Opinion dissidente de M. le juge Abraham

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124-20110504-JUD-01-02-EN
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OpINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE ABRAHAM

Droit conditionné pour les Etats tiers d’intervenir dans l’inst▯ance principale —

Absence de pouvoir discrétionnaire de la Cour — Accord sur le rejet de la demande
d’intervention du Honduras en tant que partie mais désaccord sur l▯e raisonnement
de la Cour — Absence de base de compétence entre le Honduras et les Parties à▯
l’instance — Désaccord avec le rejet de la demande d’intervention en tant ▯que non‑
partie — En l’espèce, possibilité que l’arrêt futur de la Cou▯r affecte les intérêts
d’ordre juridique du Honduras.

1. Le Honduras a demandé l’autorisation d’intervenir dans l’affaire

relative au différend territorial et maritime entre le Nicaragua eto la
Colombie, à titre principal en tant que partie et à titre subsidiaoire — si la
demande précédente est rejetée — en tant que non-partie.
2. J’approuve le dispositif de l’arrêt en tant qu’il rejette lao demande

d’intervention en qualité de partie. En revanche, je suis en désaccord avec
ce dispositif en tant qu’il rejette également la demande d’inteorvention du
Honduras en tant que non-partie. Je pense que la Cour aurait dû faire
droit aux conclusions subsidiaires de la requête et, en conséquencoe, je n’ai
pu que voter contre le dispositif.

3. Dans la présente opinion, je vais exposer succinctement les raisons
qui justifient ma position.
4. Je commencerai par des considérations générales sur la nature de
l’intervention d’un Etat tiers dans une procédure en cours, telle qu’elle est

prévue à l’article 62 du Statut de la Cour (I). Je présenterai ensuite les rai -
sons pour lesquelles, à mon avis, le Honduras ne remplissait pas les condi-
tions nécessaires pour être autorisé à intervenir en qualitéo de partie à
l’instance, raisons qui ne sont pas les mêmes que celles qui ressoortent de

l’arrêt (II). J’expliquerai enfin pourquoi, selon moi, le Honduras remplios -
sait bel et bien les conditions pour être autorisé à interveniro en qualité de
non-partie (III).

I. Considérations généraoles sur l’interventioo:n

existe-t-il un droit à l’intervoention au bénéfice deso États tier?s

5. La question a été souvent et longuement discutée, en doctrine, ode
savoir si et dans quelle mesure l’article 62 du Statut, tel que la jurispru -

dence l’a interprété jusqu’à présent, confère aux Eotats tiers un droit à
intervenir dans une instance, ou leur attribue au contraire une simple
faculté dont ils peuvent demander à bénéficier, mais dont ol’exercice est
subordonné à une autorisation de nature discrétionnaire que la oCour

choisira de leur accorder ou non.

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5 CIJ1020.indb 58 14/06/13 11:47 448 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

6. Cette question n’a pas seulement un caractère théorique ou acadoé -
mique. La réponse qu’on lui donne ne peut qu’avoir des conséoquences

importantes sur la manière dont la Cour examine chacune des requêtoes à
fin d’intervention dont elle est saisie, et sur les décisions quo’elle rend à leur
sujet — étant entendu que cette discussion ne concerne pas l’intervenotion
organisée par l’article 63 du Statut, dont nul ne conteste qu’elle constitue
un droit, selon les termes mêmes de l’article 63, paragraphe 2.

7. Le débat est obscurci, néanmoins, par le fait que la notion de
«droit» (à intervenir) est ambiguë, et que selon le sens dans lequeol on la
prend on peut répondre en faveur de l’existence ou au contraire deo
l’inexistence d’un tel droit, sans que ces réponses soient néocessairement
contradictoires. Il en va de même de la notion de pouvoir « discrétion -
naire» (de la Cour). Elle peut être prise dans plusieurs sens difféorents

(dont l’un n’est pas nécessairement meilleur que l’autre),o et l’on peut
conclure à l’existence ou à l’inexistence d’un pouvoir dioscrétionnaire
— ou d’une « marge de discrétion » — de la Cour lorsqu’elle statue sur
une requête à fin d’intervention, sans que ces réponses sooient forcément
contradictoires.

8. Aussi importe-t-il d’abord de clarifier les termes du débat afin d’évi -
ter — autant que possible — les malentendus.
En laissant de côté pour le moment l’intervention en tant que poartie (j’y
reviendrai ci-après au II), et en envisageant seulement l’intervention que
l’on pourrait appeler « ordinaire», je pense pour ma part qu’il existe bien

un droit à intervenir pour les Etats tiers — et qu’en ce sens le pouvoir de
la Cour d’autoriser ou non l’intervention ne présente pas un caoractère
discrétionnaire — mais que ce droit ne possède pas un caractère incondi -
tionnel: il est subordonné à l’existence de certaines conditions dont oil
appartient à l’Etat qui souhaite intervenir de démontrer qu’elles sont rem -
plies, et dont il appartient à la Cour d’apprécier si elles le sont. Si ces

conditions sont remplies, l’autorisation d’intervenir doit êtreo accordée. Il
faut naturellement préciser en quoi consistent ces conditions.
9. A cet égard, le texte de l’article 62 du Statut est plus clair et précis
dans sa version anglaise que dans sa version française, comme cela a osou -
vent été relevé.

La plus grande précision du texte anglais se manifeste sur deux pointos.
D’une part, la condition essentielle de l’intervention est plus cloairement
formulée en anglais qu’en français. Alors que le texte françoais indique que
la requête à fin d’intervention peut être présentée lorsque l’Etat tiers
estime que, « dans un différend, un intérêt d’ordre juridique est pour loui

en cause », l’anglais rend cette idée plus claire et plus précise en indioquant
que l’Etat tiers peut demander à intervenir lorsqu’il estime « that it has an
interest of a legal nature which may be affected by the decision in thoe
case », soit, littéralement, « qu’il possède un intérêt d’ordre juridique sus -
ceptible d’être affecté par la décision en l’espèce ».

D’autre part, en français, le paragraphe 2 de l’article 62 se borne à indi-
quer de façon lapidaire : « 2. La Cour décide. » En anglais, on lit : « 2. It

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5 CIJ1020.indb 60 14/06/13 11:47 449 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

shall be for the Court to decide upon this request », soit, littéralement, « il
appartient à la Cour de statuer sur cette requête ». La nuance est certes

minime, mais l’on peut tout de même relever que le texte françaois, dans sa
concision, peut plus facilement être interprété comme conféroant à la Cour
un très large pouvoir discrétionnaire, alors que l’anglais mentoionne que la
décision de la Cour doit porter sur la requête telle qu’elle a oété précisée
dans le paragraphe 1, ce qui suggère plutôt que la Cour doit apprécier si

— et j’ajouterai : se borner à apprécier si — la décision à rendre dans
l’affaire pendante devant elle est susceptible d’affecter un iontérêt d’ordre
juridique que possède l’Etat qui demande à intervenir.
10. Le texte français pourrait être compris comme laissant à la Couor
les mains libres pour apprécier si l’intervention serait ou non utoile au bon
déroulement de la procédure principale, autrement dit s’il est odans l’inté -

rêt d’une bonne administration de la justice de l’autoriser. Eno d’autres
termes encore, la condition explicitement mentionnée à l’article 62 — à
savoir qu’un intérêt d’ordre juridique de l’Etat tiers sooit en cause dans
l’instance principale — serait nécessaire, mais non suffisante.

Dans cette interprétation, la Cour pourrait, même si cette conditioon est
remplie, refuser l’autorisation d’intervenir si elle estime, comptoe tenu de
l’ensemble des circonstances de l’affaire, que cela ne serviraito pas les inté -
rêts d’une bonne administration de la justice. Si cela était exoact, la Cour
posséderait vraiment un pouvoir « discrétionnaire», et il n’existerait cer -

tainement pas de « droit» à intervenir pour l’Etat tiers.
11. Mais ce n’est pas l’interprétation qu’a adoptée la Cour doe l’ar -
ticle 62 dans sa jurisprudence jusqu’à ce jour, et pas davantage dans le
présent arrêt.
Il est vrai que, comme le dit l’arrêt dans son paragraphe 35 — et en cela
il n’est nullement en contradiction avec les précédents :

«[I]l ne suffit pas à [l’]Etat [tiers] d’estimer qu’il a un ointérêt d’ordre
juridique en cause dans la procédure principale pour avoir ipso facto

un droit à intervenir dans cette procédure. D’ailleurs, le paraographe 2
de l’article 62 reconnaît clairement la prérogative de la Cour de se
prononcer sur toute demande d’intervention, en fonction des éléo -
ments qui lui auront été soumis. »

Cela est exact, mais cela signifie seulement que le Statut ne confère pas à
l’Etat tiers un droit absolu et inconditionnel à intervenir, c’est-à-dire un
droit qu’il pourrait exercer dès lors qu’il aurait simplement eoxprimé le

désir de l’exercer, sans avoir à justifier d’aucune conditoion. Car si cela
était vrai, alors le pouvoir de la Cour de « décider», que lui attribue le
paragraphe 2 de l’article 62, serait dépourvu de toute substance. De
même, suivre l’argument soutenu par le Honduras selon lequel c’oest à
l’Etat qui désire intervenir, et à lui seul, d’apprécier os’il possède un intérêt
d’ordre juridique susceptible d’être atteint par l’arrêt oà intervenir dans

l’instance principale, reviendrait à rendre ineffective la condiotion posée
par l’article 62: si celui qui souhaite exercer un pouvoir est seul juge de la

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5 CIJ1020.indb 62 14/06/13 11:47 450 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

réalisation de la condition à laquelle l’exercice de ce pouvoiro est subor -
donné, cela revient à rendre ladite condition purement théoriquoe, et le

pouvoir en cause inconditionnel en réalité. Telle n’a jamais éoté la position
de la Cour en ce qui concerne l’intervention des Etats tiers.
12. Mais une chose est de dire qu’il appartient à la Cour de vérifioer que
la condition est remplie, autre chose serait de dire que, même si elloe l’est,
la Cour pourrait néanmoins refuser l’autorisation d’intervenir osur une

base discrétionnaire. Non seulement la Cour n’a jamais accepté ocette der -
nière idée, mais elle l’a écartée nettement.
Dans l’affaire du Plateau continental, elle a indiqué, comme le rappelle
le présent arrêt dans son paragraphe 36, qu’elle « ne considère pas que le
paragraphe 2 [de l’article 62] lui confère une sorte de pouvoir discrétion -
naire lui permettant d’accepter ou de rejeter une requête à fion d’interven-

tion pour de simples raisons d’opportunité» (Plateau continental (Tunisie/
Jamahiriya arabe libyenne), requête à fin d’intervention, arrê▯t, C.I.J.
Recueil 1981, p. 12, par. 17).
Cela signifie, à mes yeux, que si la Cour constate que la conditiono de
l’article 62, paragraphe 1, est remplie, sur la base des éléments produits

par le demandeur, elle est tenue d’autoriser l’intervention ; ou encore
qu’elle ne peut rejeter la requête à fin d’intervention quoe si elle estime que
l’intérêt d’ordre juridique qu’invoque l’Etat requérant n’est pas suscep -
tible d’être affecté par l’arrêt à intervenir sur le fond, et en exposant
dûment les motifs d’une telle appréciation.

13. Naturellement, l’appréciation en cause est souvent relativement
complexe ; elle peut donner lieu à des discussions au terme desquelles la
conclusion est incertaine ; elle n’est pas, à l’évidence, de nature purement
objective et factuelle. En ce sens — mais en ce sens seulement — la Cour
possède une certaine marge de discrétion lorsqu’elle est appeléoe à statuer
sur une requête à fin d’intervention ; elle n’est pas dans la position d’une

Cour appelée seulement à vérifier si des conditions objectiveos sont rem -
plies, et à en déduire automatiquement une décision déterminoée (pour
autant qu’une telle situation se rencontre dans la pratique judiciaire, ce
qui est rarement le cas). Mais l’essentiel est que, si la Cour constoate — au
terme de l’appréciation à laquelle elle doit se livrer et qui dooit être, il n’est

pas besoin de le préciser, dépourvue de tout caractère arbitraire — que la
condition de l’article 62, paragraphe 1, est remplie, elle est tenue d’auto -
riser l’intervention.
De ce point de vue, le pouvoir de la Cour ne me paraît pas pouvoir êotre
qualifié de « discrétionnaire» (il n’y entre aucune appréciation d’opportu -

nité) et l’Etat tiers possède un droit à intervenir dès olors qu’il démontre
que les conditions (ou la condition) d’exercice de ce droit sont (oest) rem -
plie(s).
14. Sur la base du raisonnement qui précède, je pense que la Cour
aurait mieux fait d’éviter d’écrire, au début du paragraphe 35 de l’arrêt,
que «l’article 62 ne confère pas à l’Etat tiers un droit à intervenir ». Sous

cette forme, l’affirmation est au moins trop abrupte, et pourrait proêter à
équivoque. Ce que veut dire ici la Cour, c’est qu’il ne suffito pas que l’Etat

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5 CIJ1020.indb 64 14/06/13 11:47 451 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

tiers demande à intervenir pour avoir le droit de le faire — c’est exacte -
ment ce que dit la suite du paragraphe 35. C’est en ce sens-là seulement

que l’on peut dire que l’intervention n’est pas un « droit » (on devrait plu -
tôt dire : un «droit absolu »). Mais cela n’empêche pas nécessairement de
considérer qu’il existe un droit à intervenir dans le sens — différent —
qu’il s’agit d’une faculté dont l’exercice n’est pas subordonné à une auto -
risation discrétionnaire conférée par la Cour, mais à la seuole réalisation

d’une condition statutaire.
Comme je n’ai aucun goût pour les querelles purement terminolo -
giques, je ne m’étendrai pas davantage sur la question et, tout eno regret -
tant la formulation abrupte de la première phrase du paragraphe 35, je
dirai que je suis d’accord en substance avec l’idée qu’expriome ce para -

graphe.
15. En somme, à cette réserve près, j’estime que dans le présoent arrêt la
Cour rappelle sa jurisprudence dans des termes qui sont fidèles. Maois,
dans l’application qu’elle en fait ensuite au cas d’espèce, oje crains qu’elle
ne s’en écarte fondamentalement, en raisonnant comme si elle exerçoait un

pouvoir discrétionnaire, fondé sur une appréciation des intéorêts d’une
bonne administration de la justice — appréciation qui, par nature, lui
laisse toute liberté — et non pas sur une recherche portant seulement sur
la condition énoncée à l’article 62, comme elle aurait dû le faire selon moi.
Cela apparaîtra mieux au III ci-après.

II. La demande d’intervenotion du Honduras en quaolité de partie

16. L’article 62 du Statut, tel qu’il est rédigé, paraît bien avoir étéo

conçu dans la perspective de l’intervention d’un Etat tiers en oqualité de
non-partie. C’est l’intervention que l’on peut qualifier d’« ordinaire ».
D’ailleurs, si un Etat demande à intervenir sans rien préciser oquant au
statut qu’il revendique, la Cour considérera naturellement qu’iol souhaite
avoir le statut d’un intervenant qui n’est pas partie à l’inostance.

Cependant, la jurisprudence a admis qu’un Etat intervenant en vertu doe
l’article 62 peut acquérir, s’il le demande et s’il y est dûment autorisoé, la
qualité de partie, avec tous les droits et les obligations qui s’yo attachent.
17. La référence essentielle, à cet égard, est l’arrêt renodu par la Chambre
de la Cour ayant statué dans l’affaire du Différend frontalier terrestre,

insulaire et maritime (El Salvador/Honduras), sur la requête à fin d’inter -
vention du Nicaragua.
Dans cet arrêt, la Chambre a indiqué :

«Il est donc patent que l’Etat admis à intervenir dans une instanceo
ne devient pas aussi une partie en cause du seul fait qu’il est un inoter -
venant. Réciproquement, il est vrai que, sous réserve du consente -
ment requis des parties en cause, l’intervenant n’est pas empêcohé par

sa qualité d’intervenant de devenir lui-même partie au procès. »
(Arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 134-135, par. 99.)

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5 CIJ1020.indb 66 14/06/13 11:47 452 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

18. En réalité, il résulte de cet arrêt et de celui que la mêome Chambre a
rendu au fond dans la même affaire (C.I.J. Recueil 1992, p. 610, par. 424),

tels que je les comprends, que l’Etat tiers qui est autorisé à ointervenir en
qualité de partie n’acquière pas, dès lors que cette autorisation lui a été
donnée, la qualité d’intervenant mais celle, purement et simpleoment, de
partie. Dès cet instant, le procès se déroule non plus entre deoux mais entre
trois parties, et il n’y a pas d’intervenant. En somme, l’Etat otiers utilise la

voie de la requête à fin d’intervention pour entrer dans l’oinstance non
comme intervenant — ce qui est l’objet normal d’une telle requête — mais
comme partie. paradoxalement, il demande donc à intervenir dans des
conditions telles que l’on peut savoir par avance qu’il ne sera paos interve -
nant (à moins que, comme en l’espèce, il ne demande à titre subsoidiaire
l’autorisation d’intervenir comme non-partie) : car ou bien sa demande

sera rejetée, et il ne sera pas présent dans l’instance, ou bien elle sera
accueillie et il sera présent comme partie.
19. On peut trouver cette construction jurisprudentielle — puisqu’elle
ne trouve pas directement sa source dans le Statut — un peu étrange,
mais elle répond à des préoccupations pratiques par une solution pragma -

tique, et je ne suis pas d’avis qu’il faille la remettre en cause.o L’arrêt ne le
fait pas, et je l’approuve sur ce point.
20. Encore faut-il que l’Etat tiers qui présente une telle demande rem -
plisse non seulement les conditions générales de l’article 62 mais des
conditions supplémentaires, ou plutôt une ou deux conditions supploémen -

taires, selon la lecture que l’on fait de la jurisprudence de la Couro à ce
jour.
Une condition supplémentaire est certainement requise: l’Etat tiers doit
démontrer qu’il existe une base de compétence entre lui et les odeux Etats
parties à l’instance déjà introduite, en ce qui concerne leso droits qu’il
entend faire valoir à leur égard.

Cela est logique, car, contrairement à l’intervenant « ordinaire », qui
cherche non pas à faire établir des droits mais à préserver odes intérêts (et
qui, pour cette raison, n’est pas tenu de démontrer l’existence d’une base
de compétence : voir l’affaire du Différend frontalier terrestre, insulaire et
maritime (El Salvador/Honduras) précitée (requête à fin d’intervention,

arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 135, par. 100), l’Etat qui souhaite entrer dans
l’instance comme partie entend soumettre à la Cour des conclusionso qui
lui soient propres, et souhaite faire admettre leur bien-fondé avec l’auto -
rité de la chose jugée.
Une seconde condition est, en revanche, sujette à controverse : faut-il

en outre que l’entrée dans la procédure de l’Etat tiers en qoualité non de
simple intervenant mais de partie soit soumise à l’accord des deuxo parties
initiales ? L’arrêt précité de 1990 dans l’affaire El Salvador/Honduras
pourrait le laisser penser, celui rendu dans la même affaire en 199o2 paraît
aller dans un sens opposé, mais il n’est pas dépourvu d’ambioguïté, loin
s’en faut (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/

Honduras ; Nicaragua (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 1992, p. 610,
par. 424).

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5 CIJ1020.indb 68 14/06/13 11:47 453 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

21. Il n’est pas nécessaire de trancher cette dernière question en ol’es -

pèce, car l’une des conditions requises pour autoriser l’intervoention du
Honduras en qualité de partie fait certainement défaut.
Selon l’arrêt, aucun intérêt d’ordre juridique possédéo par le Honduras
ne serait susceptible d’être affecté par l’arrêt qui seora rendu au principal.
Si cela était exact, cela suffirait à justifier le rejet de la orequête du Hondu

ras dans sa totalité, car cette condition — la condition de base exprimée
par l’article 62 — est commune aux deux formes d’intervention.

Mais, pour des raisons que j’exposerai un peu plus loin, cette conditoion
me paraît au contraire remplie.

22. En revanche, j’estime que la condition relative à la base de compéo -
tence — sur laquelle l’arrêt ne se prononce pas, parce qu’il n’oa pas besoin
de le faire — n’est pas remplie.
Le Honduras devait démontrer qu’il existe entre lui et le Nicaraguoa,
d’une part, la Colombie, d’autre part, une base juridique de naturoe à

fonder la compétence de la Cour pour connaître des revendications oqui
sont les siennes en matière de délimitation maritime à l’éogard de ces deux
pays.
A cette fin, il a invoqué l’article XXXI du pacte de Bogotá.
Mais l’article VI du pacte de Bogotá écarte du règlement judiciaire —

tel que prévu par la clause compromissoire de l’article XXXI — les
«questions déjà réglées au moyen d’une entente entre les poarties », celles
réglées par la « décision d’un tribunal international » et celles «réglées par
des accords ou traités en vigueur à la date de la signature du préosent
pacte ».

23. Or, la délimitation maritime entre le Honduras et le Nicaragua a
été réglée par l’arrêt de la Cour du 8 octobre 2007. Et elle l’a été complè -
tement, comme le relève à juste titre le présent arrêt dans oses para -
graphes 69 et 70, et non pas seulement, comme l’a prétendu le Honduras,
jusqu’à un point où la ligne bissectrice retenue par l’arrêot est supposée
e
s’interrompre à l’ouest du 82 méridien. Elle constitue donc une « ques-
tion réglée par la décision d’un tribunal international » au sens de l’ar-
ticle VI du pacte de Bogotá. En conséquence, le Honduras ne peut justifioer
d’aucune base de compétence pour soumettre à la Cour ses revendoications
maritimes à l’égard du Nicaragua. A supposer même qu’une telle base de

compétence existe dans les rapports entre le Honduras et la Colombie, ce
qui peut se discuter au regard des dispositions du pacte de Bogotá, iol suf -
fit de constater l’absence de base de compétence entre le Honduroas et l’un
des deux Etats parties à la procédure principale pour justifier ole rejet de la
demande d’intervention du Honduras en qualité de partie.

III. La demande d’intervenotion du Honduras
en qualité de non-partie

24. A cet égard, je me sépare de l’arrêt aussi bien quant au raiosonne -

ment que quant à la conclusion.

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5 CIJ1020.indb 70 14/06/13 11:47 454 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

25. Le Honduras a délimité une zone rectangulaire (qui apparaît suor la
carte jointe à l’arrêt) dans laquelle il affirme posséder odes intérêts sus-
ceptibles d’être affectés par l’arrêt à venir dans loa procédure principale.
Le côté sud de ce rectangle suit la ligne du 15 eparallèle. Ses côtés laté -
e
raux — ouest et est — sont situos respectivement le long du 82 méridien,
à l’ouest, et du méridien 79 56΄, à l’est. Son côté nord se situe entre les
16 eet 17 parallèles.
Cette zone rectangulaire est divisée en deux par une ligne discontinuoe

figurant en rouge sur le croquis et suivant, grosso modo, une direction
sud-ouest/nord-est. Cette ligne discontinue n’est autre que le prolonge -
ment de la ligne bissectrice que la Cour a tracée dans son arrêt dou
8 octobre 2007 (qui a autorité de chose jugée entre le Honduras et le
Nicaragua), et dont la Cour a indiqué, dans ledit arrêt, qu’elle se prolon -

gerait, le long d’une même ligne d’azimut, jusqu’à atteinodre la zone dans
laquelle elle mettrait en cause les droits d’un Etat tiers. Faute de opouvoir
statuer sur les droits des Etats tiers, la Cour n’a pas fixé en 2007 le point
terminal de la ligne : c’est pourquoi elle figure dans le croquis joint au

présent arrêt sous forme discontinue, car on ne sait pas encore quoel est
son point terminal — c’est-à-dire, exactement, quel est le point terminal
de la frontière maritime entre le Honduras et le Nicaragua.
26. Je suis d’accord avec l’arrêt lorsqu’il constate que les intoérêts du

Honduras dans la zone correspondant à la partie du rectangle qui se
trouve au nord de la ligne rouge discontinue ne risquent pas d’être affec -
tés par l’arrêt à venir dans l’affaire principale (arroêt, par. 68). En effet,
dans cette zone, les droits souverains du Honduras ne sont contestés o
par personne. Ils ne le sont pas par le Nicaragua — et ne peuvent pas

l’être, en raison de l’autorité de chose jugée qui s’aottache à l’arrêt du
8 octobre 2007. Ils ne le sont pas non plus par la Colombie et ne peuvent
pas l’être par cette dernière en raison, non de l’arrêt doe 2007 qui n’a pas
d’autorité contraignante à son égard, mais du traité bilaotéral conclu en

1986 entre elle et le Honduraseet qui attribue à celui-ci les espaces mori -
times situés au nord du 15 parallèle et à l’ouest du méridien 79 56΄.
par conséquent, les droits et intérêts du Honduras en ce qui conocerne la
partie située au nord de la ligne rouge sont à l’abri de tout eoffet préjudi -

ciable résultant de l’arrêt que la Cour rendra dans le difféorend opposant
le Nicaragua et la Colombie.
27. En revanche, je me sépare nettement de l’arrêt lorsqu’il affiorme
qu’aucun intérêt d’ordre juridique possédé par le Hondouras n’est suscep -
tible d’être affecté par l’arrêt futur en ce qui concerne la zone située au

sud de la ligne rouge.
Dans cette zone, en effet, le Honduras possède actuellement des drooits
qui découlent du traité bilatéral de 1986, mais qu’il ne peuot bien sûr faire
valoir, en vertu de l’effet relatif des traités, qu’à l’oégard de la Colombie.

Naturellement, le Nicaragua conteste formellement la délimitation opéorée
par le traité de 1986, puisqu’il revendique les espaces maritimes oque ce
traité a pour objet de partager entre le Honduras et la Colombie. Comome
l’a dit à l’audience l’un de ses conseils, le Nicaragua «o a toujours considéré

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5 CIJ1020.indb 72 14/06/13 11:47 455 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

que ce traité n’était pas valide», et que, fût-il même valide entre les parties
qui l’ont conclu, il serait sans effet « car, en concluant cet accord, les par -
ties ont disposé des droits souverains du Nicaragua ».
28. La Cour aurait dû se demander, selon moi, d’une part si la ligne
qu’elle est appelée à tracer pour délimiter les espaces mariotimes du Nica -

ragua et de la Colombie est susceptible de pénétrer dans la zone eon ques-
tion, c’est-à-dire dans la partie du rectangle bleu située au sud de la ligne
rouge ; d’autre part si, dans cette hypothèse, il en résulterait que leos inté -
rêts juridiques du Honduras seraient affectés.
29. La réponse est manifestement affirmative à l’une et l’autreo de ces

questions.
30. Quant à la première question, il ne s’agit évidemment pas deo
prévoir, et encore moins de décider à l’avance, la solution oque la Cour
adoptera dans l’instance principale. Il suffit à la Cour, lorsqu’oelle examine

une demande à fin d’intervention, de se demander s’il existe oune simple
possibilité (et non pas une certitude, ni même une probabilitéo) que l’arrêt
futur affecte les intérêts de l’Etat tiers. Elle ne peut donc écarter aucune
des possibilités qui se situent à l’intérieur des limites quoi lui sont assignées
par les conclusions des parties à l’instance principale. Ne pouvanot donner

la préférence à aucune hypothèse quant à la décision qou’elle rendra au
principal, elle doit les accepter toutes, dans la seule limite du principe qui
lui interdit de statuer ultra petita.
31. Sur cette base, il n’est pas douteux qu’il existe une possibilitéo —

dont je me garderai bien d’évaluer le degré de probabilité — pour que la
Cour fixe la ligne de délimitation — qui suivra nécessairement, plus ou
moins, une orientation nord-sud — dans une zone située entre le 80 e et le
82 eméridien. Une telle solution se situerait entre la frontière revenodiquée
par la Colombie — qui se situe, approximativement, aux environs du
e
82 méridien — et la frontière revendiquée par le Niearagua — qui se
situe beaucoup plus à l’est, aux environs du 77 méridien.
Si une telle solution était retenue — et ce n’est, j’y insiste, qu’une simple
possibilité, mais que l’on est obligé d’envisager à ce stoade —, la ligne tra -
cée se prolongerait vers le nord jusqu’à atteindre la zone oùo elle mettrait

en cause les droits d’un Etat tiers (c’est-à-dire autre que le Nicaragua et la
Colombie). Elle pénétrerait donc dans le « rectangle bleu» et s’arrêterait à
l’intersection de la ligne rouge, c’est-à-dire de la bissectrice tracée par la
Cour dans son arrêt de 2007, qui délimite les zones respectives duo Hondu -

ras et du Nicaragua.
32. S’il était tel que je viens de le supposer, l’arrêt futur auorait-il pour
résultat d’« affecter les intérêts d’ordre juridique » du Honduras ? Je ne
doute pas que la réponse soit affirmative.
33. Les intérêts du Honduras seraient affectés de deux manièreos.

34. D’une part, il résulterait de l’arrêt rendu par la Cour danso le diffé -
rend opposant le Nicaragua et la Colombie que le point terminal de la
ligne bissectrice tracée par la Cour dans son arrêt de 2007 rendu oentre le
Nicaragua et le Honduras serait enfin fixé, alors qu’il ne l’oa pas été, et
qu’il ne pouvait pas l’être, dans l’arrêt de 2007. Ainsi,o l’arrêt futur aurait

39

5 CIJ1020.indb 74 14/06/13 11:47 456 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

pour effet de préciser, sur une question essentielle, la délimitoation opérée

quelques années plus tôt par un arrêt qui a l’autorité de la chose jugée à
l’égard du Honduras. J’en déduis que celui-ci a un intérêt que l’arrêt futur
pourrait affecter — même si ce n’est qu’une simple possibilité.

35. D’autre part et surtout, l’arrêt que la Cour doit rendre, s’oil était tel

que je l’ai hypothétiquement supposé, aurait des incidences diroectes sur la
portée effective du traité bilatéral de 1986 conclu entre le Honduras et la
Colombie.
Aussi longtemps que la Cour n’a pas statué sur les droits respectiofs du
Nicaragua et de la Colombie, le Honduras peut revendiquer les espaces

délimités par le « rectangle bleu ». En ce qui concerne la partie située au
nord de la ligne rouge (la ligne bissectrice), il tire ses droits de lo’arrêt
rendu en 2007, à l’égard du Nicaragua, et du traité de 1986,o à l’égard de
la Colombie. Mais, en ce qui concerne la partie située au sud de cettoe
ligne, il ne peut revendiquer d’autres droits que ceux qu’il tiento du traité

de 1986, et qui ne sont opposables qu’à la Colombie. Encore faut-il, pour
qu’il puisse faire valoir ces droits conventionnels, que tout ou partoie des
zones qui lui sont attribuées par le traité ne se trouvent pas déovolus, par
l’effet de l’arrêt que la Cour rendra, au Nicaragua. Il n’oest pas certain
qu’un tel effet se produira : si la Cour adopte la ligne de délimitation pro -

posée par la Colombie, le Honduras pourra continuer à revendiquer,o sur
la base du traité, l’essentiel des espaces que celui-ci lui attribue. Mais il est
possible qu’il se produise : si la ligne retenue par la Cour se situe plus à
l’est que celle proposée par la Colombie, elle partagera l’espaoce situé dans
la partie sud du « rectangle bleu» de telle sorte que toute la zone se trou -

vant à l’ouest de cette ligne appartiendra au Nicaragua, et ne sera plus
susceptible d’être revendiquée par le Honduras — puisqu’il n’existe entre
lui et le Nicaragua aucune base conventionnelle permettant de fonder une
telle revendication.
A mes yeux, la possibilité que soient ainsi affectés les intérêts du Hon -

duras est évidente, et cela suffit à rendre son intervention receovable.

36. La Cour n’en a pas été convaincue, mais les raisons qu’elle oa don-
nées pour justifier sa conclusion me paraissent dépourvues de peortinence.
Je suis d’accord avec l’affirmation selon laquelle l’arrêt de 2007 a déli -

mité de façon complète la frontière séparant les espaces omaritimes respec -
tifs du Honduras et du Nicaragua, en ce sens qu’il n’a pas entendu
interrompre la ligne bissectrice à un point situé à l’ouest odu 82 eparallèle,
comme l’a prétendu le Honduras, mais qu’il a entendu que cette oligne se
prolonge vers le nord-est jusqu’à atteindre les droits d’un Etat tiers, et à

cet égard l’arrêt de 2007 est clair. Je suis aussi d’accord pour dire que
l’arrêt de 2007 s’impose au Honduras en tant qu’il vise ào prolonger la
bissectrice vers l’est — toujours jusqu’à ce point indéterminé pour le
moment — en vertu de l’autorité de la chose jugée. Je suis aussi paorfaite -
ment d’accord — car c’est une évidence — sur l’idée, qu’exprime le para -

graphe 73 de l’arrêt, que « la Cour, pour déterminer [la] frontière [entre la

40

5 CIJ1020.indb 76 14/06/13 11:47 457 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

Colombie et le Nicaragua], ne se fondera pas sur le traité de 1986 ». Com-
ment pourrait-elle le faire, puisque ce traité a été conclu par l’une des o
deux parties à l’instance principale avec un Etat tiers ?
37. En somme, je ne suis vraiment en désaccord avec aucune des pro -
positions qu’énonce la Cour aux paragraphes 57 à 74 de l’arrêt. Mais je

n’arrive pas à comprendre comment ces considérations peuvent juostifier la
conclusion à laquelle parvient la Cour, à savoir qu’aucun intéorêt juridique
du Honduras n’est susceptible d’être affecté par l’arrêot à venir. Je n’y vois
tout simplement pas une ligne de raisonnement cohérente répondant oaux
questions soulevées par la requête du Honduras. Tout se passe commoe si

la Cour s’était davantage déterminée sur la base de considéorations d’op -
portunité que sur celle des critères juridiques qu’elle a elle-même pris soin
de rappeler dans la première partie de l’arrêt.
38. C’est pourquoi, n’étant capable ni de suivre le raisonnement nio

d’adhérer à la conclusion, j’ai dû, à mon grand regreto, me séparer de la
majorité de mes collègues.

(Signé) Ronny Abraham.

41

5 CIJ1020.indb 78 14/06/13 11:47

Bilingual Content

447

OpINION DISSIDENTE DE M. LE JUGE ABRAHAM

Droit conditionné pour les Etats tiers d’intervenir dans l’inst▯ance principale —

Absence de pouvoir discrétionnaire de la Cour — Accord sur le rejet de la demande
d’intervention du Honduras en tant que partie mais désaccord sur l▯e raisonnement
de la Cour — Absence de base de compétence entre le Honduras et les Parties à▯
l’instance — Désaccord avec le rejet de la demande d’intervention en tant ▯que non‑
partie — En l’espèce, possibilité que l’arrêt futur de la Cou▯r affecte les intérêts
d’ordre juridique du Honduras.

1. Le Honduras a demandé l’autorisation d’intervenir dans l’affaire

relative au différend territorial et maritime entre le Nicaragua eto la
Colombie, à titre principal en tant que partie et à titre subsidiaoire — si la
demande précédente est rejetée — en tant que non-partie.
2. J’approuve le dispositif de l’arrêt en tant qu’il rejette lao demande

d’intervention en qualité de partie. En revanche, je suis en désaccord avec
ce dispositif en tant qu’il rejette également la demande d’inteorvention du
Honduras en tant que non-partie. Je pense que la Cour aurait dû faire
droit aux conclusions subsidiaires de la requête et, en conséquencoe, je n’ai
pu que voter contre le dispositif.

3. Dans la présente opinion, je vais exposer succinctement les raisons
qui justifient ma position.
4. Je commencerai par des considérations générales sur la nature de
l’intervention d’un Etat tiers dans une procédure en cours, telle qu’elle est

prévue à l’article 62 du Statut de la Cour (I). Je présenterai ensuite les rai -
sons pour lesquelles, à mon avis, le Honduras ne remplissait pas les condi-
tions nécessaires pour être autorisé à intervenir en qualitéo de partie à
l’instance, raisons qui ne sont pas les mêmes que celles qui ressoortent de

l’arrêt (II). J’expliquerai enfin pourquoi, selon moi, le Honduras remplios -
sait bel et bien les conditions pour être autorisé à interveniro en qualité de
non-partie (III).

I. Considérations généraoles sur l’interventioo:n

existe-t-il un droit à l’intervoention au bénéfice deso États tier?s

5. La question a été souvent et longuement discutée, en doctrine, ode
savoir si et dans quelle mesure l’article 62 du Statut, tel que la jurispru -

dence l’a interprété jusqu’à présent, confère aux Eotats tiers un droit à
intervenir dans une instance, ou leur attribue au contraire une simple
faculté dont ils peuvent demander à bénéficier, mais dont ol’exercice est
subordonné à une autorisation de nature discrétionnaire que la oCour

choisira de leur accorder ou non.

31

5 CIJ1020.indb 58 14/06/13 11:47 447

DISSENTING OpINION OF JUDGE ABRAHAM

[Translation]

Conditional right of third States to intervene in the principal proceedi▯ngs —

Lack of discretionary power of the Court — Agreement with the rejection of
Honduras’s request to intervene as a party, but disagreement with the▯ Court’s
reasoning — Lack of basis of jurisdiction between Honduras and the Parties to t▯he
case — Disagreement with the rejection of the request to intervene as a no▯n‑party —
Possibility of the Court’s future Judgment in this case affecting Honduras’s
interests of a legal nature.

1. Honduras has requested permission to intervene in the case concern-

ing the territorial and maritime dispute between Nicaragua and Colom -
bia, in the principal proceedings as a party and, in the alternative — should
that request be rejected —, as a non-party.
2. I agree with the operative part of the Judgment in so far as it rejects o

the request to intervene as a party. On the other hand, I disagree with o
that operative part in so far as it also rejects Honduras’s request too inter -
vene as a non-party. In my view, the Court should have upheld the alter -
native submissions in the Application, and I therefore had no choice but
to vote against the operative clause.

3. In this opinion, I will briefly set out the reasoning behind my posi -
tion.
4. I will begin with some general considerations on the nature of
third-State intervention in a case in progress, as provided for in Article 62

of the Statute of the Court (I). I will then set out the reasons why I believe
Honduras did not meet the necessary conditions to be allowed to intervenoe
as a party to the case, reasons which are not the same as those to be foound
in the Judgment (II). Lastly, I will explain why, in my view, Honduras does

indeed satisfy the conditions to be permitted to intervene as a non-party (III).

I. General Considerationso on Intervention:

Do Third States Have a Righot to Intervene?

5. The question has been discussed frequently and at length in
doctrine: doesArticle 62 of the Statute, as interpreted by the Court to

date, afford third States a right to intervene in a case, and to what oextent,
or, on the other hand, does it merely give third States an option which it
may seek to exercise, but whose exercise is subject to discretionary leave,
which the Court will decide whether or not to grant?

31

5 CIJ1020.indb 59 14/06/13 11:47 448 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

6. Cette question n’a pas seulement un caractère théorique ou acadoé -
mique. La réponse qu’on lui donne ne peut qu’avoir des conséoquences

importantes sur la manière dont la Cour examine chacune des requêtoes à
fin d’intervention dont elle est saisie, et sur les décisions quo’elle rend à leur
sujet — étant entendu que cette discussion ne concerne pas l’intervenotion
organisée par l’article 63 du Statut, dont nul ne conteste qu’elle constitue
un droit, selon les termes mêmes de l’article 63, paragraphe 2.

7. Le débat est obscurci, néanmoins, par le fait que la notion de
«droit» (à intervenir) est ambiguë, et que selon le sens dans lequeol on la
prend on peut répondre en faveur de l’existence ou au contraire deo
l’inexistence d’un tel droit, sans que ces réponses soient néocessairement
contradictoires. Il en va de même de la notion de pouvoir « discrétion -
naire» (de la Cour). Elle peut être prise dans plusieurs sens difféorents

(dont l’un n’est pas nécessairement meilleur que l’autre),o et l’on peut
conclure à l’existence ou à l’inexistence d’un pouvoir dioscrétionnaire
— ou d’une « marge de discrétion » — de la Cour lorsqu’elle statue sur
une requête à fin d’intervention, sans que ces réponses sooient forcément
contradictoires.

8. Aussi importe-t-il d’abord de clarifier les termes du débat afin d’évi -
ter — autant que possible — les malentendus.
En laissant de côté pour le moment l’intervention en tant que poartie (j’y
reviendrai ci-après au II), et en envisageant seulement l’intervention que
l’on pourrait appeler « ordinaire», je pense pour ma part qu’il existe bien

un droit à intervenir pour les Etats tiers — et qu’en ce sens le pouvoir de
la Cour d’autoriser ou non l’intervention ne présente pas un caoractère
discrétionnaire — mais que ce droit ne possède pas un caractère incondi -
tionnel: il est subordonné à l’existence de certaines conditions dont oil
appartient à l’Etat qui souhaite intervenir de démontrer qu’elles sont rem -
plies, et dont il appartient à la Cour d’apprécier si elles le sont. Si ces

conditions sont remplies, l’autorisation d’intervenir doit êtreo accordée. Il
faut naturellement préciser en quoi consistent ces conditions.
9. A cet égard, le texte de l’article 62 du Statut est plus clair et précis
dans sa version anglaise que dans sa version française, comme cela a osou -
vent été relevé.

La plus grande précision du texte anglais se manifeste sur deux pointos.
D’une part, la condition essentielle de l’intervention est plus cloairement
formulée en anglais qu’en français. Alors que le texte françoais indique que
la requête à fin d’intervention peut être présentée lorsque l’Etat tiers
estime que, « dans un différend, un intérêt d’ordre juridique est pour loui

en cause », l’anglais rend cette idée plus claire et plus précise en indioquant
que l’Etat tiers peut demander à intervenir lorsqu’il estime « that it has an
interest of a legal nature which may be affected by the decision in thoe
case », soit, littéralement, « qu’il possède un intérêt d’ordre juridique sus -
ceptible d’être affecté par la décision en l’espèce ».

D’autre part, en français, le paragraphe 2 de l’article 62 se borne à indi-
quer de façon lapidaire : « 2. La Cour décide. » En anglais, on lit : « 2. It

32

5 CIJ1020.indb 60 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 448

6. This question is not purely theoretical or academic. The answer
given to it inevitably has major repercussions on the way in which the

Court considers each application for permission to intervene submitted too
it, and on the decisions it takes on those applications — it being under -
stood that this debate does not concern intervention under Article 63 of
the Statute, which is indisputably a right, according to the very terms oof
its second paragraph.

7. The debate is obscured, however, by the fact that the notion of a
“right” (to intervene) is ambiguous and, according to how that nootion is
understood, it is possible to argue both in favour of and, on the contraory,
against the existence of such a right, without those arguments necessarioly
contradicting one another. The same is true of the notion of (the Courto’s)
“discretionary” power : it can be interpreted in several different ways

(with no one interpretation necessarily better than the other), and ito is
possible to conclude both that the Court has a discretionary power — or
a “margin of discretion” — when it is ruling on an application for permis -
sion to intervene, and that it does not, without those conclusions neceso -
sarily being mutually contradictory.

8. Therefore, it is important to first clarify the terms of the debate, in
order, as far as possible, to avoid any misunderstandings.
Leaving intervention as a party to one side for the moment (I will
return to it later in part II), and concentrating solely on what could be
termed “ordinary” intervention, it is my view that third States doo in fact

have a right to intervene — and that, in this sense, the Court’s power to
allow or refuse the intervention is not discretionary —, but that this right
is not unconditional : it is subject to certain conditions, whose existence
must be demonstrated by the State seeking to intervene and whose satis -
faction is to be determined by the Court. If these conditions are met,
authorization to intervene must be granted. It is of course necessary too

specify exactly what these conditions are.

9. In this respect, the text of Article 62 of the Statute is clearer and
more precise in its English version than in the French one, as has been o
frequently observed.

The greater precision of the English text is apparent on two points.
Firstly, the essential condition for intervention is more clearly formu -
lated in the English text than in the French. The French text states that
an application for permission to intervene may be submitted when a thirdo
State considers that an interest of a legal nature is at stake for it ino a dis -

pute (“dans un différend, un intérêt d’ordre juridique est pour lui en cause”
in French) ; this idea is rendered in clearer and more precise terms in the
English text, which states that a third State may seek to intervene wheno it
considers “that it has an interest of a legal nature which may be affected
by the decision in the case” (literally, in French, “qu’il possède un intérêt
d’ordre juridique susceptible d’être affecté par la décis▯ion en l’espèce”).

Secondly, in French, Article 62, paragraph 2, simply states, in a lapi -
dary fashion, that the Court decides (“2. La Cour décide” in French). In

32

5 CIJ1020.indb 61 14/06/13 11:47 449 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

shall be for the Court to decide upon this request », soit, littéralement, « il
appartient à la Cour de statuer sur cette requête ». La nuance est certes

minime, mais l’on peut tout de même relever que le texte françaois, dans sa
concision, peut plus facilement être interprété comme conféroant à la Cour
un très large pouvoir discrétionnaire, alors que l’anglais mentoionne que la
décision de la Cour doit porter sur la requête telle qu’elle a oété précisée
dans le paragraphe 1, ce qui suggère plutôt que la Cour doit apprécier si

— et j’ajouterai : se borner à apprécier si — la décision à rendre dans
l’affaire pendante devant elle est susceptible d’affecter un iontérêt d’ordre
juridique que possède l’Etat qui demande à intervenir.
10. Le texte français pourrait être compris comme laissant à la Couor
les mains libres pour apprécier si l’intervention serait ou non utoile au bon
déroulement de la procédure principale, autrement dit s’il est odans l’inté -

rêt d’une bonne administration de la justice de l’autoriser. Eno d’autres
termes encore, la condition explicitement mentionnée à l’article 62 — à
savoir qu’un intérêt d’ordre juridique de l’Etat tiers sooit en cause dans
l’instance principale — serait nécessaire, mais non suffisante.

Dans cette interprétation, la Cour pourrait, même si cette conditioon est
remplie, refuser l’autorisation d’intervenir si elle estime, comptoe tenu de
l’ensemble des circonstances de l’affaire, que cela ne serviraito pas les inté -
rêts d’une bonne administration de la justice. Si cela était exoact, la Cour
posséderait vraiment un pouvoir « discrétionnaire», et il n’existerait cer -

tainement pas de « droit» à intervenir pour l’Etat tiers.
11. Mais ce n’est pas l’interprétation qu’a adoptée la Cour doe l’ar -
ticle 62 dans sa jurisprudence jusqu’à ce jour, et pas davantage dans le
présent arrêt.
Il est vrai que, comme le dit l’arrêt dans son paragraphe 35 — et en cela
il n’est nullement en contradiction avec les précédents :

«[I]l ne suffit pas à [l’]Etat [tiers] d’estimer qu’il a un ointérêt d’ordre
juridique en cause dans la procédure principale pour avoir ipso facto

un droit à intervenir dans cette procédure. D’ailleurs, le paraographe 2
de l’article 62 reconnaît clairement la prérogative de la Cour de se
prononcer sur toute demande d’intervention, en fonction des éléo -
ments qui lui auront été soumis. »

Cela est exact, mais cela signifie seulement que le Statut ne confère pas à
l’Etat tiers un droit absolu et inconditionnel à intervenir, c’est-à-dire un
droit qu’il pourrait exercer dès lors qu’il aurait simplement eoxprimé le

désir de l’exercer, sans avoir à justifier d’aucune conditoion. Car si cela
était vrai, alors le pouvoir de la Cour de « décider», que lui attribue le
paragraphe 2 de l’article 62, serait dépourvu de toute substance. De
même, suivre l’argument soutenu par le Honduras selon lequel c’oest à
l’Etat qui désire intervenir, et à lui seul, d’apprécier os’il possède un intérêt
d’ordre juridique susceptible d’être atteint par l’arrêt oà intervenir dans

l’instance principale, reviendrait à rendre ineffective la condiotion posée
par l’article 62: si celui qui souhaite exercer un pouvoir est seul juge de la

33

5 CIJ1020.indb 62 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 449

English, it reads: “2. It shall be for the Court to decide upon this request”
(literally, in French, “il appartient à la Cour de statuer sur cette requête”).

While the difference is indeed minimal, it is nonetheless possible to o
observe that the French text, in its conciseness, may more easily be intoer-
preted as granting the Court a very broad discretionary power, whereas
the English text makes clear that the Court’s decision must concern tohe
request as it was defined in paragraph 1, which suggests rather that the

Court must decide whether — and I would add : confine itself to deciding
whether — the decision pending in the case before it might affect an inter -
est of a legal nature possessed by the State seeking to intervene.
10. The French text could be understood as allowing the Court a free
hand to decide whether or not the intervention would help the principal o
proceedings to progress smoothly, in other words, whether it would serveo

the sound administration of justice to authorize it. To put it yet anothoer
way, the condition expressly mentioned in Article 62 — namely that the
third State must have an interest of a legal nature which may be affecoted
by the decision in the principal proceedings — would be necessary, but
not sufficient.

According to this interpretation, even if this condition is met, the Couort
could refuse to allow the intervention if it considers — taking account of
all the circumstances of the case — that it would not be in the interests of
the sound administration of justice. If that is correct, the Court wouldo in
effect have a truly “discretionary” power, and there would certaoinly be no

“right” to intervene for third States.
11. But this is not the interpretation of Article 62 which the Court has
adopted in its jurisprudence to date, or indeed in the present Judgment.o

It is true that, as stated in paragraph 35 of the Judgment — and this is
in no way incompatible with earlier judgments in this respect :

“[I]t is not sufficient for [the third] State to consider that it haos an
interest of a legal nature which may be affected by the Court’s decoision

in the main proceedings in order to have, ipso facto, a right to intervene
in those proceedings. Indeed, Article 62, paragraph 2, clearly recog -
nizes the Court’s prerogative to decide on a request for permission too
intervene, on the basis of the elements which are submitted to it.”

This is correct, but only means that the Statute does not afford the tohird
State an absolute and unconditional right to intervene, i.e., a right whoich
the latter could exercise simply because it had expressed the desire to odo

so, without having to satisfy any conditions. Because, if it were able too do
so, then the Court’s power to “decide” under Article 62, paragraph 2,
would lack any substance. In the same way, to follow Honduras’s argu -
ment that it is for the State wishing to intervene, and for it alone, to
determine whether it has an interest of a legal nature which may be
affected by the Judgment in the principal case, would be to nullify the

condition laid down by Article 62 : if the State wishing to exercise the
right is the sole judge of whether the condition for the exercise of thaot

33

5 CIJ1020.indb 63 14/06/13 11:47 450 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

réalisation de la condition à laquelle l’exercice de ce pouvoiro est subor -
donné, cela revient à rendre ladite condition purement théoriquoe, et le

pouvoir en cause inconditionnel en réalité. Telle n’a jamais éoté la position
de la Cour en ce qui concerne l’intervention des Etats tiers.
12. Mais une chose est de dire qu’il appartient à la Cour de vérifioer que
la condition est remplie, autre chose serait de dire que, même si elloe l’est,
la Cour pourrait néanmoins refuser l’autorisation d’intervenir osur une

base discrétionnaire. Non seulement la Cour n’a jamais accepté ocette der -
nière idée, mais elle l’a écartée nettement.
Dans l’affaire du Plateau continental, elle a indiqué, comme le rappelle
le présent arrêt dans son paragraphe 36, qu’elle « ne considère pas que le
paragraphe 2 [de l’article 62] lui confère une sorte de pouvoir discrétion -
naire lui permettant d’accepter ou de rejeter une requête à fion d’interven-

tion pour de simples raisons d’opportunité» (Plateau continental (Tunisie/
Jamahiriya arabe libyenne), requête à fin d’intervention, arrê▯t, C.I.J.
Recueil 1981, p. 12, par. 17).
Cela signifie, à mes yeux, que si la Cour constate que la conditiono de
l’article 62, paragraphe 1, est remplie, sur la base des éléments produits

par le demandeur, elle est tenue d’autoriser l’intervention ; ou encore
qu’elle ne peut rejeter la requête à fin d’intervention quoe si elle estime que
l’intérêt d’ordre juridique qu’invoque l’Etat requérant n’est pas suscep -
tible d’être affecté par l’arrêt à intervenir sur le fond, et en exposant
dûment les motifs d’une telle appréciation.

13. Naturellement, l’appréciation en cause est souvent relativement
complexe ; elle peut donner lieu à des discussions au terme desquelles la
conclusion est incertaine ; elle n’est pas, à l’évidence, de nature purement
objective et factuelle. En ce sens — mais en ce sens seulement — la Cour
possède une certaine marge de discrétion lorsqu’elle est appeléoe à statuer
sur une requête à fin d’intervention ; elle n’est pas dans la position d’une

Cour appelée seulement à vérifier si des conditions objectiveos sont rem -
plies, et à en déduire automatiquement une décision déterminoée (pour
autant qu’une telle situation se rencontre dans la pratique judiciaire, ce
qui est rarement le cas). Mais l’essentiel est que, si la Cour constoate — au
terme de l’appréciation à laquelle elle doit se livrer et qui dooit être, il n’est

pas besoin de le préciser, dépourvue de tout caractère arbitraire — que la
condition de l’article 62, paragraphe 1, est remplie, elle est tenue d’auto -
riser l’intervention.
De ce point de vue, le pouvoir de la Cour ne me paraît pas pouvoir êotre
qualifié de « discrétionnaire» (il n’y entre aucune appréciation d’opportu -

nité) et l’Etat tiers possède un droit à intervenir dès olors qu’il démontre
que les conditions (ou la condition) d’exercice de ce droit sont (oest) rem -
plie(s).
14. Sur la base du raisonnement qui précède, je pense que la Cour
aurait mieux fait d’éviter d’écrire, au début du paragraphe 35 de l’arrêt,
que «l’article 62 ne confère pas à l’Etat tiers un droit à intervenir ». Sous

cette forme, l’affirmation est au moins trop abrupte, et pourrait proêter à
équivoque. Ce que veut dire ici la Cour, c’est qu’il ne suffito pas que l’Etat

34

5 CIJ1020.indb 64 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 450

right has been met, the condition becomes purely theoretical, and the
right in question is in reality unconditional. The Court has never takeno

such a position on third-State intervention.

12. It is one thing, however, to say that it falls to the Court to deter -
mine whether the condition is met, but it would be another thing to say o
that, even if it is met, the Court could still refuse to allow the interovention

on a discretionary basis. Not only has the Court never accepted that
proposition, but it has flatly rejected it.
In the case concerning the Continental Shelf, the Court stated, as
recalled in paragraph 36 of the present Judgment, that it “does not con -
sider paragraph 2 [of Article 62] to confer upon it any general discretion
to accept or reject a request for permission to intervene for reasons siomply

of policy” (Continental Shelf (Tunisia/Libyan Arab Jamahiriya), Applica ‑
tion for Permission to Intervene, Judgment, I.C.J. Reports 1981, p. 12,
para. 17).
To my mind, this means that, if the Court finds that the condition of
Article 62, paragraph 1, is satisfied, on the basis of the evidence produced

by the applicant, it is obliged to authorize the intervention ; or, further,
that the Court can only reject the application for permission to interveone
if it determines that the interest of a legal nature invoked by the State
seeking to intervene is not liable to be affected by the decision on tohe
merits, and by duly stating the reasons for that determination.

13. Of course, the determination in question is often a somewhat com -
plex one; it can give rise to discussions whose outcome is unclear; plainly,
it is not purely objective or factual. In that sense — and in that sense
only — the Court has a certain margin of discretion when ruling on an
application for permission to intervene ; the Court is not simply required
to determine whether certain objective conditions are met and from this o

to arrive automatically at a specific conclusion (in so far as such ao situa -
tion exists in judicial practice, which is seldom the case). However, tohe
important thing is that if — having completed the determination which it
must carry out and which, needless to say, must not be arbitrary — the
Court finds that the condition of Article 62, paragraph 1, is satisfied, it is

obliged to authorize the intervention.

From that point of view, I do not see how the Court’s power can be
termed “discretionary” (policy considerations do not enter into iot) ; the

third State has a right to intervene so long as it demonstrates that theo
conditions (or condition) for the exercise of that right are (is) meot.

14. On the basis of the foregoing reasoning, I believe that it would
have been better for the Court not to have stated, at the beginning of
paragraph 35 of the Judgment, that “a third State does not have a right

to intervene under Article 62”. In this form, the statement is, at the very
least, too abrupt and could be misunderstood. What the Court means

34

5 CIJ1020.indb 65 14/06/13 11:47 451 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

tiers demande à intervenir pour avoir le droit de le faire — c’est exacte -
ment ce que dit la suite du paragraphe 35. C’est en ce sens-là seulement

que l’on peut dire que l’intervention n’est pas un « droit » (on devrait plu -
tôt dire : un «droit absolu »). Mais cela n’empêche pas nécessairement de
considérer qu’il existe un droit à intervenir dans le sens — différent —
qu’il s’agit d’une faculté dont l’exercice n’est pas subordonné à une auto -
risation discrétionnaire conférée par la Cour, mais à la seuole réalisation

d’une condition statutaire.
Comme je n’ai aucun goût pour les querelles purement terminolo -
giques, je ne m’étendrai pas davantage sur la question et, tout eno regret -
tant la formulation abrupte de la première phrase du paragraphe 35, je
dirai que je suis d’accord en substance avec l’idée qu’expriome ce para -

graphe.
15. En somme, à cette réserve près, j’estime que dans le présoent arrêt la
Cour rappelle sa jurisprudence dans des termes qui sont fidèles. Maois,
dans l’application qu’elle en fait ensuite au cas d’espèce, oje crains qu’elle
ne s’en écarte fondamentalement, en raisonnant comme si elle exerçoait un

pouvoir discrétionnaire, fondé sur une appréciation des intéorêts d’une
bonne administration de la justice — appréciation qui, par nature, lui
laisse toute liberté — et non pas sur une recherche portant seulement sur
la condition énoncée à l’article 62, comme elle aurait dû le faire selon moi.
Cela apparaîtra mieux au III ci-après.

II. La demande d’intervenotion du Honduras en quaolité de partie

16. L’article 62 du Statut, tel qu’il est rédigé, paraît bien avoir étéo

conçu dans la perspective de l’intervention d’un Etat tiers en oqualité de
non-partie. C’est l’intervention que l’on peut qualifier d’« ordinaire ».
D’ailleurs, si un Etat demande à intervenir sans rien préciser oquant au
statut qu’il revendique, la Cour considérera naturellement qu’iol souhaite
avoir le statut d’un intervenant qui n’est pas partie à l’inostance.

Cependant, la jurisprudence a admis qu’un Etat intervenant en vertu doe
l’article 62 peut acquérir, s’il le demande et s’il y est dûment autorisoé, la
qualité de partie, avec tous les droits et les obligations qui s’yo attachent.
17. La référence essentielle, à cet égard, est l’arrêt renodu par la Chambre
de la Cour ayant statué dans l’affaire du Différend frontalier terrestre,

insulaire et maritime (El Salvador/Honduras), sur la requête à fin d’inter -
vention du Nicaragua.
Dans cet arrêt, la Chambre a indiqué :

«Il est donc patent que l’Etat admis à intervenir dans une instanceo
ne devient pas aussi une partie en cause du seul fait qu’il est un inoter -
venant. Réciproquement, il est vrai que, sous réserve du consente -
ment requis des parties en cause, l’intervenant n’est pas empêcohé par

sa qualité d’intervenant de devenir lui-même partie au procès. »
(Arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 134-135, par. 99.)

35

5 CIJ1020.indb 66 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 451

here is that it is not sufficient for a third State to ask to interveneo in order
to have the right to do so — which is precisely what is stated in the rest

of paragraph 35. It is in this sense only that it can be said that interven -
tion is not a “right” (it would be preferable to say : an “absolute right”).
However, that does not necessarily preclude the existence of a right to o
intervene in a different sense, namely, in the sense of a right whose exer -
cise is subject not to permission granted at the discretion of the Court,

but simply to the fulfilment of a statutory condition.
Since I am not a supporter of purely terminological disputes, I will noto
dwell on the matter any longer and, while the abruptly worded first seon -
tence of paragraph 35 is regrettable, I would say that I agree with the
substance of the notion which that paragraph conveys.

15. In short, that reservation aside, I believe that the Court recalls its
jurisprudence faithfully in the present Judgment. However, I fear that iot
departs from that jurisprudence fundamentally when it subsequently
applies it to the present case, by reasoning as though it was exercisingo a

discretionary power based on a consideration of the interests of the souond
administration of justice — a consideration which, by its nature, gives it
a free hand — and not on an examination solely of the condition set forth
in Article 62, as I believe it should have done. I will enlarge on this fur -
ther in part III below.

II. Honduras’s Request to Inotervene as a party

16. In the terms in which it is drafted, Article 62 of the Statute would

indeed appear to have been conceived with a view to non-party interven -
tion by a third State. This is what may be characterized as “ordinaryo”
intervention. Furthermore, if a State seeks to intervene but does not spoeci-
fy which status it is claiming, the Court will naturally consider that iot
wishes to intervene as a non-party to the proceedings.

However, the jurisprudence has recognized that a State intervening
under Article 62 can, if it so requests and is duly so authorized, acquire
the status of party, with all its associated rights and obligations.
17. The key precedent in this respect is the Judgment delivered by the
Chamber of the Court on Nicaragua’s request for permission to interveone

in the case concerning the Land, Island and Maritime Frontier Dispute
(El Salvador/Honduras).
In that Judgment, the Chamber stated :

“It is therefore clear that a State which is allowed to intervene in oa
case, does not, by reason only of being an intervener, become also a
party to the case. It is true, conversely, that, provided that there be o
the necessary consent by the parties to the case, the intervener is not o

prevented by reason of that status from itself becoming a party to the
case.” (Judgment, I.C.J. Reports 1990, pp. 134-135, para. 99.)

35

5 CIJ1020.indb 67 14/06/13 11:47 452 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

18. En réalité, il résulte de cet arrêt et de celui que la mêome Chambre a
rendu au fond dans la même affaire (C.I.J. Recueil 1992, p. 610, par. 424),

tels que je les comprends, que l’Etat tiers qui est autorisé à ointervenir en
qualité de partie n’acquière pas, dès lors que cette autorisation lui a été
donnée, la qualité d’intervenant mais celle, purement et simpleoment, de
partie. Dès cet instant, le procès se déroule non plus entre deoux mais entre
trois parties, et il n’y a pas d’intervenant. En somme, l’Etat otiers utilise la

voie de la requête à fin d’intervention pour entrer dans l’oinstance non
comme intervenant — ce qui est l’objet normal d’une telle requête — mais
comme partie. paradoxalement, il demande donc à intervenir dans des
conditions telles que l’on peut savoir par avance qu’il ne sera paos interve -
nant (à moins que, comme en l’espèce, il ne demande à titre subsoidiaire
l’autorisation d’intervenir comme non-partie) : car ou bien sa demande

sera rejetée, et il ne sera pas présent dans l’instance, ou bien elle sera
accueillie et il sera présent comme partie.
19. On peut trouver cette construction jurisprudentielle — puisqu’elle
ne trouve pas directement sa source dans le Statut — un peu étrange,
mais elle répond à des préoccupations pratiques par une solution pragma -

tique, et je ne suis pas d’avis qu’il faille la remettre en cause.o L’arrêt ne le
fait pas, et je l’approuve sur ce point.
20. Encore faut-il que l’Etat tiers qui présente une telle demande rem -
plisse non seulement les conditions générales de l’article 62 mais des
conditions supplémentaires, ou plutôt une ou deux conditions supploémen -

taires, selon la lecture que l’on fait de la jurisprudence de la Couro à ce
jour.
Une condition supplémentaire est certainement requise: l’Etat tiers doit
démontrer qu’il existe une base de compétence entre lui et les odeux Etats
parties à l’instance déjà introduite, en ce qui concerne leso droits qu’il
entend faire valoir à leur égard.

Cela est logique, car, contrairement à l’intervenant « ordinaire », qui
cherche non pas à faire établir des droits mais à préserver odes intérêts (et
qui, pour cette raison, n’est pas tenu de démontrer l’existence d’une base
de compétence : voir l’affaire du Différend frontalier terrestre, insulaire et
maritime (El Salvador/Honduras) précitée (requête à fin d’intervention,

arrêt, C.I.J. Recueil 1990, p. 135, par. 100), l’Etat qui souhaite entrer dans
l’instance comme partie entend soumettre à la Cour des conclusionso qui
lui soient propres, et souhaite faire admettre leur bien-fondé avec l’auto -
rité de la chose jugée.
Une seconde condition est, en revanche, sujette à controverse : faut-il

en outre que l’entrée dans la procédure de l’Etat tiers en qoualité non de
simple intervenant mais de partie soit soumise à l’accord des deuxo parties
initiales ? L’arrêt précité de 1990 dans l’affaire El Salvador/Honduras
pourrait le laisser penser, celui rendu dans la même affaire en 199o2 paraît
aller dans un sens opposé, mais il n’est pas dépourvu d’ambioguïté, loin
s’en faut (Différend frontalier terrestre, insulaire et maritime (El Salvador/

Honduras ; Nicaragua (intervenant)), arrêt, C.I.J. Recueil 1992, p. 610,
par. 424).

36

5 CIJ1020.indb 68 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 452

18. In reality, it follows from that Judgment and from the Judgment
on the merits delivered by the same Chamber in the same case

(I.C.J. Reports 1992, p. 610, para. 424) — as I understand them — that a
third State which is allowed to intervene as a party does not acquire thoe
status of intervener on receiving that authorization, but purely and simo -
ply that of a party. From that moment, the proceedings are no longer
between two parties, but between three, and there is no intervener. In

short, the third State uses the application for permission to intervene oas a
way to join the proceedings, not as an intervener — which is the usual
object of such an application —, but as a party. paradoxically, it thus
seeks to intervene under circumstances such that it is apparent in advanoce
that it will not be an intervener (unless, as in the present case, it aosks in
the alternative to be allowed to intervene as a non-party), because either

its request will be rejected and it will not be involved in the proceediongs,
or its request will be granted and it will become a party.
19. Because it does not have its source directly in the Statute, this
jurisprudential construct may appear somewhat surprising, but it offeros
a pragmatic solution to practical concerns, and I do not believe that

it needs to be revisited. The Judgment does not do so, and I agree with it
on that point.
20. Moreover, a third State which submits such a request must fulfil
not only the general conditions of Article 62, but certain additional con -
ditions, or rather one or two additional conditions, according to the cuor-

rent reading of the Court’s jurisprudence.

The first additional condition is undoubtedly required : the third State
must demonstrate that there is a basis of jurisdiction between itself anod
the two States parties to the proceedings already instituted in regard to
the rights which it is seeking to assert against them.

This is logical because, unlike the “ordinary” intervener, who doeos not
seek to establish rights but to protect interests (and who, for that reason,
is not obliged to demonstrate the existence of a basis of jurisdiction : see
the case cited above concerning the Land, Island and Maritime Frontier
Dispute (El Salvador/Honduras) (Application for Permission to Intervene,

Judgment, I.C.J. Reports 1990, p. 135, para. 100), a State seeking to join
the proceedings as a party intends to present its own submissions to theo
Court and wishes to have the validity of those submissions recognized
with the authority of res judicata.
The second condition, on the other hand, is a point of controversy : in

order for a third State to join the proceedings not simply as an interveoner,
but as a party, is it also necessary to have the consent of both originaol par-
ties? The above-mentioned 1990 Judgment in the El Salvador/Honduras
case might indicate that this is so ; that rendered in the same case in 1992
appears to suggest otherwise, but it is not free of ambiguity — far from it
(Land, Island and Maritime Frontier Dispute (El Salvador/Honduras: Nica ‑

ragua intervening), Judgment, I.C.J. Reports 1992, p. 610, para. 424).

36

5 CIJ1020.indb 69 14/06/13 11:47 453 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

21. Il n’est pas nécessaire de trancher cette dernière question en ol’es -

pèce, car l’une des conditions requises pour autoriser l’intervoention du
Honduras en qualité de partie fait certainement défaut.
Selon l’arrêt, aucun intérêt d’ordre juridique possédéo par le Honduras
ne serait susceptible d’être affecté par l’arrêt qui seora rendu au principal.
Si cela était exact, cela suffirait à justifier le rejet de la orequête du Hondu

ras dans sa totalité, car cette condition — la condition de base exprimée
par l’article 62 — est commune aux deux formes d’intervention.

Mais, pour des raisons que j’exposerai un peu plus loin, cette conditoion
me paraît au contraire remplie.

22. En revanche, j’estime que la condition relative à la base de compéo -
tence — sur laquelle l’arrêt ne se prononce pas, parce qu’il n’oa pas besoin
de le faire — n’est pas remplie.
Le Honduras devait démontrer qu’il existe entre lui et le Nicaraguoa,
d’une part, la Colombie, d’autre part, une base juridique de naturoe à

fonder la compétence de la Cour pour connaître des revendications oqui
sont les siennes en matière de délimitation maritime à l’éogard de ces deux
pays.
A cette fin, il a invoqué l’article XXXI du pacte de Bogotá.
Mais l’article VI du pacte de Bogotá écarte du règlement judiciaire —

tel que prévu par la clause compromissoire de l’article XXXI — les
«questions déjà réglées au moyen d’une entente entre les poarties », celles
réglées par la « décision d’un tribunal international » et celles «réglées par
des accords ou traités en vigueur à la date de la signature du préosent
pacte ».

23. Or, la délimitation maritime entre le Honduras et le Nicaragua a
été réglée par l’arrêt de la Cour du 8 octobre 2007. Et elle l’a été complè -
tement, comme le relève à juste titre le présent arrêt dans oses para -
graphes 69 et 70, et non pas seulement, comme l’a prétendu le Honduras,
jusqu’à un point où la ligne bissectrice retenue par l’arrêot est supposée
e
s’interrompre à l’ouest du 82 méridien. Elle constitue donc une « ques-
tion réglée par la décision d’un tribunal international » au sens de l’ar-
ticle VI du pacte de Bogotá. En conséquence, le Honduras ne peut justifioer
d’aucune base de compétence pour soumettre à la Cour ses revendoications
maritimes à l’égard du Nicaragua. A supposer même qu’une telle base de

compétence existe dans les rapports entre le Honduras et la Colombie, ce
qui peut se discuter au regard des dispositions du pacte de Bogotá, iol suf -
fit de constater l’absence de base de compétence entre le Honduroas et l’un
des deux Etats parties à la procédure principale pour justifier ole rejet de la
demande d’intervention du Honduras en qualité de partie.

III. La demande d’intervenotion du Honduras
en qualité de non-partie

24. A cet égard, je me sépare de l’arrêt aussi bien quant au raiosonne -

ment que quant à la conclusion.

37

5 CIJ1020.indb 70 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 453

21. It is not necessary to resolve this latter question in the present case,o
because one of the requisite conditions for the granting of Honduras’os

intervention as a party is clearly lacking.
According to the Judgment, Honduras does not have an interest of a
legal nature which might be affected by the decision to be rendered ino the
principal proceedings. If correct, this would be sufficient basis for tohe
rejection of Honduras’s Application in its entirety, because that condi -

tion — the fundamental condition expressed by Article 62 — applies to
both forms of intervention.
However, for reasons which I will set out shortly, it is my view that this
condition is in fact met.
22. On the other hand, I believe that the condition relating to the basis
of jurisdiction — upon which the Judgment does not pronounce, because

it does not need to do so — is not met.
Honduras had to demonstrate that between itself and Nicaragua, on
the one hand, and itself and Colombia, on the other, there was a legal
basis on which to found the Court’s jurisdiction to entertain its claoims on
the subject of maritime delimitation in respect of those two countries.

To that end, it invoked Article XXXI of the pact of Bogotá.
But Article VI of the pact of Bogotá precludes from judicial settle -
ment — under the compromissory clause in Article XXXI — “matters
already settled by arrangement between the parties”, those settled byo

“decision of an international court” and those “governed by agreements,
or treaties in force on the date of the conclusion of the present Treatyo”.

23. However, the maritime delimitation between Honduras and Nica -
ragua was settled by the Court’s Judgment of 8 October 2007. And it was
settled completely, as the present Judgment rightly notes in paragraphs 69

and 70, and not simply, as Honduras claimed, up until the point where
the bisector line adopted in the Judgment is supposed to stop, to the weost
of the 82nd meridian. It is therefore a “matter . . . settled . . . by decision
of an international court”, in the sense of Article VI of the pact of Bogotá.
Consequently, Honduras has no basis of jurisdiction on which to submit

to the Court its maritime claims against Nicaragua. Even supposing that o
such a basis of jurisdiction exists between Honduras and Colombia,
which is debatable in light of the provisions of the pact of Bogotá, the
lack of a basis of jurisdiction between Honduras and one of the two
States parties to the principal proceedings is a sufficient ground to roeject

Honduras’s request to intervene as a party.

III. Honduras’s Request to Inotervene
as a Non-party

24. In this respect, I disagree with both the reasoning and the conclu -
sion in the Judgment.

37

5 CIJ1020.indb 71 14/06/13 11:47 454 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

25. Le Honduras a délimité une zone rectangulaire (qui apparaît suor la
carte jointe à l’arrêt) dans laquelle il affirme posséder odes intérêts sus-
ceptibles d’être affectés par l’arrêt à venir dans loa procédure principale.
Le côté sud de ce rectangle suit la ligne du 15 eparallèle. Ses côtés laté -
e
raux — ouest et est — sont situos respectivement le long du 82 méridien,
à l’ouest, et du méridien 79 56΄, à l’est. Son côté nord se situe entre les
16 eet 17 parallèles.
Cette zone rectangulaire est divisée en deux par une ligne discontinuoe

figurant en rouge sur le croquis et suivant, grosso modo, une direction
sud-ouest/nord-est. Cette ligne discontinue n’est autre que le prolonge -
ment de la ligne bissectrice que la Cour a tracée dans son arrêt dou
8 octobre 2007 (qui a autorité de chose jugée entre le Honduras et le
Nicaragua), et dont la Cour a indiqué, dans ledit arrêt, qu’elle se prolon -

gerait, le long d’une même ligne d’azimut, jusqu’à atteinodre la zone dans
laquelle elle mettrait en cause les droits d’un Etat tiers. Faute de opouvoir
statuer sur les droits des Etats tiers, la Cour n’a pas fixé en 2007 le point
terminal de la ligne : c’est pourquoi elle figure dans le croquis joint au

présent arrêt sous forme discontinue, car on ne sait pas encore quoel est
son point terminal — c’est-à-dire, exactement, quel est le point terminal
de la frontière maritime entre le Honduras et le Nicaragua.
26. Je suis d’accord avec l’arrêt lorsqu’il constate que les intoérêts du

Honduras dans la zone correspondant à la partie du rectangle qui se
trouve au nord de la ligne rouge discontinue ne risquent pas d’être affec -
tés par l’arrêt à venir dans l’affaire principale (arroêt, par. 68). En effet,
dans cette zone, les droits souverains du Honduras ne sont contestés o
par personne. Ils ne le sont pas par le Nicaragua — et ne peuvent pas

l’être, en raison de l’autorité de chose jugée qui s’aottache à l’arrêt du
8 octobre 2007. Ils ne le sont pas non plus par la Colombie et ne peuvent
pas l’être par cette dernière en raison, non de l’arrêt doe 2007 qui n’a pas
d’autorité contraignante à son égard, mais du traité bilaotéral conclu en

1986 entre elle et le Honduraseet qui attribue à celui-ci les espaces mori -
times situés au nord du 15 parallèle et à l’ouest du méridien 79 56΄.
par conséquent, les droits et intérêts du Honduras en ce qui conocerne la
partie située au nord de la ligne rouge sont à l’abri de tout eoffet préjudi -

ciable résultant de l’arrêt que la Cour rendra dans le difféorend opposant
le Nicaragua et la Colombie.
27. En revanche, je me sépare nettement de l’arrêt lorsqu’il affiorme
qu’aucun intérêt d’ordre juridique possédé par le Hondouras n’est suscep -
tible d’être affecté par l’arrêt futur en ce qui concerne la zone située au

sud de la ligne rouge.
Dans cette zone, en effet, le Honduras possède actuellement des drooits
qui découlent du traité bilatéral de 1986, mais qu’il ne peuot bien sûr faire
valoir, en vertu de l’effet relatif des traités, qu’à l’oégard de la Colombie.

Naturellement, le Nicaragua conteste formellement la délimitation opéorée
par le traité de 1986, puisqu’il revendique les espaces maritimes oque ce
traité a pour objet de partager entre le Honduras et la Colombie. Comome
l’a dit à l’audience l’un de ses conseils, le Nicaragua «o a toujours considéré

38

5 CIJ1020.indb 72 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 454

25. Honduras has delimited a rectangular area (which can be seen on
the map appended to the Judgment), in which it claims to have rights

which might be affected by the future decision in the main proceedingso.
The rectangle’s southern side follows the line of the 15th parallel. oIts
western and eastern sides are located along meridians 82 and 79° 56´, res -
pectively. Its northern side is situated between the 16th and 17th paralolels.

This rectangle is divided in two by a broken red line on the map, which o
roughly follows a south-westerly/north-easterly direction. This broken
line is nothing more than the extension of the bisector line which the
Court established in its Judgment of 8 October 2007 (which has the
authority of res judicata for Honduras and Nicaragua), and which it
declared, in the said Judgment, would continue along the line having theo

same azimuth until it reaches the area where the rights of third States omay
be affected. Since it could not rule on the rights of third States, the Court
did not fix the endpoint of the line in 2007 : this is why it appears as a
broken line on the map appended to the present Judgment, because its
endpoint — that is, the exact endpoint of the maritime boundary between

Honduras and Nicaragua — is as yet unknown.

26. I agree with the statement in the Judgment that Honduras’s
interests in the area of the rectangle to the north of the broken red lione are
not liable to be affected by the Judgment in the main proceedings

(Judgment, para.68). In effect, Honduras’s sovereign rights are uncontested
in that area. They are not disputed by Nicaragua — and cannot be, because
of the authority of res judicata attached to the 8 October 2007 Judgment.
They are not disputed by Colombia either, and nor can they be — not
because of the 2007 Judgment, which is not binding on Colombia, but
because of the bilateral treaty concluded between Colombia and Hon-

duras in 1986, which attributes the maritime areas to the north of the
15th parallel and to the west of meridian 79° 56´ to the latter.

Accordingly, Honduras’s rights and interests in the area to the northo of
the red line are protected from any prejudicial effects resulting fromo the

Judgment which the Court will deliver in the dispute between Nicaragua
and Colombia.
27. On the other hand, I disagree entirely with the statement in the
Judgment that Honduras does not have an interest of a legal nature in thoe
area to the south of the red line which might be affected by the decisoion.

In fact, in this area, Honduras currently has rights which derive from
the 1986 bilateral treaty, but which can of course, in accordance with tohe
relative effects of treaties, only be asserted against Colombia. Clearoly,
Nicaragua formally disputes the delimitation established by the
1986 Treaty, because it lays claim to the maritime areas which that Treaty

seeks to share between Honduras and Colombia. As one of its Counsel
said at the hearings, Nicaragua “has always considered this Treaty too be

38

5 CIJ1020.indb 73 14/06/13 11:47 455 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

que ce traité n’était pas valide», et que, fût-il même valide entre les parties
qui l’ont conclu, il serait sans effet « car, en concluant cet accord, les par -
ties ont disposé des droits souverains du Nicaragua ».
28. La Cour aurait dû se demander, selon moi, d’une part si la ligne
qu’elle est appelée à tracer pour délimiter les espaces mariotimes du Nica -

ragua et de la Colombie est susceptible de pénétrer dans la zone eon ques-
tion, c’est-à-dire dans la partie du rectangle bleu située au sud de la ligne
rouge ; d’autre part si, dans cette hypothèse, il en résulterait que leos inté -
rêts juridiques du Honduras seraient affectés.
29. La réponse est manifestement affirmative à l’une et l’autreo de ces

questions.
30. Quant à la première question, il ne s’agit évidemment pas deo
prévoir, et encore moins de décider à l’avance, la solution oque la Cour
adoptera dans l’instance principale. Il suffit à la Cour, lorsqu’oelle examine

une demande à fin d’intervention, de se demander s’il existe oune simple
possibilité (et non pas une certitude, ni même une probabilitéo) que l’arrêt
futur affecte les intérêts de l’Etat tiers. Elle ne peut donc écarter aucune
des possibilités qui se situent à l’intérieur des limites quoi lui sont assignées
par les conclusions des parties à l’instance principale. Ne pouvanot donner

la préférence à aucune hypothèse quant à la décision qou’elle rendra au
principal, elle doit les accepter toutes, dans la seule limite du principe qui
lui interdit de statuer ultra petita.
31. Sur cette base, il n’est pas douteux qu’il existe une possibilitéo —

dont je me garderai bien d’évaluer le degré de probabilité — pour que la
Cour fixe la ligne de délimitation — qui suivra nécessairement, plus ou
moins, une orientation nord-sud — dans une zone située entre le 80 e et le
82 eméridien. Une telle solution se situerait entre la frontière revenodiquée
par la Colombie — qui se situe, approximativement, aux environs du
e
82 méridien — et la frontière revendiquée par le Niearagua — qui se
situe beaucoup plus à l’est, aux environs du 77 méridien.
Si une telle solution était retenue — et ce n’est, j’y insiste, qu’une simple
possibilité, mais que l’on est obligé d’envisager à ce stoade —, la ligne tra -
cée se prolongerait vers le nord jusqu’à atteindre la zone oùo elle mettrait

en cause les droits d’un Etat tiers (c’est-à-dire autre que le Nicaragua et la
Colombie). Elle pénétrerait donc dans le « rectangle bleu» et s’arrêterait à
l’intersection de la ligne rouge, c’est-à-dire de la bissectrice tracée par la
Cour dans son arrêt de 2007, qui délimite les zones respectives duo Hondu -

ras et du Nicaragua.
32. S’il était tel que je viens de le supposer, l’arrêt futur auorait-il pour
résultat d’« affecter les intérêts d’ordre juridique » du Honduras ? Je ne
doute pas que la réponse soit affirmative.
33. Les intérêts du Honduras seraient affectés de deux manièreos.

34. D’une part, il résulterait de l’arrêt rendu par la Cour danso le diffé -
rend opposant le Nicaragua et la Colombie que le point terminal de la
ligne bissectrice tracée par la Cour dans son arrêt de 2007 rendu oentre le
Nicaragua et le Honduras serait enfin fixé, alors qu’il ne l’oa pas été, et
qu’il ne pouvait pas l’être, dans l’arrêt de 2007. Ainsi,o l’arrêt futur aurait

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5 CIJ1020.indb 74 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 455

invalid” and, even if it were valid between the parties which had conocluded
it, it would be without effect “because, in entering into this agreoement, the

parties dealt with sovereign rights belonging to Nicaragua”.
28. To my mind, the Court should have asked itself whether the line it
is called upon to establish in order to delimit the maritime areas of Nioca-
ragua and Colombia is likely to enter the area in question, that is to soay,
the area within the blue rectangle to the south of the red line, and wheother,

in this event, Honduras’s legal interests might be affected as a reosult.

29. The answer to both of these questions is clearly yes.

30. Of course, the first question is not intended to anticipate, and even o
less so to decide in advance, what solution the Court will adopt in the o

principal proceedings. When considering an application for permission too
intervene, the Court has only to ask itself whether there is simply a poossi -
bility (and not a certainty, or even a likelihood) of the future Judgmoent
affecting the interests of the third State. Therefore, it cannot dismioss any
possibilities which lie within the limits assigned to it by the submissioons of

the parties to the principal proceedings. Since it cannot give preferencoe to
any hypothesis in respect of its decision in the principal proceedings, oit
has to accept them all, subject solely to the limit imposed by the princoiple
which precludes it from ruling ultra petita.
31. On this basis, there is no doubt that there is a possibility — whose

degree of probability I am not going to assess — that the Court will
establish a line of delimitation — which will have to follow a more or
less northerly/southerly direction — in an area between the 80th and
82nd meridian. Such a solution would be situated between the boundary
claimed by Colombia — which is situated approximately along the
82nd meridian — and the boundary claimed by Nicaragua — which is

located much farther east, close to the 77th meridian.
If such a solution was adopted — and it is, I repeat, a mere possibility,
but one which must be contemplated at this stage — the line established
would continue northwards until it reaches the area where the rights of o
third States (that is, States other than Nicaragua and Colombia) mighto be

affected. Thus, it would enter the “blue rectangle” and would stop when
it intersected the red line, that is to say, the bisector drawn by the Court
in its 2007 Judgment, which delimits the respective areas of Honduras
and Nicaragua.
32. If the future Judgment were to be as I have hypothesized, would it

affect Honduras’s “interests of a legal nature”? It is clear oto me that the
answer is yes.
33. Honduras’s interests would be affected in two ways.
34. Firstly, the Judgment rendered by the Court in the dispute between
Nicaragua and Colombia would finally fix the endpoint of the bisectoor
line established by the Court in its 2007 Judgment in the case between

Nicaragua and Honduras, even though this was not done, and could not
have been done, in the 2007 Judgment. Thus, the future Judgment would

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5 CIJ1020.indb 75 14/06/13 11:47 456 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

pour effet de préciser, sur une question essentielle, la délimitoation opérée

quelques années plus tôt par un arrêt qui a l’autorité de la chose jugée à
l’égard du Honduras. J’en déduis que celui-ci a un intérêt que l’arrêt futur
pourrait affecter — même si ce n’est qu’une simple possibilité.

35. D’autre part et surtout, l’arrêt que la Cour doit rendre, s’oil était tel

que je l’ai hypothétiquement supposé, aurait des incidences diroectes sur la
portée effective du traité bilatéral de 1986 conclu entre le Honduras et la
Colombie.
Aussi longtemps que la Cour n’a pas statué sur les droits respectiofs du
Nicaragua et de la Colombie, le Honduras peut revendiquer les espaces

délimités par le « rectangle bleu ». En ce qui concerne la partie située au
nord de la ligne rouge (la ligne bissectrice), il tire ses droits de lo’arrêt
rendu en 2007, à l’égard du Nicaragua, et du traité de 1986,o à l’égard de
la Colombie. Mais, en ce qui concerne la partie située au sud de cettoe
ligne, il ne peut revendiquer d’autres droits que ceux qu’il tiento du traité

de 1986, et qui ne sont opposables qu’à la Colombie. Encore faut-il, pour
qu’il puisse faire valoir ces droits conventionnels, que tout ou partoie des
zones qui lui sont attribuées par le traité ne se trouvent pas déovolus, par
l’effet de l’arrêt que la Cour rendra, au Nicaragua. Il n’oest pas certain
qu’un tel effet se produira : si la Cour adopte la ligne de délimitation pro -

posée par la Colombie, le Honduras pourra continuer à revendiquer,o sur
la base du traité, l’essentiel des espaces que celui-ci lui attribue. Mais il est
possible qu’il se produise : si la ligne retenue par la Cour se situe plus à
l’est que celle proposée par la Colombie, elle partagera l’espaoce situé dans
la partie sud du « rectangle bleu» de telle sorte que toute la zone se trou -

vant à l’ouest de cette ligne appartiendra au Nicaragua, et ne sera plus
susceptible d’être revendiquée par le Honduras — puisqu’il n’existe entre
lui et le Nicaragua aucune base conventionnelle permettant de fonder une
telle revendication.
A mes yeux, la possibilité que soient ainsi affectés les intérêts du Hon -

duras est évidente, et cela suffit à rendre son intervention receovable.

36. La Cour n’en a pas été convaincue, mais les raisons qu’elle oa don-
nées pour justifier sa conclusion me paraissent dépourvues de peortinence.
Je suis d’accord avec l’affirmation selon laquelle l’arrêt de 2007 a déli -

mité de façon complète la frontière séparant les espaces omaritimes respec -
tifs du Honduras et du Nicaragua, en ce sens qu’il n’a pas entendu
interrompre la ligne bissectrice à un point situé à l’ouest odu 82 eparallèle,
comme l’a prétendu le Honduras, mais qu’il a entendu que cette oligne se
prolonge vers le nord-est jusqu’à atteindre les droits d’un Etat tiers, et à

cet égard l’arrêt de 2007 est clair. Je suis aussi d’accord pour dire que
l’arrêt de 2007 s’impose au Honduras en tant qu’il vise ào prolonger la
bissectrice vers l’est — toujours jusqu’à ce point indéterminé pour le
moment — en vertu de l’autorité de la chose jugée. Je suis aussi paorfaite -
ment d’accord — car c’est une évidence — sur l’idée, qu’exprime le para -

graphe 73 de l’arrêt, que « la Cour, pour déterminer [la] frontière [entre la

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5 CIJ1020.indb 76 14/06/13 11:47 territorial and mariotime dispute (diss. op. aobraham) 456

have the effect of clarifying, on an essential point, the delimitationo carried
out some years earlier by a Judgment which has the authority of res judi ‑

cata for Honduras. From that, I conclude that the latter has an interest
which might be affected by the future Judgment — even if this is nothing
more than a mere possibility.
35. Secondly and more importantly, if the Judgment to be rendered by
the Court were to be as I have hypothetically assumed it to be, it wouldo

have direct consequences on the effective scope of the 1986 bilateral treaty
concluded between Honduras and Colombia.
As long as the Court has not ruled on the respective rights of Nicara -
gua and Colombia, Honduras may lay claim to the area within the “blueo
rectangle”. With regard to the area to the north of the red line (thoe bisec -
tor line), it derives its rights in respect of Nicaragua from the 2007 Judg -

ment, and in respect of Colombia from the 1986 Treaty. However, with
regard to the area to the south of that line, it can only assert the rigohts it
holds under the 1986 Treaty, and only vis-à-vis Colombia. Moreover, in
order for Honduras to be able to assert those treaty rights, it is essenotial
that the Judgment which the Court will deliver should not award to Nica -

ragua all or part of the areas attributed to it by the Treaty. It is noto cer -
tain that the Court will make such an award : if the Court adopts the line
of delimitation proposed by Colombia, Honduras will still be able to layo
claim, on the basis of the Treaty, to most of the areas which the lattero
attributes to it. However, there is a possibility that it might happen : if the

Court adopts a line further to the east than that suggested by Colombia,o
it will divide the area in the southern part of the “blue rectangle”o in such
a way that the entire area to the west of that line will belong to Nicaroa -
gua, and Honduras will no longer be able to lay claim to it, because theore
is no treaty basis between it and Nicaragua on which to found such a
claim.

To my mind, there is clearly a possibility that Honduras’s interests owill
be affected in this way, and this is sufficient to make its interventoion
admissible.
36. The Court was not convinced of this, yet the reasons it gives for its

conclusion appear to me to be misconceived.
I agree with the statement that the 2007 Judgment completely settled
the boundary separating the respective maritime areas of Honduras and
Nicaragua, in the sense that it did not intend that the bisector line shoould
stop at a point to the west of the 82nd parallel, as Honduras has

contended, but rather the intention was that that line should continue ion
a north-easterly direction until it reached an area where the rights of a
third State might be affected, and in this respect the 2007 Judgment is
clear. I also agree that the 2007 Judgment is binding on Honduras, in so
far as it intends to continue the bisector line to the east — still until that
as yet undetermined point — by virtue of the authority of res judicata. I

also fully endorse — because it is patently obvious — the statement in
paragraph 73 of the Judgment that “the Court will place no reliance on

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5 CIJ1020.indb 77 14/06/13 11:47 457 différend territorialo et maritime (op. diss. aobraham)

Colombie et le Nicaragua], ne se fondera pas sur le traité de 1986 ». Com-
ment pourrait-elle le faire, puisque ce traité a été conclu par l’une des o
deux parties à l’instance principale avec un Etat tiers ?
37. En somme, je ne suis vraiment en désaccord avec aucune des pro -
positions qu’énonce la Cour aux paragraphes 57 à 74 de l’arrêt. Mais je

n’arrive pas à comprendre comment ces considérations peuvent juostifier la
conclusion à laquelle parvient la Cour, à savoir qu’aucun intéorêt juridique
du Honduras n’est susceptible d’être affecté par l’arrêot à venir. Je n’y vois
tout simplement pas une ligne de raisonnement cohérente répondant oaux
questions soulevées par la requête du Honduras. Tout se passe commoe si

la Cour s’était davantage déterminée sur la base de considéorations d’op -
portunité que sur celle des critères juridiques qu’elle a elle-même pris soin
de rappeler dans la première partie de l’arrêt.
38. C’est pourquoi, n’étant capable ni de suivre le raisonnement nio

d’adhérer à la conclusion, j’ai dû, à mon grand regreto, me séparer de la
majorité de mes collègues.

(Signé) Ronny Abraham.

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the 1986 Treaty in determining the maritime boundary between Nicara -
gua and Colombia”. How could it, since that Treaty was concluded by
one of the two parties to the present proceedings with a third State?
37. In short, I do not really disagree with anything of what is said by
the Court in paragraphs 57 to 74 of the Judgment. But I do not under -

stand how what is said there can justify the conclusion which the Court o
arrives at, namely that Honduras does not have an interest of a legal
nature which might be affected by the future Judgment. Quite simply, I
fail to see a coherent line of reasoning responding to the issues raisedo by
Honduras’s Application. It is as if the Court had reached its decisioon

more on the basis of policy considerations than of the legal criteria, which
the Court itself was at pains to recall in the first part of the Judgmoent.

38. That is why — since I am unable to follow the reasoning or

subscribe to the conclusion — I have been obliged, much to my regret, to
disagree with the majority of my colleagues.

(Signed) Ronny Abraham.

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Document file FR
Document Long Title

Opinion dissidente de M. le juge Abraham

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