Opinion individuelle de M. Onyeama (traduction)

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053-19710621-ADV-01-05-EN
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053-19710621-ADV-01-00-EN
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OPINION INDIVIDUELLE DE M. ONYEAMA

[Traduction]

Je souscrisà la conclusion de la Cour lorsqu'elledéclarequela présence
de l'Afrique du Sud en Namibie est illégale,mais il m'estimpossible de la

suivre dans safaçoh d'aborder certains des aspects qu'elle a dû examiner
pour répondre à la questionjuridique sur laquelle le Conseildesécuritélui
demandait un avis consultatif. Ces aspects concernent la question de
savoir si la participation d'un membre de la Cour à la présenteaffaire
devait êtreexclue, le choix d'un jugead hoc, la compétence dela Cour
pour examiner la validitéformelleetintrinsèque derésolutionset décisions
de l'Assembléegénérale etdu Conseil de sécurité,t l'effetde la résolution
276 (1970)du Conseil de sécurité.

En réponse à l'objection soulevéepar l'Afrique du Sud au sujet de la
participationà la présenteaffaire de certains membres de la Cour, il ne me
paraît pas suffisant de dire, dans le cas d'un des juges mis en cause, sur
lequelporte l'ordonnance derejetno3du 26janvier 1971,que c'est comme
représentant de son gouvernement que ce juge s'est livré,aux Nations
Unies, aux activités quiont motivél'objection.
A mon avis, les mots ((ouà tout autretitre11qui figurenà l'article 17,
paragraphe 2, du Statut, sont d'une portée suffisamment large pour
englober les activités, aux Nations Unies, de membres de délégations
nationales qui deviennent ultérieurement membres de la Cour.

Chaque cas d'espècedoit êtreexaminécompte tenu des circonstances
qui lui sont propres; il est impossible d'énoncer unerèglegénérale.En
l'occurrence, le juge viséa, comme membre d'une délégationnationale
auprès des Nations Unies, pris une part active à la rédaction d'une
résolution qui se rapportaità la résolution 2145 (XXI) de l'Assemblée
généraleetqui, selon moi,joue un rôle critique dans laprésenteprocédure.

L'importance de la résolutiondont il s'agit(la résolution246 (1968)du
C~nseil de sécurité)et sa pertinence en l'espècesont attestéespar le fait
qu'elle estau nombre des documentspouvant servir àéluciderla question
qui ont ététransmis à la Cour, et que la Cour elle-mêmea cru devoir en

faire mention comme constituant l'un des élémentsde la réponse du
Conseil de sécuritéà l'appel de l'Assembléegénérale,qui avait demandé
son concours pour obtenir que l'Afrique du Sud se retire du territoire. 11m'a sembléque lescirconstances étaient telles que lejuge visén'aurait
pas dû participer à l'élaboration del'avis, et je n'ai donc pas souscrit à
l'ordonnance no3.

On sait qu'au débutde la présente instance,la République sud-africaine
a demandé à êtreautorisée à désignerun juge ad hoc en application de
l'article 83du Règlementde la Cour, aux termes duquel :

IISil'avisconsultatif est demandéau sujet d'une questionjuridique

actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du
Statut est applicable, ainsi que lesdispositions du présentRèglement
qui pourvoient à l'application de cet article))

J'estime avec la majorité de la Cour et pour les motifs qu'elle expose
qu'il n'est pas demandé à la Cour de donner un avis sur une question
juridique actuellement pendante entre l'Afrique du Sud et un autre ou
d'autres Etats mais, étant donnéle pouvoir discrétionnaire très étendu
que l'article 68de son Statut confèreà la Cour, l'inapplicabilitéde I'article

83du Règlement, à mon sens, ne règle pasla question. Selon moi, l'article
83 du Règlement envisage une situation dans laquelle l'article 31 du
Statut doit s'appliquer, mais cela n'épuise pas les possibilités de
désigner un juge ad hoc en matière consultative, pas plus que cela ne
limite ou n'épuise le pouvoir discrétionnaire que confère à la Cour
I'article 68 de son Statut et qui lui permet de s'inspirer desdispositions
de l'article 31 du Statut (dans la mesure où elle les reconnaîtra appli-
cables )I.

On a dit que la Cour ne saurait exercer cepouvoir discrétionnairepour
autoriser la désignationd'un juge ad hoc parce que l'article 31du Statut
visedes (parties)]et qu'il n'ya pasà proprement parler de ((parties »dans
une procédure consultative, mais cela ne me paraît pas une objection
valable, vu que I'article 83du Règlement de la Cour rend expressément
I'article31du Statut applicable aux avisconsultatifs et reconnaît doncpar
là que, mêmes'il n'y a pas de parties dans une procédure consultative,
desjuges adhocpeuvent êtredésignés aux fins de ces procéduresdans les
conditions définiespar I'article. Le pouvoir discrétionnaire de la Cour

n'aurait aucune réalités'il ne pouvait êtreexercépour autoriser la dési-
gnation d'un juge ad hoc dans des circonstances qui n'entrent pas dans
le cadre de I'article 83du Règlement mais dans lesquelles la Cour estime
devoir exercer ce pouvoir dans l'intérêd te lajustice.
C'est lapremière fois depuis que la Cour actuelle existe qu'on reven-
dique le droitde désignerun juge ad hocdans une procédureconsultative.
La présente requêtepour avis consultatif commence par donner à
entendre que la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie,

nonobstant la résolution276 (1970)du Conseil de sécurité, créc eertainesconséquencesjuridiques pour lesEtats,parce qu'elleserait, par hypothèse,
contraire au droit international. Les comptes rendus des débats qui se
sont déroulés au comité ad hoc du Conseil de sécuritécomme au Conseil
de sécuritélui-mêmepour aboutir au dépôtde cette requête,et certaines
des thèsesdéfenduesdevant la Cour, soit dans les exposésécrits, soitau
cours de la procédure orale, font apparaître sans doute possible que

l'Afrique du Sud étaitaccuséede violer certaines au moins de ses obliga-
tions internationales; et la requête procèdedu désirmanifeste de tirer
toutes les conséquencesde la cessation du mandat de l'Afrique du Sud
pour le Sud-Ouest africain et d'éliminer sonadministration du territoire.
Cesfaits montrent clairement quela demande d'avisconsultatifmettait
directement en jeu des intérêtsspéciaux d'importance capitale pour
l'Afrique dil Sud et c'estlà, selon moi, un élémentque la Cour aurait dû
prendre en considération pour décider, dans l'exercice du pouvoir
discrétionnairequ'elletient de l'article8 de son Statut, s'ilfallait ou non
autoriser l'Afrique du Sud à désigner un jugeadhoc.
A mon avis, donc, l'intérêt particulier de l'Afriqudu Sud en l'espèce
aurait dû paraître déterminant à la Cour et, non seulement pour que
justice soitfaitemais pour qu'ellelesoit manifestement, la Couraurait dû,

dans l'exercicede son pouvoir discrétionnaire, faire droità la demande
de désignationd'un juge ad hoc présentéepar l'Afrique du Sud.
Je n'oublie pas qu'aux fins de la procédure consultative de 1950,qui
portait sur une question juridique abstraite concernant le Statut inter-
national du Sud-Ouest africain, l'Afrique du Sud, qui s'était enquise, à
titre préliminaire, de sondroit de désigner un jugead hoc, n'a pas poussé
cette démarche plus loinet n'a pas présentéde demande officielledans ce
sens, etje n'oubliepas non plus qu'auxfinsde l'avisdont il s'agitl'Afrique
du Sud n'a pas désigné dejuge ad hoc. Mais les circonstances et les ques-
tions juridiques sur lesquelles l'avisétait demandédifféraiententièrement
de ce qu'ellessont àprésentet il ne me paraît pas légitimede tirer du fait
que l'Afrique du Sud n'a pas insistépour que soit désigné un juge ad hoc
en 1950et qu'aucun juge ad hoc n'a éti,alors, effectivement désigné, des

conclusions défavorables à la demande de l'Afrique du Sud en la présente
instance. Rien de ce qui s'estpasséàcet égarden 1950ne saurait interdire
de demander la désignationd'un juge ad hocdans une procédureconsul-
tative ultérieure, et pareille demande doit être examinéecompte tenu de
la nature des questions juridiques posées à la Cour et des circonstances
existant au moment où la demande est faite.
Lapratique de la Courpermanente deJustice internationaleconcernant
la désignation de juges ad hoc en matière consultative, que traduit
l'ordonnance rendue le 31 octobre 1935 ' en l'affaire de la Compatibilité
de certains décrets-loidantzikois avec la constitution deia Ville libre, ne
me paraît pas pouvoir guider la Cour en la présenteespèce,étantdonné
le caractère entièrementdifférentde la question poséeet le fait que les

C.P.J.Z. série AIno65, annexe 1, p. 69-71.Statuts et Règlements des deux Cours ne sont pas identiques. Le Statut
de la Cour permanente en vigueur en 1935ne contenait rien d'équivalent
à l'article 68 du Statut actuel qui, selon moi, constitue la disposition

applicable et celle qui intéressela question du pouvoir discrétionnaire de
la Cour dans le domaine considéré.
Eu égard à la décisionobligatoire par laquelle la Cour, à la majorité
de sesmembres, a refusédefaire droit en la présenteinstance à lademande
de désignation d'un juge ad hoc, il devient inutile d'examiner la question
de la composition de la Cour à ce sujet.

A la base des résolutions que le Conseil de sécuritéa adoptées sur la
Namibie et qui intéressentla question juridique sur laquelle l'avisconsul-
tatif de la Cour est demandé, on trouve la résolution 2145 (XXI) de

1'Assembiée généralee,n date du 27octobre 1966,par laquelle l'Assemblée
généralea décidéque Ile mandat confié à Sa Majestébritannique pour
êtreexercé enson nom par le Gouvernement de l'Union sud-africaine
est ..terminé, que l'Afrique du Sud n'a aucun autre droit d'administrer
le territoire et que désormaisle Sud-Ouest africain relèvedirectement de
la responsabilité del'organisation des Nations Unies )).
Au cours du débat qui s'est dérouléau Conseil de sécuritésur le
rapport déposépar ie sous-comitéad hocqui avait étécréé conformément

à la résolution 276 (1970) du Conseil, le représentant du Népal a dit, au
sujet du projet de résolution tendant à ce que le Conseil de sécurité
demande à la Cour de rendre un avis consultatif sur la question dont la
Cour a en définitiveété saisie:

11En votant pour le projet de résolution, nous estimons que la
Cour internationale devra limiter strictement la portée de son avis
consultatifà la question qui lui est posée, sans se pencher sur la
légalité ou la validité dersésolutions adoptéestant par l'Assemblée
généraleque par le Conseil de sécurité.»

Le représentant dela Syrie, de son côté, s'estexpriméen cestermes:
ILa Cour internationale de Justice, nous le voyons dans le projet
de résolution, n'est pas invitée se prononcer sur le statut mêmede

la Namibie; elle est priéeplutôt de préciser l'étenduedes moyens
dont les Etats disposent en droit pour édifier unmur d'opposition
juridique à l'occupation de la Namibie par le Gouvernement de
l'Afrique du Sud.»

En exposant l'attitude de la délégation zambiennesur le projet de résolu-
tion, le représentant dela Zambie a déclarénotamment:
CNous avons tenu compte des considérations suivantes: c) que l'énoncé juridique de la question est suffisamment explicite

pour obtenir de la Cour une opinion claire qui serait politique-
ment acceptable;
d) que nous appréhendons que la Cour, dans son avis, n'émettedes
doutes au sujet des résolutions 2145 (XXI) et 2248 (S-V) de
l'Assembléegénérale .)

Une proposition tendant à supprimer dans le projet de résolution les
mots ((nonobstant la résolution 276 (1970)du Conseil de sécurité ))n'a
pas abouti, et la résolution tendant à demander à la Courun avis consul-
tatif a étéadoptéeen définitive.

Expliquant le vote de la délégation françaisesur les différentesrésolu-
tions, le représentantde la France a dit notamment:
((nous avons accueilli avec le plus grand intérêtl'initiative de la

Finlande tendant à solliciter surla question un avis consultatif dela
Cour internationale de Justice. Certes, on peut regretter la formula-
tion, imparfaite à notre sens, de la demande adressée à la Cour. En
effet,il conviendrait selonnous, sansparaître préjugerl'avisde celle-
ci, de laisser auxjuges deLa Haye la facultéde s'interroger effective-
ment sur lesfondements juridiques de la révocationdu Mandat. ))

Et le représentant du Royaume-Uni a dit, au su-jetde l'attitude de sa
délégation :

((Au sous-comité ad hoc, le représentant du Royaume-Uni a
expliquéque mon gouvernement étaitdisposé à envisager de deman-
der un avis consultatif à la Cour internationale de Justice. Il a,
cependant, ajouté que notre appui dépendaitde laprésentation à la
Cour internationale de Justice de la question du statut du Sud-Ouest

africain dans son ensemble. La demande, telle qu'elle est rédigée ici,
ne semble pas aller dans ce sens. ))

Dans certains des exposésécrits présentés à la Cour, et pendant la
procédureorale, des arguments ont été avancéq sui tendraient à dénier à
la Cour le droit d'examiner la validité de résolutions de l'Assemblée
généraleet du Conseil de sécuritéqui ont une incidence sur la question
posée et dont l'examen serait utile pour élucider convenablement le
problème.
Dans son exposéécrit,le Secrétairegénéral a ditnotamment:

((12. On a montréque,lorsqu'il a formulélaquestion dont la Cour
est maintenant saisie, le Conseil de sécurité a employé les termes
«la présencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie, nonobstant

la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité))pour dénoter la
présencede l'Afrique du Sud après qu'il a été mis fin au mandat et
que l'Afrique du Sud a cesséd'avoir le droit d'êtreprésente en
tant que Puissance mandataire. )) NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN )P. IND.ONYEAMA) 143
Il serait fastidieux de reproduire ici toutes les thèses, écriteset orales,
exposéesdevant la Cour et tendant à ce que la Cour se borne à accepter,

sans aucun examen critique, la validitéjuridique des résolutions et déci-
sions de l'Assembléegénéraleet du Conseil de sécurité qui intéressent
directement la question sur laquelle l'avis est demandé; il suffira de
rappeler qu'un certain nombre de représentants se sont exprimésdans ce
sens. La Cour avait donc à décidersi elle étaitou non compétentepour
étudier les résolutions et les décision: de l'Assemblée générale et du
Conseil de sécuritéqui sont pertinentes par rapport à la question posée,
de manière à établirsi ces textes sont conformes àla Charte des Nations
Unies et, par suite, s'ilssont valides.

Sur cepoint, la Courdit ceci:

(89. 11est évidentque la Cour n'a pas de pouvoirs de contrôle
judiciaire ni d'appel en ce qui concerne les décisions prisespar les
organes des Nations Unies dont il s'agit. Ce n'est pas sur la validité
de la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénéraleou des résolu-
tions connexes du Conseil de sécuriténi sur leur conformitéavec la
Charte que porte la demande d'avis consultatif. Cependant, dans

l'exercice de sa fonction judiciaire et puisque des objections ont
été formuléesl,a Cour examinera ces objections dans son exposé
des motifs, avant de se prononcer sur les conséquences juridiques
découlantde ces résolutions. 1)

A mon avis, si l'on aborde ainsi la question de la compétencede la Cour
pour étudier les décisionset résolutions de l'Assembléegénéraleet du
Conseil de sécuritéqui traitent de problèmes dont elles est saisie, et pour

se prononcer à leur sujet, on ne peut pas y répondre d'une manière
suffisamment nette.
La Cour a étécrééecomme organe judiciaire principal des Nations
Unies et, à ce titre, elle statue sur les différendsentre Etats dont elle peut
valablement connaître. Elle est autoriséepar la Charte et par le Statut à
donner des avis consultatifs sur des questions juridiques à l'Assemblée
générale,au Conseil de sécurité, àd'autres organes des Nations Unies et à
des institutions spécialisées.

Dans l'exercicede ses fonctions, la Cour est pleinement indépendante
des autres organes des Nations Unies; ellen'est nullementtenue d'émettre
un arrêtou un avis qui soit ccpolitiquement acceptable »; ce n'est pas là
son rôle. Sa mission, pour reprendre les termes de l'article 38 du Statut,
est de se prononcer ((conformément au droit international 1).
Les pouvoirs de la Cour sont clairement définispar son Statut, et il
n'entre pas dans ces pouvoirs d'exercer un contrôle sur les décisions
d'autres organes des Nations Unies; mais lorsque, comme c'est lecas en

l'espèce, les décisionsde ces organes intéressent une affaire dont la Cour
est dûment saisie, et lorsqu'il est impossible de rendre un arrêtou un avisbien fondé sans examiner la validitéde ces décisions,la Cour ne peut
évitercet examen sans abdiquer son rôle d'organe judiciaire.
Dansla question posée à la Cour, ilne lui estpas explicitement demandé
de dire sià son avis, la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénérale
est ou non valide, mais les ((conséquencesjuridiques» qu'il estdemandé
àla Courde définirprésupposent cettevalidité.Sila Cour devait accepter
ce postulat sans autre examen, eIIe courrait le risquelde rendre un avis
fondé surdes prémisseserronées.ka question posée elle-même n'exclut

pas explicitement la possibilité de se pencher sur la validité de cette
résolutionet d'autres résolutions connexes; et,puisqu'il est déjà arrivà
la Cour de modifier et d'interpréterles questions quilui étaientsoumises,
on ne saurait supposer que le Conseil de sécuritéentendait entraver la
Cour dans son examen de la question sur laquelle il demandait lui-même
un avis consultatif; il faudrait une stipulation des plusfor~nellespour
établir que l'intention était effectivement de limiter ainsi la portée de
l'examende la Cour.
Je ne vois pas qu'il soit compatible avec la fonction judiciaire de la
Cour d'énoncer les conséquences d'actedsont la validitéserait tenue pour
acquise, sans que la Cour se soit assuréeelle-mêmede leur origine licite.

Pour moi donc, et qu'il y ait eu ou non des objections, la Cour avait le
devoir d'examiner la résolution2145 (XXI)de l'Assembléegénérale pour
en apprécierla valeur juridique; elle avait en outre celui d'examiner aux
mêmes fins toutes les résolutions pertinentesdu Conseil de sécurité.

Je ne trouve rien dans l'énoncéde la présente requête queixclue l'exa-
men de la validitéde toutes les résolutions pertinentes. Les mots ((no-
nobstant la résolution276 (1978)du Conseil de sécurité » supposent, me
semble-t-il, que pour le Conseil de sécuritéla résolution 276 (1970) a
valablement crééune situation telle que la présencecontinue de l'Afrique
du Sud en Namibie créepour les Etats des conséquencesjuridiques; nais,
à mon avis,cetteformule ne contraint pas la Cour à faire lemêmepostulat

ni àl'accepter sans autre examen.
S'estimepour ma part concluant le Principe énoncé à ce sujet par la
Cour dans l'affairerelativeà Certainesdépenses desNations Unies(C.I.J.
Recueil 1962,p. 157) :

«la Cour doit avoir la pleine libertéd'examiner touslesélémentsdont
elle disposepour sefaire une opiilionsur unequestion qui luiestposée
en vued'un avis consultatif))les italiques sont de nous).

Lorsque la question posée à Ia Cour est formuléede telle sorte que la
Cour ne pourrait pas s'acquitter convenablement de safonction judiciaire,

qui est d'étudieràfondtous leséléments pertinents, ou lorsque, pour tou-
te autre raison, la Cour ne jouit pas de la libertétotale laquelle elle a
droit pour étudierla question qui lui est posée,son pouvoir discrétion-
naire de rendre ou de ne pas rendre un avisla protègedu risque d'émettre NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. IND. ONYEAMA)
145
un aviséventuellementfondésur des hypothèseserronéesou deséléments
incomplets.
Je conclusqu'enla présenteinstance,laCour avait ledevoir d'examiner

toutes les résolutionsde l'Assemblée généraleet du Conseil de sécurité
intéressantla question qui lui est posée,que ces résolutions aientou non
suscité des objections,pour seprononcer sur leur validité etsur leur effet,
afin de pouvoir émettre finalement un avis satisfaisant.

Dans les avis consultatifs qu'elle a rendus en 1950, 1955et 1956 à
propos du Sud-Ouest africain et dans son arrêtdu 21 décembre 1962

concernant la première phase des affaires opposant 1'Ethiopie et le
Libéria à l'Afrique du Sud, la Cour a établi quele mandat pour le Sud-
Ouest africainavait survécu àla Société deNs ations et que la surveillance
de l'administration du mandat étaitdévolueaux Nations Unies. La Cour
a également concluau maintien de l'obligation qui incombait à l'Afrique
du Sud de communiquer à l'Assemblée générale de rspports relatifsà
son administration du territoire sousmandat.
La question de savoir si la Société deNations pouvait unilatéralement
mettre fin au mandat ou le révoquercontre la volonté dela puissance

mandataire n'a pas soulevéde problèmepratique du temps de la Société
des Nations, mais les membres de la Commission permanente des man-
dats et certains desjuristes internationaux qui ont étudié la question sur
le plan théorique n'ont pasmis en doute que si un mandataire se rendait
coupable de violations graves et répétées des dispositiondsu mandat, la
Société des Nations pourrait révoquercelui-ci.
On a dit que le pouvoir de révocationtenait à l'essencemêmede la
fonction de surveillance, et que le droit qu'avait la Société desNations
de désignerun nouveau mandataire au cas où l'un des mandataiies

existants cesserait d'exercer sesfonctions, ou d'écarterun mandataire,
étaitimplicite dans l'affirmation,contenue dans le Pacte, que les manda-
taires agiraient(au nom de la Société ))(Voir Quincy Wright, Mandates
Underthe League ofNatio~zs,1930,p. 440-441.)
A sasessionde 1931,tenue àCambridge, l'Institut dedroit international
a étudiéla question des mandats et a adoptéune résolutioncontenant
notamment les clauses suivantes:

((Lesfonctions de 1'Etat mandataire prennent fin par démission
ou révocationdu mandataire, par les modes habituels d'expiration

des engagements internationaux et aussi par abrogation du mandat
et reconnaissance de la collectivité sousmandat comme indépen-
dante.
La démission n'ad'effetqu'à partir de la date fixéepar le Conseil
de la SdN pour évitertoute interruption dans l'assistance donnée
'aux collectivitéssous mandat.

133 La révocation de 1'Etat mandataire et l'abrogation du mandat
sont décidées par le Conseil de la SdN ...))

Etant donnéle fort courant d'opinion qui existait alorsparmi lesjuristes
internationaux, et en me plaçant sur le terrain du sens commun, je pense
qu'il nefaitpas de doute que la Société des Nations, agissant par l'inter-
médiairedu Conseil, possédait - ce qui était indispensable pour l7exer-
cicede sesfonctions de surveillance - le pouvoir de révoquerou d'abro-
ger unilatéralement un mandat administré en son nom, lorsque 1'Etat
auquel le mandat avait étéconfiése rendait coupable d'une violation

grave de ses obligations aux termes du mandat.
L'opinion contraire supposerait qu'un mandat, et surtout un mandat
de la catégorie C comme celui dont il s'agit en l'espèce, nepouvait
jamais êtrerévoquéet que, malgré lasollicitude qu'ils affichaientpour le
principe de non-annexion, le bien-êtredes populations du territoire sous
mandat et la mission sacréede civilisation, les Principales Puissances
alliéeset associéeset lesautres Membres de la Sociétédes Nations avaient
en réalité,sous le couvert de belles promesses, permis l'annexion perpé-
tuelle des territoires sous mandat et l'assujettissement de leurs peuples
à la domination arbitraire de la puissance mandataire, sans espoir de

délivrance ou d'autodétermination future. S'il en avait étéainsi, la
((missionsacréede civilisation »n'aurait eu aucun sens. L'évolution suivie
en fait par le régimedes mandats à l'époque dela SdN et après 1946
s'inscrit en faux contre cette opinion, qui doit donc êtrerejetée.

Dans son avis consultatif sur le Statut international du Sud-Ouest
africain,et pour les motifs qui ysont indiqués,la Cour est parvenue à la
conclusion

((quel'Assemblée générald ees Nations Unies est fondéeen droit à
exercer les fonctions de surveillance qu'exerçait précédemmentla
Société des Nations en ce qui concerne l'administration du territoire
et que l'Union sud-africaine a l'obligation de se prêter à la surveil-
lance de l'Assemblée générale et de lui soumettre des rapports
annuels ))(C.I.J. Recueil 1950, p. 137).

La dévolution des pouvoirs de surveillance du Conseil de la Société
des Nations à l'Assembléegénéraledes Nations Unies a investi celle-ci

des droits, devoirs et obligations associés à ces pouvoirs, y compris le
droit d'abroger ou de révoquer unilatéralementle mandat pour cause de
violation grave commise par la puissance mandataire.
Il s'agitlà d'un pouvoir que l'Assemblée générale possèd en raison du
contrôle qu'elle exerce sur les mandats et il constitue, à mon avis, un
pouvoir sui generis, qui n'est pas limitépar l'article 10de la Charte.
Il s'ensuit que lorsque l'Assembléea adoptéla résolution 2145 (XXI)
l'organe compétent des Nations Unies a impérativement mis fin au
mandat et qu'à partir de ce moment l'Afrique du Sud n'avait plus ledroit d'administrer le territoire du Sud-Ouest africain. La décisionde
l'Assembléegénérale aété portée à l'attention du Conseil de sécurité
mais, selon moi, elle constituait déjà en soi une décision effectiveet
obligatoire.
Il me semble que les conséquencesjuridiques pour les Etats découlent
du fait que l'Afrique du Sud s'est refuséeà appliquer la résolution 2145
(XXI) età évacuerle territoire, ainsi que de sa présencecontinue dans le
territoire contre ia volonté des Nations Unies, et non de la résolution
276 (1970)qui n'a pas étél'instrument par lequel il a étémis fin à l'ad-
ministration sud-africaine du territoire sous mandat. Les dispositions
de la résolution 276 (1970)propres à créer des obligations légalessont

les paragraphes 2 et 5 du dispositif, qui sont libelléscomme suit:

((Le Conseil de sécurité,
......................
2. Déclareque la présencecontinue des autorités sud-africaines
en Namibie est illégaleet qu'en conséquencetoutes les mesures

prises par le Gouvernement sud-africain au nom de la Namibie
ou en ce qui la concerne après la cessation du Mandat sont illégales
et invalides
......................
5. Demande à tous les Etats, en particulier ceux qui ont des in-
térêts économiquee st autres en Namibie, de s'abstenir de toutes

relations avec le Gouvernement sud-africain qui sont incompatibles
avec le paragraphe 2 du dispositif de la présente résolution))

En soi, l'affirmation de l'illégalitéde la présencecontinue de l'Afrique
du Sud en Namibie ne rendait pas cette présence illégale;elle cons-
tituait, selon moi, une déclaration par laquelle le Conseil de sécurité
appréciait, sur le plan juridique, le caractère de la situation néedu fait
que l'Afrique du Sud n'avait pas obtempéré à la résolution de 1'Assem-
bléegénérale;cette déclaration n'engageait pas un Membre des Nations
Unies ayant une opinion différente.II s'agissaiten effetd'une constatation
juridique, et il est douteux que la Charte confère au Conseil de sécurité
le pouvoir de procéder à une telle constatation, sauf dans quelques cas

bien définisqui sont sans intérêtici. Comme le paragraphe 2, à mon
avis, ne créeaucune obligation juridique qui lierait les Etats, il s'ensuit
que le paragraphe 5 est égalementinsuffisant pour fonder des obligations
ou emporter desconséquencesjuridiques.
Cela n'épuisecependant pas la question, car la résolution 276 (1970)
((réaffirmai» la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénéraleen date
du 27 octobre 1966 ((par laquelle les Nations Unies ont décidéque le
Mandat sur le Sud-Ouest africain était terminéet ont assuméla respon-
sabilité directedu territoire jusqu'à son indépendance »; elle réaffirmait
en outre NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.IND.ONYEAMA) 148

«la résolution 264 (1969) du Conseil de sécurité,dans laquelle ce
dernier a reconnu qu'il avait étémis fin au Mandat et a demandé
au Gouvernement sud-africain de retirer immédiatement son ad-

ministration du territoir)1(voir les deuxième et troisième alinéas
du préambule delarésolution276(1970)).
Cette résolution reprenait ainsi la résolution2145 (XXI) de l'Assemblée
générale.
Il faut donc comprendre que la question portéedevant la Cour a pour

objet d'obtenir un avis consultatif sur les conséquencesjuridiques pour
les Etats de la présencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie après
que les Nations Unies eurent dûment mis fin au mandat sur le Sud-Ouest
africain. Selon moi, l'expression (nonobstant la résolution 276 (1970)
du Conseilde sécurité )n'affectepas laportéedela question.
En l'espèce, lesconséquencesjuridiques pour les Etats sont celles qui
découlentautomatiquement, en droit international, du fait du maintien
illicitede laprésencedel'Afriquedu Sud en Namibie, et ne s'étendent pas,
à mon sens, aux mesures d'exécutionqui pourront ou non êtreprises par

les Etats agissant individuellement, ou collectivement par les Nations
Unies, en vue de faire partir l'Afrique du Sud du territoire ou d'affirmer
l'autorité des NationsUnies sur celui-cià défaut dedispositions conven-
tionnelles ou d'une règle de droit international coutumier appelant
l'adoption de telles mesures. Ces conséquencessont les suivantes:

1. L'Afrique du Sud a l'obligation juridique de cesser son occupation
illiciteen mettant fin sa présenceet en retirant son administration de la
Namibie, mais tant qu'elle reste dans le territoire elle est tenue d'agir
conformément aux obligations qui lui incombent aux termes du mandat
et de la Charte.
2. Une obligation de non-reconnaissance s'impose à tous les autres
Etats; ce qui veut dire que tous les Etats sont tenus de ne reconnaître
l'Afrique du Sud aucun titre juridique l'autorisant à demeurer en

Namibie ou àmaintenir son appareil administratif dans ce territoire. Ils
sont tenus de ne rien faire qui puisse faciliter le maintien de la présence
illicite de l'Afrique du Sud ou de son administration dans le territoire
dela Namibie.
3. Si le Conseil de sécurité déciddee prendre des mesures concernant
la Namibie au titre des responsabilitésqui lui incombent en matière de
maintien de la paix et de la sécuritéinternationales, tous les Etats
Membres des Nations Unies devront accepter et appliquer toutes déci-
sions adoptées conformément à la Charte; mais encore que la décision

du Conseil de sécurité deprendre de telles mesures puisse êtreune con-
séquence de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie,
l'obligation d'accepter et d'appliquer cette décision est une obligation
qui s'impose aux Etats comme Membres des Nations Unies; ce n'est
pas pour eux une .conséquencejuridique directe de la présencecontinue
de l'Afrique du Sud en Namibie. C'estpourquoi j'estime que la Cour ne

136 NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () PIND. ONYEAMA) 149

saurait dresser la liste des conséquencesjuridiques pour les Etats et
qu'ilfaut laisser au Conseil de sécurile soin de décider quelles mesures
d'exécutionilcompteprendre en application dela Charte.

Je regrette de ne pas partager les vues de la Cour au sujet dela portée
de la doctrine de non-reconnaissance dont, sije ne me trompe, lessous-
paragraphes 2 et 3 du paragraphe 133de l'avisétaientcensés s'inspirer.
Je n'ai malheureusement pas pu voter en faveur de ces deux sous-para-
graphes. Selon moi, les effets de la doctrine de non-reconnaissance en
l'espècesont correctement exposésau paragraphe 119 de l'avis, mais
les sous-paragraphes 2 et 3 du paragraphe 133semblent attribuer à cette
doctrine une portée trop large. Je conviens, certes, que les Etats ont
l'obligation de ne pas reconnaître la légalitéde la présencede l'Afrique
du Sud en Namibie et de son administration de la Namibie; mais je ne

considèrepas que cette obligation entraine forcémentcelle de refuser de
reconnaître la validité des mesures prisespar l'Afrique du Sud au nom
de la Namibie ou en ce qui la concerne, étant donné quel'administration
sud-africaine en Namibie, bien qu'illégale,demeure le gouvernement de
facto du territoire.
Les Etats qui ne sont pas membres des Nations Unies n'ont aucune
obligation de prêter assistance à l'organisation sauf dans la mesure
prévue àl'article 2, paragraphe 6, de la Charte, et en vertu de cet article
c'est à l'organisation qu'il appartient de faire en sorte que les Etats
agissent conformément auxprincipes énoncésau chapitre premier de la
Charte.

(SignéC )harles D. ONYEAMA.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE ONYEAMA

1agree with the conclusion of the Court that the presence of South
Africa in Namibia is illegal, but feel constrained to express my inability
to concur in the Court's approach on certain aspects of the problem with
which ttie Court has had to deal in its consideration of the legal question
on which its advisory opinion is requested by the Security Council.
These aspects are, the matter of the exclusion of a Member of the Court
from participating in these proceedings, the choice of a judge ad hoc,
the Court's competence to consider the forma1 and intrinsic validity
of resolutions and decisions of the General Assembly and the Security
Council, and the effect of Security Council resolution 276 (1970).

On the objection raised by South Africa to the participation of certain
Members of the Court in the present proceedings, 1 do not agree that
it is a sufficient answer to the objection raised and which was rejected
in Order No. 3 of 26 January 1971,that the Member of the Court whose
participation as a judge in the case was challenged, was a representative
of his Government in his activities in the United Nations on which the
challenge was grounded.
In my view, the words "or in any other capacity" in Article 17 (2)
of the Statute are wide enough to include within their sweep activities
in the United Nations by members of national delegations who sub-
sequently become Members of the Court.
Each case must be considered on its own circumstances and no general
rule can be laid down. In the present case, the Member concerned had,
as a member of a national delegation to the United Nations, taken an
active part in drafting a resolution which touched upon resolution 2145
(XXI) of the General Assembly, a resolution which, to my mind, is

critical in the present proceedings.
The importance of the resolution with which the Member was con-
cerned, that is, Security Council resolution 246 (1968), and its relevance
to the present proceedings, appear from the fact that it formed part of
the documents transmitted to the Court as likely to throw light on the
question put to the Court, and the Court itself thought it necessary to
refer to it as part of the Security Council's response to the cal1 of the
General Assembly for its CO-operation in ensuring the withdrawal of
South Africa from the Territory. OPINION INDIVIDUELLE DE M. ONYEAMA

[Traduction]

Je souscrisà la conclusion de la Cour lorsqu'elledéclarequela présence
de l'Afrique du Sud en Namibie est illégale,mais il m'estimpossible de la

suivre dans safaçoh d'aborder certains des aspects qu'elle a dû examiner
pour répondre à la questionjuridique sur laquelle le Conseildesécuritélui
demandait un avis consultatif. Ces aspects concernent la question de
savoir si la participation d'un membre de la Cour à la présenteaffaire
devait êtreexclue, le choix d'un jugead hoc, la compétence dela Cour
pour examiner la validitéformelleetintrinsèque derésolutionset décisions
de l'Assembléegénérale etdu Conseil de sécurité,t l'effetde la résolution
276 (1970)du Conseil de sécurité.

En réponse à l'objection soulevéepar l'Afrique du Sud au sujet de la
participationà la présenteaffaire de certains membres de la Cour, il ne me
paraît pas suffisant de dire, dans le cas d'un des juges mis en cause, sur
lequelporte l'ordonnance derejetno3du 26janvier 1971,que c'est comme
représentant de son gouvernement que ce juge s'est livré,aux Nations
Unies, aux activités quiont motivél'objection.
A mon avis, les mots ((ouà tout autretitre11qui figurenà l'article 17,
paragraphe 2, du Statut, sont d'une portée suffisamment large pour
englober les activités, aux Nations Unies, de membres de délégations
nationales qui deviennent ultérieurement membres de la Cour.

Chaque cas d'espècedoit êtreexaminécompte tenu des circonstances
qui lui sont propres; il est impossible d'énoncer unerèglegénérale.En
l'occurrence, le juge viséa, comme membre d'une délégationnationale
auprès des Nations Unies, pris une part active à la rédaction d'une
résolution qui se rapportaità la résolution 2145 (XXI) de l'Assemblée
généraleetqui, selon moi,joue un rôle critique dans laprésenteprocédure.

L'importance de la résolutiondont il s'agit(la résolution246 (1968)du
C~nseil de sécurité)et sa pertinence en l'espècesont attestéespar le fait
qu'elle estau nombre des documentspouvant servir àéluciderla question
qui ont ététransmis à la Cour, et que la Cour elle-mêmea cru devoir en

faire mention comme constituant l'un des élémentsde la réponse du
Conseil de sécuritéà l'appel de l'Assembléegénérale,qui avait demandé
son concours pour obtenir que l'Afrique du Sud se retire du territoire.139 NAMIBTA(S.W. AFRICA) (SEP. OP. ONYEAMA)

1 thought the circumstances were such that the Member concerned
should not have participated in the decision of the present case, and
therefore dissented from Order No. 3.

It will be recalled that at the outset of these proceedings, the Republic
of South Africa applied to be allowed to choose a judge ad hoc under
Article 83 of the Rules of Court. This Article provides that:

"If the advisory opinion is requested upon a legal question
actually pending between two or more States, Article 31 of the
Statute shall apply, as also the provisions of these Rules concerning

the application of that Article."

1agree with the majority of the Court, and for the reasons given by it,
that the present Opinion is not requested upon a legal question actually
pending between South Africa and any other State or States, but in view
of the wide discretion vested in the Court by Article 68 of the Statute of
the Court, the inapplicability of Article 83 of the Rules would not, in
my view, conclude the matter. 1am of the opinion that Article 83 of the
Rules sets out one situation in which Article 31 of the Statute shall
apply, but it does not exhaust the cases in which a judge ad hoc may be
chosen in advisory proceedings, nor does it limit the Court's discretion
under Article 68 of the Statute to be guided by the provisions of Article
31 of the Statute "to the extent to which [the Court] recognizes them to

be applicable".

The objection to the exercise of the Court's discretion in favour of
the choice of a judge ad hoc on the grounds that Article 31 of the Statute
refers to "parties", and there are, strictly, no "parties" in advisory
proceedings, does not seem to me to be a valid one, in view of the pro-
visions of Article 83 of the Rules of Court which expressly applies
Article 31 of the Statute to advisory opinions, and thus recognizes that
though there are no parties in advisory proceedings, judges ad hoc
.maybe chosen in those proceedings in the circumstances therein defined.
The Court's discretion would be without substance if it could not be
exercised in favour of permitting the choice of a judge ad hoc in cir-
cumstances falling outside Article 83 of the Rules, but in which the
Court felt that the justice of the case required it to be so exercised.

This is the first occasion,ince the creation of this Court, that a claim
to a right to appoint a judge ad hoc in advisory proceedings has been
made. The present request for an advisory opinion starts off by implying
that South Africa's continued presence in Namibia notwithstanding
Security Council resolution 276 (1970) gives rise to certain legal con- 11m'a sembléque lescirconstances étaient telles que lejuge visén'aurait
pas dû participer à l'élaboration del'avis, et je n'ai donc pas souscrit à
l'ordonnance no3.

On sait qu'au débutde la présente instance,la République sud-africaine
a demandé à êtreautorisée à désignerun juge ad hoc en application de
l'article 83du Règlementde la Cour, aux termes duquel :

IISil'avisconsultatif est demandéau sujet d'une questionjuridique

actuellement pendante entre deux ou plusieurs Etats, l'article 31 du
Statut est applicable, ainsi que lesdispositions du présentRèglement
qui pourvoient à l'application de cet article))

J'estime avec la majorité de la Cour et pour les motifs qu'elle expose
qu'il n'est pas demandé à la Cour de donner un avis sur une question
juridique actuellement pendante entre l'Afrique du Sud et un autre ou
d'autres Etats mais, étant donnéle pouvoir discrétionnaire très étendu
que l'article 68de son Statut confèreà la Cour, l'inapplicabilitéde I'article

83du Règlement, à mon sens, ne règle pasla question. Selon moi, l'article
83 du Règlement envisage une situation dans laquelle l'article 31 du
Statut doit s'appliquer, mais cela n'épuise pas les possibilités de
désigner un juge ad hoc en matière consultative, pas plus que cela ne
limite ou n'épuise le pouvoir discrétionnaire que confère à la Cour
I'article 68 de son Statut et qui lui permet de s'inspirer desdispositions
de l'article 31 du Statut (dans la mesure où elle les reconnaîtra appli-
cables )I.

On a dit que la Cour ne saurait exercer cepouvoir discrétionnairepour
autoriser la désignationd'un juge ad hoc parce que l'article 31du Statut
visedes (parties)]et qu'il n'ya pasà proprement parler de ((parties »dans
une procédure consultative, mais cela ne me paraît pas une objection
valable, vu que I'article 83du Règlement de la Cour rend expressément
I'article31du Statut applicable aux avisconsultatifs et reconnaît doncpar
là que, mêmes'il n'y a pas de parties dans une procédure consultative,
desjuges adhocpeuvent êtredésignés aux fins de ces procéduresdans les
conditions définiespar I'article. Le pouvoir discrétionnaire de la Cour

n'aurait aucune réalités'il ne pouvait êtreexercépour autoriser la dési-
gnation d'un juge ad hoc dans des circonstances qui n'entrent pas dans
le cadre de I'article 83du Règlement mais dans lesquelles la Cour estime
devoir exercer ce pouvoir dans l'intérêd te lajustice.
C'est lapremière fois depuis que la Cour actuelle existe qu'on reven-
dique le droitde désignerun juge ad hocdans une procédureconsultative.
La présente requêtepour avis consultatif commence par donner à
entendre que la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie,

nonobstant la résolution276 (1970)du Conseil de sécurité, créc eertainessequences for States, since that presence is assumed to be contrary to
international law. The records of the debate in the Ad Hoc Committee of
the Security Council as well as in the Security Council itself leading up to
the request, and some of the submissions addressed to the Court in the
written statements and during the oral proceedings, leave no doubt that
South Africa was being accused of violating some, at least, of its inter-
national obligations; and at the root of the request was the desire to
enforce the consequences of the termination of South Africa's mandate

over South West Africa, and rernove its administration from the Terri-
torv.
These facts clearly show that special interests of vital concern to
South Africa were directly affected by the request for an advisory opinion
and this is, in my view, a circumstance which the Court should have
taken into account in deciding whether, in the exercise of its discretion
under Article 68of the Statute, South Africa should have been permitted
to choose a judge ad hoc.
1 am of the opinion that the circumstance of South Africa's special
interest in the present request should have prevailed with the Court, and,
so that justice may not only be done but manifestly be seen to be done,
the discretion of the Court should have been exercised in favour of the
application by South Africa to choose a judge ad hoc.
1 have not overlooked the fact that in the Advisory Opinion on an

abstract legal question on the International Status of South West Africa
in 1950, South Africa did not press her tentative enquiries about her
right to choose a judge ad hoc to the point of a forma1 claim, nor that
in that Advisory Opinion South Africa did not choose a judge ad hoc.
The circumstances of those proceedings and the present, and the legal
questions on which the advice of the Court was requested in the two
proceedings, are entirely differeiit, and it does not appear to me that
any conclusions adverse to the application in the present case can rightly
be drawn from the failure of South Africa to press its claim to a judge
ad hoc in 1950, or the fact that no judge ad hoc was, in fact, chosen.
Nothing that happened in this respect in 1950can be a bar to an applica-
tion to choose a judge ad hoc in later advisory proceedings, and such an

application must be considered in the light of the nature of the legal
questions put to the Court and the circumstances existing when the
application is made.

The practice of the Permanent Court of International Justice in the
matter of a choice of a judge ad hoc in advisory opinions as appears in
the Danzig Legislative Decree Order of 31 October 1935 does n~t seem
to me to furnish a guide in the present casein viewof the wholly different
nature of the question posed in that case, and the differencesbetween the
governing Statutes and Rules of the two Courts. The Permanent Court

P.C.I.J.,SeriesAIB, No. 65,Annex 1, pp. 69-71.

128conséquencesjuridiques pour lesEtats,parce qu'elleserait, par hypothèse,
contraire au droit international. Les comptes rendus des débats qui se
sont déroulés au comité ad hoc du Conseil de sécuritécomme au Conseil
de sécuritélui-mêmepour aboutir au dépôtde cette requête,et certaines
des thèsesdéfenduesdevant la Cour, soit dans les exposésécrits, soitau
cours de la procédure orale, font apparaître sans doute possible que

l'Afrique du Sud étaitaccuséede violer certaines au moins de ses obliga-
tions internationales; et la requête procèdedu désirmanifeste de tirer
toutes les conséquencesde la cessation du mandat de l'Afrique du Sud
pour le Sud-Ouest africain et d'éliminer sonadministration du territoire.
Cesfaits montrent clairement quela demande d'avisconsultatifmettait
directement en jeu des intérêtsspéciaux d'importance capitale pour
l'Afrique dil Sud et c'estlà, selon moi, un élémentque la Cour aurait dû
prendre en considération pour décider, dans l'exercice du pouvoir
discrétionnairequ'elletient de l'article8 de son Statut, s'ilfallait ou non
autoriser l'Afrique du Sud à désigner un jugeadhoc.
A mon avis, donc, l'intérêt particulier de l'Afriqudu Sud en l'espèce
aurait dû paraître déterminant à la Cour et, non seulement pour que
justice soitfaitemais pour qu'ellelesoit manifestement, la Couraurait dû,

dans l'exercicede son pouvoir discrétionnaire, faire droità la demande
de désignationd'un juge ad hoc présentéepar l'Afrique du Sud.
Je n'oublie pas qu'aux fins de la procédure consultative de 1950,qui
portait sur une question juridique abstraite concernant le Statut inter-
national du Sud-Ouest africain, l'Afrique du Sud, qui s'était enquise, à
titre préliminaire, de sondroit de désigner un jugead hoc, n'a pas poussé
cette démarche plus loinet n'a pas présentéde demande officielledans ce
sens, etje n'oubliepas non plus qu'auxfinsde l'avisdont il s'agitl'Afrique
du Sud n'a pas désigné dejuge ad hoc. Mais les circonstances et les ques-
tions juridiques sur lesquelles l'avisétait demandédifféraiententièrement
de ce qu'ellessont àprésentet il ne me paraît pas légitimede tirer du fait
que l'Afrique du Sud n'a pas insistépour que soit désigné un juge ad hoc
en 1950et qu'aucun juge ad hoc n'a éti,alors, effectivement désigné, des

conclusions défavorables à la demande de l'Afrique du Sud en la présente
instance. Rien de ce qui s'estpasséàcet égarden 1950ne saurait interdire
de demander la désignationd'un juge ad hocdans une procédureconsul-
tative ultérieure, et pareille demande doit être examinéecompte tenu de
la nature des questions juridiques posées à la Cour et des circonstances
existant au moment où la demande est faite.
Lapratique de la Courpermanente deJustice internationaleconcernant
la désignation de juges ad hoc en matière consultative, que traduit
l'ordonnance rendue le 31 octobre 1935 ' en l'affaire de la Compatibilité
de certains décrets-loidantzikois avec la constitution deia Ville libre, ne
me paraît pas pouvoir guider la Cour en la présenteespèce,étantdonné
le caractère entièrementdifférentde la question poséeet le fait que les

C.P.J.Z. série AIno65, annexe 1, p. 69-71.had, in 1935,nothing in its Statute in force equivalent to Article 68 of the
Statute of the Court which, to my mind, is the controlling provision
having a bearing on the point of the Court's discretion in the matter
under consideration.

In view of the binding decision of the Court, by a majority vote, to
refuse the application for a judge ad hoc in the present proceedings, it
becomes inutile to consider the question of the composition of the Court
in this connection.

Underlying the resolutions of the Security Council pertaining to
Namibia and concerning the legal question upon which the Court's
advisory opinion isrequested, is General Assembly resolution 2145(XXI)
of 27 October 1966,by which the General Assembly decided that "the
Mandate conferred upon His Britannic Majesty to be exercised on his
behalf by the Government of the Union of South Africa is .. .terminated,
that South Africa has no other right to administer the Terriiory and that

henceforth South West Africa comes under the direct responsibility of the
United Nations".
In the debate in the Security Council following on the report of the
Ad Hoc Sub-Committee which had been set up by Security Council
resolution 276 (1970), the representative of Nepal, in speaking on the
draft resolution that the Security Council request this Court to give an
advisory opinion on the question which finally came before it, said:

"In voting in favour of the draft resolution, it will be our under-
standing that the International Court limit the scope of its advisory
opinion strictly to the question put to it, and not review or examine
the legalityor validity ofthe resolutions adopted by boththe General
Assembly and the Security Council."
The representative of Syria said:

"The International Court of Justice, as we see fronî the draft
resolution, is not asked to rule on the status of Namibia as such;
rather it is requested to elicit the scope of legal means at the disposal
of States, which may erect a wall of legal opposition to the occupa-
tion of Namibia by the Government of South Africa."

In stating the attitude of the delegation of Zambia to the draft resolution,
the representative of Zambia said, inter alia:

"We have had to take into account the following considerations:Statuts et Règlements des deux Cours ne sont pas identiques. Le Statut
de la Cour permanente en vigueur en 1935ne contenait rien d'équivalent
à l'article 68 du Statut actuel qui, selon moi, constitue la disposition

applicable et celle qui intéressela question du pouvoir discrétionnaire de
la Cour dans le domaine considéré.
Eu égard à la décisionobligatoire par laquelle la Cour, à la majorité
de sesmembres, a refusédefaire droit en la présenteinstance à lademande
de désignation d'un juge ad hoc, il devient inutile d'examiner la question
de la composition de la Cour à ce sujet.

A la base des résolutions que le Conseil de sécuritéa adoptées sur la
Namibie et qui intéressentla question juridique sur laquelle l'avisconsul-
tatif de la Cour est demandé, on trouve la résolution 2145 (XXI) de

1'Assembiée généralee,n date du 27octobre 1966,par laquelle l'Assemblée
généralea décidéque Ile mandat confié à Sa Majestébritannique pour
êtreexercé enson nom par le Gouvernement de l'Union sud-africaine
est ..terminé, que l'Afrique du Sud n'a aucun autre droit d'administrer
le territoire et que désormaisle Sud-Ouest africain relèvedirectement de
la responsabilité del'organisation des Nations Unies )).
Au cours du débat qui s'est dérouléau Conseil de sécuritésur le
rapport déposépar ie sous-comitéad hocqui avait étécréé conformément

à la résolution 276 (1970) du Conseil, le représentant du Népal a dit, au
sujet du projet de résolution tendant à ce que le Conseil de sécurité
demande à la Cour de rendre un avis consultatif sur la question dont la
Cour a en définitiveété saisie:

11En votant pour le projet de résolution, nous estimons que la
Cour internationale devra limiter strictement la portée de son avis
consultatifà la question qui lui est posée, sans se pencher sur la
légalité ou la validité dersésolutions adoptéestant par l'Assemblée
généraleque par le Conseil de sécurité.»

Le représentant dela Syrie, de son côté, s'estexpriméen cestermes:
ILa Cour internationale de Justice, nous le voyons dans le projet
de résolution, n'est pas invitée se prononcer sur le statut mêmede

la Namibie; elle est priéeplutôt de préciser l'étenduedes moyens
dont les Etats disposent en droit pour édifier unmur d'opposition
juridique à l'occupation de la Namibie par le Gouvernement de
l'Afrique du Sud.»

En exposant l'attitude de la délégation zambiennesur le projet de résolu-
tion, le représentant dela Zambie a déclarénotamment:
CNous avons tenu compte des considérations suivantes: (c) That the legal drafting of the question to be put to the Court

is specificenough to elicit a clear opinion from the Court which
would be politically acceptable;
(d) That there is some concern on our part that the Court may
raise in its opinion doubts about General Assembly resolution
2145 (XXI) and about General Assembly resolution 2248
(S-V)."
A move to delete the words "notwithstanding Security Council
resolution 276 (1970)" in the draft resolution failed, and the resolution
to request an advisory opinion from the Court was eventually passed.

In explaining the vote of the French delegation on the different resolu-
tions, the French representative said, inter alia:
". ..we were much interested in the initiative taken by the repre-
sentative of Finland to request an advisory opinion on the question
from the International Court of Justice. Of course, the-in our
view-imperfect language of the request to the International Court
may be a matter of regret. Without prejudging the opinion of the
Court, it might be appropriate to leave it to the Judges at The Hague
to question the legal foundations of the revocation of the Mandate."

The representative of the United Kingdom explained the attitude of his
delegation thus :

"In the ad hoc Sub-Committee the United Kingdom representative
made it clear that my Government was quite willing to consider a
request for an advisory opinion from the International Court of
Justice. He did, however, add that our support for this depended
upon the submission to the International Court of the issue of the
status of South West Africa as a whole. The question before us does
not appear to do this."

In some of the written statements submitted to the Court in the present
proceedings and during the oral hearing, views were expressed which
tended to deny that the Court could properly examine and pronounce
upon the validity of resolutions of the General Assembly and the Security
Council which bear upon the question put to the Court and whose
examination would be relevant to the proper elucidation of the problem.
The Secretary-General in his written statement said:

"12. It has been shown that in formulating the question now
before the Court,the Security Council used the phrase 'the continued
presence of South Africa in Namibia, notwithstanding Security
Council resolution 276 (1970)' in order to denote the presence of
South Africa after the Mandate had terminated and South Africa
had ceased to have any right to be present as mandatory Power." c) que l'énoncé juridique de la question est suffisamment explicite

pour obtenir de la Cour une opinion claire qui serait politique-
ment acceptable;
d) que nous appréhendons que la Cour, dans son avis, n'émettedes
doutes au sujet des résolutions 2145 (XXI) et 2248 (S-V) de
l'Assembléegénérale .)

Une proposition tendant à supprimer dans le projet de résolution les
mots ((nonobstant la résolution 276 (1970)du Conseil de sécurité ))n'a
pas abouti, et la résolution tendant à demander à la Courun avis consul-
tatif a étéadoptéeen définitive.

Expliquant le vote de la délégation françaisesur les différentesrésolu-
tions, le représentantde la France a dit notamment:
((nous avons accueilli avec le plus grand intérêtl'initiative de la

Finlande tendant à solliciter surla question un avis consultatif dela
Cour internationale de Justice. Certes, on peut regretter la formula-
tion, imparfaite à notre sens, de la demande adressée à la Cour. En
effet,il conviendrait selonnous, sansparaître préjugerl'avisde celle-
ci, de laisser auxjuges deLa Haye la facultéde s'interroger effective-
ment sur lesfondements juridiques de la révocationdu Mandat. ))

Et le représentant du Royaume-Uni a dit, au su-jetde l'attitude de sa
délégation :

((Au sous-comité ad hoc, le représentant du Royaume-Uni a
expliquéque mon gouvernement étaitdisposé à envisager de deman-
der un avis consultatif à la Cour internationale de Justice. Il a,
cependant, ajouté que notre appui dépendaitde laprésentation à la
Cour internationale de Justice de la question du statut du Sud-Ouest

africain dans son ensemble. La demande, telle qu'elle est rédigée ici,
ne semble pas aller dans ce sens. ))

Dans certains des exposésécrits présentés à la Cour, et pendant la
procédureorale, des arguments ont été avancéq sui tendraient à dénier à
la Cour le droit d'examiner la validité de résolutions de l'Assemblée
généraleet du Conseil de sécuritéqui ont une incidence sur la question
posée et dont l'examen serait utile pour élucider convenablement le
problème.
Dans son exposéécrit,le Secrétairegénéral a ditnotamment:

((12. On a montréque,lorsqu'il a formulélaquestion dont la Cour
est maintenant saisie, le Conseil de sécurité a employé les termes
«la présencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie, nonobstant

la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité))pour dénoter la
présencede l'Afrique du Sud après qu'il a été mis fin au mandat et
que l'Afrique du Sud a cesséd'avoir le droit d'êtreprésente en
tant que Puissance mandataire. )) It would be tedious to reproduce here al1 the written and oral sub-
missions made to the Court and tending in the direction of confining
the Court to an uncritical acceptance of the correctness in law of resolu-
tions and decisions of the General Assembly and the Security Council
directly relevant to the question upon which the Court's opinion is
requested, and it sufficesto Saythat a number of representatives urged
this view upon the Court. The Court had therefore to decide whether
it was competent or not to examine resolutions and decisions of the
General Assembly and the Security Council relevant to the question
before it, with a view to determining their accordance with the Charter
of the United Nations, and, therefore, their validity.
In dealing with this matter the Court said:

"89. Undoubtedly, the Court does not possess powers of judicial

review or appeal in respect of the decisions taken by the United
Nations organs concerned. The question of the validity or con-
formity with the Charter of General Assembly resolution 2145
(XXI) or of related Security Council resolutions does not form
the subject of the request for advisory opinion. However, in the
exercise of its judicial function and since objections have been
advanced the Court, in the course of its reasoning, will consider
these objections before determining any legal consequences arising
from these resolutions."

1do not think that thisapproach tothe question ofthe Court's competence
to examine and pass upon decisions and resolutions of the General
Assembly and the Security Council which touch upon issues before it
leads to a sufficientlydefinitive answer.

The Court was established as the principal judicial organ of the
United Nations, and, as such, adjudicates upon disputes between States

when such disputes are properly brought within its jurisdiction. It
is authorized by the Charter and the Statute of the Court to render
advisory opinions on legal questions to the General Assembly, the
Security Council and other organs of the United Nations and specialized
agencies.
In exercising its functions the Court is wholly independent of the
other organs of the United Nations and is in no way obliged or concerned
to render ajudgment or opinion whichwould be "politically acceptable".
Its function is, in the words of Article 38 of the Statute, "to decide in
accordance with international law".
The Court's powers are clearly defined by the Statute, and do not
includepowers to reviewdecisions of other organs of the United Nations;
but when, as in the present proceedings, such decisions bear upon a case
properly before the Court, and a correctjudgment or opinion could not
be rendered without determining the validity of such decisions, the Court NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN )P. IND.ONYEAMA) 143
Il serait fastidieux de reproduire ici toutes les thèses, écriteset orales,
exposéesdevant la Cour et tendant à ce que la Cour se borne à accepter,

sans aucun examen critique, la validitéjuridique des résolutions et déci-
sions de l'Assembléegénéraleet du Conseil de sécurité qui intéressent
directement la question sur laquelle l'avis est demandé; il suffira de
rappeler qu'un certain nombre de représentants se sont exprimésdans ce
sens. La Cour avait donc à décidersi elle étaitou non compétentepour
étudier les résolutions et les décision: de l'Assemblée générale et du
Conseil de sécuritéqui sont pertinentes par rapport à la question posée,
de manière à établirsi ces textes sont conformes àla Charte des Nations
Unies et, par suite, s'ilssont valides.

Sur cepoint, la Courdit ceci:

(89. 11est évidentque la Cour n'a pas de pouvoirs de contrôle
judiciaire ni d'appel en ce qui concerne les décisions prisespar les
organes des Nations Unies dont il s'agit. Ce n'est pas sur la validité
de la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénéraleou des résolu-
tions connexes du Conseil de sécuriténi sur leur conformitéavec la
Charte que porte la demande d'avis consultatif. Cependant, dans

l'exercice de sa fonction judiciaire et puisque des objections ont
été formuléesl,a Cour examinera ces objections dans son exposé
des motifs, avant de se prononcer sur les conséquences juridiques
découlantde ces résolutions. 1)

A mon avis, si l'on aborde ainsi la question de la compétencede la Cour
pour étudier les décisionset résolutions de l'Assembléegénéraleet du
Conseil de sécuritéqui traitent de problèmes dont elles est saisie, et pour

se prononcer à leur sujet, on ne peut pas y répondre d'une manière
suffisamment nette.
La Cour a étécrééecomme organe judiciaire principal des Nations
Unies et, à ce titre, elle statue sur les différendsentre Etats dont elle peut
valablement connaître. Elle est autoriséepar la Charte et par le Statut à
donner des avis consultatifs sur des questions juridiques à l'Assemblée
générale,au Conseil de sécurité, àd'autres organes des Nations Unies et à
des institutions spécialisées.

Dans l'exercicede ses fonctions, la Cour est pleinement indépendante
des autres organes des Nations Unies; ellen'est nullementtenue d'émettre
un arrêtou un avis qui soit ccpolitiquement acceptable »; ce n'est pas là
son rôle. Sa mission, pour reprendre les termes de l'article 38 du Statut,
est de se prononcer ((conformément au droit international 1).
Les pouvoirs de la Cour sont clairement définispar son Statut, et il
n'entre pas dans ces pouvoirs d'exercer un contrôle sur les décisions
d'autres organes des Nations Unies; mais lorsque, comme c'est lecas en

l'espèce, les décisionsde ces organes intéressent une affaire dont la Cour
est dûment saisie, et lorsqu'il est impossible de rendre un arrêtou un avis could not possibly avoid such a determination without abdicating its
role of a judicial organ.
The question put to the Court does not, in terms, ask the Court to
give an opinion on whether General Assembly resoliition 2145 (XXI) is

valid, but the "legal consequences" which the Court is requested to
define, are postulated upon its validity. Were the Court to accept this
postulate without examination, it would run the risk of rendering an
opinion based on a false premise. The question itself has not expressly
excluded examination of thevalidity of this and other related resolutions;
and, as this Court had in the past modified and interpreted questions
put to it, it cannot be assumed that the Security Council intended to
fetter the Court in its considerations of the question on which it had
itself requested an advisory opinion; it would require the clearest in-
hibiting words to establish that such a limitation of the scope of the
Court's.consideration was intended.

I do not conceive it as compatible with the judicial function that the
Court will prsceed to state the consequences of acts whose validity is
assumed, without itself testing the lawfulness of the origin of those acts.

I am therefore of the view that, whether an objection had been raised
or not, the Court had a duty to examine General Assembly resolution
2145 (XXI) with a view to ascertaining its legal value; it had an equal
duty to examine al1relevant resolutions of the Security Council for the
same purpose.
1can find nothing in the wording of the present request which excludes
consideration of the validity of al1 pertinent resolutions. The words
"notwithstanding Security Council resolution 276 (1970)" appear to me
to indicate that the Security Council has assumed that resolution 276
(1970) validly created a situation in which South Africa's continued
presence in Namibia gives rise to legal consequences for States; but, in
my view, those words do not oblige the Court to make the same assump-
tions or to accept their correctness without examination.
The matter is, in my view, concluded by the principle stated by the
Court in the CertainExpensesof the UnitedNations case (I.C.J. Reports
1962,p. 151at p. 157)as follows:

". ..the Court must have full liberty to consider all relevant data
available to it inorming an opinionon a questionposed to itfor an
advisoryopinion" (italics added).

Where the question put to the Court is in such terms that the Court
could not properly perform its judiciai function of a thorough considera-
tion of al1relevant data, or where for any other reason the Court is not
permitted the full liberty it is entitled to in considering a question posed
to it, the Court's discretion to render or withhold an opinion would
protect the Court from the danger of rendering an opinion based on,bien fondé sans examiner la validitéde ces décisions,la Cour ne peut
évitercet examen sans abdiquer son rôle d'organe judiciaire.
Dansla question posée à la Cour, ilne lui estpas explicitement demandé
de dire sià son avis, la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénérale
est ou non valide, mais les ((conséquencesjuridiques» qu'il estdemandé
àla Courde définirprésupposent cettevalidité.Sila Cour devait accepter
ce postulat sans autre examen, eIIe courrait le risquelde rendre un avis
fondé surdes prémisseserronées.ka question posée elle-même n'exclut

pas explicitement la possibilité de se pencher sur la validité de cette
résolutionet d'autres résolutions connexes; et,puisqu'il est déjà arrivà
la Cour de modifier et d'interpréterles questions quilui étaientsoumises,
on ne saurait supposer que le Conseil de sécuritéentendait entraver la
Cour dans son examen de la question sur laquelle il demandait lui-même
un avis consultatif; il faudrait une stipulation des plusfor~nellespour
établir que l'intention était effectivement de limiter ainsi la portée de
l'examende la Cour.
Je ne vois pas qu'il soit compatible avec la fonction judiciaire de la
Cour d'énoncer les conséquences d'actedsont la validitéserait tenue pour
acquise, sans que la Cour se soit assuréeelle-mêmede leur origine licite.

Pour moi donc, et qu'il y ait eu ou non des objections, la Cour avait le
devoir d'examiner la résolution2145 (XXI)de l'Assembléegénérale pour
en apprécierla valeur juridique; elle avait en outre celui d'examiner aux
mêmes fins toutes les résolutions pertinentesdu Conseil de sécurité.

Je ne trouve rien dans l'énoncéde la présente requête queixclue l'exa-
men de la validitéde toutes les résolutions pertinentes. Les mots ((no-
nobstant la résolution276 (1978)du Conseil de sécurité » supposent, me
semble-t-il, que pour le Conseil de sécuritéla résolution 276 (1970) a
valablement crééune situation telle que la présencecontinue de l'Afrique
du Sud en Namibie créepour les Etats des conséquencesjuridiques; nais,
à mon avis,cetteformule ne contraint pas la Cour à faire lemêmepostulat

ni àl'accepter sans autre examen.
S'estimepour ma part concluant le Principe énoncé à ce sujet par la
Cour dans l'affairerelativeà Certainesdépenses desNations Unies(C.I.J.
Recueil 1962,p. 157) :

«la Cour doit avoir la pleine libertéd'examiner touslesélémentsdont
elle disposepour sefaire une opiilionsur unequestion qui luiestposée
en vued'un avis consultatif))les italiques sont de nous).

Lorsque la question posée à Ia Cour est formuléede telle sorte que la
Cour ne pourrait pas s'acquitter convenablement de safonction judiciaire,

qui est d'étudieràfondtous leséléments pertinents, ou lorsque, pour tou-
te autre raison, la Cour ne jouit pas de la libertétotale laquelle elle a
droit pour étudierla question qui lui est posée,son pouvoir discrétion-
naire de rendre ou de ne pas rendre un avisla protègedu risque d'émettre145 NAMIBIA (s.w.AFRICA) (SEP. OP. ONYEAMA)

conceivably, falseassumptions or incomplete data.

1conclude that in the present request, the Courthad a duty to examine
al1General Assembly and Security Council resolutions which are relevant
to the question posed to it, whether objections had been taken to them
or not, in order to determine their validity and effect, and so that the
Court can arrive at a satisfactory opinion.

This Court, in the Advisory Opinions rendered in 1950, 1955and 1956
on South West Africa and in the Judgment on 21 December 1962in the

first phase of the cases between Ethiopia and Liberia and South Africa,
established that the Mandate over South West Africa survived the disso-
lution of the League of Nations, and that supervisory functions over the
administration of the Mandate devolved upon the United Nations. It
also established the continuance of the obligation which rested on South
Africa to submit reports on its administration of the mandated territory
to theGeneral Assembly.
The question whether the League of Nations could unilaterally
terminate or revoke the mandate against the will of the mandatory
Power did not arise as a practical problem during the subsistence of
the League, but members of the Permanent Mandates Commission and a
number of international jurists who examined the matter as a theoretical
question, did not doubt that if a mandatory was guilty of gross and

repeated violations of the mandate,the League could revoke the mandate.

It was said that revocation went to the essence of control, and the
viewwasexpressedthat the power of the Leagueto appoint a newmanda-
tory in case one of the existing mandatories should cease to function,
and to dismiss a mandatory, may be implied from the Covenant assertion
that the mandatories act "on behalf of the League". (See Quincy Wright,
Mandates UndertheLeagueof Nations, 1930,pp. 440-441 .)

The Institute of International Law at its Cambridge session in 1931
debated the question of mandates and passed a resolution containing
the following clausesamong others :

"The functions of the mandatory State end by renunciation 01
revocation of the mandate: by the customary modes of ending
international engagements; also by the abrogation of the mandate,
and by the recognition of the independence of the community
which has been under mandate.
The renunciation takes effect only from the date fixed by the
Council of the League of Nations in order to avoid any interruption
of the assistance to be given to the community under mandate NAMIBIE (S.-O. AFRICAIN) (OP. IND. ONYEAMA)
145
un aviséventuellementfondésur des hypothèseserronéesou deséléments
incomplets.
Je conclusqu'enla présenteinstance,laCour avait ledevoir d'examiner

toutes les résolutionsde l'Assemblée généraleet du Conseil de sécurité
intéressantla question qui lui est posée,que ces résolutions aientou non
suscité des objections,pour seprononcer sur leur validité etsur leur effet,
afin de pouvoir émettre finalement un avis satisfaisant.

Dans les avis consultatifs qu'elle a rendus en 1950, 1955et 1956 à
propos du Sud-Ouest africain et dans son arrêtdu 21 décembre 1962

concernant la première phase des affaires opposant 1'Ethiopie et le
Libéria à l'Afrique du Sud, la Cour a établi quele mandat pour le Sud-
Ouest africainavait survécu àla Société deNs ations et que la surveillance
de l'administration du mandat étaitdévolueaux Nations Unies. La Cour
a également concluau maintien de l'obligation qui incombait à l'Afrique
du Sud de communiquer à l'Assemblée générale de rspports relatifsà
son administration du territoire sousmandat.
La question de savoir si la Société deNations pouvait unilatéralement
mettre fin au mandat ou le révoquercontre la volonté dela puissance

mandataire n'a pas soulevéde problèmepratique du temps de la Société
des Nations, mais les membres de la Commission permanente des man-
dats et certains desjuristes internationaux qui ont étudié la question sur
le plan théorique n'ont pasmis en doute que si un mandataire se rendait
coupable de violations graves et répétées des dispositiondsu mandat, la
Société des Nations pourrait révoquercelui-ci.
On a dit que le pouvoir de révocationtenait à l'essencemêmede la
fonction de surveillance, et que le droit qu'avait la Société desNations
de désignerun nouveau mandataire au cas où l'un des mandataiies

existants cesserait d'exercer sesfonctions, ou d'écarterun mandataire,
étaitimplicite dans l'affirmation,contenue dans le Pacte, que les manda-
taires agiraient(au nom de la Société ))(Voir Quincy Wright, Mandates
Underthe League ofNatio~zs,1930,p. 440-441.)
A sasessionde 1931,tenue àCambridge, l'Institut dedroit international
a étudiéla question des mandats et a adoptéune résolutioncontenant
notamment les clauses suivantes:

((Lesfonctions de 1'Etat mandataire prennent fin par démission
ou révocationdu mandataire, par les modes habituels d'expiration

des engagements internationaux et aussi par abrogation du mandat
et reconnaissance de la collectivité sousmandat comme indépen-
dante.
La démission n'ad'effetqu'à partir de la date fixéepar le Conseil
de la SdN pour évitertoute interruption dans l'assistance donnée
'aux collectivitéssous mandat.

133 146 NAMIBIA (s.w.AFRICA) (SEP. OP. ONYEAMA)

The revocation of the mandatory State and the abrogation of the
mandate are determined bythe Council ofthe Leagueof Nations ..."

In the face of the strong current of opinion among international
jurists, and from the common sense of the matten, it seems to me that
there can be no doubt that the League of Nations, acting through the
Council, had, as a necessary part of its supervisory powers, the power
unilaterally to revoke or terminate a mandate which was being adminis-
tered on itsbehalf, when the State ent~iistedwith the mandate was guilty
of aserious breach of its obligations under themandate.

A contrary viewwould involve the suggestion that a mandate, particu-
larly a class "C"Mandate such as the one with which the present question
is concerned, could never be revoked, and that, contrary to their
professed concern for the principles of non-annexation, the welfare of

the peoples of the mandated territory and the sacred trust of civilization,
the Principal Allied and Associated Powers and other Members of the
League of Nations, behind a façade of fair promises, had in reality
~ermitted the perpetual annexation of the mandated territories and the
subjection of their peoples to the arbitrary rule of the mandatory Power
without hope of deliverance or future self-determination. The "sacred
trust of civilisation" would, on this view, have no meaning at all. The
actual historical development of the mandate régimein the days of the
Eeague and subsequent to 1946does not support this view, and it ought
therefore to be rejected.
This Court in its Advisory Opinion on the International Status of
South West Africcr,and for the reasons stated in that Opinion, arrived
at the conclusion:

". ..that the General Assembly of the United Nations is legally
qualified to exercise the supervisory functions previously exercised
by the League of Nations with regard to the administration of the

Territory, andthat the Union of South Africa is under an obligation
to subrnit to supervision and control of the General Assembly and
to renderannual reports to it". (I.C.J. Reports 1950,p. 128at p. 137.)

The devolution of the supervisory powers of the League Council on
the-General Assembly ofthe Ucited Nations vestedthe General Assembly
with the rights, duties and obligations appurtenant to those powers,
including the power unilaterally to terminate or revoke the Mandate
on thegrounds of gross violations by the mandatory Power.
This is a power which the General Assembly possesses by reason of
its control of the Mandate and is, in my view, a power sui generis, not
limited byArticle 10of the Charter.
Jt follows that when the Assembly passed the resolution 2145(XXL)
the competent organ of the United Nations terminated the Mandate in a
binding way, andthat South Africa, thereafter, had no right to administer La révocation de 1'Etat mandataire et l'abrogation du mandat
sont décidées par le Conseil de la SdN ...))

Etant donnéle fort courant d'opinion qui existait alorsparmi lesjuristes
internationaux, et en me plaçant sur le terrain du sens commun, je pense
qu'il nefaitpas de doute que la Société des Nations, agissant par l'inter-
médiairedu Conseil, possédait - ce qui était indispensable pour l7exer-
cicede sesfonctions de surveillance - le pouvoir de révoquerou d'abro-
ger unilatéralement un mandat administré en son nom, lorsque 1'Etat
auquel le mandat avait étéconfiése rendait coupable d'une violation

grave de ses obligations aux termes du mandat.
L'opinion contraire supposerait qu'un mandat, et surtout un mandat
de la catégorie C comme celui dont il s'agit en l'espèce, nepouvait
jamais êtrerévoquéet que, malgré lasollicitude qu'ils affichaientpour le
principe de non-annexion, le bien-êtredes populations du territoire sous
mandat et la mission sacréede civilisation, les Principales Puissances
alliéeset associéeset lesautres Membres de la Sociétédes Nations avaient
en réalité,sous le couvert de belles promesses, permis l'annexion perpé-
tuelle des territoires sous mandat et l'assujettissement de leurs peuples
à la domination arbitraire de la puissance mandataire, sans espoir de

délivrance ou d'autodétermination future. S'il en avait étéainsi, la
((missionsacréede civilisation »n'aurait eu aucun sens. L'évolution suivie
en fait par le régimedes mandats à l'époque dela SdN et après 1946
s'inscrit en faux contre cette opinion, qui doit donc êtrerejetée.

Dans son avis consultatif sur le Statut international du Sud-Ouest
africain,et pour les motifs qui ysont indiqués,la Cour est parvenue à la
conclusion

((quel'Assemblée générald ees Nations Unies est fondéeen droit à
exercer les fonctions de surveillance qu'exerçait précédemmentla
Société des Nations en ce qui concerne l'administration du territoire
et que l'Union sud-africaine a l'obligation de se prêter à la surveil-
lance de l'Assemblée générale et de lui soumettre des rapports
annuels ))(C.I.J. Recueil 1950, p. 137).

La dévolution des pouvoirs de surveillance du Conseil de la Société
des Nations à l'Assembléegénéraledes Nations Unies a investi celle-ci

des droits, devoirs et obligations associés à ces pouvoirs, y compris le
droit d'abroger ou de révoquer unilatéralementle mandat pour cause de
violation grave commise par la puissance mandataire.
Il s'agitlà d'un pouvoir que l'Assemblée générale possèd en raison du
contrôle qu'elle exerce sur les mandats et il constitue, à mon avis, un
pouvoir sui generis, qui n'est pas limitépar l'article 10de la Charte.
Il s'ensuit que lorsque l'Assembléea adoptéla résolution 2145 (XXI)
l'organe compétent des Nations Unies a impérativement mis fin au
mandat et qu'à partir de ce moment l'Afrique du Sud n'avait plus le147 NAMIBIA (s.w. AFRICA ()EPO.P.ONYEAMA)
the Territory of SouthWestAfrica.The decision of the General Assembly
was brought to the attention of the Security Council but, in my view, it

was then already an effectiveand binding decision.

It seems to me that the legal consequences for States flowed from
South Africa's failure to carry out resolution 2145(XXI) and vacate the
Territory, and its continued presence in the Territory against the will of
the United Nations, and not from resolution 276 (1970)which was not
the means of putting an end to South Africa's administration of the
Mandate. The provisions of resolution 276 (1970)capable of giving rise
to legal obligations are operative paragraphs 2 and 5 and are as follows:

"TheSecurity Council

......................
2. Declures that the continued presence of the South African
authorities in Namibia is illegal and that consequently al1acts taken
by the Government of South Africa on behalf of or concerning
Namibia after the termination of the Mandate are illegal and
invalid;

......................
5. Culls uponal1States, particularly those which have economic
and other interests in Namibia, to refrain from anydealings with the
Government of South Africa which are inconsistent with operative
paragraph 2of this resolution."

The declaration of. the illegality of the continued presence of South
Africa in Namibia did not itself make such presence illegal; it was, in
my opinion, a statement of the Security Council's assessment of the
legalquality of the situation created by South Africa's failure to comply
with the General Assembly resolution-a statement not binding any
Member of the United Nations which held a different view. It was, in
effect, a judicial determination, and it is doubtful if any power exists in

the Charter for the Security Council to make such a determination
except in certain well-defined cases not relevant here. As paragraph 2
does not, in my view, create-any binding legal obligations, it follows
that paragraph 5 is similarly ineffective for founding legal obligations
or creating legalconsequences.

The matter, however, does not end there for resolution 276 (1970)
"reaffirmed" General Assembly resolution 2145 (XXI) of 27 October
1966,"by which the United Nations decided that the Mandate of South-
West Africa was terminated and assumed direct responsibility for the
territory until itSindependence", and reaffirmed:droit d'administrer le territoire du Sud-Ouest africain. La décisionde
l'Assembléegénérale aété portée à l'attention du Conseil de sécurité
mais, selon moi, elle constituait déjà en soi une décision effectiveet
obligatoire.
Il me semble que les conséquencesjuridiques pour les Etats découlent
du fait que l'Afrique du Sud s'est refuséeà appliquer la résolution 2145
(XXI) età évacuerle territoire, ainsi que de sa présencecontinue dans le
territoire contre ia volonté des Nations Unies, et non de la résolution
276 (1970)qui n'a pas étél'instrument par lequel il a étémis fin à l'ad-
ministration sud-africaine du territoire sous mandat. Les dispositions
de la résolution 276 (1970)propres à créer des obligations légalessont

les paragraphes 2 et 5 du dispositif, qui sont libelléscomme suit:

((Le Conseil de sécurité,
......................
2. Déclareque la présencecontinue des autorités sud-africaines
en Namibie est illégaleet qu'en conséquencetoutes les mesures

prises par le Gouvernement sud-africain au nom de la Namibie
ou en ce qui la concerne après la cessation du Mandat sont illégales
et invalides
......................
5. Demande à tous les Etats, en particulier ceux qui ont des in-
térêts économiquee st autres en Namibie, de s'abstenir de toutes

relations avec le Gouvernement sud-africain qui sont incompatibles
avec le paragraphe 2 du dispositif de la présente résolution))

En soi, l'affirmation de l'illégalitéde la présencecontinue de l'Afrique
du Sud en Namibie ne rendait pas cette présence illégale;elle cons-
tituait, selon moi, une déclaration par laquelle le Conseil de sécurité
appréciait, sur le plan juridique, le caractère de la situation néedu fait
que l'Afrique du Sud n'avait pas obtempéré à la résolution de 1'Assem-
bléegénérale;cette déclaration n'engageait pas un Membre des Nations
Unies ayant une opinion différente.II s'agissaiten effetd'une constatation
juridique, et il est douteux que la Charte confère au Conseil de sécurité
le pouvoir de procéder à une telle constatation, sauf dans quelques cas

bien définisqui sont sans intérêtici. Comme le paragraphe 2, à mon
avis, ne créeaucune obligation juridique qui lierait les Etats, il s'ensuit
que le paragraphe 5 est égalementinsuffisant pour fonder des obligations
ou emporter desconséquencesjuridiques.
Cela n'épuisecependant pas la question, car la résolution 276 (1970)
((réaffirmai» la résolution 2145 (XXI) de l'Assembléegénéraleen date
du 27 octobre 1966 ((par laquelle les Nations Unies ont décidéque le
Mandat sur le Sud-Ouest africain était terminéet ont assuméla respon-
sabilité directedu territoire jusqu'à son indépendance »; elle réaffirmait
en outre "... Security Council resolution 264 (1969) which recognized the
termination of the Mandate and called upon the Government of
South Africa immediately to withdraw its administration from the
Territory". (See second and third preambular paragraphs of resolu-
tion 276(1970).)
In this way the resolution incorporated General Assembly resolution
2145(XXI).
The question before the Court can therefore be understood to request

an advisory opinion on the legal consequences to States of South Africa's
continued presence in Namibia after the Mandate over South West
Africa had been duly terminated by the United Nations. In my view the
words "notwithstanding Security Council resolution 276 (1970)" do not
affectthe scope of the question.
The legal consequences for States in the case under consideration are
those which flow automatically, under international law, from the
unlawful continuation of South Africa's presence in Namibia, and do
not, in my view, extend to enforcement measures which may or may not
be adopted by States individually, or the United Nations collectively, to
remove South Africa from the Territory or to assert the authority of the
United Nations over the Territory, in the absence of treaty provisions
or a customary rule of international law requiring such measures to be
adopted. Theseconsequencesare :

(1) South Africa is under a legal obligation to end its unlawful occupa-
tion by withdrawing from Namibia its presence and its administration,
but while it remains in the Tersitory it must act in conformity with its
obligations under the Mandate and the Charter.

(2) There is imposed on al1other States an obligation of non-recogni-
tion; that is to say, al1 States are obliged not to recognize that South

Africa has any legal right to remain inNamibia orto maintain itsadminis-
tration in that Territory. They are obliged to do nothing to aid the
continuance of the unlawful presence of South Africa or its administration
in the Territory of Namibia.

(3) Tf the Security Council decides to take action in the matter of
Namibia in discharge of itsduties under its responsibility for the mainten-
ance of international peace and security, al1 Members of the United
Nations are obliged to accept and carry out any decisions which may be
made in accordance with the Charter; but although the decision of the Se-
curityCouncil to take such action may be a consequence of the continued
presence of South Africa in Namibia, the obligation to accept and cars
out the decision is an obligation Statesincur asa consequence of member-
ship of the United Nations, and not, directly, as a legal consequence for
them of South Africa's continued presence in Namibia. It is for this
reason that 1consider that the Court cannot particularize legal conse- NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () P.IND.ONYEAMA) 148

«la résolution 264 (1969) du Conseil de sécurité,dans laquelle ce
dernier a reconnu qu'il avait étémis fin au Mandat et a demandé
au Gouvernement sud-africain de retirer immédiatement son ad-

ministration du territoir)1(voir les deuxième et troisième alinéas
du préambule delarésolution276(1970)).
Cette résolution reprenait ainsi la résolution2145 (XXI) de l'Assemblée
générale.
Il faut donc comprendre que la question portéedevant la Cour a pour

objet d'obtenir un avis consultatif sur les conséquencesjuridiques pour
les Etats de la présencecontinue de l'Afrique du Sud en Namibie après
que les Nations Unies eurent dûment mis fin au mandat sur le Sud-Ouest
africain. Selon moi, l'expression (nonobstant la résolution 276 (1970)
du Conseilde sécurité )n'affectepas laportéedela question.
En l'espèce, lesconséquencesjuridiques pour les Etats sont celles qui
découlentautomatiquement, en droit international, du fait du maintien
illicitede laprésencedel'Afriquedu Sud en Namibie, et ne s'étendent pas,
à mon sens, aux mesures d'exécutionqui pourront ou non êtreprises par

les Etats agissant individuellement, ou collectivement par les Nations
Unies, en vue de faire partir l'Afrique du Sud du territoire ou d'affirmer
l'autorité des NationsUnies sur celui-cià défaut dedispositions conven-
tionnelles ou d'une règle de droit international coutumier appelant
l'adoption de telles mesures. Ces conséquencessont les suivantes:

1. L'Afrique du Sud a l'obligation juridique de cesser son occupation
illiciteen mettant fin sa présenceet en retirant son administration de la
Namibie, mais tant qu'elle reste dans le territoire elle est tenue d'agir
conformément aux obligations qui lui incombent aux termes du mandat
et de la Charte.
2. Une obligation de non-reconnaissance s'impose à tous les autres
Etats; ce qui veut dire que tous les Etats sont tenus de ne reconnaître
l'Afrique du Sud aucun titre juridique l'autorisant à demeurer en

Namibie ou àmaintenir son appareil administratif dans ce territoire. Ils
sont tenus de ne rien faire qui puisse faciliter le maintien de la présence
illicite de l'Afrique du Sud ou de son administration dans le territoire
dela Namibie.
3. Si le Conseil de sécurité déciddee prendre des mesures concernant
la Namibie au titre des responsabilitésqui lui incombent en matière de
maintien de la paix et de la sécuritéinternationales, tous les Etats
Membres des Nations Unies devront accepter et appliquer toutes déci-
sions adoptées conformément à la Charte; mais encore que la décision

du Conseil de sécurité deprendre de telles mesures puisse êtreune con-
séquence de la présence continue de l'Afrique du Sud en Namibie,
l'obligation d'accepter et d'appliquer cette décision est une obligation
qui s'impose aux Etats comme Membres des Nations Unies; ce n'est
pas pour eux une .conséquencejuridique directe de la présencecontinue
de l'Afrique du Sud en Namibie. C'estpourquoi j'estime que la Cour ne

136quences for States and that it must be left to the Security Council to
decide on what enforcernent action it should take under the Charter.

1 regret that 1 differ from the Court as to the scope of the doctrine
of non-recognition which, as 1understand it, it was intended to reflect in
sub-paragraphs 2 and 3 of paragraph 133 of the Advisory Opinion. To
my regret 1 have been unable to vote affirmatively on sub-paragraphs 2
and 3. In my view,the effect of the doctrine in the context of the case in
hand is correctly set out in paragraph 119of the Advisory Opinion, but
sub-paragraphs 2 and 3 of paragraph 133 of the Advisory Opinion

appear to me to attribute to the doctrine too wide a scope; and while 1
agree that there is on States an obligation of non-recognition of the
legality of the presence of South Africa and of its administration in
Namibia, 1do not agreethat this obligation necessarilyextends to refusing
to recognize the validity of South Africa's actson behalf of or concerning
Namibia in viewof the fact that the administration of South Africa over
Namibia (illegal though it is) still constitutes the defacto government of
the Territory.
States which are not members of the United Nations incur no obliga-
tions to assist the Organization except as provided by Articlearagraph
6, of the Charter, and this Article places upon theOrganizationthe onus
of ensuring that such States act in accordance with the principles set
out in Chapter 1of the Charter.

(Signed C)harles D. ONYEAMA. NAMIBIE (S.-O.AFRICAIN () PIND. ONYEAMA) 149

saurait dresser la liste des conséquencesjuridiques pour les Etats et
qu'ilfaut laisser au Conseil de sécurile soin de décider quelles mesures
d'exécutionilcompteprendre en application dela Charte.

Je regrette de ne pas partager les vues de la Cour au sujet dela portée
de la doctrine de non-reconnaissance dont, sije ne me trompe, lessous-
paragraphes 2 et 3 du paragraphe 133de l'avisétaientcensés s'inspirer.
Je n'ai malheureusement pas pu voter en faveur de ces deux sous-para-
graphes. Selon moi, les effets de la doctrine de non-reconnaissance en
l'espècesont correctement exposésau paragraphe 119 de l'avis, mais
les sous-paragraphes 2 et 3 du paragraphe 133semblent attribuer à cette
doctrine une portée trop large. Je conviens, certes, que les Etats ont
l'obligation de ne pas reconnaître la légalitéde la présencede l'Afrique
du Sud en Namibie et de son administration de la Namibie; mais je ne

considèrepas que cette obligation entraine forcémentcelle de refuser de
reconnaître la validité des mesures prisespar l'Afrique du Sud au nom
de la Namibie ou en ce qui la concerne, étant donné quel'administration
sud-africaine en Namibie, bien qu'illégale,demeure le gouvernement de
facto du territoire.
Les Etats qui ne sont pas membres des Nations Unies n'ont aucune
obligation de prêter assistance à l'organisation sauf dans la mesure
prévue àl'article 2, paragraphe 6, de la Charte, et en vertu de cet article
c'est à l'organisation qu'il appartient de faire en sorte que les Etats
agissent conformément auxprincipes énoncésau chapitre premier de la
Charte.

(SignéC )harles D. ONYEAMA.

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Opinion individuelle de M. Onyeama (traduction)

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