CR 2006/20
International Court Cour internationale
of Justice de Justice
THHEAGUE LAAYE
YEAR 2006
Public sitting
held on Wednesday 15 March 2006, at 3 p.m., at the Peace Palace,
President Higgins presiding,
in the case concerning the Application of the Convention on the Prevention and Punishment
of the Crime of Genocide (Bosnia and Herzegovina v. Serbia and Montenegro)
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VERBATIM RECORD
________________
ANNÉE 2006
Audience publique
tenue le mercredi 15 mars 2006, à 15 heures, au Palais de la Paix,
sous la présidence de Mme Higgins, président,
en l’affaire relative à l’Application de la convention pour la prévention et la répression du
crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro)
____________________
COMPTE RENDU
____________________ - 2 -
Present: Presieitgins
Vice-Presi-Kntasawneh
RanjevJaudges
Shi
Koroma
Parra-Aranguren
Owada
Simma
Tomka
Abraham
Keith
Sepúlveda
Bennouna
Skotnikov
Judges ad hoc AhmedMahiou
Kre Milenko ća
Couvrisrar
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 3 -
Présents : Mme Higgins,président
Al-K.hvsceprh,ident
RanMjva.
Shi
Koroma
Parra-Aranguren
Owada
Simma
Tomka
Abraham
Keith
Sepúlveda
Bennouna
Skjoteiskov,
MAahioM, .
Mrilenko ća, juges ad hoc
Cgofferr,
⎯⎯⎯⎯⎯⎯ - 4 -
The Government of Bosnia and Herzegovina is represented by:
Mr. Sakib Softić,
as Agent;
Mr. Phon van den Biesen, Attorney at Law, Amsterdam,
as Deputy Agent;
Mr.Alain Pellet, Professor at the University of ParisX-Nanterre, Member and former Chairman of
the International Law Commission of the United Nations,
Mr. Thomas M. Franck, Professor of Law Emeritus, New York University School of Law,
Ms Brigitte Stern, Professor at the University of Paris I,
Mr. Luigi Condorelli, Professorat the Faculty of Law of the University of Florence,
Ms Magda Karagiannakis, B.Ec, LL.B, LL.M., Barrister at Law, Melbourne, Australia,
Ms Joanna Korner, Q.C., Barrister at Law, London,
Ms Laura Dauban, LL.B (Hons),
as Counsel and Advocates;
Mr. Morten Torkildsen, BSc, MSc, Torkildsen Granskin og Rådgivning, Norway,
as Expert Counsel and Advocate;
H.E. Mr. Fuad Šabeta, Ambassador of Bosnia and Herzegovina to the Kingdom of the Netherlands,
Mr. Wim Muller, LL.M, M.A.,
Mr. Mauro Barelli, LL.M (University of Bristol),
Mr. Ermin Sarajlija, LL.M,
Mr. Amir Bajrić, LL.M,
Ms Amra Mehmedić, LL.M,
Mr. Antoine Ollivier, Temporary Lecturer and Research Assistant, University of Paris X-Nanterre, - 5 -
Le Gouvernement de la Bosnie-Herzégovine est représenté par :
M. Sakib Softić,
comament;
M. Phon van den Biesen, avocat, Amsterdam,
comme agent adjoint;
M. Alain Pellet, professeur à l’Université de Pa risX-Nanterre, membre et ancien président de la
Commission du droit international des Nations Unies,
M. Thomas M. Franck, professeur émérite à lafaculté de droit de l’Université de New York,
Mme Brigitte Stern, professeur à l’Université de Paris I,
M. Luigi Condorelli, professeur à la faculté de droit de l’Université de Florence,
Mme Magda Karagiannakis, B.Ec., LL.B., LL.M.,Barrister at Law, Melbourne (Australie),
Mme Joanna Korner, Q.C.,Barrister at Law, Londres,
Mme Laura Dauban, LL.B. (Hons),
comme conseils et avocats;
M. Morten Torkildsen, BSc., MSc., Torkildsen Granskin og Rådgivning, Norvège,
comme conseil-expert et avocat;
S. Exc. M. Fuad Šabeta, ambassadeur de Bosnie-Herzégovine auprès du Royaume des Pays-Bas,
M. Wim Muller, LL.M., M.A.,
M. Mauro Barelli, LL.M. (Université de Bristol),
M. Ermin Sarajlija, LL.M.,
M. Amir Bajrić, LL.M.,
Mme Amra Mehmedić, LL.M.,
M. Antoine Ollivier, attaché temporaire d’ense ignement et de recherche à l’Université de
Paris X-Nanterre, - 6 -
Ms Isabelle Moulier, Research Student in International Law, University of Paris I,
Mr. Paolo Palchetti, Associate Professor at the University of Macerata (Italy),
as Counsel.
The Government of Serbia and Montenegro is represented by:
Mr. Radoslav Stojanović, S.J.D., Head of the Law Council of the Ministry of Foreign Affairs of
Serbia and Montenegro, Professor at the Belgrade University School of Law,
as Agent;
Mr. Saša Obradović, First Counsellor of the Embassy of Serbia and Montenegro in the Kingdom of
the Netherlands,
Mr. Vladimir Cvetković, Second Secretary of the Embassy of Serbia and Montenegro in the
Kingdom of the Netherlands,
as Co-Agents;
Mr.Tibor Varady, S.J.D. (Harvard), Professor of Law at the Central European University,
Budapest and Emory University, Atlanta,
Mr. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., Member of the International Law Commission, member of
the English Bar, Distinguished Fellow of the All Souls College, Oxford,
Mr. Xavier de Roux, Master in law, avocat à la cour, Paris,
Ms Nataša Fauveau-Ivanović, avocat à la cour, Paris and member of the Council of the
International Criminal Bar,
Mr.Andreas Zimmermann, LL.M. (Harvard), Professor of Law at the University of Kiel, Director
of the Walther-Schücking Institute,
Mr. Vladimir Djerić, LL.M. (Michigan), Attorney at Law, Mikijelj, Jankovi ć & Bogdanovi ć,
Belgrade, and President of the International Law Association of Serbia and Montenegro,
Mr. Igor Olujić, Attorney at Law, Belgrade,
as Counsel and Advocates;
Ms Sanja Djajić, S.J.D., Associate Professor at the Novi Sad University School of Law,
Ms Ivana Mroz, LL.M. (Minneapolis),
Mr. Svetislav Rabrenović, Expert-associate at the Office of the Prosecutor for War Crimes of the
Republic of Serbia, - 7 -
Mme Isabelle Moulier, doctorante en droit international à l’Université de Paris I,
M. Paolo Palchetti, professeur associé à l’Université de Macerata (Italie),
comconseils.
Le Gouvernement de la Serbie-et-Monténégro est représenté par :
M. Radoslav Stojanović, S.J.D., chef du conseil juridique du ministère des affaires étrangères de la
Serbie-et-Monténégro, professeur à la faculté de droit de l’Université de Belgrade,
comament;
M. Saša Obradovi ć, premier conseiller à l’ambassade de Serbie-et-Monténégro au Royaume des
Pays-Bas,
M. Vladimir Cvetković, deuxième secrétaire à l’ambassade de Serbie-et-Monténégro au Royaume
des Pays-Bas,
comme coagents;
M. Tibor Varady, S.J.D. (Harvard), professeur de droit à l’Université d’Europe centrale de
Budapest et à l’Université Emory d’Atlanta,
M. Ian Brownlie, C.B.E., Q.C., F.B.A., membre de la Commission du droit international, membre
du barreau d’Angleterre, Distinguished Fellow au All Souls College, Oxford,
M. Xavier de Roux, maîtrise de droit, avocat à la cour, Paris,
Mme Nataša Fauveau-Ivanovi ć, avocat à la cour, Paris, et me mbre du conseil du barreau pénal
international,
M. Andreas Zimmermann, LL.M. (Harvard), professeur de droit à l’Université de Kiel, directeur de
l’Institut Walther-Schücking,
M. Vladimir Djeri ć, LL.M. (Michigan), avocat, cabinet Mikijelj, Jankovi ć & Bogdanovi ć,
Belgrade, et président de l’association de droit international de la Serbie-et-Monténégro,
M. Igor Olujić, avocat, Belgrade,
comme conseils et avocats;
Mme Sanja Djajić, S.J.D, professeur associé à la faculté de droit de l’Université de Novi Sad,
Mme Ivana Mroz, LL.M. (Minneapolis),
M. Svetislav Rabrenovi ć, expert-associé au bureau du procur eur pour les crimes de guerre de la
République de Serbie, - 8 -
Mr. Aleksandar Djurdjić, LL.M., First Secretary at the Ministry of Foreign Affairs of Serbia and
Montenegro,
Mr. Miloš Jastrebić, Second Secretary at the Ministry of Foreign Affairs of Serbia and Montenegro,
Mr. Christian J. Tams, LL.M. PhD. (Cambridge), Walther-Schücking Institute, University of Kiel,
Ms Dina Dobrkovic, LL.B.,
as Assistants. - 9 -
M. Aleksandar Djurdji ć, LL.M., premier secrétaire au ministère des affaires étrangères de la
Serbie-et-Monténégro,
M. Miloš Jastrebi ć, deuxième secrétaire au ministère des affaires étrangères de la
Serbie-et-Monténégro,
M. Christian J. Tams, LL.M., PhD. (Cambridge), Institut Walther-Schücking, Université de Kiel,
Mme Dina Dobrkovic, LL.B.,
comme assistants. - 10 -
The PRESIDENT: Please be seated. Maître de Roux.
M. de ROUX: Merci Madame le président. No us allons donc reprendre cette affaire là où
nous l’avons laissée ce matin. C’est-à-dire au moment où il convient de déterminer le groupe
national ethnique, racial ou religieux protégé par la convention sur le génocide que la
Serbie-et-Monténégro aurait cherché à détruire.
296. En effet, pour le requérant, il y aurait deux victimes du génocide :
⎯ le premier serait le peuple bosniaque ou les peuples de la Bosnie-Herzégovine; et
⎯ le deuxième serait l’Etat de la Bosnie-Herzégovine (mémoire, par. 1.3.0.9).
297. Le requérant prétend que le génocide a été commis à l’encontre du peuple de la
Bosnie-Herzégovine et à l’encontre de l’Etat du même nom, il emploie parfois le peuple, parfois
l’Etat et parfois les deux simultanément, sans faire une distinction entre les deux et sans d’ailleurs à
cet égard expliquer sa positio n. A ces groupes s’ajoute le groupe des non-Serbes, mentionné
parfois par le requérant, et finalement, dans la réplique, le groupe des Musulmans bosniaques.
298. Or, commençons par le plus simple, aux termes de la convention sur le génocide, et
également aux termes des autres textes internationa ux comme nationaux, l’Etat, un Etat en tant que
tel, ne peut être une victime du génocide. Le génocide ne peut être commis qu’à l’encontre, nous
l’avons dit centfois, d’un groupe racial, ethnique , national ou religieux. Certes, les Etats peuvent
être des Etats-nations, le génocide, comme son nom le dit, sera toujours commis envers une
population et non envers une institution. Or, l’Etat n’est qu’une construction juridique et en tant
que telle, ne peut être victime du génocide.
299. Par ailleurs, l’Etat de Bosnie-Herzégovine, loin d’être un Etat-nation est composé d’une
population mixte, nous l’avons vu, dont les Serbes font une partie substantielle puisque le tiers,
grosso modo, de la population de cet Etat est serbe.
300. Contrairement à l’Etat en soi, le peuple d’un Etat peut être l’objet d’un génocide.
Cependant, il ne suffit pas d’alléguer que le peuple de la Bosnie est la victime d’un génocide. Il
faut encore prouver que ce peuple représente en tant que tel un groupe national ⎯ pourquoi
pas ? ⎯ ethnique, ou religieux distinct aux termes de la convention sur le génocide. - 11 -
301. Avant d’analyser si le peuple de la Bo snie-Herzégovine peut être considéré comme un
groupe aux termes de la convention, il faut briève ment rappeler les critères de la détermination du
groupe. Cette détermination a donné lieu à de nombreuses discussions d’auteurs et de
jurisprudences. Cette détermination peut être objective ou subjective. Selon le critère objectif un
groupe est composé de personnes qui partagent le s mêmes caractéristiques nationales, ethniques,
raciales ou religieuses sans que l’opinion de l’ auteur du crime du génocide ou l’opinion des
personnes appartenant à ce groupe soit prise en compte.
302. Si l’on adopte par contre le critère subjec tif, l’appartenance au groupe sera déterminée,
en prenant en compte les sentiments d’appartenan ce à ce groupe, ainsi surtout que l’opinion, le
regard de l’auteur du génocide aura sur ce groupe. Le critère subjectif, c’est la détermination de la
composition du groupe par l’auteur du génocide.
303. La jurisprudence du Tribunal pénal pou r l’ex-Yougoslavie a choisi, au moins dans
l’affaire Jelisic, d’appliquer le critère subjectif. Cette Chambre a jugé :
«Si la détermination objective d’un groupe religieux est encore possible, tenter
aujourd’hui de définir un groupe national, ethnique ou racial à partir de critères
objectifs et scientifiquement non contestables serait un exercice à la fois périlleux et
dont le résultat ne correspondrait pas n écessairement à la perception des personnes
concernées par cette cat égorisation. Aussi est-il plus approprié d’apprécier la qualité
de groupe national, ethnique ou racial du po int de vue de la perception qu’en ont les
personnes qui veulent distinguer ce groupe du reste de la collectivité. La Chambre
choisit donc d’apprécier l’appartenance à un groupe national, racial ou ethnique à
partir d’un critère subjectif: c’est la stig matisation, par la collectivité, du groupe en
tant qu’entité ethnique, raciale ou nationale distincte, qui permettra de déterminer si la
population visée constitue, pour les auteurs pr ésumés de l’acte, un groupe ethnique,
1
racial ou national.»
304. Dans cette même affaire Jelisic, la Chambre a par ailleurs adopté le critère négatif de
détermination d’un groupe en constatant que :
«Une telle stigmatisation du groupe peut s’effectuer selon des critères positifs
ou négatifs. Une «approche positive» consistera pour les auteurs du crime à distinguer
le groupe en raison de ce qu’ils estiment être les caractéristiques nationales, ethniques,
raciales ou religieuses propres à ce groupe . Une «approche négative» consistera à
identifier des individus comm e ne faisant pas partie du groupe auquel les auteurs du
crime considèrent appartenir et qui présente selon eux des caractéristiques nationales,
ethniques, raciales ou religieuses propre s, l’ensemble des individus ainsi rejetés
constituant, par exclusion, un groupe distinct. La Chambre rejoint ici l’opinion déjà –
1 o
TPIY, Le procureur c. Jelisic , affaire nIT-95-10-T, Chambre de première instance, jugement,
14 décembre 1999, par. 70. - 12 -
exprimée par la commission d’experts et esti me qu’il est conforme à l’objet et au but
de la convention de considérer que ses dispositions protègent aussi les groupes définis
2
par exclusion, si c’est ainsi qu’ils sont stigmatisés par les auteurs de l’acte.»
305. Et dans son jugement la Chambre fait référence à la commission d’experts qui a
effectivement déjà exprimé la possibilité de la détermination du gr oupe par des critères négatifs en
exprimant que :
«S’il y a diversité ou pluralité de groupes victimes et si chaque groupe est
protégé comme tel, peut-être est-il conforme à l’esprit et au but de la convention de
considérer tous les groupes victimes comme constituant une entité plus large. C’est le
cas par exemple, s’il apparaît que le groupe A veut détruire en tout ou en partie les
groupes B, C et D, c’est-à-dire quiconq ue n’appartient pas au groupe national,
ethnique, racial ou religieux A. En quelque sorte, le groupe A a défini un groupe non
A pluraliste sur la base de critères natio naux, ethniques, raciaux ou religieux, et il
semble pertinent d’analyser le sort du 3roupe non A de la même manière, comme si le
groupe non A avait été homogène.»
C’est la commission des experts des NationsUnie s qui fait cette analyse, je l’admets, un peu
compliquée en droit.
306. Et c’est sans doute pour cela que cette ap proche ne fait pas l’unanimité dans l’état
actuel du droit international. Le procureur international préfère retenir l’approche positive pour
définir dans ses actes d’accusati on les groupes ethniques et religieux. Nous sommes en matière
pénale, une appréciation subjective est toujours dangereuse dans ce domaine.
307. Par ailleurs, la même Chambre du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie qui a opté, je vous
l’ai dit, pour une approche subjective et qui pe rmet une définition du groupe par des critères
négatifs indique cependant dans son jugement ⎯ et on voit bien la difficulté du problème et de sa
solution ⎯ en même temps que «[l]es travaux préparat oires de la convention montrent que l’on a
voulu limiter le champ d’application de la conventio n à la protection de groupes «stables», définis
de façon objective et auxquels les individu s appartiennent indépendamment même de leur
volonté» . Le Tribunal rappelle donc là très clairement les travaux préparatoires qui ont conduit au
vote et à l’adoption de cette convention.
2Affaire Jelisic, jugement, par. 71.
3Rapport final de la commission d’experts, par. 96.
4
Affaire Jelisic, jugement, par. 69. - 13 -
308. On ne comprend donc pas très bien comment la même Chambre dans une même
décision peut appliquer à la définition du groupe un critère subjectif qui serait finalement le choix
de l’auteur du crime, alors que l’appartenan ce au groupe doit exclure expressément, selon les
travaux préparatoires de la convention, les membres de ce groupe, et exige donc l’application selon
le critère objectif.
309. Lorsque le requérant indique que les «non-Serbes» auraient été victimes du génocide, il
ne définit pas du tout à quel groupe ils appartie nnent. Cette notion des non-Serbes est difficile à
comprendre. Logiquement elle devrait englober tous les non-Serbes de la Bosnie-Herzégovine; or,
le requérant n’a mentionné que de ux groupes ethniques, les Musulmans bosniaques et les Croates
de Bosnie. Or, la population de Bosnie-Herzégo vine pouvant être considérée comme non serbe
devrait certainement comprendre ceux qui s’appellent toujours les Yougoslaves, et qui sont souvent
issus de couples mixtes, les Tziganes, les Juifs et le s autres minorités vivant sur le territoire de la
Bosnie-Herzégovine. Cela, le requérant ne le préci se pas. En revanche, lors de sa plaidoirie du
1ermars2006, le requérant se réfère au génocid e contre les non-Serbes en précisant qu’il a été
commis «with intent to destroy in whole or in part a specific and historic national, ethnical and
religious group as such». La population non serb e de Bosnie-Herzégovine ne peut en aucun cas
être considérée comme un groupe national, ethnique, et religieux spécifique et historique. Cette
population est bien trop disparate pour avoir une identité spécifique et historique.
310. Par ailleurs, le requérant se réfère parfois à la population croate; or, la population
croate, qui a été victime de cette guerre comme les deux autres peuples de Bosnie, a souffert du
conflit, mais non pas du conflit avec les Serbes , mais essentiellement du conflit mené entre
Musulmans et Croates dans lequel les Serbes de Bosnie ne sont pas intervenus. Rappelez-vous
qu’il s’agissait de la guerre de sécession de trois peuples.
311. S’agissant du peuple de Bosnie-Herzégovin e, il n’a pas d’identité propre au sens de la
convention sur le génocide. Le peuple de Bosnie -Herzégovine ne peut être distingué ni sur une
base ethnique ni religieuse ni raciale ni nationale. Certes, les peuples, je fais la différence entre le
peuple de Bosnie, dans la mesure où la Bosnie est un Etat, et les peuples de Bosnie-Herzégovine
qui eux appartiennent à des ethnies différentes, ils pratiquent effectivement des religions
différentes, leur identité nationale est difficilement déterminable et ils appartiennent tous à la même - 14 -
race, parlant la même langue et on peut difficile ment les distinguer des autres peuples vivant en
Europe.
312. Le peuple de Bosnie-Herzégovine est une construction juridique pour répondre aux
besoins de l’argumentation du requérant. En effet, la Bosnie-Herzégovine est un Etat constitué par
trois entités reconnues comme telles par la Const itution de la Bosnie-Herzégovine en vigueur au
moment de la naissance du conflit, mais reconnues ⎯et c’est ce qui est plus important pour nous
aujourd’hui ⎯ également par les textes internationaux et notamment les accords de paix de Dayton
et de Paris. S’il existe un peuple de Bosnie, c’est un assemb lage divers qui ne constitue pas un
groupe national, ethnique ou religieux au sens de la convention sur le génocide.
313. S’il existe par contre en Bosnie trois gr oupes présentant des caractéristiques ethniques
particulières, ces groupes peuvent être considér és également comme des groupes religieux. Peu
importe quel critère est appliqué à ces groupes, il y aura toujours trois groupes ethniques et
religieux en Bosnie-Herzégovine, chacun ayant son identité religieuse bien spécifique, bien que
partout, il y ait des croyants et des non-croyants. Il ne peut être raisonnablement contesté que, sur
le territoire de la Bosn ie-Herzégovine, tel que reconnu par la communauté internationale, vivent
aujourd’hui en réalité trois peuples: Croates, Bo sniaques (Musulmans) et Serbes. Chacun de ces
trois peuples a sa propre religion, sa propre cu lture et ses propres coutumes, de sorte que ces
groupes peuvent être identifiés comme groupes ethnique croate, bosniaque (musulman) et serbe ou
comme groupes religieux, respectivement catholique, musulman et orthodoxe, même si ces
distinctions sont largement artificielles.
314. Il est donc absolument clair qu’on ne peut soutenir une tentative serbe ⎯ de
Serbie-et-Monténégro, un e tentative serbe extérieure à la Bosnie ⎯ d’exterminer «le peuple de
Bosnie-Herzégovine» pour la bonne raison que ce pe uple est divers et que le peuple serbe en est
une partie intégrante.
315. Certes, le requérant essaie de rectifier dans sa réplique son erreur. Et il se réfère plus
souvent au groupe des Musulmans de Bosnie, ma is encore une fois, il hésite à déterminer
clairement ce groupe sur la base de critères clairement déterminés par la convention sur le
génocide. - 15 -
316. Alors, la question qui se pose à votre Cour , c’est celle de savoir si l’entité serbe de
Bosnie a tenté d’exterminer l’entité musulmane de Bosnie, et si cette entité serbe agissait à
l’initiative ou avec la complicité de la Serbie-et-Monténégro, ou si tout simplement, s’agissant
d’une guerre civile, d’une guerre de sécession, les parties se sont disputées un territoire sur lequel
ils pourraient régner sans partage.
317. L’issue du conflit démontre bien que le bu t de guerre était bien la seconde hypothèse,
puisque la population serbe à Sarajevo a autant diminué que la population musulmane à Banja
Luka.
IV. L’élément moral du crime de génocide (suite)
ii) La destruction d’un groupe en tout ou partiellement
318. Le demandeur énumère dans ses mémoires une multitude d’actes, dont certains
représentent certes des actes criminels, tels que de nombreux meurtres, mais il ne démontre en
aucun cas une volonté déterminée de détruire un groupe sur le fondement des critères énoncés dans
la convention sur le génocide.
319. A titre préliminaire, il faut rappeler que la destruction doit être physique. En l’état
actuel du droit, le génocide ne peut être comm is par une destruction autre que la destruction
physique (matérielle). Bien que certaines tentativ es aient été faites aux fins d’introduire dans la
définition du génocide les différents actes dont l’ objectif serait de détruire l’identité culturelle d’un
groupe ou son environnement écologique, toutes ces tentatives, en droit international, sont restées
sans succès. Nous avons déjà expliqué --je ne vais pas y revenir-- ce qu’est une destruction
physique aux termes du droit international conventionnel et coutumier dans la partie consacrée à la
soumission d’un groupe à des conditions de vie pouvant provoquer sa destruction physique. Je vais
donc me limiter à l’analyse de la signification de s termes «en partie», ca r le terme «en totalité»
n’appelle pas de commentaires particuliers.
320. En effet, dans la présente affaire, malgré les conséquences certes graves du conflit armé
qui a duré plus de trois ans en Bosnie-Herzégovine, il est toutefois, et heureusement, impossible
d’établir l’intention de détruire un groupe entier. Les trois communautés ethniques, nationales et
religieuses vivent toujours sur le territoire de la Bosnie-Herzégovine et aucune d’elle n’est en
danger et n’a jamais été en danger de dispar ition. En conséquence, il est certain qu’en - 16 -
Bosnie-Herzégovine aucune volonté de destruction totale d’un groupe, quel qu’il soit, n’a jamais
existé.
321. Mais, aux termes de la convention sur le génocide, la destruction d’ une partie du
groupe peut suffire à constituer le génocide, si tous les autres éléments constitutifs de ce crime sont
réunis. Cependant, lorsque l’on affirme qu’une pa rtie du groupe a été détruite ou au moins qu’une
tentative de destruction d’une partie du groupe a ét é commise, il faut encore préciser la partie du
groupe qui aurait été victime de ces agissements tendant à sa destruction.
322. Il est largement accepté que l’intention de détruire doit viser au moins une partie
substantielle du groupe. Ainsi, le projet d’articles de la CDI de même que le commentaire de
5
Nehemia Robinson indiquent que les auteurs du génocide doivent chercher à détruire une «partie
substantielle» du groupe. La déclaration interpré tative du Sénat américain relative à l’article II de
la convention précise aussi que les Etats-Unis ente ndent par «destruction partielle» la destruction
6
d’une «partie substantielle» du groupe . Je pense que cette interprétation claire du Sénat américain
a quelque importance. Le Tribunal pour le Rwanda semble aller plus loin encore, en exigeant que
les accusés aient l’intention de détruire un nombre «considérable» d’individus, membres du groupe.
323. En effet, la partie du groupe visée sera considérée substantielle soit parce qu’elle
concerne une forte proportion du groupe en question, soit aussi parce qu’elle cherche à atteindre les
membres les plus représentatifs de la communauté visée. Certains allèguent que le génocide peut
avoir lieu lorsque tous les dirigeants d’un groupe sont visés, quel que soit le nombre de ceux qui
sont effectivement tués. L’existence effective du génocide pourra être établie, quel que soit le sort
réservé au reste du groupe. La destruction d’une partie du groupe peut aussi consister en meurtres
d’un nombre plus limité de personnes, celles-ci étant sélectionnées en rais on de l’impact que leur
disparition pourrait avoir sur la survie du groupe en tant que tel. Il s’agirait dans cette hypothèse
d’une volonté «sélective» de destruction du groupe 7.
5 ère
Nehemia Robinson, The Genocide Convention, New York, 1949 (1 ed.), 1960, p. 63.
6
Genocide Convention, Report of the Committee on Foreign Relations, U.S. Senate, July 18 1981, p. 22.
7 Le raisonnement de la commission d’experts a été repris par la Chambre de première instance dans l’affLere
procureur c. Krstic, affaire n IT-98-33-T («l’affaire Krstic»), 2 août 2001, par. 587. - 17 -
324. La jurisprudence internationale récente permet, par ailleurs, de parler de génocide
même si l’intention spécifique se limite à la destruction d’un groupe dans une zone géographique
réduite. Voyez que je vais jusqu’au bout de la démonstration.
325. Ayant une valeur juridique certaine, mais limitée au droit national, on peut prendre en
considération deux jugements rendus par les juridictions allemandes 8 ayant trait aux affaires de
Yougoslavie, reconnaissant que le génocide peut être commis dans une zone géographique limitée.
La valeur de ces deux jugements est relative car ils sont fondés sur le Code allemand et les règles et
principes du droit allemand ne sont pas forcément tous admis en droit international.
326. Mais, la jurisprudence du TPIY a accept é le concept de génocide géographiquement
limité et a jugé dans l’affaire Krstic, c’est-à-dire dans l’affaire Srebrenica, que: «La destruction
physique peut ne viser qu’une partie géographique ment limitée d’un groupe plus vaste, parce que
les auteurs du génocide considèrent que la destruction envisagée suffit à annihiler le groupe en tant
9
qu’entité distincte dans la zone géographique en question. »
327. Cependant, le génocide géographiquement limité n’est accepté sans réserve ni par la
jurisprudence internationale, ni par la doctrine. Ainsi, la Chambre de première instance dans
l’affaire Stakic, bien qu’elle ait accepté cette approc he, a souligné les dangers d’une telle
interprétation. La Chambre a jugé que :
«En interprétant l’expression «destructi on d’un groupe en partie», la Chambre
de première instance suit, non sans une légère hésitation, la jurisprudence du TPIY et
du TPIR qui permet de parler de génocide même si l’intention spécifique se limite à
une zone géographique réduite, comme une municipalité. La Chambre de première
instance est consciente du fait que cette ap proche est susceptible de dénaturer la
10
définition du génocide si elle n’est pas appliquée avec prudence.»
328. Comme la jurisprudence, la doctrine pose aussi des questions sur le génocide
géographiquement limité, et notamment sur l’im plication des structures étatiques dans la
commission du génocide. Ainsi, commentant le premier arrêt rendu par le TPIY dans ses affaires,
William A. Schabas écrit :
8Cour d’appel de Bavière, affaire Novislav Djajic , 23mai1997, 3St20/96, sect.VI, p.24 de la traduction
anglaise et Cour constitutionnelle fédérale de l’Allemagne, l’affaire Nikola Jorgic , 2Bv1290/99, arrêt,
12 décembre 2000, par. 23.
9
TPIY, affaire Krstic, jugement, par. 590.
10
TPIY, affaire Stakic, jugement, par. 523. - 18 -
«Bien que le concept du génocide gé ographiquement circonscrit semble
parfaitement compatible avec l’objet et le but de la convention, il soulève des
questions concernant le problème du plan ou de la politique. Un génocide limité dans
l’espace peut porter à conclure à l’absence de plan ou de politique à une échelle
nationale, et bien qu’il puisse donner lieu à la condamnation d’agents publics
subalternes au sein de la municipalité ou de la région, il peut également créer la 11
présomption que le crime n’a en fait pas été organisé à une plus grande échelle.»
329. Or le requérant, nous l’avons vu, n’est ni précis sur le groupe exactement concerné ni
sur le territoire ou la partie du territoire concerné. La longue énumération des municipalités où le
génocide aurait eu lieu ⎯sur laquelle je ne reviendrai pas ⎯ conduit justement à douter de
l’intention génocidaire puisque, dans ces municipa lités, le génocide a été expressément écarté par
le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, à la seule exception du territoire de Srebrenica.
iii)Le degré de l’intention requise pour le génocide
330. Nous avons indiqué que les actes constitu ant le génocide sont les actes constituant les
crimes de droit commun, mais également, et alte rnativement, des crimes contre l’humanité ou des
crimes de guerre. Ce qui différencie le génocide de ces autres crimes, c’es t l’intention spéciale de
détruire un groupe en tout ou partiellement. Ainsi, le Tribunal pour le Rwanda a jugé que :
«Le génocide est une forme de crime contre l’humanité. Toutefois, il diffère
fondamentalement des autres crimes contre l’humanité, en ce sens que l’intention
spécifique d’exterminer un groupe protégé ... mentionnée plus haut, doit être constatée
pour qu’il soit constitué, tandis que pour rapporter la preuve de la commission d’un
crime contre l’humanité, il suffit qu’une popul ation civile soit prise pour cible dans le
cadre d’une attaque généralisée ou systématique.» 12
331. Cette intention est spéciale dans le sens que l’auteur du génocide sait que ses actes
visent la destruction d’un groupe national ethnique, racial ou religieux, et que cette destruction est
bien sa volonté spéciale.
332. Le Tribunal pour le Rwanda a décrit préc isément la signification d’un acte criminel
constituant le génocide en jugeant que «la perpétra tion de l’acte incriminé dépasse alors sa simple
réalisation matérielle, par exemple le meurtre d’un individu particulier, pour s’insérer dans la
11
William A. Schabas, «Was genocide committed in Bo snia and Herzegovina? First Judgements of the
International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia», Fordham International Law Journal, novembre 2001, p. 23,
42 et 43.
12 o
TPIR, Le procureur c. Kayishema et Ruzindana , affaire n ICTR-95-1-T, Chambre de première instance,
jugement, 21 mai 1999, par. 89. - 19 -
réalisation d’un dessein ultérieur, qui est la destruction totale ou partielle du groupe dont l’individu
13
n’est qu’une composante» .
333. Lors des travaux préparatoires de la conve ntion, le représentant du Brésil a observé à
juste titre que : «ce qui caractérise le génocide, c’est l’intention spéciale de détruire un groupe, sans
laquelle, quelles que soient l’atrocité d’un acte et son analogie avec les actes décrits dans la
convention, il ne peut être qualifié de génocide» 14.
334. Ainsi donc, à l’exception de la claire volonté, toutes les autres formes de l’élément
moral des infractions pénales (la négligence, simp le ou grave) ne suffisent pas à constituer le
génocide.
335. Dans ce cadre, je dois dire que le requérant interprète d’une manière erronée l’article 13
du Code pénal yougoslave 15 lorsqu’il soutient que celui-ci pe rmet que les crimes intentionnels
soient commis avec une simple intention éventuelle (mémoire, par.5.3.5.10). Certes, l’article13
du Code pénal distingue entre l’intention direct e et l’intention éventuelle. Le Code pénal
yougoslave prévoyait que l’intention éventuelle étai t suffisante pour certains crimes, il prévoyait
d’ailleurs certains crimes qui ne pouvaient être commis qu’avec l’intention éventuelle, car en
présence d’une intention directe leur qualification changeait. Cependant, s’agissant du génocide,
prévu par l’article 141 du Code pénal yougoslave en vigueur à l’époque des faits allégués par le
requérant, il ne pouvait être commis qu’avec une intention directe et spéciale dirigée vers la
destruction d’un groupe racial, national, ethnique ou religieux. Le Code pénal yougoslave reprenait
lui aussi les termes de la convention.
336. Par ailleurs, le requérant donne une interprétation erronée du degré d’intention requise
pour le crime de génocide lorsqu’il indique que les Etats, comme les personnes physiques, doivent
être présumés vouloir ⎯et c’est très important ⎯ la conséquence nature lle de leurs actes.
L’intention se présumerait du résu ltat. Or dans un crime où l’ intention est spéciale, jamais
l’intention ne peut être présumée par la conséquence de l’acte. Si, dans certains cas, le Code pénal
13Affaire Akayesu, jugement, par. 522.
14
Comptes rendus analytiques des séances de la Sixième Commission de l'Assemblée générale,
21 septembre-10 décembre 1948, op. cit., p. 109.
15
Le requérant se réfère, par erreur, à l’article 7 du Code pénal yougoslave. Le texte cité par le requérant est bien
celui de l’article 13 qui contient les dispositions pertinentes pour l’intention criminelle. - 20 -
yougoslave, comme d’autres code s d’ailleurs, a pu présumer de la conséquence d’un acte
l’intention coupable, il est évident que le génocide échappe à cette présomption puisqu’il est l’un
des rares crimes qui requiert une intention spécia le, spécifiquement mentionnée dans la description
légale de cet acte criminel. L’intention requise pour les autres actes délictuels et criminels dans les
divers systèmes juridiques n’est d’aucune aide pour l’établissement du degré d’intention requise
pour le crime de génocide.
337. Les tribunaux internationaux ont confirmé la nécessité de cette intention spéciale pour
la commission du crime de génocide. Ainsi, le Tr ibunal pour le Rwanda a confirmé, dans l’affaire
Akayesu, que toute personne accusée de génocide pour l’avoir commis, exécuté, voire seulement
aidé ou encouragé, devait être «animée du dol spéc ial du génocide», défini comme «l’intention de
détruire en tout ou en partie un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel» 1.
338. La Chambre d’appel du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, toujour s dans l’affaire de
Srebrenica, toujours dans l’affaire du généralKrstic, a indiqué que :
«La connaissance qu[e l’auteur] avait de cette intention génocidaire ne permet
pas à elle seule de conclure qu’il en était an imé. Le génocide est l’un des crimes les
plus odieux qui soient, et sa gravité a pour corollaire l’exigence stricte d’une intention
spécifique. Un accusé ne peut être déclaré coupable de génocide que si cette intention
est clairement établie.» 17
339. Il reste à savoir comment cette intention génocidaire, l’élément indispensable et
constitutif du génocide, peut être prouvée, car il s’agit généralement d’un plan concerté avec un but
politique associé à une action collective.
340. La Chambre d’appel du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie a considéré que :
«L’existence d’un plan ou d’une po litique n’est pas un élément juridique
constitutif du crime de génocide. Toutef ois, lorsqu’il s’agit d’établir une intention
spécifique, l’existence d’un plan ou d’une politique peut, dans la plupart des cas, avoir
son importance. Les éléments de preuve peuvent ne pas exclur e ou peuvent même
18
établir cette existence, laquelle peut, à son tour, aider à prouver le crime.»
341. Alors, le requérant essaye de déduire l’ intention génocidaire du fait que des meurtres,
des viols, ont eu lieu en Bosnie. Il affirme que ces faits doivent être considérés comme constituant
16Affaire Akayesu, jugement, par. 485.
17Affaire Krstic, Chambre d’appel, arrêt, 19 avril 2004, par. 134.
18
Affaire Jelisic, Chambre d’appel, arrêt, 5 juillet 2001, par. 48. - 21 -
prima facie le génocide (mémoire, par.5.3.5.13). Cependant ces faits pe uvent constituer une
multitude d’autres crimes. Ils peuvent constituer les meurtres de dro it commun, les meurtres
comme crimes de guerre, les meurtres comme les crimes contre l’humanité. Seule l’intention
spéciale permet de les qu alifier de génocide. Et l’on cherche, sans jamais la trouver, la preuve de
cette intention spéciale dans les requêtes qui vous sont présentées.
342. La convention ne parle que du génocide commis par les personnes physiques, la
responsabilité de l’Etat pouvant être engagée uniq uement si l’Etat ne prend pas de mesures de
prévention du génocide ou de mesures de répression, lorsque celui-ci a été commis. L’article 8 de
la convention dispose que :
«Toute partie contractante peut saisir les organes compétents de l’Organisation
des NationsUnies afin que ceux-ci pre nnent, conformément à la Charte des
NationsUnies, les mesures qu’ils jugent appropriées pour la prévention et la
répression des actes de génocide ou de l’ un quelconque des autres actes énumérés à
l’article 3.»
343. Les mesures de prévention seraient les ac tes législatifs incriminant le génocide. La
Yougoslavie a adopté en 1977 un Code pénal fédéral, entré en vigueur le 1 erjanvier 1978, qui
prévoit le crime de génocide. Ce Code est resté en vigueur en Serbie-et-Monténégro pendant toute
la période couverte par la requête du requérant.
344. S’agissant de la répression, celle-ci signif ie la traduction devant les organes de justice
des personnes accusées d’avoir commis le génoci de. Or, pour le faire encore faut-il que la
Serbie-et-Monténégro ait une compétence sur ces crimes et sur leurs auteurs. La
Serbie-et-Monténégro n’avait plus aucune compéten ce quelconque, judiciaire et juridique, sur la
Bosnie-Herzégovine, Etat souverain.
345. Sur la base du droit international coutumier, la responsabilité de l’Etat peut être engagée
pour les actes que les agents de cet Etat ont comm is. Dans cette affaire, il faudrait encore et
d’abord, pour que la Serbie puisse être responsable du génocide, prouver que celui-ci a été commis
par des personnes physiques, et ensuite démontrer les liens entre ces personnes physiques et l’Etat
de Serbie.
346. Il appartient au requérant d’établir qu’une personne physique pouvant engager la
responsabilité de la Serbie-et-Monténégro a comm is l’un des actes énumérés à l’article2 de la - 22 -
convention sur le génocide en ayant été animée par l’intention génocidaire. La preuve de
l’intention génocidaire qui aurait animé l’auteuindividuel du génocide, pouvant engager la
responsabilité de la Serbie, doit êt re apportée par le requérant et conformément aux règles de la
procédure pénale. Seulement si cette preuve a été apportée et si la commission du génocide par une
personne pouvant engager la responsabilité de la Serbie a été établie au-delà de tout doute
raisonnable, le requérant peut prétendre à l’appli cation des règles de la responsabilité civile qui
s’appliqueront alors effectivement à l’Etat de Serbie-et-Monténégro.
347. Or, tout au long de ces débats, Madame le président, Messieurs les juges, ni dans la
requête initiale, ni dans ses mé moires successifs, la Bosnie-Herzégovine n’a jugé utile ou
nécessaire de nommer des personnes physiques qu i auraient commis le crime de génocide, si
celui-ci avait été commis et le degré de dépendance de l’Etat de Serbie-et-Monténégro. Vous avez
d’un côté, dans un Etat reconnu internationaleme nt, une guerre de sécession des trois peuples qui,
nous le reconnaissons tous, a été une guerre épouvantable, mais dont le génocide n’était pas le but.
Cela est clairement établi et c’est établi par la réalité d’aujourd’hui. Et de cette guerre de sécession
l’on voudrait tirer la conséquence qu’un Etat tiers à la Bosnie, n’était pas en guerre avec la
Bosnie, ait été complice, organisateur ⎯ on ne sait pas ⎯, d’un crime de génocide qui n’a pas été
commis. Voilà, Madame le président, Messieurs les juges, l’état de cette affaire tel que je pense
que l’on peut l’examiner et la juger. Je vais maintenant, pour conclu re, laisser la parole à
e
M Fauveau-Ivanovic qui va vous parler du problème des viols et atteintes à la personne humaine
sur le territoire de la Bosnie. Je vous remercie.
The PRESIDENT: Thank you, Maître de Roux. I call to the Bar Maître Ivanovic.
MFmUeVEAU-IVANOVI Ć :
V IOLS
II. Viol ⎯ atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale des membres du groupe moyen
de soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant
entraîner sa destruction physique totale ou partielle
1. Madame le président et Messieurs les juges, c’est un grand honneur pour moi de me
présenter devant vous dans l’intérêt de la Serbie-et-Monténégro. Mais l’honneur de vous demander - 23 -
justice est parfois une lourde tâche, la mienne au jourd’hui m’est particulièrement difficile car elle
touche à un sujet extrêmement délicat ⎯ les viols et les viols en temps de guerre.
2. Avant de m’engager dans l’analyse des faits relatifs aux viols commis en
e
Bosnie-Herzégovine pendant la guerre civile à la fin du XX siècle, je dois dire que sans égard à la
qualification juridique du viol, le viol ⎯ crime de droit commun, le viol ⎯ crime de guerre, le viol
⎯crime contre l’humanité, le viol ⎯ élément du génocide, le viol reste avant tout un viol, un
crime odieux qui humilie et dégrade la femme en ni ant son essence même, sa féminité, en niant la
femme en tant que femme et en tant qu’être humain . Je ne peux qu’être d’accord avec la Chambre
de première instance du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie qui a jugé dans l’affaire Stakic «Pour une
femme, le viol constitue de loin le crime suprême, parfois pire encore que la mort, car il la couvre
19
de honte.»
3. A ce propos je voudrais exprimer ma compassion la plus profonde avec toutes les victimes
des viols et l’indignation envers tous ceux qui ont pu s’engager dans de tels actes.
4. Cependant, je représente la Serbie-et-Mont énégro, accusée injustement du génocide, et je
suis obligée d’entrer dans l’analyse de certains faits qui en réalité ne méritent pas d’être analysés,
mais cette analyse est toutefois nécessaire afin de démontrer que ces faits aussi odieux qu’ils soient
ne constituent pas le génocide.
5. La semaine dernière, lors des plaidoiries su r les violences sexuelles et le viol, le requérant
a reconnu que les viols et les violences sexuelles accompagnaient tous les conflits. C’est un fait,
c’est la réalité de guerre. Cependant le requéra nt ne l’accepte pas, il s’efforce de démontrer
l’impossible: une politique des violences sexuelles qui aurait été partie intégrante du nettoyage
ethnique génocidaire qui aurait visé les Musulmans de Bosnie-Herzégovine.
6. Le requérant nous a exposé des faits crus et brutaux, les faits tels que vus par lui. Par
respect pour toutes les femmes qui ont eu à subir les violences sexuelles et le viol, par respect pour
toutes les femmes qui ont eu à subir la dure réa lité de la guerre, j’essa ierai d’éviter autant que
possible de polémiquer sur les faits, car les viols ét aient bien commis, les viols qui en aucun cas ne
19 o
TPIY, Le procureur c. Milomir Stakic, affaire n IT-97-24-T, 31 juillet 2003, par. 803. - 24 -
constituent le génocide. Afin de réfuter cette allégation infondée et non soutenue par aucune
preuve, je suis obligée de présenter certaines incohérences dans les arguments du requérant.
7. Madame le président, Messieurs les juges, il m’est particulièrement pénible d’analyser les
chiffres concernant les viols, les chiffres avancés par le requérant. Cette analyse semble et est
froide, impersonnelle, et bien trop rationnelle là où la raison même appelle des émotions. Derrière
bien des chiffres se cachent des êtres humains, de s femmes, des jeunes filles dont la féminité, la
dignité, l’humanité ont été offensées. Mais la réalité n’est pas telle que présentée par le requérant.
8. En1993, le requérant a déposé auprès de votre Cour une requête dans laquelle il
prétendait, parmi d’autres allégations, que cinqua nte mille femmes musulmanes avaient été violées
en Bosnie-Herzégovine (requête, par. 51). C’était en mars 1993, donc à l’époque où la guerre était
encore dans sa première année. Malheureusement, à l’époque, la guerre se poursuivait.
9. Une année plus tard, en 1994, lorsque le requérant a déposé son mémoire, la guerre durait
toujours. Cette fois-ci, le requérant alléguait vingt millevictimes, ou plus précisément «au moins
vingt mille victimes» (mémoire, par. 2.1.0.8). Donc, les cinquante mille viols de l’année 1993 sont
devenus une année plus tard, en 1994, vingt mille viols.
10. La semaine dernière, nous avons entendu que douzemilleviols ont été commis en
Bosnie-Herzégovine durant la guerre qui s’est en fin terminée fin1995. Donc, dixans après la
guerre qui avait duré de 1992 à 1995 et dans laquelle le requérant alléguait cinquante mille viols au
début 1993, puis vingt mille viols en 1994, le nombre de viols allégué est réduit à douze mille.
11. Douze mille viols et probablement autant de femmes violées. Si ce nombre est réel il est
terrible, mais enfin si ce nombre n’est pas réel, la réalité n’est toutefois pas moins terrible, car le
viol, les viols ont bien eu lieu et toute femme qu i a eu à le subir a souffert énormément, comme
d’ailleurs toute femme victime de ce crime qui est la négation de la féminité même.
12. En alléguant douzm eilleiols, le requérant se réfère au rapport de
M. Tadeusz Mazowiecki. Le requérant ne précise pas où les viols étaient commis, il ne précise pas
qui en étaient les victimes et encore moins qui en étaient les auteurs. Cependant, en écoutant la
plaidoirie du requérant du 2mars dernier, la seule conclusion qui s’imposait, était que ces
douze mille viols étaient commis en Bosnie-Herzégovine, que les victimes de ces douze mille viols
étaient des femmes musulmanes et que les auteurs de ces viols étaient des Serbes. - 25 -
13. Or, les faits présentés dans le rapport de M. Tadeusz Mazowiecki sont différents et bien
différents des allégations du requérant.
14. Tout d’abord, le nombre des victimes du viol, rapporté dans le rapport de
M.TadeuszMazowiecki est fondé sur le nombre des avortements qui auraient été causés par le
viol. Le rapport précise :
«It is not possible to know precisely th e actual number of rapes or the number
of pregnancies due to rape that have occurred. However, estimates can be made based
on the 119 documented cases of pregnancies resulting from rape. Medical studies
suggest that of the every 100 incidents of rape, one will result in pregnancy. This
suggests that 119 documented cases were likely to have been the result of
20
approximately 12,000 incidents of rape.»
En conséquence, il s’agit d’une conclusion fondée sur un calcul. Aucun témoignage ne prouve
douzemilleviols, aucune preuve matérielle ne prouve douzemilleviols, mais des études
médicales, anonymes en plus, et de surcroît non soumises à un examen contradictoire, présument
que douze mille viols auraient pu être commis en Bosnie-Herzégovine durant la guerre.
15. Mais, supposons seulement que ce nombre est exact. Le requérant sous-entend que les
douzemillevictimes étaient des femmes musulmanes et que les auteurs de ces douzemilleviols
étaient des Serbes.
16. Madame le président, Messieurs les juge s, le rapport de M.TadeuszMazowiecki ne
prétend pas que les douzemilleviols auraient été commis par les Serbes sur les femmes
musulmanes. La lecture attentive de ce rapport donne une toute autre image des faits.
17. Certes, les Serbes ont commis des viols en Bosnie-Herzégovine pendant la guerre. Le
rapport de M. Tadeusz Mazowiecki rapporte des faits commis par des Serbes
«local Serb forces in conjunction with Serb forces from outside the area would occupy
a village and restrict the movement of the local population. Often men were deported
or fled. Women were then often raped in their own homes or taken from their homes
21
to another location and raped often by neighbours or people known to them.»
20NationsUnies, situation des droits de l’homme dansle territoire de l’ex-Yougo slavie, rapport soumis par
M.TadeuszMazowiecki, rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, doc.E/CN.4/1993/50,
10 février 1993, annexe II, par. 30.
21
Id., par. 48 b). - 26 -
Cependant, le rapport continue «Reports of similar abuses were obtained from a Serb refugee who
22
came from north-eastern Bosnia and Herzegovina…»
18. Le rapport décrit ensu ite l’inertie des pouvoirs quant aux viols et cite une femme
musulmane qui a déclaré que «being taken by an ethnic Serb policeman to a private home where
she was presented with the words «Here she is, Commander. I brought her»…He [the
23
Commander] told her to go into his office which was his bedroom where he raped her.»
Cependant, la conduite identique peut être attrib uée aussi aux Musulmans et aux Croates car nous
pouvons lire dans le rapport de M.TadeuszM azowiecki, immédiatement après la déclaration
susmentionnée, que «Serb women also reported that women were raped by Croat and Muslim
24
policemen and men in position of authority.»
19. Je n’ai aucune intention de justifier les viols commis par les Serbes par les viols commis
par les Musulmans ou par les Croates, un crime ne peut être justifié par un autre crime. Cependant,
je suis obligée de souligner que les viols étaient commis dans la guerre en Bosnie-Herzégovine de
tous les côtés et que le nombre de douzemille victimes, indiqué par le requérant, comprend les
victimes musulmanes, les victimes croates, les victimes serbes et les victimes de toute autre
nationalité. Ce nombre ne peut en aucun cas être imputé au Serbes, car il concerne aussi bien les
viols commis par les Serbes, que ceux commis par les Croates ou les Musulmans. Ce nombre
inclut par ailleurs les viols commis au sein de la même communauté, car de tels viols avaient aussi
eu lieu en Bosnie-Herzégovine.
20. Le rapport de M. Tadeusz Mazowiecki ne donne aucune indication quant au pourcentage
des viols dont les victimes auraient été les femme s musulmanes et dont les auteurs auraient été les
Serbes. Il faut souligner que le rap port cité par le re quérant conclut que «there is clear evidence
that Croat, Muslim and Serb women have been detained for extended periods and repeatedly
raped» 25.
22Id.
23Id., par 48 c).
24
Id.
25Id., par. 61. - 27 -
21. D’autres rapports ont également été écrits sur les viols en Bosnie-Herzégovine. Mais,
tous ces rapports indiquent que les viols étaient commis par tous et contre tous. Ainsi le rapport de
la commission d’experts rapporte un système de conduite, mais qui était commun à toutes les
26
parties au conflit . Dans son rapport final, annexe IX, la commission d’experts a noté : «There is
evidence that rape and sexual assault have been used by all parties of the conflict to displace
27
targeted ethnic groups, though not necessarily as part of an overall policy of «ethnic cleansing.»
22. Le rapport de la commission d’ experts, tout comme le rapport de
M.TadeuszMazowiecki, établit la même condu ite criminelle envers les femmes parmi les
membres de trois communautés vivant en Bosnie -Herzégovine car il rapporte que «five patterns
emerge from the reported cases, regardless of the ethnicity of the perpetrators or the victims» et
«Rape has been reported to have been committed by all sides to the conflict.» 28
23. Egalement une mission du Conseil de l’Europe, spécialement constituée afin d’enquêter
sur les viols sur les femmes musulmanes, a constaté :
«The Mission was fully conscious that its mandate focused on the investigation
of alleged abuses against Muslim women in Bosnia-Herzegovina. However, the
Mission considers it important to place on record its view that rape and sexual
violence are restricted by neither nationality nor gender… This is not to ignore the fact
that there are many and disturbing reports of rape of Croat and Serbian women and
children, as well as sexual abuse of men in detention camps. The Mission therefore
has to emphasize that all those who are vic ti29 of this appalling conflict must be the
concern of the international community.»
24. Il s’ensuit que les viols étaient commis, ma is qu’ils ne s’inscrivaient pas dans un plan
génocidaire, un plan que les Serbes auraient eu comme le requérant veut le faire croire. Ils
s’inscrivaient dans une réalité de la guerre et plus particulièrement de la guerre civile.
25. Et encore une fois, je dois souligner que les viols commis par les Croates ou par les
Musulmans sur les femmes serbes ne peuvent justifier ou excuser les viols commis par les Serbes,
mais les faits indiqués par le requérant, par le ra pport de M. Tadeusz Mazowiecki et par le rapport
de la commission des experts ne démontrent pas un projet de viols planifiés et organisés qui aurait
26[Cette note ne figure pas dans l’original.]
27Rapport final de la commission d’experts, Nations Unies, doc. S/1994/674, annexe IX.
28
Rapport final de la commission d’experts, Nations Unies, doc. S/1994/674, partie F.
29«EC Investigative mission into the treatment of Muslim Women in the former Yugoslavia: Report to EC
Foreign Ministers», February 1993; http://www.womenaid.org/press/info/humanrights/warburtonfull.htm. - 28 -
été spécifique aux Serbes. Ils démontrent encore moins que les viols se seraient inscrits dans une
intention de destruction d’un groupe national, ethnique, religieux ou racial. Les faits et les rapports
qui les relatent ne démontrent que la réalité terrible de la guerre où les instincts les plus bas se
réveillent et ou aucune loi ne règne, sauf celle de la force.
26. Certes, les viols ont été commis en Bosnie-Herzégovine, personne ne le niera, personne
ne peut le nier. Mais des viols ne constituent pa s le génocide seulement parce qu’ils sont commis
dans une guerre. Il faut encore que quelqu’un ait voulu, que quelqu’un ait envisagé que quelqu’un
ait planifié une politique qui ferait du viol une arme destinée à détrui re un groupe national,
ethnique, racial ou religieux. Et dans cette procéd ure, il faut que le requérant prouve qu’une telle
politique existait.
27. Nous ne nions pas que le viol peut constituer le génocide car aucun doute ne subsiste que
le viol est une atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de la personne.
28. Le Tribunal pour le Rwanda a considéré, notamment dans l’affaire Akayesu, qu’une
atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale comp rend, sans s’y limiter, les actes de torture, que
cette dernière soit physique ou mentale, les tr aitements inhumains ou dégradants, le viol, les
30
violences sexuelles, la persécution .
29. Le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie a été encore plus précis en jugeant dans l’affaire
Stakic qu’une atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale s’entend, en particulier par des actes
de torture, de traitements inhumains ou dégradants , de violences sexuelles, y compris les viols,
d’interrogatoires accompagnés de violences, de me naces de mort, et d’actes portant atteinte à la
31
santé de la victime ou se traduisant par une défiguration ou des blessures .
30. Nous ne nions pas que le viol est égalem ent un acte criminel susceptible de soumettre
intentionnellement un groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique
totale ou partielle.
31. Cependant, pour qu’une atteinte grave à l’ intégrité physique ou mentale de la personne
puisse être qualifiée de génocide ou pour qu’un acte puisse être qualifié de la soumission
intentionnelle d’un groupe à des conditions d’exis tence devant entraîner sa destruction physique
30TPIR, Le procureur c. Akayesu, affaire n IT-95-1-T, Chambre de première instance, jugement, par. 504.
31
TPIY, Le procureur c. Stakic, jugement, 31 juillet 2003, par. 516. - 29 -
totale ou partielle, l’intention de destruction doit être établie; or, dans le présent cas, elle n’est pas
établie. Elle ne peut être établie, car tout simplement elle n’existait pas.
32. D’ailleurs, et le fait est significatif, car il s’agit de l’affaire Sreb renica. Dans l’affaire
Krstic, la Chambre de première instance a jugé que «The Trial Chamber is not convinced beyond
reasonable doubt that murders, rapes, beatings and abuses committed against the refugees at
32
Potocari were also an agreed upon objective…»
33. Certains cas de viols en Bosnie ont été jugés par le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie
comme les crimes de guerre et comme les crimes contre l’humanité et encore une fois nous n’avons
pas l’intention de le nier. Cependant, ni un viol, crime de droit commun, ni un viol, crime de
guerre, ni un viol, crime contre l’humanité ne s’inscrivent dans la logique du génocide.
34. Ni le caractère systématique des violences, ni la commission des crimes à grande échelle
ne constitue en soi le génocide. Elle constitue le viol, le crime contre l’humanité tel que défini dans
l’article 5 g) du Statut du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie.
35. L’intentiondiscriminatoire non plus ne fait d’un viol le génocide. Cette intention
discriminatoire fait d’un viol le crime contre l’ humanité persécution, défini dans l’article5 h) du
Statut du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie. Le cr ime contre l’humanité-persécution ne peut être
commis que dans une intention spéciale qui est un e intention discriminatoire. La Chambre de
première instance du Tribunal a jugé dans l’affaire Kupreskic la persécution comme «le déni
manifeste ou flagrant, pour des raisons discrimina toires, d’un droit fondamental consacré par le
droit international coutumier ou conventionnel, et atteignant le même degré de gravité que les
33
autres actes prohibés par l’article 5 du Statut» .
36. Dans cette même affaire, la Chambre a confirmé que les éléments matériels du crime de
persécution sont ceux qui constituent d’autres crimes contre l’humanité, parmi lesquels se trouve le
viol. Conformément au jugement du Tribunal, c’ est l’intention discriminatoire qui distingue le
34
crime de persécution des autres crimes contre l’humanité .
32TPIY, Le procureur c. Radislav Krstic, affaire n IT-98-33-T, 14 janvier 2000, par. 616.
33 o
TPIY, Le procureur c. Zoran Kupreskic et consorts, affaire n IT-95-16-T, 14 janvier 2000, par. 621.
34Id., par. 607. - 30 -
37. Justement, le crime contre l’humanité, la persécution, est un crime proche du génocide,
proche mais si lointain, lointain car entre la pe rsécution et le génocide s’inscrit cette intention
spéciale, propre au génocide, indispensable pour que le génocide soit commis, cette intention à
détruire un groupe national, ethnique, religieux ou racial.
38. Permettez-moi de citer encore une fois le jugement rendu par la Chambre de première
instance dans l’affaire Kupreskic qui décrit avec tant de précision la distinction entre le génocide et
le crime contre l’humanité-persécution :
«Dans ce contexte, la Chambre de premiè re instance souhaite insister sur le fait
que la persécution, en tant que crime contre l’humanité, est une infraction qui relève
du même genus que le génocide. Il s’agit, dans les deux cas, de crimes commis contre
des personnes qui appartiennent à un groupe déterminé et qui sont visées en raison
même de cette appartenance. Ce qui comp te dans les deux ca s, c’est l’intention
discriminatoire: pour attaquer des perso nnes à cause de leurs caractéristiques
ethniques, raciales ou religieuses. Alors que dans le cas de la persécution, l’intention
discriminatoire peut revêtir diverses formes inhumaines et s’exprimer par le biais
d’une multitude d’actes, dont l’assassinat, l’ intention requise pour le génocide doit
s’accompagner de35elle de détruire, en tout ou en partie, le groupe auquel les victimes
appartiennent.»
39. Madame le président, Messieurs les juges, aucune intention de destruction du peuple
musulman, ou des autres peuples non serbes, n’a existé et n’existe chez la Serbie-et-Monténégro ou
le peuple serbe. Les viols commis en Bosnie -Herzégovine par les Serbes, mais aussi par les
Croates et les Musulmans étaient des viols qui accompagnent la guerre, qui accompagnent les
situations chaotiques, les situations de non-droit. Ce n’est pas une excuse de ces crimes, ce n’est
pas une justification, c’est la dure réalité de la guerre et malheureusement de la cruauté de la nature
humaine qui se révèle dans des situations telles qu’une guerre civile.
II. Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe et transfert forcé
d’enfants du groupe à un autre groupe
40. Le requérant ne s’arrête pas sur les viols systématiques, il prétend que la
Serbie-et-Monténégro aurait commis le génocide par les mesures visant à entraver les naissances au
sein d’un groupe ainsi que le transfert forcé d’ enfants d’un groupe à un autre. Les deux actes
criminels auraient été commis par le moyen du viol des femmes musulmanes.
35TPIY, Le procureur c. Zoran Kupreskic et consorts, affaire n IT-95-16-T, 14 janvier 2000, par. 621. - 31 -
41. S’il est incontestable que les viols ont eu lieu en Bosnie-Herzégov ine, les allégations
selon lesquelles le viol était un moyen choisi afin d’entraver les naissances au sein d’un groupe
ainsi qu’un moyen du transfert forcé d’enfants d’un groupe à un autre groupe sont complètement
infondées.
42. En effet, le requérant tire des viols qui étaient commis certaines conséquences qui
dépassent de loin le cadre dans lequel les viols étaient commis en Bosnie-Herzégovine lors de la
guerre. Cela n’est pas vraiment surprenant, car le nombre des viols avancé par le requérant dépasse
également et largement le nombre réel des viols commis en créant l’illusion que des viols étaient
une arme de guerre résultant d’une politique délibérée, ce qui n’était pas le cas.
43. Dans l’affaire Akayesu, le Tribunal pour le Rwanda a jugé que les mesures visant à
entraver les naissances au sein du groupe englobent «les mutilations sexuelles, les stérilisations et
les contraceptions forcées, la séparation des hommes et des femmes et la prohibition des
36
mariages» . Le requérant n’allègue aucune de ces mesure s; en revanche, il allègue le viol; or, le
jugement Akayesu n’a pas mentionné le viol comme l’ une des mesures pouvant entraver les
naissances au sein du groupe. Cependant, nous n’entrerons pas dans le débat si le viol peut
constituer une telle mesure, ce débat nous semble trop indigne, trop dégradant pour toutes les
victimes du viol sans égard si elles étaient de nationalité musulmane, croate ou serbe. Ces
victimes, ces femmes ont souffert suffisamment. Encore une fois, il ne faut pas oublier que dans
cette guerre les femmes de tout es les nationalités étaient violées et parfois les auteurs des viols
étaient de même nationalité que leurs victimes. Encore une fois, il faut rappeler que les femmes
sont souvent les premières victimes d’un état de non-droit qui surgit lors de la guerre.
44. Le seul élément de preuve que le requéran t présente afin de prouver sa thèse concernant
le viol comme une mesure d’entraver les naissan ces, est le rapport de M. Tadeusz Mazowiecki qui
a rapporté que le nombre d’avor tements a grandement augmenté en 1992 en Bosnie-Herzégovine.
Sans entrer dans l’exactitude de s faits rapportés par le rapporteur Mazowiecki, nous indiquons
qu’encore une fois le requérant cite tendancieuseme nt ce rapport car il oublie de dire que dans ce
même rapport M.Tadeusz Mazowiecki indique: «W hile this increase could reflect a rise in
36TPIR, Le procureur c. Jean-Paul Akayesu , affaire n ICTR-96-4-T, Chambre de première instance, jugement,
2 septembre 1998, par. 507. - 32 -
pregnancies due to rape it could also reflect a more general response to economic and social
instability created by war.» 37
45. Le requérant n’allègue aucun fait, il n’av ance aucun argument sérieux, il ne soumet
aucune preuve pour ses allégations selon lesquelles les viols étaient commis afin d’entraver les
naissances au sein d’un groupe. La thèse du requérant selon laquelle une diminution des naissances
a eu lieu au sein du groupe en Bosnie-Herzé govine, n’est soutenue par aucune information
concernant le taux de naissance en Bosnie-Herzégovine ni avant ni après la guerre.
46. Le requérant semble oublier le vieil adage latin actori incumbis onus probandi, mais la
charge de la preuve repose bien sur le requérant; or, le requérant ne soumet aucune preuve pour ses
allégations. Il ne la soumet pas car il ne peut la soumettre, cette preuve n’existe pas car les faits
relatés par le requérant ne se so nt jamais produits. Dans cette situation, nous ne pouvons que
simplement réfuter ces allégations complètement infondées.
47. Egalement, le requérant veut faire croire que les viols en Bosnie-Herzégovine étaient des
viols procréatifs par lesquels un transfert forcé d’enfants d’un groupe, du groupe musulman, aurait
été effectué à un autre groupe, le groupe serbe. Selon le requérant, les Serbes empêchaient les
femmes musulmanes, violées d’abord, d’avorter et les forçaient ainsi à donner la naissance à des
«bébés tchetniks» (requête, par. 83), un terme particulièrement inapproprié pour les nouveau-nés.
48. Selon les allégations du requérant, le s Serbes auraient d’abord violé les femmes
musulmanes et les auraient ensuite empêchées d’avorter en les séquestrant plusieurs mois.
Cependant, et toujours selon les allégations du requérant, les femmes musulmanes auraient donné
la naissance à leurs bébés le plus souvent sur le territoire musulman. Les bébés n’auraient donc pas
été élevés par les Serbes, mais au contraire par les Musulmans. La logique de ce raisonnement qui
en déduit le transfert d’enfants d’un groupe à l’autre est incompréhensible !
49. Par ailleurs, le requérant nous informe lors de sa plaidoirie du 2mars dernier que ces
bébés ne pourraient en aucun cas être considérés comme des Musulmans. Cette théorie est
abominable puisqu’elle implique une doctrine ét range selon laquelle, le métissage ne serait pas
admissible. Certes, aucune femme n’accepterait fa cilement le bébé issu d’un viol, beaucoup de
37TPIR, Le procureur c. Jean-Paul Akayesu , affaire n ICTR-96-4-T, Chambre de première instance, jugement,
2 septembre 1998, par. 27. - 33 -
femmes ne voudraient pas garder le bébé du violer. Le viol, suivi de la grossesse est un viol
prolongé, un viol provoquant un traumatisme complémentaire, une souffrance de plus, une blessure
de plus, une cicatrice de plus. Cependant, nous ne parlons pas ici de la femme, nous parlons de la
communauté. Le viol n’est pas une raison pour que la communauté entière rejette le bébé. Or, la
communauté musulmane de la Bosnie-Herzégovine, selon l’allégation du re quérant, rejetterait ce
bébé et elle le rejetterait car ce bébé aurait des eu gènes serbes.
50. Madame le président, Messieurs les juges, la communauté serbe aurait accepté un bébé
dont l’un des parents serait un non-Serbe, peu impor te sa nationalité. La communauté serbe aurait
accepté ce bébé, sans aucune inte ntion de transférer les enfants non serbes dans le groupe serbe,
elle aurait accepté ce bébé car un bébé n’est qu’un bébé, un nouveau-né, un être innocent et sans
défense. La communauté serbe aurait accepté un bébé né de parents mixtes comme elle aurait
accepté un bébé né de parents serbes, elle lui aurait donné la possibilité de trouver ses origines et de
choisir librement sa nationalité et sa religion.
Madame le président, Messieurs les juges, ceci conclut ma plaidoirie et je vous prie de
donner la parole à M. Vladimir Cvetkovic, mais je suppose après la pause.
The PRESIDENT: Thank you, Maître Ivanovic. May I ask if your colleague would wish to
continue now, or after the short break?
CMVr.TKOVI Ć: Madam President, I would prefer to continue after the break, if I may.
The PRESIDENT: Yes. The Court will now rise and resume just after 4.30.
The Court adjourned from 4.20 to 4.35 p.m.
The PRESIDENT: Please be seated. Mr. Cvetković, you have the floor.
CMVr.TKOVI Ć: Thank you.
THE ALLEGED GENOCIDE IN THE TERRITORY OF SERBIA AND M ONTENEGRO
I. Introduction
1. Madam President, distinguished Members of the Court, it is my great honour to appear
before you for the first time. - 34 -
In the first submission of their Reply of 23April 1992, as their last written pleading, the
Applicant requested the Court to adjudge and declare:
“That the Federal Republic of Yugoslavia, directly, or through the use of its
surrogates, has violated and is violating the Convention on the Prevention and
Punishment of the Crime of Genocide, by destroying in part, and attempting to destroy
in whole, national, ethnical or religious groups within the, but not limited to the ,
territory of Bosnia and Herzegovina, including in particular the Muslim population ,
by
⎯ killing members of the group;
⎯ causing deliberate bodily or mental harm to members of the group;
⎯ deliberately inflicting on the group conditio ns of life calculated to bring about its
physical destruction in whole or in part;
38
⎯ imposing measures intended to prevent births within the group.”
2. Notwithstanding the considerable imprecisi on of this submission, both in terms of the
definition of the allegedly targeted group ⎯ of which Mr. de Roux talked before me ⎯ and of the
territory where the genocide had allegedly been committed, it is reasonably safe to conclude that
the Applicant, inter alia, claimed that the Respondent had violated the Convention with respect to
the Muslim population not only on the territory of Bosnia and Herzegovina, but also on the
territory of Serbia and Montenegro. During the previous days, the Court had the opportunity to
hear my distinguished colleagues who have succe ssfully demonstrated that genocide had not
occurred in Bosnia and Herzegovina and that, in any case, the actions of the Republika Srpska
could not be attributed to Serbia and Montenegro. It is my task today to address the Applicant’s
claims that genocide has been committed on the territory of Serbia and Montenegro.
3. The Applicant’s allegations on the alleged genocide in the territory of the Respondent are
contained in Section 12 of Chapter VIII of their Reply, entitled “Ethnic Purification in the Territory
of Yugoslavia”. Moreover, some allegations of cr imes committed in the territory of Serbia and
Montenegro are to be found in the Memorial and the Application, but are mostly superseded by the
Reply.
4. This Section12 is in itself rather short. It consists of 29pages out of the total of
973 pages of the Applicant’s substantial Reply, but it contains several claims on the alleged crimes
3Reply, Conclusions and Submissions; emphasis added. - 35 -
committed in the territory of the Respondent. Ho wever, it seems that for some reason it was
necessary for the Applicant to include claims on the alleged genocide in Serbia and Montenegro,
even if only briefly, and we have to ask ourselve s why that was the case. But, to answer that,
Madam President, we first have to look at the Applicant’s allegations contained in their Reply.
5. It is quite interesting, though, that the Applicant remained completely silent on this matter
during their oral pleadings. It is possible that they have even decided to give up on these
allegations. Nevertheless, in the absence of any explicit statement thereof, and in particular in light
of the Applicant’s constant persis tence on the well-foundation of a ll of their written pleadings, we
will assume that these allegations still stand. So , the allegations can be divided into two basic
groups: claims on the alleged crimes committed on the territory of the Respondent against the
Muslim population from Bosnia and Herzegovina and claims relating to the alleged crimes against
the Muslim population of Serbia and Montenegro. I will examine each of the claims one by one.
II. The alleged camps in the FRY
1. Reportsofinternationalorganizations
1.1. CSCE Mission Report
39
6. In its Counter-Memorial , Serbia and Montenegro quoted the Conference for Security and
Co-operation in Europe ⎯ today’s Organization for Security and Co-operation in Europe ⎯
Report, which had been published following an inspection of the alleged places of detention in
Serbia and Montenegro. The inspection was conducted in two stages ⎯ the first between
29August and 4September1992 and the second between 13 and 18January 1993. It was
conducted at the request of the President of Bosnia and Herzegovina, Mr. Alija Izetbegovic. In the
first stage, the Rapporteurs visited a coal mine in Aleksinac and in the second they visited nine
other alleged places of detention. The Rapporteur s concluded that they “[h]ave not been able to
40
verify the existence of any places of detention in the Republics of Serbia and Montenegro” .
7. In spite of this conclusion, the Applicant de voted a lot of effort to interpret the Report and
its findings to their own benefit. So, the Applicant first quoted paragraph 6 of the Report, where it
3Counter-Memorial, 1.3.1.7.
40
“Report of the CSCE Mission to Inspect Alleged Places of Detention in the Republics of Serbia and
Montenegro”, CSCE, 13-18 Jan. 1993, Ann. No. 8 to Serbia and Montenegro’s Counter-Memorial. - 36 -
was said that the CSCE Council of Ministers had stressed that, “[t]he ‘primary responsibility’ for
the conflict and atrocities in the former Yugoslavi a ‘lies with the present leaders of Serbia and
Montenegro and with the Serbian forces operating in Bosnia and Herzegovina’” 41. And in addition
that, “[t]he Ministers underscored their determination to ‘see to it that those responsible are brought
to justice’ for the massive and systematic violations of human rights in the territory of the Republic
42
of Bosnia and Herzegovina and other parts of former Yugoslavia” . From the last sentence, the
Applicant concluded in their Reply that: “These atrocities were, according to the Ministers, not
only committed on the territory of Bosnia and Herzegovina; ethnic cleansing also occurred in
‘other parts of the former Yugoslavia’” 43. The Applicant did not explicitly say that the Ministers
concluded that the ethnic cleansing had occurred in the territory of Serbia and Montenegro, but
obviously the Applicant tried to create that impression with the Court.
8. The words of the Ministers do not show in any way that they concluded that any of the
crimes had occurred in Serbia and Montenegro. The expression used by the Ministers, “other parts
of former Yugoslavia”, can relate to any of the former Yugosla v Republics, other than Serbia and
Montenegro, and it probably related to Croatia which, as it is well known, was also a place where
fighting between Croats and Serb s from Croatia was taking place and where some crimes were
certainly committed by both sides. In any case, whatever the CSCE Ministers intended by this
imprecise expression, it cannot be concluded that they had in mind Serbia and Montenegro. If they
had had, they would have expressly said so and would not have left it to the Applicant to make
conclusions on their behalf.
9. The Applicant further tried to show that the CSCE Rapporteurs had been handicapped in
their investigation and misled by the authorities of Serbia and Montenegro, since they had not been
able to visit all the sites indicated in some of the locations. From the sentence of the Report, which
reads, “[t]he Rapporteurs are not in a position to exclude entirely the possibility that there are
44
places of detention in the Republic of Serbia and Montenegro” , the Applicant drew an a contrario
41Ibid, para. 6.
42
Loc. cit.
43
Reply, Chap 8, Sec 12, para. 443.
44“Report of the CSCE Mission to Inspect Alleged Places of Detention in the Republics of Serbia and
Montenegro”, CSCE, 13-18 January 1993, para. 34. - 37 -
conclusion that detention places to detain Bo snian Muslims had actually existed in Serbia and
Montenegro. This conclusion is a clear misinterpr etation of the Rapporteurs’ findings and once
again the Applicant produced a conclusion on their behalf.
10. The same goes for the Rapporteurs’ recommendations, where they said:
“Should the CSCE feel that the findi ngs of the present report, or additional
information received from other sources, have not sufficiently relieved the concern of
the international community, the Rapporteurs recommend follow-45 action in order to
further investigate some of the alleged places of detention.”
The Applicant emphasized the end of this sent ence and inferred that the Rapporteurs had
recommended follow-up investigation. However, the Applicant completely ignored the first part of
the quoted sentence, which clearly shows that the Rapporteurs were satisfied with their mission and
findings and that this mission had obviously relieved their own concerns about the alleged places of
detention in Serbia and Montenegro.
1.2. The Mazowiecki Report
11. The Applicant continued to insist on Se rbia and Montenegro’s insufficient co-operation
with international bodies, especially with the United Nations Special Rapporteur,
Mr.TadeuszMazowiecki. In paragraphs446 to 448 of Chapter VIII of the Reply, the Applicant
extensively quoted the Special Rapporteur’s Repor t of 4 November 1994, where Mr.Mazowiecki
had expressed his concerns about th e refusal of Serbia and Montenegro to co-operate with him, as
well as with Professor Manfred Nowak, member of the Working Group on Enforced or Involuntary
Disappearances.
12. Madam President, although Mr.Mazowiecki’s words about the Respondent’s refusal to
co-operate with him may be true, they do not in any way prove that places of detention existed on
the territory of Serbia and Montenegro or that insufficient co-operati on was the result of the
Respondent’s authorities’ intention to conceal those places of detention. The refusal was simply
the result of the at that time authorities’ perception of the work of the Special Rapporteur and other
international inspections, which they perceived as one-sided, biased and directed against Serbia and
Montenegro. Albeit this perception might have been wrong, it certainly could not be interpreted in
4Ibid., para. 35. - 38 -
a way that the Applicant tried to do ⎯ as a confirmation of the existe nce of places of detention in
Serbia and Montenegro.
1.3. The United Nations Commission of Exp erts Report as the main source used by the
Applicant
13. Most of the Applicant’s claims on detent ion places in Serbia and Montenegro are based
on the United Nations Commission of Experts’ Report, Annex VIII, entitled “Prison Camps”. In
this Report, the Commission of Experts stated: “Of the reports of the 71 camps alleged in FRY,
42were corroborated (i.e. reported by a neutral source or multiple neutral sources) and 29 were
uncorroborated (i.e. reported either by multipl e non-neutral sources, or not corroborated by a
46
neutral source).”
14. In order to deal with this claim, I firs t have to say a few words about the Commission of
Experts’ Report in general, sources it used and methods it applied. You have heard more about this
Report and other sources that the Applicant used for their written pleadings, as well as oral
submissions, from our Co-Agent, Mr. Saša Obradović. However, several things should be repeated
here. First, the work of the United Nations Commission of Experts, including their Final Report,
was just a step towards the establishment of th e criminal tribunal for the former Yugoslavia ⎯ the
ICTY ⎯ and the findings of the United Nations Final Report do not present final factual findings
on the events in question. They are a result of the preliminary investigation that was later followed
by the investigation of the ICTY Office of the Prosecutor. Therefore, the information contained in
the United Nations Final Report is a kind of a raw material that was later examined by the ICTY
Office of the Prosecutor and only when the ICTY Prosecutor, after their own investigative efforts
and the examination of the evidence, had found the allegations of the Report to be credible to a
sufficient extent did they include them in the indictments.
15. Subsequently, the Trial Chambers of the ICTY examined the respective allegations in the
process that allowed cross-examination of witnes ses and evidence, and expressed their findings in
the judgments. In this respect, only the facts c ontained in the ICTY judgments may be considered
as the established facts. And with respect to th e alleged existence of dete ntion facilities in Serbia
4United Nations, Final Report of the United Nations Commission of Experts, S/1994/674/Add. 2 (Vol. IV),
28 December 1994, Ann. VIII, “Prison Camps”, pp. 31-32, paras. 240-245, as quoted in the Reply, para. 8.12.449. - 39 -
and Montenegro, it should be stressed that no ICTY judgment or an indictment contains a single
claim on detention places used to detain Bosnian Muslims in Serbia and Montenegro.
16. Madam President, the analysis of the sources used by the Commission of Experts for the
part of their Report on Prison Camps, which deal s with the alleged detention places in Serbia and
Montenegro ⎯ and this is Part E of the Report, entitled “Camps Reported in FRY” ⎯ shows that
almost two thirds of the total number of sources that the Commission used had originated either
from Croatia or from Bosnia and Herzegovina. Ho wever, the number of sources from Bosnia and
Herzegovina was 30, in contrast to 467 sources from Croatia. In addition, most of the other
sources ⎯ like State, NGO and media reports ⎯ were also predominantly based on unverified
witness accounts, and the Court had a chance to see during the presentation of Mr. Obradovi ć how
often these reports were based on incorrect alle gations. Consequently, the neutrality and the
validity of the sources used by the United Nations Commission of Experts are highly doubtful for
two reasons:
⎯ firstly, the majority of the sources came from either Croatia or Bosnia and Herzegovina, the
two States that cannot be considered as neutral in this matter, and
⎯ secondly, even the sources which did not come from Croatia or Bosnia and Herzegovina were
predominantly, if not exclusively based on witness testimonies, compiled by States or NGOs
who did not have any possibility to verify or analyse them.
17. The second striking feature, when it come s to the sources for the part of the Report
dealing with the alleged places of detention in Serbia and Montenegro, is that Croatian sources
overwhelmingly prevail over sources from Bosnia and Herzegovina ⎯ 467 sources came from
Croatia and only 30 from Bosnia and Herzegovina. On the other hand, in the total number of
sources used by the Commission for the whole report on prison camps these numbers are almost
completely balanced ⎯ the Commission had used over 1,300 sources from Bosnia and
Herzegovina and over 1,230 from Croatia. There is only one reasonable explanation for this
disproportion ⎯ the overwhelming majority of the clai ms on detention places in Serbia and
Montenegro, reproduced by the Commission of Ex perts and later partially by the Applicant,
actually relates to crimes allegedly committed against Croats from Croatia and not against Bosnian
Muslims. - 40 -
18. As a result, out of 71 alleged detention places ⎯ “corroborated” and “uncorroborated” in
the words of the Commission of Experts ⎯ 26 are reported to have contained Bosnian Muslims.
Out of those 26, however, 11 were not corroborat ed by what the Commission referred to as a
“neutral source”. For the other 15 places, the allegations in the Report came to no more than one or
two sentences. The only exception was the Penal Correction Institute in Sremska Mitrovica, which
was described in much more detail but, as I will explain later, the vast majority of the claims
related to the alleged mistreatment of Croats and not of Bosnian Muslims. And to remind you, the
CSCE Rapporteurs who had visited ten alleged places of detention in 1993 have found no evidence
of the existence of any places of detention in the territory of the Respondent.
2. Specific alleged places of detention in the FRY
19. Out of 71 alleged detention facilities in Serbia and Montenegro listed by the United
Nations Commission of Experts, the Applicant chose to include only a few of them in their written
pleadings. This is certainly not the result of the Applicant’s intention to be brief, but is more likely
to be the consequence of the lack of any credible evidence on the existence of such facilities.
2.1. The alleged camps in Užice and Zlatibor
20. The two that have been included are the alleged camps in Užice and Zlatibor. The
Applicant claims that, after the Serbian takeover of the city of Višegrad, a number of Muslims from
this town had been taken to a detention facility in Užice, a town in the Republic of Serbia, close to
the border with Bosnia and Herzegovina. As the proof for the allegations, the Applicant used the
Commission of Experts’ Final Report, which reads:
“Uzice: (The existence of this detent ion facility has been corroborated by a
neutral source, namely the National Or ganization for Victim Assistance.) According
to information from the Territo rial Defence Force in Visegrad , most of the
6,600Muslim inhabitants of Visegrad were taken by the Serbian Territorial Defence
to a detention facility in Uzice, Serbia in western Serbia near the Drina River. The
Uzice Corp was active in Visegrad in Ap 47il and May 1992, along with the ‘White
Eagles’, the ‘Garavi’, and the ‘Johnsons’.”
21. All that the Commission of Experts had to offer about the alleged “detention place” was
this brief entry and the Applicant has not given an y additional proof thereof. However, since the
4United Nations, Final Report of the United Nations Commission of Experts, S/1994/674/Add. 2 (Vol.IV),
28 Dec. 1994, Annex VIII, “Prison Camps”; emphasis added. - 41 -
Commission of Experts listed Užice as a “corrobo rated” detention place, the entry has to be
analysed.
22. The entry is supposed to be based on the information submitted to the Commission of
Experts by the National Organization for Victims Assistance, an NGO based in the United States of
America. However, the very first sentence in the text reveals that the information on the alleged
camp in Užice actually came from the territorial defence force from Višegrad, that is, the Bosnian
Muslim territorial defence force, which can hardly be considered as a neutral source.
23. The Applicant further claimed that an unknown number of women had been taken to
another camp on the mountain of Zlatibor, near the town of Užice. The entry on this alleged camp
is as follows:
“Zlatibor: (The existence of this dete ntion facility has been corroborated by
multiple sources, including the Dallas Morning News .) One report states that an
unknown number of females, captured in Visegrad for the purpose of rape, were
allegedly taken to the Zlatibor region in southern Serbia, between Uzice and
Prijepolje. The Uzice Corp was active in Visegrad in April and May 1992, along with
the ‘White Eagles’, the ‘Garavi’, and the ‘J ohnsons’. It is not clear which formation
had custody of the women.” 48
24. Although the Commission of Experts mentioned “multiple sources”, the only information
concerning the alleged camp on Zlatibor th at they referred to had come from the Dallas Morning
News, another source which the Commission of Experts considered as neutral. Nevertheless, from
footnote No. 5470 of the Report, one can see that the information actually came from the
“ex-prisoner”, since the footnote reads: “Intervi ew of ex-prisoner, taken by American journalist
George Rodrigue.” 49 There is no evidence that Mr.Rodr igue, who conducted the interview, had
made any effort to verify the claims of the person he interviewed.
25. The rest of the two entries I quoted deals wi th the Užice corps participation in fighting in
Višegrad. This is completely ir relevant for the existence of th e camps in the territory of the
Respondent. Nevertheless, it should be noted that the Užice corps of the Yugoslav People’s Army
(JNA) indeed participated in fighting in Višegrad , but it entered the town only after one Muslim
extremist had threatened to destroy the dam on the river Drina and the arrival of the JNA had a
4Ibid.
49
Footnote No. 5470 with the United Nations Commission of Experts Report on prison camps. - 42 -
50
calming effect, which was acknowledged by the ICTY in its judgment in the Vasiljević case .
Neither in this case, nor in any other, is there a mention of Muslims being taken and detained in the
territory of Serbia and Montenegro, particularly not by the JNA.
26. Accordingly, the following conclusions can be drawn:
(a) The Commission of Experts Report on the alleged places of detention in Užice and Zlatibor is
based on unreliable information.
(b) The Applicant has not offered any other proof for the claims on the existence of the two alleged
places of detention, even though their Reply has been submitted to the Court six years after the
alleged events had taken place.
(c) The ICTY has neither charged nor sentenced any person in connection with the alleged
detention places in Užice and Zlatibor.
(d) The Applicant has thus failed to prove any of their claims concerning the two alleged detention
places in Užice and Zlatibor and these claims should accordingly be dismissed by the Court.
2.2. The Penal Correction Institute in Sremska Mitrovica
27. This prison in Sremska Mitrovica ⎯ or KPD, according to the Serbian acronym that was
employed by the Commission of Experts and the Applicant ⎯ was the place of detention most
extensively described in the United Nations Commis sion of Experts’ Report and equally quoted in
the Applicant’s Reply. In contrast to most of the other alleged detenti on places, prisoners were
indeed held in the KPD. However, as I will expl ain, only a small number of those prisoners were
Bosnian Muslims and all the claims regarding the mi streatment of the prisoners in the KPD, quoted
both by the Commission of Experts and the Applicant, related to Croats and had happened long
before the conflict in Bosnia and Herzegovina even began. Thus, out of 122paragraphs that the
United Nations Final Report devoted to the Penal Correction Institute in Sremska Mitrovica, only
five paragraphs can be linked with prisoners from Bosnia and Herzegovina 5.
28. Madam President, all the other paragraphs about the KPD from the United Nations Final
Report relate to prisoners from Croatia and the a lleged mistreatment that had happened long before
50ICTY, Prosecutor v. Mitar Vasiljevic, Judgement of 29 November 2002.
51
These are paras. 3547, 3558 and 3644-3646 of the United Nations Commission of Experts’ Report on prison
camps. - 43 -
the conflict in Bosnia and Herzegovina even started. Besides, it has to be noted that all the claims
about the alleged maltreatment came from witness testimonies, compiled and communicated to the
Commission of Experts by the Croatian Governme nt and by Croatian NGOs whose objectivity is
highly doubtful in this matter. Nevertheless, ev en though none of these claims related to Bosnian
52
Muslims, the Applicant still extensively quoted them in their Reply . This, I believe, was a clear
misrepresentation of the content of the Commission of Experts’ Report.
29. As far as the Bosnian Muslims are concerned, it is indisputable that some of them were
held in the KPD. However, the number was very small and, even according to the sources used by
the United Nations Commission of Experts, it did not exceed 20. According to an interview by one
of the prisoners, Mr. Sulejman Tihić, who is presently the member of the Presidency of Bosnia and
Herzegovina, given to Serbian Te levision at that time and submitted by the Applicant before the
oral hearings 53, the number of Bosnian Muslim prisoners was ten. In any case, they were all
members of either the Bosnian armed forces or of the leadership of the SDA Party, which directed
the military actions of the Bosnian Muslims. They were captured in Bosanski Šamac and
transferred to the KPD. They were captured by the JNA, at the time before the withdrawal of the
JNA from Bosnia and Herzegovina, and they were detained in order to be exchanged for JNA
soldiers captured by Bosnian Muslim forces. Such an exchange was a common practice at that
time, used by all sides in the conflict. They were, in fact, later exchanged and the exchange took
place on 14 August 1992. None of the Bosnian Muslim prisoners died in the KPD.
30. Madam President, while the prison in Sremska Mitrovica differs from the other alleged
places of detention that the Applicant claim to ha ve existed in the territory of the Respondent, for
the fact that it indeed held a very small number of Bosnian Muslim prisoners, the Applicant’s
submission that genocide had been committed in Sremska Mitrovica has to be dismissed for the
reason that the Applicant has failed to prove that either of the two elements of the crime of
genocide has been met in this case.
5Reply, paras. 8.12.456-8.12.458.
53
Video materials submitted by the Applicant on 20 January 2006, DVD 22, clip 21. - 44 -
2.3. The alleged detention place in the Aleksinac Mines
31. Aleksinac is a place in eastern Serbia, fa r from the border with Bosnia and Herzegovina.
The Applicant claimed that a coal mine in Aleksinac held prisoners from Bosnia and Herzegovina.
These claims are not contained in Chapter VIII, Section 12, of the Reply (as are most of the others),
but in Chapter V, Section 5, dealing with the alle ged facts constituting genocide, in particular with
camps. The Applicant’s allegation on the Aleksinac mines is as follows:
“In March 1996, Prof. Manfred Nowak, expert member of the Working Group
of Enforced or Involuntary Disappearances, reported that a number of inmates of the
Omarska camp had been transferred to the Federal Republic of Yugoslavia to
54
undertake forced labour in the mines of Aleksinac.”
32. Unlike some other cases, here the applicant State used their own words and did not quote
the original text of Manfred Nowak’s Report. The reason for this is that the original text reads:
“Many of the persons missing from Prijedor and hundreds abducted from
Trnoplje were later seen in th e Omarska detention centre, and are suspected to have
been transferred to the Fede ral Republic of Yugoslavia (Serbia and Montenegro) to
undertake forced labour in the Aleksinac mines.” 55
Manfred Nowak also mentioned the Aleksinac mines in his Report from 1995, where he said:
“Moreover, in a considerable number of cases, sources reported that the
missing persons were deported to the mines of Aleksinac, north-east of Kosovo in the
Federal Republic of Yugoslavia (Serbia and Montenegro), to undertake forced
labour.” 56
And also in the same Report:
“ A source also reported that 10 persons from Babljak Rogatica (east of
Sarajevo) were arrested by the JNA. They were first detained in Borike (near 57
Rogatica) and later allegedly transferred to Aleksinac to work in the mines.”
The Applicant did not quote any of these entries, which reported the information on the alleged
detention place in Aleksinac mines with caution. Instead, the Applicant interpreted Mr.Nowak’s
words as if he had confirmed the allegations.
33. The Commission of Experts also mentioned the Aleksinac mines in their Report:
54Reply, para. 5.5.373.
55
United Nations, Special process on missing persons in the territory of the former Yugoslavia, Report submitted
by Mr. Manfred Nowak, Member of the Working Group on Enforced or Involuntary Disappearances, E/CN.4/1996/36,
4 March 1996, para. 52; emphasis added.
56
United Nations, Special process on missing persons in the territory of the former Yugoslavia, Report submitted
by Mr. Manfred Nowak, Member of the Working Group on Enforced or Involuntary Disappearances, E/CN.4/1995/37,
12 January 1995, para. 40; emphasis added.
57Ibid., para. 41; emphasis added. - 45 -
“Aleksinac Mines: (The existence of this detention facility has been
corroborated by multiple sources but none neutral .) There was also a report of
thousands of prisoners from BiH being detained in FRY, some of whom were interned
in the Aleksinac Mines. Another report alleges that a group of men from Vukovar
were forced to work in the mines in Aleksinac, and many of them were executed. The
condition58were reported as unbearable. This camp is also reported in another
report.”
The corresponding footnote of the Report reveals that the source for the allegations on Bosnian
Muslims being held in the mines was a pr ofessor from Sarajevo, Dr. Zdravko Grebo 59, who cannot
easily be considered as a neutral source.
34. As the Court would appreciate, reports on the alleged detention place in the Aleksinac
mines are very scarce and they come from non-neutral sources. Neither Manfred Nowak nor the
Commission of Experts considered them to be suffi ciently proved and reported them with caution.
The Applicant did not offer any other proof on th e existence of this detention facility and its
existence has never been discussed before the ICTY.
35. Furthermore, the CSCE Rapporteurs and several other international delegations visited
the mines and had found no proof at all of the existence of a detention facility. In their Report of
1993, the CSCE Rapporteurs wrote, “[d]uring a visit with the federal authorities in Belgrade, the
Mission was able to investigate one of these alleged places, a coal mine at Aleksinac in the
Republic of Serbia, where there was no evidence of detainees” 6.
36. Madam President, distinguished Members of the Court, in light of these facts, Serbia and
Montenegro respectfully submits that the Applican t’s allegations on the alleged place of detention
in Aleksinac mines should be dismissed as completely unfounded.
III. The alleged assistance of Serbia and Montenegro to the Republika Srpska authorities
in “ethnic cleansing”
37. In the Reply, the Applicant made a couple of allegations relating to incidents which they
qualified as the Respondent’s assistance to the authorities of the Republik a Srpska in the ethnic
cleansing of Muslims from Bosnia and Herzegovina.
58United Nations, Final Report of the United Nations Commission of Experts, S/1994/674/Add. 2 Vol. IV,
28 Dec. 1994, Annex VIII, ”Prison Camps”; emphasis added.
59See footnote No. 5470 of the United Nations Commission of Experts’ Report on prison camps.
60
Report of the CSCE Mission to Inspect Alleged Places of Detention in the Republics of Serbia and
Montenegro”, CSCE, 13-18 January 1993, para. 3. - 46 -
1. Arrest and handover of Bosnian Muslims to the authorities of Republika Srpska
38. Accordingly, in paragraph 464 of Chapter VIII of their Reply, the Applicant stated:
“In addition to the above mentioned ca mps, Yugoslav authorities used existing
detention facilities for other purposes as well. Bosnians who fled the war in Bosnia
and Herzegovina in the first months of the armed conflict were imprisoned for a short
time, before being handed over to the Bosnian Serbs.”
The Applicant listed three places used for detenti on and later handover of Bosnian Muslims, all of
them in Montenegro. The source of the claims was again the United Nations Commission of
Experts.
39. Certainly, a more reliable proof of the fact that a certain number of Bosnian Muslims
were indeed arrested in Monten egro and subsequently handed over to the authorities of Republika
Srpska are two letters from the General Secr etariat of the President of the Republic of
61
Montenegro , quoted and referred to in paragraphs 469 and 470 of Chapter VIII of the Reply. In
both cases, an official government body of the Republic of Montenegro acknowledged that
Muslims from Bosnia and Herzegovina had been ar rested and handed over upon the request of the
police of the Republika Srpska.
40. However, in both letters a mention was made of both Muslims and Serbs who had been
62
handed over. From the letter to Čardaklija Suada , which is annexed to the Applicant’s Reply but
not reproduced in the text, it can be seen that 37 persons had been handed over to an official from
“Foča” prison, out of whom 21Muslims and 16Serbs . It is obvious, thus, that Montenegrin
authorities acted upon a request from the Republik a Srpska equally with respect to Serbs and
Bosnian Muslims, and any claim that, by handing those people over, Serbia and Montenegro
assisted Bosnian Serbs to commit genocide or any other crime is completely unfounded.
41. In addition, the number of persons arrested is very small in comparison with the total
number of Bosnian Muslim refugees in Serbia and Montenegro. Various sources of information on
the number of Bosnian Muslims deported from the Republic of Montenegro to the Republika
Srpska are available to the public and the numbers differ, but in any case, the total number of
Muslims handed over to the Republika Srpska authorities was probably around 100. On the other
6Reply, Annexes 266 and 267.
62
Annex 267. - 47 -
hand, the number of Muslim refugees in Serbia and Montenegro in 1993 was around 34,000, and
63
on 31 December 1994 that number was around 36,000 .
42. Madam President, a State providing refuge to such a large number of members of a
certain ethnicity cannot be at th e same time responsible for genocide against the same ethnicity.
The cases referred to earlier were isolated an d the Montenegrin authorities acted equally with
respect to both Bosnian Muslims and Bosnian Serbs. Police co-operation between States is not an
unusual practice and it does not qualify as crime per se. Finally, the State Attorney of the Republic
of Montenegro has recently initiated an official i nvestigation in this matter against some of the
highest police officials from that time. If there is any ground for criminal liability of any of those
persons, they will be tried and adequately punished.
2. Alleged forcible deportat ion of Bosnian Muslims from the territory of Serbia and
Montenegro
2.1. Palic
43. In paragraphs472 to 474 of ChapterVI II of the Reply, the Applicant discussed an
episode when, according to their claims, around 3, 000 Bosnian Muslims from Zvornik and Kozluk
spent five days in a refugee camp in Palic, near Subotica, from whence they left to western
countries. The main source on this event is the Report of the United Nations Special Rapporteur,
Mr. Tadeusz Mazowiecki.
44. Serbia and Montenegro already addressed this issue in the Counter-Memorial
(paras.1.3.5.18-1.3.5.27), and explained that the camp in Palic had been a regular refugee camp,
providing accommodation for refug ees of all ethnicities, most of them being Serbs. The
Respondent has also demonstrated that Bosnian Muslims had been treated in this camp as refugees
and awarded the same treatment as Serbs. The explanation, however, remained insufficient in
showing how these Bosnian Muslims ended up in Subotica. Owing to joint efforts of the ICTY
Office of the Prosecutor and the War Crimes Prosecutor of the Republic of Serbia, the picture has
become clear.
6See Counter-Memorial, 3.8.1.1, and Annexes 324 and 325 of the Memorial. - 48 -
45. In 2004 the ICTY Prosecutor transferre d to the Serbian judiciary a case accusing two
Bosnian Serbs of, among other crimes, the crime of forceful evacuation. The case was transferred
in the pre-trial phase, so the Se rbian War Crimes Prosecutor and the Chamber for War Crimes of
the Belgrade District Court continued the investigation and, on 12August2005, the War Crimes
Prosecutor of the Republic of Serbia brought the indictment ⎯ this indictment is available on the
Internet64. The accused are charged with organizing the forceful evacuation of 1,822 Muslims from
places near Zvornik ⎯ out of which 1,649 people from the village of Kozluk and 173 people from
the village of Sko čić. Both accused are Serbs from Bosnia and Herzegovina, and both accused
were members of the Zvornik Crisis Staff.
46. The facts of the case, which are based on the evidence gathered by the ICTY Prosecutor
and the Serbian War Crimes Prosecutor, show that the forceful evacuation of Bosnian Muslims
from places near Zvornik was carr ied out by Serbs from the Republika Srpska. More importantly,
the facts show that the authorities of the Responde nt did not participate in the forceful evacuation
in any way. As already demonstrated by Serb ia and Montenegro in the Counter-Memorial, once
the victims had arrived in Subotica, the authoritie s of Serbia and Montenegro gave them the same
treatment and accommodation as were given to Serbian refugees.
47. Madam President, every country has an obli gation to accept refugees and, if Serbia and
Montenegro’s authorities had not accepted the people from Zvornik area, that would have probably
put the victims in a much worse position. However, once they found themselves on the territory of
the Respondent, the victims were treated in accordance with international standards and they all left
the territory of the Respondent unharmed. It is submitted, thus, that:
(a) the Applicant has failed to prove the existence of a plan on behalf of the authorities of the
Respondent to deport people from Zvornik area,
(b) the Applicant has failed to prove that the author ities of the Respondent had an intent to destroy
the Muslim population of Zvornik area,
(c) the Applicant has failed to prove that any of th e acts of the authorities of the Respondent with
respect to the refugees from Zvornik area could qualify as actus reus of genocide.
6Available in English at www.tuzilast vorz.org.yu/html_eng/optuznice/optuznica_zvornik.htm, last visited on
14 March 2006. - 49 -
Accordingly, the Applicant’s submission that th e Respondent has committed genocide by forcibly
deporting people from Zvornik area to third countries should be dismissed as completely
unfounded.
2.2Šljivovica
48. In paragraph475 of ChapterVIII of thei r Reply, the Applicant alleged that the use of
“refugee” camps to extradite non-Serbs to third countries continued throughout the war. According
to the Applicant, in 1995 the authorities of the Respondent used the Šljivovica camp to imprison
refugees from the former east Bosnian safe haven of Žepa, which fell shortly after the capture of
Srebrenica in July 1995. The Applicant also claimed that many Muslim refugees from Žepa had
been deported to third countries, often against th eir will, and that none was allowed to return to
Bosnia and Herzegovina. Finally, the Applicant alleged that at least two of the inmates had been
killed during their eight months’ stay in the camp. The main source of these allegations is a report
by the Bosnian State Commission for search of missing persons, the Commission which visited the
camp in April 1996.
49. Madam President, the so-called “camp” visited by the State Commission of Bosnia and
Herzegovina indeed existed but it was not what the Applicant tried to imply, on the contrary. Its
official name was “Braneško Polje” and it is one of the two reception centres set in western Serbia
in the second half of 1995. The other recep tion centre was called “Mitrovo Polje” and the two
centres have to be discussed jointly when addressi ng the Applicant’s allegations. During the next
phase of this oral hearing, the Court will have a chance to hear a witness proposed by Serbia and
Montenegro, Mr. Vladimir Milićević. Mr.Mili ćević was the administrator of the Mitrovo Polje
reception centre and he will give more detailed in formation about the matter. As for today, I will
limit myself to giving some basic information ab out the circumstances in which the two reception
centres were established and the way they functioned.
50. According to the initial indictment of the ICTY Office of the Prosecutor in the case
against Zdravko Tolimir, Radivoje Mileti ć and Milan Gvero 65, the army of the Republika Srpska
began an attack on the Žepa enclave on 7 July 1995. On or about 25 July 1995,
6Available at the ICTY website, at www.un.org/icty/indictment/english/tol-ii050210e.htm, last visited on
14 March 2005, paras. 17-23. - 50 -
“[h]undreds of mostly able-bodied Muslim men began to flee across the Drina River
to Serbia where many of them were regist ered by the International Committee for the
Red Cross (ICRC) and eventually released. The Muslim men fled to Serbia because
they feared they would be ha66ed or killed if they surrendered to the VRS [the army
of the Republika Srpska].”
51. The Bosnian Muslims that the ICTY indictment speaks of were the same Bosnian
Muslims that were referred to in the intercepted telephone conversation between the officers of the
army of the Republika Srpska ⎯ General Krstić and Colonel Popović ⎯ presented as exhibit 853A
in the Krstić trial before the ICTY. Our counsel, Mr. Ia n Brownlie, discussed this episode in more
67
detail on Monday . Once they crossed the Drina River, the Bosnian Muslims were received in
Serbia and Montenegro and accommodated in the two reception centres. Braneško Polje centre
was established on 1 August and Mitrovo Polje cent re on 3 August 1995. The latter was closed on
6 February 1996, and the former on 10 April 1996. The very first day that the centres were opened,
they were visited by the ICRC and the United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR)
and later both the UNHCR and the ICRC frequently visited the reception centres and played an
important role in running the centres. Two Muslim refugees indeed died, one in each centre, but
both deaths were of natural causes. All the other refugees left Serbia and Montenegro and went to
different western countries (Ireland, Australia, United States of America, France, Sweden,
Netherlands, Switzerland, Belgium and Finland). Two hundred and eleven of them went back to
Sarajevo.
52. It is obvious from the facts that the Applic ant’s claims of the alleged genocide in this
case are completely unsubstantia ted. The Applicant has not proved the existence of either the
moral or the material element of the crime of genocide. As I have already explained, the two
reception centres in 1995 were established to provide accommodation for Bosnian Muslims who
had fled the conflict in Bosnia and Herzegovina afte r the attack on the Žepa enclave. International
monitors were present all the time, they were allowed to see and talk to the inmates and they played
an important part in running the reception centre s, providing medication, food and other supplies.
In spite of the continuous international presence, the only assertion on the alleged mistreatment of
the inmates that the Applicant could find came fr om their own Commission. The fact that the
6Ibid.
67
See CR 2006/17, 13 March 2006, pp. 36-37, paras. 278-279 (Brownlie). - 51 -
Applicant could not find anything more to subs tantiate their claim, not even a media report,
indicates the nullity of the assertions.
2.3. “Continuedexistence of the extradition camps”
53. Madam President, the Applicant claimed that camps used for extradition of Bosnian
Muslims to third countries existed in Serbia and Montenegro throughout the whole conflict and
continued to exist even after the conflict had e nded with the signing of the Dayton Agreement.
However, for this continued existence th e Applicant offered only two examples, one ⎯ Palic ⎯
dating from the beginning and the other ⎯ Sljivovica ⎯ from the end of the conflict. The
Applicant has not offered any other evidence of a continued existence of the alleged extradition
camps.
54. Nevertheless, we have to make a distin ction between the two cases described by the
Applicant. In the case of 1,822 people deported from Zvornik, a crime indeed seems to have been
committed, but according to the facts established by both the ICTY Prosecutor and the Serbian War
Crimes Prosecutor, the sole perpetrators of th e crime were a few Bosnian Serbs, without any
involvement of the authorities of Serbia and Montenegro. On the other hand, in 1995 almost
800people, and most of them combatants, crossed the border in flight from the attack of the
Bosnian Serbs and found refuge in Serbia. In this case, the authorities of the Respondent were very
much involved, but they were involved in receiving those people and providing them refuge,
accommodation and food. Therefor e, it is not possible to speak of the continued existence of the
extradition camps in Serbia and Montenegro.
55. Finally, in both cases described by the Applicant, all Bosnian Muslims who found
themselves in the territory of Serbia and Montenegr o were treated in that territory as refugees and
in accordance with international law. Not a single action by the Respondent’s authorities with
respect to those people could qualify as having an actus reus of genocide. For those reasons, it is
submitted that the Court:
(a) dismiss the Applicant’s allegations of the Resp ondent’s responsibility for genocide in the case
of the refugee camp in Palic, - 52 -
(b) dismiss the Applicant’s allegations of the Respondent’s responsibility for genocide in the case
of the reception centre in Sljivovica, and
(c) dismiss the Applicant’s allegations of the continued existence of the “extradition camps” on the
territory of the Respondent.
IV. The alleged ethnic cleansing of Sandžak Muslims
56. The last part of Section12 of ChapterVI II of the Applicant’s Reply was devoted to the
alleged ethnic cleansing of the Muslim population from Serbia and Montenegro. The Applicant
claimed that ⎯ and I quote from the Reply ⎯ “[g]enocidal acts were also committed against
minorities living on the territory of the Federal Repub lic of Yugoslavia: Hungarians and Croats in
Vojvodina, in the north of Serbia, the Albanians in Kosovo and the Muslims in the Sandžak area”.
The Applicant, nevertheless, chose to focus upon “the Muslim inhabitants of the Sandžak region”
and accordingly, I will only deal with the alleged ethnic cleansing of Muslims from Sandžak.
57. Sandžak is a county in the southern pa rt of Central Serbia, with a majority Muslim
population. The Applicant’s allegations with respect to this county are contained in paragraphs 477
to 483 of ChapterVIII, on only five pages out of the Reply of 973 pages. Once again, it is
probably not because the Applicant tried to be br ief, but because they simply could not find any
evidence for their claims.
58. Nevertheless, the Applicant managed to find three international sources which said a few
words on the alleged ethnic cleansing of Muslims from Sandžak. Those sources are
Tadeusz Mazowiecki’s 68 and Elizabeth Rehn’s Periodic Reports on Human Rights in the Territory
of Former Yugoslavia, and also the Human Ri ghts Watch 1994 Report entitled “Human Rights
Abuses of Non-Serbs in Kosovo, Sandžak and Vojvodina” 70. These reports indeed offer a very
grim picture of the fate of the Muslim population in Serbia and Montenegro. Accordingly,
68United Nations, Situation of Human Rights in the tetory of the former Yugoslavia, Report Submitted by
Mr. Tadeuz Mazowiecki, Special Rapporteur of the Commission on Human Rights, E/CN.4/1992/S.1/10, October 1992,
Memorial, para.6.2.1.11; Sixth Periodic Report Submittd by Mr. Tadeuz Mazowiecki, Special Rapporteur of the
Commission on Human Rights, E/CN.4/1994/110, 21 February 1994, M.6.2.1.11.
69United Nations, Situation of Human Rights in the territory of former Yugoslavia, Periodic report submitted by
Ms Elisabeth Rehn, Special Rapporteur of the Commission on Human Rights, E/CN.4/1997/8, 25 Oct. 1996, Reply,
paras. 8.12.477-478; Reply, para. 8.12.482.
70“Human Rights Abuses of Non-Serbs in Kosovo, Sandžak and Vojvodina", Human Rights Watch/Helsinki,
May 1994, Vol. 6, Issue 6; Reply, paras. 8.12.479-482. - 53 -
Elizabeth Rehn reported that an estimated 60,000 to 80,000 Muslims had left Sandžak as a result of
violence, while four years earlier, Mazowiecki reported on 70,000 people who had left the region.
59. Madam President, with all due respect for the international rapporteurs and their good
intentions, the figures they offered are simply not true. The Respondent has submitted to the Court
an excerpt from the Statistical Yearbook of the Republic of Serbia , with population census figures
from 1991 and 2002 7; and page 74 of the Yearbook, which is the twelfth document in the judges’
folder which we submitted on the first day, has a ta ble in the lower part that shows that the number
of Muslims in Central Serbia, which includes the Sandžak county, decreased from 170,645 in 1991
to 151,539 in 2002. I should explain here that in the table the number of Muslims in 1991 is given
as a single figure, while for the 2002 census the total should be counted as a sum of people who
declared themselves as Muslims and people who declared themselves as Bosniacs.)
60. Thus, the number of Muslims in central Serbia decreased by 19,106. This is not a small
number, but it is far from the numbers given by the distinguished United Nations Special
Rapporteurs. In the same period, the number of Serbs, Montenegrins and people who declared
themselves Yugoslavs, also decreased in central Serbia, as can be seen from the first three rows of
the table. If we suppose that the 19,106 Muslims left the country because of the ethnic cleansing,
we have to ask ourselves why have then the Serbs left the country, or the Montenegrins, or the
Yugoslavs who are known to be mostly ethnic Serbs? Was there a case of self-genocide involved?
I do not think so. I simply believe that both Muslims and Serbs have left the country because of the
very poor economic situation in which Serbia and Montenegro had found itself during the last
decade of the twentieth century.
61. Madam President, I believe that we can all agree that the International Criminal Tribunal
for the former Yugoslavia was given a mandate to investigate, prosecute and try all serious
violations of international human itarian law committed in the territory of the former Yugoslavia
since 1991. We could also agree that the indictment against the former President of the Federal
Republic of Yugoslavia and the Repub lic of Serbia, Mr.Slobodan Miloševi ć, was the most
comprehensive indictment brought by the IC TY Prosecutor. Still, Slobodan Miloševi ć was not
7Available at http://webrzs.statserb.sr.gov.yu/axd/god.htm, Chapter 4, page 74. - 54 -
charged with any single crime against the Muslims from Sandžak, or any other Muslim living in
Serbia and Montenegro. I believe that this fact speaks sufficiently of the validity of the Applicant’s
claims on the alleged genocide or ethnic cleansing of the Muslim population of Serbia and
Montenegro and such allegations should accordingly be dismissed.
V. Conclusions
62. Madam President, distinguished Members of the Court, it is quite obvious then that
neither genocide nor any other serious violatio n of international humanitarian law has been
committed in the territory of Serbia and Montenegro. Still, for some reason, the Applicant thought
it necessary to include claims on the alleged genoc ide in Serbia and Montenegro in their written
pleadings. At the beginning of my speech I said that we have to ask ourselves why that was the
case and the Respondent will try to offer the answer to the Court.
63. To find the answer we have to go back to the definition of genocide and one of its basic
elements ⎯ the intent to destroy a group, in whole or in part. What is the group that the
Respondent allegedly tried to destroy? Is it the Muslim population of Bosnia and Herzegovina, the
Muslim population of Serbia and Montenegro, or both of them taken together? In their submission,
which I quoted at the beginning of my speech, the Applicant claimed, although in not very precise
terms, that it was the Muslim population of Bosnia and Herzegovina and of Serbia and
Montenegro, taken together.
64. I will agree that, if there was a genocidal in tent present, that inte nt had to be directed
against the entire Muslim population of the two St ates involved, having in mind that the two
Muslim populations constitute the same homogene ous group, both objectively and subjectively.
Objectively, Muslims from both Bosnia and Herz egovina and from Serbia and Montenegro have
the same ethnic origin, the same religion, the same customs and the same language. In the former
Yugoslavia, they were always treated as one nation. According to the subjective criterion, which is
probably even more important, the Muslim populations from both States think of themselves as
members of the same ethnicity. There has never been a single statement by any of the Muslim
politicians or historians, from either of the tw o States, claiming that th ere was any difference
between the Muslims of Bosnia and Herzegovina and the Muslims of Serbia and Montenegro. - 55 -
Moreover, this is confirmed by the name that the Muslim population from both States recently
started using ⎯ the name is Bosniacs, and it clearly derives from the name of the State of Bosnia
and Herzegovina. Consequently, the entire Muslim population of Bosnia and Herzegovina and of
Serbia and Montenegro, taken together, is the grou p that was allegedly the object of the genocidal
intent. But was there a genocidal intent?
65. It is undisputed that the definition of genocide and the relevant case law allow that
genocide may be committed against a part of a group. However, in their Reply the Applicant do
not claim that Serbia and Montenegro has committed genocide only against one part of the group.
On the contrary, they claim that genocide has b een committed against the entire group, against the
Muslim population of Bosnia and Herzegovin a and the Muslim population of Serbia and
Montenegro. This is best confirmed by the very first sentence of the Applicant’s Section 12 of the
Reply’s Chapter VIII, which reads:
“This section is completely dedicated to those genocidal acts that took place on
the territory of the Federal Re public of Yugoslavia. These acts were similar to those
perpetrated on Bosnian territory. All the constituent elements of ethnic cleansing as a
policy, so prevalent on the territory of neighbouring Bosnia and Herzegovina, were
72
also found on the territory of the Federal Republic of Yugoslavia.”
66. Why is this, Madam President? Well, wh ile genocide may be intended against only one
part of the group, the question against which part of the group it is most likely to be intended
requires some historical analysis. Fortunately, th ere have not been many cases of genocide in
history and I believe that today we can stay with the two cases that are undisputed to have
constituted genocide. The first is genocide against the Jews in Nazi Germany, and the second is
genocide in Rwanda.
67. Hitler and his followers may not have inte nded to destroy all the Jews in the world,
maybe not even all the Jews in Europe. But, they undoubtedly wanted to destroy all the Jews living
in Germany and later those Jews wh o lived in the occupied territories. Accordingly, they began to
put their monstrous design into practice in Germany itself, in their own backyard, and that is where
they were most successful. Why? Because that was the easiest thing to do. The Nazis had the full
monopoly of power and no opposing force. The Jews were not organized, they did not have an
7Reply, para. 8.12.439; emphasis added. - 56 -
army, they did not have weapons and they did not offer any resistance. Therefore, the Jews were
an easy target and unfortunately they were almost completely destroyed.
68. In the case of Rwanda, the perpetrators of genocide may not have had, and probably did
not have, the intent to destroy all the Tutsis in the world, or even all the Tutsis in Africa. But they
had the intent to destroy all the Tutsis in Rwanda. So, once again the perpetrators started genocide
where it was the easiest to commit, and once again they were very successful in carrying it out.
69. These two historical cases of genocide have to be taken into account when the Court
decides the outcome of this case. If we suppose for one second that the officials of the Respondent
had the intent to destroy the Muslim population, would not it be the easiest to start where Serbia
and Montenegro had the full monopoly of power? Would not it be the easiest to destroy first the
Muslim population of Serbia and Montenegro and not to try to destroy the Muslim population of
Bosnia and Herzegovina, where that population was not only more numerous, but also armed and
organized in an army?
70. The Applicant was fully aware of this logical conundrum and that is precisely why they
included in their submissions claims on the alleged genocide on the territory of Serbia and
Montenegro. It was simply not logical that the officials of Serbia and Montenegro would commit
genocide against the Muslim population in Bosnia and Herzegovina, and at the same time not
commit the same crime, or any other crime, against the same population in Serbia and Montenegro,
where such crime would be much easier to commit.
71. But, Madam President, this logic goes both ways. The Applicant did not prove that the
officials of Serbia and Montenegro have committed genocide or any other crime against the
Muslim population in the territory of Serbia and Montenegro. The ICTY did not charge
Slobodan Milošević or any other official of the Respondent for any crime committed against the
Muslim population on the territory of Serbia and Montenegro. Accordingly, the only conclusion
that could be drawn from these facts is that the officials of the Respondent did not have the intent
to commit genocide against the Muslim population, whether in Serbia and Montenegro or in Bosnia
and Herzegovina. Any other conclusion would simply be contrary to elementary logic. - 57 -
VI. Submissions
72. Madam President, before I make the final submissions of my presentation, I would like
to read a part of the 1994 Human Rights Watch Report, which the Applicant quoted in
paragraph 482 of Chapter VIII of their Reply. The Report reads:
“Through these repressive practices in Sandžak, the Yugoslav authorities have
accomplished several goals: the SDA, the only representative of the Sandžak
Muslims, has been effectively crushed. Once peace accords are signed in Bosnia and
Croatia and international atte ntion shifts to the burning issue of minority rights in
rump Yugoslavia, the Sandžak Muslims will have no voice.” 73
73. The peace accords were signed more than ten years ago, but this pessimistic prognosis of
the Human Rights Watch proved not to be justifie d. Today, two out of the six members of the
Council of Ministers of Serbia and Montenegro are Muslims. One of them, Mr.Rasim Ljajic, the
leader of the Sandžak Social-Democratic Party and one of the previous leaders of the SDA Party in
Serbia, is now the Minister of Human and Minority Rights and the President of Serbia and
Montenegro’s National Council for Co-operation w ith the ICTY. The SDA Party is very much
active in Serbia and its leader, Mr.Sulejman Uglja nin, is presently the Mayor of Novi Pazar, the
biggest town in the Sandžak region. The coalit ion in which his party is a member has recently
entered the ruling coalition in the Republic of Serbia.
74. These are just the most important examples of the role that the Muslim population plays
in Serbia and Montenegro today. The examples are many, but the three that I mentioned are
sufficient to show that Muslims, including the SDA as a party, definitely have a voice in “rump
Yugoslavia”.
75. Madam President, distinguished Members of the Court, the following submissions are
presented on the question of the alleged genocide in the territory of Serbia and Montenegro:
(a)The Applicant has failed to prove that genocide or any other crime against the Muslim
population of Bosnia and Herzegovina or the Muslim population of Serbia and Montenegro has
been committed in the territory of Serbia and Montenegro.
7“Human Rights Abuses of Non-Serbs in Kosovo, Sandžak and Vojvodina”, Human Rights Watch/Helsinki,
May 1994, Vol. 6, Issue 6. - 58 -
(b) The Applicant has failed to prove that any former or present official of the Respondent is
responsible for genocide or any other crime against the Muslim population committed in the
territory of Serbia and Montenegro.
(c) The absence of any of the elements of the crime of genocide against the Muslim population in
the territory of Serbia and Montenegro is clear evidence that the authorities of Serbia and
Montenegro could not have committed genocide against the same Muslim population in the
territory of Bosnia and Herzegovina.
Madam President, this concludes my today’s pr esentation as well as today’s presentation of
Serbia and Montenegro. Thank you very much for your kind attention.
The PRESIDENT: Thank you, Mr. Cvetkovi ć. The Court now rises and the oral pleadings
of Serbia and Montenegro will continue tomorrow morning at 10 o’clock.
The Court rose at 6 p.m.
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Audience publique tenue le mercredi 15 mars 2006, à 15 heures, au Palais de la Paix, sous la présidence de Mme Higgins, président