Arrêt du 27 août 1952

Document Number
011-19520827-JUD-01-00-EN
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Incidental Proceedings
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INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCERNING

RIGHTS OF NATIONALS OF
THE UNITED STATES OF AMERICA

IN MOROCCO
(FRANCEv.UNITED STATES OF AMERICA)
JUDGMENT OF AUGUST 27th,1952

COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRETS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS

DES RESSORTISSANTS
DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE
AU MAROC

(FRANCE c. ETATS-UNIS D'AMERIQUE)
A~T DU 27AOÛT 1952 Tbis Judgment should be cited as foilows :

"Case concerningrights of natiods of th United States
of America in Morocco,Judgment of August27th, 1952 :
I.C.J. Reports 1952, p. 176."

Le présentarrktdoit êtrecitécomme suit :

aA8aire relative aux droits des ressortissantsdes États-Unis
d'Amériqueau Maroc, Arrêtdu 27 août 1952:

C.I. J. RecueiZ1952, p. 176.'' AUGUST 27th1952

JUDGMENT

CASE CONCERNING RIGHTS OF NATIONALÇ
OF THE UNITED STATES OF AMERICA

IN MOROCCO
(FRANCEv.UNITED STATES OF AMERICA)

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS DES

RESSORTISSANTS DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE
AU MAROC
(FRANCE c. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE) COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

1gj2
Le 27 août
Rôle général
n3 II

27 août 1952

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS

DES RESSORTISSANTS

DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE

AU MAROC

(FRANCE: c. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE)

Liberté écono??ziqî~eazt Maroc sans aucztne inégalité d'après l'actr
général d'AlgLsiras. - Eget de l'établisseî>zentdzs protectorat szlr ce
principe. - fnfi'zience de la discriminationsztr la validité de l'arrêté
risideniiedu 30 décembre 1948 portant réglementation des importations.

Jz~ridictioncc~nsulaire dans la zone françaisedu Maroc fondée sirv
les traitisbilatéraux, les clauses de la nation la plus favorisir et les
traités ntztltilatéraux. Sens du nzot «diflérend1)dans le traité de
1836 eîîtrc le Afaroc et les États-Unis; son application az~x aflaivcs
cririzinrlles et civilesEget de la renonciation fiar les az~tresÉtats à la

jtlridictionco~zszilaire. Eflet de la convention de ,%ladrid et de l'acte
d'illgiszvasszlr la jzcridiction cansulair-. Couturile et ztsage.
iIJvoit d'assenti,nen» à la législation marocaine cow~me covollaive
de la jz~ridiction conszclaire. Assentiment nécessaire pozrr l'a,b,bli-

catioizdes lois marocaines par les tribunaztx consztlairrs- Lois
locales corzfraircs aux droits co~zventionnels.
In~itzi~nité/iscale fondée sur la conventiolz de Madrid et l'<~ctc<1':41-
gisiras cl les claz~ses de la nation la plus favorisée.
IvztevpvAationde l'article 95 de l'acte d'A1;~ésiras.

PrLsewls : Sir Arnold MCNAIR, Président ; MM. BASDEV.\ST,

HACICWORTHZ ,ORI~I~, KLAESTAD,BADAWI, RE.^,
Hsu Mo, LEVICARNEIRO S,ir Bcncgal R.111, 31.!IR>I.\SI)-
UGOX, Jllj'cs ;RI. H.~JIBKO, GrtrJ+ier.

4 En l'affaire des droits des ressortissants des États-Gnis dJAmé-
rique au Maroc,

entre

la République française,

représentéepar
M. André Gros,, professeur des Facultés de droit, jurisconsiilte
du ministère des Affaires étrangères,

comme agent,

assisté par
M. Paul Reuter, professeur à la Faculté de droit d'Aix-en-
Provence, jurisconsulte adjoint di1 ministère des Affaires
étrangères,
comnie agent adjoint,

et par

M. Henry Marchat, ministre plénipotentiaire,
comme conseil,

et par
M. de Lavergne, inspecteur des finances,
hl. Fougère, maître des requêtes au Conseil d'État,

M. de Laubadère, professeur des Facultés de droit,
comme experts ;

les États-unis- d'Amérique,
représentés par
M. Adrian S. Fisher, conseiller juridique du Départcmcnt d'État,

comme agent,
assisté par

M. Joseph M. Syeeneÿ, adjoint au conseiller juridique du
Département dJEtat,
M. Seymour J. Rubin, membre di1 barreau di1 district de
Columbia,

comme conseils,
et par

M. John A. Bovey Jr., consul aii consulat général dcs Étnts-
Unis à Casablanca,
5 ARRÊT DU 27 VI1152 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 178

M. Edwin L. Smith, conseiller juridique de la légation des
États-Unis à Tanger,
M. John E. Utter, premier secrétaire à l'ambassade des États-
Unis à Paris,

comme experts,

ainsi composée,
rend l'arrêtsztizfun:

Le 28 octobre 1:950, le chargé d'affaires a. i.de France aux
Pays-Bas a dépost! au Greffe, au 'nom du Gouvernement de la
République française, une requête introduisant devant la Cour,
contre les Etats-Unis d'Amérique, une instance relative aux
droits des ressortissants des Etats-Unis au Maroc. La re,quête
vise les déclarations par lesquelles le Gouvernement des Etats-
Unis d'une part, et le Gouvernement français d'autre part, ont
reconnu comme obligatoire la juridiction de la Cour, aux termes
de l'article 36, paragraphe 2, du Statut. Elle vise également
1:accord de coopération économique du 28 juin 1948, entre les

Etats-Unis et la France, et le traité pour l'organisation du protec-
torat franqais dans l'Empire chérifien, signé à Fez le 30 mars
1912, entre la France et l'Empire chérifien. Elle fait mention
du traité de paix et d'amitié du 16 septembre 1836, entre les
Etats-C'nis et l'Empire chérifien,ainsi que de l'acte général de la
conférenceinternationale d'Algésirasdu 7 avril 1906.

Conformément à l'article 40, paragraphes 2 et 3, du Statut,
la requête a étécommuniquée au Gouvernement des Etats-Unis
ainsi qu'aux Etats admis à ester en justice devant la Cour. Elle
a également ététransmise au Seorétairegénéraldes Nations Unies.

Ides délais pour le dépôt des pièces de la procédure écrite ont
étéfixés par ordonnance du 22 novembre 1950. Le mémoire du
Gouvernement français, présenté à la date assignée,cite plusieurs
dispositions de l'acte générald'Algésiraset en tire des conclusions
quant aux droits des Etats-Unis. S'agissant ainsi dans l'affaire
de l'intefprétation d'une convention à laquelle ont participé
d'autres Etats que .lesParties au litige, ces Etats en ont été avertis
aux termes de l'article 63, paragraphe premier, du Statut :des
notes à cet effet ont étéadressées le 6 avril 1951 aux Gouverne-
ments de la Belgique, de l'Espagne, de l'Italie, des Pays-Bas,
du Portugal, du Royaume-LTni de Grande-Bretagne et d'Irlande
du Nord et de la Suède.
Le 2.1juin 1951, dans le délai fixé pour le dépôt de son contre-

mémoire, le Gouvernement des Etats-Unis a présentéune piéce
6intitulée ((Exception préliminaire ». La procédure sur le fond a
été de ce fait suspendue. L'exception préliminaire a étécom-
muniquée au? Etats admis à ester en justice devant la Cour
comme aux Etats qui avaient étéavertis du dépôt de la requête
par application de l'article 63 du Statut. La procédure sur l'ex-
ception préliminaire alors engagée a pris fin après que le Gouver-
nement des États-unis se fut déclarédisposé à retirer l'exception,

eu égard aux explications et précisions données au nom du Gou-
vernement français, et que ce dernier gouvernement eut déclaré
ne pas faire opposition au retrait. Une ordonnance du 31 octobre
1951 a pris acte du désistement, constaté la reprise de la procédure
sur le fond et fixé de nouveau délais pour le dépôt du contre-
mémoire, de la réplique et de la duplique.

Le contre-mémoire et la réplique ont étédéposésdans les délais
ainsi fixés. Quant à la duplique, le délai pour sa présentation
a, par ordonnance du 31 mars 1952 rendue à la demande du
Gouvernement des Etats-Unis, étéprorogé du II au 18 avril
1952. La duplique ayant étédeposéeà cette dernière date, l'affaire

s'est trouvée en état. Des audiences publiques ont été tenues
les 15, 16,17, 21, 22, 23, 24 et 26 juillet1952, au cours desquelles
ont étéentendus : pour le Gouvernement français, MM. André
Gros et Paul Reuter ; pour le Gouvernement des États-unis,
MM. Adrian S. Fisher et Joseph M. Sweeney.
A l'issue des plaidoiries, les conclusions des Parties ont été
présentées comme suit :

Au nom du Gouvernement français :

« Plaiseà la Cour,
Dire et juger :
Que les privilèges des ressortissants des États-unis d'Amérique
au Maroc sont uniquement ceux qui résultent du texte des articles
20 et 21du traité du 16septembre 1836 et que, la clause dela nation
la plus favoriséecontenue dans l'articl24 dudit traité ne pouvant
plus êtreinvoquéepar les Etats-Unis dans l'étatactuel des engage-
ments internationaux de l'Empire chérifien, rien nejustifie pour
les ressortissants des Etats-Unis un régimepréférentielqui serait
contraire aux dispositions des trait;s

Que le Gouvernement des États-unis d'Amérique n'estpas en
droit de prétendre que l'applicationà ses ressortissants au Maroc
de toutes législationset réglementations dépend deson consente-
ment exprès ;
Que les ressortissants des États-unis d'Amériqueau Maroc sont
soumis aux dispositions législatives et réglementaires mises en
vigueur dans l'Empire chérifien,notamment en ce qui concerne
la réglementation du 30 décembre1948sur les importations, sans
devises, sans que l'accord préalabledu Gouvernement des Etats-
Unis soit nécessaire; Que l'arrêtédu 30 décembre 1948 portant réglementation des
importations sans devises est conforme au régime économique
applicable au Maroc selon les conventions qui lient la France et les
Etats-Unis ;

Que l'article '95de l'acte d'Algésiras définitla valeur en douane
comme la valeur de la marchandise au moment et au lieu où elle
est présentéepour les opérations de-dédouanement ;
Qu'aucun traité n'a conféréaux Etats-Unis une immunité fiscalc
pour leurs ressortissantsau Maroc, ni directement, ni par le jeu de
la clause de la nation la plus favorisée ;
Que les lois et règlements en matière fiscale mis en vigueur,dans
l'Empire chérifien sont applicables aux ressortissants des Etats-
Unis sans que l'accord préalable du Goizvernement des Etats-Unis
soit nécessaire ;
Que les taxes de consommation établies par le dahir du 28 ftvrier
1948 ont donc étélégalement perçues sur les ressortissants des Etats-
Unis et qu'il n'y a pas lieu à remboursement. ))

Au nom du Gouvernement des États-~nis :

« 1. Les thèses et conclusions soumises en l'espèce par le Gouver-
nement de la République française doivent êtrerejetées, motif pris
du fait que ce gouvernement qui, en sa qualité de demandeur et par
la nature mêmedes questions juridiques en cause, avait assumé le
fardeau de la preuve, n'est pas parvenu à faire cette preuve.
2. Les droits conventionnels des Etats-Unis au Maroc interdisent
au Maroc d'imposer aux importations d'Amérique d'autres prohi-
bitions que celles que prévoient les traités ; ces droits continuent
d'êtreen vigueur et de déployer tous leurs effets.
Le dahir du 3,odécembre 1948, en imposant une prohibition sur
les importations, contrevient directement aux droits conventionnels
des Etats-Unis par lesquels toute prohibition des importations
d'Amérique est interdite ; en appliquant aux ressortissants améri-
cains, sans l'assentiment des Etats-Unis, du 31 décembre 1948 au
II mai 1949, le dahir du 30 décembre 1948, le Gouvernement-de la
République française a violé les droits conventionnels des Etats-
Unis et s'est rendu coupable d'un manquement au droit interna-
tional.
Sans l'assentiment préalable des États-unis valant renonciation
temporaire à leurs droits conventionnels, les ressortissants améri-
cains ne peuvent légalement se voir appliquer le dahir du 30 décem-
bre 1948.
3. La compétence judiciaire que les traités de 1787 et 1836 ont
conféréeaux Etats-Unis existait au civil et au criminel pour toutes
les affaires entre citoyens américains.

En outre, les Etats-Unis ont acquis au Maroc, par l'effet de la
clause de la nation la plus favorisée, ainsi que par la coutume et
l'usage, une compétence judiciaire pour toutes affaires où iin
citoyen ou protégé américain est défendeur.
Cette compétence judiciaire n'a pas étéaffectéepar la renonciation
faite en 1937 par la Grande-Bretagne aux droits juridictionnels
dont elle était titulaire dans la zone française du Maroc.
S ARRÊT DU 27 VI1152 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 181

Les États-unis n'ont jamais, expressément ou implicitement,
renoncéà cette compétence.
4. Sous le régime de compétence judiciaire extraterritoriale
actuellement exercée au Maroc par les Etats-Unis, les citoyens
de ce pays ne sont pas soumis, en principe, à l'application des lois
marocaines.
Ces lois ne deviennent applicables aux citoyens des ktats-

Unis qu'après avoir étésoumises à l'assentiment préalable du
Gouvernement des Etats-Unis et que ce gouvernement en ait ap-
prouvi: l'application à ses citoyens. Le dahir du 30 décembre
1948 n'ayant pas étésoumis à l'assentiment préalable du Gouverne-
ment des Etats-Unis n'est pas applicable aux citoyens améri-
cains.

A titre de demande reconventionnelle
I. Aux termes de l'article 95 de l'acte d'Algésiras,ï1 faut déter-
miner, aux fins de1'6,valuationen douane,la valeur des importations
e,n provenance des Etats-Unis en ajoutant à la valeur d'achat aux
Etats-Unis de la marchandise importée les frais de transport
jusqu'au bureau de la douane marocaine, à l'exclusion des frais
postérieurs à la remise de la marchandise au bureau de douane, tels

que les droits de douane et frais de magasinage.
C'est une violation de l'acte d'Algésiras et un manquement au
droit international, de la part des autorités douanières, de s'écarter
de la méthode d'évaluation ainsi définie et de fixer, aux fins de
l'évaluation en douane, la valeur de la marchandise importée d'après
lavaleur de cet-te marchandise sur le marché local marocain.
2. Les traités; exemptent les ressortissants américains de toute
taxe, à l'exception de celles qu'ils prévoient expressément ; perce-
voir des taxes cles ressortissants américains en violation des dispo-
sitions des traités est un manquement au droit international.
Ces taxes ne peuvent en droit être recouvrées sur les ressor-
tissants américains qu'avec l'assentiment préalable des Etats-
Unis valant renonciation temporaire à leur droit conventionnel, et

à compter de la date de cet assentiment, sauf disposition contraire
contenue dans l'acte d'assentiment.
Les taxes de consommation, fixéespar le dahir du 28 février 1948
et qui ont étérecouvrées sur des,ressortissants américains jusqu'au
15 août 1950, date à laquelle les Etats-Unis ont consenti à ces taxes,
ont étéperçues illégalement et doivent leur êtreremboursées.
3. Attendu que les lois marocaines ne peuvent s'appliquer aux
citoyens américains avant d'avoir reçu l'assentiment préalable
du Gouvernement des Etats-Unis, le défaut d'assentiment du
Gouvernement cies Etats-Unis ail dahir du 28 février 1948 a donné
un caractère illégal au recouvrement des taxes de consommation
établies par ce dahir.))

La Cour examinera tout d'abord la contestation qui porte sur
l'arrêtédu Résident général de la République française au Maroc,
en date du 30 décembre 1948, relatif au contrôle des importations

9dans lazonefrançaise du Maroc. LesParties ont présentéles conclu-
sions suivantes :

Au nom du Gouvernement de la République française :

((Que I'arreté du 30 décembre 1948 portant réglementation des
importations sans devises est conforme au régime 6conomique
appljcable au Maroc selon les conventions qui lient la France et
les Etats-Unis. »

Au nom du Gouvernement des États-unis d'Amérique :

Les droits conventionnels des États-~ilis au Maroc interdisent
au Maroc d'imposer aux importations d'Amérique d'autres prohi-
bitions que celles que prévoient les traités ; ces droits continuent
d'êtreen vigueur et de déployer tous leurs effets.
Le dahir du 30 décembre 1948, en imposant une prohibition sur
les importations, contrevient directement aux droits convention-
nels des Etats-Unis par lesquels toute prohibition des iriiportations
d'Amérique est interdite ...))

Le Gouvernement français soutient que l'arrêté du 30 décembre
1948 est conforme aux dispositions c~nventionnelles applicables
au Maroc et liant la France et les Etats-Unis. Cette, thèse est

contestée pour divers motifs par le Gouvernement des Etats-Unis.
La Cour examinera tout d'abord la prétention selon laquelle l'arrêté
résidentiel entraînerait, en faveur de la France, une discrimination
contraire aux droits conventionnels des Etats-Unis.
Par dahir du 9 septembre 1939, Sa Majesté chérifienne a décidé

ce qui suit :
((Articlefirentier- Est prohibée l'importation en zone française
de l'Empire chérifien, sous un régime douanier qiielconque, des

marchandises autres que l'or sous toutes ses formes.
rlrticl2. - Toutefois, des dérogations à la prohibition d'entrée
peuvent êtreaut.oriséespar le directeur générai des Communica-
tions, en ce qui concerne les combustibles minéraux solides et les
produits pétroliers, et par le directeur des Affaires économiques, en
ce qui concerne tous les autres produits.

Article 3. - Sont laissées à la détermination du commissaire
Résident généraltoutes mesures d'application du présent daliir. )J

Un arrêté résidentiel de la rilême date a fixé les conditions
d'application du dahir, y compris des dispositions relatives à des
demandes de dérogation à la prohibition d'entrée. Selon l'article4 :
cA titre provisoire, sont adniises sans formalités spéciales 1c.s

rnarchandiscs originaires et cil provenance de la France ct de
l'Algérie.»
Une réglementation complémentaire a &téCdictée par iin arrêté

rcsidenticl du IO septembre 1939, qui souinet à une autorisatiori
IOspéciale les importations sans attribution officielle de devises. Le
paragraphe premier de l'article 7 énonce ce qui suit :

c(Les règlements commerciaux avec la France, l'Algérie, les
colonies françaises, les territoires africains sous mandat français et
la Tunisie ne sont pas soumis aux dispositions du présent arrêté. ))
Par arrêtérésidentiel du II mars 1948, l'arrêtédu 9 septembre

1939 a étécomp1ét:épar un nouvel article 5 :
((Article 5.- A l'exception de celles qui seront désignéespar
les chefs d'administration responsables, les marchandises importées
de toutes origines et provenances qui ne donnent lieu à aucun
règlement financier entre la zone française de l'Empire chérifien,
la France ou un territoire de l'Union française, d'une part, et
l'étranger, d'autre part, bénéficientd'une dérogation générale à la
prohibition d'entrée. ))

Enfin, ce nouvel a.rticle 5 a étéabrogé par l'arrêtédu 30 décembre
1948 qui fait l'objet du présent litige. Après s'être référéau dahir
du 9 septembre 19.39ainsi qu'aux arrêtés portant cette date et
celle du II mars 1948, le Résident généralde la République fran-
çaise a arrêtéce qui suit :
((Article 9remier. - Les dispositions de l'article 5 de l'arrêté
résidentiel susvisédu 9 septembre 1939cesseront d'êtreapplicables
à compter du rer janvier 1949, sous réserve de l'exception prévue
à l'articl2 du présent arrêté.

Article2. - Seront admises aux conditions prévues par l'article 5
de l'arrêtérésidentiel susvisédu 9 september 1939 les marchandises
que l'on justifie ;avoirétéexpédiéesdirectement pour la zone fran-
çaise de l'Empire chérifienavant le 15 janvier 1949.

Cet arrêtéa eu pour effet de rétablir la réglementation des impor-
tations introduite en septembre 1939. Les importations sans attri-
bution officielle de devises ont été à nouveau soumises à un système
de contrôle par licences. Mais cette réglementation des importations
ne s'appliquait pas à la France ni aux autres parties de l'Union
française. Les importations en zone française du Maroc provenant

de France et des autres parties de l'Union française étaient libres.
L'arrêtédu 30 décembre 1948 comporte par conséquent une discri-
mination en faveur de la France, et le Gouvernement des États-
Unis soutient que cette discrimination est contraire à ses droits
conventionnels.
Les Parties sont d'accord pour admettre que la caractéristique
du statut du Maroc:, tel qu'il résulte de l'acte générald'Algésiras
du 7 avril 1906, est le respect des trois principes énoncés dans le
préambule de l'acte, à savoir : (de la souveraineté et,dc l'indépen-
dance de Sa Majesté le Sultan, de l'intégrité de ses Etats et de la

liberté économique sans aucune inégalité ».Lc principe de la liberté
économique sans aucune inégalitémentionné en dernier doit, pourson application au Maroc, êtreenvisagé dans le cadre des disposi-
tions conventionnelles alors existantes et visant le commerce et
l'égalitéde traitement en matière économique.
Par le traité de commerce du 9 décembre 1856 avec la Grande-
Bretagne, comme par les traités du 20 novembre 1861avecl'Espagne,
et du rer juin 1890 avec l'Allemagne, le Sultan du Maroc a garanti

certains droits en matière de commerce, y compris les importations
au Maroc. Ces Etats, avec certains autres parmi lesquels les Etats-
Unis, ont reçu la garantie de l'égalitéde traitement par l'effet des
clauses de la nation la plus favorisée figurant dans leurs traités
avec le Maroc. A ].a veille de la conférence d'Algésiras, les trois
principes mentionnés plus haut, y compris celui de ((la liberté
économique sans aucune inégalité n, ont étéexpressément acceptés
par la France et l'Allemagne, dans un échange de lettres du 8 juillet
1905 relatives à leur attitude à l'égarddu Maroc. Ainsi, ce principe,
pour son application au Maroc, était déjà bien établi quand la
conférence l'a réaffirméet l'a insérédans le préambule de l'acte de
1906. Vu à la lumière des circonstances précitées, le principe appa-
raît clairement comme ayant été destiné à avoir le caractère d'une
obligation, et non à rester seulement formule vide. L'article 105
le confirme, lorsqu'il applique expressément ce principe en ce qui

concerne les services publics au Maroc. On en trouve également
la confirmation daris les déclarations faites à .la conférence par le
représentant de l'Espagne, qui mentionne 1'(( égalité detraitement
en matière commerciale n,ainsi que par le représentant de la France.
L'établissement du protectorat français sur le Maroc par le
traité du 30 mars 1912 entre la France et le Maroc n'a pas entraîné
de modification à c:et égard. Dans la convention du 4 novembre
1911 entre la France et l'Allemagne, concernant l'établissement
de ce protectorat, le Gouvernement allemand a énoncé,dans l'ar-
ticle premier, laréscrve que (l'action de la France sauvegardera au
Maroc l'égalitééconomique entre les nations ».D'autre part, le Gou-
vernement de la Rkpublique française a déclaréà l'article 4 qu'il
s'emploierait auprès. du Gouvernement marocain (afin d'empêcher
tout traitement différentiel entre les ressortissants des différentes

Puissances N.
Les autres États au nom desquels a étésigné l'acte d'Algésiras
ont, à l'exception des Etats-Unis, adhéré par la suite à la convcn-
tion franco-allemande de 1911, acceptant ainsi à nouveau le prin-
cipe de l'égalitéde traitement en matière économique au Maroc.
Le France s'est efforcéed'obtenir également l'adhésion des Etats-
Unis, et, dans une note du 3 novembre 1911 de l'?mbassadeur de
France à Washington au secrétaire dJEtat des Etats-Unis, une
référenceest faite à la convention franco-allemande. Il y est dit
que la France s'emploierait auprès du Gouvernement marocain
afin d'empêcher tout traitement différentiel des ressortissants des
Puissances. Dans une autre note + 14 novembre 1918, de 1'ainl)ns-
sadeur de Frarice au sccrétairc d'Etat, il est déclaréque lc béiii.ficede l'égalité commerciale au Maroc ne résulte pas seulement de
la clause de la nation la plus favorisée mais aussi de la clause
d'égalitééconomique inscrite à l'acte d'Algésiras et reprise dans
la convention franco-allemande de 1911.
Ces divers faits démontrent que l'égalité commerciale ou écono-

mique au Maroc était assurée aux Etats-linis, non seulement
par le Maroc, mais encore par la France en tant que Puissance
protectrice. On peut se demander si la France, étant donné sa
position de protectrice du Maroc, échappe à ce principe d'égalité
et peut jouir de privilèges qommerciaux ou économiques dont ne
jouissent pas également les Etats-Unis.
Le Gouvernement français ne conteste pas que le Maroc, même
sous le protectorat, a conservé sa personnalité d'Etat en droit
international. Les droits de la France au Maroc sont définis par
le traité de protectorat de 1912. Dans le domaine économique,
une situation privil4giéen'a pas étéaccordée à la France au Maroc.
Une telle situation privilégiée ne serait pas compatible avec le
principe de la liberté économique sans aucune inégalitésur lequel
se fonde l'acte d'Algésiras. La note du 14 novembre 1918 de l'am-
bassadeur de France à Washington, déjà.mentionnée plus haut,
le confirme lorsqu'elle énonce qu'en vertu de la clause d'égalité

économique inscrite à l'acte d'Algésiras, lesautres Etats ont gardé
l'avantage de cette kgalité,((mêmevis-à-vis de la Puissance protec-
trice)),et que, par conséquent, les Etats-Unis peuvent non seule-
ment reconnaître les tribunaux français au Maroc, mais renoncer,
dans la zone française, au bénéficede tous les privilèges issus des
capitulations, sans perdre cet avantage.
Des considérations qui précèdent, il résulte que les dispositions
de 1:arrêtédu 30 décembre 1948 sont contraires aux droits que
les Etats-Unis ont acquis en vertu de l'acte d'Algésiras, car elles
font une discrimination entre, d'une part, les importations prove-
nant de la France et des autres parties de 1'Uniop française, et
d'autre part les importations en provenance des Etats-Unis. La
France est dispensée du contrôle des importations sans allocation
de devises, alors que les Etats-Unis sont soumis à ce contrôle.
Ce traitement différe~ltielest inconipatihle avec l'acte d'Algésiras,

en vertu duquel les Etats-Unis peuvent revendiquer le droit d'être
traités aussi favorablement que la France pour autant qu'il s'agit
de questions économiques au Maroc.
Cette conclusion peut également se déduire du traité du 16 sep-
tembre 1836 entre les Etats-Unis et le Maroc, dont l'article 24
porte ((que toute faveur en matière de commerce ou autre qui
viendrait à être accordée à une autre Puissance chrétienne s'ap-
pliquera également aux citoyens des Etats-Unis ». Eu égard ii
la conclusion à laquelle elle est déjà arrivée sur la base de l'acte
d'Algésiras, la Cour se bornera à déclarer que, dans son opinion,
les Etats-Unis ont lc droit, en vertu dc cette clause de la nation la ARRÊT DU 27 VIIi 52 (RESSORTISSANTS DES 6.-U. AU BIAROC) 186

plus favorisée, de s'opposer à toute discrimination en faveur de la
France en matière d'importations dans la zone française du Maroc.
Le Gouvernement français a présenté divers arguments dont le
but est de démontrer que le contrôle des changes est licite. La
Cour ne croit pas nécessaire de se prononcer sur ces arguments.
Mêmeen admettant la légalité du contrôle des changes, le fait
reste cependant que les mesures prises en application de l'arrêté
du 30 décembre 11948ont entraîné une discrimination en faveur

des importations provenant de France et des autres parties de
I'vnion française. Cette discrimination ne peut se justifier par
des considérations relatives au contrôle des changes.
C'est pourquoi la Cour en vient à estimer que la conclusion
française relative ÉLl'arrêtédu 30 décembre 1948 doit êtrerejetée.
Il est donc inutile d'examiner si cette conclusion pourrait être
rejetée également pour les autres motifs invoqués par le Gouver-
nement des Etats-Unis. Dans ces circonstances, la Cour n'est
pas appe1i.e à examiner et à trancher la question générale de
l'étendue du contrcile que les autorités marocaines peuvent exercer
sur les importations.
*
*
La Cour examinera maintenant l'étendue de la juridiction
consulaire des Etals-Cnis dans la zone française du Maroc.
La conclusion du Gouvernement français sur ce point est la
suivante :

<Que les privilèges desressortissants des États-unis d'Amérique
au Marocsont uniqiiement ceux qui résultent du texte des articl-s20
et21 du trait6 du 16 septembre 1836et que, la clause de la nation la
pliis favoriséecontenue dans l'article 24 dudit traité ne pouvant
pliis êtreinvoqi1i.epar les Etats-Unis dans l'étatactuel des engage-
ments internationaux ,de l'Empire chérifien, rien ne justifie pour
Ics ressortissants des Etats-Unis un régime préférentiel qui serait
contrairc aux c1isy)ositiodes traites.))

Idaconclusion du Gouvernement des États-unis sur la juridiction
consulaire est la siiivante :
1'3.La compétence jiidiciairc que les traités de 1787 et 1836
ont 'corif6réeaux Etats-Unis existait au civil rt ail criminel pur
toiites les affaires-entre citoyens américains.
En oiitre, les Etats-Unis ont acquis aii Maroc, par l'effet de la
clause da la nation la plus favorisée, ainsique par la coutume et
l'usage, une compétencejudiciaire pour toutes affaires où un citoyen
oii protégé américaincst défendeur.
Cette compbtcnce judiciaire n'a pas étéaffectéepar la renonciation
faite en 1937 par la Grande-Bretagne aux droits jiiridictionnels
dont clicbtait titulaire dans la zone française du Maroc.
Lcs J3tats-üriis n'ont jamais, exlircss6ment oii iinplicitcmeiit,
rcnonc6 à cctte compétericc. 1)

11 n'est pas contest6 entre Ics Parties quc le présent litige est
limité à la zone française dii Maroc. C'cst sur cc tcrrain qu'il aétéplaidé. Par coriséquent, la Cour ne saurait statuer sur la situa-
tion juridique en d'autres parties du Maroc.,
Pour examiner l'étendue des droits des Etats-Unis relatifs à
la juridiction consulaire, il est nécessaire de prendre en considé-
ration trois groupes de traités.
Le premier groupe comprend les traités bilatéraux conclus par
le Maroc avec la France, les Pays-Bas, la Grande-Bretagne, le
Danemark, l'Espagne, les États-unis, la Sardaigne, l'Autriche, la
Belgique et lJAllernagne et qui s'étendent sur la période de 1631
à 1892.
Ces traités, qui se rapportaient principalement au commerce,

y compris les droits et privilèges des négociants étrangers au
Maroc, traitaient (de trois manières différentes la question de la
juridiction consulaire :
1) Certains comportaient l'octroi exprès aux Puissances inté-
ressées de droits étendus en matière de juridiction consulaire ;
par exemple, les traités de 1856 avec la Grande-Bretagne et
de 1799 et de 1861 avec l'Espagne ;

2) D'autres comportaient l'octroi de privilèges strictement
limités en matière de juridiction consulaire ; par exemple,
les traités de 1787 et de 1836 avec les Etats-Unis ;
3) D'autres encore ne définissaient pas en termes exprès les
droits converitionnels accordés par le Maroc, mais, au lieu
de cela, octroyaient aux nations étrangères, par le moyen
cies clauses de la nation la plus favorisée, les avantages et
privilèges déjà accordés ou qui seraient accordés à d'autres
nations.

On trouve un élément commun dans les clauses de la nation
la plus favorisée qui ont amen6 et maintenu une situation où il
ne pouvait y avoir de discrimination entre aucune des Puissances
au Maroc, sans égard à l'octroi,à titre particulier, de droits conven-
tionnels. Lorsque les privilèges les plus étendus en matière de
juridiction consulaire furent accordés par le Maroc à la Grande-
Bretagne en 1856, et à l'Espagne en 1861, ils s'étendirent auto-
matiquement et immédiatement aux autres Puissances par l'effet
des clauses de la nation la pli~s favorisée.
Le second groupe comprend des traités multilatéraux, la
convention de Madrid de 1880 et l'acte d'Algésiras de 1906. La
méthode consistant à s'en remettre à l'action individuelle des

Puissances intéressées, nivelée par l'effet des clauses de la nation
la plus favorisée, avait donné lieu à des abus, et il était devenu
nécessaire, non seulement d'assurer la liberté économique sans
discrimination, mais aussi d'imposer aux Puissances un élément
de modération et de prendre des mesures permettant au Maroc
de se transformer en un Etat moderne. En conséquence, les droits
de protection furent restreints, et quelques-unes des limitations
qui avaient été apportées aux pouvoirs du sultan à l'égard des ARRÊT DU 27 VIII 52 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 188

étrangers par suite des dispositions des traités bilatéraux anté-
rieurs furent supprimées. On prit soin de prévenir les possibilités
d'un abus de la part du Maroc dans l'exercice des pouvoirs ainsi
accrus en réservant au Corps diplomatique à Tanger certaines
attributions de surveillance et de contrôle.
Le troisième groupe de traités concerne l'établissement du

protectorat. Il comprend les accords qui précédèrent l'établisse-
ment par la France d'un protectorat sur le Maroc, ainsi que le
traifé de Fez de 1912. En vertu de ce traité, le Maroc demeurait
un Etat souverain, mais il concluait un accord de caractère contrac-
tuel par lequel la France s'engageait à exercer certains pouvoirs
souverains au noni et pour le compte di1 Maroc, et à se charger,
en principe, de toutes les relations internationales du Maroc.
Dans l'exercice de cette fonction, la France est liée non seulement
par les dispositions du traité de Fez, mais également par toutes
les obligations conventionnelles auxquelles le Maroc avait été
soumis avant le protectorat et qui, depuis lors, n'?nt pas pris fin
ou n'ont pas étésuspendues par accord avec les Etats intéressés.

1,'établissement du protectorat et l'organisation des tribunaux
du protectorat garantissant aux étrangers l'égalité judiciaire
amenèrent une situation essentiellement différente de celle qui
avait conduit à l'établissement de la juridiction consulaire en
vertu des traités antérieurs. En conséquence, la France a entamé
des négociations el1 vue d'obtenir des Puissances exerçant la juri-
diction consulaire dans la zone française qu'elles renoncent au
ré"ime des canituliitions. En ce aui concerne toutes les Puissances.
à l'exceptionldes États-unis, cés négociations aboutirent à uni
renonciation aux droits et privilèges capitulaires, renonciation
qui, pour la Grande-Bretagne, était cpntenue dans la convention
du 29 juillet 1937. Dans le cas des Etats-Unis, des négociations

eurent lieu au cours desquelles les Etats-Unis ont réservé leurs
droits conventionriels.
La conclusion di! Gouvernement français est fondée sur le traité
conclu entre les fStats-Unis et le Maroc, le 16 septembre 1836,
et les Parties sont d'accord pour admettre que les Etats-Unis ont
le droit d'exercer une juridiction consulaire en matière de diffé-
rends entre leurs citoyens ou protégés. Il n'y a donc pas de doute
sur l'existence, dans ce cas, d'une juridiction consulaire. La seule
question à trancher est celle de l'étendue de cette juridiction en
1950, date du dépôt de la requête.

Le premier point soulevé par les conclusions vise la portée des
dispositions juridictionnelles du traité de 1836, lesquelles ont la
teneur suivante :

((Articl20. -- Si des citoyens ou protégésdes États-unis ont
cntrc eux 111~diff~rcntl,lcconsul statuera cntre les partics ;et chaque fois que, pour l'exécutionde ses décisions,le consul deman-
dera l'aide ou. l'assistance de notre gouvernement, celles-ci lui
seront immédiatement fournies.
Article 21. -- Si un citoyen des États-Unis tue ou blesseun Maure
ou si, àl'inverse,un Maure tue ou blesse un citoyen des Etats-Unis,
la loi du pays s'appliquera et justice égalesera rendue, le consul
assistant au procès ; au cas où un délinquant s'échapperait, le
consul n'en sera responsable en aucune manière. »

11est soutenu que l'article 20 doit être interprétécomine confé-
rant une juridiction consulaire dans tous les différends, civils ou

criminels, s'élevarit entre citoyens et protégésdes Etats-Unis. De
son côté, le Gouvernement français soutient que le terme (diffé-
rend ))est limité aux affaires civiles. On fait valoir que ce terme,
dans son sens ord:inaire et naturel, est limité aux différends d'ordre
civil, les crimes étant des fautes contre l'gtat et non des différends
entre personnes privées.

Le traité de 1836 a remplacé un traité antérieur conclu en 1787
entre les Etats-U:nis et le Maroc. Les deux traités ont dans l'ensem-
ble une rédaction identique et les articles 20 et 21 sont les mêmes
dans les deux. Par conséquent, il est nécessaire, en interprétant
les dispositions dc l'article 20 - et notamment l'expression (ont
entre eux un différend ))- de tenir compte du sens du terme (diffé-

rend ))à l'époque où les deux traités furent conclus. A cette fin,
il convient d'examiner la manière dont a étéemployé le terme
« dispute )), ou son équivalent français, dans les divers traités
conclus par le M,aroc, par exemple ceux avec la France de 1631
et 1682, et avec Ila Grande-Bretagne de 1721, 1750, 1751, 1760 et
1801. Il est clair que dans ces cas le terme a étéemployé comme

s'étendant aux différends tant civils que criminels.
Il faut également tenir compte du fait qu'à l'époque où ces
deux traités fure:nt conclus, la distinction nette entre les affaires
civiles et criminelles ne s'était pas encore dégagéeau Maroc.
C'est pourquoi il faut interpréter le terme ((différend ))tel qu'il
figure dans l'article 20, comme visant tant les affaires civiles que

les affaires crimiinelles dans la mesure où celles-ci se. rattachent
à des,violations du droit pénalcommises par un citoyen pu protégé
des Etats-Unis contre un autre citoyen ou protégé des Etats-Unis.

De la conclusi.on des fitats-Unis ressort un second point, à
savoir que la juridiction consul?ire fut acquise ((pour toutes affaires
où un citoyen ou protégé des Etats-Unis est défendeur par l'effet
de la clause de la nation la plus favorisée ainsi que par la coutume
et l'usage )).Une telle juridiction ne serait pas affectéepar l'abandon,
de la part de la ~Grande-Bretagne, en 1937, des droits juridiction-

nels qu'elle exerçait dans la zone française et n'aurait jamaisfait l'objet d'une renonciation expresse ou implicite de la part
des Etats-Unis.
Il convient d'examiner attentivement les clauses de,la nation
la plus favorisée figurant dans le traité conclu par les Etats-Cnis
en 1836. L'octroi du traitement de la nation la plus favorisée
y est prévu en deux endroits.
L'article 14 dispose :

(Lt: commerce avec les États-unis sera sur le mêmepied que le
commerce avec l'Espagne, ou que le commerce avec la nation
actuellement la plus favorisée. Les citoyens de ce pays seront
respectés.etestimés ; ilauront toute liberté d'aller etde venir dans
notre pays et clans nosports sans aucun obstacle. ))
L'article 24 vise l'éventualité de la guerre, mais il contient la
phrase finale suivante :

(11est en outre déclaré quetoute faveur, en matièrede commerce
ou autre, qui viendrait à êtreaccordée à une autre Puissance chré-
tienne s'appliquera égalementaux citoyens des Etats-Unïs. ))
Ces articles autorisent les États-unis à invoquer les disposi-

tions d'autres traités relatifs au régimecapitulaire.
Les privilèges :les plus étendus que le Maroc ait accordés en
matière de juridiction consulaire sont ceux du traité généralde
1856 avec la Gramde-Bretagne et du traité de commerce et de
navigation de 1861 avec l'Espagne. En vertu des dispositions
de l'article IX du traité britannique, la juridiction consulaire était
octroyée dans toutes les affaires civiles et criminelles où des ressor-
tissants britanniques étaient défendeurs. De même,la juridiction
au civil et au périal était établie par les articles IX, X et XI du
traité de 1861avec l'Espagne dans toutes les affaires dans lesquelles
des ressortissants espagnols étaient défendeurs.
Par conséquent, en vertu des clauses de la nation la plus favo-

risée, lesEtats-Unis ont acquis la juridiction consulaire en matière
civile, et criminellle dans toutes les affaires où des ressortissants
des Etats-Unis ét.aient défendeurs.
La controverse entre les Parties relative à la juridiction consu-
laire résulte de la renonciation par l'Espagne en 1914 et par la
Grande-Bretagne en 1937 à leurs droits et privilèges capitulaires.
La renonciation d.e l'Espagne, en 1914, n'a eu aucun effet immé-
diat sur 1üposition des Etats-Unis parce qu'il était encore possible
d'invoquer les dispositions du traité général de 1856avec la Grande-
Bretagne. Toutefois, après 1937, aucune Puissance, autre que les
Etats-Unis, n'a exercé de juridiction consulaire dans la zone fran-

çaise du Maroc et aucune n'était en droit de l'exercer.
La France soutient que, dès le moment où la Grande-Bretagne
a renoncé aux droits de juridiction consulairc, les Etats-Unis n'ont
plus étéfondés, que ce soit par l'effet des clauses de la nation la
plus favorisée du traité de 1836 ou en vertu des dispositions d'un
autre traité, à exercer la juridiction consulaire pour d'autres
I8affaires que celles qui sont viséespar les dispositions des articl20
et 21 du traité de 18 6.
La conclusion cles d tats-Unis est fondée sur une série d'argu-
ments qui doivent être examinés tour à tour.

Le premier argument est déduit de l'article 17 de la convention
de Madrid de 1880, lequel énoncece qui suit :

<Le droit au traitement de la nation la plus favoriséeestreconnu
par le Maroc à.toutes les Puissances représentéesà la conférence
de Madrid. ))

Mêmesi l'on poiuyait supposer que l'article 17 a eu pour effet un
octroi généralaux Etats-Unis des droits de la nation la plus favo-
risée et que cet article n'était pas limité aux questions traitées
par la convention de Madrid, il ne s'ensuivrait pas que les Etats-
Unis seraient fondlésà invoquer encore les dispositions des traités
conclus avec la G-rande-Bretagne et avec l'Espagne, après qu'ils
ont cesséde déployer leurs effets entre le Maroc et ces deux pays.
L'argument des Etats-Unis est fondé sur la supposition que les
clauses de la nation la plus favorisée, quand elles figurent dans des
traités avec des pays tels que le Maroc, doivent recevoir une inter-
prétation différente de celle des dispositions analogues contenues
dans les traités avec d'autres pays. Deux considérations particu-

lièrès doivent ici entrer en ligne de compte.
La première considération est déduite du principe de la loi
personnelle ainsi que de l'historique du vieux conflit entre deux
concepts de droit et de juridiction : l'un fondé sur la personne
et l'autre sur le territoire. Le droit de juridiction consulaire avait
pour objet de pourvoir à une situation dans laquelle le droit maro-
cain était de caractère essentiellement personnel et ne pouvait
pas s'appliquer aux étrangers.
La seconde considération part de l'idée que les clauses de la
nation la plus favorisée contenues dans les traités conclus avec
des pays tels que le Maroc doivent être considérées comme une
façon de formuler un texte à l'aide de référencesplutôt que comme
un moyen dlétabl.ir et de maintenir l'égalité detraitement sans
discrimination entre les divers pays intéressés. Seloncette manière

de voir, les droits ou privilèges qu'un pays est fondé à invoquer
par l'effet de la clause de la nation la plus favorisée et qui existaient
à la date de l'entrée en vigueur de la clause, seraient incorporés
par référenced'une manière permanente, et la jouissance et l'exer-
cice en seraient maintenus même aprhs l'abrogation des dispositions
conventionnelles dont ils découlent.
Entendue de l'une ou l'autre façon, cette thèse n'est pas compa-
tible avec l'intention des parties aux traités dont il s'agit ici.
C'est ce que montre tout à la fois la rédaction des traités par-ticuliers et l'objet général qui se dégage de l'examen des traités
conclus de 1631 à 1892 par le Maroc, avec la France,, les Pays-
Bas, la Grande-Bretagne, le Danemark, l'Espagne, les Etats-Unis,
la Sardaigne, l'Autriche, la Belgique et l't\llemagne. Ces traités
montrent que les clauses de la nation la plus favorisée avaient
pour objet d'étab1i.ret de maintenir en tout temps l'égalitéfonda-
mentale sans discrimination entre tous les pays intéressés. En
outre, les dispositions de l'article17 de la convention de Madrid,
quelle que soit leur portée, étaient également fondéessur le niain-
tien de l'égalité.
Par conséquent, l'argument irait à l'encontre du principe d'éga-
lité et il perpétuerait la discrimination. Il ne saurait justifier la

conclusion des Etats-Cnis relative à l'étendue de la juridiction
consulaire dans la zone française.

Le deuxième argument des États-unis se fonde sur le caractkre
géographiquement limitéde la renonciation par la Grande-Bretagne
à la juridiction consulaire. La portée de cette renonciation était
restreinte à la zone française.
Il a étésoutenu au nom des États-unis que la Grande-Bretagne
conservait ,ses droits juridictionnels dans la zone espagnole et
que ccles Etats-Unis, qui continuent à traiter le Maroc comme
un seul et mêmepays, sont fondés, par le jeu de la clause de la
nation la plus favorisée figurant à l'article 24 de leur traité, à
exercer les ~i~êmedsroits de juridiction que ceux qu'exerce aujour-
d'hui la Grande-Bretagne dans une partie du Maroc en vertu du

traité de 1856 )I.
La Cour n'est pas appelée à déterminer l'existence ou l'étendue
des droits juridictionnels de la Grande-Bretagne en zone espagnole.
Il suffit donc de rejeter cet argument,pour le motif qu'il conduirait
à ilne situation clans laquelle les Etats-Unis seraient fondés à
escrccr la juridiction consulairc~dans la zone française, nonobstant
la perte di' ce droit par la Grande-Bretagne. Un tel résultat serait
contraire à l'intention des clauses de la nation la plus favorisée,
qui est cl'établir ct de maintenir en tout temps, entre les pays
intéressés, une égalité fondamentale sans discrimination.
On a également iilvoqué la position de la France et tles ressor-
tissants francais cn cc. (lui concernc les nouveaux tribunaux du
Protectorat. Ceux-ci ont étéétablis pour exercer la juridiction
sur les étrangers et leurapplicluer les lois marocaines dans la zone
française. Ces tribiliiaux ont étéconstitués avec l'aide de la France

(,t sous direction ct contrclc français. On a prétendu qu'en réalité
il s'agiraità de tribunaux consulaires et que les Etats-Unis seraient
fondés i Ctre p1acé.à cet égardsur un pied d'kgalitéavecla France.

Mais lcs tril)unaus du Protc.ctorat tlniis la zoiic, frniiçaisc
soiit eii rien des tribunaux consulaircs. Ce soiit des tribunauxmarocains organisés selon un modèle et des critères français,
accordant aux étrangers toutes garanties d'égalitéjudiciaire.
Par conséquent, la Cour ne peut admettre cet argument.

Le troisième argument des États-unis se fonde sur la nature
des accords qui ont conduit à l'abolition de la juridiction consulaire
espagnole dans la zone française. La convention du 27 novembre
1912 entre la France et l'Espagne prévoit l'exercice par l'Espagne
de droits et privilèges spéciaux dans la zone espagnole. Par une
déclaration commune de la France et de l'Espagne, en date du
7 mars 1914, l'Espagne a abandonné ses droits juridictionnels

et ses autres droits extraterritoriaux dans la zone française, et
une clause a étéinsérée envue de l'abandon ultérieur par la France
de droits semblables dans la zone espagnole. Cela fut fait par la
déclaration commune de la France et de l'Espagne du 17 novem-
bre de !a mêmeannée.
Les Etats-Unis soutiennent que la convention de 1912 et les
déclarations de 1914 étaient des accords entre la France et l'Espagne
et que, comme le Maroc n'y figurait pas comme partie, les droits
que l'Espagne tient de la disposition antérieure existent toujours
de jure, malgré que puisse exister une situation de facto qui en
empêche pour le moment l'exercice.
Mêmesi l'on accepte cet argument, la situation est telle que
l'Espagne ne peut pas, depuis 1914, invoquer le droit d'exercer
la juridiction consulaire en zone française. Les droits que les
États-unis pourraient invoquer en vertu des clauses de la nation
la plus favorisée ne comprendraient donc pas le droit d'exercer
en 1950 la juridiction consulaire. Ils seraient limités au droit
conditionnel de rétablir la juridiction consulaire dans le cas où,
ultérieurement, la France et l'Espagne abrogeraient les accords
constitués par la convention de 1912 et par les déclarations de

1914.
Le Gouvernement français soutient que ces accords ont été
conclus en vertu du pouvoir que le Maroc lui a conférépar les
dispositions du traité de Fez de 1912. Les termes généraux des
articles V et VI sont assez larges pour donner à la France la
conduite des relations internationales du Maroc, y compris l'exercice
du droit de concluire des traités. La convention et les déclarations
doivent donc être considérées comme des accords passés par la
Puissance protectrice dans les limites de ses pouvoirs, accords
relatifs aux affaires de'Etat protégéet destinés à l'obliger, comme
l'indique clairement l'alinéa 3 de l'article premier du traité de
Fez de 1912, lequel énonce : (Le Gouvernement de la République
se concertera avec le Gouvernement espagnol au sujet des intérêts
que ce gouvernerlent tient de sa position géographique et de ses
possessions territalriales sur la côte marocaine.))Dans ces condi-
tions, il faut conclure que ces accords obligent le Maroc et lui

21profitent, et qiic los droits espagnols relatifs à la juridiction consii-
laire ont pris firi de jure aussi bicn que de facto.
Il falit examiner un autre aspect de la question qui résulte des

termes de la déclaration faite par la France et l'Espagne le 7 mars
1914. Cette déclaration contient les dispositions suivantes :

I(Prenant en considiration les garanties d'bgalité jiiridiqiic
offcrtcs aux étrangers par les trif~iinaii?: français du ~irotcctorat,
le Goii\~ernement royal renonce r6clniner pour ses consuls, ses
ressortissants et ses ét;~lilissemcntsdans la zonc francriise de 1'Em-
pire cii6rificii toiis droits et pri~,ili.gcs issiis di1 r6gimc des capitii-
Iations.

En ce qiii le conccrne, le Gouvernement dc la Képublique françaisc
s'engage à renoncer égalcinent aux droits et privilèges existant en
faveur de ses consuls, de ses ressortissants et de ses établissements
dans la zonc espagnole, :iiissitôt que les tril>uilaux espagnols seront
6tal)lis d:iiis Iaditc zoiit,.

La déclaration par laquelle la France a donné effet à l'engage-
ment ci-dessus est du 17 novembrc 1914 ; clle comporte le para-
graphe suivant :

I(Prenant en considération lcs garantics d'igalité juridique offcrtcs
ailx btrangers par les tribunaux espagnols du Protectorat, Ic
(;oiivcrnement dc la K6publiqiie française renonce à réclainer 1)oiir
ses consiils, ses ressortissaiitset ses 6tablisscments dans la zoiic
csl~agnole de l'Empire chérifien tous droits ct privilèges issiis di1
risgime des caliitulations.))

On remarquera que les deux déclarations emploient les mots

((renonce à réclarner »,et la question s'est posée de savoir si ccs
termes avaient pour objet iin abandon ou une renonciation A
l'bgard tle tous les droits et privilèges résultant du régime des
capitulations, ou :s'il fallait les considérer comme des engagements
provisoires de ne pas réclamer ces droits et privilhges aussi long-

temps que les ga:ranties d'6galité juridique sont maintenues dans
la zone francaise par les tribunaux du protectorat, et aussi long-
temps (lu(: les garantics correspondantes sont mainteniics dans
la zone espagnole.
La (luestion est plus académique que pratique. Même si Ics
termes dont il s'agit devaient être interprétés comme signifiant

un engagement temporaire de rie pas réclamer les droits et pri1.i-
li,ges, il n'en rcstc pas moins que l'Espagne, en 19j0, du fait dc
ccxsc.ngajitxiiic~iits,ii'c>st1)as foiiricxscrcc3il-a ji!ri(lictioi~ coiisiilair(,
clans la zone française. 11 s'crisiiit (lue 1c.s I.:tats-lTiiissc.raiciit
bgalemerit sans titrc, à cxcrccxr cc,ttc, jiiricliciion dans la zone\ fran-

yaise cn 1050. Il faut néanmoins que la Cour examine ces déclarations pour
déterminer ce qu'ont voulu les parties quand elles se sont servies
des termes en question.
Dans les deux déclarations, les parties se sont servies de l'ex-

pression ((prenant en considération les garanties d'égalité juri-
dique ....». Ces termes, pris dans leur sens naturel et ordinaire,
énoncent la contre:-partie de l'abandon consenti, mais ce ne sont
pas des termes dont on se servirait normalement si l'on envisageait
de procéder à un abandon conditionnel.
La Cour est d'avis que les termes ((renonce à réclamer » doivent
être interprétés comme portant renonciation absolue aux droits
et privilèges capitulaires. Cette manière de voir trouve confirmation
dans les déclarations et autres arrangements conclus par la France

avec d'autres Puissances intéressées en vue d'effectuer l'abandon
de leurs tiroits juridictionnels et autres droits extraterritoriaux
dans la zone française.
Les deux déclarations faites en 1914 par la France et l'Espagne
montrent que les deux pays ont considéré l'expression ((renonce
à réclamer » comrne équivalant à la renonciation aux droits en
question. Dans la déclaration du 7 mars 1914, le Gouvernement
français s'est engagé (à renoncer également aux droits et privi-
lèges....».Dans la déclaration ultérieure du 17 novembre 1914, la

France a donné eff,età cette obligation en se servant de l'expression
((renonce à réclam'er n.11est donc clair que la France et l'Espagne
ont considéré cette expression comme celle qui convenait pour
effectuer un compl.et abandon ou renonciation à l'égard des droits
et privilèges en question.
Le 31 juillet 15116, 1,'ambassadeur de France à Washington a
envoyé au secrétaire d'Etat des Etats-Unis (le texte de la déclara-
tion signée, relati~iement à l'abrogation des capitulations dans la
zone franqaise du Maroc, par toutes les Puissances signataires de

la conférence d'Algésiras et par les Républiques d'Amérique du
Sud. ».Dans le texte ainsi transmis, l'expression en anglais était
(relinqz~islzesits daim to al1 the rights and privileges growing out
of the Capitztlatiolz regime ...». Il est donc clair qu'à cette date,
bien avant la naissance du différend actuel, la France considérait
l'expression (renonce à réclamer » comme portant abrogation des
privilèges en question.

La déclaration laite par la France et l'Espagne le 7 mars 1914

faisait partie d'une séried'accords négociéspar la France avec plus
de vingt IStats étrangers (portant abandon de leurs droits juridic-
tionnels et autres droits extraterritoriaux en ce qui est de la zone
française du Maroc 1).Au moins dix-sept de ces accords se sont
servis de l'expression (renonce à réclamer », pour réaliser l'abro-
gation complète de tous les droits ct privilèges issus du régime des
capitulations. Il y cst fait allusion dans le contre-mémoire dans les
termes suivants : ((pour l'abandon de leurs droits juridictionnels

23 .~RR~T DU 27 \'III 52 (RESSORTISSASTS DES 6.-1~. -4U MAROC)
196
ct autres droits exti-aterritoriaux ))ou encore ((portant rcnonciatiori
de droits extraterritoriaux 1).Ile plus, tous les Etats qui avaient
signé ces accords ont abandonné immédiatement l'exercice de la.
juridiction corisulaire ou autrc,s droits et privil&ges capitulaires

dans la zone française.
Dans ces conditions, il faut conclure que la déclaration dc
l'Espagne du 7 niairs 1914 a effectué l'abandon ou la renonciation
par l'Espagne à tous ses droits juridictionnels ou autres droits
extraterritoriaux dans la zone française, et l'abrogation des dispo-
sitions du traité de 1861 avec l'Espagne se rapportant (aux droits
et privilèges.issus du régime des capitulations ».
Par conséquent, la Coiir ne peut accepter la thc'scque les ctats-
Unis, en vertu des clauses de la nation la plus favorisée, ont le

droit d'in\~oquer, à l'égard de la zonc française, celles des disposi-
tions du trait6 de 1861 avec l'Espagne qiii ont trait à la juridiction
consulaire.

1,e quatrième argument du Gouvernement des États-unis
consiste à dire que la juridiction consulaire étendue, telle qu'elle
existait ail Maroc en 1880, a étéreconnue et confirmée par les
disp?sitions de la convention de Madrid et que, par conséquent,
les Etats-Unis, en tant que partie à cette convention, ont acqiiis

par là un droit autonome à l'exercice de cette juridiction, indé-
pendamment de l'effet des clauses de la nation la plus favorisée.
II n'est pas douteux que l'exercice de la juridiction consulaire
au Maroc était généralen 1880 et que la convention présuppose
l'existence de cette juridiction. Elle traitait de la situation parti-
culière des protégé!;et contenait cles dispositions ~TisantI'cxcrcicc:
de la juridiction à leur égard.
Il'autre part, il 12stégalement clair qu'aucune disposition de la

convention n'apporte expressément une confirmation du systilmc
de juridiction consulaire existant alors, ou son i.tablisscmcnt
comme un droit indépendant et autonome.
ILS buts et l'objet de cette convention sont indiqués dans Ic
préambule, qui s'exprime en ces termes : ((la nécessitéd'établir
sur des bases fixes et uniformes l'exercice du droit de protcction
au Maroc, et de régler certaines questions qui s'y rattaclient ...1).
Dans ces conditions, la Cour ne saurait adopter une interprétation
par implication des dispositions de la convention de Madrid qiii
dépasserait la portée de ses buts et de son objct explicites. I)e

plus, cet argument entraînerait dans les dispositions de la conven-
tion des modifications radicales ct des additions. Dans son avis
sur 1'intrry)rétation dcs traités dc paix, dcuxieme phase (C.I. J.
IZccfleiL19-70, 1).22'9),la Cour a dit : (Iza Cour est appcléc à intc.1--
pritcr lcs traités, n'on à lcs rcviscr.)i Le cinquième argument des États-unis est que la juridiction
consulaire au Maroc a étéreconnue et confirmée par diverses
dispositions de l'acte d'Algésiras, et que les Etats-Unis ont acquis
par là un droit a.utonome d'exercer cette juridiction indépen-
damment de l'effet des clauses de la nation la plus favorisée.

En 1906, les douze Puissances représentées à Algésiras exer-
çaient toutes des clroits et privilèges capitulaires, dans la mesure
où ils étaient prévus, soit par le traité général de 1856 avec la
Grande-Bretagne, soit par le traité de 1861 avec l'Espagne. Elles
les exerçaient soit: en vertu d'une disposition conventionnelle
directe, comme la Grande-Bretagne ou l'Espagne ;sojt en vertu
de clauses de la nation la plus favorisée, comme les Etats-Unis ;

soit encore sans droits conventionnels mais avec le consentement
qu l'accord tacite dlu Maroc, comme dans le cas de certains autres
Etats. C'est pourquoi l'acte d'Algésiras présupposa l'existence du
régime des capitulations, y compris les droits de juridiction consu-
laire, et que plusieurs de ses dispositions assignèrent des fonctions
~articulières aux tribunaux consulaires existant alors. On a fait
mention, au cours des débats, des articles 19, 23, 24, 25, 29, 45,
59, 80, 81, 87, 91, 101, 102 et 119. Par exemple, le chapitre V,
qui concerne les (douanes de l'Empire et la répression de la fraude
et de la contrebande n,contient un article 102 ainsi conçu :

((Toute confiscation, amende ou pénalité devra êtreprononcée
pour les étrangers par la juridiction consulaire et pour les sujets
marocains par la juridiction chérifienne. ))

Dans les conditions alors existantes, cet article exigeait que les
poursuites pour fra.ude et contrebande engagées contre les ressor-
tissants des douze Puissarices fussent portées devant les tribunaux
consulaires.

Depuis 1937, la situation est la suivante : onze des Puissances
ont renoncé à leurs privilèges capitulaires, et leur juridiction
consulaire a cesséd'exister. De ce fait, le Maroc a pu édicter des
lois ct prendre des dispositions en vue de juger et punir des délin-
quants appartenant. à ces onze pays. Les États-unis sont dans une
situation différente qu'il convient d'examiner maintenant.

A la différence de la convention de Madrid, l'acte d'Algésiras
était de portée généraleet n'était pas limité à un problème aussi
restreint que la protection. D'aiitre part, en interprétant les dispo-
sitions de l'acte, il convient de tenir compte de ses buts, qui sont
én0nci.sdans le préambule, tlaiis les termes suivants :

((S'inspirant de l'intérêt quis'attache à ce que l'ordre, la paix
ct la prospéritérègnent au Maroc, et ayant reconnu que ce but
réci cie uexsaurait êtreatteint que moyennant l'introduction de
reformes basces sur le triple principe de la souveraineté et de
1'iridél)t~ridance Sa Majestéle Sultan, de l'intégrité deSes Etats
et de 13lil)~'rtii'conornicluesans aucune inégalit... )) Ni les articles mentionnés plus haut ni aucune autre disposition
de l'acte d'Algésirasn'avaient pour objet d'instituer ulie juridiction

consulaire ou de c,onfirriier 1.2sdroits ou privilèges découlant du
régime des capitiila.tions existant alors. 11s'agit donc de savoir si
l'on peut fonder l'institution ou la confirmation de cette juridiction
ou de ces privilèges sur l'intention implicite des parties à l'acte,
telle qu'elle ressort des dispositions de celui-ci.
Une interprétation de l'acte, tirée de ce qu'irnpliqucraient ses
dispositions et selori laquelle il instituerait ou confirmerait une
juridiction consulaire, reviendrait à transformer en droits nouveaux
et autonomes, fondés sur l'acte même, les droits con~~entionnels

dont jouissaient alors la plupart des douze Puissances. Ces droits
conventionnels, dénonçables parfois avec un court préavis - ceux
des Etats-Unis, pa.r exemple, l'étaient avec un délai dc douze
mois - auraient étkchangés en droits dont les Puissances eussent
pu jouir pour un temps indéfini, le Maroc étant incapable d'j,
mettre fin ou de les modifier. Ki les travaux préparatoires ni le
préambule ne donnent la moindre indication d'une pareille inten-
tion. La Cour estime qu'elle ne saurait déduire par ce procédéqu'un
changement aussi fondamental que celui que comporterait l'admis-

sion de cette thèse se soit produit dans le caract6re des droits
conventionnels alors existants.
Toutefois, un autre aspect de ce problème ressort des articles
mentionnés plus hauit. Il s'agit des articles contenant des dispositions
impliquant nécessai.rement l'exercice de la juridiction consulaire.
On trouve ici une -indication claire de l'intention des parties de
voir soumettre ceritaines matières aux tribunaux consulaires et,
dans cette mesure, il est possible d'interpréter les dispositions de
l'acte comme instituant ou confirmant l'exercice de la juridiction

consulaire à ces firi:;limitiles. Le niaintien de la juridiction consu-
laire, dans la mesure où elle serait ~iécessaire à l'application de ces
dispositions particulières, se justifierait donc en tant qu'il serait
fondésur le sens 11éc:essairdees dispositions de l'acte.

Ce résultat est confirmé par les dispositions des articles IO et 16
de la convc:ntion du 29 juillet 1937 entre la Grande-Bretagne ct
la France. Ces, articles se réfCrent aux 1:rivilCges de juridiction
((accordésaux Etats-Unis d'Amériqued'aprèsles traitésen vigueur 11.

Ils présupposent donc que les privilèges de juridiction des Etats-
Unis, mêmeaprès l'abandon par la Grande-Bretagne de ses droits
capitulaires, lie se limiteraicnt pas à la juridiction prévue aux
articles 20 et 21 du traité de 1836 avec le Maroc. Ce point de vue
est confirmé en outre par les dispositions de l'article 4 du l)rotocole
de signature de cette convention. Cet article énonce l'abrogation
de certaines disl~ositions du traité gén6ral de 1856 et, en ce qui est
de l'acte d'.4lgésiraç,la renonciation ((à se prévaloir des articlcls I
à 50 inclus, 53 à 65 inclus, 70, 71, 72 à la suite des mots ((~)or~nis

spécial n, 75, 76, 80, 97, 101, 102, 104, 113 a 119 inclus ,; en outre,il dispose que, (dans l'article 81 les mots (par l'autorité consu-
((lairecompétente » doivent êtreconsidérés commesupprimés etdans
l'article 91 le mot ((compétente )substitué au mot (consulaire )D.

Il est manifeste qu'en 19.37 la France (représentant le Maroc)
et la Grande-Bretagne partaient du postulat que certaines disposi-
tions del'acte d'Algésiras reconnaissaient une juridiction consulaire
limitée aux fins des procédures judiciaires qui y sont décrites.

La Cour n'est pas appelée à examiner les articles particuliers de
l'acte d'Algésiras qui sont en cause. Elle considère qu'il lui suffit
de dire qu'à son avis la juridiction consulairedes États-unis continue
d'exister dans la mesure voulue pour permettre de donner effet à

celles des dispositions de l'acte d'Algésiras qui dépendent de
l'existence de la juridiction consulaire.
Dans certains cas, cette interprétation de l'acte aboutit à des
résultats qui peuvent ne pas paraître absolunient satisfaisants.
Mais c'est une conséquence inévitable de la façon dont la conférence
d'Algésiras a traité la question de la juridiction consulaire. La Cour
ne peut, par voie d'interprétation, tirer de l'acte une règle générale
qu'il ne contient pas au sujet de la pleine juridiction consulaire.
D'autre part, la Cour ne peut négligerles dispositions particulières
entraînant un recours limité à la juridiction consulaire, qui figurent

en fait dans l'acte et qui sont encore en vigueur pour autant qu'il
s'agit des rapports entre les États-unis et le Maroc.

Le sixième argurnent est le suivaiit : la juridiction consulaire et
les autres droits capitulaires des États-.unis au Maroc sont fondés
sur (la coutume eit l'usage ».
Cet argument a étédéveloppé de deux façons différentes. La
première vise la coutume et l'usage qui ont précédél'abandon par
la Grande-Bretagne, en 1937, de ses droits capitulaires dans la

zone française. La seconde vise la pratique suivie depuis cette date.
Si l'on envisage d'abord la période de cent cinquante années
qui s'est écouléede 1787 à 1937, deux considérations s'opposent
à ce que cet argument soit admis.
La première est qu'au c,ours de l'ensemble de cette période, la
juridiction consulaire des Etats-Unis a étéen fait fondée, non pas
sur la coutume ou l'usage, mais sur des droits conventionnels. A
toute époque, elle était fondée soit sur les dispositions du traité
de 1787, soit sur celles du traité de 1836, combinées avec les dispo-
sitions des traitCs conclus par le Maroc avec d'autres Puissailces,

la Grande-Bretagne et l'Espagne en particulier, invoquées en vertu
des clauses de la ination la plus favorisée. Tel était le cas, non
seulement pour les; États-unis, mais pour la majorité des pays
ayant des ressortisçants qui pratiquaient le commerce au Maroc.
Il est vrai qu'ily avait des Puissances représentées à la conférence

27 de Madrid, en 1880, et à Algésiras, en 1906, qui n'avaient pas de
droits conventionnels, mais qui exerçaient la juridiction consulaire
avec le consentement exprès ou tacite du Maroc. Il est vrai égale-
ment que la France, après l'établissement du protectorat, a ovenu
des déclarations de renonciation d'un grand nombre d'autres Etats

qui se troiivaient dans la même situation. Ceci ne suffit pas pour
établir que les Etats exerçant la juridiction consulaire en applica-
tion de leurs droits conventionnels possédaient en outre un titre
inclépendant à cette juridiction, fondé sur la coutumeou l'usage.
La seconde considération a trait à la question de la preuve. La
Cour a déclaré,dans l'affaire di1 droit d'asile, ,au sujet de l'établis-
sement d'une coutume locale propre aux Etats de l'Amérique
latine (C. 1.J. Relxte2L 1950, pp. 276-277) :

((La partie qui invoque une coutume de cette nature doit prouver
qu'elle s'est constituéede telle manière qu'elle est devenue obliga-
prouver que la règledont il se prévaut,est conformeColoàblin usage
constant et uniforme, pratiqué par les Etats, en question, et que
cet usage traduit un droit, appartenant à 1'Etat octroyant l'asile
et un devoir incombant à 1'Etatterritorial. Cecidécouledel'artic38
du Statut de la Cour, qui fait mention de la coiitume internationale
((comme preuve d'une pratique générale acceptéecomme étant
(le droit».)I

En l'espèce, il n'a pas étéfourni de preuve suffisante pour
permettre à la Cour de conclure qu'un droit à l'exercice d'une
juridiction consulaire fondé sur la coutume ou sur l'usage avait
étéétabli de telle manière qu'il soit devenu obligatoire pour le
Maroc.
Cet argument a également été fondé sur la pratique suivie

depuis la date à laquelle, par l'effet de l'entrée en vigueur de la
convention de I9:j7 entre la France ,et la Grande-Bretagne,
a pris fin le droit: conventionnel des Etats-Unis d'Amérique à
l'exercice d'unc juridiction consulaire étendue et aux droits qui
en découlaient.
Pendant cette ptiriode, la France et les États-unis ont négocié
sur un certain nombre de questions, y compris la renonciation
aux droits capitula~ires. On trouve dans la correspondailce diplo-
matique des expre:;sions isolées qui, prises hors de leur contexte,
peuv~nt êtreconsidéréescomme la reconnaissance des prétentions
des Etats-Lnis dle:uercer la juridiction consula.ire et autres droits

capitulaires. Mais d'autre part, la Cour ne peut ignorer la teneur
générale de la co;respondance (lui démontre qu'à tout moment
la France et les Etats-Unis cherchaient une solution fondéc siir
un accord réciproque et (lue ni l'iine ni l'nutrc des Parties n'cii\.i-
sngeait l'abandon (le sa position ji~,ridicliie.L):tns ces conditions,
l'état de choses d'al~rhs lequel les Etats-ITnis ont continué apriis
1937 d'exerccr la juridiction consulaire pour toutes les affaires
civiles et criminelles où leurs ressortissants étaient défendeurs
2Ydoit apparaître co:mme ayant la nature d'un état de choses provi-
soire tacitement accepté par les autorités du Maroc.

En conséquence, il faut conclurequ'en dehors des droits spéciaux
reconnus par les articles 20 et 21 du traité de 1836 et de ceux qui

découlent des dispositions de l'acte d'Algésiras mentionnées plus
haut, la prétention des États-~riis d'exercer à titre de droit la
juridiction consulaire et autres droits capitulaires en zone fran-
çaise et à bénéficierdecette juridiction et de ces droits est devenue
caduque quand la Grande-Bretagne a mis fin, «en ce qui concerne
la zone française de l'Empire chérifien, à tous droits et privilèges
ayant un caractère capitulaire », en vertu des dispositions de la
convention de 19:;7.

La Cour passe rnaintenant à l'examen de la prétention suivant
laquelle les ressortissants des États-unis ne'sont pas soumis, en
principe, à 1'applic:ation des lois marocaines, à moins que celles-ci
n'aient auparavarit reçu l'assentiment du Gouvernement des
États-unis.
Les conclusions du Gouvernement de la République française
sur ce point sont ainsi conçues :

(Que le Gouvernement des États-unis d'Amérique n'estpas en
droit de prétendre que l'application à ses ressortissants au Maroc
de toutes législationset réglementations dépend deson consentement
exprès ;
Que les ressoirtissants des États-unis d'Amériqueau Maroc sont
vigueur dans l'Empire chérifien,notamment enementaceequi concerne la
réglementation du 30 décembre 1948 sur les importations, sans
devises, sans qiie l'accord préalable du Gouvernement des Etats-
Unis soit nécessaire.))

La conclusion dlu Gouvernement des États-unis sur ce point
est ainsi conçue :

((4. Sous le régime de compétence judiciaire extraterritoriale
actuellement exercé au Maroc par les Etats-Unis, les citoyens
de ce pays ne sont pas soumis, en principe, à l'application des lois
marocaines.
Ces lois ne deviennent applicables aux citoyens des États-Unis
qu'après avoir (,tésoumises à l'assentiment préalabledu Gouverne-
meni des États-unis et que ce gouvernement en ait approuvé
l'application à :;escitoyens. Le dahir du 30 décembre1948n'ayant
pas étésoumis à l'assentiment préalable du Gouvernement des
Etats-Unis n'est pas applicable aux citoyens américains. ))
La prétention suivant laquelle les lois marocaines ne sont pas
obligatoires pour les ressortissants des États-unis, à moins d'avoir

29reçu l'assentiment du Gouvernement des États-unis, se rattache
au régime des capitulations ; il n'est pas nécessaire de reprendre
les considérations déjà examinées à propos de la juridiction
consulaire.

Aucune disposition d'aucun des traités examinés en l'espèce ne
confère ce droit aux Etats-Unis. Le prétendu droit d'assentiment
est seulement un ~rorollaire du système de juridiction consulaire.
Les tribunaux coni;ulaires appliquaient leur propre droit sans être
liésen aucune façon par le droit marocain ou la législation maro-
caine. Avant qu'lin tribunal consulaire pût appliquer une loi
marocaine, la Puissance étrangère intéressée devait pourvoir à
son adoption comme loi s'imposant au consul dans l'exercice de
sa compétence judiciaire. La pratique généralementsuivie consistait
à l'incorporer soit dans la législation de 1'Etat étranger, soit dans
des décisions ministérielles ou c~nsulaires de cet Etat prises en
vertu de pouvoirs délégués. L'Etat étranger pouvait avoir agi

ainsi ou pouvait refuser de pourvoir à l'application de la loi. Il
n'y avait de ((droit d'assentiment 1)que dans la mesure où l'inter-
vention du tribunal consulaire était nécessaire pour obtenir l'appli-
cation effective d'une loi marocaine à l'encontre de ressortissants
étrangers.
En l'absence de toutes dispositioils conventionnelles enlamatière,
on a soutenu qu'un ((droit d'assentiment » peut être fondé sur la
coutume, l'usage ou la pratique. Il est inutile de reprendre les
raisons qui ont étédonnées pour rejeter la coutume, l'usage et
la pratique en tant que fondement d'une juridiction consulaire
étendue, raisons qui s'appliquent, dans une large mesure, au

« droit d'assentiment )).Il convient cependant de souligner que
le très grand nombre de cas dans lesquels des lois marocaines
ont été soumises aux autorités des Etats-Unis s'explique facile-
ment par le fait qu'il s'agissait là d'un moyen commode pour en
assurer l'incorporation dans des décisions ministérielles s'impo-
sant aux tribunaux consulaires. C'est de cette façon, et de cette
façon seulement, qu'il Était possible de rendre ces lois applicables
aux ressortissants des Etats-Unis aussi longtemps qu'était exercée
la juridiction consulaire étendue.
Le problème se pose sous trois aspects qu'il faut envisager
séparément.
Le premier vise 1:s cas où l'application d'une loi marocaine aux

ressortissants, des Etats-Unis serait contraire aux droits conven-
tionnels des Etats-Lnis. Dans de tels cas, l'application directe ou
indirecte des lois inarocaines à ces ~essortissants serait, à moins
qu'elle n'ait reçu l'assentiment des Etats-Unis, contraire au droit
international, et le différend qui pourrait en résulter devrait être
traité par les methodes ordinaires pour le rhglement des différends
internationaux. Ccs considérations s'al)pliqiicnt 2 l'arreté di1
30 décembrc !948 ,rluela C,our a jiigé contraire aux droits conven-
tionncls dcs Etats--ITnis. Le second aspect sous lequel se pose le problème a trait aux
cas où le concours des tribunaux consulaires est nécessaire pour
pouvoir appliquer ,la législation marocaine. Dans de tels cas,
l'assentiment des Etats-Unis serait essentiel à l'application de

la législation par les tribunaux consulaires, que cette application
contrevienne ou non aux droits conventionnels.
Le troisième aspect sous lequel se pose le problème de l'assen-
timent a trait aux cas où il s'agit de l'application à des ressortis-
sants des Etats-Unis, autrement que par les tribunaux consulaires,
de lois marocaines qui ne violent aucun des droits conventionnels

des États-unis. Dans de tels cas, l'assentiment des autorités des
États-unis n'est pas requis.
En conséquence, et ,sous les réserves énoncées plus haut, la
Cour conclut que les Etats-Unis ne sont pas fondés à prétendre
que l'application de lois et de règlements à leurs ressortissants

en zone française requiert leur assentiment.

Le Gouvernement des États-unis d'Amérique a présenté une

demande reconventionnelle dont une partie a trait à la question
de l'immunité de taxes marocaines en général et, en particulier,
des taxes de consommation établies par le dahir chérifien du
28 février 1948. Les conclusions suivantes ont été présentées à
cet égard :

Au nom du Gouvernement des États-unis :
((2. Les traités exemptent les ressortissants américains de toute
taxe, à 1'except.ionde celles qu'ils prévoient expressément ;perce-
voir des taxes des ressortissants américains en violation des dispo-
sitions des traités est un manquement au droit international.
Ces taxes ne peuvent en droit êtrerecouvréessu; les ressortissants
américains qu'avec l'assentiment préalable des Etats-Unis valant
renonciation temporaire à leur droit conventionnel, et à compter
de la date de cet assentiment, sauf disposition contraire contenue
dans l'acte d'assentiment.

Les taxes de consommation, fixéespar le dahir du 28 février 1948
et qui ont étérecouvrées sur des,ressortissants américains jusqu'au
15 août 1950, date à laquelle les Etats-Unis ont consenti à ces taxes,
ont étéperçues illégalement et doivent leur êtreremboursées.
3. Attendu que les lois marocaines ne peuvent s'appliquer aux
citoyens américains ,avant d'avoir reçu l'assentiment préalable du
Gouvernement des Etats-Unis, le défaut d'assentiment du Gouver-
nement des Etats-Unis au dahir du 28 février 1948 a donné un
caractère illégal au recouvrement des taxes de consommation
établies par ce dahir.))

Au nom du Gouvernement français :

c(Qu'aucun t.raité n'a conféré aux États-unis une immunité
fiscale pour leurs ressortissants au Maroc, ni directement, ni par
le jeu de la clause de la nation la plus favorisée ; Que les lois et règlementsen matière fiscalemis en vigueur,dans
l'Empire chérifiensont applicables aux ressortissants des Etats-
Unis sans que l'accord préalabledu Gouvernement des Etats-Unis
soit nécessair,
Que lestaxes;de consommation établies parle dahir du 28 février
1948 ont donc étélégalement perçues sur les ressortissants des
Etats-Unis et qu'il n'y apas lieuà remboursement. II

Le Gouvernement des États-unis soutient que ses droits conven-
tionnels au Maroc confèrent aux ressortissants des États-l'nis une
exemption de taxes, sauf pour celles que les traités ont spécialc-
ment reconnues et autorisées. Cette these se fonde sur certains
traités bilatéraux avec le Maroc ainsi que sur la convention de
Madrid de 188c et sur l'acte d'Alg4siras de 1906.
La Cour examinera tout d'abord la thèse d'après laquelle lc
droit à l'immunité fiscale peut êtredéduit des clauses de la nation
la plus favorisée, dans l'article 24 du traité de 1836 entre les Etats-
Unis et le Maroc et dans l'article 17 de la convention de. Madrid,
jointes à certaines, des dispositioris des traités entre le Maroc et
la Grande-Bretagne et entre le Maroc et l'Espagne.

Le traité généralde 1856 entre la Grande-Bretagne et le Maroc
prévoit dans le deuxième alinéa de son article IV que les sujets
britanniques ((ne seront jamais forcés, sous quelque prétexte que
ce soit,à payer des taxes ou impositions )).Le traité de 1861 entre
l'Espagne et le Maroc stipule dans son article V qu'c on ne pourra,
sous aucun prétexte, obliger les sujets espagnols à payer des impôts
ou contributions 11.
Il est prétendu, au nom des États-unis, que les clauses de la
nation la plus favorisée dans les traités avec des pays commc le
Maroc avaient pour objet non de créerseulement des droits tempo-
raires ou subordonnés, mais d'instaurer ces droits à titre permanent
et de les rendre indépendants des traités qui les avaient primitive-

ment consrntis. Il est soutenu en conséquence que le droit à l'immu-
nité fiscale accordé par le traité généralbritannique de 1856 et
par le traité espag?ol de 1861 est incorporé dans les traités qui
ont garanti aux Etats-Unis le traitement de la nation la plus
favorisée, le résultat étant que ce droit persisterait même si les
droits et privilèges reconnus par les traités de 18j6 et de 1861
devaient prendre fin.
Pour les raisons exposées plus haut, à propos de la juridiction
consulaire, la Cour n'est pas en mesure d'accepter cette thèse.
Il n'est pas établi que les clauses de la nation la plus favorisée
dans les traités avec le Maroc aient une autre signification ou un
autre effet que dans les clauses semblables d'autres traités, ou
soient régies par cles regles de droit différentes. Lorsqu'il y a eu

abrogation ou renonciation à l'égard de dispositions d'immunité
fiscale contenues dans les traités entre le Maroc et les Etats tiers,
on ne peut plus s'en prévaloir en vertu d'une clause de la nationla plus favorisée. Dans ces conditions, il faut examiner si les dispo-
sitions ci-dessus mentionnées des traités de 1856 et de 1861 sont
toujours en vigueur.
Le deuxième alinéa de l'article IV du traité général avec la
Grande-Bretagne a étéabrogépar la convention franco-britannique
du 29 juillet 1937 (protocole de signature, article 4, litt. a). Dès
l'entrée en vigueur de cette convention, les Etats-Unis n'ont plus
pu se prévaloir de cet alinéa de l'article IV du traité général de
1856en vertu de la clause de la nation la plus favorisée.
Comme il a déjà été dit plus haut, la déclaration de la France
et de l'Espagne en date du 7 mars 1914 a eu pour effet la renoncia-
tion pure et simple par l'Espagne dans la zone française à tous les
droits et privilèges issus du régimedes capitulations. Dans l'opinion

de la Cour, cette renonciation impliquerait la renonciation par
l'Espagne au droit de ses ressortissants d'êtreexemptés de taxes
en vertu cle l'article V de son traité de 1861 avec le Maroc, parce
qu'une immunité fiscale aussi généraleet complète doit êtretenue
pour un élémentdu régime des capitulations au Maroc. L'Espagne
ayant abandonné tous ses droits capitulaires doit dès lors etre
considéréecomme ayant renoncé à son droit à l'immunité fiscale.
C'est ce que confirme l'attitude d'un certain nombre d'autres
États en la matikre. La Grande-Bretagne a renoncé à tous les
droits et privilèges d'un caractère capitulaire dans la zone fran-
çaise du Maroc par l'article premier de la convention de 1937
avec la France : le protocole de signature énonce que cet article
et l'article6 ont pour effet d'abroger un certain nombre d'articles
du traité généralde 1856, y compris, ainsi qu'il a étédit plus haut,
le deuxième a1ini.a de l'article IV. Ceci paraît montrer que la
France, représentamt le Maroc, et la Grande-Bretagne se fondaient
sur la présomption que l'immunité de taxes accordée par cet article
était un droit de caractère capitulaire. Les autres Etats qui avaient,

de 1914 à 1916, également renoncé à tous droits et privilèges
issus du régime des capitulations dans la zone française, ont impli-
citement acquiescé à ce que leurs ressortissants soient taxés.
C'est pourquoi la Cour conclut que le droit à l'exemption de
taxes, prévu à l'article V du traité espagnol de 1861, ayant été
abandonnk par l'Espagne, les Etats-Unis ne peuvent plus l'invoquer
en vertu d'une clamse de !a nation la plus favorisée.
Le Gouvernement des Etats-Unis a prétendu en outre avqir un
droit indépendant à l'exemption de taxes, du fait que les Etats-
Cnis sont partie à la convention de hZadrid et à l'acte d'Algésiras.
Il soutient qu'en maticre de taxes, ces instruments ont institué
un régime qui a maintenu l'exemption de taxes en faveur des
ressortissants des Etats étrangers, confirmant ainsi et incorporant
le régime antérieur, qui est par conséquent toujours en vigueur,
sauf pour les Etats qui ont conscnti à y renoncer.
La Cour estime que la convciition de hIadrid n'a pas confirmé
et incorporé le principe de l'immunité fiscale alors existant. Ellea simplement préijupposél'existence du principe et l'a limité par
le moyen d'excepl.ions dans ses articles 12 et 13, sans en modifier
la base juridique. Elle n'a fourni aucune base nouvelle et indéprii-
dante pour une prétention à l'exemption de taxes.
Desconsidérations du mêmeordre s'appliquent àl'acte d'Algésiras
qui, par le moyeri des exceptions énumérées dans ses articles 59,
61, 64 et 65, a limité encore plus le régime de l'iinmunité fiscale.
Il n'a fourni aucune base juridique nouvelle et indépendante à
l'exemption de talxes.
Le Gouvernement des États-unis a invoqué les articles 2 et 3
de la convention de Madrid, qui accordent à certaines ((personnes

protégées ))l'exemption de taxes autresque celles qui sont stipulées
aux articles 12 et 13. Mais les ((protégés r visésaux articles 2 et 3
ne constituent qu'une catégorie limitée de personnes au service
des représentants diplomatiques et consuls des Etats étrangers.
Dans l'opinion de la Cour, il n'est possible de tirer des privilèges
accordés à cette catégorie limitée de personnes protégées aucune
conclusiori quant à l'immunité fiscale des ressortissants des Etats-
Unis en général.
Enfin, il est soutenu, au nom du Gouvernement des États-~nis,
que les taxes de consommation imposées par le dahir du 28 février
1948 sont contraires à certains droits conventionnels. Il est fait
référenceaux articles III, VII, VI11 et IX du traité de commerce

de 1856 entre la Grande-Bretagne et le Maroc pour en conclure
que ces articles, joints aux clauses de la nation la plus favorisée du
traité de 1836 entre le Maroc et les Etats-Unis, exemptent les
ressortissants des Etats-Unis des taxes de consommation.

Les quatre articles précités du traité commercial de 1856 avec
la Grande-Bretagne ont trait aux taxes et droits sur les marchaii-
dises exportées du Maroc ou importées dans ce pays, ou sur les
marclianclises transportées d'un port marocain à un autre. Les
taxes de consommation prévues par le dahir du 28 février 1948
sont exigibles, selon son article 8, sur tous les produits, qu'ils soient
introduits dans la zone française du Maroc ou qu'ils y soient fabri-

qués ou obtenus. Elles ne sauraient donc êtreassimilées aux taxes
particulières mentionnées dans les articles du traité commercial
britannique qui ont été invoqués par les Etats-Unis, de même
qu'elles ne sauraient êtreconsidéréescomme un droit de douane.
Le seul fait que, clans le casde marchandises importées, il peut être
commode de percevoir la taxe de consommation à la douanc ne
change pas le caractère essentiel de cette taxe,qui est des'applicluer
à toutes marchandises, qu'elles soient importées au Maroc ou
qu'elles y soient produites. On peut rappeler à cet égardque la Cour
permanente de Justice internationale a admis qu'on ne saurait
coiifondre avec des droits de douane des droits fiscaux perçus à 1ü
frontière lors de l'entrée de certaines marchandises ; dans soliarrêt du 7 juin 19132 en l'affaire des zones franches, elle a énoncé
que (le recul de la ligne des douanes ne préjuge pas du droit, pour
le Gouvernement français, de percevoir, à la frontière politique,
des droits fiscaux n'ayant pas le caractère de droits de douane 1).
(C. P. J. I., Série.A/B, no 46, p. 172.)
Par conséquent, la Cour n'est pas en mesure de dire que l'imposi-
tion de ces taxes ,de consommation contrevient aux droits
conventionnels des Etats-Unis. Dans ces conditions, la question

d'un remboursement partie) des taxes de consommation acquittées
par les ressortissants des Etats-Unis ne se pose pas.
Deç considérations précitées, il s'ensuit que le Gouvernement
des Etats-Unis n',est pas en droit de récla.mer que les taxes, y
compris les taxes de consommation, soient soumises à son assenti-
ment préalable a~i?nt de pouvoir êtrelégalement perçues sur les
ressortissants des Etats-Unis. Puisque, de l'avis de la Cour, ces
derniers ne sont exempts du paiement d'aucune taxe dans la zone
francaise. la rétention selon laauelle les lois et rècrlemeiltsd'ordre
fiscai doibeniêtre soumis aux auiorités des États-~iis àfin d'appro-
bation est sans fondement.
La conclusion à laquelle la Cour est ainsi arriv$e paraît conforme
à l'attitude prise en la matière par d'autres Etats. L'immunité

fiscale daris la zone française n'est reclamée ni par le Royaume-Uni,
ni par l'Espagne, ni par aucun des autres Etats qui jpuissaient
précédemmentd'une telle situation privilégiée.Seuls, les Etats-Unis
revendiquent aujourd'hui ce privilège, bien que leur traité de 1836
avec le Maroc ne leur ait garanti aucune immunité fiscale. Recon-
naître l'immunité fiscale en faveur des seuls ressortissants des
États-unis, ne serait pas conforme au principe de l'égalitéde
traitement en matière économique. principe qui est à la base de
l'acte d'Algésiras.

La co~iclusioil finale des États-unis d'Amérique sur la partie
de sa demande reconventionnelle qui est fondée sur l'article 95
de l'acte d'Algésiras est la suivante :

(I. Aux termes de l'article 95 de l'acte d'Algésiras,il faut dcter-
miner, aux fins de l'évalgationen douane, la valeur des importa-
tions en prove:nancedes Etats-Unis en ajoutant à la valeur d'achat
aux Etats-Unis de la marchandise importéeles frais de transport
jusqu'au bureixu de la douane marocaine, à l'exclusion des trais
postérieiirà la remise de la marchandise au bureau de douane, tels
que les droits de douane et frais de magasinage.
C'est une v;iolatioilde l'acte d'Algésiraset un nianquenient au
droit international, de la part des autoritésdouanières,de s'écarter
de la méthode d'évaluation ainsi définieet de fixer, aux fins de
l'évaluationen douane, la valeur de la nlarchandise importéed'aprhs
la valeur de cctte marchandise sur le marcliélocal marocain. 11 La conclusion finale de la France sur cette partie de la demande
reconventionnelle énonce :

(Que l'article 95 de l'acte d'Algésiras définit la valern douane
comme la valeur de la marchandise au moment et au lieu où elle
est présentée pourles opérations de dédouanement ;»
ce par quoi il fauit entendre, comme on l'a préciséen plaidoirie,
la valeur sur le marché local, c'est-à-dire marocain.
La nécessité,dont témoignent les articles 95, 96 et 97 de l'acte
d'Algésiras, d'instituer une sorte de mécanisme pour assurer une

juste évaluation des marchandises par les autorités douanières,
semble résulter, entre autres, a) du principe d'égalitééconomiqiie
qui est l'un des principes fondamentaux de l'acte, et bj du fait
que les droits d'importation ont étéfixéspar les Puissances signü-
taires à 124 0/, .l serait évidemment facile, si on le voulait,
de traiter défavorablement tel importateur au moyen d'évaluations
arbitraires ou d'éluder une limitation de droits au moyen d'évalua-
tions exagérées. Les Puissances signataires ont compris la néces-

sité d'un mécanisme de ce genre ; toutefois, il ne semble pas que
ce mécanisme ait donné naissance à une pratique qui ait étésuivie
d'une manière invariable depuis l'entrée en vigueur de l'acte.
L'article 95 prévoit quatre facteurs pour évaluer la marchandise :
a) l'évaluation doit se fonder sur le prix, au comptant et eii
gros ;

6) le temps et le lieu de l'évaluation sont fixés comme étant
l'entrée de la marchandise au bureau de douane ;
c) la marchandise doit être évaluée ((franche de droits de
douane et de magasinage ))c'est-à-dire que sa valeur ne doit pas
comprendre lesdits frais ;
d) l'évaluation doit tenir compte, s'il y a lieu, de la dépréciatioii
résultant d'avaries.

L'article 96, qui se rapporte uniquement aux principales mar-
chandises taxées par l'administration des douanes marocaines,
envisageait la détermination annuelle de leur valeur par une
((Commission des valeurs douanières ))siégeant à Tanger. Il faut
noter le caractère local de cette commission et des personnes
qu'elle était invitée à consulter. Le tarif des valeurs fixées.par
elle était susceptible d'êtrerevisé au bout de six mois si des nod di-
fications notables étaient survenues dans la valeur de certaines

marchandises. L'article 96 est une disposition procédurale appelce
à fonctionner dans le cadre de l'article 95.
L'article 97 prévoyait l'établissement d'un (coinité des douanes »
permanent, destiné à exercer sa haute surveillance sur le fonction-
iicment des douanes et à veiller à l'application des articles 96 et
97 sousréserve de l'avis du (Corps diplomatique à Tanger ».

La Commission des valeurs douanières visée à l'article 96 semble
Ctre tombée en désuétude en 1924, (luancl 1ü coiivciitioii di1

3618 décembre 1923, relative à la zone de Tanger, est entrée en
vigueur et lui a substitué une commission représentant les trois
zones. Cette dernière commission n'a pas siégédepuis 1936.
Il faut rioter également les articles 82 à 86 de l'acte, relatifs
aux déclarations exigées des importateurs. L'article 82 oblige l'im-
portateur à préseinter une déclaration détaillée énonçant l'espèce,
la qualité, lepoids, le nombre, la mesure et la valeur des marchan-

dises ainsi que l'espèce, les marques et les numéros des colis qui
les contiennent. Certes, la déclaration de valeur faite par I'impor-
tateur ne saurait être décisive car il est partie intéressée, mais,
cependant, il est mieux renseigné que quiconque surla marchandise
et, sauf soupçon de fraude, il est juste que le montant indiqué dans
la déclaration soit un élémentimportant pour l'évaluation à faire.

On ne peut pas; dire que les dispositions de l'article 95 seules,
ou du chapitre TT considéré dans son ensemble, apportent une
preuve décisive à l'appui de l'une ou de l'autre des interpréta-

tions avancées respectivement par les Parties. Les quatre facteurs
figurent à l'article 95 sont compatibles avec les deux interpré-
tations ; en particulier, l'expression ((franche de droits de douane
et de magasinage )n'apporte pas d'indication précise car, si l'on
doit prendre cornrne base la valeur dans le pays d'origine, majorée
de l'assurance, du fret, etc.,cetteexpression signifie (avant l'entrée
au bureau de douane et le paiement des droits N, alors que si l'on
doit prendre comrne base la valeur sur le marché local, il est néces-
saire (ou tout au moins prudent) d'employer une formule de ce
genre pour indiquer que le droit de 126 O/, ne doit pas être

perçu sur un montant dans lequel ces 12h % sont déjà compris.
La Cour a pris en considération la pratique antérieure ainsi
que les travaux préparatoires de la conférence d'Algésiras de 1906,
mais on ne peut guère en tirer des indications utiles. L'accord
commercial du 4 octobre 1892 entre la France et le Maroc consiste
en lin échange de lettres entre le ministre des Affaires étrangères
du Maroc et le ministre de France au Maroc, la lettre de ce dernier
contenant la form.ule suivante :

«Ces marchandises seront estimées sur le pied de leur valeur
marchande, au comptant, en gros, dans les ports de débarquement,
en réauxde vellon. »

Un avant-projet d'acte (p. 97 des Documents diplomatiques
français, 1906, fascicule 1,Affaires du Maroc, intitulé (II. Proto-
coles et comptes rendus de la Conférence d'Algésiras») contient

l'article suivant:

((ArticlXIX. - Les droits d'entrée et de sortie seront payés
comptant et sa,nsdélaiail bureau de douane où la liquidation aura
étéeffectuée.Les droits ad valorem seront liquidéset payésd'après
la valeur en gros et au comptant de la marchandise au port de
37 débarquement ou au bureau d'entrée, s'il s'agit d'importation.
Les marchandises ne pourroilt être retirbes qu'après le paiement
des droits de douane et de magasinage.
Toute prise ,en charge ou perception devra faire l'objet d'lin
récépissé réguliedrélivrépar l'agent chargé del'opération. »

Par la suite (p. i:oo), sur proposition britannique, la deuxième

phrase fut ainsi modifiée :

c(Ides droits ad valore~nseront liquidés et payés d'après la valcur
au comptant et en gros de la marchandise ail bureau de douane et
franchc de droits de douane. 1)

Plus tard encore, la délégation allemande fit la proposition suivante
(ibid.,p. 232) :

((Les droits tzd valorent perçus au Maroc sur les importations
seront calculés sur la valeur que l'article importé a dans le lieu
de chargement ou d'achat, avec majoration des frais de transport
et d'assurance jusqu'au port de déchargement au Maroc ...»

Cet amendement fut rejeté, ce dont on peut déduire que la valeur
dans le pays d'origine a étérejetée en tant que critère concluant.

Il convient également d'examiner la pratique suivie par les

autorités douanières depuis 1906, dans la mesure où elle ressort des
documents produits par les Parties. Il semble que l'on ait répugné
à attribuer à un facteur unique quelconque un effet décisif dans
l'évaluation des marchandises.

Par exemple, dans une lettre du 16 juillef 1912, du contrôleur
des douanes marocaines au ministre des Etats-Unis à Tanger,
il est dit que les fonctionnaires des douanes ccappliquent, pour
l'estimation des ma.rchandises, les règles établies par l'acte d'Algé-
siras et par le règlement des douanes. Ils utilisent les mercuriales,

les factures, lcurs connaissance professionnelles. 1)
011 troii17eplusloin, dans lamême lettre, lespassages qui suivent :

c(La facture est un élémentd'appréciation, mais elle ne fait pas
obligatoirement foi.

La douane a toiijours procédé comme ilest dit ci-dessus à l'égard
des pétroles importés de Fiume et de Trieste, pour lesquels Irs
importateiirs Iiii donnent des moyens d'apprhciatioil en joignant
aux déclarations les factures originales clont les pris sont cornparCs
avec les cours dcs marchés d'origine.

Cette v;ilciir [;~iisfins de la tloiiane] coiiiportc Ic 1)ris d'ncliat tiii
~)étrolef. o. 1). New-York arigmeiité de tous les frais postérieiirs
à I'acliat, tels qiie les droit.; de sortie accliiittbs ailx tloiianes étran-
gères,le tr;iiisport, I'cnibnllagc, Icfret, I'assiirancc, Icsmaiii~)iilations,
38 le débarquement, etc., en un mot tout ce qui contribue à former,
au moment de la présentation au bureau de douane, la valeur au
comptant et en gros du produit suivant laquelle doivent, d'après
l'article 95 de l'acte d'Algésiras,êtreliquidésles droits.

Il est non moins intéressant de trouver dans les comptes rendus
d'une séance de la Commission des valeurs douanières, réunie à
Tanger le 7 juin 1933, l'explication suivante, donnée par le direc-
teur des douanes :
«....son service adopte comme élémentsd'appréciation pour
l'application des droits en question ;la facture d'origine, les frais
de transport jusqu'au port importateur, la valeur de la marchandise
sur lemarché localà l'arrivée,lesmercuriales et tout autre renseigne-
ment pouvant êtreutile pour fixer la valeur imposable II.

En revanche, on trouve dans le règlement des douanes et dans
les circulaires émanant du contrôle de la Dette du Maroc des
passages dans lesquels la valeur sur le marché marocain est mise
en relief comme étant le facteur important. Les derniers «Tableaux
des valeurs minima et maxima des principales marchandises impor-
tées au Maroc 11adoptés par la Commission des valeurs douanières
à sa dernière séance du II mars 1936 à Tanger, présentent des
écarts si importants que, pour évaluer vraiment telle cargaison
ou marchandise, ils offriraient seulement des indications des plus

générales.
L'impression générale qui se dégage de l'examen des documents
pertinents est que les fonctionnaires chargés de l'administration
des douanes depuis l'acte d'Algésiras ont utilisé, bien que pas tou-
jours d'une façon très conséquente, tous les facteurs d'évaluation
à leur disposition.
Dans ces conditions, la Cour est d'avis que l'article 95 n'énonce
pas de règle stricte en ce qui touche le point litigieux. Il appelle
une interprétation plus souple qu'aucune de celles avancées par
l'une et l'autre des :Parties en litige.
La Cour est d'avis que, pour fixer aux fins de la douane la valeur
des marchandises importées, les autorités douanières de la zone

française ont le devoir de prendre en considération les facteurs
suivants :
a) les quatre facteurs spécifiés à l'article95 et mentionnés
ci-dessus ;
h) le contenu de la déclaration qu'aux termes de l'acte I'impor-
tateur doit faire à la douane ;
G) la valeur au comptant et en gros sur le marché dans la zone

française ;
d) le coût dans le pays d'origine, majoré des frais de chargement
et de déchargement, de l'assurance, du fret et des autres frais
encourus avant la remise des marchandises au bureau dc douane ; e) les tarifs des valeurs, s'il en existe, préparés par la Commission
des valeurs douaniPres visée àl'article 96 ou partoute autre commis-
sion qui a pu lui êtresubstituée par des arrangements auxquels
la France et les Etats-Unis ont donné leur assentiment exprès
ou tacite ;

f) tout autre facteur imposé par les conditions particulières à
tel envoi ou à telle espèce de marchandise.
Ces facteurs ne sont pas énumérésdans un ordre de priorité ;
ils devraient jouer librement dans les limites établies ou à établir

en vertu de l!article 96 de l'acte, et, eu égard au principe directeur
de l'égaliti: économique, les mêmes méthodes doivent êtreappli-
quées sans discrimination à toutes les importations, quelles que
soient l'origine desmarchandises ou la nationalité des importateurs ;
le pouvoir d'évaluer appartient aux autorités douanières, mais
elles doivent en user raisonnablement et de bonne foi.

Par ces motifs.

sur les conclusions du Gouvernement de la République française,

àl'unanimité,
Rejette ses conclusions relatives à l'arrêtéédictéle 30 décembre
1948 par le Résiderit généralde la République française au Maroc ;

à l'unanimité,
Dit qu'en vertu des dispositions de leur traité du 16 septembre

1836 avec le Maroc, les Etats-Unis d'Amérique sont fondés à
exercer dans la zone française du Maroc la juridiction consulaire
sur tous les différends civils ou criminels entre citoyens ou protégés
des Etats-Unis ;

par dix voix contre une,
Dit qu'en vertu de l'acte général d'Algésirasdu 7 avril 1906,
les Etats-Unis d'Amérique sont également fondés à exercer dans
la zone française du Maroc la juridiction consulaire dans toutes
les affairescivi,le011 criminelles introduites contre des citoyens ou
protégés des Etats-Unis, dans la mesure requise par les disposi-
tions de cet acte relatives à la juridiction consulaire ;

par six voix contre cinq,

Rejette, réservefaite de ce qui précède, les conclusions des Ctats-
Unis d'Amérique relatives à la juridiction consulaire ;
40 à l'unanimité,
Dit que les États-unis d'Amériqqe ne sont pas fondés à prétendre
que l'application ailx citoyens des Etats-Unis des lois et règlements
de la zone,française du Maroc requiert l'assentiment du Gouyerne-

ment des Etats-Unis, mais que les tribunaux consulaires des Etats-
Unis peuvent refiiser d'appliquer aux citoyens des Etats-Unis
les lois et règlements auxquels le Gouvernement des Etats-Unis
n'a pas donné son assentiment ;

sur la demande reconventionnelle du Gouvernement des États-
Unis d'Amérique,

par six voix conire cinq,
Rejette les conclusions des États-unis d'Amérique relatives à
l'exemption de taxlrs ;

par sept voix contre quatre,

Rejette les conclusions des États-unis d'Amérique relatives
aux taxes de consommation imposées par le dahir chérifien du
28 février 1948 ;
par six voix contre cinq,

Dit que, pour appliquer l'article 95 de l'acte général d'Algésiras,
la valeur de la marchandise au pays d'origine et sa valeur sur le
marché local marocain sont l'une et l'autre des éléments pour
l'estimation de sa valeur au comptant et en gros rendue au bureau
de douane.

Fait en anglaiset en français,le texte anglaisfaisant foi, au Palais
de la Paix, à La Haye, le vingt-sept août mil neuf cent cinquante-

deux, en trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives
de la Cour et dont les autres seront transmis respectivement au
Gouvernement de la République française et au Gouvernement des
Etats-Unis d'Amérique.

Le Président,

(Signé) Arnold D. MCNAIR.

Le Greffier,

(Sigfié E. HAMRRO. M. Hsu Mo,,juge, déclare que, à son avis, les droits juridiction-
nels dont les Etats--Unis d'Amérique jouissent dans la zone fran-
çaise du Maroc se limitent aux droits prévus par les articles 20
et 2; de leur traité du 16 septembre 1836 avec le Maroc, et que

les Etats-Unis ne sont pas fondés à exercer la juridiction consu-
laire ,dans des affaires qui entraînent l'application aux citoyens
des Etats-Unis de celles des dispositions de l'acte d'Algésiras de
1906 dont l'exécution comporte certaines sanctions. L'acte d'Algé-
siras, pour autant qu'il s'agit des clauses juridictionnelles,a été
conclu en tenant compte de la sorte de juridiction consulaire qui
existait à cette époque dans sa plénitude et en complète unifor-
mité entre les Puissances au Maroc. Les diverses dispositions,
lorsqu'elles mentionnaient «la juridiction consulaire D, (l'autorité
consulaire compétente )),« le tribunal consulaire du défendeur N,
etc.,,visaient clairement la juridiction uniformément exercée par
les Etats étrangers sur leurs ressortissants respectifs dans toutes

les affaires où ilsétaient défendeurs. Elles ne visaient pas la juri-
diction limitée que les tribunaux consulaires des Etats-Unis pou-
vaient exercer, confo<mément à l'article 20 du traité de 1836
entre le Maroc ef les Etats-Unis, dans les affaires où des citoyens
ou protégésdes Etats-Unis étaient seuls en cause. Par conséquent,
lorsque la juridiction conçulaire sous sa forme complète a cessé
d'exister pour tous les Etats signataires de l'acte d'Algésiras,
toute base pour l'application, par les divers tribunaux consulaires,
des sanctions prévuc:spar l'acte, a disparu, et les règles ordinaires
du droit international sont entrées en jeu. De ce fait, les sanctions
en question devaient désormais être appli,quées par les tribunaux
territoriaux, aussi bien aux citoyens des Etats-Cnis qu'à tous les
autres ressortissants étrangers. Quanf à la référenceaux privilèges

juridictionnels dont jouissaient les Etats-Unis, contenue dans la
convention de 1937 entre la Grande-Bretagne et la France, il
faut la considérer comme une mesure de précaution prise par la
France contre un refus possible de la part des Etats-Cnis d'aban-
donner ces privilèges. En tout cas, les droits des Etats-Unis à
l'égard du Maroc, en matière de juridiction, doivent être déter-
minés par leurs propres rapports conveiitionnels et ne sauraient
découler de quelque admission faite par la France, au nom du
Maroc, à une tierce partie.

MM. HACKWORTEIB ,ADAWI,LEVI CARKEIROet sir Benegal
RAU, juges, se prévalant du droit que leur confère l'article 57

du Statut, joignent à l'arrêt l'exposé commun de leur opinion
dissidente.

(Paraphé) A. 0. RlcN.

Bilingual Content

INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

REPORTS OF JUDGMENTS,
ADVISORY OPINIONS AND ORDERS

CASE CONCERNING

RIGHTS OF NATIONALS OF
THE UNITED STATES OF AMERICA

IN MOROCCO
(FRANCEv.UNITED STATES OF AMERICA)
JUDGMENT OF AUGUST 27th,1952

COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

RECUEIL DES ARRETS,
AVIS CONSULTATIFS ET ORDONNANCES

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS

DES RESSORTISSANTS
DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE
AU MAROC

(FRANCE c. ETATS-UNIS D'AMERIQUE)
A~T DU 27AOÛT 1952 Tbis Judgment should be cited as foilows :

"Case concerningrights of natiods of th United States
of America in Morocco,Judgment of August27th, 1952 :
I.C.J. Reports 1952, p. 176."

Le présentarrktdoit êtrecitécomme suit :

aA8aire relative aux droits des ressortissantsdes États-Unis
d'Amériqueau Maroc, Arrêtdu 27 août 1952:

C.I. J. RecueiZ1952, p. 176.'' AUGUST 27th1952

JUDGMENT

CASE CONCERNING RIGHTS OF NATIONALÇ
OF THE UNITED STATES OF AMERICA

IN MOROCCO
(FRANCEv.UNITED STATES OF AMERICA)

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS DES

RESSORTISSANTS DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE
AU MAROC
(FRANCE c. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE) INTERNATIONAL COURT OF JUSTICE

1952
August 27th
General List : YEAR 1952
No. II

CASE CONCERNING

RIGHTS OF NATIONALS OF

THE UNITED STATES OF AMERICA

IN MOROCCO

(FRANCE v. UNITED STATES OF AMERICA)

Economic liberty u'itl~out any inequality in ilfinothe Getzeral

Act of A1gcciras.-Eoectof establishment of Protectorate thereon.-Egect
of discriminationon validity of Hesidential Decree of December 30th.
1948, regulating imports.
Consz~lar jurisdictiin French Zone of Alorocco as based Onbilateral
trcatics, most-favoured-nation claztses ad multilateral treaties.-Aifeaning
of "dispute" in Treaty of 1836 between illorocco and the United
States; whetl~er applicablto criminaland cioil nzatters.-Eflecof

renunciation by oiher States of ccnsular jurisdiction.-Eflof Con-
vention of Madrid and Act of Algeciras on consular jurisdiction.-
Cz~stom and usage.
"Right of assent" to hloïoccan l~~islation as corollary of consular
jurisdictio~z.-dsscnnecessary for applicationof Moroccan laws in
consular courts.-Local laws contrary to treaty rights.

Fiscal irnmuîzityas based on Convention of Aladrid and Act of
Algeciras and most-favoured-natio~z clauscs.
Interpvetatioof Articl95 of Act of Algccirus.

JUDGMEN'T

L'rescri: President Sir Arnold MCNAIR ; Jzddges BASDEVANT,
HACKWORTH, ZORICIC, KLAESTAD,BADAWI, READ,
Hsu Mo, LEVI CARNEIRO S,ir Benegal RAU, ARMAND-

C~os ;I<egistrarHx~ii<i~. COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

1gj2
Le 27 août
Rôle général
n3 II

27 août 1952

AFFAIRE RELATIVE AUX DROITS

DES RESSORTISSANTS

DES ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE

AU MAROC

(FRANCE: c. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE)

Liberté écono??ziqî~eazt Maroc sans aucztne inégalité d'après l'actr
général d'AlgLsiras. - Eget de l'établisseî>zentdzs protectorat szlr ce
principe. - fnfi'zience de la discriminationsztr la validité de l'arrêté
risideniiedu 30 décembre 1948 portant réglementation des importations.

Jz~ridictioncc~nsulaire dans la zone françaisedu Maroc fondée sirv
les traitisbilatéraux, les clauses de la nation la plus favorisir et les
traités ntztltilatéraux. Sens du nzot «diflérend1)dans le traité de
1836 eîîtrc le Afaroc et les États-Unis; son application az~x aflaivcs
cririzinrlles et civilesEget de la renonciation fiar les az~tresÉtats à la

jtlridictionco~zszilaire. Eflet de la convention de ,%ladrid et de l'acte
d'illgiszvasszlr la jzcridiction cansulair-. Couturile et ztsage.
iIJvoit d'assenti,nen» à la législation marocaine cow~me covollaive
de la jz~ridiction conszclaire. Assentiment nécessaire pozrr l'a,b,bli-

catioizdes lois marocaines par les tribunaztx consztlairrs- Lois
locales corzfraircs aux droits co~zventionnels.
In~itzi~nité/iscale fondée sur la conventiolz de Madrid et l'<~ctc<1':41-
gisiras cl les claz~ses de la nation la plus favorisée.
IvztevpvAationde l'article 95 de l'acte d'A1;~ésiras.

PrLsewls : Sir Arnold MCNAIR, Président ; MM. BASDEV.\ST,

HACICWORTHZ ,ORI~I~, KLAESTAD,BADAWI, RE.^,
Hsu Mo, LEVICARNEIRO S,ir Bcncgal R.111, 31.!IR>I.\SI)-
UGOX, Jllj'cs ;RI. H.~JIBKO, GrtrJ+ier.

4 In the case concerning the rights of nationals of the United
States of America in Morocco,

between
the French Republic,

represented by :

M. AndréGros, Professor of the Faculties of Law, Legal Adviser
to the Ministry for Foreign Affairs,
as Agent,

assisted by :
M. Paul Reuter, Professor of the Faculty of Law of Aix-en-
Provence, Assistant Legal Adviser to the Ministry for Foreign
Affairs,

as Assistant Agent,

and by :
M. Henry Marchat, Minister Plenipotentiary,
as Counsel,

and by :
M. de Lavergne, inspecteztrdes finances,

M. Fougère, nzaitredesrequêtea su Conseild'État,
M. de Laubadère, Professor of the Faculties of Law,
as Expert Advisers ;

and

the United States of America,

represented by :
Mr. Adrian S. Fisher, the 1,egal Adviser, Department of State,
as Agent,

assisted by :
Mr. Joseph M. Sweeney, Assistant to the Legal Adviser, Depart-
ment of State,

Mr. Seymour J. Rubin, member of the Bar of the District of
Columbia,
as Counsel,

and by :
Mr. John A. Bovey Jr., Corisul,United States Consulate-General,
Casablanca,

5 En l'affaire des droits des ressortissants des États-Gnis dJAmé-
rique au Maroc,

entre

la République française,

représentéepar
M. André Gros,, professeur des Facultés de droit, jurisconsiilte
du ministère des Affaires étrangères,

comme agent,

assisté par
M. Paul Reuter, professeur à la Faculté de droit d'Aix-en-
Provence, jurisconsulte adjoint di1 ministère des Affaires
étrangères,
comnie agent adjoint,

et par

M. Henry Marchat, ministre plénipotentiaire,
comme conseil,

et par
M. de Lavergne, inspecteur des finances,
hl. Fougère, maître des requêtes au Conseil d'État,

M. de Laubadère, professeur des Facultés de droit,
comme experts ;

les États-unis- d'Amérique,
représentés par
M. Adrian S. Fisher, conseiller juridique du Départcmcnt d'État,

comme agent,
assisté par

M. Joseph M. Syeeneÿ, adjoint au conseiller juridique du
Département dJEtat,
M. Seymour J. Rubin, membre di1 barreau di1 district de
Columbia,

comme conseils,
et par

M. John A. Bovey Jr., consul aii consulat général dcs Étnts-
Unis à Casablanca,
5 Mr. Edwin L. Smith, Legal Adviser, United States Legation,
Tangier,
Mr. John E. Utter, First Secretary, United States Embassy,
Paris,
as Expert Advisers,

composed as above,

delizlersfhe /oZlowingJzidgrnent :

On October 28th, 1950, the Chargé d'affaires a.i. of France to
the Netherlands filed in the Registry, on behalf of the Government
of the French Republic, an Application instituting proceedings
before the Court against the United States of America, concerning

the rights of nationals of the United States of America in Morocco.
The Application referred to the Declarations by which the Govern-
ment of the United States of America and the French Government
accepted the compulsory jurisdiction of the Court in accordance
with Article 36, paragraph 2,of the Court's Statute. It also referred
to the Economic Co-operation Agreement of June 28th, 1948,
between the United States and France, and to the Treaty for the
Organization of the French Protectorate in the Shereefian Empire,
signed at Fez on March 3oth, 1912, between France and the Sheree-
fian Empire. It mentioned the Treaty of Peace and Friendship of
September 16th, 1836, between the United States and the Sheree-
fian Empire, as well as the General Act of the International
Conference of Algeciras of April7th, 1906.
Pursuant to Article 40, paragraphs 2 and 3, of the Statute, the
Application was communicated to the Government of the United

States as well as to the States entitled to appear before the Court.
It was also transmitted to the Secretary-General of the United
Nations.
The time-Iimits for the deposit of the Pleadings were fixed by
Order of November zznd, 1950. The Memorial of the French Govern-
ment, which was filed on the appointed date, quoted several provi-
sions of the General Act of Algeciras and drew conclusions therefrom
as to the rights of the United States. The construction of a conven-
tion to which States other than those concerned in the case were
parties being thus in question, such States were notified in accord-
ance with Article 63, paragraph 1,of the Statute :for this purpose
notes were addressed on April 6th, 1951, to the Governments of
Belgium, Spain, Italy, the Netherlands, Portugal, the United
Kingdom of Great Britain and Northern Ireland and Sweden.

On June ZISt, 1951, within the time-limit fixed for the deposit
of its Counier-lllemorial, the Government of the United States of

6 ARRÊT DU 27 VI1152 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 178

M. Edwin L. Smith, conseiller juridique de la légation des
États-Unis à Tanger,
M. John E. Utter, premier secrétaire à l'ambassade des États-
Unis à Paris,

comme experts,

ainsi composée,
rend l'arrêtsztizfun:

Le 28 octobre 1:950, le chargé d'affaires a. i.de France aux
Pays-Bas a dépost! au Greffe, au 'nom du Gouvernement de la
République française, une requête introduisant devant la Cour,
contre les Etats-Unis d'Amérique, une instance relative aux
droits des ressortissants des Etats-Unis au Maroc. La re,quête
vise les déclarations par lesquelles le Gouvernement des Etats-
Unis d'une part, et le Gouvernement français d'autre part, ont
reconnu comme obligatoire la juridiction de la Cour, aux termes
de l'article 36, paragraphe 2, du Statut. Elle vise également
1:accord de coopération économique du 28 juin 1948, entre les

Etats-Unis et la France, et le traité pour l'organisation du protec-
torat franqais dans l'Empire chérifien, signé à Fez le 30 mars
1912, entre la France et l'Empire chérifien. Elle fait mention
du traité de paix et d'amitié du 16 septembre 1836, entre les
Etats-C'nis et l'Empire chérifien,ainsi que de l'acte général de la
conférenceinternationale d'Algésirasdu 7 avril 1906.

Conformément à l'article 40, paragraphes 2 et 3, du Statut,
la requête a étécommuniquée au Gouvernement des Etats-Unis
ainsi qu'aux Etats admis à ester en justice devant la Cour. Elle
a également ététransmise au Seorétairegénéraldes Nations Unies.

Ides délais pour le dépôt des pièces de la procédure écrite ont
étéfixés par ordonnance du 22 novembre 1950. Le mémoire du
Gouvernement français, présenté à la date assignée,cite plusieurs
dispositions de l'acte générald'Algésiraset en tire des conclusions
quant aux droits des Etats-Unis. S'agissant ainsi dans l'affaire
de l'intefprétation d'une convention à laquelle ont participé
d'autres Etats que .lesParties au litige, ces Etats en ont été avertis
aux termes de l'article 63, paragraphe premier, du Statut :des
notes à cet effet ont étéadressées le 6 avril 1951 aux Gouverne-
ments de la Belgique, de l'Espagne, de l'Italie, des Pays-Bas,
du Portugal, du Royaume-LTni de Grande-Bretagne et d'Irlande
du Nord et de la Suède.
Le 2.1juin 1951, dans le délai fixé pour le dépôt de son contre-

mémoire, le Gouvernement des Etats-Unis a présentéune piéce
6179 JUDGMENT OF 27 VI1152 (u.s. NATIONALS IN MOROCCO)

America filed a document entitled "Preliminary Objection". The
proceedings on the merits were thereby suspended. The Preliminary
Objection was communicated to theStates entitled to appear before
the Court as well as to the States which had been notified of the
deposit of the Application pursuant to Article 63 of the Statute.
The proceedings thus instituted by the Preliminary Objection were
terininated following a declaration by the Government of the United
States thatit was prepared to withdraw its objection, having regard
to the explanations and clarifications given on behalf of the French
Government, and followinga declaration by the French Government
that it did not oppose the withdrawal. An Order of October 31st,
1951, placed on record the discontinuance, recorded that the pro-

ceedings on the merits were resumed, and fixed new time-limits for
the filing of the Counter-Memorial, Reply and Rejoinder.
The Counter-Memorial and Reply were filed within the time-
limits thus fixed. As regard the Rejoinder, the time-limit was
extended at the request of the Government of the United States
from April 11th to April 18th, 1952, by Order of March yst, 1952.
On April18th, 1952, the Rejoinder was filed and the case was ready
for hearing. Public hearings were held on July 15th, 16th, 17th,
z~st, 22nd, 23rd, 24th and 26th, 1952, during which the Court
heard : MM. André Gros and Paul Reuter on behalf of the French
Government ;and Mr. Adrian S. Fisher and Mr. Joseph M. Sweeney
on behalf of the Government of the United States.
At the conclusion of the argument before the Court, the Subn~is-

sions of the Parties were presented as follows :

On behalf of the French Government :
"May it please the Court,

To adjudge and declare
That the privileges of the nationals of the United States of
America in Morocco are only those which result from the text of
Articles20 and 21 of the Treaty of September 16th, 1836,and that
since the most-favoured-nation clause contained in Article 24 of
the said treaty can no longer beinvoked by the United States in the
present state of the international obligations of the Shereefian
Empire, there is nothing to justify the granting to the nationals of
the United States of preferential treatment whichwouldbe contrary
to the provisions of the treatie;
That the Government of the United States of America is not
to its nationals in Moroccorequires its express consent;egulations

That the nationals of the United States of America in Morocco
are subject to the laws and regulations in force in the Shereefian
Empire and in particuIar the regulation of December 3oth, 1948,
on imports not involving an allocation of currency, without the
prior consent of the United States Government ;intitulée ((Exception préliminaire ». La procédure sur le fond a
été de ce fait suspendue. L'exception préliminaire a étécom-
muniquée au? Etats admis à ester en justice devant la Cour
comme aux Etats qui avaient étéavertis du dépôt de la requête
par application de l'article 63 du Statut. La procédure sur l'ex-
ception préliminaire alors engagée a pris fin après que le Gouver-
nement des États-unis se fut déclarédisposé à retirer l'exception,

eu égard aux explications et précisions données au nom du Gou-
vernement français, et que ce dernier gouvernement eut déclaré
ne pas faire opposition au retrait. Une ordonnance du 31 octobre
1951 a pris acte du désistement, constaté la reprise de la procédure
sur le fond et fixé de nouveau délais pour le dépôt du contre-
mémoire, de la réplique et de la duplique.

Le contre-mémoire et la réplique ont étédéposésdans les délais
ainsi fixés. Quant à la duplique, le délai pour sa présentation
a, par ordonnance du 31 mars 1952 rendue à la demande du
Gouvernement des Etats-Unis, étéprorogé du II au 18 avril
1952. La duplique ayant étédeposéeà cette dernière date, l'affaire

s'est trouvée en état. Des audiences publiques ont été tenues
les 15, 16,17, 21, 22, 23, 24 et 26 juillet1952, au cours desquelles
ont étéentendus : pour le Gouvernement français, MM. André
Gros et Paul Reuter ; pour le Gouvernement des États-unis,
MM. Adrian S. Fisher et Joseph M. Sweeney.
A l'issue des plaidoiries, les conclusions des Parties ont été
présentées comme suit :

Au nom du Gouvernement français :

« Plaiseà la Cour,
Dire et juger :
Que les privilèges des ressortissants des États-unis d'Amérique
au Maroc sont uniquement ceux qui résultent du texte des articles
20 et 21du traité du 16septembre 1836 et que, la clause dela nation
la plus favoriséecontenue dans l'articl24 dudit traité ne pouvant
plus êtreinvoquéepar les Etats-Unis dans l'étatactuel des engage-
ments internationaux de l'Empire chérifien, rien nejustifie pour
les ressortissants des Etats-Unis un régimepréférentielqui serait
contraire aux dispositions des trait;s

Que le Gouvernement des États-unis d'Amérique n'estpas en
droit de prétendre que l'applicationà ses ressortissants au Maroc
de toutes législationset réglementations dépend deson consente-
ment exprès ;
Que les ressortissants des États-unis d'Amériqueau Maroc sont
soumis aux dispositions législatives et réglementaires mises en
vigueur dans l'Empire chérifien,notamment en ce qui concerne
la réglementation du 30 décembre1948sur les importations, sans
devises, sans que l'accord préalabledu Gouvernement des Etats-
Unis soit nécessaire;180 JUDGMENT OF 27 VIII 52 (U.Ç.NATIONALS IN MOROCCO)
That the decree of December 3oth, 1948, concerning the regula-
tion of imports not involving an allocation of currency, is in confor-

mity with the economic system which is applicable to Morocco,
according to the conventions which bind France and the United
States ;
That Article 95 of the Act of Algeciras defines value for
customs piirposes as the value of the merchandise at the time and
at the place where it is presented for customs clearance ;
That no treaty has conferred on the United States fiscal immunity
for its nationals in Morocco, either directly or through the effect of
the most-favoured-nation clause ;
That the laws and regulations on fiscal matters which have been
put into force in the Shereefian Empireare applicable to the nationals
of the United States without the prior consent of the Government
of the United States ;
That, consequently, consumption taxes provided by the Dahir of
February 28th, 1948, have been legally collected from the nationals
of the United States,and should not be refunded to them."

On behalf of the Government ofthe United States :

"1. The Submissions and Conclusions presented 1)y the French
Government in this case should be rejected on the ground that thc
French Government has failed to maintain the burden of proof
which it assumed as party plaintiff and by reason of the nature
of the legal issues involved.
2. The treaty rights of the United States in Morocco forbid
Morocco to impose prohibitions on American imports, Save thosc
specificd by the treaties, and these rights are still in full force and
effect.
The Dahir of December 30, 1948, imposing a prohibition on
imports is in direct contraventionof the treaty rights of the United
States forbidding prohibitions on American imports and the French
Government by applying the Dahir of December 30, 1948, to
American nationals, without the consent of the United States, from
December 31, 1948, to May II, 1949, violated the treaty rights
of the United Statesand was guilty of a breach of international law.

American nationals can not legally be submitted to the Dahir of
December 30, 1948,without the prior consent of the United States
which operates to waive temporarily its treaty rights.

3. The jurisdiction conferred upon the United States by the
Treaties of 1787 and 1836 was jurisdiction, civil and criminal, in
al1cases arising between American citizens.
In addition, the United States acquired in Morocco jurisdiction
in al1 cases in which an American citizen or protégéwas defendant
through the effect of the most-favoiired-nation clause and through
custom and usage.
Such jurisdiction was not affectecl by the surrender by Great
Britain in 1937 of its rights of jurisdiction in the French Zone of
Morocco. Que l'arrêtédu 30 décembre 1948 portant réglementation des
importations sans devises est conforme au régime économique
applicable au Maroc selon les conventions qui lient la France et les
Etats-Unis ;

Que l'article '95de l'acte d'Algésiras définitla valeur en douane
comme la valeur de la marchandise au moment et au lieu où elle
est présentéepour les opérations de-dédouanement ;
Qu'aucun traité n'a conféréaux Etats-Unis une immunité fiscalc
pour leurs ressortissantsau Maroc, ni directement, ni par le jeu de
la clause de la nation la plus favorisée ;
Que les lois et règlements en matière fiscale mis en vigueur,dans
l'Empire chérifien sont applicables aux ressortissants des Etats-
Unis sans que l'accord préalable du Goizvernement des Etats-Unis
soit nécessaire ;
Que les taxes de consommation établies par le dahir du 28 ftvrier
1948 ont donc étélégalement perçues sur les ressortissants des Etats-
Unis et qu'il n'y a pas lieu à remboursement. ))

Au nom du Gouvernement des États-~nis :

« 1. Les thèses et conclusions soumises en l'espèce par le Gouver-
nement de la République française doivent êtrerejetées, motif pris
du fait que ce gouvernement qui, en sa qualité de demandeur et par
la nature mêmedes questions juridiques en cause, avait assumé le
fardeau de la preuve, n'est pas parvenu à faire cette preuve.
2. Les droits conventionnels des Etats-Unis au Maroc interdisent
au Maroc d'imposer aux importations d'Amérique d'autres prohi-
bitions que celles que prévoient les traités ; ces droits continuent
d'êtreen vigueur et de déployer tous leurs effets.
Le dahir du 3,odécembre 1948, en imposant une prohibition sur
les importations, contrevient directement aux droits conventionnels
des Etats-Unis par lesquels toute prohibition des importations
d'Amérique est interdite ; en appliquant aux ressortissants améri-
cains, sans l'assentiment des Etats-Unis, du 31 décembre 1948 au
II mai 1949, le dahir du 30 décembre 1948, le Gouvernement-de la
République française a violé les droits conventionnels des Etats-
Unis et s'est rendu coupable d'un manquement au droit interna-
tional.
Sans l'assentiment préalable des États-unis valant renonciation
temporaire à leurs droits conventionnels, les ressortissants améri-
cains ne peuvent légalement se voir appliquer le dahir du 30 décem-
bre 1948.
3. La compétence judiciaire que les traités de 1787 et 1836 ont
conféréeaux Etats-Unis existait au civil et au criminel pour toutes
les affaires entre citoyens américains.

En outre, les Etats-Unis ont acquis au Maroc, par l'effet de la
clause de la nation la plus favorisée, ainsi que par la coutume et
l'usage, une compétence judiciaire pour toutes affaires où iin
citoyen ou protégé américain est défendeur.
Cette compétence judiciaire n'a pas étéaffectéepar la renonciation
faite en 1937 par la Grande-Bretagne aux droits juridictionnels
dont elle était titulaire dans la zone française du Maroc.
S Such jurisdiction has nevcr been renounced, expressly or im-
pliedly, by the United States.
4. Under the regime of extraterritorial jurisdiction now exerciscd
by the United States in Morocco, United States citizens are not
siibject, in principle, to the application of Moroccan laws.

Such laws become applicable to the United States citizens only
if they are submitted to the prior assent of the United States

Government and if this Government agrees to make theni applicable
to its citizens. The Dahir of December 30, 1948, not having been
submitted to the prior assent of the United States Government,
cannot be made applicable to United States citizens.

As a counter-claim :

I. Under Article 95 of the Act of Algeciras, the value of imports
from the United States must be determined for the purpose of
customs assessments by adding tothe purchase value of the imported
merchandise in the United States the expenses incidental to its
transportation to the custom-house in Morocco, exclusive of al1
expenses following its delivery to the custom-house, such as customs
duties and storage fees.
It is a violation of the Act of Algeciras and a breach of iriter-
national law for the customs authorities to depart from the method
of valuation so defined and to determine the value of imported
merchandise for customs purposes by relying on the value of the
imported merchandise on the local Moroccan market.
2. The treaties exempt American nationals from taxes, except as
specifically provided by the same treaties ; to collect taxes £rom
American nationals in violation of the terms of the treaties is a

breach of international law.
Such taxes can legally be collected from American nationals only
with the previous consent of the United States which operates to
waive temporarily its treaty right, and from the date upon which
such consent is given, unless otherwise specified by the terms of the
conscnt.
Consumption taxes provided by the Dahir of February 28, 1948,
which were collected from American nationals up to August 15, 19.50,
the date on which the United States consented to these taxes, were
illegally collected and should be refunded to them.
3. Since Moroccan laws do not become applicable to American
citizens until they have received the prior assent of the United
States Government, the lack of assent of the United States Govern-
ment to the Dahir of February 28, 1948, rendered illegal the collec-
tion of the consumptioil taxes provided by that Dahir."

The Court willfirst deal with the dispute relating to the Decree
issued by the Resident General of the French Republic in Morocco,
dated December 3oth, 1948, concerning the regulation of imports

9 ARRÊT DU 27 VI1152 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 181

Les États-unis n'ont jamais, expressément ou implicitement,
renoncéà cette compétence.
4. Sous le régime de compétence judiciaire extraterritoriale
actuellement exercée au Maroc par les Etats-Unis, les citoyens
de ce pays ne sont pas soumis, en principe, à l'application des lois
marocaines.
Ces lois ne deviennent applicables aux citoyens des ktats-

Unis qu'après avoir étésoumises à l'assentiment préalable du
Gouvernement des Etats-Unis et que ce gouvernement en ait ap-
prouvi: l'application à ses citoyens. Le dahir du 30 décembre
1948 n'ayant pas étésoumis à l'assentiment préalable du Gouverne-
ment des Etats-Unis n'est pas applicable aux citoyens améri-
cains.

A titre de demande reconventionnelle
I. Aux termes de l'article 95 de l'acte d'Algésiras,ï1 faut déter-
miner, aux fins de1'6,valuationen douane,la valeur des importations
e,n provenance des Etats-Unis en ajoutant à la valeur d'achat aux
Etats-Unis de la marchandise importée les frais de transport
jusqu'au bureau de la douane marocaine, à l'exclusion des frais
postérieurs à la remise de la marchandise au bureau de douane, tels

que les droits de douane et frais de magasinage.
C'est une violation de l'acte d'Algésiras et un manquement au
droit international, de la part des autorités douanières, de s'écarter
de la méthode d'évaluation ainsi définie et de fixer, aux fins de
l'évaluation en douane, la valeur de la marchandise importée d'après
lavaleur de cet-te marchandise sur le marché local marocain.
2. Les traités; exemptent les ressortissants américains de toute
taxe, à l'exception de celles qu'ils prévoient expressément ; perce-
voir des taxes cles ressortissants américains en violation des dispo-
sitions des traités est un manquement au droit international.
Ces taxes ne peuvent en droit être recouvrées sur les ressor-
tissants américains qu'avec l'assentiment préalable des Etats-
Unis valant renonciation temporaire à leur droit conventionnel, et

à compter de la date de cet assentiment, sauf disposition contraire
contenue dans l'acte d'assentiment.
Les taxes de consommation, fixéespar le dahir du 28 février 1948
et qui ont étérecouvrées sur des,ressortissants américains jusqu'au
15 août 1950, date à laquelle les Etats-Unis ont consenti à ces taxes,
ont étéperçues illégalement et doivent leur êtreremboursées.
3. Attendu que les lois marocaines ne peuvent s'appliquer aux
citoyens américains avant d'avoir reçu l'assentiment préalable
du Gouvernement des Etats-Unis, le défaut d'assentiment du
Gouvernement cies Etats-Unis ail dahir du 28 février 1948 a donné
un caractère illégal au recouvrement des taxes de consommation
établies par ce dahir.))

La Cour examinera tout d'abord la contestation qui porte sur
l'arrêtédu Résident général de la République française au Maroc,
en date du 30 décembre 1948, relatif au contrôle des importations

9into the French Zone of Morocco. The following Submissions are
presented :

On behalf of the Government of France :

"That the Decree of December 3oth, 1948, coilcerning the regu-
lation of imports not involving an allocation of currency, is in
conformity with the economic system which is applicable to
I\Iorocco, according to the conventions which bind France and
the United States."

On behalf of the Government of the United States of America:

"The treaty rights of the United States in Moroccoforbid Morocco
to impose prohibitions on American imports, save those specified
by thc treaties, and these rights are still in full force and effect.

The Dahir of Decembcr 30, 1945, imposing a prohibition or1
irnports is in direct contravention of the treaty rights of the United
States forbidding prohibitions on American imports ...."

The French Government contends that the Ilecree of 1)ecein-
ber 3oth, 1948, is in conformity with the treaty provisions which
are applicable to Morocco and binding on France and the United
States. This contention is disputed by the United States Govern-
ment for various reasons. The Court will first consider the clairil

that the Decree involves a discriinination in favour of France
which contravenes the treaty rights of the United States.
By a Daliir of September gtl-i,1939, His Shereefiaii Majestydccided
3s follows :

"Article I.-It is prohibited to import into the French Zone of
the Sliereefian Empire, whatcver may be the customs regulations
in force, goods other tlian gold in any form.
Article a.-Thc Director General of Communications may, how-
cver, waivc this prohibition on entry as rcgards combustible solid
minera1 rnatter and pctroleum products, antl the Director of Econo-
mic Affairs may do likewise as regards ariy other products.

Article 3.-It is left to the decision of the Resident General to
deterrnine the measures whereby the provisions hcrein contained
shall bc putinto effect."

A Residential Decree of the saine date laid down the terms of
application of the Dahir, including provisions relating to requests
for a waiver of the prohibition of imports. Article 4 provided :

"Goods of French or Algerian origin sliipped froni France or
Algeria, shall for the time being be admitted u-ithout any spccial
formalities."
Further regulations were prescribed by a Residential 1)ccrec of

September ~oth, 1939, subjecting importswithout officia1allocation
IOdans lazonefrançaise du Maroc. LesParties ont présentéles conclu-
sions suivantes :

Au nom du Gouvernement de la République française :

((Que I'arreté du 30 décembre 1948 portant réglementation des
importations sans devises est conforme au régime 6conomique
appljcable au Maroc selon les conventions qui lient la France et
les Etats-Unis. »

Au nom du Gouvernement des États-unis d'Amérique :

Les droits conventionnels des États-~ilis au Maroc interdisent
au Maroc d'imposer aux importations d'Amérique d'autres prohi-
bitions que celles que prévoient les traités ; ces droits continuent
d'êtreen vigueur et de déployer tous leurs effets.
Le dahir du 30 décembre 1948, en imposant une prohibition sur
les importations, contrevient directement aux droits convention-
nels des Etats-Unis par lesquels toute prohibition des iriiportations
d'Amérique est interdite ...))

Le Gouvernement français soutient que l'arrêté du 30 décembre
1948 est conforme aux dispositions c~nventionnelles applicables
au Maroc et liant la France et les Etats-Unis. Cette, thèse est

contestée pour divers motifs par le Gouvernement des Etats-Unis.
La Cour examinera tout d'abord la prétention selon laquelle l'arrêté
résidentiel entraînerait, en faveur de la France, une discrimination
contraire aux droits conventionnels des Etats-Unis.
Par dahir du 9 septembre 1939, Sa Majesté chérifienne a décidé

ce qui suit :
((Articlefirentier- Est prohibée l'importation en zone française
de l'Empire chérifien, sous un régime douanier qiielconque, des

marchandises autres que l'or sous toutes ses formes.
rlrticl2. - Toutefois, des dérogations à la prohibition d'entrée
peuvent êtreaut.oriséespar le directeur générai des Communica-
tions, en ce qui concerne les combustibles minéraux solides et les
produits pétroliers, et par le directeur des Affaires économiques, en
ce qui concerne tous les autres produits.

Article 3. - Sont laissées à la détermination du commissaire
Résident généraltoutes mesures d'application du présent daliir. )J

Un arrêté résidentiel de la rilême date a fixé les conditions
d'application du dahir, y compris des dispositions relatives à des
demandes de dérogation à la prohibition d'entrée. Selon l'article4 :
cA titre provisoire, sont adniises sans formalités spéciales 1c.s

rnarchandiscs originaires et cil provenance de la France ct de
l'Algérie.»
Une réglementation complémentaire a &téCdictée par iin arrêté

rcsidenticl du IO septembre 1939, qui souinet à une autorisatiori
IOof currency to special authorization. Article 7 provided in its first
paragraph :

"Commercial arrangements with France, Algeria, French Colonies,
African territories under French Mandate, and Tunisia, are not
subject to the provisions herein contained."
By a Residential Decree of March t th, 1948, a new Article 5
was added to the Decree of September gth, 1939 :

"Article 5.-Save for such exceptions as may be specifiedby the
appropriate heads of departments, the prohibition on entry shall
hereafter be generally waived as regards goods imported from any
origin or source, when import does not entai1 any financial settle-
ment between the French zone of the Shereefian Empire, France,
territory on the other part."h Union on the one part and foreign

Finally, this new Article 5 was revoked by the Decree of Deceni-
ber 3oth, 1948, which is the subject-matter of the present dispute.
After having referred to the Dahir of September gth, 1939, and to
the Decrees of that date and of March t th, 1948, the Resideiit
General of the French Republic decreed :

"Article I.-The provisions of Article 5 of the aforesaid Residen-
tial Decree of September gtli, 1939, will cease to apply as from
January rst, 1949,Savefor the exception set out in Article2 hereof.

Article 2.-Goods which are proved to have been shipped
directly to the French Zone of the Shereefian Empire before
January 15th, 1949,shall still fa11within the provisions of Article 5
of the aforesaid Residential Decree of September gth, 1939.

The effect of this Decree was to restore the import regulations
introduced in September 1939. Imports without officia1 allocation
of currency were again subjected to a system of licensing control.
But these import regulations did not apply to France or other parts
of the French Union. From France and other parts of the French
Union imports into the French zone of Morocco were free. The
Decree of December 3oth, 1948, involved consequently a discrimi-
nation in favour of France, and the Government of the United
States contends that this discrimination contravenes its treaty
rights.

It is common ground between the Parties that the characteristic
of the status of Morocco, as resulting from the Geileral Act of
Algeciras of April7th, 1906, isrespect for the three principles stated
in the Preamble of the Act, namely : "the soverejgnty and inde-
pendence of His Majesty the Sultan, the integrity of his domains,
and economic liberty without any inequality". The last-mentioned

principle of economic liberty without any inequality must, in itsspéciale les importations sans attribution officielle de devises. Le
paragraphe premier de l'article 7 énonce ce qui suit :

c(Les règlements commerciaux avec la France, l'Algérie, les
colonies françaises, les territoires africains sous mandat français et
la Tunisie ne sont pas soumis aux dispositions du présent arrêté. ))
Par arrêtérésidentiel du II mars 1948, l'arrêtédu 9 septembre

1939 a étécomp1ét:épar un nouvel article 5 :
((Article 5.- A l'exception de celles qui seront désignéespar
les chefs d'administration responsables, les marchandises importées
de toutes origines et provenances qui ne donnent lieu à aucun
règlement financier entre la zone française de l'Empire chérifien,
la France ou un territoire de l'Union française, d'une part, et
l'étranger, d'autre part, bénéficientd'une dérogation générale à la
prohibition d'entrée. ))

Enfin, ce nouvel a.rticle 5 a étéabrogé par l'arrêtédu 30 décembre
1948 qui fait l'objet du présent litige. Après s'être référéau dahir
du 9 septembre 19.39ainsi qu'aux arrêtés portant cette date et
celle du II mars 1948, le Résident généralde la République fran-
çaise a arrêtéce qui suit :
((Article 9remier. - Les dispositions de l'article 5 de l'arrêté
résidentiel susvisédu 9 septembre 1939cesseront d'êtreapplicables
à compter du rer janvier 1949, sous réserve de l'exception prévue
à l'articl2 du présent arrêté.

Article2. - Seront admises aux conditions prévues par l'article 5
de l'arrêtérésidentiel susvisédu 9 september 1939 les marchandises
que l'on justifie ;avoirétéexpédiéesdirectement pour la zone fran-
çaise de l'Empire chérifienavant le 15 janvier 1949.

Cet arrêtéa eu pour effet de rétablir la réglementation des impor-
tations introduite en septembre 1939. Les importations sans attri-
bution officielle de devises ont été à nouveau soumises à un système
de contrôle par licences. Mais cette réglementation des importations
ne s'appliquait pas à la France ni aux autres parties de l'Union
française. Les importations en zone française du Maroc provenant

de France et des autres parties de l'Union française étaient libres.
L'arrêtédu 30 décembre 1948 comporte par conséquent une discri-
mination en faveur de la France, et le Gouvernement des États-
Unis soutient que cette discrimination est contraire à ses droits
conventionnels.
Les Parties sont d'accord pour admettre que la caractéristique
du statut du Maroc:, tel qu'il résulte de l'acte générald'Algésiras
du 7 avril 1906, est le respect des trois principes énoncés dans le
préambule de l'acte, à savoir : (de la souveraineté et,dc l'indépen-
dance de Sa Majesté le Sultan, de l'intégrité de ses Etats et de la

liberté économique sans aucune inégalité ».Lc principe de la liberté
économique sans aucune inégalitémentionné en dernier doit, pourapplication to Morocco, be considered against the background of
the treaty provisions relating to trade and equality of treatment in
economic matters existing at that time.
By the Treaty of Commerce with Great Britain of December gth,
1856, as well as by Treaties with Spain of November zoth, 1861,
and with Germany of June ~st, 1890, the Sultan of Morocco gua-
ranteed certain rights in matters of trade, including imports into
Morocco. These States, together with a number of other States,
including the United States, were guaranteed equality of treatment
by virtue of most-favoured-nation clauses in their treaties with
Morocco. On the eve of the Algeciras Conference the three principles
mentioned above, including the principle of "economic liberty with-
out any inequality", were expressly accepted by France and Ger-
many in an exchange of letters of July 8th, 1905, concerning their

attitude with regard to Morocco. This principle, inits application to
Morocco,was thus already well established, when it was reaffirmed
by that Conference and inserted in the Preamble of the Act of 1906.
Considered in the light of these circumstances, it seems clear that
the principle was intended to be of a binding character and not
merely an empty phrase. This was confirmed by Article 105, where
the principle was expressly applied in relation tothe public services
in Morocco. It was also confirmed by declarations made at the
Conference by the representative of Spain, who referred to "equa-
Iity of treatment in commercial matters", as well as by the repre-
sentative of France.
The establishment of the French Protectorate over Morocco by
the Treaty of March 3oth, 1912, between France and Morocco, did
not involve any modification in this respect. In the Convention
between France and Germany of November 4th, 1911, concerning
the establishment of this Protectorate, the Government of Germany
made in Article I the reservation that "the action of France should
secure in Morocco economic equality between the nations". On the
other hand, the Government of France declared in Article 4 that it

would use its good offices with the Moroccan Government "in order
to prevent any differential treatment of the subjects of the various
Powers."
The other States on behalf of which the Act of Algeciras was
signed, with the exception of the United States, adhered later to
the Franco-German Convention of 1911, thereby again accepting
the principle of equality of treatment in economic matters in
Morocco. France endeavoured to obtain also the adherence of the
United States, and in a Note of November 3rd, 1911, from the
French Ambassador in Washington to the United States Secretary
of State, reference was made to the Franco-German Convention. It
was declared that France would use her good officeswith the Moroc-
can Government in order to prevent any differential treatment of
the subjects of the Powers. In another Note from the French
Ambassador to thc Sccretary of State, datcd November 14th, 1918,son application au Maroc, êtreenvisagé dans le cadre des disposi-
tions conventionnelles alors existantes et visant le commerce et
l'égalitéde traitement en matière économique.
Par le traité de commerce du 9 décembre 1856 avec la Grande-
Bretagne, comme par les traités du 20 novembre 1861avecl'Espagne,
et du rer juin 1890 avec l'Allemagne, le Sultan du Maroc a garanti

certains droits en matière de commerce, y compris les importations
au Maroc. Ces Etats, avec certains autres parmi lesquels les Etats-
Unis, ont reçu la garantie de l'égalitéde traitement par l'effet des
clauses de la nation la plus favorisée figurant dans leurs traités
avec le Maroc. A ].a veille de la conférence d'Algésiras, les trois
principes mentionnés plus haut, y compris celui de ((la liberté
économique sans aucune inégalité n, ont étéexpressément acceptés
par la France et l'Allemagne, dans un échange de lettres du 8 juillet
1905 relatives à leur attitude à l'égarddu Maroc. Ainsi, ce principe,
pour son application au Maroc, était déjà bien établi quand la
conférence l'a réaffirméet l'a insérédans le préambule de l'acte de
1906. Vu à la lumière des circonstances précitées, le principe appa-
raît clairement comme ayant été destiné à avoir le caractère d'une
obligation, et non à rester seulement formule vide. L'article 105
le confirme, lorsqu'il applique expressément ce principe en ce qui

concerne les services publics au Maroc. On en trouve également
la confirmation daris les déclarations faites à .la conférence par le
représentant de l'Espagne, qui mentionne 1'(( égalité detraitement
en matière commerciale n,ainsi que par le représentant de la France.
L'établissement du protectorat français sur le Maroc par le
traité du 30 mars 1912 entre la France et le Maroc n'a pas entraîné
de modification à c:et égard. Dans la convention du 4 novembre
1911 entre la France et l'Allemagne, concernant l'établissement
de ce protectorat, le Gouvernement allemand a énoncé,dans l'ar-
ticle premier, laréscrve que (l'action de la France sauvegardera au
Maroc l'égalitééconomique entre les nations ».D'autre part, le Gou-
vernement de la Rkpublique française a déclaréà l'article 4 qu'il
s'emploierait auprès. du Gouvernement marocain (afin d'empêcher
tout traitement différentiel entre les ressortissants des différentes

Puissances N.
Les autres États au nom desquels a étésigné l'acte d'Algésiras
ont, à l'exception des Etats-Unis, adhéré par la suite à la convcn-
tion franco-allemande de 1911, acceptant ainsi à nouveau le prin-
cipe de l'égalitéde traitement en matière économique au Maroc.
Le France s'est efforcéed'obtenir également l'adhésion des Etats-
Unis, et, dans une note du 3 novembre 1911 de l'?mbassadeur de
France à Washington au secrétaire dJEtat des Etats-Unis, une
référenceest faite à la convention franco-allemande. Il y est dit
que la France s'emploierait auprès du Gouvernement marocain
afin d'empêcher tout traitement différentiel des ressortissants des
Puissances. Dans une autre note + 14 novembre 1918, de 1'ainl)ns-
sadeur de Frarice au sccrétairc d'Etat, il est déclaréque lc béiii.ficeit was declared that the benefit of commercial equality in Morocco
results, not only fron the most-favoured-nation clause, but also
from the clause of economic equality which is inserted in the Act of
Algeciras and reproduced in the Franco-German Convention of 191I.
These various facts show that coinmercial or economic equality
in Morocco was assured to the United States, not only by Morocco,
but also by France asthe protecting State. It inaybe asked whether
France, in spite of her position as the protector of Morocco, is
herself subject to this principle of equality and can not enjoy com-
mercial or economic privileges which are not equally enjoyed by the
United States.
Itis not disputed by the French Government that Morocco, even
under the Protectorate, has retained its personality as a State in

international law. The rights of France in Morocco are defined by
the Protectorate Treaty of 1912. In economic matters France is
accorded no privileged position in R4orocco.Such a privileged posi-
tion would not be compatible with the principle of economic liberty
without any inequality, on which the Act of Algeciras is based. This
was confirmed by the above-mentioned Note from the French
Ambassador in Washington of November 14th, 1918, where it is
stated that, by virtue of the clause of economic equality inserted in
the Act of Algeciras, other States have preserved their right to
enjoy such equality, "mêmevis-à-vis de la Puissance protectrice",
and that the United States can, therefore, not only recognize French
courts in Morocco, but also give up, in the French Zone, the enjoy-
ment of al1privileges following from capitulations,without thereby
losing this advantage.
It follows from the above-mentioned considerations that the pro-
visions of the Decree of December 3oth, 1948, contravene the rights
which the United States has acquired under the Act of Algeciras,
because they discriminate between imports from France and other
parts of the French Union, on the one hand, and imports from the
United States on the other. France was exempted from control of
imports without allocation of currency, while the United States was
subjected to such control. This differential treatment was not com-

patible with the Act of Algeciras, by virtue of which the United
States can claim to be treated as favourably as France, as far as
economic matters in Morocco are concerned.

This conclusion can also be derived from the Treaty between the
United States and Morocco of September r6th, 1836, Article 24,
where it is "declared that whatever indulgence, in trade or other-
wise, shall be grantkd to any of the Christian Powers, the citizens
of the United States shall be equally entitled to them". Having
regard to the conclusion already arrived at on the basis of the Act
of Algeciras, the Court will limit itself to stating as its opinion that
the United States, by virtue of this most-favoured-nation clause,de l'égalité commerciale au Maroc ne résulte pas seulement de
la clause de la nation la plus favorisée mais aussi de la clause
d'égalitééconomique inscrite à l'acte d'Algésiras et reprise dans
la convention franco-allemande de 1911.
Ces divers faits démontrent que l'égalité commerciale ou écono-

mique au Maroc était assurée aux Etats-linis, non seulement
par le Maroc, mais encore par la France en tant que Puissance
protectrice. On peut se demander si la France, étant donné sa
position de protectrice du Maroc, échappe à ce principe d'égalité
et peut jouir de privilèges qommerciaux ou économiques dont ne
jouissent pas également les Etats-Unis.
Le Gouvernement français ne conteste pas que le Maroc, même
sous le protectorat, a conservé sa personnalité d'Etat en droit
international. Les droits de la France au Maroc sont définis par
le traité de protectorat de 1912. Dans le domaine économique,
une situation privil4giéen'a pas étéaccordée à la France au Maroc.
Une telle situation privilégiée ne serait pas compatible avec le
principe de la liberté économique sans aucune inégalitésur lequel
se fonde l'acte d'Algésiras. La note du 14 novembre 1918 de l'am-
bassadeur de France à Washington, déjà.mentionnée plus haut,
le confirme lorsqu'elle énonce qu'en vertu de la clause d'égalité

économique inscrite à l'acte d'Algésiras, lesautres Etats ont gardé
l'avantage de cette kgalité,((mêmevis-à-vis de la Puissance protec-
trice)),et que, par conséquent, les Etats-Unis peuvent non seule-
ment reconnaître les tribunaux français au Maroc, mais renoncer,
dans la zone française, au bénéficede tous les privilèges issus des
capitulations, sans perdre cet avantage.
Des considérations qui précèdent, il résulte que les dispositions
de 1:arrêtédu 30 décembre 1948 sont contraires aux droits que
les Etats-Unis ont acquis en vertu de l'acte d'Algésiras, car elles
font une discrimination entre, d'une part, les importations prove-
nant de la France et des autres parties de 1'Uniop française, et
d'autre part les importations en provenance des Etats-Unis. La
France est dispensée du contrôle des importations sans allocation
de devises, alors que les Etats-Unis sont soumis à ce contrôle.
Ce traitement différe~ltielest inconipatihle avec l'acte d'Algésiras,

en vertu duquel les Etats-Unis peuvent revendiquer le droit d'être
traités aussi favorablement que la France pour autant qu'il s'agit
de questions économiques au Maroc.
Cette conclusion peut également se déduire du traité du 16 sep-
tembre 1836 entre les Etats-Unis et le Maroc, dont l'article 24
porte ((que toute faveur en matière de commerce ou autre qui
viendrait à être accordée à une autre Puissance chrétienne s'ap-
pliquera également aux citoyens des Etats-Unis ». Eu égard ii
la conclusion à laquelle elle est déjà arrivée sur la base de l'acte
d'Algésiras, la Cour se bornera à déclarer que, dans son opinion,
les Etats-Unis ont lc droit, en vertu dc cette clause de la nation la186 JUDGMENT OF 27 VI1152 (u.s. NATIONALS IN MOROCCO)

has the right to object to any discrimination in favour of France,
in the matter of imports into the French Zone of Morocco.
The Government of France has submitted various contentions
purporting to demonstrate the legality of exchange control. The
Court does not consider it necessary to pronounce upon these conten-
tions. Even assuming the legality of exchange control, the fact

nevertheless remains that the measures applied by virtue of the
Decree of December 3oth, 1948, have involved a discrimination in
favour of imports from France and other parts of the French Union.
This discrimination can not be justified by considerations relating
to exchange control.
For these reasons the Court has arrived at the conclusion that
the French Submission relating to the Decree of December 3oth,
1948,must be rejected. It therefore becomes unnecessary to consider
whether this Submission might be rejected also for other reasons
invoked by the Government of the United States. In these circum-
stances, the Court is not called upon to consider and decide the
general question of the extent of the control over importation that
may be exercised by the Moroccan authorities.
*
* *
The Court will now consider the extent of the consular jurisdic-
tion of the United States of America in the French Zone of Morocco.
The French Submission in this regard reads as follows :

"That the privileges of the nationals of the United States of
America in Morocco are only those which result from the text of
Articles20 and 21 of the Treaty of September 16th, 1836, and that
since the most-favoured-nation clause contained in Article 24 of the
said Treaty can no longer be invoked by the United States in the
present state of the international obligations of the Shereefian
Empire, there is nothing to justify the granting to the nationals of
the United States of preferential treatment which would be contrary
to the provisions of the treaties."
The United States Submission concerning consular jurisdiction
reads as follows :

"3. The jurisdiction conferred upon the United States by the
al1cases arising between American citizens. civil and criminal, in
In addition, the United States acquired in Morocco jurisdiction
in al1cases in which an American citizen or protégéwas defendant
through the effect of the most-favoured-nation clause and through
custom and usage.
Such jurisdiction was not affected by the surrender by Great
Britain in 1937 of its rights of jurisdiction in the French Zoneof
Morocco.
Siichjiirisdiction has never lxcn renounced, expresslyorimpliedly,
114t'liLïriit Stttt'."
It is comrnon ground between the Parties that the prescnt (Iisputc
is limited to the French Zone of Morocco. It isan this groiind that ARRÊT DU 27 VIIi 52 (RESSORTISSANTS DES 6.-U. AU BIAROC) 186

plus favorisée, de s'opposer à toute discrimination en faveur de la
France en matière d'importations dans la zone française du Maroc.
Le Gouvernement français a présenté divers arguments dont le
but est de démontrer que le contrôle des changes est licite. La
Cour ne croit pas nécessaire de se prononcer sur ces arguments.
Mêmeen admettant la légalité du contrôle des changes, le fait
reste cependant que les mesures prises en application de l'arrêté
du 30 décembre 11948ont entraîné une discrimination en faveur

des importations provenant de France et des autres parties de
I'vnion française. Cette discrimination ne peut se justifier par
des considérations relatives au contrôle des changes.
C'est pourquoi la Cour en vient à estimer que la conclusion
française relative ÉLl'arrêtédu 30 décembre 1948 doit êtrerejetée.
Il est donc inutile d'examiner si cette conclusion pourrait être
rejetée également pour les autres motifs invoqués par le Gouver-
nement des Etats-Unis. Dans ces circonstances, la Cour n'est
pas appe1i.e à examiner et à trancher la question générale de
l'étendue du contrcile que les autorités marocaines peuvent exercer
sur les importations.
*
*
La Cour examinera maintenant l'étendue de la juridiction
consulaire des Etals-Cnis dans la zone française du Maroc.
La conclusion du Gouvernement français sur ce point est la
suivante :

<Que les privilèges desressortissants des États-unis d'Amérique
au Marocsont uniqiiement ceux qui résultent du texte des articl-s20
et21 du trait6 du 16 septembre 1836et que, la clause de la nation la
pliis favoriséecontenue dans l'article 24 dudit traité ne pouvant
pliis êtreinvoqi1i.epar les Etats-Unis dans l'étatactuel des engage-
ments internationaux ,de l'Empire chérifien, rien ne justifie pour
Ics ressortissants des Etats-Unis un régime préférentiel qui serait
contrairc aux c1isy)ositiodes traites.))

Idaconclusion du Gouvernement des États-unis sur la juridiction
consulaire est la siiivante :
1'3.La compétence jiidiciairc que les traités de 1787 et 1836
ont 'corif6réeaux Etats-Unis existait au civil rt ail criminel pur
toiites les affaires-entre citoyens américains.
En oiitre, les Etats-Unis ont acquis aii Maroc, par l'effet de la
clause da la nation la plus favorisée, ainsique par la coutume et
l'usage, une compétencejudiciaire pour toutes affaires où un citoyen
oii protégé américaincst défendeur.
Cette compbtcnce judiciaire n'a pas étéaffectéepar la renonciation
faite en 1937 par la Grande-Bretagne aux droits jiiridictionnels
dont clicbtait titulaire dans la zone française du Maroc.
Lcs J3tats-üriis n'ont jamais, exlircss6ment oii iinplicitcmeiit,
rcnonc6 à cctte compétericc. 1)

11 n'est pas contest6 entre Ics Parties quc le présent litige est
limité à la zone française dii Maroc. C'cst sur cc tcrrain qu'il ait has been argued. The Court cannot, therefore, pronounce upon
the legal situation in other parts of Morocco.
In order to consider the extent of the rights of the United States
relating to consular jurisdiction, it has been necessary to examine

three groiips of treaties.
The first group includes the bilateral treaties of Morocco with
France, the Netherlands, Great Britain, Denmark, Spain, the
United States, Sardinia, Austria, Belgium and Germany, which
cover the period from 1631 to 1892.

Thesc treaties, which were largely concerned with commerce,
including the rights and privileges of foreign traders in Morocco,
dealt with the question of consular jurisdiction in three different
ways :

(1) Certain of the treaties included specific and comprehensive
grants of rights of consular jurisdiction to the Powers
concerned, e.g., the Treaties with Great Britain of 1856 and
with Spain of 1799 and 1861.
(2) Certain of the treaties made strictly limited grants of privi-
leges with regard to consular jurisdiction, e.g., the Treaties
with the United States of 1787 and 1836.
(3) There were other treaties, which did not define in specific
terms the treaty rights granted by Morocco, but, instead,
granted to the foreign nations through the device of most-
favoured-nation clauses, the advantages and privileges
already granted, or to be granted, to other nations.

There is a common element to be found in the most-favoured-
nation clauses which have brought about and maintained a situa-
tion in which there could be no discrimination as between any of
the Powers in Morocco, regardless of specific grants of treaty rights.
When the most extensive privileges as regards consularjurisdiction
were granted by Morocco to Great Britain in 1856 and to Spain in
1861, these enured automatically and immediately to the benefit of
the other Powers by virtue of the operation of the most-favoured-
nation clauses.
The second group consisted of multilateral treaties, the Madrid
Convention of 1880 and the Act of Algeciras of 1906. The method
of relying on individual action by interested Powers, equalized by
the operation of the most-favoured-nation clauses, had led to abuse
and it had become necessary not merely to ensure economic liberty
without discrimination, but also to impose an element of restraint
upon the Powers and to take steps to render possible the develop-
ment of Morocco into a modern State. Accordingly, the rights of
protection were restricted, and some of the limitations on the powers

of the Siiltan as regards foreigners, which had resulted frorp the
provisions of the earlier bilateral treaties,were abated. The possi-étéplaidé. Par coriséquent, la Cour ne saurait statuer sur la situa-
tion juridique en d'autres parties du Maroc.,
Pour examiner l'étendue des droits des Etats-Unis relatifs à
la juridiction consulaire, il est nécessaire de prendre en considé-
ration trois groupes de traités.
Le premier groupe comprend les traités bilatéraux conclus par
le Maroc avec la France, les Pays-Bas, la Grande-Bretagne, le
Danemark, l'Espagne, les États-unis, la Sardaigne, l'Autriche, la
Belgique et lJAllernagne et qui s'étendent sur la période de 1631
à 1892.
Ces traités, qui se rapportaient principalement au commerce,

y compris les droits et privilèges des négociants étrangers au
Maroc, traitaient (de trois manières différentes la question de la
juridiction consulaire :
1) Certains comportaient l'octroi exprès aux Puissances inté-
ressées de droits étendus en matière de juridiction consulaire ;
par exemple, les traités de 1856 avec la Grande-Bretagne et
de 1799 et de 1861 avec l'Espagne ;

2) D'autres comportaient l'octroi de privilèges strictement
limités en matière de juridiction consulaire ; par exemple,
les traités de 1787 et de 1836 avec les Etats-Unis ;
3) D'autres encore ne définissaient pas en termes exprès les
droits converitionnels accordés par le Maroc, mais, au lieu
de cela, octroyaient aux nations étrangères, par le moyen
cies clauses de la nation la plus favorisée, les avantages et
privilèges déjà accordés ou qui seraient accordés à d'autres
nations.

On trouve un élément commun dans les clauses de la nation
la plus favorisée qui ont amen6 et maintenu une situation où il
ne pouvait y avoir de discrimination entre aucune des Puissances
au Maroc, sans égard à l'octroi,à titre particulier, de droits conven-
tionnels. Lorsque les privilèges les plus étendus en matière de
juridiction consulaire furent accordés par le Maroc à la Grande-
Bretagne en 1856, et à l'Espagne en 1861, ils s'étendirent auto-
matiquement et immédiatement aux autres Puissances par l'effet
des clauses de la nation la pli~s favorisée.
Le second groupe comprend des traités multilatéraux, la
convention de Madrid de 1880 et l'acte d'Algésiras de 1906. La
méthode consistant à s'en remettre à l'action individuelle des

Puissances intéressées, nivelée par l'effet des clauses de la nation
la plus favorisée, avait donné lieu à des abus, et il était devenu
nécessaire, non seulement d'assurer la liberté économique sans
discrimination, mais aussi d'imposer aux Puissances un élément
de modération et de prendre des mesures permettant au Maroc
de se transformer en un Etat moderne. En conséquence, les droits
de protection furent restreints, et quelques-unes des limitations
qui avaient été apportées aux pouvoirs du sultan à l'égard des188 JUDGMENT OF 27 VI11 52 (u.s. NATIONALS IN IVIOKOCCO)

bility of abuse in the exercise by Morocco of the powers thus
extended, \vas taken care of by reserving an element of supervision
and control in the Diplomatic Body at Tangier.

The third group of treaties concerned the establishment of the
Protectorate. It included the agreements whichpreceded the assump-
tion by France of a protectorate over Morocco, and the Treaty of
Fez of 1912. Under thisTreaty, Morocco remained a sovereign State

but it made an arrangement of a contractual character whereby
France undertook to exercise certain sovereign powers in the name
and on behalf of Morocco, and, in principle, al1of the international
relations of Morocco. France, in the exercise of this function, is
bound not only by the provisions of the Treaty of Fez, but also by
al1treaty obligations to which Morocco had been subject before the
Protectorate and which have not since been terminated or sus-
pended by arrangement with the interested States.

The establishment of the Protectorate, and the organization of
the tribunals of the Protectorate which guaranteed judicial equality
to foreigners, brought about a situation essentially different from
that which had led to the establishment of consular jurisdiction

under the earlier treaties. Accordi~igly,France initiated negotiations
designed to bring about the renunciation of the regi~neof capitula-
tions by the Powers exercising consular jurisdiction in the French
Zone. In the case of al1the Powers except the United States, these
negotiations led to a renunciation of capitulatory rights and privi-
leges which, in the case of Great Britain, was embodied in the
Convention of July 29th, 1937. In the case of the United States,
there have been negotiations throughout which the United States
had reserved its treaty rights.

The French Submission is based upon the Treaty between the
United States and Morocco of September 16th, 1836, and it is com-

mon ground between the Parties that the United States is entitled
to exercise consular jurisdiction in the case of disputes arising
between its citizens or. protégés.There is therefore no doubt as to
the existence of consular jurisdiction in this case. The only question
to be decided is the extent of that jurisdiction in the year 1950,
when the Application was filed.

The first point raised by the Submissions relates to the scope of
the jiirisdictionalclauscs of the Treaty of 1836,which read as follows:

"Article30.-If any of the citizens of the United States, or any
persons undcr tlieir protection, shall have any dispute with each
16 ARRÊT DU 27 VIII 52 (RESSORTISSANTS DES É.-U. AU MAROC) 188

étrangers par suite des dispositions des traités bilatéraux anté-
rieurs furent supprimées. On prit soin de prévenir les possibilités
d'un abus de la part du Maroc dans l'exercice des pouvoirs ainsi
accrus en réservant au Corps diplomatique à Tanger certaines
attributions de surveillance et de contrôle.
Le troisième groupe de traités concerne l'établissement du

protectorat. Il comprend les accords qui précédèrent l'établisse-
ment par la France d'un protectorat sur le Maroc, ainsi que le
traifé de Fez de 1912. En vertu de ce traité, le Maroc demeurait
un Etat souverain, mais il concluait un accord de caractère contrac-
tuel par lequel la France s'engageait à exercer certains pouvoirs
souverains au noni et pour le compte di1 Maroc, et à se charger,
en principe, de toutes les relations internationales du Maroc.
Dans l'exercice de cette fonction, la France est liée non seulement
par les dispositions du traité de Fez, mais également par toutes
les obligations conventionnelles auxquelles le Maroc avait été
soumis avant le protectorat et qui, depuis lors, n'?nt pas pris fin
ou n'ont pas étésuspendues par accord avec les Etats intéressés.

1,'établissement du protectorat et l'organisation des tribunaux
du protectorat garantissant aux étrangers l'égalité judiciaire
amenèrent une situation essentiellement différente de celle qui
avait conduit à l'établissement de la juridiction consulaire en
vertu des traités antérieurs. En conséquence, la France a entamé
des négociations el1 vue d'obtenir des Puissances exerçant la juri-
diction consulaire dans la zone française qu'elles renoncent au
ré"ime des canituliitions. En ce aui concerne toutes les Puissances.
à l'exceptionldes États-unis, cés négociations aboutirent à uni
renonciation aux droits et privilèges capitulaires, renonciation
qui, pour la Grande-Bretagne, était cpntenue dans la convention
du 29 juillet 1937. Dans le cas des Etats-Unis, des négociations

eurent lieu au cours desquelles les Etats-Unis ont réservé leurs
droits conventionriels.
La conclusion di! Gouvernement français est fondée sur le traité
conclu entre les fStats-Unis et le Maroc, le 16 septembre 1836,
et les Parties sont d'accord pour admettre que les Etats-Unis ont
le droit d'exercer une juridiction consulaire en matière de diffé-
rends entre leurs citoyens ou protégés. Il n'y a donc pas de doute
sur l'existence, dans ce cas, d'une juridiction consulaire. La seule
question à trancher est celle de l'étendue de cette juridiction en
1950, date du dépôt de la requête.

Le premier point soulevé par les conclusions vise la portée des
dispositions juridictionnelles du traité de 1836, lesquelles ont la
teneur suivante :

((Articl20. -- Si des citoyens ou protégésdes États-unis ont
cntrc eux 111~diff~rcntl,lcconsul statuera cntre les partics ;et other, the Consul shall decide between the parties ; and whenever
the Consul shall require any aid, or assistance from Ourgovernment,
to enforce his decisions,it shall be immediatel~ g-anted to him.
Article21.-If a citizen of the United States should kill or wound
a Moor, or, on the contrary, if a Moor shall kill or wound a citizen
of the United States, the law of the country shall take place, and
equal justice shall be rendered, the Consul assisting at the trial ;
and if any delinquent shall make his escape, the Consul shall not
be answerable for him in any manner whatever."

It is argued that Article 20 should be construed as givingconsular
jurisdiction over al1 disputes, civil and criminal, between United
States citizens and protégés.France, on the other hand, contends
that the word "dispute" is limited to civil cases. It has been argued
that this word in its ordinary and natural sense would be confined
to civil disputes, andthat crimes are offences against theStateand
not disputes between private individuals.

TheTreaty of 1836 replaced an earlier treaty between the United

States and Morocco which was concluded in 1787. The two treaties
were substantially identical in terms and Articles 20 and 21 arethe
same inboth. Accordingly, in construing the provisions of Article 20
-and, in particular, the expression "shall have any dispute with
each otherJ'-it is necessary to take irito account the meaning of
the word "disputeJJ at the times when the two treaties were con-
cluded. For this purpose it is possible to look at -theway in which the
word "dispute" or its French counterpart was used in the different
treaties concluded by Morocco : e.g., with France in 1631 and 1682,
with Great Britain in 1721, 1750, 1751, 1760 and 1801. It is clear
that in these instances the word was used to cover both civil and
criminal disputes.

It is also necessary to take into account that, at the times of
these two treaties, the clear-ciit distinction between civil and
criminal matters had not yet heen developed in Morocco.
Accordingly, it is necessary to construe the word "dispute", as
used in Article 20, as referring both to civil disputes and to criminal
disputes, in so far as they relate to breaches of the criminal law
committed by a United States citizen or protégéupon another
'CJnitedStates citizen or protégé.

The second point arises out of the United States Submission that
consular jurisdiction was acquired "in al1cases in which an American

citizen or protégéwas defendant through the effect of the most-
favoured-nation clause and through custom and usage" and that
such jurisdiction was not affected by the surrender by Great Britain
in 1937 of its rights of jurisrlictioil in the French Zone and has never
been renounced expressly or impliedly by the United States. chaque fois que, pour l'exécutionde ses décisions,le consul deman-
dera l'aide ou. l'assistance de notre gouvernement, celles-ci lui
seront immédiatement fournies.
Article 21. -- Si un citoyen des États-Unis tue ou blesseun Maure
ou si, àl'inverse,un Maure tue ou blesse un citoyen des Etats-Unis,
la loi du pays s'appliquera et justice égalesera rendue, le consul
assistant au procès ; au cas où un délinquant s'échapperait, le
consul n'en sera responsable en aucune manière. »

11est soutenu que l'article 20 doit être interprétécomine confé-
rant une juridiction consulaire dans tous les différends, civils ou

criminels, s'élevarit entre citoyens et protégésdes Etats-Unis. De
son côté, le Gouvernement français soutient que le terme (diffé-
rend ))est limité aux affaires civiles. On fait valoir que ce terme,
dans son sens ord:inaire et naturel, est limité aux différends d'ordre
civil, les crimes étant des fautes contre l'gtat et non des différends
entre personnes privées.

Le traité de 1836 a remplacé un traité antérieur conclu en 1787
entre les Etats-U:nis et le Maroc. Les deux traités ont dans l'ensem-
ble une rédaction identique et les articles 20 et 21 sont les mêmes
dans les deux. Par conséquent, il est nécessaire, en interprétant
les dispositions dc l'article 20 - et notamment l'expression (ont
entre eux un différend ))- de tenir compte du sens du terme (diffé-

rend ))à l'époque où les deux traités furent conclus. A cette fin,
il convient d'examiner la manière dont a étéemployé le terme
« dispute )), ou son équivalent français, dans les divers traités
conclus par le M,aroc, par exemple ceux avec la France de 1631
et 1682, et avec Ila Grande-Bretagne de 1721, 1750, 1751, 1760 et
1801. Il est clair que dans ces cas le terme a étéemployé comme

s'étendant aux différends tant civils que criminels.
Il faut également tenir compte du fait qu'à l'époque où ces
deux traités fure:nt conclus, la distinction nette entre les affaires
civiles et criminelles ne s'était pas encore dégagéeau Maroc.
C'est pourquoi il faut interpréter le terme ((différend ))tel qu'il
figure dans l'article 20, comme visant tant les affaires civiles que

les affaires crimiinelles dans la mesure où celles-ci se. rattachent
à des,violations du droit pénalcommises par un citoyen pu protégé
des Etats-Unis contre un autre citoyen ou protégé des Etats-Unis.

De la conclusi.on des fitats-Unis ressort un second point, à
savoir que la juridiction consul?ire fut acquise ((pour toutes affaires
où un citoyen ou protégé des Etats-Unis est défendeur par l'effet
de la clause de la nation la plus favorisée ainsi que par la coutume
et l'usage )).Une telle juridiction ne serait pas affectéepar l'abandon,
de la part de la ~Grande-Bretagne, en 1937, des droits juridiction-

nels qu'elle exerçait dans la zone française et n'aurait jamais It is necessary to give special attention to the most-favoured-
nation clauses of the United StatesTreaty of 1836. There were two
grants of most-favoured-nation treatment.

Article 14 provides :

"The comrnercc with the United States shall be on the same
footing as is the commerce with Spain, or as that with the most
pccted and esteemed, and have full liberty to pass and repass Oures-
country and seaports whenever they please, without interruption."

Article 24 deals with the contingencies of war, but it contains a
final sentence :
"....and it is further declared, that whatever indulgence, in
trade or otherwise, shall bc granted to any of the Christian Powers,
the citizens of the United States shall be equally entitled to them."

These articles entitle the Gnited States to invoke the provisions
of other treaties relating to the capitulatory regime.
The most extensive privileges in the matter of consular juris-
diction granted by Morocco werc those which were contained in the
Gencral Treaty with Great Britain of 1856 and in the Treaty of
Commerce and Navigation with Spain of 1861. Under the provisions
of Article IX of the British Treaty, there was a grant of consular
jurisdiction in al1 cases, civil and criminal, when British nationals
were defcndants. Similarly, in Articles IX, X and XI of the Spanish
Trcaty of 1861, civil and criininal jurisdiction was established for
cases in which Spanish nationals were defendants.

Accordingly, the United States acquired by virtue of the most-
favoured-nation clauses, civil and criminal consular jurisdiction in
al1cases in which United States nationals were defendants.

The controversy between the Parties with regard to consular
jurisdiction results from the renunciation of capitulatory rights and
privileges by Spain in 1914 and by Great Britain in 1937. The
renunciation by Spain in 1914 had no immediate effect upon the
United States position because it was still possible to invoke the
provisions of the General Treaty with Great Britain of 1856. After
1937, however, no Power other than the United States has exer-
cised consular jurisdiction in the French Zone of Morocco and none
has been entitled to exercise such jurisdiction.
France contends that, from the date of the renunciation of the
right of consular jurisdiction by Great Britain, the United States
has not been entitled, either through the operation of the most-
favoured-nation cIauses of the Treaty of 1836 or by virtue of the
provisioiis of any other treaty, to exercise consular jurisdiction

18fait l'objet d'une renonciation expresse ou implicite de la part
des Etats-Unis.
Il convient d'examiner attentivement les clauses de,la nation
la plus favorisée figurant dans le traité conclu par les Etats-Cnis
en 1836. L'octroi du traitement de la nation la plus favorisée
y est prévu en deux endroits.
L'article 14 dispose :

(Lt: commerce avec les États-unis sera sur le mêmepied que le
commerce avec l'Espagne, ou que le commerce avec la nation
actuellement la plus favorisée. Les citoyens de ce pays seront
respectés.etestimés ; ilauront toute liberté d'aller etde venir dans
notre pays et clans nosports sans aucun obstacle. ))
L'article 24 vise l'éventualité de la guerre, mais il contient la
phrase finale suivante :

(11est en outre déclaré quetoute faveur, en matièrede commerce
ou autre, qui viendrait à êtreaccordée à une autre Puissance chré-
tienne s'appliquera égalementaux citoyens des Etats-Unïs. ))
Ces articles autorisent les États-unis à invoquer les disposi-

tions d'autres traités relatifs au régimecapitulaire.
Les privilèges :les plus étendus que le Maroc ait accordés en
matière de juridiction consulaire sont ceux du traité généralde
1856 avec la Gramde-Bretagne et du traité de commerce et de
navigation de 1861 avec l'Espagne. En vertu des dispositions
de l'article IX du traité britannique, la juridiction consulaire était
octroyée dans toutes les affaires civiles et criminelles où des ressor-
tissants britanniques étaient défendeurs. De même,la juridiction
au civil et au périal était établie par les articles IX, X et XI du
traité de 1861avec l'Espagne dans toutes les affaires dans lesquelles
des ressortissants espagnols étaient défendeurs.
Par conséquent, en vertu des clauses de la nation la plus favo-

risée, lesEtats-Unis ont acquis la juridiction consulaire en matière
civile, et criminellle dans toutes les affaires où des ressortissants
des Etats-Unis ét.aient défendeurs.
La controverse entre les Parties relative à la juridiction consu-
laire résulte de la renonciation par l'Espagne en 1914 et par la
Grande-Bretagne en 1937 à leurs droits et privilèges capitulaires.
La renonciation d.e l'Espagne, en 1914, n'a eu aucun effet immé-
diat sur 1üposition des Etats-Unis parce qu'il était encore possible
d'invoquer les dispositions du traité général de 1856avec la Grande-
Bretagne. Toutefois, après 1937, aucune Puissance, autre que les
Etats-Unis, n'a exercé de juridiction consulaire dans la zone fran-

çaise du Maroc et aucune n'était en droit de l'exercer.
La France soutient que, dès le moment où la Grande-Bretagne
a renoncé aux droits de juridiction consulairc, les Etats-Unis n'ont
plus étéfondés, que ce soit par l'effet des clauses de la nation la
plus favorisée du traité de 1836 ou en vertu des dispositions d'un
autre traité, à exercer la juridiction consulaire pour d'autres
I8beyond those cases which are covered by the provisions of Arti-
cles 20 and 21 of the Treaty of 1836.
The United States Submission is based upon a series of conten-
tions which must be dealt with in turn.

The first contention is based upon Article 17 of the Madrid

Convention of 1880,which reads as follows :
"The right to the treatment of the most favoured nation is recog-
nizedby Moroccoas belonging to al1the Powers represented at the
Madrid Conference."

Even if it could be assumed that Article 17 operated as ageneral
grant of most-favoured-nation rights to the United States and was
not confined to the matters dealt with in the Madrid Convention,
it would not follow that the United States is entitled to continue
to invoke the provisions of the British and Spanish Treaties, after
they have ceased to be operative as between Morocco and the two
countries in question.
The contention of the United States is based upon the view that
most-favoured-nation clauses contained in treaties with countries
like Morocco must be given a different construction from that which
is accorded to similar clauses in treaties with other countries. Two

specialconsiderations need to be taken into account.

The first consideration depends upon the principle of a persona1
law and the history of the old conflict between two concepts of law
and jurisdiction : the one based upon persons and the other upon
territory. The right of consular jurisdiction was designed to provide
for a situation in which Moroccan law was essentially persona1 in
character and could not be applied to foreigners.

The second consideration was based on the view that the most-
favoured-nation clauses in treatiesmade with countries like Morocco
should be regarded as a form of drafting by reference rather than
as a method for the establishment and maintenance of equality of
treatment without discrimination amongst the various countries
concerned. According to this view, rights or privileges which a

country was entitled to invoke by virtue of a most-favoured-nation
clause, and which were in existence at the date of its coming into
force, would be incorporated permanently by reference and enjoyed
and exercised even after the abrogation of the treaty provisions
from which they had been derived.

From cither point of view, this contention is inconsistent with
the intentions of the parties to the treaties now in question. This
is shown both by the wording of the particular treaties, andby the

19affaires que celles qui sont viséespar les dispositions des articl20
et 21 du traité de 18 6.
La conclusion cles d tats-Unis est fondée sur une série d'argu-
ments qui doivent être examinés tour à tour.

Le premier argument est déduit de l'article 17 de la convention
de Madrid de 1880, lequel énoncece qui suit :

<Le droit au traitement de la nation la plus favoriséeestreconnu
par le Maroc à.toutes les Puissances représentéesà la conférence
de Madrid. ))

Mêmesi l'on poiuyait supposer que l'article 17 a eu pour effet un
octroi généralaux Etats-Unis des droits de la nation la plus favo-
risée et que cet article n'était pas limité aux questions traitées
par la convention de Madrid, il ne s'ensuivrait pas que les Etats-
Unis seraient fondlésà invoquer encore les dispositions des traités
conclus avec la G-rande-Bretagne et avec l'Espagne, après qu'ils
ont cesséde déployer leurs effets entre le Maroc et ces deux pays.
L'argument des Etats-Unis est fondé sur la supposition que les
clauses de la nation la plus favorisée, quand elles figurent dans des
traités avec des pays tels que le Maroc, doivent recevoir une inter-
prétation différente de celle des dispositions analogues contenues
dans les traités avec d'autres pays. Deux considérations particu-

lièrès doivent ici entrer en ligne de compte.
La première considération est déduite du principe de la loi
personnelle ainsi que de l'historique du vieux conflit entre deux
concepts de droit et de juridiction : l'un fondé sur la personne
et l'autre sur le territoire. Le droit de juridiction consulaire avait
pour objet de pourvoir à une situation dans laquelle le droit maro-
cain était de caractère essentiellement personnel et ne pouvait
pas s'appliquer aux étrangers.
La seconde considération part de l'idée que les clauses de la
nation la plus favorisée contenues dans les traités conclus avec
des pays tels que le Maroc doivent être considérées comme une
façon de formuler un texte à l'aide de référencesplutôt que comme
un moyen dlétabl.ir et de maintenir l'égalité detraitement sans
discrimination entre les divers pays intéressés. Seloncette manière

de voir, les droits ou privilèges qu'un pays est fondé à invoquer
par l'effet de la clause de la nation la plus favorisée et qui existaient
à la date de l'entrée en vigueur de la clause, seraient incorporés
par référenced'une manière permanente, et la jouissance et l'exer-
cice en seraient maintenus même aprhs l'abrogation des dispositions
conventionnelles dont ils découlent.
Entendue de l'une ou l'autre façon, cette thèse n'est pas compa-
tible avec l'intention des parties aux traités dont il s'agit ici.
C'est ce que montre tout à la fois la rédaction des traités par-general treaty pattern which emerges from an examination of the
treaties made by Morocco with France, the Netherlands, Great
Britain, Denmark, Spain, United States, Sardinia, Austria, Belgium
and Germany over the period from 1631 to 1892. These treaties
show that the intention of the most-favoured-nation clauses was to
establish and to maintain at al1times fundamental equality without
discrimination among al1 of the countries concerned. Further, the
provisions of Article 17 of the Madrid Convention, regardless of
their scope, were clearly based on the maintenance of equality.

The contention would therefore run contrary to the principle of
ecluality andit would perpetuate discrimination. It can not support
the Subinission of the United States regarding the extent of the
consular jurisdiction in the French Zone.

The second contention of the Cnited States is based upon the
geograpliically limited character of the renunciation of consular
jurisdiction by Great Britain. This was restricted in its scope to
the French Zone.
It has been claimed on behalf of the United States that Great
Britain retained its jurisdictional rightsin the Spanish Zone and it
has been argued that "the United States, which still treats Morocco
as a single country, is entitled under the most-favoured-nation

clause in Articlc 24 of its treaty to the same jurisdictional rights
which Great Britain to-day exercises in a part of Morocco by virtue
of the Treaty of 1856".

The Court is riot called upon to determine the existence or extent
of the jurisdictional rights of Grcat Britain in the Spanish Zone. It
is sufficicnt to reject thisargument on the ground that it would lead
to a position in wl-iich tlic United States was entitled to exercise
consular jurisdiction in the French Zone notwithstanding the loss
of this right by Great Britain. This result would be contrary to the
intention of the most-favoured-nation clauses to establish and main-
tain at al1 times fundamental equality without discrimination as
between the countries concerned.
Reliance has also been placed upon the position of France and
French nationals as regards the new tribunals of the Protectorate,
which have been established for the purpose of exercising jurisdic-
tion over forcigners and applying Moroccan laws to them in the
French Zone. These tribunals have been constituted with French
aid and under French direction and supervision. It is suggested that
these arc, in reality, consular courts and that the Cnited States is
cntitled to be placed, in this regard, in a position of equality with
France.
But the tri1)unals of the Protectorate in the French Zone are not
in aiiy scnscbconsular courts. They are Aloroccan courts, organizedticuliers et l'objet général qui se dégage de l'examen des traités
conclus de 1631 à 1892 par le Maroc, avec la France,, les Pays-
Bas, la Grande-Bretagne, le Danemark, l'Espagne, les Etats-Unis,
la Sardaigne, l'Autriche, la Belgique et l't\llemagne. Ces traités
montrent que les clauses de la nation la plus favorisée avaient
pour objet d'étab1i.ret de maintenir en tout temps l'égalitéfonda-
mentale sans discrimination entre tous les pays intéressés. En
outre, les dispositions de l'article17 de la convention de Madrid,
quelle que soit leur portée, étaient également fondéessur le niain-
tien de l'égalité.
Par conséquent, l'argument irait à l'encontre du principe d'éga-
lité et il perpétuerait la discrimination. Il ne saurait justifier la

conclusion des Etats-Cnis relative à l'étendue de la juridiction
consulaire dans la zone française.

Le deuxième argument des États-unis se fonde sur le caractkre
géographiquement limitéde la renonciation par la Grande-Bretagne
à la juridiction consulaire. La portée de cette renonciation était
restreinte à la zone française.
Il a étésoutenu au nom des États-unis que la Grande-Bretagne
conservait ,ses droits juridictionnels dans la zone espagnole et
que ccles Etats-Unis, qui continuent à traiter le Maroc comme
un seul et mêmepays, sont fondés, par le jeu de la clause de la
nation la plus favorisée figurant à l'article 24 de leur traité, à
exercer les ~i~êmedsroits de juridiction que ceux qu'exerce aujour-
d'hui la Grande-Bretagne dans une partie du Maroc en vertu du

traité de 1856 )I.
La Cour n'est pas appelée à déterminer l'existence ou l'étendue
des droits juridictionnels de la Grande-Bretagne en zone espagnole.
Il suffit donc de rejeter cet argument,pour le motif qu'il conduirait
à ilne situation clans laquelle les Etats-Unis seraient fondés à
escrccr la juridiction consulairc~dans la zone française, nonobstant
la perte di' ce droit par la Grande-Bretagne. Un tel résultat serait
contraire à l'intention des clauses de la nation la plus favorisée,
qui est cl'établir ct de maintenir en tout temps, entre les pays
intéressés, une égalité fondamentale sans discrimination.
On a également iilvoqué la position de la France et tles ressor-
tissants francais cn cc. (lui concernc les nouveaux tribunaux du
Protectorat. Ceux-ci ont étéétablis pour exercer la juridiction
sur les étrangers et leurapplicluer les lois marocaines dans la zone
française. Ces tribiliiaux ont étéconstitués avec l'aide de la France

(,t sous direction ct contrclc français. On a prétendu qu'en réalité
il s'agiraità de tribunaux consulaires et que les Etats-Unis seraient
fondés i Ctre p1acé.à cet égardsur un pied d'kgalitéavecla France.

Mais lcs tril)unaus du Protc.ctorat tlniis la zoiic, frniiçaisc
soiit eii rien des tribunaux consulaircs. Ce soiit des tribunaux193 JCDGMENT OF 27 VI1152 (u.s. NATIONALS IN BIOROCCO)

on French models and standards, affording guarantees of judicial
equality to foreigners.
Accordingly the Court can not accept this contention.

The third contention of the United States is based upon the
nature of the arrangements which led to the termination of Spanish
consular jurisdiction in the French Zone. By a Convention between
France and Spain of November 27th, 1912, provision was made for
the exercise by Spain of special rights and privileges in the Spanish
Zone. By a bilateral Declaration between France and Spain of
March 7th, 1914, Spain surrendered its jurisdictional and other
extraterritorialrights in the French Zone, and provision was made
for the subsequent surrender by France of similar rights in the

Spanish Zone. This was accomplished by a bilateral Declaration
between France and Spain of November 17th of the same year.

The United States contends that, as both the Convention of 1912
and the Declarations of 1914 were agreements between France and
Spain, and as Morocco was not named as a party to either agree-
ment, the rights of Spain under the earlier provision still exist de
jure, notwithstanding that there may be a de facto situation which
temporarily prevents their exercise.
Even if this contention is accepted, the position is one in which
Spain has been unable to insist on the right to exercise consular
jurisdiction in the French Zone since 1914. The rights which the
United States would be entitled to invoke by virtue of the most-
favoured-nation clauses would therefore not include the right to
exercise consular jurisdiction in tlie year 1950. They would be
limited to the contingent right of re-establishing consular jurisdic-

tion at some later date in the event of France and Spain abrogating
the agreements made by the Convention of 1912 and the Declara-
tions of 1914.
France contends that these agreements were concluded pursuant
to the power which Morocco conferred on France by the provisions
of the Treaty of Fez of 1912. The general terms of Articles V and VI
were broad enough to give to France the conduct of the international
relations of Morocco, including the exercise of the treaty-making
power. The Convention and the Declarations must therefore be
regarded as agreements made by a protecting Power, within the
scope of its authority, touching the affairs of and intended to bind
the protected State, as is made clear by the third paragraph of
Article 1 of the Treaty of Fez of 1912 which provided that :"The
Government of the Republic will come to an understanding with
the Spanish Government regarding the interests which the latter

Government has in virtue of its geographical position and terri-
torial possessions on the Moroccan coast." In these circumçtances,
itis necessary to hold tliat these agreements bound and enured to
21marocains organisés selon un modèle et des critères français,
accordant aux étrangers toutes garanties d'égalitéjudiciaire.
Par conséquent, la Cour ne peut admettre cet argument.

Le troisième argument des États-unis se fonde sur la nature
des accords qui ont conduit à l'abolition de la juridiction consulaire
espagnole dans la zone française. La convention du 27 novembre
1912 entre la France et l'Espagne prévoit l'exercice par l'Espagne
de droits et privilèges spéciaux dans la zone espagnole. Par une
déclaration commune de la France et de l'Espagne, en date du
7 mars 1914, l'Espagne a abandonné ses droits juridictionnels

et ses autres droits extraterritoriaux dans la zone française, et
une clause a étéinsérée envue de l'abandon ultérieur par la France
de droits semblables dans la zone espagnole. Cela fut fait par la
déclaration commune de la France et de l'Espagne du 17 novem-
bre de !a mêmeannée.
Les Etats-Unis soutiennent que la convention de 1912 et les
déclarations de 1914 étaient des accords entre la France et l'Espagne
et que, comme le Maroc n'y figurait pas comme partie, les droits
que l'Espagne tient de la disposition antérieure existent toujours
de jure, malgré que puisse exister une situation de facto qui en
empêche pour le moment l'exercice.
Mêmesi l'on accepte cet argument, la situation est telle que
l'Espagne ne peut pas, depuis 1914, invoquer le droit d'exercer
la juridiction consulaire en zone française. Les droits que les
États-unis pourraient invoquer en vertu des clauses de la nation
la plus favorisée ne comprendraient donc pas le droit d'exercer
en 1950 la juridiction consulaire. Ils seraient limités au droit
conditionnel de rétablir la juridiction consulaire dans le cas où,
ultérieurement, la France et l'Espagne abrogeraient les accords
constitués par la convention de 1912 et par les déclarations de

1914.
Le Gouvernement français soutient que ces accords ont été
conclus en vertu du pouvoir que le Maroc lui a conférépar les
dispositions du traité de Fez de 1912. Les termes généraux des
articles V et VI sont assez larges pour donner à la France la
conduite des relations internationales du Maroc, y compris l'exercice
du droit de concluire des traités. La convention et les déclarations
doivent donc être considérées comme des accords passés par la
Puissance protectrice dans les limites de ses pouvoirs, accords
relatifs aux affaires de'Etat protégéet destinés à l'obliger, comme
l'indique clairement l'alinéa 3 de l'article premier du traité de
Fez de 1912, lequel énonce : (Le Gouvernement de la République
se concertera avec le Gouvernement espagnol au sujet des intérêts
que ce gouvernerlent tient de sa position géographique et de ses
possessions territalriales sur la côte marocaine.))Dans ces condi-
tions, il faut conclure que ces accords obligent le Maroc et lui

21the beiiefit of llorocco ancl that thc Spanish riglits as rcgartls coii-
siilar jurisdiction carne to an end de jitreas n-el1as de facto.
It is necessary to (ieal with anotlier aspect of this question \+,hich
arises out of the wording of the Ileclaration madc 11- France antl
Spain on Rlarch 7th, 1914. This 1)eclaration contained thc follo\\l-
ing provisions :

"Taking into considcration the guarantees of jiidicial cqiiality
offered to foreigners by the French Tribunals of the Protectoratc,
His Catholic Majesty's Government renoiinces claiming for its
consuls, its subjects, and its establishmerits in the French Zonc
of the Shereefian Empire al1 the rights and privilcges arising oiit
of the regime of the Capitulations.

.......................

So far as the Government of the French Kepublic is concerned,
it binds itself to renounce euqally the rights and privileges existiiig
in favour of its consuls, its subjects, and its establishments in the
Spanish Zone as soon as the Spanisli Tribunals are establislied in
the said Zone.
.......................

The Declaration wliereby France complied with the above ii~ider-
taking was madc on November 17th, 1914, and iiicluded the folloul-

ing paragraph :
"Taking into consideration the guarantccs of judicial cqiiality
offered to foreigners by the Spanisli Tribunals in the Protectorate,
the Goverriment of the French Repuhlic herehy rcnounces claiming
for its consuls, its siibjects and its cstablislimcnts in the Spanisli
%orleof thc Shereefian Empire, al1 the rights :iii<~~rivilcgcsnrisiiig
out of the regimc of the Capitulatioiis."

It will be observed that both Declarations ilse the words "renonce
à réclamer" (renouncesclaiming) and the question has arisen whether
these words were intended as a surrender or renunciatioiî of al1 the
rights and privileges arising out of the capitulatory rcgime, or
whether thev must be considered as tem~orarv undertakinps not
to claim those rights or privileges so long as the giiarantees for

judicial equality are maintained in the French Zone by the tribunals
of the Protectorate and solong asthe correspoiiding guarantccs arc
maintained in the Spanish Zonc.

The auestion is academic rather than uractical. Eveii if the words
in (~uestion should be constriied as meariing a temporary under-

taking not to claim the rights antl privileges, the fact remains that
Spain, in 1950, as a rcsult of these undertakings waç not entitled to
r.xcrcisc, consular jiirisdiction in the French Zone. It follows that
the Vnitcd States \vould bc etlually not entitled to cxercise such
jiiristlictionin the Frt~nch Zonc in the ycar 1950.profitent, et qiic los droits espagnols relatifs à la juridiction consii-
laire ont pris firi de jure aussi bicn que de facto.
Il falit examiner un autre aspect de la question qui résulte des

termes de la déclaration faite par la France et l'Espagne le 7 mars
1914. Cette déclaration contient les dispositions suivantes :

I(Prenant en considiration les garanties d'bgalité jiiridiqiic
offcrtcs aux étrangers par les trif~iinaii?: français du ~irotcctorat,
le Goii\~ernement royal renonce r6clniner pour ses consuls, ses
ressortissants et ses ét;~lilissemcntsdans la zonc francriise de 1'Em-
pire cii6rificii toiis droits et pri~,ili.gcs issiis di1 r6gimc des capitii-
Iations.

En ce qiii le conccrne, le Gouvernement dc la Képublique françaisc
s'engage à renoncer égalcinent aux droits et privilèges existant en
faveur de ses consuls, de ses ressortissants et de ses établissements
dans la zonc espagnole, :iiissitôt que les tril>uilaux espagnols seront
6tal)lis d:iiis Iaditc zoiit,.

La déclaration par laquelle la France a donné effet à l'engage-
ment ci-dessus est du 17 novembrc 1914 ; clle comporte le para-
graphe suivant :

I(Prenant en considération lcs garantics d'igalité juridique offcrtcs
ailx btrangers par les tribunaux espagnols du Protectorat, Ic
(;oiivcrnement dc la K6publiqiie française renonce à réclainer 1)oiir
ses consiils, ses ressortissaiitset ses 6tablisscments dans la zoiic
csl~agnole de l'Empire chérifien tous droits ct privilèges issiis di1
risgime des caliitulations.))

On remarquera que les deux déclarations emploient les mots

((renonce à réclarner »,et la question s'est posée de savoir si ccs
termes avaient pour objet iin abandon ou une renonciation A
l'bgard tle tous les droits et privilèges résultant du régime des
capitulations, ou :s'il fallait les considérer comme des engagements
provisoires de ne pas réclamer ces droits et privilhges aussi long-

temps que les ga:ranties d'6galité juridique sont maintenues dans
la zone francaise par les tribunaux du protectorat, et aussi long-
temps (lu(: les garantics correspondantes sont mainteniics dans
la zone espagnole.
La (luestion est plus académique que pratique. Même si Ics
termes dont il s'agit devaient être interprétés comme signifiant

un engagement temporaire de rie pas réclamer les droits et pri1.i-
li,ges, il n'en rcstc pas moins que l'Espagne, en 19j0, du fait dc
ccxsc.ngajitxiiic~iits,ii'c>st1)as foiiricxscrcc3il-a ji!ri(lictioi~ coiisiilair(,
clans la zone française. 11 s'crisiiit (lue 1c.s I.:tats-lTiiissc.raiciit
bgalemerit sans titrc, à cxcrccxr cc,ttc, jiiricliciion dans la zone\ fran-

yaise cn 1050.195 JUDGMENT OF 27 VI1152 (u.s.NATIONALS IN MOROCCO)

Nevertheless. it is necessarv for the Court to examine these
Declarations in order to deterhine what the parties had in mind
when they used the words in question.
The parties in both Declarations used the expression "taking into
consideration the guarantees of judicial equality ....".These are
words which, if given their ordinary and natural meaning, state the
consideration which led to the making of the surrender, but they
are not words which would normally be used if it was intended to
make a conditional surrender.
The Court is of opinion that the words "renonce à réclamer"must
be regarded as an out-and-out renunciation of the capitulatory
rights and privileges. This view is confirmed by taking into account
the declarations and other arrangements made by France with other
interested Powers designed to bring about the surrender of their
jurisdictional and other extraterritorial rights in the French Zone.

The two Declarations made by France and Spain in 1914 show
that they both regarded the expression "renonce à réclamer"as
equivalent to a renunciation of the rights in question. In the Declar-
ation of March 7th, 1914, the French Government bound itself "to
renounce equally the rights and privileges ...."In the later Declar-
ation of November 17th, 1914, France gave effect to this obligation
by using the expression "renonce à réclamer".It is clear, therefore,
that both France and Spain regarded this expression as proper for
bringing about a complete surrender or renunciation of the rights
and privileges in question.

On July 31st, 1916, the French Ambassador at Washington sent
to the Secretary of State of the United States "the text of the
Declaration signed, with reference to the abrogation of capitula-
tions in the French Zone of Morocco, by al1 the Powers signatory
of the Algeciras Conference and by the South-American Republics".
In the text, thus transmitted, the expression used in English was
"relinquishes its claim to al1 the rights and privileges growing out

of the Capitulation regime ...."It is thus clear that at that date,
long before the present dispute had arisen, France regarded the
expression "relinquishes its claim" (or, in other words, "renonce à
réclamer")as bringing about the abrogation of the privileges in
question.
The Declaration made by France and Spain of March 7th, 1914,
was one of a series of agreements negotiated by France with more
than twenty foreign States "for the surrender of their jurisdictional
and other extraterritorialrights so far as concerned the French
Zone of Morocco". At least seventeen of these agreements used the
expression "renonce à réclamer"as a means of bringing about a
complete abrogation of al1 rights and privileges arising out of the
regime of Capitulations. They are referred to in the Counter-
Memorial in the following words :"for the surrender of their juris-

23 Il faut néanmoins que la Cour examine ces déclarations pour
déterminer ce qu'ont voulu les parties quand elles se sont servies
des termes en question.
Dans les deux déclarations, les parties se sont servies de l'ex-

pression ((prenant en considération les garanties d'égalité juri-
dique ....». Ces termes, pris dans leur sens naturel et ordinaire,
énoncent la contre:-partie de l'abandon consenti, mais ce ne sont
pas des termes dont on se servirait normalement si l'on envisageait
de procéder à un abandon conditionnel.
La Cour est d'avis que les termes ((renonce à réclamer » doivent
être interprétés comme portant renonciation absolue aux droits
et privilèges capitulaires. Cette manière de voir trouve confirmation
dans les déclarations et autres arrangements conclus par la France

avec d'autres Puissances intéressées en vue d'effectuer l'abandon
de leurs tiroits juridictionnels et autres droits extraterritoriaux
dans la zone française.
Les deux déclarations faites en 1914 par la France et l'Espagne
montrent que les deux pays ont considéré l'expression ((renonce
à réclamer » comrne équivalant à la renonciation aux droits en
question. Dans la déclaration du 7 mars 1914, le Gouvernement
français s'est engagé (à renoncer également aux droits et privi-
lèges....».Dans la déclaration ultérieure du 17 novembre 1914, la

France a donné eff,età cette obligation en se servant de l'expression
((renonce à réclam'er n.11est donc clair que la France et l'Espagne
ont considéré cette expression comme celle qui convenait pour
effectuer un compl.et abandon ou renonciation à l'égard des droits
et privilèges en question.
Le 31 juillet 15116, 1,'ambassadeur de France à Washington a
envoyé au secrétaire d'Etat des Etats-Unis (le texte de la déclara-
tion signée, relati~iement à l'abrogation des capitulations dans la
zone franqaise du Maroc, par toutes les Puissances signataires de

la conférence d'Algésiras et par les Républiques d'Amérique du
Sud. ».Dans le texte ainsi transmis, l'expression en anglais était
(relinqz~islzesits daim to al1 the rights and privileges growing out
of the Capitztlatiolz regime ...». Il est donc clair qu'à cette date,
bien avant la naissance du différend actuel, la France considérait
l'expression (renonce à réclamer » comme portant abrogation des
privilèges en question.

La déclaration laite par la France et l'Espagne le 7 mars 1914

faisait partie d'une séried'accords négociéspar la France avec plus
de vingt IStats étrangers (portant abandon de leurs droits juridic-
tionnels et autres droits extraterritoriaux en ce qui est de la zone
française du Maroc 1).Au moins dix-sept de ces accords se sont
servis de l'expression (renonce à réclamer », pour réaliser l'abro-
gation complète de tous les droits ct privilèges issus du régime des
capitulations. Il y cst fait allusion dans le contre-mémoire dans les
termes suivants : ((pour l'abandon de leurs droits juridictionnels

23dictional and othcr extraterritorial rights", and again, "for thc
rcnunciation of extraterritorial rights". Furthcr, al1 of the States
nhich had signed thecc agreements abandoned forthyith the exer-

cisc of consulzr jurisdicti~n or other cal)itiilatory rights or pri\-i-
leges in the French Zone.
III these circumstances, it is necessary to conclude that the
Spanish 1)cclaration of March 7th, 1914,brought about the surrender
or renunciation of al1 Spanish jiirisclictional or other extraterritorial
rights in the French Zone, and an abrogation of those provisions of
the Spanish Treaty of 1861 which concern "the rights and privileges
arising out of the regime of Capitulations".
The Court, therefore, can not accept the contention that thc
United States is entitled, by virtue of the most-favoured-nation
clauses, to invoke in respect of the French Zone those provisions
of the Spanish Treaty of 186r which conccrn consiilar jurisdiction.

The fourth contention of the IInitetl States is that the extcnsivc
consular jurisdiction as it existed in hIorocco in the year 1880 was
recognized and confirmed by the provisions of the Madrid Conven-
tion, and that thc Vnited States, as a party to that Con\.ention,

thercby acqiiired an autonomous right to the exercise of such
jurisdiction, indcpeiidently of the operation of the most-favoured-
nation claiises.
There can be no doubt that the cxercise of coiisular jurisdiction
in J,lorocco in the !.car 1880 \vas. general, or that the Convention
~)resupposed the existence of such juristliction. It dealt with the
spccial position of protégésand coiitnincd 131-ovisions for the exercise
of jurisdiction with regard to them.
On the other hand, it is eclually clear that there werc no pro1.i-
sions of the Convention ~vhichexprcssly broiight about a confirm-
ation of the then existing system of consular jurisdiction, or its
establishment as an independent and autonomous right.
The purposes and objects of this Convention were statcd in its
Preamblc in the follolving words :"the necessity of establishing, on
fixccl and uniform bases, the exercise of the right of protection in
Morocco and oi settling certain (~iicstions connected therewith.. ..".
In these circumstanccs, the Coiirt can not adopt a coilstriiction by
implication of the provisions of the Madrid Convention which would

go beyond the scope of its declared ptirposes and objects. Further,
this contention would involve radical changes antl additions
to the provisions of the Convention. The Coiirt, in its Opinion-
Interprctation of Pence Treatics (Secontl I'hase) (I.C. J. Reports
1950, 1). 229)-state(1 :"It is thc tliity of th(, (:oiii-t to ii1tcrl)rc~t
the Trcatics, not to rcvisc tlicm." .~RR~T DU 27 \'III 52 (RESSORTISSASTS DES 6.-1~. -4U MAROC)
196
ct autres droits exti-aterritoriaux ))ou encore ((portant rcnonciatiori
de droits extraterritoriaux 1).Ile plus, tous les Etats qui avaient
signé ces accords ont abandonné immédiatement l'exercice de la.
juridiction corisulaire ou autrc,s droits et privil&ges capitulaires

dans la zone française.
Dans ces conditions, il faut conclure que la déclaration dc
l'Espagne du 7 niairs 1914 a effectué l'abandon ou la renonciation
par l'Espagne à tous ses droits juridictionnels ou autres droits
extraterritoriaux dans la zone française, et l'abrogation des dispo-
sitions du traité de 1861 avec l'Espagne se rapportant (aux droits
et privilèges.issus du régime des capitulations ».
Par conséquent, la Coiir ne peut accepter la thc'scque les ctats-
Unis, en vertu des clauses de la nation la plus favorisée, ont le

droit d'in\~oquer, à l'égard de la zonc française, celles des disposi-
tions du trait6 de 1861 avec l'Espagne qiii ont trait à la juridiction
consulaire.

1,e quatrième argument du Gouvernement des États-unis
consiste à dire que la juridiction consulaire étendue, telle qu'elle
existait ail Maroc en 1880, a étéreconnue et confirmée par les
disp?sitions de la convention de Madrid et que, par conséquent,
les Etats-Unis, en tant que partie à cette convention, ont acqiiis

par là un droit autonome à l'exercice de cette juridiction, indé-
pendamment de l'effet des clauses de la nation la plus favorisée.
II n'est pas douteux que l'exercice de la juridiction consulaire
au Maroc était généralen 1880 et que la convention présuppose
l'existence de cette juridiction. Elle traitait de la situation parti-
culière des protégé!;et contenait cles dispositions ~TisantI'cxcrcicc:
de la juridiction à leur égard.
Il'autre part, il 12stégalement clair qu'aucune disposition de la

convention n'apporte expressément une confirmation du systilmc
de juridiction consulaire existant alors, ou son i.tablisscmcnt
comme un droit indépendant et autonome.
ILS buts et l'objet de cette convention sont indiqués dans Ic
préambule, qui s'exprime en ces termes : ((la nécessitéd'établir
sur des bases fixes et uniformes l'exercice du droit de protcction
au Maroc, et de régler certaines questions qui s'y rattaclient ...1).
Dans ces conditions, la Cour ne saurait adopter une interprétation
par implication des dispositions de la convention de Madrid qiii
dépasserait la portée de ses buts et de son objct explicites. I)e

plus, cet argument entraînerait dans les dispositions de la conven-
tion des modifications radicales ct des additions. Dans son avis
sur 1'intrry)rétation dcs traités dc paix, dcuxieme phase (C.I. J.
IZccfleiL19-70, 1).22'9),la Cour a dit : (Iza Cour est appcléc à intc.1--
pritcr lcs traités, n'on à lcs rcviscr.)i197 JUDGMENT OF 27 VI11 52 (u.s. NATIONALS IN MOROCCO)

The fifth contention of the United States is that the consular
jurisdiction in Morocco was recognized and confirmed by various
provisions of the Act of Algeciras, and that the United States
acquired an autonomous right to exercise such jurisdiction inde-
pendently of the operation of the most-favoured-nation clauses.

In 1906 the twelve Powers at Algeciras al1exercised capitulatory
rights and privileges to the extent that they were prescribed either
by the General Treaty with Great Britain of 1856 or by the Spanish
Treaty of 1861. They did so by virtue of direct treaty grant, as in
the case of Great Britain or Spain ;or by virtue of most-favoured-
nation clauses, as in the case of the United States ; or without
treaty rights, but with the consent or acquiescence of Morocco, as
in the case of certain other States. Accordingly, the Act of Algeciras
pre-supposed the existence of the regime of Capitulations, including
the rights of consular jurisdiction, and many of its provisions
assigned particularfunctions to the then existingconsular tribunals.

Reference has been made in the course of the argument to Arti-
cles 19, 23, 24, 25, 29, 45, 59, 80, 81, 87, 91, IOI, 102 and 119. For
example, Chapter V, which deals with "the customs of the Empire
and the repression of fraud and smuggling", contains Article 102,
which provides :

"Every confiscation,fineor penalty must be imposedon foreigners
by consular jurisdiction, and on Moorish subjects by Shereefian
jurisdiction."

In the conditions which existed at the time, this Article made it
necessary for the prosecution of nationals of the twelve Powers for

fraud and smuggling to be dealt with in the consularcourts.

Since 1937, the position has been one in which eleven of the
Powers have abandoned their capitulatory privileges, and their
consular jurisdiction has ceased to exist. Accordingly, Morocco has
been able to make laws and to provide for the trial and punishment
of offenders who ;ire nationals of these eleven countries. The posi-
tion of the United States is different, and must now be examined.

Unlike the Madrid Convention, the Act of Algeciras was general
in its scope and was not confined to a limited problem such as that
of protection. On the other hand, the interpretation of the provisions
of the Act must take into account its purposes, which are set forth
in the Preamble in the following words :

"Inspired by the interest attaching itself to the reign of order,
peace, and prosperity in Morocco,and recognizing that the attain-
ment thereof cari only be effected by means of the introduction of
reforms based upon tlie triple principle of the sovereignty and inde-
pcndcnce of His Majesty the Sultan, the integrity of Iiis domains,
and vconomicliberty without any inequality ...."
25 Le cinquième argument des États-unis est que la juridiction
consulaire au Maroc a étéreconnue et confirmée par diverses
dispositions de l'acte d'Algésiras, et que les Etats-Unis ont acquis
par là un droit a.utonome d'exercer cette juridiction indépen-
damment de l'effet des clauses de la nation la plus favorisée.

En 1906, les douze Puissances représentées à Algésiras exer-
çaient toutes des clroits et privilèges capitulaires, dans la mesure
où ils étaient prévus, soit par le traité général de 1856 avec la
Grande-Bretagne, soit par le traité de 1861 avec l'Espagne. Elles
les exerçaient soit: en vertu d'une disposition conventionnelle
directe, comme la Grande-Bretagne ou l'Espagne ;sojt en vertu
de clauses de la nation la plus favorisée, comme les Etats-Unis ;

soit encore sans droits conventionnels mais avec le consentement
qu l'accord tacite dlu Maroc, comme dans le cas de certains autres
Etats. C'est pourquoi l'acte d'Algésiras présupposa l'existence du
régime des capitulations, y compris les droits de juridiction consu-
laire, et que plusieurs de ses dispositions assignèrent des fonctions
~articulières aux tribunaux consulaires existant alors. On a fait
mention, au cours des débats, des articles 19, 23, 24, 25, 29, 45,
59, 80, 81, 87, 91, 101, 102 et 119. Par exemple, le chapitre V,
qui concerne les (douanes de l'Empire et la répression de la fraude
et de la contrebande n,contient un article 102 ainsi conçu :

((Toute confiscation, amende ou pénalité devra êtreprononcée
pour les étrangers par la juridiction consulaire et pour les sujets
marocains par la juridiction chérifienne. ))

Dans les conditions alors existantes, cet article exigeait que les
poursuites pour fra.ude et contrebande engagées contre les ressor-
tissants des douze Puissarices fussent portées devant les tribunaux
consulaires.

Depuis 1937, la situation est la suivante : onze des Puissances
ont renoncé à leurs privilèges capitulaires, et leur juridiction
consulaire a cesséd'exister. De ce fait, le Maroc a pu édicter des
lois ct prendre des dispositions en vue de juger et punir des délin-
quants appartenant. à ces onze pays. Les États-unis sont dans une
situation différente qu'il convient d'examiner maintenant.

A la différence de la convention de Madrid, l'acte d'Algésiras
était de portée généraleet n'était pas limité à un problème aussi
restreint que la protection. D'aiitre part, en interprétant les dispo-
sitions de l'acte, il convient de tenir compte de ses buts, qui sont
én0nci.sdans le préambule, tlaiis les termes suivants :

((S'inspirant de l'intérêt quis'attache à ce que l'ordre, la paix
ct la prospéritérègnent au Maroc, et ayant reconnu que ce but
réci cie uexsaurait êtreatteint que moyennant l'introduction de
reformes basces sur le triple principe de la souveraineté et de
1'iridél)t~ridance Sa Majestéle Sultan, de l'intégrité deSes Etats
et de 13lil)~'rtii'conornicluesans aucune inégalit... )) Keither the -4rticles to which reference has been made above nor
any other provisions of the Act of Algeciras purport to establish
consiilar jurisdiction or to confirm the rights or privileges of the
regimc of Capitulations which were then in existence. The qiiestion,
therefore, is w!iethi:r the cstaF,lishment or confirmation of such
jurisdiction or privileges can be based upori the implied intentioiis
of the parties to the Act as indirated by its provisions.
-4n interprc'tation, by implication from the provisions of the Act,
establishing or confirming consular jiirisdiction would involve a
transformation of the then existing treaty rights of most of the
t\vel\.e Powers irito neuTand autononious rights based upon the Act.
It \\~ouldchange treaty rights of the Powers, some of them termiil-
able at short notice, e.g., those of tlie United States which were
terminable by twelve moi:ths' notice, into rights enjoyable for an
iinlimited period by the Powers and incapable of beirig terminated
or modified by nforocco. Neither the preparatory work nor the
Preainble gi~:esthe least indication of any such intention. The Court

fiiicisitself uiiable to imply so fundnmental a change in the ciiaracter
of tlie then oxisting treaty rights as would be involi~ed iii the
acceptance of this contention.

There is, liowever, another aspect of this problem nrising out of
the particular Articles to ~vhich refercnce has beeii made above.
These arethe Articles which iilc.ludeprovisions necessarily involving
the exercise of consular jurisdictiori. In this case, thcre is a clear
indication of the intention of the partics to the effect that certain
matters are to be dealt with t,y the consular tribunals and to this
extcnt it is possible to interpret the provisions of the .Act as estab-
lishiiig or confirmiiig the exerc:ist:of consiilar jurisdictiofor these
limited purposes. The maintenance of consular jurisdiction iii so
far as it may be riecessarv to ;:i\~ecffect to these specific provisions
can, therefore, be justified as based upon the necessary inteiidmeiit
of the provisions of the Act.
This result is confirmed by the provisions of Articles IO and 16

of the Cori\.eiitioii between Great Britaiii and France of July zgth,
1937. These Articles refer to the jiirisdictional privileges "accorded
or1thc basis of existing treaties" or "cnjoyed by the United States
of A~nerica under treüties at present in force". They prc-suppose,
therefore, tliat the jiirisdictional privileges of the United States,
even after the surrcnder of British capitulatory rights, would not
be liinited to the jurisdiction provided by Articles 20 and 21 of the
Treaty with Morocco of 1836. This view is also supported by the
provisions of Article 4 of the Protocol of Signature to this Conven-
tion. This Article provided for the abrogation of certain provisions
of the General Trcaty of 1856 and,as regards the Act of Algeciras,
for the renuiiciation "of the right to rely upoii Articles I to 50,
54 to 65, 70, 71, al1provisions of Article 72 clfter the worcl 'permit',
26 Ni les articles mentionnés plus haut ni aucune autre disposition
de l'acte d'Algésirasn'avaient pour objet d'instituer ulie juridiction

consulaire ou de c,onfirriier 1.2sdroits ou privilèges découlant du
régime des capitiila.tions existant alors. 11s'agit donc de savoir si
l'on peut fonder l'institution ou la confirmation de cette juridiction
ou de ces privilèges sur l'intention implicite des parties à l'acte,
telle qu'elle ressort des dispositions de celui-ci.
Une interprétation de l'acte, tirée de ce qu'irnpliqucraient ses
dispositions et selori laquelle il instituerait ou confirmerait une
juridiction consulaire, reviendrait à transformer en droits nouveaux
et autonomes, fondés sur l'acte même, les droits con~~entionnels

dont jouissaient alors la plupart des douze Puissances. Ces droits
conventionnels, dénonçables parfois avec un court préavis - ceux
des Etats-Unis, pa.r exemple, l'étaient avec un délai dc douze
mois - auraient étkchangés en droits dont les Puissances eussent
pu jouir pour un temps indéfini, le Maroc étant incapable d'j,
mettre fin ou de les modifier. Ki les travaux préparatoires ni le
préambule ne donnent la moindre indication d'une pareille inten-
tion. La Cour estime qu'elle ne saurait déduire par ce procédéqu'un
changement aussi fondamental que celui que comporterait l'admis-

sion de cette thèse se soit produit dans le caract6re des droits
conventionnels alors existants.
Toutefois, un autre aspect de ce problème ressort des articles
mentionnés plus hauit. Il s'agit des articles contenant des dispositions
impliquant nécessai.rement l'exercice de la juridiction consulaire.
On trouve ici une -indication claire de l'intention des parties de
voir soumettre ceritaines matières aux tribunaux consulaires et,
dans cette mesure, il est possible d'interpréter les dispositions de
l'acte comme instituant ou confirmant l'exercice de la juridiction

consulaire à ces firi:;limitiles. Le niaintien de la juridiction consu-
laire, dans la mesure où elle serait ~iécessaire à l'application de ces
dispositions particulières, se justifierait donc en tant qu'il serait
fondésur le sens 11éc:essairdees dispositions de l'acte.

Ce résultat est confirmé par les dispositions des articles IO et 16
de la convc:ntion du 29 juillet 1937 entre la Grande-Bretagne ct
la France. Ces, articles se réfCrent aux 1:rivilCges de juridiction
((accordésaux Etats-Unis d'Amériqued'aprèsles traitésen vigueur 11.

Ils présupposent donc que les privilèges de juridiction des Etats-
Unis, mêmeaprès l'abandon par la Grande-Bretagne de ses droits
capitulaires, lie se limiteraicnt pas à la juridiction prévue aux
articles 20 et 21 du traité de 1836 avec le Maroc. Ce point de vue
est confirmé en outre par les dispositions de l'article 4 du l)rotocole
de signature de cette convention. Cet article énonce l'abrogation
de certaines disl~ositions du traité gén6ral de 1856 et, en ce qui est
de l'acte d'.4lgésiraç,la renonciation ((à se prévaloir des articlcls I
à 50 inclus, 53 à 65 inclus, 70, 71, 72 à la suite des mots ((~)or~nis

spécial n, 75, 76, 80, 97, 101, 102, 104, 113 a 119 inclus ,; en outre, 75, 76, 80, 97,101, 102, 104, 113 to II~", and it also provided that
"in Article 81 the words 'by the competent consular authority'
must be deemed to be omitted and in Article 91, the word 'compe-
tent' must henceforth be substituted for the word 'consular' ".
It is clear that, in 1937, France (representjng Morocco) and Great

Britain were proceeding upon the assumption that certain of the
provisions of the Act of Algeciras recognized a limited consular
jurisdiction for the purposes of the judicial proceedings therein
described.
The Court is not called upon to examine the particular articles
of the Act of Algeciras which are involved. It considers it sufficient
to state as itsopinion that the consular jurisdiction of the United
States continues to exist to the extent that may be necessary to
render effective those provisions of the Act of Algeciras which
depend on the existence of consular jurisdiction.
This interpretation of the Act, in some instances, leads to results
which may not appear to be entirely satisfactory. But that is an
unavoidable consequence of the nlanner in which the Algeciras
Conference dealt with the question of consular jurisdiction. The
Court can not, by way of interpretation, derive from the Act a
general rule as to full consular jurisdiction which it does not contain.
On the other hand, the Court can not disregard particular provisions

involving a limited resort to consular jurisdiction, which are, in
fact, contained in the Act, and which are still in force as far as the
relations between the United States and Morocco are concerned.

The sixth contention of the United States is that its consular
jurisdiction and other capitulatory rights in Morocco are founded
cpon "custom and usage".
This contention has been developed in two different ways. The
first relates to custom and usage preceding the abandonment of
capitulatory rights in the French Zone by Great Britain in 1937.
The second relates to the practice since that date.
Ilealing first with the period of 150 years, 1787 to 1937, there
are two considerations which prevent the acceptance of this con-
tention.
The first is that throughout this whole period, the United States
consular jurisdiction was in fact based, not on custom or usage,

but on treaty rights. At al1 stages, it was based on the provisions
either of the Treaty of 1787 or of the Treaty of 1836, together with
the provisions of treaties concluded by Morocco with other Powers,
especially with Great Britain and Spain, invoked by virtue of the
most-favoured-nation clauses. This was the case 11otinerely of the
United States but of most of the countries whose nationals were
trading in Morocco. It is true that there were Powers represented
at the Conference of Madrid in 1880 and at Algeciras in 1906 which
had no treaty rights but were exercising consular jurisdiction withil dispose que, (dans l'article 81 les mots (par l'autorité consu-
((lairecompétente » doivent êtreconsidérés commesupprimés etdans
l'article 91 le mot ((compétente )substitué au mot (consulaire )D.

Il est manifeste qu'en 19.37 la France (représentant le Maroc)
et la Grande-Bretagne partaient du postulat que certaines disposi-
tions del'acte d'Algésiras reconnaissaient une juridiction consulaire
limitée aux fins des procédures judiciaires qui y sont décrites.

La Cour n'est pas appelée à examiner les articles particuliers de
l'acte d'Algésiras qui sont en cause. Elle considère qu'il lui suffit
de dire qu'à son avis la juridiction consulairedes États-unis continue
d'exister dans la mesure voulue pour permettre de donner effet à

celles des dispositions de l'acte d'Algésiras qui dépendent de
l'existence de la juridiction consulaire.
Dans certains cas, cette interprétation de l'acte aboutit à des
résultats qui peuvent ne pas paraître absolunient satisfaisants.
Mais c'est une conséquence inévitable de la façon dont la conférence
d'Algésiras a traité la question de la juridiction consulaire. La Cour
ne peut, par voie d'interprétation, tirer de l'acte une règle générale
qu'il ne contient pas au sujet de la pleine juridiction consulaire.
D'autre part, la Cour ne peut négligerles dispositions particulières
entraînant un recours limité à la juridiction consulaire, qui figurent

en fait dans l'acte et qui sont encore en vigueur pour autant qu'il
s'agit des rapports entre les États-unis et le Maroc.

Le sixième argurnent est le suivaiit : la juridiction consulaire et
les autres droits capitulaires des États-.unis au Maroc sont fondés
sur (la coutume eit l'usage ».
Cet argument a étédéveloppé de deux façons différentes. La
première vise la coutume et l'usage qui ont précédél'abandon par
la Grande-Bretagne, en 1937, de ses droits capitulaires dans la

zone française. La seconde vise la pratique suivie depuis cette date.
Si l'on envisage d'abord la période de cent cinquante années
qui s'est écouléede 1787 à 1937, deux considérations s'opposent
à ce que cet argument soit admis.
La première est qu'au c,ours de l'ensemble de cette période, la
juridiction consulaire des Etats-Unis a étéen fait fondée, non pas
sur la coutume ou l'usage, mais sur des droits conventionnels. A
toute époque, elle était fondée soit sur les dispositions du traité
de 1787, soit sur celles du traité de 1836, combinées avec les dispo-
sitions des traitCs conclus par le Maroc avec d'autres Puissailces,

la Grande-Bretagne et l'Espagne en particulier, invoquées en vertu
des clauses de la ination la plus favorisée. Tel était le cas, non
seulement pour les; États-unis, mais pour la majorité des pays
ayant des ressortisçants qui pratiquaient le commerce au Maroc.
Il est vrai qu'ily avait des Puissances représentées à la conférence

27zoo JUDGMENT OF 27 VIII 52 (u.s. NATIONALS IN MOROCCO)
the consent or acquiescence of Morocco. It is also true that France,
after the institution of the Protectorate, obtained declarations of
renunciation from a large number of other States which were in a
similar position. This is not enough to establish that the States
exercising consular jurisdiction in pursuance of treaty rights

enjoyed in addition an independent title thereto based on custom
or usage.

The second consideration relates to the question of proof. This
Court, in the Asylum Case (I. CJ. Reports 1950 ,p. 276-z77), when
dealing with the question of the establishment of a local custom
peculiar to Latin-American States, said :
"The Party which relies on a custom of this kind must prove
that this custom is established in such a manner that it has become
binding on the other Party. The ColombianGovernment must prove
that the rule invoked by it is in accordance with a constant and
uniform usage practised by the States in question, and that this
usage is the expression of a right appertaining to the State granting
asylum and a duty incumbent on the territorial State. This follows
from Article38 of the Statute of the Court, which refers to inter-
national custom 'asevidenceof a general practice accepted as law'."

In the present case there has not been sufficient evidence to
enable the Court to reach a conclusion that a right to exercise
consular jurisdiction founded upon custom or usage has been estab-
lished in such a manner that it has become binding on Morocco.

This contention has also been based upon the practice since the
date when the treaty right of the United States to exercise extended
consular jurisdiction and derivative rights came toan end with the
coming into operation of the Convention between France and Great
Britain of 1937.

During this period France and the United States were in negoti-
ation with regard to a number of questions, including the renuncia-

tion of capitulatory rights. There are isolated expressions to be
found in the diplomatic correspondence which, if considered with-
out regard to their context, might be regarded as acknowledgments
of United States claims to exercise consular jurisdiction and other
capitulatory rights. On the other hand, the Court cttn not ignore
the general tenor of the correspondence, which indicates that at
al1 times France and the United States were looking for a solution
based upon mutual agreement and that neither Party intended to
concede its legal position. In these circumstance, the situation in
which the United States continued after 1937 to exercise consular
jurisdiction over al1criminal and civil cases in which United States
nationals were defendants, is one that must be regarded as in the de Madrid, en 1880, et à Algésiras, en 1906, qui n'avaient pas de
droits conventionnels, mais qui exerçaient la juridiction consulaire
avec le consentement exprès ou tacite du Maroc. Il est vrai égale-
ment que la France, après l'établissement du protectorat, a ovenu
des déclarations de renonciation d'un grand nombre d'autres Etats

qui se troiivaient dans la même situation. Ceci ne suffit pas pour
établir que les Etats exerçant la juridiction consulaire en applica-
tion de leurs droits conventionnels possédaient en outre un titre
inclépendant à cette juridiction, fondé sur la coutumeou l'usage.
La seconde considération a trait à la question de la preuve. La
Cour a déclaré,dans l'affaire di1 droit d'asile, ,au sujet de l'établis-
sement d'une coutume locale propre aux Etats de l'Amérique
latine (C. 1.J. Relxte2L 1950, pp. 276-277) :

((La partie qui invoque une coutume de cette nature doit prouver
qu'elle s'est constituéede telle manière qu'elle est devenue obliga-
prouver que la règledont il se prévaut,est conformeColoàblin usage
constant et uniforme, pratiqué par les Etats, en question, et que
cet usage traduit un droit, appartenant à 1'Etat octroyant l'asile
et un devoir incombant à 1'Etatterritorial. Cecidécouledel'artic38
du Statut de la Cour, qui fait mention de la coiitume internationale
((comme preuve d'une pratique générale acceptéecomme étant
(le droit».)I

En l'espèce, il n'a pas étéfourni de preuve suffisante pour
permettre à la Cour de conclure qu'un droit à l'exercice d'une
juridiction consulaire fondé sur la coutume ou sur l'usage avait
étéétabli de telle manière qu'il soit devenu obligatoire pour le
Maroc.
Cet argument a également été fondé sur la pratique suivie

depuis la date à laquelle, par l'effet de l'entrée en vigueur de la
convention de I9:j7 entre la France ,et la Grande-Bretagne,
a pris fin le droit: conventionnel des Etats-Unis d'Amérique à
l'exercice d'unc juridiction consulaire étendue et aux droits qui
en découlaient.
Pendant cette ptiriode, la France et les États-unis ont négocié
sur un certain nombre de questions, y compris la renonciation
aux droits capitula~ires. On trouve dans la correspondailce diplo-
matique des expre:;sions isolées qui, prises hors de leur contexte,
peuv~nt êtreconsidéréescomme la reconnaissance des prétentions
des Etats-Lnis dle:uercer la juridiction consula.ire et autres droits

capitulaires. Mais d'autre part, la Cour ne peut ignorer la teneur
générale de la co;respondance (lui démontre qu'à tout moment
la France et les Etats-Unis cherchaient une solution fondéc siir
un accord réciproque et (lue ni l'iine ni l'nutrc des Parties n'cii\.i-
sngeait l'abandon (le sa position ji~,ridicliie.L):tns ces conditions,
l'état de choses d'al~rhs lequel les Etats-ITnis ont continué apriis
1937 d'exerccr la juridiction consulaire pour toutes les affaires
civiles et criminelles où leurs ressortissants étaient défendeurs
2Ynature of a provisional situation acquiesced in by the Moroccan
authorities.

Accordingly, it is necessary to conclude that, apart from the
special rights under Articles 20 and 21 of the Treaty of 1836 and
those which arise from the provisions of the Act of Algeciras, to
which reference has been made above, the United States claim to
exercise and enjoy, as of right, consular jurisdiction and other capitu-
latory rights in the French Zone came to an end with the term-

ination of "al1 rights and privileges of a capitulatory character in
the French Zone of the Shereefian Empire" by Great Britain, in
pursuance of the provisions of the Convention of 1937.

The Court will now consider the claim that United States nationals
are not subject, in principle, to the application of Moroccan laws,
unless they have first received the assent of the United States
Government.

The French Submission is this regard reads as follows :

"That the Government of the United States of America is not
entitled to claim that the application of al1laws and regulations to
its nationals in Moroccorequires its express consent ;

That the nationals of the United States of America in Morocco
are subject to the laws and regulations in force in the Shereefian
Empire and in particular the regulation of December 3oth, 1948,
on imports not involving an allocation of currency, without the
prior consent of the United States Government."

The United States Submission in this regard reads as follows :

"4. Under the regime of extraterritorial jurisdiction now exer-
cised by the United States in Morocco, United States citizens are
not subject, in principle, to the application of Moroccan laws.
Such laws become applicable to the United States citizens only
if they aresubmitted to the prior assent ofthe United States Govern-
ment and if this Government agrees to make them applicable to
its citizens. The Dahir of December 30,1948, not having been sub-
mitted to the prior assent of the United States Government, cannot
be made applicable to United States citizens."

The claim that Moroccan laws are not binding on United States
nationals, unless assented to by the Government of the Uniteddoit apparaître co:mme ayant la nature d'un état de choses provi-
soire tacitement accepté par les autorités du Maroc.

En conséquence, il faut conclurequ'en dehors des droits spéciaux
reconnus par les articles 20 et 21 du traité de 1836 et de ceux qui

découlent des dispositions de l'acte d'Algésiras mentionnées plus
haut, la prétention des États-~riis d'exercer à titre de droit la
juridiction consulaire et autres droits capitulaires en zone fran-
çaise et à bénéficierdecette juridiction et de ces droits est devenue
caduque quand la Grande-Bretagne a mis fin, «en ce qui concerne
la zone française de l'Empire chérifien, à tous droits et privilèges
ayant un caractère capitulaire », en vertu des dispositions de la
convention de 19:;7.

La Cour passe rnaintenant à l'examen de la prétention suivant
laquelle les ressortissants des États-unis ne'sont pas soumis, en
principe, à 1'applic:ation des lois marocaines, à moins que celles-ci
n'aient auparavarit reçu l'assentiment du Gouvernement des
États-unis.
Les conclusions du Gouvernement de la République française
sur ce point sont ainsi conçues :

(Que le Gouvernement des États-unis d'Amérique n'estpas en
droit de prétendre que l'application à ses ressortissants au Maroc
de toutes législationset réglementations dépend deson consentement
exprès ;
Que les ressoirtissants des États-unis d'Amériqueau Maroc sont
vigueur dans l'Empire chérifien,notamment enementaceequi concerne la
réglementation du 30 décembre 1948 sur les importations, sans
devises, sans qiie l'accord préalable du Gouvernement des Etats-
Unis soit nécessaire.))

La conclusion dlu Gouvernement des États-unis sur ce point
est ainsi conçue :

((4. Sous le régime de compétence judiciaire extraterritoriale
actuellement exercé au Maroc par les Etats-Unis, les citoyens
de ce pays ne sont pas soumis, en principe, à l'application des lois
marocaines.
Ces lois ne deviennent applicables aux citoyens des États-Unis
qu'après avoir (,tésoumises à l'assentiment préalabledu Gouverne-
meni des États-unis et que ce gouvernement en ait approuvé
l'application à :;escitoyens. Le dahir du 30 décembre1948n'ayant
pas étésoumis à l'assentiment préalable du Gouvernement des
Etats-Unis n'est pas applicable aux citoyens américains. ))
La prétention suivant laquelle les lois marocaines ne sont pas
obligatoires pour les ressortissants des États-unis, à moins d'avoir

29States, is linlted with the regime of Capitulations, and it will not
be necessary to repeat the considerations which have already been
cliscussed in dealing with consular jurisdiction.

There is no provision in any of the treaties which have been
under consideration in this case conferring upon the United States
any such right. The so-called "right of assent" is merely a corollary
of the system of consular jurisdiction. The consular courts applied
their own law and they were not bound in any way by RIoroccan
law or Moroccan legislation. Before a consular court could give
effect to a Moroccan law it was necessary for the foreign Power
concerned to provide for its adoption as a law binding on the consul
in his judicial capacity. It was the usual practice to do this by
embodying it either in the legislation of the foreign State or in
ministerial or consular decrees of that State issued in pursuance of
delegated powers. The foreign State could have this done or it could
refuse to provide for the enforcement of the law. There was a "right
of assent" only to the extent that the intervention of the consular
court was necessary to secure the effective enforceinent of a Moroc-
can lalv as against the foreign nationals.

In the absence of any treaty provisions dealing with this matter,
it has been contended that a "right of assent" can be based on

custom, usage or practice. It is unnecessary to repeat the reasons
~vhich have been given for rejecting custom, usage and practice
as a basis for extended consular jurisdiction, and which are largcly
applicable to the "right of assent". It is, however, necesiary to
point out that the very large number of instances in which Moroccan
laws were referred to the United States authorities can readily be
explained as a convenient way of ensuring their incorporation in
ministerial decrees binding upon the consular courts. In that way,
and in that way only, could these laws be made enforceable as
against United States nationals so long as the extended consular
jurisdiction was being exercised.

The problem arises in three ways, which must be considercd
separately.
The first is in cases where the application of a Moroccan law to
LTnited States nationals would be contrary to the treaty rights of
the United States. In such cases, the application of hforoccan laws,
whether directly or indirectly to these nationals, iinless assented to
by the Vnited States, would be contrary to international law, and

the dispute which might arisc therefrom would have to be dealt
lvith according to the ordinary mcthods for the settlement of inter-
national disputes. These considerations apply to the Decree of
1)ecembcr 3oth, 1948, \\-hich the Court has found to be contrary
to trc,nty rightsof the C7nitedStates.
3"reçu l'assentiment du Gouvernement des États-unis, se rattache
au régime des capitulations ; il n'est pas nécessaire de reprendre
les considérations déjà examinées à propos de la juridiction
consulaire.

Aucune disposition d'aucun des traités examinés en l'espèce ne
confère ce droit aux Etats-Unis. Le prétendu droit d'assentiment
est seulement un ~rorollaire du système de juridiction consulaire.
Les tribunaux coni;ulaires appliquaient leur propre droit sans être
liésen aucune façon par le droit marocain ou la législation maro-
caine. Avant qu'lin tribunal consulaire pût appliquer une loi
marocaine, la Puissance étrangère intéressée devait pourvoir à
son adoption comme loi s'imposant au consul dans l'exercice de
sa compétence judiciaire. La pratique généralementsuivie consistait
à l'incorporer soit dans la législation de 1'Etat étranger, soit dans
des décisions ministérielles ou c~nsulaires de cet Etat prises en
vertu de pouvoirs délégués. L'Etat étranger pouvait avoir agi

ainsi ou pouvait refuser de pourvoir à l'application de la loi. Il
n'y avait de ((droit d'assentiment 1)que dans la mesure où l'inter-
vention du tribunal consulaire était nécessaire pour obtenir l'appli-
cation effective d'une loi marocaine à l'encontre de ressortissants
étrangers.
En l'absence de toutes dispositioils conventionnelles enlamatière,
on a soutenu qu'un ((droit d'assentiment » peut être fondé sur la
coutume, l'usage ou la pratique. Il est inutile de reprendre les
raisons qui ont étédonnées pour rejeter la coutume, l'usage et
la pratique en tant que fondement d'une juridiction consulaire
étendue, raisons qui s'appliquent, dans une large mesure, au

« droit d'assentiment )).Il convient cependant de souligner que
le très grand nombre de cas dans lesquels des lois marocaines
ont été soumises aux autorités des Etats-Unis s'explique facile-
ment par le fait qu'il s'agissait là d'un moyen commode pour en
assurer l'incorporation dans des décisions ministérielles s'impo-
sant aux tribunaux consulaires. C'est de cette façon, et de cette
façon seulement, qu'il Était possible de rendre ces lois applicables
aux ressortissants des Etats-Unis aussi longtemps qu'était exercée
la juridiction consulaire étendue.
Le problème se pose sous trois aspects qu'il faut envisager
séparément.
Le premier vise 1:s cas où l'application d'une loi marocaine aux

ressortissants, des Etats-Unis serait contraire aux droits conven-
tionnels des Etats-Lnis. Dans de tels cas, l'application directe ou
indirecte des lois inarocaines à ces ~essortissants serait, à moins
qu'elle n'ait reçu l'assentiment des Etats-Unis, contraire au droit
international, et le différend qui pourrait en résulter devrait être
traité par les methodes ordinaires pour le rhglement des différends
internationaux. Ccs considérations s'al)pliqiicnt 2 l'arreté di1
30 décembrc !948 ,rluela C,our a jiigé contraire aux droits conven-
tionncls dcs Etats--ITnis. The second way in which the problem arises is in cases in which
the CO-operation of the consular courts is requiredin order to enforce
the Moroccan legislation. In such cases, regardless of whether the
application of the legislation would contravene treaty rights, the
assent of the United States would be essential to its enforcement
by the consular courts.
The third way in which the problem arises is in cases where the
application to United States nationals, otherwise than by enforce-
ment through the consular courts, of Moroccan laws which do not
violate any treaty rights of the United States is in question. In
such cases the assent of the United States authorities is not required.

Accordingly, and subject to the foregoing qualifications, the Court
holds that the United States is not entitled to claim that the applic-
ation of laws and regulations to its nationals in. the French Zone
requires its assent.

The Government of the United States of America has submitted
a Counter-Claim, a part of which relates to the question of immunity
from Moroccan taxes ingeneral, and particularly from the consump-
tion taxes provided by the Shereefian Dahir of February 28th, 1948.
The following Submissions are presented with regard to these ques-
tions :
On behalf of the Government of the United States :

"2. ~he treaties exempt American nationals from taxes, except
as specifically provided by the same treaties ; to collect taxes from
American nationals in violation of the terms of the treaties is a
breach of international law.
Such taxes can legally be collected from American nationals
only with the previous consent of the United States which operates
to waive temporarily itstreaty right, and from the date upon which
the consent. is given, unless otherwise specified by the terms of
Consumption taxes provided by the Dahir of February 28, 1948,
which were collected from American nationals up to August 15,
1950, the date on which the United States consented to these
taxes, were illegally collected and should be refunded to them.

3. Since Moroccan laws do not become applicable to American
citizens until they have received the prior assent of the United
States Government, the lack of assent of the United States Govern-
ment to the Dahir of February 28, 1948,rendered illegal the collec-
tion of the consumption taxes provided by that Dahir."

On behalf of the Government of France :
"That no treaty has conferred on the United States fiscal immun-
ity for its nationals in Morocco, either directly or through the
cffcct of the most-favoured-nation clause ;

3 1 Le second aspect sous lequel se pose le problème a trait aux
cas où le concours des tribunaux consulaires est nécessaire pour
pouvoir appliquer ,la législation marocaine. Dans de tels cas,
l'assentiment des Etats-Unis serait essentiel à l'application de

la législation par les tribunaux consulaires, que cette application
contrevienne ou non aux droits conventionnels.
Le troisième aspect sous lequel se pose le problème de l'assen-
timent a trait aux cas où il s'agit de l'application à des ressortis-
sants des Etats-Unis, autrement que par les tribunaux consulaires,
de lois marocaines qui ne violent aucun des droits conventionnels

des États-unis. Dans de tels cas, l'assentiment des autorités des
États-unis n'est pas requis.
En conséquence, et ,sous les réserves énoncées plus haut, la
Cour conclut que les Etats-Unis ne sont pas fondés à prétendre
que l'application de lois et de règlements à leurs ressortissants

en zone française requiert leur assentiment.

Le Gouvernement des États-unis d'Amérique a présenté une

demande reconventionnelle dont une partie a trait à la question
de l'immunité de taxes marocaines en général et, en particulier,
des taxes de consommation établies par le dahir chérifien du
28 février 1948. Les conclusions suivantes ont été présentées à
cet égard :

Au nom du Gouvernement des États-unis :
((2. Les traités exemptent les ressortissants américains de toute
taxe, à 1'except.ionde celles qu'ils prévoient expressément ;perce-
voir des taxes des ressortissants américains en violation des dispo-
sitions des traités est un manquement au droit international.
Ces taxes ne peuvent en droit êtrerecouvréessu; les ressortissants
américains qu'avec l'assentiment préalable des Etats-Unis valant
renonciation temporaire à leur droit conventionnel, et à compter
de la date de cet assentiment, sauf disposition contraire contenue
dans l'acte d'assentiment.

Les taxes de consommation, fixéespar le dahir du 28 février 1948
et qui ont étérecouvrées sur des,ressortissants américains jusqu'au
15 août 1950, date à laquelle les Etats-Unis ont consenti à ces taxes,
ont étéperçues illégalement et doivent leur êtreremboursées.
3. Attendu que les lois marocaines ne peuvent s'appliquer aux
citoyens américains ,avant d'avoir reçu l'assentiment préalable du
Gouvernement des Etats-Unis, le défaut d'assentiment du Gouver-
nement des Etats-Unis au dahir du 28 février 1948 a donné un
caractère illégal au recouvrement des taxes de consommation
établies par ce dahir.))

Au nom du Gouvernement français :

c(Qu'aucun t.raité n'a conféré aux États-unis une immunité
fiscale pour leurs ressortissants au Maroc, ni directement, ni par
le jeu de la clause de la nation la plus favorisée ; That the laws and regulations on fiscal matters which have been
put into forcein the ShereefianEmpire areapplicabletothenationals
of the United States without the prior consent of the Government
of the United States ;
That, conse(luently, consumption taxes provided by the Dahir
of Fcbruary 28th, 1948,have been legally collected from the nation-
als of the United States, and should not be refunded to them."

The Government of the United States contends that its treaty
rights in Rlorocco confer upon United States nationals an immunity
fronl taxes except the taxes specifically recognized and permitted
by the treaties. This contention is based on certain bilateraltreaties
with Morocco as well as on the Madrid Convention of 1880and the
Act of Algeciras of 1906.
The Court will first consider the contention that the right to
fiscal immunity can be derived from the most-favoured-nation
clauses in Article 24 of the Treaty between the Cnited States and
JIorocco of 1836 and in Article 17 of the Madrid Convention, in
conjunction with certain provisions in treaties betu-een hlorocco
and Great Rritain and Morocco and Spain.

The General Treaty between Great Britain and Morocco of 1856
provided in the second paragraph of Article IV that British subjects
"shall not be obliged to pay, under any pretence whatever, any
taxes or impositions". The Treaty between hlorocco and Spain of
1861 provided in Article V that "Spanish subjects can not undcr
any pretext be forced to pay taxes or contributions".

It is submitted on behalf of the United States that the most-
favoured-nation clauses in treaties with countries like Morocco were
not intended to create merely temporary or dependent rights, but
nere intended to incorporate permanently these rights and render
them independent of the treaties by which they were originally
accorded. Tt is consequently contended that the right to fiscal
immunity accorded by the British Geileral Treaty of 1856 and the
Spanish Treaty of 1861, was incorporated in the treaties which
guaranteed to the United States most-favoured-nation treatment,
with the result that this rightwould continue even if the rights and
privileges granted by the Treaties of 1856 and 1861 should corne to
an end.

For the reasons stated above in connection with consular juris-
diction, the Court is unable to accept this contention. It is not
established that most-favoured-nation clauses in treaties with
Morocco have a meaning and effect other than such clauses in
other treaties or are governed by different rules of law. When pro-
\risions granting fiscal immunity in treaties between Morocco and
third States have been abrogated or renounced, these provisions
can no longer be relied upon by virtuc of a most-favoured-nation
clause. In such circumstances, it becomes necessary to examine Que les lois et règlementsen matière fiscalemis en vigueur,dans
l'Empire chérifiensont applicables aux ressortissants des Etats-
Unis sans que l'accord préalabledu Gouvernement des Etats-Unis
soit nécessair,
Que lestaxes;de consommation établies parle dahir du 28 février
1948 ont donc étélégalement perçues sur les ressortissants des
Etats-Unis et qu'il n'y apas lieuà remboursement. II

Le Gouvernement des États-unis soutient que ses droits conven-
tionnels au Maroc confèrent aux ressortissants des États-l'nis une
exemption de taxes, sauf pour celles que les traités ont spécialc-
ment reconnues et autorisées. Cette these se fonde sur certains
traités bilatéraux avec le Maroc ainsi que sur la convention de
Madrid de 188c et sur l'acte d'Alg4siras de 1906.
La Cour examinera tout d'abord la thèse d'après laquelle lc
droit à l'immunité fiscale peut êtredéduit des clauses de la nation
la plus favorisée, dans l'article 24 du traité de 1836 entre les Etats-
Unis et le Maroc et dans l'article 17 de la convention de. Madrid,
jointes à certaines, des dispositioris des traités entre le Maroc et
la Grande-Bretagne et entre le Maroc et l'Espagne.

Le traité généralde 1856 entre la Grande-Bretagne et le Maroc
prévoit dans le deuxième alinéa de son article IV que les sujets
britanniques ((ne seront jamais forcés, sous quelque prétexte que
ce soit,à payer des taxes ou impositions )).Le traité de 1861 entre
l'Espagne et le Maroc stipule dans son article V qu'c on ne pourra,
sous aucun prétexte, obliger les sujets espagnols à payer des impôts
ou contributions 11.
Il est prétendu, au nom des États-unis, que les clauses de la
nation la plus favorisée dans les traités avec des pays commc le
Maroc avaient pour objet non de créerseulement des droits tempo-
raires ou subordonnés, mais d'instaurer ces droits à titre permanent
et de les rendre indépendants des traités qui les avaient primitive-

ment consrntis. Il est soutenu en conséquence que le droit à l'immu-
nité fiscale accordé par le traité généralbritannique de 1856 et
par le traité espag?ol de 1861 est incorporé dans les traités qui
ont garanti aux Etats-Unis le traitement de la nation la plus
favorisée, le résultat étant que ce droit persisterait même si les
droits et privilèges reconnus par les traités de 18j6 et de 1861
devaient prendre fin.
Pour les raisons exposées plus haut, à propos de la juridiction
consulaire, la Cour n'est pas en mesure d'accepter cette thèse.
Il n'est pas établi que les clauses de la nation la plus favorisée
dans les traités avec le Maroc aient une autre signification ou un
autre effet que dans les clauses semblables d'autres traités, ou
soient régies par cles regles de droit différentes. Lorsqu'il y a eu

abrogation ou renonciation à l'égard de dispositions d'immunité
fiscale contenues dans les traités entre le Maroc et les Etats tiers,
on ne peut plus s'en prévaloir en vertu d'une clause de la nation205 JUDGMENT OF 27 VI1152 (u.s.NATION.4LS IN MOROCCO)

whcther the above-mcntioned provisions in the Trcaties of 1856
and 1861 are still in force.

The second paragraph of Article IV in the General Treaty with
Great Britain was ahrogated by the Franco-British Convention of
July zgth, 1937, Protocol of Signature, Article 4 (a). As from the
coming into force of this Convention, that paragraph of Article IV
of the General Treaty of 1856could no longcr he relied upon hy the
United States by virtue of a most-favoured-nation clause.
As already held above, the effect of the neclaration madc by
France and Spain of March 7th, 1914,was an unconditional renun-

ciation by Spain of al1 the rights and privileges arising out of the
regime of Capitulations in the French Zone. This renunciation
involved, in the opinion of the Court, a renunciation by Spain of
the right of its nationals to immunity from taxes under Article V
of its Treaty with Morocco of 1861, since such a general and com-
plete immunity from taxes must be considered as an elenlent of the
regime of capitulations in Morocco. When Spain relinquished al1the
capitulatory rights, it must thereby be considered as having given
up the rights to fiscal immunity.
This view is confirmed by the attitude taken by number of other
States in this respect. Great Britain renounced al1rights and privi-
lcges of a capitulatory character in the French Zone by Article I
of its Convention with France of 1937. In the Protocol of Signature
it was declared that the effect of this Article and of Article 16 is
to abrogate a number of articles in the General Treaty of 1856,

including, as has been stated above, the second paragraph of
Article IV. This seems to show that France, representing Morocco,
and Great Britain were proceeding on the assumption that the tax
immunity accorded by that Article w-asa right of a capitulatory
character. The other States, which, during the years 1914-1916,
equally renounced al1rights and privileges arising out of the regime
of Capitulations in the French Zone, have acquiesced in the taxation
of their nationals.
For these reasons, the Court holds that the right totax immunity
accorded by Article V of the Spariish Treaty of 1861, having been
surrendered by Spain, can no longer be invoked by the United
States by virtue of a most-favoured-nation clause.
The Government of the United Stateshasfurther contended that
it has an independent claim to tax immunity by virtue of being a
party to the Convention of Madrid and the Act of Algeciras. It

contends that by these instruments a regime as to taxes was set
up, which continued the tax immunity in favour of the nationals
of foreign States, thereby confirming and incorporating this pre-
existing regime, which therefore is still in force, except for the
States which have agreed to give it up.
The Court is, however, of opinion that the Madrid Convention
did ilot confirm and incorporate the then existing principle of tax
33la plus favorisée. Dans ces conditions, il faut examiner si les dispo-
sitions ci-dessus mentionnées des traités de 1856 et de 1861 sont
toujours en vigueur.
Le deuxième alinéa de l'article IV du traité général avec la
Grande-Bretagne a étéabrogépar la convention franco-britannique
du 29 juillet 1937 (protocole de signature, article 4, litt. a). Dès
l'entrée en vigueur de cette convention, les Etats-Unis n'ont plus
pu se prévaloir de cet alinéa de l'article IV du traité général de
1856en vertu de la clause de la nation la plus favorisée.
Comme il a déjà été dit plus haut, la déclaration de la France
et de l'Espagne en date du 7 mars 1914 a eu pour effet la renoncia-
tion pure et simple par l'Espagne dans la zone française à tous les
droits et privilèges issus du régimedes capitulations. Dans l'opinion

de la Cour, cette renonciation impliquerait la renonciation par
l'Espagne au droit de ses ressortissants d'êtreexemptés de taxes
en vertu cle l'article V de son traité de 1861 avec le Maroc, parce
qu'une immunité fiscale aussi généraleet complète doit êtretenue
pour un élémentdu régime des capitulations au Maroc. L'Espagne
ayant abandonné tous ses droits capitulaires doit dès lors etre
considéréecomme ayant renoncé à son droit à l'immunité fiscale.
C'est ce que confirme l'attitude d'un certain nombre d'autres
États en la matikre. La Grande-Bretagne a renoncé à tous les
droits et privilèges d'un caractère capitulaire dans la zone fran-
çaise du Maroc par l'article premier de la convention de 1937
avec la France : le protocole de signature énonce que cet article
et l'article6 ont pour effet d'abroger un certain nombre d'articles
du traité généralde 1856, y compris, ainsi qu'il a étédit plus haut,
le deuxième a1ini.a de l'article IV. Ceci paraît montrer que la
France, représentamt le Maroc, et la Grande-Bretagne se fondaient
sur la présomption que l'immunité de taxes accordée par cet article
était un droit de caractère capitulaire. Les autres Etats qui avaient,

de 1914 à 1916, également renoncé à tous droits et privilèges
issus du régime des capitulations dans la zone française, ont impli-
citement acquiescé à ce que leurs ressortissants soient taxés.
C'est pourquoi la Cour conclut que le droit à l'exemption de
taxes, prévu à l'article V du traité espagnol de 1861, ayant été
abandonnk par l'Espagne, les Etats-Unis ne peuvent plus l'invoquer
en vertu d'une clamse de !a nation la plus favorisée.
Le Gouvernement des Etats-Unis a prétendu en outre avqir un
droit indépendant à l'exemption de taxes, du fait que les Etats-
Cnis sont partie à la convention de hZadrid et à l'acte d'Algésiras.
Il soutient qu'en maticre de taxes, ces instruments ont institué
un régime qui a maintenu l'exemption de taxes en faveur des
ressortissants des Etats étrangers, confirmant ainsi et incorporant
le régime antérieur, qui est par conséquent toujours en vigueur,
sauf pour les Etats qui ont conscnti à y renoncer.
La Cour estime que la convciition de hIadrid n'a pas confirmé
et incorporé le principe de l'immunité fiscale alors existant. Elleimmunity. It merely pre-supposed the existence of this principle
and curtailed it by exceptions in Articles 12 and 13 without modi-
fying its legal basis. It did not provide a new and independent
ground for any claim of tax immunity.
Similar considerations apply to the Act of Algcciras, which further
curtailed the regime of tax immunity by exceptions in Articles 59,
61, 64, and 65. It did not provide any new and independent legal

basis for exemption from taxes.

The Government of the United States has invoked Articles 2 and
3 of the Madrid Convention, which grant exemption from taxes,
othcr than those mentioned in Articles 12 and 13, to certain "pro-
tected persons". But the "protégés" mentioned in Articles 2 and 3
constituted only a limited class of persons in the service of diplo-
matic representati~~es and consuls of foreign States. No conclusion
as to tax immunity for nationals of the United States in general
can, in the opinion of the Court, be drawn from the privileges
granted to this limited class of protected perçons.

It is finally contended, on behalf of the Government of the
Lnited States, that the consumption taxes imposed by the Dahir of
February 28th, 1948, are in contravention of special treaty rights.

Refercnce is made to the Treaty of Commerce between Great
Britain and Morocco of 1856, Articles III, VII, VI11 and IX, and
it is submitted that United States nationals are exempt from those
consumption taxes by virtue of these Articles in conjunction with
the most-favoured-nation clauses in the Treaty of 1836 between
Morocco and the United States.
These four Articles in the British Commercial Treaty of 1856
relate to taxes and duties on e"ods ex~orted from or im~orted into
Rlorocco, or on goods conveyed from one nloroccan port to another.
The consumption taxes provided by the Dahir of February 28th,
1948, are, according to its Article 8, payable on al1products whether
they are imported into the French Zone of Morocco or manufac-
tured or produced there. They can not, therefore, be assimilated
to the particular taxes mentioned in the articles of the British
Commercial Treaty, invoked by the United States, nor can they

be considered as a customs duty. The mere fact that it may be
convenient in the case of imported goods to collect the consumption
tax at the Customs Office does not alter its essential character as a
tax levied upon al1 goods, whether imported into, or produced in,
Morocco. It may be recalled in this connection that the Permanent
Court of International Justice recognized that fiscal duties collected
at thc frontier on the entry of certain goods were not to be confused
with customs duties ; in its Judgment of June 7th, 19-32>in the
Free Zones Case (P.C.I.J., Series A/B, No. 46, 11.172), it laid down
that "the withdrawal of the customs line does not affect the righta simplement préijupposél'existence du principe et l'a limité par
le moyen d'excepl.ions dans ses articles 12 et 13, sans en modifier
la base juridique. Elle n'a fourni aucune base nouvelle et indéprii-
dante pour une prétention à l'exemption de taxes.
Desconsidérations du mêmeordre s'appliquent àl'acte d'Algésiras
qui, par le moyeri des exceptions énumérées dans ses articles 59,
61, 64 et 65, a limité encore plus le régime de l'iinmunité fiscale.
Il n'a fourni aucune base juridique nouvelle et indépendante à
l'exemption de talxes.
Le Gouvernement des États-unis a invoqué les articles 2 et 3
de la convention de Madrid, qui accordent à certaines ((personnes

protégées ))l'exemption de taxes autresque celles qui sont stipulées
aux articles 12 et 13. Mais les ((protégés r visésaux articles 2 et 3
ne constituent qu'une catégorie limitée de personnes au service
des représentants diplomatiques et consuls des Etats étrangers.
Dans l'opinion de la Cour, il n'est possible de tirer des privilèges
accordés à cette catégorie limitée de personnes protégées aucune
conclusiori quant à l'immunité fiscale des ressortissants des Etats-
Unis en général.
Enfin, il est soutenu, au nom du Gouvernement des États-~nis,
que les taxes de consommation imposées par le dahir du 28 février
1948 sont contraires à certains droits conventionnels. Il est fait
référenceaux articles III, VII, VI11 et IX du traité de commerce

de 1856 entre la Grande-Bretagne et le Maroc pour en conclure
que ces articles, joints aux clauses de la nation la plus favorisée du
traité de 1836 entre le Maroc et les Etats-Unis, exemptent les
ressortissants des Etats-Unis des taxes de consommation.

Les quatre articles précités du traité commercial de 1856 avec
la Grande-Bretagne ont trait aux taxes et droits sur les marchaii-
dises exportées du Maroc ou importées dans ce pays, ou sur les
marclianclises transportées d'un port marocain à un autre. Les
taxes de consommation prévues par le dahir du 28 février 1948
sont exigibles, selon son article 8, sur tous les produits, qu'ils soient
introduits dans la zone française du Maroc ou qu'ils y soient fabri-

qués ou obtenus. Elles ne sauraient donc êtreassimilées aux taxes
particulières mentionnées dans les articles du traité commercial
britannique qui ont été invoqués par les Etats-Unis, de même
qu'elles ne sauraient êtreconsidéréescomme un droit de douane.
Le seul fait que, clans le casde marchandises importées, il peut être
commode de percevoir la taxe de consommation à la douanc ne
change pas le caractère essentiel de cette taxe,qui est des'applicluer
à toutes marchandises, qu'elles soient importées au Maroc ou
qu'elles y soient produites. On peut rappeler à cet égardque la Cour
permanente de Justice internationale a admis qu'on ne saurait
coiifondre avec des droits de douane des droits fiscaux perçus à 1ü
frontière lors de l'entrée de certaines marchandises ; dans soliof the French Government to collect at the political frontier fiscal
duties not possessing the character of customs duties".

The Court is, consequently, unable to hold that the imposition
of these consumption taxes contravenes any treaty rights of the
United States. In such circumstances the question of a partial
refund of consumption taxes paid by United States nationals does
not arise.
It follows from the above-mentioned considerations that the
Government of the United States is not entitled to claim that
taxes, including consumption taxes, shall be submitted to the
previous consent of that Government before they can legally be
collected from nationals of the United States. Since they are, in the
opinion of the Court, not exempt from the payment of any taxes
in the French Zone, there is no legal basis for the claim that laws
and regulations on fiscal matters shall be submitted to United
States authorities for approval.

The conclusion which the Court has thus arrived at seems to be
in accordance with the attitude which other States have taken with
regard to this question. Sax immunity in the French Zone is not
claimed either by the United Kingdom or by Spain or any other
State which previously enjoyed such a privileged position. The
only State now claiming this privilege is the United States, though
no tax immunity is guaranteed by its Treaty with Morocco of
1836. To recognize tax immunity for United States nationals
alone would not be compatible with the principle of equality of
treatment in economic matters on which the Act of Algeciras is
based.

The final Submission of the United States of America upon that
part of its Counter-Claim which is based upon Article 95 of the
General Act of Algeciras, is as follows :

"1. Under Article 95 of the Act of Algeciras,the value of imports
from the United States must be determined for the purpose of
customs assessmentsby adding to the purchase value ofthe imported
merchandise in the United States the expenses incidental to its
expenses followingits delivery to the custom-houçe,such as customs
duties and storage fees.
It is a violation of the Act of Algeciras and a breach of inter-
national law for the customs authorities to depart from the method
of valuation so defined and to determine the value of imported
merchandise for customs purposes by relying on the value of the
importcd merchandisc on the local Moroccanmarkct."arrêt du 7 juin 19132 en l'affaire des zones franches, elle a énoncé
que (le recul de la ligne des douanes ne préjuge pas du droit, pour
le Gouvernement français, de percevoir, à la frontière politique,
des droits fiscaux n'ayant pas le caractère de droits de douane 1).
(C. P. J. I., Série.A/B, no 46, p. 172.)
Par conséquent, la Cour n'est pas en mesure de dire que l'imposi-
tion de ces taxes ,de consommation contrevient aux droits
conventionnels des Etats-Unis. Dans ces conditions, la question

d'un remboursement partie) des taxes de consommation acquittées
par les ressortissants des Etats-Unis ne se pose pas.
Deç considérations précitées, il s'ensuit que le Gouvernement
des Etats-Unis n',est pas en droit de récla.mer que les taxes, y
compris les taxes de consommation, soient soumises à son assenti-
ment préalable a~i?nt de pouvoir êtrelégalement perçues sur les
ressortissants des Etats-Unis. Puisque, de l'avis de la Cour, ces
derniers ne sont exempts du paiement d'aucune taxe dans la zone
francaise. la rétention selon laauelle les lois et rècrlemeiltsd'ordre
fiscai doibeniêtre soumis aux auiorités des États-~iis àfin d'appro-
bation est sans fondement.
La conclusion à laquelle la Cour est ainsi arriv$e paraît conforme
à l'attitude prise en la matière par d'autres Etats. L'immunité

fiscale daris la zone française n'est reclamée ni par le Royaume-Uni,
ni par l'Espagne, ni par aucun des autres Etats qui jpuissaient
précédemmentd'une telle situation privilégiée.Seuls, les Etats-Unis
revendiquent aujourd'hui ce privilège, bien que leur traité de 1836
avec le Maroc ne leur ait garanti aucune immunité fiscale. Recon-
naître l'immunité fiscale en faveur des seuls ressortissants des
États-unis, ne serait pas conforme au principe de l'égalitéde
traitement en matière économique. principe qui est à la base de
l'acte d'Algésiras.

La co~iclusioil finale des États-unis d'Amérique sur la partie
de sa demande reconventionnelle qui est fondée sur l'article 95
de l'acte d'Algésiras est la suivante :

(I. Aux termes de l'article 95 de l'acte d'Algésiras,il faut dcter-
miner, aux fins de l'évalgationen douane, la valeur des importa-
tions en prove:nancedes Etats-Unis en ajoutant à la valeur d'achat
aux Etats-Unis de la marchandise importéeles frais de transport
jusqu'au bureixu de la douane marocaine, à l'exclusion des trais
postérieiirà la remise de la marchandise au bureau de douane, tels
que les droits de douane et frais de magasinage.
C'est une v;iolatioilde l'acte d'Algésiraset un nianquenient au
droit international, de la part des autoritésdouanières,de s'écarter
de la méthode d'évaluation ainsi définieet de fixer, aux fins de
l'évaluationen douane, la valeur de la nlarchandise importéed'aprhs
la valeur de cctte marchandise sur le marcliélocal marocain. 11 The final Submission of the Government of France upon this part
of the Counter-Claim is as follows :
"That Article 95 of the Act of Algecirasdefinesvalue for customs
purposes as the value of the merchandise at the time and at the
place where it is presentcd for customs clearance;"
which, as was made clear in the oral argument, means the value in
the local, i.e. Moroccan, market.

The necessity, evidenced by Articles 95, 96 and 97 of the Act
of Algeciras, of creating some kind of machinery for securing a
just valuation of goods by the Customs authorities would appear to
follow, itzteralia, (a) froni the principle of economic equality which
is one of the principles underlying the Act, and (b) from the fact
that the import duties were fixed by the signatory Powers at 126 %.
Clearly, it would be easy, if it were desired to do so, to discriminate
against particular importers by means of arbitrary valuations or to
evade a fixed limitation of duties by means of inflated valuations.
But while the signatory Powers realized the necessity for some such
machinery, it does not appear that the machinery has given rise
to a practice which has been consistently followed since the Act
entered into force.
Article 95 specifies four factors in valuing merchandise :

(a) the valuation must be based upon its cash wholesale value ;

(b) the time and place of the valuation are fixed at the entry of
the merchandise at the custom-house ;
(c) the merchandise must be valued "free from customs duties
and storage dues", that is to say, the value must not i~icludethese
charges ;
(d) the valuation must take account of depreciation resulting
from damage, if any.

Article 96, which relates only to the principal goods taxed by the
Moorish Customs Administration, contemplated an annual fixing
of values by a "Committee on Customs Valuations" sitting at
Tangier. The local character of this Committee, and of the persons
whom it is directed to consult, should be noted. The schedule of
values fixed by it was to be subject to revision at the end of six
months if any considerable changes had taken place in the value of
certain goods. Article 96 is procedural and is intended to operate
within the ambit of Article 95.

Article 97 provided for the establishnient of a permanent "Com-
inittee of Customs", intended to supervise the customs service on
a high level and to watch over the application of Article 96 and

97, subject to the advice and consent of the "L)iplomatic Body at
Tangier".
Tfic Committec, on Customs Valuations referred to in Article 96
a1q)cars to have la1)sed in 1924 whcn the.Convention of L)ccem-
36 La conclusion finale de la France sur cette partie de la demande
reconventionnelle énonce :

(Que l'article 95 de l'acte d'Algésiras définit la valern douane
comme la valeur de la marchandise au moment et au lieu où elle
est présentée pourles opérations de dédouanement ;»
ce par quoi il fauit entendre, comme on l'a préciséen plaidoirie,
la valeur sur le marché local, c'est-à-dire marocain.
La nécessité,dont témoignent les articles 95, 96 et 97 de l'acte
d'Algésiras, d'instituer une sorte de mécanisme pour assurer une

juste évaluation des marchandises par les autorités douanières,
semble résulter, entre autres, a) du principe d'égalitééconomiqiie
qui est l'un des principes fondamentaux de l'acte, et bj du fait
que les droits d'importation ont étéfixéspar les Puissances signü-
taires à 124 0/, .l serait évidemment facile, si on le voulait,
de traiter défavorablement tel importateur au moyen d'évaluations
arbitraires ou d'éluder une limitation de droits au moyen d'évalua-
tions exagérées. Les Puissances signataires ont compris la néces-

sité d'un mécanisme de ce genre ; toutefois, il ne semble pas que
ce mécanisme ait donné naissance à une pratique qui ait étésuivie
d'une manière invariable depuis l'entrée en vigueur de l'acte.
L'article 95 prévoit quatre facteurs pour évaluer la marchandise :
a) l'évaluation doit se fonder sur le prix, au comptant et eii
gros ;

6) le temps et le lieu de l'évaluation sont fixés comme étant
l'entrée de la marchandise au bureau de douane ;
c) la marchandise doit être évaluée ((franche de droits de
douane et de magasinage ))c'est-à-dire que sa valeur ne doit pas
comprendre lesdits frais ;
d) l'évaluation doit tenir compte, s'il y a lieu, de la dépréciatioii
résultant d'avaries.

L'article 96, qui se rapporte uniquement aux principales mar-
chandises taxées par l'administration des douanes marocaines,
envisageait la détermination annuelle de leur valeur par une
((Commission des valeurs douanières ))siégeant à Tanger. Il faut
noter le caractère local de cette commission et des personnes
qu'elle était invitée à consulter. Le tarif des valeurs fixées.par
elle était susceptible d'êtrerevisé au bout de six mois si des nod di-
fications notables étaient survenues dans la valeur de certaines

marchandises. L'article 96 est une disposition procédurale appelce
à fonctionner dans le cadre de l'article 95.
L'article 97 prévoyait l'établissement d'un (coinité des douanes »
permanent, destiné à exercer sa haute surveillance sur le fonction-
iicment des douanes et à veiller à l'application des articles 96 et
97 sousréserve de l'avis du (Corps diplomatique à Tanger ».

La Commission des valeurs douanières visée à l'article 96 semble
Ctre tombée en désuétude en 1924, (luancl 1ü coiivciitioii di1

36ber 18th, 1923, on the Tangier Zone came into force, and replaced
it by a Committee rcpresenting the three Zones. The latter Com- .
mittee has not met since 1936.
Articles 82 to 86 of the Act, which relate to declarations by
importers, must also be noted. Article 82 requires an importer to
file a declaration, which must contain a detailed statement setting
forth the nature, quality, weight, number, measurement and value
of the merchandise, as well as the nature, marks and numbers of
the packages containing the same. A declaration of value made by
the importer can clearly not be decisive, because he is an interested
party, but at the same time he knows more about the goods than
anybody else, and, unless fraud is suspected, it is right that the
value appearing in the declaration should form an important ele-
ment in the valuation about to be made.
It can not be said that the provisions of Article 95 alone, or of
Chapter V of the Act considered as a whole, afford decisive evidence
in support of either of the interpretations contended for by the
Parties respectively. The four factors specified by Article 95 are
consistent with either'interpretation ;in particular, the expression
"
free from customs duties and storage dues" affords no clear indica-
tion, because, if the value in the country of origin, increased by the
amount of insurance, freight, etc., is to be taken as the basis, this
expression means "before entering the customs office and paying
duties" ; whereas, if the value in the local market is to be accepted
as the basis, some such expression is necessary (or at any rate
prudent) in order to indicate that the duty of 124 % must not be
levied on a value which already contains the 124 %.

The Court has examined the earlier practice, and the preparatory
work of the Conference of Algeciras of 1906, but not much guidance
is obtainable from these sources. The Commercial Agreement made
between France and Rlorocco, dated October 4th, 1892, consists of
two letters exchanged between the Foreign Minister of Morocco and
the Minister of France in Morocco, the latter of which contains the
expression :

"These goodsshall be assessedon the basis of their cash wholesale
market value in Lheport of discharge, in reals of vellon."

A preliminary draft of the Act (p. 97 of French Docume~ztsdiplo-
matiques, 1906, fascicule 1, Agaires du Maroc, entitled "II. Proto-
coles et comptes rendus de la Conférence d'Algésirasn) contains
the following article :

"ArticleXIX.-Import and export duties shall be paid forthwith
in cash at the custom-house where clearance is effected. The ad
valorenzduties shall be determined and paid on the basis of the cash
wholesalevalue of the goods at the port of discharge or the custom-
3718 décembre 1923, relative à la zone de Tanger, est entrée en
vigueur et lui a substitué une commission représentant les trois
zones. Cette dernière commission n'a pas siégédepuis 1936.
Il faut rioter également les articles 82 à 86 de l'acte, relatifs
aux déclarations exigées des importateurs. L'article 82 oblige l'im-
portateur à préseinter une déclaration détaillée énonçant l'espèce,
la qualité, lepoids, le nombre, la mesure et la valeur des marchan-

dises ainsi que l'espèce, les marques et les numéros des colis qui
les contiennent. Certes, la déclaration de valeur faite par I'impor-
tateur ne saurait être décisive car il est partie intéressée, mais,
cependant, il est mieux renseigné que quiconque surla marchandise
et, sauf soupçon de fraude, il est juste que le montant indiqué dans
la déclaration soit un élémentimportant pour l'évaluation à faire.

On ne peut pas; dire que les dispositions de l'article 95 seules,
ou du chapitre TT considéré dans son ensemble, apportent une
preuve décisive à l'appui de l'une ou de l'autre des interpréta-

tions avancées respectivement par les Parties. Les quatre facteurs
figurent à l'article 95 sont compatibles avec les deux interpré-
tations ; en particulier, l'expression ((franche de droits de douane
et de magasinage )n'apporte pas d'indication précise car, si l'on
doit prendre cornrne base la valeur dans le pays d'origine, majorée
de l'assurance, du fret, etc.,cetteexpression signifie (avant l'entrée
au bureau de douane et le paiement des droits N, alors que si l'on
doit prendre comrne base la valeur sur le marché local, il est néces-
saire (ou tout au moins prudent) d'employer une formule de ce
genre pour indiquer que le droit de 126 O/, ne doit pas être

perçu sur un montant dans lequel ces 12h % sont déjà compris.
La Cour a pris en considération la pratique antérieure ainsi
que les travaux préparatoires de la conférence d'Algésiras de 1906,
mais on ne peut guère en tirer des indications utiles. L'accord
commercial du 4 octobre 1892 entre la France et le Maroc consiste
en lin échange de lettres entre le ministre des Affaires étrangères
du Maroc et le ministre de France au Maroc, la lettre de ce dernier
contenant la form.ule suivante :

«Ces marchandises seront estimées sur le pied de leur valeur
marchande, au comptant, en gros, dans les ports de débarquement,
en réauxde vellon. »

Un avant-projet d'acte (p. 97 des Documents diplomatiques
français, 1906, fascicule 1,Affaires du Maroc, intitulé (II. Proto-
coles et comptes rendus de la Conférence d'Algésiras») contient

l'article suivant:

((ArticlXIX. - Les droits d'entrée et de sortie seront payés
comptant et sa,nsdélaiail bureau de douane où la liquidation aura
étéeffectuée.Les droits ad valorem seront liquidéset payésd'après
la valeur en gros et au comptant de la marchandise au port de
37 house in the case of imports. Merchandise can only be rcmovcd after
the payment of customs duties and storage.

The holding of the goods or the collection of duty shall, in every
case, be made the subject of a regular receipt delivered by the officer
in charge."

Later (p. IOO), upon a British proposal, thc second sentence was
modified so as to read :

"The ad valorem duties shall be determined and paid on the basis
of the cash wholesale value of the goods at the custom-house, frec
from customs duties."

At a later stage the German delegation made the following pro-
posa1 (ibid., p.232) :

"The ad valorem duties imposed on imports in Morocco shall be
assessed on the value of the imported goods in the place of shipment
or of piirchase, to which shall be added the transport and insurance
charges to the port of discharge in Morocco ...."

That amendment was rejected, from which it may be inferred
that the value in the country of origin was rejected as the conclusive
test.
It is also necessary to examine the practice of the customs
authorities since 1906, in so far as it appears from the materials

made available to the Court by the Parties. It seems that there has
bcen a reluctance to attribute a decisive effect to any single factor
in valuing merchandise.
For instance, in a letter of July 16th, 1912, from the Controller
of Moroccan Customs to the American Minister at Tangier, it is
stated that the customs officers "apply for the appraisal of mer-

chandise the rules established by the Act of Algeciras and by the
Customs regulations. They use market prices, bills of sale and their
professional knowledge. "
The following excerpts occur later in the same letter :

"The bill of sale is an element of valuation, but it is not conclusive
evidence.

The customs has always proceeded as described above in regard
to petroleum products imported from Fiume and from Trieste ;
for which importers furnish means of appraisal by attaching to the
declarations the original bills of sale, of whichthc prices are com-
pared with the market prices of origin.

This value [i.e. for customs purposes] includes the purchase
price of the petroleum f.0.b. New York, increased by al1 expenses
subsequent to the purchase, such as export duties paid to foreign
custoins, transportation, packing, freight, insurance, handling,

.S débarquement ou au bureau d'entrée, s'il s'agit d'importation.
Les marchandises ne pourroilt être retirbes qu'après le paiement
des droits de douane et de magasinage.
Toute prise ,en charge ou perception devra faire l'objet d'lin
récépissé réguliedrélivrépar l'agent chargé del'opération. »

Par la suite (p. i:oo), sur proposition britannique, la deuxième

phrase fut ainsi modifiée :

c(Ides droits ad valore~nseront liquidés et payés d'après la valcur
au comptant et en gros de la marchandise ail bureau de douane et
franchc de droits de douane. 1)

Plus tard encore, la délégation allemande fit la proposition suivante
(ibid.,p. 232) :

((Les droits tzd valorent perçus au Maroc sur les importations
seront calculés sur la valeur que l'article importé a dans le lieu
de chargement ou d'achat, avec majoration des frais de transport
et d'assurance jusqu'au port de déchargement au Maroc ...»

Cet amendement fut rejeté, ce dont on peut déduire que la valeur
dans le pays d'origine a étérejetée en tant que critère concluant.

Il convient également d'examiner la pratique suivie par les

autorités douanières depuis 1906, dans la mesure où elle ressort des
documents produits par les Parties. Il semble que l'on ait répugné
à attribuer à un facteur unique quelconque un effet décisif dans
l'évaluation des marchandises.

Par exemple, dans une lettre du 16 juillef 1912, du contrôleur
des douanes marocaines au ministre des Etats-Unis à Tanger,
il est dit que les fonctionnaires des douanes ccappliquent, pour
l'estimation des ma.rchandises, les règles établies par l'acte d'Algé-
siras et par le règlement des douanes. Ils utilisent les mercuriales,

les factures, lcurs connaissance professionnelles. 1)
011 troii17eplusloin, dans lamême lettre, lespassages qui suivent :

c(La facture est un élémentd'appréciation, mais elle ne fait pas
obligatoirement foi.

La douane a toiijours procédé comme ilest dit ci-dessus à l'égard
des pétroles importés de Fiume et de Trieste, pour lesquels Irs
importateiirs Iiii donnent des moyens d'apprhciatioil en joignant
aux déclarations les factures originales clont les pris sont cornparCs
avec les cours dcs marchés d'origine.

Cette v;ilciir [;~iisfins de la tloiiane] coiiiportc Ic 1)ris d'ncliat tiii
~)étrolef. o. 1). New-York arigmeiité de tous les frais postérieiirs
à I'acliat, tels qiie les droit.; de sortie accliiittbs ailx tloiianes étran-
gères,le tr;iiisport, I'cnibnllagc, Icfret, I'assiirancc, Icsmaiii~)iilations,
38 unloading, etc.-in short, al1 that contributes to make up at the
moment of presentation at the customs officethe cash wholesale
value of the product, according to which, under Article 95 of the
Act of Algeciras,the duties must be paid. >>
.......................
It is also interesting to note from the Minutes of the meeting at

Tangier of the Committee on Customs Valuations on June 7th,
1933, that the Director of Customs explained :

"....that his Department adopts as elements of valuation for the
application of the duties concerned, the invoice of origin, transport
costs to the port of importation, the value of the merchandise on
the local market on arrival, general market price lists and any
other information which may be useful to fix the value upon which
the duty is based".
On the other hand, passages can be found in the Customs regula-
tions and in circulars issued by the Rloroccan Debt Control in
which the emphasis is laid upon the value in the Moroccan market
as the important factor. The latest "Tables of minimum and

maximum values of the principal merchandise imported into
Morocco", adopted by the Committee on Customs Valuations at
their last meeting on March t th, 1936, at Tangier, reveal a range
so great that they could only afford the most general guidance as
to the actual valuation of a particular cargoor piece ofmerchandise.

The general impression created by an examination of the relevant
materials is that those responsible for the administration of the
customs since the date of the Act of Algeciras have made use of
al1 the various elements of valuation available to them, though
perhaps not always in a consistent manner.
In these circumstances, the Court is of the opinion that Article 95
lays down no strict rule on the point in dispute. It requires an
interpretation which is more flexible than either of those which
are respectively contended for by the Parties in this case.
The Court is of the opinion that it is the duty of the Customs

authorities in the French Zone, in fixing the valuation of imported
goods forcustoms purposes, to have regard to the following factors :

(a) the four factors specified by Article 95 and mentioned above ;

(b) the contents of the declaration which the importeris required
by the Act to file in the custom-house ;
(c) the wholesale cash value in the market of the French Zone ;

(d) the cost in the country of origin, increased by the cost of
loading and unloading, insurance, freight, and other charges
incurred before the goods are delivered at the custom-house ; le débarquement, etc., en un mot tout ce qui contribue à former,
au moment de la présentation au bureau de douane, la valeur au
comptant et en gros du produit suivant laquelle doivent, d'après
l'article 95 de l'acte d'Algésiras,êtreliquidésles droits.

Il est non moins intéressant de trouver dans les comptes rendus
d'une séance de la Commission des valeurs douanières, réunie à
Tanger le 7 juin 1933, l'explication suivante, donnée par le direc-
teur des douanes :
«....son service adopte comme élémentsd'appréciation pour
l'application des droits en question ;la facture d'origine, les frais
de transport jusqu'au port importateur, la valeur de la marchandise
sur lemarché localà l'arrivée,lesmercuriales et tout autre renseigne-
ment pouvant êtreutile pour fixer la valeur imposable II.

En revanche, on trouve dans le règlement des douanes et dans
les circulaires émanant du contrôle de la Dette du Maroc des
passages dans lesquels la valeur sur le marché marocain est mise
en relief comme étant le facteur important. Les derniers «Tableaux
des valeurs minima et maxima des principales marchandises impor-
tées au Maroc 11adoptés par la Commission des valeurs douanières
à sa dernière séance du II mars 1936 à Tanger, présentent des
écarts si importants que, pour évaluer vraiment telle cargaison
ou marchandise, ils offriraient seulement des indications des plus

générales.
L'impression générale qui se dégage de l'examen des documents
pertinents est que les fonctionnaires chargés de l'administration
des douanes depuis l'acte d'Algésiras ont utilisé, bien que pas tou-
jours d'une façon très conséquente, tous les facteurs d'évaluation
à leur disposition.
Dans ces conditions, la Cour est d'avis que l'article 95 n'énonce
pas de règle stricte en ce qui touche le point litigieux. Il appelle
une interprétation plus souple qu'aucune de celles avancées par
l'une et l'autre des :Parties en litige.
La Cour est d'avis que, pour fixer aux fins de la douane la valeur
des marchandises importées, les autorités douanières de la zone

française ont le devoir de prendre en considération les facteurs
suivants :
a) les quatre facteurs spécifiés à l'article95 et mentionnés
ci-dessus ;
h) le contenu de la déclaration qu'aux termes de l'acte I'impor-
tateur doit faire à la douane ;
G) la valeur au comptant et en gros sur le marché dans la zone

française ;
d) le coût dans le pays d'origine, majoré des frais de chargement
et de déchargement, de l'assurance, du fret et des autres frais
encourus avant la remise des marchandises au bureau dc douane ; (e) the schedule of values, if any, which may have been prepared
11ythe Committee on Customs Valuations referred to in Article 96
or by any committee which may have been substituted therefor
by arrangements to which France and the United States have
assented expressly or by implication ;
(f) any otherfactor which is required by the special circumstances
of a particular consignment or kind of merchandise.

The factors referred to above are not arranged in order of priority
biit should operate freely, within any limits that have been, or
may be, prescribed under Article 96 of the Act ; and, in view of
the governing principle of economic equality, the same methods
must be applied without discrimination to al1importations, regard-
less of the origin of the goods or the nationality of the importers.
The power of making the valuation rests with the Customs author-
ities, but it is a power which must be exercised reasonably and in

good faith.

For these reasons,

on the Submissioris of the Goiw-nment of the French Repiiblic,

iinanimously,
Rejects its Submissions relating to the Decree of December 3oth,

1948, issued by the Resident (;ciicral of thc French Republic in
Morocco ;
unariimousl y,

Finds that the United States of America is entitled, by virtue of
the provisions of its Treaty with Morocco of Septemher 16th, 1836,
to exercise in the French Zone of Morocco consular jurisdiction in
al1 disputes, civil or criminal, between citizens or protégésof the
Cnited States ;

by ten votes to one,
Finds that the IJnited States of America is also entitled, by virtue
of the General Act of Algeciras of April ?th, 1906, to exercise in the
French Zone of Morocco consular jurisdiction in al1 cases, civil or
criminal,brought against citizens or protégésof the United States, to
the extent required by the provisions of the Act relating to consular

jurisdiction ;
by six votes to five,

Rejects, except as aforesaid, the Submissions of the United
States of America concerning consular jurisdiction ;
40 e) les tarifs des valeurs, s'il en existe, préparés par la Commission
des valeurs douaniPres visée àl'article 96 ou partoute autre commis-
sion qui a pu lui êtresubstituée par des arrangements auxquels
la France et les Etats-Unis ont donné leur assentiment exprès
ou tacite ;

f) tout autre facteur imposé par les conditions particulières à
tel envoi ou à telle espèce de marchandise.
Ces facteurs ne sont pas énumérésdans un ordre de priorité ;
ils devraient jouer librement dans les limites établies ou à établir

en vertu de l!article 96 de l'acte, et, eu égard au principe directeur
de l'égaliti: économique, les mêmes méthodes doivent êtreappli-
quées sans discrimination à toutes les importations, quelles que
soient l'origine desmarchandises ou la nationalité des importateurs ;
le pouvoir d'évaluer appartient aux autorités douanières, mais
elles doivent en user raisonnablement et de bonne foi.

Par ces motifs.

sur les conclusions du Gouvernement de la République française,

àl'unanimité,
Rejette ses conclusions relatives à l'arrêtéédictéle 30 décembre
1948 par le Résiderit généralde la République française au Maroc ;

à l'unanimité,
Dit qu'en vertu des dispositions de leur traité du 16 septembre

1836 avec le Maroc, les Etats-Unis d'Amérique sont fondés à
exercer dans la zone française du Maroc la juridiction consulaire
sur tous les différends civils ou criminels entre citoyens ou protégés
des Etats-Unis ;

par dix voix contre une,
Dit qu'en vertu de l'acte général d'Algésirasdu 7 avril 1906,
les Etats-Unis d'Amérique sont également fondés à exercer dans
la zone française du Maroc la juridiction consulaire dans toutes
les affairescivi,le011 criminelles introduites contre des citoyens ou
protégés des Etats-Unis, dans la mesure requise par les disposi-
tions de cet acte relatives à la juridiction consulaire ;

par six voix contre cinq,

Rejette, réservefaite de ce qui précède, les conclusions des Ctats-
Unis d'Amérique relatives à la juridiction consulaire ;
40213 JUDGMENT OF 27 VI11 52(u.s. NATIONALS IN MOROCCO)
unanimously,

Finds that the United States of America is not entitled' to
claim that the application to citizens of the United States of
al1 laws and regulations in the French Zone of Morocco requires
the assent of the Government of the United States, but that
the consular courts of the United States may refuse to apply
to United States citizens laws or regulations which have not been
assented to bv the Government of the United States ;

on the Counter-Claim of the Government of the United States
of America,

by six votes to five,

Rejects the Submissions of the United States of America relating
to exemption from taxes ;

by seven votes to four,
Rejects the Submissions of the United States of America relating
to the consumption taxes imposed by the Shereefian Dahir of

February 28th, 1948 ;
by six votes to five,

Finds that, in applying Article 95 of the General Act of Alge-
ciras, the value of merchandise in the country of origin and its
value in the local Moroccan market are both elements in the
appraisal of its cash wholesale value delivered at the custom-
house.

Done in English and French, the English text being authoritative,
at the Peace Palace, The Hague, this twenty-seventh day of
August, one thousand nine hundred and fifty-two, in three copies,
one of which will be placed in the archives of the Court and the
others will be transmitted to the Government of the French
Republic and to the Government of the United States of America,
respective1y.

(Signed) Arnold D. MCNAIR,

President.

(Signed) E. HAMBRO,

Registrar. à l'unanimité,
Dit que les États-unis d'Amériqqe ne sont pas fondés à prétendre
que l'application ailx citoyens des Etats-Unis des lois et règlements
de la zone,française du Maroc requiert l'assentiment du Gouyerne-

ment des Etats-Unis, mais que les tribunaux consulaires des Etats-
Unis peuvent refiiser d'appliquer aux citoyens des Etats-Unis
les lois et règlements auxquels le Gouvernement des Etats-Unis
n'a pas donné son assentiment ;

sur la demande reconventionnelle du Gouvernement des États-
Unis d'Amérique,

par six voix conire cinq,
Rejette les conclusions des États-unis d'Amérique relatives à
l'exemption de taxlrs ;

par sept voix contre quatre,

Rejette les conclusions des États-unis d'Amérique relatives
aux taxes de consommation imposées par le dahir chérifien du
28 février 1948 ;
par six voix contre cinq,

Dit que, pour appliquer l'article 95 de l'acte général d'Algésiras,
la valeur de la marchandise au pays d'origine et sa valeur sur le
marché local marocain sont l'une et l'autre des éléments pour
l'estimation de sa valeur au comptant et en gros rendue au bureau
de douane.

Fait en anglaiset en français,le texte anglaisfaisant foi, au Palais
de la Paix, à La Haye, le vingt-sept août mil neuf cent cinquante-

deux, en trois exemplaires, dont l'un restera déposéaux archives
de la Cour et dont les autres seront transmis respectivement au
Gouvernement de la République française et au Gouvernement des
Etats-Unis d'Amérique.

Le Président,

(Signé) Arnold D. MCNAIR.

Le Greffier,

(Sigfié E. HAMRRO. JUDGMENT OF 27 VIII52 (u.s.NATIONALS IN IVIOROCCO)
214
Judge Hsu Mo declares that, in his o?inion, the jurisdictional
rights ofthe United States of America in the French Zone of Norocco
are limited to those provided in Articles 20 and 21 of itsTreaty with
Morocco of September 16th, 1836, and that the United States is
not entitled to exercise consular jurisdiction in cases involving the

application to Cnited States citizens of those provisions of the Act
of Algeciras of 1gc6 which, for their enforcement, carried certain
sarictions. The Act of Algeciras, as far as the jurisdictional clauses
are concerned, was concluded on the basis of a kind of consular
jurisdiction as it existed at that time in its fullform and in complete
uniformity among the Ponrers in hlorocco. The various provisions,
in referring to "consular jurisdiction", "competent consular
authority", "consular court of the defendant", etc., clearly meant
that jurisdiction which was being uniformly exercised by foreign
States over their respcctive nationals as defendants in al1 cases.
They did not mean such limited jurisdiction as might be exercised
bj- the United States consular courts, in accorclance with Article 20
of the Moroccan-United States Treaty of 1836, in cases iiivolving

Cnited States citizens or protégés only. When, therefore, consular
jurisdiction in its full form ceased to exist in respect of1the signa-
tory States to the Act of Algeciras, the basis for the application by
the various consular tribunals of the measures of sanction provided
in that Act disappeared, and the ordinary rules of international
law came into play. Consequently, such sanctions should thence-
fort11 be applied by the territorial courts, in the case of United
States citizens as well as in the case of al1 other foreign iiationals.
As regards reference in the Franco-British Convention of 1937 to
the jurisdictional privileges enjoyed by the Cnited States, it must
be considered as a precautionary measure on the part of France
against the possibility of thc refusa1 of the Cnited States to relin-
quish such privileges. In any case, the rights of the United States
vis-à-vis Morocco in matters of jurisdiction must be determined

by their own treaty relations, and could not derive from any
admission made by France on Morocco'sbehalf to a third party.

Judges HACICWORTH, BADAWI, LEVICARNEIRO and Sir Benegal
KAU, availing themselves of the right conferred on them by
Article 57 of the Statute, append to the Judgment the common
statement of their dissentirig opinion.

(Initialled) A. D. McN

(Initialled) E.H. M. Hsu Mo,,juge, déclare que, à son avis, les droits juridiction-
nels dont les Etats--Unis d'Amérique jouissent dans la zone fran-
çaise du Maroc se limitent aux droits prévus par les articles 20
et 2; de leur traité du 16 septembre 1836 avec le Maroc, et que

les Etats-Unis ne sont pas fondés à exercer la juridiction consu-
laire ,dans des affaires qui entraînent l'application aux citoyens
des Etats-Unis de celles des dispositions de l'acte d'Algésiras de
1906 dont l'exécution comporte certaines sanctions. L'acte d'Algé-
siras, pour autant qu'il s'agit des clauses juridictionnelles,a été
conclu en tenant compte de la sorte de juridiction consulaire qui
existait à cette époque dans sa plénitude et en complète unifor-
mité entre les Puissances au Maroc. Les diverses dispositions,
lorsqu'elles mentionnaient «la juridiction consulaire D, (l'autorité
consulaire compétente )),« le tribunal consulaire du défendeur N,
etc.,,visaient clairement la juridiction uniformément exercée par
les Etats étrangers sur leurs ressortissants respectifs dans toutes

les affaires où ilsétaient défendeurs. Elles ne visaient pas la juri-
diction limitée que les tribunaux consulaires des Etats-Unis pou-
vaient exercer, confo<mément à l'article 20 du traité de 1836
entre le Maroc ef les Etats-Unis, dans les affaires où des citoyens
ou protégésdes Etats-Unis étaient seuls en cause. Par conséquent,
lorsque la juridiction conçulaire sous sa forme complète a cessé
d'exister pour tous les Etats signataires de l'acte d'Algésiras,
toute base pour l'application, par les divers tribunaux consulaires,
des sanctions prévuc:spar l'acte, a disparu, et les règles ordinaires
du droit international sont entrées en jeu. De ce fait, les sanctions
en question devaient désormais être appli,quées par les tribunaux
territoriaux, aussi bien aux citoyens des Etats-Cnis qu'à tous les
autres ressortissants étrangers. Quanf à la référenceaux privilèges

juridictionnels dont jouissaient les Etats-Unis, contenue dans la
convention de 1937 entre la Grande-Bretagne et la France, il
faut la considérer comme une mesure de précaution prise par la
France contre un refus possible de la part des Etats-Cnis d'aban-
donner ces privilèges. En tout cas, les droits des Etats-Unis à
l'égard du Maroc, en matière de juridiction, doivent être déter-
minés par leurs propres rapports conveiitionnels et ne sauraient
découler de quelque admission faite par la France, au nom du
Maroc, à une tierce partie.

MM. HACKWORTEIB ,ADAWI,LEVI CARKEIROet sir Benegal
RAU, juges, se prévalant du droit que leur confère l'article 57

du Statut, joignent à l'arrêt l'exposé commun de leur opinion
dissidente.

(Paraphé) A. 0. RlcN.

ICJ document subtitle

(y compris le texte de déclaration de M. Hsu Mo)

Document file FR
Document Long Title

Arrêt du 27 août 1952

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