Opinion dissidente de M. de Castro

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058-19741220-JUD-01-08-EN
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OPINION DISSIDENTE DE M. DE CASTRO

L'ordonnance de la Cour du 22 juin 1973 a décidéque les pièces
écritesporteraient d'abord sur la question de la compétence de la Cour
pour connaître du différendet sur celle de la recevabilité de la requête.
La Cour aurait dû en conséquence statuer sur ces deux questions préa-
lables.
Malgrécela, la majorité de la Cour décideà présentde ne pas aborder

l'examen de ces questions, considérant que le différend est devenu sans
objet en raison des déclarations faites à diverses occasions par des
autorités françaises sur la cessation des essais nucléaires dans I'atmo-
sphère.
On peut qualifier de prudente cette manière de procéder et les raison-
nements développésà l'appui sont fort savants, mais à mon grand regret

je dois avouer que les arguments avancés ne parviennent pas à me con-
vaincre. Je crois donc devoir exposer les motifs qui m'empêchent de
voter avec la majorité et dire brièvement comment, à mon avis, la Cour
aurait dû se prononcer sur les questions indiquées dans l'ordonnance
mentionnée plus haut.

Divers points relatifs à la valeur des déclarations des autorités fran-
çaises pour la suite de la procédure me paraissent mériter d'êtrerelevés:

1. Je pense que la Cour a bien fait de prendre en considération les
déclarations dont il s'agit. Certes elles ne figurent pas dans les pièces
portées à la connaissance de la Cour mais les unes ont étécitéespar le

demandeur et d'autres sont des faits notoires; ce serait fermer les yeux à
une réalité évidenteque de les ignorer. Vu le défaut du défendeur, la
Cour doit s'assurer par elle-mêmede tout fait pouvant présenter de
l'importance pour la décision de justice qu'elle doit rendre en l'affaire
(art. 53 du Statut). La Cour dispose, en matière de procédure, d'une
liberté que n'offre pas le droit interne des Etats (C.P.J.I. sérieA no 2,

p. 34; art. 30 e48 du Statut).

Comme dans l'affaire du Cameroun septei7triona1,la Cour peut exa-
miner d'office si elle est ou non dans ((l'impossibilitéde rendre un arrêt
effectivement applicable)) (C.I.J. Recueil 1963, p. 33),et si le différend
dont elle est saisie existe toujou-s autrement dit elle peut examiner si,
en raison d'un fait nouveau, il n'y a plus de différendactuel.373 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

Dans I'affaire portéedevant la Cour, ilse pose donc une question d'un
caractère ((pré-préliminaire» (opinion individuelle de sir Gerald Fitz-
maurice, ibid., p. 103) qui doit êtreexaminée préalablement à toute

question de compétence (ibid.,p. 105). II s'agit de savoir si les déclara-
tions des autorités françaises ont ôtéson intérêtjuridiqueà la requêtedu
demandeur, si elles ont une efficacité telle qu'elles rendent superflu un
arrêtde la Cour éventuellement favorable aux prétentions du demandeur.
2. J'ai tout à fait conscience que I'on peut voir dans le vote de la
majorité une marque de prudence. Le <( fait nouveau )constitué par les

déclarations des autorités françaises est d'une importance qu'il ne
faudrait pas méconnaître. Ce sont des déclarations claires, formelles et
réitéréesé , manant des plus hautes autorités, qui montrent que celles-ci
ont sérieusement et délibérément l'intentionde ne plus continuer les
essais nucléaires dans I'atmosphère. Les autorités françaises connaissent

bien l'émoi suscitédans le monde entier par les essais réalisésdans la
région du Pacifique Sud et le soulagement qu'a produit l'annonce qu'ils
allaient se terminer et que I'on passerait désormaisà des essais souterrains.
Ces déclarations sont d'un intérêttout particulier pour le demandeur et
pour la Cour.
II est vrai que le Gouvernement français fait défaut,mais il est constant

que le Gouvernement français a porté à la connaissance de la Cour ses
vues sur l'affaire, d'une manière directe aussi bien qu'indirecte, et que
celles-ci ont été étudiéeest prises en considération dans les décisionsde la
Cour. Cela, le Gouvernement français le sait. 11faut donc supposer que
les autorités françaises ont pu tenir compte de l'incidence possible de leurs

déclarations sur la suite de la procédure.
La confiance justifiéepar les déclarations d'autorités responsables peut
expliquer que la majorité de la Cour ait cru désirablede mettre fin à une
procédure qui lui a semblésans objet. Tout litige a quelque chose d'une
lutte (lis) et il semble prudent pro pare de le tenir pour fini le plus vite
possible; cela correspond d'ailleurs à la fonction pacificatrice qui sied à

un organe des Nations Unies.

3. Mais, cela dit, il convient d'ajouter que la Cour, comme organe
judiciaire, doit tenir compte en premier lieu de la valeur juridique des
déclar+tions des autorités françaises.

ga Cour incombe la tâche d'interpréter le sens et de vérifierle but des
déclarations des autorités françaises. On peut y voir l'exposéd'un pro-
gramme, d'une intention visant le futur, leur but étant d'éclairer tous
ceux qui peuvent s'intéresser à la méthode que les autorités françaises
entendent suivre en matière d'essais nucléaires.On peut encore y voir de
simples promesses de ne plus faire d'essais nucléairesdans l'atmosphère.

Enfin, on peut les considérer comme des promesses donnant naissance à
une véritable obligation juridique.
II est juste de relever qu'il n'a pas un abîme entre l'expression d'une
intention de faire ou de ne pas faire quelque chose à l'avenir et une
promesse envisagéecomme source d'obligations juridiques. Mais il n'en 374 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP.DlSS. DE CASTRO)

reste pas moins que toute déclaration d'intention n'est pas une promesse.
11 existe une différence entre une promesse qui est à l'origine d'une
obligation morale (mêmelorsqu'elle est renforcée par le serment ou la
parole d'honneur) et une promesse qui contraint juridiquement à faire

ou à ne pas faire. C'est une distinction bien mise en vedette dans tous les
droits internes et dont il faut tenir compte davantage encore en droit
international.
Pour qu'une promesse oblige juridiquement un Etat, il faut que les
autorités dont elle émane aient compétence pour obliger I'Etat de cette
façon (question de droit constitutionnel interne et de droit international)

et qu'elles manifestent l'intention et la volonté d'obliger I'Etat(question
d'interprétation). LIfaut donc se demander si les autorités françaises qui
ont fait les déclarations ont pu et ont voulu obliger I'Etat français à
renoncer à toute possibilité de reprendre les essais nucléaires dans
l'atmosphère, mêmeau cas ou de tels essais seraient à nouveau néces-
saires à la défensenationale. Obligation qui, comme toute autre obliga-

tion ayant sa source dans une déclaration unilatérale, ne se présume pas
et doit se manifester clairement pour avoir efficacité endroit (obligatio
autem non oritur nisi ex i'oluntatr certa et plane declarata).

Depuis toujours dans le droit interne et du moins depuis Grotius dans

le droit international se pose la question de savoir quelles sont les con-
ditions nécessaires pour qu'une promesse animo sibi vinculandi oblige en
droit. La naissance d'une obligation de faire ou de ne pas faire à la
charge d'un sujet entraîne une limitation de la libertéde ce sujet (alienatio
cujusdam libertatis) en faveur d'un autre sujet auquel il confère un droit
sur lui-même (signum volendi jus proprium alteri conferri) ;pour cette

raison, et à l'exception des actes gratuits reconnus par le droit (par
exemple, donation, pollicitatio), le droit en généralrequiert un quid pro
quo du bénéficiaireenvers celui qui a fait la promesse. C'est pourquoi, il
ne faut pas l'oublier, toute promesse (la pollicitatio exceptée) peut être
révoquéejusqu'au moment où elle est acceptée en bonne et due forme par
le sujet auquel elle est faite (ante acceptationem, quippe jure nondum

translatum, revocari posse sine injustitia).

4. La Cour a établià l'occasion d'une autre déclaration unilatérale - le
désistement - qu'on doit examiner un acte de ce genre en liaison étroite
avec les circonstances propres à l'espèce(C.I.J. Recueil 1964, p. 19). Et
c'est en tenant compte des circonstances de la cause qu'il faudra répondre

aux questions suivantes:
Les déclarations des autorités françaises viséesdans l'arrêtn'ont-elles
d'autre sens que celui de notifier au peuple français, et si on veut au
monde entier, la politique que le gouvernement suivra en matière d'ex-
périences nucléairesdans le futur immédiat?
Ces déclarations contiennent-elles une vraie promesse de ne plus

jamais faire, en aucune circonstance, de nouveaux essais nucléaires dans
l'atmosphère? ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. D~SS. DE CASTRO)
375

Peut-on voir dans ces déclarations une intention ferme de s'obliger à ne

plus effectuer d'essais nucléairesdans I'atmosphère?

Ces mêmesdéclarations ont-elles une force juridique de nature à
empêcherI'Etat françaisdechanger d'avis et de suivre une autre politique

dans le domaine des expériences nucléaires,de nature à l'obliger envers
d'autres Etats à ne plus faire d'essais nucléairesdans I'atmosphère?
A ces questions, on peut répondre que le Gouvernement français s'est
promis à lui-même et a faitconnaître au public son intention de mettre un
terme aux essais nucléaires dans I'atmosphère à l'avenir. Mais il me

semble qu'il n'est pas possible d'aller au-delà. Je ne vois aucun indice
permettant de présumer que la France ait voulu donner naissance à une
obligation internationale. dotée de la mêmeforce obligatoire qu'un
traité- et envers qui. envers le monde entier?

11me semble que, pour déclarer sans objet le différend porté devant
elle, la Cour a besoin de s'assurer comme d'un fait évidentet hors de doute
que I'Etat français a voulu s'obliger et qu'il s'est obligéjuridiquement à ne
plus faire d'essais nucléairesdans I'atmosphère. Or à mon avis l'attitude

du Gouvernement français donne plutôt à penser qu'il considère que ses
déclarations sur les essais nucléaires appartiennent au domaine de la
politique et touchent à une question relevant du domaine réservéà la
compétence nationale de I'Etat, du fait qu'elle se rapporte à la défense

nationale.
Je comprends bien que la majoritéde la Cour éprouvede la répugnance
à laisser traîner une procédure sans intérêt pratique,visible ou probable.
Mais le respect de la règle de droit tient compte non seulement du
probable mais aussi du possible. C'est ainsi que l'application du droit

devient une garantie de la libertédes Etats et confère aux relations inter-
nationales la sécuriténécessaire.

II. COMIJETEN DE LA COUR

La Cour a considéré,dans son ordonnance du 22 juin 1973, que les

éléments quilui étaient soumis l'autorisaient à conclure que les disposi-
tions invoquées par le demandeur se présentaient comme constituant,
prima facie, une base sur laquelle la compétence de la Cour pourrait
être fondée.Au stade actuel de la procédure, la Cour doit s'assurer qu'elle
a compétence aux termes des articles 36 et 37 du Statut1.

1 Je me crois autoriàéexprimermon opinion sur la compétence dela Cour et
la recevabilité dela requête. Certes lePrésidentSpender a essayé,dans sa déclara-
tionjointà l'arrêt rensur les affairesdu Sud-Oirest africain (C.I.J. Recueil 1966,
p. 51-57), de limiter l'étenduedes questions dont les juges pourraienttraiterdans leurs
opinions. Mais il est àll'encontre mêmdee la pratique suivie dans lesaffairessur
lesquelles la Course prononçait alors. Précisantsa pensée,il a dit qu'ilon ne devrait
pas chercher dansde telles opiniàntraiterde questions totalement étrangàsla
décision dela Cour ou aux motifs donnéspar ell»(ibid., p. 55). Dans la présente1. Compétence de la Cour en vertu de la déclarationdu Gouvernement
de la Républiquefrancaise du 20 mai 1966 (art. 36, par. 2,du Statut)

La première des objections à la compétence de la Cour est fondéesur la
réservefaite par le Gouvernement français pour ce qui est

((des différends nésd'une guerre ou d'hostilités internationales, des
différends nésà l'occasion d'une crise intéressant la sécuritéde la
nation ou de toute mesure ou action s'y rapportant et des différends

concernant des activités se rapportant à la défensenationale)).

Cette réservesemble bien s'appliquer aux essais nucléaires. On a fait
observer, il est vrai, que les essais nucléaires n'entrent pas dans les acti-
vitésse rapportant à la défensenationale, parce que leur but est la mise
au point d'un instrument de destruction massive. Mais ilfaut tenir
compte de ce que nous sommes devant une déclaration unilatérale, une

déclaration facultative d'adhésion à la compétence de la Cour. On doit
donc considérer avant tout I'intention du déclarant - ce que les termes
de la déclaration et les circonstances du moment permettent de connaître.
La formule (défensenationale 1)a un sens large: on parle du ministère de

la défensenationale comme du ministère des armées.La défensenationale
comprend aussi la possibilité d'une réplique à l'offensive d'un ennemi.
C'est l'idéede la (force de frappe n.L'expression emp!oyée(((concernant
des activités se rapportant ))) empêche une interprétation restrictive.

Au reste, l'intention du Gouvernement français de viser par la réservela
question des essais nucléaires est bien connue; il a pris soin de modifier
l'exception 3 de sa déclaration d'adhésiondu IOjuillet 1959 1six semaines
avant la première expérience nucléaire 2.

Le demandeur fait observer que la réservefrançaise est nulle parce que
subjective et automatique, donc nulle comme incompatible avec les
exigences du Statut. Cet argument n'est pas convaincant. Dans l'excep-
tion 3 de la déclaration française, il n'est dit ni expl.icitement ni implicite-

ment que le Gouvernement français se réservela faculté de définir cequi
touche à la défensenationale. Quoi qu'il en soit, si la réserveétait nulle

affaire, il ne me semble pas que les questions de compétence et de recevabilité soient
étrangèresà la décision de la Co~ir.Ce sont celles que vise l'ordonnance de la Cour du
22juin 1973et qui doivent êtretranchées s'il n'est pasévident que le différend manque
d'objet.
1 En ajoutant les mots .et des différends concernant des activités se rapportant à la
défense nationale'1.
2 A mon avis, la Cour n'a pas àexaminer sur ce point les arguments sophistiqués, si
ingénieux qu'ils soient, du demandeur. La caractère objectif de la réserve n'exige pas
que l'on prouve par des donnéesdefait le sens de l'expressc(défensenationale *ou ce
que le Gouvernement français a voulu dire en l'employant. La réservedoit simplement
s'interpréter comme il convienà une déclaration de volonté unilatérale, c'est-à-dire en
tenant compte de la signification naturelle des mots et de l'intention présumée du
déclarant. Ce qu'il faudrait prouveren revanche, c'est qu'elle a un sens contraire au
sens naturel des termes utilisés.comme contraire au droit, elle entraînerait la nullitéde la déclaration, si
bien qu'avec la réservedisparaîtrait la source de lajurisdiction de la Cour
selon I'article 36, paragraphe 2, du Statut. (Dans ce sens, opinion indivi-
duelle Lauterpacht, C.I.J. Recut~ill957, p. 34et 57à 59; opinion dissidente
Lauterpacht, C.I.J. Recueil 1959, p. 101 ; opinion individuelle Spender,

C.I.J. Recueil 1959, p. 59.) La réserven'est pas une déclaration de volonté
indépendante et isolable. La nullité partielle que le demandeur propose
d'appliquer est permise seulement lorsqu'il y a une pluralité de stipula-
tions tout à fait séparées(<< tot sunt stipulationes, quot corpora >),D.45, 1,1,

par. 5) et non lorsque la réserve estla ((base essentielle 1)du consentement
(Convention de Vienne sur le droit des traités,art. 44, par. 3, al. b)) 1.

En véritéla controverse est byzantine. L'exception ou réservefrançaise
indique d'une manière propre à exclure toute espèce de doute que le
Gouvernement français ne confère pas compétence à la Cour pour des
différendsconcernant des activitésse rapportant à la défensenationale. 11
n'existe aucune possibilitéjuridique d'imposer la compétence de la Cour

à l'encontre de la volonté exprimée clairement par un Etat. On ne peut
pas aller contre la lettre et l'esprit de I'article 36 du Statut et de I'articl2,
paragraphe 7,de la Charte des Nations Unies.

2. Compétencede la Cour en vertu de l'Acte de Genève
du 26 septembre 1928 (art.36, par. 1, et art. 37 du Statut)

La question qu'il convient plus spécialement d'examiner est celle de

savoir si l'Acte général estencore en vigueur. Son article 17 est ainsi
conçu :

((Tous différends au sujet desquels les parties se contesteraient
réciproquement un droit seront, sauf les réserves éventuelles prévues
à I'article 39, soumis pour jugement à la Cour permanente de Justice
internationale, à moins que les parties ne tombent d'accord, dans les
termes prévus ci-après, pour recourir à un tribunal arbitral ...))

L'article 37 du Statut dispose:

(<Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations ou à la

Cour permanente de Justice internationale, la Cour internationale de
Justice constituera cette juridiction entre les parties au présent
Statut.))

Le Gouvernement français a fait savoir à la Cour qu'il considère que
l'Acte généralne peut servir de fondement à la compétence de la Cour.
II faut donc examiner les diverses questions soulevées au sujet de I'effi-

1 La séparabilité de la réservedoit être démontrée.Malgréses efforts, le demandeur
n'est pas parvenu étayersa thèsed'arguments convaincants.

128cacité de l'Acte de Genève après la dissolution de la Société desNa-
tions.
a) L'Acte général,comme les traités de l'époquepour la conciliation,

le règlement judiciaire et l'arbitrage, a son origine dans les mêmes pré-
occupations de sécuritéet le même désir d'assurer la paixque le système
de la Société desNations. La question poséeà l'occasion de la présente

affaire est de savoir si l'article 17 de I'Acte n'est qu'une doublure, une
répétition deI'article 36, paragraphe 2, du Statutde la Cour permanente.
S'il en est ainsi, I'article 17 de I'Acte est-il soumis aux vicissitudes de
l'article 36, paragraphe 2, du Statut et aussi aux réserves que celui-ci
- - -
permet?
II y a certes une coïncidence des buts et des moyens entre les articles
cités, mais ce sont des règles indépendantes ayant une vie propre. Cela

semblait généralement admis. Par souci de brièveté, je me borne à citer
l'opinion de deux auteurs français, dont l'autorité n'est pas contestable.
Dans son étude c(L'Acte néuérala-t-il une réelle utilité?». Gallus arrive
à cette conclusion. Il montre les similitudes et ajoute: ((Mais il ne serait

pas exact de dire que l'Acte généraln'est qu'une confirmation du système
de I'article 36 du Statut de la Cour permanente de Justice internationale ))
(Revue de droit international(Lapradelle), tome VILI, 1931,p. 390). Encore

cet auteur tient-il à relever les différencesentre les deux sources de com-
pétence (membres, conditions à remplir pour être membre, réserves
permises, durée, dénonciation) et les complications auxquelles donne lieu
la concurrence de ces deux sources (D. 392-395). Seion lui. l'Acte cons-
\,
titue ((un progrès par rapport au système de l'article 36 du Statut de la
Cour ))(ibid., p. 391).

Dans le même sens,RenéCassin s'exprime ainsi:

((L'adhésiondonnée maintenant par la France au Protocole dudit

article 36 ne fait-elle pas double emploi avec celle donnée au chapi-
treLI de l'Acte générald'arbitrage? Il faut répondre négativement. 1)
(((L'Acte générald'arbitrage )),Questions politiques et juridiques,

A,fSairesétrangères,1931, p. 17.) 1

b) On a fait observer que la réserve envisagéeà I'article 39, para-
graphe 2, alinéab), de l'Acte généralapplicable entre les gouvernements
parties à l'affaire peut êtreconsidéréecomme comprenant l'exception 3
de la déclaration française de 1966.

Cette opinion n'est pas convaincante. La réserve permise par l'Acte
généralvise ((Les différends portant sur des questions que le droit inter-
national laisse à la compétence exclusive des Etats ». Elle coïncide avec

1 Le chapitre II de I'Acte généralintitulé1Du règlementjudiciaire 1commence par
I'article 17.La valeur propre et indépendante de l'Acte, mêmeaprès la dissolution de la
SociétédesNations, ressort clairement des travaux préparatoires à la résolution 268A
(III) de l'Assembléegénérale desNations Unies et du texte mêmede la résolution. l'exception 2 de la déclaration française de 1959 concernant ((des diffé-
rends relatifs à des questions qui, d'après le droit international, relèvent
exclusivement de la compétence nationale )).Cette réserveest maintenue

dans la déclaration française de 1966 (où elle porte aussi le numéro 2).
Mais on a considérénécessaired'ajouter une autre réserve, cellequ'énonce
le point 3, qui vise des différendsconcernant des activités serapportant à

la défensenationale.
L'adjonction faite au point 3était nécessaire pour modifier l'étenduede
la réserve, étant donné les circonstances nouvelles crééespar les expé-

riences nucléaires. Le domaine réservéà la souveraineté nationale ne
comprend pas les différends nésd'actes pouvant éventuellement pro-
voquer des retombéessur des territoires étrangers. Le point 3 injîne de la
réservefrançaise de 1966 a un contenu tout nouveau, différent donc de

celui de l'article 39, paragraphe 2, alinéab), de l'Acte général.
c) Paradoxalement, on a mis en doute que I'Acte soit en vigueur, eu
égardaux travaux qui ontabouti à la résolution 268A (Ill) de l'Assemblée

généralesur la restitution à I'Acte de son efficacitépremière, et eu égard
aussi au libellémêmede cette résolution.

11est vrai qu'on trouve dans les travaux préliminaires des expressions

équivoques. On a dit que le projet de résolution n'impliquerait aucune
approbation de I'Acte de la part de l'Assembléeet que celle-ci seborne-
rait à permettre aux Etats de rétablir, de leur propre gré, ((la validité >)de

l'Acte généralde 1928 (Entezam, Iran) (Nations Unies, Documents
9fJiciels de la troisiènie session del'Assembléegénérale,pr~mière partie,
Comnlission politiqlre spéciale,26" séance,6 décembre 1948, p. 302) 1.De
leur côté, les porte-parole du groupe des républiques socialistes ont

critiqué avec acharnement l'Acte généralpour des raisons politiques, le
considérant comme un instrument sans valeur et créateur de mesures
mort-nées.

Mais les signataires de l'Acte, en parlant de régulariser, de modifier
I'Acte, envisagent de lui restituer sa pleine et ancienne efficacitéet ne
mettent pas en doute sa validité actuelle. Larock (Belgique) précise que
I'Acte général((est tou.jours valable, mais il demande à être remis à

jour ))(ihid., 28e séance, p. 323). Ordonneau (France) déclare que cla
Commission intérimaire propose tout simplement des méthodes pra-
tiques de nature a faciliter l'application de l'Article 33 [de la Charte]))
(;hic/., p. 324). Van Langenhove (Belgique) s'exprime ainsi: ((L'Acte

généralest toujours en vigueur: toutefois son efficacitése trouve diminuée
du fait de la disparition de certains rouages [de la Sociétédes Nations] 1)
(Nations Unies, Doc~rmentsofJicielsdc.la troisième sessionde l'Assemblée

gétiérule,deuxièn~epurtic., scjuncesplc;nières, 198e séance, 28 avril 1949,
p. 176). Viteri Lafronte (Equateur), rapporteur, précisequ' ((il ne s'agit
pas de faire revivre I'Acte de 1928 ni de l'imposer; cet Acte demeure
obligatoire à l'égarddes signataires qui ne l'ont pas dénoncé )) (ibid.,

1 Entezaiii eiiiploie pziit-5frc le terme , v11dans le sens d,pleine efficaci11.

130p. 189).Lapie (France)dit aussi que l'Actede 1928,auquel on propose ((de
redonner sa vigueur première, estun document précieuxque l'on a hérité
de la Société desNations et dont il faut seulement modifier les termes
pour l'adapter à la nouvelle Organisation » (ibid., 199eséance,28 avril
1949,p. 193).Enfin, et sans qu'il soit nécessaire d'allonger cet expospar
d'autres citations, il semble que personne à ce moment-là n'affirme
l'extinction de l'Acte entre ses signataires et qu'on admette au contraire

qu'il est toujours en vigueur entre eux.

La résolution268A (III) en date du 28 avril 1949 sur la restitution à
l'Acte généralde son efficacitépremièremontre bien son but et son inten-
tion. Elle considère que l'Acte se trouve diminuédu fait de la disparition
des organes de la Société des Nations et de la Cour permanente, et que les
amendements indiqués sont de nature à lui restituer son efficacitépre-
mière.La résolutionmet en reliefquede tels amendements

((nejoueront qu'entre les Etats ayant adhéré à l'Acte général ainsi
reviséet, partant, ne porteront pas atteinte aux droits des Etats qui,
parties à l'Acte tel qu'il a étéétablien 1928,entendraient s'en pré-
valoir dans la mesure où il pourrait encorejouer ».

d) Les articles 17, 33, 34 et 37 de l'Acte général,qui se réfèrent à la
Cour permanente de Justice internationale, sont-ils encore applicables
par le jeu de l'article 37 du Statut? Une réponse affirmative semble être
la seule soutenable.
La Cour a répondu indirectement à la question dans l'affaire de la
Barcelona Traction (exceptions préliminaires). M. Armand-Ugon a
montré l'identitéde nature entre les traités bilatérauxde conciliation,
règlement judiciaire et arbitragede l'époqueet le traitémultilatéralqu'est
l'Acte général.Il a dit du traité hispano-belge de 1927qu'il ((n'est autre
chose qu'un Acte général enpetit entre deux Etats)). C'est vrai. Il fait

ensuite leraisonnement suivant:la résolution268A(III) lui paraît démon-
trer sans aucun doute que l'Assemblée générale n'paas cru pouvoir faire
application de l'article 37 du Statutde la Cour aux dispositions de l'Acte
généralvisant la Cour permanente, parce que, pour le transfert ((un
nouvel accord [l'Acte de 19491était indispensable, ce qui signifiait que
l'article 37nejouait pas )(opinion dissidente, C.I.J.Recueil1964,p. 156).
La Cour n'a pas acceptécomme valable le raisonnement de M. Armand-
Ugon; elle a nié implicitement son interprétation concernant l'Acte de
1949 et déclarél'article 37 du Statut applicable àl'Acte générad le 1928 1.
La Cour enseigne que l'objet véritable de la clause juridictionnelle qui
met en jeu la Cour permanente (selon l'article 37) n'est pas ((de désigner
tel tribunal plutôt que tel autre, mais de créer uneobligation de règlement

judiciaire » (ibid., p. 38).

1 Elle ajugéque le traité entrel'Espagneet la Belgiqueest toujoursen vigueur, parce
que l'article37 du Statut lui est applicable. e) La question qui semble fondamentale dans les débatsactuels sur le

maintien en vigueur de I'Actegénéralest celle de savoir si cet instrument a
fait l'objet ou non d'une abrogation tacite.
Le droit international ne voit pas avec faveur l'abrogation tacite des
traités. La convention de Vienne, qu'on peut tenir comme la codification

de la comrnunisopinio en matière de traités(C.I.J. Recueil 1971, p. 47), a
établique ((l'extinction d'un traité))ne peut avoir lieu ((qu'enapplication
des dispositions du traité ou de la présenteConvention))(art. 42, par. 2)

et que l'extinction d'un traité - selon la convention - peut avoir lieu:
((a) conformément aux dispositions du traité; ou b) à tout moment, par
consentement de toutes les parties, après consultation des autres Etats
contractants ))(art. 54).

L'Acte général aétabli sa durée minimale, prévu son renouvellement
automatique par périodesde cinq ans et précisé laforme et les modalités
de la dénonciation (art. 45). L'Acte, comme la convention de Vienne, n'a
pas considéré l'abrogation tacite. C'est normal. L'admettre serait in-

troduire la confusion dans l'ordre international. En outre, si I'on ad-
mettait l'abrogation tacite, il faudrait établir les preuves des facta con-
cludentia à invoquer pour s'assurer du contrarius consensus des parties et

les établir avec une force suffisante pour délierles parties des obligations
contractées en vertu du traité.

f) 11me sembleexagéréde dire du silence entourant l'Acte qu'il est de

nature à faire présumer sa caducité'. On a continué à mentionner l'Acte
dans les répertoires et listes de traités en vigueur; les auteurs en ont fait
autant 2.
M. Basdevant affirme, a la Cour même,que l'Acte général est

toujours en vigueur et qu'il l'est donc entre la France et la Norvège, qui
l'ont toutes deux signé. 11attire l'attention sur le fait que l'Acte a été

1 Le fait que I'on n'a pas recoursà un traité peut être la meilleure preuve de son
efficacité: c'est qu'ila évitéles différendsentre Etats.

2 11est cité comme étant toujours en vigueur par les auteurs les plus qualifiés en
France et dans d'autres pays. Il faut noter tout demêmeles doutes de Siorat sur la
validité de I'Acte après la dissolution de la Sociétédes Nations. II pose le problème de
savoir si I'Acte généralne serait pas devenu caduc pour une autre raison que la dissolu-
tion de la Cour permanente. L'impossibilité d'exécution en raison de la défaillance du
mécanisme de la Société des Nations pourrait êtreinvoquée. Mais, pour qu'il y ait
extinction, il faudrait prouver que les fonctions incombant à la Société desNations
n'ont pas étédévolues à l'organisation des Nations Unies et que la situation, d'une
part, rendrait l'exécution littéralement impossible et, d'autre part, créerait une impos-
sibilitétotale,complète et permanente. On pourrait invoquer aussi ladésuétudemutuel-
lement acceptée. L'auteur signale que l'attitude des parties à l'égard de l'Acte est
difficileinterpréter et relèveque, pour qu'il y ait désuétude,il faudrait établir de façon
indiscutable que les parties ont adopté une attitudecommune en agissant àl'égard de
I'Acte comme s'il n'existait pas et qu'elles ont ainsi réalisé effectivement un accord
tacite en vertu duquel elles considéreraient que l'Acte a pris fin.("L'article 37 du
Statut de la Cour internationale de Justice11Annuairefran~ais de droit international,
1962, p. 321-323.) Il convient de noter que les données citées par l'auteur sont assez
incomplètes.382 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

mentionné dans les observations du Gouvernement français puis ex-
pressément invoqué par l'agent de ce gouvernement comme fondement
de la juridiction de la Cour en l'affaire; il fait égalementremarquer que

l'Acte a étémentionné aussi par le conseil du Gouvernement norvégien
(C.I.J. Recueil 1957, p. 74). Opinion bien autorisée. Mais il me semble
pertinent de noter aussi que la Cour, en rejetant la demande française
dans l'affaire relative à Certains emprunts norvégiens (contre l'opinion de
M. Basdevant), ne met pas en doute la validitéet l'efficacitéde 1'Actel.

L'opinion dissidente de M. Guerrero, sir Arnold McNair, MM. Read
et Hsu Mo, dans l'affaire des Réservesà laConventionpour laprévention
et larépression ducrime degénocide, seréfère aussi à l'Actegénérad l e 1928
et à l'Acte revisé(C.I.J. Recueil 1951, p. 37)2.

Je crois qu'il faut accepter ce qui est dit dans une étudespéciale en la
matière :

((En conclusion on peut affirmer que l'Acte généralde Genèveest
en vigueur envers vingt Etats contractants 3 encore liéspar l'Acte, et
non seulement d'une manière purement formelle, mais qu'il conserve

toute son efficacitépour les Etats contractants malgré ladisparition
de quelques organes de la Société des Nations4.))

g) Etant admis que l'Actegénéral est resté en vigueuro ,n a pu encore
se demander si la déclaration française reconnaissant comme obligatoire
la juridiction de la Cour, avec la réservede 1966 sur la défensenationale,
avait modifiéles obligations prises par la France quand elle avait signé

l'Acte, en particulier celles qu'énonce le chapitre II. En termes plus
généraux,la question est de savoir si les traitéset conventions en vigueur,
où l'acceptation de la compétence de la Cour est spécialement prévue
(hypothèse de l'article 36, par. 1, du Statut), sont subordonnés aux

1 La Cour dit que le Gouvernement français a mentionné l'Acte généralde Genève
mais elle ajoute que cette mention ne saurait être considéréecomme suffisante pour
établir que la requêtedu Gouvernement français se fondait sur'Acte général.aSi le
Gouvernement français avait voulu procéder sur cette base, il l'aurait expressément
déclaré.)La Cour pense que la requête duGouvernement français se fonde clairement
et précisémentsur l'article 36, paragraphe 2, du Statut. Pour cette raison, la Cour ne
croit pas pouvoir rechercher, pour établir sa compétence,un fondement autre que
celui que le Gouvernement français a lui-mêmeénoncédans sa requêteet sur lequel
l'affaire a étéplaidée devant la Cour par les deux Parries,, (C.I.JRecueil 1957,
p. 24-25). 11semble que le Gouvernement français n'ait pas eu intéàês'appuyer sur
l'Acte général parceque celui-ci requiert l'épuisement des recours internes (art. 31 de
l'Acte).
2 L'Acte estencore cité dans C.I.J. Recueil 1961, p. 19. Le Pakistan l'a invoqué
comme fondement de la compétence de la Cour dans sa requêtedu 11mai 1973contre
l'Inde (affaire rayéedu rôle par ordonnance du 15 décembre 197àla suite du désiste-
ment du Pakistan).
3 La France et le Royaume-Uni ont dénoncél'Acte, après l'introduction de la
présenteaffaire.
4 Kunzmann, (1Die Generalakte von New York und Genf als Streitschlichtungs-
vertrag der Vereinten NationenJIDie Friedens- Warte, 56 (1961-1966), Bâle, p. 22.

133déclarations unilatérales des Etats acceptant la compétence obligatoire de
la Cour (hypothèse de l'article 36, par. 2, du Statut), ou dépendent de ces
déclarations, avec pour conséquence que l'abrogation de cette obligation
d'être soumis à la juridiction de la Cour ou sa limitation par de nouvelles
réservesentraîne l'abrogation ou la limitation des obligations assumées en
vertu d'une convention bilatérale ou plurilatérale antérieure.

Le respect dû à la souveraineté des Etats et le caractère facultatif de la
juridiction de la Cour (art. 2, par. 7 de la Charte) ne semblent pas de
nature à écarter le principe pacta sunt servanda, pilier essentiel du droit
international. Une fois la soumission à la compétence de la Cour établie

dans un traitéou une convention (art. 36, par. 1,du Statut), les parties au
traité ou à la convention ne peuvent pas se délier à leur gréet par une
déclaration unilatérale de l'obligation prise envers un autre Etat. Cette
déclaration unilatérale n'aura pas plus de force parce qu'elle prévoit la
compétence de la Cour conformément à I'article 36, paragraphe 2, du
Statut, ou parce qu'elle est assortie de réserves, ou contient la possibilité

de priver arbitrairement la Cour de sa juridiction. Pour se délier de
l'obligation prise, il faudra toujours dénoncer le traité ou la convention,
conformément aux conditions requises par le traité ou la convention en
vigueur.
Même si l'on pense que la déclaration déposée selon l'article 36,
paragraphe 2,du Statut fait naître des obligations de nature contractuelle,

la réponse sera toujours que cette déclaration ne peut libérer 1'Etat
déclarant de tout ou partie des obligations déjà assuméesdans un accord
antérieur, en dehors des conditions déterminéesdans cet accord. Pour
qu'il y ait extinction implicite d'un traité du fait de la conclusion d'un
traité postérieur, il faut avant tout ((que toutes les parties à ce traité
concluent ultérieurement un traité portant sur la même matière ))(con-

vention de Vienne, art. 59).
11faut noter aussi que, entre la déclaration faite en vertu de l'article 36,
paragraphe 2, du Statut et l'Acte général,il n'y a pas d'incompatibilité
engendrant l'abrogation tacite du fait d'un nouveau traité. L'Acte joue
entre ses signataires - groupe fermé de vingt Etats - et impose des

conditions et limitations spéciales aux parties. Le Statut, selon l'inter-
prétation donnée à l'article 36, paragraphe 2, ouvre la porte à presque
tous les Etats (art. 93 de la Charte) et permet d'établir des conditions et
réservesde quelque nature que ce soit, à la différencede l'Acte général.

La relation entre l'Acte généralet l'acceptation postérieure de la

juridiction obligatoire est exposée avec concision et de main de maître
par M. Basdevant :
((Une voie d'accès à la Cour a étéouverte par l'adhésiondes deux

Parties à l'Acte généralde 1928: elle ne saurait êtreferméeou neu-
tralisée par la dispostion restrictive que le Gouvernement français
et non le Gouvernement norvégien a ajoutée à son acceptation384 ESSAISNUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

nouvelle de la juridiction obligatoire énoncéedans sa déclarationde
1949. Cette disposition restrictive, émanant d'un seul, ne fait pas
droit entre la France et la Norvège; elle ne suffit pasà faire échec
au régimejuridique existant entre eux sur ce point; elle ne saurait
fermer la voie d'accèsà la Cour antérieurement ouverte ni la neutra-
liser pour aboutirà l'incompétence.»(C.I.J. Recueil1957, p. 75-76.)

h) Reste toujours un mystère troublant: pourquoi le Gouvernement
français n'a-t-il pas dénoncé l'Acte général entemps voulu et dans les
formes régulières, enfaisant usage de l'article, paragraphe 3, de l'Acte,
au moment (en 1966)où ila déposéavec de nouvelles réserves sadéclara-
tion reconnaissant la compétence de la Cour? 11semble évident que le

Gouvernement français ne voulait pas en 1966 que les questions con-
cernant la défensenationale puissent être portéesdevant la Cour. On
peut ajouter qu'on ne sait pas pourquoi le Gouvernement français a
maintenu la compétence dela Cour en la matière envers les signataires de
l'Acte'. Mais cette anomalie ne saurait êtreconsidéréecomme suffisantt
pour faire présumer une dénonciation tacite de l'Acte généralpar le
Gouvernement français, pour donner àcette dénonciation une efficacité
juridique en violation des dispositions de l'Acte lui-même.L'admettre
serait contraire aux principes les plus respectésdu droit des traités; ce
serait contraireà la sécuritéjuridiqueet mêmeaux exigencesdu droit sur
les présomptions.

1. L'ordonnance du 22juin 1973a décidéque les piècesécrites porte-
raient à la fois sur la question de la compétencede la Cour pour con-
naître du différendet sur celle de la recevabilitéde la requête. LaCour a
suivi ainsi l'article de son Règlement.
Le terme ((recevabilité))est très large, mais l'ordonnance éclaire le
sens dans lequel elle l'emploie en son paragraphe 23 où il est dit qu'on
ne saurait supposer à priori que le demandeur ((ne soit pas en mesure
d'établir à l'égard de ces demandes l'existence d'un intérêt juridique

autorisant la Cour àaccueillir la requêt)).
11convient de se demander si lerequérant a fait valoir ou non dans ses
conclusions un intérêt juridique comme fondement de sonaction. Au
stade préliminaire envisagédans l'ordonnance, il faut voir d'abord si le
demandeur est fondé à engager la procédure (legitimatioad processum,
Rechtsschutzanspruch), à mettre en mouvement la machine procédurale,
avant de procéder à l'examen du fond de l'affaire. Une autre question se
poserait ensuite, celle de savoir si l'intétlléguéest, en fait et en droit,

1 Bien qu'on ait pu avancer des hypothèses pour expliquer cette conduiteen appa-
rencecontradictoire.
135digne de protection juridique 1.Mais elle se rattache au fond de l'affaire
et n'appelle donc pas une étude ici.
Le demandeur fait référenceaux violations par la France de plusieurs

règles de droit et il essaie de montrer qu'il a un intérêtjuridique à se
plaindre de chacune de ces violations. 11 importe donc d'examiner
l'intérêt ainsiinvoqué dans chaque cas de prétendue violation, mais il

semble utile de s'arrêterd'abord sur le sens de l'expression ((intérêt
juridique D.
2. L'idée de l'intérêtjuridique est au centre même des règles de

procédure (((point d'intérêt, point d'action»). Il faut donc l'employer
avec la rigueur propre à sa fonction judiciaire. L'Acte général est un bon
guide à cet effet. Il distingue entre les ((différendsde toute nature ))qui

peuvent êtresoumis à la procédure de la conciliation (art. premier), le cas
d'((un intérêtd'ordre juridique)) dans un différend à fin d'intervention
(art. 36) et ctous différendsau sujet desquels les parties se contesteraient
réciproquement un droit » (art. 17). Ceux-ci sont les seuls convenant au

règlement judiciaire et pouvant être soumis pour jugement à la Cour
permanente de Justice internationale d'après l'Acte généra l.

Comme on peut le voir, l'article 17de l'Acte généralne permet pas une
interprétation extensive de l'intérêt juridique qui peut être invoqué
devant la Cour. Il s'agit d'un droit subjectif propre au demandeur et qui

est au cŒur d'un différend, parce qu'il est matière à contestation réci-
proque entre le demandeur et le défendeur. C'est donc un droit au sens

1 M. Morelli souligne que la distinction entre le pouvoir d'action et l'intérêtsubs-
tantiel est propre au droit interne mais qu'en droit international, ce qu'il faut voir,
c'est s'ily a un différend (opinion individuelle,.J. Recueil1963, p. 132-133). L'obser-
vation ne semble pas très utile. Nier la recevabilité pour manque d'intérêtjuridique du
demandeur ou nier la recevabilité parce qu'il n'y a pas de différenden raison du défaut
d'intérêt juridique du demandeur, cela revient au même. M. Morelli croit devoir

critiquer l'arrêt de962sur le Sud-Ouert africain parce qu'à son avis l'arrêtconfond le
s droit ou pouvoir d'action ,,(qui doit êtreexaminé comme question préliminaire) et
I'existence 1d'un droit ou intérêtjuridique,), d'riun droit subjectif substantiel du
demandeur 1)(qui doit être examiné comme question de fond) (opinion individuelle,
C.I.J. Recueil 1966, p. 61).
2 Sir Gerald Fitzrnaurice a éclairci ce qu'il faut entrendre par différend. 11nous dit
qu'un différendjuridique n'existe que
csi l'issue ou le résulratdu différend,sousforme de décision de laCour, peut affecter

les intérêtsou les rapports juridiques des parties, en ce sens que cette décision
confère ou impose à l'une ou à l'autre d'entre elles un droit ou une obligation
juridique (ou qu'elle confirme ce droit ou cette obligaiton), ou bien qu'elle joue le
rôle d'une injonction ou d'une interdiction pour l'avenir, ou encore qu'elle cons-
titue un élémentde détermination à l'égardd'une situation juridique continuant
à exister1(opinion individuelle, C.I.J. Recuei1963, p. 110).
Enseignement qui n'est pas contredit par I'existence de l'action déclaratoire. A son
sujet, il faut noter qu'il appartient la procédure contentieuse de déclarer I'existence
ou l'inexistence d'un droit subjectif ou d'une obligation juridiqueconcrétiséeou bien
déterminée. Au contraire, la Cour n'est pas tenue de faire une déclaration abstraite ou
généralesur I'existence ou l'inexistence d'une règlede droit objectif ou d'une obligation
généraleou indéterminée. Cette déclaration pourra êtrel'objet d'une demande d'avis
consultatif.

136propre du terme (jus dominativum) dont la nature est d'appartenir à un
Etat ou à un autre, 1'Etat ayant la faculté de négocier à son sujet et d'y
renoncer.
Or le demandeur semble oublier l'article 17 et pense qu'il lui suffit

d'avoir un intérêtcollectif ou général.11cite plusieurs autorités pour
étayer son opinion suivant laquelle le droit international reconnaît à
tout Etat un intérêtd'ordre juridique à ce que d'autres pays observent les
obligations que le droit international leur impose, et suivant laquelle aussi
le droit reconnait l'intérêt detous les Etats à l'égard desgrandes causes

humanitaires.
Si l'on regarde de près les textes cités, on doit en tirer une autre con-
clusion. Dans les affaires du Sud-Ouest africain (exceptionspréliminaires),
M. Jessup montre que le droit international a reconnu que les Etats

peuvent avoir un intérêtjuridiquedans des questions n'affectant pas leurs
intérêts ((concrets ))ou, pourrait-on dire, ((physiques ))ou ((tangibles 1).
Mais Jessup constate aussi que ((des Etats ont fait valoir des intérêts
juridiques de ce genre en se fondant sur un traitén;il mentionne à l'appui

de cette constatation les traités de minorités, la Convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide, des conventions niises
en ceuvre par l'organisation internationale du Travail et le système des
mandats (opinion individuelle, C.I.J. Recueil 1962, p. 425 et suiv.).
L'autre opinion de M. Jessup dans les affaires du Sud-Oiiest africain

(deuxièmephase), où ilcritique l'arrêt dela Cour qui conteste aux deman-
deurs et à tout Etat le droit de recours judiciaire lorsque le demandeur
n'allègue pas un intérêtpropre touchant au fond, est très nuancée.
Jessup tient compte de ce qu'il s'agit de ctl'exécutiond'obligations con-
ventionnelles fondamentales contenues dans un traité avant ce au'on

peut appeler àjuste titre des caractéristiques constitutionnelles ))(opinion
dissidente, C.I.J. Recueil 1966, p. 386). 11précise sa pensée en disant:
((11 n'y a pas d'actio popularis généralementétablie-en droit interna-
tional ))(ibid., p. 387-388). Dans la même espèce, M. Tanaka déclare:

((Nous estimons que des intérêtsgénérauxd'ordre humanitaire
se concrétisent dans ces traités et ces organisations. Une fois qu'ils

revêtent uneforme institutionnelle, ces intérêtsprennent un caractère
juridique et doivent être protégésau moyen de procédures bien
établies.))(Opinion dissidente, C.I.J. Recueil 1966,p. 252.)

En réponse à l'argument tendant à ce qu'elle admette «une sorte
d'actio popularis, ou un droit pour chaque membre d'une collectivité
d'intenter une action pour la défensed'un intérêt public )),la Cour dit de

manière tranchante :
((Or, s'il se peut que certains systèmesde droit interne connaissent

cette notion, le droit international tel qu'il existe actuellement ne la
reconnait pas et la Cour ne saurait y voir l'un des ((principes géné-
raux de droit » mentionnés à l'article 38, paragraphe 1 c), de son
Statut. ))(C.I.J. Recueil 1966, p. 47, par. 88.)Par contre la Cour a dit aussi:

((Une distinction essentielle doit en particulier êtreétablie entre
les obligations des Etats envers la communauté internationale dans
son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat dans le
cadre de la protection diplomatique. Par leur nature même,les

premières concernent tous les Etats. Vu l'importance des droits en
cause, tous les Etats peuvent être considéréc somme ayant un intérêt
juridique à ce que ces droits soient protégés;les obligations dont il
s'agit sont des obligations erga omnes. ))(C.I.J. Recueil 1970, p. 32,
par. 33.)

Ces phrases, qu'on a pu qualifier de progressistes et juger dignes de
sympathie, doivent s'entendre cum grano salis. II me semble que le

raisonnement qu'elles formulent obiter ne doit pas être considéré comme
consacrant la reconnaissance de I'actiopopularis en droit international; il
faut l'interpréter d'une manière plus conforme à la pratique générale
acceptée comme étant le droit. Je ne peux pas croire qu'en vertu de ce
dictum la Cour estime recevable par exemple la demande de I'Etat A

contre 1'Etat B où A alléguerait que B n'applique pas ((des principes et
des règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine ))
(C.I.J. Recueil 1970, p. 32, par. 34) envers les sujets de 1'EtatB ou même
de 1'Etat C. Peut-êtreen rédigeant le paragraphe en question la Cour
a-t-elle penséau cas où 1'Etat B porterait préjudiceaux sujets de 1'EtatA

en lésant les droits fondamentaux de la personne. On doit aussi tenir
compte de ce que la Cour semble restreindre son dictiimà la manière de
M. Jessup et de M. Tanaka lorsqu'elle fait référence((à des instruments
internationaux de caractère universel ou quasi universel » (C.I.J. Recueil
1970, p. 32, par. 34)'.

En tout cas si, comme il me semble, la compétence de la Cour dans
l'affaire est fondéesur l'article17 de l'Acte généralet non sur la déclara-
tion française de 1966, la requêten'est recevable que si le demandeur fait
valoir l'existence d'un droit propre qui aurait, selon lui, étéIésépar le fait
du défendeur.

3. La demande tendant à ce que la Cour déclare que les expériences
nucléaires dans l'atmosphère sont illicites en vertu d'une règle générale
de droit international et quetout Etat, y compris le requérant, a le droit
de demander à la France de s'abstenir de procéderà ce genre d'expérimen-
tation, sucite plusieurs doutes.

selon lequel lapropliété impose une obligatioerga omnes;rmais cette obligationne
engendre undroit ou intérêjturidique a la faire valoir devant un tribunal au profit du
propriétaire qui estédans son droit ou intérêtou qui le voit méconnu. Mêmedans le
cas de vol, on ne peut pas parler d'uneo poprrlar- ce qui est autre chose que la
faculté de dénoncer le vol'autorité. II convient aussi de noter qu'une décision de la
Cour n'est pas obligatoerga omnes,elle n'est obligatoire que pour les parties en litige
et dans le cas qui a étédécidé(art. 59 du Statut). La question peut-elle êtrerégléeconformément au droit international
ou bien appartient-elle encore au domaine de la politique? Il faut aussi se

demander s'il s'agitd'une question de recevabilitéou de fond. Il faudrait
distinguer si elle porte sur le caractère politique ou judiciaire de l'affaire
(question de recevabilité)ou bien sielleporte sur la règle à appliquer et ks
conditions dans lesquelles celle-ci peut être considérée comme faisant
partie du droit coutumier (question de fond)'. Difficultéqui aurait pu
êtrerésolue peut-être enjoignant au fond la question de recevabilité.

Mais point n'est besoin de trancher ces problèmes. A mon avis, il est
clair que le demandeur n'est pas fondé à prier la Cour de déclarerque les
essais nucléairesdans l'atmosphèresont illicites. Le demandeur n'a pasun
intérêtpropre et concret d'ordre juridique, et moins encore un droit qui
soit contestépar l'autre Partie, comme l'exige l'Actegénéral. Lademande
tendant à ce que la Cour fasse une déclaration généraleet abstraite sur
l'existence d'une règlede droit dépassela fonction judiciaire de la Cour.

Celle-ci n'a pas compétence pour déclarer que toutes les expériences
nucléaires dans l'atmosphère sont illicites, mêmesi elle considère efi
conscience que ces expérienceset mêmetoutes les expériences nucléaires
en généralsont contraires à la morale et à toute considération humani-
taire.
4. Le droit invoquépar le demandeur en ce qui concerne le dépôtde
retombées radioactives sur son territoire a étéconsidérédans I'ordon-
nance du 22juin 1973(par. 30). 11faut voir à présentsi lefait d'invoquer

ce droit rend recevable la demande d'examen de l'affaire au fond. La
plainte du demandeur contre la France pour avoir violé sasouveraineté
en introduisant sans permission des matières nuisibles sur son territoire
est basée sur un intérêtd'ordre juridique bien connu depuis le droit
romain. Celui-ci connaît déjà l'interdiction de l'immissio(de l'eau, de la
fumée,des fragments de pierres) dans la propriétévoisine (D.8, 5, 8,
par. 5).Dans ledroit ancien et lesdroits modernes le principe sic utere tuo

ut aliaenum non laedas est admis. La responsabilité d'un propriétaire en
raison des fumées,odeurs insupportables, est bien connue, cparce qu'il
sort [des limites matériellesde son fonds], parce qu'il y a immissiosur les
fonds voisins, qu'il cause un dommage2)).
Dans le droit international, on peut rappeler le devoir de chaque Etat
de ne pas utiliser son territoire aux fins d'actes contraires aux droits
d'autres Etats (C.I.J. Recueil 1949, p. 22). Les sentences arbitrales des

1 Le caractèrede droit coutumierou dejus cogens attribué autraitéde Moscou est
mis en question par son manque d'universalitéet par la réserve del'articleIV selon
laquelleaChaque partie ...aura le droit de se retirerdu traité sielle décide que des
événements extraordinairees, rapport avec l'objet du présentTraité,ont compromis
les intérêts suprêmessdon pays.))
Sur les conditionà remplir pourque naisse une règle de droit coutumier, voirmon
opinion individuelle, C.I.J. Recueil 1974, p. 89 et suiv.
2 Mazeaud, Traité théoriquetpratique de la responsabilitécivile, 3e éd.,1938,tome 1,
p. 647 et suiv., par. 597. 16avril 1938et 11mars 1941rendues sur un différendentre les Etats-Unis
et le Canada mentionnent l'inexistence de précédentssur la pollution de
l'air, mais aussi l'analogie avec les cas de pollution de l'eau et le litige

suisse entre les cantons de Soleure et d'Argovie'. Le conflit entre les
Etats-Unis et le Canada à propos des fonderies de Trail est tranché sur
la base de la règle suivante:

((aucun Etat n'a le droit d'utiliser son territoire ou d'en permettre

l'utilisation de manière à causer dans le territoire d'un autre Etat ...
par l'émissionde fumées des dommages importants, établispar des
preuves claires et convaincantes » (Trail Smelter Arbitration, 1938-

1941, Etats-Unis d'Amérique-Canada, Nations Unies, Recueil des
sentences arbitrales, vol. II1,p. 19652).

S'il est admis d'une manière généralequ'on a le droit de demander
qu'il soit interdit aux voisins d'émettre des fuméesnuisibles3, il faut en

tirer la conséquence, par une évidente analogie, que le demandeur a le
droit de prier la Cour d'accueillir sa demandetendant à ce que la France
mette fin au dépôt de retombées radioactives sur son territoire.
La question de savoir si le dépôt de substances radioactives sur le

territoire du demandeur, dépôt provenant des essais nucléaires de la
France, est nuisible au demandeur ne devraitêtre tranchéeque dans une
procédure sur lefond où la Cour examinerait si l'intrusion ou violation du

territoire d'autrui est en soi contraire à la loi ou si elle ne l'est que s'il se
produit desdommages; dans ce dernier cas, elle aurait encore à examiner
la nature des préjudices allégués4,leur existences et leur importance

1 Le Tribunal fédéralsuisse établit que, selon les normes du droit international, la
souveraineté d'un Etat peut s'exercer librement tant qu'elle n'atteint pas les droits
découlant de celle d'un autre Etat; la présence du stand de tir argovien mettait en
danger certaines régions soleuroises et le tribunal a interdit l'utilisation du stand de tir
tant que des mesures de protection suffisantes n'auraient pas étéprises (Arrêtsdu
Tribunalfédéralsuisse, vol. XXVi, première partie, p. 449-451, considérant 3), citation
de Roulet, Le caractère artificiel de la tiiéoriede l'abus de droit en droit international
public, Neuchâtel, 1958, p. 121.

2 La sentence arriveà cette conclusione under the principles of international law, as
well as of the law of the United StateilLa sentenceest considéréecommz cfondamen-
tale pour tout leproblème des immixtions. Ses fondements font aujourd'hui partie du
droit international coutumier J),A. Randelzhofer, B. Simma, (Das Kernkraftwerk an
der Grenze - Ein 'ultra-hazardous activity' im Schnittpunkt von internationalem
Nachbarrecht und Umweltschutzx. Festschrift für Friedrich Berber, Munich, 1973,
p. 405. Cette sentence signifie l'abandon de la théorie de Harmon (souveraineté absolue
dechaqueEtatsur son territoire envers tous les autres);Krakan, Die Harmon Doktrin,
Eine These der Vereinigten Staaten zum internationalen Flussrechtr,Hambourg, 1966,
p. 9.
3 De continuer à émettre des fumées nuisibles ou d'en émettre à nouveau s'il est à
craindre (ad metuendum) que ce soit le cas Damnum infectum est damnum nondum
factum, quod futurum veremur, D.39, 2, 2.
4 Elle devrait dire par exemple s'il faut tenir compte ou non de ce que la poursuite
d'essais nucléairescause un préjudice, notamment des appréhensions, de l'anxiétéet de
l'inquiétude, aux habitants et au Gouvernement de l'Australie.
5 Ce qui ouvre la question de l'administration des preuves (art. 48 et 50 du Statut,
art. 62 du Règlement).relative', pour se prononcer sur la demande d'interdiction des essais
nucléaires français 2.

5. Une troisième plainte contre la France est fondéesur l'infraction au
principe de la libertéde la haute mer qui résultedes entraves à la naviga-
tion maritime et aérienne dues à l'établissement de zones interdites. Elle
pose des questions juridiques délicates.

Procéderà des essais nucléairesau-dessus de la mer et établir des zones
interdites, cela fait-il partie des ((autres libertésreconnues par les principes
générauxdu droit international ))ou bien est-ce contraire aux libertésdes
autresEtats? Sommes-nousdevant un cas analogue à celui de I'établisse-

ment de zones interdites à l'occasion d'exercices de tir ou de manŒuvres
navales? L'interprétation de l'article 2, paragraphe 2, de la Convention
sur la haute mer impose que, dans chaque cas, on tienne raisonnablement
compte des intérêts desEtats quant à l'usage des libertésde la haute mer;

il faut considérer la nature et l'importance des intérêtsen jeu, le principe
de l'usage non nuisible (prodesseenim sibi unusquisque, dum alii non nocet,
non prohibetur, D.39, 3, 1, par. 1l), de l'abus du droit et de la bonne foi
dans l'usage des libertés.
La question des essais nucléaires a été examinéepar la Conférence de

1958 sur le droit de la mer. On y a notéune forte tendance à condamner
les essais nucléaires, mais la conférence a accepté la proposition de
l'Inde; elle a reconnu que de nombreux Etats appréhendaient que les
explosions nucléairesne constituent une infraction à la libertéde la haute

mer, et a renvoyéla question à l'Assembléegénéralepour toutes mesures
appropriées.
La plainte contre la France à ce sujet pose donc des questions de droit
et des questions de fait qui touchent au fond de l'affaire, et ne doivent pas

êtreexaminées et tranchées au stade préliminaire de la procédure en-
visagépar I'ordonnance du 22 juin 1973.
Il me semble que cette troisième plainte n'est pas recevable sous la
forme où elle est présentée.Le demandeur n'allègue pas un droit propre

qui soit contesté par la France et il ne fonde sa requêtesur aucun pré-
judice concret, dont il offrirait de prouver que la responsabilité incombe à
la France3. Le demandeur n'a pas de titre juridique qui l'autorise à agir
comme porte-parole de la communauté internationale, et à demander que
la Cour condamne la conduite de la France. La Cour ne peut pas outre-

passer ses fonctions judiciaires et déterminer d'une manière généraleles
devoirs de la France en ce qui concerne les libertésde la mer.

(Signé) F. DE CASTRO.

111faut mesurer l'importance des intérêts desparties et mêmela possibilité de les
harmoniser (question du voisinage et de I'usage innocent).
2 La Cour, dans I'ordonnance du 22 juin 1973, fait allusàola possibilité que ces
essais causent1un préjudice irréparabl11au demandeur; c'est une possibilité dont on
doit tenir compte,pour l'indication de mesures conservatoires (urgde ces mesures)
mais non pour la recevabilité.
3Sur les conditions requises pour accueillir une demande de dommages, voir ce qui
est dit dansC.I.J. Recueil 1974, p. 203-205, notamment au paragraphe 76; voir aussi
ibid., p. 225.

Bilingual Content

OPINION DISSIDENTE DE M. DE CASTRO

L'ordonnance de la Cour du 22 juin 1973 a décidéque les pièces
écritesporteraient d'abord sur la question de la compétence de la Cour
pour connaître du différendet sur celle de la recevabilité de la requête.
La Cour aurait dû en conséquence statuer sur ces deux questions préa-
lables.
Malgrécela, la majorité de la Cour décideà présentde ne pas aborder

l'examen de ces questions, considérant que le différend est devenu sans
objet en raison des déclarations faites à diverses occasions par des
autorités françaises sur la cessation des essais nucléaires dans I'atmo-
sphère.
On peut qualifier de prudente cette manière de procéder et les raison-
nements développésà l'appui sont fort savants, mais à mon grand regret

je dois avouer que les arguments avancés ne parviennent pas à me con-
vaincre. Je crois donc devoir exposer les motifs qui m'empêchent de
voter avec la majorité et dire brièvement comment, à mon avis, la Cour
aurait dû se prononcer sur les questions indiquées dans l'ordonnance
mentionnée plus haut.

Divers points relatifs à la valeur des déclarations des autorités fran-
çaises pour la suite de la procédure me paraissent mériter d'êtrerelevés:

1. Je pense que la Cour a bien fait de prendre en considération les
déclarations dont il s'agit. Certes elles ne figurent pas dans les pièces
portées à la connaissance de la Cour mais les unes ont étécitéespar le

demandeur et d'autres sont des faits notoires; ce serait fermer les yeux à
une réalité évidenteque de les ignorer. Vu le défaut du défendeur, la
Cour doit s'assurer par elle-mêmede tout fait pouvant présenter de
l'importance pour la décision de justice qu'elle doit rendre en l'affaire
(art. 53 du Statut). La Cour dispose, en matière de procédure, d'une
liberté que n'offre pas le droit interne des Etats (C.P.J.I. sérieA no 2,

p. 34; art. 30 e48 du Statut).

Comme dans l'affaire du Cameroun septei7triona1,la Cour peut exa-
miner d'office si elle est ou non dans ((l'impossibilitéde rendre un arrêt
effectivement applicable)) (C.I.J. Recueil 1963, p. 33),et si le différend
dont elle est saisie existe toujou-s autrement dit elle peut examiner si,
en raison d'un fait nouveau, il n'y a plus de différendactuel. DISSENTIING OPlNION OF JUDGE DE CASTRO

[Translation]

Inits Order of22.June 1973the Court decided that thewrittenpleadings
should first be addressed to the questions of the jurisdiction of the Court
to entertain the dispute and of the admissibility of the Application. The
Court ought therefore to give a decision on these two preliminary ques-
tions.
Nevertheless, the majority of the Court has now decided not to broach

them, because it considers, in view of the statements made by French
authorities on various occasions concerningthe cessation of atmospheric
nuclear tests, that the dispute no longer has any object.

That may be described as a prudent course to follow, and very learned
arguments have been put forward in support of it, but 1am sorry to say

that they fail to convince me. It is therefore, 1feel, incumbent upon me to
set out the reasons why 1am unable to vote with the majority, and briefly
to state how, in m:yview, the Court ought to have pronounced upon the
questions specified in the above-mentioned Order.

Attention should in my view be drawn to various points concerning
the value to be attached to the French authorities' statements in relation
to the course of the proceedings:
1. 1 think the Court has done well to take these statements into con-
sideration. It is true they do not form part of the formal documentation

brought to the cognizance of the Court, but some have been cited by
the Applicant and others are matters of public knowledge; to ignore them
would be to shut one's eyes to conspicuous reality. Given the non-
appearance of the Respondent, it is the duty of the Court to make sure
proprio motlr of every fact that might be significant for the decision by
which it is to rencler justice in the case (Statute, Art. 53). In matters of
procedure, the Court enjoys a latitude which is not to be found in the

municipal law of States(P.C.I.J., Series A, No. 2, p. 34; Statute, Arts. 30
and 48).
As in the Northern Cameroons case, the Court may examine ex officio
the questions whether it is or is not "impossible for the Court 10render a
judgment capable of effective application" (I.C.J. Reports 1963, p. 33),
and whether the clispute submitted to it still exists-in other words, it

may enquire whether, on account of a new fact, there is no longer any
surviving dispute.373 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

Dans I'affaire portéedevant la Cour, ilse pose donc une question d'un
caractère ((pré-préliminaire» (opinion individuelle de sir Gerald Fitz-
maurice, ibid., p. 103) qui doit êtreexaminée préalablement à toute

question de compétence (ibid.,p. 105). II s'agit de savoir si les déclara-
tions des autorités françaises ont ôtéson intérêtjuridiqueà la requêtedu
demandeur, si elles ont une efficacité telle qu'elles rendent superflu un
arrêtde la Cour éventuellement favorable aux prétentions du demandeur.
2. J'ai tout à fait conscience que I'on peut voir dans le vote de la
majorité une marque de prudence. Le <( fait nouveau )constitué par les

déclarations des autorités françaises est d'une importance qu'il ne
faudrait pas méconnaître. Ce sont des déclarations claires, formelles et
réitéréesé , manant des plus hautes autorités, qui montrent que celles-ci
ont sérieusement et délibérément l'intentionde ne plus continuer les
essais nucléaires dans I'atmosphère. Les autorités françaises connaissent

bien l'émoi suscitédans le monde entier par les essais réalisésdans la
région du Pacifique Sud et le soulagement qu'a produit l'annonce qu'ils
allaient se terminer et que I'on passerait désormaisà des essais souterrains.
Ces déclarations sont d'un intérêttout particulier pour le demandeur et
pour la Cour.
II est vrai que le Gouvernement français fait défaut,mais il est constant

que le Gouvernement français a porté à la connaissance de la Cour ses
vues sur l'affaire, d'une manière directe aussi bien qu'indirecte, et que
celles-ci ont été étudiéeest prises en considération dans les décisionsde la
Cour. Cela, le Gouvernement français le sait. 11faut donc supposer que
les autorités françaises ont pu tenir compte de l'incidence possible de leurs

déclarations sur la suite de la procédure.
La confiance justifiéepar les déclarations d'autorités responsables peut
expliquer que la majorité de la Cour ait cru désirablede mettre fin à une
procédure qui lui a semblésans objet. Tout litige a quelque chose d'une
lutte (lis) et il semble prudent pro pare de le tenir pour fini le plus vite
possible; cela correspond d'ailleurs à la fonction pacificatrice qui sied à

un organe des Nations Unies.

3. Mais, cela dit, il convient d'ajouter que la Cour, comme organe
judiciaire, doit tenir compte en premier lieu de la valeur juridique des
déclar+tions des autorités françaises.

ga Cour incombe la tâche d'interpréter le sens et de vérifierle but des
déclarations des autorités françaises. On peut y voir l'exposéd'un pro-
gramme, d'une intention visant le futur, leur but étant d'éclairer tous
ceux qui peuvent s'intéresser à la méthode que les autorités françaises
entendent suivre en matière d'essais nucléaires.On peut encore y voir de
simples promesses de ne plus faire d'essais nucléairesdans l'atmosphère.

Enfin, on peut les considérer comme des promesses donnant naissance à
une véritable obligation juridique.
II est juste de relever qu'il n'a pas un abîme entre l'expression d'une
intention de faire ou de ne pas faire quelque chose à l'avenir et une
promesse envisagéecomme source d'obligations juridiques. Mais il n'en NUCLEAR TESTS (DISS. OP. DE CASTRO) 373

Thus, in the case brought before the Court, there arises a "pre-prelimi-
nary" question (separate opinion of Judge Sir Gerald Fitzmaurice, ibid.,
p. 103) which must be given priority over any question of jurisdiction

(ibid., p. 105); namely whether the statements of the French authorities
have removed the legal interest of the Application, and whether they
may so be relied on as to render superfluous any judgment whereby the
Court might uphold the Applicant's claims.
2. 1 am wholly aware that the vote of the majority can be viewed as a
sign of prudence. The "new fact" which the statements of the French

authorities represent is of an importance which should not be overlooked.
They are clear, forrnal and repeated statements, which emanate from the
highest authorities and show that those authorities seriously and deliber-
ately intend henceforth to discontinue atmospheric nuclear testing. The
French authoritiesare well aware of the anxiety aroused al1over thz world

by the tests conduct:ed in the South Pacificregion and of the sense of relief
produced by the announcement that they were going to cease and that
underground tests .would hereafter be carried out. These statements are
of altogether special interest to the Applicant and to the Court.

It is true that the French Government has not appeared in the proceed-

ings but, in point of fact, it has, both directly and indirectly, made known
to the Court its vie,wson the case, and those views have been studied and
taken into considelration in the Court's decisions. The French Govern-
ment knows this. Osnemust therefore suppose that the French authorities
have been able to take account of the possible effect of their statements
on the course of the proceedings.

It may be the confidence warranted by the statements of responsible
authorities which explains why the majority of the Court has thought it
desirable to terminCateproceedings which it felt to be without object. An
element of conflict (lis) is endemic in any litigation, which it seems only
wise, pro pace, to regard as terminated as soon as possible; this is more-
over in line with the peacemaking function proper to an organ of the

United Nations.
3. Even so, it must be added that the Court, as a judicial organ, must
first and foremost have regard to the legal worth of the French authorities'
statements.
Upon the Court there falls the task of interpreting their meaning and

verifying their purlpose. They can be viewed as the announcement of a
programme, of an intention with regard to the future, their purpose
being to enlighten al1those who may be interested in the method which
the French authorities propose to follow where nuclear tests are con-
cerned. They can also be viewed as simple promises to conduct no more
nuclear tests in the atmosphere. Finally, they can be considered as

promises giving ris'eto a genuine legal obligation.
It is right to point out that there is not a world of difference between
the expression of an intention to do or not do something in the future and
a promise envisage'das a source of Iegal obligations. But the fact remains 374 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP.DlSS. DE CASTRO)

reste pas moins que toute déclaration d'intention n'est pas une promesse.
11 existe une différence entre une promesse qui est à l'origine d'une
obligation morale (mêmelorsqu'elle est renforcée par le serment ou la
parole d'honneur) et une promesse qui contraint juridiquement à faire

ou à ne pas faire. C'est une distinction bien mise en vedette dans tous les
droits internes et dont il faut tenir compte davantage encore en droit
international.
Pour qu'une promesse oblige juridiquement un Etat, il faut que les
autorités dont elle émane aient compétence pour obliger I'Etat de cette
façon (question de droit constitutionnel interne et de droit international)

et qu'elles manifestent l'intention et la volonté d'obliger I'Etat(question
d'interprétation). LIfaut donc se demander si les autorités françaises qui
ont fait les déclarations ont pu et ont voulu obliger I'Etat français à
renoncer à toute possibilité de reprendre les essais nucléaires dans
l'atmosphère, mêmeau cas ou de tels essais seraient à nouveau néces-
saires à la défensenationale. Obligation qui, comme toute autre obliga-

tion ayant sa source dans une déclaration unilatérale, ne se présume pas
et doit se manifester clairement pour avoir efficacité endroit (obligatio
autem non oritur nisi ex i'oluntatr certa et plane declarata).

Depuis toujours dans le droit interne et du moins depuis Grotius dans

le droit international se pose la question de savoir quelles sont les con-
ditions nécessaires pour qu'une promesse animo sibi vinculandi oblige en
droit. La naissance d'une obligation de faire ou de ne pas faire à la
charge d'un sujet entraîne une limitation de la libertéde ce sujet (alienatio
cujusdam libertatis) en faveur d'un autre sujet auquel il confère un droit
sur lui-même (signum volendi jus proprium alteri conferri) ;pour cette

raison, et à l'exception des actes gratuits reconnus par le droit (par
exemple, donation, pollicitatio), le droit en généralrequiert un quid pro
quo du bénéficiaireenvers celui qui a fait la promesse. C'est pourquoi, il
ne faut pas l'oublier, toute promesse (la pollicitatio exceptée) peut être
révoquéejusqu'au moment où elle est acceptée en bonne et due forme par
le sujet auquel elle est faite (ante acceptationem, quippe jure nondum

translatum, revocari posse sine injustitia).

4. La Cour a établià l'occasion d'une autre déclaration unilatérale - le
désistement - qu'on doit examiner un acte de ce genre en liaison étroite
avec les circonstances propres à l'espèce(C.I.J. Recueil 1964, p. 19). Et
c'est en tenant compte des circonstances de la cause qu'il faudra répondre

aux questions suivantes:
Les déclarations des autorités françaises viséesdans l'arrêtn'ont-elles
d'autre sens que celui de notifier au peuple français, et si on veut au
monde entier, la politique que le gouvernement suivra en matière d'ex-
périences nucléairesdans le futur immédiat?
Ces déclarations contiennent-elles une vraie promesse de ne plus

jamais faire, en aucune circonstance, de nouveaux essais nucléaires dans
l'atmosphère?that not every statement of intent is a promise. There is a difference
between a promise which gives rise to a moral obligation (even when
reinforced by oath or word of honour) and a promise which legally binds

the promiser. This distinction is universally prominent in municipal law
and must be accord:ed even greater attention in international law.

For a promise to be legally binding on a State, it is necessary that the

authorities from w.hich it emanates should be competent so to bind the
State (a question of interna1 constitutional law and international law)
and that they should manifest the intention and will to bind the State
(a question of interpretation). One has therefore to ask whether the
French authorities which made the statements had the power, and were

willing, to place the French State under obligation to renounce al1possi-
bility of resuming atmospheric nuclear tests, even in the event that such
tests should again prove necessary for the sake of national defence: an
obligation which, like any other obligation stemming from a unilateral
statement, cannot be presumed and must be clearly manifested if it is to

be reliable in law (obligatio autem non oritur nisi ex iloluntate certa et
plane declarata).
The identification of the necessary conditions to render a promise
animo sibi i~inculairdilegally binding has always been a problem in
municipal law andl, since Grotius at least, in international law also.
When an obligation arises whereby a person is bound to act, or refrain

from acting, in such and such a way, this results in a restraint upon his
freedom (alienatio cuiusdam libertatis) in favour of another, upon whom
he confers a right in respect of his own conduct (signum volendi ius
.ro-rium altericonfirri) ; for that reason, and with the exception of those
gratuitous acts which are recognized by the law (e.g., donation, pollici-

ratio), the law generally requires that there should be a quidpro quo from
the benificiary to the promiser. Hence-and this should not be forgotten
-any promise (with the exception ofpollicitatio) can be withdrawn at any
time before its regular acceptance by the person to whom it is made (ante
acceptationem, quippe iure nondum translatum, revocari posse sine iniusti-

tia) .
4. On the occasion of another unilateral statement-discontinuance-
the Court established that an act of that kind must be considered in close
relationship with the circumstances of the particular case (I.C.J. Reports
1964, p. 19).And it is with the circumstances of the present case in mind
that one must seek an answer to the following questions:

Do those stateme:nts of the French authorities with which theJudgment
is concerned mean anything other than the notification to the French
people-or the world at large-of the nuclear-test policy which the
Government will birfollowing in the immediate future?
Do those statemcentscontain a genuine promise never, in any circum-

stances, to carry out any more nuclear tests in the atmosphere? ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. D~SS. DE CASTRO)
375

Peut-on voir dans ces déclarations une intention ferme de s'obliger à ne

plus effectuer d'essais nucléairesdans I'atmosphère?

Ces mêmesdéclarations ont-elles une force juridique de nature à
empêcherI'Etat françaisdechanger d'avis et de suivre une autre politique

dans le domaine des expériences nucléaires,de nature à l'obliger envers
d'autres Etats à ne plus faire d'essais nucléairesdans I'atmosphère?
A ces questions, on peut répondre que le Gouvernement français s'est
promis à lui-même et a faitconnaître au public son intention de mettre un
terme aux essais nucléaires dans I'atmosphère à l'avenir. Mais il me

semble qu'il n'est pas possible d'aller au-delà. Je ne vois aucun indice
permettant de présumer que la France ait voulu donner naissance à une
obligation internationale. dotée de la mêmeforce obligatoire qu'un
traité- et envers qui. envers le monde entier?

11me semble que, pour déclarer sans objet le différend porté devant
elle, la Cour a besoin de s'assurer comme d'un fait évidentet hors de doute
que I'Etat français a voulu s'obliger et qu'il s'est obligéjuridiquement à ne
plus faire d'essais nucléairesdans I'atmosphère. Or à mon avis l'attitude

du Gouvernement français donne plutôt à penser qu'il considère que ses
déclarations sur les essais nucléaires appartiennent au domaine de la
politique et touchent à une question relevant du domaine réservéà la
compétence nationale de I'Etat, du fait qu'elle se rapporte à la défense

nationale.
Je comprends bien que la majoritéde la Cour éprouvede la répugnance
à laisser traîner une procédure sans intérêt pratique,visible ou probable.
Mais le respect de la règle de droit tient compte non seulement du
probable mais aussi du possible. C'est ainsi que l'application du droit

devient une garantie de la libertédes Etats et confère aux relations inter-
nationales la sécuriténécessaire.

II. COMIJETEN DE LA COUR

La Cour a considéré,dans son ordonnance du 22 juin 1973, que les

éléments quilui étaient soumis l'autorisaient à conclure que les disposi-
tions invoquées par le demandeur se présentaient comme constituant,
prima facie, une base sur laquelle la compétence de la Cour pourrait
être fondée.Au stade actuel de la procédure, la Cour doit s'assurer qu'elle
a compétence aux termes des articles 36 et 37 du Statut1.

1 Je me crois autoriàéexprimermon opinion sur la compétence dela Cour et
la recevabilité dela requête. Certes lePrésidentSpender a essayé,dans sa déclara-
tionjointà l'arrêt rensur les affairesdu Sud-Oirest africain (C.I.J. Recueil 1966,
p. 51-57), de limiter l'étenduedes questions dont les juges pourraienttraiterdans leurs
opinions. Mais il est àll'encontre mêmdee la pratique suivie dans lesaffairessur
lesquelles la Course prononçait alors. Précisantsa pensée,il a dit qu'ilon ne devrait
pas chercher dansde telles opiniàntraiterde questions totalement étrangàsla
décision dela Cour ou aux motifs donnéspar ell»(ibid., p. 55). Dans la présente NIUCLEAR TESTS (DISS.OP. DE CASTRO) 375

Can those staterrients be said to embody the French Government's
firm intention to biind itself to carry out no more nuclear tests in the

atmosphere?
Dothese same statements possess a legal force such as to debar the
French State from changing its mind and following some other policy
in the domain of nuclear tests, such as to place it vis-à-vis other States

under an obligation to carry out no more nuclear tests in the atmosphere?
To these questions one may reply that the French Government has
made up its mind to cease atmospheric nuclear testing from now on,
and has informed the public of its intention to do so. But Ido not feel
that it is possible to go farther.1see no indication warranting a presump-

tion that France wished to bring into being an international obligation,
possessing the same: binding force as a treaty-and vis-à-vis whom, the
whole world?
It appears to me that, to be able to declare that the dispute brought

before it is without object, the Court requires to satisfy itself that, as a
fact evident and beyond doubt, the French State wished to bind itself,
and has legally bound itself, not to carry out any more nuclear tests in
the atmosphere. Yei:in my view the attitude of the French Government

warrants rather the inference that it considers its statements on nuclear
tests to belong to the political domain and to concern a question which,
inasmuch as it relates to national defence, lies within the domain reserved
to a State's domestic jurisdiction.
1 perfectly understand the reluctance of the majority of the Court to

countenance the protraction of proceedings which from the practical
point of view have become apparently, or probably, pointless. It is how-
ever not only the probable, but also the possible, which has to be taken
into account if rules of laware to be respected. It is thereby that the appli-

cation of the law lbecomes a safeguard for the liberty of States and
bestows the requisite security on international relations.

II. JURISDICTIO NF THE COURT

In its Order of 22 June 1973 the Court considered that the material
submitted to it justilîed the conclusion that the provisions invoked by the
Applicant appeared, prima facie, to afford a basis upon which the juris-

diction of the Court might be founded. At the present stage of the pro-
ceedings, the Court must satisfy itself that it has jurisdiction under
Articles 36 and 37 c~fthe Statute 1.

1 I believe that I aiii entitled to express my opinion on the jiirisdiction of the Court
and the admissibility of the Application.truc that, in a declaration appended tothe
Judgmenf in the SorrtlWest Africa cases (I.C.JReports 1966, pp.51-57).President
SirPercy Spender ende:ivoiired to narrow the scope of the questions with which judges
might deal in their opinions. But he was actiially going against the practice followed in
the cases upon which the Court wasivingjiidgment at the time. It was in the following
terrns that lie stated his". .siich opinionsshould nopiirport to deal with rnatters
that fall entirely outside the range of the Coiirt's decision, or of the decision's motiva-1. Compétence de la Cour en vertu de la déclarationdu Gouvernement
de la Républiquefrancaise du 20 mai 1966 (art. 36, par. 2,du Statut)

La première des objections à la compétence de la Cour est fondéesur la
réservefaite par le Gouvernement français pour ce qui est

((des différends nésd'une guerre ou d'hostilités internationales, des
différends nésà l'occasion d'une crise intéressant la sécuritéde la
nation ou de toute mesure ou action s'y rapportant et des différends

concernant des activités se rapportant à la défensenationale)).

Cette réservesemble bien s'appliquer aux essais nucléaires. On a fait
observer, il est vrai, que les essais nucléaires n'entrent pas dans les acti-
vitésse rapportant à la défensenationale, parce que leur but est la mise
au point d'un instrument de destruction massive. Mais ilfaut tenir
compte de ce que nous sommes devant une déclaration unilatérale, une

déclaration facultative d'adhésion à la compétence de la Cour. On doit
donc considérer avant tout I'intention du déclarant - ce que les termes
de la déclaration et les circonstances du moment permettent de connaître.
La formule (défensenationale 1)a un sens large: on parle du ministère de

la défensenationale comme du ministère des armées.La défensenationale
comprend aussi la possibilité d'une réplique à l'offensive d'un ennemi.
C'est l'idéede la (force de frappe n.L'expression emp!oyée(((concernant
des activités se rapportant ))) empêche une interprétation restrictive.

Au reste, l'intention du Gouvernement français de viser par la réservela
question des essais nucléaires est bien connue; il a pris soin de modifier
l'exception 3 de sa déclaration d'adhésiondu IOjuillet 1959 1six semaines
avant la première expérience nucléaire 2.

Le demandeur fait observer que la réservefrançaise est nulle parce que
subjective et automatique, donc nulle comme incompatible avec les
exigences du Statut. Cet argument n'est pas convaincant. Dans l'excep-
tion 3 de la déclaration française, il n'est dit ni expl.icitement ni implicite-

ment que le Gouvernement français se réservela faculté de définir cequi
touche à la défensenationale. Quoi qu'il en soit, si la réserveétait nulle

affaire, il ne me semble pas que les questions de compétence et de recevabilité soient
étrangèresà la décision de la Co~ir.Ce sont celles que vise l'ordonnance de la Cour du
22juin 1973et qui doivent êtretranchées s'il n'est pasévident que le différend manque
d'objet.
1 En ajoutant les mots .et des différends concernant des activités se rapportant à la
défense nationale'1.
2 A mon avis, la Cour n'a pas àexaminer sur ce point les arguments sophistiqués, si
ingénieux qu'ils soient, du demandeur. La caractère objectif de la réserve n'exige pas
que l'on prouve par des donnéesdefait le sens de l'expressc(défensenationale *ou ce
que le Gouvernement français a voulu dire en l'employant. La réservedoit simplement
s'interpréter comme il convienà une déclaration de volonté unilatérale, c'est-à-dire en
tenant compte de la signification naturelle des mots et de l'intention présumée du
déclarant. Ce qu'il faudrait prouveren revanche, c'est qu'elle a un sens contraire au
sens naturel des termes utilisés. NUCLEAR TESTS(DISS. OP. DE CASTRO) 376

1. Jurisdiction of the Court by Virtue of the French Government's Declara-
tion of 20 May 1966 (Art. 36, para. 2, of the Statute)

The first objection to the jurisdiction of the Court is based on the

reservation made b!/ the French Government asto

". ..disputes arising out of a war or international hostilities, disputes
arising out of a crisis affecting national security or any measure or
action relating thereto, and disputes concerning activities connected
with national d.efencem.

This reservation certainly seems to apply to the nuclear tests. It is true
that it has been contended that the nuclear tests do not fall within
activities connectecl with national defence, because their object is the

perfection of a weapon of mass destruction. But it must be borne in mind
that we are dealing with a unilateral declaration, an optional declaration
of adhesion to the jurisdiction of the Court. Thus the intention of the
author of the declaration is the first thing to be considered, and the terms

of the declaration and the contemporary circumstances permit of this
being ascertained. The term "national defence" is broad in meaning:
"Ministry of National Defence" is commonly used as corresponding to
"Ministry of the /irmed Forces". National defence also includes the

possibility of riposting to the offensive of an enemy. This is the idea
behind the "strike force". The expression used ("concerning activities
connected with ...") rules out any restrictive interpretation. Further-
more, it is well known that the intention of the French Government was
to cover the question of nuclear tests by this reservation; it took care to

modify reservation (3) to its declarationof 10July 1959 1 six weeks before
the first nuclear test 2.
The Applicant contends that the French reservation is void because it
is subjective and automatic, and thus void as being incompatible with

the requirements of the Statute. This argument is not convincing. In
reservation (3) of the French declaration, it is neither stated explicitly nor
implied that the French Government reserves the power to define what
is connected with national defence. However that may be, if the reser-

.-- ----~-----.
tion" (ilid., p. 55). In the present case, it does not seem to me that the questions of
jurisdiction and admis:sibility fall outside the range of the Court's decision. They are
the questions specified in the Court's Order of 22 June 1973, and they are those which
have to be resolved unless the dispute is manifestly without object.
1 By adding the wor.ds "and disputes concerning activities connected with national
defence".
2 In mv ouinion. the Court does not have to deal with the sophistical arguments of
the ~~~licant on this point. ingenious though they be. The objective nature of the
reservation does noî require that the meaning of the expression "national defence", or
what the French Government meant when it used it, be proved by evidence. The
reservation should simply be interpreted as a declaration of unilateral will, should be
interpreted, that is to :Say,taking into account the natural meaning of the words and
the presumed intention of the declarer. Wfiat would require proof would be that it had a
meaning contrary to thenatural meailing of the terms used.comme contraire au droit, elle entraînerait la nullitéde la déclaration, si
bien qu'avec la réservedisparaîtrait la source de lajurisdiction de la Cour
selon I'article 36, paragraphe 2, du Statut. (Dans ce sens, opinion indivi-
duelle Lauterpacht, C.I.J. Recut~ill957, p. 34et 57à 59; opinion dissidente
Lauterpacht, C.I.J. Recueil 1959, p. 101 ; opinion individuelle Spender,

C.I.J. Recueil 1959, p. 59.) La réserven'est pas une déclaration de volonté
indépendante et isolable. La nullité partielle que le demandeur propose
d'appliquer est permise seulement lorsqu'il y a une pluralité de stipula-
tions tout à fait séparées(<< tot sunt stipulationes, quot corpora >),D.45, 1,1,

par. 5) et non lorsque la réserve estla ((base essentielle 1)du consentement
(Convention de Vienne sur le droit des traités,art. 44, par. 3, al. b)) 1.

En véritéla controverse est byzantine. L'exception ou réservefrançaise
indique d'une manière propre à exclure toute espèce de doute que le
Gouvernement français ne confère pas compétence à la Cour pour des
différendsconcernant des activitésse rapportant à la défensenationale. 11
n'existe aucune possibilitéjuridique d'imposer la compétence de la Cour

à l'encontre de la volonté exprimée clairement par un Etat. On ne peut
pas aller contre la lettre et l'esprit de I'article 36 du Statut et de I'articl2,
paragraphe 7,de la Charte des Nations Unies.

2. Compétencede la Cour en vertu de l'Acte de Genève
du 26 septembre 1928 (art.36, par. 1, et art. 37 du Statut)

La question qu'il convient plus spécialement d'examiner est celle de

savoir si l'Acte général estencore en vigueur. Son article 17 est ainsi
conçu :

((Tous différends au sujet desquels les parties se contesteraient
réciproquement un droit seront, sauf les réserves éventuelles prévues
à I'article 39, soumis pour jugement à la Cour permanente de Justice
internationale, à moins que les parties ne tombent d'accord, dans les
termes prévus ci-après, pour recourir à un tribunal arbitral ...))

L'article 37 du Statut dispose:

(<Lorsqu'un traité ou une convention en vigueur prévoit le renvoi
à une juridiction que devait instituer la Société desNations ou à la

Cour permanente de Justice internationale, la Cour internationale de
Justice constituera cette juridiction entre les parties au présent
Statut.))

Le Gouvernement français a fait savoir à la Cour qu'il considère que
l'Acte généralne peut servir de fondement à la compétence de la Cour.
II faut donc examiner les diverses questions soulevées au sujet de I'effi-

1 La séparabilité de la réservedoit être démontrée.Malgréses efforts, le demandeur
n'est pas parvenu étayersa thèsed'arguments convaincants.

128vation were void as contrary to law, the result would be that the declara-
tion would be void, so that the source of the Court's jurisdiction under
Article 36, paragraph 2, of the Statute would disappear along with the
reservation. (In this sense, cf. separate opinion of Judge Sir Hersch Lau-
terpacht, I.C.J. Reports 1957, pp. 34 and 57-59; dissenting opinion of
Judge Sir Hersch Lauterpacht, I.C.J. Reports 1959, p. 101; separate

opinion of Judge Sir Perey Spender, 1.C.J. Reports 1959, p. 59.) The
reservation is not a statement of will which is independent and capable of
being isolated. Partial nullity, which the Applicant proposes to apply to
it, is only permissible when there is a number of terms which are entirely
distinct ("rot sunt stipulationes, quo? corpora", D. 45, 1, 1,para. 5) and
not when the reservation is the "essential basis" of the consent (Vienna

Convention on the Law of Treaties, Art. 44, para. 3 (6)) 1.
The controversy is really an academic one. The exception or reservation
in the French declaration States, in such a way as to exclude any possible
doubt, that the French Government does not confer competence on the
Court for disputes concerning activities connected with national defence.

There is no possibility in law of the Court's jurisdiction being imposed
on a State contrary to the clearly expressed will of that State. It is not
possible to disregaird both the letter and the spirit of Article 36 of the
Statute and Article 2, paragraph 7, of the United Nations Charter.

2. Jurisdiction cfthe Court by Virtue of the General Act of'Genevaof

26 September 1928 (Art. 36, para. 1, and Art. 3/ of the Statute)

The question w'hich most particularly requires to be examined is
whether the General Act is still in force. Article 17 thereof reads as
follows:

"AI1 disputes with regard to which the parties are in conflict as to
their respective rights shall, subject to any reservations'which may
be made under Article 39, be submitted for decision to the Permanent
Court of Interriational Justice, unless the parties agree, in the manner

hereinafter prcivided, to have resort to an arbitral tribunal."
Article 37 of the Statute provides that:

"Whenever a treaty or convention in force provides for reference
of a inatter to a tribunal to have been instituted by the League of

Nations, or to the Permanent Court of International Justice, the
matter shall, as between the Parties to the present Statute, be referred
to the lnternational Court of Justice."

The French Government has informed the Court that it considers that
the General Act cannot serve as a basis for the coinpetence of the Court.
It is therefore necessary to examine the various questions which have

1 The separability of the reservation would have to be proved. Despite its efforts, the
Applicant has not s~icceededin bolstering this contention with convincing arguments.
128cacité de l'Acte de Genève après la dissolution de la Société desNa-
tions.
a) L'Acte général,comme les traités de l'époquepour la conciliation,

le règlement judiciaire et l'arbitrage, a son origine dans les mêmes pré-
occupations de sécuritéet le même désir d'assurer la paixque le système
de la Société desNations. La question poséeà l'occasion de la présente

affaire est de savoir si l'article 17 de I'Acte n'est qu'une doublure, une
répétition deI'article 36, paragraphe 2, du Statutde la Cour permanente.
S'il en est ainsi, I'article 17 de I'Acte est-il soumis aux vicissitudes de
l'article 36, paragraphe 2, du Statut et aussi aux réserves que celui-ci
- - -
permet?
II y a certes une coïncidence des buts et des moyens entre les articles
cités, mais ce sont des règles indépendantes ayant une vie propre. Cela

semblait généralement admis. Par souci de brièveté, je me borne à citer
l'opinion de deux auteurs français, dont l'autorité n'est pas contestable.
Dans son étude c(L'Acte néuérala-t-il une réelle utilité?». Gallus arrive
à cette conclusion. Il montre les similitudes et ajoute: ((Mais il ne serait

pas exact de dire que l'Acte généraln'est qu'une confirmation du système
de I'article 36 du Statut de la Cour permanente de Justice internationale ))
(Revue de droit international(Lapradelle), tome VILI, 1931,p. 390). Encore

cet auteur tient-il à relever les différencesentre les deux sources de com-
pétence (membres, conditions à remplir pour être membre, réserves
permises, durée, dénonciation) et les complications auxquelles donne lieu
la concurrence de ces deux sources (D. 392-395). Seion lui. l'Acte cons-
\,
titue ((un progrès par rapport au système de l'article 36 du Statut de la
Cour ))(ibid., p. 391).

Dans le même sens,RenéCassin s'exprime ainsi:

((L'adhésiondonnée maintenant par la France au Protocole dudit

article 36 ne fait-elle pas double emploi avec celle donnée au chapi-
treLI de l'Acte générald'arbitrage? Il faut répondre négativement. 1)
(((L'Acte générald'arbitrage )),Questions politiques et juridiques,

A,fSairesétrangères,1931, p. 17.) 1

b) On a fait observer que la réserve envisagéeà I'article 39, para-
graphe 2, alinéab), de l'Acte généralapplicable entre les gouvernements
parties à l'affaire peut êtreconsidéréecomme comprenant l'exception 3
de la déclaration française de 1966.

Cette opinion n'est pas convaincante. La réserve permise par l'Acte
généralvise ((Les différends portant sur des questions que le droit inter-
national laisse à la compétence exclusive des Etats ». Elle coïncide avec

1 Le chapitre II de I'Acte généralintitulé1Du règlementjudiciaire 1commence par
I'article 17.La valeur propre et indépendante de l'Acte, mêmeaprès la dissolution de la
SociétédesNations, ressort clairement des travaux préparatoires à la résolution 268A
(III) de l'Assembléegénérale desNations Unies et du texte mêmede la résolution.been raised as to the efficacy of the Act of Geneva after the dissolution
of the League of N at'ons.
(a) The General Act, like the contemporary treaties for conciliation,

judicial settlement and arbitration, originated in the same concern for
security and the same desire to ensure peace as underlay the system
of the League of Nations. The question which arises in the present case
is whether Article 17 of the General Act is no more than a repetition
or duplication of Article 36, paragraph 2, of the Statute of the Permanent
Court. If this is so, iijArticle 17of the General Act subject to the vicissi-

tudes undergone by Article 36, paragraph 2, of the Statute, and likewise
to the reservations permitted by that provision?
The two Articles certainly coincide both in objects and means, but
they are independent provisions which each have their own individual
life. This appeared to be generally recognized. For brevity's sake, 1will

simply refer to the opinion of two French writers of indisputable autho-
rity. Gallus, in his study "L'Acte général a-t-ilune réelleutilité?", reaches
the above conclusion. He points out the similarities between the Articles,
and goes on: "But it would not be correct to Saythat the General Act is
no more than a confirmation of the systern of Article 36 of the Statute of

the Permanent Court of International Justice" (Revue de droit inter-
national (Lapradelle:), Vol. 111,1931, p. 390). The author is also careful
to point out the clifferences between the two sources of jurisdiction
(mernbers, conditio-ns of membership, permitted reservations, duration,
denunciation) and ithe complications caused by the CO-existenceof the
two sources (ibid.,pp. 392-395). In his view, the General Act amounts

to "a stepfurther thrin the system of Article 36 ofthe Statute of the Court"
(ibid., p. 391).
In the same sense, RenéCassin has said:

"Does the recent accession of France to the Protocol of the
aforesaid Article 36 not duplicate its accession to Chapter 11of the
General Act of arbitration? The answer must be that it does flot."
("L'Acte général d'arbitrage", Questions politiques et juridiques,
Affaires étrangc:res,1931, p. 17.) 1

(6) It has been said that the reservations contemplated by Article 39,
paragraph 2 (b), of the General Act, applicable between the Governments

which are Parties to this case, may be regarded as coveringreservation (3)
of the French declaration of 1966.
This view is not czonvincing.The reservation permitted by the General
Act is for "disputes concerning questions which by international law
are solely within the domestic jurisdiction of States". This coincides with

1 Chapter II of the Cieneral Act, which is entitled "Judicial Settlement", begins with
Article 17. The individiial and independent value of the Act, even after the winding-up
of the League of Nations, is clear from the travaux préparatoires of resolution 268A
(III) of the United Natiions General Assembly, and from the actual text of that resolu-
tion. l'exception 2 de la déclaration française de 1959 concernant ((des diffé-
rends relatifs à des questions qui, d'après le droit international, relèvent
exclusivement de la compétence nationale )).Cette réserveest maintenue

dans la déclaration française de 1966 (où elle porte aussi le numéro 2).
Mais on a considérénécessaired'ajouter une autre réserve, cellequ'énonce
le point 3, qui vise des différendsconcernant des activités serapportant à

la défensenationale.
L'adjonction faite au point 3était nécessaire pour modifier l'étenduede
la réserve, étant donné les circonstances nouvelles crééespar les expé-

riences nucléaires. Le domaine réservéà la souveraineté nationale ne
comprend pas les différends nésd'actes pouvant éventuellement pro-
voquer des retombéessur des territoires étrangers. Le point 3 injîne de la
réservefrançaise de 1966 a un contenu tout nouveau, différent donc de

celui de l'article 39, paragraphe 2, alinéab), de l'Acte général.
c) Paradoxalement, on a mis en doute que I'Acte soit en vigueur, eu
égardaux travaux qui ontabouti à la résolution 268A (Ill) de l'Assemblée

généralesur la restitution à I'Acte de son efficacitépremière, et eu égard
aussi au libellémêmede cette résolution.

11est vrai qu'on trouve dans les travaux préliminaires des expressions

équivoques. On a dit que le projet de résolution n'impliquerait aucune
approbation de I'Acte de la part de l'Assembléeet que celle-ci seborne-
rait à permettre aux Etats de rétablir, de leur propre gré, ((la validité >)de

l'Acte généralde 1928 (Entezam, Iran) (Nations Unies, Documents
9fJiciels de la troisiènie session del'Assembléegénérale,pr~mière partie,
Comnlission politiqlre spéciale,26" séance,6 décembre 1948, p. 302) 1.De
leur côté, les porte-parole du groupe des républiques socialistes ont

critiqué avec acharnement l'Acte généralpour des raisons politiques, le
considérant comme un instrument sans valeur et créateur de mesures
mort-nées.

Mais les signataires de l'Acte, en parlant de régulariser, de modifier
I'Acte, envisagent de lui restituer sa pleine et ancienne efficacitéet ne
mettent pas en doute sa validité actuelle. Larock (Belgique) précise que
I'Acte général((est tou.jours valable, mais il demande à être remis à

jour ))(ihid., 28e séance, p. 323). Ordonneau (France) déclare que cla
Commission intérimaire propose tout simplement des méthodes pra-
tiques de nature a faciliter l'application de l'Article 33 [de la Charte]))
(;hic/., p. 324). Van Langenhove (Belgique) s'exprime ainsi: ((L'Acte

généralest toujours en vigueur: toutefois son efficacitése trouve diminuée
du fait de la disparition de certains rouages [de la Sociétédes Nations] 1)
(Nations Unies, Doc~rmentsofJicielsdc.la troisième sessionde l'Assemblée

gétiérule,deuxièn~epurtic., scjuncesplc;nières, 198e séance, 28 avril 1949,
p. 176). Viteri Lafronte (Equateur), rapporteur, précisequ' ((il ne s'agit
pas de faire revivre I'Acte de 1928 ni de l'imposer; cet Acte demeure
obligatoire à l'égarddes signataires qui ne l'ont pas dénoncé )) (ibid.,

1 Entezaiii eiiiploie pziit-5frc le terme , v11dans le sens d,pleine efficaci11.

130reservation (2) in the French declaration of 1959, concerning "disputes
relating to questions which by international law fall exclusiveIy within the
domestic jurisdiction". That reservation was retained (also as No. 2) in
the French declarxtion of 1966; but it was thought necessary to add, in

reservation (3), an exclusion relating to disputes concerning activities
connected with national defence.

This addition to reservation (3) was necessary in order to modify its
scope in view of th.e new circumstances created by the nuclear tests. The
reserved domain of domestic jurisdiction does not include disputes

arising from acts which might cause fall-out on foreign territory. The
final phrase of reservation (3) of the French declaration of 1966 has an
entirely new conteilt, and one which therefore differs from Article 39,
paragraph 2 (b), of the General Act.
(c) Paradoxicalliy enough, doubt has been cast on the continuation

in force of the Gerieral Act in the light of the proceedings leading up to
General Assembly resolution 268A (III) on Restoration to the General
Act of its Original Efficacy, and in view also of the actual terms of the
resolution.
It is true that ambiguous expressions can be found in the records of the

preliminary discus!;ions. It was said that the draft resolution would not
imply approval on the part of the General Assembly, and that it would
thus confine itself itoallowing the States to re-establish "the validity" of
the General Act of 1928 of their own free will (Mr. Entezam of Iran,
United Nations, OSJicialRecords of the Tlzird Session of the General
Assembly, Part I, Special Political Con?mitter, 26th Meeting, 6 December

1948, p. 302) 1.The spokesmen for the socialist republics, for their part,
vigorously criticized the General Act for political reasons, regarding it as
a worthless instrument that had brought forth stillborn measures.

But the signatories of the Act, when they spoke of regularizing and

modifying the Act, were contemplating the restoration of its full original
efficacy, and were not casting doubt on its existing validity. Mr. Larock
(Belgium) explained that the General Act "was still valid, but needed to
be brought up to date" (ibid., 28th Meeting, p. 323). Mr. Ordonneau
(France) stated that "the lnterim Committee simply proposed practical
measures designed to facilitate the application of provisions of Article 33

[of the Charter]" (ibid., p. 324). Mr. Van Langenhove (Belgium) said
that "the General .4ct of 1928was still in force; nevertheless its effective-
ness had diminished since some of its machinery [i.e., machinery of the
League of Nations11had disappeared" (United Nations, Ojîcial Records of
the TlzirclSessionof the General Assembly, Part II, 198th Plenary Meeting,

28 April 1949, p. 176). Mr. Viteri Lafronte (Ecuador), the rapporteur,
explained that "there was no question of reviving the Act of 1928 or of
making adherence to it obligatory. The Act remained binding on those

1 Mr.Entezamwas perhapsusingthe word"validity"in thesenseof "fullefficacy".

130p. 189).Lapie (France)dit aussi que l'Actede 1928,auquel on propose ((de
redonner sa vigueur première, estun document précieuxque l'on a hérité
de la Société desNations et dont il faut seulement modifier les termes
pour l'adapter à la nouvelle Organisation » (ibid., 199eséance,28 avril
1949,p. 193).Enfin, et sans qu'il soit nécessaire d'allonger cet expospar
d'autres citations, il semble que personne à ce moment-là n'affirme
l'extinction de l'Acte entre ses signataires et qu'on admette au contraire

qu'il est toujours en vigueur entre eux.

La résolution268A (III) en date du 28 avril 1949 sur la restitution à
l'Acte généralde son efficacitépremièremontre bien son but et son inten-
tion. Elle considère que l'Acte se trouve diminuédu fait de la disparition
des organes de la Société des Nations et de la Cour permanente, et que les
amendements indiqués sont de nature à lui restituer son efficacitépre-
mière.La résolutionmet en reliefquede tels amendements

((nejoueront qu'entre les Etats ayant adhéré à l'Acte général ainsi
reviséet, partant, ne porteront pas atteinte aux droits des Etats qui,
parties à l'Acte tel qu'il a étéétablien 1928,entendraient s'en pré-
valoir dans la mesure où il pourrait encorejouer ».

d) Les articles 17, 33, 34 et 37 de l'Acte général,qui se réfèrent à la
Cour permanente de Justice internationale, sont-ils encore applicables
par le jeu de l'article 37 du Statut? Une réponse affirmative semble être
la seule soutenable.
La Cour a répondu indirectement à la question dans l'affaire de la
Barcelona Traction (exceptions préliminaires). M. Armand-Ugon a
montré l'identitéde nature entre les traités bilatérauxde conciliation,
règlement judiciaire et arbitragede l'époqueet le traitémultilatéralqu'est
l'Acte général.Il a dit du traité hispano-belge de 1927qu'il ((n'est autre
chose qu'un Acte général enpetit entre deux Etats)). C'est vrai. Il fait

ensuite leraisonnement suivant:la résolution268A(III) lui paraît démon-
trer sans aucun doute que l'Assemblée générale n'paas cru pouvoir faire
application de l'article 37 du Statutde la Cour aux dispositions de l'Acte
généralvisant la Cour permanente, parce que, pour le transfert ((un
nouvel accord [l'Acte de 19491était indispensable, ce qui signifiait que
l'article 37nejouait pas )(opinion dissidente, C.I.J.Recueil1964,p. 156).
La Cour n'a pas acceptécomme valable le raisonnement de M. Armand-
Ugon; elle a nié implicitement son interprétation concernant l'Acte de
1949 et déclarél'article 37 du Statut applicable àl'Acte générad le 1928 1.
La Cour enseigne que l'objet véritable de la clause juridictionnelle qui
met en jeu la Cour permanente (selon l'article 37) n'est pas ((de désigner
tel tribunal plutôt que tel autre, mais de créer uneobligation de règlement

judiciaire » (ibid., p. 38).

1 Elle ajugéque le traité entrel'Espagneet la Belgiqueest toujoursen vigueur, parce
que l'article37 du Statut lui est applicable.signatories that had not denounced it" (ibid., p. 189). Mr. Lapie (France)
also said that the General Act of 1928,which it was proposed "to restore
to its original efficacy, was a valuable document inherited from the
League of Nations and it had only to be brought into accordance with
the new Organization" (ibid., 199th Plenary Meeting, 28 April 1949,
p. 193).To sumup, and without there being any need to burden this account

of the matter with further quotations, it would seem that no-one at that
time claimed the Act had ceased to exist as between its signatories, and
that on the contrary it was recognized to be still in force between them.
Resolution 268A i(1II)of 28April 1949,on the Restoration to the Gen-
eral Act of its Origiinal Efficacy, gives a clear indication of what its object

and purpose is. It considers that the Act was impaired by the fact that
the organs of the League of Nations and the Permanent Court had dis-
appeared, and that the amendments mentioned were of a nature to restore
to it its original efficacy. The resolution emphasizes that such amendments

"will only appl:yas between the States having acceded to the General
Act as thus amended and, as a consequence, will not affect the rights
of such States, parties to the Act as established on 26 September 1928,
as should clairri to invoke it in so far as it might still be operative".

(d) Are Articles 17, 33, 34 and 37 of the Genertll Act, which refer to
the Permanent Coiurt of International Justice, still applicable by the

operation of Article 37 of the Statute? Solely an affirmative answer would
appear to be tenabbe.
The Court answered the question indirectly in the Barcelona Traction,
Light and Power Company, Limited case (Preliminary Objections stage);
Judge Armand-Ugon demonstrated that the bilateral treaties of concilia-

tion, judicialsettlement and arbitration of the time were of the same nature
as the General Act, a multilateral treaty. He said of the Hispano-Belgian
treaty of 1927 that it "is nothing other than a General Act on a small
scale between two States". That is true. He then reasoned as follows:
resolution 268A (III) seemed to him to show, beyond al1possible doubt,
that the General Assembly did not think it could apply Article 37 of the

Statute of the Court to the provisions of the General Act relating to the
Permanent Court, because for such a transfer 'ta new agreement [the 1949
Act] was essential. This meant that Article 37 did not operate" (dissenting
opinion, I.C.J. Rejlorts 1964, p. 156). The Court did not accept Judge
Armand-Ugon's reasoning as sound, and impliedly denied his interpre-

tation of the 1949 ,4ct and found Article 37 of the Statute applicable to
the 1928 General .Act 1.The doctrine of the Court was that the real
object of the jurisdictional clause invoking the Permanent Court (under
Art. 37) was not "'to specify one tribunal rather than another, but to
create an obligatioin of compulsory adjudication" (I.C.J. Reports 1964,
p. 38).

1 It held that the Hispano-Belgian treaty was still in force, because of the applica-
bility to it of Article 37 of the Statute.

131 e) La question qui semble fondamentale dans les débatsactuels sur le

maintien en vigueur de I'Actegénéralest celle de savoir si cet instrument a
fait l'objet ou non d'une abrogation tacite.
Le droit international ne voit pas avec faveur l'abrogation tacite des
traités. La convention de Vienne, qu'on peut tenir comme la codification

de la comrnunisopinio en matière de traités(C.I.J. Recueil 1971, p. 47), a
établique ((l'extinction d'un traité))ne peut avoir lieu ((qu'enapplication
des dispositions du traité ou de la présenteConvention))(art. 42, par. 2)

et que l'extinction d'un traité - selon la convention - peut avoir lieu:
((a) conformément aux dispositions du traité; ou b) à tout moment, par
consentement de toutes les parties, après consultation des autres Etats
contractants ))(art. 54).

L'Acte général aétabli sa durée minimale, prévu son renouvellement
automatique par périodesde cinq ans et précisé laforme et les modalités
de la dénonciation (art. 45). L'Acte, comme la convention de Vienne, n'a
pas considéré l'abrogation tacite. C'est normal. L'admettre serait in-

troduire la confusion dans l'ordre international. En outre, si I'on ad-
mettait l'abrogation tacite, il faudrait établir les preuves des facta con-
cludentia à invoquer pour s'assurer du contrarius consensus des parties et

les établir avec une force suffisante pour délierles parties des obligations
contractées en vertu du traité.

f) 11me sembleexagéréde dire du silence entourant l'Acte qu'il est de

nature à faire présumer sa caducité'. On a continué à mentionner l'Acte
dans les répertoires et listes de traités en vigueur; les auteurs en ont fait
autant 2.
M. Basdevant affirme, a la Cour même,que l'Acte général est

toujours en vigueur et qu'il l'est donc entre la France et la Norvège, qui
l'ont toutes deux signé. 11attire l'attention sur le fait que l'Acte a été

1 Le fait que I'on n'a pas recoursà un traité peut être la meilleure preuve de son
efficacité: c'est qu'ila évitéles différendsentre Etats.

2 11est cité comme étant toujours en vigueur par les auteurs les plus qualifiés en
France et dans d'autres pays. Il faut noter tout demêmeles doutes de Siorat sur la
validité de I'Acte après la dissolution de la Sociétédes Nations. II pose le problème de
savoir si I'Acte généralne serait pas devenu caduc pour une autre raison que la dissolu-
tion de la Cour permanente. L'impossibilité d'exécution en raison de la défaillance du
mécanisme de la Société des Nations pourrait êtreinvoquée. Mais, pour qu'il y ait
extinction, il faudrait prouver que les fonctions incombant à la Société desNations
n'ont pas étédévolues à l'organisation des Nations Unies et que la situation, d'une
part, rendrait l'exécution littéralement impossible et, d'autre part, créerait une impos-
sibilitétotale,complète et permanente. On pourrait invoquer aussi ladésuétudemutuel-
lement acceptée. L'auteur signale que l'attitude des parties à l'égard de l'Acte est
difficileinterpréter et relèveque, pour qu'il y ait désuétude,il faudrait établir de façon
indiscutable que les parties ont adopté une attitudecommune en agissant àl'égard de
I'Acte comme s'il n'existait pas et qu'elles ont ainsi réalisé effectivement un accord
tacite en vertu duquel elles considéreraient que l'Acte a pris fin.("L'article 37 du
Statut de la Cour internationale de Justice11Annuairefran~ais de droit international,
1962, p. 321-323.) Il convient de noter que les données citées par l'auteur sont assez
incomplètes. (e) The question which would appear to be basic to the present dis-
cussion on the continuance in force of the General Act is whether or not

that instrument has been subjected to tacit abrogation.
International law does not look with favour on tacit abrogation of
treaties. The Vienna Convention, which may be regrirded as the-codifica-
tion of communis opinio in the field of treaties (I.C.J. Reports 1971, p. 47),

has laid down that the "termination of a treaty" may take place only "as
a result of the application of the provisions of the treaty or of the present
Convention" (Art. 42, para. 2), and that the termination of a treaty under
the Convention may take place: "(a) in conformity with the provisions of

the treaty; or (6) at any time by consent of al1the parties after consulta-
tion with other contracting Stateî" (Art. 54).
The General Act laid down the minimum period for which it should
be in force, provided for automatic renewal for five-year periods, and
prescribed the form and means of denunciation (Art. 45). Like the Vienna

Convention, the Act did not contemplate tacit abrogation; and this is
as it should be. To admit tacit abrogation woiild be to introduce con-
fusion into the international system. Furthermore, if tacit abrogation
were recognized, it would be necessary to produce proof of the facta

concludentia which would have to be relied on to demonstrate the con-
trarius cot7sensusof'the parties, and proof of sufficient force to relieve
the parties of the otjligation undertaken by them under the treaty.
(f) It seems to me to be going too far to argue from the silence

surrounding the Act that this is such as to give rise to a presumption of
lapse 1.Digests and lists of treaties in force have continued to mention
the Act; legal authcirs have done likewise 2.
In the Court also, Judge Basdevant affirmed that the General Act was

still in force and ihat it was therefore in force between France and
Norway, which were both signatories to it. He drew attention to the fact

1The non-invocation of a treaty may in fact be due to its efficacy in obviating
disputes between the parties-and thereby constitute the best evidence of its con-
tinuance in force.
2 It has been cited as being still in force by the most qualified writers in Franceand in
other countries. Nonetheless, the doubts of Siorat should be noted, asto the validity of
the Act after the winding-up of the League of Nations. He raises the problem whether
the General Act might not have lapsed for a reason other than the winding-up of the
Permanent Court: impossibility of execution, as a result of the disappearance of the
machinery of the League of Nations, might be asserted. But for termination to have
occurred, it would be necessary to prove that the functions laid on the League of
Nations have not been transferred to the United Nations, and that the situation would
both make execution Iiterally impossible and create a total, complete and permanent
impossibility. Generally accepted deslietude inight also be asserted. This u'riter men-
tions that the attitude of the parties towards the Act is difficult to interpret,and points
out that for there to be desuetude it would be necessary to prove indisputably that
the parties had adopteii a uniform attitude by acting with regard to the Act asthough
it did not exist, and that they had thus, in effect, concl~ided a tacit agreement to regard
the Act as having terminated ("L'article 37 du Statut de la Cour internationale de
Justice",Annrraire frar~pis de droit inrrunational,962, pp. 321-323). It should be
observed that the data,givenby this writer are somewhat incoinplete.382 ESSAIS NUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

mentionné dans les observations du Gouvernement français puis ex-
pressément invoqué par l'agent de ce gouvernement comme fondement
de la juridiction de la Cour en l'affaire; il fait égalementremarquer que

l'Acte a étémentionné aussi par le conseil du Gouvernement norvégien
(C.I.J. Recueil 1957, p. 74). Opinion bien autorisée. Mais il me semble
pertinent de noter aussi que la Cour, en rejetant la demande française
dans l'affaire relative à Certains emprunts norvégiens (contre l'opinion de
M. Basdevant), ne met pas en doute la validitéet l'efficacitéde 1'Actel.

L'opinion dissidente de M. Guerrero, sir Arnold McNair, MM. Read
et Hsu Mo, dans l'affaire des Réservesà laConventionpour laprévention
et larépression ducrime degénocide, seréfère aussi à l'Actegénérad l e 1928
et à l'Acte revisé(C.I.J. Recueil 1951, p. 37)2.

Je crois qu'il faut accepter ce qui est dit dans une étudespéciale en la
matière :

((En conclusion on peut affirmer que l'Acte généralde Genèveest
en vigueur envers vingt Etats contractants 3 encore liéspar l'Acte, et
non seulement d'une manière purement formelle, mais qu'il conserve

toute son efficacitépour les Etats contractants malgré ladisparition
de quelques organes de la Société des Nations4.))

g) Etant admis que l'Actegénéral est resté en vigueuro ,n a pu encore
se demander si la déclaration française reconnaissant comme obligatoire
la juridiction de la Cour, avec la réservede 1966 sur la défensenationale,
avait modifiéles obligations prises par la France quand elle avait signé

l'Acte, en particulier celles qu'énonce le chapitre II. En termes plus
généraux,la question est de savoir si les traitéset conventions en vigueur,
où l'acceptation de la compétence de la Cour est spécialement prévue
(hypothèse de l'article 36, par. 1, du Statut), sont subordonnés aux

1 La Cour dit que le Gouvernement français a mentionné l'Acte généralde Genève
mais elle ajoute que cette mention ne saurait être considéréecomme suffisante pour
établir que la requêtedu Gouvernement français se fondait sur'Acte général.aSi le
Gouvernement français avait voulu procéder sur cette base, il l'aurait expressément
déclaré.)La Cour pense que la requête duGouvernement français se fonde clairement
et précisémentsur l'article 36, paragraphe 2, du Statut. Pour cette raison, la Cour ne
croit pas pouvoir rechercher, pour établir sa compétence,un fondement autre que
celui que le Gouvernement français a lui-mêmeénoncédans sa requêteet sur lequel
l'affaire a étéplaidée devant la Cour par les deux Parries,, (C.I.JRecueil 1957,
p. 24-25). 11semble que le Gouvernement français n'ait pas eu intéàês'appuyer sur
l'Acte général parceque celui-ci requiert l'épuisement des recours internes (art. 31 de
l'Acte).
2 L'Acte estencore cité dans C.I.J. Recueil 1961, p. 19. Le Pakistan l'a invoqué
comme fondement de la compétence de la Cour dans sa requêtedu 11mai 1973contre
l'Inde (affaire rayéedu rôle par ordonnance du 15 décembre 197àla suite du désiste-
ment du Pakistan).
3 La France et le Royaume-Uni ont dénoncél'Acte, après l'introduction de la
présenteaffaire.
4 Kunzmann, (1Die Generalakte von New York und Genf als Streitschlichtungs-
vertrag der Vereinten NationenJIDie Friedens- Warte, 56 (1961-1966), Bâle, p. 22.

133that the Act had been mentioned in the Observations of the French
Government and had later been explicitly invoked by the Agent of that
Government as a basis of the Court's jurisdiction in the case: he likewise
pointed out that the Act had also been mentioned by couns,el for the
Norwegian Government (I.C.J. Reports 1957,p. 74). This is an opinion

of considerable authority. But it seems to me relevant also to observe
that, when the Court (despite Judge Basdevant's opinion) dismissed the
French claim in the CertainNorwegian Loanscase, it did not throw doubt
on the validity and efficacy ofthe General Act 1.
The dissenting opinion ofJudges Guerrero, McNair, Read and Hsu Mo,

in the case concerning ~eservations to the Conventionfor the Prevention
and Punishment ofthe Crime of Genocide, also referred to the 1928
General Act and to the Revised Act (I.C.J. Reports 1951,p. 37) 2.
In my view, one can only agree with the following statement, taken
from a special stud:yof the matter:

"In conclusion it may be affirmed that the General Act of Geneva
is in force between twenty contracting States 3 which are still bound

by the Act, an,d not only in a purely forma1 way, for it retains full
efficacyfor the contracting States despite the disappearance of some
organs of the L,eagueof Nations 4."

(g) The continuance in force of the General Act being admitted, it has
still been possible to ask whether the French declaration recognizing the
compulsory jurisdiction of the Court, with the 1966 reservation as to

national defence, might not have modified the obligations undertaken by
France when it signed the Act, in particular those contained inChapter II.
In more general terms, the question is whether the treaties and conven-
tions in force in whiichacceptance of the Court's jurisdiction is specially
provided for (the h:ypothesisof Art. 36, para. 1, of the Statute),are sub-

1 The Court said th:it the French Government had mentioned the General Act of
Geneva, but went on to Saythat such a reference could not be regarded as sufficient to
justify the view that the Application of the French Government was based upon the
General Act. "If the French Government had intended to proceed upon that basis it
would expressly have so stated." The Court considered that the Application of the
French Government was based clearly and precisely on Article 36, paragraph 2, of the
Statute. For that reason, the Court felt that it would not be justified in seeking a basis
for its jurisdiction "different from that which the French Governmentself set out in
its Application and by reference to which the case had been presented by both Parties
to the Court" (I.C.J. Ii:eports1957,p. 24 f.). It seerns that it would not have been in the
interest of the French Government to place emphasis on the General Act, because the
latter, in Article 31, reiquired the exhaustion of local remedies.
2 The Act is also citlcdin I.C.J. Reports 1961, p. 19. Pakistan invoked it as basis of
the Court's jurisdictiori in its Application of Il May 1973 against I(acase which
was removed from the list by an Order of 15 December 1973 following a discontinu-
an3eFrance and the United Kingdorn have denounced the Act since the institution of
the present proceedings.
4 Kunzmann, "Die Generalakte von New York und Genf als Streitschlichtungs-
vertrag der Vereinten Nationen", 56 Die Friedens-Warte (1961-1966), Basle, p. 22.

133déclarations unilatérales des Etats acceptant la compétence obligatoire de
la Cour (hypothèse de l'article 36, par. 2, du Statut), ou dépendent de ces
déclarations, avec pour conséquence que l'abrogation de cette obligation
d'être soumis à la juridiction de la Cour ou sa limitation par de nouvelles
réservesentraîne l'abrogation ou la limitation des obligations assumées en
vertu d'une convention bilatérale ou plurilatérale antérieure.

Le respect dû à la souveraineté des Etats et le caractère facultatif de la
juridiction de la Cour (art. 2, par. 7 de la Charte) ne semblent pas de
nature à écarter le principe pacta sunt servanda, pilier essentiel du droit
international. Une fois la soumission à la compétence de la Cour établie

dans un traitéou une convention (art. 36, par. 1,du Statut), les parties au
traité ou à la convention ne peuvent pas se délier à leur gréet par une
déclaration unilatérale de l'obligation prise envers un autre Etat. Cette
déclaration unilatérale n'aura pas plus de force parce qu'elle prévoit la
compétence de la Cour conformément à I'article 36, paragraphe 2, du
Statut, ou parce qu'elle est assortie de réserves, ou contient la possibilité

de priver arbitrairement la Cour de sa juridiction. Pour se délier de
l'obligation prise, il faudra toujours dénoncer le traité ou la convention,
conformément aux conditions requises par le traité ou la convention en
vigueur.
Même si l'on pense que la déclaration déposée selon l'article 36,
paragraphe 2,du Statut fait naître des obligations de nature contractuelle,

la réponse sera toujours que cette déclaration ne peut libérer 1'Etat
déclarant de tout ou partie des obligations déjà assuméesdans un accord
antérieur, en dehors des conditions déterminéesdans cet accord. Pour
qu'il y ait extinction implicite d'un traité du fait de la conclusion d'un
traité postérieur, il faut avant tout ((que toutes les parties à ce traité
concluent ultérieurement un traité portant sur la même matière ))(con-

vention de Vienne, art. 59).
11faut noter aussi que, entre la déclaration faite en vertu de l'article 36,
paragraphe 2, du Statut et l'Acte général,il n'y a pas d'incompatibilité
engendrant l'abrogation tacite du fait d'un nouveau traité. L'Acte joue
entre ses signataires - groupe fermé de vingt Etats - et impose des

conditions et limitations spéciales aux parties. Le Statut, selon l'inter-
prétation donnée à l'article 36, paragraphe 2, ouvre la porte à presque
tous les Etats (art. 93 de la Charte) et permet d'établir des conditions et
réservesde quelque nature que ce soit, à la différencede l'Acte général.

La relation entre l'Acte généralet l'acceptation postérieure de la

juridiction obligatoire est exposée avec concision et de main de maître
par M. Basdevant :
((Une voie d'accès à la Cour a étéouverte par l'adhésiondes deux

Parties à l'Acte généralde 1928: elle ne saurait êtreferméeou neu-
tralisée par la dispostion restrictive que le Gouvernement français
et non le Gouvernement norvégien a ajoutée à son acceptationordinate to the unilateral declarations made by States accepting the com-
pulsory jurisdiction of the Court (the hypothesis of Art. 36, para. 2), or
depend on those declarations, with the result that the abrogation of that
obligation to be sub.jectto the Court's jurisdiction, or its limitation by the
introduction of additional reservations, also entails the abrogation or
limitation of the obligations undertaken under a previous bilateral or

multilateral convenl ion.
The respect due to the sovereignty of States, and the optional nature of
the Court's jurisdiction (Art. 2,para. 7, of the Charter), would not seem
to warrant setting aside the principle of pacta sunt servanda, an essential
pillar of internatiorial law. Once submission to the Court's jurisdiction
has been established in a treaty or convention (Art. 36, para. I, of the
Statute), the parties to the treaty or convention cannot of their own

free will and by uniilateral declaration escape the obligation undertaken
toward another State. Such declaration does not have prevailing force
simply because it provides for thejurisdiction of the Court in accordance
with Article 36, par,agraph 2,of the Statute, or because it is made subject
to reservations, or enshrines a possibility of arbitrarily depriving the
Court of jurisdiction. To undo the obligation undertaken, it will always

be necessary to denounce the treaty or convention in force, in accordance
with the prescribed conditions.
Even if it be thought that a declaration filed under Article 36, para-
graph 2, of the Staitute gives rise to obligations of a contractual nature,
the answer would still be that such declaration cannot free the declarant
State from al1or any of the obligations which it has already undertaken
in a prior agreement, otherwise than in accordance with the conditions

laid down in that agreement. For there to be implied termination of a
treaty as a result of the conclusion of a subsequent treaty, a primary
requirement is that "al1 the parties to it conclude a later treaty relating to
the same subject-m,atterW(Vienna Convention, Art. 59).
It should also be noted that there is not such incompatibility between
declarations made by virtue of Article 36, paragraph 2,of the Statute,

and the General Act, as to give rise to tacit abrogation as a result of a new
treaty. The Act operates between the signatories thereto, a closed group
of 20 States, and imposes special conditionsand limitations on the parties.
The Statute, on the contrary, according to the interpretation which has
been given of Article 36, paragraph 2,opens the door to practically al1
States (Art. 93 of the Charter), and permits of conditions and reservations

of any kind whatever being laid down.
The relationship between the General Act and subsequent acceptance
of the cornpulsory jurisdiction of the Court has been explained in a
concise and masterl!~fashion by Judge Basdevant:

"A way of access to the Court was opened up by the accession
of the two Parties to the General Act of 1928. It could not be closed
or cancelled out by the restrictive clause which the French Govern-
ment, and no~t the Norwegian Government, added to its fresh384 ESSAISNUCLÉAIRES (OP. DISS. DE CASTRO)

nouvelle de la juridiction obligatoire énoncéedans sa déclarationde
1949. Cette disposition restrictive, émanant d'un seul, ne fait pas
droit entre la France et la Norvège; elle ne suffit pasà faire échec
au régimejuridique existant entre eux sur ce point; elle ne saurait
fermer la voie d'accèsà la Cour antérieurement ouverte ni la neutra-
liser pour aboutirà l'incompétence.»(C.I.J. Recueil1957, p. 75-76.)

h) Reste toujours un mystère troublant: pourquoi le Gouvernement
français n'a-t-il pas dénoncé l'Acte général entemps voulu et dans les
formes régulières, enfaisant usage de l'article, paragraphe 3, de l'Acte,
au moment (en 1966)où ila déposéavec de nouvelles réserves sadéclara-
tion reconnaissant la compétence de la Cour? 11semble évident que le

Gouvernement français ne voulait pas en 1966 que les questions con-
cernant la défensenationale puissent être portéesdevant la Cour. On
peut ajouter qu'on ne sait pas pourquoi le Gouvernement français a
maintenu la compétence dela Cour en la matière envers les signataires de
l'Acte'. Mais cette anomalie ne saurait êtreconsidéréecomme suffisantt
pour faire présumer une dénonciation tacite de l'Acte généralpar le
Gouvernement français, pour donner àcette dénonciation une efficacité
juridique en violation des dispositions de l'Acte lui-même.L'admettre
serait contraire aux principes les plus respectésdu droit des traités; ce
serait contraireà la sécuritéjuridiqueet mêmeaux exigencesdu droit sur
les présomptions.

1. L'ordonnance du 22juin 1973a décidéque les piècesécrites porte-
raient à la fois sur la question de la compétencede la Cour pour con-
naître du différendet sur celle de la recevabilitéde la requête. LaCour a
suivi ainsi l'article de son Règlement.
Le terme ((recevabilité))est très large, mais l'ordonnance éclaire le
sens dans lequel elle l'emploie en son paragraphe 23 où il est dit qu'on
ne saurait supposer à priori que le demandeur ((ne soit pas en mesure
d'établir à l'égard de ces demandes l'existence d'un intérêt juridique

autorisant la Cour àaccueillir la requêt)).
11convient de se demander si lerequérant a fait valoir ou non dans ses
conclusions un intérêt juridique comme fondement de sonaction. Au
stade préliminaire envisagédans l'ordonnance, il faut voir d'abord si le
demandeur est fondé à engager la procédure (legitimatioad processum,
Rechtsschutzanspruch), à mettre en mouvement la machine procédurale,
avant de procéder à l'examen du fond de l'affaire. Une autre question se
poserait ensuite, celle de savoir si l'intétlléguéest, en fait et en droit,

1 Bien qu'on ait pu avancer des hypothèses pour expliquer cette conduiteen appa-
rencecontradictoire.
135 acceptance of compulsory jurisdiction stated in its Declaration of
1949. This restrictive clause, emanating from only one of thern, does
not constitute the law as between France and Norway. The clause
is not sufficient to set aside the juridical system existing between
them on this point. It cannot close the way of access to the Court that

was forrnerly open, or cancel it out with the result that no jurisdic-
tion would remmain."(1.C.J. Reports 1957, pp. 75 f.)

(h) There still rernains a teasing mystery : why did the French Govern-
ment not denounce the General Act at the appropriate time and in accor-
dance with the required forms, in exercise of Article 45, paragraph 3, of
the Act, at the time in 1966 when it filed its declaration recognizing the
jurisdiction of the Court subject to new reservations? It seems obvious

that the French Government was in 1966 not willing that questions
concerning national defence should be capable of being brought before
the Court, and we simply do not know why the French Government
preserved the Court's jurisdiction herein vis-à-vis the signatories to the
Act 1.But this anornalous situation cannot be regarded as sufficient to

give rise to a presumption of tacit denunciation of the General Act by
the French Goverriment, and to confer on such denunciation legal
effectiveness in violation of the provisions of the Act itself. To admit this
would be contrary to the most respected principles of the law of treaties;
it would be contrary to legal security and even to the requirements of the
law as to presumptions.

III. THEADMISSIBILIT OF THE APPLICATION

1. The Order of 22 June 1973decided that the written pleadings should

be addressed both to the question of the Court's jurisdiction to entertain
the dispute and to that of the admissibility of the Application. The Court
has thus followed Article 67 of its Rules.
The term "admis:iibility" is a very wide one, but the Order, in para-
graph 23, throws soine light on the meaning in which it uses it, by stating
that it cannot be assumed a priori that the Applicant "may not be able to

establish a legal interest in respect of these claims entitling the Court to
admit the Application".
The question is whether the Applicant, in its submissions, has or has
not asserted a legalinterest as basis of its action. At the preliminary stage
contemplated by the Order, the Court has first to consider whether the

Applicant is entitled to open the proceedings (legitimatio ad processum,
Rechtsschutzanspruch), to set the procedural machinery in motion, before
turning to examination ofthe merits ofthe case. Subsequently the question
would arise as to whether the interest alleged was, in fact and in law,

1 Though various h:ypotheses have been put forward to explain this apparentiy
contradictory conduct.digne de protection juridique 1.Mais elle se rattache au fond de l'affaire
et n'appelle donc pas une étude ici.
Le demandeur fait référenceaux violations par la France de plusieurs

règles de droit et il essaie de montrer qu'il a un intérêtjuridique à se
plaindre de chacune de ces violations. 11 importe donc d'examiner
l'intérêt ainsiinvoqué dans chaque cas de prétendue violation, mais il

semble utile de s'arrêterd'abord sur le sens de l'expression ((intérêt
juridique D.
2. L'idée de l'intérêtjuridique est au centre même des règles de

procédure (((point d'intérêt, point d'action»). Il faut donc l'employer
avec la rigueur propre à sa fonction judiciaire. L'Acte général est un bon
guide à cet effet. Il distingue entre les ((différendsde toute nature ))qui

peuvent êtresoumis à la procédure de la conciliation (art. premier), le cas
d'((un intérêtd'ordre juridique)) dans un différend à fin d'intervention
(art. 36) et ctous différendsau sujet desquels les parties se contesteraient
réciproquement un droit » (art. 17). Ceux-ci sont les seuls convenant au

règlement judiciaire et pouvant être soumis pour jugement à la Cour
permanente de Justice internationale d'après l'Acte généra l.

Comme on peut le voir, l'article 17de l'Acte généralne permet pas une
interprétation extensive de l'intérêt juridique qui peut être invoqué
devant la Cour. Il s'agit d'un droit subjectif propre au demandeur et qui

est au cŒur d'un différend, parce qu'il est matière à contestation réci-
proque entre le demandeur et le défendeur. C'est donc un droit au sens

1 M. Morelli souligne que la distinction entre le pouvoir d'action et l'intérêtsubs-
tantiel est propre au droit interne mais qu'en droit international, ce qu'il faut voir,
c'est s'ily a un différend (opinion individuelle,.J. Recueil1963, p. 132-133). L'obser-
vation ne semble pas très utile. Nier la recevabilité pour manque d'intérêtjuridique du
demandeur ou nier la recevabilité parce qu'il n'y a pas de différenden raison du défaut
d'intérêt juridique du demandeur, cela revient au même. M. Morelli croit devoir

critiquer l'arrêt de962sur le Sud-Ouert africain parce qu'à son avis l'arrêtconfond le
s droit ou pouvoir d'action ,,(qui doit êtreexaminé comme question préliminaire) et
I'existence 1d'un droit ou intérêtjuridique,), d'riun droit subjectif substantiel du
demandeur 1)(qui doit être examiné comme question de fond) (opinion individuelle,
C.I.J. Recueil 1966, p. 61).
2 Sir Gerald Fitzrnaurice a éclairci ce qu'il faut entrendre par différend. 11nous dit
qu'un différendjuridique n'existe que
csi l'issue ou le résulratdu différend,sousforme de décision de laCour, peut affecter

les intérêtsou les rapports juridiques des parties, en ce sens que cette décision
confère ou impose à l'une ou à l'autre d'entre elles un droit ou une obligation
juridique (ou qu'elle confirme ce droit ou cette obligaiton), ou bien qu'elle joue le
rôle d'une injonction ou d'une interdiction pour l'avenir, ou encore qu'elle cons-
titue un élémentde détermination à l'égardd'une situation juridique continuant
à exister1(opinion individuelle, C.I.J. Recuei1963, p. 110).
Enseignement qui n'est pas contredit par I'existence de l'action déclaratoire. A son
sujet, il faut noter qu'il appartient la procédure contentieuse de déclarer I'existence
ou l'inexistence d'un droit subjectif ou d'une obligation juridiqueconcrétiséeou bien
déterminée. Au contraire, la Cour n'est pas tenue de faire une déclaration abstraite ou
généralesur I'existence ou l'inexistence d'une règlede droit objectif ou d'une obligation
généraleou indéterminée. Cette déclaration pourra êtrel'objet d'une demande d'avis
consultatif.

136worthy of legal protection 1. But that would belong to the merits of the
case, and it therefore does not fa11to be considered here.
The Applicant ref'ersto violations by France of several legal rules, and

endeavoursto show that it has a legal interest to complain of each of these
violations. It will therefore be necessary to examine the interest thus
invoked in each case of alleged violation, but it would be as well for me

first of al1 to devote sorne attention to the meaning of the expression
"legal interest".
2. The idea of legal interest is at the very heart of the rules of procedure
(cf. the maxim "no interest, no action"). It must therefore be used with

the exactitude required by its judicial function. The General Act affords a
good guide in this respect: it distinguishes between "disputes of every
kind" which may be subrnitted to the procedure of conciliation (Art. l),
the case of "an interest of a legal nature" in a dispute for purposes of
intervention (Art. 36), and "al1 disputes with regard to which the Parties

are in conflict as to their respective rights" (Art. 17); only the latter are
disputes appropriate to judicial settlement, and capable of being sub-
mitted for decisiori to the Permanent Court of International Justice in

accordance with the General Act 2.
As is apparent, Article 17 of the General Act does not permit of an
extensive interpretation of the "legal interest" which may be asserted
before the Court. What is conternplated isa right specific to the Appli-
cant which is at the heart of a dispute, because it is the subject of con-

flicting claims betvieen the Applicant and the Respondent. Thus it is a

1 Judge Morelli once pointed out that the distinction between a right of action and a
substantive interest is proper to municipal law, whereas it is necessary in international
law to ascertain whether there is a dispute (separate opinion, I.C.J. Reports 1963,
pp. 132f.).1 do not fiiid this observation particularuseful. To hold an application
inadmissible because of the applicant's want of legal interest, orto reach the same con-
clusion because for want of such interest there is no dispute, conies to one and the
same thing. Judge Moirelli felt bound to criticize the 1962 South West Africa Judgment
because in his view it confused "the right to institute proceedings" (which has to be
examined as a preliminary question) and the existence of "a legal right or interest" or
"a substantive right vested in the Applicants" (which has to be regarded as a question
touching the merits) (separate opinion, I.C.J. Reports 1966, p. 61).
2 Sir Gerald Fitzmaurice has shed light on the meaning to be given to the term
"dispute". He says that a legal dispute exists
"only if its outcome or result, in theform of a decision of the Court, is capable of
affecting thlegalinterests or relations of the parties, in the sense of conferring or
imposing upon (or confirmingfor) one or other of them, a legal right or obligation,
or of operating as an injunction or a prohibition for the future,or as a ruling
material to a stili subsisting legal situation" (separateopiI.C.J. Reports 1963,
p. 110).

The point thus made is not upset by the fact that proceedings can be instituted to
secure a declaratory ruling, but in that connection it must be noted that what may
properly fall to be determined in contentious proceedings is the existence or non-
existence of a right ve:ited in a party thereto, or of a concrete or specific obligation. The
Court cannot be called upon to make a declaratory finding of an abstract or general
character asto the existence or non-existence of an objective rule of law, or of a general
or non-specific 0blig;ition. That kind of declaration may be sought by means of a
request for an advisory opinion.
136propre du terme (jus dominativum) dont la nature est d'appartenir à un
Etat ou à un autre, 1'Etat ayant la faculté de négocier à son sujet et d'y
renoncer.
Or le demandeur semble oublier l'article 17 et pense qu'il lui suffit

d'avoir un intérêtcollectif ou général.11cite plusieurs autorités pour
étayer son opinion suivant laquelle le droit international reconnaît à
tout Etat un intérêtd'ordre juridique à ce que d'autres pays observent les
obligations que le droit international leur impose, et suivant laquelle aussi
le droit reconnait l'intérêt detous les Etats à l'égard desgrandes causes

humanitaires.
Si l'on regarde de près les textes cités, on doit en tirer une autre con-
clusion. Dans les affaires du Sud-Ouest africain (exceptionspréliminaires),
M. Jessup montre que le droit international a reconnu que les Etats

peuvent avoir un intérêtjuridiquedans des questions n'affectant pas leurs
intérêts ((concrets ))ou, pourrait-on dire, ((physiques ))ou ((tangibles 1).
Mais Jessup constate aussi que ((des Etats ont fait valoir des intérêts
juridiques de ce genre en se fondant sur un traitén;il mentionne à l'appui

de cette constatation les traités de minorités, la Convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide, des conventions niises
en ceuvre par l'organisation internationale du Travail et le système des
mandats (opinion individuelle, C.I.J. Recueil 1962, p. 425 et suiv.).
L'autre opinion de M. Jessup dans les affaires du Sud-Oiiest africain

(deuxièmephase), où ilcritique l'arrêt dela Cour qui conteste aux deman-
deurs et à tout Etat le droit de recours judiciaire lorsque le demandeur
n'allègue pas un intérêtpropre touchant au fond, est très nuancée.
Jessup tient compte de ce qu'il s'agit de ctl'exécutiond'obligations con-
ventionnelles fondamentales contenues dans un traité avant ce au'on

peut appeler àjuste titre des caractéristiques constitutionnelles ))(opinion
dissidente, C.I.J. Recueil 1966, p. 386). 11précise sa pensée en disant:
((11 n'y a pas d'actio popularis généralementétablie-en droit interna-
tional ))(ibid., p. 387-388). Dans la même espèce, M. Tanaka déclare:

((Nous estimons que des intérêtsgénérauxd'ordre humanitaire
se concrétisent dans ces traités et ces organisations. Une fois qu'ils

revêtent uneforme institutionnelle, ces intérêtsprennent un caractère
juridique et doivent être protégésau moyen de procédures bien
établies.))(Opinion dissidente, C.I.J. Recueil 1966,p. 252.)

En réponse à l'argument tendant à ce qu'elle admette «une sorte
d'actio popularis, ou un droit pour chaque membre d'une collectivité
d'intenter une action pour la défensed'un intérêt public )),la Cour dit de

manière tranchante :
((Or, s'il se peut que certains systèmesde droit interne connaissent

cette notion, le droit international tel qu'il existe actuellement ne la
reconnait pas et la Cour ne saurait y voir l'un des ((principes géné-
raux de droit » mentionnés à l'article 38, paragraphe 1 c), de son
Statut. ))(C.I.J. Recueil 1966, p. 47, par. 88.)right in the proper sense of that term (ius dominativum), the nature of
which is that it belongs to one or another State, that State being entitled
to negotiate in respect thereof, and to renounce it.
The Applicant however seems to overlook Article 17, and considers
that it is sufficient for it to have a collective or general interest. It has
cited several authorïties to support its view that international law recog-
nizes that every State has an interest of a legal nature in the observation
by other countries of the obligations imposed upon them by international
law, and to the effectalso that law recognizes an interest of al1States with
regard to general humanitarian causes.
If the texts whic'h have been cited are closely examined, a different
conclusion emerges. In South West Africa (PreliminaryObjections) Judge
Jessup showed how international law has recognized that States may
have interests in matters which do not affect their "material" or, Say,

"physical" or "tangible" interests. But Judge Jessup also observes that
"States have asserted such legàl interests on the basis of some treaty";
in support of this observation he mentions the minorities treaties, the
Convention for the Prevention and Punishment of the Crime of Geno-
cide, conventions sponsored by the International Labour Organisation,
and the mandates system (separate opinion, I.C.J. Reports 1962,
pp. 425 ff.). Judge Jessup's opinion in the second phase of the South West
Africa cases, in which he criticizes the Court's Judgment, which did not
recognize that the Applicants or any State had a right of a recourse to a
tribunal when the Applicant does not allege its own legal interest relative
to the merits, is very subtly argued. Judge Jessup took into account the
fact that it was a question of "fulfilment of fundamental treaty obligations
contained in a treaty which has what may fairly be called constitutional
characteristics" (dissenting opinion, I.C.J. Reports 1966, p. 386). More
specifically, he added: "There is no generally established actio popularis
in international law" (ibid., p. 387). In the samecaseJudge Tanaka stated:

"We consider that in these treaties and organizations commonand
humanitarian interests are incorporated. By being given organiza-
tional form, these interests take the nature of 'legal interest' and
require to be protected by specific procedural means." (Dissenting
opinion, I.C.J. Reports 1966,p. 252).

In reply to the .argument that it should allow "the equivalent of an
actio popularis, or right resident in any member of a community to take
legal action in vinclication of a public interest", the Court stated:

". .. although a right of this kind may be known to certain municipal

systems of law, it is not known to international law as it stands at
present :nor is the Court able to regard it as imported by the 'general
principles of law' referred to in Article 38, paragraph 1 (c), of its
Statute" (I.C.J. Reports 1966,p. 47, para. 88).Par contre la Cour a dit aussi:

((Une distinction essentielle doit en particulier êtreétablie entre
les obligations des Etats envers la communauté internationale dans
son ensemble et celles qui naissent vis-à-vis d'un autre Etat dans le
cadre de la protection diplomatique. Par leur nature même,les

premières concernent tous les Etats. Vu l'importance des droits en
cause, tous les Etats peuvent être considéréc somme ayant un intérêt
juridique à ce que ces droits soient protégés;les obligations dont il
s'agit sont des obligations erga omnes. ))(C.I.J. Recueil 1970, p. 32,
par. 33.)

Ces phrases, qu'on a pu qualifier de progressistes et juger dignes de
sympathie, doivent s'entendre cum grano salis. II me semble que le

raisonnement qu'elles formulent obiter ne doit pas être considéré comme
consacrant la reconnaissance de I'actiopopularis en droit international; il
faut l'interpréter d'une manière plus conforme à la pratique générale
acceptée comme étant le droit. Je ne peux pas croire qu'en vertu de ce
dictum la Cour estime recevable par exemple la demande de I'Etat A

contre 1'Etat B où A alléguerait que B n'applique pas ((des principes et
des règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine ))
(C.I.J. Recueil 1970, p. 32, par. 34) envers les sujets de 1'EtatB ou même
de 1'Etat C. Peut-êtreen rédigeant le paragraphe en question la Cour
a-t-elle penséau cas où 1'Etat B porterait préjudiceaux sujets de 1'EtatA

en lésant les droits fondamentaux de la personne. On doit aussi tenir
compte de ce que la Cour semble restreindre son dictiimà la manière de
M. Jessup et de M. Tanaka lorsqu'elle fait référence((à des instruments
internationaux de caractère universel ou quasi universel » (C.I.J. Recueil
1970, p. 32, par. 34)'.

En tout cas si, comme il me semble, la compétence de la Cour dans
l'affaire est fondéesur l'article17 de l'Acte généralet non sur la déclara-
tion française de 1966, la requêten'est recevable que si le demandeur fait
valoir l'existence d'un droit propre qui aurait, selon lui, étéIésépar le fait
du défendeur.

3. La demande tendant à ce que la Cour déclare que les expériences
nucléaires dans l'atmosphère sont illicites en vertu d'une règle générale
de droit international et quetout Etat, y compris le requérant, a le droit
de demander à la France de s'abstenir de procéderà ce genre d'expérimen-
tation, sucite plusieurs doutes.

selon lequel lapropliété impose une obligatioerga omnes;rmais cette obligationne
engendre undroit ou intérêjturidique a la faire valoir devant un tribunal au profit du
propriétaire qui estédans son droit ou intérêtou qui le voit méconnu. Mêmedans le
cas de vol, on ne peut pas parler d'uneo poprrlar- ce qui est autre chose que la
faculté de dénoncer le vol'autorité. II convient aussi de noter qu'une décision de la
Cour n'est pas obligatoerga omnes,elle n'est obligatoire que pour les parties en litige
et dans le cas qui a étédécidé(art. 59 du Statut).On the other hand tbe Court has also said that:

"In particular, an essential distinction should be drawn between
the obligations of a State towa~ds the international community as a
whole, and those arising vis-à-vis another State in the field of
diplomatic protection. By their very nature the former are the
concern of al1States. In view of theimportance of the rights involved,

al1States can be:held to have a legal interest in their protection; they
are obligations erga omnes." (I.C.J. Reports 1970, p. 32, para. 33.)

These remarks, which have been described as progressive and have been
regarded as worthy of sympathetic consideration, should be taken cum
grano salis. it seems to me that the obiter reasoning expressed therein
should not be regarded as amounting to recognition of the actio popularis

in international law; it should be interpreted more in conformity with the
general practice accepted as law. 1am unable to believe that by virtue of
this dictum the Court would regard as admissible, for example, a claim
by State A against !<tateB that B was not applying "principles and rules
concerning the basic rights of the human person" (I.C.J. Reports 1970,
p. 32, para. 34) with regard to the subjects of State B or even State C.

Perhaps in drafting the paragraph in question the Court was thinking of
the case where State B injured subjects of State A by violating the funda-
mental rights of the:human person. It should also be borne in mind that
the Court appears to restrict its dictum on thesame lines as Judges Jessup
and Tanaka when referring to "international instruments of a universal

or quasi-universal character" (I.C.J. Reporrs 1970, p. 32, para. 34) 1.

In any event, if, as appears tme to be the case, the Court's jurisdiction
in the present case is based upon Article 17 of the General Act and not
on the French declaration of 1966, the Application is not admissible
unless the Applicant shows the existence of a right of its own which it

asserts to have beeii violated by the act of the Respondent.
3. The claim tha.t the Court should declare that atmospheric nuclear
tests are unlawfui by virtue of a general rule of international law, and
that al1 States, iricluding the Applicant, have the right to cal1 upon
France to refrain fr,omcarrying out this sort of test, gives rise to numerous

doubts.

1 The expression "obligatioerg0 omizes" calls to mind the principle of municipal
law to the effect that ownership imposes an obligation erga omnes; but this obligation
gives rise to a legal right or interest to assert ownership before a tribunal for the benefit
interest has been disregarded. Even in the case of theft, one cannot speak of an uctioor
popu/aris-which is soinething different from capacity to report the theft to the author-
ities. It should also be borne in mind that a decision of the Court is not binding erga
omnes: it has no binding force except between the parties to the proceedings and in
respect of the particular case decided (Statute, Art. 59). La question peut-elle êtrerégléeconformément au droit international
ou bien appartient-elle encore au domaine de la politique? Il faut aussi se

demander s'il s'agitd'une question de recevabilitéou de fond. Il faudrait
distinguer si elle porte sur le caractère politique ou judiciaire de l'affaire
(question de recevabilité)ou bien sielleporte sur la règle à appliquer et ks
conditions dans lesquelles celle-ci peut être considérée comme faisant
partie du droit coutumier (question de fond)'. Difficultéqui aurait pu
êtrerésolue peut-être enjoignant au fond la question de recevabilité.

Mais point n'est besoin de trancher ces problèmes. A mon avis, il est
clair que le demandeur n'est pas fondé à prier la Cour de déclarerque les
essais nucléairesdans l'atmosphèresont illicites. Le demandeur n'a pasun
intérêtpropre et concret d'ordre juridique, et moins encore un droit qui
soit contestépar l'autre Partie, comme l'exige l'Actegénéral. Lademande
tendant à ce que la Cour fasse une déclaration généraleet abstraite sur
l'existence d'une règlede droit dépassela fonction judiciaire de la Cour.

Celle-ci n'a pas compétence pour déclarer que toutes les expériences
nucléaires dans l'atmosphère sont illicites, mêmesi elle considère efi
conscience que ces expérienceset mêmetoutes les expériences nucléaires
en généralsont contraires à la morale et à toute considération humani-
taire.
4. Le droit invoquépar le demandeur en ce qui concerne le dépôtde
retombées radioactives sur son territoire a étéconsidérédans I'ordon-
nance du 22juin 1973(par. 30). 11faut voir à présentsi lefait d'invoquer

ce droit rend recevable la demande d'examen de l'affaire au fond. La
plainte du demandeur contre la France pour avoir violé sasouveraineté
en introduisant sans permission des matières nuisibles sur son territoire
est basée sur un intérêtd'ordre juridique bien connu depuis le droit
romain. Celui-ci connaît déjà l'interdiction de l'immissio(de l'eau, de la
fumée,des fragments de pierres) dans la propriétévoisine (D.8, 5, 8,
par. 5).Dans ledroit ancien et lesdroits modernes le principe sic utere tuo

ut aliaenum non laedas est admis. La responsabilité d'un propriétaire en
raison des fumées,odeurs insupportables, est bien connue, cparce qu'il
sort [des limites matériellesde son fonds], parce qu'il y a immissiosur les
fonds voisins, qu'il cause un dommage2)).
Dans le droit international, on peut rappeler le devoir de chaque Etat
de ne pas utiliser son territoire aux fins d'actes contraires aux droits
d'autres Etats (C.I.J. Recueil 1949, p. 22). Les sentences arbitrales des

1 Le caractèrede droit coutumierou dejus cogens attribué autraitéde Moscou est
mis en question par son manque d'universalitéet par la réserve del'articleIV selon
laquelleaChaque partie ...aura le droit de se retirerdu traité sielle décide que des
événements extraordinairees, rapport avec l'objet du présentTraité,ont compromis
les intérêts suprêmessdon pays.))
Sur les conditionà remplir pourque naisse une règle de droit coutumier, voirmon
opinion individuelle, C.I.J. Recueil 1974, p. 89 et suiv.
2 Mazeaud, Traité théoriquetpratique de la responsabilitécivile, 3e éd.,1938,tome 1,
p. 647 et suiv., par. 597. Can the question be settled in accordance with international law, or
does it still fall within the political domain? There is also the question

whether this is a niatter of admissibility or one going to the merits. A
distinction must be made as to whether it relates to the political or judicial
character of the case (a question of admissibility), or whether it relates to
the rule to be applied and the circumstances in which that rule can be

regarded as part of customary law (a question going to the merits) 1.
This is a difficulty which could have been resolved byjoining the question
of admissibilitv to )themerits.
But there is no ne:edto settle these points. In my opinion, it is clear that
the Applicant is not entitled to ask the Court to declare that atmospheric

nuclear tests are unlawful. The Applicant does not have its own material
legal interest, still less a right which has been disputed by the other Party
as-required by the Cieneral Act.The request that the Court make a general
and abstract declarationas to the existence of a rule of lawgoes beyond the

Court's judicial fuiiction. The Court has no jurisdiction to declare that
al1atmospheric nuclear tests are unlawful, even ifasa matter of conscience
it considers that such tests, or even al1 nuclear tests in general, are con-
trary to morality and to every htimanitarian consideration.

4. The right relir:d on by the Applicant with regard to the deposit of
radio-active fall-out on its territory was considered in the Order of 22
June 1973 (para. 2'0). We must now consider whether reliance on this

right makes the request for examination of the merits of the case admissi-
ble. The Applicant's complaint against France of violation of its sover-
eignty by introduciing harmful matter into its territory without its permis-
sion is based on a Iegal interest which has been well known since the time

of Roman law. The prohibition of immissio (of water, smoke, fragments
of stone) into a neighbouring property was a feature of Roman law
(D. 8, 5, 8, para. 5). The principle sic utere tuo ut aliaenum non laedas is a
feature of law both ancient and modern. It is well known that the owner
of a property is liable for intolerable smoke or smells, "because he

oversteps [the physical limits of his property], because there is immissio
over the neighbouring properties, because he causes injury 2".
In international law, the duty of each State not to use its territory for
acts contrary to the rights of other States might be mentioned (I.C.J.

Reports 1949, p. 22). The arbitral awards of 16April 1938 and 11 March

-
1 The idea that the Moscow Treaty, by its nature, partakes of customary law oius
cogens is laid open to some doubt by its want of universality and the reservation in its
Article IV to the effec'tthat "Each Party sh...have the right to withdraw from the
Treaty if it decides that extraordinarevents, related to the subject-matter of this
Treaty, have jeopardized the supreme interestsof its country".
On the oreconditions forthe birth ofa rule ofcustomary law, cf. .y separate opinion,
I.C.J. ~eiorrs 1974,pp.89 ff.
2 Mazeaud, Traité théoriqueet pratique de la responsabilité civile, 3rd ed., 1938,
Vol. 1, pp.647 f., para. 597. 16avril 1938et 11mars 1941rendues sur un différendentre les Etats-Unis
et le Canada mentionnent l'inexistence de précédentssur la pollution de
l'air, mais aussi l'analogie avec les cas de pollution de l'eau et le litige

suisse entre les cantons de Soleure et d'Argovie'. Le conflit entre les
Etats-Unis et le Canada à propos des fonderies de Trail est tranché sur
la base de la règle suivante:

((aucun Etat n'a le droit d'utiliser son territoire ou d'en permettre

l'utilisation de manière à causer dans le territoire d'un autre Etat ...
par l'émissionde fumées des dommages importants, établispar des
preuves claires et convaincantes » (Trail Smelter Arbitration, 1938-

1941, Etats-Unis d'Amérique-Canada, Nations Unies, Recueil des
sentences arbitrales, vol. II1,p. 19652).

S'il est admis d'une manière généralequ'on a le droit de demander
qu'il soit interdit aux voisins d'émettre des fuméesnuisibles3, il faut en

tirer la conséquence, par une évidente analogie, que le demandeur a le
droit de prier la Cour d'accueillir sa demandetendant à ce que la France
mette fin au dépôt de retombées radioactives sur son territoire.
La question de savoir si le dépôt de substances radioactives sur le

territoire du demandeur, dépôt provenant des essais nucléaires de la
France, est nuisible au demandeur ne devraitêtre tranchéeque dans une
procédure sur lefond où la Cour examinerait si l'intrusion ou violation du

territoire d'autrui est en soi contraire à la loi ou si elle ne l'est que s'il se
produit desdommages; dans ce dernier cas, elle aurait encore à examiner
la nature des préjudices allégués4,leur existences et leur importance

1 Le Tribunal fédéralsuisse établit que, selon les normes du droit international, la
souveraineté d'un Etat peut s'exercer librement tant qu'elle n'atteint pas les droits
découlant de celle d'un autre Etat; la présence du stand de tir argovien mettait en
danger certaines régions soleuroises et le tribunal a interdit l'utilisation du stand de tir
tant que des mesures de protection suffisantes n'auraient pas étéprises (Arrêtsdu
Tribunalfédéralsuisse, vol. XXVi, première partie, p. 449-451, considérant 3), citation
de Roulet, Le caractère artificiel de la tiiéoriede l'abus de droit en droit international
public, Neuchâtel, 1958, p. 121.

2 La sentence arriveà cette conclusione under the principles of international law, as
well as of the law of the United StateilLa sentenceest considéréecommz cfondamen-
tale pour tout leproblème des immixtions. Ses fondements font aujourd'hui partie du
droit international coutumier J),A. Randelzhofer, B. Simma, (Das Kernkraftwerk an
der Grenze - Ein 'ultra-hazardous activity' im Schnittpunkt von internationalem
Nachbarrecht und Umweltschutzx. Festschrift für Friedrich Berber, Munich, 1973,
p. 405. Cette sentence signifie l'abandon de la théorie de Harmon (souveraineté absolue
dechaqueEtatsur son territoire envers tous les autres);Krakan, Die Harmon Doktrin,
Eine These der Vereinigten Staaten zum internationalen Flussrechtr,Hambourg, 1966,
p. 9.
3 De continuer à émettre des fumées nuisibles ou d'en émettre à nouveau s'il est à
craindre (ad metuendum) que ce soit le cas Damnum infectum est damnum nondum
factum, quod futurum veremur, D.39, 2, 2.
4 Elle devrait dire par exemple s'il faut tenir compte ou non de ce que la poursuite
d'essais nucléairescause un préjudice, notamment des appréhensions, de l'anxiétéet de
l'inquiétude, aux habitants et au Gouvernement de l'Australie.
5 Ce qui ouvre la question de l'administration des preuves (art. 48 et 50 du Statut,
art. 62 du Règlement).1941 given in a dispute between the United States and Canada mention
the lack of precederits as to pollution of the air, but also the analogy with
pollution of water, and the Swiss litigation between the cantons of Solo-
thurn and Aargau '.The conflict between the United States and Canada

with regard to the 1"railSmelter was decided on the basis of the following
rule :

"No State has the right to use or permit the use of its territory in
such a manner as to cause injury by fumes in or to the territory of
another . .. when the case is of serious consequence and the injury

is established by clear and convincing evidence." (Trail Smelter
arbitration, 1'938-1941, United States of America v. Canada,
UNRIAA, Vol. III, p. 1965 2.)

If it is admitted ,asa general rule that there is a right to demand pro-
hibition of the emission by neighbouring properties of noxious fumes 3,

the consequence must be drawn, by an obvious analogy, that the Appli-
cant is entitled to ask the Court to uphold its claim that France should
put an end to the deposit of radio-active fall-out on its territory.
The question whether the deposit of radio-active substances on the

Applicant's territory as a result of the French nuclear tests is harmful
to the Applicant should only be settled in the course of proceedings on the
merits in which the Court would consider whether intrusion or trespass
into the territory of another is unlawful in itself or only if it gives rise

to damage; in the latter hypothesis, it would still have to consider the
nature of the alleged damage 4, its existence 5 and its relative import-

1 The Swiss Federal Tribunal laid down that, according to the rules of international
law. a State may freely exercise its sovereignty provided it does not infringe rights
derived from the sovereignty of anotherState; the presence of certain shooting-butts in
Aargau endangered areas of Solothurn, and the Tribunal forbadeuse of the butts until
adequate protective mieasures had been introduced (Judgments of' the Swiss Federal
Tribunal, Vol. XXVI, Part 1, pp. 449-451, Recital 3, quoted in Roulet, Le caractère
artificiel de la théoriea'el'abus de droit en droit international public, Neuchâtel 1958,
p. 121).
2 The Award reacht:~that conclusion "under the principles of international law, as
well as of the law of the United States". The award has been regarded as "basic for the
whole problem of interference. Its bases are nowpart of customary international law",
A. Randelzhofer, B. Simma, "Das Kernkraftwerk an der Grenze-Ein 'ultra-hazar-
dous activity' im Schnittpunkt von internationalem Nachbarrecht und Umweltschutz",
Festschrift für Friedrich Berber, Munich, 1973, p. 405. This awardmarks the abandon-
ment of the theory of IHarmon (absolute sovereignty of each State in its territory with
regard to al1others); Krakan, Die Harmotl Doktrin: Eine These der Vereinigten Staaten
zum internationalen Flirssrecllt, Hamburg, 1966p. 9.

3 I.e., the continuance of the emission of harmful fumes, or the renewed emission of
fumes if it iso be fear.ed fadmetuendum) that harm will result. Damnum infictum est
damnum nondumfa cru,^,quodfuturum veremur, D. 39, 2,,2.
4 It would have to Say, for example, whether or not account should be taken of the
fact that contin~iation of the nuclear tests causes injury, in particular by way of appre-
hension, anxiety and concern, to the inhabitantsand Government of Australia.
5 This raises the question of evidence (Arts. 48 and 50 of the Statute; Art. 62 of the
Rules).relative', pour se prononcer sur la demande d'interdiction des essais
nucléaires français 2.

5. Une troisième plainte contre la France est fondéesur l'infraction au
principe de la libertéde la haute mer qui résultedes entraves à la naviga-
tion maritime et aérienne dues à l'établissement de zones interdites. Elle
pose des questions juridiques délicates.

Procéderà des essais nucléairesau-dessus de la mer et établir des zones
interdites, cela fait-il partie des ((autres libertésreconnues par les principes
générauxdu droit international ))ou bien est-ce contraire aux libertésdes
autresEtats? Sommes-nousdevant un cas analogue à celui de I'établisse-

ment de zones interdites à l'occasion d'exercices de tir ou de manŒuvres
navales? L'interprétation de l'article 2, paragraphe 2, de la Convention
sur la haute mer impose que, dans chaque cas, on tienne raisonnablement
compte des intérêts desEtats quant à l'usage des libertésde la haute mer;

il faut considérer la nature et l'importance des intérêtsen jeu, le principe
de l'usage non nuisible (prodesseenim sibi unusquisque, dum alii non nocet,
non prohibetur, D.39, 3, 1, par. 1l), de l'abus du droit et de la bonne foi
dans l'usage des libertés.
La question des essais nucléaires a été examinéepar la Conférence de

1958 sur le droit de la mer. On y a notéune forte tendance à condamner
les essais nucléaires, mais la conférence a accepté la proposition de
l'Inde; elle a reconnu que de nombreux Etats appréhendaient que les
explosions nucléairesne constituent une infraction à la libertéde la haute

mer, et a renvoyéla question à l'Assembléegénéralepour toutes mesures
appropriées.
La plainte contre la France à ce sujet pose donc des questions de droit
et des questions de fait qui touchent au fond de l'affaire, et ne doivent pas

êtreexaminées et tranchées au stade préliminaire de la procédure en-
visagépar I'ordonnance du 22 juin 1973.
Il me semble que cette troisième plainte n'est pas recevable sous la
forme où elle est présentée.Le demandeur n'allègue pas un droit propre

qui soit contesté par la France et il ne fonde sa requêtesur aucun pré-
judice concret, dont il offrirait de prouver que la responsabilité incombe à
la France3. Le demandeur n'a pas de titre juridique qui l'autorise à agir
comme porte-parole de la communauté internationale, et à demander que
la Cour condamne la conduite de la France. La Cour ne peut pas outre-

passer ses fonctions judiciaires et déterminer d'une manière généraleles
devoirs de la France en ce qui concerne les libertésde la mer.

(Signé) F. DE CASTRO.

111faut mesurer l'importance des intérêts desparties et mêmela possibilité de les
harmoniser (question du voisinage et de I'usage innocent).
2 La Cour, dans I'ordonnance du 22 juin 1973, fait allusàola possibilité que ces
essais causent1un préjudice irréparabl11au demandeur; c'est une possibilité dont on
doit tenir compte,pour l'indication de mesures conservatoires (urgde ces mesures)
mais non pour la recevabilité.
3Sur les conditions requises pour accueillir une demande de dommages, voir ce qui
est dit dansC.I.J. Recueil 1974, p. 203-205, notamment au paragraphe 76; voir aussi
ibid., p. 225.ance 1,in order to pronounce on the claim for prohibition of the French
nuclear tests 2.

5. A third complaint against France is based upon infringement of the
principle of freedoni of the high seas as the result of restrictions on navi-
gation and flying due to the establishment of forbidden zones. This
raises delicate legal questions.
1sthe carrying-out of nuclear tests over the sea, and the establishment
of forbidden zones, part of the other freedoms "which are recognized by
the general principles of international law" or is it contrary to the free-

doms of other States?Are we dealing with a case analogous to that of the
establishment of forbidden zones for firing practice or naval manoeuvres?
The interpretation of Article 2, paragraph 2, of the Convention on the
High Seas requires that in each case reasonable regard be had to the
interests of other St,atesin their exercise of their freedom of the high seas;
the nature and the importance of the interests involved must be con-
sidered, as must the principle of non-harmful use (prodesse enim sibi
unusquisque, dum alii non nocet, non prohibetur, D. 39, 3, 1, para. I1), of

the misuse of rights, and oFgood faith in the exercise of freedoms.
The question of niucleartests was examined by the 1958Conference on
the Law of the Sea. A strong tendency to condemn nuclear testing was
then apparent, yet the Conference accepted India's proposal; it recog-
nized that there was apprehension on the part of many States that
nuclear explosions might constitute an infringement of freedom of the
high seas, and referred the matter to the General Assembly for appro-

priate action.
The complaint against France on this head therefore raises questions
of law and questions of fact relating to the merits of the case, which
should not be examined and dealt with at the preliminary stage of pro-
ceedings contemplated by the Order of 22 June 1973.
It seems to me that this third complaint is not admissible in the form
in which it has beenipresented. The Applicant is not relying on a right of

its own disputed by France, and does not base its Application on any
material injury, responsibility for which it is prepared to prove lies upon
France 3. The Applicant has no legal title authorizing it to act as spokes-
man for the international community and ask the Court to condemn
France's conduct. The Court cannot go beyond itsjudicial functions and
determine in a general way what France's duties are with regard to the
freedoms of the sea..

(Signed) F. DE CASTRO.

1 The relative importance of the interests of the Parties must be assessed, and the
possibility of reconciling them (question of proximity and innocent usage).
2 In its Order of22 June 1973,the Court alluded to the possibility that the tests might
cause "irreparabldamage" to the Applicant; this is a possibility which should be kept
in mind in relation to the indication of interim measures (in view notably of their
urgent character) bunlot where admissibility is concerned.
3 Regarding the conditionson which a claim for damages can be entertained, c
I.C.J. Reports 1974, pp. 203-205, especially para. 76, and sibidl.,225.

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Opinion dissidente de M. de Castro

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