Opinion dissidente de M. Petrén

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059-19730622-ORD-01-07-EN
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059-19730622-ORD-01-00-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. PETRÉN

Ayant voté contre l'adoption de l'ordonnance, je dois y joindreune
opinion dissidente.
Vu l'identité des demandes et conclusions ainsi que la coïncidence
des circonstances de fait et dedroit en la présenteaffaire et en l'affaire des
Essais nucléaires(Australie c. France), j'ai étéd'avis que les deux affaires
auraient dû êtrejointes dèsle stade actuel de la procédure.La Cour ayant
rejetécette proposition, ilne me reste qu'à exprimer ici la mêmeopinion
qu'en l'autre affaire.
Je ne saurais me rallier à l'opinion de la majorité ni en ce qui concerne

le renvoi des questions de la compétencede la Cour et de la recevabilitéde
la requête à un stade ultérieur de la procédure, ni en ce qui concerne
l'indication de mesures conservatoires.
A mon avis, le cadre commun dans lequel s'inscrivent les questions de
la compétencede la Cour et de la recevabilitéde la requête,ainsi que la
question de l'indication de mesures conservatoires, se présente comme
--it.
Avant d'entreprendre l'examen du fond d'une affaire, la Cour a, com-
me touteautre juridiction, le devoir de vérifierdans la mesure du possible
sa propre compétenceet la recevabilitéde la requête.Que 1'Etatcontre

lequel une requêteest dirigée fassedéfautn'y change rien. Au contraire,
l'article53 du Statut oblige la Cour à s'assurer de sa compétenceet dela
recevabilitéde la requêtesurla base des éléments à sa portée.Parmi ceux-
ci se trouvent en la présenteaffaire les arguments avancéspar la France
dans la lettre remise par son ambassadeuret par la Nouvelle-Zélandedans
sa requêteet dans sesplaidoiries des 24-25mai 1973.La Cour acependant
le devoir de porter aussi son attention sur tous autres éléments qu'elle
pourrait trouver pertinents. Que la Nouvelle-Zélande ait demandé des
mesures conservatoires ne dispense pas la Cour de l'obligation d'examiner
d'abord les questions de sa compétenceet de la recevabilitéde la requête

et est mêmede nature à la rendre plus urgente.

Pour que la Cour puisse se considérer comme compétente quant au
fond de l'affaire, il faudraità mes yeux, qu'elle approuve au moins l'une
des trois thèses suivantes susceptibles d'étayerla requêtedu Gouverne-
ment de la Nouvelle-Zélande:

1) la réservefaite par la France lors du renouvellement en 1966de son
acceptation de la juridiction de la Cour, réserve qui se réfère aux160 ESSAISNUCLÉAIRES(OP. DISS. PETRÉN)

activite se rapportant à la défensenationale de la France, n'est pas

valable;
2) les essais nucléaires envisagésdans la requête dela Nouvelle-Zélande
ne se rapportent pas à la défensenationale de la France;
3) l'Acte général de1928est restéen vigueur entre les Etats partiesà cet
acte en 1944,ce qui a pour conséquenceque les réserves faitespar de
tels Etats en acceptant après 1945la juridiction de la Cour internatio-
nale de Justice ne sont d'aucun effet dans leurs relations entre eux.

Les questions qui se posent ainsi la Cour ne touchent pas au fond de
l'affaire. Elles sesituent dans un contexte généralde droit international et,
à mes yeux, la Cour n'aurait pas eu besoin de nouvelles explications du
Gouvernement de la Nouvelle-Zélande pour les résoudre et elle aurait

pu et dû les trancher sur la base des élémentsdont elle dispose.
A ce sujet, il y a lieu de signaler la question de compétence met en
cause la mesure dans laquelle l'Acte général de1928a pu survivre à la
disparition de la Société desNations et de ses organes ainsi que l'effet
éventuel d'une telle survie sur les réserves faites par les Etats parties
à l'Acte en acceptant la juridiction de la Cour actuelle. Or l'article 63du
Statut exigeait que ces Etats fussent avertis sans délaique pareilles ques-
tions étaientsoumises à la Cour en la présenteaffaire. S'ilsen avaient été
avertis, ils auraient déjà eu l'occasion de manifester leur étonnement,
leur satisfactionLI leur indifférencedevant la thèsedu Gouvernement de
la Nouvelle-Zélandeévoquéesous 3 ci-dessus. Mais le fait que la notifica-
tion requise n'ait pas encore été faite ne justifie pas que la Cour invite
aujourd'hui le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande à présenter,à un

stade ultérieur dela procédure, un nouvel exposésur la question de com-
pétence.
Je suis donc d'avis que la Cour n'aurait pas dû ouvrir à cette fin une
nouvelle phase de l'affaire mais qu'elleaurait au contraire dû demander
au Gouvernement de la Nouvelle-Zélande d'acheverson argumentation à
cet égard austade actuel de I'affaire.
Comme la Cour a maintenant différé sa décision sur la question de
compétence,je ne saurais indiquer déjà ici comment j'apprécieles diffé-
rents élémentsserapportant à son examen.
Néanmoins, la demande du Gouvernement de la Nouvelle-Zélande en
indication de mesures conservatoires m'obligeà examiner silesconditions
pour que la Cour puisse indiquer de telles mesures sont remplies.

Parmi ces conditions,ilen est qui se rapportenà la question de compé-
tence. A ce sujet, le Gouvernement de la Nouvelle-Zélandes'est référé,
entre autres éléments, auxordonnances rendues par la Cour le 17 août
1972dans les deux affaires relatives laCompétenceen matièrede pêche-
ries.Dans chacune de ces ordonnances, la Cour a considéré que,lorsqu'-
elle est saisie d'une demande en indication de mesures conservatoires,
elle n'a pas besoin, avant d'indiquer ces mesures, de s'assurer de manière
concluante de sa compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'elle nedoit cependant pas appliquer l'article 41 de son Statut lorsqueson incom-
pétence est manifeste.
Le Gouvernement de la Nouvelle-Zélandea voulu tirer de ce considé-
rant la conclusion que c'est seulement quand l'incompétence dela Cour
est manifeste qu'elle nedoit pas appliquer I'article 41 du Statut. Pareille

interprétation ne saurait être acceptée. Le considérant fait simplement
allusion à deux situations extrêmes:l'une dans laquelle la compétencede
la Cour est établiede manière concluante et l'autre dans laquelle son in-
compétence est manifeste. IIdit que l'existence de la première situation
n'est pas une condition nécessairepour que la Cour puisse indiquer des
mesures conservatoires et que, dans la seconde situation, elle ne doit pas
en indiquer, constatation qui va de soi et ne prête pasàconclusions plus
vastes. Le considérant ne dit pas selon quels critères il faut, dans la zone
s'étendantentre la compétence établie de manièreconcluante et I'incom-
pétencemanifeste, tracer la limiteentre lessituations quipermettent l'appli-
cation de I'article 41 et celles qui ne le permettent pas. Ce n'est que dans
un considérant ultérieur, également commun aux deux ordonnances
précitées,que l'on trouve une réponse à cette question. La Cour y indique
qu'elle considère qu'une disposition dans un certain instrument émanant

des Parties seprésentecommeconstituant primafacie une base sur laquel-
lelacompétence de la Cour pourrait êtrefondée.
En la présenteaffaire, il ressort du paragraphe 14de l'ordonnance que
la Cour s'est inspiréede ce précédent,car elle y exprime l'opinion qu'elle
ne doit pas indiquer de mesures conservatoires si les dispositions invo-
quéespar le demandeur ne se présentent pas comme constituant prima
facie une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait êtrefondée.
Je peux me rallier à cette formule qui,à mes yeux, signifiequ'il nesuffit
pas, pour l'applicabilitéde I'article 41 du Statut, qu'un simple commen-
cement de preuve, envisagéisolément, indique la possibilitéde la compé-
tence de la Cour, mais qu'il faut une probabilitérésultantd'un examen de
l'ensemble des éléments dont dispose la Cour.
Force m'a donc étéde procéder à un tel examen. Le résultat en a été
que je ne trouve pas probable que les trois thèsesmentionnéesplus haut
ou l'une quelconque d'entre elles puissent fournir une base sur laquelle

fonder la compétencede la Cour. Pour la raison déjà indiquée,je me vois
empêché de développerau présentstade de la procédureles appréciations
m'ayant conduit à cette conclusion, qui m'interdit de voter en faveur de
l'indication de mesures conservatoires.
A côtéde la question de la compétencede la Cour se pose celle de la
recevabilitéde la requêtede la Nouvelle-Zélande.Sous ce termej'entends
l'examen de toutes questions qui se posent pour décidersi la Cour a été
valablement saisie de l'affaire. Dans cette optique il y a cependant avant
tout lieu de sedemander si, d'une manièregénérale, les essaisatmosphéri-
ques d'armes nucléaires sont déjàrégispar des normes de droit inter-
nütional, ou s'ilsn'appartiennent pas à un domaine hautement politique
où les normes concernant leur légalitéou illégalitéinternationale sont
encore en gestation.

30 Certes l'existence desarmes nucléaireset les essais servantà les per-
fectionner età les multiplier occupent une place de premier plan parmi
leshantises actuelles du genre humain. Conjurer leur spectre relève cepen-
dant en premier lieu des forces politiques.11faut espérerque celles-ci

réussiront un jourà établirun étatde choses à la fois politique et juridi-
que qui mettra l'humanitétout entière à l'abri de l'angoisse créear les
armements nucléaires. Entre-temps, se pose la question de savoir si le
moment est déjàvenu où unejuridiction internationale est le destinataire
approprié d'une requêtetelle que celle qui a étédirigéeen la présente
affaire contre l'une seulement des puissances nucléaires actuelles.
L'ordonnance renvoie la question de la recevabilité de la requête,
comme celle de la compétence dela Cour, à un stade ultérieur de la pro-
cédure.Je ne saurais me rallieràcette décision,car je pense que la Cour
aurait pu et dû réglerpendant sa présentesessionl'ensemble desquestions
préliminaires et urgentes qui se posent en l'espèce et sur lesquelles il
incombe à la Cour de prendre positionpropriomotu.
Pour ne pas anticiper sur mon vote éventueldans la nouvelle phase de
l'affaire, je croisdevoir ne rien dire de plus sur la question de la receva-

bilitéde la requête.Je ne trouve d'ailleurs pas nécessairede répondreà
la question de savoir s'il apparaît comme probable que la requêtesoit
recevable, ce qui représentel'une desconditions pour que la Cour puisse
franchir le seuil de l'article 41 de son Statut et indiquer des mesures con-
servatoires. Ayant déjà trouvél'article41 inapplicable dans le cas d'es-
pèce, à cause de l'improbabilité de ce que la France puisse, malgréla
réserve qu'ellea faite à son acceptation de la juridiction de la Cour,
être tenuepour justiciable en cette affaire, je n'ai pas besoin de meo-
qoncer sur d'autres aspects de la question de I'applicabilitéde l'article 41.

(SignéS ). PETRÉN.

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OPINION DISSIDENTE DE M. PETRÉN

Ayant voté contre l'adoption de l'ordonnance, je dois y joindreune
opinion dissidente.
Vu l'identité des demandes et conclusions ainsi que la coïncidence
des circonstances de fait et dedroit en la présenteaffaire et en l'affaire des
Essais nucléaires(Australie c. France), j'ai étéd'avis que les deux affaires
auraient dû êtrejointes dèsle stade actuel de la procédure.La Cour ayant
rejetécette proposition, ilne me reste qu'à exprimer ici la mêmeopinion
qu'en l'autre affaire.
Je ne saurais me rallier à l'opinion de la majorité ni en ce qui concerne

le renvoi des questions de la compétencede la Cour et de la recevabilitéde
la requête à un stade ultérieur de la procédure, ni en ce qui concerne
l'indication de mesures conservatoires.
A mon avis, le cadre commun dans lequel s'inscrivent les questions de
la compétencede la Cour et de la recevabilitéde la requête,ainsi que la
question de l'indication de mesures conservatoires, se présente comme
--it.
Avant d'entreprendre l'examen du fond d'une affaire, la Cour a, com-
me touteautre juridiction, le devoir de vérifierdans la mesure du possible
sa propre compétenceet la recevabilitéde la requête.Que 1'Etatcontre

lequel une requêteest dirigée fassedéfautn'y change rien. Au contraire,
l'article53 du Statut oblige la Cour à s'assurer de sa compétenceet dela
recevabilitéde la requêtesurla base des éléments à sa portée.Parmi ceux-
ci se trouvent en la présenteaffaire les arguments avancéspar la France
dans la lettre remise par son ambassadeuret par la Nouvelle-Zélandedans
sa requêteet dans sesplaidoiries des 24-25mai 1973.La Cour acependant
le devoir de porter aussi son attention sur tous autres éléments qu'elle
pourrait trouver pertinents. Que la Nouvelle-Zélande ait demandé des
mesures conservatoires ne dispense pas la Cour de l'obligation d'examiner
d'abord les questions de sa compétenceet de la recevabilitéde la requête

et est mêmede nature à la rendre plus urgente.

Pour que la Cour puisse se considérer comme compétente quant au
fond de l'affaire, il faudraità mes yeux, qu'elle approuve au moins l'une
des trois thèses suivantes susceptibles d'étayerla requêtedu Gouverne-
ment de la Nouvelle-Zélande:

1) la réservefaite par la France lors du renouvellement en 1966de son
acceptation de la juridiction de la Cour, réserve qui se réfère aux DISSENTING OPINION OF JUDGE PETRÉN

Having voted against the adoption of the Order, 1 append a dissenting
opinion.
Considering the identity of claims and submissions between this case
and the NucIearTestscase (Australiav. France),as well asthe coincident
circumstances of fact and law, 1 was of the opinion that the two cases
should have been joined even at the present stageof the proceedings. The
Court having rejected that proposal, it only remains for me to express the
same opinion here as in the other case.
1am unable to concur in the opinion of the majority either with regard
to the deferment, to a later stage in the proceedings, of the questions of
the Court's jurisdiction and the admissibility of the Application, or with

regard to the indication of provisional measures.
In my view, the questions of the Court's jurisdiction and of the admis-
sibility of the Application, and also the question of the indication of
provisional measures, fa11into a common fran~ework as follows :

Before undertaking the examination of the merits of the case, the
International Court of Justice, like any other court, has the duty of
making sure as far as possible that it possesses jurisdiction and that the
application is admissible. The absence of the State against which applica-
tion is made does not alter this requirement in any way. Onthe contrary,
Article 53 of the Statute lays an obligation on the Court to satisfy itself
as to its possession ofjurisdiction and the admissibility of the application
on the basis of the elernents at its disposal. Among the latter inthe present
case are the arguments put forward by France in the letter handed in by

its Ambassador, and by New Zealand in its Application and in its oral
pleadings of 24-25 May 1973. It is, however, the Court's duty also to
consider any other elements that it may find relevant. The fact that New
Zealand has requested provisional measures does not dispense the Court
from the obligation of beginning by an examination of the questions of
its jurisdiction and of the admissibility of the Application; indeed, it
makes that examination, if anything, more urgent.
For it to be possible for the Court to consider that it has jurisdiction
on the merits ofthe ca.se,it would, as 1seeit, be necessary for it to approve
at least one of three propositions which would serve to underpin the
Application of the New Zealand Government :

1. The reservation expressed by France when in 1966it renewed its accep-
tance of the Court's jurisdiction, a reservation referring to activities160 ESSAISNUCLÉAIRES(OP. DISS. PETRÉN)

activite se rapportant à la défensenationale de la France, n'est pas

valable;
2) les essais nucléaires envisagésdans la requête dela Nouvelle-Zélande
ne se rapportent pas à la défensenationale de la France;
3) l'Acte général de1928est restéen vigueur entre les Etats partiesà cet
acte en 1944,ce qui a pour conséquenceque les réserves faitespar de
tels Etats en acceptant après 1945la juridiction de la Cour internatio-
nale de Justice ne sont d'aucun effet dans leurs relations entre eux.

Les questions qui se posent ainsi la Cour ne touchent pas au fond de
l'affaire. Elles sesituent dans un contexte généralde droit international et,
à mes yeux, la Cour n'aurait pas eu besoin de nouvelles explications du
Gouvernement de la Nouvelle-Zélande pour les résoudre et elle aurait

pu et dû les trancher sur la base des élémentsdont elle dispose.
A ce sujet, il y a lieu de signaler la question de compétence met en
cause la mesure dans laquelle l'Acte général de1928a pu survivre à la
disparition de la Société desNations et de ses organes ainsi que l'effet
éventuel d'une telle survie sur les réserves faites par les Etats parties
à l'Acte en acceptant la juridiction de la Cour actuelle. Or l'article 63du
Statut exigeait que ces Etats fussent avertis sans délaique pareilles ques-
tions étaientsoumises à la Cour en la présenteaffaire. S'ilsen avaient été
avertis, ils auraient déjà eu l'occasion de manifester leur étonnement,
leur satisfactionLI leur indifférencedevant la thèsedu Gouvernement de
la Nouvelle-Zélandeévoquéesous 3 ci-dessus. Mais le fait que la notifica-
tion requise n'ait pas encore été faite ne justifie pas que la Cour invite
aujourd'hui le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande à présenter,à un

stade ultérieur dela procédure, un nouvel exposésur la question de com-
pétence.
Je suis donc d'avis que la Cour n'aurait pas dû ouvrir à cette fin une
nouvelle phase de l'affaire mais qu'elleaurait au contraire dû demander
au Gouvernement de la Nouvelle-Zélande d'acheverson argumentation à
cet égard austade actuel de I'affaire.
Comme la Cour a maintenant différé sa décision sur la question de
compétence,je ne saurais indiquer déjà ici comment j'apprécieles diffé-
rents élémentsserapportant à son examen.
Néanmoins, la demande du Gouvernement de la Nouvelle-Zélande en
indication de mesures conservatoires m'obligeà examiner silesconditions
pour que la Cour puisse indiquer de telles mesures sont remplies.

Parmi ces conditions,ilen est qui se rapportenà la question de compé-
tence. A ce sujet, le Gouvernement de la Nouvelle-Zélandes'est référé,
entre autres éléments, auxordonnances rendues par la Cour le 17 août
1972dans les deux affaires relatives laCompétenceen matièrede pêche-
ries.Dans chacune de ces ordonnances, la Cour a considéré que,lorsqu'-
elle est saisie d'une demande en indication de mesures conservatoires,
elle n'a pas besoin, avant d'indiquer ces mesures, de s'assurer de manière
concluante de sa compétencequant au fond de l'affaire, mais qu'elle ne connected with French national defence, is not valid;

2. The nuclear tests referred to in the New Zealand Application are not
connected with French national defence;
3. The General Act of 1928 has remained in force as between States
parties to that Act in 1944,the consequence of which is that reserva-

tions made by such States in accepting after 1945the jurisdiction of the
International Court of Justice are without effect in their relations
among themselves.
The questions thus raised for the Court do not concern themerits of the
case. They occur in a general framework of international law and, in my
view, the Court would not have needed any further explanations from
the New Zealand Government in order to resolve them, and it could and
should have settled them on the basis of the elements at its disposal.
In this connection, it should be pointed out that the question of
jurisdiction raises the:issue of the extent to which the 1928General Act
can have survived the disappearance of the League of Nations and its
organs, as also of the effect, if any, ofsuch survival on the reservations
made by States parties to that Act when accepting the jurisdiction of the
present Court. Now Article 63 of the Statute required that these States
should be notified without delay that such questions were submitted to
the Court in the present case. If they had been so notified, they would
already have had the opportunity of manifesting their astonishment,
their satisfaction ori.heir indifference in regard to the contention of the

New Zealand Government mentioned under 3 above. But the fact that
the required notification has not yet been made does not justify the Court
in today inviting the: New Zealand Government to present, at a later
stage in the proceedirigs, further argument on the question ofjurisdiction.
1am therefore of the opinion that the Court should not have opened
a new phase of the casefor that purpose but, on the contrary, should have
requested the New Zealand Government to complete its argument on that
issue in the present s-tageof the case.
As the Court has now deferred its decision on the question of juris-
diction, 1am unable to indicate here and now my own assessment of the
various factors entering into the consideration of that question.
Nevertheless, the New Zealand Government's request for the indication
of provisional measures obliges me to examinewhether the pre-conditions
for the Court's abilityyto indicate such measures have been fulfilled.
Among those pre-conditions, certain relate to the question of juris-
diction. In that connection the New Zealand Government has referred
inter aliato the Orders made by the Court on 17August 1972in the two
FisheriesJurisdiction cases. In both of these Orders the Court considered

that on a request for provisional measures it need not, before indicating
them, finally satisfy itself that it had jurisdiction on the merits of the
case, but that it ought not to act under Article 41 of the Statute if the
absence ofjurisdiction was manifest.doit cependant pas appliquer l'article 41 de son Statut lorsqueson incom-
pétence est manifeste.
Le Gouvernement de la Nouvelle-Zélandea voulu tirer de ce considé-
rant la conclusion que c'est seulement quand l'incompétence dela Cour
est manifeste qu'elle nedoit pas appliquer I'article 41 du Statut. Pareille

interprétation ne saurait être acceptée. Le considérant fait simplement
allusion à deux situations extrêmes:l'une dans laquelle la compétencede
la Cour est établiede manière concluante et l'autre dans laquelle son in-
compétence est manifeste. IIdit que l'existence de la première situation
n'est pas une condition nécessairepour que la Cour puisse indiquer des
mesures conservatoires et que, dans la seconde situation, elle ne doit pas
en indiquer, constatation qui va de soi et ne prête pasàconclusions plus
vastes. Le considérant ne dit pas selon quels critères il faut, dans la zone
s'étendantentre la compétence établie de manièreconcluante et I'incom-
pétencemanifeste, tracer la limiteentre lessituations quipermettent l'appli-
cation de I'article 41 et celles qui ne le permettent pas. Ce n'est que dans
un considérant ultérieur, également commun aux deux ordonnances
précitées,que l'on trouve une réponse à cette question. La Cour y indique
qu'elle considère qu'une disposition dans un certain instrument émanant

des Parties seprésentecommeconstituant primafacie une base sur laquel-
lelacompétence de la Cour pourrait êtrefondée.
En la présenteaffaire, il ressort du paragraphe 14de l'ordonnance que
la Cour s'est inspiréede ce précédent,car elle y exprime l'opinion qu'elle
ne doit pas indiquer de mesures conservatoires si les dispositions invo-
quéespar le demandeur ne se présentent pas comme constituant prima
facie une base sur laquelle la compétencede la Cour pourrait êtrefondée.
Je peux me rallier à cette formule qui,à mes yeux, signifiequ'il nesuffit
pas, pour l'applicabilitéde I'article 41 du Statut, qu'un simple commen-
cement de preuve, envisagéisolément, indique la possibilitéde la compé-
tence de la Cour, mais qu'il faut une probabilitérésultantd'un examen de
l'ensemble des éléments dont dispose la Cour.
Force m'a donc étéde procéder à un tel examen. Le résultat en a été
que je ne trouve pas probable que les trois thèsesmentionnéesplus haut
ou l'une quelconque d'entre elles puissent fournir une base sur laquelle

fonder la compétencede la Cour. Pour la raison déjà indiquée,je me vois
empêché de développerau présentstade de la procédureles appréciations
m'ayant conduit à cette conclusion, qui m'interdit de voter en faveur de
l'indication de mesures conservatoires.
A côtéde la question de la compétencede la Cour se pose celle de la
recevabilitéde la requêtede la Nouvelle-Zélande.Sous ce termej'entends
l'examen de toutes questions qui se posent pour décidersi la Cour a été
valablement saisie de l'affaire. Dans cette optique il y a cependant avant
tout lieu de sedemander si, d'une manièregénérale, les essaisatmosphéri-
ques d'armes nucléaires sont déjàrégispar des normes de droit inter-
nütional, ou s'ilsn'appartiennent pas à un domaine hautement politique
où les normes concernant leur légalitéou illégalitéinternationale sont
encore en gestation.

30 The New Zealand Government sought to draw from this consi-
derandum the conclusion that it is only when the absence of the Court's

jurisdiction is manifest that it ought not to act under Article 41 of the
Statute. It is not possible to accept such an interpretation. The paragraph
in question simply alludes to two extreme situations: one in which the
jurisdiction of the Court is finally established and another in which the
absence of jurisdiction is manifest. It says that the existence of the first
situation is not a necessary pre-condition for the indication of provisional
measures and that, in the second situation,the Court should not indicate
such measures, whch is a self-evident observation that does not lend
itself to broader conclusions. The paragraph does not Sayin accordance
with what criteria, within the area lying between finally established
jurisdiction and manifest absence ofjurisdiction, the line must be drawn
between the situations which permit the application of Article 41 and
those which do not permit it. 1t is only in a Iater paragraph, whch the
two Orders also have in common, that a reply is found to that question.
There the Court indicates that it considers that a provision in a certain
instrument emanating from the Parties appears, prima facie, to afford a
possible basis on which the jurisdiction of the Court might be founded.

In the present case,it appears from paragraph 14of the Order that the
Court has been guided by that precedent, for it there expresses the opinion
that it ought not to indicate interim rneasures unless the provisions
invoked by the Applicant appear, prima facie, to afford a basis on which
thejurisdiction of the Court might befounded. 1 can agree to thisformula,
which in my view signifies that for Article 41 of the Statute to be appli-
cable it is not sufficient for a mere adumbration of proof, considered in
isolation, to indicate the possibility of the Court's possessingjurisdiction
that there must also be a probability transpiring from an examination of
the whole of the elements at the Court's disposal.
1have therefore been impelled to carry out such an examination. In the
event, however, I do not find it probable that the three propositions
mentioned above, or any one of them, rnay afford a basis on which to
found the jurisdiction of the Court. For the reason already rnentioned,
1 find myself, at the present stage of the proceedings, prevented froni
setting forth the considerations which have led me to that conclusion and
preclude me from voting for the indication of provisional measures.
Alongside the question of theCourt'sjurisdiction, there arisesthat of the

admissibility of New Zealand's Application. As 1 understand that term, it
includes the examination of every question that arises in connection with
the ascertainment of whether the Court has beenvalidly seisedofthe case.
But what is first and Soremost necessary from that point of view is to ask
oneself whether atmospheric tests of nuclear weapons are, generally spea-
king, already governed by norms of international law, or whether they do
not still belong to a highly political domain where the norms concerning
their international legality or illegality are still at the gestation stage. Certes l'existence desarmes nucléaireset les essais servantà les per-
fectionner età les multiplier occupent une place de premier plan parmi
leshantises actuelles du genre humain. Conjurer leur spectre relève cepen-
dant en premier lieu des forces politiques.11faut espérerque celles-ci

réussiront un jourà établirun étatde choses à la fois politique et juridi-
que qui mettra l'humanitétout entière à l'abri de l'angoisse créear les
armements nucléaires. Entre-temps, se pose la question de savoir si le
moment est déjàvenu où unejuridiction internationale est le destinataire
approprié d'une requêtetelle que celle qui a étédirigéeen la présente
affaire contre l'une seulement des puissances nucléaires actuelles.
L'ordonnance renvoie la question de la recevabilité de la requête,
comme celle de la compétence dela Cour, à un stade ultérieur de la pro-
cédure.Je ne saurais me rallieràcette décision,car je pense que la Cour
aurait pu et dû réglerpendant sa présentesessionl'ensemble desquestions
préliminaires et urgentes qui se posent en l'espèce et sur lesquelles il
incombe à la Cour de prendre positionpropriomotu.
Pour ne pas anticiper sur mon vote éventueldans la nouvelle phase de
l'affaire, je croisdevoir ne rien dire de plus sur la question de la receva-

bilitéde la requête.Je ne trouve d'ailleurs pas nécessairede répondreà
la question de savoir s'il apparaît comme probable que la requêtesoit
recevable, ce qui représentel'une desconditions pour que la Cour puisse
franchir le seuil de l'article 41 de son Statut et indiquer des mesures con-
servatoires. Ayant déjà trouvél'article41 inapplicable dans le cas d'es-
pèce, à cause de l'improbabilité de ce que la France puisse, malgréla
réserve qu'ellea faite à son acceptation de la juridiction de la Cour,
être tenuepour justiciable en cette affaire, je n'ai pas besoin de meo-
qoncer sur d'autres aspects de la question de I'applicabilitéde l'article 41.

(SignéS ). PETRÉN. Certainly, the existence of nuclear weapons and the tests serving to

perfect and ~nultiplythem, are among the foremost subjects of dread for
mankind today. To exorcise their spectre, is, however, primarily a matter
for statesmen. One niust hope that they will one day succeed in estab-
lishing a state of affairs, both political and legal, which will shield the
whole of mankind from the anxiety created by nuclear arms. Meanwhile
there is the auestion whether tlie moment has alreadv corne when an
international tribunal is the appropriate recipient of an application like
that directed in the present case against but one of the present nuclear
Powers.
The Order defers the question of the admissibility of the Application,
like that of the Court's j~irisdiction, to a later stage in the proceedings.
1am unable to concur in this decision, because 1consider that the Court
could and should have settled in its present session the whole of the
preliminary and urgent questions which arise in the case and concerning

which it is incumbent upon the Court to take up a position proprio motu.
To avoid anticipating such vote as 1may cast in the new phase of the
proceedings, 1 must, 1 feel, refrain from saying anything more on the
question of the admissibility of the Application.1 do not, moreover, find
it necessary to answer the question whether it appears probable that the
Application is admissible, wliich constitutes one of the conditions
enabling the Court to cross the threshold of Article 41 of its Statute and
indicate provisional measures. Having already found Article 41 in-
applicable in thisinst,anceowing to the improbability that France, despite
the reservation it has attached to its acceptance of the Court's juris-
diction, could be held subject thereto in the present case,1 have no need
to pronounce Liponany other aspects of the question of the applicability
of Article41.

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Opinion dissidente de M. Petrén

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