligations lui incombant, en tant que puissance
occupante dans le district de l’Ituri, d’empêcher les actes de pillage et
d’exploitation des ressources naturelles congolaises, la République de
l’Ouganda a[vait] violé les obligations qui [étaie]nt les siennes, en vertu
du droit international, envers la République démocratique
du Congo »
(Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du
Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J. Recueil 2005, p. 280‑281, par. 345,
points 1), 3) et 4) du dispositif).
5. La Cour a également dit que « l’Ouganda ne s’[étai]t pas conformé[]
à l’ordonnance en indication de mesures conservatoires rendue par la
Cour le 1er juillet 2000 » (ibid., p. 281, par. 345, point 7) du dispositif).
6. Le non‑respect par l’Ouganda de l’ordonnance en indication de
mesures conservatoires a entraîné de lourdes pertes en vies humaines, de
graves préjudices corporels, des déplacements de populations, d’importants
dommages matériels ainsi que le pillage et l’exploitation illégale des
ressources naturelles de la RDC.
7. Il incombait à la Cour, dans la présente phase de l’affaire, de « remédier
[ex post] aux conséquences juridiques » du recours illicite à la force
par l’Ouganda et de son intervention illicite en RDC, ainsi qu’à celles
découlant d’autres violations graves des obligations lui incombant en
vertu du droit international mentionnées plus haut. Je doute que la Cour
ait complètement réussi à remplir sa mission. Le montant accordé à titre
d’indemnisation, notamment pour les dommages causés aux personnes et
les dommages matériels, ne reflète pas, à mon avis, l’ampleur des dommages
subis par la RDC et sa population pendant près de cinq années
d’activités militaires illégales menées par l’Ouganda. Le montant accordé
à titre d’indemnisation ne correspond guère à l’ampleur des souffrances et
des pertes engendrées du fait de la violation, par l’Ouganda, de la règle
fondamentale du droit international interdisant le recours à la force dans
les relations internationales et des graves violations des obligations lui
incombant en vertu du droit international humanitaire et du droit international
des droits de l’homme.
8. En tant que membre de la Cour, je me suis trouvé devant un
dilemme. N’étant pas convaincu que les montants d’indemnité fixés par la
Cour effacent, autant que possible, toutes les conséquences des actes illicites
de l’Ouganda, devais‑je voter contre le point 1) du dispositif ? Ces
montants faisant en définitive partie du montant global, bien plus important,
de l’indemnité que la RDC est certainement en droit d’attendre pour
retrouver la totalité de ce qu’elle a perdu, je n’ai pas cru devoir voter
contre ce point.
9. Le paragraphe 1 de l’article 56 du Statut oblige la Cour à motiver
son arrêt. Les motifs exposés dans celui-
ci devraient permettre au lecteur
de saisir le raisonnement par lequel la Cour est parvenue à ses conclusions.
Je doute qu’un lecteur puisse saisir, sur la base des présents motifs,
comment la Cour est parvenue aux indemnités fixées pour chacun des
armed activities (decl. tomka) 142
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forces in the territory of the Democratic Republic of the Congo and
by its failure to comply with its obligations as an occupying Power in
Ituri district to prevent acts of looting, plundering and exploitation
of Congolese natural resources, violated obligations owed to the
Democratic Republic of the Congo under international law” (Armed
Activities on the Territory of the Congo (Democratic Republic of the
Congo v. Uganda), Judgment, I.C.J. Reports 2005, pp. 280‑281,
para. 345 (1), (3) and (4)).
5. The Court also found that “Uganda did not comply with the Order
of the Court on provisional measures of 1 July 2000” (ibid., p. 281,
para. 345 (7)).
6. The failure of Uganda to comply with the Order on provisional
measures led to significant losses of human life, serious personal injuries,
displacement of populations, serious material damage and looting, plundering
and unlawful exploitation of the natural resources of the DRC.
7. It was the task of the Court, in the present phase of the case, to
“sort out ex post the legal consequences” of the unlawful use of force by
Uganda and its unlawful intervention in the DRC, as well as of the other
serious violations of its obligations under international law mentioned
above. I doubt that the Court fully succeeded in this task. The amount of
compensation awarded, in particular for personal injury (damage to persons)
and damage to property, in my view, does not reflect the scale of the
damage Uganda inflicted on the DRC and its people during the almost
five years of its unlawful military activities. The amount of compensation
awarded is not commensurate with the extent of the suffering and losses
caused by Uganda’s breach of the fundamental rule of international law
prohibiting the use of force in international relations and the serious violations
of its obligations under international humanitarian law and international
human rights law.
8. As a Member of the Court, I was faced with a dilemma. Not being
convinced that the amounts of compensation fixed by the Court will, as
far as possible, wipe out all the consequences of Uganda’s illegal acts,
should I vote against point (1) of the dispositif ? But as these amounts of
compensation are part of the much larger overall amount to which the
DRC, in order to be made whole, is certainly entitled, I decided in the end
not to vote against this point.
9. Article 56, paragraph 1, of the Statute requires that the judgment
shall state the reasons on which it is based. The reasons should allow the
reader to understand how the Court reached its conclusions. I doubt that
the reader will be able to understand how the Court arrived at the particular
amounts of compensation for various heads of damages. While the
143 activités armées (décl. tomka)
134
chefs de dommages. Bien qu’elle n’hésite pas à critiquer les rapports du
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sur la mission de
l’ONU en République démocratique du Congo ainsi que le rapport présenté
par les experts qu’elle a désignés, notamment en ce qui concerne
leurs méthodes, en fin de compte la Cour elle‑même n’explicite aucune
méthode précise par laquelle elle est parvenue au montant accordé à titre
d’indemnisation, se contentant de répéter que
« elle peut, dans les circonstances très particulières de la présente
affaire, adjuger une indemnisation sous la forme d’une somme globale,
dans la limite des possibilités offertes par les éléments de preuve
et compte tenu de considérations d’équité » (arrêt, par. 166, 181, 193,
206, 225, 258 et 365).
Ces mots récités comme une incantation ne satisfont guère à l’exigence
que l’arrêt de la Cour soit motivé.
10. J’ai voté contre la décision de la Cour d’ordonner que l’indemnité
due par l’Ouganda soit acquittée en cinq versements sur une période de
cinq ans. La Cour a fixé le montant de l’indemnité au moment de rendre
son arrêt en disant que, « pour déterminer la somme due au titre de
chaque chef de dommages, elle a tenu compte du passage du temps »
(ibid., par. 401). Pour cette raison, elle a considéré qu’il n’était pas nécessaire
d’accorder des intérêts compensatoires. Lorsqu’elle a fixé les intérêts
moratoires à un taux de 6 %, elle a décidé que ces intérêts courraient à
compter du jour suivant celui où la somme aurait dû être acquittée (ibid.,
par. 406). Cette décision, cependant, ne tient pas compte du fait que, avec
le passage du temps, la valeur réelle de l’indemnité accordée, et de celle
restant à acquitter par versements annuels, diminuera sous l’effet de l’inflation
et de la baisse du pouvoir d’achat du dollar des Etats-Unis. En
supposant que l’inflation au cours de cette période de cinq ans sera d’environ
6 % (soit le taux d’intérêt déterminé par la Cour), la valeur réelle de
l’indemnité accordée diminuera considérablement (la perte pouvant s’élever
jusqu’à 39 000 000 dollars des Etats-Unis). Bien qu’il eût été loisible à
la RDC et à l’Ouganda de convenir des modalités d’un éventuel paiement
échelonné de l’indemnité, la décision de la Cour — qui réduit la valeur de
l’indemnité accordée à une peau de chagrin — n’est pas, à mon avis, équitable
envers la requérante.
11. A mon grand regret, je ne peux souscrire à la décision de la majorité
de rejeter la demande de la RDC tendant à ce que l’Ouganda rembourse
les frais qu’elle a encourus dans le cadre de la présente affaire. Il
est vrai que l’article 64 du Statut de la Cour dispose que, « [s]’il n’en est
autrement décidé par la Cour, chaque partie supporte ses frais de procédure
». Le Statut donne donc à la Cour le pouvoir d’ordonner le remboursement
des dépens « lorsqu’elle est appelée à le faire, à charge de procéder
à un examen minutieux des circonstances propres à l’espèce » (Certaines
activités menées par le Nicaragua dans la région frontalière (Costa Rica
c. Nicaragua) et Construction d’une route au Costa Rica le long du fleuve
San Juan (Nicaragua c. Costa Rica), arrêt, C.I.J. Recueil 2015 (II),
armed activities (decl. tomka) 143
134
Court does not spare the reports of the Secretary‑General of the
United Nations on the UN Mission in the Democratic Republic of the
Congo and the report of the Court‑appointed experts from criticism, taking
issue in particular with their methodologies, in the end the Court itself
does not indicate any precise methodology by which it has arrived at the
amount of compensation it has awarded. Instead, the Court is content to
repeat that
“it may, under the exceptional circumstances of the present case,
award compensation in the form of a global sum, within the range of
possibilities indicated by the evidence and taking into account equitable
considerations” (Judgment, paras. 166, 181, 193, 206, 225, 258
and 365).
This incantation hardly satisfies the requirement of providing the reasons
for the Court’s Judgment.
10. I have voted against the Court’s decision that the compensation
due by Uganda to the DRC shall be paid in five instalments over a period
of five years. The Court fixed the amount of compensation at the moment
of rendering its Judgment, asserting that “in determining the amount to
be awarded for each head of damage, it has taken into account the
passage
of time” (ibid., para. 401). For that reason, it considered that
there was no need to award pre‑judgment interest. When determining
post‑judgment interest at 6 per cent, it decided that such interest shall
accrue from the day following the day on which the instalment was due
(ibid., para. 406). This decision, however, does not take into account that,
with the passage of time, the real value of the compensation awarded and
still remaining to be paid in instalments, will diminish due to inflation and
the decrease in the purchasing power of the US dollar. Assuming that
inflation in this five‑year period will be at around 6 per cent (the interest
determined by the Court), the real value of the compensation awarded
will significantly decrease (by up to US$39,000,000). While the DRC and
Uganda would have been free to agree on the conditions for a possible
payment of the compensation in instalments, the Court’s decision —
without protecting the value of the compensation awarded — is not, in
my view, fair to the Applicant.
11. I cannot agree with the decision of the majority to reject the DRC’s
claim to be reimbursed by Uganda for the costs it incurred in the context of
the present case. It is true that Article 64 of the Statute of the Court provides
that “[u]nless otherwise decided by the Court, each party shall bear its own
costs”. The Statute thus gives a power to the Court to award costs “when it
is called upon to do so, [and] after careful consideration of the particular
circumstances of the case” (Certain Activities Carried Out by Nicaragua in
the Border Area (Costa Rica v. Nicaragua) and Construction of a Road in
Costa Rica along the San Juan River (Nicaragua v. Costa Rica), Judgment,
I.C.J. Reports 2015 (II), joint declaration of Judges Tomka, Greenwood,
Sebutinde and Judge ad hoc Dugard, p. 754, para. 2). As the victim of an
144 activités armées (décl. tomka)
135
déclaration commune de MM. les juges Tomka et Greenwood, Mme la
juge Sebutinde et M. le juge ad hoc Dugard, p. 754, par. 2). La RDC,
victime d’un usage illicite de la force, dont une partie du territoire a été
occupée pendant une longue période et dont la population a souffert, a dû
demander la protection de la Cour et faire valoir ses droits devant elle. Le
défendeur a été jugé être en violation d’importantes obligations de droit
international. En outre, la Cour a dit dans son arrêt de 2005 que l’Ouganda
ne s’était pas conformé à l’ordonnance en indication de mesures
conservatoires qu’elle avait rendue le 1er juillet 2000. Lors des négociations
sur les réparations, l’Ouganda a d’abord proposé de verser la somme
de 25 500 000 dollars des Etats-Unis, avant de porter son offre à
37 028 368 dollars des Etats-Unis. La RDC n’a eu d’autre choix que de se
tourner à nouveau vers la Cour. La longue période de litige actif de l’affaire
devant la Cour entre 1999 et 2005, puis entre 2015 et 2021, a certainement
entraîné des frais considérables pour la RDC. Ceux-
ci dépassent
assurément de loin le montant réclamé par l’Ouganda dans sa demande
reconventionnelle, soit moins d’un million de dollars des Etats-Unis, la
renonciation par lui étant invoquée par la Cour afin de justifier son refus
« de déroger … à la règle générale » (arrêt, par. 396), et ce, alors même que
la RDC ne contestait pas cette demande dans son contre‑mémoire sur les
réparations (p. 8, par. 2.03). Tous ces éléments justifiaient que la Cour
fasse droit à la demande. Pourtant, à mon grand regret, la Cour n’a même
pas souhaité recevoir la liste définitive des frais de la RDC après la clôture
des débats.
12. La présente affaire n’a rien d’une affaire ordinaire portant sur un
différend en matière de délimitation maritime ou sur l’interprétation d’un
traité, où la Cour fournit un service aux deux parties. En l’espèce, comme
il est dit au point 1) du dispositif de l’arrêt de 2005, l’Ouganda s’est livré
illégalement à des activités militaires à l’encontre de la RDC sur le territoire
de celle-
ci, a occupé l’un de ses districts et a soutenu activement, sur
les plans militaire, logistique, économique et financier, des forces irrégulières
qui opéraient sur le territoire congolais. La RDC et sa population
ont subi d’importants dommages. S’il y a bien une affaire qui commandait
le remboursement des frais raisonnablement engagés par la requérante
pour assurer sa représentation devant la Cour, il s’agit de l’espèce.
Malheureusement, le membre de phrase « [s]’il n’en est autrement décidé
par la Cour » de l’article 64 du Statut reste ici lettre morte.
(Signé) Peter Tomka.
armed activities (decl. tomka) 144
135
unlawful use of force, with part of its territory occupied for an extended
period and whose population suffered, the DRC had to seek protection and
to vindicate its rights in this Court. The Respondent was found in breach of
important international law obligations. Moreover, the Court found in its
2005 Judgment that Uganda did not comply with its Order on provisional
measures of 1 July 2000. During the negotiations on reparations, Uganda
offered a mere US$25,500,000, later increasing its offer to US$37,028,368.
The DRC had no choice but to return to the Court. The long period of
active litigation of the case before the Court between 1999 and 2005 and
again between 2015 and 2021 no doubt entailed substantial costs for the
DRC. These costs were certainly several times higher than the value of
Uganda’s counter‑claim, worth less than US$1 million, which the DRC in
its Counter‑Memorial on reparations accepted (p. 5, para. 2.03), and the
waiver of which by Uganda is given by the Court as a reason for not
“departing . . . from the general rule” (Judgment, para. 396). All these circumstances
militate in favour of granting the request. However, to my
regret, the Court did not even wish to receive the DRC’s statement of costs
following the closure of the oral proceedings.
12. This was not an ordinary case concerning a maritime delimitation
dispute or the interpretation of a treaty in which the Court provides a
service to both parties. This was a case about Uganda unlawfully engaging
in military activities against the DRC on the latter’s territory, occupying
one of its districts and actively extending military, logistic, economic
and financial support to irregular forces which operated on the territory
of the DRC, as found in point (1) of the dispositif of the 2005 Judgment.
Significant damage was caused to the DRC and its people. If any case
calls for the reimbursement of the reasonable amount of the Applicant’s
costs of legal representation, it is this one. Unfortunately, the opening
phrase in Article 64 of the Statute “[u]nless otherwise decided” remains a
dead letter.
(Signed) Peter Tomka.

Document file FR
Document Long Title

Déclaration de M. le juge Tomka

Order
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