COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
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Résumé
Non officiel
Résumé 2023/1
Le 22 février 2023
Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Arménie c. Azerbaïdjan) Demande en indication de mesures conservatoires
La Cour commence par rappeler que, le 16 septembre 2021, l’Arménie a déposé au Greffe de la Cour une requête introductive d’instance contre l’Azerbaïdjan à raison de violations alléguées de la convention internationale du 21 décembre 1965 sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (ci-après la «CIEDR» ou la «convention»).
Dans sa requête, l’Arménie soutient que, «[d]epuis des décennies, les Arméniens subissent une discrimination raciale de la part de l’Azerbaïdjan» et que, «[e]n conséquence de cette politique de haine que promeut l’Etat contre les Arméniens, ceux-ci sont victimes d’une discrimination généralisée, de massacres, de torture et d’autres violences». Selon l’Arménie, ces violations sont commises contre des personnes d’origine ethnique ou nationale arménienne quelle que soit leur véritable nationalité. La requête contenait une demande en indication de mesures conservatoires, présentée au titre de l’article 41 du Statut de la Cour et des articles 73, 74 et 75 de son Règlement (la «première demande»). La Cour a indiqué les mesures conservatoires suivantes dans l’ordonnance qu’elle a rendue le 7 décembre 2021 :
«1) La République d’Azerbaïdjan doit, conformément aux obligations que lui impose la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale,
a) Protéger contre les voies de fait et les sévices toutes les personnes arrêtées en relation avec le conflit de 2020 qui sont toujours en détention et garantir leur sûreté et leur droit à l’égalité devant la loi ;
b) Prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher l’incitation et l’encouragement à la haine et à la discrimination raciales, y compris par ses agents et ses institutions publiques, à l’égard des personnes d’origine nationale ou ethnique arménienne ;
c) Prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher et punir les actes de dégradation et de profanation du patrimoine culturel arménien, notamment, mais pas seulement, les églises et autres lieux de culte, monuments, sites, cimetières et artefacts ;
2) Les deux Parties doivent s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend dont la Cour est saisie ou d’en rendre le règlement plus difficile.»
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La Cour rappelle en outre que, par lettre en date du 16 septembre 2022, l’Arménie, se référant à l’article 76 du Règlement de la Cour, a prié celle-ci de modifier son ordonnance du 7 décembre 2021 (la «deuxième demande»). Par ordonnance en date du 12 octobre 2022, la Cour a dit que «les circonstances, telles qu’elles se présent[aient] [alors] à elle, [n’étaient] pas de nature à exiger l’exercice de son pouvoir de modifier les mesures indiquées dans l’ordonnance du 7 décembre 2021». Elle a en outre réaffirmé les mesures conservatoires qu’elle avait indiquées dans ladite ordonnance, en particulier celle enjoignant aux Parties de s’abstenir de tout acte qui risquerait d’aggraver ou d’étendre le différend dont elle était saisie ou d’en rendre le règlement plus difficile.
Enfin, la Cour rappelle que, le 28 décembre 2022, l’Arménie, se référant à l’article 41 du Statut de la Cour et à l’article 73 de son Règlement, a présenté une nouvelle demande en indication de mesures conservatoires (la «troisième demande»). Dans cette demande, l’Arménie affirme que, le 12 décembre 2022, l’Azerbaïdjan «a orchestré le blocage de la seule route reliant au reste du monde les 120 000 habitants d’origine arménienne du Haut-Karabakh», et prie la Cour d’indiquer les mesures conservatoires suivantes :
«L’Azerbaïdjan doit cesser d’orchestrer et de soutenir les prétendus «actes de protestation» qui empêchent la circulation libre et ininterrompue le long du corridor de Latchine dans les deux sens [; et]
L’Azerbaïdjan doit veiller à ce que soit garantie la circulation libre et ininterrompue de toutes personnes, de tous véhicules et de toutes marchandises le long du corridor de Latchine, dans les deux sens.»
Par lettre en date du 26 janvier 2023, l’agent de l’Arménie a communiqué à la Cour le texte d’une nouvelle mesure conservatoire sollicitée par son gouvernement, comme suit :
«L’Azerbaïdjan doit, immédiatement et totalement, rétablir l’approvisionnement du Haut-Karabakh en gaz naturel et en d’autres biens fournis par les entreprises de services collectifs et s’abstenir de l’interrompre ou de l’entraver.»
I. OBSERVATIONS GÉNÉRALES (PAR. 22-25)
La Cour commence par observer que, dans sa troisième demande, l’Arménie la prie d’ordonner à l’Azerbaïdjan de «cesser d’orchestrer et de soutenir les prétendus «actes de protestation» qui empêchent la circulation libre et ininterrompue le long du corridor de Latchine dans les deux sens», de «veiller à ce que soit garantie la circulation libre et ininterrompue de toutes personnes, de tous véhicules et de toutes marchandises le long du corridor de Latchine, dans les deux sens» et de «totalement[] rétablir l’approvisionnement du Haut-Karabakh en gaz naturel et en d’autres biens fournis par les entreprises de services collectifs et [de] s’abstenir de l’interrompre ou de l’entraver».
Conformément au paragraphe 1 de l’article 76 du Règlement de la Cour, celle-ci peut modifier une décision concernant des mesures conservatoires si «un changement dans la situation lui paraît … justifier [une telle modification]». Aux termes du paragraphe 3 de l’article 75 du Règlement, «[l]e rejet d’une demande en indication de mesures conservatoires n’empêche pas la partie qui l’avait introduite de présenter en la même affaire une nouvelle demande fondée sur des faits nouveaux». Il en est de même lorsque des mesures additionnelles sont sollicitées. Il appartient donc à la Cour de s’assurer que la troisième demande de l’Arménie est fondée sur des circonstances nouvelles de nature à en justifier l’examen.
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La Cour relève que, dans sa troisième demande, l’Arménie se réfère au prétendu blocage par l’Azerbaïdjan, à partir du 12 décembre 2022, du corridor de Latchine, qu’elle qualifie de «seule bande de territoire reliant les 120 000 habitants d’origine arménienne du Haut-Karabakh à l’Arménie, et donc également au reste du monde». La Cour rappelle que la première demande de l’Arménie concernait le traitement réservé par l’Azerbaïdjan aux prisonniers de guerre, otages et autres détenus arméniens sous sa garde qui avaient été capturés pendant ou après les hostilités de septembre-novembre 2020 ; l’incitation et l’encouragement supposés de l’Azerbaïdjan à la haine et à la discrimination raciales à l’égard des personnes d’origine nationale ou ethnique arménienne ; et le préjudice qu’aurait causé l’Azerbaïdjan au patrimoine historique, culturel et religieux arménien.
Au vu de ce qui précède, la Cour considère que les circonstances qui sous-tendent la présente demande de l’Arménie sont différentes de celles sur la base desquelles elle a indiqué des mesures conservatoires le 7 décembre 2021. Il s’ensuit qu’il existe des circonstances nouvelles justifiant l’examen de la troisième demande de l’Arménie.
II. COMPÉTENCE PRIMA FACIE (PAR. 26)
La Cour rappelle que, dans son ordonnance du 7 décembre 2021 indiquant des mesures conservatoires en la présente affaire, elle a conclu que, «prima facie, elle a[vait] compétence en vertu de l’article 22 de la CIEDR pour connaître de l’affaire dans la mesure où le différend opposant les Parties concern[ait] «l’interprétation ou l’application» de la convention». La Cour ne voit aucune raison de revenir sur cette conclusion aux fins de la présente demande.
III. LES DROITS DONT LA PROTECTION EST RECHERCHÉE ET LE LIEN ENTRE CES DROITS ET LES MESURES DEMANDÉES (PAR. 27-44)
La Cour rappelle que le pouvoir d’indiquer des mesures conservatoires qu’elle tient de l’article 41 de son Statut a pour objet de sauvegarder, dans l’attente de sa décision au fond, les droits revendiqués par chacune des parties. Il s’ensuit que la Cour doit se préoccuper de sauvegarder par de telles mesures les droits que l’arrêt qu’elle aura ultérieurement à rendre pourrait reconnaître à l’une ou à l’autre des parties. Aussi ne peut-elle exercer ce pouvoir que si elle estime que les droits invoqués par le demandeur sont au moins plausibles.
A ce stade de la procédure, cependant, la Cour n’est pas appelée à se prononcer définitivement sur le point de savoir si les droits que l’Arménie souhaite voir protégés existent ; il lui faut seulement déterminer si les droits que celle-ci revendique au fond et dont elle sollicite la protection sont plausibles. En outre, un lien doit exister entre les droits dont la protection est recherchée et les mesures conservatoires demandées.
La Cour relève que la CIEDR impose aux Etats parties un certain nombre d’obligations concernant l’élimination de toutes les formes et de toutes les manifestations de discrimination raciale. Le paragraphe 1 de l’article premier de cet instrument définit la discrimination raciale. Conformément à l’article 2 de la convention, les Etats parties «condamnent la discrimination raciale et s’engagent à poursuivre par tous les moyens appropriés et sans retard une politique tendant à éliminer toute forme de discrimination raciale». Au titre de l’article 5, ils s’engagent à garantir le droit de chacun à l’égalité devant la loi dans la jouissance d’une liste non exhaustive de droits, notamment le «[d]roit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat», le «[d]roit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays», ainsi que le «[d]roit à la santé, aux soins médicaux, à la sécurité sociale et aux services sociaux».
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La Cour fait observer que les articles 2 et 5 de la CIEDR visent à protéger les individus contre la discrimination raciale. Elle rappelle, comme elle l’a déjà fait par le passé dans d’autres affaires dans lesquelles l’article 22 de la CIEDR était invoqué comme base de sa compétence, qu’il existe une corrélation entre le respect des droits des individus consacrés par la convention, les obligations incombant aux Etats parties au titre de la CIEDR et le droit qu’ont ceux-ci de demander l’exécution de ces obligations.
Un Etat partie à la CIEDR ne peut invoquer les droits énoncés dans les articles précités que dans la mesure où les actes dont il tire grief sont susceptibles de constituer des actes de discrimination raciale au sens de l’article premier de la convention. Dans le contexte d’une demande en indication de mesures conservatoires, la Cour doit examiner si les droits revendiqués par un demandeur sont au moins plausibles.
La Cour considère que certains au moins des droits dont l’Arménie allègue la violation au regard des articles 2 et 5 de la CIEDR du fait de l’interruption de la circulation le long du corridor de Latchine sont des droits plausibles.
La Cour en vient ensuite à la condition du lien entre les droits revendiqués par l’Arménie qu’elle a jugé plausibles et les mesures conservatoires demandées.
La Cour estime qu’il existe un lien entre la deuxième mesure sollicitée par l’Arménie, qui tend à obtenir de l’Azerbaïdjan qu’il veille à ce que soit garantie la circulation libre et ininterrompue de toutes personnes, de tous véhicules et de toutes marchandises le long du corridor de Latchine, dans les deux sens, et les droits plausibles que l’Arménie cherche à protéger. Cette mesure vise, selon la Cour, à préserver des droits plausibles invoqués par l’Arménie sur le fondement de la CIEDR.
La Cour en conclut qu’un lien existe entre certains des droits revendiqués par l’Arménie et l’une des mesures conservatoires sollicitées.
IV. RISQUE DE PRÉJUDICE IRRÉPARABLE ET URGENCE (PAR. 45-57)
La Cour note qu’elle tient de l’article 41 de son Statut le pouvoir d’indiquer des mesures conservatoires lorsqu’il existe un risque qu’un préjudice irréparable soit causé aux droits en litige dans une procédure judiciaire ou lorsque la méconnaissance alléguée de ces droits risque d’entraîner des conséquences irréparables.
Le pouvoir de la Cour d’indiquer des mesures conservatoires n’est toutefois exercé que s’il y a urgence, c’est-à-dire s’il existe un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé aux droits revendiqués avant que la Cour ne rende sa décision définitive. La condition d’urgence est remplie dès lors que les actes susceptibles de causer un préjudice irréparable peuvent «intervenir à tout moment» avant que la Cour ne se prononce de manière définitive en l’affaire. La Cour doit donc rechercher si pareil risque existe à ce stade de la procédure.
La Cour n’a pas, aux fins de sa décision sur la troisième demande, à établir l’existence de violations de la CIEDR, mais doit déterminer si les circonstances exigent l’indication de mesures conservatoires à l’effet de protéger certains droits conférés par cet instrument. Elle ne peut, à ce stade, se prononcer de façon définitive sur les faits, et sa décision relative à la troisième demande laisse intact le droit de chacune des Parties de faire valoir à cet égard ses moyens au fond.
La Cour rappelle que, dans de précédentes affaires concernant la CIEDR, elle a dit que les droits établis aux litt. d) et e) de l’article 5 sont d’une nature telle que le préjudice qui leur serait porté pourrait se révéler irréparable.
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La Cour relève que, depuis le 12 décembre 2022, la liaison entre le Haut-Karabakh et l’Arménie via le corridor de Latchine est sérieusement perturbée. Elle constate que cette situation a entraîné un certain nombre de conséquences dont les effets, pour les personnes concernées, persistent à ce jour. Les informations dont elle dispose indiquent que la perturbation de la circulation dans le corridor de Latchine a empêché des personnes d’origine nationale ou ethnique arménienne hospitalisées au Haut-Karabakh d’être transférées vers des établissements médicaux en Arménie pour y recevoir des soins urgents. Les éléments de preuve montrent également qu’il y a eu des obstacles à l’importation, au Haut-Karabakh, de produits de première nécessité, ce qui a provoqué des pénuries de nourriture, de médicaments et d’autres fournitures médicales vitales.
Comme la Cour l’a déjà noté, un préjudice peut être considéré comme irréparable lorsque la santé et la vie des personnes concernées sont mises en danger. La Cour a également relevé que les restrictions à l’importation et à l’achat de biens nécessaires à des fins humanitaires, comme les denrées alimentaires et médicaments, y compris les médicaments vitaux, les traitements de maladies chroniques ou les soins préventifs et le matériel médical, risquaient de nuire gravement à la santé et à la vie des personnes.
A l’audience publique qui s’est tenue le 30 janvier 2023, l’agent de l’Azerbaïdjan a affirmé que son gouvernement
«a[vait] pris et s’engage[ait] à continuer de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour garantir la sécurité des déplacements des personnes, des véhicules et des marchandises sur la route de Latchine, y compris en échangeant de manière continue et régulière avec le CICR, en communiquant ou en facilitant la communication avec les forces russes de maintien de la paix, en s’efforçant de nouer un dialogue avec les habitants du Garabagh et, si elle reconnaît enfin que le problème la concerne et qu’elle accepte de venir à la table des négociations, également avec l’Arménie».
La Cour prend note de cette déclaration. Toutefois, celle-ci n’élimine pas complètement le risque imminent qu’un préjudice irréparable soit causé par la perturbation de la circulation le long du corridor de Latchine.
A la lumière des considérations qui précèdent, la Cour conclut que la méconnaissance alléguée des droits qu’elle a jugés plausibles risque d’entraîner des conséquences irréparables pour ces droits et qu’il y a urgence, c’est-à-dire qu’il existe un risque réel et imminent qu’un préjudice irréparable soit causé avant que la Cour ne se prononce de manière définitive en l’affaire.
V. CONCLUSION (PAR. 58-66)
La Cour conclut par conséquent que les conditions pour l’indication de mesures conservatoires sont réunies. Il y a donc lieu pour elle d’indiquer, dans l’attente de sa décision définitive, certaines mesures visant à protéger les droits revendiqués par l’Arménie, tels qu’ils ont été spécifiés précédemment.
La Cour rappelle que, lorsqu’une demande en indication de mesures conservatoires lui est présentée, elle a le pouvoir, en vertu de son Statut, d’indiquer des mesures en tout ou en partie différentes de celles qui sont sollicitées. Le paragraphe 2 de l’article 75 de son Règlement mentionne expressément ce pouvoir, qu’elle a déjà exercé en plusieurs occasions par le passé.
La Cour relève que la déclaration faite par le président de la République d’Azerbaïdjan, le premier ministre de la République d’Arménie et le président de la Fédération de Russie le 9 novembre 2020 prévoit notamment que le corridor de Latchine, «qui reliera le Haut-Karabakh à l’Arménie … reste sous le contrôle du contingent russe de maintien de la paix». Il y est également
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précisé que l’Azerbaïdjan «garantit la sécurité de la circulation des citoyens, des moyens de transport et des marchandises le long du corridor de Latchine, dans les deux sens».
En la présente espèce, ayant examiné le libellé des mesures conservatoires sollicitées par l’Arménie ainsi que les circonstances de l’affaire, la Cour estime que les mesures à indiquer n’ont pas à être identiques à celles qui sont sollicitées.
La Cour conclut que l’Azerbaïdjan doit, dans l’attente de la décision finale en l’affaire et conformément aux obligations qui lui incombent au titre de la CIEDR, prendre toutes les mesures dont il dispose afin d’assurer la circulation sans entrave des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Latchine dans les deux sens.
La Cour rappelle que l’Arménie lui a demandé d’indiquer des mesures prescrivant à l’Azerbaïdjan de «cesser d’orchestrer et de soutenir les prétendus «actes de protestation» qui empêchent la circulation libre et ininterrompue le long du corridor de Latchine dans les deux sens». Elle estime que cette mesure supplémentaire concernant la circulation le long du corridor de Latchine ne se justifie pas.
La Cour rappelle également que l’Arménie l’a priée de dire que l’Azerbaïdjan doit, «immédiatement et totalement, rétablir l’approvisionnement du Haut-Karabakh en gaz naturel et en d’autres biens fournis par les entreprises de services collectifs et s’abstenir de l’interrompre ou de l’entraver». Elle considère que l’Arménie ne lui a pas fourni suffisamment d’éléments de preuve attestant que l’Azerbaïdjan perturbe l’approvisionnement des habitants du Haut-Karabakh en gaz naturel et autres biens. En conséquence, une telle mesure ne se justifie pas.
La Cour relève que les mesures conservatoires indiquées dans son ordonnance du 7 décembre 2021 restent en vigueur. Elle réaffirme également que ses «ordonnances indiquant des mesures conservatoires au titre de l’article 41 [du Statut] ont un caractère obligatoire» et créent donc des obligations juridiques internationales pour toute partie à laquelle ces mesures sont adressées.
La Cour réaffirme en outre que la décision rendue en la présente procédure ne préjuge en rien la question de sa compétence pour connaître du fond de l’affaire, ni aucune question relative à la recevabilité de la requête ou au fond lui-même. Cette décision laisse intact le droit des Gouvernements de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan de faire valoir leurs moyens en la matière.
VI. DISPOSITIF (PAR. 67)
Le texte complet du dispositif de l’ordonnance se lit comme suit :
«Par ces motifs,
LA COUR,
Par treize voix contre deux,
Indique la mesure conservatoire suivante :
La République d’Azerbaïdjan doit, dans l’attente de la décision finale en l’affaire et conformément aux obligations qui lui incombent au titre de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, prendre toutes les mesures dont elle dispose afin d’assurer la circulation sans entrave des personnes, des véhicules et des marchandises le long du corridor de Latchine dans les deux sens.
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POUR : Mme Donoghue, présidente ; M. Gevorgian, vice-président ; MM. Tomka, Abraham, Bennouna, Mme Xue, MM. Robinson, Salam, Iwasawa, Nolte, Mme Charlesworth, M. Brant, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Yusuf, juge ; M. Keith, juge ad hoc.»
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M. le juge YUSUF joint une déclaration à l’ordonnance ; M. le juge ad hoc KEITH joint une déclaration à l’ordonnance.
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Résumé de l'Ordonnance du 22 février 2023