Document no 1
Constitution de l’OIT
Constitution
de l’Organisation
internationale du Travail
Bureau international du Travail, Genève, 2021
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Table des matières
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Constitution de l’Organisation internationale du Travail ................ 7
Préambule ..................................................................................... 7
Chapitre I. Organisation .............................................................. 8
Article 1. Établissement et Membres ............................................. 8
Article 2. Organes ............................................................................. 9
Article 3. Conférence ........................................................................ 9
Article 4. Droit de vote ..................................................................... 10
Article 5. Lieu de réunion de la Conférence.................................. 11
Article 6. Siège du Bureau international du Travail ..................... 11
Article 7. Conseil d’administration ................................................. 11
Article 8. Directeur général ............................................................. 12
Article 9. Personnel .......................................................................... 13
Article 10. Fonctions du Bureau international du Travail ............. 13
Article 11. Relations avec les gouvernements ................................ 14
Article 12. Relations avec les organisations internationales ........ 14
Article 13. Arrangements financiers et budgétaires ..................... 15
Chapitre II. Fonctionnement ........................................................ 16
Article 14. Ordre du jour et préparation de la Conférence .......... 16
Article 15. Communication de l’ordre du jour et rapports
à soumettre à la Conférence .......................................... 17
Article 16. Contestation de l’ordre du jour ...................................... 17
Article 17. Bureau de la Conférence, fonctionnement
et commissions ................................................................. 17
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Article 18. Experts techniques .......................................................... 18
Article 19. Conventions et recommandations ................................ 18
Article 20. Enregistrement auprès des Nations Unies .................. 22
Article 21. Projets de conventions non adoptés
par la Conférence ............................................................. 23
Article 22. Rapports annuels sur les conventions ratifiées .......... 23
Article 23. Examen et transmission des rapports .......................... 23
Article 24. Réclamations au sujet de l’application
d’une convention .............................................................. 24
Article 25. Possibilité de rendre la réclamation publique ............. 24
Article 26. Plaintes au sujet de l’application d’une convention .... 24
Article 27. Informations à soumettre à la Commission
d’enquête ........................................................................... 25
Article 28. Rapport de la Commission d’enquête ........................... 25
Article 29. Suite à donner au rapport de la Commission
d’enquête ........................................................................... 25
Article 30. Infraction à l’obligation de saisir les autorités
compétentes ..................................................................... 26
Article 31. Caractère définitif des décisions de la Cour
internationale de Justice ................................................. 26
Article 32. Effet des décisions de la Cour internationale
de Justice sur les conclusions ou recommandations
de la Commission d’enquête .......................................... 26
Article 33. Non-application des recommandations
de la Commission d’enquête ou de la Cour
internationale de Justice ................................................. 26
Article 34. Application des recommandations
de la Commission d’enquête ou de la Cour
internationale de Justice ................................................. 27
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Chapitre III. Prescriptions générales ............................................ 27
Article 35. Application des conventions aux territoires
non métropolitains .......................................................... 27
Article 36. Amendements à la Constitution .................................... 29
Article 37. Interprétation de la Constitution
et des conventions ........................................................... 29
Article 38. Conférences régionales .................................................. 30
Chapitre IV. Mesures diverses ....................................................... 30
Article 39. Statut juridique de l’OIT .................................................. 30
Article 40. Privilèges et immunités ................................................... 30
Annexe Déclaration concernant les buts et objectifs
de l’Organisation internationale du Travail
(Déclaration de Philadelphie) .................................. 32
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Notes de l’éditeur:
(1) Le texte original de la Constitution, établi en 1919, a été modifié par l’amendement de 1922,
entré en vigueur le 4 juin 1934; l’Instrument d’amendement de 1945, entré en vigueur le
26 septembre 1946; l’Instrument d’amendement de 1946, entré en vigueur le 20 avril 1948;
l’Instrument d’amendement de 1953, entré en vigueur le 20 mai 1954; l’Instrument
d’amendement de 1962, entré en vigueur le 22 mai 1963, l’Instrument d’amendement de 1972,
entré en vigueur le 1er novembre 1974, et l’Instrument d’amendement de 1997, entré en vigueur
le 8 octobre 2015.
(2) L’égalité entre les hommes et les femmes est l’une des valeurs fondamentales de
l’Organisation internationale du Travail. La résolution concernant l’égalité entre les hommes et
les femmes et les formulations à employer dans les textes juridiques de l’OIT, adoptée par la
Conférence générale à sa 100e session (2011), affirme que l’égalité entre les sexes devrait être
consacrée par l’emploi de formulations appropriées dans les textes juridiques officiels de
l’Organisation et que, tant dans la Constitution que dans les autres textes juridiques de
l’Organisation, l’utilisation d’un seul genre implique une référence à l’autre genre, à moins que
le contexte ne s’y oppose de manière évidente.
Constitution de l’Organisation internationale
du Travail
Préambule
Attendu qu’une paix universelle et durable ne peut être fondée que sur
la base de la justice sociale;
Attendu qu’il existe des conditions de travail impliquant pour un grand
nombre de personnes l’injustice, la misère et les privations, ce qui engendre
un tel mécontentement que la paix et l’harmonie universelles sont mises en
danger, et attendu qu’il est urgent d’améliorer ces conditions: par exemple,
en ce qui concerne la réglementation des heures de travail, la fixation d’une
durée maximum de la journée et de la semaine de travail, le recrutement de
la main-d’oeuvre, la lutte contre le chômage, la garantie d’un salaire assurant
des conditions d’existence convenables, la protection des travailleurs contre
les maladies générales ou professionnelles et les accidents résultant du
travail, la protection des enfants, des adolescents et des femmes, les
pensions de vieillesse et d’invalidité, la défense des intérêts des travailleurs
occupés à l’étranger, l’affirmation du principe à travail égal, salaire égal,
l’affirmation du principe de la liberté syndicale, l’organisation de
l’enseignement professionnel et technique et autres mesures analogues;
Attendu que la non-adoption par une nation quelconque d’un régime de
travail réellement humain fait obstacle aux efforts des autres nations
désireuses d’améliorer le sort des travailleurs dans leurs propres pays;
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Les Hautes Parties Contractantes, mues par des sentiments de justice et
d’humanité aussi bien que par le désir d’assurer une paix mondiale durable,
et en vue d’atteindre les buts énoncés dans ce préambule, approuvent la
présente Constitution de l’Organisation internationale du Travail:
Chapitre I. Organisation
Article 1
Établissement et Membres
1. Il est fondé une organisation permanente chargée de travailler à la
réalisation du programme exposé dans le Préambule de la présente
Constitution et dans la Déclaration concernant les buts et objectifs de
l’Organisation internationale du Travail qui a été adoptée à Philadelphie le
10 mai 1944 et dont le figure en annexe à la présente Constitution.
2. Les Membres de l’Organisation internationale du Travail seront les
États qui étaient Membres de l’Organisation au 1er novembre 1945 et tous
autres États qui deviendraient Membres conformément aux dispositions des
paragraphes 3 et 4 du présent article.
3. Tout Membre originaire des Nations Unies et tout État admis en qualité
de Membre des Nations Unies par décision de l’Assemblée générale
conformément aux dispositions de la Charte peut devenir Membre de
l’Organisation internationale du Travail en communiquant au Directeur général
du Bureau international du Travail son acceptation formelle des obligations
découlant de la Constitution de l’Organisation internationale du Travail.
4. La Conférence générale de l’Organisation internationale du Travail
peut également admettre des Membres dans l’Organisation à la majorité des
deux tiers des délégués présents à la session, y compris les deux tiers des
délégués gouvernementaux présents et votants. Cette admission deviendra
effective lorsque le gouvernement du nouveau Membre aura communiqué
au Directeur général du Bureau international du Travail son acceptation
formelle des obligations découlant de la Constitution de l’Organisation.
5. Aucun Membre de l’Organisation internationale du Travail ne pourra
s’en retirer sans avoir donné préavis de son intention au Directeur général
du Bureau international du Travail. Ce préavis portera effet deux ans après
la date de sa réception par le Directeur général, sous réserve que le Membre
ait à cette date rempli toutes les obligations financières résultant de sa
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qualité de Membre. Lorsqu’un Membre aura ratifié une convention
internationale du travail, ce retrait n’affectera pas la validité, pour la période
prévue par la convention, des obligations résultant de la convention ou y
relatives.
6. Au cas où un État aurait cessé d’être Membre de l’Organisation, sa
réadmission en qualité de Membre sera régie par les dispositions des
paragraphes 3 ou 4 du présent article.
Article 2
Organes
L’Organisation permanente comprendra:
a) une Conférence générale des représentants des Membres;
b) un Conseil d’administration composé comme il est dit à l’article 7;
c) un Bureau international du Travail sous la direction du Conseil
d’administration.
Article 3
Conférence
1. La Conférence générale des représentants des Membres tiendra des
sessions chaque fois que besoin sera et au moins une fois par an. Elle sera
composée de quatre représentants de chacun des Membres, dont deux
seront les délégués du gouvernement et dont les deux autres représenteront
respectivement, d’une part, les employeurs, d’autre part, les travailleurs
ressortissant à chacun des Membres.
2. Chaque délégué pourra être accompagné par des conseillers
techniques, dont le nombre pourra être de deux au plus pour chacune des
matières distinctes inscrites à l’ordre du jour de la session. Quand des
questions intéressant spécialement des femmes doivent venir en discussion
à la Conférence, une au moins parmi les personnes désignées comme
conseillers techniques devra être une femme.
3. Tout Membre responsable des relations internationales de
territoires non métropolitains pourra désigner comme conseillers
techniques supplémentaires pour accompagner chacun de ses délégués:
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a) des personnes désignées par lui comme représentants d’un tel territoire
pour certaines questions entrant dans le cadre de la compétence propre
des autorités dudit territoire;
b) des personnes désignées par lui pour assister ses délégués au sujet des
questions intéressant des territoires qui ne se gouvernent pas eux-mêmes.
4. S’il s’agit d’un territoire placé sous l’autorité conjointe de deux ou
plusieurs Membres, des personnes pourront être désignées pour assister les
délégués de ces Membres.
5. Les Membres s’engagent à désigner les délégués et conseillers
techniques non gouvernementaux d’accord avec les organisations
professionnelles les plus représentatives soit des employeurs, soit des
travailleurs du pays considéré, sous la réserve que de telles organisations
existent.
6. Les conseillers techniques ne seront autorisés à prendre la parole
que sur la demande faite par le délégué auquel ils sont adjoints et avec
l’autorisation spéciale du Président de la Conférence; ils ne pourront prendre
part aux votes.
7. Un délégué peut, par une note écrite adressée au Président, désigner
l’un de ses conseillers techniques comme son suppléant, et ledit suppléant, en
cette qualité, pourra prendre part aux délibérations et aux votes.
8. Les noms des délégués et de leurs conseillers techniques seront
communiqués au Bureau international du Travail par le gouvernement de
chacun des Membres.
9. Les pouvoirs des délégués et de leurs conseillers techniques seront
soumis à la vérification de la Conférence, laquelle pourra, par une majorité
des deux tiers des suffrages exprimés par les délégués présents, refuser
d’admettre tout délégué ou tout conseiller technique qu’elle ne jugera pas
avoir été désigné conformément aux termes du présent article.
Article 4
Droit de vote
1. Chaque délégué aura le droit de voter individuellement sur toutes
les questions soumises aux délibérations de la Conférence.
2. Dans le cas où l’un des Membres n’aurait pas désigné l’un des
délégués non gouvernementaux auquel il a droit, l’autre délégué non
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gouvernemental aura le droit de prendre part aux discussions de la
Conférence, mais n’aura pas le droit de voter.
3. Au cas où la Conférence, en vertu des pouvoirs que lui confère
l’article 3, refuserait d’admettre l’un des délégués d’un des Membres, les
stipulations du présent article seront appliquées comme si ledit délégué
n’avait pas été désigné.
Article 5
Lieu de réunion de la Conférence
Les sessions de la Conférence se tiendront, sous réserve de toute
décision qu’aurait pu prendre la Conférence elle-même au cours d’une
session antérieure, au lieu fixé par le Conseil d’administration.
Article 6
Siège du Bureau international du Travail
Tout changement du siège du Bureau international du Travail sera
décidé par la Conférence à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés
par les délégués présents.
Article 7
Conseil d’administration
1. Le Conseil d’administration sera composé de cinquante-six
personnes:
a) vingt-huit représentant les gouvernements;
b) quatorze représentant les employeurs;
c) quatorze représentant les travailleurs.
2. Sur les vingt-huit personnes représentant les gouvernements, dix
seront nommées par les Membres dont l’importance industrielle est la plus
considérable et dix-huit seront nommées par les Membres désignés à cet
effet par les délégués gouvernementaux à la Conférence, exclusion faite des
délégués des dix Membres susmentionnés.
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3. Le Conseil d’administration déterminera, chaque fois qu’il y aura
lieu, quels sont les Membres ayant l’importance industrielle la plus
considérable et établira des règles en vue d’assurer l’examen, par un comité
impartial, de toutes questions relatives à la désignation des Membres ayant
l’importance industrielle la plus considérable avant que le Conseil
d’administration ne prenne une décision à cet égard. Tout appel formé par
un Membre contre la déclaration du Conseil d’administration arrêtant quels
sont les Membres ayant l’importance industrielle la plus considérable sera
tranché par la Conférence, mais un appel interjeté devant la Conférence ne
suspendra pas l’application de la déclaration tant que la Conférence ne se
sera pas prononcée.
4. Les personnes représentant les employeurs et les personnes
représentant les travailleurs seront élues respectivement par les délégués
des employeurs et les délégués des travailleurs à la Conférence.
5. Le Conseil d’administration sera renouvelé tous les trois ans. Si, pour
une raison quelconque, les élections au Conseil d’administration n’ont pas
lieu à l’expiration de cette période, le Conseil d’administration restera en
fonctions jusqu’à ce qu’il soit procédé à ces élections.
6. La manière de pourvoir aux sièges vacants, la désignation des
suppléants et les autres questions de même nature pourront être réglées par
le Conseil d’administration sous réserve de l’approbation de la Conférence.
7. Le Conseil d’administration élira dans son sein un président et deux
vice-présidents. Parmi ces trois personnes, l’une sera une personne
représentant un gouvernement et les deux autres seront respectivement des
personnes représentant les employeurs et les travailleurs.
8. Le Conseil d’administration établira son règlement et se réunira aux
époques qu’il fixera lui-même. Une session spéciale devra être tenue chaque
fois que seize personnes faisant partie du Conseil d’administration auront
formulé une demande écrite à cet effet.
Article 8
Directeur général
1. Un Directeur général sera placé à la tête du Bureau international du
Travail; il sera désigné par le Conseil d’administration, de qui il recevra ses
instructions et vis-à-vis de qui il sera responsable de la bonne marche du
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Bureau international du Travail ainsi que de l’exécution de toutes autres
tâches qui auront pu lui être confiées.
2. Le Directeur général ou son suppléant assisteront à toutes les
séances du Conseil d’administration.
Article 9
Personnel
1. Le personnel du Bureau international du Travail sera choisi par le
Directeur général conformément aux règles approuvées par le Conseil
d’administration.
2. Le choix fait par le Directeur général devra porter, dans toute la
mesure compatible avec le souci d’obtenir le meilleur rendement, sur des
personnes de différentes nationalités.
3. Un certain nombre de ces personnes devront être des femmes.
4. Les fonctions du Directeur général et du personnel auront un
caractère exclusivement international. Dans l’accomplissement de leurs
devoirs, le Directeur général et le personnel ne solliciteront ni n’accepteront
d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autorité extérieure à
l’Organisation. Ils s’abstiendront de tout acte incompatible avec leur situation
de fonctionnaires internationaux qui ne sont responsables qu’envers
l’Organisation.
5. Chaque Membre de l’Organisation s’engage à respecter le caractère
exclusivement international des fonctions du Directeur général et du
personnel et à ne pas chercher à les influencer dans l’exécution de leur tâche.
Article 10
Fonctions du Bureau international du Travail
1. Les fonctions du Bureau international du Travail comprendront la
centralisation et la distribution de toutes informations concernant la
réglementation internationale de la condition des travailleurs et du régime
du travail et, en particulier, l’étude des questions qu’il est proposé de
soumettre aux discussions de la Conférence en vue de la conclusion de
conventions internationales, ainsi que l’exécution de toutes enquêtes
spéciales prescrites par la Conférence ou par le Conseil d’administration.
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2. Sous réserve des directives que pourrait lui donner le Conseil
d’administration, le Bureau:
a) préparera la documentation sur les divers points à l’ordre du jour des
sessions de la Conférence;
b) fournira aux gouvernements, sur leur demande et dans la mesure de
ses moyens, toute aide appropriée pour l’élaboration de la législation
sur la base des décisions de la Conférence, ainsi que pour l’amélioration
de la pratique administrative et des systèmes d’inspection;
c) s’acquittera, en conformité des stipulations de la présente Constitution,
des devoirs qui lui incombent en ce qui concerne l’observation effective
des conventions;
d) rédigera et fera paraître dans telles langues que le Conseil
d’administration jugera appropriées des publications traitant des
questions concernant l’industrie et le travail qui présentent un intérêt
international.
3. D’une manière générale, il aura tous autres pouvoirs et fonctions
que la Conférence ou le Conseil d’administration jugeront à propos de lui
attribuer.
Article 11
Relations avec les gouvernements
Les ministères des Membres qui s’occupent des questions ouvrières
pourront communiquer directement avec le Directeur général par
l’intermédiaire du représentant de leur gouvernement au Conseil
d’administration du Bureau international du Travail ou, à défaut de ce
représentant, par l’intermédiaire de tel autre fonctionnaire dûment qualifié
et désigné à cet effet par le gouvernement intéressé.
Article 12
Relations avec les organisations internationales
1. L’Organisation internationale du Travail collaborera, dans le cadre
de la présente Constitution, avec toute organisation internationale générale
chargée de coordonner les activités d’organisations de droit international
public ayant des tâches spécialisées et avec les organisations de droit
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international public ayant des tâches spécialisées dans des domaines
connexes.
2. L’Organisation internationale du Travail pourra prendre des
dispositions appropriées pour que les représentants des organisations de
droit international public participent, sans droit de vote, à ses délibérations.
3. L’Organisation internationale du Travail pourra prendre toutes
dispositions utiles pour consulter, selon qu’il lui paraîtra désirable, des
organisations internationales non gouvernementales reconnues, y compris
des organisations internationales d’employeurs, de travailleurs,
d’agriculteurs et de coopérateurs.
Article 13
Arrangements financiers et budgétaires
1. L’Organisation internationale du Travail peut conclure avec les
Nations Unies tels arrangements financiers et budgétaires qui paraîtraient
appropriés.
2. En attendant la conclusion de tels arrangements ou si, à un moment
quelconque il n’en est pas qui soient en vigueur:
a) chacun des Membres paiera les frais de voyage et de séjour de ses
délégués et de leurs conseillers techniques, ainsi que de ses
représentants prenant part aux sessions de la Conférence et du Conseil
d’administration selon les cas;
b) tous autres frais du Bureau international du Travail, des sessions de la
Conférence ou de celles du Conseil d’administration seront payés par le
Directeur général du Bureau international du Travail sur le budget
général de l’Organisation internationale du Travail;
c) les dispositions relatives à l’approbation du budget de l’Organisation
internationale du Travail, ainsi qu’à l’assiette et au recouvrement des
contributions, seront arrêtées par la Conférence à la majorité des deux
tiers des suffrages émis par les délégués présents et stipuleront que le
budget et les arrangements concernant la répartition des dépenses
entre les Membres de l’Organisation seront approuvés par une
commission de représentants gouvernementaux.
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3. Les frais de l’Organisation internationale du Travail seront à la
charge des Membres, conformément aux arrangements en vigueur en vertu
du paragraphe 1 ou du paragraphe 2 c) du présent article.
4. Un Membre de l’Organisation en retard dans le paiement de sa
contribution aux dépenses de l’Organisation ne peut participer au vote à la
Conférence, au Conseil d’administration ou à toute commission ou aux
élections de membres du Conseil d’administration, si le montant de ses
arriérés est égal ou supérieur à la contribution due par lui pour les deux
années complètes écoulées. La Conférence peut néanmoins, par un vote à la
majorité des deux tiers des suffrages émis par les délégués présents,
autoriser ce Membre à participer au vote si elle constate que le manquement
est dû à des circonstances indépendantes de sa volonté.
5. Le Directeur général du Bureau international du Travail est
responsable vis-à-vis du Conseil d’administration pour l’emploi des fonds de
l’Organisation internationale du Travail.
Chapitre II. Fonctionnement
Article 14
Ordre du jour et préparation de la Conférence
1. Le Conseil d’administration établira l’ordre du jour des sessions de
la Conférence après avoir examiné toutes propositions faites par le
gouvernement d’un des Membres, par toute organisation représentative
visée à l’article 3, ou par toute organisation de droit international public, au
sujet des matières à inscrire à cet ordre du jour.
2. Le Conseil d’administration établira des règles pour assurer une
sérieuse préparation technique et une consultation appropriée des Membres
principalement intéressés, par une conférence préparatoire technique ou
par tout autre moyen, avant l’adoption d’une convention ou d’une
recommandation par la Conférence.
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Article 15
Communication de l’ordre du jour et rapports
à soumettre à la Conférence
1. Le Directeur général remplira les fonctions de Secrétaire général de
la Conférence, et devra faire parvenir l’ordre du jour de chaque session,
quatre mois avant l’ouverture de cette session, à chacun des Membres et, par
l’intermédiaire de ceux-ci, aux délégués non gouvernementaux, lorsque ces
derniers auront été désignés.
2. Les rapports sur chacun des points à l’ordre du jour seront transmis
de façon à atteindre les Membres à temps pour leur permettre de procéder
à un examen approprié de ces rapports avant la Conférence. Le Conseil
d’administration formulera les règles faisant porter effet à cette disposition.
Article 16
Contestation de l’ordre du jour
1. Chacun des gouvernements des Membres aura le droit de contester
l’inscription, à l’ordre du jour de la session, de l’un ou plusieurs des sujets
prévus. Les motifs justifiant cette opposition devront être exposés dans un
mémoire adressé au Directeur général, lequel devra le communiquer aux
Membres de l’Organisation.
2. Les sujets auxquels il aura été fait opposition resteront néanmoins
inclus à l’ordre du jour si la Conférence en décide ainsi à la majorité des deux
tiers des suffrages exprimés par les délégués présents.
3. Toute question au sujet de laquelle la Conférence décide, à la même
majorité des deux tiers, qu’elle doit être examinée (autrement que prévu
dans l’alinéa précédent) sera portée à l’ordre du jour de la session suivante.
Article 17
Bureau de la Conférence, fonctionnement et commissions
1. La Conférence élira un président et trois vice-présidents. Les trois
vice-présidents seront respectivement un délégué gouvernemental, un
délégué des employeurs et un délégué des travailleurs. La Conférence
formulera les règles de son fonctionnement; elle pourra nommer des
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commissions chargées de présenter des rapports sur toutes questions
qu’elle estimera devoir mettre à l’étude.
2. La simple majorité des suffrages exprimés par les membres
présents de la Conférence décidera dans tous les cas où une majorité plus
forte n’est pas spécialement prévue par d’autres articles de la présente
Constitution ou par toute convention ou autre instrument conférant des
pouvoirs à la Conférence ou par les arrangements financiers ou budgétaires
adoptés en vertu de l’article 13.
3. Aucun vote n’est acquis si le nombre des suffrages exprimés est
inférieur à la moitié du nombre des délégués présents à la session.
Article 18
Experts techniques
La Conférence pourra adjoindre aux commissions qu’elle constitue des
conseillers techniques qui n’auront pas voix délibérative.
Article 19
Conventions et recommandations
1. Si la Conférence se prononce pour l’adoption de propositions
relatives à un objet à l’ordre du jour, elle aura à déterminer si ces
propositions devront prendre la forme:
a) d’une convention internationale;
b) ou bien d’une recommandation, lorsque l’objet traité ou un de ses
aspects ne se prête pas à l’adoption immédiate d’une convention.
2. Dans les deux cas, pour qu’une convention ou qu’une
recommandation soient adoptées au vote final par la Conférence, une
majorité des deux tiers des voix des délégués présents est requise.
3. En formant une convention ou une recommandation d’une
application générale, la Conférence devra avoir égard aux pays dans lesquels
le climat, le développement incomplet de l’organisation industrielle ou
d’autres circonstances particulières rendent les conditions de l’industrie
essentiellement différentes, et elle aura à suggérer telles modifications
qu’elle considérerait comme pouvant être nécessaires pour répondre aux
conditions propres à ces pays.
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4. Deux exemplaires de la convention ou de la recommandation seront
signés par le Président de la Conférence et par le Directeur général. L’un de
ces exemplaires sera déposé aux archives du Bureau international du Travail
et l’autre entre les mains du Secrétaire général des Nations Unies. Le
Directeur général communiquera une copie certifiée conforme de la
convention ou de la recommandation à chacun des Membres.
5. S’il s’agit d’une convention:
a) la convention sera communiquée à tous les Membres en vue de sa
ratification par ceux-ci;
b) chacun des Membres s’engage à soumettre, dans le délai d’un an à
partir de la clôture de la session de la Conférence (ou, si par suite de
circonstances exceptionnelles, il est impossible de procéder dans un
délai d’un an, dès qu’il sera possible, mais jamais plus de dix-huit mois
après la clôture de la session de la Conférence), la convention à l’autorité
ou aux autorités dans la compétence desquelles rentre la matière, en
vue de la transformer en loi ou de prendre des mesures d’un autre
ordre;
c) les Membres informeront le Directeur général du Bureau international
du Travail des mesures prises, en vertu du présent article, pour
soumettre la convention à l’autorité ou aux autorités compétentes, en
lui communiquant tous renseignements sur l’autorité ou les autorités
considérées comme compétentes et sur les décisions de celles-ci;
d) le Membre qui aura obtenu le consentement de l’autorité ou des
autorités compétentes communiquera sa ratification formelle de la
convention au Directeur général et prendra telles mesures qui seront
nécessaires pour rendre effectives les dispositions de ladite convention;
e) si une convention n’obtient pas l’assentiment de l’autorité ou des
autorités dans la compétence desquelles rentre la matière, le Membre
ne sera soumis à aucune autre obligation, si ce n’est qu’il devra faire
rapport au Directeur général du Bureau international du Travail, à des
périodes appropriées, selon ce que décidera le Conseil d’administration,
sur l’état de sa législation et sur sa pratique concernant la question qui
fait l’objet de la convention, en précisant dans quelle mesure l’on a
donné suite ou l’on se propose de donner suite à toute disposition de la
convention par voie législative, par voie administrative, par voie de
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contrats collectifs ou par toute autre voie, et en exposant quelles
difficultés empêchent ou retardent la ratification d’une telle convention.
6. S’il s’agit d’une recommandation:
a) la recommandation sera communiquée à tous les Membres pour
examen, en vue de lui faire porter effet sous forme de loi nationale ou
autrement;
b) chacun des Membres s’engage à soumettre, dans le délai d’un an à
partir de la clôture de la session de la Conférence (ou, si par suite de
circonstances exceptionnelles, il est impossible de procéder dans le
délai d’un an, dès qu’il sera possible, mais jamais plus de dix-huit mois
après la clôture de la session de la Conférence), la recommandation à
l’autorité ou aux autorités dans la compétence desquelles rentre la
matière, en vue de la transformer en loi ou de prendre des mesures d’un
autre ordre;
c) les Membres informeront le Directeur général du Bureau international
du Travail des mesures prises, en vertu du présent article, pour
soumettre la recommandation à l’autorité ou aux autorités
compétentes, en lui communiquant tous renseignements sur l’autorité
ou les autorités considérées comme compétentes et sur les décisions de
celles-ci;
d) sauf l’obligation de soumettre la recommandation à l’autorité ou aux
autorités compétentes, les Membres ne seront soumis à aucune autre
obligation, si ce n’est qu’ils devront faire rapport au Directeur général
du Bureau international du Travail, à des périodes appropriées, selon ce
que décidera le Conseil d’administration, sur l’état de leur législation et
sur leur pratique concernant la question qui fait l’objet de la
recommandation, en précisant dans quelle mesure l’on a donné suite
ou l’on se propose de donner suite à toutes dispositions de la
recommandation et en indiquant les modifications de ces dispositions
qui semblent ou pourront sembler nécessaires pour leur permettre de
l’adopter ou de l’appliquer.
7. Dans le cas où il s’agit d’un État fédératif, les dispositions suivantes
seront appliquées:
a) à l’égard des conventions et des recommandations pour lesquelles le
gouvernement fédéral considère que, d’après son système
constitutionnel, une action fédérale est appropriée, les obligations de
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l’État fédératif seront les mêmes que celles des Membres qui ne sont
pas des États fédératifs;
b) à l’égard des conventions et des recommandations pour lesquelles le
gouvernement fédéral considère que, d’après son système
constitutionnel, une action de la part des États constituants, des
provinces ou des cantons est, sur tous les points ou sur certains points,
plus appropriée qu’une action fédérale, ledit gouvernement devra:
i) conclure, en conformité avec sa Constitution et les Constitutions
des États constituants, des provinces ou des cantons intéressés,
des arrangements effectifs pour que ces conventions ou
recommandations soient, au plus tard dans les dix-huit mois
suivant la clôture de la session de la Conférence, soumises aux
autorités appropriées fédérales, ou à celles des États constituants,
des provinces ou des cantons en vue d’une action législative ou de
toute autre action;
ii) prendre des mesures, sous réserve de l’accord des
gouvernements des États constituants, des provinces ou des
cantons intéressés, pour établir des consultations périodiques,
entre les autorités fédérales d’une part, et les autorités des États
constituants, des provinces ou des cantons d’autre part, en vue de
développer à l’intérieur de l’État fédératif une action coordonnée
destinée à donner effet aux dispositions de ces conventions et
recommandations;
iii) informer le Directeur général du Bureau international du Travail
des mesures prises en vertu du présent article pour soumettre ces
conventions et recommandations aux autorités appropriées
fédérales, des États constituants, des provinces ou des cantons,
en lui communiquant tous renseignements sur les autorités
considérées comme autorités appropriées et sur les décisions de
celles-ci;
iv) au sujet de chacune de ces conventions qu’il n’aura pas ratifiées,
faire rapport au Directeur général du Bureau international du
Travail, à des intervalles de temps appropriés, selon ce que
décidera le Conseil d’administration, sur l’état de la législation et
de la pratique de la fédération et des États constituants, des
provinces ou des cantons concernant la question qui fait l’objet de
la convention, en précisant dans quelle mesure il a été donné ou
22
l’on se propose de donner effet aux dispositions de la convention
par voie législative, par voie administrative, par voie de contrats
collectifs ou par toute autre voie;
v) au sujet de chacune de ces recommandations, faire rapport au
Directeur général du Bureau international du Travail, à des
intervalles de temps appropriés, selon ce que décidera le Conseil
d’administration, sur l’état de la législation et de la pratique de la
fédération et de ses États constituants, de ses provinces ou de ses
cantons concernant la question qui fait l’objet de la
recommandation, en précisant dans quelle mesure il a été donné
ou l’on se propose de donner effet aux dispositions de la
recommandation et en indiquant quelles modifications de ces
dispositions semblent ou pourront sembler nécessaires pour les
adopter ou les appliquer.
8. En aucun cas, l’adoption d’une convention ou d’une
recommandation par la Conférence, ou la ratification d’une convention par
un Membre ne devront être considérées comme affectant toute loi, toute
sentence, toute coutume ou tout accord qui assurent des conditions plus
favorables aux travailleurs intéressés que celles prévues par la convention
ou la recommandation.
9. Sur la proposition du Conseil d’administration, la Conférence peut, à
la majorité des deux tiers des voix des délégués présents, abroger toute
convention adoptée conformément aux dispositions du présent article s’il
apparaît qu’elle a perdu son objet ou qu’elle n’apporte plus de contribution
utile à l’accomplissement des objectifs de l’Organisation.
Article 20
Enregistrement auprès des Nations Unies
Toute convention ainsi ratifiée sera communiquée par le Directeur
général du Bureau international du Travail au Secrétaire général des Nations
Unies, pour enregistrement conformément aux dispositions de l’article 102
de la Charte des Nations Unies, mais ne liera que les Membres qui l’ont
ratifiée.
23
Article 21
Projets de conventions non adoptés par la Conférence
1. Tout projet qui, dans le scrutin final sur l’ensemble, ne recueillera
pas la majorité des deux tiers des suffrages exprimés par les Membres
présents peut faire l’objet d’une convention particulière entre ceux des
Membres de l’Organisation qui en ont le désir.
2. Toute convention ainsi conclue sera communiquée par les
gouvernements intéressés au Directeur général du Bureau international du
Travail et au Secrétaire général des Nations Unies, pour enregistrement
conformément aux dispositions de l’article 102 de la Charte des Nations
Unies.
Article 22
Rapports annuels sur les conventions ratifiées
Chacun des Membres s’engage à présenter au Bureau international du
Travail un rapport annuel sur les mesures prises par lui pour mettre à
exécution les conventions auxquelles il a adhéré. Ces rapports seront rédigés
sous la forme indiquée par le Conseil d’administration et devront contenir les
précisions demandées par ce dernier.
Article 23
Examen et transmission des rapports
1. Le Directeur général présentera à la plus prochaine session de la
Conférence un résumé des informations et rapports qui lui auront été
communiqués par les Membres en application des articles 19 et 22.
2. Chaque Membre communiquera aux organisations représentatives
reconnues telles aux fins de l’article 3 copie des informations et rapports
transmis au Directeur général en application des articles 19 et 22.
24
Article 24
Réclamations au sujet de l’application d’une convention
Toute réclamation adressée au Bureau international du Travail par une
organisation professionnelle des travailleurs ou des employeurs, et aux
termes de laquelle l’un quelconque des Membres n’aurait pas assuré d’une
manière satisfaisante l’exécution d’une convention à laquelle ledit Membre a
adhéré, pourra être transmise par le Conseil d’administration au
gouvernement mis en cause et ce gouvernement pourra être invité à faire
sur la matière telle déclaration qu’il jugera convenable.
Article 25
Possibilité de rendre la réclamation publique
Si aucune déclaration n’est reçue du gouvernement mis en cause dans
un délai raisonnable, ou si la déclaration reçue ne paraît pas satisfaisante au
Conseil d’administration, ce dernier aura le droit de rendre publique la
réclamation reçue et, le cas échéant, la réponse faite.
Article 26
Plaintes au sujet de l’application d’une convention
1. Chacun des Membres pourra déposer une plainte au Bureau
international du Travail contre un autre Membre qui, à son avis, n’assurerait
pas d’une manière satisfaisante l’exécution d’une convention que l’un et
l’autre auraient ratifiée en vertu des articles précédents.
2. Le Conseil d’administration peut, s’il le juge à propos, et avant de
saisir une Commission d’enquête selon la procédure indiquée ci-après, se
mettre en rapport avec le gouvernement mis en cause de la manière
indiquée à l’article 24.
3. Si le Conseil d’administration ne juge pas nécessaire de
communiquer la plainte au gouvernement mis en cause, ou si, cette
communication ayant été faite, aucune réponse ayant satisfait le Conseil
d’administration n’a été reçue dans un délai raisonnable, le Conseil pourra
former une Commission d’enquête qui aura pour mission d’étudier la
question soulevée et de déposer un rapport à ce sujet.
25
4. La même procédure pourra être engagée par le Conseil
d’administration soit d’office, soit sur la plainte d’un délégué à la Conférence.
5. Lorsqu’une question soulevée par l’application des articles 25 ou 26
viendra devant le Conseil d’administration, le gouvernement mis en cause,
s’il n’a pas déjà un représentant au sein du Conseil d’administration, aura le
droit de désigner un délégué pour prendre part aux délibérations du Conseil
relatives à cette affaire. La date à laquelle ces discussions doivent avoir lieu
sera notifiée en temps utile au gouvernement mis en cause.
Article 27
Informations à soumettre à la Commission d’enquête
Dans le cas où une plainte serait renvoyée, en vertu de l’article 26,
devant une Commission d’enquête, chacun des Membres, qu’il soit ou non
directement intéressé à la plainte, s’engage à mettre à la disposition de la
Commission toute information qui se trouverait en sa possession
relativement à l’objet de la plainte.
Article 28
Rapport de la Commission d’enquête
La Commission d’enquête, après un examen approfondi de la plainte,
rédigera un rapport dans lequel elle consignera ses constatations sur tous
les points de fait permettant de préciser la portée de la contestation, ainsi
que les recommandations qu’elle croira devoir formuler quant aux mesures
à prendre pour donner satisfaction au gouvernement plaignant et quant aux
délais dans lesquels ces mesures devraient être prises.
Article 29
Suite à donner au rapport de la Commission d’enquête
1. Le Directeur général du Bureau international du Travail
communiquera le rapport de la Commission d’enquête au Conseil
d’administration et à chacun des gouvernements intéressés dans le
différend, et en assurera la publication.
2. Chacun des gouvernements intéressés devra signifier au Directeur
général du Bureau international du Travail, dans le délai de trois mois, s’il
26
accepte ou non les recommandations contenues dans le rapport de la
Commission et, au cas où il ne les accepte pas, s’il désire soumettre le
différend à la Cour internationale de Justice.
Article 30
Infraction à l’obligation de saisir les autorités compétentes
Dans le cas où l’un des Membres ne prendrait pas, relativement à une
convention ou à une recommandation, les mesures prescrites aux
paragraphes 5 b), 6 b) ou 7 b) i) de l’article 19, tout autre Membre aura le droit
d’en référer au Conseil d’administration. Au cas où le Conseil d’administration
trouverait que le Membre n’a pas pris les mesures prescrites, il en fera
rapport à la Conférence.
Article 31
Caractère définitif des décisions de la Cour internationale de Justice
La décision de la Cour internationale de Justice concernant une plainte
ou une question qui lui aurait été soumise conformément à l’article 29 ne
sera pas susceptible d’appel.
Article 32
Effet des décisions de la Cour internationale de Justice
sur les conclusions ou recommandations
de la Commission d’enquête
Les conclusions ou recommandations éventuelles de la Commission
d’enquête pourront être confirmées, amendées ou annulées par la Cour
internationale de Justice.
Article 33
Non-application des recommandations de la Commission d’enquête
ou de la Cour internationale de Justice
Si un Membre quelconque ne se conforme pas dans le délai prescrit aux
recommandations éventuellement contenues soit dans le rapport de la
Commission d’enquête, soit dans la décision de la Cour internationale de
Justice, selon le cas, le Conseil d’administration pourra recommander à la
27
Conférence telle mesure qui lui paraîtra opportune pour assurer l’exécution
de ces recommandations.
Article 34
Application des recommandations de la Commission d’enquête
ou de la Cour internationale de Justice
Le gouvernement en faute peut, à tout moment, informer le Conseil
d’administration qu’il a pris les mesures nécessaires pour se conformer soit
aux recommandations de la Commission d’enquête, soit à celles contenues
dans la décision de la Cour internationale de Justice, et peut lui demander de
bien vouloir faire constituer une Commission d’enquête chargée de vérifier
ses dires. Dans ce cas, les stipulations des articles 27, 28, 29, 31 et 32
s’appliqueront, et si le rapport de la Commission d’enquête ou la décision de
la Cour internationale de Justice sont favorables au gouvernement qui était
en faute, le Conseil d’administration devra aussitôt recommander que les
mesures prises conformément à l’article 33 soient rapportées.
Chapitre III. Prescriptions générales
Article 35
Application des conventions aux territoires non métropolitains
1. Les Membres s’engagent à appliquer les conventions qu’ils auront
ratifiées, conformément aux dispositions de la présente Constitution, aux
territoires non métropolitains dont ils assurent les relations internationales,
y compris tous territoires sous tutelle pour lesquels ils seraient l’autorité
chargée de l’administration, à moins que les questions traitées par la
convention ne rentrent dans le cadre de la compétence propre des autorités
du territoire ou que la convention ne soit rendue inapplicable par les
conditions locales, ou sous réserve des modifications qui seraient
nécessaires pour adapter les conventions aux conditions locales.
2. Chaque Membre qui ratifie une convention doit, dans le plus bref
délai possible après sa ratification, communiquer au Directeur général du
Bureau international du Travail une déclaration faisant connaître, en ce qui
concerne les territoires autres que ceux dont il s’agit aux paragraphes 4 et 5
ci-dessous, dans quelle mesure il s’engage à ce que les dispositions de la
28
convention soient appliquées, et donnant tous les renseignements prescrits
par ladite convention.
3. Chaque Membre qui aura communiqué une déclaration en vertu du
paragraphe précédent pourra périodiquement communiquer,
conformément aux termes de la convention, une nouvelle déclaration
modifiant les termes de toute déclaration antérieure et faisant connaître la
situation concernant les territoires visés au paragraphe ci-dessus.
4. Lorsque les questions traitées par la convention entrent dans le
cadre de la compétence propre des autorités d’un territoire non
métropolitain, le Membre responsable des relations internationales de ce
territoire devra communiquer dans le plus bref délai possible la convention
au gouvernement dudit territoire, afin que ce gouvernement puisse
promulguer une législation ou prendre d’autres mesures. Par la suite, le
Membre, en accord avec le gouvernement de ce territoire, pourra
communiquer au Directeur général du Bureau international du Travail une
déclaration d’acceptation des obligations de la convention au nom de ce
territoire.
5. Une déclaration d’acceptation des obligations d’une convention peut
être communiquée au Directeur général du Bureau international du Travail:
a) par deux ou plusieurs Membres de l’Organisation pour un territoire
placé sous leur autorité conjointe;
b) par toute autorité internationale responsable de l’administration d’un
territoire en vertu des dispositions de la Charte des Nations Unies ou de
toute autre disposition en vigueur à l’égard de ce territoire.
6. L’acceptation des obligations d’une convention en vertu des
paragraphes 4 ou 5 du présent article devra comporter l’acceptation, au nom
du territoire intéressé, des obligations découlant des termes de la
convention et des obligations qui, aux termes de la Constitution de
l’Organisation, s’appliquent aux conventions ratifiées. Toute déclaration
d’acceptation peut spécifier les modifications aux dispositions de la
convention qui seraient nécessaires pour adapter la convention aux
conditions locales.
7. Chaque Membre ou autorité internationale qui aura communiqué
une déclaration en vertu des paragraphes 4 ou 5 du présent article pourra
périodiquement communiquer, conformément aux termes de la convention,
une nouvelle déclaration modifiant les termes de toute déclaration
29
antérieure ou dénonçant l’acceptation des obligations de toute convention
au nom du territoire intéressé.
8. Si les obligations d’une convention ne sont pas acceptées au nom
d’un territoire visé par les paragraphes 4 ou 5 du présent article, le Membre
ou les Membres ou l’autorité internationale feront rapport au Directeur
général du Bureau international du Travail sur la législation et la pratique de
ce territoire à l’égard des questions traitées dans la convention, et le rapport
montrera dans quelle mesure il aura été ou sera donné effet à toute
disposition de la convention, par la législation, les mesures administratives,
les contrats collectifs ou toutes autres mesures, et le rapport déclarera de
plus les difficultés qui empêchent ou retardent l’acceptation de cette
convention.
Article 36
Amendements à la Constitution
Les amendements à la présente Constitution adoptés par la Conférence
à la majorité des deux tiers des suffrages émis par les délégués présents
entreront en vigueur lorsqu’ils auront été ratifiés ou acceptés par les deux
tiers des Membres de l’Organisation comprenant cinq des dix Membres
représentés au Conseil d’administration en qualité de Membres ayant
l’importance industrielle la plus considérable, conformément aux
dispositions du paragraphe 3 de l’article 7 de la présente Constitution.
Article 37
Interprétation de la Constitution et des conventions
1. Toutes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la
présente Constitution et des conventions ultérieurement conclues par les
Membres, en vertu de ladite Constitution, seront soumises à l’appréciation
de la Cour internationale de Justice.
2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1 du présent article, le
Conseil d’administration pourra formuler et soumettre à la Conférence pour
approbation des règles pour l’institution d’un tribunal en vue du prompt
règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une
convention, qui pourront être portées devant le tribunal par le Conseil
d’administration ou conformément aux termes de ladite convention. Tous
30
arrêts ou avis consultatifs de la Cour internationale de Justice lieront tout
tribunal institué en vertu du présent paragraphe. Toute sentence prononcée
par un tel tribunal sera communiquée aux Membres de l’Organisation et
toute observation de ceux-ci sera présentée à la Conférence.
Article 38
Conférences régionales
1. L’Organisation internationale du Travail pourra convoquer telles
conférences régionales et établir telles institutions régionales qui lui
paraîtront utiles pour atteindre les buts et objectifs de l’Organisation.
2. Les pouvoirs, fonctions et procédure des conférences régionales
seront régis par des règles formulées par le Conseil d’administration et
présentées par lui à la Conférence générale pour confirmation.
Chapitre IV. Mesures diverses
Article 39
Statut juridique de l’OIT
L’Organisation internationale du Travail doit posséder la personnalité
juridique; elle a notamment la capacité:
a) de contracter;
b) d’acquérir des biens meubles et immeubles, de disposer de ces biens;
c) d’ester en justice.
Article 40
Privilèges et immunités
1. L’Organisation internationale du Travail jouit, sur le territoire de
chacun de ses Membres, des privilèges et immunités qui lui sont nécessaires
pour atteindre ses buts.
2. Les délégués à la Conférence, les membres du Conseil
d’administration ainsi que le Directeur général et les fonctionnaires du
Bureau jouissent également des privilèges et immunités qui leur sont
31
nécessaires pour exercer, en toute indépendance, leurs fonctions en rapport
avec l’Organisation.
3. Ces privilèges et immunités seront précisés dans un accord séparé
qui sera préparé par l’Organisation en vue de son acceptation par les États
Membres.
32
Annexe
Déclaration concernant les buts et objectifs
de l’Organisation internationale du Travail
(Déclaration de Philadelphie)
La Conférence générale de l’Organisation internationale du Travail,
réunie à Philadelphie en sa vingt-sixième session, adopte, ce dixième jour de
mai 1944, la présente Déclaration des buts et objectifs de l’Organisation
internationale du Travail, ainsi que des principes dont devrait s’inspirer la
politique de ses Membres.
I
La Conférence affirme à nouveau les principes fondamentaux sur
lesquels est fondée l’Organisation, à savoir notamment:
a) le travail n’est pas une marchandise;
b) la liberté d’expression et d’association est une condition indispensable
d’un progrès soutenu;
c) la pauvreté, où qu’elle existe, constitue un danger pour la prospérité de
tous;
d) la lutte contre le besoin doit être menée avec une inlassable énergie au
sein de chaque nation et par un effort international continu et concerté
dans lequel les représentants des travailleurs et des employeurs,
coopérant sur un pied d’égalité avec ceux des gouvernements,
participent à de libres discussions et à des décisions de caractère
démocratique en vue de promouvoir le bien commun.
II
Convaincue que l’expérience a pleinement démontré le bien-fondé de la
déclaration contenue dans la Constitution de l’Organisation internationale
du Travail, et d’après laquelle une paix durable ne peut être établie que sur
la base de la justice sociale, la Conférence affirme que:
a) tous les êtres humains, quels que soient leur race, leur croyance ou leur
sexe, ont le droit de poursuivre leur progrès matériel et leur
développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité
économique et avec des chances égales;
33
b) la réalisation des conditions permettant d’aboutir à ce résultat doit
constituer le but central de toute politique nationale et internationale;
c) tous les programmes d’action et mesures prises sur le plan national et
international, notamment dans le domaine économique et financier,
doivent être appréciés de ce point de vue et acceptés seulement dans la
mesure où ils apparaissent de nature à favoriser, et non à entraver,
l’accomplissement de cet objectif fondamental;
d) il incombe à l’Organisation internationale du Travail d’examiner et de
considérer à la lumière de cet objectif fondamental, dans le domaine
international, tous les programmes d’action et mesures d’ordre
économique et financier;
e) en s’acquittant des tâches qui lui sont confiées, l’Organisation
internationale du Travail, après avoir tenu compte de tous les facteurs
économiques et financiers pertinents, a qualité pour inclure dans ses
décisions et recommandations toutes dispositions qu’elle juge
appropriées.
III
La Conférence reconnaît l’obligation solennelle pour l’Organisation
internationale du Travail de seconder la mise en oeuvre, parmi les différentes
nations du monde, de programmes propres à réaliser:
a) la plénitude de l’emploi et l’élévation des niveaux de vie;
b) l’emploi des travailleurs à des occupations où ils aient la satisfaction de
donner toute la mesure de leur habileté et de leurs connaissances et de
contribuer le mieux au bien-être commun;
c) pour atteindre ce but, la mise en oeuvre, moyennant garanties
adéquates pour tous les intéressés, de possibilités de formation et de
moyens propres à faciliter les transferts de travailleurs, y compris les
migrations de main-d’oeuvre et de colons;
d) la possibilité pour tous d’une participation équitable aux fruits du
progrès en matière de salaires et de gains, de durée du travail et autres
conditions de travail, et un salaire minimum vital pour tous ceux qui ont
un emploi et ont besoin d’une telle protection;
e) la reconnaissance effective du droit de négociation collective et la
coopération des employeurs et de la main-d’oeuvre pour l’amélioration
continue de l’organisation de la production, ainsi que la collaboration
34
des travailleurs et des employeurs à l’élaboration et à l’application de la
politique sociale et économique;
f) l’extension des mesures de sécurité sociale en vue d’assurer un revenu
de base à tous ceux qui ont besoin d’une telle protection ainsi que des
soins médicaux complets;
g) une protection adéquate de la vie et de la santé des travailleurs dans
toutes les occupations;
h) la protection de l’enfance et de la maternité;
i) un niveau adéquat d’alimentation, de logement et de moyens de
récréation et de culture;
j) la garantie de chances égales dans le domaine éducatif et professionnel.
IV
Convaincue qu’une utilisation plus complète et plus large des
ressources productives du monde, nécessaire à l’accomplissement des
objectifs énumérés dans la présente Déclaration, peut être assurée par une
action efficace sur le plan international et national, et notamment par des
mesures tendant à promouvoir l’expansion de la production et de la
consommation, à éviter des fluctuations économiques graves, à réaliser
l’avancement économique et social des régions dont la mise en valeur est
peu avancée, à assurer une plus grande stabilité des prix mondiaux des
matières premières et denrées, et à promouvoir un commerce international
de volume élevé et constant, la Conférence promet l’entière collaboration de
l’Organisation internationale du Travail avec tous les organismes
internationaux auxquels pourra être confiée une part de responsabilité dans
cette grande tâche, ainsi que dans l’amélioration de la santé, de l’éducation
et du bien-être de tous les peuples.
V
La Conférence affirme que les principes énoncés dans la présente
Déclaration sont pleinement applicables à tous les peuples du monde, et que,
si, dans les modalités de leur application, il doit être dûment tenu compte du
degré de développement social et économique de chaque peuple, leur
application progressive aux peuples qui sont encore dépendants aussi bien
qu’à ceux qui ont atteint le stade où ils se gouvernent eux-mêmes, intéresse
l’ensemble du monde civilisé.
Document no 2
Accord entre les Nations Unies et l’OIT, 1946
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
OFFUCOEL
20 décernbre 1946 Vol. XX1X, N° 6
Protocole relatifà en vigueur de conclu
entre les Nations Unies et l'Organisation inter'
nationale du Travail
L'article 57 de Ia Charte des Nations Unies prévoit que les institu
tions spécialisées créées par accords intergouvernementaux et
pourvues, aux termes de leurs statuts, d'attributions internationales
étendues dans les domaines économique, social, de la
culture intellectuelle et de l'éducation, de la sante publique et autres
domaines connexes seront reliées a l'Organisation des Nations
Unies. L'article 63 de Ia Charte prévoit que le Conseil économique
et social peut conclure avec toute institution visée a l'article
57 des accords flxant les conditions dans lesquelles cette institution
sera reliée a l'Organisation des Nations Unies et precise que ces
accords seront soumis a l'approbation de l'Assemblée générale.
La Conference internationale du Travail, en sa vingt-septième
session, tenue a Paris, a adopté, le 3 novembre 1945, une resolution
confirmant le désir de l'Organisation internationale du Travail
d'entrer en relation avec l'Organisation des Nations Unies selon
les modalités qui seront déterminées par accord mutuel perniettant
a l'Organisation internationale du Travail, dans laquelle les représentants
des travailleurs et ceux des employeurs sont places sur un
pied d'égalite avec ceux des gouvernements, de coopérer pleinement
a Ia réalisation des fins des Nations Unies, tout en conservant les
pouvoirs nécessaires a l'exercice des attributions que lui confèrent
Ia Constitution de l'Organisation et Ia Declaration de Philadeiphie,
et autorisant le Conseil d'administration du Bureau international
du Travail a conclure, avec les autorités compétentes de l'Organisation
des Nations Unies, sous reserve de l'approbation de Ia Conférence,
tous accords de cette nature qui pourront être nécessaires
ou désirables a cette fin.
Le Conseil économique et social, au cours de sa premiere session,
en janvier et février 1946, a adopté une resolution instituant une
390
Commission du Conseil chargée des négociations avec les institutions
spécialisées et ayant pour instructions d'entrer en négociations
aussitôt que possible avec l'Organisation internationale du Travail.
Des négociations entre la Commission du Conseil économique
et social chargee des négociations avec les institutions spécialisées
et Ia délegai-ion de l'Organisation internationale du chargée
des négociations eurent lieu a New-York, les 28 et 29 mai 1946,
Ct aboutirent a un Accord. Cet Accord fut signé, le 30 mai 1946,
par Sir A. Ramaswami Mudaliar, Président du Conseil économique
et social et de la Commission du Conseil chargée des négociations
avec les institutions spécialisées, et par M. G. Myrddin-Evans,
Président du Conseil d'administration du Bureau international
du Travail et de Ia délégation de l'Organisation internationale du
Travail chargee des négociations.
Le 21 juin 1946, le Conseil économique et social, pendant sa
deuxième session, recommanda a I'unanimité a l'Assemblée générale
des Nations Unies d'approuver I'Accord entre i'Organisation
des Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail.
L'article XX de i'Accord prévoit quecciui-ci entrera en vigueur
des qu'il sera approuvé par i'Assemblée generale des Nations Unies
et La Conference générale de l'Organisation internationale du Travail.
Ccl. Accord a été approuvé le 14 décembre 1946 par l'Assemblée
genérale des Nations Unies, et IC 2 octobre 1946 par Ia CoiifCrence
génerale de l'Organisation internationale du Travail.
En consequence i'Accord est en vigueur Ic 14
1946.
Un exemplaire du texte authentique de cet Accord est annexé
au present Protocole.
EN FOl DE QUOI nous avons apposé nos signatures le dixneuf
décembre mu neuf cent quarante-six sur deux exemplaires
originaux du present Protocole, qui est redigé en anglais et en
francais, les deux versions faisant également foi. des
exemplaires sera classé et enregistré au Secretariat de l'Orgarzisation
des Nations Unies et l'autre sera déposé aux archives du Bureau
international du Travail.
TRYGVE LIE
Secrétaire général de l'Organisalion
des Nations Unies
EDWARD PHELAN
Directeur général du Bureau
international du Travail
391
Accord entre les Nations Unies et I'Organisation
internationale du Travail
L'article 57 de la Charte des Nations Unies prévoit que les
diverses institutions spécialisées créées par accords intergouvernementaux
et pourvues, aux termes de leurs statuts, d'attributions
internationales étendues dans les domaines économique, social, de
la culture intellectuelle et de l'éducation, de la sante publique et
autres domaines connexes, seront reliées aux Nations Unies.
La Conference internationale du Travail, en sa vingt-septième
session tenue a Paris, a adopté, Ic 3 novembre 1945, une resolution
exprimant le désir de 1'Organisation internationale du Travail
d'entrer en relation avec les Nations Unies coriformément a des
dispositions a determiner par accord mutuel.
En consequence, les Nations Unies et l'Organisation internationale
du Travail conviennent de ce qui suit:
ARTICLE I
L'Organisation internationale du Travail est reconnue par les
Nations Unies comme étant une institution spécialisée investie de
Ia responsabilité de prendre des mesures appropriées, aux termes de
son instrument fondamental, pour l'accomplissement des objectifs
prévus a cet instrument.
ARTICLE II
Representation réciproque
1. Des représentants des Nations Unies seront invites a assister
aux reunions de la Conference internationale du Travail (designee
ci-dessous par Ic terme ((Conferences) et de ses commissions; du
Conseil d'administration et de ses commissions; et des autres conférences
generales, regionales ou spéciales, convoquées par l'Organisation
internationale du Travail, et a participer, sans droit de vote,
aux délibérations de ces organes.
2. Des représentants de l'Organisation internationale du Travail
seront invites a assister aux reunions du Conseil économique et
social des Nations Unies (designe ci-dessous par le terme ((Conseil)))
et de ses commissions et comités et a participer, sans droit de vote,
aux délibérations de ces organes en cc qui concerne les questions
figurant a leur ordre du jour et pour lesquelles l'Organisation
internationale du Travail aura indiqué avoir un intérêt.
3. Des représentants de l'Organisation internationale du Travail
seront invites a assister, a titre consultatif, aux reunions de l'Assemblée
générale. 11 leur sera donné l'occasion de presenter pleinement
392
a I'Assemblée generale les vues de 1'Organisation internationale
du Travail sur les questions entrant dans le domaine de ses activités.
4. Des représentants de l'Organisatiori internationale du Travail
seront invites a assister aux reunions des commissions principales
de I'Assemblée genérale pour lesquelles l'Organisation internationale
du Travail a un intérêt et a participer, sans droit de vote, aux
déiibérations de ces commissions.
3. Des représentants de l'Organisation internationale du Travail
seront invites a assister aux reunions du Conseil de tutelle et a
participer, sans droit de vote, a ses délibérations en ce qui concerne
les questions figurant a son ordre du jour et pour lesquelics l'Organisation
aura indiquC avoir un intérêt.
6. Le Secretariat des Nations Unies assurera Ia distribution
de toute communication écrite de l'Organisation aux membres de
l'Assemblée générale, du Conseil et de ses commissions, ainsi que
du Conseil de tutelle, selon le cas.
ARTICLE III
iflS€VtiOfl des questions dans l'ordre du jour
Sous des consultations préliminaires qui pourraient étre
nécessaires, I'Organisation internationale du Travail dans
l'ordre du jour du Conseil d'administration les questions proposées
par les Nations Unies. IC Conseil et ses commissions,
ainsi que le Conseil de tutelle inséreront dans leur ordre dii
jour iCS questions proposécs par i'Organisation unternationale
du Travail.
ARTICLE IV
Recommandations de l'Assemblée générale et du Conseil
1. L'Organisation internationale du Travail, tenant compte de
l'obligation des Nations Unies de favoriser les objectifs prévus a
l'article 55 de Ia Charte et des fonctions et pouvoirs dii Conseil aux
termes de l'article 62 de Ia Charte de faire ou de provoquer des
etudes et des rapports sur des questions internationales dans les
domaines économique, social, de la culture, de l'éducation et de la
sante publique et autres domaines connexes et d'adresser des recommandations
sur ces questions aux institutions spécialisees; et tenant
compte également de la responsabilité des Nations Unies, aux termes
des articles 58 et 63 de la Charte, de faire des recommandations
en vue de coordonner les programmes et activités des institutions
spécialisées, convient de prendre des mesures en vue de soumettre,
aussitôt que possible, au Conseil d'administration, a Ia Conference
ou a tout autre organe de l'Organisation internationale du Travail
393
qui pourrait être approprié, toutes les recommandations formelles
que I'Assemblée générale ou le Conseil pourra lui adresser.
2. L'Organisation internationale du Travail convient de procéder
a des échanges de vues avec les Nations Unies, a leur demande, au
sujet de ces recommandations et de faire rapport en temps opportun
aux Nations Unies sur les mesures prises par l'Organisation
ou par ses Membres en vue de donner effet a ces recommandations,
ou sur tous autres résultats dont aurait été suivie la prise en considération
de ces recommandations.
3. L'Organisation internationale du Travail affirme son intention
de coopérer dans toutes autres mesures qui pourront être nécessaires
en vue d'assurer la coordination effective des activités des institutions
spécialisées et de celles des Nations Unies. Notamment, elle
convient de participer dans tout organisme ou tous organismes que
le Conseil pourrait créer en vue de faciliter cette coordination, de
coopérer avec ces organismes et de fournir les informations qui
pourraient être nécessaires dans F'accomplissement de cette tâche.
ARTICLE V
Echange d'informations et de documents
1. Sous reserve de mesures qui pourraient être nécessaires pour
sauvegarder le caractère confidentiel de certains documents, les
Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail procéderont
a l'echange le plus complet et le plus rapide d'informations
et de documents.
2. Sans porter prejudice au caractère general des dispositions
du paragraphe 1:
a) l'Organisation internationale du Travail convient de fournir
aux Nations Unies des rapports réguliers sur les activités de
l'Organisation internationale du Travail;
b) l'Organisation internationale du Travail convient de donner
suite, dans toute la mesure du possible, a toute demande de
rapports spéciaux, d'études ou d'informations, présentée par
les Nations Unies, sous reserve des dispositions de I'article XV; et
c) le Secrétaire général, a Ia demande du Directeur, procédera
a des echanges de vues avec lui en vue de fournir les informations
pour lesquelles l'Organisation internationale du Travail
aurait un intérêt special.
ARTICLE VI
Assistance au Conseil de sécurité
L'Organisation internatjonale du Travail convient de coopérer
avec le Conseil économique et social en fournissant telles informa394
tions et telle assistance que le Conseil de sécurité pourrait demander,
y compris l'assistance destinée à permettre l'application des décisions
du Conseil de sécurité pour le maintien ou !e rétablissement
de la paix et de la sécurité internationales.
ARTICLE VII
Assistance au Conseil de tutelle
L'Organisation internationale du Travail convient de coopérer
avec le Conseil de tutelle des Nations Unies dans l'accomplissement
de ses fonctions et, en particulier, de fournir au Conseil de tutelle,
dans toute la mesure du possible, telle assistance que le Conseil
pourrait lui demander au sujet des questions intéressant l'Organisation.
ARTICLE VIII
Territoires non autonomes
L'Organisation internationale du Travail convient de coopérer
avec les Nations Unies à la mise en oeuvre des principes et obligations
prévus au chapitre XI de la Charte en ce qui concerne les
questions affectant le bien-être et le développement des peuples
des territoires non autonomes.
A,rrrrr"' JY
Relations avec la Cour internationale de Justice
1. L'Organisation internationale du Travail convient de fournir
toutes informations qui lui seraient demandées par la Cour internationale
.de Justice, conformément à l'article 34 du Statut de la
Cour.
2. L'Assemblée générale autorise ! 'Organisation internationale
du Travail à demander des avis consultatifs à la Cour internationale
de Justice sur des questions juridiques qui se poseraient
dans le cadre de son activité, à l'exception de celles concernant les
relations réciproques entre l'Organisation internationale du Travail
et des Nations Unies ou d'autres institutions spécialisées.
3. La demande peut être adressée à la Cour par la Conférence,
ou par le Conseil d'administration autorisé par la Conférence.
4. Au moment de présenter à la Cour internationale de Justice
une demande d'avis consultatif, l'Organisation internationale du
Travail informera le Conseil économique et social de la demande.
395
ARTICLE X
Siege et bureaux régionaux
1. L'Organisation internationale du Travail, tenant compte de
l'intérêt qu'il y a a ce que le siege des institutions spécialisées soit
situé au siege permanent des Nations Unies, et des avantages
présentés par cette centralisation, convient de procéder a des
échanges de vues avec les Nations Unies avant de decider de Ia
situation de son siege permanent.
2. Dans Ia mesure du possible, les bureaux régionaux ou les
branches que l'Organisation internationale du Travail pourrait
établir seront en rapports étroits avec les bureaux régionaux ou
les branches que les Nations Unies pourraient étahlir.
ARTICLE XI
A rrangemeiits concernant le personnel
1. Les Nations TJnies et l'Organisation internationale du Travail
reconnaissent que le développement futur d'un service civil international
uniflé est souhaitable du point de vue d'une coordination
administrative effective et, a cette fin, conviennent de favoriser les
règles communes concernant le personnel, les méthodes et arrangements
destinés a éviter de graves inégalités dans les termes et les
conditions d'emploi, ainsi qu'à éviter une concurrence dans le
recrutement du personnel et a faciliter l'echange du personnel
en vue d'obtenir le maximum d'avantages de leurs services.
2. Les Nations Unies et l'Organisation internationale du
Travail conviennent de coopérer, dans la plus large mesure possible,
en vue d'atteindre ce but et notamment, elles conviennent:
a) de procéder a des echanges de vues au sujet de l'établissement
d'une Commission de service civil international, chargée de
donner des conseils sur les moyens permettant d'assurer des
règles communes pour le recrutement du personnel des secrétariats
des Nations Unies et des institutions specialisees;
b) de procécler a des échanges de vues au sujet des questions relatives
a l'emploi des fonctionnaires et du personnel, y compris
les conditions de service, la durée des nominations, les catégories
du personnel, l'échelle des traitements et des indemnités,
la retraite et les droits de pension, ainsi que les regles et les règlements
du personnel afin d'assurer autant d'uniformité qu'il
sera possible dans ce domaine;
c) de coopérer dans l'echange de personnel, lorsque cela sera
souhaitable, sur une base soit temporaire, soit permanente, en
prenant soin de garantir l'ancienneté et les droits a pension; et
396
d) de coopérer a l'établissement et a Ia mise en d'un mécanisme
approprié pour le règlement des litiges concernant l'emploi
du personnel ct ICS questions s'y rattachant.
ARTICLE XII
Services de stalistiques
1. Les Nations Unies et I'Organisation internationale du Travail
conviennent de réaliser une cooperation aussi complete que possible,
d'éviter le double emploi superflu et d'utiliser avec Ia plus grande
efficacité leur personnel technique dans leurs activités respectives
concernant le rassemblement, l'analyse, Ia publication et Ia diffusion
des informations statistiques. Les Nations Unies et l'Organisation
internationale du Travail conviennent de mettre leurs
efforts en commun en vue d'assurer Ia plus grande utilité et le plus
grand usage possibles de leurs informations statistiques et de réduire
au minimum les charges des gouvernements nationaux et de toutes
autres organisations auprès desquels ces informations seront
recueillies.
2. L'Orgariisatioa internationale du Travail reconnait que les
Nations Unies constituent l'organisme central chargé de recueillir,
analyser, publier, standardiser et faire progresser les statistiques
servant aux huts g6n&aux des organisations internationales.
& L'Organisation internationale du Travail est reconnue par
les Nations Unies comme étant iorganisme approprié chargé
de recucillir, analyser, publier, standardiser et faire progresser les
statistiques dans son propre domaine, sans qu'il soit porte préjudice
au droit des Nations Unies de s'intéresser a de telles statistiques
pour autant qu'elles soient essentielles a la poursuite de leurs
propres buts et au développement des statistiques a travers le
monde.
4. Les Nations Unies établiront les instruments administratifs
et la procedure au moyen desquels une cooperation effective concernant
les statistiques entre les Nations Unies et les institutions
reliées a elles, pourra être assurée.
5. II est reconnu souhaitable que le rassemblement des informations
statistiques ne soit pas répété par les Nations Unies ou par
toute autre institution spécialisée chaque fois qu'il est possible
d'utiliser les informations ou la documentation qu'une autre institution
pcut fournir.
6. Afin d'établir un centre de rassemblement des informations
statistiques destinées a un usage general, ii est convenu que les
données fournies a l'Organisation internationale du Travail pour
insertion dans ses series statistiques de base et ses rapports spéciaux
397
seront, dans la mesure du possible, mises a Ia disposition des Nations
Unies.
ARTICLE XIII
administratifs et techniques
1. Les Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail
reconnaissent que, afin d'unifier les méthodes administratives et
techniques et de faire le meilleur usage possible du personnel et
des ressources, ii est souhaitable d'éviter, dans toute la mesure
du possible, au sein des Nations Unies et des institutions spécialisées,
Ia creation de services qui se fassent concurrence ou qui
fassent double emploi.
2. En consequence, les Nations Unies et I'Organisation internationale
du Travail conviennent de procéder a des echanges de
vues concernant l'établissement des services administratifs et techniques
communs, en plus de ceux qui sont mentionnés aux articles
XI, XII et XIV, dans Ia mesure oü, de temps a autre, l'organisation
et l'usage de tels services sembleront possibles et appropriés.
3. Les Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail
prendront des dispositions concernant l'enregistrement et le dépôt
des documents officiels.
ARTICLE XIV
Arrangements bud getaires et financiers
1. L'Organisation internationale du Travail reconnait qu'il
serait souhaitable que d'étroites relations budgétaires et financières
s'établissent avec les Nations Unies afin que les travaux administratifs
des Nations Unies et des institutions spécialisées soient
menés a bien de la manière Ia plus efficace et la plus économique
et que le maximum de coordination et d'uniformité dans ces travaux
soit assure.
2. Les Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail
conviennent de coopérer dans toute Ia mesure du possible, dans Ia
poursuite de ces objectifs et notamment de procéder a des echanges
de vues pour determiner s'il serait souhaitable de faire des arrangements
appropriés pour l'insertion du budget de l'Organisation dans
un budget general des Nations Unies. Tout arrangement qui
pourrait être conclu a cette fin sera déflni dans un accord supplementaire
entre les deux organisations.
3. Au cours de la preparation du budget de l'Organisation
internationale du Travail, celle-ci procédera a des échanges de
vues avec les Nations Unies.
398
4. L'Organisation internationale du Travail convient de cornmuniquer
annuellement aux Nations Unies son projet de budget
en même temps qu'elle le communique a ses Membres. L'Asscrnblee
générale examinera le budget ou le projet de budget de l'Organisation
et pourra faire des recommandations a l'Organisation au sujet
d'un ou de plusieurs postes dudit budget.
5. Les représentants de i'Organisation internationale du Travail
ont le droit de participer, sans droit de vote, aux délibérations de
l'Assemblée génerale ou de toute commission de celle-ci, en tout
temps sont examines le budget de l'Organisation ou des questions
génerales administratives ou financières intéressant I'Organisation.
6. Les Nations Unies pourront entreprendre le recouvrement
des contributions des Membres de l'Organisation internationale
du Travail qui sont également des Membres des Nations Unies,
conformément aux arrangements qui, le cas échéant, seraient
définis dans un accord ultérieur entre les Nations Unies et l'Organisation
internationale du Travail.
7. Les Nations Unies prendront de leur propre initiative, ou
sur demande de I'Organisation internationale du Travail, des dispositions
pour faire des etudes sur les questions et
fiscales intéressant l'Organisation et les autres institutions spécialisCes,
en vue d'établir des services et d'assurer l'uniformite
dans ces domaines.
8. L'Orgaiiisation internationale du Travail convient de se
conformer, dans Ia mcsurc du possible, aux pratiques et aux règies
uniformes recommandCes par les Natious Unies.
ARTICLE XV
Financernent des services spéci.aux
1. Dans le cas l'Organisation internationale du Travail
aurait a faire face des dépenses supplémentaires importantes
rendues nécessaires par suite d'une demande de rapports, d'études
ou d'assistance spéciale présentée par les Nations Unies, aux termes
des articles V, VI, VII, ou de toute autre disposition du present
Accord, l'Organisation internationale du Travail et les Nations
Unies procéderont a des echanges de vues afin de determiner Ia
facon Ia plus equitable de faire face a ces dépenses.
2. Dc mêrne, les Nations Unies ci i'Organisation internationale
du Travail procéderont a des echanges de vues afin de prendre les
dispositions équitables pour couvrir les frais des services centraux
administratifs, techniques ou fiscaux ou de toute autre assistance
fournie par les Nations Unies.
399
ARTICLE XVI
A ccords entre institutions
L'Organisation internationale du Travail convient d'informer
le Conseil sur Ia nature Ct la portée de tout accord formel entre
l'Organisation internationale du Travail et toute autre institution
spécialisée ou organisation intergouvernementale, et notamment
convient d'informer le Conseil avant de conclure de tels accords.
ARTICLE XVII
Liaison
1. Les Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail
conviennent des dispositions précédentes dans l'espoir qu'elles contribueront
a assurer une liaison effective entre les deux organisations.
Elles aflirment leur intention de prendre toutes les mesures
supplémentaires qui pourront être nécessaires pour rendre cette
liaison vraiment effective.
2. Les dispositions relatives aux liaisons prévues aux articles
précédents du present Accord s'appliqueront, dans Ia mesure du
possible, autant aux relations entre les branches et les bureaux
régionaux que les deux organisations pourront établir qu'à leurs
organismes centraux.
ARTICLE XVIII
Execution de l'A ccord
Le Secrétaire général et Ic Directeur peuvent conclure tous
arrangements supplémentaires en vue de l'application du present
Accord, qui peuvent paraitre souhaitables a Ia lumière de l'expérience
des deux organisations.
ARTICLE XIX
Revision
Le present Accord sera sujet a revision par accord entre les
Nations Unies et l'Organisation internationale du Travail.
400
ARTICLE XX
Entrée en vigueur
Le present Accord entrera en vigueur des qu'il sera approuvé
par 1'Assemblée générale des Nations Unies et la Conference
générale de l'Organisation internationale du Travail.
Document no 3
Résolution 50(I) de l’Assemblée générale des Nations
Unies du 14 décembre 1946
Takes note of the action of the Council to
place certain non-governmental organizations in
category (a);
Expresses agreement with the general principle
that ail non-governmental organizations in category
(a) should receive equal treatment in respect
of consultative arrangements with the Council.
Sixty-sixth plenary meeting,
15 December 1946.
50 ( 1). Agreements with
Specialized Agencies 1
The General Assembly,
Whereas agreements entered into by the Economie
and Social Council with certain specialized
agencies art now before the General Assem
bly for approval:
Resolves to approvc the agreements with the
International Labour Organization,2 the United
Nations Educational, Scientific and Cultural Organization,•
the Food and Agriculture Oi:ganization
of the United Nations• and the International
Civil Aviation Organization, • provided
that, in the case of the agreement with the International
Civil Aviation Organization, that Organization
complies with any decision of the
General Assembly regarding Franco Spain.
Furthermore, considering it essential that the
policies and activities of the specialized agencies
and of the organs of the United Nations should
be co-ordinated:
Requests the Economie and Social Council to
follow carefully the progress of such collaboration;
Instructs the Economis; and Social Council to
report on this question to the l';eneral Assembly
within the space of three years, so as to keep the
Assembly informed and in order that the Council
and the General Assembly may, if necessary,
and after consultation with the said agencies,
formulate suitable proposais for improving such
collaboration.
Sixty-fif th plenary meeting,
14 December 1946.
51. (1). Transfer to the United Nations
of certain non-poUtical
Functions and Activities of
the League of Nations, other
than those pursuant to International
Agreemenis
In accordance with the resolution adopted by
the General Assembly on 12 February 1946 and
the resolution adopted by the Economie and Social
Council on 16 February 1946, the Secretary-
' See also a resolution adoptcd on the report of the Fifth
Committee (page 148).
• Document A/72.
'Documents A/77, A/77/Corr. 1 and A/77/Corr. 11.
• Document A/78.
• Documents A/1o6 and A/1o6/Corr. ,.
78
Prend acte de- la décision du Conseil de classtt
un certain nombre d'organisations non gouvernementales
dans la catégorie a);
Approuve le pi;incipe suivant lequel on réservera
à toutes les organisations non gouvernementales
classées dans la catégorie a) le même régime
en ce qui concerne les modalités de consultatioru
avec le Conseil.
Soixan.te-rixième séance plénière,
le 15 décembre 1946.
50 ( 1). Accords avec les Institutions
spécialisées 1
L'Assemblée générale,
Considérant que les accords conclus P.U: _ le
Conseil économique et social avec certames
institutions spécialisées sont actuellement soumis
à l'approbation de l'As~emblée,
Décide d'approuver les accords avec l'Organisation
internationale du Travail 1, l'Organisation
des Nations Unies pour l'éducation, la -science et
la culture•, l'Organisation des Nations Unies
pour l'alimentation et l'agriculture', et l'Organisation
de l'aviation civile ihternationale5, sous
réserve, en ce qui touche l'accord avec l'Organisation
de l'aviation civile internationale, que
cette Organisation se conforme à toute décision
de l'Assemblée générale concernant l'Espagne
franquiste.
Considérant d'autre part que la coordination
des programmes et des activités des institutions
spécialisées et de ceux des organes des Nations
Unies est essentielle,
Demande au Conseil économique et social de
suivre attentivement le développement de cette
collaboration;
Charge le Conseil économique et social de faire
rapport sur cette question à l'Assemblée générale
dans le délai de trois ans, afin d'informer l'Assemblée,
et de façon que le Conseil et l'Assemblée
puissent, s'il y a lieu, et après consultation avec
ces institutions, formuler les propositions appropriées
en vue d'améliorer cette collaboration.
Soixante-cinquième séance plénière,
le 14 décembre 1946.
51 ( 1). Transfert aux Nations Unies
de certaines fonctions et
activités non politiques de la
Société des Nations autres
que celles lui appartenant
en vertu d'accords internationaux
Conformément à la résolution adoptée par
l'Assemblée générale le 12 février 1946 et à la
résolution adoptée par le Conseil économique et
social le 16 février 1946, le Secrétaire général a
'Voir aussi une résolution adoptée par la Cinquième
Commission (page 148).
• Document A/72.
'Documents A/77, A/77/Corr. 1 et A/77/Corr. a.
• Document A/78.
• Documents A/1o6 et A/1o6/Corr. 1.
Document no 4
CIT, 32e session, 1949, Résolution concernant les
demandes d’avis consultatifs à la Cour internationale de
Justice, Bulletin officiel, vol. XXXII, 1949, pp. 362-363
362
Travau.x de· 1a Conference
La 32m0 session de la Conference internationale du Travail s'est tenue
a Geneve, du 8 juin au 2 juillet 1949.
Les textes adoptes par la Conference au cours de cette session figurent
au Bulletin offwiel, vol. XXXII, n° 3, du 15 aoO.t 1949 5•
Le Bureau international du Travail a publie egalenient le Oompte rendu
des travaum de la 32me session de la Conference. Celui-ci comprend les listes
des membres des delegations, des commissions, du bureau et du secretariat
de la Conference, le compte rendu stenographique des debats, ainsi que des
annexes comportant les documents et rapports des commissions de la
Conference et les textes adoptes par· cette derniere.
Les lettres par lesquelles ces textes ont ete communiques aux gouverne
ments des Etats Membres sont reproduites plus loin.
Resolution concernant les demandes d'avis consultatif9
a la Oour internationale de Justice
(Adoptee par la Conference internationale du Travail a sa 32m0 session 6)
Attendu que !'accord entre les Nations Unies et !'Organisation internationale du
Travail autorise l'Organisation internationale du Travail A demander des avis
consultatifs A la Cour internationale de Justice sur des questions juridiques qui se
poseraient dans le cadre de son activite, A l'exception de celles qui concernent les
5 A !'exception des deux textes reprod'l:lits ci-apres .(pp. 362-364j.
6 Cette resolution avait ete soumise a la Conference a la suite d'une decision prise pllfl" le
Conseil d'administration a sa 1Q7m• session. Voir B'l.lilleti'II, otficiel, vol. XXXI, n• 3, 31 dee. 1948,
p. 223.
863
relations reciproques entre !'Organisation internationale du Travail et les Nations
Unies ou d'autres institutions specialisees, et prevoit que de telles demandes peuvent
tre adressees a la Cour par la Conference ou par le Conseil d'administration autorise
par la Conference ;
Attendu qu'll est desirable que le Conseil d'administration de !'Organisation
internationale du Travail soit autorise a adresser a la Cour internationale de
Justice des demandes d'avis consultatifs,
La Conference generale de !'Organisation internationale du Travail, convoquee
a Geneve par le Conseil d'administration du Bureau international du Travail, et s'y
etant reunie, le 8 juin 1949, en sa trente-deuxieme session,
Autorise par la presente resolution, ce vingt-septieme jour de juin 1949, le
Conseil d'administration du Bureau international du Travail a demander des avis
consultatifs a la Cour internationale de Justice sur des questions juridiques qui se
poseraient dans le cadre de l'activite de !'Organisation internationale du Travail, a
l'exception de celles qui concernent les relations reciproques entre !'Organisation
internationale du Travail et les Nations Unies ou d'autres institutions specialisees.
Document no 5
Lettre de la Vice-présidente travailleuse du Conseil
d’administration du BIT au Directeur général du BIT, datée
du 12 juillet 2023
1
Groupe des travailleurs
À:
M. Gilbert Houngbo, Directeur général
Bureau international du Travail
Route des Morillons 4
CH-1211 Genève, Suisse
Objet: Renvoi d'une difficulté d’interprétation devant la Cour internationale de Justice en
vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l'OIT
Monsieur le Directeur général,
Comme annoncé précédemment à la 347e session (mars 2023) du Conseil
d’administration, nous nous adressons à vous au sujet de la difficulté existant de longue
date concernant l’interprétation de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, l'une des conventions fondamentales de
l’Organisation, et le droit de grève.
Conformément à la théorie et à la pratique constitutionnelles de l’OIT, et dans le souci
d’assurer la sécurité juridique et de garder intactes l’intégrité et la crédibilité du système
de contrôle de l’Organisation, nous demandons officiellement par la présente que la
question soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice (la
Cour).
Bien que les mandants tripartites aient multiplié les efforts depuis de nombreuses
années pour régler ce différend par le dialogue social, il n’a pas été possible de parvenir
à une solution négociée, et il n'y a pas de raison de penser que la poursuite du dialogue
social permettra de sortir de l'impasse.
Nous sommes fermement convaincus que la Cour, en tant que principal organe
judiciaire des Nations Unies, est la mieux placée et la plus apte pour ce qui est de fournir
à l’OIT et à ses mandants les orientations faisant autorité et la sécurité juridique
indispensables pour que l’Organisation puisse s’acquitter efficacement de son mandat
en matière de justice sociale. Conformément à la pratique constitutionnelle bien établie,
nous nous engageons à accepter d’être liés par l'avis consultatif qui sera rendu par la
Cour en vue du règlement définitif de ce différend.
Cent ans après le premier avis consultatif historique de la Cour permanente de Justice
internationale concernant la désignation du délégué ouvrier néerlandais à la troisième
session de la Conférence internationale du Travail, et 90 ans après son avis consultatif
sur l’interprétation de la convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes,
l’OIT ne devrait pas hésiter à s’en remettre une nouvelle fois à l’instance judiciaire
mondiale.
Compte tenu des considérations qui précèdent, nous recommandons que les questions
suivantes soient soumises à la Cour pour avis consultatif.
1. Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948?
2. La Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations était-elle compétente pour:
2
a) déterminer que le droit de grève découle de la convention (n o 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et
b) préciser, lors de l’examen de l’application de la convention, certains
aspects du champ d’application du droit de grève, des limites de celui-ci
et des conditions dans lesquelles il peut être exercé de façon licite?
En conséquence, nous souhaitons demander au Bureau de prendre toutes les mesures
nécessaires pour:
i) inscrire à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration, pour examen
et décision, une question relative à la requête d’avis consultatif à soumettre à la Cour
internationale de Justice sur les questions susmentionnées, sur la base du
paragraphe 1 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT;
ii) préparer un rapport détaillé afin d’aider le Conseil d’administration à adopter une
décision éclairée à cette session;
iii) porter dans les meilleurs délais la présente communication ainsi que le rapport qu’il
aura élaboré à l’attention de l’ensemble des groupes de mandants et des États
Membres de l’OIT en vue de recueillir toutes les observations que ceux-ci pourraient
souhaiter transmettre avant la 349e session du Conseil d'administration.
Pleinement conscients du fait que le Conseil d’administration est habilité à demander
un avis consultatif à la Cour, et gardant à l’esprit l’importance que revêt le recours à
l’article 37 de la Constitution, nous croyons fermement que le Conseil d’administration
devrait à présent prendre rapidement des mesures et se prononcer sur le renvoi de la
difficulté d’interprétation à sa prochaine session en novembre 2023.
En prévision de la discussion et de la décision du Conseil d’administration, nous
souhaitons également demander que la question fasse l’objet d’une procédure
d’urgence auprès de la Cour, dans la mesure du possible, et que les organisations
internationales d’employeurs et de travailleurs soient autorisées à participer pleinement
et de manière autonome à la procédure, eu égard à la structure tripartite unique de
l’OIT.
Enfin, pour dissiper tout doute quant à la position du groupe des travailleurs sur cette
question, nous réaffirmons notre profonde conviction - confortée par la pratique suivie
de longue date par les organes de contrôle de l'OIT - selon laquelle le droit de grève est
un corollaire indissociable et indispensable de la liberté syndicale et du droit syndical et
qu’il est, à ce titre, protégé par la convention no 87 et par la Constitution de l’OIT. Cela
signifie, de notre point de vue, que le contrôle de l’application du droit de grève et des
conditions de son exercice relève légitimement du mandat de la Commission d’experts
pour l’application des conventions et recommandations.
Nous vous remercions de nous confirmer, dès qu'il vous sera possible, que la présente
communication sera soumise au Conseil d’administration pour examen, et que le
Bureau prendra toutes les mesures nécessaires en temps utile afin de faciliter les
discussions au sein du Conseil d’administration, notamment en rendant disponibles les
éléments d’information pertinents.
Amstelveen, Pays-Bas, 12 juillet 2023
Au nom du groupe des travailleurs à l’OIT
Meilleures salutations,
[signé]
3
Catelene Passchier
Présidente du groupe des travailleurs et Vice-présidente du Conseil d’administration du
BIT
Document no 6
Lettre de la Représentante permanente de l’Espagne
auprès des organisations internationales à Genève au
Directeur général du BIT transmettant une lettre au nom
des États membres de l’Union européenne, de l’Islande et
de la Norvège, datée du 14 juillet 2023
1
Union européenne et ses États membres, Islande et Norvège
MISSION PERMANENTE DE L’ESPAGNE
AUPRÈS DES ORGANISATIONS
INTERNATIONALES
GENÈVE
MINISTÈRE DES AFFAIRES
ÉTRANGÈRES, DE L’UNION
EUROPÉENNE ET DE LA COOPÉRATION
MISSION PERMANENTE DE L’ESPAGNE
AUPRÈS DE L’ONU
Emb.(a) RR PP Adjunto
EMBADJT-SECRETARIA
Genève, 14 juillet 2023
M. Gilbert F. Houngbo
Directeur général
Organisation internationale du Travail (OIT)
Genève
Monsieur le Directeur général,
Veuillez trouver ci-joint une lettre vous étant adressée au nom des États membres de
l’Union européenne ainsi que de la Norvège et de l’Islande, deux pays membres de
l’Espace économique européen, par laquelle nous vous demandons de bien vouloir faire
inscrire à l'ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration une question
relative au renvoi devant la Cour internationale de justice d’une difficulté relative à
l’interprétation de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, s’agissant du droit de grève.
Afin d’éclairer la décision du Conseil d’administration à cet égard, nous demandons au
Bureau de préparer un rapport détaillé contenant tous les éléments nécessaires,
notamment les questions d’interprétation à examiner en vue de leur soumission à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice.
Cordiales salutations
[signé]
Aurora Díaz-Rato
2
UNION EUROPÉENNE
Délégation permanente auprès de l’Office des
Nations Unies et des autres organisations
internationales à Genève
U-23
Présidence espagnole
Genève, 14 juillet 2023
Monsieur le Directeur général,
L’Union européenne et ses États membres ainsi que l’Islande et la Norvège - pays membres de
l’Association européenne de libre-échange et de l’Espace économique européen - font suite aux
discussions qui se sont tenues à la 347e session du Conseil d’administration et à la décision
adoptée concernant le document intitulé «Plan de travail visant à renforcer le système de
contrôle: propositions concernant de nouvelles dispositions en vue d’assurer la sécurité
juridique» (GB.347/INS/5). Nous souhaitons demander que, compte tenu de son importance
fondamentale, la question concernant le renvoi devant la Cour internationale de justice d’une
difficulté relative à l’interprétation de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, s’agissant du droit de grève soit inscrite à l'ordre du jour de la 349e session
du Conseil d'administration, pour décision.
Nous notons que les mandants tripartites ont tenté à plusieurs reprises de régler ce différend
ancien, notamment par le dialogue social. Malgré les efforts déployés, aucune solution
consensuelle n’a été trouvée. Lorsque des différends concernant l’interprétation juridique d’une
convention perdurent, il convient de recourir à un mécanisme de règlement juridique, comme
cela est prévu par l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, qui offre une solution
simple ainsi qu’une garantie d'intégrité et d'indépendance. En l’absence de sécurité juridique, ce
différend continuera d’être préjudiciable au système de contrôle, de porter atteinte à la crédibilité
de l’OIT en tant qu’institution normative au sein du système des Nations Unies et en dehors, et
de nuire à la mise en oeuvre effective des normes internationales du travail. Après plus de dix ans
vainement passés à essayer de trouver une solution, il est devenu urgent d’assurer la clarté
juridique.
Compte tenu de ce qui précède, et conformément à la position qui est la nôtre depuis longtemps
et que nous avons rappelée à la 347e session du Conseil d’administration, nous demandons que
cette question soit inscrite à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration. Afin
que ce dernier puisse prendre une décision éclairée, nous demandons au Bureau de préparer un
rapport détaillé contenant tous les éléments nécessaires, notamment la ou les questions
d’interprétation à examiner en vue de leur soumission à l’appréciation de la Cour internationale
de Justice.
Cette difficulté d’interprétation persistante étant de la plus haute importance d’un point de vue
institutionnel, nous demandons également au Bureau de communiquer dès que possible cette
lettre à tous les mandants de l’Organisation internationale du travail, avant que ne débutent les
discussions au sein du Conseil d’administration.
Veuillez agréer, Monsieur le Directeur général, l’assurance de ma haute considération.
[signé] S.E. Mme Lotte Knudsen
Ambassadrice
Représentante permanente de l’Union
européenne auprès de l’Office des Nations
Unies à Genève
S.E. Mme Aurora Diaz-Rato Revuelta
Ambassadrice
Représentante permanente de l'Espagne
auprès de l’Office des Nations Unies à
Genève
Document no 7
Lettre du ministre du Travail et de l’Emploi du Brésil au
Directeur général du BIT, datée du 13 juillet 2023
1
Gouvernement du Brésil
Mission permanente du Brésil auprès de l’Office des Nations Unies
et des autres organisations internationales sises à Genève
Chemin Camille-Vidart, 15, 1202 Genève — Suisse
Téléphone: (+41) (0) 22 3325000 / Fax: (+41) (0) 229100751
Courriel: [email protected]. br
N° 340/2023
La Mission permanente du Brésil auprès de l’Office des Nations Unies à Genève présente ses
compliments à l’Organisation internationale du Travail (OIT) et a l’honneur de lui faire tenir cijoint
le texte d’une lettre du ministre du Travail et de l’Emploi, Luiz Marinho, adressée au Directeur
général, Gilbert Houngbo, à l’appui de la demande officielle présentée par le groupe des
travailleurs en vue d’inscrire à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration une
question concernant la saisine de la Cour internationale de Justice au sujet d’une difficulté
d’interprétation (relative au droit de grève dans la convention no 87 de l’OIT) en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
La Mission permanente du Brésil saisit cette occasion pour renouveler à l’Organisation
internationale du Travail les assurances de sa très haute considération.
Genève, le 14 juillet 2023
Bureau international du Travail
Cabinet du Directeur général
Route des Morillons, 4, 1211, Genève
[email protected]; [email protected]
2
PIÈCE JOINTE
TEXTE DE LA LETTRE DU MINISTRE DU TRAVAIL ET DE L’EMPLOI DU BRÉSIL, LUIZ MARINHO
Demande d’inscription à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration d’une question
concernant la saisine de la Cour internationale de Justice au sujet d’une difficulté d’interprétation
en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
Monsieur le Directeur général,
Le Brésil demande par la présente qu’une question soit inscrite de toute urgence à
l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration en vue d’un débat et d’une
décision concernant le renvoi devant la Cour internationale de Justice (CIJ) du différend
de longue date relatif à l’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, au regard du droit de grève.
Afin de faciliter l’examen de cette question par le Conseil d’administration et la prise
d’une décision, nous prions également le Bureau d’établir un rapport contenant tous les
éléments à prendre en considération en vue d’une saisine de la CIJ, y compris les
questions qu’il conviendrait de poser à celle-ci.
Les mandants tripartites ont tenté à plusieurs reprises de surmonter ce différend de
longue date, notamment dans le cadre du dialogue social, mais aucune solution
consensuelle n’a pu être trouvée. Étant donné que les difficultés persistent quant à
l’interprétation de cette question, l’Organisation devrait mettre à profit la procédure
prévue à l’article 37, paragraphe 1, de sa Constitution et saisir la Cour internationale de
Justice. Les gouvernements ont besoin de sécurité juridique en ce qui concerne
l’ensemble de leurs obligations au titre de la convention no 87 et le contrôle de
l’application de celle-ci par la commission d’experts.
En l’absence de sécurité juridique, nous estimons que ce différend continuera de nuire
au bon fonctionnement du système de contrôle, à la crédibilité de l’OIT en tant
qu’organisme normatif au sein du système des Nations Unies et au-delà, ainsi qu’à
l’application effective des normes internationales du travail.
Compte tenu des conséquences institutionnelles qu’entraîne cette difficulté
d’interprétation persistante et de la nécessité de la résoudre de toute urgence, nous
demandons également au Bureau de diffuser dès que possible la présente lettre à tous
les mandants de l’OIT en prévision de la discussion du Conseil d’administration sur ce
point.
Nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous confirmer que les mesures
nécessaires ont été prises pour donner suite à la présente lettre.
Brasilia, le 13 juin 2023
(signé)
LUIZ MARINHO
Ministre du Travail et de l’Emploi du Brésil
Document no 8
Lettre du ministre de l’Emploi et du Travail de la
République d’Afrique du Sud au Directeur général du BIT,
datée du 14 juillet 2023
1
Gouvernement de l’Afrique du Sud
MINISTÈRE
DE L’EMPLOI ET DU TRAVAIL
RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE
Department of Employment and Labour, Laboria House, 215 Francis Baard Street PRETORIA Tél.: (012) 392
9628 Fax: (012) 320 1942 Private Bag X9090 CAPE TOWN, 8001 RSA 12th Floor 120 Plain Street CAPE TOWN
Tél.: 021 466 7160 Fax: 021 462 2832 www.labour.gov.za
Monsieur G. F. Houngbo
Directeur général
Bureau international du Travail
4 route des Morillons
CH-1211, Genève
SUISSE
Monsieur le Directeur général,
OBJET: SOUTIEN À LA PROPOSITION DU GROUPE DES TRAVAILLEURS CONCERNANT LA
QUESTION DU DROIT DE GRÈVE
J’espère que vous allez bien. Je vous écris pour exprimer mon plein soutien à la proposition
présentée par le groupe des travailleurs au sujet de l’interprétation de la convention no 87 (sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical) en ce qui concerne le droit de grève.
Comme vous le savez, le groupe des travailleurs a officiellement demandé que la Cour
internationale de Justice (CIJ) soit saisie de cette question de toute urgence afin d’établir la
sécurité juridique et de préserver l’intégrité et la crédibilité du système de contrôle de l’OIT. Lors
de la session du Conseil d’administration de mars dernier, il est apparu clairement qu’ un
consensus ne pouvait être trouvé sur le cadre de procédure régissant une saisine de ce type.
Par conséquent, au nom du gouvernement de la République sud-africaine, nous soutenons sans
réserve l’appel du groupe des travailleurs en faveur de la tenue de toute urgence d’une discussion
sur la saisine de la CIJ et de l’inscription de cette question à l’ordre du jour de la 349e session du
Conseil d’administration, qui se tiendra en novembre 2023.
Les droits des travailleurs, en particulier le droit de grève et la liberté syndicale, sont
extrêmement importants aux yeux de la République sud-africaine. Notre Constitution ainsi que
divers textes issus de notre législation, notamment la loi sur les relations de travail (LRA),
consacrent et protègent ces droits socio-économiques fondamentaux. Ces droits jouent un rôle
crucial dans la protection des intérêts des travailleurs et la promotion d’une relation juste et
équilibrée entre employeurs et salariés.
En outre, nous sommes fermement convaincus qu’il est essentiel de trouver une solution à la
question du droit de grève alors même que nous nous efforçons d’assurer une meilleure
protection aux travailleurs du monde entier. Tout en reconnaissant l’importance du dialogue
social et de la négociation collective, qui constituent l’objectif ultime, nous estimons que
l’incertitude actuelle qui entoure l’interprétation de la convention no 87 prive les travailleurs de
leur outil le plus puissant en cas de conflit du travail.
Nous vous prions de bien vouloir faire part du soutien indéfectible de notre gouvernement au
groupe des travailleurs et de l’assurer de notre détermination à coopérer avec tous les mandants
2
de l’OIT. Nous sommes convaincus qu’une position unifiée renforcera notre engagement à
protéger les plus vulnérables d’entre nous et à faire progresser la justice sociale dans le monde
du travail.
Nous soulignons de nouveau la nécessité de pallier de toute urgence l’absence de sécurité
juridique en ce qui concerne l’interprétation de la convention no 87 et considérons également que
la CIJ est la mieux placée pour nous aider à résoudre cette question déjà ancienne.
Enfin, nous vous remercions de vos efforts pour promouvoir les droits des travailleurs et rendre
le monde du travail plus juste et plus équitable à l’échelle mondiale. Nous sommes convaincus
que l’OIT continuera de jouer un rôle central dans la promotion de la justice sociale et la
protection des droits des travailleurs partout dans le monde.
Nous vous remercions de l’attention que vous accorderez à cette question et nous réjouissons à
la perspective de poursuivre notre coopération avec l’OIT et ses mandants.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur général, les assurances de ma très haute
considération.
(signé)
M. TW NXESI
MINISTRE DE L’EMPLOI ET DU TRAVAIL
RÉPUBLIQUE SUD-AFRICAINE
Date: 14 juillet 2023
Document no 9
Lettre de la ministre du Travail, de l’Emploi et de la
Sécurité sociale de l’Argentine au Directeur général du
BIT, datée du 14 juillet 2023
République argentine – Pouvoir exécutif
national
1983/2023 – 40 ans de démocratie
Note
Référence: NO-2023-81872752-APN-MT
BUENOS AIRES
Vendredi 14 juillet 2023
Objet: Convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948- Saisine de la Cour
internationale du Justice – Droit de grève
À: Gilbert F. Houngbo (Bureau international du Travail (BIT)),
Copie à:
Monsieur le Directeur général,
J’ai l’honneur de m’adresser à vous en ma qualité de ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale de la
République d’Argentine, pour faire suite à la note qui vous a été adressée par le Groupe des travailleurs au sein de
l’OIT concernant la demande tendant à ce que la question de la portée de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, s’agissant du droit de grève, soit soumise à l’appréciation de la Cour
internationale du Justice (la Cour).
À cet égard, je souhaite appuyer la demande faite par la Vice-présidente travailleuse du Conseil d’administration
du BIT au nom du Groupe des travailleurs, tendant à inscrire, de toute urgence, une question à l’ordre du jour de la
349e session du Conseil d’administration afin que celui-ci examine le renvoi à la Cour de la difficulté de longue
date relative à l’interprétation de la convention n° 87 s’agissant du droit de grève, et prenne une décision à ce sujet.
Pour faciliter la discussion et aider le Conseil d’administration à prendre une décision, nous demandons en outre en
Bureau d’établir un rapport détaillé contenant tous les éléments nécessaires à prendre en compte pour la saisine de
la Cour, notamment les questions devant être soumises à son appréciation.
Les mandants tripartites ont tenté à plusieurs reprises de régler ce différend d’interprétation ancien, notamment par
le dialogue social. Malgré les efforts déployés, aucune solution consensuelle n’a été trouvée. Lorsque des différends
concernant l’interprétation juridique d’une convention perdurent, l’Organisation devrait user de la procédure
constitutionnelle prévue par l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, et soumettre la question à
l’appréciation de la Cour. Les gouvernements ont besoin de sécurité juridique en ce qui concerne l’ensemble de
leurs obligations au titre de la convention n° 87 et le contrôle de l’application de celle-ci par la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations. En l’absence de sécurité juridique, ce différend
continuera de nuire au bon fonctionnement du système de contrôle, à la crédibilité de l’OIT en tant qu’organisme
normatif au sein du système des Nations Unies et au-delà, ainsi qu’à l’application effective des normes
internationales du travail.
Compte tenu des conséquences institutionnelles qu’entraîne cette difficulté d’interprétation persistante et de la
nécessité de la résoudre de toute urgence, nous demandons également au Bureau de communiquer dès que possible
la présente lettre à tous les mandants de l’OIT en prévision de la discussion du Conseil d’administration.
Enfin, je souhaite appeler l’attention sur le fait que, au cours du débat de longue date sur ce point, la République
d’Argentine a toujours maintenu trois positions claires:
I. En ce qui concerne les examens successifs de cette question, au cours desquels diverses positions ont été
exprimées, et dans le but de donner à la communauté internationale plus de certitude quant au champ
d’application de la convention N° 87, la République d’Argentine s’est prononcée en faveur du renvoi du
différend à la Cour en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, en vue de son
règlement définitif.
II. De même, lorsque la discussion s’est focalisée sur la nécessité d’établir une procédure spéciale pour saisir
la Cour, la République d’Argentine a estimé qu’une telle procédure n’était pas nécessaire et qu’une
demande claire d’un État Membre, d’un groupe d’employeurs ou d’un groupe de travailleurs de l’OIT
était suffisante, l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT ne subordonnant le droit de saisine
à aucune procédure préalable, et la saisine n’étant soumise qu’à l’approbation éventuelle du Conseil
d’administration, celui-ci se prononçant à la majorité conformément aux règles applicables.
III. Sans préjudice de ce qui précède, quel que soit le scénario envisagé dans la discussion, la République
d’Argentine a toujours soutenu que la convention n° 87 couvrait le droit de grève, conformément à ses
articles 3 et 10.
Compte tenu de ce qui précède, je vous serait reconnaissante de me confirmer que les mesures nécessaires ont été
prises pour donner suite à la présente lettre.
Je vous prie d’agréer l’expression de ma plus haute considération.
.
Signé électroniquement par système de
gestion électronique Date: 2023.07.14
19:59:12 -03:00
Raquel Cecilia
Kismer Ministre
Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale
Signé électroniquement par
système de gestion électronique
de documents
Date: 2023.07.14 19:59:12 -03:00
Document no 10
Lettre de la Vice-présidente employeuse du Conseil
d’administration du BIT au Directeur général du BIT, datée
du 2 août 2023
1
2 août 2023
M. Gilbert Houngbo
Directeur général
Organisation internationale du Travail
Route de Morillons
CH-1211 Genève
Suisse
Monsieur le Directeur général,
Objet: Lettre datée du 13 juillet 2023
J’accuse réception, par la présente, de votre lettre du 13 juillet 2023 relative à la communication
de la Vice-présidente travailleuse du Conseil d’administration datée du 12 juillet (ci-après «la
communication des travailleurs»), qui comporte une demande officielle visant à soumettre
d’urgence la question «de la difficulté existant de longue date concernant l’interprétation de la
convention no 87 […] et le droit de grève» à l’appréciation de la Cour internationale de Justice.
Nous notons que, dans leur communication, les travailleurs demandent au Bureau de prendre
toutes les mesures nécessaires pour:
i) inscrire à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration, pour examen
et décision, une question relative à la requête d’avis consultatif à soumettre à la Cour
internationale de Justice sur les questions susmentionnées, sur la base du paragraphe 1
de l’article 37 de la Constitution de l’OIT;
ii) préparer un rapport détaillé afin d’aider le Conseil d’administration à adopter une
décision éclairée à cette session;
iii) porter dans les meilleurs délais la présente communication ainsi que le rapport qu’il
aura élaboré à l’attention de l’ensemble des groupes de mandants et des États Membres
de l’OIT en vue de recueillir toutes les observations que ceux-ci pourraient souhaiter
transmettre avant la 349e session du Conseil d’administration.
Nous prenons note des demandes des travailleurs, qui avaient déjà fait part de leurs intentions à cet
égard à la session de mars du Conseil d’administration. Cependant, nous nous y opposons pour les
raisons suivantes:
Premièrement, conformément à l’article 3.1.1 du Règlement du Conseil d’administration, «[l]’ordre
du jour de chaque session est établi par un groupe de sélection tripartite composé du bureau du Conseil
d’administration, du président du groupe gouvernemental, des coordonnateurs régionaux représentant
les gouvernements, des secrétaires des groupes des employeurs et des travailleurs, ou de leur
représentant.» En outre, l’article 3.1.3 du Règlement dispose que, «[l]orsque se pose une question
urgente, l’ordre du jour provisoire peut être actualisé par le bureau du Conseil d’administration après
consultation des autres membres du groupe de sélection tripartite mentionné au paragraphe 3.1.1.»
(c’est nous qui soulignons). De fait, l’ordre du jour provisoire adopté par consensus à la dernière
réunion du groupe de sélection tripartite, tenue le 4 mai dernier, ne comporte aucune question
concernant l’article 37 de la Constitution de l’OIT, le droit de grève ou la convention no 87. La
question relative au «Plan de travail visant à renforcer le système de contrôle», qu’il est proposé
d’inscrire à l’ordre du jour au titre du point INS/7, a trait uniquement aux réclamations soumises
en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT et à la présentation des rapports prévus à
l’article 22. Il découle des dispositions des articles du Règlement du Conseil d’administration
susmentionnés que le bureau du Conseil d’administration doit avoir la possibilité de consulter
comme il convient les autres membres du groupe de sélection tripartite avant de décider d’une
2
éventuelle actualisation de l’ordre du jour provisoire, et disposer pour cela d’un délai suffisant.
C’est à cette seule condition qu’une réunion du bureau du Conseil d’administration peut être
programmée aux fins de l’actualisation de l’ordre du jour.
Deuxièmement, nous notons que lors des discussions tenues par le Conseil d’administration en
mars 2023, les groupes étaient très divisés sur le cadre de procédure relatif à l’article 37 qu’il était
proposé d’utiliser pour résoudre la question du «droit de grève. Un vote demandé par la Présidente
sur ce cadre de procédure a été annulé au dernier moment. Un gouvernement avait déclaré qu’il
n’était «pas prêt à voter sur une question dont la complexité et la technicité nécessit[aient] des
discussions et des négociations approfondies». En conséquence, le Conseil d’administration a décidé
«de remettre à une future session l’examen de la question [faisant] l’objet du document
GB.347/INS/5», sans préciser quelle session. Nous notons, d’après la communication des
travailleurs, que la question d’un cadre de procédure pour l’application de l’article 37 n’est
manifestement plus à l’ordre du jour et qu’il est maintenant proposé de saisir la CIJ sans qu’un tel
cadre ait été établi. Nous tenons néanmoins à souligner que la complexité et le caractère
politiquement explosif de l’utilisation éventuelle de l’article 37 dans le cas du «droit de grève» n’ont
pas disparu entre-temps. Comme l’ont également souligné certains gouvernements lors de la
discussion qui s’est tenue en mars, nous réaffirmons la nécessité de trouver une solution dans le
cadre du dialogue social, sur la base des règles établies et avec la participation de toutes les
composantes tripartites de l’Organisation qui sont représentées à la Conférence internationale du
Travail. Nous restons fermement convaincus que la question du «droit de grève», qui relève de la
compétence fondamentale de l’OIT, ne saurait être purement et simplement abandonnée et laissée
à la décision d’une institution extérieure. Selon nous, les délibérations futures du Conseil
d’administration sur cette question doivent donc porter principalement sur des solutions internes à
l’OIT, qui sont les seules susceptibles d’être largement et durablement acceptées, bien qu’elles
impliquent inévitablement des compromis et peuvent de ce fait ne pas être considérées comme
idéales par certains.
En conséquence, nous prions le Directeur général de bien vouloir:
i) inscrire à l’ordre du jour de la 350e session du Conseil d’administration une question
relative aux propositions concernant de nouvelles dispositions en vue d’assurer la sécurité
juridique s’agissant de l’interprétation du «droit de grève» dans le contexte de la convention
(n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948;
ii) demander au Bureau d’établir une note présentant de manière détaillée toutes les
propositions qui permettraient de résoudre la question d’interprétation relative au «droit de
grève» par le dialogue social dans le cadre des procédures et règles de l’OIT;
iii) inviter tous les mandants tripartites des États Membres de l’OIT à soumettre leurs
observations à cet égard avant la 350e session du Conseil d’administration;
iv) communiquer la présente lettre à tous les groupes de mandants et États Membres de
l’OIT pour examen.
Nous vous remercions de votre concours sur cette question importante et attendons avec intérêt
tout élément nouveau à cet égard.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur général, l’assurance de ma haute considération,
Renate Hornung-Draus
Présidente du groupe des employeurs et Vice-présidente du Conseil d’administration
Document no 11
Lettre de l’Ambassadeur et Représentant permanent de
la Barbade auprès de l’Office des Nations Unies à Genève
au Directeur général du BIT, datée du 4 août 2023
Government de la Barbade
MISSION PERMANENTE DE LA BARBADE AUPRÈS DE L’OFFICE DES NATIONS UNIES À
GENÈVE
18A Chemin François-Lehmann
Tél. (+41 22) 791 85 00
Fax. (+41 22) 920 98 58
E-mail: [email protected]
M. Gilbert Houngbo
Directeur général
Bureau international du Travail
4 route des Morillons
CH-1211, Genève 22 Suisse
Le 4 août 2023,
Demande d’inscription d’une question à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil
d’administration: renvoi d’une difficulté d’interprétation devant la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT
Monsieur le Directeur général,
Au nom du gouvernement de la Barbade, je demande qu’une question relative à
l’interprétation de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève, soit inscrite à l’ordre du jour de la 349e
session du Conseil d’administration pour discussion et décision concernant le renvoi
devant la Cour internationale de Justice (CIJ) de cette difficulté d’interprétation existant de
longue date.
Afin de faciliter les délibérations du Conseil d’administration et la prise d’une décision par
celui-ci, la Barbade demande au Bureau d’établir un rapport présentant tous les éléments
à prendre en considération en vue d’une saisine de la CIJ, y compris les questions à poser
à cette dernière.
La Barbade présente cette demande en sachant que les mandants tripartites ont à
plusieurs reprises tenté de régler ce différend, y compris par le dialogue social. Faute d’un
accord à ce jour, une incertitude préoccupante demeure sur le plan juridique. Or, vous le
comprendrez, la sécurité juridique est nécessaire aux gouvernements. Nous pensons que
l’OIT devrait recourir à la procédure prévue à l’article 37, paragraphe 1, de sa Constitution
et renvoyer cette question devant la Cour internationale de Justice.
Nous attendons avec intérêt que le Bureau fasse le nécessaire sur cette question.
(Signé)
Matthew Wilson
Représentant permanent et Ambassadeur
Document no 12
Lettre du ministre du Travail de la Colombie au Directeur
général du BIT, datée du 10 août 2023
Gouvernement de la Colombie
Mission permanente de la Colombie auprès des
Nations Unies à Genève
DCHONU no 458/23
La Mission permanente de la République de Colombie auprès de l’Office des Nations Unies et
des autres organisations internationales à Genève présente ses compliments au Bureau
international du Travail et, se référant à la demande formulée par le groupe des travailleurs
en vue du dépôt devant la Cour internationale de Justice d’une requête pour avis consultatif
concernant la portée et la teneur de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève, a l’honneur de faire tenir
ci-joint une lettre de la ministre du Travail de la République de Colombie, Gloria Ines Ramirez
Ríos, adressée au Directeur général du BIT, Gilbert Houngbo.
La Mission permanente de la République de Colombie auprès de l’Office des Nations Unies et
des autres organisations internationales à Genève saisit cette occasion pour renouveler au
Bureau international du Travail les assurances de sa très haute considération et estime.
Genève, 10 août 2023
À l’attention du Directeur général
du Bureau international du Travail
Gilbert Houngbo
Bogota D,C
GILBERT HOUNGBO,
Directeur général
Bureau international du Travail
Route des Morillons, 4
CH - 1211 Genève, Suisse
Objet: Demande visant l’inscription à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil
d’administration de la question du renvoi d’un différend en matière d’interprétation devant la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
Monsieur le Directeur général,
Nous avons été informés que la Vice-présidente travailleuse du Conseil d’administration avait
présenté une lettre contenant certaines demandes au nom du groupe des travailleurs, comme
suite à l’annonce formelle qui avait été faite à la 347e session du Conseil d’administration en
mars dernier.
Nous tenons à vous faire savoir que le gouvernement de la Colombie souscrit pleinement aux
fondements et à l’objectif des demandes du groupe des travailleurs, qui tendent à inscrire, de
toute urgence, une question à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil d’administration afin
que celui-ci examine la possibilité d’un renvoi devant la Cour d’un différend de longue date relatif
à l’interprétation de la convention n° 87 s’agissant du droit de grève, et prenne une décision à
ce sujet.
Pour faciliter la discussion et aider le Conseil d’administration à prendre une décision, nous
demandons en outre en Bureau d’établir un rapport détaillé contenant tous les éléments à
prendre en compte pour la saisine de la Cour, y compris les questions devant être soumises à
son appréciation.
Les mandants tripartites ont tenté à plusieurs reprises de régler ce différend d’interprétation
ancien, notamment par le dialogue social. Malgré les efforts déployés, aucune solution
consensuelle n’a été trouvée. Lorsque des différends concernant l’interprétation juridique d’une
convention perdurent, l’Organisation devrait user de la procédure prévue par l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT et soumettre la question à l’appréciation de la Cour.
Les gouvernements ont besoin de sécurité juridique en ce qui concerne l’ensemble de leurs
obligations au titre de la convention n° 87 et le contrôle de l’application de celle-ci par la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations. En l’absence de
sécurité juridique, ce différend continuera de nuire au bon fonctionnement du système de
contrôle, à la crédibilité de l’OIT en tant qu’organisme normatif au sein du système des Nations
Unies et au-delà, ainsi qu’à l’application effective des normes internationales du travail.
Compte tenu des conséquences institutionnelles qu’entraîne ce différend persistant en matière
d’interprétation et de la nécessité de la résoudre de toute urgence, nous demandons également
au Bureau de communiquer dès que possible la présente lettre à tous les mandants de l’OIT en
prévision de la discussion du Conseil d’administration.
Je vous saurais gré de bien vouloir me confirmer que les mesures nécessaires ont été prises
pour donner suite à la présente lettre.
Je vous prie d’agréer l’expression de ma très haute considération.
(signé)
GLORIA INES RAMIREZ RIOS
Ministre du Travail
Document no 13
Lettre du ministre du Travail de l’Équateur au Directeur
général du BIT, datée du 25 août 2023
Gouvernement de l’Équateur
Réf.: MDT-MDT-2023-0482-O
Quito, le 25 août 2023
Monsieur Gilbert F. Houngbo
Directeur général du BIT
Bureau du Directeur général
ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL
Objet: OIT: position du ministère du Travail concernant l’interprétation de la convention
no 87 et du droit de grève
Monsieur le Directeur général,
Je me réfère aux lettres envoyées par l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant
les positions relatives à l’interprétation de la convention no 87 et du droit de grève.
À cet égard, je vous informe que notre ministère a examiné et analysé les informations
soumises par l’OIT, ainsi que par les représentants des travailleurs, des employeurs et des
gouvernements. La législation équatorienne ayant pour principe le règlement pacifique des
différends et des conflits internationaux, et rejetant la menace ou le recours à la force pour les
résoudre, notre ministère estime qu’il est essentiel, conformément aux demandes d’autres
États Membres, d’inscrire un point à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil
d’administration pour examen et décision concernant le renvoi à la Cour internationale de
justice (CIJ) du différend qui perdure quant à l’interprétation de la convention (n° 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, notamment en ce qui concerne le droit
de grève. Ce faisant, le débat et le processus décisionnel du Conseil d’administration seront
favorisés, ce qui permettra à tous les acteurs concernés de bénéficier d’une sécurité juridique,
principe fondamental du dialogue tripartite et de la prise de décision.
Afin de garantir un débat serein, il convient de préciser que le Bureau de l’OIT devra préparer
et transmettre aux membres un rapport complet contenant tous les éléments nécessaires à
une analyse approfondie et, en particulier, à une prise de décision concernant la demande
formulée par le groupe des travailleurs auprès de l’OIT, y compris les questions à soumettre à
la CIJ.
Je vous remercie de tenir compte de ces informations que je porte à votre connaissance à
toutes fins utiles et vous prie d’agréer, Monsieur le Directeur général, l’assurance de ma haute
considération.
Patricio Donoso Chiriboga
Ministre du Travail
Document no 14
Note verbale n° 185/MP-ANG/GEN/2023 de la Mission
permanente de la République d’Angola, datée du 6
septembre 2023
Gouvernement de l’Angola
Document no 15
Lettre du Conseiller fédéral et Chef du Département
fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche
de la Suisse au Directeur général du BIT, datée du
6 septembre 2023
Schweizerische Eidgenossenschaft
Confëdëration suisse
Confederazione Svizzera
Confederaziun svizra
0 Le Chef du Dëpartement fëdëral de l’ëconomie, de
la formation et de la recherche DEFR
Berne, le 6 septembre 2023
Monsieur le Directeur gënëral,
La Suisse vous remerciep our les lettresd ’informationd es 17 juiËlet4, et 10 aoüt 2023 au sujet de la
rëception de plusieurs communications concernant la question en suspens de I'interprëtation de la
Convention n' 87 sur la libertë syndicale et la protection du droit syndical. 1948, Nous avons pris
bonne note de la demande de la reprësentanted es Travailleurse t de la rëponse de celle des Employeurs
ainsi que des prises de position de plusieurs gouvernements.
La Suisse a suivi de trës prës le dëbat sur l’interprëtationd es conventions de 1’Organisationi nternationale
du Travail (OIT) et la transposition de 1’art. 37 de la Constitution de l’OIT ces quinze derniëres annëes.
Les questionsd ’interprëtationre vëtentu ne importancei nstitutionnelleL. ’OIT prësente de nombreuses
spëcificitës. Tout en respectant la demande officielted ëposëe par te groupe des Travailleurs,
la Suisse rëitëre de faQon constante sa prëfërence de favoriser le chemin de 1’art, 37 al. 2 Cst pour les
questions d’interprëtation.L a Suisse rappelle ëgalement qu’aucun cadre de procëdure pour 1’art.3 7 al
1 Cst n’a ëtë adoptë lors de la session du Conseil d’administrationd e mars 2023
Dans la perspectived ’une futured iscussion au sein du Conseil d’administrationa u sujet d’un possible
renvoi de la questËond ’interprëtatËoän la Cour internationaled e Justice (Cl J), nous aimerions insister
sur les ëlëments suivants
La procëdure ne peut pas ëtre sëparëe de la question ou des questions d’interprëtation ä poser.
Or, ä ce stade, on peut douter que les questions soumises, teIles qu’elles sont formulëes
soient vëritablement des questions d’interprëtation et qu’elles soient recevables pour la Cl J.
La Confërence internationaled u travail (CIT) devrait approuver la saisine de la Cour et la ou
les questions d’interprëtation, aprës analyse approfondie par le Conseil. II faut veiller ä ce que
tous les gouvernements intëressës puissent participer ä ces discussions dans Ie respect des
rëgles de procëdure. Soit le Conseil se rëunit en session plëniëre ou comitë plënier avec droit
d'tnterventiond e tous les Etats membres, sott la discusston est transmise et soumise ä la Confërence
Monsieur Gilbert Houngbo
Directeur Gënëral
Bureau internationald u Travai
Genëve
Palais fëdëral est, CH-3003 Berne
0
La participation aux dëlibërations et nëgociatËons doit ëtre ouverte ä tous tes Ëtats Membres
qui ne sont pas reprësentës au sein du Conseil d’administration. Tous les Ëtats Membres devraient
pouvoir participer aux discussions et ä la prise de dëcision concernant le renvoi de diffërends
devant la Cour, et l’efficacitë et I'ëquitë du processus devraient ëtre assurëes
Les Etats signataires de la Convention n'’ 87 doivent impërativement ëtre impliquës dans les discussions
concernant le contenu de la question d’interprëtation qui serait posëe ä la Cl J. En effet, les Etats
signataires sont les premiers concernës. De plus, selon unejurisprudence constante de la Cl J, eIle
s’assure de disposer de toutes les informationsn ëcessaires. Dans ce but, la Cl J peut invitert ous les
Etats signataires ä participer activement ä la procëdure. L’implication de ces Etats dans l’ëlaboration
de la question est par consëquent prlmordiale pour assurer de la continuitë et de la cohërence
Le contenu de la question ou, au minimum, la dëcision de renvoyer ou non la ou les questions ä la Cl J
doit ëtre prise par la CIT, En effet, la Convention n'’ 87 est considërëe comme fondamentale et est 1’objet
d’un principe et droit fondamental que tous les Etats membres doivent respecter, promouvoir et rëaliser.
De plus, la rësolution donnant la compëtence au Conseil d'administration de dëposer des demandes
d’avis consultatif date de 1949. La composition de l’OIT aujourd’hui n’est pas comparable ä
celle de 1949. A l’ëpoque, l’OIT comptait 62 Etats membres. Le Conseil d'administration ëtait alors
beaucoup plus reprësentatif de ses membres. Ainsi, dans un souci d’ëquitë et d’inclusion, la CIT doit
ëtre impliquëe dans les discussions et dëcisions au sujet du contenu et/ou du renvoi de la question ä la
CIJ
Le gouvernement suisse demande par consëquent au bureau du Conseil de prëvoir une discussion au
Conseil d'administration sous la forme d’un comitë plënier et de prëvoir ëgalement une approbation, le
moment venu par la Confërence internationale du travail.
Je vous remercie de prendre bonne note de ces remarques et vous prësente, Monsieur le Directeur
gënëral, I'assurance de ma haute considëration
Guy Parmelin
Conseiller fëdëral
2/2
Document no 16
Lettre signée par les 14 membres titulaires du groupe des
employeurs du Conseil d’administration du BIT au
Président du Conseil d’administration, datée du 12
septembre 2023
M. Abiodun Richards Adejola
Représentant permanent du Nigéria auprès de l’Office des Nations Unies
Président du Conseil d’administration du BIT
Organisation internationale du Travail
Route des Morillons
CH-1211 Genève
Suisse
Le 12 septembre 2023
Objet: demande formulée par 14 membres titulaires du groupe des employeurs en vue de la
tenue d’une réunion extraordinaire du Conseil d’administration, au titre de l’article 3.2.2 du
Règlement du Conseil d’administration du BIT, ayant pour but d’inscrire sans délai une
question normative sur le droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence
internationale du Travail
Monsieur le Président du Conseil d’administration,
Nous, soussignés, vous adressons par la présente une demande visant à convoquer une réunion
extraordinaire du Conseil d’administration au titre de l’article 3.2.2 du Règlement du Conseil
d’administration.
Cette réunion aurait pour objectif de statuer sur l’inscription sans délai d’une question normative
sur le droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail
(CIT) en 2024. De façon plus concrète, il est proposé que la CIT adopte un protocole sur le droit
de grève ou, plus largement, sur l’action syndicale à la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948. L’adoption du protocole définirait avec autorité la portée
du droit de grève et ses limites dans le contexte de la convention no 87. Les obligations découlant
du protocole deviendraient contraignantes pour les États parties à la convention no 87 qui
ratifieraient le protocole. Ainsi, l’adoption du protocole réglerait le différend qui persiste sur les
interprétations du droit de grève.
L’adoption d’un protocole sur le droit de grève à la convention no 87 permettrait ainsi de
démontrer que le dialogue au sein des structures tripartites de l’OIT est à même d’apporter une
solution durable au conflit portant sur les interprétations du droit de grève et qu’une saisine de
la Cour internationale de justice (CIJ) n’est pas nécessaire.
Afin de garantir qu’une possible action normative portant sur le droit de grève ne soit pas rendue
obsolète par la saisine de la CIJ, nous vous prions également d’organiser cette réunion
extraordinaire avant la réunion extraordinaire souhaitée par le groupe des travailleurs et
34 gouvernements.
Nous vous saurions gré de convoquer, en votre qualité de Président du Conseil d’administration,
cette réunion extraordinaire à une date opportune et de solliciter le soutien du Bureau dans sa
préparation et son organisation, conformément aux modalités définies plus haut.
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président du Conseil d’administration, l’assurance de
notre haute considération.
1
Signatures des 14 membres employeurs titulaires du Conseil d’administration:
M. S. Barklamb (Australie)
[signature]
M. H. Diop (Sénégal)
[signature]
M. R. Dubey (Inde)
[signature]
Mme R. Hornung-Draus (Allemagne)
[signature]
M. T. Mackall (États-Unis)
[signature]
M. J. Mailhos (Uruguay)
[signature]
M. K. Mattar (Émirats arabes unis)
[signature]
M. B. Matthey (Suisse)
[signature]
Mme J. Mugo (Kenya)
[signature]
M. H. Munthe (Norvège)
[signature]
Mme E. Nagasawa (Japon)
[signature]
Mme A. Vauchez (France)
[signature]
M. F. Yllanes (Mexique)
[signature]
M. H. Zouanat (Maroc)
[signature]
2
Document no 17
Note verbale Z-2023/62441669/36640282 de la
Mission permanente de la République de Türkiye, datée
du 22 septembre 2023
MISSION PERMANENTE DE LA RÉPUBLIQUE DE TÜRKIYE
AUPRÈS DE L’OFFICE DES NATIONS UNIES À GENÈVE
Organisation internationale du Travail (OIT)
4 route des Morillons
CH-1211 Genève 22, Suisse
Genève, le 22 septembre 2023
Z-2023/62441669/36640282 -
La Mission permanente de la République de Türkiye auprès de l’Office des Nations Unies à
Genève et des autres organisations internationales en Suisse présente ses compliments à
l’Organisation internationale du Travail (OIT) et a l’honneur d’accuser réception de la
communication datée du 15 septembre 2023 concernant les sessions spéciales du Conseil
d’administration, et de souligner les points ci-après.
Au nom du gouvernement de la Türkiye, la Mission permanente exprime son plein soutien à
la démarche inclusive proposée par la Suisse et le groupe des employeurs en vue des réunions
spéciales du Conseil d’administration qui se tiendront prochainement. Plus précisément, la
Mission permanente réitère son soutien à la proposition de convoquer ces réunions spéciales sous
la forme d’un comité plénier, ce qui permettrait aux États qui ne sont pas membres du Conseil
d’administration de prendre une part active au débat et d’exprimer leur point de vue sur la
question essentielle que constitue la convention n° 87 de l’OIT. La Mission permanente est
convaincue que cette démarche s’inscrirait dans le droit fil des principes de transparence, de
représentation et de dialogue, lesquels sont essentiels au bon fonctionnement de l’OIT.
En outre, la Mission permanente accueille favorablement la demande de convocation
d’une réunion spéciale visant à inscrire une question normative sur le droit de grève à l’ordre du
jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail. Cette réunion spéciale pourrait
jouer un rôle déterminant dans le règlement de ce différend de longue date, en suscitant un
dialogue social constructif au sein de l’OIT. L’objectif premier de cette réunion spéciale devrait
être de favoriser l’approbation d’un protocole accompagnant la convention n° 87, et englobant les
thèmes du droit de grève et de l’action syndicale au sens large. Dès lors, ce protocole définirait
avec clarté et autorité les orientations à suivre, et ferait office d’instrument de référence faisant foi
pour définir les paramètres précis régissant la portée et les limites du droit de grève dans le cadre
général de la convention n° 87, ce qui permettrait à terme de résoudre le désaccord qui subsiste à
ce sujet.
À cet égard, la Mission permanente prie le Bureau de bien vouloir diffuser la présente note
verbale à tous les États Membres de l’OIT ainsi qu’aux membres du Conseil d’administration du
Bureau international du Travail.
La Mission permanente de la République de Türkiye saisit cette occasion pour renouveler
à l’Organisation internationale du Travail les assurances de sa très haute considération.
Reçu par CABINET
2 5 SEP. 2023
Document no 18
BIT, Note relative aux sessions spéciales du Conseil
d’administration – pratique antérieure, septembre 2023
Sessions spéciales du Conseil
d’administration – Pratique antérieure
1. Une session spéciale, ou session extraordinaire, du Conseil d’administration (special
meeting of the Governing Body en anglais) peut être convoquée i) dès lors que 16 membres
titulaires du Conseil d’administration formulent une demande écrite à cet effet
(paragraphe 8 de l’article 7 de la Constitution de l’OIT); ii) à la demande de 16 membres
du groupe gouvernemental, ou 12 membres du groupe des employeurs, ou 12 membres
du groupe des travailleurs (paragraphe 3.2.2. du Règlement du Conseil d’administration);
iii) lorsque le Président du Conseil d’administration le juge nécessaire (paragraphe 3.2.2).
2. Par le passé, trois sessions extraordinaires ont été convoquées par le Président du Conseil
d’administration en vertu de son pouvoir discrétionnaire de le faire quand cela lui paraît
nécessaire. À deux autres occasions, il a refusé des demandes visant à tenir une telle
session (voir la note interne du Bureau du Conseiller juridique du 16 août 1977, ci-jointe).1
3. La première session extraordinaire du Conseil d’administration a été convoquée en
septembre 1932, entre ses 59e et 60e sessions, à la demande du gouvernement de l’Italie.
La proposition de ce dernier consistait à demander au Conseil d’administration de décider
que l’Organisation internationale du Travail devait examiner d’urgence la question de la
réduction de la durée du travail, conformément aux résolutions de la Commission du
chômage adoptées par le Conseil d’administration et à la résolution que la Conférence
avait elle-même adoptée à sa 16e session. Aux fins de cette session extraordinaire, le
gouvernement de l’Italie avait proposé une résolution et le Bureau, rédigé une note.
4. Le deuxième précédent a été la session extraordinaire convoquée le 3 octobre 1935 entre
les 72e et 73e sessions du Conseil d’administration. Tenue la veille de l’ouverture de la 73e
session du Conseil, elle était convoquée par le Président pour examiner des questions qui
devaient être résolues avant le début de la 73e session (à laquelle de nouveaux membres
du bureau du Conseil devaient être élus). En l’occurrence, les questions à trancher étaient
le retrait effectif de l’Allemagne, la désignation du Canada comme État ayant l’importance
industrielle la plus considérable et la révision des règles régissant l’élection des membres
du bureau du Conseil d’administration.
5. Dans le troisième cas, le Conseil d’administration a siégé en session extraordinaire les 19
et 20 mai 1970 en vue d’élire un nouveau Directeur général à la suite de la démission de
David Morse le 9 février 1970, prenant effet le 31 mai 1970. Lors de la session ordinaire
précédente (178e session), le Président avait « annonc[é] qu'à la suite des consultations
entre les groupes et conformément à l'article 20 du Règlement du Conseil
d'administration, il a[vait] convoqué une session spéciale pour la désignation du Directeur
général du Bureau international du Travail, qui se tiendra[it] du 18 au 20 mai 1970. »
(GB.178/PV, p. 86).
1 Il convient de faire une distinction entre les sessions spéciales et les séances spéciales, lesquelles ont été organisées, par
exemple, en hommage à la mémoire d’un Directeur général (Albert Thomas en juin 1932 ou Wilfred Jenks en novembre
1973) ou encore pour accueillir des personnalités éminentes (Joseph Stiglitz en mars 2009).
6. Comme indiqué précédemment, le Président a refusé à deux occasions de répondre
favorablement à des demandes visant à convoquer une session extraordinaire. Tout
d’abord, en 1973, lorsque deux membres du Conseil d’administration avaient demandé la
tenue d’une session extraordinaire pour débattre de la question du coup d’État au Chili.
Après avoir consulté les Vice-présidents, le Président avait décidé qu’il n’était pas
nécessaire de convoquer une session extraordinaire, « en raison de la situation financière
de l'OIT, et comme la présente session devait commencer incessamment » (GB.191/PV,
p. II/1).
7. Deux années plus tard, en 1975, la Fédération syndicale mondiale a demandé la
convocation d’une session extraordinaire consacrée aux événements en Espagne, mais le
Président du Conseil d’administration a décidé de ne pas accéder à cette demande (voir
la note interne du Bureau du Conseiller juridique du 7 octobre 1975, ci-jointe).
Document no 19
BIT, Note relative aux sessions spéciales du Conseil
d’administration – origine et évolution des règles
applicables, septembre 2023
Sessions spéciales du Conseil d’administration – Origine et évolution des règles applicables
Règlement du Conseil
d’administration
Constitution Membres
titulaires du
Conseil
Origine et justification
1920 ARTICLE 10
Sessions.
[…] Sans préjudice de ce qui est
stipulé au dernier alinéa de
l'article 393 du Traité de
Versailles, le Président peut
également convoquer une
session extraordinaire quand cela
lui parait nécessaire, et il est tenu
de convoquer une session
spéciale lorsqu'il a reçu à cet
effet une demande signée par six
membres du même groupe.
*
50 pour cent des membres du
groupe gouvernemental ou tous
les membres d’un groupe non
gouvernemental
ARTICLE 393
[…] Une session spéciale
devra être tenue chaque
fois que dix membres au
moins du Conseil auront
formulé une demande écrite
à ce sujet.
*
41 pour cent du nombre
total de membres
titulaires du Conseil
d’administration (24)
Gouvernements:
12
Employeurs: 6
Travailleurs: 6
À la deuxième session du Conseil d’administration, un
projet de règlement a été présenté mais pas examiné
(annexe 9 des procès-verbaux)
Puis le projet d’article 11 prévoyait la convocation
d’une session spéciale «à réception d’une demande
écrite formulée à cet effet et signée par 10 membres
du Conseil ou plus, conformément aux dispositions
de l’article 393 du Traité de Versailles. La tenue d’une
session spéciale est annoncée au moins 7 jours avant
l’ouverture de celle-ci.»
À la troisième session du Conseil d’administration, un
projet de règlement a été présenté par une
commission spéciale et examiné (GB.3/PV, p.16-18 et
60-61). L’article 11 proposé par la commission
spéciale a été adopté en tant qu’article 10.
Le motif de l'évolution intervenue entre la deuxième
et la troisième sessions est exposé dans une note non
datée et non signée contenant l’observation cidessous
sur la proposition visant à fixer à 10 le
nombre de membres signataires requis:
« A ceci on peut objecter que, seul, le groupe des
représentants des Gouvernements serait à même de
provoquer une réunion et qu’aucun des autres groupes
n’aurait la possibilité de le faire. Il conviendrait de
réduire le nombre de membres exigés afin de permettre
à tout groupe qui le désirerait, de provoquer une session
extraordinaire ».
1934 ARTICLE 11
2. Sans préjudice de ce qui est
stipulé au dernier alinéa de
l'article 7 de la Constitution de
l'Organisation (393), le Président
peut également convoquer une
session extraordinaire quand cela
lui paraît nécessaire, et il est tenu
de convoquer une session
spéciale lorsqu'il a reçu à cet effet
une demande signée par huit
membres du groupe
gouvernemental, ou six membres
du groupe patronal, ou six
membres du groupe ouvrier.
*
50 pour cent des membres du
groupe gouvernemental ou 75
pour cent des membres d’un
groupe non gouvernemental
Article 393 (modifié par la
Conférence internationale
du Travail à sa 4e session,
en octobre 1922)
Une session spéciale
devra être tenue chaque
fois que douze personnes
faisant partie du Conseil
auront formulé une
demande écrite à cet effet.
*
37, 5 pour cent du nombre
total de membres
titulaires du Conseil
d’administration (32)
Article 393
(modifié)
Gouvernements:
16
Employeurs: 8
Travailleurs: 8
GB.68/PV, p. 80-81
« La Commission a considéré qu'en raison de
l'accroissement de la représentation des pays extraeuropéens
au sein du Conseil, il serait difficile
d'obtenir la signature de tous les membres du groupe
patronal ou du groupe ouvrier pour la convocation de
sessions spéciales du Conseil; en conséquence, une
disposition qui exigerait la signature de tous les
membres de l'un ou l'autre de ces groupes rendrait
impossible la convocation dans un bref délai d'une
session extraordinaire pour l'examen des questions
urgentes, sauf à la demande des membres du groupe
gouvernemental.
La Commission propose donc de porter à huit le nombre
de membres du groupe gouvernemental et de maintenir
le nombre de membres à six dans le cas de deux autres
groupes.»
1955 Article 20
2. Sans préjudice de ce qui est
stipulé au dernier alinéa de
l'article 7 de la Constitution de
l'Organisation, le Président peut
Article 7, paragraphe 8
(modifié par la Conférence
à sa 36e session, en juin
1953)
Article 7,
paragraphe 8
(modifié)
GB.128/PV, p. 109 «La Commission a également noté
que le Règlement mentionne dans divers articles le
nombre des membres du Conseil qui doivent accomplir
telle démarche déterminée pour qu'elle soit valable. Elle
a estimé qu'en raison de l'augmentation du nombre des
membres du Conseil, les chiffres prévus dans ces
également convoquer une
session extraordinaire quand cela
lui paraît nécessaire, et il est tenu
de convoquer une session
spéciale lorsqu'il a reçu à cet effet
une demande signée par dix
membres du groupe
gouvernemental, ou sept membres
du groupe des employeurs, ou sept
membres du groupe des
travailleurs.
*
50 pour cent des membres du
groupe gouvernemental ou 70
pour cent des membres d’un
groupe non gouvernemental
Une session spéciale
devra être tenue chaque
fois que seize personnes
faisant partie du Conseil
auront formulé une
demande écrite à cet effet.
*
41 pour cent du nombre
total de membres
titulaires du Conseil
d’administration (40)
Gouvernements:
20
Employeurs: 10
Travailleurs: 10
dispositions devraient être modifiés pour maintenir dans
l'ensemble les mêmes proportions».
1974 Article 20
2. Sans préjudice de ce qui est
stipulé au dernier alinéa de
l'article 7 de la Constitution de
l'Organisation, le Président peut
également convoquer une
session extraordinaire quand cela
lui paraît nécessaire, et il est tenu
de convoquer une session
spéciale lorsqu'il a reçu à cet effet
une demande signée par seize
membres du groupe
gouvernemental, ou douze
membres du groupe des
Article 7, paragraphe 8
Non modifié
Article 7,
paragraphe 1
(amendé en
1962 et 1972)
Gouvernements:
28
Employeurs: 14
Travailleurs: 14
GB.194/SC/5/4, paragr. 6 d) «l'article 20, paragraphe 2,
qui dispose qu'on est tenu de convoquer une session
spéciale du Conseil d'administration lorsqu'il a été reçu
une demande signée par dix membres du groupe
gouvernemental, ou sept membres du groupe des
employeurs, ou sept membres du groupe des
travailleurs. Jusqu'en 1963, ces chiffres équivalaient à la
moitié des membres du groupe gouvernemental et à 70
pour cent du groupe des employeurs ou du groupe des
travailleurs; à partir de 1963, ils représentaient
respectivement quelque 40 et 60 pour cent. On
remarquera que, dans l'un et l'autre cas, ces chiffres
sont sensiblement inférieurs à celui des seize membres
requis à cet effet par la Constitution (article 7,
paragraphe 8); ce dernier chiffre a été fixé par
employeurs, ou douze membres du
groupe des travailleurs.
*
57 pour cent des membres du
groupe gouvernemental, ou 85
pour cent des membres d’un
groupe non gouvernemental
l'Instrument d'amendement à la Constitution de
l'Organisation internationale du Travail, 1953, pour
maintenir la proportion antérieure (de 40 pour cent) par
rapport au nombre total des membres du Conseil
d'administration. Compte tenu de la disposition
constitutionnelle, qui ne permet pas d'exiger plus de
seize voix pour demander une session spéciale du
Conseil d'administration, il est proposé que les chiffres
"dix", "sept" et "sept" soient remplacés par les chiffres
"seize", "douze" et "douze"».
2005 3.2.2
Non modifié
Non modifié Non modifié GB.294/LILS/1 Nouvelle numérotation dans le cadre
de la publication du Recueil de règles applicables au
Conseil d’administration
2016 3.2.2. Sans préjudice de ce qui est
stipulé au dernier alinéa de l’article
7 de la Constitution de
l’Organisation, le Président peut
également convoquer, après
consultation avec les autres
membres du bureau, une session
extraordinaire quand cela lui paraît
nécessaire. Le Président est tenu de
le faire à la réception d’une
demande à cet effet signée par
seize membres du groupe
gouvernemental, ou douze
membres du groupe des
employeurs, ou douze membres du
groupe des travailleurs.
Non modifié Non modifié GB.326/LILS/2
La consultation avec les autres membres du bureau a
été ajoutée afin de codifier la pratique établie.
Conclusion
L’article 7, paragraphe 8, de la Constitution prévoit qu’une session extraordinaire du Conseil d’administration se tient à la demande d’un nombre
déterminé de membres titulaires du Conseil d’administration (représentant environ 40 pour cent du nombre total de membres titulaires), sans
considération du groupe auquel ces membres appartiennent. Ce nombre, initialement fixé à 10, est actuellement de 16, et sera porté à 32 à l’entrée
en vigueur de l’Instrument d’amendement à la Constitution de l’Organisation internationale du Travail, 1986.
L’article 7 de la Constitution prévoit en outre que le Conseil d’administration établit son règlement. Dans les limites ainsi fixées, le Conseil
d’administration a défini des règles complémentaires en application desquelles une session extraordinaire peut aussi être convoquée à l’initiative du
Président ou à la demande, formulée par écrit, d’un nombre déterminé de membres titulaires de l’un des trois groupes. Le nombre de membres d’un
groupe requis pour convoquer une session extraordinaire était de 6 membres de l’un des groupes (formule 6-6-6), puis est passé à 10 membres du
groupe gouvernemental, ou 7 membres du groupe des employeurs, ou 7 membres du groupe des travailleurs (formule 10-7-7), et est aujourd’hui de
16 membres du groupe gouvernemental, ou 12 membres du groupe des employeurs, ou 12 membres du groupe des travailleurs (formule 16-12-12).
La raison d’être cette règle complémentaire est que chacun des trois groupes, et pas uniquement le groupe gouvernemental, devrait avoir le pouvoir
de déclencher la convocation d’une session extraordinaire.
Il ressort de la lecture combinée de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution et du paragraphe 3.2.2. du Règlement du Conseil d’administration
qu’une session spéciale, ou session extraordinaire, du Conseil d’administration («special meeting of the Governing Body» en anglais) peut être convoquée
dans trois situations distinctes.
• Premièrement, à la demande d’au moins 16 membres titulaires du Conseil d’administration, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent
(par exemple, une demande écrite signée par 8 membres du groupe gouvernemental, 2 membres du groupe des employeurs et 6 membres
du groupe des travailleurs, ou une demande écrite signée par 6 membres du groupe gouvernemental et 10 membres du groupe des
employeurs, ou encore une demande écrite signée par 7 membres du groupe des employeurs et 9 membres du groupe des travailleurs). Il
n’existe aucun précédent.
• Deuxièmement, à la discrétion du Président, lorsqu’il le juge nécessaire après consultation des Vice-présidents. Cette possibilité a été invoquée
à cinq reprises; trois sessions extraordinaires ont été convoquées.
• Troisièmement, à la demande de la majorité des membres titulaires de l’un des trois groupes, c’est-à-dire 16 membres du groupe
gouvernemental, ou 12 membres du groupe des employeurs, ou 12 membres du groupe des travailleurs. Il n’existe aucun précédent.
En résumé, en raison de son caractère exceptionnel, une session extraordinaire du Conseil d’administration devrait être convoquée seulement si le
Président le juge nécessaire, ou si un nombre considérable de membres titulaires du Conseil d’administration appartenant au même groupe ou à des
groupes différents en font la demande formelle. Ces règles sont complémentaires mais distinctes, et peuvent être appliquées séparément.
Document no 20
BIT, Note relative à l’effet juridique contraignant des avis
consultatifs de la CIJ, septembre 2023
Effet juridique contraignant des avis consultatifs de la CIJ
1. La question est souvent posée de savoir si, en cas de saisine de la Cour internationale de
Justice (CIJ), l’avis consultatif de la Cour aurait un effet contraignant et, dans l’affirmative,
sur quelle base.
2. D’après la théorie générale du droit, les avis consultatifs de la CIJ sont des exposés de
droit sur des questions juridiques soumises à la Cour par des organes du système des
Nations Unies et d’autres institutions internationales autorisés à le faire. Les avis
consultatifs ne constituent pas une décision au sens de l’article 59 du Statut de la Cour.
Contrairement aux procédures contentieuses, les procédures consultatives ne
concernent pas des parties à un différend entre États et n’ont pas l’autorité de la chose
jugée (res judicata), ce qui signifie qu’elles n’ont pas pour résultat un arrêt définitif et non
susceptible de recours excluant la remise en débat de la même réclamation entre les
mêmes parties.
3. Toutefois, les avis consultatifs relatifs à l’interprétation de la Constitution de l’OIT ou d’une
convention internationale du travail ont force obligatoire parce que le paragraphe 1 de
l’article 37 de la Constitution le prévoit expressément (I). Plus largement, il ressort
nettement de la pratique des États et de la doctrine que l’effet juridique d’un avis
consultatif de la Cour fait en réalité autant autorité qu’un arrêt et que l’organisation
requérante est liée par l’«avis» de la Cour (II).
I.
4. Selon la Cour internationale de Justice, «[u]ne distinction doit être établie entre le
caractère consultatif de la fonction de la Cour et les effets particuliers que les parties à un
différend existant peuvent souhaiter attribuer, dans leurs relations mutuelles, à un avis
consultatif de la Cour, qui, “comme te[l], … ne saurait avoir d’effet obligatoire”
(Interprétation des traités de paix conclus avec la Bulgarie, la Hongrie et la Roumanie, avis
consultatif, C.I.J. Recueil 1950, p. 71). Ces effets particuliers, étrangers à la Charte et au
Statut qui fixent les règles de fonctionnement de la Cour, découlent d’accords distincts;
en l’espèce, la section 30 de l’article VIII de la Convention générale dispose que “[l]’avis de
la Cour sera accepté par les parties comme décisif”.» (Immunité de juridiction d’un
rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme, avis consultatif, C.I.J. Recueil
1999, paragr. 25, p. 77).
5. Comme l’indique le site Web de la Cour, «[c]ontrairement aux arrêts, et sauf les rares cas
où il est expressément prévu qu’ils auront force obligatoire (comme le font, par exemple,
la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, la Convention sur les
privilèges et immunités des institutions spécialisées des Nations Unies et l’Accord entre
l’Organisation des Nations Unies et les États-Unis d’Amérique relatif au Siège de
l’Organisation des Nations Unies), les avis consultatifs de la Cour n’ont pas d’effet
contraignant. Il appartient aux institutions ou organes internationaux qui les ont demandés
de décider, par les moyens qui leur sont propres, de la suite à réserver à ces avis.»
6. Dans le cas de l’OIT, un «effet particulier» est attribué aux avis consultatifs de la Cour par
une disposition constitutionnelle expresse, à savoir le paragraphe 1 de l’article 37, qui
prévoit sans aucune ambiguïté de soumettre à l’«appréciation» de la Cour internationale
de Justice les différends d’interprétation. Les rédacteurs de la Constitution de l’OIT ont
donc confié à la Cour la responsabilité de formuler des «appréciations» – et non des avis
– en vue du règlement définitif des différends d’interprétation. Il s’ensuit qu’en adhérant
à l’Organisation tous les États Membres acceptent le caractère contraignant de toute
«appréciation» que formulerait la Cour en réponse à une demande qui lui serait soumise
en vertu du paragraphe 1 de l’article 37 de la Constitution.
7. Comme Roberto Ago, ancien président de la Cour, l’a écrit: «en vertu de certaines
dispositions, [les avis consultatifs] peuvent poursuivre un objectif plus ambitieux, à savoir
régler un différend auquel une de ces institutions est partie. Des exemples de telles
dispositions peuvent être trouvés dans […] les instruments constitutifs de certaines de ces
organisations […] La caractéristique essentielle commune à toutes ces dispositions est
que celles-ci qualifient l’avis demandé à la Cour de “décision” au sujet du différend en
question, ce qui signifie qu’elles lui confèrent une “force contraignante” pour les parties
au différend 1». Shabtai Rosenne, pour sa part, fait état de «cas exceptionnels dans lesquels
des États et des organisations internationales sont convenus par des accord collatéraux
que l’avis aura force obligatoire ou sera décisif. Dans ces cas, l’obligation de respecter
l’avis découle de l’accord» 2.
8. Des dispositions similaires, prévoyant la saisine de la Cour, sont énoncées à la section 32 de
la Convention de 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, qui
établit que l’avis de la Cour sera accepté comme décisif, et à l’ancien article XII du Statut du
Tribunal administratif de l’OIT. Guillaume Bacot, faisant explicitement référence au
paragraphe 1 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, note qu’«il est habituellement admis
que toutes ces dispositions signifient que ces avis rendus par la Cour doivent être acceptés
comme obligatoires» 3. Robert Kolb estime quant à lui que «la force obligatoire de l’avis de
la Cour découle, en droit, non pas de l’avis lui-même, mais du texte juridique collatéral qui
confère à l’avis une force juridique qu’il n’aurait pas eue autrement. Dans un tel cas, l’avis
est une forme déguisée d’arrêt, la fonction consultative de la Cour étant utilisée pour
trancher un différend ou un point de droit […] Les parties ne peuvent pas déroger au Statut
et au Règlement [de la Cour] en réduisant les obligations qui leur incombent en vertu de ces
textes […] Toutefois, elles sont tout à fait en droit de se donner des obligations
supplémentaires sous réserve que cela ne soit pas contraire à la lettre et à l’esprit des
textes» 4.
1 Roberto Ago, «Binding Advisory Opinions of the International Court of Justice» (en anglais), American
Journal of International Law, vol. 85, 1991, p 439. Comme le note Ago, «la Cour n’a jamais considéré qu’il lui
appartenait de se prononcer sur la conformité de ces clauses avec les critères par lesquels son Statut établit
des distinctions entre les fonctions de la Cour. De même, elle n’a pas estimé utile de se prononcer sur la
question de savoir si le fait d’attribuer le caractère contraignant d’une «décision» à un texte adopté en tant
qu’«avis» était compatible avec le caractère intrinsèquement consultatif de ce dernier»; ibid, p. 443.
2 Shabtai Rosenne, The Law and Practice of the International Court, 1920-2005, 2006, vol. III, p. 1698,
disponible en anglais.
3 Guillaume Bacot, «Réflexions sur les clauses qui rendent obligatoires les avis consultatifs de la CPJI et de la
CIJ», Revue générale de droit international public, vol. 84, 1980, p.1034.
4 Robert Kolb, The International Court of Justice, 2014. pp. 1187-1188 (en anglais). Voir aussi Jochen Frowein;
Karin Oellers-Frahm, «Advisory opinions - Article 65» in A Zimmermann; C Tomuschat; K Oellers-Frahm (eds.),
The Statute of the International Court of Justice – A Commentary, 2006, p. 1416.
9. Le caractère contraignant des avis consultatifs rendus par la Cour à la demande de l’OIT
est généralement reconnu et accepté depuis plus de 100 ans par tous les mandats
tripartites (gouvernements, employeurs, travailleurs) sans exception. En effet, les
archives du BIT abondent d’expressions qu’ont utilisées les mandants (mais aussi le
Bureau et les organes de contrôle), telles que «avis contraignant», «force de loi», «décision
contraignante», «vérité juridique», «interprétation faisant autorité», «décision faisant
autorité», «interprétation définitive», «décision finale», «expression du droit en vigueur»
– qui toutes traduisent la conviction profonde que le paragraphe 1 de l’article 37 de la
Constitution confère un caractère contraignant aux avis consultatifs obtenus sur cette
base. Une compilation des déclarations à cet effet est présentée dans l’annexe. En
substance, cette opinio juris des mandants tripartites de l’OIT illustre le fait que le
paragraphe 1 de l’article 37 doit être compris comme une «clause compromissoire»
conférant un caractère décisif et concluant aux avis consultatifs de la Cour.
10. C’est précisément cette conviction qui a motivé les six demandes de renvoi déposées
auprès de la Cour permanente de Justice internationale (CPJI) entre 1922 et 1932.
Pourquoi les mandants de l’OIT auraient-ils débattu de ces demandes et les auraient-ils
soumises à un vote s’ils n’avaient pas eu pour compréhension commune qu’ils auraient
l’obligation de se conformer à la «décision» de la Cour? Et qui connaîtrait mieux l’effet
juridique des avis consultatifs que ceux qui, par le passé, ont comparu devant la Cour et
expliqué les motifs des demandes de renvoi adressées par l’OIT? Quand les deux
premières questions d’interprétation ont été soumises à la CPJI en 1922, Albert Thomas a
déclaré «[p]our trancher des conflits de cette nature, il a paru à notre Organisation, et il
a paru aux Gouvernements qu’il n’était pas d’autorité plus haute ni plus certaine, que la
Cour permanente de Justice internationale» et noté «l’acceptation de la juridiction
obligatoire [de la Cour permanente], qui a le droit de donner d’une convention
internationale quelconque, une interprétation officielle, participant de la force obligatoire
de l’acte lui-même auquel elle s’incorpore». Harold Butler a quant à lui indiqué, dans une
déclaration écrite à la Cour ce qui suit: «L’objet de la présente procédure devant la Cour
est d’obtenir une interprétation authentique. Une fois que cette interprétation aura été
donnée, dans quelque sens que ce soit, elle entraînera ipso facto la disparition de toutes
les divergences et toutes les inégalités, car les États liés par la convention auront
l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour donner effet à l’interprétation
fournie par la Cour».
11. Outre la mention expresse de «l’appréciation de la Cour internationale de Justice» au
paragraphe 1 de l’article 37, l’effet contraignant des avis consultatifs se fonde sur la
logique institutionnelle et le bon sens. Si l’avis de la Cour n’était pas accepté comme
contraignant, l’article 37 perdrait tout son sens et serait privé de son objet en tant que
clause de règlement des différends, car aucune autorité ne serait désignée comme
compétente pour régler avec autorité une difficulté d’interprétation. Dans ce cas, quelle
serait la nécessité ou l’utilité d’inclure le paragraphe 1 de l’article 37 dans la Constitution
de l’OIT et pourquoi la Constitution imposerait-elle de soumettre toute question ou
difficulté d’interprétation à l’appréciation de la CIJ?
II.
12. À un niveau plus général, il est communément admis dans la pratique des États et la
doctrine que les avis consultatifs de la CIJ, même s’ils ne sont pas formellement
contraignants, ont une valeur juridique et peuvent, à bien des égards, être assimilés à des
arrêts juridiquement contraignants. En 1927 déjà, un comité de la Cour permanente avait
exprimé l’avis suivant: «il n’y a qu’une différence purement nominale entre les affaires
contentieuses et les affaires consultatives. La différence principale réside dans la façon
dont l’affaire est introduite devant la Cour. De la sorte, l’opinion selon laquelle les avis
consultatifs n’ont pas force obligatoire est plutôt théorique que réelle» 5.
13. En 1929, Charles De Visscher a exprimé l’avis que «dans les limites de la question qu’il a
posée à la Cour sur les aspects juridiques d’un différend, le Conseil [de la Société des
Nations] est forcément lié par l’avis rendu: cet avis n’est donc pas une consultation
ordinaire, semblable à celle que le Conseil pourrait demander à un comité de juristes, par
exemple, et qu’il serait libre par la suite d’écarter à volonté» 6. Quatre ans après, Georges
Scelle écrivait: «un avis consultatif est un exposé de droit; il est contradictoire, et donc
techniquement impossible de déclarer, qu’un sujet de droit […], quand il sait ce que le
droit dit au sujet d’un cas concret, peut refuser de s’y conformer» 7.
14. La doctrine a depuis confirmé que l’autorité des avis de la Cour les rend – dans la
pratique – contraignants pour l’organisation requérante. Ainsi qu’il a été observé, «un avis
consultatif n’est pas seulement un conseil ou une consultation […]. Il n’y a pas de
différence fondamentale entre la valeur intrinsèque du contenu de l’avis de la Cour et
celle d’un arrêt rendu par la même Cour, en ce sens que tous deux sont des décisions
judiciaires qui font autorité et tranchent des questions ayant été soumises à la Cour» 8.
Selon un autre théoricien, «que les avis consultatifs de la Cour soient formellement
contraignants pour d’autres ou non, ils le sont pour les organes des Nations Unies en ce
qui concerne le point de droit tranché par l’acte juridictionnel de la Cour. Dans la mesure
où ces organes sont obligés, ou décident délibérément, d’adopter une solution juridique
sur le point tranché par l’avis de la Cour, ce point de droit devient contraignant pour
l’organe requérant» 9.
15. Il est aussi largement prouvé que les États acceptent systématiquement les avis de la
Cour comme étant définitifs et s’abstiennent de mettre en question le raisonnement
juridique de la Cour. Les déclarations des représentants de la France et du Royaume-Uni
à l’Assemblée générale des Nations Unies en réaction à l’avis consultatif sur la réparation
des dommages subis en sont des illustrations éloquentes. Comme l’avait souligné
Mme Bastid, représentante de la France, «l’Assemblée avait demandé à la Cour
5 Cité dans Leland Goodrich, «The nature of the advisory opinions of the Permanent Court of International
Justice», American Journal of International Law, vol. 32, 1938, p. 739.
6 Ch. De Visscher, «Nature des avis consultatifs et limites de leur autorité», Recueil des cours de l’Académie de
La Haye, vol. 26, 1929, p. 27.
7 Georges Scelle, «Règles générales du droit de la paix», Recueil des cours de l’Académie de La Haye, vol. 46,
1933, p. 581.
8 Georges Abi-Saab, Les exceptions préliminaires dans la procédure de la Cour internationale, 1967, p.75.
9 R. Kolb, op. cit., p. 1184 (en anglais).
internationale de Justice de rendre un avis faisant autorité, car elle ne savait pas
exactement quelles conditions juridiques devaient être remplies pour que le Secrétaire
général puisse agir. L’Assemblée générale se trouve désormais dans la même situation
qu’une personne qui aurait demandé l’avis d’un juriste sur une question juridique et qui,
sur la foi de cet avis et sans le discuter, agirait conformément aux conclusions de cet
expert». M. Fitzmaurice, représentant du Royaume-Uni, avait quant à lui déclaré: «la
Sixième Commission ne pouvait ni approuver ni rejeter les conclusions de la Cour sur un
point de droit. Le gouvernement du Royaume-Uni se félicite vivement de l’avis de la Cour,
non parce que ses conclusions sont conformes à l’argumentation que le Royaume-Uni
avait présentée à la Cour, mais parce qu’il pense qu’elles sont dans l’intérêt supérieur des
Nations Unies elles-mêmes» 10.
16. Il y a lieu aussi de rappeler que dans sa résolution A/RES/73/295, adoptée le 22 mai 2019
pour donner suite à l’avis consultatif de la Cour sur l’affaire de l’archipel des Chagos,
l’Assemblée générale a considéré «que le respect de la Cour et des fonctions qu’elle
remplit, notamment dans l’exercice de la compétence consultative, est essentiel au droit
international, à la justice internationale et à un ordre international fondé sur l’état de
droit». Dans le même ordre d’idée, dans sa résolution A/RES/ES-10/15, adoptée à la suite
de l’avis consultatif sur l’édification d’un mur, l’Assemblée générale a «considér[é] que le
respect de la Cour et des fonctions qu’elle remplit est indispensable pour faire prévaloir
le droit et […] demand[é] à tous les États Membres de l’Organisation des Nations Unies
de s’acquitter de leurs obligations juridiques telles qu’elles sont énoncées dans l’avis
consultatif».
17. On ne saurait par ailleurs trop souligner l’autorité morale dont jouissent les avis
consultatifs de la Cour en raison de la stature des juges et de la haute estime dans laquelle
la Cour est tenue. La Cour a rendu des avis qui ont fait date et ont apporté une
contribution déterminante au développement du droit international dans de nombreux
domaines (par exemple, l’avis sur le génocide (1951), l’avis sur la réparation des dommages
subis (1949), l’avis sur la Namibie (1971), l’avis sur les armes nucléaires (1996)) 11. De
surcroît, les avis consultatifs sont souvent formulés en des termes qui ne laissent guère
de doute quant à l’autorité des exposés de droit qu’ils contiennent. Les avis consultatifs
sur l’édification d’un mur (2002) et l’archipel des Chagos (2019) sont des exemples
notables d’«avis» juridiques équivalant à des arrêts erga omnes auxquels il faut se
conformer, en particulier en ce qui concerne les devoirs et obligations des États Membres
de l’Organisation des Nations Unies en vertu du droit international 12.
18. Il est intéressant de noter que la principale distinction entre les arrêts et les avis
consultatifs, à savoir le fait que seuls les arrêts ont l’autorité de la chose jugée (ce qui
signifie que la décision est définitive et que la question ne peut être réexaminée), a
10 Cité dans Edvard Hambro, «The Authority of the Advisory Opinions of the International Court of Justice»,
disponible en anglais, International and Comparative Law Quarterly, vol. 3, 1954, pp. 16-17.
11 Au sujet de l’effet normatif des avis consultatifs de la Cour, voir Teresa Mayr, Jelka Mayr-Singer, «Keep the
wheels spinning: The contributions of advisory opinions of the international Court of Justice to the
development of International Law», ZaöRV, vol. 76, 2016, pp. 425-449.
12 Voir Richard Falk, «Towards Authoritativeness: The ICJ Ruling on Israel’s Security Wall», American Journal of
International Law, vol. 99, 2005, pp. 42-52.
récemment été remise en cause. Dans un arrêt de 2021 relatif à la délimitation de la
frontière maritime entre Maurice et les Maldives, le Tribunal international du droit de la
mer (TIDM) a fait valoir que l’avis consultatif de 2019 sur l’archipel des Chagos avait réglé
le différend en faveur de Maurice, marquant ainsi «le début d’une nouvelle ère dans
laquelle les cours et tribunaux internationaux reconnaissent les avis consultatifs de la
Cour comme des précédents qui ont l’autorité (normative) de régler un différend» 13.
Avant même l’arrêt du TIDM, cependant, il avait été souligné dans des publications
spécialisées qu’«un avis consultatif, comme un jugement dans une affaire contentieuse,
jouit de fait d’une sorte de statut de la chose jugée, étant donné qu’il n’existe pas de
mécanisme de recours contre l’un ou l’autre. En bref, bien qu’elle ait été souvent
soulignée, l’absence de l’autorité de la chose jugée, dans un avis consultatif, a des
incidences pratiques très négligeables» 14.
* * *
19. En conclusion, s’il était envisagé de soumettre à l’appréciation de la Cour la difficulté
d’interprétation de la convention no 87, il faudrait dûment prendre en compte le fait que,
pour les raisons exposées plus haut, l’avis de la Cour sur la ou les questions juridiques qui
lui seraient soumises serait contraignant pour l’Organisation et ses mandants tripartites.
Bien comprendre cet important paramètre serait une condition nécessaire à toute prise
de décision quant à la saisine de la cour. Pour citer une fois encore une étude d’une
importance fondamentale sur le fonctionnement de la Cour, «toute autre attitude
porterait atteinte à l’autorité et au prestige de la Cour. Sur le plan politique, les deux
choses sont une: soit l’organisation requérante est prête à suivre ou à être guidée par
l’avis consultatif de la Cour, auquel cas elle peut en demander un, soit elle ne l’est pas,
auquel cas elle ne doit pas le demander. C’est là une responsabilité politique majeure que
doit assumer quiconque envisage de demander un avis consultatif. Il faut de toute
évidence éviter d’embarrasser l’organe judiciaire suprême des Nations Unies» 15.
20. Comme l’a souligné la Présidente de la Cour dans une récente déclaration, «les États qui
adhèrent vraiment à l’état de droit doivent confier aux cours et tribunaux internationaux
le règlement judiciaire de leurs différends. Quand un État se soustrait au règlement
obligatoire d’un différend par une tierce partie, ses invocations de l’état de droit sonnent
creux. […] L’état de droit exige des États qu’ils appliquent systématiquement les décisions
des cours et des tribunaux qui sont obligatoires à leur égard, même s’ils ne sont pas
d’accord avec une décision». Il est difficile de concevoir pourquoi le principe de la
primauté du droit s’appliquerait différemment à l’OIT au sujet d’un avis consultatif rendu
par la CIJ à la demande de l’OIT elle-même et sur la base d’une clause obligatoire de
règlement des différends par une tierce partie figurant dans sa Constitution.
13 Niccolo Lanzoni, «The authority of ICJ advisory opinions as precedents: The Mauritius/ Maldives Case» (en
anglais), Italian Review of International and Comparative Law, 2022, p. 321.
14 R. Kolb, op. cit., p. 1183 (en anglais).
15 R. Kolb, op. cit., p. 1186 (en anglais).
Annexe – Compilation de déclarations relatives à l’effet juridique des avis consultatifs
demandés au titre de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT
I. Gouvernements
En 1922, dans le cadre des discussions du Conseil de la Société des Nations au sujet
du renvoi éventuel devant la Cour permanente de Justice internationale (ci-après «la CPJI»)
de la question concernant la Production agricole (1922), le délégué de la France a déclaré:
«il suffirait de s’en référer à la Cour, dont une décision formelle lèverait tout difficulté
ultérieure» (Bulletin officiel, 1922, vol. VI, no 11, p. 388).
En 1931, dans le contexte de la procédure consultative concernant la Ville libre de
Dantzig et l’OIT, le représentant de la Pologne a déclaré ce qui suit devant la CPJI: «[l]a
Pologne attend avec déférence l’opinion de la Cour; conformément à la réponse qui sera
donnée à la question posée par le Conseil de la Société des Nations, la Pologne entreprendra
les mesures nécessaires dictées par la situation qui, dès lors, se présentera» (Bulletin officiel,
1931, vol. XVI, no 2, p. 247).
En 1932, dans le cadre de la procédure consultative relative à l’Interprétation de la
convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes, le représentant du Royaume-
Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord a déclaré que «les États avaient des
interprétations différentes [...] et que, dans ces conditions, le gouvernement de Sa
Majesté proposait que le Conseil d’administration invite le Conseil de la Société des
Nations à obtenir un règlement faisant autorité auprès de la Cour» (Bulletin officiel, 1933,
vol. XVIII, no 2, p. 84).
En 1989, le membre gouvernemental des Pays-Bas de la Commission de l’application
des normes a souligné «la nécessité d’une coordination étroite entre les juristes du BIT et les
juristes nationaux [car] leur interprétation des normes de l’OIT peut sensiblement diverger,
aucune d’elle ne faisant d’ailleurs autorité puisque, on le sait, seule la Cour internationale de
Justice est compétente en la matière» (CIT, Compte rendu provisoire, 1989, p. 26/4,
paragr. 12).
En 1990, le membre gouvernemental de la Finlande, s’exprimant au nom des
gouvernements nordiques, a déclaré devant la Commission de l’application des normes
que «[s]elon la Constitution de l’OIT, la compétence pour donner des interprétations définitives
des conventions appartient à la Cour internationale de Justice» (CIT, Compte rendu
provisoire, 1990, p. 27/8, paragr. 31).
En 1991, le membre gouvernemental de la France a déclaré devant la Commission de
l’application des normes que «la Cour internationale de Justice est, en cas de besoin, le
recours suprême pour l’interprétation de la Constitution et des conventions» (CIT, Compte
rendu provisoire, 1991, p. 24/5, paragr. 21).
En 2010, le membre gouvernemental du Venezuela, s’exprimant au nom du Groupe
des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), a exprimé l’avis suivant: «la
commission d’experts interprète des conventions alors que la Constitution a attribué cette
compétence à la Cour internationale de Justice» (CIT, Compte rendu provisoire, 2010,
Compte rendu provisoire 16, Rapport de la Commission de l’application des normes,
première partie, paragr. 64).
En 2014, le délégué gouvernemental du Venezuela à la Conférente internationale du
Travail a déclaré ce qui suit en séance plénière: «[l]es dispositions du paragraphe 1 de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT sont claires et catégoriques quant au règlement des
différends, à savoir qu’il faut se tourner vers la Cour internationale de Justice pour qu’elle
interprète une fois pour toutes la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical, 1948, et qu’elle émette un avis contraignant sur la question faisant débat» (CIT,
Compte rendu des travaux, 2014, p. 17/12).
II. Employeurs
En 1926, dans le cadre de la procédure consultative concernant le Travail personnel du
patron (1926), le représentant de l’Organisation internationale des employeurs industriels
a déclaré ce qui suit devant la CPIJ: «En vain viendrait-on dire que la Cour ne peut donner ici
qu’un avis consultatif. Il est évident qu’ici, comme dans d’autres domaines, la Cour exerce la
fonction judiciaire consistant à interpréter le droit et que son avis doit être considéré comme
exprimant le droit en vigueur» (Bulletin officiel, 1926, vol. XI, no 5, p. 221).
En 1989, le membre employeur de la Suède de la Commission de l’application des
normes a déclaré ce qui suit: «Un seul organisme – la Cour internationale de Justice – est
habilité à donner des interprétations des conventions de l’OIT qui font foi. Il a rarement été fait
recours à cette instance, probablement parce que la manière dont le système fonctionne a
largement donné satisfaction. Il faudrait cependant avoir toujours présent à l’esprit la fonction
de suprême arbitre de la Cour internationale de Justice» (CIT, Compte rendu des travaux,
1989, p. 26/6, paragr. 21).
En 1992, le porte-parole du groupe des employeurs à la Commission de l’application
des normes a affirmé qu’«en vertu de la Constitution de l’OIT, seule la Cour internationale de
justice [pouvait] donner une interprétation définitive d’une convention» (CIT, Compte rendu
des travaux, 1992, pp. 27/4 et 27/5, paragr. 17).
En 1993, le porte-parole du groupe des employeurs a fait observer que «tout organe
de contrôle ayant à examiner si un État remplit ses obligations en vertu d’une convention a[vait]
une tâche d’interprétation à mener, bien qu’une seule instance -– la Cour internationale de
justice – ait autorité pour lier les parties» (CIT, Compte rendu des travaux, 1993, p. 25/4,
paragr. 19).
En 1994, le porte-parole des employeurs a fait remarquer que «[s]eule la Cour
internationale de Justice [pouvait] donner des interprétations contraignantes» (CIT, Compte
rendu des travaux, 1994, p. 25/9, paragr. 21).
En 1998, le porte-parole des employeurs a réaffirmé que, «[d]’après la Constitution de
l’OIT, seule la Cour internationale de Justice [était] habilitée à donner des interprétations
définitives» (CIT, Compte rendu des travaux, 1998, p. 18/8, paragr. 17).
En 1999, le porte-parole des employeurs est parvenu avec regret à la conclusion
suivante: «C’est donc une bien maigre consolation de rappeler qu’une interprétation
contraignante de textes juridiques ne peut être faite que par la seule Cour internationale de
Justice. En l’absence de toute décision de la part de cette instance, il n’existe donc pas
d’interprétation contraignante d’une manière générale de l’une et l’autre convention» (CIT,
Compte rendu des travaux, 1999, pp. 23/39 et 23/40, paragr. 114).
En 2001, le vice-président employeur de la Commission de l’application des normes a
estimé que la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations «ne [devait] pas créer de jurisprudence et se croire infaillible dans
l’interprétation des normes [et qu’en] vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, cette
compétence [relevait] exclusivement de la Cour internationale de justice» (CIT, Compte rendu
des travaux, 2001, p. 22/4).
En 2002, le porte-parole des employeurs à la Commission de l’application des normes
a souligné que «[s]eule la Cour internationale de justice avait autorité pour émettre des
interprétations contraignantes de conventions et recommandations, ce qui découl[ait]
clairement de l’article 37 de la Constitution» (CIT, Compte rendu des travaux, 2002, Compte
rendu provisoire no 28, Rapport de la Commission de l’application des normes, Première
partie, p. 28/13, paragr. 45).
En 2006, le représentant des employeurs à la Commission de proposition a déclaré ce
qui suit: «Un avis consultatif de la Cour internationale de Justice est un résultat qui pourrait
être obtenu à relativement court terme et il s’agirait d’une décision contraignante dont
l’exécution pourrait être assurée par le Conseil de sécurité des Nations Unies» (CIT, Compte
rendu des travaux, 2006, Compte rendu provisoire no 3-2, Deuxième rapport de la
Commission de proposition, p. 3-2(&Corr.)/4).
En 2012, le porte-parole des employeurs à la Commission de l’application des normes
a souligné que, «[c]onformément à l’article 37 de la Constitution de l’OIT, seule la Cour
internationale de Justice [pouvait] donner une interprétation définitive des conventions
internationales du travail» (CIT, Compte rendu des travaux, 2012, Compte rendu provisoire
no 19(Rev.), Rapport de la Commission de l’application des normes, Première partie,
paragr. 82).
III. Travailleurs
En 1932, dans le cadre de la procédure consultative relative à la convention sur le
travail de nuit (femmes), le représentant de la Confédération internationale des syndicats
chrétiens a déclaré qu’il attendait de la Cour «la vérité juridique sur le texte en question, plus
encore: la méthode d’interprétation des conventions qui [serait] le guide des États, de
l’Organisation internationale du Travail et des organisations professionnelles dans tout le
domaine des conventions» (Bulletin officiel, 1933, vol. XVIII, no 2, p. 147).
En 1991, le porte-parole des travailleurs à la Commission de l’application des normes
a déclaré que «[p]our les membres travailleurs, les évaluations de cette commission ainsi que
les vues exprimées par les experts n’[avaient] pas force de loi, bien que les vues de la
commission d’experts, du fait de sa composition et de ses méthodes de travail, soient
généralement admises sous réserve d’une interprétation définitive de la Cour internationale de
Justice». (CIT, Compte rendu des travaux, 1991, p. 24/4, paragr. 16).
En 1992, le membre travailleur de la Finlande à la Commission de l’application des
normes a déclaré ce qui suit: «jusqu’à une période récente, les interprétations faites par la
commission d’experts ont été considérées comme liant les États Membres jusqu’à ce qu’une
décision finale de la Cour internationale de Justice intervienne» (CIT, Compte rendu des
travaux, 1992, p. 27/5, paragr. 19).
IV. Commission d’experts
En 1977, la Commission d’experts a déclaré que, aux termes «de son mandat, la
commission n’[était] pas appelée à donner une interprétation des conventions, cette
compétence étant confiée à la Cour internationale de Justice par l’article 37 de la Constitution».
(CIT, 1977, Rapport III, Partie 4A, Rapport de la commission d’experts, étude d’ensemble,
paragr. 32).
La commission a réitéré que «son mandat ne lui [prescrivait] pas de donner des
interprétations définitives des conventions, cette compétence revenant exclusivement à la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT» en 1987, 1990,
1991, 2006 et 2013 (CIT, 1987, Rapport III, Partie 4A, paragr. 21; CIT, 1990, Rapport III,
Partie 4A, paragr. 7; CIT, 1991, Rapport III, Partie 4A, paragr. 9; CIT, 2006, Rapport III,
Partie 1A, p. 3; CIT, 2013, Rapport III, Partie 1A, paragr. 26).
En 1991, la commission a noté qu’«[il était] essentiel pour le système de l’OIT que les vues
qu’elle [était] appelée à exprimer à l’occasion de l’exercice desdites fonctions, dans les
conditions ci-dessus rappelées, soient réputées valables et communément admises, sous
réserve du pouvoir que [détenait] la Cour internationale de Justice qui, seule, [avait]
compétence pour l’interprétation définitive des conventions» (CIT, 1991, rapport III, Partie 4A,
paragr. 12).
V. Le Bureau
En 1922, dans le cadre de la toute première demande d’avis consultatif présentée par
l’OIT, le Directeur général du Bureau, M. Albert Thomas, a déclaré que, «[p]our trancher
des conflits de cette nature, il a paru à notre Organisation, et il a paru aux Gouvernements qu’il
n’était pas d’autorité plus haute ni plus certaine, que la Cour permanente de Justice
internationale» (Bulletin officiel, 1922, vol. VI, p. 73).
En 1922, dans son mémoire relatif à la Compétence de l’OIT pour la réglementation
internationale des conditions de travail des personnes employées dans l’agriculture, le Bureau
a indiqué que, «jusqu’à la création de la Cour permanente de Justice internationale et à
l’acceptation de sa juridiction obligatoire, le droit de donner, d’une convention internationale
quelconque, une interprétation officielle, participant de la force obligatoire de l’acte lui-même
auquel elle s’incorpore, appartenait exclusivement aux États signataires» (Bulletin officiel,
1922, vol. VI, p. 329).
À la suite du prononcé de l’avis consultatif de la Cour, une lettre fut adressée à
plusieurs gouvernements pour les informer que le «débat (…) [avait] trouvé sa conclusion
dans la décision de la Cour permanente de Justice internationale» (Bulletin officiel, 1923,
vol. VIII, nos 1-2, p. 2).
En 1926, dans son mémoire en la procédure relative au Travail personnel du patron, le
Bureau a apporté la précision suivante: «Le considérant qui accompagne la question soumise
à la Cour ne saurait être entendu comme une affirmation préjugeant l’opinion que la Cour est
appelée à émettre; il va sans dire que, tout au contraire, le Conseil d’administration du Bureau
international du Travail s’incline par avance devant la décision de la Cour» (Bulletin officiel,
1926, vol. XI, no 5, p. 180).
En 1930, dans son mémoire en la procédure relative à la Ville libre de Dantzig, le Bureau
a déclaré qu’il «ne se [croyait] pas autorisé à formuler à ce sujet une conclusion quelconque,
et [qu’]il [attendait] avec déférence la réponse de la Cour, à laquelle l’Organisation
internationale du Travail ne [manquerait] pas de conformer son attitude» (Bulletin officiel,
1931, vol. XVI, no 2, p. 109).
En 1932, lors de l’exposé oral qu’il a présenté dans le cadre de la procédure relative à
la Convention concernant le travail de nuit des femmes, le représentant de l’OIT a déclaré:
«L’objet de la présente procédure devant la Cour est d’obtenir une interprétation authentique.
Une fois cette interprétation donnée, dans un sens ou dans un autre, elle mettra un terme ipso
facto à toutes les divergences et inégalités, étant donné que les États liés par la convention
seront tenus de prendre les mesures nécessaires pour donner effet à l’interprétation formulée
par la Cour» (Bulletin officiel, 1933, vol. XVIII, no 2, p. 116 (en anglais)).
En 1969, le représentant du Conseiller juridique a expliqué aux membres de la
Commission des programmes pour la jeunesse que, «selon l’article 37 de la Constitution,
seule la Cour internationale de Justice [avait] toute autorité pour interpréter les conventions»
(CIT, Compte rendu des travaux, 1969, p. 756, paragr. 59).
En 1978, le Conseiller juridique de la Conférence, exposant son avis sur l’admission
éventuelle de la Namibie en qualité de Membre de l’OIT, a déclaré que «seule la Cour
internationale de Justice [était], aux termes de l’article 37 de la Constitution, compétente pour
donner une réponse autorisée» sur toute question ou difficulté d’interprétation de la
Constitution (CIT, Compte rendu des travaux, 1978, p. 24/22).
Dans son rapport à la 70e session de la Conférence en 1984, le Directeur général a
rappelé la position de la commission d’experts, à savoir qu’«il incombe à la Cour
internationale de Justice, en vertu de l’article 37 de la Constitution, de donner une interprétation
des conventions. Si, en raison de la qualité et de la compétence des membres de la commission
d’experts, les avis de cette dernière méritent la plus grande attention et le plus grand respect, et
si, dans la grande majorité des cas, ils sont acceptés par les gouvernements concernés, ils n’ont
toutefois pas force de loi. La commission n’est pas un tribunal habilité à rendre des décisions liant
les États Membres» (CIT, Rapport du Directeur général, 1984, p. 32).
En 1990, le représentant du Secrétaire général auprès de la Commission de l’application
des normes a indiqué que les avis de la commission d’experts «n’[avaient] pas l’autorité de la
chose jugée en ce qui [concernait] l’interprétation dont ils [pouvaient] éventuellement procéder
[et qu’]une telle autorité s’[attachait] exclusivement aux décisions de la Cour internationale de
Justice» (CIT, Rapport du Directeur général, 1990, p. 27/9, paragr. 35).
En 2010, la représentante du Secrétaire général auprès de la Commission de
l’application des normes a fait valoir que la Cour internationale de Justice était «le seul
organe actuellement compétent pour fournir l’interprétation authentique prévu par l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution» (CIT, Compte rendu des travaux, 2010, Compte rendu
provisoire no 16, Rapport de la Commission de l’application des normes, première partie,
paragr. 33).
(Source: GB.347/INS/5, paragr. 13, note de bas de page 11)
Document no 21
BIT, Note relative au fondement juridique d’une requête
pour avis consultatif, septembre 2023
Fondement juridique d’une requête pour avis consultatif
1. Le renvoi d’une question devant la Cour internationale de Justice (ci-après «la CIJ» ou «la
Cour») trouve son fondement juridique dans deux dispositions: l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution, et l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord conclu entre les Nations Unies
et l’Organisation internationale du Travail en 1946 (ci-après «l’Accord ONU-OIT»).
2. L’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, qui reprend l’article 423 du Traité de
Versailles, prévoit que toutes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la
Constitution ou d’une convention internationale du travail seront soumises à
l’appréciation de la CIJ. Telle qu’elle est libellée, cette disposition semble indiquer que le
renvoi des difficultés d’interprétation devant la CIJ est obligatoire et que l’avis de la Cour
est définitif et contraignant (voir GB.322/INS/5, paragr. 27).
3. L’article IX, paragraphe 2, de l’Accord ONU-OIT dispose: «[l]’Assemblée générale autorise
l’Organisation internationale du Travail à demander des avis consultatifs à la Cour
internationale de Justice sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de son
activité, à l’exception de celles concernant les relations réciproques entre l’Organisation
internationale du Travail et [l’Organisation] des Nations Unies ou d’autres institutions
spécialisées». Cette autorisation était nécessaire eu égard à l’article 96, paragraphe 2, de
la Charte des Nations Unies, qui prévoit que seuls les organes de l’Organisation des
Nations Unies et les institutions spécialisées qui peuvent, à un moment quelconque,
recevoir de l’Assemblée générale une autorisation à cet effet ont également le droit de
demander à la Cour des avis consultatifs sur des questions juridiques qui se poseraient
dans le cadre de leur activité. De même, aux termes de l’article 65 du Statut de la CIJ, «[l]a
Cour peut donner un avis sur toute question juridique, à la demande de tout organe ou
institution qui aura été autorisé par la Charte des Nations Unies ou conformément à ses
dispositions à demander cet avis».
4. L’historique de la négociation de l’Accord ONU-OIT confirme que l’intention était de
garantir la possibilité de renvoyer devant la CIJ des questions juridiques dépassant le
cadre strict des questions relatives à l’interprétation de la Constitution de l’OIT ou des
conventions internationales du travail. Conformément au mandat défini par la
Conférence internationale du Travail dans sa résolution du 3 novembre 1945 relative aux
relations entre l’OIT et les Nations Unies, une délégation chargée des négociations a
rédigé un projet d’accord que le Président du Conseil d’administration a signé en son nom
le 30 mai 1946 (Bulletin officiel, vol. XXVII, no 3, p. 972). Dans le cadre des discussions sur
cet accord qui ont été menées à la session de la Conférence de 1946, le président de la
Délégation pour les questions constitutionnelles a précisé que l’accord donnait une
autorisation générale et n’exigeait pas qu’une demande spéciale soit introduite chaque
fois qu’un avis serait demandé (CIT, 29e session, 1946, Bulletin officiel, p. 896). Il n’a à
aucun moment été fait mention de l’article 37 ou de la nécessité d’aligner l’Accord
ONU-OIT sur la disposition pertinente de la Constitution. Si telle avait été l’intention, les
rédacteurs auraient tout simplement fait référence à l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution.
5. La diversité des questions juridiques pouvant être renvoyées devant la CIJ a été confirmée
par la Cour dans un avis consultatif datant de 1956, dans lequel celle-ci a déclaré qu’une
institution spécialisée des Nations Unies dûment autorisée à cette fin «a[vait] le pouvoir
général de demander à la Cour des avis consultatifs sur les questions qui se posent dans
le cadre de son activité» (Jugements du Tribunal administratif de l’OIT sur requêtes contre
l’UNESCO, avis consultatif, C.I.J. Recueil 1956, p. 99).
6. La Cour a ultérieurement précisé que «trois conditions sont requises pour fonder la
compétence de la Cour lorsqu’une requête pour avis consultatif lui est soumise par une
institution spécialisée: l’institution dont émane la requête doit être dûment autorisée,
conformément à la Charte, à demander des avis à la Cour; l’avis sollicité doit porter sur
une question juridique; et cette question doit se poser dans le cadre de l’activité de
l’institution requérante» (voir Licéité de l’utilisation des armes nucléaires par un État dans
un conflit armé, avis consultatif, C.I.J Recueil1996, p. 71–72).
7. Il est donc clair que le champ des questions juridiques pouvant être adressées à la CIJ en
vertu de l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord ONU-OIT s’étend bien au-delà des questions
d’interprétation visées à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution.
8. Cette dualité du fondement juridique, qui permet de renvoyer devant la CIJ aussi bien des
questions d’interprétation que des questions juridiques se posant dans le cadre de
l’activité de l’organisation requérante, n’a rien d’inhabituel dans le système des Nations
Unies; on peut notamment citer les exemples suivants:
• L’article 75 de la Constitution de l’OMS et l’article X, paragraphe 2, de l’Accord
conclue entre les Nations Unies et l’OMS en 1948;
• L’article XVII, paragraphe 2, de l’Acte constitutif de la FAO et l’article IX,
paragraphe 2, de l’Accord conclu entre les Nations Unies et la FAO en 1947;
• L’article XIV, paragraphe 2, de l’Acte constitutif de l’UNESCO et l’article XI,
paragraphe 2, de l’Accord entre les Nations Unies et l’UNESCO de 1947.
9. Il est intéressant de noter que, dans le cas de certaines institutions spécialisées, la
disposition pertinente de l’accord régissant leurs relations avec les Nations Unies est
expressément énoncée dans leur Constitution; on peut citer à titre d’exemple les
articles 75 et 76 de la Constitution de l’OMS, qui se lisent comme suit:
Article 75
Toute question ou différend concernant l’interprétation ou l’application de cette
Constitution, qui n’aura pas été réglé par voie de négociation ou par l’Assemblée
de la Santé, sera déféré par les parties à la Cour internationale de Justice
conformément au Statut de ladite Cour, à moins que les parties intéressées ne
conviennent d’un autre mode de règlement.
Article 76
Sous le couvert de l’autorisation de l’Assemblée générale des Nations Unies ou
sous le couvert de l’autorisation résultant de tout accord entre l’Organisation et
les Nations Unies, l’Organisation pourra demander à la Cour internationale de
Justice un avis consultatif sur toute question juridique éventuelle du ressort de
l’Organisation.
De même, l’article XVII de l’Acte constitutif de la FAO dispose:
Article XVII
1. Toute question ou tout litige relatif à l’interprétation du présent acte, et
n’ayant pas été réglé par la Conférence, est porté devant la Cour
internationale de Justice dans les conditions prévues par le Statut de la Cour,
ou devant tout autre organisme que désigne la Conférence.
2. Toute requête d’avis consultatif à l’occasion des activités de l’Organisation est
présentée à la Cour internationale de Justice dans les conditions prévues par
tous accords conclus entre l’Organisation et les Nations Unies.
10. Les institutions spécialisées ont invoqué ce double fondement juridique dans le passé.
Par exemple, la requête pour avis consultatif concernant la licéité de l’utilisation des
armes nucléaires par un État dans un conflit armé était fondée sur l’article 76 de la
Constitution de l’OMS et sur l’article X, paragraphe 2, de l’accord entre les Nations Unies
et l’OMS. De même, dans sa requête pour avis consultatif concernant la composition du
Comité de la Sécurité maritime, l’Organisation intergouvernementale consultative de la
Navigation maritime a invoqué l’article 56 de son acte constitutif ainsi que l’article IX de
l’accord régissant ses relations avec l’Organisation des Nations Unies.
11. Si le contenu de l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord ONU-OIT n’a pas été intégré dans
l’article 37 de la Constitution de l’OIT, c’est probablement parce que, contrairement à la
plupart des institutions du système des Nations Unies, qui ont été créées en même temps
que l’ONU, l’OIT existait déjà au moment de la création de l’ONU. La Constitution de l’OIT
n’a jamais été modifiée dans le but d’aligner le contenu de son article 37 sur celui des
dispositions pertinentes de la Charte des Nations Unies ou du Statut de la CIJ, peut-être
parce que, à l’époque, l’attention était focalisée sur l’ajout d’un nouveau paragraphe dans
l’article 37 tendant à autoriser l’institution d’un tribunal interne.
12. En conclusion, l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution n’est pas le seul fondement
juridique du renvoi d’une question ou d’un différend juridique pour avis consultatif de la
CIJ. L’Accord ONU-OIT, lu conjointement avec la Charte des Nations Unies et le Statut de
la CIJ, habilite l’OIT à renvoyer devant la Cour des questions juridiques autres que des
questions relatives à l’interprétation de la Constitution ou des conventions, et reconnaît
la compétence de la Cour pour examiner ces questions 1.
1 Accessoirement, d’autres textes prévoient également la saisine de la CIJ, notamment la section 32 de la Convention de
1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, qui dispose que toute contestation portant sur
l’interprétation ou l’application de la Convention sera portée devant la CIJ pour avis consultatif et que l’avis de la Cour sera
accepté par les parties comme décisif. On peut également citer l’ancien article XII du Statut du Tribunal administratif de
l’OIT, en vertu duquel toute organisation ayant reconnu la compétence du Tribunal qui souhaitait contester la validité
d’une décision du Tribunal au motif que celle-ci était foncièrement viciée sur le plan procédural pouvait le faire en
demandant un avis consultatif à la CIJ.
Document no 22
Commentaires du secrétariat des employeurs sur les
notes du BIT, octobre 2023
1
[Traduction non officielle]
Commentaires préliminaires du Secrétariat des Employeurs sur les notes
complémentaires sur les avis consultatifs de la CIJ préparées par le Bureau
Après un examen approfondi des trois documents supplémentaires du Bureau communiqués
aux mandants tripartites de l'OIT le 20 octobre 2023, le secrétariat des employeurs doit
malheureusement conclure que les informations et l'analyse qu'ils contiennent sont
juridiquement incohérentes et peuvent être fortement trompeuses pour les raisons suivantes.
Les commentaires sur ces trois documents seront abordés séparément ci-dessous:
1. L'effet juridique contraignant des avis consultatifs de la CIJ
Le paragraphe 3 de ce document indique que "les avis consultatifs relatifs à l'interprétation de
la Constitution de l'OIT ou d'une convention internationale du travail ont force obligatoire
parce que le paragraphe 1 de l'article 37 le prévoit expressément". Nous considérons que cet
argument n'est pas juridiquement cohérent.
L'argumentation de l'Office semble être que, comme indiqué au paragraphe 5, si les avis
consultatifs de la CIJ ne sont pas contraignants, sauf dans de rares cas, "il appartient aux
institutions ou organes internationaux qui les ont demandés de décider, par les moyens qui
leur sont propres, de la suite à réserver à ces avis" et que l'OIT, par le biais de l'article 37(1) de
la Constitution de l'OIT, a déterminé pour ses mandants la nature contraignante des avis
consultatifs de la CIJ.
Il convient toutefois de noter que l'article 37, paragraphe 1, est muet sur le caractère
contraignant des avis consultatifs de la CIJ. L'article 37(1) se lit comme suit : “Toutes questions
ou difficultés relatives à l'interprétation de la présente Constitution et des conventions
ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution, seront soumises à
l'appréciation de la Cour internationale de Justice. ». Cette disposition ne prévoit nulle part
que les avis consultatifs de la CIJ sont juridiquement contraignants.
En particulier, aucun effet juridiquement contraignant pour un avis consultatif de la CIJ ne
peut être déduit du terme "décision". Le terme "decision" [utilisé dans la version anglaise] de
l'article 37, paragraphe 1, semble être utilisé comme un terme générique pour tous les types
de prononcés qui peuvent être obtenues de la CIJ en vertu de cette disposition, qui ne sont
pas seulement les avis consultatifs. Par exemple, l'article 37(1) peut également être invoqué
par un État membre individuel pour obtenir une décision en cas de différend sur
l'interprétation d'une convention avec un autre État membre. Une "décision" de la CIJ, qui
dans ce cas prendrait la forme d'un arrêt dans la procédure contentieuse, serait en effet
contraignante1.
1 1 OIT, Conférence internationale du travail, compte rendu provisoire 2, quatre-vingt-quinzième session,
Genève, 2006, p. 2/8, premier point.
2
En outre, l'article 37, paragraphe 2, dispose que "Tous arrêts ou avis consultatifs de la Cour
internationale de Justice lieront tout tribunal institué en vertu du présent paragraphe".
L'absence de formulation correspondante dans l'article 37(1) permet de conclure que le
caractère contraignant d'un avis consultatif de la CIJ est limité à tout tribunal établi en vertu
de l'article 37(2), et que les avis consultatifs de la CIJ n'ont pas d'effet contraignant dans le cas
de l'article 37(1). C'est également l'avis de l'ancien président de la CIJ, Roberto Ago, qui déclare
que : En ce qui concerne cependant l'OIT, le tribunal en question n'a jamais vu le jour et toute
demande du Conseil d'administration de l'OIT à la Cour internationale de justice ne pourrait
donc déboucher que sur un avis consultatif qui, en tant que tel, n'aurait pas d'effet décisif..."
22.
Troisièmement, étant donné la nature délicate de la question d'un éventuel effet contraignant
des avis consultatifs de la CIJ sur la souveraineté nationale, les exigences de clarté et d'absence
d'ambiguïté de la formulation des dispositions pertinentes devraient être assez élevées.
Comme indiqué ci-dessus, l'article 37, paragraphe 1, n'est pas clair et sans ambiguïté à cet
égard.
Quatrièmement, il est important de noter que le Bureau lui-même, dans des documents
préparés pour le Conseil d'administration en 2006 et 2007, a remis en question l'effet
contraignant des avis consultatifs de la CIJ pour l'OIT et ses mandants:
« Cependant, outre la question touchant à l’interprétation de la convention, il en est
d’autres que le Conseil d’administration souhaitera peut-être étudier pour le cas où un
avis consultatif serait demandé à la Cour internationale de Justice. La première
concernerait l’interprétation de la Constitution de l’OIT. Dans la mesure où le Conseil
d’administration décide de soumettre toute question d’interprétation à la Cour
internationale de Justice, il serait logique de lui soumettre la question complémentaire
de savoir si l’interprétation demandée sous forme d’avis consultatif pourrait ou devrait
être reconnue comme contraignante par tous les Membres en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution. Cette question, qui a posé un problème théorique
pendant un certain temps, revêtirait du coup une grande importance pratique au cas où
le Conseil d’administration déciderait d’adresser à la Cour une demande d’avis
consultative »33.
« Il serait également possible d’examiner si la Cour pourrait, sur le fondement de l’article
37, paragraphe 1, donner un avis consultatif en interprétation ayant force obligatoire
pour l’OIT et les Etats parties à la convention concernée » 4.
Comme indiqué ci-dessus, il semble que le Bureau lui-même et l'ancien président de la CIJ
étaient beaucoup plus prudents lorsqu'il s'agissait de la question de l'éventuelle nature
contraignante des avis consultatifs de la CIJ. Dans ces conditions, les employeurs doutent de
l'efficacité des avis consultatifs de la CIJ pour résoudre les différends relatifs à l'interprétation
des conventions de l'OIT avec une certitude juridique définitive.
En tout état de cause, avant que la CIJ ne soit saisie du différend sur le droit de grève en vertu
2 Roberto Ago, “Binding” Advisory Opinions of the International Court of Justice, p.449, note 44.
3 OIT, Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention
(n° 29) sur le travail forcé, 1930, GB 298, mars 2007, INS/5/2, para. 5.
4 OIT, Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention
(n° 29) sur le travail forcé, 1930, GB 297, novembre 2006, INS 8/2, paragraphe 9.
3
de l'article 37, paragraphe 1, la Conférence internationale du travail (CIT) devrait
nécessairement avoir l'occasion de discuter et de clarifier l'effet contraignant d'une éventuelle
saisine de la CIJ.
2. Procédures consultatives de la CIJ - Jurisprudence pertinente
Quant à ce document du Bureau, le Secrétariat des Employeurs estime qu'il est peu pertinent
pour la compréhension des avis consultatifs de la CIJ aux fins de l'OIT. La plupart des avis
consultatifs de la CIJ présentées ici concernent des questions juridiques qui n'impliquent pas
l'interprétation des conventions.
Il convient également de noter que l'OIT est unique et différente de l'ONU et des autres
organisations de l'ONU en ce sens que ses organes sont composés non seulement de
représentants des gouvernements, mais aussi de représentants des employeurs et des
travailleurs. La compétence de la CIJ en matière d'avis consultatif concernant l'ONU et les
autres organisations de l'ONU doit donc être considérée avec une grande prudence pour les
besoins de l'OIT.
En outre, si tous les avis consultatifs de la CIJ sollicités par l'OIT dans le passé ont été suivis de
décisions consensuelles de la CIT ou du Conseil d'administration, il n'existe pas d'automatisme
permettant de déclarer les avis consultatifs de la CIJ juridiquement contraignants.
3. Base juridique de la demande d'avis consultatif
Le Secrétariat des employeurs relève dans ce document que l'article IX(2) de l'Accord de 1946
sur les relations entre l'ONU et l'OIT a une portée plus large que l'article 37(1) de la
Constitution de l'OIT en ce sens qu'il autorise l'OIT à demander des avis consultatifs à la CIJ
"sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de son activité" autres que les
questions concernant les relations mutuelles des organisations et de l'ONU ou d'autres
institutions spécialisées.
La raison pour laquelle le troisième document a été produit dans le contexte du différend sur
l'interprétation du droit de grève dans la C87 n'est pas tout à fait claire. Les avis de la CIJ émis
sur la base de l'article IX(2) de l'accord de 1946 sur les relations entre l'ONU et l'OIT ne sont
en aucun cas juridiquement contraignants. Cette disposition est totalement silencieuse sur la
nature contraignante des avis consultatifs de la CIJ et la CIJ a elle-même déclaré qu'ils n'étaient
pas juridiquement contraignants5.
Si l'article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l'OIT prévoit une base juridique pour saisir
la CIJ d'une question juridique ou d'un différend concernant l'interprétation d'une convention,
il existe d'autres moyens de résoudre les questions juridiques et les différends en matière
d'interprétation en utilisant les moyens d'action internes existants de l'OIT. En particulier, la
Conférence internationale du travail (CIT), l'organe suprême de l'OIT, a la compétence et
l'autorité juridique pour régler les différends liés à l'interprétation des conventions, par
5 CIJ, Compétence en matière consultative « Contrairement aux arrêts, et sauf les cas rares où il est expressément
prévu qu'ils auront force obligatoire (comme le font, par exemple, la convention sur les privilèges et immunités
des Nations Unies, la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées des Nations Unies et
l'accord de siège entre l'Organisation des Nations Unies et les Etats-Unis d'Amérique), les avis consultatifs de la
Cour n'ont pas d'effet contraignant ».
4
l'adoption de conventions révisées ou l'adoption de protocoles.
Compte tenu de la complexité et de la nature à plusieurs niveaux du conflit d'interprétation
sur la portée et les limites du droit de grève, la CIT apparaît également comme l'autorité la
plus appropriée pour régler ce conflit, car elle permet à tous les mandants de l'OIT de
contribuer activement au processus et de s'y engager. En fait, c'est le seul organe qui peut
garantir que toute solution sera fondée sur un consensus ou bénéficiera d'un large soutien
des mandants de l'OIT, ce qui renforcera la sécurité juridique souhaitée.
Document no 23
OIE, Commentaires sur le rapport d’information préparé
par le BIT intitulé «Suite à donner à la demande du groupe
des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que
la difficulté d’interprétation de la convention no 87
concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en
vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution»,
datés du 6 octobre 2023
6 octobre 2023
Commentaires sur le rapport d’information préparé par le Bureau intitulé "Suite à donner à
la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence
à l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de
la Constitution de l’OIT".
Table des matières
I. Introduction ................................................................................................................. 3
II. Remarques générales .................................................................................................. 4
III. Comprendre la difficulté d’interprétation de longue date ............................................ 5
IV. La position des employeurs sur le droit de grève dans le contexte de la C87 ................ 5
V. Les éléments centraux du différend ............................................................................ 8
VI. Le mandat de la CEACR ...............................................................................................13
VII. Les questions à soumettre à la Cour ...........................................................................15
VIII. Prochaines étapes possibles ......................................................................................15
IX. Conclusion ...................................................................................................................15
[Traduction non officielle]
2
I. Introduction
Le 31 août 2023, le Directeur général de l'OIT a envoyé à tous les États membres de l'OIT, avec
une invitation à soumettre des commentaires avant le 6 octobre 2023, le rapport
d'information préparé par le Bureau intitulé « Suite à donner à la demande du groupe des
travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation de la
convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de
l’OIT ».
En sa qualité de secrétariat du groupe des employeurs à l'OIT, l'Organisation internationale
des employeurs (OIE) soumet par la présente ses commentaires préliminaires sur le rapport
d’information. Nous notons qu'une version légèrement révisée du rapport d’information a été
publiée sur le site web du Conseil d'administration du BIT le 18 septembre 2023 en tant
qu'annexe à un document pour la 349e bis session (spéciale) du Conseil d'administration,
prévue pour le 10 novembre 20231. En outre, nous nous réservons la possibilité d'actualiser
et de compléter notre position à la lumière du second contenu du rapport d’information que
le Bureau prépare actuellement pour la 349e session (spéciale) du Conseil d'administration
demandée par les employeurs et prévue pour le 11 novembre, ainsi qu'à la lumière de toute
consultation ultérieure et du retour du groupe des employeurs et des discussions qui auront
lieu lors des sessions spéciales des 10 et 11 novembre 2023.
Premièrement, l'OIE considère que le titre du rapport cité en référence, qui fait référence à
« 34 gouvernements », est trompeur. L'article 7(8) de la Constitution2 et le paragraphe 3.2.2
du Règlement du Conseil d'administration3, sur lesquels le groupe des travailleurs s'appuie
pour demander une session spéciale, se réfèrent uniquement aux gouvernements représentés
au sein du Conseil d'administration. Nous notons que la première version du rapport
d’information envoyée par le Bureau le 31 août 2023 contient à l'annexe I les lettres de soutien
reçues des gouvernements. Cependant, la lettre de l'Union européenne (UE) et de ses États
membres, de l'Islande et de la Norvège n'a été signée que par le Représentant permanent de
l'UE auprès des Nations Unies (NU) à Genève et par le Représentant permanent de l'Espagne
auprès des Nations unies à Genève. Il n'y a pas eu de signatures et donc pas de « demandes
écrites » de la part d'autres États membres de l'UE. Outre le fait que l'UE n'est pas un État
membre de l'OIT, tous les États membres de l'UE et les pays de l'AELE (Islande) ne sont pas
membres du groupe gouvernemental du Conseil d'administration4. De même, l'Afrique du Sud,
1 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, GB349bis/INS/1,
18 septembre 2023
2 L'article 7(8) de la Constitution de l'OIT dispose que : « Le Conseil d'administration établira son règlement et se
réunira aux époques qu'il fixera lui-même. Une session spéciale devra être tenue chaque fois que seize personnes
faisant partie du Conseil auront formulé une demande écrite à cet effet ».
3 OIT, Règlement du Conseil d’administration, par. 3.2.2. se lit comme suit :« Sans préjudice de ce qui est stipulé
au dernier alinéa de l’article 7 de la Constitution de l’Organisation, le Président peut également convoquer, après
consultation des Vice-présidents, une session extraordinaire quand cela lui paraît nécessaire. Le Président est tenu
de le faire à la réception d’une demande à cet effet signée par seize membres du groupe gouvernemental, ou
douze membres du groupe des employeurs, ou douze membres du groupe des travailleurs ».
4 Les États membres de l'UE qui sont membres titulaires du Conseil d'administration sont l'Allemagne, la France, la
Roumanie, l'Italie et la Tchécoslovaquie, et les membres suppléants du Conseil d'administration sont la Belgique,
la Croatie, l'Espagne, la Lituanie, le Portugal, la Suède et la Slovénie. Les États membres de l'UE qui ne sont pas
3
qui a également envoyé une lettre de soutien, n'est pas membre du groupe gouvernemental
du Conseil d'administration5. Le Bureau n'aurait dû compter que les Etats membres qui sont
membres du Conseil de direction. Au total, il apparaît que seuls 23 membres du groupe des
travailleurs et du groupe gouvernemental du Conseil d'administration parmi ceux qui ont
demandé une session spéciale du Conseil d'administration étaient habilités à le faire, et non
34 comme indiqué dans le titre du rapport référencé ou 36 comme indiqué dans la version
publiée le 18 septembre 20236.
II. Remarques générales
Les employeurs souhaitent souligner le manque d'objectivité et d'impartialité dont le Bureau a
fait preuve en produisant le rapport d’information. Bien que le rapport d’information indique
qu' « il ne vise pas à apporter de réponses de fond au différend de longue date concernant le
droit de grève, ni d'examiner le bien-fondé des points de vue divergents ou d'exprimer
d'opinion sur l'opportunité de saisir la Cour »7, le Bureau fournit en partie un récit unilatéral
qui soutient le renvoi du différend devant la CIJ.
En particulier, le rapport d’information ne reflète pas les opinions exprimées par les
employeurs sur la proposition des travailleurs dans leurs lettres récentes au Directeur général
du BIT; et aucune de ces lettres n'est jointe au rapport d’information. Au total, sept lettres ont
été reçues par le Directeur général du BIT au moment de l'envoi du rapport d’information le 31
août 20238. Ces lettres sont très pertinentes pour fournir aux mandants tripartites de l'OIT un
aperçu complet des différentes positions sur cette question et sont conformes aux principes de
transparence et d'inclusivité.
En outre, le rapport d’information va au-delà de la fourniture d'informations sur le différend,
et cherche également à anticiper le résultat des discussions du Conseil d’administration. Cela
concerne en particulier le projet de résolution du Conseil d'administration figurant à l'annexe
II9 et le tableau relatif à la procédure consultative devant la CIJ figurant à l'annexe IV.10 Le projet
membres du Conseil d'administration sont l'Autriche, la Bulgarie, Chypre, le Danemark, l'Estonie, la Finlande, la
Grèce, la Hongrie, l'Irlande, la Lettonie, le Luxembourg, Malte, les Pays-Bas, la Pologne et la Slovaquie.
5 (Non daté) Réponse du Bureau à la "Note sur les questions de procédure concernant l'inclusion d'un point urgent
dans l'ordre du jour" soumise par l'OIE le 20 août 2023, p. 2.
6 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, GB349bis/INS/1,
18 septembre 2023.
7 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023,
par. 4.
8 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023,
annexe I, qui ne contient que les lettres reçues par les travailleurs et les gouvernements.
9 Voir aussi OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
31 août 2023, annexe I.
10 Voir aussi, OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que
la difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
4
de résolution figurant à l'annexe II est trompeur en ce qu'il présente la saisine de la CIJ en vertu
de l'article 37(1) de la Constitution de l'OIT comme « la seule option viable disponible » pour
mettre fin au différend. De cette manière, le projet de résolution cherche à exclure les
discussions à venir sur ce point litigieux. Les annexes II et IV ne tiennent pas compte des points
de vue précédemment exprimés par les différents groupes et ne reconnaissent pas non plus
qu'aucun consensus n'a été atteint lors de la session de mars 2023 du Conseil d’administration.
Ceci est totalement inacceptable.
III. Comprendre la difficulté d’interprétation de longue date
Le rapport d’information décrit le conflit d'interprétation sur le droit de grève comme une
« difficulté qui, au sein de l’OIT, oppose le groupe des employeurs et le groupe des travailleurs depuis
plus de trente ans »11. Toutefois, cette description n'est pas exacte, car elle ne donne pas une image
complète de ce différend de longue date.
Le différend trouve son origine dans l'interprétation large, détaillée et étendue que la
Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations (CEACR) de l'OIT a
donnée du droit de grève dans ses observations sur l'application de la convention C87 dans son
rapport annuel. Ces interprétations ont ensuite été soutenues par les travailleurs et contestées par
les employeurs et certains gouvernements. Le fait même que la CEACR ait continué à développer
ces interprétations année après année, contrairement à toutes les préoccupations exprimées par
les mandants, a conduit au différend actuel, qui dure depuis plus de trois décennies.
À cet égard, il convient de noter le rôle influent du Bureau dans les interprétations de la CEACR. En
préparant les projets de commentaires de la CEACR, le Bureau a assuré la continuité et la cohérence
des interprétations au fil du temps, indépendamment des changements dans la composition de la
CEACR.
Il est clair que, sans l'assistance du Bureau à la CEACR, le différend entre les employeurs et les
travailleurs sur le droit de grève n'aurait pas surgi pour commencer. Les employeurs rappellent
une fois de plus que la CEACR, conformément à son mandat et à sa pratique passée, peut, chaque
fois qu'elle détecte des divergences dans l'interprétation des conventions, porter ces divergences à
l'attention du Conseil d'administration et de la Conférence internationale du Travail (CIT) afin qu'ils
puissent prendre les mesures nécessaires12.
IV. La position des employeurs sur le droit de grève dans le contexte de la C87
Il est important de préciser que les employeurs reconnaissent que le droit de grève est garanti dans
la plupart des juridictions et que les pays ont établi diverses manières de déterminer sa portée et
ses limites dans le cadre de la législation nationale. Les employeurs ont également reconnu que le
31 août 2023, annexe III.
11 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023,
par. 7.
12 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, pars
79 et 86.
5
droit des travailleurs et des employeurs de mener des actions industrielles pour soutenir leurs
intérêts industriels légitimes est reconnu conjointement par les mandants de l'OIT13. Par
conséquent, les employeurs ne remettent pas en question le droit de grève au niveau national,
qui est une réalité. Cependant, les employeurs sont fermement convaincus, et l'ont
systématiquement été par le passé, que le droit de grève n'est pas prévu ou réglementé dans la
convention C87 ou dans toute autre convention de l'OIT. La reconnaissance et la réglementation
du droit de grève dans une norme de l'OIT nécessiteraient l'application d'un processus normatif
avec toute son approche participative, ses garanties procédurales et ses règles de prise de décision
établies, qui seul pourrait prendre en compte de manière adéquate la grande diversité des systèmes
de relations professionnelles dans les Etats Membres de l'OIT.
Les travaux préparatoires de la C87 montre indéniablement que le droit de grève n'a pas été négligé,
mais que les mandants tripartites qui étaient les rédacteurs de la convention n'ont pas inclus le droit
de grève de manière implicite ou explicite. Comme le souligne à juste titre le rapport d'information,
au moment de l'adoption de la convention C87:
« Plusieurs gouvernements… ont … souligné, à juste titre semble-t-il, que le projet de convention
ne porte que sur la liberté syndicale et non pas sur le droit de grève, problème qui sera examiné
à propos de la question VIII (conciliation et arbitrage) inscrite à l’ordre du jour de la Conférence.
Dans ces conditions, il nous a semblé préférable de ne pas faire figure une disposition à cet effet
dans le projet de convention sur la liberté syndicale »14.
Bien que l'article 37(1) de la Constitution de l'OIT dispose que toute question ou toute difficulté
relative à l'interprétation de la Constitution ou de toute convention ultérieure sera soumise à la
CIJ, les mandants ont toujours privilégié les solutions tripartites, sauf à une occasion : en 1932,
l'OIT a saisi la CIJ d'un différend portant sur l'interprétation du terme « femmes » à l'article 3 de
la convention (n° 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919.
De façon plus importante, la CIJ n'est pas le seul organe compétent disponible pour garantir la
sécurité juridique15. Il y a aussi la CIT, qui est l'organe exécutif de l'OIT, et qui a toute autorité
et compétence pour clarifier toute interprétation par l'établissement de normes.
D'autre part, il est également important de noter que les avis consultatifs de la CIJ ne sont par
nature pas juridiquement contraignants, sauf indication contraire explicite16. Alors que l'article
37(2) de la Constitution de l'OIT indique que « tous arrêts de la CIJ lieront tout tribunal institué
13 OIT, Réunion tripartite sur la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau national.
TMFAPROC/2015/2, Annexe I, p. 2.
14 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, par.
43, voir également OIT, Liberté syndicale et protection du droit syndical : rapport VII, 31e session de la CIT, 29 juin
1948, p. 92.
15 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023,
par.14.
16 CIJ, Compétence en matière consultative « Contrairement aux arrêts, et sauf les cas rares où il est expressément
prévu qu'ils auront force obligatoire (comme le font, par exemple, la convention sur les privilèges et immunités des
Nations Unies, la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées des Nations Unies et
l'accord de siège entre l'Organisation des Nations Unies et les Etats-Unis d'Amérique), les avis consultatifs de la
Cour n'ont pas d'effet contraignant».
6
en vertu du présent paragraphe", l'article 37(1) est totalement silencieux sur l'effet juridique
d'une décision de la CIJ17. En d'autres termes, le caractère contraignant d'un avis consultatif de
la CIJ est limité à tout tribunal établi en vertu de l'article 37, paragraphe 2, qui n'existe pas à ce
jour. Sachant qu'au-delà de cette exception très marginale et théorique, « l'organe, l'organisme,
l'agence ou l'organisation requérant reste libre de donner effet à l'avis comme il l'entend, ou de
ne pas le faire du tout »18, la CIJ ne peut apporter qu'une certitude juridique limitée au
différend relatif à l'interprétation. Par conséquent, toute implication juridique des avis
consultatifs de la CIJ pour les différents acteurs de l'OIT impliqués dans le différend, y compris
la possibilité de créer un effet juridiquement contraignant pour les mandants de l'OIT, doit être
soigneusement examinée et discutée au sein du Conseil d'administration ou de la CIT.
D'autre part, l'établissement de normes au sein de la CIT peut apporter une plus grande
sécurité juridique concernant d'éventuelles normes de l'OIT sur le droit de grève, y compris des
obligations juridiques relatives à ces normes pour les États membres qui ratifient le nouvel
instrument. En outre, seule une approche tripartite fondée sur le dialogue social pour traiter la
question du droit de grève garantirait l'inclusivité et la démocratie en permettant à tous les
mandants de l'OIT de participer activement au processus ; les solutions seraient fondées sur
des recherches préalables (rapport sur le droit et la pratique) et sur un consensus ou au moins
une large majorité; et les résultats adoptés seraient universellement pertinents et acceptés. De
façon plus importante, cette approche est pleinement conforme au mandat de l'OIT et respecte
les principes du tripartisme et du dialogue social.
Il convient de rappeler que le Conseil d'administration a discuté en 1992 de la proposition du
gouvernement colombien d'inscrire un point normatif concernant le droit de grève à l'ordre du
jour de la CIT en 199419. La proposition colombienne a été justifiée dans les termes suivants:
« Le droit de grève est une garantie fondamentale de la classe ouvrière. Ainsi l'ont reconnu les
constitutions et législations des pays à régime démocratique, dont la Colombie. Mais 72 ans après
sa création, l'Organisation internationale du Travail n'a toujours pas adopté de convention allant
dans ce sens... En réalité, seule la convention no 87 traite du droit des travailleurs et des employeurs
de constituer des organisations et de s'y affilier; du droit de ces institutions d'élaborer librement leurs
statuts et règlements et d'élire leurs représentants, sans pouvoir être dissoutes ou suspendues par
voie administrative, et de leur droit de constituer des fédérations ou des confédérations »20.
Au cours de la discussion de 1992, un certain nombre de pays ont soutenu cette proposition,
reconnaissant que le droit de grève n'était pas réglementé par les normes de l'OIT.
En particulier, le membre gouvernemental du Maroc a déclaré :
« Aucun instrument n'existant sur la question, il convient de combler ce vide juridique. Si le droit
de grève est accordé aux travailleurs dans un grand nombre de pays, rares sont ceux qui ont
déterminé les modalités d'application de ce droit. Il est essentiel de préciser la notion de droit de
grève du fait qu'il n'existe pas de droit absolu de grève. Il est donc important de définir ses limites
qui concernent plus particulièrement les services essentiels ».21
17 Article 37(1), Constitution de l'OIT « Toutes questions ou difficultés relatives à l'interprétation de la présente
Constitution et des conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution, seront
soumises à l'appréciation de la Cour internationale de Justice ».
18 CIJ, fonctionnement https://www.icj-cij.org/fr/fonctionnement
19 OIT, procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992.
20 OIT, Ordre du jour de la 81e session (1994) de la Conférence, GB.253/2/3(Rev.), Annexe I, p. 23.
21 OIT, procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/12- I/13.
7
De même, le membre gouvernemental du Venezuela a justifié sa position en affirmant que « les
instruments pertinents de l'OIT, notamment les conventions nos 87 et 98, ne font pas état du
droit de grève […] Il est donc essentiel de disposer d'un instrument international sur le droit de
grève »22.
Les gouvernements ont ainsi reconnu que la C87 ne contient pas le droit de grève et ont
considéré l'établissement éventuel d'une norme comme l'option naturelle pour traiter cette
question.
V. Les éléments centraux du différend
A. Ni la convention 87, ni aucun instrument de l'OIT à ce jour ne prévoit le "droit de grève"
Il est important de souligner que les employeurs, les travailleurs et les gouvernements, ainsi que
les organes de contrôle des normes de l'OIT ont tous reconnu à de multiples reprises que ni la
C87 ni aucun instrument de l'OIT ne prévoyait ni n'avait l'intention d'inclure le "droit de grève".
Premièrement, au moment de la rédaction et de l'adoption de la C87, le Bureau a conclu que
le droit de grève ne serait pas inclus dans cette convention23. Dans le même ordre d'idées, les
membres travailleurs et gouvernementaux du comité de rédaction de la résolution de l'OIT de
1970 concernant les droits syndicaux et leur relation avec les libertés civiles ont déclaré que
« bien que le droit de grève soit prévu dans certains instruments adoptés par d'autres
organisations internationales, aucun instrument de l'OIT ne traite de ce droit et que l'OIT
devrait envisager la possibilité d'adopter des normes sur ce sujet »24.
De même, les gouvernements ont également reconnu que la C87 ne prévoit pas le droit de
grève. Par exemple, lors de la discussion de l'étude générale sur les C87 et 98 en 1973, le
gouvernement de la Suisse a indiqué que le droit de grève n'était pas couvert par la C87, comme
en témoignent les travaux préparatoires qui ont conduit à son adoption25. Le membre
gouvernemental du Japon a également souligné qu'« il n’y a pas de convention ou de
recommandation d'autre décision de la Conférence internationale du Travail qui définisse la
portée du droit de grève dans le secteur public »26. De même, le membre gouvernemental de
Chypre « a considéré que la position d'un certain nombre de gouvernements sur cette question
est qu'ils ne peuvent renoncer à la souveraineté de l'Etat. Sa propre conclusion est que les
conventions sur la liberté syndicale sont maintenant inadéquates en ce qui concerne la situation
des fonctionnaires publics et qu'elles devraient faire l'objet d'un réexamen en vue de leur mise à
jour »27.
Lors de la discussion de l'étude générale sur les C87 et 98 à la CIT en 1983, le membre
gouvernemental de la Tunisie a contesté les interprétations du comité d'experts concernant le
droit de grève dans le C87 en déclarant que « son gouvernement divergeait avec la commission
d'experts quant à l'interprétation que celle-ci a donné à la notion de services essentiels»28.
22 OIT, procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/16.
23 OIT, Liberté syndicale et protection du droit syndical : Rapport VII, 31e session de la CIT, 29 juin 1948, p. 92.
24 OIT, compte rendu des travaux, 54e session de la CIT, 22 juin 1970, p. 632 et 636, pars 12 et 25.
25 OIT, compte rendu des travaux, 58e session de la CIT, 22 juin 1973, p. 590, par. 27.
26 OIT, compte rendu des travaux, 58e session de la CIT, 22 juin 1973, p. 590, par. 26.
27 OIT, compte rendu des travaux, 58e session de la CIT, 22 juin 1973, p. 590 par. 27.
28 OIT, compte rendu des travaux, 69e session de la CIT, 17 juin 1983, p. 31/14, par. 62.
8
De même, lors de la session du Conseil d'administration de 1991, le membre gouvernemental
de la Suède a reconnu que « cependant, certains aspects des conventions ne sont pas
parfaitement clairs, et c'est le cas notamment du droit de grève qui n'est pas mentionné dans
les conventions nos 87 et 98, et dont il n'a pas non plus été question lors des travaux
préparatoires de la Conférence internationale du Travail qui a adopté ces instruments »29.
En outre, lors de la discussion au sein de la Commission de la Conférence de l'application des
normes (CAN) en 1986, le membre gouvernemental de la République démocratique allemande
a déclaré « que la convention ne mentionne dans aucune de ses dispositions le droit à la grève
» et fait référence à l’opinion de la Commission d’experts selon laquelle « l'interdiction de la
grève est contraire à l'article 3 de la convention » comme « une simple interprétation » 189 est
« une méthode de travail [qui] doit être rejetée ».30
La CEACR a également reconnu elle-même que « le droit de grève ne soit pas expressément
inscrit dans la Constitution de l'OIT ou dans la Déclaration de Philadelphie, ni reconnu
spécifiquement dans les conventions n° 87 et 98 »31. De même, la Commission d’investigation
et de conciliation en matière de liberté syndicale l'a reconnu en déclarant que « en droit
international, le droit de grève est explicitement reconnu [dans un certain] nombre
d’instruments adoptés aux plans international et régional. Les instruments de l’OIT cependant
n’en traitent pas expressément »32.
En outre, le Conseil d'administration a reconnu que la C87 n'inclut pas le droit de grève. En
1956, le Conseil d'administration a décidé de ne pas réviser le formulaire de rapport pour la C87
en vue d'ajouter des questions spécifiques sur les restrictions au droit de grève pour les
employés publics, précisément parce qu'il considérait que la C87 ne couvrait pas le droit de
grève.33 A ce jour, le formulaire de rapport pour la C87 ne comporte aucune question relative
au droit de grève. De même, la CIT n'a pas non plus mentionné le droit de grève lors du 40e
anniversaire de l'adoption de la C87, étant donné que ce droit n'existe pas dans l'instrument34.
En résumé, on peut dire que divers mandants et organes de l'OIT ont reconnu à différentes
occasions que la C87 n'incluait pas expressément ou implicitement le droit de grève. Le
rapport d’information aurait dû fournir un compte rendu complet de toutes les discussions
qui ont eu lieu sur le droit de grève au sein de l'OIT et en relation avec la C87, et pas seulement
à la CIT.
B. Les règles d'interprétation des traités prévues par la Convention de Vienne doivent
être pleinement respectées
Les règles générales d'interprétation prévues aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne
sur le droit des traités (Convention de Vienne) sont explicitement claires et doivent être
29 OIT, procès-verbaux de la 251e session, GB.251/PV(Rev.), 12 novembre 1991, p. III/8.
30 OIT, compte rendu des travaux, 72e session de la CIT, 21 juin 1986, p. 31/35.
31 OIT, Liberté syndicale et négociation collective, CIT 81e session, 1994, p. 62, para 142.
32 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, para
67.
33 OIT, procès-verbaux de la 131e session du Conseil d'administration, 1956, annexe XXII, p. 209.
34 OIT, Résolutions adoptées par la Conférence internationale du travail, 73e session de la CIT, 1987.
9
pleinement respectées35. Il n'y a pas de désaccord sur l'applicabilité de la Convention de Vienne
aux conventions de l'OIT, telles que la C87. D'autres méthodes d'interprétation non reconnues
par la Convention de Vienne ne devraient pas être acceptées, car elles seraient source
d'incertitude juridique et d'ambiguïté.
1. Interprétation dynamique ou évolutive
Les travailleurs soutiennent que « la possibilité d'une interprétation "dynamique" » est offerte
par l'article 31 de la Convention de Vienne.36 L'article 31, paragraphe 1, de la Convention de
Vienne est libellé comme suit : « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens
ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son
but ». Il apparaît que l'article 31(1) définit clairement les critères d'une interprétation valable et
qu'il n'y a pas de place pour des concepts vagues tels que l'interprétation « dynamique ». En
particulier, pour satisfaire au critère du « sens ordinaire à attribuer aux termes du traité », les
mots « droit de grève » ou des termes similaires devraient être utilisés dans la C87, ce qui n'est
pas le cas.
2. Objet et but
Deuxièmement, le groupe des travailleurs a justifié le recours à l'interprétation dynamique
« dans la mesure où elle exige que les dispositions du traité soient interprétées à la lumière de
l'objet et du but du traité ». Cependant, au moment de la rédaction de la C87, il a été indiqué
que « plusieurs gouvernements… ont … souligné, à juste titre semble-t-il, que le projet de
convention ne porte que sur la liberté syndicale et non pas sur le droit de grève »37. En outre, le
Président a déclaré clairement que « la convention n'était pas destinée à être un "code de
réglementation" pour la protection du droit syndical, mais plutôt une déclaration concise de
certains principes fondamentaux ».38 Par conséquent, s'il est clair que « l'objet et le but » de la
C87 était de réglementer la liberté syndicale et la protection du droit syndical, il a également été
explicitement déclaré que « l'objet et le but » n'était pas de réglementer le droit de grève.
3. Accord ultérieur entre les parties concernant l'interprétation et pratique subséquente
établissant l'accord des parties concernant l'interprétation
Troisièmement, le groupe des travailleurs soutient que:
« les termes de la convention no 87 garantissant le droit d’organisation doivent être
compris dans le contexte du libellé pertinent du préambule de la Constitution de l’OIT et de la
Déclaration de Philadelphie, et compte tenu de toute pratique ultérieure établissant l’existence
d’un accord général quant à leur interprétation, à travers par exemple la jurisprudence
35 ONU, Convention de Vienne sur le droit des traités, 23 mai 1969, Recueil des Traités, vol. 1155, p. 331.
36 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023,
par. 10.
37 OIT, Liberté syndicale et protection du droit syndical : rapport VII, 31e session de la CIT, 29 juin 1948, p. 92.
38 Renate Hornung-Draus, 'The Right to Strike in the ILO System of Standards: Facts and Fiction' (2018) 39 Comp
Lab L & Pol'y J 531, p. 534.
10
constante des organes chargés de veiller à l’application de la convention »39.
Cependant, ni le préambule ni le texte de la Constitution de l'OIT et de la Déclaration de
Philadelphie n'incluent expressément ou implicitement le droit de grève, ni même la protection
du droit syndical. Par conséquent, l'argument des travailleurs selon lequel le C87 inclut le droit
de grève sur la base de ce "contexte" est infondé et invalide.
En ce qui concerne un éventuel accord ultérieur sur cette interprétation, le fait que plusieurs
États ayant ratifié la C87 aient déclaré à différents moments que ni la C87 ni aucun autre
instrument de l'OIT ne prévoyait le droit de grève montre qu'il n'existe pas d'accord général
de ce type40.
En ce qui concerne une éventuelle pratique ultérieure établissant l'accord des parties sur
l'interprétation, le non-respect actuel par la plupart des pays parties à la convention d'une ou
plusieurs interprétations de la CEACR sur le droit de grève, tel que reflété dans les observations
de la CEACR sur la C87 dans chaque rapport annuel, est la preuve qu'une telle pratique n'existe
pas.
En outre, il est important de noter que si les observations de la CEACR ont une influence sur les
tribunaux nationaux, seuls 12 pays et une cour régionale ont appliqué les interprétations de
la CEACR sur le droit de grève dans leurs décisions judiciaires nationales41. Étant donné que
158 États membres de l'OIT ont ratifié la C8742, l'application des interprétations de la CEACR par
12 États membres est loin de représenter une pratique ultérieure établissant un accord entre
les parties à la C87 sur l'interprétation concernant le droit de grève.
En outre, le rapport d'information note également que le Comité de la liberté syndicale du
Conseil d'administration et son prédécesseur, la Commission d’investigation et de conciliation
en matière de liberté syndicale, ont affirmé que le droit de grève est intrinsèquement lié au
principe de la liberté syndicale et qu'il est donc protégé en vertu de la C8743. Il est important de
noter que le mandat de ces deux organes est d'examiner les allégations de violation des
principes de la liberté d'association et de la reconnaissance effective du droit de négociation
collective dans la Constitution de l'OIT et la Déclaration de Philadelphie. Le mandat n'inclut pas
le contrôle de l'application de la C8744. Les deux organes émettent des recommandations et des
39 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, para
10.
40 Voir par exemple le Maroc, le Venezuela, l'Allemagne et la Colombie en 1992, ainsi que la Suède en 1991. OIT,
Procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/12- I/13 et I/16 ; OIT, Ordre du jour de la 81e
session (1994) de la Conférence, GB.253/2/3(Rev.), annexe I. de la Conférence, GB.253/2/3(Rev.), Annexe I, p. 23;
OIT, procès-verbaux de la 251e session, GB.251/PV(Rev.), 12 novembre 1991, p. III/8.
41 A savoir le Botswana, le Brésil, le Burkina Faso, le Canada, la Colombie, la Cour européenne des droits de l'homme,
Fidji, le Kenya, Nigeria, Pérou, Fédération de Russie, Sénégal et Afrique du Sud. Voir CCI-OIT, Recueil de décisions de
justice, sous la rubrique "droit de grève".
42 OIT, Ratifications de la convention C087 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948 (n° 87).
43 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, para
61-67.
44 OIT, Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, paragraphe 1 "Le Comité de la liberté syndicale
(CLS) est un organe tripartite institué en 1951 par le Conseil d’administration (CA) de l’Organisation internationale
11
conclusions qui sont décidées au cas par cas et ne constituent pas de précédents juridiques. Les
prises de position occasionnelles du Comité de la liberté syndicale sur le droit de grève dans
les différents pays ne peuvent remplacer un processus normatif approprié, dans le cadre
duquel les mandants tripartites de l'OIT négocient et décident du contenu et du champ
d'application des instruments.
Enfin, pendant de nombreuses années, la Commission de l'application des normes (CAN) n'a pas
non plus fait référence au « droit de grève » dans ses conclusions sur les affaires concernant la
C87, en raison du désaccord sur l'interprétation de la C8745.
En considérant l’ensemble, on ne peut pas affirmer qu'un accord sur l'interprétation du droit
de grève dans la C87 a été établi par la pratique subséquente des parties.
4. Travaux préparatoires du traité
Enfin, les travailleurs ont fait valoir qu' « il n’est pas nécessaire de faire appel aux travaux
préparatoires, puisque les conditions énoncées dans la Convention de Vienne ne sont pas
remplies, l’interprétation proposée en application de son article 31 ne laissant pas le sens
ambigu ou obscur et ne conduisant pas à un résultat manifestement absurde ou
déraisonnable »46.
Sur ce point, les employeurs conviennent que l'application des moyens d'interprétation prévus
à l'article 31 ne laisse pas le sens des dispositions pertinentes de la C87 ambigu ou obscur, ni ne
conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable. Comme indiqué ci-dessus, les
dispositions de la C87 sont claires quant à la non-inclusion du droit de grève.
Toutefois, il convient également de préciser qu'en vertu de l'article 32 de la convention de
Vienne, il est possible de recourir à des moyens complémentaires d'interprétation, tels que les
travaux préparatoires, « afin de confirmer le sens résultant de l'application de l'article 31 »47.
Cela signifie qu'il sera toujours possible de recourir aux travaux préparatoires en tant que
moyen complémentaire pour confirmer un résultat interprétatif résultant de l'application de
moyens au titre de l'article 31.
du travail (OIT). Le CLS examine les violations alléguées des principes de la liberté syndicale et de la reconnaissance
effective du droit de négociation collective contenus dans la Constitution de l’Organisation internationale du travail
(Préambule), dans la Déclaration de Philadelphie, et tel qu’exprimé dans la Résolution de 1970 de la Conférence
internationale du Travail".
45 OIT, Commission de l'application des normes, CAN/D.1, 5 mai 2023, p. 7, par. 32 « Les conclusions relatives aux
cas individuels sont proposées par les vice-présidents et soumis par le/la président(e) de la commission pour
adoption. Les conclusions doivent prendre en considération les points soulevés pendant la discussion et les
informations écrites fournies par le gouvernement. Les conclusions devraient être brèves et claires et préciser
l’action attendue des gouvernements. Elles peuvent également inclure une référence à l’assistance technique devant
être fournie par le Bureau. Elles devraient être l’expression de recommandations consensuelles. Les divergences
d’opinions peuvent être reflétées dans le compte rendu des travaux de la commission »
46 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, para 10.
47 Convention de Vienne sur le droit des traités, article 32 « Il peut être fait appel à des moyens complémentaires
d'interprétation, notamment aux travaux préparatoires du traité et aux circonstances de sa conclusion, pour
confirmer le sens résultant de l'application de l'article 31 ou pour déterminer ce sens lorsque l'interprétation selon
l'article 31 : a) laisse le sens ambigu ou obscur ; ou b) conduit à un résultat qui est manifestement absurde ou
déraisonnable ».
12
Comme l'indique le rapport d’information, en répondant au questionnaire sur la forme et le
contenu d'une éventuelle réglementation internationale concernant le droit à la liberté
d'association et le droit syndical, plusieurs gouvernements ont indiqué que l'instrument
proposé ne devrait concerner que la liberté d'association et non le droit de grève.48 En
conséquence, le Bureau n'a pas inclus de disposition sur le droit de grève dans le projet
d'instrument et lors de la discussion à la Conférence, le droit de grève n'a même pas été
mentionné. Ce fait confirme l'interprétation sous l'article 31 de la Convention de Vienne selon
laquelle la C87 n'inclut pas le droit de grève.
VI. Le mandat de la CEACR
Le mandat de la CEACR est clair. La CEACR « procède à une analyse impartiale et technique de
la façon dont les conventions ratifiées sont appliquées dans la législation et la pratique par les
Etats Membres, en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les différents systèmes
juridiques. Ce faisant, elle examine la portée juridique, le contenu et la signification des
dispositions des conventions. Ses avis et recommandations ont un caractère non contraignant,
leur objet étant de guider l’action des autorités nationales »49. La CIT a précisé à cet égard que
la CEACR « ne devrait pas assumer de fonctions d'ordre judiciaire et qu'elle ne serait pas
compétente pour donner des interprétations des dispositions des conventions ni pour se
prononcer en faveur d'une interprétation plutôt que d'une autre »50.
Il est important de noter que la CEACR a mentionné le droit de grève pour la première fois dans
sa troisième étude d’ensemble sur le sujet en 1959, dans un seul paragraphe et uniquement en
ce qui concerne les services publics51. Toutefois, au fil du temps, la CEACR a progressivement
élargi son point de vue sur la question pour atteindre sept paragraphes en 1973, 25 en 1983 et
un chapitre distinct de pas moins de 44 paragraphes en 1994 et 2012, y compris un certain
nombre de nouveaux sujets52.
Plus inquiétant encore, la CEACR, au paragraphe 145 de son étude générale de 1994, a déclaré
qu' « en l'absence d'une disposition expresse sur le droit de grève dans les textes fondamentaux,
les organes de contrôle de l’OIT ont été amenés à se prononcer sur la portée et la signification
exactes des conventions en cette matière »53. Cette déclaration témoigne d'une
compréhension totalement erronée et très contestable des tâches de la CEACR. La CEACR n'a
en aucun cas le pouvoir ou même le devoir de réglementer par voie d'interprétation des
questions qui n'ont délibérément pas été réglementées dans une convention de l'OIT. Une telle
compétence n'a jamais été conférée à la CEACR, ni par le Conseil d'administration, ni par la
CIT.
48 OIT, Liberté syndicale et protection du droit syndical : Rapport VII, 31e session de la CIT, 29 juin 1948, p. 92. Voir
les Pays-Bas et la Suède, qui considéraient que la Convention ne devait pas s'occuper des questions relatives au droit
de grève.
49 OIT, Réunion tripartite sur la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau national,
TMFAPROC/2015/2, 23 février 2015, Annexe I, p. 2.
50 OIT, Compte rendu des travaux, 8e session de la CIT, 1926, annexe V, pp. 405-407.
51 OIT, Liberté syndicale et négociation collective, 43e session de la CIT, 1959, p. 124, par. 68.
52 Renate Hornung-Draus, 'The Right to Strike in the ILO System of Standards: Facts and Fiction' (2018) 39 Comp Lab L &
Pol'y J 531, p. 533
53 OIT, Liberté syndicale et négociation collective, CIT 81e session, 1994, p- 66-67, par. 145.
13
Le membre gouvernemental du Danemark, qui s'est exprimé au nom des gouvernements
nordiques, a également remis en question l'autorité autoproclamée de la CEACR en déclarant
que :
« la commission d'experts va peut-être un peu trop loin lorsqu'elle suggère qu'un gouvernement
qui n'accepte pas son interprétation devrait demander une décision juridiquement contraignante
à la Cour internationale de Justice. A son avis, cette obligation n'est pas dans l'esprit de l'article
37 de la Constitution de l'OIT »54.
Sur la base de ce présupposé erroné, la CEACR a formulé des observations sur de nombreux cas
impliquant des dispositions ou des pratiques nationales spécifiques restreignant l'action de
grève55. Dans environ 90 à 98 % de ces cas, les experts ont conclu que les restrictions à l'action
de grève n'étaient pas compatibles avec la C87. La CEACR a progressivement élaboré un
ensemble complet d'interprétations larges, étendues et détaillées qui garantissent une liberté
de grève étendue et presque illimitée. L'élargissement de l'interprétation de la CEACR sur le
droit de grève, les heures supplémentaires, a conduit à une situation critique sur laquelle les
employeurs ont dû se faire progressivement entendre, au moins depuis 1987.
Par conséquent, les employeurs considèrent que les interprétations de la CEACR ne peuvent et
ne doivent pas servir de base pour déterminer au niveau international la portée et les limites
du droit de grève, ni pour évaluer ou contrôler sa mise en oeuvre.
54 OIT, Compte rendu des travaux, 78e session de la CIT, 1991, p. 24/7, par. 33.
55 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, par. 60.
14
VII. Les questions à soumettre à la Cour
Les employeurs prennent note du fait que les questions des travailleurs relatives à la saisine
conservent le même libellé que celui proposé pour la discussion du Conseil d'administration en
novembre 201456. Toutefois, il aurait fallu souligner ici que la première question, à savoir si un
droit de grève fait partie de la C87, ne peut être tranchée que sur la base des règles des articles
31 et 32 de la Convention de Vienne.
En ce qui concerne la deuxième question de savoir si la CEACR était compétente pour préciser
certains éléments concernant l'étendue du droit de grève, ses limites et les conditions de son
exercice légitime dans le cadre de la C87, il aurait également fallu se référer aux articles 31 et 32
de la Convention de Vienne. En effet, la CEACR n'a jamais reçu de mandat d'interprétation qui
l'aurait dispensée de respecter les règles de la Convention de Vienne. En d'autres termes, la
compétence de la CEACR pour préciser la portée, les limites et les conditions du droit de grève
dans le cadre de la C87 est limitée par les exigences des articles 31 et 32 de la Convention de
Vienne, que la Commission doit respecter dans chaque cas individuel.
VIII. Prochaines étapes possibles
Les employeurs considèrent qu'il serait trop simpliste de confier au seul Conseil d'administration
la responsabilité d'évaluer les demandes de renvoi et de laisser de côté les Etats parties à la C87.
Nous suggérons que les Etats parties à une convention faisant l'objet d'un différend en matière
d'interprétation (et leurs partenaires sociaux nationaux respectifs), étant donné qu'ils pourraient
être directement affectés par une décision de la CIJ, devraient avoir un droit prioritaire à être
impliqués dans les décisions de renvoi au titre de l'article 37(1). Cela semble nécessaire, ne seraitce
que pour promouvoir leur acceptation d'un avis consultatif de la CIJ. Par conséquent, à notre
avis, aucune décision de renvoi d'un différend d'interprétation à la CIJ ne devrait être prise si
elle n'est pas fondée sur le soutien des États parties à la Convention concernée lors de la CIT.
IX. Conclusion
En conclusion, l'OIE apprécie l’opportunité qui lui est donnée de faire part de ses commentaires
sur le rapport d’information et de ses opinions préliminaires sur une éventuelle saisine de la CIJ
pour le différend sur l'interprétation de la C87 en relation avec le droit de grève. Les employeurs
ont été clairs : une saisine de la CIJ ne peut pas régler le différend sur le droit de grève de
manière concluante et ne constitue donc pas une solution viable pour l'avenir, car le droit de
grève est une question multiforme et complexe qui ne peut pas être séparée des systèmes et
pratiques de relations professionnelles très divergents dans les États membres de l'OIT. Il
n’apparaît pas clairement comment des organes externes et judiciaires pourraient élaborer une
solution qui répondrait aux réalités et aux besoins divers des systèmes de relations
professionnelles dans les États membres et qui serait donc largement acceptée par les mandants
de l'OIT.
Les employeurs ont exprimé leur ferme conviction que la solution pour mettre fin à ce différend
et parvenir à la sécurité juridique devrait rester entre les mains des mandants tripartites de
l'OIT. L'OIT et ses mandants tripartites ont besoin d'un espace de dialogue et de coopération
56 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, par. 100.
15
pour se rapprocher d'un consensus. Si la Constitution de l'OIT prévoit la possibilité de saisir la CIJ
pour résoudre les différends en matière d'interprétation, cette voie ne semble pas adaptée au
cas du droit de grève. Au contraire, l'établissement de normes sur le droit de grève garantirait
que tous les mandants de l'OIT puissent s'engager activement dans le processus, que toute
solution obtenue soit basée sur un consensus ou au moins une large majorité, et enfin que tout
résultat adopté soit universellement pertinent et accepté.
Il s'ensuit que la saisine d'organes externes et judiciaires, de la CIJ ou d'un tribunal de l'OIT, ne
devrait avoir lieu que si toutes les possibilités de dialogue entre les principaux acteurs de l'OIT
compétents en matière de normes de l'OIT ont été épuisées, ce qui n'est pas le cas à l'heure
actuelle. En particulier, l'établissement de normes, qui est à l'OIT la forme la plus développée de
dialogue social pour trouver un terrain d'entente sur les questions sociales et de travail, n'a
jamais été utilisé en ce qui concerne le droit de grève.
Les employeurs ont exprimé leur engagement en faveur du dialogue social et du tripartisme, qui
sont les pierres angulaires de l'OIT, et attendons les discussions de fond qui auront lieu lors de la
session spéciale du Conseil d'administration qui se tiendra les 10 et 11 novembre 2023.
Document no 24
CSI, Commentaires sur le rapport d’information du BIT
concernant la demande du groupe des travailleurs visant
à ce que la difficulté d’interprétation de la convention
no 87 concernant le droit de grève soit soumise
d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale
de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de
la Constitution, datés du 6 octobre 2023
1
M. Gilbert Houngbo
Directeur général
Bureau international du Travail
Route des Morillons, 4
CH - 1211 Genève
Suisse
CSI/Lex 6 octobre 2023
Action à entreprendre à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant
à ce que la difficulté d’interprétation de la convention nº 87 au sujet du droit de grève soit
soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37(1)
de la Constitution
Monsieur le Directeur général,
Nous nous référons à votre lettre du 31 août 2023 adressée à tous les États membres de l'OIT
concernant la demande, à travers la lettre du groupe des travailleurs du 12 juillet 2023, de renvoyer
d'urgence le différend relatif à l'interprétation de la convention n° 87 de l'OIT au sujet du droit de grève
à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour appréciation conformément à l'article 37(1) de la
Constitution de l'OIT.
Nous saluons le Rapport d’information du Bureau, joint à votre lettre, comme une bonne base pour les
discussions à la session spéciale qui se tiendra conjointement avec la 349e session (octobre-novembre
2023) du Conseil d’administration, prévue le 10 novembre 2023 (en tant que session 349e bis).
Faisant suite à votre demande que tout commentaire au sujet du rapport d’information du Bureau de la
part des gouvernements ou des organisations d’employeurs et de travailleurs concernés soit adressé
au Bureau du Conseiller juridique le vendredi 6 octobre 2023 au plus tard, vous trouverez ci-après les
commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) à ce sujet. En outre, nous nous
référons également à l’analyse juridique de 2014 de la CSI sur le fondement juridique du droit de grève
en droit international et à la Note d’information (Questions-Réponses) du groupe des travailleurs de
l’OIT (Voir en annexe). Nous attirons également l’attention du Bureau et des mandants de l’OIT, avec
l’autorisation des auteurs, sur le livre publié en 2020, The Right to Strike in International Law1.
Nous espérons que vous communiquerez ces commentaires en temps voulu au Conseil
d’administration et aux autres processus liés à ce différend.
[formule de politesse]
Luc Triangle
Secrétaire général par intérim
1 Jeffrey Vogt, et. Al., The Right to Strike in International Law (Hart Publishers, 2020).
[Traduction non officielle]
2
Commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI) sur le Rapport
d’information du Bureau concernant la demande du groupe des travailleurs visant à ce
que la difficulté d’interprétation de la convention nº 87 au sujet du droit de grève soit
soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de
l’article 37(1) de la Constitution
Introduction
Ce document est envoyé au Bureau de l’OIT à la demande de son Directeur général, en
réponse au rapport d’information publié par le Bureau le 31 août 2023. Il a pour objet de
transmettre la position de la CSI et de ses affiliés, qui représentent plus de 191 millions de
travailleurs, afin que le Conseil d’administration puisse prendre une décision afin de soumettre
la difficulté d’interprétation sur la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical, 1948, au sujet du droit de grève à l’appréciation de la Cour internationale de
Justice en vertu de l’article 37(1) de la Constitution de l’OIT.
Rappel des faits et de la nature du différend concernant le droit de grève en lien avec la
convention nº 87
1. En 2012, le groupe des employeurs a créé une crise institutionnelle au sein de l’OIT
quand il a empêché la Commission de l’application des normes de la Conférence
(CAN) d’exercer sa fonction institutionnelle. Le groupe a perturbé la CAN parce qu’il a
contesté les orientations adoptées de longue date par les organes de contrôle de l'OIT,
y compris la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations (CEACR/Commission d’experts) concernant le droit de grève et la
portée juridique de la convention nº 87. Depuis, l’OIT, les gouvernements et les
partenaires sociaux ont essayé à plusieurs reprises de régler ce différend dans le
cadre du dialogue social. Ces efforts n’ont pas abouti, et il n’y a pas de raison de
penser que la poursuite du dialogue permettra de sortir de l’impasse.
2. Le différend, la confusion et l’absence de sécurité juridique qui en découlent a servi à
entraver le bon fonctionnement du système de contrôle2 et a nui à l’OIT dans son
ensemble3. Heureusement, la Constitution de l’Organisation offre un mécanisme
efficace et disponible pour régler ce différend juridique, en son article 37(1), dans le
respect de l’état de droit.
Il établit clairement que les difficultés d’interprétation doivent être soumises à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice (CIJ) pour avis consultatif4. La CIJ,
l’un des principaux organes des Nations Unies, avec ses juges compétents de grande
réputation sur les questions de droit international, est bien placée pour fournir à l’OIT
et à ses mandants, les nécessaires clarté et sécurité juridiques pour qu’elle puisse
s’acquitter efficacement de son mandat en matière de justice sociale.
2 Depuis 2012, par exemple, la Commission de l’application des normes de la Conférence (CAN) n’a pas été en
mesure d’arriver à des conclusions concernant l’exercice du droit de grève et par conséquent n’a pas été à
même de fournir des orientations aux Etats Membres à cet égard.
3 Nous n’essayons pas ici de tenter d’aborder le fond du différend d’interprétation, mais seulement de
constater qu’un tel différend existe, et que la Constitution nous impose de recourir la CIJ pour un avis
consultatif.
4 Notant, conformément au paragr. 104 du Rapport d’information du Bureau que « La Cour a même estimé
que «lorsque des considérations politiques jouent un rôle marquant il peut être particulièrement nécessaire à
une organisation internationale d’obtenir un avis consultatif de la Cour sur les principes juridiques applicables
à la matière en discussion».
3
3. Comme indiqué dans le précédent document du Bureau sur le sujet5 « Un désaccord
concernant la portée juridique ou le sens de certaines dispositions peut survenir sans
que cela remette nécessairement en question la validité des commentaires,
conclusions ou recommandations formulés par les organes de contrôle, ni la
compétence de ces derniers en la matière. » Le différend actuel concernant le droit de
grève sous la convention nº 87 n’entre pas dans cette catégorie. Comme déjà
mentionné, ce différend a créé une crise institutionnelle au sein de l’OIT depuis 2012
en remettant en question la validité des commentaires, conclusions et
recommandations des organes de contrôle et remettant en question leur compétence
pour formuler de tels commentaires, conclusions et recommandations quant à la
question du droit de grève et de la portée juridique de la convention nº 87.
4. En vertu de l’article 37(1) de la Constitution de l’OIT, en cas de questions ou de
difficultés relatives à l’interprétation d’une convention, c’est la Cour internationale de
Justice (CIJ) qui a le pouvoir de règlement ou de détermination finaux. Régler la
question d’interprétation juridique de la portée juridique de la convention nº 87
concernant le droit de grève et par conséquent confirmer que les orientations
formulées par le système de contrôle à cet égard, dont la Commission d’Experts, font
autorité, doit être le moyen le plus raisonnable, rationnel et efficace à privilégier pour
aller de l’avant. Aucune autre voie ne fournira la clarté et la sécurité juridiques requises
dont dépendent les mandants, et qui sont nécessaires pour le fonctionnement de l’OIT
en tant qu’organisation normative.
5. D’autres options, tel que le recours à l’article 37(2) de la Constitution de l’OIT
n’apportera pas de solution définitive au différend, du fait qu’il pourrait cependant être
« fait appel » à la CIJ d’un jugement du tribunal en vertu de l’article 37(2). En outre, il
n'existe à ce jour pas un tel tribunal prêt à recevoir et à résoudre un différend, il n'y a
pas d'accord sur l'opportunité ou la manière de créer un tel tribunal, et, de ce fait, la
procédure serait lourde et retarderait encore la résolution du différend. En outre,
lorsque le différend est important, plutôt que d’être simplement technique, et a des
implications plus larges pour l'obligation des États Membres dans le cadre plus large
du système de contrôle de l'OIT ainsi que la stabilité du droit international des droits
humains en général, il est donc logique que la CIJ soit le forum judiciaire le mieux
placé pour régler le différend en matière d’interprétation.
6. Toute tentative d'utiliser le pouvoir législatif de l'OIT (dans le cadre d’une action
normative) n’est pas non plus appropriée. Il y a 70 ans de travaux d’experts, de
conclusions et de recommandations bipartites et tripartites sur le sujet du droit de
grève. Le corpus d’orientations juridiques résultant de ces 70 ans de travaux a informé,
et de fait, est inscrite dans la législation et la pratique des gouvernements, des
tribunaux nationaux et internationaux, des organisations multilatérales, des organes
nationaux, internationaux et régionaux compétents dans le domaine des droits
humains et a été utilisé par les travailleurs et leurs organisations pour la défense de
leurs droits et de leurs intérêts. Cela ne peut pas être ignoré. Si le groupe des
employeurs de l’OIT a des doutes au sujet de l’interprétation juridique résultant de ce
corpus juridique d’orientations sur la question du droit de grève, qui constitue,
fondamentalement et intrinsèquement, le corollaire de la liberté syndicale et de la
protection du droit syndical, cela devrait être confirmé ou infirmé par un avis consultatif
faisant autorité qui apportera la clarification et la sécurité juridiques nécessaires pour
aller de l’avant. Et c’est la CIJ, au moyen d’un avis consultatif, qui peut fournir de telles
clarifications juridiques faisant autorité et une sécurité juridique. En outre, il est difficile
de comprendre l’idée qu’il sera plus aisé d’atteindre un consensus sur une action
5 Voir paragr. 14 du GB.343/INS/INF/5(Rev.1)
4
normative concernant cette question que sur un renvoi de la question à la CIJ. Les
mêmes vues opposées et mutuellement exclusives sur la portée juridique de la
convention nº 87 au sujet du droit de grève et l’autorité du corpus juridique établi de
longue date par les organes de contrôle, seraient un obstacle à un tel consensus. Les
tentatives passées pour traiter de cette question par le biais d’une action normative
ont échoué comme cela a été le cas en 1991 lorsque, d’après le Rapport d’information
du Bureau, le Conseil d’administration a tenté d’inscrire une action normative sur cette
question à l’ordre du jour de la Conférence « mais a finalement renoncé à le faire »6.
7. Au coeur du différend sur l’interprétation se trouve le refus d’un seul groupe, le groupe
des employeurs, d’accepter que le système de contrôle de l’OIT a considéré depuis
plus de 70 ans que la convention nº 87 protège le droit de grève. Il convient de
souligner qu’il ne s’agit pas d’un différend entre les travailleurs et les employeurs. Ce
différend est survenu du fait que le groupe employeurs conteste la validité juridique
des orientations formulées par le système de contrôle de l’OIT au sujet du droit de
grève et de la portée juridique de la convention nº 87. Cela repose sur la position
adoptée de longue date - position établie lorsque la liberté syndicale a été incluse dans
la Constitution de 1919 - selon laquelle le droit de grève des travailleurs et de leurs
organisations constitue, fondamentalement et intrinsèquement, le corollaire de la
liberté syndicale et de la protection du droit syndical. Le droit de grève est une action
ou un moyen (programme et activité) syndicaux essentiels par lesquels les travailleurs
et leurs organisations défendent leurs droits et leurs intérêts. A ce titre, toute mesure(s)
ou action prise en application de la convention nº 87 qui porte atteinte, restreint,
empêche ou interfère de toute autre manière avec l’exercice du droit de grève pour la
défense des intérêts et des droits des travailleurs relève du champ d’application et du
sens de la convention.
Une fois dans le champ d’application de la convention, il est sujet au contrôle normal
par les organes de contrôle de l’OIT, y compris la Commission d’experts, le Comité de
la liberté syndicale et la Commission de l’application des normes de la Conférence
(CAN).
8. Il y a lieu de rappeler que cette interprétation juridique et le corpus juridique
d’orientations qui en résulte ont été reconnus et appliqués de manière cohérente par
les organes de contrôle de l’OIT dans le respect des règles juridiques concernant
l’interprétation des traités. Cela a également été invoqué par les mécanismes
constitutionnels de plainte de l’OIT, tels que ceux mis en place en vertu des articles
24 et 26 de la Constitution de l’OIT. Ce corollaire indissociable entre le droit de grève
et la liberté syndicale a été également reconnu et utilisé par la Commission
d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale de l’OIT. En effet, les
Nations Unies et autres organes de droits humains ont affirmé qu’il a atteint le statut
de droit international coutumier.
9. Il convient également de rappeler qu’aucun groupe n’a remis en cause l’existence du
droit de grève protégé par la Constitution de l’OIT, qui est également dérivé du même
principe juridique de liberté syndicale et de protection du droit syndical. C’est une des
bases du contrôle des principes de la liberté syndicale du Comité de la liberté syndicale
(CLS). Les principes de base de la hiérarchie des normes et la nécessité d'une
cohérence et d'une rigueur institutionnelles dans l’application des principes juridiques
(une pierre angulaire du principe de l’état de droit) nécessiteraient une application
équivalente du principe constitutionnel concernant le droit de grève dans le cadre du
système de contrôle de l’OIT et doivent guider son action normative (y compris les
l’adoption de normes). A cet égard, il y aura de la confusion et incertitude juridiques
6 Voir le paragr. 44 du Rapport d’information du Bureau et d'autres commentaires sur cette question cidessous.
5
pour toute action normative de l’OIT sur le même sujet pour ne pas protéger le même
droit et, de la même manière, dont il est convenu qu’il est protégé par la Constitution.
10. Rejeter cette interprétation juridique largement reconnue et le corpus juridique
d’orientations qu’elle a produit dans le système de contrôle de l’OIT et au-delà, priverait
les travailleurs et leurs organisations de la protection dont ils bénéficient, depuis au
moins plus de 70 ans, pour la défense de leurs droits et de leurs intérêts, y compris
sous la convention nº 87. Cela fragiliserait également les fondements juridiques sur
lesquels d’autres organismes des Nations Unies, des juridictions régionales
compétentes dans le domaine des droits de l’homme et les décisions des hautes cours
de plusieurs Etats Membres de l’OIT se sont appuyés pour interpréter leurs propres
instruments et lois, qui ont tous compris que la liberté syndicale protégée par la
convention nº 87 protège aussi le droit de grève.7 C’est sur cette base qu’une approche
des relations professionnelles fondée sur les droits internationaux a servi de point
d’appui pour l’OIT8.
Justification de la proposition de recours au titre de l'article 37(1) de la
Constitution de l’OIT
11. L’article 37(1) de la Constitution prévoie que:
Toutes questions ou difficultés relatives à l'interprétation de la présente Constitution et
des conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite
Constitution, seront soumises à l'appréciation de la Cour internationale de Justice.
Il y a des difficultés relatives à l’interprétation d’une convention.
12. Au début de la Conférence internationale du Travail en 2012, le porte-parole du groupe
des employeurs à la Commission de l’application des normes (CAN) a annoncé que
son groupe refuserait d’accepter une liste de cas à contrôler à moins que le groupe
des travailleurs ne s’abstienne de proposer un cas sur la convention no°87 où la
Commission d’experts avait fait des observations concernant le droit de grève. En
outre, le groupe des employeurs a demandé l’insertion d’un « caveat » dans l’étude
d’ensemble de la Commission d’experts, qui cette même année avait confirmé sa
vision de longue date que la convention n° 87 de l’OIT protégeait l’exercice du droit de
grève. Ces deux conditions préalables, qui étaient contraires au droit et à la pratique
établis, ont été rejetées par le groupe des travailleurs. En réponse, le groupe des
employeurs a refusé de participer aux activités de contrôle de la CAN et, par
conséquent, la CAN n’a pas pu adopter une liste de cas à examiner et n’a donc pas
examiné de cas durant la Conférence. Depuis lors, le différend a persisté et continue
d’affecter le bon fonctionnement du système de contrôle.
Ce sont des difficultés que la CIJ, et non un tribunal interne, est censée
résoudre.
7 Id.
8 Voir la Déclaration de l’OIT de 1998 « … Attendu que l’OIT est l’organisation internationale mandatée par sa
Constitution, ainsi que l’organe compétent pour établir les normes internationales du travail et s’en occuper,
et qu’elle bénéficie d’un appui et d’une reconnaissance universels en matière de promotion des droits
fondamentaux au travail, en tant qu’expression de ses principes constitutionnels; Attendu que, dans une
situation d’interdépendance économique croissante, il est urgent de réaffirmer la permanence des principes et
droits fondamentaux inscrits dans la Constitution de l’Organisation ainsi que de promouvoir leur application
universelle … »
6
13. Comme le rapport INS/5 de la 344e Session du Conseil d’administration l’explique, au
cours des discussions de la Conférence qui ont abouti à l’amendement constitutionnel
de 1946, une distinction a été faite entre les questions susceptibles d’être portées
devant le tribunal et celles qui devaient être renvoyées à la CIJ. Si en principe – dans
l’hypothèse où un tribunal serait créé – toute question ou difficulté pourrait être portée
devant l’une ou l’autre de ces instances, cette décision étant laissée à l’appréciation
du Conseil d’administration, il a toutefois été admis que certaines questions relatives
à la portée ou à la signification de conventions internationales du travail ne justifiaient
peut-être pas la saisine du principal organe judiciaire des Nations Unies.
Par conséquent, on peut considérer que les questions ayant des implications
systémiques plus larges pour l’Organisation et au-delà pourraient être renvoyées à la
CIJ, tandis que celles qui sont essentiellement de nature technique et qui ont des
incidences limitées en dehors du cadre de la convention concernée pourraient, en
premier ressort, être portées devant le tribunal9.
14. Le droit de grève a été défini à plusieurs reprises comme « un corollaire indissociable »
du droit fondamental de la liberté syndicale protégé par la convention n° 8710. Les
difficultés d’interprétation concernent ici l’existence d’un droit fondamental. Il peut
difficilement être considéré comme étant de nature étroite ou technique. La résolution
du différend a manifestement des conséquentes importantes tant à l’intérieur qu’à
l’extérieur de l’Organisation. Comme l’a expliqué l’ancien Rapporteur spécial sur le
droit de réunion pacifique et la liberté d’association, « Le droit de grève est établi en
droit international depuis des décennies, dans des instruments internationaux et
régionaux, et est également inscrit dans les constitutions d’au moins 90 pays. Le droit
de grève a, de fait, intégré le droit international coutumier »11. On peut imaginer peu
de différends plus importants pour l’OIT et son agenda pour la justice sociale et pour
le monde du travail que celui-là.
15. En mettant de côté le fait évident qu'un tel tribunal n'existe pas, un tel différend n’aurait
pas sa place devant ce tribunal même s'il existait. Toute suggestion selon lequel le
différend actuel devrait se poursuivre pendant les quelques années nécessaires pour
convenir des modalités d’un tribunal interne et soumettre ensuite soumettre le
différend à ce dernier, bien qu'elle puisse être proposée de bonne foi, est totalement
injustifiée. Et, comme nous l'avons vu, il n'existe actuellement aucun consensus sur la
création d'un tel tribunal et sur le caractère définitif de sa sentence finale. Au contraire,
confronté à une telle question d'interprétation de nature juridique qui aura un impact
sur l'exercice d'un droit fondamental et sur le bon fonctionnement du système de
contrôle de l'OIT et au-delà, le recours le plus prudent et le plus approprié pour le
règlement est l'utilisation de l’article 37(1). L’article 37(1) en déclarant que des
difficultés « seront soumises » à l'appréciation de la CIJ crée une obligation juridique
directe de soumettre ce différend en matière d'interprétation d'une convention12.
Le différend ne sera pas résolu par d'autres moyens
A. La poursuite du dialogue ne résoudra pas la question
9 OIT, Plan de travail visant à renforcer le système de contrôle: propositions concernant de nouvelles
dispositions en vue d’assurer la sécurité juridique et point sur les autres mesures contenues dans le plan de
travail, 16 février 2022 (GB344/INS/5), paragr. 41.
10 OIT, Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale (Genève, 6e édition, 2018), paragr. 754.
11 Maina Kiai (Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association), Rapport du
Rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, paragr. 56, Doc. Nations Unies
A/71/385 (14 sep. 2016).
12 Voir paragr. 21 du document GB.343/INS/INF/5(Rev.1).
7
16. Comme déjà indiqué ci-dessus, en particulier depuis 2012, l’OIT, les gouvernements
et les partenaires sociaux ont essayé à plusieurs reprises de régler le différend
d’interprétation dans le cadre du dialogue social (se référer à la Note d’information
(Questions-Réponses) du groupe des travailleurs), de façon spécifique en ce qui
concerne le droit de grève, ainsi que le mandat et le fonctionnement des différents
organes du système de contrôle de l'OIT. Ces efforts n'ont pas permis de résoudre la
question du droit de grève. Il n'y a aucune raison de croire que la poursuite du dialogue
social permettra de sortir de cette impasse. Une action normative serait inappropriée
et, en tout état de cause, ne résoudra pas le différend, étant donné que la base
juridique de toute action normative de ce type devrait toujours être fondée sur les le
corpus juridique existant d’orientations du système de contrôle auquel le groupe des
employeurs s’oppose fondamentalement. Le groupe continue de contester la position
de la Commissions d’experts en ce qui concerne la convention nº 87 (et désormais
d’autres conventions).
17. Il ressort clairement de tous les efforts déployés jusqu'à présent, dont la réunion
tripartite de 2015 sur la question du droit de grève, que la nature du différend ne se
prête pas au dialogue comme premier et principal moyen de son règlement intégral et
définitif et que, à moins que le groupe des employeurs ne reconnaisse l'interprétation
juridique et le principe largement répandus concernant le lien fondamental entre le
droit de grève et la liberté syndicale et la protection du droit syndical par la convention
nº 87 ainsi que l’autorité du corpus juridique d’orientations des organes de contrôle y
compris la CEACR, la clarté et la sécurité juridiques par le recours à l'article 37(1)
seront forcément nécessaires13.
18. Il est également important de rappeler la discussion qui a eu lieu au sein du Conseil
d’administration de mars 2022 et ses résultats. Il y a eu un accord général sur la
justesse de l'analyse du document du Bureau selon laquelle la seule façon d'assurer
la sécurité juridique lorsqu’il s’agit d’interpréter une convention (ou la Constitution ellemême)
est le recours à des voies judiciaires, i.e. à travers l’article 37 (paragr. 1 ou
paragr. 2) de la Constitution, et que le dialogue social ne peut y pourvoir.
Les alternatives suggérées par le groupe des employeurs ne sont pas
appropriées
19. A plusieurs reprises, le groupe des employeurs a suggéré que le différend soit examiné
par la Conférence internationale du Travail, et que la Conférence pourrait fournir une
interprétation de la convention nº 87 ou produire des lignes directrices14. Cette idée n'a
cependant pas de base constitutionnelle et, dans la pratique, n'apportera pas la
sécurité juridique nécessaire pour régler ce différend juridique.
20. La question de savoir si la Conférence est la mieux placée pour adopter et interpréter
les conventions a été examinée dans un rapport soumis par le BIT au Conseil
d’administration en 1993. Le rapport a noté qu'aucune Conférence ne peut en lier une
autre. Le rapport s’est également demandé si l'interprétation par la Conférence ne
risquait pas d'aboutir à une « modification clandestine du signifié ». Le rapport a conclu
que l’« interprétation par la Conférence, si elle est parfaitement légitime, devrait
logiquement se couler dans le moule d’une nouvelle rédaction, c’est-à-dire d’une
13 Le Rapport d’information du Bureau mentionne au paragr. 15 les « positions fermes et intransigeantes ».
14 OIT, Projet de Procès-verbaux de la Section institutionnelle, 347e session, Genève, mars 2023, paragr.
228-229.
8
révision »15. En d’autres termes, si la Conférence n'est pas satisfaite de l'interprétation
d'un instrument, elle est libre de modifier cet instrument dans le cadre de sa fonction
législative. La Conférence a donc le droit de réviser les conventions pour exprimer des
significations exactes, sous réserve de la ratification des instruments révisés. Le
document poursuit en indiquant que le processus de révision a été mis en place
davantage pour adapter les conventions à de nouvelles situations (de modernisation)
plutôt que d'aborder les divergences d'interprétation16.
21. En effet, le pouvoir législatif de la Conférence devrait être utilisé de manière
prospective pour combler les lacunes en matière de couverture et de protection des
travailleurs et non de manière rétrospective pour limiter les droits déjà élaborés et
exercés par les travailleurs. Il est important de rappeler, qu’avant et depuis 2012, le
système de contrôle, le groupe gouvernemental et le groupe des travailleurs ont pris
le parti de soutenir les orientations de la CEACR et des organes de contrôle en la
matière, qui font autorité depuis longtemps, et le groupe des employeurs est le seul
groupe qui conteste encore la validité juridique fondamentale de ce corpus juridique
d’orientations. La Conférence n'a donc aucun rôle à jouer à cet égard.
22. Le groupe des employeurs a récemment – dans sa lettre du 13 septembre adressée
au Président du Conseil d’administration demandant d’organiser une session spéciale
du Conseil d’administration afin d’examiner cette question – proposé la discussion et
l'adoption d'un protocole comme autre moyen de recours afin de régler les difficultés
d'interprétation. Pour toutes les raisons déjà évoquées concernant la nature juridique
fondamentale du différend et le besoin primordial de clarification et de sécurité
juridiques en premier lieu, tout effort visant à utiliser le pouvoir législatif de la
Conférence afin de régler ce différend entraînera davantage de division et de confusion
en ce qui concerne les obligations juridiques des Etats Membres et des mandants au
titre de la convention nº 87, en tenant également compte du fait que les points de vue
et les perspectives juridiques sur le sujet sont diamétralement opposés, incompatibles
et inconciliables, il ne faut donc pas s'attendre à ce qu’une adoption consensuelle soit
facilitée sur un tel exercice législatif17.
23. Ce n’est pas l’endroit pour aborder spécifiquement la demande du groupe des
employeurs d’organiser une session spéciale, qui a été programmée18, si ce n’est pour
répéter qu’une action normative (et par le biais d'un protocole qui nécessitera de
nouvelles ratifications) sera un exercice infructueux à cet égard, car il n’est pas du tout
clair comment un protocole sur le droit de grève pourrait sortir du champ d’application
de la convention nº 87 (concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical)
les mesures prises par les Etats Membres qui impactent l’exercice du droit de grève
comme un moyen (action/activité/programme) par lequel les travailleurs et leurs
organisations défendent ou font avancer leurs droits et leurs intérêts. C’est uniquement
par l'interprétation de la convention n° 87, en respectant le sens de son texte, de son
objet et de son but, conformément à la Convention de Vienne sur le droit des traités,
que la clarté et la sécurité juridiques peuvent être assurées avec autorité. En tout état
de cause, il existe déjà un corpus élaboré d’orientations formulées sur la portée
15 OIT, Article 37, paragraphe 2, de la Constitution et interprétation des conventions internationales du travail,
Conseil d’administration, 256e session, mai 1993, GB256/2/2, paragr. 22-4.
16 Un document du Conseil d’administration de 2009, paragr. 31-33, reprend le document de 1993.
17 Outre les raisons juridiques et politiques justifiant le rejet d’un protocole, la proposition du groupe des
employeurs pour une action normative en 2024 est à la fois juridiquement, techniquement et politiquement
impossibles. Les procédures pour mettre un point normatif à l’ordre du jour n’ont pas été suivies et il est st
inconcevable que le Bureau puisse se préparer à un tel exercice sans avoir recours aux règles et à l’examen
habituel en la matière à l’OIT.
18 Voir https://www.ilo.org/gb/GBSessions/GB349bis/lang--fr/index.htm.
9
juridique, le contenu et la signification du droit de grève concernant la Convention
n° 87, qui ont été utilisées en faveur de la protection des droits humains, depuis au
moins 70 ans, et qui ne peuvent être oubliées. Juridiquement et sur le plan pratique,
tout effort visant à résoudre ces difficultés d'interprétation par le biais d'une action
normative, tant que demeurent le manque de clarté et l’insécurité juridiques suscites
par la contestation des employeurs, ne peut pas traiter et ne traitera pas efficacement
la question de la portée juridique de la convention nº 87 s’agissant du droit de grève
et ne traitera donc pas de la nature et de l'étendue des difficultés d'interprétation
actuelles.
24. En outre, démarrer une action normative sur cette question conduira à accroître
l’insécurité juridique et le manque de cohérence, entraînant une plus grande confusion
en ce qui concerne les obligations des Etats Membres, ce qui sera la cause d'un
exercice très conflictuel, qui plutôt que d’aboutir à un plus grand consensus, fragilisera
le consensus et également les droits humains et la justice sociale, et le mandat de
l‘OIT. A cet égard, le rappel d'un avis précédent figurant dans les procès-verbaux du
Conseil d’administration de 1930 est instructif;
« Le Directeur ne voudrait pas voir renaitre à propos de cette question des
débats que le Conseil connaît bien, au sujet du pouvoir d'interprétation du
Conseil d'administration et de la Conference, ainsi que du rôle du Bureau
international du Travail lorsqu'il donne des informations sur l'interprétation des
conventions. Il a paru toutefois utile, à l'occasion de la question soulevée, de
rappeler qu'aux termes de l'article 423 du Traité de Paix, seule la Cour
permanente de Justice a qualité pour donner des interprétations autorisées de
conventions. Toutes les autres interprétations, même celles de la Conference,
peuvent donner lieu à des contestations. Aussi croit-il qu'il serait utile de rappeler
aux Etats la possibilité de recourir à la Cour permanente de Justice
internationale. On a dit qu'il s'agissait d'un mécanisme coûteux et difficile à
mettre en mouvement. Mais, même si la procédure est coûteuse et lente, ii vaut
mieux recourir à la Cour que de rester dans l'incertitude »19. (Souligné par
l’auteur)
25. La Constitution de l’OIT d’après-guerre ne diffère pas sur ce point. L’article 37(1) est
clair: « Toutes questions ou difficultés relatives à l'interprétation de la présente
Constitution et des conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de
ladite Constitution, seront soumises à l'appréciation de la Cour internationale de
Justice. » Il n'y a pas en soi de rôle d'interprétation assigné aux membres de la
Conférence.
Justification de la proposition de soumettre à la Cour les questions ou les
différends juridiques
Compétence de la CIJ pour rendre des avis consultatifs en ce qui concerne
l'OIT
26. L’OIT peut demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice (CIJ) sur
la base de sa propre Constitution ainsi que sur la base de l‘Accord conclu entre les
19 Conseil d’administration de l’OIT, Procès-verbaux, 50e session, oct. 1930, pp. 656-57.
10
Nations Unies et l’OIT. L’Accord conclu entre les Nations Unies et l’OIT permet à la
Cour mondiale, si elle est sollicitée, de se prononcer sur des questions juridiques qui
se poseraient dans Ie cadre des activités de l’OIT. L’article 9 prévoit à la sous-section
2: « L'Assemblée générale autorise I'Organisation internationale du Travail à
demander des avis consultatifs à Ia Cour internationale de Justice sur des questions
juridiques qui se poseraient dans Ie cadre de son activité, à l'exception de celles
concernant les relations réciproques entre l'Organisation internationale du Travail et
des Nations Unies ou d'autres institutions spécialisées. » (Souligné par l’auteur)
La ou les question devrai(ent) conduire à un règlement complet du différend juridique
27. En 2014, le Bureau a proposé les questions suivantes lorsque le Conseil
d’administration de l’OIT examinait la question du renvoi de ce différend devant la CIJ :
1) Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par
la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948?
2) La Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations de l’OIT était-elle compétente pour: a) déterminer que le
droit de grève découle de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, et b) préciser, lors de l’examen de
l’application de la convention, certains aspects du champ d’application du
droit de grève, des limites de celui-ci et des conditions dans lesquelles il peut
être exercé de façon licite?
28. Un examen objectif du débat qui a eu lieu depuis 2012 montrera que la détermination
juridique de ces deux questions couvre tous les aspects nécessaire de ce différend
d'interprétation. Bien qu'une réponse affirmative à la première question soutiendrait
nécessairement les travaux du système de contrôle de l’OIT, une déclaration claire sur
mandat de contrôle et de fourniture d’orientations sur l’application de la Convention
contribuerait grandement à empêcher d'autres attaques contre le système. Obtenir la
sécurité juridique quant au mandat du système de contrôle de l’OIT, et en particulier
de la Commission d’experts, est donc décisif pour le règlement du différend. La
contestation des employeurs, bien qu’initialement axée sur le droit de grève, a été de
remettre en cause de manière persistante et fondamentale la capacité de
l'Organisation de faire appliquer pleinement ses conventions par les Etats Membres
par l’intermédiaire de son système de contrôle – ce qui a toujours nécessité une part
d'interprétation. La ou les question(s) finale(s) doit(vent) donc également avoir une
vision claire du mandat de la Commission d’experts concernant ses orientations sur
l’application de la convention.
29. Il est également noté que la formulation finale de la ou des question(s), tout comme le
renvoi lui-même, doit faire l’objet d’une décision du Conseil d’administration. La ou les
question(s) qui seront finalement adoptées par le Conseil d’administration doit(vent)
être telle(s) qu’en cas de succès, elle(s) règlera(ont), par voie de confirmation, la
position adoptée de longue date, depuis que la liberté syndicale a été incluse à la
Constitution de 1919, que le droit de grève pour les travailleurs et leurs organisations
constitue intrinsèquement le corollaire de la liberté syndicale et de la protection du droit
syndical, car c’est un moyen essentiel (action/activité/programme) par lequel les
travailleurs et leurs organisations défendent leurs droits et leurs intérêts, ce qui signifie
également que toute mesure ou action liée à l’application de la convention nº 87 qui
porte atteinte, restreint, empêche, ou interfère de toute autre manière avec l’exercice
du droit de grève pour la défense des intérêts et des droits des travailleurs relève de
11
la convention et ainsi est sujette à l’examen normal par les organes de contrôle de
l’OIT y compris la Commission d’experts, le Comité de la liberté syndicale et la CAN.
30. Il a été reconnu qu'indépendamment de ces questions soulevées, la pratique de la CIJ
montre que: « Il appartient à la Cour d’établir objectivement ce sur quoi porte le
différend entre les parties en circonscrivant le véritable problème en cause et en
précisant l’objet des griefs du demandeur. La Cour examine à cet effet la requête, ainsi
que les exposés écrits et oraux des parties, tout en consacrant une attention
particulière à la formulation du différend utilisée par le demandeur. Elle tient compte
des faits que celui-ci invoque à l’appui de ses demandes. Il s’agit là d’une question de
fond, et non de forme»20 (Souligné par l’auteur).
Les orientations de la CEACR, qui font autorité depuis longtemps, concernant
le droit de grève tel qu'il est protégé par la C87
Le mandat de la Commission d'experts de l'OIT
31. Le paragraphe 29 du rapport 2015 de la Commission d'experts décrit le mandat de la
Commission d'experts comme suit,21
« La Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations est un organe indépendant établi par la Conférence
internationale du Travail; ses membres sont nommés par le Conseil
d’administration. Elle est constituée de juristes ayant pour mission d’examiner
l’application des conventions et recommandations de l’OIT dans les Etats
Membres de cette Organisation. La commission d’experts procède à une
analyse impartiale et technique de la façon dont les conventions ratifiées sont
appliquées dans la législation et la pratique par les Etats Membres, en gardant
à l’esprit les diverses réalités nationales et les différents systèmes juridiques.
Ce faisant, elle examine la portée juridique, le contenu et la signification des
dispositions des conventions. Ses avis et recommandations ont un caractère
non contraignant, leur objet étant de guider l’action des autorités nationales. Ils
tirent leur valeur persuasive de la légitimité et de la rationalité du travail de la
commission qui est basé sur son impartialité, son expérience et son expertise.
Le rôle technique de la commission et son autorité morale sont largement
reconnus, en particulier du fait qu’elle poursuit sa tâche de contrôle depuis plus
de quatre-vingt-cinq ans et en raison de sa composition, de son indépendance
et de ses méthodes de travail qui se fondent sur un dialogue continu avec les
gouvernements et prennent en compte les informations fournies par les
organisations d’employeurs et de travailleurs. Cela se reflète dans l’intégration
des avis et recommandations de la commission dans les législations nationales,
dans des instruments internationaux et dans les décisions des tribunaux. Cela
20 Voir les paragraphes 41 et 42 de l'affaire Qatar contre EAU (2018) et la référence à... " (Application de la
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme et de la Convention internationale
sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Ukraine c. Fédération de Russie), exceptions
préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2019 (11), p. 575, par. 24 ; Immunités et procédures pénales (Guinée
équatoriale c. France), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J Recueil 2018 (I), p. 308-309, par. 48 https://www.icjcij.
org/sites/default/files/case-related/172/172-20210204-JUD-01-00-BI.pdf La pratique et les arrêts de la CIJ
doivent également être lus à la lumière de l'accord spécifique entre les Nations Unies (ONU) et l'OIT concernant
la compétence de la CIJ.
21 Voir également la déclaration conjointe du 23 février 2015 du groupe des travailleurs et du groupe des
employeurs.
https://www.ilo.org/wcmsp5/groups/public/---ed_norm/---
relconf/documents/meetingdocument/wcms_351492.pdf
12
se reflète dans l’intégration des avis et recommandations de la commission
dans les législations nationales, dans des instruments internationaux et dans
les décisions des tribunaux ».
Respect et soutien des orientations de la CEACR qui font autorité
32. La CSI et ses affiliés respectent et soutiennent les orientations de longue date des
organes de contrôle de l'OIT sur le droit de grève tel qu'il est protégé par la Convention
87 de l'OIT, ainsi que l'approche interprétative adoptée par la CEACR pour parvenir à
sa détermination, telle qu'articulée dans l'étude d’ensemble de 201222.
33. Selon la Commission d'experts, le droit de grève découle de la Convention 87. La
Commission a réaffirmé cette conclusion juridique inévitable, conformément à une
lecture téléologique (compte tenu du texte, de l'objet et du but de la convention) de la
portée et du sens de la Convention. L'avis mûrement réfléchi de la Commission
souligne que: « La grève constitue un moyen essentiel permettant aux travailleurs et
à leurs organisations de défendre leurs intérêts; il existe cependant différentes
opinions sur le droit de grève. Si la grève constitue certes un droit fondamental, elle
ne constitue pas une fin en soi, mais un recours ultime des organisations de
travailleurs, en raison du fait qu’elle est lourde de conséquences non seulement pour
les employeurs, mais aussi pour les travailleurs, leurs familles et leurs organisations
ainsi que pour des tiers dans certains circonstances. En l’absence d’une disposition
expresse dans la convention no. 87, c’est essentiellement sur la base de l’article 3 de
la convention qui consacre le droit des organisations de travailleurs d’organiser leurs
activités et de formuler leur programme d’action et de l’article 10 qui établit comme
objectif de ces organisations de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs
que fut développé progressivement – comme ce fut d’ailleurs le cas en ce qui concerne
les autres dispositions de la convention – par le Comité de la liberté syndicale en tant
qu’organe tripartite spécialisé (depuis 1952) et par la commission d’experts (depuis
1959, prenant en considération essentiellement les principes établis par le comité) un
certain nombre de principes sur le droit de grève »23. Ceci doit également être appliqué
à la lumière de l'article 8 de la Convention qui, tout en reconnaissant que les
organisations sont tenues, dans l'exercice de ces droits, de respecter la loi, stipule que
la loi du pays ne doit pas être de nature à porter atteinte, ni être appliquée de manière
à porter atteinte, aux droits protégés par la Convention.
34. Il convient de souligner que l'étude d’ensemble de 1959, la première sur la convention
87, une dizaine d'années après son adoption, a constaté qu'en plus d'aller à l'encontre
des articles 8 et 10 de la Convention, « l'interdiction de la grève des travailleurs, autres
que les fonctionnaires risque de constituer une limitation importante des possibilités
d'action des organisations syndicales »… contraire à l'article 3.
35. Sur la question très débattue des travaux préparatoires et sur le fait s'ils soutiennent
ou non la protection du droit de grève sous la Convention 87, nous nous faisons l'écho
de la position de la Commission d'experts selon laquelle « ... l’absence d’une
disposition expresse n’est pas déterminante puisque les termes de la convention
doivent être interprétés à la lumière de son objet et de son but ». Comme les experts
l'ont abondamment indiqué, les travaux préparatoires, en tant que source
d'interprétation dans leurs travaux relatifs à l'application de la Convention par un État
membre, « ... peuvent être écartés au profit des autres règles d’interprétation,
notamment, dans ce cas spécifique, de la pratique ultérieurement suivie pendant plus
22 Voir les paragraphes 117-127 de l’étude d’ensemble 2012 de la CEACR de l'OIT.
23 Voir le paragraphe 117 de l’étude d’ensemble
13
de cinquante-deux années (voir art. 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit
des traités) » et que « ... le processus permettant de déterminer s’il y a respect ou non
d’un droit de grève général implique systématiquement un examen des circonstances
spécifiques dans le contexte desquelles la commission est appelée à déterminer le
champ d’application et les modalités de ce droit». Cette interaction et ce dialogue entre
les États membres ratifiants et la CEACR, de manière forte et unique et sur une base
continue, comprennent les orientations faisant autorité de la CEACR avec la pratique
ultérieure des États membres ratifiants, ce qui conduit à des changements ou à des
amendements dans le droit et la pratique, concernant leur législation et les institutions
du marché du travail, conformément aux recommandations, commentaires et
conclusions spécifiques de la Commission d'experts.
36. En outre, l'analyse juridique de 2014 de la CSI sur ce sujet mettait déjà en garde contre
une utilisation excessive des travaux préparatoires de la convention 87, indiquant que
« la question posée aux mandants dans le questionnaire portait uniquement sur la
question de savoir si le droit d'association des fonctionnaires préjugerait de la question
du droit de grève de ces fonctionnaires. Il y avait une présomption de l'existence du
droit de grève inhérente à cette question, qui visait à traiter uniquement du droit de
grève des fonctionnaires et non du droit de grève de tous les travailleurs » En tout état
de cause, il n'y a pas eu de vote sur cette question, ce qui permet d'affirmer que les
travaux préparatoires ne sont pas déterminants.
37. En ce qui concerne la question de la pratique ultérieure et la nature des orientations
fournies par la CEACR conformément à son mandat, la Commission a déclaré que
chaque année, il : « examine de nombreux cas individuels portant sur les dispositions
nationales réglementant les grèves, le plus souvent sans contestation de la part des
gouvernements concernés, qui en général adoptent des mesures pour donner suite
aux commentaires de la commission d’experts. Au fil des années, les organes de
contrôle ont précisé une série d’aspects concernant l’exercice pacifique du droit de
grève, de la finalité et des conditions de licéité de la grève qui peuvent être résumés
comme suit: i) le droit de grève est un droit dont doivent jouir les organisations de
travailleurs (syndicats, fédérations et confédérations); ii) en tant que moyen essentiel
pour la défense des intérêts des travailleurs au travers de leurs organisations, les
catégories de travailleurs susceptibles d’être privées de ce droit et les restrictions
susceptibles d’être mises à son exercice par la loi ne peuvent être que limitées; iii) la
grève doit avoir pour but de promouvoir et de défendre les intérêts économiques et
sociaux des travailleurs; et iv) l’exercice légitime du droit de grève ne peut entraîner
de sanctions d’aucune sorte, lesquelles seraient assimilables à des actes de
discrimination antisyndicale. Dès lors, sous réserve des restrictions autorisées,
l’interdiction générale de la grève est incompatible avec la convention, mais les
organes de contrôle admettent l’interdiction des grèves sauvages. De plus, les grèves
sont souvent déclenchées par les fédérations et confédérations qui devraient, selon la
commission, se voir reconnaître le droit de grève. Par conséquent, les législations qui
leur interdisent ce droit ne sont pas compatibles avec la convention »24.
38. Comme nous l'avons déjà indiqué, La Commission exerce ses fonctions en évaluant,
pays par pays, l'application de la Convention en droit et en pratique. Dans une affaire
où la Commission a été saisie à la suite de certaines décisions de la Cour de justice
des Communautés européennes (CJCE) concernant l'exercice du droit de grève, la
24 Voir le paragraphe 122 de l’étude d’ensemble de 2012.
14
Commission a rappelé... que son mandat se limite à examiner l’application des
conventions dans un Etat membre donné25.
39. La CEACR a également souligné, au regard des larges références au droit de grève
dans la législation de la grande majorité des pays et par un nombre important de
constitutions, ainsi que par plusieurs instruments internationaux et régionaux et en
justifiant sa propre approche en la matière, qu'elle n’avait « jamais considéré que le
droit de grève constituait un droit absolu ou illimité et qu’elle a cherché à délimiter
l’étendue du droit de grève pour pouvoir déterminer les cas d’abus et de se prononcer
sur les sanctions qu’ils peuvent entraîner »26.
40. Il convient donc de noter que la CEACR et les organes de contrôle devront continuer
à contrôler l'application de la Convention 87 pour s'assurer que les mesures prises
dans le cadre de sa mise en oeuvre n'aboutissent pas à des abus, en portant atteinte,
en interdisant, en entravant ou en interférant de toute autre manière avec la liberté
syndicale en ce qui concerne le droit de grève.
Positions d'autres instruments internationaux et régionaux de protection des humains
concernant la liberté d'association et le droit de grève
41. Les instruments et organes internationaux et régionaux de défense des droits humains
ont également eu l'occasion de se prononcer sur la liberté d'association et le droit de
grève des travailleurs et de leurs organisations et/ou de donner des orientations à ce
sujet.
42. La Commission africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) a adopté une
résolution sur les droits économiques, sociaux et culturels en Afrique au regard des
articles 14, 15, 16, 17, 18, 21 et 22 de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples, en précisant que l'article 15 sur le droit au travail inclut « droit à la liberté
d’association, y compris le droit de négociation collective, de grève et d'autres droits
organisationnels et syndicaux pertinents »27.
43. La Cour interaméricaine des droits de l'homme a déclaré dans un avis consultatif
récent que : « le droit de grève ... est l'un des droits fondamentaux des travailleurs et
de leurs organisations, car il constitue un moyen légitime de défendre leurs intérêts
économiques, sociaux et professionnels. Les États doivent donc protéger l'exercice de
ce droit par la loi »28.
44. L'Observation générale n° 23 (2016) sur l'article 7 du Pacte international relatif aux
droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) prévoit que « Le droit qu’a toute
personne de jouir de conditions de travail justes et favorables est reconnu dans le
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et d’autres
instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme ainsi que dans
des instruments juridiques internationaux portant sur des sujets similaires, en
particulier les conventions et les recommandations de l’Organisation internationale du
Travail (OIT). C’est une composante importante des droits liés au travail consacrés
par le Pacte, et c’est le corollaire du droit au travail en tant qu’il est librement choisi et
accepté. Dans le même ordre d’idées, les droits syndicaux, la liberté syndicale et le
25 Voir le paragraphe 128 de l’étude d’ensemble de 2012 concernant les commentaires sur les décisions de la
Cour de justice de l'Union européenne (Viking, Laval, Ruffert et Luxembourg) sur les droits relatifs à la liberté
d'association et la reconnaissance effective de la négociation collective.
26 Voir le paragraphe 119 de l’étude d’ensemble de 2012.
27 https://africanlii.org/akn/aa-au/statement/resolution/achpr/2004/73/fra@2004-12-07
28 https://corteidh.or.cr/docs/comunicados/cp_47_2021_eng.pdf
15
droit de grève sont déterminants pour l’instauration, la préservation et la défense de
conditions de travail justes et favorables… »
45. L'interprétation juridique et l'ensemble des orientations juridiques relatives au principe
selon lequel le droit de grève est un moyen essentiel (activité/programme) lié à la
liberté syndicale et à la protection du droit syndical pour défendre et promouvoir les
droits et les intérêts des travailleurs et de leurs organisations sont également protégés
par les instruments européens relatifs aux droits de l'homme et par les décisions de la
Cour européenne des droits de l'homme.
Conclusion
46. Tout d'abord, nous apprécions le rapport du Bureau en tant que rapport d’information
important et précieux pour la discussion suite à la lettre du groupe des travailleurs du
12 juillet 2023 demandant le renvoi du différend de longue date sur le droit de grève à
la CIJ en vertu de l'article 37(1
47. À cet égard, l'équité procédurale et la nécessité d'être exhaustif en ce qui concerne la
préparation des informations et le temps nécessaire à un examen approprié
exigeraient que notre demande déposée le 12 juillet soit traitée séparément de toute
demande ultérieure, telle que celle déposée par le groupe des employeurs le 13
septembre, qui propose des alternatives diamétralement opposées à notre demande.
Pour les mêmes raisons, il est important que notre demande, qui s'apparente à une
plainte constitutionnelle, ne soit pas bloquée par des considérations procédurales, y
compris des considérations de commodité. Chaque proposition doit être considérée
séparément et traitée sur le fond.
48. A cet égard, nous sommes en accord avec la résolution proposée dans le rapport
comme bonne base de discussion.
49. Deuxièmement, l'opinion de longue date, telle qu'elle a été exprimée lorsque la liberté
syndicale a été incluse dans la Constitution de 1919, selon laquelle le droit de grève
des travailleurs et de leurs organisations est un corollaire fondamental et intrinsèque
de la liberté syndicale et de la protection du droit syndical, a trouvé son expression
dans le champ d'application de divers instruments nationaux, internationaux et
régionaux relatifs aux droits humains qui fournissent des orientations et des décisions
faisant autorité en matière de protection des travailleurs. La pratique de l'OIT et de ses
organes de contrôle à cet égard, y compris la CEACR, le CLS et la CAN, est conforme
à cette interprétation. La remise en cause de cette interprétation juridique par le groupe
des employeurs et la crise institutionnelle qu'elle a provoquée au sein de l'OIT
nécessitent clarté et certitude juridiques. Seule la CIJ peut régler cette question de
certitude et de clarté juridiques aux implications si vastes.
50. La Cour a déclaré à propos de l'interprétation des traités que « selon le paragraphe 1
de l’article 31 de la convention de Vienne, ‘[u]n traité doit être interprété de bonne foi
suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la
lumière de son objet et de son but’. L’interprétation faite par la Cour doit prendre en
compte l’ensemble de ces éléments considérés comme un tout »29. La Cour a
également déclaré que : « dans sa jurisprudence, elle a pris en compte la pratique des
comités établis en vertu de conventions relatives aux droits de l’homme, ainsi que la
29 Voir le paragraphe 78 de l'affaire Qatar c. EAU et les références à (Délimitation maritime dans l'océan Indien
(Somalie c. Kenya), exceptions préliminaires, arrêt, C.I.J. Recueil 2017, p. 29, par. 64) https://www.icjcij.
org/sites/default/files/case-related/172/172-20210204-JUD-01-00-BI.pdf
16
pratique des cours régionales des droits de l’homme, dans la mesure où celle-ci était
pertinente aux fins de l’interprétation …»30.
51. La Commission d'experts et le système de contrôle de l'OIT ont se sont appuyés à
juste titre sur les règles d'interprétation pour interpréter la convention 87 et en faire
dériver avec autorité la protection du droit de grève. Face à la contestation de la validité
de leurs orientations faisant autorité, il appartient à la CIJ, qui s'est vu confier un rôle
à part entière dans la Constitution de l'OIT pour trancher de tels différends
d'interprétation, de les régler définitivement afin de garantir que l'OIT continue
d'assumer son mandat de justice sociale. La CIJ a joué ce rôle de manière crédible
dans le passé. Toute tentative d'utiliser le pouvoir législatif de l'OIT pour régler ce
différend d'interprétation serait contraire à l'article 37(1) et sera inappropriée, d'autant
plus si une telle activité normative est lancée avant d'avoir obtenu la clarté et la sécurité
juridiques nécessaires sur cette question. Le fait d'imposer un tel effort ne sera qu'une
tentative évidente de contourner un dossier de 70 ans ou des conclusions et
recommandations d'experts, bipartites et tripartites, sur le sujet du droit de grève, ce
qui n'est pas dans l'intérêt de l'OIT et de ses mandants, et n'apportera pas non plus la
clarté et la certitude juridiques nécessaires.
30 Voir le paragraphe 77 de l'affaire Qatar c. EAU y compris les références suivantes (Ahmadou Sadio Diallo
(République de Guinée c. République démocratique du Congo), indemnisation, arrêt, C.I.J. Recueil 2012 (l), p.
331, par. 13 ; p. 334-335, para. 24 ; p. 337, par. 33, et p. 339-340, par. 40 ; Questions relatives à l'obligation de
poursuivre ou d'extrader (Belgique c. Sénégal), arrêt, C.I.J. Recueil 2012 (11), p. 457-458, para. 101 ; Ahmadou
Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique du Congo), fond, arrêt, I.CJ. Reports 2010 (11),
pp. 663-664, para. 66 ; Conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans le territoire palestinien occupé,
avis consultatif, C.I.J. Recueil 2004 (I), p. 179, par. 109, et pp. 192-193, par. 136).
Document no 25
OIE, Commentaires sur le rapport d’information préparé
par le BIT intitulé «Suite à donner à la demande du groupe
des employeurs visant à ce que la question du droit de
grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative,
à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence
internationale du Travail», datés du 24 octobre 2023
24 octobre 2023
Commentaires sur le rapport d’information préparé par le Bureau intitulé « Suite à donner à
la demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit
inscrite d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la
Conférence internationale du Travail »
Résumé
Les employeurs sont convaincus que pour résoudre le différend de longue date sur
l'interprétation du droit de grève dans le contexte de la convention sur la liberté syndicale et
le droit d'organisation (C87), il faut s'efforcer de trouver une solution solide et durable fondée
sur le dialogue social et déterminée par les mandants tripartites de l'OIT, plutôt que de
recourir à des moyens externes pour obtenir la solution la plus rapide possible.
Les employeurs ne contestent pas le droit de grève au niveau national, qui est une réalité dans
la plupart des pays. Cependant, les employeurs sont fermement convaincus, et l'ont toujours
affirmé par le passé, que le droit de grève n'est pas prévu ou réglementé dans la convention
C87 ou dans toute autre convention de l'OIT. D'autres mandants de l'OIT ainsi que les organes
de contrôle des normes de l'OIT, y compris la Commission d'experts (CEACR), ont reconnu que
le droit de grève n'est pas explicitement énoncé ou reconnu dans la convention C87 ou tout
autre instrument de l'OIT. Cela signifie qu'il peut y avoir une lacune réglementaire dans le
corpus de normes de l'OIT sur le droit de grève et que le seul moyen de combler cette lacune
serait de fixer des normes au sein de la Conférence internationale du travail (CIT). Jusqu'à
présent, la CIT n'a pas tenté de fixer des normes relatives au droit de grève ou à l'action
syndicale.
Les employeurs considèrent que l'élaboration de normes est l'étape la plus évidente, la plus
appropriée et la plus logique pour définir des règles de l'OIT faisant autorité en matière de
droit de grève et résoudre ainsi le différend sur l'interprétation. L'action normative est
inhérente au mandat principal de l'OIT et reflète les valeurs fondamentales de l'OIT que sont
le tripartisme et le dialogue social. Seule l'élaboration de normes garantira que tous les
mandants de l'OIT peuvent s'engager activement dans le processus, que tout résultat obtenu
sera fondé sur un consensus ou au moins une large majorité, et que tout résultat adopté est
universellement pertinent et accepté.
Plus concrètement, les employeurs proposent que la Conférence internationale du travail
adopte un instrument juridiquement contraignant sur le droit de grève ou, plus largement, sur
l'action syndicale, en particulier un protocole à la convention C87. L'objectif de ce protocole
serait de déterminer avec autorité un droit de grève dans une norme internationale du travail,
ainsi que sa portée et ses limites, et de mettre ainsi un terme au différend actuel sur les
interprétations du droit de grève.
Les inconvénients ou les difficultés liés à l'établissement de normes à une date rapprochée ne
devraient pas être une raison pour ne pas poursuivre l'option de l'établissement de normes et
[Traduction non officielle]
laisser la définition des règles sur le droit de grève à des institutions externes telles que le
commission d'experts et la Cour internationale de justice (CIJ).Bien que les employeurs aient
proposé que l'action normative ait lieu le plus tôt possible, c'est-à-dire à la CIT en 2024, ils ne
s'opposeraient pas à une CIT ultérieure à condition que la CIJ ne soit pas saisie. Il est important
qu'aucune décision sur le renvoi à une solution externe ne soit prise sans que la présente
proposition n'ait été dûment examinée et débattue.
3
Table des matières
I. Introduction ................................................................................................................. 2
II. Remarques générales ................................................................................................... 2
III. Proposition d’action normative sur le droit de grève ................................................... 3
IV. Action normative sous la forme d'un protocole ............................................................. 8
V. Inscription d'une question normative à l'ordre du jour de la CIT ............................................. 10
VI. Observations finales .................................................................................................... 12
I. Introduction
Le 13 septembre 2023, le Président du Conseil d'administration a décidé que la 349ebis
session spéciale du Conseil d'administration se tiendrait le 10 novembre pour discuter de la
proposition des travailleurs de saisir la Cour internationale de justice (CIJ). Cette décision a été
prise en dépit des préoccupations exprimées par plusieurs groupes concernant l'ordre du jour
de cette session spéciale. En conséquence, la vice-présidente du groupe des employeurs a
annoncé au président du Conseil d'administration une lettre signée par 14 membres titulaires
du groupe des employeurs demandant la tenue d'une autre session spéciale du Conseil
d'administration en vertu de l'article 3.2.2 du règlement du Conseil d'administration du BIT.
L'objectif de cette session extraordinaire serait de discuter de l'inclusion urgente d'une
question normative sur le droit de grève ou, plus largement, sur l'action syndicale, à l'ordre du
jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail (CIT) en 20241.
Le 11 octobre 2023, le directeur général de l'OIT a envoyé à tous les États membres de l'OIT,
avec une invitation à formuler des commentaires, un rapport d'information préparé par le
Bureau intitulé "Suite à donner à la demande du groupe des employeurs d'inscrire d'urgence
un point normatif sur le droit de grève à l'ordre du jour de la 112e session de la Conférence
internationale du Travail".
En tant que secrétariat du groupe des employeurs à l'OIT, l'Organisation internationale des
employeurs (OIE) présente ici des commentaires préliminaires sur le rapport d’information.
Nous nous réservons la possibilité d'actualiser et de compléter notre position à la lumière de
toute consultation ultérieure avec le groupe des employeurs et des réactions reçues de celuici,
ainsi que des discussions qui auront lieu lors de la 349ebis session spéciale sur la proposition
des travailleurs le 10 novembre et de la 349eter session spéciale sur la proposition des
employeurs le 11 novembre 2023.
II. Remarques générales
Tout d'abord, l'OIE souhaite souligner que le titre du rapport d’information est inexact. Le
gouvernement de Türkiye a envoyé une lettre au Directeur général le 22 septembre 2023
indiquant qu'il soutenait la demande des employeurs. Par conséquent, à l'instar du rapport
1 Lettre des employeurs au président du Conseil d’administration, Demande de 14 membres titulaires du groupe des
employeurs pour une réunion spéciale du Conseil d'administration en vertu de l'article 3.2.2 du Règlement du Conseil
d'administration de l'OIT visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à
l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail, 12 septembre 2023.
4
d’information relatif à la proposition des travailleurs2 qui indique les gouvernements qui la
soutiennent, le document de référence pour la proposition des employeurs aurait dû être
intitulé comme suit : "Suite à donner à la demande du groupe des employeurs et du
gouvernement de Türkiye visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite d'urgence,
pour discussion normative, à l'ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale
du Travail".
En outre, l'OIE note le traitement inégal des deux rapports d’information et des deux
sessions spéciales. En particulier, contrairement au rapport d’information sur la proposition
des travailleurs3 qui invite explicitement les États membres de l'OIT à transmettre leurs
commentaires avant la date limite fixée au 6 octobre 2023, le rapport d’information sur la
proposition des employeurs n'invite pas les mandants tripartites de l'OIT à faire part de leurs
commentaires. Seule la lettre du Directeur général, envoyée séparément le même jour,
indique que les commentaires doivent être adressés au département NORMES4. Toutefois,
cette lettre ne mentionne pas de délai précis et indique que les commentaires ne seront
disponibles que dans leur langue d'origine, sans résumé. Les employeurs considèrent que,
malgré le peu de temps disponible avant la session spéciale du Conseil d'administration, une
date limite aurait dû être fixée pour les commentaires sur la proposition des employeurs, et
que le Bureau devrait en tout état de cause préparer un résumé des commentaires reçus. Les
employeurs soulignent que le Conseil d'administration doit être informé de manière égale des
opinions des mandants de l'OIT sur les deux propositions afin de pouvoir prendre une décision
significative, en particulier parce que les deux propositions représentent des approches liées,
mais mutuellement exclusives, de la question du droit de grève.
III. Proposition d’action normative sur le droit de grève
1. L'action normative est inhérente au mandat principal de l'OIT et a été le moyen
privilégié de créer des règles claires et contraignantes en ce qui concerne le travail et
les questions sociales
La Déclaration du centenaire de l'OIT déclare que “l’élaboration, la promotion, la ratification
des normes internationales du travail et le contrôle de leur application revêtent une
importance fondamentale pour l’OIT. L’Organisation doit, de ce fait, posséder et promouvoir
un corpus clairement défini, solide et à jour de normes internationales du travail et améliorer
la transparence”5.
Chaque année presque, la CIT traite de questions normatives, que ce soit la révision ou
l'adoption de nouvelles normes internationales liées au monde du travail. Au cours du dernier
centenaire, l'OIT a adopté au total 405 instruments, dont 191 conventions, 6 protocoles et 208
recommandations. L'action normative est considérée comme une procédure bien établie
pour créer des règles faisant autorité sur des sujets importants dans le monde du travail.
Tous les mandants tripartites et les organes de contrôle des normes de l'OIT ont reconnu qu'il
2 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention n° 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023.
3 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, 31 août 2023, para 24.
4 OIT, lettre du Directeur général à tous les États membres de l'OIT en date du 11 octobre 2023.
5 OIT, Déclaration du centenaire de l’OIT sur l’avenir du travail, p.8.
5
n'existe actuellement aucun instrument de l'OIT prévoyant le droit de grève6. Cela signifie qu'il
pourrait y avoir une lacune réglementaire à combler dans le corpus de normes de l'OIT sur le
droit de grève, et que le seul moyen de combler cette lacune est d’adopter des normes au sein
de la CIT.
Dans ce cadre, le gouvernement colombien a proposé pour la première fois en 1992 une action
normative sur le droit de grève. Le gouvernement du Maroc a souscrit à cette proposition en
déclarant que " Aucun instrument n'existant sur la question, il convient de combler ce vide
juridique. Si le droit de grève est accordé aux travailleurs dans un grand nombre de pays, rares
sont ceux qui ont déterminé les modalités d'application de ce droit. Il est essentiel de préciser
la notion de droit de grève du fait qu'il n'existe pas de droit absolu de grève. Il est donc
important de définir ses limites qui concernent plus particulièrement les services essentiels"7.
De même, le gouvernement du Venezuela a déclaré qu’ «il est donc essentiel de disposer d'un
instrument international sur le droit de grève»8.
En outre, l'expérience de la convention (n° 4) sur le travail de nuit des femmes, 1919, montre
que l'action normative est la première étape logique pour régler les différends en matière
d'interprétation. Dans ce cas, il y avait une divergence de vues sur la signification du terme
"femmes" à l'article 3 de la convention, à savoir si la protection prévue par la convention
s'appliquait uniquement aux travailleuses manuelles ou à toutes les femmes, y compris les
employées salariées. Pour résoudre ce différend, une question normative a été inscrite à
l'ordre du jour de la 15e session de la CIT en 1931 afin de discuter d'une convention révisée.
En fin de compte, la convention révisée n'a pas été adoptée car elle n'a pas atteint la majorité
des deux tiers lors du vote final9. Ce n'est qu'après que la CIT ait tenté de trouver une solution
de cette manière que la question a été soumise pour avis consultatif à la Cour permanente de
justice internationale (CPJI), le prédécesseur de la CIJ10.
2. Seule l'action normative peut apporter une sécurité juridique et fixer des règles
juridiquement contraignantes en matière de droit de grève pour les pays qui les
6 OIT, Ordre du jour de la 81e session (1994) de la Conférence, GB.253/2/3(Rev.), Annexe I, p. 21-22 ; OIT, Procès-verbal de
la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/12- I/13 ; BIT, procès-verbal de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28
mai 1992, p. I/16 ; BIT, compte rendu des travaux, 54e session de la CIT, 22 juin 1970, p. 580 & 583, paragraphes 12 & 25 ;
BIT, compte rendu des travaux, 58e session de la CIT, 22 juin 1973, p. 544, paragraphes 26-27 ; BIT, compte rendu de la
251e session, GB.251 /PV(Rev.), 12 novembre 1991, p. III/8 ; BIT, compte rendu des travaux, 72e session de la CIT, 21 juin
1986, p. 31/33 ; BIT, Liberté syndicale et protection du droit syndical : rapport VII, 31e session de la CIT, 29 juin 1948, p. 87;
BIT, Liberté syndicale et négociation collective, 81e session de la CIT, 1994, p. 62, paragraphe 142 ; BIT, procès-verbal de la
131e session du Conseil d'administration, 1956, annexe XXII, p. 188. Concernant la Commission d'investigation et de
conciliation, voir OIT, Mesures à prendre à la demande du groupe des travailleurs et de 34 gouvernements de soumettre
d'urgence le différend relatif à l'interprétation de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, en ce qui concerne le droit de grève, à la Cour internationale de justice pour décision conformément à
l'article 37(1) de la Constitution, 31 août 2023, paragraphe 67. Voir aussi BIT, Suite à donner à la demande du groupe des
travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit
de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution de l’OIT - Résumé des observations reçues des mandants, GB.349bis/INS/2, 10 novembre 2023, p. 4,
paragr. 14.
7 BIT, procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/12- I/13.
8 BIT, procès-verbaux de la 253e session, GB. 253/PV(Rev.), 28 mai 1992, p. I/16.
9 Société des Nations, Conférence internationale du travail, 15e session, 1931, p. 478.
10 CPJI, Avis consultatif Interprétation de la Convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes, 15 novembre
1932, p.366. La question posée à la CPJI était de savoir si la Convention concernant le travail de nuit des femmes, adoptée
en 1919 par la Conférence internationale du travail, s'applique, dans les établissements industriels visés par ladite
convention, aux femmes qui occupent des postes de surveillance ou de direction et n’effectuent pas normalement un travail
manuel.
6
ratifient.
Les employeurs s'opposent fermement au point de vue du Bureau selon lequel
“les deux seuls mécanismes à même d’offrir cette sécurité sont expressément énoncés
à l’article 37 de la Constitution de l’OIT. Un processus normatif mené sur la base du
consensus ne saurait créer la sécurité juridique que confère le recours aux options
prévues par l’article 37. En effet, une convention ou un protocole élaboré par consensus
ne lierait que les États Membres qui l’auraient ratifié. Par conséquent, dans le cas des
États Membres qui ont ratifié une convention faisant l’objet d’un différend juridique,
l’insécurité juridique perdurerait tant qu’ils ne seraient pas en mesure de ratifier la
convention ou le protocole nouvellement adopté.”11
La saisine de la CIJ n'est pas une solution car l'article 37(1) est muet sur le caractère
contraignant des avis consultatifs de la CIJ. L'article 37, paragraphe 1, se lit comme suit :
« Toutes questions ou difficultés relatives à l'interprétation de la présente Constitution et des
conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution, seront
soumises à l'appréciation de la Cour internationale de Justice ». La disposition ne prévoit nulle
part que les avis consultatifs de la CIJ sont juridiquement contraignants.
En outre, l’article 37(2) dispose que « tous arrêts ou avis consultatifs de la Cour internationale
de Justice lieront tout tribunal institué en vertu du présent paragraphe ». L'absence de
formulation correspondante à l'article 37 (1), permet de conclure que le caractère
contraignant d'un avis consultatif de la CIJ est limité à tout tribunal établi en vertu de l'article
37 (2), et que les avis consultatifs de la CIJ n'ont pas d'effet contraignant dans le cas de l'article
37(1). C'est également l'avis de l'ancien président de la CIJ, Roberto Ago, qui déclare que : « En
ce qui concerne l'OIT, cependant, le tribunal en question n'a jamais vu le jour et toute demande
du Conseil d'administration de l'OIT à la Cour internationale de justice ne pourrait donc
déboucher que sur un avis consultatif qui, en tant que tel, n'aurait pas d'effet décisif »12.
En outre, le Bureau a lui-même remis en question l'effet contraignant des avis consultatifs de
la CIJ pour l'OIT et ses mandants dès 2007. En particulier, le Bureau a souligné que
« Cependant, outre la question touchant à l’interprétation de la convention, il en est
d’autres que le Conseil d’administration souhaitera peut-être étudier pour le cas où un
avis consultatif serait demandé à la Cour internationale de Justice. La première
concernerait l’interprétation de la Constitution de l’OIT. Dans la mesure où le Conseil
d’administration décide de soumettre toute question d’interprétation à la Cour
internationale de Justice, il serait logique de lui soumettre la question complémentaire
de savoir si l’interprétation demandée sous forme d’avis consultatif pourrait ou devrait
être reconnue comme contraignante par tous les Membres en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution. Cette question, qui a posé un problème théorique
pendant un certain temps, revêtirait du coup une grande importance pratique au cas où
le Conseil d’administration déciderait d’adresser à la Cour une demande d’avis
consultatif »13
11 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite
d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail,
GB.349ter/INS/1, annexe para 56.
12 Roberto Ago, “Binding” Advisory Opinions of the International Court of Justice, p.449, footnote 44.
13 OIT, Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur
le travail forcé, 1930, GB 298, mars 2007, INS/5/2, para. 5.
7
À une autre occasion, l'Office a également noté que « Il serait également possible d’examiner
si la Cour pourrait, sur le fondement de l’article 37, paragraphe 1, donner un avis consultatif
en interprétation ayant force obligatoire pour l’OIT et les Etats parties à la convention
concernée »14
Ces remarques démontrent l'incertitude quant à l'effet contraignant des avis consultatifs de
la CIJ pour l'OIT et ses mandants, et remettent donc en question le potentiel d’un avis
consultatif de la CIJ à apporter une solution efficace au différend sur le droit de grève en
relation avec la C.87.
D'autre part, par l'adoption d'une convention ou d'un protocole, la CIT peut apporter de
manière faisant autorité une certitude juridique sur une question particulière. Le protocole à
la convention sur le travail forcé (P29) est un excellent exemple à cet égard. L'article 7 du P29
stipule que « les dispositions transitoires de l’article 1, paragraphes 2 et 3, et des articles 3 à
24 de la convention sont supprimées »15. Par conséquent, lors de l'entrée en vigueur du P29,
ces dispositions transitoires ont été supprimées du texte de la directive C29. En d'autres
termes, P29 a clarifié avec certitude juridique que les dispositions transitoires ne s'appliquent
plus à aucun pays, ni aux pays qui ont ratifié P29, ni aux pays qui ont seulement ratifié C29.
Il est donc suggéré que le protocole proposé à la convention 87 (P87) contienne, soit dans le
préambule, soit dans un article ultérieur, un libellé indiquant explicitement que l'objectif du
protocole est de régler définitivement le différend relatif à l'interprétation de la convention
87 sur le droit de grève et que le droit de grève est régi par le protocole 87 et non par la
convention 87 ou par toute autre convention de l'OIT. De cette manière, un P87 pourrait
prévoir avec autorité et sécurité juridique que par son entrée en vigueur i) seules les règles
sur le droit de grève dans le P29 s'appliquent aux pays qui ont ratifié le P29 et ii) les
interprétations sur le droit de grève dans le C29 cessent d'exister en même temps.
On peut supposer que la CEACR devra suivre les nouvelles dispositions sur le droit de grève
concernant C87. La CEACR elle-même a fait valoir qu'elle avait élaboré ses règles sur le droit
de grève pour combler une lacune réglementaire16. Avec l'adoption de la P87, cette lacune
serait comblée et même dans la logique de la CEACR, la justification de ses propres
interprétations ne s'appliquerait plus17.
Enfin, il n'est pas déraisonnable de supposer qu'un P87 bien conçu sur le droit de grève serait
ratifiée rapidement par de nombreux États membres, étant donné sa grande visibilité due à
son lien avec la convention fondamentale C87.
3. L’action normative est conforme aux valeurs fondamentales de l'OIT que sont le
dialogue social et le tripartisme.
La déclaration du centenaire de l'OIT déclare qu'il incombe à l'OIT de renforcer la capacité de
14 OIT, Faits nouveaux concernant la question de l’exécution par le gouvernement du Myanmar de la convention (nº 29) sur
le travail forcé, 1930, GB 297Novembre 2006, INS 8/2, para 9.
15 OIT, Protocole de 2014 à la Convention sur le travail forcé, 1930.
16 Conférence internationale du travail, 81e session, 1994, rapport III (partie 4B), Liberté d'association et de négociation
collective, paragraphe. 145 « En l'absence d'une disposition expresse sur le droit de grève, les organes de contrôle ont été
amenés à se prononcer sur la portée et la signification exactes des conventions en cette matière ».
17 De même, lorsque la directive P29 est entrée en vigueur, la commission d'experts a mis fin à son interprétation de la
traite des personne dans le contexte de la C29, puisque le sujet était désormais couvert par le P29.
8
ses mandants tripartites « d’aborder tous les principes et droits fondamentaux au travail, à
tous les niveaux, selon qu’il convient, grâce à des mécanismes de dialogue social solides,
influents et inclusifs. » Étant donné que la C87 exprime et développe sous forme de droits et
d'obligations spécifiques l'un des principes et droits fondamentaux au travail de la Déclaration
de 1998, à savoir la liberté syndicale, il est impératif que la solution pour résoudre le différend
d'interprétation soit basée sur le dialogue social.18 L'action normative est la forme la plus
avancée et la plus développée de dialogue social à l'OIT.
De nombreux gouvernements conviennent également que le dialogue social est l'option
privilégiée pour résoudre le problème du droit de grève. Par exemple, lors de la discussion du
Conseil d'administration de 2014, le représentant du gouvernement du Lesotho a également
noté que le dialogue social en tant que « un des principaux piliers de l’OIT" devrait avoir une
chance et a souligné que " la saisine de la CIJ serait le signe d’un fléchissement de l’esprit du
tripartisme. Il conviendrait d’utiliser les mécanismes en place et de chercher des solutions en
interne avant d’envisager de régler le problème par des moyens externes »19. De même, le
représentant du gouvernement du Botswana a soutenu « une approche qui ferait du dialogue
social l’instrument idéal pour régler les différends »20. De même, le représentant
gouvernemental de la Chine, s'exprimant au nom du GASPAC, a également indiqué que le
meilleur moyen de résoudre les différends était de mener des discussions tripartites au sein
de l'organe directeur ou de la CIT21. En outre, le gouvernement de l'Inde a soutenu la poursuite
d'un processus tripartite, estimant que les décisions concernant l'Organisation devraient être
prises par les mandants de l'OIT. Le représentant gouvernemental de l'Indonésie a également
noté que "les problèmes au sein de l’OIT devraient être résolus au moyen des mécanismes
internes disponibles, et l’Organisation devrait éviter de créer un précédent en soumettant à la
CIJ la question de la protection du droit de grève par la convention no. 87 »22. Le représentant
du gouvernement iranien et le représentant du gouvernement jordanien ont également
souligné qu'il fallait donner au tripartisme une véritable chance, sur la base de la confiance et
de la volonté mutuelles des parties prenantes23.
Il convient également de mentionner la déclaration du groupe gouvernemental en 2015, par
laquelle les gouvernements ont indiqué qu'ils étaient prêts à discuter du droit de grève dans
le cadre de l'OIT24. Elle se lit comme suit :
“ Nous sommes prêts, dès aujourd’hui, à envisager de débattre, dans la forme et le
cadre qui seront considérés comme adaptés, de l’exercice du droit de grève. Nous
pensons que l’ensemble complexe de recommandations et d’observations formulées
au cours des 65 dernières années d’application de la convention n°87 par les différents
18 OIT, dialogue social "Tous les types de négociation, de consultation ou simplement d'échange d'informations entre, ou
entre les représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs, sur des questions d'intérêt commun
relatives à la politique économique et sociale".
19 BIT, Projet de procès-verbaux de la 322e session du Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
GB.322/PV, 30 octobre-13 novembre 2014, p. 29, paragr. 114.
20 BIT, Projet de procès-verbaux de la 322e session du Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
GB.322/PV, 30 octobre-13 novembre 2014, p. 29, paragr. 112.
21 BIT, Projet de procès-verbaux de la 322e session du Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
GB.322/PV, 30 octobre-13 novembre 2014, p. 29, paragr. 70.
22 BIT, Projet de procès-verbaux de la 322e session du Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
GB.322/PV, 30 octobre-13 novembre 2014, p. 29, paragr. 108.
23 BIT, Projet de procès-verbaux de la 322e session du Conseil d'administration du Bureau international du Travail,
GB.322/PV, 30 octobre-13 novembre 2014, p. 26, paragraphe 101, et p. 29, paragraphe 116.
24 Parmi les autres cadres de l'OIT figurent les réunions tripartites, les réunions d'experts, les réunions techniques, les
consultations informelles, etc.
9
éléments du système de contrôle de l’OIT constitue une ressource précieuse pour de
telles discussions, au même titre que les règlements très divers que les Etats et
certaines régions ont adoptés pour encadrer le droit de grève »25.
Il est important de souligner que si un rapport de fond sur le droit de grève et les modalités et
pratiques de la grève au niveau national a été préparé par le Bureau en 2014, une discussion
de fond visant à déterminer le terrain d'entente sur la portée et les limites de la grève n'a
jamais eu lieu. Par conséquent, contrairement aux arguments de certains groupes, le dialogue
social n'a pas encore été épuisé.
Plus récemment, lors de la session de mars 2023 du CA, le gouvernement de la Chine,
s'exprimant au nom de la majorité des pays du GASPAC, a déclaré que tout différend dans le
monde du travail devrait être résolu par le dialogue social tripartite dans la mesure du
possible, y compris les questions relatives à l'interprétation des conventions de l'OIT. L'article
37 est un dernier recours et ne doit être utilisé qu'avec prudence.26 Le représentant
gouvernemental de la Chine a également rappelé que le dialogue social est le seul moyen de
résoudre les différends et de garantir le fonctionnement du mécanisme de contrôle, en
renforçant la coopération et en évitant la confrontation27.
En outre, le gouvernement du Brésil a noté que si la Constitution de l'OIT prévoit des
alternatives à ce processus, le dialogue social est depuis longtemps la méthode privilégiée
pour régler les désaccords à l'OIT et qu'aucune tentative ne devrait être faite pour bloquer ce
processus28.
De même, dans leurs commentaires sur le rapport d’information relatif à la proposition des
travailleurs, certains gouvernements ont indiqué leur préférence pour la poursuite du
dialogue social, à savoir les gouvernements de l'Indonésie, du Kenya et de la Türkiye29.
IV. L'action normative sous la forme d'un protocole
Les employeurs proposent un protocole en tant que traité complémentaire à la C87 afin de
mettre un terme définitif au différend sur l'interprétation du droit de grève dans le contexte
de la C87. L'objectif de ce protocole n'est pas d'amender la C87, qui ne contient aucune
disposition sur le droit de grève, mais plutôt de définir dans un instrument distinct la portée
et les limites du droit de grève d'un point de vue mondial. À l'instar d'autres protocoles, seuls
les États membres ratifiant le C87 pourront ratifier le P87 et seuls ceux qui ratifieront le P87
seront liés par ses dispositions.
25 OIT, Réunion tripartite sur la convention (n o 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce
qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau national, TMFAPROC/2015/2,
23 février 2015, Annexe II, paragraphe 5.
26 OIT, procès-verbaux de la 347e session du Conseil d'administration du Bureau international du travail, GB.347/PV, 13-23
mars 2023, p. 61, paragraphe 251.
27 OIT, procès-verbaux de la 347e session du Conseil d'administration du Bureau international du travail, GB.347/PV, 13-23
mars 2023, p. 61, paragraphe 258.
28 OIT, procès-verbal de la 344e session du Conseil d'administration du Bureau international du travail, GB.344/PV, mars
2022, p. 43, paragraphe 152.
29 OIT, Résumé des observations reçues des mandants, GB. 349e bis/INS/1/2, 13 octobre 2023, paragraphe 4.
10
Bien qu'aucun des protocoles de l'OIT adoptés jusqu'à présent ne visait à régler un différend
relatif à l'interprétation des dispositions de la convention correspondante,30 cela ne signifie
pas que le Conseil d'administration ne puisse pas adopter un nouveau protocole à la
convention C87 à cette fin.
En fait, les employeurs considèrent que l'expérience du Protocole à la convention sur le travail
forcé (P29) est similaire à la situation actuelle concernant le droit de grève et que les
enseignements tirés devraient être pris en compte par le Conseil d'administration pour les
raisons suivantes.
Premièrement, la convention sur le travail forcé (C29) a été adoptée en 1930 et ne contient
aucune référence expresse ou implicite à la traite des personnes, que ce soit dans le
préambule ou dans le corps du texte31. Malgré l'absence de toute référence à la traite des
êtres humains dans la convention C29, la CEACR a, au fil du temps, formulé des commentaires
sur la traite des personnes lors de l'examen de la convention32. Comme dans le cas présent, la
CEACR a, au fil du temps, élaboré des interprétations détaillées sur le droit de grève lors de
l'examen de la convention C87, bien que le droit de grève ne soit pas mentionné dans le texte
et qu'il ait été expressément exclu par les rédacteurs de l'instrument.
Deuxièmement, P29 a été proposé pour combler une lacune identifiée dans le corpus des
normes de l'OIT en ajoutant un contenu réglementaire aux normes contenues dans la C29.
Lors de la Réunion tripartite d'experts sur le travail forcé et la traite des personnes à des fins
d'exploitation au travail
en février 2013 ("réunion tripartite d'experts de 2013"), les experts ont convenu qu'il y avait
une lacune dans le corpus de normes de l'OIT concernant la traite des personnes et ont
convenu de l'adoption de mesures supplémentaires pour traiter efficacement de l'éradication
du travail forcé sous toutes ses formes33. De même, toutes les parties prenantes de l'OIT
s'accordent à dire que le C87 et aucun instrument de l'OIT ne prévoient le droit de grève34. En
d'autres termes, il pourrait y avoir une lacune dans le corpus de normes de l'OIT sur le droit
de grève. Cette lacune ne devrait pas être comblée par les interprétations de la CEACR, mais
plutôt par des normes négociées et adoptées par la CIT.
Troisièmement, P29 a montré que l'action normative est l'approche interne normale pour
combler les lacunes dans le corpus de normes de l'OIT. Lors de la réunion tripartite d'experts
de 2013, les experts ont convenu que les lacunes devaient être comblées par une action
normative de l'OIT35. Le porte-parole des travailleurs a notamment souligné que « cette
approche normative est indispensable et pourra contribuer à l’adoption d’une démarche
systématique, cohérente et coordonnée au niveau international ». En outre, le porte-parole
des travailleurs a déclaré que « Il serait dommageable pour l’OIT, organisation tripartite, de
30 Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite
d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail,
GB.349ter/INS/1, 11 novembre 2023, annexe, paragraphe 62.
31 OIT, Rapport final, TMELE/2013/7, 11-15 février 2013, p. 11-12, paragraphe 47.
32 OIT, Réunion tripartite d’experts sur le travail forcé et la traite des personnes à des fins d’exploitation au travail
TMELE/2013, 11-15 février 2013, p. 39, paragraphe 138.
33 OIT, Rapport final, TMELE/2013/7, 11-15 février 2013, p. 41, paragraphes 26-27.
34 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT - Résumé des observations
reçues des mandants, GB.349bis/INS/2, 10 novembre 2023, p. 4, paragraphe 13.
35 OIT, Rapport final, TMELE/2013/7, 11-15 février 2013, p. 41, paragraphe 27.
11
ne pas agir dans un domaine qui relève de son mandat et de risquer ainsi de voir imposer aux
Etats des dispositions par d’autres organisations internationales ou régionales, hors du cadre
tripartite »36. En appliquant la même logique, la solution pour combler une lacune sur le droit
de grève dans le corpus de normes de l'OIT n'est pas de saisir la CIJ et de courir le risque de
voir des obligations imposées aux États membres par la CIJ, mais plutôt de passer par
l'établissement de normes par la CIT.
V. Inscription d'une question normative à l'ordre du jour de la CIT
1. L'inscription d'une question normative à l'ordre du jour de la CIT de 2024 est
juridiquement possible dans le cadre statutaire.
Pour répondre au sentiment d'urgence exprimé par les travailleurs et les groupes
gouvernementaux régionaux concernant le règlement du différend sur le droit de grève
devant la CIJ, les employeurs ont proposé que le Conseil d'administration inscrive une
question sur le droit de grève à l'ordre du jour de la CIT à la date la plus proche possible, c'està-
dire en 2024. Cela peut être difficile à réaliser dans la pratique, mais contrairement à
l'analyse du cadre statutaire faite par le Bureau, 37 il n'y a pas d'obstacles juridiques à cela.
Premièrement, la décision d'inscrire une question normative sur le droit de grève à l'ordre du
jour de la CIT peut être prise à la majorité simple et ne requiert pas le consentement unanime.
L'article 5.1.1 du règlement du Conseil d'administration ne s'applique pas. Il se lit comme suit:
« Lorsque le Conseil d’administration est appelé à discuter, pour la première fois, une
proposition d’inscrire une question à l’ordre du jour de la Conférence, il ne peut, sauf
assentiment unanime des membres présents, prendre de décision qu’à la session
suivante ».38
Ce n'est pas la première fois que le Conseil d'administration propose une question normative
sur le droit de grève. Lors de la 253e session du Conseil d'administration en 1992, sur
proposition du gouvernement colombien, l'inscription éventuelle d'une question sur le droit
de grève à l'ordre du jour de la CIT avait déjà été examinée.
Deuxièmement, le Conseil d'administration peut approuver une question normative avec un
programme comportant des délais réduits comme les pratiques passées pour d'autres
protocoles en vertu de deux dispositions,39 si une question a été inscrite à l'ordre du jour de
la CIT pour un point normatif en vertu de la procédure de double discussion moins de 18 mois
avant l'ouverture de la session de la CIT.40 Par conséquent, il est tout à fait possible pour le
Conseil d'administration de décider d'un programme comportant des délais réduits pour une
question normative à inscrire pour la session de la CIT de 2024.
36 OIT, Rapport final, TMELE/2013/7, 11-15 février 2013, p. 34, paragraphe 122
37 Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite
d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail,
GB.349ter/INS/1, 11 novembre 2023, annexe, paragraphes 1-4
38 Il convient de noter que l'article 5.1.1 n'exige pas qu'une proposition " sont inscrites à deux sessions successives " du
Conseil d'administration. Le paragraphe 54 de la note introductive, qui contient un tel libellé, ne peut l'emporter sur l'article
5.1.1 étant donné que la note introductive elle-même prévoit qu'elle reflète « certaines pratiques sans pour autant ériger
celles-ci en dispositions réglementaires", voir BIT, règlement du Conseil d'administration, note introductive, paragr. 1.
39 Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite
d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail,
GB.349ter/INS/1, 11 novembre 2023, annexe, paragraphe 10. Voir le protocole de 2014 à la convention (n° 29) sur le travail
forcé, 1930, et le protocole à la convention (n° 108) sur les pièces d'identité des gens de mer, 1958.
40 Voir OIT, règlement de la Conférence internationale du Travail, article 46(5) et article similaire 45(4).
12
Troisièmement, l'article 5.1.1 du règlement du Conseil d'administration ne semble pertinent
que dans le cas où une question urgente doit être renvoyée à la CIT pour une seule discussion.41
Toutefois, il semble que si le Conseil d'administration décide de renvoyer une question
normative urgente à la CIT pour une double discussion, la majorité des trois cinquièmes des
voix ne serait pas requise, de sorte que la majorité simple suffirait.
Si le Conseil d'administration estime que le droit de grève doit être traité de manière
prioritaire et urgente, il pourrait l'inscrire à l'ordre du jour de la CIT de 2024 et reporter la
discussion d’une question déjà inscrite à l'ordre du jour de la CIT à une CIT ultérieure. Par
exemple, le Conseil d'administration pourrait décider de reporter à une date ultérieure (2026)
la question normative relative à la protection de la sécurité et de la santé au travail contre les
dangers biologiques. Contrairement à la question du droit de grève qui pourrait nécessiter
une attention urgente pour mettre fin au différend sur l'interprétation, aucun des groupes n'a
exprimé un besoin urgent de normes sur les dangers biologiques. Il est important de souligner
que le Conseil d'administration a toujours la prérogative de modifier ses décisions antérieures
lorsqu'il le juge nécessaire.
2. La saisine de la CIJ sur le droit de grève ne permettrait guère d'obtenir des résultats plus
rapides
Pour le renvoi à la CIJ de la question complexe du droit de grève, le Conseil d'administration
aurait également besoin de temps pour procéder à plusieurs séries de consultations, à la
collecte et à l'évaluation de divers documents. Ensuite, pour une bonne gouvernance, la CIT
devrait également approuver les questions de renvoi en juin 2024 ou 2025. Tenant compte de
la procédure consultative devant la CIJ que le Bureau a préparée, la procédure devant la CIJ
prendrait également un certain temps, probablement de 12 à 18 mois.42 Par la suite, la CIT
pourrait être amenée à rediscuter des mesures appropriées à prendre à la suite de cet avis,
l'occasion la plus proche étant alors 2025 ou 2026 pour la CIT. Il est important de noter qu'il
n'y a pas eu d'accord sur cette procédure consultative à ce jour.
3. Afin de permettre une préparation approfondie, l'inscription d'une question sur droit
de grève à l'ordre du jour d'une CIT ultérieure pourrait être envisagée
Si le Conseil d'administration décide qu'un temps de préparation plus long est nécessaire, il
pourrait également envisager d'inscrire une action normative à l'ordre du jour d'une
Conférence ultérieure. Par exemple, le Conseil d'administration pourrait, lors de sa session de
mars 2024, inscrire une question sur le droit de grève à l'ordre du jour de la CIT de 2025 ou
2026 pour une action normative dans le cadre de la procédure de double discussion, ce qui
laisserait suffisamment de temps pour la préparation et pourrait se faire sans avoir à
supprimer des points déjà inscrits à l'ordre du jour de la CIT.
En tout état de cause, les éventuelles difficultés d'inscription à l'ordre du jour de la CIT de 2024
ne doivent pas servir de prétexte pour écarter purement et simplement cette option et
trancher en faveur d'une saisine de la CIJ au titre de l'article 37(1) de la Constitution de l'OIT.
41 OIT, Règlement du Conseil d'administration, article 5.1.5, qui se lit comme suit « En cas d’urgence spéciale ou si d’autres
circonstances particulières le justifient, le Conseil d’administration peut, à la majorité des trois cinquièmes des votes
exprimés, décider de soumettre une question à la Conférence pour faire l’objet d’une simple discussion, en vue de
l’adoption d’une convention ou d’une recommandation »
42 OIT, Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT - Résumé des observations
reçues des mandants, GB.349bis/INS/2, 10 novembre 2023, annexe III
13
VI. Observations finales
Les employeurs sont fermement convaincus qu’une action normative est la solution tripartite
la plus appropriée, fondée sur le dialogue social, qui garantira que tous les mandants de l'OIT
pourront s'engager activement dans le processus, que toute solution obtenue sera fondée sur
un consensus ou au moins une large majorité, et enfin que tout résultat adopté sera
universellement pertinent et accepté.
Le but et l'objectif du protocole proposé à la C87 seraient de déterminer la portée et les limites
du droit de grève au niveau international, dans la mesure du possible, et de combler la lacune
réglementaire qui existe actuellement dans le corpus de normes de l'OIT. Ce faisant, le
protocole clarifierait que les règles relatives au droit de grève ne sont contenues que dans la
P87 et non dans la C87.
De même que les mandants tripartites peuvent décider de la portée et des limites du droit de
grève, ils peuvent déterminer les sources à prendre en considération. Les employeurs
soulignent que le point de départ et la source la plus importante devraient être, comme c'est
le cas pour toute discussion normative, la législation et la pratique nationales sur le droit de
grève dans les Etats Membres de l'OIT.
Une fois que la CIT a décidé d'adopter un protocole sur le droit de grève, on peut s'attendre à
ce que la CEACR suive fidèlement la décision de la CIT qui fait autorité et les intentions des
rédacteurs de la P87. La CEACR n'aurait aucune possibilité de maintenir ses propres opinions
sur le droit de grève en relation avec la C87.
Il n'y a pas d'obstacle juridique à l'inscription d'une question normative sur le droit de grève à
l'ordre du jour de la CIT de 2024 dans le cadre d'un programme comportant des délais réduits.
Les employeurs ont proposé une action normative en 2024 pour répondre à l'urgence des
demandes de certains groupes. Toutefois, les employeurs ne sont pas opposés à une action
normative ultérieure à condition qu'il n'y ait pas de saisine de la CIJ du différend relatif à
l'interprétation et, si la préférence est donnée à l'action normative, une date ultérieure
pourrait faciliter les préparatifs.
Enfin, les employeurs ont exprimé leur attachement au dialogue social et au tripartisme, qui
sont les pierres angulaires de l'OIT, et ils attendent avec intérêt les discussions de fond qui
auront lieu lors des deux sessions spéciales du Conseil d'administration qui se tiendront les 10
et 11 novembre 2023.
Document no 26
CSI, Commentaires sur le rapport d’information du
Bureau relatif à la «Suite à donner à la demande du
groupe des employeurs visant à ce que la question du
droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion
normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la
Conférence internationale du Travail», datés du 27
octobre 2023
ITUC
CSI
CSI
IGB
International Trade Union Confederation
Confédération syndicale internationale
Confederación Sindical Internacional
lnternationaler Gewerkschaftsbund
Akiko
Gono
President
Présidente
Prasidentin
Presidenta
Luc Triangle
Acting General Secretary
Geschaftsfuhrender Generalsekretar
Secretario General en Funciones
Secrétaire général par interim
Mr Gilbert Houngbo
Directeur général
Bureau international du
Travail
Route des Morillons, 4
CH -1211 Geneva
Suisse
ITUC/Lex 27 octobre 2023
Re: SUITE À DONNER À LA DEMANDE DU GROUPE DES EMPLOYEURS VISANT À CE QUE
LA QUESTION DU DROIT DE GRÈVE SOIT INSCRITE D’URGENCE, POUR DISCUSSION
NORMATIVE, À L’ORDRE DU JOUR DE LA 112E SESSION DE LA CONFÉRENCE
INTERNATIONALE DU TRAVAIL
Monsieur le Directeur général,
Je me réfère à votre lettre du 11 Octobre 2023 nous informant que le rapport d’information
du Bureau pour la session spéciale du Conseil d’administration sur la suite à donner à la
demande du groupe des employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite
d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence
internationale du Travail, était disponible.
Votre lettre indiquait également que tout commentaire que nous souhaiterions
présenter devrait être adressé à [email protected].
Vous trouverez ci-après les commentaires de la CSI sur la question.
Nous espérons qu'en temps voulu, vous porterez ces commentaires à l'attention du
Conseil d’administration ainsi que dans le cadre d’autres processus concernant le
différend.
[Salutations]
[Signé]
Luc Triangle
Secrétaire général par interim
Contact: Boulevard du Jardin Botanique, 20
B-1000 Bruxelles, Belgique
Tel: +32 (0)2 224 02 11 e-mail: [email protected]
www.ituc-csi.org
[Traduction non officielle]
COMMENTAIRES DE LA CONDERATION SYNDICALE INTERNATIONALE
(CSI) SUR LE RAPPORT D’INFORMATION DU BUREAU SUR “ SUITE À
DONNER À LA DEMANDE DU GROUPE DES EMPLOYEURS VISANT À CE
QUE LA QUESTION DU DROIT DE GRÈVE SOIT INSCRITE D’URGENCE,
POUR DISCUSSION NORMATIVE, À L’ORDRE DU JOUR DE LA 112E SESSION
DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL”
(Voir le rapport du Bureau (GB.349ter/INS/1)
Introduction et chronologie
1. Lors de la 347e session du Conseil administration du 13 au 23 mars 2023, la viceprésidente
du groupe des travailleurs a donné un préavis concernant le différend relatif
à l’interprétation du droit de grève en déclarant que : « Il est déjà acquis que tout
Membre de l’Organisation peut soulever une question d’interprétation et prier le
Directeur général de soumettre cette question au Conseil d’administration en vue d’un
éventuel renvoi devant la Cour. Une question d’interprétation particulière attend
depuis trop longtemps d’être résolue, et le groupe des travailleurs considère que
l’attente a assez duré. De fait, il envisage de demander au Directeur général dans les
mois à venir que la question soit soumise au Conseil d’administration pour examen à
sa 349e session et espère recevoir le soutien des gouvernements à cet égard. Cette
question particulière doit faire l’objet d’un débat dès que possible1.”
2. Suite à ce préavis, le 12 juillet 2023, la vice-présidente du groupe des travailleurs du
Conseil d'administration a adressé une lettre au Directeur général, demandant
officiellement que le différend de longue date sur l'interprétation de la convention (n°
87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, en ce qui concerne
le droit de grève, soit soumis d'urgence à la Cour internationale de justice pour
décision, conformément à l'article 37(1) de la Constitution de l'OIT, et donc d'inscrire
la question pour discussion et décision à l'ordre du jour du Conseil d'administration de
novembre 2023. Cette demande a été appuyée par des lettres adressées au DG par 32
gouvernements dans un premier temps, puis finalement par 37 gouvernements.
3. La demande du groupe des travailleurs a été contestée par le groupe des employeurs
sans aucune base juridique. Suite aux efforts du groupe des employeurs pour bloquer
la demande du groupe des travailleurs pour une discussion au Conseil d'administration
concernant le renvoi à la CIJ du différend d'interprétation de longue date sur le droit
de grève, le groupe des travailleurs a soumis le 9 août 2023 une demande au président
du Conseil d'administration pour une réunion spéciale sur la question, conformément
à la Constitution de l'OIT et au règlement du Conseil d'administration. Le groupe des
travailleurs a toujours agi de bonne foi dans ses efforts pour régler ce différend de
longue date, afin d'offrir une sécurité juridique aux États membres et aux mandants et
d'éviter qu’il ne soit porter d’avantage préjudice au système de contrôle de l'OIT.
1 Voir para 344 des minutes.
4. Malheureusement, sur cette question, le groupe des employeurs, de l'avis de la CSI,
n'a pas été constructif et n'a pas agi de bonne foi, en essayant d'empêcher tout pas en
direction de la résolution de ce différend d'interprétation, au mépris du cadre
institutionnel de l'OIT et de l'état de droit. Nous affirmons cela pour plusieurs raisons.
Premièrement, bien que le groupe des travailleurs ait invoqué une demande au titre de
l'article 37(1) de la Constitution de l'OIT, qui s'apparente à une plainte
constitutionnelle de l'OIT, le groupe des employeurs a bloqué son renvoi automatique
au Conseil d'administration de novembre pour discussion et décision, essayant
d'exercer un droit de veto sur cette demande de nature constitutionnelle.
Deuxièmement, lorsque le groupe des travailleurs s'est rendu compte que le groupe
des employeurs ne permettrait pas que les procédures normales soient suivies, et a
décidé de procéder en vertu de l'article 7(8) de la Constitution de l'OIT en conjonction
avec le paragraphe 3.2.2 du règlement du Conseil d'administration en demandant une
réunion spéciale du Conseil d'administration, le groupe des employeurs a continué à
contester à la fois la légalité et la légitimité du processus et a fait tout son possible pour
empêcher toute décision concernant la programmation de la réunion.
5. Compte tenu du caractère obligatoire de la demande du groupe des travailleurs en vertu
de l'article 7(8) de la Constitution et du paragraphe 3.2.2. du règlement du CA, et après
la décision prise par la présidence du CA qu'une telle réunion devait donc avoir lieu,
une réunion du groupe de sélection a été convoquée pour déterminer les modalités de
la réunion spéciale demandée par le groupe des travailleurs.
6. Lors de la réunion du groupe de sélection, qui s'est tenue le 13 septembre 2023, le
groupe des employeurs a soudain présenté une demande au titre du paragraphe 3.2.2
du règlement du Conseil d'administration en vue de la tenue d'une réunion spéciale
pour inscrire d'urgence une action normative sur le droit de grève à l'ordre du jour de
la 112e session de la Conférence internationale du Travail. Et ce, tout en continuant à
contester la légalité et la légitimité de la procédure qu'ils utilisent désormais euxmêmes.
Plus concrètement, le groupe des employeurs a proposé que la Conférence
adopte en juin 2024 un protocole à la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, relatif au droit de grève. Le groupe des employeurs
a également insisté pour que sa demande soit discutée avant l'autre réunion spéciale,
ignorant la nature constitutionnelle de la demande déposée par le groupe des
travailleurs et un nombre considérable de gouvernements et le fait que le président du
CA avait déjà pris une décision au sujet de la réunion spéciale demandée par le groupe
des travailleurs, que ladite réunion spéciale devait avoir lieu, alors que la demande du
groupe des employeurs venait juste d'être déposée et nécessitait clairement une prise
de décision supplémentaire.
7. Le 13 septembre 2023, le groupe de sélection a décidé que la réunion spéciale pour
discuter de la saisine de la CIJ aurait lieu le vendredi 10 novembre. Lors d'une réunion
ultérieure, le 28 septembre, le groupe de sélection a décidé que la réunion spéciale
pour discuter de la proposition concernant l'ajout d'une action normative sur le droit
de grève à l'ordre du jour de la CIT de 2024 serait discutée le jour suivant (samedi 11
novembre).
8. Tout en reconnaissant que le règlement au titre du paragraphe 3.2.2. n'exige aucune
condition pour obtenir la tenue d’une réunion spéciale, il est important de souligner la
différence entre les deux demandes, l'une invoquant la Constitution, en vertu de
l'article 7(8), et en vertu de l'article 37(1) en vue de résoudre un différend
d'interprétation, et l'autre ne l'invoquant manifestement pas. À cet égard, on peut se
demander pourquoi le groupe des employeurs a présenté sa demande d'inscription
d'une action normatives à l'ordre du jour de l'OIT sous la forme d'une réunion spéciale
au lieu de s'en remettre à la procédure normale du Conseil d'administration pour
inscrire des questions à l'ordre du jour de la Conférence.
9. A notre avis, cette proposition du groupe des employeurs pour un protocole à la C87,
compte tenu de son infaisabilité et de son manque de solidité juridique, technique et
pratique, doit être considérée et discutée à la lumière de tous les efforts passés et
présents du groupe pour empêcher toute discussion sur le litige d'une manière qui
apporterait la sécurité et la stabilité juridiques ainsi que le renforcement du système de
contrôle, et alors que le groupe continue à attaquer en permanence les organes clés du
système de contrôle, à savoir la CEACR, la CAN et le CLS, du fait de leurs orientations
qui pourtant garantissent la cohérence quant à la portée, au sens et à l'application de la
C87 en ce qui concerne le droit de grève, affaiblissant ainsi le système de contrôle et
sapant son important travail sur la liberté syndicale et le droit syndical.
10. Il convient de rappeler que, jusqu'à présent, les gouvernements, le groupe des
employeurs et le groupe des travailleurs sont tous d'accord pour dire que ce différend
sur le droit de grève concernant la C87 est un différend d'interprétation. Cela signifie
que nous ne pouvons pas ignorer le langage clair et faisant autorité de l'article 37(1)
qui oblige expressément et sans ambiguïté le Conseil d'administration, une fois qu'il
est parvenu à la conclusion qu'un différend porte sur l'interprétation d'une convention
ou de la Constitution (en notant, comme première étape raisonnable, que le dialogue
n'a pas été en mesure de régler le différend), à recourir à la Cour internationale de
justice (CIJ) pour le règlement du différend. La Constitution ne prévoit pas l’action
normative comme un recours dans ces circonstances. L'autorité et le caractère définitif
de la décision de la CIJ à cet égard ne font aucun doute, que ce soit du point de vue
des précédents, de la bonne gouvernance ou de la hiérarchie des normes et des
décisions judiciaires, en tenant compte de l'effet d'une telle décision de la CIJ sur un
tribunal judiciaire (un organe de rang inférieur à la CIJ) du type de celui proposé à
l'article 37.22. Compte tenu du respect des mandants de l'OIT pour la primauté du droit,
nous pensons que la décision de la CIJ réglera ce différend et permettra à l'OIT de
trouver une voie pour aller de l'avant.
11. La CSI souligne la nécessité d'agir dans l'intérêt des objectifs institutionnels de l'OIT
2 La hiérarchie entre un tel tribunal et la CIG doit être également examinée à la lumière de l’article 9(2) de l’accord NU-OIT de
1946.
et de son but constitutionnel de protection des travailleurs et de respecter l'esprit de
bonne foi et de dialogue social constructif. Un dialogue social de bonne foi exige
également de comprendre que lorsque les partenaires sociaux ne parviennent pas à se
mettre d'accord, en raison d'un différend sous-jacent sur les aspects juridiques d'une
situation, il est logique de recourir à un mécanisme de règlement des différends
disponible. Dans le contexte de l'OIT, il s'agit du recours obligatoire à la CIJ sur la
base de l'article 37, paragraphe 1, de la Constitution.
Les raisons pour lesquelles la demande du groupe des employeurs visant à ce que la
question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du
jour de la 112e session, doit être rejetée
12. La proposition du groupe des employeurs d'une action normative sous la forme d'un
protocole à la C87 est à notre avis juridiquement, techniquement et politiquement
impossible et une idée irréalisable, qui n'est ni adaptée ni de nature à réaliser la sécurité
et la stabilité juridiques nécessaires, pour les raisons suivantes ;
Un protocole sur le droit de grève ne résoudra pas le différend d’interprétation
13. Les protocoles sont des traités internationaux qui sont reliés à des conventions
existantes. Un protocole ne peut être ratifié que par les États qui sont déjà liés par la
convention à laquelle le protocole est rattaché.
14. L'origine des protocoles dans le contexte de l'OIT remonte au rapport de 1979 du
groupe de travail Ventejol sur la révision des normes. Avant 1982, la seule méthode
de révision totale ou partielle des conventions était l'élaboration d'une nouvelle
convention sur la base d'une discussion unique ou d'une double discussion au sein de
la Conférence.
15. A ce jour, six protocoles ont été adoptés par l'OIT. Sur la base de la pratique passée,
comme indiqué dans le rapport d’information du Bureau (paragraphe 41), les
protocoles adoptés jusqu'à présent avaient les objectifs suivants :
- permettre une plus grande souplesse et potentiellement réduire le champ
d’application (protocole relatif à la convention no 110);
- élargir le champ et la portée d’une convention (protocole relatif à la convention no
81);
- élargir les possibilités de dérogation pour faciliter une transition vers des normes
reflétant l’évolution du monde du travail (protocole relatif à la convention no 89) ;
- mettre à jour certains aspects normatifs dans une convention dont ils portent
révision partielle (protocole relatif à la convention no 147);
- compléter les dispositions normatives d’une convention dont ils portent révision
partielle en vue de combler des lacunes dans la mise en oeuvre (protocoles relatifs
aux conventions nos 29 et 155).
16. Aucun des six protocoles adoptés à ce jour ne visait à régler un différend relatif à
l’interprétation des dispositions de la convention connexe (voir para 62 du rapport
d’information du Bureau).
17. Il convient de noter, ainsi que le rappelle correctement le rapport d’information du
Bureau ainsi que le document de mars 2022 pour le CA3, que l’adoption d’un
« processus normatif mené sur la base du consensus ne saurait créer la sécurité
juridique que confère l’article 37 de la Constitution de l’OIT. Le contenu consensuel
d’une convention ou d’un protocole liera uniquement les États Membres qui les
auront finalement ratifiés. » (para 65). Par conséquent, un protocole sur le droit de
grève générerait une plus grande incertitude juridique, car il créerait des "régimes
juridiques alternatifs" sur le droit de grève, selon que les États membres auraient
ratifié ou non la convention n° 87 et qu'ils auraient ou non ratifié en plus le protocole
proposé.
18. Un tel protocole entraînerait également une incertitude supplémentaire quant à son
impact sur l'examen, par la commission d'experts et d'autres organes de contrôle, de
l'application de la convention n° 87 par les États membres qui décideraient
finalement de ne pas devenir parties au protocole en question. Alors que la
commission d'experts devrait tenir pleinement compte des dispositions du protocole
vis-à-vis des États membres qui l'auraient ratifié, elle devra décider, en tant
qu'organe indépendant, comment procéder vis-à-vis des États membres qui n'auraient
pas ratifié le protocole et qui ne seraient liés que par la Convention.
19. Dans ce contexte, il convient surtout d'ajouter que les protocoles créent des
obligations juridiques pour les États qui les ratifient sans effet rétroactif. Cela
signifie que les orientations de la commission d'experts continueront à s'appliquer
aux États membres qui ont ratifié la convention et non le protocole. L'incertitude
juridique subsistera en ce qui concerne l'ensemble des normes internationales du
travail liées à la convention no 87 et au principe de la liberté syndicale.
20. Au sein de l'OIT, la liberté syndicale inclut le droit de grève, qui est inhérent à la
Constitution de l'OIT. L'application cohérente de la convention no87 par les
organes de contrôle protège également le droit de grève depuis plus de 70 ans. La
proposition du groupe des employeurs selon laquelle cette protection des
travailleurs peut être supprimée par l'établissement de normes ouvre un domaine
inconnu et n'a pas sa place dans le contexte des objectifs institutionnels, de la
théorie constitutionnelle et du cadre de l'OIT. Une telle action remettrait en cause
3 Document du CA intitulé « Plan de travail visant à renforcer le système de contrôle : propositions concernant de nouvelles
dispositions en vue d’assurer la sécurité juridique et point sur les autres mesures contenues dans le plan de travail », para.65.
la raison d'être de l'OIT et de ses conventions4.
21. Il convient de souligner que la convention C87 joue un rôle central dans le dispositif
institutionnel de l'OIT en tant que convention fondamentale, qui a d'ailleurs été
caractérisée, avec la convention C98, comme prévoyant des droits qui sont d'une
importance capitale pour les travailleurs du monde entier afin de garantir le respect
d'autres droits du travail. L'incertitude juridique actuelle, qui dure depuis longtemps,
quant à la portée de la Convention et à sa signification dans un domaine aussi
fondamental que le droit des travailleurs à l'action collective, est très préjudiciable
pour l’ensemble des mandants de l'OIT.
Manque de clarté des questions à traiter dans le cadre d’un protocole sur le droit
de grève
22. Le refus du groupe des employeurs de reconnaître que la convention n° 87 protège le
droit de grève soulève la question fondamentale suivante : étant donné que les
protocoles visent à réviser partiellement les conventions existantes, quelles
dispositions de la convention n° 87 devraient être révisées, comment seraient-elles
identifiées et quel rôle joueront les orientations existantes du système de contrôle ?
23. Comme le rappelle le Bureau dans le rapport d’information (paragraphe 65), il
ressort de l'examen des six protocoles existants qu'au moins deux protocoles - ceux
liés aux conventions n° 29 et 147 - se sont explicitement appuyés sur les
commentaires et les études d’ensemble de la commission d'experts pour mettre à jour
et compléter les dispositions des conventions concernées.
24. Les commentaires et observations des organes de contrôle de l'OIT constituent des
orientations fondamentales pour les mandants de l'OIT lorsqu'ils envisagent de réviser
des conventions par le biais de protocoles. Par conséquent, étant donné que, depuis
des décennies, la commission d'experts et le comité de la liberté syndicale ont
progressivement élaboré "un certain nombre de principes relatifs au droit de grève"
sur la base de la convention n° 87, le protocole proposé consoliderait normalement les
orientations des organes de contrôle de l'OIT.
25. Cependant, étant donné l'opposition répétée des employeurs aux commentaires de la
commission d'experts sur le droit de grève, le groupe des employeurs s'attend à ce
que le contenu du protocole proposé renverse les commentaires des experts sur la
question, ce qui non seulement créerait une incertitude juridique encore plus grande,
mais aussi un "monstrum" juridique, car le groupe plaide essentiellement en faveur
4 Le Préambule de la Constitution de l’OIT est clair en ce qui concerne le but institutionnel de l’OIT: “ Attendu qu'une
paix universelle et durable ne peut être fondée que sur la base de la justice sociale; Attendu qu'il existe des conditions de
travail impliquant pour un grand nombre de personnes l'injustice, la misère et les privations, ce qui engendre un tel
mécontentement que la paix et l'harmonie universelles sont mises en danger, et attendu qu'il est urgent d'améliorer
ces conditions ;… , l'affirmation du principe de la liberté syndicale… » ( soulignement ajouté)
de l'adoption d'un protocole à une convention dans le seul but de défaire les
orientations du système de contrôle de l'OIT qui font autorité et qui ont été élaborées
au cours des 70 dernières années au sujet de cette convention.
26. Enfin, le raisonnement des employeurs 5visant à adopter un protocole sur le droit de
grève pour circonscrire et limiter l'autorité interprétative de la commission d'experts
est aussi, d'un point de vue technique, totalement erroné. Conformément à son
mandat consistant à déterminer la portée, le sens et le contenu des conventions, la
commission d'experts devrait examiner la mise en oeuvre du protocole et donc
déterminer la portée juridique, le contenu et le sens de ses dispositions. Une fois
encore, le protocole proposé par les employeurs va à l'encontre de l'objectif
consistant à garantir une sécurité juridique définitive en la matière.
27. En résumé, nous sommes fermement convaincus qu'un protocole sur le droit de
grève ne résoudrait pas le conflit d'interprétation, car la discussion sur une action
normative éventuelle mettrait en évidence le même désaccord fondamental et
persistant sur l'interprétation, empêchant ainsi tout consensus. En outre, il conduirait
à une incertitude juridique encore plus grande et serait, par essence, juridiquement
non fondé.
Le calendrier proposé pour une action normative en vue de l’adoption d’un protocole
à la Convention No.87 n’est pas réalisable
Le processus n normative et le calendrier applicable
28. La procédure concernant les normes est inscrite au règlement de la Conférence
internationale du Travail (articles 45 et 46) qui prévoit des délais réglementaires pour
les stades préparatoires de la procédure de double discussion ou de simple discussion.
29. Ces stades préparatoires comprennent:
- la préparation d'un rapport préliminaire sur la législation et la pratique nationales
avec un questionnaire (à envoyer aux gouvernements au moins 18 mois avant
l'ouverture de la Conférence au cours de laquelle la discussion aura lieu) ;
- la communication des réponses par les mandants (devant être reçues le Bureau au
moins 11 mois avant l'ouverture de la Conférence au cours de laquelle la discussion
aura lieu) ;
- et la préparation d'un nouveau rapport du Bureau avec des projets de conclusions
qui servent en principe de base à la première discussion de la Conférence (à
communiquer au moins 4 mois avant l'ouverture de la Conférence au cours de
laquelle la discussion aura lieu).
30. Ces dispositions s'appliquent dans les cas où la question a été inscrite à l'ordre du jour
5 Comme le rappelle le rapport d’information (para.59), l’objectif déclaré du groupe des employeurs est «de faire en sorte que la
commission d’experts ne crée pas de nouvelles obligations en plus de celles prévues par les mandants tripartites lors de la
Conférence. La commission d’experts devrait renvoyer aux mandants les questions difficiles ou les lacunes liées à une
convention pour qu’ils y apportent une solution; c’est précisément parce qu’elle ne l’a pas fait dans le cas du droit de grève que le
différend actuel existe. »
de la Conférence 26 mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conférence au
cours de laquelle elle doit être examinée dans le cas d'une discussion unique, ou 18
mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conférence dans le cas d'une double
discussion. Lorsque la question normative est inscrite à l'ordre du jour de la
Conférence moins de 26 mois pour une discussion unique ou moins de 18 mois pour
une double discussion, un programme comportant des délais réduits doit être approuvé
par le Conseil d'administration.
31. Il est clair que la proposition des employeurs ne permettrait pas de respecter les
exigences énoncées dans le règlement, car, en pratique, cela signifierait que le temps
disponible entre l'inscription du point à l'ordre du jour de la CIT (novembre 2023) et
la première discussion en juin 2024 ne serait que de sept (7) mois.
32. Même si l'on essayait d'argumenter en faveur de l'approbation par le CA d'un
programme comportant des délais réduits, cela ne serait à notre avis pas réalisable,
compte tenu de la nécessité de respecter les exigences procédurales existantes pour
garantir la pleine participation et contribution des mandants tripartites au processus
préparatoire, ainsi que de la pratique passée et de la quantité de travail préparatoire qui
serait exigée du Bureau (rapport sur le droit et la pratique, rapport avec projet de
conclusions et projet de texte). Il serait absolument impossible d'achever tous ces
travaux préparatoires en 7 mois.
33. Comme indiqué dans le rapport d’information du Bureau (paragraphe 72), tous les
protocoles de l'OIT ont été inscrits à l'ordre du jour de la Conférence entre 15 et 19
mois avant l'ouverture de la session au cours de laquelle ils devaient être discutés, à
l'exception du protocole à la convention n° 147. Toutefois, ce dernier avait été préparé
dans le cadre d'une réunion technique antérieure. Un programme comportant des délais
a été adopté pour la préparation des deux derniers protocoles aux Conventions n° 155
et 29, conformément à l'article 38, paragraphe 3 (maintenant article 45, paragraphe 4)
du Règlement de la Conférence.
34. Des délais réduits ne sont possibles que s’il existe un large consensus sur les questions
et la préparation de l’action normative.
35. En outre, quatre des six protocoles adoptés par la Conférence ont été précédés de
réunions techniques ou tripartites d'experts qui ont facilité les travaux préparatoires
du Bureau et garanti la participation des mandants tripartites au processus. Ce
travail préparatoire, qui consiste en des analyses techniques approfondies et des
débats tripartites, s'est avéré essentiel pour élaborer des normes solides et reposant
sur toutes les informations nécessaires.
36. Il est clair qu'aucun travail préparatoire sur une quelconque approche normative du
droit de grève n'a été mené. L'analyse technique et les orientations existantes du
système de contrôle, qui devraient normalement constituer une base consensuelle
pour les travaux préparatoires, sont rejetées par le groupe des employeurs. Compte
tenu des délais statutaires existants, de la pratique passée, de la nécessité de
respecter la participation tripartite ainsi que des considérations pratiques, la
proposition des employeurs visant à ce qu'un protocole sur le droit de grève soit
examiné lors de la CIT de 2024 n'est tout simplement pas réalisable. Cela s'ajoute
au fait qu'à notre avis, comme nous l'avons expliqué plus haut, la proposition n'est
pas fondée sur le plan juridique.
Il n’y pas plus de possibilité d’ajouter des questions à l’ordre du jour déjà
approuvé des prochaines sessions de la Conférence internationale du Travail
(GB.349/INS/2)
37. La responsabilité de l'établissement de l'ordre du jour de la Conférence incombe au
Conseil d'administration. Les propositions d'inscription d'une question à l'ordre du jour
de la Conférence doivent être examinées lors de deux sessions successives du Conseil
d'administration, à moins qu'il n'y ait consentement unanime pour inscrire une question
à l'ordre du jour de la Conférence lorsqu'elle est examinée pour la première fois par le
Conseil d'administration (paragraphe 5.1.1 du règlement du Conseil d'administration).
38. L'ordre du jour de la CIT de 2024 a déjà été décidé par le CA lors des sessions
précédentes, et les questions suivante, en plus des questions inscrites d’office, ont été
inscrits à l'ordre du jour :
- Protection de la sécurité et de la santé au travail contre les dangers biologiques –
action normative (première discussion) [décidée en mars 2021].
- Discussion récurrente sur l'objectif stratégique des principes et droits
fondamentaux au travail.
- Travail décent et l’économie du soin - discussion générale. [décidée en mars 2022
- Abrogation des conventions n° 45, 62, 63 et 85. [décidée en novembre 2021]
39. Conformément à la pratique établie comprenant la constitution de trois commissions
techniques en plus de la commission des affaires générales (GAC - à convoquer en
cas de besoin), il n'y a donc pas de créneau possible pour une action normative
supplémentaire dans l'ordre du jour de la CIT de 2024.
40. Pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus, la proposition des employeurs d'adopter
un protocole repose sur un raisonnement erroné et va à l'encontre de l'objectif qu'elle
s'est fixé, à savoir faciliter l'obtention d'un consensus et renforcer la sécurité juridique
en ce qui concerne le droit de grève. Un protocole ne résoudrait pas le différend sur
l'interprétation concernant le droit de grève, car il est juridiquement, pratiquement et
politiquement impossible à mettre en oeuvre.
41. La préservation de la nature unique de l'OIT en tant qu'organisation tripartite
normative exige que la sécurité juridique soit rétablie pour les mandants de l'OIT et
le système de contrôle en ce qui concerne ce différend de longue date sur
l'interprétation de la C87. Par conséquent, le Conseil d'administration doit décider
maintenant de résoudre ce différend en le soumettant à la CIJ en vertu de l'article
37(1) de la Constitution de l'OIT et non par l'adoption d'un protocole à la C87 (voir
le texte dans l'encadré ci-dessous).
Tenir compte du caractère unique de la structure de gouvernance tripartite de l’OIT
Le groupe des employeurs a fait valoir que sa demande d’action normative comme moyen privilégié de régler le différend
en matière d'interprétation se fonde sur le fait que l’action normative est la seule solution fondée sur le dialogue social
à l'OIT ou la forme la plus élevée de dialogue social à l'OIT. Cette affirmation est erronée.
Conformément à son mandat constitutionnel, l'OIT est une organisation normative tripartite fondée sur le dialogue social
et dotée de relations systémiques entre ses systèmes de gouvernance, d’action législative et de contrôle visant à protéger
les travailleurs, à instaurer la justice sociale et à réaliser la paix universelle.
Compte tenu du dialogue qui a lieu entre les partenaires sociaux tripartites au niveau national et le système de contrôle
régulier de l'OIT par le biais des rapports prévus aux articles 19, 22 et 23 de la Constitution de l'OIT visant à améliorer
la mise en oeuvre des conventions ratifiées, il est inapproprié de suggérer que ce système de contrôle n'est pas fondé sur
le dialogue social.
De même, étant donné le rôle que jouent la Conférence internationale du travail et le Conseil d'administration en ce qui
concerne le travail des organes de contrôle en vertu de la Constitution de l'OIT, et le rôle spécifique joué par le Conseil
d'administration (qui est également une structure tripartite) en ce qui concerne les délibérations et la décision de
soumettre une question ou un différend à la CIJ en vertu de l'article 37, paragraphe 1, il est tout aussi inapproprié de
suggérer que le processus de soumission d'un différend à la CIJ n'inclut pas, par nature, le dialogue social.
L'avis consultatif de la CIJ, lorsqu'il sera rendu, ne constituera pas non plus une action imposée de l’extérieure pour
l'OIT et ses mandants. Afin de garantir la sécurité juridique et la prévisibilité associées à l'état de droit, l'OIT traitera
l'avis consultatif de la CIJ à la lumière de sa Constitution et de ses précédents, qui prescrivent la nécessité de soumettre
un différend d'interprétation à la CIJ pour décision et considèrent donc que le résultat est définitif et contraignant pour
l'organisation.
Il convient de noter que les systèmes de dialogue social de nombreux États membres de l'OIT comprennent également
des mécanismes de règlement des différends, fondés sur la loi ou convenus à l'avance par les partenaires sociaux, qui
prévoient le recours au règlement judiciaire des différends de nature juridique survenant dans le cadre du dialogue
social.
L'OIT est une organisation normative fondée sur une culture du dialogue social qui inclut son mécanisme de règlement
des différends, ce qui la rend unique. Il faut également souligner que le caractère unique de l'OIT réside également dans
le fait que son système de contrôle n'impose pas de décisions aux États membres. La CEACR, en tant qu'organe
indépendant, entreprend une analyse impartiale et technique de la manière dont les conventions ratifiées sont appliquées
en droit et en pratique par les États membres, tout en tenant compte des différentes réalités et systèmes juridiques
nationaux, et fournit des orientations non contraignantes par le biais d'un dialogue permanent avec les gouvernements,
en tenant compte des informations fournies par les organisations d'employeurs et de travailleurs. Le CLS parvient à des
conclusions et formule des recommandations aux États membres sur une base tripartite. Ces organes, dans le cadre d'un
dialogue permanent avec les États membres et les mandants, s'efforcent de guider les actions des autorités nationales
dans l'application des normes et principes internationaux du travail, en droit et en pratique. Les États membres, en
devenant volontairement membres de l'OIT en adhérant à sa Constitution et en ratifiant volontairement les conventions
de l'OIT, s'engagent dans ce dialogue avec les organes de contrôle.
Il est donc trompeur de présenter le système de contrôle comme extérieur et imposant sa volonté aux États membres et
aux mandants. Il est également trompeur de présenter toute décision de la CIJ comme "imposée" ou "étrangère à l'OIT"
pour les mêmes raisons que celles exposées ci-dessus.
Enfin, soutenir que le dialogue social devrait être préféré à tout mécanisme de règlement des différends conduirait à une
situation où une impasse dans le dialogue social persisterait à l'infini, donnant à la partie qui bloque l'accès au règlement
des différends un droit de veto. Cela ne serait certainement pas conforme aux principes fondamentaux du dialogue social
et à la structure de gouvernance tripartite de l'OIT.
Document no 27
GB.349/INS/18/5(Rev.1), Cinquième rapport
supplémentaire du Directeur général: dispositions
applicables aux sessions 349e bis et 349e ter (spéciales)
du Conseil d’administration, novembre 2023
GB.349/INS/18/5(Rev.1)
Afin de réduire au maximum l’impact environnemental des activités de l’OIT, les documents du Conseil d’administration publiés avant ou après les sessions ne
sont pas imprimés. Seuls les documents publiés en cours de session sont imprimés, en nombre limité, et distribués aux membres du Conseil d’administration.
Tous les documents du Conseil d’administration sont disponibles sur Internet, à l’adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
349ᵉ session, Genève, 30 octobre-9 novembre 2023
Section institutionnelle INS
Date: 1er novembre 2023
Original: anglais
Dix-huitième question à l’ordre du jour
Rapport du Directeur général
Cinquième rapport supplémentaire: Dispositions
applicables aux 349ebis et 349eter sessions (spéciales)
du Conseil d’administration
Introduction
1. Lors de la réunion du groupe de sélection du 28 septembre 2023, il a été demandé au Bureau
de fournir des informations sur les modalités pratiques des deux prochaines sessions spéciales
du Conseil d’administration, qui doivent se tenir les 10 et 11 novembre 2023, dans l’éventualité
où le Conseil déciderait, à sa 349e session (octobre-novembre 2023), de siéger en partie en
comité plénier. Le présent document a été établi en réponse à cette demande, afin de faciliter
l’examen de cette question et la prise de décision par le Conseil d’administration.
2. Il est rappelé que, en application de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution de l’OIT et du
paragraphe 3.2.2 de son Règlement, le Conseil d’administration tiendra deux sessions
spéciales les 10 et 11 novembre 2023: la 349ebis session (spéciale) portera sur la soumission
éventuelle de la difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève
à l’appréciation de la Cour internationale de Justice, comme suite à la demande présentée par
le groupe des travailleurs et 36 gouvernements, et la 349eter session (spéciale) concernera
l’inscription, pour discussion normative, de la question du droit de grève à l’ordre du jour de la
112e session (juin 2024) de la Conférence internationale du Travail, comme suite à la demande
du groupe des employeurs. Lorsque la date et la durée de ces sessions spéciales ont été
GB.349/INS/18/5(Rev.1) 2
discutées, certains mandants ont estimé que, dans un souci d’inclusivité, le Conseil
d’administration devrait siéger en comité plénier.
3. La possibilité d’une réunion en comité plénier est prévue au paragraphe 4.3.1 du Règlement
du Conseil d’administration, qui est ainsi libellé:
Le Conseil d’administration peut décider de se réunir en comité plénier pour procéder à un
échange de vues en offrant, le cas échéant et selon des modalités par lui définies, la possibilité
aux représentants de gouvernements qui ne sont pas représentés au Conseil d’administration
d’exprimer leurs vues au sujet des questions qui concernent leur situation propre. Le comité
plénier fait rapport au Conseil d’administration.
4. Dans l’éventualité où le Conseil d’administration déciderait de siéger en partie en comité
plénier lors de l’une de ses sessions spéciales ou des deux, il pourrait être envisagé de prendre
les dispositions pratiques suivantes, étant entendu que le Président, en consultation avec les
Vice-présidentes, pourra décider d’apporter les ajustements nécessaires à la conduite efficace
des travaux:
• lors de la séance du matin (10 h 30-13 h 00), le Conseil d’administration procédera à un
échange de vues sur la question à l’ordre du jour auquel les gouvernements non représentés
au Conseil pourront participer pleinement, avec la possibilité pour chacun de faire une seule
déclaration n’excédant pas trois minutes;
• les membres du Conseil d’administration représentant les gouvernements pourront faire
une seule déclaration n’excédant pas trois minutes;
• le temps de parole des autres participants pourrait être fixé comme suit: 15 minutes pour
les déclarations liminaires et finales des porte-parole des groupes des employeurs et des
travailleurs; et 5 minutes pour les déclarations faites au nom des groupes
gouvernementaux;
• le Président pourrait réduire le temps de parole si la situation l’exige, par exemple si la liste
des orateurs est particulièrement longue;
• les délégués souhaitant prendre la parole pendant la séance du matin devraient s’inscrire
au moins 24 heures à l’avance en adressant un courriel à l’adresse [email protected];
• dans l’après-midi (15 h 30-18 h 30), le Conseil d’administration se réunira en séance plénière
pour conclure sa discussion et prendre une décision sur la question à l’ordre du jour. Au
début de cette séance plénière, le Président rendrait oralement compte de la teneur des
vues échangées au sein du comité plénier. La séance de l’après-midi pourrait se prolonger
dans la soirée, si nécessaire.
Projet de décision
5. Le Conseil d’administration approuve les dispositions proposées au paragraphe 4 du
document GB.349/INS/18/5(Rev.1) aux fins de ses 349ebis et 349eter sessions (spéciales) et
demande que ces dispositions soient promptement portées à la connaissance de tous les
États Membres et publiées sur la page Web publique du Conseil d’administration.
Document no 28
Projet de procès-verbaux de la 349e session du
Conseil d’administration, novembre 2023,
paragr. 686-737
GB.349/INS/PV/Projet
Conseil d’administration
349ᵉ session, Genève, 30 octobre-9 novembre 2023
Section institutionnelle INS
Avertissement : Ce document est un projet, qui peut comporter des omissions ou des erreurs et n’est rendu public
qu’à des fins de vérification et de rectification. Les mentions contenues dans ce document provisoire n’engagent
pas les personnes dont les propos sont rapportés. La responsabilité du BIT ne saurait être engagée à raison des
éventuelles erreurs et omissions entachant ce document, ou de l’utilisation qui pourrait en être faite par des tiers.
Les membres du Conseil d’administration peuvent envoyer des corrections à leurs propres interventions jusqu’au
14 janvier 2024 à l’adresse [email protected].
Projet de procès-verbaux de la Section
institutionnelle
Table des matières
Page
Remarques liminaires .......................................................................................................................... 5
1. Approbation des procès-verbaux de la 348e session
du Conseil d’administration (GB.349/INS/1) .................................................................. 9
Décision .............................................................................................................................. 9
2. Ordre du jour des prochaines sessions de la Conférence internationale
du Travail (GB.349/INS/2) ................................................................................................. 9
Décision .............................................................................................................................. 18
3. Questions découlant des travaux de la 111e session (2023) de la Conférence
internationale du Travail .................................................................................................. 19
3.1. Plan d’action pour la mise en oeuvre de la recommandation (no 208)
sur les apprentissages de qualité, 2023 (GB.349/INS/3/1) .......................................... 19
Décision .............................................................................................................................. 26
3.2. Suivi de la Résolution concernant la deuxième discussion récurrente
sur la protection des travailleurs (GB.349/INS/3/2) ..................................................... 26
Décision .............................................................................................................................. 36
GB.349/INS/PV/Projet 158
et Mme Fanfan Rwanyindo Kayirangwa à faire et à signer la déclaration de loyauté prévue
à l’article 1.4, alinéa b), du Statut du personnel du BIT.
(GB.349/INS/18/3, paragraphe 4)
(Mme Andrees et Mme Rwanyindo Kayirangwa font et signent la déclaration de loyauté.)
18.4. Quatrième rapport supplémentaire: Documents soumis
pour information uniquement
(GB.349/INS/18/4)
Décision
685. Le Conseil d’administration prend note des informations contenues dans les documents
suivants:
• Colloques, séminaires, ateliers et réunions analogues approuvés (GB.349/INS/INF/1);
• Rapport sur l’état d’avancement des réclamations au titre de l’article 24 de la
Constitution de l’OIT (GB.349/INS/INF/2);
• Point sur l’état d’avancement de la ratification de l’Instrument d’amendement à la
Constitution de l’OIT, 1986 (GB.349/INS/INF/3);
• Suivi de la cinquième Conférence mondiale sur l’élimination du travail des enfants de
Durban (GB.349/POL/INF/1);
• Accords conclus avec d’autres organisations internationales (GB.349/LILS/INF/1);
• Contributions volontaires et dons (GB.349/PFA/INF/1);
• Point sur l’état d’avancement du projet de rénovation du bâtiment du siège
(GB.349/PFA/INF/2);
• Point sur les locaux du Bureau régional de l’OIT pour l’Afrique et du Bureau de pays
pour la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Togo à Abidjan
(GB.349/PFA/INF/3).
(GB.349/INS/18/4, paragraphe 3)
18.5. Cinquième rapport supplémentaire: Dispositions applicables
aux 349ebis et 349eter sessions (spéciales) du Conseil d’administration
(GB.349/INS/18/5 et GB.349/INS/18/5(Rev.1))
686. Le Président invite les membres du Conseil d’administration à indiquer dans leur déclaration
s’ils sont favorables à la première option figurant dans le projet de décision, à savoir tenir la
séance du matin de chacune des sessions spéciales sous la forme d’un comité plénier, ou à la
deuxième option, à savoir tenir les deux sessions spéciales comme des séances normales du
Conseil d’administration.
687. La Vice-présidente employeuse remercie le gouvernement de la Suisse d’avoir proposé la
tenue d’un comité plénier par souci d’inclusivité et de représentativité, qui sont absolument
nécessaires pour le groupe des employeurs. Elle estime toutefois qu’une certaine souplesse
est de mise quant aux horaires, car une demi-journée ne suffira peut-être pas pour que tous
les gouvernements qui le souhaitent puissent prendre la parole. Dans la mesure où la décision
GB.349/INS/PV/Projet 159
sur la saisine de la Cour internationale de Justice (CIJ) pourrait être incompatible avec la
décision relative à un protocole pour adjonction à la convention (no 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, le groupe des employeurs propose que le Conseil
d’administration siège en comité plénier toute la journée lors des deux sessions spéciales, afin
d’offrir toutes les garanties de transparence et de représentativité. Le temps de parole qu’il est
proposé d’allouer aux participants qui ne sont pas membres du Conseil d’administration,
c’est-à-dire un maximum de deux déclarations de deux minutes chacune, est insuffisant. La
séance de l’après-midi de chaque session spéciale ne devrait pas se prolonger au-delà de la
journée normale de travail; si les discussions n’ont pas abouti avant la fin de la journée normale
de travail le 11 novembre 2023, elles devront se poursuivre à la session suivante du Conseil
d’administration, en mars 2024. En tout état de cause, la discussion en comité plénier ne
saurait se substituer à une discussion et une décision au sein de la Conférence internationale
du Travail. La convention no 87 étant une convention fondamentale, toute décision concernant
le différend relatif à son interprétation aura des effets sur tous les mandants de l’OIT, y compris
les employeurs et les travailleurs qui ne participeront pas au comité plénier. Il est donc
essentiel pour la bonne gouvernance démocratique de l’Organisation que la décision finale sur
la saisine de la CIJ concernant le droit de grève soit prise par la Conférence et non par le Conseil
d’administration.
688. Le groupe des employeurs est disposé à appuyer la première option figurant dans le projet de
décision, pour autant que quelques modifications soient apportées au paragraphe 4 du
document GB.349/INS/18/5: les mots «lors de la séance du matin (10 h 30-13 h 00)» devraient
être remplacés par «lors des séances du matin et de l’après-midi»; les mots «dans l’après-midi
(15 h 30-18 h 30)» devraient être remplacés par «à la fin de chaque session»; la dernière
phrase, «La séance de l’après-midi pourrait se prolonger dans la soirée, si nécessaire.», devrait
être supprimée. Les mots «tel qu’amendé» devraient alors être insérés dans le projet de
décision, après la référence au «paragraphe 4 du document GB.349/INS/18/5».
689. La Vice-présidente travailleuse demande au Bureau si des amendements peuvent être
proposés à des parties du document autres que le projet de décision.
690. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) précise que des amendements
ne peuvent être proposés qu’au projet de décision. Si des modifications étaient apportées au
corps du document, par exemple concernant les dispositions proposées au paragraphe 4, le
Bureau devrait publier une version révisée que le Conseil d’administration examinerait le jour
suivant. Le projet de décision pourrait alors être adopté sans les mots «tel qu’amendé».
691. La Vice-présidente travailleuse indique que, dans la mesure où la tenue des discussions en
comité plénier influe sur la participation des gouvernements et non sur celle des employeurs
et des travailleurs, elle réserve sa position sur ce point jusqu’à ce que les membres
gouvernementaux se soient exprimés. Pour le reste, elle rappelle que, en juillet 2023, le groupe
des travailleurs a envoyé une lettre dans laquelle il demandait qu’un débat ait lieu et qu’une
décision soit prise de toute urgence quant à l’éventuelle saisine de la CIJ sur la question du
droit de grève, et a prié le Bureau d’établir un rapport d’information et de sonder les opinions
de tous les États Membres afin de garantir l’inclusivité du processus. Le groupe des travailleurs
est donc favorable à l’inclusivité. Cela étant dit, le Bureau a reçu peu de contributions des
gouvernements et des organisations d’employeurs. Le groupe des travailleurs doute qu’il soit
nécessaire de convoquer un comité plénier étant donné que le Conseil d’administration s’est
vu attribuer en 1949 la compétence de soumettre à la CIJ les questions d’interprétation des
normes internationales du travail. Bien qu’elle puisse être encore améliorée, la composition du
Conseil d’administration est déjà bien plus démocratique qu’elle ne l’était il y a cent ans, et
même il y a cinquante ans. La proposition que fait le groupe des employeurs de tenir les deux
GB.349/INS/PV/Projet 160
sessions spéciales entièrement en comité plénier vise à empêcher toute prise de décision, et
le groupe des travailleurs s’y oppose avec force. En ce qui concerne les heures de travail, le
groupe des travailleurs est favorable à ce qu’elles soient décentes. Toutefois, étant donné que
deux sessions spéciales sont organisées et qu’il est urgent de prendre des décisions, il ne
faudrait pas exclure d’emblée la possibilité de prolonger les séances.
692. S’exprimant au nom du groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), une
représentante du gouvernement du Mexique réaffirme le soutien de son groupe à des
discussions inclusives dans tous les domaines qui intéressent l’OIT, lesquelles ne doivent pas
nuire à la capacité de prise de décision du Conseil d’administration. Dès lors, le GRULAC
souscrit à l’idée de tenir les séances du matin des deux sessions spéciales sous la forme d’un
comité plénier. Une bonne gestion du temps étant essentielle, le groupe propose d’harmoniser
les temps de parole des gouvernements, qu’ils soient membres ou non du Conseil
d’administration, en leur donnant la possibilité de faire une déclaration de trois minutes plutôt
que deux déclarations de deux minutes chacune. Le GRULAC appuie la proposition visant à
convoquer un comité plénier lors de la séance du matin, suivie l’après-midi d’une séance au
cours de laquelle le Président présentera un rapport oral, une discussion sera menée et une
décision sera prise sur la question à l’ordre du jour de chaque session spéciale. Sous réserve
des modifications qu’il a proposées, le GRULAC peut souscrire à la première option figurant
dans le projet de décision.
693. S’exprimant au nom du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC), une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran affirme que, dans un souci d’inclusivité et
compte tenu des vastes incidences que les décisions envisagées auront sur tous les États
Membres de l’OIT, le GASPAC est favorable à l’idée que le Conseil d’administration se réunisse
en comité plénier à titre exceptionnel. Elle encourage les participants à gérer leur temps
efficacement. Le rapport oral du Président sur l’échange de vues devrait être examiné durant
la séance de l’après-midi du Conseil d’administration, pour garantir l’inclusivité de la prise de
décision sur ces questions cruciales. Une majorité des membres du GASPAC appuie la
proposition visant à ce que la décision relative à l’éventuelle saisine de la CIJ et celle concernant
l’action normative soient toutes deux prises à la session de 2024 de la Conférence
internationale du Travail, ce qui garantirait la prise en compte de tous les points de vue.
694. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, une représentante du gouvernement de
l’Algérie dit que son groupe souscrit à l’idée de convoquer un comité plénier lors des séances
du matin des sessions spéciales. Le Règlement du Conseil d’administration prévoit cette
possibilité, qui serait un gage d’inclusivité et de transparence, et donc de crédibilité du
processus. Les États Membres qui le souhaitent devraient participer aux discussions afin
d’assurer la prise en considération d’une plus grande diversité d’opinions et de points de vue,
ce qui permettrait de prendre des décisions plus équilibrées sur cette question essentielle pour
tous les États Membres, en particulier ceux qui ont ratifié la convention no 87, mais qui ne sont
pas membres du Conseil d’administration et ne pourraient donc pas, autrement, participer à
la prise de décision. En conséquence, le groupe de l’Afrique appuie la première option figurant
dans le projet de décision.
695. S’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres, un représentant
du gouvernement de l’Espagne déclare que l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine du
Nord, la République de Moldova, le Monténégro, la Serbie, la Géorgie, l’Islande, la Norvège et
l’Arménie s’associent à sa déclaration. Il rappelle que, le 14 juillet 2023, l’UE et ses États
membres ainsi que l’Islande et la Norvège ont envoyé au Directeur général une lettre dans
laquelle ils demandaient que, compte tenu de son importance fondamentale, la question
concernant le renvoi devant la CIJ de la difficulté relative à l’interprétation de la convention
GB.349/INS/PV/Projet 161
no 87 s’agissant du droit de grève soit inscrite à l’ordre du jour du Conseil d’administration, et
indiquaient qu’il était urgent d’assurer la clarté juridique après plus de dix ans vainement
passés à essayer de trouver une solution. Il sait gré au Bureau d’avoir géré ce processus avec
impartialité et transparence et salue l’approche inclusive que celui-ci a suivie en donnant à tous
les mandants la possibilité de soumettre des observations écrites. Le temps disponible pour
les sessions spéciales étant limité, l’UE et ses États membres sont favorables à la deuxième
option figurant dans le projet de décision, à savoir tenir les sessions comme des séances
normales, conformément au Règlement du Conseil d’administration. L’UE et ses États
membres ne souscrivent pas aux amendements proposés par le groupe des employeurs.
696. Un représentant du gouvernement du Bangladesh affirme que le Conseil d’administration
ne pourra pas être considéré comme véritablement représentatif des États Membres de l’OIT
tant que l’Instrument d’amendement à la Constitution de l’OIT, 1986, ne sera pas en vigueur.
Étant donné que toute interprétation ou action normative concernant la convention no 87 aura
des incidences sur tous les États Membres de l’OIT, tous les gouvernements devraient
participer activement aux discussions afin d’arriver à une décision tripartite consensuelle. Le
gouvernement du Bangladesh est favorable à ce que les deux sessions spéciales se tiennent
sous la forme d’un comité plénier.
697. Un représentant du gouvernement de la Suisse, que le bureau du Conseil d’administration
a autorisé à prendre la parole conformément au paragraphe 1.8.3 du Règlement, déclare que,
puisque la convention no 87 est une convention fondamentale et, donc, contraignante pour
tous les États Membres de l’OIT, tous les gouvernements – ou du moins tous ceux qui ont ratifié
la convention – pourraient être invités à participer à la procédure devant la CIJ. En
conséquence, tous les États Membres devraient prendre une part active aux discussions sur la
saisine de la Cour et, le cas échéant, sur la question à lui poser, ainsi que sur l’inscription d’une
question normative à l’ordre du jour d’une session de la Conférence internationale du Travail.
Les communications écrites ne suffisent pas. Le gouvernement de la Suisse appuie donc la
première option, à savoir la convocation d’un comité plénier, que le Bureau a proposée à la
session de mars 2023 du Conseil d’administration. Les modalités proposées garantiraient
l’inclusivité et la représentativité lors des discussions et permettraient une gestion efficace du
temps disponible. Le gouvernement de la Suisse plaide depuis de nombreuses années en
faveur de la démocratisation du Conseil d’administration. Le nombre d’États Membres de l’OIT
a considérablement augmenté depuis 1949, lorsque le Conseil d’administration s’est vu
attribuer la compétence de déposer des demandes d’avis consultatifs à la CIJ. Il semble donc
approprié que cette compétence revienne désormais à la Conférence.
698. La Vice-présidente travailleuse met en garde contre l’utilisation de l’argument de la
démocratisation dans le contexte de la discussion en cours. Le groupe des travailleurs est tout
à fait favorable à la démocratisation du Conseil d’administration et à la suppression du statut
d’États Membres ayant l’importance industrielle la plus considérable. Mais ces arguments ne
sont pas pertinents pour ce qui est de déterminer qui devrait débattre d’une éventuelle saisine
de la CIJ. La Conférence a attribué en 1949 une compétence au Conseil d’administration,
laquelle reste d’application et constitue la base juridique de cette saisine. Il n’est pas nécessaire
que la décision du Conseil d’administration soit débattue à la Conférence ou validée par elle; si
cette décision l’était, ce serait l’occasion pour les mandants de faire pression contre elle. En
outre, une discussion à la Conférence ne serait pas plus inclusive. Les membres du Conseil
d’administration sont des représentants qui participent aux réunions de groupes en vue
d’exprimer les points de vue de ces derniers devant le Conseil d’administration. Il n’y a aucune
raison pour que celui-ci ne soit pas en mesure de prendre une décision sur les points à
examiner lors des sessions spéciales en exerçant la compétence qui lui a été formellement
GB.349/INS/PV/Projet 162
attribuée, ce qu’il fera à n’en pas douter de manière responsable. Bien qu’il n’appuie pas la
convocation d’un comité plénier, le groupe des travailleurs peut l’accepter car de nombreux
gouvernements, mais pas tous, y sont favorables et y voient un moyen de recueillir des
contributions plus variées. On notera toutefois que le comité plénier ne sera pas forcément
plus démocratique puisque les gouvernements autorisés à participer seraient plus nombreux,
mais pas les représentants des partenaires sociaux. Il y a aussi le risque qu’un temps
considérable soit consacré à des points de vue maintes fois répétés. En outre, étant donné que
seuls dix gouvernements ont présenté des observations écrites, les gouvernements qui ne
sont pas membres du Conseil d’administration ne seront peut-être pas nombreux à vouloir
participer. Le Président devrait dès lors avoir la possibilité d’évaluer la situation, avec l’aide du
Bureau, dans les 24 heures précédant le début de chaque session spéciale, et d’écourter le
comité plénier pour donner au Conseil d’administration plus de temps pour prendre ses
décisions. En toute hypothèse, le comité plénier ne devrait pas se prolonger au-delà de la
séance du matin. La proposition de la représentante du GRULAC d’autoriser les
gouvernements à faire une seule déclaration n’excédant pas trois minutes peut aider, mais le
groupe des travailleurs peut aussi accepter l’idée des deux déclarations de deux minutes. Le
groupe des travailleurs peut souscrire à la première option figurant dans le projet de décision.
699. La Vice-présidente employeuse affirme que les décisions raisonnables sont celles qui
renforcent l’OIT en tant qu’organisation tripartite de dialogue social. C’est la raison pour
laquelle le groupe des employeurs a plaidé pour un examen tripartite et inclusif de cette
question lors d’une session de la Conférence internationale du Travail. La Conférence n’a
jamais débattu du fond de cette question, pas plus que la réunion d’experts sur le droit de
grève de 2015, qui a rassemblé très peu de participants. Le groupe gouvernemental de cette
réunion d’experts avait adopté une déclaration, soutenue par les partenaires sociaux, dans
laquelle il se disait prêt à débattre de façon inclusive sur le fond, mais ces discussions n’ont
jamais eu lieu. Par conséquent, la seule décision raisonnable serait de discuter du fond de cette
question dans le cadre du dialogue social lors de la Conférence.
700. En ce qui concerne les sessions spéciales, il est important de gérer rigoureusement le temps
de parole de tous les orateurs, pour autant que tous les gouvernements souhaitant s’exprimer
au cours du comité plénier soient autorisés à le faire. Le groupe des employeurs ne veut
toutefois pas se montrer intransigeant; la séance pourra être plus longue ou plus courte que
prévu, et la référence à la plage horaire de 10 h 30 à 13 h 00, au paragraphe 4 du document,
pourrait être supprimée pour offrir plus de souplesse.
701. La Vice-présidente travailleuse fait observer que l’essentiel est la tenue d’un comité plénier
à la séance du matin de chaque session spéciale. S’ils sont nombreux, les orateurs auront un
temps de parole plus court; s’ils sont moins nombreux, ils en auront un plus long. En tout état
de cause, le comité plénier devra s’achever à 13 heures afin que le Conseil d’administration,
seul organe de décision pour les questions en jeu, puisse tenir sa séance. Les autres questions
soulevées par le groupe des employeurs seront examinées lors des sessions spéciales.
702. Le Président relève qu’il y a convergence de vues quant à la convocation d’un comité plénier.
Les temps de parole pourront être ajustés, si nécessaire, en fonction du nombre d’orateurs. Il
est également important de laisser assez de temps pour la préparation du rapport oral avant
chaque séance du Conseil d’administration de l’après-midi.
703. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, un représentant du gouvernement de
l’Espagne déclare que l’Albanie, la Macédoine du Nord, le Monténégro, l’Islande, la Norvège et
l’Arménie s’associent à sa déclaration. Alors qu’ils étaient au départ favorables à la tenue d’une
session normale du Conseil d’administration, l’UE et ses États membres peuvent, dans l’intérêt
GB.349/INS/PV/Projet 163
du consensus, souscrire à l’option consistant à convoquer un comité plénier lors des séances
du matin. L’UE et ses États membres appuient également la proposition de la représentante
du GRULAC visant à permettre à tous les gouvernements de faire chacun une déclaration de
trois minutes au maximum.
704. La Vice-présidente travailleuse veut savoir si la proposition du GRULAC en faveur d’une seule
déclaration de trois minutes peut être adoptée.
705. La Vice-présidente employeuse déclare que, étant entendu que tous les gouvernements
souhaitant s’exprimer pourront le faire, il n’est pas nécessaire à ce stade de prendre une
décision quant au temps de parole des gouvernements s’exprimant à titre individuel.
706. S’exprimant au nom du GRULAC, une représentante du gouvernement du Mexique précise
que, dans la mesure où on ne sait pas exactement quels gouvernements auront la possibilité
d’intervenir deux fois, son groupe a proposé de limiter le temps de parole de tous les
gouvernements, qu’ils soient ou non membres du Conseil d’administration, à une seule
déclaration n’excédant pas trois minutes, ce qui devrait permettre à tous de participer aux
travaux du comité plénier.
707. La Vice-présidente employeuse convient que, pendant les réunions en comité plénier,
aucune différence ne devrait être faite entre les membres et les non-membres du Conseil
d’administration. Il conviendrait toutefois d’examiner plus avant le nombre et la durée des
déclarations de chacun.
708. Le Directeur général fait observer que les gouvernements qui ne sont pas membres du
Conseil d’administration doivent être informés des dispositions applicables aux réunions en
comité plénier, ce qui impose de prendre rapidement une décision. Il faut faire preuve d’une
certaine souplesse quant au temps de parole. Étant donné que le temps de parole global pour
une séance donnée dépend du nombre d’orateurs, le Président devrait avoir la possibilité de
réduire la durée des interventions, si nécessaire. Toutefois, une durée minimale de deux
minutes est indispensable. À cet égard, une seule déclaration de trois minutes pourrait
convenir davantage que deux déclarations de deux minutes chacune. À moins que le Conseil
d’administration ne décide de clôturer sa séance du matin à 13 heures, celle-ci pourrait être
prolongée un peu sans que le format de la séance de l’après-midi ne soit remis en cause.
709. La vice-présidente travailleuse déclare que, dans la mesure où un plus grand nombre de
gouvernements, mais pas de représentants des employeurs et des travailleurs, pourraient
participer aux réunions en comité plénier, c’est aux représentants des gouvernements qu’il
appartient de prendre une décision. Elle convient que le Président devrait avoir la possibilité
d’organiser la séance du matin de telle sorte que tous les participants puissent apporter leur
contribution. Pour le groupe des travailleurs, le plus important est que rien ne vienne
compromettre le bon déroulement de la séance normale de l’après-midi.
710. Une représentante du gouvernement de l’Inde convient que tous les gouvernements, qu’ils
soient ou non membres du Conseil d’administration, devraient disposer du même temps de
parole pendant les réunions en comité plénier, et se montre flexible quant à sa durée précise.
Dans leurs déclarations, les gouvernements doivent éviter de se répéter; si chacun dispose
d’un tour de parole, la séance pourra se terminer à l’heure.
711. Le Président constate que la proposition visant à harmoniser les temps de parole des
gouvernements membres et non membres du Conseil d’administration pendant les réunions
en comité plénier recueille un franc soutien. Il estime qu’une seule déclaration de trois minutes
serait préférable à deux déclarations de deux minutes, qui équivaudraient à un temps de
parole de quatre minutes pour chaque gouvernement. Il disposera d’une marge de manoeuvre
GB.349/INS/PV/Projet 164
pour réduire au besoin le temps de parole. L’orateur demande si le Conseil d’administration
est prêt à trouver un accord sur le projet de décision.
712. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique) rappelle que, avant d’adopter le
projet de décision, il faut d’abord modifier le paragraphe 4 du document GB.349/INS/18/5 de
sorte qu’il tienne compte des souhaits des membres du Conseil d’administration relatifs au
nombre d’interventions, aux temps de parole et à la souplesse supplémentaire. Le Bureau
effectuera les changements nécessaires et distribuera une version révisée du document.
713. La Vice-présidente employeuse reconnaît que le paragraphe 4 devrait être modifié de
manière à prendre en compte les débats du Conseil d’administration. Il devrait prévoir une
certaine souplesse quant au temps de parole, et faire disparaître la distinction entre membres
et non-membres du Conseil d’administration.
714. La Vice-présidente travailleuse indique que le Conseil d’administration pourra facilement
approuver le projet de décision une fois que la version révisée du document aura été publiée.
Elle souligne toutefois que la séance de l’après-midi doit avoir lieu selon les modalités
habituelles.
715. Le Président note que le Bureau a établi une version révisée du document, dans laquelle le
paragraphe 4 a été modifié de manière à tenir compte du consensus relatif aux dispositions
pratiques applicables aux deux sessions spéciales, et à spécifier que le Président peut procéder
s’il y a lieu aux ajustements nécessaires. Il invite le Conseil d’administration à adopter le projet
de décision.
716. La Vice-présidente employeuse rappelle que son groupe a formulé trois propositions:
prolonger le comité plénier dans l’après-midi afin de permettre aux gouvernements qui
souhaitent prendre la parole de le faire; autoriser les gouvernements à faire deux déclarations
n’excédant pas deux minutes chacune; fixer la clôture de la séance de l’après-midi à 20 heures
au plus tard, afin de garantir des conditions de travail décentes. Pourtant, la version révisée du
document ne tient pas compte de ces propositions. Elle ne prévoit pas de prolongation du
comité plénier et indique que, à chaque séance de l’après-midi, le Conseil d’administration
devra conclure sa discussion et prendre une décision sur la question à l’ordre du jour. Ce n’est
pas ce qui a été convenu. L’oratrice insiste sur le fait que c’est à la Conférence, réunie en séance
plénière, qu’il appartient de prendre la décision finale quant à l’éventuelle saisine de la CIJ sur
la question du droit de grève, compte tenu de l’impact de cette question pour tous les
mandants. L’absence d’esprit de compromis et d’ouverture dont le Bureau a fait preuve face
aux préoccupations du groupe des employeurs n’a pas permis d’aboutir à un document
équilibré et constructif, et a créé un climat peu propice aux difficiles discussions qui
s’annoncent dans le cadre des sessions spéciales. Le problème aurait pu être évité si le Bureau
avait donné au groupe de sélection le pouvoir d’examiner les dispositions pratiques avant le
début de la présente session du Conseil d’administration. Le groupe des employeurs ne peut
pas accepter les dispositions telles qu’elles sont définies au paragraphe 4 de la version révisée
du document, et souhaite poursuivre la discussion en vue d’aboutir à un consensus.
717. La Vice-présidente travailleuse dit que le projet de décision, qui n’a fait l’objet d’aucune
proposition ’ d’amendement, aurait dû être adopté lorsque la question a été examinée pour la
première fois. Comme cela a été clairement indiqué à l’occasion de la discussion sur le
programme et budget pour 2024-25 lors des sessions précédentes, le Conseil d’administration
ne peut pas amender un document du Bureau. La version révisée publiée par le Bureau tente
de refléter fidèlement la discussion qui a eu lieu, notamment l’accord sur le fait que le
Président, en consultation avec les Vice-présidentes, bénéficiera d’une certaine marge de
manoeuvre quant aux dispositions applicables aux séances du matin. Le groupe des
GB.349/INS/PV/Projet 165
travailleurs a clairement dit que cette souplesse ne pouvait être telle qu’une journée entière
de réunion soit consacrée au comité plénier; il est extrêmement important que les séances de
l’après-midi se tiennent comme des séances normales du Conseil d’administration.
718. L’objection relative au libellé du paragraphe 4, sur la nécessité de conclure la discussion et de
prendre une décision sur la question à l’ordre du jour, est sans fondement, car le Bureau a
expliqué qu’une session spéciale doit donner lieu à une décision. La formulation ne préjuge en
rien du résultat des sessions spéciales. Par ailleurs, un comité plénier ne peut être convoqué
que sur décision du Conseil d’administration. Si le groupe des employeurs s’oppose aux
dispositions y afférentes, le Conseil d’administration ne peut pas décider de siéger en comité
plénier et les sessions spéciales doivent alors se dérouler comme des séances normales du
Conseil d’administration. Le groupe des travailleurs ne souscrira pas à des dispositions autres
que celles qui sont reflétées dans la version révisée du document.
719. La Vice-présidente employeuse précise que son groupe considère que la formulation
adoptée dans la dernière puce du paragraphe 4 du document révisé est très ouverte, alors que
les employeurs ont clairement indiqué qu’il ne fallait pas laisser supposer qu’un vote serait
organisé pour conclure la discussion. La version révisée du document ne mentionne pas que
la réunion doit se terminer à une heure raisonnable, ou que le Président dispose d’une marge
de manoeuvre pour répondre favorablement aux demandes de prise de parole, y compris dans
le cas où certains gouvernements voudraient s’exprimer une seconde fois. Les dispositions
sont applicables non seulement au comité plénier, mais aussi aux sessions spéciales dans leur
entier. L’oratrice souhaite connaître le point de vue de vue du Président, notamment savoir si
celui-ci désire bénéficier d’une telle marge de manoeuvre pour ce qui est de la gestion du
temps, et l’engagement peut être pris de faire en sorte que les sessions spéciales se terminent
à une heure raisonnable.
720. La Vice-présidente travailleuse souligne qu’elle a clairement indiqué que la souplesse dans
la gestion du temps était limitée par la nécessité de tenir à la fois une réunion en comité plénier
et une séance normale du Conseil d’administration. En outre, il incombe au Conseil
d’administration, sous la direction de son Président, de déterminer s’il convient de prendre une
décision ou de procéder à un vote. Le groupe des travailleurs est assurément très favorable à
des horaires de travail décents, mais les discussions peuvent devenir difficiles et elles
prendront du temps; limiter ce temps à l’avance apparaît comme une tentative d’empêcher
qu’une quelconque décision soit prise.
721. Le Président observe que, précédemment, le Conseil d’administration a semblé près de
parvenir à un consensus. Le Bureau a intégré les éléments à l’examen dans le document révisé.
L’orateur fait valoir que le document n’est peut-être pas parfait du point de vue des
employeurs, mais que la formulation traduit les accords trouvés concernant les dispositions
qui devraient s’appliquer aux sessions spéciales. Par ailleurs, les décisions relatives à la gestion
du temps sont une prérogative du Président.
722. Le Directeur général souligne que, pour concilier séance plénière et séance normale du
Conseil d’administration, il faut faire preuve de souplesse sur la question des temps de parole
et des horaires des séances de l’après-midi. Le Président doit disposer de la marge de
manoeuvre nécessaire pour réduire ou prolonger le temps de parole en vue de répondre
favorablement à toutes les demandes de prise de parole. L’heure d’ouverture de la séance
normale du Conseil d’administration dépendra de l’heure de clôture de la réunion en comité
plénier, et devra tenir compte du temps nécessaire pour préparer le compte rendu oral. Il est
donc probable que la séance de l’après-midi sera, par défaut, une séance prolongée. En outre,
la référence, dans le document, à une décision ne donne pas d’indication sur la nature de la
GB.349/INS/PV/Projet 166
décision qui sera prise. Il est néanmoins nécessaire que chaque session spéciale produise un
résultat.
723. La Vice-présidente employeuse fait observer qu’il n’est pas habituel de déclarer qu’une
assemblée doit conclure sa discussion, puisque la décision prise peut être de poursuivre la
discussion. Le groupe des employeurs voit dans le membre de phrase «pour conclure sa
discussion et prendre une décision sur la question à l’ordre du jour» une volonté d’imposer un
vote, et estime par conséquent que cette formulation n’est pas neutre. Si ce membre de phrase
est supprimé, et qu’il est convenu que toute prolongation de la séance de l’après-midi dans la
soirée se fera dans les limites du raisonnable, le groupe des employeurs est disposé à accepter
le projet de décision.
724. La Vice-présidente travailleuse réaffirme que les modifications proposées par le groupe des
employeurs constituent des amendements à une partie du document qu’il n’est pas possible
d’amender. La décision de poursuivre une discussion est bien sûr aussi une décision; si le
Conseil d’administration devait renvoyer la question à la Conférence – comme le souhaitent les
employeurs –, il faudrait également qu’une décision soit prise. La question de savoir si le temps
sera suffisant pour que tous les gouvernements souhaitant s’exprimer puissent le faire est
effectivement un sujet de préoccupation, d’autant que de nombreux gouvernements ont
déclaré vouloir qu’un débat se tienne d’urgence, en novembre. Comme il n’a pas été accepté
que la question soit inscrite de toute urgence à l’ordre du jour de la session ordinaire du Conseil
d’administration, le groupe des travailleurs a demandé qu’une session spéciale soit tenue pour
l’examiner et prendre une décision. L’oratrice met en garde contre le risque d’enlisement dans
des questions de formulation.
725. La Vice-présidente employeuse répond que la demande visant à ce qu’une question soit
ajoutée à l’ordre du jour de la session ordinaire du Conseil d’administration n’a pas été
présentée au groupe de sélection, qui aurait eu le temps de définir les dispositions applicables.
Telles qu’elles sont formulées actuellement, les dispositions applicables aux sessions spéciales
ne prévoient pas la possibilité qu’une décision soit prise de poursuivre la discussion. La
conclusion d’une discussion ne peut être imposée. Les règles applicables au Conseil
d’administration obligent le Président à rechercher le consensus, ce qui normalement suppose
tenir au moins deux sessions ordinaires, pendant lesquelles les questions controversées sont
examinées sans pression indue. Le groupe des employeurs est opposé à ce qui est défini quant
à la conclusion de la discussion, qui préjuge de la nécessité d’un vote.
726. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, le représentant du gouvernement de
l’Espagne rappelle que les gouvernements de son groupe étaient nettement favorables, à
l’origine, à ce que les sessions spéciales soient organisées de la même manière que les sessions
ordinaires du Conseil d’administration, mais avaient accepté la tenue de réunions en comité
plénier le matin dans un souci de consensus. Le Conseil d’administration s’est efforcé de
préciser les éléments énoncés au paragraphe 4 du document, et le consensus recueilli a été
reflété dans la version révisée. L’orateur prie instamment le Conseil d’administration d’adopter
la décision.
727. Une représentante du gouvernement de la Namibie déplore l’absence de confiance entre
les participants. Le Conseil d’administration doit pouvoir examiner dans des conditions
équitables les importantes questions de fond que sont la possibilité de saisir la CIJ et
l’éventuelle action normative. L’oratrice prie instamment les membres de trouver un moyen de
permettre au Conseil d’administration de traiter ces questions.
GB.349/INS/PV/Projet 167
728. Le Président estime que, s’il est vrai que les sessions spéciales doivent aboutit à un résultat,
la référence qui est faite à une décision dans le document ne préjuge en rien de la nature de
cette décision.
729. La Vice-présidente employeuse demande au Président de donner l’assurance qu’il fera
preuve de souplesse en ce qui concerne les temps de parole, que la discussion sera inclusive,
que les questions seront examinées quant au fond, qu’il recherchera le consensus et que, si
aucun consensus n’est trouvé, le Conseil d’administration pourra décider de poursuivre la
discussion.
730. La Vice-présidente travailleuse fait observer qu’il n’est pas approprié de demander de telles
garanties au Président. Il sera difficile d’arriver à un consensus sur les questions complexes à
l’examen, mais le Président s’efforcera de le favoriser. Tous les membres ont le droit de
demander un vote, même si une majorité claire se dégage, mais le Conseil d’administration n’a
jamais été obligé de procéder à un vote. L’oratrice souhaite savoir si l’absence de décision du
Conseil d’administration concernant les dispositions applicables au comité plénier signifie que
la réunion doit prendre la forme d’une session ordinaire du Conseil d’administration.
731. Le Président donne au Conseil d’administration l’assurance que la réunion sera gérée de
manière équitable et que chacun sera entendu. Il est impossible de savoir à l’avance comment
la réunion se déroulera exactement, mais il faudra conclure la discussion à un moment donné.
Les membres du Conseil d’administration devront déterminer, ensemble et sur la base de la
discussion, toute décision à prendre.
732. La Vice-présidente employeuse fait remarquer qu’un vote a bel et bien été imposé dans le
passé. En mars 2023, un vote devait être tenu sur la question de la saisine de la CIJ, contre la
volonté clairement exprimée du groupe des employeurs et d’un grand nombre de
gouvernements, mais il n’a finalement pas eu lieu. L’oratrice souhaite donc avoir l’assurance
que le Président évitera que cette situation ne se reproduise et qu’il cherchera à dégager un
consensus avant que la décision ne soit prise de procéder à un vote. Lorsque le groupe des
employeurs aura obtenu ces garanties, il pourra approuver le projet de décision.
733. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique), répondant à la question de la
Vice-présidente travailleuse, rappelle que, conformément à la pratique établie, le projet de
décision figurant dans la version révisée du document doit être soit adopté, soit modifié, selon
ce que le Conseil d’administration jugera opportun. Il ajoute qu’une décision doit être prise
quant aux dispositions pratiques en particulier, car le Directeur général doit informer tous les
États Membres de ces modalités spécifiques avant les sessions spéciales. Il explique que le
Bureau a préparé une version révisée du document qui prend en compte la discussion. La
clause de souplesse permettant au Président d’apporter les ajustements nécessaires, en
consultation avec les Vice-présidentes, est applicable à la fois aux séances du matin et à celles
de l’après-midi, et couvre donc la possibilité de prolonger la réunion du comité plénier au début
de l’après-midi et d’ajuster les temps de parole. Le Bureau a estimé que, compte tenu de la
marge de manoeuvre disponible, aucune autre modification d’ordre rédactionnel n’était
nécessaire.
734. La Vice-présidente travailleuse dit que le document définit de manière adéquate les
dispositions applicables aux sessions spéciales. Elle rappelle que demander un vote est une
prérogative de chaque membre du Conseil d’administration. Le groupe des travailleurs
préférerait néanmoins éviter un vote, dans la mesure où une décision devrait pouvoir être
prise si une majorité claire se dégage.
GB.349/INS/PV/Projet 168
735. La Vice-présidente employeuse concède que, le Président ayant donné l’assurance qu’il
veillerait à ce que la réunion se déroule de manière équitable, notamment en ce qui concerne
le temps de parole, et qu’il rechercherait le consensus et l’instauration d’un climat constructif
où la confiance règne, son groupe peut accepter le projet de décision.
736. Le Président réaffirme que le consensus reste l’objectif commun, et prie instamment tous les
membres du Conseil d’administration d’oeuvrer à la réalisation de celui-ci.
Décision
737. Le Conseil d’administration approuve les dispositions proposées au paragraphe 4 du
document GB.349/INS/18/5(Rev.1) aux fins de ses 349ebis et 349eter sessions (spéciales) et
demande que ces dispositions soient promptement portées à la connaissance de tous les
États Membres et publiées sur la page Web publique du Conseil d’administration.
(GB.349/INS/18/5(Rev.1), paragraphe 5)
19. Rapports du bureau du Conseil d’administration
19.1. Premier rapport: plainte alléguant le non-respect par le Nicaragua
de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, de la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, de la convention
(no 111) concernant la discrimination (emploi et profession), 1958,
et de la convention (no 144) sur les consultations tripartites relatives
aux normes internationales du travail, 1976, déposée par des délégués
à la 111e session (2023) de la Conférence internationale du Travail
en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT
(GB.349/INS/19/1)
738. Le porte-parole du groupe des employeurs indique que la plainte a été déposée en raison
de la gravité des faits et de l’urgente nécessité de rétablir l’état de droit et la liberté syndicale
au Nicaragua. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a dénoncé les
violations des droits de l’homme au Nicaragua, en particulier les restrictions que le
gouvernement continue d’imposer à l’espace civique et aux libertés individuelles et collectives,
la persécution des individus perçus comme des opposants ou des détracteurs des autorités, la
torture de détenus et l’expulsion des organismes internationaux chargés de surveiller les
conditions de détention. Le Conseil supérieur de l’entreprise privée (COSEP), l’organisation
d’employeurs la plus représentative du Nicaragua, a fait l’objet de nombreuses violations,
confirmées par diverses organisations internationales, mais non reconnues par le
gouvernement du Nicaragua, qui affirme que les droits des personnes sont respectés et les
conventions de l’OIT appliquées. La situation dans le pays est à l’évidence inacceptable, au
point que les experts des Nations Unies chargés de la suivre ont déclaré que des crimes contre
l’humanité, liés à la persécution pour des motifs politiques, étaient commis depuis 2018. Le
Conseil d’administration doit agir de manière résolue en utilisant les mécanismes disponibles
et en nommant une commission d’enquête conformément à l’article 26 de la Constitution de
l’OIT.
Document no 29
GB.349bis/INS/1/1, Suite à donner à la demande du
groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à
ce que la difficulté d’interprétation de la convention no 87
concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en
vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de
l’OIT – Rapport d’information du Bureau, octobre 2023
GB.349bis/INS/1/1
Afin de réduire au maximum l’impact environnemental des activités de l’OIT, les documents du Conseil d’administration publiés avant ou après les sessions ne
sont pas imprimés. Seuls les documents publiés en cours de session sont imprimés, en nombre limité, et distribués aux membres du Conseil d’administration.
Tous les documents du Conseil d’administration sont disponibles sur Internet, à l’adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
349ᵉbis session (spéciale), Genève, 10 novembre 2023
Section institutionnelle INS
Date: 12 octobre 2023
Original: anglais
Première question à l’ordre du jour
Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs
et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant
le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation
de la Cour internationale de Justice en vertu
de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT
Rapport d’information du Bureau
Le présent document a été élaboré aux fins de la session spéciale du Conseil d’administration qui a été convoquée
au titre de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution de l’OIT à la suite de la demande du groupe des travailleurs
et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution. Le
rapport d’information y annexé donne des renseignements factuels sur la genèse et la portée de cette difficulté
d’interprétation de longue date afin d’aider le Conseil d’administration dans son examen et sa prise de décision.
Le Conseil d’administration est invité à prendre note du rapport d’information et à fournir des orientations sur la
suite à donner aux demandes de renvoi reçues (voir le projet de décision au paragraphe 27).
Objectif stratégique pertinent: Aucun.
Objet du document
GB.349bis/INS/1/1 2
Principal résultat: Résultat2 : Des normes internationales du travail et un système de contrôle efficace et faisant
autorité.
Incidences sur le plan des politiques: Aucune.
Incidences juridiques: Aucune à ce stade.
Incidences financières: Aucune à ce stade.
Suivi nécessaire: Selon la décision du Conseil d’administration.
Unité auteur: Bureau du Conseiller juridique (JUR).
Documents connexes: GB.347/PV(Rev.); GB.347/INS/5; GB.323/INS/5/Appendix III; GB.322/INS/5.
GB.349bis/INS/1/1 3
Introduction
1. Selon la Constitution de l’OIT et le Règlement du Conseil d’administration, une session spéciale
du Conseil d’administration peut être convoquée lorsque le nombre minimal requis de
membres titulaires du Conseil en fait la demande par écrit, ou lorsque le Président de celui-ci
l’estime nécessaire.
2. En particulier, l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution prévoit ce qui suit:
Une session spéciale (special meeting) [du Conseil d’administration] devra être tenue chaque
fois que seize personnes faisant partie du Conseil auront formulé une demande écrite à cet
effet.
3. En outre, le paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration est ainsi libellé:
Sans préjudice de ce qui est stipulé au dernier alinéa de l’article 7 de la Constitution de
l’Organisation, le Président peut également convoquer, après consultation des Vice-présidents,
une session extraordinaire (special meeting) quand cela lui paraît nécessaire. Le Président est
tenu de le faire à la réception d’une demande à cet effet signée par seize membres du groupe
gouvernemental, ou douze membres du groupe des employeurs, ou douze membres du
groupe des travailleurs.
4. Par voie de conséquence, la tenue d’une session spéciale est obligatoire lorsqu’une demande
écrite est formulée à cet effet soit par 16 membres titulaires tous groupes confondus, soit par
16 membres titulaires du groupe gouvernemental, ou 12 membres titulaires du groupe des
employeurs, ou 12 membres titulaires du groupe des travailleurs; une telle session peut
également être convoquée de manière volontaire par le Président du Conseil d’administration,
dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire 1.
5. À ce jour, une session spéciale a été convoquée à trois occasions, en septembre 1932, en
octobre 1935 et en mai 1970, chaque fois à l’initiative du Président du Conseil d’administration,
dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire 2.
Chronologie
6. Par une lettre en date du 12 juillet 2023 adressée au Directeur général, la Vice-présidente
travailleuse du Conseil d’administration a officiellement demandé que la difficulté de longue
date concernant l’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, difficulté qui a trait au droit de grève, soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice (la CIJ ou la Cour) en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT. À cette fin, elle a prié le Bureau de prendre toutes les
mesures nécessaires pour inscrire à l’ordre du jour de la 349e session du Conseil
d’administration (octobre-novembre 2023), pour examen et décision, la question de la
demande d’avis consultatif à la Cour. Elle a également demandé au Bureau d’établir un rapport
1 Pour en savoir davantage, voir la note du Bureau sur l’origine et l’évolution des règles applicables à la tenue des sessions
spéciales du Conseil d’administration.
2 Pour en savoir davantage, voir la note du Bureau sur la pratique antérieure relative aux sessions spéciales du Conseil
d’administration.
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détaillé à ce propos afin que le Conseil d’administration puisse prendre une décision éclairée
à l’occasion de cette session.
7. Dans les jours et les semaines qui ont suivi la réception de la lettre de la Vice-présidente
travailleuse, le Directeur général a reçu des lettres analogues au nom des gouvernements des
États membres de l’Union européenne, de l’Islande et de la Norvège, ainsi que des
gouvernements de l’Angola, de l’Afrique du Sud, de l’Argentine, de la Barbade, du Brésil, de la
Colombie et de l’Équateur, dans lesquelles il était demandé que la question soit examinée de
toute urgence à la prochaine session du Conseil d’administration afin qu’une décision soit prise
sur son renvoi devant la CIJ pour avis consultatif. Faisant écho à la demande du groupe des
travailleurs, les gouvernements susmentionnés ont prié le Bureau d’établir et de diffuser, avant
la discussion du Conseil d’administration, un rapport d’information contenant tous les
éléments nécessaires et de porter leurs lettres à l’attention de tous les mandants de
l’Organisation.
8. Par une lettre circulaire en date du 17 juillet 2023, le Directeur général a informé tous les États
Membres des demandes de renvoi reçues jusqu’alors et a indiqué que, dans l’attente de la
confirmation des membres du bureau du Conseil d’administration, le Bureau envisageait
toutes les dispositions à prendre, y compris l’élaboration d’un rapport détaillé qui serait diffusé
bien en amont de la prochaine session du Conseil d’administration.
9. Les demandes de renvoi ont été transmises aux membres du bureau du Conseil
d’administration pour que ceux-ci en confirment l’examen à la 349e session, étant entendu que
le groupe de sélection tripartite devrait se réunir à une date ultérieure pour convenir des
éventuels ajustements à apporter à l’ordre du jour. Ce faisant, le Bureau a précisé que, ces
demandes portant sur la mise en oeuvre d’une procédure constitutionnelle, elles devaient être
soumises directement et immédiatement au Conseil d’administration pour examen et que ni
les membres du bureau ni les autres membres du groupe de sélection n’avaient la faculté d’y
faire obstacle ou de retarder cette soumission. Il a également précisé que toute objection de
fond quant à la saisine de la Cour de manière générale, ou aux questions à soumettre à celleci
en particulier, pourrait et devrait être formulée lors de la discussion du Conseil
d’administration, mais ne saurait l’être auprès des membres du bureau du Conseil, dont le rôle
se limitait à ce stade à confirmer l’examen de la question à la prochaine session.
10. Par des lettres en date du 18 juillet et du 2 août 2023 adressées au Directeur général, la Viceprésidente
employeuse du Conseil d’administration a exprimé l’opposition de son groupe aux
demandes reçues en faisant valoir que, selon le paragraphe 3.1.3 du Règlement du Conseil
d’administration, toute actualisation de l’ordre du jour provisoire devait faire l’objet de
consultations au sein du groupe de sélection tripartite. En conséquence, la Vice-présidente
employeuse a demandé au Directeur général d’inscrire à l’ordre du jour de la 350e session
(mars 2024) une question relative aux nouvelles solutions proposées pour assurer la sécurité
juridique dans le contexte de l’interprétation de la convention nº 87, s’agissant du «droit de
grève». Elle a aussi prié le Bureau d’élaborer une note contenant un examen détaillé de toutes
les possibilités envisageables pour régler la difficulté d’interprétation existante par le dialogue
social, dans le cadre des règles et procédures établies de l’Organisation. Dans sa réponse datée
du 3 août 2023, le Directeur général a indiqué que, étant donné que la proposition du groupe
des employeurs ne portait pas sur le recours à une procédure constitutionnelle, mais visait
l’ajout d’une nouvelle question à l’ordre du jour de la session du Conseil d’administration de
mars 2024, elle devrait, conformément à la pratique établie, être examinée par le groupe de
sélection lorsque celui-ci se pencherait sur l’ordre du jour provisoire de cette future session.
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11. Par une lettre circulaire en date du 4 août 2023, le Directeur général a informé tous les États
Membres de la réception d’une nouvelle demande de renvoi, en portant également à leur
connaissance la lettre de la Vice-présidente employeuse en date du 2 août et une note du Bureau
en date du 13 juillet contenant des précisions juridiques au sujet de la procédure à suivre.
12. Les membres du bureau du Conseil d’administration se sont réunis à deux reprises, les 2 et
9 août 2023, pour régler des questions de procédure. Lors de la seconde réunion, leur
attention a été appelée sur le fait que, les conditions énoncées à l’article 7, paragraphe 8, de la
Constitution étant réunies, il n’y avait plus lieu de poursuivre l’examen de la procédure à suivre
puisque, au fond, la demande de renvoi portait sur la mise en oeuvre de la procédure
constitutionnelle prévue à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, de sorte que le bureau
n’était pas habilité à empêcher ou retarder la transmission de cette demande au Conseil
d’administration pour examen et décision. Lors de la même réunion, le Président a reçu une
lettre en date du 9 août signée par les 14 membres travailleurs titulaires du Conseil
d’administration, dans laquelle il lui était demandé de convoquer une session spéciale au titre
du paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil dans l’éventualité où les membres du bureau ne
parviendraient pas à s’entendre.
13. Eu égard à ces considérations, il a été conclu qu’une session spéciale aurait lieu dans la
deuxième partie de l’automne, en marge de la 349e session du Conseil d’administration,
conformément à la demande initiale présentée par le groupe des travailleurs et plusieurs
gouvernements en vue de faire inscrire une question supplémentaire à l’ordre du jour de cette
session 3.
14. Par une lettre circulaire en date du 10 août 2023, le Directeur général a informé tous les États
Membres de la réception de deux demandes de renvoi supplémentaires et de la décision prise
par les membres du bureau du Conseil à l’issue de leur seconde réunion, selon laquelle une
session spéciale aurait lieu dans la deuxième partie de l’automne, en marge de la 349e session
du Conseil d’administration, relativement à la demande de renvoi présentée par le groupe des
travailleurs et un certain nombre de gouvernements. Le Directeur général a également indiqué
que le Bureau comptait diffuser d’ici le 8 septembre un rapport détaillé afin de faciliter les
prochaines discussions du Conseil d’administration et que toutes observations formulées à cet
égard, qui devraient avoir été reçues le 6 octobre au plus tard, seraient synthétisées et
communiquées en amont de la session spéciale.
15. Entre le 25 août et le 15 septembre, le Bureau a reçu des lettres identiques de six organisations
nationales d’employeurs dans lesquelles celles-ci appelaient son attention sur le non-respect
par leurs gouvernements respectifs de l’obligation de mener des consultations tripartites
établie dans la convention (nº 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes
internationales du travail, 1976, s’agissant de la demande de renvoi adressée à l’OIT, et
demandaient au Directeur général d’intervenir d’urgence afin de rappeler les gouvernements
concernés aux obligations leur incombant au titre de cette convention. Le Bureau a fait tenir
copie de ces communications aux gouvernements en question en leur indiquant que, selon la
pratique établie, les observations des organisations d’employeurs et les commentaires qu’ils
pourraient vouloir formuler à cet égard seraient portés à la connaissance de la Commission
d'experts pour l’application des conventions et recommandations à la prochaine session de
3 Il a ensuite été demandé aux gouvernements concernés de confirmer que leurs demandes visaient bien à ce que le Conseil
d’administration tienne une discussion d’urgence, quelle que soit la forme particulière qui pourrait être donnée à cette
discussion pour des raisons procédurales, ce que lesdits gouvernements ont confirmé.
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celle-ci (novembre-décembre 2023). L’une des organisations d’employeurs concernées a
ensuite retiré sa communication.
16. Par un courriel en date du 20 août 2023, le Secrétaire général de l’Organisation internationale
des employeurs a transmis une «Note sur des questions de procédure concernant l’inscription
d’une question urgente à l’ordre du jour de la session du Conseil d’administration» à l’effet de
préciser la position du groupe des employeurs, comme suit:
a) l’inscription d’une question urgente à l’ordre du jour ne peut se faire que par
l’intermédiaire du groupe de sélection, une procédure qui ne saurait donc être
contournée;
b) les questions relevant de l’article 37 ne sauraient être traitées de la même manière que
les réclamations au titre de l’article 24 ou les plaintes au titre de l’article 26;
c) la disposition relative aux sessions spéciales qui figure à l’article 7, paragraphe 8, de la
Constitution n’est pas applicable aux questions relevant de l’article 37, paragraphe 1), et,
en tout état de cause, il n’existe pas de réelle urgence ou nécessité justifiant la tenue d’une
telle session;
d) la tenue de la session spéciale prévue au paragraphe 3.2.2. du Règlement du Conseil
d’administration n’est ni justifiée ni appropriée et, de toute façon, l’ordre du jour d’une
telle session doit faire l’objet d’un accord au sein du groupe de sélection;
e) les procédures antérieures de renvoi au titre de l’article 37, paragraphe 1, diffèrent à tel
point du renvoi envisagé ici qu’elles n’offrent aucun point de comparaison.
17. Dans sa réponse en date du 29 août 2023, le Bureau a fourni des éclaircissements sur les points
suivants:
a) la compétence du bureau et du groupe de sélection tripartite en ce qui concerne
l’application des procédures constitutionnelles est limitée;
b) la tenue d’une session spéciale au titre de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution et
du paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration s’impose
automatiquement et n’est soumise à aucune condition d’ordre procédural, si ce n’est
qu’elle doit être demandée par un nombre minimum de membres;
c) les six procédures antérieures de saisine de la Cour permanente de justice internationale
sont pertinentes et peuvent incontestablement être considérées comme ayant force de
précédent.
Le Bureau a conclu en indiquant que le cadre juridique applicable avait été scrupuleusement
respecté, que le bureau du Conseil d’administration avait confirmé l’obligation de tenir une
session spéciale en application de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution dès lors que la
demande était présentée par le nombre minimal requis de 16 membres titulaires, et que le
Président était tenu de convoquer une session spéciale puisque 14 membres travailleurs
titulaires avaient formulé une demande écrite à cet effet, conformément au paragraphe 3.2.2
du Règlement du Conseil d’administration.
18. Par une lettre circulaire en date du 12 septembre 2023, le Directeur général a informé tous les
États Membres de la réception de deux nouvelles demandes de renvoi et d’une communication
du gouvernement de la Confédération suisse dans laquelle celui-ci rappelait sa position quant
à un éventuel renvoi de la difficulté d’interprétation de la convention no 87 devant la CIJ, à
savoir que la Conférence internationale du Travail devrait approuver un tel renvoi ainsi que la
ou les questions à poser à la Cour, que les débats à cet égard devraient être ouverts à tous les
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États Membres et que les États parties à la convention no 87 devaient être associés aux
discussions concernant la ou les questions à soumettre à la Cour. Le gouvernement de la
Suisse demandait en outre que le bureau du Conseil d’administration organise une discussion
du Conseil réuni en comité plénier.
19. Lors d’une réunion tenue le 13 septembre 2023, le groupe de sélection tripartite a décidé que
la session spéciale aurait lieu les 10 et 11 novembre 2023, immédiatement après la clôture de
la 349e session, et que son ordre du jour ne comporterait qu’une seule question, ainsi libellée:
Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence
à l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT.
20. Pendant la réunion du groupe de sélection, la Vice-présidente employeuse du Conseil
d’administration a remis au Président du Conseil d’administration une lettre datée du
12 septembre et signée par les 14 membres employeurs titulaires du Conseil d’administration,
dans laquelle ces derniers demandaient la convocation d’une session spéciale au titre du
paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration aux fins de l’inscription d’urgence
d’une question normative sur le droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session (juin 2024)
de la Conférence internationale du Travail. L’objet de cette session spéciale serait d’ouvrir la
voie à l’adoption d’un protocole à la convention no 87 qui porterait sur le droit de grève, ou sur
les actions collectives de manière plus générale, et définirait une fois pour toutes le champ
d’application et les limites du droit de grève dans le cadre de la convention no 87, ce qui
réglerait le différend.
21. Par une lettre circulaire en date du 15 septembre 2023, le Directeur général a informé tous les
États Membres que la 349ebis session (spéciale) du Conseil d’administration aurait lieu le
10 novembre 2023 et serait chargée d’examiner la demande de renvoi du groupe des
travailleurs et de 36 gouvernements, et qu’une demande tendant à inscrire d’urgence une
question normative sur le droit de grève à l’ordre du jour de la prochaine Conférence avait été
reçue des 14 membres employeurs titulaires du Conseil d’administration.
Rapport d’information du Bureau
22. Comme suite à la requête expressément formulée dans la demande de renvoi du groupe des
travailleurs et de plusieurs gouvernements, le Bureau a élaboré un rapport d’information afin
de faciliter la discussion du Conseil d’administration. Ce rapport, qui est annexé au présent
document, décrit la genèse et l’étendue de la difficulté d’interprétation ainsi que les aspects
juridiques et procéduraux de son éventuelle soumission à la CIJ pour avis consultatif 4. Il a pour
seul but de fournir des informations et d’expliquer les différents aspects de la question afin de
permettre aux mandants tripartites de prendre une décision éclairée sur une éventuelle
saisine de la Cour. Il n’apporte pas de réponses de fond à la controverse qui existe de longue
4 Le présent rapport devrait être lu conjointement avec les documents suivants: L’initiative sur les normes – Appendice III.
Document de référence pour la Réunion tripartite sur la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau national
(révisé) (Genève, 23-25 février 2015), GB.323/INS/5/Appendix III, paragr. 1-59; GB.322/INS/5, paragr. 7-53, et GB.347/INS/5,
paragr. 9-27.
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date concernant le droit de grève, pas plus qu’il n’évalue le bien-fondé des points de vue
opposés ni ne soumet un quelconque avis sur l’opportunité d’une saisine de la Cour.
23. Le rapport d’information est axé sur les deux aspects essentiels du différend, à savoir
l’interprétation de la convention no 87 et le mandat de la Commission d’experts pour
l’application des conventions et recommandations de l’OIT, et présente le contexte factuel dans
lequel s’inscrit le débat en cours. Il fournit également de brèves explications sur les questions
qui pourraient être soumises à la Cour pour avis consultatif et sur les démarches procédurales
que cela supposerait.
24. Ce rapport a été communiqué à tous les États Membres de l’OIT le 31 août 2023, accompagné
d’une invitation à transmettre avant le 6 octobre 2023 toutes observations que ceux-ci
souhaiteraient formuler sur les questions à régler, après consultation de leurs organisations
d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives. Un résumé des observations reçues
sera publié dans un document distinct.
Prochaines étapes
25. Dans ce contexte, à sa session spéciale, le Conseil d’administration examinera la demande
tendant à ce que la difficulté d’interprétation soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour,
c’est-à-dire la question de savoir s’il est ou non nécessaire de saisir la Cour pour avis consultatif
et, dans l’affirmative, la ou les questions à poser à la Cour pour résoudre la difficulté. La session
spéciale offrira donc une occasion d’avoir un échange de vues approfondi et de prendre une
décision éclairée sur ce qu’il convient de faire, le cas échéant, y compris, mais pas
exclusivement, en ce qui concerne la requête d’avis consultatif de la Cour.
26. Dans son libellé actuel, la question inscrite à l’ordre du jour de la session spéciale du Conseil
d’administration devrait encourager la réflexion et permettre de débattre de toutes les options
possibles, comme: la saisine immédiate ou sous conditions de la Cour; la poursuite de la
discussion et le report de la décision à une session suivante; ou un accord sur les moyens de
régler la difficulté d’interprétation sans en référer à la Cour.
Projet de décision
27. Suite à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution de l’OIT, le Conseil d’administration décide
[décision à prendre à l’issue de la session spéciale].
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Annexe
Difficulté d’interprétation de la convention no 87
concernant le droit de grève – Rapport d’information
Résumé
Depuis plus de soixante-dix ans, la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations de l’OIT, composée d’experts indépendants chargés de contrôler l’application des
conventions ratifiées par les États Membres (ci-après la «commission d’experts»), considère que le droit de
grève est un corollaire de la liberté syndicale et que, en tant que tel, il est reconnu et protégé par la convention
(nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
Vers 1989, le groupe des employeurs a commencé à mettre en question l’interprétation de la convention
no 87 par la commission d’experts et à contester la compétence de celle-ci pour interpréter les
conventions.
La controverse s’est progressivement intensifiée et a donné lieu en 2012 à une crise institutionnelle majeure,
lorsque la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail (ci-après «la
Conférence») s’est trouvée empêchée pour la première fois d’exercer ses fonctions de contrôle.
Un sentiment largement partagé est que le désaccord persistant sur ces aspects essentiels du mandat
normatif de l’OIT nuit à la crédibilité du système de contrôle de l’Organisation et à sa réputation en tant
qu’institution normative.
Selon les règles applicables, une question juridique se posant dans le cadre de l’activité de l’OIT, concernant
par exemple l’interprétation d’une convention internationale du travail, peut être soumise à la Cour
internationale de Justice (ci-après «la CIJ» ou «la Cour») pour avis consultatif soit par la Conférence, soit par le
Conseil d’administration sur autorisation expresse de la Conférence.
Les questions juridiques qui opposent les deux groupes non gouvernementaux de l’OIT et qui pourraient être
soumises à la Cour sont: premièrement, celle de savoir s’il peut être considéré que le droit de grève découle
de la convention no 87 en tant que droit des travailleurs internationalement reconnu, même s’il n’est pas
expressément énoncé dans la convention; et, deuxièmement, celle de savoir si la commission d’experts a
outrepassé ses pouvoirs lorsqu’elle a affirmé que le droit de grève était inhérent à la liberté syndicale, et donc
protégé par la convention no 87, ou qu’elle a recherché si les limites ou conditions posées à l’exercice du droit
grève étaient susceptibles de porter atteinte à la liberté syndicale, en contravention de la convention
Si le Conseil d’administration décide de saisir la CIJ, ce sera la septième fois que l’OIT demande un avis
consultatif en vertu de l’article 37 de sa Constitution, mais seulement la deuxième fois qu’une telle demande
porte sur l’interprétation d’une convention internationale du travail.
Le présent rapport donne une vue d’ensemble des questions en jeu afin d’aider les mandants tripartites à
prendre une décision éclairée sur une éventuelle saisine de la CIJ.
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Table des matières
Page
I. Une difficulté d’interprétation de longue date: éléments de compréhension ......................... 11
I.1. Bref rappel des deux thèses en litige ..................................................................................... 11
I.2. Histoire de la difficulté survenue sur le plan juridique ....................................................... 13
II. Les principales données du problème ............................................................................................ 21
II.1. La convention no 87 de l’OIT et le droit de grève .................................................................. 21
II.1.1. Historique des négociations concernant la convention no 87 .............................. 21
II.1.2. Pratique ultérieurement suivie: les organes de contrôle de l’OIT
et le droit de grève ....................................................................................................... 24
II.1.3. L’interprétation des traités: règles et pratique ....................................................... 30
II.2. Le mandat de la commission d’experts ................................................................................. 33
II.2.1. Établissement et évolution des responsabilités de la commission
d’experts ........................................................................................................................ 33
II.2.2. Fonctions interprétatives des organes de contrôle et du secrétariat
de l’OIT ........................................................................................................................... 36
II.2.3. Les pouvoirs implicites des organes chargés de contrôler l’application
des instruments relatifs aux droits de l’homme: un plus large débat ................. 38
III. Question(s) à soumettre à la Cour .................................................................................................. 40
IV. Prochaines étapes possibles ............................................................................................................ 42
V. Observations finales .......................................................................................................................... 43
Annexes
I. Projet de résolution du Conseil d’administration ......................................................................... 45
II. Demandes d’interprétation soumises à la Cour permanente de justice internationale
en vertu de l’article 14 du Pacte de la Société des Nations (1922-1932) ................................... 47
III. Déroulement de la procédure menant au prononcé d’un avis consultatif
par la Cour internationale de Justice .............................................................................................. 49
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I. Une difficulté d’interprétation de longue date: éléments
de compréhension
I.1. Bref rappel des deux thèses en litige
1. La difficulté qui, au sein de l’OIT, oppose le groupe des employeurs et le groupe des travailleurs
depuis plus de trente ans recouvre deux questions: l’une concerne l’interprétation proprement
dite – littérale ou dynamique – de certaines dispositions de la convention no 87, en particulier
ses articles 3 et 10, et l’autre concerne la compétence de la commission d’experts pour
procéder à une telle interprétation, ainsi que les limites de cette compétence.
2. Sur la question de l’interprétation de la convention no 87, le groupe des employeurs avance
deux arguments principaux: le premier est que cet instrument ne contient aucune disposition
dont le sens ordinaire ou littéral impliquerait – en application de la règle coutumière
d’interprétation des traités énoncée à l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des
traités (ci-après la «Convention de Vienne») – l’existence d’un droit de grève; le second est que
les travaux préparatoires qui ont conduit à l’adoption de la convention no 87 – lesquels, selon
l’article 32 de la Convention de Vienne, peuvent servir de moyen complémentaire
d’interprétation – confirment que l’intention des rédacteurs n’était manifestement pas
d’inclure le droit de grève dans le champ d’application de la convention no 87 1.
3. En ce qui concerne la compétence de la commission d’experts pour interpréter les conventions,
la position du groupe des employeurs est que, malgré les tentatives de la commission d’élargir
de facto son mandat, celle-ci n’est investie depuis sa création que de fonctions purement
techniques et non judiciaires. En outre, le groupe des employeurs soutient que les conclusions
de la commission ne sauraient être considérées comme ayant un caractère contraignant
puisque, en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, seule la CIJ peut donner une
interprétation obligatoire des normes internationales du travail. Le groupe des employeurs
s’oppose donc systématiquement à ce qu’il considère comme une acceptation «dogmatique»,
par la commission d’experts, d’un droit de grève universel, explicite et détaillé ainsi qu’aux
tentatives de cette dernière de créer une nouvelle «jurisprudence» alors qu’elle n’a ni pouvoir
législatif ni compétence pour rendre des décisions contraignantes sur l’application des
législations nationales 2. Selon une publication de l’Organisation internationale des
employeurs:
Le droit de grève n’est pas prévu dans les conventions 87 et 98 de l’OIT – et elles n’ont d’ailleurs
pas été rédigées dans ce sens par les mandants tripartites à l’époque de [leur] création et de
[leur] adoption. [...] Malgré ce contexte, la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR) maintient que le droit de grève se [fonde] sur
l’article 3 de la convention no 87 [...] et l’article 10 [...] Sur la base de cette interprétation, la
CEACR étudie chaque année de nombreux cas impliquant des dispositions nationales
spécifiques ou des pratiques limitant les actions de grève. Dans près de 90 à 98 pour cent des
cas, les experts concluent que les restrictions au droit de grève, qu’elles soient de facto ou de
jure, ne sont pas compatibles avec la convention. Ils ont donc élaboré un corpus complet sur
un droit de grève extrêmement détaillé qui aboutit à une liberté très étendue et presque
illimitée de faire grève .3
1 Conférence internationale du Travail (CIT), 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 25/35-40. Voir aussi Alfred
Wisskirchen, «Le système normatif de l’OIT: Pratique et questions juridiques», Revue internationale du Travail 144, no 3 (2005):
267-305.
2 CIT, 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 28/9-12. Voir aussi Wisskirchen, 286-288.
3 Organisation internationale des employeurs (OIE), «Les conventions 87 et 98 reconnaissent-elles le droit de grève?»,
octobre 2014, 1-4.
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4. Le groupe des travailleurs défend une position diamétralement opposée sur ces deux
questions. S’il convient que les règles d’interprétation énoncées dans la Convention de Vienne
ont force de droit international coutumier et s’appliquent donc à la convention no 87, il met
l’accent sur la possibilité d’interprétation «dynamique» offerte par l’article 31 de la Convention
de Vienne, dans la mesure où ce dernier dispose qu’un traité doit être interprété dans son
contexte et à la lumière de son objet et de son but. En conséquence, le groupe des travailleurs
soutient que les termes de la convention no 87 garantissant le droit d’organisation doivent être
compris dans le contexte du libellé pertinent du préambule de la Constitution de l’OIT et de la
Déclaration de Philadelphie, et compte tenu de toute pratique ultérieure établissant l’existence
d’un accord général quant à leur interprétation, à travers par exemple la jurisprudence
constante des organes chargés de veiller à l’application de la convention. Il affirme en outre
qu’il n’est pas nécessaire de faire appel aux travaux préparatoires, puisque les conditions
énoncées dans la Convention de Vienne ne sont pas remplies, l’interprétation proposée en
application de son article 31 ne laissant pas le sens ambigu ou obscur et ne conduisant pas à
un résultat manifestement absurde ou déraisonnable.4
5. À propos du mandat de la commission d’experts, le groupe des travailleurs considère que tous
les organes de l’OIT ayant des attributions de contrôle interprètent nécessairement le sens des
normes et que, par conséquent, la commission d’experts – ainsi que les commissions d’enquête
chargées d’étudier les plaintes déposées au titre de l’article 26, les comités tripartites institués
pour examiner les réclamations présentées au titre de l’article 24 et la Commission de
l’application des normes – peuvent occasionnellement exercer des fonctions interprétatives,
sous réserve de toute interprétation contraignante susceptible d’être formulée par la CIJ 5.
6. En ce qui concerne les solutions envisageables pour aller de l’avant, le groupe des employeurs
rappelle souvent qu’il a «proposé de discuter, lors de la [Conférence internationale du Travail],
de la question de savoir si un droit de grève devait être repris dans un des instruments de l’OIT
[, mais] [qu’i]l n’y a pas été donné suite», alors que, d’après lui, «avec sa structure tripartite
unique, l’OIT [serait] le lieu idéal et le plus approprié pour résoudre cette question» 6. À la
344e session du Conseil d’administration (mars 2022), dans le cadre de l’examen du plan de
travail visant à renforcer le système de contrôle et des propositions destinées à assurer la
sécurité juridique, la porte-parole du groupe des employeurs a déclaré ce qui suit:
l’article 37 ne constitue pas une solution viable, car le droit de grève est un sujet
multidimensionnel et complexe, qui ne peut être considéré indépendamment des systèmes et
pratiques de relations professionnelles hétérogènes en place dans les États Membres de l’OIT.
Il est peu probable que le recours aux options prévues à l’article 37 permette d’assurer la
sécurité juridique. On ne voit en effet pas bien comment des organes extérieurs et judiciaires
pourraient trouver une solution largement acceptée des mandants sur un sujet si délicat. [...]
Ceux-ci disposent en effet d’un important espace de dialogue et de coopération propre à la
recherche du consensus. La saisine d’organes extérieurs et judiciaires, qu’il s’agisse de la Cour
internationale de Justice (CIJ) ou d’un tribunal de l’OIT, ne devrait intervenir que si toutes les
possibilités de dialogue entre les principaux acteurs de l’Organisation compétents en matière
de normes de l’OIT ont été épuisées, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. 7
7. Un an plus tard, revenant sur la question de la sécurité juridique à la 347e session du Conseil
d’administration (mars 2023), la porte-parole du groupe des employeurs a réaffirmé que «la
Cour internationale de Justice […] ne devrait être saisie qu’en dernier ressort. Il serait
4 Confédération syndicale internationale (CSI), «The right to strike and the ILO: The legal foundations», mars 2014, 74-88.
5 CSI, 35-40.
6 OIE, 11-12.
7 Procès-verbaux de la 344e session du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, GB.344/PV, paragr. 139.
GB.349bis/INS/1/1 13
préférable de rechercher des solutions internes qui bénéficient d’un large soutien des
mandants» 8.
8. En revanche, le groupe des travailleurs affirme que ceux qui souhaitent continuer à contester
le droit de grève ont deux possibilités en vertu de la Constitution de l’OIT: prier le Conseil
d’administration du BIT de demander un avis consultatif à la CIJ (article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT) ou accepter l’institution d’un tribunal interne indépendant en vue du
prompt règlement de toutes questions ou difficultés («dispute» en anglais) relatives à
l’interprétation de la convention no 87 (article 37, paragraphe 2) 9. Lorsque la question de la
mise en oeuvre de l’article 37 de la Constitution a été soumise au Conseil d’administration en
mars 2022, la porte-parole du groupe des travailleurs a indiqué que la seule façon «de régler
le différend («dispute») persistant concernant l’interprétation de la convention no 87 et du droit
de grève d’une manière qui garantisse la sécurité juridique et soit conforme à la Constitution
de l’OIT [était] de le soumettre à la CIJ» 10. Un an plus tard, à la session de mars 2023 du Conseil
d’administration, la porte-parole du groupe des travailleurs a déclaré ce qui suit:
L’OIT est dotée par sa propre Constitution d’un mécanisme de règlement des différends. […]
[L]a discussion de cette question n’a que trop duré et [l’oratrice] ne voit pas l’intérêt de
poursuivre le dialogue social en la matière alors qu’un consensus reste hors de portée. Le
consensus est impossible tant les points de vue sont incompatibles: soit les membres acceptent
l’existence d’un lien entre la convention no 87 et le droit de grève (lien qui a déjà été établi non
seulement par la commission d’experts, mais aussi par le Comité de la liberté syndicale, organe
tripartite) et respectent l’autorité du système de contrôle de l’OIT et de la commission d’experts,
soit ils ne le font pas. Certains désaccords ne peuvent être résolus par la voie du dialogue et ne
peuvent l’être que par le recours à une autorité. La Constitution de l’OIT désigne l’autorité à
laquelle l’OIT peut en référer: il s’agit de la Cour.[…] L’OIT devrait faire bon usage du mécanisme
de règlement dont l’a dotée sa Constitution. 11
I.2. Historique de la difficulté survenue sur le plan juridique
9. Il n’est pas rare d’entendre que la difficulté relative à l’interprétation de la convention no 87,
pour ce qui a trait au droit de grève, est survenue ces dix dernières années mais, en réalité, la
question alimente le débat politique et juridique depuis plus d’un demi-siècle, principalement
lors des discussions de la Commission de l’application des normes de la Conférence. Un
élément caractéristique à cet égard est que les parties campent fermement sur leurs positions
et refusent toute concession, ce qui met à rude épreuve les principes fondamentaux sur
lesquels reposent le système de contrôle de l’OIT et son ordre constitutionnel.
10. La portée de la convention no 87 du point de vue du droit de grève fut mise en question pour
la toute première fois en 1953, lorsque le porte-parole employeur du Comité de la liberté
syndicale déclara: «il n’existe pas, en matière de droit de grève, de réglementation
8 GB.347/PV(Rev.), paragr. 231.
9 CSI, 4.
10 GB.344/PV, paragr. 145. Dans le même ordre d’idées, la représentante du groupe des pays industrialisés à économie de
marché (PIEM) a exprimé le point de vue suivant: «Les modalités fondées sur le consensus tripartite ont pour l’heure
uniquement permis d’établir un consensus politique temporaire et ne peuvent apporter la sécurité juridique nécessaire pour
garantir le fonctionnement efficace du système de contrôle. Des mesures doivent par conséquent être prises en vue d’un
règlement dans le cadre de l’article 37 de la Constitution. […] Le groupe des PIEM attend avec intérêt de pouvoir participer à
un processus tripartite visant à formuler de manière équilibrée une question pour soumission à la CIJ et à constituer le
dossier» (paragr. 50-151).
11 GB.347/PV/(Rev.), paragr. 278. Dans le même esprit, le représentant de l’Union européenne et de ses États membres a dit
ce qui suit: «Le désaccord prolongé sur le droit de grève dans le contexte de la convention no 87 doit être résolu dans le cadre
des dispositions de l’article 37, paragraphe 1. […] [L]a Cour est bien placée pour examiner ce différend, et […] le Conseil
d’administration [est invité] à la saisir sans délai.» (paragr. 254). Les représentantes du groupe des États d’Amérique latine et
des Caraïbes (paragr. 247) et du groupe des PIEM (paragr. 250) ont exprimé des points de vue analogues.
GB.349bis/INS/1/1 14
internationale qui autorise les organes de l’Organisation à porter un jugement sur les
réglementations nationales que tel ou tel pays peut avoir établies dans ce domaine» 12. La
question fut ensuite soulevée à la 58e session (1973) de la Conférence dans le cadre d’une
discussion de la Commission de l’application des normes sur le droit de grève dans le secteur
public. À cette occasion, le membre travailleur du Japon indiqua: «alors qu’on prétend souvent
que le droit de grève n’est pas protégé par les conventions internationales du travail, la
convention no 87 prévoit que les syndicats ont le droit d’organiser leurs activités et de formuler
leur programme et elle garantit ainsi implicitement le droit de grève». Le membre employeur
du Japon affirma à l’inverse qu’«en aucun cas le Comité de la liberté syndicale ne s’[était] référé
au droit de grève comme à un droit absolu, particulièrement dans les services essentiels et
dans le service public», tandis que le membre gouvernemental de la Suisse déclara que la
convention no 87 ne couvrait pas le droit de grève, comme en témoignaient les travaux
préparatoires de la convention 13.
11. En 1986, lors d’une discussion concernant l’application de la convention no 87 par la République
arabe syrienne, le membre gouvernemental de la République démocratique allemande
rappela ce qui suit:
la convention ne mentionne dans aucune de ses dispositions le droit à la grève. Pourtant la
commission d’experts déclare que l’interdiction de la grève est contraire à l’article 3 de la
convention. Cette conclusion ne repose pas sur le texte de la convention, mais doit être
considérée comme une simple interprétation de la commission d’experts. Une telle méthode
de travail doit être rejetée car elle est en contradiction directe avec le principe selon lequel les
gouvernements n’ont l’obligation de faire rapport que sur les instruments qu’ils ont ratifiés.
Toute autre conclusion serait susceptible de conduire à des incertitudes et à une insécurité
juridique qui risquent d’empêcher de nouvelles ratifications, les États ne pouvant connaître à
l’avance les interprétations qui seront données ultérieurement sur les conventions
considérées. 14
12. En 1989, dans le cadre de la Commission de l’application des normes de la Conférence, le
membre employeur de la Suède fit observer:
Un seul organisme – la Cour internationale de Justice – est habilité à donner des interprétations
des conventions de l’OIT qui font foi. […] Il faudrait […] avoir toujours présent à l’esprit la
fonction de suprême arbitre de la Cour internationale de Justice. Une convention de l’OIT doit
être interprétée conformément aux principes établis dans la Convention de Vienne sur le droit
des traités (1969). […] [L]e présent rapport de la commission d’experts contient
malheureusement un certain nombre d’interprétations qui vont trop loin, surtout en ce qui
concerne les conventions relatives aux droits fondamentaux de l’homme, et en particulier la
convention no 87. 15
13. À la même session, lors de la clôture de la discussion générale, le représentant du Secrétaire
général déclara notamment:
il appartient aux gouvernements qui contestent les interprétations données par les organes de
contrôle de saisir éventuellement la Cour internationale de Justice. Dans deux cas, la
commission d’experts a attiré l’attention sur cette possibilité. En ce qui concerne les questions
du droit de grève et des services essentiels, on peut dire que la jurisprudence des organes de
contrôle a été constante. Pour ce qui est du droit de grève, tant la commission d’experts que le
Comité de la liberté syndicale ont estimé que ce droit constitue un des moyens essentiels dont
disposent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et défendre leurs intérêts
12 Procès-verbaux de la 121e session du Conseil d’administration (mars 1953), 39.
13 CIT, 58e session, 1973, Compte rendu des travaux, 590, paragr. 26.
14 CIT, 72e session, 1986, Compte rendu des travaux, 31/35.
15 CIT, 76e session, 1989, Compte rendu des travaux, 26/6, paragr. 21.
GB.349bis/INS/1/1 15
économiques et sociaux. Ce principe a toujours été soutenu par ces deux organes de contrôle,
qui ont, au fil du temps, déterminé les conditions dans lesquelles ce droit devrait s’exercer. 16
14. En 1990, la discussion générale de la Commission de l’application des normes fut en partie
consacrée aux liens entre les organes de contrôle et l’interprétation des conventions.
Réagissant à l’avis exprimé par la commission d’experts – selon lequel ses points de vue sur la
teneur et le sens des dispositions des conventions devaient être considérés comme valides et
généralement acceptés dans la mesure où ils n’étaient pas contredits par la CIJ, l’acceptation
de ces considérations étant indispensable pour assurer la sécurité juridique et le respect du
principe de légalité –, les membres employeurs estimèrent que:
l’avis de la commission d’experts, qui revient à considérer ses évaluations comme ayant un
caractère obligatoire tant que la Cour n’est pas saisie, ne saurait être fondé. […] Pour une raison
juridique, […] car cela est contredit par les dispositions de la Constitution de l’OIT et du
Règlement de la Conférence sur la présentation des rapports des gouvernements et le mandat
de la commission de la Conférence. Celle-ci a une compétence propre d’examen.
[…]
À cet égard, les membres employeurs rappellent à titre d’exemple leurs divergences
d’interprétation avec les experts sur les questions du droit de grève. Bien que ces questions ne
soient réglées de façon expresse dans aucune norme […] (si on excepte le cas très particulier
de la recommandation (nº 92) sur la conciliation et l’arbitrage volontaires, 1951), les experts ont
progressivement déduit de la convention no 87 un droit de grève qui n’est plus guère limité, ce
que les membres employeurs ne peuvent accepter, non seulement parce qu’ils ont des
réserves juridiques mais surtout parce que cela touche directement les intérêts des
employeurs. 17
15. Au cours des trois années suivantes, les membres employeurs de la Commission de
l’application des normes firent régulièrement consigner dans le compte rendu des travaux leur
objection de principe à ce que la commission d’experts exerce une fonction interprétative, en
particulier en ce qui concerne la convention no 87 et le droit de grève. Par exemple, en 1991,
les membres employeurs déclarèrent:
les critères d’interprétation qui s’imposent aux experts sont contenus dans la Convention de
Vienne de 1969 sur le droit des traités. Les critères d’interprétation contenus dans cet
instrument ne peuvent être écartés par la simple reconnaissance de l’existence d’une
convergence d’opinions entre plusieurs organes de l’OIT, comme cela se fait, notamment avec
le Comité de la liberté syndicale […]. L’application de la Convention de Vienne est incontestée
en droit international […]. Un autre principe non contesté en droit international est in dubio
mitius (si les termes d’une disposition d’un traité ne sont pas clairs, le choix entre différentes
interprétations admissibles doit s’opérer en faveur de celle qui implique le moins d’obligations
pour les Parties). Les membres employeurs n’ont pas insisté sur le principe de façon théorique
mais du fait de ses implications pratiques sur la manière [dont] des questions importantes ont
été interprétées et appliquées en pratique, tel que le droit de grève, lequel n’est même pas
inscrit dans la convention applicable, mais est devenu l’objet de principes minutieusement
ciselés, extraits par voie d’interprétation. 18
Dans le même ordre d’idées, le membre employeur des États-Unis nota:
il n[‘]appartient pas [à la commission d’experts] de fonctionner comme un législateur
supranational, si l’interprétation donnée ne peut se fonder sur les travaux du comité tripartite
ayant rédigé la convention. C’est en agissant sans retenue que la commission d’experts
introduirait cette incertitude juridique qu’elle considère comme sapant «le bon fonctionnement
du système normatif de l’OIT». […] [I]l ne convient pas que la commission d’experts entérine
16 CIT, 76e session, 1989, Compte rendu des travaux, 26/7, paragr. 23.
17 CIT, 77e session, 1990, Compte rendu des travaux, 27/6, paragr. 22-23.
18 CIT, 78e session, 1991, Compte rendu des travaux, 24/6, paragr. 26.
GB.349bis/INS/1/1 16
dans leur intégralité les décisions du Comité de la liberté syndicale qui se fondent sur des
principes généraux et ne sont pas limitées aux termes de la convention (nº 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (nº 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, étendant la portée de ces textes au-delà de
l’intention des auteurs de ces conventions, telle que reflétée par les travaux préparatoires et
par les textes. 19
16. À la même session, le membre gouvernemental du Danemark, s’exprimant au nom des
gouvernements nordiques, exprima l’avis suivant:
la commission d’experts va peut-être un peu trop loin lorsqu’elle suggère qu’un gouvernement
qui n’accepte pas son interprétation devrait demander une décision juridiquement
contraignante à la Cour internationale de Justice. [C]ette obligation n’est pas dans l’esprit de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT 20.
17. En 1993, au cours d’une discussion sur l’opportunité de créer un tribunal interne en vertu du
paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, les membres employeurs de la
Commission de l’application des normes rappelèrent que «[l]e rapport de la commission de la
Conférence qui a[vait] conduit à la création de la commission d’experts spécifiait que celle-ci
n’aurait pas de capacité ou de compétence judiciaire pour donner des interprétations de
conventions». Ils précisèrent en outre que leur position était restée la même puisque, en 1953
déjà, «le porte-parole des employeurs, Pierre Waline, rejetait catégoriquement qu’un droit de
grève spécifique p[ût] être déduit» des conventions nos 87 et 98. Enfin, les membres
employeurs indiquèrent que «la convention no 87 ne réglementait pas le droit de grève [car] le
texte de la convention ne le mentionn[ait] pas, et les travaux préparatoires montr[ai]ent qu’il
n’y a[vait] pas eu de consensus à la Conférence sur la question» 21.
18. À cette même session de 1993, les membres travailleurs formulèrent l’avis suivant:
la signification ordinaire des termes d’une convention concernant les droits de l’homme,
comme la convention no 87, doit s’apprécier dans son contexte et à la lumière du but et de
l’objectif de cette convention. Les conventions traitant des droits de l’homme devraient
nécessairement être interprétées progressivement et comme des instruments vivants. 22
Ils firent en outre observer que:
Le droit de grève est inséparable de la notion de liberté syndicale […]. [D]ivers principes de
liberté syndicale [sont] considérés comme faisant partie du droit coutumier; l’interprétation du
droit de grève dans la convention no 87 donnée par la commission d’experts a été acceptée
depuis de nombreuses années et cela la rend pertinente en vertu de l’article 31 3) c) de la
Convention de Vienne. […] [L]e droit de grève doit être considéré à la lumière du principe ubi
jus ibi remedium comme un ultime moyen d’exercer la substance des droits contenus dans les
conventions nos 87 et 98 23.
19. En 1994, la publication de l’étude d’ensemble de la commission d’experts sur les conventions
nos 87 et 98 donna lieu à un nouvel échange de vues sur le droit de grève au sein de la
Commission de l’application des normes 24. Les membres employeurs indiquèrent «qu’ils ne
[pouvaient] absolument pas accepter que la commission d’experts déduise du texte de la
convention un droit aussi global, précis et détaillé» 25. Faisant expressément référence aux
19 CIT, 78e session, 1991, Compte rendu des travaux, 24/6, paragr. 28.
20 CIT, 78e session, 1991, Compte rendu des travaux, 24/7, paragr. 33.
21 CIT, 80e session, 1993, Compte rendu des travaux, 25/5, paragr. 20, 21; 25/9, paragr. 58.
22 CIT, 80e session, 1993, Compte rendu des travaux, 25/5, paragr. 23.
23 CIT, 80e session, 1993, Compte rendu des travaux, 25/10 et 25/11, paragr. 61.
24 CIT, 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 25/35-25/46, paragr. 114-148.
25 CIT, 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 25/36, paragr. 116.
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travaux de la Conférence ayant conduit à l’adoption des conventions nos 87 et 98 et de la
recommandation no 92, ils déclarèrent ce qui suit:
il est incompréhensible pour les membres employeurs que les organes de contrôle aient pu se
prononcer sur la portée et le contenu exacts du droit de grève en l’absence de dispositions
concrètes et explicites sur le sujet […]. Ce que la commission d’experts a mis ici en pratique
s’appelle un axiome en mathématiques, et un dogme en théologie catholique: il s’agit de
l’acceptation totale, sans conditions préalables, d’une vérité tenue pour certaine et de laquelle
tout dérive. […] [L]e droit de grève n’avait pas été oublié lors de l’élaboration de ces
instruments: des tentatives ont été faites pour intégrer ce droit aux conventions, mais ont été
rejetées, faute de majorité. […] S’agissant de l’observation du membre travailleur de Pologne
selon laquelle les conventions devraient être interprétées de façon dynamique et fonctionnelle,
les membres employeurs y voient un aveu qu’il n’existe pas de fondement juridique au droit de
grève dans les instruments de l’OIT. 26
20. Réfutant ces arguments, les membres travailleurs réaffirmèrent que:
le droit de grève [était] un corollaire indissociable du droit d’association syndicale [qui était]
protégé par la convention no 87 et par les principes énoncés dans la Constitution de l’OIT. Sans
droit de grève, la liberté syndicale serait vidée de sa substance; il suffit pour s’en convaincre de
parcourir les travaux préparatoires de la convention no 87, les multiples conclusions et
recommandations du Comité de la liberté syndicale et les études d’ensemble successives que
la commission d’experts a élaborées sur le sujet. Dans l’étude de 1994, la commission d’experts
a formellement et clairement confirmé cette relation, consacrant un chapitre distinct aux
principes et modalités du droit de grève. 27
21. Au cours des quinze années suivantes, les membres employeurs continuèrent d’émettre
systématiquement des réserves quant à l’interprétation de la convention no 87 donnée par la
commission d’experts au sujet du droit de grève. En 1999, par exemple, les membres
employeurs de la Commission de l’application des normes déclarèrent:
des doutes substantiels subsistent quant à l’interprétation de ces conventions, laquelle diverge
largement par rapport à leur libellé. C’est donc une bien maigre consolation de rappeler qu’une
interprétation contraignante de textes juridiques ne peut être faite que par la seule Cour
internationale de Justice. En l’absence de toute décision de la part de cette instance, il n’existe
donc pas d’interprétation contraignante d’une manière générale de l’une et l’autre
convention. 28
22. En 2002, les membres employeurs s’exprimèrent en ces termes:
il serait erroné à bien des égards de penser que les recommandations individuelles faites par
le Comité de la liberté syndicale puissent créer une jurisprudence sur le droit de grève. Les
membres employeurs répètent depuis douze ans, comme ils l’avaient déjà dit en 1953, que l’on
ne saurait déduire l’existence d’un droit de grève dans les conflits du travail de la
convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ou de la
convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949. Ce point de vue
est fondé sur trois éléments: le libellé des normes, l’application correcte de règles
contraignantes d’interprétation des traités internationaux, et les documents révélant les
intentions quant à leur portée lorsque les normes en question ont été élaborées et adoptées. 29
23. Dans le même esprit, en 2004, les membres employeurs rappelèrent que:
ce qui n’a pas besoin d’être interprété ne doit pas l’être. La Cour internationale de Justice a
également constaté que la Convention de Vienne confirme ce principe. La base de
26 CIT, 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 25/37-25/39, paragr. 119, 124-125.
27 CIT, 81e session, 1994, Compte rendu des travaux, 25/38, paragr. 136.
28 CIT, 87e session, 1999, Compte rendu des travaux, 23/39, paragr. 114.
29 CIT, 90e session, 2002, Compte rendu des travaux, 28/15, paragr. 48.
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l’interprétation est le texte lui-même, soit les termes de la convention selon leur sens naturel
et usuel en vertu de la «règle du sens ordinaire». Les travaux préparatoires d’une convention
ne sont importants que si les termes du traité demeurent obscurs. 30
En 2010, ils «ont à nouveau demandé à la commission d’experts de revoir son interprétation
du droit de grève, laquelle a été progressivement élargie depuis 1959 et ne trouve pas de
fondement dans les conventions nos 87 et 98» 31.
24. En 2012, le désaccord persistant relatif à l’interprétation par la commission d’experts de la
convention no 87 s’agissant du droit de grève a provoqué une crise institutionnelle. Pour la
première fois depuis la création de la Commission de l’application des normes, le groupe des
employeurs et le groupe des travailleurs ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur la liste
des cas de non-respect devant être examinés par la commission. Les membres employeurs se
sont opposés très fermement à l’interprétation que la commission d’experts donnait de la
convention no 87 et du droit de grève dans son étude d’ensemble de 2012, et ont indiqué que
«leurs positions et leurs actions dans tous les domaines d’activités de l’OIT concernant la
convention et le droit de grève en [seraient] profondément modifiées» 32. Ainsi, en l’absence
d’éclaircissement concernant le mandat incombant à la commission d’experts dans le cadre de
l’étude d’ensemble, «ils ne pou[v]aient […] accepter la supervision de cas relatifs à la convention
no 87 qui comprendrait des interprétations du droit de grève par la commission d’experts» 33.
Or le groupe des travailleurs a estimé que cette position était inacceptable 34, de sorte que la
Commission de l’application des normes a finalement conclu ses travaux sans avoir examiné
aucun cas de non-respect de la convention 35.
25. En novembre-décembre 2012, face à la contestation directe de son autorité et à la demande
du groupe des employeurs visant l’inclusion dans son rapport d’une sorte de réserve relative
au droit de grève, la commission d’experts a exposé sa conception de son mandat. Elle a
notamment expliqué, au sujet du contrôle de l’application des conventions:
Cette démarche requiert logiquement et inévitablement une évaluation, laquelle implique
elle-même un certain degré d’interprétation tant de la législation nationale que du texte de la
convention. […] [La] combinaison d’indépendance, d’expérience et de compétence [des
membres de la commission] contribue à asseoir la légitimité de [celle-ci] au sein de la
communauté de l’OIT. […] [La commission] a toujours dit clairement que les conseils qu’elle
formule […] ne sont pas contraignants. […] [L]es opinions ou conclusions – sans caractère
contraignant – de la commission d’experts ont pour but de guider l’action des États Membres
de l’OIT par la vertu de leur rationalité et de leur force de persuasion, [et] de la source de leur
légitimité. 36
30 CIT, 92e session, 2004, Compte rendu des travaux, 24/21 et 24/22, paragr. 79.
31 CIT, 99e session, 2010, Compte rendu provisoire, partie I/19, paragr. 57.
32 CIT, 101e session, 2012, Compte rendu des travaux, partie I/24, paragr. 82.
33 CIT, 101e session, 2012, Compte rendu des travaux, partie I/38, paragr. 150.
34 CIT, 101e session, 2012, Compte rendu des travaux, partie I/43, paragr. 171.
35 Au sujet de la crise institutionnelle de 2012, voir, entre autres: Francis Maupain, «The ILO supervisory system: A model in
crisis», International Organizations Law Review 10, no 1 (2013): 117-165; Lee Swepston, «Crisis in the ILO Supervisory System:
Dispute over the Right to Strike», International Journal of Comparative Law and Industrial Relations 29, no 2 (2013): 199-218;
Janice R. Bellace, «The ILO and the right to strike», International Labour Review 153, no 1 (2014): 29-70; Keith D. Ewing, «Myth
and Reality of the Right to Strike as a “Fundamental Labour Right”», International Journal of Comparative Labour Law and
Industrial Relations 29, no 2 (2013): 145-166; Paul Mackay, «The Right to Strike: Commentary», New Zealand Journal of
Employment Relations 38, no 3 (2014): 58-70.
36 CIT, 102e session, 2013, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), paragr. 33-36.
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La commission d’experts a conclu qu’ajouter une réserve n’était pas nécessaire, car cela
«interférerait à des égards multiples et majeurs avec son indépendance» 37.
26. À la 102e session (2013) de la Conférence, une note a été insérée dans les conclusions relatives
à tous les cas individuels liés à l’application de la convention no 87 qui avaient été examinés par
la Commission de l’application des normes, à savoir: «La commission n’a pas abordé le droit de
grève dans ce cas, les employeurs n’étant pas d’accord avec le fait que la convention no 87
reconnaisse le droit de grève» 38.
27. En novembre-décembre 2013, la commission d’experts est revenue sur la question de
l’insertion d’une réserve et a décidé d’ajouter le paragraphe suivant, que l’on retrouve depuis
invariablement dans son rapport:
Mandat
La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations est un
organe indépendant établi par la Conférence internationale du Travail; ses membres sont
nommés par le Conseil d’administration. Elle est constituée de juristes ayant pour mission
d’examiner l’application des conventions et recommandations de l’OIT dans les États Membres
de cette Organisation. La commission d’experts procède à une analyse impartiale et technique
de la façon dont les conventions ratifiées sont appliquées dans la législation et la pratique par
les États Membres, en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les différents
systèmes juridiques. Ce faisant, elle examine la portée juridique, le contenu et la signification
des dispositions des conventions. Ses avis et recommandations ont un caractère non
contraignant, leur objet étant de guider l’action des autorités nationales. Ils tirent leur valeur
persuasive de la légitimité et de la rationalité du travail de la commission qui est basé sur son
impartialité, son expérience et son expertise. Le rôle technique de la commission et son
autorité morale sont largement reconnus, en particulier du fait qu’elle poursuit sa tâche de
contrôle depuis plus de quatre-vingt-cinq ans et en raison de sa composition, de son
indépendance et de ses méthodes de travail qui se fondent sur un dialogue continu avec les
gouvernements et prennent en compte les informations fournies par les organisations
d’employeurs et de travailleurs. Cela se reflète dans l’intégration des avis et recommandations
de la commission dans les législations nationales, dans des instruments internationaux et dans
les décisions des tribunaux. 39
28. À la 103e session (2014) de la Conférence, la Commission de l’application des normes n’a pas
été en mesure d’adopter des conclusions sur 19 cas individuels en raison du désaccord
concernant la question du droit de grève 40.
29. Face à cette impasse, le Conseil d’administration a, à sa session d’octobre-novembre 2014,
examiné un document exposant les modalités, la portée et le coût des mesures pouvant être
prises en vertu de l’article 37 de la Constitution 41. Au cours de la discussion, le Vice-président
travailleur a dit que son groupe était «parvenu à l’inévitable conclusion que, pour permettre
au système de contrôle de l’OIT de demeurer pertinent et de continuer à fonctionner, la seule
solution [était] de soumettre d’urgence le différend en matière d’interprétation à la Cour
internationale de Justice […] pour avis consultatif» 42. Les membres employeurs, toutefois,
n’étaient pas favorables à la saisine de la Cour et préféraient que le différend fût réglé
moyennant un dialogue tripartite: «Le scénario ainsi proposé permettrait d’économiser du
37 CIT, 102e session, 2013, Rapport de la Commission d’experts, paragr. 36.
38 CIT, 102e session, 2013, Compte rendu des travaux, 16, partie I/58.
39 CIT, 103e session, 2014, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), paragr. 31.
40 CIT, 103e session, 2014, Compte rendu des travaux, 13, partie I/53-59, paragr. 201-219.
41 Initiative sur les normes: Suivi de la session de 2012 de la Commission de l’application des normes de la Conférence
internationale du Travail, GB.322/INS/5, annexe I.
42 Procès-verbaux de la 322e session du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, GB.322/PV, paragr. 50.
GB.349bis/INS/1/1 20
temps et des ressources, et serait plus participatif et plus souple qu’une procédure devant
la CIJ. Solliciter l’avis de la Cour reviendrait à reconnaître non seulement que le tripartisme et
le dialogue social ont échoué, mais aussi que les possibilités d’un tel dialogue n’ont même pas
été exploitées pour tenter de régler le présent différend» 43. Côté gouvernements, le groupe
des États d’Amérique latine et des Caraïbes, le groupe des pays industrialisés à économie de
marché et l’Union européenne et ses États membres ont soutenu la proposition de renvoi
devant la CIJ, tandis que le groupe de l’Asie et du Pacifique s’est déclaré favorable aux
discussions tripartites et que le groupe de l’Afrique a estimé que la saisine de la CIJ devait être
une solution de dernier recours 44.
30. Dans ce contexte, le Conseil d’administration a décidé de convoquer une réunion tripartite
– qui lui ferait rapport à sa session de mars 2015 – sur la question de la convention no 87
concernant le droit de grève et les modalités et pratiques de l’action de grève à l’échelle
nationale. La réunion s’est tenue du 23 au 25 février 2015. À cette occasion, le groupe des
travailleurs et le groupe des employeurs ont présenté une déclaration conjointe dans laquelle
ils ont exposé un ensemble de mesures afin de trouver une issue possible à la situation de
blocage dans laquelle se trouvait alors le système de contrôle 45. Cette déclaration conjointe
indiquait que les mandants de l’OIT reconnaissaient aux travailleurs et aux employeurs le droit
de mener des actions collectives pour défendre leurs intérêts professionnels légitimes et que
cette reconnaissance internationale par l’Organisation exigeait des groupes des travailleurs et
des employeurs qu’ils se penchent sur certaines questions systémiques, telles que le mandat
de la commission d’experts et les méthodes de travail de la Commission de l’application des
normes (établissement de la liste des cas et adoption des conclusions). La déclaration conjointe
ne prévoyait pas de mesures de suivi sur la question particulière du droit de grève dans le
contexte de la convention no 87. De son côté, le groupe gouvernemental a prononcé deux
déclarations. La première énonçait sa position commune au sujet du droit de grève, dont il
reconnaissait qu’il était «lié à la liberté syndicale, qui [était] un principe et droit fondamental
au travail de l’OIT […et que,] [s]ans protection de ce droit de grève, la liberté syndicale et, en
particulier, le droit d’organiser des activités pour promouvoir et protéger les intérêts des
travailleurs ne p[ouvaient] être pleinement garantis». Le groupe gouvernemental a toutefois
précisé que «le droit de grève [n’était] pas un droit absolu [et que sa] portée et les conditions
de son exercice [étaient] réglementées au niveau national». Dans sa seconde déclaration, le
groupe gouvernemental a pris acte de la déclaration conjointe du groupe des employeurs et
du groupe des travailleurs et a appelé à la tenue d’une discussion approfondie au sein du
Conseil d’administration 46.
31. Les trois déclarations ont été présentées à la session de mars 2015 du Conseil d’administration
comme étant le résultat de la réunion tripartite. À cette session, les membres employeurs ont
réaffirmé que, de leur point de vue, le «droit de grève» n’était pas reconnu par la convention
no 87, la déclaration conjointe étant considérée comme un engagement à continuer de
travailler ensemble afin de renforcer le système de contrôle en dépit des divergences
d’opinions. Les membres travailleurs ont confirmé que la déclaration conjointe avait pour seul
but de permettre à l’OIT de reprendre le contrôle de l’application des normes. Ils ont maintenu
que le droit de grève était protégé par la convention no 87. À la lumière du résultat de la
réunion tripartite, le Conseil d’administration a décidé «de ne prendre dans l’immédiat aucune
mesure au titre de l’article 37 de la Constitution pour résoudre la question de l’interprétation
43 GB.322/PV, paragr. 58.
44 GB.322/PV, paragr. 64, 70, 78, 82.
45 L’initiative sur les normes, Addendum, GB.323/INS/5(Add.); L’initiative sur les normes – Appendice I, GB.323/INS/5/Appendice I,
annexe I.
46 GB.323/INS/5/Appendice I, annexes II et III.
GB.349bis/INS/1/1 21
de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève». Il a cependant pris un certain nombre
de décisions en lien avec le système de contrôle et la mise en place du mécanisme d’examen
des normes 47.
32. À la 104e session (2015) de la Conférence, la Commission de l’application des normes n’a
formulé d’observations sur le droit de grève que dans une seule de ses conclusions concernant
l’application de la convention no 87. L’absence de toute référence au droit de grève est le modus
vivendi qui prévaut à ce jour au sein de la commission. Les membres employeurs continuent
toutefois d’opposer leurs objections aux observations formulées par la commission d’experts
quant aux conditions d’exercice du droit de grève 48.
33. En conclusion, les constatations ci-après peuvent être formulées. Premièrement, la difficulté
juridique tient fondamentalement à deux questions, qui consistent à savoir si le droit de grève
est un moyen légitime de défense des intérêts des travailleurs qui est reconnu et protégé par
la convention no 87, et si la commission d’experts est habilitée à élaborer, lorsqu’elle s’acquitte
de ses attributions de contrôle, un cadre élargi et détaillé aux fins de l’examen et de
l’appréciation des conditions d’exercice de ce droit. Deuxièmement, et de manière plus
générale, le désaccord porte fondamentalement sur le point de savoir si la commission
d’experts a compétence pour créer de nouvelles obligations juridiques à la charge des États
ayant ratifié les conventions internationales du travail lorsqu’elle fait une interprétation
incidente, ou fonctionnelle, desdites conventions dans l’exercice de ses attributions de
contrôle. Troisièmement, il est largement admis que la convention no 87 devrait être
interprétée conformément aux principes de droit international coutumier régissant
l’interprétation des traités, tels qu’ils sont codifiés dans la Convention de Vienne de 1969 sur le
droit des traités, et que seule la CIJ est habilitée à formuler des avis contraignants et faisant
autorité au sujet de l’interprétation des conventions internationales du travail.
II. Principales données du problème
34. Pour mieux comprendre les profondes divergences de vues qui opposent le groupe des
employeurs et celui des travailleurs sur cette question, il importe d’examiner de plus près,
premièrement, la convention no 87, l’historique des négociations la concernant et la manière
dont elle a été interprétée par les organes de contrôle de l’OIT et, deuxièmement, la
commission d’experts, en particulier l’évolution de son mandat et de ses méthodes de travail
en ce qui concerne l’interprétation des conventions internationales du travail.
II.1. La convention no 87 de l’OIT et le droit de grève
II.1.1. Historique des négociations concernant la convention no 87
35. La convention no 87 résulte d’une demande formulée en 1947 par le Conseil économique et
social des Nations Unies, conformément à l’accord de 1946 entre les Nations Unies et l’OIT 49.
Par suite, lors de sa 30e session (1947), la Conférence internationale du Travail tint une
première discussion sur la question de la liberté syndicale et des relations professionnelles et
47 Procès-verbaux de la 323e session du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, GB.323/PV, paragr. 51,
52, 84.
48 Voir, par exemple, CIT, 110e session, 2022, Compte rendu des travaux 4A/P.I, paragr. 113-114, 127, 233. Voir également CIT,
110e session, 2022, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), paragr. 17, 20.
49 Le Conseil économique et social des Nations Unies avait adopté une résolution par laquelle il décidait de transmettre à
l’OIT des documents présentés par la Fédération syndicale mondiale et l’American Federation of Labor en priant
l’Organisation d’inscrire à l’ordre du jour de la prochaine session de la Conférence internationale du Travail une question
relative aux droits syndicaux; voir Conseil économique et social, quatrième session, 1947, Résolution 52/IV.
GB.349bis/INS/1/1 22
adopta une résolution concernant la liberté syndicale et la protection du droit d’organisation
et de négociation collective, qui définissait les principes fondamentaux sur lesquels la liberté
syndicale devait être fondée 50. La Conférence décida également d’inscrire à l’ordre du jour de
sa 31e session (1948) les questions de la liberté syndicale et de la protection du droit syndical,
pour examen selon la procédure de simple discussion 51.
36. Le Bureau établit un rapport de synthèse sur les travaux de la 30e session de la Conférence,
ainsi qu’un questionnaire destiné à recueillir les vues des mandants sur la forme et le contenu
d’une éventuelle réglementation internationale concernant la liberté syndicale et la protection
du droit syndical. Dans le questionnaire, la question suivante était notamment posée:
«Estimez-vous qu’il serait désirable de stipuler que la reconnaissance du droit syndical des
fonctionnaires par la réglementation internationale ne devrait préjuger en rien la question du
droit de grève des fonctionnaires?» 52 Plusieurs pays (Australie, Autriche, Belgique, Bulgarie,
Canada, Danemark, Équateur, États-Unis, Finlande, France, Hongrie, Inde, Suisse et Union sudafricaine)
s’y déclarèrent favorables, un pays (Mexique) s’y opposa et deux pays (Pays-Bas et
Suède) estimèrent que la convention ne devait pas traiter de questions relatives au droit de
grève 53.
37. Sur la base des avis exprimés, le Bureau conclut que:
Plusieurs gouvernements [...] ont [...] souligné, à juste titre semble-t-il, que le projet de
convention ne porte que sur la liberté syndicale et non pas sur le droit de grève, problème qui
sera examiné à propos de la question VIII (conciliation et arbitrage) inscrite à l’ordre du jour de
la Conférence. Dans ces conditions, il nous a semblé préférable de ne pas faire figurer une
disposition à cet effet dans le projet de convention sur la liberté syndicale. 54
38. En conséquence, le droit de grève ne fit pas l’objet d’un débat ciblé ou approfondi au cours des
négociations qui aboutirent à l’adoption de la convention no 87. En fait, lors des travaux de la
Conférence, le droit de grève ne fut expressément mentionné que dans le cadre d’un projet
d’amendement présenté par le représentant du gouvernement de l’Inde en 1947 en vue
d’exclure la police et les forces armées du champ d’application de la liberté syndicale au motif
que ni l’une ni l’autre n’étaient «autorisées à engager des négociations collectives ou à déclarer
la grève» 55, et d’une déclaration du représentant du gouvernement du Portugal en 1948 dans
laquelle celui-ci exprimait son soutien aux pays qui avaient «affirmé, [...] d’une façon plus ou
moins expresse, qu’il fallait éviter toute rédaction qui pourrait insinuer l’idée d’une concession
du droit de grève aux fonctionnaires». 56
39. De fait, il ressort des éléments disponibles que, dès sa création, la convention no 87 visait à
consacrer et à codifier des principes généraux relatifs à la liberté syndicale et non à établir un
50 CIT, 30e session, 1947, Compte rendu des travaux, annexe XIII, 570-571.
51 CIT, 30e session, 1947, Compte rendu des travaux, annexe XIII, 571.
52 CIT, 31e session, 1948, Liberté syndicale et protection du droit syndical, questionnaire, 15.
53 CIT, 31e session, 1948, Liberté syndicale et protection du droit syndical, rapport VII, 71.
54 CIT, 31e session, 1948, Rapport VII, 92. En effet, le rapport sur le droit et la pratique en matière de relations professionnelles
contenait une section sur les grèves et les lock-out dans le contexte des procédures de conciliation et d’arbitrage; voir CIT,
31e session, 1948, Relations industrielles, rapport VIII(1), 113-122.
55 L’amendement fut finalement rejeté; voir CIT, 30e session, 1947, Compte rendu des travaux, 554. Lors de la session suivante
de la Conférence, le gouvernement indien présenta un nouvel amendement visant à exclure les forces armées et la police du
champ d’application de la convention au motif que «la plupart des États Membres ne seraient pas en mesure de ratifier une
convention aux termes de laquelle la liberté syndicale serait accordée sans réserve aux membres des forces armées et de la
police, étant donné qu’il incomb[ait] aux gouvernements de défendre la loi et de maintenir l’ordre public». La clause fut
modifiée au cours de la discussion et finalement adoptée en tant qu’article 9 de la convention no 87; voir CIT, 31e session,
1948, Compte rendu des travaux, 500.
56 CIT, 31e session, 1948, Compte rendu des travaux, 241.
GB.349bis/INS/1/1 23
cadre réglementaire détaillé. Comme le Bureau l’expliqua dans son premier rapport à la
Conférence:
L’enquête documentaire sur la liberté syndicale avait révélé que les modalités de la
réglementation syndicale différaient certes considérablement de pays à pays, mais que les
questions fondamentales étaient réglées de façon sensiblement analogue.
Aussi le Bureau, plutôt que de soumettre à la Conférence un projet de réglementation détaillé
– ce qui eût obligé la plupart des pays à modifier leur législation – avait-il préféré ramasser
l’essentiel du problème en quelques formules précises, dont la consécration eût constitué une
garantie suffisante pour le libre fonctionnement des syndicats professionnels.
Le projet soumis à la Conférence se bornait en effet à garantir, d’une part, la liberté pour les
salariés et les employeurs de s’associer pour la défense collective de leurs intérêts
professionnels, d’autre part, la liberté pour les syndicats de poursuivre leurs fins par tous les
moyens non contraires aux lois et règlements établis pour le maintien de l’ordre public. 57
40. C’est précisément en raison de ce caractère délibérément général de la convention no 87 qu’il
est souvent fait référence à l’article 3, qui énonce le principe selon lequel les organisations de
travailleurs et d’employeurs sont libres de choisir leurs moyens d’action pour la défense de
leurs intérêts et qui a donc été interprété comme englobant également le droit de grève.
L’article 3 est libellé comme suit:
1. Les organisations de travailleurs et d’employeurs ont le droit d’élaborer leurs statuts et
règlements administratifs, d’élire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et
leur activité, et de formuler leur programme d’action.
2. Les autorités publiques doivent s’abstenir de toute intervention de nature à limiter ce droit ou
à en entraver l’exercice légal.
41. Dans le questionnaire du Bureau, il était expliqué que cet article avait pour objet de compléter
la garantie relative à la constitution des organisations en garantissant également à celles-ci le
droit d’organiser leur vie interne et externe en toute autonomie; le terme «légal» dans le texte
visait à préciser que les organisations d’employeurs et de travailleurs étaient tenues, dans
l’exercice de leurs droits, de respecter les lois générales du pays 58.
42. Lors des débats de la session de 1948 de la Conférence, toutes les propositions d’amendement
à l’article 3 tendant à faire référence à l’établissement dans les législations nationales de
conditions minimales pour la constitution ou le fonctionnement des organisations furent
retirées après que le président de la commission de la Conférence eut précisé que «la
convention ne prétend[ait] pas être un “code de réglementation“ du droit syndical, mais se
born[ait] à énoncer dans un texte succinct certains principes fondamentaux» 59.
43. L’article 10 est une autre disposition souvent citée dans le débat sur l’interprétation de la
convention no 87 concernant le droit de grève. Il est libellé comme suit: «Dans la présente
convention, le terme organisation signifie toute organisation de travailleurs ou d’employeurs
ayant pour but de promouvoir et de défendre les intérêts des travailleurs ou des employeurs».
Cette disposition est le fruit de discussions sur diverses propositions visant à insérer une
définition des «organisations de travailleurs et d’employeurs». Elle résulte d’un amendement
présenté par le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord afin
de définir le terme «organisation» comme «toute organisation de travailleurs ou d’employeurs
tendant à promouvoir et à défendre les intérêts des travailleurs et des employeurs
respectivement, à l’exception des trusts ou cartels tels qu’ils sont définis par les lois ou
règlements nationaux». La référence aux trusts et aux cartels fut finalement supprimée. Il fut
57 CIT, 30e session, 1947, Liberté d’association et relations industrielles: Rapport VII, 16-17.
58 CIT, 31e session, 1948, questionnaire, 8–9. Voir aussi CIT, 31e session, 1948, rapport VII, 24-31 et 90-91.
59 CIT, 31e session, 1948, Compte rendu des travaux, 499.
GB.349bis/INS/1/1 24
généralement convenu que l’activité syndicale ne se limitait pas au domaine professionnel et
que la définition ne devait pas être interprétée comme restreignant le droit des organisations
syndicales de participer à des activités politiques 60.
44. Quatre autres faits postérieurs à l’adoption de la convention no 87 éclairent encore le contexte.
Premièrement, en 1953, le Directeur général a fait savoir au Conseil d’administration qu’il serait
selon lui inopportun d’exprimer un avis sur l’interprétation des conventions nos 87 et 98, du fait
qu’une procédure spéciale avait été établie par le Conseil d’administration pour traiter des
plaintes relatives à des atteintes qui auraient été portées à la liberté syndicale 61.
Deuxièmement, en 1956, le Conseil d’administration a décidé de ne pas modifier le formulaire
de rapport relatif à l’application de la convention no 87 en vue d’ajouter des questions
spécifiques sur les restrictions au droit de grève des salariés du secteur public, car il a
considéré que le droit de grève n’entrait pas dans le cadre de ladite convention 62.
Troisièmement, en 1987, la Conférence a publié une résolution concernant le 40e anniversaire
de l’adoption de la convention no 87, dans laquelle le droit de grève n’était pas mentionné 63.
Quatrièmement, en 1991, le Conseil d’administration a examiné une proposition visant à
inscrire à l’ordre du jour de la Conférence la question du droit de grève pour discussion
normative, mais a finalement décidé de ne pas le faire 64.
II.1.2. Pratique ultérieurement suivie: les organes de contrôle de l’OIT et le droit de grève
45. Au cours des soixante-quinze années qui ont suivi l’adoption de la convention no 87, divers
organes de contrôle de l’OIT chargés soit du contrôle régulier soit de procédures spéciales se
sont exprimés sur les liens entre le droit de grève et le principe de la liberté syndicale inscrit
dans la convention no 87. Comme indiqué ci-dessous, ils ont invariablement affirmé que le droit
de grève était intrinsèquement lié au principe de la liberté syndicale et qu’il était donc protégé
par la convention no 87.
La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
46. La commission d’experts s’est exprimée pour la première fois sur le droit de grève au regard
de la convention no 87 dans son étude d’ensemble de 1959. Dans ses commentaires sur le droit
des organisations d’employeurs et de travailleurs d’organiser leur activité et de formuler leur
programme d’action en vertu de l’article 3, paragraphe 1, de la convention no 87, elle a observé
que:
l’interdiction de la grève aux travailleurs, autres que les fonctionnaires publics agissant comme
organes de la puissance publique, [...] risque d’aller à l’encontre de l’article 8, paragraphe 2, de
la convention [no 87], selon lequel «la législation nationale ne devra porter atteinte ni être
appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la... convention» et
notamment à la liberté d’action des organisations syndicales pour défendre leurs intérêts
professionnels. 65
60 CIT, 31e session, 1948, Compte rendu des travaux, 498.
61 Procès-verbaux de la 122e session du Conseil d’administration (mai-juin 1953), 108.
62 Procès-verbaux de la 131e session du Conseil d’administration, mars 1956, annexe XXII, 209.
63 Voir les résolutions adoptées par la Conférence internationale du Travail à sa 73e session (1987). En revanche, la Résolution
concernant l’abrogation des lois dirigées contre les organisations syndicales de travailleurs dans les états membres de
l’organisation internationale du travail (1957) faisait référence à «l’exercice […] sans restriction des droits syndicaux par les
travailleurs, y compris le droit de grève», tandis que la Résolution concernant les droits syndicaux et leurs relations avec les
libertés civiles (1970) préconisait d’entreprendre des recherches approfondies sur la législation et la pratique dans des
domaines concernant la liberté d’association et les droits syndicaux, y compris le droit de grève.
64 Voir Ordre du jour de la 81e session (1994) de la Conférence, GB.253/2/3(Rev.), paragr. 14, 35-38 et annexe I.
65 CIT, 43e session, 1959, Résumé des rapports sur les conventions ratifiées, rapport III (partie IV), 124, paragr. 68.
GB.349bis/INS/1/1 25
47. La commission d’experts a formulé d’autres observations sur le droit de grève dans des études
d’ensemble ultérieures. Par exemple, en 1973, elle a exprimé le point de vue suivant:
L’interdiction générale des grèves limite considérablement les possibilités qu’ont les syndicats
de promouvoir et de défendre les intérêts de leurs membres (art. 10 de la convention n° 87) et
le droit qu’ont les syndicats d’organiser leur activité (art. 3); il convient de rappeler à cet égard
que l’article 8 de la convention précise que la législation nationale ne devra porter atteinte ni
être appliquée de manière à porter atteinte aux garanties prévues par la convention,
notamment le droit des syndicats d’organiser leur activité. 66
48. En outre, citant le Comité de la liberté syndicale, la commission d’experts a indiqué que «les
conditions posées par la législation pour qu’une grève soit licite doivent être raisonnables et,
en tout cas, ne pas être de nature à limiter considérablement les moyens d’action des
organisations syndicales» 67.
49. En 1983, la commission d’experts a affirmé que «le droit de grève [était] un des moyens
essentiels dont dispos[ai]ent les travailleurs et leurs organisations pour promouvoir et pour
défendre leurs intérêts économiques et sociaux» 68. Elle a répété le point de vue qu’elle avait
exprimé en 1973 au sujet du droit de grève et des articles 3 et 10 de la convention et a souligné
que «[l]’interdiction générale de la grève [...] n’[était] [...] pas compatible avec les principes de
la liberté syndicale» 69.
50. En 1994, la commission d’experts a qualifié le droit de grève de «droit fondamental» et de
«principe général» 70. Elle a noté que, «[b]ien que le droit de grève ne soit pas expressément
inscrit dans la Constitution de l’OIT ou dans la Déclaration de Philadelphie, ni reconnu
spécifiquement dans les conventions nos 87 et 98, il semble avoir été tenu pour acquis dans le
rapport préparé en vue de la première discussion sur la convention no 87», mais que, «lors des
discussions à la Conférence en 1947 et en 1948, aucun amendement consacrant ou écartant
expressément le droit de grève ne fut adopté, ni même présenté» 71. Selon la commission
d’experts, «[e]n l’absence d’une disposition expresse sur le droit de grève dans les textes
fondamentaux, les organes de contrôle de l’OIT ont été amenés à se prononcer sur la portée
et la signification exactes des conventions en cette matière» 72.
51. La commission a expliqué que le point de vue qu’elle avait exprimé depuis 1959 était fondé sur
«[le] droit reconnu aux organisations de travailleurs et d’employeurs d’organiser leur activité
et de formuler leur programme d’action, dans le but de promouvoir et défendre les intérêts de
leurs membres (articles 3, 8 et 10 de la convention no 87)» 73. Sur la base d’une lecture conjointe
des articles 3 et 10 de la convention, elle a notamment conclu que la grève était comprise dans
les notions d’«activité» et de «programme d’action» des organisations au sens de l’article 3 74.
Ainsi, la commission d’experts a «confirm[é] sa position de principe selon laquelle le droit de
66 CIT, 58e session, 1973, Liberté syndicale et négociation collective: Étude d’ensemble de la Commission d’experts pour l’application
des conventions et recommandations, rapport II (partie 4B), paragr. 107.
67 CIT, 58e session, 1973, Étude d’ensemble, paragr. 108. La commission a également examiné des cas où, sous certaines
conditions, le droit de grève pouvait être interdit ou limité (paragr. 109 à 111).
68 CIT, 69e session, 1983, Liberté syndicale et négociation collective: Étude d’ensemble, rapport III (partie 4B), paragr. 200 et 201.
69 CIT, 69e session, 1983, Étude d’ensemble, paragr. 205. La commission d’experts a également continué à préciser son point
de vue sur les conditions d’interdiction ou de limitation du droit de grève (paragr. 204 à 226).
70 CIT, 81e session, 1994, Liberté syndicale et négociation collective: Étude d’ensemble des rapports sur la convention (n° 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation
collective, 1949, rapport III (partie 4B), paragr. 137 et 159.
71 CIT, 81e session, 1994, Étude d’ensemble, paragr. 142.
72 CIT, 81e session, 1994, Étude d’ensemble, paragr. 145.
73 CIT, 81e session, 1994, Étude d’ensemble, paragr. 147.
74 CIT, 81e session, 1994, Étude d’ensemble, paragr. 148 et 149.
GB.349bis/INS/1/1 26
grève [était] un corollaire indissociable du droit d’association syndicale protégé par la
convention no 87» 75.
52. En 2012, la commission d’experts a noté que, «[e]n l’absence d’une disposition expresse dans
la convention no 87», le Comité de la liberté syndicale et elle-même avaient progressivement
défini, au fil des décennies écoulées, «un certain nombre de principes sur le droit de grève» à
la lumière des articles 3 et 10 de cette convention 76. En réponse aux vues exprimées par le
groupe des employeurs au sein de la Commission de l’application des normes lors de la
99e session (2010) de la Conférence, la commission d’experts a affirmé que «l’absence d’une
disposition expresse [sur le droit de grève dans la convention no 87] n’[était] pas déterminante»
et que, bien que «les travaux préparatoires soient un moyen complémentaire d’interprétation
important dans l’examen de l’application d’une convention en particulier dans un pays donné,
ils peuvent être écartés au profit des autres règles d’interprétation, notamment, dans ce cas
spécifique, de la pratique ultérieurement suivie pendant plus de cinquante-deux années (voir
art. 31 et 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités)» 77. Par conséquent, la
commission a «réaffirm[é] que le droit de grève découl[ait] de la [convention no 87]» 78 et a
ensuite précisé «une série d’aspects concernant l’exercice pacifique du droit de grève, [sa]
finalité et [les] conditions de licéité de la grève» 79.
53. Dans la même étude d’ensemble, la commission d’experts a répété que sa position sur le droit
de grève «s’inscri[vai]t dans le cadre plus large de la reconnaissance de ce droit au niveau
international», citant des dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, de la Charte de l’Organisation des États américains, de la Charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne, de la Charte interaméricaine des garanties sociales, de
la Charte sociale européenne, du Protocole additionnel à la Convention américaine relative aux
droits de l’homme traitant des droits économiques, sociaux et culturels, et de la Charte arabe
des droits de l’homme 80. En outre, elle a noté que d’autres normes internationales du travail,
comme la convention (nº 105) sur l’abolition du travail forcé, 1957, et la recommandation
(nº 92) sur la conciliation et l’arbitrage volontaires, 1951, ainsi que des résolutions adoptées
dans différents contextes à l’OIT, faisaient également référence au droit de grève 81.
54. Outre les études d’ensemble précitées, la commission d’experts a, au cours des soixante-cinq
dernières années, formulé de nombreuses observations sur le droit de grève dans tel ou tel
pays, dans le cadre de son activité de contrôle régulier et de l’examen des rapports présentés
au titre de l’article 22 de la Constitution. Ces deux dernières années, la commission a adressé
aux États Membres 75 observations relatives à l’exercice du droit de grève dans le contexte du
contrôle de l’application de la convention no 87 82.
75 CIT, 81e session, 1994, Étude d’ensemble, paragr. 151. La commission a aussi souligné que «le droit de grève ne saurait être
considéré comme un droit absolu», puis a décrit les interdictions et les restrictions applicables à ce droit (paragr. 151-179).
76 CIT, 101e session, 2012, Donner un visage humain à la mondialisation: Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales
concernant les droits au travail à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008,
rapport III (partie 1B), paragr. 117.
77 CIT, 101e session, 2012, Étude d’ensemble, paragr. 118.
78 CIT, 101e session, 2012, Étude d’ensemble, paragr. 119.
79 CIT, 101e session, 2012, Étude d’ensemble, paragr. 122-161.
80 CIT, 101e session, 2012, Étude d’ensemble, paragr. 120.
81 CIT, 101e session, 2012, Étude d’ensemble, paragr. 121.
82 CIT, 110e session, 2022, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie A), 99-340, et CIT, 111e session, 2023, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations, rapport III (partie A), 101-396.
GB.349bis/INS/1/1 27
Le Comité de la liberté syndicale
55. Pour l’essentiel, les observations de la commission d’experts sur le droit de grève reflètent
celles formulées en la matière par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration,
qui a élaboré au fil des ans un ensemble de décisions détaillées en s’assurant que les
législations et pratiques examinées concernant la portée et les conditions de l’exercice de ce
droit étaient conformes aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective 83.
De fait, le Comité de la liberté syndicale a été le premier organe de contrôle à reconnaître le
droit de grève comme un droit syndical; lors de l’examen d’une plainte déposée contre le
gouvernement de la Jamaïque (cas no 28) en mars 1952, il a déclaré que «[l]e droit de grève et
celui d’organiser des réunions syndicales [étaient] des éléments essentiels du droit syndical, et
[que] les mesures prises par les autorités pour faire respecter la légalité ne dev[a]ient donc pas
avoir pour effet d’empêcher les syndicats d’organiser des réunions à l’occasion des conflits du
travail» 84.
56. Dans le cadre de ses nombreuses décisions, le Comité de la liberté syndicale a notamment
affirmé que «[l]es actions de contestation [étaient] protégées par les principes de la liberté
syndicale uniquement lorsque ces actions [étaient] planifiées par des organisations syndicales
ou p[ouvaient] être assimilées à des actions syndicales légitimes au sens de l’article 3 de la
convention no 87» 85.
57. Le comité a ajouté que, s’il avait «toujours considéré le droit de grève comme étant un des
droits fondamentaux des travailleurs et de leurs organisations, c’[était] dans la mesure
seulement où il constitu[ait] un moyen de défense de leurs intérêts économiques» 86. En ce qui
concerne la convention no 87, le comité a déclaré à intervalles réguliers que «[l]e droit de grève
[était] un corollaire indissociable du droit syndical protégé par la convention no 87» et que
«[l]’interdiction faite aux fédérations et confédérations de déclencher la grève n’[était] pas
compatible avec la convention no 87» 87.
58. Le comité a aussi considéré que «[l]e licenciement de travailleurs pour fait de grève
constitu[ait] une grave discrimination en matière d’emploi pour exercice d’activité syndicale
licite [et était] contraire à la convention no 98» et que, «[d]ans certains cas, [il était] difficile
d’accepter comme étant sans rapport avec les activités syndicales la décision des chefs de
département de convoquer immédiatement après une grève des conseils de discipline qui, sur
83 Le mandat du comité «consiste à déterminer si, concrètement, telle ou telle législation ou pratique est conforme aux
principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions portant sur ces sujets». Lorsque
les pays ont ratifié une ou plusieurs conventions sur la liberté syndicale, la commission d’experts est généralement chargée
d’examiner la suite donnée aux recommandations du Comité de la liberté syndicale, qui appellent l’attention de la commission
d’experts sur les divergences entre les lois et pratiques nationales et les termes des conventions, ou sur l’incompatibilité
d’une situation donnée avec les dispositions de ces instruments; voir Recueil des règles applicables au Conseil d’administration
du Bureau international du Travail, annexe II, «Procédures spéciales en vigueur pour l’examen des plaintes en violation de la
liberté syndicale au sein de l’Organisation internationale du Travail», paragr. 14 et 72.
84 Sixième rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 68. Dans son huitième rapport, lors de l’examen d’une plainte contre
le gouvernement du Japon (cas no 60), le Comité de la liberté syndicale a présenté une synthèse de la position qu’il avait
adoptée jusque-là au sujet du droit de grève:
53. Le Comité estime qu’il n’est pas appelé à examiner dans quelle mesure le droit de grève en général – droit qui n’est pas spécialement
visé par la convention no 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, ni par la convention no 98 sur le droit d’organisation
et de négociation collective – doit être considéré comme un droit syndical. Toutefois, dans plusieurs cas antérieurs, et notamment dans
celui de la Turquie, le Comité a constaté que le droit de grève est généralement accordé aux travailleurs et à leurs organisations comme
faisant partie de leurs droits de défense des intérêts communs. Dans un autre cas […], le Comité avait recommandé au Conseil
d’administration d’attirer l’attention du gouvernement brésilien sur l’importance qu’il attachait, dans les cas où les grèves sont interdites
dans des occupations essentielles, à assurer des garanties adéquates pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs, ainsi
privés d’un «moyen essentiel de défendre leurs intérêts professionnels».
85 Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 204 et 210.
86 Compilation des décisions, paragr. 751.
87 Compilation des décisions, paragr. 754 et 757.
GB.349bis/INS/1/1 28
la base de leurs états de service, [avaient] ordonné le licenciement non seulement de plusieurs
travailleuses grévistes, mais aussi de membres du comité d’entreprise» 88.
59. En outre, le Comité de la liberté syndicale a élaboré un vaste ensemble de décisions, sur divers
cas et aspects particuliers de la grève, notamment la finalité de la grève, les formes de grève,
les conditions préalables, les cas dans lesquels la grève peut faire l’objet de restrictions voire
être frappée d’interdiction et les garanties compensatoires à accorder en conséquence aux
travailleurs concernés, ou encore les questions relatives aux sanctions, tant en cas de grève
légitime qu’en cas d’abus dans l’exercice du droit de grève 89.
La Commission d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale
60. Autre mécanisme compétent pour examiner les violations alléguées de la liberté syndicale, la
Commission d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale a exprimé des
vues analogues en ce qui concerne le droit de grève dans deux cas 90. Le premier portait sur
des allégations de violation de droits syndicaux par le Japon. Dans son rapport publié en
Janvier 1966, la commission:
souscrit aux principes établis par le Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration,
[à savoir que] quand les grèves des travailleurs sont interdites ou soumises à des restrictions
dans les services essentiels, ces restrictions ou cette interdiction devraient s’assortir de
garanties adéquates pour sauvegarder pleinement les intérêts des travailleurs ainsi privés d’un
moyen essentiel de défense de leurs intérêts professionnels. 91
61. Le second cas portait sur des allégations formulées à l’encontre de l’Afrique du Sud (qui, à
l’époque, n’était pas Membre de l’OIT). Dans son rapport publié en mai 1992, la commission
résume la situation comme suit:
En droit international, le droit de grève est explicitement reconnu [dans un certain] nombre
d’instruments adoptés aux plans international et régional. Les instruments de l’OIT cependant
n’en traitent pas expressément. L’article 3 de la convention no 87, qui dispose que les
organisations de travailleurs ont le droit «d’organiser leur gestion et leur activité et de formuler
leur programme d’action», a été la base juridique à partir de laquelle les organes de contrôle
de l’OIT ont élaboré une vaste jurisprudence en matière de grève et de toute action de
revendication. Ils ont affirmé en particulier le principe fondamental selon lequel le droit de
grève est un des moyens essentiels dont disposent les travailleurs et leurs organisations pour
promouvoir et défendre leurs intérêts économiques et sociaux. L’exercice de ce droit en toute
liberté, sans obstacles législatifs ou autres, a toujours été protégé par les principes de l’OIT.
Parallèlement, à la lumière des relations professionnelles modernes, certaines restrictions au
droit de grève ont été considérées comme acceptables. 92
88 Compilation des décisions, paragr. 957 et 1110.
89 Il a été noté que la lecture des rapports de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale depuis 1952 révélait
que c’était ce dernier, et non la commission d’experts, qui jouait le rôle de chef de file dans la définition du droit de grève.
Voir Janice R. Bellace, «The Committee on Freedom of Association: Making freedom of association a reality», Karen Curtis,
Oksana Wolfson (dir. de publication), 70 Years of the ILO Committee on Freedom of Association: A Reliable Compass in Any Weather,
2022, 16.
90 Créée par le Conseil d’administration en janvier 1950, la commission a été le premier organe institué dans le cadre de la
procédure d’examen des allégations relatives à la violation du droit syndical convenue entre l’OIT et le Conseil économique
et social des Nations Unies; voir Procès-verbaux de la 110e session du Conseil d’administration, annexe VI. Contrairement aux
plaintes soumises au Comité de la liberté syndicale, aucune allégation ne pouvait être communiquée à la commission sans
le consentement du gouvernement concerné.
91 «Rapport de la Commission d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale concernant les personnes
employées dans le secteur public au Japon», Bulletin officiel, supplément spécial, vol. XLIX, no 1, janvier 1966, 556.
92 Rapport de la Commission d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale concernant la République sudafricaine,
GB.253/15/7, juin 1992, paragr. 303.
GB.349bis/INS/1/1 29
Plaintes en vertu de l’article 26 et réclamations au titre de l’article 24
62. À trois occasions, les commissions d’enquête instituées pour examiner des plaintes concernant
l’application de la convention no 87 se sont penchées sur la question de savoir si le droit de
grève était protégé par la convention. En 1968, la commission d’enquête chargée d’examiner
des plaintes relatives à l’application par la Grèce des conventions n° 87 et 98 observa que:
la convention nº 87 ne contient aucune garantie spécifique concernant le droit de grève. […]
[T]outefois [...] une interdiction absolue de la grève constituerait une limitation sérieuse du
droit des organisations de promouvoir et de défendre les intérêts de leurs membres (art. 10 de
la convention) et pourrait aller à l’encontre de l’article 8, paragraphe 2, de la convention en
vertu duquel «la législation nationale ne devra porter atteinte ni être appliquée de manière à
porter atteinte aux garanties prévues [par la convention]», garanties qui comportent le droit
pour les syndicats d’organiser librement leur activité (art. 3). 93
63. De même, dans son rapport publié en 1984, la commission d’enquête chargée d’examiner une
plainte concernant l’application par la Pologne des conventions nos 87 et 98 conclut:
La convention no 87 ne contient aucune garantie spécifique concernant la grève. Toutefois, les
organes de contrôle de l’OIT ont toujours considéré – et la commission partage cet avis – que
le droit de grève constitue un des moyens essentiels dont devraient disposer les organisations
syndicales pour, conformément à l’article 10 de la convention, promouvoir et défendre les
intérêts de leurs membres. 94
64. Enfin, en 2009, la commission d’enquête instituée pour statuer sur des plaintes relatives à
l’application par le Zimbabwe des conventions nos 87 et 98 a confirmé, dans le cadre de son
examen de la législation et de la pratique nationales en matière de droit de grève, «que le droit
de grève [était] un corollaire indissociable du droit syndical protégé par la convention no 87» 95.
65. Par ailleurs, à ce jour, on dénombre quatre réclamations au titre de l’article 24 de la
Constitution touchant l’exercice du droit de grève. Au cours de l’examen de ces réclamations,
le Comité de la liberté syndicale a réaffirmé que le droit de grève était un moyen légitime de
défense des intérêts des travailleurs 96 et que nul ne devait être privé de sa liberté ni faire l’objet
de sanctions pénales pour le simple fait d’avoir organisé ou participé à une grève pacifique 97.
Le comité a également eu l’occasion de rappeler que le droit de grève pouvait être restreint ou
interdit dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires exerçant des fonctions
93 «Rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale
du Travail pour examiner les plaintes au sujet de l’observation par la Grèce de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et
la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949,
présentées aux termes de l’article 26 de la Constitution de l’OIT par un certain nombre des délégués à la 52e session de la
Conférence internationale du Travail», Bulletin officiel, supplément spécial, vol. LIV, no 2, 1971, paragr. 261.
94 Rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale du
Travail pour examiner la plainte au sujet de l’observation par la Pologne de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949,
présentée par des délégués à la 68e session de la Conférence internationale du Travail, paragr. 517.
95 Rapport de la Commission d’enquête instituée en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’Organisation internationale du
Travail pour examiner le respect, par le gouvernement du Zimbabwe, de la convention (n° 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, et de la convention (n° 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949,
paragr. 575.
96 Cas no 1364 (1987), Réclamation contre le gouvernement de la France présentée en vertu de l’article 24 de la Constitution
de l’OIT par la Confédération générale du travail (CGT), paragr. 140.
97 Cas no 1304 (1985), Réclamation présentée par la Confédération des travailleurs du Costa Rica (CTC), la Confédération
authentique des travailleurs démocratiques (CATD), la Confédération unitaire des travailleurs (CUT), la Confédération des
travailleurs démocratiques du Costa Rica (CCTD) et la Confédération nationale des travailleurs (CNT), en vertu de l’article 24
de la Constitution de l’OIT, alléguant l’inexécution des conventions internationales du travail nos 11, 87, 98 et 135 par le Costa
Rica, paragr. 99.
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d’autorité au nom de l’État ou dans des services essentiels au sens strict du terme 98. Il a
également conclu que les restrictions excessives apportées à l’exercice du droit de grève par
les travailleurs constituaient une grave violation des principes de la liberté syndicale et que de
telles restrictions ne se justifieraient que si la grève perdait son caractère pacifique 99.
II.1.3. L’interprétation des traités: règles et pratique
66. Au coeur de la controverse, on trouve une divergence de vues sur la méthode d’interprétation
à employer pour déterminer si le droit de grève est protégé par la convention no 87. Comme
indiqué ci-dessus, le groupe des employeurs semble privilégier clairement une interprétation
textuelle ou littérale fondée sur le sens naturel des termes de la convention, alors que le groupe
des travailleurs prône une interprétation dynamique, dans le droit fil de l’approche suivie par
la commission d’experts et d’autres organes de contrôle de l’OIT, qui donne la priorité à la
réalisation effective de l’objet et du but déclarés ou apparents des dispositions de la
convention no 87.
67. Selon la méthode textuelle, l’interprétation doit viser et consister uniquement à déterminer ou
à confirmer le sens ordinaire des termes d’un traité. En revanche, selon la méthode de
l’interprétation dynamique (souvent appelée téléologique ou évolutive) 100, les dispositions du
traité doivent être lues à la lumière de leur objet et de leur but. On retrouve ces deux méthodes
à l’article 31 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, dont il est
généralement admis qu’elle a force de droit international coutumier 101.
68. D’après l’article 31 de la Convention de Vienne, il convient de rechercher de bonne foi le sens
ordinaire des termes d’un traité, lus dans leur contexte 102. En même temps, la référence, au
98 Cas no 1971 (1999), Réclamation présentée par l’Association des employés du secteur des transports aériens et l’Association
du personnel de vol de Maersk Air en vertu de l’article 24 de la Constitution de l’OIT alléguant le non-respect par le Danemark
de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et de la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949, paragr. 55.
99 Cas no 1810 (1996), Réclamation présentée par la Confédération des syndicats ouvriers de Turquie (TURK-IŞ), en vertu de
l’article 24 de la Constitution de l’OIT, alléguant l’inexécution par la Turquie de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et
la protection du droit syndical, 1948, paragr. 61.
100 La raison d’être de ce type d’interprétation est que certains termes ne sont pas statiques, leur signification pouvant
changer au fil du temps pour tenir compte de l’évolution des réalités. L’avis consultatif rendu par la CIJ au sujet de la Namibie
et l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Tyrer sont souvent cités comme exemples
emblématiques; voir Conséquences juridiques pour les États de la présence continue de l’Afrique du Sud en Namibie (Sud-Ouest
africain) nonobstant la résolution 276 (1970) du Conseil de sécurité, avis consultatif du 21 juin 1971, CIJ Recueil 1971, paragr. 53,
et Tyrer c. Royaume-Uni, arrêt du 25 avril 1978. Voir aussi Affaire du plateau continental de la mer Égée (Grèce c. Turquie), arrêt
du 19 décembre 1978, CIJ Recueil 1978, paragr. 80; Différend relatif à des droits de navigation et des droits connexes (Costa Rica
c. Nicaragua), arrêt du 13 juillet 2009, CIJ Recueil 2009, paragr. 64; affaire relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve
Uruguay (Argentine c. Uruguay), arrêt du 20 avril 2010, CIJ Recueil 2010 (I), paragr. 204.
101 La CIJ a déclaré pour la première fois en 1991 que «[l]es articles 31 et 32 de la convention de Vienne [...] [peuvent], à bien
des égards, […] être considérés sur ce point comme une codification du droit international coutumier existant»; voir affaire
relative à la Sentence arbitrale du 31 juillet 1989 (Guinée-Bissau c. Sénégal), arrêt du 12 novembre 1991, CIJ Recueil 1991,
paragr. 48. Plus récemment, la Cour a confirmé cette conclusion dans l’affaire relative à l’Application de la convention pour la
prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt du 26 février 2007, CIJ Recueil
2007 (I), paragr. 160; affaire relative à des Usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay (Argentine c. Uruguay), arrêt du 20 avril
2010, CIJ Recueil 2010 (I), paragr. 65. Par conséquent, dans la mesure où ils sont universellement contraignants en tant qu’ils
font partie du droit international coutumier, les articles 31 et 32 de la Convention de Vienne s’appliquent à tous les traités
hors du champ d’application de la convention, à savoir les traités conclus avant 1969 ainsi que les traités conclus entre les
États qui n’ont pas adhéré à la convention.
102 Dans le seul avis consultatif demandé à ce jour au sujet d’une convention internationale du travail, la Cour permanente de
justice internationale avait relevé, à propos de l’article 3 de la convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919: «Le texte
de l’article 3, considéré isolément, ne soulève par lui-même aucune difficulté; il est rédigé en termes généraux, exempts
d’ambiguïté ou d’obscurité. [...] Si, par conséquent, l’article 3 [...] doit être interprété de manière à ne pas s’appliquer aux
femmes qui occupent des postes de supervision ou de gestion et n’effectuent pas normalement un travail manuel, il faudrait
trouver un motif valable pour interpréter la disposition autrement qu’en conformité avec le sens ordinaire des mots». La cour
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paragraphe 1 de cet article, à l’objet et au but du traité ouvre la possibilité d’interpréter ce
dernier de manière dynamique et extratextuelle et d’appliquer le principe de l’effet utile 103. En
ce qui concerne la «règle générale» d’interprétation énoncée à l’article 31, il a été observé ce
qui suit:
Cette disposition combine en une seule règle les principes de la textualité, du sens ordinaire et
de l’intégration, ainsi que le principe téléologique de «l’objet et du but» (lui-même
généralement considéré comme incorporant le principe de «l’effet utile»). Même si ces
principes sont présentés dans un ordre qui semble accorder une certaine primauté au texte,
ne fût-ce que comme point de départ, la hiérarchie entre les différentes composantes de la
règle est loin d’être exprimée de manière catégorique, ou même claire. 104
69. En outre, le paragraphe 3 de l’article 31 de la Convention de Vienne prévoit qu’aux fins de
l’interprétation d’un traité il sera tenu compte, en même temps que du contexte, de tout accord
ultérieur intervenu entre les parties et de toute pratique ultérieurement suivie par ces
dernières 105. L’expression «accord ultérieur» s’entend d’un accord sur l’interprétation ou
l’application d’un traité qui s’est fait jour après la conclusion dudit traité, tandis qu’une
«pratique ultérieurement suivie» s’entend d’une conduite qui établit l’accord des parties à
l’égard de l’interprétation du traité. L’accord et la pratique ultérieurs constituent une preuve
objective de la manière dont les parties conçoivent le sens du traité. Un accord ultérieur doit
refléter sans équivoque une «convergence de vues»; l’existence d’un accord est donc exclue si
les différentes parties à un traité expriment des positions contradictoires au sujet de son
interprétation. La pratique ultérieure peut consister en tout comportement (action ou
omission) observé par l’organe d’un État, que ce soit dans l’exercice de fonctions exécutives,
législatives, judiciaires ou autres, d’une déclaration officielle, d’une décision de justice, de
l’adoption d’une législation nationale ou de la conclusion d’un accord international. Le poids
d’une pratique ou d’un accord ultérieur comme moyen d’interprétation dépend de certains
critères (clarté et spécificité, répétition éventuelle et formes de cette répétition, par exemple).
70. Un élément particulièrement intéressant est le poids que peuvent avoir dans l’interprétation
d’un traité les déclarations des organes spécialisés qui sont chargés d’en contrôler l’application.
Bien que les déclarations, opinions et observations de ces organes ne puissent, en tant que
telles, constituer une pratique ou un accord ultérieur, elles peuvent donner lieu à une pratique
ou à un accord ultérieur des parties elles-mêmes qui peut, à son tour, être repris dans les
résolutions d’organisations internationales ou de conférences d’États parties, par exemple.
Dans l’affaire Diallo, la CIJ a estimé, par souci de clarté, de cohérence et de sécurité juridique,
«devoir accorder une grande considération à l’interprétation adoptée par cet organe
indépendant [le Comité des droits de l’homme], spécialement établi en vue de superviser
permanente avait ajouté que l’examen des travaux préparatoires confirmait également l’interprétation textuelle et que, par
conséquent, «il n’exist[ait] aucun motif valable d’interpréter l’article 3 autrement que suivant le sens ordinaire des mots»; voir
Interprétation de la convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes, avis consultatif du 15 novembre 1932, Cour
permanente de justice internationale, Série A/B, no 50, 373 et 380.
103 Le principe de l’effet utile (ut res magis valeat quam pereat) repose sur l’hypothèse qu’un traité vise un objectif et doit donc
être interprété de manière à promouvoir la réalisation de ce dernier.
104 Malgosia Fitzmaurice, «Interpretation of Human Rights Treaties», in Dinah Shelton (dir. de publication), The Oxford
Handbook of International Human Rights Law, 2013, 746. Selon la Cour européenne des droits de l’homme, en vertu de la règle
générale énoncée à l’article 31 de la Convention de Vienne, «le processus d’interprétation d’un traité forme un tout, une seule
opération complexe; ladite règle, étroitement intégrée, place sur le même pied les divers éléments qu’énumèrent les quatre
paragraphes de l’article». Affaire Golder c. Royaume-Uni, 21 février 1975, paragr. 30. Voir aussi Richard Gardiner, Treaty
Interpretation, 2008, 161-202.
105 Oliver Dörr et Kirsten Schmalenbach (dir. de publication), Vienna Convention on the Law of Treaties: A Commentary, 2012,
552-560; Olivier Corten et Pierre Klein (dir. de publication), The Vienna Conventions on the Law of Treaties: A Commentary, 2011,
vol. I, 825-829; Gardiner, Treaty Interpretation, 203-249. Voir aussi Commission du droit international des Nations Unies, Projet
de conclusions sur les accords et la pratique ultérieurs dans le contexte de l’interprétation des traités et commentaires y
relatifs, 2018, 24-34.
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l’application de ce traité [le Pacte international relatif aux droits civils et politiques]» 106. Les
juridictions régionales compétentes dans le domaine des droits de l’homme s’appuient
également sur les déclarations d’organes spécialisés lorsqu’elles interprètent les traités
pertinents en matière de droits de l’homme 107.
71. En outre, l’article 32 de la Convention de Vienne prévoit qu’il peut être fait appel à des moyens
complémentaires d’interprétation, notamment aux travaux préparatoires du traité et aux
circonstances dans lesquelles celui-ci a été conclu, pour déterminer le sens des termes utilisés
lorsque l’interprétation donnée conformément à la règle générale laisse le sens ambigu ou
obscur, ou conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable 108. À cet égard, en
vertu d’une clause de réserve générale figurant à l’article 5 de la Convention de Vienne, les
règles de base de l’interprétation s’appliquent sous réserve de toute règle, pratique ou
procédure particulière applicable aux traités adoptés au sein des organisations
internationales. Dans le cas de l’OIT, une telle règle pourrait consister à attacher une
importance spéciale aux travaux préparatoires, compte tenu des contributions et négociations
tripartites qui font partie du processus d’élaboration des normes.
72. Dans ce contexte, et sans préjudice de la décision du Conseil d’administration quant à son
éventuelle saisine, la CIJ pourrait estimer nécessaire d’examiner les points ci-après concernant
la reconnaissance du droit de grève dans la convention no 87:
a) Des termes et expressions tels que «droit […] d’organiser», «garanties» et «défendre les
intérêts» figurant dans les articles 3, 8 et 10 de la convention no 87 devraient-ils être
interprétés de manière textuelle ou évolutive?
(ii) Peut-il être considéré que le sens ordinaire de l’un ou l’autre de ces termes et
expressions, lus dans leur contexte et à la lumière de leur objet et de leur but, englobe
l’action collective, et en particulier la grève?
(iii) Quel est l’effet juridique des travaux préparatoires qui ont conduit à l’adoption de la
convention no 87 et dans quelle mesure l’intention des rédacteurs est-elle
déterminante pour l’interprétation des dispositions en question?
b) Quelle force juridique revêt la pratique ultérieurement suivie, notamment les
observations et conclusions d’organes de contrôle tels que la commission d’experts, aux
fins de l’interprétation de la convention no 87?
106 Affaire Ahmadou Sadio Diallo (République de Guinée c. République démocratique du Congo), fond, arrêt du 30 novembre 2010,
CIJ Recueil 2010 (II), paragr. 66. Dans une autre procédure, la Cour a fait référence à la «pratique constante» du Comité des
droits de l’homme pour étayer sa propre interprétation de l’applicabilité extraterritoriale du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques; voir Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis
consultatif du 9 juillet 2004, CIJ Recueil 2004 (I), paragr. 109.
107 Par exemple, la Cour interaméricaine des droits de l’homme s’est appuyée sur les conclusions du Comité des droits de
l’homme pour confirmer son opinion selon laquelle les châtiments corporels étaient incompatibles avec les garanties
internationales contre les traitements cruels, inhumains ou dégradants; voir Caesar v. Trinidad and Tobago, Judgment of
March 11, 2005, paragr. 60-63. La Cour européenne des droits de l’homme a évoqué le rôle de la commission d’experts de
l’OIT en tant que «rôle de référence et de guide pour l’interprétation de certaines dispositions de la Convention [de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales]»; voir affaire National Union of Rail, Maritime and Transport
Workers c. Royaume-Uni, arrêt du 8 avril 2014, paragr. 97.
108 Dörr et Schmalenbach, 571-578; Corten et Klein, 846-859.
GB.349bis/INS/1/1 33
II.2. Le mandat de la commission d’experts
II.2.1. Établissement et évolution des responsabilités de la commission d’experts
73. La commission d’experts, ainsi que la Commission de l’application des normes, fut créée
en 1926 par une résolution de la Conférence 109, dans laquelle le Conseil d’administration était
chargé de nommer «une commission technique de six à huit membres ayant pour mission
d’utiliser ces renseignements [les résumés des rapports des États Membres] de la façon la
meilleure et la plus complète et d’obtenir telles données prévues dans les formulaires
approuvés par le Conseil d’administration» 110. En ce qui concerne la nature et l’étendue de la
compétence de la commission, notamment en matière d’interprétation des conventions, la
Conférence convint de ce qui suit:
la commission d’experts ne devrait pas assumer de fonctions d’ordre judiciaire et […] ne serait
pas compétente pour donner des interprétations des dispositions des conventions ni pour se
prononcer en faveur d’une interprétation plutôt que d’une autre. Elle ne pourrait donc empiéter
sur les fonctions des Commissions d’enquête et de la Cour permanente de justice
internationale en ce qui concerne les réclamations présentées sur la non-exécution des
conventions ratifiées ou en ce qui concerne l’interprétation de celles-ci. [...] Elle notera les cas
où les renseignements fournis semblent ne pas suffire pour l’intelligence complète de la
situation, soit en général, soit dans un pays en particulier. [...] L’examen de la Commission
révélera certainement des cas dans lesquels des pays différents semblent avoir adopté des
interprétations divergentes des dispositions des conventions. La Commission devra attirer
l’attention sur de tels cas. [...] [Elle] présenterait un rapport technique au Directeur et celui-ci
communiquerait ce rapport à la Conférence. 111
74. La commission d’experts fut nommée par le Conseil d’administration à sa 33e session (octobre
1926) pour une période d’essai initiale de deux ans et devint un organe permanent en 1928 112.
Huit experts furent tout d’abord nommés pour la durée de cette première période de deux
ans. À partir de 1934, les experts furent nommés pour une période de trois ans 113. En 1939, la
commission d’experts comptait 13 membres: 9 de pays européens et 4 de pays non européens.
75. Au cours de ses premières années d’existence, la commission d’experts se contenta de
recenser les divergences d’interprétation des conventions, en invitant généralement le Bureau
à se mettre en relation avec le gouvernement concerné. Lorsque les difficultés étaient
considérées comme importantes – par exemple lorsqu’elles mettaient en jeu la législation
nationale de plusieurs pays –, la commission d’experts les portait à l’attention du Conseil
d’administration. La Commission de l’application des normes pouvait elle aussi prendre note
des difficultés et les porter à l’attention de la Conférence. La Commission de l’application des
109 CIT, 8e session, 1926, Compte rendu des travaux, annexe VII, 429. Le projet de résolution soumis à la Conférence prévoyait
la création de la commission d’experts par le Conseil d’administration. Au cours de la Conférence, il fut également décidé que
celle-ci nommerait à chacune de ses sessions sa propre commission chargée d’examiner le résumé établi par le Directeur
général et le rapport de la commission d’experts.
110 La Conférence estima également que les membres de la commission d’experts devaient essentiellement être choisis sur
la base de leurs qualifications spécialisées et sur aucune autre, quelle qu’elle soit, et qu’ils devaient l’être «uniquement en
raison de leurs connaissances approfondies de la législation internationale du travail et de leur expérience en matière de
conditions du travail envisagées du point de vue international»; CIT, 8e session, 1926, Compte rendu des travaux, 241. La
Conférence reprit ainsi la proposition formulée dans une note établie par le Bureau en vue de sa session, aux termes de
laquelle: «On devrait choisir des membres qui possèdent une connaissance approfondie des conditions du travail et de
l’application de la législation du travail. Ces membres devraient être des personnalités indépendantes et on devrait les choisir
de manière à ce qu’[ils] représentent, dans la mesure du possible, les divers degrés du développement industriel et les formes
différentes des méthodes industrielles qui se rencontrent parmi les États Membres de l’Organisation» (annexe V, 401).
111 CIT, 8e session, 1926, Compte rendu des travaux, annexe V, 405-407.
112 Procès-verbaux de la 42e session du Conseil d’administration, octobre 1928, 546.
113 Procès-verbaux de la 68e session du Conseil d’administration, septembre 1934, 292 et 409.
GB.349bis/INS/1/1 34
normes et le Conseil d’administration pouvaient également demander à la commission
d’experts d’accorder une attention particulière à certaines divergences d’interprétation.
76. En 1947, les mandats respectifs de la Commission de l’application des normes et de la
commission d’experts furent élargis, à la suite de l’adoption de l’amendement constitutionnel
de 1946 114. Il s’agit d’une évolution institutionnelle majeure pour les deux commissions, non
seulement parce que leur mandat était ainsi étendu à l’examen de rapports normatifs
additionnels demandés aux États Membres, mais aussi parce que cette extension traduisait
une reconnaissance explicite de l’importance de leur travail pour l’Organisation 115.
77. À sa 102e session (juin-juillet 1947), lorsqu’il décida de soumettre à la Conférence un
amendement au Règlement de celle-ci visant à élargir le mandat de la Commission de
l’application des normes, le Conseil d’administration nota que «l’élargissement proposé du
mandat de la Commission de l’application des conventions de la Conférence rendra nécessaire
un élargissement correspondant du mandat de la Commission d’experts pour l’application des
conventions, qui prépare le terrain pour les travaux de la Commission de la Conférence» 116. À
sa 30e session (juin-juillet 1947), la Conférence élargit le mandat de la Commission de
l’application des normes. À sa 103e session (décembre 1947), le Conseil d’administration
approuva l’«élargissement correspondant du mandat de la commission d’experts» 117.
78. À partir du début des années 1950, la durée des sessions de la commission d’experts fut portée
à une semaine et demie en moyenne, et la composition de cet organe passa de 13 à
17 membres. La composition de la commission fut de nouveau revue à la hausse en 1979, où
elle passa à son niveau actuel de 20 experts; la durée de la session annuelle de la commission
d’experts est désormais de quatre semaines 118.
79. Le mandat de la commission d’experts est resté inchangé depuis 1947. Néanmoins, les
méthodes de travail de la commission ont considérablement évolué, notamment en ce qui
concerne l’interprétation des conventions internationales du travail. Comme cela a été noté
devant le Conseil d’administration:
Par rapport à ce mandat originel, il est clair que la commission a assumé un rôle plus autonome
en matière d’interprétation, comme elle l’a fait du reste dans d’autres domaines sans
rencontrer d’objections de principe. Cette expansion répondait en effet à des nécessités
inhérentes à sa tâche ainsi qu’aux conditions dans lesquelles elle est amenée à examiner un
nombre toujours plus grand de rapports portant sur des conventions également en constante
augmentation. 119
80. Cette évolution s’explique en grande partie par l’obligation faite aux gouvernements de
présenter des rapports sur l’effet donné aux conventions et recommandations non ratifiées,
114 En vertu de l’amendement constitutionnel de 1946, les obligations des gouvernements en matière de présentation de
rapports ont été étendues aux rapports sur les mesures prises pour porter les normes adoptées par la Conférence à la
connaissance des autorités compétentes et sur les difficultés ayant empêché ou retardé une plus large ratification des
conventions ou acceptation des recommandations. En outre, les gouvernements étaient priés de communiquer copie de leur
rapport aux organisations représentatives des employeurs et des travailleurs.
115 Procès-verbaux de la 102e session du Conseil d’administration, juin-juillet 1947, 238-239. La Commission de l’application des
normes proposa d’élargir le champ d’application des procédures constitutionnelles de contrôle dans le cadre d’une résolution
adoptée en 1945; CIT, 27e session, 1945, Compte rendu des travaux, 493-494.
116 Procès-verbaux de la 102e session du Conseil d’administration, 239.
117 Procès-verbaux de la 103e session du Conseil d’administration, décembre 1947, 57-60 et 180. À cette époque, il fut reconnu
«dès le début […] que l’étude technique des rapports annuels accomplie par les experts [était] un préliminaire indispensable
à l’examen d’ordre général de l’application auquel procède la Conférence par la voie de sa Commission de l’application des
conventions».
118 Procès-verbaux de la 344e session du Conseil d’administration, paragr. 729.
119 Article 37, paragraphe 2, de la Constitution et interprétation des conventions internationales du travail, GB.256/SC/2/2,
paragr. 26.
GB.349bis/INS/1/1 35
qui est à l’origine des études d’ensemble élaborées par la commission d’experts puis
examinées par la Commission de l’application des normes 120. Dans les premières études
d’ensemble, la commission d’experts a continué de se borner à souligner les divergences
d’interprétation de certaines dispositions des conventions, mais elle a progressivement
entrepris d’en préciser le sens de manière plus détaillée.
81. Assez rapidement, la fonction interprétative de la commission d’experts a été mise en question.
En particulier, de 1962 à 1989, les pays socialistes exprimèrent des préoccupations à ce sujet,
arguant que la Constitution n’autorisait pas les jugements et condamnations ni l’interprétation
des dispositions des conventions 121. En réponse, à l’occasion de son 50e anniversaire, la
commission d’experts rappela que, «[a]ux termes de son mandat, [elle n’était] pas appelée à
donner une interprétation des conventions, cette compétence étant confiée à la Cour
internationale de Justice par l’article 37 de la Constitution», mais que, «pour remplir sa fonction
qui est d’évaluer l’application des conventions, il [lui] appart[enait] […] d’examiner la
signification de certaines dispositions des conventions et d’exprimer ses vues à leur sujet» 122.
82. Dans son rapport de 1987 123, la commission d’experts revint sur le sujet de l’interprétation en
faisant une déclaration similaire, qui donna lieu à un certain nombre de commentaires de la
part de membres de la Commission de l’application des normes. Les pays socialistes, en
particulier, estimèrent que la commission d’experts était allée au-delà de son mandat et s’était
«muée en une sorte de tribunal supranational» 124, et proposèrent l’établissement d’une série
de règles destinées à encadrer le fonctionnement de la commission. Cette proposition fut
rejetée par le porte-parole du groupe des employeurs, les membres travailleurs et un certain
nombre d’États Membres, qui rappelèrent que le rapport de la commission d’experts, «dans
lequel [celle-ci] évalu[ait] l’effet donné aux conventions, d’un point de vue strictement
juridique, ser[vai]t de base au dialogue qui s’institu[ait] à la commission de la Conférence» 125.
Néanmoins, à partir de 1989, les membres employeurs commencèrent à exprimer des
préoccupations concernant la tendance de la commission d’experts à «surinterpréter» les
conventions alors que, en vertu de la Constitution de l’OIT, seule la CIJ avait autorité pour
interpréter les conventions internationales du travail 126.
83. Au sujet de la raison d’être et des limites de sa fonction interprétative, la commission d’experts
a toujours reconnu que la CIJ était l’organe compétent, au titre de la Constitution, pour
interpréter les conventions internationales du travail. En même temps, elle a toujours souligné
que l’accomplissement de son mandat exigeait qu’elle éclaircisse le sens des dispositions des
conventions, en s’appuyant sur les compétences de ses membres et en s’inspirant des
120 En novembre 1955, le Conseil d’administration décida que la commission d’experts devait entreprendre une étude de
problèmes d’un intérêt plus vaste, comme la situation d’ensemble en ce qui concerne l’application de certaines conventions
et recommandations par tous les gouvernements, afin de fournir une base de discussion à la Commission de l’application
des normes. Ces études devaient porter sur les conventions et recommandations sélectionnées pour faire l’objet de rapports
en vertu de l’article 19 de la Constitution. Les rapports demandés chaque année en vertu de l’article 19 portant sur des textes
groupés autour d’un ou deux problèmes centraux, il fut proposé que les rapports soumis au titre de l’article 22 de la
Constitution soient également pris en considération; voir Procès-verbaux de la 129e session du Conseil d’administration, maijuin
1955, 97-98, et Procès-verbaux de la 130e session du Conseil d’administration, novembre 1955, 44, 146-147.
121 CIT, 46e session, 1962, Compte rendu des travaux, 452; CIT, 66e session, 1980, Compte rendu des travaux, 37/3, paragr. 8; CIT,
69e session, 1983, Compte rendu des travaux, 31/40-31/41; CIT, 71e session (1985), Compte rendu des travaux, 30/5, paragr. 25.
122 CIT, 63e session, 1977, Résumé des rapports sur les conventions ratifiées, rapport III (partie 1), rapport général, paragr. 32.
123 CIT, 73e session, 1987, Résumé des rapports, rapport III (parties 1, 2 et 3), paragr. 21.
124 CIT, 73e session, 1987, Compte rendu des travaux, 24/6, paragr. 26-27
125 CIT, 73e session, 1987, Compte rendu des travaux, 24/6, paragr. 27.
126 CIT, 76e session, 1989, Compte rendu des travaux, 26/6, paragr. 21.
GB.349bis/INS/1/1 36
principes clés d’indépendance, d’objectivité et d’impartialité. Dans le rapport de sa 81e session
(novembre-décembre 2010), elle exposa clairement sa position:
Conformément au mandat qui lui a été confié par le Conseil d’administration, la tâche de la
commission consiste à évaluer la législation et la pratique nationales par rapport aux
prescriptions des conventions internationales du travail. […] [Ses membres] sont nommés à
titre personnel et doivent être choisis sur la base de leur indépendance, de leur impartialité et
de leur compétence. [Ils] proviennent de toutes les régions du monde et possèdent une
expérience directe des différents systèmes juridiques, économiques et sociaux. […]
À la lumière de ces éléments, la commission réitère l’approche fonctionnelle qui est la sienne
s’agissant de son rôle lorsqu’elle examine la signification des dispositions des conventions. Bien
que son mandat ne lui prescrive pas de donner des interprétations définitives des conventions,
la commission doit examiner la portée juridique et la signification de certaines dispositions de
ces conventions et exprimer ses vues, le cas échéant, pour remplir le mandat qui lui a été confié
quant au contrôle de la mise en oeuvre des conventions ratifiées. L’examen de la signification
des dispositions des conventions fait nécessairement partie intégrante de sa fonction
d’évaluation du champ d’application et de la mise en oeuvre des conventions [...].
[L]a commission réaffirme qu’elle garde constamment à l’esprit toutes les différentes
méthodes d’interprétation des traités reconnues par le droit international public et, en
particulier, dans la Convention de Vienne sur le droit des traités, 1969. Plus particulièrement,
la commission s’est toujours dûment attachée au sens des mots, dans leur contexte, à la
lumière du but et de l’objet de la convention, comme prévu à l’article 31 de la Convention de
Vienne sur le droit des traités, en prenant en considération de manière égale les deux versions
authentiques des conventions de l’OIT – la version anglaise et la version française (article 33 de
la Convention de Vienne). De plus, conformément aux articles 5 et 32 de la Convention de
Vienne, la commission tient compte de la pratique de l’Organisation consistant à examiner les
travaux préparatoires ayant conduit à l’adoption de la convention. Cet aspect revêt une
importance particulière pour les conventions de l’OIT, eu égard à la nature tripartite de
l’Organisation et au rôle que les mandants tripartites jouent dans l’action normative. 127
II.2.2. Fonctions interprétatives des organes de contrôle et du secrétariat de l’OIT
84. Sans faire appel à la CIJ en vertu de l’article 37 de la Constitution, les organes de contrôle de
l’OIT, et même le Bureau international du Travail, secrétariat de l’Organisation, ont
occasionnellement exercé ce que l’on pourrait appeler des «fonctions interprétatives». Les
organes de contrôle l’ont fait de manière incidente lors de l’exercice de leur fonction de
surveillance de l’application des conventions ratifiées, tandis que le Bureau a émis des avis
informels en réponse aux demandes d’éclaircissements ordinairement formulées par les
gouvernements au sujet de l’interprétation d’une convention, le plus souvent avant la
ratification de celle-ci. Comme le Bureau l’a noté dans un rapport de 1993, des mécanismes
d’interprétation «de substitution se sont développés parallèlement et [...] permettent de régler,
jusqu’à un certain point, les difficultés courantes sans la lourdeur dissuasive de la procédure
de demande d’avis à la Cour» 128.
85. Les avis interprétatifs des organes de contrôle reposent invariablement sur le principe selon
lequel un certain degré d’interprétation est inhérent à toute fonction de surveillance de
l’application d’un instrument. Comme indiqué plus haut, la commission d’experts a relevé que
le contrôle de l’application des conventions ratifiées «requiert logiquement et inévitablement
127 CIT, 100e session, 2011, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), paragr. 10-12.
128 GB.256/SC/2/2, paragr. 10. Toutefois, comme il est conclu dans le même rapport, malgré la «diversité et [la] richesse peu
communes» des différents types de mécanismes d’interprétation, «il n’en existe aucun qui réunisse l’ensemble des conditions
permettant de régler de manière définitive une controverse au sujet du sens à donner aux dispositions d’une convention»
(paragr. 33).
GB.349bis/INS/1/1 37
une évaluation, laquelle implique elle-même un certain degré d’interprétation tant de la
législation nationale que du texte de la convention» 129. Les avis des organes de contrôle,
comme la commission d’experts ou une commission d’enquête, revêtent une force morale
considérable en raison du statut éminent de leurs membres et de la nature quasi judiciaire des
fonctions qui leur incombent. Ils peuvent prendre diverses formes, allant de simples
orientations pratiques visant à éclaircir le sens de termes abstraits ou de clauses de souplesse
jusqu’à une interprétation dynamique de dispositions essentielles de conventions 130.
86. À titre d’exemple, la commission d’experts a expliqué la signification de l’expression
«équivalent, dans l’ensemble,» figurant à l’article 2 a), de la convention no 147 131, apporté des
précisions sur la notion de «consultation» utilisée dans la convention no 169 132 et formulé des
orientations sur les conditions dans lesquelles le travail des détenus dans des prisons privées
pouvait être compatible avec la convention no 29 133. D’autres exemples sont la conclusion de
la commission d’enquête concernant le Myanmar selon laquelle l’interdiction du travail forcé
est devenue une norme impérative du droit international 134 ou celle d’un comité tripartite
chargé d’examiner une réclamation au titre de l’article 24 sur ce qu’il convient d’entendre par
«durée […] raisonnable» au sens de l’article 2, paragraphe 2, de la convention no 158 135.
87. Les avis et les conclusions des organes de contrôle de l’OIT ont été directement invoqués par
des juridictions internationales. La Cour européenne des droits de l’homme a ainsi estimé que,
«quand elle définit le sens des termes et des notions figurant dans le texte de la [Convention
de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, elle pouvait] et [devait]
tenir compte des éléments de droit international autres que la Convention, des interprétations
faites de ces éléments par les organes compétents et de la pratique des États européens
reflétant leurs valeurs communes» 136. Elle a ainsi pris en considération la position du
mécanisme de contrôle de l’OIT sur le droit de grève 137. En ce qui concerne la mise en garde
figurant dans les rapports de la commission d’experts, elle n’a pas estimé «que cette mise au
point exige[ait] qu’elle reconsidère le rôle de cet organe, qui est un rôle de référence et de
guide pour l’interprétation de certaines dispositions de la Convention» 138.
88. De même, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a fait savoir que, dans le cadre de
son interprétation de la Convention américaine relative aux droits de l’homme, elle prendrait
en considération d’autres sources de droit international, ainsi que les avis et recommandations
du Comité de la liberté syndicale et de la commission d’experts de l’OIT, afin d’interpréter de
manière harmonieuse les obligations internationales établies en vertu des instruments
internationaux régissant le droit du travail 139. Les observations de la commission d’experts ont
129 CIT, 102e session, 2013, rapport III (partie 1A), paragr. 33.
130 Claire La Hovary, «The ILO’s supervisory bodies’ «soft law jurisprudence»», Adelle Blackett et Anne Trebilcock (dir. de
publication), Research Handbook on Transnational Labour Law, 2015, 316-328.
131 CIT, 77e session, 1990, Étude d’ensemble des rapports concernant la convention (no 147) sur la marine marchande (normes
minima) et la recommandation (no 155) sur la marine marchande (amélioration des normes), 1976, rapport III (partie 4B),
paragr. 65 à 79.
132 CIT, 100e session, 2011, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), 857 à 863.
133 CIT, 89e session, 2001, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations, rapport III
(partie 1A), paragr. 82 à 146.
134 Bulletin officiel, vol. LXXXI, 1998, série B, supplément spécial, paragr. 203.
135 GB.300/20/6, paragr. 65 à 72.
136 Affaire Demir et Baykara c. Turquie, arrêt du 12 novembre 2008, paragr. 85.
137 Affaire Enerji Yapi-Yol Sen c. Turquie, arrêt du 21 avril 2009, paragr. 24.
138 Affaire National Union of Rail, Maritime and Transport Workers c. Royaume-Uni, arrêt du 8 avril 2014, paragr. 97.
139 Cour interaméricaine des droits de l’homme, Right to Freedom of Association, Right to Collective Bargaining and Right to Strike,
and their Relation to other Rights, with a Gender Perspective, Advisory Opinion OC-27/21, 5 mai 2021, paragr. 52 et 98. Voir aussi
GB.349bis/INS/1/1 38
également orienté l’action de divers organes conventionnels compétents en matière de droits
de l’homme 140 et de points de contact nationaux pour les Principes directeurs de l’OCDE à
l’intention des entreprises multinationales 141, tandis que les avis du Comité de la liberté
syndicale ont été notamment invoqués dans le cadre de procédures d’arbitrage 142.
89. Les avis informels du Bureau ont toujours été considérés comme relevant de l’assistance
administrative que les États Membres pouvaient recevoir du secrétariat de l’Organisation,
étant entendu que la Constitution ne confère à celui-ci aucune compétence particulière aux
fins de l’interprétation des conventions internationales du travail 143. Ainsi, ces avis n’ont pas
d’effet juridique contraignant et sont sans préjudice des observations des organes de contrôle
de l’OIT 144. Jusqu’en 2002, un total de 147 interprétations non officielles ont été communiquées
par le Bureau au Conseil d’administration et publiées dans le Bulletin officiel, pratique qui a
cependant été abandonnée depuis. Les avis officieux du Bureau ont parfois été pris en
considération ou confirmés par la commission d’experts 145.
II.2.3. Les pouvoirs implicites des organes chargés de contrôler l’application des instruments
relatifs aux droits de l’homme: un plus large débat
90. Le différend sur les pouvoirs d’interprétation de la commission d’experts fait écho à un débat
beaucoup plus large sur le contrôle du respect du droit international des droits de l’homme, et
en particulier sur le rôle et la fonction des organes de l’ONU créés en vertu d’instruments
internationaux relatifs aux droits de l’homme.
Former Employees of the Judiciary v. Guatemala, Judgment of 17 November 2021 (Preliminary Objections, Merits and
Reparations), paragr. 107 et 109.
140 Comité des droits de l’homme, Constatations, 31 octobre 2005, CCPR/C/85/D/1036/2001, paragr. 4.7 et 4.8; Conseil
économique et social des Nations Unies, Comité des droits économiques, sociaux et culturels, Observation générale no 23
(2016) sur le droit à des conditions de travail justes et favorables (art. 7 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux
et culturels), 27 avril 2016, E/C.12/GC/23, paragr. 19, note de bas de page 15.
141 Voir, par exemple, Point de contact national norvégien, Norwegian United Federation of Trade Unions (Fellesforbundet)
v. Kongsberg Automotive, Final Statement, 28 mai 2009; Point de contact national français, SHERPA et European Centre for
Constitutional and Human Rights c. Devcot, Communiqué, 21 septembre 2012.
142 Voir, par exemple, Dominican Republic–Central America–United States Free Trade Agreement – Arbitral Panel Established
Pursuant to Chapter Twenty – In the Matter of Guatemala – Issues Relating to the Obligations Under Article 16.2.1(a) of the
CAFTA-DR, rapport final, 14 juin 2017, paragr. 427; Report of the Panel of Experts: Proceeding constituted under article 13.15
of the EU–Korea Free Trade Agreement, 20 janvier 2021, paragr. 138.
143 C. W. Jenks, «The interpretation of international labour Conventions by the International Labour Office», British Yearbook of
International Law, 20, 1939, 132-141; C. H. Dillon, International Labor Conventions – Their Interpretation and Revision, 1942, 135-149.
144 Il a toutefois été soutenu que, par l’effet d’une pratique continue et incontestée, le Bureau était devenu l’organe principal
chargé de rendre des avis faisant autorité sur l’interprétation des normes internationales du travail et que ces avis, une fois
communiqués au Conseil d’administration et publiés dans le Bulletin officiel, étaient tacitement acceptés et présumés
contraignants; voir J. F. McMahon, «The legislative techniques of the International Labour Organisation», British Yearbook of
International Law, 41, 1965-66, 90, 99; E. Osieke, Constitutional Law and Practice in the International Labour Organisation, 1985,
207-210. La pratique a été revue à deux reprises, en vue de renforcer le caractère officiel des interprétations du Bureau,
notamment par une approbation du Conseil d’administration, mais aucun changement n’a été apporté; voir Procès-verbaux
de la 9e session du Conseil d’administration, octobre 1921, 324, et Procès-verbaux de la 57e session du Conseil d’administration,
avril 1932, 345.
145 Un récent exemple est celui de l’observation générale de la commission d’experts, publiée en 2019, selon laquelle, en vertu
de la convention du travail maritime, 2006, telle qu’amendée, le service continu à bord d’un marin sans congé ne peut excéder
onze mois. Cette observation s’appuie sur un avis officieux rendu par le Bureau en 2016. Voir aussi CIT, 87e session, 1999,
Étude d’ensemble des rapports sur la convention (no 97) et la recommandation (no 86) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949,
et sur la convention (no 143) et la recommandation (no 151) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975,
rapport III (partie 1B), paragr. 168; CIT, 93e session, 2005, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions
et recommandations, rapport III (partie 1A), 387; CIT, 97e session, 2008, Étude d’ensemble relative à la convention (nº 94) et à la
recommandation (nº 4) sur les clauses de travail (contrats publics), 1949, rapport III (partie 1B), paragr. 70.
GB.349bis/INS/1/1 39
91. À l’heure actuelle, il existe dix organes (comités) créés en vertu d’instruments internationaux
relatifs aux droits de l’homme qui sont chargés de veiller au respect de leur traité constitutif.
Composés d’experts indépendants, ces comités sont chargés d’examiner les rapports des États
parties et d’adopter des «observations générales» ou des «constatations» propres à un pays
donné. Les observations générales des comités chargés de veiller au respect des deux pactes
internationaux relatifs aux droits de l’homme (le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels) ont
donné lieu à des avis très divergents sur leur légitimité. Dans les publications en la matière,
certains auteurs considèrent que l’autorité des comités relève de leur compétence inhérente,
ou de leurs «pouvoirs implicites», selon le dictum formulé par la CIJ dans son avis de 1949 sur
la Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, tandis que certains détracteurs
considèrent les observations générales comme une tentative d’attribuer à des dispositions
conventionnelles un sens qu’elles n’ont pas 146.
92. Un des aspects importants de ce débat a trait aux limites de l’interprétation «fonctionnelle»,
c’est-à-dire de toute interprétation nécessaire à l’exercice effectif des fonctions de contrôle; en
d’autres termes, la question est celle de la délimitation entre l’interprétation stricto sensu et
l’interprétation créatrice de droit 147. Cet aspect devient de plus en plus important, car les
tribunaux internationaux et nationaux se réfèrent de plus en plus aux avis des organes
spécialisés et leur attachent souvent une force juridique déterminante 148.
146 Les nombreuses publications sur le sujet comprennent: Dinah Shelton, «The Legal Status of Normative Pronouncements
of Human Rights Treaty Bodies», Coexistence, Cooperation and Solidarity, 2012; Philip Alston, «The Historical Origins of the
Concept of “General Comments” in Human Rights Law», in Laurence Boisson de Chazournes et Vera Gowlland-Debbas (dir.
de publication), The International Legal System in Quest of Equity and Universality, Liber amicorum Georges Abi–Saab, 763-776;
Laurence R. Helfer, «Pushback Against Supervisory Systems: Lessons for the ILO from International Human Rights
Institutions», in George P. Politakis, Tomi Kohiyama, Thomas Lieby (dir. de publication), ILO100: Law for Social Justice, 257-278;
Linos-Alexandre Sicilianos, «Le dialogue entre la Cour européenne des droits de l’homme et les autres organes
internationaux, juridictionnels et quasi-juridictionnels», in Linos-Alexandre Sicilianos, Iulia A. Motoc, Róbert Spanó, Roberto
Chenal (dir. de publication), Intersecting Views on National and International Human Rights Protection, Liber amicorum Guido
Raimondi, 2019, 871-893; Helen Keller et Leena Grover, «General Comments of the Human Rights Committee and their
legitimacy», in Helen Keller, Geir Ulfstein (dir. de publication), UN Human Rights Treaty Bodies: Law and Legitimacy, 2012,
116-133.
147 Il a été observé que, bien qu’il y ait des limites à respecter entre l’interprétation et la création d’une norme, le droit
international des droits de l’homme est invariablement formulé sous forme de principes et de normes générales, qui doivent
nécessairement être développés plus avant lorsqu’ils sont appliqués à une situation donnée. Il est donc inhérent à la tâche
de l’interprète d’expliciter, de préciser et de développer la norme; Cecilia Median, «The role of international tribunals: Lawmaking
or creative interpretation?», in Dinah Shelton (dir. de publication), The Oxford Handbook of International Human Rights
Law, 2013, 651. Pour d’autres, le non-respect des règles d’interprétation soulève la question de savoir où un comité établit la
limite entre l’interprétation d’un traité et l’élaboration d’une nouvelle législation, ce qui outrepasse sa compétence. Bien que
les organes conventionnels remplissent une fonction de promotion générale dans le cadre de leur mandat, un amalgame
entre la promotion et l’interprétation des droits et obligations met en péril la crédibilité et l’importance du système de
contrôle assuré par les organes conventionnels, qui dépendent de la force de persuasion de leurs conclusions. Kerstin
Mechlem, «Treaty Bodies and the Interpretation of Human Rights», Vanderbilt Journal of Transnational Law 42(3) (2009): 946.
148 Pour en savoir plus sur l’utilisation des conclusions des organes conventionnels par les cours et tribunaux internationaux,
voir International Law Association, Final Report on the Impact of Findings of the United Nations Human Rights Treaty Bodies, 2004,
29-38. La Commission du droit international a estimé que les avis d’experts pouvaient être considérés comme traduisant un
accord ou une pratique ultérieurs au sens de l’article 31, paragraphe 3, de la Convention de Vienne sur le droit des traités, ou
comme des décisions judiciaires ou des enseignements aux fins de déterminer le droit international coutumier, ou encore
comme des moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international; voir Commission du droit international,
Projet de conclusions sur la détermination du droit international coutumier et commentaires y relatifs, 2018; Commission du
droit international, Premier rapport sur les moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international, 13 février 2023,
A/CN.4/760.
GB.349bis/INS/1/1 40
III. Question(s) à soumettre à la Cour
93. Comme indiqué ci-dessus, c’est en novembre 2014 que l’OIT a examiné de près pour la dernière
fois la procédure à suivre en vue de renvoyer la difficulté d’interprétation existante devant la CIJ
pour avis consultatif. Dans le document soumis à l’époque au Conseil d’administration, il était
indiqué ce qui suit:
Deux questions dominent manifestement les débats sur ce thème : 1) la question de fond, à
savoir si la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
peut être interprétée comme protégeant le droit de grève; et 2) si, en vertu de son mandat, la
commission d’experts est compétente pour donner de telles interprétations et, dans
l’affirmative, pour aller au-delà de principes généraux en précisant certains détails quant à
l’application de ces principes. Il semble qu’une réponse doit être donnée à ces deux questions
pour régler le différend actuel et créer la sécurité juridique nécessaire au bon fonctionnement
du système de contrôle. 149
94. Ces aspects essentiels de la difficulté d’interprétation ne semblent pas avoir beaucoup changé
au cours des dix dernières années. De fait, les questions proposées dans la demande de renvoi
présentée par le groupe des travailleurs le 12 juillet 2023 reprennent la formulation de celles
soumises à l’examen du Conseil d’administration en novembre 2014, à savoir:
1) Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la convention
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2) La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations était-elle
compétente pour:
a) déterminer que le droit de grève découle de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et
la protection du droit syndical, 1948; et
b) préciser, lors de l’examen de l’application de la convention, certains aspects du champ
d’application du droit de grève, des limites de celui-ci et des conditions dans lesquelles il
peut être exercé de façon licite?
95. Les récentes prises de position des groupes des travailleurs et des employeurs semblent
confirmer que les questions litigieuses restent les mêmes. Par exemple, à la session de mars
2023 du Conseil d’administration, la porte-parole du groupe des travailleurs a affirmé qu’il
n’existait «actuellement qu’un seul différend profond et persistant en matière d’interprétation
au sein de l’Organisation, lequel porte sur la convention no 87, pour ce qui est du droit de grève,
et la compétence de la commission d’experts [pour] fournir des orientations à cet égard» 150,
tandis que la porte-parole du groupe des employeurs a déclaré que l’objectif de son groupe
était de «faire en sorte que la commission d’experts ne crée pas de nouvelles obligations en
plus de celles prévues par les mandants tripartites lors de la Conférence. [Elle a ajouté que l]a
commission d’experts devrait renvoyer aux mandants les questions difficiles ou les lacunes
liées à une convention pour qu’ils y apportent une solution; c’est précisément parce qu’elle ne
l’a pas fait dans le cas du droit de grève que le différend actuel existe» 151.
96. Sans préjuger la décision du Conseil d’administration quant à la ou aux questions à porter
devant la Cour, un certain nombre d’observations peuvent être formulées à ce stade.
Premièrement, du point de vue de la procédure, la question doit être de nature juridique et
relever du domaine de compétence de l’Organisation. Comme la Cour l’a fait observer, les
questions libellées en termes juridiques et soulevant des problèmes de droit international
sont, par leur nature même, susceptibles de recevoir une réponse fondée en droit et ont un
149 GB.322/INS/5, paragr. 49.
150 GB.347/PV(Rev.), paragr. 238.
151 GB.347/PV(Rev.), paragr. 230.
GB.349bis/INS/1/1 41
caractère juridique 152. Selon la jurisprudence de la CIJ, l’expression «question juridique» ne doit
pas être interprétée de manière restrictive et la Cour peut donner un avis consultatif sur toute
question juridique, fût-elle abstraite 153 ou même purement théorique ou historique 154. À ce
jour, la CIJ n’a refusé de donner l’avis consultatif demandé que dans un cas, au motif que la
question débordait le cadre de la compétence de l’organisation concernée et que, partant, une
«condition essentielle pour fonder sa compétence en l’espèce [faisait] défaut» 155.
97. Deuxièmement, la question doit saisir les différents aspects du litige de manière concise et
directe. La Cour a estimé qu’un manque de clarté dans le libellé d’une question ne saurait la
priver de sa compétence et a rappelé à cet égard qu’elle avait souvent été amenée à élargir,
interpréter, voire reformuler les questions qui lui étaient posées 156.
98. Troisièmement, le fait qu’une demande de renvoi puisse avoir des motivations politiques ne
constitue pas en soi un obstacle à la compétence de la CIJ. La Cour a en effet relevé à plusieurs
reprises que le fait qu’une «question [juridique] revête par ailleurs des aspects politiques,
comme c’est, par la nature des choses, le cas de bon nombre de questions qui viennent à se
poser dans la vie internationale, ne suffit pas à la priver de son caractère «juridique»» 157. Elle
a ajouté que «la nature politique des mobiles qui auraient inspiré la requête et les implications
politiques que pourrait avoir l’avis donné [étaient] sans pertinence au regard de
l’établissement de sa compétence» 158. La Cour a même estimé que «lorsque des
considérations politiques jouent un rôle marquant il peut être particulièrement nécessaire à
une organisation internationale d’obtenir [son] avis consultatif […] sur les principes juridiques
applicables à la matière en discussion» 159.
99. Quatrièmement, si la Cour peut, à sa discrétion, refuser de répondre à une question qui lui est
posée pour des raisons d’opportunité judiciaire, elle a fait observer qu’elle gardait à l’esprit que
sa réponse à une demande d’avis consultatif constituait une participation de sa part à l’action
de l’Organisation et qu’elle ne devait pas, en principe, refuser de donner un tel avis, à moins
que des raisons décisives ne l’y incitent 160. Dans de récentes procédures, la Cour n’a accepté
comme raison décisive aucun des arguments invoqués pour l’inviter à refuser de donner un
avis consultatif. Elle a ainsi rejeté des arguments concernant les motifs de la demande, le
caractère vague ou abstrait de la question posée ou le fait que l’avis sollicité risquait d’entraver
des négociations en cours ou d’empêcher l’obtention d’une solution négociée, ou encore ne
serait d’aucune utilité.
152 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif, CIJ Recueil 1996 (I), paragr. 13, citant sahara occidental,
avis consultatif, CIJ Recueil 1975, paragr. 15.
153 Conditions de l’admission d’un État comme Membre des Nations Unies (article 4 de la Charte), avis consultatif, 1948, CIJ Recueil
1948, 61.
154 Sahara occidental, paragr. 18-19.
155 Licéité de l’utilisation des armes nucléaires par un État dans un conflit armé, avis consultatif, CIJ Recueil 1996 (I), paragr. 31.
156 Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, CIJ Recueil 2004 (I),
paragr. 38; Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif,
CIJ Recueil 2010 (II), paragr. 50.
157 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, paragr. 13; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le
territoire palestinien occupé, paragr. 41; Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au
Kosovo, paragr. 27.
158 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, paragr. 13.
159 Interprétation de l’accord du 25 mars 1951 entre l’OMS et l’Égypte, avis consultatif, CIJ Recueil 1980, paragr. 33.
160 Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, paragr. 14; Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le
territoire palestinien occupé, paragr. 44.
GB.349bis/INS/1/1 42
IV. Prochaines étapes possibles
100. En matière consultative, la Cour est ouverte aux institutions spécialisées autorisées à la saisir
par l’Assemblée générale des Nations Unies. Tel est le cas de l’OIT, qui y est autorisée par
l’article IX, paragraphe 2, de son accord de 1946 avec les Nations Unies. La question soumise
à la Cour doit être de nature juridique, avoir un lien direct avec l’activité de l’Organisation et
relever du domaine de compétence de cette dernière.
101. Comme il a été expliqué à plusieurs reprises, la procédure consultative commence par le dépôt
d’une requête pour avis consultatif, qui doit être présentée par écrit et transmise à la Cour 161.
Conformément à l’article 65, paragraphe 2, du Statut de la CIJ, «[l]es questions sur lesquelles
l’avis consultatif de la Cour est demandé sont exposées à la Cour par une requête écrite qui
formule, en termes précis, la question sur laquelle l’avis de la Cour est demandé. Il y est joint
tout document pouvant servir à élucider la question» 162. À ce jour, toutes les demandes
soumises à la Cour ont pris la forme d’une résolution officielle adoptée par l’organe compétent
de l’organisation requérante. Ces résolutions contiennent généralement un court préambule
exposant le contexte du problème sur lequel l’avis est sollicité, suivi par la ou les questions
posées à la Cour 163.
102. En conséquence, si le Conseil d’administration décide de saisir la Cour pour avis consultatif, il
devra adopter de la manière habituelle – par consensus ou par un vote à la majorité – une
résolution soumettant formellement à la CIJ la ou les questions juridiques sur lesquelles l’avis
autorisé de celle-ci est demandé. On trouvera à l’annexe I un projet de résolution du Conseil
d’administration. Le Conseil d’administration adresserait la demande à la Cour en vertu de la
résolution de 1949, qui autorise l’OIT à solliciter l’avis consultatif de la Cour sur des questions
juridiques qui se poseraient dans le cadre de l’activité de l’Organisation 164.
103. La participation à une procédure consultative consiste à présenter des exposés écrits et, si la
Cour décide de tenir des audiences, des exposés oraux. La Cour peut accélérer la procédure
consultative au titre de l’article 103 de son Règlement si la demande lui en est faite
expressément. Au moment de décider quels États, organisations internationales ou autres
entités devraient être invités à participer à la procédure consultative en vertu de l’article 66,
paragraphe 2, de son Statut, la Cour s’efforce de faire en sorte que tous les acteurs susceptibles
de lui communiquer des informations qu’elle ne pourrait pas obtenir autrement soient
associés à la procédure. Pragmatique dans son approche, la Cour est disposée à accepter la
participation d’acteurs autres que les organisations intergouvernementales et les États si cela
permet d’obtenir les informations les plus précises et factuelles possibles ou si les
circonstances particulières de l’affaire le justifient. Les demandes d’avis consultatif entraînent
161 GB.322/INS/5, paragr. 14-15, et GB.347/INS/5, paragr. 10. On trouvera des informations générales sur la compétence
consultative de la CIJ dans La Cour internationale de Justice: Manuel, 2019, 81-93, ainsi que dans la note du greffe à l’intention des
États et des organisations internationales intitulée «Demande d’avis consultatif – Procédure suivie par la Cour internationale de
Justice». Voir aussi Khawar Qureshi, Catriona Nicol et Joseph Dyke, Advisory Opinions of the International Court of Justice, 2018;
Hugh Thirlway, «Advisory Opinions», Max Planck Encyclopedia of Public International Law, 2006.
162 Conformément à l’article 104 du Règlement de la Cour, les documents sont transmis à la Cour en même temps que la
requête ou le plus tôt possible après celle-ci, dans le nombre d’exemplaires requis par le greffe. La Cour n’est officiellement
saisie qu’à la date à laquelle le greffe reçoit la lettre de transmission.
163 De 1948 à 2022, la CIJ a rendu au total 27 avis consultatifs en réponse à des requêtes soumises par l’ONU et quatre
institutions spécialisées, à savoir l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture, l’Organisation
maritime internationale, l’Organisation mondiale de la santé et le Fonds international de développement agricole. On
trouvera le texte complet de l’ensemble des avis consultatifs de la Cour à l’adresse https://icj-cij.org/fr/decisions. La dernière
requête pour avis consultatif en date a été formulée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 77/276
du 29 mars 2023, qui a été transmise à la présidente de la Cour par une lettre du Secrétaire général de l’Organisation des
Nations Unies datée du 12 avril 2023.
164 CIT, 32e session, 1949, Résolution concernant les demandes d’avis consultatif à la Cour internationale de Justice.
GB.349bis/INS/1/1 43
des coûts très limités (reproduction de documents et frais de mission aux fins de la
participation aux éventuelles audiences), les dépenses de la Cour étant supportées par l’ONU.
104. Si la CIJ est saisie, ce sera la septième fois que l’OIT aura recours à la procédure prévue à
l’article 37, paragraphe 1, de sa Constitution en vue de résoudre une difficulté d’interprétation,
et la deuxième fois qu’un avis consultatif sera demandé au sujet de l’interprétation d’une
convention. On trouvera à l’annexe II un résumé des six demandes adressées entre 1922 et
1932 à la Cour permanente de justice internationale en vertu de l’article 14 du Pacte de la
Société des Nations, et à l’annexe III une représentation schématique de la procédure menant
au prononcé d’un avis consultatif par la CIJ.
V. Observations finales
105. Comme indiqué dans l’introduction, le présent rapport n’a pas pour objet d’examiner la
difficulté d’interprétation quant au fond, mais simplement d’en exposer les divers aspects en
vue d’aider les mandants à prendre une décision éclairée sur l’opportunité, compte tenu de
l’importance institutionnelle de la question, de saisir la CIJ pour avis consultatif, conformément
à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT. Au vu de l’analyse qui précède, un
certain nombre d’observations finales peuvent être formulées:
a) Il existe entre les mandants tripartites de l’OIT un différend profond et persistant sur
l’interprétation de la convention no 87 s’agissant du droit de grève, et une incertitude
juridique subsiste donc en la matière. Les mandants campent fermement sur leurs
positions, et toute possibilité d’accord semble hors de portée.
b) Cette difficulté de longue date peut se résumer à ces deux questions: la convention no 87
peut-elle être interprétée comme reconnaissant ou protégeant le droit de grève ? Dans
l’exercice de ses fonctions de contrôle, la commission d’experts peut-elle (et, si tel est le
cas, dans quelle mesure) interpréter la convention no 87 de façon incidente, en particulier
en ce qui concerne les conditions qu’il est permis de poser à l’exercice du droit de grève?
c) Ces deux questions sont de nature juridique, ont un lien direct avec l’activité de
l’Organisation et relèvent de son domaine de compétence.
d) Un avis autorisé peut être demandé à la CIJ sur ces deux questions, en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT et de l’article IX, paragraphe 2, de l’accord conclu
entre les Nations Unies et l’OIT. De par leur autorité, les réponses juridiques de la Cour
pourraient avoir des incidences au-delà de l’OIT, car elles porteraient sur des questions
telles que l’interprétation des traités ou le système de contrôle du respect des instruments
internationaux relatifs aux droits de l’homme.
e) La demande d’avis consultatif peut être soumise en bonne et due forme à la Cour par le
Conseil d’administration en vertu de la délégation de pouvoir qu’il a reçue de la
Conférence.
f) Lorsqu’ils envisageront une éventuelle saisine de la Cour, les mandants souhaiteront
peut-être accorder une attention particulière aux éléments suivants:
i) les avantages et les inconvénients d’un maintien du statu quo;
ii) les conséquences de la situation actuelle sur le système de contrôle;
iii) la perspective d’assurer la sécurité juridique par la voie judiciaire;
iv) la possibilité pour les gouvernements de tous les États Membres et pour les
secrétariats des deux groupes non gouvernementaux de participer pleinement et
en toute autonomie à la procédure consultative devant la Cour;
GB.349bis/INS/1/1 44
v) les enjeux d’un recours à l’article 37 de la Constitution quelque quatre-vingt-dix ans
après le dernier recours, notamment en ce qui concerne la gouvernance et le
principe de la primauté du droit.
GB.349bis/INS/1/1 45
Annexe I
Projet de résolution du Conseil d’administration
Le Conseil d’administration,
Conscient qu’il existe entre les mandants tripartites de l’Organisation internationale du
Travail (OIT) un désaccord profond et persistant au sujet de l’interprétation de la convention
(nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de
grève,
Rappelant que cette difficulté d’interprétation découle d’une divergence de vues entre les
mandants tripartites de l’Organisation quant à la position adoptée de longue date par la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (commission
d’experts) selon laquelle le droit de grève est protégé par la convention no 87, et au point de savoir
si la commission d’experts a outrepassé sa compétence en adoptant une telle position,
Notant que non seulement la commission d’experts, mais aussi le Comité tripartite de la
liberté syndicale estiment que le droit de grève est un corollaire de la liberté syndicale, qui
constitue un droit fondamental, et que les conclusions de ces organes de contrôle trouvent un
large écho dans les décisions des juridictions internationales compétentes en matière de droits
de l’homme,
Gravement préoccupé par les incidences que cette difficulté d’interprétation a sur le
fonctionnement des mécanismes de contrôle de l’OIT et la crédibilité de son système normatif,
Affirmant la nécessité que cette difficulté soit résolue de manière définitive et la sécurité
juridique rétablie, conformément à la théorie et à la pratique constitutionnelles de l’Organisation,
Rappelant que, aux termes de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, «[t]outes
questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la […] Constitution et des conventions
ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution, seront soumises à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice»,
Convaincu que la seule solution viable consiste à solliciter un avis juridique faisant autorité
auprès de la Cour, étant donné que les tentatives de parvenir par le dialogue tripartite à une
solution acceptable pour toutes les parties ont échoué,
Reconnaissant le caractère définitif et contraignant de tout avis consultatif ainsi obtenu,
Exprimant le voeu que, compte tenu de la structure tripartite unique de l’OIT non seulement
les gouvernements des États Membres de l’Organisation, mais aussi les organisations
internationales d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif général auprès de l’OIT
seront invités à participer directement et sur un pied d’égalité à la procédure écrite et à toute
procédure orale devant la Cour,
1. Décide, conformément à l’article 96, paragraphe 2, de la Charte des Nations Unies, à
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, à l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord
entre les Nations Unies et l’OIT, tel qu’approuvé par l’Assemblée générale des Nations Unies
dans sa résolution 50 (I) du 14 décembre 1946, et à la résolution concernant les demandes
d’avis consultatifs à la Cour internationale de Justice, adoptée par la Conférence
internationale du Travail le 27 juin 1949, de demander à la Cour internationale de Justice de
rendre d’urgence un avis consultatif sur les questions suivantes:
GB.349bis/INS/1/1 46
[1. Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la convention
(nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2. La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT
était-elle compétente pour:
a) déterminer que le droit de grève découle de la convention (nº 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
b) préciser, lors de l’examen de l’application de cette convention, certains aspects
concernant le champ d’application du droit de grève, les limites de celui-ci et les
conditions dans lesquelles il peut être exercé de façon légitime?]
2. Charge le Directeur général:
a) de transmettre la présente résolution à la Cour internationale de Justice, accompagnée
de tout document pouvant servir à élucider la question, conformément à l’article 65,
paragraphe 2, du Statut de la Cour;
b) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice de permettre que les
organisations d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif général auprès
de l’OIT participent à la procédure consultative;
c) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice d’examiner les
mesures possibles pour accélérer la procédure, conformément à l’article 103 du
Règlement de la Cour, de manière à répondre d’urgence à cette demande;
d) d’informer le Conseil économique et social des Nations Unies de cette demande,
conformément à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord entre les Nations Unies et
l’Organisation internationale du Travail, 1946.
GB.349bis/INS/1/1 47
Annexe II
Demandes d’interprétation présentées à la Cour permanente de justice internationale
(1922-1932) en vertu de l’article 14 du Pacte de la Société des Nations
1. Désignation du délégué ouvrier néerlandais à la troisième session de la Conférence
internationale du Travail
Avis consultatif du 31 juillet 1922
Requête formulée dans une résolution de la Conférence du 18 novembre 1921.
Renvoi devant la Cour approuvé à l’unanimité par les membres du Conseil d’administration (janvier 1922).
Durée de la procédure: 2 mois et demi (du 22 mai au 31 juillet 1922).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer:
• l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs;
• la Fédération internationale des syndicats ouvriers chrétiens;
• la Fédération syndicale internationale.
Deux organisations ont présenté des exposés oraux.
2. Compétence de l’OIT pour la réglementation internationale des conditions de travail
des personnes employées dans l’agriculture
Avis consultatif du 12 août 1922
Requête formulée dans une motion directement soumise par le gouvernement de la France au Conseil de la
Société des Nations (janvier 1922).
Requête examinée par le Conseil d’administration sur la base d’un rapport oral du Directeur, mais pas de
décision.
Durée de la procédure: 3 mois (du 22 mai au 12 août 1922).
Huit organisations internationales ont été invitées à participer:
• la Confédération internationale des syndicats agricoles;
• la Ligue internationale des sociétés agricoles;
• la Commission internationale d’agriculture;
• la Fédération internationale des syndicats chrétiens des travailleurs de la terre;
• la Fédération internationale des travailleurs de la terre;
• l’Institut international d’agriculture;
• la Fédération syndicale internationale;
• l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs.
Plusieurs organisations ont présenté des exposés écrits et ont également participé à la procédure orale.
3. Compétence de l’OIT pour l’examen de propositions tendant à organiser et à développer
les moyens de production agricole
Avis consultatif du 12 août 1922
Requête formulée par le gouvernement de la France dans une lettre du 13 juin 1922 adressée directement au
Secrétaire général de la Société des Nations.
Soumission d’un rapport du Bureau au Conseil d’administration (juillet 1922), mais pas de discussion ni de
décision.
Durée de la procédure: 24 jours (du 18 juillet au 12 août 1922).
Une organisation internationale a été invitée à participer: l’Institut international d’agriculture (a envoyé une
communication distincte).
GB.349bis/INS/1/1 48
4. Compétence de l’OIT pour réglementer accessoirement le travail personnel du patron
Avis consultatif du 23 juillet 1926
Requête formulée par le groupe patronal du Conseil d’administration dans une lettre du 8 janvier 1926.
Renvoi devant la Cour examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (30e session, janvier 1926).
Durée de la procédure: 4 mois (du 20 mars au 23 juillet 1926).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer:
• l’Organisation internationale des employeurs industriels;
• la Fédération syndicale internationale;
• la Confédération internationale des syndicats chrétiens.
Deux organisations ont présenté des mémoires écrits, et les trois ont participé à la procédure orale.
5. Ville libre de Dantzig et OIT
Avis consultatif du 26 août 1930
Requête formulée par le Bureau à la suite d’une lettre du 20 janvier 1930 dans laquelle le gouvernement de la
Pologne demandait que la Ville libre de Dantzig soit admise au sein de l’OIT.
Renvoi devant la Cour examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (48e session, avril 1930).
Durée de la procédure: 4 mois et demi (du 15 avril au 26 août 1930).
Aucune organisation internationale n’a été invitée à participer.
6. Interprétation de la convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes
Avis consultatif du 15 novembre 1932
Requête formulée par le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord dans une
lettre du 20 janvier 1932 adressée au Président du Conseil d’administration.
Renvoi devant la Cour examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (57e session, avril 1932).
Durée de la procédure: 6 mois (du 10 mai au 15 novembre 1932).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer:
• la Fédération syndicale internationale;
• la Confédération internationale des syndicats chrétiens;
• l’Organisation internationale des employeurs industriels.
Deux organisations ont présenté des exposés écrits et ont également participé à la procédure orale.
Le texte intégral des avis consultatifs de la Cour permanente de justice internationale et des plaidoiries, exposés
oraux et documents soumis à celle-ci peut être consulté sur le site Web de la Cour internationale de Justice.
GB.349bis/INS/1/1 49
Annexe III
Déroulement de la procédure menant au prononcé d’un avis consultatif par la Cour
internationale de Justice
Conseil d’administration
Sur la base d’un rapport du Bureau, délibère et prend
une décision sur l’opportunité de saisir la Cour pour avis
consultatif et, le cas échéant, sur la ou les questions
juridiques à soumettre à l’appréciation de celle-ci.
Nonobstant la délégation de pouvoir de 1949, le Conseil
peut soumettre sa décision à la session suivante de la
Conférence pour approbation.
Résolution du Conseil d’administration
ou de la Conférence
La décision de renvoi prend la forme d’une résolution qui
explique le contexte, expose la ou les questions à
soumettre et donne au Directeur général des
instructions concernant le dossier à communiquer et les
mesures à prendre dans l’attente de l’avis de la Cour.
Directeur général du BIT
Écrit au président ou au greffier de la Cour pour
communiquer la résolution du Conseil d’administration
ou de la Conférence, demander une autorisation aux fins
de la participation d’organisations d’employeurs et de
travailleurs et, si nécessaire, solliciter une procédure
accélérée.
Soumet le dossier du Bureau contenant des éléments
factuels.
Procédure devant la Cour
Ouverture de la procédure consultative (art. 65 et 66 du
Statut, art. 102 à 106 du Règlement de la Cour).
Pas d’affaire à juger, pas de parties.
La Cour invite les entités pertinentes à participer,
détermine la forme des observations et le délai imparti
pour leur dépôt.
Organisations d’employeurs
et de travailleurs
Si la Cour estime qu’elles sont susceptibles de fournir des
renseignements spécifiques, peuvent être invitées à présenter des
exposés écrits et oraux dans un délai de deux à six mois.
Droit de réponse aux exposés des autres participants, sur
autorisation (art. 66(4) du Statut, art. 105 du Règlement de la Cour).
Ensemble des États Membres
Reçoivent une notification générale de la Cour, peuvent
demander l’autorisation de présenter des exposés écrits et
oraux sous deux à six mois, selon le délai fixé par la Cour.
Droit de réponse aux exposés des autres participants, sur
autorisation (art. 66(4) du Statut, art. 105 du Règlement de
la Cour).
Avis consultatif
Lu en séance publique, copie transmise au Directeur
général du BIT.
Le dispositif final contient les conclusions de la Cour sur
la ou les questions soumises à son appréciation; les
éventuelles opinions individuelles ou dissidentes sont
jointes à l’avis.
Revêt un caractère contraignant au regard de la théorie
et de la pratique constitutionnelles de l’OIT.
Document no 30
GB.349bis/INS/1/2, Suite à donner à la demande du
groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à
ce que la difficulté d’interprétation de la convention
n° 87 concernant le droit de grève soit soumise
d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale
de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT – Résumé des observations
reçues des mandants, octobre 2023
GB.349bis/INS/1/2
Afin de réduire au maximum l’impact environnemental des activités de l’OIT, les documents du Conseil d’administration publiés avant ou après les sessions ne
sont pas imprimés. Seuls les documents publiés en cours de session sont imprimés, en nombre limité, et distribués aux membres du Conseil d’administration.
Tous les documents du Conseil d’administration sont disponibles sur Internet, à l’adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
349ᵉbis session (spéciale), Genève, 10 novembre 2023
Section institutionnelle INS
Date: 13 octobre 2023
Original: anglais
Première question à l’ordre du jour
Suite à donner à la demande du groupe
des travailleurs et de 36 gouvernements
visant à ce que la difficulté d’interprétation
de la convention no 87 concernant le droit de grève
soit soumise d’urgence à l’appréciation
de la Cour internationale de Justice
en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution de l’OIT
Résumé des observations reçues des mandants
Introduction
1. À l’occasion de la diffusion du rapport d’information du Bureau (GB.349bis/INS/1/1, annexe)
établi en vue de la session spéciale du Conseil d’administration relative à la demande du
groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation de
la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, s’agissant
du droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice
(«la CIJ» ou «la Cour»), le Directeur général a invité les États Membres et, par leur intermédiaire,
les organisations d’employeurs et de travailleurs concernées, à communiquer telles
GB.349bis/INS/1/2 2
observations qu’ils pourraient souhaiter faire sur cette question. L’objectif était de favoriser
des délibérations inclusives sur une question d’une grande importance institutionnelle,
notamment en offrant aux Membres qui ne sont actuellement pas représentés au Conseil
d’administration la possibilité de faire connaître leurs vues.
2. Au 11 octobre 2023, le Bureau avait reçu des communications de 10 gouvernements, des
secrétariats des deux groupes non gouvernementaux, de 14 organisations nationales
d’employeurs et de 101 organisations nationales de travailleurs. On trouvera dans l’annexe la
liste des mandants ayant fait parvenir des observations. Celles-ci sont publiées dans leur
intégralité sur la page Web de la 349ebis session (spéciale) du Conseil d’administration.
Résumé des observations des mandants
3. Sur la question centrale de savoir si l’Organisation devrait ou non soumettre la difficulté
d’interprétation à l’appréciation de la Cour en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution, trois gouvernements (Érythrée, Niger et Somalie) 1 ont fait savoir qu’ils soutenaient
la proposition du groupe des travailleurs. La principale raison invoquée était que les États avaient
besoin de sécurité juridique quant aux obligations que leur impose la ratification des
conventions de l’OIT. Les trois mêmes gouvernements ont également fait observer que la
persistance de la controverse avait des répercussions négatives sur le système normatif de l’OIT.
4. Trois autres gouvernements (Indonésie, Kenya et Türkiye) ont indiqué qu’ils n’étaient pas
favorables à la saisine de la Cour et qu’ils préféraient que le dialogue se poursuive. L’Indonésie,
tout en reconnaissant que le droit de grève est un droit humain fondamental et que la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations («la commission
d’experts») est compétente pour interpréter les conventions, a fait valoir que l’approche la plus
prudente était la recherche d’un consensus tripartite, et elle a instamment prié le Conseil
d’administration d’envisager d’inscrire une question en ce sens à l’ordre du jour de la
112e session (juin 2024) de la Conférence internationale du Travail («la Conférence»). L’objectif
serait de procéder à une discussion approfondie et de réfléchir à la possibilité d’élaborer un
cadre ou une norme qui définirait les limites et la teneur du droit de grève dans le contexte de
la convention no 87. Si le consensus tripartite se révèle impossible à atteindre, la saisine de la
Cour en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, sera toujours possible.
De même, la Türkiye, tout en notant que le droit de grève fait partie intégrante des principes et
droits fondamentaux au travail mais n’est pas un droit absolu, s’est dite favorable à ce que les
efforts se poursuivent en vue d’un règlement du différend dans le cadre des structures
existantes de l’OIT, grâce à la promotion d’une collaboration active et d’un dialogue ouvert.
Cette approche serait propice à un résultat équilibré et acceptable par tous. Le Kenya a indiqué
qu’il souhaitait que le différend fasse l’objet d’un règlement amiable, et a rappelé qu’il
reconnaissait et encourageait la liberté syndicale et le droit de grève bien qu’il n’ait pas encore
ratifié la convention no 87.
5. Le Costa Rica a fait savoir qu’il était favorable à la proposition du groupe des travailleurs visant
à ce que la question soit renvoyée devant la Cour, sans préjudice d’autres solutions possibles
telles que la tenue, à la prochaine session de la Conférence, d’une discussion en vue de
1 Les États Membres qui ont ratifié la convention no 87 apparaissent en italique.
GB.349bis/INS/1/2 3
l’adoption éventuelle d’un protocole, ou toute autre solution qui pourrait être convenue à
l’issue des 349ebis et 349eter sessions (spéciales) du Conseil d’administration.
6. La Suisse a réaffirmé sa préférence pour l’institution, en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de
la Constitution de l’OIT, d’un tribunal interne chargé de régler les difficultés d’interprétation.
Au sujet d’une possible saisine de la CIJ, la Suisse a mis en doute le caractère interprétatif des
deux questions que le groupe des travailleurs propose de soumettre à l’appréciation de la
Cour. En tout état de cause, les États parties à la convention no 87 devraient être pleinement
associés aux discussions relatives à la teneur de la ou des questions à renvoyer devant la Cour.
Pour ce qui est de la décision relative à l’opportunité du renvoi, la Suisse a fait valoir que,
nonobstant l’autorité déléguée au Conseil d’administration en la matière, et pour des raisons
d’inclusivité et de représentativité, c’est à la Conférence que devrait appartenir cette décision.
Lorsque, en 1949, la Conférence a adopté la résolution autorisant le Conseil d’administration
à demander un avis consultatif à la Cour, la composition du Conseil reflétait celle de
l’Organisation, or ce n’est plus le cas à l’heure actuelle.
7. De même, la Malaisie est d’avis que, bien que l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution
prévoie la soumission de toutes difficultés d’interprétation à l’appréciation de la CIJ, celle-ci ne
devrait être saisie qu’en cas d’échec de toutes les autres tentatives de règlement de la difficulté
concernée. Il est préférable de rechercher des solutions au sein de l’OIT, notamment par
l’institution d’un tribunal interne indépendant en vue du prompt règlement de toute difficulté
d’interprétation.
8. Le Japon a fait valoir qu’il était essentiel que les mandants tripartites discutent d’abord entre
eux, et que la saisine de la CIJ ne devrait être envisagée qu’en dernier ressort. Quant à la
question à soumettre à l’appréciation de la Cour, elle devrait refléter le fait que le droit de grève
n’est pas un droit absolu. Elle ne devrait en aucun cas porter sur la compétence de la
commission d’experts, ce point devant être discuté plus avant par les mandants de l’OIT. Le
Japon a proposé en conséquence des amendements au projet de résolution figurant dans
l’annexe I du rapport d’information.
9. Les organisations d’employeurs ont indiqué que, bien que la saisine de la Cour aux fins du
règlement de difficultés d’interprétation soit prévue par la Constitution, elles n’y étaient en
l’occurrence pas favorables. Elles ont invoqué en substance les trois raisons suivantes:
premièrement, les voies internes de règlement du différend n’ont pas été épuisées, telles que
la tenue d’un débat à la Conférence en vue de l’adoption d’une norme internationale du travail;
deuxièmement, un avis consultatif de la Cour tendrait à créer davantage d’insécurité juridique
quant au champ d’application du droit de grève et serait préjudiciable pour la «paix sociale»
en général au sein de l’OIT; et troisièmement, un avis consultatif de la Cour nuirait à la
réputation et à la crédibilité de l’OIT. Le droit de grève est une question complexe qui doit être
examinée de manière approfondie par les acteurs tripartites du monde du travail. La recherche
d’une solution reposant sur le consensus permettrait au contraire à tous les mandants de
participer au processus et aboutirait à un résultat acceptable par tous.
10. Bien que, d’une manière générale, elles reconnaissent l’existence du droit de grève, les
organisations d’employeurs ont réaffirmé leur position selon laquelle ce droit n’entre pas dans
le champ d’application de la convention no 87, ni expressément, ni implicitement. Les travaux
préparatoires montrent que le droit de grève a été délibérément exclu du champ d’application
de la convention. La commission d’experts n’est aucunement habilitée à réécrire la convention
s’agissant du droit de grève ni à l’interpréter comme si elle protégeait expressément ce droit
et à constituer ainsi un corpus interprétatif en dehors du cadre tripartite régissant la prise de
GB.349bis/INS/1/2 4
décision. Le Comité de la liberté syndicale n’a quant à lui aucun pouvoir général
d’interprétation ou de contrôle à l’égard de la convention no 87.
11. De leur côté, les organisations de travailleurs ont exprimé leur soutien en faveur du renvoi du
différend devant la Cour; elles ont souligné l’importance primordiale que revêt le droit de grève
pour les travailleurs et leurs organisations ainsi que pour les droits au travail en général, et ont
fait valoir qu’il est urgent de restaurer la sécurité juridique au moyen d’un avis consultatif
contraignant de la Cour. L’incapacité où se trouve l’OIT de contrôler la bonne application du
droit de grève au titre de la convention no 87 en raison de la persistance du différend nuit aux
relations professionnelles au niveau national. Le protocole qu’il est proposé d’adjoindre à la
convention no 87 n’apporterait rien étant donné que, comme l’ont expliqué en détail les
organes de contrôle de l’OIT, la convention no 87 garantit déjà le droit de grève en tant que
principe et droit fondamental au travail. L’adoption d’un protocole n’assurerait pas la sécurité
juridique voulue et risquerait au contraire d’accentuer le différend.
12. Pour les organisations de travailleurs, la protection du droit de grève est inhérente au mandat
constitutionnel de l’OIT et, de ce fait, elle fait partie intégrante du champ d’application de la
convention no 87. Plus largement, le droit de grève relève du droit international et il est
impératif que sa protection soit assurée au niveau international. La convention no 87 et les vues
exprimées par la commission d’experts et le Comité de la liberté syndicale ont trouvé un large
écho, notamment dans les décisions rendues par les juridictions nationales et internationales,
les codes de conduite des entreprises multinationales et les instruments de libre-échange, ce
qui pourrait expliquer pourquoi, alors que ces vues n’ont pas été remises en question pendant
plus de soixante ans, le groupe des employeurs est revenu sur sa position.
Observations reçues de l’Organisation internationale
des employeurs
13. L’Organisation internationale des employeurs (OIE) est d’avis que le différend trouve son
origine dans l’interprétation extensive que la commission d’experts a donnée du droit de grève,
et fait valoir que le Bureau a joué un rôle à cet égard. Les employeurs reconnaissent l’existence
du droit de grève au niveau national, mais ils sont fermement convaincus que ni la
convention no 87, ni du reste aucune autre convention, ne protègent ce droit ni n’en régissent
les conditions d’exercice. S’il est vrai que le renvoi devant la CIJ de toute question ou difficulté
d’interprétation est prévu par l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, les mandants de
l’OIT ont toujours privilégié les solutions tripartites, excepté à une occasion, au sujet de
l’interprétation de la convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919. Un élément
important est que la CIJ n’est pas le seul organe compétent et que, de fait, elle ne peut apporter
qu’une sécurité juridique limitée concernant les difficultés d’interprétation soumises à son
appréciation puisque, par définition, ses avis consultatifs ne sont juridiquement pas
contraignants. Par ailleurs, une action normative serait davantage à même de renforcer la
sécurité juridique concernant le droit de grève et garantirait un processus inclusif et
démocratique en ce que tous les mandants pourraient y participer activement. Cette option
serait pleinement conforme au mandat de l’OIT et aux principes du tripartisme et du dialogue
social.
14. Pour ce qui est de l’application de la convention no 87 au droit de grève, l’OIE fait valoir que les
travaux préparatoires de la convention sont parfaitement clairs: c’est à dessein que les
mandants tripartites n’ont fait figurer le droit de grève ni expressément ni implicitement dans
GB.349bis/INS/1/2 5
la convention au moment de l’élaboration de l’instrument. De nombreux documents officiels
des gouvernements, des employeurs et des travailleurs ainsi que des organes de contrôle de
l’OIT attestent que ni la convention no 87, ni aucune autre convention ne traitent du droit de
grève. Les règles régissant l’interprétation des traités énoncées aux articles 31 et 32 de la
Convention de Vienne sur le droit des traités, 1969, devraient être pleinement respectées. Le
sens ordinaire des dispositions pertinentes, notamment, est clair, et il n’est nul besoin de
recourir à des concepts vagues tels que l’interprétation «dynamique». Le fait est que la
convention no 87 ne contient pas le terme «droit de grève» ni de termes équivalents. On ne
saurait pas non plus prétendre qu’il existe entre les parties à la convention no 87 un accord
quant à une interprétation du droit de grève qui découlerait d’un accord ultérieur survenu
entre elles ou d’une pratique ultérieurement suivie. La preuve en est que plusieurs États ayant
ratifié la convention ont fait valoir à des époques différentes que ni la convention no 87, ni
aucun autre instrument de l’OIT ne garantissent le droit de grève. Il pourrait toutefois être fait
appel à des moyens complémentaires d’interprétation, tels que les travaux préparatoires, pour
confirmer le sens à attribuer aux dispositions de la convention en application de l’article 31.
15. Pour ce qui est du mandat de la commission d’experts, il est clair que celui-ci se limite à une
analyse impartiale et technique et que les vues et les recommandations de la commission ne
sont pas contraignantes. En outre, lorsque la commission d’experts a été créée en 1926, la
Conférence a précisé qu’elle n’aurait pas compétence pour interpréter les conventions.
Pourtant, la commission d’experts a progressivement constitué un vaste corpus
d’interprétations extensives et très détaillées qui ont étendu la portée de la liberté de faire
grève jusqu’à la rendre quasiment illimitée.
16. En ce qui concerne les questions qu’il est proposé de soumettre à la Cour, l’OIE considère
qu’une référence aux articles 31 et 32 de la Convention de Vienne devrait y figurer, car aussi
bien l’interprétation de la convention no 87 s’agissant du droit de grève que la compétence de
la commission d’experts devraient être déterminées compte dûment tenu des prescriptions
énoncées dans ces dispositions. En tout état de cause, les deux questions proposées par les
travailleurs sont incomplètes en ce qu’il faudrait aussi demander à la CIJ des éclaircissements
sur le rôle de la Conférence à l’égard de la commission d’experts ainsi que sur le point de savoir
si la Conférence a autorité pour régler des difficultés d’interprétation au moyen d’une action
normative.
17. Pour ce qui est des options envisageables pour la suite, l’OIE estime qu’il ne devrait pas être
décidé de soumettre une difficulté d’interprétation à l’appréciation de la CIJ sans le soutien des
États parties à la convention, soutien qui devrait être exprimé dans le cadre de la Conférence.
La saisine de la Cour ne devrait pas être envisagée à moins que toutes les possibilités de
dialogue entre les principaux acteurs de l’OIT compétents en matière de normes
internationales du travail aient été épuisées.
18. Les observations reçues de l’OIE sont publiées dans leur intégralité sur la page Web de la
349ebis session (spéciale) du Conseil d’administration.
Observations reçues de la Confédération syndicale
internationale
19. La Confédération syndicale internationale (CSI) a rappelé que, depuis que la crise
institutionnelle a éclaté en 2012, les gouvernements et les partenaires sociaux ont essayé à
GB.349bis/INS/1/2 6
plusieurs reprises de régler la difficulté d’interprétation dans le cadre du dialogue social, en
vain. Selon elle, la poursuite du dialogue ne permettra pas de sortir de l’impasse. Le différend
et l’absence de sécurité juridique qui en découle entravent le fonctionnement du système de
contrôle. Le moyen à privilégier pour aller de l’avant, qui est le plus raisonnable, le plus
rationnel et le plus efficace, consiste à obtenir le règlement de la question juridique de
l’application de la convention no 87 au droit de grève et la confirmation que les orientations
formulées par les organes de contrôle de l’Organisation font autorité. La Constitution, en son
article 37, paragraphe 1, met à disposition un mécanisme efficace pour régler ce différend
juridique.
20. Le groupe des employeurs est le seul groupe qui conteste la valeur juridique des orientations
formulées par les organes de contrôle au sujet du droit de grève et du champ d’application de
la convention no 87. Pourtant, ces orientations reposent sur la position adoptée de longue date
selon laquelle le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations constitue,
fondamentalement et intrinsèquement, le corollaire de la liberté syndicale et du droit syndical.
Cette interprétation juridique a toujours prévalu et a inspiré non seulement les législations et
les pratiques nationales, mais aussi les juridictions internationales, les organisations
multilatérales et les organes nationaux, régionaux et internationaux compétents dans le
domaine des droits de l’homme.
21. Le recours à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, se justifie par le fait que, dès lors que
la question d’interprétation en cause nuit à l’exercice d’un droit fondamental, entrave le
fonctionnement du système de contrôle de l’OIT et a des répercussions plus larges, l’approche
la plus prudente et la plus indiquée est de faire appel à la procédure constitutionnelle prévue
par cette disposition. À moins que le groupe des employeurs se range à l’interprétation et au
principe juridiques largement admis selon lesquels le droit de grève est intimement lié à la
liberté syndicale et au droit syndical et est à ce titre protégé par la convention no 87, et qu’il
reconnaisse que le corpus juridique formé par les orientations des organes de contrôle, dont
la commission d’experts, fait autorité, le recours à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution
est le seul moyen d’obtenir la sécurité juridique voulue.
22. Rien dans la Constitution n’autorise le groupe des employeurs à prétendre que le différend
devrait être discuté à la Conférence. Pour ce qui est de la proposition tendant à adopter un
protocole, la CSI est d’avis que tenter de régler la difficulté d’interprétation en cause au moyen
d’une action normative, alors que l’incertitude demeure, ne permettrait pas de véritablement
clarifier le champ d’application de la convention no 87 s’agissant du droit de grève.
23. En ce qui concerne les deux questions qu’il est proposé de soumettre à la Cour, l’intention est
de couvrir tous les aspects de la difficulté d’interprétation. Une décision répondant par
l’affirmative à la première question et apportant la sécurité juridique voulue quant au mandat
de la commission d’experts serait décisive pour le règlement du différend.
24. Pour ce qui est du rôle des travaux préparatoires qui ont conduit à l’adoption de la
convention no 87, la CSI rappelle la position de la commission d’experts, à savoir que l’absence
d’une disposition expresse n’est pas déterminante puisque les termes de la convention doivent
être interprétés à la lumière de son objet et de son but.
25. La CSI appuie le projet de résolution annexé au rapport d’information, et affirme que la CIJ est
le seul mécanisme capable d’assurer la sécurité et la clarté juridiques voulues au sujet d’une
question aussi lourde de conséquences que celle en litige.
26. Les observations reçues de la CSI sont publiées dans leur intégralité sur la page Web de la
349ebis session (spéciale) du Conseil d’administration.
GB.349bis/INS/1/2 7
Conclusion
27. Malgré la diffusion anticipée du rapport d’information, le taux de réponse, en particulier de la
part des gouvernements, a été faible.
28. Les observations reçues confirment que le différend ne porte pas tant sur la reconnaissance
du droit de grève que sur l’interprétation de la convention no 87 et le point de savoir si la
commission d’experts est habilitée à formuler des orientations faisant autorité au sujet des
conditions d’exercice du droit de grève et des limites de ce droit.
29. Comme on pouvait s’y attendre, les observations émanant respectivement des organisations
d’employeurs et des organisations de travailleurs illustrent clairement leur divergence de vues
quant à l’opportunité de soumettre le différend à l’appréciation de la Cour en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
GB.349bis/INS/1/2 9
Annexe
Gouvernements
Costa Rica
Érythrée
Indonésie
Japon
Kenya
Malaisie
Niger
Somalie
Suisse
Türkiye
Organisations d’employeurs
International Organisation of Employers (IOE)
Confederación de Cámaras Industriales de los Estados Unidos Mexicanos (CONCAMIN)
Confederación Patronal de la República Mexicana (COPARMEX)
Confederation of Danish Employers (DA)
Confederation of Finnish Industries (EK)
Confederation of Norwegian Enterprise (NHO)
Confederation of Portuguese Business (CIP)
Confederation of Swedish Enterprise (SN)
Comité Coordinador de Asociaciones Agrícolas, Comerciales, Industriales y Financieras (CACIF)
(Guatemala)
Fédération des entreprises de Belgique (FEB)
Hellenic Federation of Enterprises (SEV)
Japan Business Federation (Keidanren)
Malaysian Employers Federation (MEF)
Union patronale suisse (UPS)
Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA)
Organisations de travailleurs
International Trade Union Confederation (ITUC)
All Indonesian Trade Union Confederation (KSBSI)
GB.349bis/INS/1/2 10
All Nepal Federation of Trade Unions (ANTUF)
All-Poland Alliance of Trade Unions (OPZZ)
Australian Council of Trade Unions (ACTU)
Bangladesh Free Trade Union Congress (BFTUC)
Bangladesh Jatiyatabadi Sramik Dal DAL-BJSD
Bangladesh Labour Federation (BLF)
Botswana Federation of Trade Unions (BFTU)
Canadian Labour Congress (CLC)
Central Autónoma de Trabajadores del Perú (CATP)
Central Autónoma de Trabajadores Salvadoreños (CATS)
Central de Trabajadores/as de la Argentina Autónoma (CTA-A)
Central Organisation of Finnish Trade Unions (SAK)
Central Organization of Trade Unions - Kenya (COTU-K)
Central Unitaria de Trabajadores/as de Chile (CUT-Chile)
Central Unitaria de Trabajadores del Perú (CUT-Perú)
Confederação Geral dos Trabalhadores Portugueses (CGTP)
Confederación Auténtica de Trabajadores de la República Mexicana (CAT)
Confederacíon Autónoma Sindical Clasista (CASC) (République dominicaine)
Confederación de Trabajadores de México (CTM)
Confederación de Unificación Sindical (CUS) (Nicaragua)
Confederación General del Trabajo de la República Argentina (CGT-RA)
Confederación Intersindical Galega (CIG) (Espagne)
Confederación Nacional de Unidad Sindical (CNUS) (République dominicaine)
Confederación Nacional de Unidad Sindical Independiente (CONUSI) (Panama)
Confederación Sindical de Comisiones Obreras (CCOO) (Espagne)
Confederația Națională Sindicală (Cartel Alfa) (Roumanie)
Confédération des syndicats autonomes du Sénégal (CSA)
Confédération des Travailleurs des Secteurs Publique et Privé (CTSP) (Maurice)
Confédération française démocratique du travail (CFDT)
Confédération générale autonome des travailleurs en Algérie (CGATA)
Confédération libre des travailleurs de Mauritanie (CLTM)
Confédération luxembourgeoise des syndicats chrétiens (LCGB)
Confédération nationale des travailleurs du Burkina (CNTB)
Confédération nationale des travailleurs du Sénégal (CNTS)
GB.349bis/INS/1/2 11
Confederation of Autonomous Trade Unions of Serbia (CATUS)
Confederation of Ethiopian Trade Unions (CETU)
Confederation of Free Trade Unions of Macedonia (KSS)
Confederation of Free Trade Unions of Ukraine (KVPU)
Confederation of Independent Trade Unions in Bulgaria (CITUB)
Confederation of Progressive Trade Unions of Turkey (DISK)
Confederation of Public Employees’ Trade Unions (KESK) (Türkiye)
Confederation of Trade Unions of Albania (KSSH)
Confederation of Trade Unions of Montenegro (CTUM)
Confederation of Turkish Trade Unions (TÜRK-İŞ)
Confederation of Unions for Professionals (Unio) (Norvège)
Confédération syndicale des travailleurs du Togo (CSTT)
Confédération syndicale du Congo (CSC) (République démocratique du Congo)
Confédération syndicale indépendante du Luxembourg (OGBL)
Consejo Nacional del Trabajadores Organizados (CONATO) (Panama)
Construction and Building Materials Industry Workers’ Union of Ukraine (PROFBUD)
Czech Moravian Confederation of Trade Unions (ČMKOS)
Federación Sindical de Trabajadores Independientes (FSTIES) (El Salvador)
Fédération nationale des syndicats des ouvriers et des employés du Liban (FENASOL)
Federation of Independent Trade Unions of Russia (FNPR)
Federation of Iraq Trade Unions (FITU)
Federation of Korean Trade Unions (FKTU)
Federation of Somali Trade Unions (FESTU)
Federation of Trade Unions of Macedonia (SSM)
Federation of Trade Unions of the Republic of Kazakhstan (FPRK)
Federation of Trade Unions of Ukraine (FPU)
General Federation of Bahrain Trade Unions (GFBTU)
General Workers’ Union (UGT) (Portugal)
Georgian Trade Union Confederation (GTUC)
German Confederation of Trade Unions (DGB)
Greek General Confederation of Labour (GSEE)
Hind Mazdoor Sabha (HMS) (Inde)
Independent and Self Governing Trade Union Solidarność (NSZZ “Solidarność”) (Pologne)
Independent Trade Unions of Croatia (NHS)
GB.349bis/INS/1/2 12
Italian Confederation of Workers’ Trade Unions (CISL)
Italian General Confederation of Labour (CGIL)
Italian Labour Union (UIL)
Japanese Trade Union Confederation (JTUC-RENGO)
Kilusang Mayo Uno (KMU) (Philippines)
Korean Confederation of Trade Unions (KCTU)
Liberia Labour Congress (LLC)
National Trade Union Confederation (NTUC) (Maurice)
Netherlands Trade Union Confederation (FNV)
Pakistan Workers’ Federation (PWF)
Pan-Cyprian Federation of labour (PEO) (Chypre)
Randrana Sendikaly USAM-SVS (Madagascar)
Singapore National Trades Union Congress (SNTUC)
Swedish Confederation of Professional Associations (SACO)
Swedish Confederation of Professional Employees (TCO)
Swedish Trade Union Confederation (LO)
Syndicat des enseignants du supérieur solidaires (SESS) (Algérie)
Swiss Trade Union Confederation (SGB/USS)
Trade Union Congress (TUC) (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord)
Trade Union Congress of Namibia (TUCNA)
Trade Union Congress of Swaziland (TUCOSWA)
Trade Union Confederation “Nezavisnot” (Nezavisnost) (Serbie)
Trade Union Confederation of the Republic of Srpska (Bosnie-Herzégovine)
Unión General de los Trabajadores del Brazil (UGT)
Unión General de Trabajadoras y Trabajadores de España (UGT-E) (Espagne)
Unión Nacional de Trabajadores (UNT) (Mexique)
Union nationale des syndicats des travailleurs du Bénin (UNSTB)
Union nationale des travailleurs de Guinée-Bissau (UNTG-CS)
Union of Autonomous Trade Unions of Croatia (UATUC)
Union of Free Trade Unions of Montenegro (UFTUM)
Union of Independent Trade Unions of Albania (BSPSH)
Zimbabwe Congress of Trade Unions (ZCTU)
Document no 31
Projet de procès-verbaux de la session 349e bis (spéciale)
du Conseil d’administration, novembre 2023
GB.349bis/PV/Projet
Conseil d’administration
349ᵉbis session (spéciale), Genève, 10 novembre 2023
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Projet de procès-verbaux de la 349e bis session
(spéciale) du Conseil d’administration du Bureau
international du Travail
Table des matières
Page
Section institutionnelle ........................................................................................................................ 3
1. Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements
visant à ce que la difficulté d’interprétation de la convention no 87 concernant
le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale
de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT
(GB.349bis/INS/1/1 et GB.349bis/INS/1/2) .......................................................................... 3
Comité plénier ................................................................................................................................. 3
Conseil d’administration ................................................................................................................ 19
Décision ................................................................................................................................... 36
GB.349bis/PV/Projet 3
Section institutionnelle
1. Suite à donner à la demande du groupe des travailleurs
et de 36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation
de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise
d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice
en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT
(GB.349bis/INS/1/1 et GB.349bis/INS/1/2)
Comité plénier
1. Le Président rappelle que la 349ebis session (spéciale) du Conseil d’administration a été
convoquée en application de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution de l’Organisation
internationale du Travail et du paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration.
À sa 349e session, le Conseil d’administration a approuvé les dispositions applicables à la
session spéciale. Celles-ci prévoient que le Conseil d’administration se réunira en comité
plénier, en application de l’article 4.3 du Règlement, pour procéder à un vaste échange de vues
auxquels les gouvernements qui ne sont pas représentés au Conseil d’administration seront
invités à participer, étant entendu que toute décision sera prise par le Conseil d’administration
réuni en session plénière ordinaire, à l’issue de la session du Comité plénier.
2. La 349e session (spéciale) est consacrée à une discussion approfondie aux fins de prendre une
décision en connaissance de cause sur la demande du groupe des travailleurs et de
36 gouvernements visant à ce que la difficulté d’interprétation de la convention (nº 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit
soumise d’urgence à l’appréciation de la Cour internationale de Justice (CIJ) en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT. Le Président demande aux participants
de ne pas se prononcer sur le fond du désaccord concernant la convention no 87 et le droit de
grève, mais de mettre l’accent sur les avantages et les inconvénients qu’il y aurait à soumettre
la difficulté d’interprétation à l’appréciation de la Cour, ce qui est l’objet de la demande à
l’examen.
3. Le Président note que les projets de décision et de résolution suivants, tels qu’amendés, ont
été proposés par un groupe de 44 pays de diverses régions et diffusés par le Bureau 1:
Suite à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection
du droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation
de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution
de l’OIT, le Conseil d’administration décide d’adopter la résolution suivante:
1 Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Barbade, Belgique, Brésil, Bulgarie, Canada, Colombie, Costa Rica,
Chili, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, États-Unis d’Amérique, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie,
Islande, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Malte, Macédoine du Nord, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne,
Portugal, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Slovaquie, Slovénie, Suède, Tchéquie et Ukraine.
GB.349bis/PV/Projet 4
Le Conseil d’administration,
Conscient qu’il existe entre les mandants tripartites de l’Organisation internationale du
Travail (OIT) un désaccord profond et persistant au sujet de l’interprétation de la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce
qui est du droit de grève,
Rappelant que cette difficulté d’interprétation découle d’une divergence de vues entre les
mandants tripartites de l’Organisation quant au point de savoir si le droit de grève est
protégé par la convention no 87,
Notant que les organes de contrôle de l’OIT ont systématiquement observé que le droit
de grève est un corollaire de la liberté syndicale, qui constitue un droit fondamental,
Gravement préoccupé par les incidences que cette difficulté d’interprétation a sur le
fonctionnement de l’OIT et la crédibilité de son système normatif,
Affirmant la nécessité que cette difficulté soit résolue conformément à la Constitution de l’OIT,
Rappelant que, aux termes de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
«[t]outes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la […] Constitution et des
conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution,
seront soumises à l’appréciation de la Cour internationale de Justice»,
Rappelant la décision consensuelle prise par le Conseil d’administration à sa 320e session
(mars 2014), dans laquelle celui-ci se félicitait de «l’exposé clair de son mandat par la
commission d’experts, tel qu’il figure dans le rapport de la commission pour 2014»:
«La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
est un organe indépendant établi par la Conférence internationale du Travail; ses
membres sont nommés par le Conseil d’administration. Elle est constituée de
juristes ayant pour mission d’examiner l’application des conventions et
recommandations de l’OIT dans les États Membres de cette Organisation. La
commission d’experts procède à une analyse impartiale et technique de la façon
dont les conventions ratifiées sont appliquées dans la législation et la pratique par
les États Membres, en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les
différents systèmes juridiques. Ce faisant, elle examine la portée juridique, le
contenu et la signification des dispositions des conventions. Ses avis et
recommandations ont un caractère non contraignant, leur objet étant de guider
l’action des autorités nationales. Ils tirent leur valeur persuasive de la légitimité et
de la rationalité du travail de la commission qui est basé sur son impartialité, son
expérience et son expertise. Le rôle technique de la commission et son autorité
morale sont largement reconnus, en particulier du fait qu’elle poursuit sa tâche de
contrôle depuis plus de quatre-vingt-cinq ans et en raison de sa composition, de son
indépendance et de ses méthodes de travail qui se fondent sur un dialogue continu
avec les gouvernements et prennent en compte les informations fournies par les
organisations d’employeurs et de travailleurs. Cela se reflète dans l’intégration des
avis et recommandations de la commission dans les législations nationales, dans
des instruments internationaux et dans les décisions des tribunaux.»
Notant que, malgré les tentatives menées de longue date, aucun consensus n’a été atteint
par le dialogue tripartite,
Soulignant que l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution établit que tout renvoi devant
la Cour internationale de Justice vise à obtenir l’appréciation de la Cour sur la question ou
difficulté d’interprétation objet du renvoi,
Exprimant le voeu que, compte tenu de la structure tripartite unique de l’OIT, non
seulement les gouvernements des États Membres de l’Organisation, mais aussi les
organisations internationales d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif
général auprès de l’OIT seront invités à participer directement et sur un pied d’égalité à
la procédure écrite et à toute procédure orale devant la Cour,
GB.349bis/PV/Projet 5
Décide, conformément à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
1. de demander à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence, en vertu
de l’article 65, paragraphe 1, de son Statut et de l’article 103 de son Règlement,
un avis consultatif sur la question suivante:
Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la
convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2. Charge le Directeur général:
a) de transmettre la présente résolution à la Cour internationale de Justice,
accompagnée de tout document pouvant servir à élucider la question,
conformément à l’article 65, paragraphe 2, du Statut de la Cour;
b) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice de
permettre que les organisations d’employeurs et de travailleurs ayant un
statut consultatif général auprès de l’OIT participent à la procédure
consultative;
c) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice
d’examiner les mesures possibles pour accélérer la procédure,
conformément à l’article 103 du Règlement de la Cour, de manière à
répondre d’urgence à cette demande;
d) d’informer le Conseil économique et social des Nations Unies de cette
demande, conformément à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord entre les
Nations Unies et l’Organisation internationale du Travail, 1946.
4. La Vice-présidente travailleuse fait observer que la liberté syndicale est au coeur du mandat
centenaire de l’OIT; elle est inscrite dans la Constitution de l’Organisation et réaffirmée dans la
Déclaration de Philadelphie. Elle fait l’objet de dispositions détaillées dans la convention no 87, et
le Comité de la liberté syndicale a été créé en 1951 pour en superviser l’application. Il s’agit d’un
droit essentiel qui, avec le droit de négociation collective, est indispensable à l’exercice de tous
les autres droits. Pourtant, ce droit fondamental est celui qui est le plus fréquemment violé.
5. Le droit de grève est depuis longtemps considéré comme un corollaire indissociable de la
liberté syndicale, tant au sein de l’OIT qu’au-delà. Ce droit doit pouvoir être exercé en dernier
ressort, offrant aux travailleurs syndiqués un moyen de faire contrepoids au pouvoir de leurs
employeurs. Toutefois, à la session de la Conférence internationale du Travail de 2012, le
groupe des employeurs a remis en question la compétence de la Commission d’experts pour
l’application des conventions et recommandations (CEACR) lorsque celle-ci a affirmé que le
droit de grève découlait de la convention no 87 et refuse depuis lors de coopérer avec la
Commission de l’application des normes dès lors que celle-ci examine un cas concernant la
convention no 87 au sujet duquel la commission d’experts a formulé des observations relatives
au droit de grève. C’est ce qui a fait que, pour la première fois depuis sa création en 1926, la
Commission de l’application des normes n’a pas adopté de conclusions. En dépit des nombreux
efforts déployés par le Bureau et les mandants tripartites, le différend n’a pas été réglé, ce qui
a donc remis en question l’existence et la protection d’un droit fondamental, amoindri la
capacité de contrôle de l’OIT et créé une insécurité juridique pour les États Membres ayant
ratifié la convention no 87. Cela a également engendré un climat d’hostilité au sein de l’OIT, ce
qui nuit à son efficacité.
6. Les échanges entre le groupe des travailleurs et les gouvernements au cours des mois
précédents ont montré que l’on reconnaît généralement l’importance de la liberté syndicale,
dont le droit de grève est un corollaire, et qu’il est de fait urgent de résoudre le différend en
suspens dans l’intérêt de tous les mandants. Toutefois, les points de vue divergent quant à la
manière de le faire. Étant donné que toutes les autres tentatives en ce sens ont échoué, le
groupe des travailleurs considère qu’il n’y a pas d’autre solution que de saisir la Cour. Le
GB.349bis/PV/Projet 6
12 juillet 2023, le groupe a donc adressé au Directeur général un courrier dans lequel il a
invoqué l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, qui reconnaît la compétence
exclusive de la Cour pour donner de la Constitution et des conventions de l’OIT une
interprétation faisant autorité, et qui établit sans ambiguïté l’obligation pour l’OIT de
soumettre toute difficulté d’interprétation à l’appréciation de la Cour. Conformément à la
théorie et à la pratique constitutionnelles de l’OIT, le groupe des travailleurs réaffirme son
engagement à accepter la décision de la Cour comme faisant autorité et ayant un caractère
définitif. Le groupe attend de la Cour qu’elle confirme la loi et la pratique au sein de l’OIT,
auquel cas le système de contrôle de l’OIT pourra poursuivre ses travaux, notamment en
fournissant aux États Membres et aux partenaires sociaux au niveau national des orientations
faisant autorité sur la manière d’interpréter et de mettre en oeuvre la convention no 87. Le
groupe des travailleurs ne cherche pas à faire évoluer le statu quo concernant le droit de grève
qui, il en convient, n’est pas un droit absolu.
7. Pour répondre à l’argument du groupe des employeurs et de certains gouvernements selon
lequel la question devrait être résolue par le dialogue social au motif que la saisine de la Cour
constituerait un échec du tripartisme, le groupe des travailleurs soutient que les chances de
parvenir à un consensus sont infimes étant donné que chacun semble camper sur ses
positions, incompatibles avec celles des autres parties, depuis très longtemps. La proposition
du groupe des employeurs consistant à inscrire à l’ordre du jour de la session de la Conférence
de 2024 une question normative concernant un protocole relatif à la convention no 87 est
foncièrement intenable et irrationnelle sur les plans juridique, technique et politique.
Premièrement, il est difficile de dire si juridiquement, il faudrait partir de l’hypothèse que le
droit de grève est couvert par la convention no 87 ou, au contraire, qu’il ne l’est pas.
Deuxièmement, le fait que le groupe des employeurs fasse valoir tout à la fois que la
convention no 87 ne consacre pas le droit de grève et qu’un protocole relatif à la convention
pourrait être élaboré pour encadrer ce droit est contradictoire du point de vue juridique.
Troisièmement, en plaidant pour l’élaboration d’un tel protocole, l’objectif clairement affiché
par le groupe des employeurs est de supprimer les orientations faisant autorité que les
organes de contrôle ont déjà formulées. Cela pourrait créer un système juridique à deux
vitesses et réduire ainsi la sécurité juridique. Quatrièmement, la proposition du groupe des
employeurs aura pour effet de supprimer les droits fondamentaux, que celui-ci proposera
ensuite de négocier à nouveau. Cinquièmement, la proposition du groupe des employeurs
d’inscrire la question controversée à l’ordre du jour de la Conférence de 2024 serait contraire
à toutes les règles et à toutes les procédures existantes de l’OIT visant à préserver la
participation pleine et entière des partenaires tripartites à l’élaboration des normes. Enfin,
comme l’a affirmé le Conseil d’administration à sa 344e session (mars 2022), la seule façon
d’assurer la sécurité juridique est de recourir à des moyens juridiques, comme l’application de
l’article 37 de la Constitution. Cette discussion a aussi montré que la poursuite des travaux
visant à instituer un tribunal interne en vertu de l’article 37, paragraphe 2, ne bénéficiait pas
d’un large soutien au sein du Conseil d’administration.
8. Pour ce qui est de la question ou des questions que la Cour devrait examiner, la Vice-présidente
travailleuse dit que, étant donné que le groupe des employeurs a contesté à la fois l’existence du
droit de grève en vertu de la convention no 87 et l’avis de la commission d’experts selon lequel le
droit de grève découle de la convention no 87, ces deux aspects du différend sont étroitement
liés. En outre, la difficulté d’interprétation remet en cause la validité des orientations données
par les organes de contrôle concernant le principe constitutionnel de la liberté syndicale et le
droit de grève, considéré comme un corollaire indissociable de cette dernière et par conséquent
protégé par la convention no 87. Il suffit donc qu’une seule question soit soumise à la Cour, celle
de savoir si le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est protégé par la
GB.349bis/PV/Projet 7
convention no 87. Le groupe des travailleurs attend du Conseil d’administration qu’il demande à
la Cour d’autoriser la Confédération syndicale internationale (CSI) et l’Organisation internationale
des employeurs (OIE) à participer de manière autonome à la procédure.
9. Quant à la question de savoir si le Conseil d’administration est habilité à se prononcer sur le
renvoi, le groupe des travailleurs considère que cela ne fait aucun doute et que le Conseil
d’administration est même la structure la mieux à même de prendre une telle décision. En
vertu de l’article IX , paragraphe 2, de l’accord de 1946 conclu entre l’Organisation des Nations
Unies et l’OIT, cette dernière est expressément autorisée à demander un avis consultatif à la
Cour internationale de Justice sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de
son activité. En outre, à sa 32e session (1949), la Conférence, par sa résolution concernant les
demandes d’avis consultatif à la Cour internationale de Justice a habilité le Conseil
d’administration à se prononcer sur les demandes de renvoi devant la Cour, et cette délégation
de pouvoirs reste valide. En outre, c’est le Conseil d’administration qui suit la question
depuis 2012.
10. Depuis la soumission du groupe des travailleurs en juillet, la procédure a été inclusive. Le
différend est urgent, puisque l’incertitude juridique au sujet des obligations des
gouvernements en vertu de la convention no 87 jette le doute sur l’étendue de la protection
des travailleurs. Le renvoi devant la Cour par le Conseil d’administration est le seul moyen
d’aller de l’avant de manière pratique, efficace, rapide, décisive, inclusive, juste et raisonnable.
L’argument selon lequel la Conférence aurait un rôle à jouer en approuvant la décision du
Conseil d’administration au motif que celui-ci ne serait pas un organe démocratique est
irrationnel. Cela fait plus d’un siècle que le Conseil d’administration prend des décisions; on ne
peut donc pas considérer comme non démocratiques uniquement celles que l’on veut
contester. Ajouter un niveau supplémentaire dans la prise de décision risquerait d’engendrer
davantage de confusion et de retarder le processus, et le précédent qui en découlerait pourrait
nuire à la reconnaissance de l’autorité et des compétences du Conseil d’administration.
11. Le rôle du Conseil d’administration est d’administrer, et il faut qu’une décision soit prise. Il
serait préférable qu’elle le soit par consensus, mais il sera peut-être nécessaire de recourir à
un vote. En pareil cas, les membres du Conseil d’administration ne sauraient voter contre la
protection d’un droit fondamental des travailleurs et certainement pas contre l’exercice d’une
obligation constitutionnelle. Les futures générations tiendraient les membres du Conseil
d’administration pour responsables de leur décision sur la question. Pour que la justice sociale
l’emporte, il est parfois nécessaire que l’appareil judiciaire fournisse des orientations qui
fassent autorité sur le fondement juridique des activités essentielles que mène l’Organisation.
12. Le groupe des travailleurs appuie le projet de décision amendé tel qu’il a été proposé par le
groupe des 44 pays.
13. La Vice-présidente employeuse déclare être en profond désaccord avec la manière dont la
question a trouvé sa place dans l’ordre du jour du Conseil d’administration; la session spéciale
n’a pas été convoquée conformément aux règles et à la pratique établies en matière de
gouvernance. En outre, les informations et les orientations fournies par le Bureau sont biaisées
en faveur du renvoi de la difficulté d’interprétation devant la Cour, une position qui n’est pas
celle de l’ensemble des mandants. Le Bureau a manqué à son devoir d’impartialité et s’est
entendu avec un groupe de mandants, ce qui n’est pas de bon augure.
14. L’oratrice fait observer que, malgré les propos de la Vice-présidente travailleuse selon lesquels
la saisine de la CIJ est la seule voie possible en l’absence d’une solution par le dialogue, c’est le
groupe des travailleurs qui a constamment refusé un débat de fond sur le champ d’application
et les limites du droit de grève. Le groupe gouvernemental a indiqué, lors de la réunion
GB.349bis/PV/Projet 8
tripartite tenue en février 2015, qu’il était disposé à envisager de débattre de l’exercice du droit
de grève, et le groupe des employeurs n’a eu de cesse de plaider en faveur du dialogue social
à ce sujet. La Conférence internationale du Travail n’a jamais examiné ni adopté de règles
d’application universelle ni de limites définissant le droit de grève. Plusieurs instruments
juridiques internationaux font état de l’existence d’un droit de grève, mais ce droit est défini
par la législation nationale; il n’existe aucune définition ni règle universellement applicable en
la matière.
15. Le groupe des employeurs s’oppose fermement à la saisine de la CIJ. Conformément à l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, cette saisine doit s’inscrire dans le cadre d’une difficulté
d’interprétation. Or, il ne peut pas y avoir de difficulté relative à l’interprétation de la convention
no 87, puisque celle-ci ne fait nullement référence à un «droit de grève» et ne comporte même
pas le terme «grève». Les rédacteurs de la convention ont délibérément exclu ce sujet de son
champ d’application, estimant que ce droit devait être régi par une norme distincte.
16. Le point litigieux porte sur l’interprétation abusive de la convention no 87 faite par la
commission d’experts, qui s’est appuyée sur les termes «activité» et «défendre les intérêts des
travailleurs» figurant aux articles 3 et 10 pour justifier l’élaboration d’un ensemble de règles
excessives sur le champ d’application et les conditions d’exercice du droit de grève. Le degré
de précision et la longueur du catalogue de règles – 44 paragraphes de l’étude d’ensemble
de 2012 sur la convention no 87 – montrent bien qu’il ne s’agit pas d’une interprétation, mais
d’un élargissement du champ d’application de la convention visant à combler une lacune
réglementaire. Or, seule la Conférence est compétente pour combler les lacunes normatives.
17. Non seulement la saisine de la CIJ ne résoudrait pas le différend, mais elle aurait des effets
préjudiciables pour l’OIT et son mécanisme de contrôle. Toute conclusion selon laquelle la
convention no 87 prévoit le droit de grève – alors que ses rédacteurs l’ont expressément exclu
et que de nombreux gouvernements ont reconnu qu’il ne figurait pas dans le texte – ne serait
pas sans conséquences sur la ratification des normes. La confiance dans la fiabilité des
obligations découlant des conventions ratifiées serait rompue, et les mandants pourraient se
montrer réticents à établir de nouvelles normes. Cela créerait un très fâcheux précédent, qui
saperait les efforts déployés pour résoudre les divergences de vues par la voie du dialogue
social et d’un accord mutuel.
18. Un avis consultatif de la CIJ mettrait particulièrement en relief les incompatibilités entre la
législation et la pratique des différents pays, d’une part, et les règles excessives émanant de la
commission d’experts, d’autre part. À titre d’exemple, la commission d’experts a estimé que les
grèves politiques, les grèves de solidarité et les grèves dans la fonction publique doivent être
autorisées, et les services essentiels définis de manière extrêmement restrictive. Les pays dont
les réglementations et la pratique interdisent certains types de grève subiront une forte
pression en faveur d’une mise en conformité de leur législation nationale ou même de leur
droit constitutionnel, avec les «interprétations» faites par la commission d’experts, faute de
quoi une plainte à leur encontre risquerait d’être déposée devant l’un des organes de contrôle.
En outre, une saisine de la CIJ pourrait dissuader les pays n’ayant pas encore ratifié la
convention de le faire.
19. Un renvoi du différend devant la Cour enverrait aussi un message très négatif au public quant
à la capacité de l’OIT de régler les divergences sur des questions de fond importantes, en
donnant à penser que les questions délicates sont tranchées par la voie contentieuse plutôt
que par celle du consensus. Quelle que soit la teneur de l’avis consultatif, le groupe des
employeurs n’acceptera pas les nombreux avis détaillés et excessifs de la commission d’experts
sur le droit de grève, et le problème restera donc entier.
GB.349bis/PV/Projet 9
20. Par ailleurs, certaines questions de procédure subsistent. Le groupe des employeurs estime
que la Conférence joue un rôle crucial dans le processus de gouvernance en garantissant la
participation de tous les États parties à une convention donnée. La résolution de 1949 autorise
le Conseil d’administration à demander des avis consultatifs, mais moins d’un tiers des
187 États Membres que compte l’Organisation sont parties à cette décision, qui n’a donc
aucune légitimité démocratique et doit être réexaminée. Le groupe des employeurs exprime
en outre sa préoccupation face à un éventuel manque d’impartialité du Département des
normes internationales du travail, sachant que le différend découle d’un rapport de la
commission d’experts auquel ce département a grandement contribué.
21. Le groupe des employeurs est convaincu que la saisine de la Cour en vue d’obtenir un avis
consultatif ne peut pas résoudre la difficulté d’interprétation, quelles que soient les questions
qui lui seront soumises. Le droit de grève est un sujet complexe et multidimensionnel, qui ne
peut être dissocié des systèmes et pratiques de relations professionnelles très hétérogènes et
profondément ancrées dans l’ensemble des États Membres de l’OIT. Toute décision relative à
des règles internationales sur le droit de grève devra tenir compte de ces différences, ce que
seuls les mandants tripartites seront en mesure de faire dans le cadre des procédures établies
de l’OIT, lors de la Conférence.
22. En outre, les avis consultatifs de la Cour ne sont pas contraignants juridiquement, et l’on voit
très mal comment l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution pourrait leur conférer un tel
caractère pour l’OIT et ses mandants. Des doutes à cet égard ont déjà été exprimés par le
Bureau lui-même, ainsi que par un ancien président de la Cour, doutes partagés par de
nombreux gouvernements. Si le groupe des employeurs respecte le rôle crucial de la CIJ dans
le règlement des différends entre pays et le pouvoir de persuasion de ses avis consultatifs, il
n’acceptera pas un avis consultatif qui reconnaîtrait le droit de grève au titre de la convention
no 87 et validerait les interprétations de la commission d’experts, celles-ci n’ayant jamais été
examinées ni approuvées dans le cadre d’un processus normatif tripartite. Le groupe des
employeurs maintiendra son refus d’adopter des conclusions sur le droit de grève au sein de
la Commission de l’application des normes et d’autres organes de contrôle.
23. Imposer une saisine de la CIJ par un vote quand il existe de telles divergences de vues risque
de poser de sérieux problèmes. Dans sa note sur l’effet juridique contraignant des avis
consultatifs de la Cour, le Bureau a indiqué que l’OIT devait être «prête à suivre ou à être guidée
par l’avis consultatif de la Cour», autrement «elle ne doit pas le demander». La saisine de la CIJ
n’étant pas pour de nombreux mandants le moyen approprié de régler le différend, il faudrait
y renoncer.
24. Un dialogue social approfondi et inclusif lors de la Conférence est le seul moyen de parvenir à
une solution durable et juridiquement valable. Dans le passé, l’adoption d’une
recommandation, d’une convention, d’un protocole ou d’une résolution était le seul moyen
reconnu d’élaborer des règles internationales en matière de travail qui soient claires et
transparentes, sur la base d’une participation et d’un soutien tripartites, et qui respectent la
souveraineté nationale des États Membres en leur laissant le choix de les ratifier ou non. En
1992, la Colombie, soutenue par l’Allemagne, le Maroc et le Venezuela, a proposé une action
normative sur le droit de grève, mais de nombreux autres gouvernements, ainsi que certaines
organisations de travailleurs, se sont prononcés en faveur de solutions reposant sur le
dialogue social tripartite au sujet du droit de grève.
25. Le recours à l’article 37 n’est censé intervenir qu’en dernier ressort, lorsque toute les voies du
dialogue social tripartite ont été épuisées, ce qui n’est pas encore le cas. Une discussion à la
Conférence, qui tiendrait compte de certains points de vue émis par la commission d’experts,
GB.349bis/PV/Projet 10
permettrait de dégager un solide consensus tripartite sur des règles universellement
applicables concernant le droit de grève, ses principes de base et ses limites. Procéder ainsi
serait le meilleur moyen d’avancer et d’apporter une sécurité juridique qu’il ne serait plus
possible de contester. Le Conseil d’administration ne saurait se substituer à la Conférence, sa
représentation étant limitée. L’oratrice invite donc instamment tous les mandants à trouver un
consensus sur le renvoi de la question à la Conférence internationale du Travail, qui est
l’organe décisionnel suprême de l’OIT, et non à la Cour.
26. S’exprimant au nom du groupe de 44 pays, un représentant du gouvernement de la
Colombie relève avec satisfaction le travail accompli par le Bureau, sur le plan tant quantitatif
que qualitatif, dans le but de faciliter cette importante discussion et exprime l’espoir que la
proposition avancée ouvrira la voie à un règlement de la difficulté d’interprétation. Cette
difficulté d’interprétation relevant de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, le
projet de décision amendé prévoit que le Conseil d’administration demande à la CIJ de rendre
d’urgence un avis consultatif sur la question.
27. S’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres, une
représentante du gouvernement de l’Espagne déclare que la Macédoine du Nord, le
Monténégro, la Géorgie, la Norvège et l’Islande s’associent à sa déclaration. Elle rappelle que,
le 14 juillet 2023, l’UE et ses États membres ont adressé une lettre au Directeur général dans
laquelle ils demandaient l’inscription à l’ordre du jour du Conseil d’administration, compte tenu
de son importance fondamentale, de la question concernant le renvoi devant la Cour d’une
difficulté relative à l’interprétation de la convention no 87 au sujet du droit de grève, et
soulignaient combien il était devenu urgent, après plus de dix ans vainement passés à essayer
de trouver une solution, d’assurer la clarté juridique. L’UE et ses États membres considèrent
que la commission d’experts est un organe indépendant chargé par la Conférence d’analyser
l’application des conventions par les États Membres et que ses avis et recommandations ne
sont pas contraignants. Ils conviennent que les avis consultatifs de la CIJ sont des exposés de
droit sur des questions juridiques soumises par des organisations autorisées à le faire et que,
dans le cas de l’OIT, ces avis consultatifs sont contraignants en application de l’article 37,
paragraphe 1, de sa Constitution. Ils sont favorables à la saisine de la CIJ aux fins du règlement
de la difficulté d’interprétation pour assurer la sécurité juridique. Ce faisant, ils souhaitent aussi
maintenir le pouvoir de la commission d’experts, tel qu’il en a été décidé par le Conseil
d’administration en 2014, et préserver le système de contrôle. L’UE et ses États membres
remercient le Bureau pour tout l’appui qu’il a apporté à la préparation de la session spéciale et
sont disposés à décider de l’adoption d’une résolution sur la saisine de la CIJ.
28. S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), une
représentante du gouvernement de l’Indonésie déclare que son groupe préférerait que le
différend soit réglé en recourant au mécanisme interne prévu par l’OIT, plutôt que par une
saisine de la CIJ. Toutefois, cette position ne doit pas être interprétée comme un déni du droit
fondamental de faire grève. Il ne faut se prévaloir des dispositions de la Constitution de l’OIT
autorisant la saisine de la CIJ en cas d’interprétations divergentes d’une convention qu’en
dernier recours. La difficulté d’interprétation devrait être résolue par des voies internes si l’on
veut parvenir à une solution globale, acceptable et inclusive. L’ASEAN ne doute pas de la
capacité de la Conférence de parvenir à un consensus interne et, ce faisant, de trouver une
solution convaincante qui renforcera le système de contrôle de l’OIT.
29. L’ASEAN propose de convenir d’un délai pendant lequel toutes les parties prenantes s’efforceront
de trouver un terrain d’entente le plus large possible dans le cadre de réunions tripartites. La CIJ
ne devrait être saisie que si aucune solution n’est trouvée à l’issue de ce délai. Les résultats des
deux sessions spéciales devraient être présentés à la Conférence internationale du Travail en vue
GB.349bis/PV/Projet 11
d’un examen plus approfondi et d’une décision. La situation a beaucoup changé depuis
l’adoption par la Conférence, il y soixante-quatorze ans, de la résolution autorisant le Conseil
d’administration à demander un avis consultatif à la CIJ. En sa qualité d’organe suprême et le
plus représentatif de la nature tripartite de l’OIT, la Conférence constitue le meilleur cadre
possible pour mener un débat de fond, exhaustif et approfondi, sur l’interprétation de la
convention, dans un esprit de démocratisation et de représentation équitable.
30. S’exprimant au nom du groupe des États arabes, un représentant du gouvernement du
Qatar affirme que la tenue de deux sessions spéciales du Conseil d’administration consacrées
à l’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève reflète l’importance de la
question et la volonté des mandants tripartites de l’OIT de régler un différend de longue date.
Le dialogue au sein de l’OIT est le meilleur moyen d’assurer la sécurité juridique pour toute
difficulté d’interprétation relative à des conventions de l’OIT, aussi convient-il d’épuiser toutes
les voies internes de règlement avant de saisir la Cour. Il est encore possible de parvenir à un
consensus par le dialogue social lors de la Conférence internationale du Travail. Il faudrait
donner à tous les États Membres le temps nécessaire pour examiner les autres solutions
envisageables, dont l’action normative devant être discutée le lendemain. En tout état de
cause, c’est la Conférence qui devrait avoir le dernier mot sur la question.
31. Un représentant du gouvernement de la Bulgarie déclare qu’aucune solution consensuelle
n’ayant été trouvée à la difficulté persistante concernant l’interprétation de la convention
fondamentale no 87 au sujet du droit de grève, la CIJ devrait être saisie de la question. Ce
différend de longue date nuit au fonctionnement de l’OIT dans son ensemble, en particulier à
celui de ses organes de contrôle, et à la crédibilité de son corpus normatif. L’adoption d’un
protocole à la convention n’apporterait pas la sécurité juridique nécessaire, car il n’aurait d’effet
juridique que pour les États qui l’auraient ratifié, ce qui risque de créer un système à deux vitesses
et de renforcer l’insécurité juridique. Il faut garder un esprit constructif, l’application effective des
normes internationales du travail étant l’objectif commun de tous les mandants.
32. Un représentant du gouvernement de l’Égypte déclare qu’il importe d’assurer la sécurité
juridique en ce qui concerne l’interprétation de la convention no 87 à propos du droit de grève,
que la priorité revient au dialogue tripartite au sein de l’OIT et que la saisine de la CIJ ne devrait
intervenir qu’en dernier ressort, après que tous les autres moyens auront été épuisés et que
l’ensemble des points de vue exprimés pendant les deux sessions spéciales du Conseil
d’administration auront été examinés. Il faut laisser suffisamment de temps à tous les
mandants pour qu’ils étudient la proposition, tout en poursuivant les consultations sur la
formulation de la demande de renvoi et de la question ou des questions qu’elle devrait
contenir, en vue de la soumettre à la Conférence pour adoption. L’approbation de cette
requête par la Conférence garantirait la participation de tous les pays ayant ratifié la
convention à la prise de décision. Le mandat accordé au Conseil d’administration par la
résolution de 1949 visait des questions qui ne pouvaient pas attendre la session suivante de la
Conférence. Le différend en cours durant depuis plus de douze ans, six mois supplémentaires
ne devraient pas être un obstacle.
33. Un représentant du gouvernement des Pays-Bas déclare que son pays, membre fondateur de
l’OIT, est partisan de la recherche de solutions par la voie du dialogue social. Toutefois, aucune
solution n’ayant pu être trouvée par cette voie en l’espèce, le moment est venu de renvoyer la
question devant la CIJ pour obtenir la clarté juridique voulue. Il importe d’éviter que le différend
qui persiste nuise à la crédibilité de l’OIT, à ses fonctions de contrôle et à sa réputation en tant
qu’institution normative. L’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT habilite
l’Organisation à soumettre à l’appréciation de la Cour toutes difficultés relatives à l’interprétation
d’une convention, et c’est précisément ce qu’exige la situation. Tout protocole que la Conférence
GB.349bis/PV/Projet 12
pourrait adopter sur la question du droit de grève ne s’appliquerait qu’aux États Membres qui le
ratifieraient et n’apporterait donc pas la sécurité juridique ni l’universalité requises.
34. Une représentante du gouvernement de la Norvège dit que la position de son pays, qui n’a
pas changé depuis 2014, est que la difficulté d’interprétation doit être renvoyée devant la CIJ
et qu’aucune autre mesure n’est nécessaire. Des principes sur le droit de grève ont été
progressivement définis par le Comité de la liberté syndicale et la commission d’experts, et
tous les organes de contrôle de l’OIT ont agi dans le respect de leur mandat. Pour promouvoir
et défendre leurs intérêts, les travailleurs doivent avoir un moyen de pression qui leur
permette de faire aboutir leurs revendications. Il est naturel de considérer que le droit de grève
découle de la convention no 87. Par ailleurs, l’OIT et ses organes de contrôle ne fonctionnent
pas en vase clos: plusieurs instruments internationaux traitent du droit de grève, offrant un
cadre juridique plus large dans lequel interpréter la convention. Il serait paradoxal que
l’institution des Nations Unies spécialisée dans les questions de travail ne reconnaisse pas ce
droit dans ses propres conventions.
35. Un représentant du gouvernement du Panama fait remarquer qu’un avis de la CIJ aura des
effets sur l’application d’autres conventions, mais aussi sur le système de contrôle dans son
ensemble. Il faut prendre garde à ne pas créer de précédent en recourant à la CIJ sans avoir
épuisé les autres moyens d’action disponibles. La liberté syndicale repose sur trois droits
indissociables: le droit d’organisation, le droit de négociation collective et le droit de grève.
Dans le cadre de la négociation syndicale, la grève est un outil puissant pour régler les conflits,
mais elle doit être utilisée de manière réfléchie et responsable. Si le seul moyen d’aller de
l’avant est de saisir la CIJ, le système de contrôle de l’application des normes doit parallèlement
continuer de jouer son rôle.
36. Un représentant du gouvernement du Paraguay dit que le droit de grève ou de participation
à un arrêt du travail est expressément reconnu par la Constitution de son pays aux travailleurs
du secteur public comme du secteur privé ainsi qu’aux employeurs; par contre, les membres
des forces armées et de la police et les travailleurs des services publics essentiels sont exclus
du champ d’application de ce droit. Il importe que tous les différends pouvant survenir au sein
de l’Organisation se règlent par la voie du dialogue social. L’orateur demande donc
instamment au Conseil d’administration de poursuivre les efforts déployés pour promouvoir
la coopération dans le cadre d’initiatives tripartites.
37. Un représentant du gouvernement de l’Afrique du Sud affirme que son pays est mû par la
volonté de lever l’ambiguïté juridique relative à l’interprétation de la convention no 87 pour ce
qui est du droit de grève, et par son engagement inébranlable en faveur du renforcement du
système de contrôle de l’OIT. Le renvoi de la question devant la CIJ permettra d’obtenir la
sécurité juridique voulue, ce qui donnera au système de contrôle les moyens de s’acquitter de
ses fonctions sans que son autorité ne puisse être remise en cause. Le droit de grève est
indissociable de la notion plus large de liberté syndicale.
38. Une représentante du gouvernement de la Suisse dit que son pays respecte la demande
formulée par le groupe des travailleurs, mais regrette que le document du Bureau ne présente
aucune analyse critique des questions soumises par les travailleurs, d’autant plus que celles-ci
sont les mêmes que celles qui avaient été soulevées par le Bureau en 2014 dans le
document GB322/INS/5. Par conséquent, la Suisse ne saurait accepter l’argument selon lequel
une analyse de ces questions porterait atteinte à la neutralité et à l’impartialité du Bureau. Pour
permettre aux mandants de prendre une décision éclairée, il est indispensable que toutes les
informations nécessaires leur soient transmises de manière transparente, objective et complète.
Ni le libellé ni le fond des questions devant être soumises à l’appréciation de la Cour n’ont été
GB.349bis/PV/Projet 13
discutés au Conseil d’administration. Au nom du tripartisme et pour préserver la cohésion du
Conseil d’administration, ces questions doivent être examinées de manière inclusive.
39. La première question proposée n’est pas suffisamment précise et ne reflète pas le problème
en jeu, car une décision concernant le fait de savoir si le droit de grève est protégé ou non par
la convention no 87 ne permettra pas de clarifier les modalités d’exercice de ce droit. S’il est
reconnu que la convention no 87 protège le droit de grève sans pour autant énoncer de règles
en la matière, la question de savoir à qui il revient de fixer les modalités d’exercice de ce droit
se posera, et il ne s’agira alors plus d’une question d’interprétation de la convention no 87, mais
d’une question d’interprétation de la Constitution de l’OIT. Il faudrait plutôt demander à la Cour
s’il revient aux législateurs tripartites, aux organes de contrôle, aux juges de la CIJ ou au juge
d’un tribunal interne de déterminer les modalités d’exercice ainsi que les limites éventuelles
du droit de grève de manière contraignante, alors que ces éléments ne sont pas traités dans
le corpus législatif existant. La deuxième question proposée ne constitue pas une question
relative à l’interprétation d’une convention au sens de l’article 37 de la Constitution.
40. Si les avis de la CIJ sont juridiquement contraignants, tous les mandants tripartites devraient
participer à la discussion et à la décision. Ainsi, une fois que le contenu de la question à
soumettre à la Cour aura été convenu, la Conférence internationale du Travail devrait avoir la
possibilité de décider en dernier ressort de saisir la CIJ ou non.
41. Une représentante du gouvernement de la Tunisie souligne l’importance qu’il y a à permettre
à tous les États Membres, en particulier ceux qui ont ratifié la convention no 87, d’exprimer leur
point de vue sur la question à l’examen. Le Conseil d’administration devrait se demander si toutes
les voies privilégiant le dialogue ont véritablement été épuisées et s’il est judicieux pour l’OIT de
pousser à la saisine de la CIJ en dépit des divergences apparentes et de leurs conséquences
éventuelles en termes d’acceptation et d’appropriation de la décision de la Cour.
42. Le dialogue est un moyen efficace de parvenir à des décisions consensuelles, qui ont plus de
chances d’être acceptées et appliquées. La question devrait donc être inscrite à l’ordre du jour
de la session suivante de la Conférence internationale du Travail, ce qui permettrait de
poursuivre les discussions dans un cadre propice à l’inclusivité. La Conférence doit pouvoir se
prononcer sur toute décision du Conseil d’administration. La résolution adoptée par la
Conférence en 1949 autorise certes le Conseil d’administration à demander l’avis de la CIJ, mais
elle n’interdit pas à la Conférence de prendre des décisions quant à l’opportunité de saisir la
Cour. Le rappel de ce fait ne vise pas à remettre en cause la légitimité et le rôle du Conseil
d’administration; il s’agit simplement de souligner que certaines questions, du fait de leur
importance, méritent d’être examinées par l’ensemble des États Membres. Il est indispensable
de garder à l’esprit qu’il n’est pas du ressort de la CIJ de se prononcer sur des questions
dépassant le cadre des dispositions de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
43. Un représentant du gouvernement de la Türkiye se félicite de la décision consistant à
examiner la question en comité plénier. La Türkiye reconnaît l’importance de préserver le droit
de grève en tant que droit fondamental au travail, mais émet des réserves quant à
l’interprétation qui a été faite de la convention no 87 à cet égard. Le dialogue social a fait la
preuve de son efficacité pour ce qui est de régler les différends; il permet de parvenir à des
solutions efficaces et durables avec le concours de toutes les parties. La Türkiye est donc
favorable à l’idée de résoudre la difficulté d’interprétation dans le cadre des organes et
mécanismes de l’OIT existants au lieu de saisir la CIJ, option qui risquerait d’affaiblir les
mécanismes tripartites de l’Organisation.
44. Une représentante du gouvernement du Zimbabwe prend note de la demande légitime du
groupe des travailleurs et dit que son pays souhaite que la sécurité juridique soit assurée sur
GB.349bis/PV/Projet 14
la question du droit de grève car, depuis 2012, le différend qui s’y rapporte nuit au bon
fonctionnement du système de contrôle de l’OIT. Le Zimbabwe attend avec intérêt de connaître
l’avis consultatif de la CIJ, d’autant que, depuis des années, le système de contrôle manque
d’objectivité dans l’analyse des cas qui lui sont soumis.
45. Les conseils juridiques du Bureau sont bienvenus. Toutefois, la délégation de pouvoir accordée
au Conseil d’administration par la résolution de 1949 n’est plus d’actualité, et l’Organisation et
ses Membres, de même que la composition du Conseil d’administration, ont changé depuis
lors. Le pouvoir de décision devrait donc revenir à la Conférence, puisque c’est elle qui l’avait
délégué au Conseil. Par ailleurs, la composition du Conseil d’administration n’est pas
représentative de la composition de l’OIT, étant donné que les pays ayant l’importance
industrielle la plus considérable sont des membres permanents du Conseil d’administration. Il
est préoccupant que certains membres du Conseil d’administration qui n’ont pas ratifié la
convention no 87 aient le droit de se prononcer sur la question à l’examen, alors que d’autres
pays ayant ratifié la convention ne sont pas autorisés à voter, parce qu’ils ne sont pas membres
du Conseil d’administration. C’est donc à la Conférence, au sein de laquelle tous les États
Membres de l’OIT sont représentés, que devrait revenir la décision finale.
46. Une représentante du gouvernement de l’Algérie déclare que la tenue d’un dialogue
tripartite sur une question aussi importante contribuera à prévenir les crises institutionnelles
et à assurer la sécurité juridique au sein de l’OIT. La question soumise à la CIJ devrait
essentiellement être celle de savoir si le droit de grève découle ou non de la convention no 87;
en effet, élargir le champ de la saisine ne ferait qu’accentuer les divergences de vues et ne
refléterait pas l’essence de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT. Toute décision
relative à la saisine de la CIJ concernant l’interprétation d’une convention fondamentale doit
être approuvée par la Conférence internationale du Travail, car c’est le seul moyen d’inclure
tous les États Membres dans la prise de décision et de garantir que les positions de l’ensemble
des parties sont prises en considération. L’approbation par la Conférence renforcera la
crédibilité de la saisine et rétablira la confiance entre les mandants.
47. Une représentante du gouvernement de l’Australie dit que l’on ne peut laisser persister
l’insécurité causée par le différend en matière d’interprétation et que saisir la CIJ est le moyen
approprié pour obtenir la sécurité juridique voulue. L’Australie n’est pas favorable à ce qu’une
action normative soit menée sur le droit de grève avant que le différend ait été réglé.
48. Un représentant du gouvernement du Bangladesh dit que, selon la Constitution de l’OIT,
l’action normative relève du mandat de la Conférence internationale du Travail. La délégation de
pouvoir accordée au Conseil d’administration par la résolution de 1949 à l’égard des questions
relatives aux normes internationales du travail n’est pas permanente, et la question de savoir si
le terme «activités» utilisé dans la résolution recouvre l’action normative directe ou indirecte
soulève de sérieux doutes. La compétence de la Conférence doit être pleine et entière; le Conseil
d’administration ne saurait se prévaloir d’une compétence exclusive à cet égard. La saisine de la
CIJ est une mesure de dernier recours; il ne faut pas y recourir à ce stade. La compétence de la
Conférence en matière normative, inhérente à son mandat, ne doit pas être diluée. La résolution
de 1949 n’exige pas que la Conférence approuve les décisions du Conseil d’administration
concernant une éventuelle saisine de la CIJ, puisque c’est la Conférence elle-même qui a habilité
le Conseil d’administration à prendre de telles décisions. Les voies internes de règlement des
différends de l’OIT n’ont pas encore été épuisées; il faudra donc faire appel à l’autorité suprême
de la Conférence. Le droit de grève n’est pas expressément mentionné dans les conventions
nos 87 et 98. Or, les obligations juridiques n’existent que si elles sont expressément énoncées
comme telles dans la législation ou dans une convention.
GB.349bis/PV/Projet 15
49. Un représentant du gouvernement de la Barbade indique que, lors des consultations tenues
plus tôt dans l’année, son gouvernement s’est joint à l’appel lancé en faveur de l’application de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT, force étant de constater que le dialogue social ne mène
pas toujours au consensus. Il est inacceptable que les décisions de l’OIT sur des questions
relatives aux conventions de l’Organisation et sur un sujet aussi important que le droit de grève
ne fassent pas autorité auprès de ses États Membres. La fonction normative de l’Organisation
est affaiblie par cet écueil. L’incertitude n’a que trop duré; la question doit à présent être
renvoyée devant la CIJ.
50. Une représentante du gouvernement du Cameroun déclare que le tripartisme, principe
fondamental de l’OIT, reste le meilleur moyen de résoudre le différend et de rétablir la sécurité
juridique concernant l’interprétation de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève.
Le Cameroun est convaincu qu’il est encore possible de résoudre la difficulté d’interprétation
en interne. La CIJ ne devrait être saisie qu’en dernier recours, une fois que toutes les voies de
dialogue tripartite interne auront été épuisées; il serait prématuré de la solliciter à ce stade.
Au nom de la paix, de la justice sociale et de la démocratie, tous les États Membres – en
particulier ceux qui ont ratifié la convention no 87 – devraient être en mesure de participer aux
discussions et à la prise de décision quant à une éventuelle saisine de la CIJ. La question devrait
par conséquent être inscrite à l’ordre du jour de la session suivante de la Conférence
internationale du travail, à laquelle devrait revenir la décision finale.
51. Une représentante du gouvernement du Canada exprime sa préoccupation quant aux
conséquences négatives de la difficulté d’interprétation sur le fonctionnement du système
de contrôle de l’OIT. Il faudrait que le champ d’application de la convention no 87 soit
clairement défini afin que les gouvernements qui ont ratifié cette convention ou envisagent
de le faire puissent apprécier la nature et l’étendue des obligations découlant de la
ratification et adapter leur législation et leur pratique en conséquence. Le désaccord doit
donc être réglé sans plus tarder.
52. Le Canada, fervent défenseur du dialogue social, a oeuvré dans le passé en faveur d’un
règlement tripartite et négocié du différend. Toutefois, après un examen attentif de la
situation, il estime à présent que toutes les possibilités de dialogue social ont été épuisées,
étant donné que les négociations sont dans une impasse depuis plus de dix ans et que les
positions des mandants de l’OIT sur la question sont diamétralement opposées. Par
conséquent, le Canada est favorable à la saisine de la CIJ, en tant que mesure exceptionnelle
et de dernier recours. Un avis consultatif faisant autorité permettra aux mandants d’aller de
l’avant, une fois la clarté juridique voulue dûment établie sur la question.
53. Un représentant du gouvernement du Chili insiste sur l’attachement de son pays à la
fonction normative de l’OIT. Le droit de grève est reconnu par la législation et la jurisprudence
chiliennes comme faisant partie intégrante de la liberté syndicale au sens de la convention
no 87. Par conséquent, le Chili estime que l’OIT devrait demander à la CIJ de rendre d’urgence
un avis consultatif sur la question de la protection du droit de grève dans le contexte de la
convention no 87.
54. Un représentant du gouvernement de la Chine affirme que, quelles que soient les
recommandations ou conclusions qu’adoptera le Conseil d’administration à sa session en
cours, elles devront être soumises à la Conférence internationale du Travail pour décision
finale. La Chine reste convaincue que les différends devraient être réglés par la consultation et
le dialogue. La saisine de la CIJ n’est pas la seule option dont dispose l’OIT, et encore moins la
meilleure. L’Organisation doit continuer à améliorer ses mécanismes internes dans un esprit
GB.349bis/PV/Projet 16
de tripartisme et de dialogue social inclusif afin de parvenir à des solutions réalisables et
nuancées qui répondent aux préoccupations de l’ensemble des parties.
55. Un représentant du gouvernement de la Colombie, saluant la décision de permettre à tous
les gouvernements d’exprimer leur point de vue sur la question, déclare que la saisine de la CIJ
serait la voie à suivre. La question a été traitée conformément aux normes et règlements qui
guident le Conseil d’administration, lequel est donc en droit de prendre une décision, et le
Bureau a agi de manière impartiale en appliquant ce cadre normatif. Ni le mandat du Conseil
d’administration ni celui de la commission d’experts ne doivent être remis en question, et la
légitimité des organes de contrôle de l’OIT ne doit pas être compromise, car tous les mandants
tirent avantage de leurs décisions, considérations et recommandations. Leur rôle est crucial
pour la promotion du tripartisme, qui contribue à la réussite du dialogue social et constitue un
exemple pour les autres organisations du système des Nations Unies. Le gouvernement de la
Colombie ne doute pas que la CIJ sera en mesure de résoudre le différend et que, une fois la
décision rendue, l’Organisation trouvera un moyen de régler la question à la satisfaction de
toutes les parties et dans le respect des normes internationales du travail. Si nécessaire,
l’Organisation pourrait alors explorer d’autres voies.
56. Un représentant du gouvernement de l’Eswatini signale que le droit de grève n’a jamais été
remis en cause au niveau national en Eswatini. Il reconnaît toutefois que le différend
international de longue date a d’importantes répercussions sur les travaux des organes de
contrôle de l’OIT. Le caractère d’urgence que revêtent les efforts actuellement déployés pour
régler la difficulté d’interprétation va à l’encontre des idéaux de dialogue social et de
consultation de l’OIT. En outre, la prise de décision au sein du Conseil d’administration exclut
nombre d’États Membres qui seraient directement concernés par le résultat de la discussion,
en particulier ceux d’entre eux qui ont ratifié la convention no 87. Le gouvernement de
l’Eswatini prie instamment le Conseil d’administration d’examiner toutes les options
disponibles, y compris les consultations tripartites, et de reporter sa décision à mars 2024.
57. Une représentante du gouvernement de l’Inde estime que les discussions en cours ne se
limitent pas à la liberté syndicale et pourraient créer un précédent pour l’avenir. Elle rappelle
que la commission d’experts a interprété la convention no 87 comme incluant le droit de grève.
En outre, sur le plan de la procédure, le différend relève clairement de la compétence de la
Conférence internationale du Travail, car il faut faire en sorte que ceux qui ne sont pas
membres du Conseil d’administration ne soient pas exclus d’une prise de décision qui les
concernent. Le gouvernement de l’Inde appelle donc à une discussion au sein de la Conférence
internationale du Travail; le différend ne devrait être soumis à la CIJ par la Conférence que s’il
n’est pas résolu. L’OIT doit respecter le principe de la prise de décision démocratique.
58. Un représentant du gouvernement du Mexique rappelle que son gouvernement a affirmé
à maintes reprises la nécessité de garantir la sécurité juridique et de renforcer le système de
contrôle de l’OIT. Il est important d’appliquer comme il convient les dispositions de la
Constitution de l’OIT, en particulier l’article 37, paragraphe 1. Le fait de soumettre la difficulté
d’interprétation à la CIJ offrirait une sécurité juridique et renforcerait les droits de l’homme, les
droits des travailleurs et les principes du tripartisme et du dialogue social. Le résultat fournirait
une base solide pour la mise en oeuvre de la convention no 87 et protégerait les droits des
travailleurs. Le gouvernement du Mexique soutient donc les amendements au projet de
décision proposés par le représentant du gouvernement de la Colombie, au nom d’un groupe
transrégional de pays.
59. Une représentante du gouvernement de la Namibie rappelle que le différend persistant sur
le droit de grève et l’interprétation de la convention no 87 a porté atteinte au mandat normatif
GB.349bis/PV/Projet 17
de l’OIT et à la crédibilité de son système de contrôle. Le dialogue social n’a pas permis de
trouver une solution. Il est clair que la discussion en cours constitue une «question ou une
difficulté» au sens de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT et que, de ce fait,
la CIJ devrait être saisie sans délai. Une telle décision constituerait un acte de bonne foi et
apporterait une sécurité juridique au système de contrôle.
60. Un représentant du gouvernement du Niger déclare qu’il est déplorable que ce différend de
longue date n’ait pas été résolu par la voie du dialogue social et qu’il ait pu peser sur le
fonctionnement du système de contrôle de l’OIT. L’orateur est favorable à la saisine de la CIJ,
car l’avis consultatif qui en résulterait serait reconnu comme définitif et contraignant par
toutes les parties. Toutefois, compte tenu de l’importance du sujet, la décision de saisir la CIJ
devrait être prise par la Conférence internationale du Travail en 2024, indépendamment de la
délégation de pouvoir qui a été accordée au Conseil d’administration en 1949. Tous les
mandants devraient accepter de mettre en oeuvre l’avis de la CIJ dans le respect mutuel.
L’orateur salue le soutien que le Bureau du conseiller juridique a apporté aux mandants dans
la préparation de la discussion en cours. Compte tenu des différentes approches de
l’application de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, il demande au Directeur
général d’élaborer un projet de règles de procédure pour l’application de cette disposition et
d’autres de nature similaire. Le gouvernement du Niger souscrit au projet de résolution, mais
préférerait que les paragraphes 2 et 3 soient supprimés.
61. Un représentant du gouvernement du Nigéria explique que le fait d’entreprendre une grève
sans suivre les procédures convenues et sans recourir au règlement des différends a des
incidences négatives sur l’économie et sur les entreprises concernées. Dans son pays, les
questions d’interprétation et d’ambiguïté de la législation sont soumises à un organe
indépendant. Ainsi, la disposition contenue dans l’article 37 de la Constitution de l’OIT, qui
prévoit de soumettre la difficulté d’interprétation à l’appréciation de la CIJ, pourrait servir à
résoudre le différend. Il est temps pour le Conseil d’administration de déterminer quel organe
de gouvernance de l’OIT devrait prendre la décision d’une telle saisine et d’adopter une version
actualisée du projet de résolution initialement présenté en 2014.
62. Un représentant du gouvernement du Pakistan souligne l’importance du tripartisme et du
dialogue au sein de l’OIT. Il demande si une norme internationale reconnue par un instrument
juridique, comme le droit de grève dans le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, devrait être reconnue par d’autres sans plus ample examen. En tant que
norme relative aux droits de l’homme, le droit de grève devrait être considéré comme une
norme du travail. En ce qui concerne la mise en oeuvre et la supervision, l’orateur relève que le
système de contrôle guide l’application de ces normes, mais que les observations formulées
par les organes de contrôle sont par nature consultatives et ne sauraient créer de nouvelles
obligations. Le gouvernement du Pakistan espère que le différend pourra être résolu par la
négociation et le dialogue.
63. Un représentant du gouvernement de la Fédération de Russie déclare que le recours à des
mesures externes pour résoudre des différends internes ne devrait être envisagé qu’en dernier
ressort et que les mécanismes de dialogue social interne n’ont pas encore été épuisés dans le
cas d’espèce. Le différend n’a pas été examiné par la Conférence internationale du Travail et,
de ce fait, une majorité d’États Membres n’a pas pu participer aux discussions sur la question.
Le Conseil d’administration a effectivement été autorisé à demander des avis consultatifs à
la CIJ, mais il est vrai aussi que la composition et les procédures de prise de décision de l’OIT
ont considérablement évolué et que la résolution de 1949 ne fournit donc pas
automatiquement les motifs d’une telle action. De plus, aucun délai n’a été fixé en ce qui
concerne le dialogue, et le différend dépasse le cadre de l’interprétation pour englober des
GB.349bis/PV/Projet 18
aspects institutionnels du fonctionnement de l’OIT. Enfin, l’orateur conteste l’idée selon
laquelle un avis consultatif de la CIJ garantirait la sécurité juridique. Un tel avis est, par nature,
consultatif et conduira inévitablement à des différends sur sa nature juridique. Le
gouvernement de la Fédération de Russie n’est donc favorable ni à la proposition de saisir la CIJ
ni aux amendements au projet de décision proposés par le représentant du gouvernement de
la Colombie au nom d’un groupe transrégional de pays.
64. Un représentant du gouvernement du Soudan prend note de la demande du groupe des
travailleurs de solliciter un avis consultatif de la CIJ sur l’interprétation de la convention no 87
pour ce qui est du droit de grève. Il fait valoir que la CIJ ne devrait être saisie que lorsque tous
les autres mécanismes ont été épuisés, y compris une discussion à la Conférence
internationale du Travail à laquelle tous les États Membres peuvent participer. Il espère qu’une
telle discussion apportera clarté et certitude juridiques et protégera le principe du dialogue
social. Le gouvernement du Soudan propose que le Conseil d’administration fixe un calendrier
pour ces discussions afin que d’autres mesures puissent, au besoin, être prises.
65. Une représentante du le gouvernement des États-Unis d’Amérique déclare que le droit de
grève est protégé par la convention no 87. Cela dit, compte tenu du désaccord de longue date
sur cette interprétation et des répercussions négatives de ce différend sur l’intégrité du
système de contrôle de l’OIT, le gouvernement des États-Unis est ouvert à la saisine de la CIJ.
Toutefois, il n’est ni nécessaire ni approprié de renvoyer la question de savoir si la commission
d’experts est compétente pour déterminer la portée du droit de grève et dire que celui-ci
découle de la convention no 87. Le gouvernement des États-Unis soutient pleinement le travail
de la commission d’experts en tant qu’élément essentiel du système de contrôle et appuie en
particulier les travaux de la commission consistant à fournir des observations et des
recommandations non contraignantes sur la protection, l’étendue et les paramètres du droit
de grève. Le gouvernement des États-Unis espère que la discussion en cours aboutira à un
plan clair pour résoudre le différend.
66. La Vice-présidente travailleuse se félicite des informations fournies par les États Membres et
prend note de la volonté générale de trouver une solution au différend.
67. La Vice-présidente employeuse déclare que le recours au format du comité plénier a donné
lieu à une discussion fructueuse, malgré l’opposition qu’il avait suscitée auparavant. Elle
constate qu’aucun gouvernement n’a nié que le droit de grève est un droit fondamental et
rappelle que la question centrale est de savoir si une convention, qui a explicitement exclu le
droit de grève, peut servir de base à une interprétation extensive de ce droit par l’un des
organes de contrôle – la commission d’experts – et non par les autres. Il s’agit d’une question
de légitimité démocratique. Depuis l’adoption de la résolution de 1949, le nombre de membres
de l’OIT est passé de 61 à 187. De ce fait, la résolution de 1949 ne constitue pas, de l’avis du
groupe des employeurs, une base d’action démocratiquement légitime.
68. Le Directeur général déclare que le désaccord entre les mandants et le Bureau est un élément
normal du processus démocratique. Cependant, utiliser ce désaccord pour formuler des
allégations non fondées de partialité, de parti pris et même de collusion de la part du Bureau
est inexcusable, en particulier à la lumière du travail accompli par le Bureau pour préparer les
discussions en cours. Il exprime l’espoir que ces allégations seront retirées.
GB.349bis/PV/Projet 19
Conseil d’administration
69. Le Conseil d’administration était saisi d’un sous-amendement à l’amendement au projet de
résolution que le gouvernement de la Colombie avait proposé au nom du groupe de 44 pays.
Proposé par le groupe des employeurs et distribué par le Bureau, ce sous-amendement se lit
comme suit:
Suite à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à l’appréciation de la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
le Conseil d’administration décide d’adopter la résolution suivante:
Le Conseil d’administration,
Conscient qu’il existe entre les mandants tripartites de l’Organisation internationale du
Travail (OIT) un désaccord profond et persistant au sujet de l’interprétation de la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce
qui est du droit de grève,
Rappelant que cette difficulté d’interprétation découle d’une divergence de vues entre les
mandants tripartites de l’Organisation quant au point de savoir si le droit de grève est
protégé par la convention no 87 et si la commission d’experts a outrepassé sa compétence
en formulant des avis et recommandations non contraignants sur le droit de grève,
Notant que les organes de contrôle de l’OIT ont systématiquement observé que le droit
de grève est un corollaire de la liberté syndicale, qui constitue un droit fondamental,
Notant que la question à l’examen porte sur le champ d’application de la convention no 87
et les avis formulés par la commission d’experts sur le droit de grève,
Gravement préoccupé par les incidences que cette difficulté d’interprétation a sur le
fonctionnement de l’OIT et la crédibilité de son système normatif,
Affirmant la nécessité que cette difficulté soit résolue conformément à la Constitution de
l’OIT,
Rappelant que, aux termes de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
«[t]outes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la […] Constitution et des
conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution,
seront soumises à l’appréciation de la Cour internationale de Justice»,
Rappelant la décision consensuelle prise par le Conseil d’administration à sa 320e session
(mars 2014), dans laquelle celui-ci se félicitait de «l’exposé clair de son mandat par la
commission d’experts, tel qu’il figure dans le rapport de la commission pour 2014»:
«La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
est un organe indépendant établi par la Conférence internationale du Travail; ses
membres sont nommés par le Conseil d’administration. Elle est constituée de
juristes ayant pour mission d’examiner l’application des conventions et
recommandations de l’OIT dans les États Membres de cette Organisation. La
commission d’experts procède à une analyse impartiale et technique de la façon
dont les conventions ratifiées sont appliquées dans la législation et la pratique par
les États Membres, en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les
différents systèmes juridiques. Ce faisant, elle examine la portée juridique, le
contenu et la signification des dispositions des conventions. Ses avis et
recommandations ont un caractère non contraignant, leur objet étant de guider
l’action des autorités nationales. Ils tirent leur valeur persuasive de la légitimité et
de la rationalité du travail de la commission qui est basé sur son impartialité, son
expérience et son expertise. Le rôle technique de la commission et son autorité
morale sont largement reconnus, en particulier du fait qu’elle poursuit sa tâche de
contrôle depuis plus de quatre-vingt-cinq ans et en raison de sa composition, de son
indépendance et de ses méthodes de travail qui se fondent sur un dialogue continu
GB.349bis/PV/Projet 20
avec les gouvernements et prennent en compte les informations fournies par les
organisations d’employeurs et de travailleurs. Cela se reflète dans l’intégration des
avis et recommandations de la commission dans les législations nationales, dans
des instruments internationaux et dans les décisions des tribunaux.»
Notant que, malgré les tentatives menées de longue date, aucun consensus n’a été atteint
par le dialogue tripartite,
Reconnaissant le rôle de la Conférence internationale du Travail en qualité d’organe
suprême de l’OIT, composé de délégations tripartites des États Membres de
l’Organisation et investi du pouvoir d’adopter des normes internationales du travail et de
formuler des orientations sur le monde du travail,
Soulignant que l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution établit que tout renvoi devant
la Cour internationale de Justice vise à obtenir l’appréciation de la Cour sur la question ou
difficulté d’interprétation objet du renvoi,
Exprimant le voeu que, compte tenu de la structure tripartite unique de l’OIT, non
seulement les gouvernements des États Membres de l’Organisation, mais aussi les
organisations internationales d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif
général auprès de l’OIT seront invités à participer directement et sur un pied d’égalité à
la procédure écrite et à toute procédure orale devant la Cour, s’il est décidé de la saisir,
Le Conseil d’administration prie le Bureau d’inscrire à l’ordre du jour de la 112e session
(2024) de la Conférence internationale du Travail une question en vue de mener une
discussion et de prendre une décision sur les options permettant de garantir la sécurité
juridique, notamment au moyen:
a) des mesures appropriées à prendre par la Conférence internationale du Travail;
b) de la saisine de la Cour internationale de Justice en vue d’obtenir un avis
consultatif sur l’interprétation de la convention no 87 pour ce qui est du droit de
grève et, le cas échéant, d’une décision sur les mesures de suivi à prendre après
réception de l’avis consultatif.
Décide, conformément à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT:
1. de demander à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence, en vertu de
l’article 65, paragraphe 1, de son Statut et de l’article 103 de son Règlement, un avis
consultatif sur la question suivante:
Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la convention
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2. Charge le Directeur général:
a) de transmettre la présente résolution à la Cour internationale de Justice,
accompagnée de tout document pouvant servir à élucider la question,
conformément à l’article 65, paragraphe 2, du Statut de la Cour;
b) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice de permettre
que les organisations d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif
général auprès de l’OIT participent à la procédure consultative;
c) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice d’examiner
les mesures possibles pour accélérer la procédure, conformément à l’article 103 du
Règlement de la Cour, de manière à répondre d’urgence à cette demande;
d) d’informer le Conseil économique et social des Nations Unies de cette demande,
conformément à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord entre les Nations Unies et
l’Organisation internationale du Travail, 1946.
70. Le Président, conformément à l’article 4.3. du Règlement et aux dispositions applicables à la
session spéciale adoptées par le Conseil d’administration à sa 349e session, rend compte
oralement de la teneur des vues échangées au sein du comité plénier:
GB.349bis/PV/Projet 21
Conformément à l’article 4.3. du Règlement du Conseil d’administration et aux
dispositions adoptées pour cette session spéciale, j’ai l’honneur de faire rapport au
Conseil d’administration sur la teneur des vues échangées ce matin.
Le comité plénier a été l’occasion d’un riche échange de vues, auquel ont participé
35 orateurs, dont les représentants de 12 gouvernements qui ne siègent pas au Conseil
d’administration. Un certain nombre de participants se sont félicités de cette modalité de
travail, dans laquelle ils ont vu une garantie de transparence et d’inclusion, essentielles
pour une question aussi importante sur le plan institutionnel.
Sur la question principale de savoir si l’Organisation devait ou non demander à la Cour
internationale de Justice (CIJ) de rendre d’urgence un avis consultatif, en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, le groupe des employeurs et le groupe des
travailleurs ont réaffirmé leurs positions respectives.
Le groupe des travailleurs a rappelé que la difficulté portait sur un principe et droit
fondamental au travail et que le droit de grève était pour les organisations de travailleurs
un moyen essentiel, parfois le seul, de défendre leurs intérêts. L’OIT était une forteresse
pour les travailleurs du monde entier, qui pâtissaient de cette incertitude juridique de
longue date. Il n’y avait pas d’autre solution que de saisir la CIJ. Le dialogue social n’offrait
aucune chance réaliste de régler le différend puisque le groupe des employeurs
n’acceptait ni le fait que le droit de grève était couvert par la convention no 87, ni l’autorité
des avis juridiques des organes de contrôle en la matière. La priorité devait être de
répondre à la question juridique du champ d’application de la convention no 87
concernant le droit de grève et d’affirmer l’autorité des organes de contrôle de
l’Organisation, en appliquant les dispositions constitutionnelles pertinentes, à savoir
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution.
Au sujet des deux questions qu’il était proposé de poser à la Cour, le groupe des
travailleurs a expliqué que l’intention était de couvrir tous les aspects de la difficulté
d’interprétation. Le groupe a toutefois estimé que la question unique sur le droit de grève
proposée par certains gouvernements suffirait à régler le différend, étant entendu que
la CIJ recevrait tous les documents utiles. Enfin, la délégation de pouvoir de 1949 était
toujours valable et le Conseil d’administration avait donc compétence pour soumettre le
différend à la CIJ pour décision. Le groupe des travailleurs accepterait l’avis de la CIJ
comme une décision définitive faisant autorité.
Le groupe des employeurs a réaffirmé qu’il était fermement opposé à la saisine de la CIJ. Le
différend ne tenait pas à l’interprétation de la convention no 87 puisque cet instrument ne
traitait pas du droit de grève. Le coeur du problème était plutôt les «interprétations» larges,
détaillées et approfondies que la commission d’experts donnait du droit de grève, ainsi que
le fait que la commission avait comblé un vide réglementaire, ce pour quoi seule la
Conférence était compétente. La saisine de la Cour constituerait un précédent fâcheux, en
ce qu’elle serait un aveu public, par l’OIT, de son incapacité à régler les différends en interne.
Le groupe des employeurs a réaffirmé que, par sa nature même, l’avis consultatif de la CIJ
n’était pas contraignant, et qu’il n’en accepterait aucun en l’espèce, quel que soit son
contenu. Il continuerait de rejeter les interprétations détaillées et extensives données par
la commission d’experts et de refuser de débattre des questions liées au droit de grève
dans le cadre de la Commission de l’application des normes de la Conférence. Le groupe
des employeurs a jugé en outre que les questions proposées n’étaient pas suffisantes et
qu’elles devraient également porter sur le rôle de la Conférence. Celle-ci devrait examiner
et adopter des règles internationales concernant le droit de grève, puisqu’elle était
l’instance compétente pour trouver une solution. Le droit de grève était une question aux
multiples facettes qui nécessitait un débat approfondi entre les acteurs tripartites du
monde du travail. Une action normative de la Conférence était la seule voie à suivre.
Une large majorité de gouvernements a réaffirmé l’importance de la liberté syndicale et
du droit de grève, et nombre d’entre eux ont mis en exergue leurs lois et pratiques
nationales à cet égard.
GB.349bis/PV/Projet 22
Un grand nombre de gouvernements ont clairement dit être favorables à la saisine de la
Cour, et souligné que les gouvernements avaient besoin de sécurité juridique quant à la
portée des obligations découlant de la ratification de la convention no 87. Tout en
réaffirmant leur soutien aux solutions fondées sur le dialogue social, ils ont considéré que
cette voie n’avait pas permis de régler un différend qui durait depuis trop longtemps. Il
fallait débloquer l’impasse concernant un principe et droit fondamental au travail. Il fallait
éviter que le différend décrédibilise encore plus l’OIT, s’agissant en particulier de sa
fonction normative et de sa fonction de contrôle. Ces gouvernements ont dit être
intimement convaincus que la saisine de la CIJ était la voie à suivre pour parvenir à la
sécurité juridique. À cet égard, la plupart d’entre eux ont rappelé que l’avis consultatif
serait contraignant pour l’OIT. Ils ont estimé par ailleurs que l’action normative proposée
par le groupe des employeurs et par d’autres gouvernements ne pouvait pas garantir la
sécurité juridique, étant donné que les Membres qui n’auraient pas ratifié l’instrument
concerné resteraient dans l’incertitude découlant du différend relatif à la convention
no 87. Certains gouvernements ont souligné que le dialogue social aurait sa place lorsqu’il
s’agirait de donner suite à la décision de la CIJ, le cas échéant.
Concernant les questions à poser à la CIJ, un appui a été exprimé à la première. Aucun
gouvernement ne s’est dit favorable à la deuxième question énoncée dans la demande
du groupe des travailleurs. Un gouvernement a estimé que la première question, sur le
droit de grève, ne rendait pas pleinement compte du différend, tandis que la seconde, sur
le mandat de la commission d’experts, ne pouvait pas être considérée comme une
question d’interprétation au titre de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
Un certain nombre de gouvernements, tout en reconnaissant que la Constitution prévoit
la possibilité de saisir la Cour en cas de difficulté d’interprétation, n’étaient pas favorables
à cette saisine, qui, selon eux, devait être un dernier recours à envisager seulement après
l’échec de tous les autres moyens. Pour certains de ces gouvernements, l’action normative
de la Conférence serait la méthode la plus transparente, la plus appropriée et la plus
logique pour formuler des règles de l’OIT faisant autorité en matière de droit de grève.
Respectueuse des principes fondamentaux de l’OIT que sont le tripartisme et le dialogue
social, l’action normative pouvait aboutir à un résultat équilibré et acceptable à l’échelle
mondiale. S’il se révélait impossible de trouver une solution par le dialogue tripartite, la
saisine de la CIJ resterait possible, conformément à l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT, en dernier recours.
Qu’ils soient favorables ou non à la saisine de la CIJ, nombre des participants étaient d’avis
qu’il serait préférable de débattre et trancher la question au sein de la Conférence
internationale du Travail. Ils ont indiqué que, même si le Conseil d’administration avait
été dûment autorisé en 1949 à demander des avis consultatifs, l’évolution de la
composition de l’OIT imposait que cette question soit examinée par l’organe délibérant
suprême, par souci de légitimité. Un nombre tout aussi important d’orateurs, dont ceux
qui avaient proposé l’amendement, ont estimé que le Conseil d’administration était
compétent pour prendre cette décision.
Pour conclure, je pense que personne ne sera surpris de m’entendre dire qu’il semble y
avoir une convergence de vues sur le diagnostic mais pas sur le remède. Les échanges
ont mis en évidence la diversité et la divergence des points de vue sur cette question.
L’ouverture de l’échange de vues rendue possible par le comité plénier a été saluée et
appréciée par tous les participants. J’espère que ce compte rendu a fait justice à la qualité
des échanges ainsi qu’à l’engagement et au sens des responsabilités dont ont fait preuve
les trois groupes.
Je n’ai aucun doute que le Conseil d’administration pourra maintenant prendre la suite,
en session plénière, et avoir un débat constructif sur la voie à suivre.
71. La Vice-présidente du groupe des employeurs, répondant au rapport oral, précise que ce
n’est pas parce que son groupe ne peut pas accepter la position du Bureau, selon laquelle les
avis consultatifs de la CIJ sont juridiquement contraignants, ni accepter ou reconnaître
GB.349bis/PV/Projet 23
l’approbation par la CIJ des opinions de la commission d’experts sur le droit de grève, qu’il
n’acceptera aucun avis consultatif de la CIJ. En outre, le groupe des employeurs n’a pas dit
qu’une action normative était la seule solution viable, bien qu’il considère que la Conférence
internationale du Travail, en tant qu’organe suprême de l’Organisation, devrait avoir la liberté
de décider de la forme que doivent prendre les délibérations et les décisions.
72. Des questions se posent quant à l’impartialité du Bureau. Comme l’a fait observer le
gouvernement de la Suisse, bien que la question dont le renvoi est proposé par le groupe des
travailleurs soit identique à celle figurant dans le document GB.322/INS/5, le Bureau a refusé
d’en faire une analyse juridique, par souci de neutralité. Au cours des mois précédents, le
Bureau a contourné les règles de procédure et de gouvernance pour aider le groupe des
travailleurs à parvenir à ses fins et a tenu à l’écart le groupe des employeurs, au mépris de
l’équilibre tripartite de l’OIT. Par exemple, le Bureau a permis au groupe des travailleurs
d’inscrire une question à l’ordre du jour du Conseil d’administration sans soumission préalable
au groupe de sélection, alors qu’il a refusé de faire de même pour le groupe des employeurs.
De plus, les documents d’information concernant la demande du groupe des employeurs et
celle du groupe des travailleurs ne présentent pas le même niveau de détail. Ainsi, le document
concernant la proposition du groupe des travailleurs est accompagné des lettres de soutien
des gouvernements, mais pas le document concernant les propositions du groupe des
employeurs. Le Bureau a aussi tenu les gouvernements à l’écart en omettant de leur
communiquer toutes les informations pertinentes. Le traitement injuste dont le Bureau a fait
preuve à l’égard des mandants, qui tient davantage à une volonté politique qu’à un manque
de professionnalisme de la part de son personnel, est totalement inadmissible.
73. Le projet de résolution initial est inapproprié et subjectif, en ce qu’il reflète uniquement la
position du groupe des travailleurs et vise à vider de leur substance les discussions du Conseil
d’administration. De nombreux gouvernements ont dit qu’une question d’une telle importance
devrait selon eux être traitée par la Conférence internationale du Travail plutôt que par le
Conseil d’administration. L’oratrice n’est pas d’accord avec l’affirmation figurant dans le projet
de résolution initial, selon laquelle la difficulté d’interprétation découle d’une divergence de
vues entre les mandants tripartites quant au point de savoir si le droit de grève est protégé
par la convention no 87. Le différend trouve plutôt son origine dans le fait que la commission
d’experts a, au fil du temps et de sa propre initiative, élaboré des règles relatives au droit de
grève qui renvoient à cette convention, alors même que la Conférence a délibérément exclu
ce droit du texte au moment de sa rédaction et son adoption. L’oratrice est également en
profond désaccord avec l’affirmation selon laquelle «la seule solution viable consiste à solliciter
un avis juridique faisant autorité auprès de la Cour», et rejette «le caractère définitif et
contraignant de tout avis consultatif ainsi obtenu». Bien que ces phrases aient été supprimés
dans l’amendement proposé par le groupe de 44 pays, elles ont été prononcées par les
gouvernements dans leurs déclarations.
74. L’amendement au projet de résolution proposé par le groupe de 44 pays fait également
référence au mandat de la commission d’experts. L’oratrice souhaite souligner que la
commission d’experts a outrepassé son mandat en formulant des opinions détaillées sur le
droit de grève, lesquelles ne sauraient être considérées comme une interprétation de la
convention no 87, puisqu’elles vont au-delà de son champ d’application. En outre, la proposition
consistant à remplacer la référence au Comité de la liberté syndicale par «les organes de
contrôle de l’application des normes de l’OIT» est incorrecte sur le plan factuel, puisque parmi
ces organes figurent le Comité de la liberté syndicale, qui ne contrôle pas l’application des
normes telles que la convention no 87, et la Commission de l’application des normes, qui
n’estime pas que le droit de grève est couvert par cette convention.
GB.349bis/PV/Projet 24
75. Bien qu’elle appuie la suppression de la référence à «la sécurité juridique rétablie» proposée
par le groupe de 44 pays, l’oratrice ne souscrit pas à la proposition d’ajouter le membre de
phrase: «Notant que, malgré les tentatives menées de longue date, aucun consensus n’a été
atteint par le dialogue tripartite», puisqu’il n’y a eu aucune tentative d’examiner le droit de
grève à la Conférence, du fait du refus persistant du groupe des travailleurs d’inscrire à l’ordre
du jour une discussion de fond sur cette question. La résolution concernant les demandes
d’avis consultatif à la Cour internationale de Justice est dépassée, l’Organisation ayant
beaucoup changé depuis son adoption en 1949. La Conférence conserve le droit de demander
à la Cour des avis consultatifs à tout moment, en particulier sur des sujets aussi importants
que le droit de grève. Le groupe des employeurs ne peut donc appuyer ni le projet de
résolution initial ni l’amendement proposé par le groupe de 44 pays. Le sous-amendement du
groupe des employeurs reflète l’opinion majoritaire au sein du comité plénier, selon laquelle
la question devrait être soumise à la Conférence.
76. La Vice-présidente du groupe des travailleurs rappelle qu’il est demandé au Conseil
d’administration de décider s’il renverra la difficulté d’interprétation devant la CIJ, en
reconnaissant dans l’affirmative la pertinence de l’article 37 dans ce contexte. Elle rappelle
également que le Directeur général a demandé instamment aux participants de s’abstenir de
tenir certains propos et que cette demande a recueilli un large appui. Le Directeur général a
prié le groupe des employeurs de retirer ses allégations de collusion. Ce dernier ne l’a pas fait,
bien au contraire. Il est extrêmement problématique que l’impartialité du Bureau soit remise
en cause simplement parce que certains mandants adhèrent plus étroitement que d’autres à
un certain point de vue.
77. Le groupe des employeurs a déclaré que le différend à régler n’était pas une question
d’interprétation. Pourtant, dans la contribution qu’elle a soumise le 24 octobre 2023,
l’Organisation internationale des employeurs a proposé qu’une action normative soit menée
en 2024 en vue de l’adoption d’un protocole. Le Bureau a donc préparé un rapport sur la
proposition. Plus important encore, dans le document qu’il a présenté, le groupe des
employeurs exprimait la conviction qu’un dialogue solide et durable était nécessaire pour
résoudre cette difficulté déjà ancienne d’interprétation concernant le droit de grève dans le
cadre de la convention no 87. Le groupe des employeurs a donc d’abord reconnu qu’il existait
une difficulté d’interprétation et déclaré que l’action normative était le moyen le plus évident
de résoudre la question. Puis il a exprimé le souhait de parvenir à un règlement rapide plutôt
que de recourir à des moyens externes, ce qui montre qu’il est conscient de l’urgence.
78. Le groupe des travailleurs n’attend pas de la CIJ qu’elle crée plus d’obligations que n’en a prévu
la convention no 87. Depuis plus de soixante-dix ans, les organes de contrôle de l’OIT
considèrent que le droit de grève est un corollaire de la liberté syndicale, laquelle est consacrée
dans la Constitution de l’OIT et dans la convention no 87. Le groupe des travailleurs souhaite
simplement que la CIJ confirme cette position adoptée de longue date, sans la modifier.
Certains pays se sont dits vivement préoccupés par le fait qu’une question posée sur le point
de savoir si le droit de grève est protégé par la convention no 87 puisse créer un droit de grève
absolu. Le groupe des travailleurs affirme que, de son point de vue, il est certain que la CIJ n’ira
pas au-delà de la pratique suivie à l’OIT. Il est simplement demandé à la CIJ de confirmer la
légitimité des mesures prises par l’OIT et les organes de contrôle sur la base de la convention
no 87. Il y a peu de chances que la CIJ crée un droit de grève absolu ou confère davantage de
pouvoir à la commission d’experts. Le mandat de la commission d’experts est établi par l’OIT
elle-même et non par la CIJ. L’amendement proposé par le groupe de 44 pays cite ce mandat
dans l’unique but de préciser qu’il a été accepté par tous et qu’il sous-tend tous les travaux
menés au sein du système de contrôle.
GB.349bis/PV/Projet 25
79. Le groupe des employeurs continue d’invoquer le fait que, lors des travaux préparatoires de la
convention no 87, le droit de grève n’a pas été inclus ni expressément exclu. Il est vrai que les
travaux préparatoires de n’importe quel texte juridique peuvent être utilisés pour expliquer ou
prouver l’intention des rédacteurs. Néanmoins, conformément aux dispositions de la
Convention de Vienne sur le droit des traités, et comme l’a récemment affirmé la CIJ, aux fins
de l’interprétation d’un texte juridique, l’historique n’est pertinent que si le sens ordinaire à
attribuer à une disposition, dans son contexte et à la lumière de son objet et de son but, conduit
à des résultats absurdes. La CIJ se sert aussi des travaux préparatoires comme d’une source
secondaire pour confirmer son interprétation d’un texte, si nécessaire. L’historique des
négociations de la convention no 87 montre que les travaux préparatoires ne sont pas
concluants. Ils ne peuvent pas contribuer à régler le différend, parce qu’ils n’apportent pas la
preuve que les délégués présents à la Conférence avaient bel et bien l’intention d’exclure le
droit de grève de la convention no 87. En revanche, il ressort des réponses aux questionnaires
du Bureau que plusieurs gouvernements – et assurément pas la majorité – préféraient que la
convention no 87 porte uniquement sur la liberté syndicale et non sur le droit de grève. Les
délégués à la Conférence qui ont soulevé une question à cet égard s’inquiétaient uniquement
de l’exercice éventuel du droit de grève dans le secteur public, et non du droit de grève des
travailleurs en général. La Conférence a finalement décidé d’adopter des principes généraux
relatifs à la liberté syndicale, sans plus de détails. Par conséquent, les travaux préparatoires ne
permettant pas d’établir que les délégués à la Conférence avaient l’intention d’exclure le droit
de grève de la convention no 87, ils ne sont pas considérés comme un élément déterminant. Il
est donc important de tenir compte en priorité de la pratique ultérieurement suivie à l’OIT et
dans ses États Membres, conformément aux dispositions de la Convention de Vienne. La
pratique ultérieurement suivie à l’OIT s’entend des travaux des organes de contrôle. En outre,
au moment de l’adoption de la convention no 87, la liberté syndicale était déjà consacrée par la
Constitution de l’OIT et la Déclaration de Philadelphie. De surcroît, selon le Comité de la liberté
syndicale, qui tire son mandat de la Constitution de l’OIT, le droit de grève est protégé par le
principe constitutionnel de la liberté syndicale ainsi que par la convention no 87. Il conviendrait
de consulter la jurisprudence contenue dans la Compilation des décisions du Comité de la
liberté syndicale.
80. La vice-présidente du groupe des travailleurs juge par ailleurs préoccupant que la question de
la démocratisation du Conseil d’administration ou du degré de démocratie au sein de celui-ci
vienne parasiter les autres débats, y compris en ce qui concerne le mandat donné au Conseil
d’administration pour porter les différends devant la CIJ. Le groupe des travailleurs est
fermement attaché à la démocratie en général et à la démocratisation en tant que processus
au sein de l’OIT. Toutes les autres voies ayant été épuisées, il est temps de porter le différend
devant la Cour. Des débats tripartites devraient être engagés après que la CIJ aura rendu sa
décision. En tant que partenaire social, le groupe des travailleurs est l’interlocuteur avec lequel
le groupe des employeurs devra poursuivre le dialogue s’il le souhaite et chercher un
consensus. Cette question a fait l’objet de discussions approfondies, sans résultat. Il ne sert à
rien de les poursuivre.
81. Le groupe des employeurs a déclaré pendant le Comité plénier qu’il ne respecterait pas la
décision de la CIJ – des propos scandaleux et contraires au principe de la primauté du droit. Il
a heureusement nuancé sa position par la suite. Le groupe des travailleurs s’oppose à tous les
amendements proposés par le groupe des employeurs.
82. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC),
une représentante du gouvernement de la République islamique d’Iran prie instamment le
Bureau et le Conseil d’administration de tenir compte du fait que les États qui seront le plus
GB.349bis/PV/Projet 26
touchés par les conséquences éventuelles d’une décision sur le droit de grève ne sont pas
membres du Conseil d’administration. La majorité des pays du GASPAC préférerait donc que
la décision soit prise par la Conférence et que le résultat de la session en cours soit soumis au
Conseil d’administration en vue d’un examen plus approfondi avant d’être soumis à la
Conférence pour décision finale.
83. Le consensus tripartite fondé sur le dialogue social devrait néanmoins rester la solution
première pour régler les différends liés au monde du travail. En outre, les solutions internes,
qui sont le seul moyen de garantir la participation active de tous les mandants de l’OIT,
devraient être privilégiées et épuisées avant de s’orienter vers une saisine de la CIJ. Les
processus internes de l’OIT et le tripartisme devraient par conséquent être renforcés. L’oratrice
propose que des réunions tripartites soient organisées d’urgence en vue de trouver une
solution juste qui réponde à la demande du groupe des travailleurs ainsi qu’aux
préoccupations du groupe des employeurs et des gouvernements. Un protocole facultatif à la
convention no 87 pourrait être élaboré, de sorte que les États qui ont adopté la convention
en 1948 ne soient pas obligés d’accepter les nouvelles interprétations. La majorité des pays
du GASPAC n’acceptera aucun amendement ni aucune décision contraire à sa position.
84. S’exprimant au nom de l’Argentine, du Brésil, du Chili et de la Colombie, un représentant
du gouvernement du Chili se dit surpris de voir que, plus de cent ans après sa fondation, l’OIT
continue à débattre du point de savoir si le droit de grève est couvert par son cadre normatif.
Ce droit est indissociable de la liberté syndicale, qui est un droit universel protégeant aussi
bien les employeurs que les travailleurs. Si le dialogue social devrait être un outil pour régler
les différends d’interprétation des normes du travail, les mandants tripartites sont en droit
d’utiliser tous les mécanismes disponibles, y compris la saisine de la CIJ, pour tenter de parvenir
à une solution lorsqu’il atteint ses limites. L’orateur soutient cette démarche, qui permettra
d’assurer la sécurité juridique indispensable s’agissant du droit de grève. Le Bureau a toujours
agi avec professionnalisme et impartialité, en respectant le Règlement du Conseil
d’administration.
85. S’exprimant au nom d’un groupe composé des pays du groupe des États arabes, d’une
majorité de pays du GASPAC, de 17 pays africains et de 3 pays européens, un représentant
du gouvernement du Soudan déclare que le dialogue tripartite au sein de l’OIT reste le meilleur
moyen de régler les différends. Bien que la saisine de la CIJ soit un droit constitutionnel pouvant
être exercé après épuisement de tous les processus internes et de toutes les possibilités de
dialogue tripartite, la sécurité juridique devrait être assurée au moyen d’un processus
participatif. Il est nécessaire que tous les États Membres participent aux discussions et à la prise
de décision concernant la proposition de saisine de la CIJ, aussi cette décision devrait-elle être
prise par la Conférence. En outre, la résolution autorisant le Conseil d’administration à saisir la
Cour a été adoptée en 1949, lorsque les États Membres était beaucoup moins nombreux, et ne
prive pas la Conférence du droit de prendre de telles décisions. Les discussions sur cette question
devraient donc se poursuivre à la prochaine session du Conseil d’administration, et le Bureau
devrait organiser des réunions tripartites dans l’intervalle. Le groupe de pays au nom duquel
s’exprime l’orateur ne souscrit pas au projet de décision.
86. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, un représentant du gouvernement de
l’Espagne déclare soutenir pleinement le Bureau pour le travail exhaustif accompli en vue de
préparer les discussions. L‘amendement proposés par le groupe de 44 pays devrait permettre
de rallier le soutien le plus large possible. La saisine de la CIJ pourrait conduire à la confirmation
que le droit de grève est couvert par la convention no 87, ce qui serait conforme à
l’interprétation des organes de contrôle de l’OIT. Le fait de confier à la Conférence
internationale du Travail le soin de prendre la décision de renvoi risque de prolonger un
GB.349bis/PV/Projet 27
différend déjà ancien sans apporter de nouvelles solutions, raison pour laquelle l’intervenant
ne soutient pas les sous-amendements proposés par le groupe des employeurs.
87. Un représentant du gouvernement de l’Argentine, rappelant que la question à l’examen
n’est pas nouvelle et qu’elle est préjudiciable au bon fonctionnement des organes de contrôle
de l'OIT, appuie la demande du groupe des travailleurs visant à solliciter l’avis consultatif de
la CIJ. Cette démarche est autorisée par la Constitution de l’OIT, laquelle prime sur toutes les
autres dispositions normatives ou procédurales. S’il ne fait aucun doute qu’un droit aussi
important que le droit de grève est couvert par la convention no 87, la sécurité juridique en la
matière est indispensable pour mieux défendre les droits collectifs. L’intervenant se félicite que
le groupe des travailleurs ait reconnu qu’il n’y avait plus lieu de traiter sa deuxième question,
et soutient le projet de décision.
88. Un représentant du gouvernement de la Barbade fait observer que, tant que la Constitution
ou le Règlement du Conseil d’administration ne sont pas modifiés, les règles existantes,
notamment celles qui régissent la délégation de pouvoir, restent en vigueur. Le rapport de
force entre les employeurs et les travailleurs est foncièrement déséquilibré. Le droit
d’association dont jouit la partie la plus faible perdrait tout son sens s’il n’incluait pas également
le droit d’utiliser tous les outils à disposition pour lui permettre de se faire voir, de se faire
entendre et de se mobiliser de manière respectueuse. L’OIT devrait éclairer ses États Membres
sur la question de savoir si la convention, sous son libellé actuel, inclut le droit de grève, comme
le pensent nombre d’États Membres.
89. L’intervenant se dit préoccupé par la crédibilité du système de contrôle de l’OIT. L’OIT et ses
États Membres devraient comprendre parfaitement la teneur des conventions de
l’Organisation. Cette dernière s’efforce vainement de résoudre le différend depuis nombreuses
années. Elle doit donc recourir aux méthodes prévues par sa Constitution, sauf s’il apparaît
clairement que le mode de règlement des différends envisagé est déraisonnable, peu fiable
ou injuste. La Barbade ne pense pas que ce soit le cas. Elle estime qu’il convient de saisir la CIJ
et appuie le projet de décision proposé par le groupe de 44 pays.
90. Un représentant du gouvernement du Brésil estime que l’article 37 de la Constitution de
l’OIT ne laisse aucun doute quant à la légalité du renvoi du différend devant la CIJ. Les points
de vue divergents du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs semblent
totalement figés. Il y a toutefois urgence à assurer la sécurité et la clarté juridiques et quant
au champ d’application de la convention no 87. Le projet de résolution figurant dans le
document du Bureau porte essentiellement sur deux questions cruciales: l’interprétation de la
convention no 87 et le mandat de la commission d’experts. La saisine de la CIJ, solution de
dernier recours pour garantir la sécurité juridique à tous les mandants tripartites, est conforme
à la Constitution de l’OIT. Le dialogue social, outil qui a les faveurs du Brésil, s’est soldé par un
échec au bout de onze années. La visée essentielle de la convention no 87 est une
démocratisation des lieux de travail qui permet d’équilibrer le rapport de force entre les
travailleurs et les employeurs. En ne prenant pas de décision au sujet du droit de grève, les
mandants ont perpétué les atteintes à ce principe fondamental. Le droit de grève est
intrinsèquement lié à la liberté syndicale et au droit de négociation collective, valeurs
incontestables qui protègent aussi bien les travailleurs que les employeurs et constituent pour
les gouvernements un gage de stabilité, tant en matière normative que sur le plan social. Le
Brésil approuve la résolution amendée présentée par la Colombie au nom du groupe de
44 pays et approuve pleinement l’objet de la session spéciale du Conseil d'administration.
91. Un représentant du gouvernement de la Colombie dit que le droit de grève est
intrinsèquement lié à la liberté syndicale, au droit d’organisation et de négociation collective – un
GB.349bis/PV/Projet 28
principe qui, dans les sociétés démocratiques, se voit confirmé par les tribunaux et la législation.
Il s’agit d’un droit habilitant qui peut être invoqué en l’absence d’autres options. En Colombie, les
diverses procédures régissant les grèves tiennent compte des recommandations de l’OIT. Les
gouvernements ont besoin de sécurité juridique quant aux obligations qui leur incombent au
titre de la convention no 87. La commission d’experts, entité indépendante, impartiale et
objective, est chargée d’interpréter les normes dans le cadre de ses fonctions de contrôle. Le fait
de remettre en cause le mandat ou les conclusions de la commission d’experts porte atteinte à
la crédibilité de l’OIT, conduit à un déficit de sécurité juridique et, par voie de conséquence,
compromet les efforts déployés par l’Organisation pour inciter les États Membres à appliquer
effectivement les normes internationales du travail. Des tentatives sont entreprises depuis des
dizaines d’années pour régler le différend par divers moyens, et l’OIT doit dès lors recourir à la
procédure prévue à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT et demander à la CIJ de
rendre au plus vite un avis consultatif sur la question de savoir si le droit de grève est protégé
par la convention no 87. C’est dans cette perspective que l’intervenant, au nom d’un groupe de
44 pays, a présenté un amendement comportant une résolution. La Colombie ne soutient pas le
sous-amendement proposé par le groupe des employeurs.
92. Une représentante du gouvernement de l’Équateur déclare que, avant de soumettre le
différend à la CIJ – si la décision démocratique du Conseil d’administration allait dans ce sens –,
tout doit être mis en oeuvre pour le résoudre au sein de l’OIT, dans le cadre du dialogue social.
Une autre solution consisterait à instituer un organe quasi judiciaire temporaire qui serait chargé
de contrôler l’application des dispositions de la convention no 87. L’Équateur serait également
disposé à soutenir l’adoption d’un protocole, qui devrait être ratifié par les États Membres. Cette
formule donnerait une plus grande souplesse concernant la convention no 87 ou permettrait
l’élargissement des obligations qui y sont énoncées.
93. Une représentante du gouvernement du Gabon indique que son pays, désireux d’obtenir
une décision définitive sur ce différend déjà ancien, est favorable à la saisine de la CIJ.
Toutefois, compte tenu de la spécificité de la procédure à engager et des conséquences qu’elle
pourrait avoir sur les législations nationales, la saisine en question ne devrait être décidée
qu’après un examen de la question à la prochaine session de la Conférence internationale du
Travail, l’objectif étant d’obtenir un mandat exprès de la part de l’ensemble des mandants. Le
Gabon est donc favorable à une saisine de la CIJ, pour autant que ce soit la Conférence, et non
le Conseil d’administration, qui prenne la décision.
94. Une représentante du gouvernement de l’Inde fait observer que ce désaccord fondamental,
lourd de conséquences, a de profondes répercussions au niveau mondial. Il ne serait de ce fait
ni équitable ni juste que le Conseil d’administration prenne la décision de saisir la CIJ. Il
convient d’élargir la discussion et de permettre à tous les membres de l’OIT d’y participer, dans
le cadre de la Conférence internationale du Travail. L’intervenante soutient donc la déclaration
faite par le représentant du gouvernement du Soudan au nom d'un groupe de pays.
95. Un représentant du gouvernement du Japon estime qu’il faut avoir épuisé toutes les
possibilités offertes par les discussions tripartites avant de saisir la CIJ. La saisine de la Cour,
dans la mesure où elle créerait un précédent, doit être considérée comme la solution de
dernier recours. Néanmoins, le différend a été examiné sous tous ses aspects, comme
l’attestent la déclaration du groupe des travailleurs et le projet de décision amendé présenté
par la Colombie au nom d’un groupe de pays. Le droit de grève n’est pas un droit absolu et
peut faire l’objet de restrictions pour certaines catégories de travailleurs et dans certaines
situations. Par ailleurs, aucune disposition concernant le droit de grève n’a été incluse dans la
convention no 87 lors de son adoption, et les 158 États Membres qui ont ratifié la convention
ne parviennent toujours pas à dégager une vision commune cohérente de la portée du droit
GB.349bis/PV/Projet 29
de grève. L’intervenant demande au Bureau de préciser si la discussion se fonde sur le principe
– énoncé dans la déclaration faite par le groupe gouvernemental à la réunion tripartite de 2015
sur la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève – voulant que le droit de grève ne soit
pas absolu et que la portée et les conditions d’exercice de ce droit soient réglementées au
niveau national.
96. Une représentante du gouvernement de la Malaisie est favorable à un règlement interne
du différend, la saisine de la CIJ ne devant intervenir qu’en dernier ressort. Elle demande
instamment au Bureau de créer un tribunal interne indépendant qui puisse rapidement
statuer sur le litige. La réglementation des grèves est devenue problématique pour les
mandants en raison de l’incertitude qui règne. S’il persistait, le différend pourrait nuire au
système de contrôle et à la crédibilité de l’OIT, en sa qualité d’organisation chargée de
l’établissement de normes internationales du travail, et compromettre l’application efficace de
ces dernières.
97. Une représentante du gouvernement du Mexique souligne l’importance de mettre en
oeuvre l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT pour assurer la sécurité juridique
et mettre fin à une controverse le longue date. Un avis consultatif de la CIJ constituerait une
assise solide pour l’application de la convention no 87, dans l’intérêt des droits des travailleurs
et, à ce titre, renforcerait le droit international, les droits de l'homme, le tripartisme et le
dialogue social. La résolution de 1949 autorisant le Conseil d’administration à soumettre le
différend à la CIJ, il n’est pas nécessaire de passer par la Conférence. Le Mexique soutient
l’amendement proposé par le groupe de 44 pays, sans le sous-amendement proposé par le
groupe des employeurs.
98. Un représentant du gouvernement de la Namibie fait observer que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève a porté atteinte au
mandat normatif de l’Organisation et à la crédibilité de son système de contrôle. La question
étant de nature juridique et non politique, il convient d’invoquer l’article 37, paragraphe 1, de
la Constitution de l’OIT pour parvenir à un règlement juridique du différend. La Namibie appuie
donc l’amendement proposé par le groupe de 44 pays, mais rejette le sous-amendement
proposé par le groupe des employeurs.
99. Un représentant du gouvernement du Niger se dit favorable à la saisine de la CIJ, tout en
soulignant qu’il est important d’assurer la participation de toutes les parties concernées,
notamment les États qui ont ratifié la convention no 87. Il demande des éclaircissements sur
les conséquences que pourrait avoir un avis consultatif reconnaissant que le droit de grève est
protégé par la convention no 87 pour les États qui ont ratifié la convention mais ne
reconnaissent pas le droit de grève, et, à l’inverse, sur les conséquences que pourrait avoir un
avis de la CIJ estimant que le droit de grève n’est pas protégé par la convention no 87 pour les
États qui ont ratifié la convention et reconnaissent le droit de grève.
100. Un représentant du gouvernement du Nigéria est conscient qu’il y a avantage à poursuivre
le dialogue, mais insiste sur la nécessité de mettre un terme à l’incertitude et de trouver à cette
fin à un moyen d’aller de l’avant. Il suggère donc de tenir des consultations en vue d’une
poursuite de la discussion à la 350e session (mars 2024) du Conseil d’administration et à la
112e session (juin 2024) de la Conférence internationale du Travail. Le gouvernement du
Nigéria est disposé à faire preuve de souplesse en ce qui concerne les modalités de la
discussion, à condition qu’un accord puisse être établi sur la manière de régler le problème.
L’intervenant aimerait savoir de façon plus précise s’il appartient à la Conférence de décider
d’une saisine de la CIJ, et souhaite être éclairé sur les conséquences, prévues ou imprévues,
que pourrait avoir le projet de résolution.
GB.349bis/PV/Projet 30
101. Un représentant du gouvernement de la Fédération de Russie déclare que, compte tenu
de la division manifeste au sein du Conseil d’administration sur cette question, la poursuite du
dialogue social est la seule façon d’aller de l’avant. Il n’est de ce fait pas favorable à une décision
de saisir la CIJ qui ne recueillerait pas l’adhésion d’une proportion importante des participants.
Il souscrit aux déclarations faites au nom des membres du GASPAC, de l’ASEAN et du groupe
de pays représenté par le Soudan.
102. Un représentant du gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du
Nord reconnaît l’importance du dialogue social. Toutefois, dans certains cas exceptionnels,
lorsque les tentatives multiples et répétées de dialogue tripartite restent trop longtemps
vaines, il convient d’envisager d’autres solutions pour permettre à l’Organisation d’aller de
l’avant. L’intervenant réitère de ce fait le soutien du gouvernement du Royaume-Uni à
l’amendement proposé par le groupe de 44 pays aux fins d’une saisine de la CIJ en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l'OIT.
103. Le Directeur général, répondant à la question du représentant du gouvernement du Niger,
dit qu’il n’est pas possible de spéculer sur le contenu ou les conséquences d’un avis consultatif
de la CIJ. Il ajoute que le Bureau fournira à l’ensemble des membres du Conseil
d’administration une réponse écrite détaillée au sujet des commentaires formulés par le
groupe des employeurs au sujet de ce que ce dernier considère comme un manque
d’impartialité de la part du Bureau.
104. Une représentante du Directeur général (directrice du Département des normes
internationales du travail), répondant à la question du représentant du gouvernement du
Japon, confirme que la commission d’experts a toujours affirmé que le droit de grève n’était
pas un droit absolu.
105. Un autre représentant du Directeur général (Conseiller juridique), répondant aux demandes
de précision du représentant du gouvernement du Nigéria, explique qu’il existe deux bases
juridiques (ou «titres de compétence») concurrentes pour demander un avis consultatif à la CIJ.
La première est l’article 37, paragraphe 1 de la Constitution de l’OIT – initialement l’article 423
du Traité de Versailles – qui prévoit que l’Organisation demande des avis consultatifs à la CIJ
au sujet de l’interprétation de la Constitution ou des conventions internationales du travail. La
seconde est l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord entre les Nations Unies et l’Organisation
internationale du Travail, conclu en 1946, aux termes duquel l’Assemblée générale des Nations
Unies autorise l’Organisation internationale du Travail à demander des avis consultatifs à la
Cour internationale de Justice sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de
son activité. Le paragraphe 3 du même article dispose que ces demandes peuvent être
adressées par la Conférence internationale du travail ou par le Conseil d’administration
autorisé par la Conférence. Cette autorisation a été accordée trois ans plus tard, en 1949. La
Conférence et le Conseil d’administration jouissent donc de l’autorisation permanente de
l’Assemblée générale des Nations Unies pour demander des avis consultatifs à la CIJ,
conformément à l’article 96 de la Charte des Nations Unies.
106. En ce qui concerne les conséquences de l’amendement et du sous-amendement, l’intervenant
précise que l’adoption de l’amendement proposé par le groupe de 44 pays impliquerait que
l’on soumette la ou les questions juridiques concernées à la CIJ et qu’on lui demande de rendre
d’urgence un avis consultatif. Le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs
vise quant à lui à inscrire une question à l’ordre du jour de la 112e session (juin 2024) de la
Conférence. Sauf si elle fait consensus, la décision d’inscrire une question à l’ordre du jour de
la Conférence doit, en application du paragraphe 5.1.1 du Règlement du Conseil
GB.349bis/PV/Projet 31
d’administration, faire l’objet d’un deuxième examen à une session suivante du Conseil
d’administration.
107. En ce qui concerne la demande de précision du représentant du gouvernement du Niger,
l’intervenant reprend à son compte l’avis du Directeur général selon lequel il n’est pas possible
de spéculer sur l’incidence ou les répercussions juridiques du futur avis consultatif, d’autant
plus que le Conseil d’administration n’a pas arrêté la question ou les questions à soumettre à
la CIJ. Lorsqu’il aura été rendu, l’avis consultatif devra être analysé et soumis au Conseil
d’administration – ou à la Conférence, selon l’organe qui sera à l’origine de la demande – en
vue d’un débat et d’une décision sur les mesures envisageables pour la suite. La CIJ a précisé à
de nombreuses reprises que son rôle était de fournir une assistance juridique aux
organisations requérantes, auxquelles il appartient de décider de la suite à donner.
108. La Vice-présidente travailleuse indique que la décision de demander la saisine de la Cour
internationale de Justice n’a pas été prise à la légère. En effet, depuis que le groupe des
employeurs a pour la première fois contesté l’interprétation de la convention no 87 en 2012,
des travaux considérables ont été menés, qui comprennent l’élaboration d’un plan de travail
visant à renforcer le système de contrôle. Certains gouvernements s’inquiètent de l’incidence
de ce renvoi devant la CIJ, mais il convient également de tenir compte du préjudice immense
que cette difficulté d’interprétation persistante cause à l’exercice d’un droit fondamental des
travailleurs, et de l’insécurité qu’elle génère pour la protection syndicale. En outre, les organes
de contrôle ont été considérablement entravés dans leur capacité à formuler des orientations
sur ce droit fondamental. Un accord n’ayant pu être trouvé, il est naturel de se tourner vers
la CIJ. Aucune disposition de la Constitution ne suggère que la saisine de la CIJ n’est possible
qu’après épuisement de toutes les autres options; dans tous les cas, la question est à l’examen
depuis déjà plusieurs années. Il est temps pour le Conseil d’administration de prendre une
décision, ce qui n’empêchera pas pour autant la tenue d’autres discussions, car l’approche
démocratique de l’Organisation peut toujours être améliorée. Le groupe des travailleurs
demande donc que l’amendement du groupe de 44 pays contenant un projet de résolution
soit soumis à un vote.
109. S’exprimant au nom du groupe des États arabes, un représentant du gouvernement du
Maroc prend note de l’explication selon laquelle la Conférence, comme le Conseil
d’administration, peut décider de renvoyer une question devant la CIJ. La Conférence étant une
enceinte plus inclusive que le Conseil d’administration, il est logique de lui soumettre en
premier une question aussi importante. Refuser de le faire va à l’encontre de l’image de
«maison du dialogue» qui est associée à l’OIT.
110. Le groupe propose donc un sous-amendement tendant à ajouter, au début du premier
paragraphe du dispositif de la résolution, le membre de phrase «de soumettre à la 112e session
de la Conférence internationale du Travail, pour considération, conformément à l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, la question de savoir s’il convient», avant «de
demander à la Cour internationale de Justice […]», et à sous-amender comme suit le texte
introductif du deuxième paragraphe du dispositif: «Selon le résultat obtenu à la Conférence
internationale du Travail, charge le Directeur général, s’il en est ainsi décidé:». Le propos n’est
pas de remettre en question la Constitution de l’OIT ou toute autre base juridique établie pour
la gouvernance de l’Organisation, mais est simplement de progresser vers un consensus. Dans
ce contexte, le groupe des États arabes demande au Bureau quelles sont les conditions à
satisfaire pour inscrire la question à l’ordre du jour de la Conférence.
111. La Vice-présidente travailleuse demande si des sous-amendements peuvent encore être
proposés, étant donné qu’elle a demandé un vote.
GB.349bis/PV/Projet 32
112. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) précise que les demandes de
vote sont notées par le Président mais que, conformément à la pratique établie, elles
n’appellent pas de décision immédiate. Bien que le Règlement lui donne la faculté de
déterminer si une question doit ou non être mise aux voix, et à quel moment cela doit être fait,
le Président doit continuer de rechercher la convergence dans la mesure du possible, selon la
pratique habituellement suivie à l’OIT, ce qui peut impliquer la soumission d’autres sousamendements,
comme dans le présent cas.
113. La Vice-présidente employeuse observe aussi, comme l’a clairement expliqué le Conseiller
juridique, que l’autorisation accordée en 1949 au Conseil d’administration de demander l’avis
consultatif de la CIJ n’enlève pas à la Conférence le pouvoir d’en faire de même. La difficulté
d’interprétation de longue date découle du refus systématique du groupe des travailleurs
d’examiner la question à la Conférence, alors même que l’intention des rédacteurs de la
convention no 87 était que le droit de grève fasse l’objet d’une norme distincte et qu’il a été
proposé à plusieurs reprises au fil des ans d’engager une action normative. Chacun reconnaît
l’importance du principe de la liberté syndicale, et le groupe des employeurs et le groupe des
travailleurs ont publié en 2015 une déclaration conjointe indiquant que le droit de grève est
un instrument légitime de défense des intérêts des travailleurs. Le groupe des employeurs n’a
pas demandé la saisine de la Cour internationale de Justice, car il pense que la question devrait
être réglée par le dialogue social dans le cadre d’une discussion normative à la Conférence, qui
permettrait à tous les mandants d’exprimer leurs vues. Si le sous-amendement proposé par le
groupe des États arabes recueille un consensus, le groupe des employeurs est prêt à l’appuyer.
La Vice-présidente employeuse prie instamment les autres membres du Conseil
d’administration de soutenir ce sous-amendement pour éviter d’alimenter encore les divisions
et de porter davantage atteinte aux travaux de l’Organisation.
114. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du GASPAC, une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran se dit favorable au sous-amendement
proposé par le groupe des États arabes et demande qu’il soit soumis à un vote.
115. D’après la Vice-présidente travailleuse, le sous-amendement proposé donne à penser que
tous les travaux préparatoires de la session spéciale n’ont pas été suffisants. La tenue d’une
discussion ouverte sur la question à la Conférence ne permettrait pas d’obtenir un résultat
clair. Il s’agit d’une difficulté d’interprétation sur une question cruciale qui affaiblit la protection
d’un droit fondamental des travailleurs. Le Conseil d’administration a pour responsabilité et
pour mandat de décider du renvoi de la question devant la CIJ. Par conséquent, la Viceprésidente
travailleuse prie instamment le Président de demander un vote.
116. S’exprimant au nom du groupe des États arabes, le représentant du gouvernement du Maroc
précise que le sous-amendement qu’il a proposé vise simplement à ce qu’une décision soit prise
de la manière la plus inclusive possible. Il demande pourquoi le Conseil d’administration
s’oppose à une approche inclusive. Demander l’approbation de la Conférence enverrait un
message positif au monde extérieur et montrerait que la décision a été prise à la majorité.
117. La Vice-présidente travailleuse déclare que la notion d’inclusivité est extrêmement
complexe. L’OIT est une organisation tripartite, et les opinions des travailleurs et des
employeurs de tous les États Membres sont représentées au Conseil d’administration par les
porte-parole. Bien que les gouvernements souhaitent prendre part à la discussion, le comité
plénier n’est pas nécessairement le format le plus inclusif pour les travailleurs. Les vives
préoccupations exprimées depuis onze ans par le groupe des travailleurs ne sont aucunement
prises en compte.
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118. En vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, tous les organes, aussi bien
le Conseil d’administration que la Conférence, sont tenus de soumettre les difficultés
d’interprétation à l’appréciation de la CIJ. L’oratrice ne voit pas l’utilité de poser la même
question à la Conférence. Le groupe des travailleurs compte bien examiner des mesures visant
à améliorer l’inclusion, mais cela ne justifie pas de retarder davantage une décision en
renvoyant la question devant la Conférence. Par conséquent, la Vice-présidente travailleuse ne
souscrit pas au sous-amendement proposé par le groupe des États arabes.
119. La Vice-présidente employeuse indique que la Conférence internationale du Travail est la
seule enceinte dans laquelle l’ensemble des gouvernements, des employeurs et des
travailleurs sont présents et ont un droit de vote. Le comité plénier est utile, mais seuls des
gouvernements supplémentaires peuvent y prendre la parole, et non des représentants
supplémentaires des partenaires sociaux; il ne peut donc pas remplacer la Conférence.
L’oratrice ne comprend pas pourquoi le groupe des travailleurs s’oppose à ce que la question
soit débattue dans l’enceinte la plus représentative.
120. Le Conseil d’administration est actuellement saisi de deux propositions visant à inscrire une
question à l’ordre du jour de la Conférence et, selon le paragraphe 5.1.1 de son Règlement, il
ne peut, lorsqu’il est appelé à discuter pour la première fois une proposition d’inscrire une
question à l’ordre du jour de la Conférence, prendre de décision qu’à la session suivante, sauf
assentiment unanime des membres présents. Ainsi, en cas de divergence de vues, il faudra
tenir une autre discussion à ce sujet à la prochaine session du Conseil d’administration.
121. Une représentante du gouvernement de l’Inde demande tout d’abord des éclaircissements
au Conseiller juridique sur le point de savoir si l’autorisation donnée par la Conférence au
Conseil d’administration de renvoyer des questions juridiques devant la CIJ est un blanc-seing
d’application générale en toute situation et à tout moment, qui n’admet aucune exception
constitutionnelle. Deuxièmement, elle observe que, d’après la jurisprudence, lorsqu’une
question touche l’instance suprême de l’Organisation, toute décision prise sans consulter
celle-ci par un organe auquel elle a délégué son pouvoir risque d’être partiellement entachée
d’invalidité, voire de manquer à l’éthique. Le Conseil d’administration ne saurait présumer que
les Membres de l’OIT ne souhaiteraient pas participer au processus de prise de décision plus
large et plus inclusif que permet la Conférence. L’oratrice demande par ailleurs si, étant donné
que des discussions doivent avoir lieu à deux sessions du Conseil d’administration avant qu’une
question puisse être inscrite à l’ordre du jour de la Conférence, la discussion tenue à la session
de mars 2023 du Conseil d’administration sur le cadre de procédure concernant le renvoi de
difficultés d’interprétation devant la CIJ au titre de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution
peut être considérée comme une première discussion. L’Inde soutient le sous-amendement
proposé par le groupe des États arabes.
122. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) indique que l’article IX de
l’Accord de 1946 entre les Nations Unies et l’Organisation internationale du Travail est très clair:
l'Assemblée générale des Nations Unies autorise l'OIT à demander des avis consultatifs à la CIJ
sur des questions juridiques se posant dans le cadre de son activité, et les demandes peuvent
être adressées à la Cour par la Conférence internationale du Travail ou par le Conseil
d'administration autorisé par la Conférence. En l’absence de précision supplémentaire, les
deux organes sont donc titulaires d’une autorisation expresse et sont dûment habilités à
renvoyer des difficultés ou questions d’interprétation devant la CIJ. Quant au point de savoir
s’il peut être présumé que les délégués tripartites à la session annuelle de la Conférence
souhaiteront prendre part au processus de prise de décision, ce n’est pas une question
juridique, et l’orateur s’abstiendra d’exprimer une opinion à ce sujet.
GB.349bis/PV/Projet 34
123. Le Conseiller juridique confirme que, conformément au paragraphe 5.1.1 du Règlement du
Conseil d’administration, lorsque le Conseil d’administration est appelé à discuter pour la
première fois d’une proposition d’inscrire une question à l’ordre du jour de la Conférence, il ne
peut, sauf assentiment unanime des membres présents, prendre de décision qu’à la session
suivante. Lorsqu’il a discuté à sa 347e session (mars 2023) du cadre de procédure présenté à
l’annexe I du document GB.347/INS/5 aux fins du renvoi de questions ou de difficultés
d’interprétation devant la CIJ – lequel cadre renfermait des orientations non contraignantes
pour utilisation future –, le Conseil d’administration n’a aucunement abordé la possibilité de
renvoyer devant la CIJ la difficulté d’interprétation particulière concernant la convention no 87,
qui a trait au droit de grève. Cette discussion ne peut donc pas être considérée comme une
première discussion de la proposition d’inscrire la question à l’ordre du jour de la Conférence.
124. Au sujet du sous-amendement proposé par le groupe des États arabes, l’orateur note qu’il est
inexact de dire que le Conseil d’administration peut décider, conformément à l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution, de soumettre une question à la Conférence pour considération.
L’article mentionné concerne la soumission de questions à l’appréciation de la CIJ. Le Conseiller
juridique croit comprendre que le sous-amendement vise à inscrire une question à l’ordre du
jour de la Conférence et suggère donc que le texte soit reformulé en conséquence.
125. La Vice-présidente travailleuse fait observer que, dans la mesure où son groupe a écrit pour
la première fois au Directeur général en juillet 2023 en invoquant l’article 37, paragraphe 1,
tous les États Membres ont été informés de la situation et invités à formuler des observations
sur le rapport d’information du Bureau, suivant un processus que l’on ne peut que qualifier
d’inclusif. Le comité plénier a été organisé de façon que tout État Membre désireux de
participer puisse le faire. Cependant, tous les mandants de l’OIT n’ont pas à entrer dans les
moindres détails des travaux du Conseil d’administration. Reconnaissant que le Président peut
continuer à rechercher la convergence après une demande de vote, la Vice-présidente
travailleuse ajoute que la poursuite des discussions sur le sous-amendement proposé par le
groupe des employeurs – que le groupe des travailleurs ne peut pas accepter – ne laisse
entrevoir aucune convergence.
126. S’exprimant au nom du groupe des États arabes, un représentant du gouvernement du
Maroc propose que le sous-amendement présenté par son groupe soit modifié pour tenir
compte des observations du Conseiller juridique.
127. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) propose que, par souci
d’exactitude, le membre de phrase «, conformément à l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT,» soit placé après « s’il convient de demander».
128. Une représentante du gouvernement de la Namibie fait observer que, selon le
paragraphe 5.7.3 du Règlement du Conseil d’administration, le Président peut déterminer
l’ordre dans lequel les amendements doivent être discutés et faire l’objet d’une décision. La
manière de procéder la plus efficace serait de soumettre à un vote le sous-amendement
proposé par le groupe de 44 pays. Les manoeuvres non démocratiques qui ne respectent pas
les procédures du Conseil d’administration devraient être évitées. Il convient de prendre en
considération le coût que représente pour les gouvernements l’envoi de délégations à des
réunions où le fond du problème n’est pas examiné.
129. Un représentant du gouvernement du Brésil déclare que, même si une décision de la
Conférence serait indubitablement plus démocratique, la question est à l’ordre du jour de la
session du Conseil d’administration, et c’est à lui qu’il incombe de décider. Il relève que sa
participation aux sessions du Conseil d’administration a un coût très élevé pour son
GB.349bis/PV/Projet 35
gouvernement et qu’il ne peut donc rentrer dans son pays sans qu’une décision ait été prise.
La question devrait être mise aux voix.
130. La Vice-présidente employeuse est d’avis que le processus mené jusqu’à présent est loin
d’être inclusif; le groupe des travailleurs a adressé au Directeur général une lettre sur la
question en juillet, au moment où beaucoup de personnes étaient en vacances, ne laissant
ainsi au groupe des employeurs et aux gouvernements que très peu de temps pour tenir des
consultations et prendre des décisions. L’oratrice rappelle que le vote devrait être un
mécanisme de dernier recours. En effet, soumettre à un vote une question de fond si
importante porterait préjudice à l’Organisation. De plus, il ne s’agirait pas d’une solution de
dernier recours, puisque qu’il n’y a jamais eu de dialogue social sur cette question, le groupe
des travailleurs ayant refusé qu’une question soit inscrite à l’ordre du jour de la Conférence
pour que le droit de grève fasse l’objet d’une discussion de fond. C’est précisément dans
l’intérêt du dialogue social que le groupe des employeurs souhaite à présent soumettre la
question à la Conférence. La Vice-présidente employeuse rejette l’idée d’un vote sur la question
et demande au Président de continuer à essayer d’obtenir une convergence de vues, même s’il
faut attendre la 350e session (mars 2024) du Conseil d’administration.
131. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du GASPAC, une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran relève que de nombreux gouvernements ne
sont pas encore parvenus au terme des consultations tripartites internes qu’ils ont engagées
sur la question. Elle estime que le Conseil d’administration devrait en référer à la Conférence
pour obtenir une décision finale inclusive.
132. S’exprimant au nom du groupe de 44 pays, un représentant du gouvernement de la
Colombie déclare, à propos du sous-amendement proposé par le groupe des États arabes, que
l’inscription de la question à l’ordre du jour de la Conférence serait une perte de temps, car la
seule réponse possible pour celle-ci serait de saisir la CIJ. L’orateur n’a rien contre l’inclusivité
ni la recherche d’un processus plus démocratique. Il estime toutefois que le Conseil
d’administration a suffisamment discuté pour pouvoir prendre sa décision et qu’il doit cesser
de tourner en rond. Le représentant du gouvernement de la Colombie demande donc un vote.
133. Un représentant du gouvernement du Bangladesh déclare que, comme la réponse
apportée à la difficulté d’interprétation sera applicable à tous les pays, il serait préférable
d’adopter une approche inclusive et de soumettre la question à la Conférence.
134. Un représentant du gouvernement de la Chine, soulignant qu’il convient de respecter le
principe du tripartisme, se dit favorable au sous-amendement proposé par le groupe des États
arabes, qui lui semble être une solution constructive, pragmatique, impartiale et inclusive, et
probablement la plus acceptable.
135. Le Président fait observer que le Conseil d’administration est saisi d’un amendement et de
deux sous-amendements et que, après de longs débats et de vaines tentatives pour parvenir
à des opinions convergentes ou des compromis, le groupe des travailleurs et un certain
nombre de gouvernements ont demandé un vote. Compte tenu de la situation, le recours au
vote semble inévitable.
136. Le Greffier du Conseil d’administration rappelle que, conformément au paragraphe 5.7.3 du
Règlement du Conseil d’administration, il revient au Président de déterminer l’ordre dans
lequel les amendements et les sous-amendements doivent être discutés et faire l’objet d’une
décision. Il suggère que le Conseil d’administration se prononce d’abord sur le sousamendement
proposé par le groupe des employeurs. En cas de rejet, le Conseil
GB.349bis/PV/Projet 36
d’administration pourrait alors se prononcer sur le sous-amendement proposé par le groupe
des États arabes. Puis, en cas de nouveau rejet, sur l’amendement initial.
137. Le Président demande que le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs soit
soumis à un vote à main levée.
138. Le Greffier du Conseil d’administration présente la procédure de vote, en indiquant
qu’aucun membre gouvernemental titulaire n’est privé du droit de vote en raison d’un retard
dans le paiement de la contribution de son État.
(Le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs est rejeté par 29 voix contre 14, avec
10 abstentions.)
139. Le Greffier du Conseil d’administration invite le Conseil à voter à main levée sur le sousamendement
proposé par le groupe des États arabes.
(Le sous-amendement proposé par le groupe des États arabes est rejeté par 29 voix contre 23, avec
4 abstentions.)
140. La Vice-présidente employeuse demande au Bureau de vérifier le nombre de voix en faveur
du sous-amendement proposé par son groupe, qui est selon elle supérieur à celui annoncé.
141. Le Président déclare que, eu égard aux préoccupations exprimées par le groupe des
employeurs, le sous-amendement proposé par ce groupe sera de nouveau mis aux voix afin
de garantir l’intégrité de la procédure.
142. Une représentante du gouvernement des États-Unis, soulevant une motion d’ordre, déclare
qu’un nouveau vote sur le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs pourrait
modifier le résultat des votes sur l’amendement et l’autre sous-amendement, et demande des
précisions au sujet de la procédure.
143. Le Conseiller juridique indique que, conformément au paragraphe 6.1.2 du Règlement du
Conseil d’administration, en cas d’incertitude sur le résultat d’un vote, le Président est habilité
à demander qu’il soit procédé à un nouveau vote. Toutefois, si le Président estime que rien
dans le déroulement du vote ou le décompte des voix ne pose de problème manifeste, il peut
confirmer le résultat déjà annoncé.
144. La Vice-présidente travailleuse demande ce qu’il en est du vote sur le sous-amendement
proposé par le groupe des employeurs.
145. Le Greffier du Conseil d’administration répond que, conformément à la décision du
président, le Conseil d’administration s’apprête à procéder à un nouveau vote à main levée sur
le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs, afin de ne laisser planer aucun
doute sur la transparence et l’intégrité de la procédure.
(Le sous-amendement proposé par le groupe des employeurs est rejeté par 30 voix contre 16, avec
8 abstentions.)
146. Le Greffier du Conseil d’administration indique que le Conseil d’administration procèdera
ensuite à un vote à main levée sur l’amendement proposé par le groupe de 44 pays.
(L’amendement proposé par le groupe de 44 pays est accepté par 33 voix contre 21, avec
2 abstentions.)
Décision
147. Suite à la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements visant à ce que la
difficulté d’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection
GB.349bis/PV/Projet 37
du droit syndical, 1948, concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution de l’OIT, le Conseil d’administration décide d’adopter la résolution
suivante:
Le Conseil d’administration,
Conscient qu’il existe entre les mandants tripartites de l’Organisation internationale du
Travail (OIT) un désaccord profond et persistant au sujet de l’interprétation de la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce
qui est du droit de grève,
Rappelant que cette difficulté d’interprétation découle d’une divergence de vues entre
les mandants tripartites de l’Organisation quant au point de savoir si le droit de grève est
protégé par la convention no 87,
Notant que les organes de contrôle de l’OIT ont systématiquement observé que le droit
de grève est un corolaire de la liberté syndicale, qui constitue un droit fondamental,
Gravement préoccupé par les incidences que cette difficulté d’interprétation a sur le
fonctionnement de l’OIT et la crédibilité de son système normatif,
Affirmant la nécessité que cette difficulté soit résolue conformément à la Constitution
de l’OIT,
Rappelant que, aux termes de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT,
«[t]outes questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la […] Constitution et des
conventions ultérieurement conclues par les Membres, en vertu de ladite Constitution,
seront soumises à l’appréciation de la Cour internationale de Justice»,
Rappelant la décision consensuelle prise par le Conseil d’administration à sa 320e session
(mars 2014), dans laquelle celui-ci se félicitait de «l’exposé clair de son mandat par la
commission d’experts, tel qu’il figure dans le rapport de la Commission pour 2014»:
«La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
est un organe indépendant établi par la Conférence internationale du Travail; ses
membres sont nommés par le Conseil d’administration. Elle est constituée de juristes
ayant pour mission d’examiner l’application des conventions et recommandations de
l’OIT dans les États Membres de cette Organisation. La commission d’experts procède
à une analyse impartiale et technique de la façon dont les conventions ratifiées sont
appliquées dans la législation et la pratique par les États Membres, en gardant à
l’esprit les diverses réalités nationales et les différents systèmes juridiques. Ce
faisant, elle examine la portée juridique, le contenu et la signification des
dispositions des conventions. Ses avis et recommandations ont un caractère non
contraignant, leur objet étant de guider l’action des autorités nationales. Ils tirent
leur valeur persuasive de la légitimité et de la rationalité du travail de la commission
qui est basé sur son impartialité, son expérience et son expertise. Le rôle technique
de la commission et son autorité morale sont largement reconnus, en particulier du
fait qu’elle poursuit sa tâche de contrôle depuis plus de quatre-vingt-cinq ans et en
raison de sa composition, de son indépendance et de ses méthodes de travail qui se
fondent sur un dialogue continu avec les gouvernements et prennent en compte les
informations fournies par les organisations d’employeurs et de travailleurs. Cela se
reflète dans l’intégration des avis et recommandations de la commission dans les
législations nationales, dans des instruments internationaux et dans les décisions
des tribunaux.»
Notant que, malgré les tentatives menées de longue date, aucun consensus n’a été
atteint par le dialogue tripartite,
Soulignant que l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution établit que tout renvoi
devant la Cour internationale de Justice vise à obtenir l’appréciation de la Cour sur la
question ou difficulté d’interprétation objet du renvoi,
GB.349bis/PV/Projet 38
Exprimant le voeu que, compte tenu de la structure tripartite unique de l’OIT, non
seulement les gouvernements des États Membres de l’Organisation, mais aussi les
organisations internationales d’employeurs et de travailleurs ayant un statut consultatif
général auprès de l’OIT seront invités à participer directement et sur un pied d’égalité à
la procédure écrite et à toute procédure orale devant la Cour,
Décide, conformément à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT:
1. de demander à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence, en
vertu de l’article 65, paragraphe 1, de son Statut et de l’article 103 de son
Règlement, un avis consultatif sur la question suivante:
Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par
la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948?
2. Charge le Directeur général:
a) de transmettre la présente résolution à la Cour internationale de Justice,
accompagnée de tout document pouvant servir à élucider la question,
conformément à l’article 65, paragraphe 2, du Statut de la Cour;
b) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice de
permettre que les organisations d’employeurs et de travailleurs ayant un
statut consultatif général auprès de l’OIT participent à la procédure
consultative;
c) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice
d’examiner les mesures possibles pour accélérer la procédure,
conformément à l’article 103 du Règlement de la Cour, de manière à répondre
d’urgence à cette demande;
d) d’informer le Conseil économique et social des Nations Unies de cette
demande, conformément à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord entre les
Nations Unies et l’Organisation internationale du Travail, 1946.
(GB.349bis/INS/1/1, paragraphe 27, tel que modifié par le Conseil d’administration)
148. La Vice-présidente employeuse remercie les gouvernements qui ont pris part au débat, en
particulier ceux qui ont plaidé en faveur du dialogue social. Il est regrettable que le Président
ait imposé un vote sur la question, alors que le Conseil d’administration doit aborder une
question très similaire le lendemain, à sa 349e ter session. En outre, la grande majorité des pays
qui ont pris la parole le matin en comité plénier se sont déclarés favorables au dialogue social
et opposés au renvoi de la question devant la CIJ. Nombre d’entre eux ont également exprimé
des doutes sur l’opportunité que le Conseil d’administration se prononce sur la question, eu
égard aux préoccupations formulées quant au caractère démocratique de sa composition.
149. Les 33 voix exprimées en faveur du renvoi de la question devant la CIJ représentent un
pourcentage très faible – 4 ou 5 pour cent selon son estimation – du nombre des voix qui
auraient pu être recueillies si la décision avait été soumise à la Conférence internationale du
Travail. La grande majorité des mandants de l’OIT ont donc été privés de la possibilité de
dialoguer et de se prononcer sur la question en toute légitimité et de façon inclusive.
150. L’oratrice déclare avec un profond regret que les gouvernements qui étaient auparavant les
champions du dialogue social ont perdu toute légitimité en la matière, car ils n’ont pas associé
le groupe des employeurs aux consultations qu’ils ont menées ni tenté de parvenir à un
consensus tripartite, créant ainsi un nouveau précédent dans ce domaine. Les conséquences
de l’adoption forcée de la décision seront désastreuses pour l’Organisation.
151. La Vice-présidente travailleuse refuse qu’on puisse laisser entendre que seuls les
gouvernements ayant appuyé les vues du groupe des employeurs sont en faveur du dialogue
GB.349bis/PV/Projet 39
social. Elle ne peut pas non plus laisser dire que le Président a été contraint de recourir au vote;
le groupe des travailleurs était en droit de demander que la décision soit mise aux voix face à
l’impossibilité de parvenir à un consensus. Les membres du Conseil d’administration sont
mandatés par ceux qu’ils représentent pour s’exprimer et prendre une décision en leur nom.
Si elle convient qu’il faut manifestement poursuivre les discussions relatives à la
démocratisation du Conseil d’administration, l’oratrice conteste l’idée que celui-ci serait
dépourvu d’autorité décisionnelle, qui revient de fait à remettre en cause la structure de
gouvernance de l’Organisation.
152. Afin de préserver la crédibilité de l’OIT, il importe de ne laisser aucun conflit sans solution.
L’oratrice forme l’espoir que les mandants de tous bords contribueront comme il convient à
l’examen de la question par la CIJ et que, une fois cette procédure à son terme, le Conseil
d’administration tiendra des discussions approfondies sur la suite à donner à l’avis rendu.
153. La Vice-présidente travailleuse remercie tous les gouvernements qui ont pris part aux
discussions et sait gré à ceux qui ont proposé l’amendement de leur engagement. Elle salue le
professionnalisme, la compétence et l’investissement dont le Bureau et son personnel ont fait
preuve pour organiser et gérer la session spéciale et remercie le Président d’avoir permis, par
sa conduite des débats, de parvenir à une décision solide.
154. Un représentant du gouvernement du Pakistan, expliquant son vote, dit que la position de
sa délégation au sujet de l’amendement proposé par le groupe de 44 pays doit être replacée
dans le contexte de la déclaration formulée par son gouvernement concernant l’acceptation
de la juridiction de la CIJ à l’égard des différends résultant d’un traité multilatéral.
Document no 32
GB.349ter/INS/1, Suite à donner à la demande du groupe
des employeurs visant à ce que la question du droit de
grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative,
à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence
internationale du Travail, octobre 2023
GB.349ter/INS/1
Afin de réduire au maximum l’impact environnemental des activités de l’OIT, les documents du Conseil d’administration publiés avant ou après les sessions ne
sont pas imprimés. Seuls les documents publiés en cours de session sont imprimés, en nombre limité, et distribués aux membres du Conseil d’administration.
Tous les documents du Conseil d’administration sont disponibles sur Internet, à l’adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
349ᵉ ter session (spéciale), Genève, 11 novembre 2023
Section institutionnelle INS
Date: 11 octobre 2023
Original: anglais
Première question à l’ordre du jour
Suite à donner à la demande du groupe
des employeurs visant à ce que la question du droit
de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion
normative, à l’ordre du jour de la 112e session
de la Conférence internationale du Travail
Le présent document a été élaboré aux fins de la session spéciale du Conseil d’administration qui a été convoquée
au titre du paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration à la suite de la demande du groupe des
employeurs visant à ce que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à
l’ordre du jour de la 112e session (juin 2024) de la Conférence internationale du Travail. Il contient un rapport
d’information en prévision de la discussion. Ce rapport d’information présente les règles de l’OIT applicables à
l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence en vue d’une discussion normative, la pratique suivie
par l’Organisation concernant l’adoption de protocoles, les origines de la proposition de tenir une discussion
normative sur le droit de grève, puis certaines observations finales synthétisant les conséquences possibles de
ces facteurs sur l’action normative proposée. Le Conseil d’administration est invité à prendre note de ce rapport
d’information et à fournir des orientations sur la suite à donner à la proposition visant l’inscription d’une question
pour discussion normative à l’ordre du jour de la Conférence de l’an prochain (voir le projet de décision au
paragraphe 16).
Objectif stratégique pertinent: Normes et principes et droits fondamentaux au travail.
Principal résultat: Résultat 2: Des normes internationales du travail et un système de contrôle efficace et
faisant autorité.
Objet du document
GB.349ter/INS/1 2
Incidences sur le plan des politiques: Aucune à ce stade.
Incidences juridiques: Aucune à ce stade.
Incidences financières: Aucune à ce stade.
Suivi nécessaire: Selon la décision du Conseil d’administration.
Unité auteur: Département des normes internationales du travail (NORMES).
Documents connexes: GB.349bis/INS/1; GB.349/INS/2.
GB.349ter/INS/1 3
Table des matières
Page
Introduction .............................................................................................................................................. 5
Chronologie ............................................................................................................................................... 5
Rapport d’information du Bureau .......................................................................................................... 7
Projet de décision ..................................................................................................................................... 7
Annexe ....................................................................................................................................................... 9
Action normative sur le droit de grève en vue de l’adoption éventuelle d’un protocole
– rapport d’information ....................................................................................................................... 9
I. Règles applicables à l’inscription d’une question à l’ordre du jour
de la Conférence en vue d’une discussion normative ......................................................... 9
Inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence en vue
d’une discussion normative ..................................................................................................... 9
Préparation d’une discussion normative en vue de l’adoption d’un protocole ............... 10
Ordre du jour des sessions à venir de la Conférence .......................................................... 11
II. Action normative en vue de l’adoption d’un protocole ....................................................... 12
A. Protocoles relatifs à des conventions internationales du travail – généralités ....... 12
A.1. Nature, objet et effets juridiques d’un protocole ................................................. 12
A.2. Présentation succincte des protocoles de l’OIT .................................................... 12
Protocole de 1982 relatif à la convention sur les plantations,
1958 (P110) ................................................................................................................. 13
Protocole de 1990 relatif à la convention sur le travail de nuit
(femmes) (révisée), 1948 (P089) .............................................................................. 13
Protocole de 1995 relatif à la convention sur l’inspection
du travail, 1947 (P081) .............................................................................................. 14
Protocole de 1996 relatif à la convention sur la marine
marchande (normes minima), 1976 (P147) ........................................................... 15
Protocole de 2002 relatif à la convention sur la sécurité
et la santé des travailleurs, 1981 (P155) ................................................................ 16
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé,
1930 (P029) ................................................................................................................. 16
III. Origine de la proposition d’action normative sur le droit de grève .................................. 18
IV. Considérations finales .............................................................................................................. 23
Objet et but d’un protocole de l’OIT sur le droit de grève .................................................. 24
Une relation synergique entre les fonctions de contrôle indépendant
de la commission d’experts et la fonction normative de la Conférence ........................... 24
Procédure d’adoption et calendrier ........................................................................................ 26
V. Observations finales ................................................................................................................. 26
GB.349ter/INS/1 5
Introduction
1. Selon la Constitution de l’OIT et le Règlement du Conseil d’administration, une session spéciale
du Conseil d’administration peut être convoquée lorsque le nombre minimal requis de
membres titulaires du Conseil en fait la demande par écrit, ou lorsque le Président de celui-ci
l’estime nécessaire.
2. En particulier, l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution prévoit ce qui suit:
Une session spéciale (special meeting) [du Conseil d’administration] devra être tenue chaque
fois que seize personnes faisant partie du Conseil auront formulé une demande écrite à cet
effet.
3. En outre, le paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration est ainsi libellé:
Sans préjudice de ce qui est stipulé au dernier alinéa de l’article 7 de la Constitution de
l’Organisation, le Président peut également convoquer, après consultation des Vice-présidents,
une session extraordinaire (special meeting) quand cela lui paraît nécessaire. Le Président est
tenu de le faire à la réception d’une demande à cet effet signée par seize membres du groupe
gouvernemental, ou douze membres du groupe des employeurs, ou douze membres du
groupe des travailleurs.
4. Par voie de conséquence, la tenue d’une session spéciale est obligatoire lorsqu’une demande
écrite est formulée à cet effet soit par 16 membres titulaires tous groupes confondus, soit par
16 membres titulaires du groupe gouvernemental, ou 12 membres titulaires du groupe des
employeurs, ou 12 membres titulaires du groupe des travailleurs; une telle session peut
également être convoquée de manière volontaire par le Président du Conseil d’administration,
dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire 1..
5. À ce jour, une session spéciale a été convoquée à trois occasions, en septembre 1932, en
octobre 1935 et en mai 1970, chaque fois à l’initiative du Président du Conseil d’administration,
dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire 2.
Chronologie
6. Dans une communication en date du 12 septembre 2023 adressée au Président du Conseil
d’administration, les 14 membres titulaires du groupe des employeurs siégeant au Conseil ont
demandé la tenue d’une session spéciale en vertu du paragraphe 3.2.2 du Règlement du
Conseil d’administration afin qu’une décision soit prise sur la proposition visant l’inscription
d’urgence, pour discussion normative, de la question du droit de grève à l’ordre du jour de la
112e session (juin 2024) de la Conférence internationale du Travail (la Conférence).
7. Plus concrètement, le groupe des employeurs propose que la Conférence adopte un protocole
pour adjonction à la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1 Pour en savoir davantage, voir la Note du Bureau sur l’origine et l’évolution des règles applicables à la tenue des sessions
spéciales du Conseil d’administration.
2 Pour en savoir davantage, voir la Note du Bureau sur la pratique antérieure relative aux sessions spéciales du Conseil
d’administration.
GB.349ter/INS/1 6
1948. Ce protocole porterait sur le droit de grève et, plus largement, sur l’action collective 3. Le
protocole ainsi adopté définirait avec autorité la portée du droit de grève et ses limites dans le
contexte de la convention no 87. Les obligations découlant du protocole deviendraient
contraignantes pour les parties à la convention qui l’auraient ratifié. De ce fait, l’adoption d’un
tel protocole réglerait la difficulté d’interprétation persistante au sujet du droit de grève.
8. Dans leur communication, les membres du groupe des employeurs indiquent également que
l’adoption d’un protocole sur le droit de grève pour adjonction à la convention no 87
démontrerait que le dialogue au sein des structures tripartites de l’OIT permet d’apporter une
solution durable au conflit relatif à l’interprétation du droit de grève et qu’une saisine de la
Cour internationale de Justice (la CIJ ou la Cour) n’est pas nécessaire.
9. Cette communication a été remise au groupe de sélection du Conseil d’administration par la
Vice-présidente employeuse lors d’une réunion tenue le 13 septembre 2023, dont l’objet était
de discuter de la convocation d’une session spéciale aux fins de l’examen d’une demande,
présentée par le groupe des travailleurs et 36 gouvernements, visant à ce que la difficulté
d’interprétation de la convention no 87 concernant le droit de grève soit soumise d’urgence à
l’appréciation de la CIJ en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT 4.
10. Dans leur communication, les membres du groupe des employeurs demandaient à ce qu’une
session spéciale concernant l’adjonction éventuelle d’un protocole sur le droit de grève à la
convention no 87 ait lieu avant celle demandée par le groupe des travailleurs et
36 gouvernements, afin de faire en sorte que la possibilité d’une action normative sur le droit
de grève ne soit pas rendue obsolète par la saisine de la CIJ.
11. Par une lettre circulaire en date du 15 septembre 2023, le Directeur général a informé
l’ensemble des États Membres de la demande du groupe des employeurs et de la décision du
groupe de sélection.
12. Le 25 septembre 2023, le Bureau a reçu une note verbale de la mission permanente de la
République de Türkiye auprès de l’Office des Nations Unies à Genève dans laquelle celle-ci se
déclarait favorable à la tenue demandée d’une session spéciale concernant l’inscription, pour
discussion normative, de la question du droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session de
la Conférence et l’élaboration d’un protocole à la convention no 87, et ajoutait que l’objectif
principal d’un tel protocole serait de définir, au moyen de critères précis et faisant autorité, la
portée et les limites du droit de grève, ce qui permettrait en définitive de résoudre la difficulté
d’interprétation persistante. Cette note verbale a été transmise à tous les États Membres sous
le couvert d’une lettre circulaire du Directeur général en date du 26 septembre 2023.
13. Le 28 septembre 2023, le groupe de sélection tripartite a décidé qu’une session spéciale
consacrée à la demande du groupe des employeurs se tiendrait le 11 novembre. Le Directeur
général a informé tous les États Membres de la décision du groupe de sélection par une lettre
circulaire en date du 29 septembre 2023.
3 Il est rappelé que, dans leur déclaration conjointe de 2015, le groupe des employeurs et le groupe des travailleurs s’étaient
référés au droit de mener des actions collectives. Eu égard à une série de commentaires formulés en la matière par des
organes de contrôle de l’OIT et à plusieurs législations internes, la notion d’action collective peut être interprétée comme
englobant: i) différents types d’actions de grève menées par les travailleurs et leurs organisations selon différentes modalités
(grève des bras croisés, grève perlée, grève du zèle, par exemple); et/ou ii) non seulement les actions de grève des travailleurs
et de leurs organisations mais aussi les grèves patronales (lock-outs).
4 Un historique détaillé figure dans le document GB.349bis/INS/1, aux paragraphes 6 à 21.
GB.349ter/INS/1 7
Rapport d’information du Bureau
14. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil d’administration examinera la demande du groupe
des employeurs dans le cadre d’une session spéciale. Cette session spéciale permettra aux
parties prenantes de procéder à un échange de vues approfondi et au Conseil d’administration
de prendre une décision éclairée eu égard à l’objet et au but de l’instrument proposé et au
calendrier envisagé.
15. En conséquence, le Bureau a élaboré un rapport d’information afin de faciliter les discussions
du Conseil d’administration. Ce rapport d’information présente: i) les règles de l’OIT applicables
à l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence en vue d’une discussion
normative; ii) la pratique suivie par l’Organisation concernant les protocoles; iii) les origines de
la proposition de tenir une discussion normative sur le droit de grève; iv) d’ultimes
considérations au sujet des conséquences possibles de la discussion normative proposée; et
v) quelques observations finales.
Projet de décision
16. Suite à la demande du groupe des employeurs et de la République de Türkiye visant à ce
que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à
l’ordre du jour de la 112e session (2024) de la Conférence internationale du Travail, le
Conseil d’administration décide
[décision à prendre à l’issue de la session spéciale]
GB.349ter/INS/1 9
Annexe
Action normative sur le droit de grève en vue de l’adoption éventuelle
d’un protocole – rapport d’information
I. Règles applicables à l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence
en vue d’une discussion normative
Inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence
en vue d’une discussion normative
1. La proposition tendant à inscrire une question à l’ordre du jour de la 112e session (juin 2024)
de la Conférence en vue d’une discussion normative doit être examinée à la lumière du cadre
juridique et procédural applicable en la matière, tel qu’établi par la Constitution, le Règlement
de la Conférence internationale du Travail et le Règlement du Conseil d’administration 1.
2. L’établissement de l’ordre du jour de la Conférence incombe au premier chef au Conseil
d’administration. Les propositions tendant à inscrire une question à l’ordre du jour de la
Conférence doivent être discutées à deux sessions successives du Conseil d’administration,
sauf si l’inscription d’une question proposée recueille l’assentiment unanime des membres du
Conseil lors de la première discussion (paragraphe 5.1.1 du Règlement du Conseil
d’administration).
3. Les paragraphes 54 à 56 de la Note introductive au Règlement du Conseil d’administration
disposent ce qui suit:
54. Les questions inscrites à l’ordre du jour de la Conférence sont inscrites à deux sessions
successives du Conseil de sorte que la décision finale puisse être prise deux années avant
l’ouverture de la Conférence.
55. La première étape de la discussion, qui a lieu lors de la session de novembre, vise à
déterminer les questions parmi lesquelles le choix pourrait être fait. Le Conseil se fonde pour
ce faire sur un document contenant toutes les informations nécessaires sur les questions
proposées par le Directeur général.
56. La deuxième étape, qui a lieu lors de la session de mars, vise à prendre une décision
définitive. Le document qui sert de base à la discussion comprend les questions
supplémentaires proposées par le Conseil lors de la première étape de la discussion. Si une
décision ne peut être prise lors de la session de mars, il est encore possible de prendre une
décision définitive à la session du mois de novembre suivant. Néanmoins, en vue d’assurer une
préparation complète par le Bureau, cette troisième discussion devrait rester exceptionnelle.
4. À moins que le Conseil d’administration n’en décide autrement, une question inscrite à l’ordre
du jour de la Conférence en vue d’une action normative est considérée comme soumise à la
Conférence pour faire l’objet d’une double discussion (paragraphe 5.1.4 du Règlement du
Conseil d’administration). Le paragraphe 5.1.5 du Règlement du Conseil d’administration
prévoit que, en cas d’urgence spéciale ou si d’autres circonstances particulières le justifient, le
Conseil d’administration peut, à la majorité des trois cinquièmes des votes exprimés, décider
1 Voir Constitution de l’OIT, art. 14 (1); Règlement de la Conférence internationale du Travail, art. 44 à 52; Règlement du
Conseil d’administration, art. 5.1, ainsi que la Note introductive du Recueil de règles applicables au Conseil d’administration,
paragr. 54 à 56.
GB.349ter/INS/1 10
de soumettre une question à la Conférence pour faire l’objet d’une simple discussion, en vue
de l’adoption d’une convention ou d’une recommandation. Jusqu’à présent, tous les protocoles
sauf un (le protocole de 1990 relatif à la convention (nº 89) sur le travail de nuit (femmes)
(révisée), 1948) ont été adoptés à l’issue d’une simple discussion à la Conférence.
Préparation d’une discussion normative en vue de l’adoption d’un protocole
5. Les questions devant faire l’objet d’une discussion normative sont généralement inscrites à
l’ordre du jour de la Conférence plus de deux ans avant l’ouverture de la session à laquelle elles
doivent être discutées, en raison des délais impartis pour les stades préparatoires des
procédures de simple discussion et de double discussion qui sont expressément définis par le
Règlement de la Conférence (articles 45 et 46 du Règlement de la Conférence). Comme indiqué
plus en détail ci-après, ces stades préparatoires comprennent l’élaboration d’un rapport
préliminaire exposant la législation et la pratique des différents pays, accompagné d’un
questionnaire, la communication des réponses des mandants et l’élaboration par le Bureau
d’un nouveau rapport contenant un projet de conclusions qui, en principe, sert de base à la
première discussion de la Conférence.
6. Ainsi que le prévoient les articles 45 et 46 du Règlement de la Conférence, lorsqu’une question
est inscrite à l’ordre du jour de la Conférence en vue d’une action normative régie par la
procédure de simple ou de double discussion, le Bureau élabore, aussitôt que possible, un
rapport préliminaire exposant la législation et la pratique dans les différents pays, ainsi que
tous les autres éléments d’information utiles, en même temps qu’un questionnaire demandant
aux gouvernements de consulter les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus
représentatives avant d’arrêter définitivement leurs réponses, et de donner des réponses
motivées. Le Bureau communique le rapport et le questionnaire aux gouvernements de telle
manière qu’ils leur parviennent dix-huit mois au moins avant l’ouverture de la session de la
Conférence à laquelle la première discussion doit avoir lieu. Les réponses devraient parvenir
au Bureau aussitôt que possible et en tout cas onze mois au moins avant l’ouverture de la
session de la Conférence à laquelle la première discussion doit avoir lieu. Sur la base des
réponses reçues, le Bureau élabore un nouveau rapport indiquant les principales questions à
considérer par la Conférence. Ce rapport est communiqué aussitôt que possible aux
gouvernements par le Bureau, lequel ne ménagera aucun effort pour que ce rapport leur
parvienne quatre mois au moins avant l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle la
première discussion doit avoir lieu.
7. On trouvera ici un schéma contenant des explications détaillées sur les étapes d’une discussion
normative et les délais statutaires y relatifs.
8. Ces dispositions s’appliquent uniquement dans les cas où la question a été inscrite à l’ordre du
jour de la Conférence vingt-six mois au moins avant l’ouverture de la session de la Conférence
à laquelle elle doit être discutée s’il s’agit d’une simple discussion (article 45, paragraphe 4, du
Règlement de la Conférence) ou dix-huit mois au moins avant l’ouverture de la session de la
Conférence à laquelle elle doit être discutée s’il s’agit d’une double discussion (article 46,
paragraphe 5, du Règlement de la Conférence).
9. Si une question est inscrite à l’ordre du jour de la Conférence moins de vingt-six mois avant
l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle elle doit être discutée s’il s’agit d’une
simple discussion, ou moins de dix-huit mois avant l’ouverture de la session de la Conférence
à laquelle elle doit être discutée s’il s’agit d’une double discussion, le Conseil d’administration
approuve un programme prévoyant des délais réduits.
GB.349ter/INS/1 11
10. La dernière fois que le Conseil d’administration a approuvé un programme prévoyant des
délais réduits en vue d’une simple discussion relative à l’adoption éventuelle d’un protocole
remonte à mars 2013 (GB.317/PV, paragr. 25 b); il avait alors décidé d’inscrire à l’ordre du jour
de la session de 2014 de la Conférence une question en vue d’une discussion normative pour
compléter la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, discussion qui a abouti à l’adoption
du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930. Le Conseil
d’administration a également approuvé des délais réduits en mars 2002 (GB.283/PV, page I/7;
GB.283/16/3), lorsqu’il a décidé d’inscrire à l’ordre du jour de la session de 2003 de la
Conférence une question en vue d’une discussion normative sur l’adjonction éventuelle d’un
protocole à la convention (nº 108) sur les pièces d’identité des gens de mer, 1958, discussion
qui a abouti à l’adoption de la convention (no 185) sur les pièces d’identité des gens de mer
(révisée), 2003, telle qu’amendée.
11. D’après les archives du BIT, aucune action normative ayant abouti à l’adoption d’un protocole
n’a été menée à bien en moins de quatorze ou quinze mois à compter de la date d’inscription
de la question correspondante à l’ordre du jour de la Conférence, sauf dans le cas du protocole
de 1996 relatif à la convention (nº 147) sur la marine marchande (normes minima), 1976, qui
avait fait l’objet d’une conférence technique préparatoire.
Ordre du jour des sessions à venir de la Conférence
12. Au titre de la deuxième question de sa section institutionnelle, le Conseil d’administration
examine des propositions concernant l’ordre du jour des sessions à venir de la Conférence en
s’appuyant sur une approche stratégique et cohérente qu’il a approuvée à sa 322e session
(octobre-novembre 2014) 2.
13. À sa 341e session (mars 2021), le Conseil d’administration a décidé d’inscrire à l’ordre du jour
des 112e et 113e sessions (2024 et 2025) de la Conférence une question relative à la protection
de la sécurité et de la santé au travail contre les dangers biologiques (action normative –
double discussion) 3.
14. Comme indiqué dans le document GB.349/INS/2 qui sera examiné à la 349e session du Conseil
d’administration (octobre-novembre 2023), le Conseil, à sa 344e session (mars 2022), a ajouté
à l’ordre du jour de la session de 2024 de la Conférence une question sur le travail décent et
l’économie du soin en vue d’une discussion générale 4.
15. À sa 347e session (mars 2023), le Conseil d’administration a ajouté à l’ordre du jour de la
113e session (2025) de la Conférence une question sur l’économie des plateformes en vue d’une
action normative et une question sur des approches innovantes pour lutter contre l’informalité
et promouvoir des transitions vers la formalité afin d’encourager le travail décent, en vue d’une
discussion générale 5.
16. Le Conseil d’administration est invité à décider, à sa 349e session (octobre-novembre 2023), s’il
convient d’inscrire à l’ordre du jour de la 114e session (juin 2026) ou de la 115e session (juin
2027) de la Conférence une question sur le regroupement des instruments concernant les
dangers liés aux produits chimiques en vue d’une action normative régie par la procédure de
double discussion. Eu égard aux délais statutaires rappelés plus haut, pour pouvoir inscrire
2 GB.322/PV, paragr. 17; et GB.322/INS/2, paragr. 11 à 19.
3 GB.341/INS/3/1(Rev.2)/Décision.
4 GB.344/INS/3/1 et GB.344/INS/3/1/Décision.
5 GB.347/INS/2/1 et GB.347/INS/2/1/Décision.
GB.349ter/INS/1 12
cette question à l’ordre du jour de la 114e session (juin 2026) de la Conférence, le Conseil
d’administration devrait prendre une décision au plus tard à sa 350e session (mars 2024) 6.
II. Action normative en vue de l’adoption d’un protocole
A. Protocoles relatifs à des conventions internationales du travail – généralités
A.1. Nature, objet et effets juridiques d’un protocole
17. Les protocoles sont des traités internationaux ouverts à la ratification des États Membres de
l’OIT. Chaque protocole est rattaché à une convention existante. Les protocoles entrent en
vigueur conformément aux conditions énoncées dans leurs dispositions finales et créent des
obligations juridiques pour les États qui les ratifient, sans effet rétroactif. Les protocoles sont
soumis aux mêmes obligations en matière de présentation de rapports que les conventions
auxquelles ils sont rattachés, et peuvent donner lieu à des plaintes et à des réclamations 7.
18. Un protocole ne peut être ratifié que par les États qui sont déjà liés par la convention à laquelle
il est rattaché. Les États qui décident de ne pas ratifier le protocole demeurent liés par la
convention pertinente dans sa forme originale, ce qui va dans le même sens que l’article 40(4)
de la Convention de Vienne sur le droit des traités, aux termes duquel un «accord portant
amendement ne lie pas les États qui sont déjà parties au traité et qui ne deviennent pas parties
à cet accord».
19. Le principal avantage d’un protocole, outre son champ d’application bien délimité, est qu’il n’a
aucune incidence sur les ratifications de la convention à laquelle il est rattaché, celle-ci restant
ouverte à de nouvelles ratifications. C’est un instrument simple et souple, particulièrement
utile pour modifier ou compléter une partie d’une convention existante ou un nombre limité
de ses dispositions.
20. À ce jour, l’OIT a adopté six protocoles relatifs à des conventions internationales du travail. Le
premier protocole a été adopté en 1982 et visait à réviser la convention (nº 110) sur les
plantations, 1958. Il s’agissait d’apporter des modifications limitées selon une méthode
simplifiée, sans avoir à rédiger une nouvelle convention ou à reproduire intégralement le texte
de la convention existante 8.
21. Cette manière innovante de procéder a été décrite pour la première fois dans le rapport du
Groupe de travail Ventejol de 1979 sur la révision des normes. Avant 1982, la seule méthode
utilisée aux fins de la révision, totale ou partielle, d’une convention consistait à élaborer une
nouvelle convention dans le cadre d’une simple discussion ou d’une double discussion à la
Conférence. En réalité, tous les exercices de révision auxquels il a été procédé depuis 1950 ont
été menés conformément à la procédure généralement utilisée aux fins de l’adoption de
nouvelles normes.
A.2. Présentation succincte des protocoles de l’OIT
22. On trouvera ci-après une présentation succincte des six protocoles adoptés par l’OIT. L’objectif
est de faire le point sur la pratique qui a été suivie antérieurement en ce qui concerne l’objet
6 GB.349/INS/2, paragr. 15.
7 OIT, Renforcer la lutte contre le travail forcé, ILC.103/IV/1, 2014, 73; et Compte rendu des travaux, PR 9(Rev.), Conférence
internationale du Travail (CIT), 103e session, 2014, paragr. 580.
8 OIT, Révision de la convention (no 110) et de la recommandation (nº 110) sur les plantations, 1958, Rapport VII (2), 26; et «Rapport
de la Commission des plantations», Compte rendu provisoire, no 18, CIT, 68e session, 1982, paragr. 9.
GB.349ter/INS/1 13
et le contenu des protocoles, le calendrier des travaux et le processus d’adoption. Ce tour
d’horizon éclairera les considérations finales énoncées à la fin du rapport.
Protocole de 1982 relatif à la convention sur les plantations, 1958 (P110)
23. Objet et contenu: Ce protocole vise à modifier le champ d’application de la convention no 110
en donnant la possibilité aux États Membres d’exclure de l’application de la convention, après
consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs, les exploitations dont la
superficie ne dépasse pas 5 hectares, et qui n’emploient pas plus de dix travailleurs dans une
période quelconque au cours d’une année civile.
24. Processus d’adoption: À sa 214e session (novembre 1980), le Conseil d’administration a décidé
d’inscrire à l’ordre du jour de la 68e session (1982) de la Conférence une question concernant
une révision limitée de la convention no 110 en vue d’une action normative régie par la
procédure de simple discussion. Un rapport sur la législation et la pratique des États,
accompagné d’un questionnaire, a été élaboré de manière à pouvoir être communiqué aux
gouvernements douze mois au moins avant l’ouverture de la 68e session. Les réponses
devaient parvenir au Bureau le 2 octobre 1981 au plus tard. Il n’a pas été approuvé de
programme prévoyant des délais réduits car la question avait été inscrite à l’ordre du jour dans
les délais prévus par le Règlement de la Conférence 9.
25. Ratification: À ce jour, le protocole a été ratifié par deux des dix pays qui sont liés par la
convention no 110.
Protocole de 1990 relatif à la convention sur le travail de nuit (femmes) (révisée), 1948 (P089)
26. Objet et contenu: Le protocole vise à élargir le champ des dérogations à l’interdiction du
travail de nuit des femmes dans l’industrie qui peuvent être permises et à introduire des durées
variables de la période de nuit, ainsi que le prévoit la convention no 89. Ces modifications ont
été jugées nécessaires pour tenir compte de l’évolution du rôle des femmes dans le monde du
travail et de la forte augmentation de leur taux d’activité au cours des quarante-deux années
écoulées depuis l’adoption de la convention. Les dérogations reposent sur l’élaboration de
politiques consensuelles mettant en balance les mesures qui limitent la liberté de choix des
femmes quant à leurs horaires de travail et réduisent leur capacité à concurrencer les hommes
sur le marché du travail, avec les mesures visant à leur assurer une protection adéquate dans
les cas où existe un besoin avéré de protection 10. Une réunion d’experts tenue avant l’adoption
du protocole avait mis en évidence la complexité de la question due aux conflits qu’elle
supposait entre les valeurs et les doctrines juridiques relatives à la prévention de la
discrimination en matière d’emploi et celles axées sur la sécurité et la santé des travailleuses.
9 Dans le Règlement en vigueur à l’époque, les dispositions pertinentes étaient l’article 38, paragraphe 1, libellé comme suit:
Lorsqu’une question est régie par la procédure de simple discussion, le Bureau international du Travail communique à
tous les gouvernements, de telle manière qu’il leur parvienne douze mois au moins avant l’ouverture de la session de la
Conférence à laquelle la question doit être discutée, un rapport sommaire sur cette question contenant un exposé de la
législation et de la pratique dans les différents pays et accompagné d’un questionnaire établi en vue de l’élaboration de
conventions ou de recommandations. Ce questionnaire demande des réponses motivées des gouvernements. Ces
réponses devraient parvenir au Bureau aussitôt que possible et en tout cas huit mois au moins avant l’ouverture de la
session de la Conférence à laquelle la question doit être discutée.
Et l’article 38, paragraphe 3, libellé comme suit:
Ces dispositions ne s’appliquent que dans les cas où la question a été inscrite à l’ordre du jour de la Conférence dix-huit
mois au moins avant l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle elle doit être discutée.
10 OIT, Travail de nuit des femmes dans l’industrie, Rapport III (partie 1B), CIT, 89e session, 2001, paragr. 24.
GB.349ter/INS/1 14
Le protocole a été adopté en même temps que la convention (nº 171) sur le travail de nuit,
1990, dans l’idée de favoriser la conciliation des différentes perspectives et doctrines au sein
d’une politique cohérente 11. Le protocole a aussi permis d’assouplir les interdictions du travail
de nuit des femmes tout en maintenant les restrictions dont il était estimé qu’elles
demeuraient valables dans certains contextes. Les pays qui étaient disposés à adopter une
approche centrée sur l’égalité de traitement des femmes et des hommes ont trouvé dans la
convention no 171 un arsenal de mesures de protection pouvant être prises au profit de
l’ensemble des travailleurs de nuit, sans discrimination, mesures qui portaient notamment sur
de nombreux aspects intéressant tout particulièrement les femmes.
27. Processus d’adoption: À sa 238e session (novembre 1987), le Conseil d’administration a décidé
d’inscrire à l’ordre du jour de la 76e session (1989) de la Conférence une question concernant
le travail de nuit en vue d’une action normative régie par la procédure de double discussion.
Un rapport sur la législation et la pratique des États, accompagné d’un questionnaire, a été
élaboré de manière à pouvoir être communiqué aux gouvernements douze mois au moins
avant l’ouverture de la 76e session. Les réponses devaient parvenir au Bureau le 6 octobre 1988
au plus tard. Il n’a pas été approuvé de programme prévoyant des délais réduits car la question
avait été inscrite à l’ordre du jour de la Conférence dans les délais prévus par le Règlement de
la Conférence.
28. Ratification: Le protocole a été ratifié par trois des 44 États Membres qui sont toujours liés
par la convention no 89.
Protocole de 1995 relatif à la convention sur l’inspection du travail, 1947 (P081)
29. Objet et contenu: Le protocole fait entrer dans le champ d’application de la convention (nº 81)
sur l’inspection du travail, 1947, toutes les catégories d’établissements qui ne sont pas
considérés comme industriels ou commerciaux. Il est apparu nécessaire de soumettre le
secteur des services non commerciaux à un «système d’inspection du travail aussi efficace et
aussi impartial» que celui prévu par la convention no 81, et d’aligner le champ d’application de
la convention no 81 sur celui de la convention (nº 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs,
1981, et de la convention (nº 161) sur les services de santé au travail, 1985, qui couvrent toutes
les branches d’activité économique. Suite à l’adoption de la convention, l’expérience a montré
que «les objections soulevées au départ quant au coût et aux difficultés [de l’extension du
système d’inspection au secteur des services non commerciaux] ont pu être surmontées ou
étaient sans fondement» 12.
30. Processus d’adoption: À sa 258e session (novembre 1993), le Conseil d’administration a décidé
d’inscrire à l’ordre du jour de la 82e session (1995) de la Conférence la question de l’extension
de la convention no 81 aux activités du secteur des services non commerciaux en vue d’une
action normative régie par la procédure de simple discussion. Un rapport sur la législation et
la pratique des États, accompagné d’un questionnaire, a été élaboré de manière à être
communiqué aux gouvernements douze mois au moins avant l’ouverture de la 82e session. Les
réponses devaient parvenir au Bureau le 30 septembre 1994 au plus tard. Il n’a pas été
approuvé de programme prévoyant des délais réduits car la question avait été inscrite à l’ordre
du jour de la Conférence dans les délais prévus par le Règlement de la Conférence.
11 OIT, Réunion d’experts sur les mesures spéciales de protection pour le femmes et l’égalité de chances et de traitement,
MEPMW/1989/7,1989, 1.
12 OIT, Extension de la convention (no 81) sur l’inspection du travail, 1947, aux activités du secteur des services non commerciaux,
Rapport VI (1), CIT, 82e session, 1995, 35.
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31. Ratification: À ce jour, le protocole a été ratifié par 12 des 148 États Membres qui sont liés par
la convention no 81.
Protocole de 1996 relatif à la convention sur la marine marchande (normes minima), 1976 (P147)
32. Objet et contenu: L’objectif du protocole était de mettre à jour la convention (nº 147) sur la
marine marchande (normes minima), 1976, moyennant une révision partielle de son annexe,
en s’appuyant sur les conclusions d’une Réunion tripartite sur les normes du travail maritime
tenue deux ans auparavant, en 1994. La convention no 147 comportait une annexe dans
laquelle étaient énumérées les normes que les États ayant ratifié l’instrument devaient
appliquer dans le contexte maritime. L’application des normes en question reposait sur le
principe «d’équivalence d’ensemble», dans la mesure où les États Membres, s’ils n’avaient pas
ratifié ces instruments, n’étaient pas liés par leurs dispositions. Le protocole avait pour effet
d’étendre la liste des conventions figurant en annexe à la convention no 147 pour y inclure des
conventions à jour relatives à la sécurité sociale, aux pièces d’identité ou encore au
rapatriement des gens de mer. La révision reposait notamment sur les enseignements tirés
des activités de contrôle régulier de l’application de la convention menées par la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations dans le cadre de l’examen
des rapports soumis au titre de l’article 22 de la Constitution et de ceux soumis au titre de
l’article 19 de la Constitution aux fins de l’Étude d’ensemble de 1990 13.
33. Processus d’adoption: À sa 262e session (mars-avril 1995), le Conseil d’administration a
examiné le rapport de la Réunion tripartite sur les normes du travail maritime
(novembre-décembre 1994) et décidé d’inscrire à l’ordre du jour de la 84e session (maritime)
de la Conférence, prévue pour janvier 1996, une question relative à la révision partielle de la
convention no 147. À ce moment-là, on a estimé que la question qu’il était proposé d’inscrire à
l’ordre du jour avait fait l’objet d’une conférence technique préparatoire au sens des
dispositions applicables du Règlement de la Conférence 14. Par conséquent, plutôt que de
communiquer un rapport et un questionnaire aux gouvernements, il a été demandé au Bureau
d’élaborer un rapport définitif en s’appuyant sur les travaux de la réunion tripartite. La
84e session (maritime) de la Conférence internationale du Travail a eu lieu en octobre 1996.
34. Ratification: Au moment de l’adoption de la convention du travail maritime, 2006 (MLC, 2006),
portant révision de la convention no 147 et de son protocole, 24 États, sur les 56 qui étaient
parties à la convention no 147, en avaient ratifié le protocole. À sa 111e session (juin 2023), la
Conférence a décidé de procéder au retrait du protocole, qui n’était plus en vigueur puisqu’il
avait entre-temps été dénoncé par tous les États Membres qui l’avaient ratifié, comme suite à
la ratification de la MLC, 2006 15.
13 OIT, Révision partielle de la convention (n° 147) sur la marine marchande (normes minima), 1976, Rapport IV, CIT, 84e session
(maritime) 1996, 6 et 7.
14 L’article 38, paragraphe 4, était alors libellé comme suit:
Si une question à l’ordre du jour fait l’objet d’une conférence technique préparatoire, le Bureau peut, suivant la décision
prise à cet égard par le Conseil d’administration: a) soit communiquer aux gouvernements un rapport sommaire et un
questionnaire comme il est prévu au paragraphe 1 ci-dessus; b) soit rédiger directement, sur la base des travaux de la
conférence technique préparatoire, le rapport définitif prévu au paragraphe 2 ci-dessus.
15 OIT, Abrogation d’une convention internationale du travail et retrait de quatre conventions, un protocole et 18 recommandations,
ILC.111/VII/1, 2023.
GB.349ter/INS/1 16
Protocole de 2002 relatif à la convention sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981 (P155)
35. Objet et contenu: Le protocole a été adopté pour remédier à une lacune dans la mise en
oeuvre de la convention no 155, à savoir au fait qu’il était «d’autant plus difficile de réduire
l’incidence des accidents du travail et des maladies professionnelles, auxquels l’humanité
continu[ait] de payer un lourd tribut, que l’on manqu[ait] d’informations fiables à ce sujet» 16.
Concrètement, le protocole est venu compléter l’article 11 de la convention, qui donne effet à
l’article 4, en disposant que chacun des États ayant ratifié la convention doit, en consultation
avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, établir et
réexaminer périodiquement les prescriptions et procédures aux fins de l’enregistrement et de
la déclaration des accidents du travail, des maladies professionnelles et, lorsque cela est
approprié, des événements dangereux, des accidents de trajet et des cas de maladie dont
l’origine professionnelle est soupçonnée et publier chaque année des statistiques compilées à
ce sujet. Le fait que les taux de lésions professionnelles servent actuellement d’indicateur pour
suivre les progrès accomplis en matière de défense des droits des travailleurs et de promotion
de la sécurité sur le lieu de travail dans le contexte du Programme de développement durable
à l’horizon 2030 (cible 8.8 et indicateur 8.8.1 des objectifs de développement durable (ODD))
montre bien la pertinence et l’importance des questions traitées dans le protocole. Lorsque,
en 2022, la Conférence a élevé les conventions nos 155 et 187 au rang d’instruments
fondamentaux, elle n’en a pas fait de même pour le protocole relatif à la convention no 155 et,
pendant les discussions, la possibilité de ce faire n’a pas fait l’objet de débats approfondis.
36. Processus d’adoption: À sa 279e session (novembre 2000), le Conseil d’administration a décidé
d’inscrire à l’ordre du jour de la 90e session (2002) de la Conférence une question relative à
l’enregistrement et à la déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles,
selon la procédure de simple discussion. Un rapport sur la législation et la pratique ainsi qu’un
questionnaire ont été communiqués aux gouvernements en février 2001, sachant que les
réponses devaient être reçues le 30 septembre 2001 au plus tard. Le Conseil d’administration
a approuvé un programme comportant des délais réduits, conformément au Règlement de la
Conférence 17.
37. Ratification: À ce jour, le protocole a été ratifié par 17 États Membres, sur les 75 qui sont liés
par la convention no 155.
Protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930 (P029)
38. Objet et contenu: Le protocole vise à intensifier les efforts déployés pour parvenir à
l’élimination du travail forcé en établissant des normes relatives aux mesures de prévention,
de protection et d’indemnisation, le but étant de combler les lacunes recensées dans la mise
en oeuvre. Il a été établi en tenant compte des enseignements tirés des activités de contrôle
de l’application de la convention menées par la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations dans le cadre de l’examen des rapports soumis au titre de
16 OIT, Enregistrement et déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles et liste des maladies professionnelles,
Rapport V (1), CIT, 90e session, 2002, 3.
17 À la suite des amendements au Règlement de la Conférence adoptés en 1994, l’article 38, paragraphe 3, était libellé comme
suit: «Ces dispositions ne s’appliquent que dans les cas où la question a été inscrite à l’ordre du jour de la Conférence vingt-six
mois au moins avant l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle elle doit être discutée. Si la question a été inscrite à
l’ordre du jour moins de vingt-six mois avant l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle elle doit être discutée, il
appartiendra au Conseil d’administration d’approuver un programme comportant des délais réduits; si le bureau du Conseil
d’administration considère qu’il n’est pratiquement pas possible que le Conseil d’administration approuve un programme
détaillé, il appartiendra au bureau du Conseil d’arrêter, d’accord avec le Directeur général, un tel programme comportant
des délais réduit.»
GB.349ter/INS/1 17
l’article 22 de la Constitution et de ceux soumis au titre de l’article 19 de la Constitution aux fins
de l’Étude d’ensemble de 2012 18. L’examen du protocole par la Conférence faisait suite à une
Réunion tripartite d’experts sur le travail forcé et la traite des personnes à des fins
d’exploitation au travail, organisée à Genève du 11 au 15 février 2013, réunion qu’il avait été
décidé de convoquer à l’issue de la discussion récurrente sur les principes et droits
fondamentaux au travail tenue lors de la 101e session de la Conférence 19. L’un des principaux
objectifs du protocole est de lutter contre les formes contemporaines d’esclavage et de traite
des personnes, qui sont un sujet de préoccupation pour l’ensemble de la communauté
internationale, en dépit de la ratification quasi universelle de la convention no 29. Comme
souligné dans le rapport à la Conférence sur cette question, si le travail forcé imposé par les
autorités demeure une préoccupation dans certains pays, il est aujourd’hui largement éclipsé
par le travail forcé imposé par des particuliers et des entreprises qui ne respectent pas l’état
de droit 20. Par conséquent, le protocole dispose que la définition du travail forcé ou obligatoire
couvre la traite et que «les mesures [qui y sont visées] doivent inclure une action spécifique
contre la traite des personnes à des fins de travail forcé ou obligatoire». En outre, il vient
compléter la convention no 29 en ajoutant des dispositions sur la prévention du travail forcé
ou obligatoire, les recours et la protection, la réadaptation et l’indemnisation des victimes. Le
protocole a été désigné comme étant un instrument fondamental. Il est au fondement de
l’Alliance mondiale pour l’éradication du travail forcé, de l’esclavage moderne, de la traite des
personnes et du travail des enfants instituée au titre de la cible 8.7 des ODD.
39. Processus d’adoption: À sa 317e session (mars 2013), le Conseil d’administration a décidé
d’inscrire à l’ordre du jour de la 103e session (2014) de la Conférence une question relative au
travail forcé, selon la procédure de simple discussion. Le Conseil d’administration a approuvé
un programme comportant des délais réduits, conformément au Règlement de la Conférence.
Un rapport sur la législation et la pratique, assorti d’un questionnaire, a dû être envoyé le
15 juillet 2013 au plus tard; les réponses au questionnaire devaient être reçues avant le
31 décembre 2013, afin que le rapport définitif soit communiqué en mars 2014 au plus tard.
40. Ratification: À ce jour, sur les 181 pays liés par la convention no 29, 60 ont ratifié le protocole.
41. Pour résumer, les protocoles adoptés jusqu’ici l’ont été pour différentes raisons, à savoir:
a) permettre une plus grande souplesse et potentiellement réduire le champ d’application
d’une convention pour en faciliter la ratification (protocole relatif à la convention no 110);
b) élargir le champ et la portée d’une convention (protocole relatif à la convention no 81);
c) élargir les possibilités de dérogation pour faciliter une transition vers des normes
reflétant l’évolution du monde du travail (protocole relatif à la convention no 89);
18 OIT, Donner un visage humain à la mondialisation: Étude d’ensemble sur les conventions fondamentales concernant les droits au
travail à la lumière de la Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008, ILC.101/III/1B, 2012.
Dans le rapport sur la législation et la pratique de 2014, il est indiqué que «[la commission d’experts] a examiné la traite et le
travail forcé des enfants sous l’angle de la convention no 182 depuis l’entrée en vigueur de cet instrument en 2000 et, depuis
2001, analyse systématiquement la question de la traite dans ses commentaires sur la convention no 29, et demande des
informations sur les mesures prises par les gouvernements pour prévenir, réprimer et punir la traite des personnes». OIT,
Renforcer la lutte contre le travail forcé, ILC.103/IV/1, 2014, paragr. 37. Voir aussi les paragraphes 57, 86, 126, 168 et 189, entre
autres références.
19 TMELE/2013/6.
20 OIT, Renforcer la lutte contre le travail forcé, ILC.103/IV/1, 2014, paragr. 3.
GB.349ter/INS/1 18
d) mettre à jour certains aspects normatifs dans une convention dont ils portent révision
partielle (protocole relatif à la convention no 147);
e) compléter les dispositions normatives d’une convention dont ils portent révision partielle
en vue de combler des lacunes dans la mise en oeuvre (protocoles relatifs aux conventions
nos 29 et 155).
42. Il ressort de ce qui précède qu’il est important de déterminer quel serait l’objet d’un protocole
relatif à la convention no 87, en s’appuyant à cette fin sur l’une des options susmentionnées ou
en convenant d’une autre option.
III. Origine de la proposition d’action normative sur le droit de grève
43. En ce qui concerne le droit de grève, le rapport d’information établi en vue de la discussion de
la demande du groupe des travailleurs et de 36 gouvernements de saisir d’urgence la CIJ
fournit une analyse détaillée de la controverse qui s’est développée à partir de 1989 autour de
la position de la commission d’experts, selon laquelle le droit de grève est un corollaire
indissociable des droits syndicaux protégés par la convention no 87 21.
44. En lien avec la demande du groupe des employeurs visant à ce qu’une question sur le droit de
grève soit inscrite à l’ordre du jour de la prochaine session de la Conférence en vue d’une action
normative, la présente section offre une synthèse des discussions précédemment tenues par
le Conseil d’administration au cours desquelles la possibilité d’une telle action a été évoquée.
45. C’est à la 253e session (mai-juin 1992) du Conseil d’administration qu’il a pour la première fois
été proposé d’inscrire une question sur le droit de grève à l’ordre du jour de la Conférence en
vue d’une action normative 22. Cette proposition avait été présentée dans une lettre adressée
au Directeur général du BIT par le ministre du Travail et de la Sécurité sociale de la Colombie,
dans laquelle ce dernier demandait, en vertu de l’article 10, paragraphe 1, et de l’article 14,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, que la question soit soumise au Conseil
d’administration pour examen. Au moment de cet examen, plusieurs gouvernements et le
groupe des travailleurs ont fait part de leur opposition catégorique, tandis que le groupe des
employeurs, qui était à l’origine d’une proposition parallèle de discussion générale sur le
règlement des conflits du travail, a estimé «préférable d’explorer tous les moyens susceptibles
d’éviter le recours à la grève avec ses conséquences négatives inévitables. Le groupe des
employeurs [a indiqué qu’il] aimerait mettre l’accent sur l’échange d’expériences en vue de
trouver des mécanismes qui permettent de résoudre les conflits sans avoir recours à la grève
dont la légitimité n’est pas contestée. Il [a suggéré] qu’avant de procéder à l’adoption d’un
instrument la Conférence ait la possibilité de débattre de la question dans une discussion
générale, ce qui pourrait aider à éviter de formaliser les oppositions entre les différentes
parties.» 23
46. Les débats sur l’inscription éventuelle d’une question relative au règlement des conflits du
travail à l’ordre du jour de la Conférence en vue d’une discussion générale ou d’une action
normative se sont poursuivis au fil des ans, et ont notamment porté, à partir de 1999, sur une
proposition de discussion générale intitulée «Nouvelles tendances dans la prévention et la
résolution des conflits du travail» 24. Cette proposition a été examinée pour la dernière fois par
21 GB.349bis/INS/1.
22 GB.253/2/3, paragr. 35 à 38 et annexe I.
23 GB.253/PV(Rev.), I/11.
24 Voir, par exemple, GB.276/PV et GB.303/3/2, 24.
GB.349ter/INS/1 19
le Conseil d’administration à sa 303e session (novembre 2008) 25 mais, compte tenu du manque
d’intérêt constaté, a finalement été retirée de la liste des questions susceptibles de faire l’objet
d’une discussion générale 26.
47. La controverse concernant le droit de grève s’est intensifiée en 2012, lorsque la Commission
de l’application des normes de la Conférence s’est trouvée empêchée pour la première fois
d’exercer ses fonctions de contrôle. Par la suite, en 2013 et 2014, plusieurs consultations
tripartites informelles ont été organisées et ont préparé le terrain pour la discussion
concernant l’initiative sur les normes qu’a tenue le Conseil d’administration en novembre
2014 27.
48. En novembre 2014, après avoir examiné de manière approfondie la cinquième question à
l’ordre du jour de sa section institutionnelle, intitulée Initiative sur les normes: Suivi de la session
de 2012 de la Commission de l’application des normes de la Conférence internationale du Travail, le
Conseil d’administration a décidé 28:
1) de convoquer une réunion tripartite de trois jours en février 2015, ouverte à la
participation d’observateurs ayant un droit de parole par l’intermédiaire de leur groupe,
présidée par le Président du Conseil d’administration et composée de 32 membres
gouvernementaux, 16 membres employeurs et 16 membres travailleurs, en vue de
présenter un rapport à la 323e session du Conseil d’administration (mars 2015) sur:
• la question de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
• les modalités et les pratiques de l’action de grève au niveau national;
2) d’inscrire à l’ordre du jour de sa 323e session le résultat des travaux et le rapport de cette
réunion afin que, sur cette base, le Conseil d’administration prenne une décision sur la
nécessité ou non de demander à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence un
avis consultatif concernant l’interprétation de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale
et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
3) de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon déroulement des travaux de la
Commission de l’application des normes à la 104e session de la Conférence internationale
du Travail et, à cette fin, de convoquer à nouveau le Groupe de travail sur les méthodes
de travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence afin qu’il prépare
des recommandations pour la 323e session du Conseil d’administration (mars 2015), en
particulier au sujet de l’établissement de la liste de cas et l’adoption des conclusions;
4) de reporter à ce stade l’examen de la création éventuelle d’un tribunal en vertu du
paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution;
25 GB.303/PV. À cette session, les gouvernements du Canada, de la Chine, de Cuba, de la Fédération de Russie, de l’Inde, du
Mexique et de la Thaïlande ont appuyé l’inscription d’une question sur les nouvelles tendances dans la prévention et la
résolution des conflits du travail, tandis que ni le groupe des employeurs, ni le groupe des travailleurs ne l’ont évoquée dans
leurs interventions.
26 La discussion générale sur le thème «accès à la justice du travail: prévention et règlement des conflits du travail», dont la
tenue a été proposée plus récemment, porterait sur le fonctionnement des institutions chargées de la prévention et du
règlement des conflits du travail, notamment de la justice du travail, et non sur le droit de grève.
27 Initiative sur les normes: Suivi de la session de 2012 de la Commission de l’application des normes de la Conférence
internationale du Travail: GB.322/INS/5; GB.322/INS/5(Add.); GB.322/INS/5(Add.1); GB.322/INS/5(Add.2);
GB.322/INS/5(Add.3); et GB.322/PV.
28 GB.322/INS/5(Add.2), paragraphe 1, tel que modifié pendant la discussion.
GB.349ter/INS/1 20
5) dans le cadre de cet ensemble de mesures, de soumettre à sa 323e session ce qui suit:
a) la mise en place du mécanisme d’examen des normes et, à cette fin, la création d’un
groupe de travail tripartite composé de 16 membres gouvernementaux, huit
membres employeurs et huit membres travailleurs, qui sera chargé de faire, à la
323e session du Conseil d’administration (mars 2015), des propositions sur les
modalités, le champ et le calendrier de la mise en oeuvre de ce mécanisme;
b) une demande au président de la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR), M. le juge Abdul Koroma (Sierra Leone),
et au président du Comité de la liberté syndicale, M. le professeur Paul van der
Heijden (Pays-Bas), afin qu’ils préparent ensemble un rapport sur l’interaction, le
fonctionnement et l’amélioration possible des différentes procédures de contrôle
découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution de l’OIT et du mécanisme
de traitement des plaintes relatives à la liberté syndicale.
49. La Réunion tripartite sur la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action
de grève au niveau national a eu lieu du 23 au 25 février 2015. La partie I du rapport élaboré
par le Bureau en vue de cette réunion donnait des informations factuelles sur l’adoption de la
convention n° 87 et le contrôle de son application pour ce qui est du droit de grève, ainsi que
sur les règles de droit international applicables en matière d’interprétation des traités. La
partie II donnait une vue d’ensemble des modalités de l’action de grève au niveau national, en
droit comme dans la pratique 29.
50. Comme l’indique le document soumis au Conseil d’administration en mars 2015, la réunion
tripartite s’est déroulée dans un climat constructif 30. Le groupe des travailleurs et le groupe
des employeurs ont présenté une déclaration conjointe dans laquelle ils ont exposé un
ensemble de mesures afin de trouver une issue possible à la situation de blocage dans laquelle
se trouvait le système de contrôle 31. Dans cette déclaration, les travailleurs et les employeurs
ont reconnu le mandat de la commission d’experts tel que celle-ci l’a défini dans son rapport
de 2015 (paragraphe 29), selon lequel «[s]es avis et recommandations ont un caractère non
contraignant, leur objet étant de guider l’action des autorités nationales. Ils tirent leur valeur
persuasive de la légitimité et de la rationalité du travail de la commission qui est basé sur son
impartialité, son expérience et son expertise.» La déclaration ne proposait aucune mesure de
suivi particulière sur la convention no 87 et le droit de grève. Le groupe gouvernemental a
présenté une position commune sur le droit de grève dans le contexte de la liberté syndicale 32
et, dans une deuxième déclaration, a répondu à la déclaration commune des partenaires
sociaux 33.
51. Prenant note du résultat et du rapport de la réunion tripartite, le Conseil d’administration a
décidé, à la lumière de ces informations, de ne prendre dans l’immédiat aucune mesure au
titre de l’article 37 de la Constitution pour résoudre la question de l’interprétation de la
convention no 87 pour ce qui est du droit de grève. Il a adopté l’initiative sur les normes, qui
29 GB.323/INS/5/Appendice III.
30 GB.323/INS/5/Appendice I.
31 Voir annexe I, GB.323/INS/5/Appendice I.
32 Voir annexe II, GB.323/INS/5/Appendice I.
33 Voir annexe III, GB.323/INS/5/Appendice I.
GB.349ter/INS/1 21
vise à renforcer le système de contrôle, notamment en assurant la sécurité juridique, et à
préserver un corpus de normes internationales du travail solide, clairement défini et à jour au
moyen du mécanisme d’examen des normes.
52. Dans le cadre de la mise en oeuvre de l’initiative sur les normes, en mars 2017, le groupe des
employeurs et le groupe des travailleurs ont réitéré leur déclaration conjointe du 23 février
2015, fait observer que «[l]’interprétation des conventions [continuait] de susciter des
divergences de points de vue et des conflits» et reconnu «qu’il pourrait être intéressant d’avoir
un échange de vues tripartite sur les éléments et les conditions nécessaires à la mise en place
d’un organe indépendant au titre de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT» 34.
53. Le Conseil d’administration a donné de nouvelles orientations préliminaires sur la question de
la sécurité juridique en novembre 2017 et mars 2018. Plusieurs membres gouvernementaux
ont insisté sur la nécessité de prendre des mesures au titre de l’article 37, paragraphe 2, de la
Constitution pour renforcer la sécurité juridique, tandis que d’autres ont indiqué préférer
continuer à «explorer les possibilités de parvenir à une interprétation des conventions sur la
base du consensus». Les membres travailleurs et les membres employeurs ont appuyé la
proposition visant à tenir au préalable des consultations informelles sur cette question 35.
54. En novembre 2018, le Conseil d’administration a décidé de demander au Bureau de lui
présenter des propositions concrètes pour préparer la discussion sur de nouvelles dispositions
pour assurer la sécurité juridique, y compris, mais non exclusivement, pour organiser un
échange de vues sur l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution. En mars 2019, il a décidé de
tenir des consultations informelles en janvier 2020 et, pour faciliter cet échange de vues
tripartite, a demandé au Bureau d’établir «un document sur les éléments et conditions
nécessaires à la mise en place d’un organe indépendant en vertu du paragraphe 2 de
l’article 37 et de toute autre option fondée sur un consensus» 36.
55. Également en mars 2019, le groupe des employeurs a souscrit à la proposition de tenir des
consultations informelles tripartites sur la sécurité juridique et souligné l’importance d’avoir
«une approche globale de la question et d’étudier toutes les possibilités sans limiter la
discussion à l’article 37, paragraphe 2». Selon les employeurs, «[l]e document du Bureau et les
consultations y relatives devraient cibler des solutions consensuelles. Le Bureau devrait
envisager des moyens de remédier aux désaccords éventuels sur l’interprétation des
conventions avant que ceux-ci ne se transforment en controverses majeures. Les mandants de
l’OIT sont responsables au premier chef du fonctionnement du système de contrôle des
normes. Le pouvoir de décision en la matière ne devrait pas être confié trop rapidement à un
nouvel organe, comme cela serait le cas si l’option prévue au titre de l’article 37, paragraphe 2,
était retenue.» Cela étant, le groupe des employeurs s’est dit «déterminé à participer
activement aux discussions qui seront menées à propos de toutes les solutions
envisageables» 37. Concernant les paramètres d’un éventuel échange de vues tripartite sur la
sécurité juridique, le groupe des travailleurs a pour sa part affirmé que le document du Bureau
devrait mettre l’accent sur les éléments nécessaires à la mise en place d’un organe
indépendant en vertu de l’article 37, paragraphe 2, plutôt que sur les autres solutions
34 GB.335/INS/5, paragr. 47 et GB.329/PV, annexe II, Position commune du groupe des travailleurs et du groupe des
employeurs sur le système de contrôle de l’OIT, 221.
35 GB.335/INS/5, paragr. 48.
36 GB.335/INS/5, paragr. 48 et 84 g).
37 GB.335/PV, paragr. 243.
GB.349ter/INS/1 22
possibles. Il a estimé qu’il fallait analyser de façon approfondie les options prévues par
l’article 37, paragraphes 1 et 2, avant d’examiner d’autres propositions 38. Plusieurs membres
gouvernementaux ont jugé qu’il était opportun d’étudier les options fondées sur un
consensus 39.
56. Le Conseil d’administration a repris en mars 2022 son examen des propositions concernant de
nouvelles dispositions en vue d’assurer la sécurité juridique en s’appuyant sur un document
traitant des éléments et des conditions nécessaires à la mise en place d’un organe indépendant
en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT et de toute autre option
fondée sur un consensus, ainsi que de la procédure prévue à l’article 37, paragraphe 1 40. Les
paragraphes 60 à 65 du document GB.344/INS/5 sont consacrés au rôle des modalités fondées
sur un consensus tripartite, lesquelles visent, soit à: i) essayer de concilier des divergences de
vues par une discussion tripartite avant de soumettre, le cas échéant, la question
d’interprétation à la CIJ ou à un tribunal interne, soit à: ii) donner suite à un avis consultatif de
la CIJ ou à une décision d’un tribunal interne. Le document précise en outre que, si la sécurité
juridique en matière d’interprétation s’entend de la possibilité d’obtenir des décisions finales
sur le champ d’application et le sens de dispositions conventionnelles, les deux seuls
mécanismes à même d’offrir cette sécurité sont expressément énoncés à l’article 37 de la
Constitution de l’OIT. Un processus normatif mené sur la base du consensus ne saurait créer
la sécurité juridique que confère le recours aux options prévues par l’article 37. En effet, une
convention ou un protocole élaboré par consensus ne lierait que les États Membres qui
l’auraient ratifié. Par conséquent, dans le cas des États Membres qui ont ratifié une convention
faisant l’objet d’un différend juridique, l’insécurité juridique perdurerait tant qu’ils ne seraient
pas en mesure de ratifier la convention ou le protocole nouvellement adopté 41.
57. Le groupe des employeurs, faisant part de ses vues sur ces différentes options et sur une
action normative, a indiqué qu’il «aurait souhaité [...] une analyse plus approfondie des
modalités fondées sur un consensus tripartite. C’est à ces modalités qu’il faudrait recourir en
premier lieu pour résoudre les divergences de vues en matière d’interprétation, ce qui
permettrait aux mandants tripartites de demeurer compétents pour déterminer le contenu
des normes internationales du travail. L’option fondée sur le consensus n’aurait pas pour but
de parvenir à une solution ayant force obligatoire au terme d’une procédure juridique, mais
de trouver une solution reposant sur l’autorité conférée par l’appui d’une majorité des
mandants tripartites. Un désaccord concernant une interprétation particulière d’une
convention de l’OIT pourrait faire l’objet d’une question inscrite à l’ordre du jour de la
Conférence internationale du Travail, laquelle pourrait décider de procéder à un examen dans
le cadre d’une commission qui formulerait des recommandations sur la manière d’interpréter
la convention concernée ou sur les mesures à prendre à cet égard. Une autre possibilité
consisterait à engager un processus dans le cadre duquel les mandants seraient priés de
présenter par écrit leurs vues concernant une interprétation litigieuse, ce qui permettrait de
déterminer le degré d’acceptation de ladite interprétation et contribuerait à régler le
désaccord. La commission d’experts devrait ensuite tenir compte des résultats du processus
dans ses observations sur la convention no 87. En cas d’échec, une dernière possibilité serait
d’envisager une action normative visant à élaborer un protocole relatif à la convention
38 GB.335/PV, paragr. 241.
39 GB.335/PV, paragr. 244, 247 et 248.
40 GB.344/INS/5.
41 GB.344/INS/5, paragr. 65.
GB.349ter/INS/1 23
concernée. Ce protocole énoncerait l’interprétation considérée comme correcte et devrait être
approuvé par la Conférence internationale du Travail à la majorité des deux tiers. Il aurait force
obligatoire uniquement pour les pays l’ayant ratifié.» 42
58. Le groupe des travailleurs s’est quant à lui catégoriquement opposé à ce que l’OIT puisse
adopter une nouvelle norme pour résoudre une difficulté d’interprétation, étant d’avis que les
divergences subsisteraient lors de l’élaboration de cette norme et empêcheraient tout
consensus 43. Quant aux gouvernements, certains ont souligné la nécessité de renforcer la
sécurité juridique sur la base de l’article 37, tandis que d’autres se sont une nouvelle fois dit
convaincus que le dialogue social pouvait ouvrir la voie au consensus et ont rappelé que
l’adoption de normes et le contrôle de leur application incombent au premier chef aux
mandants tripartites 44.
59. En mars 2023, le groupe des employeurs a de nouveau souligné que la question au coeur des
discussions était l’interprétation que la commission d’experts fait du droit de grève dans le
cadre de la convention no 87, et que le Bureau devait donner aux groupes tous les moyens
possibles de résoudre les difficultés d’interprétation en interne, parmi lesquelles l’organisation
d’une réunion technique tripartite ou la tenue d’une discussion consacrée à l’une de ces
difficultés à la Conférence. Le groupe des employeurs a indiqué que son objectif était «de faire
en sorte que la commission d’experts ne crée pas de nouvelles obligations en plus de celles
prévues par les mandants tripartites lors de la Conférence», et a affirmé que «[l]a commission
d’experts devrait renvoyer aux mandants les questions difficiles ou les lacunes liées à une
convention pour qu’ils y apportent une solution; c’est précisément parce qu’elle ne l’a pas fait
dans le cas du droit de grève que le différend actuel existe» 45. Le groupe des employeurs a
proposé d’amender le projet de décision à l’examen, notamment à l’effet d’y mentionner «les
autres propositions visant à assurer la sécurité juridique et à renforcer le système de contrôle,
notamment par l’inscription de cette question, pour examen, à l’ordre du jour de la Conférence
internationale du Travail» 46. Le groupe des travailleurs a une nouvelle fois affirmé que la seule
manière d’assurer la sécurité juridique était de saisir la CIJ et que l’OIT devrait faire bon usage
du mécanisme de règlement dont l’a dotée sa Constitution. Il a estimé que la situation n’avait
que trop duré et que, en l’absence de consensus, une solution faisant autorité devait être
trouvée 47. Plusieurs représentants gouvernementaux ont exprimé des points de vue
analogues 48.
IV. Considérations finales
60. Comme indiqué dans l’introduction, le présent rapport a pour objet de décrire le contexte qui
sert de toile de fond à la demande du groupe des employeurs visant à inscrire d’urgence à
l’ordre du jour de la Conférence de juin 2024 une question sur le droit de grève, en vue d’une
action normative prenant la forme d’un protocole. Il a également pour objet d’exposer les
divers aspects de la demande en vue d’aider les mandants à prendre une décision éclairée à
42 GB.344/PV, paragr. 142.
43 GB.344/PV, paragr. 148.
44 GB.344/PV, paragr. 150 et suivants.
45 GB.347/PV(Rev.), paragr. 229 et 230.
46 GB.347/PV(Rev.), paragr. 235.
47 GB.347/PV(Rev.), paragr. 278. Voir aussi GB.349bis/INS/1, annexe, rapport d’information, paragr. 8.
48 GB.347/PV(Rev.), paragr. 247 et suivants, et GB.349bis/INS/1, annexe, rapport d’information, note de bas de page 15.
GB.349ter/INS/1 24
ce sujet. Au vu de l’analyse qui précède, quelques considérations finales pourraient guider la
discussion du Conseil d’administration.
Objet et but d’un protocole de l’OIT sur le droit de grève
61. L’objet et le but du protocole à la convention no 87 proposé, tels qu’envisagés par le groupe
des employeurs, seraient de définir une fois pour toutes le champ d’application et les limites
du droit de grève dans le cadre de la convention no 87, et ainsi d’énoncer l’interprétation
considérée comme correcte.
62. Il ressort de l’examen des six protocoles de l’Organisation qu’aucun des protocoles adoptés à
ce jour par la Conférence ne visait à régler un différend relatif à l’interprétation des dispositions
de la convention connexe 49.
63. Comme il est indiqué plus haut, les protocoles de l’OIT n’ont force obligatoire que s’ils sont
ratifiés par les États Membres déjà liés par la convention à laquelle ils se rapportent. En
conséquence, les États Membres qui ne ratifient pas le protocole restent liés par la convention
concernée dans sa forme originale et le protocole n’a pas d’incidence sur les obligations
découlant de la ratification de la convention. Il s’ensuit que l’insécurité juridique perdurerait
dans le cas des États Membres qui décideraient de ne pas ratifier le protocole nouvellement
adopté 50.
64. Cela pose aussi la question de la mesure dans laquelle il est tenu compte des observations que
la commission d’experts a formulées depuis qu’elle a commencé à examiner l’application de la
convention no 87 par les États Membres concernant le droit de grève 51.
Une relation synergique entre les fonctions de contrôle indépendant
de la commission d’experts et la fonction normative de la Conférence
65. Il ressort de l’examen des six protocoles existants que deux d’entre eux au moins – ceux qui
sont rattachés aux conventions nos 29 et 147 – s’appuient explicitement sur les observations et
les études d’ensemble de la commission d’experts pour actualiser les dispositions des
conventions concernées et y ajouter du contenu normatif.
66. L’objet et le but proposés d’un protocole sur le droit de grève ou sur l’action collective peuvent
laisser supposer que les observations de la commission d’experts et les cinq études d’ensemble
sur la convention no 87 qui ont examiné l’application de cette convention par les États Membres
concernant le droit de grève n’éclaireront pas la discussion normative. À cet égard, il y a lieu
de rappeler que les observations de la commission d’experts s’appuient le plus souvent sur les
49 En droit international général, les parties à un traité ont la possibilité d’adopter un protocole de signature, qui est un
instrument subsidiaire complétant le traité. Ce protocole porte sur des questions secondaires comme l’interprétation de
certaines clauses du traité. Cependant, un tel protocole est généralement adopté en même temps que le traité dont la
ratification entraîne ipso facto la ratification du protocole, ce qui permet de garantir l’application cohérente du traité par les
parties. Collection des traités des Nations Unies.
50 GB.344/INS/5, paragr. 65.
51 En ce qui concerne la source des données et les matériels sur lesquels s’appuie la révision, une question supplémentaire
se pose, celle de savoir s’il faudrait y inclure les travaux des organes de contrôle de l’OIT autres que la commission d’experts.
Ces organes de contrôle sont notamment la Commission de l’application des normes de la Conférence, le Comité de la liberté
syndicale, la Commission d’investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale, les comités tripartites ad hoc
établis pour l’examen des réclamations au titre de l’article 24 de la Constitution de l’OIT et les commissions d’enquête
instituées pour examiner les plaintes présentées en vertu de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Ces sources contiennent
de précieuses orientations fondées sur les conclusions et recommandations, y compris sur le droit de grève, qui ont été
formulées au fil des décennies.
GB.349ter/INS/1 25
conclusions du Comité de la liberté syndicale adoptées par consensus tripartite, garantissant
ainsi la cohérence et la cohésion dans l’ensemble des organes de contrôle.
67. Un autre aspect à prendre en considération est l’incidence qu’un protocole sur le droit de grève
ou l’action collective aurait sur l’examen, par la commission d’experts et d’autres organes de
contrôle, de l’application de la convention no 87 par les États Membres qui décideraient de ne
pas devenir parties audit protocole.
68. La commission d’experts devrait tenir pleinement compte des dispositions du protocole à
l’égard des États Membres qui l’ont ratifié, mais devrait décider, en tant qu’organe
indépendant, de la manière de procéder à l’égard des États Membres qui n’ont pas ratifié le
protocole et ne sont liés que par la convention.
69. Référence peut être faite, à titre d’exemple, à l’adoption du protocole de 2014 relatif à la
convention no 29 et à son incidence sur le contrôle de l’application de cette convention.
L’adoption de ce protocole a conduit la commission d’experts à distinguer les États Membres
qui l’ont ratifié de ceux qui ne l’ont pas fait. Avant l’adoption du protocole de 2014, la
commission d’experts soulevait systématiquement des questions liées à la traite de personnes,
à la prévention et à l’accès des victimes à des mécanismes de recours et de réparation dans
ses observations au titre de la convention no 29. Elle prenait appui, pour ce faire, sur les travaux
préparatoires de la convention qui confirment que ces aspects font partie intégrante des
obligations consacrées par la convention. En consolidant cette interprétation, le protocole de
2014 a permis à la commission d’experts de poursuivre un examen détaillé de ces questions
dans le cas des États Membres liés par le protocole, tout en formulant des observations de
caractère plus général à l’égard des États Membres uniquement liés par la convention.
70. Dans un cas, la Conférence a abordé explicitement une question touchant au but d’une
convention et influencé de facto la manière dont la commission d’experts exerce son contrôle,
en adoptant à sa 95e session (2006) la Résolution concernant l’amiante. La convention (nº 162)
sur l’amiante, 1986, donne la priorité à la prévention et au contrôle des risques dus à
l’exposition à l’amiante (article 3) et n’impose pas d’interdire catégoriquement tous les types
d’amiante 52. Dans le même temps, la convention (nº 139) sur le cancer professionnel, 1974, fait
obligation aux États Membres de déterminer périodiquement les substances et agents
cancérogènes auxquels l’exposition professionnelle sera interdite (article 1). Notant que toutes
les formes d’amiante, notamment le chrysotile, sont classées parmi les substances
cancérogènes pour l’homme par le Centre international de recherche sur le cancer, et
préoccupée de constater que des travailleurs continuent à courir des risques graves du fait de
leur exposition à l’amiante, la Conférence a souligné, en particulier, que la convention no 162
concernant la sécurité dans l'utilisation de l'amiante ne devrait pas servir à justifier ou à
accepter la poursuite de l’usage de cette substance.
71. Pour donner suite à la résolution adoptée par la Conférence, le Conseil d’administration a
chargé le Bureau de continuer d’encourager les États Membres à ratifier et à donner effet aux
conventions nos 162 et 139, et la commission d’experts a tenu pleinement compte des
orientations contenues dans la résolution dans l’exercice de sa fonction de contrôle de
l’application de la convention no 162 53.
52 L’article 10 dispose que les États Membres doivent prévoir l’interdiction totale ou partielle de l’utilisation de l’amiante là où
cela est nécessaire pour protéger la santé des travailleurs et réalisable du point de vue technique, et l’article 11 interdit
l’utilisation du crocidolite.
53 Voir par exemple, CEACR, convention no 162: État plurinational de Bolivie, observation, 2021; Monténégro, demande
directe, 2019; Portugal, observation, 2017; Brésil, observation, 2015.
GB.349ter/INS/1 26
Procédure d’adoption et calendrier
72. Conformément aux délais statutaires prévus aux articles 45 et 46 du Règlement de la
Conférence, tous les protocoles existants ont été inscrits à l’ordre du jour de la Conférence
quinze à dix-neuf mois avant l’ouverture de la session de la Conférence à laquelle ils devaient
être discutés, à l’exception du protocole relatif à la convention no 147, qui avait été élaboré
dans le cadre d’une réunion technique. Des programmes comportant des délais réduits ont
été adoptés aux fins de l’élaboration des deux protocoles les plus récents, relatifs aux
conventions nos 155 et 29 respectivement, en accord avec l’article 38, paragraphe 3 (devenu
l’article 45, paragraphe 4) du Règlement de la Conférence. La question de la faisabilité de la
proposition de tenir une discussion normative à la 112e session de la Conférence, c’est-à-dire
moins de sept mois après la session spéciale, doit être examinée à la lumière de ces
paramètres factuels.
73. En outre, il convient de noter que l’adoption de quatre des six protocoles existants par la
Conférence a été précédée par des réunions techniques ou tripartites d’experts. Il est avéré
que ces travaux préparatoires, qui consistent en des analyses techniques et des débats
tripartites approfondis, sont essentiels pour élaborer des normes solides et bien étayées aux
fins de la protection des travailleurs et compte tenu des besoins des entreprises durables.
V. Observations finales
74. Lorsqu’ils examineront la demande du groupe des employeurs, les mandants souhaiteront
peut-être accorder une attention particulière aux éléments suivants:
a) les avantages et les inconvénients d’un processus législatif qui pourrait aboutir à un
instrument négocié ouvert à la ratification volontaire;
b) l’objet et le but du protocole proposé sur le droit de grève ou l’action collective au regard
de la convention no 87. Les questions qu’il faudrait traiter seraient notamment les
suivantes: la ou les dispositions précises de la convention no 87 que le protocole envisagé
réviserait; le degré de précision des dispositions à insérer dans le protocole; la portée de
la révision; la teneur des dispositions réglementaires; la source des données et des
informations aux fins de la révision;
c) la mesure dans laquelle il est tenu compte des observations formulées par la commission
d’experts et d’autres organes de contrôle lorsqu’ils examinent l’application de la
convention no 87 par les États Membres de l’OIT pour ce qui est du droit de grève;
d) l’incidence d’un protocole sur le droit de grève ou l’action collective sur l’examen, par la
commission d’experts et d’autres organes de contrôle, de l’application de la convention
no 87 par des États Membres qui ne sont pas liés par ledit protocole;
e) les délais statutaires à respecter pour inscrire une question normative à l’ordre du jour de
la Conférence et préparer un projet d’instrument;
f) les décisions déjà prises par le Conseil d’administration concernant l’ordre du jour de la
Conférence internationale du Travail.
Document no 33
Projet de procès-verbaux de la session 349e ter (spéciale)
du Conseil d’administration, novembre 2023
GB.349ter/PV/Projet
Conseil d’administration
349ᵉ ter session (spéciale), Genève, 11 novembre 2023
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Les membres du Conseil d’administration peuvent envoyer des corrections à leurs propres interventions jusqu’au
25 janvier 2024 à l’adresse [email protected].
Projet de procès-verbal de la 349e ter session
(spéciale) du Conseil d’administration
du Bureau international du Travail
Table des matières
Page
Section institutionnelle
1. Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant à ce que
la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative,
à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail
(GB.349ter/INS/1) ................................................................................................................... 3
Comité plénier ................................................................................................................................. 3
Conseil d’administration ................................................................................................................ 11
Décision .................................................................................................................................... 21
Observations finales ....................................................................................................................... 21
GB.349ter/PV/Projet 3
Section institutionnelle
1. Suite à donner à la demande du groupe des employeurs visant
à ce que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence,
pour discussion normative, à l’ordre du jour de la 112e session
de la Conférence internationale du Travail
(GB.349ter/INS/1)
Comité plénier
1. Le Président rappelle que la 349e ter session (spéciale) du Conseil d’administration a été
convoquée en application de l’article 7, paragraphe 8, de la Constitution de l’Organisation
internationale du Travail et du paragraphe 3.2.2 du Règlement du Conseil d’administration.
À sa 349e session, le Conseil d’administration a approuvé les dispositions applicables à la
session spéciale. Ces dispositions prévoient une séance en comité plénier, conformément à
l’article 4.3 du Règlement, afin de procéder à un large échange de vues en présence de
représentants de gouvernements qui ne siègent pas au Conseil d’administration, étant
entendu que toute décision sera prise par le Conseil d’administration réuni en session plénière
ordinaire à l’issue de la séance en comité plénier.
2. À sa 349e bis session (spéciale), le Conseil d’administration a décidé de soumettre la difficulté
d’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, concernant le droit de grève, à l’appréciation de la Cour internationale de Justice (CIJ) en
vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT. La 349e ter session (spéciale) est
consacrée à l’examen de la demande du groupe des employeurs visant à ce qu’une question
concernant l’adoption d’un protocole relatif à la convention no 87 soit inscrite d’urgence à l’ordre
du jour de la Conférence internationale du Travail, en vue de définir avec autorité la portée et les
limites du droit de grève ou, plus largement, de l’action collective, dans le contexte de cette
convention. Le Bureau a établi un document présentant les règles de l’OIT applicables à
l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence en vue d’une discussion normative,
la pratique suivie par l’Organisation concernant l’adoption de protocoles, les origines de la
proposition de tenir une discussion normative sur le droit de grève, et quelques observations
finales synthétisant les conséquences possibles de ces facteurs sur l’action normative proposée.
Les États Membres et les organisations nationales d’employeurs et de travailleurs ont été invités
à soumettre leurs commentaires sur les questions soulevées dans le document, et ces
commentaires ont été publiés sur le site Web du Conseil d’administration. Le Conseil
d’administration est invité à fournir des orientations sur les mesures à prendre.
3. Le comité plénier est saisi de deux propositions d’amendement au projet de décision, qui ont
été diffusées par le Bureau. La première, émanant du groupe des employeurs, est libellée
comme suit:
Suite à la demande du groupe des employeurs et de la République de Türkiye visant à ce que
la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du
jour de la 112e session (2024) de la Conférence internationale du Travail, le Conseil
d’administration décide de donner suite au Résultat de la Réunion tripartite qui s’est tenue en
2015 concernant la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
GB.349ter/PV/Projet 4
1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève
au niveau national, et
1) d’inscrire à l’ordre du jour de la 112e, 113e ou 114e session de la Conférence (2024, 2025
ou 2026) une question en vue d’une discussion normative (protocole relatif à la convention
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948/recommandation/convention) sur le droit de grève et/ou l’action collective;
OU
2) d’inscrire à l’ordre du jour de la 112e, 113e ou 114e session de la Conférence (2024, 2025
ou 2026) une question en vue d’une discussion générale sur le droit de grève et/ou l’action
collective;
OU
3) de convoquer dès que possible une réunion d’experts chargée d’examiner la question du
droit de grève et/ou de l’action collective;
OU
4) de continuer d’examiner à sa 350e session toutes les propositions envisageables
concernant les nouvelles dispositions à prendre pour assurer la sécurité juridique en vue
de parvenir à un accord sur la voie à suivre.
4. La deuxième proposition d’amendement au projet de décision émane du groupe des
travailleurs et est libellée comme suit:
Suite à la demande du groupe des employeurs et de la République de Türkiye visant à ce que
la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion normative, à l’ordre du
jour de la 112e session (2024) de la Conférence internationale du Travail, le Conseil
d’administration décide qu’aucune mesure supplémentaire n’est nécessaire.
5. La Vice-présidente employeuse exprime sa profonde déception à l’issue de la 349e bis session
(spéciale) du Conseil d’administration, qui marque le début de ce qui sera une période
extrêmement difficile pour l’OIT. Il est regrettable que le Président ait été persuadé d’imposer
un vote sur la question à l’examen, alors qu’il avait donné l’assurance qu’il s’efforcerait de
trouver un consensus. Il est également regrettable que certains gouvernements, tout en
prétendant être les champions du dialogue social, aient refusé de collaborer avec le groupe
des employeurs. Certains ont même violé leurs obligations au titre de la convention (no 144)
sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, en ne
consultant pas les organisations nationales d’employeurs sur la question.
6. La plupart des gouvernements qui ont participé au comité plénier se sont prononcés en faveur
de la résolution de la difficulté d’interprétation par le dialogue social – la pierre angulaire de
l’OIT – dans le contexte de la Conférence. Ce fait n’a pas été pris en considération lors du vote,
ce qui a contribué à mettre sur la touche un grand nombre d’États Membres qui ne siègent pas
au Conseil d’administration. En conséquence, le groupe des employeurs prendra d’autres
mesures pour renforcer la démocratisation et l’inclusivité des processus de prise de décision à
l’OIT, notamment en appelant à de nouvelles discussions sur la question lors des prochaines
sessions du Conseil d’administration et de la Conférence. Une minorité de gouvernements ne
devraient pas avoir la possibilité de faire prévaloir leurs visées politiques sur des questions
techniques qui ont une incidence sur le reste du monde. Le dialogue social a été gravement
compromis et les valeurs de l’Organisation mises en péril, ce qui nuit à la crédibilité et à la
pertinence de nombreuses initiatives de l’OIT. En outre, le refus du groupe des travailleurs de
s’engager pleinement dans le dialogue social tripartite, de prendre des mesures pour combler
les lacunes du cadre normatif et de participer au dialogue social sur le droit de grève crée un
précédent inquiétant pour les travaux de l’Organisation.
GB.349ter/PV/Projet 5
7. La difficulté d’interprétation ne sera pas résolue par la soumission d’une question à
l’appréciation de la CIJ. Le droit de grève est une question multidimensionnelle et complexe, et
les différents systèmes et pratiques de relations professionnelles en place dans les États
Membres doivent être pris en compte lors de l’élaboration de règles internationales en la
matière. Ces règles doivent être établies par les mandants tripartites dans le cadre des
procédures en vigueur à l’OIT. Par conséquent, indépendamment de l’avis consultatif de la CIJ,
il sera toujours nécessaire d’établir des normes si le droit de grève doit être réglementé au
niveau international.
8. Le groupe des employeurs reste d’avis que l’établissement de normes par la Conférence est le
moyen le plus approprié et le plus logique de mettre un terme définitif à la difficulté
d’interprétation. Les mandants tripartites, ainsi que les organes de contrôle de l’OIT, ont reconnu
qu’il n’existe actuellement aucun instrument de l’OIT protégeant expressément le droit de grève.
La seule façon de combler le vide réglementaire est de recourir à des moyens réglementaires.
En outre, l’action normative est une procédure bien établie pour élaborer des règles faisant
autorité sur des sujets importants dans le monde du travail. Elle a constitué la première étape
dans la résolution d’une difficulté d’interprétation de la convention (no 4) sur le travail de nuit
(femmes), 1919, par exemple. La devancière de la CIJ n’a été saisie de cette difficulté
d’interprétation qu’après que des efforts ont été déployés pour la résoudre en inscrivant à l’ordre
du jour de la Conférence une question normative sur ce thème. La Conférence peut apporter
une fois pour toute une sécurité juridique sur une question particulière, ce qu’un avis consultatif
non contraignant de la CIJ ne peut pas faire. Seule la voie normative garantira que tous les
mandants de l’OIT peuvent participer activement au processus, que toute solution sera fondée
sur un consensus ou sur un vote majoritaire de tous les mandants de l’OIT, et que le résultat,
quel qu’il soit, sera universellement pertinent et accepté. À l’inverse, un avis consultatif de la CIJ
n’empêchera pas le groupe des employeurs et de nombreux gouvernements d’être en désaccord
avec les interprétations et avis extensifs sur le droit de grève qui sont émis par la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations.
9. Pour résoudre la difficulté d’interprétation, le groupe des employeurs propose qu’un protocole
relatif à la convention no 87 soit élaboré. L’intention n’est pas d’amender la convention, mais
plutôt de définir dans un instrument distinct la portée et les limites du droit de grève d’un point
de vue global. Le groupe n’est pas opposé à l’établissement de normes au moyen d’un autre
type d’instrument. Toutefois, sur la base des enseignements tirés de l’élaboration et de la mise
en oeuvre du protocole de 2014 relatif à la convention sur le travail forcé, 1930, un protocole
serait l’instrument le plus approprié pour réglementer le droit de grève. Une fois un tel
instrument adopté, la commission d’experts serait censée se conformer fidèlement à la décision
de la Conférence et aux intentions des rédacteurs et ne pourrait pas continuer à émettre des avis
extensifs et inappropriés sur le droit de grève au regard de la convention no 87.
10. Le groupe des employeurs a demandé qu’une question normative soit inscrite à l’ordre du jour
de la session de la Conférence de 2024 pour tenir compte de l’urgence des demandes
formulées par le groupe des travailleurs et certains gouvernements. Il n’y aurait pas d’obstacle
juridique à cette mesure si le Conseil d’administration décidait d’adopter un programme
prévoyant des délais réduits pour le processus préparatoire. Il existe un précédent puisqu’une
telle proposition a été formulée en 1992. Le groupe des employeurs n’est pas opposé à ce que
cette question soit plutôt inscrite à l’ordre du jour de la Conférence de 2025 ou 2026, si cela
peut faciliter les préparatifs. Les difficultés à surmonter pour inscrire la question à l’ordre du
jour de la session de la Conférence de 2024 ne doivent pas servir de prétexte pour écarter
purement et simplement cette option.
GB.349ter/PV/Projet 6
11. Les débats de la 112e session (2024) de la Conférence ne seront pas faciles. Le groupe des
employeurs exprimera avec plus de force son désaccord avec la commission d’experts et
l’oratrice s’attend à ce qu’il soit demandé de tenir une session spéciale de la Commission de
l’application des normes en vue d’examiner la question. La décision prise par le Conseil
d’administration à sa 349e bis session (spéciale) aura également une incidence négative sur la
discussion récurrente consacrée aux principes et droits fondamentaux au travail et sur les
travaux du Comité de la liberté syndicale.
12. Si l’élaboration de normes est la solution la plus appropriée au problème, le groupe des
employeurs n’a pas de position arrêtée sur d’autres options – telles que l’organisation d’une
discussion générale ou d’une réunion tripartite d’experts consacrée à cette question – ou sur
les résultats et le calendrier de l’action normative. Les propositions du groupe sont pleinement
conformes aux valeurs de tripartisme et de dialogue social de l’OIT. L’oratrice appelle tous les
gouvernements à démontrer leur attachement à ces valeurs et à donner leur avis sur les
options présentées dans la version du projet de décision amendée par le groupe des
employeurs.
13. La Vice-présidente travailleuse reconnaît que l’action normative est au coeur du mandat de
l’OIT. Fidèle au mandat de l’Organisation tel qu’il est énoncé dans la Constitution, le Conseil
d’administration contribue à cette action en s’efforçant constamment d’améliorer les normes.
Cependant, la proposition avancée par le groupe des employeurs – dans les commentaires
qu’il a formulés sur le document du Bureau – aura l’effet inverse, puisqu’elle prévoit l’adoption
d’un protocole dans le seul but de détricoter les orientations de longue date et solidement
fondées des organes de contrôle de l’OIT concernant la convention no 87. En outre, la tentative
de limiter le pouvoir d’interprétation de la commission d’experts n’aboutira pas dans la
pratique, car la commission devra toujours assurer le suivi de la mise en oeuvre du protocole
et déterminer la portée juridique, le contenu et la signification de ses dispositions. Le protocole
proposé n’apportera donc pas de sécurité juridique définitive sur la question, et la discussion
normative nécessaire à son établissement mettra en évidence les mêmes désaccords
fondamentaux et persistants en matière d’interprétation.
14. Il n’y a pas de lacunes dans la protection et la réglementation du droit de grève au niveau
international. Toutefois, afin de remédier au désaccord entre le groupe des employeurs, d’une
part, et le groupe des travailleurs et un grand nombre de gouvernements, d’autre part, il a été
décidé de demander à la CIJ de rendre un avis consultatif sur la question de savoir si le droit
de grève est protégé par la convention no 87. Compte tenu des positions incompatibles et
opposées qui ont été exprimées sur cette question, il sera impossible de proposer une
quelconque initiative de nature normative sans que la question soit résolue au préalable par
une décision de la CIJ contraignante et faisant autorité.
15. Les protocoles sont généralement utilisés comme un moyen flexible de réviser en partie
certaines dispositions des conventions existantes, ce qui signifie que, dans le cas présent, il
sera nécessaire de déterminer les dispositions de la convention no 87 qui doivent être révisées
ou clarifiées. Toutefois, si, comme le prétend le groupe des employeurs, le droit de grève n’est
en aucune manière traité dans la convention no 87, il ne sera ni logique ni conforme à la théorie
et à la pratique constitutionnelles de l’OIT de lier un tel protocole à cette convention.
16. Il est juridiquement et techniquement impossible d’annuler les orientations sur la convention
no 87 qui font autorité dans le cadre du système de contrôle et de les remplacer par les
dispositions contraignantes qui figureraient dans le protocole proposé, car cela reviendrait à
réduire au silence la commission d’experts. En outre, il est très préoccupant que le groupe des
employeurs ait exprimé à plusieurs reprises son opposition aux commentaires de la
GB.349ter/PV/Projet 7
commission d’experts sur le droit de grève et qu’il propose leur suppression, qui ne ferait
qu’accroître l’insécurité juridique. L’adoption d’un protocole aurait pour effet de créer un
système à deux vitesses: l’un pour les pays qui n’ont ratifié que la convention no 87, l’autre pour
les pays qui ont ratifié à la fois la convention et son protocole. La commission d’experts devrait
alors fournir des orientations sur les deux, ce qui pourrait conduire à des résultats divergents.
17. Le groupe des travailleurs conteste l’argument du groupe des employeurs selon lequel l’action
normative est la seule solution viable à la difficulté d’interprétation, car elle permettrait de
parvenir à une «solution s’appuyant sur le dialogue social tripartite» qui serait «fondée sur un
consensus ou du moins sur une large majorité». Compte tenu du désaccord fondamental qui
sous-tend la difficulté d’interprétation, il est malaisé de voir comment un tel consensus ou une
telle majorité pourraient être dégagés. Il semble que le groupe des employeurs tente
simplement de supprimer le droit fondamental et la protection dont les travailleurs jouissent
actuellement en vertu de la convention no 87, obligeant ainsi les mandants de l’OIT à
renégocier ce principe et droit fondamental au travail. Cette démarche est inacceptable pour
le groupe des travailleurs et pour l’ensemble du mouvement syndical international, et il est
improbable que les gouvernements la soutiennent. L’objectif et le mandat constitutionnels de
l’OIT sont de protéger les droits des travailleurs; une action normative visant à revenir sur des
droits existants ou à les supprimer est contraire à cet objectif et à ce mandat.
18. Concrètement, la proposition du groupe des employeurs d’inscrire à l’ordre du jour de la
112e session de la Conférence (2024) une question sur le droit de grève en vue d’une discussion
normative qui se tiendrait dans sept mois seulement témoigne d’un manque de respect pour
les procédures de l’Organisation. Comme expliqué dans l’annexe du document
GB.349ter/INS/1, cela serait irréalisable, même si un programme de réduction des délais était
approuvé, compte tenu notamment des travaux préparatoires nécessaires pour assurer la
pleine participation des mandants tripartites. En faisant cette proposition, le groupe des
employeurs manifeste peu de respect pour les décisions antérieures du Conseil d’administration
concernant l’ordre du jour de la Conférence, qui a été élaboré par consensus sur la base des
recommandations du Groupe de travail tripartite du mécanisme d’examen des normes.
19. Outre qu’il rejette la proposition de tenir une discussion normative, le groupe des travailleurs
est opposé à la proposition d’amendement du groupe des employeurs au projet de décision,
qui n’a guère de sens à la lumière de la décision de soumettre la difficulté d’interprétation à
l’appréciation de la CIJ et qui ne tient pas compte de la procédure normale d’inscription des
questions à l’ordre du jour de la Conférence. Aucun débat ne devrait avoir lieu à la Conférence
tant que la CIJ n’aura pas rendu son avis sur la question. La convocation d’une réunion d’experts
serait également contre-productive au stade actuel et ne constituerait pas une procédure
suffisamment inclusive. Le dernier élément de l’amendement, selon lequel le Conseil
d’administration continuerait d’examiner les dispositions à prendre pour assurer la sécurité
juridique, est tout simplement inutile. Le groupe des travailleurs est d’avis que le Conseil
d’administration devrait attendre les orientations de la CIJ avant de prendre toute autre
mesure, et propose à cet effet une version amendée du projet de décision.
20. S’exprimant au nom de l’Union européenne et de ses États membres, un représentant du
gouvernement de l’Espagne indique que le Monténégro, l’Islande et la Norvège s’associent à
sa déclaration. Il rappelle l’importance d’obtenir une sécurité juridique sur la question de savoir
si la convention no 87 prévoit le droit de grève, mais souligne qu’une action normative, y
compris l’adoption d’un protocole relatif à la convention, ne serait d’aucune utilité à cet égard.
Non seulement la portée et la valeur ajoutée d’un tel protocole ne sont pas claires, mais encore
celui-ci pourrait remettre en cause l’autorité des organes de contrôle de l’OIT. En outre, il ne
semble pas possible de lier un protocole sur le droit de grève à une convention qui fait l’objet
GB.349ter/PV/Projet 8
d’un différend concernant ce droit. Si une nouvelle question normative était inscrite à l’ordre
du jour de la session de la Conférence internationale du Travail de 2024, les mandants de l’OIT
ne disposeraient pas de suffisamment de temps pour se préparer. Par conséquent, l’Union
européenne et ses États membres n’appuient pas la demande d’inscription d’une question
normative sur le droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence.
21. Une représentante du gouvernement de l’Autriche estime que la discussion en cours n’est
plus nécessaire, car aucune autre mesure ne doit être prise tant que l’avis consultatif de la CIJ
n’a pas été reçu. Le gouvernement de l’Autriche ne souscrit pas à la demande de tenir une
discussion normative sur le droit de grève.
22. Une représentante du gouvernement de la Suisse déclare que son gouvernement respecte
la demande formulée par le groupe des employeurs. Toutefois, compte tenu de la décision que
le Conseil d’administration a prise à sa 349e bis session (spéciale) et que le gouvernement de la
Suisse respecte, la Suisse s’abstiendra d’entamer l’examen de tout instrument juridique
éventuel concernant le droit de grève tant que la CIJ n’aura pas rendu son avis consultatif,
comme cela lui a été demandé. La Suisse estime que le fait d’établir que la convention no 87
protège ou non le droit de grève n’éclairera pas les modalités de l’exercice de ce droit. S’il était
décidé que la convention protège le droit de grève sans le réglementer, il faudrait alors se
demander qui détermine les modalités d’exercice de ce droit, à savoir s’il appartient aux
législateurs tripartites, aux organes de contrôle, aux juges de la CIJ ou aux juges des tribunaux
nationaux de prendre une décision contraignante à ce sujet. En conclusion, l’oratrice rappelle
la position commune exprimée par le groupe gouvernemental en 2015: «[L]e droit de grève,
même s’il fait partie des principes et droits fondamentaux au travail de l’OIT, n’est pas un droit
absolu. Sa portée et les conditions de l’exercice de ce droit sont réglementées au niveau
national.» L’oratrice demande au Bureau ce qu’il advient des cas concernant le droit de grève
examinés par le Comité de la liberté syndicale ou la commission d’experts, et notamment si le
recours à la CIJ a un effet suspensif.
23. Un représentant du gouvernement de la Türkiye souligne l’importance de préserver le droit
de grève en tant que partie intégrante des principes et droits au travail et réaffirme que, si le
droit de grève est fondamental, il ne constitue pas un droit absolu. La portée et les conditions
de ce droit doivent donc être réglementées au niveau national. Le gouvernement de la Türkiye
maintient que les différends relatifs à l’interprétation de la convention no 87 doivent être
résolus par le biais des mécanismes existants de l’Organisation. Cela dit, bien qu’il eût été
préférable de soumettre la question à la Conférence, il devrait néanmoins être possible de
parvenir à une issue positive pour toutes les parties sur la base de la décision du Conseil
d’administration de soumettre le différend à la CIJ. Une approche constructive et collaborative
dans le cadre tripartite de l’OIT devrait toujours être le premier ressort pour trouver des
solutions pratiques et mieux comprendre les différents points de vue des mandants.
24. Un représentant du gouvernement de l’Algérie regrette l’absence de consensus sur la
question, qui a divisé l’Organisation et qui doit être traitée de manière constructive et
pragmatique, en conformité avec les valeurs de l’OIT, tout en préservant la clarté et la cohérence
des normes internationales du travail. Toute discussion normative relative à la convention no 87
devrait être menée dans le cadre d’un processus transparent, équilibré et bénéfique pour toutes
les parties, fondé sur le dialogue social et conformément aux procédures en vigueur. Les
discussions sur l’élaboration d’un protocole ou d’un instrument similaire doivent garantir que les
relations entre les employeurs et les travailleurs ne seront pas compromises. Il conviendrait de
procéder à une analyse approfondie des incidences des actions normatives sur le champ
d’application de la convention, ce qui devrait permettre de résoudre le différend.
GB.349ter/PV/Projet 9
25. Un représentant du gouvernement de la Colombie est d’avis qu’il aurait été préférable que
les discussions tenues lors de la 349e bis session (spéciale) du Conseil d’administration
aboutissent à un consensus. Le droit de grève est inextricablement lié au droit de négociation
collective et à la liberté syndicale. Le gouvernement de la Colombie est en train d’appliquer les
recommandations de la commission d’experts et du Comité de la liberté syndicale sur le droit
de grève dans son processus de réforme de la législation du travail et apprécie donc la sécurité
juridique que peut lui apporter l’OIT à cet égard. Il faut continuer à renforcer le dialogue en
tant que pilier de l’OIT; toutefois, lorsqu’il n’est pas possible de parvenir à un consensus,
l’Organisation doit utiliser les mécanismes dont elle dispose. L’orateur remercie le Président
des efforts qu’il déploie pour rechercher une convergence des vues, et le Bureau d’avoir permis
la discussion, notant que tous deux ont agi de manière impartiale. Le gouvernement de la
Colombie soutient le projet de décision tel qu’amendé par le groupe des travailleurs, en
précisant qu’aucune autre mesure ne doit être prise tant que la CIJ n’aura pas rendu un avis
sur la question.
26. Un représentant du gouvernement du Japon estime que, du fait de la décision que le Conseil
d’administration a prise à sa 349e bis session (spéciale), il est prématuré d’évaluer la proposition
du groupe des employeurs compte tenu de l’incertitude quant au contenu d’un protocole
relatif à la convention no 87. Le gouvernement du Japon ne peut donc pas soutenir le projet de
décision tel qu’amendé par le groupe des employeurs. L’orateur propose de sous-amender
l’amendement présenté par le groupe des travailleurs en ajoutant, à la fin de la phrase, les
mots «pour le moment», car le Conseil d’administration pourrait avoir besoin d’étudier ses
options après que la CIJ aura rendu son avis.
27. S’exprimant au nom du groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), une
représentante du gouvernement du Mexique remercie le Bureau, sous la direction du
Directeur général, pour ses travaux, qui ont été menés avec intégrité et impartialité. Le
GRULAC reconnaît également le savoir-faire du Président dans la conduite des débats.
28. La représentante du gouvernement du Mexique, s’exprimant au nom de son pays, souligne
que le droit de grève fait partie intégrante de l’exercice de la liberté syndicale. Elle se félicite de
la proposition du groupe des employeurs d’adopter des dispositions expresses pour
réglementer le droit de grève sur la base de la convention no 87. Toutefois, avant d’accepter
une telle discussion, les mandants tripartites de l’OIT ont besoin de la sécurité juridique que
leur apporterait l’avis consultatif de la CIJ. Les différentes options contenues dans la
proposition d’amendement du groupe des employeurs sont bienvenues et certaines d’entre
elles pourraient être utiles à l’avenir, une fois que l’avis consultatif aura été reçu. La sécurité
juridique quant à la convention no 87 affermira les organes de l’OIT, le tripartisme et le dialogue
social, et leur permettra de renforcer les droits fondamentaux des travailleurs.
29. Un représentant du gouvernement de la Fédération de Russie remercie le Président pour
la façon dont il a dirigé le Conseil d’administration dans des débats difficiles. Le droit de grève
est reconnu dans l’écrasante majorité, sinon la totalité, des États Membres, y compris la
Fédération de Russie. Toutefois, les dispositions juridiques régissant le droit de grève varient
d’un État à l’autre, ce qui signifie qu’il est peu probable qu’un instrument international puisse
consolider toutes les approches. Le gouvernement de la Fédération de Russie ne peut, en
conséquence, soutenir la proposition d’élaborer un instrument international, mais n’exclut pas
la possibilité de travailler sur un tel instrument à l’avenir. Une question pourrait être inscrite à
l’ordre du jour d’une prochaine session de la Conférence, étant entendu que les discussions ne
déboucheront pas sur l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant.
GB.349ter/PV/Projet 10
30. Une représentante du Directeur général (directrice, Département des normes
internationales du travail (NORMES)), répondant à une question de la représentante du
gouvernement de la Suisse, renvoie au document GB.347/INS/5, en particulier au
paragraphe 27 du corps du document et au paragraphe 17 du cadre de procédure figurant à
l’annexe I, qui dispose que «[l]e renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation
devant la Cour et l’ouverture consécutive d’une procédure consultative ne sauraient avoir pour
effet de suspendre, ni d’entraver de quelque autre manière, le contrôle de l’application de la
ou des conventions faisant l’objet de ladite procédure». Les organes de contrôle resteraient
bien entendu libres de décider de la ligne de conduite qu’ils jugeraient appropriée à cet égard.
31. La Vice-présidente travailleuse se dit préoccupée par le fait que certaines des questions
soulevées par la représentante du gouvernement de la Suisse n’ont peut-être pas fait l’objet
d’un consensus tripartite solide, bien que, contrairement au groupe des employeurs, elle ne
veuille pas donner à entendre qu’un gouvernement viole la convention no 144. Il est important
de s’accorder sur le fait que le différend persistant ne perturbera pas les travaux des organes
de contrôle de l’OIT plus qu’il ne l’a déjà fait. L’opinion dominante est que le droit de grève est
couvert par la convention no 87, ce que seul le groupe des employeurs a contesté, sans un
large soutien des gouvernements, et le système de contrôle aurait dû de ce fait être en mesure
de continuer à fonctionner sur cette base. L’effet perturbateur du différend a toutefois entraîné
la nécessité de saisir la CIJ. Il est à espérer que la question du fonctionnement du système de
contrôle aura montré combien le sujet est sensible, mais tout le monde doit comprendre,
comme vient de le préciser le Bureau, que le fait de demander un avis à la CIJ n’empêche pas
les organes de contrôle de continuer à travailler comme d’habitude, jusqu’à ce que la Cour leur
dise le contraire. Le système ne doit pas être attaqué davantage.
32. Une représentante du gouvernement de la Suisse relève que les gouvernements ont le droit
de demander des précisions au Bureau et que poser la question de savoir si une saisine de la
Cour a un effet suspensif n’est pas une remise en cause du système de contrôle de l’OIT. La
position du gouvernement suisse, transmise au Bureau en réponse au rapport d’information
élaboré par celui-ci, a été très claire dès le départ et a été définie en consultation avec les
partenaires sociaux suisses. Ces derniers ont également envoyé leur propre réponse au
Bureau. L’oratrice demande donc à la Vice-présidente travailleuse de retirer son commentaire
mettant en doute la consultation des partenaires sociaux suisses, ainsi que son commentaire
laissant entendre que la question posée par la Suisse remet en cause le système de contrôle
de l’OIT.
33. La Vice-présidente travailleuse indique que, si le gouvernement de la Suisse a procédé
récemment à des consultations sur la question, elle retirera ce qu’elle a laissé entendre au sujet
du manque de consultation. Toutefois, son groupe a entendu dire, au début du processus, que
les syndicats n’étaient pas satisfaits de la situation en Suisse. L’oratrice reconnaît pleinement
le droit de chacun à poser des questions au Bureau. Elle tient simplement à établir très
clairement que le sujet est très sensible. À cet égard, elle est reconnaissante à la représentante
du gouvernement de la Suisse d’avoir posé la question et se déclare satisfaite des
éclaircissements apportés par le Bureau.
34. La Vice-présidente employeuse déplore le fait que la décision prise la veille lors de la 349e bis
session (spéciale) ait fait échouer les discussions de la 349e ter session (spéciale) et que les deux
solutions n’aient pas pu être discutées calmement dans le cadre du dialogue social. Ayant
entendu principalement des membres n’appartenant pas au Conseil d’administration durant
le comité plénier, elle réservera sa déclaration finale jusqu’à ce qu’elle ait entendu les membres
du Conseil d’administration.
GB.349ter/PV/Projet 11
Conseil d’administration
35. Le Conseil d’administration est saisi de deux versions amendées du projet de décision,
proposées par le groupe des employeurs et par le groupe des travailleurs, dont il a été débattu
en comité plénier.
36. Le Président, conformément à l’article 4.3 du Règlement et aux dispositions applicables à la
session spéciale adoptées par le Conseil d’administration à sa 349e session, rend compte
oralement de la teneur des vues échangées lors du comité plénier:
Conformément à l’article 4.3 du Règlement du Conseil d’administration et aux dispositions
adoptées pour cette session spéciale, j’ai l’honneur de rendre compte au Conseil
d’administration de la teneur des vues échangées ce matin.
Le comité plénier a permis un échange de vues constructif auquel ont participé 11 orateurs,
dont les représentants de gouvernements qui ne sont pas représentés au Conseil
d’administration.
Sur la question principale de savoir si l’Organisation doit ou non inscrire d’urgence la question
du droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail
(juin 2024), pour discussion normative, le groupe des travailleurs et le groupe des employeurs
ont réaffirmé leurs positions respectives.
Le groupe des employeurs a exprimé son profond regret et sa grande déception au sujet de
l’issue de la 349e bis session (spéciale) du Conseil d’administration, estimant que le dialogue
social avait été gravement mis à mal. Le dialogue social était la pierre angulaire de l’OIT, et non
les actions en justice.
Le groupe des employeurs a par ailleurs remercié les nombreux gouvernements qui se sont
prononcés en faveur d’une solution fondée sur le dialogue tripartite dans le cadre de la
Conférence internationale du Travail et a regretté que son propre point de vue et celui de
nombreux gouvernements n’aient pas été pris en compte et qu’un vote en faveur de la saisine
de la Cour internationale de Justice (CIJ) soit passé en force. En conséquence, il allait prendre
d’autres mesures lors des sessions suivantes du Conseil d’administration et de la Conférence
internationale du Travail pour rendre les procédures de l’OIT plus démocratiques et plus
inclusives.
De l’avis du groupe des employeurs, les questions relatives au droit de grève présentaient de
multiples facettes et ni la CIJ ni la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations n’était en mesure d’y répondre correctement et de manière concluante.
Compte tenu de l’absence de normes de l’OIT sur la question et du fait que les instruments
internationaux existants concernant le droit de grève renvoyaient au rôle de la législation
nationale, il était nécessaire d’adopter une réglementation internationale, ce qui cadrait
parfaitement avec le rôle normatif de l’OIT.
Le groupe des employeurs a réaffirmé que le seul moyen de régler des difficultés
d’interprétation était de mener une action normative associant tous les mandants de l’OIT, afin
d’aboutir à la sécurité juridique et à des règles faisant autorité que la commission d’experts
serait tenue de suivre. A contrario, les avis consultatifs de la CIJ n’étaient pas juridiquement
contraignants et n’empêcheraient pas le groupe des employeurs de continuer de s’opposer aux
prises de position précises de la commission d’experts sur le droit de grève.
Le protocole proposé ne modifierait en rien la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, qui ne mentionnait pas le droit de grève, mais définirait des
règles encadrant ce droit, qui seraient contraignantes seulement pour ceux qui le ratifieraient.
Le groupe des employeurs ne s’opposerait toutefois pas à d’autres options normatives, comme
l’élaboration d’une recommandation ou d’une convention.
Le groupe des employeurs a déclaré que le Conseil d’administration avait la possibilité, en
mars 2024, d’inscrire une question relative au droit de grève à l’ordre du jour de la 112e session
de la Conférence internationale du Travail (2024), en vue d’une discussion normative. Mais ce
GB.349ter/PV/Projet 12
point pourrait aussi être débattu aux sessions 2025 et 2026 de la Conférence. Le groupe des
employeurs était également ouvert à d’autres options, telles qu’une discussion générale ou une
réunion tripartite d’experts.
Le groupe des travailleurs a rappelé que l’action normative était au coeur de l’Organisation qui
avait été créée pour réduire la pauvreté et sauvegarder la dignité humaine en renforçant les
droits et en améliorant les conditions de travail. Il ne pouvait donc pas accepter des
propositions qui visaient à revoir à la baisse les normes relatives au droit de grève ou à affaiblir
ou infirmer les orientations de la commission d’experts qui faisaient autorité à ce sujet. Un
protocole ne permettrait pas de régler le différend en question. Au contraire, il serait à l’origine
d’une plus grande insécurité juridique en ce qu’il instaurerait deux régimes juridiques distincts,
l’un qui s’appliquerait aux Membres ayant ratifié la convention no 87 uniquement et l’autre à
ceux ayant ratifié à la fois la convention et le protocole. Aucune initiative ne serait pertinente
tant que la CIJ n’aurait pas rendu son avis consultatif. La question se posait en outre de savoir
comment un protocole sur le droit de grève pourrait se rapporter à une convention qui, selon
le groupe des employeurs, ne couvrait pas ce droit.
Selon le groupe des travailleurs, il serait difficile d’arriver à un consensus tripartite lors de la
Conférence, dans la mesure où le dialogue n’avait pas permis d’en dégager un jusqu’à présent.
Les tentatives visant à défaire ou à supprimer les droits fondamentaux allaient à l’encontre des
objectifs et du mandat de l’OIT et resteraient inacceptables, tant pour le mouvement syndical
que pour de nombreux gouvernements. Le groupe des travailleurs s’interrogeait aussi sur la
procédure au vu des questions déjà inscrites par le Conseil d’administration et de la
préparation qu’exige une action normative. Les autres pistes proposées dans l’amendement
des employeurs ne valaient pas mieux que le protocole. De l’avis du groupe des travailleurs, la
seule approche possible consistait à attendre les orientations de la CIJ qui préciseraient si le
droit de grève était ou non couvert par la convention no 87. Cela pouvait certes compromettre
le travail du système de l’OIT ou d’autres discussions, mais c’était le seul moyen de mettre un
terme au différend.
Tous les gouvernements ont réaffirmé l’importance de la liberté syndicale et du droit de grève.
Beaucoup ont souligné que le droit de grève était un corollaire indissociable de la liberté
syndicale ainsi qu’un principe et droit fondamental au travail.
Un nombre important de gouvernements ont estimé que, comme il avait été décidé de
soumettre la difficulté d’interprétation concernant le droit de grève à la CIJ pour avis consultatif,
il était prématuré de débattre de l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence
pour discussion normative. Certains ont ajouté qu’il n’était pas possible de discuter d’une action
normative sur le droit de grève tant que le différend sur la question de savoir si ce droit était
couvert par la convention no 87 n’était pas tranché.
Certains gouvernements ont dit regretter la décision de renvoyer cette difficulté
d’interprétation devant la CIJ, estimant qu’elle faisait obstacle au dialogue social, qui est
normalement la voie à suivre pour régler les différends à l’OIT. D’autres estimaient que la
sécurité juridique était dans l’intérêt de l’Organisation dans son ensemble, y compris des
mandants tripartites et des organes de contrôle.
Certains gouvernements ont évoqué la possibilité d’une reprise du dialogue tripartite,
éventuellement dans le cadre d’une action normative à la Conférence ou par d’autres moyens,
une fois que la CIJ aura rendu son avis consultatif. Ils ont exprimé le souhait qu’une solution
soutenue par tous les mandants tripartites soit finalement trouvée.
Plusieurs orateurs ont fait observer que le droit de grève n’était pas un droit absolu et qu’il
devait être réglementé au niveau national. Il a été dit à cet égard que la CIJ n’avait pas
compétence pour examiner la question des modalités d’exercice du droit de grève. Selon
certains orateurs, ces modalités pourraient être abordées dans le cadre du dialogue social,
lorsque l’avis consultatif aura été rendu.
Certains orateurs ont exprimé le souhait de s’en remettre à la Conférence à un stade ultérieur
en vue de parvenir à des solutions équilibrées et pragmatiques qui tiennent compte des
divergences de vues.
GB.349ter/PV/Projet 13
Tous les orateurs ont souligné l’importance du dialogue social et ont dit espérer qu’il serait
sauvegardé et renforcé au sein de l’OIT.
Enfin, en réponse à une question posée par un gouvernement, le Bureau a indiqué que la
saisine de la CIJ n’aurait pas d’effet suspensif sur le fonctionnement régulier du mécanisme de
contrôle de l’OIT (voir GB.347/INS/5, paragraphe 27, et le paragraphe 17 du cadre de
procédure, à l’annexe I du même document).
J’espère avoir rendu justice à la qualité des échanges de vue qui ont eu lieu en comité plénier
ainsi qu’à l’engagement et au sens des responsabilités manifestés par les trois groupes.
Je compte maintenant sur le Conseil d’administration pour prendre la suite, en séance plénière,
et engager un débat constructif sur les options envisageables pour aller de l’avant.
37. La Vice-présidente employeuse déclare que le comité plénier offre un cadre de discussion
important et utile pour les questions fondamentales. Elle rappelle que l’objectif du groupe des
employeurs est de permettre à la Conférence internationale du Travail de discuter
d’éventuelles réglementations internationales concernant la définition, la portée et les limites
du droit de grève, et de prendre des décisions à ce sujet. Ces réglementations ne peuvent être
élaborées que par les mandants tripartites, dans le cadre des procédures établies de l’OIT, et
pas par la CIJ ou la commission d’experts.
38. En se penchant sur la question de savoir si la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, couvre le droit de grève, la CIJ devrait prendre en
considération le refus persistant du groupe des travailleurs et de certains gouvernements de
permettre une action normative sur ce droit. Ce que le groupe des travailleurs ne souhaite pas
voir explicitement réglementé dans un instrument ne peut pas l’être implicitement dans la
convention. Dans son amendement, le groupe des employeurs a présenté quatre options pour
une discussion inclusive sur le droit de grève. Ce qui distingue fondamentalement les deux
projets d’amendement, c’est que le groupe des employeurs a proposé une discussion sans
précédent à la Conférence, tandis que le groupe des travailleurs a imposé unilatéralement sa
position, bafouant ainsi l’esprit du dialogue social.
39. La première option proposée par le groupe des employeurs est une action normative souple,
qui pourrait déboucher sur des recommandations, des protocoles ou des conventions. Si le
groupe des employeurs a proposé que ces travaux aient lieu en 2024, c’est uniquement pour
répondre à l’urgence alléguée par le groupe des travailleurs, et il serait satisfait s’ils étaient
reportés à une session ultérieure de la Conférence, pour une meilleure préparation. La
deuxième option consiste en une discussion générale sur le droit de grève et l’action collective
à la Conférence, qui permettrait à tous les États Membres et aux partenaires sociaux de
participer à un débat de fond. Quant à la réunion d’experts, proposée dans la troisième option,
elle donnerait lieu à un débat de fond, contrairement à la réunion d’experts qui s’est tenue en
2015. La quatrième option consiste à poursuivre l’examen, à la session suivante du Conseil
d’administration, de toutes les propositions envisageables concernant les nouvelles
dispositions à prendre pour assurer la sécurité juridique.
40. L’amendement proposé par le groupe des travailleurs témoigne quant à lui d’un mépris total
pour la Conférence et l’OIT dans son ensemble. En refusant d’inscrire la question du droit de
grève à l’ordre du jour de la Conférence, le groupe des travailleurs montre qu’il n’est pas
disposé à régler le problème et qu’il préfère imposer l’établissement d’une norme par des
moyens extérieurs. Le groupe des travailleurs prétend que le protocole proposé serait
substantiellement inférieur aux normes existantes, mais cela ne peut pas être vrai puisque le
droit de grève n’est pas encore réglementé au niveau mondial. En outre, alors que la
convention no 87 ne contient pas le mot «grève», le groupe des travailleurs s’oppose à ce que
cette lacune réglementaire soit comblée par une action normative. Qui plus est, tous les traités
GB.349ter/PV/Projet 14
internationaux relatif au droit de grève renvoient à la législation et à la pratique nationales, et
tout instrument de l’OIT peut soit confirmer les avis de la commission d’experts, soit s’en
écarter. Une norme élaborée par la Conférence, organe suprême de l’OIT, sera légitime aux
yeux de tous les mandants de l’OIT et obtiendra leur adhésion. Pour régler le différend, un bon
point de départ serait de reconnaître le rôle unique de la Conférence en tant que productrice
de normes sur toutes les questions relatives au travail, y compris le droit de grève.
41. La convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, ne fait aucune référence explicite ou implicite à
la traite des personnes. Néanmoins, au fil du temps, la commission d’experts a fait des
commentaires sur la traite lorsqu’elle examinait l’application de cet instrument, et cette lacune
réglementaire a été comblée par un protocole. L’action normative que le groupe des
employeurs propose, sous la forme d’un protocole, s’inscrit donc parfaitement dans la logique
de la pratique antérieure, puisque la commission d’experts a également formulé des avis
détaillés sur le droit de grève lorsqu’elle examinait l’application de la convention no 87, alors
que le droit de grève est expressément exclu de cet instrument.
42. Un certain nombre de gouvernements ont estimé que les propositions faites par le groupe des
employeurs pouvaient être des pistes à envisager à un stade ultérieur. L’oratrice réaffirme
donc que le groupe des employeurs entend saisir la Conférence de cette question à une
session future et aussi réaffirmer, à la session suivante de la Conférence, son point de vue sur
les avis de la commission d’experts concernant le droit de grève, d’autant plus que le Bureau a
précisé que la saisine de la CIJ n’aurait pas d’effet suspensif et que la commission d’experts
pourrait donc continuer de formuler des avis sur cette question.
43. La Vice-présidente travailleuse fait savoir qu’elle n’est toujours pas satisfaite de la réponse
apportée par la Vice-présidente employeuse à sa demande urgente de clarification de la
déclaration selon laquelle la décision adoptée par le Conseil d’administration à sa 349e bis
session (spéciale) aura des conséquences sur la session 2024 de la Conférence. Elle souhaite
obtenir l’assurance que tous les mandants de l’OIT participeront de bonne foi aux discussions
tripartites lors de cette session, faute de quoi son groupe cessera de participer à un dialogue
social faussé par l’attitude du groupe des employeurs.
44. Le groupe des travailleurs a un avis différent sur le précédent relatif à la convention no 4, utilisé
par le groupe des employeurs pour défendre l’option d’une action normative. Avant d’être
renvoyée devant la CIJ, la difficulté d’interprétation de cette convention, qui portait sur la
définition des travailleuses, avait soulevé au Conseil d’administration des désaccords majeurs
quant à la façon dont elle pouvait être réglée. La décision initiale du Conseil d’administration
en faveur d’une action normative n’a pas pu obtenir la majorité requise à la Conférence à cause
de désaccords persistants sur la définition en question, montrant ainsi qu’il était nécessaire de
recevoir l’avis de la CIJ avant de pouvoir réviser la convention. Il est donc évident que, lorsque
l’interprétation d’une convention suscite d’importantes divergences de vues, la clarté juridique
doit être d’abord assurée pour qu’une action normative ultérieure soit efficace ou souhaitable.
45. Le groupe des employeurs a répété à l’envi ses arguments, et peu de progrès ont été accomplis.
Son ferme soutien en faveur de l’action normative constitue un changement de position
spectaculaire, quoique bienvenu, par rapport à la décennie précédente. L’idée que toutes les
questions devraient être réglées par l’action normative va à l’encontre de la position
traditionnelle du groupe des employeurs, et le groupe des travailleurs estime qu’une telle
approche est inappropriée, notamment eu égard au fait que la CIJ n’a pas encore rendu son avis
consultatif. Enfin, s’il a été largement reconnu que la convention no 29 comportait une lacune
réglementaire, ce qui a conduit à l’élaboration d’un protocole sur la base des orientations de la
commission d’experts, dans le cas de la convention no 87, les avis divergent quant à l’existence
d’une lacune, et le protocole proposé par le groupe des employeurs ne s’appuierait pas sur les
orientations de la commission d’experts: il les annulerait purement et simplement.
GB.349ter/PV/Projet 15
46. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC),
un représentant du gouvernement de la République islamique d’Iran se déclare très favorable
à l’inscription opportune, pour discussion normative, de la question du droit de grève à l’ordre
du jour de la 112e session de la Conférence internationale du Travail. Le protocole qu’il est
proposé d’adjoindre à la convention no 87, bien que volontaire, assurerait la sécurité juridique
sur une question qui se pose de longue date, et représente une avancée notable en ce qu’il
créerait des obligations concernant le droit de grève pour les États qui le ratifieraient, et
pourrait aussi servir à actualiser la convention. Les désaccords sur les dispositions essentielles
devraient être réglés par le dialogue tripartite et l’action normative, et les gouvernements au
nom desquels s’exprime l’orateur sont prêts à participer activement à la discussion tripartite
et aux préparatifs techniques de la discussion normative. Il est toutefois regrettable que la
décision de demander l’avis consultatif de la CIJ ait été prise par un vote du Conseil
d’administration et non à la Conférence internationale du Travail, alors que la plupart des États
Membres de l’OIT avaient fait part de leur préférence pour cet organe au comité plénier. Le
tripartisme, le consensus et les procédures normatives sont les meilleurs moyens de donner
suite à l’avis consultatif en fonction des différentes situations nationales.
47. S’exprimant au nom d’un groupe de 45 pays 1, un représentant du gouvernement de la
Colombie, soulignant la détermination de son groupe à trouver un consensus grâce au
dialogue social et au tripartisme, et notant que les mesures nécessaires ne pourront être
adoptées tant que la CIJ n’aura pas rendu son avis consultatif, propose de sous-amender
comme suit l’amendement proposé par le groupe des travailleurs:
16. Le Conseil d’administration décide:
a) Ssuite à la demande du groupe des employeurs et de la République de Türkiye visant
à ce que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion
normative, à l’ordre du jour de la 112e session (2024) de la Conférence internationale
du Travail, de ne pas inscrire cette question à l’ordre du jour;le Conseil d’administration
décidequ’aucune mesure supplémentaire n’est nécessaire;
b) que, lorsqu’il aura reçu l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice demandé
à sa 349e bis session (spéciale), il envisagera les mesures appropriées pour y donner
suite.
48. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du GASPAC, une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran propose un autre sous-amendement à
l’amendement proposé par le groupe des travailleurs, qui vise à remplacer le membre de
phrase «décide qu’aucune mesure supplémentaire n’est nécessaire» par «recommande de
donner suite à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice en inscrivant le plus tôt
possible à l’ordre du jour d’une prochaine session de la Conférence internationale du Travail
une question en vue de mener une discussion approfondie sur les éventuelles mesures de suivi
à prendre».
49. Un représentant du gouvernement de l’Argentine signale qu’une question normative ne
peut pas être inscrite à l’ordre du jour de la session suivante de la Conférence, car il
n’appartient pas aux États d’établir la portée du droit de grève, celui-ci étant lié à la défense
des intérêts des travailleurs et constituant donc un droit humain. En outre, les demandes du
1 Afrique du Sud, Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Barbade, Belgique, Brésil, Bulgarie, Canada, Chili, Chypre,
Colombie, Costa Rica, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, États-Unis d’Amérique, Finlande, France, Géorgie, Grèce,
Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Japon, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Macédoine du Nord, Malte, Monténégro, Norvège,
Pays-Bas, Pologne, Portugal, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Slovaquie, Slovénie, Suède,
Tchéquie et Ukraine.
GB.349ter/PV/Projet 16
groupe des employeurs risquent d’être remises en cause par le fait que seuls les travailleurs
bénéficient du droit de grève. Les États ne peuvent restreindre ce droit que s’il a une incidence
sur les droits humains d’autres groupes, s’il met en danger la vie, la sécurité ou la santé, ou
dans d’autres circonstances bien déterminées. Ces situations ne peuvent être réglementées
que par les États, conformément à leur législation nationale et aux instruments internationaux
pertinents, dont la convention no 87; elles ne peuvent être régies par un traité international. Si
un protocole à la convention no 87 était élaboré, le droit de grève ne serait limité que dans les
États l’ayant ratifié, ce qui entamerait la cohérence du système multilatéral.
50. L’inscription d’une question normative à l’ordre du jour de la Conférence se heurte aussi à des
obstacles de procédure. Par exemple, il n’est pas approprié d’examiner la question avant que
la CIJ ait rendu son avis consultatif, et l’échéance de la 112e session de la Conférence est trop
proche pour que les délais de procédure énoncés dans les Règlements respectifs du Conseil
d’administration et de la Conférence puissent être respectés.
51. Un représentant du gouvernement du Bangladesh se dit préoccupé par le fait que la
décision relative à la saisine de la CIJ a été prise au moyen d’un vote du Conseil
d’administration, excluant ainsi de nombreux États Membres, et malgré l’existence de divisions
apparentes au sein de l’Organisation. Cette situation renforce le plaidoyer en faveur de la
démocratisation du Conseil d’administration. Une discussion normative est nécessaire, car la
CIJ n’est pas censée se prononcer sur la mesure ou sur les circonstances dans lesquelles les
gouvernements devraient autoriser les grèves. La question en jeu découle de l’interprétation
par la commission d’experts, hors mandat, de la convention no 87, et les divergences d’opinions
portent non pas sur le point de savoir si le droit de grève doit être accordé, mais selon quelles
modalités. Étant donné que la majorité des législations nationales autorise l’action de grève, la
plupart des gouvernements seront probablement disposés à contribuer au processus visant à
déterminer la portée et les limites du droit de grève. La participation de l’ensemble des
mandants de l’OIT sera essentielle à l’élaboration du protocole proposé. Le Bangladesh appuie
le sous-amendement proposé par une majorité de pays du GASPAC.
52. Un représentant du gouvernement du Brésil attire l’attention sur la nécessité de renforcer
le dialogue social, car les obstacles qui l’entravent ont conduit à la situation actuelle. Le
gouvernement du Brésil pratique quotidiennement le dialogue social dans le cadre de groupes
de travail tripartites et souhaiterait que de nouvelles discussions sur le droit de grève aient
lieu, par exemple au sein d’un groupe de travail tripartite et à une prochaine session de la
Conférence, sous réserve que le Conseil d’administration ait adopté une décision à cet effet, et
seulement une fois que la CIJ aura mené à bien son évaluation juridique.
53. Une représentante du gouvernement de l’Indonésie souligne l’importance du dialogue social
dans la prise de décision à l’OIT et déclare que, dans un souci d’équité, la proposition du groupe
des employeurs devrait recevoir la même attention que celle du groupe des travailleurs.
L’Indonésie soutient le sous-amendement proposé par une majorité de pays du GASPAC.
54. Une représentante du gouvernement de l’Inde insiste sur le fait que, même si la décision
relative à la saisine de la CIJ a été prise au moyen d’un vote du Conseil d’administration, la
majorité des États Membres était d’avis qu’elle devrait être examinée par la Conférence.
Néanmoins, le sous-amendement proposé par une majorité de pays du GASPAC reconnaît la
nécessité d’aller de l’avant, de façon constructive et collective, en soumettant à la Conférence
l’avis consultatif de la CIJ, ce qui devrait favoriser la démocratisation du processus de prise de
décision. Ce sous-amendement aborde également la responsabilité du Conseil
d’administration à l’égard de la Conférence, un point particulièrement pertinent dans la
mesure où la plupart des États Membres concernés n’ont pas pu exprimer leur opinion.
GB.349ter/PV/Projet 17
55. S’exprimant au nom du groupe des États arabes, un représentant du gouvernement du
Maroc appuie le sous-amendement proposé par une majorité de pays du GASPAC.
56. La Vice-présidente employeuse précise que l’amendement proposé par son groupe ne vise
pas à affaiblir les normes établies, mais plutôt à faire en sorte que la Conférence internationale
du Travail puisse avoir un débat à ce sujet. La question de la définition des travailleuses dans
la convention no 4 a été renvoyée devant la CIJ seulement après que la Conférence a échoué à
prendre une décision à la majorité; cette procédure est celle qui devrait être suivie dans les
circonstances actuelles. Les sous-amendements proposés par le groupe de 45 pays et par une
majorité de pays du GASPAC témoignent d’une volonté d’engager une discussion plus inclusive
sur le droit de grève.
57. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) rappelle que la CIJ rendra son
avis consultatif à l’organe requérant, à savoir le Conseil d’administration. Il incombera ensuite
à ce dernier de l’analyser et d’envisager les éventuelles mesures à prendre pour y donner suite,
qui pourraient inclure la soumission de la question à la Conférence. Cet aspect est traité aux
paragraphes 18 à 20 du cadre de procédure concernant le renvoi de questions ou de difficultés
d’interprétation devant la CIJ au titre de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution, qui se
trouve à l’annexe I du document GB.347/INS/5.
58. La Vice-présidente employeuse soulève une question d’ordre, indiquant que le Conseil
d’administration est au courant des procédures juridiques et que le Conseiller juridique ne
devrait pas intervenir dans les débats d’orientation.
59. Le Directeur général dit que l’objectif était de s’assurer que tous les membres du Conseil
d’administration connaissent la procédure.
(Le Conseil d’administration reprend l’examen de la question après une brève suspension de séance.)
60. La Vice-présidente travailleuse appuie le sous-amendement proposé par le groupe de 45 pays.
61. La Vice-présidente employeuse rejette le sous-amendement proposé par le groupe de
45 pays au motif que son groupe souhaite obtenir l’engagement ferme que la question du droit
de grève sera débattue à la Conférence internationale du Travail. Cette décision est
complètement distincte de la décision de saisir la CIJ prise à la 349e bis session (spéciale) du
Conseil d’administration, même si le groupe des employeurs reconnaît que la discussion du
droit de grève à la Conférence devrait naturellement avoir lieu une fois que la CIJ aura rendu
son avis consultatif. L’oratrice appuie donc le sous-amendement proposé par une majorité de
pays du GASPAC, qui reflète la nécessité d’une discussion inclusive sur le droit de grève. Une
autre option acceptable consisterait à fusionner les deux sous-amendements en conservant le
membre de phrase indiquant que le Conseil d’administration envisagera les mesures
appropriées pour donner suite à l’avis consultatif, mais en ajoutant un libellé à l’effet de
préciser que ces mesures incluront l’inscription d’une question à l’ordre du jour de la
Conférence. Le groupe des employeurs demande au Conseil d’administration de faire preuve
de souplesse en envisageant cette solution, qui représente un compromis entre deux positions
opposées.
62. La Vice-présidente travailleuse dit que son groupe n’a pas accepté de soumettre la question
à la Conférence au titre de la décision prise à la 349e bis session (spéciale) du Conseil
d’administration et ne l’acceptera au titre d’aucune décision prise lors de cette session. Les
paramètres des mesures de suivi que pourrait prendre le Conseil d’administration ne devraient
pas être établis avant que la CIJ ait rendu son avis consultatif. Dans ce contexte, le groupe des
travailleurs demande à la Vice-présidente employeuse de clarifier sa position concernant la
Conférence compte tenu de la décision de saisir la CIJ.
GB.349ter/PV/Projet 18
63. La Vice-présidente employeuse déplore que sa tentative de rechercher un compromis ait été
rejetée par le groupe des travailleurs et certains gouvernements. Le groupe des employeurs est
prêt à faire des concessions, mais se heurte aux obstacles opposés par les autres parties; cela
n’inspire pas confiance dans la capacité de l’Organisation à mener un dialogue tripartite. Au vu
de l’état désastreux du débat lors des sessions récentes du Conseil d’administration, la direction
du Bureau devrait examiner attentivement la manière dont les procédures sont menées.
(Le Conseil d’administration reprend l’examen de la question après une brève suspension de séance.)
64. La Vice-présidente travailleuse indique que, à l’issue d’une discussion durant laquelle
différentes alternatives à un vote ont été étudiées, son groupe a décidé, compte tenu de la
gravité de la situation, de ne pas faire de compromis. Les tentatives entreprises ces onze
dernières années par le groupe des travailleurs pour trouver des solutions grâce au dialogue
social ont été bloquées par le groupe des employeurs. Tout ce qui pouvait tendre à faire
reconnaître l’existence d’une difficulté d’interprétation persistante et profonde et la volonté du
groupe des travailleurs d’accéder à la justice a été refusé. Le groupe des employeurs démontre
un grave manque de confiance vis-à-vis des travailleurs et des gouvernements, ainsi qu’à
l’égard du Bureau. Le groupe des travailleurs demande donc un vote.
65. La Vice-présidente employeuse demande à pouvoir examiner le projet de procès-verbal de
la session pour s’assurer de son exactitude.
66. Un représentant du gouvernement du Maroc explique que, lorsqu’il a participé pour la
première fois aux travaux du Conseil d’administration, on lui a dit que cet organe trouvait
toujours des solutions par le dialogue, et que le recours au vote y était exceptionnel. Il semble
que cela ne soit plus le cas. Un vote suppose qu’il y ait des gagnants et des perdants. En réalité,
les plus grands perdants sont le tripartisme, et l’Organisation elle-même qui se retrouvera
bloquée à chaque fois qu’elle devra prendre une décision importante. Il faut aussi regarder
vers l’avenir. Les membres du Conseil d’administration ne pourront pas continuer à travailler
ensemble s’ils n’ont plus confiance les uns dans les autres.
67. Des efforts sincères pour parvenir à un consensus peuvent encore être déployés, sur la base
du sous-amendement proposé par le groupe de 45 pays. Le groupe des travailleurs a le droit
de demander un vote, mais l’orateur l’appelle à reconsidérer l’importance du dialogue social et
à essayer une dernière fois de trouver une solution commune. À cet égard, il propose que le
membre de phrase «, y compris des discussions à la Conférence internationale du Travail» soit
ajouté à la fin de l’alinéa b) du sous-amendement proposé par le groupe de 45 pays.
68. La Vice-présidente travailleuse déclare que son groupe a déjà examiné en détail toutes les
options et estime qu’aucune d’entre elles n’est acceptable. La question ne pourra pas être
résolue dans le cadre d’une discussion à la Conférence. Elle demande une nouvelle fois qu’il
soit procédé à un vote.
69. La Vice-présidente employeuse remercie le représentant du gouvernement du Maroc pour
les efforts qu’il a inlassablement déployés afin de faire émerger un consensus et rappelle que
son groupe – et d’autres – se sont montrés disposés à faire des compromis. Pourtant, le groupe
des travailleurs reste totalement inflexible. La situation est désastreuse et n’augure rien de
bon pour l’avenir. L’oratrice annonce qu’elle doit malheureusement quitter la séance, mais
qu’elle sera remplacée par un autre porte-parole de son groupe.
70. S’exprimant au nom de la majorité des pays du GASPAC, une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran dit être elle aussi d’avis que la mise aux voix
ne doit avoir lieu que dans des situations exceptionnelles, et elle demande instamment à tous
les participants de penser à ce qu’il en coûterait, à l’OIT et au tripartisme, de choisir cette voie.
Elle soutient l’ajout proposé par le Maroc, mais suggère de supprimer le mot «possibles».
GB.349ter/PV/Projet 19
71. La Vice-présidente travailleuse, présentant une motion d’ordre, fait observer que la session
spéciale en cours a été organisée à la demande du groupe des employeurs, que tous les
participants se sont rendus disponibles pendant le week-end et ont été invités à se préparer à
des séances prolongées. Le fait que la Vice-présidente employeuse ait décidé de quitter la salle
avant la fin des débats témoigne d’un mépris total pour les travaux du Conseil d’administration.
72. S’exprimant au nom du groupe de 45 pays, un représentant du gouvernement de la
Colombie se félicite des efforts qui ont été faits pour parvenir à un consensus, mais constate
avec regret que toutes les solutions possibles ont été envisagées, sans succès. Il demande qu’il
soit procédé à un vote.
73. La Vice-présidente employeuse juge inacceptables les remarques de la Vice-présidente
travailleuse. C’est pour une raison bien précise qu’elle se voit contrainte de modifier ses dates
de voyage et de partir avant la fin de la séance. La Vice-présidente travailleuse n’a pas à
critiquer la manière dont le groupe des employeurs s’organise.
74. La Vice-présidente travailleuse présente ses excuses à la Vice-présidente employeuse. La
courtoisie aurait toutefois voulu que cette dernière prévienne le Conseil d’administration de
son départ anticipé.
75. S’exprimant au nom du groupe gouvernemental, une représentante du gouvernement de
la Namibie invite instamment tous les participants à focaliser leur attention sur les questions
soumises au Conseil d’administration et à respecter les procédures et les dispositifs en vigueur.
76. Le Président invite les porte-parole du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs,
les représentants des gouvernements de la Colombie et de la République islamique d’Iran et
la présidente du groupe gouvernemental à se réunir de manière informelle.
(Le Conseil d’administration reprend l’examen de la question après une brève suspension de séance.)
77. S’exprimant au nom du groupe de 45 pays, un représentant du gouvernement de l’Espagne
note que la question complexe à l’examen est révélatrice d’une crise profonde. L’objectif de
son groupe est d’obtenir la sécurité juridique voulue et de soutenir les mécanismes de contrôle
de l’OIT, dont la légitimité ne doit pas être remise en cause. D’autres questions ont été
soulevées, notamment au sujet de l’inclusivité et de la démocratisation, qui ont également
contribué à l’impasse dans laquelle se trouve à présent la discussion. Il n’est toutefois guère
judicieux de mettre sur le même plan des questions qui sont de natures totalement différentes
et ne sauraient interférer dans des négociations devant suivre une tout autre voie. Une
discussion à la Conférence ne devrait pas être le seul moyen d’aboutir à une décision légitime.
Le Conseil d’administration devrait attendre l’avis consultatif de la CIJ pour décider des
mesures à prendre.
78. S’exprimant au nom du GRULAC, une représentante du gouvernement du Mexique remercie
le Président d’avoir tout mis en oeuvre pour parvenir à un accord, mais estime que toute
réunion informelle tenue en marge de la séance plénière devrait être inclusive et, partant, être
ouverte aux coordonnateurs de tous les groupes régionaux.
79. Le Président prend bonne note de la remarque du GRULAC et explique que le but de la réunion
informelle étant de parvenir à un consensus, les participants ont été choisis en conséquence.
80. S’exprimant au nom du groupe de 45 pays, un représentant du gouvernement de l’Espagne
demande des précisions au sujet de l’ordre dans lequel le Conseil d’administration entend
examiner les sous-amendements proposés.
81. Un représentant du gouvernement du Maroc déclare que, sa proposition n’ayant pas
recueilli le consensus, il souhaite la retirer.
GB.349ter/PV/Projet 20
82. Le Président, se référant aux sous-amendements qu’il a été proposé d’apporter à
l’amendement des travailleurs, indique que le Conseil d’administration se prononcera d’abord
sur le sous-amendement proposé par un groupe de 45 pays, puis sur celui proposé par une
majorité de pays du GASPAC.
83. Le Greffier du Conseil d’administration invite le Conseil d’administration à procéder à un
vote à main levée sur le sous-amendement proposé par le groupe de 45 pays.
(Le sous-amendement proposé par le groupe de 45 pays est approuvé par 30 voix contre 19, avec
6 abstentions.)
84. La Vice-présidente travailleuse présente une motion d’ordre à l’effet de demander des
précisions concernant la finalité du vote sur le sous-amendement proposé par une majorité de
pays du GASPAC, lequel aurait dû devenir caduc après l’adoption de celui qui a été proposé par
le groupe de 45 pays.
85. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du GASPAC, un représentant du gouvernement
de la République islamique d’Iran confirme que le GASPAC n’a pas retiré son sousamendement.
86. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) fait observer que, dès lors que
le sous-amendement proposé par une majorité de pays du GASPAC est incompatible avec celui
du groupe de 45 pays, qui vient d’être adopté, il devient caduc. L’orateur suggère que le Conseil
d’administration se prononce sur l’amendement proposé par le groupe des travailleurs,
décision qui pourra être prise soit par consensus, soit au moyen d’un vote.
87. La porte-parole du groupe des employeurs déclare que les implications du vote n’ont pas
été clairement expliquées au préalable. Elle demande s’il serait possible que le Conseil
d’administration procède à un nouveau vote afin de déterminer lequel des deux sousamendements
proposés il souhaite retenir.
88. Le Président admet qu’il est possible que les membres du Conseil d’administration n’aient pas
tout à fait saisi les tenants et les aboutissants de la procédure de vote. Un second vote va donc
avoir lieu, dans le but de protéger l’intégrité de la procédure. Les deux sous-amendements
vont être mis aux voix, comme le prévoit expressément le Règlement.
89. Le Greffier du Conseil d’administration déclare que le Conseil d’administration va procéder
à un vote à main levée pour déterminer lequel des deux sous-amendements proposés il
souhaite retenir.
(30 voix sont comptabilisées en faveur du sous-amendement soumis par le groupe de 45 pays, 22 en
faveur de l’amendement soumis par une majorité de pays du GASPAC, et 3 abstentions.)
90. Le Président annonce les résultats et prend note de l’approbation du sous-amendement
proposé par le groupe de 45 pays et du rejet de l’amendement proposé par une majorité de
pays du GASPAC. En l’absence d’objection, il considère que le Conseil d’administration est
disposé à adopter l’amendement proposé par le groupe des travailleurs, tel que sous-amendé
par le groupe de 45 pays.
GB.349ter/PV/Projet 21
Décision
91. Le Conseil d’administration décide:
a) suite à la demande du groupe des employeurs et de la République de Türkiye visant
à ce que la question du droit de grève soit inscrite d’urgence, pour discussion
normative, à l’ordre du jour de la 112e session (2024) de la Conférence internationale
du Travail, de ne pas inscrire cette question à l’ordre du jour;
b) que, lorsqu’il aura reçu l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice
demandé à sa 349e bis session (spéciale), il envisagera les mesures appropriées pour
y donner suite.
(GB.349ter/INS/1, paragraphe 16, tel que modifié par le Conseil d’administration)
Observations finales
92. La Vice-présidente travailleuse déclare que, si la Conférence internationale du Travail a le
soutien de son groupe, l’expérience a montré qu’une discussion sereine sur le droit de grève
n’est pas de l’ordre du possible, et son groupe éprouve une certaine méfiance à l’égard des
motifs obscurs qui sous-tendent ces propositions. Le groupe des employeurs a proposé une
action normative dont le but est de frapper de nullité la jurisprudence élaborée pendant
soixante-dix ans par la commission d’experts. L’oratrice invite tous ceux qui ont accusé son
groupe – entre autres – de ne pas respecter la démocratie et de ne pas adhérer aux valeurs du
dialogue social à regarder ce qui se passe dans leur pays.
93. L’oratrice se félicite que le groupe de 45 pays ait reconnu que la meilleure décision à prendre
à la session en cours était d’attendre l’avis consultatif de la CIJ et de le soumettre au Conseil
d’administration pour examen. Elle remercie le Président pour la manière dont il a dirigé les
travaux de cette session extrêmement compliquée, ainsi que les autres participants, qui ont
participé à un dialogue social tripartite respectueux, et elle invite le groupe des employeurs à
poursuivre la discussion afin d’éviter tout conflit à l’avenir.
94. La porte-parole du groupe des employeurs se dit profondément déçue par le résultat auquel
ont abouti les deux sessions spéciales. Elle remercie cependant les participants qui ont soutenu
les positions de son groupe. Elle salue les efforts qui ont été déployés pour dégager un
consensus, mais estime que l’issue des deux sessions spéciales est désastreuse pour l’OIT et
témoigne d’une division profonde entre ses mandants. Le Conseil d’administration a une fois
encore pris ses décisions au moyen d’un vote plutôt que par consensus, ce qui porte gravement
atteinte à sa crédibilité et à son intégrité. Qu’il s’agisse du ton utilisé ou de leur teneur même,
les débats qui se tiennent au sein du Conseil d’administration doivent être respectueux.
L’oratrice proteste contre les accusations fallacieuses portées par le groupe des travailleurs à
l’encontre de son groupe.
95. De nombreux gouvernements ayant souligné l’importance de l’inclusivité et d’un processus
décisionnel démocratique, la question du droit de grève doit être inscrite à l’ordre du jour de
la session suivante du Conseil d’administration afin de faire l’objet d’une discussion à la
Conférence, organe suprême de l’Organisation. Le groupe des employeurs estime que la
situation actuelle s’explique en partie par la réticence de certains gouvernements à l’égard du
processus de démocratisation et du renforcement du rôle de la Conférence. Il est regrettable
que le groupe des travailleurs n’ait pas confiance dans la décision que pourra prendre la
Conférence.
GB.349ter/PV/Projet 22
96. L’oratrice félicite le Président de s’être acquitté de sa tâche dans des circonstances aussi
difficiles et remercie le Bureau pour son appui. Elle remercie également la Vice-présidente
employeuse pour la ténacité avec laquelle elle a défendu la position de son groupe, dont
l’objectif était de faire en sorte que les décisions prises soient acceptables par tous. Étant
donné l’importance de ces décisions, il importe que le Conseil d’administration s’emploie à
concilier les points de vue divergents pour parvenir à un consensus.
97. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, un représentant du gouvernement du Maroc
remercie le Bureau pour son appui indéfectible et le Président pour l’impartialité avec laquelle
il a su diriger les travaux de la 349e session et des 349e bis et 349e ter sessions (spéciales) du
Conseil d’administration.
98. S’exprimant au nom du groupe gouvernemental, un représentant du gouvernement de la
Namibie félicite le président pour l’efficacité de sa direction, remercie les participants pour leur
ouverture à l’égard des différents points de vue exprimés et la bonne foi qu’ils ont montrée
dans les négociations, et exprime sa gratitude au Bureau pour son soutien sans faille.
99. S’exprimant au nom d’une majorité de pays du GASPAC, une représentante du
gouvernement de la République islamique d’Iran fait observer que, si les pays au nom desquels
elle s’exprime n’ont pas retiré leur proposition de sous-amendement, c’est parce qu’ils restent
convaincus que la Conférence internationale du Travail doit rester l’organe suprême de
l’Organisation. Tous les pays du GASPAC remercient le Bureau pour son travail.
100. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) indique que le Directeur général
communiquera officiellement dans les jours à venir la résolution contenant la décision du
Conseil d’administration de soumettre la question relative à l’interprétation de la
convention no 87 à la CIJ, et demandera à cette dernière d’autoriser les organisations
internationales d’employeurs et de travailleurs dotées du statut consultatif général auprès de
l’OIT à participer à la procédure consultative. Il demandera également à la CIJ d’envisager si
possible l’engagement d’une procédure accélérée. Le Directeur général écrira par ailleurs au
Conseil économique et social des Nations Unies pour l’informer de la requête, conformément
à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord conclu en 1946 entre les Nations Unies et l’Organisation
internationale du Travail (également connu sous l’appellation «Accord ONU-OIT»).
101. Dès réception de la communication du Directeur général, le greffier de la CIJ notifiera la
requête à l’ensemble des États Membres de l’OIT ainsi qu’à toutes les organisations
internationales dont la CIJ considérera qu’elles sont susceptibles de fournir des
renseignements sur la question. La CIJ déterminera ensuite la forme des observations écrites,
le délai de soumission de ces dernières et s’il y a lieu de tenir des audiences, dont il fixera la
date, le cas échéant. Le Bureau commencera sous peu à constituer un dossier complet de
nature à apporter un éclairage sur la question, lequel sera soumis à la CIJ. Ce dossier et les
autres informations pertinentes seront publiés sur une page dédiée du site Web de l’OIT. Le
Bureau fournira des informations détaillées au fur et à mesure de l’avancement du processus.
102. Le Président remercie tous les participants pour leurs précieuses contributions et leur
remarquable investissement personnel.
Document no 34
GB.322/INS/5, Initiative sur les normes: Suivi de la
session de 2012 de la Commission de l’application des
normes de la Conférence internationale du Travail,
octobre 2014
Ce document est tiré à un nombre restreint d’exemplaires afin de réduire autant que possible l’impact sur l’environnement des activités de l’OIT
et de contribuer à la neutralité climatique tout en optimisant l’efficience. Nous serions reconnaissants aux membres du Conseil d’administration
et aux observateurs de bien vouloir se rendre aux réunions munis de leurs propres exemplaires afin de ne pas avoir à en demander d’autres.
Nous rappelons que tous les documents du Conseil d’administration sont accessibles sur Internet à l’adresse http://www.ilo.org.
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
Conseil d’administration
322e session, Genève, 30 octobre-13 novembre 2014
GB.322/INS/5
Section institutionnelle INS
Date: 16 octobre 2014
Original: anglais
CINQUIÈME QUESTION À L’ORDRE DU JOUR
Initiative sur les normes: Suivi de la session
de 2012 de la Commission de l’application
des normes de la Conférence internationale
du Travail
Objet du document
Le présent document expose les modalités, la portée et le coût possibles des mesures
pouvant être prises en vertu de l’article 37 de la Constitution en cas de question ou de difficulté
concernant l’interprétation d’une convention de l’OIT. Il porte également sur les questions qui se
posent encore au sujet de la politique normative et du système de contrôle (voir le projet de
décision au paragraphe 125).
Objectif stratégique pertinent: Promouvoir et mettre en oeuvre les normes et les principes et droits fondamentaux au travail.
Incidences sur le plan des politiques: Le présent document a trait aux discussions en cours sur la politique normative de
l’Organisation.
Incidences juridiques: Incidences découlant de l’éventuel recours à l’article 37 (paragraphes 1 et 2) de la Constitution de
l’OIT, notamment de la possibilité de demander un avis consultatif à la Cour internationale de Justice et d’instituer un
tribunal interne en vue du prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une convention.
La création, le cas échéant, d’un mécanisme d’examen des normes aurait des incidences juridiques importantes.
Incidences financières: A déterminer en fonction des décisions prises.
Suivi nécessaire: A déterminer en fonction des décisions prises.
Unité auteur: Cabinet du Directeur général (CABINET).
Documents connexes: GB.309/LILS/4; GB.304/3/1(Rev.); GB.312/LILS/5;GB.320/LILS/4.
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Table des matières
Page
Introduction ....................................................................................................................................... 1
Section I. Modalités, portée et coût des mesures pouvant être prises au titre
des paragraphes 1 et 2 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT .................................. 1
A. Article 37, paragraphe 1: Saisine de la Cour internationale de Justice ................ 2
A.1. Fonction consultative de la Cour internationale de Justice:
Aspects procéduraux .............................................................................. 3
A.1.1. Observations générales ........................................................... 3
A.1.2. Ouverture de la procédure....................................................... 4
A.1.3. Notification, invitation à participer à la procédure ................. 5
A.1.4. Exposés écrits et oraux ........................................................... 6
A.1.5. Requêtes urgentes ................................................................... 7
A.1.6. Lecture publique de l’avis consultatif ..................................... 7
A.1.7. Effets juridiques d’un avis consultatif .................................... 8
A.1.8. Coûts ....................................................................................... 9
A.1.9. Suivi institutionnel .................................................................. 9
A.2. Objet de la demande d’avis consultatif: Compétence et recevabilité .... 10
A.2.1. Compétence de la Cour d’examiner une demande
d’avis consultatif ..................................................................... 10
A.2.2. Pouvoir discrétionnaire de la Cour de refuser de donner
un avis consultatif ................................................................... 11
A.3. Participation des organisations internationales d’employeurs
et de travailleurs aux demandes d’avis consultatifs ............................... 12
A.4. La situation actuelle: Formulation de la question .................................. 15
B. Article 37, paragraphe 2: Etablissement d’un tribunal interne permanent ........... 15
B.1. Le tribunal .............................................................................................. 16
B.1.1. Etablissement .......................................................................... 16
B.1.2. Compétence ............................................................................ 16
B.1.3. Composition ............................................................................ 17
B.1.4. Sélection et nomination .......................................................... 18
B.1.5. Constitution du panel .............................................................. 18
B.1.6. Incompatibilité ........................................................................ 19
B.1.7. Démission, retrait et révocation .............................................. 19
B.1.8. Remplacements et vacances.................................................... 19
B.1.9. Statut ....................................................................................... 20
B.1.10. Honoraires ............................................................................... 20
B.1.11. Mesures administratives ......................................................... 20
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Page
B.2. Procédure ............................................................................................... 21
B.2.1. Ouverture de la procédure ....................................................... 21
B.2.2. Participation à la procédure .................................................... 22
B.2.3. Déroulement de la procédure .................................................. 22
B.2.4. Phases de la procédure ............................................................ 23
B.2.5. Procédure écrite ...................................................................... 23
B.2.6. Procédure orale ....................................................................... 24
B.2.7. Publicité .................................................................................. 24
B.2.8. Adoption des décisions; quorum; effet de la sentence
du tribunal ............................................................................... 24
B.3. Coûts ...................................................................................................... 25
Section II. Examiner les questions qui se posent encore au sujet de la politique normative
et du système de contrôle ................................................................................................ 26
A. Concevoir un mécanisme d’examen des normes ................................................. 27
B. Fonctionnement de la Commission de l’application
des normes de la Conférence ............................................................................... 28
C. Questions liées au contrôle régulier et au contrôle fondé
sur la présentation de plaintes .............................................................................. 28
D. Questions liées au fonctionnement de la Commission d’experts
pour l’application des conventions et recommandations ..................................... 29
Annexes
I. Projet de résolution du Conseil d’administration du BIT ............................................... 31
II. Projet de Statut ................................................................................................................ 33
GB.322/INS/5
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Introduction
1. En mars 2014, au terme d’une vaste procédure de consultation menée avec tous les
groupes, le Conseil d’administration a été invité à donner ses orientations sur des
propositions concrètes afin de résoudre les questions en suspens concernant le système de
contrôle des normes. Compte tenu de l’urgence et de la gravité de la situation, le Conseil a
jugé nécessaire d’approfondir les options envisageables en vertu des paragraphes 1 et 2 de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT et demandé au Directeur général d’établir pour sa
322e session (novembre 2014) un document fixant les modalités possibles, la portée et le
coût des mesures pouvant être prises au titre de l’article 37 de la Constitution en cas de
question ou de difficulté concernant l’interprétation d’une convention de l’OIT 1 . Le
Conseil d’administration a également reconnu qu’un certain nombre de mesures pourraient
être examinées en vue d’améliorer les méthodes de travail du système de contrôle des
normes et a demandé au Directeur général de présenter à la 322e session du Conseil un
calendrier pour l’examen des questions qui se posent encore au sujet du système de
contrôle et pour le lancement du mécanisme d’examen des normes.
2. Le présent document est ainsi divisé en deux sections. La Section I porte sur les modalités
pratiques des deux mesures prévues à l’article 37 de la Constitution, à savoir la soumission
d’une requête pour avis consultatif à la Cour internationale de Justice (ci-après, la CIJ) et
l’institution d’un tribunal interne en vue du prompt règlement de toute question ou
difficulté relatives à l’interprétation d’une convention. La Section II porte sur un certain
nombre de questions qui se posent encore concernant la politique normative de
l’Organisation et le système de contrôle.
Section I. Modalités, portée et coût des mesures
pouvant être prises au titre des paragraphes 1
et 2 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT
3. La partie A expose les principales caractéristiques et aspects procéduraux de la fonction
consultative de la Cour internationale de Justice, l’accent étant mis sur les questions qui
revêtent une importance particulière pour l’OIT, comme la possibilité pour les
organisations internationales d’employeurs et de travailleurs de participer directement à la
procédure. Pour faciliter la discussion, elle comporte également une proposition de libellé
de questions sur le droit de grève et le mandat de la commission d’experts qui pourraient
être portées devant la CIJ, ainsi qu’un projet de résolution du Conseil d’administration
contenant la question dont la Cour devrait être saisie (annexe I).
4. La partie B formule des propositions concernant l’institution d’un tribunal en vue du
prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation des
conventions de l’OIT. Ces propositions, qui tiennent compte des spécificités des
1 Document GB.320/LILS/4, paragr. 41 a). La question de l’interprétation des conventions
internationales du travail et d’un éventuel recours à l’article 37 a été examinée à plusieurs reprises
ces quatre dernières années. Voir Non-document sur l’interprétation des Conventions
internationales du travail (février 2010); Document exploratoire informel sur l’interprétation des
Conventions internationales du travail (octobre 2010); Le système de contrôle de l’OIT: note
d’information factuelle et historique (septembre 2012); Document d’information sur l’historique et
l’évolution du mandat de la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations (février 2013). Ces documents peuvent être consultés sur le site:
https://www.ilo.org/public/french/bureau/leg/art37.htm.
GB.322/INS/5
2 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
conventions et de la nature tripartite de l’Organisation, visent à mettre en place un
mécanisme économiquement viable permettant un règlement rapide des questions
d’interprétation. Un projet de Statut (annexe II) a été élaboré sur la base des débats
antérieurs et de recherches approfondies concernant le fonctionnement des cours et
tribunaux internationaux actuellement en activité. Cette partie contient également des
informations pratiques sur l’estimation du coût et la durée possible de la procédure.
5. Il convient de préciser d’emblée que les mesures prévues aux paragraphes 1 et 2 de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT sont complémentaires et ne s’excluent pas
mutuellement. L’article 37, paragraphe 1, qui porte sur la fonction consultative de la CIJ,
date du texte original de la Constitution établi en 1919 tandis que l’article 37,
paragraphe 2, qui prévoit l’institution d’une instance judiciaire interne, remonte à
l’amendement de la Constitution en 1946. Dans son libellé actuel, l’article 37 part du
postulat que les questions les plus sensibles concernant l’interprétation des conventions de
l’OIT et toute question portant sur l’interprétation de la Constitution elle-même devraient
être portées devant la CIJ, alors que les demandes relatives à l’interprétation des
conventions de l’OIT qui seraient moins complexes ou qui se prêteraient mieux à un
règlement rapide pourraient être soumises à un tribunal interne.
6. Bien que, conformément à la décision du Conseil d’administration, le présent document
traite des deux options prévues par l’article 37 de la Constitution de l’OIT, il convient de
rappeler que le Conseil pourrait aussi en examiner d’autres, notamment la possibilité de
tenir une discussion tripartite sur les questions qui se sont posées au sujet du droit de grève,
de son application et des limites à son exercice. Cette discussion tripartite pourrait, par
exemple, prendre la forme d’un débat pendant une session du Conseil ou lors d’une
réunion convoquée à cette fin par celui-ci, d’une question spécifique inscrite à l’ordre du
jour de la Conférence internationale du Travail ou encore d’une session spéciale de la
Commission de l’application des normes de la Conférence.
A. Article 37, paragraphe 1: Saisine
de la Cour internationale de Justice
7. L’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT dispose que «toutes questions ou
difficultés» (any question or dispute en anglais) relatives à l’interprétation de la
Constitution ou des conventions internationales du travail conclues par les Etats Membres,
en vertu de ladite Constitution, «seront soumises à l’appréciation» (shall be referred for
decision en anglais) de la CIJ. Malgré les différences entre les versions anglaise et
française, l’article 37, paragraphe 1, exprime l’intention manifeste des rédacteurs de
confier, en dernier ressort, le règlement de toute question ou difficulté relatives à
l’interprétation de la Constitution ou d’une convention internationale du travail à la plus
haute autorité judiciaire du système des Nations Unies et de reconnaître que ses avis seront
acceptés comme décisifs. Au regard de la théorie et de la pratique constitutionnelle,
l’article 37, paragraphe 1, a toujours été compris comme conférant un effet obligatoire et
décisoire aux avis consultatifs obtenus sur cette base.
8. Dans ses premières années d’existence, l’OIT (en réalité, la Société des Nations agissant
sur demande de l’Organisation) a sollicité l’avis de la Cour permanente de Justice
internationale à six reprises entre 1922 et 1932 (dont une demandant spécifiquement
l’interprétation d’une convention internationale du travail) mais n’a jamais demandé à ce
jour celui de la CIJ 2. Ces six requêtes ont toutes été soumises à la CPJI par l’intermédiaire
2 La Cour permanente de Justice internationale (CPJI) – prédécesseur de la CIJ – a tenu sa séance
inaugurale en 1922 et a été dissoute en 1946. Durant cette période, elle a instruit 29 affaires
contentieuses entre des Etats et rendu 27 avis consultatifs, dont six concernaient l’OIT: Désignation
GB.322/INS/5
GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx 3
du Conseil de la Société des Nations, en vertu de l’article 14 du Pacte de la Société des
Nations.
9. L’article 14 du Pacte, qui prévoyait la création d’une Cour permanente de Justice
internationale, disposait également que la Cour donnerait «des avis consultatifs sur tout
différend ou tout point dont la saisira le Conseil ou l’Assemblée». Selon l’interprétation
qui lui a été donnée dans la pratique, reflétée par la suite à l’article 82 du Règlement de la
Cour de 1936, deux types d’avis consultatifs étaient envisagés: les avis liés à un
«différend» (dispute en anglais), concernant essentiellement les affaires contentieuses, et
les avis relatifs à un «point» non contentieux (question en anglais).
10. L’article 14 du Pacte a été remplacé par l’article 96 de la Charte des Nations Unies, qui
reprend le même schéma et octroie le droit d’engager une procédure consultative «sur toute
question juridique» aux deux organes principaux de l’Organisation des Nations Unies, à
savoir l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, ainsi qu’aux agences spécialisées
autorisées par l’Assemblée générale à demander à la Cour des avis consultatifs sur «des
questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leur activité» . L’article 65 du Statut
de la CIJ, successeur de la CPJI, reproduit pour ainsi dire à l’identique cette disposition. Il
existe un élément important de continuité entre les deux Cours, ce qui pourrait avoir un
impact positif sur les avis consultatifs que demanderait l’OIT.
A.1. Fonction consultative de la Cour internationale
de Justice: Aspects procéduraux
A.1.1. Observations générales
11. Contrairement à sa compétence en matière contentieuse, la fonction consultative de la CIJ
n’a pas pour but de régler les différends entre Etats (bien qu’elle puisse contribuer à un tel
règlement) mais plutôt de fournir un avis juridique aux organes et institutions qui
sollicitent son opinion 3. La procédure de consultation est régie par les articles 65 et 66 du
Statut de la Cour et les articles 102 à 109 de son Règlement 4.
12. Toutefois, la distinction majeure est qu’il n’existe pas d’«affaire» à juger dans une
procédure consultative et donc pas de «parties» en présence. C’est une demande d’avis
juridique qui est soumise à la Cour, et cette dernière doit s’assurer d’obtenir toutes les
du délégué ouvrier néerlandais à la troisième session de la Conférence internationale du Travail
(1922); Compétence de l’OIT pour la réglementation internationale des conditions de travail des
personnes employées dans l’agriculture (1922); Compétence de l’OIT pour l’examen de
propositions tendant à organiser et développer les moyens de production agricole (1922);
Compétence de l’OIT pour réglementer accessoirement le travail personnel du patron (1926); Ville
libre de Dantzig et l’OIT (1930); Interprétation de la Convention de 1919 concernant le travail de
nuit des femmes (1932). Pour un bref compte rendu sur ces affaires, voir S.M. Schwebel: «Was the
capacity to request an advisory opinion wider in the Permanent Court of International Justice than
it is in the International Court of Justice?», British Yearbook of International Law (1991, vol. 62),
pp. 87-90.
3 Sur les aspects procéduraux de la fonction consultative de la CIJ, voir S. Rosenne: The law and
practice of the International Court 1920-2005, 4e édition (2006, vol. III), pp. 1653-1703;
C.F. Amerasinghe: Jurisdiction of specific international tribunals (2009), pp. 199-254; R. Kolb: The
International Court of Justice (2013), pp. 1102-1111; M. Pomerance: The advisory function of the
International Court in the League and UN Eras (1973), pp. 277-329.
4 Le texte intégral du Statut et du Règlement de la CIJ, ainsi que le texte de tous les avis consultatifs
et documents de référence, peuvent être consultés à l’adresse www.icj-cij.org. Des informations
supplémentaires sur la fonction consultative de la Cour figurent sur le site https://www.ilo.org/
public/french/bureau/leg/art37.htm.
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4 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
informations nécessaires au moyen d’exposés écrits et/ou oraux avant de rendre son avis.
Par conséquent, le consentement des parties à un différend, qui fonde la compétence de la
Cour en matière contentieuse, n’est pas requis dans une procédure consultative.
13. Selon le Statut de la Cour, une demande formelle d’avis consultatif doit émaner d’un
organe autorisé par la Charte des Nations Unies à présenter une telle requête, comme
indiqué plus haut 5. L’Assemblée générale des Nations Unies ayant dûment autorisé l’OIT
à demander des avis consultatifs, conformément à l’article 96, paragraphe 2, de sa Charte,
si l’Organisation présentait une demande d’avis consultatif, il est probable que la Cour
fonderait principalement sa compétence sur l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord de 1946
entre les Nations Unies et l’OIT, qui autorise expressément cette dernière à demander un
avis consultatif, et sur la Résolution 50(I) de l’Assemblée générale des Nations Unies du
14 décembre 1946, par laquelle l’Assemblée générale a approuvé l’Accord entre les
Nations Unies et l’OIT 6.
A.1.2. Ouverture de la procédure
14. La procédure consultative commence par le dépôt d’une requête pour avis consultatif, qui
doit être formulée par écrit et transmise à la Cour. Il appartient à l’organisation requérante
de formuler la question et de déterminer comment la décision de demander un avis
consultatif doit être prise. Conformément à l’article 65, paragraphe 2, du Statut de la CIJ,
«les questions sur lesquelles l’avis consultatif de la Cour est demandé sont exposées à la
Cour par une requête écrite qui formule, en termes précis, la question sur laquelle l’avis de
la Cour est demandé. Il y est joint tout document pouvant servir à élucider la question 7.»
Cette documentation doit contenir toutes les informations de base sur le fond du différend
et peut également renvoyer aux débats qui ont amené le requérant à demander un avis
consultatif 8.
5 Selon l’Annuaire de la CIJ (2010-11, pp. 107-108), hormis le Conseil de sécurité et l’Assemblée
générale, trois organismes des Nations Unies et 16 organisations sont actuellement autorisés à
demander des avis consultatifs. A ce jour, seules quatre institutions spécialisées ont sollicité un avis
consultatif auprès de la Cour: l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la
Culture (UNESCO), l’Organisation Maritime Internationale (OMI), l’Organisation Mondiale de la
Santé (OMS) et le Fonds international de développement agricole (FIDA).
6 L’article IX, paragraphe 3, de l’Accord NU-OIT dispose que la demande peut être adressée à la
CIJ par la Conférence ou par le Conseil d’administration du BIT autorisé par la Conférence. Cette
autorisation a été donnée en 1949; voir CIT: «Résolution concernant la procédure pour les
demandes d’avis consultatifs à la Cour internationale de Justice», Bulletin officiel (1949, XXXII),
pp. 362-363. L’article IX, paragraphe 4, de l’Accord prévoit en outre que l’OIT doit informer le
Conseil économique et social des Nations Unies dans le cas d’une demande d’avis consultatif à la
CIJ. Un projet de lettre au Secrétaire général figure sur le site
https://www.ilo.org/public/french/bureau/
leg/art37.htm.
7 En outre, conformément à l’article 104 du Règlement de la Cour, «les documents … sont transmis
à la Cour en même temps que la requête ou le plus tôt possible après celle-ci, dans le nombre
d’exemplaires requis par le Greffe». En pratique, la Cour n’attend pas nécessairement d’avoir reçu
la documentation pertinente de la part du plus haut fonctionnaire de l’organisation requérante avant
de fixer un délai pour la présentation des exposés écrits.
8 La décision de l’organisation requérante de présenter une demande constitue la première étape,
mais la Cour n’est officiellement saisie de l’affaire qu’après que le Greffe a reçu la lettre
d’accompagnement; la date de réception de son exemplaire original constitue la date d’ouverture de
la procédure. Bien que cela arrive rarement en pratique, la demande n’est pas toujours soumise à la
Cour immédiatement après que l’organisation requérante a pris la décision; dans l’affaire OMCI,
GB.322/INS/5
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15. A ce jour, toutes les demandes soumises à la Cour ont pris la forme d’une résolution
officielle adoptée suivant une procédure habituelle par l’organisation requérante. Ces
résolutions contiennent généralement un préambule de quelques paragraphes exposant le
contexte du problème sur lequel l’avis est sollicité, suivi par la ou les questions posées à la
Cour. La résolution comprend parfois les instructions données à la direction de
l’organisation requérante quant aux documents à transmettre à la Cour, les mesures à
prendre en attendant l’avis ainsi que les mesures de suivi une fois l’avis reçu 9.
A.1.3. Notification, invitation à participer à la procédure
16. L’article 66, paragraphe 1, du Statut dispose que: «Le Greffier notifie immédiatement la
requête demandant l’avis consultatif à tous les Etats admis à ester en justice devant la
Cour». L’article 66, paragraphe 2, précise que: «En outre, à tout Etat admis à ester devant
la Cour et à toute organisation internationale jugés, par la Cour ou par le Président si elle
ne siège pas, susceptibles de fournir des renseignements sur la question, le Greffier fait
connaître, par communication spéciale et directe, que la Cour est disposée à recevoir des
exposés écrits dans un délai à fixer par le Président, ou à entendre des exposés oraux au
cours d’une audience publique tenue à cet effet.»
17. Tous les Etats admis à ester en justice devant la Cour sont automatiquement informés, de
manière générale, des demandes d’avis consultatif énoncées à l’article 66, paragraphe 1; en
revanche, seuls les Etats et les organisations internationales qui, de l’avis de la Cour, sont
en mesure de fournir des renseignements spécifiques, reçoivent la communication spéciale
et directe prévue à l’article 66, paragraphe 2. Il convient de noter que les Etats ou les
organisations qui reçoivent une communication spéciale conformément à l’article 66,
paragraphe 2, ont le droit de participer à toute phase écrite ou orale de la procédure s’ils le
souhaitent, mais qu’ils n’ont aucune obligation à cet égard. En outre, comme il est expliqué
plus en détail ci-après, à chaque fois qu’un avis consultatif concernant l’OIT a été
demandé, les organisations internationales d’employeurs et de travailleurs ont été
autorisées à participer à la procédure.
18. La Cour a toujours pris un soin particulier de s’assurer que les informations à sa
disposition sont suffisamment complètes et adéquates pour lui permettre d’exercer sa
fonction judiciaire. En fait, elle se préoccupe toujours de savoir si «elle dispose de
renseignements et d’éléments de preuve suffisants pour être à même de porter un jugement
sur toute question de fait contestée et qu’il lui faudrait établir pour se prononcer d’une
manière conforme à son caractère judiciaire» (Mur, 2004, paragr. 56). La Cour rendant un
avis consultatif qui dit le droit sur la base des faits qui lui sont soumis à la date de la
décision (Armes nucléaires/ONU, 1996, paragr. 97), si l’OIT demandait un avis consultatif
à la CIJ, il faudrait impérativement s’assurer que le plus grand nombre possible d’Etats
Membres – de toutes les régions et représentant tous les systèmes juridiques – participent
activement à la procédure et lui communiquent les informations pertinentes.
l’organisation requérante a décidé le 19 janvier 1959 de soumettre une demande, mais celle-ci n’a
été signifiée à la Cour que le 23 mars; dans l’affaire des Armes nucléaires/OMS, la décision a été
prise le 14 mai 1993 mais n’a été transmise à la Cour que le 3 septembre. Un projet de lettre
d’accompagnement envoyé au Greffier de la CIJ figure sur le site https://www.ilo.org/public/
french/bureau/leg/art37.htm.
9 Comme en témoigne la jurisprudence de la Cour, cette dernière se fonde souvent sur les
indications données dans le préambule de la résolution pour identifier l’objet de la demande et la
nature de la question. Voir Rosenne, op. cit., vol. II, p. 965; et Amerasinghe, op. cit., p. 204.
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A.1.4. Exposés écrits et oraux
19. La Cour fixe par ordonnance le délai pour toute présentation d’exposés écrits par les Etats
et les organisations internationales qui ont été invités à participer à la procédure. Ce délai
varie en pratique entre deux et six mois. La Cour peut décider de prolonger ce délai et peut
également décider de solliciter une série d’observations écrites sur les exposés écrits des
autres intervenants 10.
20. Le Statut de la Cour prévoit que les participants à la procédure consultative peuvent se voir
accorder un droit de réponse aux exposés présentés par les autres intervenants. Aux termes
de l’article 66, paragraphe 4, du Statut: «Les Etats et les organisations qui ont présenté des
exposés écrits ou oraux sont admis à discuter les exposés faits par d’autres Etats et
organisations dans les formes, mesures et délais fixés, dans chaque cas d’espèce, par la
Cour.» En outre, aux termes de l’article 105 du Règlement de la Cour: «Le Greffier
communique les exposés écrits soumis à la Cour aux Etats et organisations qui en ont euxmêmes
présenté. La Cour ou, si elle ne siège pas, le Président: a) détermine sous quelle
forme et dans quelle mesure les observations qu’autorise l’article 66, paragraphe 4, du
Statut peuvent être reçues et fixe le délai dans lequel elles peuvent être déposées par écrit;
b) décide si une procédure orale aura lieu, pendant laquelle des exposés et observations
pourront être présentés à la Cour en vertu de l’article 66 du Statut, et en fixe le cas échéant
la date d’ouverture.»
21. La Cour peut, à sa discrétion, décider de tenir des audiences publiques pour les exposés
oraux 11. En revanche, lorsque la procédure est urgente ou si des contraintes de temps
l’exigent, elle peut renoncer à tenir des audiences publiques. Les participants qui ont
communiqué un exposé écrit ne sont aucunement tenus de participer à la procédure orale
et, inversement, la participation à la procédure orale n’est pas conditionnée à la
participation à une phase écrite. Si, techniquement, dans le cas d’une procédure
consultative, il n’existe pas de «parties» et les Etats ne désignent pas un «agent» pour
présenter leur point de vue (ces termes sont uniquement utilisés dans les affaires
contentieuses), en pratique cependant une demande d’avis consultatif peut être menée
selon des modalités très semblables à celles qui prévalent en matière contentieuse 12.
10 Sur le plan théorique, rien ne semble s’opposer à ce qu’un Etat soumette des exposés écrits au
nom d’un groupe régional. Dans l’affaire du Mur (2004), l’Irlande, qui assurait à l’époque la
présidence tournante de l’Union européenne, a déposé un exposé écrit au nom de l’Union
européenne.
11 La durée des audiences dépend, inter alia, du nombre d’entités qui ont manifesté leur intention de
présenter des exposés oraux. Les participants peuvent disposer de 45 minutes à une heure. Les juges
peuvent demander aux participants de fournir des réponses écrites aux questions qu’ils posent
durant les audiences. A ce jour, seul un cas n’a donné lieu à aucune audience car, quand bien même
la Cour avait décidé de tenir de telles audiences, aucun Etat n’avait demandé à être entendu.
12 Il n’existe pas de règle préétablie quant à l’ordre des exposés oraux en audience publique, mais
c’est toujours le plus haut fonctionnaire de l’organisation requérante qui s’est adressé d’abord à la
Cour. Les représentants des organisations requérantes se contentent normalement de fournir des
informations ou des explications générales sur le point de vue du secrétariat de leur organisation.
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22. Aux termes de l’article 106 de son Règlement, la Cour peut, durant la procédure, décider
que les observations et exposés écrits ainsi que les documents annexés seront rendus
accessibles au public. En pratique, la Cour rend ces documents publics à l’ouverture de la
procédure orale, en les affichant sur son site Internet 13.
A.1.5. Requêtes urgentes
23. L’article 103 du Règlement de la Cour prévoit que: «Lorsque l’organe ou institution
autorisé par la Charte des Nations Unies ou conformément à ses dispositions à demander
un avis consultatif informe la Cour que la demande appelle une réponse urgente, … la
Cour prend toutes mesures utiles pour accélérer la procédure et se réunit le plus tôt
possible pour tenir audience et délibérer sur la demande 14.» La Cour examine la nécessité
de rendre rapidement un avis dans chaque cas d’espèce, et son Règlement ne comporte pas
de dispositions spécifiques sur la façon dont elle peut accélérer la procédure. Lorsqu’elle
reconnaît l’urgence d’une demande, la Cour fixe normalement des délais assez brefs pour
les exposés écrits et/ou les observations écrites et/ou pour l’ouverture de la procédure
orale. La Cour n’a à ce jour jamais renoncé à la phase écrite ou orale dans les demandes
urgentes d’avis consultatif.
A.1.6. Lecture publique de l’avis consultatif
24. La Cour prononce son avis en séance publique. Désormais, la lecture de l’avis est
retransmise en direct sur le site Internet de la Cour. Suivant un format plus ou moins
standardisé, employé dans les affaires contentieuses comme dans les procédures
consultatives, le texte de l’avis consultatif contient les éléments suivants: la composition de
la Cour, un compte rendu succinct de la procédure, les différents arguments et points de
vue, le raisonnement de la Cour et, dans le dernier paragraphe, intitulé dispositif, la
réponse de la Cour à la (aux) question(s) posée(s). L’avis indique en outre le nom des juges
qui ont voté pour et contre les principales conclusions de la Cour, et de ceux qui ont joint
une opinion individuelle ou dissidente. Après la lecture de l’avis, un exemplaire dûment
signé et scellé est remis au représentant de l’organisation requérante, un autre est envoyé
au Secrétaire général des Nations Unies et un troisième est déposé aux Archives de la
Cour.
13 La pratique varie considérablement quant au nombre d’exposés écrits/d’observations écrites et
d’interventions orales que la Cour doit prendre en considération. Dans l’affaire du Mur (2004), la
Cour a reçu des exposés écrits de 48 entités et entendu les arguments oraux de 15 d’entre elles. Dans
l’affaire des Armes nucléaires/ONU (1996), elle a reçu 28 exposés écrits ainsi que trois observations
écrites de la part d’Etats sur les exposés écrits des autres, et a entendu 21 exposés oraux. Dans
l’affaire du Kosovo (2010), la Cour a reçu 35 exposés écrits ainsi que 14 observations écrites sur les
exposés écrits des autres intervenants, et a entendu 29 exposés oraux.
14 Par exemple, une réponse urgente a été demandée dans les affaires suivantes: Mur (2004); Armes
nucléaires/ONU (1996); Accord entre l’OMS et l’Egypte (1980). Parfois, les requérants n’invoquent
pas l’article 103 mais demandent que l’avis consultatif soit rendu «d’urgence», «en priorité», «au
plus tôt» ou «en tenant compte des contraintes de temps».
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A.1.7. Effets juridiques d’un avis consultatif
25. Les avis consultatifs ne sont ni définitifs ni obligatoires, au sens donné à ces termes aux
articles 59 et 60 du Statut de la Cour en ce qui concerne les affaires contentieuses 15. Ils
peuvent cependant être considérés comme obligatoires par le biais de conventions ou
d’actes spécifiques des organisations internationales. Par exemple, les avis consultatifs
relatifs à la révision des jugements du Tribunal administratif de l’OIT se voient conférer un
effet obligatoire par l’article XII du Statut du Tribunal. De même, l’article IX (section 32)
de la Convention de 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées
dispose que, si un différend surgit entre une des institutions spécialisées et un Etat
Membre, un avis consultatif sur tout point de droit soulevé sera demandé à la Cour
internationale de Justice, et que «l’avis de la Cour sera accepté par les parties comme
décisif». Quoi qu’il en soit, la Cour a toujours souligné que de telles clauses ne portent pas
atteinte à la nature de sa fonction consultative, pas plus qu’elles n’influent sur le
raisonnement qu’elle suit ou sur le fond des avis consultatifs. La Cour a toujours établi une
distinction entre le caractère consultatif de sa fonction et les effets particuliers que les
parties à un différend existant souhaitent attribuer à un avis consultatif (Immunité de
juridiction, 1999, paragr. 25).
Procédure consultative: Modalités
■ La compétence consultative de la Cour est ouverte à l’Assemblée générale des Nations Unies, au Conseil
de sécurité (sur toute question juridique) et aux autres entités autorisées à s’en prévaloir par l’Assemblée
générale (sur des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leur activité).
■ La demande d’avis consultatif doit être fondée sur une décision de l’organe compétent de l’organisation
concernée, contenant la question posée à la Cour.
■ La demande doit être accompagnée d’un dossier contenant toutes les informations qui, de l’avis de
l’organisation concernée, doivent être portées à la connaissance de la Cour.
■ Les avis consultatifs ont pour objectif de donner des avis juridiques à l’organisation qui formule la
demande.
■ Lorsqu’elle décide de qui est habilité à participer à la procédure consultative, le principal objectif de la
Cour est de s’assurer que, autant que possible, tous les acteurs concernés sont impliqués et qu’ainsi
toutes les informations pertinentes sont à sa disposition.
■ La Cour a montré qu’elle est disposée à accepter la participation d’acteurs autres que les organisations
intergouvernementales ou que les Etats si: a) cela permet d’obtenir les informations les plus précises et
factuelles possibles; b) les circonstances particulières de l’affaire le justifient.
■ La procédure d’avis consultatif se déroule sur la base de soumissions écrites – qui peuvent inclure des
observations sur les exposés des autres intervenants – et/ou d’audiences.
■ La Cour est disposée à accélérer la procédure consultative si la demande lui en est faite expressément.
26. Même si les avis consultatifs ne sont pas obligatoires, pas plus qu’ils n’ont l’autorité de la
chose jugée, ils reflètent l’état du droit international et bénéficient de l’autorité de la Cour
internationale de Justice, organe judiciaire principal des Nations Unies, et, à ce titre, ils ont
un poids juridique important. Il convient de rappeler que certains avis consultatifs
contiennent des prononcés judiciaires de grande importance et qui sont maintenant
considérés comme des jalons dans le développement du droit international, par exemple:
concernant la capacité des organisations intergouvernementales de présenter des
réclamations au niveau international (Réparation des dommages subis, 1949); concernant
la notion de normes impératives du droit international imposant des obligations erga
15 Comme l’a déclaré la Cour à plusieurs reprises, «Ces avis sont consultatifs, non obligatoires [et]
sont destinés à éclairer l’Organisation des Nations Unies» (Privilèges et Immunités, 1989,
paragr. 31).
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omnes (Réserves à la Convention sur le génocide, 1951); en donnant une interprétation
large des fonctions et pouvoirs de l’Assemblée générale, y compris en matière de maintien
de la paix et de la sécurité (Certaines dépenses des Nations Unies, 1962); et concernant
l’obligation des Etats de ne pas reconnaître une situation illicite découlant d’une violation
grave du droit international (Sud-Ouest africain, 1971).
27. S’agissant de l’OIT, il convient de faire référence à l’avis consultatif de la Cour
permanente de Justice internationale de 1922 concernant la désignation du délégué ouvrier
néerlandais à la troisième session de la Conférence internationale du Travail, qui,
aujourd’hui encore, reste le seul avis juridique faisant autorité sur les questions liées à la
représentativité des organisations de travailleurs et sur lequel la Commission de
vérification des pouvoirs de la Conférence fonde systématiquement ses décisions. Il
convient également de noter que la raison d’être de l’article 37 de la Constitution de l’OIT
est de reconnaître l’avis de la CIJ comme ultime recours en matière d’interprétation et
d’accepter son «appréciation» comme règlement définitif de la «difficulté». Par
conséquent, selon la lettre et l’esprit de la Constitution de l’OIT, il est clair que les avis
consultatifs de la CIJ bénéficient d’une légitimité et d’une autorité supplémentaires à
l’égard de tous les Membres de l’Organisation.
A.1.8. Coûts
28. Les demandes d’avis consultatif donnent lieu à des frais minimes. Aucune disposition
n’impose de frais administratifs ou de procédure pour le dépôt d’une requête auprès de la
CIJ. Conformément à l’article 33 de son Statut, les frais de la Cour sont pris en charge par
les Nations Unies, dont le budget intègre en fait celui de la Cour. Les seuls frais concernent
la reproduction du dossier dans le nombre d’exemplaires requis par le Greffe (45 en
anglais et 45 en français) et les frais de mission du représentant de l’organisation
requérante, s’il participe à la phase orale de la procédure.
A.1.9. Suivi institutionnel
29. La Cour a toujours considéré qu’il appartient exclusivement à l’organisation requérante de
décider de l’utilité pratique de l’avis consultatif et, une fois que la Cour a dit le droit, que
c’est à ladite organisation de tirer les conclusions de l’avis. Comme elle l’a indiqué dans
une affaire récente, «la Cour ne peut substituer sa propre appréciation de l’utilité de l’avis
demandé à celle de l’organe qui le sollicite» (Mur, 2004, paragr. 62). Dans certains cas,
notamment lorsque la décision de demander un avis consultatif est prise dans un contexte
politique très polarisé, ou résulte d’un vote divisé, la mise en oeuvre de l’avis de la Cour
peut s’avérer particulièrement difficile. Selon la pratique courante des Nations Unies, le
Secrétaire général distribue l’avis consultatif à tous les Etats Membres, le publie dans les
Documents officiels et veille à ce qu’un point soit inscrit à cet égard à l’ordre du jour de
l’organisation requérante. Le Secrétaire général peut également être appelé à se conformer
à toutes les instructions particulières figurant dans la résolution contenant la demande
d’avis consultatif. Dans la plupart des cas, à la réception d’un avis, l’Assemblée générale
adopte une ou plusieurs résolutions aux termes desquelles elle exprime ses remerciements
à la Cour, prend acte de son avis et communique ses recommandations aux Etats Membres
en vue de la mise en oeuvre de ses conclusions 16.
16 En général, ces résolutions reflètent l’acceptation intégrale et le plus grand respect pour l’avis de
la Cour. Cependant, il n’est pas rare que certains Etats votent contre ces résolutions et refusent de se
conformer à l’avis juridique de la Cour, auquel cas ce dernier est sérieusement affaibli et laisse
fondamentalement en suspens la question controversée à l’origine de la demande.
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30. Les six avis consultatifs rendus à la demande de l’OIT ont tous été publiés au Bulletin
officiel du BIT et mentionnés dans le rapport du Directeur général à la Conférence.
L’Organisation leur a également donné effet, en fonction de la question concernée, dans sa
pratique ultérieure. Par exemple, suite à l’avis consultatif de la Cour permanente de Justice
internationale relatif à l’interprétation de la convention (no 4) sur le travail de nuit
(femmes), 1919, le Conseil d’administration a décidé en 1933 de proposer une révision de
la convention, qui fut finalement adoptée par la Conférence en 1934 17.
A.2. Objet de la demande d’avis consultatif:
Compétence et recevabilité
31. Lorsqu’elle est saisie d’une demande d’avis consultatif, la Cour considère d’abord si elle a
compétence et, auquel cas, s’il existe une raison pour laquelle, à sa discrétion, elle devrait
refuser de l’exercer. Comme elle l’a déclaré: «La Cour ne saurait toutefois exercer ce
pouvoir discrétionnaire que si elle a établi au préalable qu’elle a compétence dans l’espèce
considérée; si la Cour n’est pas compétente, la question de l’exercice de son pouvoir
discrétionnaire ne se pose pas.» (Armes nucléaires/OMS, 1996, paragr. 14).
A.2.1. Compétence de la Cour d’examiner une demande
d’avis consultatif
32. La Cour a toujours souligné que sa compétence est subordonnée à plusieurs conditions, à
savoir: l’avis consultatif doit être demandé par un organe dûment autorisé à le solliciter;
l’avis doit concerner une question juridique; et, lorsque la demande d’avis n’émane pas de
l’Assemblée générale ou du Conseil de sécurité, la question doit se poser dans le cadre des
activités de l’organe requérant (Mur, 2004, paragr. 14; Kosovo, 2010, paragr. 19).
33. S’agissant de la nature juridique de la question, la Cour a fait observer que les questions
libellées en termes juridiques et soulevant des problèmes de droit international sont, par
leur nature même, susceptibles de recevoir une réponse fondée en droit et sont des
questions ayant un caractère juridique (Armes nucléaires/ONU, 1996, paragr. 13). Selon la
jurisprudence de la Cour, le terme «question juridique» ne doit pas être interprété de
manière restrictive, et la Cour peut donner un avis consultatif sur toute question juridique,
même abstraite (Conditions d’admission, 1948, paragr. 61), voire purement académique ou
historique (Sahara occidental, 1975, paragr. 18-19).
34. La Cour a fait observer à plusieurs reprises que le fait qu’une question juridique comporte
également des aspects politiques (ce qui est, par la nature des choses, le cas de bon nombre
de questions qui viennent à se poser dans la vie internationale) ne suffit pas à la priver de
son caractère juridique (Kosovo, 2010, paragr. 27; Mur, 2004, paragr. 41). Elle a en outre
estimé que la nature politique des mobiles qui peuvent avoir inspiré la demande, et les
implications politiques potentielles de l’avis consultatif sont sans pertinence au regard de
l’établissement de sa compétence (Armes nucléaires/ONU, 1996, paragr. 13). La Cour a
même considéré que, lorsque les considérations politiques jouent un rôle marquant, il peut
être particulièrement nécessaire à une organisation internationale d’obtenir un avis
consultatif de la Cour sur les principes juridiques applicables à la matière en discussion
(Accord entre l’OMS et Egypte, 1980, paragr. 33).
17 Voir Procès-verbal du Conseil d’administration, 64e session (1933), p. 20; et CIT, 18e session,
Compte rendu des travaux (1934), pp. 196, 202.
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35. La Cour a également estimé que le manque de clarté dans la rédaction d’une question ne la
prive pas de sa compétence et a rappelé à cet égard qu’elle a souvent été amenée à élargir,
interpréter, voire reformuler les questions qui lui étaient posées (Mur, 2004, paragr. 38;
Kosovo, 2010, paragr. 50).
36. Lorsque la demande d’avis consultatif émane d’un organe autre que l’Assemblée générale
ou le Conseil de sécurité, la Cour, en se prononçant sur sa compétence, doit non seulement
s’assurer que la demande concerne une question juridique, mais également que cette
question se pose dans le cadre des activités de l’organisation requérante. A ce jour, la Cour
a refusé dans un seul cas de donner l’avis consultatif demandé, au motif que la question
posée n’entrait pas dans le cadre de l’activité de l’organisation concernée et, partant,
qu’une «… condition essentielle pour fonder sa compétence en l’espèce [faisait] défaut»
(Armes nucléaires/OMS, 1996, paragr. 31) 18.
A.2.2. Pouvoir discrétionnaire de la Cour de refuser
de donner un avis consultatif
37. S’agissant de son pouvoir discrétionnaire d’exercer sa compétence et de refuser de
répondre à une question pour des motifs d’opportunité judiciaire, la position constante de
la Cour est que, même si elle dispose d’une large marge d’appréciation à cet égard, elle a
toujours été consciente que sa réponse à une demande d’avis consultatif constitue une
participation à l’action de l’Organisation, qu’elle ne devrait pas, en principe, refuser de
donner un avis consultatif et que seules des raisons décisives pourraient l’amener à opposer
un tel refus (Armes nucléaires/ONU, 1996, paragr. 14; Mur, 2004, paragr. 44). En réalité,
dans son histoire, la Cour n’a jamais refusé de donner suite à une demande d’avis
consultatif en se fondant sur son pouvoir discrétionnaire 19.
Objet de la requête: Eléments clés
■ La question posée à la Cour doit être de nature juridique.
■ La question doit être directement liée aux activités de l’organisation requérante et doit concerner des
questions relevant de son domaine de compétence ou de spécialité.
■ Le fait que la question peut avoir des dimensions politiques, ou est abstraite ou imprécise, ne suffit pas, en
principe, pour que la Cour refuse de donner un avis.
■ Si elle le juge approprié, la Cour peut reformuler ou interpréter la question pour rendre son avis.
18 Tout en réaffirmant que les organisations internationales jouissent de «pouvoirs implicites» (qui
leur sont implicitement conférés parce qu’essentiels à l’exercice de leurs fonctions), la Cour a
rappelé que les institutions spécialisées sont des organisations autonomes investies de
responsabilités et de pouvoirs dans un domaine donné, qui, toutefois, sont nécessairement limités à
leur sphère de spécialité (par exemple, la santé publique dans le cas de l’OMS) et ne peuvent
empiéter sur ceux des autres organes du système des Nations Unies (par exemple, la légalité de la
menace ou de l’emploi d’armes nucléaires et le désarmement nucléaire).
19 La CPJI ne l’a fait qu’une seule fois, eu égard «aux circonstances toutes particulières de l’espèce,
à savoir, notamment, que cette question concernait directement un différend déjà né auquel était
partie un Etat qui n’avait pas adhéré au Statut de la Cour permanente, n’était pas membre de la
Société des Nations, s’opposait à la procédure et refusait d’y prendre part de quelque manière que ce
soit (Statut de la Carélie orientale, C.P.J.I. série B no 5)» (Armes nucléaires/ONU, 1996,
paragr. 14).
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38. Dans les affaires récemment portées devant elle, la Cour n’a accepté comme raison
décisive aucun des arguments invoqués pour l’inviter à refuser de donner un avis
consultatif. Ainsi, elle a rejeté des arguments concernant: les motifs de la demande; le
caractère vague ou abstrait de la question posée; ou le fait que l’avis pourrait entraver des
négociations en cours, nuire à une solution négociée, ou ne serait d’aucune utilité. Elle a
clairement indiqué à cet égard qu’il appartient à l’organe requérant, et non à la Cour, de
déterminer si l’avis est nécessaire au bon exercice de ses fonctions (Mur, 2004, paragr. 62;
Kosovo, 2010, paragr. 34).
A.3. Participation des organisations internationales
d’employeurs et de travailleurs aux demandes
d’avis consultatifs
39. La question de savoir si les partenaires sociaux peuvent participer à la procédure
consultative a été au coeur du débat sur le renvoi éventuel à la Cour internationale de
Justice d’une question ou difficulté concernant l’interprétation d’une convention 20.
40. L’incertitude découle de l’article 66, paragraphe 2, du Statut de la Cour, qui dispose ce qui
suit: «à tout Etat admis à ester devant la Cour et à toute organisation internationale jugés
par la Cour ... susceptibles de fournir des renseignements sur la question, le Greffier fait
connaître … que la Cour est disposée à recevoir des exposés écrits … ou à entendre des
exposés oraux …» sur la question. En effet, la Cour a interprété restrictivement le terme
«organisation internationale» figurant dans cet article, essentiellement afin d’exclure la
participation des organisations non gouvernementales. Dans le cadre de la procédure
consultative sur la Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, la Cour avait
reçu un grand nombre de communications spontanées de la part d’organisations non
gouvernementales; en conséquence, elle a adopté en 2004 l’Instruction de procédure XII,
qui donne à penser que les termes «organisation internationale» et «organisation
intergouvernementale» ont la même acception 21.
20 En 1993, un document du Bureau sur l’interprétation des conventions internationales du travail
mentionnait ce qui suit: «il est sans doute permis de penser qu’il importe davantage, pour que la
spécificité de l’Organisation et des conventions internationales du travail soit convenablement prise
en compte devant la Cour, d’assurer un accès approprié aux partenaires sociaux, afin qu’ils puissent
eux-mêmes faire valoir leurs intérêts et leurs intentions, que de se préoccuper des méthodes et
principes d’interprétation qui peuvent être appliqués par la Cour» (GB.256/SC/2/2, paragr. 48). Le
même document indiquait toutefois: «Il n’est pas certain que, dans le contexte actuel du Statut de la
Cour …, l’expression “organisation internationale” pourrait continuer à être interprétée de manière
aussi extensive.» et permettre aux organisations internationales d’employeurs et de travailleurs
d’être consultées et entendues directement (ibid., paragr. 42).
21 L’Instruction de procédure XII prévoit en outre que: «Lorsqu’une organisation non
gouvernementale présente, de sa propre initiative, un exposé écrit et/ou un document dans le cadre
d’une procédure consultative, cet exposé et/ou ce document ne doivent pas être considérés comme
faisant partie du dossier de l’affaire. […] Les exposés écrits et/ou les documents soumis par des
organisations non gouvernementales sont placés dans une salle du Palais de la Paix désignée à cet
effet. Tous les Etats et organisations intergouvernementales présentant des exposés écrits ou oraux
en vertu de l’article 66 du Statut seront informés de l’endroit où peuvent être consultés les exposés
écrits et/ou documents soumis par des organisations non gouvernementales.» Certains auteurs ont
toutefois avancé que les travaux préparatoires relatifs aux articles 66 et 67 du Statut permettent de
conclure que l’omission du mot «public» dans ces dispositions était délibérée, et que le texte était
ainsi libellé pour inclure les organisations internationales non gouvernementales parmi les entités
habilitées à ester devant la Cour dans les procédures consultatives et à fournir des renseignements à
la Cour si elle le souhaite. Voir E. Jiménez de Aréchaga: «The participation of international
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41. Toutefois, s’agissant d’une participation éventuelle des organisations internationales
d’employeurs et de travailleurs à une demande d’avis consultatif soumise par l’OIT, il est
peu probable que la Cour interprète aussi restrictivement l’expression «organisation
internationale». En réalité, il y a de bonnes raisons de penser que la Cour puisse décider
d’inviter un nombre restreint d’organisations internationales d’employeurs et de
travailleurs à participer de façon autonome à la procédure.
42. Premièrement, dans la pratique, plusieurs organisations internationales d’employeurs et de
travailleurs ont été autorisées à fournir des renseignements dans le cadre des procédures
consultatives concernant l’OIT à l’époque de la Société des Nations. De fait, l’article 66,
paragraphe 2, du Statut de la CIJ reproduit l’article 73 du Règlement révisé de la Cour
permanente de Justice internationale, l’institution qui l’a précédée. La Cour permanente a
autorisé les organisations d’employeurs et de travailleurs à participer aux procédures
consultatives concernant l’OIT entre 1922 et 1932 22. Comme l’a déclaré le juge Loder,
alors Président de la Cour, la pratique a établi un précédent qui voulait que soient admises
à ester devant elle les grandes organisations de travailleurs ou d’employeurs, organisations
qu’il aurait été difficile d’exclure en raison de leur importance majeure, bien que, au
demeurant, elles n’aient été qu’indirectement reconnues comme éléments constitutifs de
l’OIT 23.
43. Deuxièmement, la jurisprudence récente montre que la Cour est disposée à ouvrir sa
procédure consultative à d’autres acteurs que les Etats et les organisations internationales
intergouvernementales chaque fois que leur participation s’avère essentielle, tant sur le
fond qu’en matière procédurale, compte tenu des aspects concrets du cas d’espèce, en
tenant compte de considérations d’équité et de justice mais aussi de la nécessité d’obtenir
l’information la plus complète possible.
organizations in advisory proceedings before the International Court of Justice», dans
Communicazioni e Studi (1975, vol. 14), p. 419.
22 Dans la procédure consultative de 1922 concernant la Désignation du délégué ouvrier néerlandais
à la troisième session de la Conférence internationale du Travail, la Cour a invité l’Association
internationale pour la protection légale des travailleurs, la Fédération internationale des syndicats
ouvriers chrétiens et la Fédération syndicale internationale à participer à la procédure. La même
année, dans la procédure consultative sur la Compétence de l’OIT pour la réglementation
internationale des conditions de travail des personnes employées dans l’agriculture, la Cour a
invité six organisations à participer: la Confédération internationale des syndicats agricoles, la Ligue
internationale des sociétés agricoles, la Fédération internationale des syndicats chrétiens de
travailleurs de la terre, la Fédération internationale des travailleurs de la terre, la Fédération
syndicale internationale et l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs.
Dans la procédure consultative de 1926 sur la Compétence de l’OIT pour réglementer
accessoirement le travail personnel du patron, la Cour a invité trois organisations à participer:
l’Organisation internationale des employeurs industriels, la Fédération syndicale internationale et la
Confédération internationale des syndicats chrétiens. Il est révélateur que le troisième rapport
annuel de la CPJI, publié en 1927, contienne une liste des organisations internationales autorisées à
soumettre des informations à la Cour en vertu de l’article 73 où ne figurent pratiquement que des
syndicats internationaux. Voir D. Shilton: «The participation of non-governmental organizations in
international judicial proceedings», dans American Journal of International Law (1994, vol. 88),
p. 623.
23 Voir Y. Ronen: «Participation of non-State actors in ICJ proceedings», dans The Law and
Practice of International Courts and Tribunals (2012), p. 88. Cet auteur suggère que la raison de ce
traitement «préférentiel» de l’OIT tient peut-être à la disposition de sa Constitution désignant
expressément la Cour comme instance de règlement des différends concernant les plaintes pour nonrespect
des conventions de l’OIT et leur interprétation, constituant en quelque sorte «… une
invitation spéciale faite à la Cour d’accueillir les demandes d’avis consultatif. Si la Cour souhaitait
y répondre par l’affirmative et remplir son rôle de manière convaincante, elle ne pouvait ignorer le
mode de fonctionnement (modus operandi) de l’OIT.» (ibid., p. 93).
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14 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
44. En 2003, par exemple, l’Assemblée générale des Nations Unies a demandé à la Cour
internationale de Justice de rendre un avis consultatif sur les conséquences de la
construction par Israël d’un mur dans le territoire palestinien occupé. En autorisant la
Palestine à présenter un exposé écrit et à prendre part aux audiences, la Cour a notamment
tenu compte «du fait que [la Palestine] était coauteur du projet de résolution demandant
l’avis consultatif» (Mur, 2004, paragr. 4). De même, en 2007, lorsque l’Assemblée
générale l’a invitée à rendre un avis consultatif sur la conformité de la déclaration
unilatérale d’indépendance élaborée par les institutions provisoires d’administration
autonome du Kosovo au regard du droit international, la Cour a décidé d’inviter les auteurs
de la déclaration aux phases écrite et orale de la procédure, notant que «la déclaration
unilatérale d’indépendance du 17 février 2008 faisant l’objet de la question qui lui était
soumise pour avis consultatif, [et que par conséquent] les auteurs de cette déclaration
étaient susceptibles de fournir des renseignements sur la question» (Kosovo, 2010,
paragr. 3).
45. La même jurisprudence semble confirmer que la Cour est ouverte à la participation des
entités qui ont un intérêt direct dans un litige et risquent d’être affectées par l’issue de la
procédure; elles sont également susceptibles de fournir à la Cour des informations dont elle
ne disposerait peut-être pas autrement 24.
46. En tout état de cause, il est maintenant bien établi que la Cour adopte une approche
pragmatique afin de s’assurer que tous les intérêts en jeu sont exprimés et fait preuve d’une
certaine souplesse afin d’obtenir le point de vue d’autres parties que les Etats 25. En outre,
s’agissant de l’OIT, il est communément admis que, au regard de la pratique antérieure de
la Cour, la possibilité pour les acteurs non étatiques de pouvoir participer aux procédures
consultatives est particulièrement forte, les organisations d’employeurs et de travailleurs
étant représentées au sein de la structure tripartite de l’OIT et pouvant donc être
considérées comme éléments constitutifs de l’Organisation 26.
47. Enfin, indépendamment de la question de savoir si la Cour est disposée à autoriser toutes
les organisations internationales d’employeurs et de travailleurs à participer de façon
autonome à la procédure, il convient de souligner que le Bureau pourrait joindre au dossier
accompagnant la demande les mémoires, argumentaires ou autres documents que ces
organisations souhaiteraient porter à la connaissance de la Cour. Quoi qu’il en soit, à
défaut d’invitation directe par la Cour, rien n’empêche les organisations d’employeurs et
de travailleurs de présenter spontanément un mémoire exposant leur point de vue. En
outre, on ne peut pas exclure que certains Etats Membres, lorsqu’ils préparent leur exposé
écrit, consultent les organisations nationales d’employeurs et de travailleurs afin de refléter
correctement leur point de vue dans le cadre des informations communiquées à la Cour.
24 Il importe de noter que, lors des audiences dans les affaires du Mur et du Kosovo, les
représentants de la Palestine et les rédacteurs de la déclaration d’indépendance du Kosovo ont été
inscrits respectivement aux premier et deuxième rangs dans la liste des orateurs et ont bénéficié de
trois heures pour présenter leur exposé oral, soit quatre fois plus que les autres participants.
25 Voir, par exemple, Pierre-Olivier Savoie: «La CIJ, l’avis consultatif et la fonction judiciaire: entre
décision et consultation», Annuaire canadien de droit international (2004), p. 71. Selon un autre
commentateur, «au moins lorsque les organisations non gouvernementales jouissent de droits et ont
des obligations au niveau international – ce qui peut aller des organisations d’employeurs et de
travailleurs dans le Statut de l’OIT au CICR en droit humanitaire international –, la Cour peut
envisager de les autoriser à fournir des informations»; voir Andreas Paulus: «Article 66», dans
A. Zimmermann, C. Tomuschat et K. Oellers-Frahm (dir. de publication): The Statute of the
International Court of Justice: A Comment (2006), pp. 1435, 1440.
26 Voir Ronen, op. cit., pp. 88 et 89.
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A.4. La situation actuelle: Formulation de la question
48. Pour formuler la question que le Conseil d’administration pourrait décider de poser à la
Cour en ce qui concerne la controverse actuelle sur le droit de grève et le mandat de la
commission d’experts, il est important de prendre en compte les éléments suivants: a) la
question doit couvrir tous les aspects de la présente controverse pour laquelle un avis
juridique est demandé; b) elle doit exprimer de manière directe et concise les différents
points de vue exprimés; c) elle doit être formulée clairement de manière à limiter la
nécessité pour la Cour d’avoir à interpréter elle-même la question; et d) elle doit se prêter à
une réponse sans équivoque, donnant immédiatement des orientations pratiques aux
organes de l’OIT sur les limites de leur action dans les domaines visés par la demande.
49. Deux questions dominent manifestement les débats sur ce thème: 1) la question de fond, à
savoir si la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, peut être interprétée comme protégeant le droit de grève; et 2) si en vertu de son
mandat, la commission d’experts est compétente pour donner de telles interprétations et,
dans l’affirmative, pour aller au-delà de principes généraux en précisant certains détails
quant à l’application de ces principes. Il semble qu’une réponse doit être donnée à ces deux
questions pour régler le différend actuel et créer la sécurité juridique nécessaire au bon
fonctionnement du système de contrôle. Il semble également approprié de formuler les
deux questions suivantes séparément:
1) Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2) La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
était-elle compétente pour:
a) déterminer que le droit de grève découle de la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et
b) préciser, lors de l’examen de l’application de la convention, certains aspects du
champ d’application du droit de grève, des limites de celui-ci et des conditions
dans lesquelles il peut être exercé de façon licite?
B. Article 37, paragraphe 2: Etablissement
d’un tribunal interne permanent
50. Cette section vise à définir les contours d’une structure interne à l’Organisation en vue du
prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation des
conventions de l’OIT. Pour ce faire, le Bureau a tenu compte des discussions et
consultations précédentes sur le sujet 27 et a procédé à un examen exhaustif de la structure
des principaux cours et tribunaux internationaux en opération 28.
27 Voir, notamment, GB.256/SC/2/2, GB.256/PV(Rev.); Non-document sur l’interprétation des
Conventions internationales du travail (février 2010); Document exploratoire informel sur
l’interprétation des Conventions internationales du travail (octobre 2010). Des copies de ces
documents sont disponibles sur https://www.ilo.org/public/french/bureau/leg/art37.htm.
28 Les statuts et les règles de procédure des cours et tribunaux suivants ont été consultés: Cour
internationale de Justice; Tribunal international du droit de la mer; Cour pénale internationale;
Tribunal pénal international pour le Rwanda; Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie;
Cour interaméricaine des droits de l’homme; Cour européenne des droits de l’homme; Cour
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51. Les paragraphes qui suivent contiennent des commentaires sur le projet de Statut d’un
tribunal établi conformément à l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution et décrivent les
conditions nécessaires au bon fonctionnement d’un tribunal indépendant, qui recueille le
soutien des mandants tripartites de l’OIT et reflète adéquatement les spécificités des
conventions de l’OIT. Combinant rapidité et un bon rapport coût/efficacité, le tribunal est
conçu comme un organe facilement accessible qui se réunit exclusivement lorsqu’une
question ou une difficulté lui est soumise.
52. Le Statut devrait d’abord être examiné et approuvé par le Conseil d’administration avant
d’être soumis à la Conférence pour approbation. La même procédure s’appliquerait pour
tout amendement au Statut. Cette procédure découlant de l’article 37, paragraphe 2, il n’a
pas été jugé nécessaire d’inclure dans le Statut des dispositions spécifiques concernant les
amendements.
53. Compte tenu du temps nécessaire à un examen approfondi du projet de Statut, si le Conseil
d’administration devait décider de poursuivre l’examen relatif au possible établissement
d’un tribunal en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution, il pourrait instituer
un groupe de travail chargé de préparer des recommandations sur la base du Statut proposé
et de soumettre ces recommandations au Conseil d’administration à une session ultérieure.
Ce groupe de travail pourrait être composé de huit membres de chaque groupe et pourrait
tenir trois réunions de deux jours (par exemple, en janvier, mars et juin 2015) 29.
B.1. Le tribunal
B.1.1. Etablissement
54. Le tribunal serait établi en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT.
Il est proposé que son siège soit situé au Bureau international du Travail à Genève, ce qui
permettrait de réduire son coût de fonctionnement et faciliterait la protection de son statut
et des immunités nécessaires, y compris l’inviolabilité de ses archives.
B.1.2. Compétence
55. Comme indiqué à l’article 37, paragraphe 2, le tribunal aurait compétence pour statuer sur
toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une convention de l’OIT, dont il
serait saisi par le Conseil d’administration, ou conformément aux termes de ladite
convention 30 . A ce jour, aucune convention internationale du travail ne prévoit cette
saisine, mais on pourrait envisager la rédaction d’une clause type, qui serait incluse dans
les futurs instruments si un tribunal était établi en vertu de l’article 37, paragraphe 2.
56. Le renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation au tribunal ne devrait pas être
considéré comme une condition préalable à une demande d’avis consultatif à la Cour
internationale de Justice. Les deux mécanismes seraient disponibles pour se prononcer sur
africaine des droits de l’homme et des peuples; et Tribunal administratif de l’OIT. Parmi les autres
documents pertinents, on peut citer: le Règlement d’arbitrage et d’arbitrage accéléré de
l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle; l’Accord instituant l’Organisation mondiale
du commerce (OMC); le Mémorandum d’accord de l’OMC sur les règles et procédures régissant le
règlement des différends; et le Règlement d’arbitrage de la CNUDCI.
29 En supposant que deux de ses réunions se tiennent en marge des 323e et 324e sessions du Conseil
d’administration (mars et juin 2015), le coût pourrait être estimé à environ 157 600 francs suisses
(CHF).
30 Les termes «question» et «difficulté» sont employés indifféremment pour désigner tous les
problèmes d’interprétation pouvant faire l’objet d’une demande portée devant le tribunal.
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des questions et difficultés, le recours à l’un ou à l’autre dépendant de la nature et de
l’importance du sujet. Alors que l’Organisation devrait choisir de s’adresser à la Cour
internationale de Justice pour répondre à une plus grande variété de questions juridiques, y
compris celles de nature constitutionnelle, le tribunal interne, une fois établi, offrirait un
recours techniquement plus spécialisé, adapté au prompt règlement de demandes
d’interprétation précises, et peut-être moins sensibles.
57. Il a souvent été soutenu que les conventions de l’OIT présentent des spécificités dont il
faut tenir compte pour les interpréter. La question de savoir si les règles générales
d’interprétation des traités, telles que prévues par la Convention de Vienne de 1969 sur le
droit des traités, répondent entièrement aux caractéristiques particulières des conventions
internationales du travail, et notamment au rôle unique des organisations d’employeurs et
de travailleurs lors de l’adoption des instruments, a également été soulevée. Il convient de
rappeler à cet égard que l’article 5 de la Convention de Vienne prévoit que ses dispositions
s’appliquent «à tout traité adopté au sein d’une organisation internationale, sous réserve de
toute règle pertinente de l’organisation». Le Statut proposé requiert donc que le tribunal
prenne en compte les spécificités des conventions de l’OIT en tant que traités
internationaux, reconnaissant ainsi l’importance de tenir pleinement compte du processus
tripartite d’adoption de ces conventions.
B.1.3. Composition
58. Afin d’assurer une composition appropriée du tribunal, le projet de Statut énonce au sujet
des juges un certain nombre de conditions, inspirées des prescriptions figurant
généralement dans les statuts d’autres cours et tribunaux internationaux. Premièrement, les
qualités élémentaires attendues de toute personne appelée à statuer sur des différends:
considération morale et indépendance. Deuxièmement, ils devraient réunir les conditions
requises pour l’exercice de hautes fonctions judiciaires ou pour être considérés comme des
juristes possédant une compétence notoire. Troisièmement, ils devraient posséder des
compétences spécialisées, notamment une expertise confirmée en droit du travail et en
droit international. Quatrièmement, ils devraient parfaitement maîtriser l’une des langues
officielles du tribunal (anglais, français ou espagnol), et posséder une connaissance passive
d’une autre de ces langues.
59. Comme c’est le cas dans la plupart des tribunaux, les questions ou difficultés portées
devant le tribunal devraient être examinées par un nombre impair de juges afin de faciliter
le processus décisionnel. Trois juges semblent constituer le minimum nécessaire, mais un
nombre impair plus élevé – cinq par exemple – semblerait souhaitable compte tenu de
l’autorité nécessaire pour statuer sur l’interprétation d’une convention de l’OIT qui, au fil
des ans, peut avoir fait l’objet de nombreux commentaires des organes de contrôle ou
d’opinions très divergentes de la part des mandants. En outre, le tribunal pouvant rester
inactif pendant un certain temps, on ne saurait s’attendre à ce que tous les juges soient en
permanence immédiatement disponibles pour siéger sous bref préavis dans une affaire
exigeant leur présence à temps plein. Il serait donc souhaitable de nommer un plus grand
nombre de juges afin de pouvoir effectuer un choix lorsque le Conseil d’administration
décide de procéder à un renvoi.
60. Il est donc proposé de nommer douze juges au tribunal, chaque demande d’interprétation
devant être examinée par un panel restreint de cinq juges. Cette structure présente plusieurs
avantages. Premièrement, un panel de cinq membres – avec la diversité qu’il suppose –
conférerait au tribunal une grande autorité, supérieure à celle de trois adjudicateurs.
Deuxièmement, il resterait suffisamment restreint pour ne pas entraîner des coûts trop
importants ou une complexité excessive, notamment si l’on considère que le tribunal ne
siégerait que s’il est saisi d’une demande et que les juges devraient alors être rapidement
engagés et délibérer de manière efficace. Troisièmement, le tribunal siégeant «sur
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demande», la présence de sept juges supplémentaires faciliterait la constitution rapide du
panel, ainsi que tout remplacement éventuel au cours du processus. La nomination d’un
plus grand nombre de juges au tribunal n’entraînerait pas de coûts supplémentaires pour
l’Organisation et permettrait d’assurer son fonctionnement rapide et continu, qui ne serait
pas compromis, ni retardé, en cas de vacance. Quatrièmement, un panel de cinq juges
permettrait d’établir des règles relatives au quorum et à la majorité qui concilient les
impératifs de faisabilité (garantissant le prompt déroulement de la procédure) et un soutien
adéquat aux sentences finales (voir section B.2.8).
61. Enfin, la composition du tribunal pourrait refléter dans toute la mesure possible l’équilibre
entre les hommes et les femmes, la représentation des principaux systèmes juridiques et la
répartition géographique. Les juges devraient également être de nationalités différentes. Ce
sont là les critères figurant généralement dans de nombreux textes constitutifs des cours et
tribunaux internationaux actuellement en activité.
B.1.4. Sélection et nomination
62. Il est prévu que les membres du tribunal soient nommés par la Conférence internationale
du Travail pour une période de six ans. Cela serait conforme au principe général selon
lequel une nomination suffisamment longue garantit l’indépendance des adjudicateurs. En
outre, ce mandat semble à la fois efficace et pleinement compatible avec la nature du
tribunal envisagé à l’article 37, paragraphe 2. Compte tenu de sa charge de travail aléatoire
et de sa possible inactivité pendant des périodes prolongées, il apparaît souhaitable de ne
pas surcharger la Conférence et le Conseil d’administration en exigeant qu’ils reprennent
trop souvent la procédure de sélection et de nomination.
63. Dans le Statut proposé, le bureau du Conseil d’administration se voit confier une
responsabilité spéciale concernant la préparation des candidatures pour la nomination des
membres du tribunal et la constitution des panels. Toutefois, d’autres options pourraient
être envisagées, en particulier afin d’assurer une participation plus large des mandants.
64. Un possible mécanisme de sélection et de nomination consisterait à charger le Directeur
général de soumettre au bureau du Conseil d’administration une liste de candidatures
possibles: a) répondant aux exigences de qualifications et de compétence; et b) assurant
dans la mesure du possible le respect des critères mentionnés ci-dessus (équilibre entre les
hommes et les femmes, représentation des différents systèmes juridiques et répartition
géographique) dans la composition du tribunal. Le Directeur général pourrait recevoir à cet
égard les suggestions ou propositions de tout membre du Conseil d’administration et en
tiendrait compte avant de communiquer les nominations proposées au bureau du Conseil.
65. Ce dernier pourrait ensuite évaluer les nominations proposées et formuler des propositions
pour la composition du tribunal en vue de leur soumission au Conseil d’administration. Le
cas échéant, le bureau du Conseil pourrait demander l’assistance du Directeur général afin
d’identifier d’autres candidats.
66. Les propositions formulées par le bureau du Conseil devraient être approuvées par le
Conseil d’administration en vue de leur soumission à la Conférence. En tant que juges
indépendants, tous les membres du tribunal bénéficieraient donc de la confiance des trois
groupes.
B.1.5. Constitution du panel
67. Un panel de cinq membres serait constitué pour examiner une question ou une difficulté
d’interprétation dès son renvoi au tribunal par le Conseil d’administration. Il est proposé
d’établir un mécanisme de désignation par défaut pour déterminer la composition du panel
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de cinq juges, tout en autorisant une désignation ad hoc dans le cas où un consensus
tripartite unanime existerait.
68. Par défaut, les cinq juges seraient choisis par tirage au sort par le bureau du Conseil
d’administration. Pour favoriser la rotation, le panel ainsi constitué ne pourrait pas
comprendre plus de deux juges ayant siégé dans l’affaire précédente, sauf si cela est
nécessaire pour constituer un panel complet de cinq juges (par exemple, en raison de
l’indisponibilité des autres juges). Ce mode de désignation par défaut offrirait une
procédure rapide et fiable pour la constitution du panel, et dispenserait d’avoir à décider
quel juge serait le plus apte à siéger sur telle ou telle affaire, avec les délais que cela
suppose. En outre, la règle interdisant que plus de deux juges siègent sur deux renvois
consécutifs favoriserait la rotation et rendrait moins prévisible la composition du panel
suivant.
69. Néanmoins, le Statut proposé pourrait également autoriser une certaine souplesse dans le
mécanisme de désignation afin d’adapter la composition du panel si les circonstances le
justifient, sous réserve d’un consensus tripartite. Cela pourrait être réalisé en autorisant le
bureau du Conseil à décider – à l’unanimité – de renoncer au mécanisme de désignation
par défaut et de choisir un ou plusieurs juges pour constituer le panel. Il est également
prévu que cette option ne doit pas retarder indûment la désignation rapide des cinq juges,
de telle sorte que le panel serait constitué selon le mécanisme de désignation par défaut en
l’absence d’une décision rapide et unanime du bureau du Conseil.
70. Une fois choisis, les juges éliraient leur président, qui aurait une voix prépondérante (voir
section B.2.8) et disposerait de tous les pouvoirs nécessaires au prompt déroulement du
processus, ce qui pourrait accélérer l’adoption des décisions d’ordre procédural, telles les
demandes spéciales de participation à la procédure.
B.1.6. Incompatibilité
71. Afin de préserver l’indépendance et l’impartialité des juges, il leur serait interdit d’être
fonctionnaires du BIT ou de siéger à un titre quelconque dans un autre organe de l’OIT.
B.1.7. Démission, retrait et révocation
72. Reconnaissant que différentes circonstances peuvent obliger à modifier la composition du
tribunal, le Statut proposé s’inspire des règles figurant généralement dans les autres textes
instituant les cours et tribunaux internationaux. Les juges pourraient ainsi démissionner à
tout moment en informant le Directeur général de leur décision, qui transmettrait alors
l’information au Conseil d’administration afin de lancer la procédure pour combler le poste
vacant. Les juges devraient par ailleurs se retirer de toute affaire dans laquelle leur
impartialité peut raisonnablement être mise en doute, pour quelque raison que ce soit. Il
devrait être possible de les révoquer, temporairement ou définitivement selon le cas, s’ils
sont incapables ou inaptes à exercer leurs fonctions. Toute question relative à la démission
ou à la révocation d’un juge serait soulevée par le juge concerné ou, le cas échéant,
tranchée par le tribunal.
B.1.8. Remplacements et vacances
73. S’il s’avère nécessaire de remplacer l’un des juges après la constitution du panel, par
exemple, en raison de circonstances imprévues qui le rendent inapte à exercer ses
fonctions, la méthode de remplacement serait la même que celle utilisée pour constituer le
panel. De la même façon, les postes vacants au tribunal seraient pourvus selon la procédure
de nomination initiale, la nomination étant en ce cas limitée à la durée restante du mandat.
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B.1.9. Statut
74. Comme les membres d’autres organes spéciaux de l’OIT, tels les commissions d’enquête,
les membres du tribunal seraient considérés comme des experts chargés d’une mission
spéciale par l’Organisation, à savoir le règlement des différends relatifs à l’interprétation
des conventions de l’OIT. Cela suppose l’octroi de certains privilèges et immunités
nécessaires à l’exercice effectif de leurs fonctions, prévus à l’annexe I de la Convention sur
les privilèges et immunités des institutions spécialisées. Il s’agit surtout de l’immunité de
juridiction concernant les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions officielles (y
compris leurs paroles et écrits).
B.1.10. Honoraires
75. Comme pour les autres tribunaux internationaux, le projet de Statut prévoit l’indemnisation
des juges pour l’exercice de leurs fonctions, ainsi que le remboursement de leurs frais de
voyage et une indemnité de séjour lors des réunions officielles du tribunal. Le Conseil
d’administration serait habilité à approuver les montants de ces indemnisations (et à les
actualiser au besoin), qui seraient mentionnés en annexe au Statut (voir section B.3). Le
tribunal proposé siégeant uniquement sur demande, les juges ne seraient indemnisés que
pour leur participation dans un panel, et ne percevraient aucun émolument du simple fait
de leur nomination au tribunal. Cela limiterait le coût de fonctionnement du tribunal.
B.1.11. Mesures administratives
76. Le Directeur général serait chargé de prendre les mesures administratives nécessaires au
bon fonctionnement du tribunal. Considérant que ce dernier serait uniquement en session
lorsqu’il est saisi d’une question ou d’une difficulté, et afin d’éviter des coûts fixes
importants, il est proposé de ne pas établir de greffe permanent. Le Statut proposé
n’implique par conséquent ni l’existence d’une structure administrative permanente ni la
nomination d’un greffier, offrant ainsi au tribunal la flexibilité voulue pour fonctionner à
moindre coût. Il n’est donc pas prévu d’y nommer des fonctionnaires permanents ou de
créer de nouveaux postes liés au fonctionnement du tribunal.
77. Plusieurs alternatives peuvent être envisagées pour assurer le soutien requis au tribunal.
Comme pour les commissions d’enquête, des fonctionnaires du BIT pourraient être
détachés, au besoin, pour assurer le secrétariat du tribunal (par exemple, le personnel
administratif nécessaire). Etant donné que le tribunal n’instruirait vraisemblablement
qu’une seule affaire durant une même session, il suffirait dans un premier temps de
détacher à temps partiel un fonctionnaire de catégorie P et un de catégorie G pour la durée
de la procédure; à défaut, on pourrait envisager le recrutement externe du personnel de
soutien requis pour la durée de la procédure. Afin de maximiser le rapport coût-efficacité,
il est proposé de privilégier le détachement à temps partiel de fonctionnaires pour fournir
le soutien nécessaire au tribunal. Les affaires qui sont soumises au tribunal pourraient en
principe durer au maximum six mois, ce qui représenterait tout au plus trois mois de travail
d’un fonctionnaire de catégorie P et d’un fonctionnaire de catégorie G (voir section B.3).
78. Le Statut proposé prévoit également la mise en place de plusieurs mesures administratives
susceptibles d’accélérer le fonctionnement du tribunal et d’en réduire le coût, notamment
les outils informatiques et les communications électroniques permettant aux juges
d’exercer certaines fonctions à distance; cela pourrait notamment prendre la forme d’une
plate-forme électronique en ligne permettant la transmission rapide des notifications et des
communications aux participants. Afin de promouvoir la rapidité des procédures et de
réduire leur coût, le tribunal pourrait décider que, sauf demande contraire, les documents
présentés par les participants et ceux qui sont mis à leur disposition le seraient sous forme
électronique. Les moyens technologiques permettraient également aux membres du
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tribunal de communiquer et d’effectuer certaines tâches à distance, limitant ainsi la durée
et le coût de leurs réunions à Genève.
B.2. Procédure
79. Le Statut proposé prévoit une procédure qui concilie la nécessité d’assurer un accès
tripartite au tribunal, d’une part, et le prompt règlement des difficultés à un coût
raisonnable, de l’autre. Il autorise également une certaine souplesse afin, le cas échéant,
d’adapter son fonctionnement aux circonstances particulières des questions ou difficultés
dont il est saisi.
B.2.1. Ouverture de la procédure
80. Bien que le tribunal soit conçu de manière à pouvoir recevoir et instruire à tout moment les
demandes d’interprétation, il siégerait uniquement lorsqu’une question ou une difficulté lui
est transmise par le Conseil d’administration. Les juges n’exerceraient aucune fonction, et
le tribunal ne serait pas en session tant qu’un panel n’est pas constitué pour traiter une
affaire.
81. Conformément à l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution, le renvoi au tribunal des
questions ou difficultés relatives à l’interprétation des conventions est une prérogative du
Conseil d’administration. Par conséquent, le Statut proposé ne tente pas de définir
comment le Conseil pourrait évaluer l’opportunité de saisir le tribunal d’une affaire
donnée. Pour ce faire, il pourrait examiner toutes les circonstances pratiques, juridiques et
politiques qu’il juge pertinentes, par exemple: le fait que cette question a déjà fait l’objet
de commentaires par un organe de l’OIT ou par un autre organisme; la nature de la
question ou difficulté d’interprétation, ainsi que ses implications, y compris pour le
système de contrôle de l’OIT; l’existence de demandes de clarification antérieures et par
qui elles ont été formulées; et l’utilité d’obtenir une interprétation faisant autorité.
82. Par ailleurs, le Statut proposé ne réglemente pas les modalités de soumission d’une
question ou d’une difficulté au Conseil d’administration car il serait difficile de prévoir
tous les cas de figure possibles; au demeurant, le Règlement du Conseil d’administration
prévoit déjà un mécanisme adéquat, notamment dans le cadre du groupe de sélection
tripartite 31. Plusieurs pistes peuvent néanmoins être envisagées quant aux modalités de
soumission d’une question ou d’une difficulté au Conseil d’administration en vue de son
renvoi éventuel au tribunal. Par exemple, les organes de contrôle de l’OIT, notamment la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations ou la
Commission de l’application des normes de la Conférence, pourraient, dans leur rapport,
inviter le Conseil d’administration à renvoyer une question donnée au tribunal. Le groupe
de sélection tripartite peut également inscrire une question d’interprétation à l’ordre du
jour d’une session du Conseil d’administration, son mandat à cet égard lui permettant de le
faire lorsqu’il le juge approprié. En outre, le Conseil d’administration lui-même pourrait
décider d’inscrire à son ordre du jour un point sur un éventuel renvoi au tribunal. De plus,
en cas d’urgence, le règlement en vigueur autorise le bureau du Conseil, après consultation
des autres membres du groupe de sélection tripartite, à inscrire à l’ordre du jour du Conseil
d’administration les questions urgentes survenant entre les sessions ou durant celles-ci. En
résumé, les règles en vigueur concernant l’ordre du jour du Conseil d’administration
offrent un cadre adéquat et complet, qui préserve son pouvoir discrétionnaire et la
flexibilité dont il dispose pour l’examen des demandes d’interprétation.
31 Art. 3, paragr. 1, du Règlement du Conseil d’administration, et paragr. 28-34 de la Note
introductive du Recueil des règles applicables au Conseil d’administration.
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83. Lorsqu’il renvoie une demande d’interprétation au tribunal, le Conseil d’administration
doit s’entendre sur la question à poser. Le Directeur général serait chargé de communiquer
au tribunal les documents présentés au soutien de la demande.
B.2.2. Participation à la procédure
84. Compte tenu de la structure tripartite de l’OIT, la procédure devant le tribunal doit
permettre une pleine participation tripartite. Il est proposé d’accorder un droit de
participation aux gouvernements de tous les Etats Membres de l’OIT, aux membres
employeurs et travailleurs du Conseil d’administration et aux organisations bénéficiant du
statut consultatif général 32. Le tribunal ou le Conseil d’administration pourrait également
inviter d’autres personnes ou organisations à se joindre à l’instance. Par exemple, lorsque
la demande d’interprétation est de nature technique ou sectorielle, le Conseil pourrait
inviter les organisations internationales d’employeurs et de travailleurs directement
concernées. Il pourrait également transmettre une invitation à certaines organisations
internationales comme les Nations Unies, les institutions spécialisées ou les organisations
régionales ayant un intérêt dans la question portée devant le tribunal. Le cas échéant, le
Conseil pourrait envisager d’accorder une invitation permanente à certaines
organisations 33.
85. En outre, comme le prévoient les statuts d’autres tribunaux autorisant la participation des
parties intéressées, les organisations intergouvernementales ou non gouvernementales
internationales, notamment les organisations d’employeurs et de travailleurs ayant un
intérêt dans la question ou la difficulté, pourraient demander au tribunal l’autorisation de
participer à la procédure. Il est également proposé d’assurer la souplesse de la procédure en
habilitant le tribunal à décider s’il convient d’accéder à la demande de participation et à en
fixer les modalités. Le tribunal pourrait, par exemple, autoriser et fixer les conditions dans
lesquelles peuvent être soumis des mémoires d’amicus curiae. Enfin, le Statut proposé
reconnaît également que la participation peut être exercée collectivement, ce qui pourrait
contribuer au prompt règlement des demandes d’interprétation.
B.2.3. Déroulement de la procédure
86. Le Statut proposé vise à assurer la rapidité de la procédure par deux types de dispositions:
premièrement, les dispositions générales relatives aux délais qui s’appliqueraient
automatiquement, de telle sorte que les juges n’auraient pas à prendre des décisions
d’ordre administratif ou procédural; deuxièmement, les dispositions qui autorisent le
tribunal à rendre des ordonnances pour accélérer la procédure, y compris sur la longueur et
la forme des exposés écrits ou la durée des exposés oraux. Il serait également possible de
gagner du temps en recourant systématiquement aux outils informatiques, par exemple, en
affichant toutes les notifications et communications de nature procédurale sur une page
Web dédiée.
87. En se fondant sur une analyse comparative des délais fixés par les statuts d’autres
tribunaux, on peut raisonnablement s’attendre à ce que l’instruction d’une demande ne
dépasse pas six mois, de la date de soumission d’une demande formelle d’interprétation
32 Voir Recueil des règles applicables au Conseil d’administration, annexe V.
33 Par exemple, les organisations internationales publiques compétentes ou les organisations
internationales non gouvernementales bénéficiant du statut consultatif régional ou figurant dans la
Liste spéciale.
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par le Conseil d’administration à celle à laquelle le tribunal communique sa sentence 34.
C’est le délai prévu par défaut dans le projet de Statut. Si une question ou une difficulté
donnée exige un délai différent, par exemple, en raison de la complexité du sujet, ou si
l’instruction a pris du retard en raison du retrait ou du remplacement d’un ou plusieurs
juges, le Conseil d’administration ou le tribunal devrait être habilité à moduler les délais en
conséquence.
88. Il est proposé que les langues officielles du tribunal soient celles de l’OIT – anglais,
français et espagnol – dans lesquelles seraient présentés les exposés écrits et oraux.
L’interprétation simultanée serait assurée dans les trois langues officielles durant les
audiences.
89. Le Statut proposé suffit à rendre le tribunal pleinement opérationnel. Cependant, lorsqu’il
commencera à siéger, ses membres souhaiteront probablement adopter des règles plus
détaillées concernant son fonctionnement et sa procédure. Le Statut proposé prévoit donc
l’adoption éventuelle de règles de procédure qui seraient élaborées en fonction des
suggestions des juges et de l’expérience vécue du tribunal. L’adoption de règles de
procédure – pratique courante dans la plupart des cours et tribunaux internationaux –
permettrait de préciser les dispositions du Statut traitant de la procédure ou de
l’organisation du tribunal, sans être tenu de modifier formellement le Statut et d’obtenir
l’approbation de la Conférence.
B.2.4. Phases de la procédure
90. La plupart des statuts des cours et tribunaux internationaux prévoient à la fois une phase
écrite et une phase orale. Bien que la phase orale soit susceptible d’allonger la procédure et
d’en augmenter le coût, lors des discussions antérieures sur ce sujet les intervenants ont
souligné la nécessité d’assurer le caractère contradictoire de la procédure, et donc de tenir
des audiences. Dans certains cas toutefois, l’échange d’exposés écrits pourrait permettre un
débat suffisamment approfondi puisque tous les participants auraient accès aux exposés
des autres intervenants et pourraient présenter leurs observations. Il est donc suggéré
d’adopter une procédure en deux étapes, à savoir une procédure écrite, suivie d’une
procédure orale, sauf décision contraire du tribunal (par exemple, s’il juge que cette
dernière ne contribuerait pas utilement à l’examen de l’affaire).
B.2.5. Procédure écrite
91. En règle générale, le Statut proposé prévoit que les demandes d’interprétation doivent être
notifiées à tous les participants habilités à participer à la procédure. Cette obligation de
notification permettrait de s’assurer que tous les participants sont informés du dépôt de la
demande et, si le tribunal en décide ainsi, du délai de présentation des exposés écrits. En
l’absence d’échéance spécifique, le Statut prévoit un délai par défaut de quarante-cinq
jours.
92. Afin de permettre l’échange complet des arguments écrits de toutes les parties intéressées,
et renforcer ainsi le caractère contradictoire de la procédure devant le tribunal, le projet de
Statut prévoit en outre que les exposés reçus deviennent accessibles à l’expiration du délai
fixé pour la soumission des exposés écrits. Aux termes des règles proposées sur la publicité
(voir section B.2.7), ces exposés seraient rendus publics, à moins que le tribunal n’en
34 Par exemple, le Mémorandum de l’OMC sur le règlement des différends, annexe 2, dispose que le
Groupe spécial doit publier son rapport dans les six mois (art. 12.8), et l’Organe d’appel publier le
sien dans les 60 jours (art. 17.5); le Règlement d’arbitrage accéléré de l’OMPI dispose que la
décision finale doit être rendue dans les quatre mois (art. 58); et le Règlement d’arbitrage de la CCI
prévoit qu’elle doit l’être dans les six mois (art. 30).
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décide autrement, par exemple, pour en limiter l’accès aux seuls participants, si des raisons
particulières le justifient. Les participants qui ont présenté des exposés écrits pourraient
ainsi présenter des observations sur les exposés des autres intervenants dans les délais fixés
par le tribunal. Si le tribunal n’estime pas nécessaire de spécifier un délai différent, le
Statut proposé prévoit un délai par défaut de trente jours.
B.2.6. Procédure orale
93. Comme indiqué ci-dessus, le Statut proposé offre la possibilité de tenir des audiences, sauf
si le tribunal en décide autrement. Si le tribunal opte pour la tenue d’audiences, il pourrait
en fixer les dates et modalités. Le Statut proposé prévoit par défaut une durée de cinq
jours, qui semble suffisante pour entendre les points de vue de tous les participants
habilités et de toute autre personne que le tribunal souhaiterait entendre (par exemple, des
experts ou d’autres personnes ou entités susceptibles de l’aider à se prononcer rapidement).
B.2.7. Publicité
94. Le Statut proposé rappelle le caractère public de l’instance. Sauf si le tribunal en décide
autrement pour des raisons spécifiques, les documents déposés auprès du tribunal seraient
accessibles au public et les audiences seraient publiques. Ces dispositions sont compatibles
avec les règles des autres cours et tribunaux. Ce caractère public présumé se reflète
également dans la disposition concernant la mise à disposition des observations reçues par
le tribunal.
B.2.8. Adoption des décisions; quorum;
effet de la sentence du tribunal
95. Le Statut proposé recherche un équilibre entre deux objectifs: veiller au bon
fonctionnement du tribunal et s’assurer que ses décisions reflètent un large consensus des
juges pour maintenir leur autorité. Le Statut propose donc un quorum de trois juges, tant
pour les décisions d’ordre procédural que pour la sentence. Toutes les questions seraient
tranchées à la majorité des juges présents, le président (ou le juge qui le remplace) ayant
une voix prépondérante en cas d’égalité. Ces dispositions sont calquées sur la pratique de
nombreux tribunaux. Quant à la sentence du tribunal, il est proposé d’exiger le vote
affirmatif d’au moins trois juges.
96. Les sentences du tribunal, y compris l’interprétation des dispositions des conventions de
l’OIT et les autres décisions rendues dans le cadre du règlement de la question dont il est
saisi, seraient obligatoires; elles seraient donc opposables à tous, sous réserve de tout arrêt
ou avis consultatif de la Cour internationale de Justice 35. En outre, conséquence corollaire
du caractère obligatoire de la sentence, le Statut proposé dispose que tous les organes de
l’OIT doivent donner effet aux interprétations du tribunal.
35 Comme le montrent les travaux préparatoires, les délégations tripartites qui ont discuté de
l’article 37, paragraphe 2, à la Commission constitutionnelle en 1946 ont souligné la nécessité d’une
interprétation uniforme des textes et se sont dits d’avis que les sentences du tribunal devraient avoir
force obligatoire pour tous les Etats Membres. Durant ces débats, Wilfred Jenks, reprenant les
observations de certains intervenants, a déclaré qu’il «faut avoir une interprétation uniforme et
obligatoirement applicable à tous les pays» (Bulletin officiel, vol. XXVII, no 3, 1946, p. 817). Un
orateur ayant objecté que l’amendement constitutionnel proposé ne précisait pas que les décisions
du tribunal auraient force obligatoire, le président a répondu: «Ce point trouvera une solution dans
les règles formulées par le Conseil d’administration» (ibid., p. 821).
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97. Comme le prévoit l’article 37, paragraphe 2, la sentence du tribunal serait communiquée
aux Etats Membres de l’OIT et toute observation de ceux-ci sera présentée à la
Conférence. Etroitement liée au caractère obligatoire de la sentence du tribunal, cette
exigence constitutionnelle permet aux Etats Membres d’exposer leur point de vue et
permet à la Conférence d’envisager les mesures de suivi qu’elle juge appropriées (par
exemple, en débattant de l’opportunité d’une action normative à la suite d’une sentence).
98. Conformément à l’esprit de l’article 37, paragraphe 2, le Statut proposé ne prévoit aucun
droit d’appel car cela irait à l’encontre de l’objectif du prompt règlement d’une question ou
difficulté. Cependant, rien n’empêche que cette même question ou difficulté soit portée
devant la Cour internationale de Justice.
B.3. Coûts
99. Dans la configuration proposée pour le tribunal, les coûts resteraient relativement
modestes. Les membres du tribunal seraient nommés pour un mandat renouvelable de six
ans mais ne percevraient d’honoraires que s’ils sont choisis pour siéger sur une affaire. De
même, les services de soutien et le Greffe ne seraient sollicités qu’en cas de besoin.
Lorsque le Conseil d’administration soumet une demande d’interprétation au tribunal, deux
questions financières se posent.
100. La première concerne l’indemnisation adéquate des juges. Le Conseil d’administration
devrait en approuver le montant qui pourrait être forfaitaire ou calculé sur la base du temps
consacré à l’affaire. Il conviendrait également de leur verser une indemnité de séjour et de
rembourser leurs frais de voyage pour les sessions du tribunal auxquelles ils participent.
S’agissant de l’indemnisation, il est proposé de la calculer forfaitairement, par dossier.
Bien qu’il existe une très grande variété de modes de rétribution dans les tribunaux
internationaux 36, prévoir des honoraires forfaitaires par dossier permet de mieux contrôler
les coûts de fonctionnement du tribunal. Ayant examiné les émoluments payés par d’autres
tribunaux internationaux et organes semblables 37, et tenant compte de la durée probable de
chaque affaire, il est proposé de verser une indemnisation de 4 000 à 7 000 francs suisses
(CHF) par dossier, somme que le Conseil d’administration pourrait actualiser au besoin.
Cela représenterait un coût raisonnable et prévisible, qui préserverait le caractère
symbolique de cette indemnisation 38. Quant à l’indemnité de subsistance et aux frais de
voyage, il est proposé d’appliquer aux juges le même traitement et les mêmes règles
qu’aux membres du Conseil d’administration. On trouvera au tableau 1 une estimation du
36 Par exemple, les juges du Tribunal administratif de l’OIT reçoivent 3 000 dollars E.-U. par
décision rédigée et 750 dollars E.-U. par décision signée. A l’OMC, les membres de l’Organe de
règlement des différends reçoivent 600 CHF par jour de travail à Genève et 600 CHF par tranche de
huit heures de travail préparatoire, tandis que les membres de l’Organe d’appel reçoivent des
émoluments forfaitaires mensuels de 9 031 CHF, et un remboursement de 330 CHF par mois au titre
des frais administratifs. Les juges de la Cour internationale de Justice, du Tribunal pénal
international pour le Rwanda et du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie reçoivent un
salaire de base d’environ 166 000 dollars E.-U. et un ajustement de poste.
37 Par exemple, les honoraires de 4 000 CHF par session perçus par les membres de la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR) constituent une
comparaison utile.
38 Les honoraires de 4 000 à 7 000 CHF sont comparables à ceux reçus par: les juges du Tribunal
administratif de l’OIT par décision rédigée; les membres de l’Organe de règlement des différends de
l’OMC pour deux semaines de travail; et les membres de la CEACR. Ils sont largement inférieurs
aux salaires versés par la Cour internationale de Justice et aux honoraires forfaitaires payés aux
membres de l’Organe d’appel de l’OMC, ce qui en reflète le caractère symbolique.
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coût minimum d’instruction d’un cas, basée sur les hypothèses suivantes: cinq juges
effectuant deux voyages aller-retour en provenance de différentes régions et un séjour total
de deux semaines à Genève.
Tableau 1. Coût estimatif minimum par affaire
Dépenses Calcul Montant (CHF)
Indemnisation 4 000-7 000 CHF par juge x 5 juges 20 000-35 000
Indemnité de subsistance 380 CHF par jour par juge x 14 jours x 5 juges 26 600
Frais de voyage
Afrique 4 000 CHF par voyage x 2 voyages 8 000
Amériques 4 000 CHF par voyage x 2 voyages 8 000
Asie 4 000 CHF par voyage x 2 voyages 8 000
Europe 500 CHF par voyage x 2 voyages 1 000
Moyenne des 4 régions 3 125 CHF par voyage x 2 voyages 6 250
Frais de traduction 3 traducteurs(trices) x 10 jours 11 250
Frais d’interprétation 5 jours d’audiences 35 000
Total par affaire 124 100-139 100
101. La deuxième question financière concerne les coûts administratifs. Comme indiqué cidessus,
l’objectif serait de les minimiser et, dans la mesure du possible, de les absorber
dans les allocations budgétaires existantes du Bureau. Il est proposé que le Bureau détache
deux fonctionnaires à temps partiel pour accomplir les tâches de soutien des activités du
tribunal. En supposant que chaque affaire dure en moyenne six mois, que deux
fonctionnaires (un P4 et un G6) suffisent à couvrir les besoins, et que le temps total
consacré à chaque affaire n’excède pas la moitié de leur durée de travail, le coût pour ces
deux postes ne représenterait pas plus de trois mois de travail pour chacun d’entre eux par
dossier 39 . Les autres frais, comme les services de documentation, l’infrastructure
informatique ou l’archivage, seraient absorbés par le budget des départements du BIT
concernés. Il convient enfin de rappeler que le fonctionnement du tribunal dans les trois
langues officielles de l’OIT suppose des frais conséquents de traduction et
d’interprétation 40 qui ne pourraient vraisemblablement pas être absorbés par les crédits
budgétaires existants.
Section II. Examiner les questions qui se posent
encore au sujet de la politique normative
et du système de contrôle
102. Outre le point de savoir comment régler toute question ou difficulté relatives à
l’interprétation d’une convention de l’OIT, le Conseil d’administration a étudié, à de
récentes sessions, un certain nombre d’autres questions qui se rapportent à la politique
39 Pour l’exercice biennal en cours, le coût moyen d’un mois de travail est de 19 020 dollars E.-U.
pour un fonctionnaire P4 et de 13 890 dollars E.-U. pour un fonctionnaire G6.
40 Les frais de traduction et d’interprétation restent très difficiles à estimer, car ils dépendent de
plusieurs variables, telles que le nombre d’exposés reçus et les capacités linguistiques des membres
du panel.
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normative et au système de contrôle et a demandé que soit proposé un calendrier en vue de
leur examen.
A. Concevoir un mécanisme d’examen des normes
103. En particulier, le Conseil d’administration a jugé important de mettre en place un
mécanisme d’examen des normes. On rappellera qu’il a pris une décision de principe, à sa
312e session (novembre 2011), en vue de la création d’un tel mécanisme dans le cadre de la
politique normative convenue à sa 309e session (novembre 2010). Toutefois, il a également
prié le Bureau de tenir des «consultations complémentaires sur les modalités de ce
mécanisme dans le but de déterminer et résoudre les préoccupations qu’il suscite et de
présenter au Conseil d’administration à sa session de mars 2012 une proposition sur les
options présentées dans le document GB.312/LILS/5, en gardant à l’esprit les avis
exprimés par les membres du Conseil d’administration sur ce point de l’ordre du jour».
104. Le Bureau a procédé à ces consultations, comme demandé, afin d’instaurer la confiance
nécessaire au sein des mandants tripartites pour pouvoir aborder concrètement les
questions de fond que soulève nécessairement la création d’un mécanisme d’examen des
normes.
105. En mars 2012, le Conseil d’administration a invité le Bureau «à poursuivre les
consultations déjà engagées, y compris sur les modalités du mécanisme d’examen des
normes, et à présenter au Conseil d’administration à sa 316e session (novembre 2012) une
proposition sur les options présentées dans le document GB.312/LILS/5, en gardant à
l’esprit les avis exprimés par les membres du Conseil d’administration sur ce point de
l’ordre du jour».
106. Au cours de ces discussions, un consensus s’est dégagé sur le fait que la Déclaration de
l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable, 2008, constituait le cadre
général de la mise en oeuvre de la politique normative de l’Organisation et plus
particulièrement que la création d’un mécanisme d’examen des normes était le moyen de
donner effet aux dispositions de la Déclaration selon lesquelles l’OIT doit «promouvoir sa
politique normative en tant que pierre angulaire des activités de l’OIT en renforçant sa
pertinence pour le monde du travail, et s’assurer que les normes remplissent bien leur rôle
dans la réalisation des objectifs constitutionnels de l’Organisation».
107. Le Conseil d’administration est aussi convenu que l’initiative sur les normes proposée par
le Directeur général dans son rapport à la Conférence internationale du Travail en 2013
devrait être menée à bien dans le cadre d’une démarche commune, dont le mécanisme
d’examen des normes ferait partie intégrante.
108. Toutefois, les vives controverses qui entourent la question du droit de grève et d’autres
questions connexes depuis la session de 2012 de la Conférence internationale du Travail
n’ont pas permis de progresser dans la mise en place de ce mécanisme d’examen. A ce
stade, en l’absence de la confiance et de la compréhension nécessaires entre les mandants
de l’OIT du fait de ces controverses, il n’a pas été possible de prendre des mesures
concrètes pour donner suite aux décisions de principe déjà adoptées.
109. Par conséquent, le Conseil d’administration est saisi de la question de savoir comment
respecter l’engagement qui a été pris de concevoir l’initiative sur les normes comme une
démarche commune dont le mécanisme d’examen des normes serait une composante
essentielle, dans un climat de controverse constante sur le droit de grève. A l’évidence,
cette difficulté serait largement, ou intégralement, résolue en cas d’accord sur les options
exposées dans la première section du présent document. Quoi qu’il en soit, le Conseil
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d’administration souhaitera peut-être considérer qu’il est néanmoins possible d’avancer sur
la question du mécanisme d’examen des normes, à compter de sa session de mars 2015.
110. En particulier, il y a lieu de consacrer de nouveaux travaux à la conception d’un
mécanisme d’examen des normes en se fondant sur les discussions et décisions
importantes du Conseil d’administration en 2011. Ces travaux pourraient être entrepris
maintenant, de telle sorte que le mécanisme pourrait être opérationnel dès que les décisions
prises dans d’autres domaines permettraient de réunir les conditions préalables à son bon
fonctionnement.
111. A cet égard, l’examen d’un calendrier devrait porter non seulement sur le moment du
lancement du mécanisme d’examen des normes, mais aussi sur le laps de temps nécessaire
à sa mise au point définitive, compte tenu notamment de la méthode ambitieuse et
exigeante envisagée en 2011.
B. Fonctionnement de la Commission de l’application
des normes de la Conférence
112. Parallèlement à la question du mécanisme d’examen des normes, les mandants continuent
d’appeler l’attention sur la nécessité éventuelle d’améliorer encore certains aspects des
travaux de la Commission de l’application des normes. On rappellera que les décisions sur
la liste des cas devant être examinés par la commission ont été prises en temps voulu en
2014, même si des conclusions n’ont pas pu être adoptées pour la plupart de ces cas.
Toutefois, la poursuite de l’examen des questions en jeu continue de susciter de l’intérêt,
étant entendu que la composition de la liste reste la prérogative du groupe des travailleurs
et du groupe des employeurs.
113. Le Conseil d’administration pourrait estimer judicieux par conséquent de convoquer à
nouveau le Groupe de travail tripartite sur les méthodes de travail de la Commission de
l’application des normes, qui s’est réuni pendant les sessions du Conseil d’administration
jusqu’en novembre 2011, mais dont les travaux ont été interrompus depuis. Le groupe de
travail pourrait se réunir dès que le Conseil d’administration le jugera utile, pendant ou
entre ses sessions.
C. Questions liées au contrôle régulier et au contrôle
fondé sur la présentation de plaintes
114. Au cours des débats qui ont eu lieu sur le système de contrôle des normes depuis 2012,
plusieurs idées ont été proposées en ce qui concerne l’application appropriée des
articles 22, 23 et 24 de la Constitution de l’OIT, l’acheminement vers les différents
organes du système de contrôle des rapports et des réclamations qui en découlent et, enfin,
les relations entre ces organes et la répartition de leurs responsabilités respectives.
Certaines de ces idées renvoyaient aux préoccupations suscitées par la charge de travail
sans cesse croissante à laquelle est confronté le système de contrôle. Dans ce contexte,
l’attention s’est tournée vers les dispositifs institutionnels mis au point, sur une base
tripartite, dans certains Etats Membres pour faciliter le règlement au niveau national de
questions, qui sinon seraient directement adressées à l’OIT, tout en veillant à préserver le
droit d’accès au système de contrôle.
115. Ces questions ont fait l’objet de discussions au Conseil d’administration à sa 320e session
(mars 2014). Toutefois, les avis exprimés à ce jour ne donnent pas à penser qu’il existe une
véritable communauté de vues en la matière ni qu’il soit utile à ce stade d’accorder une
attention plus poussée à ces questions, étant donné qu’elles pourraient visiblement susciter
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des débats approfondis et complexes à un moment où le Conseil d’administration est déjà
saisi d’un ensemble de questions difficiles concernant les normes.
116. Par conséquent, le Conseil d’administration devrait formuler de nouvelles orientations
concrètes qui serviraient de base à la proposition d’un éventuel calendrier aux fins des
mesures à prendre dans ce domaine.
D. Questions liées au fonctionnement de la Commission
d’experts pour l’application des conventions
et recommandations
117. Le Bureau a continué de veiller activement à renforcer l’appui qu’il fournit à la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations afin d’aider
celle-ci à s’acquitter de son mandat.
118. A sa session de novembre-décembre 2013, la commission d’experts a décidé de convoquer
de nouveau, à sa session de 2014, sa Sous-commission sur les méthodes de travail afin
d’examiner ses méthodes de travail à la lumière des questions soulevées depuis 2012. Le
Bureau a préparé un document de travail interne pour faciliter ces discussions en se
fondant sur les orientations fournies par les experts. A compter de 2013, à la demande de la
commission d’experts, sa session annuelle a été prolongée d’une journée, (elle se termine
désormais le dernier samedi de la session). Le coût correspondant a été financé par les
ressources existantes. A la demande de la commission d’experts, le Bureau a remanié le
programme de travail afin d’améliorer la gestion du temps et de parvenir ainsi à un
meilleur équilibre entre les délais impartis aux membres de la commission pour procéder à
l’examen individuel des dossiers dont ils ont la charge et les séances plénières de la
commission.
119. Depuis 2012, le Bureau aide la commission d’experts à créer des groupes de travail pour
examiner un ensemble consolidé de rapports portant sur des questions précises. Grâce à la
mise en place d’une plate-forme informatique protégée par un mot de passe, les membres
de la commission d’experts peuvent facilement accéder depuis 2013 à toutes les
informations et à tous les documents ayant trait aux rapports qui relèvent de leur
compétence, et ce bien avant le début de la session de la commission. Depuis 2012, les
nouveaux membres de la commission sont invités à des séances d’information très
complètes organisées en amont de la première session à laquelle ils participeront ainsi qu’à
leur arrivée avant la session en question. Depuis 2013, les nouveaux membres se voient
adjoindre un membre plus ancien de la commission pour la durée de la première session à
laquelle ils participent. La préparation requise en vue de pourvoir les sièges vacants est
effectuée en temps voulu pour permettre au Directeur général de soumettre ses
propositions au bureau du Conseil d’administration.
120. A la présente session, une proposition a été présentée au bureau du Conseil
d’administration afin d’envisager la possibilité d’augmenter de deux le nombre des
membres de la commission, ce qui aurait pour effet, si la proposition était acceptée, de
porter la composition de la commission à 22 membres. Cette proposition répond aux
préoccupations exprimées par les experts eux-mêmes quant à leur surcroît de travail dû à
plusieurs facteurs: l’augmentation du taux de ratification des conventions de l’OIT ces
dernières années, le fait que les pays respectent davantage leur obligation de présenter des
rapports, le suivi assuré par la commission à la demande des autres organes de contrôle de
l’Organisation, et la rigueur dont les experts doivent faire preuve pour garantir la qualité et
la cohérence de leurs commentaires.
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121. Le Bureau a aussi amélioré l’appui qu’il apporte aux experts en mettant des outils,
modifiés ou nouveaux, à la disposition du personnel qui les seconde dans leurs travaux afin
d’assurer un meilleur contrôle de la qualité et une plus grande cohérence.
122. A la présente session du Conseil d’administration, son bureau sera également saisi de
propositions visant à pourvoir un certain nombre de sièges vacants à la commission
d’experts. Trois sièges sont actuellement vacants, et le Directeur général n’en a été avisé
que récemment pour l’un d’entre eux.
123. Le Conseil d’administration n’est pas sans savoir que son bureau a déjà longuement
délibéré ces derniers mois sur la méthode la plus indiquée pour lui présenter des
recommandations relatives aux nominations à la commission. Selon les dispositions
actuelles, le Directeur général présente deux listes de candidats (une liste longue et une
liste restreinte) au bureau, auquel il revient ensuite de faire part de ses recommandations au
Conseil d’administration. Récemment, certains sièges vacants ont parfois été pourvus avec
du retard du fait des difficultés rencontrées par les membres du bureau pour convenir de
recommandations à la lumière des informations qui leur avaient été fournies.
124. Le bureau fera de nouveau rapport sur cette question au Conseil d’administration à sa
présente session.
Projet de décision
125. Le Conseil d’administration voudra sans doute prendre une décision sur tout ou
partie des mesures suivantes:
a) l’adoption de la résolution, figurant dans l’annexe I du présent document,
aux termes de laquelle il est demandé à la Cour internationale de justice de
rendre d’urgence un avis consultatif en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution;
b) l’établissement d’un tribunal en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de la
Constitution et, à cette fin, l’institution d’un groupe de travail, comme
indiqué au paragraphe 53 du présent document, qui serait chargé de
préparer des recommandations, sur la base du projet de Statut figurant dans
l’annexe II du présent document, en vue de leur soumission au Conseil
d’administration à sa 325e session (novembre 2015);
c) les mesures à prendre en ce qui concerne le mécanisme d’examen des
normes;
d) la relance des consultations tripartites visant à résoudre les questions qui se
posent encore au sujet du fonctionnement du système de contrôle, en
particulier s’agissant du fonctionnement de la Commission de l’application
des normes à la 104e session (2015) de la Conférence internationale du
Travail.
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Annexe I
Projet de résolution du Conseil d’administration du BIT
Le Conseil d’administration,
Conscient que l’Organisation internationale du Travail est confrontée à une grave
crise institutionnelle qui met en danger le fonctionnement du système de contrôle de
l’Organisation et qui a empêché, à deux reprises au cours des trois dernières années, la
Commission de l’application des normes de la Conférence de s’acquitter de ses
responsabilités;
Rappelant qu’à l’origine de la controverse grandissante se trouve la décision d’une
partie des mandants de l’OIT de contester la position de longue date de la Commission
d’experts pour l’application des conventions et recommandations – telle qu’exprimée dans
l’étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales – selon laquelle le droit de
grève est protégé par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, et d’affirmer, ce faisant, que la commission d’experts a outrepassé son
mandat et s’est à tort engagée dans des fonctions d’interprétation;
Notant qu’une autre partie des mandants de l’OIT soutient au contraire que le droit à
la liberté syndicale est communément compris comme incluant le droit de grève, que des
commentaires formulés à cet effet non seulement par la commission d’experts mais aussi
par le Comité de la liberté syndicale sont restés incontestés pendant quarante ans, et que les
conclusions de ces organes de contrôle sont maintenant largement reprises dans des
jugements de juridictions internationales compétentes en matière de protection des droits
humains;
Affirmant que le système de contrôle de l’OIT tel qu’il a fonctionné durant les quatrevingt-
huit dernières années est fondé sur la complémentarité de la commission d’experts et
de la Commission de l’application des normes de la Conférence et est souvent considéré
comme étant parmi les plus efficaces du système multilatéral;
Conscient de la nécessité pour l’OIT de continuer à disposer d’un système de contrôle
solide bénéficiant de l’appui de toutes les parties, et conscient que l’absence de réponses
satisfaisantes aux problèmes en suspens et aux préoccupations persistantes porterait
atteinte au fonctionnement et à la force du système;
Reconnaissant la nécessité de recevoir un avis juridique faisant autorité de la part de
la Cour internationale de Justice, en tant que seul organe pouvant apprécier toutes
questions ou difficultés relatives à l’interprétation de la Constitution ou d’une convention
internationale du travail en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, et prenant acte
de l’effet décisoire de tout avis consultatif ainsi obtenu;
Exprimant le voeu que, compte tenu de la structure tripartite unique de l’OIT, non
seulement les gouvernements mais aussi les organisations internationales d’employeurs et
de travailleurs seront invités à participer directement et sur un pied d’égalité à toute
procédure visant à clarifier la situation actuelle,
GB.322/INS/5
32 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
1. Décide, conformément à l’article 96, paragraphe 2, de la Charte des Nations
Unies, à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT, à l’article IX, paragraphe 2,
de l’Accord entre les Nations Unies et l’OIT, approuvé par la Résolution 50(I) de
l’Assemblée générale des Nations Unies le 14 décembre 1946, et à la Résolution
concernant les demandes d’avis consultatifs à la Cour internationale de Justice, adoptée par
la Conférence internationale du Travail le 27 juin 1949, de demander à la Cour
internationale de Justice de rendre d’urgence un avis consultatif sur les questions
suivantes:
1) Le droit de grève des travailleurs et de leurs organisations est-il protégé par la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948?
2) La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de
l’OIT était-elle compétente pour:
a) déterminer que le droit de grève découle de la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et
b) préciser, lors de l’examen de l’application de la convention, certains aspects du
champ d’application du droit de grève, des limites de celui-ci et des conditions
dans lesquelles il peut être exercé de façon licite?
2. Charge le Directeur général:
a) de transmettre cette résolution à la Cour internationale de Justice, accompagnée de
tout document pouvant servir à élucider la question, conformément à l’article 65,
paragraphe 2, du Statut de la Cour;
b) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice de permettre la
participation des organisations d’employeurs et de travailleurs bénéficiant du statut
consultatif général auprès de l’OIT à la procédure consultative;
c) de demander respectueusement à la Cour internationale de Justice d’examiner les
mesures possibles pour accélérer la procédure, conformément à l’article 103 du
Règlement de la Cour, de manière à rendre une réponse urgente à cette demande;
d) de préparer, après que la Cour aura rendu son avis, des propositions concrètes pour
donner effet à cet avis;
e) d’informer, conformément à l’article IX, paragraphe 4, de l’Accord de 1946 entre les
Nations Unies et l’OIT, le Conseil économique et social des Nations Unies de cette
demande.
GB.322/INS/5
GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx 33
Annexe II
Projet de Statut
I. LE TRIBUNAL
ARTICLE 1
Institution
1. Un tribunal pour le prompt règlement des questions ou difficultés relatives à
l’interprétation des conventions de l’OIT est établi conformément à l’article 37,
paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT.
2. Le siège du Tribunal est fixé au Bureau international du Travail à Genève,
Suisse.
ARTICLE 2
Compétence
1. Le Tribunal est compétent pour statuer sur toute question ou difficulté relative à
l’interprétation d’une convention de l’OIT qui lui est soumise par le Conseil
d’administration ou conformément aux termes de ladite convention.
2. En statuant sur toute question ou difficulté, le Tribunal doit prendre en compte les
spécificités des conventions de l’OIT en tant que traités internationaux.
ARTICLE 3
Composition
1. Le Tribunal se compose de juges indépendants nommés parmi les personnes
jouissant de la plus haute considération morale. Ils doivent réunir les conditions requises
pour l’exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des juristes possédant une
compétence notoire, et doivent posséder une expérience confirmée en droit du travail et en
droit international. Ils doivent maîtriser au moins l’une des langues officielles du Tribunal
et avoir une connaissance passive d’au moins une autre de ces langues.
2. Le Tribunal se compose de douze juges et siège en panel de cinq juges.
3. La composition du Tribunal reflète dans toute la mesure possible l’équilibre entre
les hommes et les femmes, la représentation des principaux systèmes juridiques et la
répartition géographique. Les juges sont de nationalités différentes.
ARTICLE 4
Sélection et nomination
1. Les juges du Tribunal sont nommés par la Conférence internationale du Travail
pour une période de six ans, et leur mandat peut être reconduit.
GB.322/INS/5
34 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
2. Le Directeur général présente au bureau du Conseil d’administration des
candidatures répondant aux critères énoncés à l’article 3. Avant de soumettre la liste de
candidatures, le Directeur général tient compte des suggestions ou propositions formulées
par tout membre du Conseil d’administration.
3. Le bureau du Conseil d’administration évalue les candidatures et prépare une
proposition de composition du Tribunal. Si nécessaire, le bureau peut demander au
Directeur général de fournir des candidatures supplémentaires.
4. La proposition de composition du Tribunal est approuvée par le Conseil
d’administration en vue de sa soumission à la Conférence internationale du Travail.
ARTICLE 5
Constitution des panels
1. Un panel de cinq juges est rapidement constitué lorsque le Conseil
d’administration porte une question ou difficulté devant le Tribunal.
2. Le bureau du Conseil d’administration, ou toute personne ou entité à qui le
bureau du Conseil délègue cette fonction, désigne les juges du panel par tirage au sort. Le
panel ne comporte pas plus de deux juges ayant servi dans l’affaire précédente, sauf si
nécessaire pour constituer un panel complet de cinq juges.
3. Nonobstant les dispositions qui précèdent, le bureau du Conseil d’administration
peut, par décision unanime, désigner expressément un ou plusieurs juges au panel. Cette
décision ne doit pas retarder indûment la constitution rapide du panel.
4. Chaque panel élit son Président. Le panel peut déléguer au Président toute
fonction nécessaire à la conduite rapide de la procédure.
ARTICLE 6
Incompatibilité
Un juge ne peut être nommé comme fonctionnaire du BIT, ni siéger à quelconque
titre dans un organe de l’OIT.
ARTICLE 7
Démission, retrait et révocation
1. Un juge peut démissionner à tout moment par avis donné au Directeur général
qui en informe le Conseil d’administration.
2. Un juge doit se retirer de toute affaire dans laquelle son impartialité peut
raisonnablement être mise en doute.
3. Un juge doit être révoqué, temporairement ou définitivement selon le cas, s’il est
incapable ou inapte à exercer ses fonctions.
4. Toute question relative au retrait ou à la révocation d’un juge est soulevée par le
juge concerné ou décidée par le Tribunal.
GB.322/INS/5
GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx 35
ARTICLE 8
Remplacements
S’il s’avère nécessaire de remplacer un juge d’un panel, ledit remplacement est
effectué conformément à la procédure de constitution des panels.
ARTICLE 9
Vacances
Les postes vacants au Tribunal sont pourvus conformément à la procédure de
nomination. La nomination prend fin au terme du mandat initial.
ARTICLE 10
Statut
Dans l’exécution de leurs fonctions pour le Tribunal, les juges ont le statut d’experts
en mission et jouissent des privilèges et immunités prévus à l’annexe I de la Convention
sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées.
ARTICLE 11
Honoraires
1. Les juges reçoivent une indemnisation pour l’exécution de leurs fonctions dans
les procédures dans lesquelles ils sont engagés. Ils perçoivent aussi une indemnité de
subsistance et sont remboursés de leurs frais de voyage pour leurs réunions officielles au
siège du Tribunal.
2. Les taux d’indemnisation, les frais de voyage ainsi que les indemnités de
subsistance sont approuvés par le Conseil d’administration et annexés au présent Statut.
ARTICLE 12
Mesures administratives
Le Directeur général prend les mesures administratives nécessaires au prompt
fonctionnement du Tribunal, y compris les services de greffe, l’usage d’outils
technologiques et la possibilité pour les juges d’accomplir certaines de leurs fonctions à
distance.
II. PROCÉDURE
ARTICLE 13
Ouverture de la procédure
1. Le Tribunal n’est en session que lorsqu’il est saisi d’une question ou difficulté.
2. Le Conseil d’administration porte les questions ou difficultés devant le Tribunal
au moyen d’une demande d’interprétation.
GB.322/INS/5
36 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
3. Le Directeur général communique au Tribunal tous les documents et
informations relatifs à la demande d’interprétation.
ARTICLE 14
Participation à la procédure
1. Les gouvernements des Etats Membres de l’OIT, les membres employeurs et
travailleurs du Conseil d’administration, les organisations internationales non
gouvernementales dotées du statut consultatif général, ainsi que toutes autres organisations
ou personnes invitées par le Conseil d’administration ou par le Tribunal ont le droit de
participer à la procédure. La participation peut être exercée collectivement.
2. Les organisations internationales ou les organisations internationales non
gouvernementales ayant un intérêt dans la question ou la difficulté, notamment les
organisations d’employeurs et de travailleurs, peuvent soumettre une demande au Tribunal
pour être autorisées à participer à la procédure. Le Tribunal statue sur la portée et les délais
de cette participation.
ARTICLE 15
Déroulement de la procédure
1. Le Tribunal rend les ordonnances pour le prompt déroulement de la procédure, y
compris en ce qui concerne la forme et la durée des exposés écrits et oraux.
2. La procédure ne doit pas dépasser six mois entre la date à laquelle le Conseil
d’administration soumet une demande d’interprétation au Tribunal et celle où le Tribunal
communique sa sentence. Des délais différents peuvent être fixés sur demande expresse du
Conseil d’administration, ou par décision du Tribunal.
3. A tout stade de la procédure, le Tribunal peut demander aux participants de
produire des documents ou de fournir d’autres informations.
4. Les langues officielles du Tribunal sont l’anglais, le français et l’espagnol. Les
exposés écrits et oraux peuvent être faits dans l’une des langues officielles. La sentence est
rendue dans les trois langues officielles, les trois textes faisant également foi.
5. Sous réserve des dispositions du présent Statut, le Conseil d’administration peut
adopter des règles de procédure applicables au Tribunal.
ARTICLE 16
Phases de la procédure
La procédure devant le Tribunal comporte une phase écrite, suivie d’une phase orale,
sauf si le Tribunal en décide autrement.
ARTICLE 17
Notification
Les demandes d’interprétation sont rapidement notifiées aux personnes ou entités
habilitées à participer à la procédure en vertu de l’article 14, paragraphe 1.
GB.322/INS/5
GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx 37
ARTICLE 18
Procédure écrite
1. Sauf si le Tribunal en décide autrement, la notification initiale comporte une
invitation à soumettre des exposés écrits dans un délai de 45 jours.
2. Les exposés écrits reçus deviennent accessibles à l’expiration du délai fixé pour
leur soumission.
3. Les participants ayant soumis des exposés écrits ont le droit de présenter des
observations sur les exposés des autres participants. Sauf si le Tribunal en décide
autrement, lesdites observations sont soumises dans les 30 jours à compter de l’expiration
du délai fixé pour soumettre des exposés écrits.
ARTICLE 19
Procédure orale
1. Le Tribunal décide si une procédure orale doit être tenue, et en fixe les dates et
modalités. Sauf si le Tribunal en décide autrement, les audiences ne dépassent pas cinq
jours.
2. La procédure orale consiste en l’audition par le Tribunal des personnes ou entités
habilitées à participer en vertu de l’article 14, et des autres personnes ou entités que le
Tribunal décide d’entendre.
ARTICLE 20
Publicité
Sauf si le Tribunal en décide autrement, les audiences sont publiques et les documents
déposés auprès du Tribunal sont accessibles au public.
ARTICLE 21
Adoption des décisions
1. Le quorum pour l’adoption des décisions par le Tribunal est de trois juges.
2. Toutes les questions doivent être décidées à la majorité des juges présents. En cas
d’égalité de votes, le président a voix prépondérante.
3. L’adoption d’une sentence requiert le vote affirmatif de trois juges.
ARTICLE 22
Sentence
Le Tribunal statue sur les demandes d’interprétation en prononçant une sentence. La
décision est communiquée aux Etats Membres et toute observation de ceux-ci sera
présentée à la Conférence.
GB.322/INS/5
38 GB322-INS_5_[CABIN-141013-1]-Fr.docx
ARTICLE 23
Effet
1. Les sentences du Tribunal sont obligatoires et doivent être appliquées par tous les
organes de l’OIT.
2. La disposition qui précède s’applique sous réserve des dispositions de la
Constitution de l’OIT, ou de tout arrêt ou avis consultatif de la Cour internationale de
Justice, qui lieront le Tribunal.
Document no 35
Procès-verbaux de la 322e session du Conseil
d’administration, octobre-novembre 2014, paragr. 47-
209
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
322e session, Genève, 30 octobre-13 novembre 2014
GB.322/PV
Procès-verbaux de la 322e session
du
du Bureau international du Travail
GB.322/PV
18 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
organisée le 12 novembre pour que les membres puissent poser leurs questions et exprimer
données fiables et les statistiques joueront un rôle déterminant dans son élaboration.
Décision
45.
a) a demandé au Bureau d élaborer un plan d action détaillé comportant des
cibles et des indicateurs mesurables, en tenant dûment compte de la
discussion au sein du Conseil d administration, et de présenter un rapport
sur les progrès accomplis;
b) a demandé au Directeur général d apporter son soutien à la mobilisation des
(Document GB.322/INS/4/2, paragraphe 28.)
Hommage à Son Excellence M. Michael Sata,
Président de la République de Zambie
46.
hommage à Son Excellence M. Michael Sata, Président de la République de Zambie,
décédé le 24 octobre 2014. M.
cause des travailleurs. Une minute de silence est observée.
Initiative sur les normes: Suivi de la session
des normes de la Conférence internationale
du Travail
(GB.322/INS/5, GB.322/INS/5(Add.),
GB.322/INS/5(Add.1), GB.322/INS/5(Add.2)
et GB.322/INS/5(Add.3))
47. Le Président rappelle grave crise institutionnelle met en péril le fonctionnement du
système de contrôle et, à deux reprises ces trois dernières années, a
empêché la
Travail (cises
responsabilités. Des efforts doivent donc être faits pour trouver une solution pérenne.
48. Le Directeur général dit que des consultations intensives ont eu lieu depuis la session de
juin 2014 de la Conférence, en stricte conformité avec les instructions données par le
unanime sur le foncti
convenues que cet objectif revêtait une importance cruciale pour le bon fonctionnement de
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 19
manifes notamment de la part des
gouvernements
responsabilité partagée à cet égard ont été observées. Il faut maintenant trouver un terrain
49. Les divers sujets traités dans les deux sections du document du Bureau sont
interdépendants. Si cela complique quelque peu la tâche, compte tenu de la complexité des
pour ménager un espace de négociation et concilier les différents points de vue à propos
points soulevés. Le Directeur général rappelle avoir préconisé, à la session de juin 2013 de
occasions susceptibles de se présenter pendant la session pour conclure un accord sur la
ligne de conduite à adopter. Le Directeur général précise que, à cet effet, il se tiendra, avec
remercie les nombreux gouvernements qui ont proposé des installations et services afin
l débat sur le projet de décision figurant au
paragraphe 125 a été laissé ouvert à dessein
de décisions sur lequel pourraient se fonder des solutions concertées.
50. Le Vice-président travailleur dit conclusion que,
de demeurer pertinent et de continuer à
fonctionner, la seule solution est
à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour avis consultatif. Le contrôle
réserve des mandants tripartites. Or, en 2012, les membres employeurs ont contesté que le
droit de grève soit protégé par la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection
ière de la
-après
conventions. Ils ont en outre refusé de parvenir à des conclusions consensuelles pour les
convention et ont donc pris des dispositions pour que de telles questions soient soumises à
intégrante de ce système, dont elle est un élément indispensable, et il est incontestable
que les questions qui lui sont posées soient claires, directes et concises, et que la Cour soit
en mesure de comprendre le ou les problèmes juridiques qui lui sont soumis pour avis. Les
syndical
auront la possibilité de participer de façon autonome à la procédure.
51.
reformulation de la question énoncée au paragraphe 1. 2) du projet de résolution figurant
GB.322/PV
20 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
fondée sur le dialogue, les travailleurs sont sensibles aux arguments qui ont été avancés
pour la défendre. Fervents partisans du dialogue social, ils ont participé de bonne foi à une
montré que la poursuite des discussions ne permettrait pas de trancher la controverse
actu
puisque le point contesté par les membres employeurs porte sur la protection internationale
de ce droit dans la convention no
du droit de grève au niveau national ne présent etarder encore le
règlement de cette question affaiblirait le système de -être de
manière irréversible.
52. L 37.2 de la Constitution pourrait
être envisagée à titre de solution possible à long terme, sous réserve de certaines garanties
toutefois. Le g
53.
respect mutuel entre les trois groupes, qui fait actuellement défaut. Il est difficile de
groupes conteste les observations formulées par les experts au sujet de plusieurs
conventions dministration décide de soumettre le présent
différend à la CIJ pour avis consultatif, le groupe des travailleurs pourrait cependant
la conception de ce mécanisme, et notamment sur sa
est indiqué au paragraphe 111, il conviendrait aussi
autres options.
54.
réunion du Groupe de travail tripartite sur les méthodes de travail de la Commission de
juin 2014 de parvenir à des conclusions non consensuelles, si elle était employée pour les
cas examinés par la commission, porterait atteinte au système de contrôle et nuirait à la
clarté sur le plan juridique, avec des conséquences préjudiciables non seulement sur les
travailleurs mais encore sur les gouvernements. Elle permettrait également à un groupe
55.
décelé
rééquilibrer le système
que le moment est mal choisi
procédures de contrôle prévues dans la Constitution. Il soutient la proposition de porter à
22 le nombre de membres de la CEACR.
56.
travailleurs est disposé à engager le dialogue avec les autres groupe
global éventuel sur les autres questions abordées dans le document.
57. Le coordonnateur du groupe des employeurs fait un certain nombre de propositions
système.
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 21
58. Les employeurs estiment que le droit de grève est reconnu dans différentes juridictions
nationales urrait faire une
janvier 2015, afin de mieux cerner les problèmes li
compris sur le plan normatif. La réunion, dont la durée ne devrait pas excéder une semaine,
pourrait rassembler deux experts gouvernementaux, un expert employeur et un expert
travailleur par région, et serait présidée par une personnalité internationale choisie par le
seraient présentés pour e
juin 2015. Tant que de telles discussions sont en cours, il ne serait guère judicieux de
continuer de traiter des cas relatifs au droit de grève, qui devraient être mis en suspens dans
dure devant la
même pas été exploitées pour tenter de régler le présent différend.
59. Le groupe des employeurs considère que, si la CIJ décidait que la convention no 87 inclut
effectivement le droit de grève et les modalités définies par la CEACR, les pays qui ont
ratifié la convention seraient obligés de réviser en conséquence leurs législations et
pratiques, ce qui pourrait porter atteinte à la souveraineté nationale en matière de relations
professionnelles. Un avis contraire de la CIJ entacherait la crédibilité du système de
validité des observations et des
rapports de la commission. De la même façon, si la CIJ décidait que le principe
10 du
Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, inclut le droit de
tenus de réviser en conséquence leurs législations et pratiques, ce qui pourrait aussi porter
atteinte à la souveraineté nationale en matière de relations professionnelles. Et là encore,
en remettant en cause la pertinence du Recueil
rendu par la CIJ, des questions difficiles continueront de se poser et devront être examinées
.
60.
propos
qui tiendrait compte non
seulement de leur pe de
convention, meilleur équilibre. Les groupes
des employeurs et des travailleurs pourraient
que le projet de liste ne soit soumis, pour adoption, à la Commission
normes en 2015. Les employeurs sont prêts à conclure un accord sur cette proposition.
61.
y compris un programme de travail
62.
procédure spéciale informelle, destinée à régler les questions concernant les divergences
a charge de travail de cette dernière,
GB.322/PV
22 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
dans le rapport présenté à la session de 2014 de la Conférence et confirmant le caractère
non contraignant des commentaires formulés par cette commission. La déclaration devrait
63. Les employeurs sont aussi disposés
concevoir le système de c
devraient contribue
sa mission au profit de tous les mandants.
64. g GRULAC),
un représentant du gouvernement de Cuba souscrit à la proposition de saisir la CIJ de la
o 87, pour ce qui est du droit de grève. Il
souligne toutefois que les trois groupes de mandants devraient être pleinement associés à la
procédure devant la Cour. Par ailleurs -
accélérée.
65. permanent en
le que proposée au paragraphe 125 b) du document, que si celui-
CIJ. Un tel groupe de travail devrait être composé de 16 membres gouvernementaux, huit
membres employeurs et huit membres travailleurs. Dans le cas où un groupe de travail
pourrait également être examinée par ledit groupe de travail.
66.
place et que, malgré la décision adoptée à cet égard à la 320e session, aucun calendrier
questions en suspens relatives au système de contrôle et pour le lancement du mécanisme
à mars 2015.
67. ns à certains aspects des travaux de la
cas, qui reste la prérogative du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs,
ées au nom du GRULAC à la 320e session du Conseil
2 convoquer de
nouveau le Groupe de travail tripartite sur les méthodes de travail de la Commission de
venir de ce groupe de travail seraient incorporés dans les travaux du Groupe de travail sur
Travail (document GB.322/WP/GBC/1).
2 Document GB.320/PV, paragr. 585 et 586.
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 23
68. En ce qui concerne les questions liées au contrôle régulier et au contrôle fondé sur la
présentation de plai
né des cas par plusieurs composantes du système, ce qui risque
plus grande attention à cette question, même si cela doit susciter des débats approfondis et
complexes, et un calendrier doit être arrêté concernant les mesures à prendre.
69. -122 et se dit convaincu que la CEACR
avec la Commiss
mandants tripartites et en nouant des discussions informelles avec les représentants
des sièges vacants de la CEACR, et rappelle la décision adoptée en mars 2014 en vue de
cet objectif» 3 . Le GRULAC continuera de suivre avec attention les débats sur cette
nécessaire.
70. GASPAC), un représentant du
gouvernement de la Chine réaffirme que le dialogue tripartite est le meilleur moyen pour
Conférence internationale du Travail. Le GASPAC craint que, en saisissan
se retrouve dépossédée de la question et que la pratique du tripartisme soit mise en échec.
Le GASPAC appuie la proposition du groupe des employeurs consistant à mener des
discussions tripartites pour trouver une solution à long terme aux questions relatives au
droit de grève, et ce
question de savoir si le droit de grève constitue une règle internationale peut être tranchée à
71. Le GASPAC se déclare opposé à
pourraient également être contestées, ce qui nécessiterait à nouveau de saisir la CIJ.
72. toutes les questions
relatives aux normes et de convoquer de nouveau le Groupe de travail tripartite sur les
méthodes de travail de la Commi
établir les listes de cas et de garantir un équilibre entre les régions et les conventions. Le
GASPAC encoura
même cas soit traité par plusieurs mécanismes. Le GASPAC recommande de sélectionner
un plus grand n
pourvoir les sièges vacants de la CEACR, afin de garantir un équilibre entre les régions et
entre les pays développés et en développement.
73. , un représentant du gouvernement du Kenya
offertes par des discussions tripartites sur les diverses questions en jeu, soit au sein du
3 Document GB.320/PV, paragr. 597, alinéa d).
GB.322/PV
24 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
expressément convoquée à cette fin.
74. Afin de régler le différend actuel et de créer la sécurité juridique nécessaire pour que le
système de contrôle puisse à nouveau fonctionner, il conviendrait de répondre à deux
questions: celle de savoir si la convention no 87 doit être interprétée comme prévoyant ou
protégeant le droit de grève et celle de savoir si le mandat de la CEACR confère à cette
s interprétations
pour aller aude
ces principes.
75. Les circonstances actuelles ne son
la saisine de la CIJ devrait être le recours ultime, lorsque toutes les possibilités de dialogue
soutien d) du projet de décision, qui envisage la relance des consultations
tripartites visant à résoudre les questions qui se posent encore au sujet du fonctionnement
du système de contrôle. Un document du Bureau sur la réforme du système de contrôle et
le fonction
e session (mars 2015)
e
pr c) du projet de décision après en avoir communiqué le
texte aux partenaires sociaux.
76.
obstacle à de nouveaux progrès concernant le m
prévu de discuter plus avant en mars 2015. Il serait judicieux de convoquer à nouveau le
des normes, qui devrait se réunir
fonctionnement de la CEACR.
77. ant au nom du groupe des pays industrialisés à économie de marché (PIEM), une
contrôle, garant de la pertinence des normes internationales du travail dans le monde
constructive
et équilibrée.
78. Le groupe des PIEM a toujours soutenu que le retour au consensus passait par la
tude actuel, il semble judicieux
de demander à la CIJ un avis juridique faisant autorité, afin de jeter les bases de nouvelles
te pour parvenir à un consensus sur la
question précise qui sera posée à la Cour. A cette fin, le groupe des PIEM propose la
CIJ un échec du tripartisme, mais au contraire une partie de la solution, entièrement fondée
sur le tripartisme et le consensus.
79. 37.2 de la
Constitution, et le groupe des PIEM souhaite que le Bureau, ou un groupe de travail
tripartite, poursuive la réflexion afin que la question puisse être soumise au Conseil
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 25
concernant la sélection et la nomination des juges ainsi que la constitution des panels, et
80.
Commissio
mécanisme devraient reprendre dès que possible, de même que les consultations tripartites,
afin de régler les questions en suspens concernant le fonctionnement du système de
contrôle.
81. (UE) et de ses Etats membres, une
déclarations du groupe gouvernemental et du groupe des PIEM. Etant donné que le
, celle-ci attache beaucoup
nce au contrôle impartial du respect des normes internationales du travail
82.
fournir des orientations faisant autorité pour éclairer et orienter de nouvelles discussions
tripartites, peut-être même au niveau de la Conférence internationale du Travail. Les
questions posées à la CIJ devraient exclusivement porter sur le principal point en
discussion: la protection du droit de grève par la convention no 87, et la question de savoir
si la CEACR est compétente pour déterminer que le droit de grève découle de la
convention no 87. Il conviendrait donc de supprimer le paragraphe 1.2.b) du projet de
nnexe I du document, qui pose la question de savoir si la CEACR
conditions dans lesquelles il peut être exercé de façon licite. Si les mandants ont besoin de
davantage de temps pour élaborer un texte consensuel, un comité de rédaction ad hoc
consultatif de la CIJ.
83.
propose une refonte de la partie B de la section I du document, qui serait confiée au Bureau
nomination des juges ainsi que la constitution des panels, et disposer de plus amples
renseignements concernant les coûts.
84.
e session du C
appuie la relance du Groupe de travail sur les méthodes de travail de la Commission de
mécanisme de transition ser on durable soit trouvée.
CEACR.
85. Un représentant du gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela est
o 87, pour ce qui est du
droit de grève, puisque la Cour est la seule institution ayant compétence pour interpréter
GB.322/PV
26 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
pas des
du
Venezuela est toujours ouvert au dialogue mais, compte tenu des vues divergentes
exprimées par les employeurs et les travailleurs, il lui semble permis de douter que la
discussion tripartite sur le droit de grève mentionnée au paragraphe 6 du document préparé
par le Bureau puisse produire des résultats positifs; une telle discussion pourrait se révéler
une perte de temps.
86.
normes et espère bientôt recevoir le calendrier qui
diverses composantes du système de contrôle, le
gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela espère recevoir le calendrier
mentionné au paragraphe I en attendant la
présentation des amendements y a b) du projet de
87. Une représentante du gouvernement de la République dominicaine rappelle que deux
la CEACR est compétente pour interpréter les conventions et recommandations. Par
conséquent, cette question doit être portée de toute urgence devant la CIJ en vertu de
37.1 de la Constitution. La liste des pays qui sont priés de fournir des informations
mandants de faire en sorte
88. dit que les mandants devraient se poser la
question de savoir si la CEACR est compétente pour interpréter les conventions en gardant
89. Un représentant du gouvernement de la France
normes internationales du travail est un élément essentiel pour garantir une vraie
établir et à faire respecter ces normes partout dans le monde. Cette crédibilité a été mise en
la responsabilité de tous les mandants de démontrer que le tripartisme est utile et efficace.
Le premier pas serait une décision largement consensuelle pour ouvrir le processus de
décisions qui prendrait en compte les différents aspects du mécanisme de contrôle.
90. La France est favorable
de la convention no
question ou d
37.2 de la
faire des propositions relatives au fonctionnement, à la composition et aux modalités de
e
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 27
matif efficace et
normes.
91. Une représentante du gouvernement du Brésil dit que les opinions de la CEACR ne sont
nationales. Le gouvernement du Brésil ne pense pas que la fonction interprétative de la
té soulevée concernant
o 87 et le fait que cet instrument reconnaît le droit de
grève, il convient de renvoyer cette question à la CIJ pour avis consultatif, avis qui
appellera un nouveau dialogue et de nouvelles décisions. Cependant, la Cour ne devrait pas
être consultée sur la compétence de la CEACR. La question posée au paragraphe 1.2 du
I ne doit donc pas être retenue. Il est prématuré de
interne. Le nombre limité de divergences
d
un tel tribunal, lequel pourrait nuire au dialogue et au tripartisme et encourager le recours à
b) du
projet de décision figurant au paragraphe 125 du document.
92. Un représentant du gouvernement de la Chine indique que son gouvernement est favorable
37 de la
dialogue. Cependant, si le recours à
prochainement, car il aurait un rôle décisif à jouer pour garantir que les normes
internationales du travail sont toujours à jour et répondent aux besoins des mandants.
instamment au Directeur général de pourvoir les postes vacants au sein de la CEACR.
93.
perdre le rôle u
fassent entendre leur voix. Le consensus est certes un grand atout, mais il faut trouver
favorable à la saisine de la CIJ, qui ne signifierait pas une faillite du tripartisme, mais
propose de reformuler de manière plus concise les questions soumises à la CIJ et préconise
plus large pour conférer un caractère obligatoire à un avis consultatif de la Cour. Il lui
faudra en outre créer, également sur la base du consensus, un mécanisme de transition afin
Le groupe des employeurs a proposé
aire puisque les pays
rantissent déjà ce droit à leurs citoyens. Si un consensus se
dégageait entre les trois parties sur le principe selon lequel le droit de grève est inscrit dans
la convention no
qu
GB.322/PV
28 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
groupe de travail sur les questions en discussion serait un pas dans la bonne direction. Une
décision de principe doit être prise sans plus tarder.
94. Un représentant du gouvernement des Emirats arabes unis déclare que le règlement des
différe
Le recours à des mécanismes externes risque de compromettre
n en tant
formuler des recommandations pour parvenir au consensus.
95. Un représentant du gouvernement du Panama
pays au projet de décision figurant au paragraphe b).
96. Un représentant du gouvernement du Royaume-Uni tirer profit de la
situation actuelle pour promouvoir la relance du
des normes devrait être pleinement opérationnelle en 2015, soutenue par des
été préférable que les partenaires sociaux trouvent une solution sur la base du dialogue. Il
faut parvenir à un accord tripartite sur les questions à poser à la Cour et mettre en place un
97. Un représentant du gouvernement du Zimbabwe déclare que, depuis que le conflit a vu le
jour en 2012, le Bureau a engagé des consultations informelles avec les employeurs et les
la C
à tous et de donner une soit résoudre le problème en
teur propose
Conférence et demande au Bureau de rédiger un document donnant des orientations en ce
sens e
98. fait part du soutien de sa délégation au
point a) du projet de décision concernant la demande adressée à la CIJ, mais déclare que la
deuxième question figurant au paragraphe
appropriée puisque la nature non contraignante des observations de la CEACR a déjà été
clarifiée. Il est encore trop tôt pour envisager de désigner un tribunal comme prévu dans le
point b) du projet de décision.
99. Un représentant du gouvernement du Japon
la question de manière défi
devra poursuivre les consultations sur la suite à donner en interne. Une telle consultation
ne pourra aboutir que lorsque la confiance sera revenue entre employeurs et travailleurs.
Deuxièmem
, car cela reviendrait à déclarer
problèm
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 29
à
faire avancer les discussions dans un contexte tripartite, le gouvernement du Japon propose
o 87 à la
session de 2015 de la Conférence. Il y a certes de nombreuses questions à résoudre, mais il
vaudrait mieux se limiter à rétablir une bonne atmosphère et à rouvrir des consultations
constructives. Sa délégation appuie les points c) et d) du projet de décision, mais pas les
points a) et b).
100. Un représentant du gouvernement du Mexique déclare que, même si son gouvernement
permettant de trouver une solution. Le Mexique appuie donc le projet de porter la question
du droit de grève et de la compétence de la CEACR devant la CIJ.
101. Un représentant du gouvernement de la R rappelle que le
e
être envisagée comme une seule et même démar
normes. Il appelle le Bureau à travailler à la mise en place du mécanisme de contrôle de
2015) et à travailler assidûment à la conception du mécanisme. Les mandants devraient
grève ont déjà échoué. Il faudrait donner une véritable chance au tripartisme, sur la base
e nouvelle convocation du Groupe de travail
tripartite sur les méthodes de travail de la commission.
102. , une représentante du gouvernement du Canada
déclare, au sujet de la question du droit de grève, que son groupe est prêt à discuter, à la
37.1 de la
103. Un représentant du gouvernement de la Turquie
tion devrait étudier tous les moyens de parvenir à une solution
portés d
c
échéances et promouvoir la compréhension mutuelle sur les questions en suspens. Les
p
104. Une représentante du gouvernement de la Bulgarie déclare que son gouvernement est
convaincu que le fait de consulter la CIJ ne portera pas atteinte au dialogue tripartite, mais
mécanismes
GB.322/PV
30 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
105. Une représentante du gouvernement de la République de Corée déclare que, concernant
o 87 pour ce qui est du droit de grève, il faudrait
ère acceptable. Son
gouvernement ne juge pas utile de porter la question du mandat de la CEACR devant la
CIJ ou un tribunal interne. Ce dernier serait établi par une décision de la Conférence et son
autorité sur la CEACR pourrait être mise en doute. De fai
présenté à la Conférence en juin 2014, la CEACR a clairement fait savoir que son mandat
lois nationales, de même que la signification des articles pertinents des conventions. En
conséquence, le gouvernement de la République de Corée appuie les points c) et d) du
projet de décision, et demande au Bureau de fournir un calendrier pour convoquer à
nouveau le Groupe de travail tripartite sur les méthodes de travail de la Commission de
106. réitère la demande de son gouvernement, qui
avait sollicité une analyse approfondie du système actuel et des raisons de son échec. Il
souhaite aussi connaître la proportion de cas dans lesquels entre en jeu la question relative
au droit de grève en tant que partie intégrante de la convention no 87, ainsi que le nombre
u de désaccords sur
être prises par les mandants de
tribunal interne et la saisine de la CIJ ne feraient que multiplier les intervenants, sans
clarifier la situation. Le mo
continuent établir la liste des cas et que des critères soient clairement définis pour assurer
un équilibre entre les régions et entre les catégories de convention. Les autres organismes
internationaux devraient continuer de at,
lesquelles ne devraient pas avoir trait aux normes fondamentales du travail. Il importe
t
grâce au pourvoi des postes vacants.
107. )
et des Pays-Bas, un représentant du gouvernement de la Norvège apporte son soutien à la
et de continuer de
les mandants. Certes, en cas de divergence
d convention, mais
contexte plus large
ajustements techniques. Le projet de décision propose une solution constructive et
du projet de décision soumis à la présente session. Il est indispensable de prendre une
a) du projet de décision, au paragraphe 125, dans lequel il est
I. En ce qui
b) du projet de décision, au paragraphe
c) du projet de décision concernant les mesures à prendre en parallèle en ce qui
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 31
d) du projet de décision, dans lequel le Bureau
propose de relancer des consultations tripartites sur certaines questions restées en suspens.
Le projet de décision présente un ensemble équilibré de mesures, dans lequel la question
de savoir si le droit de grève est protégé par la convention no : une
question juridique appelle une réponse juridique. La saisine de la CIJ ne constitue pas un
échec du dialogue social, puisque cette procédure est prévue par la Constitution de
108. déclare que son gouvernement souscrit
pleinement à la relance des consultations tripartites. Les pro
devrait éviter de créer un précédent en soumettant à la CIJ la question de la protection du
droit de grève par la convention no 87. La création d
lourde charge financière et fragiliserait les mécanismes existants. Le gouvernement de
ment socio-économique et être applicables aux
109. 37 de la
d) du projet de décision, au paragraphe 125,
concernant la relance des consultations tripartites.
110. Un représentant du gouvernement de la Belgique
o 87 au cours de la
présente session et demander un avis consultatif à la CIJ. En outre, à sa prochaine session,
pplication des normes devrait adopter par consensus une liste de cas
et des conclusions.
111. Une représentante du gouvernement de la Colombie déclare que son gouvernement
gou
constitue un élément essentiel du tripartisme.
112. Une représentante du gouvernement du Botswana estime que la question de
o
anisation, il appelle une solution politique et
-il une approche qui ferait du
l pour régler les différends.
113. déclare que, compte tenu de la complexité
de la question, seul un consensus tripartite sur un ensemble de mesures concrètes, globales
ment défini, permettra de trouver une
système de contrôle de manière pérenne.
114. Une représentante du gouvernement du Lesotho
au
GB.322/PV
32 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
r le problème par
des moyens externes. Par conséquent, le gouvernement du Lesotho appuie pleinement la
proposition concernant la poursuite des consultations en vue de parvenir à un consensus et
à une compréhension mutuelle.
115. Un représentant du gouvernement de la Pologne
performant, lui permettant de contribuer véritablement à la promotion et à la mise en
sels. Il faut donc, dès que possible, trouver une
solution pratique dans le cadre du «trialogue» et du consensus, au lieu de recourir à la CIJ.
de la Pologne est prêt à se rallier à cette décision, par esprit de consensus.
116. Un représentant du gouvernement de la Jordanie
gouvernements pourrait contribuer à apaiser les tensions. Tout avis rendu par la CIJ devrait
difficultés. Le
117.
le consensus. Il suggère que les différentes possibilités énoncées dans le document soient
118. Une représentante du gouvernement de la Suisse rappelle que le Directeur général a
n à long terme, fondée sur le dialogue et la
confiance. Il est primordial de trouver une solution immédiate, mais aussi de résoudre
certaines difficultés sousce
qui est en son pouvoir p
119. Le coordonnateur du groupe des employeurs se veut optimiste et réaffirme la
que ce soit. Le groupe des employeurs est disposé à participer à toute activité qui
permettrait de faire évoluer la situation.
120. Le Vice-président travailleur constate que toutes les parties ont reconnu la difficulté de la
différend. Seul
un avis consultatif de la CIJ pourrait permettre de reprendre, de bonne foi, des discussions
tripartites sur le système de contrôle dans un climat de plus grande sécurité juridique. Le
groupe des travailleurs exprime sa reconnaissance aux membres du Conseil
majorité des mandants. Bien que la question ait été
bipartites et tripartites depuis 2012 et que tous les mandants aient eu la possibilité de faire
onvient de suivre en cas de divergence de vues sur
; la saisine de la CIJ fait partie intégrante du système de
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 33
Conférence internationale du Travail, qui a une fonction normative et non judiciaire.
du
dernier recours
ussions, celuijuridiques
des Etats Membres qui ont ratifié la convention no 87 ne seront aucunement
modifié
donnera une interprétation définitive de la convention. La CEACR a déjà formulé des
Etats Membres dont la législation était jugée non conforme à
la convention no
et le contenu des observations formulées par la CEACR au sujet du droit de grève. Il ne
est déterminé
à trouver une issue. La Conférence internationale du Travail a donné au Conseil
sente session du Conseil
121. Le Directeur général la
participation de tous les mandants tripartites en vue de parvenir à un consensus sur des
questions difficiles. Il semble que toute
solution . Les mandants ont fait part de leur bonne volonté et de leur esprit de
compromis pour progresser en ce sens, sans toutefois parvenir à un consensus clair leur
permettant de prendre une décision. Au vu de la situation, il est cependant indispensable
fond. Le Directeur général propose que le Bureau étudie attentivement les déclarations des
mandants et, sur la base de celles-ci, élabore un document contenant une série de
le 10 novembre 2014, dans la
matinée. Les propositions remplaceront le projet de décision figurant au paragraphe 125.
Tout ser
122. , un représentant du gouvernement de Cuba souligne que
le document qui sera présenté par le Directeur général doit être impartial et objectif, et tenir
compte des questions soulevées pendant la discussion.
123.
124. Le Directeur général présente une version révisée du projet de décision figurant au
paragraphe 125 du document GB.322/INS/5 et fait observer que le nouveau texte,
mais a été élaboré sous sa seule responsabilité. Il
une décision sans délai et que seul un ensemble de décisions permettra de faire avancer la
document équilibré et complet, qui tente de bâtir à la
fois un compromis entre des points de vue divergents et un ensemble de décisions cohérent
présentant une logique interne. Les six éléments sont interdépendants; ils se complètent en
évitant les chevau
éléments considérés en bloc doit donc être prise, au cours de la présente session si possible.
125. Un représentant du Directeur général (Directeur général adjoint pour la gestion et la
réforme) présente le document GB.322/INS/5(Add.1) sur les incidences financières du
projet de décision révisé figurant dans le document GB.322/INS/5(Add.) et déclare que la
complexité du tableau tient au nombre de variables qui entrent en ligne de compte dans
prévue au point 2 du projet de
GB.322/PV
34 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
décision révisé. Parmi celles-ci, on peut citer le nombre de participants, les services
de mesures
proposées par le Directeur général est estimé à 1 148 300 dollars des Etats-Unis. Les frais
liés à la avis consultatif à la CIJ sur la question énoncée au point 1 seraient pris
en charge par le Bureau. Des frais de voyage supplémentaires compris entre 5 000 et
7 000 dollars E.-U. pourraient toutefois y ajouter. Le projet de décision révisé expose
des mesures sera assumé.
126. Le Coordonnateur du groupe des employeurs déclare que son groupe souscrit au point 2 du
projet de décision préciser la mesure
dans laquelle par la CEACR a eu une influence sur la
pratique au niveau national et quelle serait par conséquent la meilleure manière de
présenter à la CIJ la question énoncée au point 1,
recours de la saisir. La réunion devrait avoir lieu
avant la session de mars 2015 sur cette décision.
, tel que
défini par la CEACR au niveau international, aurait une incidence sur le pouvoir des Etats
Membres de légiférer sur cette question au niveau national. Le groupe des employeurs
approuve le point 3 et propose que le Bureau précise que le
normes devrait être mis en place afin de ménager suffisamment de temps
pour les travaux préparatoires qui suivront nécessairement la soumission des propositions
Le groupe des employeurs appuie également le point 4 concernant le Groupe de travail sur
où le groupe de travail serait convoqué à nouveau, lui
donner des orientations précises à sa présente
session et à titre de disposition spéciale
des cas devant être examinés par la Commission de s de la
Conférence à la session de 2015 de la Conférence internationale du Travail. Le groupe des
employeurs appuie le point 5. Les porte-parole employeur et travailleur de la Commission
du Comité de la liberté syndicale
pourraient aussi participer à la préparation du rapport mentionné dans ce point. Ce rapport
Le groupe
des employeurs appuie aussi le point 6, mais estime que toute
explorées en ce
qui concerne la question figurant au point ou une
majorité au sein Si un
consensus devait toutefois se dégager, la décision de demander, en dernier recours, un avis
consultatif à . Ainsi, la question figurant
au point 1 du projet de décision ne fait pas ressortir le problème essentiel
de la question du droit de grève; elle devrait être reformulée si
la convention no 87 impose des règles contraignantes en ce qui concerne la portée du droit
de grève, ses limites et les conditions de son exercice légitime que les Etats Membres sont
tenus de faire appliquer en droit et en pratique. Le groupe des employeurs souhaite savoir
par ailleurs comment les partenaires sociaux et les Etats Membres participeraient à la
procédure conduite par la Cour, comme indiqué au paragraphe 2 b) du projet de résolution
annexé au projet de décision révisé, leur participation. Les
employeurs souhaiteraient pouvoir discuter notamment du quatrième paragraphe du
préambule et des paragraphes 2 b) et 2 d) du dispositif du projet de résolution. En outre, le
grève par les organes rendu. Le
Bureau devrait commencer les travaux nécessaires pour permettre au Conseil
nécessité de porter ou non la question devant la CIJ.
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 35
127. Le Vice-président travailleur déclare que les mandants tripartites devraient être disposés à
trouver un compromis sur le train de mesures proposées dans le projet de décision révisé
travailleurs souscrit au point 1 qui prévoit de
tout ensemble de mesures sur la question. Les travailleurs ne voient pas en revanche la
proposé au point
travailleurs est
toutefois prêt à accepter le point 2 dans un souci de consensus. En ce qui concerne le
point
défaut. La protection des travailleurs est, et doi
des normes. Toutefois, le groupe des travailleurs est prêt à accepter le point 3, à la
4, mais rappelle que
seule la Conférence internationale du Travail peut prendre une décision sur la liste des cas.
5, le groupe des travailleurs ne juge pas nécessaire de revoir les
nt. Il souscrira néanmoins au point 5, dans un esprit de compromis.
Il souscrit aussi au point
Dans un esprit de dialogue et de compromis tripartites, le groupe des travailleurs est
disposé à
apparaissent dans le projet de décision révisé.
128. , un représentant du gouvernement de Cuba déclare que
son groupe souscrit à la mesure proposée au point 1 du projet de décision révisé. La
2 devrait être convoquée
en avril 2015 au plus tard. Des discussions de vaste portée devraient être engagées sur tous
4, qui prévoit de convoquer à nouveau le Groupe de travail
sur les méthodes de travail de la Commission
afin que les dispositions voulues soient prises pour assurer le bon déroulement des travaux
de la commission à la 104e session de la Conférence (juin 2015). La liste des cas devrait
être établie et les conclusi
et transparente. Le rapport mentionné au point 5 devrait être préparé en consultation avec
les mandants tripartites et les conclusions devraient être soumises au Conseil
pour évaluation et approbation. Le GRULAC appuie le point 6 et
convient que la question devrait être examinée à une date ultérieure. Le GRULAC souscrit
129. , un représentant du gouvernement de la Chine déclare
long terme aux problèmes liés au droit de grève.
130. , un représentant du gouvernement du
Kenya rappelle que son groupe considère le dialogue tripartite comme le meilleur moyen
dernier recours. Au vu du projet de décision révisé, il constate toutefois que la préférence
que le
est prématuré de saisir la CIJ et soulève un certain nombre de questions: combien de temps
la procédure dureraiteffets
de cette situation sur le fonctionnement des autres commissions? Dans quelle mesure
les parties souhaiteraient-elles continuer de dialoguer? Cette solution serait-elle un facteur
GB.322/PV
36 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
1 ne
reflète pas la position du group
faudrait déplacer le point
convoquée au
en place dans des délais précis; le Groupe de travail sur les méthodes de travail de la
nouveau avec effet immédiat; le rapport mentionné au point 5 devrait être établi et le
mesures proposées seront disponibles et que leur mobilisation ne se fera pas au détriment
des autres domaines prioritaires.
131. , une représentante du gouvernement du Canada
manière constructive et
dans un esprit de compromis. Elle invite les autres groupes à faire de même afin de
parvenir à un consensus tripartite sur le projet de décision révisé.
132. , une représentante du gouvernement
les conséquences juridiques du libellé de la question à soumettre à la CIJ et, en particulier,
es spéciales de la
133. Un représentant du gouvernement des Etats-Unis, tout en se déclarant préoccupé par les
conséquences que pourrait avoir un différend qui se prolonge, dit ne pas pouvoir appuyer
le point 1 du projet de décision révisé. Le gouvernement des Etats-Unis ne fera pas
obstacle au consensus, mais juge préoccupant de demander un avis consultatif à la CIJ et
de créer ainsi un précédent.
134. Un représentant du gouvernement de la France fait remarquer que le projet de décision
no 87
ainsi que sur la
gouvernement de la France soutient le projet de
décision révisé et se tient prêt à participer activement aux différents groupes de travail et
aux consultations qui seront lancées.
135. Un représentant du gouvernement du Japon exhorte les participants à tenter une dernière
fois de trouver une solution au moyen de la consultation tripartite. Il réitère sa proposition
e session (2015) de la Conférence
internationale du Travail par laquelle celletripartite,
si oui ou non la convention no 87 inclut le droit de grève. Les employeurs comme
les travailleurs
parviendra à un consensus durant la présente session.
136. Une représentante du gouvernement de la Fédération de Russie appuie les points 2 à 6 du
solution de compromis qui soit acceptable pour tous.
Non seulement il serait prématuré de saisir la CIJ, mais cela pourrait aussi compliquer la
par le Directeur général. Il faudrait donc déplacer le point 1 à la fin de la série des mesures
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 37
Conseil
137. Un représentant du gouvernement du Royaume-Uni
proposées, en précisant toutefois que toute question adressée à la CIJ devra être formulée
en des termes qui permetten
convention no 87 porte sur le droit de grève.
138. Un représentant du gouvernement de la République de Corée réitère le point de vue selon
lequel des consultations tripartites devraient avoir lieu dans des délais déterminés avant
avec la convention no
rende son avis consultatif. Des consultations tripartites ou un avis consultatif apporteraient
une nouvelle dimension aux travaux de la réunion
propositions.
139. Le ministre du Travail et du Perfectionnement de la main- du Panama exprime son
soutien au projet de décision révisé.
140. Un représentant du gouvernement souscrit au projet de décision révisé, en
particulier au point 1. Le fait de demander un avis consultatif à la CIJ constitue un bon
représente pas un échec du tripartisme.
141. Un représentant du gouvernement du Zimbabwe déclare que la proposition antérieure du
gr
gouvernements
nce
véritablement accordée aux points de vue des gouvernements sur ces questions
essentielles. Il faut donner une nouvelle chance au dialogue interne.
142. Un représentant du gouvernement du Mexique
proposées tient compte avec cohérence des différentes positions et de leur
et les mandants devraient
les p
143. Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède)
et des Pays-Bas, un représentant du gouvernement de la Norvège déclare souscrire à la
exceptionnel la CIJ est
retour à un dialogue social constructif.
144. La ministre du Travail de la République dominicaine appuie le projet de décision révisé et
se déclare prête à participer activement à toute activité aboutissant à des résultats
consensuels.
GB.322/PV
38 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
145. Une représentante du gouvernement affirme que la consultation tripartite à la
Conférence internationale du Travail constitue le meilleur moyen de régler la question.
dispositions de la convention no 87, que le Bureau pourrait préparer pour la réunion
elle analyse permettrait de mieux comprendre les raisons de
gouvernement
146. Un représentant du gouvernement de la Turquie 1, que les
gouvernement de la Turquie continue de chercher une voie plus constructive. Il appuie en
revanche le reste des prop
décision révisé est quelque peu complexe, et le Directeur général devrait proposer un
147. Un représentant du gouvernement de la Thaïlande
148. Un représentant du gouvernement de la Belgique souscrit au projet de décision révisé.
149. Une représentante du gouvernement exprime une vive préférence pour le
t
durablement dans une impasse. Le gouvernement
ter toute
que proposés dans le projet de décision révisé.
150. Le Directeur général
serait domma Conseil
ont estimé que le projet de décision révisé était équitable, objectif et constituait une
tentative équilibr
co
pour
point 1, la saisine de la CIJ, et la relation entre ce point et le point 2, le dialogue tripartite.
Il faut réexaminer ces deux composantes pour concilier les différents points de vue
ève, sous des angles différents mais
proposé par certains au cours des débats. Les points 3 à 6 ont suscité un large consensus
devrait être vu comme un tout. Le Bureau
soumettra un nouveau projet de décision révisé pour examen et décision.
151. Le Président indique que le Bureau a apporté de nouvelles modifications au projet
de décision sur la question 5, de manière à tenir compte des points de vue exprimés au
cours des discussions les plus récentes sur ce sujet. Le nouveau projet de décision
révisé figure dans le document GB.322/INS/5(Add.2). Les coûts estimatifs des
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 39
mesures proposées dans ce nouveau projet de décision ont également été revus et sont
présentés dans le document GB.322/INS/5(Add.3).
152. Le Vice-président travailleur déclare que l ensemble de mesures proposé précédemment
contenait de nombreux éléments que le groupe des travailleurs n avait pas demandés, mais
qu pté le projet dans son intégralité, par esprit de compromis.
Malheureusement, le nouvel ensemble de mesures ne prévoit plus la possibilité de
demander à la CIJ de rendre d urgence un avis consultatif sur la question de savoir si le
droit de grève est protégé par la convention no 87. Le groupe des travailleurs ne s est pas
opposé à la tenue de la réunion tripartite d experts qui a été proposée précédemment en vue
d examiner et d analyser les législations et les pratiques nationales en matière de droit de
grève. Néanmoins, les travaux d une réunion tripartite sur la question de la protection du
droit de grève par la convention no 87 et sur les limites de ce droit ne peuvent pas se
substituer au jugement de la CEACR. Suivre cette voie reviendrait à soutenir la théorie
erronée des employeurs, selon laquelle seuls les mandants tripartites, et non la CEACR ou,
en dernier recours, la CIJ, sont habilités à interpréter les conventions de l OIT.
L interprétation de la convention no 87 ne devrait donc pas être examinée dans le cadre
d une réunion de ce type. Selon la Constitution de l OIT, toute divergence d interprétation
d une convention devrait faire l objet d une demande d avis consultatif adressée à la CIJ.
153. Au point 2, il n est pas proposé de saisir la CIJ, mais simplement d inscrire, pour décision,
la question de cette saisine à l ordre du jour de la 323e session du Conseil d administration.
Or, il est peu probable que les divergences de vues observées jusqu ici évoluent au cours
de la session de mars 2015, s il n est pas décidé de soumettre la question à la CIJ pour avis
consultatif, le bon déroulement des travaux de la Commission de l application des normes
à la session de 2015 pourrait être compromis. En ce qui concerne le point 3, le manque de
confiance entre les différents groupes empêche la mise en place du mécanisme d examen
des normes, qui ne peut fonctionner correctement que si les divergences d interprétation
sont résolues selon le droit applicable, et non selon les points de vue des mandants. Les
travailleurs craignent que ce mécanisme ne soit utilisé pour affaiblir la protection dont
bénéficient actuellement les travailleurs en vertu des normes internationales du travail.
154. Le rapport sur les différentes procédures de contrôle, mentionné au point 5, peut fournir
des indications utiles sur le fonctionnement du système de contrôle et sur les améliorations
qui pourraient lui être apportées. Cependant, si les mandants tripartites n acceptent pas de
se plier aux principes du droit et continuent d entraver le bon fonctionnement du système
de contrôle, la pertinence de ce rapport sera limitée. Le système de contrôle ne peut jouer
son rôle que si les mandants ont toute confiance dans les avis de la CEACR et les
acceptent. Or, me plus à ces avis. Si aucun
accord n est conclu à l issue de la réunion tripartite sur la question de la protection du droit
de grève par la convention no 87, la question devrait être immédiatement soumise à la CIJ.
Les points 3 et 5 devraient être retirés du nouveau projet de décision révisé et faire l objet
d un nouvel examen par le Conseil d administration à sa session de mars 2015.
155. Le coordonnateur du groupe des employeurs déclare que le nouveau projet de décision
révisé n est pas à la hauteur des attentes du groupe des employeurs, mais constitue un pas
dans la bonne direction. Le groupe convient de la nécessité d avancer et s en tient aux
arguments et aux propositions qu il a précédemment formulés. Si la situation n évolue pas,
il sera difficile pour les mandants tripartites et les partenaires de l OIT de continuer de
croire à la mission et aux objectifs de l Organisation. Le groupe des employeurs pourrait
appuyer le nouveau projet de décision révisé.
156. E et de ses Etats membres, une représentante du gouvernement
de l Italie déclare que l UE avait jugé le précédent ensemble de mesures globalement
cohérent et y avait souscrit. L ajout ou le retrait d éléments pourrait nuire à l équilibre de
GB.322/PV
40 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
l ensemble et le nouvel ordre dans lequel ils sont proposés en modifie la nature. Elle est
cependant prête à accepter la proposition en tant que base de discussion. En ce qui
concerne le point 1, elle est résolument convaincue que seule la question de l interprétation
de la convention no 87, pour ce qui est du droit de grève, devrait être examinée à l occasion
de la réunion tripartite. Les deux questions proposées ne peuvent être étudiées au cours
d une réunion de trois jours, et peuvent nécessiter chacune des compétences différentes. Il
conviendrait de donner la possibilité aux Etats observateurs d assister à la réunion et de
prendre part aux discussions, et de permettre aux gouvernements de s exprimer en tant que
groupes. L intervenante demande que, à la fin du point 1, soit ajoutée une phrase indiquant
que, en l absence de consensus sur la question à l issue de la réunion tripartite, les
conditions d application de l 37.1 de la Constitution de l OIT seront réunies. Elle
suggère également que le passage au point 2 «la question d une demande à la Cour
internationale de Justice» soit remplacé par «la question de la saisine immédiate de la Cour
internationale de Justice». Le Conseil d administration doit prendre une décision sur le
sujet sans délai.
157. e estime que le nouveau projet de décision
révisé est équilibré et qu il reflète avec exactitude les discussions les plus récentes sur le
sujet. Le gouvernement de l Allemagne considère la réunion tripartite qui se tiendra en
février 2015 comme la dernière possibilité d aboutir à une solution. S il n est pas possible
de parvenir à un accord à cette occasion, l article 37.1 de la Constitution de l OIT devrait
être immédiatement appliqué.
158. Un représentant du gouvernement du Royaume-Uni dit que le Conseil d administration
doit prendre une décision aujourd hui même. Il encourage tous les mandants tripartites à
participer à la discussion en vue de parvenir à un consensus sur le sujet et, éventuellement,
d éviter de devoir demander un avis consultatif à la CIJ. La réunion tripartite proposée sera
la dernière possibilité de le faire. Si un consensus ne se dégage pas, la question devra être
soumise à la CIJ.
159. Un représentant du gouvernement de la Fédération de Russie observe que le nouveau
projet de décision révisé reflète avec exactitude les discussions les plus récentes sur le
sujet. Il reste toutefois convaincu que la saisine immédiate de la CIJ, si aucun accord n est
conclu à l issue de la réunion tripartite de février, serait prématurée et pourrait avoir une
incidence négative sur les futures discussions relatives à cette question. Il souscrit au
nouveau projet de décision révisé.
160. )
et des Pays-Bas, un représentant du gouvernement de la Norvège déclare qu il souscrit à la
déclaration prononcée au nom de l UE. Le nouveau projet de décision révisé ne reflète pas
avec exactitude les discussions les plus récentes sur la question et ne propose pas un juste
compromis. Si aucun accord n est conclu sur la question de la protection du droit de grève
par la convention no 87, rien ne garantit que la nouvelle proposition permette de déclencher
les mécanismes appropriés; la dernière séance de la Commission de l application des
normes a démontré que les mandants tripartites ne parvenaient pas à s entendre sur cette
question. L intervenant ne s oppose pas à la tenue d une réunion tripartite, mais doute qu il
s agisse du cadre approprié pour examiner des questions relatives à l interprétation d une
convention de l OIT. Un examen de ce type devrait être effectué par la Commission de
l application des normes, l organe de contrôle compétent de l OIT pour traiter des
questions de cette nature, ou au moyen de l application des dispositions de la Constitution
de l OIT. L intervenant demande davantage de précisions sur la réunion tripartite proposée
au point 1 et sur le lien entre les points 1 et 2. L éventuelle absence de consensus à l issue
de la réunion tripartite sur l interprétation de la convention no 87 ne devrait pas avoir
d effet sur la décision de soumettre la question à la CIJ. En outre, il est difficile de
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 41
comprendre en quoi une réunion sur les pratiques et les expériences nationales en matière
de droit de grève peut éclairer une prise de décision sur le sujet.
161. Un représentant du gouvernement du Japon déclare que le nouveau projet de décision
révisé constitue une bonne base en vue d un compromis. La réunion tripartite proposée
sera la dernière occasion de parvenir à un consensus avant de demander un avis consultatif
à la CIJ. L intervenant souscrit au nouveau projet de décision révisé.
162. Un représentant du gouvernement de la France soutient le nouveau projet de décision
révisé ainsi que les modifications présentées par l UE, et encourage le Conseil
d administration à prendre une décision sur le sujet aujourd hui même.
163. Une représentante du gouvernement de la Belgique déclare ne pas comprendre, elle non
plus, en quoi une réunion sur les modalités et les pratiques de l action de grève peut
influencer la décision de soumettre la question relative au droit de grève à la CIJ.
164. , un représentant du gouvernement de Cuba estime que
les points 3 à 6 du nouveau projet de décision révisé sont importants et devraient être
conservés. Le groupe formulera des observations sur les points 1 et 2 à un stade ultérieur
de la discussion.
165. Un représentant du gouvernement du Panama indique que son pays considère toujours que
la question devrait être soumise à la CIJ. Pour faire avancer la discussion, le gouvernement
du Panama pourrait souscrire au projet de décision révisé, à condition que la question du
droit de grève soit soumise sans délai à la CIJ si aucun accord n est trouvé à l issue de la
réunion tripartite proposée au point 1. Le point 2 du nouveau projet de décision devrait
donc être modifié en conséquence.
166. estime que la réunion tripartite,
proposée au point 1 du nouveau projet de décision révisé, devrait porter uniquement sur la
question de l interprétation de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève, et non
sur les modalités et les pratiques de l action de grève, et permettre de formuler une
proposition concrète qui puisse être examinée par le Conseil d administration à sa session
de mars 2015. En ce qui concerne le point 2, si un consensus tripartite ne peut se dégager,
le Conseil d administration devrait être autorisé à demander d urgence à la CIJ un avis
consultatif, au titre de l 37.1 de la Constitution de l OIT. L intervenante souscrit
pleinement aux points 3 à 6 du nouveau projet de décision révisé.
167. rique, un représentant du gouvernement du Kenya
observe que le nouveau projet de décision révisé reflète en grande partie les points de vue
exprimés par les mandants tripartites et donne la priorité au dialogue tripartite, qui reste
l atout majeur pour sortir de l impasse actuelle. Le groupe se félicite également de la
proposition d on puisse aboutir à une décision
du Conseil d administration à sa session de mars 2015. L intervenant appuie le nouveau
projet de décision révisé.
168. , un représentant du gouvernement de la Chine déclare
que le nouveau projet de décision révisé répond en grande partie aux préoccupations du
groupe et que celui-ci pourrait y souscrire, tout en se réservant la possibilité de proposer
certaines modifications le moment venu.
169. estime que le meilleur moyen de résoudre la
question serait de mener une consultation tripartite dans le cadre de la Conférence. Le
projet de décision révisé offre la possibilité de parvenir à une solution logique, fondée sur
un large consensus. Le gouvernement de l Inde est prêt à envisager plusieurs options, à la
GB.322/PV
42 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
lumière des résultats de la réunion tripartite proposée, y compris la saisine de la CIJ. Une
saisine automatique de la Cour compromettrait cependant les chances des consultations
tripartites d aboutir à un résultat positif.
170. Une représentante du gouvernement du Zimbabwe déclare que, même si certaines
préoccupations demeurent, elle est en mesure d accepter le projet de décision par esprit de
compromis, et salue la détermination constante de toutes les parties à parvenir à une
solution.
171. Le Directeur général constate qu il reste encore un certain chemin à parcourir avant de
parvenir à un consensus. Le Bureau mènera des consultations en vue de présenter au
Conseil d administration un projet de décision qui puisse convenir à tous.
172. , une représentante du gouvernement
de l Italie apporte des précisions concernant les modifications du nouveau projet de
décision révisé que l UE a proposées. Premièrement, en ce qui concerne le point 1, les
Etats observateurs devraient pouvoir assister à la réunion tripartite de trois jours et y
prendre la parole. En outre, les gouvernements devraient pouvoir s exprimer en tant que
groupes. Deuxièmement, le groupe de l UE pourrait accepter que le mot «interprétation»
soit retiré de la première question relative à la convention no 87 et au droit de grève.
Troisièmement, si l UE souhaite que la deuxième question, relative aux modalités et aux
pratiques de l action de grève, soit retirée, c est pour ne pas surcharger l ordre du jour de la
réunion et en raison des compétences différentes que peut nécessiter l examen de chacune
de ces deux questions. L intervenante prend note des réserves de certains groupes quant à
la formulation de la phrase ci-après, qu il est proposé d 1: «En l absence
d une réponse claire et consensuelle apportée à la question susmentionnée par la réunion
tripartite, les conditions pour l application de l article 37.1 de la Constitution de l
seront réunies.» Cette phrase vise à énoncer clairement une issue possible et non à
la réunion. Au vu de ces réserves, l intervenante propose l
phrase suivante: «A l inverse, si la réunion tripartite convient d une réponse consensuelle à
la question susmentionnée, le résultat sera soumis au Conseil d administration pour
adoption.» En ce qui concerne la modification que l UE propose au point 2, à savoir de
remplacer le passage «la question d la question d une saisine
immédiate de la Cour», l intervenante suggère de remplacer «immédiate» par «d »,
ou par toute autre formulation qui permettrait d éviter de laisser entendre que la CIJ serait
automatiquement saisie. Elle souscrit au point 4 du projet de décision révisé à la lumière
du débat tenu au sein du Conseil d novembre 2014, mais se réserve le
droit de revenir sur les points 3, 5 et 6 une fois la version finale de l ensemble de mesures
établie.
173. , un représentant du gouvernement de Cuba souligne que
la proposition doit être examinée en tant que solution d ensemble. Le GRULAC souscrit
aux modifications que l UE propose d 1 et 2. Par esprit de conciliation,
le groupe convient de reporter la révision des points 3 et 5 à une date ultérieure, à la
323e session du Conseil d administration par exemple. Les points 4 et 6 devraient
conserver leur forme originale.
174. , un représentant du gouvernement de la Chine
déclare que seules trois possibilités se présentent aux mandants: reporter l examen de la
question à la session de mars 2015; soumettre la question à un vote, ce qui serait la
pire option étant donné qu elle causerait un préjudice irréparable à la structure tripartite de
l Organisation; ou parvenir à un compromis sur la décision révisée. Le GASPAC
souscrit au document dans sa globalité. L intervenant propose d ajouter dans la
version anglaise le mot «including» après le mot «meeting» au point 2 du nouveau
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 43
projet de décision révisé. Il est favorable à la suppression de la deuxième puce du point 1,
portant sur les modalités et les pratiques de l action de grève.
175. , un représentant du gouvernement du Kenya
rappelle que le groupe soutient la proposition en tant que solution d ensemble. Des
consultations sont encore nécessaires, car les gouvernements ont été associés tardivement
au processus. Elles contribueront à la discussion qui se tiendra à l
323e session du Conseil d administration. Il est difficile de souscrire à la modification du
point 2 que propose l , car elle va à l encontre de l esprit de compromis et suppose une
issue prédéterminée, ce qui porte atteinte au dialogue social et laisse entendre qu il n est
pas tenu compte des consultations avec les mandants.
176. Le coordonnateur du groupe des employeurs déclare que le groupe soutient dans son
intégralité l ensemble de mesures présenté dans le nouveau projet de décision révisé. Le
groupe n a pas été consulté au sujet de la proposition de l UE, qui semble accentuer le
caractère automatique de la saisine de la CIJ, et ne souscrit pas à cette proposition. Il est
quelque peu dérouté par la procédure suivie. Les travaux préparatoires du groupe se sont
appuyés sur l ensemble de mesures proposé, qui semble maintenant se désagréger peu à
peu. Le groupe ne peut soutenir aucune des modifications proposées, étant donné qu il n a
pas eu la possibilité de les analyser.
177. Le Vice-président travailleur insiste sur l absence d un élément dans l ensemble de
mesures, qui ne constitue donc plus un ensemble selon lui, contrairement au projet de
décision proposé dans la matinée. Si les modifications proposées par l UE ne répondent
pas à tous les besoins du groupe des travailleurs, elles répondent néanmoins à certaines de
ses préoccupations. Il devrait être possible de trouver une solution avant la fin de la
session. L intervenant note que le GRULAC souhaite que les points 4 et 6 restent
inchangés. Dans ce contexte, les autres points ne peuvent pas conserver leur forme
actuelle. Le groupe est néanmoins disposé à trouver une solution une fois que des décisions
concernant les autres points auront été prises, ce qui pourrait se faire à la session de mars
2015 du Conseil d administration.
178. Le Directeur général déclare que, concernant le point 1, aucune objection à la participation
d Etats observateurs à la réunion tripartite ne semble avoir été formulée, mais note que
cette mesure devrait s appliquer aux observateurs travailleurs et employeurs également.
Des points de vue exprimés au sujet du mandat de la réunion tripartite, il retient la volonté
de supprimer les mots «de l tation» dans la première question et
de la deuxième question. Deux difficultés demeurent, qui sont corrélées entre elles;
premièrement, les préoccupations au sujet du lien entre le résultat de la réunion et les
mesures qui seraient prises en conséquence, en ce qui concerne notamment un éventuel
recours à l 37.1 de la Constitution; deuxièmement, l intégrité des mesures en tant
que solution d ensemb 1 et 2 puisse être trouvé et
qu un consensus autour des points 4 et 6 se soit dégagé.
179. Le coordonnateur du groupe des employeurs signale qu il est incorrect de laisser entendre
qu un consensus s est dégagé. Le groupe des employeurs a clairement indiqué qu il
soutenait uniquement l ensemble de mesures présenté précédemment, et rien d autre.
180. Le Directeur général dit que, dans le cadre des débats sur la solution d ensemble, ou sur
certains éléments en particulier, aucune véritable opposition au contenu des points 4 et 6
n a été exprimée. Pour ce qui est des points 3 et 5, des réserves ont été émises par certains
gouvernements et par le groupe des travailleurs. Toutefois, un accord sur les points 1, 2, 4
et 6 pourrait être trouvé. Une décision concernant les points 3 et 5 peut être reportée à mars
2015, en tenant compte des progrès accomplis en ce qui concerne les autres éléments de
l ensemble de mesures. Pour que la situation évolue, il est primordial de définir le lien
GB.322/PV
44 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
entre le résultat de la réunion tripartite proposée et les mesures qui seront prises en
conséquence, sans préjuger ce résultat. Le Directeur général propose de poursuivre la
discussion ou de marquer une pause en vue de trouver la formulation appropriée.
181. Le coordonnateur du groupe des employeurs indique que les travaux du groupe se sont
appuyés sur un ensemble de mesures et qu il est quelque peu dérouté par la procédure
suivie. En ce qui concerne les questions soulevées, l intervenant estime que l utilité de la
participation d observateurs à la réunion tripartite n est pas clairement établie. Il ne
souscrit pas à la suppression de la deuxième puce relative aux modalités et aux pratiques
de l action de grève, car il est important d axer la discussion sur le monde réel et sur les
conséquences que toute mesure peut avoir sur les entreprises. Le groupe n est pas
favorable aux propositions de l UE concernant les points 1 et 2, et, sans les points 3, 4, 5 et
6, il ne peut pas appuyer les points 1 et 2 tels qu ils ont été précédemment formulés. Le
groupe ne souscrit pas à la volonté de s écarter de la solution d ensemble.
182. Le Vice-président travailleur est prêt à débattre des différentes questions évoquées par le
Directeur général et propose par conséquent la tenue de consultations entre les groupes.
(La séance est suspendue.)
183. A la reprise de la séance, le Président dit que les consultations ont abouti à un projet de
1. A la suite de la discussion de vaste portée qui a eu lieu sur la cinquième question à
1) de convoquer une réunion tripartite de trois jours en février 2015, ouverte à la
bservateurs ayant un droit de parole, présidée par le Président du
membres gouvernementaux,
16 membres employeurs et 16 membres travailleurs, en vue de présenter un rapport
à la 323e ation (mars 2015) sur:
la question de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du
droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
les modalités et les pratiques de l action de grève;
2) 323e session le résultat des travaux et le rapport de
décision sur la nécessité ou non de demander à la Cour internationale de Justice de
(no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui
est du droit de grève;
3) de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon déroulement des travaux de
la Commission de e session de la Conférence
internationale du Travail et, à cette fin, de convoquer à nouveau le Groupe de
des recommandations pour la 323e session du
4) vertu du
paragraphe 37 de la Constitution;
5) dans le cadre de cet ensemble de mesures, de soumettre à sa 323e session:
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 45
a)
osé de 16 membres
gouvernementaux, huit membres employeurs et huit membres travailleurs,
qui sera chargé de faire à la 323e
(mars 2015) des propositions sur les modalités, le champ et le calendrier de la
ce mécanisme;
b)
conventions et recommandations (CEACR), M. le juge Abdul Koroma
(Sierra Leone), et au président du Comité de la liberté syndicale, M. le
professeur Paul van der Heijden (Paysdifférentes
procédures de contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la
ment des plaintes relatives à
la liberté syndicale.
184. Le coordonnateur du groupe des employeurs dit que son groupe accueille favorablement le
formulation du point 2 est acceptab a)
et b) du point 5 à la 323e
«ensemble de mesures».
185. Le Vice-président travailleur
puce du
point
a), qui anticipe la mise en place
b) du point 5
186. , un représentant du gouvernement de la Chine appuie le
projet de décisio
de leur groupe», afin que les observateurs puissent exprimer leur point de vue par
temps.
187. , une représentante du gouvernement
1 ainsi que la
initialement supprimer la deuxième puce du point 1 concernant les modalités et les
tripartite en février, afin de pouvoir exprimer son p
discussion des deux questions. A propos du point 2, elle voudrait obtenir des
need or otherwise for» dans la version
supprimer ces mots.
188. , un représentant du gouvernement du Kenya
dit que son groupe appuie les points
des alinéas a) et b) du point
GB.322/PV
46 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
disposé à accepter un compromis.
189. Le coordonnateur du groupe des employeurs note que les mots «the need or otherwise for»
bservation formulée au nom
190. Le Vice-président travailleur
préférerait que ces mots soient supprimés.
191. et de ses Etats membres, une représentante du gouvernement
Bureau à ce sujet.
192. Le Vice-président travailleur
les supprimer.
193. Le coordonnateur du groupe des employeurs propose de les remplacer par «necessity
or not».
194. , un représentant du gouvernement du Kenya
dit que, si la formulation originale lui paraît personnellement claire, il appuiera cependant
la formulation proposée par les employeurs.
195. , un représentant du gouvernement de la Chine dit que
son groupe considère la formulation originale comme pertinente et est opposé à sa
suppression.
196. membres, une représentante du gouvernement
concernés si les travaille
également la formulation proposée par les employeurs.
197. Le Directeur général
GASPAC à propos des observateurs ayant un droit de parole pa
groupe ainsi que la proposition de modification de la deuxième puce du point 1 formulée
formulation la plus neutre possible; le Directeur général convient cependant que
5, le
Directeur général croit comprendre que le groupe de
point
mesures». Etant donné que les travailleurs sont fermement opposés à son insertion, le
Directeur général propose de garder la formulation telle quelle et dit que le point de vue
des employeurs à ce propos pourrait être mentionné dans les procès-verbaux. Le texte tel
que modifié est soumis au Conse
198. Le coordonnateur du groupe des employeurs dit que son groupe cherche simplement à
e session est tout
à fait crucial, et plusieurs gouvernements se sont prononcés en faveur de la mise en place
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 47
a) du point supplémentaire.
199. Le Vice-président travailleur dit que, pour son groupe, tout ensemble de mesures inclura la
question de la saisine de la CIJ. Quant à la décision sur la nécessité ou non de solliciter
question devra être tranchée.
200. dit que la traduction espagnole du
point
versions français
ou non de demander», alors que la version espagnole évoque «une décision sur la nécessité
de demander». Les traductions devraient être harmonisées, mais la version française
semble plus claire.
201. Le Président
traductions soient harmonisées en conséquence.
202. Le Vice-président travailleur
souhaite indiquer très clairement que, lors de la discussion qui aura lieu à la réunion
devant la CIJ.
203. Le coordonnateur du groupe des employeurs dit que la décision sur la nécessité ou non de
e session
ultérieure, ce qui ne correspond pas au point de vue des employeurs.
204. Un représentant du Directeur général (Directeur général adjoint pour la gestion et la
-verbal de la réunion, mais ne
car toute décision prise est
205. Le coordonnateur du groupe des employeurs
s
correspondre à une décision qui devrait aboutir à la mise en place de ce mécanisme,
quoique à une date ultérieure, et le groupe des employeurs souhaiterait que les travailleurs
206. Le Vice-président travailleur dit que le groupe des travailleurs cherche à parvenir à un
projet de décision équilibré et que la position des employeurs consistant à reporter la
mesures seraient acceptés, détruirait cet équilibre.
207. Le coordonnateur du groupe des employeurs
consensus
son
GB.322/PV
48 GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx
un facteur clé
un recours automatique à la CIJ.
208. Le Vice-président travailleur dit que son groupe consent aux termes «nécessité ou non»
dans le contexte de la déclaration que les travailleurs ont faite à ce propos. Il est indéniable
que le groupe des travailleurs a fait de grands efforts et formulé diverses propositions pour
trouver des solutions lors des discussions. Les travailleurs ont fait évoluer certaines de
leurs opinions et positions pour parvenir à une décision. Le groupe des travailleurs
au procès-verbal que, pour le groupe des travailleurs, la décision concernant le point 5 sera
prise à la 323e
Décisions
209. A la suite de la discussion de vaste portée qui a eu lieu sur la cinquième question
décidé:
1) de convoquer une réunion tripartite de trois jours en février 2015, ouverte à
composée de 32 membres gouvernementaux, 16 membres employeurs et
16 membres travailleurs, en vue de présenter un rapport à la 323e session du
la question de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
les modalités et les pratiques de l action de grève au niveau national;
2) e session le résultat des travaux et le
prenne une décision sur la nécessité ou non de demander à la Cour
ntion (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
3) de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon déroulement des
pplication des normes à la 104e session de la
Conférence internationale du Travail et, à cette fin, de convoquer à nouveau
le Groupe de travail sur les méthodes de travail de la Commission de
es
recommandations pour la 323e sess
4) tribunal en
vertu du paragraphe 37 de la Constitution;
5) dans le cadre de cet ensemble de mesures, de soumettre à sa 323e session ce
qui suit:
GB.322/PV
GB322_PV-[RELME-150323-1]-Fr.docx 49
a)
gouvernementaux, huit membres employeurs et huit membres
travailleurs, qui sera chargé de faire, à la 323e session du Conseil
, des propositions sur les modalités, le
b) une deman
le juge
Abdul Koroma (Sierra Leone), et au président du Comité de la liberté
syndicale (CLS), M. le professeur Paul van der Heijden (Pays-Bas), afin
contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution de
atives à la liberté
syndicale.
(Document GB.322/INS/5(Add.2), paragraphe 1, tel que modifié selon la discussion.)
Incidences financières
210.
proposées par le Directeur général, dont le montant maximal est estimé à
684 300 dollars des Etats-Unis, qui ne pourrait pas être financé par des
contributions extrabudgétaires sera financé en premier lieu par des économies
réalisées dans la partie I du budget pour 2014- ation de
la partie II, étant entendu que, si par la suite cela devait se révéler impossible, le
(Document GB.322/INS/5(Add.3), paragraphe 3.)
Sixième question à l ordre du jour
Programme de développement durable
pour l après-2015: Eléments nouveaux
(GB.322/INS/6)
211. Le coordonnateur du groupe des employeurs se déclare favorable à la poursuite des
-2015 et se
travail décent et la protection sociale. Il importe cependant que ces travaux soient menés
selon les orientations données par les mandants. A sa prochaine session, le Conseil
devrait également poursui
développement (OMD).
212. Le porte-parole des travailleurs déclare que les 17 objectifs de développement durable
proposés constituent une bonne base pour le cycle final de négociations. Il se félicite des
8 porte sur le plein emploi
productif et le travail décent. Tous les gouvernements devraient donner leur adhésion au
travail décent et à ses quatre piliers dans leurs mandats de négociation nationaux. Il faut
Document no 36
GB.323/INS/5, L’initiative sur les normes, mars 2015
GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
Conseil d’administration
323e session, Genève, 12-27 mars 2015
GB.323/INS/5
Section institutionnelle INS
Date: 13 mars 2015
Original: anglais
CINQUIÈME QUESTION À L’ORDRE DU JOUR
L’initiative sur les normes
Introduction
1. Le présent document et ses trois appendices fournissent des informations sur le suivi et les
progrès réalisés dans la mise en oeuvre de la décision prise par le Conseil d’administration
à sa 322e session (novembre 2014) en ce qui concerne l’initiative sur les normes (document
GB.322/INS/5), libellée ainsi:
Le Conseil d’administration décide:
1) de convoquer une réunion tripartite de trois jours en février 2015, ouverte à la
participation d’observateurs ayant un droit de parole par l’intermédiaire de leur groupe,
présidée par le Président du Conseil d’administration et composée de 32 membres
gouvernementaux, 16 membres employeurs et 16 membres travailleurs, en vue de
présenter un rapport à la 323e session du Conseil d’administration (mars 2015) sur:
– la question de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
– les modalités et les pratiques de l’action de grève au niveau national;
2) d’inscrire à l’ordre du jour de sa 323e session le résultat des travaux et le rapport de cette
réunion afin que, sur cette base, le Conseil d’administration prenne une décision sur la
nécessité ou non de demander à la Cour internationale de Justice de rendre d’urgence un
avis consultatif concernant l’interprétation de la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève;
3) de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon déroulement des travaux de la
Commission de l’application des normes à la 104e session de la Conférence
internationale du Travail et, à cette fin, de convoquer à nouveau le groupe de travail sur
les méthodes de travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence
afin qu’il prépare des recommandations pour la 323e session du Conseil d’administration
(mars 2015), en particulier au sujet de l’établissement de la liste de cas et l’adoption des
conclusions;
4) de reporter à ce stade l’examen de la création éventuelle d’un tribunal en vertu du
paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution;
5) dans le cadre de cet ensemble de mesures, de soumettre à sa 323e session ce qui suit:
a) la mise en place du mécanisme d’examen des normes et, à cette fin, la création
d’un groupe de travail tripartite composé de 16 membres gouvernementaux, huit
GB.323/INS/5
2 GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx
membres employeurs et huit membres travailleurs, qui sera chargé de faire à la
323e session du Conseil d’administration (mars 2015) des propositions sur les
modalités, le champ et le calendrier de la mise en oeuvre de ce mécanisme;
b) une demande au Président de la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR), M. le juge Abdul Koroma (Sierra
Leone), et au Président du Comité de la liberté syndicale (CLS), M. le professeur
Paul van der Heijden (Pays-Bas), afin qu’ils préparent ensemble un rapport sur
l’interaction, le fonctionnement et l’amélioration possible des différentes
procédures de contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution de
l’OIT et du mécanisme de traitement des plaintes relatives à la liberté syndicale.
A. Résultat et rapport de la Réunion tripartite
sur la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948,
pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités
et pratiques de l’action de grève au niveau national
2. La réunion tripartite s’est tenue du 23 au 25 février 2015, sur la base d’un document de
référence établi par le Bureau. La Partie I du document expliquait factuellement le contexte
de l’adoption et du suivi de l’application de la convention no 87 en ce qui concerne le droit
de grève et présentait les règles pertinentes du droit international sur l’interprétation des
traités. La Partie II dressait une vue d’ensemble des modalités de l’action de grève au
niveau national, en droit comme dans la pratique.
3. La réunion s’est déroulée dans un climat constructif. Le groupe des travailleurs et le
groupe des employeurs ont présenté une déclaration conjointe dans laquelle ils ont exposé
un ensemble de mesures, afin de trouver une issue possible à la situation de blocage dans
laquelle se trouve actuellement le système de contrôle. Le groupe gouvernemental a
exprimé la position commune des gouvernements sur le lien entre le droit de grève et la
liberté syndicale, et présenté une deuxième déclaration en réponse à la déclaration
conjointe des partenaires sociaux. Le résultat et le rapport de la réunion tripartite, ainsi que
le document de référence du Bureau sont joints au présent document (appendices I, II
et III).
4. Le Conseil d’administration est appelé, sur la base du résultat et du rapport de la réunion
tripartite, à se prononcer sur la nécessité de demander à la Cour internationale de Justice,
conformément à l’article 37 de la Constitution de l’OIT, un avis consultatif sur la question
de l’interprétation de la convention no 87 en ce qui concerne le droit de grève.
B. Bon déroulement des travaux de la Commission
de l’application des normes
5. Après consultation des trois groupes, des dispositions ont été prises pour que le Groupe de
travail sur les méthodes de travail de la Commission de l’application des normes de la
Conférence (ci-après le «Groupe de travail CAN») 1 se réunisse lors de la 323e session du
Conseil d’administration.
1 A sa dernière réunion (novembre 2011), le Groupe de travail CAN était composé comme suit: neuf
représentants des employeurs; neuf représentants des travailleurs; et neuf représentants des
gouvernements, dont deux d’Afrique, deux des Amériques, deux de la région Asie-Pacifique, deux
d’Europe et un des Etats arabes.
GB.323/INS/5
GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx 3
6. L’ordre du jour proposé pour le Groupe de travail CAN comprendra les deux questions qui
lui sont soumises par le Conseil d’administration, à savoir: l’établissement de la liste des
cas et l’adoption des conclusions. Il est également proposé que le groupe examine les
éventuelles répercussions de la session de deux semaines de la Conférence à sa
104e session (2015) sur les travaux de la commission, tout en conservant le nombre actuel
de séances de la commission. Le Bureau a préparé des documents de référence pour
faciliter les discussions du Groupe de travail CAN, en tenant compte des déclarations du
groupe gouvernemental 2 et de la déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du
groupe des employeurs 3 présentées lors de la réunion tripartite.
7. Les recommandations formulées par le Groupe de travail CAN seront soumises à la
323e session du Conseil d’administration et présentées à la Commission de l’application
des normes au début de ses travaux à la 104e session de la Conférence (juin 2015) 4. A la
325e session (novembre 2015) du Conseil d’administration, le Groupe de travail sur le
fonctionnement du Conseil d’administration et de la Conférence internationale du Travail
(WP/GBC) examinera le déroulement de la session de deux semaines de la Conférence 5.
C. Lancement du mécanisme d’examen des normes
8. Il est rappelé qu’à sa 312e session (novembre 2011) le Conseil d’administration était saisi
d’un document 6 énonçant neuf éléments liés aux «modalités» du mécanisme d’examen des
normes qui devaient faire l’objet de consultations et d’un examen tripartites:
– Elément 1: Objectifs et résultats proposés.
– Elément 2: Principes directeurs.
– Elément 3: Cadre de fonctionnement.
– Elément 4: Rôle dévolu à la Section des questions juridiques et des normes
internationales du travail (Section LILS du Conseil d’administration).
– Elément 5: Création du groupe de travail tripartite.
– Elément 6: Composition du groupe de travail tripartite.
– Elément 7: Méthodes de travail et mandat du groupe de travail tripartite.
– Elément 8: Choix des normes à examiner.
– Elément 9: Calendrier des examens.
2 Document TMFAPROC/2015/2, annexes II et III.
3 Document TMFAPROC/2015/2, annexe I.
4 Le résultat des travaux du Groupe de travail CAN sera reflété dans le document D.1 «Travaux de
la commission», qui est censé être adopté par la commission au début de ses travaux, auquel seront
annexés la lettre dressant la liste préliminaire des cas individuels et un projet de programme de
travail provisoire de la commission.
5 Document GB.322/INS/ PV/Projet, paragr. 287 b) i).
6 Document GB.312/LILS/5, paragr. 4-34.
GB.323/INS/5
4 GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx
Elément 1: Objectifs et résultats proposés
9. A la 312e session du Conseil d’administration (novembre 2011), les objectifs suivants ont
été attribués au mécanisme d’examen des normes: déterminer le statut des normes
concernées; recenser les normes à jour et en faire la promotion; déterminer les meilleurs
moyens de tenir à jour le corpus de normes; recenser celles qui doivent être révisées,
regroupées ou faire l’objet d’autres mesures; rechercher de nouvelles thématiques et de
nouvelles approches dans le domaine de l’action normative; rechercher les meilleures
méthodes d’élaboration, d’adoption et de mise en oeuvre effective des normes.
10. S’agissant des résultats, le mécanisme d’examen des normes devrait s’assurer que les
normes de l’OIT protègent efficacement tous les travailleurs. Il devrait également: prendre
en compte les besoins des entreprises durables, ainsi que les nécessités contemporaines et
les défis futurs; renforcer le soutien aux normes considérées comme étant à jour;
augmenter le nombre de ratifications; améliorer la mise en oeuvre effective des conventions
ratifiées; et s’assurer que l’ensemble des normes internationales du travail en vigueur
contribuent à la réalisation des objectifs stratégiques de l’OIT.
Elément 2: Principes directeurs
11. A ses 310e et 312e sessions (mars et novembre 2011), le Conseil d’administration a
examiné un ensemble de principes généraux visant à guider les discussions sur la politique
normative et qui, à terme, devraient fonder les recommandations formulées dans le cadre
du mécanisme d’examen des normes. Après de nouvelles discussions à la 313e session du
Conseil d’administration (mars 2012), le groupe des employeurs et le groupe des
travailleurs ont conjointement présenté aux gouvernements un ensemble de principes
communs mettent l’accent sur la nécessité:
■ d’une cohérence des politiques dans le contexte de la Déclaration de l’OIT sur la
justice sociale pour une mondialisation équitable;
■ d’un corpus de normes solide, clairement défini et actualisé permettant de protéger les
travailleurs, en tenant compte des besoins des entreprises durables;
■ de l’adoption des décisions par consensus et, en l’absence de consensus, du maintien
des décisions existantes;
■ de négociations de bonne foi permettant d’élaborer un corpus de normes solide,
clairement défini et actualisé; et
■ d’une volonté commune des partenaires sociaux de mettre en oeuvre ces
engagements 7.
12. La déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs à la
réunion tripartite s’appuie sur des principes semblables:
■ «Création d’un cadre d’action cohérent, intégré aux mécanismes des normes de
l’OIT;
■ un corpus de normes clairement défini, solide et à jour;
7 Document GB.313/PV, paragr. 485.
GB.323/INS/5
GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx 5
■ aux fins de la protection des travailleurs et compte tenu des besoins des entreprises
durables;
■ adoption des décisions par consensus;
■ négociation de bonne foi afin de disposer d’un corpus de normes clairement défini,
solide et à jour;
■ les partenaires sociaux conviennent de respecter ces engagements.»
Elément 3: Cadre de fonctionnement
13. Les débats de la 312e session du Conseil d’administration (novembre 2011) ont révélé
l’existence d’un consensus parmi les mandants, à savoir que la Déclaration sur la justice
sociale constitue un cadre adéquat pour le mécanisme d’examen des normes, comme le
confirme la déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs:
«La Déclaration de l’OIT sur la justice sociale pour une mondialisation équitable
constituerait le cadre de référence du mécanisme d’examen des normes.»
Elément 4: Rôle dévolu à la Section des questions
juridiques et des normes internationales du travail
(Section LILS du Conseil d’administration)
14. Sur la base des discussions du Conseil d’administration en mars 2011, les mandants sont
convenus que sa Section LILS devrait être chargée d’établir et de superviser le processus
d’établissement du mécanisme d’examen des normes, et d’assurer le suivi des
recommandations du groupe de travail tripartite; la déclaration conjointe du groupe des
travailleurs et du groupe des employeurs allait dans le même sens: «Supervision et suivi
des décisions du mécanisme d’examen des normes: assurés par le Conseil d’administration
dans le cadre de la Section LILS.»
Eléments 5, 6 & 7: Création, composition, méthodes
de travail et mandat du groupe de travail tripartite
15. La décision prise en novembre 2014 par le Conseil d’administration prévoit la création
d’un groupe de travail tripartite, composé de 16 gouvernements, huit employeurs et huit
travailleurs. La déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du groupe des
employeurs mentionne un groupe de travail tripartite composé de 24 membres (huit
gouvernements, huit employeurs et huit travailleurs) et demande que le groupe de travail
tripartite se réunisse pendant une session de trois jours, en mars et novembre de chaque
année.
Elément 8: Choix des normes à examiner
16. Le Bureau a proposé l’alternative suivante au Conseil d’administration à sa 312e session
(novembre 2011):
GB.323/INS/5
6 GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx
1) examen de toutes les normes, à l’exception des conventions fondamentales et des
conventions de gouvernance ainsi que des recommandations qui les accompagnent, et
des instruments retirés, remplacés et récemment regroupés 8; ou
2) examen des normes non examinées par le Groupe de travail Cartier, adoptées entre
1985 et 2000 – à l’exception de la convention (no 182) sur les pires formes de travail
des enfants, 1999, de sa recommandation (no 190) et des normes récemment
regroupées –, de celles définies par le Groupe de travail Cartier comme ayant un
statut intérimaire et de celles pour lesquelles une révision ou un complément
d’information s’imposent 9.
17. La déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs à la
réunion tripartite contient la proposition suivante pour les travaux du Groupe tripartite sur
le mécanisme d’examen des normes: «Toutes les normes internationales du travail, à
l’exception des normes obsolètes, retirées, remplacées ou récemment regroupées, devraient
faire l’objet d’une discussion et, moyennant accord, d’un examen. Dans un premier temps,
les normes qui n’ont pas été examinées par le Groupe de travail Cartier et qui ont été
adoptées entre 1985 et 2000, celles pour lesquelles le Groupe de travail Cartier avait
demandé des informations complémentaires, celles définies par le Groupe de travail
Cartier comme ayant un statut intérimaire, et celles devant être révisées pourraient faire
l’objet d’un examen. 10»
Elément 9: Calendrier des examens
18. Selon la proposition contenue dans la déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du
groupe des employeurs mentionnée ci-dessus, le Groupe de travail tripartite sur le
mécanisme d’examen des normes tiendrait sa première réunion de trois jours avant la
325e session du Conseil d’administration (novembre 2015). Il pourrait examiner les
modalités mentionnées ci-dessus, et identifier et choisir les normes devant faire l’objet
d’un examen.
19. Compte tenu des éléments ci-dessus, le Bureau propose l’échéancier suivant:
■ avril-juillet 2015: le Bureau prépare un document de travail en vue de consultations
tripartites.
■ septembre 2015: consultation des trois groupes; le Bureau prépare ensuite un
document révisé tenant compte des résultats des consultations.
■ novembre 2015: le Groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes tient sa
première réunion avant le Conseil d’administration afin d’examiner les modalités de
fonctionnement du mécanisme et d’identifier le premier groupe de normes devant
8 Soit 130 conventions, trois protocoles et 105 recommandations.
9 Soit 49 conventions et 52 recommandations. Le Protocole de 1996 relatif à la convention sur la
marine marchande (normes minima), 1976, qui avait été antérieurement inclus dans ce groupe
d’instruments a été révisé et remplacé par la MLC, 2006.
10 Voir la liste des instruments dans le document GB.312/LILS/5, annexe II. Cette proposition
signifierait l’examen de 139 conventions, quatre protocoles et 113 recommandations. En ce qui
concerne les instruments adoptés entre 1985 et 2000, le groupe de travail devrait examiner
49 conventions et 52 recommandations.
GB.323/INS/5
GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx 7
faire l’objet d’un examen. Un rapport d’étape est présenté à la Section LILS du
Conseil d’administration pour discussion et décision;
■ janvier-février 2016: le Bureau prépare un deuxième document de travail afin
d’assurer le suivi des discussions tenues, des orientations données et des décisions
prises par le Conseil d’administration à sa session de novembre 2015;
■ mars 2016: le Groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes tient sa
deuxième réunion sur la base du document de travail préparé par le Bureau et formule
une proposition sur le groupe de normes devant faire l’objet d’un examen ainsi que
sur le processus de consultation aux fins de cet examen;
■ novembre 2016: les résultats de l’examen du premier groupe de normes analysées par
le mécanisme d’examen des normes sont soumis au Conseil d’administration pour
examen et décision;
■ mars 2017: le Groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes rend compte
de l’avancement de ses travaux;
■ novembre 2017: le Groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes poursuit
ses travaux et le Conseil d’administration adopte les décisions pertinentes;
■ mars 2018: le Conseil d’administration assure le suivi des décisions qu’il a prises en
novembre 2017.
D. Préparation d’un rapport sur l’interaction,
le fonctionnement et l’amélioration possible
des différentes procédures de contrôle découlant
des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution
de l’OIT (décision point 5 b))
20. A sa 322e session (novembre 2014), le Conseil d’administration a décidé de reporter à la
présente session l’examen d’une demande adressée aux présidents de la CEACR et du
Comité de la liberté syndicale, à savoir préparer conjointement un rapport sur l’interaction,
le fonctionnement et l’amélioration possible des différentes procédures de contrôle
découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution de l’OIT et du mécanisme de
traitement des plaintes relatives à la liberté syndicale. La déclaration conjointe du groupe
des travailleurs et du groupe des employeurs mentionne également la «Clarification des
rôles et mandats du CLS et des procédures au titre des articles 24 et 26 dans le cadre du
contrôle régulier des normes.»
Incidences financières
21. Ni le programme et budget 2014-15, ni les Propositions de programme et budget pour
2016-17 présentées par le Directeur général ne prévoient le financement du coût des
résultats de la réunion tripartite; il convient de prendre les dispositions financières voulues
si le Conseil d’administration décide d’adopter les mesures proposées.
22. Le coût estimatif des travaux du Groupe de travail tripartite sur le mécanisme d’examen
des normes exposés aux paragraphes 15 et 19 serait de 176 800 dollars des Etats-Unis par
réunion, se décomposant comme suit:
GB.323/INS/5
8 GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx
Dollars E.-U.
Frais de voyage 105 300
Interprétation 70 000
Documentation 1 500
Coût total 176 800
23. Les coûts estimatifs s’élèveraient à 176 800 dollars E.-U. en 2015 et à 707 200 dollars
E.-U. en 2016-17.
24. Le coût estimatif de la préparation et de la publication du rapport durant l’exercice biennal
en cours, visé au paragraphe 20, représente 50 000 dollars E.-U.
Projet de décision
25. Le Conseil d’administration:
a) prend note du résultat et du rapport de la Réunion tripartite sur la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de
l’action de grève au niveau national;
b) décide, à la lumière du résultat et du rapport de la réunion tripartite, de ne
prendre dans l’immédiat aucune mesure au titre de l’article 37 de la
Constitution pour résoudre la question de l’interprétation de la convention
no 87 pour ce qui est du droit de grève;
c) décide de prendre les mesures voulues pour assurer le bon fonctionnement
de la Commission de l’application des normes à la 104e session de la
Conférence internationale du Travail, en tenant compte des
recommandations formulées par le Groupe de travail sur les méthodes de
travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence,
notamment en ce qui concerne l’établissement de la liste des cas et
l’adoption des conclusions;
d) décide de créer, dans le cadre du mécanisme d’examen des normes, un
groupe de travail tripartite composé de 32 membres, 16 représentant les
gouvernements, huit représentant les employeurs et huit représentant les
travailleurs, qui se réuniront tous les ans pendant trois jours avant les
sessions de mars et de novembre du Conseil d’administration;
e) décide que ce groupe de travail tripartite fera rapport au Conseil
d’administration à sa 325e session (novembre 2015) sur les progrès
accomplis dans la mise en oeuvre du mécanisme d’examen des normes;
f) demande au Président de la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR), le juge Abdul Koroma (Sierra
Leone), et au Président du Comité de la liberté syndicale (CLS), le
professeur Paul van der Heijden (Pays-Bas), de préparer ensemble un
rapport sur l’interaction, le fonctionnement et l’amélioration possible des
différentes procédures de contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de
GB.323/INS/5
GB323-INS_5_[CABIN-150305-1]-Fr.docx 9
la Constitution de l’OIT et du mécanisme de traitement des plaintes relatives
à la liberté syndicale;
g) décide que le coût des mesures proposées dans le présent document qui,
selon les estimations, pourrait atteindre 226 800 dollars E.-U. en 2015 et
707 200 dollars E.-U. en 2016-17, sera financé en premier lieu par des
économies réalisées dans la Partie I du budget pour les périodes biennales
correspondantes ou, à défaut, par l’utilisation de la Partie II, étant entendu
que, si par la suite cela se révélait impossible, le Directeur général
proposerait d’autres méthodes de financement.
Document no 37
Procès-verbaux de la 323e session du Conseil
d’administration, mars 2015, paragr. 51-84
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx
BUREAU INTERNATIONAL DU TRAVAIL
Conseil d’administration
323e session, Genève, 12-27 mars 2015
GB.323/PV
Procès-verbaux de la 323e session
du Conseil d’administration
du Bureau international du Travail
GB.323/PV
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx 15
47. Un représentant du gouvernement de Cuba considère que la participation de l’OIT a été
déterminante dans les progrès accomplis par le Myanmar et qu’elle apporte la preuve que
la coopération, sous toutes ses formes, constitue le meilleur moyen de surmonter les
obstacles et d’obtenir des résultats.
48. Une représentante du gouvernement du Cambodge dit qu’une forte détermination du
gouvernement du Myanmar est encore nécessaire dans de nombreux domaines pour
réaliser des progrès supplémentaires et résoudre certaines difficultés relatives au travail
dans le pays. La coopération et le dialogue entre toutes les parties prenantes ainsi que
l’appui de l’OIT sont indispensables pour garantir des conditions de travail sûres et justes
au Myanmar.
49. Un représentant du gouvernement de la Chine estime que les mesures positives prises par
le gouvernement du Myanmar et la coopération de ce dernier avec l’OIT doivent être
pleinement reconnues par le Conseil d’administration. Il soutient la proposition du
gouvernement du Myanmar visant à reporter l’adoption du projet de décision.
Décision
50. Le Conseil d’administration a noté que des progrès avaient été accomplis, mais
qu’un certain nombre d’activités fondamentales prescrites par le plan d’action
pour l’élimination du travail forcé au Myanmar d’ici à 2015 n’avaient pas
encore été menées à bien. Dans ces conditions, le Conseil d’administration:
a) a prié le Directeur général d’établir un rapport, qui sera examiné par le
Conseil d’administration à sa 325e session (novembre 2015), sur la mise en
oeuvre du plan d’action et l’opportunité de le proroger, la situation de tous
les cas individuels non résolus, notamment les cas spécifiquement cités dans
le rapport, ainsi que les mesures à prendre pour garantir que ceux qui ont
eu recours au travail forcé feront l’objet de poursuites et auront à répondre
de leurs actes;
b) a invité le gouvernement du Myanmar à faire le nécessaire pour assurer le
respect de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et lui a demandé
de soumettre à la 325e session du Conseil d’administration (novembre 2015)
un rapport sur les mesures qu’il entendait prendre à cette fin aussitôt que
possible.
(Document GB.323/INS/4(Add.), paragraphe 1.)
Cinquième question à l’ordre du jour
L’initiative sur les normes
(GB.323/INS/5), (GB.323/INS/5/Appendice I),
(GB.323/INS/5/Appendice II) et (GB.323/INS/5/Appendice III)
51. Le coordonnateur du groupe des employeurs prend note avec satisfaction du document, qui
rend compte de manière juste et équilibrée des travaux du Conseil d’administration à sa
session de novembre et de la réunion tripartite réunie au mois de février 2015 sur la
question du droit de grève. Ces résultats sont importants pour sortir du blocage qui a
empêché le système de contrôle de l’OIT de fonctionner correctement, mais ils ne sont
GB.323/PV
16 GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx
qu’une première étape sur la voie d’un système de contrôle efficace et qui fonctionne bien.
La position du groupe des employeurs, selon laquelle la convention no 87 ne reconnaît pas
le «droit de grève», demeure inchangée. La «déclaration conjointe» est néanmoins
l’expression d’une volonté de continuer à oeuvrer ensemble en vue de renforcer le système
de supervision en dépit des divergences d’opinions. Le groupe des employeurs reste
déterminé à trouver des solutions aux nombreux problèmes décrits dans le document. Il est
important de respecter l’échéancier indiqué au paragraphe 19 tout en avançant, étape par
étape, vers une solution. La déclaration conjointe du groupe des travailleurs et du groupe
des employeurs souligne la nécessité de clarifier et rationaliser les procédures de contrôle,
entre autres le rôle et le mandat du Comité de la liberté syndicale. Il serait effectivement
souhaitable que le président du Comité de la liberté syndicale et le président de la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR)
établissent un rapport sur l’interaction, le fonctionnement et l’amélioration possible des
différentes procédures de contrôle, comme il est proposé au paragraphe 20. Les partenaires
tripartites devraient être étroitement associés à la préparation et à la rédaction de ce
rapport. Le groupe des employeurs appuie le projet de décision figurant au paragraphe 25.
52. Le Vice-président travailleur apporte quelques précisions à la déclaration conjointe
présentée par le groupe des travailleurs et le groupe des employeurs à la réunion tripartite
qui s’est tenue au mois de février 2015. Sans prétendre résoudre tous les problèmes, cette
déclaration conjointe permet à l’OIT de recommencer à contrôler sans entraves
l’application des normes internationales du travail, ce qui est crucial pour la promotion du
travail décent partout dans le monde. Cette déclaration ne signifie pas que l’opinion du
groupe des travailleurs sur le droit de grève a changé. Le droit de grève est un élément
fondamental de la démocratie et une possibilité essentielle pour les travailleurs. Il est
protégé par la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948. L’orateur se félicite que le groupe des employeurs, en dépit de son désaccord sur
l’interprétation de la convention, se soit engagé à rétablir des relations professionnelles
harmonieuses et à reconnaître le droit des travailleurs de mener des actions collectives pour
défendre leurs intérêts professionnels légitimes. Il fait sienne la déclaration du groupe
gouvernemental dans laquelle celui-ci réaffirme que le droit de grève est un corollaire
indissociable du droit à la liberté syndicale. L’élément le plus important de la déclaration
conjointe des partenaires sociaux est peut-être la reconnaissance du mandat de la CEACR
puisqu’il permettra à la Commission de l’application des normes de la Conférence de
reprendre l’examen normal des cas.
53. En ce qui concerne le projet de décision, l’intervenant prend note avec satisfaction de
l’alinéa a). Le groupe des travailleurs attend avec intérêt la discussion qui aura lieu au sein
du groupe de travail sur les méthodes de travail de la Commission de l’application des
normes de la Conférence, qui devrait garantir que dorénavant cette commission
fonctionnera normalement. Les travailleurs et les employeurs se sont entendus sur les
modalités d’établissement d’une liste longue et d’une liste restreinte de cas ainsi que sur
l’élaboration de conclusions fondées sur le consensus avec la participation renforcée des
partenaires sociaux. Par conséquent, le groupe des travailleurs souscrit à l’alinéa c). Ayant
été d’accord pour lancer le mécanisme d’examen des normes, et au vu du climat de
confiance et de respect mutuel qui règne entre les partenaires sociaux, il approuve les
alinéas d) et e) relatifs à la création et à la composition du groupe de travail tripartite qui
sera créé dans le cadre du mécanisme d’examen des normes. Etant donné qu’un rapport
conjoint des présidents de la CEACR et du Comité de la liberté syndicale pourrait fournir
des indications intéressantes sur le fonctionnement et l’amélioration possible du système
de contrôle, les travailleurs appuient l’alinéa f). Ils approuvent également les alinéas g)
et b) puisqu’ils n’envisagent plus de demander à la Cour internationale de Justice un avis
sur la question de l’interprétation de la convention no 87 en ce qui concerne le droit de
grève.
GB.323/PV
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx 17
54. S’exprimant au nom du groupe gouvernemental, une représentante du gouvernement de
l’Italie se félicite de l’attitude constructive des partenaires sociaux au regard du dialogue.
Elle souligne que le groupe gouvernemental reconnaît que le droit de grève est lié à la
liberté syndicale, laquelle est un principe fondamental de l’OIT. Le groupe reconnaît
spécifiquement que la liberté syndicale, en particulier le droit d’organiser des activités pour
promouvoir et protéger les intérêts des travailleurs, ne peut être pleinement garantie sans
protection du droit de grève, lequel, bien qu’il fasse partie des principes et droits
fondamentaux au travail de l’OIT, n’est pas un droit absolu. La portée et les conditions
d’exercice de ce droit sont réglementées au niveau national. Dès lors, les Etats Membres
sont responsables de l’application effective et du respect des normes du travail.
55. Le processus de désignation des neuf pays participant au groupe de travail sur les
méthodes de travail de la Commission de l’application des normes est achevé. La
Commission de l’application des normes de la Conférence voudra peut-être revoir
elle-même la composition du groupe de travail afin de refléter la structure régionale
particulière du groupe gouvernemental. Les observateurs sans droit de parole pourront
assister aux réunions du groupe de travail. En ce qui concerne le groupe de travail sur le
mécanisme d’examen des normes, le groupe gouvernemental prévoit d’achever le
processus de désignation des 16 participants gouvernementaux et d’un président
indépendant compétent avant la session du Conseil d’administration de juin 2015. Afin de
limiter les coûts et de permettre des discussions plus approfondies, le groupe de travail
devrait se réunir une fois par an pendant une semaine. L’intervenante est d’accord pour
qu’il soit demandé aux présidents de la CEACR et du Comité de la liberté syndicale
d’établir conjointement le rapport mentionné au paragraphe 20. Tout en approuvant les
dispositions financières indiquées au paragraphe 25 g), elle voudrait avoir des
éclaircissements sur les autres méthodes de financement envisagées. Enfin, elle propose
plusieurs amendements, qui ont été diffusés dans un document distribué la veille.
56. S’exprimant au nom du Groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC),
un représentant du gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela dit que le
GRULAC a joué un rôle actif dans la réunion tripartite qui s’est tenue en février 2015, lors
de laquelle le groupe gouvernemental est parvenu à une position commune reconnaissant
le lien entre la liberté syndicale et le droit de grève. Il est regrettable que les conclusions et
recommandations du Groupe de travail sur les méthodes de travail de la Commission de
l’application des normes de la Conférence n’aient pas été soumises au Groupe de travail
sur le fonctionnement du Conseil d’administration et de la Conférence internationale du
Travail. Il conviendrait à l’avenir de suivre cette procédure. Pour ce qui est du mécanisme
d’examen des normes, on peut se demander s’il est vraiment nécessaire que le groupe de
travail tripartite se réunisse deux fois par an pour des sessions de trois jours. Le GRULAC
approuve l’échéancier proposé au paragraphe 19 et est en faveur de l’établissement du
rapport conjoint mentionné au paragraphe 20, qui devrait être présenté à la 326e session du
Conseil d’administration. Enfin, la décision adoptée à la session en cours devra être revue
à la 328e session sans préjudice de l’examen préalable de toute autre question se posant sur
le sujet qui s’avérerait nécessaire. L’intervenant appuie le projet de décision figurant au
paragraphe 25, sous réserve des amendements proposés par le groupe gouvernemental.
57. S’exprimant au nom du GASPAC, un représentant du gouvernement de la Chine se félicite
du fait que les partenaires sociaux sont parvenus à un accord sur l’initiative sur les normes,
sans avoir à porter la question devant la Cour internationale de Justice. La sélection des cas
soumis à la Commission de l’application des normes devrait être dépolitisée et fondée sur
des critères objectifs. La liste devrait assurer un équilibre entre les conventions
fondamentales et les conventions techniques, la représentation géographique et le niveau
de développement des pays, et devrait être publiée avant l’ouverture de la Conférence
internationale du Travail. Pour ce qui est du mécanisme d’examen des normes
nouvellement lancé, celui-ci pourra garantir un corpus de normes clairement défini, solide
GB.323/PV
18 GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx
et à jour, répondant aux besoins et aux défis du monde actuel du travail. Toutes les normes
internationales du travail, à l’exception des normes obsolètes, retirées, remplacées ou
récemment regroupées, devraient faire l’objet d’une discussion et, moyennant accord, d’un
examen. Concernant le rapport conjoint mentionné à l’alinéa f) du projet de décision, il est
important d’éviter tout chevauchement dans les travaux des différents mécanismes de
contrôle. Il faudrait donc clarifier les rôles et mandats du Comité de la liberté syndicale,
tout comme ceux liés aux procédures de contrôle régulier au titre des articles 24 et 26 de la
Constitution de l’OIT. Le GASPAC appuie le projet de décision.
58. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, un représentant du gouvernement du Kenya se
dit satisfait que le dialogue tripartite ait permis de résoudre les questions soulevées par la
convention no 87 à propos du droit de grève ainsi que des modalités et pratiques de l’action
de grève au niveau national. Son groupe attend avec intérêt de collaborer étroitement avec
les partenaires sociaux en vue de rétablir pleinement le bon fonctionnement de la
Commission de l’application des normes, y compris le réexamen prévu de l’ensemble du
système de contrôle. Il propose que les délégations gouvernementales soient financées
selon les dispositions budgétaires mentionnées à l’alinéa g) du projet de décision, de sorte
qu’elles puissent participer au groupe de travail tripartite sur le mécanisme d’examen des
normes. Il appuie le projet de décision, tel que modifié par le groupe gouvernemental.
59. S’exprimant au nom du groupe des PIEM, une représentante du gouvernement des Etats-
Unis se félicite des progrès accomplis dans le domaine de l’initiative sur les normes, et en
particulier des résultats de la Réunion tripartite sur la convention (no 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève. Cette
réunion a permis de renforcer la confiance entre les partenaires sociaux et l’unité entre les
gouvernements. L’ensemble des mesures présentées dans la déclaration conjointe des
partenaires sociaux et les deux déclarations du groupe gouvernemental a ouvert la voie à
une solution efficace et durable des questions liées au système de contrôle de l’OIT. Le
groupe des PIEM est favorable à la réactivation du Groupe de travail sur les méthodes de
travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence et à l’ordre du jour
proposé. Il conviendrait de désigner un président indépendant, issu du groupe
gouvernemental, en plus des neuf membres gouvernementaux. Les gouvernements ne
devraient pas participer à l’établissement de la liste des cas individuels devant être
examinés par la Commission de l’application des normes, dont les conclusions donnent
aux mandants des orientations utiles.
60. Le mécanisme d’examen des normes devrait être lancé dès que possible; des
éclaircissements et des clarifications restent toutefois nécessaires. Si le groupe des PIEM
peut apporter son soutien aux objectifs du mécanisme d’examen des normes, tels
qu’énoncés dans le paragraphe 9 du document GB.323/INS/5, il met en garde contre une
surcharge du processus. La tâche principale doit être de tenir à jour le corpus de normes.
Un mécanisme de suivi devrait être prévu pour faire en sorte que les normes nécessitant
une révision soient inscrites à l’ordre du jour de la Conférence internationale du Travail
dans un délai raisonnable. Le groupe des PIEM convient que la Déclaration de l’OIT sur la
justice sociale pour une mondialisation équitable constitue un cadre adéquat pour le
mécanisme d’examen des normes et souscrit au rôle de la Section des questions juridiques
et des normes internationales du travail, tel que décrit au paragraphe 14. Il est en faveur de
la création du Groupe de travail tripartite sur le mécanisme d’examen des normes, tel que
défini au paragraphe 15, et de la désignation d’un président indépendant issu du groupe
gouvernemental, en plus des 16 membres gouvernementaux. Les membres du groupe de
travail devraient avoir une connaissance approfondie du cadre juridique de l’OIT, et la
composition de ce groupe devrait pouvoir varier selon les compétences nécessaires à
l’examen des normes concernées. Le groupe de travail a besoin d’un mandat clair afin
d’éviter tout chevauchement avec les travaux du Groupe de travail Cartier.
GB.323/PV
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx 19
61. Lors de la sélection des normes à examiner, il faudra soigneusement étudier la question de
savoir s’il faut exclure les conventions fondamentales et les conventions relatives à la
gouvernance car elles ont un statut particulier. Le groupe des PIEM souscrit au contenu de
l’alinéa 2 du paragraphe 16 et au calendrier proposé, étant entendu que des aménagements
pourront y être apportés si nécessaire. Le rapport conjoint mentionné au paragraphe 20
devrait être examiné lors de la 326e session (mars 2016) du Conseil d’administration.
L’oratrice veut croire que cet examen ne remettra pas en cause l’indépendance de la
CEACR. Elle demande des éclaircissements sur les coûts indiqués au paragraphe 22. Pour
limiter ceux-ci, le Groupe de travail tripartite sur le mécanisme d’examen des normes
devrait se rencontrer pendant une semaine, une fois par an.
62. S’exprimant au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), un
représentant du gouvernement du Cambodge se félicite du résultat de la réunion tripartite
organisée en février 2015 et des efforts déployés pour assurer le bon fonctionnement de la
Commission de l’application des normes. Les critères de sélection des cas à soumettre à
cette dernière devraient être objectifs et veiller à maintenir un équilibre entre différents
éléments: conventions fondamentales et conventions techniques; représentation
géographique; niveau de développement des pays. L’ASEAN appuie le lancement du
mécanisme d’examen des normes. Il est essentiel de clarifier les rôles et mandats du
Comité de la liberté syndicale et les procédures au titre des articles 24 et 26 de la
Constitution de l’OIT. L’ASEAN appuie le projet de décision tel que présenté au
paragraphe 25.
63. Un représentant du gouvernement de la France, notant que l’application effective des
normes internationales du travail est au coeur de l’activité de l’Organisation, se félicite de
la capacité de dialogue retrouvé entre les différents mandants du Conseil d’administration,
de la volonté des mandants de garantir un système normatif du travail efficace et de la
relance du mécanisme d’examen des normes. L’importante déclaration faite par les
gouvernements lors de la réunion tripartite de février aurait dû être mentionnée dans le
projet de décision. Les gouvernements sont prêts à examiner les conditions d’exercice du
droit de grève; néanmoins, l’introduction de points de vue divergents dans les conclusions
de la Commission de l’application des normes risque de menacer la légitimité du
tripartisme. Il n’y a toujours pas de procédure légitime pour résoudre le différend
d’interprétation sur la convention no 87 de même que pour résoudre d’autres différends
d’interprétation. Le gouvernement de la France reste en faveur de l’établissement d’un
mécanisme d’interprétation sur la base de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de
l’OIT, qui serait souple, à faible coût et mobilisable sur demande expresse du Conseil
d’administration.
64. Un représentant du gouvernement de l’Indonésie accueille avec satisfaction le résultat des
travaux et le rapport de la réunion tripartite. Il salue en particulier les efforts des
partenaires sociaux pour présenter une déclaration conjointe dans laquelle ils exposent un
ensemble de mesures visant à trouver une issue possible à la situation de blocage dans
laquelle se trouve actuellement le système de contrôle. Soulignant l’importance de la
concertation tripartite, il espère que l’atmosphère constructive perdurera. Il appuie les
efforts visant à établir un mécanisme d’examen des normes.
65. Un représentant du gouvernement du Japon estime que la controverse sur les mécanismes
de contrôle devrait être résolue dans le cadre d’une consultation tripartite interne. Il salue à
cet égard les efforts consentis pendant la réunion tripartite en vue de parvenir à un
consensus. Il souscrit à la proposition, formulée dans la déclaration conjointe des
travailleurs et des employeurs, selon laquelle la liste des cas choisis pour la Commission de
l’application des normes devrait s’appuyer sur des critères objectifs et assurer un équilibre
entre les conventions fondamentales et les conventions techniques, la représentation
géographique et le niveau de développement des pays. Compte tenu de la proposition de ne
GB.323/PV
20 GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx
pas formuler de conclusions en l’absence de consensus, l’intervenant dit que les
employeurs et les travailleurs devraient veiller à éviter qu’une telle situation se produise,
car elle fragiliserait le rôle de la commission. Il se dit favorable à l’établissement d’un
rapport sur l’interaction, le fonctionnement et l’amélioration des procédures de contrôle.
66. Un représentant du gouvernement de l’Allemagne salue les progrès accomplis et les efforts
déployés par les partenaires sociaux, notamment pour trouver une issue à la situation de
blocage. Toutefois, beaucoup reste encore à faire et le gouvernement de l’Allemagne
entend participer activement à ce processus.
67. Un représentant du gouvernement du Brésil espère qu’un consensus sera finalement
trouvé, y compris en ce qui concerne l’application de l’article 37 de la Constitution. La
question de l’interprétation devrait être tranchée par la Cour internationale de Justice,
plutôt que par un tribunal interne de l’OIT. Le droit de grève est formellement reconnu
dans le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que
dans les traités constitutifs d’organismes régionaux tels que l’Organisation des Etats
américains. L’orateur souscrit à l’établissement d’un mécanisme d’examen des normes. La
sélection de cas soumis à la Commission d’application des normes devrait s’appuyer sur
des critères plus transparents. Le rôle des gouvernements, en tant que titulaires des
obligations découlant des instruments concernés, pourrait être renforcé. La hiérarchie des
procédures de la commission et le degré de priorité attribué à chacune d’elles devraient être
précisés. La fréquence des rapports devrait être réduite et la fonction de contrôle
considérée comme un processus unique.
68. Une représentante du gouvernement de l’Inde salue le résultat des travaux de la réunion
tripartite et souligne l’importance des discussions tripartites. A cet égard, la Conférence
internationale du Travail constitue l’instance de décision suprême pour les questions liées
au travail. L’intervenante souscrit à l’établissement d’un mécanisme d’examen des normes
et attend avec intérêt le rapport conjoint des présidents de la CEACR et du Comité de la
liberté syndicale sur le fonctionnement et la possible amélioration des procédures de
contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la Constitution. Il conviendrait de
réfléchir à la charge que représente l’établissement de rapports et envisager de nouveaux
modes de présentation de rapports.
69. Un représentant du gouvernement des Etats-Unis réaffirme que son gouvernement
souhaite ardemment voir les organes de contrôle de l’OIT fonctionner pleinement et
efficacement, et est disposé à collaborer avec les autres gouvernements et les partenaires
sociaux à cette fin. Notant avec satisfaction les progrès accomplis au cours de la réunion
tripartite, notamment en ce qui concerne le cadre proposé par les employeurs et les
travailleurs, l’intervenant salue l’esprit de collaboration et d’engagement retrouvé qui
donne un nouvel élan au système de contrôle.
70. Un représentant du gouvernement de l’Angola, tout en saluant le résultat des travaux de la
réunion tripartite, dit que le droit de grève n’est pas absolu, étant donné qu’il s’exerce dans
les limites prévues par la législation nationale. La liste des cas à traiter par la Commission
de l’application des normes devrait assurer un équilibre entre les conventions
fondamentales et les conventions techniques, la représentation géographique et le niveau
de développement des différents pays.
71. Un représentant du gouvernement de la Turquie, notant que la réunion tripartite a permis
de mener un dialogue social constructif, dit que la déclaration conjointe des employeurs et
des travailleurs a donné l’espoir qu’un consensus était possible pour sortir de la situation
de blocage dans laquelle se trouve actuellement le système de contrôle. Il se félicite
également que le mandat de la CEACR ait fait l’objet d’un consensus et espère que les
travaux de la Commission de l’application des normes réuniront un même consensus. Il
GB.323/PV
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx 21
rappelle que cette commission n’est pas un tribunal, mais une instance de dialogue social,
et que ses conclusions ne constituent pas des décisions de justice. Ce principe devrait
transparaître dans la formulation des conclusions. Les efforts visant à assurer un équilibre
dans la liste des cas – laquelle devrait être adoptée à un stade plus précoce – ne devraient
pas se traduire par l’omission des cas portant sur des violations plus sérieuses. Lorsqu’une
plainte est déposée, elle devrait s’accompagner d’une explication des mesures prises à
l’échelle nationale pour résoudre les problèmes en question.
72. Un représentant du gouvernement de la Chine souligne l’importance du dialogue social, du
tripartisme et de la coopération technique, et salue le résultat positif des travaux de la
réunion tripartite. Il souscrit à la proposition formulée dans la déclaration conjointe des
travailleurs et des employeurs selon laquelle la liste des cas choisis pour la Commission de
l’application des normes – qui devrait être arrêtée avant le début de la session de la
Conférence – devrait s’appuyer sur des critères objectifs et assurer un équilibre entre les
conventions fondamentales et les conventions techniques, la représentation géographique
et le niveau de développement des pays. L’intervenant convient que l’objectif global du
mécanisme d’examen des normes devrait être de garantir la mise en oeuvre de normes
internationales du travail adaptées aux mutations constantes du monde du travail en vue de
protéger les travailleurs et compte tenu du développement des entreprises durables. Il
soutient la mise en place d’un groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes,
telle que proposée au paragraphe 17.
73. Un représentant du gouvernement du Royaume-Uni dit que le résultat positif des travaux
de la réunion tripartite met en évidence le rôle remarquable que joue l’OIT pour trouver
des solutions durables et consensuelles; l’importance de ce rôle ne doit pas être
sous-estimée. Il note avec satisfaction que des mesures ont été prises pour assurer le bon
fonctionnement de la Commission de l’application des normes et se félicite du renouveau
de la relation tripartite et des effets positifs qui en découleront. Saluant l’engagement en
faveur du mécanisme d’examen des normes exprimé au sein du Conseil d’administration,
l’intervenant dit que le gouvernement du Royaume-Uni contribuera dans un esprit
constructif à assurer la pertinence et l’efficacité du corpus des normes internationales du
travail.
74. Une représentante du gouvernement de la Belgique, soulignant le lien entre le droit de
grève et la liberté syndicale, déclare qu’il faudrait continuer de réfléchir à la question de
savoir si les conventions fondamentales devraient être concernées par le mécanisme
d’examen des normes. A cet égard, il serait utile de préparer les termes de référence des
futures réunions. Réaffirmant l’attachement de son gouvernement à un fonctionnement
efficace de la Commission de l’application des normes, l’oratrice déclare que, si des
progrès significatifs ont été accomplis en la matière, de nombreuses tâches restent à mener.
75. Le représentant du Directeur général (DDG/MR) explique que les mesures proposées au
paragraphe 25 g) peuvent être financées par le biais de la réaffectation de toute ressource
sous-utilisée ou de toute économie réalisée dans l’ensemble du Bureau ou en utilisant les
provisions pour les dépenses imprévues inscrites dans la Partie II du budget. Ce n’est que
lorsque ces options auront été épuisées que l’on envisagera de se tourner vers d’autres
méthodes de financement. La présentation du rapport du Groupe de travail sur le
fonctionnement du Conseil d’administration et de la Conférence internationale du Travail
plus tard durant la session sera pour le Conseil d’administration l’occasion d’examiner le
lien entre ce groupe et le groupe de travail de la Commission de l’application des normes.
Le coût estimé des réunions du groupe de travail sur le mécanisme d’examen des normes
n’inclut pas la prise en charge des frais de voyage des représentants gouvernementaux.
GB.323/PV
22 GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx
76. Le représentant du Directeur général (DDG/MR), renvoyant à l’alinéa c) du projet de
décision, déclare qu’aucune recommandation à l’intention du Conseil d’administration n’a
été faite lors de la réunion du Groupe de travail tripartite sur les méthodes de travail de la
Commission de l’application des normes qui s’est tenue le 23 mars 2015. Les résultats de
cette réunion seront élaborés plus avant lors de la réunion à venir du groupe de travail en
juin 2015.
77. Le coordonnateur du groupe des employeurs dit que son groupe peut appuyer le projet de
décision tel qu’amendé par le groupe gouvernemental.
78. Le porte-parole des travailleurs déclare que, globalement, son groupe peut appuyer les
amendements proposés par le groupe gouvernemental, mis à part les termes ajoutés à
l’alinéa b), puisqu’il n’a pas été décidé durant la 322e session (novembre 2014) du Conseil
d’administration de ne pas agir en vertu de l’article 37 de la Constitution.
79. S’exprimant au nom du groupe gouvernemental, une représentante du gouvernement de
l’Italie déclare que la décision adoptée en novembre 2014 reporte l’examen de la création
éventuelle d’un tribunal en vertu du paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution. Son
groupe a souhaité rappeler cette décision dans l’alinéa concerné.
80. Le porte-parole des travailleurs déclare que, au vu de cette explication, il conviendrait
d’ajouter un alinéa distinct relatif à l’action au titre du paragraphe 1 de l’article 37 sur
laquelle aucune décision n’a été prise en novembre 2014.
81. Le représentant du Directeur général (DDG/MR) propose de modifier l’alinéa b) comme
suit: «en application de la décision prise en novembre 2014, décide, à la lumière du résultat
et du rapport…».
82. S’exprimant au nom du groupe gouvernemental, la représentante du gouvernement de
l’Italie souscrit au libellé proposé par le représentant du Directeur général.
83. Le porte-parole des travailleurs et le coordonnateur du groupe des employeurs souscrivent
également au libellé proposé par le représentant du Directeur général.
Décision
84. Le Conseil d’administration:
a) a pris note du résultat et du rapport de la Réunion tripartite sur la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de
l’action de grève au niveau national;
b) en application de la décision prise lors de la 322e session du Conseil
d’administration (novembre 2014) a décidé, à la lumière du résultat et du
rapport de la réunion tripartite, de ne prendre dans l’immédiat aucune
mesure au titre de l’article 37 de la Constitution pour résoudre la question
de l’interprétation de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève;
c) a décidé de prendre les mesures voulues pour assurer le bon fonctionnement
de la Commission de l’application des normes à la 104e session de la
Conférence internationale du Travail (juin 2015), en tenant compte des
recommandations formulées par le Groupe de travail sur les méthodes de
GB.323/PV
GB323_PV-[RELME-150613-1]-Fr.docx 23
travail de la Commission de l’application des normes de la Conférence,
notamment en ce qui concerne l’établissement de la liste des cas et
l’adoption des conclusions;
d) a demandé à toutes les parties concernées, compte tenu des engagements
pris à la réunion tripartite et à la 323e session (mars 2015) du Conseil
d’administration, de contribuer à la conclusion satisfaisante des travaux de
la Commission de l’application des normes de la Conférence, à la
104e session (juin 2015) de la Conférence internationale du Travail;
e) a décidé de créer, dans le cadre du mécanisme d’examen des normes, un
groupe de travail tripartite composé de 32 membres, 16 représentant les
gouvernements, 8 représentant les employeurs et 8 représentant les
travailleurs, qui se réuniront une fois par an pendant une semaine;
f) a demandé au Directeur général de préparer, pour ce groupe de travail
tripartite, un projet de mandat qui sera présenté pour examen et décision au
Conseil d’administration, à sa 325e session (novembre 2015);
g) a décidé que ce groupe de travail tripartite fera rapport au Conseil
d’administration à sa 325e session (novembre 2015) sur les progrès
accomplis dans la mise en oeuvre du mécanisme d’examen des normes;
h) a demandé au président de la Commission d’experts pour l’application des
conventions et recommandations (CEACR), le juge Abdul Koroma (Sierra
Leone), et au président du Comité de la liberté syndicale, le professeur Paul
van der Heijden (Pays-Bas), de préparer ensemble un rapport qui sera
présenté à la 326e session (mars 2016) du Conseil d’administration, sur
l’interaction, le fonctionnement et l’amélioration possible des différentes
procédures de contrôle découlant des articles 22, 23, 24 et 26 de la
Constitution de l’OIT et du mécanisme de traitement des plaintes relatives à
la liberté syndicale;
i) a décidé que le coût des mesures proposées dans le document GB.323/INS/5
qui, selon les estimations, pourrait atteindre 226 800 dollars E.-U. en 2015 et
707 200 dollars E.-U. en 2016-17 sera financé en premier lieu par des
économies réalisées dans la Partie I du budget pour les périodes biennales
correspondantes ou, à défaut, par l’utilisation de la Partie II, étant entendu
que, si par la suite cela se révélait impossible, le Directeur général
proposerait d’autres méthodes de financement;
j) a décidé d’inscrire à l’ordre du jour de sa 328e session (novembre 2016) un
examen général de cette décision, sans préjudice de toute autre question
découlant de l’initiative sur les normes qui pourrait nécessiter un examen
préalable.
(Document GB.323/INS/5, paragraphe 25, tel que modifié.)
Document no 38
GB.344/INS/5, Plan de travail visant à renforcer le
système de contrôle: propositions concernant de
nouvelles dispositions en vue d’assurer la sécurité
juridique et point sur les autres mesures contenues dans
le plan de travail, février 2022
GB.344/INS/5
Ce document est publié en édition limitée afin de minimiser l'impact environnemental des activités et procédures de l'OIT et de contribuer à la neutralité et à
l'efficacité climatiques. Les membres du Conseil d'administration et les observateurs sont invités à apporter leurs propres exemplaires aux réunions et à ne pas
demander d'autres exemplaires. Tous les documents du Conseil d'administration sont disponibles sur Internet à l'adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
344ᵉ session, Genève, mars 2022
Section institutionnelle INS
Date: 16 février 2022
Original: anglais
Cinquième question à l’ordre du jour
Plan de travail visant à renforcer le système
de contrôle: propositions concernant de nouvelles
dispositions en vue d’assurer la sécurité juridique
et point sur les autres mesures contenues
dans le plan de travail
Le présent document rend compte du résultat des consultations tripartites informelles qui se sont tenues en
janvier 2020 et dans le cadre desquelles a eu lieu un échange de vues tripartite sur les propositions concernant
les nouvelles dispositions à envisager pour assurer la sécurité juridique. Cet échange s’appuyait sur un document
du Bureau traitant des éléments et des conditions nécessaires à la mise en place d’un organe indépendant en
vertu du paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution et de toute autre option fondée sur un consensus, ainsi
que de la procédure prévue au paragraphe 1 de l’article 37. Le présent document contient un complément
d’information sur les progrès accomplis dans la mise en oeuvre de certaines propositions du plan de travail visant
à renforcer le système de contrôle.
Note: L’examen de cette question est reporté depuis la 338e session (mars 2020) du Conseil d’administration, auquel
un document sur le sujet a été soumis pour information à ses 341e et 343e sessions. Le présent document est le
même que le document GB.343/INS/INF/5(Rev.1), à l’exception de quelques modifications apportées au
paragraphe 73 et à l’annexe II. Un projet de décision a été ajouté au paragraphe 74.
Objectifs stratégiques pertinents: Les quatre objectifs stratégiques.
Principaux résultats: Résultat 2: Des normes internationales du travail et un système de contrôle efficace et
faisant autorité et Résultat facilitateur B: Une gouvernance efficace et efficiente de l’Organisation.
Objet du document
GB.344/INS/5 2
Incidences sur le plan des politiques: Aucune à ce stade.
Incidences financières: Aucune à ce stade.
Suivi nécessaire: Il dépendra des décisions prises par le Conseil d’administration.
Unité auteur: Bureau du Conseiller juridique (JUR) et Département des normes internationales du travail
(NORMES).
Documents connexes: GB.343/INS/INF/5(Rev.1); GB.341/INS/INF/1; GB.337/INS/5; GB.337/PV; GB.335/INS/5;
GB.335/PV; GB.334/INS/5; GB.334/PV; GB.332/INS/5(Rev.); GB.332/PV; GB.331/INS/5; GB.331/INS/3;
GB.331/POL/2; GB.331/PFA/5; GB.331/PV; GB.329/INS/5; GB.329/INS/5(Add.)(Rev.); GB.329/PV; GB.328/LILS/2/2;
GB.328/INS/6; GB.328/PV; GB.326/LILS/3/1; GB.326/PV; GB.323/INS/5; GB.323/PV.
GB.344/INS/5 3
Table des matières
Introduction .............................................................................................................................................. 5
Sécurité juridique, interprétation des conventions internationales du travail
et ordre constitutionnel de l’OIT ............................................................................................................ 5
Précédentes discussions tripartites ................................................................................................ 5
Principe de sécurité juridique .......................................................................................................... 7
Principales caractéristiques de la procédure consultative de la CIJ
au titre du paragraphe 1 de l’article 37 .......................................................................................... 8
Aperçu du cadre juridique pour l’institution d’un éventuel tribunal interne
en vertu du paragraphe 2 de l’article 37 ........................................................................................ 13
Rôle des modalités fondées sur un consensus tripartite ............................................................ 18
Considérations finales ....................................................................................................................... 19
Plan de travail révisé visant à renforcer le système de contrôle – Point sur certains
éléments du plan de travail .................................................................................................................... 21
Guide des pratiques établies au sein du système de contrôle et codification
de la procédure prévue à l’article 26 (actions 1.1 et 2.1) ............................................................. 21
Projet de décision ..................................................................................................................................... 22
Annexes
I. Décisions prises par le Conseil d’administration sur le renforcement
du système de contrôle ..................................................................................................................... 23
II. Plan de travail et calendrier des discussions au Conseil d’administration concernant
le renforcement du système de contrôle ....................................................................................... 27
GB.344/INS/5 5
Introduction
1. Le plan de travail révisé relatif au renforcement du système de contrôle, approuvé par le
Conseil d’administration en mars 2017 1, prévoyait, au titre de l’action 2.3 sur la sécurité
juridique, que des orientations seraient demandées au Conseil d’administration concernant les
modalités d’un éventuel échange de vues tripartite sur l’article 37, paragraphe 2, de la
Constitution et sur les éléments et les conditions nécessaires à la mise en place d’un organe
indépendant chargé d’interpréter les conventions internationales du travail. À sa 335e session
(mars 2019), le Conseil d’administration, «en ce qui concerne la proposition d’envisager de
nouvelles dispositions pour assurer la sécurité juridique», a décidé de tenir des consultations
informelles en janvier 2020 et, pour faciliter l’échange de vues tripartite susmentionné, il a
demandé au Bureau d’établir un document sur les éléments et conditions nécessaires à la mise
en place d’un organe indépendant en vertu du paragraphe 2 de l’article 37 et de toute autre
option fondée sur un consensus, ainsi qu’en vertu de la procédure prévue au paragraphe 1 de
l’article 37 2.
2. En janvier 2020, le Bureau a organisé l’échange de vues tripartite sur les nouvelles dispositions
à envisager pour assurer la sécurité juridique, aux fins duquel il avait établi un document
précisant ce que recouvre la sécurité juridique et ce qu’elle implique pour l’interprétation des
conventions. L’échange de vues tripartite a permis de consolider la position commune selon
laquelle: i) l’article 37 établit le seul mécanisme constitutionnel à même d’assurer la sécurité
juridique en matière d’interprétation des conventions; ii) l’ordre constitutionnel en vigueur de
l’Organisation fait obligation aux mandants tripartites de soumettre toutes questions ou
difficultés relatives à l’interprétation des conventions à la Cour internationale de Justice (CIJ)
ou, éventuellement, à un tribunal interne à l’Organisation.
3. Le présent document donne des précisions sur le document qui a servi de base à l’échange de
vues tripartite et vise à répondre aux préoccupations qui ont été exprimées dans le cadre de
cet échange. Il fait en outre le point sur l’état d’avancement de certaines mesures du plan de
travail révisé visant à renforcer le système de contrôle.
Sécurité juridique, interprétation des conventions
internationales du travail et ordre
constitutionnel de l’OIT
Précédentes discussions tripartites
4. Des discussions et consultations de grande ampleur ont déjà eu lieu au sujet des conditions et
des modalités d’une éventuelle utilisation des possibilités énoncées dans l’article 37 de la
Constitution en vue de résoudre toutes questions ou difficultés relatives à l’interprétation
d’une convention. Le Conseil d’administration a tenu deux discussions de fond en la matière.
1 GB.329/INS/5(Add.)(Rev.).
2 GB.335/PV, paragr. 304 g).
GB.344/INS/5 6
5. La première a eu lieu à la 256e session du Conseil d’administration, en 1993. Le document de
travail qui a servi de base à cette discussion revenait tout d’abord sur l’origine et le but de
l’article 37, paragraphe 2, puis décrivait comment le problème de l’interprétation avait été
traité et quelles étaient les limites de l’approche qui avait été suivie à cet effet et, enfin,
examinait la question de savoir si un tribunal institué en vertu de l’article 37, paragraphe 2,
pouvait compléter utilement le dispositif existant 3. Bien qu’ils aient accueilli favorablement le
document, les membres du Conseil d’administration n’en ont pas discuté en détail et ont dans
l’ensemble estimé que la création d’un tribunal en vertu de l’article 37, paragraphe 2, devait
être examinée plus avant 4.
6. Plus récemment, le Conseil d’administration, à sa 320e session (mars 2014), a demandé au
Directeur général d’établir un document exposant les modalités, la portée et le coût possibles
des mesures pouvant être prises en vertu de l’article 37 de la Constitution de l’OIT en cas de
question ou de difficulté concernant l’interprétation d’une convention de l’OIT. Présenté au
Conseil d’administration à sa 322e session (octobre-novembre 2014), le document du Bureau
traitait successivement du paragraphe 1 et du paragraphe 2 de l’article 37. La première partie
du document, consacrée au paragraphe 1, énonçait les principales caractéristiques et les
aspects procéduraux de la fonction consultative de la CIJ. Les informations juridiques et
pratiques figurant dans ce document demeurent entièrement valables et à jour 5. La seconde
partie contenait un projet de statut du tribunal interne susceptible d’être mis en place en vertu
de l’article 37, paragraphe 2. À l’issue de la discussion, le Conseil d’administration a décidé de
reporter la poursuite de l’examen de la création éventuelle d’un tribunal interne en vertu de
l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution 6.
7. Il est ressorti des discussions tenues par le Conseil d’administration en novembre 2018 et mars
2019 que la nécessité d’assurer la sécurité juridique sur le plan normatif faisait l’objet d’un
accord général, en particulier lorsqu’il s’agissait de résoudre des difficultés relatives à
l’interprétation des normes internationales du travail 7. Dans le cadre de ces discussions, des
mandants ont demandé des explications quant au sens et à l’utilité du principe de sécurité
juridique 8. On rappellera à ce sujet que, dans leur position commune sur le système de
contrôle de l’OIT formulée le 13 mars 2017, le groupe des travailleurs et le groupe des
employeurs ont fait observer que «l’interprétation des conventions continue de susciter des
divergences de points de vue et des conflits» 9.
8. Compte tenu de ces précédentes discussions et du récent échange de vues tripartite, l’analyse
figurant dans le présent document a pour objet de faire ressortir les principales
caractéristiques du cadre constitutionnel pour un règlement définitif et faisant autorité des
différends en matière d’interprétation et de préciser ce qui est laissé à la discrétion des
mandants tripartites au sein de ce cadre constitutionnel. Cette analyse, exposée ci-après,
comporte trois parties. La première passe en revue les modalités de la procédure à suivre pour
solliciter l’avis consultatif de la CIJ. La deuxième apporte des précisions sur les paramètres
3 GB.256/SC/2/2.
4 GB.256/11/22, paragr. 10 à 15, et GB.256/PV(Rev.), VI/3 et VI/4.
5 GB.322/INS/5.
6 GB.322/PV, paragr. 209 4).
7 GB.335/PV, paragr. 240.
8 GB.334/PV, paragr. 254.
9 GB.329/PV, annexe II, Position commune du groupe des travailleurs et du groupe des employeurs sur le système de contrôle
de l’OIT, 219.
GB.344/INS/5 7
essentiels de la création et du fonctionnement d’un tribunal interne. La troisième contient des
considérations quant à la manière dont les modalités fondées sur un consensus tripartite
peuvent contribuer à promouvoir la sécurité juridique.
Principe de sécurité juridique
9. La sécurité juridique peut se définir comme la clarté, l’absence d’ambiguïté et la stabilité qui
doivent caractériser un système de droit afin de permettre aux personnes relevant de ce
système de régler leur conduite conformément à la loi 10. La sécurité juridique est un élément
fondamental du principe de l’état de droit 11 et remplit une triple fonction en étant un facteur
de certitude (certitudo), de sécurité (securitas) et de bonne foi (fides) dans l’élaboration,
l’interprétation ou l’application de la loi 12.
10. Lorsqu’il s’agit d’interpréter des conventions internationales du travail, la sécurité juridique
suppose de pouvoir obtenir des avis définitifs et non ambigus sur le champ d’application et le
sens des dispositions des conventions afin que les États parties, ou les États qui envisagent de
ratifier les instruments en question, puissent pleinement apprécier la nature et l’étendue des
obligations découlant de la ratification et adapter la législation et la pratique nationales en
conséquence.
11. En ce sens, le recours à la fonction consultative de la CIJ ou l’établissement d’un tribunal interne
permettraient de gagner en stabilité et en prévisibilité en matière d’interprétation des
conventions, ce qui pourrait avoir une incidence positive sur la ratification et l’application des
conventions et, plus largement, sur la crédibilité de l’OIT et sur l’efficacité et la transparence
de son système de contrôle de l’application des normes. En effet, s’il existait des procédures
pleinement opérationnelles à même de résoudre rapidement et définitivement des différends
en matière d’interprétation, le corpus normatif de l’OIT pourrait être davantage perçu comme
un «code international du travail» intégré et cohérent.
12. En outre, compte tenu du nombre croissant d’accords internationaux et de mécanismes de
règlement des différends qui ont une incidence sur les normes internationales du travail mais
qui s’appliquent en dehors de l’Organisation, le fait pour l’OIT de faire usage des prescriptions
constitutionnelles de l’article 37 et de s’y conformer lui permettrait de contrebalancer, de
maîtriser ou encore d’influencer cette évolution, au moyen d’une procédure connue et
contrôlée par les mandants. Des interprétations contraignantes et faisant autorité obtenues
par l’intermédiaire de la CIJ en vertu de l’article 37, paragraphe 1, ou par l’intermédiaire d’un
organe judiciaire interne sous réserve des conditions énoncées à l’article 37, paragraphe 2,
auraient pour effet de protéger et de préserver l’intégrité du corpus normatif de l’OIT et
diminuerait efficacement le risque de voir des entités extérieures à l’Organisation «interpréter»
les normes de l’OIT sans que celle-ci puisse exercer une quelconque influence sur cette
10 Black’s Law Dictionary, dixième édition.
11 Selon les mots du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, «[l’]“état de droit” […] désigne un principe de
gouvernance en vertu duquel l’ensemble des individus, des institutions et des entités […] ont à répondre de l’observation de
lois promulguées publiquement, appliquées de façon identique pour tous et administrées de manière indépendante […]. Il
implique, d’autre part, des mesures propres à assurer le respect des principes de la primauté du droit, de l’égalité devant la
loi, de la responsabilité au regard de la loi, de l’équité dans l’application de la loi, […] de la sécurité juridique, du refus de
l’arbitraire et de la transparence des procédures et des processus législatifs.» Voir «Rétablissement de l’état de droit et
administration de la justice pendant la période de transition dans les sociétés en proie à un conflit ou sortant d’un conflit»,
S/2004/616, paragr. 6.
12 Voir, par exemple, Robert Kolb, «La sécurité juridique en droit international: aspects théoriques», African Yearbook of
International Law, 2002, vol. 10, 103.
GB.344/INS/5 8
interprétation. Par conséquent, l’article 37 est essentiel pour assurer la sécurité juridique et
éviter une certaine fragmentation de l’interprétation des conventions de l’OIT.
Principales caractéristiques de la procédure consultative
de la CIJ au titre du paragraphe 1 de l’article 37
Théorie et pratique constitutionnelles
13. L’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT dispose que «toutes questions ou
difficultés» (any question or dispute) relatives à l’interprétation de la Constitution ou de toute
convention internationale du travail conclue par les États Membres, en vertu de ladite
Constitution, seront soumises à «l’appréciation» de la CIJ. Les termes «question» et «dispute»
utilisés dans la version anglaise sont directement tirés de l’article 14 du Pacte de la Société des
Nations, qui disposait que la Cour donnerait des avis consultatifs sur tout différend (dispute)
ou tout point (question) dont la saisirait le Conseil ou l’Assemblée, et ont été incorporés par la
Commission de la législation internationale du travail dans ce qui allait devenir l’article 37 de
la Constitution. Il semble que ces deux termes aient été utilisés dans le Pacte afin de ne pas
restreindre l’étendue de la fonction consultative de la Cour permanente de justice
internationale (CPJI). En effet, en droit international, un différend désigne «un désaccord sur
un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposition de thèses juridiques ou d’intérêts
entre deux personnes» 13, alors que le terme «point» (ou question) a une portée suffisamment
large pour permettre la soumission de toute demande d’interprétation à la Cour 14. Cela ne
signifie évidemment pas que toute question peut, ou doit, être soumise à la Cour. Il appartient
au Conseil d’administration de déterminer s’il existe une question ou une difficulté
d’interprétation qui, en principe, devrait aboutir à une requête pour avis consultatif de la Cour.
À l’heure actuelle, un différend en matière d’interprétation est pendant; il concerne la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
14. Les différends en matière d’interprétation sont à distinguer des simples désaccords exprimés
occasionnellement quant au sens des normes internationales du travail, ainsi que des
demandes d’éclaircissements ou de conseils adressées au Bureau. Un désaccord concernant
le champ d’application ou le sens de certaines dispositions peut survenir sans que cela remette
nécessairement en question la validité des commentaires, conclusions ou recommandations
formulés par les organes de contrôle, ni la compétence de ces derniers en la matière. Les
demandes adressées au Bureau visent à obtenir des éclaircissements sur le sens de certaines
dispositions et nécessitent principalement d’examiner attentivement les travaux préparatoires
relatifs à ces dispositions.
15. Au regard de la théorie et de la pratique constitutionnelles, l’article 37, paragraphe 1, a
toujours été compris comme conférant un effet contraignant et définitif aux avis consultatifs
obtenus en application de cette disposition. Dans ses premières années d’existence, l’OIT (en
réalité, la Société des Nations agissant sur demande de l’Organisation) a sollicité l’avis
consultatif de la CPJI à six reprises entre 1922 et 1932 en vertu de la disposition figurant dans
la Constitution de 1919 – quasiment identique au libellé actuel de l’article 37, paragraphe 1. La
13 Affaire des concessions Mavrommatis en Palestine, Cour permanente de justice internationale, Recueil des arrêts, série A,
no 2, 11.
14 Le mot «point» (question) employé à l’article 14 du Pacte de la Société des Nations désigne généralement d’autres questions
que des différends, ou des éléments détachés d’un différend, ou encore des questions de droit considérées indépendamment
d’un litige; voir Robert Kolb (dir. de publication), Commentaire sur le Pacte de la Société des Nations, 2014, 593.
GB.344/INS/5 9
CPJI a rendu cinq avis consultatifs sur l’interprétation de la Constitution et un avis consultatif
sur l’interprétation de la convention (no 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919. Ces six avis ont
tous été rapidement acceptés et suivis d’effet. Ainsi, par exemple, à la suite de l’avis rendu par
la CPJI sur l’interprétation de la convention no 4, la Conférence a décidé que cette convention
devait être révisée et a en conséquence adopté la convention (no 41) (révisée) du travail de nuit
(femmes), 1934 15.
16. Ces six avis ont tous été une source précieuse d’éléments d’appréciation et d’orientations au
sujet du mandat, du champ d’action et de la fonction normative de l’Organisation. Le premier
avis consultatif, qui portait sur l’article 3, paragraphe 5, de la Constitution, a apporté un
éclairage – qui reste d’actualité – sur la question du mode de désignation des délégués non
gouvernementaux à la Conférence. L’avis relatif au travail de nuit des femmes a abouti à la
révision de la convention no 4, et les trois autres avis relatifs à la compétence de l’OIT ont
confirmé que l’action normative pouvait s’étendre aux travaux du secteur agricole et régir les
activités des employeurs. L’avis consultatif sur la Ville libre de Dantzig a, quant à lui, établi que
la capacité d’une entité de participer librement aux activités de l’OIT, en accomplissant
notamment des actes tels que la ratification des conventions internationales du travail, était
une condition préalable au statut d’État et, partant, à l’acquisition de la qualité de Membre de
l’Organisation.
17. Depuis que la CIJ a succédé à la CPJI, l’OIT n’a pas sollicité son avis consultatif sur une question
d’interprétation. S’agissant des raisons pour lesquelles il n’a pas été recouru à l’article 37
depuis 1932, il y a lieu de rappeler qu’en 1919, le cadre constitutionnel initial établissait une
distinction entre trois fonctions normatives: l’adoption des normes internationales du travail,
le contrôle de leur application et leur interprétation. Au fil du temps, et en particulier après la
réforme constitutionnelle de 1946, les organes de contrôle ont joué un rôle de plus en plus
important dans l’«interprétation» des normes internationales du travail dans l’exercice de leurs
responsabilités. Pendant une longue période, leurs avis ont été considérés globalement
suffisants pour préserver la sécurité juridique. L’expérience récente montre toutefois que,
dans les cas où les commentaires ou les conclusions formulés par les organes de contrôle sont
jugés insuffisants pour préserver la sécurité juridique, il convient de recourir à la procédure
prévue à l’article 37, paragraphe 1, afin d’empêcher qu’un différend en matière d’interprétation
crée une controverse ou une incertitude juridique telle que la poursuite harmonieuse des
activités normatives de l’Organisation en serait compromise.
18. On rappellera qu’un tel avis peut être demandé pour une interprétation ou des «questions ou
difficultés relatives à l’interprétation» en vertu de l’article 37, paragraphe 1, ou encore pour
«des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de [l’activité de l’OIT]» en vertu de
l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord entre les Nations Unies et l’Organisation internationale
du Travail de 1946.
Nature juridique de l’article 37
19. L’article 37 de la Constitution de l’OIT est le parfait exemple de ce que l’on désigne plus
communément par «clause de règlement des différends», c’est-à-dire une disposition arrêtant
la méthode, la technique ou la procédure qui devrait être utilisée pour résoudre les
contestations futures découlant de l’application ou de l’interprétation d’un traité international.
De par sa nature, une clause de règlement des différends prévoit donc une procédure
15 Interprétation de la convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes (Avis consultatif no 25; CPJI, série A/B, no 50),
Oxford Public International Law.
GB.344/INS/5 10
obligatoire et non facultative; elle prescrit en des termes plus ou moins précis une solution
juridique particulière à l’exclusion de toute autre.
20. Pour ce qui est de l’article 37, en particulier, le libellé général traduit l’idée d’une obligation
juridique directe encore plus forte, «toutes» les difficultés d’interprétation étant soumises à
l’appréciation de la CIJ («any dispute relating to the interpretation [...] shall be referred»). Si
l’intention avait été de laisser aux parties une marge de manoeuvre, les rédacteurs auraient
précisé qu’une question «peut être soumise» à la CIJ ou auraient conditionné la saisine de la
Cour à l’incapacité de résoudre la question par d’autres moyens. C’est par exemple le cas de la
Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, dont la section 32
stipule que toutes les contestations sont portées devant la CIJ «à moins que, dans un cas
donné, les parties ne conviennent d’avoir recours à un autre mode de règlement» 16.
21. Suivant le cadre juridique autonome défini par les rédacteurs de la Constitution de l’OIT, le
recours à la fonction consultative de la CIJ apparaît comme obligatoire dans tous les cas. Si,
d’un point de vue procédural, la soumission d’une question à la Cour doit être examinée et
décidée par l’organe compétent, l’instance et la méthode de règlement sont expressément
mentionnées à l’article 37, paragraphe 1. L’article 37, paragraphe 2, a complété ce cadre en
1946 en prévoyant la possibilité d’instituer une instance judiciaire distincte aux fins du prompt
règlement des différends relatifs à l’interprétation d’une convention lorsque «[l]es points à
régler […] sont […] si minutieux qu’ils ne valent pas la peine d’être portés devant le principal
organe judiciaire de la communauté internationale» 17. Tant que cette possibilité n’est pas mise
en oeuvre, la saisine de la CIJ pour un avis consultatif en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
reste la seule voie constitutionnelle pour une résolution faisant autorité d’un différend en
matière d’interprétation. Par conséquent, il est difficile de justifier, au regard de la Constitution,
de ne pas recourir à l’article 37 alors même qu’il est communément admis qu’un différend en
matière d’interprétation existe.
Ouverture de la procédure
22. L’OIT peut engager la procédure consultative moyennant une requête écrite adressée par le
Bureau au greffier de la CIJ. Le Bureau doit formuler en termes précis la question
– conformément à la décision du Conseil d’administration – sur laquelle l’avis de la Cour est
demandé et joindre tout document pouvant servir à l’élucider. Cette documentation devrait
contenir toutes les informations de base sur le fond du différend 18.
Compétence et recevabilité
23. Pour que la Cour soit compétente, la question doit être directement liée aux activités de
l’organisation requérante et concerner des questions relevant de son domaine de compétence
16 Voir aussi l’article 75 de la Constitution de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui dispose que toute question ou
différend concernant l’interprétation ou l’application de cette constitution, «qui n’aura pas été réglé par voie de négociation
ou par l’Assemblée de la Santé, sera déféré par les parties à la Cour internationale de Justice», «à moins que les parties
intéressées ne conviennent d’un autre mode de règlement». De même, l’article XVII de la Constitution de l’Organisation pour
l’alimentation et l’agriculture (FAO) dispose que toute question ou tout litige relatif à l’interprétation de la constitution, «et
n’ayant pas été réglé par la Conférence», est porté devant la CIJ.
17 BIT, rapport IV (1), Conférence internationale du Travail, 27e session, 1945, 113.
18 Par exemple, lorsqu’elle a demandé un avis consultatif sur l’interprétation de la convention no 4, l’OIT a communiqué à la
Cour des extraits des comptes rendus des séances de la Conférence internationale du Travail et des procès-verbaux du
Conseil d’administration ainsi que des projets de convention, des rapports du Bureau et des exposés écrits émanant des
mandants.
GB.344/INS/5 11
ou de spécialité. Pour être recevable, la question posée à la Cour doit être de nature juridique.
Le fait que la question peut avoir des dimensions politiques, ou est abstraite ou imprécise, ne
suffit pas, en principe, pour que la Cour refuse de donner un avis. Il est à noter que, si elle le
juge approprié, la Cour peut reformuler ou interpréter la question pour rendre son avis.
Notification et invitation à participer à la procédure
24. La Cour a toujours soigneusement veillé à ce que les informations mises à sa disposition soient
suffisamment complètes et adéquates pour lui permettre d’exercer sa fonction judiciaire. Tous
les États admis à ester en justice devant la Cour et toutes les organisations internationales
jugés par la Cour comme étant susceptibles de fournir des renseignements sur la question
sont invités à présenter des exposés écrits ou oraux, mais n’ont aucune obligation à cet égard.
25. Par conséquent, dans l’hypothèse d’une requête pour avis consultatif sur l’interprétation d’une
convention de l’OIT, il est probable que tous les États Membres, qu’ils aient ou non ratifié la
convention en question, auront la possibilité de participer activement à la procédure et de
communiquer à la Cour les informations pertinentes.
Participation des organisations internationales d’employeurs et de travailleurs
26. La question de savoir si les partenaires sociaux pouvaient participer à la procédure consultative
a été au coeur du débat sur le renvoi éventuel à la CIJ d’une question ou d’une difficulté
concernant l’interprétation d’une convention.
27. Il n’est pas toujours évident de savoir quelles «organisations internationales» sont habilitées à
soumettre des mémoires à la Cour ou à se présenter devant elle, cette expression excluant en
principe la participation des organisations non gouvernementales. Toutefois, il est peu
probable que la Cour fasse une interprétation restrictive de cette expression en ce qui
concerne l’éventuelle participation des organisations internationales d’employeurs et de
travailleurs à une procédure consultative engagée par l’OIT.
28. De fait, à chaque fois qu’un avis consultatif concernant l’OIT a été demandé entre 1922 et 1932,
des organisations internationales d’employeurs et de travailleurs ont été autorisées à
participer à la procédure 19. L’article 66, paragraphe 2, du Statut de la CIJ reproduit l’article 73
du Règlement révisé de la CPJI.
29. En outre, la jurisprudence récente montre que la Cour est disposée à ouvrir sa procédure
consultative à d’autres acteurs que les États et les organisations internationales
intergouvernementales chaque fois que leur participation s’avère essentielle, tant sur le fond
qu’en matière procédurale, compte tenu des aspects concrets du cas d’espèce, en tenant
19 Dans la procédure consultative de 1922 concernant la Désignation du délégué ouvrier néerlandais à la troisième session de la
Conférence internationale du Travail, la Cour a invité l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs, la
Fédération internationale des syndicats ouvriers chrétiens et la Fédération syndicale internationale à participer à la
procédure. La même année, dans la procédure consultative sur la Compétence de l’OIT pour la réglementation internationale
des conditions de travail des personnes employées dans l’agriculture, la Cour a invité six organisations à participer: la
Confédération internationale des syndicats agricoles, la Ligue internationale des sociétés agricoles, la Fédération
internationale des syndicats chrétiens de travailleurs de la terre, la Fédération internationale des travailleurs de la terre, la
Fédération syndicale internationale et l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs. Dans la
procédure consultative de 1926 sur la Compétence de l’OIT pour réglementer accessoirement le travail personnel du patron, la
Cour a invité trois organisations à participer: l’Organisation internationale des employeurs industriels, la Fédération syndicale
internationale et la Confédération internationale des syndicats chrétiens. Dans le cadre de la procédure qui a abouti à l’avis
consultatif de 1932 sur l’Interprétation de la convention de 1919 concernant le travail de nuit des femmes, la Fédération syndicale
internationale et la Confédération internationale des syndicats chrétiens ont présenté des exposés écrits et oraux.
GB.344/INS/5 12
compte de considérations d’équité et de justice, mais aussi de la nécessité d’obtenir
l’information la plus complète possible 20. Il est maintenant bien établi que la Cour adopte une
approche pragmatique afin de s’assurer que tous les intérêts en jeu sont exprimés et fait
preuve d’une certaine souplesse afin d’obtenir le point de vue d’autres parties que les États.
30. Quoi qu’il en soit, dans le cas où un avis consultatif serait demandé, le Bureau pourrait joindre
au dossier accompagnant la demande les mémoires, argumentaires ou autres documents que
le groupe des employeurs et le groupe des travailleurs souhaiteraient porter à la connaissance
de la Cour.
Exposés écrits et oraux
31. La Cour fixe par ordonnance le délai pour toute présentation d’exposés écrits par les États et
les organisations internationales qui ont été invités à participer à la procédure. Le Statut de la
Cour prévoit que les participants à la procédure consultative peuvent se voir accorder un droit
de réponse aux exposés présentés par les autres intervenants. La Cour peut, à sa discrétion,
décider de tenir des audiences publiques pour les exposés oraux.
Demandes appelant une réponse urgente
32. La Cour peut rendre un avis consultatif selon une procédure accélérée si la demande lui en est
faite (délais plus courts pour la présentation des exposés écrits ou absence d’audiences, par
exemple). Elle examine la nécessité de rendre rapidement un avis dans chaque cas d’espèce.
Coûts
33. Les requêtes pour avis consultatifs ne donnent lieu à aucuns dépens hormis les frais liés à la
participation du Bureau à la procédure orale devant la Cour. Le fonctionnement de la CIJ est
financé dans sa totalité par les Nations Unies. Les seules dépenses à couvrir seraient celles qui
auraient éventuellement trait à la reproduction du «dossier», dans le nombre d’exemplaires
requis par le greffe, et aux frais de mission du représentant de l’organisation requérante, s’il
participe à la phase orale de la procédure.
Effet juridique d’un avis consultatif et suivi institutionnel
34. Bien qu’ils ne le soient pas par nature, les avis consultatifs peuvent être acceptés comme étant
contraignants, moyennant une disposition spécifique à cet effet. La Cour a toujours établi une
distinction entre le caractère consultatif de sa fonction et les effets particuliers que les parties
à un différend souhaitaient conférer à ses avis. Conformément à la pratique constitutionnelle,
l’OIT a toujours considéré les avis consultatifs comme contraignants. Concrètement, il
appartiendra aux organes exécutifs de l’OIT d’adopter et de mettre en oeuvre les mesures
– juridiques, politiques, administratives ou autres – nécessaires pour donner plein effet à l’avis
de la Cour. Il convient de rappeler par exemple que la révision de la convention no 4, qui a
finalement conduit à l’adoption de la convention no 41 sur le travail de nuit des femmes, a été
20 Par exemple, dans le cadre de procédures consultatives récentes (Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le
Territoire palestinien occupé, ordonnance du 19 décembre 2003, C.I.J., Recueil 2003, 429, et Conformité au droit international de la
déclaration unilatérale d’indépendance des institutions provisoires d’administration autonome du Kosovo, ordonnance du
17 octobre 2008, C.I.J., Recueil 2008, 410), la Cour a accepté de recevoir des exposés d’entités qui n’étaient ni des États ni des
organisations internationales publiques. Voir aussi Dinah Shelton, «The participation of non-governmental organizations in
international judicial proceedings», American Journal of International Law, vol. 88, 1994, 623.
GB.344/INS/5 13
entreprise en application de l’avis consultatif rendu par la CPJI concernant l’interprétation de
l’article 3 de la convention no 4 21.
35. Pour ce qui est du suivi institutionnel, la Cour a toujours considéré qu’il appartenait à la seule
organisation requérante de décider de l’utilité pratique d’un avis consultatif et que, lorsque la
Cour avait dit le droit, c’était à cette organisation de tirer les conclusions de l’avis rendu.
36. Les six avis consultatifs rendus à la demande de l’OIT ont tous été publiés au Bulletin officiel et
mentionnés dans le rapport du Directeur général à la Conférence. Ils ont en outre rapidement
été mis en oeuvre dans la pratique. Ainsi, à la suite de l’avis consultatif de la Cour relatif à
l’interprétation de la convention no 4, le Conseil d’administration a décidé en 1933 de proposer
la révision de la convention, ce qui a finalement conduit à l’adoption de la convention no 41 en
1934 22.
Aperçu du cadre juridique pour l’institution d’un éventuel
tribunal interne en vertu du paragraphe 2 de l’article 37
Paramètres constitutionnels
37. L’article 37, paragraphe 2, de la Constitution est libellé comme suit: «Nonobstant les
dispositions du paragraphe 1 du présent article, le Conseil d’administration pourra formuler et
soumettre à la Conférence pour approbation des règles pour l’institution d’un tribunal en vue
du prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une
convention, qui pourront être portées devant le tribunal par le Conseil d’administration ou
conformément aux termes de ladite convention. Tous arrêts ou avis consultatifs de la Cour
internationale de Justice lieront tout tribunal institué en vertu du présent paragraphe. Toute
sentence prononcée par un tel tribunal sera communiquée aux Membres de l’Organisation et
toute observation de ceux-ci sera présentée à la Conférence.»
38. Cet article fournit peu d’indications quant à l’organisation et au fonctionnement du tribunal et
laisse donc au Conseil d’administration une grande latitude pour créer cette instance en
fonction des besoins et des préférences. La Constitution définit toutefois, sans entrer dans le
détail, plusieurs paramètres essentiels qui posent le cadre au sein duquel le Conseil
d’administration pourra instituer le tribunal à sa discrétion.
39. Premièrement, selon les termes de l’article 37, paragraphe 2, l’organe indépendant ainsi créé
ne peut être qu’un tribunal, à l’exclusion de tout autre type d’organe composé d’experts, quand
bien même il aurait des fonctions quasi judiciaires. Un tribunal est défini comme une cour de
justice ou un autre organe juridictionnel 23 ou comme un «organe juridictionnel institué pour
statuer sur des litiges qui lui sont soumis par décision obligatoire en appliquant les règles du
droit» 24. De même, il convient de noter que le tribunal prononce des «sentences», qui sont des
«acte[s] juridictionnel[s] dont l’objet est de trancher de manière définitive et obligatoire une
contestation» 25. Il s’ensuit que le tribunal mentionné à l’article 37, paragraphe 2, doit être
composé de juges répondant à des critères élevés d’expertise juridique, d’intégrité et
21 Voir la note de bas de page 14.
22 BIT, voir Procès-verbaux de la 64e session du Conseil d’administration, 1933, 20; Compte rendu des travaux, CIT, 18e session,
1934, 196, 202.
23 Black’s Law Dictionary, dixième édition.
24 Émile Bruylant, Dictionnaire de droit international public, 2001.
25 Émile Bruylant, 2001.
GB.344/INS/5 14
d’impartialité. Les mandants qui ont participé à l’échange de vues tripartite organisé au cours
du mois de janvier 2020 ont souligné qu’il était important que les juges remplissent ces critères
et ont considéré de manière générale qu’une composition tripartite n’était pas appropriée pour
un tribunal.
40. Les travaux préparatoires 26 à l’élaboration de l’article 37, paragraphe 2, confirment que les
termes «tribunal» et «sentence», qui figurent dans cette disposition, se rapportent à un
règlement judiciaire et ne laissent aucun doute quant au fait que les sentences du tribunal
seraient contraignantes et opposables à tous, sous réserve exclusive de tout arrêt ou avis
consultatif pertinent de la CIJ 27.
41. Deuxièmement, le tribunal a pour vocation de garantir le «prompt règlement» de toute
question ou difficulté relative à l’interprétation d’une convention. Cela signifie que certaines
questions d’interprétation devraient pouvoir être tranchées rapidement par un tribunal
interne. Au cours des discussions de la Conférence qui ont abouti à l’amendement
constitutionnel de 1946, une distinction a été faite entre les questions susceptibles d’être
portées devant le tribunal et celles qui devaient être renvoyées à la CIJ. Si en principe – dans
l’hypothèse où un tribunal serait créé – toute question ou difficulté pourrait être portée devant
l’une ou l’autre de ces instances, cette décision étant laissée à l’appréciation du Conseil
d’administration, il a toutefois été admis que certaines questions relatives au champ
d’application ou à la signification de telles ou telles dispositions de conventions internationales
du travail ne justifiaient peut-être pas la saisine du principal organe judiciaire des Nations
Unies 28. Par conséquent, on peut considérer que les questions ayant de vastes conséquences
à l’échelle de l’Organisation, et au-delà, pourraient être renvoyées à la CIJ, tandis que celles qui
sont essentiellement de nature technique et qui ont des incidences limitées en dehors du cadre
de la convention concernée pourraient, en premier ressort, être portées devant le tribunal.
42. Troisièmement, les règles instituant le tribunal – notamment un statut, qui en serait
l’instrument constitutif, et un règlement – seront établies par le Conseil d’administration et
approuvées par la Conférence. Le Bureau pourrait fournir un appui à l’élaboration de ces règles
en se fondant sur la pratique des autres tribunaux internationaux chargés d’interpréter les
traités internationaux.
43. Quatrièmement, toute question ou difficulté d’interprétation ne pourrait être soumise à un
tribunal que par le Conseil d’administration ou conformément aux dispositions de la
convention concernée. À ce stade, seules les questions d’interprétation soumises par le Conseil
d’administration pourraient être traitées par le tribunal. Si celui-ci était créé, on pourrait
ajouter aux dispositions finales des conventions futures une clause type prévoyant la
soumission à ce tribunal des différends portant sur des questions d’interprétation.
44. Cinquièmement, tout arrêt ou avis consultatif de la CIJ liera le tribunal, ce qui signifie que les
sentences qu’il prononcera pourront éventuellement être contestées «en appel» devant la CIJ.
26 La délégation tripartite de la Conférence pour les questions constitutionnelles, qui a examiné l’article 37, paragraphe 2, en
1946, a souligné la nécessité d’une interprétation uniforme des textes et a estimé que les sentences du tribunal devraient
avoir force obligatoire pour tous les États Membres.
27 Article 37, paragraphe 2. La CIJ n’est pas une cour d’appel pour quelque tribunal international que ce soit (voir
https://www.icj-cij.org/fr/questions-frequemment-posees). Toutefois, les observations formulées concernant les décisions du
tribunal seront soumises à la Conférence (article 37, paragraphe 2). Dans le cas où une décision du tribunal serait contestée,
il serait toujours possible de demander un avis consultatif à la CIJ en application de l’article 37, paragraphe 1.
28 BIT, rapport IV (1), Conférence internationale du Travail, 27e session, 1945, 113.
GB.344/INS/5 15
45. Sixièmement, les décisions rendues par le tribunal seront communiquées aux Membres de
l’Organisation afin que ceux-ci puissent faire des observations, lesquelles seront présentées à
la Conférence. Il semble que l’intention des rédacteurs ait été de veiller à ce que tous les États
Membres de l’OIT soient informés des sentences du tribunal et aient la possibilité d’exprimer
leurs vues devant la Conférence. La communication des observations des États Membres à la
Conférence n’entraînerait pas, en principe, la réouverture du débat de fond sur la question
d’interprétation, à moins que des mandants souhaitent «faire appel» de la sentence en
saisissant la CIJ pour qu’elle rende une décision définitive. L’accent a par conséquent été placé
à la fois sur la nature publique de la procédure et sur la possibilité pour les Membres de
l’Organisation et la Conférence de tirer les conséquences d’une interprétation particulière faite
par le tribunal, y compris en procédant à la révision de la convention interprétée par ce dernier.
Conformément à la pratique d’autres cours et tribunaux internationaux, les travaux pourraient
être rendus publics, dans les limites éventuellement fixées par le Conseil d’administration ou
le tribunal lui-même.
46. Dans le respect de ces paramètres constitutionnels, il serait utile de mettre en lumière les
spécificités d’un tribunal interne. Deux éléments majeurs pourraient renforcer le rôle du
tripartisme en matière d’interprétation et constitueraient des garde-fous importants pour les
mandants s’agissant de décisions qui auraient un effet obligatoire et s’appliqueraient à tous
les États Membres. D’une part, l’élaboration et l’adoption de règles pour l’institution d’un
tribunal en application de l’article 37, paragraphe 2, permettraient aux mandants de définir les
modalités de création d’un mécanisme d’interprétation faisant autorité ainsi que son
intégration dans le système global de contrôle de l’application des normes. D’autre part, des
règles instituant une procédure contradictoire et la possibilité d’une procédure orale
permettraient aux mandants tripartites de contribuer activement à l’élaboration d’un corpus
d’interprétation sur des questions importantes concernant les normes.
47. Il convient en outre de rappeler que le tribunal aurait pour vocation première de permettre le
prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une convention.
Contrairement à la CIJ qui est saisie tous les ans d’un grand nombre d’affaires et de requêtes
d’avis consultatif, le tribunal siégerait sur saisine et aurait à traiter exclusivement des
demandes d’interprétation soumises par le Conseil d’administration, ce qui serait un gage de
rapidité procédurale. Autre caractéristique importante du tribunal, sa structure et ses
procédures relèveraient du contrôle du Conseil d’administration et offriraient donc davantage
de souplesse que celles de la CIJ. En outre, comme cela a déjà été mentionné, le tribunal
pourrait être saisi de toutes les questions d’interprétation qui ne sembleraient pas nécessiter
un renvoi devant le principal organe judiciaire des Nations Unies.
Structure et composition
48. Le Conseil d’administration aurait à décider s’il souhaite ou non instituer une structure
permanente. Cela dépendrait largement de la charge de travail envisagée pour le tribunal. Le
nombre exact de requêtes d’interprétation futures pouvant être difficile à prévoir avec
précision, il serait sans doute judicieux d’envisager l’instauration d’un mécanisme fonctionnant
sur demande, ou à titre expérimental pour une durée de trois à cinq ans.
49. L’article 37, paragraphe 2, ne traitant pas de la composition d’un tribunal interne (nombre de
juges et qualifications requises), il appartiendrait au Conseil d’administration de fixer le
nombre de juges (éventuellement entre trois et sept) et d’établir les critères d’éligibilité. La
composition d’un tribunal international répond généralement à deux impératifs: sélectionner
des juges de haute moralité et ayant d’excellentes qualifications professionnelles et assurer
l’équilibre géographique et l’équilibre entre hommes et femmes. Le Conseil d’administration
GB.344/INS/5 16
pourrait aussi envisager de désigner des assesseurs choisis par le groupe des employeurs et
le groupe des travailleurs et spécialement chargés d’apporter des contributions techniques
sans exercer aucun pouvoir décisionnel. Le statut du tribunal devrait aussi régir certaines
questions concernant les juges, telles que les incompatibilités, la démission, les conflits
d’intérêts et la récusation, la destitution et les honoraires.
Sélection et mandat des juges
50. Le Conseil d’administration aurait à établir les règles applicables à la sélection et à la
désignation des juges, notamment la recherche de candidats par le Bureau, les
recommandations soumises par le Directeur général, l’examen des candidatures admissibles
par le Conseil d’administration et leur approbation par la Conférence.
51. La durée du mandat des juges devrait être fixée par le statut du tribunal. La pratique des cours
et tribunaux internationaux varie considérablement en la matière, qu’il s’agisse du nombre
d’années fixé ou de la possibilité de renouvellement d’un mandat. Étant donné qu’il est difficile
de prévoir la charge de travail et qu’il importe de garantir l’indépendance du tribunal, un
mandat relativement long, de cinq à dix ans, pourrait être envisagé.
Dispositions et coûts administratifs
52. Le siège du tribunal serait établi au siège de l’OIT à Genève. Le Directeur général serait chargé
de prendre les dispositions administratives nécessaires au fonctionnement du tribunal. Le
Conseil d’administration devrait décider s’il y a lieu de prévoir un greffe permanent. Si le
mécanisme institué fonctionnait de manière ad hoc ou sur demande, les fonctionnaires du
Bureau affectés au Tribunal administratif de l’OIT pourraient être détachés, en tant que de
besoin, pour assurer le secrétariat du tribunal.
53. Les coûts dépendraient du type de mécanisme (permanent ou sur demande) et des autres
modalités (greffe permanent ou détachement temporaire de fonctionnaires) retenus par le
Conseil d’administration, ainsi que du nombre d’affaires soumises au tribunal. Les dépenses
pourraient être maintenues à un niveau relativement modeste. Il pourrait être décidé par
exemple que les juges ne percevraient des honoraires que s’ils étaient choisis pour siéger sur
une affaire ou encore que les services d’appui et de greffe seraient demandés seulement en
cas de besoin 29.
Relations avec les organes de contrôle
54. Des préoccupations ont souvent été exprimées lors des précédentes discussions sur les
conséquences que pourrait avoir la création d’un tribunal interne sur le statut et l’autorité des
organes de contrôle. Cette question relève en dernier ressort des mandants et devrait être
examinée dans le cadre des règles applicables à l’institution d’un tribunal. Parmi ces règles
pourraient figurer des garanties procédurales propres à assurer que les fonctions et
attributions du tribunal seront clairement distinctes de celles des organes de contrôle 30.
29 Selon une estimation de coûts faite en 2014, il faudrait compter au plus entre 124 100 et 139 100 francs suisses par affaire
pour un tribunal pouvant recevoir et examiner à tout moment des demandes d’interprétation, mais ne siégeant que lorsqu’il
serait saisi d’une question ou d’un différend par le Conseil d’administration. Un tel tribunal ne fonctionnerait donc que
lorsqu’un collège de juges serait constitué pour connaître d’une affaire (voir document GB.322/INS/5, paragr. 100).
30 Voir également le rapport conjoint des présidents de la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations (CEACR) et du Comité de la liberté syndicale, GB.326/LILS/3/1, paragr. 131-136.
GB.344/INS/5 17
Règles de procédure – Ouverture de la procédure
55. En vertu de l’article 37, paragraphe 2, la soumission d’une demande d’interprétation est une
prérogative du Conseil d’administration. Pour déterminer s’il y a lieu de présenter une telle
demande, le Conseil d’administration peut tenir compte de toutes les circonstances pratiques,
juridiques et politiques qu’il juge pertinentes. Lors de l’élaboration des règles, le Conseil
d’administration pourrait également prévoir des critères de recevabilité (par exemple,
tentatives infructueuses visant à résoudre de manière consensuelle une question
d’interprétation, demande spécifique reçue des organes de contrôle ou d’organisations ou
organes extérieurs). Comme cela a déjà été mentionné, les règles pourraient permettre aux
organes de contrôle, ou à d’autres entités restant à déterminer, de présenter une demande au
Conseil d’administration afin que celui-ci saisisse le tribunal sur une question d’interprétation.
En effet, il convient de rappeler que, dans les premières années d’existence de l’Organisation 31,
la commission d’experts et la Commission de l’application des normes de la Conférence ont
appelé l’attention du Conseil d’administration sur un certain nombre de difficultés liées à
l’interprétation des conventions.
Déroulement de la procédure
56. Dans le cas d’une demande d’interprétation soumise par le Conseil d’administration, il n’y
aurait pas à proprement parler de «parties» à un différend. Le statut ou le règlement du
tribunal pourrait prévoir une participation pleinement tripartite à la procédure et permettre à
tout gouvernement d’un État Membre ainsi qu’au groupe des employeurs et au groupe des
travailleurs de soumettre leurs vues au tribunal. Suivant en cela la pratique d’autres tribunaux
internationaux, le Conseil d’administration pourrait décider d’autoriser les organisations ayant
un statut consultatif général, les organisations internationales publiques ou les organisations
internationales non gouvernementales à présenter des mémoires, communément appelés
«mémoires d’amicus curiae», ou d’autoriser le tribunal à inviter ces organisations à lui fournir
toute information pertinente.
57. Les règles formulées par le Conseil d’administration devraient prévoir la longueur et la forme
des exposés écrits et les délais dans lesquels ceux-ci devraient être soumis ainsi que la durée
des exposés oraux. Une autre possibilité serait de laisser ces questions, ou certains de leurs
aspects spécifiques, à l’appréciation du tribunal.
Moyens d’interprétation
58. Le Conseil d’administration peut également décider d’adopter des dispositions précisant les
moyens d’interprétation auxquels doit recourir le tribunal. Par exemple, on pourrait envisager
que, pour trancher des difficultés ou questions relatives à l’interprétation d’une convention
internationale du travail, le tribunal applique, outre la convention en question, toute autre
règle pertinente du droit international (ce qui pourrait inclure les conventions internationales
pertinentes, le droit coutumier international tel que les règles d’interprétation figurant dans la
Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, les principes généraux et la
jurisprudence des cours et tribunaux internationaux) et se fonde sur les travaux préparatoires
à l’élaboration de la convention en question ainsi que sur les commentaires, rapports ou
conclusions des organes de contrôle de l’OIT.
31 Note sur l’application de l’article 423 du Traité de paix, Commission du Règlement, 15 octobre 1931, 1.
GB.344/INS/5 18
Adoption des décisions
59. Le Conseil d’administration devrait déterminer le quorum permettant de valider les sentences
du tribunal ainsi que la majorité requise. Dans la pratique, la plupart des cours et tribunaux
internationaux adoptent leurs décisions à la majorité, le président ayant voix prépondérante.
Le Conseil d’administration pourrait choisir entre les règles du droit civil selon lesquelles un
jugement est rendu par le tribunal sans que les juges aient la possibilité de joindre des opinions
concordantes, individuelles ou dissidentes, et la pratique des pays de la common law
(également suivie par des tribunaux internationaux comme la CIJ) qui prévoit une telle
possibilité.
Rôle des modalités fondées sur un consensus tripartite
60. La Constitution de l’OIT prévoit deux procédures spécifiques pour donner des interprétations
des conventions internationales du travail qui fassent autorité et qui soient contraignantes.
Comme indiqué plus haut, si l’on entend par sécurité juridique en matière d’interprétation la
possibilité d’obtenir des décisions finales sur le champ d’application et le sens des dispositions
conventionnelles, les deux seuls mécanismes à même d’offrir cette sécurité sont expressément
énoncés à l’article 37.
61. Dans ce contexte, les modalités fondées sur un consensus seraient envisageables uniquement
lorsqu’il s’agirait soit i) d’essayer de concilier des divergences de vues par une discussion
tripartite avant de soumettre, le cas échéant, la question d’interprétation à la CIJ ou à un
tribunal interne, soit ii) de donner suite à l’avis consultatif de la CIJ ou à la sentence d’un tribunal
interne.
62. La première modalité – à savoir rechercher un consensus afin de concilier des divergences de
vues avant de soumettre, le cas échéant, la question d’interprétation conformément à la
procédure de l’article 37 – a été appliquée en 2014-15 et a abouti à la Réunion tripartite sur la
convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui
est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau
national. Au cours de cette réunion, qui a jeté les bases de l’initiative sur les normes, les
partenaires sociaux ont présenté une déclaration conjointe exposant un ensemble de mesures
visant à trouver une issue possible à la situation de blocage dans laquelle se trouvait alors le
système de contrôle 32.
63. Cette réunion tripartite ad hoc semble attester de l’efficacité de tels mécanismes qui, sans
fournir d’interprétations répondant aux critères de sécurité juridique décrits ci-dessus,
permettent de créer un consensus «politique» suffisamment solide pour atténuer
provisoirement les conséquences d’un différend juridique sans pour autant le régler. Pour que
ces «pactes tripartites» soient fonctionnels sur le plan institutionnel, dans la limite de leurs
possibilités, il semble qu’à tout le moins la réunion convoquée par le Conseil d’administration
doive être investie d’un mandat clair et représenter un échantillon suffisamment large des
Membres de l’OIT 33. Les organes de contrôle entretiennent un dialogue régulier (mesure
prévue dans le plan de travail visant à renforcer le système de contrôle 34) qui peut continuer
32 TMFAPROC/2015/2.
33 La réunion tripartite faisait suite à une décision prise par le Conseil d’administration à sa 322e session (document
GB.322/INS/5(Add.2)) et réunissait des participants de 32 gouvernements d’États Membres de l’OIT, 16 participants
employeurs et 16 participants travailleurs désignés respectivement par le groupe des employeurs et le groupe des
travailleurs du Conseil d’administration.
34 Voir annexe II, action 1.2.
GB.344/INS/5 19
de les aider à approfondir leur compréhension réciproque de leurs méthodes de travail et à
trouver un consensus en la matière, notamment en ce qui concerne le sens qu’ils attribuent
aux dispositions d’une convention lorsqu’ils contrôlent l’application qu’en fait un État Membre.
Toutefois, lorsque des divergences quant au sens à donner à ces dispositions demeurent et ne
peuvent pas être résolues, un différend d’interprétation juridique survient, et c’est au Conseil
d’administration qu’il incombe de le régler conformément aux dispositions de l’article 37.
64. La deuxième modalité – à savoir rechercher un consensus en vue de donner suite à un avis
consultatif ou à une sentence – a été appliquée pour donner effet à l’avis consultatif de la CPJI,
déjà mentionné plus haut, sur l’interprétation de la convention no 4, moyennant l’adoption de
la convention no 41 portant révision de la convention no 4 35.
65. Enfin, le processus normatif ordinaire, qui implique la recherche d’un consensus conduisant à
l’adoption de conventions, de protocoles ou de recommandations, reste toujours une
possibilité pour régler des questions d’interprétation. Par exemple, le protocole de 2014 relatif
à la convention sur le travail forcé, 1930, a précisé que la période transitoire initialement
prévue, mais non définie, dans la convention no 29, pendant laquelle le recours au travail forcé
continuait d’être autorisé sous certaines conditions, avait officiellement expiré. Toutefois, un
processus normatif mené sur la base du consensus ne saurait créer la sécurité juridique que
confère l’article 37 de la Constitution de l’OIT. De par leur nature même, les recommandations
n’ont pas d’effet contraignant en vertu du droit international. Le contenu consensuel d’une
convention ou d’un protocole liera uniquement les États Membres qui les auront finalement
ratifiés. Par conséquent, dans le cas des États Membres qui ont ratifié une convention faisant
l’objet d’un différend juridique, l’insécurité juridique perdurera tant qu’ils ne seront pas en
mesure de ratifier la convention ou le protocole nouvellement adopté en lien avec cet
instrument.
Considérations finales
66. En résumé, la discussion concernant l’article 37 de la Constitution de l’OIT peut être menée sur
la base des considérations suivantes:
1) Une contestation ou une difficulté relative au champ d’application et au sens des
dispositions des conventions est une question juridique qui, à ce titre, appelle une
réponse juridique devant être apportée par des moyens légaux.
2) Le libellé de l’article 37 ne laisse aucun doute quant au fait que l’Organisation – c’est-à-dire
ses mandants tripartites et ses organes exécutifs ou délibérants – a l’obligation de
résoudre les difficultés d’interprétation en recourant à des moyens judiciaires et qu’à
l’heure actuelle le pouvoir de donner des interprétations définitives et contraignantes
appartient exclusivement à la CIJ. Le Bureau émet des avis officieux selon une pratique
bien établie qui ne saurait affecter – et cela n’a jamais été le cas – la validité de cette
obligation constitutionnelle, puisqu’il a toujours assorti ses avis de la réserve d’usage
selon laquelle la CIJ est le seul organe compétent pour interpréter les conventions
internationales du travail. L’OIT se tourne également vers des organes qui sont chargés
de veiller à l’application des dispositions du droit international dans la législation et la
pratique des États Membres et qui, dans le cadre de leur mandat, sont amenés à préciser
le sens qu’ils attribuent à ces dispositions et comment ils les comprennent.
35 Voir paragr. 15.
GB.344/INS/5 20
3) Les mécanismes prévus à l’article 37 sont les seuls à pouvoir garantir la sécurité juridique
puisque l’interprétation juridique prend in fine la forme d’une décision judiciaire définitive
et non susceptible de recours. La sécurité juridique est le sentiment de confiance
qu’inspire un ensemble de règles clairement définies et systématiquement appliquées.
Synonyme à bien des égards de sécurité, de stabilité, de prévisibilité et de bonne foi, elle
est une condition sine qua non du fonctionnement et de la crédibilité d’une organisation
normative internationale.
4) L’article 37, paragraphe 1, lie le règlement des difficultés d’interprétation à la fonction
consultative de la CIJ, qui est régie par le Statut et le Règlement de la Cour. Il s’agit d’une
procédure éprouvée, bien connue et gratuite à laquelle l’Organisation des Nations Unies
et les institutions spécialisées ont eu recours à plusieurs reprises dans le passé.
5) L’article 37, paragraphe 2, indique sans ambiguïté que l’organe visé doit être de nature
judiciaire – et donc composé de juges satisfaisant aux critères d’indépendance et
d’impartialité les plus élevés – mais laisse à cet organe un large pouvoir discrétionnaire
en ce qui concerne sa structure et ses règles de procédure (par exemple, le nombre de
juges, les critères d’éligibilité, le processus de sélection et de désignation, le greffe, le droit
applicable, etc.).
6) Le fait de ne pas prendre de mesures pour régler des différends d’interprétation
conformément à ce que prévoit la Constitution laisse penser à tort que les moyens légaux
de règlement applicables à ce type de différend ne sont pas disponibles ou ont échoué.
7) L’incertitude juridique non seulement compromet la crédibilité des normes et du système
de contrôle, mais représente aussi un problème pour la gouvernance globale de
l’Organisation.
8) Les modalités fondées sur un consensus ne peuvent jouer un rôle que lorsqu’il s’agit soit
i) d’essayer de concilier des divergences de vues par une discussion tripartite avant
d’envisager de soumettre la question d’interprétation à la CIJ ou à un tribunal interne, soit
ii) de donner suite à l’avis consultatif de la CIJ ou à la sentence d’un tribunal interne.
67. Il est ressorti de l’échange de vues tripartite tenu en janvier 2020 que la nécessité d’assurer la
sécurité juridique dans l’interprétation des normes conformément aux dispositions
constitutionnelles applicables était une préoccupation unanimement partagée. Dans ce
contexte, et compte tenu du fait que certains groupes ont exprimé des opinions purement
préliminaires, la possibilité de saisir la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, en cas de questions ou de difficultés relatives à l’interprétation d’une
convention, a recueilli un certain soutien. Des questions méritant un complément d’examen
ont été soulevées au sujet de l’application de l’article 37, paragraphe 2. En particulier, des
précisions ont été demandées quant à la nécessité d’un tribunal et aux modalités de sa
création.
68. Dans un premier temps, le Conseil d’administration voudra sans doute formuler à sa
344e session (mars 2022) des orientations sur les considérations exposées dans le présent
document quant à la manière d’assurer la sécurité juridique, en tenant compte de l’échange
de vues tripartite tenu en janvier 2020. À des sessions ultérieures, le Conseil d’administration
souhaitera peut-être examiner un éventuel cadre de procédure relatif à la soumission de
difficultés d’interprétation à la CIJ en vue d’obtenir un avis consultatif conformément à
l’article 37, paragraphe 1, ainsi que d’autres aspects de l’application du paragraphe 2 de cet
article. Le Bureau est disposé à élaborer des propositions concernant ce cadre de procédure,
compte tenu des orientations que le Conseil d’administration aura données à ce sujet.
GB.344/INS/5 21
Plan de travail révisé visant à renforcer le système
de contrôle – Point sur certains éléments du plan de travail
69. Il était prévu dès l’origine que le Conseil d’administration assurerait le suivi de la mise en oeuvre
du plan de travail, conformément au rôle de gouvernance qui lui incombe. Toutes les actions
prévues dans ce plan de travail continuent d’être menées à bien conformément aux décisions
prises, y compris l’application à titre expérimental d’une procédure de conciliation volontaire à
caractère facultatif ou d’autres mesures au niveau national que le Conseil d’administration, à
sa 334e session (octobre-novembre 2018), avait décidé d’introduire dans le fonctionnement de
la procédure de réclamation prévue par l’article 24 de la Constitution (voir annexe I). Le Conseil
d’administration souhaitera peut-être examiner l’application à titre expérimental de la
procédure de conciliation volontaire à caractère facultatif introduite dans le fonctionnement
de la procédure de réclamation prévue à l’article 24 de la Constitution, ainsi que le projet pilote
visant à établir des bases de référence concernant la convention (no 187) sur le cadre
promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, 2006, à l’une de ses prochaines sessions,
par exemple à sa 346e session (octobre-novembre 2022) (voir annexe II).
Guide des pratiques établies au sein du système de contrôle
et codification de la procédure prévue à l’article 26
(actions 1.1 et 2.1) 36
70. À sa 335e session (octobre-novembre 2019), le Conseil d’administration, «en ce qui concerne la
proposition de codification de la procédure prévue à l’article 26, [a] rappel[é] la décision
d’examiner les mesures à prendre une fois que le guide sur le système de contrôle aura été
mis à la disposition des mandants et [a] pri[é] le Bureau de lui fournir des informations
complémentaires à cet égard en mars 2020» (voir annexe I).
71. À sa 331e session (octobre-novembre 2017), le Conseil d’administration a approuvé
l’élaboration d’un «guide clair et simple d’utilisation sur le système de contrôle qui regrouperait
des informations utiles et assurerait un même niveau de connaissance du système. Dans la
pratique, ce guide pourrait s’appuyer sur les descriptions existantes du système de contrôle et
de ses procédures» 37.
72. Il est proposé d’envisager la codification éventuelle des procédures de traitement des plaintes
prévues aux articles 26 à 34 de la Constitution, car la procédure régissant la période comprise
entre le dépôt d’une plainte et la décision du Conseil d’administration de former une
commission d’enquête ou de clore la procédure sans instituer une telle commission suit la
pratique établie et non des règles codifiées. Le Conseil d’administration est parvenu à un
consensus sur une approche en plusieurs étapes consistant, dans un premier temps, à préciser
au moyen du guide des pratiques établies les règles et pratiques existantes et la manière dont
celles-ci s’articulent avec les autres procédures. Dans le cas où cette approche s’avérerait
insuffisante, un débat tripartite sur l’éventuelle codification de la procédure prévue à
l’article 26 pourrait se poursuivre dans un second temps.
73. Le Bureau, en coopération avec le Centre international de formation de l’OIT, Turin, a élaboré
un guide dans les trois langues officielles, qui se présente sous la forme d’un outil en ligne et
36 GB.329/INS/5.
37 GB.329/INS/5, paragr. 15.
GB.344/INS/5 22
d’une application entièrement personnalisable pour tablette ou smartphone. Une version bêta
de cet outil et de cette application a été présentée aux membres du Conseil d’administration
pendant les consultations informelles tenues en janvier 2019, et le texte en format
téléchargeable a été distribué avant publication aux groupes de mandants en avril 2019 pour
qu’ils puissent donner leur avis. À la fin de 2019, le Bureau avait reçu de très nombreux
commentaires de la part de tous les groupes de mandants. L’outil en ligne a été lancé en août
2021 et il est disponible dans les trois langues officielles 38. L’application pour tablette et
smartphone est désormais elle aussi disponible 39.
Projet de décision
74. Le Conseil d’administration, considérant qu’il est fondamental de régler les différends
relatifs à l’interprétation des conventions internationales du travail conformément aux
dispositions de l’article 37 de la Constitution de l’OIT afin d’assurer le contrôle effectif de
l’application des normes internationales du travail, décide de poursuivre la discussion de
cette question à sa 346e session (octobre-novembre 2022) et demande au Bureau
d’organiser des consultations tripartites en vue de préparer:
a) des propositions concernant un cadre de procédure régissant la soumission de
questions ou de difficultés relatives à l’interprétation de conventions
internationales du travail à l’appréciation de la Cour internationale de Justice
conformément à l’article 37, paragraphe 1;
b) d’autres propositions au sujet de l’application de l’article 37, paragraphe 2, en tenant
compte de ses orientations et des avis exprimés au cours de l’échange de vues
tripartite.
38 Le système de contrôle de l’OIT: Un guide pour les mandants.
39 L’application mobile peut être téléchargée depuis l’App Store ou Google Play Store. Les liens vers ces boutiques
d’applications figurent dans le coin inférieur droit de la page d’accueil du guide susmentionné.
GB.344/INS/5 23
Annexe I
Décisions prises par le Conseil d’administration sur le renforcement
du système de contrôle
334e session (octobre-novembre 2018)
Sur la base des propositions formulées dans les documents GB.334/INS/5 et
GB.332/INS/5(Rev.) ainsi que des nouvelles orientations fournies lors de la discussion et des
consultations tripartites, le Conseil d’administration:
1) approuve les mesures suivantes concernant le fonctionnement de la procédure de
réclamation prévue par l’article 24 de la Constitution:
a) modalités permettant une conciliation volontaire à caractère facultatif ou d’autres
mesures au niveau national et donnant lieu à une suspension temporaire, pour une
période maximale de six mois, de l’examen quant au fond d’une réclamation par le
comité ad hoc. Cette suspension temporaire devrait faire l’objet de l’accord du
plaignant, tel qu’exprimé dans le formulaire de réclamation, et de l’accord du
gouvernement. Ces modalités seraient réexaminées par le Conseil d’administration
au terme d’une période d’essai de deux ans;
b) publication d’un document d’information sur l’état d’avancement des réclamations
aux sessions de mars et de novembre du Conseil d’administration;
c) communication par le Bureau de tous les renseignements et documents pertinents
aux membres des comités tripartites ad hoc institués au titre de l’article 24, quinze
jours avant leurs réunions, et distribution du rapport final de ces comités au Conseil
d’administration trois jours avant la date à laquelle il doit procéder à l’adoption de
ses conclusions;
d) condition selon laquelle les membres gouvernementaux des comités ad hoc
devraient représenter des États Membres ayant ratifié les conventions concernées à
moins qu’il n’y ait au Conseil d’administration aucun membre gouvernemental
titulaire ou adjoint ressortissant d’un État ayant ratifié lesdites conventions;
e) maintien des mesures en vigueur et recherche d’autres mesures qui pourraient être
prises avec l’accord du Conseil d’administration pour garantir l’intégrité de la
procédure et protéger les membres des comités ad hoc de toute ingérence;
f) meilleure intégration des mesures de suivi dans les recommandations des comités
et publication d’un document d’information, à l’intention du Conseil
d’administration, régulièrement mis à jour sur l’effet donné à ces recommandations,
parallèlement à la poursuite de l’examen des modalités de suivi des
recommandations adoptées par le Conseil d’administration concernant les
réclamations;
2) approuve les mesures proposées pour rationaliser la présentation des rapports relatifs à
l’application des conventions ratifiées concernant:
a) le regroupement thématique en vue de porter à six ans le cycle de présentation des
rapports sur les conventions techniques, étant entendu que la Commission
GB.344/INS/5 24
d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR)
continuera d’examiner, de préciser et, si nécessaire, d’élargir les critères permettant
de rompre ce cycle;
b) un nouveau formulaire de rapport pour les rapports simplifiés (annexe II du
document GB.334/INS/5);
3) décide de continuer d’étudier des mesures concrètes et pratiques visant à améliorer
l’utilisation des paragraphes 5 e) et 6 d) de l’article 19 de la Constitution, notamment en
vue de renforcer le rôle des études d’ensemble et d’améliorer la qualité de leur examen
et de leur suivi;
4) charge le Comité de la liberté syndicale d’examiner les réclamations dont il est saisi
conformément aux procédures exposées dans le règlement relatif à la procédure pour
l’examen des réclamations au titre de l’article 24 afin de garantir que les réclamations
dont il est saisi seront examinées conformément aux modalités énoncées dans ledit
règlement;
5) encourage la CEACR à poursuivre l’examen des questions relevant d’un même thème dans
des commentaires consolidés, et l’invite à formuler des propositions sur la façon dont elle
pourrait contribuer à une utilisation optimale des paragraphes 5 e) et 6 d) de l’article 19
de la Constitution, en particulier en envisageant des mesures visant à améliorer la
présentation des études d’ensemble dans une optique de lisibilité afin d’en optimiser
l’utilité pour les mandants;
6) invite la Commission de l’application des normes de la Conférence à envisager, dans le
cadre des consultations tripartites informelles consacrées à ses méthodes de travail, des
mesures visant à améliorer son examen des études d’ensemble;
7) demande au Bureau de lui présenter, à sa 335e session (mars 2019), à l’issue de
consultations avec les mandants tripartites:
a) des propositions concrètes pour préparer la discussion sur les actions 1.2 (tenue de
discussions régulières entre les organes de contrôle) et 2.3 (dispositions éventuelles
à prendre pour renforcer la sécurité juridique), y compris mais non exclusivement
pour organiser un échange de vues tripartite au cours du second semestre 2019 sur
le paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution;
b) un rapport sur les progrès réalisés dans l’élaboration d’un guide des pratiques
établies au sein du système de contrôle, compte tenu des orientations reçues
concernant l’action 2.1 (codification de la pratique établie pour la procédure prévue
à l’article 26);
c) d’autres propositions détaillées sur l’utilisation des paragraphes 5 e) et 6 d) de
l’article 19 de la Constitution, notamment à la lumière de l’examen annuel au titre
du suivi de la Déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au
travail;
d) un rapport sur les progrès réalisés dans l’élaboration de propositions détaillées
concernant la possibilité de donner aux mandants un accès en ligne au système de
contrôle (présentation des rapports par voie électronique, section 2.1 du document
GB.332/INS/5(Rev.)), compte tenu des préoccupations exprimées par les mandants
lors de la discussion;
e) de plus amples informations sur un projet pilote visant à établir des bases de
référence concernant la convention (no 187) sur le cadre promotionnel pour la
GB.344/INS/5 25
sécurité et la santé au travail, 2006 (section 2.2.2.2 du document
GB.332/INS/5(Rev.));
f) un rapport sur les progrès réalisés dans l’exécution du plan de travail relatif à
l’initiative sur les normes tel que révisé par le Conseil d’administration en mars 2017,
y compris des informations sur les progrès accomplis en ce qui concerne l’examen
par les organes de contrôle de leurs méthodes de travail et des nouvelles
améliorations pouvant y être apportées en vue de renforcer le tripartisme et de
gagner en cohérence, en transparence et en efficacité.
(GB.334/INS/5, paragraphe 21, tel que modifié par le Conseil d’administration)
335e session (mars 2019)
Le Conseil d’administration:
a) se félicite des efforts déployés par tous les mandants et le Bureau, qui ont permis
les progrès signalés dans la mise en oeuvre des deux composantes de l’initiative sur
les normes, à savoir le mécanisme d’examen des normes (MEN) et le plan de travail
visant à renforcer le système de contrôle;
b) en ce qui concerne la composante relative au MEN, prend note des informations
fournies sur les enseignements à retenir et sur les orientations futures, demande au
Groupe de travail tripartite du MEN de tenir compte de ses orientations dans la
poursuite de ses travaux et de lui présenter un rapport en vue de son deuxième
examen du fonctionnement du Groupe de travail tripartite du MEN en mars 2020 et,
pour garantir l’utilité de ces travaux, appelle de nouveau l’Organisation et ses
mandants tripartites à prendre les mesures appropriées pour donner suite à toutes
ses recommandations antérieures;
c) ayant examiné, au regard des principes communs devant guider le renforcement du
système de contrôle, le rapport sur l’état d’avancement de la mise en oeuvre des dix
propositions figurant dans le plan de travail, se félicite des progrès accomplis à ce
jour et prie le Bureau de poursuivre la mise en oeuvre du plan de travail, qui devrait
être actualisé conformément à ses orientations;
d) approuvant l’approche adoptée et les délais proposés, demande au Bureau de veiller
à ce que des mesures soient prises en ce qui concerne l’élaboration du guide des
pratiques établies dans l’ensemble du système de contrôle, le fonctionnement de la
procédure prévue à l’article 24, la rationalisation du processus d’établissement des
rapports, le partage d’informations avec les autres organisations, la formulation de
recommandations claires par les organes de contrôle, le suivi systématique au
niveau national et l’examen des possibilités offertes par les paragraphes 5 e) et 6 d)
de l’article 19;
e) en ce qui concerne la proposition d’organiser des discussions régulières entre les
organes de contrôle, invite le président du Comité de la liberté syndicale à présenter
son rapport annuel à la Commission de l’application des normes à compter de 2019;
f) en ce qui concerne la proposition de codification de la procédure prévue à
l’article 26, rappelle la décision d’examiner les mesures à prendre une fois que le
guide sur le système de contrôle aura été mis à la disposition des mandants et prie
le Bureau de lui fournir des informations complémentaires à cet égard en mars
2020;
GB.344/INS/5 26
g) en ce qui concerne la proposition d’envisager de nouvelles dispositions pour assurer
la sécurité juridique, décide de tenir des consultations informelles en janvier 2020
et, pour faciliter cet échange de vues tripartite, demande au Bureau d’établir un
document sur les éléments et conditions nécessaires à la mise en place d’un organe
indépendant en vertu du paragraphe 2 de l’article 37 et de toute autre option fondée
sur un consensus, ainsi qu’en vertu de la procédure prévue au paragraphe 1 de
l’article 37;
h) en ce qui concerne la proposition d’examen par les organes de contrôle de leurs
méthodes de travail, invite la Commission de l’application des normes, la CEACR et
le Comité de la liberté syndicale à poursuivre leur examen régulier de leurs
méthodes de travail.
(GB.335/INS/5, paragraphe 84, tel que modifié par le Conseil d’administration)
Annexe II
Plan de travail et calendrier des discussions au Conseil d’administration concernant
le renforcement du système de contrôle
Examen du plan de travail
Conseil d’administration
d’octobre-novembre 2018
Conseil d’administration
de mars 2019
Conseil d’administration
de mars 2020
Conseil d’administration
de novembre 2021
Conseil d’administration
de mars 2022
Conseil d’administration
de novembre 2022
Conseil d'administration
de mars 2023
Décisions prises GB.334/INS/5, paragraphe 21 GB.335/INS/5, paragraphe 84
1.1. Guide des pratiques établies
dans l’ensemble du système
Rapport
sur les mesures prises
Rapport
sur les mesures prises
Information
Rapport sur les mesures prises
(fin)
Achevé Mise à jour
1.2. Discussions régulières
entre les organes de contrôle
Examen
2.1. Examen de la codification
de la procédure prévue à l’article 26
Orientations sur la possibilité
d’un règlement
Rapport
sur les mesures prises
Rapport
sur les mesures prises
Examen à un stade ultérieur Examen à un stade ultérieur
2.2. Examen du fonctionnement
de la procédure prévue à l’article 24
Discussion fondée
sur les orientations reçues
Examen Examen
2.3. Dispositions éventuelles à prendre
pour assurer la sécurité juridique
Orientations sur un éventuel
échange de vues tripartite
Orientations sur un éventuel
échange de vues tripartite
Examen à la suite de l’échange de
vues tripartite (reporté)
Information
Suivi de la discussion
de mars 2022
Suivi de la discussion de
novembre 2022 (à confirmer)
3.1. Rationalisation du processus
d’établissement des rapports
Poursuite de l’examen
des différentes options
Poursuite de l’examen
des différentes options
Examen Examen
3.2. Échange d’informations avec
d’autres
Examen
4.1. Formulation de recommandations
claires par les organes de contrôle
Examen
4.2. Suivi systématique au niveau national Examen
4.3. Possibilités offertes par l’article 19 Orientations complémentaires Orientations complémentaires Examen
Commission de l’application des normes
Commission d’experts
Comité de la liberté syndicale
Domaine d’intervention 1: liens entre les procédures
Domaine d’intervention 4: portée et mise en oeuvre
Domaine d’intervention 3: présentation de rapports et information
Domaine d’intervention 2: règles et pratiques
Examen par les organes et procédures de contrôle de leurs méthodes de travail
Consultation tripartite informelle sur les méthodes de travail
Discussion en cours des méthodes de travail
Discussion en cours des méthodes de travail
GB.344/INS/5 27
Document no 39
Procès-verbaux de la 344e session du Conseil
d’administration, mars 2022, paragr. 139-202
GB.344/PV
Conseil d’administration
344ᵉ session, Genève, mars 2022
Procès-verbaux de la 344e session du Conseil
d’administration du Bureau international du Travail
Table des matières
Page
Liste des sigles et acronymes ................................................................................................................. 9
Introduction .............................................................................................................................................. 11
I. Bureau du Conseil d’administration.................................................................................. 11
II. Sections et segments .......................................................................................................... 11
III. Autres organes ..................................................................................................................... 12
Section institutionnelle
Remarques liminaires .................................................................................................................... 13
1. Approbation des procès-verbaux de la 343e session du Conseil d’administration
(GB.344/INS/1) ...................................................................................................................... 20
Décision ................................................................................................................................. 20
2. Dispositions applicables à la 344e session du Conseil d’administration,
y compris aux audiences des candidats et candidates et à l’élection
et la nomination du Directeur général (GB.344/INS/2) .................................................. 21
Décision ................................................................................................................................. 21
Résumé des commentaires reçus par écrit pendant la période de consultation
sur cette question par correspondance .......................................................................... 22
Résumé des commentaires reçus par écrit pendant le vote ouvert aux membres
titulaires du Conseil d’administration ............................................................................... 22
3. Ordre du jour de la Conférence internationale du Travail ............................................ 23
3.1. Ordre du jour des prochaines sessions de la Conférence (GB.344/INS/3/1) .............. 23
Décision ................................................................................................................................. 36
GB.344/PV 47
5. Plan de travail visant à renforcer le système de contrôle:
propositions concernant de nouvelles dispositions en vue d’assurer
la sécurité juridique et point sur les autres mesures contenues
dans le plan de travail
(GB.344/INS/5)
139. La porte-parole du groupe des employeurs dit qu’il faut continuer à rechercher des réponses
concrètes possibles à la question de la sécurité juridique dans le cadre du tripartisme en vue
de forger un consensus sur la meilleure manière de procéder. Il semble prématuré de prendre
des décisions concernant le recours aux options prévues à l’article 37 de la Constitution de
l’OIT. Le groupe des employeurs reconnaît qu’il est nécessaire d’assurer la sécurité juridique
concernant les dispositions des conventions de l’OIT. Pour ce faire, le sens des termes et des
dispositions des conventions doit être clair d’un point de vue juridique et être largement
accepté. La question est donc de savoir quel est le meilleur moyen de garantir la sécurité
juridique et dans quelle mesure les procédures prévues à l’article 37 peuvent y contribuer. Le
principal désaccord porte sur les règles détaillées relatives au droit de grève qui ont été
élaborées par la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations
dans le cadre de sa mission de contrôle de l’application de la convention (nº 87) sur la liberté
syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Le groupe des employeurs estime que
l’article 37 ne constitue pas une solution viable, car le droit de grève est un sujet
multidimensionnel et complexe, qui ne peut être considéré indépendamment des systèmes et
pratiques de relations professionnelles hétérogènes en place dans les États Membres de l’OIT.
Il est peu probable que le recours aux options prévues à l’article 37 permette d’assurer la
sécurité juridique. On ne voit en effet pas bien comment des organes extérieurs et judiciaires
pourraient trouver une solution largement acceptée des mandants sur un sujet si délicat. La
définition d’une telle solution devrait continuer à relever de la commission d’experts, du
Bureau et des mandants tripartites de l’OIT. Ceux-ci disposent en effet d’un important espace
de dialogue et de coopération propre à la recherche du consensus. La saisine d’organes
extérieurs et judiciaires, qu’il s’agisse de la Cour internationale de Justice (CIJ) ou d’un tribunal
de l’OIT, ne devrait intervenir que si toutes les possibilités de dialogue entre les principaux
acteurs de l’Organisation compétents en matière de normes de l’OIT ont été épuisées, ce qui
n’est pas le cas en l’espèce.
140. Pour ce qui est des principales caractéristiques de la procédure prévue à l’article 37,
paragraphe 1 (saisine de la CIJ pour un avis consultatif), bien que cette disposition puisse avoir
pour but de renforcer la légitimité et l’autorité des avis consultatifs, il n’en découle pas
clairement que ces avis ont force obligatoire. Le fait que l’OIT ait considéré les six avis
consultatifs rendus par la Cour permanente de Justice internationale comme contraignants
n’implique pas nécessairement qu’elle déciderait de faire de même en cas de nouvelle saisine.
La seule décision rendue par la cour permanente concernant l’interprétation d’une convention
de l’OIT date d’il y a cent ans, et la convention concernée, la convention (nº 4) sur le travail de
nuit (femmes), 1919, traitait d’un sujet bien moins complexe que le droit de grève. Le groupe
des employeurs rejette l’argument selon lequel l’emploi des mots «seront soumises» (shall be
referred) à l’article 37, paragraphe 1, signifie que la saisine de la CIJ est obligatoire. Il faut plutôt
déterminer qui décide si une difficulté peut être portée devant la CIJ. L’option prévue à
l’article 37, paragraphe 1, ayant été conçue comme une procédure de dernier recours, on
pourrait arguer qu’un différend ne peut être soumis à la CIJ que lorsque toutes les autres
possibilités ont été épuisées. L’auteur d’une question relative à l’interprétation d’une
convention a indéniablement toute liberté pour décider de manière unilatérale si sa question
GB.344/PV 48
doit être soumise à la CIJ. Toutefois, l’article 37, paragraphe 1, tel que libellé, pourrait aussi
signifier que, si dans le cas d’une question ou d’une difficulté relative à l’interprétation d’une
convention de l’OIT il est décidé de demander une réponse faisant autorité, ladite réponse ne
peut être obtenue que de la CIJ, à l’exclusion de toute autre institution de règlement des
différends n’appartenant pas au système des Nations Unies.
141. En ce qui concerne la proposition d’instituer un tribunal de l’OIT en application de l’article 37,
paragraphe 2, l’oratrice fait observer qu’aucun effort notable n’a jamais été entrepris à cette
fin. En outre, la majorité des participants aux consultations informelles de janvier 2020 ne se
sont pas montrés favorables à cette option. La création d’un tel tribunal aurait pour objet le
prompt règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation d’une convention,
mais seules les questions particulières et de portée limitée trouveraient une réponse rapide,
pas les questions de longue date, complexes et litigieuses telles que l’interprétation par la
commission d’experts du droit de grève dans le cadre de la convention no 87.
142. Le groupe des employeurs aurait souhaité que le document présente une analyse plus
approfondie des modalités fondées sur un consensus tripartite. C’est à ces modalités qu’il
faudrait recourir en premier lieu pour résoudre les divergences de vues en matière
d’interprétation, ce qui permettrait aux mandants tripartites de demeurer compétents pour
déterminer le contenu des normes internationales du travail. L’option fondée sur le consensus
n’aurait pas pour but de parvenir à une solution ayant force obligatoire au terme d’une
procédure juridique, mais de trouver une solution reposant sur l’autorité conférée par l’appui
d’une majorité des mandants tripartites. Un désaccord concernant une interprétation
particulière d’une convention de l’OIT pourrait faire l’objet d’une question inscrite à l’ordre du
jour de la Conférence internationale du Travail, laquelle pourrait décider de procéder à un
examen dans le cadre d’une commission qui formulerait des recommandations sur la manière
d’interpréter la convention concernée ou sur les mesures à prendre à cet égard. Une autre
possibilité consisterait à engager un processus dans le cadre duquel les mandants seraient
priés de présenter par écrit leurs vues concernant une interprétation litigieuse, ce qui
permettrait de déterminer le degré d’acceptation de ladite interprétation et contribuerait à
régler le désaccord. La commission d’experts devrait ensuite tenir compte des résultats du
processus dans ses observations sur la convention no 87. En cas d’échec, une dernière
possibilité serait d’envisager une action normative visant à élaborer un protocole relatif à la
convention concernée. Ce protocole énoncerait l’interprétation considérée comme correcte et
devrait être approuvé par la Conférence internationale du Travail à la majorité des deux tiers.
Il aurait force obligatoire uniquement pour les pays l’ayant ratifié.
143. Le groupe des employeurs exprime son plein appui au dialogue social et est résolument
favorable à une solution fondée sur le consensus pour régler les difficultés existantes et en
prévenir de nouvelles. Les mandants tripartites, les organes de contrôle et le Bureau ont une
responsabilité partagée pour ce qui est d’assurer la sécurité juridique, et un rôle essentiel à
jouer en la matière. C’est pourquoi le groupe des employeurs propose d’amender le projet de
décision comme suit:
Le Conseil d’administration décide de poursuivre la discussion de cette question à sa
346e session (octobre-novembre 2022) et demande au Bureau d’organiser des consultations
tripartites en vue de préparer de nouvelles propositions permettant de trouver des solutions
consensuelles dans le cadre des procédures existantes en associant les mandants tripartites,
notamment par un dialogue tripartite informel avec la commission d’experts.
144. La porte-parole du groupe des travailleurs fait remarquer que, depuis 2012, le groupe des
employeurs conteste l’interprétation de longue date et faisant autorité des organes de
contrôle de l’OIT, selon laquelle le droit de grève est reconnu et protégé par la
GB.344/PV 49
convention no 87. Cette question a suscité des débats houleux et fait l’objet de négociations,
mais n’est toujours pas réglée du point de vue des employeurs. Cette situation n’est plus
acceptable, car ce sont la crédibilité, le mandat tripartite unique et la mission de justice sociale
de l’Organisation qui sont en jeu. Le seul moyen constitutionnel dont dispose l’OIT pour assurer
la sécurité juridique et prendre des décisions déterminantes en matière d’interprétation des
conventions est l’application de l’article 37. La sécurité juridique est essentielle pour les États
qui ont ratifié des conventions particulières ou qui envisagent de le faire. Faute
d’interprétations contraignantes et faisant autorité obtenues par l’intermédiaire de l’OIT,
d’autres organes nationaux, régionaux ou internationaux développeront leurs propres
interprétations, ce qui pourrait conduire à des incohérences et accroître l’insécurité juridique.
145. L’OIT a fait appel à la CIJ à six reprises, et les décisions rendues dans ce cadre ont été mises en
oeuvre sans difficulté. Conformément à la pratique constitutionnelle, l’OIT a toujours considéré
les avis consultatifs de la cour comme contraignants. Le document à l’examen indique
clairement que l’article 37, paragraphe 1, impose à l’OIT l’obligation juridique directe de
soumettre toute question d’interprétation à la CIJ. C’est au Conseil d’administration qu’il
incombe de saisir la CIJ. La seule manière de régler le différend persistant concernant
l’interprétation de la convention no 87 et du droit de grève d’une manière qui garantisse la
sécurité juridique et soit conforme à la Constitution de l’OIT est de le soumettre à la CIJ.
146. Le groupe des travailleurs est disposé à étudier la possibilité d’instituer un tribunal en
application de l’article 37, paragraphe 2, mais uniquement si certaines garanties sont fournies
et certaines conditions remplies. Un tel tribunal, s’il venait à être créé, serait tout de même lié
par les avis consultatifs rendus par la CIJ. Le groupe des travailleurs estime tout comme le
groupe des employeurs que l’article 37, paragraphe 2, fait référence à des cas dans lesquels
un avis rapide serait nécessaire concernant une question d’interprétation de moindre
importance. Le groupe des travailleurs est fermement opposé à la création d’un tribunal
tripartite; en tant qu’organe judiciaire, un tribunal institué en application de l’article 37,
paragraphe 2, doit être composé de juges répondant à des critères élevés d’expertise
juridique, d’intégrité et d’impartialité. Le groupe des travailleurs n’appuie pas non plus la
proposition tendant à ajouter aux dispositions finales des conventions futures une clause
prévoyant la soumission des difficultés d’interprétation à un tel tribunal, car cela ne serait
d’aucune utilité pour résoudre les questions relatives à l’interprétation des conventions
existantes qui ne comportent pas ce type de clause, et pourrait conduire à un nombre excessif
de saisines. Un tribunal ad hoc serait plus adapté qu’un tribunal permanent pour traiter les cas
graves de désaccord. Le règlement du tribunal devrait clairement énoncer l’objectif poursuivi.
L’incidence d’un tribunal ad hoc sur le système de contrôle et les conséquences indésirables
d’une utilisation excessive de la procédure suscitent des préoccupations légitimes. Le groupe
des travailleurs demande des précisions sur la possibilité qui pourrait être donnée à la
commission d’experts et à la Commission de l’application des normes de soumettre au tribunal
des questions d’interprétation. Il formule de sérieuses réserves concernant la suggestion de
permettre à d’autres organisations internationales de présenter au tribunal des demandes
d’interprétation. Conformément à l’article 37, paragraphe 2, toutes les demandes doivent être
soumises par l’intermédiaire du Conseil d’administration. En outre, d’autres institutions
judiciaires devraient pouvoir présenter de telles demandes. Pour ce qui est des autres moyens
d’interprétation fondés sur la jurisprudence internationale pertinente, les travaux
préparatoires à l’élaboration des conventions et les rapports des organes de contrôle, des
précisions doivent être apportées sur les conséquences potentielles pour la mission des
organes de contrôle.
GB.344/PV 50
147. Le groupe des travailleurs souscrit à l’analyse juridique présentée dans le document, selon
laquelle les modalités fondées sur le consensus ne peuvent garantir la sécurité juridique. Les
efforts tripartites déployés pour résoudre les questions d’interprétation en suspens jouent un
rôle avant la saisine de la CIJ ou d’un tribunal interne et au titre du suivi d’un avis consultatif de
la CIJ ou d’une décision du tribunal. Toutefois, il ne devrait y avoir aucune ambiguïté quant au
fait que, si les efforts déployés au stade préliminaire sont infructueux, le différend ne peut être
réglé qu’en activant l’un des deux mécanismes prévus à l’article 37. En conséquence, il faut
établir une procédure assortie de délais pour veiller à ce que les débats ne se poursuivent pas
indéfiniment et ne créent pas une situation d’insécurité juridique persistante. Selon le groupe
des travailleurs, l’OIT se trouve précisément dans cette situation: les nombreuses tentatives
visant à concilier, dans le cadre de discussions tripartites, les différents points de vue sur le
droit de grève n’ont débouché que sur la décision d’acter temporairement l’absence d’accord.
Ce processus a été extrêmement difficile, et le groupe des travailleurs ne souhaite pas le
prolonger ni renouveler l’expérience.
148. Le groupe des travailleurs s’oppose catégoriquement à ce que l’OIT puisse adopter de
nouvelles normes pour régler des différends concernant des questions d’interprétation, car les
divergences subsisteraient lors de l’élaboration de ces normes et empêcheraient tout
consensus. L’exemple de la convention (nº 29) sur le travail forcé, 1930, et de son protocole
n’est pas approprié: le protocole visait à mettre à jour la convention, et il n’y avait aucun
désaccord sur l’interprétation de la convention. Le règlement des différends d’interprétation
doit passer par la mise en oeuvre de l’article 37 de la Constitution, pas par une action normative.
149. En conséquence, le groupe des travailleurs appuie l’alinéa a) du projet de décision concernant la
soumission de questions ou de difficultés en matière d’interprétation à la CIJ, mais souhaite
reporter l’examen de l’alinéa b) concernant la mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2.
Compte tenu de l’importance et de la complexité de ce sujet, le Conseil d’administration devrait
reprendre son examen à sa 347e session plutôt qu’à sa 346e session, ce qui laisserait aussi le
temps au nouveau Directeur général de se saisir de la question. Le groupe des travailleurs ne
peut appuyer l’amendement présenté par le groupe des employeurs, qui passe complètement
sous silence l’article 37. Le groupe des travailleurs est en désaccord total avec l’idée selon laquelle
un dialogue tripartite informel avec la commission d’experts devrait être considéré comme
participant d’une solution fondée sur le consensus et pouvant contribuer à ce titre à régler le
différend concernant l’interprétation du droit de grève. Des pistes comparables ont déjà été
explorées, sans résultat. Un différend sur le champ d’application et le sens des dispositions d’une
convention est une question d’ordre juridique qui doit être réglée par des mécanismes juridiques
propres à assurer la sécurité juridique.
150. S’exprimant au nom du groupe des PIEM, une représentante du gouvernement des
États-Unis convient que l’article 37 de la Constitution de l’OIT fournit les moyens appropriés
pour assurer la sécurité juridique concernant les instruments de l’OIT existants et que la
sécurité juridique dans les cas de désaccord de longue date est un élément essentiel du
fonctionnement et de la crédibilité de l’OIT en tant qu’organisation internationale établissant
des normes. Le groupe des PIEM note qu’il n’existe actuellement qu’un seul différend
d’interprétation et que ce dernier concerne la convention no 87. L’oratrice demande aux
partenaires sociaux de confirmer que c’est bien le cas. Les modalités fondées sur le consensus
tripartite ont pour l’heure uniquement permis d’établir un consensus politique temporaire et
ne peuvent apporter la sécurité juridique nécessaire pour garantir le fonctionnement efficace
du système de contrôle. Des mesures doivent par conséquent être prises en vue d’un
règlement dans le cadre de l’article 37 de la Constitution.
GB.344/PV 51
151. L’option consistant à saisir la CIJ en application de l’article 37, paragraphe 1, semble présenter
des avantages. Le différend concernant l’interprétation de la convention no 87 a sans conteste
des conséquences systémiques plus larges pour l’exercice du droit fondamental à la liberté
syndicale, lequel est nécessaire pour une pleine participation au sein de l’OIT. Ce différend n’est
donc pas anecdotique. Le groupe des PIEM attend avec intérêt de pouvoir participer à un
processus tripartite visant à formuler de manière équilibrée une question pour soumission à
la CIJ et à constituer le dossier. L’oratrice prend note avec satisfaction de l’analyse du Bureau,
selon laquelle tous les mandants de l’OIT auraient vraisemblablement le droit de participer à
la procédure, et demande au Bureau des informations complémentaires sur le temps
nécessaire pour préparer la présentation d’une requête au titre de l’article 37, paragraphe 1,
et sur le rôle des États Membres et des partenaires sociaux à cet égard. Pour ce qui est de
l’article 37, paragraphe 2, le groupe des PIEM estime que le Bureau a bien cerné les enjeux. Si
un consensus se dégage en faveur de l’institution d’un tribunal, ce dernier devra être composé
de juges experts, et sa mise en place nécessitera des consultations approfondies avec les
mandants et une démarche concertée de ces derniers. Le groupe des PIEM ne peut pas
appuyer l’amendement proposé par le groupe des employeurs.
152. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, un représentant du gouvernement de
la France déclare que la Turquie, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie, l’Albanie,
l’Islande, la Norvège, l’Ukraine, la République de Moldova et la Géorgie s’associent à sa
déclaration. Il fait observer que les divergences de longue date génèrent de l’insécurité quant
aux obligations juridiques qui incombent aux pays au titre des conventions ratifiées, ce qui
peut entamer la volonté des gouvernements de ratifier des instruments. En 2014, l’UE et ses
États membres étaient prêts à soutenir l’option consistant à solliciter l’avis consultatif de la CIJ
sur l’interprétation de la convention no 87. Ils restent d’avis que les différends non résolus
concernant l’interprétation juridique de cette convention doivent être soumis à la cour, qui a
démontré sa capacité à remplir de telles fonctions. Si les outils que sont le dialogue social, la
discussion tripartite et la recherche du consensus se sont révélés efficaces pour résoudre les
différends portant sur d’autres questions, la situation concernant la convention no 87 n’est pas
tenable. L’UE et ses États membres sont prêts à participer à la recherche de la solution la plus
appropriée et soutiennent le projet de décision initial.
153. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, un représentant du gouvernement du Maroc
rappelle qu’aucun accord n’a été trouvé sur cette question malgré les longues discussions qui
ont eu lieu à de précédentes sessions du Conseil d’administration. Il exprime l’espoir qu’une
décision par consensus pourra bientôt être prise. Les mécanismes prévus à l’article 37 pour
garantir la sécurité juridique dans l’interprétation des normes de l’OIT doivent être
indépendants et fonctionner conformément aux principes de transparence, de
responsabilisation et de bonne gouvernance. L’orateur salue les efforts déployés en vue de
parvenir à un règlement des différends d’interprétation et appelle à poursuivre les discussions
tripartites afin que les mandants puissent examiner les avantages et les inconvénients des
deux options présentées au Conseil d’administration. Une analyse coûts-avantages de chaque
option aiderait également les mandants à prendre une décision en connaissance de cause. Le
groupe de l’Afrique appuie le projet de décision initial.
154. Une représentante du gouvernement de la Colombie dit que les États Membres accordent
une grande importance aux recommandations des organes de contrôle de l’OIT. Si le Conseil
d’administration devait envisager l’institution d’un tribunal en vertu de l’article 37,
paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT, il serait essentiel de réfléchir aux coûts importants
qui pourraient en découler et à l’incidence que l’existence d’un tel tribunal aurait sur le travail
de la commission d’experts, qui est régie par les principes d’indépendance, d’impartialité et
GB.344/PV 52
d’objectivité et composée de membres ayant une expérience directe des différents systèmes
juridiques, économiques et sociaux. Il convient de faire preuve d’une très grande prudence
afin de ne pas ébranler la confiance des mandants tripartites ni affaiblir la commission
d’experts. Le nombre de difficultés d’interprétation soumises à la CIJ étant très faible,
l’institution d’un tribunal uniquement compétent en matière d’interprétation serait
inappropriée. On ne sait pas très bien si un tel tribunal exercerait d’autres fonctions liées au
mandat de l’OIT, qui concerneraient par exemple l’acceptation ou l’application par un pays
d’une procédure au titre de l’article 26 de la Constitution de l’OIT. Le gouvernement de la
Colombie est convaincu que le dialogue social peut faciliter l’obtention d’un consensus et
appuie donc l’amendement proposé par le groupe des employeurs.
155. Un représentant du gouvernement du Brésil rappelle que la responsabilité en matière
d’adoption des normes et de contrôle de leur application incombe au premier chef aux
mandants tripartites réunis à la Conférence internationale du Travail. Le texte des instruments
adoptés, les travaux préparatoires y afférents et l’interprétation des mandants devraient donc
constituer les références faisant autorité aux fins de l’application des normes, et les différends
portant sur des questions d’interprétation devraient être réglés en premier lieu dans le cadre
de consultations tripartites. Si la Constitution de l’OIT prévoit d’autres solutions, le dialogue
social est depuis longtemps la méthode privilégiée pour régler les désaccords à l’OIT, et il
convient de ne pas faire obstacle à ce processus. Le gouvernement du Brésil soutient
l’amendement proposé par le groupe des employeurs.
156. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique), répondant à une question du
groupe des PIEM, dit qu’il est difficile d’estimer le temps nécessaire pour préparer une saisine de
la CIJ en vertu de l’article 37, paragraphe 1, mais indique qu’il faudrait entre trois et cinq mois
pour constituer un dossier comprenant un exposé détaillé de la question, des informations de
base et éventuellement les vues des mandants. Le dossier devrait être soumis à la CIJ peu après
la décision du Conseil d’administration de la saisir de l’affaire. Il est probable que les
organisations d’employeurs et de travailleurs seraient autorisées à participer aux procédures
consultatives, ainsi que le laissent penser les explications fournies en 2014 par le greffier de la
CIJ ainsi que la pratique récente (par exemple les procédures consultatives intitulées
Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé et Conformité
au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo), qui confirme
que la cour fait preuve de pragmatisme et se réserve le droit d’inviter des entités autres que des
organisations intergouvernementales chaque fois qu’elle l’estime nécessaire. Il convient
également de rappeler que les organisations d’employeurs et de travailleurs ont été autorisées
à participer aux procédures engagées devant la Cour permanente de Justice internationale.
157. Une représentante du Directeur général (directrice, (NORMES)) précise qu’un tribunal
institué en vertu de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT ne serait compétent
qu’en matière d’interprétation des conventions et ne serait pas appelé à traiter d’autres
questions, y compris celles découlant de l’acceptation ou de l’application de l’article 26.
158. La porte-parole du groupe des travailleurs demande au Conseiller juridique de préciser si les
mots «seront soumises» (shall be referred) à l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT
mettent une quelconque obligation à la charge de l’Organisation. Elle rappelle l’importance que
revêt le dialogue social pour son groupe, mais ajoute qu’il est toutefois nécessaire de disposer
d’un mécanisme de règlement des différends en matière d’interprétation lorsque les tentatives
engagées pour parvenir à un consensus au moyen du dialogue social sont infructueuses. Le
groupe des travailleurs reste favorable aux modalités existantes et considère que le fait de
demander la poursuite des discussions sur cette question n’est qu’une tactique dilatoire. Le
groupe des travailleurs maintient son appui au projet de décision initial.
GB.344/PV 53
159. La porte-parole du groupe des employeurs note avec satisfaction que plusieurs
gouvernements se sont déclarés favorables à l’approche fondée sur le dialogue social qu’elle
a exposée. Il n’y a manifestement aucun désaccord sur le fait que le principe de la liberté
syndicale inclut le droit de grève; la question qui se pose est celle du contenu précis de la
réglementation internationale de ce droit. Un document présenté par le Bureau décrit les
différentes réglementations que les États ont adoptées pour encadrer le droit de grève. Il faut
toutefois reconnaître que l’expertise tirée de l’expérience nationale ou des cas individuels ne
peut pas toujours être transposée au niveau international ou à autre contexte national. Les
participants à la discussion qui a conduit à l’adoption de la convention no 87 se sont
expressément opposés à l’inclusion de la notion de réglementation internationale du droit de
grève dans cet instrument. On ne comprend pas bien pourquoi les travailleurs ne veulent pas
d’une discussion tripartite globale sur cette question.
160. Dans un esprit de compromis, l’oratrice propose un sous-amendement consistant à rétablir les
alinéas a) et b) du projet de décision initial et à ajouter un alinéa c) reprenant l’amendement
présenté initialement par son groupe. Le projet de décision serait libellé comme suit:
Le Conseil d’administration, considérant qu’il est fondamental de régler les différends relatifs
à l’interprétation des conventions internationales du travail conformément aux dispositions de
l’article 37 de la Constitution de l’OIT afin d’assurer le contrôle effectif de l’application des
normes internationales du travail, décide de poursuivre la discussion de cette question à sa
346e session (octobre-novembre 2022) et demande au Bureau d’organiser des consultations
tripartites en vue de préparer:
a) des propositions concernant un cadre de procédure régissant la soumission de questions
ou de difficultés relatives à l’interprétation de conventions internationales du travail à
l’appréciation de la Cour internationale de Justice conformément à l’article 37,
paragraphe 1;
b) d’autres propositions au sujet de l’application de l’article 37, paragraphe 2, en tenant
compte de ses orientations et des avis exprimés au cours de l’échange de vues tripartite;
c) de nouvelles propositions permettant de trouver des solutions consensuelles dans le
cadre des procédures existantes en associant les mandants tripartites, notamment par un
dialogue tripartite informel avec la commission d’experts.
161. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique), répondant à la demande de
clarification de la porte-parole du groupe des travailleurs sur la signification exacte de
l’article 37, paragraphe 1, déclare que cette disposition est libellée de manière claire et sans
ambiguïté. Conformément aux principes d’interprétation du droit coutumier reflétés à
l’article 31 de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, un texte doit être
interprété suivant le sens ordinaire des termes utilisés dans leur contexte et à la lumière de
l’objet et du but du texte. Les mots «Toutes […] difficultés […] seront soumises à l’appréciation»
ne laissent aucun doute quant au caractère obligatoire du règlement judiciaire des différends
d’interprétation. En outre, l’article 37, paragraphe 1, est formulé en termes absolus.
Contrairement à l’acte constitutif d’autres organisations telles que l’Organisation des Nations
Unies pour l’alimentation et l’agriculture ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS),
l’obligation de soumettre toutes les difficultés d’interprétation à la CIJ qui est énoncée à
l’article 37, paragraphe 1, ne souffre aucune exception (par exemple un règlement par voie de
négociation ou par un organe de gouvernance interne), ce qui signifie qu’il n’existe aucun autre
mécanisme possible de règlement des différends.
162. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare qu’il existe à n’en pas douter un différend
d’interprétation et rappelle que le Conseil d’administration est tenu en vertu de la Constitution
de le soumettre à la CIJ. À cet égard, il pourrait être utile de préciser qu’il appartient au système
de contrôle de l’OIT d’établir les conditions du droit de grève. L’oratrice ne comprend pas bien
GB.344/PV 54
pourquoi les employeurs sont si réticents à saisir la CIJ. Le groupe des travailleurs n’est pas
disposé à tenir une nouvelle discussion informelle sur ce point. Plusieurs groupes de
gouvernements se sont exprimés en faveur du projet de décision initial et ont présenté un
certain nombre de conditions à examiner pour aller de l’avant, conditions sur lesquelles les
employeurs peuvent s’exprimer. Le groupe des travailleurs est prêt à poursuivre sur cette base.
163. La porte-parole du groupe des employeurs répète que, pour convenir de principes codifiés
au niveau mondial, il faut d’abord se concentrer sur les différentes situations nationales, qui
peuvent être étudiées dans le cadre de discussions entre les pays et avec les mandants
tripartites des pays. Elle appelle les participants à examiner le projet de décision tel que
sous-amendé, ce qui permettrait de passer à l’étape suivante avec l’organisation d’un dialogue
tripartite informel avec la commission d’experts.
164. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare que son groupe n’accepte pas le
sous-amendement proposé et ne voit pas la nécessité d’un dialogue tripartite informel avec la
commission d’experts, qui est un organe indépendant chargé d’apporter une expertise sur
l’application des conventions.
165. La porte-parole du groupe des employeurs répète que le différend d’interprétation ne relève
pas de la CIJ. Elle rappelle que la seule discussion que la Conférence a consacrée à ce sujet s’est
tenue au cours de la période précédant l’adoption de la convention no 87 et a conduit à la
décision d’exclure le droit de grève de la partie réglementaire de la convention. Les mandants
devraient avoir la possibilité de discuter de cette décision et d’examiner comment les choses
ont évolué et quelles conséquences cela a eu sur la réglementation au niveau mondial. C’est
ce que permettrait le dialogue tripartite proposé dans l’amendement initial présenté par le
groupe des employeurs et sous-amendé pour répondre aux souhaits de ceux qui veulent
également faire référence à l’article 37.
166. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, un représentant du gouvernement de
la France juge discutable la proposition du groupe des employeurs de supprimer la référence
à la Constitution de l’OIT dans le projet de décision. L’inclusion de cette référence serait utile
et contribuerait à prévenir de futurs différends. Aussi claire que soit l’intention des parties au
moment de l’adoption d’une convention, cette intention peut perdre de sa clarté au fil des ans.
Le recours aux procédures déjà prévues par la Constitution pourrait permettre au Conseil
d’administration d’aller de l’avant et lui éviterait de faire appel à un juge. Le projet de décision
initial est donc une bonne proposition, car il laisse du temps pour examiner les différentes
options.
167. S’exprimant au nom du groupe des PIEM, une représentante du gouvernement des
États-Unis déclare que son groupe n’est pas en mesure d’appuyer le sous-amendement
proposé par le groupe des employeurs.
168. La porte-parole du groupe des travailleurs précise que, bien que soutenant le projet de
décision initial, son groupe préférerait poursuivre la discussion en mars 2023 afin de laisser au
nouveau Directeur général le temps de prendre ses marques avant la reprise de la discussion.
169. Le Président suggère que, puisque la majorité s’est prononcée en faveur du projet de décision
initial, le Conseil d’administration adopte cette version.
170. La porte-parole du groupe des employeurs indique que son groupe ne peut pas appuyer le
projet de décision tel que proposé par le Bureau. Les employeurs ont proposé que des
discussions tripartites soient organisées sur la question, et cette proposition a reçu le soutien
de gouvernements. Le groupe des employeurs a présenté un compromis tenant compte des
deux points de vue et incluant également les éléments jugés importants par les employeurs et
GB.344/PV 55
un certain nombre de gouvernements. Il souhaite dialoguer de manière tripartite et informelle
avec la commission d’experts afin de trouver une solution consensuelle, conformément au
mandat du Conseil d’administration. Dans un esprit de compromis, le groupe des employeurs
est disposé à discuter des paragraphes 1 et 2 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT et à
inclure une référence à la Constitution dans le projet de décision.
171. La porte-parole du groupe des travailleurs note que, tout comme son groupe, plusieurs
groupes de gouvernements ont souscrit au projet de décision initial avec une date modifiée,
alors que seuls deux groupes de gouvernements ont appuyé les amendements proposés par
le groupe des employeurs. La position du Conseil d’administration est claire.
172. Le Président fait savoir que le bureau du Conseil d’administration a décidé d’avancer et
d’examiner de nouveau la question en mars 2023.
173. La porte-parole du groupe des employeurs dit que, puisqu’un nouvel élément a été ajouté,
les employeurs ne sont pas en mesure de donner leur accord à ce stade. Il faudra revenir sur
cette question.
174. La porte-parole du groupe des travailleurs indique qu’elle a initialement proposé que
l’examen ait lieu en mars 2023, mais que si cela n’est pas acceptable pour le Conseil
d’administration les travailleurs pourraient s’accommoder d’un examen en novembre 2022.
175. La porte-parole du groupe des employeurs suggère de suspendre la discussion pour
rechercher un consensus sur le projet de décision et de la reprendre ultérieurement.
176. La porte-parole du groupe des travailleurs rappelle que, en dépit de toutes les paroles
prononcées avec emphase au sujet du consensus, aucun accord sur la question n’est intervenu
depuis dix ans. Il est évident qu’une majorité souhaite aller de l’avant, ce qui signifie que de
nouvelles consultations tripartites devraient être organisées en vue de préparer des
propositions; telle est la décision qui devrait être prise.
(La discussion est ajournée.)
177. La porte-parole du groupe des employeurs constate que des gouvernements semblent
partager l’avis de son groupe, à savoir que le projet de décision devrait faire référence au
dialogue tripartite. Ainsi, se référant au projet de décision initial figurant au paragraphe 74 du
document, elle propose que l’alinéa b) soit modifié comme suit: «d’autres propositions au sujet
de l’application de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT». Elle propose ensuite
d’ajouter un nouveau paragraphe 75 libellé en ces termes: «Le Conseil d’administration
demande au Bureau d’élaborer également, dans un délai raisonnable, des propositions
d’approches possibles aux fins du règlement des divergences de vues concernant les normes
internationales du travail dans le cadre des structures tripartites de l’OIT». L’on pourrait
également ajouter un nouveau paragraphe 76 empruntant aux termes de l’alinéa b) initial, qui
se lirait comme suit: «Le Bureau est invité à préparer les propositions visées aux
paragraphes 74 et 75 en tenant compte des orientations du Conseil d’administration et des
avis exprimés au cours de l’échange de vues tripartite.»
178. La porte-parole du groupe des travailleurs se félicite que les mandants se rapprochent d’un
accord concernant le paragraphe 74. Elle réaffirme l’attachement de son groupe au
tripartisme, au dialogue social et à la recherche d’un consensus, mais estime que le nouveau
paragraphe 75 proposé par le groupe des employeurs est trop général, voire superflu, étant
donné que le Conseil d’administration s’est toujours employé à trouver des solutions tripartites
aux divergences de vues qui se sont fait jour au sujet des normes internationales du travail
depuis la création de l’OIT. Toute référence au tripartisme doit se rapporter précisément au
GB.344/PV 56
plan de travail visant à renforcer le système de contrôle. Partant, l’oratrice suggère de remanier
le paragraphe 75 de façon à dire dans les grandes lignes que le Conseil d’administration
s’engage à continuer ses discussions tripartites sur la poursuite de la mise en oeuvre dudit plan
de travail. Elle rappelle que le Conseil d’administration a déjà pris un engagement en ce sens
en 2017, lorsqu’il a adopté le plan de travail révisé visant à renforcer le système de contrôle.
179. La porte-parole du groupe des employeurs sait gré au groupe des travailleurs de la
souplesse dont il fait preuve en vue de trouver une solution. Elle se déclare disposée à accepter
le libellé proposé par les travailleurs, pourvu qu’une référence au plan de travail et aux
divergences de vues puisse aussi être incluse.
(Le Conseil d’administration reprend l’examen de la question après une brève suspension de séance
destinée à permettre des consultations.)
180. La porte-parole du groupe des travailleurs, se référant au projet de décision initial, propose
de conserver le paragraphe 74 dans sa totalité, en ne modifiant que la date, et d’ajouter un
nouveau paragraphe formulé ainsi: «Le Conseil d’administration s’engage à poursuivre la mise
en oeuvre du plan de travail visant à renforcer le système de contrôle.»
181. La porte-parole du groupe des employeurs relève que le nouveau paragraphe suggéré par
le groupe des travailleurs omet l’élément essentiel pour son groupe. Aussi propose-t-elle de
sous-amender la phrase afin de faire référence aux normes internationales du travail et aux
structures tripartites de l’OIT, et de rendre compte des vues exprimées par les gouvernements
sur la nécessité de poser des délais. Le paragraphe se lirait donc comme suit: «Le Conseil
d’administration s’engage à poursuivre la mise en oeuvre du plan de travail visant à renforcer
le système de contrôle, y compris moyennant l’élaboration d’approches aux fins du règlement
des divergences de vues concernant les normes internationales du travail dans le cadre des
structures tripartites de l’OIT, dans un délai raisonnable.»
182. La porte-parole du groupe des travailleurs indique que, si le groupe des employeurs ne peut
accepter le nouveau libellé proposé par son groupe, elle préférerait n’ajouter aucun
paragraphe nouveau et s’en tenir simplement au texte initial du paragraphe 74. Les
gouvernements ont eux aussi souligné la nécessité d’assurer la sécurité juridique, ce qui en
cas de divergence ne peut être fait qu’en appliquant l’article 37. Elle ne peut accepter le
sous-amendement que le groupe des employeurs propose d’apporter au nouveau
paragraphe, car il ne ferait selon elle qu’ajouter à l’incertitude et à la confusion. Elle répète que,
le Conseil d’administration étant une institution tripartite, tout engagement pris par lui est
nécessairement tripartite et qu’il n’y a pas lieu de le préciser expressément.
183. Les représentants des gouvernements du Brésil et de la Colombie approuvent le nouveau
paragraphe, tel que sous-amendé par le groupe des employeurs.
184. Un représentant du gouvernement du Japon suggère de ne retenir que les parties du
sous-amendement du groupe des employeurs qui figurent dans le plan de travail.
185. Une représentante du gouvernement des États-Unis propose un autre sous-amendement
au nouveau paragraphe, de façon à ce que celui-ci se lise comme suit: «Le Conseil
d’administration s’engage à renforcer le système de contrôle, y compris dans le cadre du
dialogue social tripartite.»
186. Un représentant du gouvernement de l’Argentine estime que la solution la plus appropriée
consiste à adopter le nouveau paragraphe proposé par le groupe des travailleurs.
GB.344/PV 57
187. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la France se déclare favorable au nouveau paragraphe, tel que proposé par le groupe des
travailleurs. Elle n’est pas en mesure d’accepter le sous-amendement proposé par le groupe
des employeurs, au motif que tous les différends concernant des conventions de l’OIT
devraient être régis par l’article 37 de la Constitution de l’Organisation. L’intervenante
demande davantage de temps pour examiner le sous-amendement proposé par la
représentante des États-Unis.
188. La porte-parole du groupe des travailleurs précise que le plan de travail, qui a vocation à
renforcer le système de contrôle, ne traite pas des questions soulevées par le
sous-amendement du groupe des employeurs. L’introduction de ces questions nouvelles
aurait pour effet de compliquer encore un débat dans le cadre duquel son groupe recherche
au contraire davantage de clarté et de sécurité juridique. Le sous-amendement de la
représentante des États-Unis tend également à étendre la portée du paragraphe à l’examen.
La porte-parole du groupe des travailleurs déconseille d’engager une discussion plus large sur
le renforcement du système de contrôle de manière générale. Elle préfère toujours le nouveau
paragraphe proposé par son groupe, auquel elle ne pourra accepter aucun ajout.
189. Un représentant du gouvernement de la Chine estime que le nouveau paragraphe, tel que
sous-amendé par le groupe des employeurs, offre une solution pratique: il tient compte des
avis divergents exprimés et permet la recherche d’autres solutions.
190. La porte-parole du groupe des employeurs rappelle qu’un grand nombre de gouvernements
a souligné l’importance de la gouvernance et des structures tripartites. Un système juridique
n’est solide que s’il bénéficie d’un réel soutien. S’il reposait sur un large consensus tripartite, le
système de contrôle n’en serait que plus fort et plus efficace. Il faut tenter de trouver un
consensus avant d’ester en justice. Les traditions juridiques et la jurisprudence de tous les pays
favorisent de plus en plus la discussion et la médiation pour régler les conflits avant tout recours
à la justice, a fortiori dans le domaine des relations professionnelles. Si l’OIT, championne du
dialogue tripartite sur la scène internationale, s’abstenait de toute tentative en ce sens, elle se
mettrait en porte-à-faux avec l’histoire. S’il n’est pas fait référence aux structures tripartites dans
le nouveau paragraphe, il ne s’agit pas d’une solution de compromis. Les deux éléments doivent
être réunis pour faire en sorte que l’élément relatif au dialogue tripartite vienne renforcer tout
l’édifice du système de contrôle, tant dans les faits que sur le fond.
191. Les représentants des gouvernements de l’Australie, du Japon, du Mexique et du
Royaume-Uni se déclarent favorables au sous-amendement que la représentante des États-
Unis a proposé d’apporter au nouveau paragraphe.
192. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la France réaffirme son soutien en faveur du nouveau paragraphe tel que proposé par le
groupe des travailleurs. Avant de prendre position sur le sous-amendement proposé par la
représentante des États-Unis, elle souhaite entendre les vues des groupes des travailleurs et
des employeurs.
193. Un représentant du gouvernement du Brésil apporte son appui au sous-amendement
proposé par la représentante des États-Unis, mais suggère d’ajouter une formule telle que
«, en tant que mode de règlement extrajudiciaire» après «y compris dans le cadre du dialogue
social tripartite».
194. La porte-parole du groupe des employeurs demande des précisions sur le point de savoir si
le sous-amendement proposé par la représentante des États-Unis comprend la référence au
plan de travail.
GB.344/PV 58
195. La représentante du gouvernement des États-Unis répond que sa proposition initiale
n’incluait pas la référence au plan de travail, mais qu’elle serait heureuse de la conserver.
196. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare qu’elle serait prête, pour parvenir à un
accord, à ajouter «, y compris dans le cadre du dialogue social tripartite» à la fin du nouveau
paragraphe proposé par son groupe. L’oratrice ajoute que la phrase devrait s’achever ainsi, et
qu’elle ne pourra accepter aucun ajout. Elle croit comprendre que de nombreux
gouvernements ne veulent pas d’un paragraphe qui n’indique pas clairement la manière de
traiter l’interprétation des normes internationales du travail et les divergences en la matière,
et fait observer que certains membres de son groupe sont réticents à l’idée d’élargir le débat
au-delà de la question des moyens d’assurer la sécurité juridique.
197. La porte-parole du groupe des employeurs indique que le rôle du Conseil d’administration
consiste à trouver des façons d’aller de l’avant, et rappelle que les gouvernements ont exprimé
divers points de vue. Le groupe des employeurs accueille favorablement le sous-amendement
proposé par la représentante des États-Unis et est disposé à accepter une version du nouveau
paragraphe qui comprenne à la fois ce sous-amendement et celui que le groupe des
travailleurs vient de proposer, étant entendu que le Bureau concevra également des
approches et des méthodes en vue du règlement des différends non résolus et de leur examen
dans le cadre d’un dialogue social tripartite, en laissant ainsi la porte ouverte à cet égard.
198. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, un représentant du gouvernement du Maroc
apporte son appui au nouveau paragraphe, tel que sous-amendé par la représentante des
États-Unis et par le groupe des travailleurs.
199. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la France apporte elle aussi son soutien au nouveau paragraphe, tel que sous-amendé par
la représentante des États-Unis et par le groupe des travailleurs. Elle sait gré aux différents
groupes de leur bonne volonté à l’égard de la solution proposée.
200. La porte-parole du groupe des travailleurs se déclare en mesure d’adopter le texte
sous-amendé et apprécie la contribution de chacun à ce résultat, qui constitue un progrès
important. Bien qu’elle soit prête à participer aux discussions futures du Conseil
d’administration sur les avis divergents des uns et des autres, elle précise qu’elle ne partage
pas le point de vue du groupe des employeurs sur la question.
Décision
201. Le Conseil d’administration, considérant qu’il est fondamental de régler les différends
relatifs à l’interprétation des conventions internationales du travail conformément aux
dispositions de l’article 37 de la Constitution de l’OIT afin d’assurer le contrôle effectif de
l’application des normes internationales du travail, décide de poursuivre la discussion de
cette question à sa 347e session (mars 2023) et demande au Bureau d’organiser des
consultations tripartites en vue de préparer:
a) des propositions concernant un cadre de procédure régissant la soumission de
questions ou de difficultés relatives à l’interprétation de conventions
internationales du travail à l’appréciation de la Cour internationale de Justice
conformément à l’article 37, paragraphe 1;
b) d’autres propositions au sujet de l’application de l’article 37, paragraphe 2, en tenant
compte de ses orientations et des avis exprimés au cours de l’échange de vues
tripartite.
GB.344/PV 59
202. Le Conseil d’administration s’engage à poursuivre la mise en oeuvre du plan de travail
visant à renforcer le système de contrôle, y compris dans le cadre du dialogue social
tripartite.
(GB.344/INS/5, paragraphe 74, tel que modifié par le Conseil d’administration)
6. Questions relatives à l’inclusion des conditions de travail sûres
et salubres dans le cadre des principes et droits fondamentaux
au travail de l’OIT
(GB.344/INS/6 et GB.344/INS/6(Add.1))
203. La porte-parole du groupe des employeurs dit qu’il est important de garder à l’esprit que le
projet de résolution ne créerait pas un nouveau principe constitutionnel mais reconnaîtrait le
caractère fondamental d’un principe existant. Au sein de l’OIT, les parties aux conventions
fondamentales relatives à la sécurité et à la santé au travail feraient ainsi l’objet d’un contrôle
renforcé de l’application effective, en droit et dans la pratique, de ces instruments dans leur
pays. Elles devraient présenter plus souvent des rapports à la Commission d’experts pour
l’application des conventions et recommandations et à la Commission de l’application des
normes de la Conférence, et il y aurait plus souvent des réclamations au titre de l’article 24. En
vertu de la Déclaration de 1998, les gouvernements qui n’ont pas ratifié la convention reconnue
comme fondamentale auraient néanmoins l’obligation constitutionnelle, du seul fait de leur
appartenance à l’OIT, «de respecter, promouvoir et réaliser, de bonne foi,» le nouveau principe
sur la sécurité et la santé au travail. Le choix de l’expression à utiliser pour désigner le principe
fondamental et de la convention qui sera considérée comme fondamentale aura de profondes
répercussions en dehors de l’OIT, car les États et les acteurs non étatiques pourraient prendre
des mesures influencées par les normes de l’OIT en matière de sécurité et de santé au travail.
Les principaux États commerçants ou les grandes banques commerciales pourraient en
revenir à exercer des pressions sur les pays en développement afin qu’ils ratifient la nouvelle
convention et l’appliquent en incluant des exigences à son sujet dans les accords commerciaux,
les régimes d’incitation au commerce et les accords de prêt ou d’investissement. Pour
rationaliser les incidences et éviter les conséquences involontaires, il est important de se
concentrer sur l’essentiel.
204. Pour ce qui est de choisir une ou plusieurs conventions relatives à la sécurité et à la santé au
travail devant être reconnues comme fondamentales, il faudrait évaluer les quatre conventions
proposées dans les documents au regard de critères couvrant leur caractère fondamental et
la mesure dans laquelle ce caractère fondamental est reconnu au sein et en dehors de l’OIT.
Bien que le projet de résolution ne contienne pas d’informations suffisantes pour évaluer
correctement les instruments au regard de ces critères, le groupe des employeurs est d’avis
que la convention (nº 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail,
2006, est le choix idéal. Les deux principaux objectifs de cette convention sont la mise en place
d’une culture de prévention en matière de sécurité et de santé au travail et l’application d’un
système de gestion de la sécurité et de la santé au travail au niveau national. La convention
no 187 donne aux États Membres qui la ratifient la souplesse nécessaire pour la mettre en
oeuvre, indépendamment du niveau de développement du pays concerné. En outre, elle est la
norme de l’OIT relative à la sécurité et à la santé au travail la plus moderne et celle qui a
enregistré le plus grand nombre de ratifications au cours des cinq années précédentes. Elle a
été reconnue comme un instrument essentiel dans le Plan d’action (2010-2016) pour parvenir
à une large ratification et à une mise en oeuvre effective des instruments relatifs à la sécurité
et à la santé au travail (convention (nº 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, son
Document no 40
GB.347/INS/5, Plan de travail visant à renforcer le
système de contrôle: propositions concernant de
nouvelles dispositions en vue d’assurer la sécurité
juridique, février 2023
GB.347/INS/5
Afin de réduire au maximum l’impact environnemental des activités de l’OIT, les documents du Conseil d’administration publiés avant ou après les sessions ne
sont pas imprimés. Seuls les documents publiés en cours de session sont imprimés, en nombre limité, et distribués aux membres du Conseil d’administration.
Tous les documents du Conseil d’administration sont disponibles sur Internet, à l’adresse www.ilo.org/gb.
Conseil d’administration
347ᵉ session, Genève, 13-23 mars 2023
Section institutionnelle INS
Date: 27 février 2023
Original: anglais
Cinquième question à l’ordre du jour
Plan de travail visant à renforcer le système
de contrôle: propositions concernant de nouvelles
dispositions en vue d’assurer la sécurité juridique
Établi comme suite à la décision prise par le Conseil d’administration à sa 344e session (mars 2022), le présent
document contient un projet de cadre de procédure concernant le renvoi de questions ou de difficultés relatives
à l’interprétation des conventions internationales du travail devant la Cour internationale de Justice en vertu de
l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution. Il contient par ailleurs de nouvelles pistes de réflexion et
propositions concernant l’éventuelle institution d’un tribunal interne en vue du prompt règlement de toute
question ou difficulté d’interprétation conformément à l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution. Le présent
document a été établi compte tenu des vues exprimées durant les consultations informelles tenues en
novembre-décembre 2022 et en janvier-février 2023 (voir le projet de décision au paragraphe 62).
Objectifs stratégiques pertinents: Tous les objectifs stratégiques.
Principal résultat: Résultat 2: Des normes internationales du travail et un système de contrôle efficace et
faisant autorité.
Incidences sur le plan des politiques: Aucune à ce stade.
Incidences juridiques: Aucune à ce stade.
Incidences financières: Aucune à ce stade.
Suivi nécessaire: Il dépendra de la décision du Conseil d’administration.
Objet du document
GB.347/INS/5 2
Unité auteur: Bureau du Conseiller juridique (JUR).
Documents connexes: GB.344/PV; GB.344/INS/5; GB.335/INS/5; GB.329/INS/5(Add.)(Rev.); GB.329/PV;
GB.323/PV; GB.322/INS/5; GB.320/PV.
GB.347/INS/5 3
Table des matières
Introduction .............................................................................................................................................. 5
1. Cadre de procédure concernant le renvoi de questions ou de difficultés d’interprétation
devant la Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1...................... 7
1.1. La procédure consultative en bref .......................................................................................... 7
1.2. Cadre de procédure – les points essentiels à prendre en considération ......................... 8
2. Autres propositions concernant l’application de l’article 37, paragraphe 2, relatif
à l’institution d’un tribunal interne en vue du prompt règlement de toute question
ou difficulté d’interprétation ............................................................................................................ 12
2.1. Principes de base....................................................................................................................... 12
2.2. Origines de l’article 37, paragraphe 2, et compétence du tribunal ................................... 14
2.3. Structure et composition.......................................................................................................... 16
2.4. Sélection et nomination des juges .......................................................................................... 17
2.5. Règles régissant l’ouverture et la conduite de la procédure .............................................. 18
2.6. Relations avec les organes de contrôle.................................................................................. 19
2.7. Effet juridique des sentences du tribunal .............................................................................. 20
2.8. Travaux futurs ............................................................................................................................ 21
Projet de décision ..................................................................................................................................... 21
Annexes
I. Renvoi de questions ou de difficultés d’interprétation devant la Cour internationale
de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution ......................................... 23
II. Représentation schématique du cadre de procédure ................................................................. 29
III. Historique du débat relatif à l’article 37 – Dates clés ................................................................... 30
IV. Demandes d’interprétation soumises à la Cour permanente de Justice internationale
en vertu de l’article 37 (six précédents) ......................................................................................... 31
GB.347/INS/5 5
Introduction
1. À sa 344e session (mars 2022), le Conseil d’administration, considérant qu’il est fondamental
de régler les différends relatifs à l’interprétation des conventions internationales du travail
conformément aux dispositions de l’article 37 de la Constitution de l’OIT afin d’assurer le
contrôle effectif de l’application des normes internationales du travail, a demandé au Bureau
d’organiser des consultations tripartites en vue de préparer: a) des propositions concernant
un cadre de procédure régissant la soumission de questions ou de difficultés relatives à
l’interprétation de conventions internationales du travail à l’appréciation de la Cour
internationale de Justice (la Cour) conformément à l’article 37, paragraphe 1; b) d’autres
propositions au sujet de l’application de l’article 37, paragraphe 2 1.
2. Cette décision était fondée sur l’idée selon laquelle «[l]e libellé de l’article 37 ne laisse aucun
doute quant au fait que l’Organisation […] a l’obligation de résoudre les difficultés
d’interprétation en recourant à des moyens judiciaires et qu’à l’heure actuelle le pouvoir de
donner des interprétations définitives et contraignantes appartient exclusivement à la [Cour
internationale de Justice]» 2.
3. La discussion devant se tenir à la présente session s’inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre
du plan de travail visant à renforcer le système de contrôle. Lancé en mars 2017, ce plan de
travail constitue l’une des deux composantes de l’initiative sur les normes. Il prévoit l’examen,
au titre de la mesure 2.3 de ladite initiative 3, de nouvelles dispositions en vue d’assurer la
sécurité juridique, comme suite à la décision prise par le Conseil d’administration à sa
323e session (mars 2015) de ne prendre dans l’immédiat aucune mesure au titre de l’article 37
de la Constitution pour résoudre la question de l’interprétation de la convention (nº 87) sur la
liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève 4.
4. Les premières discussions concernant le volet «sécurité juridique» du plan de travail visant à
renforcer le système de contrôle ont eu lieu lors de la 335e session (mars 2019) du Conseil
d’administration. À cette session, le Conseil a décidé de tenir des consultations informelles et,
pour faciliter cet échange de vues tripartite, a demandé au Bureau d’établir un document sur
les éléments et conditions nécessaires à la mise en place d’un organe indépendant en vertu du
paragraphe 2 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT et de toute autre option fondée sur un
1 GB.344/PV, paragr. 201.
2 GB.344/INS/5, paragr. 66. Dans le même document, il est aussi précisé que «[l]’article 37 de la Constitution de l’OIT est le
parfait exemple de ce que l’on désigne plus communément par “clause de règlement des différends” […]. De par sa nature,
une clause de règlement des différends prévoit donc une procédure obligatoire et non facultative; elle prescrit en des termes
plus ou moins précis une solution juridique particulière à l’exclusion de toute autre.» (paragr. 19). Cette juridiction
«obligatoire» de la Cour internationale de Justice à l’égard de toutes questions d’interprétation vaut pour tous les Membres
de l’Organisation et, en 1953, lorsque l’Union soviétique a fait part de son souhait d’intégrer l’Organisation en formulant une
réserve à ce sujet, celle-ci n’a pas été acceptée. Voir Bulletin officiel, 31 décembre 1954, vol. XXXVII, no 7, 242-243.
3 GB.329/INS/5(Add.)(Rev.); GB.329/PV, paragr. 95-148.
4 GB.323/PV, paragr. 84. Cette décision a eu pour effet de suspendre temporairement l’examen d’un éventuel renvoi de la
question devant la Cour internationale de Justice entrepris à la suite de la discussion sur les modalités, la portée et le coût
des mesures pouvant être prises en vertu de l’article 37, paragraphe 1, tenue à la 322e session (novembre 2014) du Conseil
d’administration, et de la Réunion tripartite sur la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical,
1948, pour ce qui est du droit de grève ainsi que les modalités et pratiques de l’action de grève au niveau national, tenue en
février 2015.
GB.347/INS/5 6
consensus, ainsi qu’en vertu de la procédure prévue au paragraphe 1 de l’article 37 5. Les
consultations informelles et l’échange de vues tripartite ont été organisés en janvier 2020, et il
en a été rendu compte dans un document qui a été soumis pour discussion à la 338e session
(mars 2020) du Conseil d’administration 6. Cette session ayant été annulée en raison de la
pandémie de COVID-19, le Conseil d’administration n’a pu reprendre l’examen de cette
question qu’à sa 344e session (mars 2022) 7. On trouvera dans l’annexe III un bref historique
des discussions menées précédemment au sujet de l’article 37, ainsi que les liens vers tous les
documents pertinents.
5. Ainsi que le lui avait demandé le Conseil d’administration en mars 2022, le Bureau a organisé
une série de consultations informelles, en novembre-décembre 2022 et en janvier-février 2023.
Compte tenu des vues exprimées par les mandants tripartites, des précédents et de la pratique
de la Cour 8, le Bureau a élaboré un projet de cadre de procédure au titre de l’article 37,
paragraphe 1, et formulé d’autres propositions au sujet de l’article 37, paragraphe 2, en vue de
faciliter la poursuite des discussions, notamment au sujet des mesures de suivi à envisager.
On trouvera dans l’annexe I le projet de cadre de procédure concernant le renvoi de questions
ou de difficultés d’interprétation devant la Cour en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
accompagné d’une note introductive.
6. Il convient de noter que, bien que la décision du Conseil d’administration fasse référence au
renvoi de questions ou de difficultés relatives à l’interprétation de conventions internationales
du travail, le cadre de procédure proposé s’appliquerait également à toute question ou
difficulté relative à l’interprétation de la Constitution de l’OIT.
7. Le présent document contient par ailleurs de nouvelles pistes de réflexion et propositions
concernant l’éventuelle institution d’un tribunal interne en vue du prompt règlement de toute
question ou difficulté d’interprétation conformément à l’article 37, paragraphe 2, de la
Constitution de l’OIT, sur la base desquelles le Conseil d’administration pourra décider s’il
souhaite poursuivre l’examen de la question de l’application de l’article 37, paragraphe 2, et,
dans l’affirmative, préciser le calendrier envisagé à cette fin.
8. Entre autres informations complémentaires, on trouvera également dans le présent document
une représentation schématique du cadre de procédure proposé (annexe II) ainsi qu’un
récapitulatif des six demandes d’interprétation soumises par l’OIT à la Cour permanente de
Justice internationale en vertu de l’article 37 entre 1922 et 1932 (annexe IV).
5 GB.335/INS/5, paragr. 84 g).
6 GB.338/INS/5.
7 GB.344/INS/5.
8 On trouvera des informations d’ordre général sur la compétence consultative de la Cour dans La Cour internationale de
Justice: Manuel, 2019, 81-93. Voir aussi Khawar Qureshi, Catriona Nicol et Joseph Dyke: Advisory Opinions of the International
Court of Justice (Londres: Wildy, Simmonds and Hill Publishing, 2018); Hugh Thirlway, «Advisory Opinions» dans Max Planck
Encyclopedia of Public International Law (Oxford: Oxford University Press, 2006).
GB.347/INS/5 7
1. Cadre de procédure concernant le renvoi de questions
ou de difficultés d’interprétation devant la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37,
paragraphe 1
1.1. La procédure consultative en bref
9. Pour faciliter l’examen du cadre de procédure proposé, il est utile de rappeler les principaux
aspects de la fonction consultative de la Cour tels qu’ils ressortent de son Statut et de son
Règlement ainsi que de la pratique établie 9.
10. Les avis consultatifs n’ont pas pour objet de résoudre des différends entre États; ils visent
uniquement à donner un avis juridique faisant autorité aux organisations qui en font la
demande. Toute requête pour avis consultatif doit être fondée sur une décision de l’organe
compétent de l’organisation concernée dans laquelle figure la question à poser à la Cour, et
être accompagnée d’un dossier contenant tous les documents que l’organisation juge utile de
porter à la connaissance de la Cour.
11. La procédure consultative de la Cour est ouverte aux institutions spécialisées autorisées à s’en
prévaloir par l’Assemblée générale des Nations Unies, parmi lesquelles l’OIT, qui y est habilitée
en vertu de l’article IX, paragraphe 2, de l’Accord de 1946 qu’elle a conclu avec l’Organisation
des Nations Unies (ONU). Les demandes d’avis consultatif entraînent des coûts minimes
(reproduction de documents et frais de mission aux fins de la participation aux audiences), les
dépenses de la Cour étant supportées par l’ONU. La question soumise à la Cour doit être de
nature juridique, avoir un lien direct avec les activités de l’organisation requérante et relever
de son domaine de compétence. Le fait qu’une question soit vague ou ambiguë, ou encore que
la requête ait été motivée par des considérations politiques est sans pertinence au regard de
l’établissement de la compétence de la Cour.
12. La participation à une procédure consultative consiste à soumettre des observations écrites et,
si la Cour décide de tenir des audiences, à être entendu par celle-ci. La Cour peut accélérer la
procédure consultative si la demande lui en est faite expressément. Au moment de décider
quels États, organisations internationales ou autres entités devraient être invités à participer
à la procédure consultative, la Cour s’efforce de faire en sorte que tous les acteurs susceptibles
de lui communiquer des informations qu’elle ne pourrait pas obtenir autrement soient
associés à la procédure 10.
13. À l’inverse des arrêts rendus dans les affaires contentieuses, les avis consultatifs sont par
nature non contraignants. Nonobstant, la Cour a toujours établi une distinction entre le
caractère consultatif de sa fonction et les effets particuliers que l’organisation requérante
9 De 1948 à 2022, la Cour internationale de Justice a rendu 27 avis consultatifs en réponse à des requêtes soumises par
l’Organisation des Nations Unies (ONU) et quatre institutions spécialisées, à savoir l’Organisation des Nations Unies pour
l’éducation, la science et la culture, l’Organisation maritime internationale, l’Organisation mondiale de la santé et le Fonds
international de développement agricole. On trouvera le texte complet de tous les avis consultatifs de la Cour sur la page de
son site Web consacrée aux procédures consultatives. La dernière requête pour avis consultatif en date a été formulée par
l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution 77/247 du 30 décembre 2022 et transmise à la Présidente de la
Cour dans une lettre du Secrétaire général de l’ONU datée du 17 janvier 2023.
10 On trouvera de plus amples informations au sujet des principales caractéristiques et des aspects procéduraux de la fonction
consultative de la Cour dans le document GB.322/INS/5,paragr. 7-47.
GB.347/INS/5 8
pourrait souhaiter conférer à son avis. D’ailleurs, selon la lettre et l’esprit de l’article 37 de la
Constitution de l’OIT («Toutes questions ou difficultés […] seront soumises à l’appréciation de
la Cour internationale de Justice») et ainsi que l’ont réaffirmé les mandants tripartites à maintes
reprises 11, les avis consultatifs rendus par la Cour à la demande de l’OIT sont considérés
comme des décisions définitives faisant autorité, et ils devraient être appliqués comme telles.
1.2. Cadre de procédure – les points essentiels à prendre en considération
14. Il semble y avoir un large consensus quant à la nécessité de tenir compte des éléments
énumérés ci-après pour élaborer une procédure applicable au renvoi de questions ou de
difficultés d’interprétation devant la Cour en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT:
i) primauté des prescriptions de l’article 37 de la Constitution et extrême importance de la
sécurité juridique pour la crédibilité de l’OIT en tant qu’organisation normative;
ii) nécessité d’assurer la stabilité et un règlement définitif des différends en matière
d’interprétation par des voies judiciaires satisfaisant aux normes les plus élevées
d’expertise juridique, d’intégrité et d’indépendance;
iii) recours à l’article 37, paragraphe 1, pour obtenir le règlement de différends profonds et
persistants en matière d’interprétation qui justifient la saisine du principal organe
judiciaire du système des Nations Unies.
15. En outre, les consultations semblent confirmer que le cadre de procédure devrait:
i) être aussi fidèle que possible à la lettre et à l’esprit de l’article 37, paragraphe 1;
ii) éviter d’introduire des modalités d’application qui iraient à l’encontre de la Constitution et
risqueraient de compliquer la situation;
iii) garantir la tenue de discussions inclusives et la prise de décisions éclairées dans les délais
fixés à toutes les étapes de la procédure.
16. L’adoption d’un tel cadre serait d’une grande utilité pratique en ce qu’il établirait une méthode
simple, claire et prête à l’emploi pour l’examen des demandes de renvoi et la prise de décisions
en vue de l’ouverture d’une procédure consultative, préciserait le rôle et les responsabilités du
Bureau en amont et au cours de la procédure, et faciliterait la planification des éventuelles
mesures à prendre pour donner suite à l’avis de la Cour. Ce cadre renforcerait la cohérence, la
transparence et l’efficacité puisque les modalités qui y seraient énoncées auraient été
convenues à l’avance par les mandants et traduiraient l’engagement pris par ceux-ci de s’y
conformer, évitant ainsi que chaque demande de renvoi soumise pour examen donne lieu à
des discussions chronophages sur la procédure à suivre. L’adoption de ce cadre ne saurait
toutefois conditionner la soumission d’une requête pour avis consultatif de la Cour dans la
mesure où ce cadre ne peut en aucun cas primer sur les dispositions de la Constitution.
11 À titre d’exemple, voir la déclaration prononcée au nom du groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes à la session
de mars 2014 du Conseil d’administration, selon laquelle la compétence «pour interpréter de manière juridiquement
contraignante les conventions internationales du travail […] appartient exclusivement à la CIJ, conformément au
paragraphe 1 de l’article 37 de la Constitution» (GB.320/PV, paragr. 585). Voir également la déclaration de 2002 des membres
employeurs de la Commission de l’application des normes, selon laquelle «[s]eule la Cour internationale de Justice a autorité
pour émettre des interprétations contraignantes de conventions et recommandations, ce qui découle clairement de
l’article 37 de la Constitution […]» (OIT, Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 90e session, 2002,
28/14, paragr. 45), ou encore la déclaration faite en 1991 par les membres travailleurs de la même commission, selon laquelle
les évaluations et les vues des organes de contrôle sont généralement admises «sous réserve d’une interprétation définitive
de la Cour internationale de Justice» (OIT, Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 78e session, 1991,
24/4, paragr. 16). On trouvera ici une compilation de déclarations similaires.
GB.347/INS/5 9
17. Trois grandes questions ont retenu l’attention des mandants au cours des consultations
informelles: i) le niveau de soutien (ou «seuil») requis pour déclencher une discussion en bonne
et due forme au Conseil d’administration quant à l’opportunité d’un renvoi devant la Cour; ii) le
délai dans lequel le Conseil d’administration devrait prendre une décision sur un éventuel
renvoi; et iii) le rôle de la Conférence internationale du Travail dans la procédure de renvoi.
18. Premièrement, en ce qui concerne le tri éventuel des demandes de renvoi, il semble y avoir un
certain soutien en faveur de la fixation d’un seuil indicatif – non prescriptif – quant au nombre
de membres du Conseil d’administration ou d’États Membres qui devraient appuyer une
demande de renvoi pour que celle-ci soit examinée par le Conseil d’administration. Le fait que
ce seuil indicatif soit atteint et que la demande de renvoi puisse par conséquent être soumise
au Conseil d’administration pour examen ne préjugerait en rien de la décision finale du Conseil
quant à l’opportunité d’un renvoi devant la Cour. Certains mandants ont exprimé leur
préférence pour un seuil élevé, tandis que d’autres ont estimé que la majorité des États parties
à la convention concernée devraient soutenir la demande de renvoi pour que celle-ci puisse
être examinée. Il convient de noter que la Constitution de l’OIT prévoit que tout différend relatif
à l’interprétation d’une convention doit être soumis à l’appréciation de la Cour, mais qu’elle ne
contient aucune référence, directe ou indirecte, au degré de soutien dont une demande de
renvoi devrait bénéficier. Toutefois, dans les faits, tout renvoi devant la Cour nécessite une
discussion et une décision du Conseil d’administration, ce qui en soi tend à confirmer que les
différends en matière d’interprétation n’ont pas tous vocation à être portés devant la Cour 12.
19. En tout état de cause, le seuil indicatif proposé ne saurait, d’un point de vue juridique, instituer
une règle contraignante en matière de recevabilité, ce qui du reste n’est pas son but; il s’agit
plutôt de faire en sorte que les mandants aient une compréhension commune et sans
équivoque de la manière dont il convient de procéder, dans un souci d’efficacité opérationnelle
et d’économie procédurale. Une demande de renvoi pour laquelle le seuil indicatif de soutien
ne serait pas atteint serait tout de même soumise au bureau du Conseil d’administration, qui
pourrait formuler des recommandations quant aux mesures de suivi à prendre.
20. Deuxièmement, pour ce qui est de la durée des délibérations précédant la décision du Conseil
d’administration sur le renvoi, de nombreux mandants jugent souhaitable qu’un délai précis
soit fixé à cet égard, tandis que pour d’autres, il importe de ne pas limiter la durée de la
discussion, en particulier eu égard à l’incertitude qu’entraîneraient les cas dans lesquels le
Conseil d’administration ne parviendrait pas à prendre une décision dans le délai fixé. À ce
sujet, il n’est pas inutile de rappeler que les délibérations du Conseil d’administration sur un
éventuel renvoi se rapporteraient en principe à un désaccord persistant et que, par
conséquent, on pourrait raisonnablement penser que la ou les questions concernées et les
vues divergentes y relatives seraient déjà suffisamment claires pour tous, ou que le différend
aurait déjà fait l’objet de discussions au sein de l’Organisation. Si donc l’on considère que le
recours à l’article 37, paragraphe 1, est une mesure de dernier ressort en cas de différend
profond et persistant en matière d’interprétation, il serait logique et réaliste d’attendre du
Conseil d’administration qu’il mène à bien ses délibérations dans un certain délai, en particulier
12 Ainsi, en 1932, alors qu’il examinait l’opportunité de renvoyer devant la Cour une question sur le travail de nuit des femmes
posée par le gouvernement du Royaume-Uni, le Conseil d’administration a été saisi d’une demande du gouvernement de
l’Allemagne sollicitant le renvoi devant la Cour d’une question distincte quoique liée à celle soulevée par le Royaume-Uni. Le
Conseil d’administration a estimé que l’examen de la question soulevée par le gouvernement de l’Allemagne devrait être
ajourné afin que le Bureau puisse l’étudier de manière approfondie. Le gouvernement de l’Allemagne n’étant pas d’accord
avec la proposition d’ajournement, celle-ci a dû être mise aux voix, et il a été finalement décidé d’ajourner l’examen de la
question soulevée par le gouvernement de l’Allemagne. Voir les procès-verbaux de la 58e session du Conseil d’administration,
1932, 401.
GB.347/INS/5 10
si la demande portée devant la Cour appelle une «réponse urgente» ainsi que le prévoit
l’article 103 de son Règlement. Dans cette optique, il ne serait pas avisé de dissocier la
discussion sur la demande de renvoi de l’examen de la ou des questions à soumettre à la Cour
car cela ralentirait le processus.
21. Troisièmement, des vues divergentes ont été exprimées quant à l’organe auquel il devrait
appartenir de décider de l’opportunité du renvoi. Bien que le Conseil d’administration soit
habilité à demander un avis consultatif en vertu de la résolution adoptée par la Conférence en
1949, qui lui délègue ce pouvoir, de nombreux mandants sont résolument d’avis que la
décision du Conseil d’administration devrait être soumise à la validation ou à l’approbation de
la Conférence internationale du Travail, qui, en plus d’être l’organe exécutif suprême de l’OIT,
est aussi l’organe le plus représentatif des mandants tripartites. Pour certains mandants, toute
discussion sur le fond devrait se dérouler à la Conférence, alors que pour d’autres, la
Conférence ne serait pas l’instance indiquée pour une telle discussion dès lors qu’elle a habilité
le Conseil d’administration à trancher ce type de questions.
22. À ce sujet, on peut noter que, compte tenu du mode de fonctionnement du Conseil
d’administration et ainsi que le confirme la pratique suivie dans le passé, celui-ci serait
peut-être mieux placé pour faire le tri entre les demandes de renvoi, procéder à une analyse
approfondie de l’objet du différend en matière d’interprétation, apprécier l’opportunité de
saisir la Cour et, éventuellement, déterminer la ou les questions juridiques à soumettre à
celle-ci 13. Cela étant, dans le cas d’un différend particulièrement profond ou important sur le
plan institutionnel, la Conférence pourrait être invitée à approuver la décision du Conseil
d’administration (sans procéder à un nouvel examen de la demande de renvoi sur le fond) et à
autoriser le renvoi au nom de l’ensemble des Membres de l’OIT 14. En pareil cas, le Conseil
d’administration, après s’être prononcé en faveur du renvoi (par consensus ou par un vote à la
majorité simple), déciderait de soumettre un projet de résolution à la session suivante de la
Conférence pour adoption. La résolution, qui serait transmise à la plénière par la Commission
des affaires générales, confirmerait sa décision de demander un avis consultatif à la Cour, y
compris les questions à soumettre à l’appréciation de celle-ci, et chargerait le Directeur général
de faire suivre ces questions au Greffier ou au Président de la Cour conformément aux règles
applicables.
23. Cette approche «en deux temps» faisant intervenir une décision du Conseil d’administration
suivie d’une décision de la Conférence se retrouve à l’article 33, à l’article 37, paragraphe 2, et
à l’article 38, paragraphe 2, de la Constitution, qui prévoient l’approbation ou la confirmation
par la Conférence de recommandations ou de règles formulées par le Conseil
d’administration 15. Dans les trois cas, le but semble être de répondre à la nécessité d’associer
13 Ainsi que cela a été souligné en 1949 par le rapporteur de la Commission du Règlement, la Conférence «n’a qu’une existence
très sporadique: elle se réunit environ trois semaines par an, généralement, et il peut arriver qu’une demande d’avis
consultatif soit rendue nécessaire par les circonstances, auquel cas il semble qu’il doive appartenir au Conseil d’administration
de saisir la Cour». Voir OIT, Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 32e session, 1949, 242.
14 Il convient de noter à ce sujet que, ainsi que le précisait la note du Bureau adressée à la Commission du Règlement à la
session de la Conférence de 1949, «le Conseil d’administration exerce d’importantes fonctions relatives au fonctionnement
de l’Organisation internationale du Travail et peut, en cette qualité, se trouver dans une situation où il lui semblerait désirable
et même indispensable de saisir la Cour sans délai. Dans ces conditions, le Conseil d’administration a estimé qu’il serait utile
de demander à la Conférence de lui accorder, à l’avance et sous une forme générale, l’autorisation prévue dans l’accord avec
les Nations Unies. La Commission du Règlement partage l’avis du Conseil sur ce point et, comme lui, estime que la méthode
la plus simple serait que le Conseil reçoive une autorisation conçue en termes généraux». Voir OIT, Compte rendu des travaux,
Conférence internationale du Travail, 32e session, 1949, 391.
15 La proposition initiale du Bureau concernant l’article 33 prévoyait que le Conseil d’administration recommande des
mesures dans les cas où un Membre ne mettrait pas en oeuvre les recommandations d’une commission d’enquête. Un
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la Conférence, en raison de sa représentativité, à des décisions ayant des conséquences
importantes pour l’ensemble des Membres de l’Organisation 16. Ainsi, il pourrait être judicieux
de faire figurer dans le cadre de procédure une disposition prévoyant expressément que le
Conseil d’administration peut décider, au cas par cas, de soumette une décision de renvoi à
l’approbation de la Conférence.
24. En plus des principaux aspects susmentionnés, trois questions connexes ont été examinées au
cours des échanges tripartites: celle de savoir s’il faudrait autoriser les États Membres qui ne
sont pas représentés au Conseil d’administration à participer aux délibérations de celui-ci
quant à l’opportunité d’un renvoi devant la Cour; celle de savoir si le Bureau devrait adopter
une position rigoureusement neutre et impartiale tout au long de la procédure de renvoi et de
la procédure consultative; et, enfin, celle de savoir si le renvoi devrait avoir un effet suspensif
sur les travaux des organes de contrôle se rapportant à la convention concernée.
25. Premièrement, pour ce qui est de la participation éventuelle de tous les gouvernements
intéressés aux délibérations du Conseil d’administration, il convient de préciser que, en vertu
des règles en vigueur (article 4.3 du Règlement du Conseil d’administration), le Conseil
d’administration peut se réunir en comité plénier et donner aux représentants des
gouvernements qui ne sont pas représentés au Conseil d’administration la possibilité
d’exprimer leurs vues. Les gouvernements qui ne sont pas membres du Conseil
d’administration pourraient par ailleurs être invités à soumettre des observations écrites, dans
les limites fixées par le Conseil, avant le premier examen de la demande de renvoi. Cette
possibilité, combinée à celle de soumettre la question à l’approbation de la Conférence,
garantirait le caractère inclusif de la procédure sans toutefois surcharger ni retarder les
délibérations du Conseil d’administration.
26. Deuxièmement, en ce qui concerne l’obligation de neutralité et d’impartialité qui incombe au
Bureau, il est en effet impératif que celui-ci s’abstienne de toute action susceptible d’être
perçue comme un soutien ou une assistance à l’une ou l’autre des parties prenantes dans le
différend en matière d’interprétation. Il convient d’éviter que vienne s’ajouter au différend une
controverse au sujet du rôle et des responsabilités du Bureau 17. À cette fin, le dossier détaillé
devant être envoyé à la Cour devrait être préparé sous la seule responsabilité du Directeur
général et ne devrait pas être soumis aux groupes pour examen. En outre, le Bureau ne devrait
apporter aucune assistance matérielle, aucun conseil juridique ni aucun appui financier à un
groupe de mandants ou à des Membres éventuellement concernés par la procédure devant la
amendement a été adopté, qui précisait que des mesures devraient être recommandées à la Conférence pour autant qu’elles
se rapportent à «des cas très graves» et que, par conséquent, «il semble souhaitable d’avoir l’appui de la Conférence», celle-ci
étant «l’organe souverain de l’Organisation». Pour ce qui est de l’article 37, paragraphe 2, la référence à l’approbation, par la
Conférence, des règles formulées par le Conseil d’administration a été ajoutée à la suite d’une discussion portant sur le
caractère obligatoire que revêtaient les décisions rendues par le tribunal pour tous les États Membres, et, partant, sur la
nécessité que la Conférence joue un rôle dans ce processus. Voir OIT, Bulletin officiel, 1946, vol. XXVII, no 3, 641, 819 et 914.
16 Dans le même ordre d’idée, l’Instrument d’amendement à la Constitution de l’OIT, 1986 (qui n’est pas encore entré en
vigueur), prévoit que la nomination du Directeur général relève de la compétence du Conseil d’administration mais qu’elle
doit être soumise à l’approbation de l’ensemble des Membres représentés à la Conférence. Voir OIT, Compte rendu des travaux,
Conférence internationale du Travail, 72e session, 1986, 18. Une procédure analogue s’applique à la nomination du chef de
secrétariat à l’UNESCO et à l’OMS.
17 Il ne s’agit pas là d’une simple hypothèse. Dans le contexte de la procédure consultative relative à la compétence de l’OIT à
l’égard de la réglementation internationale des conditions de travail des personnes employées dans l’agriculture, un membre
du Conseil d’administration s’est plaint directement auprès de la Cour, par lettre du 17 juin 1922, du manque d’objectivité et
de neutralité du mémorandum soumis par le Directeur du BIT ainsi que de l’absence de consultations. Voir Actes et documents
relatifs aux arrêts et aux avis consultatifs de la Cour, no 1, Première session ordinaire, 15 juin-12 août 1922, section B, documents
relatifs à l’Avis consultatif no 2, 494.
GB.347/INS/5 12
Cour (par exemple pour la préparation des exposés écrits, la représentation juridique, les frais
de voyage, etc.). Quant à la participation du Bureau aux audiences qui pourraient être
organisées par la Cour, elle serait l’occasion pour lui de présenter un compte rendu fidèle des
mesures et des décisions prises préalablement au renvoi, et d’apporter des précisions d’ordre
factuel (par exemple sur l’historique du différend, la théorie constitutionnelle, la structure et
les responsabilités institutionnelles, les processus et le système normatifs de l’OIT, etc.) 18.
27. Troisièmement, au sujet de l’effet du renvoi sur les principales fonctions et procédures de
contrôle, il est à noter que, dès lors que la procédure consultative viendrait mettre fin à une
controverse persistante, il n’y aurait pas lieu de suspendre les activités de contrôle régulier
précisément à ce moment-là. Ainsi, les procédures visant à garantir le respect des normes
continueraient de s’appliquer et les organes de contrôle de s’acquitter de leurs fonctions
pendant que la requête pour avis consultatif serait en instance, comme cela avait été le cas
depuis l’apparition du différend. Toutefois, bien qu’il ne soit pas souhaitable que les travaux
ordinaires des organes de contrôle soient suspendus pendant la durée de la procédure
consultative en raison des perturbations que cela entraînerait, les organes de contrôle
pourraient décider de leur propre chef, au cas par cas, de suspendre l’examen d’un aspect
particulier d’une convention en attendant que la Cour se soit prononcée.
2. Autres propositions concernant l’application de l’article 37,
paragraphe 2, relatif à l’institution d’un tribunal interne
en vue du prompt règlement de toute question ou difficulté
d’interprétation
2.1. Principes de base
28. À la 322e session (octobre-novembre 2014) du Conseil d’administration, le Bureau a présenté
des propositions détaillées concernant la création d’un tribunal interne en vue du prompt
règlement de toute question ou difficulté relatives à l’interprétation des conventions
internationales du travail, auxquelles était joint un projet de statut rédigé sur la base d’un
examen exhaustif de la structure des principales juridictions internationales en activité 19. De
plus amples précisions quant à l’organisation et au fonctionnement du tribunal ont été
fournies dans le document soumis à la 338e session (mars 2020) du Conseil d’administration 20.
18 À ce sujet, il y a lieu de rappeler l’exposé écrit que le Bureau a soumis dans le cadre de la procédure relative à la convention
(nº 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919, dans lequel on pouvait lire notamment ce qui suit: «le présent mémoire
comportera, en premier lieu, un exposé historique des faits et, en second lieu, un exposé des thèses en présence. […] Le Bureau
international du Travail s’est efforcé, dans le présent mémoire, de rapporter aussi exactement que possible les faits et les
arguments relatifs à la question soumise à la Cour. Il ne lui appartient pas de formuler une conclusion dans un sens ou dans
l’autre» (CPJI, série C: Actes et documents relatifs aux arrêts et aux avis consultatifs de la Cour; pièces de la procédure écrite,
première partie, 162, 180). Dans son exposé oral, Edward Phelan a fait observer ce qui suit: «Le Bureau international du
Travail vous a déjà transmis un exposé écrit, dont l’objet était de présenter à la Cour, aussi impartialement que possible, tous
les éléments du problème soumis pour règlement à son appréciation […]. Le Bureau international du Travail constate qu’il existe
des interprétations divergentes de la convention sur le travail de nuit des femmes; il déplore ces divergences d’interprétation,
et se présente devant la Cour dans le seul but de faciliter l’obtention d’un règlement juridiquement satisfaisant de ce
problème» (CPJI, série C: Actes et documents relatifs aux arrêts et aux avis consultatifs de la Cour, séances publiques et
plaidoiries, 208).
19 GB.322/INS/5, paragr. 50 à 101 et annexe II.
20 GB.338/INS/5, paragr. 37 à 59.
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29. Comme indiqué dans les documents précédemment établis sur cette question, la Constitution
de l’OIT définit six paramètres essentiels dont le Conseil d’administration devrait tenir compte
aux fins de l’application de l’article 37, paragraphe 2:
i) l’organe de règlement des différends dont l’institution est envisagée devrait être un
tribunal composé de juges;
ii) ce tribunal aurait pour mission de régler promptement toute question ou difficulté
relatives à l’interprétation d’une convention dont le Conseil d’administration estime
qu’elles ne justifient pas un renvoi devant la Cour;
iii) les règles instituant le tribunal devraient être établies par le Conseil d’administration et
approuvées par la Conférence;
iv) le renvoi devant le tribunal d’une question ou d’une difficulté relative à l’interprétation
d’une convention serait décidé par le Conseil d’administration ou conformément aux
termes de ladite convention;
v) tous arrêts ou avis consultatifs de la Cour lieraient le tribunal;
vi) les décisions rendues par le tribunal devraient être communiquées aux Membres pour
commentaires, lesquels devraient ensuite être transmis à la Conférence internationale
du Travail.
30. Sur le plan institutionnel, la création d’un tel tribunal viendrait concrétiser le seul élément
prévu dans la Constitution pour le règlement des différends en matière d’interprétation qui
fait actuellement défaut. Ce tribunal rendrait rapidement des décisions motivées et faisant
autorité sur des questions relatives à l’interprétation des conventions internationales du travail
et offrirait également une solution rationnelle et légitime pour le règlement de toute question
ou difficulté ne paraissant pas justifier un renvoi devant la Cour, principal organe judiciaire des
Nations Unies. Un tribunal interne serait aisément accessible et hautement spécialisé, car sa
compétence porterait exclusivement sur l’interprétation des conventions de l’OIT.
L’Organisation serait en outre pleinement partie prenante du fait que ses organes directeurs
auraient la main sur la structure et le fonctionnement du tribunal.
31. Au cours des consultations tripartites organisées en vue de la discussion devant se tenir à la
présente session du Conseil d’administration, certains mandants ont dit ne guère voir l’intérêt
d’examiner en détail les modalités de création d’un tribunal interne à ce stade, eu égard au fait
que le différend concernant l’interprétation de la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et
la protection du droit syndical, 1948, pour ce qui est du droit de grève, ne pourrait pas lui être
soumis. À l’inverse, d’autres ont estimé qu’il fallait explorer toutes les possibilités qu’offrait un
tribunal interne en tant que voie effective de règlement pour les questions ne justifiant pas la
saisine de la Cour.
32. Certains mandants se sont aussi intéressés aux motifs qui avaient conduit à l’introduction du
paragraphe 2 de l’article 37 au titre de l’amendement à la Constitution de 1946, et notamment
sur les limites éventuellement envisagées quant à la compétence du tribunal interne.
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33. Les autres propositions présentées ci-après visent à préciser certains aspects du
fonctionnement du tribunal interne, tels que la nature des questions d’interprétation
susceptibles de lui être soumises et le processus de sélection des juges, et donnent un aperçu
des futurs travaux à entreprendre.
2.2. Origines de l’article 37, paragraphe 2, et compétence du tribunal
34. L’idée d’instituer un tribunal spécial chargé d’examiner les questions d’interprétation des
conventions internationales du travail trouve son origine dans les discussions tenues au
Conseil d’administration quant à la possibilité d’établir une procédure spéciale «entre la
procédure officieuse de consultation du Bureau et la procédure constitutionnelle de demande
d’avis à la Cour permanente […] qui, sans jouir de l’autorité des décisions de la Cour
permanente, donnerait cependant aux Membres de l’Organisation des garanties plus grandes
que celles qu’offrent les avis formulés par le Bureau» 21.
35. Cette idée a pris corps au moment de la création de l’Organisation des Nations Unies et des
discussions qui l’ont suivie au sujet de la relation entre l’OIT et les autres organismes
internationaux, notamment s’agissant du transfert à la Cour internationale de Justice de la
compétence reconnue à la Cour permanente de Justice internationale par la Constitution de
l’OIT. Dans un mémorandum sur l’évolution future de la Constitution et de la pratique
constitutionnelle de l’Organisation, rédigé par Wilfred Jenks, alors Conseiller juridique du BIT,
il était fait référence à la nécessité de prévoir des dispositions tendant «à faciliter la solution
des questions d’interprétation insuffisamment importantes pour justifier un renvoi à la Cour
permanente de Justice internationale» 22. On retrouve la même idée dans un rapport établi par
le Bureau pour la Conférence afin que celle-ci se prononce sur un certain nombre de questions
constitutionnelles:
Pour les questions ou différends concernant l’interprétation des conventions, la situation est
différente. Les points à régler dans ce genre de cas sont souvent si minutieux qu’ils ne valent
pas la peine d’être portés devant le principal organe judiciaire de la communauté internationale
[…] La pratique suivant laquelle des interprétations officieuses des conventions étaient
données par le Bureau international du Travail a été très développée et s’est révélée très
satisfaisante; elle devrait être poursuivie à l’avenir. Mais ces opinions n’ont pas force de loi et
le Conseil d’administration ne se sent pas qualifié pour assumer la responsabilité de
l’interprétation des conventions et n’estime pas opportun d’autoriser le Comité d’experts pour
l’application des conventions à donner de telles interprétations. Dans ces conditions,
l’incertitude qui règne au sujet de la signification exacte de certaines conventions constitue un
obstacle sérieux à leur ratification par tous les pays 23.
36. Au-delà de son utilité en tant que moyen de trancher les questions d’interprétation de moindre
importance – quoique tout aussi déterminantes pour la promotion des normes –, l’introduction
d’une nouvelle procédure était justifiée à trois principaux titres: l’incertitude quant au point de
savoir si l’OIT pourrait saisir librement la Cour; l’existence d’une clause analogue dans la
constitution des autres organisations intergouvernementales de l’époque; et la nécessité de
résoudre les cas exceptionnels et urgents 24. En outre, de l’avis général, les décisions du
tribunal devaient être contraignantes pour tous les États Membres, car il était essentiel que
21 Procès-verbaux de la 57e session du Conseil d’administration, avril 1932, 344 et 345.
22 Italiques ajoutées. Première session de la Commission des questions constitutionnelles du Conseil d’administration, Bulletin
officiel, 10 décembre 1945, vol. XXVII, 135 et136.
23 OIT, Questions résultant des travaux de la Commission des questions constitutionnelles. Fascicule 1. Relations avec les
organismes internationaux, Rapport IV(1), Conférence internationale du Travail, 27e session (Montréal, 1945), 113.
24 Première session de la Délégation de la Conférence pour les questions constitutionnelles, Bulletin officiel, 15 décembre
1946, vol. XXVII, no 3, 775, 817 et 818.
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l’interprétation donnée soit appliquée de manière uniforme, et le tribunal ne devait pas être
mis en place pour les besoins de chaque cause qui se présenterait, mais avoir un caractère
permanent 25.
37. Pour ce qui est de l’étendue des pouvoirs du tribunal interne, l’intention des rédacteurs était
manifestement de prévoir un dispositif souple qui offrirait toutes les garanties d’impartialité
attendues d’un organe juridictionnel et serait compétent pour examiner des questions
d’interprétation considérées comme insuffisamment sensibles ou importantes pour être
portées devant la Cour 26.
38. Des règles pourraient être élaborées pour préciser la nature des questions ou difficultés
susceptibles d’être portées devant le tribunal. Cependant, dès lors que la décision finale quant
à l’opportunité du renvoi reviendrait au Conseil d’administration, il conviendrait de ne pas
définir la compétence du tribunal de façon trop étroite de manière à lui laisser une certaine
marge d’appréciation. La Cour et le tribunal interne seraient tous deux compétents pour
examiner des questions d’interprétation et devraient fonctionner de manière complémentaire,
notamment eu égard au fait que le Conseil d’administration pourrait décider en tant que de
besoin de demander un avis consultatif à la Cour sur une question ayant déjà fait l’objet d’une
décision du tribunal.
39. Une liste indicative de questions d’interprétation ayant soulevé de sérieuses difficultés figure
dans le document sur l’article 37, paragraphe 2, qui a été présenté au Conseil d’administration
à sa 256e session (mai 1993) 27. On trouvera ci-après quelques exemples de questions sur
lesquelles l’avis officieux du Bureau a été sollicité 28 et qu’un tribunal interne aurait pu être
appelé à examiner:
i) Diverses formes de service semi-militaire peuvent-elles être considérées comme des
exceptions au sens de l’article 2, paragraphe 2 a), de la convention (nº 29) sur le travail
forcé, 1930?
ii) La convention (nº 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, s’applique-t-elle
aux mesures concernant les accidents liés au travail et ouvre-t-elle droit à des prestations
à ce titre auprès des caisses d’assurance en vertu de la législation nationale?
25 Bulletin officiel, vol. XXVII, no 3, 820.
26 Ainsi qu’il est expliqué dans le document établi en vue de la 322e session du Conseil d’administration (novembre 2014),
«[l]es deux mécanismes seraient disponibles pour se prononcer sur des questions et difficultés, le recours à l’un ou à l’autre
dépendant de la nature et de l’importance du sujet. Alors que l’Organisation devrait choisir de s’adresser à la Cour
internationale de Justice pour répondre à une plus grande variété de questions juridiques, y compris celles de nature
constitutionnelle, le tribunal interne, une fois établi, offrirait un recours techniquement plus spécialisé, adapté au prompt
règlement de demandes d’interprétation précises, et peut-être moins sensibles»; voir GB.322/INS/5, paragr. 56.
27 GB.256/SC/2/2, paragr. 50.
28 Les «interprétations» non officielles ont toujours été considérées comme faisant partie de l’assistance administrative que
les États Membres pouvaient espérer recevoir du secrétariat de l’OIT, étant entendu que la Constitution ne confère à celui-ci
aucune compétence spéciale pour interpréter les conventions internationales du travail. Pour de plus amples informations à
ce sujet, voir la page (en anglais seulement) du site de l’OIT intitulée «Informal opinion». Voir aussi J. F. McMahon, «The
legislative techniques of the international Labour Organization», British Yearbook of international Law, vol. 41 (1965-66), 87
à101.
GB.347/INS/5 16
iii) Un État Membre qui est partie à la convention (no 185) sur les pièces d’identité des gens
de mer (révisée), 2003, est-il tenu de reconnaître les pièces d’identité délivrées à des gens
de mer en vertu de la convention (nº 108) sur les pièces d’identité des gens de mer, 1958?
iv) Quelle est la durée maximale de service ininterrompu à bord applicable aux gens de mer
en vertu de la convention du travail maritime, 2006, telle qu’amendée (MLC, 2006) 29?
2.3. Structure et composition
40. Le tribunal interne pourrait prendre la forme soit d’une structure permanente, soit d’un
dispositif ad hoc. Un tribunal permanent devrait s’entendre d’un organe juridictionnel créé en
vertu d’un texte constitutif (un statut), dont les membres ne seraient appelés à siéger (en
présentiel ou à distance, selon le cas) que lorsqu’une question ou une difficulté d’interprétation
donnée lui serait soumise. En d’autres termes, il s’agirait d’un organe permanent composé de
juges nommés pour une durée déterminée et siégeant uniquement en cas de besoin
(mobilisables à la demande).
41. À l’inverse, un tribunal ad hoc consisterait en un collège de juges spécialement sélectionnés et
nommés pour examiner une question ou une difficulté d’interprétation donnée, selon une
pratique analogue à celle suivie pour les commissions d’enquête constituées pour examiner
les plaintes soumises en vertu de l’article 26 de la Constitution. Ce caractère ad hoc retarderait
le processus en ce sens que la sélection et la nomination des juges pourraient dans certains
cas prendre plus de temps qu’il n’en faudrait au tribunal pour statuer sur la question
d’interprétation. Cela irait à l’encontre de l’objectif visé, qui est d’obtenir le «prompt règlement»
d’une question ou d’une difficulté d’interprétation, et pourrait en outre nuire à la cohérence
globale de la jurisprudence du tribunal 30.
42. S’il est décidé de créer une structure permanente, huit juges au total pourraient être nommés
pour une durée non renouvelable de cinq à sept ans. Outre la nécessité de garantir
l’indépendance des juges, il faudrait veiller à assurer une répartition géographique équilibrée
ainsi que la continuité du fonctionnement du tribunal dans l’éventualité où un ou plusieurs
sièges deviendraient vacants de manière inopinée. La formation collégiale devrait comprendre
trois juges au moins, mais un nombre impair plus élevé – cinq par exemple – pourrait aussi
être envisagé.
43. Pour ce qui est des critères de sélection des juges, le Bureau a précédemment insisté sur
quatre qualités essentielles: jouir de la plus haute considération morale et de l’indépendance
attendue de toute personne appelée à statuer sur des différends; posséder d’excellentes
qualifications professionnelles; avoir une connaissance approfondie de la matière concernée,
en particulier une expertise avérée en matière de droit du travail et de droit international; et
29 Cette question d’interprétation a déjà donné lieu à un avis officieux du Bureau, à des observations répétées de la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations et à une proposition d’amendement de la
convention du travail maritime, 2006, qui a été examinée – mais n’a pas été adoptée – par la Commission tripartite spéciale
à sa quatrième réunion (mai 2022); voir OIT, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et
recommandations, ILC.108/III(A), 2019, paragr. 105 à 113, et document d’information pour la discussion,
STCMLC/Partie II/2022/2, 20.
30 Lors des débats tenus en 1946, le Conseiller juridique a exprimé le point de vue ci-après au sujet d’un amendement présenté
en vue de limiter la saisine du tribunal aux cas particulièrement urgents: «Si l’amendement […] est adopté, cela impliquera
qu’un tribunal spécial sera institué pour chaque cas d’une urgence particulière, et on aura une collection de décisions
particulières et indépendantes au lieu d’un corps d’interprétation. Si le paragraphe ne prévoit que des tribunaux spéciaux
plutôt qu’une autorisation générale, il détruira ce qui était obtenu par sa dernière phrase.»; Bulletin officiel, vol. XXVII, no 3,
817.
GB.347/INS/5 17
maîtriser l’une des trois langues officielles de l’OIT (la connaissance d’une autre langue serait
un atout). En outre, les juges devraient tous être de nationalité différente et la composition du
tribunal devrait, dans toute la mesure possible, refléter les principaux systèmes juridiques et
assurer une représentation géographique équitable et un équilibre entre les femmes et les
hommes.
44. Les consultations tripartites ont confirmé l’adhésion générale à ces critères, qui sont similaires
aux exigences habituellement énoncées dans le statut des juridictions internationales. Compte
tenu de l’avis exprimé par certains mandants, selon lesquels les critères devraient être élargis
de manière à exiger notamment des juges qu’ils possèdent une expérience auprès des
organisations d’employeurs et de travailleurs, le tribunal serait chargé de trancher, par voie de
décision judiciaire, des questions d’interprétation juridiques abstraites; il ne lui appartiendrait
pas de régler des conflits individuels du travail. Quant à l’idée selon laquelle il y aurait
incompatibilité entre l’exercice de certaines fonctions, telles que celles de membre de la
Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (la commission
d’experts) ou de fonctionnaire du BIT, et la nomination au poste de juge, la question a déjà été
soulevée et il conviendrait en effet d’y répondre afin de préserver l’indépendance et
l’impartialité des juges 31.
2.4. Sélection et nomination des juges
45. Le processus de sélection et de nomination des juges devrait satisfaire certaines conditions
préalables, notamment en matière de transparence, d’inclusivité et de participation tripartite.
À cet égard, on trouvera des orientations utiles dans la procédure de nomination des juges du
Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies et du Tribunal d’appel des Nations
Unies. Les juges de ces deux tribunaux sont nommés par l’Assemblée générale sur la
recommandation du Conseil de justice interne, un organe indépendant 32.
46. Dans le cas des deux tribunaux des Nations Unies, le processus débute par la publication des
avis de vacance de poste dans les éditions imprimées et en ligne des principaux journaux ainsi
que sur le site Web du Bureau de l’administration de la justice 33. Après avoir examiné les
candidatures, le Conseil invite certains candidats à passer une épreuve écrite visant à tester
leurs connaissances juridiques et leur aptitude à la rédaction juridique. Sur la base des
résultats de cette épreuve, le Conseil sélectionne les candidats admis à passer un entretien et
prend contact avec les barreaux nationaux concernés pour vérifier l’intégrité des intéressés. Il
indique les noms des candidats qu’il souhaite recommander dans un rapport à l’Assemblée
générale qui contient également un bref résumé de leur carrière ainsi que leur curriculum vitae
présenté sous forme concise et standardisée 34.
31 GB.322/INS/5, paragr. 71.
32 Le Conseil de justice interne est chargé de chercher des candidats convenables et d’en recommander deux ou trois à
l’Assemblée générale pour chaque poste vacant, compte dûment tenu du principe de la répartition géographique; voir
résolution 62/228 de l’Assemblée générale des Nations Unies, 22 décembre 2007, paragr. 35 à 38.
33 Les avis de vacance de poste sont également adressés à toutes les missions permanentes auprès des offices des Nations
Unies à New York, Genève et Vienne, accompagnés d’une note verbale les invitant à communiquer ces avis au président de
la plus haute cour ou autorité judiciaire de leur pays; voir résolution 65/251 de l’Assemblée générale des Nations Unies,
24 décembre 2010, paragr. 45.
34 Voir, par exemple, Nomination de juges au Tribunal d’appel des Nations Unies et au Tribunal du contentieux administratif
des Nations Unies, A/70/190, 14 août 2015. Le Conseil ne peut pas recommander plus d’un candidat par État membre; voir
résolution 63/253 de l’Assemblée générale des Nations Unies, 24 décembre 2008, paragr. 57.
GB.347/INS/5 18
47. D’autres orientations utiles pour le processus de sélection figurent dans la procédure de
nomination des membres de la commission d’experts qui est récemment entrée en vigueur.
Le processus de sélection des juges du tribunal pourrait reprendre certaines des exigences qui
y sont énoncées, par exemple celles qui suivent: il faudrait donner une large publicité aux
postes vacants au moyen d’un appel à manifestation d’intérêt sur le site Internet public de
l’OIT, à l’échelle mondiale et régionale; le processus de sélection ne devrait pas donner lieu à
des interventions ni à des déclarations publiques de la part des mandants de l’OIT au sujet des
candidats ou du processus de sélection; le Directeur général devrait tenir le bureau du Conseil
d’administration informé et lui soumettre un rapport détaillé sur le processus de sélection pour
examen lors d’une séance spécialement prévue à cet effet 35.
2.5. Règles régissant l’ouverture et la conduite de la procédure
48. L’article 37, paragraphe 2, de la Constitution de l’OIT établit clairement que des questions
d’interprétation pourront être portées devant le tribunal par le Conseil d’administration, ce qui
suppose nécessairement un processus de tri. Celui-ci devrait être simple, dès lors que les
questions ou difficultés qui seraient portées devant le tribunal appelleraient en principe un
prompt règlement. Une discussion unique au Conseil d’administration – qui pourrait si
nécessaire s’appuyer sur un rapport d’information succinct rédigé par le Bureau – serait
appropriée et suffisante pour déterminer quelles questions renvoyer devant le tribunal.
49. La procédure proprement dite pourrait s’inscrire dans un cadre simplifié répondant aux
principaux objectifs visés, à savoir la promptitude et l’efficacité sur le plan des coûts; en
principe, elle ne devrait pas durer plus de trois à six mois. À réception d’une question
d’interprétation, le tribunal adresserait une lettre type à tous les États Membres, aux
secrétariats des deux groupes non gouvernementaux et au Bureau pour les inviter à lui
communiquer des observations dans un délai donné. Le tribunal aurait toute latitude pour
solliciter des observations supplémentaires ou organiser des audiences. Il serait aussi habilité
à mettre en place une procédure accélérée pour les questions urgentes.
50. Les règles de procédure reposeraient sur le principe que le renvoi d’une question devant le
tribunal ne serait pas une procédure judiciaire traditionnelle opposant un requérant et un
défendeur. Toutes les parties intéressées auraient la possibilité de participer en présentant
des observations ou d’autres informations pertinentes. L’utilisation d’outils de communication
électroniques favoriserait la transparence et l’accessibilité de même qu’un fonctionnement
souple et économique du tribunal. Toutes les communications de nature procédurale et les
observations écrites seraient publiées sur une page Web dédiée.
51. Pour ce qui est des moyens d’interprétation, le tribunal s’appuierait sur les principes du droit
international coutumier consacrés par les articles 31 à 33 de la Convention de Vienne sur le
droit des traités, en tenant compte du contexte interprétatif propre à l’OIT. Ainsi, pour
déterminer le sens ordinaire à attribuer aux termes et expressions utilisés dans les normes
internationales du travail à la lumière de leur objet et de leur but, il tiendrait compte en
particulier des éléments suivants: les travaux préparatoires menés avant l’adoption des
normes concernées, en particulier les rapports du Bureau et les comptes rendus des travaux
des commissions techniques de la Conférence; la manière dont des termes similaires sont
utilisés dans d’autres instruments internationaux du travail; les observations éventuellement
formulées par les organes de contrôle de l’OIT à l’égard de l’application des normes
35 GB.343/PV, paragr. 556.
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concernées; et la mesure dans laquelle la législation et la pratique des États Membres peuvent
contribuer à clarifier la question d’interprétation considérée.
52. En mars 2022, certains mandants ont demandé des éclaircissements concernant la possibilité
que des questions d’interprétation soient portées devant le tribunal par la commission
d’experts et la Commission de l’application des normes. Si le Conseil d’administration décidait
d’adopter des dispositions spéciales aux fins de l’application de l’article 37, cela pourrait inciter
les organes de contrôle, et en particulier ces deux commissions, à signaler les difficultés
majeures en matière d’interprétation des conventions qu’ils pourraient rencontrer dans
l’exercice de leurs fonctions, et, partant, encourager un membre du Conseil d’administration
ou un État Membre à proposer le renvoi d’une question particulière devant le tribunal.
53. De sérieuses réserves ont été formulées en mars 2022 au sujet de la proposition tendant à
donner à d’autres institutions internationales la possibilité de saisir le tribunal d’une demande
d’interprétation 36. Cette proposition visait à tenir compte, sans préjudice de l’exercice par le
Conseil d’administration du pouvoir discrétionnaire que lui confère l’article 37, paragraphe 2,
du fait que d’autres organes de contrôle et d’autres juridictions régionales ou internationales
se réfèrent de plus en plus aux conventions de l’OIT. À l’instar de ce que prévoient les
dispositions de l’article 14 de la Constitution pour l’établissement de l’ordre du jour des
sessions de la Conférence, le Conseil d’administration pourrait examiner les propositions faites
par toute organisation de droit international public en vue du renvoi d’une question donnée
devant le tribunal. Le tribunal pourrait éventuellement être saisi d’urgence, par exemple dans
les cas où une organisation internationale ou un organe international spécialisé aurait besoin
de savoir comment interpréter une disposition donnée d’une convention internationale du
travail et où le Conseil d’administration jugerait la question importante aux fins de la
préservation et de la promotion de l’autorité de l’OIT en matière d’interprétation des normes
internationales du travail. À réception d’une requête de cette nature, le Conseil
d’administration exercerait sa prérogative pour déterminer s’il y a lieu de renvoyer la question
devant le tribunal.
2.6. Relations avec les organes de contrôle
54. Lors des précédentes discussions, certains mandants ont exprimé des inquiétudes quant à
l’incidence que pourrait avoir le tribunal sur les travaux des organes de contrôle, évoquant par
exemple les conséquences indésirables d’une utilisation excessive de la procédure et la
nécessité d’éviter d’affaiblir la commission d’experts 37.
55. Ainsi qu’il ressort de la Constitution, le contrôle de l’application des normes et l’interprétation
des conventions internationales du travail relèvent de deux procédures distinctes, quoique
liées entre elles: les organes de contrôle examinent des questions concrètes relatives à
l’application par les pays des conventions qu’ils ont ratifiées, alors que le tribunal, à l’instar de
la Cour, examinerait des questions d’interprétation juridiques abstraites en se focalisant sur la
portée et le sens des dispositions juridiques concernées, non sur leur application par les pays
en vertu de la législation nationale. Toutefois, dans l’intérêt de la solidité du système de
normes, ces deux procédures devraient fonctionner de manière cohérente; comme l’a indiqué
le Conseil d’administration dans sa décision de mars 2022, il est fondamental de régler les
différends en matière d’interprétation conformément à l’article 37 de la Constitution afin
d’assurer le contrôle effectif de l’application des normes internationales du travail.
36 GB.344/PV, paragr. 146.
37 GB.344/PV, paragr. 146, 154.
GB.347/INS/5 20
56. Le futur règlement du tribunal devra établir un équilibre prudent entre ces deux fonctions
complémentaires que sont le contrôle de l’application et l’interprétation, ainsi qu’entre les
attributions respectives des organes qui en sont investis. Par ailleurs, il ne faut pas
sous-estimer la valeur ajoutée qu’un organe juridictionnel spécialisé, du fait de son autorité
juridique et morale, apporterait à la réputation et à la visibilité du système normatif de l’OIT.
Le prompt règlement de questions d’interprétation par des juges éminents rendant des
décisions contraignantes représenterait un gain qualitatif majeur pour le système normatif de
l’OIT. Il est raisonnable de penser que la distinction entre interprétation des normes et contrôle
de leur application apparaîtra plus clairement au fur et à mesure que le tribunal interne
développera sa jurisprudence et perfectionnera ses méthodes de travail, tandis que les
organes de contrôle continueront de fonctionner normalement en parallèle.
2.7. Effet juridique des sentences du tribunal
57. Ainsi que le prévoit la Constitution, une fois rendue la décision du tribunal, le Bureau doit sans
attendre la communiquer aux États Membres et transmettre par ailleurs à la Conférence les
observations éventuellement reçues de ces derniers.
58. Pour ce qui est de la force juridique des sentences du tribunal, les travaux préparatoires relatifs
à l’amendement constitutionnel de 1946 confirment que celles-ci avaient vocation à être
contraignantes et opposables à tous 38. Les rédacteurs envisageaient deux organes
juridictionnels – la Cour d’un côté, le tribunal interne de l’autre – qui statueraient, chacun dans
son domaine de compétence, sur les différends en matière d’interprétation que le Conseil
d’administration jugerait opportun de porter devant eux et dont les décisions seraient
contraignantes.
59. Les travaux préparatoires confirment en outre que l’établissement d’une procédure de
recours, qui signifierait que le tribunal interne statuerait en première instance, n’avait été ni
prévu ni envisagé 39. Toutefois, l’article 37, paragraphe 2, comporte un élément important qui
tend à confirmer l’idée d’une relation «verticale» entre la Cour et le tribunal: le fait que le
tribunal est obligatoirement lié par tout arrêt de la Cour. Dès lors, il semblerait que rien
n’empêche qu’une question ou une difficulté d’interprétation soit soumise à la Cour après avoir
été examinée par le tribunal. Cependant, permettre qu’une sentence du tribunal soit contestée
présente en théorie le risque que toute question d’interprétation – même celles qui sont
«insuffisamment importantes» ou portent sur des points «minutieux» – pourrait arriver devant
la Cour, ce qui serait contre-productif et incompatible avec l’objectif de l’article 37, qui est
d’assurer la sécurité juridique.
38 GB.322/INS/5, paragr. 96 et note de bas de page 35.
39 La référence au caractère contraignant des arrêts et des avis consultatifs de la Cour a été ajoutée à la proposition initiale
du Bureau à l’initiative des membres tripartites du groupe de travail chargé d’examiner certains amendements à la
Constitution. Le groupe de travail et la Conférence ont décidé de ne pas prévoir la possibilité de faire appel devant la Cour.
Lorsque la disposition en question a été examinée par la Commission des questions constitutionnelles à la session de 1946
de la Conférence, le membre gouvernemental de l’Australie a présenté un amendement visant à conférer un droit de recours
devant la Cour internationale de Justice à «[t]out Membre qui ne sera[it] pas satisfait par la décision prise par un tel tribunal».
L’amendement a été retiré sans discussion; voir Bulletin officiel, vol. XXVII, no 3, 775, 817, 819-821, 888 et 917.
GB.347/INS/5 21
2.8. Travaux futurs
60. Si le Conseil d’administration décide de poursuivre sa discussion sur l’application de l’article 37,
paragraphe 2, et la définition des fondements d’un tribunal interne, le Bureau pourrait
organiser des consultations tripartites en vue de l’élaboration d’un projet d’ensemble de règles
fondées sur les anciens rapports pertinents, pour examen par le Conseil d’administration à sa
352e session (novembre 2024) 40.
61. Le tribunal pourrait être institué à titre provisoire pour une période initiale comprise par
exemple entre cinq et sept ans 41. Au terme de cette période d’essai, le Conseil d’administration
pourrait évaluer le fonctionnement du tribunal en vue de confirmer son institution et de
décider des éventuelles modifications à apporter aux règles y relatives. Tout ensemble révisé
de règles serait soumis à la Conférence pour approbation.
Projet de décision
62. Le Conseil d’administration décide:
a) d’approuver la note introductive et le cadre de procédure concernant le renvoi de
questions ou de difficultés d’interprétation devant la Cour internationale de Justice
en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT tels qu’ils figurent
à l’annexe I du document GB.347/INS/5;
b) de poursuivre la discussion sur la mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2, et prie
à cette fin le Directeur général d’organiser des consultations tripartites en vue de
l’élaboration d’un projet de règles concernant l’institution d’un tribunal, pour
examen à sa 352e session (novembre 2024).
40 Une approche similaire a été proposée en 2014 (voir GB.322/INS/5, paragr. 53).
41 Le Tribunal administratif de la Société des Nations (qui est devenu le Tribunal administratif de l’OIT après la dissolution de
la Société des Nations) a été institué en septembre 1927, à titre expérimental, pour une durée de trois ans, en vertu d’une
résolution de l’Assemblée portant adoption de son statut (Société des Nations, Journal officiel, Supplément spécial no 54,
Actes de la huitième session ordinaire de l’Assemblée, séances plénières, 478). Dans une résolution adoptée en 1931,
l’Assemblée a confirmé le statut sans modifications, faisant ainsi du tribunal un organe permanent de la Société des Nations
(Société des Nations, Journal officiel, Supplément spécial no 93, Actes de la douzième session ordinaire de l’Assemblée,
séances plénières, 152). De la même façon, le Règlement des réunions régionales a été adopté par le Conseil d’administration
pour application à titre expérimental (voir GB.267/LILS/1) avant d’être confirmé par la Conférence avec quelques
modifications en 2002 (voir Compte rendu provisoire, no 2, Conférence internationale du Travail, 90e session).
GB.347/INS/5 23
Annexe I
Renvoi de questions ou de difficultés d’interprétation devant la Cour
internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1,
de la Constitution
Note introductive
Portée et objet
Le cadre de procédure concernant le renvoi de questions ou de difficultés d’interprétation
devant la Cour internationale de Justice (la Cour) en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution de l’OIT ne saurait primer sur l’article 37 de la Constitution ni sur les dispositions
du Règlement de la Conférence internationale du Travail ou du Règlement du Conseil
d’administration. Il énonce un ensemble de modalités pratiques que les mandants tripartites
s’engagent à appliquer de bonne foi en vue de faciliter la mise en oeuvre, le cas échéant, d’une
procédure de recours à la fonction consultative de la Cour qui soit rationnelle, efficace et
assortie de délais.
Plus concrètement, le cadre de procédure porte sur les éléments suivants: i) les décisions
et mesures internes préalables à l’ouverture d’une procédure consultative; ii) le rôle du Bureau
en amont et au cours de la procédure; et iii) les mesures à prendre ou à prévoir dès le prononcé
de l’avis consultatif de la Cour.
Soumission de la demande de renvoi
Comme il ressort de la théorie et de la pratique constitutionnelles établies, les questions
ou difficultés d’interprétation ne justifient pas toutes la saisine immédiate de la Cour
internationale de Justice, et il incombe au Conseil d’administration d’examiner les demandes
de renvoi. La procédure de renvoi serait engagée dans le but d’obtenir le règlement d’un
désaccord profond et persistant entre les mandants tripartites au sujet de l’interprétation
d’une disposition de la Constitution de l’OIT ou d’une convention internationale du travail 1,
pour autant que les tentatives visant à parvenir à un accord acceptable par toutes les parties
aient été infructueuses et que le recours à la procédure de règlement prévue à l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution soit le seul moyen d’assurer la sécurité juridique.
L’échec des discussions tripartites, des tentatives de médiation ou d’initiatives similaires
pourra être considéré comme le signe qu’un règlement effectif du différend est peu probable
et que la question d’interprétation en litige appelle une décision faisant autorité. Il appartient
au Conseil d’administration de déterminer si la situation est dans l’impasse, compte tenu en
particulier de la durée du différend et de sa profondeur.
Dans un souci d’économie et d’efficacité procédurales, selon l’appréciation du Conseil
d’administration, une demande de renvoi devrait bénéficier d’un certain niveau de soutien
parmi les mandants. Le but est de ménager un équilibre entre les termes de l’article 37,
1 Aux fins du présent cadre de procédure, le terme «convention» s’entend aussi des protocoles se rapportant
aux conventions en vigueur.
GB.347/INS/5 24
paragraphe 1, et la volonté d’éviter que la procédure soit utilisée pour des demandes de renvoi
peu susceptibles d’aboutir. Une demande de renvoi soumise conjointement par au moins
20 membres titulaires (c’est-à-dire ayant le droit de vote) du Conseil d’administration ou
30 États Membres (qu’ils soient ou non membres du Conseil d’administration) sera réputée
recueillir un niveau de soutien suffisant pour déclencher automatiquement la première étape
de la procédure, à savoir l’établissement par le Bureau, dans un délai maximum de deux mois,
d’un rapport pour soumission à la session suivante du Conseil d’administration. Toute
demande de renvoi ne recueillant pas le niveau de soutien susmentionné sera transmise au
bureau du Conseil d’administration qui pourra formuler des recommandations quant à la suite
à lui donner.
Les organes de contrôle ne pourront pas soumettre directement une demande de renvoi
au Conseil d’administration.
Rapport du Bureau
Le Bureau établira un rapport pour aider le Conseil d’administration à apprécier
l’opportunité d’un éventuel renvoi. Il s’agira d’un document technique contenant des éléments
d’information détaillés au sujet de la question ou du différend qui sera élaboré sous la
responsabilité exclusive du Directeur général et ne fera pas l’objet de consultations préalables
avec les groupes.
Délibérations et décision du Conseil d’administration
Lorsqu’il examinera les mesures à prendre au titre de l’article 37, paragraphe 1, le Conseil
d’administration devrait s’assurer qu’un règlement judiciaire constitue la seule option viable,
eu égard à la persistance du différend et à l’échec des tentatives visant à parvenir à un accord
acceptable par toutes les parties par la voie du dialogue tripartite.
Eu égard à l’objectif général, qui est d’assurer la sécurité juridique dans l’intérêt de
l’Organisation, la discussion au Conseil d’administration ne devrait pas s’étendre au-delà de
deux sessions consécutives. Dans ce délai, le Conseil d’administration devrait dire s’il approuve
la saisine de la Cour et, dans l’affirmative, quelle(s) est ou sont la ou les questions juridiques à
porter devant elle. Conformément à la pratique habituelle, le Conseil d’administration devrait
dans la mesure du possible prendre sa décision par consensus; si cela s’avère impossible, la
décision fera l’objet d’un vote à la majorité simple.
Compte tenu de l’importance que revêt la saisine de la Cour sur le plan institutionnel, et
dans un souci d’inclusivité, tous les États Membres intéressés devraient être autorisés à
présenter des observations écrites pour contribuer aux délibérations du Conseil
d’administration. Il importerait en particulier de s’enquérir des vues des États Membres qui ont
ratifié la ou les conventions concernées mais qui ne sont pas représentés au Conseil
d’administration.
Le Conseil d’administration pourra décider, s’il le juge approprié, de soumettre sa décision
de demander un avis consultatif à la Conférence pour approbation à sa session suivante. Dans
ce cas, il devra transmettre à la Conférence un projet de résolution contenant la ou les
questions juridiques à soumettre à l’appréciation de la Cour, dans lequel la Conférence sera
invitée à entériner sa décision, y compris le libellé de la ou des questions juridiques à porter
devant la Cour, et à autoriser le renvoi. Conformément à la pratique habituelle, la Conférence
devra dans la mesure du possible se prononcer par consensus, faute de quoi elle prendra sa
décision par un vote à la majorité simple.
GB.347/INS/5 25
Que la décision de renvoi soit prise par le Conseil d’administration ou par la Conférence,
devraient y figurer: une synthèse du contexte; la ou les questions juridiques sur lesquelles l’avis
de la Cour est demandé; des instructions éventuelles à l’intention du Directeur général, pour
lui indiquer par exemple qu’il s’agit d’une demande appelant une réponse urgente ou qu’une
autorisation de la Cour concernant la participation d’organisations d’employeurs et de
travailleurs à la procédure doit être expressément demandée; et une description des mesures
devant éventuellement être prises en attendant l’avis consultatif de la Cour, par exemple à
l’effet de poursuivre le contrôle régulier de l’application de la ou des conventions concernées,
d’exhorter les mandants à collaborer pleinement et de bonne foi avec la Cour et de s’engager
à donner la suite voulue à l’avis de la Cour, celui-ci étant définitif et contraignant.
Procédure consultative
Tout au long de la procédure de renvoi et de la procédure consultative en découlant, le
Bureau devrait observer la plus grande discrétion et se conformer à ses obligations de
neutralité et d’impartialité à l’égard du différend en matière d’interprétation.
Lorsqu’il transmettra à la Cour le dossier et la décision du Conseil d’administration ou,
selon le cas, de la Conférence, le Directeur général devrait demander expressément à la Cour
d’autoriser, par «communication spéciale directe», les organisations internationales
d’employeurs et de travailleurs jouissant du statut consultatif général auprès de l’OIT à
participer aux phases écrite et orale de la procédure, ainsi que le prévoit l’article 66(2) du Statut
de la Cour. Dans cette même communication, le Directeur général devrait indiquer s’il s’agit
d’une demande appelant une réponse urgente au sens de l’article 103 du Règlement de la
Cour. Les gouvernements des États Membres dont la Cour juge qu’ils sont susceptibles de
fournir des renseignements sur la question soumise à son appréciation seront invités à
participer par communication spéciale et directe. Tout État Membre n’ayant pas été l’objet
d’une communication spéciale pourra adresser une requête particulière à la Cour.
L’ouverture d’une procédure consultative ne saurait empêcher le Bureau, les organes de
contrôle ou les groupes de mandants de continuer de s’acquitter de leurs responsabilités et
fonctions respectives en matière de normes à l’égard de la ou des conventions concernées.
L’absence d’effet suspensif sur les procédures de contrôle vise à empêcher qu’une question ou
une difficulté d’interprétation, aussi sérieuse soit-elle, paralyse les fonctions essentielles de
l’OIT, en particulier eu égard à la durée globale des procédures devant la Cour et au délai
susceptible de s’écouler jusqu’à la réception de son avis.
Par souci de transparence, le Bureau devrait veiller, pendant toute la durée de la
procédure, à ce qu’il soit indiqué dans les ressources électroniques et documents pertinents
(la base de données NORMLEX par exemple) que telle disposition de la Constitution de l’OIT ou
d’une convention internationale du travail soulève une question ou une difficulté
d’interprétation et que celle-ci a été soumise à l’appréciation de la Cour en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution.
Avis consultatif – Suite à donner
Conformément au principe directeur selon lequel le prompt règlement d’un différend au
sujet de l’interprétation de la Constitution ou d’une convention internationale du travail peut
contribuer à la sécurité juridique, l’avis de la Cour, ainsi qu’une analyse en bonne et due forme
des mesures éventuellement nécessaires pour y donner suite, devrait être soumis au Conseil
d’administration dans les meilleurs délais.
GB.347/INS/5 26
La nécessité ou l’opportunité de prendre des mesures de suivi en sus de celles prises pour
faire connaître l’avis consultatif de la Cour dépendra de la nature de la question qui lui aura
été posée et de sa réponse. Le Conseil d’administration a toute latitude quant au type de
mesures pouvant être prises ou recommandées pour mettre en oeuvre l’avis de la Cour. Il ne
pourra cependant pas demander à la Cour de reconsidérer son avis.
Afin d’agir avec une célérité raisonnable, le Conseil d’administration devrait limiter à deux
sessions consécutives son examen des mesures à prendre pour donner suite à l’avis de la Cour.
Le rapport du Bureau au Conseil d’administration devrait également contenir des informations
détaillées sur le montant total des coûts encourus par le secrétariat aux fins de la procédure
consultative.
Cadre de procédure
Soumission de la demande de renvoi
1. Toute demande de renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation devant la Cour
internationale de Justice (la Cour) est adressée au Directeur général et précise l’objet de la
question ou de la difficulté, la ou les dispositions de la Constitution de l’OIT ou de la ou des
conventions concernées, et les raisons motivant sa soumission.
2. Pour pouvoir être examinée par le Conseil d’administration conformément au présent cadre
de procédure, une demande de renvoi devrait être déposée par au moins 20 membres
titulaires du Conseil d’administration ou 30 États Membres (qu’ils soient ou non membre du
Conseil d’administration).
Rapport du Bureau
3. À réception d’une demande de renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation, le
Directeur général informe le bureau du Conseil d’administration et prépare un rapport qui doit
être soumis au Conseil pour examen dans les meilleurs délais et, au plus tard, deux mois après
la date de réception de la demande de renvoi.
4. Le rapport du Bureau contient tous les éléments d’information pertinents, notamment en ce
qui concerne la nature et l’origine de la question ou de la difficulté d’interprétation et les
positions divergentes des mandants, l’historique de la négociation de la ou des dispositions
concernées, les vues des organes de contrôle ainsi que la ou les questions juridiques
susceptibles d’être soumises à la Cour.
Délibérations et décision du Conseil d’administration
5. Avant de renvoyer une question ou une difficulté d’interprétation devant la Cour, le Conseil
d’administration devrait s’assurer qu’il existe entre les mandants un désaccord profond et
persistant au sujet de la portée ou du sens d’une disposition figurant dans la Constitution de
l’OIT ou dans une ou plusieurs conventions internationales du travail, et que les tentatives
visant à parvenir à un accord acceptable par toutes les parties par la voie du dialogue tripartite
n’ont pas abouti, et ont peu de chances d’aboutir, à des résultats concluants.
6. Le Conseil d’administration devrait prendre une décision sur la demande de renvoi au plus tard
à la session suivant celle à laquelle le rapport du Bureau aura fait l’objet d’un examen et d’une
discussion. Le Conseil d’administration devrait se prononcer en même temps sur le renvoi et
sur la ou les questions juridiques à soumettre à la Cour.
GB.347/INS/5 27
7. En l’absence de consensus, le Conseil d’administration prend sa décision par un vote à la
majorité simple.
8. Tout gouvernement intéressé qui n’est pas représenté au sein du Conseil d’administration a la
possibilité de contribuer aux délibérations en soumettant des observations écrites, dans les
limites fixées par le Conseil d’administration.
9. Toute décision en faveur du renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation devant
la Cour sera réputée valoir autorisation du financement des coûts liés à la participation du
Bureau aux phases écrite et orale de la procédure.
10. Le Conseil d’administration pourra soumettre sa décision de renvoyer une question ou une
difficulté d’interprétation devant la Cour à la Conférence pour approbation à sa session
suivante.
Procédure consultative
11. Une fois prise la décision de renvoyer une question ou une difficulté d’interprétation devant la
Cour, le Directeur général en fait promptement tenir copie au Président ou au Greffier de la
Cour, ladite décision devant préciser la ou les questions juridiques soumises à l’examen de
celle-ci.
12. Le Directeur général fait également tenir au Greffier un dossier dans les meilleurs délais et, en
tout état de cause, dans un délai maximal d’un mois à compter de la date de communication
formelle de la requête pour avis consultatif. Le dossier contient tous les éléments d’information
pertinents et expose le processus qui a conduit au renvoi ainsi que la portée de la ou des
questions juridiques soumises à la Cour.
13. Dans sa lettre à la Cour accompagnant la décision et le dossier, le Directeur général devrait
demander expressément à celle-ci d’inviter, par communication spéciale et directe, les
organisations internationales d’employeurs et de travailleurs jouissant du statut consultatif
général auprès de l’Organisation à participer à la procédure, et indiquer si la demande appelle
une réponse urgente.
14. Le Bureau publie la lettre du Directeur général accompagnant la demande, le dossier et les
autres documents ou informations pertinents aux fins de la procédure consultative sur une
page Web dédiée qui sera régulièrement mise à jour.
15. Tout au long de la procédure consultative, le Directeur général coordonne les mesures prises
par le secrétariat pour répondre à toute requête de la Cour, y compris en ce qui concerne la
participation à d’éventuelles audiences. Le Bureau ne saurait jouer aucun rôle de coordination
pour ce qui est de la participation des mandants tripartites à la procédure, et devrait faire
preuve de discrétion en toutes circonstances et observer la neutralité et l’impartialité les plus
strictes.
16. Le Bureau ne saurait intervenir dans le cadre de la procédure, si ce n’est à la demande expresse
de la Cour.
17. Le renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation devant la Cour et l’ouverture
consécutive d’une procédure consultative ne sauraient avoir pour effet de suspendre, ni
d’entraver de quelque autre manière, le contrôle de l’application de la ou des conventions
faisant l’objet de ladite procédure.
GB.347/INS/5 28
Avis consultatif – Suite à donner
18. Dès réception de l’avis de la Cour et afin de faciliter l’adoption d’une décision éclairée quant
aux éventuelles mesures de suivi à prendre, le Directeur général fait tenir copie de l’avis
consultatif rendu par la Cour au bureau du Conseil d’administration et prépare dans les
meilleurs délais un rapport détaillé, qui doit être soumis au plus tard un mois à compter de la
date de réception de l’avis de la Cour.
19. Le rapport du Bureau contient une analyse de la réponse donnée par la Cour à la ou aux
questions juridiques soumises à son appréciation et précise les mesures qu’il pourrait être
nécessaire ou opportun de prendre pour donner effet, à court ou à long terme, à l’avis
consultatif.
20. Le Conseil d’administration adopte une décision sur les mesures de suivi qu’il convient
éventuellement de prendre au plus tard à la session suivant celle à laquelle le rapport du
Bureau aura fait l’objet d’un examen et d’une discussion.
GB.347/INS/5 29
Annexe II
Représentation schématique du cadre de procédure
Demande de renvoi
Doit être soumise par au moins
20 membres titulaires du Conseil
d’administration ou 30 États Membres.
À défaut, le bureau du Conseil
recommande des mesures.
Directeur général
Informe le bureau du Conseil et charge
le Bureau de préparer pour information
un rapport factuel dans un délai de deux
mois.
Conseil d’administration
Délibère et prend une décision, au bout
de deux sessions consécutives au plus,
sur l’opportunité de renvoyer le
différend devant la Cour et sur la ou les
questions juridiques à soumettre à son
appréciation.
Résolution du Conseil d’administration
Explique le contexte, expose la ou les
questions concernées, donne au DG
des instructions concernant le dossier
à soumettre et les mesures à prendre
en attendant l’avis de la Cour. En dépit
de la délégation de pouvoir de 1949, le
Conseil peut décider de soumettre sa
décision à la session suivante de la
Conférence pour approbation.
Directeur général
Écrit au Président ou au Greffier de la Cour aux fins
suivantes:
1) communiquer la résolution du Conseil;
2) solliciter une autorisation aux fins de la participation
d’organisations d’employeurs et de travailleurs;
3) solliciter une procédure accélérée.
Soumet le dossier du Bureau contenant des éléments
factuels dans un délai d’un mois.
Procédure devant la Cour
Ouverture de la procédure consultative (art. 65-66
du Statut, 102 à 106 du Règlement).
Pas de litige à trancher entre des parties.
La Cour invite les entités pertinentes à participer,
détermine la forme des observations et le délai
imparti pour leur dépôt.
Partenaires sociaux
S’ils sont réputés être en mesure de
fournir des renseignements spécifiques,
peuvent être invités à faire des exposés
écrits ou oraux dans un délai de deux à
six mois.
Droit de réponse concernant les exposés
d’autres participants, si autorisé
(art. 66(4) du Statut, art. 105
du Règlement).
Tous les États Membres
Reçoivent une notification générale de la
Cour, peuvent demander l’autorisation de
présenter des exposés écrits ou d’être
entendus dans un délai de deux à six mois
tel que fixé par la Cour. Peuvent exercer
un droit de réponse concernant les
exposés d’autres participants, si autorisés
(art.66(4) du Statut, art.105 du Règlement).
Avis consultatif
Lu en séance publique, copie
transmise au Directeur général du BIT.
Le dernier point du dispositif contient
la réponse de la Cour à la ou aux
questions soumises à son
appréciation; les éventuelles opinions
individuelles ou dissidentes sont
jointes à l’avis. Celui-ci revêt un
caractère contraignant au regard de la
théorie et de la pratique
constitutionnelles de l’OIT.
Conseil d’administration
Délibère et prend une décision sur
la suite à donner au bout de deux
sessions consécutives au plus.
Directeur général
Informe le bureau du Conseil
et charge le Bureau de rédiger un
rapport sur les options de mise
en oeuvre dans un délai d’un mois.
Résolution du Conseil
d’administration
Remercie la Cour et décrit dans les
grandes lignes les mesures de mise en
oeuvre des conclusions de la Cour.
GB.347/INS/5 30
Annexe III
Historique du débat relatif à l’article 37 – Dates clés
Mai 1993
Le Conseil
d’administration
examine l’application
de l’article 37(2) sans
prendre
de décision.
Novembre 2014
Le Conseil
d’administration
examine la mise en
oeuvre de l’article 37 au
sujet de l’interprétation
de la C.87 pour ce qui
est du droit de grève;
décide de convoquer
une réunion tripartite
et de reporter la
décision sur le renvoi
devant la Cour.
Mars 2015
Le Conseil
d’administration décide
de ne prendre dans
l’immédiat aucune
mesure au titre de
l’article 37 au sujet de
l’interprétation de la
C.87 pour ce qui est du
droit de grève.
Mars 2017
Le Conseil
d’administration
approuve le plan de
travail relatif au
renforcement du
système de contrôle, y
compris les mesures
visant à assurer la
sécurité juridique et la
tenue éventuelle de
futures discussions sur
l’article 37.
Mars 2019
Le Conseil
d’administration décide
de tenir des
consultations sur la
sécurité juridique en
janvier 2020; document
établi pour examen à la
session de mars 2020
(reportée en raison de
la pandémie).
Mars 2022
Le Conseil
d’administration
demande que soient
élaborés un cadre de
procédure sur
l’application de
l’article 37(1) ainsi que
d’autres propositions
sur l’application
de l’article 37(2) pour
discussion en mars
2023.
1919
Article 423, Traité de Versailles:
consacre la compétence de la Cour
permanente de Justice internationale
(CPJI) pour ce qui est de
l’interprétation des conventions
de l’OIT.
1932
Avis consultatif de la
CPJI sur la convention
(nº 4) sur le travail de
nuit (femmes), 1919.
1946
Instrument d’amendement de la Constitution de
l’OIT: La CPJI est remplacée par la Cour
internationale de Justice (CIJ); ajout d’une nouvelle
disposition concernant l’institution d’un tribunal
interne en vue du prompt règlement des questions
d’interprétation.
Novembre 2009
Le Conseil
d’administration invite
le Bureau à engager
des consultations sur
l’interprétation des
conventions; des
consultations
infructueuses ont eu
lieu en 2010.
Article 37 – Origines et pratique antérieure
GB.347/INS/5 31
Annexe IV
Demandes d’interprétation soumises à la Cour permanente de Justice internationale
en vertu de l’article 37 (six précédents)
Désignation du délégué ouvrier des Pays-Bas à la troisième session de la Conférence internationale du Travail
Avis consultatif du 31 juillet 1922
Requête soumise par la voie d’une résolution de la Conférence (18 novembre 1921).
Renvoi devant la Cour décidé avec l’accord unanime des membres du Conseil d’administration (janvier 1922).
Durée de la procédure: deux mois et demi (du 22 mai au 31 juillet 1922).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer: l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs; la Fédération internationale
des syndicats ouvriers chrétiens; et la Fédération syndicale internationale. Deux d’entre elles ont été entendues.
Compétence de l’OIT à l’égard de la réglementation internationale des conditions de travail des personnes employées
dans l’agriculture
Avis consultatif du 12 août 1922
Requête soumise par motion directe du gouvernement de la France au Conseil de la Société des Nations (janvier 1922).
Requête examinée par le Conseil d’administration sur la base d’un rapport oral du Directeur, mais pas de décision.
Durée de la procédure: trois mois (du 22 mai au 12 août 1922).
Huit organisations internationales ont été invitées à participer: la Confédération internationale des syndicats agricoles; la Ligue internationale des sociétés
agricoles; la Commission internationale d’agriculture; la Fédération internationale des syndicats chrétiens des travailleurs de la terre; la Fédération internationale
des travailleurs de la terre; l’Institut international d’agriculture; la Fédération syndicale internationale; et l’Association internationale pour la protection légale
des travailleurs. Plusieurs d’entre elles ont présenté des exposés écrits et ont également participé à la procédure orale.
GB.347/INS/5 32
Compétence de l’OIT pour examiner des propositions tendant à organiser et à développer les moyens de production agricole
Avis consultatif du 12 août 1922
Requête soumise par une lettre du gouvernement de la France adressée directement au Secrétaire général de la Société des Nations en date du 13 juin 1922.
Soumission d’un rapport du Bureau au Conseil d’administration (juillet 1922) mais pas de discussion ni de décision.
Durée de la procédure: vingt-quatre jours (du 18 juillet au 12 août 1922).
Une organisation internationale a été invitée à participer: l’Institut international d’agriculture (a envoyé une communication distincte).
Compétence de l’OIT pour réglementer accessoirement le travail personnel du patron
Avis consultatif du 23 juillet 1926
Requête soumise par une lettre du groupe patronal du Conseil d’administration en date du 8 janvier 1926.
Son renvoi devant la Cour a été examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (30e session, janvier 1926).
Durée de la procédure: quatre mois (du 20 mars au 23 juillet 1926).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer: l’Organisation internationale des employeurs industriels; la Fédération syndicale internationale;
et la Confédération internationale des syndicats chrétiens. Deux d’entre elles ont présenté des mémoires écrits et toutes trois ont participé aux audiences.
La Ville libre de Dantzig et l’Organisation internationale du Travail
Avis consultatif du 26 août 1930
Requête soumise par le Bureau comme suite à une lettre du 20 janvier 1930 dans laquelle le gouvernement de la Pologne demandait que la Ville libre de Dantzig
soit admise au sein de l’OIT.
Son renvoi devant la Cour a été examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (48e session, avril 1930).
Durée de la procédure: quatre mois et demi (du 15 avril au 26 août 1930).
Aucune organisation internationale n’a été invitée à participer.
GB.347/INS/5 33
Interprétation de la convention (nº 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919
Avis consultatif du 15 novembre 1932
Requête soumise par une lettre du gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord au Président du Conseil d’administration en date
du 20 janvier 1932.
Son renvoi devant la Cour a été examiné par le Conseil d’administration et soumis à un vote (57e session, avril 1932).
Durée de la procédure: six mois (du 10 mai au 15 novembre 1932).
Trois organisations internationales ont été invitées à participer: la Fédération syndicale internationale; la Confédération internationale des syndicats chrétiens;
et l’Organisation internationale des employeurs industriels. Deux d’entre elles ont présenté des exposés écrits et ont également participé à la procédure orale.
Les avis consultatifs de la Cour permanente de Justice internationale ainsi que les plaidoiries, les exposés oraux et les documents soumis à la Cour sont publiés
dans leur intégralité sur le site Web de la Cour internationale de Justice.
Document no 41
Procès-verbaux de la 347e session du Conseil
d’administration, mars 2023, paragr. 229-346
GB.347/PV(Rev.)
Conseil d’administration
347ᵉ session, Genève, 13-23 mars 2023
Procès-verbaux de la 347e session du Conseil
d’administration du Bureau international du Travail
Table des matières
Page
Liste des sigles et acronymes ................................................................................................................. 9
Introduction .............................................................................................................................................. 11
Bureau du Conseil d’administration ............................................................................................ 11
Présidents et orateurs par section ............................................................................................... 11
Autres organes ................................................................................................................................ 13
Section institutionnelle
Remarques liminaires .................................................................................................................... 15
1. Approbation des procès-verbaux de la 346e session du Conseil d’administration
(GB.347/INS/1) ...................................................................................................................... 16
Décision ................................................................................................................................. 16
2. Ordre du jour de la Conférence internationale du Travail ............................................ 17
2.1. Ordre du jour des prochaines sessions de la Conférence (GB.347/INS/2/1) .............. 17
Décision ................................................................................................................................. 25
2.2. Dispositions applicables à la 111e session (2023) de la Conférence
(GB.347/INS/2/2) .................................................................................................................. 25
Décision ................................................................................................................................. 30
3. Examen des rapports annuels au titre du suivi de la Déclaration de l’OIT
relative aux principes et droits fondamentaux au travail (1998), telle qu’amendée
en 2022 (GB.347/INS/3) ....................................................................................................... 30
Décision ................................................................................................................................. 36
GB.347/PV(Rev.) 63
227. Le porte-parole du groupe des travailleurs, la porte-parole du groupe des employeurs et
les représentants gouvernementaux des groupes régionaux souscrivent à la dernière
proposition.
Décision
228. Le Conseil d’administration:
a) accueille favorablement l’initiative du Directeur général visant à instaurer une
Coalition mondiale pour la justice sociale, y compris dans le cadre du Sommet sur le
monde du travail: Justice sociale pendant la 111e session de la Conférence
internationale du Travail (juin 2023), ainsi que les consultations tripartites
proposées aux fins de la préparation du Sommet;
b) se félicite de l’engagement pris par le Directeur général de tenir compte de ses
orientations et de sa proposition d’organiser des consultations tripartites pour la
préparation d’une structure de gouvernance, y compris de critères et d’une
procédure régissant la participation des partenaires et d’un plan thématique, sur la
base de l’Agenda du travail décent, établi dans la Déclaration de l’OIT sur la justice
sociale pour une mondialisation équitable (2008), telle qu’amendée en 2022, et
réaffirmé dans la Déclaration du centenaire de l’OIT pour l’avenir du travail (2019),
entre autres documents pertinents de l’OIT;
c) prie le Directeur général de faire rapport au Conseil d’administration sur tout fait
nouveau concernant la Coalition à sa 349e session (octobre-novembre 2023) et de
tenir compte des orientations qu’il continuera de lui fournir.
(GB.347/INS/4, paragraphe 31, tel que modifié par le Conseil d’administration)
5. Plan de travail visant à renforcer le système de contrôle:
propositions concernant de nouvelles dispositions
en vue d’assurer la sécurité juridique
(GB.347/INS/5)
229. La porte-parole du groupe des employeurs regrette que, malgré des retours d’information
complets lors des consultations informelles, le Bureau n’ait pas tenu compte de la majorité des
opinions exprimées lorsqu’il a préparé le cadre de procédure. Contrairement à ce que laisse
entendre le projet de décision, aucun accord n’a été trouvé sur la marche à suivre. En outre, la
question qui est au coeur des discussions est l’interprétation que la Commission d’experts pour
l’application des conventions et recommandations (la commission d’experts) fait du droit de
grève dans le contexte de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 1948; or, cette question n’est pas l’élément principal des propositions. De plus, le
Bureau n’a pas présenté aux groupes concernés tous les moyens possibles de résoudre les
questions d’interprétation en interne, tels que l’organisation d’une réunion technique tripartite
ou d’une discussion spécifique lors de la Conférence internationale du Travail (la Conférence).
L’amendement proposé par le groupe des employeurs vise donc à ajouter un paragraphe
prévoyant une solution interne pour traiter la question du droit de grève; celle-ci devrait
garantir que tous les mandants peuvent prendre une part active à la procédure, que les
solutions se fondent sur le consensus et que les résultats adoptés sont universellement
pertinents et acceptés.
GB.347/PV(Rev.) 64
230. L’objectif du groupe des employeurs est de faire en sorte que la commission d’experts ne crée
pas de nouvelles obligations en plus de celles prévues par les mandants tripartites lors de la
Conférence. La commission d’experts devrait renvoyer aux mandants les questions difficiles
ou les lacunes liées à une convention pour qu’ils y apportent une solution; c’est précisément
parce qu’elle ne l’a pas fait dans le cas du droit de grève que le différend actuel existe.
231. Si l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT prévoit un moyen de résoudre les
questions ou les difficultés d’interprétation, en revanche la Cour internationale de Justice (la
Cour) ne devrait être saisie qu’en dernier ressort. Il serait préférable de rechercher des
solutions internes qui bénéficient d’un large soutien des mandants. Les avis consultatifs de la
Cour ne sont pas juridiquement contraignants. Le groupe des employeurs doute qu’il soit
juridiquement envisageable de faire référence, dans la Note introductive, à un engagement à
donner la suite voulue à l’avis de la Cour en le considérant comme définitif et contraignant, en
particulier pour ceux qui n’ont pas soutenu le renvoi à la Cour. Il n’a pas été tenu compte des
répercussions pour les acteurs non étatiques. De plus, ce type d’engagement peut accroître la
pression exercée sur les pays ayant ratifié la convention concernée et avoir des conséquences
négatives, notamment une perte de confiance dans la prévisibilité et la fiabilité des obligations
en vertu des conventions ratifiées et, par voie de conséquence, la réticence des mandants à
établir de nouvelles normes.
232. Pour que la procédure suscite la confiance nécessaire, la demande de renvoi ne devrait être
examinée que si elle a le soutien de la majorité de tous les États parties à la convention
concernée. La Conférence devrait jouer un rôle tout au long de la procédure en vue de garantir
la participation des États parties directement concernés par un avis consultatif de la Cour. Le
groupe des employeurs s’inquiète de ce que le Département des normes internationales du
travail pourrait ne pas observer une stricte neutralité, surtout lorsqu’une difficulté résulte
d’une évaluation de la commission d’experts. En outre, il considère que les interprétations
d’une convention faisant l’objet d’un examen par la Cour devraient être suspendues pendant
la procédure.
233. Le groupe des employeurs ne peut accepter ni la Note introductive ni le cadre de procédure
proposés. Des changements sur le fond sont nécessaires pour traduire les vues de la majorité,
ce qui appelle de nouvelles consultations, ainsi que la recherche d’un consensus entre les
mandants.
234. En ce qui concerne les propositions de mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2, de la
Constitution, le groupe des employeurs émet des observations sur le fond quant à la structure
et à la composition d’un tribunal interne et reste disposé à en discuter avec le Bureau.
235. Le groupe des employeurs propose les amendements suivants au projet de décision:
Le Conseil d’administration décide de poursuivre, à sa 349e session, en novembre 2023, la
discussion sur:
a) d’approuverles éventuelles questions en suspens dans la Note introductive et le cadre de
procédure concernant le renvoi de questions ou de difficultés d’interprétation devant la
Cour internationale de Justice en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution de
l’OIT tels qu’ils figurent à l’annexe I du document GB.347/INS/5;
b) de poursuivre la discussion surla mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2, et prie à
cette fin le Directeur général d’organiser des consultations tripartites en vue de
l’élaboration d’un projet de règles concernant l’institution d’un tribunal, pour examen;à
sa 352e session (novembre 2024).
GB.347/PV(Rev.) 65
c) les autres propositions visant à assurer la sécurité juridique et à renforcer le système de
contrôle, notamment par l’inscription de cette question, pour examen, à l’ordre du jour
de la Conférence internationale du Travail.
236. L’oratrice espère qu’il sera possible de trouver un moyen positif d’aller de l’avant, mais souligne
que, la question à l’examen étant complexe et hautement sensible, du temps doit être consacré
à la recherche d’une solution consensuelle.
237. La porte-parole du groupe des travailleurs rappelle que, comme le Conseiller juridique l’a
précédemment expliqué, l’article 37, paragraphe 1, de la Constitution prévoit le renvoi à la
Cour des questions d’interprétation. Le paragraphe 2 du même article énonce simplement la
possibilité de saisir un tribunal dont la sentence peut, en tout état de cause, être annulée par
une décision de la Cour. Il est donc clair que, selon la Constitution et le cadre juridique de l’OIT
– qu’il n’est pas question de modifier –, il n’est pas strictement nécessaire de disposer d’un
cadre de procédure et il n’existe aucune exigence quant au soutien minimum requis pour
renvoyer une question d’interprétation ou en déterminer la gravité. De même, il ne faut pas
nécessairement avoir épuisé tous les autres moyens avant de procéder à un renvoi. Le seul
frein est prévu à l’article 37, paragraphe 2, en vertu duquel le Conseil d’administration doit
approuver la saisie d’un tribunal. Dès lors, même en l’absence d’un cadre de procédure, les
Membres de l’OIT peuvent soulever une question d’interprétation et demander la saisine de la
Cour; le point doit être inscrit à l’ordre du jour du Conseil d’administration pour décision
conformément à ses procédures normales.
238. Il n’existe actuellement qu’un seul différend profond et persistant en matière d’interprétation
au sein de l’Organisation, lequel porte sur la convention no 87, pour ce qui est du droit de grève,
et la compétence de la commission d’experts à fournir des orientations à cet égard. Le groupe
des travailleurs estime que ce n’est pas une question mineure, car le droit de grève est un
corollaire de la liberté syndicale et du droit de négociation collective; le droit de grève corrige
le rapport de force inégal entre les travailleurs, d’une part, et les employeurs et les entreprises,
d’autre part. Bien que le droit de grève ne soit pas un droit absolu, il y a des limites aux
restrictions dont il peut faire l’objet, comme l’ont établi les orientations de longue date et
faisant autorité de la commission d’experts. Il est préjudiciable, non seulement pour les
travailleurs, mais aussi pour la réputation et la crédibilité de l’Organisation, que l’OIT ne
confirme pas que le droit de grève est reconnu et protégé en vertu de la convention no 87. Les
employeurs et leurs organisations n’hésitent pas à faire appel au pouvoir judiciaire pour
contester une grève, mais semblent réticents à utiliser correctement les moyens
constitutionnels existants pour résoudre la question du droit de grève. Même s’il n’est pas
strictement nécessaire, le cadre de procédure proposé pourrait fournir une approche
graduelle pour examiner les obligations en vertu de l’article 37, paragraphe 1, de la
Constitution. Le groupe des travailleurs est disposé à discuter de bonne foi des détails du
cadre, mais ne souhaite pas entamer des discussions générales supplémentaires qui ne feront
que créer des retards supplémentaires.
239. Le cadre de procédure devrait être simple, pratique et conforme autant que possible aux
procédures actuelles du Conseil d’administration. Il devrait aussi pleinement tenir compte des
orientations fournies durant la 344e session du Conseil d’administration. Le groupe des
travailleurs est dans l’ensemble favorable au cadre de procédure proposé et en approuve les
éléments tels qu’ils sont énoncés aux paragraphes 14 et 15 du document. En ce qui concerne
le niveau de soutien ou «seuil» requis pour déclencher une discussion en bonne et due forme
au Conseil d’administration quant à l’opportunité d’un renvoi devant la Cour, tout seuil devrait
être indicatif, car il régit la soumission d’une demande plutôt que la procédure de prise de
décision elle-même. Le cadre juridique existant ne prévoit pas de limites quant au nombre de
GB.347/PV(Rev.) 66
membres ou de groupes qui peuvent soulever une question d’interprétation. Toutefois, dans
le souci d’établir un cadre pratique, le groupe des travailleurs peut soutenir un seuil indicatif
de 20 membres du Conseil d’administration pour déposer une demande de renvoi, étant
entendu que ce seuil ne saurait, d’un point de vue juridique, instituer une règle en matière de
recevabilité. Le seuil d’au moins 30 États Membres de l’Organisation devrait être adapté ou
supprimé. Même s’il semble logique de permettre à des États qui ne sont pas représentés au
sein du Conseil d’administration de soumettre des demandes, des précisions doivent être
données concernant le groupe des employeurs et le groupe des travailleurs. En outre, bien
que la Note introductive mentionne la possibilité de soumettre au bureau du Conseil
d’administration les demandes de renvoi pour lesquelles le degré de soutien requis n’est pas
atteint, ce point devrait être traité dans le texte relatif au cadre de procédure pour garantir la
cohérence avec le cadre juridique de l’Organisation, qui ne prévoit pas de seuil. Cinq des six
instances introduites devant la devancière de la Cour l’avaient été par des États Membres
agissant seuls et avaient trait à des questions clés devant être clarifiées.
240. En ce qui concerne les délais, il est essentiel de veiller à ce que les décisions du Conseil
d’administration ne soient pas retardées indéfiniment; il est exact d’affirmer que le recours à
l’article 37, paragraphe 1, est une mesure de dernier ressort en cas de différend profond et
persistant en matière d’interprétation. Toutefois, l’expression «dernier ressort» ne doit pas être
interprétée comme signifiant que tout renvoi doit être précédé de procédures interminables.
Reconnaître l’importance du dialogue social n’exclut pas la possibilité de saisir un tribunal, car
des différends qui nécessitent un avis juridique faisant autorité peuvent survenir même
lorsqu’il existe des systèmes de dialogue social et de négociation collective hautement
développés. Le fait que le dialogue social n’aboutisse pas à une solution ne doit pas non plus
être une condition préalable formelle au renvoi d’une question. À la 344e session du Conseil
d’administration, il a été convenu que les différends en matière d’interprétation de questions
juridiques, telles que l’interprétation faisant autorité d’une convention, ne pouvaient pas être
réglés par le dialogue social, car celui-ci n’offre pas la sécurité juridique nécessaire. Le groupe
des travailleurs soutient donc le libellé du paragraphe 5 du cadre proposé et estime que
l’inclusion de toute autre condition que devrait remplir le Conseil d’administration avant de
pouvoir porter une question devant la Cour irait à l’encontre de l’article 37, paragraphe 1, de
la Constitution qui ne prévoit pas ce genre de condition. Il souscrit également au paragraphe 6,
selon lequel le Conseil d’administration doit examiner simultanément le renvoi et la question
juridique.
241. Concernant le paragraphe 21 du document, l’oratrice souligne que le Conseil d’administration
a pleine compétence pour se prononcer sur un renvoi compte tenu du mandat que la
Conférence lui a confié en 1949. Permettre à tous les États Membres d’intervenir dans la prise
de décision du Conseil d’administration sur les renvois au titre de l’article 37 créerait un
précédent fâcheux et remettrait en question la position du Conseil. Le groupe des travailleurs
n’y est pas favorable. Toutefois, il estime acceptable la proposition qui est faite au
paragraphe 8 du projet de cadre de procédure de donner aux États Membres qui ne sont pas
représentés au sein du Conseil la possibilité de soumettre des observations écrites. Si les
gouvernements tiennent à ce que la Conférence soit associée à la procédure, le groupe des
travailleurs peut envisager une disposition permettant à cette dernière de valider la décision
du Conseil d’administration, comme le décrit le paragraphe 22 du document, pour autant que
l’usage de cette disposition soit limité au cas par cas. Par conséquent, le groupe des travailleurs
soutient le texte proposé au paragraphe 10 du cadre de procédure.
GB.347/PV(Rev.) 67
242. S’agissant des dispositions de l’article 37, paragraphe 2, de la Constitution, l’oratrice fait
remarquer que la création d’un tribunal n’avait pas suscité d’intérêt auparavant. Le groupe des
employeurs a d’ailleurs déclaré à la 344e session du Conseil d’administration qu’un tel tribunal
ne conviendrait pas pour résoudre des questions de longue date, complexes et litigieuses
telles que l’interprétation par la commission d’experts du droit de grève dans le cadre de la
convention no 87. L’oratrice aimerait savoir si le groupe des employeurs est toujours de cet
avis. Le groupe des travailleurs partage l’analyse du Bureau et du Conseiller juridique selon
laquelle l’article 37, paragraphe 2, vise à résoudre des questions techniques de portée limitée
plutôt que des différends graves aux conséquences systémiques plus larges, et ne garantit pas
la sécurité juridique. Outre le fait qu’un éventuel tribunal interne pourrait porter atteinte à
l’autorité et à l’indépendance du système de contrôle actuel, dont la commission d’experts, et
à l’obligation d’examiner les différends ayant des incidences de grande ampleur en recourant
à l’article 37, paragraphe 1, il n’est pas judicieux de se lancer dans une procédure au titre de
l’article 37, paragraphe 2, car rien ne garantit qu’elle apportera la sécurité juridique nécessaire.
Par conséquent, le groupe des travailleurs déconseille vivement d’élaborer d’autres
propositions en vue d’instituer un tribunal interne sur la base de l’article 37, paragraphe 2, car
cela ne contribuerait pas à régler le différend actuel sur le droit de grève qui ne peut être
examiné que par le truchement de l’article 37, paragraphe 1. Le groupe des travailleurs
propose donc un amendement à l’alinéa b) du projet de décision:
b) de poursuivre la discussion sur la mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2, et prie à
cette fin le Directeur général d’organiser des consultations tripartites en vue de
l’élaboration d’un projet de règles concernant l’institution d’un tribunal, pour examen à
sa 352e session (novembre 2024).
243. Pour ce qui est de l’amendement proposé par le groupe des employeurs, l’oratrice s’élève
contre la proposition de reporter encore les discussions, des consultations approfondies ayant
déjà eu lieu. Bien qu’il ait insisté sur la nécessité de parvenir à un consensus, le groupe des
employeurs s’est déjà opposé au consensus existant en remettant en question l’interprétation
de la convention no 87 pour ce qui est du droit de grève. Le nouvel alinéa c) proposé, qui prévoit
d’inscrire à l’ordre du jour de la Conférence une question appelant une discussion, manque de
clarté et donne à penser qu’aucun mécanisme ne permet actuellement d’atteindre la sécurité
juridique, alors que l’article 37 de la Constitution couvre cette situation de manière adéquate,
comme le mentionne la décision du Conseil d’administration de mars 2022 concernant le plan
de travail visant à renforcer le système de contrôle. Le groupe des travailleurs ne soutient donc
pas l’amendement proposé par le groupe des employeurs.
244. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, une représentante du gouvernement du Malawi
souligne l’importance du dialogue social pour régler les différends. Son groupe adhère aux
critères convenus pour renvoyer une question devant la Cour en vertu de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution. Tout cadre de procédure devrait être uniformément appliqué
à toutes les demandes. L’oratrice prend note de la proposition visant à associer tous les États
Membres à la discussion concernant la saisine de la Cour. Le groupe de l’Afrique convient que
le Conseil d’administration, réuni en comité plénier, est un organe approprié pour faire le tri
entre les demandes de renvoi, les examiner et en débattre, et il est d’avis que la Conférence
approuve les demandes au moyen d’une résolution. L’oratrice réaffirme qu’il est nécessaire
que le Bureau reste neutre et impartial tout au long de la procédure de renvoi.
245. En ce qui concerne les propositions relatives à l’article 37, paragraphe 2, l’oratrice estime que
la saisine de la Cour devrait être une mesure de dernier ressort. En conséquence, un tribunal
interne devrait être institué en tant que mécanisme de règlement des différends en première
instance et prendre la forme d’une structure permanente ou d’un dispositif ad hoc. Les parties
GB.347/PV(Rev.) 68
qui ne seraient pas satisfaites de la décision de ce tribunal auraient alors la possibilité de se
tourner vers une autorité supérieure. L’oratrice adhère aux critères de sélection des juges,
dont elle souligne la nécessité de préserver l’indépendance et l’impartialité tout en veillant à la
représentation des différents systèmes juridiques. La procédure de sélection tripartite devra
être transparente et inclusive. Du reste, un équilibre devra être établi entre les fonctions de
contrôle de l’application et l’interprétation du tribunal. Il ne devrait y avoir aucune restriction
si une partie s’estime lésée par une sentence du tribunal. L’oratrice note que, même si une
sentence du tribunal peut être contestée, le Conseil d’administration devra toujours approuver
le renvoi de toute question devant la Cour.
246. Le groupe de l’Afrique a plusieurs questions en suspens. L’oratrice prie le Bureau de préciser
si les avis consultatifs de la Cour seront contraignants pour tous les États Membres. Elle
demande pourquoi la procédure de renvoi en vertu de l’article 37, paragraphe 1, doit être
adoptée avant qu’un accord soit trouvé sur la création d’un tribunal interne. Le Bureau devrait
éclaircir les points suivants: les raisons pour lesquelles un tribunal interne ne pourrait pas être
compétent pour toutes les questions d’interprétation; les critères qui seront employés pour
déterminer les questions les plus importantes; le rôle du Conseil d’administration et de la
Conférence pour ce qui est de décider si un cas doit être renvoyé devant le tribunal interne
proposé ou devant la Cour; et la procédure et le délai pour porter un différend devant la Cour.
247. S’exprimant au nom du groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC), une
représentante du gouvernement de la Colombie dit que l’article 37 fournit un cadre pour
aborder les divergences d’interprétation des conventions. Une procédure simple, transparente
et équitable au titre de l’article 37, paragraphe 1, assurerait la stabilité sans créer de
dispositions supplémentaires. L’oratrice est favorable, aux fins de la saisine de la Cour, à la
fixation d’un seuil indicatif qui pourrait s’appliquer aux membres du Conseil d’administration
ou aux États Membres, pour faire en sorte que tout État Membre de l’Organisation soit en
mesure d’engager une procédure au titre de l’article 37. Il convient aussi de prévoir un
calendrier pour les délibérations du Conseil d’administration relatives à des renvois éventuels,
et la Conférence devrait approuver la saisine de la Cour, après analyse approfondie par le
Conseil. Il faut veiller à ce que tous les gouvernements intéressés puissent participer à ces
discussions dans le respect des règles de procédure. L’oratrice convient que les activités de
contrôle régulier ne devraient pas être suspendues lorsqu’une instance est introduite devant
la Cour.
248. En ce qui concerne le cadre de procédure proposé, l’oratrice souscrit: à l’objectif de saisine de
la Cour au titre de l’article 37, paragraphe 1; au rôle du Conseil d’administration dans la
procédure de renvoi; au calendrier établi pour les délibérations du Conseil à cet égard; et à la
participation à ces délibérations d’États Membres qui ne sont pas représentés au sein du
Conseil d’administration. Le Bureau doit veiller à faire preuve de discrétion, de neutralité et
d’impartialité tout au long de la procédure. Le GRULAC convient que l’avis de la Cour ainsi
qu’une analyse de toutes mesures nécessaires pour y donner suite devraient être soumis au
Conseil d’administration. En outre, le délai accordé à ces discussions devrait être limité à deux
sessions consécutives. Toute procédure convenue par le Conseil d’administration devrait être
ajoutée aux règles de procédure du Conseil.
249. Pour le GRULAC, l’institution d’un tribunal interne doit faire l’objet d’une étude plus approfondie.
Un tel tribunal ne pourrait être utilisé que pour régler des différends de portée plus limitée ou
moins complexes, en se concentrant uniquement sur l’interprétation des normes.
GB.347/PV(Rev.) 69
250. S’exprimant au nom du groupe des pays industrialisés à économie de marché (PIEM), une
représentante du gouvernement des États-Unis d’Amérique insiste sur l’importance de la
sécurité juridique pour le système de contrôle de l’Organisation et le maintien du corpus de
normes internationales du travail. L’article 37 énonce une disposition claire aux fins de la
résolution des difficultés d’interprétation. Le différend relatif au le droit de grève existe de
longue date et entrave le fonctionnement du système de contrôle, surtout en ce qui concerne
l’application de la convention no 87. Le Conseil d’administration a l’obligation de régler ce
différend. Par conséquent, le groupe des PIEM soutient l’élaboration d’un cadre de procédure
au titre du paragraphe 1 de l’article 37 et souligne que les différends qui méritent d’être
renvoyés devant la Cour devraient l’être sans préjudice des discussions en cours sur les
dispositions au titre du paragraphe 2 de l’article 37.
251. S’exprimant au nom de la majorité des pays de l’Asie et du Pacifique, un représentant du
gouvernement de la Chine indique que tout conflit survenant dans le monde du travail, y
compris les questions relatives à l’interprétation des conventions de l’OIT, devrait, dans la
mesure du possible, être résolu par le dialogue social tripartite. L’article 37 propose une
solution de dernier ressort et ne doit être utilisé qu’avec prudence. Le cadre de procédure
proposé au titre de l’article 37, paragraphe 1, et sa Note introductive n’apaisent pas certaines
des préoccupations majeures de son groupe. Le pouvoir de décision a certes été délégué au
Conseil d’administration, mais la Conférence est un cadre plus approprié pour discuter du
renvoi d’un différend devant la Cour. Il revient également à la Conférence de définir les
mesures à prendre pour donner suite à l’avis consultatif de la Cour. Compte tenu du caractère
contraignant d’un avis consultatif de la Cour, toute décision de renvoi doit être prise par
consensus et non par un vote à la majorité. Par conséquent, il serait approprié de prévoir un
délai de deux sessions consécutives du Conseil d’administration, ainsi que la possibilité de
prolonger les discussions le cas échéant. Considérant qu’un seuil de soutien à une demande
de renvoi devrait être fixé pour que celle-ci soit examinée par le Conseil d’administration,
l’orateur demande au Bureau de préciser ses propositions relatives au nombre exact d’États
requis pour entamer une discussion. Un nombre plus élevé d’États Membres traduirait mieux
l’importance de la question.
252. Son groupe salue les propositions préliminaires relatives à la création d’un tribunal interne, y
compris l’établissement de règles de procédure pour cet organe, ce qui appelle des consultations
tripartites. L’article 37, paragraphe 2, prévoit clairement le renvoi de toute difficulté relative à
l’interprétation d’une convention devant un tribunal interne dont le mandat ne doit donc pas être
limité. Ce tribunal doit être un dispositif ad hoc pour faire en sorte que les juges qui examinent
un différend disposent de l’expertise requise, et sa composition doit garantir une représentation
équilibrée des différents systèmes juridiques, des régions et des genres.
253. Le Conseil d’administration devrait approuver des procédures de mise en oeuvre des deux
paragraphes de l’article 37 avant de saisir la Cour. Par conséquent, le groupe de pays au nom
duquel l’orateur s’exprime appuie les amendements apportés au projet de décision par le
groupe des employeurs et ne soutient pas le projet de décision dans sa forme initiale.
254. S’exprimant au nom de l’Union européenne (UE) et de ses États membres, un représentant
du gouvernement de la Suède indique que l’Albanie, la Macédoine du Nord, la République de
Moldova, le Monténégro, la Serbie, la Géorgie, l’Islande et la Norvège s’associent à sa
déclaration. Il souscrit à la déclaration prononcée au nom du groupe des PIEM. Le désaccord
prolongé sur le droit de grève dans le contexte de la convention no 87 doit être résolu dans le
cadre des dispositions de l’article 37, paragraphe 1. L’orateur estime que la Cour est bien
placée pour examiner ce différend et il invite le Conseil d’administration à la saisir sans délai.
GB.347/PV(Rev.) 70
255. Le cadre de procédure proposé pour mettre en oeuvre les dispositions de l’article 37,
paragraphe 1, ne devrait pas changer les règles de procédure du Conseil d’administration. Le
seuil requis pour soumettre une demande de renvoi doit être indicatif et non prescriptif, il
devrait obtenir un soutien régional, et la décision pourrait être prise à la majorité simple. L’UE
et ses États membres sont d’avis que la décision finale sur la saisine de la Cour peut être
adoptée par la Conférence plutôt que par le Conseil d’administration. Il reviendrait
exclusivement au Directeur général de préparer le dossier, et le Bureau devrait rester neutre
et impartial en toutes circonstances. Le cadre de procédure proposé et les propositions
relatives à l’application de l’article 37, paragraphe 2, doivent être examinés séparément. Par
conséquent, l’UE et ses États membres soutiennent l’amendement au projet de décision
présenté par le groupe des travailleurs.
256. S’exprimant au nom d’un groupe de pays composé de l’Australie, du Canada, des États-
Unis, de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du
Nord, une représentante du gouvernement de l’Australie déclare que le cadre de procédure
proposé au titre de l’article 37, paragraphe 1, établit une méthode claire et prête à l’emploi et
que son adoption ne saurait conditionner la soumission d’une requête pour avis consultatif de
la Cour. Le cadre proposé faciliterait la mise en oeuvre d’une procédure de recours rationnelle,
efficace et assortie de délais, ce qui est un élément essentiel d’une bonne gouvernance. Son
groupe est favorable à un seuil indicatif de 20 membres du Conseil d’administration ou de
30 États Membres; soutient un délai maximum de deux sessions du Conseil pour délibérer sur
le renvoi d’un différend devant la Cour et déterminer la question juridique à porter devant elle;
et convient qu’une décision de renvoi devant la Cour peut être soumise à l’approbation de la
Conférence. Bien qu’il ne voie pas d’intérêt à poursuivre actuellement l’examen de l’article 37,
paragraphe 2, le groupe de pays au nom duquel s’exprime l’oratrice soutient le projet de
décision et l’amendement proposé par le groupe des travailleurs. Le Conseil d’administration
devrait se prononcer sur le projet de cadre de procédure à sa session en cours. Le groupe ne
peut pas appuyer l’amendement proposé par le groupe des employeurs.
257. Un représentant du gouvernement de l’Argentine dit qu’un mécanisme de renvoi des
différends devant la Cour renforcerait le système de contrôle. Toutefois, aucune procédure
supplémentaire n’est nécessaire pour mettre en oeuvre les dispositions de l’article 37. Le cadre
de procédure proposé garantirait la sécurité juridique et renforcerait la gouvernance au sein
de l’OIT, contribuant ainsi à la réalisation du travail décent pour tous. L’orateur accueille
favorablement les propositions relatives à l’institution d’un tribunal interne aux fins de la mise
en oeuvre du paragraphe 2 de l’article 37, mais estime que de plus amples analyses sont
nécessaires. Le Conseil d’administration ne devrait se prononcer que sur la mise en oeuvre du
paragraphe 1 de l’article 37, et, à ce titre, l’Argentine soutient l’amendement au projet de
décision soumis par le groupe des travailleurs.
258. Un représentant du gouvernement de la Chine reconnaît que des problèmes se posent de
longue date quant à l’interprétation des conventions et que la sécurité juridique garantit la
stabilité et la crédibilité du système de contrôle. Tous les travaux en la matière devraient se
fonder sur l’application de l’article 37, et aucun processus législatif ne devrait être établi. Le
cadre de procédure proposé au titre de l’article 37, paragraphe 1, aurait d’importantes
conséquences pour les mandants tripartites. Tous les États Membres devraient pouvoir
participer aux discussions et à la prise de décision concernant le renvoi de différends devant
la Cour, et l’efficacité et l’équité du processus devraient être assurées. Il convient de revoir le
projet de cadre de procédure en tenant compte des observations qui ont été formulées, de
manière à répondre aux préoccupations de toutes les parties et à s’assurer qu’il pourra être
adopté par consensus. En ce qui concerne l’institution d’un tribunal interne, les mandants
GB.347/PV(Rev.) 71
tripartites soulignent l’importance de résoudre les différends par le dialogue. Le
gouvernement de la Chine réaffirme que le dialogue est le seul moyen de résoudre les
différends et de garantir le fonctionnement du système de contrôle en renforçant la
coopération et en évitant la confrontation. L’orateur exhorte le Bureau à explorer d’autres
arrangements institutionnels. La Chine soutient le projet de décision tel qu’amendé par le
groupe des employeurs.
259. Un représentant du gouvernement de l’Allemagne déclare que le lien entre la liberté
syndicale et le droit de grève a été remis en question à maintes reprises, ce qui limite le
contrôle efficace des normes de l’OIT s’y rapportant. Cette situation est inacceptable, et
l’orateur demande que la question soit réglée le plus rapidement possible. Le cadre de
procédure proposé est bien conçu, équilibré, viable et ancré dans la Constitution de l’OIT, et il
tient compte des préoccupations et des commentaires de tous les mandants. L’orateur
demande instamment au Conseil d’administration d’approuver cette solution pour la mise en
oeuvre de l’article 37, paragraphe 1.
260. Une représentante du gouvernement de la Colombie reconnaît la nécessité d’une
procédure de renvoi des différends en matière d’’interprétation des normes devant la Cour,
conformément à l’article 37, paragraphe 1. Elle salue les efforts déployés pour préparer un
cadre de procédure clair, objectif et transparent. Compte tenu des conséquences possibles de
toute recommandation émise par un organe de contrôle sur la législation d’un pays, il faudrait
examiner plus avant la proposition de créer un tribunal interne en vertu de l’article 37,
paragraphe 2. Un tel tribunal devrait veiller à représenter les différents systèmes juridiques,
économiques et sociaux. Le Bureau devrait se pencher sur les éventuelles incidences
budgétaires et veiller à ce que tout nouveau dispositif n’ait pas d’impact négatif sur les
mécanismes existants du système de contrôle. La Colombie soutient le projet de décision et
l’amendement proposé par le groupe des travailleurs; elle ne souscrit pas à l’amendement
soumis par le groupe des employeurs.
261. Une représentante du gouvernement du Mexique souligne que la sécurité juridique dans
l’interprétation des conventions devrait être garantie. L’article 37, paragraphe 1, fournit une
base pour le règlement des différends, et ses dispositions n’appellent pas d’interprétation
supplémentaire. Le Conseil d’administration devrait adopter, à sa session en cours, une
procédure simple, transparente et équitable pour la saisine de la Cour en cas de différend. Les
propositions relatives à la mise en oeuvre de l’article 37, paragraphe 2, nécessitent un examen
plus approfondi. Par conséquent, le Mexique soutient le projet de décision tel qu’amendé par
le groupe des travailleurs.
262. Un représentant du gouvernement du Japon souligne qu’il est important d’avancer sur la
question. La discussion tripartite doit être le principe de base à respecter face un problème
difficile, mais il faut aussi reconnaître qu’un problème doit être réglé. Le cadre de procédure
proposé pour le renvoi d’un différend en vertu de l’article 37, paragraphe 1, peut constituer la
base d’un consensus au sein du Conseil d’administration. L’orateur demande que le principe
de la consultation tripartite soit clarifié de manière exhaustive et se déclare ouvert à la
discussion sur toute question spécifique.
263. Un représentant du gouvernement du Chili convient qu’une procédure simple, transparente
et équitable est nécessaire pour renforcer le système de contrôle de l’OIT et assurer la sécurité
juridique face aux divergences d’interprétation des conventions. Le Chili soutient le projet de
décision tel qu’amendé à l’alinéa b) par le groupe des travailleurs.
GB.347/PV(Rev.) 72
264. Un représentant du gouvernement du Bangladesh relève que le tripartisme est le principe
fondamental qui guide les travaux de l’OIT; le moment est critique, parce que le Conseil
d’administration doit décider d’une exception à ce principe. L’orateur n’est pas favorable à la
mise en place d’une approche qui pourrait avoir des effets en cascade. Des points de vue
divergents sur la question de la sécurité juridique au titre de l’article 37 ont été exprimés
durant les discussions de groupe, et il faut en tenir compte pour la suite. L’orateur propose
que la discussion soit poursuivie afin de parvenir à une décision consensuelle. Il faudrait
adopter, pour les questions d’interprétation, une approche interne qui serait guidée par
l’héritage, la jurisprudence interinstitutionnelle et la culture institutionnelle. Les deux alinéas
de l’article 37 devraient être examinés ensemble et faire l’objet d’une décision à l’issue d’un
débat plus approfondi.
265. Une représentante du gouvernement de l’Inde déclare que le solide corpus de normes
internationales du travail que l’OIT et ses mandants ont contribué à constituer et à maintenir
a joué un rôle essentiel dans la promotion de conditions de travail décentes et productives
pour la main-d’oeuvre mondiale. Les questions relatives à l’interprétation de ces normes
doivent être résolues pour garantir une supervision et une mise en oeuvre efficaces. En tant
que seule institution tripartite du système des Nations Unies, l’OIT a résolu efficacement les
questions d’interprétation dans le passé. La mise en oeuvre des normes grâce au dialogue
social et aux consultations tripartites est au coeur de l’action de l’OIT. Le recours au mandat de
la Cour pour régler les questions d’interprétation en vertu de l’article 37, paragraphe 1, doit
donc être subordonné à l’épuisement de toutes les voies de résolution par la consultation
tripartite. Le renvoi de questions d’interprétation à la Cour ou à un tribunal interne ne devrait
être envisagé que lorsqu’un seuil raisonnablement élevé a été atteint, dont un niveau élevé de
soutien d’une majorité d’États parties à la convention concernée. Une approche prescriptive
plutôt qu’indicative garantirait que le recours à l’article 37 n’est utilisé que pour des différends
profonds et persistants. Toute question d’interprétation devrait d’abord être soumise au
tribunal interne créé en application de l’article 37, paragraphe 2, avant d’être renvoyée à la
Cour; l’OIT devrait donc d’abord instituer le tribunal interne chargé d’examiner ces questions.
L’oratrice est convaincue que tout différend ou blocage peut être résolu par des consultations
ou des structures tripartites de l’OIT.
266. Un représentant du gouvernement de la Fédération de Russie indique qu’il ressort des
consultations informelles tenues sur ce point que de nombreux États, sinon la majorité,
considèrent le recours à l’article 37, paragraphe 1, comme une mesure de dernier ressort en
cas de différend profond et persistant en matière d’interprétation. La Fédération de Russie
partage ce point de vue. Le cadre de procédure pour la mise en oeuvre doit donc établir un
équilibre prudent entre le libellé plutôt général du paragraphe 1 de l’article 37 et la nécessité
d’épuiser au préalable tous les mécanismes internes de règlement des différends de l’OIT, en
s’appuyant avant tout sur le dialogue social. Cet objectif peut être atteint, premièrement, en
fixant un seuil élevé pour que le Conseil d’administration envisage formellement le recours à
l’article 37: il faut dégager un consensus, ou du moins une majorité qualifiée des membres du
Conseil d’administration, à cette fin, et envisager de faire participer les États parties à la
convention qui est l’objet du différend. Deuxièmement, la décision finale de renvoi doit être
prise par la Conférence. Ce point est important non seulement parce qu’il constitue une
garantie, mais aussi parce que l’avis consultatif final de la Cour aura des incidences sur
l’interprétation et l’application de tous les instruments juridiques de l’OIT, au-delà des termes
spécifiques du différend à l’origine de la saisine. Le plus grand nombre possible d’États
Membres devrait donc participer à la procédure, en particulier les États parties à la convention
qui seraient concernés par l’avis consultatif.
GB.347/PV(Rev.) 73
267. L’intervention de la Conférence ne doit pas se limiter à la simple validation d’une décision du
Conseil d’administration, car la Conférence doit avoir la possibilité d’examiner la question sur
le fond. L’orateur n’approuve pas la proposition visant à fixer un délai pour l’examen d’une
question: précipiter les choses c’est risquer de saper les tentatives de règlement du différend
par le dialogue social. Le libellé du paragraphe 1 de l’article 37 est suffisamment général pour
que de telles garanties puissent être prises sans aller à l’encontre de l’objet et du but de l’article.
De surcroît, le paragraphe 2 de l’article 37 doit faire l’objet d’un examen approfondi. L’orateur
ne voit pas l’intérêt de procéder à l’élaboration d’un règlement pour le tribunal, du moins selon
le calendrier proposé dans le projet de décision.
268. Un représentant du Directeur général (Conseiller juridique) remercie les membres du
Conseil d’administration pour la richesse de leurs contributions, qui rendent justice à
l’importance institutionnelle capitale du sujet. La sécurité juridique est en effet un principe
fondateur de tous les systèmes juridiques, ce qui signifie a contrario que l’insécurité juridique
constitue une menace directe et sérieuse pour tout système juridique. Il remercie tous les
membres qui ont participé à la série de consultations et de réunions d’information que le
Bureau a organisées au cours des quatre derniers mois en vue de mieux expliquer les
dimensions constitutionnelles, juridiques et historiques de la question, afin que le Conseil
puisse prendre une décision en connaissance de cause.
269. Répondant aux questions posées sur l’effet juridique des avis consultatifs de la Cour, l’orateur
précise que, en vertu du Statut de la Cour internationale de justice, les avis consultatifs en tant
que tels n’ont pas force obligatoire. Toutefois, un caractère contraignant – également appelé
décisif, concluant ou faisant autorité – peut leur être attribué par d’autres voies. La section 32
de la Convention de 1947 sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées est un
exemple de clause qui attribue spécifiquement un caractère décisif à un avis consultatif par
ailleurs non contraignant. Dans un article intitulé “Binding” Advisory Opinions of the International
Court of Justice, Roberto Ago, ancien juge à la Cour et ancien membre de la commission
d’experts, indique que les instruments constitutifs de certaines organisations, dont l’OIT,
établissent le caractère contraignant des avis consultatifs de la Cour en les qualifiant de
«décision». Dans le cas de l’OIT, le caractère contraignant des avis consultatifs découle non
seulement de la lettre de l’article 37, paragraphe 1, qui fait explicitement référence à
«l’appréciation de la Cour internationale de Justice», mais aussi de l’esprit de ce même article
en tant que clause de règlement des différends prévoyant les moyens d’action obligatoires à
engager en dernier ressort. Un élément tout aussi important est la compréhension unanime
et profonde que tous les mandants de l’OIT ont du fait que les avis consultatifs rendus en vertu
de l’article 37, paragraphe 1, sont contraignants, définitifs et font autorité pour l’Organisation,
ses organes et ses Membres. La note de bas de page 11 du document contient un lien
hypertexte vers une compilation de déclarations de représentants de tous les mandants de
l’OIT affirmant le caractère contraignant des avis consultatifs rendus par la Cour. Tous les
documents récents que le Bureau a établis sur la question sont clairs et cohérents en ce qui
concerne l’effet juridique des avis consultatifs demandés à la Cour au titre de l’article 37,
paragraphe 1, de la Constitution de l’OIT.
270. S’agissant du niveau indicatif de soutien, ou «seuil», requis pour qu’une demande de renvoi
soit examinée, et en particulier de l’avis exprimé par le groupe des employeurs, selon lequel le
Conseil d’administration ne peut être saisi d’une demande de renvoi que si la majorité des États
Membres ayant ratifié la convention en question soutient la requête, l’orateur note que, d’un
point de vue strictement juridique, il ne semble pas y avoir de raison valable de faire une
distinction entre les États ayant ratifié la convention et ceux qui ne l’ont pas fait. Si une
distinction était faite, cela signifierait qu’un État devrait ratifier une convention avant de
GB.347/PV(Rev.) 74
pouvoir soulever la moindre question au sujet de cette convention; or la plupart des demandes
d’avis officieux que le Bureau reçoit émanent d’États Membres qui n’ont pas encore ratifié la
convention en question. De plus, définir le seuil exclusivement par référence aux États ayant
ratifié une convention donnée priverait nécessairement les employeurs et les travailleurs de la
possibilité de soumettre une demande de renvoi, puisque seuls les États peuvent ratifier des
conventions internationales du travail. Au paragraphe 18 du document, le Bureau a traduit le
point de vue exprimé lors des consultations sur la majorité à atteindre, mais estime que fixer
le seuil indicatif à un niveau aussi élevé serait excessivement restrictif.
271. Au sujet du délai indicatif proposé, à savoir un maximum de deux sessions du Conseil
d’administration, l’orateur affirme qu’il est comparable aux délais indicatifs appliqués à
d’autres procédures et processus du Conseil d’administration. C’est notamment le cas de la
procédure d’inscription d’une question à l’ordre du jour de la Conférence, énoncée au
paragraphe 54 de la Note introductive du Recueil de règles applicables au Conseil
d’administration du Bureau international du Travail, qui fait mention de deux sessions. Le délai
proposé ne serait qu’une indication et, en cas de difficultés, il appartiendrait au Conseil
d’administration de décider de la marche à suivre.
272. S’il est précisé au paragraphe 2 du cadre de procédure qu’une demande de renvoi devra être
déposée par «au moins 20 membres titulaires du Conseil d’administration», c’est pour
approcher la majorité requise au cas où la procédure de saisine devrait faire l’objet d’un vote.
Les groupes non gouvernementaux comptant chacun 14 membres au sein du Conseil, le
«seuil» de 20 membres comprendrait nécessairement un groupe non gouvernemental. L’autre
possibilité, à savoir «au moins […] 30 États Membres (qu’ils soient ou non membres du Conseil
d’administration)» vise à répondre à l’attente légitime des États non représentés au Conseil
d’administration de pouvoir lui soumettre une question d’interprétation qu’ils jugent
importante, dans le cas improbable où un nombre insuffisant d’États Membres titulaires se
prononcerait en faveur du dépôt de la demande. Le libellé du paragraphe 2 du cadre de
procédure n’interdit pas à un groupe non gouvernemental de s’associer au groupe des 30 États
Membres. La formulation a donc été pensée de façon à tenir compte des intérêts de tous les
mandants. La suggestion des travailleurs d’ajouter au paragraphe 2 du cadre de procédure ce
qui figure déjà dans la Note introductive, à savoir que le bureau du Conseil d’administration
devra examiner comment donner suite à une demande de renvoi qui n’aurait pas recueilli le
niveau de soutien requis ou attendu, peut être prise en compte lors de la préparation d’une
proposition de version révisée du texte si la salle en est d’accord.
273. En réponse aux questions soulevées par le groupe de l’Afrique, l’orateur indique que les
incidences juridiques d’un avis consultatif final de la Cour pour les États Membres ayant ratifié
une convention dépendront de la ou des questions portées devant la Cour et de l’avis rendu.
Toutefois, l’avis sera contraignant avant tout pour l’Organisation et ses organes de contrôle.
C’est ensuite par l’intermédiaire du système de contrôle que l’avis faisant autorité de la Cour
sera transmis aux États qui ont ratifié la convention en question et qui sont donc tenus de la
mettre pleinement en oeuvre.
274. L’orateur précise que l’élaboration d’une méthode pour saisir la Cour et la création d’un
tribunal interne ne sont pas liées, ce qui signifie que le cadre de procédure peut être adopté
immédiatement. Si un tribunal interne devait être institué ultérieurement, l’incidence sur le
cadre de procédure serait très limitée. Il faudrait, par exemple, modifier les paragraphes du
cadre de procédure sous le titre «Délibérations et décision du Conseil d’administration» pour
fournir des orientations sur la manière dont le Conseil d’administration déterminerait si une
question ou une difficulté d’interprétation doit être portée devant la Cour ou devant le tribunal
interne. Les deux juridictions faisant l’une et l’autre partie du mécanisme prévu dans la
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Constitution pour le règlement des différends en matière d’interprétation, le Conseil
d’administration ne devrait pas donner une définition étroite de la compétence du tribunal
interne. Ce dernier pourrait en définitive examiner toute difficulté ou question d’interprétation,
et il appartiendrait au Conseil d’administration d’en évaluer l’importance et de décider de la
juridiction à saisir.
275. Les informations sur le contexte juridique et historique qui a conduit à l’introduction du
paragraphe 2 de l’article 37 au titre de l’amendement à la Constitution de 1946 ont été fournies
en réponse à une demande spécifique formulée au cours des consultations. Lors de la
préparation de l’amendement constitutionnel, il a été précisé que le tribunal interne prévu au
paragraphe 2 de l’article 37 serait chargé du prompt règlement de toutes questions de
moindre importance ou relatives à des points minutieux, qu’il n’est pas justifié de porter jusqu’à
La Haye. Il a été expliqué qu’un tribunal interne était nécessaire pour répondre aux questions
se situant entre celles adressées au Bureau pour obtenir son avis officieux et celles justifiant la
saisine de la Cour.
276. En ce qui concerne les délais possibles pour demander et obtenir un avis consultatif, l’orateur
renvoie le Conseil d’administration à la représentation schématique du cadre de procédure
(annexe II), ainsi qu’à l’exemple de la façon dont une résolution du Conseil d’administration
pourrait se lire si une lettre devait être envoyée à la Cour (annexe I du
document GB.322/INS/5). En procédant étape par étape comme le suggère la proposition de
cadre de procédure, il faudra compter, en plus des deux mois nécessaires à la préparation du
rapport du Bureau, deux sessions du Conseil d’administration pour prendre la décision de
renvoi et rédiger la ou les questions à porter devant la Cour, la décision étant ensuite soumise
à la validation de la Conférence au mois de juin. À cela s’ajoute le temps nécessaire à la Cour
pour rendre son avis consultatif; le délai serait laissé à l’entière discrétion de la Cour et
dépendrait de sa charge de travail, mais il devrait être de l’ordre de douze à dix-huit mois.
L’orateur rappelle à cet égard que l’article 103 du règlement de la Cour prévoit la possibilité de
soumettre une demande appelant une réponse urgente.
277. Il appartient au Conseil d’administration de répondre à la question posée par le GRULAC de
savoir si le cadre de procédure pourrait faire partie du Recueil de règles applicables au Conseil
d’administration du Bureau international du Travail. L’orateur affirme une nouvelle fois que le
niveau de soutien, ou «seuil», proposé est indicatif et non prescriptif. La possibilité que le
Conseil d’administration se réunisse en comité plénier figure déjà dans le document. Le point
soulevé par le représentant du gouvernement de la Chine, selon lequel l’organe prévu au
paragraphe 2 de l’article 37 devrait être compétent pour tous les différends en matière
d’interprétation, quelle qu’en soit la gravité, est conforme aux indications contenues dans le
document qui est soumis au Conseil d’administration. En tout état de cause, toutefois, il
appartiendra au Conseil d’administration de décider de l’organe juridictionnel auquel la
question sera renvoyée. Enfin, le point de vue selon lequel le cadre de procédure devrait
préciser que seule la Conférence sera compétente pour discuter et décider d’un éventuel
renvoi imposerait de faire abstraction de la résolution de 1949 déléguant le pouvoir au Conseil
d’administration. Il serait juridiquement inexact d’élaborer un cadre de procédure prévoyant
que seule la Conférence est habilitée à discuter et à décider tant que celle-ci n’a pas révoqué
sa résolution de 1949.
278. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare que le moment est venu d’aller de l’avant.
Elle appelle l’attention sur les remarques du gouvernement allemand et espère que tous les
gouvernements reconnaissent le caractère fondamental de la liberté syndicale et le lien que
celle-ci entretient avec le droit de grève. Au cours des onze dernières années, le groupe
gouvernemental n’a jamais remis ce lien en question, pas plus que l’importance et l’autorité de
GB.347/PV(Rev.) 76
la commission d’experts, qui est chargée des questions d’interprétation y afférentes. L’OIT est
dotée par sa propre Constitution d’un mécanisme de règlement des différends. L’intervenante
prie instamment le Conseil d’administration de déclarer que des efforts suffisants ont été faits;
la discussion de cette question n’a que trop duré et elle ne voit pas l’intérêt de poursuivre le
dialogue social en la matière alors qu’un consensus reste hors de portée. Le consensus est
impossible tant les points de vue sont incompatibles: soit les membres acceptent l’existence
d’un lien entre la convention no 87 et le droit de grève (lien qui a déjà été établi non seulement
par la commission d’experts, mais aussi par le Comité de la liberté syndicale, organe tripartite)
et respectent l’autorité du système de contrôle de l’OIT et de la commission d’experts, soit ils
ne le font pas. Certains désaccords ne peuvent être résolus par la voie du dialogue et ne
peuvent l’être que par le recours à une autorité. La Constitution de l’OIT désigne l’autorité à
laquelle l’OIT peut en référer: il s’agit de la Cour. Le groupe des travailleurs demeurera toujours
attaché à la nature tripartite de l’OIT et à ce que les mandants cherchent des solutions dans le
cadre d’une concertation, mais tout système de dialogue social comprend nécessairement un
mécanisme de règlement des différends. L’OIT devrait faire bon usage du mécanisme de
règlement dont l’a dotée sa Constitution.
279. L’oratrice prend bonne note de l’explication claire fournie par le Conseiller juridique quant à
l’impossibilité d’accepter la fixation de seuils sur le plan juridique, le Conseil d’administration
n’étant pas censé modifier la Constitution de l’OIT ni son propre cadre juridique. Il sera toujours
logique qu’un groupe en désaccord avec une opinion dominante souhaite que la question soit
renvoyée devant un tribunal; ainsi, le groupe des travailleurs n’entend pas empêcher le groupe
des employeurs de soumettre une telle question au Conseil d’administration pour règlement,
même s’il n’est pas d’accord sur celle-ci. Ce qui, selon l’oratrice, est illogique et contraire au
système juridique de l’OIT, c’est de décréter qu’un groupe particulier doit s’assurer le soutien
de plus de la moitié des États ayant ratifié la convention avant de pouvoir soumettre une
question au Conseil d’administration. Les ordres du jour des sessions du Conseil
d’administration abondent en questions qui ne font pas l’objet d’un accord au départ, mais qui
sont réglées ensuite dans le cadre des procédures normales, c’est-à-dire soit en cherchant un
consensus soit, en l’absence de consensus, en décidant par un vote à la majorité. Dans le cadre
du système des Nations Unies, il est important de ne jamais être bloqué par un impératif
d’unanimité, car le monde est fait d’opinions très diverses, et que de longs débats sont
nécessaires pour parvenir tôt ou tard à une décision adoptée à la majorité. Le groupe des
travailleurs ne pourrait donc accepter de modifier la pratique de l’OIT à cet égard, qu’il estime
être une bonne pratique.
280. La porte-parole du groupe des travailleurs constate avec satisfaction que de nombreux
gouvernements sont conscients que l’adoption du cadre de procédure doit être dissociée de la
discussion portant sur le paragraphe 2 de l’article 37, à laquelle le Conseil d’administration ne
devrait pas consacrer davantage de temps à ce stade. Cependant, l’amendement proposé par
son groupe vise à tenir compte du fait que certains souhaitent poursuivre le débat. Le Conseil
d’administration pourrait ainsi continuer de peser les avantages et les risques d’un recours au
paragraphe 2 de l’article 37 et de décider s’il y a lieu d’établir le tribunal envisagé en temps utile.
Cela étant, la Cour existe déjà et est donc en mesure de rendre un avis définitif, ce qu’un tribunal
ne pourrait pas faire. Le groupe des travailleurs estime par conséquent qu’il est temps d’adopter
le cadre de procédure proposé et de l’utiliser de manière judicieuse pour aller de l’avant.
281. La porte-parole du groupe des employeurs déclare que le Bureau a manqué une occasion de
forger un consensus, car ses propositions ne tiennent pas compte de la diversité des opinions
exprimées par les gouvernements dans le cadre des consultations tripartites. Le Bureau ne
devrait ménager aucun effort pour tracer une voie susceptible de fédérer les groupes.
GB.347/PV(Rev.) 77
282. Si aucune disposition juridique n’impose de faire une distinction entre les pays qui ont ratifié
une convention et ceux qui ne l’ont pas fait, il est cependant logique que la décision de saisir
la Cour soit approuvée par une majorité d’États ayant ratifié la convention en question. Il ne
serait guère sensé qu’un pays non partie à une convention saisisse la Cour pour obtenir une
décision sur la manière dont un pays partie doit en assurer la mise en oeuvre. Les pays qui
envisagent de ratifier une convention sollicitent l’avis du Bureau afin de mieux comprendre les
obligations qui leur incomberont s’ils décident de le faire. L’intervenante souligne qu’elle a fait
référence à un «pays partie» et non à un «gouvernement partie», étant donné que les
travailleurs et les employeurs sont eux aussi appelés à participer à la prise de décision.
283. Si les décisions de la Cour sont juridiquement contraignantes, tous les pays ayant ratifié la
convention no 87 n’en demeurent pas moins liés par l’ensemble des recommandations
formulées sur celle-ci par la commission d’experts, qui a minutieusement délimité les contours
du droit de grève. La définition de ce droit varie toutefois énormément d’un pays à l’autre, et il
importe que l’OIT respecte ces différences; les grèves politiques, par exemple, sont interdites
dans certains États, mais sont un droit garanti par la Constitution dans d’autres. Le droit de
grève est consacré dans diverses sources du droit international, mais c’est au niveau national
qu’il est défini et exercé. L’OIT ne doit pas aller à l’encontre de cette façon de procéder. Le
groupe des employeurs ne remet nullement en cause le droit de grève, qui traduit un exercice
légitime de la liberté syndicale. Il ne s’agit cependant pas d’un droit absolu. En outre, les pays
qui ont ratifié la convention no 87 ne devraient pas être liés par une interprétation trop
restrictive de cette dernière.
284. Il conviendrait d’utiliser les voies existantes au sein de l’OIT pour résoudre la question
d’interprétation relative au droit de grève; les voies de recours prévues par l’article 37 de la
Constitution ne sont pas les seules qui permettent d’assurer la sécurité juridique, cette
dernière exigeant simplement une solution qui soit largement acceptée. L’intervenante estime,
contrairement au groupe des travailleurs, que le débat est loin d’être épuisé étant donné que,
depuis 2015, les gouvernements expriment leur volonté d’engager un dialogue sur les
questions de fond liées au droit de grève. La porte-parole du groupe des employeurs propose
que ces questions de fond soient débattues et, si nécessaire, que la question soit portée devant
la Cour lorsque toutes les possibilités offertes par le dialogue social tripartite auront été
exploitées.
285. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare que, s’il avait été décidé de saisir la Cour
en 2014, il y a fort à parier que cette dernière aurait avalisé la position qui dominait alors au
sein de l’OIT, ce qui explique peut-être pourquoi les employeurs étaient si réticents à ester
devant la Cour. Les avis de la commission d’experts font autorité, mais n’ont pas force
obligatoire et sont pris en considération par les juges nationaux lorsque ceux-ci interprètent
la législation nationale sur le droit de grève. La question à poser à la Cour consisterait à savoir
si le point de vue dominant au Conseil d’administration au sujet de ce droit est fondé ou non.
Quand bien même la Cour donnerait raison aux employeurs, la position de l’OIT à l’égard du
droit de grève devrait être débattue, avec la participation de tous les mandants; la législation
ou la pratique nationale n’aurait donc pas à être révisée du jour au lendemain. La porte-parole
du groupe des travailleurs voit mal comment les mandants pourraient parvenir à un consensus
sur la question en poursuivant les débats alors que la situation est au point mort depuis une
dizaine d’années.
286. La porte-parole du groupe des employeurs précise que son groupe n’a jamais dit qu’il
refuserait systématiquement d’ester devant la Cour et proteste fermement contre toute
présentation faussée de ses propos. Elle demande des éclaircissements sur la manière dont le
Conseil d’administration devrait procéder.
GB.347/PV(Rev.) 78
287. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, une représentante du gouvernement du Malawi
déclare, au sujet du paragraphe 1 de l’article 37, que la Conférence devrait approuver le renvoi
d’un différend devant la Cour. Son groupe souhaiterait savoir comment la résolution de 1949
concernant les demandes d’avis consultatifs à la Cour (résolution de 1949) pourrait être modifiée
afin de conférer à la Conférence le pouvoir de décision final, puisque la composition de celle-ci a
considérablement évolué depuis 1949. La représentante du gouvernement du Malawi prône de
poursuivre les discussions au sujet du paragraphe 2 de l’article 37 et du projet de décision.
288. Une représentante du gouvernement de l’Italie relève qu’il importe de trouver une solution
pour renforcer la crédibilité de l’OIT en tant qu’instance internationale chargée du dialogue
social et de l’élaboration de normes. Il incombe aux mandants de résoudre les questions ou
difficultés d’interprétation conformément au paragraphe 1 de l’article 37, qui prévoit la saisine
de la Cour. Étant donné qu’il n’existe aucun lien entre le paragraphe 1 et le paragraphe 2 de
l’article 37, le paragraphe 1 devrait être appliqué sans plus tarder.
289. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la Suède indique que l’Islande, la Macédoine du Nord, le Monténégro et la Norvège
s’associent à sa déclaration. Après plus de dix ans de discussions, le moment est venu de porter
le différend devant la Cour. Le désaccord persistant sur le droit de grève nuit au système de
contrôle et à d’autres mécanismes de l’OIT. Une large majorité des membres du Conseil
d’administration est disposée à aller de l’avant pour sortir de l’impasse. Il n’existe aucun lien
de subordination entre les paragraphes 1 et 2 de l’article 37. Le paragraphe 1 de l’article 37
devrait donc être mis en oeuvre sans délai. La représentante du gouvernement de la Suède
soutient par conséquent le projet de décision, tel que modifié par le groupe des travailleurs.
290. La porte-parole du groupe des travailleurs renvoie au paragraphe 10 du projet de cadre de
procédure figurant à l’annexe I du document à l’examen, où il est indiqué que le Conseil
d’administration «pourra» soumettre sa décision à la Conférence pour approbation à la session
suivante de celle-ci. Le groupe des travailleurs peut souscrire à cette approche. En 1949, le
Conseil d’administration a été chargé de trancher de telles questions par la Conférence; il ne
peut décider aujourd’hui de se défaire de ce mandat.
291. La porte-parole du groupe des employeurs réaffirme que son groupe ne remet pas en cause
le droit de grève. Elle rappelle que, en 2015, employeurs et travailleurs ont publié une
déclaration conjointe proclamant ce droit. Cela étant, la convention no 87 n’autorise pas
l’établissement de règles quant à la portée et aux limites de ce droit, telles qu’elles ont été
constatées par la commission d’experts. Les travaux préparatoires de la convention montrent
clairement que le droit de grève est régi par la législation nationale. Toute tentative d’établir
des règles internationales en la matière doit se faire dans le cadre d’une procédure normative
en bonne et due forme ou d’un processus équivalent et reposer sur un accord tripartite. Il n’est
pas nécessaire d’établir un cadre de procédure pour le renvoi des difficultés relatives à
l’interprétation de la convention no 87 devant la Cour, car il existe dans ce domaine un
précédent qu’il convient de suivre.
292. En ce qui concerne le paragraphe 1 de l’article 37, les employeurs ne peuvent souscrire au
cadre de procédure proposé par le Bureau, dans la mesure où ce cadre ne tient pas compte de
la majorité des vues exprimées lors des consultations informelles. Les employeurs considèrent
que, en l’état, le texte ne peut être adopté. L’oratrice rappelle toutefois que le groupe des
travailleurs a lui-même émis des doutes quant à la nécessité d’établir un cadre de procédure,
et peine à saisir sur quelle base le cadre en question a été présenté et est examiné, s’il n’est
pas nécessaire. Elle ne partage pas l’avis selon lequel la procédure prévue par le paragraphe 2
de l’article 37 est facultative et doit être dissociée du paragraphe 1; il lui semble au contraire
que les deux articles sont liés et doivent être examinés en parallèle.
GB.347/PV(Rev.) 79
293. Notant que, si un tribunal devait être créé le cadre de procédure concernant le paragraphe 1
de l’article 37 devrait être modifié par l’ajout d’une clause relative au règlement des différends,
elle déclare que les employeurs souhaiteraient que toutes les solutions disponibles soient
pleinement discutées.
294. Une discussion à la Conférence n’exclurait pas les solutions prévues aux paragraphes 1 et 2 de
l’article 37. Elle serait plutôt l’occasion d’examiner le droit de grève dans le cadre d’un forum
inclusif et représentatif et permettrait au Conseil d’administration d’être mieux préparé et
conscient des risques encourus, s’il devait finalement décider de saisir la Cour. Seule la
recherche d’un accord tripartite est une pratique viable pour amener les parties à s’entendre
sur la question de l’interprétation. Si plusieurs parties recherchent un consensus sur cette
question, le Conseil d’administration devrait s’employer à forger ce consensus.
295. Une représentante du gouvernement de l’Inde rappelle qu’il ne suffit pas que justice soit
rendue, encore faut-il qu’elle soit perçue comme telle. Elle réaffirme qu’un tribunal interne,
constitué pour connaître d’une question particulière, devrait être la juridiction de premier
ressort. L’Inde accueille favorablement la proposition concernant l’organisation de
consultations tripartites aux fins de l’élaboration d’un projet de règlement pour ce tribunal et
estime, comme le groupe des employeurs, que la saisine de la Cour, sur décision de ce tribunal
interne, devrait passer par la Conférence et non exclusivement par le Conseil d’administration,
ce qui rendrait la procédure plus équitable et plus inclusive. La représentante du
gouvernement de l’Inde note que le cadre de procédure proposé a l’appui d’une majorité des
membres du Conseil d’administration, mais ne fait pas l’objet d’un consensus, ce qui porte
atteinte au principe de justice naturelle. Il devrait être modifié en conséquence.
296. Un représentant du gouvernement de la Chine, s’exprimant au nom d’une importante
majorité d’États membres du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC), s’associe à la
déclaration de la représentante du gouvernement de l’Inde. Une question d’une telle portée
institutionnelle mérite des délibérations approfondies. Il convient également avec le groupe
de l’Afrique que la décision de soumettre une requête à la Cour devrait être prise en dernier
ressort par la Conférence et non par le Conseil d’administration. Le contexte a
considérablement évolué depuis 1949. L’orateur demande des éclaircissements au sujet de la
procédure qui permettrait aujourd’hui de réviser la résolution de 1949 et répète que son
groupe est favorable à l’établissement d’un seuil plus élevé pour la soumission d’une demande
de renvoi au titre du paragraphe 1 de l’article 37. Le paragraphe 2 de ce même article doit être
examiné plus avant; la question ne peut en l’état être tranchée à la présente session.
297. Une représentante du gouvernement de l’Australie réaffirme que son gouvernement
approuve le cadre de procédure proposé et exhorte résolument le Conseil d’administration à
s’engager à prendre position dans le cadre de ses deux prochaines sessions au sujet de la
saisine de la Cour et de la question juridique à soumettre à celle-ci. Le Conseil d’administration
devrait, selon elle, être en mesure de prendre une décision à ce sujet immédiatement.
298. Un représentant du gouvernement du Japon réaffirme que des discussions tripartites
exhaustives débouchant sur un consensus constituent le meilleur moyen de faire avancer ce
dossier.
299. S’exprimant au nom du groupe de l’Asie et du Pacifique (GASPAC), une représentante du
gouvernement des Philippines fait savoir qu’il n’a pas été possible de parvenir à un consensus
au sein du GASPAC.
GB.347/PV(Rev.) 80
300. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare ne toujours pas comprendre pour quelle
raison les employeurs sont opposés à la saisine de la Cour pour obtenir un avis juridique faisant
autorité. Il ne sera de toute évidence pas possible de parvenir à un consensus sur la question,
quel que soit le temps consacré aux discussions et aux consultations. Le Conseiller juridique a
confirmé que le cadre de procédure n’était pas une nécessité. Le Bureau a élaboré ce cadre
pour qu’il serve d’outil, comme suite à la demande expressément formulée par le Conseil
d’administration à sa 344e session (mars 2022), après qu’il fut devenu évident que le dialogue
social ne permettrait jamais de régler la question et qu’il avait été proposé de recourir à
l’article 37. L’intervenante ne se souvient pas que, lors de cette session, une majorité ait
demandé un cadre radicalement différent. Certaines préoccupations ont été prises en
considération et d’autres, non, car elles n’étaient pas partagées par la majorité. Les
consultations informelles ne peuvent en revanche être considérées comme déterminantes, car
rien ne garantit que les participants gouvernementaux y aient été dûment représentés. Les
décisions du Conseil d’administration constituent la voie appropriée, et il est quelque peu
fallacieux de la part du groupe des employeurs de prétendre qu’il est possible de parvenir à un
consensus après onze ans de discussions. Le groupe des travailleurs est un fervent partisan
du dialogue social et du tripartisme, mais estime que ceux-ci ne doivent pas être utilisés pour
faire obstacle au progrès. Le groupe des travailleurs ne s’oppose pas à ce que la procédure soit
validée par la Conférence; cependant, le choix de cette option n’est peut-être pas des plus
judicieux étant donné les difficultés que rencontre actuellement le Conseil d’administration
pour parvenir à un consensus. Le paragraphe 2 de l’article 37 n’a pas été conçu pour le
traitement de questions juridiques aussi complexes que celle qui est en jeu et ne devrait donc
pas être utilisé à cette fin. Opter pour un tribunal au lieu du recours au paragraphe 1 de
l’article 37 serait une solution coûteuse en temps et en efforts, sans être gage de la sécurité
juridique souhaitée.
301. La porte-parole du groupe des employeurs n’a pas le même souvenir des discussions de la
344e session (mars 2022) que son homologue du groupe des travailleurs. Comme en témoigne
le procès-verbal de cette session, elle avait insisté sur le fait que le cadre devrait être élaboré
sur la base d’un dialogue social tripartite. La position des employeurs sur ce point n’a pas varié.
En ce qui concerne la portée, l’étendue et la teneur du droit de grève, l’intervenante rappelle
que les avis de la commission d’experts ne sont pas juridiquement contraignants. Pour
interpréter la convention no 87, l’instrument applicable est la Convention de Vienne de 1969
sur le droit des traités. Les mandants tripartites n’ont jamais mené un débat de fond sur le
droit de grève, alors qu’un tel débat est nécessaire pour parvenir à un consensus.
302. La Présidente déclare que les divergences de vues commandent la tenue d’un vote.
303. La porte-parole du groupe des employeurs indique qu’elle n’est pas favorable à un vote, de
nombreux gouvernements ayant déclaré qu’il n’était pas possible de prendre une décision. Le
Conseil d’administration examine le cadre de procédure pour la première fois, et ses membres
ne devraient pas être contraints de prendre une décision, eu égard à la complexité de la
situation et aux divergences de vues qui se sont fait jour. La décision doit être reportée.
304. La porte-parole du groupe des travailleurs rappelle que l’administration de la procédure est
une prérogative de la Présidente. Le cadre de procédure proposé a fait l’objet de longs débats,
et le groupe des travailleurs a exprimé très clairement sa position: le cadre en question n’est
pas requis en droit, mais serait utile pour l’organisation des travaux futurs. D’un point de vue
juridique, aucun seuil ne doit être atteint pour qu’une discussion sur le renvoi d’une question
puisse avoir lieu au sein du Conseil d’administration, puisqu’il suffit qu’un seul gouvernement
ou un seul groupe en fasse la demande. Il s’agit ici de décider d’adopter ou non le cadre de
procédure.
GB.347/PV(Rev.) 81
305. Une représentante du gouvernement de la Chine déclare qu’il serait regrettable que la
question fasse l’objet d’un vote. Si un tel vote se révélait nécessaire, il devrait se tenir à la fin
de la session afin que les représentants gouvernementaux aient le temps de consulter leurs
autorités nationales, compte tenu de la complexité et de la nature juridique de la question.
306. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, une représentante du gouvernement du Malawi
déclare que son groupe n’est pas prêt à voter sur ce point.
307. La porte-parole du groupe des travailleurs comprend parfaitement que les gouvernements
aient besoin de davantage de temps. Pour regrettable qu’il soit, ce vote est nécessaire, car la
question est débattue depuis onze ans.
308. La porte-parole du groupe des employeurs demande au Bureau de confirmer que le Conseil
d’administration examine le cadre de procédure pour la toute première fois.
309. Une représentante du gouvernement de la France déclare que cette question est inscrite à
l’ordre du jour du Conseil d’administration depuis mars 2022 et que de nombreuses réunions
préparatoires ont eu lieu; aucune délégation gouvernementale ne peut donc prétendre ne pas
avoir connaissance des enjeux. Toutes les données de fait étant disponibles, la représentante
du gouvernement de la France ne voit aucune raison de reporter le vote.
310. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique) rappelle que, à la 344e session
(mars 2022), le Bureau a été prié d’élaborer pour décision des propositions concernant un
cadre de procédure régissant la soumission de questions ou de difficultés relatives à
l’interprétation de conventions internationales du travail à l’appréciation de la Cour
conformément au paragraphe 1 de l’article 37 de la Constitution de l’OIT, ainsi que des
propositions supplémentaires concernant la mise en oeuvre du paragraphe 2 de l’article 37,
pour discussion à la session en cours.
311. La porte-parole du groupe des employeurs rappelle que la première consultation tripartite
n’a, de fait, eu lieu qu’en janvier 2023. La majorité des participants ont alors fortement critiqué
la proposition, laquelle a pourtant été soumise pour examen à la présente session sans avoir
été aucunement modifiée. Il est inacceptable que le Bureau n’ait pas tenu compte des points
soulevés ou des demandes formulées dans le cadre de cette consultation. La résolution
de 1949 doit être modifiée avant l’adoption d’un cadre de procédure. Il va donc falloir
davantage de temps, et aucune décision ne peut être prise à ce stade.
312. Une représentante du gouvernement de l’Algérie demande des précisions au sujet du
terme «majorité», auquel les membres semblent prêter des acceptions différentes.
313. S’exprimant au nom d’une importante majorité d’États membres du GASPAC, un
représentant du gouvernement de la Chine déclare que, sauf tout le respect qui est le sien à
l’égard de la prérogative de la Présidente de décider de la procédure à suivre pour chaque
question de l’ordre du jour, cette question-là ne devrait pas être mise aux voix et mérite une
discussion sérieuse et constructive.
314. La Présidente déclare que les divergences d’opinions rendent le vote nécessaire et qu’il
convient de décider du moment auquel celui-ci aura lieu.
315. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique) précise que seule la Conférence
est habilitée à révoquer ou amender la résolution de 1949, en vertu du «parallélisme des
formes», principe de droit qui veut que tout acte juridique adopté selon une certaine procédure
ne puisse être modifié qu’en suivant la même procédure. La proposition soumise au Conseil
d’administration n’exige aucune modification formelle de la résolution de 1949, le Conseil
d’administration ayant déjà été autorisé par la Conférence à demander des avis consultatifs à
GB.347/PV(Rev.) 82
la Cour. La question est de savoir si, pour des raisons d’inclusivité et eu égard à la portée et à
l’importance institutionnelle que peuvent revêtir certains différends, la décision concernant le
renvoi devrait être prise en dernier ressort par la Conférence. Comme il est rappelé dans le
document (note de bas de page 14), au moment de solliciter l’approbation de la Conférence en
1949, le Bureau avait précisé que le Conseil d’administration devait solliciter l’avis de la
Conférence sur des questions, notamment d’ordre normatif, relevant au premier chef de la
responsabilité de cette dernière. En ce qui concerne l’emploi du terme «majorité» dans le cadre
des discussions du Conseil d’administration, le Conseiller juridique explique qu’il est fait
référence non pas à un nombre précis, calculé par rapport au nombre de membres, qu’ils
soient titulaires ou suppléants, ou à la composition globale des groupes régionaux, mais à la
perception que l’intervenant peut avoir lui-même de l’opinion dominante sur un sujet donné,
à tel ou tel stade de la discussion.
316. La porte-parole du groupe des employeurs relève qu’il est très inhabituel qu’un président
impose un vote lorsque de nombreux gouvernements sollicitent davantage de temps. Elle
demande que la décision soit reportée dans l’attente de nouvelles consultations tripartites,
l’objectif étant de parvenir à un consensus et de prendre le temps d’examiner toutes les
implications que le cadre de procédure aura pour les États Membres. Il serait extrêmement
fâcheux que le Conseil d’administration prenne une décision contre la volonté de nombreux
membres.
317. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare que, dans la mesure où les avis diffèrent
sur toutes les questions, y compris celle de savoir si la problématique à l’examen peut en l’état
faire l’objet d’une discussion et d’une décision, la seule façon d’avancer est de procéder à un
vote. Aucune ligne de conduite ne recueille une majorité claire. Les représentants auront
largement le temps de consulter leurs autorités nationales, comme pour les autres questions
de l’ordre du jour, et le vote devrait avoir lieu avant la dernière séance de la session en cours.
318. Un représentant du gouvernement du Cameroun suggère que le Bureau organise de
nouvelles consultations pour déterminer si un vote est nécessaire. Certains membres ne sont
pas prêts à procéder à un vote, et les décisions ne devraient pas être précipitées.
319. Une représentante du gouvernement de l’Inde propose de modifier le paragraphe 10 du
cadre de procédure de manière à ce que le Conseil d’administration soit tenu de soumettre à
la Conférence sa décision sur le renvoi d’une question ou d’une difficulté d’interprétation
lorsque ladite décision a été adoptée par un vote à la majorité simple, et que cette soumission
soit facultative lorsque la décision a été prise par consensus.
320. Une représentante du gouvernement de l’Indonésie déclare que son gouvernement n’a pas
eu suffisamment de temps pour examiner la question et n’est pas prêt à prendre une décision.
D’autres voies susceptibles de déboucher sur un consensus devraient être explorées, comme
celle proposée par l’Inde.
321. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la Suède déclare que l’UE et ses États membres soutiennent la proposition de la Présidente
de procéder à un vote.
322. Un représentant du gouvernement du Nigéria suggère que le Bureau soumette des
propositions sur la voie à suivre. Le gouvernement du Nigéria n’est pas prêt à voter sur une
question dont la complexité et la technicité nécessitent des discussions et des négociations
approfondies.
323. La porte-parole du groupe des travailleurs estime qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la
discussion et que, du point de vue juridique, la situation est parfaitement claire.
GB.347/PV(Rev.) 83
324. S’exprimant au nom du GRULAC, une représentante du gouvernement de la Colombie
déclare que son groupe est pleinement favorable à la proposition de la Présidente de procéder
à un vote.
325. La Présidente annonce qu’un vote aura lieu sur le projet de décision et les amendements
proposés par les employeurs et les travailleurs lorsque les représentants gouvernementaux
auront pu consulter leurs instances nationales respectives.
326. S’exprimant au nom de l’UE et de ses États membres, une représentante du gouvernement
de la Suède déclare que sa délégation a engagé des consultations avec divers gouvernements
ainsi qu’avec les groupes des employeurs et des travailleurs. Si son groupe considère que le
cadre de procédure proposé par le Bureau est pertinent, il est toutefois évident que de
nombreuses questions subsistent quant à son contenu et aux délais. Certains membres ont le
sentiment d’être acculés à voter. L’UE et ses États membres font grand cas du caractère
tripartite du Conseil d’administration et du fait que, jusqu’à présent, celui-ci soit parvenu à
prendre l’essentiel de ses décisions par consensus. Le vote est une solution de dernier recours
à sa disposition, mais ne doit pas être utilisé trop souvent, en particulier lorsqu’il s’agit de
questions si fondamentales, car cela le rendrait contre-productif sur le long terme. Partant,
l’UE et ses États membres, soucieux de tenir compte des préoccupations de toutes les parties
et de parvenir à un règlement consensuel de la question, proposent de clore le débat et de le
reporter à une prochaine session.
327. Le représentant du Directeur général (Conseiller juridique), se référant au paragraphe 5.7.6
du Règlement du Conseil d’administration, précise que les motions d’ordre n’ont pas à être
remises par écrit à la personne présidant la séance ni distribuées. Au nombre de ces motions
figure celle tendant à ajourner la discussion d’une question particulière. Le Conseiller juridique
croit comprendre que la présente motion tend à ajourner la discussion sur l’intégralité de la
question de l’ordre du jour qui fait l’objet du document INS/5, c’est-à-dire aussi bien sur le cadre
de procédure concernant le paragraphe 1 de l’article 37 que sur les propositions
supplémentaires portant sur la mise en oeuvre du paragraphe 2 de l’article 37. Il appartient
donc à la Présidente d’ouvrir une discussion afin qu’une décision puisse être prise au sujet de
la motion.
328. La porte-parole du groupe des travailleurs déclare qu’elle a également consulté d’autres
membres et qu’il lui semble que les préoccupations portent davantage sur le cadre de
procédure que sur la question du droit de grève. Elle souhaite examiner plus en détail la voie
proposée, mais aurait besoin de poursuivre les consultations avec son groupe.
329. La porte-parole du groupe des employeurs déclare que son groupe a précisé d’emblée que
la question en était à un stade trop précoce pour faire l’objet d’une décision. Il s’agit de la toute
première fois que le Conseil d’administration examine le cadre de procédure et, dans une
institution championne du dialogue, les mandants doivent se voir accorder suffisamment de
temps pour forger un consensus. Le fait de mettre la question aux voix placerait de nombreux
gouvernements dans une situation difficile, étant donné que les questions juridiques
complexes qui sont en jeu exigent le concours de leurs autorités nationales. L’intervenante
soutient la motion tendant à reporter l’examen de la question dans son intégralité, car un tel
report permettrait de trouver une solution fondée sur le consensus. Il s’agit là d’une décision
politique, et non juridique, et la marche à suivre doit être coordonnée par les décideurs et les
plus hauts responsables de l’OIT.
330. S’exprimant au nom du groupe de l’Afrique, une représentante du gouvernement du Malawi
déclare que son groupe veut croire que l’OIT reste l’institution championne du dialogue social
et exhorte en conséquence le Conseil d’administration à ne ménager aucun effort pour faire
GB.347/PV(Rev.) 84
naître un consensus. Soumettre des questions cruciales à un vote serait contraire à la nature
même de l’Organisation. Le consensus exige des consultations. Le cadre de procédure n’a été
présenté que récemment, des consultations tripartites s’étant tenues pour la première fois en
janvier 2023 avec une suite en février 2023, et c’est la première fois qu’il est examiné par le
Conseil d’administration. L’oratrice espère que, si les mandants disposent de davantage de
temps pour échanger leurs vues, un consensus pourra être atteint la prochaine fois que le
Conseil d’administration examinera le cadre en question. Le groupe de l’Afrique appuie la
motion présentée par l’UE et ses États membres.
331. Une représentante du gouvernement du Mexique déclare que sa délégation soutient sans
réserve la décision de la Présidente de procéder à un vote. Il est important de mettre en oeuvre
le paragraphe 1 de l’article 37 le plus rapidement possible. Après avoir écouté les discussions
et consulté d’autres groupes et délégations, l’intervenante a le sentiment que le Conseil
d’administration n’est pas loin de parvenir à un accord sur le cadre de procédure. La
représentante du gouvernement du Mexique se déclare toutefois prête à soutenir la motion,
afin de permettre la poursuite des discussions et de privilégier le dialogue social.
332. Une représentante du gouvernement de l’Inde souscrit pleinement à la motion. Cela dit,
lorsqu’il reprendra l’examen de cette question, le Conseil d’administration devra réexaminer le
cadre de procédure qui, en l’état, contient certains éléments ne respectant pas strictement les
principes de la justice naturelle. Il conviendrait donc de le reformuler pour le rendre plus juste,
plus transparent, plus inclusif et plus représentatif.
333. Un représentant du gouvernement du Pakistan préconise une approche fondée sur le
consensus pour les questions d’une telle importance; il importe de ce fait que la procédure de
saisine de la Cour soit fondée sur l’accord de toutes les parties. L’orateur prend bonne note
des préoccupations exprimées par le groupe des travailleurs, relève qu’il est nécessaire de
poursuivre la discussion et exhorte toutes les parties concernées à rechercher des points de
convergence, afin de ménager de manière plus efficace et constructive les droits et besoins de
chacun.
334. S’exprimant au nom d’une majorité importante des États membres du GASPAC, un
représentant du gouvernement de la Chine accueille favorablement la motion proposée par
l’UE et ses États membres, qui permettrait de renouer avec l’esprit du dialogue social et de la
coopération tripartite. Il fait observer que de nombreux votes ont été tenus au cours de la
présente session et qu’un vote sur une question d’une telle portée institutionnelle serait
préjudiciable à l’esprit du dialogue social.
335. Une représentante du gouvernement de la Chine déclare que son gouvernement soutient
la motion et fait observer que la recherche d’un consensus parmi les mandants constitue l’un
des principaux attributs et atouts de l’OIT. Le gouvernement de la Chine apprécie la souplesse
et l’esprit de compromis dont ont fait preuve tous les membres et convient qu’un sujet d’une
telle importance mérite plus ample discussion.
336. Un représentant du gouvernement du Guatemala déclare que, faute de consensus, il
soutient la motion, qui montre que le dialogue social n’est pas épuisé. Il faut aller de l’avant en
suivant une approche consensuelle.
337. Une représentante du gouvernement de la Colombie se déclare favorable à la motion
présentée par l’UE et ses États membres et souligne à quel point il est important que les
décisions soient prises par consensus.
GB.347/PV(Rev.) 85
338. Un représentant du gouvernement de l’Indonésie déclare que les mandants ont besoin de
davantage de temps pour élaborer un cadre de procédure susceptible d’être accepté par tous.
Il apporte donc lui aussi son soutien à la motion qui a été présentée.
339. Une représentante du gouvernement des États-Unis souscrit également à la motion. Le
cadre de procédure continue manifestement de susciter d’importantes préoccupations, son
gouvernement n’étant d’ailleurs même pas certain qu’il soit nécessaire.
340. La porte-parole du groupe des travailleurs reconnaît que la motion présentée par l’UE et ses
États membres bénéficie d’un large soutien. Avant de l’approuver, elle doit consulter son groupe.
341. La porte-parole du groupe des employeurs rappelle que, au début de la discussion, son groupe
a présenté une version amendée du projet de décision demandant le report de la discussion à
une future session du Conseil d’administration. La discussion ne pouvant avoir lieu lors de la
348e session (juin 2023), qui est trop courte pour permettre la tenue d’une discussion de fond
aussi ardue, elle devrait être reportée à la 349e session (octobre-novembre 2023). Cette
discussion doit être précédée de consultations sérieuses sur le fond, sur la base desquelles le
Bureau devrait présenter une version révisée du cadre de procédure.
342. La porte-parole du groupe des travailleurs rappelle que le cadre de procédure n’est pas
juridiquement contraignant et que, s’il n’est pas absolument nécessaire, il n’est pas inutile pour
autant. L’élaboration d’un tel outil, qui est censé permettre le traitement des conflits
d’interprétation profonds et persistants qui pourraient se faire jour à l’avenir, nécessite
apparemment une discussion plus approfondie. La porte-parole du groupe des travailleurs est
disposée à accepter la motion de l’UE et de ses États membres tendant à ce que le débat soit
ajourné et reporté à une future session.
Décision
343. Conformément au paragraphe 5.7.6 du Règlement, le Conseil d’administration décide de
remettre à une future session l’examen de la question qui fait l’objet du document
GB.347/INS/5.
(GB.347/INS/5, paragraphe 62, tel que modifié par le Conseil d’administration)
344. La porte-parole du groupe des travailleurs, prenant note des applaudissements, exprime
l’espoir que le Conseil d’administration sera bientôt en mesure d’applaudir également le
règlement d’un différend persistant, ce qui, de l’avis de son groupe, ne sera possible qu’en
ayant recours à la Cour. Elle admet qu’il pourrait être utile de disposer d’un cadre de procédure
non contraignant qui puisse servir d’outil dans les débats relatifs aux conflits d’interprétation,
et que toutes les parties devraient savoir précisément comment l’utiliser.
345. Il est déjà acquis que tout Membre de l’Organisation peut soulever une question d’interprétation
et prier le Directeur général de soumettre cette question au Conseil d’administration en vue d’un
éventuel renvoi devant la Cour. Une question d’interprétation particulière attend depuis trop
longtemps d’être résolue, et le groupe des travailleurs considère que l’attente a assez duré. De
fait, il envisage de demander au Directeur général dans les mois à venir que la question soit
soumise au Conseil d’administration pour examen à sa 349e session et espère recevoir le soutien
des gouvernements à cet égard. Cette question particulière doit faire l’objet d’un débat dès que
possible.
346. L’intervenante se fait l’écho des préoccupations déjà exprimées par d’autres membres quant
au fait que le Conseil d’administration ne semble plus pouvoir décider sans voter dès lors qu’il
s’agit d’une question importante, même en présence d’une majorité claire. Aussi invite-t-elle
GB.347/PV(Rev.) 86
toutes les parties à se demander si l’OIT est toujours une institution efficace, efficiente,
équitable et si elle fonctionne de façon satisfaisante. La porte-parole du groupe des travailleurs
rappelle enfin que son groupe est déterminé à rechercher un consensus et à progresser dans
le règlement des questions en suspens.
6. Rapport final du Groupe de travail tripartite chargé de la question
de la pleine participation, démocratique et sur un pied d’égalité,
à la gouvernance tripartite de l’OIT
(GB.347/INS/6)
347. Le Conseil d’administration est saisi d’une version amendée du projet de décision, proposée
par le groupe de l’Afrique et diffusée par le Bureau. Cette version amendée est libellée comme
suit:
21. Le Conseil d’administration:
a) prend note du rapport final du Groupe de travail tripartite chargé de la question de
la pleine participation, démocratique et sur un pied d’égalité, à la gouvernance
tripartite de l’OIT;
b) se félicite des progrès importants qui ont été réalisés depuis la création du groupe
de travail concernant la ratification de l’Instrument d’amendement à la Constitution
de l’Organisation internationale du Travail, 1986;
c) exhorte les huit États Membres ayant l’importance industrielle la plus considérable
qui n’ont pas encore ratifié l’Instrument d’amendement de 1986 à considérer
favorablement sa ratification dans les meilleurs délais;
d) demande au Directeur général de prendre toutes les initiatives nécessaires aux fins
de l’entrée en vigueur de l’Instrument d’amendement de 1986, et de le tenir informé
à intervalles réguliers et de lui fournir à cet égard une feuille de route qui sera
réexaminée tous les deux ans;
e) décide que cette question sera inscrite d’office à l’ordre du jour de ses sessions de
mars et de novembre jusqu’à ce que l’Instrument d’amendement de 1986 entre en
vigueur.
348. La coprésidente du groupe de travail tripartite souligne que la contribution pleine et entière
des mandants ne pourra être assurée que s’ils participent pleinement, sur un pied d’égalité et
démocratiquement à la gouvernance tripartite de l’Organisation. La pandémie de COVID-19 et
les restrictions en matière de voyage ont rendu la tâche déjà ardue du groupe de travail encore
plus complexe mais, grâce à l’esprit de collaboration, au soutien et à la coopération des
partenaires sociaux et des États Membres, les réunions en ligne ont été constructives. Le
processus lancé afin d’atteindre l’objectif de la ratification universelle de l’Instrument
d’amendement à la Constitution de l’Organisation internationale du Travail, 1986 (ci-après
«l’Instrument d’amendement de 1986»), avance lentement. Le monde du travail a
considérablement évolué au cours des trois décennies précédentes et la nécessité d’instaurer
une gouvernance démocratique dans l’Organisation se fait sentir plus que jamais.
349. Le coprésident du groupe de travail tripartite dit que les activités du groupe de travail
tripartite ont suscité un regain d’intérêt pour l’Instrument d’amendement de 1986 et mis en
évidence l’importance fondamentale que revêt l’Organisation pour les États Membres. Alors
qu’il suffirait que trois Membres ayant l’importance industrielle la plus considérable ratifient
l’Instrument d’amendement de 1986 pour que ce texte puisse entrer en vigueur, aucun des
Membres concernés ne s’est directement engagé à le ratifier lors des réunions bilatérales que
le groupe de travail a organisées avec chacun d’entre eux. Toutefois, le groupe de travail a bon
Document no 42
CPJI, Désignation du délégué ouvrier néerlandais à la
troisième session de la Conférence internationale du
Travail, avis consultatif no 1, 31 juillet 1922, pp. 8, 10
COUR PERMANENTE DE JUSTICE
INTERNATIONALE.
1922,
le 31 Juillet
Dossier F. a.
PREMIÈRE SESSION (ORDINAIRE). RBle. 1 : 2.
PRÉSENTS:
M. LODER, Président,
M. WEISS, Vice-président,
Lord FINLAY,
MM. NYHOLM,
MOORE,
DE BUSTAMANTE,
ALTAMIRA,
ODA,
ANZILOTTI, juges titulaires ;
MM. BEICHMANN,
NEGULESCO, juges suppléants.
AVIS CONSULTATIF No. 1.
Par sa résolution en date du 12 mai 1922, le.~okseild e la
Société des Nations a invité la Cour, conformément à l'article
14 du Pacte, à donner un avis consultatif sur la question de
savoir :
,,Si le +délégué ouvrier des Pays-Bas à la troisième session
de la Conférence internationale d~ Travail a été désigné en
conformité des dispositions du paragraphe 3 de l'article 389
du Traité de Versailles."
La requête pour avis consultatif sur cette question a été
transmise à la Cour par une lettre du Secrétaire général de
la Société des Nations, dûment autorisé à cet effet par le Conseil.
En exécution de l'article 73 du Règlement de la Cour,
la requête a été notifiée aux Membres de la Société des
Nations par l'intermédiaire de son Secrétaire général, aux
Etats mentionnés à l'Annexe au Pacte et aux organisations
suivantes :
L'Association internationale pour la protection légale
des travailleurs ;
la Fédération internationale des syndicats ouvriers
chrétiens ;
la Fédération syndicale internationale.
La requête a été, en outre, commupiquée à l'Allemagne
et à la Hongrie.
Enfin, la Cour a décidé d'entendre, au sujet de cette
question, en séance publique, les représentants de tout
gouvernement et de toute organisation internationale qui
lui notifieraient, dans un délai déterminé, le désir d'être
ainsi entendus. Cette décision fut portée à la connaissance
de tous les Membres, Etats et organisations mentionnés
ci-dessus et du Bureau international du Travail, à Genève
Au moment de formuler son avis, la Cour se trouvait
ainsi en présence des documents suivants :
I) Lettre du Directeur du Bureau international du
Tfavail au Secrétaire ggnéral, du 17 mars 1922, avec
les annekes à cette lettre ;
2) mémoire du Gouvernement néerlandais du 14
juin 1922 ;
13) mémoire de la Fédération professionnelle généralè
néerlalidaise ( Algemeen Nederlandsch Vakverbond) ;
4) Télégramme du Gouvernement suédois.
Elle a, de plus, entendu des exposés oraux:
1) de la part du Gouvernement britannique ;
2) de la part du Gouvernement néerlandais ;
3) de la part de la Fédération syndicale internationale
;
4) de la part de la Confédération internationale des
syndicats chrétiens ;
5) de la part du Bureau international du Travail.
De ces informations résultent les faits suivants :
' En vue de réaliser l'accord prescrit par l'article 389,
alinéa 3, du Traité de Versailles, le Ministre du Travail des
Pays-Bas a provoqué, au sujet de la nomination du délégué
Document no 43
CPJI, Compétence de l’OIT pour la réglementation
internationale des conditions du travail des personnes
employées dans l’agriculture, avis consultatif no 2, 12 août
1922, pp. 8, 10
COUR PERMANENTE DE JUSTICE
INTERNATIONALE
1922.
. -- Le 12 aoüt.
Dossier F. a. II.
PREMIÈRE SESSION (ORDINAIRE)
R61e 1 : 1.
PRÉSENTS
M. I,ODER, Président,
M. W-EISS, Vice-président,
Lord FINLAY,
MM. NYHOLM,
MOORE,
DE BUSTAMANTE,
ALTAMIRA,
ODA,
ANZILOTTI, juges titulaires,
M. NEGULESCO, juge suppléant.
AVIS CONSULTATIF No. 2
Par sa résolution en date du 12 mai 1922, le Conseil de la
Société des Nations a invité la Cour, conformément à l'article
14 du Pacte, à donner un avis consultatif sur la question
suivante :
« La compétence de L'Organisation internationale du Travail
s'étend-elle à la réglementation des conditions du travail des personnes
employées dans l'agriculture? 1)
En vertu des pouvoirs que lui conférait cette résolution, J
le Secrétaire général de la Société des Nations, par lettre datée
de Genève le 22 mai 1922, transmettait à la Cour la requête du
Conseil. A cette lettre était annexée une copie certifiée conforme
de la résolution ainsi qu'un mémoire préparé par le Bureau
international du Travail, lequel avait été invité par le Conseil,
dans la même résolution, à fournir à la Cour toute l'assistance
dont celle-ci pourrait avoir besoin pour l'examen dela question
à elle soumise.
En exécution de l'article 73 du Règlement de la Cour, la
10
requete a ete notifiee aux Membres de la Societe des Nations
par l'intermediaire de son Secretaire general, aux Etats
mentionnes a l'annexe au Pacte, et aux organisations suivantes:
La Confederation internationale des Syndicats agricoles
;
la Ligue
nationaler
schaften) ;
internationale des Societes agricoles (InterBund
der Landwirtschaftlichen Genossenla
Commission internationale d'Agriculture;
la Federation internationale des Syndicats chretiens
des Travailleurs de la Terre;
la Federation in terna tionale des T ra vailleurs de la Terre;
l'Institut international d'Agriculture a Rome;
la Federation syndicale internationa.le ;
l' Association internationale pour la protection legale
des Travailleurs.
La requete a ete en outre communiquee a l' Allemagne et a
la Hongrie.
Enfin, la Cour a decide d'entendre, en seance publique, les
representants de tout gouvernement et de toute organisation
internationale qui lui notifieraient, dans un delai determine,
le desir d'etre ainsi entendus. Cette decision fut portee a
la connaissance de tous les Membres, Etats et organisations
mentionnes ci-dessus et du Bureau international du Travail,
a Geneve.
Au moment de formuler son avis, la Cour se trouvait en
presence des documents suivants :
1) Copie certifiee conforme d'une lettre, sans date,
du Directeur du Bureau international du Travail au
Secretaire general de la Societe des Nations, avec une
note annexee ; et note complementaire du 20 juillet
1922;
2) copie certifiee conforme d'une lettre, en date du
13 juin 1922, du Ministre des Affaires etrangeres du Gouvernement
de la Republique franc;aise au Secretaire general
de la Societe des Nations, avec un memoire de ce Gouvernement
et un memoire annexe de la Societe des
Agriculteurs de France ; et note complementaire, du
Document no 44
CPJI, Compétence de l’OIT pour réglementer
accessoirement le travail personnel du patron, avis
consultatif no 13, 23 juillet 1926, p. 8
PUBLICATIONS DE LA COUR PERMANENTE DE JUSTICE
INTERNATIONALE
S ~ R I EB - P 73
Le 23 juillet 1926
RECUEIL DES AVIS CON SULTATIFS
COMPETENCE DE L'ORGANISATION INTERNATIONALE
DU TRAVAIL POUR RÉGLEMENTER ACCESSOIREMENT
LE TRAVAIL PERSONNEL DU PATRON
PUBLICATIONS OF THE PERMANENT COURT
OF INTERNATIONAL JUSTICE.
SERIES B. - NO. 73
July 23rd, 1926
COLLECTION OF ADVISORY OPINIONS
COMPETENCE OF THE INTERNATIONAL LABOUR
ORGANIZATION TO REGULATE, INCIDENTALLU,
THE PERSONAL WORK OF THE EMPLOYER
Socikté d'Editions A. W. Sijthoirs
A. W. Sijthoff Publishing Company
Leyde Leyden
8 AVIS CONSULTATIF No 13
« Le Secrétaire général se tiendra à la disposition de la Cour
pour donner toute l'aide nécessaire à l'examen de l'affaire et
prendra, le cas échéant, des dispositions pour être représenté
devant la Cour. ))
Conformément à l'article 73 du Règlement, la Requête a été
notifiée aux Membres de la Société des Nations, ainsi qu'aux États
mentionnés dans l'annexe au Pacte.
En vertu du même article, la Requête a été notifiée également à
l'Organisation internationale du Travail et aux organisations
internationales, désignées ci-après, qui ont été considérées comme
étant susceptibles de fournir des renseignements sur la question
soumise à la Cour :
Organisation internationale des employeurs industriels ;
Fédération syndicale internationale ;
Confédération internationale des syndicats chrétiens.
11 a, en outre, été porté à la connaissance des quatre organisations
auxquelles avait été notifiée la Requête, que, si elles désiraient
fournir des renseignements sur la question soumise à la Cour, elles
devraient déposer une demande à cet effet ; en même temps, un
délai a été fixé pour la présentation éventuelle de mémoires écrits.
Toutes les organisations intéressées, à l'exception de la Confédération
internationale des syndicats chrétiens, ont fait parvenir des
mémoires à la Cour.
Sur la demande des organisations intéressées, leurs représentants
ont fourni des renseignements au cours des audiences tenues respectivement
les 28 et 29 juin 1926. Ces représentants étaient :
1) pour l'Organisation internationale du Travail, M. Albert
Thomas, Directeur du Bureau international du Travail ;
2) pour l'Organisation internationale des employeurs industriels,
Me Borel, de Genève, et Me Lecocq, de Bruxelles, Secrétaire
général de l'Organisation ;
3) pour la Fédération syndicale internationale, Me Mendels,
d'Amsterdam ;
4) pour la Confédération internationale des syndicats chrétiens,
M. Serrarens, d'Utrecht, Secrétaire général de la Confédération.
Enfin, le Bureau international du Travail a soumis à la Cour,
conformément à la Résolution du Conseil de la Société des Nations,
une collection de documents visant la manière dont avait été traitée,
Document no 45
CPJI, Interprétation de la convention de 1919 concernant
le travail de nuit des femmes, avis consultatif,
15 novembre 1932, pp. 367-368
COUR PERMANENTE DE JUSTICE INTERNATIONALE
SERIE AIB
ARRÊTS, ORDONNANCES ET AVIS CONSULTATIFS
FASCICULE No 50
INTERPRÉTATION DE LA CONVENTION
DE 1 9 1 9 CONCERNANT LE TRAVAIL
DE NUIT DES FEMMES
AVIS CONSULTATlF DU 15 NOVEMBRE 1932
XX VIme SESSION
XXVIth SESSION
ADVISORY OPINION OF NOVEMBER 15th, 1932
PERMANENT COURT OF INTERNATIONAL JUSTICE
JUDGMENTS, ORDERS AND ADVISORY OPINIONS
.-
FASCICULE No. 50
INTERPRETATION OF THE CONVENTION
OF 1 9 1 9 CONCERNING EMPLOYMENT
OF WOMEN DURINC THE NICHT
LEYDE II LEYDEN
SOCIÉTÉ D'ÉDITIONS A. W. SIJTHOFF'S
A. W. SIJTHOFF PUBLISHING COMPANY
367 TRAVAIL DE NUIT DES FEMMES
du g mai 1932 ; plus tard, l'extrait pertinent des procèsverbaux
du Conseil fut également envoyé à la Cour.
Par lettre datée du 6 juin 1932, le Secrétaire général a, en
outre, fait parvenir au Greffier un dossier relatif à la demande
d'avis consultatif et établi par les soins du Bureau international
du Travail l. Ce dossier a été dûment mis à la disposition
des membres de la Cour.
Conformément à l'article 73, no 1, alinéa 1, du Règlement
de la Cour, la requête a été communiquée aux Membres de la
Société des Nations (par l'entremise du Secrétaire général
de la Société), ainsi qu'aux autres États admis à ester devant
la Cour. Le Greffier, en outre, par une communication spéciale
et directe du 21 mai 1932, a attiré l'attention des gouvernements
des États ayant ratifié la Convention de 1919
concernant le travail de nuit des femmes sur les dispositions
de I'article 73, no 1, alinéa 3, du Règlement. A la suite de
cette communication, le Gouvernement du Royaume-Uni de
la Grande-Bretagne et de l'Irlande du Nord a fait savoir
au Greffier, par lettre du II juin 1932, que ce Gouvernement
était désireux de se faire représenter devant la Cour aux fins
de l'affaire; la Cour décida de faire droit à cette demande.
D'autre part, par lettres du 27 mai 1932, le Greffier a
adressé à quatre organisations internationales, jugées par le
Président - la Cour ne siégeant pas - comme susceptibles
de fournir à celle-ci des renseignements sur la question à
elle soumise pour avis consultatif, la communication spéciale
et directe prévue par l'article 73, no 1, alinéa 2, du Règlement
; de ces organisations - savoir, l'organisation internationale
du Travail, la Fédération syndicale internationale,
la Confédération internationale des Syndicats chrétiens et
l'organisation internationale des Employeurs industriels -,
les trois premières ont déclaré désirer présenter à la Cour
des exposés écrits et oraux.
Par une ordonnance rendue le 27 mai 1932, le Président
de la Cour - celle-ci ne siégeant pas - a fixé au ~earoû t 1932
la date à laquelle des exposés écrits relatifs à la question
Voir bordereau A l'annexe
6
TRAVAIL DE NUIT DES FEMMES
pouvaient etre deposes au Greffe par les Ihats et organisations
interesses, et au 12 septembre 1932 la date a laquelle de
seconds exposes pourraient etre presentes, si, le moment venu,
le depot en etait admis.
Le 4 aout 1932, la Cour a decide, d'une part, d'admettre
le depot, dans le delai ainsi fixe, de seconds exposes ecrits
par les Etats ou organisations qui en avaient deja presente
et, d'autre part, que les autres Etats ou organisations auxquelles
la requete avait ete notifiee pouvaient, le cas echeant,
etre admis a soumettre un expose dans le meme delai. En
vertu de cette decision, le President de la Cour - celle-ci
ne siegeant pas - a fait droit, par ordonnance du 6 septembre
1932, a une demande du Gouvernement allemand tendant
a etre admis a presenter un expose ecrit ; par la meme
ordonnance, le President a etendu au 20 septembre 1932 le
delai expirant le 12 du meme mois.
Des exposes furent deposes au nom des Gouvernements
allemand et britannique, ainsi que de la part de !'Organisation
internationale du Travail, de la Federation syndicale
internationale et de la Confederation internationale des
Syndicats chretiens.
La presentation des exposes de la Confederation internationale
des Syndicats chretiens, ainsi que du Gouvernement
allemand, ayant ete tardive, le President, en vertu des pouvoirs
que lui confere !'article 33 du Reglement, a neanmoins
decide de les accepter.
Les Gouvernements et organisations mentionnes ci-dessus
se firent egalement representer devant la Cour, qui a entendu,
au cours des audiences publiques tenues le 14 octobre 1932
sur l'affaire, les renseignements fournis verbalement par
M. A. P. Fachiri, conseil, au nom du Gouvernement du
Royaume-Uni, par le Dr J. Feig, agent-adjoint, au nom du Gouvernement
allemand, par M. Phelan, chef de la Division
diplomatique du Bureau international du Travail, au nom
de }'Organisation internationale du Travail, par M. Serrarens au
nom de la Confederation internationale des Syndicats chretiens,
ainsi que par M. Schevenels au nom de la Federation
syndicale internationale.
7
Document no 46
CPJI, Révision du règlement de la Cour, Actes
et documents relatifs à l’organisation de la Cour,
série D, addendum au no 2, pp. 223-228
VINGT-:--EUVIEME SEANCE (28 JUILLET 1926)
a cet amendement, il y a un sous-amendement de
M. Anzilotti.
Passant ensuite a l'examen de l'article 73, le President
attire l'attention de la Cour sur le nouveau texte
etabli par le Greffier (p. 87 du Document Distr. 794) 1.
M. DE BUSTAMANTE declare retirer sa proposition
relative a !'article 73 2.
M. ALTAMIRA demande s'il est bien entendu que le
mot « requete » sera remplace par « demande » dans les
articles 72 et 73.
Le PRESIDENT repond affirmativement.
M. PESSOA propose de supprimer les mots : (< par
sutxAse clμ Secretaire general de la Societe des
Nations », dans la pensee que cette notification peut
etre faite directement par le Greffier.
Le GREFFIER rappelle que, pour la communication
tout a fait analogue des requetes introductives
d'instance, l'article 40 du Statut prescrit de passer
par l'intermediaire du Secretaire general a l'egard des
Membres de la Societe. Pour les Etats qui ne sont pas
Membres de la Societe des Nations, Jes requetes, dans
les deux cas, leur sont communiquees directement. II
ajoute qu'il existe egalement pour cela des raisons d'ordre
pratique: ii est plus simple d'expedier les cinquantesix
communications a Geneve aux fins de transmission,
que de les envoyer a chacun des Etats interesses.
M. PEssoA n'insiste pas, si le procede actuel offre
des avantages pratiques.
Le PRESIDENT aborde la proposition de M. Anzilotti,
relative a la definition de la not ion d'cc organisations
internationales 1>.
M. ANZILOTTI pense qu'il peut y avoir des inconvenients
a admettre une organisation internationale quelconque
a venir devant la Cour. Lorsqu'il s'agit d'un
organisme non officiel, Jes personnes qui parlent en son
nom n'encourent en realite aucune responsabilite. Par
suite, ii pourrait arriver qu'elles missent Ja Cour dans
une situation difficile.
M. Anzilotti reconnait que, d'apres la proposition du
Greffier, cc danger n'existerait guere, puisqu'il s'agirait
d'une initiative a prendre par la Cour elle-meme.
Neanmoins, ii avait cru que !'article 50 du Statut
suffisait pour permettre a la Cour de s'adresser a des
organisations privees pouvant fournir des renseignements
utiles. Mais il ne fait pas de proposition precise,
car tout ira bien, sans doute, si la Cour conserve !'initiative:
elle ne manquera pas, en effet, de s'adresser exclusivement
a des organisations internationales offrant
toutes les garanties necessaires.
Le PRESIDENT a toujours interprete !'expression
<< organisations internationales » comme equivalente
a cc organisations officielles n, par exemple le Bureau
international du Travail. Mais, a l'heure actuelle, on a
1 Voir p. 315.
I » pp. 262-263.
224
TWENTY-XIXTH MEETING (JULY 28th, 1926)
form. To that amendment there was a further amendment
by M. Anzilotti.
Proceeding, next, to consider Article 73, the President
called attention to the new draft prepared by the
Registrar (p. 87 of Document Distr. 794) 1.
M. DE BUSTAMANTE said that he withdrew his proposal
in regard to Article 73 2.
M. ALTAMIRA asked whether it were clearly understood
that the word reqi,tte should be altered to demande
in Articles 72 and 73.
The PRESIDENT replied in the affirmative.
M. PESSOA proposed to delete the words "through the
Secretary-General of the League of Nations" as he held
that that notice might be given directly by the Registrar.
The REGISTRAR recalled that in the entirely analagous
case of notice of applications instituting proceedings,
Article 40 of the Statute laid down that notice was to be
given through the Secretary-General, in so far as
Members of the League were concerned. As regarded
States which were not Members of the League, the
applications were in both cases communicated to them
directly. He added that there were also reasons of a
practical nature ; it was easier to send the fifty-six
notices to Geneva for transmission, than to send them
to each of the States concerned.
M. PESSOA did not insist if the present procedu1'e- had
practical advantages.
The PRESIDENT then approached M. A!lzi19W's
proposal regarding the definition of the conceptfon
of "international organizations".
M. ANZILOTTI thought that there might be some
drawbacks to allowing any kind of international
organization to come before the Court. In the ,case
of an unofficial organization, the p~rsons who spoke
on its behalf in reality incurred no responsibility.
Consequently they might sometimes place the Court
in a difficult position.
M. Anzilotti recognized that, according to the
Registrar's proposal, that danger would hardly exist,
since the initiative would rest with the Court itself.
Nevertheless, he had thought that Article 50 of the
Statute sufficed to enable the Court to apply to private
organizations capable of supplying useful information.
He did not, however, make a definite proposal, because
no doubt everything would work out satisfactorily if
the Court retained the initiative, for it would
undoubtedly be careful only to approach international
organizations offering all the necessary guarantees.
The PRESIDENT had always construed the expression
"international organizations" as tantamount to
"official organizations", for instance, the International
Labour Office. But now a species of precedent had been
1 Seep. 31 5. .
~ " pp. 262- 2'63.
VINGT-NEUVIEME SEANCE (28 JUILLET 1926)
cree une sorte de precedent, en admettant egalement
les grandes organisations industrielles, ouvrieres ou
patronales, et il serait bien difficile de les ecarter maintenant,
en raison de leur tres grande importance. Au
surplus, ces grandes organisations sont reconnues, du
moins d'une fa9on indirecte, comme etant des elements
de !'Organisation internationale du Travail, qui est
fondee d'une part sur une representation des £tats, et,
d'autre part, sur une representation egale des organisations
patronales et ouvrieres.
M. ANZILOTTI declare que c'etait precisement la
situation des organisations en question devant la Cour
qui l'avait preoccupe; mais, si c'est la Cour elle-meme
qui doit prendre !'initiative, il n'insiste pas.
Le PRESIDENT constate que M. Anzilotti ne maintient
pas sa proposition.
M. DE BUSTAMANTE, se referant au texte de la derniere
phrase du 1° de !'article 73 amende (p. 87, D:istr. 794) 1,
se demande ce qui arrivera s'il n'est pas dlonne suite
aux questions posees par la Cour.
Le GREFFIER explique qu'il existe des moyens
permettant d'eviter a la Cour toute chicane de ce genre;
par exemple, la question ne sera pas posee a ll'Etat ou a
!'organisation interessee sans que l'on se s-oit assure,
au prealable, que cette question sera suivie d'un effet
quelconque.
Le PRESIDENT constate que la suppression de la derniere
phrase du premier alinea n'est pas de:mandee, et
ouvre la discussion sur l'alinea suivant, dont lecture
est donnee.
Le GREFFIER declare qu'il s'a.git la d'un point assez
important. C'est au fond la question de l'imtervention
qui se pose, lransportee clans le domaine des a.vis consultatifs.
Si 1a Cour admet le principe qu'il lui appartient
de prendre J'initiative pour faire· connaitre aux
Etats interesses qu'ils peuvent formuler une demande
aux fins d'etre entendus, elle doi t admettre aussi un
correctif, pour le cas ou elle aurait omis d' adresser la
notification a un Etat reellement interesse ; c'est ce
correctif que le paragraphe en question a pour objet de
foumir.
Le PRESIDENT fait observer que le paragraphe
reproduit, en l'adaptant a la procedure consultative,
le principe des articles 62 et 63 du Statut.
Ayant constate que la Cour est d'accord pour maintenir
le texte dont ii s'agit, le President pass,e au paragraphe
2 de !'article 73 arrtende, dont ii don.ne lectm;e.
M. WEISS dem:tnde la substitution du mot « discuter »
au mut «commenter ", comme dans un article anterieur.
M. DE BUSTAMANTE demande si !'intention est bien que
tous les Etats qui ont presente des exposes ecrits OU
oraux soient admis a discuter les exposes des autres.
Dans ce cas, c'est un double debat qui va s'instituer
1 Voir p. 315.
TWENTY-NINTH MEETING (JULY 28th, 1926)
created by also admitting great industrial organizations,
whether of workers or of employers, and it would be very
difficult now to leave them out, owing to their very
great importance. Moreover, these great organizations
were at any rate indirectly recognized as constituting
elements of the International Labour Organization,
which was composed partly of representatives of
States and partly of representatives of an equal number
of employers' and workers' organizations.
M. ANZIL0TTI stated that it was exactly the situation
of those organizations, when they came before the Court,
which he had had in mind, but as the initiative rested
with the Court itself, he would not press the matter.
The PRESIDENT observed that M. Anzilotti did not
maintain his proposal.
M. DE BUSTAMANTE, referring to the wording of the
last sentence of No. r of Article 73 as amended (p. 87,
Distr. 794) 1, wondered what would happen if questions
put by the Court were not answered.
The REGISTRAR explained that there were · means
of protecting the Court from incidents of that kind ;
for instance, a question would not be put to the State
or organization concerned without previously ascertaining
that some reply would be given.
The PRESIDENT observed that there was no motion
for the deletion of the last sentence of the first paragraph
and he opened the discussion on the next paragraph,
which was read.
The REGISTRAR stateu Lhal that was a point of some
importance. It was in reality the question of intervention
as it arose in connection with advisory opinions.
If the principle were accepted that it rested with
the Court to take the initiative of informing interested
States that they might submit a request for a hearing,
provision must also be made for a case where the Court
might have omitted to give notice to a State which
was really interested ; the paragraph in question was
intended to provide for such a case.
The PRESIDENT observed that the paragraph
reproduced the principle contained in Articles 62 and
63 of the Statute, adapting it to advisory procedure.
Having satisfied himself that the Court agreed to
maintain the clause in question, the President passed
to paragraph 2 of Article 73 amended, which he read.
M. WEISS asked that the word "comment" should be
replaced by the word "discuss" as in a previous article.
M. DE BUSTAMANTE asked whether the intention
really was that all States who had submitted written
or oral statements should be allowed to discuss the
statements of others. In that case a twofold discussion
1 See p. 31 5.
225
Document no 47
Lettre du Greffier de la CPJI au Directeur du BIT, datée du
26 mars 1926
r
✓ COUR PERMANENTE DE
JUSTICE INTE RNATIONAL E,
LA HAYE.
PERMANENT COURT OF
INTERNATIONAL JUSTICE,
THE HAGUE.
Rappeler
Quote
Votre
Your
Le
The
.. lonsieur le llinistre,
26 mar s 1926. ············· ·····················• ................... .
Je vi er1s de recevoir du Secrétariat de la Société
des lations la requête }JOltr t:tvis au sujet dè la compétenc
e de 1 1 organisatior1 inter:ir tionale du tr&vsil :pour
s'occuipsr du travajl l ê:rsonnel du patron.
J
.o.ussitôt la requête imprimée, ell6 sere, bien
entendu, co .. ,rnniqüée d.U Bureuu intern&.tiofaü du 'J.1ravail
onsie ur Albert Thomas,
Directeur d.u Bureau interntïtior.ial du :,.1ravail,
et. etc. etc.
G:SIBV3
LOUR PERMANENTE DE
JUSTICE INTERNATIONALE,
LA HAYE.
•• 8248
lz
....... ,.., .. .
Page ........................... . PERMANENT COURT OF
INTERNATIONAL JUSTICE,
THE HAGUE.
confo rme0en t a l'a rticle 73, alinea 2 de n otre Reglement.
La que stion se po se ce:p endant de save ir s'i l
existe d'autres norgsnis ations internati one,les11 aux
termes de la disposition dont il s'agit, auxquell es
il conv iendrait egalement d'0dresser des notifications
offic iel le s.
- -Ir;rest difficile de me fo1·1:1er en ce mom en t un e
idee 2-Jreci se ace sujet, le d o s si er c:omplet de 11 affaire
ne rn' etant pus encor-e parvenu - en effet, je
cro is com1)rendre qu' il sera. compo se et envo;ye d'un
cornmun accord par le Bureau interne. tior:al du Travail
et le Secretar iat. En attendant je me sui s personnelJement
figure que, telle que la question est libellee ,
les troi s seul es organisation s qui pourra ien t eventuellement
entrer en li gn e cle co1:1:pt e se nLient
1) la 1!1ederation Syndicale Internationale;
2) la Confederati on Internationale des Syndicats
Ohretiens; et
6) l 'Organisation int erna ti onal.e des Employeurs
Ina.us tr iel s.
Vous m'obl igeriez i nfiniment en voulant bien
me dormer vot re opinion sur e:e point.
Veuillez agreer, ,:onsieur' 16 .i:inistre, les fSsuranc:es
a.e ma haute consideration.
Le Greffier de la Cour·,
Document no 48
Minute du Conseiller juridique du BIT Jean Morellet,
datée du 10 avril 1926
I
II
• '
' )
t M. S. B.
' MINUTE SHEET.
I
'' Melle liund t.
___;--,.,:· -----
(elements d1une reponse a la lettre de IJ . Schifferstein en
date du 6 Avril I926.)
l) D1 apres l'article 73 du Reglement de la Cour de Justice
internationale, lorsque la Cour est saisie d'une requ@te demandant
un avis consultatif, "les organisations internationales susceptibles
de fournir ·des rehsei gnements sur la question en regoive
n t c omrnuni eat i on . "
Aucun texte ne prevoit la representation devant la Cour
des organisations internationales consultees lors de la procedure
en matiere consultative. En fait, la Cour a decide,chaque fois
qu1une organisation internati onale a ete consultee, d'entendre
son representant en audience publique si elle en exprimait le desir.
Il est done a ~eu pres certain que la Cour invitera les organisations
internationales consultees sur la question de la reg~
mentation du travail du patron a se faire representer devant elle.
Si par hasard la Cour n'adressait pas une telle invitation aux
organisations intermssees, ces dernieres pourraient prendre l'in:i:tiative
de demander a faire entendre leur repreaenfant.
2) Le Greffier de la Cour a der.aande au Directeur du BIT de
lui faire connaitre les organisations a consulter et il a annonce
des a present son intention de communiquer la requgte a la Federation
syndicale internationale, a la Confederation internationale
des syndicats chretiens et a 1 1 0:r gani sation internationale des
em.? loyeurs industriels. Bien que la Federation de 1 1 alirnentation
soit affiliee a la Federation syndicale internationale qui sera
consultee, il y aurait sans doute inter@t ace que 1 1 organisation
de wr. Schifferstein soi t s:oeciale!lient consul t ee elle aussi et le
BIT va signaler au G:reffii.er de la Cour le desir de 1,I. Schifferste
in.
IO Avril I926 .
62427• Wt.No. 12713/3S8. 1,500 000, 9,24. M&M Ltd. 11 61, (AGUMISTl. [v VER.
Document no 49
CPJI, Troisième rapport annuel (15 juin 1926-15 juin
1927), série E – no 3
SÉRIE E - NO 3
--
'~1IC~ISIÈ:JlE RAPPOKT ANNUEL
DE LA
COUN PEKllXJiEXTE DE JUSTICE INTEIINAT10KL4LE
(13 juin 1926 - 15 juin 1927)
rait ultérieurement demander aux intéressés des renseignements
complémentaires, auquel cas une audience serait tenue à cet effet.
- Les intéressés furent autorisés à déposer chacun une pièce écrite
complémentaire (par assimilation au Contre-Mémoire de la procédure
ouverte par conipromis) afin de remplacer les exposés oraux.
Le 20 avril 1925, en la même affaire, la Cour, à l'unanimité, approuva
la communication à chacun des intéressés des pièces déposées par
l'autre. Il fut décidé que les intéressés pourraient présenter, par
écrit, des observatioris sur les pièces jointes au (( Contre-Mémoire )I
(voir ce qui vient d être dit). Mais la Cour (le 21 avril 1925) se
réserva la faculté de prendre, selon les circonstances du cas, une
décision sur chacune des demandes que pourraient ultérieurement
présenter les intéressés en vue de se faire entendre en audience
publique.
A la date du 24 août 1923 (Avis consultatif no 7), le Gouvernement
roumain ayant invoqué les articles 62 et 63 du Statut à l'appui d'une
demande aux fins d'i3tre entendu, la Cour décida de lui faire connaître
que ces articles du Statut, ainsi que les articles correspondants
du Règlement, n'ont trait qu'à la procédure contentieuse. La Cour,
toutefois, conformément à l'article 73 de son Règlement, se déclara
disposée à entendre le représentant du Gouvernement roumain.
Lors de la revision du Règlement (session ordinaire de 1926), la
Cour rechercha quelles organisations internationales pourraient être
admises à lui fournir des renseignements (article 73 du Règlement).
Il fut établi que la Cour, qu'il s'agît de s'adresser à un Etat ou à
une organisation internationale, conserve toujours l'initiative.
(Voir Publications de la Cour, Série D, no 2, addendum, pp. 224-225.)
Les organisations internationales admises jusqu'à présent à
fournir des renseignements à la Cour dans une ou plusieurs affaires
ont été les suivante; :
Commission in ternationale d'Agriculture.
Fédération syndica.le internationale.
Organisation interiiationale du Travail.
-4ssociation internationale pour la protection légale des travailleurs.
Confédération in ternationale des syndicats agricoles.
Fédération internationale des travailleurs de la terre.
Institut international d'Agriculture (Rome).
Fédération internationale des syndicats chrétiens des travailleurs
de la terre.
Organisation internationale des employeurs industriels.
Confédération internationale des syndicats chrétiens.
Lors de l'Avis corisultatif no 13, l'Union internationale des fédérations
des ouvriers et ouvrières de l'alimentation, dont le siège est
à Zurich, exprima le désir de se faire entendre devant la Cour.
Le Président, touteflais, ne communiqua pas la requête aux fins
d'avis consultatif à cette organisation, qui n'occupait pas la même
.
Document no 50
Note introductive au Règlement du Conseil
d’administration, paragr. 23
7
Note introductive
1. Le Conseil d’administration du Bureau international du Travail
(ci-après le «Conseil d’administration») est établi en vertu des articles 2 et 7
de la Constitution de l’Organisation internationale du Travail. Le
fonctionnement du Conseil d’administration obéit à un ensemble de règles
réparties entre différents textes et publications ainsi qu’à une série de
pratiques et d’arrangements dégagés progressivement depuis sa première
session, le 27 novembre 1919 à Washington, DC. Depuis 2006, ces règles
sont toutes regroupées dans le présent recueil et sont précédées de cette
Note introductive qui décrit certaines pratiques sans pour autant ériger
celles-ci en dispositions réglementaires 1.
2. Le recueil a été amendé en 2009 afin d’inclure d’autres ensembles
de règles et de promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes 2, puis
en 2011 afin d’intégrer les modifications découlant du paquet de réformes
issu des travaux du Groupe de travail sur le fonctionnement du Conseil
d’administration et de la Conférence internationale du Travail (ci-après la
«Conférence»). Par la suite, d’autres modifications ont été apportées au
Règlement et à la Note introductive à l’issue de l’examen de l’application du
paquet de réformes mené en 2014 et 2015 3. Les annexes du recueil ont
également été modifiées conformément aux décisions prises par le Conseil
d’administration 4.
* L’OIT s’engage à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes. À cette fin, des
amendements à la présente Note introductive ont été adoptés par le Conseil d’administration
à sa 306e session (novembre 2009). Les dispositions de la présente note dans lesquelles est
utilisé le genre masculin, au singulier ou au pluriel, se réfèrent sans distinction à une femme
ou à un homme ou, suivant le contexte, à des femmes ou à des hommes.
1 GB.291/LILS/3 et GB.291/9(Rev.), paragr. 33 à 42.
2 GB.306/LILS/1 et GB.306/10/1(Rev.), paragr. 2 à 8.
3 GB.320/WP/GBC/2 et GB.323/WP/GBC/2.
4 La date à laquelle chacune des annexes a été adoptée ou amendée par le Conseil
d’administration est indiquée.
16
gouvernemental (telles que président, vice-président ou coordonnateur
régional) doivent être communiquées par écrit au Président du Conseil
d’administration, au début de chaque nouveau mandat du Conseil
d’administration ou à l’occasion de tout changement au cours de ce
mandat.
21. Le Président du Conseil d’administration assure que des
consultations sont effectuées avec le président du groupe gouvernemental
ou son représentant sur toute question concernant le traitement d’un point
de l’ordre du jour du Conseil d’administration sur laquelle il estime
nécessaire de consulter les membres du bureau en cours de session.
22. Pour faciliter et promouvoir par tous les moyens possibles la
pleine participation du groupe gouvernemental, un dispositif spécial au
sein du Bureau permet d’assurer la tenue suffisamment à l’avance de
consultations efficaces avec les représentants des gouvernements, de leur
donner accès dans les meilleurs délais à la documentation et à l’information
lorsqu’ils la sollicitent, d’organiser à leur demande des séances
d’information et des rencontres, de fournir un appui technique et logistique
au président du groupe gouvernemental et aux coordonnateurs régionaux,
et de faciliter les consultations avec les deux autres groupes.
Les groupes des employeurs et des travailleurs
23. C’est une pratique bien établie que les Vice-présidents employeur
et travailleur du Conseil d’administration président respectivement leurs
groupes. Chaque groupe peut aussi désigner d’autres porte-parole pour les
divers segments et sections du Conseil d’administration. Les secrétaires des
groupes sont désignés par les groupes, traditionnellement au sein de
l’Organisation internationale des employeurs (OIE) pour les employeurs et
de la Confédération syndicale internationale (CSI) pour les travailleurs. Ces
désignations doivent être communiquées au Président du Conseil
d’administration au début de chaque nouveau mandat du Conseil
d’administration, ou à l’occasion de tout changement au cours de ce
mandat.
Rapport du Président du Conseil d’administration
à la Conférence
24. Le Président du Conseil d’administration, après avoir consulté les
Vice-présidents du Conseil d’administration, fait directement rapport à la
Document no 51
BIT, Note explicative sur le rôle des organisations
internationales d’employeurs et de travailleurs
bénéficiant d’un statut consultatif général auprès de
l’OIT, 17 avril 2023
1
N O T E E X P L I C A T I V E
Rôle des organisations internationales d'employeurs et de travailleurs bénéficiant
d’un statut consultatif général auprès de l'OIT
Introduction
1. En raison de la structure tripartite de l'Organisation internationale du Travail (OIT), les
représentants des employeurs et des travailleurs sont intégrés à ses organes de
gouvernance, à savoir la Conférence internationale du Travail et le Conseil
d'administration, aux côtés des représentants des gouvernements. Les organisations
internationales d'employeurs et de travailleurs ne sont pas membres en tant que tels des
organes de gouvernance, mais elles entretiennent des relations institutionnelles étroites
avec l'OIT.
2. En accordant le "statut consultatif général" à une organisation internationale non
gouvernementale, l'OIT reconnaît que la collaboration avec l'organisation concernée
revêt une importance institutionnelle particulière1. Six organisations bénéficient
actuellement du statut consultatif général:
- l'Organisation internationale des employeurs (OIE)
- la Confédération syndicale internationale (CSI)
- la Fédération syndicale mondiale (FSM)
- l’Alliance coopérative internationale (ACI)
- l’Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA)
- Business Africa2
3. Outre leur statut consultatif, deux de ces organisations - l'OIE et la CSI - assurent le
secrétariat des représentants des employeurs et des travailleurs siégeant dans les
organes de gouvernance de l'OIT.
1 A l'OIT, une distinction est faite entre les catégories suivantes d'organisations internationales non
gouvernementales :
(a) les organisations bénéficiant du statut consultatif général, tel que décidé par le Conseil
d'administration en 1948 ;
(b) les organisations ayant un statut consultatif régional, tel que décidé par le Conseil
d'administration en 1964 ;
(c) les OING figurant sur la "liste spéciale" établie par le Conseil d'administration en 1956;
(d) d'autres organisations.
2 Seules trois autres organisations ont bénéficié du statut consultatif général par le passé : la Confédération
internationale des syndicats libres (CISL), la Confédération mondiale du travail (CMT) et la Fédération
internationale des producteurs agricoles (FIPA), qui a été dissoute en 2010. La CISL et la CMT ont fusionné
en 2006 pour devenir la CSI.
2
Statut consultatif général auprès de l'OIT
4. Dès 1920, des dispositions ont été prises par l'OIT pour promouvoir l'interaction avec les
organisations internationales d'employeurs et de travailleurs et pour aider ces
organisations à suivre les travaux de l'Organisation3. Cette pratique a été codifiée en
1946 à l'article 12(3) de la Constitution de l'OIT, qui s'inspire de l'article 71 de la Charte
des Nations Unies et se lit comme suit : « L'Organisation internationale du Travail pourra
prendre toutes dispositions utiles pour consulter, selon qu'il lui paraîtra désirable, des
organisations internationales non gouvernementales reconnues, y compris des organisations
internationales d'employeurs, de travailleurs, d'agriculteurs et de coopérateurs ».
5. Les « dispositions utiles » mentionnées dans cette disposition ont été établis par
plusieurs décisions du Conseil d'administration. Le statut consultatif général a été le
premier arrangement de ce type adopté par le Conseil d'administration à sa 105e
session (juin 1948) sous la forme d'une résolution. Cette résolution continue d'énoncer
les règles applicables aux organisations internationales non gouvernementales dotées
de ce statut4. Pour donner effet à la résolution, le Conseil d'administration a adopté des
amendements à son Règlement intérieur et a proposé des amendements au Règlement
de la Conférence5.
6. Au fil des ans, l'OIT a revu l'étendue de la collaboration et la nature des facilités accordées
aux organisations internationales non gouvernementales. Cependant, à ce jour, le statut
consultatif général représente le cadre de collaboration le plus avantageux dont une
organisation internationale d'employeurs ou de travailleurs peut bénéficier à l'OIT.
7. Le statut consultatif général est accordé aux organisations internationales non
gouvernementales « qui ont un intérêt substantiel dans un grand nombre d’activités
diverses de l’OIT ». Il a pour but de faciliter « le renvoi devant l’[OIT], par des organisations
non gouvernementales, de propositions que ces organisations désireraient présenter
pour une action internationale officielle relative à des questions relevant principalement
de la compétence de l’[OIT] »6.
3 Cette pratique a été rappelée par le Directeur général du BIT lorsque la question des relations avec la
Fédération syndicale mondiale a été examinée par le Conseil d'administration à sa 103e session (décembre
1947) ; voir les procès-verbaux du Conseil d'administration de la 103e session, p. 49. Sur la base de cette
pratique bien établie, les organisations internationales d'employeurs et de travailleurs ont été invitées par
la Cour permanente de Justice internationale à fournir des informations dans les six procédures
consultatives introduites devant la Cour entre 1922 et 1932 concernant l'interprétation de la Constitution de
l'OIT et d'une convention internationale du travail.
4 Recueil de règles applicables au Conseil d’administration du Bureau international du Travail, Annexe V
Représentation des organisations internationales non gouvernementales, y compris les organisations
internationales d’employeurs et de travailleurs, aux réunions de l’OIT, Résolution adoptée par le Conseil
d’administration à sa 105e session (14 juin 1948).
5 Procès-verbaux de la 105e session du Conseil d’administration (juin 1948), p. 31-40,p. 90-91. . Les
dispositions applicables sont les articles 2.2(j), 14(9) et 36(6) du Règlement de la Conférence ainsi que l'article
1.10 du Règlement du Conseil d'administration.
6 Résolution adoptée par le Conseil d’administration à sa 105e session (14 juin 1948).
3
8. La principale facilité accordée à ces organisations est la possibilité d'être représentées à
un large éventail de réunions de l'OIT, notamment aux réunions de la Conférence et du
Conseil d'administration, sans qu'il soit nécessaire de leur adresser une invitation
spécifique. En ce qui concerne la Conférence, ces organisations ont le droit d'accréditer
un nombre illimité de représentants et peuvent ainsi participer aux travaux des
différentes commissions de la Conférence (à l'exception des questions administratives ou
financières ou des réunions de la Commission de vérification des pouvoirs et du Comité
de rédaction). Ils peuvent décider des commissions auxquelles ils souhaitent participer
sans demander d'autorisation spécifique à la Conférence. Il s'agit notamment des
commissions de la Conférence qui négocient les projets de normes internationales du
travail et de la Commission permanente de l'application des normes de la Conférence
chargée d'examiner l'application des normes par les États membres. Les représentants
de ces organisations peuvent également faire ou diffuser des déclarations s'ils y sont
autorisés par les bureaux des commissions ou de la Conférence.
9. Dans la pratique, les six organisations internationales non gouvernementales
mentionnées ci-dessus sont représentées à chaque session de la Conférence annuelle. La
participation au Conseil d'administration est plus variable - à l'exception de l'OIE et de la
CSI qui participent respectivement en tant que secrétariats des groupes des employeurs
et des travailleurs. En dehors des réunions des organes de gouvernance de l'OIT, ces
organisations internationales non gouvernementales jouent un rôle important dans le
fonctionnement des procédures de contrôle de l'OIT, puisqu'elles peuvent soumettre des
observations sur l'application des conventions ratifiées par les États membres, qui sont
ensuite examinées par la Commission d'experts pour l'application des conventions et
recommandations de l'OIT. En outre, ces organisations peuvent déposer des
réclamations en vertu de l'article 24 de la Constitution à l'encontre d'un État membre qui
n'aurait pas assuré d'une manière satisfaisante l'exécution d’une convention à laquelle il
est partie, et elles peuvent également déposer des plaintes dans le cadre des procédures
spéciales pour l'examen des plaintes alléguant des violations de la liberté d'association.
Secrétariats des groupes employeurs et travailleurs
10. Conformément à la structure tripartite de l'Organisation, les mandants de l'OIT
représentant les gouvernements, les employeurs et les travailleurs s'organisent en
groupes autonomes. Le « principe de l'autonomie » de ces trois groupes constitutifs est
bien établi dans la théorie et la pratique constitutionnelles de l'OIT. Il est garanti par la
Constitution en ce qui concerne la Conférence internationale du Travail7. Il constitue une
garantie institutionnelle que les mandants tripartites de l'OIT jouissent d'une large
discrétion en ce qui concerne leurs organisation, coordination et représentation au sein
des organes exécutifs ou délibératifs de l'Organisation, sous réserve des dispositions de
la Constitution et des règlements applicables8.
7 L’article 4(1) de la Constitution dispose que chaque délégué d’une délégation tripartite d’un Etat membre
« aura le droit de voter individuellement sur toutes les questions soumises aux délibérations de la
Conférence ».
8 Ce principe est énoncé dans le Règlement de la Conférence internationale du Travail (article 5, paragraphe
1), le Règlement du Conseil d'administration (article 7.1), le Règlement des réunions régionales (article 14)
4
11. L'exercice effectif des fonctions et responsabilités des représentants des employeurs et
des travailleurs dépend dans une large mesure de l'appui et de la coordination fournis
par les secrétariats respectifs. Les représentants des employeurs et des travailleurs ont
également besoin d'une structure permanente pour les aider à préparer les travaux liés
à l'OIT et pour représenter leurs intérêts au sein du Bureau de manière continue - à
l'instar de la représentation des gouvernements assurée par la Mission permanente de
chaque pays. En outre, les secrétariats des groupes des employeurs et des travailleurs
exercent des fonctions politiques et peuvent avoir recours à l'appui technique des
services compétents du Bureau international du Travail.
12. Chaque groupe élit son secrétaire pour les réunions de la Conférence et les réunions du
Conseil d'administration. L'élection d'un secrétaire par le groupe des employeurs et le
groupe des travailleurs à la Conférence est prévue par le Règlement de la Conférence
depuis 1927. Les membres du secrétariat du groupe des employeurs et du groupe des
travailleurs sont officiellement inscrits sur la liste des participants à la Conférence9. Le
Règlement pour les réunions techniques et les réunions d'experts prévoit que les
membres des secrétariats des deux groupes peuvent assister à ces réunions, y compris
celles de tout organe subsidiaire, et intervenir dans les débats10.
13. Bien que les deux groupes non gouvernementaux soient libres de nommer les secrétaires
de leur choix, les secrétariats des groupes des employeurs et des travailleurs sont
traditionnellement assurés par l'OIE et la CSI11. Cette pratique est reflétée dans la note
introductive du Règlement du Conseil d'administration12 et dans la note introductive du
Règlement intérieur pour les réunions techniques et les réunions d'experts13.
14. Le fait que l'OIE et la CSI fournissent traditionnellement ces services importants aux
groupes des employeurs et des travailleurs définit la relation spéciale qu'elles
entretiennent avec l'OIT. Plus concrètement, en raison de leurs responsabilités en tant
que secrétaires des deux groupes, l'OIE et la CSI jouent un rôle clé dans la facilitation du
dialogue tripartite au sein de l'Organisation, par exemple en participant au groupe de
sélection tripartite chargé de fixer l'ordre du jour des sessions du Conseil
d'administration14, en discutant avec le Bureau de la composition et d'autres questions
d'organisation des réunions tripartites, en étant directement impliquées dans des
consultations informelles sur un large éventail de questions et en recevant de
nombreuses communications du Bureau pour les transmettre aux groupes respectifs. Ils
ainsi que dans les règles applicables à d'autres réunions ou organes de l'OIT. Elle a également été codifiée
dans un instrument d'amendement à la Constitution, qui a été adopté en 1986 mais n'est pas encore entré
en vigueur.
9 Les dispositions pertinentes sont les articles 2(2)(m) et 5 du Règlement de la Conférence.
10 Articles 9(7) et 13(2) du Règlement pour les réunions techniques et article 9(6) du Règlement intérieur pour
les réunions d'experts.
11 Avant la création de la CSI en 2006, la CISL assurait le secrétariat du groupe des travailleurs..
12 Paragraphe 23 de la note introductive.
13 Section 4 de la note introductive.
14 Paragraphe 3.1.1 du Règlement du Conseil d'administration.
5
jouent un rôle majeur dans les travaux des organes de contrôle de l'OIT à composition
tripartite, tels que la Commission de l'application des normes de la Conférence, le Comité
de la liberté syndicale du Conseil d'administration ou les comités tripartites nommés par
le Conseil d'administration pour examiner les réclamations soumises en vertu de l'article
24 de la Constitution. Ils assurent la continuité des positions des groupes au sein de
l'Organisation, pendant et en dehors des sessions de la Conférence et du Conseil
d'administration.
15. En août 2019, en reconnaissance du rôle institutionnel et de la stature internationale de
l'OIE et de la CSI, les gouvernements de la France, de l'Allemagne et de la Türkiye ont
demandé que ces deux organisations se voient accorder le statut d'observateur à
l'Assemblée générale des Nations Unies. La demande comprenait une lettre de soutien
du Directeur général de l'OIT soulignant la portée internationale de l'action des deux
organisations, leur rôle actif dans le système multilatéral en général et le système des
Nations Unies en particulier15.
Conclusion
16. Depuis ses débuts, l'OIT attache une grande importance à la collaboration avec les
organisations internationales non gouvernementales dont la réputation est reconnue,
sur des questions d'intérêt mutuel. Les six organisations dotées du statut consultatif
général illustrent le degré d'implication et le rôle institutionnel que les organisations
d'employeurs et de travailleurs peuvent jouer dans les activités de l'OIT. Plus
particulièrement, l'OIE et la CSI, en tant que secrétariats des groupes des employeurs et
des travailleurs, sont les principaux interlocuteurs institutionnels représentant les
mandants non gouvernementaux de l'OIT.
17 avril 2023
15A/74/291 (OIE) A/74/292 (CSI). La demande fait suite à une discussion lors de la 335e session (mars 2019)
du Conseil d'administration au cours de laquelle le Conseil d'administration s’est félicité « de ce que la
Confédération syndicale internationale (CSI) et l’Organisation internationale des employeurs (OIE) aient
pour objectif d’obtenir le statut d’observateur auprès de l’Assemblée générale des Nations Unies ». La
décision de l'Assemblée générale a été reportée à sa 78e session (2023).
6
Annexe
Informations succinctes sur les six ONG dotées du statut consultatif général auprès de l'OIT
1. Organisation internationale des employeurs (OIE)
Le statut consultatif général de l'OIE a été reconnu lors de la 118e session (mars 1952) du Conseil
d'administration16. Basée à Genève, en Suisse, l'OIE a été créée en mars 1920. Elle est composée
de plus de 150 organisations d'employeurs et d'entreprises dans plus de 140 pays, représentant
un total de plus de 50 millions d'entreprises. Sa vision déclarée est de « créer un environnement
économique durable dans le monde, qui permette de promouvoir la libre entreprise et qui soit
équitable et avantageux tant pour les entreprises que pour la société » 17. Les objectifs statutaires
de l'OIE sont notamment de « constituer un forum international qui rassemble, représente et
promeut, dans le monde entier, les intérêts des organisations nationales d'employeurs et
d’entreprises et de leurs membres » et de « coordonner les intérêts des employeurs et des
entreprises au niveau international, particulièrement au sein de l'Organisation internationale du
Travail et d’autres institutions internationales » 18. Sa structure de gouvernance comprend le
Conseil général, le Comité de direction et un Secrétariat. L'OIE a obtenu le statut consultatif
général auprès de l'ECOSOC en 1947.
Les statuts de l'OIE comportent plusieurs références à l'OIT ; par exemple, le Comité de direction
comprend un vice-président pour l'OIT qui est élu parmi les membres employeurs titulaires du
Conseil d'administration de l'OIT. Ce vice-président est également désigné comme porte-parole
du groupe des employeurs au sein du Conseil d'administration. Les statuts précisent également
que le Secrétaire général de l'OIE assure le secrétariat du groupe des employeurs à l'OIT.
2. Confédération syndicale internationale (CSI)
Le statut consultatif général de la CSI a été reconnu lors de la 297e session (novembre 2006) du
Conseil d'administration19. Basée à Bruxelles, en Belgique, la CSI est née le 1er novembre 2006
de la fusion de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et de la Confédération
mondiale du travail (CMT) 20. La CSI compte 338 affiliés nationaux et représente environ 200
millions de travailleurs dans 168 pays et territoires. Sa mission déclarée est « la promotion et la
défense des droits et des intérêts des travailleurs, au travers de la coopération internationale
entre les syndicats, de campagnes mondiales et d'actions militantes au sein des principales
16 Conseil d’administration, Procès-verbaux, 118e session (mars 1952), p. 50 et annexe XX.
17 Voir le document « L’OIE en bref » (April 2023), disponible au lien suivant : À propos de nous (ioe-emp.org).
18 Statuts de l’OIE, article 2, disponible au lien suivant : https://www.ioe-emp.org/fr/a-propos-denous/
gouvernance.
19 Conseil d’administration, Procès-verbaux, 297e session (novembre 2006), paras 276-280 et GB.297/19/7.
20 Le statut consultatif général de la CISL avait été reconnu par le Conseil d'administration lors de sa 111e
session (mars 1950) (procès-verbaux, p. 73-75 et Annexe XXV), alors que celui de la CMT, connue à l'époque
sous le nom de Confédération internationale des syndicats chrétiens, avait été reconnu par le Conseil
d'administration lors de sa 105e session (juin 1948) (procès-verbaux, p. 41-45).
7
institutions internationales ». Ses principaux domaines d’action sont « Ses principaux domaines
d’action sont les suivants : les droits syndicaux et les droits humains ; l’économie, la société et le
lieu de travail ; l’égalité et la non-discrimination ; la solidarité internationale ». La CSI est dirigée
par un Congrès mondial, un Conseil général et un Bureau exécutif21. La CSI a obtenu le statut
consultatif général auprès de l'ECOSOC en 200722.
L'un des objectifs de la CSI, tel qu'énoncé dans sa Constitution, est de « renforcer le rôle de l’OIT,
et pour assurer l’élaboration et la mise en oeuvre universelle des normes internationales du
travail, ainsi que pour obtenir sa représentation dans d’autres organisations internationales et
régionales afin que leurs politiques et activités contribuent de façon cohérente à la réalisation du
travail décent, de la justice sociale et du développement durable »23.
3. Fédération syndicale mondiale (FSM)
Le Conseil d'administration a accordé le statut consultatif général à la FSM lors de sa 103e session
(décembre 1947) 24. Basée à Athènes, en Grèce, la FSM a été créée le 3 octobre 194525. Elle est
ouverte aux organisations syndicales. Actuellement, elle représente 105 millions de membres
dans 133 pays26. Selon ses statuts, la FSM est une « organisation syndicale internationale de
classe, a comme objectif premier l’émancipation des travailleurs au moyen de la lutte »27. Elle se
compose du Congrès syndical mondial, d'un Conseil général, d'un Conseil présidentiel et d'un
Secrétariat et s'organise en outre sur la base de Centrales nationales affiliées (regroupées en
bureaux régionaux dans chaque région ou continent) et d'organisations de branches industrielles
appelées Unions Internationales Syndicales (UIS). La FSM a obtenu le statut consultatif général
auprès de l'ECOSOC en 194628.
4. Alliance cooperative internationale (ACI)
Le statut consultatif général de l'ACI au sein de l'OIT a été reconnu par le Conseil d'administration
lors de sa 107e session (décembre 1948) 29. Basée à Bruxelles, en Belgique, l'ACI a été créée le 19
août 189530. Elle compte parmi ses membres plus de 310 organisations issues de 107 pays31.
Selon ses statuts, l'ACI, une « organisation mondiale en réseau, organisée aux niveaux mondial,
régional, sectoriel et thématique », est « un représentant mondial des organisations coopératives
de toutes sortes » visant à « servir de forum pour l'échange d'expériences et de source
d'information sur le développement coopératif, la recherche et les statistiques », à « coordonner
les actions pour la promotion du développement coopératif » et à « collaborer avec les
institutions mondiales et régionales, y compris les organisations des Nations Unies, et avec toute
21 https://www.ituc-csi.org/about-us?lang=fr
22 https://esango.un.org/civilsociety/consultativeStatusSummary.do?profileCode=3119&locale=fr
23 Statuts de la CSI, disponible au lien suivant : https://www.ituc-csi.org/ituc-constitution-fr
24 Conseil d’administration, Procès-verbaux, 103e session (Décembre 1947), pp. 42-55, et Annexe XX, p. 239.
25 https://www.wftucentral.org/historique/?lang=fr
26 https://www.wftucentral.org/the-wftu-general-secretary-addressed-the-17th-congress-of-citu/
27 Statuts de la FSM, disponibles au lien suivant : at https://www.wftucentral.org/?wpfb_dl=243
28 https://esango.un.org/civilsociety/consultativeStatusSummary.do?profileCode=462&locale=fr
29 Conseil d’administration, Procès-verbaux, 107e session (Décembre 1948), p. 95-96, and Annexe XX, p. 29.
30 https://www.ica.coop/fr/coop%C3%A9ratives/histoire-du-mouvement-cooperatif
31 https://www.ica.coop/fr/coop%C3%A9ratives/histoire-du-mouvement-cooperatif
8
autre organisation gouvernementale et non gouvernementale, internationale et nationale, qui
poursuit des objectifs importants pour les coopératives »32. L'ACI se compose d'un Conseil
d'administration, d'une Assemblée générale, de quatre Régions et de huit Organisations
sectorielles, ainsi que de plusieurs Comités et réseaux thématiques33. L'ACI a obtenu le statut
consultatif général auprès de l'ECOSOC en 194634.
5. Organisation de l'unité syndicale africaine (OUSA)
L’OUSA s'est vu accorder le statut consultatif général par le Conseil d'administration lors de sa
212e session (mars 1980) 35. Basée à Accra, au Ghana, l'OATUU a été créée en avril 197336. Elle
compte 61 organisations affiliées en Afrique, représentant environ 25 millions de personnes. Sa
mission déclarée est de « renforcer la capacité des syndicats en Afrique et de coordonner les
activités des affiliés afin de réaliser l'unité et la solidarité entre les travailleurs africains aux
niveaux national, sous-régional et continental pour la défense, la protection et la promotion des
droits et des intérêts des travailleurs et des citoyens africains dans leur ensemble »37. Elle est
dirigée par un congrès, un comité exécutif et un secrétariat.
6. Business Africa
Business Africa (anciennement connu sous le nom de Confédération panafricaine des
employeurs) s'est vu accorder le statut consultatif général par le Conseil d'administration lors de
sa 235e session (mars 1987)38. Basée à Nairobi, au Kenya, Business Africa a été créée le 12 octobre
1986. Elle est composée d'organisations d'employeurs de plus de 45 pays africains. Business
Africa « travaille dans les domaines du travail, de l'emploi et des affaires sociales et dans le
contexte d'organisations internationales » telles que l'OIT. Une partie de sa mission consiste à
« chercher à influencer les politiques au niveau continental en renforçant la voix des entreprises
dans les organes continentaux et internationaux », à « s'appuyer sur les relations développées au
sein du système des Nations Unies », à « poursuivre ses relations avec les groupes d'entreprises
européens et américains [et] à établir des partenariats avec les fédérations d'entreprises des
économies émergentes » et à « chercher à renforcer l'intégration régionale pour stimuler le
commerce intra-africain ». La structure de Business Africa comprend une Assemblée générale,
un Conseil exécutif et un Secrétariat39.
32 Statuts de l’ACI, article 4, disponible au lien suivant : https://www.ica.coop/en/about-us/ourstructure/
alliance-rules-and-laws.
33 https://www.ica.coop/fr/coop%C3%A9ratives/histoire-du-mouvement-cooperatif
34 https://esango.un.org/civilsociety/consultativeStatusSummary.do?profileCode=579&locale=fr
35 Conseil administration, Procès-verbaux, 212e session (mars 1980), p. VIII/18 et GB.212/18/34.
36 https://www.oatuuousa.org/about-us/
37 https://www.oatuuousa.org/
38 Conseil administration, Procès-verbaux, 235e session (mars 1987), p. IX/12, GB.235/17/19 et
GB.319/INS/INF/3.
39 https://businessafrica-emp.org/en-US/About-Us/About-BUSINESSAfrica
Document no 52
OIE, Statuts, articles 2, 6-8
International Organisation of Employers Organisation Internationale des Employeurs Organización Internacional de Empleadores
Statuts de l'OIE
tels qu'adoptés lors de la réunion du
Conseil général de l'OIE le 29 mai 2022
1
Article 1 Constitution
1. Une organisation internationale établie en 1920 et
composée d'organisations centrales d’employeurs et
d’entreprises dont l'activité sur le plan national est
consacrée aux questions compatibles avec celles
décrites à l'Article 2 ci-après est, par les présentes,
fondée sous le nom de : "Organisation internationale
des employeurs" (ci-après "OIE" ou "l’Organisation").
2. L’OIE est organisée corporativement en tant
qu'association suisse à but non lucratif en vertu des
Articles 60 et suivants du Code civil suisse et des
présents Statuts.
3. Le siège de l’OIE est établi dans le canton de Genève,
en Suisse.
Article 2 Objectifs
Les objectifs de l'OIE sont :
a) promouvoir un environnement économique et les
politiques sociales et de l'emploi nécessaires au
développement et à la survie de la libre entreprise et
de l'économie de marché ;
b) constituer un forum international qui rassemble,
représente et promeut, dans le monde entier, les
intérêts des organisations nationales d'employeurs
et d’entreprises et de leurs membres dans les
domaines de politique socio-économique et de
l’emploi ;
c) aider, conseiller, représenter et fournir les services et
informations appropriés aux membres de l’OIE (ciaprès
"les membres"), établir et maintenir un contact
permanent entre eux et coordonner les intérêts des
employeurs et des entreprises au niveau
international, particulièrement au sein de
l'Organisation internationale du Travail (ci-après
"OIT") ou du Bureau international du Travail (ci-après
"BIT") et d’autres institutions internationales ;
d) promouvoir et appuyer le développement et le
renforcement d'organisations d'employeurs et
d’entreprises autonomes et indépendantes et
6
6. L'ordre du jour du Conseil général sera établi par le
Comité de direction et adressé aux membres au
moins cinq semaines avant la date de l'assemblée.
7. Tout membre peut demander l’inscription d’un ou
plusieurs points supplémentaires à l’ordre du jour.
Ces demandes devront parvenir au Secrétariat au
moins trois semaines avant la date de l’assemblée.
8. Les votes seront pris à la majorité simple des
membres physiquement représentés, sauf
disposition contraire des Statuts. En cas d’impasse, la
voix du Président l’emportera.
9. Le Conseil général ne peut adopter que des
résolutions relatives à des points inscrits à l’ordre du
jour. Le Président déterminera la procédure de vote à
suivre à l’assemblée (par exemple, scrutin secret ou
public).
10. Le procès-verbal des réunions sera établi par le
Secrétaire général et soumis à la prochaine session
du Conseil général pour approbation.
Article 6 Comité de direction
1. Le Comité de direction sera composé :
a) d’un Président qui assurera la présidence du
Comité de direction ;
b) de cinq Vice-présidents régionaux, élus par le
Conseil général, sur proposition de chacune des
cinq régions. Leur mandat sera d’une durée de
trois ans, avec la possibilité de réélection, ou
d’une durée plus courte s’il s’agit d’achever le
mandat d’un titulaire qui aurait quitté ses
fonctions. Ils conseilleront le Président et
coordonneront les activités propres à leur
région ;
c) d’un Vice-président auprès de l'OIT, élu par le
Conseil général parmi les membres employeurs
titulaires du Conseil d'administration du BIT, et
qui doit également être désigné par le Groupe
des employeurs pour devenir le porte-parole des
employeurs au sein de l'OIT pour un mandat de
trois ans, avec possibilité de réélection ;
7
d) d’un Trésorier ;
e) de Représentants des membres des catégories 1
à 5 dans le tableau des cotisations, à moins
d’avoir été élus pour l’une des fonctions décrites
sous les points b) ou c) ci-dessus ;
f) de Représentants des huit autres membres élus
par le Conseil général pour un mandat de trois
ans avec possibilité de réélection (deux pour
l’Afrique, deux pour les Amériques, deux pour
l’Asie et deux pour l’Europe) ;
g) d’un maximum de trois représentants des
membres cooptés par le Comité de direction
pour une période déterminée, sur proposition du
Président après consultation des Vice-présidents
régionaux et du Secrétaire général. Ces membres
peuvent être cooptés pour un ou plusieurs
mandats.
2. Le Comité de direction :
a) assurera l’exécution des objectifs de l’OIE et des
décisions du Conseil général ainsi que des
activités nécessaires au bon fonctionnement de
l’OIE ;
b) élaborera, entre les réunions du Conseil général,
des prises de positions politiques et formulera
des stratégies appropriées ;
c) préparera les décisions du Conseil général en
matière d’adhésions et de retraits ;
d) préparera les décisions du Conseil général en
matière financière et budgétaire sur la base de
propositions du Trésorier ;
e) statuera sur les propositions du Secrétaire
général relatives au fonctionnement et à
l’organisation du Secrétariat ;
f) préparera un programme d’action annuel qui
sera soumis au Conseil général ;
g) préparera un rapport annuel sur les activités de
l’OIE qui sera soumis au Conseil général.
3. En accomplissant toutes les responsabilités
contenues dans l’Article 6.2, le Comité de direction
peut être assisté par des commissions, composées
8
par des membres du Comité de direction et opérant
selon des termes de référence décidés par le Comité
de direction.
4. Le Comité de direction adoptera son propre
règlement.
Article 7 Le Président
1. Le Président de l’OIE (ci-après "le Président") sera élu
pour trois ans par le Conseil général sur proposition
du Comité de direction, avec possibilité de
réélection.
2. Le Président représentera l’OIE au plus haut niveau et
présidera le Conseil général et le Comité de direction.
En cas d’impossibilité, ces fonctions seront exercées
par l’un des Vice-présidents régionaux.
3. Dans la mesure du possible, le Président sera élu
selon le principe de la rotation entre les régions
géographiques.
4. Le Président sera le principal porte-parole de l’OIE en
dehors du BIT et sera chargé de mettre en oeuvre les
politiques dans le respect des orientations fixées par
le Conseil général et le Comité de direction.
Article 8 Le Secrétaire général
1. Le Comité de direction désignera un Secrétaire
général, qui ne sera pas un membre dudit Comité. Le
Secrétaire général sera salarié à plein temps.
2. Le Secrétaire général fera rapport au Conseil général
et au Comité de direction qui devront lui accorder
leur confiance, faute de quoi le Comité de direction
pourra révoquer le Secrétaire général sur décision
unanime conformément au règlement intérieur du
Comité de direction et au droit suisse.
3. Les tâches du Secrétaire général comprendront :
a) la direction du Secrétariat ;
b) la désignation de ses membres et l’organisation
de leurs responsabilités ;
9
c) la gestion financière de l’OIE, sous le contrôle du
Trésorier ;
d) la préparation de prises de positions politiques ;
e) la liaison permanente et les communications
avec les membres ;
f) l’exécution des programmes de coopération
technique destinés aux organisations
d’employeurs et d’entreprises ;
g) avec son personnel et sous le contrôle du porteparole
du Groupe des employeurs auprès du BIT,
le Secrétariat du Groupe des employeurs au BIT ;
h) le maintien de contacts permanents avec la
direction du BIT et ses responsables à tous les
niveaux ;
i) le maintien de contacts fréquents avec des
organismes publics et le renforcement de
l’image de l’OIE auprès des groupes d’intérêt et
du public en général.
Article 9 Le vérificateur aux comptes
Le Comité de direction fait appel à un vérificateur aux
comptes désigné pour un mandat d’un an, reconductible.
Le vérificateur aux comptes doit agir en toute
indépendance vis-à-vis de l’Organisation, et plus
particulièrement du Comité de direction. Il vérifie les
comptes de l’OIE et soumet un rapport de l’exercice
financier écoulé au Conseil général.
Article 10 Pouvoir de signatures
1. Tout document officiel ou juridique relatif à
l’Organisation sera conjointement signé par deux des
personnes habilitées à le faire, à savoir le Président,
le Trésorier et le Secrétaire général.
2. Dans le cadre strict de la gestion quotidienne de ses
activités, l’OIE sera représentée par le Secrétaire
général à l’égard des tiers.
Document no 53
CSI, Statuts, Objectifs
9
CONFÉDÉRATION SYNDICALE
INTERNATIONALE
STATUTS
DÉCLARATION DE PRINCIPES
La Confédération syndicale internationale (CSI) rend hommage au sacrifice et
aux conquêtes de nombreuses générations de travailleuses et de travailleurs
qui, dans le cadre de leur lutte syndicale, ont combattu pour la cause de
la justice sociale, de la liberté, de la démocratie, de la paix et de l’égalité.
Elle s’engage à poursuivre leur lutte pour l’émancipation des travailleuses et
travailleurs et un monde dans lequel la dignité et les droits de tous les êtres
humains sont assurés, et où chacun et chacune peut aspirer au bien-être
personnel et réaliser son potentiel sur les lieux de travail et dans la société.
La Confédération note l’urgente nécessité de transformer les structures et
les relations sociales, économiques et politiques qui se dressent comme
des obstacles à cette vision. Elle assume la tâche de combattre la pauvreté,
la faim, l’exploitation, l’oppression et l’inégalité par le biais de l’action
internationale que réclament les conditions de l’économie globalisée, tout
comme elle assume la tâche de lutter pour la gouvernance démocratique de
cette économie, dans l’intérêt du travail, qu’elle considère primer sur l’intérêt
du capital.
La Confédération existe pour unir et mobiliser les forces démocratiques et
indépendantes du syndicalisme mondial en donnant aux travailleurs et aux
travailleuses une représentation effective, quel que soit l’endroit où ils et elles
travaillent et dans quelles conditions. Sa mission est d’apporter une solidarité
pratique à toutes les personnes qui en ont besoin et de s’élever contre
les stratégies globales du capital financier en leur opposant des stratégies
syndicales globales.
La Confédération estime universel le respect des droits des travailleuses
et des travailleurs, et juge l’accès au travail décent indispensable à un
développement juste et durable. Leur déni, où qu’il se manifeste, constitue
une menace immédiate à la sécurité humaine partout.
10
La Confédération s’engage à promouvoir la démocratie et à agir pour la
protéger où que ce soit, afin que toutes et tous bénéficient des conditions qui
permettent de jouir du plein exercice de tous les droits humains, universels,
indivisibles et inaliénables. Elle défendra partout les droits collectifs et les
libertés individuelles, dont la liberté de pensée, d’expression et de réunion.
La Confédération s’engage en outre à assurer un développement économique
et social général et équitable pour les travailleuses et travailleurs où que ce
soit et en particulier là où la pauvreté et l’exploitation sévissent le plus.
La Confédération condamne toutes les formes de discrimination comme un
affront à la dignité humaine et à l’égalité auxquelles chaque personne a droit
à la naissance et doit avoir droit durant toute sa vie, et s’engage fermement à
défendre le respect de la diversité au travail et dans la société.
La Confédération soutient ardemment le maintien et le renforcement de la
paix et s’engage en faveur d’un monde sans armes de destruction massive et
en faveur d’un désarmement général. Elle affirme le droit de chaque peuple
à l’autodétermination et à vivre à l’abri de toutes formes d’agression et de
totalitarisme sous le gouvernement de son choix. Elle rejette le recours à la
guerre pour résoudre les conflits, et condamne le terrorisme, le colonialisme
et le militarisme, ainsi que le racisme et le sexisme.
La Confédération exprime son soutien indéfectible aux principes et au rôle
des Nations unies, et à sa légitimité et son autorité uniques qui constituent
une garantie réelle de paix, de sécurité et de développement, appelant le
respect et l’adhésion de la communauté internationale toute entière.
L’affiliation à la Confédération, qui se veut unitaire et pluraliste, est ouverte aux
centrales syndicales démocratiques, indépendantes et représentatives, dans
le respect de leur autonomie et de la diversité de leurs sources d’inspiration
et de leurs formes d’organisation. Ses règles sont établies pour garantir la
démocratie interne, la pleine participation des organisations affiliées et pour
assurer que la composition des organes directeurs de la Confédération et sa
représentation respectent son caractère pluraliste.
11
Les décisions de la Confédération sont prises, et ses activités mises en oeuvre,
en totale indépendance de toute influence externe, qu’elle soit publique,
politique, patronale, religieuse, économique ou autre.
OBJECTIFS
La Confédération est inspirée par la profonde conviction que l’organisation
en syndicats démocratiques et indépendants et la négociation collective sont
essentielles pour assurer le bien-être des travailleurs et des travailleuses et
de leur famille, et la sécurité, le progrès social et un développement durable
pour tous.
L’amélioration des conditions de travail et de vie des travailleurs et des
travailleuses et de leur famille, et la lutte pour les droits humains, la justice
sociale, l’égalité des genres, la paix, la liberté et la démocratie, ont été le rôle
historique du syndicalisme et restent sa mission. Plus que jamais dans son
histoire, face à une mondialisation capitaliste débridée, un internationalisme
efficace est essentiel à la force future du syndicalisme et à sa capacité à
accomplir cette mission.
La Confédération demande aux travailleurs et aux travailleuses du monde
entier de s’unir dans ses rangs, pour en faire l’instrument nécessaire à
l’avènement d’un meilleur avenir pour eux-mêmes et pour toute l’humanité.
La Confédération a la responsabilité permanente:
De défendre et de promouvoir les droits et les intérêts de tous les travailleurs
et de toutes les travailleuses, sans aucune distinction, et d’obtenir en
particulier une juste rétribution de leur travail dans des conditions de dignité,
de justice, et de sécurité, au travail et dans la société en général.
• Elle luttera pour le respect universel des droits fondamentaux au
travail, tant que le travail des enfants et le travail forcé sous toutes
leurs formes ne seront pas abolis, que la discrimination au travail ne
sera pas éliminée et que les droits syndicaux de tous les travailleurs
ne seront pas pleinement respectés partout dans le monde.
12
• Elle dénoncera les violations de la liberté syndicale, du droit de grève,
dont l’action transfrontière, et du droit de négociation collective et
elle mobilisera la solidarité internationale pour y mettre un terme.
• Elle combattra pour le droit à un emploi productif, librement choisi, et
à la sécurité sociale pour tous.
• Elle agira pour mettre fin à toute discrimination fondée sur le sexe,
la religion, la couleur, la nationalité, l’ethnicité, l’orientation sexuelle,
l’identité de genre, l’opinion politique, l’origine sociale, l’âge ou le
handicap, et pour défendre le respect de la diversité dans la société
et dans l’emploi.
De promouvoir la croissance et la force du mouvement syndical indépendant
et démocratique.
• Elle apportera un soutien pratique pour renforcer les capacités
des mouvements syndicaux nationaux et l’affiliation à ces derniers,
par le biais de l’apport coordonné d’une aide internationale au
développement.
• Elle initiera et soutiendra l’action entreprise pour accroître la
représentativité des syndicats par le recrutement des travailleurs et
des travailleuses des économies informelle et formelle, par l’extension
des pleins droits et de la protection aux personnes qui effectuent un
travail précaire et non protégé, et par l’octroi d’une assistance aux
stratégies et campagnes de syndicalisation.
D’être une force de contrepouvoir dans l’économie mondiale, engagée à
assurer une juste distribution des richesses et des revenus au sein des pays
et entre eux, la protection de l’environnement, l’accès universel aux biens
et services publics, une protection sociale intégrale, l’apprentissage tout au
long de la vie et des possibilités de travail décent pour tous.
• Elle agira pour renforcer le rôle de l’OIT, et pour assurer l’élaboration
et la mise en oeuvre universelle des normes internationales du travail,
ainsi que pour obtenir sa représentation dans d’autres organisations
13
internationales et régionales afin que leurs politiques et activités
contribuent de façon cohérente à la réalisation du travail décent, de
la justice sociale et du développement durable.
• En coopération avec les Fédérations syndicales internationales et la
TUAC, elle encouragera et soutiendra la coordination des politiques
et des activités syndicales internationales à l’égard des entreprises
multinationales et le dialogue social avec les organisations
internationales d’employeurs.
De rendre le mouvement syndical inclusif, attentif aux points de vue et aux
besoins de tous les secteurs de la population active mondiale.
• Elle fera progresser les droits des femmes et l’égalité des genres,
garantira la pleine intégration des femmes dans les syndicats et
encouragera activement une totale parité des genres dans ses
organes directeurs et dans ses activités à tous les niveaux.
• Elle combattra le racisme, la xénophobie et l’exclusion et défendra
les droits et intérêts des travailleurs migrants et de leur famille et
oeuvrera pour la tolérance, l’égalité et le dialogue entre les différentes
cultures.
• Elle assurera la pleine intégration des jeunes dans le mouvement
syndical et agira pour soutenir l’accès des jeunes à une éducation et
à une formation adéquates et au travail décent, et pour combattre la
précarité dans la vie active.
• Elle renforcera la solidarité entre les générations et soutiendra le droit
des travailleurs et des travailleuses retraités à des revenus décents et
s’efforcera de promouvoir leurs intérêts.
• Elle défendra et promouvra les droits des travailleurs et des
travailleuses souffrant d’un handicap.
De mobiliser la force, l’énergie, les ressources, l’engagement et le talent de
ses organisations affiliées et de leurs membres pour la réalisation de ces
14
objectifs, en faisant de l’internationalisme syndical une partie intégrante de
leur travail quotidien.
• Elle encouragera et organisera des campagnes, des activités de
solidarité, des journées d’action et d’autres mobilisations jugées
nécessaires à cette fin, et elle rassemblera et diffusera les informations
nécessaires pour garantir de manière effective et dans les temps la
solidarité mondiale.
• Elle cherchera à établir des dispositions pour assurer la meilleure
coopération possible avec d’autres organisations syndicales qui
partagent ses objectifs afin d’optimaliser la cohésion et l’incidence
d’action aux différents niveaux du mouvement syndical international
démocratique et indépendant.
• Elle développera des liens et une coopération avec d’autres
organisations de la société civile et groupements politiques, sans
compromettre l’indépendance syndicale, dans la poursuite des
objectifs de la Confédération.
La Confédération, en assurant le plus haut niveau de gouvernance
démocratique, de transparence et de responsabilisation historiquement
intégré dans l’organisation, s’engage à poursuivre ces objectifs avec
détermination, et conformément aux valeurs syndicales imprescriptibles de
solidarité, de démocratie et de justice. Elle ne renoncera pas à leur réalisation
et ne se laissera pas dissuader par les ennemis du progrès, forte de sa
conviction qu’il appartient aux travailleurs et travailleuses de déterminer leur
propre avenir.
AFFILIATION À LA CONFÉDÉRATION
Article I: Affiliation
(a) Toute centrale syndicale nationale, démocratique, indépendante et
représentative, souscrivant aux Statuts de la Confédération peut en
devenir membre.
Document no 54
Constitution de l’OIT, articles 19-21
r Constitution
de l'Organisation
internationale du Travail
Bureau international du Travail, Geneve, 2021
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Article19
Conventions et recommandations
1. Si la Conference se prononce pour l'adoption de propositions
relatives a un objet a l'ordre du jour, elle aura a determiner si ces
propositions devront prendre la forme:
a) d'une convention internationale;
b) ou bien d'une recommandation, lorsque l'objet traite ou un de ses
aspects ne se prate pas a l'adoption immediate d'une convention.
2. Dans les deux cas, pour qu'une convention ou qu'une
recommandation soient adoptees au vote final par la Conference, une
majority des deux tiers des voix des delegues presents est requise.
3. En formant une convention ou une recommandation d'une
application generale, la Conference devra avoir 6gard aux pays dans lesquels
le climat, le developpement incomplet de l'organisation industrielle ou
d'autres circonstances particulieres rendent les conditions de l'industrie
essentiellement differentes, et elle aura a suggerer telles modifications
qu'elle considererait comme pouvant @tre necessaires pour repondre aux
conditions propres a ces pays.
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4. Deuxexemplairesdelaconventionoudelarecommandationseront
sign's par le President de la Conference et par le Directeur general. L'un de
ces exemplaires sera depose aux archives du Bureau international du Travail
et l'autre entre les mains du Secretaire general des Nations Unies. Le
Directeur general communiquera une copie certifiee conforme de la
convention ou de la recommandation (3 chacun des Membres.
5. S'il s'agit d'une convention:
a) la convention sera communiquee a tous les Membres en vue de sa
ratification par ceux-ci;
b) chacun des Membres s'engage a soumettre, dans le delai d'un an a
partir de la cl5ture de la session de la Conference (ou, si par suite de
circonstances exceptionnelles, il est impossible de proceder dans un
delai d'un an, dos qu'il sera possible, mais jamais plus de dix-huit mois
apres la cl6ture de la session de la Conference), la convention a l'autorite
ou aux autorites dans la competence desquelles rentre la matiere, en
vue de la transformer en loi ou de prendre des mesures d'un autre
ordre;
c) les Membres informeront le Directeur general du Bureau international
du Travail des mesures prises, en vertu du present article, pour
soumettre la convention a l'autorite ou aux autorites competentes, en
lui communiquant tous renseignements sur l'autorite ou les autorites
considerees comme competentes et sur les decisions de celles-ci;
d) le Membre qui aura obtenu le consentement de l'autorite ou des
autorites competentes communiquera sa ratification formelle de la
convention au Directeur general et prendra telles mesures qui seront
necessaires pour rendre effectives les dispositions de ladite convention;
e) si une convention n"obtient pas I"assentiment de I"autorite ou des
autorites dans la competence desquelles rentre la matiere, le Membre
ne sera soumis a aucune autre obligation, si ce n'est qu'il devra faire
rapport au Directeur general du Bureau international du Travail, a des
periodes appropriees, selon ce que decidera le Conseil d'administration,
sur l'etat de sa 16gislation et sur sa pratique concernant la question qui
fait l'objet de la convention, en precisant dans quelle mesure l'on a
donne suite ou l'on se propose de donner suite a toute disposition de la
convention par voie 16gislative, par voie administrative, par voie de
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contrats collectifs ou par toute autre voie, et en exposant quelles
difficultys empechent ou retardent la ratification d'une telle convention.
6. S'il s'agit d'une recommandation:
a) la recommandation sera communiquee a tous les Membres pour
examen, en vue de lui faire porter effet sous forme de loi nationale ou
autrement;
b) chacun des Membres s'engage a soumettre, dans le delai d'un an a
partir de la cl5ture de la session de la Conference (ou, si par suite de
circonstances exceptionnelles, il est impossible de proceder dans le
delai d'un an, dos qu'il sera possible, mais jamais plus de dix-huit mois
apres la cl6ture de la session de la Conference), la recommandation a
l'autorite ou aux autoriMs dans la competence desquelles rentre la
matiere, en vue de la transformer en loi ou de prendre des mesures d'un
autre ordre;
c) les Membres informeront le Directeur general du Bureau international
du Travail des mesures prises, en vertu du present article, pour
soumettre la recommandation a l'autorite ou aux autorites
competentes, en lui communaiquant tous renseignements sur l'autorite
ou les autorites considerees comme competentes et surles decisions de
celles-ci;
d) sauf l'obligation de soumettre la recommandation a l'autorite ou aux
autorites competentes, les Membres ne seront soumis a aucune autre
obligation, si ce n'est qu'ils devront faire rapport au Directeur general
du Bureau international du Travail, a des periodes appropriees, selon ce
que decidera le Conseil d'administration, sur l'etat de leur 16gislation et
sur leur pratique concernant la question qui fait l'objet de la
recommandation, en precisant dans quelle mesure l'on a donne suite
ou l'on se propose de donner suite a toutes dispositions de la
recommandation et en indiquant les modifications de ces dispositions
qui semblent ou pourront sembler necessaires pour leur permettre de
l'adopter ou de l'appliquer.
7, Dans le cas ou il s'agit d'un Etat federatif, les dispositions suivantes
seront appliquees:
a) a l'egard des conventions et des recommandations pour lesquelles le
gouvernement federal considere que, d'apres son systeme
constitutionnel, une action federale est appropriee, les obligations de
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l'Etat federatif seront les memes que celles des Membres qui ne sont
pas des Etats federatifs;
b) a l'egard des conventions et des recommandations pour lesquelles le
gouvernement federal considere que, d'apres son systeme
constitutionnel, une action de la part des etats constituants, des
provinces ou des cantons est, sur tous les points ou sur certains points,
plus appropriee qu'une action federale, ledit gouvernement devra:
i) conclure, en conformity avec sa Constitution et les Constitutions
des Etats constituants, des provinces ou des cantons interesses,
des arrangements effectifs pour que ces conventions ou
recommandations soient, au plus tard dans les dix-huit mois
suivant la cl6ture de la session de la Conference, soumises aux
autorites appropriees f6derales, ou ;a celles des Etats constituants,
des provinces ou des cantons en vue d'une action 16gislative ou de
toute autre action;
ii) prendre des mesures, sous reserve de l'accord des
gouvernements des Etats constituants, des provinces ou des
cantons interesses, pour 6tablir des consultations periodiques,
entre les autorites federales d'une part, et les autorites des (ftats
constituants, des provinces ou des cantons d'autre part, en vue de
developper a l'interieur de l'etat federatif une action coordonnee
destinee a donner effet aux dispositions de ces conventions et
recommandations;
iii) informer le Directeur general du Bureau international du Travail
des mesures prises en vertu du present article pour soumettre ces
conventions et recommandations aux autorites appropriees
federales, des (2tats constituants, des provinces ou des cantons,
en lui communiquant tous renseignements sur les autorites
considerees comme autorites appropriees et sur les decisions de
celles-ci;
iv) au sujet de chacune de ces conventions qu'il n'aura pas ratifiees,
faire rapport au Directeur general du Bureau international du
Travail, a des intervalles de temps appropries, selon ce que
decidera le Conseil d'administration, sur l'etat de la 16gislation et
de la pratique de la federation et des Etats constituants, des
provinces ou des cantons concernant la question qui fait l'objet de
la convention, en precisant dans quelle mesure if a ete donne ou
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l'on se propose de donner effet aux dispositions de la convention
par voie 16gislative, par voie administrative, par voie de contrats
collectifs ou par toute autre voie;
v) au sujet de chacune de ces recommandations, faire rapport au
Directeur general du Bureau international du Travail, a des
intervalles de temps appropries, selon ce que decidera le Conseil
d'administration, sur l'etat de la 16gislation et de la pratique de la
federation et de ses (2tats constituants, de ses provinces ou de ses
cantons concernant la question qui fait l'objet de la
recommandation, en precisant dans quelle mesure il a ete donne
ou l'on se propose de donner effet aux dispositions de la
recommandation et en indiquant quelles modifications de ces
dispositions semblent ou pourront sembler necessaires pour les
adopter ou les appliquer.
8. En aucun cas, l'adoption d'une convention ou d'une
recommandation par la Conference, ou la ratification d'une convention par
un Membre ne devront etre considerees comme affectant toute loi, toute
sentence, toute coutume ou tout accord qui assurent des conditions plus
favorables aux travailleurs interesses que celles prevues par la convention
ou la recommandation.
9. Surla proposition du Conseil d'administration, la Conference peut, a
la majorite des deux tiers des voix des delegues presents, abroger toute
convention adoptee conformement aux dispositions du present article s'il
apparaTt qu'elle a perdu son objet ou qu'elle n'apporte plus de contribution
utile a l'accomplissement des objectifs de l'Organisation.
Article 20
Enreqistrement aupres des Nations Unies
Toute convention ainsi ratifiee sera communiquee par le Directeur
general du Bureau international du Travail au Secretaire general des Nations
Unies, pour enregistrement conformement aux dispositions de l'article 102
de la Charte des Nations Unies, mais ne liera que les Membres qui l'ont
ratifiee.
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Article 21
Projets de conventions non adoptes par la Conf6rence
1. Tout projet qui, dans le scrutin final sur l'ensemble, ne recueillera
pas la majorite des deux tiers des suffrages exprimes par les Membres
presents peut faire l'objet d'une convention particuliere entre ceux des
Membres de l'Organisation qui en ont le desir.
2. Toute convention ainsi conclue sera communiquee par les
gouvernements interesses au Directeur general du Bureau international du
Travail et au Secretaire general des Nations Unies, pour enregistrement
conformement aux dispositions de l'article 102 de la Charte des Nations
Unies.
Document no 55
Règlement de la Conférence internationale du Travail,
articles 44-52
r Reqlement de la Conf6rence
internationale du Travail
Bureau international du Travail, Geneve, 2021
Partie 5. Proc6dure concernant les conventions
et recommandations
Article 44
Procedure d'inscription d'une question 0 l'ordre du jour de la Conference
La procedure appliquee par le Conseil d"administration pour inscrire une question
a I"ordre du jour de la Conference est r6gie par le Reglement du Conseil
d"administration ".
Article 45
Stades pr6paratoires de la pror6dure de simple discussion
1. Lorsqu"une question est r6gie par la procedure de simple discussion, le Bureau
41abore, aussit6t que possible, un rapport sommaire exposant la 16gislation et la pratique
dans les differents pays, ainsi que tous les autres 616ments d'information utiles, en meme
temps qu"un questionnaire 6tabli en vue de I"elaboration de conventions ou de
recommandations. Ce questionnaire demande aux gouvernements de consulter les
organisations d'employeurs et de travailleurs les plus representatives avant d"arreter
definitivement leurs reponses et de donner des reponses motiv6es. Le Bureau
communique le rapport et le questionnaire aux gouvernements de telle maniere qu'ils
leur parviennent dix-huit mois au moins avant I"ouverture de la session de la Conference
;a laquelle la question doit @tre discut6e.
2. Les reponses devraient parvenir au Bureau aussit6t que possible et en tout cas
onze mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conference 5 laquelle la
question doit Otre discutee. Dans le cas d"etats federaux ou de pays dans lesquels il est
n6cessaire de traduire les questionnaires dans la langue ou les langues nationales, le
delai de sept mois prevu pour la preparation des r6ponses sera porte :a huit mois si le
gouvernement interess6 demande qu"il en soit ainsi.
3. Sur la base des reponses regues, le Bureau 61abore un rapport definitif
contenant 6ventuellement un ou plusieurs projets de convention ou de
recommandation. Ce rapport est communiqu6 aussit6t que possible aux gouvernements
parle Bureau, lequel fera tous ses efforts pour que ce rapport leur parvienne quatre mois
au moins avant I"ouverture de la session de la Conference a laquelle la question doit etre
discuMe.
4. Ces dispositions ne s"appliquent que dans les cas OLI la question a ete inscrite ;a
l'ordre du jour de la Conference vingt-six mois au moins avant l'ouverture de la session
' Note de l'editeur: Les dispositions applicables figurent aux articles5.1 a 5.4 et 6.2, du
ROglement du Conseil d'administration.
de la Conference a laquelle elle doit etre discutee. Si la question a ete inscrite a l'ordre
du jour moins de vingt-six mois avant l'ouverture de la session dela ConMrence alaquelle
elle doit etre discut6e, il appartiendra au Conseil d'administration d'approuver un
programme comportant des d61ais reduits, ou a son bureau en consultation avec le
Directeur general, s'il n'est pas realiste pour le Conseil d'administration d'approuver un
programme detaille.
5. Si une question a I"ordre du jour fait l'objet d'une conference technique
preparatoire, le Conseil d'administration d6cidera si le Bureau devrait:
a) soit communiquer aux gouvernements un rapport sommaire et un questionnaire
comme il est pr6vu au paragraphe 1;
b) soit 61aborer le rapport definitif prevu au paragraphe 3 directement surla base des
travaux de la conference technique pr6paratoire.
Article 46
Stades preparatoires de la proc6dure de double discussion
1. Lorsqu'une question est regie par la procedure de double discussion, le Bureau
61abore, aussit6t que possible, un rapport preliminaire exposant la 16gislation et la
pratique dans les differents pays, ainsi que tous les autres 616ments d"information utiles,
en meme temps qu'un questionnaire demandant aux gouvernements de consulter les
organisations d'employeurs et de travailleurs les plus representatives avant d'arreter
definitivement leurs reponses et de donner des reponses motiv6es. Le Bureau
communique le rapport et le questionnaire aux gouvernements de telle maniere qu"ils
leur parviennent dix-huit mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conference
;r laquelle la premiere discussion doit avoir lieu.
2. LesreponsesdevraientparvenirauBureauaussit6tquepossibleetentoutcas
onze mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conference ;r laquelle la
premiere discussion doit avoir lieu. Dans le cas d'etats f6deraux ou de pays dans lesquels
il est necessaire de traduire les questionnaires dans la langue ou les langues nationales,
le d61ai de sept mois prevu pour la preparation des reponses sera porte ;g huit mois si le
gouvernement int6resse demande qu'il en soit ainsi.
3. Sur la base des reponses regues, le Bureau 61abore un nouveau rapport
indiquant les principales questions a considerer par la Conference. Ce rapport est
communiqu6 aussit6t que possible aux gouvernements par le Bureau, lequel fera tous
ses efforts pour que ce rapport leur parvienne quatre mois au moins avant l'ouverture
de la session de la Conference ;a laquelle la premiere discussion doit avoir lieu.
4. Ces rapports sont soumis ;a une discussion de la Conference, soit en s6ance
pleniere, soit en commission. Si la Conference decide que la question est susceptible de
faire l'objet d'une convention ou d'une recommandation, elle doit adopter des
conclusions appropriees, apres leur renvoi au ComiM de r6daction, et peut d6cider:
a) soit d'inscrire la question a I"ordre du jour de la session suivante, conform6ment a
I"article 16, paragraphe 3, de la Constitution;
b) soit de demander au Conseil d'administration d'inscrire la question ;a l'ordre du jour
d'une session ulterieure.
5. Les dispositions enoncees aux paragraphes 1 a 4 ne s'appliquent que dans le
cas ou la question a et6 inscrite a l'ordre du jour de la Conference dix-huit mois au moins
avant I"ouverture de la session de la Conference ;a laquelle la premiere discussion doit
avoir lieu. Si la question a 6te inscrite ;r l'ordre du jour moins de dix-huit mois avant
I"ouverture de la session de la Conference ;a laquelle la premiere discussion doit avoir
lieu, il appartiendra au Conseil d'administration d'approuver un programme comportant
des delais r6duits, ou ;a son bureau en accord avec le Directeur general, s"il n'est pas
realiste pour le Conseil d"administration d"approuver un programme d6taill6.
6. Sur la base des reponses regues au questionnaire vis6 au paragraphe I et en
tenant compte de la premiere discussion par la Conference, le Bureau 61abore un ou
plusieurs projets de convention ou de recommandation et les communique aux
gouvernements de telle maniere qu'ils leur parviennent au plus tard deux mois a partir
de la cl6ture de la session de la Conference, en leur demandant de faire connaitre, dans
un delai de trois mois, apres consultation des organisations d'employeurs et de
travailleurs les plus representatives, les amendements ou observations 6ventuels qu"ils
ant a pr6senter.
7. Sur la base des r6ponses regues, le Bureau prepare un rapport final contenant
les projets de convention ou de recommandation, amendes s'il y a lieu. Ce rapport est
communique par le Bureau aux gouvernements de maniere qu'il leur parvienne trois
mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conference 5 laquelle la seconde
discussion doit avoir lieu.
8. Les dispositions 6noncees aux paragraphes 6 et 7 ne s'appliquent que dans le
cas OLI un intervalle de onze mois s"ecoule entre la date de cl6ture de la session de la
Conference a laquelle la premiere discussion a eu lieu et la date d'ouverture de la session
suivante de la Conference. Si cet intervalle est inferieur ;g onze mois, il appartiendra au
Conseil d'administration, ou a son bureau en accord avec le Directeur general,
d"approuver un programme comportant des delais reduits, s"il n'est pas realiste pour le
Conseil d'administration d'approuver un programme detaille.
Article 47
Consultation de rOrganisation des Nations Unies
et des institutions speciali'Aes
Lorsqu'une question inscrite a I"ordre du jour de la Conference en vue de l'adoption
d'une convention ou d'une recommandation a trait a des sujets interessant directement
I"Organisation des Nations Unies ou une ou plusieurs institutions specialis6es, le Bureau
consulte I"organisation ou les organisations interessees au moment oa if demande aux
gouvernements leurs commentaires sur le pro')et de convention ou de recommandation.
Le resultat de ces consultations est consigne dans le rapport pr6sente a la Conference.
Article 48
ProrAdure a suivre pour l'examen de projets d'instrument
1. A moins qu'elle n'en decide autrement, la Conference prend comme base de
discussion les projets de conventions ou de recommandations prepares par le Bureau et
les renvoie a une commission pour rapport.
2. Lorsque la Conference a renvo% ?aune commission uniquement un projet de
recommandation, la decision de la commission de proposer une convention ;a la
Conference pour adoption (en lieu et place ou en plus de la recommandation) exige la
majority des deux tiers des suffrages exprimes.
3. Si le projet de convention ou de recommandation a ete renvo% ;a une
commission, les dispositions du projet d"instrument, telles qu'elles ont ete adopt6es par
la commission, sont soumises au Comity de redaction pour la preparation d"un texte
definitif. Apr's avoir ete approuve par la commission, ou par son bureau en vertu des
pouvoirs que celle-ci lui aura delegu6s, le texte definitif est soumis a la Conference pour
adoption article par article.
4. Aucun amendement ;a ce texte ne pourra plus etre admis, sauf decision
contraire du President de la Conference, d'accord avec les trois Vice-presidents.
5. Une fois que le texte de la convention ou de la recommandation est adopt6
article par article, la Conference procede a un vote final surl"adoption de la convention
ou de la recommandation, dans les conditions prevues 5 l'article 19 de la Constitution.
6. Le vote final ne peut avoirlieu avant le lendemain du jour ou le texte approuv6
par la commission a ete mis ;a la disposition des delegues et en aucun cas moins de 14
heures apres la mise a disposition du texte.
Article 49
Procedure a suivre lorsqu'une convention n'obtient
pas la majority des deux tiers
Si une convention n'obtient pas, au vote final, la majority des deux tiers des voix
requise pour son adoption, mais seulement la majorite simple, la Conference decide
immediatement si la convention doit Otre renvo%e au Comit6 de redaction pour Otre
transformee en recommandation. Dans le cas oa la Conference se prononce en faveur
du renvoi au ComiM de redaction, les propositions contenues dans la convention sont
soumises a l'approbation de la Conference, sous forme d'une recommandation, avant la
fin de la session.
Article 50
Traductions officielles
Apr's l'adoption des textes anglais, espagnol et fran4ais, les conventions ou
recommandations pourront, ;a la demande des gouvernements interesses, faire l'objet
de traductions officielles 6tablies par le Directeur general. Les gouvernements interesses
pourront considerer ces traductions comme faisant foi dans leurs pays respectifs pour
l'application des conventions et des recommandations.
Article 51
Proc6dure A suivre en cas de revision d'une convention
ou d'une recommandation
1. Lorsque I"ordre du jour de la Conference comporte la revision totale ou
partielle d'une convention ou d"une recommandation qu'elle a adoptee ant6rieurement,
le Bureau lui soumet des projets d'amendement qui sont 6tablis sur la base des
conclusions du rapport du Conseil d'administration recommandant une revision totale
ou partielle et qui correspondent 5 la ou aux questions dont la revision figure a l'ordre
du jour.
2. A moins qu'elle n"en decide autrement, la Conference prend comme base de
discussion les projets d"amendement prepares par le Bureau et les renvoie (l une
commission pour rapport.
3. Si les projets d"amendement sont renvo%s a une commission, les
amendements ainsi que les amendements apportes en consequence ;a des dispositions
inchangees de la convention ou de la recommandation en cours de revision, tels qu'ils
ont 6te adoptes par la commission, sont soumis au Comite de r6daction qui les rassemble
avec les dispositions inchang6es de la convention ou de la recommandation en cours de
revision de maniere ;i 6tablir le texte d6finitif de l'instrument sous sa forme revisee.
Apr's avoir et6 approuve par la commission, ou par son bureau en vertu des pouvoirs
que celle-ci lui aura delegues, ce texte est soumis a la Conference pour adoption article
par article.
4. Aucun amendement ;r ce texte ne pourra plus Otre admis, sauf decision
contraire du President de la Conference, d'accord avec les trois Vice-presidents.
5. Une fois que le texte de la convention ou de la recommandation est adopte
article par article sous sa forme revisee, la Conference procede :a un vote final sur
I"adoption de la convention ou de la recommandation, dans les conditions prevues a
I"article 19 de la Constitution.
6. Le vote final ne peut avoirlieu avant le lendemain du jour ou le texte approuv6
par la commission a ete mis a la disposition des delegues et en aucun cas moins de 14
heures apres la mise a disposition du texte.
7. Conform6ment a l'article 14 de la Constitution et sous reserve des dispositions
de l'article 16, paragraphe 3, de la Constitution, la Conference ne peut, a aucun moment
lors de la procedure de revision, reviser totalement ou partiellement une convention ou
une recommandation qu'elle a adoptee ant6rieurement, hormis en ce qui concerne la ou
les questions portees a l'ordre du jour de la session par le Conseil d'administration.
Article 52
Procedure a suivre en CCIS d'abrogation ou de retrait de conventions
et de recommandations
1. Lorsqu'une question d'abrogation ou de retrait est inscrite a l'ordre du jour de
la Conference, le Bureau communique aux gouvernements, de telle maniere qu'ils leur
parviennent dix-huit mois au moins avant l'ouverture de la session de la Conference ;a
laquelle la question doit etre discutee, un bref rapport ainsi qu'un questionnaire leur
demandant d'indiquer, dans un delai de douze mois, leur position motivee au sujet de
l'abrogation ou du retrait propose, en fournissant les 616ments d'information pertinents.
Ce questionnaire demande aux gouvernements de consulter les organisations
d"employeurs et de travailleurs les plus representatives avant d'arrOter definitivement
leurs reponses. Sur la base des reponses regues, le Bureau 61abore un rapport contenant
une proposition definitive et le met a la disposition des gouvernements quatre mois
avant la session de la Conference.
2. La Conference peut decider d'examiner ce rapport et la proposition qu'il
contient directement en s6ance pleniere ou de le renvoyer ;g la Commission des affaires
gen6rales. Au terme de cet examen en pleniere ou au vu du rapport de la Commission
des affaires generales, le cas 6ch6ant, la Conference decide par consensus ou, ;a defaut,
par un vote preliminaire :a la majorit6 des deux tiers, de soumettre a un vote final la
proposition formelle d'abrogation ou de retrait. Ce vote final par appel nominal aura lieu
au plus t6t le lendemain de la decision preliminaire.
Document no 56
Règlement du Conseil d’administration, articles 5.1-5.4
r Recueil de reqles applicables
au Conseil d'administration
du Bureau international
du Travail
Bureau international du Travail, Geneve, 2021
r Reqlement du Conseil d'administration *
Adopte par le Conseil d'administration le 23 mars 1920. Modifie par le
Conseil les 12 et 13 octobre 1922; 2 fevrier, 12 avril et 18 octobre 1923; 13 juin
1924; 10 janvier et 4 avril 1925; 27 et 28 avril 1928; 5 juin 1930; 21 et 22 avril et
17octobre 1931; 6avril et 26octobre 1932; 24janvier, 27avril, 1"'juin et
28 septembre 1934; 2 fevrier 1935; 2 juin 1936; 5 fevrier 1938; 20 juin 1947;
19 mars, 14 juin et 11 decembre 1948; 4 juin 1949; 3 janvier, 11 mars, 16 juin et
21 novembre 1950; 2 juin 1951; 12 mars 1952; 29 mai 1953; 9 mars 1954; 2 mars
1955a 6 mars 1956; 8 mars et 14 novembre 1963; 1"' juin 1973; 15 novembre
1974; 5 mars et 19 novembre 1976; 2 mars et 27 mai 1977; 3 mars 1978; 1'-' juin
1979; 18 novembre 1982; 28 fevrier 1985; 14 novembre 1989, 3 mars et
16 novembre 1993; 20 novembre 1997; 27 mars 1998; 18 novembre 1999;
17 novembre 2005; 20 mars 2008; 19 novembre 2009; 20 juin et 18 novembre
2011; et 21 mars 2016.
" L'OIT s'engage a promouvoir l'egalite entre les femmes et les hommes. A cette fin, des
amendements au present Reglement ont ete adoptes par le Conseil d'administration A sa
306f session (novembre 2009). Les dispositions du present Reglement dans lesquelles est utilise
le genre masculin, au singulier ou au pluriel, se referent sans distinction 5 une femme ou ;a un
homme ou, suivant le contexte, a des femmes ou 5 des hommes.
Section 5 Conduite des travaux
Article 5.1
ProrAdure d'inscription d'une question & l'ordre du jour
de la Conference internationale du Travail
5.1.1. Lorsque le Conseil d'administration est appele a discuter, pour la
premiere fois, une proposition d'inscrire une question a I"ordre du jour de la
Conference, if ne peut, sauf assentiment unanime des membres presents,
prendre de decision qu'a la session suivante.
5.1.2. Quand une question a inscrire a l'ordre du jour de la Conference
implique la connaissance des I%islations des differents pays, le Bureau saisit le
Conseil d"un expose succinct des lois en vigueur et des principales modalites de
leur application en ce qui concerne la question proposee. Cet expose doit etre
soumis au Conseil avant qu"il prenne une decision.
5.1.3. Lorsqu'il examine l'eventualite d'inscrire une question a I"ordre du
jour de la Conference, le Conseil d'administration peut, s"il y a des circonstances
speciales qui le justifient, decider de soumettre cette question a une conference
technique preparatoire chargee de lui faire rapport sur cette question
prealablement a son inscription a I"ordre du jour. Le Conseil d'administration
peut 6galement decider, dans les memes conditions, de convoquer une
conference technique preparatoire au moment ou if inscrit une question a l'ordre
du jour de la Conference.
5.1.4. A moins que le Conseil d"administration n'en decide autrement, une
question inscrite a l'ordre du jour de la Conference en vue de I"adoption d'une
convention ou d"une recommandation est consideree comme soumise a la
Conference pour faire l'objet d'une double discussion.
5.1.5. En cas d"urgence speciale ou si d"autres circonstances particulieres
le justifient, le Conseil d"administration peut, a la majority des trois cinquiemes
des votes exprimes, decider de soumettre une question a la Conference pour
faire I"objet d"une simple discussion, en vue de l'adoption d"une convention ou
d'une recommandation.
5.1.6. Lorsque le Conseil d'administration decide qu"une question doit
faire I"objet d'une conference technique preparatoire, il doit determiner la date,
la composition et le champ des travaux de cette conference preparatoire.
5.1.7. Le Conseil d'administration doit etre represente a ces conferences
techniques qui, en principe, doivent etre de caractere tripartite.
5.1.8. Chaque delegue a ces conferences peut se faire accompagner d"un
ou de plusieurs conseillers techniques.
5.1.9. Pour chaque conference preparatoire convoquee par le Conseil
d'administration, le Bureau prepare un rapport destine a faciliter un 6change de
vues sur toutes les questions soumises (3 ladite conference; ce rapport contient
notamment un expose de la 16gislation et de la pratique existant dans les
differents pays.
Article 5.2
Procedure relative A rinscription al'ordre du jour de la Conference
de la revision totale ou partielle d'une convention
5.2.1. Lorsque le Conseil d'administration, conformement aux
dispositions d"une convention, juge necessaire de presenter a la Conference un
rapport sur l'application de ladite convention et d"examiner s"il convient
d'inscrire la question de sa revision totale ou partielle a l'ordre du jour de la
Conference, le Bureau soumet au Conseil toutes les informations dont il dispose,
notamment sur la 16gislation et l'application de ladite convention dans les etats
qui l'ont ratifiee, comme sur la 16gislation et son application relativement a
I"objet de la convention dans ceux qui ne I"ont pas ratifiee. Ce projet de rapport
du Bureau est communique pour observations a tous les Membres de
I"Organisation.
5.2.2. Apr's un delai de six mois a partir de I"envoi aux gouvernements et
aux membres du Conseil d"administration du rapport du Bureau mentionne au
paragraphe 5.2.1, le Conseil arrete les termes de ce rapport et examine si oui ou
non il y a lieu d'envisager l'inscription de la revision totale ou partielle de la
convention ;i I"ordre du jour de la Conference.
5.2.3. Si le Conseil considere qu'il n'y a pas lieu d"inscrire la revision totale
ou partielle de la convention a I"ordre du jour de la Conference, le Bureau
communique a la Conference ledit rapport.
5.2.4. Si le Conseil considere qu'il y a lieu d"envisager l'inscription de la
revision totale ou partielle de la convention, le Bureau envoie ledit rapport aux
divers gouvernements des Membres et leur demande leur avis, en signalant les
points qui ont specialement retenu I"attention du Conseil.
s.;.s. Ensuite le Conseil, a l'expiration d"un delai de quatre mois a dater
de l'envoi du rapport aux gouvernements, et en tenant compte des reponses des
gouvernements, adopte le rapport final et d6finit exactement la ou les questions
qu"il inscrit a I"ordre du jour de la Conference.
5.2.6. Si le Conseil, hors le cas ou il juge necessaire de presenter a la
Conference un rapport sur I"application d'une convention conformement aux
dispositions de ladite convention, decide qu'il convient d'envisager l'inscription
a I"ordre du jour de la Conference d'une revision totale ou partielle d"une
convention, le Bureau notifie cette decision aux gouvernements des Membres et
leur demande leur avis, en signalant les points qui ont specialement retenu
l'attention du Conseil.
5.2.7. Ensuite le Conseil, a I"expiration d"un delai de quatre mois a dater
de I"envoi de cette notification aux gouvernements, et en tenant compte des
reponses des gouvernements, definit exactement la ou les questions qu'il inscrit
a I"ordre du jour de la Conference.
Article 5.3
Procedure relative 0 l'inscription 9 l'ordre du jour de la Conference
de la revision totale ou partielle d'une recommandation
5.3.1. Si le Conseil d"administration considere qu'il y a lieu d"inscrire la
revision totale ou partielle d"une recommandation a I"ordre du jour de la
Conference, le Bureau notifie cette decision aux gouvernements des Membres
et leur demande leur avis, en signalant les points qui ont specialement retenu
l'attention du Conseil.
5.3.2. Le Conseil d"administration, a l'expiration d"un delai de quatre mois
a dater de l'envoi de cette notification aux gouvernements et en tenant compte
des reponses des gouvernements, definit exactement la ou les questions qu'il
inscrit :a I"ordre du jour de la Conference.
Article 5.4
Proc6dure relative ffi rinscription a l'ordre du jour de la Conf6rence
de l'abrogation d'une convention en vigueur ou du retrait
d'une convention ou d'une recommandation
5.4.1. Lorsqu"il est envisage d"inscrire a I"ordre du jour de la Conference
une question qui implique soit I"abrogation d"une convention en vigueur, soit le
retrait d"une convention qui n'est pas en vigueur ou celui d'une
recommandation, le Bureau saisit le Conseil d'administration d'un rapport
contenant toutes les informations pertinentes dont il dispose a ce sujet.
5.4.2. Les dispositions de I"article 6.2 concernant la fixation de l'ordre du
jour de la Conference ne s'appliquent pas a la decision d'inscrire a I"ordre du jour
d'une session determinee de la Conference une question relative a une telle
abrogation ou a un tel retrait. Une telle decision devra, dans toute la mesure
possible, faire I"objet d"un consensus ou, si un tel consensus ne peut @tre atteint
lors de deux sessions successives du Conseil, obtenir la majoriM des quatre
cinquiemes des membres du Conseil disposant du droit de vote lors de la
deuxieme de ces sessions.
Document no 57
Conférence des Nations Unies sur le droit des traités,
Documents officiels, première session, 1968, séances de
la Commission plénière, septième séance, Déclaration de
l’observateur de l’Organisation internationale du Travail,
pp. 40-41
CONFÉRENCE
DES NATIONS UNIES
SUR LE DROIT
DES TRAITÉS
Première session
Vienne, 26 mars-24 mai 1968
DOCUMENTS OFFICIELS
Comptes rendus analytiques
des séances plénières et des séances
de la Commission plénière
NATIONS UNIES
NOTE INTRODUCTIVE
Ce volume contient les comptes rendus analytiques des séances plénières de la Conférence
et des séances de la Commission plénière tenues pendant la première session de la
Conférence. Les documents soumis à la Conférence seront publiés après la clôture de la
deuxième session.
Les comptes rendus des séances plénières ont été distribués à l'origine sous forme
ronéographiée sous la cote A/CONF.39/SR.1 à SR.5 et ceux de la Commission plénière
sous la cote A/CONF.39/C.1/SR.1 à SR.83. Ils contiennent les corrections apportées aux
comptes rendus provisoires à la demande des délégations et les autres modifications qu'ont
exigées les travaux d'éditions.
* *
Les cotes des documents de l'Organisation des Nations Unies se composent de lettres
majuscules et de chiffres. La mention dans un texte d'une cote ainsi composée signifie qu'il
s'agit d'un document de l'Organisation.
A/CONF.39/11
PUBLICATION DES NATIONS UNIES
Numéro de vente : F.68. V. 7
Prix: 6,50 dollars des Etats-Unis
(ou l'équivalent en monnaie du pays)
40 Séances de la Commission plénière
SEPTIÈME SÉANCE
Lundi 1" avril 1968, à 15 h 20
Président : M. ELIAS (Nigeria)
Examen de la question du droit des traités conformément
à la résolution 2166 (XXI) adoptée par l'Assemblée
générale le 5 décembre 1966 (suite)
ARTICLE 3 (Accords internationaux n'entrant pas dans le
cadre des présents articles) [suite]
1. Le PRÉSIDENT invite les membres de la Commission
à poursuivre l'examen de l'article 3 du projet de la Commission
du droit international1.
2. M. JENKS (Observateur de l'Organisation internationale
du Travail), prenant la parole sur l'invitation du
Président, se félicite de ce que la Commission plénière ait
pris la décision de recommander que la question des
accords auxquels sont parties les sujets du droit international
autres que les Etats soit examinée par la Commission
du droit international. Le Bureau international
du Travail serait heureux de participer pleinement à cette
tâche qui doit permettre de régler notamment les points
suivants: comment une codification des règles régissant
ces accords deviendrait obligatoire pour les organisations
internationales intéressées; comment elle ménagerait la
possibilité d'adapter les règles générales pour tenir compte
des conditions propres aux différentes organisations et
comment elle permettrait à ces organisations de croître
et de se développer.
3. Les articles 3 et 4 du projet énoncent des principes
d'importance capitale pour le développement à long
terme des organisations internationales et du droit
international. L'article 4 formule à la fois une règle et une
exception à cette règle: la règle c'est que les traités
adoptés au sein d'une organisation internationale sont
soumis en principe au droit général des traités, et l'exception,
c'est que cette règle ne joue pas lorsqu'il s'agit de
questions auxquelles s'applique une lex specialis en vertu
de telle ou telle règle applicable, y compris la pratique
établie, de l'organisation intéressée.
4. Cette règle est importante car la situation deviendrait
très confuse s'il existait un droit des traités différent pour
les instruments adoptés au sein de chacune des organisations
internationales ou régionales qui sont déjà 40 et dont
le nombre augmentera peut-être. Rares sont celles qui
pourraient élaborer leur propre ensemble de règles et
aucune ne pourrait prétendre suivre une pratique spéciale
ou se réclamer de besoins spéciaux en ce qui concerne
l'ensemble du droit des traités. Telle n'est pas, en tout cas,
la position adoptée par l'Organisation internationale du
Travail.
5. L'exception est elle aussi importante: il est des cas
en effet où une organisation a, en matière de conventions,
des règles spéciales et une pratique bien établie qui
forment un ensemble d'obligations internationales plus
cohérent, plus stable et mieux adapté aux exigences de la
Pour la liste des amendements proposés, voir 6e séance, note 4.
situation que celui qu'on obtiendrait en appliquant les
dispositions plus souples du droit général. C'est sous
l'égide de l'Organisation internationale du Travail que
128 conventions internationales du travail ont été ratifiées
par plus de 115 Etats membres et 1 200 déclarations
d'acceptation en vue de leur application à d'autres
territoires. Ce faisceau d'obligations est régi par les
dispositions de la Constitution de TOIT et par une
pratique bien établie dont les débuts remontent à près de
50 ans. L'OIT n'est sans doute pas la seule organisation
à suivre une pratique particulière en matière de droit des
traités, mais seules la Société des Nations et l'Organisation
des Nations Unies ont à elles deux une expérience qui
puisse se comparer à la sienne quant à la durée, à la
variété et à l'étendue de leurs activités. La Conférence est
en droit de savoir quelle incidence le projet d'articles aura
sur la manière dont l'OIT s'acquittera de ses obligations
et, de son côté, l'OIT est en droit d'espérer que la Conférence
tiendra pleinement compte des obligations assumées
par les Membres de l'Organisation des Nations Unies en
tant que membres de l'Organisation internationale du
Travail.
6. Dans certains cas, il y a visiblement incompatibilité
entre les règles et la pratique de l'OIT et les dispositions
du projet d'articles; une modification des premières qui,
de toute façon, ne pourrait avoir d'effet rétroactif sur les
conventions auxquelles les Etats membres sont déjà
parties, serait incompatible avec la structure constitutionnelle
de l'OIT et avec l'objet des conventions du
travail. Dans d'autres cas, on ne pourrait faire concorder
les règles et la pratique de l'OIT avec les dispositions du
projet d'articles qu'en « forçant » l'interprétation des
unes ou des autres ou en modifiant artificiellement
certaines des règles actuelles de l'OIT, ce qui n'est pas
absolument indispensable. Dans d'autres cas enfin, il
faudrait, pour obtenir un résultat raisonnable et équitable,
interpréter le projet d'articles en tenant compte des règles
et de la pratique établies de l'OIT.
7. Il serait parfois inutile de discuter pour rattacher une
situation à telle ou telle de ces catégories.
8. L'article 8, par exemple, prévoit que l'adoption du
texte d'un traité lors d'une conférence internationale
s'effectue à la majorité des deux tiers des Etats participant
à la conférence, à moins que ces Etats ne décident, à la
même majorité, d'appliquer une règle différente. A
l'Organisation internationale du Travail, la règle est tout
autre: un texte est adopté à la majorité des deux tiers des
suffrages exprimés par les délégués présents, mais la moitié
des délégués ayant le droit de vote ne représentent pas des
gouvernements.
9. L'article 9 prévoit que le texte d'un traité est arrêté
comme authentique et définitif suivant la procédure
établie dans ce texte ou convenue par les Etats participant
à sa rédaction ou, à défaut d'une telle procédure, par
l'acte d'authentification accompli par les représentants
des Etats, alors qu'aux termes de la Constitution de
l'OIT, les conventions de l'OIT sont authentifiées par la
signature du Président de la Conférence générale et du
Directeur général.
10. L'article 12 traite de l'adhésion. Les conventions de
l'OIT sont conclues dans le cadre des obligations prévues
par la Constitution en ce qui concerne leur application et
Septième séance — 1er avril 1968 41
toute adhésion qui n'engloberait pas ces obligations
serait donc inconcevable.
11. Les articles 16 à 20 traitent de la question des réserves.
Selon la pratique de l'OIT, les réserves incompatibles avec
l'objet et le but du traité sont déclarées irrecevables et ce
principe a toujours été respecté. Les procédures prévues
pour les réserves dans le projet d'articles, ne peuvent
s'appliquer dans le contexte de l'OIT en raison du
caractère tripartite de cette organisation. Certaines
conventions internationales du travail demandent à être
appliquées avec beaucoup de souplesse pour répondre
à des situations très diverses. Toutefois, les dispositions
que la Conférence internationale du Travail juge sages
et nécessaires sont incorporées dans le texte même des
conventions et peuvent, si elles se révèlent inappropriées,
être revisées à tout moment selon les procédures normales.
Toute autre méthode ferait perdre au code international
du travail son caractère de code de normes communes.
12. La pratique de l'OIT en matière d'interprétation fait
une plus large part aux travaux préparatoires que l'article
28 du projet d'articles.
13. En ce qui concerne les liens entre traités successifs
portant sur la même matière, ainsi que l'amendement et
la modification des traités, l'OIT a une très large expérience
et elle a créé toute une branche du droit et de la pratique
14. Les règles de l'OIT qui régissent la procédure de
revision des conventions et les effets juridiques de la
revision diffèrent de celles que prévoit l'article 36, où
figure la clause de sauvegarde « A moins que le traité
n'en dispose autrement », et sont mieux adaptées aux
besoins dans ce domaine. Certaines seulement des règles
pertinentes figurent dans les conventions; les autres
découlent de la Constitution et des règles de procédure
formulées dans le règlement.
15. Quelques conventions internationales du travail
autorisent expressément la modification de certaines de
leurs dispositions, généralement par des accords inter se,
à condition qu'il ne soit pas porté atteinte aux droits des
autres parties et que l'accord inter se assure une protection
équivalente. Toutefois, dans la majorité des conventions
du travail, de tels accords seraient jugés incompatibles
avec l'objet et le but du traité dans son ensemble; ce
serait le cas par exemple d'une convention portant sur
l'un des droits fondamentaux de l'homme. De tels
problèmes ne pourraient être réglés de manière satisfaisante
en se référant aux dispositions de l'article 37 du
projet. La Constitution de l'OIT confère aux parties
intéressées autres que les gouvernements qui sont parties
à une convention le droit d'engager des procédures
relatives à l'application de cette convention et aucun
accord inter se ne saurait porter atteinte à ce droit, qui
découle directement de la Constitution.
16. L'article 57 indique les conséquences qu'entraîné la
violation substantielle d'un traité multilatéral et les
articles 62 à 64 exposent la procédure à suivre quand on
allègue une telle violation. Les articles 22 à 34 de la
Constitution de l'OIT prévoient les procédures applicables
au cas où l'un des membres n'assurerait pas effectivement
l'exécution d'une convention internationale du travail
après l'avoir ratifiée. Ils prévoient entre autres que le
Conseil d'administration peut, le cas échéant, former une
commission d'enquête qui aura pour mission d'étudier la
violation invoquée. Ces articles de la Constitution constituent
une lex specialis mieux adaptée à l'application des
conventions internationales du travail que les dispositions
de caractère nécessairement général des articles 62 à 64.
17. M. Jenks ne suggère pas d'apporter une modification
quelconque au droit général tel qu'il est formulé dans le
projet d'articles ; il demande qu'il soit nettement reconnu
qu'une organisation internationale a le droit d'avoir une
lex specialis qui puisse être modifiée par des procédures
régulières conformément aux dispositions prévues dans
sa constitution. Les questions dont il s'agit ici ne sont
pas seulement des questions de procédure trop complexes
pour être réglées par des amendements de détail au projet
d'articles, elles ne peuvent être convenablement réglées
que par une disposition à la fois générale et complète.
Sur le plan pratique, l'importance que présentent ces
procédures pour les Etats Membres dépend du nombre
des conventions internationales du travail auxquelles ils
sont parties et elle doit être évaluée en fonction de
considérations à long terme de politique internationale
générale.
18. Le principe selon lequel les conventions adoptées au
sein d'une organisation internationale peuvent être
subordonnées à une lex specialis présente de l'importance
à long terme aussi bien que dans l'immédiat.
19. La technique de la législation internationale est encore
si imparfaite qu'il faut ménager la possibilité de mettre
au point, selon les besoins, des procédures spéciales répondant
à des fins spéciales. S'agissant de la codification
du droit international, il a fallu d'abord s'assurer qu'elle
ne constituerait pas un obstacle mais au contraire un
stimulant pour le développement progressif du droit. Si le
droit des traités avait été codifié 20 ans plus tôt, une
grande partie du présent projet d'articles n'y aurait pas
figuré. Le texte de l'article 4 a la souplesse nécessaire
pour permettre la réalisation progressive des objectifs à
long terme de la Charte des Nations Unies et M. Jenks
espère que cet article sera adopté a peu près dans sa
forme actuelle.
20. M. AUGE (Gabon) indique que la délégation de son
pays a présenté un amendement (A/CONF.39/C.1/L.41)
qui est destiné à être soumis à l'examen du Comité de
rédaction et qui a pour objet de rendre plus clair le texte
de l'article 3. Les mots « à laquelle ils seraient soumis
indépendamment de ces derniers » ont été supprimés car
il n'en est pas fait mention dans le commentaire de la
Commission du droit international. Le premier membre
de phrase « le fait que les présents articles ne se réfèrent
pas » a également été supprimé.
21. M. KEBRETH (Ethiopie) souligne l'importance de
l'article 3, qui a pour but d'affirmer le caractère obligatoire
des accords verbaux et des accords conclus entre des
Etats et d'autres sujets du droit international ou entre ces
autres sujets du droit international. La Commission paraît
s'être préoccupée surtout de savoir si les accords verbaux
et les accords qui ne sont pas conclus exclusivement entre
Etats relèvent ou non du droit des traités. Le projet de
convention en cours d'élaboration doit être appelé à devenir
l'instrument principal où se trouveront énoncées
les règles 'de fond applicables, dans toute la mesure
possible, à tous les accords internationaux; car, en derDocument
no 58
CIT, 70e session, 1984, Rapport du Directeur général,
pp. 3-76
Conférence internationale du Travail
70" session 1984
Rapport du Directeur général
Bureau international du Travail Genéve
ISBN 92-2-203433-3
rssN 0251-3218
Premiire édition 1984
Les désignations utilisées dans cette publication, qui sont conformes d la pratique des
Nations Unies, et la présentation des données qui y figurent n'impliquent de la part du
Bureau international du Travail aucune prise de position quant au statut juridique de tel ou
tel pays ou territoire, ou de ses autorités, ni quant au tracé de ses frontiéres.
Les articles, études et autres textes signés n'engagent que leurs auteurs et leur publication ne
signifie pas que le Bureau international du Travail souscrit aux opinions qui y sont exprimées.
Les publications du Bureau international du Travail peuvent étre obtenues dans les
principales librairies ou auprés des bureaux du BIT. On peut aussi se les procurer directement,
de méme qu'un catalogue ou une liste des nouvelles publications, á I'adresse suivante:
Publications du BIT, Bureau international du Travail, CH-I211 Genéve 22, Suisse.
Imprimé en Suisr
TABLE DES MATrEnes
Introduction
Partie I: Normes internationales du travail
Introduction
Elaboration et contenu des normes internationales du travail
Principales caractéristiques de l'action normative de I'OIT
Etat des ratifications
La dénonciation. . .
Révision et consolidation des norrnes de I'OIT
Les limites de I'action normative
R6les respectifs des conventions et des recommandations, et utilisation
des conventions promotionnelles .
La souplesse des normes
Fixation de I'ordre du jour de la Conférence . . .
Mesures pour faciliter la participation des Etats Membres á l'élaboration
des norrnes et pour améliorer les procédures de la Conference
Les clauses d'équivalence d'ensemble
Conditions d'entrée en vigueur des conventions . . .
Contróle de l'application des nornes de I'OIT
Principales caractéristiques du contrdle de I'OIT
L'impact du contrdle de I'OIT
Composition de la commission d'experts
Méthodes d'évaluation utilisées dans le contrdle
Méthodes de travail de la commission de la Conference . .
Plaintes et réclamations
Mécanisme spécial pour l'examen des plaintes en violation des droits
syndicaux
Etudes spéciales sur la situation des syndicats et le systéme des
relations professionnelles dans certains pays d'Europe . . . . . . . .
Mesures promotionnelles en matiére de normes internationales du travail
Contacts directs, missions consultatives, conseillers régionaux
Autres services consultatifs
V
3
6
7
9
t2
l3
14
l9
))
23
24
24
26
28
29
30
40
42
l5
l6
18
49
50
5l
53
Séminaires . .
Formation et manuels
Mesures visant á assurer une participation plus active des organisations
d'employeurs et de travailleurs et á promouvoir les consultations
tripartites nationales sur les questions relatives aux normes de
rOIT
Discussions régionales
Les normes de I'OIT et la coopération technique . . . .
L'application pratique des conventions . . .
L,a collaboration entre organisations pour l'élaboration et la mise en GuYre
des normes internationales
Remarques finales .
Partie II: Actiütés de I'OIT, 1983
Droits de I'homme et normes internationales du travail
Promotion de l'égalité
Relations professionnelles . . .
Administration du travail
Activités pour les travailleurs
Activités pour les employeurs
Programme international pour I'amélioration des conditions et du milieu
de travail (PIACT)
Sécurité sociale
Programme mondial de l'emploi
Formation
Coopératives . .
Activités sectorielles
Informations sur le travail et statistiques du travail
Activités régionales, y compris les principales réunions régionales
Institut international d'études sociales
Association internationale de la sécurité sociale
Centre international de perfectionnement professionnel et technique de
Turin
Les annexes au présent rapport figurent dans un volume séparé.
54
55
55
58
59
6l
63
70
79
84
87
90
92
96
97
t02
106
tt7
125
127
t34
136
150
t52
ts4
lv
I NTRODUCTI ON
Ce rapport est composé de deux parties. La seconde répond á I'obligation
qui incombe au Directeur général du BIT de soumettre chaque année á la
Conférence un rapport sur les activités de l'Organisation.
la partie I porte exclusivement sur le probléme de l'action normative de
I'OIT. La Conference se souviendra que lors de la 69" session, en juin 1983,
je I'avais informée de mon intention de proposer en 1984 á sa réflexion
comme théme de discussion ce probléme. Pourquoi ?
Ia premiére raison tient au fait que I'action normative a constitué, depuis
la création de I'oIT, I'outil par excellence pour promouvoir la justice sociale
dans un mouvement général auquel tous les Etats Membres sans exception
ont adhéré, á quelque date qu'ils aient décidé de participer aux travaux de
l'oIT et quels qu'aient été alors leur niveau de développement et leur systéme
politique et économique.
I¿ structure tripartite de I'OIT a constitué, dés l'origine, un puissant
stimulant pour cette @uvre législative dés lors que son objet n'a cessé d'étre
la protection des travailleurs et l'amélioration de leur condition par I'action
combinée des pouvoirs publics et des partenaires sociaux. En d'autres termes,
I'action normative de l'oIT découle de l'essence méme de I'institution, de
sa structure, de ses objectifs, de ses ambitions : promouvoir la justice sociale
dans des conditions propres par ailleurs á faire échec aux conséquences d'une
compétition déloyale entre les nations.
Personne ne conteste que I'euvre poursuivie depuis soixante-cinq ans,
unique dans le systéme des Nations lJnies, impressionnante par sa
dimension, est remarquable par l'étendue et la diversité des prescriptions
contenues dans les cent cinquante-neuf conventions internationales du
travail et les cent soixante-huit recommandations internationales du travail.
Ce travail de << sédimentation »» poursuivi au rythme moyen de cinq
instruments par an a été conduit par le conseil d'administration, auquel
revient le soin de fixer I'ordre du jour de la conférence, et par la conference
elle-méme avec la volonté d'épouser le mieux possible les besoins du monde
du travail.
V
Rapport du Directeur généra!
En coun de route, le Conseil et les organes qui en dépendent, de méme
que la Conférence, ont á de multiples moments évalué l'Guvre accomplie,
dressé un bilan, arrété ou envisagé des mesures pour I'améliorer.
Chacun s'accorde á penser que les résultats atteints par I'OIT dans le
vaste domaine dont elle a la charge font honneur á tous ceux qui ont mis
leur intelligence, leur compétence et leur foi au service de la cause de la
justice sociale dans la période extraordinairement troublée qui est celle de
notre temps. Si, globalement, les résultats peuvent étre jugés bons, est-ce á
dire qu'il n'y a pas d'ombre au tableau ? Certainement pas. Si certaines
conventions ont regu une large adhésion marquée par un nombre
impressionnant de ratifications, leur application laisse souvent á désirer,
quand elle n'est pas parfois méme entachée de violations flagrantes des
principes qu'elles contiennent. D'autres conventions n'ont pas requ le
nombre de ratifications nécessaires pour entrer en vigueur ou ne sont ratifiées
que par un nombre réduit d'Etats.
Au niveau de la préparation des normes, de leur examen par la
Conference, au niveau de leur ratification, de leur mise en application, de
leur contróle, des critiques ont été formulées de differents cótés et de
multiples questions ont été posées. Ces critiques et ces questions seront
largement évoquées dans I'analyse soumise á I'appréciation de la Conference
dans l'a partie I de ce rapport.
Dans cette analyse, le Bureau s'est efforcé, á partir de faits précis, de tirer
de l'action passée des enseignements pour I'avenir. En effet, je souhaite que
ce rÍlpport soit orienté ven l'avenir et réponde á la question de savoir ce que
I'OIT peut et doit faire á travers I'action normative (et á travers les autres
outils á sa disposition) pour améliorer la condition des travailleun, de tous
les travailleurs á I'usine, á la terre, dans les services, quels que soient leur
race, leur sexe, leur conviction politique, religieuse ou autre. Posée dans ces
termes la question engage la communauté internationale tout entiére, mais
elle l'engage dans la penpective historique marquée par l'écart énorme entre
pays riches et pauvres - s'esf ce qui est appelé le probléme Nord-Sud -, par la crise qui accentue cet écart, enfin par les changements technologiques
et structurels dont on commence á peine á percevoir les conséquences, tout
spécialement dans le domaine du travail et pour le monde du travail. Dans
cette perspective quel devrait étre le sens de la démarche de I'OIT ?
S'agissant de l'action passée, si certaines conventions peuvent étre tenues
pour caduques ou inopérantes, la grande majorité d'entre elles gardent tout
leur prix. Un nombre appréciable, portant en particulier sur la protection
des travailleurs, sur la politique de I'emploi et le développement des
ressources humaines, sur la condition des groupes les plus vulnérables, sur
les libertés fondamentales (droit d'association et de négociation collective,
discrimination, etc.) devraient étre ratifiées par tous les Etats et appliquées
scrupuleusement. Si leur mise en application continuait á poser des
problémes aux pays en développement - ce qui est le cas actuellement -, il conviendrait de rappeler que toute I'action du BIT, en particulier á travers
VI
lntroduction
ses travaux de recherche, la coopération technique, les services consultatifs, a
pour but de leur apporter les concours désirables.
S'agissant de l'avenir, I'action de I'OIT devra s'inspirer, sans défaillance,
des principes de justice et de liberté fixés dans sa constitution et dans la
Déclaration de Philadelphie. ces textes sont clairs. Le débat dans lequel la
conférence va s'engager ne saurait ouvrir la voie á des concessions en ce qui
concerne les principes sur lesquels I'action de l'oIT est fondée et le cadre
tripartite dans lequel cette action s'est développée au cours des six derniéres
décennies.
Mais I'action de I'OIT dans l'avenir devra tenir compte de maniére plus
nette de I'interdépendance croissante des pays qui composent la communauté
internationale á l'Ouest, á l'Est, au Nord, au Sud. Pour I'OIT cela signifie
qu'il lui appartient de relever le double défi que pose, d'une paft, la
satisfaction des besoins essentiels du plus grand nombre et, d'autre part, de
maitriser les conséquences sur le plan social et dans le domaine du travail
des mutations technologiques. L'oIT se doit de rappeler que les besoins de
I'homme sont la base de l'économie et qu'ils ne peuvent lui étre subordonnés.
L'économie n'est pas une hn en soi. Toute la démarche de I'OIT doit tendre
dans ce sens. Tous ses moyens d'action doivent étre engagés á cet effet. parmi
ces moyens, l'action normative peut jouer un grand róle, sans doute accru
par rapport au passé qui a vu cependant s'édiflrer une @uvre législative
impressionnante.
Pour que I'action future ait tout l'impact désirable, il conviendra de
choisir avec soin les questions inscrites á l'ordre du jour de la conference,
d'assurer la participation la plus large, non seulement de tous les Etats, mais
des partenaires sociaux, á la préparation, á la discussion et á I'adoption de
nornes internationales. Il conviendra, par ailleurs, de mettre en ceuvre des
moyens accrus pour apporter aux Etats Membres I'aide nécessaire pour
surmonter les diflicultés que peut légitimement créer l'application de certains
textes. L'intervention du Bureau devrait s'accroitre pour ce qui est des
contacts directs, utilisés en particulier dans des situations de désaccords ou
de conflits. Ainsi le róle de l'oIT serait non seulement celui de contróler le
respect des obligations assumées par les Etats Membres dans le domaine des
nornes, mais également celui d'aider dans leur mise en euvre. Le recours
aux procédures de plaintes, de réclamations, ne se recommanderait, dés lors,
que dans des situations sérieuses afrectant l'observation des conventions
portant sur les droits de l'homme et les droits des travailleurs.
Dans les perspectives résumées ci-dessus, l'action normative de I,OIT
devrait s'imposer aussi aux autres institutions internationales et en particulier
aux institutions á vocation économique, financiére ou monétaire telles que
le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. ces institutions ont
eu, et continuent d'avoir, une action remarquable et, pour ce qui est du court
terme, le Fonds monétaire international, en particulier, exerce une action
essentielle pour aider les Etats qui s'adressent á lui á redresser des situations
particuliérement difñciles. Mais ce qui est en cause, c'est de construire á
vil
Rapport du Diresteur général
moyen et á long terme un monde solidaire dans lequel l'économie ne dictera
pas seule les décisions affectant les millions d'hommes et de femmes au
travail ou sans travail. C'est lá que devra se situer l'action de I'OIT, y compris
I'action normative qui fait I'objet de ce rapport.
ks considérations qui précédent, méme si elles peuvent apparaitre á
certains comme dépassant I'objet de ce rapport, ne lui sont pas étrangéres.
L'action normative demeure, pour I'OIT, le moyen privilégié pour atteindre
ses objectifs de progrés économique et de justice sociale et pour exercer un
róle croissant dans la communauté internationale. C'est á ce r6le, á cette
responsabilité qu'elle doit se préparer. Le débat auquel ce rapport la convie
devrait, je I'espére, y contribuer.
Qu'il me soit permis d'ajouter deux observations:
l. Si la Conférence offre un cadre adéquat á la vaste réflexion á laquelle ce
rapport lui permettra de se livrer, elle ne saurait épuiser la matiére á
traven la discussion en séance pléniére du rapport du Directeur général.
Je me propose donc, au lendemain méme de la Conference' de faire
établir une synthése des débats qui se seront déroulés á la 70" session de
la Conference et d'étudier attentivement les points de vues exprimés. Il
sera alon possible de déterminer les moyens d'en faire poursuivre
l'examen par les organes appropriés de la Conférence et du Conseil
d'administration. Le Conseil d'administration, saisi de propositions par
le Bureau, pourrait décider de constituer un groupe de travail chargé
d'examiner certaines des questions soulevées et appellant une solution.
2. Il serait souhaitable que, dans cette perspective, les délégués participant
á la Conférence s'abstiennent de présenter des projets de résolution au
titre de I'article 17 du Réglement de la Conférence sur le théme qui fait
I'objet du présent rapportr.
l"'mars 1984. Francis BLANCHARD
Note
I Il est rappelé que le rapport du Drecteur général, s'il est de.regle á la Conference, ne
constitue pas un point de l'ordre du jour au sens de I'article susmentionné.
vllr
PARTIE I
NORMES INTERNATIONALES DU TRAVAIL
NORMES INTERNATIONALES DU TRAVAIL
INTRODUCTION
C'est essentiellement pour établir un systéme de normes internationales
du travail qu'a été créée I'Organisation internationale du Travail, et c'est
encore de nos jours une de ses táches maitresses. Plus de trois cents
instruments ont été adoptés, les conventions ont obtenu plus de 5 000
ratifications, et avec le temps s'est développé un ensemble de procédures
pour en apprécier et garantir l'application. On ne compte plus les cas oü
ces normes et ce contróle ont amélioré les conditions sociales et renforcé la
protection des travailleurs et des travailleuses.
L'importance de cette action normative tient aux buts mémes de I'OIT:
de par sa Constitution, I'Organisation est tenue de poursuivre certains buts
normatifs pour assurer que tous les étres humains, quel que soit leur race,
leur croyance ou leur sexe, puissent poursuivre leur progrés matériel et leur
développement spirituel dans la liberté et la dignité, dans la sécurité
économique et avec des chances égales. Tous les Etats Membres, en vertu de
leur appartenance á I'Organisation, ont la responsabilité commune d'euvrer
vers ces objectifs. Les conventions et recommandations adoptées par la
Conference donnent le moyen de traduire les orientations constitutionnelles
en régles et directives spécifiques; elles donnent aussi l'unité de vues
nécessaire á I'action de I'OIT : des normes et des politiques définies dans ces
instruments doivent inspirer la coopération technique, la recherche et autres
activités pratiques de I'OIT, et en retour ces activités peuvent servir á
promouvoir et apprécier le degré d'application des normes, á estimer leur
valeur dans les situations nouvelles, et á juger de l'opportunité et de la
nécessité de modifier les instruments existants ou d'en élaborer de nouveaux.
Les Etats Membres ont reconnu le r6le que les norrnes de I'OIT peuvent
jouer comme moyen d'assurer un développement économique et social
équilibré et de garantir que I'attention voulue soit accordée á l'amélioration
du niveau de vie et des conditions de travail, á la fois fin derniére et moteur
de ce développementr *.
3
+ I¡s notes figurent á la fin de cette partie du rapport.
Rapport du Directeur généra!
ks activités normatives de I'OIT sont aussi trés liées au renforcement du
tripartisme, tant au plan national qu'intemational: les employeurs et les
travailleurs jouent un grand r6le dans l'élaboration des normes et dans le
contróle de leur application, ét on trouve dans les instruments de I'OIT de
nombreuses dispositions exigeant une participation tripartite á leur application
nationale; de plus, les débats tripartites de la Conference ne manquent pas
d'influer sur le climat des rapports entre gouvemements, employeurs et travailleurs
dans leurs propres pays 2.
L'importance attachée á I'action normative de I'OIT a pour pendant
logique le souci d'en assurer l'efficacité en assurant que les instruments comespondent
aux problémes á résoudre dans les Etats Membres et que les mécanismes
de contrdle entrainent I'amélioration des conditions de vie et de travail.
Il faut donc réexaminer périodiquement le fonctionnement du systéme norrnatif.
Ces questions viennent d'ailleurs souvent dans le débat. En 1963 et en1964,
dans le cadre d'un examen global des programmes de I'OIT, la Conference
avait étudié I'action normative á venir. En 1968 la Conference, en discutant
I'euvre de I'OIT en matiére de droits de I'homme, avait nécessairement abordé
la question des normes et du contróle. A partir de 1974, et pendant cinq
années, le Conseil d'administration a mené sur les noÍnes internationales du
travail une étude en profondeur, d'oü ont résulté la modification des mécanismes
de contróle et un examen systématique de toutes les conventions et
recommandations existantes pour identifier celles dont I'application devait étre
considérée comme objectif prioritaire et pour planifier le choix des objets á
venir de l'action normative. I¿ Conseil d'administration a adopté en 1980 un
nouveau reglement pour l'examen des réclamations présentées conformément
á I'article 24 dela Constitution. L'examen des ratifications et de I'application
des conventions dans les diverses regions est devenu une activité réguliére des
commissions consultatives et des conférences régionales. En 1982, le Bureau a
innové en tenant pour les pays d'Asie et du Pacifique un séminaire tripartite
sur les procédures de formulation des normes intemationales du travail.
ks org;anes de contróle de I'OIT ont eux aussi réexaminé leurs méthodes.
I-a Commission d'experts pour I'application des conventions et recommandations
a entrepris ert 1977 le dernier examen général de ses méthodes; en 1978,
elle a étudié les moyens dont elle dispose pour évaluer l'application pratique
des conventions, et en 1979 elle a analysé I'expérience acquise pendant les dix
premiéres années de fonctionnement des contacts directs. La Commission de la
Conference sur I'application des conventions et recommandations a Éexaminé
ses méthodes de travail en 1979 et en 1980, oü elle a adopté certaines modifications.
A plusieurs reprises, dont la derniére remonte á1979,1e Comité de la
liberté syndicale du Conseil d'administration a examiné ses propres procédures
et a pÉsenté au Conseil d'administration des propositions pour leur aménagement
et leur développement.
I¡s mandants de I'OIT dans leur ensemble continuent á appuyer fermement
les activités normatives et de contr6le, mais le fonctionnement du systéme
a donné lieu á cert¿ines préoccupations ces demiéres années.
4
Normes internationales du travail
Des porte-parole gouvernementaux du tiers monde ont demandé que l'on
tienne plus grand compte des besoins, des priorités, des aspirations et des
moyens de leurs pays dans le choix des sujets retenus pour une action
normative et dans la teneur des instruments. Ils ont souligné la nécessité de
rédiger les instruments avec assez de souplesse, et d'assurer aux pays en
développement des occasions suffrsantes de faire connaitre leur avis lors des
étapes préparatoires et des débats de la Conference. Parmi ceux qui ont
exprimé de telles préoccupations, on peut rappeler le ministre fedéral du
Travail et de la Réhabilitation de l'Inde : s'adressant en 1983 á la Conference,
il se felicitait de voir les normes de I'OIT gagner en souplesse depuis quelques
années, et déclarait que << le processus de consultations doit étre amélioré, et
le point de vue du monde en développement doit étre mieux reflété dans la
formulation des normes »> 3. Des opinions semblables ont été exprimées au
séminaire tripartite régional tenu á Bangkok en avril 1982 sur les pays en
développement et les nornes de I'OIT a.
Les représentants des employeurs ont demandé que l'on améliore les
procédures d'élaboration des normes et que l'on prenne des mesures pour
élargir la participation des employeurs et des travailleurs á cette activité. Ils
ont particuliérement souligné l'intérét de réduire le nombre des points
proposés á la Conference pour l'adoption de normes, d'améliorer les
procédures de consultation préalable avec les Etats Membres - y compris
leurs organisations d'employeurs et de travailleurs -, et d'organiser les
travaux des commissions de la Conférence d'une maniére qui permette
d'examiner les propositions plus profondément et en pleine connaissance des
conditions réelles partout dans le monde 5.
Il y a plusieurs années que les représentants de pays socialistes critiquent
le fonctionnement des mécanismes de contróle de I'OIT. En 1983, la Conférence
a été saisie d'un mémorandum présenté au nom de plusieurs gouvernements
socialistes qui, tout en aflirmant leur soutien á I'action normative,
dans laquelle ils voient l'un des meilleurs moyens de protéger les droits des
travailleurs dans tous les pays, invitaient l'Organisation á réexaminer ses
procédures de contróle. Ces gouvernements estiment que les organes de
I'OIT, faute de prendre en compte les réalités du monde contemporain, se
sont trouvés amenés á des appréciations tendancieuses et unilatérales sur la
législation et la pratique des pays socialistes et des pays en développement;
les gouvernements socialistes demandent donc que I'on réforme la composition,
les pouvoirs et les procédures des organes de contróle de I'OIT 6.
Indépendamment des differents courants de pensée, il est d'autres raisons,
plus générales, de s'interroger sur le r6le et l'orientation á venir de notre
action normative: en quoi est-elle affectée par les profonds changements qui
se manifestent dans l'économie mondiale et par la rapide et continuelle
évolution des techniques et des structures sociales ? Dans une situation aussi
mouvante et précaire que I'actuelle, que peuvent apporter les normes
internationales en tant que garanties de la politique et de la protection
sociales et en tant que moyens de résoudre les nouveaux problémes ?
5
Rapport du Directeur général
Ces divenes considérations laissent á penser qu'il est temps de relancer
la discussion sur I'action normative, et la présente partie du rapport tend
précisément á jeter les bases de cette discussion. Eclairés par les avis qui
seront exprimés á la Conference, les divers organes qui réglent le cours de
I'action normative et du contróle verront mieux quels aspects il faut
réexaminer, et comment procéder le mieux á cet examen.
Ia partie I comprend quatre sections principales. Ia premiére traite de
l'élaboration et du contenu des noÍnes internationales du travail; la
deuxiéme porte sur le systéme de contróle de leur application; la troisiéme
examine les mesures promotionnelles dans le domaine des normes; enfin, la
quatriéme considére les mesures propres á favoriser la collaboration de I'OIT
et des autres organisations intemationales á l'élaboration et á l'application
des normes internationales.
Une question trés discutée depuis plusieurs années est celle de savoir si,
sur la base des conventions et recommandations de I'OIT, il est possible de
s'accorder sur un ensemble de normes minimales du travail que tous les Etats
devraient appliquer parallélement au développement de l'économie et du
commerce international, et qui contribueraient á l'établissement d'un nouvel
ordre économique international. Le Conseil d'administration en a largement
discuté il y a une dizaine d'années 7. La question a aussi été débattue dans
les négociations entre la Communauté économique européenne et les pays
en développement d'Afrique, des Antilles et du Pacifique qui sont parties á
I'accord de Lomé, et elle a été abordée dans le rapport de la Commission
Brandt 8. Enfin elle a encore été ces derniéres années, au sein de I'OIT, I'objet
d'une étude attentive á la lumiére de laquelle des consultations oflicieuses
ont été entamées en vue d'une nouvelle discussion au Conseil d'administration.
C'est une question complexe qui exige en soi une discussion tres approfondie
sur la base d'une analyse détaillée de tous les éléments; c'est pourquoi
il a paru préférable de ne pas I'aborder dans le cadre du présent rapport.
ÉLnaonnroN ETcoNTENU
DES NORMES INTERNATIONALES DU TRAVAIL
Les principales questions examinées ici seront de savoir si I'actuel
ensemble de conventions et de recommandations est adapté aux besoins présents
des Membres de I'OIT, et quelles mesures il est nécessaire et possible de
prendre á I'avenir pour que les normes répondent pleinement á ces besoins.
Il faut pour cela non seulement considérer le genre de sujets á traiter et la
maniére de les aborder, mais aussi étudier les procédures d'élaboration des
nornes, car de ces procédures dépendront trois choses: le degré de participation,
et donc d'influence sur les résultats, de l'ensemble des Membres de
I'OIT (et notamment de nombreux pays du tien monde); la consultation et
la participation tripartites; et, d'une fagon générale, les possibilités de procéder
á une discussion et á une réflexion approfondies sur les propositions.
6
Normes internationales du travail
Principales caractérist¡ques de l'action normative de l'OlT
Il convient de rappeler d'abord certains traits essentiels de I'action
normative de I'OIT. C'est une des grandes activités réguliéres de la
Conférence, qui la méne selon une procédure établie. Les instruments de
I'OIT ne sont donc pas une collection disparate de conventions et de
recommandations, mais un ensemble de normes qui régissent presque tous
les domaines d'intérét de I'Organisation; leur effet s'en trouve amplifié, car
les responsables des affaires sociales, méme quand nulle ratification ne les y
oblige, tendent á s'inspirer des normes de I'OIT comme l'expression des vues
d'une assemblée représentative universelle. L'existence d'une procédure
établie assure également ¿ I'OIT une grande économie de moyens, á la
différence d'autres organisations pour qui, faute d'une telle procédure,
l'élaboration d'instruments internationaux est souvent une entreprise de
longue haleine entrainant de nombreuses réunions successives.
L'OIT a évidemment la particularité de fonder ses débats et décisions sur
le tripartisme. Ce principe influe beaucoup sur le contenu des instruments,
sur leur autorité et sur l'attention qui leur est portée dans la formulation des
politiques nationales. Cette influence ne provient pas seulement de ce que
les représentants employeun et travailleurs ont part aux suffrages, mais aussi
de ce qu'ils se font entendre des gouvernements lors des consultations et
délibérations tripartites.
Depuis soixante-cinq ans, la Conference a adopté en tout 159 conventions
et 168 recommandations. Cet édifice normatif inspire plusieurs questions:
L'OIT peut-elle continuer á adopter des normes de la méme maniére que
jusqu'á présent ? Y a-t-il encore place pour de nouveaux instruments ? Quelle
valeur gardent les normes anciennes, et dans quelle mesure importe-t-il de
les réviser? I¡s instruments de I'OIT sont-ils assez souples ? Faut-il á l'avenir
chercher á étendre et améliorer I'application des normes existantes plutót
que d'en établir de nouvelles ?
Certaines de ces questions ont été traitées par le gfoupe de travail du
Conseil d'administration qui, de 1977 it 1979, a systématiquement examiné
les instruments existants et les domaines dans lesquels il conviendrait de
réviser les normes anciennes ou d'en adopter de nouvelles e. Le groupe a
identifié dix-neuf objets d'éventuelle révision des instruments existants, et
quarante-trois objets sur lesquels on pourrait envisager des instruments
nouveaux. Des objets de révision, cinq ont été traités depuis ou sont
actuellement examinés par la Conference; sur deux autres, le Conseil
d'administration, aprés avoir examiné les rapports du Bureau et consulté les
Etats Membres, a conclu que, faute d'accord sur la nature de la révision, il
n'était pas opportun d'y procéder. En revanche, la Conference a depuis lors
adopté des instruments révisés en trois domaines dans lesquels le groupe de
travail n'avait pas suggéré de révision. Quant aux objets retenus pour
l'éventuelle adoption de nouveaux instruments, seuls trois ont été portés
devant la Conference.
7
Rapport du Directeur généra!
Il était entendu que les conclusions du groupe de travail seraient de temps
á autre révisées selon les besoins nouveaux; le programme et budget pour
1984-85 prévoit le début d'une telle révision au cours de la période biennale.
On notera que les résultats du précédent examen présentaient certaines
insuflisances: parmi les objets retenus pour d'éventuels nouveaux instruments,
il y en avait beaucoup qui nécessitaient encore des études préliminaires,
qui ne se prétaient pas aisément á une action normative, ou pour
lesquelles il serait diffrcile d'obtenir un consensus suflisant; de plus, leur
classification ne suggérait pas d'ordre de priorité. C'est pourquoi, á l'occasion
de la nouvelle révision, je compte faire sur les listes antérieures des remarques
qui doivent permettre un choix plus rigoureux et plus réaliste.
ks possibilités d'action normative sont inséparables des perspectives
économiques mondiales; dans une situation aussi défavorable que I'actuelle,
on constate de maintes parts une hésitation á envisager des innovations
sociales qui susciteraient de nouvelles aspirations en un moment oü il est
déjá diflicile de maintenir le niveau actuel de protection. Les questions qui
méritent examen en l'occurrence sont la maniére d'assurer le respect des
garanties sociales fondamentales en période de récession, et la mesure dans
laquelle I'action normative peut faciliter l'adaptation au changement, en ce
qui concerne par exemple le rapport entre durée du travail et emploi ou le
r6le de la sécurité sociale dans un monde oü se transforment les structures
de population et d'emploi.
Il peut étre utile de rappeler sur quelles questions la Conference a émis
des normes ces derniéres années. De l97l ¿ 1983, elle a adopté 25 conventions
et 26 recommandations, do¡t 24 complémentaires á des conventions.
Plusieurs de ces instruments traitent des droits d'organisation et de
négociation des travailleurs (travailleurs ruraux, travailleurs de la fonction
publique, protection et facilités á accorder aux représentants des travailleurs
dans l'entreprise, négociation collective, et consultations tripartites sur les
normes et activités de I'OIT). Le souci d'assurer l'égalité et de répondre aux
besoins particuliers des groupes défavorisés s'est exprimé par des instruments
visant les travailleurs migrants, les travailleurs ágés, les travailleurs ayant des
responsabilités familiales et les handicapés. La sécurité de I'emploi a fait
I'objet d'instruments sur la cessation de la relation de travail á l'initiative de
I'employeur et sur la sécurité d'emploi pour des catégories particuliéres telles
que les gens de mer et les dockers. Plusieurs instruments traitent de la sécurité
et de l'hygiéne du travail, en ce qui concerne tant la politique générale et le
cadre institutionnel que certains risques particuliers (benzéne, cancer
professionnel, pollution de I'air, bruit et vibrations, sécurité dans les
manutentions portuaires); d'autres visent des catégories spécifiques de
travailleurs telles que les gens de mer, les dockers, le personnel infirmier
et celui des transports routiers (durée du travail et du repos). D'autres enfin
concernent I'administration du travail, la formation et I'orientation
professionnelles, l'áge minimum, le congé-éducation payé et les droits des
migrants á la sécurité sociale.
I
Normes internationales du travail
Sans vouloir peser les mérites de ces divers instruments, on peut observer
qu'ils couvrent une grande variété de sujets, les uns abordés pour la premiére
fois, les autres repris sous un aspect nouveau. La question se pose maintenant
de savoir s'il est souhaitable de grossir indéfiniment la somme des instruments
de I'OIT, ou si leur foisonnement ne risque pas de faire oublier des
táches plus pressantes.
Plusieurs fois déjá, on a suggéré de retenir un nombre limité d'instruments
sur lesquels concentrer l'action nationale et les ratifications. Dans son
précédent examen des normes existantes, le Conseil d'administration avait
désigné comme << instruments prioritaires >> r0 environ la moitié des conventions
et recommandations adoptées jusqu'á 1978. Il est intéressant de relever
que c'est précisément sur cette catégorie de conventions que porte la grande
majorité des ratifications récentes. Ces six derniéres années, parmi les
nouvelles ratifications (c'est-á-dire sans compter les ratifications par lesquelles
les Etats nouveaux venus á I'OIT confirment leurs obligations),
plus de 90 pour cent portent sur des conventions adoptées depuis la seconde
guerre mondiale, et six sur dix visent des conventions adoptées depuis 1971.
Etat des ratifications
Au 3l décembre 1983, on comptait en tout 5137 ratifications de
conventions de I'OIT, soit en moyenne 34 par Etat Membre. Les moyennes
nationales par région sont: 57 pour I'Europe (Europe occidentale, 60;
Europe orientale, 50), 38 pour les Amériques, 26 pour I'Afrique, et 20 pour
I'Asie et le Pacifique.
Au cours des dix années de 1974 á 1983, on a enregistré ll77 ratifications,
dont environ le tiers vient de pays industrialisés et les deux tiers de
pays en développement. Abstraction faite de confirmations de leurs obligations
par les nouveaux Etats Membres, le total des nouvelles ratihcations
pour cette période est de 786 (soit en moyenne 79 par an), dont 45 pour cent
par des pays industrialisés et 55 pour cent par des pays en développement.
Il est instructif d'examiner l'état des ratifications des conventions adoptées
pendant les trente années de l95l á 1980. Le tableau I donne la moyenne
des ratifications pour les conventions adoptées pendant chacune des trois
décennies, et l'allure de leur accroissement.
Les chiffres du tableau semblent confirmer plusieurs conclusions qui se
dégagent aussi d'autres sources (telles que les documents touchant á la soumission
des instruments de I'OIT aux autorités nationales compétentes et les
premiers rapports sur l'application des conventions ratifiées), á savoir: que
les conventions de I'OIT fixent des normes qui ne sont pas seulement le commun
dénominateur des pratiques nationales, mais qui exigent de la plupart
des pays le relévement ou le perfectionnement des nornes nationales; que
I'on s'efforce d'atteindre graduellement le niveau de protection prévu par les
conventions; et que la plupart des gouvernements procédent á la ratification
avec prudence et réflexion, conscients des obligations qui en découlent.
9
Rapport du Directeur général
Tableau 1. Progrés de la ratification des conventions adoptées entre 1g5l et IgBOr
Nombre moyen de mtifications par convention
Fin 1963 Fin l9?3 Fin 1983
Conventions adoptées en l95l-1960
Conventions adoptées en l96l-1970
Conventions adoptées en l97l-1980
20 35
l8
44
27
2t
I Saufla convention (n. I 16) portant révision des articles ñnals, 1961.
Le tableau 2 montre I'ampleur des ratifications selon les domaines considérés.
On notera que, parmi les conventions le plus largement ratifiées, figurent
les principaux instruments relatifs á la liberté d'association, á I'abolition du
travail forcé et á l'égalité dans l'emploi, ainsi que les conventions traitant de
la politique de I'emploi, des services de I'emploi, de I'inspection du travail
dans le commerce et I'industrie, des mécanismes de fixation des salaires
minima, et de la protection du salaire.
Cependant seulement 43 conventions ont regu plus de 40 ratifications et,
sur le nombre, un tiers ont été révisées et ne constituent donc plus des
objectifs prioritaires.
A premiére vue, il est inquiétant de voir que, sur les 157 conventions
portées au tableau 2, 6l comptent moins de 20 ratifications et que 53 autres
n'ont que de 20 á 40 ratifications. Ces chiffres appellent toutefois des
éclaircissements.
Tout d'abord, les conventions les moins ratifiées comprennent celles qui
ont été adoptées si récemment que la procédure de ratification ne fait que
commencer, ou se trouve en tout cas loin de porter tous ses effets. C'est le
cas de 20 á 25 instruments.
Beaucoup de conventions ont été révisées et, de ce fait, sont fermées á la
ratification. Sur les 4l conventions révisées, 27 rassemblent moins de 40 ratifications.
Certaines conventions portent sur des questions qui n'ont d'intérét que
pour quelques pays: ainsi, 4 conventions applicables aux territoires non
métropolitains ne se prétent á ratification que par des pays ayant la
responsabilité de tels territoires, et 5 conventions relatives á I'emploi des
travailleurs indigénes visaient surtout la situation dans les colonies, et sont
maintenant presque dépassées. On peut citer aussi les conventions sur les
gens de mer et les plantations, qui ne concernent qu'une partie des Etats
Membres.
Méme sous réserve des observations qui précédent, les chiffres du
tableau 2 font apparaitre que, dans certains domaines, la ratification
rencontre de sérieux obstacles; on voit par exemple, en matiére de durée du
travail, que 8 conventions visant des professions particuliéres ne sont pas
10
Normes internationales du travail
Tableau 2 Ratifications de convent¡ons de l'OlT (désignées par leurs numéros, et non
compris les conventions no' 80 et 1 1 6 portant révision des articles finals)
Domaine Nombre de mtiñcations
20 20-40 4l-69 69-80 8l-100 Plusde t00
Liberté d'association
et de négociation
collective
Travail forcé
Egalité de chances
et de traitement
Emploi et formation
Politique sociale
Administration
du travail
Salaires
Durée du travail,
repos et congés
Marins, pécheurs
et dockers
Plantations
Personnel infirmier
Total
r Convention réYisée.
l5l,l54 l4l
156
34*,158,159 96,t42 2 88,122
tt7
63, t29,144,
150
l3t
30, 140
32*,62,115,
tt9,t2'1,136,
r39
24*, 102, tt9
3*,41*,103
33*,.59*,77,
78,90,r24,
138
2t,97
50,64,65,86,
to4, to7
9,23,53,68,
69,73,74,
9t*,92, tt2*,
tt3, tt4,134,
t37
135
94,99
I , 52*,
101 *,
106
13,27,
t20
8'7
26,95
t4
I 1,98
29, t05
100, lll
8l
l9
Hygiéne et sécurité
du travail
Sécurité sociale
20,31*,43,
46,47,49,51,
61 ,67 *, 132,
153
28 *, 148, I 55
25 *, 35 *, 36 *,
37 *, 38 *, 39 *,
40*,44,48,
t2t,128,130,
r57
Emploi des femmes
Emploi des enfants 60*,79
et desjeunes
Travailleurs migrants 65 *, 143
Travailleurs indi- 82,83, 84,85
génes et territoires
non métropolitains
89
5,*
45
7*,8, 15*, l6
lg*,
42*
12*,
17*
54*,55,56,
57 *,70,71,
72*,7 5*,7 6*,
93*,109,125,
4*
6*,
l0 *,
123*
'r)
58 *,
108
126, t33,
146, t4'7 ,
ll0
149
6l
t45,
152
53 2285 8
11
Rapport du Directeur général
entrées en vigueur, et que méme la convention (n'47) des quarante heures,
1935, n'a regu que 8 ratifications. Il est significatif que le seul instrument
général adopté depuis 1945 sur la durée du travail soit une recommandation.
Les conventions relatives á la sécurité sociale ont elles aussi, pour la
plupart, requ peu de ratifications, et cela malgré tous les eflorts déployés pour
y incorporer diverses formules de souplesse.
Les ratifications d'instruments concernant l'emploi des gens de mer sont
également peu nombreuses, meme compte tenu de ce qu'elles aflectent moins
de pays que les autres.
l¿ ratification n'est évidemment pas la seule mesure de I'accueil fait aux
nornes de I'OIT, et de nombreuses informations montrent que les
conventions non ratifiées ont de l'effet sur la législation et la pratique
nationales; c'est par exemple le cas de plusieurs conventions maritimes qui,
á n'en juger que par les ratiñcations, n'auraient pas eu grand succésrr. On
peut donc se demander si dans ces cas la convention était nécessairement la
meilleure forme d'instrument: une convention ratifiée seulement par une
poignée d'Etats équivaut pour la plupart des Membres á une recommandation.
A plusieurs reprises on s'est posé la question de savoir si un gouvernement
devrait voter pour l'adoption d'une convention qu'il n'est pas en mesure de
ratifier. Que l'on consulte á cet égard le tableau l, relatif au nombre moyen
de ratifications par convention adoptée entre l95l et 1981, et qui montre
que les Etats n'atteignent que progressivement une situation qui leur
permette d'assumer l'obligation d'appliquer pleinement une convention qui
découle de la ratification; ils peuvent donc en conscience voter pour des
nornes qui leur paraissent un objectif désirable pour la communauté
mondiale, ou qu'ils peuvent prendre pour but de leurs politique et législation
sociales propres. Si leurs délégués veulent éviter qu'on se méprenne sur leur
position, ils ont toute liberté - et en usent souvent - de procéder á une
explication de vote.
Les conclusions générales tirées des chiffres du tableau 2 valent d'étre
gardées á l'esprit lorsqu'on prend des décisions sur I'action normative á venir,
sur les domaines susceptibles de révision, et sur l'action á mener pour
promouvoir une application plus large des norrnes de I'OIT.
La dénonciation
Il faut aussi parler des dénonciations de conventions. Mis á part les
248 dénonciations qui résultent de la ratification de conventions révisées, et
qui reviennent donc á un simple changement d'obligations, il y a eu
45 dénonciations « pures )), mettant fin aux obligations. Pendant les
cinquante premiéres années de I'OIT, il n'y a eu que l3 de ces dénonciations,
contre 32 au cours des quatorze années suivantes. On s'est parfois inquiété
de cette augmentation, mais le total représente encore moins de I pour cent
des ratifications. I¿ moitié des conventions dénoncées vise trois domaines oü
12
Normes internationales du travail
l'évolution des conceptions et des techniques a mis en doute l'actualité des
noÍnes: le travail de nuit des femmes (13 dénonciations), les travaux
souterrains des femmes (3) et le travail de nuit dans les boulangeries (6). Il y
a eu aussi 3 dénonciations de la convention (n'2) sur le ch6mage, 1919, et
autant pour la convention (n" 48) sur la conservation des droits á pension
des migrants, 1935, et pour la convention (n" 88) sur le service de l'emploi,
1948. Les dénonciations de la convention no 48 viennent de pays esteuropéens
et s'expliquent par les changements de régime suryenus depuis
la ratification; pour les deux autres, elles tiennent á diverses raisons, pour la
plupart de portée limitée et technique.
Depuis le milieu des années trente s'est établi l'usage de prévoir, dans les
articles finals des conventions, la possibilité de les dénoncer á intervalles de
dix ans á compter de I'entrée en vigueur initiale ; jusqu'alors la pratique était
de permettre la dénonciation á tout moment aprés expiration des dix années
suivant l'entrée en vigueur initiale (conventions no' I it 25); quelques
conventions, datant pour la plupart des années trente, sont ouvertes á la
dénonciation á intervalles de cinq ans. Les dénonciations (( pures »
représentent 1,1 pour cent des ratifications pour les conventions anciennes
qui pendant la plus grande partie de leur existence peuvent étre dénoncées
á tout moment; 0,9 pour cent pour les conventions ouvertes á la dénonciation
tous les cinq ans, et 0,8 pour cent quand l'intervalle est de dix ans.
Ces chiffres semblent indiquer que l'intervalle de dix ans prévu pour la
plupart des conventions est un bon compromis entre le souci de peñnanence
des obligations et la nécessité de prévoir l'évolution des conceptions et des
situations nationales, surtout si l'on pense que les plus anciennes
conventions, dont les régles de dénonciation sont les plus souples, sont
ratifiées depuis plus longtemps et risquent de se trouver dépassées par
l'évolution des circonstances.
Révision et consolidation des normes de l'OlT
A maintes reprises on a souligné la nécessité de réviser les instruments
les plus anciens pour les adapter aux situations nouvelles, et I'OIT a
beaucoup fait en ce sens. En tout, 4l conventions, dont la moitié de celles
adoptées avant 1945, ont été révisées. Comme on l'a vu, on a déjá donné
suite á plusieurs des suggestions de révisions formulées par le groupe de
travail approuvées par le Conseil d'administration en 1979. ll faudra de
nouveau considérer attentivement les besoins de révision lors du prochain
examen.
Il y a un cas oü la révision s'est traduite par une importante
consolidation: la convention de 1973 sur l'áge minimum porte révision de
l0 conventions antérieures, qu'elle vise á remplacer progressivement. Il a été
suggéré d'en user de méme dans d'autres domaines; la chose est en principe
faisable, mais on peut se demander s'il en résulterait une véritable fusion des
noÍnes antérieures (comme en ce qui concerne l'áge minimum) ou, au
13
Rapport du Directeur général
contraire, un encombrant instrument global regroupant toutes les dispositions
des conventions antérieures (par exemple en matiére de sécurité sociale
ou d'hygiéne et sécurité du travail). Certaines conventions de ces derniéres
années établissent un cadre général pour la politique nationale, la
réglementation et I'administration, comme c'est le cas par exemple pour la
sécurité et la santé des travailleurs et pour I'emploi des gens de mer; c'est
une formule qui pourrait étre envisagée au lieu du processus plus complexe
de consolidation, mais elle pose le probléme de savoir comment y rattacher
les normes plus détaillées, et de décider si ces derniéres doivent étre énoncées
dans des conventions ou dans des textes non contraignants, tels que
recommandations ou directives. Méme en matiére d'áge minimum, la
révision globale ne fera sentir ses effets qu'á la longue, car pour le moment
les anciennes conventions sectorielles restent en vigueur pour bon nombre
d'Etats Membres, et certaines peuvent encore constituer des objectifs
intermédiaires valables.
Il n'existe pas de procédure pour abroger les conventions. Plusieurs sont
mort-nées du fait qu'elles n'ont pas eu assez de ratifications pour entrer en
vigueur, et de ce nombre quelques-unes, ayant été révisées, ne sont plus
ouvertes á la ratification; d'autres, qui peuvent encore en principe étre
ratifiées, ne le seront sans doute pas (comme certaines portant sur la durée
du travail ou l'emploi des gens de mer, déjá évoquées plus haut). On a déjá
pris certaines mesures tenant compte de cet état de choses, comme de ne
plus publier les conventions tombées en désuétude dans la compilation des
instruments de I'OIT ou de ne plus les porter sur les tableaux de ratifications.
Ce sont des mesures qu'on pourrait maintenant pousser plus loin: par
exemple, on pourrait simplifier encore le tableau des ratifications en y
omettant certaines conventions qui ne sont pas entrées en vigueur et peuvent
étre tenues pour lettre morte, méme si elles sont encore ouvertes á
ratification. On pourrait aussi envisager de ne plus demander de rapports
détaillés sur certaines conventions qui sont dépassées, par exemple les
conventions (n' 15) sur l'áge minimum (soutiers et chauffeurs), et (n" 2l)
sur l'inspection des émigrants, et certaines conventions (no' 50, 64, 65,
86, 104) relatives aux travailleurs indigénes. Le Conseil d'administration
pourrait décider que ces conventions ne soient désormais traitées que dans
les rapports généraux des gouvernements, sous réserve de revoir sa décision
si nécessaire.
Les limites de l'action normative
En examinant quelles noÍnes seraient á élaborer á l'avenir, il
conviendrait de tenir compte des limites de cette action. Tous les problémes
sociaux qui sollicitent I'OIT ne se prétent pas nécessairement á des normes.
Certains posent en effet des questions générales de politique dans la solution
desquelles les normes juridiques ne peuvent servir que d'appoint pratique,
et non de facteurs déterminants des politiques á suivre. Tel semble étre
14
Normes internationales du travail
notamment le cas pour les programmes de développement rural et pour le
travail dans certains secteurs non organisés. En pareilles circonstances, un
débat général tendant á éclaircir les problémes et orienter les gouvemements
sera peut-étre plus fructueux que I'adoption de conventions
et de recommandations. Ces discussions générales n'auront toutefois de
fruit que si elles assurent un véritable échange d'expériences et un examen
approfondi des questions de fond, sans se transformer en processus pseudonormatif
dans lequel l'attention se porterait sur l'adoption de noÍnes
déterminées.
De méme, si l'action normative doit répondre á l'évolution économique,
sociale et technique, elle ne peut pas par elle-méme la gouverner. Il faudra
souvent étudier et discuter en détail les conséquences des grandes
transformations avant de décider sur quelles questions et sous quelle forme
les normes doivent étre élaborées. L'adoption de conventions et recommandations
n'intervient normalement qu'une fois que, á la lumiére de
I'expérience nationale, la question a pris assez de maturité pour obtenir une
adhésion suffisante.
Le mode national de réglementation influera lui aussi sur les possibilités
d'action normative. Plusieurs conventions prévoient l'application par
accords collectifs, et les organes de contróle ont admis que certaines
conventions puissent étre appliquées par ce biais, méme quand elles ne le
prescrivent pas expressément. Cette modalité n'est d'ailleurs pas sans
inconvénients, surtout quand la couverture des accords collectifs ne répond
pas entiérement á celle de l'instrument international, ou que les accords
individuels n'assurent pas le respect de ses dispositions de fond. Ainsi, le fait
que certains aspects des relations professionnelles sont largement régis par
accords collectifs dans les Etats Membres et les différences de pratique qui
en résultent peuvent rendre diffrcile le réglement de ces questions par des
textes autres qu'une recommandation.
R6les respectifs des conventions et des recommandations,
et utilisation des conventions promotionnelles
Les remarques qui précédent aménent á considérer les r6les respectifs des
conventions et recommandations et le recours á des conventions promotionnelles.
Avec le temps, la Conference en est venue á considérer les recommandations
comme des instruments de second rang. Beaucoup de questions
étaient autrefois traitées par recommandations, surtout quand il s'agissait de
politiques générales ou de programmes pratiques ou si, faute d'une
expérierice suflisante dans les pays, il semblait préferable d'adopter des
norrnes expérimentales. La chose est maintenant rare: alors qu'entre l95l
et 1970 bien plus de la moitié des recommandations adoptées (31 sur 55)
étaient des instruments autonomes sans lien avec une convention, depuis
l97l seules 2 recommandations sur 26 sont de cet ordre, toutes les autres
15
Rapport du Directeur général
venant compléter une convention. On use aussi de plus en plus de
conventions promotionnelles, c'est-á-dire de conventions qui demandent de
poursuivre une politique nationale dans le domaine traité, sans prévoir de
noÍnes précises. Tant que les buts sont assez nettement définis - comme
dans les premiéres conventions de ce type sur l'égalité de rémunération et
sur la discrimination dans I'emploi -, cette formule peut fortement stimuler
I'action nationale; mais de plus en plus les conventions promotionnelles ont
fixé des objectifs moins précis qui parfois nécessitent une action dans de
vastes domaines, de sorte qu'il devient diflicile aux Etats qui ont ratifié de
savoir quelles mesures on attend d'eux, et aux organes de contróle de I'OIT
d'apprécier dans quelle mesure les obligations assumées sont respectées. Il
est certain qu'en inscrivant les nornes dans une convention on leur assure,
une fois I'instrument ratifié, un contróle national et international plus
régulier que si elles figurent dans une recommandation; en revanche, en
laissant trop incertaines les obligations faites aux Etats, on risque de porter
atteinte á la crédibilité des conventions et, plus généralement, de I'action
normative méme de I'OIT.
L'une des questions essentielles pour l'avenir est donc de savoir s'il ne
faudrait pas faire de nouveau plus grand usage des instruments non
obligatoires et réserver les conventions á des questions importantes et propres
á une définition et une action précises.
Il faut aussi rappeler que les recommandations ne sont pas les seuls
instruments non obligatoires dont dispose I'OIT: certaines questions, tant
de principe que d'ordre principalement technique, peuvent étre réglées
efficacement et économiquement par d'autres textes non contraignants12.
La souplesse des normes
I1 est généralement admis que l'action normative de I'OIT doit rester
universelle, quitte á prévoir les formules de souplesse voulues pour tenir
compte des differences de situation et de développement entre les pays 13.
L'OIT s'est toujours efforcée, dans l'élaboration de ses instruments,
d'examiner le besoin de souplesse, et elle a peu á peu mis au point un
certain nombre de << formules de souplesse »» ; celles-ci comprennent la faculté
de ne ratifier les conventions que par parties, le choix entre des parties
prévoyant des obligations plus ou moins strictes, des limitations du champ
d'application, des << clauses d'application graduelles »> permettant de relever
ou d'étendre le niveau ou la portée de la protection, des exceptions
temporaires, et la flexibilité dans les méthodes d'application. Les conventions
promotionnelles définissent des objectifs, mais laissent généralement de
grandes latitudes quant aux méthodes propres á les atteindre. On notera
toutefois deux choses: que les clauses de souplesse de certaines conventions
sont peu utilisées, et que pourtant les représentants de pays en développement
reprochent souvent aux norrnes de I'OIT leur manque de
flexibilité.
16
Normes internationales du travail
Pour le premier de ces points, on peut citer la convention (n, 102)
concernant la sécurité sociale (norme minimum), 1952; cette convention
peut étre ratifiée en acceptant les obligations pour trois au moins des neuf
branches de sécurité sociale. Elle a été ratifiée par 18 pays industriels et
12 pays en développement; le nombre moyen de branches de sécurité sociale
sur lesquelles porte la ratification est le méme, á savoir six, dans les deux
catégories. Seuls trois pays ont usé de la faculté, offerte aux pays dont
l'économie et les ressources médicales n'ont pas atteint un développement
suflisant, de spécifier un niveau de protection inferieur. La convention
(n" I 19) sur la protection des machines, 1963, a été ratifiée par 36 pays,
dont 24 en développement; un seul pays, la Norvége, a usé du droit que
donne l'article 17 d'en restreindre le champ d'application. La convention
(n' 138) sur l'áge minimum, 1973, a été ratifiée par 27 pays, parmi lesquels
I I sont en voie de développement; quatre de ces derniers ont usé de la
possibilité, donnée aux pays dont l'économie et les institutions scolaires ne
sont pas suffrsamment développées, de commencer par un áge minimum de
quatorze ans au lieu de quinze ans; un seul pays a fait une déclaration pour
limiter initialement la portée d'application, et seuls deux des pays qui ont
jusqu'á présent fait rapport sur I'application de cet instrument (un pays
avancé et un en développement) ont indiqué qu'ils avaient usé du droit
d'exclure certaines catégories d'activités dans lesquelles I'application présenterait
de substantielles diflicultés.
Ces considérations aménent á se demander non seulement si les pays qui
ratifient examinent assez les assouplissements qui leur sont offerts, mais
encore si une utilisation plus large des clauses de souplesse ne faciliterait pas
la ratification par d'autres pays; d'oü la question corollaire, sur laquelle on
reviendra plus loin, de la nécessité de mieux informer et conseiller les Etats
Membres en ces matiéres.
Si nul ne conteste la nécessité de la souplesse dans les normes de I'OIT,
les avis diflérent, tant parmi les groupes représentés á la Conférence que
parmi les délégations de pays, sur le degré précis de souplesse á admettre
selon le cas particulier; c'est en définitive une question de jugement. Il
faut aussi bien voir que le degré de souplesse dépendra de la matiére traitée.
Cela admis, on peut se poser cerLaines questions: certaines conventions
sont-elles trop détaillées, et faudrait-il á l'avenir chercher á mieux
borner les conventions á l'énoncé de principes essentiels, et régler le
détail dans des recommandations complémentaires ? Les procédures d'établissement
des normes laissent-elles á tous les Etats Membres une possibilité
suflisante de faire connaitre leur avis et leurs difñcultés particuliéres,
tant á l'étape de la consultation préliminaire qu'á celle de la discussion
á la Conference ? Le Bureau devrait-il faire plus pour avancer des suggestions
sur les formules de souplesse, tant dans les questionnaires initiaux que
par la suite ?
Ces questions demandent que I'on examine les procédures d'établissement
des norrnes de I'OIT, et les moyens de les améliorer.
17
Rapport du Directeur général
Fixation de l'ordre du jour de la Conférence
La procédure d'adoption des normes de I'OIT commence formellement
quand le Conseil d'administration décide d'inscrire une question á l'ordre du
jour de la Conférence. Le Conseil d'administration fonde son choix de
questions sur les suggestions du Bureau, qui lui-méme s'inspire des décisions
et discussions antérieures de la Conférence intemationale du Travail, du
Conseil d'administration, des réunions régionales, des commissions d'industrie,
des réunions d'experts, et de ses propres études et recherches. Depuis
quelques années, on tient particuliérement compte du rapport final du
Groupe de travail du Conseil d'administration sur les normes internationales
du travail (1979), et des indications données dans le Plan á moyen terme.
Lorsque le Bureau suggére des questions á inscrire á l'ordre du jour de la
Conference en vue de I'adoption de normes, il cherche á s'assurer que les
sujets sont suflisamment mürs, c'est-á-dire que la matiére á réglementer est
clairement définie et techniquement bien au point, et qu'elle recueillera un
degré suflisant d'adhésion. Pendant l'étude en profondeur sur les normes
internationales du travail entreprise par le Conseil d'administration,
plusieurs autres critéres de choix ont été proposés, entre autres le nombre de
travailleurs affectés, l'intérét pour les travailleurs des catégories économiques
les plus basses, et la gravité du probléme. Bien que ces critéres n'aient pas
fait l'objet d'une décision spécifique, le Bureau en tient généralement compte
quand il présente au Conseil d'administration des questions susceptibles
d'étre inscrites á I'ordre du jour de la Conférence. Les représentants des pays
en développement ont souligné la nécessité d'étudier les questions
concernant leurs besoins prioritaires; il conviendrait de considérer si, avec
les actuelles procédures, cette nécessité est suflisamment prise en compte, ou
s'il faudrait envisager un systéme de consultation plus étendu. L'une des
solutions pourrait étre de remplacer l'actuel systéme, selon lequel le Conseil
d'administration examine au cours de deux de ses sessions l'ordre du jour de
la Conference, par une consultation écrite préliminaire de tous les Etats
Membres, aprés quoi des propositions d'ordre du jour seraient faites au
Conseil d'administration, qui devrait en discuter et en décider au cours d'une
seule session. On pourrait aussi recueillir les avis des conferences régionales
de I'OIT sur les résultats du réexamen que le Conseil d'administration va
mener sur les questions susceptibles d'action normative.
Bien qu'il ait été fait état de nombreux sujets susceptibles d'action
normative, le Bureau, depuis plusieurs années, a éprouvé des diflicultés á
présenter au Conseil d'administration assez de sujets qui soient suflisamment
mürs pour une action dans le sens indiqué plus haut. C'est pourquoi il
conviendrait d'étudier si, pour le moment au moins, il ne faudrait pas ralentir
quelque peu l'action normative. Cette opinion a été exprimée de divenes
parts, et not¿mment par des porte-parole des employeurs, selon qui, en
réduisant le nombre des points á l'ordre du jour de la Conference, on pourrait
adopter des normes mieux préparées.
18
Normes internationales du travail
Mesures pour faciliter la participation
des Etats Membres á l'élaboration des normes
et pour améliorer les procédures de la Conférence
Un des veux exprimés á cet égard est que de plus nombreux Etats
Membres puissent faire connaitre leur opinion lors des consultations qui
précédent la discussion á la Conference. A I'heure actuelle, seuls le tiers ou
la moitié des Membres répondent aux questionnaires envoyés avant la
premiére discussion; il serait certainement désirable de recevoir plus de
réponses, surtout de la part des pays en développement. Il faudrait aussi
laisser aux gouvernements assez de temps pour consulter les organisations
d'employeurs et de travailleurs avant I'envoi de leurs réponses, comme ils y
sont tenus quand ils ont ratiñé la convention (n" 144) sur les consultations
tripartites relatives aux nornes internationales du travail, 1976, et comme
le Conseil d'administration I'a recommandé á l'ensemble des Etats Membres.
On étudiera dans une autre section les mesures propres á renforcer les
dispositions administratives et institutionnelles en ces matiéres. On pourrait
aussi envisager de modifier le calendrier du Conseil d'administration en ce
qui concerne ses décisions sur I'ordre du jour de la Conférence, en lui faisant
prendre sa décision finale en mai au lieu de novembre, avec possibilité de
modifications de détails lors de la session du Conseil suivant immédiatement
la Conférence si les décisions de cette derniére I'exigent. De tels aménagements
laisseraient plus de temps au Bureau pour dresser son premier
rapport << exposant la législation et la pratique »» et, si ce rapport était envoyé
aux Etats Membres au début de I'année suivante, ils auraient deux fois plus
de temps que maintenant pour étudier le questionnaire et préparer leurs
réponses. La consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs
s'en trouverait grandement facilitée.
Et¿nt donné le nombre des points á l'ordre du jour, les pays qui ne
peuvent pas financer de grosses délégations á la Conference ont peine á suivre
les travaux de toutes les commissions; cela limite particuliérement la part
que prennent les pays en développement aux débats des commissions, et
restreint leur influence sur I'issue des débats sur les nouvelles normes. On se
souviendra qu'un groupe de travail du Conseil d'administration avait
examiné, de 1974 iL 1976,les moyens d'aider les pays Membres á envoyer
des délégations tripartites á la Conference en mettant les frais á la charge de
I'OIT, mais pour des raisons de restrictions budgétaires cet examen ne s'était
pas poursuivi. C'est lá une question de principe trés importante pour le
fonctionnement équilibré de I'Organisation, et sur laquelle il conviendrait de
reprendre la discussion.
En attendant une éventuelle action dans ce domaine, il faut envisager des
mesures spécifiques pour faciliter la participation des pays en développement
á la formulation des nofines. En réduisant le nombre des questions á I'ordre
du jour on diminuerait, mais sans les éliminer, les diflicultés de ces pays.
Parmi les mesures á prendre, on pourrait envisager un eflort accru pour
19
Rapport du Directeur général
coordonner les positions des groupes régionaux et sous-régionaux ou d'autres
pays liés entre eux. Certains groupes comme la Communauté économique
européenne ou les pays nordiques essaient déjá d'agir en ce sens, et on voit
aisément I'avantage qu'il y aurait si d'autres groupements en faisaient de
méme, tant par la possibilité qu'ils auraient de faire sentir leur avis que par
la plus grande clarté qui en résulterait dans les débats en commission. Les
gouvernements intéressés pourraient se communiquer les commentaires
qu'ils envoient au Bureau sur les points normatifs de l'ordre du jour, et
surtout organiser des consultations systématiques entre leurs délégations á la
Conférence pour coordonner leur participation aux commissions et adopter,
chaque fois que possible, une position commune.
Une autre possibilité qui mérite attention serait d'avoir recours plus
fréquemment, á la Conférence, á la simple discussion précédée d'une
réunion technique et á la consultation des Etats Membres dans des délais
assez larges pour laisser tout le temps nécessaire á I'examen de la question.
Cette procédure pourrait réduire le nombre de fois qu'il faut consulter
les Etats Membres et le nombre de questions soumises simultanément
á la Conference. Si cette pratique se répandait, elle allégerait beaucoup
la táche de la Confrrence et renforcerait les arguments en faveur de
la tenue de la Conférence tous les deux ans, ou de I'alternance
entre sessions á ordre du jour complet et sessions á ordre du jour
restreint14.
On voit depuis quelques années s'aggraver la difficulté qu'ont les
commissions de la Conférence, obligées de discuter trop d'amendements en
trop peu de temps. Cette difliculté nuit inévitablement á la qualité des
instruments adoptés, car on a tendance á n'examiner les amendements que
dans le cadre de la disposition qu'ils visent, sans avoir le temps d'en
considérer l'effet sur I'ensemble de l'instrument. On peut certes éliminer les
diflicultés résultant d'amendements adoptés en premiére discussion, mais
cela n'est pas possible pour ceux adoptés en seconde discussionrs.
Le volume de travail imposé aux commissions de la Conference crée aussi
des diflicultés au stade des comités de rédaction. La pression sous laquelle le
secrétariat doit traduire et distribuer les innombrables amendements fait
parfois que les textes adoptés n'ont pas le méme sens dans les differentes
langues. De plus, il arrive que les commissions renvoient á leur comité de
rédaction des décisions qui ne touchent pas seulement á la forme, mais au
fond. Les comités de rédaction se trouvent donc surchargés, et obligés de
siéger en moyenne six á sept heures, á un moment de la Conférence oü la
fatigue de deux semaines de travaux commence á se faire sentir, sans que le
calendrier permette le moindre retard.
On pourrait au moins alléger ces diflicultés gráce á certaines des mesures
préconisées plus haut, par exemple si on laissait plus de temps pour les
consultations préliminaires, ou si les groupements régionaux, sous-régionaux
ou autres s'entendaient plus souvent pour adopter et faire connaitre des
positions communes. Une autre procédure, d'ailleurs déjá utilisée, consiste-
20
Normes internationales du travail
rait á ce que les commissions discutent les points essentiels, et confient
l'examen des amendements á des groupes de travail; cela laisserait la
rédaction proprement dite aux soins de plus petites réunions, abaisserait le
nombre de séances pléniéres des commissions, et réduirait donc la pression
que subissent les petites délégations. Il serait bon que cette procédure
devienne systématique.
On pourrait améliorer encore la situation en invitant les délégations á
envoyer leurs projets d'amendement au Bureau avant I'ouverture de la
Conference: la présentation méme des amendements ne pourrait avoir lieu
qu'une fois les commissions constituées, et on pourrait encore en présenter
d'autres dans les limites de temps fixées par les commissions, mais la pression
sur le secrétariat serait allégée, et les textes des amendements pourraient étre
distribués plus tót..
Malgré les avantages évidents de disposer d'une procédure établie pour
l'élaboration des instruments de I'OIT, il ne faudrait pas la croire inflexible.
En effet, le but hnal est d'avoir des textes réalistes et les plus eflicaces possible.
Par conséquent, si dans un cas particulier le temps vient á manquer pour
I'examen approfondi des questions ou des textes portés devant une
commission, celle-ci devrait pouvoir diflerer la discussion jusqu'á la session
suivante de la Conférence. Il faudrait évidemment considérer les effets d'une
telle décision sur la charge de travail des sessions á venir, et donc modifier
éventuellement leur ordre du jour.
La Conference a pour pratique, pour les questions traitées selon la
procédure de double discussion, de décider á la premiére discussion de la
forme á donner aux no[nes proposées, ce qui permet de rédiger les textes
proposés et de les soumettre á consultation avant la seconde discussion. Il
est arrivé plusieurs fois ces derniéres années qu'aprés avoir décidé en
premiére discussion que l'instrument serait une recommandation la
Conférence ait renversé sa décision en seconde discussion pour adopter une
convention complétée par une recommandation16. Ce genre de décision a le
double inconvénient que les textes définitifs sont établis á la háte, et que les
instruments adoptés n'ont pas été l'objet de la << consultation appropriée des
Membres principalement intéressés»» prescrite par l'article l4 de la Constitution
et par les articles correspondants du Réglement de la Conference. Il
serait donc souhaitable soit de revenir au principe de fixer en premiére
discussion la forme de l'instrument, soit, chaque fois que cette décision serait
renversée en seconde discussion, de reporter I'examen définitif de la question
á une session ultérieure de la Conférence, pour assurer que les projets
d'instruments soient soumis á une préparation, et á une consultation avec
les Etats Membres, aussi sérieuses que le prévoit le réglement sur la procédure
de double discussion.
Un nouveau probléme se pose depuis que se développe la consultation
des organisations d'employeurs et de travailleurs sur les réponses de leur
gouvernement aux rapports préliminaires concernant les questions soumises
á la ConÍérence : comment refléter les avis exprimés par ces organisations ?
21
Rapport du Directeur général
La pratique la plus appropriée, d'ailleurs suivie par plusieurs Etats, consiste
en ce que les gouvernements tiennent compte des avis de ces organisations
quand ils rédigent leurs réponses. Or d'autres gouvernements communiquent
ces observations séparément, et le Bureau a pour pratique de ne pas les
reproduire. Les représentants des employeurs ont réclamé un changement de
pratique, et on envisage á titre expérimental de résumer les observations des
organisations d'employeurs et de travailleurs dans un des rapports soumis á
la 70" session de la Conference (seconde discussion de la politique de
l'emploi). Toutefois, et indépendamment des questions juridiques qui pourraient
résulter de I'actuel Réglement de la Conference, qui prescrit que les
rapports de Ia Conférence doivent étre dressés «sur la base des réponses des
gouvernements »», le résumé systématique des remarques des organisations
pourrait poser des problémes pratiques touchant au volume, au calendrier
et au coüt des rapports de la Conférence. Ces diflicultés pourraient s'aggraver
á mesure que se généralise la consultation, surtout qu'en bien des pays
plusieurs organisations doivent étre consultées. Aussi vaudrait-il mieux que
tous les gouvernements incorporent les remarques des organisations á leurs
réponses, au lieu de simplement les y annexer. C'est une question de
procédure qu'il serait utile de régler par accord entre les parties á la
consultation tripartite nationale.
Les questionnaires inclus dans les rapports préliminaires en vue d'une
premiére discussion comprennent toujours une section relative aux particularités
de la législation et de la pratique nationales qui pourraient géner
l'application; cela permet de reconnaitre les points sur lesquels les instruments
proposés devraient laisser une certaine souplesse. A l'heure actuelle,
le traitement ultérieur de ces points dépend de la tendance majoritaire qui
se dégage des réponses. Il serait souhaitable pour I'avenir d'étudier plus
attentivement les réponses données par les pays en développement, surtout
quand il y a déséquilibre entre les nombres de réponses reques de ces derniers
et des pays développés. Il peut aussi étre désirable de prendre en compte les
opinions minoritaires exprimées en premiére discussion, pour mieux assurer
la souplesse dans la suite des consultations et au cours de la seconde
discussion.
Les clauses d'équivalence d'ensemble
On a parfois dit que les conventions pourraient étre plus largement
acceptées s'il était possible de les ratifier sur la base d'une protection
équivalant dans I'ensemble á celle que prévoit I'instrument. Certaines
conventions contiennent déjá des clauses de cet ordre; ainsi, les plus récentes
conventions sur la sécurité sociale permettent d'exclure les gens de mer et
les fonctionnaires s'ils sont au bénéfice de régimes spéciaux qui leur assurent
dans l'ensemble des prestations au moins équivalentes á celles que prescrit
la convention. La convention (no 147) sur la marine marchande (normes
minima), 1976, exige que tout Membre qui la ratihe ait des normes de
22
Normes internationales du travail
sécurité, un régime de sécurité sociale et des conditions d'emploi qui
équivalent, dans l'ensemble, á ce que disposent des conventions antérieures
expressément désignées. La convention (no 152) sur la sécurité et I'hygiéne
dans les manutentions portuaires, 1979, permet de modifier les mesures
techniques qui y sont prescrites pourvu que les modifications garantissent
des avantages équivalents et que, dans son ensemble, la protection assurée
ne soit pas inférieure á celle qui résulterait de I'application intégrale des
dispositions de la convention. Si de telles clauses peuvent étre utiles pour
résoudre des problémes techniques particuliers, elles ne vont pas sans
difliculté, car elles imposent aux organes de contróle la grande responsabilité
de déterminer ce qui peut étre tenu pour une protection équivalente, et
peuvent créer incertitudes et controverses. D'une fagon générale il semblerait
préftrable, pour assouplir les instruments, d'y énoncer expressément les
mesures admissibles en remplacement des dispositions des divers articles. En
ce qui concerne les dispositions secondaires, il faudrait d'abord déterminer
dans quelle mesure il est vraiment nécessaire de les prescrire dans la
convention, puis chercher á les exprimer d'une maniére souple, ou á énoncer
expressément differents moyens d'atteindre le but recherché. Autrement dit,
si les clauses d'équivalence d'ensemble peuvent étre utiles dans certains cas,
il semble en général préferable de fixer les limites de la flexibilité avec
précision.
Conditions d'entrée en vigueur des conventions
La question a été posée de savoir s'il ne faudrait pas mettre des conditions
plus strictes á I'entrée en vigueur des conventions, afin que le mécanisme de
contróle n'opére qu'á partir du moment oü existe un ensemble suflisant de
ratifications. Actuellement, en dehors de cas particuliers comme ceux des
conventions maritimes, les conventions entrent généralement en vigueur
douze mois aprés I'enregistrement de la deuxiéme ratification. Or l'examen
des ratifications concernant les conventions adoptées ces vingt derniéres
années montre que, si le seuil avait été de six ratifications, I'entrée en vigueur
n'en aurait été que fort peu retardée, et que, méme avec un seuil de dix
ratifications, le retard n'aurait été que d'un ou deux ans, sauf pour quelques
conventions qui visent les gens de mer, les pécheurs, la sécurité sociale et les
migrants. L'entrée en vigueur rapide des conventions a I'avantage que
l'examen des diflicultés d'application par les organes de contróle peut éclairer
les Etats qui en sont encore á envisager la ratification. Au cours de son
prochain examen des normes existantes, le Conseil d'administration pourrait
accorder une attention particuliére á celles des conventions qui, bien
qu'adoptées depuis déjá assez longtemps, n'ont pas attiré un nombre
appréciable de ratifications. En examinant les causes de cette situation et
l'opportunité d'y remédier par révision des instruments, le Conseil pourrait
dégager aussi les conclusions générales pour l'élaboration de normes á
l'avenir.
23
Rapport du Directeur général
CONTROLE DE L'APPLICATION DES NORMES DE LOIT
Deux points méritent d'étre soulignés dans la discussion des procédures
établies par I'OIT pour contróler l'application des nonnes adoptées par la
Conférence. Certaines dispositions fondamentales du systéme de contróle
existant - telles que l'obligation de présenter des rapports sur les mesures
qui ont été prises pour donner effet aux conventions ratifiées et les procédures
de présentation des plaintes et des réclamations - figuraient dans la
Constitution d'origine. Le systéme a, toutefois, été sensiblement développé
au fil des ansr7. Certains aspects de cette évolution (par exemple l'obligation
de faire rapport sur les mesures prises pour soumettre les instruments
nouvellement adoptés aux autorités nationales compétentes et l'obligation
de présenter des rapports, á la demande du Conseil d'administration, sur la
situation en ce qui concerne les conventions non ratifiées et les
recommandations) ont découlé d'amendements apportés á la Constitution.
D'autres mesures importantes ont fait suite á des décisions du Conseil
d'administration ou de la Conference, notamment l'établissement de la
commission d'experts et de la Commission de I'application des conventions
et recommandations de la Conférence et la création d'un systéme spécial
d'examen des plaintes en violation des droits syndicaux. Les méthodes de
travail des organes de contróle ont également évolué au fil des ans.
Principales caractér¡stiques du contróle de l'OlT
L'eflicacité du systéme de contróIe de I'OIT dépend d'un certain nombre
de caractéristiques particuliéres.
En premier lieu, les norrnes de I'OIT - et, partiant, les obligations
résultant de leur ratification - sont généralement déflrnies de fagon précise,
par rapport á un certain nombre d'instruments adoptés tant au niveau
mondial qu'au niveau régional.
En deuxiéme lieu, le systéme de contróle de I'OIT est uniforme. Un seul
ensemble de procédures (contróle régulier par une commission d'experts et
une commission tripartite de la Conference, complété par un systéme
d'examen des plaintes et des réclamations) est applicable á toutes les
conventions. Cette méthode diflére de la pratique suivie par certaines autres
organisations (en particulier I'Organisation des Nations Unies) qui consiste
á établir des systémes de contróle distincts et variables pour chaque instrument
adopté.
En troisiéme lieu, comme il a déjá été indiqué, le systéme de I'OIT prévoit
á la fois un contróle régulier sur la base des rapports et l'examen des plaintes
et des réclamations.
En quatriéme lieu, les organes de contrdle de I'OIT bénéficient du soutien
technique d'un personnel qualifié. Cela permet non seulement une analyse
plus approfondie de l'application, mais également une uniformité dans le
traitement des cas, en mettant systématiquement á la disposition des organes
24
Normes internationales du travail
de contróle une documentation et des informations sur lesquelles ils peuvent
se fonder pour prendre leurs décisions.
En cinquiéme lieu, le systéme de I'OIT combine une évaluation
technique réalisée par des experts indépendants et un examen tripartite. La
premiére démarche vise á permettre une évaluation impartiale et objective
de la maniére dont les pays Membres s'acquittent de leurs obligations. La
seconde permet á ceux qui sont directement concernés d'examiner la
situation, de se faire une opinion et de proposer des solutions aux problémes
qui se posent.
En sixiéme lieu, le systéme de I'OIT implique la participation active des
organisations d'employeurs et de travailleurs á l'application des nornes.
Cette participation se manifeste á trois niveaux. Les organisations d'employeurs
et de travailleurs ont un r6le important á jouer en contribuant á
I'adoption et á I'examen des mesures d'application des conventions et
recommandations de I'OIT au niveau national. Elles peuvent étre une source
d'informations pour les organes de contróle de I'OIT ou étre á I'origine de
plaintes ou de réclamations. Leurs représentants participent directement au
travail de contróle, notamment au sein de la commission tripartite de la
Conference.
Enfin, le systéme uniforme qui est applicable á toutes les normes de I'OIT
est complété par plusieurs procédures spéciales dans des domaines
spécifiques, tels que le systéme d'examen des plaintes en violation de la
liberté syndicale et la possibilité d'effectuer des études spéciales concernant
la discrimination dans I'emploi et la profession. En outre, le Bureau
international du Travail a la compétence générale, en vertu de I'article l0
de la Constitution, de mener des enquétes spéciales et il en a usé á plusieurs
reprises pour effectuer d'importantes études spécifiques. Il est possible de
recourir á toutes ces procédures spéciales, méme lorsque le pays concerné
n'a pas ratifié les conventions pertinentes de I'OIT.
Comme il a déjá été mentionné, les mécanismes de contróle de I'OIT ne
sont pas demeurés statiques, mais ont, au contraire, connu une évolution et
une adaptation progressives. Jusqu'en 1958, les rapports relatifs aux
conventions ratifiées devaient étre soumis chaque année. Puis la périodicité
des rapports détaillés a été portée á deux ans. En 1977, le systéme a de
nouveau été modifié, les rapports détaillés devant étre présentés tous les ans,
tous les deux ans ou tous les quatre ans selon le sujet de la convention et la
nature des problémes rencontrés dans son application. La Commission
d'experts pour I'application des conventions et recommandations, qui était
á I'origine (en 1927) composée de 8 membres, compte aujourd'hui 20
membres, reflétant l'élargissement de la composition de l'Organisation.
Depuis 1957, pour axer l'attention sur les problémes les plus importants,
seule une partie des commentaires formulés par la commission est publiée
dans ses rapports, le reste étant adressé aux Etats concernés sous forme de
demandes directes. La Commission de I'application des conventions et
recommandations de la Conference a établi, depuis 1957, le systéme qui
25
Rapport du Directeur général
consiste á attirer spécialement l'attention dans ses rapports sur des cas oü
certains Etats rencontrent des diflicultés pour s'acquitter de leurs obligations.
Ce systéme a été revu et adapté á plusieurs reprises, la derniére fois en 1980.
Ces dix derniéres années, une série de mesures ont été prises pour encourager
les organisations d'employeurs et de travailleurs á contribuer plus activement
aux procédures de contróle. Depuis 1969,la procédure de cont¿cts directs
permet de discuter, au cours de missions, des problémes rencontrés par
certains pays pour s'acquitter de leurs obligations á l'égard des normes de
I'OIT et des moyens de résoudre ces problémes. La procédure des cont¿cts
directs a été complétée ultérieurement par des missions consultatives moins
officielles et, plus récemment, par la nomination de conseillen régionaux sur
les normes internationales du travail.
L'impact du contróle de l'OlT
On s'est beaucoup attaché á étudier l'impact des normes et du contróle
de I'OIT. En 1954, la commission d'experts a étudié I'eflicacité de ses
observations18. Depuis 1955, une série d'articles analysant I'influence des
conventions et recommandations dans divers pays a été publiée dansla Revue
internationale du Travail, et, en l976,le Bureau a publié une étude générale
sur ce sujetre. Depuis 1964, la commission d'experts énumére dans son
rapport les cas pour lesquels, á la suite de ses observations, elle a pu noter
des progrés dans l'application des conventions ratifiées. Le nombre de cas de
ce genre enregistrés au cours des vingt années allant de 1964 iL 1983 dépasse
I 500 au total.
Aux fins du présent rapport, on a analysé les 761 cas pour lesquels la
commission d'experts a relevé des progrés dans I'application des conventions
ratihées au cours de ces dix derniéres années (1974-1983). Le tableau 3 donne
la répartition régionale de ces cas et indique également la proportion de
ratifications provenant de chaque région. En comparant ces chiffres, il faut
tenir compte du fait que le nombre des observations faites par la commission
d'experts (et, partant, des cas oü des progrés sont possibles) pour un pays
donné n'est pas forcément proportionnel au nombre des conventions qu'il a
ratihées. En outre, il n'est pas fait de distinction, en ce qui concerne les
chiffres, entre les cas oü les carences dans I'application d'une convention,
relevées par la commission d'experts, ont été entiérement éliminées et ceux
oü la commission n'a relevé que certains progrés. Toutefois, cela étant, les
chiffres montrent que les pays de toutes les régions sont sensibles au contrdle
de I'OIT.
Le tableau 4 analyse les cas pour lesquels des progrés ont été relevés,
selon le domaine, les pays développés étant distingués des pays en
développement.
En relevant les cas oü des progrés ont été réalisés gráce aux mesures prises
par les gouvernements,.á la suite des observations de la commission d'experts,
cette derniére a souligné le fait qu'il ne s'agissait pas lá des seuls exemples
26
Normes internationales du travail
Tableau 3. Cas pour lesquels la Commission d'experts pour l'application des conventions
et recommandations a relevé des progrés dans l'application des conventions
ratifiées, 1974-1983, par région
Région Nombre total
de cas de progrés
relevés
Pourcentage
du total des cas
de progrés relevés
Pourc€ntage
des ntifications
de conventions de I'OIT
Afrique
Amériques
Asie et Pacifique
Europe
oü les noÍnes de I'OIT ont influé sur la pratique et la législation nationales.
Ainsi, depuis 1975, la commission a noté 77 cas (deux tiers concernent les
pays développés) pour lésquels le premier rapport sur l'application d'une
convention ratifiée a montré que de nouvelles mesures destinées á la mise
en @uvre de cette convention ont été adoptées, peu avant ou peu apr¿s sa
ratification. De méme, souvent, les rapports relatifs aux conventions non
ratifiées et aux recommandations, présentés par les pays confoÍnément á
I'article 19 de la Constitution, font apparaitre que les normes de I'OIT
influent sur l'adoption de mesures au niveau national20. Les études de I'OIT
montrent que, dans d'autres cas, les pays adaptent progressivement leur
pratique et leur législation nationales aux prescriptions d'une convention
avant de décider de la ratifier. Les gouvernements sont conscients du fait que,
s'ils ratifient une convention, ils feront I'objet d'un contrÓle quant á son
application et la plupart d'entre eux tiennent á s'assurer qu'ils se conforment
á cette convention déjá au moment oü ils la ratifient. Ainsi, l'impact des
procédures de contrdle de I'OIT ne se limite pas aux cas oü les observations
critiques formulées par la commission aprés la ratification d'une convention
par un pays ont conduit ce dernier á prendre des mesures de correction. Ces
procédures ont aussi une influence indirecte importante, de caractére
préventif.
Les observations précédentes montrent l'esprit dans lequel est abordé
I'ensemble de la question du contr6le international. Les procédures de I'OIT
peuvent aider les Etats Membres á comprendre toute la signification des
nornes qu'ils se sont engagés á observer et les inciter á remédier á tout
manquement á leurs obligations. Toutefois, I'objectif essentiel du systéme
consiste á assurer que les Etats s'acquittent des obligations qu'ils ont
librement contractées et á préserver ainsi la crédibilité de l'acte de
ratiflrcation.
Alors que les procédures adoptées pour assurer l'application des normes
de I'OIT sont considérées comme I'un des systémes les plus efftcaces et les
plus complets de contróle international, elles ont également suscité des
critiques, en particulier de la part de pays socialistes. La situation de ces pays
a été exposée dans le mémorandum qu'ils ont présenté á la Conférence en
27
145
274
ll0
232
t9
36
t4
31
26
24
t4
36
Rapport du Directeur général
Tableau 4. Cas de progrés dans l'application des convent¡ons ratifiées relevés par la
Commission d'experts pour l'applicat¡on des conventions et recommandations,
1974-1 983, par sujet
Domaine des conventions concemées Nombre de cm oü des progrés ont été ¡elevés
développés
Pays en
développement
Pays
Droits londamentaux de I'homme
Emploi et formation
Administration du travail
Conditions générales de travail (salaires,
durée du travail, repos, congés)
Sécurité et hygiéne du travail
Sécurité sociale
Emploi des femmes, des enfants
et des jeunes gens
Marins, pécheurs, dockers
Autres (politique sociale, travailleurs migrants,
travailleurs indigénes, plantations,
personnel infirmier)
Totaux
80
l1
26
94
2t
52
t5
31
78
68
58
44
80
l2
9
59
20
246 515
1983 et dont le contenu a été confirmé, dans sa totalité, dans une
communication adressée au Directeur général, le l8 novembre 1983, par le
gouvernement de I'URSS au nom d'un certain nombre de pays socialistes.
L'adoption en séance pléniére du rapport de la Commission de l'application
des conventions et recommandations de la Conférence a posé des problémes
á plusieurs reprises, ces derni¿res années, et par trois fois (en 1974,1977 et
1982) la Conference, faute de quorum, n'a pu adopter le rapport. Les
principaux problémes qu'il faut examiner, compte tenu de ces discussions,
ont trait á la composition, aux pouvoirs et aux méthodes de travail des
organes de contróle.
Composition de la commission d'experts
En ce qui concerne la commission d'experts, il est rappelé que, si ses
membres sont désignés á titre individuel parmi des personnes indépendantes,
ils sont choisis dans toutes les parties du monde ahn qu'ils possédent une
expérience directe des differents systémes juridiques, économiques et sociaux.
Le Conseil d'administration a examiné pour la derniére fois la composition
de la commission en mars 1983 2r. A mon avis, á la suite de la nomination
d'un nouveau membre en provenance d'Afrique et d'un membre ressortissant
d'un pays arabe, on est parvenu á un équilibre raisonnable. Comme I'objectif
visé, en donnant á la commission une large composition, est d'assurer que
les membres ont une expérience directe des différents syst¿mes juridiques,
2A
3
Normes internationales du travail
économiques et sociaux existant dans les pays dont elle est appelée á
examiner la législation et la pratique, il peut étre intéressant de comparer la
composition de la commission et la proportion des ratifications en
provenance des diverses régions. Les chiffres relatifs á cette question sont
donnés au tableau 5.
Méthodes d'évaluation utilisées dans le contróle
Pour ce qui est des méthodes utilisées pour évaluer la maniére dont les
pays s'acquittent de leurs obligations á l'égard des conventions ratifiées, l'un
des principaux points sur lesquels la discussion a porté est la mesure dans
laquelle il conviendrait de tenir compte des systémes économiques, sociaux
et politiques des divers pays. Les représentants des pays socialistes n'ont cessé
d'insister sur le fait qu'il fallait tenir compte de ces facteurs, et qu'en s'y
refusant la commission en est arrivée á faire des évaluations tendancieuses
et partiales de la législation et de la pratique des pays socialistes et des pays
en développement et á s'ingérer dans des affaires qui relévent de la
souveraineté des Etats. A leur avis, le systéme de contróle se trouve ainsi
converti en une sorte de tribunal supranational qui cherche á imposer sa
propre interprétation de la législation nationale, alors qu'une interprétation
valable de la législation ne peut étre donnée que par ceux qui l'adoptent, á
savoir les gouvernements des pays intéressés 22.
La commission d'experts a étudié cette question. Elle a précisé sa position
en exposant une nouvelle fois, dans son rapport de 1977, ses principes
fondamentaux et ses méthodes de travail, dans les termes suivants:
La commission a discuté de la méthode á adopter dans l'évaluation de la
législation et de la pratique nationales par rapport aux prescriptions des conventions
internationales du travail. Elle réaflirme que sa fonction consiste á déterminer si les
prescriptions d'une convention donnée sont remplies, quelles que soient les
conditions économiques et sociales existant dans un pays donné. Ces prescriptions
demeurent constantes et uniformes pour tous les pays, sous la seule réserve des
dérogations éventuelles que la convention elle-méme autorise expressément. En
effectuant cette táche, la commission n'est guidée que par les normes contenues dans
la convention, sans toutefois perdre de vue le fait que les modalités de leur mise en
Guvre peuvent diflerer suivant les Etats. I1 s'agit de normes internationales et la
maniére dont leur application est évaluée doit étre uniforme et ne doit pas étre
affectée par des conceptions dérivées d'aucun systéme social ou économique
particulier 23.
La majorité des membres de la Commission de l'application des
conventions et recommandations de la Conférence a adopté une position
similaire. Ils ont estimé que la diversité des conditions nationales est un
élément á prendre en compte lors de l'élaboration des normes de I'OIT, en
leur donnant une certaine souplesse, comme l'exige la Constitution de I'OIT,
mais qu'une fois une convention ratifiée il ne saurait y avoir davantage de
souplesse que celle qui est prévue expressément par la convention. Ils ont
insisté sur le fait que l'évaluation de la maniére dont les Etats s'acquittent
29
Rapport du D¡recteur général
Tableau 5. Répartition géographique des membres de la Commission d'experts pour
I'application des convent¡ons et recommandations, et des ratificat¡ons des
conventions
Nombre de membres Pourcentage du total
de la commission
d'experts
Pourcentage
de membres
de la commission
des Étifications
des conventions
Afrique 3
Amériques 5
Asie 4 t
Europe occidentale 5
Europe orientale 3
I Y compris un memb¡e d'un pays d'Asie occidentale.
l5
25
20
25
15
26
24
14
26
l0
de leurs obligations au titre des conventions ratifiées doit se faire selon les
mémes critéres pour tous les pays, et que toute autre approche serait
incompatible avec le principe de l'égalité des Etats, et laisserait chaque Etat
libre d'interpréter ses obligations comme il I'estime approprié. Tout Etat est
libre de décider s'il ratiñe ou non une convention, mais une fois qu'il a décidé
de le faire il doit accepter les obligations découlant de cette ratification et ne
peut pas invoquer des questions de souveraineté comme un obstacle ¿ sa
mise en Guvre 24.
Méthodes de travail de la commission de la Conférence
Une autre question importante concerne les méthodes adoptées par la
commission de la Conference pour attirer particuliérement l'attention, dans
son rapport général, sur certains des cas qu'elle a étudiés, en particulier en
ce qui concerne I'application des conventions ratifiées.
Le mandat de la commission á cet égard, tel qu'il est défini á I'article 7,
paragraphe l, du Réglement de la Conférence, consiste á << examiner les
mesures prises par les Membres afin de donner effet aux dispositions des
conventions auxquelles ils sont partie, ainsi que les informations fournies par
les Membres concernant les résultats des inspections »». Conformément au
paragraphe 2 de I'article 7 du Réglement, la commission doit présenter un
rapport á la Conférence.
En raison du temps limité qui lui est imparti, la commission a pour
pratique de sélectionner, en vue de la discussion, un certain nombre de cas
au sujet desquels la commission d'experts a formulé des observations. A la
fin de la discussion d'un cas, le président fait une déclaration récapitulative
des débats, dans laquelle il est généralement fait état des explications et
assurances données par le gouvernement intéressé et dans laquelle s'exprime
I'espoir que les mesures qui peuvent étre nécessaires pour assurer le respect
de la convention considérée seront adoptées. Il arrive que les membres de la
30
Normes internationales du travail
commission, en particulier les porte-parole des groupes non gouvernementaux,
proposent un libellé précis pour les conclusions de la commission. Le
compte rendu des débats relatifs á chaque cas est consigné dans le rapport
de la commission.
En 1957,la commission de la Conférence a décidé d'inclure une nouvelle
rubrique dans son rapport á la Conférence. Tout en conservant dans le
compte rendu des débats portant sur les divers cas les conclusions auxquelles
elle est parvenue, la commission a estimé que, << dans certains cas, les
divergences signalées présentent un caractére si important ou existent depuis
une si longue durée que I'attention de la Conference devrait étre attirée sur
cette situation peu satisfaisante. Aussi la commission a-t-elle décidé d'attirer
I'attention sur certains de ces cas 2s. >>
C'est depuis lors que l'on a instauré le systéme actuel qui consiste á
mentionner spécialement certains cas. A diverses ieprises, la commission de
la Conference a revu ce systéme. En 1979 et 1980, il a été examiné dans le
détail par un groupe de travail créé par la commission. Il en est résulté
certaines modifications de forme. Toutefois, le systéme continue de préter á
controverse. Les principaux problémes sur lesquels sont axés les débats ont
trait au fondement juridique de la pratique adoptée par la commission, á son
efEcacité et á son équité.
D'une part, d'aucuns ont argué que le fait de mettre en relief certains
problémes que souléve I'application des conventions ratifiées, en mentionnant
certains cas sur une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux,
constitue une sanction qui ne repose sur aucun fondement constitutionnel,
que cela décourage les Etats de ratifier les conventions, que le systéme a été
improprement utilisé á des fins politiques et que cela détourne le systéme de
contróle de son véritable objectif qui est d'aider les Etats Membres á
améliorer leur législation nationale, sur la base du dialogue, de l'échange des
données d'expérience et de la coopération26.
D'autre part, dans leur majorité, les membres de la commission de la
Conférence ont estimé que le recours á la liste spéciale et aux paragraphes
spéciaux ne constitue pas une sanction juridique, puisqu'elle n'a d'autre eflet
que sa force morale en tant qu'expression de I'opinion de la commission et
de la Conference, que la commission a le droit et le devoir de tirer des
conclusions sur les cas qu'elle examine et que, sans cette ávaluation, les
conventions et ratifications risquent de perdre toute signification27.
Un premier point qu'il convient de noter est que la pratique suivie depuis
longtemps par la commission, consistant á présenter des conclusions sur les
cas qu'elle a examinés et á les consigner dans le compte rendu des débats qui
figure dans son rapport, n'a soulevé aucune objection. Le débat porte sur la
pratique qui consiste á retenir certains cas pour en faire une mention spéciale
dans le rapport général de la commission. La nature des décisions prises
conformément á cette pratique est indiquée par la commission dans ses
rapports. Elle demeure la méme que lors de I'adoption de cette méthode en
1957, it savoir appeler I'attention de la Conférence sur les discussions
31
Rapport du Directeur général
relatives á certains cas 28. L'adoption de cette pratique constitue ainsi une
décision quant á la maniére de faire rapport á la Conférence, confornément
aux dispositions stipulées dans l'article 7, paragrapbe 2, du Réglement.
Un autre aspect qu'il parait utile d'étudier a trait au caractére et aux
fonctions de la commission d'experts et de la commission de la Conférence.
La commission d'experts est appelée á examiner la maniére dont les pays
s'acquittent de leurs obligations á l'égard des instruments de I'OIT, et en
particulier I'obligation, stipulée dans I'article l9 de la Constitution de 1'OIT,
de donner eflet aux dispositions des conventions ratihées. La commission a
fait observer que, pour remplir sa fonction, elle doit examiner la signification
des dispositions des conventions et exprimer ses vues á leur sujet. En méme
temps, elle a relevé qu'il incombe á la Cour internationale de justice, en vertu
de I'article 37 de la Constitution, de donner une interprétation des
conventions 2e. Si, en raison de la qualité et de la compétence des membres
de la commission d'experts, les avis de cette derniére méritent la plus grande
attention et le plus grand respect, et si, dans la grande majorité des cas, ils
sont acceptés par les gouvernements concernés, ils n'ont toutefois pas force
de loi. La commission n'est pas un tribunal habilité á rendre des décisions
liant les Etats Membres.
La commission de la Conférence, contrairement á la commission
d'experts, est composée non pas d'experts indépendants, mais de représentants
des parties directement intéressées par I'application des conventions.
Les délibérations de la commission offrent la possibilité aux constituants de
I'OIT de participer démocratiquement á l'examen de la suite donnée aux
instruments de I'Organisation. Les évaluations de la commission, ainsi que
toutes les évaluations faites par la Conférence sur la base du rapport de la
commission, ne sont pas non plus des sentences et n'ont pas force obligatoire.
Elles expriment une opinion ayant valeur morale et de persuasion.
Il est donc évident que I'on ne peut contraindre un Etat á accepter les
avis ni de la commission d'experts ni de la commission de la Conférence,
non plus qu'á leur donner suite. Il ne serait toutefois pas satisfaisant, ni pour
I'Organisation, ni pour I'Etat intéressé, de laisser en suspens des problémes
importants qui touchent á I'application des conventions ratiflrées, lorsque,
aprés en avoir pris pleinement connáissance, un gouvernement rejette les
conclusions formulées par ces commissions. La Constitution de I'OIT offre
des moyens pour faire face á ces situations, en prévoyant des commissions
d'enquéte et le renvoi de certaines questions á la Cour intemationale de
justice. L'article 26 dela Constitution permet d'avoir recours á la procédure
de plainte en manquement aux obligations d'une convention ratifiée,
notamment par le Conseil d'administration, mesure que celui-ci pourrait
méme prendre á la demande de l'Etat concerné. Aux termes des articles 3l
et32,la Cour internationale de justice est habilitée á prendre des décisions
sans appel, aussi bien en ce qui concerne les conclusions que les
recommandations, lorsqu'un gouvernement faisant l'objet d'une plainte
n'accepte pas les recommandations d'une commission d'enquéte. Conformé-
32
Normes internationales du travail
ment á l'article 37, la Cour a compétence pour apprécier toutes questions
ou diflicultés relatives á l'interprétation des conventions de I'OIT. Il
conviendrait d'examiner l'opportunité de recourir á ces mécanismes lorsque
d'importants problémes relatifs á I'application des conventions ratifiées
demeurent sans solution
Les observations précédentes ont porté sur le caractére juridique des
travaux des organes de contrdle. Il faut également étudier les aspects
pratiques et politiques de ces questions. En particulier, malgré la discussion
approfondie á laquelle les méthodes de travail de la commission de la
conférence ont donné lieu en 1979 et 1980, des divergences de vues existent
sur le point de savoir si le recours á la liste spéciale et aux paragraphes
spéciaux pour mettre en lumiére les lacunes relevées dans l'application des
conventions ratifiées incite les Etats á mieux appliquer lesdites conventions
ou, au contraire, s'il n'a pas un effet opposé á celui recherché en indisposant
les gouvernements á l'égard des efforts déployés par I'OIT pour assurer
I'acceptation et la mise en Guvre la plus large possible de ses normes. On a
rappelé, á cet égard, le fait que la Conference n'a pas adopté á trois reprises,
ces dix derniéres années, le rapport de cette commission.
La Conference trouvera peut-étre utile de disposer d'une analyse
montrant dans quelle mesure les Etats intéressés ont apporté des
améliorations dans l'application des conventions ratifiées, lorsqu'ils ont été
mentionnés dans une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux depuis
l'adoption de cette pratique, en 1957, par la commission de la Conference.
Les tableaux 6,7 et 8 donnent des indications á ce sujet.
Le tableau 6 donne des résultats globaux, groupés par périodes de huit
ans, plus une période finale couvrant les trois derniéres années. On s'apergoit
que, si le nombre de pays a varié quelque peu d'une période á l'autre, le
nombre de cas mentionné est demeuré plus ou moins le méme dans chaque
période. Le tableau montre également que des mesures ont été prises de fagon
réguliére en vue de l'élimination partielle ou totale des carences observées
dans I'application des conventions ratifiées, si l'on tient compte du décalage
qui semble avoir affecté la premiére période considérée et du fait que, au
cours de la derniére période, d'une durée limitée, les progrés relevés ont fait
suite, en partie, aux mentions spéciales faites au cours des périodes
antérieures. Dans I'ensemble, depuis 1957 , 16l cas ont été cités sur une liste
spéciale ou dans des paragraphes spéciaux. Dans 58 de ces cas (soit 36 pour
cent), les carences qui ont donné lieu á ces mentions ont été éliminées. Dans
49 cas (soit 30 pour cent), des progrés partiels ont été relevés. euarante-cinq
pays au total étaient concernés. On a relevé, dans 20 pays, des cas
d'élimination totale des carences. Dans 22 pays, des progrés partiels ont été
enregistrés. Dans certains pays, on a noté á la fois des cas d'élimination totale
des carences dans l'application de certaines conventions, et des progrés
partiels dans celle de certaines autres. Au total, on a enregistré des progrés
(totaux ou partiels) dans 33 des 45 pays qui ont été mentionnés dans des
listes spéciales ou des paragraphes spéciaux.
33
Rapport du Directeur général
Tableau 6 Progrés dans l'application des conventions ratifiées, r-elevés par la commission
d'eiperts, s'agissant de cas que la commission de la Conférence a mentionnés
dans une listé spéciale ou dans des paragraphes spéciaux, 1 957-1 983
195't-1964 1965-1972 1973-t980 l98l-1983 Total
Nombre de pays qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Nombre de cas qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Progrés partiel:
- nombre de pays
- nombre de cas
Progrés total:
- nombre de pays
- nombre de cas
23 t7 23 ll 45
lól
22
49
20
58
55 53 54 27
3
J
lt
JJ
18
3l
l4
22
4
4
l0
23
13
28
J
J
Nombre de cas de progrés aprés
des contacts direits - 4 25 4 33
Dénonciations 2 | 3
N. B. : L¡ nombre de pays et de cs est donné pour chacune des périodes indiquées. Comme certains pays et certains ca ont
i"iif'oUj"t d'une mentión spéciale durant plus d'une de ces périodes, les totaux indiqués dans la demiére colonne rcnt
inférieus á la rcmme des chilTres précédents. - ó"áini "^ ont fait I'objet de progrés partiels d plus d'une reprire. D'autres ont d'abord fait I'objet de progr¿s partiels
puitf,irn" ¿fi.lniiion iot"Lé des careíces'conceméis. Le total généml des cas de progrés partiel est donc inférieur d la
somme des chiffres qui le précédent.
Deux autres points méritent d'étre relevés. Dans un gmnd nombre de cas,
des progrés ont fait suite aux missions de contacts directs, procédure appliquée
depuis 1969. n s'agit dans la plupart des cas (29 sur 33) de pays de la
région des Amériques. Dans 3 cas, les conventions mentionnées dans la liste
spéciale ont été dénoncées. Ces dénonciations ont eu lieu entre l96l et 1965.
Deux avaient trait á la convention (n" 4) sur le travail de nuit (femmes), 1919.
La troisiéme avait trait á la convention (n" 3) sur la protection de la maternité,
1919. Toutefois, en I'occurrence, le pays en question a ratifié, quatre
ans aprés, la convention révisée no 103.
Le tableau 7 analyse les chiffres dans le cas des pays développés et des
pays en développement. L€ nombre de pays concernés dans chaque gloupe
refl¿te á peu prés I'importance numérique de la composition de I'oIT. I€
nombre de cas relatifs á des pays en développement est proportionnellement
plus grand. Cela tient au fait que les pays en développement ont plus souvent
été mentionnés sur une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux, au
sujet de diverses conventions. Pour ce qui est des pays développés, des progrés
o;t été relevés dans la moitié des cas mentionnés, avec, dans la quasi-totalité
des cas, une élimination totale des carences. Quant aux pays en développement,
la proportion des cas ayant donné lieu á une action est supérieure
(69 pour cent), mais seule la moitié d'entre eux ont abouti á une élimination
totale des carences.
34
Normes internationales du travail
Tableau 7 Progrés dans l'application des convent¡ons ratifiées relevés par la co-mmission
d'eiperts, s'agissant des cas que la commission de la Conférence a
meniionnés dáns une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux,
1957-1983, dans les pays développés et dans les pays en développement
1957-t964 1965-t972 1973-1980 1981-1983 Total
A. Pays développés
Nombre de pays qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Nombre de cas qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Progrés partiel:
- nombre de pays
- nombre de cas
Progrés total:
- nombre de pays
- nombre de cas
B. Pays en développement
Nombre de pays qui ont fait l'objet
d'une mention spéciale
Nombre de cas qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Progrés partiel:
- nombre de pays
- nombre de cas
Progrés total:
- nombre de pays
- nombre de cas
N. B. : Voir sous tableau 6.
8
8
3
3
2
2
2
J
J
3
t4
49
l5
3
4 8
4 4 t2
5 20
l9 7 33
46 22 l4l
7
9
47
2
2
l0
32
t'7
30
l4
22
2t
48
ll
25
13
49
7
20
2
l2
Le t¿bleau 8 donne une ventilation des chiffres selon le domaine des
conventions considérées, une distinction étant faite entre les instruments
relatifs aux droits de I'homme fondamentaux et les autres conventions de
caractére essentiellement technique. Il montre qu'au fil des ans le nombre
de cas mentionnés sur une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux,
concernant des conventions relatives aux droits de I'homme fondamentaux, a
augmenté progressivement, alors que I'on a enregistré une diminution des
cas relatifs aux autres conventions. Pour ce qui est du premier groupe de
conventions, les carences concernées ont été éliminées dans un sixiéme des
cas, et on a enregistré des pro$és partiels dans un peu plus d'un quart des
cas. Pour ce qui est des conventions techniques, les résultats ont été
supérieurs: progrés total dans 44 pour cent des cas et progrés partiel dans
32 pour cent d'entre eux. La mesure dans laquelle des cas relatifs á
l'application des conventions techniques ont fait l'objet de progrés peut
35
Rapport du Directeur général
Tableau 8. Progrés dans l'application des convent¡ons ratifiées relevés par la commission
d'experts, s'agissant de cas que la commission de la Conférence a
mentionnés sur une liste spéciale ou dans des paragraphes spéciaux,
1 957-1 983, par sujet des conventions concernées
195'l-1964 1965-1972 1973-1980 l98t-1983 Total
A. Conventions concernant les droits
de l'homme fondamentaux (liberté
syndicale et négociation collective,
travail forcé, discrimination dans
I'emploi et la profession et égalité
de rémunération)
Nombre de cas qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Progrés partiel
Progrés total
B. Autres conventions
Nombre de pays qui ont fait I'objet
d'une mention spéciale
Prog¡és partiel
Progrés total
N. B. : Voir sous tableau 6.
48
l3
8
38
3l
22
l2
l5
2
113
36
50
14
7
I
3l
8
6
23
23
22
15
2
I
7
J
4
48
expliquer en partie la diminution de leur nombre. Les chiffres refl¿tent
également le caractére plus complexe des probl¿mes rencontrés dans
l'application des conventions relatives á la liberté syndicale, au travail forcé
et á la discrimination.
I¡s chiffres indiqués dans les tableaux susmentionnés ne doivent pas étre
considérés comme exprimant la somme totale de I'expérience acquise dans
le fonctionnement du systéme de mise en évidence de certains cas appliqué
par la commission de la Conference. La commission a souvent differé la
décision de mentionner spécialement un cas apr¿s avoir requ I'assurance d'un
gouvernement qu'il s'engageait á prendre des mesures en vue de remédier
aux lacunes dans l'application de la convention en cours d'examen. La
commission a également prévenu, á diverses reprises, les pays Membres
concernés que, si la situation ne s'était pas améliorée au moment de la reprise
de la discussion du cas, elle proposerait de les mentionner sur une liste
spéciale ou dans un paragraphe spécial. L'éventualité d'une mention spéciale
constitue ainsi pour les pays Membres une incitation á éliminer les
divergences constatées.
L'analyse qui précéde conduit á la conclusion que la méthode de mise
en évidence de certains cas adoptée par la commission de la Conference
a eu pour effet d'améliorer I'application des conventions ratifiées, en
particulier si I'on songe qu'elle a été utilisée surtout pour des cas au sujet
36
Normes internationales du travail
desquels, pendant trés longtemps, il n'avait pas été donné suite aux
observations des organes de contróle. Il reste toutefois qu'un certain nombre
d'Etats Membres estiment que le systéme n'offre pas de garanties
d'application juste et équitable et que les décisions de la commission sont
largement infuencées par des considérations politiques. Il est deux maniéres
de considérer ces arguments. L'une serait de considérer que, si l'évaluation
faite par des experts constitue une part essentielle du contróle de I'OIT,
I'examen de la maniére dont les Etats s'acquittent de leurs obligations au
titre des conventions ne devrait pas étre I'affaire des seuls experts et que les
gouvernements, les employeurs et les travailleurs qui sont les éléments
constitutifs de I'Organisation devraient également pouvoir étudier, en se
fondant sur les conclusions des experts, les problémes qui se posent et faire
connaitre leur position en la matiére. Les délégués et les conseillers
techniques qui assistent á la Conférence estiment certainement qu'ils ont leur
mot á dire sur ces questions. L'autre maniére de voir serait de considérer
que, méme si les conclusions de la commission n'ont pas force obligatoire,
elles constituent une évaluation de la maniére dont les Etats s'acquittent de
leurs obligations et que le fait de procéder á une telle évaluation en recourant
á une décision majoritaire dans un organisme groupant les représentants des
parties intéressées n'est pas conforme á la notion de la régle de droit.
Une autre question dont il faut tenir compte a trait aux diflicultés qui se
sont posées en plusieurs occasions au moment de l'examen par la Conférence
du rapport de la commission. Comme on l'a déjá rappelé, par trois fois, faute
de quorum en séance pléniére, la Conference n'a pu adopter le rapport de
la commission. Cela n'a pas empéché les discussions de la commission de
figurer dans le compte rendu des travaux de la Conference, et n'a pas
davantage affecté les conclusions de la commission d'experts, mais une telle
situation, si elle se répétait, ne pourrait qu'affaiblir la force morale du systéme
de contróle.
Compte tenu de ces divers facteun, il incombe á la commission de la
Conférence et á la Conférence elle-méme de déterminer s'il serait opportun
et éventuellement utile d'examiner de nouveau les méthodes appliquées par
la commission.
Il est un point qu'il conviendrait de ne pas perdre de vue dans cette
discussion, c'est que les différentes parties du systéme de contróle de I'OIT
n'agissent pas de maniére isolée mais sont complémentaires. Si les discussions
au sein de la commission de la Conférence et de la Conférence elle-méme
marquent l'étape finale de ce que l'on appelle le contróle régulier, le fait que
ces instances ne parviennent pas á un consensus, ou á faire accepter les vues
des organes de contróle par les gouvernements intéressés, ne doit pas
nécessairement étre considéré comme le résultat ultime du contróle de I'OIT.
Il reste la possibilité - dont il a déjá été question - d'avoir recours á la
procédure de plainte prévue par la Constitution et de saisir la Cour
internationale de justice. Le recours á ces procédures élimineraitla crainte
de conclusions dictées par des considérations politiques et assurerait á toutes
37
Rapport du Directeur général
les parties intéressées les garanties inhérentes á un processus judiciaire ou
quasi judiciaire.
Certes, le recours aux multiples procédures, fixées par la Constitution ou
élaborées au cours des années par le Conseil d'administration, doit étre
entouré de toutes les garanties d'objectivité nécessaires et ces procédures ne
doivent étre invoquées que de la maniére la plus responsable dans des
situations caractérisées de violation des conventions fondamentales et, en
particulier, des conventions se rapportant aux droits de I'homme. Pratiqué
de cette fagon, le recours á ces procédures offre le seul moyen véritable
d'observer la régle de droit (due process). Il donnerait son véritable sens aux
travaux de la Commission de I'application des conventions et recommandations
de la Conférence dont le róle demeure essentiel. En effet, cette commission,
par le fait méme de sa composition tripartite, est le lieu par excellence
oü, gráce aux informations dont elle est saisie par la commission d'experts,
gráce aux questions posées aux gouvernements, aux réponses enregistrées,
peuvent étre appréciées les conditions dans lesquelles sont appliquées les
conventions internationales du travail. La commission, au cours des années,
a pris un soin accru á rapporter les discussions, aussi bien pour enregistrer
d'un c6té les progrés réalisés que pour exprimer ses préoccupations en ce qui
concerne les manquements aux prescriptions fixées dans les conventions
internationales ou pour relever les défaillances des gouyernements qui
refusent ou s'abstiennent de fournir au Bureau les rapports auxquels ils sont
tenus. Il convient que les débats tripartites au sein de la commission soient
les plus amples possibles et soient rapportés avec le plus de soin possible. La
possibilité demeure pour les délégués de formuler leurs observations, en
séance pléniére, non seulement sur le rapport de la commission de la Conference
mais également sur celui de la commission d'experts, qui doit demeurer
I'instrument essentiel d'un examen critique de l'application des conventions
internationales. La táche ainsi accomplie par la commission de la Conférence,
prolongée en cas de besoin en séance pléniére, devrait permettre
d'établir chaque année, pour le bénéfice de chacun des gouvernements
comme des employeurs et des travailleurg ainsi que de l'opinion publique,
un panorama complet de la situation au regard des conventions internationales
du travail, des progrés de leur ratification et de leur application, des
diffi cultés rencontrées.
Sur cette base, il appartiendrait á la Conférence, en adoptant ou en
prenant note du rapport soumis par la commission tripartite, d'inclure dans
les procés-verbaux les commentaires formulés en séance par les délégués qui
entendraient s'exprimer. Au-delá, s'agissant des situations critiques au regard,
en particulier, des conventions fondamentales, il resterait, ainsi que je I'ai
signalé ci-dessus, Ia possibilité de recourir á la procédure de plainte et de
demander, dans des cas limites je le présume, une interprétation de la Cour
internationale de justice.
Les observations qui précédent ont eu trait á la maniére dont la commission
de la Conférence met en évidence les problémes graves que pose
38
Normes internationales du travail
l'application des conventions ratifiées. La commission appelle également
I'attention sur divers cas de pays qui n'ont pas fourni les rapports et
informations voulus faisant réference á une série de critéres concrets et
objectifs ¡0. Elle a décidé, en 1980, de ne plus énumérer ces cas dans une liste
composite mais de les inclure dans les sections correspondantes de son
rapport. Elle a également décidé d'y faire figurer les explications données par
les gouvernements concernés au sujet des diffrcultés qu'ils ont rencontrées
pour s'acquitter de leurs obligations. Ces modiflrcations ont d'une maniére
générale été bien accueillies. Seul un nombre relativement petit de pays ont
été cités, ces derniéres années, sur la base des critéres en question. Il s'agissait
dans presque tous les cas de pays les moins développés ayant des diffrcultés
d'ordre administratif ou de pays en butte á une désorganisation due á des
catastiophes naturelles ou á un conflit armé. Parfois, les cas mentionnés ont
trait á des carences de caractére limité, tels que le non-envoi, pendant deux
ans, d'un seul premier rapport sur les conventions ratifiées (méme lorsque
d'autres premiers rapports ont été fournis) ou le manquement á répondre á
un ou deux commentaires formulés par la commission d'experts, lorsqu'ils
sont les seuls á appeler une réponse. Ces cas sont nettement moins graves
que celui du non-envoi pendant cinq ans d'aucun des rapports requis sur les
conventions non ratifiées et sur les recommandations ou que celui du
non-envoi d'informations sur la soumission aux autorités compétentes des
instruments adoptés au cours de sept sessions successives de la Conférence.
La commission de la Conférence voudra peut-étre examiner s'il serait justifié
de nuancer encore les critéres dits objectifs compte tenu de I'importance
quantitative ou qualitative des cas.
Lorsqu'elle a revu ses méthodes de travail en 1980, la commission de la
Conférence a décidé d'adopter un nouveau critére concret, pour les pays qui,
au cours des trois années précédentes, n'ont pas indiqué á quelles organisations
représentatives d'employeurs et de travailleurs ils ont envoyé, conformément
á I'article 23, paragraphe 2, de la Constitution de I'OIT, copie des
rapports et informations qu'ils ont adressés á I'OIT au titre des articles 19 et
22 de la Constitution. Il est intéressant de noter que, jusqu'á présent, aucun
pays n'a été cité sur la base de ce critére.
Un aspect des travaux de la commission de la Conference dont certains
pays ont continué á se plaindre est le fait que des Etats qui n'ont pas ratiflré
une convention donnée et se trouvent ainsi á l'abri de toute critique peuvent,
néanmoins, participer librement aux débats et aux conclusions relatives á
I'application de ladite convention par des Etats qui l'ont ratifiée. La situation
juridique á cet égard parait claire. Tous les délégués et conseillers techniques
participent sur un pied d'égalité aux travaux des commissions de la
Conférence. En outre, les travaux de la commission ont trait á I'examen de
la maniére dont les Etats s'acquittent de leurs obligations á l'égard des normes
de I'OIT envers l'Organisation tout entiére. Le fait qu'un Etat n'a pas
lui-méme ratifié la convention qui fait I'objet de la discussion affecte la
crédibilité morale et politique de toute critique qu'il peut adresser á d'autres
39
Rapport du Directeur général
Etats plutót que ses droits juridiques á participer aux travaux de la
Conference. La seule incapacité juridique á laquelle se heurte un tel
gouvernement consiste en ce qu'il ne peut déposer une plainte au titre de
l'article 26,paragraphe l, de la Constitution au sujet de l'application par un
autre Etat d'une convention que lui-méme n'a pas ratifiée.
Plaintes et réclamations
Comme nous I'avons déjá rappelé, les procédures de contróle périodique
ou de routine sont complétées par la possibilité d'examiner certains problémes
concernant I'application de conventions ratifiées dans le cadre des
procédures de réclamation et de plainte prévues par la Constitution. L'article
24 de celle-ci prévoit qu'une réclamation peut étre adressée par toute
organisation professionnelle de travailleurs ou d'employeurs; l'article 26
prévoit quant á lui qu'une plainte peut étre déposée par un autre Etat qui a
ratifié la convention dont il s'agit ou la procédure engagée par le Conseil
d'administration, de sa propre initiative ou sur la plainte d'un délégué á la
Conférence. Lorsque le Conseil d'administration a réalisé son étude en profondeur
des nonnes internationales du travail, en 197 4, il a été souligné que le
recours á ces procédures n'avait guére été fréquent, mais qu'elles constituaient
un moyen utile pour l'examen approfondi de cas importants qu'il
n'avait pas été possible de régler dans le cadre du contr6le périodique. La
seule proposition qui ait été faite en ce qui concerne ces procédures prévues
par la Constitution a été de mettre á jour le réglement relatif á l'examen des
réclamations 3r. C'est ce qui a été fait depuis 32.
Le nombre total des plaintes et des réclamations présentées (14 et 20,
respectivement) est peu élevé, mais on a recouru de plus en plus á ces procédures,
notamment - mais pas exclusivement - pour ce qui est des conventions
concernant les droits de I'homme fondamentaux. Dans les quarante
premiéres années d'existence de I'OIT, il n'y a eu qu'une seule plainte (réglée
sans recours á une commission d'enquéte) et 7 réclamations. Depuis 1961, il
y a eu 13 plaintes et 13 réclamations (7 de ces derniéres présentées ces trois
derniéres années). Sur les l3 plaintes, 7 ont été transmises á une commission
d'enquéte, 3 renvoyées au Comité de la liberté syndicale, I réglée á la satisfaction
des parties, et 2 plaintes connexes ont fait I'objet de contacts directs
par accord entre les parties, suivis par une mission de coopération technique
de I'OIT. Sur les l3 réclamations reques depuis 1965,2 ont été jugées irrecevables,
2 ont abouti á la dénonciation de la convention visée, I a été réglée á
la satisfaction de I'organisation qui avait présenté la réclamation, I a été
renvoyée au Comité de la liberté syndicale et 2 sont en cours d'examen. Dans
les 5 cas restants, au terme de leur examen par le Conseil d'administration,
les questions dont il s'agissait ont continué d'étre étudiées par les organismes
chargés du contróle régulier. Dans un cas seulement, le Conseil d'administration
a décidé, conformément aux dispositions de I'article 25 de la Constitution,
de rendre publiques la réclamation regue et la réponse faite.
40
Normes internationales du travail
Le recours croissant aux procédures prévues par la Constitution montre,
d'une part, qu'on est de plus en plus conscient des possibilités d'étude
approfondie qu'elles offrent et, d'autre part, que leur fonctionnement dans
les cas précédents a été jugé par les constituants de I'OIT comme ayant abouti
á des résultats utiles. Nous avons déjá évoqué dans la présente section le róle
que la procédure de plainte peut jouer en tant que moyen de régler des
questions importantes en suspens touchant I'application des conventions
ratifiées et á titre d'étape ultérieure de contróle aprés les débats en
commission de la Conference. Vu la composition des commissions d'enquéte
et les pouvoirs dont elles sont dotées (notamment en ce qui concerne
l'audition de témoins et les enquétes sur place), elles sont particuliérement
á méme d'assumer des fonctions de ce genre. La procédure de réclamation,
en revanche, offre moins de possibilités d'enquéte et de décision impartiales.
Il est prévu dans le Réglement relatif á la procédure á suivre pour l'examen
des réclamations que, lorsqu'il est saisi d'une réclamation, le Conseil
d'administration peut, en tout temps, engager á ce sujet la procédure de
plainte, c'est-á-dire saisir une commission d'enquéte, conformément aux
pouvoirs qui lui sont conférés en vertu du paragraphe 4 de l'article 26 dela
Constitution 33. Quand une réclamation porte sur des questions complexes
de fait ou de droit, il serait souhaitable que le Conseil d'administration étudie
de prés s'il ne convient pas d'en saisir une commission d'enquéte.
Rappelons aussi que les organisations d'employeurs et de travailleurs
peuvent présenter des commentaires pour examen par la commission
d'experts. Ces derniéres années, aprés les mesures prises par le Bureau pour
mieux faire connaitre aux organisations les possibilités qui leur sont offertes
et pour informer les organisations nationales représentatives des observations
de la commission d'experts touchant leur pays, le nombre de ces
commentaires a sensiblement augmenté. Toute observation adressée au
Bureau par les organisations d'employeurs ou de travailleurs touchant
I'application des normes de I'OIT est portée á la connaissance de la
commission d'experts á sa session suivante, méme lorsqu'un rapport détaillé
sur la convention n'est pas attendu du gouvernement intéressé. Les
organisations pourraient utilement considérer la communication d'observations
á la commission d'experts comme étant une solution plus simple et
souvent plus rapide que la présentation d'une réclamation.
Il existe aussi d'autres moyens de trouver des solutions aux problémes en
suspens dans le domaine de l'application des conventions ratifiées par voie
de discussion et de médiation plutót qu'en cherchant á obtenir une décision.
La procédure des contacts directs vise á fournir la possibilité, par un dialogue
avec les gouvernements intéressés, d'examiner de fagon plus approfondie les
questions soulevées dans les observations de la commission d'experts. Dans
la pratique, dans les nombreux cas oü un gouvernement, tout en
reconnaissant la validité des observations de la commission, souhaitait avoir
des avis sur le meilleur moyen d'éliminer les points litigieux, les contacts
directs ont plutót revétu la forme d'une assistance technique. Dans certains
41
Rapport du Directeur général
cas, en revanche, ils ont servi á préciser les considérations qui avaient inspiré
les commentaires des organes de contróle, á permettre au gouvernement
d'exposer de faqon plus détaillée son point de vue et á étudier les moyens de
se conformer aux conventions en question tout en tenant compte des
préoccupations nationales. On peut citer, á titre d'exemple particuliérement
intéressant á cet égard, la suggestion faite par le représentant des syndicats
néerlandais á la Conference de 1983 et acceptée par la suite par le
gouvernement des Pays-Bas, de demander des contacts directs relativement
á la convention sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical pour
examiner les restrictions apportées á la négociation collective du fait des
limitations de salaire appliquées depuis plusieurs années et contestées par les
organisations d'employeurs et les syndicats des Pays-Bas.
Mécanisme spécial pour l'examen des plaintes
en violation des droits syndicaux
Aprés I'adoption des conventions sur la liberté syndicale et sur le droit
d'association et de négociation collective en 1948 et 1949, le Conseil
d'administration a décidé en 1950 d'établir un mécanisme spécial pour
l'examen des allégations relatives á des violations des droits syndicaux. Il
était bien entendu que ce mécanisme devait servir non pas á remplacer les
procédures générales de contróle de I'application des conventions ratifiées,
mais á les compléter. Le systéme de contróle régulier par I'intermédiaire de
la commission d'experts et de la Commission de l'application des conventions
et recommandations de la Conférence et les dispositions constitutionnelles
relatives aux plaintes et aux réclamations s'appliquent aux conventions
ayant trait aux droits syndicaux tout comme aux conventions. Le mécanisme
spécial a été particuliérement congu en vue de faciliter I'examen impartial
et autorisé des allégations concernant des questions de fait.
Deux considérations essentielles sont á la base du mécanisme spécial
destiné á protéger les droits syndicaux. D'une part, il y a reconnaissance du
róle actif que des organisations libres et eflicaces peuvent jouer dans la
promotion du progrés et du développement social. L'affrrmation, qui figure
dans la Constitution de I'OIT, que << la liberté d'expression et d'association
est une condition indispensable d'un progrés soutenu » a été reprise á de
multiples occasions par la Conference internationale du Travail et par
d'autres réunions de I'OIT. D'autre part, il y a f importance que revét la
liberté syndicale pour le fonctionnement méme de I'OIT, en tant
qu'organisation tripartite.
Le mécanisme applicable aux plaintes touchant la liberté syndicale a été
créé sur décision du Conseil d'administration, approuvée par la suite par la
Conference, mais on peut en trouver le fondement dans l'engagement que
prennent tous les Etats Membres vis-á-vis des objectifs énoncés dans la
Constitution de I'OIT, dont la reconnaissance du principe de la liberté
syndicale. Pendant l'examen de la procédure á la 33' session de la Conference
42
Normes internationales du travail
(1950), on a fait observer que lorsque des accusations sont portées contre
un Etat Membre touchant les droits syndicaux << il est de son devoir
[á I'Organisation] de s'enquérir du bien-fondé de ces accusations >» 3a. Le
Comité de la liberté syndicale a souligné, dans son premier rapport,
que I'OIT << ne peut pas hésiter á se livrer á un tel examen lorsqu'il s'agit
de cas qui seraient de nature á porter sérieusement atteinte á la réalisation
des buts et objectifs de l'Organisation internationale du Travail tels qu'ils
sont exposés dans la Constitution de l'Organisation, dans la Déclaration
de Philadelphie et dans les diverses conventions relatives á la liberté
d'association »> 35.
Le mécanisme spécial pour l'examen des plaintes a été établi en accord
avec I'Organisation des Nations Unies, dont le Conseil économique et social
a décidé en 1950 d'accepter les services de la Commission d'investigation et
de conciliation en matiére de liberté syndicale, au nom des Nations Unies. En
conséquence, il est arrivé que des cas concernant des Etats qui, á l'époque,
étaient Membres des Nations Unies sans étre Membres de I'OIT aient été
transmis á cette commission, avec l'accord des gouvernements intéressés.
Aprés la création en l95l du Comité de la liberté syndicale du Conseil
d'administration, le Conséil économique et social a également décidé, en
1953, que les allégations concernant des violations des droits syndicaux
regues par les Nations Unies et intéressant des Etats Membres de I'OIT
seraient communiquées au Conseil d'administration.
Le champ d'investigation couvert par le mécanisme spécial est, á divers
égards, plus vaste que celui qui est prévu dans le cadre du systéme général de
contróle applicable aux conventions ratifiées. Comme la procédure est basée
sur le principe constitutionnel de la liberté d'association, elle peut étre
invoquée, que le pays intéressé ait ou non ratifié les conventions pertinentes.
En outre, le Comité de la liberté syndicale et la Coinmission d'investigation
et de conciliation, tout en tenant compte des dispositions de ces conventions
lorsqu'ils examinent les cas et des obligations découlant des ratifications 36,
ont aussi eu l'occasion de se pencher et de se prononcer sur des questions
touchant I'exercice des droits syndicaux qui ne sont pas expressément
envisagés dans les conventions existantes.
A ce jour, 5 cas seulement ont été renvoyés á la Commission
d'investigation et de conciliation. La responsabilité d'examiner les plaintes
est surtout échue au Comité de la liberté syndicale qui, en une trentaine
d'années, a traité plus de I 200 cas. Accessoirement á son róle essentiel qui
consiste á chercher á élucider les faits et á proposer des solutions pour les
cas dont il est saisi, le comité a été á l'origine d'un corps important de
décisions indiquant de quelle maniére les principes de la liberté syndicale
doivent s'appliquer dans des circonstances diverses3T. Ces décisions peuvent
avoir un róle utile de prévention en permettant aux gouvernements et aux
organisations de tenir compte des normes et des principes pertinents dans
leurs activités et dans leurs relations et en les incitant á résoudre des
problémes sans avoir recours á I'OIT.
43
Rapport du Directeur général
Dans la grande majorité des cas, les gouvernements intéressés ont
collaboré á l'examen des plaintes, méme si cela n'a pas toujours été fait aussi
rapidement que cela aurait été souhaitable. Il a été souligné que si la
procédure vise á protéger les organisations contre des violations des droits
syndicaux, elle est également destinée á protéger les gouvernements contre
des accusations injustes ou sans fondement 38. Il est donc de I'intérét des
gouvernements de répondre aux plaintes de faqon détaillée. La mesure dans
laquelle ils ont contribué á la bonne marche de la procédure montre la
confiance que placent en elle les Etats Membres.
Le nombre des cas soumis au Comité de la liberté syndicale a
sensiblement augmenté ces derniéres années. Avant 1980, il était en moyenne
de 30 par an environ. Depuis cette date, les chiffres enregistrés ont été les
suivants: 1980:66 cas; l98l:88 cas1'1982:70 cas; 1983:76 cas. Cette
augmentation est due á la fois á l'aggravation générale des problémes que
rencontrent les organisations professionnelles dans une période de grande
instabilité économique et politique et á une meilleure connaissance des
possibilités offertes par le mécanisme de I'OIT en vue de I'examen
international impartial de conflits et de problémes nationaux. Ces sept
derniéres années, les plaintes examinées ont intéressé 72 des 150 Etats
Membres. Un nombre croissant de plaintes concernent des pays oü la liberté
syndicale en général n'est pas en cause. Certes, les questions soulevées dans
de tels cas ont généralement une portée assez restreinte, mais elles sont
souvent aussi d'une trés grande complexité. Ces cas montrent que les avis
autorisés du comité sont considérés comme un moyen propice au
développement des relations professionnelles dans les pays intéressés.
Comme nous l'avons déjá rappelé, lorsque la procédure a été établie, on
a accordé une attention particuliére aux moyens qu'elle fournirait pour
l'examen des questions de fait. Bien que le Comité de la liberté syndicale soit
réguliérement appelé á étudier des questions relatives á la législation, la
majeure partie de son travail concerne des allégations portant sur des faits
ou découlant de l'application de la loi. Ces cinq derniéres années, 45 pour
cent des cas traités avaient trait á des questions de vie ou de liberté
(arrestations, détentions, persécutions, exil, morts ou disparitions). Dans
30 pour cent des cas, il s'agissait d'allégatioris touchant I'ingérence du
gouvernement dans les activités des syndicats. Dans 30 pour cent des cas
encore, il s'agissait de pratiques déloyales dans le domaine du travail
(licenciements, transferts et autres formes de discrimination antisyndicale,
questions de reconnaissance, etc.). Dans 25 pour cent des cas, il s'agissait de
questions concernant la négociation collective et les gréves.
Le Comité de la liberté syndicale s'est constamment employé á perfectionner
ses méthodes en vue notamment d'accélérer I'examen des cas et
d'obtenir des informations précises sur les questions dont il était saisi. Dans
son 193" rapport, en 1979,le comité a passé en revue les améliorations
apportées dans le passé á sa procédure et il a formulé une série de nouvelles
recommandations que le Conseil d'administration a approuvées en mai 1979.
44
Normes internationales du travail
Parmi les questions examinées Iiguraient I'accélération des relations avec les
plaignants et avec les gouvernements, les missions sur place, dont les missions
de contacts préliminaires dés la réception d'une plainte et les procédures
d'audition des parties á une plainte.
Il est peut-étre bon d'indiquer dans quelle mesure divers moyens ont
été utilisés depuis le début de 1980. Dans 3 cas, un représentant du
gouvernement intéressé a été entendu par le Comité de la liberté syndicale.
Il y a eu 19 missions de contacts directs ou autres missions sur place, dont
2, considérées comme urgentes, ont eu lieu trés peu de temps aprés la
réception de la plainte. Sept de ces missions ont été acceptées par le
gouvernement intéressé á la suite d'une demande formulée par le comité.
Dans 2 autres cas, une demande du méme genre est restée sans réponse
jusqu'ici. Dans 6 cas, le président du comité a eu, pendant les sessions de la
Conference, des entretiens avec les représentants de gouvernements dont les
réponses á des plaintes ou á des demandes d'informations étaient en
souffrance depuis trés longtemps. Dans 5 de ces cas, le gouvernement
intéressé a envoyé des informations par la suite. Dans 32 cas, le comité a
lancé des appels urgents á des gouvernements qui n'avaient fourni ni
informations ni observations, en indiquant que s'il n'avait pas regu de
réponse avant sa prochaine session, il procéderait néanmoins á l'examen des
plaintes au fond. Dans 30 cas, aprés de tels appels, les gouvernements
intéressés ont transmis des informations. En revanche, dans 2 cas, le comité
a dü examiner les plaintes sans avoir regu de réponse du gouvernement.
La procédure suivie par le comité prévoit la possibilité d'inviter les
gouvernements á indiquer les mesures qu'ils ont prises á la suite des
recommandations approuvées par le Conseil d'administration. Le comité a
eu de plus en plus souvent recours á cette faculté qui lui permet de maintenir
le dynamisme de son action et d'évaluer I'effet de ses recommandations.
Parmi les résultats positifs notés par le comité ces derniéres années dans des
cas dont il avait été saisi, citons la libération d'un nombre important de
syndicalistes qui avaient été arrétés ou détenus ou le retour d'exil, la
réintégration de travailleurs licenciés á la suite de conflits du travail,
l'annulation de décisions pronongant la dissolution d'une organisation ou
destituant des dirigeants syndicaux de leurs fonctions, la reconnaissance ou
le rétablissement de la personnalité juridique des syndicats, le rétablissement
du droit de gréve, l'élimination du contrdle du gouvernement sur les
syndicats et, dans certains cas, des réformes importantes dans la législation
syndicale, notamment á la faveur d'un changement de régime politique d'un
pays 3e.
L'accroissement sensible du nombre des plaintes dont le Comité de la
liberté syndicale est saisi et leur complexité grandissante ont entrainé un
surcroit de travail tant pour le personnel chargé d'assurer le secrétariat du
comité que pour le comité lui-méme. Il faudra veiller á ce que les ressources
et le temps nécessaires soient disponibles pour peÍnettre á cette importante
procédure de fonctionner de maniére satisfaisante.
45
Rapport du Directeur général
Comme nous l'avons noté, les plaintes soumises au Comité de la liberté
syndicale ces derniéres années concernaient á peu prés la moitié des Etats
Membres de I'OIT. Les cas intéressaient des pays de toutes les régions du
monde, ayant des systémes politiques, économiques ou sociaux différents.
Malgré cette diversité, les plaintes concernant des pays d'"{mérique latine ou
des Caraibes ont continué d'étre proportionnellement plus nombreuses que
pour d'autres régions. Ces cinq derniéres années, 46 pour cent des cas visaient
ces pays. D'aprés les informations en provenance d'autres sources, y compris
l'examen des rapports par la commission d'experts, il apparait que cela ne
refléte pas la gravité relative des difficultés que rencontrent les syndicats dans
cette région par rapport á ce qui se passe dans des pays d'autres régions et
que d'importantes restrictions aux droits syndicaux existent également dans
divers pays qui n'ont pas fait l'objet de plaintes. Le non-recours á la
procédure de plainte de I'OIT s'explique parfois par la faiblesse ou la
vulnérabilité des mouvements syndicaux. L'utilisation inégale sur le plan
géographique de cette procédure est regrettable, mais ce n'est pas I'OIT
elle-méme qui peut y remédier. Par définition, une procédure de plainte est
une facilité dont la mise en route dépend d'initiatives venant du dehors.
Certes, I'OIT peut prendre des mesures en vue de faire connaitre et
comprendre le mieux possible ses noÍnes et ses procédures (cette question
sera examinée plus en détail dans la suite de la présente partie), mais
I'Organisation n'a pas pour mission d'encourager la présentation des plaintes.
Pour apprécier dans quelle mesure la liberté syndicale est garantie dans
I'ensemble des Etats Membres de I'OIT, il convient de se rapporter aux
procédures de contr§le régulier, y compris les études d'ensemble réalisées
par la commission d'experts. Rappelons qu'en 1983 l'étude d'ensemble
portait sur la liberté syndicale et la négociation collective a.
On s'est toujours préoccupé d'accélérer la procédure de plainte en matiére
de liberté syndicale et de la rendre plus efftcace. Les nouveautés introduites
dans la procédure au fil des années ont essentiellement tendu á ces fins. Deux
considérations sont á retenir á cet égard.
Sur un premier point, le succés de la procédure dépend en fin de compte
de la possibilité d'obtenir la collaboration des Etats intéressés. Les méthodes
utilisées doivent donc maintenir un juste équilibre entre les pressions morales
exercées par I'Organisation en faveur du respect de la liberté syndicale et
l'acceptation par les gouvernements qu'il est de leur propre intérét de
participer á la procédure. Les gouvernements, comme les plaignants, doivent
étre convaincus que tous les cas seront examinés avec le plus grand soin et
la plus grande équité possible. En conséquence, le souci d'avoir la meilleure
connaissance possible des faits gráce aux informations fournies par toutes les
parties peut devoir I'emporter sur celui d'accélérer la procédure.
Le deuxiéme point porte sur la question de savoir dans quelle mesure les
moyens dont dispose le Comité de la liberté syndicale sont suffisants pour
parvenir á des conclusions sur les questions de fait. La procédure demeure
essentiellement basée sur des communications écrites. Lorsque le comité se
46
Normes internationales du travail
trouve en présence de déclarations contradictoires quant aux faits, il lui est
trés difficile de prendre une décision. En pareil cas, des méthodes
d'investigation plus directes sont nécessaires. Il serait souhaitable dans les
années á venir de favoriser le recours plus fréquent á de telles méthodes. Elles
pourraient revétir la forme de contacts directs et d'autres missions sur place
effectuées par un représentant du Directeur général qui peut étre soit un
fonctionnaire du BIT, soit une personnalité indépendante. On pourrait aussi
envisager de renvoyer certaines plaintes á la Commission d'investigation et
de conciliation ou á une commission d'enquéte constituée en vertu de
I'article 26 de la Constitution de I'OIT, si les problémes dont il s'agit ont
trait au respect d'une convention ratifiée par I'Etat en question.
ks plaignants sont évidemment tenus de fournir des preuves á I'appui
de leurs allégations. Dans les cas qui exigent des mesures d'urgence, cela
n'est pas toujoun immédiatement possible, mais méme alors tout doit étre
mis en Guvre pour fournir le plus t6t possible des informations complétes á
l'appui de la plainte. Dans d'autres cas, il serait souhaitable que les plaignants
communiquent tous les renseignements pertinents au moment oü ils
transmettent leurs allégations de fagon á permettre tant au gouvernement
intéressé qu'au Comité de la liberté syndicale d'avoir une idée claire des
questions dont il s'agit et de faciliter I'examen rapide du cas.
Il ne parait pas nécessaire d'envisager de modifier les régles régissant la
recevabilité des plaintes. Comme les autres procédures de plainte de I'OIT
- et á la difference de nombreuses autres procédures internationales
d'enquéte et de réglement des differends -, la procédure d'examen des
plaintes en violation de la liberté syndicale ne prévoit pas, comme condition
préalable á la présentation d'une plainte, l'épuisement des recours internes,
bien que le Comité de la liberté syndicale puisse reporter l'examen d'un cas
lorsqu'une procédure est en cours devant une instance nationale et qu'il ait
aussi dans certains cas, lors de I'examen au fond, tenu compte de la
non-utilisation des voies de recours nationales. Mis á part les aspects
juridiques de la question, les organisations devraient, dans la pratique, du
moins dans les cas de portée limitée ou de caractére technique, s'efforcer de
résoudre leurs problémes par des discussions ou autres moyens existant au
niveau national avant d'avoir recours á la procédure de I'OIT.
Les observations qui précédent avaient trait á des questions de procédure.
Un probléme d'ordre plus général, celui de la composition du Comité de la
liberté syndicale, appelle des commentaires. Les porte-parole de pays
socialistes se sont plaints de n'étre pas représentés au sein du comité et ils
ont demandé que soit réexaminée la composition du comité sur la base d'une
représentation équitable des diverses régions et des divers systémes
socio-économiquesar. C'est lá une question dont I'examen incombe au
Conseil d'administration, qui est habilité á déterminer la composition des
comités qui dépendent de lui.
Dans tous les cas oü I'on considére que la procédure du comité ne permet
pas aux vues du gouvernement intéressé d'étre équitablement appréciées ou
47
Rapport du Directeur général
lorsqu'un gouvernement est d'avis que les conclusions et les recommandations
du comité sont erronées, le gouvernement peut, outre la fourniture
d'éclaircissements au Conseil d'administration lui-méme, demander á ce
dernier de renvoyer le cas pour un examen plus approfondi de toutes les
questions devant la Commission d'investigation et de conciliation ou, le cas
échéant, devant une commission d'enquéte.
A diverses reprises, la question s'est posée de savoir si, dans les cas de
graves violations des droits syndicaux pour lesquels les recommandations du
comité et du Conseil d'administration étaient restées sans suite, des mesures
comme la suppression de la coopération technique pourraient étre prises a2.
On a admis qu'il serait diflicile d'établir une régle générale dans ce domaine,
chaque cas devant étre considéré dans son contexte propre. Il arrive parfois
que certains facteurs fassent gravement obstacle á I'exécution effective de
projets de coopération technique, de sorte que la question de leur viabilité
doit faire I'objet d'un examen attentif. Il peut arriver aussi que des projets
de I'OIT pourraient contribuer néanmoins á améliorer les conditions de vie
et de travail et que la présence de I'OIT et la possibilité qu'elle offrirait de
contacts avec les organisations et les institutions nationales pourraient servir
également á provoquer une réaction plus favorable á son action tendant á
assurer I'exercice de la liberté syndicale. Il y a lieu d'évoquer ici les débats
que le Conseil d'administration a consacrés en 1968 aux rapports entre la
coopération technique et le respect des droits de l'homme. Le Conseil
d'administration a décidé, en particulier, que I'OIT a pour politique de
prendre des décisions relatives á des demandes ou á des propositions d'aide
á tout Etat Membre ou de coopération avec tout Etat Membre en se fondant
sur la mesure dans laquelle la demande ou la proposition favorisera les buts
et objectifs de I'OIT et, en particulier, I'objectif central défini dans la
Déclaration de Philadelphie, selon lequel << tous les étres humains, quels que
soient leur race, leur croyance ou leur sexe, ont le droit de poursuivre leur
progrés matériel et leur développement spirituel dans la liberté et la dignité,
dans la sécurité économique et avec des chances égales >». Le Conseil
d'administration a en outre précisé que l'assistance était << soumise á la
surveillance et au contróle normaux que I'OIT exerce sur tous ses
programmes de coopération technique dans l'intérét de ses Membres » a3.
L'action en faveur de la liberté syndicale ne doit pas étre considérée
uniquement du point de vue des procédures de contróle de l'application des
conventions adoptées dans ce domaine et d'examen des cas de violation des
droits syndicaux. Il y a lieu de rappeler que I'un des buts de cette derniére
procédure était de fournir des voies de conciliation en cas de differend. Cet
aspect de la procédure de plainte a peut-étre été obscurci face au traitement,
á partir surtout de documents, d'un grand nombre d'allégations, mais les missions
de contacts directs ont souvent permis, gráce á des discussions avec les
diverses parties, d'envisager les solutions possibles. Il serait évidemment souhaitable
de développer encore toutes les formes d'action par lesquelles l'Organisation
peut contribuer au réglement des conflits dans ce domaine essentiel.
48
Normes internationales du travail
C'est aussi dans la perspective des mesures tendant á promouvoir la
liberté syndicale qu'il convient d'examiner le programme d'études spéciales
sur la situation des syndicats et les relations professionnelles dans certains
pays d'Europe qui a débuté pendant l'exercice 1982-83.
Etudes spéciales sur la situation des syndicats et le systéme
des relations professionnelles dans certains pays d'Europe
Ces études ont été effectuées pour donner suite aux résolutions adoptées
par les deuxiéme et troisiéme conférences régionales européennes qui se sont
tenues en 1974 et en 1979. Leur but est d'analyser de fagon objective la
situation des syndicats et les relations professionnelles dans les pays intéressés
et d'étudier les questions essentielles qui se posent dans ces domaines en
tenant compte des normes pertinentes de I'OIT aa. Jusqu'ici, deux études, qui
ont trait respectivement á la Norvége et á la Hongrie, ont été achevées. Deux
autres, qui concernent la Yougoslavie et l'Espagne, sont en cours. Une
cinquiéme est prévue dans le budget pour l'exercice 1984-85 et une sixiéme
est envisagée pour la période biennale suivante.
Rappelons que ce n'est pas la premiére fois que I'OIT effectue des études
dans le domaine de la liberté syndicale en dehors du cadre de ses procédures
de contróle. Des études exhaustives ont été réalisées dans les années vingt.
Dans les années cinquante, un comité présidé par lord McNair a mené une
enquéte sur la liberté et l'indépendance des organisations d'employeurs et de
travailleurs. Entre 1959 et 1962, des missions ont été effectuées dans divers
pays pour réaliser sur place des études sur la situation en matiére de liberté
syndicale.
Les études actuelles sur des pays d'Europe sont effectuées par des
fonctionnaires du BIT. Elles se fondent sur l'examen approfondi de tous les
documents disponibles touchant la situation juridique (y compris les
décisions judiciaires et la doctrine) et la pratique, ainsi que sur des séjours
dans les pays pour des entretiens avec un grand nombre de personnes
participant aux activités syndicales ou aux relations professionnelles ou ayant
des connaissances spéciales dans ce domaine. Les études sont revues par un
groupe de travail tripartite du Conseil d'administration avant d,étre
présentées á celui-ci. Elles doivent étre portées á la connaissance de la
Conference régionale européenne á sa prochaine session.
ces études ne visent ni á se substituer aux diverses procédures de contr6le
ou de plainte ni á affecter en quoi que ce soit leur fonctionnement. Elles sont
trés diflérentes, de par leur but et leur nature, de ces procédures. ces derniéres
ont essentiellement pour raison d'étre de se pencher sur les problémes qui
se posent sur le plan des principes et des obligations juridiques. Lorsqu'ils
sont appelés á examiner des plaintes, les organes de contróle doivent
s'occuper des questions spécifiques qui leur sont soumises, sans formuler une
appréciation générale sur la situation des syndicats; en outre, comme nous
l'avons noté, en l'absence de plaintes, il leur est impossible d'intervenir,
49
Rapport du Directeur général
méme si I'exercice des droits syndicaux dans un pays donné se heurte á de
graves diffrcultés. En revanche, les études sont effectuées en l'absence de toute
plainte: il serait, en effet, difficile de les réaliser s'il existait de graves tensions
ielativement aux normes de I'OIT en matiére de liberté syndicale et de
relations professionnelles. Les entretiens, lors des missions dans les pays
intéressés, sont de plus vaste portée et comme ils ne se rattachent pas á une
situation conflictuelle, ils ouvrent plus facilement la voie á l'examen des
problémes et des difñcultés dans la franchise et dans le calme. Les rapports
qui en résultent visent á donner une vue d'ensemble de la situation qui n'ait
pas un caractére purement descriptif mais comporte aussi une analyse
critique. Ces rapports, comme, en fait, tout le processus qui aboutit á leur
préparation, peuvent servir á éclairer la politique et la pratique et proposer
des améliorations en tenant compte des normes pertinentes de I'OIT. Leur
utilité pour favoriser une meilleure connaissance et compréhension des
nornes de l'oIT et pour susciter de nouvelles idées quant aux moyens les
plus eflicaces d'appliquer ces noÍnes a été reconnue tant par les gouvernements
que par les organisations des pays qui ont fait l'objet de telles études.
Dans deux résolutions adoptées en octobre 1983 par la sixiéme
Conférence régionale africaine, qui concement respectivement les normes
internationales du travail et la liberté d'association, le Conseil d'administration
a été invité á entrepiendre des études sur les systémes de relations
professionnelles en Afrique qui serviront de base á un échange d'idées et
d'expériences franc et objectif a5.
Il est donc possible que dans les années á venir on étende á certains pays
d'Afrique - et, de fait, á d'autres régions - les études du genre de celles qui
ont été déjá réalisées en Europe.
MESURES PROMOTIONNELLES EN MATIÉRE DE NORMES
INTERNATIONALES DU TRAVAIL
Depuis le début de 1960, le nombre des Etats Membres de I'OIT a presque
doublé, passant de 80 á 150. Ia plupart des nouveaux Etats Membres
venaient d'accéder á I'indépendance, la quasi-totalité d'entre eux étant des
pays en développement. En général,les administrations du travail de ces pays
n'étaient pas bien préparées á s'occuper de toutes les questions découlant de
I'acquisition de la qualité de Membre de I'OIT, y compris celles qui
concernent I'adoption, la ratification, la mise en @uvre et l'établissement de
rapports sur l'application des noÍnes de I'Oryanisation. Ces administrations
atiendaient du Bureau des conseils et une aide pour pouvoir faire face á ces
nouvelles táches. Le Bureau a donc jugé nécessaire de renforcer ses activités
dans ce domaine, en plus de la coopération technique destinée généralement
á améliorer l'administration du travail et la législation sociale. Parmi les
diverses mesures existant actuellement, citons les suivantes: contacts directs
et missions consultatives de caractére moins ofliciel, nomination de
conseillers régionaux et autres services consultatifs sur des questions relatives
50
Normes internationales du travail
aux nonnes internationales du travail, séminaires, formation et manuels,
mesures destinées á renforcer la participation des organisations d'employeurs
et de travailleurs et développement des consultations tripartites au niveau
national sur des questions concernant les normes de I'OIT, débats régionaux
touchant la ratiñcation et I'application des nonnes de I'OIT, mesures visant
á mieux intégrer les normes dans les programmes d'activités pratiques. Les
réunions régionales de I'OIT ont, á diverses reprises, souligné I'intérét de ces
mesures et demandé qu'elles soient renforcees. Il convient d'examiner les
diverses formes d'action et de voir dans quelle mesure elles pourraient étre
intensifiées ou complétées.
Contacts directs, missions consultatives, conseillers régionaux
A I'origine, la procédure des contacts directs avait été proposée par la
Commission d'experts pour I'application des conventions et recommandations
á titre de moyen permettant I'examen plus direct et plus approfondi
des cas dans lesquels sa procédure normale, fondée sur l'échange de rapports
écrits et d'observations écrites, n'a pas fait disparaitre les diffrcultés relatives
á l'application des conventions ratifiées. Cette procédure a commencé d'étre
utilisée en 1969. Dix années plus tard, 28 pays y avaient recouru, pour
222 cas.d'application des conventions ratifiées, au titre de 68 conventions
différentes. Pendant cette période, des progrés ont été notés par la
commission d'experts dans 23 des pays intéressés, concernant 115 cas ayant
trait á 56 des conventions en question a6.
Dans la pratique, les contacts directs ont été utilisés á des ñns beaucoup
plus diverses qu'on ne I'avait prévu au départ. S'agissant de l'application de
conventions ratifiées, ils ont servi, selon les cas, les trois buts principaux suivants:
tantót clarifier et trouver des solutions aux problémes non résolus ;
tantót vérifier des faits touchant le respect des conventions ; tantót, lorsque les
observations formulées par les organismes de contróle n'étaient pas contestées
quant au fond, examiner les meilleurs moyens de combler les lacunes et
fournir des avis á ce sujet. La portée des contacts directs a été étendue de
fagon á englober les questions relatives á l'exécution d'autres obligations
comme la soumission des conventions et des recommandations aux autorités
compétentes et l'établissement des rapports, ainsi que les questions concernant
les mesures á prendre en vue de la ratification de certaines conventions.
Dans un cas, en 1976, des missions de contacts directs ont été effectuées dans
un groupe d'Etats (le Groupe andin) pour étudier la possibilité d'appliquer et
de ratiflrer 25 conventions choisies en vue d'harmoniser la législation du travail
de ces Etats; depuis, le nombre total des ratifications de ces conventions
par les Etats intéressés est passé de 5l á 83. La formule des contacts directs a
aussi été largement utilisée dans le cadre de la procédure d'examen des plaintes
en violation des droits syndicaux par le Comité de la liberté syndicale.
La pratique des missions consultatives de caractére moins ofliciel
effectuées par des fonctionnaires du BIT s'est également développée,
51
Rapport du Directeur général
permettant I'examen d'ensemble des questions relatives á I'application et á
la ratification des conventions et des dispositions á prendre en vue de
l'établissement des rapports. l¡rs des contacts directs et des missions de ce
genre des conseils et une formation ont été souvent fournis touchant les
mesures administratives á prendre pour régler eflicacement les questions
relatives á I'adoption et á I'application des instruments de I'OIT.
L'utilité de ces diverses activités tant pour les Etats Membres que pour
I'Organisation elle-méme a été largement reconnue et a conduit á la
suggestion, faite notamment dans le cadre des réunions régionales, de
désigner des conseillers régionaux en matiére de normes internationales du
travail. Dés 1980, des dispositions ont été prises en r.ue du détachement á
temps partiel de fonctionnaires du Département des normes intemationales
du travail qui ont été chargés d'assurer des services consultatifs en Afrique,
en Asie et dans le Paciflrque ainsi qu'en Amérique latine. En 1983, des
conseillers régionaux á plein temps ont été nommés dans ces deux derniéres
régions. Pour l'Afrique, le systéme des détachements á temps partiel de
fonctionnaires du siége a été maintenu; le budget pour I'exercice 1984-85
prévoit ár cette fin le méme montant de ressources que dans les autres régions.
En Asie occidentale, le conseiller régional dans le domaine de I'administration
du travail donne aussi des conseils sur les questions touchant les normes
de I'OIT.
Le mandat des conseillers régionaux est le suivant:
l. Conseiller les gouvemements pour toutes les questions relatives á
I'exécution de leurs obligations au titre des conventions ratifiées ou de la
Constitution de I'OIT en ce qui concerne les normes internationales du
travail. Ces activités comprennent notamment les suivantes: conseiller les
gouvernements au sujet de leurs réponses aux questionnaires concernant des
questions inscrites á l'ordre du jour de la Conférence internationale du
Travail et de leurs commentaires sur les projets de textes devant étre
examinés par la Conférence; préciser la nature et la portée des diverses
obligations touchant l'établissement des rapports; expliquer les observations
formulées par les organes de contróle de I'OIT; donner des avis sur les
mesures á prendre en vue de surmonter les difñcultés rencontrées, y compris
une aide pour la rédaction des amendements á apporter á la législation, etc. ;
aider, si besoin est, le gouvernement ¿ établir ses rapports; émettre des avis
en ce qui concerne la soumission des conventions et des recommandations
aux autorités nationales compétentes ; donner des avis touchant la ratification
de nouvelles conventions; promouvoir le tripartisme pour les questions
relatives aux noÍnes de I'OIT, et notamment favoriser I'institution de
procédures pour des consultations tripartites du genre de celles qui sont
prévues dans la convention ff 144.
2. Fournir des informations touchant les questions qui se posent dans le
cadre de la procédure spéciale de plainte en cas d'allégations concernant des
violations des droits syndicaux et, en particulier, se mettre en rapport avec
52
Normes internationales du travail
les gouvernements qui tardent á transmettre les renseignements et les
observations qui leur sont demandés.
3. Etablir et maintenir les relations les plus étroites possible avec
les organisations d'employeurs et de travailleurs, en les informant et en
les conseillant pour tout ce qui touche aux nornes et aux procédures de
I'OIT.
4. Dans le cadre des activités prévues sous l, 2 et3, effectuer des missions
consultatives ofñcieuses dans les pays de la région intéressée, ainsi que des
missions officielles (contacts directs), s'il y a lieu.
5. Transmettre systématiquement au Département des nonnes internationales
du travail, au directeur régional et aux autres bureaux de I'OIT de
la région, tous les renseignements pertinents obtenus dans le cadre des
activités indiquées ci-dessus.
6. Participer á la préparation et á I'organisation des réunions relatives
aux no(nes (séminaires, colloques, etc.) qui doivent se tenir dans la région
et des missions de contacts directs qui peuvent étre organisées par le siége.
7. Collaborer á la préparation des rapports relatifs aux norrnes qui seront
présentés aux réunions de commissions consultatives régionales et aux
conférences régionales et participer á ces réunions.
8. Donner des avis aux membres du personnel des bureaux de I'OIT et
aux experts de la coopération technique sur toutes les questions se rapportant
aux no[nes en relation avec leurs activités, de fagon que les nonnes
pertinentes de I'OIT soient düment prises en considération dans les
programmes d'action de I'Organisation dans la région.
Autres services consultatifs
Des avis sur des questions concernant les normes internationales du
travail peuvent étre obtenus du Bureau de diverses maniéres autres que celles
qui supposent I'envoi de fonctionnaires du BIT dans les differents pays. Lors
des sessions de la Conference internationale du Travail et aussi aux
conferences régionales, il existe un service spécialement chargé de fournir
des informations sur de telles questions, qui peuvent avoir trait soit aux
problémes de fond qui se posent pour appliquer les conventions - avant ou
aprés la ratification -, soit á des éclaircissements au sujet des observations
faites par les organes de contróle, soit á des questions de procédure découlant
des obligations que doivent assumer les Etats Membres aux termes de la
Constitution. Lorsque cela est nécessaire, des discussions avec les services
techniques compétents du Bureau sont aussi possibles. Les contacts qui ont
lieu lors des conférences peuvent également fournir I'occasion d'examiner la
nécessité d'octroyer une aide sous d'autres formes: projets de coopération
technique, missions consultatives, bourses de formation en ce qui concerne
les procédures relatives aux conventions et aux recommandations.
53
Rapport du Directeur général
Les gouvernements cherchent souvent á avoir des avis du Bureau sur la
signification de telles ou telles dispositions des conventions, soit lorsqu'ils
envisagent de les ratiñer, soit aprés la ratification, quand ils prévoient des
mesures en vue de leur application. Le Bureau s'est toujours fait une régle
de répondre á de telles demandes tout en précisant que la Constitution de
I'OIT ne lui confére aucune compétence particuliére pour interpréter les
conventions et qu'en cas de ratification la conformité avec les normes en
question reléverait des procédures de contróle établies. Les avis du Bureau
sur la portée des dispositions des conventions visent á appeler particuliérement
l'attention sur les éléments pertinents des travaux préparatoires qui ont
précédé leur adoption et sur les vues déjá exprimées par les organes de
contr6le a7.
Séminaires
Depuis l964,le BIT a organisé une série de séminaires régionaux en vue
de familiariser les fonctionnaires des ministéres du Travail avec les
procédures relatives aux conventions et aux recommandations de I'OIT et
de passer en revue les problémes que peut soulever leur application.
Initialement, ces séminaires étaient prévus á tour de r6le pour les pays
d'Afrique anglophones, les pays d'Afrique francophones, les pays d'Amérique
latine et les pays d'Asie et du Pacifique. Par la suite, on a ajouté au
programme des séminaires pour les pays des Antilles, les pays arabes et les
pays du Paciñque Sud.
Plus récemment, on a aussi organisé un certain nombre de séminaires
tripartites. Certains ont eu lieu á l'échelon régional ou sous-régional, comme
celui de Bangalore en l98l et celui de Bangkok en 1982 (consacré aux
pratiques et procédures suivies pour l'élaboration des normes du travail).
D'autres se sont tenus au niveau national.
En trois ans (de l98l á 1983), le BIT a organisé en tout 20 séminaires
concernant les normes internationales du travail, ou y a participé:
7 séminaires régionaux ou sous-régionaux á l'intention des fonctionnaires
gouvernementaux, 3 séminaires tripartites régionaux ou sous-régionaux,
6 séminaires tripartites nationaux, 3 séminaires nationaux organisés, respectivement,
á l'intention des fonctionnaires gouvernementaux, des syndicats
et des employeurs, et I séminaire national ouvert á un large public
de fonctionnaires, d'universitaires, d'employeurs et de représentants des
syndicats.
En outre, au cours de la 67" session de la Conférence internationale du
Travail, en 1981, les procédures nationales de mise en ceuvre de la
convention (n" 144) sur les consultations tripartites relatives aux noÍnes
internationales du travail, 1976, et de la recommandation (n" 152) qui
la compléte ont fait I'objet d'un séminaire tripartite. Immédiatement avant
la sixiéme Conférence régionale africaine, qui a eu lieu á Tunis, en
octobre 1983, le BIT a organisé dans cette ville un séminaire tripartite sur
54
Normes internationales du travail
la liberté syndicale, afin de permettre á des participants d'Afrique d'examiner
les problémes que pose dans la région I'application des normes pertinentes
de I'OIT ainsi que les procédures de l'Organisation pour la protection des
droits syndicaux.
Formation et manuels
Les séminaires régionaux et sous-régionaux á l'intention des fonctionnaires
des ministéres du Travail dont il a été question plus haut visent á
former les fonctionnaires qui sont chargés des questions relatives á I'adoption
et á I'application des nornes. Ils donnent l'occasion de passer en revue les
procédures en vigueur dans ce domaine, en procédant également á un travail
pratique, de discuter certains problémes de fond et de procéder á un utile
échange de données d'expérience entre les participants.
Le BIT forme aussi individuellement des fonctionnaires qui font des
stages au siége de I'Organisation. De 1980 á 1983, des fonctionnaires de
34 pays ont regu une formation de ce genre 48.
Pour fournir des informations systématiques sur les régles et les pratiques
en vigueur dans ce domaine, le BIT a publié, en 1965, le Manuel sur les
procédures en matiére de conyentions et recommandations internalionales
du travail, destiné surtout á servir de guide aux fonctionnaires gouvernementaux
qui sont appelés á s'occuper de ces questions. Ce manuel a été révisé
périodiquement, la derniére fois en 1980.
A la suite du Séminaire tripartite régional sur les pratiques et procédures
suivies pour l'élaboration de normes du travail tenu á Bangkok en 1982, un
recueil des travaux de ce séminaire, oü figurent les documents de travail
utilisés et les conclusions formulées á I'issue de la réunion, a été publié dans
le cadre du Projet régional pour le renforcement de I'administration du travail
et de la main-d'ceuvre en Asie et dans le Pacifique (ARPLA), de méme
qu'une brochure qui vise á fournir des orientations sur ces questions aux
délégués á la Conférence internationale du Travail.
Le Bureau a aussi rédigé une note, pour donner des orientations sur
I'organisation et le fonctionnement des consultations tripartites nationales
conformément aux dispositions de la convention no 144 et de la
recommandation n' 152.
Mesures visant á assurer une participation plus active
des organisations d'employeurs et de travailleurs
et á promouvoir les consultations tripartites nationales
sur les quest¡ons relatives aux normes de l'OlT
Il a été question plus haut des diverses fagons dont les organisations
d'employeurs et de travailleurs sont appelées á participer au fonctionnement
des mécanismes de contróle de I'OIT. L'importance de leur contribution á
la mise en Guvre des conventions et des recommandations a été soulignée á
55
Rapport du Directeur général
maintes reprises par les organes de contróle ainsi que par la Conférence, en
particulier dans les résolutions réclamant un renforcement du tripartisme
qu'elle a adoptées en l97l et 1977. La commission d'experts a examiné de
prés la fagon dont les Etats s'acquittent des prescriptions des conventions qui
ont trait á la consultation des organisations d'employeun et de travailleurs
et á leur association á l'application de ces instruments ae. Le Bureau a pris
diverses mesures pour renseigner les organisations d'employeurs et de
travailleurs sur les possibilités qui leur sont ouvertes de participer au contróle
de la mise en Guvre des conventions et sur la position des divers pays en ce
qui concerne les normes de I'OIT. Chaque année, il envoie des lettres aux
organisations centrales d'employeurs et de travailleurs des Etats Membres
pour leur faire savoir quels sont les instruments sur lesquels leur
gouvernement doit faire rapport, ainsi que le texte de tous commentaires
formulés par la commission d'experts au sujet des conventions en question.
En réponse á des demandes de délégués des travailleurs á la Conférence,
le BIT a organisé des réunions d'études sur les procédures d'élaboration
des normes et de contróle de I'OIT, á l'intention des représentants des
travailleurs á la Conference internationale du Travail et aux conferences
régionales.
Ces mesures - et la discussion réguliére de I'application des normes lors
des réunions régionales - ont éveillé au sein des organisations professionnelles
un intérét plus actif pour la mise en ceuvre des instruments de I'OIT.
Cela s'est traduit, par exemple, par une forte augmentation du nombre des
observations d'organisations d'employeurs ou de travailleurs portées á
I'attention de la commission d'experts. De 1979 ir 1983, la commission
d'experts a pris note en moyenne, chaque année, de 65 observations de ce
genre, soit cinq fois plus que dix ans auparavant. Trois quarts des
observations émanaient d'organisations de travailleurs et un quart d'organisations
d'employeurs.
Quand on compare le nombre des observations formulées par des
organisations professionnelles au nombre total des rapports examinés chaque
année et au nombre total des ratifications (puisqu'il est possible de
transmettre des observatiohs au sujet de conventions pour lesquelles aucun
rapport détaillé n'est actuellement attendu), on est amené á se demander s'il
n'y aurait pas place pour une utilisation beaucoup plus large de ce moyen
relativement simple de porter á l'attention des organes de contróle les
problémes que pose la mise en Guvre des conventions. Cette question parait
plus opportune encore si I'on compare la situation des pays développés avec
celle des pays en développement. La grande majorité des observations regues
des organisations d'employeurs ou de travailleurs au cours de ces cinq
derniéres années (78 pour cent) concerne des pays développés, et trois
cinquiémes des Etats Membres appartenant á cette catégorie ont fait I'objet
de telles observations. En revanche, du cdté des pays en développement, un
Etat Membre sur huit, seulement, a fait I'objet d'observations 50. Cela souléve
la question de savoir dans quelle mesure les organisations professionnelles
56
Normes internationales du travail
des pays moins développés ont les moyens de s'occuper de toutes les
questions que posent les normes internationales du travail.
L'une des plus importantes mesures prises pour donner suite á la
résolution sur le renforcement du tripartisme de l97l a été I'adoption, en
l9'76, de la convention (n" 144) sur les consultations tripartites relatives aux
noÍnes internationales du travail et de la recommandation (n" 152) sur les
consultations tripartites relatives aux activités de l'Organisation internationale
du Travail. Jusqu'ici, la convention a été ratifiée par 34 Etats, dont
16 Etats d'Europe (tous d'Europe occidentale), 5 d'Afrique, 9 de la région
américaine et 4 de l'Asie et du Paciñque. Dans ses activités consultatives et
les divers contacts qu'il a avec des gouvernements, le Bureau préte une
attention particuliére á la mise sur pied des procédures de consultation
prévues par ces instruments. Comme on l'a vu plus haut, il a rédigé une note
en vue de fournir des orientations sur la question. Les conseillers régionaux
sur les noÍnes internationales du travail sont chargés, entre autres choses,
de promouvoir l'établissement de ces procédures. L'étude d'ensemble que la
Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations
a réalisée en 1982 sur la base des rapports présentés, au titre de
I'article 19 de la Constitution, au sujet des instruments susmentionnés a
permis d'éclaircir certains points et d'encourager un regain d'efforts en faveur
de la mise en euvre de ces instruments st. Il ressort de cette étude et d'autres
sources s2 que des procédures de consultation du type de celles que prévoit la
convention f 144 existent dans un grand nombre de pays qui n'ont pas
encore ratifié cette convention.
Des consultations tripartites effectives dans les domaines visés par la
convention n" 144 sont la meilleure garantie que les questions relatives á
l'élaboration et á la mise en Guvre des normes de I'OIT seront examinées
de faqon systématique et approfondie par les parties directement intéressées.
La mise sur pied et le renforcement des procédures nationales prévues á cette
fin doivent donc constituer pour I'OIT un objectif prioritaire dans les années
á venir. L'Organisation devrait s'efforcer d'accroitre l'aide qu'elle apporte
aux Etats Membres á cet égard, en leur donnant des conseils, non seulement
sur la forme des procédures de consultation, mais aussi sur les mesures
administratives qui doivent étre prises, dans les services offrciels compétents
comme au sein des organisations centrales d'employeurs et de travailleurs,
pour constituer une solide infrastructure en vue de discussions suivies et
fructueuses. Cette aide pourrait s'étendre aux questions concernant l'organisation
des services de secrétariat et la formation á dispenser á ce niveau,
la documentation et le programme des réunions et des autres formes de
consultation eu égard au calendrier et au déroulement des diverses procédures
et activités de I'OIT au sujet desquelles les consultations devraient
avoir lieu.
Des progrés dans ce sens devraient permettre de résoudre divers
problémes en les discutant au niveau national sans qu'ils aient á faire l'objet
de commentaires de la part des organes de contróle de I'OIT, et aussi de
57
Rapport du Directeur général
déterminer dans des délais raisonnables les mesures á prendre pour donner
suite aux commentaires éventuellement formulés par ces organes.
Puisque ces mesures visent á aider les organisations d'employeurs et de
travailleurs á pr6ter une attention systématique aux questions que soulévent
les normes de I'OIT et á participer effectivement aux discussions nationales
les concernant, il faudra les coordonner avec le programme général des
activités de I'OIT en faveur de ces organisations. Un manuel d'éducation
ouvriére sur I¿s normes internationales du travail a été publié en 1978, et
une édition mise á jour est parue en 1982 en anglais. Le budget pour 1984-85
prévoit l'établissement, dans le cadre du programme d'éducation ouvriére,
d'un guide de formation sur les consultations tripartites et de brochures sur
la participation des syndicats á I'application des nonnes internationales du
travail.
Discussions régionales
Depuis le début des années soixante-dix, c'est devenu une pratique
réguliére pour les commissions consultatives et les conferences régionales en
Afrique, dans les Amériques et dans la région d'Asie et du Pacifique que de
passer en revue la situation dans la région en ce qui concerne I'application
et la ratification des conventions de I'OIT. Les rapports présentés á ces
réunions donnent un apergu de la situation générale et des problémes
rencontrés, mais ils font aussi le point en ce qui concerne les conventions
intéressant des domaines particuliers, tels que la liberté syndicale, le travail
forcé, la discrimination en matiére d'emploi et de profession, la politique de
I'emploi, l'inspection du travail, les salaires ou la sécurité sociale. Les
discussions ont abouti á I'adoption d'une serie de résolutions et de
conclusions, qui dénotent un certain nombre de préoccupations communes:
insistance sur la souplesse avec laquelle il convient de formuler les normes
pour tenir düment compte des problémes auxquels se heurtent les pays en
développement, reconnaissance de l'importance des instruments de I'OIT
pour définir les objectifs de la politique de développement, ainsi que des
consultations tripartites á ce sujet, et désir de développer et d'utiliser
pleinement toutes les formes d'aide de I'OIT en vue de promouvoir
I'application des normes de l'Organisation.
Ces discussions régionales ont beaucoup contribué á l'intensification des
activités pratiques de I'OIT dans le domaine des normes dont il a été question
plus haut. Dans toutes les régions, on note un désir manifeste de voir les
organismes régionaux intéressés suivre ces questions.
Comme on I'a vu, les rapports présentés aux réunions régionales au sujet
de la ratification et de I'application des conventions analysent la situation
dans divers domaines. Cependant, faute de temps, il n'a pas été possible, lors
de ces réunions, d'examiner en détail les analyses figurant dans ces rapports,
en sus des problémes généraux auxquels les Etats Membres se heurtent en
ce qui concerne les normes de I'OIT. C'est seulement dans le cadre de la
58
Normes internationales du travail
discussion de questions techniques particuliéres inscrites á l'ordre du jour des
réunions régionales qu'on a pu considérer telle ou telle question de fond. Il
serait bon qu'á I'avenir les problémes que la mise en @uvre des normes de
I'OIT soulévent dans des domaines déterminés puissent étre discutés lors de
réunions spéciales, par exemple des séminaires tripartites. On peut prendre
comme exémple de ce type de réunion le séminaire tripartite sur la liberté
syndicale pour les pays d'Afrique organisé á l'occasion de la conference
régionale africaine qui s'est tenue récemment, mais on pourrait aussi organiser
des séminaires de ce genre indépendamrnent des réunions des organes
régionaux.
Il n'a pas été organisé jusqu'ici de séminaires régionaux sur les questions
concernant les normes de I'OIT pour les Etats Membres européens. Il serait
bon de réparer cette omission dans les années qui viennent.
Les normes de l'OlT et la coopération technique
Il a été reconnu de faqon générale que les activités normatives de I'OIT et
la coopération technique devraient se soutenir réciproquement. La coopération
technique devrait étre un moyen de promouvoir la mise en euvre des
conventions et des recommandations. Il conviendrait que ces instruments
soient pris en considération pour la conception des projets, dans leur
exécution et dans toute recommandation en résultant. Les informations
fournies aux experts devraient faire état des normes qui auront des implications
dans leur travail, des obligations que le pays intéressé a assumées au
titre des conventions en cause, ainsi que de tout probléme relevé dans
I'application de ces conventions. Un mémorandum destiné aux experts de la
coopération technique définit leurs attributions en ce qui concerne les
nonnes de I'OIT. Il appelle leur attention sur la nécessité de respecter les
prescriptions des conventions ratifiées, de tenir pleinement compte des
conventions concernant les droits fondamentaux de I'homme (méme lorsqu'elles
n'ont pas été ratifiées) et de se réferer autant que possible aux autres
conventions non ratifiéeS et aux recommandations comme Sources d'orientation
faisant autorité. Des dispositions sont aussi prévues pour que le
département compétent puisse controler les projets de rapports sur les
activités de coopération technique qui font intervenir des questions liées aux
norfnes.
Entre autres attributions, les conseillers régionaux sur les normes internationales
du travail sont chargés de fournir des avis aux experts de la
coopération technique au sujet de tous les aspects des normes de l'oIT qui
ont une incidence sur leur travail. Ils peuvent eux-mémes apporter certaines
fOrmes d'asSistance aux gouvernements, par exemple leur donner des conseils
sur le type de mesures á prendre pour mettre en @uvre les conventions, les
informer des dispositions que d'autres pays ont adoptées en la matiére, ou
les aider á mettre au point les modifications qu'il conviendrait d'apporter á
leur législation pour supprimer les divergences ou les lacunes relevées dans
59
Rapport du Directeur général
I'application des conventions. En outre, ils peuvent contribuer á repérer
certains besoins et recommander d'autres activités de coopération technique
plus étendues.
En principe, on a donc lá les bases d'une relation étroite entre les activités
normatives de I'OIT et ses activités pratiques. Toutefois, l'incidence des
noÍnes sur les activités pratiques de I'Organisation varie beaucoup, selon les
domaines et selon la nature des projets.
Dans certains cas, c'est toute une sphére d'activités qui a pour objectif la
mise en ceuvre de normes déterminées. Tel est le cas pour le renforcement
et Ie développement des organisations de travailleurs ruraux, dont la
convention et la recommandation adoptées sur la question en 1975 fournissent
le mandat de base, encore que bon nombre des activités effectives
soient, par nature, essentiellement pratiques et terre á terre.
En général, les normes de I'OIT peuvent constituer une importante source
d'orientations pour les projets qui visent á fournir des conseils sur les
politiques de base, la législation ou la mise sur pied ou I'amélioration de
certains types d'institutions, comme l'administration du travail ou les services
d'inspection. Toutefois, de nombreux projets impliquent üne action pratique
qui dépend plus de considérations techniques que de questions de politique
générale ou de normes juridiques.
Cette distinction apparait, par exemple, dans le cas de la coopération
technique concernant la sécurité sociale s3. Une partie des activités porte sur
la conception, la mise sur pied et I'amélioration des régimes de sécurité
sociale. Ici, les noÍnes de I'OIT sont d'un intérét direct et sont constamment
prises en considération. En revanche, d'autres activités visent á fournir une
aide technique en matiére financiére et actuarielle ou des conseils sur la
gestion des régimes de sécurité sociale, domaines dans lesquels il est
beaucoup moins probable que des questions relatives aux norrnes de I'OIT
puissent se poser.
On retrouve la méme distinction dans le domaine de la formation
professionnelle, entre les activités qui visent á promouvoir une conception
systématique et cohérente de la formation (y compris les mesures tendant á
faire participer les organisations d'employeurs et de travailleurs á l'élaboration
et á la mise en euvre de la politique et des programmes de formation)
et les projets qui se situent á un niveau inferieur, essentiellement pratique.
l¿ convention et la recommandation de 1975 sur la mise en valeur des
ressources humaines fournissent un cadre normatif pour le premier de ces
deux types d'action, dont le besoin ne devrait cesser de se faire sentir dans
les années qui viennent5a.
Méme dans les domaines oü la plupart des projets ont un caractére
technique ou pratique, on peut s'appuyer sur les noÍnes de I'OIT pour faire
en sorte que certaines garanties soient respectées. Ainsi, les principes
directeurs concernant I'organisation des programmes spéciaux de travaux á
haute intensité de main-d'euvre font réference au respect des dispositions
des conventions et des recommandations de I'OIT sur des questions telles
60
Normes internationales du travail
que le recrutement des travailleurs (en particulier, pour veiller á ce que leur
participation á ces travaux soit volontaire), l'áge minimum d'admission á
I'emploi, la rémunération, la durée du travail, la sécurité et I'indemnisation
des lésions professionnelles5s. De méme, dans le cadre des arrangements
convenus avec le Programme alimentaire mondial, l'examen par le BIT des
demandes de projets au titre de ce programme porte non seulement sur leur
faisabilité technique, mais aussi sur leur compatibilité avec les normes de
I'OIT s6.
Bien que ces exemples montrent I'interaction qui existe entre les norrnes
de I'OIT et ses activités de coopération technique, on n'a jusqu'ici procédé
á aucune étude systématique de la question. Il serait utile d'effectuer une
étude de ce genre, en vue de déterminer avec plus de précision dans quels
cas les norrnes peuvent fournir des principes directeurs utiles pour les
activités pratiques, quelles sont les limites de ce type d'influence, si les
directives données aux experts de la coopération technique en ce qui
conceme les normes sont suflisantes, et jusqu'á quel point ceux-ci s'appuient
effectivement sur les noÍnes au cours de l'exécution des projets.
La question se pose aussi de savoir dans quelle mesure les gouvernements,
lorsqu'ils élaborent leur politique et fixent leurs priorités en vue de demander
une assistance technique, considérent I'aide qui pourra leur étre apportée
comme un moyen de s'acquitter des obligations qu'ils ont assumées au titre
des conventions ratifiées ou d'atteindre les objectifs définis méme dals les
instruments par lesquels ils ne sont pas liés. La coopération technique ne
pourrait-elle servir plus souvent á surmonter les difñcultés que souléve
l'application des conventions ratifiées, en particulier lorsqu'elles tiennent á
d'importantes carences matérielles ou institutionnelles?
L'application pratique des conventions
L'examen de ces questions nous améne tout naturellement á analyser les
problémes qui ont une incidence sur l'application pratique des conventions.
Lorsqu'un Etat ratihe une convention internationale du travail, il s'engage
á rendre effectives ses dispositions. Cela suppose non seulement que celles-ci
se refléten1 dans des lois ou d'autres instruments formels, mais aussi qu'en
pratique les textes nationaux visant á assurer la mise en cuvre de la
convention soient bien appliqués.et respectés. A cet égard, des problémes
peuvent exister á deux niveaux: les pays considérés possédent-ils les
mécanismes administratifs nécessaires pour assurer eflicacement cette application
pratique ? Les organes de contróle de I'OIT ont-ils les moyens
d'apprécier dans quelle mesure les conventions sont appliquées dans la
pratique ?
La premiére de ces questions, bien qu'elle se pose ici á propos de
l'application des conventions de I'OIT, va en fait beaucoup plus loin.
Combien d'Etats ont-ils une administration du travail solidement structurée
et dotée de moyens lui permettant d'exercer eflicacement les fonctions
61
Rapport du Directeur général
définies par la convention (n" 150) et la recommandation (n" 158) sur
I'administration du travail, 1978, et par les conventions et recommandations
qui traitent plus précisément de l'inspection du travail5T ? Méme les pays les
plus avancés, face á la nécessité de limiter les dépenses publiques tandis que
la diversité et la complexité des problémes á traiter augmentent, ont du mal
á maintenir leurs services d'inspection á un niveau satisfaisant. Quant aux
pays en développement, trés souvent, faute de ressources, les services
d'inspection du travail ne peuvent y jouer qu'un r6le marginal, et l'écart est
criant entre la protection souhaitée, que la loi consacre, et la réalité
quotidienne. L'étude d'ensemble sur I'effet donné aux nornes de I'OIT
concernant I'inspection du travail que la Commission d'experts pour I'application
des conventions et recommandations doit effectuer en 1985 viendra
á point nommé pour pennettre d'apprécier ces problémes et de recenser les
mesures que I'OIT pourrait prendre pour aider ses Etats Membres á
améliorer la situation á cet égard. Il ne faut pas oublier que, dans bien des
pays en développement, le renforcement de I'administration du travail ne
saurait étre considéré isolément, en faisant abstraction du probléme plus
vaste que pose le maintien de I'eflicacité de I'administration püblique face á
des diflicultés économiques accablantes.
Dés I'origine, la Commission d'experts pour I'application des conventions
et recommandations a compris qu'il importe d'apprécier l'application des
conventions non seulement en droit, mais aussi en pratique, et qu'il est
diffrcile de recueillir des informations suffrsantes sur ce point. C'esi pourquoi
on a inclus dans les formulaires de rapport pour les conventions ratiflrées une
série de questions qui visent á obtenir des informations d'ordre statistique et
des renseignements sur les mesures d'inspection et autres mesures d'exécution,
les décisions judiciaires, les observations formulées par les organisations
d'employeurs et de travailleurs et tout élément de documentation générale
susceptible de mettre en lumiére la faqon dont la convention est appliquée.
I¿ commission d'experts recense de temps á autre les moyens dont elle
dispose pour examiner l'application pratique des conventions s8 et, dans
chacun de ses rapports, elle indique dans quelle mesure elle a pu obtenir les
informations requises (notamment de sources comme les rapports sur les
services d'inspection du travail, les annuaires statistiques, les rapports des
missions de contacts directs et les rapports concernant les projets de
coopération technique).
I-a commission d'experts est consciente de ce que les possibilités de
fournir des informations sur I'application pratique d'une convention varient
beaucoup selon le sujet de celle-ci. Elle concentre son attention sur les
instruments pour lesquels les formulaires de rapport contiennent des questions
précises á cet égard. Ces derniéres années, la proportion des cas dans
lesquels les pays intéressés ont donné des indications sur I'application
pratique des conventions a été de I'ordre de 40 á 50 pour cent. Toutefois,
I'intérét de ces informations varie énormément. Il est assez rare qu'elles
permettent de déterminer en détail dans quelle mesure l'instrument est
62
Normes internat¡onales du travail
appliqué en pratique. En diverses occasions, de graves lacunes pratiques ne
sont apparues qu'á la suite d'études, de missions ou d'enquétes spéciales se.
Il serait utile que le Bureau étudie les moyens d'améliorer le rassemblement
et I'analyse systématiques des informations intéressant la mise en Guvre
pratique des normes de I'OIT, en vue d'un examen ultérieur de cette question
par les organes de contr6le.
LA COLLABORATION ENTR E ORGAN ISATIONS
POUR TÉLABORATION ET LA MISE EN CEUVRE
DES NORMES INTERNATIONALES
L'OIT n'est pas la seule institution qui s'emploie á élaborer des normes
internationales. D'autres organisations, au sein du systéme des Nations Unies
et au niveau régional, déploient une importante activité normative. L'OIT
s'est efforcée de favoriser le plus possible la collaboration et la coordination
dans ce domaine. En 1973, le Comité administratif de coordination a
examiné cette question á I'initiative du BIT, et il a défini comme suit les
principaux buts de la coordination des travaux législatifs des organisations
internationales appartenant ou non au systéme des Nations Unies: a) prévenir
les chevauchements inutiles; á/ prévenir les contradictions entre les
obligations contractées par les Etats aux termes des différents instruments ou
les divergences dans I'interprétation des instruments adoptés par les differentes
organisations ; c) faire en sorte que ce soient les organisations les mieux
placées pour le faire qui soient chargées d'élaborer les régles touchant des
questions hautement techniques et qui en contrólent l'application. Le comité
a également jugé que, étant donné l'importance d'une interprétation uniforme
des nornes, leur application devrait étre analysée par les organismes
les mieux placés pour le faire et que, lorsqu'un instrument intéresse plus
d'une organisation, il serait souhaitable qu'une clause relative á la coopération
figure dans I'instrument lui-méme et que cette coopération revéte á la
fois la forme d'une représentation mutuelle et d'échanges d'informations et
d'observations, selon que de besoin 60.
Nous allons voir, tout d'abord, comment I'OIT a tenu compte de ces
principes dans son propre travail normatif. Dans bien des cas, elle a cherché
á obtenir la collaboration d'autres institutions du systéme des Nations Unies
pour élaborer des normes sur des sujets dont certains aspects relevaient de
leur compétence. On peut en citer comme exemples les instruments
concernant les populations aborigénes et tribales, la convention sur les
objectifs et les normes de base de la politique sociale, et les instruments
concernant la sécurité des gens de mer, la formation professionnelle, les
organisations de travailleurs ruraux, le penonnel infirmier et les travailleurs
migrants. Les préambules de ces instruments rappellent que les normes qu'ils
contiennent ont été élaborées en collaboration avec les autres organisations
intéressées et que I'on se propose d'obtenir qu'elles apportent d'une maniére
63
Rapport du Directeur général
continue leur collaboration aux mesures destinées á encourager et á assurer
l'application de ces norfnes. En conséquence, le BIT a convenu avec les
diverses institutions en question de leur communiquer des copies des
rapports des gouvernements concernant ces instruments ainsi que le texte
des commentaires formulés précédemment par les organes de contróle de
I'OIT, en les invitant á lui transmettre tous renseignements pertinents
qu'elles auraient en leur possession et tous commentaires qui pourraient aider
la Commission d'experts pour I'application des conventions et recommandations
dans son travail. Les diverses organisations sont invitées á se faire
représenter aux réunions de la commission d'experts lorsquq celle-ci examine,
l'application des normes en question6r, tandis que les Nations Unies le sont
pendant toute la session de la commission.
L'OIT s'est aussi efforcée d'apporter sa collaboration á d'autres organisations
pour établir des normes dans des domaines d'intérét commun et
en contróler la mise en @uvre. C'est ainsi, par exemple, qu'elle a élaboré
en coopération avec I'UNESCO la recommandation concernant le statut
du personnel enseignánt adoptée en 1966 et qu'un comité conjoint -
OIT-UNESCO - d'experts a été chargé d'examiner les rapports sur
I'application de cette recommandation requis périodiquement des Etats
membres des deux organisations. De méme I'OIT a collaboré avec
I'UNESCO et I'OMPI pour élaborer et appliquer des norrnes visant á
protéger les artistes interprétes ou exécutants, les producteurs de phonogrammes
et les organismes de radiodiffusion (Convention de Rome de 196l).
Elle a aussi collaboré étroitement avec le Conseil de l'Europe pour établir et
mettre en ceuvre divers instruments concernant le domaine social, comme la
Charte sociale européenne, le Code européen de sécurité sociale et son
protocole, et la convention européenne de sécurité sociale. outre la
contribution technique qu'elle a apportée á la rédaction de la Charte sociale
européenne, I'OIT, á la demande du Conseil de l'Europe, a convoqué une
conférence tripartite chargée d'examiner le projet. Conformément aux
dispositions de la Charte sociale européenne, un représentant de I'OIT
participe, á titre consultatif, aux sessions du comité d'experts indépendants
qui examine les rapports des Etats partie á la charte. Le Code européen de
sécurité sociale est fondé sur la convention n" 102 de I'OIT et, en l'occurrence,
I'examen des rapports des Etats qui l'ont ratifié est confié en premier
lieu á un organe de I'OIT, la Commission d'experts pour I'application des
conventions et recommandations 62. L'OIT participe aussi aux discussions
qui ont lieu actuellement en vue de mettre á jour la Charte sociale
européenne et de réviser le Code européen de sécurité sociale.
Dans le cas des normes élaborées par les Nations Unies, I'OIT, en vertu
de I'accord conclu avec cette organisation, est en droit de participer aux
réunions des divers organes intéressés et aussi de présenter des commentaires
écrits. Elle a par exemple contribué de fagon appréciable á l'élaboration du
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et,
actuellement, conformément á une politique approuvée par le Conseil
64
Normes internationales du travail
d'administration, elle prend une part active aux discussions du groupe de
travail que l'Assemblée générale des Nations Unies a chargé de rédiger une
convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs
migrants et de leur famille. Sa participation vise en particulier á faire en
sorte que les normes existantes de I'OIT soient pleinement connues et á
éviter, dans la mesure du possible, les conflits ou les chevauchements de
nornes. Dans ce cas, le Bureau, á la demande d'un groupe de pays européens
auteur des propositions qui servent de base aux discussions, leur a aussi
fourni des conseils techniques suivis.
Divers mécanismes de contróle, auxquels les institutions spécialisées sont
associées de fagon plus ou moins étroite, ont été institués conformément
aux dispositions d'instruments des Nations Unies. Ainsi, l'article 18 du
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
prévoit la possibilité pour le Conseil économique et social de conclure des
arrangements avec les institutions spécialisées afin qu'elles présentent des
rapports sur les progrés accomplis quant á I'observation des dispositions du
pacte qui entrent dans le cadre de leurs activités. En mai 1976, dans la
résolution 1988(LX), le conseil a prié les institutions spécialisées de
soumettre de tels rapports. En novembre 1976, e¡ accédant á cette demande
pour le compte de I'OIT, le Conseil d'administration a décidé de charger
la Commission d'experts pour I'application des conventions et recommandations
d'examiner les rapports et les autres renseignements disponibles au
sujet de I'application des dispositions du pacte qui entrent dans la sphére
des activités de I'OIT. Ces dispositions concernent I'emploi, les conditions
de travail, les droits syndicaux, la, sécurité sociale, I'emploi des femmes et
l'emploi des enfants et des adolescents. Depuis 1978, la commission d'experts
a présenté six rapports au Conseil économique et social au titre des
arangements en question. Ces rapports ont été portés á l'attention du Conseil
d'administration et de la Commission de I'application des conventions et
recommandations de la Conference. Le BIT s'est aussi fait représenter aux
réunions du groupe de travail d'experts gouvernementaux que le Conseil a
constitué pour qu'il l'aide á examiner les rapports sur la mise en cuvre du
pacte 63.
Bien que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques traite
de certaines questions qui relévent aussi de la sphére de compétence des
institutions spécialisées (pour I'OIT, I'interdiction du travail forcé et le droit
de constituer des syndicats et d'y adhérer), il ne contient pas de dispositions
expresses tendant á ce que ces institutions contribuent á sa mise en Guvre.
Aprés la création en 1976 du Comité des droits de I'homme, organe de
contróle élu par les Etats parties au pacte, le BIT a oflert d'apporter son
concours en fournissant des renseignements et une documentation, en
particulier sur la situation au regard des instruments pertinents de I'OIT.
A la suite d'une décision prise par le comité á sa 8" session, en 1979, ces
renseignements sont maintenant fournis de faqon réguliére, pour l'information
de ses membres, au sujet des pays dont il doit examiner les rapports.
65
Rapport du Directeur général
Le comité a aussi invité les institutions spécialisées á assister á ses réunions,
mais sans le droit d'intervenir, sauf si on le leur demande e.
Des arrangements en vue d'un échange d'informations et d'une représentation
mutuelle aux réunions des organes de contróle ont été conclus par les
Nations IJnies, le BIT et IUNESCO en ce qui concerne la Convention
intemationale des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale, la convention de I'OIT concernant la discrimination
(emploi et profession), de 1958, et la convention de I'UNESCO concernant
la lutte contre la discrimination dans le domaine de I'enseigfiement. Dans le
cas de la convention des Nations Unies, la participation du BIT et de
I'UNESCO aux réunions du comité de contrÓle vise á soumettre des
renseignements sur des questions d'ordre général, á I'exclusion de commentaires
au sujet de tel ou tel rapport.
La Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes
de discrimination á l'égard des femmes, qui contient des dispositions relatives
á la discrimination dans des domaines relevant aussi de la compétence de
certaines institutions spécialisées (comme I'emploi ou I'enseignement),
prévoit, dans son article 22, qlue les institutions spécialisées ont le droit d'étre
représentées aux réunions du comité de contr§le élu par les Et¿ts parties lors
de I'examen de la mise en Guvre de toute disposition entrant dans le cadre
de leurs activités. Le comité peut aussi inviter les institutions spécialisées á
soumettre des rapports sur I'application de la convention dans les domaines
qui entrent dans le cadre de leurs activités. A sa 2" session, en aoüt 1983, le
comité a décidé d'adresser une telle invitation aux institutions intéressées. I¡
Bureau a aussi établi une note sur la compatibilité des dispositions de la
convention des Nations Unies avec les noÍnes de I'OIT concernant I'emploi
des femmes, pour la soumettre au comité.
Un groupe de travail de la Commission des droits de I'homme des Nations
Unies prépare depuis quelques années une convention relative aux droits de
I'enfant. Le BIT se préoccupe de faire en sorte que les dispositions envisagées
sur des questions comme le travail des enfants et la protection qui leur est
assurée dans le cadre de la sécurité sociale soient compatibles avec les nonnes
de I'Organisation, et elle a présenté á cette fin des documents au groupe de
travail.
Plusieun questions devront continuer de retenir I'attention si l'on veut
essayer d'assurer un développement harmonieux des normes internationales.
Il s'agit de la division des compétences au sein du systéme des Nations Unies,
des arrangements en vue d'une coordination de l'élaboration des normes, de
la coordination des mécanismes de contr§le, et du rapport entre l'élaboration
de normes et les procédures d'application au niveau mondial et au niveau
régional.
L,es services juridiques des institutions du systéme des Nations Unies ont
pris des dispositions en vue d'un échange annuel d'informations sur les
activités législatives prévues, et les services des organisations internationales
qui s'occupent des droits de I'homme tiennent aussi périodiquement des
66
Normes internationales du travail
consultations informelles pour passer en revue les questions d'intérét commun.
Ces arangements au niveau des secrétariats ne peuvent toutefois
garantir que les décisions des organes délibérants aboutiront toujours á la
meilleure division du travail ou aux formes les mieux appropriées de
collaboration entre les organisations.
Ces derniéres années, la décision de l'Assemblée générale des Nations
Unies d'élaborer une convention sur les droits de tous les travailleurs
migrants et de leur famille a été un sujet de préoccupation particuliére pour
I'OIT. Conformément á sa Constitution, I'OIT a toujours eu pour mandat
<<la défense des intéréts des travailleurs occupés á l'étranger>». En 1947, les
Nations Unies et I'OIT ont passé des arrangements en vue de coordonner
leun táches dans le domaine des migrations. En vertu de ces affangements,
la compétence de I'OIT devrait comprendre les droits et la situation des
migrants en tant que travailleurs et la compétence des Nations Unies, les
droits et la situation des migrants en tant qu'étrangers65. Parmi ses activités
en faveur des travailleun migrants, I'OIT a adopté diverses conventions et
recommandations, en particulier en 1949 et en 1975. Dans l'une et I'autre
de ces occasions, les Nations Unies s'en sont felicitées tr. Cela étant, il aurait
été souhaitable de commencer par analyser les normes internationales qui
protégent déjá les travailleurs migrants de faqon á déterminer sur quelles
questions des normes complémentaires étaient nécessaires et dans quelle
enceinte il serait le plus indiqué de les adopter. Pourtant, I'Assemblée
générale des Nations Unies a rejeté les propositions faites en ce sens 67.
Le projet de normes sur les droits des travailleurs migrants en cours de
discussion au sein du groupe de travail de I'Assemblée générale porte sur
deux types de questions. D'un cóté, on a une série de dispositions, fondées
sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui visent á
garantir une protection contre les empiétements arbitraires sur la liberté
individuelle et la sécurité de la personne, ainsi que la jouissance de diverses
libertés. Ce sont lá des problémes qui touchent les travailleurs migrants en
leur qualité d'étrangers, indépendamment du fait qu'ils exercent ou non une
activité économique, et, conformément aux arrangements passés e¡ 1947, il
est tout á fait approprié pour les Nations Unies d'engager une action dans
ces domaines 68. D'un autre c6té, on a une série de dispositions qui concernent
les migrants en tant que travailleurs, c'est-á-dire qui portent sur des
questions comme les procédures de recrutement, I'accés á l'emploi, l'égalité
de traitement en matiére d'emploi, I'exercice des droits syndicaux et la
sécurité sociale. En principe, ces questions relévent de la compétence de
I'OIT. Sur ces sujets, il y aura inévitablement des chevauchements avec les
noÍnes existantes de I'OIT, ainsi que des divergences importantes par
rapport á ces normes. Une fois la convention des Nations Unies adoptée et
entrée en vigueur, il y aura donc deux ensembles de normes distincts sur
cette importante question, avec des procédures de contróle differentes, á
I'ONU et á I'OIT respectivement. Ces nouvelles norrnes ayant été élaborées
par une organisation dont la composition est purement gouvernementale, les
67
Rapport du Directeur général
employeurs et les travailleurs auront été privés de la possibilité de participer
á l'élaboration de normes dans un domaine qui les intéresse directement. De
méme, les organisations d'employeurs et de travailleurs ne pourraient
participer au fonctionnement des mécanismes de contróle prévus jusqu'ici
pour la convention des Nations Unies, comme ils sont en droit de le
faire dans le cadre des procédures de I'OIT. Enfin, dans les années á
venir, I'existence de norrnes des Nations Unies risque de géner en pratique
I'OIT dans l'exercice des compétences que sa Constitution lui assigne en la
matiére.
Il faut aussi mentionner le probléme du rapport entre les conventions de
I'OIT et les conventions de portée globale que les Nations Unies ont adoptées
ou sont en train d'élaborer, comme les instruments sur l'élimination de la
discrimination á l'égard des femmes ou sur les droits de l'enfant. Généralement,
ces instruments ne font que poser des principes généraux, en laissant
pour I'essentiel á chaque pays le soin de décider des méthodes d'application.
Méme s'ils n'entrent pas expressément en contradiction avec les normes plus
précises énoncées dans les conventions de I'OIT, ils risquent de les affaiblir
et de nuire au respect des obligations acceptées en ce qui les concerne.
Des questions de nature quelque peu differente se posent dans certains
domaines d'intérét commun pour I'UNESCO et I'OIT. Nous avons évoqué
plus haut l'action conjointe que ces deux organisations ont menée en ce qui
concerne la profession enseignante. L'UNESCO a aussi adopté des recommandations
au sujet des chercheurs, des traducteurs et des artistes, et elle
envisage actuellement d'adopter des instruments relatifs aux journalistes et
au personnel de l'enseignement supérieur. Les travaux du Comité conjoint
OIT-UNESCO d'experts sur l'application de la recommandation concernant
la condition du personnel enseignant ont soulevé la question de savoir si
certains aspects de la situation des enseignants pourraient faire l'objet d'une
convention internationale. Tout cela améne á s'interroger sur le contexte
institutionnel qui se préterait le mieux á l'élaboration des norrnes envisagées,
sur la nature et la portée de la collaboration interinstitutions, et sur le type
d'instrument qui serait le plus indiqué pour traiter de ces divers problémes.
Il est certes souhaitable que I'OIT participe á I'adoption et á la mise en @uvre
de normes qui ont une incidence sur les intéréts des travailleurs. Par contre,
on hésite en général á utiliser les mécanismes normatifs prévus par la
Constitution de I'OIT pour réglementer la situation de catégories professionnelles
assez étroites. En pareil cas des textes d'un autre genre, comme
des conclusions de réunions ou des réglements types, peuvent étre plus
indiqués. On pourrait aussi essayer de repérer des problémes communs á un
certain nombre de groupes professionnels, qui pourraient se préter á faire
I'objet d'une convention ou d'une recommandation.
Il a été question plus haut des dispositions prises pour associer I'OIT aux
activités normatives du Conseil de I'Europe dans le domaine social. Une série
de conventions sur les droits de I'homme ont aussi été adoptées, par le
Conseil de l'Europe en 1950, par I'Organisation des Etats américains en 1969
68
Normes internationales du travail
et par I'Organisation de I'unité africaine en 1981. Aucune de ces conventions
ne prévoit expressément une collaboration avec d'autres organisations en
matiére d'application et de contróle. Bien qu'elles traitent essentiellement
des droits civils et politiques, toutes trois contiennent certaines dispositions
qui intéressent directement I'OIT 6e. Il est donc nécessaire pour celle-ci de
suivre de prés la fagon dont ces divers instruments régionaux sont interprétés
et appliqués. Encore que des divergences de détail aient parfois amené les
organes de la Convention européenne á rendre des décisions qui différaient
des conclusions á propos de normes de I'OIT zo, ll n'y a pas eu jusqu'ici
d'importantes divergences d'interprétation et les organes ont pris soin d'étudier
les instruments pertinents de I'OIT, les travaux préparatoires et les vues
des organes de contróle de I'OrganisationTr.
Outre les mécanismes de contróle fondés sur une convention, il existe un
certain nombre de procédures d'enquéte plus générales, comme la procédure
des Nations Unies pour l'examen des communications alléguant des violations
flagrantes, constantes et systématiques des droits de l'homme, les études
de la situation au regard des droits de l'homme dans des pays déterminés
effectuées par des rapporteurs spéciaux désignés par les organes des Nations
Unies compétents en la matiére, la procédure de I'UNESCO pour I'examen
des communications concernant les violations des droits de l'homme relevant
de la compétence de cette organisation, et le mandat général de la Commission
interaméricaine des droits de I'homme d'examiner les communications
qu'elle regoit au sujet de violations des droits de l'homme dans des Etats qui
ne sont pas parties á la Convention américaine relative aux droits de
l'homme. Le risque existe que les principes et les norrnes concernant les
droits de l'homme puissent étre interprétés de fagon differente et qu'une
situation particuliére ne soit pas appréciée de la méme fagon dans Ie cadre
de ces procédures et dans celui des procédures de I'OIT. Des échanges
d'informations fréquents ont eu lieu, au niveau des secrétariats, pour essayer
de réduire ce risque. Le fait que certaines des procédures en question - par
exemple celles des Nations Unies et de I'UNESCO pour l'examen des
communications alléguant des violations des droits de l'homme - sont régies
par de strictes régles de confidentialité empéche de savoir si des problémes
relevant de la compétence de I'OIT ont été traités et, dans l'afñrmative, ce
qui a été décidé á leur sujet.
En dehors des problémes de fond auxquels on peut se heurter quand on
cherche á coordonner et á harmoniser le travail normatif et les dispositifs de
contróle des organisations internationales, la proliferation des instruments et
des mécanismes de contróle pose des problémes de ressources. Déjá, la
gamme des activités normatives et des procédures de contróle de niveau
mondial ou régional auxquelles I'OIT est appelée á collaborer ou qu'elle doit
au moins suivre est si étendue que cela représente une charge de travail
appréciable, en particulier pour les fonctionnaires de niveau supérieur. On
se trouve de ce fait en présence d'un dilemme. D'un c6té, il est évidemment
souhaitable de rechercher le plus haut degré d'ordre et de coopération dans
69
Rapport du Directeur général
ces activités. D'un autre c6té, on risque de voir de plus en plus un volume
excessif de ressources distrait des táches qui contribuent directement á
l'accomplissement de la mission propre de I'OIT. Il apparait aussi que les
Etats trouvent que le nombre croissant des procédures de contr§le internationales
leur impose un fardeau trop lourd, ce qui entraine une grosse
accumulation de rapports en retard au sujet de divers instruments des Nations
Unies 72.
Ces observations donnent á penser que, dans les années á venir, il faudra
avoir soin de ne pas constituer une masse incontrólable de normes et de
procédures internationales. Elles soulignent aussi I'importance des efforts qui
tendent á rationaliser les travaux législatifs des organisations intemationales
conformément aux principes que le Comité administratif de coordination a
approuvés en 1973. Chaque fois que I'on décéle des problémes dans
I'application de ces principes, il faudrait les soumettre en temps opportun á
une étude approfondie et tenir des consultations en vue d'arriver aux
solutions les plus eflicaces, si possible arrétées en commun accord.
REMAROUES FINALES
En passant en revue le fonctionnement du systéme normatif et des
procédures de contróle, j'ai mis en lumiére les efforts que I'OIT a déployés
au fil des années pour adapter et renforcer ce qui est pour elle un moyen
d'action essentiel, mais aussi le fait que ces efforts sont appelés á se pounuivre
sans reláche. Aujourd'hui, en outre, de nombreuses questions demandent á
étre examinées, en vue de déterminer comment la teneur des conventions et
des recommandations peut le mieux étre adaptée á l'évolution des circonstances
et comment, en combinant judicieusement des mesures d'encouragement
et une évaluation impartiale de la fagon dont les Etats s'acquittent de
leurs obligations, on pourrait faire en sorte que ces instruments atteignent
bien leur objectif: améliorer la vie des hommes et des femmes et la solidité
du tissu social de la communauté mondiale.
Toutes les institutions humaines doivent trouver un juste milieu entre la
stabilité et le changement. Cela vaut aussi pour le systéme des normes
internationales du travail. C'est pourquoi, lorsqu'on discute du cours futur
des activités normatives, il importe de reconnaitre que, si dans de nombreux
domaines il peut étre nécessaire d'envisager de nouveaux concepts et de
nouvelles méthodes, il en est d'autres oü les conventions existantes énoncent
des normes qui présentent une importance fondamentale pour I'instauration
et le maintien d'un ordre social libre et équitable. Ces conventions ñgurent
parmi les instruments de I'OIT qui ont été le plus largement ratifiés et les
principaux organes délibérants de l'Organisation ont réafErmé á maintes
reprises qu'elles gardent une validité universelle. Maintenir ces nornes, les
faire accepter et observer toujours plus largement doit rester pour I'OIT un
objectif prioritaire.
70
Normes internationales du travail
L'OIT doit aussi continuer á chercher de quelle maniére elle peut aider
ses Etats Membres á donner effet aux conventions et recommandations et á
respecter les obligations qu'ils assument au titre de ces instruments. Elle doit
rester attentive au fonctionnement des divers mécanismes de contróle et s'efforcer
constamment de mieux y sensibiliser les Etats Membres. Le contróle
doit pouvoir s'appuyer sur un dialogue franc et approfondi, et il est essentiel
également á cet égard que I'Organisation soit en mesure d'évaluer de fagon
objective, en toute indépendance et sans crainte la fagon dont les Etats exécutent
les obligations qu'ils ont librement acceptées. Ces obligations, inhérentes
á la qualité de Membre de I'OIT ou résultant de la ratification des
conventions, doivent garder leur crédibilité d'engagement solennel.
Je me felicite du débat qui va avoir lieu sur ces questions á la Conférence,
car j'y vois une nouvelle occasion de perfectionner le systéme normatif de
I'OIT. J'ai I'espoir que ce débat aidera á préciser la politique de l'Organisation
au sujet des principaux problémes que j'ai abordés dans mon rapport:
- la politique générale suivie en ce qui concerne I'adoption, la révision, la
consolidation et la mise en ceuvre des normes;
- les améliorations á apporter aux procédures d'adoption des conventions et
des recommandations afin que les thémes d'activités normatives choisis et
le contenu des instruments adoptés répondent aussi pleinement que possible
aux besoins et aux aspirations de tous les Membres de l'Organisation,
que l'adoption des nonnes s'appuie sur de larges consultations tripartites
préalables ainsi que sur une dicussion approfondie á la Conference et que
l'on arrive á un juste équilibre entre le souci de promouvoir le progrés
social et la nécessité d'une certaine souplesse permettant de tenir compte
des différences de niveau de développement;
- la clariñcation des principes dont s'inspire le contróle de l'exécution des
obligations acceptées en ce qui concerne les normes de I'OIT, ainsi que
le caractére et les effets juridiques des travaux des divers organes de
contróle;
- les moyens de régler les situations dans lesquelles I'Etat intéressé conteste
les vues des organes de contróle ;
- les mesures visant á aider les Etats Membres á participer plus activement á
l'élaboration des conventions et des recommandations et á promouvoir
leur mise en Guvre ;
- les mesures tendant á assurer la bonne coordination des activités noÍnatives
des diverses organisations internationales.
Notes
¡ Voir par exemple la résolution concernant la ratihcation et la mise en Guvre des normes
internationales du travail en Afrique, adoptée par la sixiéme Conference régionale africaine
(Tunis, octobre 1983), G8.224/6/15, p.38; la résolution concernant les normes internatio-
71
Rapport du Directeur général
nales du travail en Asie (notamment celles qui concernent les droits de I'homme et les droits
syndicaux), adoptée par la huitiéme Conférence asienne (Colombo, septembre-octobre 1975):
Bulletin ofrtciel,vol.LlX, 1976, série A, n' 1, p. 58; et la résolution sur le r6le des normes
internationales du travail dans les pays d'Amérique, adoptée par la dixiéme Conférence des
Etats d'Amérique Membres de I'OIT (Mexico, novembre-décembre 1974): Bulletin fficiel,
vol. LV[I, 1975, série A, n'2, p. 178.
2Voir L. E. Troclet et E. Vogel-Poski: «L'influence des conventions internationales du
travail sur la législation sociale en Belgiqrte»>, Revue internationale du Travail, vol. 98, I 968,
en particulier pp. 444-447.
lBlT: Compte rendu des travaux, Conférence internationale du Travail, 69" session,
1983, pp.9/3-4.
a l,es procés-verbaux de ce séminaire ont été publiés par le Projet d'administration du
travail pour I'Asie et le Pacifique (ARPLA). Voir BIT: Labour adminisÜation: Developing
countriis and ILO standards, ARPLA series No.5 (Bangkok, 1983) (en anglais seulement).
5 Les membres employeurs du Conseil d'administration ont adressé au Directeur général
des remarques sur ces (uéstions en octobre 1982. I*urs points de vue ont été exprimés par
plusieurs délégués employeurs á la Conférence de 1983; voir notamment les déclarations de
M. von Holtin (Coipte rendu des travaux, 1983, pp. 2l/27-28) et de M. Decosterd (iál.,
pp.36113-15).
6 lbid., pp.7/20-21.
iVoir doc. GB.l85/2/4, GB.l85/2/19, GB.l86/3/7, GB.189/4/10, GB.l9l/6/3' et
Procés-verbaux de la 192" session du Conseil d'administation (évrier-mars 1974),
pp. IVll-10.
sYoir Nord-Sud: un programme de survie, rapport de la Commission indépendante sur
les problémes de développement international (Paris, Gallimard, 1980), pp. 319-20 et 507/8.
e Voir rapport final du Groupe de travail sur les normes internationales du travail: Bulletin
olficiel,vol. LX[, 1979, série A, numéro spécial.
ro Les conferences régionales de I'OIT ont elles aussi, par plusieurs résolutions, invité les
Etats des régions considéiées á donner priorité á l'application et á la ratihcation de certaines
conventions.
ItVoir BIT: L'impact des conventions et recommandations internationales du travail
(Genéve, 197 6), pp. 2l -23.
t2 On peut aussi se rapporter aux nombreux réglements types, recueils de directives
pratiques, guides et manuels d'hygiéne et de sécurité du travail, et á la Déclaration de principes
iripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale.
'3Voir GB.199/9/22(Rér.), annexe, paragr. 15, qui résume les traits saillants de la
discussion de l'étude en profondeur des normes intemationales du travail faite par la
Commission du programmé, du budget et de l'administration du Conseil d'administration en
novembre 1976; etGS.ZtStSlt, annexe II, paragr. T (Conclusions d'un groupe de travail de
la neuviéme Conference régionale asienne, Manille, 1980).
fa Pour les discussions antérieures de ces questions, voir Procis-verbaux de la 141" session
du Conseil d'administration (mars /959), p.7l; Rapport du Directeur général, rapportl
(partie l), Conférence internationale du Travail, 48" session (1964), pp. 145-148 ; Quatriéme
rapport du Groupe de travail sur le programme et la structure de I'OIT, rapport du Directeur
géhéral, partie II (supplément), Conftrence internationale du Travail, 51" session, 1967,
pp. l1-18.
rs On en trouve un exemple dans le fait que, pendant la seconde discussion de la
convention (n. 143) sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), 1975, une
disposition concernant l'égalité de traitement a été transferée de la partie I! (égalité de chances
et de traitement) á la partie I (migrations dans des conditions abusives). Il en est résulté des
diflicultés d'interprétation - voir le mémorandum du Bureau international du Travail dans
le Bulletín olficiel, vol. LXl, 1979, série A, n" 3, p. 165 - qui semblent avoir fait obstacle á
la ratification de la convention par les pays d'immigration.
16 l¡ cas s'est présenté pour les normes concemant les représentants des travailleurs
(1971), les organisátions de travailleurs ruraux (1975), le personnel infirmier (1977), la
négociation collective (1981) et la réadaptation professionnelle et I'emploi des personnes
handicapées (1983).
72
Normes internationales du travail
17 On trouvera une description générale du développement et du fonctionnement des
procédures de contróle de I'OIT dans: N. Valticos: Droit international du travail, secortde
édition, 1983, pp. 581-655.
18 Voir également E. A. Landry: The elfectiveness of infernational supervision: Thirty
years of ILO experience (Londres, Stevens; Dobbs Ferry, New York, Oceana Publications,
r e66).
tg BIT: L'impact des conventions et recommandations internationales du travail, op. cit.
20 lbid.; voir en général les exemples donnés dans le chapitre IIL
2tYoir Procés-verbaux de la 222" session du Conseil d'administration (mars 1983), doc.
G8.222 / PY (R.év.), pp. lY / 2 - 5.
22 Voir le mémorandum présenté á la Conférence en 1983 au nom d'un certain nombre
de gouvernements socialistes, op. cit. (note 6); voir également les déclarations des délégués
gouvernementaux de la Tchécoslovaquie et de I'URSS, dans BIT : Compte rendu des travaux,
Conférence internationale du Travail, 69" session, 1983, pp. 25/3-4 et p.29/1, et le rapport
de la Commission de l'application des conventions et recommandations, dans BIT'. Compte
rendu des travaux, Conference internationale du Travail,68" session, 1982, premiére partie,
pp.3l/2-3, paragr. 5.
23BlT: Rapport de la Commission d'experts pour I'application des conventions et
recommandatiorls, rapport III (partie 4A), Conference internationale du Travail, 63" session,
1977, premiére partie, p. 11, paragr. 31. Il s'agit d'une déclaration unanime de la commission.
Toutefois, en exprimant des opinions minoritaires concernant I'application de certaines
conventions dans des pays socialistes, deux membres ont invoqué la nécessité de tenir compte
des systémes économique et social existant dans ces pays(ibid., pp. 85 et 14l).
2a Voir, par exemple, rapport de la Commission de I'application des conventions et
recommandations de la Conference, dans BIT: Compte rendu des travaux, Conférence
intemationale du Travail, 68" session, 1982, premiére partie, p. 3l/3,paragr.6.
2s lbid., 1957 , p. 679, paragr. 30.
26 Voir le rapport de la Commission de I'application des conventions et recommandations,
dans BIT: Compte rendu des trayaux, Conférence internationale du Travail,66" session, 1980,
premiére partie, p.37/6, paragr.22-23, et annexe, pp.37/21-22, paragr.3 et l0; voir
également le mémorandum présenté á la Conférence en 1983 au nom d'un certain nombre de
pays socialistes, op. cit. (note 6).
27 Voir le rapport de la Commission de I'application des conventions et recommandations,
dans BIT: Compte rendu des travaux, Conference internationale du Travail,66" session, 1980,
premiére partie, pp. 37/4-6, paragr. 16-21 et annexe, p.37/21, paragr. 5.
28 lbid., 1983, premiére partie, p. 3l/17, paragr.84 et 87.
2e BIT: Rapport de la Commission d'experts pour I'application des conyentions et
recommandatiorzs, rapport III (partie 4A), Conférence internationale du Travail, 63" session,
1977, premiére partie, p. ll, paragr.32.
30 Ces critéres ont trait aux questions suivantes: aucun rapport sur des conventions ratifiées
n'a été fourni pendant les deux derniéres années; des premiers rapports sur des conventions
ratifiées n'ont pas été fournis pendant au moins deux ans; aucun rapport demandé au titre de
I'article 19 de la Constitution sur des conventions non ratifiées ou des recommandations n'a
été fourni au cours des cinq derniéres années; il n'a été fourni aucune information indiquant
que des mesures ont été prises en vue de la soumission aux autorités compétentes des
conventions et recommandations adoptées lors des sept derniéres sessions de la Conference en
application de I'article 19 de la Constitution; aucune information n'a été regue en ce qui
concerne la totalité ou la plupart des observations ou des demandes directes de la commission
d'experts; le gouvernement a manqué pendant les trois derniéres années d'indiquer les
organisations représentatives d'employeurs et de travailleurs auxquelles, conformément á
l'article 23 (2) de la Constitution, doivent étre communiquées copies des rapports et informations
adressés á I'OIT au titre des articles 19 et 22; le gouvernement s'est abstenu, en dépit
des invitations répétées de la commission de la Conférence, de prendre part á la discussion
concernant son pays.
3r GB.l94IPFA/12/5, paragr. 103 ¿ 109.
32 Voir BIT: Bulletin fficiel, vol. LXIV, 1981, série A, no l, pp. 99-101.
33 Article 10 du Réglement.
73
Rapport du Directeur général
3a Rapport de la Sous-commission de la Commission de proposition sur la Commission
d'investigation et de conciliation en mati¿re de liberté syndicale, Conférence internationale du
Travail, 33" session, 1950, paragr. 8 á).
35 Premier rapport du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration,
paragr.32.
36 Le Comité de la liberté syndicale porte reguliérement á la connaissance de la Commission
d'experts pour I'application des conventions et recommandations les aspects des cas
examinés qui donnent des informations sur I'application des conventions ratifiées.
37 Voir BIT: Recueil de décisions du Comité de la liberté syndicale du Conseil d'administration
du B^II (Genéve, 1976), 2" édition. Une nouvelle édition est en préparation.
38Voir premier rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 31, et 193'rapport,
paragr. 37.
3e Pour un apergu général, voir A. J. Pouyat : « Les normes et les procédures de I'OIT en
matiére de liberté syndicale: un bilan», Revue internationale du Travail, mai-juin 1982,
p. 309.
n Etude d'ensemble de I'application des conventions sur la liberté syndicale et sur le droit
d'organisation et de négociation collective ainsi que de la convention et de la recommandation
sur les organisations de travailleurs ruraux, rapport III (partie 4B), Conférence internationale
du Travail,69" session, 1983.
at Yoir Procés-verbaux de la 210" session du Conseil d'administration (mai-juin 1979),
pp. IVl14-15, et le mémorandum présenté á la Conférence en 1983, op. cit., note 6.
a2 Voir, par exemple, 193" rapport du Comité de la liberté syndicale, paragr. 33 á 39.
asYoir Procés-verbaux de la 173" session du Conseil d'administration (novembre 1968),
pp.44 á 46 et 133.
aa Doc. GB.214/4/2 (nov. l98O).
a5 Doc. G8.224/6/15, paragr. 44,45 et 48, et annexe II.
tr Voir BIT: Rapport de la Commission d'experts pour I'application des conventions et
recommandations, rapport III (partie 4A), Conférence internationale du Travail, 65" session,
1979, premiére partie, paragr. 42 á 89. Par la suite, on a enregistré d'autres progrés dus aux
contacts directs.
a7 Voir la note sur I'interprétation par le Bureau de conventions internationales du travail
présentée au Conseil d'administration en novembre 1982, doc. GB.22l/19/1.
a8 Il s'agissait des pays suivants: Bahreih, Bulgarie, Colombie, Egypte, Emirats arabes unis,
Ethiopie, Gabon, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Guinée équatoriale, Indonésie, Kowei't,
Malaisie, Maurice, Mexique, Mongolie, Nigéria, Panama, Pérou, Philippines, Pologne,
Polynésie frangaise, Roumanie, Somalie, Soudan, Sri t¿nka, Swaziland, République arabe
syrienne, Tchécoslovaquie, URSS, Venezuela, Viet Nam, Yémen démocratique. Un fonctionnaire
de I'Organisation arabe du travail a aussi bénéficié de ce type de formation.
ae Pour un exposé plus complet des mesures prises par la commission d'experts, voir les
rapports de la commission pour 1972, 1973 et 1974; rapport III (partie 4A), Conference
internationale du Travail, 57" session, premiére partie, paragr. 28 á 98 ; ibid., 58'session,
premiére partie, paragr. 56 á 77 ; ibid., 59" session, premiére partie, parag.r. 43 ¿ 51.
50 Sur les 14 Etats en question, 8 étaient des Etats de la région américaine, 3 des Etats
d'Afrique et 3 des Etats d'Asie.
5t BIT: Etude d'ensemble des rapports concernant la convention n' 144 et la recommandation
no 152, npport III (partie 4 B), Conference intemationale du Travail, 68. session, 1982.
52 Voir, par exemple, les rapports présentés, á la Commission consultative interaméricaine
en 1982 (doc. AM/AC/VII3), pp. 17-18, á la Commission consultative asienne en 1983
(doc. AAC/XVII/3), paragr. 98, et á la sixiéme Conference régionale africaine en 1983
(Rapport du Directeur général, rapport I (partie 2)), paragr. 106-108.
5r Voir le document sur les activités de coopération technique de I'OIT en 1982 présenté
au Conseil d'administration en novembre 1983, doc. G8.224/OP/\/3, parag¡. 272-281.
5aYoJr Rapport du Directeur général, Conférence internationale du Travail,66" session,
1980, partie I, p. 48, et PNUD-OIT: Thematic Evaluation Study on Training of Industrial
Manpower (New York et Genéve, sept. 1983), paragr. 6-8 et 365-400.
55 Voir E. Costa, S. Guha, M. I. Hussain, N. T. B. Thuy et A. Fardet: L'organisation des
programmes spéciaux de travaux d haute intensité de main-d'euvre: principes directeurs
74
Normes internationales du travail
(Genéve, BIT, deuxiéme édition révisée, 1980; recherches pour le Programme mondial de
I'emploi, document de travail polycopié pour distribution restreinte). Ces questions ont aussi
été considérées lors de stages organisés dans le cadre du PME et aux réunions annuelles
conjointes PNUD-OIT pour le soutien aux programmes spéciaux de travaux publics.
56 Voir FAO' Application des normes internationales du travail aux opérations du
Programme alimentaíre mondial, Comité intergouvernemental du PAM, 4" session, Rome,
1963 (doc. WM/IGC:4/10 ; polycopié).
57La convention (n' 8l) sur I'inspection du travail, 1947, a été ratifiée par 105 Etats
(86 l'ont ratifiée pour l'industrie et le commerce, et 19 pour I'industrie seulement). Son
application se heurte á de sérieuses diflicultés dans bon nombre de ces pays, surtout lorsqu'il
s'agit de faire en sorte qu'il y ait un nombre suffisant d'inspecteurs du travail, disposant des
moyens matériels voulus (en particulier, des moyens de transport), de fagon que les visites
d'inspection puissent avoir la portée et la fréquence adéquates. Dans bien des pays, le travail
des services d'inspection semble se limiter essentiellement á enquéter sur des plaintes et á
intervenir dans les differends. La convention (n' 129) sur l'inspection du travail (agriculture),
1969, n'a été ratifiée que par 23 Etats.
sEYoir Rapport de la Commission d'experts pour I'application des conventions et
recommandations, rapport III (partie IV), Conference internationale du Travail, 47" session,
l963,premiérepartie,paragr. l7-62;ibid.,rapport III(partie 4A),64' session, l978,premiére
partie, paragr. 40-70.
5e En matiére d'études et de débats récents concernant le travail des enfants, voir Rapport
du Direcfeur général, Conference internationale du Travail, 69" session, 1983, partie I: «k
travail des enfants>>, et L'exploítation du travail des enfants, rapport final présenté par
A. Bouhdiba (New York, Nations Unies, doc. E/CN.4/Sub. 2/479/Rév.1,1982).
o Voir Conseil économique et social des Nations Ur,ies; Rapport annuel du Comité
administratif de coordination pour 1973-74 (doc. E/5488, 20 mai 197 4, polycopié), paragr. 200
á 208.
ó'Voir BIT: Rapport de la Commission d'experts pour I'application des conventions et
recommandations, rapport III (partie 4 A), Conférence internationale du Travail, 69" session,
1983, premiére partie, paragr. 25 et 26.
62 lbid., paragr. 23 et 24.
63 Des informations sur la composition, le mandat et les activités de ce groupe de travail
ont été fournies au Conseil d'administration: voir doc. GB.2ll/lo./3/6, paragr. 14-19;
GB.2l4/lO/5/3,paragr. 10-15;GB.2l8/l0/2/ll,paragr.7-13;GB.22l/lO/2/6,paragr.9-13.
6a Voir doc. G8.205/lO/5/5;G8.208/lO/3/5, paragr. 19-22;GB.2l2/lO/5/7, paragr. l0-l l.
65 Voir BIT : Bulletin oficiel, vol. XXX, n. 5, déc. 1947, pp. 433-437.
trVoir résolutions 85(V) et 1789(LI9, respectivement dans Résolutions adoptées par le
Conseil économique et social pendant sa cinquiéme session du 19 juillet au 16 aoítt 1947 (l-ake
Success, New York, Nations Unies) (numéro de vente: 1947 .1.20\, et Conseil économique et
social, documents fficiels, cinquante-quatriéme session: résolutions, supplément n. I (New
York, Nations Unies, doc. E/5367, 1973), p.27).
67 Yoir GB.2l2/lO/l/8, parasr. 14-21.
68 Un autre groupe de travail de I'Assemblée générale des Nations Unies s'occupe
actuellement de rédiger une déclaration sur les droits de I'homme des personnes qui ne sont
pas des ressortissants du pays dans lequel elles vivent.
6e La convention européenne et la convention américaine interdisent toutes deux le travail
forcé. I¿ premiére prévoit le droit de constituer des syndicats et de s'y aflilier, tandis que la
seconde reconnait le droit de s'associer, notamment, á des fins économiques, professionnelles
ou sociales. Irs Etats parties á la convention américaine s'engagent aussi á adopter des mesures
visant á réaliser progressivement les droits implicites dans les noÍnes économiques et sociales
énoncées dans la Charte de I'Organisation des Etats américains. l¿ Charte africaine des droits
de l'homme et des peuples prévoit, en termes généraux, le droit de constituer librement des
associations, le droit pour tout individu de travailler dans des conditions équitables et
satisfaisantes et de percevoir un salaire égal pour un travail égal, et le droit de tous les peuples
á leur développement économique, social et culturel. Elle prévoit aussi divers devoirs pour
I'individu, notamment celui de servir sa communauté nationale en mettant ses capacités
physiques et intellectuelles á son service et celui de travailler dans la mesure de ses capacités
et de ses possibilités.
75
Rapport du Directeur général
70 Par exemple, la Commission européenne des droits de l'homme est parvenue á la
conclusion que l'utilisation de prisonniers par des entreprises privées n'est pas contraire aux
dispositions de la convention européenne, car, á la différence de la convention de I'OIT sur le
travail forcé, celle-ci n'interdit pas cette pratique. En revanche, dans I'affaire Young, James et
Webster (1981), la Cour européenne des droits de l'homme a jugé que certaines situations
résultant d'accords de sécurité syndicale étaient contraires aux dispositions concernant la
liberté syndicale de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales, tandis que les normes de I'OIT n'autorisent ni n'interdisent les clauses
dites de sécurité syndicale. Voir Conseil de l'Europe, Cour européenne des droits de I'homme:
Alfaire Young, James et Vl¡ebster: lrrál (Strasbourg, l3 aoüt l98l).
7r Voir, par exemple, les arréts rendus par la Cour européenne des droits de I'homme dans
I'affaire Young, James et Webster (1981) (note 70 ci-desstrs) et dans I'affaire Van der Mussele
(1983), relative á une allégation de travail forcé. Idem: Alfaire Vander Mussele: Aruét
(Strasbourg, 23 nov. 1983).
72 Voir Assemblée générale des Nations U¡ies:. Elimination de toutes les formes de
discrimination raciale, oü il est indiqué que, á la fin de 1982, le nombre des rapports en retard
se chiffrait á 94 pour les Etats parties au Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, á 76 pour les Etats parties á la Convention internationale sur l'élimination
de toutes les formes de discrimination raciale et á 74 pour les Etats parties á la Convention
internationale sur l'élimination et la répression du crime d'apartheid (New York,
doc. N38/393, 30 sept. 1983, polycopié), pp. 10-12.
76
Volume 1 - Documents 1-58