Opinion individuelle de Mme. Higgins (traduction)

Document Number
090-19980310-ORD-01-02-EN
Parent Document Number
090-19980310-ORD-01-00-EN
Document File
Bilingual Document File

OPINION INDIVIDUELLE DE MME HIGGINS

[Traduction]

Je suis d'accord avec la Cour pour dire que la demande reconvention-
nelle présentéepar les Etats-Unis dans leur contre-mémoire estrecevable
et fait maintenant partie de l'instance en cours.
Il y a toutefois un point que la Cour n'a pas du tout examiné,bien
qu'elleait apparemment abouti à une conclusion négative à son sujet; et
ily a deux autres points qu'elle semblegarderpour lefond, alors que l'on

peut soutenir qu'ils auraient dû faire l'objet d'une décisione stade.
Comme le rappelle la présenteordonnance, l'Iran a introduit une ins-
tance contre les Etats-Unis en alléguant que ceux-ci avaient enfreint
l'article premier, le paragraphe 1 de l'article IV et le paragraphe 1 de
l'article X du traité d'amitiéde 1955.La Cour, après avoir examinéles
exceptions préliminairessoulevéespar les Etats-Unis à sa compétence,a
dit qu'elle a compétencedans son arrêtdu 12 décembre 1996 ((pour
connaître des demandes formuléespar la Républiqueislamique d'Iran au
titre du paragraphe 1de l'article Xudit traité».Elle a dit qu'ellen'a pas
compétencepour connaître des demandes formuléesau titre de l'article
premier et du paragraphe 1 de l'article IV.
Le 23juin 1997, lesEtats-Unis ont présenté à la fois leurs moyens de

défense à l'égarddu mémoirede l'Iran et de la demande reconvention-
nelle qui fait l'objet de la présenteordonnance. Les Etats-Unis ont sou-
tenu que l'Iran, pour sa part, commis des actes contraires à l'article X
du traité. Dans la section 1 de leur demande reconventionnelle, ils ont
fondéleur demande sur le paragraphe 1 de l'article X du traité. Dans la
section2, ils l'ont fondéesur les ((autres dispositionsde l'article X» et ils
se sont ensuite référépslus particulièrementdes actes qui constituaient,
alléguaient-ils,des violations du paragraphe3 de l'article X. Dans leurs
conclusions, la Cour étaitpriéede dire et juger quel'Iran avait enfreint
ses obligations au titre de l'article X de façon générale.
Dans leur réponse à l'invitation de la Couà présenter leursvues sur
lesobservationsde l'Iran relatives aux demandes reconventionnelles (voir

paragraphe 9 de la présente ordonnance), les Etats-Unis, au para-
graphe 39,sesont aussi référéasux ((paragraphes 2 à5 de l'articleX». Ils
ont à la fois allégué desviolations de ces dispositions en évoquant des
faits particuliers et soulevél'objection selon laquelle,dans ses argu-
ments relatifsàla compétence,l'Iran cherche à enfermer l'ensemble dela
demande reconventionnelle des Etats-Unis dans les limites du para-
graphe 1 de l'article X du traitéde1955)).
L'ordonnance de la Cour ne mentionne pas du tout ceséchangesentre
les Parties, sauf pour rappeler, au paragraphe 26, qu'effectivement les
Etats-Unis ont fondédes demandes sur les paragraphes 2 à 5 de l'ar-ticle X. Cependant, bien qu'à l'alinéaA, comme à l'accoutumée,le dis-
positif se contente de déclarer recevablela demande reconventionnelle, il
semble résulterdu texte de l'ordonnance qu'il n'enest ainsi qu'au regard

du paragraphe 1 de l'article X. Au paragraphe 34, la Cour dit que «sa
compétenceen l'espècecouvr[e]les demandes formuléesau titre du para-
graphe 1de l'article X du traitéde 1955»,dont elle cite ensuite le texte.
Au paragraphe 36 elle dit que la demande reconventionnelle entre:
((dans lesprévisionsdu paragraphe 1de l'articleX du traitéde 1955
tel qu'interprétépar la Cour; et que celle-ci est compétentepour
connaître de la demande reconventionnelle des Etats-Unis dans la

mesure où les faits alléguéontpu porter atteinte aux libertésgaran-
ties par le paragraphe 1 de l'article.
Il se peut donc que, alors que le paragraphe 1 de l'article X constitue la
seule base de compétence déterminép ear la Cour, les paragraphes 2 à 6
restent pertinents lorsqu'il s'agit d'établir quelles libesont garanties
en vertu du paragraphe 1.
En premier lieu, les décisionsqui rejettent les prétentionsde l'une des

parties doivent êtremotivées.On ne doit pas admettre volontiers la ten-
dance regrettable à proposer des conclusions, mais non des motifs. En
second lieu, le postulat non explicitéselonlequelle fondement dela com-
pétence établipour une demande constitue nécessairement laseule base
de compétence d'une demande reconventionnelle, à laquelle il assignedes
limites, peut donner lieuà contestation.
Dans lessystèmestant de droit civilque decommon law,commedans le
Règlement dela Cour, un défendeurqui tente de présenter une demande
reconventionnelle doit établirque la Cour est compétentepour statuer à
son sujet. 11n'est toutefois pas essentiel que le fondement de la compé-
tence soit le mêmepour la demande principale et la demande reconven-
tionnelle.Il suffit que la compétenceexiste. (Certes, s'il n'en était pas
ainsi,jamais on ne pourrait présenter une demande reconventionnelle,par
exemple au titre de la responsabilitécivile délictuelledans une action
engagée enmatière contractuelle, alors quecela sefait de façon courante.)
Rien dans le Règlementou la pratique de la Cour n'indique que l'auteur

d'unedemandereconventionnelle doiveétablir unlien decompétence tout à
faitidentique.Lestravaux préparatoiresdes diversesformulations decequi
estmaintenant l'article80du Règlementde la Cour n'indiquent enrien que
l'on aitenvisagéune telle exigence.La règlerelative aux demandesrecon-
ventionnellesa fait l'objetdemodificationssuccessives.Cependant une telle
conceptionn'apparaît nulle part dans lesdiscussionsde 1922,ni dans celles
de 1934, 1935, 1936n ,i davantage dans cellesde 1946, 1968,1970,1972.
L'attention a porté surtout, d'une part, sur la ((connexité))requise et,
d'autre part, sur certaines questions relativesla compétenceet, en par-
ticulier (en922),sur cellede savoir silesdemandes reconventionnelles se
limitaient aux affaires relevant de la juridiction obligatoire et s'il allait
êtrepermis de soulever des exceptions d'incompétence s'agissant de
demandes reconventionnelles. Il n'a jamais étproposé àaucun moment,ni moins encore accepté, d'exiger unfondement de la compétence iden-
tique pour la demande principale et la demande reconventionnelle. Le
libellédu paragraphe 1 de l'article 80 ne le donne pas davantage à en-
tendre. Il exige qu'une demande reconventionnelle ((relèvede la compé-

tence de la Cour» et non pas qu'elle ((relèvede la compétenceétablie
par la Cour à l'égarddes réclamationsdu demandeur)).
Bien entendu, l'exigence même d'une connexité directeavec l'objet de
la demande principale serait de nature à faire entrer l'auteur de la
demande reconventionnelle dans le mêmedomaine général de compé-
tence, autrement dit le mêmetraité peutbien servir de base pour fonder
la compétenceinvoquéeafin de présenter une demande reconvention-
nelle.Il n'y a rien de plus.
Lorsque le comitépour la revision du Règlementa décidé de garder la
formule «et qu'elle relèvede la compétence dela Cour »,qui figuraitdans
l'ancien Règlement, il a estiméque cette formule signifiait que l'auteur
d'une demande reconventionnelle ne pouvait pas présenter une demande

que la Cour n'aurait pas eu compétencepour en connaître, si elle avait
fait l'objet d'une requête ordinaire devant elle.
Telle reste la position adoptée au titre de l'article 80 du Règlement
actuel de la Cour, qui continue à exiger simplement que la demande
reconventionnelle ((relèvede la compétencede la Cour». En l'espèce, à
supposer que les demandes des Etats-Unis relatives aux paragraphes 2à
5 de l'article X aient «fait l'objet d'une requête ordinaire devant la
Cour», la procédure correcte et nécessaireaurait étépour la Cour de
rechercher si elle était compétentepour en connaître.
Dans son arrêtdu 12 décembre1996(affaire des Plates-formes pétro-
lières(Républiqueislamique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique),exception
puéliminaire,C.I.J. Recueil 1996, p. 803), la Cour a définila méthodà

suivre à cette fin lorsqu'il y a une contestation sur la compétence établie
par un traité.Le critèreconsiste savoir si lesfaits allégsar le deman-
deur peuvent s'appliquer à une violation d'une disposition déterminée
(quant à savoir silesfaits sont avér,'ilsconstituentvraiment une viola-
tion et s'ilexisteun moyen de défense,il s'agitde questionsqui relèvent
du fond). Rien n'explique quela Cour n'ait pas entrepris cette recheàche
propos delademande reconventionnelledesEtats-Unis fondéesurlespara-
graphes 2 à 5 de l'article X du traitéde 1955,de manièreà donner à ce
sujet une réponse motivéed, ans un sens ou dans l'autre.
L'Iran, lui non plus, ne semble pas réellements'attendre ce qu'une
demandereconventionnelle répondantaux conditions requises selimite à
des questions qui relèventdu paragraphe 1de l'article X du traitéd'ami-

tié.Son document du 18novembre 1997intitulé((Demandetendant à ce
que lesparties soiententendues au sujet de la demande reconventionnelle
des Etats-Unis en application du paragraphe 3 de l'article 80 du Règle-
ment de la Cour» abonde en arguments qui tendent à établir quelesfaits
allégués à l'appui des demandes reconventionnelles précisesdes Etats-
Unis excluent que celles-cirelèvent desparagraphes 3 à 5 de l'article X
(par. 17, 19b), 19d), 19e), 19f), 21, ainsi que les notes 21 et 24). PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP.IND.HIGGINS) 220

Implicitement, la manièredont la Cour sefonde, sans l'expliquer, surle
paragraphe 1de l'articleX comme base apparemment unique de la com-
pétencesuppose qu'à son avis une demande reconventionnelle ne puisse
procéderque d'unedemande initiale et ne puisse donc pas reposer sur une
base juridictionnelle plus étendueque la demande initiale. Or il ne s'agit
pas de l'aptitude de l'auteur d'une demandereconventionnelle à «élargir»
la compétenceinitialementétabliepar la Cour. La Cour établit d'abordsa
compétencepar rapport aux faits qu'allèguele demandeur. Cela ne signi-

fiepas qu'elle ne puissepas être compétenteà l'égard d'allégationsformu-
léespar le défendeuren invoquant d'autres clauses du mêmetraité.
L'ordonnance rendue par la Cour le 17décembre1997enl'affairede la
Conventionsur le génocide(qui concernait aussi une compétencefondée
sur un traité)se réfèreà cette question dans les termes suivants:
((Considérant que le défendeurne saurait tirer parti de l'action

reconventionnelle pour porter devant le juge international des
demandes qui excéderaitles limites dans lesquelles lesparties ont
reconnu sa compétence...))(Application de la conventionpour lapré-
vention et la répressiondu crime de génocide,demandes reconven-
tionnelles, ordonnance du 17 décembre 1997,C.I.J. Recueil 1997,
p. 257, par. 31;les italiques sont de moi.)
Ce qui compte dans une demande reconventionnelle, c'estla compétence

mutuellementreconnue par les parties en vertu du traité - et nonpas la
compétenceétabliepar la Cour à l'égard de faits particuliers initialement
allégués par le demandeur. (Il se trouve que, dans la Convention sur le
génocide, la base de compétenceidentique était en litige entre les deux
Parties, au regard d'obligationserga omnes.)
Pour satisfaire au critère des limites «dans lesquelles les parties ont
reconnu sa compétence)),appliquéen l'affaire de la Convention sur le
génocide, la Cour devra décidersi les paragraphes 2 à 5 de l'article X,
compte tenu des faits alléguéspar le défendeur, peuvent fonder des
demandes relatives à des violations commisespar ledemandeur. L'ordon-
nance, qui constitue lemoyen de statuer sur lesquestions préliminaires de
la demande reconventionnelle, aurait dû contenir une décision motivée
sur ce point.
Il peut êtreutile d'envisagerla question de la façon suivante. Au regard

des paragraphes 2 à5 de l'article X la compétenceinvoquée à l'appui de
demandes fondées sur les faits alléguéspar les Etats-Unis existe ou
n'existe pas. S'ilétaitpossible de présenterune demande initiale en allé-
guant des violations de ces dispositions, cette faculténe saurait dispa-
raître parce que la Cour a déjà établisa compétenceen vertu d'une autre
disposition (le paragraphe 1de l'article) pour des demandes formulées
par l'Iran.
Sinon, en réalité,la compétencefondée surun traité«dans les limites
dans lesquellesles parties [l']ontreconnue))serait modifiéepar une déci-
sionjudiciaire sur la compétencerendue à propos d'une demande initiale
fondée sur une disposition déterminée. Si, pour les besoins de l'argumentation, on admet que les dispositions
conventionnelles des paragraphes 2 à 5 de l'article X auraient fondé la
compétenceaux fins d'une demande initiale, alors les Etats-Unis, semble-
t-il, pourraient encore présenter une demande de novo, bien qu'aux
termes de l'ordonnance de la Cour ils ne soient pas autorisés à le faireà
titre de demande reconventionnelle. Une telle conséquencen'est guère
compatible avec le but déclaré des demandes reconventionnelles, c'est-
à-dire la commodité de l'administration delajustice. Cela souligne que ce

qu'exige le paragraphe 1 de l'article 80 du Règlement, c'est qu'une
demande reconventionnelle((relèvedela compétencedelaCour ))par rap-
port aux principes de juridiction normaux, plutôt que par rapport à la
base de compétence déterminée que le demandeur initial se trouve avoir
invoquée à l'égard des faits qu'il alléguait lui-même.

Si les Etats-Unis pouvaient raisonnablement s'attendre à une réponse
motivée à leur demande selon laquelle la Cour est compétente en vertu
des paragraphes 2 à 5 de l'article X, mais aussi sur la base du para-
graphe 1du mêmearticle, l'Iran pouvait raisonnablement s'attendre à ce
qu'au titre de l'égalité dtraitement la présenteordonnance tranche deux
questions sur lesquelles elle garde en réalitéle silence.
Dans la demande reconventionnelle, les faits allégués concernent la
destruction de navires plutôt que celle de plates-formes pétrolières. Le

point de savoir si le paragraphe 1 de l'article X se limite au commerce
entre les deux Parties a été examinée de façon exhaustive en tant que
question pertinente aux fins de lajuridiction dans la phase de la présente
affaire relativà la com~étence.En l'occurrence la Cour a déclaré au'elle
«n'a pas à se pencher sur la question de savoir si cette disposition ne
s'applique qu'au commerce ((entre»les Parties)), car celles-ci«ne contes-
tent pas ..que les exportations de pétrole del'Iran vers les Etats-Unis se
soient - dans une certaine mesure - poursuivies» (Plates-formespétro-
lières(Républiqueislamiqued'Iran c. Etats-Unis d'Amérique),exceptions

préliminaires,arrêt, C.1.J. Recueil 1996, p. 817-818, par. 44). Du point
de vue de la demande reconventionnelle, il n'y a pas d'accord sur le fait
que tous les navires participaient au commerce entre les Parties. L'Iran
soutient aAe.2lors de nombre des incidents citéspar les Etats-Unis dans
leur demande reconventionnelle, il s'agissait de navires qui «ne partici-
paient pas (et dont on ne peut mêmepas soutenir qu'ils participaient) au
commerce ni même à la navigation entre les territoires des Hautes Parties
contractantes)) (requêtede l'Iran, par. 21). Il semble que, pour décider

si la Cour est compétente en vertudu paragraphe 1de l'article X du traité
pour connaître des demandes relatives aux dommages infligés à des na-
vires de guerre, il faille statuer maintenant, en 1998, sur la question
qu'il n'étaitpas nécessairede trancher en 1996.L'Iran a traitécette ques-
tion comme se rattachant àla compétence et pertinente aux fins des con-
ditions définies auparagraphe 1 de l'article 80 du Règlement dela Cour. PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP. IND.HIGGINS) 222

Les partiesà un différend devraientêtretraitées de façoncomparable.
Or il semble résulterdu silence de la Cour dans la présenteordonnance

que, ce qu'elle envisageait comme une question de compétence en sta-
tuant sur les exceptions préliminaires soulevéespar les Etats-Unis à
l'égard de lademande principale, elle le traite comme une question de
fond quand elleexamine la réponsede l'Iranà la demande reconvention-
nelle.
Deuxièmement,l'Iran soutient que les navires énuméréq sui présentent
le caractère de navires de guerre sont exclus du champ d'application du
paragraphe 1 de l'articleX par les termes du paragraphe 2 du mêmear-
ticle. Il se peut que cela soit exact ou ne le soit pas dans ce contexte.
Cependant le silence de l'ordonnance sur cette question - que l'Iran
considérait manifestement comme pertinente aux fins de l'exigenced'une

((connexité directe)) figurant au paragraphe 1 de l'article 80 du Règle-
ment, et donc comme préliminaire -, signifie que l'Iran sera forcé de
répondre sur le fond à toutes les allégationsde fait et de droit relatives
aux demandes qui concernent des navires de guerre. La Cour n'a pas
appliqué aux deux Parties les mêmesprocédurespour déterminer l'éten-
due de sa compétenceen vertu du traité.
Incontestablement certaines des difficultésprocèdent des termes de
l'article 80 lui-même.Le paragraphe 1 de l'article 80 subordonne la rece-
vabilité des demandes reconventionnelles à deux exigences: qu'ellesaient
une connexité directeavec l'objet de la demande et qu'elles relèventde la
compétence de la Cour. Le paragraphe 3 de l'article 80 prévoit que la
Cour entend les parties «si le rapport de connexitéentre la demande pré-

sentéecomme demande reconventionnelle et l'objet de la demande de la
partie adverse n'est pas apparent)). Aucune disposition ne prévoitque les
parties doivent êtreentendues quand il n'estpas apparent que la demande
reconventionnelle relèvede la compétencede laCour. Il serait concevable
que cela, peut-être,ait été voulu et quel'on se soit proposé que laCour ne
statue sur d'éventuellesincertitudes relativessa compétence qu'enabor-
dant le fond. Il y aurait la une sorte d'exception permanente au para-
graphe 6 de l'article 79 du Règlement (ou, en d'autres termes, en cas de
contestation sur la compétence,toute demande reconventionnelle serait
toujours et nécessairementtraitéecomme n'ayant pas un caractèreexclu-
sivement préliminaire auxfins du paragraphe 7 de l'article 79). Quoi qu'il

en soit, l'idéequ'ilfaillestatuer sur la ((connexitédirecte))au sensdu para-
graphe 1 de l'article80àtitre préliminaire, tandis quela condition relative
à la compétenceprévuedans lemêmeparagraphe 1 de l'article 80doit être
examinée avecle fond, ne trouve aucun appui, quel qu'il soit,dans les tra-
vaux préparatoires des diversesversions du Règlement,y compris dans le
Règlement actuel.Sile paragraphe 3 de l'article 80ne «cadre» pas avec le
paragraphe 1 du mêmearticle, cela semble être parinadvertance et l'on
n'a eu aucune intention d'établir une distinctionentre les exceptions rela-
tivesà la ((connexité))et les exceptions relativàsla ((compétence)).
Ce que l'on peut dire, c'est qu'il ressort bien des travaux que, depuis
1922, la Cour s'est montrée résolue à se réserver un très largepouvoir PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP.IND.HIGGINS) 223

discrétionnairepour traiter cesquestions en fonction des circonstances de
chaque affaire. Dans l'exercicede ce pouvoir discrétionnaire, laCour a

constaté qu'au paragraphe 3 de l'article 80, si le ((rapportde connexité))
n'est pas apparent, l'inclusion de la formule «après avoir entendu les
parties))peut s'entendre, dans une affaire déterminée,du dépôtdeconclu-
sionsécrites '.Les termes du paragraphe 3de l'article 80n'exigentpas des
conclusions orales et ne les excluent pas. De plus, la Cour a considéré
aussi qu'elle avait suffisamment de latitude pour décider, malgré la ter-
minologie d'apparence restrictive du paragraphe 3 de l'article 80, que les
Parties peuvent êtreentendues (par écritou oralement) sur la question de
la compétence aussibien que sur celle du rapport de connexité.

L'exception autoriséepar le paragraphe 7 de l'article 79, qui consiste
ne pas statuer sur des questions préliminairespendant la phase prélimi-
naire, doit êtreutiliséeavec parcimonie pour ne pas aller à l'encontre du
but visépar la revision de cet article effectuée en 1978.De plus, les cri-
tères appliqués à l'Iran pour déterminer si ses demandes relevaient du
traitéde 1955auraient dû êtreappliqués égalementaux Etats-Unis (par
exemple pour rechercher si, sur la base des faits alléguésu , ne demande
reconventionnelle pouvait êtreprésentée en vertu de clauses et d'articles
déterminés). Les élémentssur lesquels la Cour s'est appuyéepour dire

que certaines demandes de l'Iran ne relevaient pas de sa compétenceen
vertu du traitéd'amitié et ne devaientdonc pas êtreexaminéesau fond
auraient dû êtreappliqués égalementdans le cas des demandes reconven-
tionnelles des Etats-Unis, afin de déterminersi elles doivent ou non être
traitéesdans leur intégralitéau stade du fond.
Il y a beaucoup à dire au sujet de trois principesjudiciaires. Première-
ment, les conclusions judiciaires doivent êtrejustifiéespar des motifs de
droit. Deuxièmement, il convient de statuer, chaque fois que c'est pos-
sible, sur les questions relatives à la compétence avant d'aborder le
fond. Troisièmement, les parties à une instance ont droit à l'égalitéde

traitement (voir, par exemple, Barcelona Traction, Light and Power
Company, Limited, exceptions préliminaires,C.I.J. Recueil 1964, p. 25;
Demande d'examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l'arrêt
rendupar la Cour le20 décembre 1974 dansl'affairedes Essais nucléaires
(Nouvelle-Zélande c. France), ordonnance du 22 septembre 1995, C.Z.J.
Recueil 1995, p. 296).

(Signé) Rosalyn HIGGINS.

'Cette question est soulevéedans la note 2 dela requête del'Iran et dansla déclaration
hoc, en l'affaire reàl'Applicationde la convention pourlaprévention et la répression
du crimedegénocide, demandes reconventionnelles,ordce17 décembre 1997C.ZJ.
Recueil 1997,p. 262-271et 278-286,respectivement.

37

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE HIGGINS

1agree with the Court's finding that the counter-claim presented by the
United States in its Counter-Memorial is admissible and now forms part
of the current proceedings.
There is, however, one point which the Court has not at al1addressed,
while nevertheless apparently making a negative finding on it; and there

are two further points which it seems to hold over for the merits, when
arguably they should have been disposed of at thisjuncture.
As the present Order recalls, Iran instituted proceedings against the
United States claimingbreaches by the latter of Article1,Article IV, para-
graph 1,and Article X, paragraph 1,of the Treaty of Amity of 1955.The
Court, having heard the preliminary objections to its jurisdiction of the
United States, in its Judgment of 12 December 1996determined that it
had jurisdiction "to entertain the claims made by the Islamic Republic of
Iran under Article X, paragraph 1, of that Treaty". It found it did not
have jurisdiction to entertain the claims under Article 1 and Article IV,
paragraph 1.

On 23 June 1997 the United States presented both a defence to
Iran's Memorial and the counter-claim which is the subject of the
present Order. The United States contended that Iran, for its part, had
engaged in actions which violated Article X of the Treaty. In Section 1
of its counter-claim it based its application on Article X, paragraph 1,
of the Treaty. In Section 2 it based its application on "the remainder of
Article X" and went on to refer particularly to acts it alleged constituted

violations of Article X, paragraph 3. In its submissions the Court
was asked to adjudge and declare that Iran had breached its obligations
under Article X, generally.

In its reply to the Court's invitation to present its views on Iran's
observations on the counter-claims (see paragraph 9 of this Order), the
United States further referred at paragraph 39 to "paragraphs X (2)
through X (5)". It both claimed violations of these provisions by refer-
ence to particular events and it objected that "Iran's jurisdictional argu-
ments seek to force al1 of the US counter-claim into the confines of
Article X (1) of the 1955Treaty".

The Court's Order makes no reference whatsoever to these exchanges
of the Parties save that it recalls in paragraph 26 that the United States
did indeed make claims under Article X, paragraphs 2 to 5. However, OPINION INDIVIDUELLE DE MME HIGGINS

[Traduction]

Je suis d'accord avec la Cour pour dire que la demande reconvention-
nelle présentéepar les Etats-Unis dans leur contre-mémoire estrecevable
et fait maintenant partie de l'instance en cours.
Il y a toutefois un point que la Cour n'a pas du tout examiné,bien
qu'elleait apparemment abouti à une conclusion négative à son sujet; et
ily a deux autres points qu'elle semblegarderpour lefond, alors que l'on

peut soutenir qu'ils auraient dû faire l'objet d'une décisione stade.
Comme le rappelle la présenteordonnance, l'Iran a introduit une ins-
tance contre les Etats-Unis en alléguant que ceux-ci avaient enfreint
l'article premier, le paragraphe 1 de l'article IV et le paragraphe 1 de
l'article X du traité d'amitiéde 1955.La Cour, après avoir examinéles
exceptions préliminairessoulevéespar les Etats-Unis à sa compétence,a
dit qu'elle a compétencedans son arrêtdu 12 décembre 1996 ((pour
connaître des demandes formuléespar la Républiqueislamique d'Iran au
titre du paragraphe 1de l'article Xudit traité».Elle a dit qu'ellen'a pas
compétencepour connaître des demandes formuléesau titre de l'article
premier et du paragraphe 1 de l'article IV.
Le 23juin 1997, lesEtats-Unis ont présenté à la fois leurs moyens de

défense à l'égarddu mémoirede l'Iran et de la demande reconvention-
nelle qui fait l'objet de la présenteordonnance. Les Etats-Unis ont sou-
tenu que l'Iran, pour sa part, commis des actes contraires à l'article X
du traité. Dans la section 1 de leur demande reconventionnelle, ils ont
fondéleur demande sur le paragraphe 1 de l'article X du traité. Dans la
section2, ils l'ont fondéesur les ((autres dispositionsde l'article X» et ils
se sont ensuite référépslus particulièrementdes actes qui constituaient,
alléguaient-ils,des violations du paragraphe3 de l'article X. Dans leurs
conclusions, la Cour étaitpriéede dire et juger quel'Iran avait enfreint
ses obligations au titre de l'article X de façon générale.
Dans leur réponse à l'invitation de la Couà présenter leursvues sur
lesobservationsde l'Iran relatives aux demandes reconventionnelles (voir

paragraphe 9 de la présente ordonnance), les Etats-Unis, au para-
graphe 39,sesont aussi référéasux ((paragraphes 2 à5 de l'articleX». Ils
ont à la fois allégué desviolations de ces dispositions en évoquant des
faits particuliers et soulevél'objection selon laquelle,dans ses argu-
ments relatifsàla compétence,l'Iran cherche à enfermer l'ensemble dela
demande reconventionnelle des Etats-Unis dans les limites du para-
graphe 1 de l'article X du traitéde1955)).
L'ordonnance de la Cour ne mentionne pas du tout ceséchangesentre
les Parties, sauf pour rappeler, au paragraphe 26, qu'effectivement les
Etats-Unis ont fondédes demandes sur les paragraphes 2 à 5 de l'ar-although the dispositifin paragraph A, as is customary, merely finds that
the counter-claim is admissible, it seems from the text of the Order that
this is only in relation to Article X, paragraph 1. In paragraph 34 the
Court states that "its jurisdiction in the present case covers claims under
Article X, paragraph 1, of the 1955 Treaty", the text of which it then
cites. In paragraph 36 it finds that the counter-claim falls

"within the scope of Article X, paragraph 1, of the 1955Treaty as
interpreted by the Court; and whereas the Court has jurisdiction to
entertain the United States counter-claim in so far as the facts
alleged may have prejudiced the freedoms guaranteed by Article X,
paragraph 1 ".

It may thus be that whileArticle X, paragraph 1,is the solebasis ofjuris-
diction identified by the Court, paragraphs 2 to 6 still have relevance to
the task of ascertaining the freedoms guaranteed under paragraph 1.

In the first place, findingsthat reject the contentions of a party should
be based on reasons. The disturbing tendency to offer conclusions but
not reasons is not to be welcomed. In the second place, the inarticulate
assumption that thejurisdictional basis established for a claim necessarily
is the onlyjurisdictional basis for, and sets the limits to, a counter-claim,
is open to challenge.

In both civiland common law domestic systems,as in the Rules of the
Court, a defendant seeking to bring a counter-claimmust show that the
Court has jurisdiction to pronounce upon them. But it is not essential
that the basis of jurisdiction in the claim and in the counter-claim be
identical. It is sufficientthat theresjurisdiction. (Indeed, were it other-
wise,counter-claimsin, for example, tort could never be brought, as they
routinely are, to actions initiated in contract.)

There is nothing in the Rules or practice of the Court to suggest that
the very identicaljurisdictional nexus must be established by a counter-
claimant. The travaux préparatoires to the various formulations of what
is now Article 80 of the Rules of Court contain no suggestion whatever
that this was thought of as a requirement. The rule on counter-claimshas
gone through successivechanges. But neither in the discussions of 1922,
nor of 1934, 1935, 1936,nor again of 1946, 1968, 1970,1972,does this
thought anywhere appear.
Attention was focused on the one hand on the required "connection"
and on the other on certain matters relating to jurisdiction, notably (in
1922) whether counter-claims were limited to compulsory jurisdiction
cases and whether objections to counter-claim jurisdiction would be
allowed. At no stage was it even proposed, much less accepted, that the
jurisdictional basis for the claim and counter-claim must be identical.ticle X. Cependant, bien qu'à l'alinéaA, comme à l'accoutumée,le dis-
positif se contente de déclarer recevablela demande reconventionnelle, il
semble résulterdu texte de l'ordonnance qu'il n'enest ainsi qu'au regard

du paragraphe 1 de l'article X. Au paragraphe 34, la Cour dit que «sa
compétenceen l'espècecouvr[e]les demandes formuléesau titre du para-
graphe 1de l'article X du traitéde 1955»,dont elle cite ensuite le texte.
Au paragraphe 36 elle dit que la demande reconventionnelle entre:
((dans lesprévisionsdu paragraphe 1de l'articleX du traitéde 1955
tel qu'interprétépar la Cour; et que celle-ci est compétentepour
connaître de la demande reconventionnelle des Etats-Unis dans la

mesure où les faits alléguéontpu porter atteinte aux libertésgaran-
ties par le paragraphe 1 de l'article.
Il se peut donc que, alors que le paragraphe 1 de l'article X constitue la
seule base de compétence déterminép ear la Cour, les paragraphes 2 à 6
restent pertinents lorsqu'il s'agit d'établir quelles libesont garanties
en vertu du paragraphe 1.
En premier lieu, les décisionsqui rejettent les prétentionsde l'une des

parties doivent êtremotivées.On ne doit pas admettre volontiers la ten-
dance regrettable à proposer des conclusions, mais non des motifs. En
second lieu, le postulat non explicitéselonlequelle fondement dela com-
pétence établipour une demande constitue nécessairement laseule base
de compétence d'une demande reconventionnelle, à laquelle il assignedes
limites, peut donner lieuà contestation.
Dans lessystèmestant de droit civilque decommon law,commedans le
Règlement dela Cour, un défendeurqui tente de présenter une demande
reconventionnelle doit établirque la Cour est compétentepour statuer à
son sujet. 11n'est toutefois pas essentiel que le fondement de la compé-
tence soit le mêmepour la demande principale et la demande reconven-
tionnelle.Il suffit que la compétenceexiste. (Certes, s'il n'en était pas
ainsi,jamais on ne pourrait présenter une demande reconventionnelle,par
exemple au titre de la responsabilitécivile délictuelledans une action
engagée enmatière contractuelle, alors quecela sefait de façon courante.)
Rien dans le Règlementou la pratique de la Cour n'indique que l'auteur

d'unedemandereconventionnelle doiveétablir unlien decompétence tout à
faitidentique.Lestravaux préparatoiresdes diversesformulations decequi
estmaintenant l'article80du Règlementde la Cour n'indiquent enrien que
l'on aitenvisagéune telle exigence.La règlerelative aux demandesrecon-
ventionnellesa fait l'objetdemodificationssuccessives.Cependant une telle
conceptionn'apparaît nulle part dans lesdiscussionsde 1922,ni dans celles
de 1934, 1935, 1936n ,i davantage dans cellesde 1946, 1968,1970,1972.
L'attention a porté surtout, d'une part, sur la ((connexité))requise et,
d'autre part, sur certaines questions relativesla compétenceet, en par-
ticulier (en922),sur cellede savoir silesdemandes reconventionnelles se
limitaient aux affaires relevant de la juridiction obligatoire et s'il allait
êtrepermis de soulever des exceptions d'incompétence s'agissant de
demandes reconventionnelles. Il n'a jamais étproposé àaucun moment,Nor does the wording of Article 80,paragraph 1,suggestthis. It requires
that a counter-claim "comes within the jurisdiction of the Court", not
that it "was within the jurisdiction established by the Court in respect of
the claims of the applicant".

Of course,the very requirement of a directconnection with the subject-
matter of the claim is likely to bring a counter-claimant into the same
generaljurisdictional area, i.e., the same treaty may wellform the basis of
the claimed jurisdiction for the bringing of a counter-claim. But that is
all.

The view of the Committee for the Revision of the Rules, when decid-
ing to retain the phrase "and that it comes within the jurisdiction of the
Court" from the old Rule, was that the phrase meant that a counter-
claimant could not introduce a matter which the Court would not have
hadjurisdiction to deal with had it beenthe subject of an ordinary applica-
tion to the Court.
And that remains the position under Article 80 of the present Rules of
Court, which continues simply to require that a counter-claim "comes
within the jurisdiction of the Court". The correct and necessary pro-
cedure in the present case would have been for the Court to enquire
whether it would have had jurisdiction to deal with the claims of the
United States, as they related to Article X, paragraphs 2 to 5, had they
"been the subject of an ordinary application to the Court".
In its Judgment of 12 December 1996(case concerning Oil Platforms
(Islamic Republic of Iran v. United States of America), Preliminary
Objection,1.C.J. Reports 1996, p. 803)the Court established the metho-

dology for doing this where there is contested jurisdiction under a
treaty. The test is whether the facts as claimed by the applicant might
give to a violation of a specifiedprovision (whether the facts are in fact
correct, whether they do constitute a violation, and if there is a defence,
are then al1matters for the merits). There is no reason why the Court
should not have engaged in this exercisein relation to the counter-claim
of the United States based on Article X, paragraphs 2 to 5, of the 1955
Treaty and thus to provide it with a reasoned response, one way or the
other.
Iran, too, seems not really to expect any eligible counter-claim to be
limited to matters falling under Article X, paragraph 1, of the Treaty of
Amity. Its document of 18November 1997,entitled "Request for Hear-
ing in Relation to the United States Counter-Claim Pursuant to Ar-
ticle 80 (3) of the Rules of Court" is replete with arguments directed
towards showing that the specificcounter-claims of the United States are
excluded by their facts from falling under Article X, paragraphs 3 to 5
(paras. 17, 19 (b), 19 (d), 19 (e), 19 (f), 21 and footnotes 21 and 24.)ni moins encore accepté, d'exiger unfondement de la compétence iden-
tique pour la demande principale et la demande reconventionnelle. Le
libellédu paragraphe 1 de l'article 80 ne le donne pas davantage à en-
tendre. Il exige qu'une demande reconventionnelle ((relèvede la compé-

tence de la Cour» et non pas qu'elle ((relèvede la compétenceétablie
par la Cour à l'égarddes réclamationsdu demandeur)).
Bien entendu, l'exigence même d'une connexité directeavec l'objet de
la demande principale serait de nature à faire entrer l'auteur de la
demande reconventionnelle dans le mêmedomaine général de compé-
tence, autrement dit le mêmetraité peutbien servir de base pour fonder
la compétenceinvoquéeafin de présenter une demande reconvention-
nelle.Il n'y a rien de plus.
Lorsque le comitépour la revision du Règlementa décidé de garder la
formule «et qu'elle relèvede la compétence dela Cour »,qui figuraitdans
l'ancien Règlement, il a estiméque cette formule signifiait que l'auteur
d'une demande reconventionnelle ne pouvait pas présenter une demande

que la Cour n'aurait pas eu compétencepour en connaître, si elle avait
fait l'objet d'une requête ordinaire devant elle.
Telle reste la position adoptée au titre de l'article 80 du Règlement
actuel de la Cour, qui continue à exiger simplement que la demande
reconventionnelle ((relèvede la compétencede la Cour». En l'espèce, à
supposer que les demandes des Etats-Unis relatives aux paragraphes 2à
5 de l'article X aient «fait l'objet d'une requête ordinaire devant la
Cour», la procédure correcte et nécessaireaurait étépour la Cour de
rechercher si elle était compétentepour en connaître.
Dans son arrêtdu 12 décembre1996(affaire des Plates-formes pétro-
lières(Républiqueislamique d'Iran c. Etats-Unis d'Amérique),exception
puéliminaire,C.I.J. Recueil 1996, p. 803), la Cour a définila méthodà

suivre à cette fin lorsqu'il y a une contestation sur la compétence établie
par un traité.Le critèreconsiste savoir si lesfaits allégsar le deman-
deur peuvent s'appliquer à une violation d'une disposition déterminée
(quant à savoir silesfaits sont avér,'ilsconstituentvraiment une viola-
tion et s'ilexisteun moyen de défense,il s'agitde questionsqui relèvent
du fond). Rien n'explique quela Cour n'ait pas entrepris cette recheàche
propos delademande reconventionnelledesEtats-Unis fondéesurlespara-
graphes 2 à 5 de l'article X du traitéde 1955,de manièreà donner à ce
sujet une réponse motivéed, ans un sens ou dans l'autre.
L'Iran, lui non plus, ne semble pas réellements'attendre ce qu'une
demandereconventionnelle répondantaux conditions requises selimite à
des questions qui relèventdu paragraphe 1de l'article X du traitéd'ami-

tié.Son document du 18novembre 1997intitulé((Demandetendant à ce
que lesparties soiententendues au sujet de la demande reconventionnelle
des Etats-Unis en application du paragraphe 3 de l'article 80 du Règle-
ment de la Cour» abonde en arguments qui tendent à établir quelesfaits
allégués à l'appui des demandes reconventionnelles précisesdes Etats-
Unis excluent que celles-cirelèvent desparagraphes 3 à 5 de l'article X
(par. 17, 19b), 19d), 19e), 19f), 21, ainsi que les notes 21 et 24). Implicit in the Court's unexplained reliance on Article X, paragraph 1,
as the apparent sole basis of jurisdiction is the thought that a counter-
claim can only arise out of an initial claim, and therefore cannot be on a
widerjurisdiction basis than the initial claim. But it is not a question of a
counter-claimant being able to "expand" the jurisdiction initially estab-
lished by the Court. The Court first establishes its jurisdiction by refer-
enceto the facts as allegedby the claimant. But that does not mean to say
that it might not have jurisdiction in relation to allegations brought by
the defendant under other clauses of the same treaty.

The Order which the Court issued on 17December 1997in respect of
the GenocideConventioncase (also concerningtreaty-basedjurisdiction)
referred to the matter in the following terms:
"Whereas the Respondent cannot use a counter-claimas a means
of referring to an international court claims which exceed the limits
of its jurisdiction as recognized by the parties . .." (Application of

the Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of
Genocide, Counter-Claims, Order of 17 December 1997, 1C.J.
Reports 1997, p. 257, para. 31; emphasis added).

What matters in a counter-claim is the jurisdiction mutually recognized
by the parties under the Treaty - not the jurisdiction established by the
Court in respect of particular factsinitially alleged by the claimant. (It so

happens in the Genocide Convention that the identical basis of jurisdic-
tion was in issue for both parties, in relation to erga omnes obligations.)

The test in the GenocideConventioncase of "jurisdiction as recognized
by the parties" will only be met when the Court decides whether Ar-
ticleX, paragraphs 2 to 5, on the facts alleged by the Defendant, might
sustain claims of violations by the Applicant. The Order, which is the
vehiclefor dealing with preliminarymatters in the counter-claim,should
have contained a reasoned decision on this point.

The matter may usefully be looked at in the following way. There
either is, or isot, jurisdiction to sustain claims, on the basis of the facts
alleged by the United States, in relation to Article X, paragraphs 2 to 5.

If an initial claim could have been brought claiming breaches of these
provisions, that cannot be taken away by virtue of the fact that the Court
has already established its jurisdiction, in respect of another provision
(Art. X, para. 1)in respect of claims articulated by Iran.

This would in effect revise treaty jurisdiction "as recognized by the
parties" through a judicial finding on jurisdiction relating to an initial
claimant under a particular provision. PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP.IND.HIGGINS) 220

Implicitement, la manièredont la Cour sefonde, sans l'expliquer, surle
paragraphe 1de l'articleX comme base apparemment unique de la com-
pétencesuppose qu'à son avis une demande reconventionnelle ne puisse
procéderque d'unedemande initiale et ne puisse donc pas reposer sur une
base juridictionnelle plus étendueque la demande initiale. Or il ne s'agit
pas de l'aptitude de l'auteur d'une demandereconventionnelle à «élargir»
la compétenceinitialementétabliepar la Cour. La Cour établit d'abordsa
compétencepar rapport aux faits qu'allèguele demandeur. Cela ne signi-

fiepas qu'elle ne puissepas être compétenteà l'égard d'allégationsformu-
léespar le défendeuren invoquant d'autres clauses du mêmetraité.
L'ordonnance rendue par la Cour le 17décembre1997enl'affairede la
Conventionsur le génocide(qui concernait aussi une compétencefondée
sur un traité)se réfèreà cette question dans les termes suivants:
((Considérant que le défendeurne saurait tirer parti de l'action

reconventionnelle pour porter devant le juge international des
demandes qui excéderaitles limites dans lesquelles lesparties ont
reconnu sa compétence...))(Application de la conventionpour lapré-
vention et la répressiondu crime de génocide,demandes reconven-
tionnelles, ordonnance du 17 décembre 1997,C.I.J. Recueil 1997,
p. 257, par. 31;les italiques sont de moi.)
Ce qui compte dans une demande reconventionnelle, c'estla compétence

mutuellementreconnue par les parties en vertu du traité - et nonpas la
compétenceétabliepar la Cour à l'égard de faits particuliers initialement
allégués par le demandeur. (Il se trouve que, dans la Convention sur le
génocide, la base de compétenceidentique était en litige entre les deux
Parties, au regard d'obligationserga omnes.)
Pour satisfaire au critère des limites «dans lesquelles les parties ont
reconnu sa compétence)),appliquéen l'affaire de la Convention sur le
génocide, la Cour devra décidersi les paragraphes 2 à 5 de l'article X,
compte tenu des faits alléguéspar le défendeur, peuvent fonder des
demandes relatives à des violations commisespar ledemandeur. L'ordon-
nance, qui constitue lemoyen de statuer sur lesquestions préliminaires de
la demande reconventionnelle, aurait dû contenir une décision motivée
sur ce point.
Il peut êtreutile d'envisagerla question de la façon suivante. Au regard

des paragraphes 2 à5 de l'article X la compétenceinvoquée à l'appui de
demandes fondées sur les faits alléguéspar les Etats-Unis existe ou
n'existe pas. S'ilétaitpossible de présenterune demande initiale en allé-
guant des violations de ces dispositions, cette faculténe saurait dispa-
raître parce que la Cour a déjà établisa compétenceen vertu d'une autre
disposition (le paragraphe 1de l'article) pour des demandes formulées
par l'Iran.
Sinon, en réalité,la compétencefondée surun traité«dans les limites
dans lesquellesles parties [l']ontreconnue))serait modifiéepar une déci-
sionjudiciaire sur la compétencerendue à propos d'une demande initiale
fondée sur une disposition déterminée. If, arguendo, the treaty provisions of Article X, paragraphs 2 to 5,
would have founded jurisdiction in an initial claim then presumably the
United States could still bring a claim de novoeven if it is not allowed to
do so as a counter-claim under the Court's Order. Such a result is hardly
consistent with the stated purpose of counter-claims, namely, conven-
ience of court management. It underlines that what is required under
Article 80, paragraph 1, of the Rules is that a counter-claim "comes
within the jurisdiction of the Court" by reference to the normal juris-
dictional principles rather than by reference to the particular basis of
jurisdiction that the initiallaimant happens to have relied on in relation
to its own particular facts.

If the United States might reasonably have expected a reasoned
response to its claim that the Court hasjurisdiction under Article X, para-
graphs 2 to 5, as well as under Article X, paragraph 1, Iran might
reasonably have expected that, on the basis of equality of treatment,
this Order would have resolved two items on which it is in fact silent.

In the counter-claim the facts alleged concern destruction of vessels
rather than oil platforms. The issue of whether Article X, paragraph 1,is
restricted to commerce between the two Parties was fully canvassed as an

issue relevant to jurisdiction in the jurisdictional phase of this case. In the
event, the Court stated that it did "not have to enter into the question
whether [Article X, paragraph 11is restricted to commerce 'between'the
Parties" as it was "not contested between them that oil exports from Iran
to the United States were - to some degree - ongoing" (Oil Platforms
(Islamic Republic of Iran v. United States of America), Preliminary
Objection, Judgment, I.C.J. Reports 1996,pp. 817-818,para. 44). And in
the context of the counter-claim there is not agreement as to the existence
that al1the vessels wereengaged in commerce between the Parties. Iran
argues that in many of the incidents cited by the United States in its
counter-claim, the vessels "were not (even arguably) engaged in com-
merce or even navigation between the territories of the High Contracting
Parties" (Iranian Request, para. 21). It would seem that, in order to

determine whether it has jurisdiction in respect of claims relating to dam-
age to warships under Article X, paragraph 1, of the Treaty, the matter
which it was not necessary to decide in 1996 must now be decided in
1998.Iran has treated this question as going to jurisdiction and as rele-
vant to the conditions laid down in Article 80, paragraph 1, of the Rules
of Court. Si, pour les besoins de l'argumentation, on admet que les dispositions
conventionnelles des paragraphes 2 à 5 de l'article X auraient fondé la
compétenceaux fins d'une demande initiale, alors les Etats-Unis, semble-
t-il, pourraient encore présenter une demande de novo, bien qu'aux
termes de l'ordonnance de la Cour ils ne soient pas autorisés à le faireà
titre de demande reconventionnelle. Une telle conséquencen'est guère
compatible avec le but déclaré des demandes reconventionnelles, c'est-
à-dire la commodité de l'administration delajustice. Cela souligne que ce

qu'exige le paragraphe 1 de l'article 80 du Règlement, c'est qu'une
demande reconventionnelle((relèvedela compétencedelaCour ))par rap-
port aux principes de juridiction normaux, plutôt que par rapport à la
base de compétence déterminée que le demandeur initial se trouve avoir
invoquée à l'égard des faits qu'il alléguait lui-même.

Si les Etats-Unis pouvaient raisonnablement s'attendre à une réponse
motivée à leur demande selon laquelle la Cour est compétente en vertu
des paragraphes 2 à 5 de l'article X, mais aussi sur la base du para-
graphe 1du mêmearticle, l'Iran pouvait raisonnablement s'attendre à ce
qu'au titre de l'égalité dtraitement la présenteordonnance tranche deux
questions sur lesquelles elle garde en réalitéle silence.
Dans la demande reconventionnelle, les faits allégués concernent la
destruction de navires plutôt que celle de plates-formes pétrolières. Le

point de savoir si le paragraphe 1 de l'article X se limite au commerce
entre les deux Parties a été examinée de façon exhaustive en tant que
question pertinente aux fins de lajuridiction dans la phase de la présente
affaire relativà la com~étence.En l'occurrence la Cour a déclaré au'elle
«n'a pas à se pencher sur la question de savoir si cette disposition ne
s'applique qu'au commerce ((entre»les Parties)), car celles-ci«ne contes-
tent pas ..que les exportations de pétrole del'Iran vers les Etats-Unis se
soient - dans une certaine mesure - poursuivies» (Plates-formespétro-
lières(Républiqueislamiqued'Iran c. Etats-Unis d'Amérique),exceptions

préliminaires,arrêt, C.1.J. Recueil 1996, p. 817-818, par. 44). Du point
de vue de la demande reconventionnelle, il n'y a pas d'accord sur le fait
que tous les navires participaient au commerce entre les Parties. L'Iran
soutient aAe.2lors de nombre des incidents citéspar les Etats-Unis dans
leur demande reconventionnelle, il s'agissait de navires qui «ne partici-
paient pas (et dont on ne peut mêmepas soutenir qu'ils participaient) au
commerce ni même à la navigation entre les territoires des Hautes Parties
contractantes)) (requêtede l'Iran, par. 21). Il semble que, pour décider

si la Cour est compétente en vertudu paragraphe 1de l'article X du traité
pour connaître des demandes relatives aux dommages infligés à des na-
vires de guerre, il faille statuer maintenant, en 1998, sur la question
qu'il n'étaitpas nécessairede trancher en 1996.L'Iran a traitécette ques-
tion comme se rattachant àla compétence et pertinente aux fins des con-
ditions définies auparagraphe 1 de l'article 80 du Règlement dela Cour.222 OIL PLATFORMS (SEP.OP.HIGGINS)

Parties to litigation should be treated in a comparable manner. But,
from the silence of the Court in the present Order, it seems that what it
saw as a jurisdictional question when determining United States prelimi-

nary objections to the main claim it treats as a matter forthe merits when
considering Iran's response to the counter-claim.

Second, Iran claims that those itemized vessels identified as warships
are excluded from the reach of Article X, paragraph 1, by the terms of
Article X, paragraph 2. This may or may not be correct in the particular
context. But the silence of the Order on this question - which Iran
clearly saw as relevant to the "direct connection" requirement in
Article 80, paragraph 1, of the Rules, and thus as preliminary - means
that Iran willperforce have to answer on the merits al1contentions of fact

and law relating to the claims concerning warships. The Court has not
applied the same procedures, in determining the scope of its jurisdiction
under the Treaty, to both of the Parties.

Undoubtedly, some of the difficultiesstem from the terms of Article 80
itself. Paragraph 1 of Article 80 contains two requirements for counter-
claims to be admissible - that they have a direct connection with the
subject-matter of the claim and that they come within the jurisdiction of
the Court. Paragraph 3 of Article 80 provides that the Court shall hear
the parties "In the event of doubt as to the connection between the ques-

tion presented by way of counter-claim and the subject-matter of the
claim of the other party." No provision is made to hear the parties in the
event of doubt as to whether the counter-claim comes within the jurisdic-
tion of the Court. It might be thought that this was perhaps deliberate,
and that the intention was that the Court would resolve any doubts as to
its jurisdiction only when it got to the merits. This would be a sort of
standing exception to Article 79, paragraph 6, of the Rules (or, put dif-
ferently, a counter-claim where jurisdiction is contested would always
and necessarily be treated as not having an exclusivelypreliminary char-
acter under Article 79, paragraph 7). In any event, the idea that "direct
connection" within the meaning of Article 80, paragraph 1, should be

disposed of as a preliminary matter, while the jurisdiction requirement in
Article 80, paragraph 1, should be dealt with on the merits finds no sup-
port at al1in the travaux préparatoires of the various versions of the
Rules, including the present Rules. The failure of Article 80,paragraph 3,
to "match" Article 80, paragraph 1, seems to have been inadvertent and
there was no intention to distinguish between objections relating to "con-
nection" and those to "jurisdiction".

What can be said is that thetravaux do show that the Court has, since
1922,resolved to keep ample room for discretion in the handling of these PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP. IND.HIGGINS) 222

Les partiesà un différend devraientêtretraitées de façoncomparable.
Or il semble résulterdu silence de la Cour dans la présenteordonnance

que, ce qu'elle envisageait comme une question de compétence en sta-
tuant sur les exceptions préliminaires soulevéespar les Etats-Unis à
l'égard de lademande principale, elle le traite comme une question de
fond quand elleexamine la réponsede l'Iranà la demande reconvention-
nelle.
Deuxièmement,l'Iran soutient que les navires énuméréq sui présentent
le caractère de navires de guerre sont exclus du champ d'application du
paragraphe 1 de l'articleX par les termes du paragraphe 2 du mêmear-
ticle. Il se peut que cela soit exact ou ne le soit pas dans ce contexte.
Cependant le silence de l'ordonnance sur cette question - que l'Iran
considérait manifestement comme pertinente aux fins de l'exigenced'une

((connexité directe)) figurant au paragraphe 1 de l'article 80 du Règle-
ment, et donc comme préliminaire -, signifie que l'Iran sera forcé de
répondre sur le fond à toutes les allégationsde fait et de droit relatives
aux demandes qui concernent des navires de guerre. La Cour n'a pas
appliqué aux deux Parties les mêmesprocédurespour déterminer l'éten-
due de sa compétenceen vertu du traité.
Incontestablement certaines des difficultésprocèdent des termes de
l'article 80 lui-même.Le paragraphe 1 de l'article 80 subordonne la rece-
vabilité des demandes reconventionnelles à deux exigences: qu'ellesaient
une connexité directeavec l'objet de la demande et qu'elles relèventde la
compétence de la Cour. Le paragraphe 3 de l'article 80 prévoit que la
Cour entend les parties «si le rapport de connexitéentre la demande pré-

sentéecomme demande reconventionnelle et l'objet de la demande de la
partie adverse n'est pas apparent)). Aucune disposition ne prévoitque les
parties doivent êtreentendues quand il n'estpas apparent que la demande
reconventionnelle relèvede la compétencede laCour. Il serait concevable
que cela, peut-être,ait été voulu et quel'on se soit proposé que laCour ne
statue sur d'éventuellesincertitudes relativessa compétence qu'enabor-
dant le fond. Il y aurait la une sorte d'exception permanente au para-
graphe 6 de l'article 79 du Règlement (ou, en d'autres termes, en cas de
contestation sur la compétence,toute demande reconventionnelle serait
toujours et nécessairementtraitéecomme n'ayant pas un caractèreexclu-
sivement préliminaire auxfins du paragraphe 7 de l'article 79). Quoi qu'il

en soit, l'idéequ'ilfaillestatuer sur la ((connexitédirecte))au sensdu para-
graphe 1 de l'article80àtitre préliminaire, tandis quela condition relative
à la compétenceprévuedans lemêmeparagraphe 1 de l'article 80doit être
examinée avecle fond, ne trouve aucun appui, quel qu'il soit,dans les tra-
vaux préparatoires des diversesversions du Règlement,y compris dans le
Règlement actuel.Sile paragraphe 3 de l'article 80ne «cadre» pas avec le
paragraphe 1 du mêmearticle, cela semble être parinadvertance et l'on
n'a eu aucune intention d'établir une distinctionentre les exceptions rela-
tivesà la ((connexité))et les exceptions relativàsla ((compétence)).
Ce que l'on peut dire, c'est qu'il ressort bien des travaux que, depuis
1922, la Cour s'est montrée résolue à se réserver un très largepouvoirmatters, on a case-by-case basis. In the exercise of this discretion the
Court has determined that the reference in Article 80, paragraph 3, in
case of doubt as to "connection", to the phrase "after hearing the
parties" may be taken in a particular case as the receipt of written
submissionsl. Oral submissions are neither required by the terms of
Article 80, paragraph 3, nor excluded. Further, the Court has also
found sufficientfreedom to decide, notwithstanding the apparently limit-

ing terminology of Article 80, paragraph 3, that the Parties may be
heard (whether in writing or orally) on the question ofjurisdiction as well
as on the question of connection.

The exception allowed in Article 79, paragraph 7, whereby prelimi-
nary matters are not disposed of at the preliminary phase, is to be used
sparingly, lest the purpose underlying the 1978alteration to that Article
be negated. Further, the tests applied to Iran to see if its claims came
under the 1955 Treaty should equally have been applied to the United
States (Le., to see, if on the facts alleged, a counter-claim could pos-
sibly lie under particular articles and clauses). The process by which
certain claims of Iran were found not to be within the jurisdiction of
the Court under the Treaty of Amity, and would thus not proceed to

the merits, should be equally applied to the counter-claims of the United
States to see whether or not they should advance in their entirety to the
merits.

There is much to be said for three judicial principles. First, judicial
conclusions should be justified bylegal reasons. Second, matters going to
jurisdiction should, whenever possible, be disposed of before proceeding
to the merits. Third, parties to litigation are entitled to an equality of
treatment (see, for example, Barcelona Traction, Light and Power Com-
pany, Limited, Preliminary Objections, I.C.J. Reports 1964, p. 25;
Request for an Examination of the Situation in Accordance with Para-
graph 63 of the Court's Judgment of 20 December 1974 in the Nuclear
Tests (New Zealand v. France) Case,
Order of 22 September 1995,
I.C.J. Reports 1995, p. 296).

(Signed) Rosalyn HIGGINS.

' This matter is raised in footnote 2 of Iran's Request and in the declaration of Judge ad
hoc KreCaand the separate opinion of Judge ad hoc Lauterpacht in the Application of the
Convention on the Prevention and Punishment of the Crime of Genocide, Counter-Claims,
Order of 17 December 1997, I.C.J. Reports 1997, pp. 262-271and 278-286,respectively. PLATES-FORMES PÉTROLIÈRES (OP.IND.HIGGINS) 223

discrétionnairepour traiter cesquestions en fonction des circonstances de
chaque affaire. Dans l'exercicede ce pouvoir discrétionnaire, laCour a

constaté qu'au paragraphe 3 de l'article 80, si le ((rapportde connexité))
n'est pas apparent, l'inclusion de la formule «après avoir entendu les
parties))peut s'entendre, dans une affaire déterminée,du dépôtdeconclu-
sionsécrites '.Les termes du paragraphe 3de l'article 80n'exigentpas des
conclusions orales et ne les excluent pas. De plus, la Cour a considéré
aussi qu'elle avait suffisamment de latitude pour décider, malgré la ter-
minologie d'apparence restrictive du paragraphe 3 de l'article 80, que les
Parties peuvent êtreentendues (par écritou oralement) sur la question de
la compétence aussibien que sur celle du rapport de connexité.

L'exception autoriséepar le paragraphe 7 de l'article 79, qui consiste
ne pas statuer sur des questions préliminairespendant la phase prélimi-
naire, doit êtreutiliséeavec parcimonie pour ne pas aller à l'encontre du
but visépar la revision de cet article effectuée en 1978.De plus, les cri-
tères appliqués à l'Iran pour déterminer si ses demandes relevaient du
traitéde 1955auraient dû êtreappliqués égalementaux Etats-Unis (par
exemple pour rechercher si, sur la base des faits alléguésu , ne demande
reconventionnelle pouvait êtreprésentée en vertu de clauses et d'articles
déterminés). Les élémentssur lesquels la Cour s'est appuyéepour dire

que certaines demandes de l'Iran ne relevaient pas de sa compétenceen
vertu du traitéd'amitié et ne devaientdonc pas êtreexaminéesau fond
auraient dû êtreappliqués égalementdans le cas des demandes reconven-
tionnelles des Etats-Unis, afin de déterminersi elles doivent ou non être
traitéesdans leur intégralitéau stade du fond.
Il y a beaucoup à dire au sujet de trois principesjudiciaires. Première-
ment, les conclusions judiciaires doivent êtrejustifiéespar des motifs de
droit. Deuxièmement, il convient de statuer, chaque fois que c'est pos-
sible, sur les questions relatives à la compétence avant d'aborder le
fond. Troisièmement, les parties à une instance ont droit à l'égalitéde

traitement (voir, par exemple, Barcelona Traction, Light and Power
Company, Limited, exceptions préliminaires,C.I.J. Recueil 1964, p. 25;
Demande d'examen de la situation au titre du paragraphe 63 de l'arrêt
rendupar la Cour le20 décembre 1974 dansl'affairedes Essais nucléaires
(Nouvelle-Zélande c. France), ordonnance du 22 septembre 1995, C.Z.J.
Recueil 1995, p. 296).

(Signé) Rosalyn HIGGINS.

'Cette question est soulevéedans la note 2 dela requête del'Iran et dansla déclaration
hoc, en l'affaire reàl'Applicationde la convention pourlaprévention et la répression
du crimedegénocide, demandes reconventionnelles,ordce17 décembre 1997C.ZJ.
Recueil 1997,p. 262-271et 278-286,respectivement.

37

Document file FR
Document Long Title

Opinion individuelle de Mme. Higgins (traduction)

Links