Opinion dissidente collective de Sir Hersch Lauterpacht, M. Wellington Koo et Sir Percy Spender (traduction)

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035-19590526-JUD-01-03-EN
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OPINION DISSIDENTE COLLECTIVE
DE SIR HERSCH LAUTERPACHT, M. WELLINGTOK KOO
ET SIR PERCY SPENDER
[Traduction]

Le paragraphe 5 de l'article36 du Statut de la présente Cour
s'exprime comme suit :
Les déclarationsfaites en application de l'arti36edu Statut
de la Cour permanente de Justice internationale pour une durée
qui n'est pas encore expiréeseront considéréesd, ans les rapports
entre parties au présent Statut, comme comportant acceptation
de la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice
pour la duréerestant à courir d'aprèsces déclarationset confor-
mément à leurs termes.»

Le 29 juille1921, la Bulgarie a accepté purement et simplement,
pour une durée illimitée, la juridiction de la Cour permanente de
Justice internationale, en vertu de l'article36,paragraphe 2, du
Statut de celle-ci. Le 14 décembre 1955, la Bulgarie est devenue
Membre des Nations Unies et partie au Statut de la présente Cour.
Conformément au paragraphe 5 de l'article36, tel qu'il est cité
plus haut, les deux conditions suivantes doivent être remplies
pour que les déclarations d'acceptation se référant à la Cour per-
manente soient transférées à la Cour internationale de Justice: 1)
1'Etat déclarant doit devenir partie au Statut de la Cour inter-
nationale de Justice; 2) sa déclaration doit être (still inforce»,
c'est-à-dire que la durée pour laquelle elle a été faite doit n'être
pas expirée. Du fait de ces conditions, les obligations résultant de
la déclaration faitepara Bulgarie l29 juille1921 ontététransférées
à la Cour internationale de Justice le 14 décembre 1955, lorsque
ce pays est devenu partie au Statut de la Cour internationale de
Justice. Ce jour-là, le paragraphe 5 est devenu applicable à la
Bulgarie. ,4 notre avis, au regard de cette disposition, la Cour,

contrairement aux conclusions de la premièreexception préliminaire
du Gouvernement de la Bulgarie, est compétente pour statuer sur
la requête présentée à la Cour par le Gouvernement d'Israël, en se
fondant sur sa déclaration d'acceptation du 17 octobre 1956.
Aux conditions expresses, énoncéesplus haut, du paragraphe 5
de l'article36 du Statut,, le présent arrêt de la Cour ajoute deux
autres conditions: 1) 1'Etat déclarant doit avoir participé à la
Conférencede San Francisco; 2)1'Etat déclarant doit êtredevenu
partie au Statut de la présente Cour avant la date de la dissolution
de la Cour permanente, à savoir avant le 18 avril 1946. Ni l'une
ni l'autre de ces deux conditions n'ayant étéremplies dans le cas
de la Bulgarie, la Cour a jugé que les obligations résultant de la
déclaration d'acceptation faite par elle en921 n'ont pas été trans-
férées à la Cour internationale de Justice lorsque la Bulgarie est

33devenue partie au Statut de celle-ci en 1955 et que, par conséquent,
la Cour est sans compétence aux termes de cette déclaration. Nous
regrettons de ne pouvoir nous rallier à l'arrêt de la Cour fondé

sur le texte d'un article du Statut ainsi amendé et élargi.

La première exception préliminaire du Gouvernement de la
Bulgarie, telle qu'elle a étéénoncéedans les exceptions préliminaires
écriteset au cours de la procédure orale, se fonde exclusivement sur
la thèse d'après laquelle la déclaration d'acceptation bulgare de
1921 serait définitivement et irrévocablement devenue caduque le

18 avril 1946, c'est-à-dire à la date où la Cour permanente de Justice
internationale a étédissoute, et que par conséquent on ne pourrait
légitimement soutenir qu'elle était (stillin force))(encoreenvigueur)
quand la Bulgarie est devenue partie au Statut en vertu de son
admission aux Nations Unies.
Le principal argument invoqué à ce propos par le Gouvernement
de la Bulgarie et admis par la Cour est que la déclaration d'accep-
tation bulgare de 1921, étant indissolublement rattachée au Statut

de la Cour permanente, a cesséd'exister lors de la dissolution de
cette Cour le 18 avril 1946, à moins qu'avant cette date l'État
déclarant ne soit devenu partie au Statut de la Cour internationale
de Justice. D'après cette thèse, les mots !(which are still in force »
étaient destinés à viser non pas la question de l'expiration de la
durée pour laquelle la déclaration avait été faite,mais une question
toute différente, à savoir l'éventualité de la dissolution de la Cour
permanente. Suivant cette interprétation, les déclarations des États

qui sont devenus parties au Statut après le 18 avril 1946 avaient
cesséd'êtreen vigueur, avec pour conséquence qu'après cette date
elles ne rentraient plus dans le domaine d'application du paragra-
phe 5de l'article36. C'est en se référantaux effets ainsi énoncésde
la dissolution de la Cour permanente que le Gouvernement de la
Bulgarie a prétendu que les mots ((which are still in force 1)n'ont
pas le sens qui leur est normalement attribué àpropos delavalidité
des engagements internationaux. D'ordinaire, ces mots s'appliquent

à des instruments qui ne sont pas arrivés à expiration en vertu soit
d'une dénonciation, soit de la caducité résultant de l'échéancedu
terme prévu dans l'instrument.

Sur ce texte du paragraphe 5 de l'article 36, la thèse principale
du Gouvernement de la Bulgarie a greffé un texte nouveau. Le
Gouvernement de la Bulgarie a soutenu en fait que la Cour devait
omettre du texte de l'article 36, paragraphe 5,les mots ((which are

still in. force)(pour une durée qui n'est pas encore expirée) et les
remplacer par d'autres mots. Il a été soutenu que la Cour devait
lire le passage pertinent de l'article 36, paragraphe 5, de la manière
suivante: ((Les déclarations faites en application de l'article 36 duStatut de la Cour permanente seront considérées,dans les rapports
entre parties au présent Statut qui en seront devenues parties avant
la dissolution de cette Cour, comme comportant acceptation de la
juridiction obligatoire de laCour internationale de Justice. »Nous
ne pouvons accepter cet amendement d'une disposition claire du
Statut, et cela pour deux raisons:la première est queI'interprétation
ainsi invoquée est contraire aux termes clairs du paragraphe 5;la
deuxième est que cette interprétation est contraire au but manifeste
de cette disposition. Nous examineronsséparément ces deux aspects
de l'interprétation du paragraphe 5.

La question essentielle poséepar la première exception prélimi-
naire de la Bulgarie est de savoir si la déclaration bulgare du 29
juillet1921, acceptant la juridiction obligatoire de la Cour perma-
nente de Justice internationale, est toujours valable et en vigueur,
au sens de l'articl36, paragraphe 5, du Statut de la présente Cour.
Il s'agit de déterminer le véritable sens de ce paragraphe, à la fois
dans son propre contexte et dans celui du Statut et de la Charte
des Nations Unies.

Bien que les conclusions de la présente opinion se fondent sur
le texte de l'article36, paragraphe 5, il est utile de rappeler,par
référenceau but avoué de cette disposition, l'origine historique de
la création de la Cour internationale de Justice.
Quoique l'établissement de la Cour internationale de Justice
et la dissolutionde la Cour permanente fussent deux actes distincts,
ils étaient étroitement liésl'un à l'autre par l'intention commune
d'assurer, autant que possible, la continuité de l'administration de
la justice internationale. Par sa résolution du 18 avril 1946,
l'Assemblée de la Société desNations s'est expressément référée
à l'article92 de la Charte des Nations Unies, qui prévoit la création
d'une Cour internationale de Justice comme organe judiciaire
principal des Nations Unies, et à la résolution de la Commission
préparatoire des Nations Unies du 18 décembre 1945, déclarant
qu'elle accueillerait avec faveur les mesures appropriées que la
Société desNations pourrait prendre en vue de la dissolution de
la Cour permanente de Justice internationale.
La dissolution de la Cour permanente n'était pas un acte de
liquidation ordinaire, ayant pour effet de faire disparaître tout ce
qui se rapportait à cette Cour, par suite de la disparition de celle-ci.
Tandis que différentes considérations poussaient à la dissolution
de la Cour permanente et à la création de la Cour internationale
de Justice, on était généralement d'accord sur l'identité de fond
de ces deux organes. En particulier, tous les efforts ont été faits
pour assurer la continuité de l'administration de la justice inter-

nationale. La résolution adoptée par la Cour permanente à sa
séance de clôture, tenue à La Haye à la fin d'octobre 1945, déclare: cLa Cour permanente de Justice internationale attache la plus
grande importance au principe de la continuité dans I'administra-
tion de la justice internationale. Aussi désire-t-elle, dans toute la
mesure du possible, faciliterl'inauguration de la Cour internationale
de Justice, organisme qui, à la Conférence de San Francisco, a
C. J. Yearbook,
été qualifié de ((successeur de la Cour ».» (1.
1946-1947, p. 26.) Il n'est pas sans signification que la Cour inter-
nationale de Justice ait étéinaugurée à La Haye le 18 avril 1946
- un jour avant que la résolution de la Sociétédes Nations
portant dissolution de la Cour permanente ait pris effet. Le rapport
du comité I de la commission IV de la Conférence de San Fran-
cisco sur l'organe judiciaire avait antérieurement déclaré ce
qui suit :

« La constitution d'une nouvelle Cour n'interrompra pas la
continuité avec le passé. Non seulement le Statut de cette Cour
aura pour base celui de l'ancienne, mais encore ce fait sera
expressément mentionné dans la Charte. D'une manière générale
la Cour nouvelle sera dotée de la mêmeorganisation que l'an-
cienne, et les dispositions relativesà sa compétencesuivront de
très près celles de l'ancien Stat...Les articles du nouveau Statut
porteront les mêmesnuméros que les articles correspondants de
l'ancien, ce qui facilitera le recours aux précédents établis sous
l'empire de ce dernier.
Dans un certain sens, par conséquent, la nouvelle Cour doit
êtreconsidéréecomme le successeur de celle qu'elle remplacera.
Le nouveau Statut y fera explicitement allusion, notamment dans
ses articles 36, alinéa 4 [devenu par la suite alinéa 51, et 37. »
(Documents de la Conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,t. 13, pp. 418-419.)

Le passage citémontre clairement que si certaines considérations
appelaient la création d'une nouvelle Cour, celle-ci devait être,au
fond, une continuation de la Cour permanente. 11 ne fallait pas
que les modifications formelles et, en fait, insignifiantes apbortées
par le Statut de la nouvelle Cour pussent faire obstacle à la reprise
par la Cour internationale de la juridiction obligatoire, telle qu'elle
existait alors, de la Cour permanente. On envisageait précisément
que la continuité des deux Cours trouverait son expression dans
la reconnaissance de la continuité de la juridiction obligatoire
telle qu'elle existait alors.1eût étédifficile d'employer des termes
plus nets que ceux-ci: (Le nouveau Statut y [à cette succession]

fera explicitement allusion.. . »
En fait, l'étude des procès-verbaux de la Conférence montre.
que la volonté d'assurer la continuité des deux Cours se rattachait.
étroitement à la question de la juridiction obligatoire de la nouvelle
Cour d'une manière directement pertinente pour l'interprétation
du paragraphe 5 de l'article 36.
La discussion au sein du comité de juristes de Washington et
du comité I de la commission IV de la Conférence de San Fran-cisco, sur la question de la juridiction de la nouvelle Cour, avait
révéléque la tendance prépondérante était en faveur de la juri-
diction obligatoire. Le comité de juristes, considérant que la
question de la juridiction obligatoire présentait un caractère

politique, n'a pas pris de décision à ce sujet. Mais, dans son rapport
définitif,il a présentéun choix de textes - l'un laissant I'accepta-
tion de la juridiction obligatoire en matière de différends d'ordre
juridique à la libre décision de chaque État partie au Statut,
l'autre prévoyant l'acceptation immédiate de cette juridiction
obligatoire par toutes les parties au Statut.
A San Francisco, le comité I de la commission IV était saisi
de ces deux textes, ainsi que de quelques autres propositions.
Sous réserve de quelques variantes, ces propositions étaient toutes
en faveur de la juridiction obligatoire de la nouvelle Cour. Les

longs débats qui ont eu lieu ont montré l'existence d'un courant
prépondérant à l'appui de la reconnaissance immédiate, par
l'ensemble des membres de la nouvelle organisation internationale,
du principe de la juridiction obligatoire de la Cour. Le représentant
du Royaume-Uni poussait à l'adoption d'un compromis à intro-
duire dans le Statut entre les tenants de la juridiction obligatoire
et ses adversaires. Il a déclaré: (Si le comité décidede conserver
la clause facultative, il pourrait prévoir la prolongation de la
validité des adhésions actuelles. 1Un sous-comité a été (chargé de
rechercher une formule acceptable 1).Ce sous-comité a présenté le

texte actuel du paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.
En fait, aux mêmes séances,dans les mêmes discours, dans les
mêmesrapports on a traité les deux questions - la prolongation
de la juridiction obligatoire existante, dans les termes prévus au
paragraphe 5 de I'article 36 (ainsi qu'à l'article 37)) et la question
généralede la juridiction obligatoire - comme deux aspects d'une
même question plus large. Cela reçsort clairement des documents
contenant les comptes rendus de la dix-septième séance du
comité IV/I (Documents de La Conférence,t. 13, pp. 256-260, et
en particulier du compte rendu du sous-comité sur l'article 36

du comité IV/I, pp. 562-564).
II est donc clair que le but du paragraphe 5 était de prévoir
((la prolongation de la validité des adhésions actuelles )à la dispo-
sition facultative. Loin de penser qu'une quelconque des déclara-
tionsd'acceptation existant alors dût disparaître à la dissolution de
la Cour permanente, les auteurs du paragraphe 5 envisageaient le
maintien du groupe tout entier des déclarations d'acceptation qui
n'étaient pas encore expirées et conformément à leurs termes,
sans tenir compte de la dissolution de la Cour permanente. Cette

intention s'exprimait dans les termes les plus larges possibles,
destinés à éliminer toute difficulté juridique réelle ou apparente:
« les déclarations .. seront considérées,dans les rapports entre
parties au présent Statut, comme comportant acceptation de la
juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice 1).Et,comme on le verra plus loin dans la présente opinion, il n'y a
aucune preuve indiquant que l'intention des auteurs du para-
graphe 5 fût d'en limiter l'application aux Etats ayant participé
à la Conférence de San Francisco et devenus Membres originaires
des Nations Unies. tels au'ils sont définisà l'article de la Charte.
Il est légitime de' soutenir que le résultat du compromis réalisé
à la Conférenceet incorporé dans le paragraphe 5 ne saurait être
amenuisé par voie d'interprétation du texte clair et sans réserve
du paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.

Nous examinerous tout d'abord en les interprétant - aussi
bien en eux-mêmes que dans leur contexte - les termes per-
tinents de l'article 36, paragraphe 5, eu égard à la thèse de
la Bulgarie d'après laquelle les mots (which are still in force ))
contenus dans ce paragraphe 5 se réfèrent à l'existence de la
Cour permanente et ne s'appliquent par conséquent pas à la
déclaration de la Bulgarie qui, a-t-on fait valoir, a cesséd'exister
à la dissolution de la Cour permanente. Nous montrerons dans la
suite de la présente opinion que le maintien ou la rupture du
lien entre la déclaration et l'existence de la Cour permanente
est sans pertinence étant donné l'objet clair du. paragraphe 5.
Nous traiterons à présent de l'interprétation des termes en question
en tant que tels. Nous considérons que les mots ccwhich are still

in force »,lorsqu'on les prend dans le contexte de l'ensemble du
paragraphe, peuvent uniquement signifier, et sont destinés à
signifier, que sont exclues quelque quatorze déclarations d'accep-
tation de la juridiction obligatoire de la Cour permanente déjà
expirées et que sont inclues, indépendamment de la continuation
ou de la dissolution de la Cour permanente, toutes les déclarations
dont la durée n'est pas expirée. A la Conférencede San Francisco
étaient présents un certain nombre d'États qui avaient dans le
passé fait des déclarations d'acceptation qui, faute d'avoir été
renouvelées,étaient devenues caduques et n'étaient par conséquent
plus en vigueur. Tel était, par exemple, le cas des déclarations de
la Chine, de l'Égypte, de l'Éthiopie, de la France, de la Grèce,
du Pérou, de la Turquie et de la Yougoslavie. 11était clairement
nécessaire d'exclure ces États du domaine du paragraphe 5 en y

insérant l'expression «which are still in forc».Cette interprétation
est appuyée par le texte français, qui fait foi au mêmetitre que
le texte anglais et est encore plus clair et indiscutable que celui-ci.
Les mots «pour une durée qui n'est pas encore expirée » doivent
être considérés comme déterminant le sens véritable du texte
anglais en question. Le fait que les textes chinois, russe et espagnol
de ce paragraphe se rapprochent de l'anglais ne contredit pas et
n'affaiblit pas le sens évident du texte français. Ces trois textes
ont ététraduits de l'anglais, tandis que le texte français était celui de l'une des deux langues officielles adoptées à la Conférence
de San Francisco. Toutefois, si le texte français enlève tout doute
quant à la signification de ces termes, il n'y a pas non plus
effectivement de doute raisonnable à leur égard en ce qui concerne
le texte anglais. Il n'est pas question ici de donner la préférence
au texte français. Les deux textes ont le mêmesens. Le français
n'est que la traduction exacte de l'anglais tel qu'on l'entend
généralementou plutôt, puisqu'il apparaît que la version définitive

a d'abord étéformulée en français, le texte anglais n'est que la
traduction exacte du français.
Le Gouvernement bulgare a soutenu que la première version
française adoptée par le comité IV/I - «dédarations qui sont
encore en vigueur » -- était la traduction fidèle du texte anglais;
que c'est à la demande de la délégation française qu'elle a été
changée pour aboutir au texte fiançais actuel: «pour une durée
qui n'est pas encore expirée »;et que le représentant de la France
a expliqué au comité que les modifications dont il proposait
l'insertion ne portaient pas sur le fond mais étaient destinées à
améliorer la rédaction. La relation de ces modifications successives
est exacte, mais elle n'appuie pas l'argumentation en vue de

IaquelIe elle a étédonnée. 11est à noter en effet que l'amendement
français a étéproposé après l'adoption du texte du paragraphe
en question et approuvé sans opposition lors d'une réunion ulté-
rieure du comité. Aucune modification de fond n'a été apportée
au paragraphe pour la raison que le sens clair et sans ambiguïté
de l'amendement français a étéentendu par l'ensemble du comité
comme correspondant également au véritable sens du texte anglais.
Le rapporteur du comité 1, qui présentait son rapport en anglais,
a déclaréau sujet de la question de l'article 36: «Un nouveau
paragraphe 4 [actuellement paragraphe 51 fut ensuite inséré en
vue de sauvegarder les déclarations non expirées (for Periods of
time zuhichare not expired) faites en application de l'article 36 de

l'ancien Statut et pour les considérer comme se rapportant à la
nouvelle Cour. » Il semble qu'il n'y ait pas eu de doute dans l'esprit
des membres du comité I quant au sens des mots « still in forc))
dans le texte anglais. Le but de l'amendement français n'a pas
étéd'obtenir une modification de fond mais seulement une clan-
f--ation.
Certes, une obligation internationale peut cesser d'exister pour
d'autres raisons que l'échéancedu terme; elle peut, par exemple,
prendre fin par suite de l'accomplissement de son objet, de sa
dénonciation d'une manière prévue dans l'acte ou de sa dissolution
par consentement mutuel. Toutefois, ces divers modes de cessation

et d'extinction des obligations ne correspondent pas au sens admis
par l'usage du membre de phrase «whiclz are stillin force ».Il est
clair qu'ils ne correspondent pas à leur version française, laquelle
parle «d'une durée qui n'est pas encore expirée ». Le sens de
l'expression « which are still in force» est si bien établi en anglaisqu'il n'a pas étéjugénécessairedans le texte anglais de donner une
traduction littérale, mot àmot,dutexte français. Lesdeux membres
de phrases visent, dans leur sens ordinaire, l'élément d'échéancedu
terme - et non l'expiration par suite d'un événementextérieur tel
que la dissolution de la Cour permanente. L'argument d'après
lequel, bien que ces expressions se réfèrent ordinairement à l'élé-
ment de temps, on peut, à force d'ingéniosité,leur donner un sens
différent de leur sens ordinaire est peu convaincant.

On arrive au mêmerésultat lorsque l'on considère les termes en
question en se référant à leur contexte dans les autres dispositions

de la Charte portant sur des matières analogues. Les mots «still in
force » ne peuvent, à défaut d'un texte exprès en sens contraire,
s'interpréter dans leparagraphe 5 avec un sens différent de celui qui
est évidemment le leur dans les articles 36, paragraphe 1,et 37 du
Statut - qui parlent l'un et l'autre des traités en vigueur. Aucune
des deux Parties n'a suggéréque ces dernières dispositions visent
la validité des traités en question sur la base d'un autre critère que
l'échéancedu terme pour lequel ils ont étéconclus. Nous ne pouvons
interpréter ces mots d'une manière qui non seulement est contraire
au sens admis par l'usage du texte anglais et aux termes explicites
du texte français qui a étérédigé en premier, mais encore s'écarte

du sens évident - et non contesté - des mêmesmots dans les
passages du Statut qui précèdent et qui suivent immédiatement.
Pour des raisons qui seront exposées plus en détail dans un
instant, on est mal fonde à soutenir que les déclarations faites
en vertu de l'article 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour perma-
nente étaient indissolublement liéesà ce Statut et sont, par consé-
quent, devenues inévitablement et définitivement caduques à la
dissolution de cette Cour, alors que les traités visés à l'article 37
étaient exempts d'un tel lien et que, par conséquent, leur transfert
à la juridiction de la Cour internationale a survécu à la dissolution
de la Cour permanente. La force de droit, en tant que source de

juridiction de la Cour, des dispositions juridictionnelles de tout
traité repose sur le paragraphe I de l'article 36 du Statut, lequel
dispose que la compétence de la présente Cour s'étend à (tous les
cas spécialement prévus ... dans les traités et conventions en
vigueur ». Si, par suite de l'introduction de conditions extérieures
dans les termes clairs de l'article 36, paragraphe 5, la dissolution de
la Cour permanente avait pour effet de mettre fin aux déclarations
faites en vertu de l'article 36, paragraphe 2,du Statut de la Cour
permanente, on aboutirait aux mêmes conséquencespour les traités
et conventions visés à l'article 37 du présent Statut. Or, il est clair
qu'aucune de ces dispositions n'a de telles conséquencesà cet égard

et on ne l'a pas prétendu. Pour toutes ces dispositions,l'expression
in force))n'a pas un sens différent de celui qui s'attache ordinai-
rement à ces termes, à savoir qu'ils se réfèrentà l'élémentde temps. Nous n'attribuons pas une importance décisiveà la question, sur
laquelle les Parties ont été en net désaccord,de la date à laquelle il
faut rattacher l'expression ((which are stillin force ».Il peut s'agir
soit de la date d'entrée en vigueur de la Charte, c'est-à-dire du
24 octobre 1945, soit de la date à laquelle 1'Etat déclarant est
devenu partie au Statut de la Cour internationale de Justice. On

peut, comme le Gouvernement d'Israël, dire à l'appui de la première
solution qu'un acte juridique se réfère normalement à sa date
d'entrée en vigueur. Toutefois, on est également fondé à soutenir
que cette ?pression doit plus proprement se rattacher à la date à
laquelle 1'Etat intéressé devient liépar les obligations du Statut.
On ne doit pas, sans bonnes raisons, supposer qu'une disposifion
ait un effet rétroactif; c'est normalement la date àlaquelleun Etat
devient partie à l'acte qui détermine, à l'égardde cet État, la date
d'entrée en vigueur de ses différentes dispositions.

Nous ne considérons pas que l'adoption de l'une de ces deux
dates de préférence à l'autre ait des conséquences pratiques pré-
judiciables aux thèses de l'une ou l'autre Partie. A notre avis, la
validité du paragraphe 5 n'a pas expiréà la dissolution de la Cour
permanente; son but était de rendre cette dissolutioninopérante en
matière de transfert de déclarations; il était destiné à s'appliquer
aussitôt qu'un Etat déclarant devenait partie au Statut - à moins
que sa déclaration ne Mt plus en vigueur, étant devenue caduque
conformément à la fin du paragraphe 5. C'est pourquoi la thèse
principale du Gouvernement d'Israël n'est pas mise en échec si
l'on rattache l'expression which are still in force)) à la date à

laquelle la Bulgarie est devenue partie au Statut. A cette date -
ou à partir de cette date - sa déclaration de 1921, préservée de la
caducité en vertu de l'article 36, paragraphe 5, est devenue pleine-
ment applicable.

Nous parvenons en conséquence à la conclusion qu'en raison
du sens ordinaire de ces termes ainsi que de leur contexte,
les mots (which are still in force ))visent les déclarations elles-
mêmes,c'est-à-dire une durée limitée ou illimitée qui n'était pas

expirée, indépendamment de la date éventuelle ou effective de
la dissolution de la Cour permanente. Pour autant que la durée
des déclarations faites en vertu de l'article 36 du Statut de la Cour
permanente reste à courir au moment où l'État déclarant intéressé
devient partie au Statut de la Cour internationale de Justice, ces
déclarations tombent sous le coup de l'article 36, paragraphe 5, du
nouveau Statut et ((seront considéréescomme comportant accepta-tion de la juridiction obligatoire de la Cour internationale pour la
durée restant à courir d'après ces déclarations et conformément à
leurs termes ».

Nous allons maintenant examiner le sens de ces termes concrets
du paragraphe 5 en nous référant àl'objet de cette disposition. La
juridiction de la Cour internationale de Justice est établie par la
Charte et le Statut de la Cour. En droit, elle n'aurait pu être et
elle n'a étéaffectée en aucune manière par la mesure prise par

l'Assemblée de la Sociétédes Kations pour dissoudre la Cour per-
manente, pas plus que l'institution de la nouvelle Cour n'aurait pu
juridiquement affecter la juridiction de la Cour permanente. La
création de l'une et la fin de l'autre ont constitué deux actes juri-
diques distincts. Et cela bien qu'il y eût entre eux un lien étroit de
cause à effet. Pendant une certaine Dériode.entre la mise en Œuvre
de ces deux mesures, les deux institutions ont existé en droit bien
que l'une ne fût pas encore organisée et que l'autre se préparât
déjà à êtredissoute. Comme l'a dit le sous-comité IV/I/A: « Etant
donné cependant qu'on ne peut envisager l'existence de deux cours
mondiales, ayant chacune leur siège à La Haye ...il est évident
qu'il importera de prendre, le plus tôt possible, des mesures en vue
de mettre fin à l'existence de l'ancienne Cour ...))(Conférencedes
Nations Unies sur l'organisation internationale, t. 13, p. 531.)

Il est donc clair que les dispositions de l'article 36, paragraph5,
du nouveau Statut jouent indépendamment de la Cour permanente
et queleur application n'est pas affectéepar la dissolution de celle-ci.
Ainsi que nous l'avons déjà montré, la préoccupation du comité
IV/I de la Conférence de San Francisco au sujet de ce paragraphe
était de préserver pour la nouvelle Cour l'ensemble des déclarations
d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour permanente.
Il ne se préoccilpait pas de savoir si les déclarations seraient valides
lorsqu'elles seraient détachées de la Cour permanente. Il se préoc-
cupait de rédiger et d'adopter une formule qui assurerait la pro-
longation de leur validité.
La Conférencede San Francisco avait pour objet essentiel, comme
l'a dit le comité 1, de prévoir ((la prolongation de la validité des
adhésions actuelles 1d'une manière com~atible avec le droit inter-

national. Le fait de la séparation d'avéc la Cour permanente de
Justice internationale était considéré comme acquis pour les décla-
rations d'acceptation. C'est le rattachement des déclarations à la
nouvelle Cour qui était considéré comme essentiel et c'est cet
objectif qui a dicté l'adoption de la formule reprise à l'article 36,
paragraphe 5,en vue d'assurer la prolongation de la validité de ces
déclarations. La date de séparation d'avec la Cour permanente
n'était pas considéréenon plus comme importante. Il est par consé-
quent sans importance de savoir si cette date a été le 24 octobre1945, jour où la Charte des Nations Unies prévoyant l'institution
de la Cour internationale de Justice est entrée en vigueur, ou le
18 avril1946, jour où la Cour permanente a étéformellement dissoute
à dater du 19 avril. En fait, la Cour permanente a tenu sa dernière

session en octobre 1945; tous ses membres ont démissionné enjan-
vier 1946. En raison de l'imminence de la dissolution de la Société
des Nations, il n'y avait pas de rouages pour élire de nouveaux
juges. Ce qui importe pour la validité d'une déclarationà l'égard de
1sprésente Cour, c'est de savoir si elle remplit les conditions posées
à l'articl36,paragraphe 5. En d'autres termes, pour ce qui concerne
la présente Cour, la dissolution de la Cour permanente n'était pas
destinée à avoir d'effet sur les déclarations d'acceptation visées à
l'article36,paragraphe 5, et elle n'en a pas eu. Le point de savoir
si ces déclarations, y compris la déclaration bulgare de 1921, sont
applicables ou non à la Cour internationale de Justice, ne doit être
tranché que conformément à l'articl36,paragraphe 5, du nouveau
Statut - lequel, du fait d'une omission délibérée, nmentionne pas
la dissolution de la Cour permanente.
A l'égardde la Cour permanente de Justice internationale et de
son Statut, la déclaration bulgare de 1921 a cessé, en fait comme
au sens strict du droit, d'être applicable lorsque cette Cour a été
dissoute le 18 avril 1946. Toutefois, à l'égard de la Cour inter-
nationale de Justice, la dissolution de la Cour permanente est pré-
cisémentla situation qui a étéconsidéréepar les auteurs du nouveau
Statut comme une raison d'adopter le paragraphe 5 étde le mettre
pleinement en application en conséquence et à la suite de la dis-
solution de la Cour permanente. C'est afin de sauvegarder pour la
nouvelle Cour la juridiction obligatoire conférée à l'ancienne, et
dont la durée de validité n'était pas expirée, que le paragraphe 5
a étéadopté et insérédans l'article 36 du présent Statut et que

l'article7 y a été introduit. En vertu de l'articl36, paragraphe 5,
les déclarations d'acceptation encore en vigueur des États devenus
parties au Statut le24 octobre 1945, date d'entrée en vigueur de la
Charte, étaient considéréescomme comportant acceptationde la juri-
diction de la nouvelle Cour. Toutefois, les autres déclarations
d'acceptation qui étaient encore en vigueur ne devaient pas être
éteintes et oybliées. Leur application était suspendue jusqu'au
moment où 1'Etat déclarant devenait partie au Statut, par admission
aux Nations Unies ou en vertu de l'article 93, paragraphe 2, de la
Charte. La Bulgarie a demandé plus d'une fois à êtreadmise aux
Nations Unies. Lorsqu'elle l'a été,le 14 décembre 1955, elle est
devenue le même jour partie au Statut. Comme la déclaration
bulgare ne contient aucune limitation de durée, elle est, le même
jour, tombée sous le coup de l'article36, paragraphe 5. 11est une autre considération d'ordre pratique qui empêched'in-
terpréter les mots « which are stilin force))comme visant l'éventua-
lité de la dissolution de la Cour permanente. Si telle était l'inter-
prétation exacte de ces termes, il y aurait eu nettement possibilité
que l'objet du paragraphe 5 soit mis en échec. LesÉtats participant
à la Conférencede San Francisco, ayant décidéla création d'une
nouvelle Cour, désiraient voir I'ancienne prendre fin. Des cinquante
et un États qui assistaient à la Conférencede San Francisco, trente
et un étaient parties à l'ancien Statut et, à de rares exceptions près,
Membres de la Société desNations. 11était possible que la Société
des Nations se réunit pour se dissoudre, ainsi que la Cour perma-

nente, avant l'entrée en vigueur de la Charte des Nations Unies et
du Statut de la nouvelle Cour. Au surplus, on ne pouvait prévoir
avec certitude que l'on atteindrait le 24 octobre 1945 le chiffre de
vingt-neuf ratifications de la Charte, y compris les ratifications des
cinq membres permanents du Conseil de Sécurité.Cela aurait pu
se réaliserà une date ultérieure et, peut-être, après la dissolution
de la Société desNations et de l'ancienne Cour. Dans l'un ou l'autre
cas, l'article6, paragraphe 5, serait devenu lettre morte. Car alors,
d'après la thèse de la Bulgarie, toutes les déclarations seraient
devenuescaduques par suitede la dissolutionde la Cour permanente
et de l'expiration de l'ancien Statut et elles n'auraient plus été en
vigueur.

L'article 36, paragraphe 5, était destiné à éliminerles difficultés
touchant à l'imminente dissolution de la Cour permanente et de
nature à entraver la prolongation de la validité des déclarations.

La thèse bulgare admise par la Cour a retenu ces considérations
comme partie intégrarite de l'article 36. La formule sans réserve du
paragraphe 5 tend à indiquer que toute difficulté juridique réelle
ou apparente découlant du fait que les déclarations étaient annexées
au Statut de la Cour permanente, ainsi que toutes les autres diffi-
cultés juridiques réelles ou apparentes auxquelles les auteurs du
paragraphe 5 ont songéou qui leur ont échappé,a étérésoluepar
la dispositiond'unelarge portéeénonçantqueces déclarations seraient
considérées,dans lesrapports entreparties au présentStatut, comme
comportant acceptation de la juridiction obligatoire de la nouvelle
Cour. Ce sont précisémentdes obstacles de ce genre que les auteurs
del'article36ontentendu neutraliser. Tel aété le but du paragraphe 5.
Ils ont déclaréen fait: quels que soient les obstacles juridiques,
ces déclarations seront maintenues à l'égard dela Cour internatio-
nale de Justice, pourvu que leur durée de validité ne soit pas
expirée - c'est-à-dire pourvu qu'elles soient encore en vigueur lejour de l'entréeen vigueur de la Charte ou le jour où l'État déclarant
devient partie au Statut.
Le paragraphe 5, qui emploie les termes «seront considérées ...
comme comportant acceptation »,est destiné à percer tout réseau

de complications et problèmes juridiques pouvant se présenter dans
ce domaine. Le paragraphe 5 n'est pas destiné à reconnaître un
effet décisifà ces difficultéspar une formule - «still in force» -
qui signifie normalement autre chose. Autrement, si les mots «still
in force ))devaient signifier simplement «tant que la Cour perma-
nente n'aura pas été dissoute »,on ne comprendrait pas pourquoi
cette dernière formule n'aurait Das étéem~lovée Iu .,eu de la
formule ((still in forc»,laquelle a un sens propre, clair et différent,
c'est-à-dire qu'elle vise l'expiration par l'échéancedu terme. En
conséquence, attacher une importance décisive à l'effet de la dis-
solution de la Cour permanente revient non seulement à récrire
le paragraphe 5, mais encore à y ajouter une condition extérieure

que cet article avait pour but d'écarter et de négliger. Lorsqu'on
affirme,par conséquent,que l'effet de la dissolution de la Cour per-
manente a été de mettre fin auxdéclarations d'acceptation existantes
le 19 avril 1946,la réponsecorrecte à toute affirmation de ce genre
est que tel'était précisément lerésultat que le paragraphe 5 était
destiné à empêcher.
Le principe dominant qui est à la base du paragraphe 5 est celui
de la continuation automatiaue au ~rofit de la Cour internationale
de Justice des engagements c'ontraciésen application du Statut de
la Cour permanente dont on envisageait et dont on escomptait
clairement la dissolution. Nous avons cité plus haut le passage en
question du rapport du comité IV/I. Nous estimons donc que tout

argument fondé sur la dissolution de la Cour permanente et la
caducité de son Statut, auquel se rattachait la déclaration de 1921,
est sans pertinence soit pour l'interprétation des termes ccwhich
are still in force»,soit à tout autre point de vue. Pour la même
raison, on est mal fondé à soutenir que le paragraphe 5, ayant
pour objet d'assurer. la continuité de la juridiction de la Cour, ne
saurait être considéré commedestiné à ressusciter les déclarations
expirées par suite de la dissolution de la Cour permanente. L'objet
du paragraphe 5, clairement exprimé dans les travaux prépara-
toires cités, était précisément d'empêcher ces déclarations de
devenir définitivement caduques à tous égards. Il ne fait pas de

doute qu'elles étaient devenues caduques en ce qui concerne la
Cour permanente; elles n'étaient pas devenues caduques en ce qui
concerne la présente Cour. L'objet du paragraphe 5 était d'assurer
la succession en matière de juridiction obligatoire de la Cour.
Il est vrai que la déclaration de la Bulgarie était fondée sur le
Statut de la Cour permanente. Il est vrai aussi que ce Statut a
cesséd'exister et de lier la Bulgarie lorsque la Cour permanente a
étédissoute et que le Statut de la présente Cour n'a liéla Bulgarie
que lorsqu'elle est devenue partieaudit Statut. Mais, àce moment, sadéclaration est tombéesous le coup du paragraphe 5 qui conservait
une valeur potentielle aux déclarations concernant les États rele-
vant des termes clairs de cette disposition, c'est-à-dire concernant
les Etats devenant parties au Statut. Par conséquent, lorsqu'en
1955 la Bulgarie est devenue partie au Statut, en devenant Membre
des Nations Unies, le paragraphe 5 est devenu pleinement appli-
cable à son égard.Son but ne s'étaitpas éteint par la dissolution de
la Cour permanente; il étaitd'empêcher la dissolutionde cette Cour
de devenir un facteur destructif pour les déclarations faites en
vertu de son Statut. Son but était de sauvegarder la juridiction

obligatoire existant au bénéficede la présente Cour, nonobstant
l'événement clairement envisagé par les auteurs du paragraphe 5,
à savoir la dissolution de la Cour permanente. C'est précisément
cet événement prévuqui a motivéle paragraphe 5.

L'idéeque le paragraphe 5 n'était destiné à prévenir ce résultat
qu'à condition que les États intéressés devinssent parties au Statut
avant le 18 avril1946 n'est pas très convaincante. Cette conception
ne repose sur aucunepreuve et il n'y a pas d'explication satisfaisante
d'une telle intention tendant à réduire la période d'application dii
paragraphe 5 et à le rendre vague en y introduisant l'élémen
d'incertitude touchant à la date de la dissolution de la Cour perma
nente. Au moment où le texte de la Charte a étéétabli,il était diffi
cile de prévoir quand cette dissolution aurait lieu,

C'est pourquoi nous ne considérons pas qu'il soit nécessaire de
traiter des arguments avancés en termes expressifs au sujet de la
possibilité de raviver la déclaration bulgare de 1921 dont l'exis-
tence, a-t-on prétendu, avait pris fin par suite de la dissolution de

la Cour permanente. Comme nous l'avons dit, il n'en était ainsi que
sousréserve de l'application du paragraphe 5. On peut ajouter qu'il
y a des limites évidentes à l'analogie entre la mort d'une personne
et la cessation de l'application d'une disposition juridique. Rien ne
peut ressusciter les morts; un bref alinéa dans un traité peut
donner une vie nouvelle et vigoureuse à un traité ou à un article
de traité dont l'application est suspendue ou qui a cesséd'exis-
ter. Certains traités, par exemple, sont automatiquement dissous
par suite de la guerre; une simple disposition du traité de paix
suffit à les ressusciter soit immédiatement, soit sous certaines
conditions à réaliserà l'avenir. Le paragraphe 5 vise au même
résultat à l'égard des déclarationsqui auraient pu devenir momen-
tanément inopérantes par suite de la dissolution prévue de la Cour
permanente et de la fin de son Statut. Les relations juridiques entre
États - comme entre individus - offrent de nombreux exem-
ples de dispositionscontractuelles en sommeil, et dont l'application
est suspendue, dans l'attente de la réalisation d'un événementdu
fait d'une partie ou de quelque circonstance extérieure. Il est donc sans importance - en raison des dispositions ex-
presses de l'article 36, paragraphe j - de savoir si l'acceptation
par la Bulgarie du Statut et nécessairement,par suite, del'article 36,
paragraphe j, doit être considérée,pour la déclaration bulgare
de 1921, soit comme un acte de ratification d'une déclaration faite
antérieurement, mais sous réserve de ratification, soit comme le
renouvellement d'une déclaration antérieure, soit comme un acte

équivalant au dépôt d'une nouvelle déclaration adoptant la forme
et le contenu de celle de 1921, sans suivre les formalités prescrites
pour une déclaration d'acceptation. De quelque façon qu'on envi-
sage le problème,il n'existe aucun doute quant àla claireexpression
de la volonté souveraine de la Bulgarie - manifestée par son
acceptation volontaire du Statut, y compris de l'article 36, para-
graphe 5 -, expression de volonté qui a constitué la base consen-
suelle d'une déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire
de la nouvelle Cour. On peut ajouter que cet acte d'acceptation
constitue l'application de la déclaration solennelle faite par la
Bulgarie le 9 octobre 1948, de son acceptation des obligations -
de toutes les obligations - de la Charte des Nations Unies. Cette
déclaration énonce notamment «que la République populaire de
Bulgarie accepte par la présente, sans réserve aucune, les obliga-

tions découlant de la Charte des Nations Unies et qu'elle fait la
promesse de les observer, en tant qu'inviolables, du jour où elle
deviendra Membre des Nations Unies » (Nations Unies, Recueil des
Traités, vol. 223, p. 32). La Bulgarie ne pouvait exprimer plus
clairement son intention d'accepter et d'observer les obligations de
la Charte des Nations Unies et du Statut. Nous nous proposons
d'examiner plus en détail dans la suite de la présente opinion la
question du consentement donné par la Bulgarie, lorsque nous
traiterons du deuxième motif de l'arrêtde la Cour, à savoir que
l'application du paragraphe 5 est limitée aux Membres originaires
des Nations Unies.

Comme nous l'avons dit, nous ne pouvons accepter la thèse
principale de la Bulgarie d'après laquelle la dissolution de la Cour
permanente a eu pour effet de mettre définitivement et irrévoca-
blement fin aux déclarations rattachées au Statut de cette Cour.
C'est pourquoi nous ne croyons pas nécessaired'examiner en détail
les motifs d'ordre général invoqués pour soutenir que le para-
graphe j doit contenir implicitement certaines conditions supplé-
mentaires. C'est ainsi qu'on a soutenu qu'à moins que l'application
du paragraphe 5 ne soit limitée aux États qui sont devenus parties
au Statut avant la dissolution de la Cour, il faudrait considérerque
la Conférencede San Francisco a tenté prendre une mesure qu'elle
n'avait juridiquement aucune compétencepour tenter de prendre et

aucun pouvoir de réaliser. On a fait valoir que cette mesure auraitdétaché laforce obligatoire de la déclaration du Statut auquel elle
était rattachée juridiquement par un lien indissoluble et qui avait
cesséd'exister à la dissolution de la Cour permanente. On a soutenu
également que, ce faisant, la Conférence de San Francisco aurait
tenté de prendre une autre mesure radicale pour laquelle elle n'avait
juridiquement ni pouvoir, ni compétence, à savoir: détruire le
caractère consensuel, fondésur le Statut, des déclarations d'accep-

tation. Cette argumentation ne nous paraît pas bien fondée.
C'est simplifier les choses de manière quelque peu fallacieuse
que de soutenir que la Conférencede San Francisco a pris certaines
décisions - ou qu'elle était absolument sans pouvoir pour prendre
certaines décisions -, par exemple, priver les déclarations d'ac-
ceptation de leur caractère consensuel ou les rattacher à quelque
chose qui avait cesséd'exister. La seule chose qu'ait faite et que
pouvait faire la Conférence à;cet égard, c'était d'établirun texte.
Ce texte ne liait aucun Etat. Tout signataire de la Charte
était libre de refuser de la ratifier. Tout État envisageant d'être
admis comme Membre des Nations Unies était libre de le traiter

comme une offre qu'il avait la liberté d'accepter ou de rejeter.
La validité et le caractère obligatoire de la Charte et de chacune
de Ses dispositions ne résultent pas de la décision de la Confé-
rence de San Francisco, mais de la volontémêmedes Etats quiont
volontairement adhéré àsesobligations en 1945 et au cours desannées
suivantes. Comme tout autre Menibre des Nations Unies, la Bulgarie
a, en y adhérant de son plein gré, accepté les obligations de la
Charte, y compris celles de I'article 36, paragraphe 5,du Statut.
Ce faisant, elle a fourni ce lien consensuel que l'on affirme essentiel
aux déclarations faites en vertu de la disposition facultative. Elle
a égale-gentfourni le lien consensuel nécessairepour la modification
- si minime fût-elle en l'espèce - de sa déclaration d'acceptation.
Le Statut aurait pu disposer que toutes les déclarations déjà

expirées, à quelque époque qu'elles eussent étéfaites, seraient
considéréescomme ravivées et maintenues en vigueur pour une
nouvelle période de vingt ans. Pareille disposition aurait été
inhabituelle et radicale. Si un État y avait consenti en adhérant
à la Charte, cela aurait été le résultat véritable de son admission
aux Kations Unies. Le lien consensuel aurait été fourni. Comme
toute autre disposition du Statut, I'article 36, paragraphe 5, est
une disposition d'un caractère consensuel. On est mal fondé à
prétendre qu'il est essentiel pour la structure de I'article 36 que
le lien consensuel ne s'établisse que pour le paragraphe 2, à
l'exclusion de tout autre paragraphe. Ainsi, le paragraphe I de

I'article36 établit la base consensuelle de la juridiction de la
Cour pour Btoutes les affaires que les parties lui soumettront,
ainsi [que] tous les cas spécialement prévus dans la Charte des
Nations Unies ou dans les traités ou conventions en vigueur 1).
Dans un autre domaine, l'article 37 fournit le lien consensuel
pour la succession de la Cour internationale de Justice à la juri-
48diction de la Cour permanente ou de tout autre tribunal établi
par la Société des Nations.
Sans doute, une fois $e texte de la Charte établi par décision
de la Conférence, les Etats qui y ont adhéré par la suite
n'avaient d'autre choix que d'en accepter toutes les disposi-
tions. Mais cela ne signifie pas qu'ils n'ont pas, de leur plein
gré, consenti aux divers articles de la Charte et du Statut, en
contre-partie des avantages déterminants de l'admission aux
Nations Unies, D'après la pratique internationale établie et
uniforme, un Etat adhérant à un acte international l'accepte

tel qu'il est, sauf disposition expresse de cet acte en sens
contraire. En outre, comme nous l'avons déjàdit, il n'y avait en fait
aucune innovation dans la disposition qu'ils choisissaient ainsi
d'accepter. C'était tout au plus, selon toute appréciation raison-
nable, un procédétechnique dans le domaine de la continuité
de l'organisation judiciaire internationale. Les Membres des Nations
Unies sont convenus que leurs déclarations rattachées au Statut
de la Cour permanente seraient, nonobstant la dissolution de
celle-ci, maintenues en vigueur à l'égard de ce qui était essen-
tiellement et, au fond, la mêmeCour. Le paragraphe a expressé-
ment disposé que les déclarations seront maintenues cpour la
durée restant à courir d'après ces déclarations et conformément
à leurs termes ». A part leur transfert à la Cour internationale de
Justice, elles n'étaient pas modifiées. Comparée à de nombreuses

autres dispositions de la Charte qui limitent la souveraineté de
ses Membres, telle que la consacrait le droit international tradi-
tionnel, c'était une disposition d'une portée nettement limitée.
Qu'il suffise de la comparer, par exemple, aux articles de la Charte
qui imposent aux Membres l'obligation juridique de se conformer
aux décisions du Conseil de Sécuritéou de ne pas recourir ,à la
force, mêmesans aller jusqu'à la guerre et mêmecontre des Etats
non Membres des Nations Unies, pour le règlement de leurs diffé-
rends. Il est donc, mêmede ce point de vue, peu convaincant
de soutenir, comme l'a fait la Bulgarie, que des conséquences juri-
diques radicales - ou mêmeabsurdes - résulteraient, de ce fait,
de l'interprétation du paragraphe 5 conforme à ses termes clairs.

Pour les raisons indiquées, nous ne pouvons admettre la thèse
de la Bulgane d'après laquelle l'objet et la base de la déclaration
de 1921 ont disparu pour le motif que la Cour permanente a été
remplacée par ce qui était essentiellement un organe judiciaire
identique. L'objet et la base de la déclaration sont tous deux
restés les mêmes; au surplus, ils relevaient du but clairement
manifesté qu'ont eu les auteurs du Statut d'assurer la continuité
de la juridiction obligatoire de la Cour. Indépendamment de
considérations de caractère formel, que le paragraphe 5 avait

49précisémentpour but d'éliminer, quelle était, en droit et en fait,
la conséquence effective de la dissolution de la Cour permanente
quant à la base et à l'objet de la déclaration bulgare de 1921 et
des déclarations similaires? En tant que le Statut de la Cour
permanente constituait la base de la déclaration de 1921, cette
base n'a guère étéaffectée par l'adoption d'un nouveau Statut
qui, dans la pratique, ne pouvait se distinguer de celui de la Cour
permanente. La différenced'objet entre les deux déclarations, en
tant qu'elles visaient la Cour permanente et la Cour internationale
de Justice, était encore plus théorique s'il est possible: l'objet
des deux déclarations était exactement le même, à savoir de
contracter des obligations de règlement judiciaire obligatoire à
l'égard d'organes qui étaient, dans la pratique, identiques - cette

identité correspondant au but net et fréquemment exprimé que
~oursuivait la Conférenced'assurer la continuité de la iuridiction
jnternationale en matière de règlement judiciaire oblig&oire.
Nous considérons comme important de maintenir l'esprit de la
jurisprudence de la Cour en matière de succession des organisations
internationales. Dans son avis consultatif sur le Statut international
du Sud-Ouest africain, la Cour a eu à connaître de la thèse d'après
laquelle la disparition de la Société desNations, organe chargé
de la surveillance du régime des Mandats, avait mis fin au Mandat,
ainsi qu'aux obligations internationales du Mandataire. La Cour
a rejeté cette thèse. Elle a jugé que les Nations Unies avaient
succédéà la Société desNations dans ses fonctions de surveillance.
Elle l'a fait, bien que la Charte ne contienne aucune disposition

expresse en ce sens et bien que les Nations Unies et la Société
des Nations soient des institutions différentes. Dans la rés ente
affaire, il y a une disposition d'un caractère très explicite et sans
réserve Iour le transfert de iuridiction au bénéficede ce auiIdoit
être considéré, selon toute appréciation raisonnable, comme un
organe identique. C'est pour nous une raison supplémentaire de ne
pouvoir admettre l'exactitude de la thèsed'aprèslaquelle l'objet et la
base de la déclaration bulgare de 1921 ont disparu à la dissolution
de la Cour permanente.

Tels sont donc les deux élémentsdominants de la situation: le

premier est que l'expression ccwhich are still in force», lorsqu'on
l'interprète dans son sens ordinaire et admis, vise la caducité par
échéancedu terme et non un événementextérieur quelconque tel
que la dissolution de la Cour permanente. Le second est que c'est
précisémentl'objet du paragraphe 5 que d'empecher que la disso-
lution de la Cour permanente n'ait un effet destructeur sur les
déclarations existantes. Le résultat conjoint de ces deux facteurs
est, en premier lieu, de maintenir immédiatement et automatique-
ment ces déclarations à l'égarddes Membres originaires des NationsUnies. Il est en second lieu de les conserver potentiellement à
l'égard desautres Etats déclarants jusqu'au moment - au moment
raisonnable - où ils deviennent parties au Statut. La question
du caractère raisonnable de la période en question sera examinée
dans la suite de la présente opinion. Qu'il suffise de dire pour le

moment qu'après la dissolution de la Cour permanente, le para-
graphe 5 n'a pas cesséd'être opérant à l'égard desparties éventuelles
au Statut. Leurs déclarations n'ont pas non plus cesséd'êtreopé-
rantes aux fins de ce.paragraphe. C'était essentiellement le but du
paragraphe 5 que de l'éviter. Le texte, d'une large portée, de cette
disposition - ((seront considérées ...comme comportant accepta-
tion ))- rend inutile toute spéculation sur la nature exacte de cette
oyigation continue et dont l'application restait en suspens tant que
1'Etat déclarant ne devenait pas partie au Statut. Il se peut que

l'expression fiction juridique ))soit utile ou non à cet égard; il
en est de mêmede la notion d'une obligation juridique simplement
en sommeil. Les termes et le but du paragraphe j rendent inutile
toute subtile spéculation en la matière.
Il est d'un intérêtdirect, pour la question ici traitée, de noter
la manière dont l'application de l'article 36, paragraphe 5, était,
au début de 1947 comprise par un auteur qui est considéré comme
l'un des commentateurs les plus autorisés du Statut, qui a été
membrede la Courpermanente et qui a assistépour elle au comitéde
juristes de Washington ainsi qu'au comitépertinent de la Conférence

de San Francisco. Le professeur Manley Hudson déclarait à cette
époque, sans faire état d'aucune exception, quJ«aux termes de
l'article36, paragraphe 5, les déclarations faites antérieurement en
vertu de l'article 36 doivent êtreconsidérées commeétant encore
en vigueur, pour autant qu'elles ne sont pas expiréesconformément
àleurs termes, ((dans lesrapports entre parties au présent Statut )».
(American Journal of International Law, vol. 41, 1947; p. IO.)
Il énumérait ensuite les pays dont les déclarations antérieures
étaient en vigueur ((jusqu'à la fin de 1946 ». La liste comprenait
la Thaïlande. Il n'indiquait nullement que la dissolution de la

Cour permanente en avril 1946 eût entraîné la caducité de la décla-
ration de la Thaïlande qui n'était, en fait, devenue membre des
Nations Unies qu'en décembre 1946. M. Hudson, après avoir men-
tionné certains autres États dont les déclarations étaient venues à
expiration au cours de l'année 1946 et avaient étérenouvelées par
la suite, faisait alors état de la déclaration de la Suède, venue à
expiration ((au cours de l'année ))- à savoir, disait-il, le 16 août
1946 - et non renouvelée. Là encore, il n'était pas suggéré que
la déclaration de la Suède,qui ne devint partie au Statut qu'en 1947,

eût expiré au moment de la dissolution de la Cour permanente.
Elle avait expiré le 16 août 1946. En conclusion, nous ne pouvons, en ce qui concerne le sens des
termes cwhich are still iiz jolrc)),retenir une interprétation qui
s'écarte du sens admis et ordinaire des mots; qui s'écarte du sens
admis des termes correspondants figurant dans d'autres dispositions
qui précèdentou suivent immédiatement dans le Statut; qui intro-
duit dans le paragraphe j un élbmentétranger que cette disposition
avait précisémentpour but d'exclure; et qui, si elle avait étéaccep-

tée, aurait mis en échec ou considérablement réduit l'effet du
paragraphe 5. Nous estimons que les termes en question visent non
pas la dissolution de la Cour permanente, mais la validité dans le
temps des déclarations d'acceptation la date d'entrée en vigueur
de la Charte, ou la date à laquelle 1'Etat déclarant devient partie
du Statut. Pour ces motifs, nous devons rejeter la première exception
préliminaire de la Bulgarie en tant qu'elle se fonde sur cette conclu-
sion particulière.

Le deuxième motif principal pour lequel la première exception
préliminaire est admise est que le paragraphe 5 de l'article 36
s'applique seulement aux Membres originaires des Sations Lnies.
En dehors d'une mention faite en passant, au cours des plaidoiries,
à propos de l'exclusion des Etats ex-ennemis du domaine d'appli-
cation du paragraphe 5, ce motif particulier n'a pas étéinvoquépar
la Bulgarie. Il n'a étédiscuté par les Parties ni dans la procédure
écrite, ni dans la procédure orale.
Rien, ni dans le paragraphe j, ni dans les travaux pr5paratoires
de la Conférencede San Francisco, ni dans les principes généraux
du droit international, ni dans les diverses dispositions de la Charte,
ne justifie I'idéeque ce paragraphe s'applique seulement aux Mem-

bres originaires des Nations Unies, tels qu'ils sont définiàl'article 3
de la Charte. Amoins qu'il n'en soitexpressément disposéautrement,
les dispositions de la Charte s'appliquent également à tous les Etats
qui deviennent Membres des Kations Unies. Pour les Membres des
Nations Unies, quelle que soit la date de leur adhésion, aucune
disposition de la Charte ne saurait êtreresinter alios acta,de manière
à êtreopposable aux uns, mais non aux autres. L'idéeque les droits
et obligations de la Charte varient à cet égard entre les différents
Membres des Nations Vnies est contraire à toute la structure de la
Charte et aux principes pertinents du droit international géné-
ralement admis en la matière. En pratique, toute idéede ce genre,
si on l'acceptait, entraînerait degraves conséquences. On ne peut davantage accepter l'idéeque le,paragraphe 5 se borne
à exprimer un accord conclu inter separ les Etats qui ont participé
à la Conférencede San Francisco. Nulle part la Charte n'incorpore
des accords particuliers entre des Membres particuliers. Toute
méthode de ce genre serait tout à fait étrangère à son but et à son
caractère. Les dispositions de la Charte sont d'application générale.
Il en est de mêmedu Statut, qui fait partie de la Charte.

A notre avis, l'assertion d'après laquelle, alors que les Membres
originaires des Nations Unies pouvaient s'obliger à propos du
transfert des déclarations en vertu du paragfaphe 5 de l'article 36
du Statut, ils ne pouvaient lier d'autres Etats adhérant par la

suite à la Charte manque de fondement juridique. Il est de
l'essence mêmede la Charte que ses dispositions - toutes ses dis-
positions - obligent les Etats qui adhèrent à la Charte après son
entrée en vigueur. Si l'article361avait prévu sans réservela juridic-
tion obligatoire de la Cour - et non pas simplement le maintien
des déclarations existantes, conformément à leurs termes - il
obli erait non seulement les Membres originaires mais encore tous
les 8 tats qui y ont adhéré,par la suite. Il ne serait pas res inter
alios acta à propos de ces Etats. Cette proposition est trop fonda-
mentale pour qu'il soit besoin de la développer. Nous estimons
impératif en tranchant une controverse particulière, qui peut avoir
un caractère passager, de ne pas appuyer des propositions générales
telles que celle d'après laquelle il existe une différence,au regard
d'une obligation quelconque de la Charte, entre les Membres
originaires et les autres; ou celle d'après laquelle une disposition
quelconque de la Charte peut être res inter aLiosacta à l'égard
d'Etats adhérant par la suite; ou encore celle d'aprèslaquelle les
obligations de recourir au règlement judiciaire doivent s'interpréter

par référence à des normes plus exigeantes que l'interprétation
d'autres obligations de la Charte.
Il n'est pas une seule disposition de la Charte qui enregistre un
accord inter se entre un nombre limité de Membres des Nations
Unies. Dans plusieurs articles - tels que les articles 43(2) et (3),
j2-54, 64,77 (2) - la Charte prévoit lapossibilitéde pareils accords.
Mais s'ils sont envisagés ou permis par la Charte, ces accords n'en
font pas partie. Les dispositions de la Charte sont des dispositions,
applicables à tous, d'un traité législatif généralqui, pensait-on,
embrasserait un jour tous les membres de la communauté interna-
tionale. Il est difficile d'admettre qu'un traité de ce caractère ait
étéutilisé comme instrument pour incorporer des accords privés,
de portée et de durée limitées,entre un nombre limité de Membres
des Nations Unies.

53 Étant donné que, lors de la signature de la Charte, on ignorait
combien de signataires la ratifieraient avant la dissolution de la
Cour ~ermanente. il était ~ossible aue le nombre dJEtats finalement
liéspar ce qu'on affirme êtreun accord particulier, incorporé au
paragraphe 5,fût encore plus réduit qu'il ne ressort àpremière vue
de cette disposition. En outre, si l'on accepte l'opinion que la mise
en Œuvre du paragraphe 5 se limite aux Etats qui ont ratifié la

Charte avant la dissolution de la Cour permanente, le résultat
aurait éténon seulement qu'il s'agissait d'un accord particulier
entre un nombre limité de Membres des Nations Unies; mais
encore que c'était un accord valable et applicable pour une durée
de six mois seulement - la période allant d'octobre 1945 à avril
1946. Il ne nous est pas possible d'admettre qu'un accord tronqué
de cet ordre, entre un nombre limité d'États, puisse faire partie
d'une Charte posant les bases d'une communauté universelle
d'États organisés en Nations Unies.

A la Conférencede San Francisco, il ne fut pas question pour les
États participants d'imposer aux futurs Membres des Nations

Unies des obligations quelconques contre leur volonté. Ce que les
auteurs de la Charte avaient le droit de faire, et ce qu'ils ont fait
effectivement, c'était de disposer que l'une des conditions de l'ad-
mission comme Membre - qu'il s'agît des Membre: originaires ou
des États qui adhéreraient par la suite àla Charte - serait que les
déclarations existantes se rapportant à la disposition facultative
fussent maintenues conformément à leurs termes. Tous les Mem-
bres des Nations Unies, quelle que soit la date de leur admission,
devaient êtreplacés à ce point de vue sur un pied d'égalité.En
l'absence de disposition contraire expresse, l'égalité des droits et
des obligations est un trait fondamental de la Charte. Lé fait de
devenir Membre des Nations Unies et, par suite, partie au Statut
était un acte consensuel de choix volontaire. Mais c'était un acte

entraînant des conséquences automatiques au regard du para-
graphe 5 de l'article 36 - aussi bien qu'au regard des autres
obligations de la Charte.
Ces considérations sont particulièrement pertinentes si l'on
songe que les auteurs de la Charte attachaient une importance
particulière à l'emploi d'une terminologie exacte pour désigner les
entités auxquelles les dispositions de la Charte étaient destinées à
s'appliquer. Toutes lesfoisque cela a éténécessaire,on a pris grand
soin de distinguer entre les« Membres originaires » et les«Membres
signataires » d'une part et les «Membres des Nations Unies » de
l'autre. Par exemple, l'article 3 de la Charte contient une définition
des «Membres originaires ».L'article IIO (4) vise expressément à

la fois«les États signataires de la présente Charte» et les«Membres
originaires des Nations Unies ». L'article 107 vise un État «signa-
taire de la présente Charte »; l'articleIIO (1) vise encore «les
États signataires ))Il eût étéfacile aux rédacteurs du paragraphe 5- qui, soutient-on, étaient parfaitement au courant des réalités
de la situation - d'employer les mots «Membres originaires
des Nations Unies » ou (États signataires de la présente Charte D,
au lieu de ((partiesau présent Statut 1).Ils n'en ont rien fait.
La conclusion, qui n'a rien de forcé, est qu'ils ont jugé sans
pertinence ces prétendus faits. La Cour ne saurait spéculer sur la

question de savoir si les signataires de la Charte ont ou non prévu
la longue suite d'événements politiques qui a retardé l'admission
aux Nations Cnies d'un certain nombre d'États. Elle ne saurait
davantage, sous réserve de considérations touchant à l'application
raisonnable du Statut, s'engager dans des suppositions sur la durée
du délai que les signataires ont pu ou non considérer comme
approprié en la matière.
Les mots (parties au Statut )apparaissent constamment dans le
Statut - nous citerons simplemerit les articles 5 (1),35, 36 (z),37.
Tous ces articles se réfèrentà toutes les parties au Statut, à quelque

moment que ce soit. Il ne saurait être permis de les interpréter à
propos du paragraphe 5 de l'article 36 comme signifiant «les pré-
sentes parties au présent Statut ».On remarquera donc que, pour
admettre la thèse d'après laquelle l'application du paragraphe 5
se limite aux Membres originaires des Nations Unies, on serait
entraîné à une autre modification encore à la rédaction de cette
disposition. Elle entraînerait une modification substantielle du
texte du paragraphe 5 tel qu'il existe. Il faudrait modifier les mots
« dans les rapports entre parties au présent Statut » et lireà leur

place cdans les rapports entre les présentes parties au présent
Statut ». *

Sans doute, à l'inverse du cas des Membres originaires des
Nations Unies, l'application du paragraphe 5 aux Etats non
représentés à la Conférence ne pouvait être immédiate et auto-
matique. Cela ne signifiait pas que ces États fussent exclus de
son application. Cela signifiait que leurs déclarations ne seraient
transférées à la Cour internationale de Justice que le jour où ils

deviendraient parties au Statut. Le professeur Manley Hudson,
déjà cité dans un passage précédent de la présente opinion, a
attiré l'attention sur cet aspect de la question dans un article
datant du début de 1946. Il a souligné que «le nouveau para-
graphe 5 fut inséré pour préserverdans une certaine mesure la
juridiction de la Cour permanente au bénéficede la nouvelle
Cour 1).Après avoir cité les noms de onze Etats ayant déposé
leurs instriiments de ratification le 24 octobre 1945 et dont les
déclarations faites en vertu de l'article 36 étaient en vigueur, il
continuait: «Dans les rapports entre parties au Statut, c'est donc

à ces États que s'applique la disposition. D Il donnait ensuite les
noms de dix autres États ayant participé à la Conférence et aux
déclarations desquels «la disposition s'appliquera de même, àpartir de la date du dépôt de leurs instruments de ratification ».
Et il ajoutait: (Par ailleurs, les déclarations faites en vertu de
l'article36, par les États suivants, et qui étaient également en
vigueur le 24 octobre 1945, ne tomberont sous le coup de cette
disposition que s'ils deviennent qarties au nouveau Statut: Rul-
garie, Finlande, Irlande, Portugal, Siam, Suède et Suisse 1)(Ame-
rican Jaurnal of International Law, vol. 40, 1946, p. 34) - cette
phrase montre clairement qu'aux yeux de l'éminent auteur, ces
Etats devaient rentrer dans le domaine d'application du para-

graphe 5 dès qu'ils deviendraient parties au nouveau Statut.

Il est intéressant de noter ici une remarque faite à ce sujet
par le représentant de l'Australie au comité I de la com-
mission IV de la Conférence de San Francisco -- remarque qui,
à moins d'êtrelue attentivement, peut donner l'impression que,
dans une certaine mesure, elle vient à l'appui de l'opinion qu'on
avait entendu limiter l'application du paragraphe 5 aux Membres
originaires des Nations Unies. Son intervention dans la discussion

a été précédéepar celles des représentants du Canada et du
Royaume-Uni. Le premier, visant le projet de paragraphe 5, avait
dit: ((D'après le nouveau paragraphe cité ci-dessus, aussitôt que
les États signent la Charte, la grande majorité d'entre eux tombent
automatiquement sous la juridiction obligatoire de la Cour du
fait des déclarations encore en vigueur. ))(Docunzentsde la Conjé-
rence des Nations Unies sur l'organisation internationale, t. 13,
p. 258. Au dire du représentant du Royaume-Uni, environ (qua-
rante k tats deviendraient automatiquement soumis à la juridiction
obligatoire de la Cour ))(ibid., p.259). C'est alors que le repré-
sentant de l'Australie a indiqué une correction dans l'évaluation
du nombre des États qui seraient automatiquement liés par le

compromis résultant du paragraphe 5. Aux termes du compte
rendu du comité: ((11 attire l'attention sur le fait que non pas
quarante mais vingt États environ seront automatiquement liés
par suite du compromis. A cet égard, sur les cinquante et un
États, qui ont adhéré à la clause facultative, trois ont cesséd'être
des Etats indépendants, dix-sept ne sont pas <représentés à la
Conférence,et les déclarations d'une dizaine des Etats restant sont
venues à expiration ))(ibid., p.267). C'est à juste titre que cette
intervention a limité l'application automatique et immédiate du
paragraphe 5 aux États représentés à la Conférence et ratifiant
la Charte. Les déclarations des autres États devaient être trans-
féréesà la présente Cour dès qu'ils deviendraient parties au Statut.

Dans leur cas, il ne devait pas y avoir de transfert automatique
et immédiat des déclarations.
Il semblerait donc que, loin de jeter un doute sur l'applicabilité
du paragraphe 5 aux États non représentés à la Conférence, ses
56travaur; préparatoires confirment que ce paragraphe s'applique
à ces Etats dès qu'ils deviennent parties au Statut.
Cependant les procès-verbaux de la Conférence montrent plus
directement - d'une manière qui ne laisse aucune place au doute
- que l'application du paragraphe 5 de l'article 36 et, celle de
l'article 37 n'étaient pas destinées à être limitées aux Etats qui

ont pris part à la Conférence de San Francisco. Il suffit de citer
ici littéralement le texte complet du passage pertinent du rapport
du rapporteur du principal comité IV/I (Documents de la Con-
férencedes Nations Unies sur l'organisation internationale, vol. 13,
p. 419) .e texte de ce rapport se suffit à lui-même. A propos de
l'article 37, le rapporteur déclare :

((a) Il est stipulà l'article 37 du projet de Statut que seront
considéréesentre Membres de l'organisation, comme s'appliquant
à la Cour nouvelle les dispositions des traités ou conventions en
vigueur qui prévoient le renvoi de diflérends à l'ancienne Cour. ))

Cela montre que l'application de l'article 37 devait être auto-
matique ccentre Membres de l'organisation )),sans faire de dis-
tinction quant à la date de leur adhésion aux Nations Unies. Les

termes du rapport sont encore plus précis à propos du paragraphe 5
de l'article 36:
«b) Il est stipuléà l'alinéa4 [devenu par la suite alinéa 51 de
l'article 36 du mêmeprojet de Statut, que les déclarations,encore
en vigueur, faites sous l'empire de l'article 36 de l'ancien Statut
seront considéréese,ntre parties au nouveau Statut, commes'appli-
quant conformément àleurs termes à la compétence obligatoirede
la nouvelle Cour. 1)

Rien ne pourrait exprimer plus clairement l'intention d'appli-
quer le paragraphe 5 de l'article 36 (centre parties au nouveau
Statut »,ce qui ne peut avoir qu'une seule signification: les États
qui deviennent parties au nouveau Statut à quelque date qu ce soit.
Après avoir examiné de la sorte la position des Membres des
Nations Unies et des parties au Statut, le rapporteur continue en
ces termes :

(cc)On devrait également réglerde quelque manière les cas où
compétencea été attribuée à l'ancienne Cour pour connaître des
différendss'élevant, soit entre des États qui seront parties au
nouveau Statut et d'autres États, soit entre ces autres États. Il
semble désirable que des négociations soient entreprises afin
d'obtenir que ces acceptations de compétence s'appliquent à la
nouvelle Cour. Cette question ne saurait être régléeni par la
Charte ni par le Statut. Mais l'Assembléegénéralepourrait ulté-
rieurement se trouver en mesure de faciliter des négociations
utiles))

En conséquence, il ne semble pas qu'on puisse mettre en doute
que les seules acceptations au sujet desquelles il fût nécessaire
57 d'entreprendre des négociations et de procéder à des accords

-aient celles relatives à ((des différends s'élevant soit entre des
Etats qui seront part-s au nouveau Statut et d'autres Etats,
soit entre ces autres Etats )j.Aucune négociation, aucun accord
de ce genre n'était nécessaire à, propos des acceptations en cas
de différends,lorsque les deux Etats devaient devenir parties au
Statut. Vn Etat qui devenait partje au Statut cessait de faire
partie de ja catégorie des (autres Etats et aucune négociation
avec cet Etat n'était nécessaire. L'article 36, paragraphe 5, lui
devenait directement applicable.

Le rapport définitif, que nous venons de citer littéralement, est
-- à notre avis - concluant en la matière. Toutefois, il importe
pour mieux comprendre le problènr de donner quelques détails sui

l'historique de la rédaction de la disposition en question. En
particulier, il est utile d'attirer l'attention sur les rédactions
successives de l'article 37, qui était destiné à remplir un but général
analogue à celui du paragraphe 5 de l'article 36.
Le comité I de la commission IV, examinant le problème du
transfert àla présente Cour desdispositions des traitéset conventions
en vigueur relatives au renvoi à la Cour permanente, adopta tout
d'abord, le 7 juin 1945, le texte suivant de l'article 37:

((Lorsqu'un traité ou convention en vigueur entre les parties
à ce Statut prévoitle renvoi à une juridiction que devait instituer
la Société desNations, ou à la Cour permanente de Justice inter-
nationale crééepar leprotocole du 16 décembre 1920, amendéle
14 septembre 1929, l'affaire sera portée devant la Cour inter-
nationale de Justice. ))

Toutefois, sur la recommandation du comité consultatif de
juristes de la Conférence de San Francisco, le comité I adopta le
14 juin 1945 un texte revisé, qui constitue l'article 37 du présent
Statut et qui est ainsi conçu:

c(Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le
renvoi à une juridiction que devait instituer la Société desNations
ou à la Cour permanente de Justice internationale, la Cour inter-
nationale de Justice constituera cette juridiction entre les fiarties
au firésentStatut.))

Les considérations qui ont conduit à adopter la revision recom-
mandée sont exposéesau compte rendu du comité Idans les termes
suivants :
«Le comité consultatif de juristes, après avoir examiné l'ar-
ticle 37, recommande quelques modifications d'après lesquelles un
traité ou convention en vigueur qui prévoitle renvoi d'une question
à une juridiction instituée par la Sociétédes Nations ou à la Cour

58 permanente de Justice internationale devrait être interprétépar
les parties au présent Statut comme prévoyant ce renvoi à la
Cour internationale de Justice. L'article tel qu'il a d'abord été
approuvé par le comiténe prévoit cette interprétation que pour
d'avis qu'il serait opportun d'éliminercette restriction puisque
l'article37 du Statut s'applique maintenant à tous les traités; la
négociation d'un nouveau traité pour le renvoi d'une question à
la Cour sera donc inutile.))(Ibid.,p. 462.)

Ainsi, il était clair, en ce qui était des parties au Statut, que ni
négociations ni accords supplémentaires n'étaient nécessaires. Les
négociations en vue d'un accord qui avaient été considéréestout

d'abord comme indispensables en ce qui concernait l'objet de l'ar-
ticle 37 étaient rendues inutiles par l'adoption pour l'article 37d'une
formule - ((constituera ...entre les parties au présent Statut »
-qui étaitprécisémentla mêmeque celle qui figure dans l'article 36,
paragraphe 5,au sujet des déclarations d'acceptation en vigueur.
Tout cela confirme l'opinion d'après laquelle le paragraphe 5 de
l'article 36 était destiné s'appliquer à toutes les parties au Statut,
qu'il s'agit d'États signataires ou non signataires, sans qu'il fût
besoin de négociation en vue d'un accord spécial. Pour les deux
dispositions, le consentement nécessaire est apporté par le fait
que l'État intéressk accepte d'êtreMembre des Nations Unies -
ce qui le fait devenir partie au Statut - et qu'il skngage formelle-
ment à observer les obligations de la Charte dont le Statut est une
partie intégrante.

Le cas de la Thaïlande est directement pertinent à l'égard de
la question à l'examen, comme à l'égard du prétendu effet de la
dissoliition de la Cour permanente. Pour des raisons qui n'im-
portent pas ici, la Thaïlande n'a pas participé à la Conférencede
San Francisco. Le 3 mai 1940, elle a renouvelé sa déclaration
d'acceptation antérieure pour une période de dix ans. Elle n'est
devenue membre des Nations Unies que le 16 décembre 1946,
c'est-à-dire sept mois après la dissolution de la Cour permanente.
D'après la théorie qui exclut les États non participants de l'appli-
cation du paragraphe 5,la déclaration de la Thaïlande, faite en
1940 pour une durée de dix ans, serait devenue lettre morte à
la date de la dissolution de la Cour permanente, c'est-à-dire le

18 avril 1946. Tel n'a pas étél'avis de la Thaïlande. Elle s'est
considéréecomme liéepar sa déclaration de 1940. En conséquence,
elle n'a pas jugé nécessaire de prendre aucune disposition avant
l'expiration de toute la période de dix ans énoncéedans sa décla-
ration de 1940. A l'expiration de cette période, elle a renouvelé
son acceptation pour une nouvelle période de dix ans à partir du
3 mai 1950. D'après l'opinion qui limite l'application du para-graphe j aux Membres originaires des Sations LTnics,l'attitude
du Gouvernement de la Thaïlande procédait d'une conception
erronée de la situation juridique. Toutefois, cette attitude reposait
sur une opinion qui n'a pas étécontredite. Au surplus, il est
significatif que la mesure prise par la Thaïlande l'ait étéindépen-
damment de toute controverse en cours. ,C'est une attitude qui,

eu égard à l'absence d'une pratique des Etats différente, se rap-
portant directement à la matière, présente un intérêtparticulier.
Nous avons déjà mentionné l'analyse entreprise par le professeur
Hudson-et confirmant que la Thaïlande - ainsi que quelques
autrcs Etats qui n'étaient pas Membres originaires des Nat'ions
Unies - relevait du domaine des dispositions du paragraphe 5
de l'article 36.

A ce propos, il faut rappeler la théor-e qui soulève un important
problème d'interprétation - d'après laquelle on doit limiter l'objet

de l'article36, paragraphe 5, aux Membres originaires des Nations
Unies, en raison des réalitésen face desquelles se trouvaient les
Etats qui ont pris part à la Conférencede San Francisco et dont il
faut présumer qu'ils ont eu connaissance. On prétend qu'une limi-
tation en ce sens résulte implicitement de ce paragraphe pour le
motif que, si les Membres originaires pouvaient apprécierleurpropre
situation telle qu'elle existait à l'époque et leur attitude à venir
à l'égard de la juridiction obligatoire de la Cour, ils étaient
tout à fait incapables de le faire en ce qui concernait les Etats
pouvant adhérer à l'avenir.
Il nous est difficile de comprendre les conséquences que pourrait
avoir une incertitude quelconque sur la position de ces Etats dans

l'avenir en ce qyi concerne la continuation, sur un pied d'égalité
avec les autres Etats déclarants, de leurs obligations aux termes de
leurs déclarations d'acceptation. On remarquera qu'en vertu de
l'article93 de la Charte, ces Etats ne pouvaient ultérieurement
devenir parties au Statut sans le concours du Conseil de Sécurité
et de l'Assembléegénérale.
Sam doute, la tâche de l'interprète ne doit pas se limiter àdégager
le sens littéral du seul texte d'une disposition. Lorsqu'un traité
n'est pas clair, la Cour a le droit et le devoir de tenir compte des
circonstances qui ont accompagné son adoption. Néanmoins, nous
estimons qu'il ne rentre pas dans le domaine de l'interprétation de

rédiger à nouveau un traité en y insérant des conditions extérieures,
en invoquant des réalitésdont, prétend-on, les parties avaient pleine
connaissance et auxquelles elles étaient en mesiire de donner effet
par une rédaction de la plus grande concision si, en fait, telle avait
étéleur intention. Elles auraient pu le faire dans le cas actuel en
disant au paragraphe j, au lieu de «dans les rapports entre parties
au présent Statut ».(cdans les rapports entre les Membres origi-
60 INCIDENT .~ÉRIEN (OPIX. DISSIDEKTE COLLECTIVE)
184
naires des Nations Unies ». Elles n'en ont rien fait et, de toute
évidence, elles n'ont pas désiré le faire. Leur intention, ainsi qu'il
a été démontréau début de notre opinion, était de maintenir le
nombre maximum - et non pas mininium - de déclarations
existantes. Il est particulièrement légitime à ce propos d'attirer

l'attention sur le principe d'interprétation auquel la Cour a donné
une expression vigoureuse dans l'avis consultatif sur l'Acquisition
de la nationalité polonaise: ((Le devoir de la Cour est nettement
tracé. Placée en présence d'un texte dont la clarté ne laisse rien à
désirer, elle est tenue de l'appliquer tel qu'il est, sans qu'elle ait à
se demander si d'autres dispositions auraient pu lui êtreajoutées ou
substituées avec avantage. ))(C.P. J. I., Shie B, no 7, p. 20.)
Au surplus, en examinant de plus près les réalitésen question,
on s'aperçoit que le problème auquel les auteurs du Statut avaient,
dit-on, à faire face existaità peine. Quels étaient les États dont la
situation incertaineet les intentions dans un lointain avenir impo-
saientde lesécarterdu domaine du paragraphe 5 de l'article 3- non

pas par leprocédénormal d'uneexclusion directe, mais par la métho-
deindirecte du silence à propos d'une disposition par ailleurs conçue
en termes larges ? Le nombre de ces États était de neuf: la Bulgarie,
l'Estonie, la Finlande, l'Irlande, la Lettonje, le Portugal, la Suède,
la Suisse et la Thaïlande. Tous les autres Etats déclarants dont les
déclarations n'étaient pas expirées ont participé à la Conférence
de San Francisco et. par la suite, sont devenus Membres originaires
des Nations Unies. Quant aux neuf États énumérés plus haut, on
peut dire tout d'abord que leur position future sur la question
était sans pertinence si, contrairement à notre avis, la force obliga-
toire de leurs déclarations expirait en tout cas avec la dissolution
de la Cour permanente.

Toutefois, il est souhaitable d'examiner la prétendue incertitude
au sujet des neuf États mentionnés plus haut. En tout cas, pour
autant que la Cour dût en connaître judiciairement, la position de
l'Estonie et de la Lettonie ne posait pas de problème. Les déclara-
tions de l'Irlande, de la,Suède et de la Suiçse devaient expirer sous
peu et, en fait, expirèrent avant que ces Etats ne fussent devenus
parties au Statut de la Cour internationale de Justice. 11restait
donc trois États - la Bulgarie, le Portugal et la Thaïlande -.dont
la position à venir aurait pu donner lieu à une incertitude. En ce
qui est de ces Etats, tout risque d'adhésion prématuréeau Statut,
ou toute espèce d'incertitude, était pleinement prévu du fait que,
pour devenir parties au Statut, il leur fallait ou bien êtreadmis aux

Nations Unies, ou bien se confornier aux conditions fixéespar le
Conseil de Sécuritéet par l'Assembléegénérale, en application de
l'article93 (2)de la Charte. -4 notre avis, il n'y a pas de place pour
une interprétation qui modifie les termes du paragraphe 5 et réduit
ses effets par référence à des réalités d'une portéeaussi limitée. Ces considérations fournissent également une réponse à la théorie

- mentionnée par le conseil de la Bulgarie et confirmée par les
procès-verbaux de la Conférencede San Francisco - d-près laquelle
les rédacteurs de la Charte entendaient exclure les Etats ennemis
du bénéficede l'accès immédiat à la nouvelle Cour. Mais cette
intention n'était pas de suivre une politique d'ostracisme perma-
nent. Comme le montrent les ((dispositions transitoires de sécurité))
de l'article107 de la Charte, l'intention était d'empêcherles Etats
ex-ennemis de faire obstacle aux mesures se rapportant à la liqui-
dation de la guerre. A cette fin, il n'est pas nécessaire de soutenir
la thèse beaucoup plus large, et d'ailleurs inexacte, d'après laquelle

l'application du paragraphe j étaitdestinéeàselimiter aux Membres
originaires desKations Unies. Pour ce qui est de la Cour internatio-
nale de Justice, l'objet de l'exclusion des Etats ex-ennemis d'une
participation immédiate à la Cour était satisfait en posant que le
transfert des déclarations ne prendrait effet que dans les rapports
entre (parties au présent Statut » - condition qui ne pouvait être
remplie, le moment venu, sans le concours di1 Conseil de Sécurité
et de l'Assembléegénérale.Toute idée qui aurait été retenue en
1945 d'un ostracisme permanent des Etats ennemis s'est trouvée
dépassée lorsqu'en 1947 les demandes d'admission d'un certain

nombre d'entre eux ont étéexaminées par le Conseil de Sécuritéet
par l'Assemblée générale.A cette occasion, la raison avouée de
l'opposition de certains gopvernements à la demand~ de la Bulgarie
n'était pas qu'elle fût un Etat ex-ennemi mais, notamment, qu'elle
avait faillià remplir ses obligations, contractées en vertu du Traité
de paix de 1947, de respecter les droits de l'homme et les libertés
fondamentales. (Conseil des écuritéP, rocès-verbauxoficiels, deuxième
année, 1917, no 81, p. 2132.)

A ce propos, il faut mentionner la résolution 171 (II)adoptée par
l'Assemblée généralele 14 novembre 1947. Dans cette résolution
l'Assembléegénérale «attire l'attention des États qui n'ontpas encore
acceptéla juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice
conformément à l'article 36, paragraphes 2 et 5, du Statut de la
Cour, sur l'intérêtqu'il y a à ce que le plus grand nombre possible
d'États acceptent cette juridiction avec le moins de réservespossi-
ble »(Résolution171 (II)). Les mots soulignés (qui n'ont pas encore
accepté 1)sont particulièrement intéressants. Ils indiquent qu'en

novembre 1947, aux yeux de l'Assembléegénérale, l'effetdu para-
graphe 5 n'était pas encore épuisé; d'aprèscette opinion, le para-
graphe 5 pouvait encore s'appliquer dans une certaine mesure,
nonobstant la dissolution de la Cour permanente. En fait, la Thaï-
lande s'y est conformée lorsque le moment fut venu pour elle de
renouveler sa déclaration. On peut ajouter que cette partie de la
résolution est intéressante également en ce qu'elle s'adresse non pas
62aux Membres des Nations Unies ou aux États Membres, mais aux
Etats - ce qui indique qu'en cette matière les actes se référant
aux paragraphes 2 et 5 de l'article36 n'étaient pas limités aux
Membres originaires ou mêmeaux États alors Membres. Il ressort
clairement des termes de la résolution prise dans son ensemble,
ainsi que de la pratique généraledes Nations Unies, qu'on a apporté
un soin particulier au choix de la terminologie à ce sujet - à
savoir, indiquer si une résolution s'adresse à un État, à un État
Membre ou à un signataire.

Les considérations qui précèdent montrent qu'eu égard à sa
rédaction et à l'historique de son adoption aussi bien qu'aux
principes de droit international applicables, l'application du para-
graphe 5 de l'articl36 n'est pas limitée aux déclarations de ceux
des États qui avaient participé à la Conférenceet étaient devenus
parties au Statut lors de l'entrée en vigueur de la Charte, l24 oc-
tobre 1945. 11s'applique à toutes les déclarations faites en vertu
de l'article36 du Statut de la Cour permanente et dont le délai
ratione temporis, conformément à leurs propres termes, n'était pas
expiré.Il s'applique à toutes les déclarations qui,leur durée n'ayant
pas expiré par échéancedu terme, «are stilin force» au moment
où l'État déclarant devient de son plein gré partie au nouveau
Statut. C'est pourquoi nous estimons ne pouvoir nous rallier à
l'arrêtde la Cour en tant qu'il adopte l'opinion que le paragraphe5
de l'article36 s'applique uniquement aux Membres originaires des
Nations Unies et, par conséquent, ne s'applique pas à la déclaration

bulgare de 1921.

Pour les raisons que nous avons indiquées, il ne nous est pas
possible'd'accepter l'opinion que le paragraphe 5 de l'articl36 est
inapplicable à la Bulgarie. Nous ne pouvons accepter cette opinion
ni par référenceau motif, invoqué par la Bulgarie,que la dissolution
de la Cour permanente a définitivement et irrévocablement retiré
toute force de droit à sa déclaration de 1921, ni par référenceau
motif, non invoqué par la Bulgarie et non discuté par les Parties,
que le paragraphe 5 de l'article36 s'applique uniquement aux
Membres originairesdes Nations Unies. A notre avis, cette disposi-

tion du Statut s'applique clairement à la Bulgarie. En adhérant à
la Charte et en déclarant, en outre, formellement et expressément
son intention et sa détermination de respecter toutes les obligations
de la Charte - dont le Statut fait partie intégrant-, la Bulgarie
a donnéson consentement à la juridiction de la Cour, telle qu'elle
est confirméeet maintenue par cette disposition.
63 1-ajuridiction de la Cour se fonde sur le consentement des États.
Ce principe est trop fermement établi dans la jurisprudence de la
Cour et dans le droit international général pour qu'il soitbesoin de
le confirmer en invoquant les précédents, ou de quelque autre
manière. L'autorité des précédents n'est pas discutable. Au surplus

ces précédentssont tout à fait sans pertinence dans le cas actuel.
Le consentement nécessairea étédonnépar la Bulgarie lorsque, en
devenant Membre des Nations Unies, elle a accepté les obligations
de l'article36, paragraphe 5,en mêmetemps que les autres obliga-
tions résultant de *la Charte et du Statut. Nous ne prétendons
nullement qu'elle devrait, sans son consentement, êtreconsidérée
comme liéepar sa déclaration de 1921 à l'égard dela Cour inter-
nationale de Justice.
Si - comme telle est notre opinion en la présente affaire -
l'on considère que le paragraphe 5 de l'article 36, lorsqu'on l'inter-
prète conformément au sens ordinaire de ses termes et à son objet
évident, tel qu'il a étéentendu par ses auteurs, est applicable
à la Bulgarie, le consentement de celle-ci est établi directement

par son adhésion à la Charte. II n'était pas nécessaire que ce
consentement reçût encore une autre expression additionnelle.
Aucun consentement additionnel de ce genre n'était nécessaire au
regard des obligations nombreuses et plus importantesrésultant
de la Charte, par lesquelles la Bulgaries'est trouvée liéeen devenant
Membre des Nations Unies. Nous ne pouvons accepter l'opinion
d'après laquelle les obligations de soumettre les différendsau règle-
ment judiciaire sur la base du droitinternational sont si rigoureuses
et si exceptionnelles qu'elles requièrent un double consentement de
ce genre - en particulier à propos d'une disposition qui, loin de
créer une obligation nouvelle, soit quant au fond, soit quant à sa
durée, se limite au transfert à ce qui est essentiellement et indis-
cutablement un organe judiciaire identique, de déclarations exis-
tantes «pour la durée restant à courir d'après ces déclarations
et conformément à leurs termes 1).Il ne faut pas confondre le

sens et le but du paragraphe 5 de l'article 36 avecle paragraphe 2
du mêmearticle, qui incorpore le système de la disposition facul-
tative. Les deux paragraphes visent deux situations différentes. Le
paragraphe 5, qui maintient en vigueur les déclarations déjà faites,
opère automatiquement du fait que l'État déclarant devient partie
au Statut ;aucun consentement supplémentaire n'est nécessairedans
cecas. Leparagraphe 2exige un consentement expressément déclaré.
'. En conséquence, nous estimons qu'il est sans pertinence d'invo-
quer à ce propos le principe non contesté d'après lequel la juridic-
tion de la Cour doit invariablement se fonder sur le consentement
des parties et d'après lequel ce consentement ne saurait se présumer.
La nécessitédu consentement ne saurait dégénérer en négationdu
consentement ou, ce qui revient au même, enexigence d'un double
consentement, à savoir de la confirmation du consentement

déjà donné.
64 INCIDENT AÉRIEK (OPIN. DISSIDENTE COLLECTIVE) 188

Le comité de juristes de Washington, mentionné au début de la
présente opinion, a envisagé la nécessité d'assurer au moyen
d'une clause spéciale quelconque le maintien des déclarations
existantes. L'un de ses sous-comités a proposé que ((la Conférence
de San Francisco devrait prévoir un accord spécial pour maintenir
ces acceptations en vigueur aux finsdu présent Statnt »(Conférence
des Nations Unies sur l'organisation internationale, vol.14, p. 290).
A la Conférence de San Francisco, la disposition envisagée a pris

la forme du paragraphe 5 actuel de l'articl36.Il est difficiled'ima-
giner que, outre cette disposition, le paragraphe 5 ait envisagé la
nécessitéd'un accord supplémentaire et pliis spécifique.

Nous devons maintenant rechercher si, indépendamment de
l'interprétation des termes de l'article 36, paragraphe 5, il existe
quelque autre motif juridique faisant obstacle à son application
à la Bulgarie dans les circonstances ds la présente affaire. En parti-
culier, eu égard à certaines considérations qui sont à la base de
l'arrêtde la Cour, il est nécessaire de rechercher si cette disposition,

dont le sens en soi ne donne lieu à aucun doute, peut s'appliquer
d'une manière raisonnable. Peut-elle s'appliquer de cette manière
en ce qui concerne une requête soumise à la Cour douze ans après
l'entréeen vigueur de la Charte et onze ans aprèsla dissolutionde la
Cour permanente et l'établissement de la Cour internationale de
Justice? Dans quelle mesure est-il exact de soutenir que c'est le
caractère raisonnable qiu doit déterminer d'une manière décisive
l'interprétationà donner au paragraphe 5 de l'article 36, en ce sens
que si cette disposition n'était pas considéréecomme destinée à
s'appliquer aux seuls Membres originaires des Nations Unies, on
courrait le risque que d'autres parties éventuelles au Statut soient
à mêmede se prévaloir du paragraphe 5 à une date future dérai-
sonnablement éloignéede celle de l'établissement de la Cour inter-
nationale de Justice ?

En appliquant une disposition juridique, la Cour ne doit pas
ignorer les circonstances de fait pertinentes quant au critère du
caractère raisonnable. Ces faits, s'ils sont pertinents, peuvent
ruiner le recours introduit devant la Cour par le Gouvernement
demandeur, bien qu'il n'y ait rien dans le paragraphe 5 qui soit de
nature à faire échec à ce recours. Mais, à la suite d'une étude
approfondie, nous n'avons pu parvenir à la conclusion que pareilles
circonsta,nces aient un poids suffisant, en l'espèce, pour aboutir à
priver 1'Etat demandeur d'un recours auquel il aurait normalement
droit.
En ce qui concerne la durée d'application du paragraphe 5, il
semble résulter de cette disposition et des raisons qui ont motivé

65son ado~tion au'elle était destinée à être transitoire.sans aucun
doute, 1; notion même de transition contient une idée de limitation

dans le temps. Ainsi, il serait déraisonnable de prétendre que la
périodedetransition entrela Cour permanente et la Cour internatio-
nale doive durer cinquante ans. Cela serait aussi déraisonnable que
de prétendre qu'elle n'aurait dû durer que six mois, par exemple de
l'entrée en vigueur de la Charte en octobre 1945 à la dissolution
de la Cour permanente en avril 1946. La question relative à l'effet
de l'écoulement d'une période d'un demi-siècle peut être écartée,
car le caractère extravagant d'une réponse affirmative provient
dans une large mesure de l'exagération de la question même.

Il est conforme au principe et à la pratique éclairéed'appliquer
le critère du caractère raisonnable à l'interprétation des actes
internationau?; c'est un critère qui procède du devoir qu'ont
toujours les Etats d'agir de bonne foi. Toutefois, le critère du
caractère raisonnable doit lui-même s'appliquer d'une manière
raisonnable; il ne doit pas s'appliquer en invoquant des hypothèses
qui présentent elles-mêmes un caractère manifestement exagéré;

il ne doit pas s'appliquer en invoquant des exemples frisant l'ab-
surdité. Si un Etat invoque une disposition entièrement fondée
sur le traité douze ans après la date de son adoption, il est contraire
au véritable critère du caractère raisonnable de rejeter sademapde
pour le motif qu'il serait tout à fait déraisonnable que cet Etat
invorquât le traité cinquante ou cent ans après. Si la manière dont
un Etat invoque un traité dans un cas donné est raisonnable, il
est déraisonnable de suggérer que l'interprétation sur laquelle il
se fonde pourrait, dans des hypothèses extrêmes, aboutir à des
résultats déraisonnables. La Cour n'a pas àconnaître d'une situation
se présentant en 1995. Elle a à connaître d'une situation qui s'est
produite en 1957, lorsque Israël a invoqué la con~pétence de la
Cour. Cette situation est fixéepar l'entrée en vigueur de la Charte
et du Statut en 1945; par la demande d'admission aux Nations
Cnies formulée par la Bulgarie en 1947; par les déclarations
solennelles faites en 1948, et répétéespar la suite, par lesquelles
ce pays a accepté toutes les obligations de la Charte et du Statut;

et par son admission aux Nations Lnies en 1955. Il est vrai que
la déclaration bulgare de 1921 est maintenant la dernière décla-
ration à laquelle s'appliquent les dispositions de l'article 36,
paragraphe 5. Mais ce n'est pas une raison valable de refuser de
lui donner effet. Les périodes en question ne sont que de douze ans
à partir de l'entréeen vigueur de la Charte et de deux ans à partir
de l'admission de la Bulgarie comme Membre des Xations Unies.
La jurisprudence internationale - y compris celle de la Cour
elle-même - offre des exemples d'application de dispositions de
traités conclus dans un passé plus lointain.
A aucun moment le Gouvernement bulgare n'a soutenu que la
déclaration de 1921 avait échappé à son attention - bien qu'il

66ait expliqué qu'il eût jugé inutile de prendre des mesures pour se
libérer, le cas échéant, de l'application de la déclaration.

Il peut sembler à première vue singulier que la déclaration
bulgare de 1921, qui a cesséd'êtreapplicable à l'égard dela Cour
permanente de Justice internationale lors de la dissolution de
celle-ci, doive être considéréecomme ayant été
«still in force))
dix ans après l'entrée en vigueur de la Charte, lorsque la Bulgarie
est devenue Membre des Nations Unies et ipso facto partie au
Statut de la Cour internationale. Toutefois, le retard avec IequeI
elle a étéadmise résulte de circonstances extérieures. Eu égard
au véritable sens du membre de phrase « which are still in jorcD,
ce retard est sans pertinence quant à la question de l'applicabilité
de l'article 36, paragraphe 5. Il est clair que cette disposition
n'est soumise à aucune limite de temps. La Bulgarie a, pour la
première fois, demandé son admission en 1947. La situation
internationale a empêché qu'ellesoit admise plus tôt et a retardé
son accession à la qualité de partie ail nouveau Statut. C'est là

une cause extrinsèque qui ne saurait affecter la force de droit
de l'article 36, paragraphe 5. Si la Bulgarie était devenue Membre
des Nations Unies à la fin de 1946, en 1947 ou pême en 1950,
les dispositions transitoires énoncéesen termes clairs au para-
graphe 5 se seraient pleinement appliquées à ce pays. Nous recon-
naissons la possibilité de soutenir que, à partir de 1950, la tran-
sition pouvait êtreconsidérée commeterminée; qu'à cette date,
sauf les déclarations de durée indéterminée,pratiquement toutes
les déclarations visées par le paragraphe 5 étaient cadgques ou
avaient étéremplacées par de nouvelles déclarations; et qu'il ne
s'agissait plus d'assurer la continuité de la Cour permanente. Dans
cette mesure, on peut soutenir sans exagération évidente qu'il

est déraisonnable de remettre le paragraphe 5 en application
après cette période.
D'un autre côté, il importe de ne pas exagérer le caractère
déraisonnable de la solution contraire. Il n'y a rien de manifes-
tement déraisonnable en soi à invoquer en 1956 la déclaration
bulgare de 1921 - déclaration qui, en 1945, avait potentiellement
reçu un nouveau bail de vie dans le Statut de la Cour et qui a
étéconfirmée par le fait que la Bulgarie est entrée aux Nations
Unies en 1955 et qu'au cours des années précédentes elle avait
affirméà plusieurs reprises son intention d'êtreliéepar les obliga-
tions qui en résulteraient. Au surplus - considération qui semble

être importante pour cet aspect de l'affaire- il nous semble
inadmissible qu'un État soit privé des droits qu'il tient d'un acte
international pour le motif que son but a été atteint de manière
substantielle, quoique non complète. En ce qui concerne cet État,
c'est son intérêtdans cet acte qui en constitue le but principal.
67Peu importe à cet État - en l'espèce l'État demandeur - que
la plupart des autres parties ou toutes les autres parties en aient
déjà bénéficié ou s'en soient déjà prévalues. A moins que l'État
intéressén'ait fait preuve de négligence ou de mauvaise foi dans
l'exercice de ses droits, il est fondé à s'attendre à ce qu'il soit
donné effet au traité.

Pour des raisons analogues, il y a une objection évidente à

introduire dans l'interprétation du paragraphe 5 les facteurs
extrinsèques que sont la dissolution de la Cour permanente et la
limitation de ce paragraphe aux signataires originaires de la
Charte et à justifier cette interprétation en affirmant que ses
conséquences correspondent à tout ce que les auteurs du Statut
pouvaient raisonnablement espérer réaliser. A notre avis, ce à
quoi on pouvait raisonnablement s'attendre ressort de l'inter-
prétation du paragraphe 5 conformément à ses termes, sans y
ajouter des considérations extrinsèques. 11 est peu convaincant
de dire que l'interprétation ainsi adoptée en introduisant des
éléments extrinsèques n'a aujo-urd'hui pour résultat effectif que
d'exclure un petit nombre d'Etats - peut-être un seul - de
l'application de la disposition en question. On ne saurait négliger

le droit d'un Etat pour le motif que c'est celui d'un seul État.
Au surplus, ainsi que nous l'avons déjà dit, pour autant que les
rédacteurs du Statut aient pu le savoir, l'introduction dans le
paragraphe 5 de critères extrinsèques tels que la dissolution de
la Cour permanente, ou la nécessitéd'êtreMembre orig?naire des
Nations Unies, aurait pu affecter un grand nombre d'Etats.
Et surtout, en jugeant de la manière raisonnable ou non dont
un Etat invoque les termes d'un acte international, on ne doit
pas perdre de vue la nature du droit invoqué. C'est pour la Cour
une chose que de rejeter, sur la base du critère du caractère
raisonnable, une demande, de fond causant un tort injuste à des
intérêts importants de 1'Etat défendeur ou les mettant en péril
par usage abusif d'un droit; c'en est une autre que de rejeter,
sur la base du critère du caractère raisonnable, une demande

fondéesur un acte valable et tendant à ce que le principal organe
judiciaire des Nations Unies tranche un litige sur la base du droit
international. On ne doit pas considérer qu'un Etat agit à tort
si, se fondant- mêmed'une manière rigide - sur un acte valable,
il demande à la Cour de faire usage de sa compétence pour admi-
nistrer le droit internationaC'est seulement dans des circonstances
exceptionnelles qu'une demande fondée sur un traité valable et
visant l'exercice de la fonction principale de la Cour d'administrer
la justice sur la base du droit peut êtreconsidérée commedérai-
sonnable. Ces circonstances exceptionnelles peuvent comprendre

68l'application de la règle de la prescription extinctive après une
période d'inaction prolongée de la part de 1'Etat demandeur.
Aucun motif de cette sorte n'a étéinvoqué en l'espèce.
En matière de compétence, il est fondamental que seuls les
droits légitimesdes parties peuvent constituer la base de la décision
de la Cour. A cet égard, nous nous estimons tenus de nous rallier à
la jurisprudence passée de la Cour, laquelle, tout en reconnaissant
constamment un caractère décisif à l'élémentde consentement, a ap-

pliquéle critère du caractère raisonnable comme un motif d'affirmer
sa compétence, mais non de la décliner. Elle l'a fait, au début de
l'existence de la Cour permanente, lorsque, dans l'affaire des Conces-
sions Mavrommatis en Palestine, elle a estimé que sa compétence
n'était pas mise en échecpar le fait que la négociation prescrite par
le Mandat avait eu lieu entre un Gouvernement et la partie privée
intéresséeet non pas entre Gouvernements (C. P. J. I., SérieA,
no 2, pp. 13-15). Elle l'a fait à plusieurs reprises lorsqu'elle a
interprété le fait d'avoir consenti à sa compétence en vue de
dkcider s'il y avait violation d'une obligation internationale comme
constituant un consentement implicite à sa compétence en vue de

fixer une indemnité pour toute violation d'obligation internationale
(affaire relative à Certains intérêtsallemands en Haute-Silésie
fiolonaise,C. P. J. I., SérieA, no 7, pp. 23 et 25; affaire du Détroit
de Corfou, C. I.J. Recueil 1949, p. 26). Elle a fréquemment agi
de la mêmemanière lorsqu'elle a interprété l'attitude et l'argu-
mentation des parties comme constituant un consentement im-
plicite à sa compétence (Droits de minoritésen Haute-Silésiepolo-
naise, C. P. J. I., Série A, nP 15, pp. 23-24) Nous ne voyons
aucune raison pour que l'on s'écarte en la présente affaire de cette
pratique de la Cour.

Nous croyons nécessaire d'examiner une théorie qui, sans
que l'arrêt de la Cour en fasse état, n'en a pas moins pris une
certaine importance et qui porte sur l'interprétation du para-
graphe 5. On affirme que les termes du paragraphe j - ((pour la
durée restant à courir d'après ces déclarations ))- impliquent
que ce paragraphe vise uniquement les déclarations stipulant une
limite à la durée de leur validité et qu'il ne couvre par conséquent

pas les déclarations dont la durée, comme c'est le cas pour la
Bulgarie, n'est pas nettement limitée dans le temps. Bien que
cette thèse n'ait figuréni dans les plaidoiries ni dans les conclusions
de la Bulgarie, elle a trouvé quelque place dans ses exceptions
préliminaires écrites. Du point de vue de la pure logique concep-
tuelle - car c'est là la base de l'argument - la formule de la
fin du paragraphe, qui vient d'être citée, peut s'étendre aux

69déclarations de durée indéterminée, car, en bonne logique, celles-ci
ont encore à courir pour la période indéterminée de leur durée.
Il nous semble pourtant que ces mots ne peuvent avoir qu'un
sens, à savoir celui qui résulte du but évident qu'ils se proposent;
on ne saurait présumer qu'en prévoyant le transfert à la présente
Cour des déclarations existantes, le Statut aurait envisagé de les
faire continuer quelle que fût la période qui leur restait à counr.
Elles devaient être maintenues «pour la durée restant à courir
d'après ces déclarations et conformément à leurs termes ».Si l'on
avait eu l'intention d'exclure du domaine du paragraphe 5 les
déclarations de durée illimitée, cette intention aurait pu s'ex-
primer par l'addition à la fin du paragraphe d'une simple formule:
«la présente disposition ne s'applique pas aux déclarations qui

ne contiennent pas de limite de durée 1).
Il n'y a rien de plus à dire sur cet argument, si ce n'est pour
attirer l'attention sur ses conséquences.En 1945, il aurait eu pour
résultat de réduire de moitié le nombre des États viséspar ailleurs
par une disposition destinée à assurer le maintien de la juridiction
existante de la Cour. Il aurait éliminé lesdéclarations ne contenant
aucune clause de dénonciation, ainsi que les déclarations qui, tout
en ayant prévu originellement la possibilité d'une dénonciation,
s'étaient, conformément à leurs termes, transformées en déclara-
tions sans limite de durée. Ce dernier cas était celui des décla-
rations d'un grand nombre d'États, telles que celles du Royaume-
Uni et de l'Iran, qui, bien que faites initialement pour un nombre
fixe d'années, contenaient une clause d'après laquelle, après cette
période, elles devaient counr pour une durée illimitée, jusqu'à

leur dénonciation. Après l'expiration de la période initiale, la durée
de ces déclarations était indéterminée. D'après la théorie dont
nous traitons ici, elles auraient dû être considérées,elles aussi,
comme étant restées en dehors du domaine du paragraphe 5 et
comme s'étant par conséquent éteintes par suite de la dissolution
de la Cour permanente. Ainsi, la déclaration iranienne du 2 octobre
1930 avait été faite pour une durée de six ans et, à l'expiration
de ce délai, jusqu'à notification de son abrogation. Si l'inter-
prétation tendant à exclure les déclarations de durée illimitéedu
domaine du paragraphe 5 était exacte, la déclaration iranienne
n'était plus valable lorsque, le26 mai 1951, le Gouvernement du
Royaume-Uni a déposéauprès de la présente Cour une requête
invoquant ladite déclaration en l'affaire deJAnglo-Iranian Oil Co.

Pareil motif de nullité n'a éténi invoqué par le Gouvernement
iranien ni retenu par la Cour.
Au surplus, si elle avait étéadoptée par la Cour dans la présente
affaire, l'interprétation invoquée aurait eu pour résultat d'annuler,
à dater de l'arrêt de la Cour, les déclarations existantes d'un
certain nombre d'États - tels que la Colombie, Haïti, le Nicaragua
et l'Uruguay. Il est difficile de comprendre lratio legid'une telle disposition
exprimée de façon si inattendue par un détour verbal. Il est peu

probable que les auteurs du Statut aient profité de l'occasion
qu'ils avaient de maintenir la juridiction de la Cour pour libérer
quatorze Etats de ce qu'on a appelé le poids déraisonnable des
déclarations de durée illimitéeet pour réduire de moitiéle nombre
des déclarations qui, sans cela, eussent éténaturellement visées
par le paragraphe 5.
Il est à noter qu'écarter du domaine d'application du para-
graphe 5les déclarations qui, en leur forme ou en substance, sont
d'une durée illimitée, ainsi que celles des États qui n'ont pas
participé à la Conférence de San Francisco, aurait pour effet de
réduire à sept le nombre des déclarations viséespar ce paragraphe.
Il s'agirait des déclarations de l'Argentine, de la Belgique, de la
Bolivie, du Brésil, du Danemark, des Pays-Bas et de la Norvège.
Cela ne semble pas constituer une interprétation acceptable d'une
disposition destinéeà maintenir la juridiction de la Cour perma-
nente à titre de compromis substantiel entre la juridiction obliga-
toire et la juridiction volontaire de laCour.

Pour les raisons qui précèdent, nous sommes d'avis que la
première exception préliminaire de la Bulgarie doit être rejetée

et que la Cour aurait dû procéder à l'examen des autres exceptions
préliminaires et se prononcer sur celles-ci.

(Signé) Hersch LAUTERPACHT.
(Signé) WELLINGTON KOO.

(Signé) Percy C. SPENDER.

Bilingual Content

JOINT DISSENTING OPINION
BY JUDGES SIR HERSCH LAUTERPACHT,
WELLINGTON KOO AND SIR PERCY SPENDER

Paragraph 5 of Article 36 of the Statute of this Court provides as
follows :
cDeclarations made under Article 36 of the Statute of the
Permanent Court of International Justice and which are still in
forceshallbe deemed,as betweenthe parties to the present Statute,
to be acceptances of thecompulsoryjurisdiction ofthe International
Court ofJustice for the period which they still have to run and in
accordance withtheir terms."

On zgth July, 1921, Bulgaria accepted unconditionally for an
unlimited period the jurisdiction of the Permanent Court of Inter-
national Justice under Article 36, paragraph 2, of the Statute of
that Court. On 14th December, 1955, Bulgaria became a Member
of the United Nations and a party to the Statute of this Court.
According to paragraph 5 of Article 36, as cited above, the fol-

lowing two conditions must be fulfilled for the transfer to the
International Court of Justice of the declaration~~of acceptance
made with respect to the Permanent Court: (1) the declarant State
must become a party to the Statute of the International Court of
Justice; (2) its declaration must be "still in force", that is to Say,
the period for which it has been made must not have expired. By
virtue of these conditions the obligations of the Declaration made
by Bulgaria on 29th July, 1921, were transferred to the Inter-
national Court of Justice on 14th December, 1955, when she became
a party to the Statute of the International Court of Justice. On
that day, paragraph 5 became applicable to Bulgaria. We are of

the view that, so far as that provision is concerned, the Court,
contrary to the conclusions of the First Preliminary Objection of
the Government of Bulgaria, is competent to adjudicate upon the
application of the Government of Israel brought before the Court
in reliance upon its declaration of acceptance of 17th October, 1956.
To the express conditions, as stated, of paragraph 5 of Article 36
of the Statute, the present Judgment of the Court adds two further
conditions: (1)the declarant State must have participated in the
Conference of San Francisco; (2) the declarant State must have
become a party to the Statute of this Court prior to the date of the
dissolution of the Permanent Court, namely, prior to 18th April,

1946. As neither of these two conditions were fulfilled in the case
ofBulgaria the Court has held that the obligations of her Declaration
ofAcceptance made in 1921were not transferred to the International
Court of Justice when in 1955she became a party toits Statute and, OPINION DISSIDENTE COLLECTIVE
DE SIR HERSCH LAUTERPACHT, M. WELLINGTOK KOO
ET SIR PERCY SPENDER
[Traduction]

Le paragraphe 5 de l'article36 du Statut de la présente Cour
s'exprime comme suit :
Les déclarationsfaites en application de l'arti36edu Statut
de la Cour permanente de Justice internationale pour une durée
qui n'est pas encore expiréeseront considéréesd, ans les rapports
entre parties au présent Statut, comme comportant acceptation
de la juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice
pour la duréerestant à courir d'aprèsces déclarationset confor-
mément à leurs termes.»

Le 29 juille1921, la Bulgarie a accepté purement et simplement,
pour une durée illimitée, la juridiction de la Cour permanente de
Justice internationale, en vertu de l'article36,paragraphe 2, du
Statut de celle-ci. Le 14 décembre 1955, la Bulgarie est devenue
Membre des Nations Unies et partie au Statut de la présente Cour.
Conformément au paragraphe 5 de l'article36, tel qu'il est cité
plus haut, les deux conditions suivantes doivent être remplies
pour que les déclarations d'acceptation se référant à la Cour per-
manente soient transférées à la Cour internationale de Justice: 1)
1'Etat déclarant doit devenir partie au Statut de la Cour inter-
nationale de Justice; 2) sa déclaration doit être (still inforce»,
c'est-à-dire que la durée pour laquelle elle a été faite doit n'être
pas expirée. Du fait de ces conditions, les obligations résultant de
la déclaration faitepara Bulgarie l29 juille1921 ontététransférées
à la Cour internationale de Justice le 14 décembre 1955, lorsque
ce pays est devenu partie au Statut de la Cour internationale de
Justice. Ce jour-là, le paragraphe 5 est devenu applicable à la
Bulgarie. ,4 notre avis, au regard de cette disposition, la Cour,

contrairement aux conclusions de la premièreexception préliminaire
du Gouvernement de la Bulgarie, est compétente pour statuer sur
la requête présentée à la Cour par le Gouvernement d'Israël, en se
fondant sur sa déclaration d'acceptation du 17 octobre 1956.
Aux conditions expresses, énoncéesplus haut, du paragraphe 5
de l'article36 du Statut,, le présent arrêt de la Cour ajoute deux
autres conditions: 1) 1'Etat déclarant doit avoir participé à la
Conférencede San Francisco; 2)1'Etat déclarant doit êtredevenu
partie au Statut de la présente Cour avant la date de la dissolution
de la Cour permanente, à savoir avant le 18 avril 1946. Ni l'une
ni l'autre de ces deux conditions n'ayant étéremplies dans le cas
de la Bulgarie, la Cour a jugé que les obligations résultant de la
déclaration d'acceptation faite par elle en921 n'ont pas été trans-
férées à la Cour internationale de Justice lorsque la Bulgarie est

33therefore, that the Court has no jurisdiction by reference to that
declaration. We regret that we are compelled to dissent from the
Judgment of the Court based on a text of an article of the Statute
thus amended and amplified.

The First Preliminary Objection ofthe Government of Bulgaria as
advanced in the written Preliminary Objections and during the
oral hearing is based exclusively on the contention that the Bul-
garian Declaration of Acceptance of 1921 had finally and irrevo-
cably lapsed on 18th April, 1946, namely, on the date of the dis-
solution of the Permanent Court of International Justice, and that
it cannot therefore accurately be maintained that it was "still in
force" when Bulgaria became a party to the Statute by virtue of
her admission to the United Xations.

The principal argument put fonvard in this connection by the
Government of Bulgaria and admitted by the Court was that, asthe
Bulgarian Declaration of Acceptance of 1921 was indissolubly
linked with the Statute of the Permanent Court, it ceased to exist

with the dissolution of that Court on 18th April, 1946, unless prior
tothat date the declaring State had become a party to the Statute
of the International Court of Justice. According to that contention
the words "which are still in force" were intended to cover not the
question of the expiration of the time for which the Declaration
was made but an altogether different matter, namely, the contin-
gency of the dissolution of the Permanent Court. On that inter-
pretation the declarations of States which became parties to the
Statute subsequent to 18th April, 1946, ceased to be in force with
the result that subsequent to that date they were no longer covered
by paragraph 5 of Article 36. It is by reference to these asserted
effects of the dissolution of the Permanent Court that the Govern-
ment of Bulearia has advanced the contention that the words
"which are Zill in force" do not possess the meaning normally
attributed to them in relation to the validity of international
undertakings. Ordinarily these. words refer to instruments which
have not come to an end in consequence of either denunciation or

termination as the result of the lapse of the period provided in the
instrument.
Upon that text of paragraph 5 of Article 36 the principal conten-
tion of the Government of Bulgaria engrafted a new text. The
Govemment of Bulgaria contended, in effect, that the Court must
omit from the text of Article 36, paragraph 5, the words "which
are still in force" and re~lace them bv other words. It was contended
that the Court must ;ead the relkant part of Article 36, para-
graph 5, as follows: "Declarations made under Article 36 of the
Statute of the Permanent Court shall be deemed as between thedevenue partie au Statut de celle-ci en 1955 et que, par conséquent,
la Cour est sans compétence aux termes de cette déclaration. Nous
regrettons de ne pouvoir nous rallier à l'arrêt de la Cour fondé

sur le texte d'un article du Statut ainsi amendé et élargi.

La première exception préliminaire du Gouvernement de la
Bulgarie, telle qu'elle a étéénoncéedans les exceptions préliminaires
écriteset au cours de la procédure orale, se fonde exclusivement sur
la thèse d'après laquelle la déclaration d'acceptation bulgare de
1921 serait définitivement et irrévocablement devenue caduque le

18 avril 1946, c'est-à-dire à la date où la Cour permanente de Justice
internationale a étédissoute, et que par conséquent on ne pourrait
légitimement soutenir qu'elle était (stillin force))(encoreenvigueur)
quand la Bulgarie est devenue partie au Statut en vertu de son
admission aux Nations Unies.
Le principal argument invoqué à ce propos par le Gouvernement
de la Bulgarie et admis par la Cour est que la déclaration d'accep-
tation bulgare de 1921, étant indissolublement rattachée au Statut

de la Cour permanente, a cesséd'exister lors de la dissolution de
cette Cour le 18 avril 1946, à moins qu'avant cette date l'État
déclarant ne soit devenu partie au Statut de la Cour internationale
de Justice. D'après cette thèse, les mots !(which are still in force »
étaient destinés à viser non pas la question de l'expiration de la
durée pour laquelle la déclaration avait été faite,mais une question
toute différente, à savoir l'éventualité de la dissolution de la Cour
permanente. Suivant cette interprétation, les déclarations des États

qui sont devenus parties au Statut après le 18 avril 1946 avaient
cesséd'êtreen vigueur, avec pour conséquence qu'après cette date
elles ne rentraient plus dans le domaine d'application du paragra-
phe 5de l'article36. C'est en se référantaux effets ainsi énoncésde
la dissolution de la Cour permanente que le Gouvernement de la
Bulgarie a prétendu que les mots ((which are still in force 1)n'ont
pas le sens qui leur est normalement attribué àpropos delavalidité
des engagements internationaux. D'ordinaire, ces mots s'appliquent

à des instruments qui ne sont pas arrivés à expiration en vertu soit
d'une dénonciation, soit de la caducité résultant de l'échéancedu
terme prévu dans l'instrument.

Sur ce texte du paragraphe 5 de l'article 36, la thèse principale
du Gouvernement de la Bulgarie a greffé un texte nouveau. Le
Gouvernement de la Bulgarie a soutenu en fait que la Cour devait
omettre du texte de l'article 36, paragraphe 5,les mots ((which are

still in. force)(pour une durée qui n'est pas encore expirée) et les
remplacer par d'autres mots. Il a été soutenu que la Cour devait
lire le passage pertinent de l'article 36, paragraphe 5, de la manière
suivante: ((Les déclarations faites en application de l'article 36 duparties to the present Statute who have become parties thereto
prior to the dissolution of that Court to be acceptances of the
compulsory jurisdiction of the International Court ofJustice ..."We

are unable to accept that emendation of a clear provision of the
Statute. We are unable to do so for two reasons: The first is that the
interpretation thus advanced is contrary to the clear terms of para-
graph 5 ;the second is that that interpretation is contrary to the
manifest purpose of that provision. We will now examine separately
these two aspects of the interpretation of paragraph 5.

The essential issue arising out of the First Preliminary Objection
of Bulgaria is whether the Bulgarian Declaration of 29th July, 1921,
accepting the compulsory jurisdiction of the Permanent Court of
International Justice is still valid and in force in the sense of
Article 36, paragraph 5, of the Statute of this Court. The issue is
one of determining the true meaning of that paragraph, both in its
own context and in that of the Statute and the Charter of the

United Nations.
While the conclusions of the present Opinion are based on the
text of Article 36, paragraph 5, it is useful to give an account, by
reference to the avowed Rurpose of that provision, of the historical
background of the creation of the International Court of Justice.
Although the establishment of the International Court of Justice
and the dissolution of the Permanent Court were two separate acts,
they were closely linked by the common intention to ensure, as far
aspossible, the continuity of administration of international justice.
In its Resolution of April 18th, 1946, the Assembly of the League
of Nations made express reference to Article 92 of the Charter of
the United Nations providing for the creation of an International
Court of Justice as the principal judicial organ of the United
Nations and to the Resolution of the Preparatory Commission of
the United Nations of December 18th, 1945, which declared that it
would welcome the taking of appropriate steps by the League of
Nations for the purpose of dissolving the Permanent Court.

The dissolution of the Permanent Court was not an ordinary
act of liquidation whereby everything connected with that Court
disappeared as a consequence of the termination of its existence.
While various considerations urged the dissolution of the Perma-
nent Court and the creation of the International Court of Justice,
there was general agreement as to the substantial identity of these
two organs. In particular, every effort was made to secure conti-
nuity in the administration of international justice. In the Resolu-
tion adopted by the Permanent Court at its final session at The
Hague at the end of October 1945, it is stated: "The PermanentStatut de la Cour permanente seront considérées,dans les rapports
entre parties au présent Statut qui en seront devenues parties avant
la dissolution de cette Cour, comme comportant acceptation de la
juridiction obligatoire de laCour internationale de Justice. »Nous
ne pouvons accepter cet amendement d'une disposition claire du
Statut, et cela pour deux raisons:la première est queI'interprétation
ainsi invoquée est contraire aux termes clairs du paragraphe 5;la
deuxième est que cette interprétation est contraire au but manifeste
de cette disposition. Nous examineronsséparément ces deux aspects
de l'interprétation du paragraphe 5.

La question essentielle poséepar la première exception prélimi-
naire de la Bulgarie est de savoir si la déclaration bulgare du 29
juillet1921, acceptant la juridiction obligatoire de la Cour perma-
nente de Justice internationale, est toujours valable et en vigueur,
au sens de l'articl36, paragraphe 5, du Statut de la présente Cour.
Il s'agit de déterminer le véritable sens de ce paragraphe, à la fois
dans son propre contexte et dans celui du Statut et de la Charte
des Nations Unies.

Bien que les conclusions de la présente opinion se fondent sur
le texte de l'article36, paragraphe 5, il est utile de rappeler,par
référenceau but avoué de cette disposition, l'origine historique de
la création de la Cour internationale de Justice.
Quoique l'établissement de la Cour internationale de Justice
et la dissolutionde la Cour permanente fussent deux actes distincts,
ils étaient étroitement liésl'un à l'autre par l'intention commune
d'assurer, autant que possible, la continuité de l'administration de
la justice internationale. Par sa résolution du 18 avril 1946,
l'Assemblée de la Société desNations s'est expressément référée
à l'article92 de la Charte des Nations Unies, qui prévoit la création
d'une Cour internationale de Justice comme organe judiciaire
principal des Nations Unies, et à la résolution de la Commission
préparatoire des Nations Unies du 18 décembre 1945, déclarant
qu'elle accueillerait avec faveur les mesures appropriées que la
Société desNations pourrait prendre en vue de la dissolution de
la Cour permanente de Justice internationale.
La dissolution de la Cour permanente n'était pas un acte de
liquidation ordinaire, ayant pour effet de faire disparaître tout ce
qui se rapportait à cette Cour, par suite de la disparition de celle-ci.
Tandis que différentes considérations poussaient à la dissolution
de la Cour permanente et à la création de la Cour internationale
de Justice, on était généralement d'accord sur l'identité de fond
de ces deux organes. En particulier, tous les efforts ont été faits
pour assurer la continuité de l'administration de la justice inter-

nationale. La résolution adoptée par la Cour permanente à sa
séance de clôture, tenue à La Haye à la fin d'octobre 1945, déclare:Court of International Justice attaches the greatest importance to

the principle of continuity in the administration of international
justice. Accordingly, it desires to do everything possible to facilitate
the inauguration of the International Court of Justice, which was
referred to at the San Francisco Conference as the 'successor' to
the present Court." (I.C.J. Yearbook, 1946-1947, p. 26.) It is not
withoiit significance that the International Court of Justice was
inaugurated at The Hague on April18th, 1946-one day before the
Resolution of the League of Nations dissolving the Permanent
Court took effect. Previously, the Report of Committee I of Com-
mission IV on Judicial Organization of the Conference of San
Francisco had stated as follows:

"The creation of the new Court will not break the chain of conti-
nuity with the past. Not only will the Statute of the new Court be
based upon the Statute of the old Court but this fact will be ex-
pressly set down in the Charter. In general, the new Court will
have the same organization asthe old,and the provisionsconcerning
its jurisdiction will follow very closely those in the old Statut...
To make possible the use of precedents under the old Statute, the
sarne numbering of the Articles has been followed in the new
Statute.
In a sense, therefore, the new Court may be looked upon as the
successorto the old Court which is replaced. The succession will be
explicitly contemplated in some of the provisions of the new
Statute, notably in Article 36, paragraph 4 [which subsequently
became paragraph 52,and Article 37." (United Nations Con.ference
on International Organization, Documents, Vol. 13, p. 354.)

The passage quoted shows clearly that, although certain consider-
ations called for the creation of a new Court, that Court was to
be in substance a continuation of the Permanent Court. The forma1
and, in effect, insignificant changes in the Statute of the new Court
were not to be permitted to stand in the way of the then existing
compulsory jurisdiction of the Permanent Court being taken over

by the International Court. It was specifically contemplated that
the continuity of the two Courts should be given expression by
recognizing the continuity of the compulsory jurisdiction at that
time existing. It would have been difficult to use more specific
terms : "The succession will be expressly contemplated.. ."

In fact, a study of the records of the Conference shows that the
determination to secure the continuity of the two Courts was
closely linked with the question of the compulsory jurisdiction of
the new Court in a manner which is directly relevant to the inter-
pretation of paragraph 5 of Article 36.
With regard to the question of the jurisdiction of the new Court,
the discussions in both the Washington Committee of Jurists and

36 cLa Cour permanente de Justice internationale attache la plus
grande importance au principe de la continuité dans I'administra-
tion de la justice internationale. Aussi désire-t-elle, dans toute la
mesure du possible, faciliterl'inauguration de la Cour internationale
de Justice, organisme qui, à la Conférence de San Francisco, a
C. J. Yearbook,
été qualifié de ((successeur de la Cour ».» (1.
1946-1947, p. 26.) Il n'est pas sans signification que la Cour inter-
nationale de Justice ait étéinaugurée à La Haye le 18 avril 1946
- un jour avant que la résolution de la Sociétédes Nations
portant dissolution de la Cour permanente ait pris effet. Le rapport
du comité I de la commission IV de la Conférence de San Fran-
cisco sur l'organe judiciaire avait antérieurement déclaré ce
qui suit :

« La constitution d'une nouvelle Cour n'interrompra pas la
continuité avec le passé. Non seulement le Statut de cette Cour
aura pour base celui de l'ancienne, mais encore ce fait sera
expressément mentionné dans la Charte. D'une manière générale
la Cour nouvelle sera dotée de la mêmeorganisation que l'an-
cienne, et les dispositions relativesà sa compétencesuivront de
très près celles de l'ancien Stat...Les articles du nouveau Statut
porteront les mêmesnuméros que les articles correspondants de
l'ancien, ce qui facilitera le recours aux précédents établis sous
l'empire de ce dernier.
Dans un certain sens, par conséquent, la nouvelle Cour doit
êtreconsidéréecomme le successeur de celle qu'elle remplacera.
Le nouveau Statut y fera explicitement allusion, notamment dans
ses articles 36, alinéa 4 [devenu par la suite alinéa 51, et 37. »
(Documents de la Conférencedes Nations Unies sur l'organisation
internationale,t. 13, pp. 418-419.)

Le passage citémontre clairement que si certaines considérations
appelaient la création d'une nouvelle Cour, celle-ci devait être,au
fond, une continuation de la Cour permanente. 11 ne fallait pas
que les modifications formelles et, en fait, insignifiantes apbortées
par le Statut de la nouvelle Cour pussent faire obstacle à la reprise
par la Cour internationale de la juridiction obligatoire, telle qu'elle
existait alors, de la Cour permanente. On envisageait précisément
que la continuité des deux Cours trouverait son expression dans
la reconnaissance de la continuité de la juridiction obligatoire
telle qu'elle existait alors.1eût étédifficile d'employer des termes
plus nets que ceux-ci: (Le nouveau Statut y [à cette succession]

fera explicitement allusion.. . »
En fait, l'étude des procès-verbaux de la Conférence montre.
que la volonté d'assurer la continuité des deux Cours se rattachait.
étroitement à la question de la juridiction obligatoire de la nouvelle
Cour d'une manière directement pertinente pour l'interprétation
du paragraphe 5 de l'article 36.
La discussion au sein du comité de juristes de Washington et
du comité I de la commission IV de la Conférence de San Fran-Committee I of Commission IV of the San Francisco Conference
had disclosed a preponderance of sentiment in favour of compulsory
jurisdiction. The Committee of Jurists, considering the question of
compulsory jurisdiction to be of a political character, took no
decision on the subject. Instead, in its final report it presented
alternative texts-one leaving the acceptance of compulsory juris-
diction over legal disputes to a free decision of each State which is a
party to the Statute; the other providing for the immediate accep-
tance of such compulsory jurisdiction by al1parties to the Statute.

At San Francisco, the First Committee of Commission IV had
these two texts before it, as well as some other proposals. These
proposals were, subject to some variations, al1 in favour of com-
pulsory jurisdiction of the New Court. The prolonged debate which
took place showed the existence of a preponderant volume ofsupport
for the immediate recognition, throughout the membership of the
new international organization, of the principle of the compulsory
jurisdiction of the Court. The United Kingdom representative urged

the adoption of a compromise between the advocates and the
opponents of the principle of compulsory jurisdiction to be incor-
porated into the Statute. He stated: "If the Committee decides to
retain the optional clause, it could provide for the continuing
validity of existing adherences to it." A Sub-Committee was
created to "seek an acceptable formula". It presented the existing
text of paragraph 5 of Article 36 of the Statute.
In fact, the two questions-the continuity of the existing com-
pulsory jurisdiction as provided in paragraph 5 of Article 36 (as well
as in Article 37) and the general question of compulsory juris-
diction-were treated as two aspects of the same wider question
at the same meetings, in the same speeches, in the same reports.
This is clearly shown in the documents containing the Reports of
the Seventeenth Meeting of Committee IV/I (Documents of the
Conference,Vol. 13, pp. 246-250) and, in particular, in the Report
of the Sub-Committee of Committee IV/I on Article 36 (pp. 557-559).

It is thus clear that the purpose of paragraph 5 was to provide
"for the continuing validity of the existing adherences" to the
Optional Clause. Far from contemplating that any of the then
existing declarations of acceptance should disappear with the
dissolution of the Permanent Court, the authors of paragraph 5
had in mind the maintenance of the entire group of declarations of
acceptance which were still in force and in accordance with their
terms, irrespective of the dissolution of the Permanent Court.
That purpose was expressed in the widest possible terms intended
to eliminate any real or apparent legal difficulties: "They [the
Declarations] shall be deemed, as between the parties to the present
Statute, to be acceptances of the compulsory jurisdiction of the
International Court of Justice." Neither, as will be shown later in

37cisco, sur la question de la juridiction de la nouvelle Cour, avait
révéléque la tendance prépondérante était en faveur de la juri-
diction obligatoire. Le comité de juristes, considérant que la
question de la juridiction obligatoire présentait un caractère

politique, n'a pas pris de décision à ce sujet. Mais, dans son rapport
définitif,il a présentéun choix de textes - l'un laissant I'accepta-
tion de la juridiction obligatoire en matière de différends d'ordre
juridique à la libre décision de chaque État partie au Statut,
l'autre prévoyant l'acceptation immédiate de cette juridiction
obligatoire par toutes les parties au Statut.
A San Francisco, le comité I de la commission IV était saisi
de ces deux textes, ainsi que de quelques autres propositions.
Sous réserve de quelques variantes, ces propositions étaient toutes
en faveur de la juridiction obligatoire de la nouvelle Cour. Les

longs débats qui ont eu lieu ont montré l'existence d'un courant
prépondérant à l'appui de la reconnaissance immédiate, par
l'ensemble des membres de la nouvelle organisation internationale,
du principe de la juridiction obligatoire de la Cour. Le représentant
du Royaume-Uni poussait à l'adoption d'un compromis à intro-
duire dans le Statut entre les tenants de la juridiction obligatoire
et ses adversaires. Il a déclaré: (Si le comité décidede conserver
la clause facultative, il pourrait prévoir la prolongation de la
validité des adhésions actuelles. 1Un sous-comité a été (chargé de
rechercher une formule acceptable 1).Ce sous-comité a présenté le

texte actuel du paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.
En fait, aux mêmes séances,dans les mêmes discours, dans les
mêmesrapports on a traité les deux questions - la prolongation
de la juridiction obligatoire existante, dans les termes prévus au
paragraphe 5 de I'article 36 (ainsi qu'à l'article 37)) et la question
généralede la juridiction obligatoire - comme deux aspects d'une
même question plus large. Cela reçsort clairement des documents
contenant les comptes rendus de la dix-septième séance du
comité IV/I (Documents de La Conférence,t. 13, pp. 256-260, et
en particulier du compte rendu du sous-comité sur l'article 36

du comité IV/I, pp. 562-564).
II est donc clair que le but du paragraphe 5 était de prévoir
((la prolongation de la validité des adhésions actuelles )à la dispo-
sition facultative. Loin de penser qu'une quelconque des déclara-
tionsd'acceptation existant alors dût disparaître à la dissolution de
la Cour permanente, les auteurs du paragraphe 5 envisageaient le
maintien du groupe tout entier des déclarations d'acceptation qui
n'étaient pas encore expirées et conformément à leurs termes,
sans tenir compte de la dissolution de la Cour permanente. Cette

intention s'exprimait dans les termes les plus larges possibles,
destinés à éliminer toute difficulté juridique réelle ou apparente:
« les déclarations .. seront considérées,dans les rapports entre
parties au présent Statut, comme comportant acceptation de la
juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice 1).Et,the present Opinion, is there any evidence to suggest that the
intention of the authors of paragraph 5 was to limit its operation
to States which participated in the Conference of San Francisco
and which became the original Members of the United Nations as

defined in Article 3 of the Charter. It is legitimate to hold that the
result of the compromise reached at the Conference and embodied
in paragraph 5 should not be whittled down by way of inter-
pretation of the clear and unqualified text of paragraph 5 of
Article 36 of the Statute.

We will now, in the first instance, examine as a matter of inter-
pretation-both in themselves and in their context-the relevant
words of paragraph 5 of Article 36 in relation to the contention of
Bulgaria that the words "which are still in force" in paragraph 5
refer to the existence of the Permanent Court and do not therefore
apply to Bulgaria's Declaration which, it is asserted, ceased to
exist with the dissolution of the Permanent Court. It will be shown
later in this Opinion that the maintenance or severance of the
connection between the Declaration and the existence of the Per-
manent Court is irrelevant having regard to the clear object of
paragraph 5. We are at present concerned with the interpretation
of the terms in question as such. We consider that the words
"which are still in force", when read in the context of the whole
paragraph, can only mean, and are intended to mean, the exclusion
of some fourteen declarations of acceptance of the compulsory
jurisdiction of the Permanent Court which had already expired and
the inclusion, irrespective of the continuance or dissolution of the

Permanent Court, of al1the declarations the duration of which has
not expired. At the Conference of San Francisco there were present
a number of States that had in the past made Declarations of
Acceptance which, not having been renewed, had lapsed and were
therefore no longer in force. This applied, for instance, to theDe-
clarations of China, Egypt, Ethiopia, France, Greece, Peru, Turkey
and Yugoslavia. It was clearly necessary, byinserting the expression
"whicli are still in force", tolude those States from the operation
of paragraph 5. That interpretation is supported by the French
text which is as authoritative as the English text and which is even
more clear and indisputable than the latter. The words "pour une
durée qztin'est$as encoreexpirée"(for a duration which has not yet
expired) must be regarded as deterrnining the true meaning of the
English text in question. The fact that the Chinese, Russian and
Spanish texts of that paragraph approximate to the English text
does not invalidate or weaken the obvious meaning of the French
text. Those three texts were translated from the English version,
whereas the French text was that of one of the two official working
languages adopted at the San Francisco Conference. However, while

38comme on le verra plus loin dans la présente opinion, il n'y a
aucune preuve indiquant que l'intention des auteurs du para-
graphe 5 fût d'en limiter l'application aux Etats ayant participé
à la Conférence de San Francisco et devenus Membres originaires
des Nations Unies. tels au'ils sont définisà l'article de la Charte.
Il est légitime de' soutenir que le résultat du compromis réalisé
à la Conférenceet incorporé dans le paragraphe 5 ne saurait être
amenuisé par voie d'interprétation du texte clair et sans réserve
du paragraphe 5 de l'article 36 du Statut.

Nous examinerous tout d'abord en les interprétant - aussi
bien en eux-mêmes que dans leur contexte - les termes per-
tinents de l'article 36, paragraphe 5, eu égard à la thèse de
la Bulgarie d'après laquelle les mots (which are still in force ))
contenus dans ce paragraphe 5 se réfèrent à l'existence de la
Cour permanente et ne s'appliquent par conséquent pas à la
déclaration de la Bulgarie qui, a-t-on fait valoir, a cesséd'exister
à la dissolution de la Cour permanente. Nous montrerons dans la
suite de la présente opinion que le maintien ou la rupture du
lien entre la déclaration et l'existence de la Cour permanente
est sans pertinence étant donné l'objet clair du. paragraphe 5.
Nous traiterons à présent de l'interprétation des termes en question
en tant que tels. Nous considérons que les mots ccwhich are still

in force »,lorsqu'on les prend dans le contexte de l'ensemble du
paragraphe, peuvent uniquement signifier, et sont destinés à
signifier, que sont exclues quelque quatorze déclarations d'accep-
tation de la juridiction obligatoire de la Cour permanente déjà
expirées et que sont inclues, indépendamment de la continuation
ou de la dissolution de la Cour permanente, toutes les déclarations
dont la durée n'est pas expirée. A la Conférencede San Francisco
étaient présents un certain nombre d'États qui avaient dans le
passé fait des déclarations d'acceptation qui, faute d'avoir été
renouvelées,étaient devenues caduques et n'étaient par conséquent
plus en vigueur. Tel était, par exemple, le cas des déclarations de
la Chine, de l'Égypte, de l'Éthiopie, de la France, de la Grèce,
du Pérou, de la Turquie et de la Yougoslavie. 11était clairement
nécessaire d'exclure ces États du domaine du paragraphe 5 en y

insérant l'expression «which are still in forc».Cette interprétation
est appuyée par le texte français, qui fait foi au mêmetitre que
le texte anglais et est encore plus clair et indiscutable que celui-ci.
Les mots «pour une durée qui n'est pas encore expirée » doivent
être considérés comme déterminant le sens véritable du texte
anglais en question. Le fait que les textes chinois, russe et espagnol
de ce paragraphe se rapprochent de l'anglais ne contredit pas et
n'affaiblit pas le sens évident du texte français. Ces trois textes
ont ététraduits de l'anglais, tandis que le texte français étaitthe French text removes any doubt whatsoever astothe meaning of

these words, there is in effect no reasonable doubt about them also
so far as the English text is concerned. There is no question here of
giving preference to the French text. Both texts have the same
meaning. The French text is no more than an accurate translation
of the English text aç generally understood. Or, rather, in so far as
it appears that the final version was first formulated in the French
language, the English text is no more than an accurate translation
from the French.

The Government of Bulgaria contended that the first French
version adopted by Committee IVII-"déclarations qui sont encore
en vigueur" (declarations which are still in force)-was a faithfd
translation of the English text; that it was changed at the request
of the French delegation into the present wording in French : ''@our
une duréequi n'estpas encore expirée"(fora duration which has not
yet expired) ;and that the French representative had explained in
the Committee that the changes which he proposed for insertion
did not relate to the substance but were intended to improve the

drafting. The account of these successive changes is correct. Yet it
provides no support for the argument in aid of which it is adduced.
For it must be noted that the French amendment was proposed
subsequent to the adoption of the text of the paragraph in question
and was approved without dissent at a subsequent meeting of the
Committee. There was no change in the substance of the paragraph
for the reason that the clear and unambiguous meaning of the
French amendment was understood by the whole Committee as
conveying the true sense of the English text as well. The Rappor-
teur of the First Committee, who made his report in the English
language, stated, after referring to the question of Article 36, as
follows: "A new paragraph 4 [now paragraph 51 was inserted to
preserve declarations made under Article 36 of the old Statute for
periods of time whichhavenot expired andto make these declarations
applicable to the jurisdiction of the new Court." There seems to
have been no doubt in the minds of the members of the First Com-
mittee as to the meaning of the words "still in force" in the English
text. The French amendment was made indeed not with a view to

any change in substance but only for the purpose of clarification.
Admittedly, an international obligation may cease to exist for
reasons other than lapse of time; it may, for instance, terminate
because of the fulfilment of its object, denunciation in a manner
provided in the instrument, or its dissolution bymutual agreement.
However, those various modes of termination and extinction of
obligations are not covered by the accepted usage of the phrase
"which are still in force". They are clearly not covered by its
French version which speaks of "a duration which has not yet
expired" (pour une duréequi n'est pas encoreexpirée).That meaning
of the expression "which are still in force" is so well established in

39 celui de l'une des deux langues officielles adoptées à la Conférence
de San Francisco. Toutefois, si le texte français enlève tout doute
quant à la signification de ces termes, il n'y a pas non plus
effectivement de doute raisonnable à leur égard en ce qui concerne
le texte anglais. Il n'est pas question ici de donner la préférence
au texte français. Les deux textes ont le mêmesens. Le français
n'est que la traduction exacte de l'anglais tel qu'on l'entend
généralementou plutôt, puisqu'il apparaît que la version définitive

a d'abord étéformulée en français, le texte anglais n'est que la
traduction exacte du français.
Le Gouvernement bulgare a soutenu que la première version
française adoptée par le comité IV/I - «dédarations qui sont
encore en vigueur » -- était la traduction fidèle du texte anglais;
que c'est à la demande de la délégation française qu'elle a été
changée pour aboutir au texte fiançais actuel: «pour une durée
qui n'est pas encore expirée »;et que le représentant de la France
a expliqué au comité que les modifications dont il proposait
l'insertion ne portaient pas sur le fond mais étaient destinées à
améliorer la rédaction. La relation de ces modifications successives
est exacte, mais elle n'appuie pas l'argumentation en vue de

IaquelIe elle a étédonnée. 11est à noter en effet que l'amendement
français a étéproposé après l'adoption du texte du paragraphe
en question et approuvé sans opposition lors d'une réunion ulté-
rieure du comité. Aucune modification de fond n'a été apportée
au paragraphe pour la raison que le sens clair et sans ambiguïté
de l'amendement français a étéentendu par l'ensemble du comité
comme correspondant également au véritable sens du texte anglais.
Le rapporteur du comité 1, qui présentait son rapport en anglais,
a déclaréau sujet de la question de l'article 36: «Un nouveau
paragraphe 4 [actuellement paragraphe 51 fut ensuite inséré en
vue de sauvegarder les déclarations non expirées (for Periods of
time zuhichare not expired) faites en application de l'article 36 de

l'ancien Statut et pour les considérer comme se rapportant à la
nouvelle Cour. » Il semble qu'il n'y ait pas eu de doute dans l'esprit
des membres du comité I quant au sens des mots « still in forc))
dans le texte anglais. Le but de l'amendement français n'a pas
étéd'obtenir une modification de fond mais seulement une clan-
f--ation.
Certes, une obligation internationale peut cesser d'exister pour
d'autres raisons que l'échéancedu terme; elle peut, par exemple,
prendre fin par suite de l'accomplissement de son objet, de sa
dénonciation d'une manière prévue dans l'acte ou de sa dissolution
par consentement mutuel. Toutefois, ces divers modes de cessation

et d'extinction des obligations ne correspondent pas au sens admis
par l'usage du membre de phrase «whiclz are stillin force ».Il est
clair qu'ils ne correspondent pas à leur version française, laquelle
parle «d'une durée qui n'est pas encore expirée ». Le sens de
l'expression « which are still in force» est si bien établi en anglaisthe English language that it was not deemed necessary in the
English wording to give a literal translation, word by word, of the
French version. Both phrases refer, in their ordinary connotation,
to the element of the expiration of time-not to termination as the
result of an extraneous event such as the dissolution of the Perma-
nent Court. There is no persuasive power in the.argument that these
expressions, although ordinarily referring to the element of time,
may, by dint of some ingenuity, be made to mean something
different from their ordinarv connotation.
The same result followsween the terms in question are considered
by reference to their context in relation to other provisions of the
Charter on cognate matters. The words "still in force" in para-
graph 5 cannot, in the absence of express language to the contrary,
be interpreted in a sense different from that which they obviously

have in paragraph I of Article 36 and in Article 37 of the Statute-
both of which refer to treaties in force. Neither party has suggested
that the latter provisions refer to the validity of the treaties in
question by reference to any test other than lapse of time for which
they were concluded. We are unable to interpret these words
in a manner which is not only contrary to accepted usage in
the English text and the explicit wording in the French language
in which they were first formulated, but which also departs from
the obvious-and uncontroverted-meaning of these terms in the
passages, immediately following and preceding, of the Statute.
There is, for reasons which will be elaborated presently in more
detail, no ment in the contention that the declarations made under
paragraph 2 of Article 36 of the Statute of the Permanent Court
were indissolubly linked with that Statute and therefore inevitably
and finally lapsed with the dissolution of that Court, while the
treaties referred to in Article 37 were not so linked and therefore

their transfer to the jurisdiction of the International Court of
Justice survived the dissolution of the Permanent Court. The legal
authonty, as a source of the jurisdiction of the Court, of the juris-
dictional provisions of any treaty whatsoever is grounded in para-
graph I of Article 36 of the Statute which provides that the juns-
diction of the present Court comprises "all matters specially
provided for ...in treaties and conventions in force". If, as the
result of the injection of extraneous conditions into the clear
terms of paragraph 5 of Article 36, the dissolution of the Permanent
Court had an effect of putting an end to the declarations made
under paragraph 2 of Article 36 of the Statute of the Permanent
Court, the same consequences would follow with regard to the
treaties and conventions referred to in Article 37 of the present
Statute. Yet it is clear that no such consequences follow, and none
have been asserted to follow, in this respect in relation to any of

these provisions. In relation to al1of them the expression "in force"
does not possess a meaning different from that ordinarily attached
to these terms, namely, as refening to the element of time.qu'il n'a pas étéjugénécessairedans le texte anglais de donner une
traduction littérale, mot àmot,dutexte français. Lesdeux membres
de phrases visent, dans leur sens ordinaire, l'élément d'échéancedu
terme - et non l'expiration par suite d'un événementextérieur tel
que la dissolution de la Cour permanente. L'argument d'après
lequel, bien que ces expressions se réfèrent ordinairement à l'élé-
ment de temps, on peut, à force d'ingéniosité,leur donner un sens
différent de leur sens ordinaire est peu convaincant.

On arrive au mêmerésultat lorsque l'on considère les termes en
question en se référant à leur contexte dans les autres dispositions

de la Charte portant sur des matières analogues. Les mots «still in
force » ne peuvent, à défaut d'un texte exprès en sens contraire,
s'interpréter dans leparagraphe 5 avec un sens différent de celui qui
est évidemment le leur dans les articles 36, paragraphe 1,et 37 du
Statut - qui parlent l'un et l'autre des traités en vigueur. Aucune
des deux Parties n'a suggéréque ces dernières dispositions visent
la validité des traités en question sur la base d'un autre critère que
l'échéancedu terme pour lequel ils ont étéconclus. Nous ne pouvons
interpréter ces mots d'une manière qui non seulement est contraire
au sens admis par l'usage du texte anglais et aux termes explicites
du texte français qui a étérédigé en premier, mais encore s'écarte

du sens évident - et non contesté - des mêmesmots dans les
passages du Statut qui précèdent et qui suivent immédiatement.
Pour des raisons qui seront exposées plus en détail dans un
instant, on est mal fonde à soutenir que les déclarations faites
en vertu de l'article 36, paragraphe 2, du Statut de la Cour perma-
nente étaient indissolublement liéesà ce Statut et sont, par consé-
quent, devenues inévitablement et définitivement caduques à la
dissolution de cette Cour, alors que les traités visés à l'article 37
étaient exempts d'un tel lien et que, par conséquent, leur transfert
à la juridiction de la Cour internationale a survécu à la dissolution
de la Cour permanente. La force de droit, en tant que source de

juridiction de la Cour, des dispositions juridictionnelles de tout
traité repose sur le paragraphe I de l'article 36 du Statut, lequel
dispose que la compétence de la présente Cour s'étend à (tous les
cas spécialement prévus ... dans les traités et conventions en
vigueur ». Si, par suite de l'introduction de conditions extérieures
dans les termes clairs de l'article 36, paragraphe 5, la dissolution de
la Cour permanente avait pour effet de mettre fin aux déclarations
faites en vertu de l'article 36, paragraphe 2,du Statut de la Cour
permanente, on aboutirait aux mêmes conséquencespour les traités
et conventions visés à l'article 37 du présent Statut. Or, il est clair
qu'aucune de ces dispositions n'a de telles conséquencesà cet égard

et on ne l'a pas prétendu. Pour toutes ces dispositions,l'expression
in force))n'a pas un sens différent de celui qui s'attache ordinai-
rement à ces termes, à savoir qu'ils se réfèrentà l'élémentde temps. We do not attach decisive importance to the question, with
regard to which the parties were sharply divided, of the date to
which the expression "which are still in force" must be attached.
That may be either the date on which the Charter entered into
force, namely, 24th October, 1945, or the date on which the
declarant State has become a party to the Statute of the Intema-

tional Court of Justice. It may be said, in support of the first
alternative, as urged by the Government of Israel, that normally a
legal instrument speaks as of the date on which it enters into force.
However, there is also substance in the view that that expression
ought, more properly, to be attached to the date on which the
particular State becomes bound by the obligations of the Statute.
Retroactive operation of a provision ought not to be assumedwith-
out good cause; normally, it is the date of the State becoming a
party to the instrument which determines, in relation to that
State,the date of the commencement of the operation of its various
Lrovisions.
We do not consider that any practical consequences, detrimental
to the contentions of either party, follow from the adoption of one
of these alternative dates in preference to another. In Ourview, the
validity of paragraph 5 did not lapse on the dissolution of the
Permanent Court; its purpose was to render that dissolution irre-
levant in the matter of the transfer of declarations; the intention
was that it should become operative as soon as a declarant State

becomes a party tothe Statute-unless its declaration was no longer
in force by reason of having expired in conformitywith the conclud-
ing passage of paragraph 5.Accordingly, the main contention of the
Govemment of Israel is not defeated if the expression "which are
still in force" is attached to the date on which Bulgaria became a
party to the Statute. On that date--or from that date-her Decla-
ration of 1921, saved from extinction by virtue of paragraph 5
of Article 36, became fully operative.

Accordingly, we reach the conclusion that, having regard both
to the ordinary meaning of their language and their context, the
words "which are still in force" refer to the declarations them-
selves, namely, to a period of time, limited or unlimited, which has
not expired, regardless of any prospective or actual date of the dis-
solution of the Permanent Court. So long as the period of time of

declarations made under Article 36 of the Statute of the Permanent
Court still has to run at the time when the declarant State concerned
becomes a party to the Statute of the International Court ofJustice,
those declarations fall within the purview of Articl36, paragraph 5,
of the new Statute and "shall be deemed to be acceptances of the Nous n'attribuons pas une importance décisiveà la question, sur
laquelle les Parties ont été en net désaccord,de la date à laquelle il
faut rattacher l'expression ((which are stillin force ».Il peut s'agir
soit de la date d'entrée en vigueur de la Charte, c'est-à-dire du
24 octobre 1945, soit de la date à laquelle 1'Etat déclarant est
devenu partie au Statut de la Cour internationale de Justice. On

peut, comme le Gouvernement d'Israël, dire à l'appui de la première
solution qu'un acte juridique se réfère normalement à sa date
d'entrée en vigueur. Toutefois, on est également fondé à soutenir
que cette ?pression doit plus proprement se rattacher à la date à
laquelle 1'Etat intéressé devient liépar les obligations du Statut.
On ne doit pas, sans bonnes raisons, supposer qu'une disposifion
ait un effet rétroactif; c'est normalement la date àlaquelleun Etat
devient partie à l'acte qui détermine, à l'égardde cet État, la date
d'entrée en vigueur de ses différentes dispositions.

Nous ne considérons pas que l'adoption de l'une de ces deux
dates de préférence à l'autre ait des conséquences pratiques pré-
judiciables aux thèses de l'une ou l'autre Partie. A notre avis, la
validité du paragraphe 5 n'a pas expiréà la dissolution de la Cour
permanente; son but était de rendre cette dissolutioninopérante en
matière de transfert de déclarations; il était destiné à s'appliquer
aussitôt qu'un Etat déclarant devenait partie au Statut - à moins
que sa déclaration ne Mt plus en vigueur, étant devenue caduque
conformément à la fin du paragraphe 5. C'est pourquoi la thèse
principale du Gouvernement d'Israël n'est pas mise en échec si
l'on rattache l'expression which are still in force)) à la date à

laquelle la Bulgarie est devenue partie au Statut. A cette date -
ou à partir de cette date - sa déclaration de 1921, préservée de la
caducité en vertu de l'article 36, paragraphe 5, est devenue pleine-
ment applicable.

Nous parvenons en conséquence à la conclusion qu'en raison
du sens ordinaire de ces termes ainsi que de leur contexte,
les mots (which are still in force ))visent les déclarations elles-
mêmes,c'est-à-dire une durée limitée ou illimitée qui n'était pas

expirée, indépendamment de la date éventuelle ou effective de
la dissolution de la Cour permanente. Pour autant que la durée
des déclarations faites en vertu de l'article 36 du Statut de la Cour
permanente reste à courir au moment où l'État déclarant intéressé
devient partie au Statut de la Cour internationale de Justice, ces
déclarations tombent sous le coup de l'article 36, paragraphe 5, du
nouveau Statut et ((seront considéréescomme comportant accepta-compulsory jurisdiction of the International Court for the period
which they still have to run and in accordance with their terms".

We will now examine the me an in^ of these concrete terms of
paragraph jby reference to the objezt of that provision. The juris-
diction of the International Court of Justice is established by the
Charter and the Statute of the Court. In law it could not have been,
and was not, affected in any way by the action of the Assembly
of the League of Nations in dissolving the Permanent Court any
more than the establishment of the new Court could have juridically
affected the iurisdiction of the Permanent Court. The creation of
the one and the termination of the other were two separate legal
acts. This was so although there was a close link of cause and effect
between them. For a period of time between the enactment of these
two measures the two institutions existed in law, though one was
not yet organized and the other already preparing for dissolution.
In the words of Sub-Committee IV/I/A, "since, however, it is im-
possible to contemplate the existence of the two World Courts,
each with their seat at The Hague ...it is clear that at the earliest

possible moment steps will have to be taken to bring the old Court
to an end...".(UnitedNations Conferenceon International Organiza-
tions, Vol. 13, p. 521.)
It is thus clear that the provisions of Article 36, paragraph j,
of the new Statute operate independently of the Permanent Court
and that such ~peration is not affected by its dissolution. As
already shown, the preoccupation of the San Francisco Committee
IV/I relating to that paragraph was to preserve as a whole the
declarations of acceptance of the compulsory junsdiction of the
Permanent Court for the new Court. It was not concerned with
the question whether the Declarations would be valid when detached
from the Permanent Court. It was concerned with the drafting and
adoption of a formula which would provide for their continuing
validit y.
The essential object of the Conference of San Francisco as
expressed by the First Committee was to provide "for the continuing
validity of the existing adherences to it" in a manner consistent

with international law. The fact of severance from the Permanent
Court of International Justice was taken for granted in respect of
declarations of acceptance. It was the attachment ofthe declarations
to the new Court which was considered essential and it was that
object which prompted the adoption of the formula provided in
paragraph 5 of Article 36 in order to ensure the continued validity
of those declarations. Nor was the date of severance from the
Permanent Court considered to be of importance. It is therefore
immaterial whether that date was October zqth, 1945, on whichtion de la juridiction obligatoire de la Cour internationale pour la
durée restant à courir d'après ces déclarations et conformément à
leurs termes ».

Nous allons maintenant examiner le sens de ces termes concrets
du paragraphe 5 en nous référant àl'objet de cette disposition. La
juridiction de la Cour internationale de Justice est établie par la
Charte et le Statut de la Cour. En droit, elle n'aurait pu être et
elle n'a étéaffectée en aucune manière par la mesure prise par

l'Assemblée de la Sociétédes Kations pour dissoudre la Cour per-
manente, pas plus que l'institution de la nouvelle Cour n'aurait pu
juridiquement affecter la juridiction de la Cour permanente. La
création de l'une et la fin de l'autre ont constitué deux actes juri-
diques distincts. Et cela bien qu'il y eût entre eux un lien étroit de
cause à effet. Pendant une certaine Dériode.entre la mise en Œuvre
de ces deux mesures, les deux institutions ont existé en droit bien
que l'une ne fût pas encore organisée et que l'autre se préparât
déjà à êtredissoute. Comme l'a dit le sous-comité IV/I/A: « Etant
donné cependant qu'on ne peut envisager l'existence de deux cours
mondiales, ayant chacune leur siège à La Haye ...il est évident
qu'il importera de prendre, le plus tôt possible, des mesures en vue
de mettre fin à l'existence de l'ancienne Cour ...))(Conférencedes
Nations Unies sur l'organisation internationale, t. 13, p. 531.)

Il est donc clair que les dispositions de l'article 36, paragraph5,
du nouveau Statut jouent indépendamment de la Cour permanente
et queleur application n'est pas affectéepar la dissolution de celle-ci.
Ainsi que nous l'avons déjà montré, la préoccupation du comité
IV/I de la Conférence de San Francisco au sujet de ce paragraphe
était de préserver pour la nouvelle Cour l'ensemble des déclarations
d'acceptation de la juridiction obligatoire de la Cour permanente.
Il ne se préoccilpait pas de savoir si les déclarations seraient valides
lorsqu'elles seraient détachées de la Cour permanente. Il se préoc-
cupait de rédiger et d'adopter une formule qui assurerait la pro-
longation de leur validité.
La Conférencede San Francisco avait pour objet essentiel, comme
l'a dit le comité 1, de prévoir ((la prolongation de la validité des
adhésions actuelles 1d'une manière com~atible avec le droit inter-

national. Le fait de la séparation d'avéc la Cour permanente de
Justice internationale était considéré comme acquis pour les décla-
rations d'acceptation. C'est le rattachement des déclarations à la
nouvelle Cour qui était considéré comme essentiel et c'est cet
objectif qui a dicté l'adoption de la formule reprise à l'article 36,
paragraphe 5,en vue d'assurer la prolongation de la validité de ces
déclarations. La date de séparation d'avec la Cour permanente
n'était pas considéréenon plus comme importante. Il est par consé-
quent sans importance de savoir si cette date a été le 24 octobre the Charter of the United Nations providing for the establishment

of the International Court of Justice came into force, or the date
of April 18th, 1946, on which day the Permanent Court was for-
mally dissolved to take effect on April 19th. As a matter of fact,
the Permanent Court held its final session in October, 1945; al1the
Judges resigned in January 1946. In view of the imminent disso-
lution of the League of Nations there was no machinery for the
election of new Judges. What is material in respect of the validity
of a declaration in relation to the present Court is whether it fulfils
the requirements of Article 36, paragraph 5. In other words, the
dissolution of the Permanent Court was not intended to have any
effect, and had none, upon the declarations of acceptance provided
for in Article 36, paragraph 5, so far asthe present Court is concern-
ed. Whether these declarations, including the Bulgarian Declaration
of 1921,are applicable to the International Court of Justice or not
is to be determined solelyin accordance with Article 36, paragraph 5,
of the new Statute-in which, by deliberate omission, there is no

reference to the dissolution of the Permanent Court.
In so far as its relation to the Permanent Court of International
Justice and its Statute is concerned, the Bulgarian Declaration
of 1921 ceased, both in fact and in the strict sense of the law, to
be applicable when that Court was dissolved on April 18th, 1946.
However, in relation to the International Court of Justice, the
dissolution of the Permanent Court was precisely the situation
envisaged by the frarners of the new Statute as a reason for the
adoption of paragraph 5 and its full operation in consequence of
and subsequent to the dissolution of the Permanent Court. It was
for the purpose of preserving for the new Court the compulsory
junsdiction which had been conferred upon the old Court and whose
period of validity had not expired that paragraph 5 was adopted
and inserted in Article 36 of the present Statute and that Article 37
was introduced. By virtue of paragraph 5 of Article 36 the decla-
rations of acceptance still in force of the States which became parties

to the Statute on 24th October, 1945, when the Charter came into
force, are deemed to be acceptances of the jurisdiction of the new
Court. However, the other declarations of acceptance which were
still in force were not to be extinguished and forgotten. Their
operation was suspended until such time as the declarant State
became a party to the Statute by being admitted to the United
Nations or by virtue of Article 93 (2) of the Charter. Bulgaria more
than once applied for admission to the United Nations. When
admitted on December 14th, 1955, she became on that day a party
to the Statute. Since the Bulgarian Declaration of 1921has notime-
limit attached to it, it came on the same day within the purview of
Article 36, paragraph 5.1945, jour où la Charte des Nations Unies prévoyant l'institution
de la Cour internationale de Justice est entrée en vigueur, ou le
18 avril1946, jour où la Cour permanente a étéformellement dissoute
à dater du 19 avril. En fait, la Cour permanente a tenu sa dernière

session en octobre 1945; tous ses membres ont démissionné enjan-
vier 1946. En raison de l'imminence de la dissolution de la Société
des Nations, il n'y avait pas de rouages pour élire de nouveaux
juges. Ce qui importe pour la validité d'une déclarationà l'égard de
1sprésente Cour, c'est de savoir si elle remplit les conditions posées
à l'articl36,paragraphe 5. En d'autres termes, pour ce qui concerne
la présente Cour, la dissolution de la Cour permanente n'était pas
destinée à avoir d'effet sur les déclarations d'acceptation visées à
l'article36,paragraphe 5, et elle n'en a pas eu. Le point de savoir
si ces déclarations, y compris la déclaration bulgare de 1921, sont
applicables ou non à la Cour internationale de Justice, ne doit être
tranché que conformément à l'articl36,paragraphe 5, du nouveau
Statut - lequel, du fait d'une omission délibérée, nmentionne pas
la dissolution de la Cour permanente.
A l'égardde la Cour permanente de Justice internationale et de
son Statut, la déclaration bulgare de 1921 a cessé, en fait comme
au sens strict du droit, d'être applicable lorsque cette Cour a été
dissoute le 18 avril 1946. Toutefois, à l'égard de la Cour inter-
nationale de Justice, la dissolution de la Cour permanente est pré-
cisémentla situation qui a étéconsidéréepar les auteurs du nouveau
Statut comme une raison d'adopter le paragraphe 5 étde le mettre
pleinement en application en conséquence et à la suite de la dis-
solution de la Cour permanente. C'est afin de sauvegarder pour la
nouvelle Cour la juridiction obligatoire conférée à l'ancienne, et
dont la durée de validité n'était pas expirée, que le paragraphe 5
a étéadopté et insérédans l'article 36 du présent Statut et que

l'article7 y a été introduit. En vertu de l'articl36, paragraphe 5,
les déclarations d'acceptation encore en vigueur des États devenus
parties au Statut le24 octobre 1945, date d'entrée en vigueur de la
Charte, étaient considéréescomme comportant acceptationde la juri-
diction de la nouvelle Cour. Toutefois, les autres déclarations
d'acceptation qui étaient encore en vigueur ne devaient pas être
éteintes et oybliées. Leur application était suspendue jusqu'au
moment où 1'Etat déclarant devenait partie au Statut, par admission
aux Nations Unies ou en vertu de l'article 93, paragraphe 2, de la
Charte. La Bulgarie a demandé plus d'une fois à êtreadmise aux
Nations Unies. Lorsqu'elle l'a été,le 14 décembre 1955, elle est
devenue le même jour partie au Statut. Comme la déclaration
bulgare ne contient aucune limitation de durée, elle est, le même
jour, tombée sous le coup de l'article36, paragraphe 5. There is a further consideration of a practical nature which
precludes the interpretation of the words "which are still in force"
as being directed to the contingency of the dissolution of the
Permanent Court. If that were the true interpretation of these
words, there would have existed a distinct possibility of the object
of paragraph j being frustrated. The States participating in the
Conference of San Francisco, having decided upon the creation of
a new Court, were anxious to see the old Court terminated. Of the
fifty-one States attending the San Francisco Conference, thirty-one
were parties to the old Statute and, with a few exceptions, were
Meïnbers of the League of Nations. There existed the possibility of
the League of Kations meeting and dissolving itself and the Per-
manent Court before the coming into force of the Charter of the

United Kations and the Statute of the new Court. Moreover, the
attainment of twenty-nine ratifications of the Charter on October
24th, 1945, including the ratifications of five permanent members
of the Security Council, could not have been foreseen with any
degree of certainty. Tt might have been achieved at a later date,
possibly after the dissolution of the League and of the old Court.
In either evèntuality, Article 36, paragraph j,would have become
a dead letter. For in that case, according to the contention of
Bulgaria, al1the declarations would have lapsed with the dissolution
of the Permanent Court and the extinction of the old Statute, and
would no longer be in force.

The intention of paragraph j of Article 36 was to eliminate the
difficulties connected with the impending dissoliition of the Per-
manent Court and likely to interfere with the continued validity of
the declarations. The Bulgarian contention, accepted by the Court,
introduced these considerations as an integral part of Article 36.
The unqualified language of paragraph 5 suggests that any real or
apparent legal difficulty ensuing from the fact that the declarations
were annexed tothe Statute of the Permanent Court and any other
legal difficulties, real or apparent, which did or did not occur to the
authors of paragraph j were met by the comprehensive provision
laying down that these declarations shall be deemed, as between the
parties to the present Statute, to be acceptances of the compulsory
jurisdiction of the new Court. It is exactly some such obstacles
which the authors of Article 36 wished to neutralize. This was the

purpose of paragraph j. They said in effect: Whatever legal ob-
stacles there may be, these declarations, provided that their period
of validity has not expired-that is provided that they are still in
force on the day of the entry of the Charter into force or on the day
on which the declarant State becomes a party tothe Statute-shall
44 11est une autre considération d'ordre pratique qui empêched'in-
terpréter les mots « which are stilin force))comme visant l'éventua-
lité de la dissolution de la Cour permanente. Si telle était l'inter-
prétation exacte de ces termes, il y aurait eu nettement possibilité
que l'objet du paragraphe 5 soit mis en échec. LesÉtats participant
à la Conférencede San Francisco, ayant décidéla création d'une
nouvelle Cour, désiraient voir I'ancienne prendre fin. Des cinquante
et un États qui assistaient à la Conférencede San Francisco, trente
et un étaient parties à l'ancien Statut et, à de rares exceptions près,
Membres de la Société desNations. 11était possible que la Société
des Nations se réunit pour se dissoudre, ainsi que la Cour perma-

nente, avant l'entrée en vigueur de la Charte des Nations Unies et
du Statut de la nouvelle Cour. Au surplus, on ne pouvait prévoir
avec certitude que l'on atteindrait le 24 octobre 1945 le chiffre de
vingt-neuf ratifications de la Charte, y compris les ratifications des
cinq membres permanents du Conseil de Sécurité.Cela aurait pu
se réaliserà une date ultérieure et, peut-être, après la dissolution
de la Société desNations et de l'ancienne Cour. Dans l'un ou l'autre
cas, l'article6, paragraphe 5, serait devenu lettre morte. Car alors,
d'après la thèse de la Bulgarie, toutes les déclarations seraient
devenuescaduques par suitede la dissolutionde la Cour permanente
et de l'expiration de l'ancien Statut et elles n'auraient plus été en
vigueur.

L'article 36, paragraphe 5, était destiné à éliminerles difficultés
touchant à l'imminente dissolution de la Cour permanente et de
nature à entraver la prolongation de la validité des déclarations.

La thèse bulgare admise par la Cour a retenu ces considérations
comme partie intégrarite de l'article 36. La formule sans réserve du
paragraphe 5 tend à indiquer que toute difficulté juridique réelle
ou apparente découlant du fait que les déclarations étaient annexées
au Statut de la Cour permanente, ainsi que toutes les autres diffi-
cultés juridiques réelles ou apparentes auxquelles les auteurs du
paragraphe 5 ont songéou qui leur ont échappé,a étérésoluepar
la dispositiond'unelarge portéeénonçantqueces déclarations seraient
considérées,dans lesrapports entreparties au présentStatut, comme
comportant acceptation de la juridiction obligatoire de la nouvelle
Cour. Ce sont précisémentdes obstacles de ce genre que les auteurs
del'article36ontentendu neutraliser. Tel aété le but du paragraphe 5.
Ils ont déclaréen fait: quels que soient les obstacles juridiques,
ces déclarations seront maintenues à l'égard dela Cour internatio-
nale de Justice, pourvu que leur durée de validité ne soit pas
expirée - c'est-à-dire pourvu qu'elles soient encore en vigueur lecontinue in respect of the International Court of Justice.

The intention of paragraph 5 which used the words "shall be
deemed ..to be acceptances" is to cut clear through any cobweb of
legal complications and problems which might anse in this connec-

tion. It is not the intention ofparagraph5 to recognize any decisive
effect of these difficulties by a form of words-"still in forcew-
which normally mean something else. It is othenvise incompre-
hensible why if the words "still in force" were intended to mean
only "so long asthe Permanent Court has not been dissolved" these
latter words should not have been used instead of the words "still
in force" which have a clear and different meaning of their own,
namely, as referring to termination as the result of lapse of time.
Accordingly, to attach decisive importance tothe effect of the disso-
lution of the Permanent Court amounts not only to re-writing
paragraph 5; it amounts to adding to it an extraneous condition
which it was the purpose of that Article to exclude and to disregard.
When it is therefore asserted that the effect of the dissolution of
the Permanent Court was to terminate the declarations of accept-
ance existing on 19th April, 1946, the correct answer to any such
assertion is that that was exactly the result which paragraph 5
was intended to prevent.
The governing principle underlying paragraph 5 is that of
automatic succession of the International Court of Justice in respect
of the engagements undertaken by reference to the Statute of the
Permanent Court, the dissolution of which was clearly envisaged and
anticipated. We have cited the passage in question from the report
of Committee IV/I. We therefore consider that any argument

based on the dissolution of the Permanent Court and the lapse of
its Statute to which the Declaration of 1921 was attached is irre-
levant either in connection with the interpretation of the words
"which are still in forceJ'or otherwise. There is, for the same reason,
no basis for the argument that the object of paragraph 5 being to
ensure the continuity of the jurisdiction of the Court, it cannot be
regarded as intended to resuscitate the declarations which had
lapsed as the result of the dissolution of the Permanent Court.
The object of paragraph 5, clearly expressed in the course of the
preparatory work as cited, was precisely to prevent these decla-
rations from lapsing with finality for all purposes. Undoubtedly,
they lapsed so far as the Permanent Court was concerned; they did
not lapse so far as the present Court is concerned. The object of
paragraph 5 was to secure succession in the sphere of the obligatory
jurisdiction of the Court.
Admittedly, the declaration of Bulgaria was based on the Statute
of the Permanent Court. Admittedly also, the Statute ceased to
exist and to be binding upon Bulgaria when the Permanent Court
was dissolved, and the Statute of the present Court was not binding
upon her unless and until she became a party to its Statute.

45jour de l'entréeen vigueur de la Charte ou le jour où l'État déclarant
devient partie au Statut.
Le paragraphe 5, qui emploie les termes «seront considérées ...
comme comportant acceptation »,est destiné à percer tout réseau

de complications et problèmes juridiques pouvant se présenter dans
ce domaine. Le paragraphe 5 n'est pas destiné à reconnaître un
effet décisifà ces difficultéspar une formule - «still in force» -
qui signifie normalement autre chose. Autrement, si les mots «still
in force ))devaient signifier simplement «tant que la Cour perma-
nente n'aura pas été dissoute »,on ne comprendrait pas pourquoi
cette dernière formule n'aurait Das étéem~lovée Iu .,eu de la
formule ((still in forc»,laquelle a un sens propre, clair et différent,
c'est-à-dire qu'elle vise l'expiration par l'échéancedu terme. En
conséquence, attacher une importance décisive à l'effet de la dis-
solution de la Cour permanente revient non seulement à récrire
le paragraphe 5, mais encore à y ajouter une condition extérieure

que cet article avait pour but d'écarter et de négliger. Lorsqu'on
affirme,par conséquent,que l'effet de la dissolution de la Cour per-
manente a été de mettre fin auxdéclarations d'acceptation existantes
le 19 avril 1946,la réponsecorrecte à toute affirmation de ce genre
est que tel'était précisément lerésultat que le paragraphe 5 était
destiné à empêcher.
Le principe dominant qui est à la base du paragraphe 5 est celui
de la continuation automatiaue au ~rofit de la Cour internationale
de Justice des engagements c'ontraciésen application du Statut de
la Cour permanente dont on envisageait et dont on escomptait
clairement la dissolution. Nous avons cité plus haut le passage en
question du rapport du comité IV/I. Nous estimons donc que tout

argument fondé sur la dissolution de la Cour permanente et la
caducité de son Statut, auquel se rattachait la déclaration de 1921,
est sans pertinence soit pour l'interprétation des termes ccwhich
are still in force»,soit à tout autre point de vue. Pour la même
raison, on est mal fondé à soutenir que le paragraphe 5, ayant
pour objet d'assurer. la continuité de la juridiction de la Cour, ne
saurait être considéré commedestiné à ressusciter les déclarations
expirées par suite de la dissolution de la Cour permanente. L'objet
du paragraphe 5, clairement exprimé dans les travaux prépara-
toires cités, était précisément d'empêcher ces déclarations de
devenir définitivement caduques à tous égards. Il ne fait pas de

doute qu'elles étaient devenues caduques en ce qui concerne la
Cour permanente; elles n'étaient pas devenues caduques en ce qui
concerne la présente Cour. L'objet du paragraphe 5 était d'assurer
la succession en matière de juridiction obligatoire de la Cour.
Il est vrai que la déclaration de la Bulgarie était fondée sur le
Statut de la Cour permanente. Il est vrai aussi que ce Statut a
cesséd'exister et de lier la Bulgarie lorsque la Cour permanente a
étédissoute et que le Statut de la présente Cour n'a liéla Bulgarie
que lorsqu'elle est devenue partieaudit Statut. Mais, àce moment, saHowever, upon that event, her declaration became subject to the
operation of paragraph 5 which maintained the potential force of
the declarations in relation to the States covered by the plain

terms of that provision, namely, in relation to the States becoming
parties to the Statute. Consequently, when in1955 Bulgaria became
aparty tothe Statute by becoming a Member of the United Nations,
paragraph 5 became fully operative in relation to her. Its purpose
was not extinguished through the dissolution of the Permanent
Court; it was to prevent the dissolution of that Court from becoming
a destructive factor in relation to the declarations made under its
Statute. Its purpose was to safeguard the existing compulsory
jurisdiction in relation to the present Court notwithstanding the
event clearly envisaged by the authors of paragraph 5, namely,
the dissolution of the Permanent Court. It was exactly that anti-
cipated event which prompted paragraph 5.
There is little persuasive power in the suggestion that paragra5h
was intended to prevent that result only on condition that the
States concerned became parties to the Statute prior to 18th Apnl,
1946. There is no evidence in support of that proposition and no
satisfactory explanation of any such intention calculated to reduce
the period of the operation of paragraph 5 and to render it vague
by introducing the element of uncertainty connected with the date
of the dissolution of the Permanent Court. At the time when the
text of the Charter was established it wasdifficult to foresee when
the dissolution would take place.
Accordingly, we do not consider it necessary to pursue the

arguments propounded, in expressive language, with regard to the
possibility of reviving the Bulgarian Declaration of 1921 whose
life, it was asserted, was terminated as the result of the dissolution
of the Permanent Court. As stated, this was so only subject to the
operation of paragraph 5.It may be added that there are obvious
limits to the analogy between thedeath of aperson and the cessation
of the operation of a legal provision. Nothingn revive the dead; a
short paragraph in a treaty can instill new and vigorous life into a
treaty or provision of it whose operations suspended or which had
ceased to exist. Some treaties, for instance, are automatically
dissolved as the result of war; they are resuscitated by a single
provision of the Treaty of Peace either immediately ornder certain
conditions to be fulfilled in the future. Paragraph 5 intends the
same result with regard to declarations which might have been
temporarily inoperative in consequence of the contemplated event
of the dissolution of the Permanent Court andthe termination of its
Statute. Legal intercourse between States-as between individuals
-abounds in examples of a contractual provision being dormant,
and its operation suspended, pending the accomplishment of an
event by an act of a party or some extraneous occurrence.déclaration est tombéesous le coup du paragraphe 5 qui conservait
une valeur potentielle aux déclarations concernant les États rele-
vant des termes clairs de cette disposition, c'est-à-dire concernant
les Etats devenant parties au Statut. Par conséquent, lorsqu'en
1955 la Bulgarie est devenue partie au Statut, en devenant Membre
des Nations Unies, le paragraphe 5 est devenu pleinement appli-
cable à son égard.Son but ne s'étaitpas éteint par la dissolution de
la Cour permanente; il étaitd'empêcher la dissolutionde cette Cour
de devenir un facteur destructif pour les déclarations faites en
vertu de son Statut. Son but était de sauvegarder la juridiction

obligatoire existant au bénéficede la présente Cour, nonobstant
l'événement clairement envisagé par les auteurs du paragraphe 5,
à savoir la dissolution de la Cour permanente. C'est précisément
cet événement prévuqui a motivéle paragraphe 5.

L'idéeque le paragraphe 5 n'était destiné à prévenir ce résultat
qu'à condition que les États intéressés devinssent parties au Statut
avant le 18 avril1946 n'est pas très convaincante. Cette conception
ne repose sur aucunepreuve et il n'y a pas d'explication satisfaisante
d'une telle intention tendant à réduire la période d'application dii
paragraphe 5 et à le rendre vague en y introduisant l'élémen
d'incertitude touchant à la date de la dissolution de la Cour perma
nente. Au moment où le texte de la Charte a étéétabli,il était diffi
cile de prévoir quand cette dissolution aurait lieu,

C'est pourquoi nous ne considérons pas qu'il soit nécessaire de
traiter des arguments avancés en termes expressifs au sujet de la
possibilité de raviver la déclaration bulgare de 1921 dont l'exis-
tence, a-t-on prétendu, avait pris fin par suite de la dissolution de

la Cour permanente. Comme nous l'avons dit, il n'en était ainsi que
sousréserve de l'application du paragraphe 5. On peut ajouter qu'il
y a des limites évidentes à l'analogie entre la mort d'une personne
et la cessation de l'application d'une disposition juridique. Rien ne
peut ressusciter les morts; un bref alinéa dans un traité peut
donner une vie nouvelle et vigoureuse à un traité ou à un article
de traité dont l'application est suspendue ou qui a cesséd'exis-
ter. Certains traités, par exemple, sont automatiquement dissous
par suite de la guerre; une simple disposition du traité de paix
suffit à les ressusciter soit immédiatement, soit sous certaines
conditions à réaliserà l'avenir. Le paragraphe 5 vise au même
résultat à l'égard des déclarationsqui auraient pu devenir momen-
tanément inopérantes par suite de la dissolution prévue de la Cour
permanente et de la fin de son Statut. Les relations juridiques entre
États - comme entre individus - offrent de nombreux exem-
ples de dispositionscontractuelles en sommeil, et dont l'application
est suspendue, dans l'attente de la réalisation d'un événementdu
fait d'une partie ou de quelque circonstance extérieure. It is therefore of no consequence-in view of the specific provi-
sions of Article 36, paragraph 5-whether the acceptance by
Bulgaria of the Statute and therefore necessarily of Article 36,
paragraph 5, is to be considered, in regard to the Bulgarian Declar-
ation of 1921, as an act of ratification of a declaration previously
made but subject to ratification, or as a renewal of a former declar-
ation, or as an act equivalent to the making of a new declaration in
the form and with the content of that of 1921 without following the
requisite formalities of a declaration of acceptance. In whatever
way the matter is viewed there is no doubt as to the clear expression
of the sovereign will of Bulgaria-as given through her voluntary
acceptance of the Statute, including Article 36, paragraph 5-an
expression of will which supplied the consensual basis of a declar-
ation of acceptance of the compulsory jurisdiction of the new Court.
That act of acceptance, it may be added, is an implementation of

the solemn Declaration made by Bulgaria on 9th October, 1948,
of the acceptance of the obligations-of al1the obligations-of the
Charter of the United Nations. That Declaration reads, in part, as
follows :"The People's Republic of Bulgaria hereby accepts without
reserve the obligations arising from the United Nations Charter
and promises to observe them as inviolable from the date of its
accession to the United Nations" (United Nations Treaty Series,
Vol. 223, p. 33). There could be no clearer expression of the will of
Bulgaria to accept and observe the obligations of the Charter of
the United Nations and of the Statute. Later in this Opinion we
propose to examine in more detail the question of consent on the
part of Bulgaria in connection with the alternative basis of the
Judgment of the Court, namely, that the operation of paragraph 5
is limited to the orignal Members of the United Nations.

As stated we are unable to uphold the main Bulganan contention
according to which the dissolution of the Permanent Court had the
effect of finally and irrevocably putting an end to the declarations
attached to its Statute. Accordingly, we do not consider it necessary
to examine, in detail, the general grounds by reference to which it
was maintained that certain additional conditions must be implied
in paragraph 5. Thus it was argued that unless the operation of
paragraph 5 is limited to States who have become parties to the
Statute prior to the dissolution of the Court, the Conference of
San Francisco would have to be considered as having attempted
a measure which it was legally quite incompetent to attempt and
powerless to achieve. That measure would, it wascontended, separate
the binding force of the declaration from the Statute to which it was Il est donc sans importance - en raison des dispositions ex-
presses de l'article 36, paragraphe j - de savoir si l'acceptation
par la Bulgarie du Statut et nécessairement,par suite, del'article 36,
paragraphe j, doit être considérée,pour la déclaration bulgare
de 1921, soit comme un acte de ratification d'une déclaration faite
antérieurement, mais sous réserve de ratification, soit comme le
renouvellement d'une déclaration antérieure, soit comme un acte

équivalant au dépôt d'une nouvelle déclaration adoptant la forme
et le contenu de celle de 1921, sans suivre les formalités prescrites
pour une déclaration d'acceptation. De quelque façon qu'on envi-
sage le problème,il n'existe aucun doute quant àla claireexpression
de la volonté souveraine de la Bulgarie - manifestée par son
acceptation volontaire du Statut, y compris de l'article 36, para-
graphe 5 -, expression de volonté qui a constitué la base consen-
suelle d'une déclaration d'acceptation de la juridiction obligatoire
de la nouvelle Cour. On peut ajouter que cet acte d'acceptation
constitue l'application de la déclaration solennelle faite par la
Bulgarie le 9 octobre 1948, de son acceptation des obligations -
de toutes les obligations - de la Charte des Nations Unies. Cette
déclaration énonce notamment «que la République populaire de
Bulgarie accepte par la présente, sans réserve aucune, les obliga-

tions découlant de la Charte des Nations Unies et qu'elle fait la
promesse de les observer, en tant qu'inviolables, du jour où elle
deviendra Membre des Nations Unies » (Nations Unies, Recueil des
Traités, vol. 223, p. 32). La Bulgarie ne pouvait exprimer plus
clairement son intention d'accepter et d'observer les obligations de
la Charte des Nations Unies et du Statut. Nous nous proposons
d'examiner plus en détail dans la suite de la présente opinion la
question du consentement donné par la Bulgarie, lorsque nous
traiterons du deuxième motif de l'arrêtde la Cour, à savoir que
l'application du paragraphe 5 est limitée aux Membres originaires
des Nations Unies.

Comme nous l'avons dit, nous ne pouvons accepter la thèse
principale de la Bulgarie d'après laquelle la dissolution de la Cour
permanente a eu pour effet de mettre définitivement et irrévoca-
blement fin aux déclarations rattachées au Statut de cette Cour.
C'est pourquoi nous ne croyons pas nécessaired'examiner en détail
les motifs d'ordre général invoqués pour soutenir que le para-
graphe j doit contenir implicitement certaines conditions supplé-
mentaires. C'est ainsi qu'on a soutenu qu'à moins que l'application
du paragraphe 5 ne soit limitée aux États qui sont devenus parties
au Statut avant la dissolution de la Cour, il faudrait considérerque
la Conférencede San Francisco a tenté prendre une mesure qu'elle
n'avait juridiquement aucune compétencepour tenter de prendre et

aucun pouvoir de réaliser. On a fait valoir que cette mesure auraitlegally attached by an indissoluble link and which had ceased to
exist with the dissolution of the Permanent Court. It was further
argued that by doing so the Conference of San Francisco would be
attempting another drastic step which it was not legally entitled
or competent to undertake, namely, to destroy the consensual
character, grounded in the Statute, ofthe declarations ofacceptance.
We can find no merit in that line of argument.

There is a deceptive element of simplification in some such notion
as that the Conference of San Francisco decreed certain measures
or that it had no power to decree them-for instance, to deprive
the declarations of acceptance of their consensual character or to
attach them to something which had ceased to exist. The only step
which the Conference did take and could take in this connection
was to establish a text. That text did not bind any State. Any
signatory of the Charter was free to refuse to ratify it. Any State
subsequently contemplating membership of the United Nations

was free to treat it as an offer which it was at liberty to accept or
to reject. The validity and binding force of the Charter and any
of its provisions are due not to the decision of the Conference of
San Francisco but to the very will of the States which subscribed
voluntarily to its obligations in1945 and in subsequent years. Like
any other Member of the United Nations, Bulgaria, in adhenng to
the Charter, of her own free will, accepted its obligations, including
those of paragraph 5 of Article 36 of the Statute. In doing so, she
supplied that very consensual link which, it is asserted, isessential
to the declarations of the Optional Clause. She also supplied the
consensual link necessary for the modification-however slight in
the present case-of her Declaration of Acceptance.

The Statute could have provided that all the declarations, when-
ever made, which had already expired, should be considered as being
revived and as continuing for another twenty years. This would

have been an unusual and drastic provision. If a Statehad consented
to it by adhering to the Charter, that would have been the inevitable
result of its membership of the United Nations. The consensual
link would have been supplied. Paragraph 5 of Article 36, like any
other provision of the Statute, is a provision of a consensual
character. There is no basis for the suggestion that it is essential
for the structure of Article 36 that the consensual link be established
only through paragraph 2, and not through any other paragraph.
Thus, paragraph I of Article 36 establishes the consensual basis of
the jurisdiction of the Court with regard to "all cases which the
parties refer to it and on matters specially provided for in the Charter
of the United Nations or in treaties and conventions in force". In
a different sphere, Article 37 provides the consensual link with
regard to the succession of the International Court of Justice to the
jurisdiction of either the Permanent Court or any other tribunal

48détaché laforce obligatoire de la déclaration du Statut auquel elle
était rattachée juridiquement par un lien indissoluble et qui avait
cesséd'exister à la dissolution de la Cour permanente. On a soutenu
également que, ce faisant, la Conférence de San Francisco aurait
tenté de prendre une autre mesure radicale pour laquelle elle n'avait
juridiquement ni pouvoir, ni compétence, à savoir: détruire le
caractère consensuel, fondésur le Statut, des déclarations d'accep-

tation. Cette argumentation ne nous paraît pas bien fondée.
C'est simplifier les choses de manière quelque peu fallacieuse
que de soutenir que la Conférencede San Francisco a pris certaines
décisions - ou qu'elle était absolument sans pouvoir pour prendre
certaines décisions -, par exemple, priver les déclarations d'ac-
ceptation de leur caractère consensuel ou les rattacher à quelque
chose qui avait cesséd'exister. La seule chose qu'ait faite et que
pouvait faire la Conférence à;cet égard, c'était d'établirun texte.
Ce texte ne liait aucun Etat. Tout signataire de la Charte
était libre de refuser de la ratifier. Tout État envisageant d'être
admis comme Membre des Nations Unies était libre de le traiter

comme une offre qu'il avait la liberté d'accepter ou de rejeter.
La validité et le caractère obligatoire de la Charte et de chacune
de Ses dispositions ne résultent pas de la décision de la Confé-
rence de San Francisco, mais de la volontémêmedes Etats quiont
volontairement adhéré àsesobligations en 1945 et au cours desannées
suivantes. Comme tout autre Menibre des Nations Unies, la Bulgarie
a, en y adhérant de son plein gré, accepté les obligations de la
Charte, y compris celles de I'article 36, paragraphe 5,du Statut.
Ce faisant, elle a fourni ce lien consensuel que l'on affirme essentiel
aux déclarations faites en vertu de la disposition facultative. Elle
a égale-gentfourni le lien consensuel nécessairepour la modification
- si minime fût-elle en l'espèce - de sa déclaration d'acceptation.
Le Statut aurait pu disposer que toutes les déclarations déjà

expirées, à quelque époque qu'elles eussent étéfaites, seraient
considéréescomme ravivées et maintenues en vigueur pour une
nouvelle période de vingt ans. Pareille disposition aurait été
inhabituelle et radicale. Si un État y avait consenti en adhérant
à la Charte, cela aurait été le résultat véritable de son admission
aux Kations Unies. Le lien consensuel aurait été fourni. Comme
toute autre disposition du Statut, I'article 36, paragraphe 5, est
une disposition d'un caractère consensuel. On est mal fondé à
prétendre qu'il est essentiel pour la structure de I'article 36 que
le lien consensuel ne s'établisse que pour le paragraphe 2, à
l'exclusion de tout autre paragraphe. Ainsi, le paragraphe I de

I'article36 établit la base consensuelle de la juridiction de la
Cour pour Btoutes les affaires que les parties lui soumettront,
ainsi [que] tous les cas spécialement prévus dans la Charte des
Nations Unies ou dans les traités ou conventions en vigueur 1).
Dans un autre domaine, l'article 37 fournit le lien consensuel
pour la succession de la Cour internationale de Justice à la juri-
48established by the League of Nations.

Admittedly, once the text of the Charter had been established
by a decision of the Conference, the States which subsequently
adhered to it had no option but to agree to al1 its provisions.
However, this does not mean that they did not of their own volition
agree, in consideration of the ovenvhelming advantages of Mem-
bership of the United Nations, to the various Articles of the Charter
and the Statute. According to established and uniform international
practice, a State adhering to an international instrument agrees-
unless othenvise expressly provided by the instrument-to accept
it as it stands. Moreover, as already stated, there was no innovation
in the provision to which they thus elected to agree. It was, on any
reasonable estimate, no more than a piece of machinery in the
sphere of succession of international judicial organization. Members

of the United Nations agreed that their declarations in respect of
the Statute of the Permanent Court should continue, notwith-
standing the dissolution of that Court, in respect of what was
essentially and substantially the same Court. Paragraph 5 expressly
laid down that the declarations shall continue "for the period for
which they still have to run and in accordance with their terms".
Except for their transference to the International Court of Justice,
they were not modified. When compared with many other provisions
of the Charter restricting the sovereignty of its Members, as en-
shrined in traditional international law, this was a provision of dis-
tinctly limited scope. It is sufficient to compare it, for instance,
with the Articles of the Charter which lay down that Members are
under a legal obligation to comply with decisions of the Security
Council or that they must not resort to force, even if not amounting
to war and even against States which are not Members of the
United Nations, for the settlement of disputes. There is therefore,

also from this point of view, no persuasive power in the argument
advanced by Bulgaria and clairning that radical-or, indeed,
absurd-legal consequences would result, on that account, from the
interpretation of paragraph 5 in accordance with its clear terms.

Forthe reasons stated we cannot admit the contention of Bulgaria
that the object and the basis of the Declaration of1921disappeared
for the reason that the Permanent Court was replaced by what was
essentially an identical judicial organ. Both the object and the
basis of the Declaration remained the same; they were covered, in
addition, by the clearly manifested purpose of the authors of the
Statute to secure the continuity of the compulsory jurisdiction of
the Court. Apart from considerations of a forma1 character, which
it was the very purpose of paragraph 5 to eliminate, what was indiction de la Cour permanente ou de tout autre tribunal établi
par la Société des Nations.
Sans doute, une fois $e texte de la Charte établi par décision
de la Conférence, les Etats qui y ont adhéré par la suite
n'avaient d'autre choix que d'en accepter toutes les disposi-
tions. Mais cela ne signifie pas qu'ils n'ont pas, de leur plein
gré, consenti aux divers articles de la Charte et du Statut, en
contre-partie des avantages déterminants de l'admission aux
Nations Unies, D'après la pratique internationale établie et
uniforme, un Etat adhérant à un acte international l'accepte

tel qu'il est, sauf disposition expresse de cet acte en sens
contraire. En outre, comme nous l'avons déjàdit, il n'y avait en fait
aucune innovation dans la disposition qu'ils choisissaient ainsi
d'accepter. C'était tout au plus, selon toute appréciation raison-
nable, un procédétechnique dans le domaine de la continuité
de l'organisation judiciaire internationale. Les Membres des Nations
Unies sont convenus que leurs déclarations rattachées au Statut
de la Cour permanente seraient, nonobstant la dissolution de
celle-ci, maintenues en vigueur à l'égard de ce qui était essen-
tiellement et, au fond, la mêmeCour. Le paragraphe a expressé-
ment disposé que les déclarations seront maintenues cpour la
durée restant à courir d'après ces déclarations et conformément
à leurs termes ». A part leur transfert à la Cour internationale de
Justice, elles n'étaient pas modifiées. Comparée à de nombreuses

autres dispositions de la Charte qui limitent la souveraineté de
ses Membres, telle que la consacrait le droit international tradi-
tionnel, c'était une disposition d'une portée nettement limitée.
Qu'il suffise de la comparer, par exemple, aux articles de la Charte
qui imposent aux Membres l'obligation juridique de se conformer
aux décisions du Conseil de Sécuritéou de ne pas recourir ,à la
force, mêmesans aller jusqu'à la guerre et mêmecontre des Etats
non Membres des Nations Unies, pour le règlement de leurs diffé-
rends. Il est donc, mêmede ce point de vue, peu convaincant
de soutenir, comme l'a fait la Bulgarie, que des conséquences juri-
diques radicales - ou mêmeabsurdes - résulteraient, de ce fait,
de l'interprétation du paragraphe 5 conforme à ses termes clairs.

Pour les raisons indiquées, nous ne pouvons admettre la thèse
de la Bulgane d'après laquelle l'objet et la base de la déclaration
de 1921 ont disparu pour le motif que la Cour permanente a été
remplacée par ce qui était essentiellement un organe judiciaire
identique. L'objet et la base de la déclaration sont tous deux
restés les mêmes; au surplus, ils relevaient du but clairement
manifesté qu'ont eu les auteurs du Statut d'assurer la continuité
de la juridiction obligatoire de la Cour. Indépendamment de
considérations de caractère formel, que le paragraphe 5 avait

49173 AERIAL INCIDENT (JOINT DISS. OPINION)
law and in fact the actual consequence of the dissolution of the
Permanent Court in relation to the basis and the object of the
Bulgarian Declaration of 1921 and of similar declarations? In so

far as the Statute of the Permanent Court was the basis of the
Declaration of 1921, that basis was hardly affected by the adoption
ofanew Statute which for al1practical purposes was indistinguishable
from that of the Permanent Court. The difference in the object of
the two declarations as related to the Permanent Court and the
International Court of Justice was, if possible, even more nominal:
the object of both declarations was exactly the same, namely, to
undertake obligations of compulsory judicial settlement with regard
to what were, for al1 practical purposes, identical organs-an
identity which corresponded to the articulate and frequently
expressed purpose of the Conference to secure the continuity of
international jurisdiction in the matter of obligatory judicial
settlement.
We attach importance to upholding the spirit of the jurisprudence
of the Court on the subject of succession in international organiza-
tion. In the Advisory Opinion concerning the International Status
of South-West Afrzca, the Court was confronted with the contention

that the disappearance of the League of Nations, the organ charged
with the supervision of the system of Mandates, put an end to the
Mandate and the international obligations of the Mandatory. The
Court rejected that contention. It held that the United Nations
succeeded to the supervisory functions of the League of Nations.
It did so although the Charter contained no express provision to
that effect and although the United Nations and the League of
Nations were different institutions. In the present case, most
explicit and unqualified provision is made for the transfer of
jurisdiction to what on any reasonable estimate must be regarded
as an identical organ. It is also for that additional reason that we
are unable to admit the accuracy of the contention that the object
and the basis of the Bulgarian Declaration of 1921 disappeared
with the dissolution of the Permanent Court.

These, then, are the two governing factors in the situation: the
first is that the expression "which are still in force", when inter-
preted in its ordinary and accepted meaning, refers to termination
asthe result of expiration of time, and not to any extraneousevent
such as the dissolution of the Permanent Court. The second is that
it is the very object of paragrâph 5 to prevent the dissolution of
the Permanent Court from exercising a destructive effect upon the
existing declarations. The combined result of these two factors was,
in the first instance, tointain these declarations immediately and
automatically with regard to the original Members of the Unitedprécisémentpour but d'éliminer, quelle était, en droit et en fait,
la conséquence effective de la dissolution de la Cour permanente
quant à la base et à l'objet de la déclaration bulgare de 1921 et
des déclarations similaires? En tant que le Statut de la Cour
permanente constituait la base de la déclaration de 1921, cette
base n'a guère étéaffectée par l'adoption d'un nouveau Statut
qui, dans la pratique, ne pouvait se distinguer de celui de la Cour
permanente. La différenced'objet entre les deux déclarations, en
tant qu'elles visaient la Cour permanente et la Cour internationale
de Justice, était encore plus théorique s'il est possible: l'objet
des deux déclarations était exactement le même, à savoir de
contracter des obligations de règlement judiciaire obligatoire à
l'égard d'organes qui étaient, dans la pratique, identiques - cette

identité correspondant au but net et fréquemment exprimé que
~oursuivait la Conférenced'assurer la continuité de la iuridiction
jnternationale en matière de règlement judiciaire oblig&oire.
Nous considérons comme important de maintenir l'esprit de la
jurisprudence de la Cour en matière de succession des organisations
internationales. Dans son avis consultatif sur le Statut international
du Sud-Ouest africain, la Cour a eu à connaître de la thèse d'après
laquelle la disparition de la Société desNations, organe chargé
de la surveillance du régime des Mandats, avait mis fin au Mandat,
ainsi qu'aux obligations internationales du Mandataire. La Cour
a rejeté cette thèse. Elle a jugé que les Nations Unies avaient
succédéà la Société desNations dans ses fonctions de surveillance.
Elle l'a fait, bien que la Charte ne contienne aucune disposition

expresse en ce sens et bien que les Nations Unies et la Société
des Nations soient des institutions différentes. Dans la rés ente
affaire, il y a une disposition d'un caractère très explicite et sans
réserve Iour le transfert de iuridiction au bénéficede ce auiIdoit
être considéré, selon toute appréciation raisonnable, comme un
organe identique. C'est pour nous une raison supplémentaire de ne
pouvoir admettre l'exactitude de la thèsed'aprèslaquelle l'objet et la
base de la déclaration bulgare de 1921 ont disparu à la dissolution
de la Cour permanente.

Tels sont donc les deux élémentsdominants de la situation: le

premier est que l'expression ccwhich are still in force», lorsqu'on
l'interprète dans son sens ordinaire et admis, vise la caducité par
échéancedu terme et non un événementextérieur quelconque tel
que la dissolution de la Cour permanente. Le second est que c'est
précisémentl'objet du paragraphe 5 que d'empecher que la disso-
lution de la Cour permanente n'ait un effet destructeur sur les
déclarations existantes. Le résultat conjoint de ces deux facteurs
est, en premier lieu, de maintenir immédiatement et automatique-
ment ces déclarations à l'égarddes Membres originaires des NationsNations. Secondly, the result was to preserve them potentially
with regard to the other declaring States until the time-a reason-
able time-when they become parties to the Statute. The question
of the reasonableness of the period involved is examined later on in
this Opinion. In the present context it is sufficient to state that
after the dissolution of the Permanent Court paragraph 5 did not
cease to be operative in relation to the potential parties to the

Statute. Neither, for the purposes of that paragraph, did their decla-
rations. It was of the essence of the purpose of paragraph 5 to
prevent any such result. The comprehensive language of that
provision-"shall be deemed ...to be acceptances"-renders it
useless to speculate on the exact nature of that continuing
obligation whose operation remained in suspense so long as the
declarant State did not become a party to the Statute. The expres-
sion "legal fiction" may or may not be helpful in that connection;
so may the notion of a merely dormant obligation. The language
and purpose of paragraph 5 render unnecessary any refinement of
speculation on the subject.
It is of direct interest to the issue here examined to note the
manner in which, at the beginning of 1947, a writer, who is regarded
as a most authoritative commentator of the Statute, who was a
Judge of the Permanent Court and who was present on behalf of
that Court both in the Committee of Jurists at Washington and in
the relevant Comrnittee of the Conference of San Francisco, under-
stood the operation of paragraph 5 of Article 36. Professor Manley
Hudson stated, at that time, without alluding to any exception,
that "under paragraph 5 of Article 36 previous declarations under
Article 36 are to be deemed to be still in force, to the extent that
they have not expired according to their terms, 'as between the
parties to the present Statute'" (American Journal of International

Law, Vol. 41 (1g47), p. IO). He then enumerated the countries
whose previous declarations were in force "down to the end of
1946". The enumeration included Thailand. There was no sugges-
tion that the dissolution of the Permanent Court in April 1946
brought about the termination of the declaration of Thailand,
which in fact did not become a member of the United Nations till
December 1946. Professor Hudson, after mentioning some other
States whose declarations expired during 1946 and were subse-
quently renewed, then referred to the declaration of Sweden which
expired "during the yearJ'-namely, as he stated, on August 16th,
1946-and was not renewed. Again there was no suggestion that
the declaration of Sweden,who had not become a-party to the
Statute until 1947, expired simultaneously with the dissolution of
the Permanent Court. It expired on 16th August, 1946.Unies. Il est en second lieu de les conserver potentiellement à
l'égard desautres Etats déclarants jusqu'au moment - au moment
raisonnable - où ils deviennent parties au Statut. La question
du caractère raisonnable de la période en question sera examinée
dans la suite de la présente opinion. Qu'il suffise de dire pour le

moment qu'après la dissolution de la Cour permanente, le para-
graphe 5 n'a pas cesséd'être opérant à l'égard desparties éventuelles
au Statut. Leurs déclarations n'ont pas non plus cesséd'êtreopé-
rantes aux fins de ce.paragraphe. C'était essentiellement le but du
paragraphe 5 que de l'éviter. Le texte, d'une large portée, de cette
disposition - ((seront considérées ...comme comportant accepta-
tion ))- rend inutile toute spéculation sur la nature exacte de cette
oyigation continue et dont l'application restait en suspens tant que
1'Etat déclarant ne devenait pas partie au Statut. Il se peut que

l'expression fiction juridique ))soit utile ou non à cet égard; il
en est de mêmede la notion d'une obligation juridique simplement
en sommeil. Les termes et le but du paragraphe j rendent inutile
toute subtile spéculation en la matière.
Il est d'un intérêtdirect, pour la question ici traitée, de noter
la manière dont l'application de l'article 36, paragraphe 5, était,
au début de 1947 comprise par un auteur qui est considéré comme
l'un des commentateurs les plus autorisés du Statut, qui a été
membrede la Courpermanente et qui a assistépour elle au comitéde
juristes de Washington ainsi qu'au comitépertinent de la Conférence

de San Francisco. Le professeur Manley Hudson déclarait à cette
époque, sans faire état d'aucune exception, quJ«aux termes de
l'article36, paragraphe 5, les déclarations faites antérieurement en
vertu de l'article 36 doivent êtreconsidérées commeétant encore
en vigueur, pour autant qu'elles ne sont pas expiréesconformément
àleurs termes, ((dans lesrapports entre parties au présent Statut )».
(American Journal of International Law, vol. 41, 1947; p. IO.)
Il énumérait ensuite les pays dont les déclarations antérieures
étaient en vigueur ((jusqu'à la fin de 1946 ». La liste comprenait
la Thaïlande. Il n'indiquait nullement que la dissolution de la

Cour permanente en avril 1946 eût entraîné la caducité de la décla-
ration de la Thaïlande qui n'était, en fait, devenue membre des
Nations Unies qu'en décembre 1946. M. Hudson, après avoir men-
tionné certains autres États dont les déclarations étaient venues à
expiration au cours de l'année 1946 et avaient étérenouvelées par
la suite, faisait alors état de la déclaration de la Suède, venue à
expiration ((au cours de l'année ))- à savoir, disait-il, le 16 août
1946 - et non renouvelée. Là encore, il n'était pas suggéré que
la déclaration de la Suède,qui ne devint partie au Statut qu'en 1947,

eût expiré au moment de la dissolution de la Cour permanente.
Elle avait expiré le 16 août 1946. Our conclusion is that we cannot, in the matter of the meaning
of the terms "which are still in force", uphold an interpretation
which departs from the accepted and ordinary use of terms; which
is at variance with the admitted sense of corresponding terms in
other provisions, immediately following or preceding, of the Sta-
tute;which introduces into paragraph 5 an extraneous factor which
it was the very purpose of that provision to exclude; and which, if
accepted, might have frustrated or considerably reduced the effect
of paragraph 5. We hold that the terms in question refer not to the
dissolution of the Permanent Court but to the validity, in point of
time, 'of the declarations of acceptance on the date of the entry
into force of the Charter or of the declarant State becoming aparty
to the Statute. For these reasons we must reject the First Prelimi-

nary Objection of Rulgaria in so far as it is based on that particular
submission.

The second main ground by reference to which the First Preli-
minary Objection is upheld is that paragraph 5 of Article 36 applies
only to original Members of the United Nations. Apart from one
passing reference, in the course of the oral argument, in connec-
tion with the exclusion of former enemy States from the opera-
tion of paragraph 5, that particular ground was not invoked by
Bulgaria. It was not argued by the Parties either in the written

or in the oral proceedings.
There is nothing in paragraph 5, or in the preparatory work of
the Conference of San Francisco, or in general principles of inter-
national law, or in the various provisions of the Charter to sub-
stantiate the view that that paragraph applies only to original
Members of the United Nations in the sense of Article 3 of the
Charter. Unless otherwise expressly provided, the provisions of the
Charter apply in equal measure to every State which becomes a
Member of the vnited Nations. In relation to Members of the
Cnited Nations, whatever may be the date of their adherence, no
provision of the Charter can be res inter alios acta so as to bind
some but not other Members. The proposition that the rights and
obligations of the Charter Vary in this respect as between the
various Members of the United Nations is contrary to the entire
structure of the Charter and the relevant principles, generally
accepted, of international law on the subject. In practice, any such

proposition, if accepted, would lead to serious consequences.
52 En conclusion, nous ne pouvons, en ce qui concerne le sens des
termes cwhich are still iiz jolrc)),retenir une interprétation qui
s'écarte du sens admis et ordinaire des mots; qui s'écarte du sens
admis des termes correspondants figurant dans d'autres dispositions
qui précèdentou suivent immédiatement dans le Statut; qui intro-
duit dans le paragraphe j un élbmentétranger que cette disposition
avait précisémentpour but d'exclure; et qui, si elle avait étéaccep-

tée, aurait mis en échec ou considérablement réduit l'effet du
paragraphe 5. Nous estimons que les termes en question visent non
pas la dissolution de la Cour permanente, mais la validité dans le
temps des déclarations d'acceptation la date d'entrée en vigueur
de la Charte, ou la date à laquelle 1'Etat déclarant devient partie
du Statut. Pour ces motifs, nous devons rejeter la première exception
préliminaire de la Bulgarie en tant qu'elle se fonde sur cette conclu-
sion particulière.

Le deuxième motif principal pour lequel la première exception
préliminaire est admise est que le paragraphe 5 de l'article 36
s'applique seulement aux Membres originaires des Sations Lnies.
En dehors d'une mention faite en passant, au cours des plaidoiries,
à propos de l'exclusion des Etats ex-ennemis du domaine d'appli-
cation du paragraphe 5, ce motif particulier n'a pas étéinvoquépar
la Bulgarie. Il n'a étédiscuté par les Parties ni dans la procédure
écrite, ni dans la procédure orale.
Rien, ni dans le paragraphe j, ni dans les travaux pr5paratoires
de la Conférencede San Francisco, ni dans les principes généraux
du droit international, ni dans les diverses dispositions de la Charte,
ne justifie I'idéeque ce paragraphe s'applique seulement aux Mem-

bres originaires des Nations Unies, tels qu'ils sont définiàl'article 3
de la Charte. Amoins qu'il n'en soitexpressément disposéautrement,
les dispositions de la Charte s'appliquent également à tous les Etats
qui deviennent Membres des Kations Unies. Pour les Membres des
Nations Unies, quelle que soit la date de leur adhésion, aucune
disposition de la Charte ne saurait êtreresinter alios acta,de manière
à êtreopposable aux uns, mais non aux autres. L'idéeque les droits
et obligations de la Charte varient à cet égard entre les différents
Membres des Nations Vnies est contraire à toute la structure de la
Charte et aux principes pertinents du droit international géné-
ralement admis en la matière. En pratique, toute idéede ce genre,
si on l'acceptait, entraînerait degraves conséquences. Neither can the suggestion be accepted that paragraph 5 does no
more than to give expression to an agreement reached inter se
between the States which participated in the Conference of San
Francisco. The Charter nowhere embodies particular agreements
between particular Members. Any such method would be wholly
alien to itspurpose and character. The provisions of the Charter are
of general application. The sarne applies to the Statute, which is
part of the Charter.

In Ouropinion there is no legal basis for the assertion that, while
the original Membersofthe United Nations could bind themselves in
the matter of the transfer of the declarations under paragraph 5 of
Article 36 of the Statute, they could not bind other States subse-
quentlyadhering to the Charter. It isofthe veryessence ofthe Charter

that its provisions-al1 its provisions-bind States which adhere to
the Charter subsequent to its coming into force. If Article 36 had
provided unconditionally for the obligatory jurisdiction of the
Court-and not merely for the maintenance of existing declarations
in accordance with their terms-it would be binding not only upon
original Members but also upon al1 States subsequently adhering.
It would not be res inter alios actain relation to those States. That
proposition is too fundamental to require elaboration. We consider
it imperative that in deciding any particular controversy, which
may be of a passing character, no countenance should be given to
general propositions such as that there is a difference, with regard
to any obligations of the Charter, between original Members and
others; or that any provision of the Charter can be res l?zteralios
actain relation to States subsequentlyadhering; or that the obliga-
tions of a judicial settlement must be interpreted by reference to
standards more exacting than the interpretation of other obliga-
tions of the Charter.

There is not a single provision of the Charter which registers an
agreement inter se between a limited number of Members of the
United Nations. The Charter, in a number of articles-such as
Articles 43 (2)and (3),52-54, 64, 77 (2)-pro"des for the possibility
of such agreements. But these agreements, .while contemplated or
perrnitted by the Charter, do not form part thereof. The provisions
of the Charter are provisions, applicable to all, of ageneral legisla-
tive treaty which, it was expected, would in due course embrace
ailmembers of the international community. It cannot be admitted
that a treaty of that character was used as an instrument for
embodying pnvate agreements of limited scope and duration
between a lirnited number of Members of the United Nations. On ne peut davantage accepter l'idéeque le,paragraphe 5 se borne
à exprimer un accord conclu inter separ les Etats qui ont participé
à la Conférencede San Francisco. Nulle part la Charte n'incorpore
des accords particuliers entre des Membres particuliers. Toute
méthode de ce genre serait tout à fait étrangère à son but et à son
caractère. Les dispositions de la Charte sont d'application générale.
Il en est de mêmedu Statut, qui fait partie de la Charte.

A notre avis, l'assertion d'après laquelle, alors que les Membres
originaires des Nations Unies pouvaient s'obliger à propos du
transfert des déclarations en vertu du paragfaphe 5 de l'article 36
du Statut, ils ne pouvaient lier d'autres Etats adhérant par la

suite à la Charte manque de fondement juridique. Il est de
l'essence mêmede la Charte que ses dispositions - toutes ses dis-
positions - obligent les Etats qui adhèrent à la Charte après son
entrée en vigueur. Si l'article361avait prévu sans réservela juridic-
tion obligatoire de la Cour - et non pas simplement le maintien
des déclarations existantes, conformément à leurs termes - il
obli erait non seulement les Membres originaires mais encore tous
les 8 tats qui y ont adhéré,par la suite. Il ne serait pas res inter
alios acta à propos de ces Etats. Cette proposition est trop fonda-
mentale pour qu'il soit besoin de la développer. Nous estimons
impératif en tranchant une controverse particulière, qui peut avoir
un caractère passager, de ne pas appuyer des propositions générales
telles que celle d'après laquelle il existe une différence,au regard
d'une obligation quelconque de la Charte, entre les Membres
originaires et les autres; ou celle d'après laquelle une disposition
quelconque de la Charte peut être res inter aLiosacta à l'égard
d'Etats adhérant par la suite; ou encore celle d'aprèslaquelle les
obligations de recourir au règlement judiciaire doivent s'interpréter

par référence à des normes plus exigeantes que l'interprétation
d'autres obligations de la Charte.
Il n'est pas une seule disposition de la Charte qui enregistre un
accord inter se entre un nombre limité de Membres des Nations
Unies. Dans plusieurs articles - tels que les articles 43(2) et (3),
j2-54, 64,77 (2) - la Charte prévoit lapossibilitéde pareils accords.
Mais s'ils sont envisagés ou permis par la Charte, ces accords n'en
font pas partie. Les dispositions de la Charte sont des dispositions,
applicables à tous, d'un traité législatif généralqui, pensait-on,
embrasserait un jour tous les membres de la communauté interna-
tionale. Il est difficile d'admettre qu'un traité de ce caractère ait
étéutilisé comme instrument pour incorporer des accords privés,
de portée et de durée limitées,entre un nombre limité de Membres
des Nations Unies.

53 As it was not known at the time of the signature of the Chartei-
how many signatories would ratif!. it pi-iorto the dissolution of the
Permanent Court, it was possible that the number of States event-
ually bound by what is asserted to be a particular agreement
embodied in paragraph j would be even smaller than that appear-
ing on the face of that provision. Moreover, if the view is acceptec!
that the operation of paragraph j is confined to States which
ratified the Charter prior to the dissolution of the Permanent

Court, the result would have been not only that that was a par-
ticular agreement between a limited number of Members of the
United Nations; the result would have also been that that was an
agreement valid and operative for a period of six months only-the
period between October 1945 and April 1946. We do not find it
possible to admit that a truncated agreement of that kind, between
a limited number of States, can form part of a Charter laying down
the foundations of a universal community of States organized in
the United Nations.
There was no question at the Conference of San Francisco of the
participant States imposing upon future Alembers of the United
Nations any obligations against their will. IVhat the authors of the

Charter were entitled to do, and what in fact they did, was to
provide that it should be a condition of meinbership-whether on
the part of the original Members or of States subsequently adhering
to the Charter-that the existing declarations in the matter of the
Optional Clause should continue in accordance with their terms. 411
Members of the United Nations, whatever the date of their mem-
bership, were to be placed in this respect on an equal footing. The
equality of rights and obligations is, unless otherwise expresslj-
provided, a fundamental feature of the Charter. The act of becoming
a Member of the United Nations, and thus a party to the Statute,
was a consensual act of voluntary choice. But it was an act invol\--

ing automatic consequences in respect of paragraph 5 of Article 36
-as well as in respect of other obligations of the Charter.

These considerations are specially pertinent when it is borne in
mind that the authors of the Charter attached particular impor-
tance to using accurate terminology in designating the entities to
which the provisions of the Charter were intended to apply. Great
care was taken to distinguish, whenever necessary, between "ori-
ginal Members" and "signatory Members" on the one hand and
Members of the United Nations" on the other. For instance,
Article 3 of the Charter contains a definition of what are "original

Members". Article IIO (4) refers explicitly both to "States signa-
tory to the present Charter" and "original Members of the United
Nations". Article 107 refers to a State which is "a signatory to the
present Charter"; Article IIO (1)again refers to "signatory States".
Tt would have been easy for the authors of paragraph 5-who, it is
54 Étant donné que, lors de la signature de la Charte, on ignorait
combien de signataires la ratifieraient avant la dissolution de la
Cour ~ermanente. il était ~ossible aue le nombre dJEtats finalement
liéspar ce qu'on affirme êtreun accord particulier, incorporé au
paragraphe 5,fût encore plus réduit qu'il ne ressort àpremière vue
de cette disposition. En outre, si l'on accepte l'opinion que la mise
en Œuvre du paragraphe 5 se limite aux Etats qui ont ratifié la

Charte avant la dissolution de la Cour permanente, le résultat
aurait éténon seulement qu'il s'agissait d'un accord particulier
entre un nombre limité de Membres des Nations Unies; mais
encore que c'était un accord valable et applicable pour une durée
de six mois seulement - la période allant d'octobre 1945 à avril
1946. Il ne nous est pas possible d'admettre qu'un accord tronqué
de cet ordre, entre un nombre limité d'États, puisse faire partie
d'une Charte posant les bases d'une communauté universelle
d'États organisés en Nations Unies.

A la Conférencede San Francisco, il ne fut pas question pour les
États participants d'imposer aux futurs Membres des Nations

Unies des obligations quelconques contre leur volonté. Ce que les
auteurs de la Charte avaient le droit de faire, et ce qu'ils ont fait
effectivement, c'était de disposer que l'une des conditions de l'ad-
mission comme Membre - qu'il s'agît des Membre: originaires ou
des États qui adhéreraient par la suite àla Charte - serait que les
déclarations existantes se rapportant à la disposition facultative
fussent maintenues conformément à leurs termes. Tous les Mem-
bres des Nations Unies, quelle que soit la date de leur admission,
devaient êtreplacés à ce point de vue sur un pied d'égalité.En
l'absence de disposition contraire expresse, l'égalité des droits et
des obligations est un trait fondamental de la Charte. Lé fait de
devenir Membre des Nations Unies et, par suite, partie au Statut
était un acte consensuel de choix volontaire. Mais c'était un acte

entraînant des conséquences automatiques au regard du para-
graphe 5 de l'article 36 - aussi bien qu'au regard des autres
obligations de la Charte.
Ces considérations sont particulièrement pertinentes si l'on
songe que les auteurs de la Charte attachaient une importance
particulière à l'emploi d'une terminologie exacte pour désigner les
entités auxquelles les dispositions de la Charte étaient destinées à
s'appliquer. Toutes lesfoisque cela a éténécessaire,on a pris grand
soin de distinguer entre les« Membres originaires » et les«Membres
signataires » d'une part et les «Membres des Nations Unies » de
l'autre. Par exemple, l'article 3 de la Charte contient une définition
des «Membres originaires ».L'article IIO (4) vise expressément à

la fois«les États signataires de la présente Charte» et les«Membres
originaires des Nations Unies ». L'article 107 vise un État «signa-
taire de la présente Charte »; l'articleIIO (1) vise encore «les
États signataires ))Il eût étéfacile aux rédacteurs du paragraphe 5 asserted, were fully cognizant of the realities of the situation-to
use the words "original Members of the United NationsJ' or
"States signatory to the present Charter" instead of "parties to the
present Statute". They did not do so. The inference, which is not a
strained one, is that they considered these asserted realities to be
irrelevant. The Court cannot speculate on the question whether
the signatories of the Charter did or did not foresee the long chain
of political events which delayed the admission of a number of
States to the United Nations. Neither, subject to any considera-
tions of a reasonable application of the Statute, can the Court
engage in surmises as to the duration of the delay which the signa-
tories may or may not have considered proper in this connection.

The words "parties to the Statute" occur constantly in the
Statute-to mention only Articles 5 (1), 35, 36 (z), 37. Al1 these
Articles refer to al1the parties to the Statute at any time. It is not
permissible to interpret them in relation to paragraph5 of Article 36,
as meaning "present parties to the present Statute". It will there-
fore be noted that to admit the contention that the operation of
paragraph 5 is limited to original Members of the United Nations
would involve yet anotheralteration ofthe wording ofthat provision.
It would involve a substantial change in the existing text of
paragraph 5. The words "as between the parties to the present
Statute" wouldhave to be altered to read "as between the present
parties to the present Statute".

Admittedly, unlike in the case of the original Members of the
United Nations, the operation of paragraph 5 in relation to States
not represented at the Conference could not be immediate and
auiomatic. That did not signify that those States were excluded
from its operation. What it meant was that their declarations would
be transferred to the International Court of Justice only when they
became parties to the Statute. Professor Manley Hudson, to whom
reference is made in a previous part of the present Opinion, drew
attention to this aspect of the question when writing early in 1946.
He pointed out that "the new paragraph 5 was inserted with the
purpose of preserving some of the jurisdiction of the Permanent
Court for the new Court". After giving the names of the eleven
States which had deposited ratifications of the Charter by 24th Oc-

tober, 1945, and whose declarations made under Article 36 were
in force, he continued: " 'As between the parties to the Statute',
the provision applies to them." He then gave the names of ten other
States who participated inthe Conference and to whose declarations
"the provision will similarly apply from the dates of their deposits
of ratifications". He added: "On the other hand, declarations made
55- qui, soutient-on, étaient parfaitement au courant des réalités
de la situation - d'employer les mots «Membres originaires
des Nations Unies » ou (États signataires de la présente Charte D,
au lieu de ((partiesau présent Statut 1).Ils n'en ont rien fait.
La conclusion, qui n'a rien de forcé, est qu'ils ont jugé sans
pertinence ces prétendus faits. La Cour ne saurait spéculer sur la

question de savoir si les signataires de la Charte ont ou non prévu
la longue suite d'événements politiques qui a retardé l'admission
aux Nations Cnies d'un certain nombre d'États. Elle ne saurait
davantage, sous réserve de considérations touchant à l'application
raisonnable du Statut, s'engager dans des suppositions sur la durée
du délai que les signataires ont pu ou non considérer comme
approprié en la matière.
Les mots (parties au Statut )apparaissent constamment dans le
Statut - nous citerons simplemerit les articles 5 (1),35, 36 (z),37.
Tous ces articles se réfèrentà toutes les parties au Statut, à quelque

moment que ce soit. Il ne saurait être permis de les interpréter à
propos du paragraphe 5 de l'article 36 comme signifiant «les pré-
sentes parties au présent Statut ».On remarquera donc que, pour
admettre la thèse d'après laquelle l'application du paragraphe 5
se limite aux Membres originaires des Nations Unies, on serait
entraîné à une autre modification encore à la rédaction de cette
disposition. Elle entraînerait une modification substantielle du
texte du paragraphe 5 tel qu'il existe. Il faudrait modifier les mots
« dans les rapports entre parties au présent Statut » et lireà leur

place cdans les rapports entre les présentes parties au présent
Statut ». *

Sans doute, à l'inverse du cas des Membres originaires des
Nations Unies, l'application du paragraphe 5 aux Etats non
représentés à la Conférence ne pouvait être immédiate et auto-
matique. Cela ne signifiait pas que ces États fussent exclus de
son application. Cela signifiait que leurs déclarations ne seraient
transférées à la Cour internationale de Justice que le jour où ils

deviendraient parties au Statut. Le professeur Manley Hudson,
déjà cité dans un passage précédent de la présente opinion, a
attiré l'attention sur cet aspect de la question dans un article
datant du début de 1946. Il a souligné que «le nouveau para-
graphe 5 fut inséré pour préserverdans une certaine mesure la
juridiction de la Cour permanente au bénéficede la nouvelle
Cour 1).Après avoir cité les noms de onze Etats ayant déposé
leurs instriiments de ratification le 24 octobre 1945 et dont les
déclarations faites en vertu de l'article 36 étaient en vigueur, il
continuait: «Dans les rapports entre parties au Statut, c'est donc

à ces États que s'applique la disposition. D Il donnait ensuite les
noms de dix autres États ayant participé à la Conférence et aux
déclarations desquels «la disposition s'appliquera de même, àby the following States under Article 36, which were also in force
on October qth, 1945, will not be covered by the provision unless
these States become parties to the new Statute: Rulgaria, Finland,
Ireland, Portugal, Siam, Sweden, and Switzerland" (American

Journal of International Law, Vol. 40 (1946), p. 34)-a statement
showing clearly that in the view of the learned writer those States
were to come within the ambit of the operation of paragraph 5 as
soon asthey became parties to the new Statute.

It is of interest to note here a statement on the subject by the
Australian representative at the First Committee of Commission IV
of the Conference of San Francisco-a statement which, unless
read carefully, may give the impression of lending some support
to the view that the operation of paragraph 5 was intended to be
limited to original Members of the United Nations. His contribution
to the discussion was preceded by those of the representatives of
Canada and the United Kingdom. The first, in refemng to the
proposed paragraph 5, said: "In view of the new paragraph quoted

above, as soon as States sign the Charter, the great majority of
them would be automatically under the compulsory jurisdiction of
the Court because of existing declarations" (United Nations Con-
ference on International Organization, Documents, Vol. 1.3, pp.
247-248). According to the statement of the representative of the
United Kingdom, "some forty States would thereby become auto-
matically subject to the compulsory jurisdiction of the Court"
(ibid., p. 249). The representative of Australia then suggested a
correction of that estimated number of States which would become
automatically bound by the compromise effected through para-
graph 5. In the words of the Record of the Committee : "He desired
to cal1attention to the fact that not forty but about twenty States
would be automatically bound as the result of the compromise.
In this connection he pointed out that of the fifty-one States that
have adhered to the Optional Clause, three had ceased to be in-
dependent States, seventeen were not represented at the Conference,
and about ten of the declarations of other States had expirer
(ibid., p. 266). That statement accurately confined the automatic
and immediate operation of paragraph 5 to the States represented

at the Conference and ratifying the Charter. The declarations of
other States were to be transferred to this Court as soon as they
became parties to its Statute. In their case there would be no
automatic and immediate transfer of declarations.

It would thus appear that the preparatory work of the Conference,
far from casting doubt upon the applicability of paragraph 5 to
56partir de la date du dépôt de leurs instruments de ratification ».
Et il ajoutait: (Par ailleurs, les déclarations faites en vertu de
l'article36, par les États suivants, et qui étaient également en
vigueur le 24 octobre 1945, ne tomberont sous le coup de cette
disposition que s'ils deviennent qarties au nouveau Statut: Rul-
garie, Finlande, Irlande, Portugal, Siam, Suède et Suisse 1)(Ame-
rican Jaurnal of International Law, vol. 40, 1946, p. 34) - cette
phrase montre clairement qu'aux yeux de l'éminent auteur, ces
Etats devaient rentrer dans le domaine d'application du para-

graphe 5 dès qu'ils deviendraient parties au nouveau Statut.

Il est intéressant de noter ici une remarque faite à ce sujet
par le représentant de l'Australie au comité I de la com-
mission IV de la Conférence de San Francisco -- remarque qui,
à moins d'êtrelue attentivement, peut donner l'impression que,
dans une certaine mesure, elle vient à l'appui de l'opinion qu'on
avait entendu limiter l'application du paragraphe 5 aux Membres
originaires des Nations Unies. Son intervention dans la discussion

a été précédéepar celles des représentants du Canada et du
Royaume-Uni. Le premier, visant le projet de paragraphe 5, avait
dit: ((D'après le nouveau paragraphe cité ci-dessus, aussitôt que
les États signent la Charte, la grande majorité d'entre eux tombent
automatiquement sous la juridiction obligatoire de la Cour du
fait des déclarations encore en vigueur. ))(Docunzentsde la Conjé-
rence des Nations Unies sur l'organisation internationale, t. 13,
p. 258. Au dire du représentant du Royaume-Uni, environ (qua-
rante k tats deviendraient automatiquement soumis à la juridiction
obligatoire de la Cour ))(ibid., p.259). C'est alors que le repré-
sentant de l'Australie a indiqué une correction dans l'évaluation
du nombre des États qui seraient automatiquement liés par le

compromis résultant du paragraphe 5. Aux termes du compte
rendu du comité: ((11 attire l'attention sur le fait que non pas
quarante mais vingt États environ seront automatiquement liés
par suite du compromis. A cet égard, sur les cinquante et un
États, qui ont adhéré à la clause facultative, trois ont cesséd'être
des Etats indépendants, dix-sept ne sont pas <représentés à la
Conférence,et les déclarations d'une dizaine des Etats restant sont
venues à expiration ))(ibid., p.267). C'est à juste titre que cette
intervention a limité l'application automatique et immédiate du
paragraphe 5 aux États représentés à la Conférence et ratifiant
la Charte. Les déclarations des autres États devaient être trans-
féréesà la présente Cour dès qu'ils deviendraient parties au Statut.

Dans leur cas, il ne devait pas y avoir de transfert automatique
et immédiat des déclarations.
Il semblerait donc que, loin de jeter un doute sur l'applicabilité
du paragraphe 5 aux États non représentés à la Conférence, ses
56States not represented at the Conference, confinns its operation in
relation to them as soon as they become parties to the Statute.
However, the records of the Conference show more directly-in
a manner which leaves no room for doubt-that the operation of
paragraph 5 of Article 36, as well as that of Article 37, was not
intended to be limited to States participating in the Conference of

San Francisco. It is sufficient to quote here literally the full text
of the relevant part of the Report of the Rapporteur of the Main
Committee IV/r (United Nations Conference on International
Organizations,Docz~ments,Vol. 13, pp. 384-385). The text of that
Report speaks for itself. The Rapporteur said with regard to
Article 37:
"(a) It is provided in Article 37 of the draft Statute that where
treaties or conventions in force contain provisions for the reference
of disputesto the old Court such provisions shall be deemed, as
between the members of the Organization, to be applicable to
the new Court."

It will thus be seen that with regard to Article 37 its operation was
to be automatic, "as between the members of the Organization",
with no distinction being made between the date of their adherence
to the United Nations. With regard to paragraph 5 of Article 36,
the language of the Report is even more specific:
"(b) It is provided in paragraph 4 [nowparagraph 51of Article 36
of the draft Statute that declarationsmade under Article 36 of
the old Statute and still in force shall be deemed as between
parties to the new Statute to apply in accordance with their terms
to the compulsory jurisdiction of the new Court."

Nothing could express more clearly the intention that paragraph 5
of Article 36 should be operative "as between the parties to the
new Statute", which can only mean States which become Parties
to the new Statute at any time.
The Rapporteur, after having thus examined the position of the
Members of the United Nations and of the Parties to the Statute,
proceeded as follows :

putes arising between parties to the new Statute and other States,
or between other States, should also be covered in some way, and
it seems desirable that negotiations should be initiated with a
view to agreement that such acceptances will apply to the juris-
diction of the new Court. This matter cannot be dealt with in
the Charter or the Statute, but it may later be possible for the
General Assembly to facilitate such negotiations."

L4ccordingly, there seems to be no room for doubt that the only
acceptances, with regard to which future negotiation and agreementtravaur; préparatoires confirment que ce paragraphe s'applique
à ces Etats dès qu'ils deviennent parties au Statut.
Cependant les procès-verbaux de la Conférence montrent plus
directement - d'une manière qui ne laisse aucune place au doute
- que l'application du paragraphe 5 de l'article 36 et, celle de
l'article 37 n'étaient pas destinées à être limitées aux Etats qui

ont pris part à la Conférence de San Francisco. Il suffit de citer
ici littéralement le texte complet du passage pertinent du rapport
du rapporteur du principal comité IV/I (Documents de la Con-
férencedes Nations Unies sur l'organisation internationale, vol. 13,
p. 419) .e texte de ce rapport se suffit à lui-même. A propos de
l'article 37, le rapporteur déclare :

((a) Il est stipulà l'article 37 du projet de Statut que seront
considéréesentre Membres de l'organisation, comme s'appliquant
à la Cour nouvelle les dispositions des traités ou conventions en
vigueur qui prévoient le renvoi de diflérends à l'ancienne Cour. ))

Cela montre que l'application de l'article 37 devait être auto-
matique ccentre Membres de l'organisation )),sans faire de dis-
tinction quant à la date de leur adhésion aux Nations Unies. Les

termes du rapport sont encore plus précis à propos du paragraphe 5
de l'article 36:
«b) Il est stipuléà l'alinéa4 [devenu par la suite alinéa 51 de
l'article 36 du mêmeprojet de Statut, que les déclarations,encore
en vigueur, faites sous l'empire de l'article 36 de l'ancien Statut
seront considéréese,ntre parties au nouveau Statut, commes'appli-
quant conformément àleurs termes à la compétence obligatoirede
la nouvelle Cour. 1)

Rien ne pourrait exprimer plus clairement l'intention d'appli-
quer le paragraphe 5 de l'article 36 (centre parties au nouveau
Statut »,ce qui ne peut avoir qu'une seule signification: les États
qui deviennent parties au nouveau Statut à quelque date qu ce soit.
Après avoir examiné de la sorte la position des Membres des
Nations Unies et des parties au Statut, le rapporteur continue en
ces termes :

(cc)On devrait également réglerde quelque manière les cas où
compétencea été attribuée à l'ancienne Cour pour connaître des
différendss'élevant, soit entre des États qui seront parties au
nouveau Statut et d'autres États, soit entre ces autres États. Il
semble désirable que des négociations soient entreprises afin
d'obtenir que ces acceptations de compétence s'appliquent à la
nouvelle Cour. Cette question ne saurait être régléeni par la
Charte ni par le Statut. Mais l'Assembléegénéralepourrait ulté-
rieurement se trouver en mesure de faciliter des négociations
utiles))

En conséquence, il ne semble pas qu'on puisse mettre en doute
que les seules acceptations au sujet desquelles il fût nécessaire
57were required were those relating to "disputes arising between parties
to the new Statute and other States, or between other States". No
such negotiations and agreements were required with regard to
acceptances in cases of disputes when both States were to become
parties tothe Statute. A State which became a party to the Statute
ceased to belong to the category of "other States," and no nego-

tiations with that State were required. Article 36, paragraph 5,
became directly applicable to it.

The final Report, as here literally cited, is-in Our view-con-
clusive on the subject. However, it is instructive for its fuller under-
standing to give some details of the history of the drafting of the
provision in question. In particular, it is useful to draw attention
to the successive drafts of Article 37, which was intended to serve
a general purpose similar to that underlying paragraph 5 of Arti-

cle 36.
The First Committee of Commission IV in examining the problem
of transfemng to the present Court the provisions relating to the
reference to the Permanent Court in the treaties and conventions
in force at first adopted the following text of Article7 on June 7th,
1945:
"Whenever a treaty or convention in force between the parties
to this Statute provides for reference of a matter to a tribunal
to have been instituted by the League of Nations, or to the Per-
manent Court of International Justice established by the Protocol
of December 16, 1920, amended September 14, 1929, the matter
shall be referred to the International Court of Justice."

However, on the recommendation of the Advisory Committee of
Jurists of the San Francisco Conference the First Committee
adopted, on June 14th, 1945, a revised text, which constitutes
Article 37 of the present Statute and which is as,follows:
"Whenever a treaty or convention in force provides for reference
of a matter to a tribunal to have been instituted by the League
of Nations, or to the Permanent Court of International Justice,
the matter shall as betweenthe flarties to the present Statute be
referred to the International Court of Justice."

The considerations which led to the adoption of the recommended
revision are explained in the Minute of the First Committee as
follows:
"The Advisory Committee of Jurists in considering Article 37
recommended changeswhereby a treaty or convention which refers
a matter to a tribunal instituted by the League of Nations or to
the Permanent Court of International Justice should be construed, d'entreprendre des négociations et de procéder à des accords

-aient celles relatives à ((des différends s'élevant soit entre des
Etats qui seront part-s au nouveau Statut et d'autres Etats,
soit entre ces autres Etats )j.Aucune négociation, aucun accord
de ce genre n'était nécessaire à, propos des acceptations en cas
de différends,lorsque les deux Etats devaient devenir parties au
Statut. Vn Etat qui devenait partje au Statut cessait de faire
partie de ja catégorie des (autres Etats et aucune négociation
avec cet Etat n'était nécessaire. L'article 36, paragraphe 5, lui
devenait directement applicable.

Le rapport définitif, que nous venons de citer littéralement, est
-- à notre avis - concluant en la matière. Toutefois, il importe
pour mieux comprendre le problènr de donner quelques détails sui

l'historique de la rédaction de la disposition en question. En
particulier, il est utile d'attirer l'attention sur les rédactions
successives de l'article 37, qui était destiné à remplir un but général
analogue à celui du paragraphe 5 de l'article 36.
Le comité I de la commission IV, examinant le problème du
transfert àla présente Cour desdispositions des traitéset conventions
en vigueur relatives au renvoi à la Cour permanente, adopta tout
d'abord, le 7 juin 1945, le texte suivant de l'article 37:

((Lorsqu'un traité ou convention en vigueur entre les parties
à ce Statut prévoitle renvoi à une juridiction que devait instituer
la Société desNations, ou à la Cour permanente de Justice inter-
nationale crééepar leprotocole du 16 décembre 1920, amendéle
14 septembre 1929, l'affaire sera portée devant la Cour inter-
nationale de Justice. ))

Toutefois, sur la recommandation du comité consultatif de
juristes de la Conférence de San Francisco, le comité I adopta le
14 juin 1945 un texte revisé, qui constitue l'article 37 du présent
Statut et qui est ainsi conçu:

c(Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le
renvoi à une juridiction que devait instituer la Société desNations
ou à la Cour permanente de Justice internationale, la Cour inter-
nationale de Justice constituera cette juridiction entre les fiarties
au firésentStatut.))

Les considérations qui ont conduit à adopter la revision recom-
mandée sont exposéesau compte rendu du comité Idans les termes
suivants :
«Le comité consultatif de juristes, après avoir examiné l'ar-
ticle 37, recommande quelques modifications d'après lesquelles un
traité ou convention en vigueur qui prévoitle renvoi d'une question
à une juridiction instituée par la Sociétédes Nations ou à la Cour

58 as between the parties of the present Statute, to refer the matter
to the International Court of Justice. The Article as originally
approved by the Committee provided that only treaties between
agreed that the eliminationlofbthis limitation was desirable since
Article 37 of the Statute now envisages al1 treaties, which will
make it unnecessary to negotiatea new treaty in order to refer a
case to the Court." (Ibid.p. 460.)

It was thus made clear that, so far as parties to the Statute were
concerned, no additional negotiations and agreements were re-
quired. The negotiations with a view to agreement which were at
first thought to be indispensable in regard to the subject-matter of

Article 37 were made unnecessary by the adoption of precisely the
same formula-"shall, as between the parties to the Statute, b..."-
for Article 37 as is embodied in Article 36, paragraph 5, with regard
to the existing declarations of acceptance. Al1 this confirms the
view that paragraph 5 of Article 36 was intended to appk to al1
parties to the Statute, non-signatory aswell as signatory States,
without need of negotiation for any special agreement. In relation
to both provisions the requirement of consent is supplied by the
State concemed accepting membership of the United Nations-an
event which makes it a party to the Statute-and by its forma1
undertaking to observe the obligations of the Charter, of which the
Statute is an integral part.

The case of Thailand is directly instructive on the issue here

examined as well as with regard to the asserted effect of the dis-
solution of the Permanent Court. For reasons which are not relevant
in the present context, Thailand did not participate in the Confer-
ence of San Francisco. On 3rd May, 1940, she had renewed for a
period of ten years her previous declaration of acceptance. She
did not become a Member of the United Nations till16th December,
1946, that is to Say, seven months after the dissolution of the
Permanent Court. According to the view which excludes non-
participating States from the operation of paragraph 5, the Declar-
ation of Thailand, made in 1940 for ten years, became a dead
letter on the date of the dissolution of the Permanent Court,
namely, on 18th April, 1946. This was not the view of Thailand.
She considered herself bound by the Declaration of 1940. Accord-
ingly, she did not deem it necessary to take any action prior to the
expiration of the full period of ten years as laidwn in her Declara-
tion of 1940. When that period expired, she renewed, as from

3rd May, 1950, her acceptance for another ten years. According to
the view which restricts the operation of paragraph 5 to the original
59 permanente de Justice internationale devrait être interprétépar
les parties au présent Statut comme prévoyant ce renvoi à la
Cour internationale de Justice. L'article tel qu'il a d'abord été
approuvé par le comiténe prévoit cette interprétation que pour
d'avis qu'il serait opportun d'éliminercette restriction puisque
l'article37 du Statut s'applique maintenant à tous les traités; la
négociation d'un nouveau traité pour le renvoi d'une question à
la Cour sera donc inutile.))(Ibid.,p. 462.)

Ainsi, il était clair, en ce qui était des parties au Statut, que ni
négociations ni accords supplémentaires n'étaient nécessaires. Les
négociations en vue d'un accord qui avaient été considéréestout

d'abord comme indispensables en ce qui concernait l'objet de l'ar-
ticle 37 étaient rendues inutiles par l'adoption pour l'article 37d'une
formule - ((constituera ...entre les parties au présent Statut »
-qui étaitprécisémentla mêmeque celle qui figure dans l'article 36,
paragraphe 5,au sujet des déclarations d'acceptation en vigueur.
Tout cela confirme l'opinion d'après laquelle le paragraphe 5 de
l'article 36 était destiné s'appliquer à toutes les parties au Statut,
qu'il s'agit d'États signataires ou non signataires, sans qu'il fût
besoin de négociation en vue d'un accord spécial. Pour les deux
dispositions, le consentement nécessaire est apporté par le fait
que l'État intéressk accepte d'êtreMembre des Nations Unies -
ce qui le fait devenir partie au Statut - et qu'il skngage formelle-
ment à observer les obligations de la Charte dont le Statut est une
partie intégrante.

Le cas de la Thaïlande est directement pertinent à l'égard de
la question à l'examen, comme à l'égard du prétendu effet de la
dissoliition de la Cour permanente. Pour des raisons qui n'im-
portent pas ici, la Thaïlande n'a pas participé à la Conférencede
San Francisco. Le 3 mai 1940, elle a renouvelé sa déclaration
d'acceptation antérieure pour une période de dix ans. Elle n'est
devenue membre des Nations Unies que le 16 décembre 1946,
c'est-à-dire sept mois après la dissolution de la Cour permanente.
D'après la théorie qui exclut les États non participants de l'appli-
cation du paragraphe 5,la déclaration de la Thaïlande, faite en
1940 pour une durée de dix ans, serait devenue lettre morte à
la date de la dissolution de la Cour permanente, c'est-à-dire le

18 avril 1946. Tel n'a pas étél'avis de la Thaïlande. Elle s'est
considéréecomme liéepar sa déclaration de 1940. En conséquence,
elle n'a pas jugé nécessaire de prendre aucune disposition avant
l'expiration de toute la période de dix ans énoncéedans sa décla-
ration de 1940. A l'expiration de cette période, elle a renouvelé
son acceptation pour une nouvelle période de dix ans à partir du
3 mai 1950. D'après l'opinion qui limite l'application du para- Members of the United Nations, that attitude of the Government
ofThailand was due to a mistaken estimate of the legal situation.
However, it was an attitude based on a view which met with no
contradiction. Moreover, it is significant that the action taken by
Thailand was undertaken regardless of any existing controversy.

It was an attitude which, having regard to the absence of othe~
State practice bearing directly on the subject, is of particular
weight. We have already referred to the analysis undertaken by
Professor Hudson and confirming that Thailand-together with
some other States who were not original Members of the United
Nations-was covered by the provisions of paragraph 5of Article 36.

In this connection reference must be made to the assertion-
which involves an important issue of interpretation-that the object
of Article 36, paragraph 5, must be limited to original Members of
the United Nations on account of the realities which confronted the
States participating at the Conference of San Francisco and of

which they must be presumed to have had knowledge. It is asserted
that some such limitation must be implied in that paragraph for
the reason that while the original Members were able to assess their
own situation as it existed at that time and their future attitude to
the obligatory jurisdiction of the Court, they were wholly unable to
do so with regard to States which might adhere in the future.

We find it difficult to inderstand what effect any uncertainty as
to the future position of those States could have in the matter of
continuing, on a footing of equality with other declarant States,
their obligations under their declarations of acceptance. It will be
noted that, by virtue of Article 93 of the Charter, those States
could not subsequently become parties to the Statute without the
concurrence of the Security Council and of the General Assembly.

Lndoubtedly, the task of interpretation must not be confined to
a literal interpretation of the bare letter of a provision. When a

treaty is not clear the Court is entitled and bound to take into
consideration the circumstances surrounding its adoption. How-
ever, we consider that it is not within the province of interpreta-
tion to re-write a treaty, by inserting into it extraneous conditions,
in reliance on realities of which, it asserted, the parties were fully
cognizant and to which they were in the position to give effect by a
form of words of utmost brevity if in fact that had been their
intention. They could have done it in the present case by saying
in paragraph 5, instead of "as between the parties to the present
Statute", "as between the original Members of the United Nations".graphe j aux Membres originaires des Sations LTnics,l'attitude
du Gouvernement de la Thaïlande procédait d'une conception
erronée de la situation juridique. Toutefois, cette attitude reposait
sur une opinion qui n'a pas étécontredite. Au surplus, il est
significatif que la mesure prise par la Thaïlande l'ait étéindépen-
damment de toute controverse en cours. ,C'est une attitude qui,

eu égard à l'absence d'une pratique des Etats différente, se rap-
portant directement à la matière, présente un intérêtparticulier.
Nous avons déjà mentionné l'analyse entreprise par le professeur
Hudson-et confirmant que la Thaïlande - ainsi que quelques
autrcs Etats qui n'étaient pas Membres originaires des Nat'ions
Unies - relevait du domaine des dispositions du paragraphe 5
de l'article 36.

A ce propos, il faut rappeler la théor-e qui soulève un important
problème d'interprétation - d'après laquelle on doit limiter l'objet

de l'article36, paragraphe 5, aux Membres originaires des Nations
Unies, en raison des réalitésen face desquelles se trouvaient les
Etats qui ont pris part à la Conférencede San Francisco et dont il
faut présumer qu'ils ont eu connaissance. On prétend qu'une limi-
tation en ce sens résulte implicitement de ce paragraphe pour le
motif que, si les Membres originaires pouvaient apprécierleurpropre
situation telle qu'elle existait à l'époque et leur attitude à venir
à l'égard de la juridiction obligatoire de la Cour, ils étaient
tout à fait incapables de le faire en ce qui concernait les Etats
pouvant adhérer à l'avenir.
Il nous est difficile de comprendre les conséquences que pourrait
avoir une incertitude quelconque sur la position de ces Etats dans

l'avenir en ce qyi concerne la continuation, sur un pied d'égalité
avec les autres Etats déclarants, de leurs obligations aux termes de
leurs déclarations d'acceptation. On remarquera qu'en vertu de
l'article93 de la Charte, ces Etats ne pouvaient ultérieurement
devenir parties au Statut sans le concours du Conseil de Sécurité
et de l'Assembléegénérale.
Sam doute, la tâche de l'interprète ne doit pas se limiter àdégager
le sens littéral du seul texte d'une disposition. Lorsqu'un traité
n'est pas clair, la Cour a le droit et le devoir de tenir compte des
circonstances qui ont accompagné son adoption. Néanmoins, nous
estimons qu'il ne rentre pas dans le domaine de l'interprétation de

rédiger à nouveau un traité en y insérant des conditions extérieures,
en invoquant des réalitésdont, prétend-on, les parties avaient pleine
connaissance et auxquelles elles étaient en mesiire de donner effet
par une rédaction de la plus grande concision si, en fait, telle avait
étéleur intention. Elles auraient pu le faire dans le cas actuel en
disant au paragraphe j, au lieu de «dans les rapports entre parties
au présent Statut ».(cdans les rapports entre les Membres origi-
60This they did not do and, clearly, they did not wish to do. Their
intention, as shown at the beginning of this Opinion, was to main-
tain the maximum-not the minimum-of existing declarations.
It is particularly appropriate in this connection to draw attention
to the principle of interpretation to which the Court gave emphatic
expression in the Advisory Opinion on the Acquisition of Polish
Nationality : "The Court's task is clearly defined. Having before
it a clause which leaves little to be desired in thenature of clearness,
it is bound to apply this clause as it stands, without considering
whether other provisions might with advantage have been added
to or substituted for it." (P.C.I.J.,Series B, No. 7, p. 20.)

Moreover, a closer examination of the realities in question shows
that the problem with which, it is asserted, the authors of the
Statute were confronted hardly existed. What were these States
whose uncertain status and disposition in the distant future made
it imperative to exclude them-not by the normal process of direct

exclusion but by the indirect method of silence in relation to an
otherwise comprehensive provision-from the operation of para-
graph 5 of Article 36? These States were nine in number: Bulgaria,
Estonia, Finland, Ireland, Latvia, Portugal, Sweden, Switzerland
and Thailand. All other declaring States whose declarations had
not expired participated in the Conference of San Francisco and
became subsequently original Members of the United Nations. As
to the nine States referred to above it may be said, in the first
instance, that their future attitudes on the question were irrelevant
if, contrary to Our view, the binding force of their declarations
lapsed in any case with the dissolution of the Permanent Court.

However, it is desirable to consider the asserted position of un-
certainty with gegard to the nine States referred to above. In all
the circumstances, of which the Court must take judicial notice,
the position of Estonia and Latvia created no problem. The declar-
ations of Ireland, Sweden and Switzerland were due to expire

before long and they did in fact expire before those States became
parties to the Statute of the International Court of Justice. There
thus remained three States-Bulgaria, Portugal and Thailand-
whose future position may have given rise to uncertainty. With
regard to these States, any dangers of their premature adherence
to the Statute or any kind of uncertainty were fully met by the
fact that inorder to become parties to the Statute they would have
either had to be admitted to the United Nations or comply with the
conditions determined by the Security Council and the General
Assembly in accordance with Article 93 (2)of the Charter. In Our
view there is no room for an interpretation which alters the terms
of paragraph 5 and reduces its effectiveness by reference to realities
of such small compass. INCIDENT .~ÉRIEN (OPIX. DISSIDEKTE COLLECTIVE)
184
naires des Nations Unies ». Elles n'en ont rien fait et, de toute
évidence, elles n'ont pas désiré le faire. Leur intention, ainsi qu'il
a été démontréau début de notre opinion, était de maintenir le
nombre maximum - et non pas mininium - de déclarations
existantes. Il est particulièrement légitime à ce propos d'attirer

l'attention sur le principe d'interprétation auquel la Cour a donné
une expression vigoureuse dans l'avis consultatif sur l'Acquisition
de la nationalité polonaise: ((Le devoir de la Cour est nettement
tracé. Placée en présence d'un texte dont la clarté ne laisse rien à
désirer, elle est tenue de l'appliquer tel qu'il est, sans qu'elle ait à
se demander si d'autres dispositions auraient pu lui êtreajoutées ou
substituées avec avantage. ))(C.P. J. I., Shie B, no 7, p. 20.)
Au surplus, en examinant de plus près les réalitésen question,
on s'aperçoit que le problème auquel les auteurs du Statut avaient,
dit-on, à faire face existaità peine. Quels étaient les États dont la
situation incertaineet les intentions dans un lointain avenir impo-
saientde lesécarterdu domaine du paragraphe 5 de l'article 3- non

pas par leprocédénormal d'uneexclusion directe, mais par la métho-
deindirecte du silence à propos d'une disposition par ailleurs conçue
en termes larges ? Le nombre de ces États était de neuf: la Bulgarie,
l'Estonie, la Finlande, l'Irlande, la Lettonje, le Portugal, la Suède,
la Suisse et la Thaïlande. Tous les autres Etats déclarants dont les
déclarations n'étaient pas expirées ont participé à la Conférence
de San Francisco et. par la suite, sont devenus Membres originaires
des Nations Unies. Quant aux neuf États énumérés plus haut, on
peut dire tout d'abord que leur position future sur la question
était sans pertinence si, contrairement à notre avis, la force obliga-
toire de leurs déclarations expirait en tout cas avec la dissolution
de la Cour permanente.

Toutefois, il est souhaitable d'examiner la prétendue incertitude
au sujet des neuf États mentionnés plus haut. En tout cas, pour
autant que la Cour dût en connaître judiciairement, la position de
l'Estonie et de la Lettonie ne posait pas de problème. Les déclara-
tions de l'Irlande, de la,Suède et de la Suiçse devaient expirer sous
peu et, en fait, expirèrent avant que ces Etats ne fussent devenus
parties au Statut de la Cour internationale de Justice. 11restait
donc trois États - la Bulgarie, le Portugal et la Thaïlande -.dont
la position à venir aurait pu donner lieu à une incertitude. En ce
qui est de ces Etats, tout risque d'adhésion prématuréeau Statut,
ou toute espèce d'incertitude, était pleinement prévu du fait que,
pour devenir parties au Statut, il leur fallait ou bien êtreadmis aux

Nations Unies, ou bien se confornier aux conditions fixéespar le
Conseil de Sécuritéet par l'Assembléegénérale, en application de
l'article93 (2)de la Charte. -4 notre avis, il n'y a pas de place pour
une interprétation qui modifie les termes du paragraphe 5 et réduit
ses effets par référence à des réalités d'une portéeaussi limitée. These considerations also supply an ansn-er to the contention-
referred to by Counsel for Bulgaria and confirmed by the records
of the Coriference of San Francisco-that the draftsmen of the

Charter intended to exclude eilemy States from the benefits of
immediate access to the new Court. Hou-ever, that intention \vas
not to pursue a policy of permanent ostracism. As shown in the
"transitional security arrangements" of Article 107 of the Charter,
the intention was to prevent ex-enemy States from obstructing
measures connected with the liquidation of the war. To achieve
that object, it is not necessary to maintain the much wider, and
inaccurate, proposition to the effect that the operation of para-
graph 5 was intended to be limited to the original Members of the
United Nations. So far as the International Court of Justice Ras
concerned, the object of excluding ex-enemy States from immediate
participation in the Court was achieved by laying down that the
transfer of the declarations shall operate only in relation to the
"parties to the present Statute"-a condition whicli could not be
fulfilled without the concurrence, in due course, of the Securitj-
Council and the General Assembly. Any notion, said to have been
entertained in 1945,of permanent ostracism of enemy States became
a matter of the past when, in 1947, the applications of a number
of them were considered by the Security Council and the General
Assembly. On that occasion the stated reason for which the appli-
cation of Bulgaria was opposed by some Governments was not that
she was an ex-enemy State but, inter alia, that she had failed to

coniply with her obligations, contracted in the Treaty of Peace of
1947, to respect human rights and fundamental freedoms. (Seczirity
Council, 0,ficial Records, Second Year, 1947, No. 81, p. 2132.)

Reference may be made in this connection to the Resolution 171
(II) adopted by the General Assembly on 14th November, 1947. In
that Resolution the General Assembly "draws the attention of the
States which have not yet acceptedthe compulsory jurisdiction of
the .Court in accordance with Article36, paragraphs 2 and 5, of the
Statute, to the desirability of the greatest possible number of
States accepting this jurisdiction with as few reservations as
possible" (Resolution 171 (II)). The italicized words "have not yet
accepted" are of particular interest. They suggest that in November
1947, in the view of the General Assembly, the force of paragraph 5
hacl not yet been spent; on that view paragraph 5 had still some
application notwithstanding the dissolution of the Permanent
Court. It was in fact acted upon by Thailand when the time came
to renew her declaration. It may be added that this part of the

Resolution is also of interest inasmuch as it is addressed not to
Members of the United Nations, or to States Members, but to Ces considérations fournissent également une réponse à la théorie

- mentionnée par le conseil de la Bulgarie et confirmée par les
procès-verbaux de la Conférencede San Francisco - d-près laquelle
les rédacteurs de la Charte entendaient exclure les Etats ennemis
du bénéficede l'accès immédiat à la nouvelle Cour. Mais cette
intention n'était pas de suivre une politique d'ostracisme perma-
nent. Comme le montrent les ((dispositions transitoires de sécurité))
de l'article107 de la Charte, l'intention était d'empêcherles Etats
ex-ennemis de faire obstacle aux mesures se rapportant à la liqui-
dation de la guerre. A cette fin, il n'est pas nécessaire de soutenir
la thèse beaucoup plus large, et d'ailleurs inexacte, d'après laquelle

l'application du paragraphe j étaitdestinéeàselimiter aux Membres
originaires desKations Unies. Pour ce qui est de la Cour internatio-
nale de Justice, l'objet de l'exclusion des Etats ex-ennemis d'une
participation immédiate à la Cour était satisfait en posant que le
transfert des déclarations ne prendrait effet que dans les rapports
entre (parties au présent Statut » - condition qui ne pouvait être
remplie, le moment venu, sans le concours di1 Conseil de Sécurité
et de l'Assembléegénérale.Toute idée qui aurait été retenue en
1945 d'un ostracisme permanent des Etats ennemis s'est trouvée
dépassée lorsqu'en 1947 les demandes d'admission d'un certain

nombre d'entre eux ont étéexaminées par le Conseil de Sécuritéet
par l'Assemblée générale.A cette occasion, la raison avouée de
l'opposition de certains gopvernements à la demand~ de la Bulgarie
n'était pas qu'elle fût un Etat ex-ennemi mais, notamment, qu'elle
avait faillià remplir ses obligations, contractées en vertu du Traité
de paix de 1947, de respecter les droits de l'homme et les libertés
fondamentales. (Conseil des écuritéP, rocès-verbauxoficiels, deuxième
année, 1917, no 81, p. 2132.)

A ce propos, il faut mentionner la résolution 171 (II)adoptée par
l'Assemblée généralele 14 novembre 1947. Dans cette résolution
l'Assembléegénérale «attire l'attention des États qui n'ontpas encore
acceptéla juridiction obligatoire de la Cour internationale de Justice
conformément à l'article 36, paragraphes 2 et 5, du Statut de la
Cour, sur l'intérêtqu'il y a à ce que le plus grand nombre possible
d'États acceptent cette juridiction avec le moins de réservespossi-
ble »(Résolution171 (II)). Les mots soulignés (qui n'ont pas encore
accepté 1)sont particulièrement intéressants. Ils indiquent qu'en

novembre 1947, aux yeux de l'Assembléegénérale, l'effetdu para-
graphe 5 n'était pas encore épuisé; d'aprèscette opinion, le para-
graphe 5 pouvait encore s'appliquer dans une certaine mesure,
nonobstant la dissolution de la Cour permanente. En fait, la Thaï-
lande s'y est conformée lorsque le moment fut venu pour elle de
renouveler sa déclaration. On peut ajouter que cette partie de la
résolution est intéressante également en ce qu'elle s'adresse non pas
62 I86 AERIAL INCIDENT (JOINT DISS.OPINION)

States-an indication that in this matter action by reference to
paragraphs 2and 5 of Article 36 was not limited to original Members
or even existing Member States. It is clear from the terms of that
Resolution, when read in its entirety, as well as from the general
practice of the United Nations, that particular care was taken in
the choice of terminology in this respect-namely, whether a
Resolution isaddressed to a State, or a llember State, or a Signatory.

The preceding considerations show that having regard to its
wording and the history of its adoption, as well as to applicable
principles of international law, the operation of paragraph 5 of

Article 36 is not limited to the declarations of those States which
participated in the Conference and which became parties to the
Statute when the Charter entered into force on 24th October, 1945.
It is applicable toalldeclarations which were made under Article 36
of the Statute of the Permanent Court and the time-limit ofwhich
by their own terms rationetemporis, had not expired. It is applicable
to al1declarations which, their duration not having been terminated
by expiration of time, "are still in force" at the time when the
declarant State by its own free will becomes a party to the new
Statute. For these reasons, we feel bound to dissent from the
Judgment of the Court in so far as it adopts the view that para-
graph 5 of Article 36 applies only to original Members of the
United Nations and does not therefore apply to the Bulgarian

Declaration of 1921.

For the reasons stated, Ive are unable to accept the view that
paragraph 5 of Article36 is inapplicable to Bulgaria. We are unable
to accept that view either by reference to the ground, relied upon
by Bulgaria, that the dissolution of the Permanent Court finally

and irrevocably deprived her Declaration of 1921 of al1legal force,
or by reference to the ground, not invoked by Bulgaria and not
argued by the Parties, that paragraph 5 of Article 36 applies only
to the original Members of the United Nations. In our opinion that
provision of the Statute clearly applies to Bulgaria. By adhering
to the Charter and, in addition, by formally and expressly declaring
her intention and determination to respect al1 the obligations of
the Charter-of which the Statute is an integral part-Bulgana
gave her consent to the jurisdiction of the Court as confirmed and
continued by that provision.aux Membres des Nations Unies ou aux États Membres, mais aux
Etats - ce qui indique qu'en cette matière les actes se référant
aux paragraphes 2 et 5 de l'article36 n'étaient pas limités aux
Membres originaires ou mêmeaux États alors Membres. Il ressort
clairement des termes de la résolution prise dans son ensemble,
ainsi que de la pratique généraledes Nations Unies, qu'on a apporté
un soin particulier au choix de la terminologie à ce sujet - à
savoir, indiquer si une résolution s'adresse à un État, à un État
Membre ou à un signataire.

Les considérations qui précèdent montrent qu'eu égard à sa
rédaction et à l'historique de son adoption aussi bien qu'aux
principes de droit international applicables, l'application du para-
graphe 5 de l'articl36 n'est pas limitée aux déclarations de ceux
des États qui avaient participé à la Conférenceet étaient devenus
parties au Statut lors de l'entrée en vigueur de la Charte, l24 oc-
tobre 1945. 11s'applique à toutes les déclarations faites en vertu
de l'article36 du Statut de la Cour permanente et dont le délai
ratione temporis, conformément à leurs propres termes, n'était pas
expiré.Il s'applique à toutes les déclarations qui,leur durée n'ayant
pas expiré par échéancedu terme, «are stilin force» au moment
où l'État déclarant devient de son plein gré partie au nouveau
Statut. C'est pourquoi nous estimons ne pouvoir nous rallier à
l'arrêtde la Cour en tant qu'il adopte l'opinion que le paragraphe5
de l'article36 s'applique uniquement aux Membres originaires des
Nations Unies et, par conséquent, ne s'applique pas à la déclaration

bulgare de 1921.

Pour les raisons que nous avons indiquées, il ne nous est pas
possible'd'accepter l'opinion que le paragraphe 5 de l'articl36 est
inapplicable à la Bulgarie. Nous ne pouvons accepter cette opinion
ni par référenceau motif, invoqué par la Bulgarie,que la dissolution
de la Cour permanente a définitivement et irrévocablement retiré
toute force de droit à sa déclaration de 1921, ni par référenceau
motif, non invoqué par la Bulgarie et non discuté par les Parties,
que le paragraphe 5 de l'article36 s'applique uniquement aux
Membres originairesdes Nations Unies. A notre avis, cette disposi-

tion du Statut s'applique clairement à la Bulgarie. En adhérant à
la Charte et en déclarant, en outre, formellement et expressément
son intention et sa détermination de respecter toutes les obligations
de la Charte - dont le Statut fait partie intégrant-, la Bulgarie
a donnéson consentement à la juridiction de la Cour, telle qu'elle
est confirméeet maintenue par cette disposition.
63187 AERIAL INCIDENT (JOINT DISS. OPINION)

The jurisdiction of the Court is based on the consent of States.
That principle is too firmly established in the jurisprudence of the
Court and in international law in general to require confirmation
by reference to precedents or otherwise. Their authority is beyond
challenge. However, such precedents are altogether irrelevant in the
present case. The required consent was given by Bulgaria when,
on becoming a Member of the United Nations, she accepted the
obligations of Article 36, paragraph5,togetherwith other obligations
of the Charter and of the Statiite. There is no suggestion that,
without her consent, she should be considered bound by her Decla-
ration of 1921 in relation to the International Court of Justice.

If-as is Our vieu7in the present case-paragraph 5 of Article 36,

when interpreted in accordance with the ordinary meaning of its
terms and its clear object as intended by its authors, must be held
to be applicable to Bulgaria, her consent is directly established
by her adherence to the Charter. It was not necessary that that
consent should be given yet another and additional expression. No
such additional consent was required with regard to the numerous
and more substantial obligations of the Charter by which Bulgaria
became bound on becoming a Member of the United Nations. We
are unable to accept the view that obligations of judicial settlement
of disputes on the basis of international law are so drastic and
exceptional as to necessitate such double consent-especially with
regard to a provision which, far from creating a new obligation
either in substance or in duration, is limited to the transfer, to
what is essentially and indisputably an identical judicial organ, of
existing decIarations "for the period which they still have to run
and in accordance with their terms". The meaning and the purport

of paragraph 5 of Article 36 must not be confused with paragraph 2
of the same Article which embodies the system of the Optional
Clause. The two paragraphs cover two different situations. Para-
graph 5, which maintains in force declarations already made,
operates automatically by virtue of the declarant State becoming
a party to the Statute; no additional consent is required in that
case. Paragraph z requires consent expressly declared.

Accordingly, we consider that it is irrelevant in this connection
to invoke the unchallenged principle that the jurisdiction of the
Court must be invariably based on the consent of the parties and
that it must not be presumed. The requirement of consent cannot
be allowed to degenerate into a negation of consent or, what is the
same thing, into a requirement of double consent, namely, of
confirmation of consent already given. The Washington Committee

of Jurists, mentioned at the beginning of this Opinion, envisaged
64 1-ajuridiction de la Cour se fonde sur le consentement des États.
Ce principe est trop fermement établi dans la jurisprudence de la
Cour et dans le droit international général pour qu'il soitbesoin de
le confirmer en invoquant les précédents, ou de quelque autre
manière. L'autorité des précédents n'est pas discutable. Au surplus

ces précédentssont tout à fait sans pertinence dans le cas actuel.
Le consentement nécessairea étédonnépar la Bulgarie lorsque, en
devenant Membre des Nations Unies, elle a accepté les obligations
de l'article36, paragraphe 5,en mêmetemps que les autres obliga-
tions résultant de *la Charte et du Statut. Nous ne prétendons
nullement qu'elle devrait, sans son consentement, êtreconsidérée
comme liéepar sa déclaration de 1921 à l'égard dela Cour inter-
nationale de Justice.
Si - comme telle est notre opinion en la présente affaire -
l'on considère que le paragraphe 5 de l'article 36, lorsqu'on l'inter-
prète conformément au sens ordinaire de ses termes et à son objet
évident, tel qu'il a étéentendu par ses auteurs, est applicable
à la Bulgarie, le consentement de celle-ci est établi directement

par son adhésion à la Charte. II n'était pas nécessaire que ce
consentement reçût encore une autre expression additionnelle.
Aucun consentement additionnel de ce genre n'était nécessaire au
regard des obligations nombreuses et plus importantesrésultant
de la Charte, par lesquelles la Bulgaries'est trouvée liéeen devenant
Membre des Nations Unies. Nous ne pouvons accepter l'opinion
d'après laquelle les obligations de soumettre les différendsau règle-
ment judiciaire sur la base du droitinternational sont si rigoureuses
et si exceptionnelles qu'elles requièrent un double consentement de
ce genre - en particulier à propos d'une disposition qui, loin de
créer une obligation nouvelle, soit quant au fond, soit quant à sa
durée, se limite au transfert à ce qui est essentiellement et indis-
cutablement un organe judiciaire identique, de déclarations exis-
tantes «pour la durée restant à courir d'après ces déclarations
et conformément à leurs termes 1).Il ne faut pas confondre le

sens et le but du paragraphe 5 de l'article 36 avecle paragraphe 2
du mêmearticle, qui incorpore le système de la disposition facul-
tative. Les deux paragraphes visent deux situations différentes. Le
paragraphe 5, qui maintient en vigueur les déclarations déjà faites,
opère automatiquement du fait que l'État déclarant devient partie
au Statut ;aucun consentement supplémentaire n'est nécessairedans
cecas. Leparagraphe 2exige un consentement expressément déclaré.
'. En conséquence, nous estimons qu'il est sans pertinence d'invo-
quer à ce propos le principe non contesté d'après lequel la juridic-
tion de la Cour doit invariablement se fonder sur le consentement
des parties et d'après lequel ce consentement ne saurait se présumer.
La nécessitédu consentement ne saurait dégénérer en négationdu
consentement ou, ce qui revient au même, enexigence d'un double
consentement, à savoir de la confirmation du consentement

déjà donné.
64 the necessity of providing, by way of some special clause, for the
maintenance of existing declarations. One of its sub-Committees

proposed that "provision should be made at the San Francisco
Conference for a specialagreement for continuing these acceptances
in force for the purpose of this Statute"(United Nations Conference
onInternational Organization, Vol. 14,pp. 288-289). That suggested
provision assumed at the Conference of San Francisco the form of
the existing paragraph 5of Article 36. It is difficult to imagine that,
in addition to that provision, paragraph 5 envisaged the necessity
of a further, and more specific, agreement.

We must now consider whether there is some other legal ground,
independent of the interpretation of the terms of paragraph 5 of
Article 36, which places an obstacle to its application to Rulgaria
in the circumstances of tlie present case. In particular, having
regard to some considerations underlying the Judgrnent of the
Court, it is necessary to consider whether that provision, whose
meaning in itself leaves no room for doubt, can be applied consist-
ently with the requirement of reasonableness. Can it be so applied
in relation to an application brought before the Court twelve years

after the entry into force of the Charter and eleven years after the
dissolution of the Permanent Court and the establishment of the
International Court of Justice? To what extent can it accurately
be maintained that it is that factor of reasonableness which must
decisively influence the interpretationof paragraph 5 of Article 36
in the sense that unless that provision is held to have been intended
to apply only to the original Members of the United Nations there
was a danger that other potential parties to the Statute might be
in a position to act upon paragraph 5 at an unreasonably distant
future far removed from the establishment of the International
Court of Justice ?
In applying a legal provision, the Court must not ignore circum-
stances of fact relevant to the test of reasonableness. Such facts, if
relevant, might defeat the claim of the applicant Government to a
remedy by the Court although there is nothing in paragraph 5 of
Article 36 as such to defeat it. However, we have been unable,
after full consideration, to come to the conclusion that in the pre-
sent case any such circumstances are sufficiently weighty to deprive
the applicant State of a remedy to which it may othenvise be
entitled.

With regard to the duration of the operation of paragraph 5, it
would appear from that provision and the reasons which prompted

65 INCIDENT AÉRIEK (OPIN. DISSIDENTE COLLECTIVE) 188

Le comité de juristes de Washington, mentionné au début de la
présente opinion, a envisagé la nécessité d'assurer au moyen
d'une clause spéciale quelconque le maintien des déclarations
existantes. L'un de ses sous-comités a proposé que ((la Conférence
de San Francisco devrait prévoir un accord spécial pour maintenir
ces acceptations en vigueur aux finsdu présent Statnt »(Conférence
des Nations Unies sur l'organisation internationale, vol.14, p. 290).
A la Conférence de San Francisco, la disposition envisagée a pris

la forme du paragraphe 5 actuel de l'articl36.Il est difficiled'ima-
giner que, outre cette disposition, le paragraphe 5 ait envisagé la
nécessitéd'un accord supplémentaire et pliis spécifique.

Nous devons maintenant rechercher si, indépendamment de
l'interprétation des termes de l'article 36, paragraphe 5, il existe
quelque autre motif juridique faisant obstacle à son application
à la Bulgarie dans les circonstances ds la présente affaire. En parti-
culier, eu égard à certaines considérations qui sont à la base de
l'arrêtde la Cour, il est nécessaire de rechercher si cette disposition,

dont le sens en soi ne donne lieu à aucun doute, peut s'appliquer
d'une manière raisonnable. Peut-elle s'appliquer de cette manière
en ce qui concerne une requête soumise à la Cour douze ans après
l'entréeen vigueur de la Charte et onze ans aprèsla dissolutionde la
Cour permanente et l'établissement de la Cour internationale de
Justice? Dans quelle mesure est-il exact de soutenir que c'est le
caractère raisonnable qiu doit déterminer d'une manière décisive
l'interprétationà donner au paragraphe 5 de l'article 36, en ce sens
que si cette disposition n'était pas considéréecomme destinée à
s'appliquer aux seuls Membres originaires des Nations Unies, on
courrait le risque que d'autres parties éventuelles au Statut soient
à mêmede se prévaloir du paragraphe 5 à une date future dérai-
sonnablement éloignéede celle de l'établissement de la Cour inter-
nationale de Justice ?

En appliquant une disposition juridique, la Cour ne doit pas
ignorer les circonstances de fait pertinentes quant au critère du
caractère raisonnable. Ces faits, s'ils sont pertinents, peuvent
ruiner le recours introduit devant la Cour par le Gouvernement
demandeur, bien qu'il n'y ait rien dans le paragraphe 5 qui soit de
nature à faire échec à ce recours. Mais, à la suite d'une étude
approfondie, nous n'avons pu parvenir à la conclusion que pareilles
circonsta,nces aient un poids suffisant, en l'espèce, pour aboutir à
priver 1'Etat demandeur d'un recours auquel il aurait normalement
droit.
En ce qui concerne la durée d'application du paragraphe 5, il
semble résulter de cette disposition et des raisons qui ont motivé

65its adoption that it was intended to be of a transitional character.
Lndoubtedly, there is inherent in the very notion of transition a
certain limitation of time. Thus it would be unreasonable to main-
tain that the period of transition from the Permanent Court to the
International Court should last half a century. To contend that
would be as unreasonable as to maintain that it should last only
six months, for instance, for the period between the coming into

force of the Charter in October 1945 and the dissolution of the
Permanent Court in April 1946. The question bearing on the effect
of the lapse of half a century can be disregarded for the reason
that the extravagance of an affirmative answer is due largely to the
exaggeration inherent in the question.
It is consistent with enlightened practice and principle to apply
the test of reasonableness to the interpretation of international
instruments-a test which follows from the ever present duty of
States to act in good faith. However, the test of reasonablenèss
must itself be applied in a reasonable way; it must not be applied
by reference to contingencies which are in themselves of a mani-
festly exaggerated character; it must not be applied by reference to
examples bordering on absurdity. If a State invokes a provision,
fullygrounded in the treaty, after twelve years from the date of its
adoption, it is contrary to the true test of reasonableness to defeat
itsclaim on the ground that it would be wholly unreasonable for it
to invoke the treaty after fifty or one hundred years. If the manner
in which a State invokes a treaty in a particular case is reasonable,
it is unreasonable to suggest that the interpretation on which it
relies might in extreme cases produce unreasonable results. The
Court is not confronted with a situation arising in1995. It is faced
with a situation which arose in 1957 when Israel invoked the
jurisdiction of the Court. That situation is determined by the entry

into force of the Charter and the Statute in 1945; by the Bulgarian
application for admission to the United Nations in 1947; by her
solemn declarations, made in 1948 and subsequently reiterated,
accepting al1 the obligations of the Charter and the Statute; and
by her admission to the United Nations in 1955. It is true that the
Bulgarian Declaration of 1921 is now the last declaration to which
there apply the provisions of paragraph 5 of Article 36. But this
cannot properly be a reason for refusing to give effect to it. The
periods involved are only twelve years since the Charter came into
force and only two years since Bulgaria became a Member of the
United Nations. International jurisprudence-including that of the
Court itself-shows instances of application of provisions of treaties
concluded in the more distant past.

The Bulgarian Government at no time contended that the
Declaration of 1921 had escaped its notice-though it explained

66son ado~tion au'elle était destinée à être transitoire.sans aucun
doute, 1; notion même de transition contient une idée de limitation

dans le temps. Ainsi, il serait déraisonnable de prétendre que la
périodedetransition entrela Cour permanente et la Cour internatio-
nale doive durer cinquante ans. Cela serait aussi déraisonnable que
de prétendre qu'elle n'aurait dû durer que six mois, par exemple de
l'entrée en vigueur de la Charte en octobre 1945 à la dissolution
de la Cour permanente en avril 1946. La question relative à l'effet
de l'écoulement d'une période d'un demi-siècle peut être écartée,
car le caractère extravagant d'une réponse affirmative provient
dans une large mesure de l'exagération de la question même.

Il est conforme au principe et à la pratique éclairéed'appliquer
le critère du caractère raisonnable à l'interprétation des actes
internationau?; c'est un critère qui procède du devoir qu'ont
toujours les Etats d'agir de bonne foi. Toutefois, le critère du
caractère raisonnable doit lui-même s'appliquer d'une manière
raisonnable; il ne doit pas s'appliquer en invoquant des hypothèses
qui présentent elles-mêmes un caractère manifestement exagéré;

il ne doit pas s'appliquer en invoquant des exemples frisant l'ab-
surdité. Si un Etat invoque une disposition entièrement fondée
sur le traité douze ans après la date de son adoption, il est contraire
au véritable critère du caractère raisonnable de rejeter sademapde
pour le motif qu'il serait tout à fait déraisonnable que cet Etat
invorquât le traité cinquante ou cent ans après. Si la manière dont
un Etat invoque un traité dans un cas donné est raisonnable, il
est déraisonnable de suggérer que l'interprétation sur laquelle il
se fonde pourrait, dans des hypothèses extrêmes, aboutir à des
résultats déraisonnables. La Cour n'a pas àconnaître d'une situation
se présentant en 1995. Elle a à connaître d'une situation qui s'est
produite en 1957, lorsque Israël a invoqué la con~pétence de la
Cour. Cette situation est fixéepar l'entrée en vigueur de la Charte
et du Statut en 1945; par la demande d'admission aux Nations
Cnies formulée par la Bulgarie en 1947; par les déclarations
solennelles faites en 1948, et répétéespar la suite, par lesquelles
ce pays a accepté toutes les obligations de la Charte et du Statut;

et par son admission aux Nations Lnies en 1955. Il est vrai que
la déclaration bulgare de 1921 est maintenant la dernière décla-
ration à laquelle s'appliquent les dispositions de l'article 36,
paragraphe 5. Mais ce n'est pas une raison valable de refuser de
lui donner effet. Les périodes en question ne sont que de douze ans
à partir de l'entréeen vigueur de la Charte et de deux ans à partir
de l'admission de la Bulgarie comme Membre des Xations Unies.
La jurisprudence internationale - y compris celle de la Cour
elle-même - offre des exemples d'application de dispositions de
traités conclus dans un passé plus lointain.
A aucun moment le Gouvernement bulgare n'a soutenu que la
déclaration de 1921 avait échappé à son attention - bien qu'il

66that it deemed it unnecessary to take steps for releasing itself of
the operation, if any, of the Declaration.

It may appear singular, at first sight, that the Bulgarian Declara-
tion of 1921, which had ceased to be operative in relation to the
Permanent Court of International Justice on the dissolution of
that Court, should be deemed to be "still in force" ten years after
the entry into force of the Charter-when Bulgaria became a
Member of the United Nations and ipso factoa party to the Statute
of the International Court. However, the delay in its admission was
due to external circumstances. In view of the true sense of the
phrase "which are still in force", that delay is not relevant to the
question of the applicability of Article 36, paragraph 5. That pro-
vision is clearly not subject to any time-limit. Bulgaria first applied
for membership in 1947. The international situation prevented her
early admission and delayed her becoming a party to the new
Statute. This is an extrinsic cause which cannot affect the legal
forcè of Article 36, paragraph 5. If Bulgaria had become a Member
of the United Nations at the end of 1946, or in 1947, or even 1950,
the transitional provisions of the clear terms of paragraph 5 would
fdy apply to her. We acknowledge that there is room for the view

that on and after 1950 the transition may be held to have been
accomplished; that by that time, with the exception of declara-
tions of indefinite duration, practically al1 declarations covered
by paragraph 5 had lapsed or been replaced by new declarations;
and that the continuity of the Permanent Court was no longer an
object to be fulfilled. To that extent it might be contended, without
obvious exaggeration, that it is unreasonable to resuscitate the
operation of paragraph 5 after that period.

On the other hand, it is of importance not to exaggerate the
degree of unreasonablenessinvolved in the contrary solution. There
is nothing manifestly unreasonable in itself in invoking in 1956 the
Bulgarian Declaration of 1921-a declaration which in 1945 was
aven a new potential lease of life in the Statute of the Court and
which was confirmed by the entry of Bulgaria into the United
Nations in 1955 and, in the preceding years, by her repeated affir-
mation of the intention to be bound by the resulting obligations.

Moreover-and this appears to be a material consideration with
regard to that aspect of the case-it seems to us inadmissible that
a State should be deprived of its rights under an international
instrument for the reason that its object has been substantially,
though not fully, realized. So far as that State is concerned, it is
its interest in that instrument which constitutes its main object.
67ait expliqué qu'il eût jugé inutile de prendre des mesures pour se
libérer, le cas échéant, de l'application de la déclaration.

Il peut sembler à première vue singulier que la déclaration
bulgare de 1921, qui a cesséd'êtreapplicable à l'égard dela Cour
permanente de Justice internationale lors de la dissolution de
celle-ci, doive être considéréecomme ayant été
«still in force))
dix ans après l'entrée en vigueur de la Charte, lorsque la Bulgarie
est devenue Membre des Nations Unies et ipso facto partie au
Statut de la Cour internationale. Toutefois, le retard avec IequeI
elle a étéadmise résulte de circonstances extérieures. Eu égard
au véritable sens du membre de phrase « which are still in jorcD,
ce retard est sans pertinence quant à la question de l'applicabilité
de l'article 36, paragraphe 5. Il est clair que cette disposition
n'est soumise à aucune limite de temps. La Bulgarie a, pour la
première fois, demandé son admission en 1947. La situation
internationale a empêché qu'ellesoit admise plus tôt et a retardé
son accession à la qualité de partie ail nouveau Statut. C'est là

une cause extrinsèque qui ne saurait affecter la force de droit
de l'article 36, paragraphe 5. Si la Bulgarie était devenue Membre
des Nations Unies à la fin de 1946, en 1947 ou pême en 1950,
les dispositions transitoires énoncéesen termes clairs au para-
graphe 5 se seraient pleinement appliquées à ce pays. Nous recon-
naissons la possibilité de soutenir que, à partir de 1950, la tran-
sition pouvait êtreconsidérée commeterminée; qu'à cette date,
sauf les déclarations de durée indéterminée,pratiquement toutes
les déclarations visées par le paragraphe 5 étaient cadgques ou
avaient étéremplacées par de nouvelles déclarations; et qu'il ne
s'agissait plus d'assurer la continuité de la Cour permanente. Dans
cette mesure, on peut soutenir sans exagération évidente qu'il

est déraisonnable de remettre le paragraphe 5 en application
après cette période.
D'un autre côté, il importe de ne pas exagérer le caractère
déraisonnable de la solution contraire. Il n'y a rien de manifes-
tement déraisonnable en soi à invoquer en 1956 la déclaration
bulgare de 1921 - déclaration qui, en 1945, avait potentiellement
reçu un nouveau bail de vie dans le Statut de la Cour et qui a
étéconfirmée par le fait que la Bulgarie est entrée aux Nations
Unies en 1955 et qu'au cours des années précédentes elle avait
affirméà plusieurs reprises son intention d'êtreliéepar les obliga-
tions qui en résulteraient. Au surplus - considération qui semble

être importante pour cet aspect de l'affaire- il nous semble
inadmissible qu'un État soit privé des droits qu'il tient d'un acte
international pour le motif que son but a été atteint de manière
substantielle, quoique non complète. En ce qui concerne cet État,
c'est son intérêtdans cet acte qui en constitue le but principal.
67 It matters little to that State-in the present case the applicant

State-that most or al1 other parties have already benefited from
it and acted upon it. Unless the interested State has been guilty of
negligence or bad faith in pursuing its legal rights, it is entitled to
expect that the treaty will be given effect.

For similar reasons there is an obvious objection to introducing
into the interpretation of paragraph 5the extraneousfactors of the
dissolution or the Permanent Court and of the limitation of its
scope to the original signatories of the Charter and justifying such
interpretation by asserting that its results constitute al1 that the
framers of the Sta-tute could have reasonably hoped to have achiev-
ed. In Our view the reasonable expectation is one which results
from the interpretation of paragraph 5 in accordance with its terms
without adding extraneous considerations. There is a lack of cogency

in the suggestion that the result of the interpretationthus adopted
by way of introduction of extraneous elements is, today, to exclude
in effect only a small number of States-perhaps merely one-
from the operation of that provision. The legal right of a State
must not be disregarded for the reason that it is the right of one
State only. Moreover, as already stated, for al1 the draftsmen of
the Statute knew, the effect of adopting as part of paragraph 5
extraneous tests, such as the dissolution of the Permanent Court
or the requirement of original membership of the United Nations,
might have been such as to exclude a considerable number of
States.
Above all, in judging the reasonableness or otherwise of the
reliance by a State on the terms of an international instrument,
some regard must be had to the nature of the right invoked. It is
one thing for the Court to cut down, by reference to the test of
reasonableness, a substantive claim which causes unfair hardship
or which, through an abusive reliance upon a legal right, puts in
jeopardy important interests of the defendant State. It is another

thing to deny, by reference to the test of reasonableness, a demand,
based on a valid instrument, that the principal judicial organ of the
United Nations should adjudicate upon a controversy by reference
TO international law. A State ought not to be deemed to be acting
improperly if in reliance-even if it be rigid reliance-upon a valid
instrument it asks the Court to declare its competence to administer
international law. It is only in most exceptional circumstances that
a demand, based on a valid treaty, for the exercise of the primary
function of the Court to administer justice based on law can be
held to be unreasonable. These exceptional circumstances may
include the operation of the rule of extinctive prescription after a
68Peu importe à cet État - en l'espèce l'État demandeur - que
la plupart des autres parties ou toutes les autres parties en aient
déjà bénéficié ou s'en soient déjà prévalues. A moins que l'État
intéressén'ait fait preuve de négligence ou de mauvaise foi dans
l'exercice de ses droits, il est fondé à s'attendre à ce qu'il soit
donné effet au traité.

Pour des raisons analogues, il y a une objection évidente à

introduire dans l'interprétation du paragraphe 5 les facteurs
extrinsèques que sont la dissolution de la Cour permanente et la
limitation de ce paragraphe aux signataires originaires de la
Charte et à justifier cette interprétation en affirmant que ses
conséquences correspondent à tout ce que les auteurs du Statut
pouvaient raisonnablement espérer réaliser. A notre avis, ce à
quoi on pouvait raisonnablement s'attendre ressort de l'inter-
prétation du paragraphe 5 conformément à ses termes, sans y
ajouter des considérations extrinsèques. 11 est peu convaincant
de dire que l'interprétation ainsi adoptée en introduisant des
éléments extrinsèques n'a aujo-urd'hui pour résultat effectif que
d'exclure un petit nombre d'Etats - peut-être un seul - de
l'application de la disposition en question. On ne saurait négliger

le droit d'un Etat pour le motif que c'est celui d'un seul État.
Au surplus, ainsi que nous l'avons déjà dit, pour autant que les
rédacteurs du Statut aient pu le savoir, l'introduction dans le
paragraphe 5 de critères extrinsèques tels que la dissolution de
la Cour permanente, ou la nécessitéd'êtreMembre orig?naire des
Nations Unies, aurait pu affecter un grand nombre d'Etats.
Et surtout, en jugeant de la manière raisonnable ou non dont
un Etat invoque les termes d'un acte international, on ne doit
pas perdre de vue la nature du droit invoqué. C'est pour la Cour
une chose que de rejeter, sur la base du critère du caractère
raisonnable, une demande, de fond causant un tort injuste à des
intérêts importants de 1'Etat défendeur ou les mettant en péril
par usage abusif d'un droit; c'en est une autre que de rejeter,
sur la base du critère du caractère raisonnable, une demande

fondéesur un acte valable et tendant à ce que le principal organe
judiciaire des Nations Unies tranche un litige sur la base du droit
international. On ne doit pas considérer qu'un Etat agit à tort
si, se fondant- mêmed'une manière rigide - sur un acte valable,
il demande à la Cour de faire usage de sa compétence pour admi-
nistrer le droit internationaC'est seulement dans des circonstances
exceptionnelles qu'une demande fondée sur un traité valable et
visant l'exercice de la fonction principale de la Cour d'administrer
la justice sur la base du droit peut êtreconsidérée commedérai-
sonnable. Ces circonstances exceptionnelles peuvent comprendre

68prolonged period of inaction on the part of the applicant State.
No such ground has been invoked here.

In the matter of its jurisdiction it is fundamental that only the
legitimate rights of the parties can supply a basis for the decision
of the Court. In this matter we feel bound to adhere to the past
jurisprudence of the Court which, while consistently treating the
element of consent as the decisive factor, has applied the test of
reasonableness as a motive not for defeating but for upholding its
jurisdiction. It did so, early in the history of the Permanent Court,
when in the Mavrommatis Palestine Concessionscase it considered
that its jurisdiction was not defeated by the fact that the negotia-
tions, required by the Mandate, had taken place not between Gov-
ernments but between a Government and the interested private
party (P.C.I.J., Series A, No. 2, pp. 13-15). It did so, on a number
of occasions, when it interpreted consent toits competence to decide
whether there was a breach of international obligation as implying
consent to its competence to award compensation for any breach

of international obligation (case of Certain German interests in
Polish Upper Silesia, P.C.I. J., Series A, No. 7,pp. 23, 25; Corfu
Channelcase, I.C.J. Reports 1949 ,. 26).It frequently acted in the
same way when it interpreted the conduct and the pleadings of the
parties as constituting implied consent to its jurisdiction (Rights
of Minorities in Polish Upper Silesia, P.C.I.J., Series A, No. 15,
pp. 23, 24). We see no reason for departing in the present case from
that practice of the Court.

We deem it necessary to examine a contention which, although

not referred to in the Judgment of the Court, has acquired some
slight prominence and which bears on the interpretation of para-
graph 5. That contention is that the words in the concluding passage
of paragraph 5-"for the period for which they still have to runJ'-
imply that that paragraph covers only those declarations which
contain a time-limit of their validity and that therefore it does not
embrace declarations, such as that of Bulgana, whose duration is
not definitely circumscribed by a limited penod of time. While
that assertion did not appear either in the oral submissions or in the
Conclusions of Bulgaria, it found some place in her written Preli-
minary Objections. From the point of view of purely conceptual
interpretation-for it is on that basis that the argument rests-the
form of words of the concluding passage as cited may cover declara-

69l'application de la règle de la prescription extinctive après une
période d'inaction prolongée de la part de 1'Etat demandeur.
Aucun motif de cette sorte n'a étéinvoqué en l'espèce.
En matière de compétence, il est fondamental que seuls les
droits légitimesdes parties peuvent constituer la base de la décision
de la Cour. A cet égard, nous nous estimons tenus de nous rallier à
la jurisprudence passée de la Cour, laquelle, tout en reconnaissant
constamment un caractère décisif à l'élémentde consentement, a ap-

pliquéle critère du caractère raisonnable comme un motif d'affirmer
sa compétence, mais non de la décliner. Elle l'a fait, au début de
l'existence de la Cour permanente, lorsque, dans l'affaire des Conces-
sions Mavrommatis en Palestine, elle a estimé que sa compétence
n'était pas mise en échecpar le fait que la négociation prescrite par
le Mandat avait eu lieu entre un Gouvernement et la partie privée
intéresséeet non pas entre Gouvernements (C. P. J. I., SérieA,
no 2, pp. 13-15). Elle l'a fait à plusieurs reprises lorsqu'elle a
interprété le fait d'avoir consenti à sa compétence en vue de
dkcider s'il y avait violation d'une obligation internationale comme
constituant un consentement implicite à sa compétence en vue de

fixer une indemnité pour toute violation d'obligation internationale
(affaire relative à Certains intérêtsallemands en Haute-Silésie
fiolonaise,C. P. J. I., SérieA, no 7, pp. 23 et 25; affaire du Détroit
de Corfou, C. I.J. Recueil 1949, p. 26). Elle a fréquemment agi
de la mêmemanière lorsqu'elle a interprété l'attitude et l'argu-
mentation des parties comme constituant un consentement im-
plicite à sa compétence (Droits de minoritésen Haute-Silésiepolo-
naise, C. P. J. I., Série A, nP 15, pp. 23-24) Nous ne voyons
aucune raison pour que l'on s'écarte en la présente affaire de cette
pratique de la Cour.

Nous croyons nécessaire d'examiner une théorie qui, sans
que l'arrêt de la Cour en fasse état, n'en a pas moins pris une
certaine importance et qui porte sur l'interprétation du para-
graphe 5. On affirme que les termes du paragraphe j - ((pour la
durée restant à courir d'après ces déclarations ))- impliquent
que ce paragraphe vise uniquement les déclarations stipulant une
limite à la durée de leur validité et qu'il ne couvre par conséquent

pas les déclarations dont la durée, comme c'est le cas pour la
Bulgarie, n'est pas nettement limitée dans le temps. Bien que
cette thèse n'ait figuréni dans les plaidoiries ni dans les conclusions
de la Bulgarie, elle a trouvé quelque place dans ses exceptions
préliminaires écrites. Du point de vue de la pure logique concep-
tuelle - car c'est là la base de l'argument - la formule de la
fin du paragraphe, qui vient d'être citée, peut s'étendre aux

69tions of indefinite duration; for, in strict logic, these have still to
run for such indefinite time as they may last. However, in Ourview
these words can have only one meaning, namely, that which is
conveyed by the clear purpose which underlay them: in providing
for the transfer to the present Court of the existing declarations,
the Statute cannot be presumed to have intended that they should
continue regardless of the period for which they have still torun.
They were to be maintained "for the period which they still have

to run and in accordance with their terms". If there had been an
intention to exclude from the purview of paragraph 5 declarations
of unlimited duration, that intention could have been expressed
by the addition, at the end of the paragraph, of a simple form of
words: "This provision does not apply to declarations which
contain no time-limit of their duration."
It is not necessary to examine further this particular contention
except to the extent of drawing attention to its consequences. Its
result would have been, in 1945 ,o cut by one half the number of
States otherwise contemplated by a provision intended to secure
the maintenance of the existing jurisdiction of the Court.Itwould
have eliminated declarations which contain no provision for denun-
ciation as well as those which, although originally containing a
provision for possible denunciation, had, by their terms, been
transformed into declarations without a time-limit.The latter were
declarations of a considerable number of States, such as those of
the United Kingdom and Iran which, although expressed initiaIly
for a fixed number of years, contained a clause whereby subsequent
to that period the declarations were to run for an indefinite period,
until denounced. After the expiration of the initial period, thea-
tion of these declarations was indefinite. According to the conten-
tion here examined they, too, would have to be coïisidered as
having remained outside the operation of paragraph 5 and there-
fore extinguished as the result of the dissolution of the Permanent
Court. Thus the declaration of Iran of 2nd October, 1930 , as for
a period of six years and, after expiration of that period, until

notification of abrogation. If the interpretatioexcluding declara-
tions of indefinite duration from the operation of paragraph 5
were correct, then the Iranian Declaration was of no validity when
on 26th May, 1951 he Government of the United Kingdom lodged
with this Court an application invoking that declaration in the case
of the Anglo-Iranian Oil Company. No such ground of invalidity
was advanced by the Iranian Government or referred to by the
Court.
Moreover, if the interpretation contended for had been adopted
by the Court in the present case, its result would be to invalidate,
as from the date of the Judgment of the Court, the existing declara-
tions of a number of States-such as Colombia, Haiti, Nicaragua
and Uruguay.déclarations de durée indéterminée, car, en bonne logique, celles-ci
ont encore à courir pour la période indéterminée de leur durée.
Il nous semble pourtant que ces mots ne peuvent avoir qu'un
sens, à savoir celui qui résulte du but évident qu'ils se proposent;
on ne saurait présumer qu'en prévoyant le transfert à la présente
Cour des déclarations existantes, le Statut aurait envisagé de les
faire continuer quelle que fût la période qui leur restait à counr.
Elles devaient être maintenues «pour la durée restant à courir
d'après ces déclarations et conformément à leurs termes ».Si l'on
avait eu l'intention d'exclure du domaine du paragraphe 5 les
déclarations de durée illimitée, cette intention aurait pu s'ex-
primer par l'addition à la fin du paragraphe d'une simple formule:
«la présente disposition ne s'applique pas aux déclarations qui

ne contiennent pas de limite de durée 1).
Il n'y a rien de plus à dire sur cet argument, si ce n'est pour
attirer l'attention sur ses conséquences.En 1945, il aurait eu pour
résultat de réduire de moitié le nombre des États viséspar ailleurs
par une disposition destinée à assurer le maintien de la juridiction
existante de la Cour. Il aurait éliminé lesdéclarations ne contenant
aucune clause de dénonciation, ainsi que les déclarations qui, tout
en ayant prévu originellement la possibilité d'une dénonciation,
s'étaient, conformément à leurs termes, transformées en déclara-
tions sans limite de durée. Ce dernier cas était celui des décla-
rations d'un grand nombre d'États, telles que celles du Royaume-
Uni et de l'Iran, qui, bien que faites initialement pour un nombre
fixe d'années, contenaient une clause d'après laquelle, après cette
période, elles devaient counr pour une durée illimitée, jusqu'à

leur dénonciation. Après l'expiration de la période initiale, la durée
de ces déclarations était indéterminée. D'après la théorie dont
nous traitons ici, elles auraient dû être considérées,elles aussi,
comme étant restées en dehors du domaine du paragraphe 5 et
comme s'étant par conséquent éteintes par suite de la dissolution
de la Cour permanente. Ainsi, la déclaration iranienne du 2 octobre
1930 avait été faite pour une durée de six ans et, à l'expiration
de ce délai, jusqu'à notification de son abrogation. Si l'inter-
prétation tendant à exclure les déclarations de durée illimitéedu
domaine du paragraphe 5 était exacte, la déclaration iranienne
n'était plus valable lorsque, le26 mai 1951, le Gouvernement du
Royaume-Uni a déposéauprès de la présente Cour une requête
invoquant ladite déclaration en l'affaire deJAnglo-Iranian Oil Co.

Pareil motif de nullité n'a éténi invoqué par le Gouvernement
iranien ni retenu par la Cour.
Au surplus, si elle avait étéadoptée par la Cour dans la présente
affaire, l'interprétation invoquée aurait eu pour résultat d'annuler,
à dater de l'arrêt de la Cour, les déclarations existantes d'un
certain nombre d'États - tels que la Colombie, Haïti, le Nicaragua
et l'Uruguay. It would be difficult to comprehend the ratiolegisof the provision
in question so unexpectedly expressed by verbal indirection. It is
hardly probable that the occasion for maintaining the jurisdiction
of the Court was used by the authors of the Statute as an oppor-
tunity for freeing a number of States of what ha been described

as the unreasonable burden of declarations of unlimited duration
and for cutting down by one half the number of declarations which
would othenvise naturally be in the contemplation of paragraph 5.
It will be noted that the effect of the exclusion from the scope of
the operation of paragraph 5 of declarations which are in form or in
substance of unlimited duration as well as declarations of States
which did not participate in the Conference of San Francisco would
be to reduce to seven the number of declarations covered by that
paragraph. These would be the declarations of Argentina, Belgium,
Bolivia, Brazil, Denmark, the Netherlands and Norway. This does
not seem to be an acceptable interpretation of a provision the inten-
tion of which was to maintain the jurisdiction of the Permanent
Court as a significant measure of compromise between the obliga-
tory and the voluntary jurisdiction of the Court.

For the foregoing reasons we are of the opinion that the First
Preliminary Objection of Bulgaria must be rejected and that the
Court should have proceeded to examine and to adjudicate upon
the other Preliminary Objections.

(Signed) Hersch LAUTERPACHT.

(Signed) WELLINGTON KOO.
(Signed) Percy C. SPENDER. Il est difficile de comprendre lratio legid'une telle disposition
exprimée de façon si inattendue par un détour verbal. Il est peu

probable que les auteurs du Statut aient profité de l'occasion
qu'ils avaient de maintenir la juridiction de la Cour pour libérer
quatorze Etats de ce qu'on a appelé le poids déraisonnable des
déclarations de durée illimitéeet pour réduire de moitiéle nombre
des déclarations qui, sans cela, eussent éténaturellement visées
par le paragraphe 5.
Il est à noter qu'écarter du domaine d'application du para-
graphe 5les déclarations qui, en leur forme ou en substance, sont
d'une durée illimitée, ainsi que celles des États qui n'ont pas
participé à la Conférence de San Francisco, aurait pour effet de
réduire à sept le nombre des déclarations viséespar ce paragraphe.
Il s'agirait des déclarations de l'Argentine, de la Belgique, de la
Bolivie, du Brésil, du Danemark, des Pays-Bas et de la Norvège.
Cela ne semble pas constituer une interprétation acceptable d'une
disposition destinéeà maintenir la juridiction de la Cour perma-
nente à titre de compromis substantiel entre la juridiction obliga-
toire et la juridiction volontaire de laCour.

Pour les raisons qui précèdent, nous sommes d'avis que la
première exception préliminaire de la Bulgarie doit être rejetée

et que la Cour aurait dû procéder à l'examen des autres exceptions
préliminaires et se prononcer sur celles-ci.

(Signé) Hersch LAUTERPACHT.
(Signé) WELLINGTON KOO.

(Signé) Percy C. SPENDER.

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Opinion dissidente collective de Sir Hersch Lauterpacht, M. Wellington Koo et Sir Percy Spender (traduction)

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