Opinion dissidente de M. Broms (traduction)

Document Number
086-19910729-ORD-01-04-EN
Parent Document Number
086-19910729-ORD-02-00-EN
Document File
Bilingual Document File

OPINION INDIVIDUELLE DE M. BROMS

[Traduction]

M'étant associéaux autres membres de la Cour pour adopter la
présenteordonnance, je tiens à expliquer les faits qui constituent la toile
de fondde son adoption. Cefaisant,je merendsbiencomptequ'à cestade

les commentaires ne:doivent porter que sur la demande en indication de
mesuresconservatoires,car le fond de l'affaire ne sera examinéque lors-
que la Cour rendra son arrêt définitif. Pointn'estbesoin de rappeler que
les Parties ont effectivement,l'audience, abordécertaines questions de
fond pour justifierleur point de vue sur les mesures conservatoires.Cela
s'estrévéléindispensable pour déterminersila cause du demandeur était
fondée primafacie.
A l'époque oùla Finlande a présenté sademande en indication de
mesures conservatoires, les conditions normalement requises pour son
acceptation semblaient réunies. La compétencede la Cour ne présentait
aucun problème; la demande au fond soulevait à l'évidence des
problèmesjuridiques àtrancher par la Cour et avaità première vue des
chances raisonnablt:~ d'êtreaccueillie. En outre, le demandeur pouvait
prouver que sans I'iridicationdemesuresconservatoiresunpréjudiceirré-

parable eût pu êtrecauséau droit de librepassagedes navires de forage et
plates-formespétrolièresfondé,selonsesallégations,sur plusieurstraités
internationaux et sur la coutume internationale. La condition d'urgence,
qui a souventjoué un rôle décisiflorsque la Cour a eu à statuer sur les
demandes en indication de mesures conservatoires,semblait également
remplie. Ledélaifixépour l'acceptation dessoumissionsfinales relatives
à la construction du pont sur le chenal Est venaiàexpiration le 18août
1991etlescommandes de plates-formespétrolièresetde navires de forage
finlandais risquaient de connaîtreunebaisse, lesacheteurséventuelscrai-
gnant que leurconstructionsoitbientôtarrêtéeenraisonde l'impossibilité
d'utiliser le droitde librepassage par le Grand-Belt.
A l'audience, le ~Gouvemementdu Danemark déclara que, selon le
déroulement prévu des travaux de construction du pont sur le chenal Est,
«il n'yaura pas d'obstacle matérielau passage par le Grand-Beltavant la

fin de l'année 1994~ (observations écrites du Danemark, par. 140, 2);
audience du mardi 2juillet 1991,matin, CR 91/11,p. 11(M.Lehmann)). Il
ajouta que d'icilà la Cour aurait rendu un arrêt définitifen l'espèce.Sur
ce, l'agent duDaneimarkdit que rien n'obligeait à indiquer des mesures
conservatoires (ibid.).Il expliqua en outre que la construction du pont sur
le chenal Est ne créerait pas, en pratique, d'obstacle au passage par les
détroitsdanoisdes unitésmobiles de forageoffshorefinlandaises etque la
navigation dans leGrand-Belt pourrait sepoursuivrecomme par le passé
(voir le paragraphe:25de l'ordonnance). Ainsi,selon l'agentdu Danemark, iln'ya pasurgence. Lasituationtelle
qu'elleseprésentait àl'origine futencoremodifiéedu fait quepar lasuite,
au cours de son délibéré sur la demande, la Cour a décidéde rendre son
arrêtdéfinitifenl'espècedans lesmeilleursdélais,probablement au cours
du printemps ou,au plus tard, de l'automne 1992.Cette décision,s'ajou-
tant auxassurances donnéespar le Danemark en cequiconcerne lemain-
tien du droit de libre passage, oblige à voir sous un jour nouveau la
question de l'urgence. Le droit de transit est maintenant garanti aux
navires finlandais, ycompris lesplates-formespétrolièresetlesnavires de
forage, au moins jusqu'à la fin de l'année 1994 et la Cour tranchera
l'affaireavectoute lacéléritépossible- entout casavant cetemps. Ainsi,

par suite des événementsque j'ai expliqués,la base matériellejustifiant
l'acceptation de la demandeen indication de mesuresconservatoires a été
modifiée.Avecceschangements, les conditionsnécessaires à l'accueil de
la demande se sonttrouvéesréduitessansqu'ily ait eu aucunefautede la
part du demandeur. L'autre solution possible était la présente ordon-
nance.
Cette ordonnance:confirme les assurances, déjà mentionnées,que le
Danemark a données à la Cour. Le plus important, toutefois, c'est la
teneur duparagraphe 32de l'ordonnance, dans lequel la Cour soulignela
règlede droitbienétablieselonlaquelleun Etat partie àun différendavec
un autre Etat devant la Cour ne saurait améliorer sa position juridique
vis-à-visde cet autre:Etat par quelque action que ce soitendente lite,et
qu'aucune action de ce genre «ne saurait exercer une influence quelcon-

que surl'étatde droitqu'il incombe àla Cour de définir»(Statutjuridique
du territoiredu sud-est du Groënland,C.P.J.I.sérieA/B no48,p. 287).Ce
principe concerne naturellement les deux Parties mais, compte tenu des
circonstances de la présente affaire,sonimportance est particulièrement
grande pour la Finlande, qu'il protège contre tout changement préjudi-
ciable que pourrait entreprendre 1'Etattitulaire de l'autorité territoriale
sur le Grand-Belt.
Dans son ordonnance, la Cour tranche aussi une autre question juri-
dique importante évoquée àl'audience par le conseil du Gouvernement
du Danemark, M. Bowett.Celui-cia faitvaloir quedans lecas où uneresti-
tution en nature se révéleraitune charge excessive pour le Danemark,
une indemnisation pécuniaire du dommage constituerait une réparation
suffisante pour la Finlande, si la Cour lui donnait gain de cause au fond

(audience du 5juillet 1991,CR 91/14, p. 45).Mais ce n'estpas là ceque le
demandeur cherche àobtenir.Cequ'il cherche àobtenir, c'estunerestitu-
tion en nature. Par conséquent,l'opinionde la Cour privant de validitéla
théorie danoise est correcte et constitue une interprétation importante.
Enfin, je considé:reégalement comme extrêmementimportante la
teneur des paragraphes 33 et 34, compte tenu en particulier du para-
graphe 35 dans lequella Cour dit qu'une négociation entreles Parties en
vue de parvenir au règlement de leur différend serait la bienvenue. Le
principe de l'égalitdetraitement des Parties a étappliquédefaçontout
à faitcorrecteauxparagraphes 33et34,dans lesquels lesdeux Partiessontinvitéesa examinerdifférentessolutionspour résoudre ledifférend.Avec
l'aide desexpertstechniques de l'uneetdel'autre,lesnégociationsfutures
recommandées par la Cour aux deux Parties pourraient se révélerdéci-
sivespour trouver Uriesolution mutuellement acceptable.
Je n'ai pu me défairede l'impression que ce différendest de ceux que
desnégociationsentre lesdeuxgouvernementspermettraientpeut-être de
résoudre.En s'engageant dans cette voie,ceux-cine feraient qu'agir dans
l'esprit de courtoisie et de coopération propre aux pays nordiques en
n'épargnant aucun effortpour trouver une solution satisfaisante pour les
deux Parties.
Après tout, le différend principal doit être ramené à des dimensions

réalistes.On adu mal à imaginerque lecoût, pour le Danemark, del'amé-
nagement d'une ouverture dans le pont sur le chenal Est au moyen d'un
ponttournant, ou encored'une autre solutiontechnique,puissereprésen-
ter plus qu'une assez petite fraction du coût total de la construction qui,
nousdit-on, s'élèveà plus de 4milliards de dollars.Unetellemodification
ne devrait pas non plusretarder sensiblement lestravaux de construction,
à supposerque la décision nécessairesoitprisedansun avenirprochain.
Comme la Cour elle-même,dans son ordonnance, suggèredes négocia-
tions aux Parties, on ne peut plus dire que l'acceptation de négociations
leur ferait perdre la face l'une ou à l'autre. Bien au contraire, la Cour
apprécierait un tel effort de leur part. Il va sans dire que même si les
Parties ne pouvaie:nt résoudre leur différend par des négociations
directes, les résultatsde ces dernières,et notamment les solutionstechni-

ques qui pourraient Ctreenvisagées,seraient utileà la Cour qui, pour des
raisonsbien évidentes,est forméedejuristes et non de techniciens.
Comme la Cour ;imaintenant décidé d'examiner avec célérité cette
affaire,lasolutionqii'elleadopte estdans l'intérêt desdeux Parties.Onne
doit pas laisserl'incertitude causée par la situation durer plus qu'il n'est
absolument nécessaire. Maintenant que la Cour a adopté son ordon-
nance, ilfaut espérerqu'avec la coopération desdeux agentsl'affaire sera
effectivementtranchée sur lefondau plustard ala finde 1992.Onréduira
ainsi au minimum lespréjudicesque pourrait subirl'une ou l'autre Partie.

(Signé)Bengt BROMS.

Bilingual Content

SEPARATE OPINION OF JUDGE BROMS

Havingjoined the other Members ofthe Court in adoptingthe present
Order 1want to explain the factual background to the adoption of the
Order. In doing this 1do realizethat at thisstage any commentmustrelate
solely to the request forthe provisional measures while the merits of the
case will only be discussed when the final decision of the Court will be
made. Needless to say the Parties at the hearing did refer to some of the
merits in order to justify their views on the provisional measures. This
turned out tobe necessaryin order to estimate whether the claimant had a
prima facie case.

At the time the Application for the provisional measures was made by

Finland the normal prerequisites seemed to exist for the granting of the
request. The jurisdiction of the Court did not present any problems; the
claim obviouslyincluded legal problems to be judged by the Court, and
was one which on its face had reasonable chances of succeeding. The
claimant also could prove that without provisional measures irreparable
prejudice could be caused to the right of free passage of drill ships and
oil rigs allegedlybased on several international treaties and international
custom. There also seemed to be the required urgency, which has often
played a decisive role in the Court's decision-making on applications
for provisional measures. The final construction tenders for the East
Channel Bridge have an acceptance deadline of 18 August 1991 and
there was a dangerthat tenders for Finnish oil rigs and drillships would
diminish due to the fear of the potential buyers that the construction
work would be prevented in the near future due to the impossibility of
making use of the right of freepassagethrough the Great Belt.

At the hearing the Danish Government made a statement that, accord-
ing to the schedule for construction of the East Channel Bridge, "no
physical hindrance for the passage through the Great Belt will occur
before the end of 1994" (Danish Written Observations, para. 140 (2);
PublicSittingof2July 1991(morning),CR9 1/ 11,p. 11(Lehmann)).Tothisit
was addedthat by that time the casewould havebeen finally decided by
the Court. Having said this the Agent for Denmark suggested that no
indication for provisional measures was required (ibid.). He went on
to explain that the construction of the East Channel Bridge will not
present any practical hindrance for the passage of mobile offshore
drilling units through the Danish Straits and the navigation may con-
tinue through the Straitas before (seepara. 25of the Order). OPINION INDIVIDUELLE DE M. BROMS

[Traduction]

M'étant associéaux autres membres de la Cour pour adopter la
présenteordonnance, je tiens à expliquer les faits qui constituent la toile
de fondde son adoption. Cefaisant,je merendsbiencomptequ'à cestade

les commentaires ne:doivent porter que sur la demande en indication de
mesuresconservatoires,car le fond de l'affaire ne sera examinéque lors-
que la Cour rendra son arrêt définitif. Pointn'estbesoin de rappeler que
les Parties ont effectivement,l'audience, abordécertaines questions de
fond pour justifierleur point de vue sur les mesures conservatoires.Cela
s'estrévéléindispensable pour déterminersila cause du demandeur était
fondée primafacie.
A l'époque oùla Finlande a présenté sademande en indication de
mesures conservatoires, les conditions normalement requises pour son
acceptation semblaient réunies. La compétencede la Cour ne présentait
aucun problème; la demande au fond soulevait à l'évidence des
problèmesjuridiques àtrancher par la Cour et avaità première vue des
chances raisonnablt:~ d'êtreaccueillie. En outre, le demandeur pouvait
prouver que sans I'iridicationdemesuresconservatoiresunpréjudiceirré-

parable eût pu êtrecauséau droit de librepassagedes navires de forage et
plates-formespétrolièresfondé,selonsesallégations,sur plusieurstraités
internationaux et sur la coutume internationale. La condition d'urgence,
qui a souventjoué un rôle décisiflorsque la Cour a eu à statuer sur les
demandes en indication de mesures conservatoires,semblait également
remplie. Ledélaifixépour l'acceptation dessoumissionsfinales relatives
à la construction du pont sur le chenal Est venaiàexpiration le 18août
1991etlescommandes de plates-formespétrolièresetde navires de forage
finlandais risquaient de connaîtreunebaisse, lesacheteurséventuelscrai-
gnant que leurconstructionsoitbientôtarrêtéeenraisonde l'impossibilité
d'utiliser le droitde librepassage par le Grand-Belt.
A l'audience, le ~Gouvemementdu Danemark déclara que, selon le
déroulement prévu des travaux de construction du pont sur le chenal Est,
«il n'yaura pas d'obstacle matérielau passage par le Grand-Beltavant la

fin de l'année 1994~ (observations écrites du Danemark, par. 140, 2);
audience du mardi 2juillet 1991,matin, CR 91/11,p. 11(M.Lehmann)). Il
ajouta que d'icilà la Cour aurait rendu un arrêt définitifen l'espèce.Sur
ce, l'agent duDaneimarkdit que rien n'obligeait à indiquer des mesures
conservatoires (ibid.).Il expliqua en outre que la construction du pont sur
le chenal Est ne créerait pas, en pratique, d'obstacle au passage par les
détroitsdanoisdes unitésmobiles de forageoffshorefinlandaises etque la
navigation dans leGrand-Belt pourrait sepoursuivrecomme par le passé
(voir le paragraphe:25de l'ordonnance). Thus according to the Agent of Denmark, there isno urgency. Another
thing changing the original situation was that later during the delibera-

tions of the case the Court decided to make the final decision of the case
expeditiously,probably during thespring of 1992or atthe latest inthe fa11
of 1992.Whenthis decision iscombined withthe Danish assurances as to
the continuation of the right of freepassage,the issue of urgencymust be
seen in another light. Finnish ships, including the oil rigs and drill ships,
are nowguaranteed theright oftransit atleastuntilthe end of 1994and the
Court will decide the caseasexpeditiouslyaspossible - certainlybefore
the above date. Thus, asaresult ofthe above explained eventsthe material
grounds for the acceptance of the Application have changed. With these
changes the prerequisites forthe adoption of the Application diminished
without any fault of the claimant. The remaining alternative was the
present Order.

The present Order confirms the above-mentioned Danish assurances

given to the Court. What is most important, however, is the provision
included in paragraph 32,whereby the Court underlines the well-estab-
lished legal nom that a State engagedin a dispute before the Court with
another Statecannot improveits legalposition vis-à-visthat other State by
any action taken pendente lire,and no such action "can have any effect
whatever as regards the legal situation which the Court is called upon to
define" (Legal Status of the South-Eastern Territory of Greenland,
P.C.Z.J.,SeriesA/B, No. 48,p. 287).This concerns naturally both Parties
but, taking into account the circumstances of the present case,this prin-
ciple is especially important as a guarantee to Finland against any
detrimental change which might be undertaken by the territorial power
of the Great Belt.

The Order also decides another important legal issuewhich was taken
up atthe hearing by the counsel, Professor Bowett,speaking forthe Gov-
ernment of Denmark. He suggested that in the event a restitution in kind
should prove excessively onerous for Denmark, a monetary compensa-

tion ofdamages would suffice as a payment to Finland, should Finland's
claim eventually be accepted by the Court (Public Sitting of 5July 1991,
CR 91/14, p. 45).But this is not what the claimant has been seeking.The
claimant isseekingrestitutionin kind. Therefore, theopinion ofthe Court
which denies thevalidity ofthe Danish theory iscorrect,andan important
interpretation.
Finally,1 also regard the contents of paragraphs 33 and 34 to be most
important, especiallyin light of paragraph 35,wherethe Court welcomes
the Parties to enter into negotiations to solvetheir dispute. The principle
of equal treatment ofthe Parties has been quite correctly adopted in para-
graphs 33and 34.Both Parties are requested to consider alternative solu-
tions to settle the dispute. With the help of their combined technical Ainsi,selon l'agentdu Danemark, iln'ya pasurgence. Lasituationtelle
qu'elleseprésentait àl'origine futencoremodifiéedu fait quepar lasuite,
au cours de son délibéré sur la demande, la Cour a décidéde rendre son
arrêtdéfinitifenl'espècedans lesmeilleursdélais,probablement au cours
du printemps ou,au plus tard, de l'automne 1992.Cette décision,s'ajou-
tant auxassurances donnéespar le Danemark en cequiconcerne lemain-
tien du droit de libre passage, oblige à voir sous un jour nouveau la
question de l'urgence. Le droit de transit est maintenant garanti aux
navires finlandais, ycompris lesplates-formespétrolièresetlesnavires de
forage, au moins jusqu'à la fin de l'année 1994 et la Cour tranchera
l'affaireavectoute lacéléritépossible- entout casavant cetemps. Ainsi,

par suite des événementsque j'ai expliqués,la base matériellejustifiant
l'acceptation de la demandeen indication de mesuresconservatoires a été
modifiée.Avecceschangements, les conditionsnécessaires à l'accueil de
la demande se sonttrouvéesréduitessansqu'ily ait eu aucunefautede la
part du demandeur. L'autre solution possible était la présente ordon-
nance.
Cette ordonnance:confirme les assurances, déjà mentionnées,que le
Danemark a données à la Cour. Le plus important, toutefois, c'est la
teneur duparagraphe 32de l'ordonnance, dans lequel la Cour soulignela
règlede droitbienétablieselonlaquelleun Etat partie àun différendavec
un autre Etat devant la Cour ne saurait améliorer sa position juridique
vis-à-visde cet autre:Etat par quelque action que ce soitendente lite,et
qu'aucune action de ce genre «ne saurait exercer une influence quelcon-

que surl'étatde droitqu'il incombe àla Cour de définir»(Statutjuridique
du territoiredu sud-est du Groënland,C.P.J.I.sérieA/B no48,p. 287).Ce
principe concerne naturellement les deux Parties mais, compte tenu des
circonstances de la présente affaire,sonimportance est particulièrement
grande pour la Finlande, qu'il protège contre tout changement préjudi-
ciable que pourrait entreprendre 1'Etattitulaire de l'autorité territoriale
sur le Grand-Belt.
Dans son ordonnance, la Cour tranche aussi une autre question juri-
dique importante évoquée àl'audience par le conseil du Gouvernement
du Danemark, M. Bowett.Celui-cia faitvaloir quedans lecas où uneresti-
tution en nature se révéleraitune charge excessive pour le Danemark,
une indemnisation pécuniaire du dommage constituerait une réparation
suffisante pour la Finlande, si la Cour lui donnait gain de cause au fond

(audience du 5juillet 1991,CR 91/14, p. 45).Mais ce n'estpas là ceque le
demandeur cherche àobtenir.Cequ'il cherche àobtenir, c'estunerestitu-
tion en nature. Par conséquent,l'opinionde la Cour privant de validitéla
théorie danoise est correcte et constitue une interprétation importante.
Enfin, je considé:reégalement comme extrêmementimportante la
teneur des paragraphes 33 et 34, compte tenu en particulier du para-
graphe 35 dans lequella Cour dit qu'une négociation entreles Parties en
vue de parvenir au règlement de leur différend serait la bienvenue. Le
principe de l'égalitdetraitement des Parties a étappliquédefaçontout
à faitcorrecteauxparagraphes 33et34,dans lesquels lesdeux Partiessontexpertise, the future negotiations which the Court recommends to both
Parties might turn out to be decisive in finding a mutually acceptable
solution.

1 have not been able to avoid the impression that the dispute is one
which couldalso possiblybe solved bythe use ofnegotiations between the
two Governments. Bydoingthisthey would onlybeacting inthebest Nor-
dic spirit of comity and CO-operationto make the utmost effort to find a
solution which would satisfy bothsides.

After all, the main dispute should be brought to its realistic measure-
ments. It is not easyto understand how the building of an opening to the
East Channel Bridge by means of a swingbridge, or possibly by another
technical solution, could cause more expense to Denmark than a rela-
tively small fraction of the total construction costs, which are said to be
more than 4billiondollars.Neither should such amodification causeany
real delayto the construction work presumingthat the necessarydecision
is reached in the foreseeablefuture. Asthe Order of the Court itself sug-
gests negotiations to the Parties, the acceptance of negotiations can no
longerbe said to lead toany lossoffaceoneither side.Tothecontrary, the
Court would appreciate such an effort by the Parties. Needless to Say,
even if the Parties could not solvetheir dispute through direcnegotia-
tions, the results ofsuch negotiations, and inparticular the technicalsolu-
tions which may be explored, would be helpful to the Court which, for
natural reasons, is composed of legal, and not technical, representatives.

As the Court now has decided to deal expeditiously with the case this
solution is in theterest of both Parties.Theuncertainty of the situation
should not be allowedtocontinueanylonger than isabsolutely necessary.
Nowthatthe Court has adoptedthe above Order itistobehoped that with
the CO-operationof the two Agents the merits of the case will, indeed,be
decided at thelatest by the end of 1992.That way anypossible damage to
either Partywould be minimized.

(Signe Bd)ngt BROMS.invitéesa examinerdifférentessolutionspour résoudre ledifférend.Avec
l'aide desexpertstechniques de l'uneetdel'autre,lesnégociationsfutures
recommandées par la Cour aux deux Parties pourraient se révélerdéci-
sivespour trouver Uriesolution mutuellement acceptable.
Je n'ai pu me défairede l'impression que ce différendest de ceux que
desnégociationsentre lesdeuxgouvernementspermettraientpeut-être de
résoudre.En s'engageant dans cette voie,ceux-cine feraient qu'agir dans
l'esprit de courtoisie et de coopération propre aux pays nordiques en
n'épargnant aucun effortpour trouver une solution satisfaisante pour les
deux Parties.
Après tout, le différend principal doit être ramené à des dimensions

réalistes.On adu mal à imaginerque lecoût, pour le Danemark, del'amé-
nagement d'une ouverture dans le pont sur le chenal Est au moyen d'un
ponttournant, ou encored'une autre solutiontechnique,puissereprésen-
ter plus qu'une assez petite fraction du coût total de la construction qui,
nousdit-on, s'élèveà plus de 4milliards de dollars.Unetellemodification
ne devrait pas non plusretarder sensiblement lestravaux de construction,
à supposerque la décision nécessairesoitprisedansun avenirprochain.
Comme la Cour elle-même,dans son ordonnance, suggèredes négocia-
tions aux Parties, on ne peut plus dire que l'acceptation de négociations
leur ferait perdre la face l'une ou à l'autre. Bien au contraire, la Cour
apprécierait un tel effort de leur part. Il va sans dire que même si les
Parties ne pouvaie:nt résoudre leur différend par des négociations
directes, les résultatsde ces dernières,et notamment les solutionstechni-

ques qui pourraient Ctreenvisagées,seraient utileà la Cour qui, pour des
raisonsbien évidentes,est forméedejuristes et non de techniciens.
Comme la Cour ;imaintenant décidé d'examiner avec célérité cette
affaire,lasolutionqii'elleadopte estdans l'intérêt desdeux Parties.Onne
doit pas laisserl'incertitude causée par la situation durer plus qu'il n'est
absolument nécessaire. Maintenant que la Cour a adopté son ordon-
nance, ilfaut espérerqu'avec la coopération desdeux agentsl'affaire sera
effectivementtranchée sur lefondau plustard ala finde 1992.Onréduira
ainsi au minimum lespréjudicesque pourrait subirl'une ou l'autre Partie.

(Signé)Bengt BROMS.

Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. Broms (traduction)

Links