11872
COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE
APPLICATION DE L’ACCORD INTÉRIMAIRE DU 13 SEPTEMBRE 1995
(EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE c. GRÈCE)
MÉMOIRE
VOLUME I
20 juillet 2009
[Traduction du Greffe] T ABLE DES MATIÈRES
Chapitre I. Introduction et présentation générale de l’affaire............................................................. 1
Section I. Présentation générale ............................................................................................. 1
Section II. Plan du mémoire.................................................................................................... 4
Chapitre II. Le contexte factuel.......................................................................................................... 7
Introduction.............................................................................................................................. 7
Section I. L’accession du demandeur à la qualité d’Etat........................................................ 7
SectionII.En quête de reconnaissance in ternationale: la Communauté européenne
et les Nations Unies ............................................................................................. 10
A. Le premier contact avec la Communauté européenne............................................ 11
B.L’admission du demandeur à l’Organisation des NationsUnies et la
résolution 817......................................................................................................... 15
C.Les négociations menées par l’Or ganisation des NationsUnies et la
résolution 845 du Conseil de sécurité..................................................................... 18
DL . ’intégration et la reconnaissance internationale grandissantes du
demandeur, et l’embargo économique.................................................................... 20
Section III. L’accord intérimaire et son application............................................................... 22
A. Le contenu et la structure de l’accord intérimaire.................................................. 22
B.La désignation du demandeur dans l’accord intérimaire et les accords y
relatifs..................................................................................................................... 23
CC. andidatures du demandeur auprès d’organisations et institutions
internationales et qualité de membre au sein de celles-ci: engagements du
défendeur................................................................................................................ 25
D. L’entrée en vigueur de l’accord intérimaire............................................................ 25
Section IV. L’intégration du demandeur dans la communauté internationale....................... 26
Section V. La participation du demandeur aux activités de l’OTAN et l’opposition du
défendeur à son admission au sein de cette organisation..................................... 28
A. L’OTAN et son processus d’admission.................................................................. 28
B. Les liens du demandeur avec l’OTAN ................................................................... 29
C. Le sommet de l’OTAN tenu à Bucarest en 2008.................................................... 31
D. L’opposition du défendeur à l’adhésion du demandeur à l’OTAN........................ 34
E. La position déclarée du défendeur c oncernant l’adhésion du demandeur à
l’Union européenne................................................................................................ 38 - ii -
Section VI. La présente instance............................................................................................ 38
A. L’introduction de la présente instance.................................................................. 38
B. Le comportement du défendeur depuis le 3 avril 2008 ........................................ 39
Section VII. Conclusions....................................................................................................... 41
Chapitre III. Compétence de la Cour ............................................................................................... 42
Chapitre IV. Le sens et l’effet du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire................... 46
Introduction............................................................................................................................ 46
Section I. L’objet et le but de l’accord intérimaire de 1995................................................. 47
Section II. L’article 11 à la lumière de ses travaux préparatoires.......................................... 49
Section III. L’obligation énoncée à l’article 11 ..................................................................... 50
A.La première clause du paragraphe 1 de l’article 11: l’obligation du
défendeur de «ne pas s’opposer»........................................................................... 51
B. La seconde clause du paragraphe 1 de l’article 11 : le seul motif d’opposition
autorisé au défendeur.............................................................................................. 52
C. Le paragraphe 2 de l’article 11............................................................................... 53
Section IV. Conclusion..........................................................................................................54
ChapitreV. Le défendeur a violé le paragraphe 1 de l’article11 de l’accord intérimaire en
s’opposant à l’adhésion du demandeur à l’OTAN....................................................... 55
Introduction............................................................................................................................ 55
SectionI. Le comportement du défendeur fi n mars/début avril2008 est contraire au
paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire ............................................ 56
Section II. La violation commise par le dé fendeur n’était pas une réaction licite à des
actes se rapportant à d’autres dispositions de l’accord intérimaire, celles-ci
renvoyant à des procédures particulières pour le règlement des différends......... 58
Section III.L’inexécution de son obligation par le défendeur ne saur ait être justifiée
par la suspension de l’application du paragraphe1 de l’article11 de
l’accord intérimaire en raison d’une violation substantielle ............................... 61
Section IV.La violation du paragraphe 1 de l’article 11 par le défendeur ne peut
être excusée comme une contre-m esure répondant à un acte illicite du
demandeur............................................................................................................ 65
SectionV. Sur le fond, les allégations du dé fendeur quant à la violation substantielle
de l’accord intérimaire par le demandeur sont dénuées de fondement................ 69
Section VI.Conclusions..........................................................................................................73 - iii -
Chapitre VI.La réparation demandée............................................................................................... 74
Introduction............................................................................................................................ 74
Section I. La première demande ............................................................................................ 75
Section. II. La seconde demande ........................................................................................... 77
Section III. Réserve de droits................................................................................................. 79
Conclusions ................................................................................................................... .................. 80
Certification ..................................................................................................................................... 81
Liste des annexes.............................................................................................................................. 82 C HAPITRE I
5
INTRODUCTION ET PRÉSENTATION GÉNÉRALE DE L ’AFFAIRE
S ECTION I. RÉSENTATION GÉNÉRALE
1.1. Le 17novembre2008, le demandeur a introduit une instance devant la Cour
internationale de Justice («la C our») contre le défendeur pour pr otéger les droits que lui confère
1
l’article 11 de l’accord intérimaire de 2995 («l’accord intérimaire») , traité signé par les deux Etats
(«les Parties») le 13septembre1995 . Fondée sur le paragraphe2 de l’article21 de l’accord
intérimaire, la présente instance vise à rappeler le défendeur à l’obligation qu’il a contractée à
l’article 11 de cet accord, à laquelle il est contrevenu en s’opposant à la participation du demandeur
à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord («l’OTAN»). L’objection du défendeur a empêché
le demandeur d’être invité à poursuivre les fo rmalités requises pour devenir membre de l’OTAN.
Cette affaire est donc engagée pour faire en sort e que le demandeur puisse continuer à exercer les
prérogatives qui sont les siennes, en tant qu’Eta t indépendant agissant conformément aux droits
qu’il tient de l’accord intérimaire et du droit inte rnational, qui comprennent celui de demander à
faire partie de l’OTAN et d’autres organisations internationales.
1.2. Par son ordonnance du 20janvier2009, la Cour a fixé au 20juillet2009 la date
d’expiration du délai imparti au demandeur pour déposer son mémoire. Le présent mémoire et les
annexes qui l’accompagnent sont soumis en application de cette ordonnance.
6 1.3. Le différend entre les Parties est bien ci rconscrit, ce qui ne signifie toutefois pas que les
questions en jeu soient, sur le plan du droit et des faits, dépourvues d’une r éelle importance, tant
pour les Parties que dans une perspective plus vast e. Ce différend est né dans le contexte des
mesures prises par le défendeur contre le processu s engagé par le demandeur pour faire partie de
l’OTAN, et de préoccupations du même ordre concernant l’Union européenne («l’UE»).
L’appartenance à l’OTAN —directement liée à l’entrée dans l’UE— figure en tête des priorités
stratégiques du demandeur, et fera beaucoup pour la sécurité de sa démocratie multiethnique
comme pour la stabilité de la région des Balkans tout entière. Dans la présente affaire, il échet à la
Cour d’examiner et de constater l’objection du défe ndeur, ainsi que d’interpréter et d’appliquer les
obligations juridiques incombant à celui-ci en ve rtu du paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire.
1.4. Le différend entre les Parties s’est cristallisé le 3 avril 2008, encore qu’il ait commencé à
apparaître publiquement dès novembre2004 que le dé fendeur comptait empêch er la participation
3
du demandeur à l’OTAN . Fin mars et début avril 2008 — et, en particulier, le 3 avril 2008 ou vers
cette date —, le défendeur, en sa qualité de membre de l’OTAN, a donné effet à son opposition et
1Accord intérimaire conclu par le demandeur et le défendeur (NewYork, 13septembre1995), entré en vigueur
le 13 octobre 1995 ; annexe 1.
2Requête soumise à la Cour le 17novembre2008 au sujet d’un différend concernant l’application du
paragraphe1 de l’article11 de l’accord intérimaire du 1ptembre1995, par.1. La requête contient trois erreurs
typographiques. Premièrement, à la page 7 (par. 17), la quatriè me ligne de la citation du paragraphe 1 de l’article11 de
l’accord intérimaire doit se lire en anglais de la manière suiv ante: «organizations and institutions of which the Party of
the First Part». Deuxièmement, à la page 7 (p ar. 17), la cinquième ligne de la citation du paragraphe 1 de l’article 11 de
l’accord intérimaire doit se lire en anglais de manière suivante: «however, the Party of the First Part».
Troisièmement, à la page 10, le numéro «V» est omis dans la numérotation des paragraphes.
3Voir chap. II, par. 2.60. - 2 -
est passé à l’acte afin d’empêcher le demandeur d’être invité à poursuivre les formalités nécessaires
pour devenir membre de l’OTAN sous la dénomination provisoir e d’«ex-République yougoslave
de Macédoine». Conséquence directe des actes du défendeur, puisque la participation d’un Etat à
l’OTAN doit recueillir l’adhésion de tous les membre s existants, le demandeur n’a pas été invité à
rejoindre l’Organisation.
1.5. Le défendeur n’a tenté à aucun moment de justifier son objection en faisant valoir que le
demandeur serait désigné à l’OTAN sous une appellation différente de celle utilisée au
paragraphe2 de la résolutio n817(1993) du Conseil de sécu rité de l’Organisation des
4
Nations Unies («la résolution 817») , ce motif étant le seul qui puisse fonder une telle objection au
titre du paragraphe1 de l’article 11 de l’accord intérimaire 5. Cela ressort clairement des
déclarations faites à l’époque par certains représ entants du défendeur, qui traduisent la position de
7
celui-ci avant et pendant le sommet tenu par l’OTAN à Bucarest le 3 avril 2008, ainsi que dans les
jours qui ont suivi la décision 6. Les éléments de preuve sont irréfutables et sont examinés plus
avant aux chapitres II et IV.
1.6. En outre, en agissant ainsi, le défendeur ne s’est pas opposé à l’admission du demandeur
à l’OTAN en alléguant quelque droit tiré du droit des traités ou de la responsabilité de l’Etat ; avant
d’élever son objection le3avril2008 ou aux envi rons de cette date, il n’avait pas indiqué au
demandeur, par écrit ou au moyen d’une note verbale, qu’il lui faisait grief d’avoir manqué d’une
certaine façon, substantielle ou non, aux obligati ons que lui imposait l’accord intérimaire; il ne
s’est pas non plus réclamé, pour se justifier, du droit de prendre des contre-mesures.
1.7. Ainsi qu’on le verra au chapitre II, le fait que l’objection du défendeur à la participation
du demandeur à l’OTAN n’ait pas été fondée sur le seul motif autorisé au paragraphe1 de
l’article11 ressort des dossiers d’actualité de l’époque. Ni les médias grecs ni les médias
internationaux n’ont en effet indiqué que le défe ndeur était hostile à ce que le demandeur devienne
membre de l’OTAN parce qu’il pensait que celui -ci serait désigné à l’OTAN sous une appellation
7
différente de celle utilisée au pa ragraphe 2 de la résolution 817 . Ce fait a également été confirmé
par les représentants d’autres Etats membres de l’OTAN qui ont vécu de près les événements
du 3 avril 2008 .8
1.8. L’opposition du défendeur à la partic ipation du demandeur à l’OTAN constitue une
violation claire des obligations qui lui incomben t en vertu du paragraphe 1 de l’article11 de
l’accord intérimaire. Dans cette disposition, le défendeur a souscrit une obligation, par laquelle il
est lié en droit international, de
«ne [pas] s’oppos[er]…à la demande d’admission d[udemandeur] dans des
organisations et institutions internati onales, multilatérales ou régionales dont
[lui-même] est membre, non plus qu’à la participation d[udemandeur] à ces
organisations et institutions»,
dès lors que, en attendant le règlement du diffé rend relatif à la dénomin ation du demandeur, ce
dernier «doit être dot[é]…d’une appellation» conf orme à celle prévue à titre provisoire dans la
4 Résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité de l’Orga nisation des Nations Unies, (S/RES/817) (7 avril 1993) ;
annexe 22.
5 Voir chap. IV, par. 4.29-4.32.
6
Voir chap. II, par. 2.59.
7
Voir chap. II, par. 2.61.
8 Voir chap. II, par. 2.61-2.62. - 3 -
résolution817, à savoir «ex-République yougoslave de Macédoine» au sein des organisations ou
8 institutions en question. Nul ne conteste que le demandeur est déjà désigné ainsi à l’OTAN sans
faire partie de cette organisation et qu’il conserve rait cette dénomination s’ il en devenait membre.
La violation du paragraphe1 de l’article11 paraît donc claire. Le défendeur avait juré qu’il «ne
s’opposera[it] pas»: cette obligation s’appli que que son objection constitue ou non un veto, et
quels qu’en soient l’effet ou les conséquences. Part ant, cette affaire ne se rapporte d’aucune façon
aux actes ou omissions d’éventuels Etats tiers , ni à l’une quelconque des dispositions de
l’instrument constitutif de l’OT AN ou d’une autre organisation ou institution internationale: la
présente instance a exclusivement pour objet les actes du défendeur et leur incompatibilité avec
l’accord intérimaire.
1.9. A cet égard, il est particulièrement impor tant de souligner l’importance de la date à
laquelle le défendeur s’est opposé à ce que le de mandeur fasse partie de l’OTAN. Aux fins qui
nous occupent ici, la date du 3avril2008 est déte rminante car il s’agit de la date critique par
rapport à laquelle la licéité des acte s du défendeur doit être appréciée. Selon la pratique établie de
la Cour, en effet, tout acte intervenu après la date à laquelle le différend a vu le jour aura
nécessairement un poids limité dans l’examen de la licéité des objections du défendeur. Les actes
postérieurs à cette date passeront invariablement pour des actes in téressés, d’autant qu’ils peuvent
viser à justifier ex post facto les agissements d’un Etat. Dans le contexte des différends en matière
de délimitation maritime, la Cour a systématiquement considéré que :
«elle ne saurait prendre en c onsidération des actes qui se sont produits après la date à
laquelle le différend entre les Parties s’est cristallisé, à moins que ces activités ne
constituent la continuation normale d’activit és antérieures et pour autant qu’elles
n’aient pas été entreprises en vue d’améliorer la position juridique des Parties qui les
9
invoquent» .
9 1.10. La logique de cette approche est tout au ssi pertinente dans la présente affaire: pour
apprécier la licéité des actes du défendeur, la Cour doit nécessairement examiner avec attention les
événements intervenus le 3avril2008 et avan t cette date, qui est celle du sommet de l’OTAN à
Bucarest. Cet examen est d’autant plus nécessaire que le défendeur s’est ingénié à modifier sa
position et ses arguments après cette date critique, et compte tenu en particulier de ses actes après
le 17 novembre 2008, date à laquelle la présente instance a été portée devant la Cour. Plus
spécifiquement, le demandeur n’a connaissance d’au cune occasion, avant le 3 avril 2008, où le
défendeur lui aurait formellement reproché, par écrit ou par voie de note verbale à son intention,
d’avoir commis une violation substantielle de l’accord intérimaire. En particulier, le défendeur n’a
jamais, avant cette date, exprimé la moindre préoccupation par écrit, dans une note verbale, quant à
la procédure établie au paragraphe3 de l’ar ticle7 de l’accord intérimaire, qui prévoit un
mécanisme de notification entre parties dans le cas de certains actes jugés incompatibles avec les
dispositions de cet article. Comme il est indiqué au chapitre II du présent mémoire, c’est seulement
le 15 mai 2008, après que le demandeur l’eut accusé d’avoir manqué au paragraphe 1 de l’article 11
de l’accord intérimaire, que le défendeur adressa à celui-ci sa toute première note verbale formelle
pour lui reprocher d’avoir violé l’accord intérimaire 10. Le défendeur semble avoir formulé ces
assertions en réaction à la plainte du demandeur. Cette première note verbale fut suivie d’une
deuxième, datée du 15 janvier 2009, soit deux mois après le dépôt de la requête en l’espèce, dans
laquelle le défendeur faisait te nir au demandeur une plainte formelle pour violation de ses
9
Souveraineté sur Pulau Ligitan et Pulau Sipadan (Indonésie/Malais, arrêt, C.I.J. Recueil 2002, p.682,
par. 135.
10
Note verbale en date du 15 mai 2008 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau
de liaison du défendeur à Skopje ; annexe 51. Voir chap. II, par. 2.66-2.69. - 4 -
obligations au titre de l’accord intérimaire11. Force est de constater que ces démarches récentes du
défendeur o12 été «entreprises en vue d’améliore r la position juridique d[ e la] Parti[e] qui les
invoqu[e]» . Le fait que les questions faisant l’ob jet de ces notes n’aient pas été soulevées
formellement par écrit aupr ès du demandeur avant le 3 avril008, ni même avant
le 17 novembre 2008, ou qu’elles se rapportent à des événements postérieurs au 17 novembre 2008,
10 montre que le défendeur a radicalement infléchi sa position. De l’avis du demandeur, cette
inflexion signifie que le défendeur a compris que les motifs qu’il avait av ancés à l’époque de son
objection, et pendant un certain temps après, c onstituaient une violation de ses obligations au titre
de l’accord intérimaire.
1.11. La présente affaire concerne la licéité de l’objection du défendeur, ni plus ni moins.
Son but est d’assurer le respect de l’accord intérimaire et du droit des traités. La mission de la
Cour consiste à déterminer si l’objection élevée par le défendeur — fin mars-début avril 2008 — a
donné lieu ou non à une violation des obligations qui découlent pour celui-ci du paragraphe1 de
l’article11 de l’accord intérimaire. Il ne s’agit de rien d’autre en l’espèce, et la Cour n’est pas
appelée à se prononcer d’une quelconque façon sur le bien-fondé ou non de la position adoptée par
l’une ou l’autre des Parties dans le cadre des négoc iations qui ont lieu en vertu du paragraphe 1 de
l’article5 de l’accord intérimaire au sujet du différend relatif au nom du demandeur. De même,
comme indiqué plus haut, la présente affaire por te uniquement sur les actes et l’objection du
défendeur, non sur les actes de quelque autre Etat membre de l’OTAN ou sur ceux de l’OTAN en
tant qu’organisation. La Cour n’est pas appelée non plus à exprimer le moindre point de vue quant
au bien-fondé des justifications avancées ex post facto par le défendeur depuis le dépôt de la
requête. Le demandeur a constaté avec intérêt que le défendeur avait soulevé toute une série de
nouvelles questions dans ses notes verbales, en particulier dans celles du 15mai2008 et du
15 janvier 2009 . Le fait qu’il ait éprouvé la nécessité de créer une nouvelle base pour justifier ses
actes du 3 avril 2008 traduit de sa part une reconnais sance de ce que la raison avancée à l’appui de
son objection — «l’impossibilité de s’entendre sur une solution pratique et définitive au problème
du nom de l’Etat» [traduction du Greffe] — va clairement à l’encontre des obligations qui lui
incombent en vertu de l’article 11 de l’accord intérimaire.
1.12. Pareillement, la présente affaire ne c oncerne pas les conditions d’adhésion à l’OTAN,
ni les actes d’éventuels Etats tiers. Elle ne se rapporte pas aux circonstances historiques qui ont
donné lieu au différend relatif au nom du demandeur , et la Cour n’a pas à dire quoi que ce soit
⎯ directement ou indirectement ⎯ sur d’autres questions dont les Parties ont débattu dans d’autres
11
contextes, comme les droits des minorités vivant de part et d’autre de la frontière.
SECTION II. PLAN DU MÉMOIRE
1.13. Le présent mémoire comprend six chapitr es. A la suite de cette introduction, le
chapitre II expose les aspects factuels du différend. Découpé en septsections, il commence
nécessairement par le contexte historique dans le cadre duquel le différend est né, en présentant les
circonstances dans lesquelles le demandeur a accéd é à l’indépendance après la dissolution de la
République fédérative socia liste de Yougoslavie en1991 (section I). La section II présente le
contexte dans lequel fut négocié et adopté l’accord intérimaire, en relatant le cheminement suivi
par le demandeur pour obtenir la reconnaissance in ternationale ; les conditions de son adhésion à
11Note verbale en date du 15janvier2009 adressée aministère des affaires étra ngères du demandeur par le
bureau de liaison du défendeur à Skopje ; annexe 52.
12
Ibid., note 9, supra.
13Note verbale en date du 15 mai 2008 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau
de liaison du défendeur à Skopje (annexe 51) ; note verbale en date du 15 janvier 2009 adressée au ministère des affaires
étrangères du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje (annexe 52). - 5 -
l’Organisation des NationsUnies en1993, confor mément aux termes de la résolution817 du
Conseil de sécurité; les négociations conduites s ous l’égide de l’Organisation des NationsUnies
qui ont abouti à l’adoption de la résolution845 du Conseil de sécurité; et, enfin, l’intégration
internationale croissante du demandeur et l’em bargo économique que le défendeur lui a fait subir
en conséquence. La section III est consacrée au contenu et à la structure de l’accord intérimaire,
l’accent étant mis en particulier sur le paragraphe1 de l’article11. La section IV du chapitreII
expose la pratique suivie en vertu de l’article 11 de l’accord intérimaire, en relatant l’intégration du
demandeur au sein de la communauté internationale et la manière dont, après l’entrée en vigueur de
l’accord intérimaire, il a pu demander à faire pa rtie — puis devenir membre — d’un grand nombre
d’organisations et d’institutions internationales, multilatérales et régionales, dont le Conseil de
l’Europe, sous l’appellation provisoire mentionn ée dans la résolution817. Tel était l’un des
principaux objectifs de l’accord intérimair e, du point de vue du demandeur. La section V du
chapitre décrit les relations du demandeur avec l’OT AN dans la période antérieure au 3 avril 2008,
notamment sa participation au partenariat pour la paix, programme de l’Organisation auquel il s’est
joint dès 1995, ainsi qu’à son plan d’action pour l’ adhésion, lancé en 1999. Elle dépeint également
les circonstances dans lesquelles le défendeur est intervenu afin d’empêcher le demandeur de
devenir membre de l’OTAN. En particulier, elle montre que le demandeur devait être désigné au
sein de l’OTAN sous l’appellation pr évue au paragraphe 2 de la r ésolution 817 (1993) du Conseil
de sécurité, que le demandeur avait accepté cette situation ; que, en dépit de cela, le défendeur s’est
12
illicitement opposé à ce que le demandeur soit inv ité à engager des pourparlers d’adhésion en vue
de devenir membre de l’OTAN ; et que, sans l’in tervention du défendeur, le demandeur aurait été
invité à rejoindre l’OTAN. La section VI du chapitre relate l’introduction de la présente instance et
le comportement du défendeur depuis le 3avr il2008, en particulier ses tentatives de trouver
d’autres excuses ex post facto pour justifier son objection. Cette section montre comment le
défendeur a infléchi sa position dans la période qui a suivi le 3avril2008, puis une nouvelle fois
après le17novembre2008, date du dépôt de la requête introductive d’instance. La section VII
expose les conclusions de ce chapitre.
1.1e4. chapitre III est consacré à la compétence de la Cour, qui est fondée sur le
paragraphe 2 de l’article 21 de l’accord intérimaire de 1995 et sur le paragraphe 1 de l’article 36 de
son Statut. La compétence de la Cour est clairement établie: la présente affaire porte sur un
différend né entre les Parties «en ce qui concer ne l’interprétation ou l’exécution d[e] l’accord
intérimaire», en particulier du pa ragraphe1 de son article11, et non sur la divergence sur le nom
du demandeur spécifiée dans les résolutions8 17 (1993) et 845 (1993) du Conseil de sécurité,
auxquelles renvoie le paragraphe1 de l’article5 de l’accord intérimaire de1995. De même,
l’affaire ne soulève pas de questions plus généra les concernant la participation à l’OTAN, ou les
actes d’un quelconque Etat tiers.
1.e5. chapitre IV du mémoire expose les éléments su r lesquels le demandeur se fonde
pour affirmer que le défendeur a violé l’obliga tion lui incombant en vertu du paragraphe1 de
l’article11 de l’accord intérimaire. La section I présente de façon générale l’objet et le but de
l’accord intérimaire ainsi que l’effet r echerché à travers son adoption. La section II traite de la
signification du paragraphe 1 de l’article 11, la disposition violée par le défendeur, sous l’angle des
travaux préparatoires de cet accord. La section III, qui contient une analyse plus détaillée du sens
et de l’effet de l’article11, expose i) l’obligation générale contractée par le défendeur au
paragraphe 1 de cet article de ne pas s’opposer à la participation du demandeur aux organisations et
institutions dont il est lui-même membre puis, ii) le seul et unique motif d’objection qu’il était
loisible au défendeur d’invoquer cont re une telle participation. La section IV vient clore le
chapitre. - 6 -
13 1.e6. chapitre V présente le droit applicable au règlement du présent différend . La
section I traite de l’obligation du défendeur énoncée au paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire — une disposition que le défendeur n’a jamais cherché à dénoncer ou à faire suspendre
pour cause de violation substantielle ou pour quel que autre raison que ce soit, et qui demeure
pleinement applicable — obligation que le défendeur a transgressée par ses actes de la fin mars et
du début avril 2008. La section II fait clairement apparaître que le manquement du défendeur au
paragraphe1 de l’article11 ne pouvait constituer de sa part une réaction légitime à des questions
touchant d’autres dispositions de l’accord intérimaire. Aux sections III et IV, le manquement du
défendeur est analysé au regard d’autres instrume nts internationaux liant les Parties, comme le
traité de l’Atlantique Nord de 1949 et la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, ainsi
que des règles générales du droit international ré gissant les circonstances dans lesquelles un traité
peut être suspendu et des «contre-mesures» un ilatérales prises, des circonstances dont aucune
n’existe en l’espèce. La section V traite des allégations de violation substantielle formulées ex post
facto par le défendeur et démontre que celles-ci sont dénuées de fondement. Les conclusions de ce
chapitre sont exposées dans la section VI.
1.e7. chapitre VI du mémoire expose la réparation s ouhaitée par le demandeur. Après
une brève présentation de la réparation demandée da ns le cadre des articles de la Commission du
droit international sur la responsabilité de l’ Etat pour fait internationalement illicite, les sections I
et II précisent les deux formes de réparation recherchées par le demandeur, à savoir une déclaration
constatant le manquement du défendeur à ses obligations au titre du pa ragraphe 1 de l’article 11 de
l’accord intérimaire de 1995, et une autre lui ordonnant de prendre immédiatement toutes les
mesures nécessaires pour satisfaire à l’obligatio n que lui impose cette disposition. Dans ce
chapitre, le demandeur explique également pourquoi il veut que cet ordre porte expressément sur la
participation à l’OTAN et à d’autres organi sations internationales. Enfin, la section III traite du
droit que le demandeur se réserve «de modifier et de compléter les termes de la présente requête,
ainsi que les fondements invoqués».
1.18. Le mémoire comprend également un volume d’ annexes, qui contient i) des instruments
internationaux, i)es instruments nationaux, ii)es documents de l’Organisation des
NationsUnies et de la correspondance échang ée avec celle-ci, iv)de la correspondance
diplomatique échangée entre les Parties, v)des communiqués de presse, des articles, des
déclarations et vi) d’autres documents. - 7 -
14 C HAPITRE II
LE CONTEXTE FACTUEL
INTRODUCTION
2.1. L’objet du présent chapitre est d’exposer le contexte factuel nécessaire pour comprendre
les circonstances dans lesquelles s’est fait jour le différend qui a été porté devant la Cour. A cette
fin, la sectionI de ce chapitre retrace l’accession du demandeur à la qualité d’Etat et présente les
principaux documents constitutionnels de cet Etat. Dans la sectionII est décrit le contexte dans
lequel l’article11 a été adopté; y sont rappel ées les principales étapes de la reconnaissance
internationale du demandeur, l’accent étant plus part iculièrement mis sur la reconnaissance par la
Communauté européenne et l’admission en tant que membre de l’Organisatio n des Nations Unies.
La sectionIII porte essentiellement sur l’accord inté rimaire conclu par les Parties en1995, et en
particulier sur le paragraphe 1 de l’article 11, qui forme l’objet du différend porté devant la Cour.
La sectionIV retrace l’intégra tion du demandeur à la communauté internationale, et notamment
son adhésion à différentes organisations et institutio ns internationales, multilatérales et régionales,
à la suite de l’entrée en vigueur de l’accord in térimaire. Dans la sectionV sont exposées les
relations du demandeur avec l’OTAN ainsi que l’ objection du défendeur à son adhésion à cette
organisation, objection qui s’est cristallisée le 3avril2008. La sectionVI est consacrée à
l’introduction de la présente instance et au comportement du défendeur depuis le mois d’avril 2008.
Enfin, les conclusions du présent chapitre sont énoncées dans la section VII.
SECTION I. LACCESSION DU DEMANDEUR À LA QUALITÉ D ’E TAT
2.2. Le demandeur est un Etat enclavé d’envi ron 25 713 kilomètres carrés, bordé au nord par
la Serbie et le Kosovo, au sud, par le défendeur, à l’est, par la Bulgarie, et à l’ouest, par l’Albanie.
14
Il s’agit d’une démocratie multiethnique d’environ deux millions d’habitants . Sa capitale est
Skopje.
15 2.3. Le demandeur est l’un des nouveaux Etats indépendants des Balkans nés de l’éclatement
de la République fédérative socialiste de Y ougoslavie (RFSY), dont il était l’une des six
15
républiques constituantes ; il a accédé pacifiquement à l’indépendance. Le25janvier1991, le
demandeur a adopté la «déclaration sur la souverain eté de la République socialiste de Macédoine»,
qui affirmait la souveraineté de l’Etat et le droit de son peuple à l’autodétermination 16.
17
Le7juin1991, le parlement du demandeur a, par la voie d’un amendement constitutionnel ,
rebaptisé «République de Macédoine» (Republika Makedonija) la «République socialiste de
Macédoine» (Socijalistička Republika Makedonija), nom qui avait été celui de la république
14Ministère des affaires étrangères du demandeur, La République de Macédoine ⎯ données
fondamentales (2007) : http://www.mfa.gov.mk/default1.aspx?ItemID=288. Le demandeur a une population
d’environ 2 022 547 habitants, composée de Macédoniens (64,18 %), d’Albanais (25,1%), de Turcs (3,85 %), de Roms
(2,66%), de Serbes (1,78%), de Valaques (0 ,48%), de Bosniaques(0,84%) et autreRecensement de la population,
des ménages et des habitations de la République de Macédoine, 2002, livre XIII, Skopje (mai 2005), Office statistique du
demandeur : http://www.stat.gov.mk/pdf/kniga_13.pdf
15En tant que «République socialiste de Macé doine», aux côtés des Ré publiques socialistes de
Bosnie-Herzégovine, de Croatie, du Monténégro, de Serbie et de Slovénie.
16«Déclaration sur la souveraineté de la République socialiste de Macédoine» (25 janviJournal officiel
de la République socialiste de Macédoine, nannée XLVII (Skopje, 1 février 1991) ; annexe 13.
17«Décision portant promulgationdes amendementsLXXXII à LXXXV à la Constitution de la République
socialiste de Macédoine»(7juin1991), Journal officiel de la République socialiste de Macédoine, nnée XLVII
(Skopje, 11 juin 1991) ; annexe 14. - 8 -
entre1963 e18991 et par leque l le défendeur s’était adressé à elle dans sa correspondance
officielle . Trois mois plus tard, le8septembre1991, la déclaration du25janvier1991 a été
17 confirmée par un référendum dans lequel les participants ont voté à une écrasante majorité de 95 %
(pour un taux de participation de 75%) en faveur d’une «Macé doine souveraine et
indépendante» . Au vu des résultats de ce ré férendum, l’assemblée du demandeur a,
le 17 septembre 1991, adopté une «déclaration» qui affirmait la souveraineté et l’indépendance de
20
l’Etat ainsi que le droit de son peuple à l’autodétermination , confirmant ainsi la volonté des
citoyens exprimée par le référendum et énon çant les principes fondamentaux de la politique
étrangère de l’Etat. Dans ce doc ument fondateur du nouvel Etat, il était souligné sans ambiguïté
que le demandeur acceptait et respectait les règles et principes reconnus en matière de relations
internationales y compris les principes d’inté grité et de souveraineté territoriales et de
non-ingérence dans les affaires intérieures des autr es Etats. L’article2de la déclaration se lit
comme suit :
«La République de Macédoine, en tant qu’Etat souverain et indépendant,
s’engage à respecter en toute circonstan ce les principes généralement reconnus en
matière de relations internationales, te ls que contenus dans les documents de
l’Organisation des NationsUnies, l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris. La
République de Macédoine, en tant que sujet du droit international, est guidée par le
principe du respect des règles internationales régissant les relations entre Etats ; elle se
conforme pleinement aux principes de l’intégr ité et de la souveraineté territoriales, de
la non-ingérence dans les affaires intérieures, du respect et de la confiance entre les
16 Etats ainsi que du développement de la c oopération dans tous les domaines et avec
l’ensemble des pays et des nations, sur la base d’un intérêt mutuel.»
18Voir, par exemple, la lettre en date du14 sept embre1979 adressée au Gouvernement de «la République
socialiste de Macédoine» par le président du défendeur, M. ConstantinosTsatsos, et la lettre en date du
10 décembre 1990 adressée au «comité sur les relations avec l’ét ranger de la République socialiste de Macédoine» par le
consul général du défendeur à Skopje, jointes à la lettre en date du5février1993 et au mémorandum adressés au
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies par le président du demandeur, M. Kiro Gligorov ; annexe 27. La
république a été rebaptisée «République socialiste de Macédoine» en 1963, après que la République fédérative populaire
de Yougoslavie eut été rebaptisée «République fédérative socialiste de Yougoslavie». Depuis la création de
l’ex-Yougoslavie en1945 jusqu’en1963, elle portait le nom de «République populaire de Macédoine» (Narodna
Republika Makedojina), nom utilisé dans les traités auxqu els le défendeur était partie. Voir, par exemple, la convention
bilatérale entre la République fédérati ve populaire de Yougoslavie et le Royaum e de Grèce sur les relations juridiques
mutuelles, conclue entre le défendeur et l’ex-RFSY à Athènes le 18 juin 1959, dont l’article 7 dispose :
«Les demandes d’assistance judiciaire sont présentées soit par l’entremise des ministères ou
secrétariats d’Etat à la justice respectifs, qui corr espondent directement entre eux à cet effet (en ce qui
concerne la Yougoslavie les secrétar iats d’Etat à la justice despubliques populaires de Serbie, de
Croatie, de Slovénie, de Bosnie-Herzégovine, de Macédoine et du Monténégro).» (Les italiques sont de
nous.) Nations Unies, Recueil des traités, vol. 368, p. 87 ; annexe 2.
Cette convention est restée en vigueur entre le défendeur et le demandeur, en vertu du paragraphe 1 de l’article 12
de l’accord intérimaire de 1995 (annexe 1), qui dispose :
«A compter de l’entrée en vigueur du présent acc ord intérimaire, les Parties seront guidées, dans
leurs relations, par les dispositiondes accords bilatéraux ci-après conclus le 18juin1959 entre
l’ex-République socialiste fédérative de Yougoslavie et la première Partie :
a) la convention relative aux relations juridiques mutuelles.»
19«Résultats du référendum tenu le8se ptembre1991 en République de Macédoine», Journal officiel de la
République de Macédoine, n 43, année XLVII (Skopje, 20 septembre 1991) ; annexe 16.
20«Déclaration» (17septembre1991), Journal officiel de la République de Macédoine, n 42, année XLVII
(Skopje, 18 septembre 1991) ; annexe 15. - 9 -
2.4. A l’article 3, le nouvel Etat s’engage à en tretenir des relations de bon voisinage avec les
pays de la région. La partie pertinente se lit comme suit :
«Agissant dans le cadre de ces principe s, la République de Macédoine s’engage
à développer dans tous les domaines des re lations de bon voisinage et de coopération
avec l’ensemble de ses voisins, ainsi qu’à développer des relations et une coopération
avec tous les pays européens et extra- européens, les organisations et groupes
internationaux.»
2.5. La déclaration appelait également à un strict respect des frontières existantes et
réaffirmait que le demandeur n’avait de prétentions territoriales à l’égard d’aucun de ses voisins.
L’article 4 se lit comme suit :
«La République de Macédoine, se confor mant strictement au principe de
l’inviolabilité des frontières, et en vue de gara ntir la paix et la sécurité dans la région
et au-delà, réaffirme qu’elle ne nourrit au cune prétention ou ambition territoriale à
l’égard d’un quelconque pays voisin. Par a illeurs, elle entend agir avec détermination
contre toute violation de son intégrité et de sa souveraineté territoriales ou toute
menace dont celles-ci seraient l’objet. La République de Macédoine s’engage à se
conformer strictement au principe du règlement pacifique des différends dans ses
relations avec d’autres Etats, par voie de négociation et sur la base du respect
mutuel.» 21
2.6. Cette déclaration a été suivie par l’adoption, le 17novembre1991, d’une nouvelle
18 22
constitution , dans laquelle était réaffirmée l’inviolabilité des frontières étatiques. L’article3 de
cette constitution se lit comme suit :
«Le territoire de la République de Macédoi ne est indivisible et inaliénable. Les
frontières existantes de la République de M acédoine sont inviolables. Les frontières
de la République de Macédoi ne ne peuvent être modifiées que conformément à la
constitution.» 23
21
Le 13novembre1991, le président du demandeur, M.Kiro Gligorov, a adressé une lett re au premier ministre
du défendeur, M.Constantine Mitsotakis , l’informant de la déclaration du 17 septembre1991 et soulignant que le
demandeur s’était solennellement engagé à «respecter en t oute circonstance les principes généralement reconnus en
matière de relations internationales» et à entretenir drelations de bon voisinage. Dans cette lettre, le demandeur
soulignait également qu’il s’engageait à respecter le princpe de l’inviolabilité des frontières et qu’il «confirmait
résolument et sans équivoque» n’avoir aucune «prétention territoriale» à l’égard d’un quelconque Etat voisin, «y compris
la République hellénique» ; annexe 48.
22«Décision portant promulgation de la Constitution de la République de Macédoine» (17novembre1991),
Journal officiel de la République de Macédoine, n 52, année XLVII (Skopje, 22 novembre 1991) ; annexe 17.
23L’article3 a été modifié par l’amendement constitu tionnel du 6janvier1992; voir la «Décision portant
promulgation des amendements I et II à la Constitution de la République de Macédoine» (6 janvier 1992), Journal officiel
de la République de Macédoine, no1, année XLVIII (10 janvier 1992), annexe 19 (voir également par. 2.12 et note de bas
o
de page n 33 ci-dessous). Cet article se lit désormais comme suit: «Le territoire de la République de Macédoine est
indivisible et inaliénable. Les frontières existantes de la République de Macédoine sont inviolables. Les frontières de la
République de Macédoine ne peuvent être modifiées que c onformément à la constitution, selon le principe de bonne
volonté et conformément aux normes internationales générale ment reconnues. La République de Macédoine n’a pas de
prétentions territoriales à l’égard des pays voisins.» - 10 -
2.7. L’article8 de la no uvelle constitution fait de la primauté du droit un principe
fondamental de gouvernement :
«Les valeurs fondamentales de l’ordre constitutionnel de la République de
Macédoine sont :
⎯ les libertés fondamentales et droits fondamentaux de l’homme et du citoyen
reconnus par le droit international et définis par la Constitution ;
⎯ la libre expression de l’appartenance nationale ;
⎯ la primauté du droit ;
⎯ la séparation des pouvoirs de l’Etat en législatif, exécutif et judiciaire ;
⎯ le pluralisme politique et les élections démocratiques, libres et directes ;
⎯ la protection juridique de la propriété ;
⎯ la liberté du marché et de l’entreprise ;
⎯ l’humanisme, la justice sociale et la solidarité ;
19
⎯ l’autogestion locale ;
⎯ l’aménagement et l’humanisation de l’espace, et la protection et la promotion de
l’environnement et de la nature ;
⎯ le respect des normes universellement reconnues du droit international.
En République de Macédoine est libre tout ce qui n’est pas interdit par la
Constitution et la loi.»
2.8. Les articles9 à 49 garantissent le resp ect des droits fondamentaux de l’homme, des
droits des minorités et des droits économiques et sociaux. La Constitution met également l’accent
sur la politique du demandeur visant à ce que soient reconnus les groupes minoritaires qui se
considèrent comme Macédoniens et vivent dans des Etats voisins, et à ce que soient respectés leurs
droits de l’homme et libertés (art. 49)2.
S ECTION II. EN QUÊTE DE RECONNAISSANCE INTERNATIONALE :
LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE ET LES N ATIONS UNIES
2.9. La présente section explique les circonstances dans lesquelles l’accord intérimaire a été
rédigé et conclu par les Parties. Comme il a été clairement précisé dans le chapitre I, le différend
porté devant la Cour ne concerne pas la di vergence entre les Parties concernant le nom du
demandeur.
24L’article49 a été modifié par l’amendement constituti onnel du 6janvier1992, qui a introduit une disposition
supplémentaire précisant que, «[e]n cela, la République ne s’immiscera pas dans le s droits souverains des autres Etats ni
dans leurs affaires intérieures»: voir la «Décision portant promulgation des ame ndementsI et II à la Constitution de la
République de Macédoine» (6 janvier 1992), supra, annexe 19 (voir également par. 2.12 ci-dessous). En ce qui concerne
la question des minorités, voir également, par exe; Conseil de l’Europe, commissaire aux droits de l’ho,me
rapport de MThomas Hammarberg, commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, sur sa visite en Grèce
du 8 au 1décembr2008. Thème examiné: les droits de l’homme des minorités, (19 février 2009),
doc. CommDH (2009)9), par. 16 ; voir également Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies,
rapport de l’experte indépendante pour les questions relatives aux minorités, Mme Gay McDougall : additif : mission en
Grèce (8-16 septembre 2008), (18 février 2009), Nations Unies, doc.A/HRC/10/11/add.3, par.84 et 90; Conseil de
l’Europe, commission européenne contre le racisme et l’intoléTroisièmerapport sur la Grèce , (8février2004),
doc.CRI(2004)24, par.81. Voir également: Ouranio Toxo et autres c.Grèce, (200, dont la version anglaise est
reproduite dans EHRR, vol. 45, p. 8, par. 40 ; et Sidiropoulos et autres c.Grèce, (1999) , dont la version anglaise est
reproduite dans EHRR, vol. 27, p. 633, par. 30-47. - 11 -
20 A. Le premier contact avec la Communauté européenne
2.10. Après avoir proclamé son indépendan ce, le demandeur chercha, avec d’autres
ex-Républiques yougoslaves, à obtenir la reconnais sance de la Communauté européenne (CE). Il
participa à la conférence pour la paix sur l’ ex-Yougoslavie et engagea le dialogue avec la
commission d’arbitrage (dite «commission Badinter», d’après le nom de son président,
25
Robert Badinter) , créée sous les auspices de la CE pour examiner les demandes de reconnaissance
présentées à celle-ci par les ex-Républiques yougosla ves. La commission Badinter a été chargée
d’examiner les demandes de reconnaissance à la lumière de la décl aration sur les lignes directrices
sur la reconnaissance de nouveaux Etats en Europe orientale et en Union soviétique («les lignes
21 directrices») et de la déclaration sur la Yougoslavie («la déclaration») , élaborée par les ministres
des affaires étrangères des Etats membres de la CE lors d’une réunion extraordinaire organisée à
Bruxelles le 17décembre1991. La déclaration prévoyait que toute ex-République yougoslave
souhaitant être reconnue en tant qu’Etat indépendant devait en faire la demande ⎯ qui devait
comporter une déclaration d’acceptation des princip es énoncés dans la déclaration et les lignes
directrices ⎯ auprès de la commission Badinter nouvelle ment créée. Elle liait également la
reconnaissance à la condition spécifique suivante, in scrite dans la déclaration à l’insistance du
défendeur et qui visait le demandeur :
«La Communauté et ses Etats membres demandent également d’une République
yougoslave qu’elle s’engage , avant qu’elle soit reconnue, à donner des garanties
constitutionnelles et politiques assurant qu’elle n’a aucune revendication territoriale
25
La commission Badinter était composée de cinq éminents juristes de différents pays européens: M.Badinter,
président du Conseil constitutionnel français, les présidents des conse ils constitutionnels allemand, espagnol et italien, à
savoir MM. Roman Herzog, Franciso Tomás y Valiente et Aldo Corasaniti, et la présidente de la Cour d’arbitrage belge,
Irène Pétry. Créée par le Conseil des ministres de la CE, la commission avait pour mission de fournir des conseils
juridiques sur les demandes de reconnaissance présentées par les ex-Etats yougoslaves, ains i que sur d’autres questions
juridiques liées à la dissolution de la RFSY.
26
Déclaration sur les «lignes directri ces sur la reconnaissance de nouveauxEtats en Europe orientale et en
Union soviétique», jointe en annexeII à une lettre en date du 17décembre1991 adressée au président du Conseil de
sécurité de l’Organisation des Nations Unies par les représentants permanents de la Belgique, de la France et du
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irl ande du Nord auprès de l’Organisati on des NationsUnies, NationsUnies,
doc. S/23293 (17 décembre 1991) ; annexe 24. Dans ces lignes di rectrices, les Etats membres de la CE soulignent qu’ils
reconnaissent le «principe d’autodé termination» et affirment leur vol onté de reconnaître ces nouveaux Etats
«conformément aux normes acceptées de la pratique internati onale et tenant compte des réalités politiques dans chaque
cas concret», précisant que, pour êt re reconnus, ces nouveaux Etats doivent «[s’être constitués] sur une base
démocratique, [avoir] accepté les obliga tions internationales pertinentes,[s’être] engagés de bonne foi dans un
processus pacifique et négocié» et que, pour obtenir la reconnaissance, les ex-Répub liques yougoslaves doivent de
surcroît satisfaire aux conditions suivantes :
⎯ «[respecter les] dispositions de la Charte des Na tions Unies et [les] enga gements souscrits dans
l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris, ntamment en ce qui concerne l’Etat de droit, la
démocratie et les droits de l’homme ;
⎯ [garantir les] droits des groupes ethniques et nationaux et des minor ités conformément aux
engagements souscrits dans le cadre de la CSCE [Conférence sur la sécurité et la coopération en
Europe] ;
⎯ [respecter] l’inviolabilité des limites territoriales qui ne peuvent être modi fiées que par des moyens
pacifiques et d’un commun accord ;
⎯ [reprendre] tous les engagements pertinents re latifs au désarmement et à la non-prolifération
nucléaire ainsi qu’à la sécurité et à la stabilité régionale ;
⎯ [s’engager] à régler par accord, notamment le cas échéant, par un r ecours à l’arbitrage, toutes les
questions afférentes à la succession d’Etats et aux différends régionaux.»
27
Déclaration sur la Yougoslavie , jointe en annexeI à une lettre en date du 17décembre1991 adressée au
président du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies par les représentants permanents de la Belgique, de
la France et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irla nde du Nord auprès de l’Orga nisation des Na tions Unies,
Nations Unies, doc. S/23293 (17 décembre 1991) ; annexe 24. - 12 -
vis-à-vis d’un pays voisin membre de la Communauté et à ne pas conduire d’activités
hostiles de propagande contre un pays voisi n membre de la Communauté, y compris
l’utilisation d’une dénomination impliquant des revendications territoriales.»
2.11. Deux jours après la réunion de Bruxelles, le 19décembre1991, l’Assemblée du
demandeur adopta la «déclaration sur la reconna issance internationale de la République de
Macédoine en tant qu’Etat souverain et indépendant» 28, qui mettait en exergue le désir du
demandeur d’être reconnu en tant qu’Etat indépendant et souverain au niveau international et son
attachement aux lignes directrices et à la déclaration des Etats membres de la CE.
2.12. Le demandeur soumit officiellement sa demande de reconnaissance par les Etats
29
membres de la CE le 20décembre1991 et celle-ci fut examinée par la commission Badinter au
22 cours des mois suivants. Pendant ce temps, le demandeur réaffirma une fois encore sans équivoque
dans son dialogue avec la commission Badinter qu’il ne nourrissait aucune revendication
irrédentiste à l’égard du défende ur ou d’un quelconque autre Etat européen, pas plus qu’il ne
s’engagerait dans des activités hostiles à leur encontre 30. En outre, il souhaitait réitérer ces
engagements ⎯déjà énoncés aux articles2 à4 de la déclaration «sur [l’]Etat souverain et
indépendant de Macédoine» du 17 septembre 1991 (voir les paragraphes 2.3 à 2.5 ci-dessus) et déjà
garantis par les articles3 et8 de sa constitu tion (voir paragraphes2.6 et2.7 ci-dessus) ⎯ en
31
modifiant sa constitution, afin d’apaiser les peurs du défendeur . Les amendements 1 et 2 apportés
par le demandeur à sa constitution démontrent in contestablement l’absence de toute revendication
territoriale de sa part à l’égard du défendeur ou de tout autre Etat :
o
«Amendement n 1
1. La République de Macédoi ne n’a aucune revendication territoriale à l’égard des
Etats voisins.
2. Les frontières de la République de M acédoine ne pourraient être modifiées qu’en
conformité avec la constitution, sur la base de l’accord des Etats et des règles
généralement acceptées du droit international...
28«Déclaration sur la reconnaissance internationale de la République de Macédoine en tant qu’Etat souverain et
o
indépendant» (19 décembre 1991), Journal officiel de la République de Macédoine , n 57, année XLVII
(24 décembre 1991) ; annexe 18.
29Lettre en date du 20décembre1991 adressée au prés ident du Conseil des mi nistres des Communautés
européennes par le ministre des affaires étrangères du demandeur, M. Denko Maleski ; annexe 107.
30Voir, par exemple, les réponses appor tées par le ministère des affaires étrangères du demandeur aux questions
posées par la commission Badinter, Réponses de la République de Macédoi ne aux questions de la commission
d’arbitrage de la conférence pour la paix en Yougoslavie (29décembre1991)(annexe108); et la lettre en date du
10janvier1992 adressée au président de la commission d’arbitrag e de la conférence sur la Yougoslavie, par laquelle le
ministre des affaires étrangères du de mandeur, M. Denko Maleski, s’engageait formellement à ce que le demandeur
s’abstienne de toute propagande hostile à l’égard d’un quelc onque Etat voisin membre de la Communauté européenne
(annexe111), mentionnée au paragraphe2 de l’avisn 6 de la commission d’arbitrage sur la reconnaissance de la
République socialiste de Macédoine par la Communauté eur opéenne et ses Etats membres (14janvier1992), joint en
annexeIII à la lettre en date du 26mai1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le Secrétaire général de
l’Organisation des Nations Unies, Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai 1993) (annexe 33).
31«Décision portant promulgation des amendements I et II à la Constitution de la République de Macédoine»,
supra : annexe 19. Voir également la lettre en date du 6 ja nvier 1992 adressée au président de la commission d’arbitrage
de la conférence sur la Yougoslavie, M.RobertBadinter, par le ministre des affaires étra ngères du demandeur,
M.DenkoMaleski, par laquelle ce dernier informe le des tinataire de l’adoption des amendements constitutionnels par
l’Assemblée du demandeur ; annexe 110. Il est important de s ouligner qu’il s’agit là de l’un des rares cas dans l’histoire
où un Etat a modifié volontairement sa constitution afin d’atténuer les appréhensions d’un Etat voisin. - 13 -
Amendement n 2 o
23
1. La République ne portera pas atteinte a ux droits souverains et ne s’immiscera pas
32
dans les affaires intérieures des autres Etats…»
2.13. Dans son avisn o6 du 14janvier1992 33, la commission Badinter a établi que le
demandeur satisfaisait à toutes les conditions de reconnaissance déterminées par la CE. Elle a en
particulier relevé que le demandeur avait formellement renoncé à toute revendication territoriale et
confirmé, notamment, que «l’utilisation du34om «M acédoine»» n’impliquait aucune revendication
territoriale à l’égard du défendeur .
32 «Décision portant promulgation des amendements I et II à la Constitution de la République de Macédoine»,
supra. La clause1 de l’amendement I est un addendum à l’article3 de la constituti on. La clause2 de l’amendementI
remplace le paragraphe3 du même arti cle. L’amendementII est un addendum au paragraphe1 de l’article49 de la
constitution. Vingt-neuf autres amendements ont été appor tés à la Constitution depuis 1992: voir «Constitution de la
République de Macédoine : avec les ame ndements apportés à la Constitution I-XXX», Journal officiel de la République
de Macédoine , ISBN 978-9989-617-65-2 (Skopje, 2007), téléchargeable à l’adresse
http://www.slvesnik.com.mk/WBStorage/Files/USTAV-eng.pdf, et la «Décision portant promulgation de l’amendement
XXXI à la Constitution de la République de Macédoine», Journal officiel de la République de Macédoine, n 3 (Skopje,
9 janvier 2009).
33
Commission d’arbitrage de la conférence sur la Yougoslavie, Avis n° 6 sur la reconnaissance de la République
socialiste de Macédoine par la Communauté européenne et ses Etats membres (14 janvier 1992), jointe en annexe III à la
lettre en date du 26 mai 1993 adressée au prés ident du Conseil de sécurité par le Secr étaire général de l’Organisation des
Nations Unies, Nations Unies, doc.S/25855 (28mai1993); annexe33. Cet av is était l’un des quatre rendus le
14janvier1991 par la commission Badinter sur le point de savoir si chacune de s ex-Républiques fédérales yougoslaves
en question, à savoir la Bosnie-Herzégovine (avis n o4), la Croatie (avis n 5), la Macédoine (avis n 6) et la Slovénie
o
(avis n 7), avait satisfait aux conditions de reconnaissance par le s Etats membres de la CE ét ablies par le Conseil des
ministres de la CE le 16 décembre 1991.
34 o
Voir le paragraphe 5 de l’avis n 6, supra, page 11 :
«la République de Macédoine satisfait aux conditions posées par les Lignes directrices relatives à la
reconnaissance de nouveaux Etats en Europe de l’Est et en Union soviétique ainsi que par la Déclaration
sur la Yougoslavie adoptée par le Conseil des minist res de la Communauté européenne, le
16 décembre 1991 ;
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
⎯ de surcroît, la République de Macédoine a renoncé à toute revendication territoriale quelle qu’elle
soit, dans des déclarations sans ambiguïté et ayant force obligat oire en droit international;… dès
lors, l’utilisation du nom de «Macédoine» ne saur ait impliquer aucune revendication territoriale à
l’égard d’un autre Etat [les italiques sont de nous] ; et
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
⎯ la République de Macédoine s’est engagée, formellement, selon le droit international, à s’interdire en
général, et notamment en appli cation de l’article49 de sa constitution, t oute propagande hostile à
l’encontre d’un autre Etat…» - 14 -
35
24 2.14. Toutefois, au grand regret du demandeur , les Etats membres de la CE ont, sous la
pression directement exercée par le défendeur 36, ignoré l’avis juridique clair de la commission
37
Badinter et refusé d’accorder leur reconnaissance au demandeur . Dès lors, les objections du
défendeur ont eu pour conséquence de maintenir le demandeur dans un état d’incertitude où la
reconnaissance de sa qualité d’Etat indépendant lui était refusée en dépit du fait qu’un organisme
indépendant avait confirmé sans équivoque qu’il ne nourrissait auc une revendication territoriale à
l’égard du défendeur.
2.15. L’absence de reconnaissance par la CE fut suivie, en juillet 1992, d’un vote de défiance
25
à l’égard du gouvernement du demandeur qui fit craindre le déclenchement de graves troubles
sociaux dans l’Etat naissant. Ces craintes furent renforcées lorsque le défendeur, en août1992,
imposa au deman38ur un embargo sur toutes les impor tations de pétrole qui entraîna des ravages
économiques et servit de prélude à l’embargo économique total que le défendeur imposa ensuite
au demandeur en 1994 .39. Or, en l’absence de reconnaissan ce internationale, le demandeur
demeura dans l’impossibilité d’ adhérer à des institutions et organisations financières
internationales, telles que la Banque mondiale ⎯et donc d’en recevoir l’assistance ⎯ en cette
40
période de crise économique .
35Voir, par exemple, le communiqué du président du demandeur, M.KiroGligorov, «Communiqué sur la
déclaration de la Communauté européenne sur la Macédoine, en date du 2 mai 1992» (2 mai 1992) (annexe 115) ; et la
«Déclaration» de l’Assemblée du demandeur concernant la déclaration sur l’ex -Yougoslavie du Conseil des
Communautés européennes (3 juillet 1992) (annexe 20).
36Voir les lettres en date du 3 janvier 1992 adressées aux chefs de gouvernement des Etats membres de la CE par
le président du défendeur, M.Kostas Ka ramanlis (annexe109); et sa lettre en date du 21janvier1992 adressée au
premier ministre italien (annexe113), toutes de ux dans G. Valinakis & S. Dalis (éd.), The Skopje Question ⎯ Attempts
towards Recognition and the Greek Position, Official Texts 1990-1996, (2 éd., 1996), Sideris/ELIAMEP, respectivement
aux pages 63-64 et 83-84; et la lettre en date du 17janvier 1992 adressée par le ministre des affaires étrangères du
défendeur, M. Andonis Samaras, à ses homologues des Etats me mbres de la CE, ainsi que le discours officiel prononcé
par le ministre des affaires étra ngères du défendeur, MA. ndonisSama ras, «Address of Foreign Minister
AndonisSamaras» (Lisbonne, 17févr ier1992), dans A.Tziambiris, Greece, European Political Cooperation and the
Macedonian Question (2000), respectivement aux pages 207 à 213 (annexe 112) et 218 à 232 (annexe 114).
37Le 15janvier1992, ignorant de fait l’avis juridique formulé par la commission Badinter, la CE a annoncé
qu’elle ne reconnaîtrait officiellement que la Slovénie et la Croatie (déclara tion de la Présidence concernant la
reconnaissance des Républiques yougoslave s (15janvier1992), communiqué de pre sse EPC 9/92). Les décisions et
déclarations ultérieures des organes communautaires mirent en évidence que le refus de reconnaître le demandeur était lié
à l’opposition du défendeur au nom de l’Etat : voir par exemple la déclaration du Conseil des ministres réuni à Guimaraes
le 2mai1992, par laquelle le s Etats membres de la CE a ffirment «souhaiter reconnaître cet Etat [le demandeur] en tant
qu’Etat souverain et indépendant, au se in des frontières existantes, et sous une dénomination acceptable pour toutes les
parties concernées» (réunion informelle des ministres des affaires étrangères, Déclaration concernant l’ex-République
yougoslave de Macédoine , Guimaraes, 1-2mai1992, communi qué de presse EPC 53/92); et la déclaration du Conseil
européen au sommet de Lisbonne du 27juin1992, par la quelle celui-ci indiquait qu’ilne reconnaîtrait le nouveau
demandeur que «sous une dénomination qui ne com porte pas le terme «Macédoine»» (Conseil européen, Déclaration
concernant l’ex-Yougoslavie , Lisbonne, j7i992, Bull. CE 6-1992, 2:.http://aei.pitt.edu
/1420/01/Lisbon_june_1992.pdf), position qui fut maintenue lors du sommet européen d’Edimbourg le 12 décembre 1992
(Conseil européen, Conclusions de la pr ésidence, SN/456/92, partieD, relatio ns extérieures (11-12décembre1992):
http://www.europarl.europa.eu/summits/edinburgh/d0_fr.pdf).
38Voir la lettre en date du 1 eoctobre1992 adressée au ministre de s affaires étrangères du Royaume des
Pays-Bas, M. Hans van den Broek, par le président du demandeur, M. Kiro Gligorov (annexe 117) ; des lettres similaires
furent envoyées à tous les ministres des affaires étrangères des Etats membres de la CE. Les difficultés rencontrées par le
demandeur à obtenir la reconnaissance in ternationale en raison de la divergence relative à sa dénomination furent
largement reconnues comme constituant l’un des risques importants pour la stabilité interne de l’Etat. Voir par exemple
le document Rapport pour le Congrès sur la Macédoine: reconnaissance et prévention des conflits (Washington DC,
avril 1993), p. 4, rédigé par le service de recherche du Congrès des Etats-Unis.
39Voir également les par. 2.27 et 2.28, infra.
40 ème
Voir par exemple l’ Exposé présenté à la 52 session de l’Assemblée de la République de Macédoine par le
président du demandeur (Skopje, 9 décembre 1992) ; annexe 118. - 15 -
B. L’admission du demandeur à l’Organisation des Nations Unies et la résolution 817
2.16. Au cours de l’année 1992 et au début de l’année 1993, la qualité d’Etat indépendant du
demandeur a été reconnue par un certain nombre d’Etats, dont la Bulgarie 41, la Turquie 42, la
43 44 45 46 47
Croatie , la Slovénie , la Lituanie , la Fédération de Russie etleMaroc . Toutefois, la
reconnaissance par la Communauté européenne et ses Etats membres demeurait hors de portée,
48
principalement en raison des objections du défendeur au nom c onstitutionnel du demandeur .
26 C’est dans ce contexte que le demandeur a tenté d’être admis à l’Organisation des Nations Unies.
Le 30juillet1992, il a déposé une demande formelle d’admission à l’Organisation des
Nations Unies , transmise par le Secrétaire général au C onseil de sécurité sous couvert d’une note
50
en date du 22 janvier 1993 .
2.17 La demande d’admission à l’Organisation des NationsUnies présentée par le
demandeur fit l’objet de la part du défendeur de fortes objections semblables à celles qu’il souleva
51
dans le cadre de la CE . Toutefois, en mars 1993, à la su ite de longues négociations menées par
trois Etats membres de la CE au sein du Conseil de sécurité (la France, l’Espagne et le
41
15 janvier 1992.
42 6 février 1992.
43 12 février 1992.
44 12 février 1992.
45 25 juin 1992.
46
5 août 1992.
47
18 septembre 2002.
48
A cet égard, voir, par exemple, Bureau du pr ésident, «Communiqué du président du demandeur,
M. Kiro Gligorov, sur la déclaration de la CE faite à Lisbonne le 27 juin 1992» faisant suite à la décision de cette dernière
de ne reconnaître le demandeur sous aucun nom contenant le mot «Macédoine», (Skopje, 28 juin 1992) ; annexe 116.
49
Note du Secrétaire général de l’Organisation des NationsUnies, diffusant la demande d’admission à
l’Organisation des Nations Unies, en date du 30 juillet 1992, pr ésentée par le président du demandeur, M. Kiro Gligorov,
Nations Unies, doc. S/25147 (22 janvier 1993) ; annexe 25.
50 Le retard était en grande partie destiné à faciliter dive rs efforts de médiation menés sous l’égide de la CE, sous
les présidences du Portugal et du Royaume-Uni, afin de tr ouver une solution au différend relatif au nom du demandeur.
Cependant, en décembre 1992, alors que le demandeur n’était toujours pas membre de l’Organisation des Nations Unies,
et à la demande de celui-ci, le Conseil de sécurité autori sa le Secrétaire général, pa r sa résolution795 en date du
11 décembre 1992, à établir une présence de l’Organisation des Nations Unies dans l’Etat du demandeur afin d’empêcher
qu’il ne soit touché par l’instabilité et entraîné dans les c onflits qui faisaient alors rage dans d’autres parties de
l’ex-Yougoslavie. Dans la résolution79 5, le demandeur était dé signé sous le nom d’«ex-République yougoslave de
Macédoine».
51 Voir la lettre en date du 25 janvier 1993, adressée au Secrétaire général de l’Or ganisation des NationsUnies
par le représentant permanent du défendeur auprès de l’Orga nisation, M. Antonios Exarchos, faisant tenir une lettre en
date du même jour adressée au Secrétaire général de l’Or ganisation des NationsUnies pa r le ministre des affaires
étrangères du défendeur, M.MichaelPa paconstantinou, ainsi que son annexe, NationsUnies, doc.S/25158 (25 janvier
1993), où il est officiellement fait object ion à l’admission du demandeur à l’Organi sation des NationsUnies «avant que
ne soient réglées certaines questions en suspens, dont la solu tion est essentielle pour sauvegard er la paix et la stabilité
ainsi que les relations de bon voisinage dans la région», Na tions Unies, doc. S/25158 (25 janvier 1993) ; annexe 26. Le
président du demandeur, M. Kiro Gligorov, répondit aux allégations du défendeur dans un mémorandum qui fut remis au
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies le 5 février 1993 ; annexe 27. - 16 -
Royaume-Uni), les Parties convinrent finalement de mesures permettant au demandeur de devenir
52 53
27 membre de l’Organisation des Nations Unies . Ainsi, la résolution 817 du Conseil de sécurité de
l’Organisation des Nations Unies, en date du 7 avril 1993, dispose ce qui suit :
«Le Conseil de sécurité,
Ayant examiné la demande d’admission à l’Organisation des NationsUnies
formulée dans le document S/25147,
Notant que le demandeur satisfait aux critères d’admission à l’Organisation des
Nations Unies énoncés à l’article 4 de la Charte,
Notant cependant qu’une divergence a surgi au sujet du nom de l’Etat, qu’il
faudrait régler dans l’intérêt commun du ma intien de relations pacifiques et de bon
voisinage dans la région,
Se félicitant que les coprésidents du comité directeur de la conférence
internationale sur l’ex-Yougoslavie soient di sposés à user de leurs bons offices, sur la
demande du Secrétaire général, pour régler la divergence susmentionnée et
promouvoir l’adoption de mesures de confiance entre les parties,
Prenant acte de la teneur des lettres émanant des parties, dont le texte est
reproduit dans les documents S/25541, S/25542 et S/25543,
1. Prie instamment les parties de con tinuer à coopérer avec les coprésidents du
comité directeur de la co nférence internationale sur l’ex-Yougoslavie afin de
parvenir à un règlement rapide de la divergence qui existe entre elles ;
2.Recommande à l’Assemblée généra le d’admettre à l’Organisation des
Nations Unies l’Etat dont la demande est formulée dans le document S/25147, cet
28 Etat devant être désigné provisoirement, à toutes fins utiles à l’Organisation, sous
le nom d’«ex-République youg oslave de Macédoine» en attendant que soit réglée
la divergence qui a surgi au sujet de son nom ;
3. Prie le Secrétaire général de lui faire connaître l’issue de l’initiative prise par les
coprésidents du comité directeur de la conférence internationale sur
l’ex-Yougoslavie.»
2.18. Il ressort clairement du paragraphe 2 du préambule de la résolution 817 que le fait que
le demandeur remplissait tous l es critères d’admission à l’Organisa tion des Nations Unies énoncés
54
par la Charte n’était pas contesté. Bien que les auteurs de la résolution817 aient exhorté les
52Voir les lettres adressées au président du Conseil de sécurité par le premier ministre du demandeur,
M. Branko Crvenkovski, en date du 24 mars 1993, Nations Unies, doc. S/25541 (6 avril 1993) (annexe 28) ; et en date du
5 avril 1993, Nations Unies, doc. S/25542 (6 avril 1993) (annexe 29); et la lettre en date du 6avril1993 adressée au
président du Conseil de sécurité par le ministre des aires étrangères du défendeur, M. Michael Papaconstantinou,
Nations Unies, doc. S/25543 (6 avril 1993) (annexe 30). Les mesures convenues prévoyaient notamment que le drapeau
national du demandeur ne serait pas arboré dans les locaux de l’Organisation des Nations Unies le jour de son admission
(voir Nations Unies, doc. S/25543 (6 avril 1993) (annexe 30), et qu’il siégerait à l’Assemblée générale sous la lettre «T»,
pour «the» former Yugoslav Republic of Macedonia et non sous la lettre «M», comme le souhaitait le demandeur, ou
sous la lettre «F» (pour «former»), comme le souhaitait le défendeur.
53Résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité de l’Orga nisation des Nations Unies (S/RES/817) (7 avril 1993) ;
annexe 22.
54Comme cela est précisé à l’article4 de la Charte dl’Organisation des Nations Unies: «[p]euvent devenir
Membres des NationsUnies tous autres Etats pacifiques qui acceptent les obligations de la présente Charte et, au
jugement de l’Organisation, sont capables de les remplir et disposés à le faire.» - 17 -
Parties à coopérer, sous les auspices du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, afin
de parvenir à un règlement rapide de leur di vergence relative au nom du demandeur, il ressort
également clairement du texte de la résolution que l’admission du demandeur à l’Organisation des
Nations Unies ne faisait l’objet d’aucune réserve et ne dépendait en aucun cas de ce règlement.
2.19. Dans la résolution817, le demandeur n’est pas désigné par son nom mais par
55
l’expression «l’Etat dont la demande est formulée dans le document S/25147» ou simplement par
«l’Etat». Eu égard à la «divergence» entre les pa rties au sujet du nom du demandeur, la résolution
prévoit que le demandeur sera «désigné provisoirement…à l’Organisation, sous le nom
d’«ex-République yougoslave de Macédoine»», jusqu’à ce que le demandeur et le défendeur soient
parvenus à régler leur divergence au sujet du nom de l’Etat 56. C’est ainsi que, à la suite de la
résolution817, le demandeur fut, par la résolution225 de l’Assemblée générale 57, admis le
e
29 8 avril 1993 à l’Organisation des Nations Unies, dont il devint le 181 Membre. Le siège qui lui fut
attribué dans l’ordre alphabétique était situé à côté de la Thaïlande, sous la lettre «t» (le nom de
l’Etat demandeur commençant, en anglais par «the»).
2.20. Il ressort clairement du libellé du pa ragraphe2 de la résolution817 que l’expression
«ex-République yougoslave de Macédoine» n’avait pas vocation à devenir le nouveau nom
provisoire de l’Etat demandeur, mais qu’il s’agissait plutôt d’une désignation descriptive provisoire
faisant référence au statut antérieur de l’Etat afin qu’il puisse être identifié au sein de
58
l’Organisation des Nations Unies, en attendant que soit résolu le différend concernant son nom . Il
est significatif que la résolutio n n’ait pas imposé au demandeur de se désigner lui-même par
l’appellation «ex-République yougos lave de Macédoine», ce que celui-ci n’a d’ailleurs jamais
consenti à faire. Dès lors, conformément à la résolution 817 et sans que cela ne pose de difficultés
au Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies, le demandeur a toujours fait usage de son nom
constitutionnel dans ses communications écrites et orales avec l’Organisation, ses membres et ses
représentants :
⎯ Communications écrites : le demandeur fait usage de son nom constituti onnel dans les
documents écrits, y compris les lettres, les notes verbales, les rapports et les instruments de
ratification qu’il communique à l’Organisation des Nations Unies. Pour les diffuser en tant que
documents officiels de l’Organisation des Nations Unies, le Secrétariat de l’Organisation les
assortit d’une page de couverture revêtant le l ogo de l’Organisation et reprenant la mention
provisoire prévue par la résolution817, mais ne modifie pas les documents eux-mêmes. 59
L’Organisation des NationsUnies et le défendeur ne se sont jamais opposés à cette pratique,
pas plus qu’ils n’ont refusé d’accepter ou d’examiner des documents du demandeur dans lequel
ce dernier faisait usage de son nom constitutionne l. De surcroît, en ce qui concerne la
signature d’accords multilatéraux dont l’Organisa tion des NationsUnies est le dépositaire, le
demandeur a et a toujours eu pour pratique de fa ire insérer sur la page de signature par la
55
La demande d’admission à l’Organisa tion des NationsUnies a été déposée sous le nom de «République de
Macédoine».
56Résolution 817, supra ; annexe 22. Voir également note 52 supra ; annexes 28-30.
57Cette résolution fut adoptée après que le Comitéd’admission de nouveaux memb res a émis une opinion
favorable : Rapport du Comité d’admission de no uveaux membres concernant la demande d’admission à l’Organisation
des Nations Unies formulée dans le document S/25147, Nations Unies, doc. S/25544 (7 avril 1993) ; annexe 31.
58Voir infra, chapitre V, par. 5.66.
59
Pour des exemples récents, voir : Conseil des dro its de l’homme de l’Organisation des Nations Unies, Rapport
national présenté conformément au paragraphe 15 a) de l’annexe à la résolution 5/1 du Conseil des droits de l’homme.
Ex-République yougoslave de Macédoine , NationsUnies, doc.A/HRC/WG.6/5 /MKD/1 (23 février 2009); Assemblée
générale, Conseil de sécurité, Lettre adressée au Secrétaire général par le représentant permanent de l’ex-République
yougoslave de Macédoine auprès de l’Organisation des Natios nies , Nations Unies, do./2008/763
(5 décembre 2008). - 18 -
30 personne signant en son nom, au-dessus de sa si gnatu60 et sous la mention provisoire, les
mots : «pour le compte de la République de Macédoine» .
⎯ Communications orales : les représentants du demandeur auprès de l’Organisation des
Nations Unies utilisent toujours son nom constitutionnel dans les communications orales et les
déclarations, comme cela a été convenu lors d es discussions qui ont précédé l’adoption de la
résolution 817. Cette pratique est conforme à la résolution 817 et, en tant que telle, n’a jamais
été critiquée par l’Organisation des NationsUnies. Au cours des premières années qui ont
suivi l’admission du demandeur à l’Organisa tion des NationsUnies, le défendeur s’est
régulièrement opposé à ce que les représenta nts du demandeur fassent usage du nom
constitutionnel de ce dernier, en vertu de quoi le demandeur lui a, à plusieurs reprises, conseillé
de solliciter l’avis du Bureau des affaires juridi ques de l’Organisation quant à la licéité de cet
usage. Depuis lors, les objections du défendeur se sont faites rares et sporadiques.
C. Les négociations menées par l’Organisation des Nations Unies
et la résolution 845 du Conseil de sécurité
2.21. A la suite de l’adoption de la résolu tion 817, et conformément à celle-ci, de nouvelles
négociations entre les parties ⎯visant à régler la divergence au sujet du nom du demandeur et à
élaborer un accord sur des «mesures de confiance» ⎯ furent entamées à l’initiative des
coprésidents du comité directeur de la conféren ce internationale sur l’ex-Yougoslavie, à savoir
M.CyrusVance, le représentant des NationsUnies à la conférence, et lordOwen, le représentant
de la Communauté européenne.
2.22. A l’issue de ces discussions, M.Cyrus Vance et lordOwen présentèrent aux parties,
le14mai1993, un projet de traité intitulé «Traité portant confirmation de la frontière existante et
31 adoption de mesures de confian ce, d’amitié et de coopération dans un esprit de bon voisinage» 61
(ci-après «le projet de traité de 1993»), lequel fut également communiqué au Conseil de sécurité de
l’Organisation des Nations Unies, en application de la résolution 817, en tant qu’annexe à une lettre
du Secrétaire général datée du 26mai 1993 62. Le projet de traité de1993 proposait l’adoption du
nom ««République d63Nova Makedonija», qui serait utilisé à tout es fins officielles, nationales et
internationales» . Ce projet comprend un préambule, qui rappelle, entre autres, «les principes de
l’inviolabilité des frontières et de l’intégrité terr itoriale des Etats…», ainsi que vingt-cinq articles
répartis en six sections : la section A énonce un certain nombre de dispositions spéciales destinées à
promouvoir les relations amicales entre les parties et à créer un climat de confiance. Les sections B
àE contiennent des dispositions relatives au r espect mutuel ainsi qu’à des relations de bon
voisinage et de coopération : la section B traite des droits de l’homme et culturels ; la section C des
institutions européennes; la sectionD des relati ons conventionnelles; la sectionE des relations
dans les domaines économique, commercial, envir onnemental et juridique. Enfin, la sectionF
contient les clauses finales, y compris celles rela tives au règlement pacifique des différends. La
60Voir par exemple les actes de ratification suivan ts: Organisation des Nations Unies, convention sur
l’évaluation de l’impact sur l’envi ronnement dans un contexte transf rontière, C.N.784.1999.TREATIES-10,
(3 septembre 1999) ; Organisation des Nations Unies, statut de Rome de la Cour pénale internationale,
C.N.210.2002.TREATIES-6, (7mars2002); Organisation des NationsUnie s, convention des Nati onsUnies contre la
criminalité transnationale organisée, CN.29.2005.TREATIES-3, (24 janvier 2005).
61Voir, plus loin, chap.IV, sect.I et II. Le projettraité de1993 était lui-même inspiré d’un traité antérieur
rédigé par sirRobinO’Neill, envoyé spécial du présid ent de la Communauté européenne, intitulé «Traité portant
confirmation de la frontière existante».
62AnnexeV de la lettre en date du 26mai1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le Secrétaire
général, M.Boutros Boutros-Ghali, intitulée «Projet proposé par M.CyrusVance et lordOwen le 14mai1993»,
Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai 1993) ; annexe 33.
63AnnexeI de la lettre en date du 26mai1993 adressée au président du Conseil de s écurité par le Secrétaire
général, M. Boutros Boutros-Ghali, supra ; annexe 33. - 19 -
sectionC est la section du projet de traité de1993 la plus pertinente dans le cadre de la présente
instance. L’article 11, qui figure sous l’intitulé «Institutions européennes», se lit comme suit :
«1.La République hellénique s’efforce d’ appuyer, partout où cela est possible,
l’admission de la République de Nova Makedonija aux institutions européennes
dont la Grèce est membre.
2. Les Parties conviennent que la tran sformation économique en cours de la
République de Nova Makedonija devrait êt re appuyée au moyen de la coopération
internationale, dans toute la mesure possi ble, par une relation plus étroite de la
République de Nova Makedonija avec l’ Espace économique européen et la
Communauté européenne.»
2.23. Le projet de traité de 1993 fu t rejeté par le défendeur le 27mai1993 64 et par le
32 65
demandeur le 29mai1993 , essentiellement parce qu’il était pr oposé que le demandeur porte le
nom de «République de Nova Ma kedonija», ce que les deux Parties jugeaient inacceptable. Ces
dernières ne parvenant toujours pas à s’entendre, le Conseil de sécurité de l’Organisation des
Nations Unies adopta, trois semaines plus tard, une nouvelle résolution, dans laquelle il remerciait
les coprésidents du comité directeur de la conf érence internationale sur l’ex-Yougoslavie de leurs
efforts pour trouver une solution et recommandait le projet de traité de 1993 en tant que «base pour
le règlement» de la divergence concernant le nom du demandeur. La résolution845(1993) se lit
comme suit :
«Le Conseil de sécurité,
Rappelant la résolution 817(1993) du 7avril1993, dans laquelle il a prié la
Grèce et l’ex-République yougoslave de M acédoine de continuer à coopérer avec les
coprésidents du comité directeur de la conf érence internationale sur l’ex-Yougoslavie
afin de parvenir à un règlement rapide de la divergence qui existe entre elles,
Ayeanat iné le rapport du Secrétaire général soumis en application de la
résolution 817(1993), ainsi que la déclar ation du Gouvernement grec et la lettre du
président de l’ex-République yougoslave de Macédoine datées des 27 et 29 mai 1993,
respectivement (S/25855 et Add. 1 et 2),
Re1m.ercie les coprésidents du comité directeur de la conférence internationale
sur l’ex-Yougoslavie de leurs efforts et recommande aux parties les propositions
formulées dans l’annexe V au rapport du Secrétai re général en tant que base pour le
règlement de leur divergence ;
2. Prie instamment les parties de poursuivre les efforts qu’elles mènent sous les
33 auspices du Secrétaire général en vue de pa rvenir à un règlement rapide des questions
qu’il leur reste à résoudre ;
64
Lettre en date du 28 mai 1993 adressée au président du Cons eil de Sécurité par le Secrétaire général, contenant
en annexe une déclaration remise au Secrétaire général par l’ambassadeur et envoyé spécial du défendeur,
S. Exc. M. George D. Papoulias, le 27 mai 1993, Nations Unies, doc. S/25855/Add. 1 (3 juin 1993) ; annexe 34.
65Lettre en date du 3 juin 1993 adressée au président du Cons eil de Sécurité par le Secrétaire général, lui faisant
tenir une lettre en date du 29mai1993 qui lui avait étssée par le président du demandeur, M.KiroGligorov,
Nations Unies, doc. S/25855/Add. 2 (3 juin 1993) ; annexe 35. - 20 -
Prie. le Secrétaire général de le tenir au courant du progrès de ces nouveaux
efforts, dont l’objectif est de régler la divergence entre les deux parties avant le
commencement de la quarante-huitième session ordinaire de l’Assemblée générale, et
de lui en faire connaître l’issue au moment voulu, et décide de reprendre l’examen de
la question à la lumière du rapport.» 66 [Les italiques sont de nous.]
2.24. Les négociations menées par M. Cyrus Vance ⎯ qui intervenait en tant qu’envoyé du
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies ⎯ se poursuivirent en application de la
résolution 845 jusqu’au mois d’octobre 1993. Il y fut cependant brusquement mis un terme à la fin
du mois d’octobre 1993, lorsque le gouvernement socialiste nouvellement élu du défendeur décida
67
de se retirer en indiquant qu’il ne poursuivrait que si le demandeur accédait à ses demandes .
D. L’intégration et la reconnaissance internationale grandissantes du demandeur,
et l’embargo économique
2.25. A la suite de la résolution 817, et gr âce à sa qualité de Membre de l’Organisation des
Nations Unies, le demandeur devint membre de nombreux organes et institutions des
34 68
NationsUnies, y compris l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) , l’Organisation
internationale du Travail (OIT) 69et l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et
la culture (Unesco) . Le défendeur s’opposa toutefois à ce qu’il devienne membre de diverses
autres institutions et organisations internationa les, multilatérales et régionales non affiliées à
l’ONU ⎯dont le défendeur était lui-même membre ⎯, notamment le Conseil de l’Europe et la
Conférence sur la sécurité et la coopération en Euro pe et ce, en raison de la divergence relative au
nom. Le rapporteur spécial de la Commission d es droits de l’homme de l’Organisation des
NationsUnies releva, dans le rapport qu’il établit en 1994 sur la situation des droits de l’homme
dans le territoire de l’ex-Yougoslavie, l’effet d éstabilisateur pour le demandeur du rejet de ses
candidatures auprès de ces organisations. Il recommanda notamment, en ce qui concerne le
demandeur :
«que les demandes d’adhésion à des organisa tions internationales par l’ex-République
yougoslave de Macédoine [soient] examinées sa ns parti pris. Il est particulièrement
important de permettre ra pidement à l’ex-République yougoslave de Macédoine
d’adhérer à tous les mécanismes de sécurité perti71nts, en particulier à la Conférence
sur la sécurité et la coopération en Europe.»
66
Résolution 845 (1993) du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (S/RES/845) (18 juin 1993) ;
annexe 23.
67
Voir la lettre en date du 5 novembre 1993 adressée au S ecrétaire général de l’Orga nisation des Nations Unies
par le ministre des affaires étrangères du défendeur, M.Karolos Papoulias (annexe36); et la lettre en date du
8novembre1993 adressée au ministre des affaires étrangères du défendeur, M.KarolosPa poulias, par le Secrétaire
général de l’Organisation des Nations Unies (annexe37). Ces deux lettres fi gurent dans G.Valinakis & S.Dalis
(dir. publ.), op. cit., p.177-180 et 181-182, respectivement, tout comme la lettre en date du 24novembre1993 adressée
au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unie s par le ministre des relatons extérieures du demandeur,
M. Stevo Crvenkovski (annexe 38). Ce dur cissement de la position du défendeur ét ait directement lié au changement de
gouvernement: voir la lettre en date du 31mars1994 adressée au président du C onseil de sécurité per le Secrétaire
général de l’Organisation des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, Nations Unies, doc. S/1994/376 (1 avril 1994) ;
annexe 39.
68
Le 22 avril 1993.
69Le 28 mai 1993.
70Le 28 juin 1993.
71
Note du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies faisant tenir le Neuvième rapport périodique de
la Commission des droits de l’homme dans l’ex-Yougoslavie , établi par M. Tadeusz Mazowiecki, rapporteur spécial, sur
la situation des droits de l’homme, Nations Unies, doc. S/1994/1252 (4 novembre 1994), p. 54, par. 243 ; annexe 41. - 21 -
2.26. L’admission du demandeur à l’Organisation des NationsUnies ouvrit la voie à sa
reconnaissance diplomatique par divers Etats dans le monde. Ainsi, dans les mois qui suivirent 72
l’adoption de la résolution 817 du Conseil de s écurité, plusieurs pays, dont la Nouvelle-Zélande ,
35 la Slovaquie 73et la République populaire de Chine 74, le reconnurent officiellement. Six Etats
75
membres de l’Union européenne (UE) (l’Allemagne, le Danemark, la France, l’Italie, les
Pays-Bas et le Royaume–Uni) firent de même le 16décembre1993 et établirent des relations
diplomatiques normales avec lui, et, à la fin du mo is de décembre 1993, tous les Etats membres de
l’UE ⎯à l’exception du défendeur ⎯ l’avaient reconnu sous son appellation provisoire 76. Ce
mouvement se poursuivit au début de l’année19 94, les Etats-Unis d’Amérique reconnaissant
officiellement le demandeur le 9 février 1994 , et le Japon, le 1 mars 1994. er
2.27. La reconnaissance internationale croissante du demandeur suscita de vives
78
protestations de la part du défendeur et, le 16 février 1994, en réponse à sa reconnaissance par les
Etats-Unis d’Amérique, le défe ndeur lui imposa un embargo sur le commerce et les transports 79,
bloquant ainsi l’arrivée de toute marchandise dans cet Etat enclavé, à l’exception des médicaments
et de l’aide humanitaire. L’embargo dura 19mo is et coûta au demandeur, selon les estimations,
un milliard de dollars 80 ce qui eut de graves répercussions sur son économie et mena l’Etat au bord
81
de l’effondrement. L’attitude du défendeur fut vivement critiquée en Europe .
72
Le 4 avril 1993.
73
Le 26 juin 1993. Des relations diplomatiques ont été établies le 4 mars 1994.
74
Le 12 octobre 1993.
75L’Union européenne est née officiellement le 1 enovembre1993, avec l’entrée en vigueur du traité de
Maastricht.
76Des relations diplomatiques officielles ont été établies entre le demandeur et l’UE le 10 janvier 1996.
77Des relations diplomatiques ont été établies le 13 septembre 1995.
78John Shea, Macedonia and Greece: The Struggle to Define a New Balkan Nation , McFarland & Company
(1997), p. 284.
79Le demandeur dénonça immédiatement cet embargo le qual ifiant «de violation des dispositions de la Charte
des Nations Unies, des documents de la CSCE et du droit international», d éclaration concernant les mesures unilatérales
que la République hellénique a prises à l’encontre de la République de Ma cédoine, 16 février 1994, Nations Unies,
doc. S/1994/194 (18 février 1994). En ce qui concerne l’incidence de l’embargo, voir : Information about the losses the
economy of the Republic of Macedonia has suffered as a consequence of the trade and transport embargo imposed by the
Republic of Greece, Gouvernement de la République de Macédoine, Skopje, (15 avril 1994).
80
Les effets de l’embargo imposé par le défendeur furent aggravés par l’embargo décidé par les Nations Unies à
l’égard du principal partenaire commercial du demandeur, la Serbie, au nord, qui eut pour effet d’interrompre non
seulement le commerce, mais aussi tout tr ansit de poids lourds, de même que le seul lien ferroviaire du demandeur avec
le reste de l’Europe : Rapport du Secrétaire général présenté en application de la résolution 908(1994) , Nations Unies,
doc. S/1994/1067 (17 septembre 1994), par. 24 ; annexe 40.
81Voir, par exemple, la résolution1027(1994) du Cons eil de l’Europe dans laquelle celui-ci indique
«désapprouve[r] fermement les mesures pris es par le Gouvernement grec qui peuvent avoir un effet déstabilisateur dans
une région particulièreme nt vulnérable à l’heure actuelle»; voir égalem ent (sachant toutefois que les représentants
siégeant à l’Assemblée du Conseil de l’Eur ope n’expriment pas les vues de leur Et at), les observations de M.Atkinson
(Royaume-Uni) à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, session de 1994, 21 eséance (30 juin 1994) :
«[c]omment la Grèce pensait-elle que la Macédoine pouvait envahir sa région septentrionale, elle ne l’a jamais précisé, ce
qui n’a rien de surprenant. En effet, il serait impossible à la Macédoine d’envahir la Grèce, puisqu’elle n’a ni chars, ni
artillerie, ni missiles, étant donné que la Yougoslavie a confis qué tous les équipements militaires essentiels. Certes, la
Macédoine dispose de soixante pilotes de chasse qualifiés, mais elle n’a pas d’av ion à leur donner. Et, bien sûr, la
Macédoine ne possède pas de marine, pui squ’elle n’a pas de côtes. » (Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe,
Compte rendu officiel, session de 1994, vol. 3 (1998), p. 584). Voir également la déclaration de M. Seitlinger (France) :
«Concernant les prétendues menaces territoriales, M. Atkinson a déjà expliqué que la Macédoine est la zone la plus
démilitarisée en Europe. Il n’y a pas un seul avion, pas un missile, pas un char. On ne peut donc menacer personne. Une
telle allégation est dépourvue de t oute crédibilité.» (Assemb lée parlementaire du Conseil de l’Europe, Compte rendu
officiel, session de 1994, vol. 3 (1998), p. 585). - 22 -
37 2.28. Tout au long de l’embargo, et nonobsta nt les effets paralysants pour son économie et
ses structures sociales des actes du défendeur 82, le demandeur resta tout à fait ouvert aux
négociations avec le défendeuret se montra désireux de les poursuivre 83. En octobre1994, le
président du demandeur, M. Kiro Gligorov, rappela, lors d’un discours de réélection, que son pays
était «prêt à discuter de toutes les questions d’importance pour les relations entre la Macédoine et la
Grèce qui ne menaceraient pas l’identité nationale et la dignité de notre pays ou de notre peuple» et
qu’il était «prêt à envisager la signature d’un accord avec la République hellénique relativement à
l’inviolabilité de notre frontière commune … qui serait garanti par l’Organisation des
NationsUnies, l’Union européenne, les Etats- Unis d’Amérique…». Il affirma par ailleurs
solennellement que «la Constituti on de la République de Macédoi ne ne conte[nait] aucune
36 prétention territoriale ni aucune forme d’ingérence dans les affaires intérieures de la Grèce ou d’un
84
autre voisin» .
S ECTION III. L’ACCORD INTÉRIMAIRE ET SON APPLICATION
A. Le contenu et la structure de l’accord intérimaire
2.29. C’est dans le contexte exposé dans la sectionII que les Parties négocièrent et
adoptèrent l’accord intérimaire. Il s’agit d’un acco rd provisoire, visant à permettre et faciliter les
relations bilatérales entre le demandeur et le défendeur en attendant que ne soit trouvé un règlement
définitif de la divergence relative au nom. L’une de ses dispositions, l’article5, rappelle le cadre
des négociations sur cette divergence.
2.30. Le texte de l’accord intérimaire s’inspir e largement du projet de traité de 1993 proposé
par M.CyrusVance et lordOwen 85, dont il reprend la structure et le nombre des dispositions.
L’accord intérimaire a été signé le 13 septembre 1995 par les ministres des affaires étrangères des
Parties, après six mois d’intense activité diploma tique, le défendeur ayant accepté de reprendre les
86
négociations avec le demandeur .
82Voir, par exemple, le rapport du Secrétaire général de l’Organisation des Nati onsUnies, en date du
17 septembre 1994, présenté en application de la résolution 908 (1994), qui reconnaît le rôle direct de l’embargo imposé
par le défendeur dans la crise économique et sociale à laquelle a dû faire face le demandeur. NationsUnies,
doc. S/1994/1067 (17 septembre 1994), par. 24 (annexe 40) ; et le rapport du rapporteur spécial de la Commission des
droits de l’homme de l’Organisation desNationsUnies, qui exprime son inquiétudeau sujet des effets négatifs de la
situation économique sur la stabilité sociale du pays et son incidence sur certaines questions sociales plus larges.
Nations Unies, Commission des droits de l’homme, Neuvième rapport périodique sur la situation des droits de l’homme
dans le territoire de l’ex-Yougoslavie , soumis par M.TadeuszMazowiecki, ra pporteur spécial de la Commission des
droits de l’homme. Nations Unies, doc. S/1994/1252 (4 novembre 1994), p. 49, par. 225 (annexe 41).
83Voir, par exemple, la lettre en date du 23fé vrier1994 adressée au premie r ministre du défendeur,
M. Andreas Papandreou, par le président du demandeur, M. Ki ro Gligorov, demandant la tenue d’une réunion et réitérant
la volonté du demandeur de signer un accord garantissant l’inviolabilité de la frontière entre le demandeur et le
défendeur, qui serait garanti par l’Organisation des Nations Unies ou l’Union européenne ; annexe 49.
84Discours d’ouverture du président du demandeur lors de la cérémonie inaugur ale du parlement de la
République de Macédoine (Skopje, le 19 novembre 1994) ; annexe 122.
85Tel que présenté aux paragraphes2. 22 et2.23 ci-dessus, et tel qu’xposé de manière détaillée dans le
chapitre IV ci-après.
86
L’accord, conclu grâce à la médiation de l’envoyé personnel du Secrétaire général de l’Organisation des
Nations Unies, M.Vance, et du Secrét aire d’Etat adjoint des Etats-Unis d’Am érique, M.RichardHolbrooke, fut signé à
la veille des négociations de Dayton qui mirent un terme à la guerre en Bosnie-Herzégovine. - 23 -
2.31. Aux termes de l’accord intérimaire, le défendeur reconnaît le demandeur sous
l’appellation provisoire d’«ex-République yougoslave de Macédoine» (article premier) et s’engage
à lever l’embargo qu’il lui a imposé (article8). Pour sa part, le demandeur réaffirme qu’il n’a ni
n’avancera aucune revendication territoriale à l’égard du défendeur, et que rien dans sa
Constitution ne doit être interprété en ce sens (ar ticle6). Le demandeur s’engage également à
38
modifier son drapeau national (article 7) , concession im87rtante visant à favoriser le
développement de relations pacifiques et la fin de l’embargo .
2.32. Les articles2 à 4 de l’accord intérimair e réaffirment le respect des Parties pour le
caractère «durable et inviolable» de leur fron tière commune, ainsi que po ur leur «souveraineté,
[leur] intégrité territoriale [et leur] indépendance politique». Chacune des Parties s’engage à ne pas
chercher à modifier la frontière commune ou à appuyer une quelconque action en ce sens. En vertu
de l’article 7, les Parties sont en outre convenues de prendre des mesures efficaces afin d’interdire
les actes d’hostilité ou de propagande des organismes d’Etat et de décourager les actes de cette
nature menés par des entités privées. Au paragr aphe3 de l’article7 est énoncée la procédure à
suivre si l’une des Parties pense que l’autre utilise «un ou plusieurs symboles faisant partie de son
patrimoine historique ou culturel» :
«Si l’une des Parties pense que l’autr e Partie utilise un ou plusieurs symboles
faisant partie de son patrimoine historique ou culturel, elle por tera cette question à
l’attention de l’autre Partie et cette de rnière, soit prendra les mesures voulues pour
remédier à la situation, soit indiquera pourquoi elle ne considère pas nécessaire de le
faire.»
2.33. L’accord intérimaire permettait donc de nor maliser les relations entre le demandeur et
le défendeur et spécifiait un cadre de règlement de la divergence relative au nom du premier, des
mesures pratiques afin d’éviter que cette divergence n’affecte les relations bilatérales (article5),
ainsi qu’un cadre devant favoriser et permettre le développement de relations de bon voisinage et
de coopération. L’accord comprend également des engagements relatifs aux droits de l’homme et
39 culturels (articles9 et10), aux institutions interna tionales, multilatérales et régionales (article11),
aux relations conventionnelles (a rticles12 à14), aux relations dans les domaines économique,
commercial, environnemental et juridique (ar ticles15 à20), et au règlement pacifique des
différends (article 21).
B. La désignation du demandeur dans l’accord intérimaire et les accords y relatifs
2.34. L’accord intérimaire n’avait pas pour objet de proposer une solution finale à la
divergence sur le nom du demandeur. En réalité, en vertu du paragraphe 1 de l’article 5, les Parties
se sont engagées à reprendre les négociations concernant ce différend sous les auspices du
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, conformément à la résolution845 du
Conseil de sécurité.
87Ainsi que l’a indiqué le président du demandeur, M.Gligorov, dans une interview télévisée du
16 septembre 1995 : «Allons-nous maintenant livrer bataille, 2 300 ans après ? Allons-nous transformer cette question en
problème chypriote qui ne sera toujours pa s réglé dans 10ans? Si nous livrons bataille pour un sy mbole, voici ce qui
pourrait arriver : les personnes qui ont aujourd’hui 20 ans en au ront 40 lorsqu’elles pourront enfin avoir une vie normale,
lorsqu’elles pourront enfin avoir accès au monde, et lorsque nous pourrons enfin lancer le processus d’adhésion à l’Union
européenne. Est-ce le prix que nous devons payer pour avoi r insisté sur un symbole ? Ce symbole est magnifique, notre
drapeau lui aussi est magnifique, mais tout bien considéré du point de vue de chacun, je pense que, personne au monde ne
nous comprenant, nous aurions mené une ba taille chimérique pour quelque chos e qui a, par le passé, souvent été à
l’origine de guerres dans les Balkans.» Nova Makedonija, (Skopje, 17 septembre 1995). - 24 -
2.35. Evitant tout emploi de nom, l’accord intérimaire appelle le défendeur «la première
Partie» et le demandeur «la seconde Partie». Aucune des Parties n’est désignée par son nom
constitutionnel et l’appellation provisoire d’«ex-République yougoslave de Macédoine», qui figure
dans la résolution 817, n’est pas non plus employée pour se référer au demandeur. Le paragraphe 2
de l’article 5 réserve et garantit le droit de chaque Partie de traiter avec l’autre «compte tenu de leur
position respective» :
«Compte tenu du différend qui les oppose en ce qui concerne le nom de la
seconde Partie, chacune des Parties réserve tous ses droits, sans préjudice des
obligations spécifiques assumées au titre du présent accord intérimaire. Les Parties
coopéreront en vue de fac iliter leurs relations mutuell es, indépendamment de leur
position respective quant au nom de la sec onde Partie. Dans ce contexte, elles
prendront des dispositions pratiques, por tant notamment sur la question de la
documentation, en vue de permettre des activités commerciales normales entre elles,
compte tenu de leur position respective en ce qui concerne le nom de la seconde
Partie. Les Parties prendront des dispositions pratiques pour que le différend relatif au
nom de la seconde Partie ne porte pas a tteinte aux relations commerciales normales
entre la seconde Partie et des tierces parties.»
40 2.36. Les «dispositions pratiques» mentionnées au paragraphe2 de l’article5 devaient
permettre aux Parties de développer des relati ons mutuelles sans préjudice de leur position
respective relativement au différend sur le no m du demandeur, qui devait faire l’objet de
négociations ultérieures. Les «dispositions pra tiques» en question furent définies dans le
mémorandum relatif aux «dispositions pratiques» c oncernant l’accord intérimaire de New York en
date du 1septembr1e995 signé à Skopje le 1o 3ctobr1e995 (ci-après le
88
«mémorandum 1») ⎯, ainsi que dans le mémorandum relatif à l’accord intérimaire de New York
du 13 septembre 1995 sur la mise en place de bureaux de liaison dans les deux pays, qui fut signé à
Athènes le 20 octobre 1995 (ci-après le «mémorandum 2») . Ces deux memoranda ont le statut de
traités bilatéraux; ils énoncent des dispositions pr atiques visant à faciliter les relations entre les
deux pays sur des questions telles que la corresponda nce officielle entre les Parties, la mise en
place de bureaux de liaison, les visas, les transferts bancaires et l’enregistrement des véhicules. Les
«dispositions pratiques» prévoien t expressément que le demandeur peut continuer à utiliser son
nom constitutionnel dans ses rapports avec le défendeur, confirmant ainsi la pratique suivie au sein
de l’Organisation des NationsUnies après l’a doption de la résolution817. Deux exemples
suffisent :
⎯ Correspondance officielle entre les deux Parties : Le mémorandum 1 prévoit que le demandeur
utilisera son nom constitutionnel dans les corres pondances officielles avec le défendeur et que
celui-ci se référera au demandeur en utilisan t l’appellation provisoire figurant dans la
résolution 817. Lorsque le défendeur recevra un document émanant du demandeur dans lequel
celui-ci utilisera son nom constitutionnel, le défendeur «apposera un cachet» sur lequel figurera
l’appellation provisoire; inversement, lors que le demandeur rece vra des documents du
défendeur utilisant l’appellation provisoire, il «apposera un cachet» sur lequel figurera son nom
constitutionnel .
88 Mémorandum relatif aux «dispositions pratiques» concernant l’accord intérimaire de NewYork du
13 septembre 1995 (Skopje, 13 octobre 1995) ; annexe 3.
89
Mémorandum relatif à l’accord intérimaire de New York du 13 septembre 1995, concernant la mise en place de
bureaux de liaison dans les deux pays (Athènes, 20 octobre 1995) ; annexe 4.
90Ibid., note 88 supra, annexe 3, p. 3. - 25 -
⎯ Bureaux de liaison: En vertu du mémorandum2, le demandeur peut faire figurer son nom
constitutionnel à l’intérieur de ses bureaux de liais on situés sur le territoire du défendeur. Une
41 autre plaque peut également être placée à l’ex térieur des locaux en question; le demandeur y
sera désigné pas son appellation provisoire et il sera indiqué que ce n’est pas lui qui l’a
91
placée .
C. Candidatures du demandeur auprès d’organisations et institutions internationales et
qualité de membre au sein de celles-ci : engagements du défendeur
2.37. L’article 11 de l’accord intérimaire énonce l’engagement qui est au cŒur de la présente
affaire, et qui est examiné de manière détaillée da ns le chapitreIV. En vertu du paragraphe1 de
l’article11 de l’accord intérimaire, le défendeur s’est engagé à ne pas s’opposer à ce que le
demandeur devienne membre d’or ganisations et institutions inte rnationales, multilatérales ou
régionales dont il est lui-même membre, dès lors que le demandeur y sera désigné par l’appellation
«ex-République yougoslave de Macédoine». Le différend relatif au nom du demandeur ne devait
donc pas faire obstacle à son adhésion à des orga nisations et institutions internationales,
multilatérales et régionales :
«Lorsque le présent accord intérimaire sera entré en vigueur, la première Partie
[le défendeur] ne s’opposera pas à la demande d’admission de la seconde Partie [le
demandeur] dans des organisations et ins titutions internationales, multilatérales ou
régionales dont la première Partie [le défendeur] est membre, non plus qu’à la
participation de la seconde Partie [le dema ndeur] à ces organisations et institutions;
toutefois, la première Partie [le défendeur] se réserve le droit d’élever des objections à
une telle demande ou à une telle participation si la seconde Partie [le demandeur] doit
être dotée dans ces organisations ou institu tions d’une appellation différente de celle
prévue au paragraphe2 de la résoluti on 817 (1993) du Conseil de sécurité des
Nations Unies.»
2.38. L’article11 devait aplanir les difficu ltés rencontrées par le demandeur pour devenir
membre de diverses organisations internationales et régionales du fait de l’opposition du défendeur.
42 En témoigne l’exemple du Conseil de l’Europe : le défendeur s’est opposé à ce que le demandeur
en devienne membre pendant plus de deux ans ⎯ à compter de la date de l’acte de candidature, le
92
25 juin 1993 ⎯, en raison principalement de le ur différend concernant le nom . Les décisions du
Conseil de l’Europe en matière d’invitations à de venir membre devant être prises par consensus,
l’opposition du défendeur a contribué au blocage de la candidature du dema ndeur. Le défendeur
s’est également opposé à la candidature du demande ur à l’Organisation pour la sécurité et la
coopération en Europe (OSCE).
D. L’entrée en vigueur de l’accord intérimaire
2.39. En application de l’accord intérimaire, le Parlement du demandeur a, le 6 octobre 1995,
voté la loi de1995 relative au drapeau national, remplaçant le drapeau auquel s’opposait le
défendeur par un nouvel emblème, qui représente un soleil jaune sur fond rouge. Sept jours plus
tard, le 13 octobre 1995, l’accord intérimaire entra it en vigueur, conformément au paragraphe 1 de
l’article 22. Le défendeur a enregistré l’accord auprès de l’Organisation des Nations Unies (sous le
numéro 32193) le même jour. Il lie depuis lors les Parties. Cet accord a été un cadre efficace pour
91
Mémorandum relatif à l’accord intérimaire de New York du 13 septembre 1995, concernant la mise en place de
bureaux de liaison dans les deux pays, signé à Athènes le 20 octobre 1995 ; annexe 4, p. 1-2.
92Conseil de l’Europe, comité des ministres, 506 réunion des délégués des ministres (tenue à Strasbourg du 10
au 14 janvier 1994, ainsi que le 20 janvier 1994) (CM/Del/Act(94)506) (10 mars 1994), p. 3-5 ; annexe 121. - 26 -
les relations bilatérales des deux pays, nonobsta nt la poursuite du différend quant au nom du
demandeur. Conformément au paragraphe2 de l’article23, l’accord intérimaire est resté en
vigueur. Il n’a jamais été remplacé par un accord définitif, et le défendeur n’a jamais cherché à y
renoncer par voie de notification écrite prenant effet douzemois plus tard—, ou à invoquer la
suspension de l’une ou l’autre de ses parties. Le demandeur n’a par ailleurs pas connaissance
d’une quelconque objection formelle et écrite par laquelle le défend eur lui aurait reproché d’avoir
commis une violation substantielle de l’article 7 de l’accord intérimaire ou d’une autre disposition
de cet instrument avant fin mars/début avril 2008.
43 S ECTION IV. L’INTÉGRATION DU DEMANDEUR DANS
LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE
2.40. La signature de l’accord intérima ire ouvrait la voie à une ère nouvelle pour le
développement de relations bilaté rales cordiales entre les Parti es. Elle a également facilité
l’intégration pleine et entière du demandeur dans la communauté internationale, comme en atteste
le fait qu’il est devenu membre de diverses «or ganisations et instituti ons internationales,
multilatérales et régionales», ainsi que le prévoyait l’article 11 de l’accord intérimaire. Parmi ces
organisations et institutions figurent :
⎯ le Conseil de l’Europe (9 novembre 1995) ;
⎯ l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (12 octobre 1995) ;
⎯ l’Organisation intergouvernementale pour le s transports internationaux ferroviaires
(1 juin 1996) ;
⎯ l’initiative de coopération pour l’Europe du Sud-Est (6 décembre 1996) ;
⎯ la Conférence européenne de l’aviation civile (3 juillet 1997) ;
⎯ l’Organisation intra-européenne des administrations fiscales (1997) ;
⎯ l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (20 juillet 1997) ;
⎯ l’Organisation européenne et méditerranéenne de protection des plantes (1998) ;
⎯ la Charte européenne de l’énergie (27 mars 1998) ;
⎯ l’Organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne (1 ernovembre 1998) ;
⎯ la Banque des règlements internationaux (26 novembre 1998) ;
⎯ les Autorités communes d’aviation (Joint Aviation Authorities) (15 décembre 1999) ;
⎯ la commission préparatoire de l’Organisation du traité d’interdiction complète des essais
nucléaires (14 mars 2000) ;
⎯ la Cour permanente d’arbitrage (17 février 2001) ;
⎯ l’Organisation internationale de la vigne et du vin (2004) ;
⎯ l’Office européen des brevets (1 erjanvier 2009) .
93La décision d’admettre le demandeur en qualité de membre de l’Office eur opéen des brevets a été prise par le
conseil d’administration de l’Office le 10mars2006, mais le demandeur devenu membre à part entière de cette
organisation que le 1 janvier 2009. - 27 -
2.41. Conformément au paragra phe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire, le défendeur ne
44 s’est pas opposé à la candidature du demandeur auprès de ces organisations, au sein desquelles
94
celui-ci est appelé «ex-Républi que yougoslave de Macédoine» . Le défendeur a levé les
oppositions qu’il avait antérieurement formulées, permettant ainsi au demandeur de devenir
membre des organisations ou institu tions concernées. Ainsi, en ce qui concerne le Conseil de
l’Europe, le défendeur a cessé de s’opposer à l’ adhésion du demandeur en septembre1995, lui
permettant d’en devenir membre deux mois plus tard . 95
2.42. Au cours des années qui ont suivi la si gnature de l’accord intérimaire, le demandeur a
également établi des relations diplomatiques av ec un nombre important d’autres pays, notamment
la République de SierraLeone 96, la République fédérative du Brésil 97, le Royaume hachémite de
98 99 100
Jordanie , les Etats-Unis du Mexique , et la République somalienne . Il entretient à ce jour des
relations diplomatiques avec 160 Etats dans le monde.
2.43. Tout au long de cette période, nonobsta nt l’absence de règlement définitif du différend
concernant le nom du demandeur, les deux Part ies ont poursuivi leurs négociations sur les
questions non résolues. Entre 1995 et 2005, elles ont signé plus de vingt accords et protocoles,
couvrant des domaines très variés allant des trans ports au développement et aux investissements
101
45 financiers, en passant par de nombreux accords rela tifs à la sécurité et la coopération militaire .
Pendant cette période, l’absence d’accord définitif sur la question du nom n’a pas été utilisée ou
considérée comme un obstacle au développement de la coopération entre les Parties ou à des
relations de bon voisinage. Prenant acte de la coopération accrue entre les deux Etats,
94
Pour chacune de ces organisations, le demandeur a présenté sa demande d’adhésion sous son nom
constitutionnel, étant entendu qu’il serait provisoirement dégné, au sein de ces organi sations ou institutions, sous
l’appellation provisoire figurant dans la résolution817 (1993). Le défendeur ne s’y est pas opposé et cela n’a
aucunement fait obstacle à la participati on du demandeur au sein des organisati ons concernées. Voir annexe5 à la
requête soumise à la Cour le 17novembre2008 pour des ex emples de documents relatif s à la qualité de membre
d’organisations.
95 Voir, Assemblée parlementair e du Conseil de l’Europe, rappor t officiel, session de1995, 29 eréunion
(27 septembre 1995).
96Le 17 juillet 1998.
97Le 14 octobre 1998.
98Le 15 septembre 2000.
99
Le 4 octobre 2001.
100
Le 17 février 2005.
101A titre d’exemple, on peut citer le protocole relatif arégime réciproque en matière de visas et de droits
(Athènes, 20 octobre 1995) (annexe 6) ; le protocole relatif aux transports et communications (Athènes, 20 octobre 1995),
annexe5; le protocole relatif à la coop ération frontalière (Athènes, 23juin1998) (annexe7); le protocole relatif à la
coopération en matière de police (Ohr id, 8 juillet 1998) (annexe 8) ; l’accord de coopération militaire (Skopje,
14décembre1999) (annexe9); le protocole relatif à la coop ération dans le domaine de la formation militaire (Skopje,
19 décembre 2002) (annexe 10) ; le mémorandum relatif à l’établissement de bureaux pour les affaires consulaires,
économiques et commerciales à Bitola et Thessalonique (Skopje, 22janvier2 004) (annexe11); et le mémorandum
d’entente relatif à l’appui à l’équipmédicale conjointe aux fins de la participation à l’opération ISAF menée par
l’OTAN en Afghanistan (Athènes, 27 juillet 2005) (annexe 12). Tous ces accords ⎯ à une exception près ⎯ utilisent les
expressions retenues dans l’accord intérima ire, à savoir «la première partie» et «l a seconde partie». Aucune des parties
n’est appelée par son nom, et l’appellation provisoire n’est pas non plus utilisée. - 28 -
M. Costas Simitis, premier ministre du défendeur, a même déclaré en2000: «la période de
tensions est derrière nous et nous sommes entrés dans une ère nouvelle de coopération et de
développement de nos relations bilatérales» 102.
S ECTION V. L A PARTICIPATION DU DEMANDEUR AUX ACTIVITÉS DE L ’OTAN ET L ’OPPOSITION
DU DÉFENDEUR À SON ADMISSION AU SEIN DE CETTE ORGANISATION
A. L’OTAN et son processus d’admission
2.44. L’Organisation du traité de l’Atlanti que Nord (OTAN), également désignée sous le
nom d’«Alliance de l’Atlantique Nord», est une alliance militaire intergouvernementale, fondée par
le traité de l’Atlantique No rd, en date du 4avril1949, en vertu duquel les pays membres
s’engagent à respecter les principes de défense co llective, d’assistance mutuelle et de coopération.
46 103
L’Alliance, qui comptait douze pays fondateurs , a adopté ce qu’elle appelle une «politique de la
porte ouverte» vis-à-vis de nouvelles adhésions et compte aujourd’hui 28Etats membres, ayant
ainsi plus que doublé sa taille au cours des 60dern ières années. La Grèce a rejoint l’Alliance
en 1952, aux côtés de la Turquie, suivie par l’ Allemagne de l’Ouest en 1955, l’Espagne en 1982 et
un grand nombre de pays ayant appartenu à l’anci en bloc de l’Est (la République tchèque, la
Hongrie et la Pologne en 1999; la Bulgarie, l’Est onie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la
Slovaquie et la Slovénie en 2004 ; et l’Albanie et la Croatie, qui ont été invitées à devenir membres
en 2009, lors du Sommet de l’OTAN à Bucarest, en av ril 2008). Le processus d’élargissement de
l’Alliance s’est déroulé conformé ment à l’article10 du traité de l’Atlantique Nord, qui se lit
comme suit :
pLaesevent, par accord unanime, inviter à accéder au traité tout autre
Etat européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent traité
et de contribuer à la sécurité de la région de l’Atlantique Nord. Tout Etat ainsi invité
peut devenir partie au traité en dé posant son instrument d’accession auprès du
gouvernement des Etats-Unis d’Amérique. Ce lui-ci informera chacune des parties du
dépôt de chaque instrument d’accession.» (Les italiques sont de nous.)
2.45. Ainsi, pour qu’un Etat soit invité à deve nir membre de l’Alliance, il doit: i)y être
invité par accord unanime; ii)se situer en Europe; iii)être susceptible de favoriser le
développement des principes du traité de l’Atlantique Nord ; et iv) être susceptible de contribuer à
la sécurité de la région de l’Atla ntique Nord. La condition i) est la plus importante aux fins de la
présente instance : elle pose le consensus de t ous les pays membres comme condition nécessaire à
l’adoption des décisions relatives à l’élargissement de l’Alliance 10: l’objection d’un seul pays
membre de l’OTAN suffit à faire échec à la demande d’adhésion d’un autre Etat.
10Déclaration du premier ministre du défendeur, M. Costas Simitis, «PM: Our Policy on Balkan Reconstruction
and FYROM» [Notre politique à l’égard de lreconstruction des Balkans et de l’ERYM], Macedonian Press Agency:
News in English (7avril2000), disponible à l’adresse httww.hri.org/news/greek/mpab/2000/00-04-07.mpab.html.
M. Simitis a également déclaré que le différend relatif au nom était «le seul problème non encore résolu de nos relations
avec l’ex-République yougoslave de Macédoine, mais qu’in’avait pas empêché [les de ux pays] de développer des
relations bilatérales dans tous les domaines».
103La Belgique, le Canada, le Danemark, les Etats-Unis d’Amérique, la France, l’Islande, l’Italie,
le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal et le Royaume-Uni.
10Les pays membres de l’OTAN conservent leur entière souveraineté au sein de l’Alliance. Toutes les
décisions, y compris celles relatives à l’élargissement, sont prises d’un commun accord par l’ensemble des 28pays
membres. - 29 -
47 2.46. Le processus d’admission des Etats souhaitant devenir membres de l’OTAN a évolué
depuis la fin de la Guerre froide. L’Alliance a ainsi créé plusieurs programmes dans le but de
favoriser la coopération avec les pays non membres et d’aider les Etats souhaitant faire partie de
l’OTAN à remplir les conditions iii) et iv) susmentionnées. Il s’agit en particulier du partenariat
pour la paix (PPP), lancé en1994, et du plan d’action pour l’adhésion (MAP), mis en place
en 1999.
2.47. Le PPP est un programme de coopération b ilatérale pratique entre les pays partenaires
et l’OTAN visant, d’une part, à promouvoir la confiance et les relations bilatérales entre l’OTAN et
les pays de l’ancien bloc de l’Est et, d’autre part, à réduire les menaces contre la paix pouvant
naître entre les pays partenaires ou à l’intérieur de leurs frontières. Les Etats non membres qui y
participent peuvent bénéficier de l’entraînement dispensé par les forces de l’OTAN et se joindre à
des missions de maintien de la paix. Le MA P est un mécanisme complémentaire du PPP dont le
but est d’aider les pays qui souhaitent devenir me mbres de l’OTAN à se préparer à leur éventuelle
adhésion. Les pays reçoivent des conseils, une assistance et un appui logistique adaptés à leurs
besoins afin de satisfaire aux exig ences liées au statut de membre. Chaque pays qui participe au
MAP est tenu d’élaborer un programme national annuel, dans lequel sont exposées en détail les
mesures qu’il entend prendre en vue de son a dhésion. Ce programme national porte sur des
questions politiques, économiques et juridiques, et sur des questions relatives à la défense, aux
ressources et à la sécurité et est examiné par les représentants de l’OTAN, qui évaluent les progrès
réalisés. Bien que la participation à ce progra mme ne garantie nullement, à terme, l’adhésion à
l’OTAN, sur les dix pays qui y ont participé de puis 1999, seul le demandeur ne s’est pas vu offrir
le statut de membre 105.
2.48. C’est généralement à l’occasion de ses sommets, organisés tous les deux ans environ,
que l’OTAN prend la décision d’inviter un pays candidat à rejoindre l’Alliance. Lorsqu’une
candidature reçoit un accueil favorable unanime, le pays est alors invité à entamer des pourparlers
d’adhésion. Cette invitation marque le début du processus d’admission, qui s’achève en général au
terme d’une période de deux ans 106. Suite à cette invitation, le pays candidat s’engage dans une
série de pourparlers avec des experts de l’OTAN, qui ont pour but de débattre et d’obtenir une
confirmation officielle de la part du pays inv ité de sa volonté et de sa capacité d’honorer les
48 obligations et engagements politiques, juridiques et militaires découlant de son adhésion, ainsi que
de discuter plus avant des réformes qu’il est censé adopter, avant et après son adhésion, en vue
d’accroître sa contribution à l’Alliance. Au term e de ces pourparlers, le ministre des affaires
étrangères du pays invité envoie une lettre d’intention, faisant état du désir du pays de devenir
membre de l’OTAN, lequel établit alors un protocole d’adhésion au traité de l’Atlantique Nord, qui
devra être signé et ratifié par tous les pays membres de l’OTAN. Au terme du processus de
ratification, le pays est invité par le Secrétaire général de l’OTAN à devenir partie au traité. Une
fois qu’il a été satisfait aux procédures nationales visant à autoriser l’admission à l’OTAN, le pays
dépose son instrument d’accession auprès du gouvernement des Etats-Unis, et devient
officiellement partie au traité de l’Atlantique Nord et, par voie de conséquence, membre de
l’OTAN.
B. Les liens du demandeur avec l’OTAN
2.49. Le demandeur, plébiscité par plus de 90 % de sa population, aspire depuis longtemps à
devenir membre de l’OTAN et de l’UE, deux buts essentiels à ses yeux pour assurer sa sécurité.
Cela fait en effet plus de 15 ans qu’il multiplie les démarches auprès de l’OTAN en vue d’obtenir
105Les 10pays qui ont participé au MAP sont les suiva: le demandeur, l’Albanie, la Bulgarie, la Croatie,
l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie.
106
Quoique ce processus puisse être nettement plus court, comme dans les cas de la Croatie et de l’Albanie. - 30 -
son adhésion: depuis le 23décembre1993 exactem ent, date à laquelle il a adopté une résolution
107
dans laquelle il faisait part de son désir de faire partie de l’OTAN .
2.50. En1995, suite à la signature de l’accord intérimaire, le demandeur a été invité à
participer au PPP sous le nom provisoire d’«ex-République yougoslave de Macédoine» ⎯ offre
qu’il a acceptée. Quatre ans plus tard, en 1999, il était invité à participer au MAP, là encore sous la
même appellation provisoire, ⎯ offre qu’il a également acceptée. Depuis lors, les forces militaires
du demandeur ont participé à de nombreux exer cices de l’OTAN et apporté leur concours à
plusieurs campagnes de l’OTAN. Ainsi, dans les Balkans, le demandeur a fourni un appui
49
logistique à la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR), placée sous le commandement
de l’OTAN 10, à partir du quartier général de l’or ganisation à Skopje de1999 à2007, année
pendant laquelle il a pris la direction du centre de coordination de la KFOR, placé entièrement sous
109
sa responsabilité . En Afghanistan, le demandeur appor te sa contribution à l’opération menée
sous la conduite de l’OTAN depuis2002, et co mpte actuellement que lque 170hommes servant
sous ses ordres.
2.51. Le demandeur a toujours été désigné sous le nom d’«ex-Ré publique yougoslave de
Macédoine» au sein de l’OTAN et a cl airement indiqué qu’il acceptait ce modus vivendi afin de
faciliter son adhésion. Comme l’a dit le président d’alors, Branko Crvenkovski :
«Naturellement, le plus satisfaisant pour nous serait de devenir membre de
l’OTAN sous notre nom constitutionnel. N éanmoins, si aucune solution à notre
différend n’est trouvée avant que nous ayons rejoint l’OTAN, nous sommes prêts, à
titre de solution temporaire, à devenir un membre à part entière sous le nom par lequel
nous sommes actuellement désignés aux Nations Unies.» 110
2.52. Le défendeur avait déclaré que, c onformément à ses obligations découlant du
paragraphe1 de l’article11 de l’accord inté rimaire, il ne s’opposerait pas à l’admission du
demandeur à l’OTAN, à la condition que celui-ci y soit désigné sous le nom d’«ex-République
yougoslave de Macédoine». Voir, par exemple, l es déclarations du ministre des affaires étrangères
du défendeur, M.PetrosMolyviatis, et du porte -parole du ministère, M.GeorgeKoumoutsakos,
telles qu’elles ont été rapportées en 2005 :
«M.Molyviatis a déclaré…aux jour nalistes que la position du Gouvernement
grec sur la question du nom de l’ex-Ré publique yougoslave de Macédoine était
dépourvue d’ambigüité. Il a indirectement mais clairement mis en garde contre
l’exercice par la Grèce de son droit de veto: «Nous avons le droit, sur la base de
l’accord intérimaire de1995, de nous opposer à l’admission de ce pays voisin dans
50 des organisations internationales sous une appellation autre que celle
d’«ex-République yougoslave de Macédoine» … Le nom d’«ex-République
yougoslave de Macédoine» utilisé dans les re lations entre ce pays voisin et l’Union
européenne «ne pose aucun problème à la Grèce aussi longtemps qu’il demeurera
107
Décision relative à l’adhésion de la République de Macé doine à l’Organisation do traité de l’Atlantique Nord
(OTAN), en date du 23décembre1993, Journal officiel de la République de Macédoine , n 78, année XLIX
(27 décembre 1993) ; annexe 21.
108
La KFOR est une force internationale, créée parésolution1244 du Conseil de sécurité de l’Organisation
des Nations Unies, en date du 10 juin 1999 (S/RES/1244) afin de créer un environnement sûr et sécurisé au Kosovo.
10Ce qui a réduit les coûts financiers et de personnel de l’OTAN de manièr e significative tout en assurant aux
opérations de la KFOR la fourniture de services d’appui comparables à ceux de l’OTAN.
11Stavros Tzimas, «Nous sommes prêts à devenir membres de l’OTAN sous le nom d’«ex-République
yougoslave de Macédoine»», Kathimerini (4 juin 2007) ; annexe 69. - 31 -
inchangé»», a déclaré le porte-parole du ministère des affaires étrangères, George
Koumoutsakos.» 111 (Les italiques sont de nous.)
C. Le sommet de l’OTAN tenu à Bucarest en 2008
2.53. La demande d’admission du demande ur comme membre de l’OTAN sous la
désignation provisoire d’«ex-République yougosla ve de Macédoine» a été examinée lors du
sommet de l’organisation qui s’est tenu à Bucarest les 2 et 3 avril 2008, aux côtés des demandes de
l’Albanie et de la Croatie. Dans la période qui a précédé ce sommet, l’adhésion de la Macédoine a
reçu un large soutien et le fait que le demandeur satisfaisait aux critères régissant la qualité de
112
membre de l’OTAN n’a, ainsi que l’attestent les déclarations suivantes, nullement été contesté :
51 ⎯ Déclaration faite le 11mars2008 par M.Daniel Fried, secrétaire d’Etat adjoint aux affaires
européennes et eurasiennes des Etats-Unis d’ Amérique, devant la commission des affaires
étrangères du Sénat, à Washington :
111Service de presse de l’ambassade du défendeur à Washington, communiqué de presse, «Le ministre des
affaires étrangères informe le premier ministre des derniers événements conc ernant la question de l’ex-République
yougoslave de Macédoine» (12 octobre 2005) ; annexe 68.
112Ministère de la défense de la Républi que de Slovénie, «Selon le ministre de la défense, la Macédoine satisfait
aux normes de l’OTAN» (27 juillet 2007) : annexe 70. «Le ministre de la défense tchèque s’engage à aider la Macédoine
à entrer dans l’OTAN», Agence de presse tchèque (14 septembre 2007) : annexe 72. «Le ministre des affaires étrangères
reçoit le soutien du Royaume-Uni à l’intégration de la Macédoine dans l’UE et dans l’OTAN», BBC Monitoring Europe
(18 octobre 2007) : annexe 74. «Les ministres macédonien et canadien évoquent les réformes de l’OTAN et les missions
de maintien de la paix», BBC Monitoring Europe (1 enovembre2007): annexe75. «Des représentants des ministères
des affaires étrangères macédonie n et slovaque s’entretiennent des relations b ilatérales, de l’Union européenne et de
l’OTAN», BBC Monitoring Europe (23janvier2008): annexe76. «La Turquie s’engage à Œuvrer en faveur de
l’adhésion de la Macédoine à l’OTAN», BBC Monitoring Europe (10 février 2008) : annexe 77. «Les premiers ministres
macédonien et luxembourgeois s’en tretiennent de l’adhésion à l’OT AN et à l’Union européenne», BBC Monitoring
Europe (15février2008): annexe78. Ministère des affaires étrangères de la République de Lettonie, communiqué de
presse, «Le ministre des affaires étrangères letton déclare qu’il soutient l’entrée de la Croatie dans l’Union européenne et
l’OTAN» (19 février 2008) : annexe 79. «La Bulgarie soutient l’adhésion de la Macédoine à l’OTAN», S ofia News
Agency (5mars2008): annexe 81. Ministère des affaires étrangères de la République de Lituanie, communiqué de
presse, «La Lituanie soutient résolument la politique de la porte ouverte de l’Alliance Atlantique» (6mars2008):
annexe 82. Ministère norvégien des affaires étrangères, «Réunion des ministres des affaires étrangères des pays membres
de l’OTAN ⎯siège de l’OTAN, Bruxelles, 6mars2008 ⎯ Liste des points à aborder par le ministre et observations»,
page Web officielle (téléchargée le6 mars2008): annexe125. Ministère roum ain des affaires étrangères, communiqué
de presse, «Participation du ministre des a ffaires étrangères, M. Adrian Cioroianu, à la réunion des ministres des affaires
étrangères de l’OTAN» (7mars2008): annexe84; «Des députés néerlandais considèrent que la question du nom ne
devrait pas conditionner l’entrée de la Macédoine dans l’OTAN», BBC Monitoring Europe (11 mars 2008) : annexe 85 ;
«La Slovaquie soutient les efforts de la Macédoine pour rejoindre l’OTAN et l’Union européenne», People’s Daily
Online (12mars2008): annexe86; Gouvernement de la Répub lique d’Estonie, communiqué de presse, «Le premier
ministre Ansip confirme que l’Estonie soutenait la volonté de la Macédoine d’ entrer dans l’OTAN» (26mars2008):
annexe87; Ministère des affaires ét rangères de la République de Hongrie , «La Hongrie est favorable à un nouvel
élargissement de l’Alliance atlantique au sommet de l’OTAN qui se tiendra à Bucarest la semaine prochaine ⎯ note
d’information du secrétaire d’Etat et directeur des affair es politiques Gábor Szentiványi à l’intention des membres du
club OTAN du parlement hongrois», page Web officielle (téléchargée le 26 mars 2008) : annexe 127 ; «La République
tchèque et les Etats-Unis devraient conclure dans les prochains jours un accord sur l’implantation d’une station radar…»,
agence de presse nationale CTK (31 mars 2008) : annexe 91 ; «La Hongrie et l’Allemagne soutiennent l’adhésion à
l’OTAN de trois Etats des Balkans», Budapest Times (31 mars 2008) : annexe 92 ; Lech Kaczynski, «L’OTAN doit
accueillir l’Ukraine et la Géorgie», the Financerl Times (30 mars 2008) : annexe 93 ; «Le président se rendra mercredi au
sommet de l’OTAN», agence de presse PAP (1 avril2008): annexe94; «Le président Kaczynski présent à Bucarest
pour le sommet de l’OTAN», agence de presse PAP (2 avril 2008) : annexe 95 ; OTAN, page Web officielle du sommet
de Bucarest, «Discours d’ouverture du premier ministre C ălin Popescu-Tăriceanu à la conférence de Bucarest, «OTAN :
une transformation nécessaire»» (2avrl 008), dont la ve rsion anglaise peut être consultée sur le site:
http://www.summitbucharest.ro/documente/fisiere/en/Discurs_Premierul_Ta… : annexe 128 ;
«Le premier ministre slovène espère qu’un compromi s sera trouvé au sujet du nom de la Macédoine», BBC Monitoring
Europe (2avril2008): annexe96; «Bush présente ses observations au sommet de l’OTAN», The Washington Post
(2 avril 2008) : annexe 97; «L’ambassade d’Italie dément les informations diffusées par les médias sel on lesquelles elle
soutiendrait le veto contre l’entrée de la Macédoine dans l’OTAN», BBC Monitoring Europe (4 avril 2008) :
annexe 101 ; Ministère canadien des affaires étrangères et du commerce international, «Les relations entre le Canada et la
République de Macédoine», page Web officielle (téléchargée en octobre 2008) : annexe 134. - 32 -
«Grâce au travail accompli par de nombreux membres de votre commission,
l’élargissement de l’OTAN a été un très grand succès. Le Gouvernement soutient
résolument la volonté de l’Albanie, de la Croatie et de la Macédoine de rejoindre
l’OTAN. Ces trois Etats ont réalisé des progrès importants, particulièrement ces deux
dernières années. Leurs forces sont présentes à nos côtés en Afghanistan et participent
à d’autres opérations de maintien de la paix dans le monde. Ils continuent à jouer un
rôle important au Kosovo. En résumé, ils ont démontré clairement qu’ils étaient
résolus à assumer les responsabilités qui sont celles d’un membre de l’OTAN …
Depuis2001, la Macédoine a fait de gra nds progrès vers l’établissement d’une
démocratie multiethnique. Son gouvernemen t a Œuvré avec fermeté en faveur de
l’état de droit en appliquant plusieurs lois essentielles relatives à ses tribunaux et à ses
forces de police et en prenant des mesu res contre la traite des personnes. La
Macédoine, tout comme les autres pays candidats, fait plus que jouer son rôle dans les
opérations de maintien de la paix, et l es réformes en matière de défense qu’elle a
engagées sont remarquables. Une question, cependant, pèse sur sa candidature à
l’OTAN: le différend avec la Grèce au suje t du nom de la Macédoine. La Grèce a
indiqué que, si cette question n’était p as réglée, elle s’opposerait à ce que la
52 113
Macédoine soit invitée à entrer dans l’OTAN.» (Les italiques sont de nous.)
⎯ Déclaration du 14septembre2007 du ministre de la défense de la République tchèque,
Vlasta Parkanova :
«Ma visite [au demandeur] est le si gne du soutien que nous apportons à la
Macédoine sur la voie de son adhésion aux organisations euro-atlantiques. J’espère
que la Macédoine sera invitée à rejoindre l’OTAN au sommet de Bucarest en
avril 2008.» 114
⎯ Déclaration du secrétaire d’Etat et directeu r des affaires politiques de la Hongrie,
Gábor Szentiványi :
«Selon nous, il est particulièrement important qu’une nouvelle vague
d’élargissements soit inaugurée à l’occasion du sommet de Bucarest et que les trois
Etats candidats (l’Albanie, la Croatie et l’ex-République yougoslave de Macédoine)
soient invités à rejoindre l’Alliance.»115
2.54. Malheureusement, le défendeur s’ét ant opposé à l’adhésion du demandeur à l’OTAN,
dont les règles exigent le consensus de tous les pays membres, l’organisation a annoncé le
3avril2008 qu’elle inviterait l’Albanie et la Cr oatie à entamer les pourparlers en vue de leur
adhésion, mais qu’elle n’en ferait pas de même à l’égard du demandeur.
2.55. Dans la déclaration qu’elle a pub liée à l’issue du sommet de Bucarest, l’OTAN a
félicité le demandeur pour «l’engage ment dont [il] fait preuve à l’égard des valeurs de l’OTAN et
53 des opérations de l’Alliance», indiquant claire ment qu’il remplissait sans conteste toutes les
conditions pour adhérer à l’organisation. Cette position a d’aille urs été confirmée par le président
113
Mission des Etats-Unis d’Amérique a uprès de l’OTAN, déclaration de M.DanielFried, secrétaire d’Etat
adjoint aux affaires européennes et eurasiennes, dela commission des affaireétrangères du Sénat, «OTAN:
élargissement et efficacité» (11 mars 2008) ; annexe 126.
114«Le ministre de la défense tchèque s’engage à aider la Ma cédoine à entrer dans l’OTAN», Agence de presse
tchèque (14 septembre 2007) ; annexe 72.
115Ministère des affaires étrangère s de la République de Hongria Hongrie est favorable à un nouvel
élargissement de l’Alliance atlantique au sommel’OTAN qui se tiendra à Bucarest la semaine procha⎯ note
d’information du secrétaire d’Etat et directeur des affair es politiques Gábor Szentiványi à l’intention des membres du
club OTAN du parlement hongrois», page Web officielle (téléchargée le 26 mars 2008) ; annexe 127. - 33 -
des Etats-Unis d’Amérique dans une déclaration officielle faite deux jours après le sommet : «[t]out
comme la Croatie et l’Albanie, la Macédoine satisfait à l’ensemble des critères régissant l’adhésion
à l’OTAN» 11.
2.56. Ce nonobstant, il a été décidé, à la suite de l’opposition du défendeur, que le
demandeur ne serait invité à rejoindre l’Alliance que lorsqu’«une solution mutuellement acceptable
aura[it] été trouvée à la question du nom». Dans sa déclaration du 3avril2008, l’Alliance
reconnaît «le travail important accompli par l’ ex-République yougoslave de Macédoine et
l’engagement dont elle fait preuve à l’égard des valeurs de l’OTAN et des opérations de
l’Alliance», et salue «les efforts mis en Œuvre par ce pays pour instaurer une société
multiethnique». La déclaration se poursuit cependant comme suit :
«Dans le cadre des NationsUnies, de nombreux acteurs se sont employés
activement au règlement de la question du nom, mais l’Alliance a noté avec regret que
ces pourparlers n'avaient pas abouti. C’ est pourquoi nous sommes convenus qu’une
54 invitation serait faite à l’ex République yo ugoslave de Macédoine dès qu’une solution
mutuellement acceptable aura été trouvée à la question du nom. Nous souhaitons
vivement voir les négociations reprendre san s délai et comptons bien qu’elles seront
117
menées à bonne fin dès que possible.»
2.57. L’opposition du défendeur qui a conduit, le 3avril2008, au rejet de la demande
d’adhésion du demandeur à l’OT AN a cristallisé le différend entre les Parties au sujet des
obligations qui incombent au défendeur en vertu du paragraphe1 de l’article11. Cette date
constitue donc la date critique pour le différend.
116
Chef du service de pre sse des Etats-Unis d’Amérique, allocution radiophonique du président des Etats-Unis
d’Amérique, George W. Bush (5 avril 2008); annexe102. Voir également la déclaration du secrétaire d’Etat de
l’époque, Mme Condoleezza Rice, lors d’une conférence de presse tenue à l’issue du sommet de Bucarest :
«[n]ous regrettons sincèrement que la Macédoine n’ ait pas été invitée à rejoindre l’OTAN aujourd’hui,
alors que nous avons, avec tant d’autres, beaucoup Œuvr é pour que cela se produise. Mais l’organisation
est fondée sur la règle du consensus, le point positif étant que personne n’a laissé entendre que la
Macédoine n’était pas prête à y adhérer, qu’elle neremplissait pas tel ou tel critère. Si vous lisez la
déclaration, ce qui est dit, c’est que la Macédoine pourra rejoindre l’OTAN dès que le problème du nom
aura été résolu. J’espère que tel sera bientôtcas, sachant que nous n’avons fait aucun mystère de ce
que nous considérions que la Macédoine aurait dû être invitée à adhérer dès maintenant. Mais, encore
une fois, notre organisation est fondée sur le consensus». Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique,
bureau du chef du service de presse de la Maison blanch e, conférence de presse de la secrétaire d’Etat,
Mme Condoleeza Rice, et du conseiller pour la sécurité nationale, M. Stephen Hadley (3 avril 2008) ;
annexe 98.
Voir également la lettre en date du 19 mai 2008 adressée au secrétaire géné ral de l’OTAN par vingt diplomates,
universitaires et responsables internationaux européens et américains de haut rang : «Pour l’adhésion de la République de
Macédoine à l’OTAN» :
«Nous prenons acte et nous nous félicitons de ce que l’Alliance ai t, au paragraphe20 de la
déclaration du sommet du Bucarest, reconnu que la Macédoine satisfaisait aux critères régissant
l’adhésion. Nous relevons cependant que, dans ce même paragraphe, toute invitation à adhérer qui
pourrait être adressée à la Macédoi ne semble être conditionnée au règlement du différend qui oppose
celle-ci à la Grèce en ce qui concerne le nom du pays. Si tel est le cas, cette condition semblerait
contraire à l’engagement de la Grèce, en vertu de l’accord intérimaire de1995, de ne pas s’opposer à
l’adhésion de la Macédoine, à condition que celle- ci soit dénommée «ex-République yougoslave de
Macédoine»» ; annexe 133.
117Communiqué de presse de l’OTAN (2008)049, «Décl aration du sommet de Bucarest publiée par les chefs
d’Etat et de gouvernement participant à la réunion du Conseil de l’Atlantique No rd tenue à Bucarest le 3avril2008»
(3 avril 2008) ; annexe 65. - 34 -
D. L’opposition du défendeur à l’adhésion du demandeur à l’OTAN
2.58. Le fait que le défendeur, qui est membre de l’OTAN depuis 1952, se soit opposé à
l’adhésion du demandeur à cette organisation est incontestable. C’est cette opposition qui a
finalement empêché le demandeur d’être invité à rejoindre l’OTAN. Le premier ministre du
défendeur l’a explicitement indiqué dans une décl aration qu’il a faite aux «femmes et hommes de
Grèce» le jour du sommet de Bucarest, après que l’OTAN eut annoncé que le demandeur ne serait
pas invité à adhérer à l’organisation :
«Femmes et hommes de Grèce,
unis et confiants dans nos capacités, nous a vons remporté une bata ille … Pendant le
sommet de l’OTAN qui s’est tenu ici, à Bucarest, nous avons examiné les
candidatures de trois pays qui souhaitent devenir membres de l’Alliance
nord-atlantique: l’Albanie, la Croatie et l’ex-République yougoslave de Macédoine.
Il a été décidé à l’unanimité que l’Albani e et la Croatie adhèreraient à l’OTAN. En
raison du veto de la Grèce, l’ex-République yougoslave de Macédoine ne rejoindra
pas l’OTAN … Hier et aujourd’hui, pendant nos réunions, nous avons fait valoir nos
solides arguments, affirmant clairement nos positions et nos intentions.» (Les
italiques sont de nous.) 118
55 2.59. La déclaration du premier ministre Ka ramanlis ne laisse subsister aucun doute et
aucune ambiguïté. Elle a d’ailleurs été confirmé e quelques jours plus tard par le représentant
permanent du défendeur auprès de l’Organisation des Nations Unies, dans une lettre en date du
14 avril 2008, adressée aux représentants permanents des autres Etats membres :
«Lors du récent sommet de l’OTAN à Bucarest, étant donné qu’aucune solution
viable et définitive n’a pu être trouvée à la question du nom, la Grèce n’a pas pu
accepter que l’ex-République yougoslave de Macédoine soit invitée à rejoindre
l’Alliance nord-atlantique.» 119 (Les italiques sont de nous.)
2.60. Un grand nombre de déclarations faites avant, pendant et après le sommet de Bucarest
confirment que le défendeur avait l’intention de s’opposer à l’adhésion du demandeur à l’OTAN le
3avril2008 ou aux alentours de cette date, et qu’il l’a effectivement fait. Le défendeur a
également précisé qu’il s’opposerait à la demande d’adhésion du demandeur à une autre institution
120
régionale, à savoir l’Union européenne . La position sans ambiguïté du défendeur ressort de
nombreuses lettres, articles de presse, discours et interviews qui ont précédé le sommet de Bucarest
et faisaient notamment suite à la réunion informelle des ministres des affaires étrangères de
118Ministère des affaires étrangères du défendeurMessage du premier ministre, M.Kostas Karamanlis ,
(3 avril 2008) ; annexe 99.
119Lettre en date du 14 avril 2008 adressée au représentant permanent du Costa Rica auprès de l’Organisation des
Nations Unies, M. Jorge Urbina, par le représentant permanent du défendeur auprès de l’Organisation des Nations Unies,
M.John Mourikis; annexe132. Des lettr es similaires ont été adressées par le défendeur à tous les autres membres du
Conseil de sécurité ainsi qu’au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
120Voir, par exemple: «Karamanlis: la Grèce opposera son veto aux candidatures de la Macédoine à l’Union
européenne et à l’OTAN si la question du nom n’est pas réglée»,Southeast European Times (7 septembre 2007) :
annexe 71 ; et Dora Bakoyannis, «Le point de vue d’Athènes», International Herald Tribune (31 mars 2008) : annexe 90. - 35 -
121
56 l’OTAN, tenue à Bruxelles le 6 mars 2008 . Les éléments présentés ci-après illustrent de manière
non exhaustive la position du défendeur, position contraire à l’obl igation qui lui incombe en vertu
de l’accord intérimaire. Ainsi qu’il en ressort clairement, l’opposition du défendeur n’était pas
fondée sur le seul motif autorisé en vertu du paragra phe1 de l’article11, et le défendeur ne l’a
d’ailleurs jamais, avant la fin du mois de mars/le début du mois d’avril2008, formulée en ces
termes :
⎯ Déclaration faite devant le Parlement par le premier ministre du défendeur,
M. Kostas Karamanlis, le 22 février 2008 :
«En l’absence de solution mutuellement acceptable au problème du nom, l’ex-
République yougoslave de Macédoine ne saurait être invitée à participer à la même
alliance que nous.» 122
⎯ Déclaration du ministre des affaires étrangères du défendeur, Mme Dora Bakoyannis, à la suite
de la réunion informelle des ministres des a ffaires étrangères de l’OTAN, tenue à Bruxelles
le 6 mars 2008 :
«En ce qui concerne l’ex-République yougoslave de Macédoine, j’ai indiqué
clairement à nos alliés que la politique suivie par le gouvernement de notre voisin dans
ses relations avec la Grèce…ne nous perm ettait malheureusement pas d’adopter la
même attitude positive que dans le cas de la Croatie ou de l’Albanie… Comme je l’ai
précisé à mes collègues du Conseil , c’est pour cette raison que la Grèce n’a pas pu
consentir à cette invitation . Nous le déplorons. Pers onne n’aime faire usage d’un
«droit de veto»… Tant qu’aucune solution…ne sera trouvée, les ambitions
euro-atlantiques de l’ex-République yougos lave de Macédoine se heurteront à un
obstacle insurmontable.» 123 (Les italiques sont de nous.)
⎯ Discours prononcé le 2m 7ar2s008 par le premier ministre du défendeur,
57 M. Kostas Karamanlis, devant le groupe parlementaire du parti au pouvoir :
«Au cours de ces derniers mois, nous avons pris nos responsabilités en
indiquant clairement que, en l’absence de solution mutuellement acceptable, il n’était
121Le défendeur avait déjà, par le passé, menacé ds’opposer à l’adhésion du demandeur à l’OTAN, menace
formulée pour la première fois le 5 novembre2004, lendemain du jour où les Etats-Unis d’Amérique avaient annoncé
leur décision de reconnaître le demandeur sous son nom constitutionnel (voir la déclaration du porte-parole du
gouvernement du défendeur, M.EvangelosAntonaros, telle que rapportée dans l’article intitulé «La Grèce pourrait
s’opposer aux candidatures de la Macédoine à l’OTAN et à l’Union européenne en raison de la question du nom», Dow
Jones International News (5novembre2004); annexe67. Voir ég alement «La Grèce devr ait opposer son veto à
l’adhésion de la Macédoine à l’Union européenne et à l’ OTAN si aucun accord n’est trouvé sur la question du nom»,
Agence France Presse (5 novembre 2004) ; annexe 66. Ces menaces ont été réitérées par intervalles dans les années qui
ont précédé le sommet de Bucarest (voir, par exemple, la déclaration faite par le premier ministre du défendeur,
MK. ostasKaramanlis au cours d’un débat consacré à la politique étrangère au parlement du défendeur
(2 novembre 2006) : annexe 123 ; et «Karamanlis : la Grèce opposera son veto aux candidatures de la Macédoine à
l’Union européenne et à l’OTAN si la question du nom n’est pas réglée», Southeast European Times
(7 septembre 2007) : annexe 71). Le 14 octobre 2007, la ministre des affair es étrangères du défendeur,
MmeDoraBakoyannis, est allée jusqu’à laisser entendre que le fait, pour le défendeur, drespecter les termes de
l’accord intérimaire en permettant au demandeur de rejoindre l’OTAN sous la dénomination provisoire d’«ex-République
yougoslave de Macédoine» constituerait une «lâcheté politiue», ambassade du défendeur à Washington, Interview
accordée par la ministre des affaires étrangè res, Mme Bakoyannis, au quotidien athénien Kathimerini le 14 octobre 2007
(recueillie par Mme D. Antoniou) (15 octobre 2007) ; annexe 73. Toutefois, ce n’est qu’en2008 qu’il est apparu
clairement que le défendeur mettrait ses menaces à exécution.
122«Le premier ministre évoque à demi-mot la possibilité d’un veto contre l’ERYM», Kathimerini
(23 février 2008) ; annexe 80.
123DoraBakoyannis, «L’élargissement de l’OTAN et le s principes de l’Alliance», Atlantic-community.org
(téléchargé le 7 mars 2008) ; annexe 83. - 36 -
pas possible d’ouvrir à no124 voisin la voie vers une adhésion à l’OTAN. Il ne saurait
être invité à adhérer…» .
⎯ Discours prononcé le 27mars2008 par le minist re des affaires étrangères du défendeur,
Mme Dora Bakoyannis, devant le groupe parlementaire du parti au pouvoir :
«[n]otre gouvernement s’est progressivement ⎯étape par étape, en procédant avec
ordre et méthode ⎯ orienté vers la solution consistant à exercer le droit de veto
inaliénable qu’il détient en tant qu’Etat me mbre de l’OTAN. Cela nous a permis de
préciser la position que nous avons présenté e le 6mars, à la réunion informelle des
ministres des affaires étrangères de l’OTAN à Bruxelles, à savoir, pour l’essentiel, un
premier veto contre toute invitation à a dhérer qu’il pourrait être envisagé d’adresser
à Skopje au sommet de Bucarest… Pas de solution ⎯ pas d’invitation. Nous l’avons
125
dit, ce ne sont pas des paroles en l’air, et chacun le sait. » (Les italiques sont de
nous.)
⎯ Article publié le 31 mars 2008 dans le International Herald Tribune par le ministre des affaires
étrangères du défendeur, Mme Dora Bakoyannis :
«En tant que pays le plus ancien de la région à être membre de l’OTAN et de
l’Union européenne, nous éprouvons un sens des responsabilités accru vis-à-vis de nos
voisins, et ressentons l’obligation de nous m ontrer à la fois constructifs, pragmatiques
et solidaires. Nous soutiendrons donc résolument l’adhésion de l’Albanie et de la
Croatie à l’OTAN. En revanche, nous ne pourrons pas soutenir celle de
l’ex-République yougoslave de Macédoine, tant que ses dirigeants refuseront de régler
la question de son nom, ce qu’ils se sont pour tant engagés à faire il y a plus de 13 ans
dans le cadre de l’Organisation des Nations Unies… Tant que ce problème perdurera,
nous ne pourrons pas accepter, et nous n’accepterons pas, que l’ex-Républi126
yougoslave de Macédoine rejoigne l’OTAN ou l’Union européenne… » . (Les
58 italiques sont de nous.)
2.61. Au moment du sommet de Bucarest, les médias internationaux se sont largement fait
l’écho de l’intention du défende ur de s’opposer à l’adhésion du demandeur à l’OTAN et du fait
127
qu’il s’y est effectivement opposé . L’opposition du défendeur à l’adhésion du demandeur à
l’alliance est également mentionn ée dans des rapports et documen ts officiels d’autres pays
membres de l’OTAN, dont il ressort clairement qu’elle n’était pas fondée sur le seul motif autorisé
en vertu du paragraphe1 de l’article11 de l’accord intérimaire. Voir, par exemple, les extraits
reproduits ci-après du rapport présenté au Congrès par le service des études du Congrès des
124
Ambassade du défendeur à Washington, extraits du discours prononcé par le premier ministre,
M. Kostas Karamanlis, devant le groupe parlementaire du parti au pouvoir (27 mars 2008) ; annexe 88.
125
Ambassade du défendeur à Washi ngton, discours prononcé par la mini stre des affaires étrangères,
Mme Bakoyannis, devant le groupe parlementaire du parti au pouvoir (27 mars 2008) ; annexe 89.
126Dora Bakoyannis, «Le point de vue d’Athènes» International Herald Tribune (31 mars 2008) ; annexe 90.
127Voir par exemple: Ivo H. Daalder (M. Daalder a été nommé ambassadeur des Etats-Unis d’Amérique auprès
de l’OTAN en mai 2009) et Ja mes M. Goldgeier, «[Un simulacre d’élargissement», The New York Times (8 avril 2008) :
«Les décisions prises lors du sommet de l’OTAN de la semaine dernière ont malheureusement entamé le sérieux et la
crédibilité de ce processus. Tout comme la Croatie et l’Albanie, la Macédoine a respecté le plan d’action pour l’adhésion
(MAP). Elle n’a cependant pas été invitée à rejoindre l’alliance parce que l’un de ses m⎯ la Grèce ⎯ s’oppose
au nom de ce pays. Le fait que la Gr èce prétende redouter que la Macédoine ait des vues sur la région située sur son
territoire et connue sous ce même nom est déjà suffisamment absurde. Aller jusqu’à intégrer ce désaccord dans les
discussions sur la question de savoirla Macédoine doit être autorisée à rejoi ndre l’alliance la plus utile du monde
transforme le processus d’élargissement en simulacre»: an nexe 103 ; Julian Borger, «Karzai entend faire jouer un rôle
accru à une armée afghane plus importante; une proposition qui apporte une embellie au moment où les dirigeants de
l’OTAN se divisent sur la question des nouveaux membres; la prome sse française d’envoyer un nouveau contingent ne
répond pas aux attentes de ses partenaires», The Guardian (3 avril 2008) : annexe 100. - 37 -
Etats-Unis d’Amérique, intitulé «Elargissement de l’OTAN: l’Albanie, la Croatie et les futurs
candidats éventuels» :
«L’une des principales questions examinées lors du sommet de l’OTAN qui
s’est tenu à Bucarest, en Roumanie, du 2 au 4avril2008, était l’examen des
candidatures de l’Albanie, de la Croatie et de la Macédoine. Les alliés sont convenus
d’inviter l’Albanie et la Croatie à rejoindre l’organisation. Bien que celle-ci ait jugé
que la Macédoine satisfaisait aux critères d’adhésion, la Grèce a opposé son veto à la
candidature de ce pays en raison d’un différend de longue date concernant son nom…
Pour qu’un Etat candidat puisse être invité à rejoindre l’alliance à Bucarest, un
consensus entre les gouvernements des 26pays membres était nécessaire. Chaque
candidature a été examinée séparément. Le vote défavorable d’un ou de plusieurs
membres de l’alliance aurait empêché le candidat en question d’accéder à la
59 prochaine étape du processus d’adhésion. Ainsi, c’est l’opposition de la Grèce qui a
empêché la Macédoine de se voir invitée à adhérer à l’OTAN…
Alors que le différend [relatif au nom ] avait longtemps été examiné séparément
des aspirations euro-atlantiques de la Macédoine, ces deux points sont devenus
indissociablement liés au cours de la période qui a précédé le sommet de Bucarest.
Athènes a précisé qu’elle ne pouvait souten ir la candidature de la Macédoine à
l’OTAN si aucun accord mutuellement accep table n’était conclu sur la question du
nom. Le fonctionnement de l’OTAN étant fondé sur le consensus, il était donc clair
que la Grèce ferait usage de son droit de veto. Le Gouvernement de la Macédoine a,
pour sa part, assuré qu’il avait déjà fait de nombreuses concessions, et que le fait
d’établir un lien entre ses perspectives d’ad hésion et le différend bilatéral relatif au
nom serait inacceptable et constituerait une vi olation d’un accord intérimaire conclu
entre les deux parties en 1995.» 128 (Les italiques sont de nous.)
2.62. Dans une interview télévisée qu’il a récemment accordée au journaliste
Goran Momirovski, l’ancien premier ministre slovène, M. Janez Jansa, a confirmé que le défendeur
s’était opposé à l’adhésion de la Macédoine et la manière dont cela s’était déroulé :
«GoranMomirovski: C’est très intéressant pour nous de savoir comment cela
s’est passé, qui a soulevé la question et comment tout cela s’est déroulé, comment la
Grèce a exercé son droit de veto.
Janez Jansa : cela s’est passé avant le sommet de Bucarest. A Bucarest, il était
clair que la Grèce ne reviendrait pas sur sa position. Une autre tentative a été faite
pendant le dîner, qui se déroulait à huisclos et rassemblait le cercle restreint des
dirigeants des Etats membres de l’OTAN. Au cours de ce dîner, la Macédoine a reçu
un soutien important et appuyé. Tous ceux qui ont pris la parole l’ont soutenue.
Certes, il y a ceux qui ne se sont pas exprimés, mais vous avez reçu notre soutien,
celui des Etats-Unis et celui des grands pa ys européens. A la fin du dîner, le
Secrétaire général a cependant indiqué qu’ il n’y avait pas d’accord sur le sujet. A
60 l’OTAN, toutes les décisions importantes sont prises par consensus. Le problème était
là. Il ne s’agissait pas de savoir si la Grèce avait recueilli un consensus lui permettant
d’exercer son droit de veto: un pays n’a p as besoin de consensus pour ce faire. En
réalité, la Grèce avait déjà fait usage de s on droit de veto au sein des organes qui
avaient pris les premières décisions, veto qu’elle a réitéré à Bucarest. La diplomatie
128
Service des études du Congrès des Etats-Unis d’Amérique, Elargissement de l’OTAN : l’Albanie, la Croatie et
les futurs candidats éventuels (14 avril 2009), voir résumé et pages 3 et 11 ; annexe 135. - 38 -
grecque n’avait nullement fait mystère de s es intentions; la condition qu’elle posait
était que le problème du nom soit résolu.» 129
2.63. L’adhésion à l’OTAN nécessitant le consentement de l’ensemble de ses membres,
l’opposition du défendeur a eu pour conséquence que la candidature du demandeur a été écartée, et
ce en dépit du fait que celui-ci avait accepté d’être désigné au sein de l’organisation conformément
aux termes employés dans la résolution 817 et aux prescriptions du paragraphe 1 de l’article 11 de
130
l’accord intérimaire .
E. La position déclarée du défendeur concernant l’adhésion du demandeur
à l’Union européenne
2.64. Ce ne sont pas les actes attribuabl es au défendeur relativement à l’obje131f du
demandeur d’adhérer à l’Union europ éenne — objectif qu’il poursuit depuis1998 — qui ont
conduit celui-ci à introduire la présente instance de vant la Cour. Ce nonobs tant, il ressort de ses
déclarations exposées aux paragraphes2.58 à 2.60 ci-dessus que le défendeur adopte, en ce qui
concerne l’adhésion du demandeur à l’Union euro péenne, une position similaire à celle qu’il a
adoptée relativement à son adhésion à l’OTAN, sachant qu’il dispose d’un droit de veto au sein de
61
l’Union, et donc du pouvoir de s’opposer à cette ad hésion. Aussi le demandeur se réserve-t-il le
droit de modifier la réparation demandée en la présente espèce, y compris en ce qui concerne des
questions incidentes, en fonction d’éventuelles m esures que le défendeur pourrait prendre au sujet
de son adhésion à l’Union européenne.
S ECTION VI. L A PRÉSENTE INSTANCE
A. L’introduction de la présente instance
2.65. Le défendeur n’ayant pas respecté le paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire au sommet de l’OTAN à Bucarest, le demandeur a écrit au bureau de liaison du
défendeur à Skopje, le 17 avril 2008, pour protester contre «la violation flagrante par la République
hellénique de l’accord intérimaire du 13septemb re1995», démontrée par «le comportement, les
agissements et les déclarations des plus hauts repr ésentants de la première Partie et confirmée par
l’opposition directe de celle-ci à l’invitation faite à la seconde Partie de devenir membre de
132
l’OTAN» . En outre, dans une lettre en date du 23 av ril 2008, adressée au Secrétaire général de
l’Organisation des Nations Unies par sa chargée d’ affaires, le demandeur a officiellement appelé
129Goran Momirovski, «Janez Jansa : la décision de ne pas inviter la Macédoine à adhérer à l’OTAN a été prise
en raison d’un veto opposé par la Grèce», Kanal 5 TV (25 juin 2009) ; annexe 106. Voir également les deux interviews
suivantes de l’ancien premier ministre slovène, M.Ja nez Jansa: «Vous avez été vi ctimes du droit de veto»,
A1 Television, (20 mars 2009) : annexe 104 ; et Hristo Ivanovski, «Interviewde Janez Jansa, ancien premier ministre
slovène : la Macédoine a été une victime de Bucarest», Dnevnik (21 mars 2009) : annexe 105.
130
Communiqué de presse de l’OTAN (2008)049, «Décl aration du sommet de Bucarest publiée par les chefs
d’Etat et de gouvernement participant à la réunion du Conseil de l’Atlantique No rd tenue à Bucarest le 3avril2008»
(3 avril 2008) ; annexe 65.
131
Voir la Déclaration sur le développement des relationsenore la République de Macédoine et l’Union
européenne, adoptée par l’assemblée du de mandeur le 4 février 1998 (n 07-460/1), dont la versi on anglaise peut être
consultée sur le site: http://www .sobranie.mk/en/default.asp?ItemID=EE1D606586695F408E6FC58893EED7F7; et la
Déclaration sur le renforcement des relations entla République de Macédoine et l’Union européenne , adoptée par
l’assemblée du demandeur le 27 novembre 2000. La Macédoine a été formellement désignée en tant que pays candidat à
l’Union européenne, mais n’a pas encore été invitée à entamer les pourparlers en vue de son adhésion.
132Note verbale en date du 17avril2008, adressée au bur eau de liaison du défendeur à Skopje par le ministère
des affaires étrangères du demandeur ; annexe 50. - 39 -
l’attention de l’Organisation des Nations U133s su r «la violation…flagrante de l’article 11 de
l’accord intérimaire» par le défendeur . Sept mois plus tard, le 17 novembre 2008, le demandeur
a dûment déposé une requête introductive d’instance auprès de la Cour contre le défendeur à raison
de la violation du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire. Comme il est indiqué dans
la requête, on peut considérer que le différend porté devant la Cour s’est cristallisé le 3 avril 2008,
date à laquelle le défendeur a ag i au mépris de ses obligations découlant du paragraphe1 de
l’article 11 de l’accord intérimaire.
62 B. Le comportement du défendeur depuis le 3 avril 2008
2.66. Il importe de relever que, avant la fin du mois de mars ou le début du mois
d’avril 2008, jamais le défendeur n’avait déposé la moindre plainte ni avancé la moindre allégation,
sous forme écrite, à l’adresse du demandeur l’accu sant officiellement d’être l’auteur d’une
violation substantielle de l’accord intérimaire ou de l’une quelconque de ses dispositions. De plus,
le défendeur n’a jamais fait part de son intentio n de renoncer à l’accord intérimaire, par voie de
notification écrite, ni de suspendre l’une quelc onque de ses dispositions, comme il aurait été en
droit de le faire si le demandeur avait syst ématiquement violé les dispositions de l’accord 13. Ce
n’est que depuis le 3avril2008 ⎯et plus exactement depuis le 17avril2008, date à laquelle le
demandeur a adressé une note verbale au défendeur l’accusant d’être l’auteur d’une violation
substantielle de l’accord intérimaire ⎯ que le défendeur a commencé, dans des lettres écrite135u
des notes verbales adressées au demandeur et à l’Organisation des Nations Unies , à formuler des
allégations selon lesquelles le demandeur «[était] responsable d’une viol ation substantielle de
136
l’accord intérimaire depuis sa conclusion» , quatorze ans plus tôt.
2.67. C’est ainsi que, le 15 mai 2008, dans la lettre qu’il a adressée au demandeur en réponse
à la note verbale précitée du 17 avril 2008, le défendeur a avancé un certain nombre d’allégations
imprécises et sans fondement selon lesquelles le demandeur aurait commis des violations
63 substantielles des articles2, 3, 4, 5 (par.1), 6 (par.2), 7 (par.1 et 3) et 8 (par.1) de l’accord
intérimaire et n’aurait pas respecté les dispositions de l’article 11 (par. 1 et 2) 137. Allégations qu’il
133Lettre en date du 23avril2008, adre ssée au Secrétaire général de l’Or ganisation des NationsUnies par la
chargée d’affaires de la mission perman ente du demandeur auprès de l’Organisation des Nati onsUnies, à laquelle est
annexée une lettre adressée au Secrétaire général par le président du demandeur, M. Branko Crvenkovski, Nations Unies,
doc. S/2008/290 (2 mai 2008) ; annexe 42.
134Accord intérimaire, paragraphe 2 de l’article 23.
135
Pour autant que le demandeur ait c onnaissance de ces plaintes. Il convi ent également de noter que dans deux
lettres envoyées par le défendeur, l’une au Secrétaire gnéral de l’Organisation des Etat s américains et l’autre au
représentant permanent du Costa Rica auprès de l’Organisation des Nations Unies, datées respectivement du 28 janvier et
du 14 avril 2008, dans lesquelles il expose sa position aujet de l’admission du demandeur à l’OTAN, le défendeur
n’avance aucune allégation contre le demandeur au sujetde la violation substantiell e d’une quelconque disposition de
l’accord intérimaire, pas plus qu’il ne tente de jtifier son opposition à l’admission du demandeur à l’OTAN en
invoquant le seul motif autorisé pour soulever une objection en vertu du para graphe 1 de l’article 11 de l’accord
intérimaire; annexes 124 et 132. Le demandeur a cependant eu connaissance de deux documents non datés adressés à
certains pays membres de l’OTAN dans lesquels le défendeur fait état de la «violation» par le demandeur de l’article 5 de
l’accord intérimaire, concernant les divergences sur le ndu demandeur, qui ne relèvent pa s de la compétence de la
Cour, et d’agissements «non conformes audit accord (art.7)» (voir l’Aide-mémoire du défendeur à l’annexe129) et
accuse le demandeur de mener «une politique de propagande et d’irrédentisme contraire aux articles 2, 3, 4 et 7 de
l’accord intérimaire» (voir le mémorandum du défendeur, La question du nom de l’ex-République yougoslave de
Macédoine et la propagande: une ré ponse aux allégations de Skopje , à l’annexe131, rédigée da ns le but de contrer le
mémorandum du demandeur, La République de Macédoine, pays candidat à l’OTAN et à l’UE , concernant ses
candidatures auprès de ces deux organisations, annexe 130).Ces documents n’ont toutefoi s jamais été officiellement
communiqués au demandeur par le défendeur.
136Note verbale en date du 15 mai 2008 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau
de liaison du défendeur à Skopje ; annexe 51.
137Ibid. - 40 -
a réitérées dans une lettre adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies le
23 mai 2008 13, en réponse à la lettre susmentionnée du demandeur appelant l’attention du
Secrétaire général sur le fait que le défendeur avait violé l’accord intérimaire.
2.68. Il est intéressant de constater que, depuis qu’il a introduit la présente instance en
novembre 2008, le demandeur a pour la première fois reçu du défendeur, formellement et par écrit,
un flux continu d’allégations selon lesquelles il n’au rait pas respecté plusieurs articles de l’accord
intérimaire, accompagnées de plusieurs autres plaintes concernant les dispositions dudit accord. La
plupart de ces allégations portent sur de prétendu es violations de l’accord intérimaire qui seraient
postérieures à l’introduction de la présente instance. Ces allégations sont examinées de façon plus
détaillée au chapitre V (par. 5.55-5.65).
2.69. Depuis le 3 avril 2008, le défendeur a également adressé plusieurs lettres au Secrétaire
général de l’Organisation des Nations Unies da ns lesquelles il avance des allégations aussi
générales qu’évasives selon lesquelles le demandeur «viol[erait] constamment les dispositions de
l’accord intérimaire» 139, et réitère certaines des plaintes spécifiques qu’il avait formulées par écrit à
l’adresse du demandeur comme autant de faits censés démontrer un comportement «contraire à
l’esprit et à la lettre de l’accord intérimaire» 140. A la connaissance du demandeur, aucune lettre
64 faisant état de telles violations substantie 141es n’avait été adressée à l’Organisation des
Nations Unies par le défendeur avant cette date .
2.70. Le demandeur a répondu aux allégati ons avancées par le défendeur depuis mai2008
selon lesquelles il aurait violé l’accord intérimair e et il a expliqué sa position dans des lettres
142 143
adressées au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies et au défendeur . Lorsque
cela a été nécessaire, il a pris des mesures correctives conformément au paragraphe 3 de l’article 7
138 Lettre en date du 23 mai 2008 adressée au Secrétaire général de l’Orga nisation des NationsUnies par le
représentant permanent du défendeur aupr ès de l’Organisation des Nations Unies, M. John Mourikis. NationsUnies,
doc S/2008/346 (28 mai 2008) ; annexe 43.
139Lettre en date du 27 novembre 2008 adressée au Secrétai re général de l’Organisation des Nations Unies par le
représentant permanent du défendeur aupr ès de l’Organisation des Nations Unies, M. John Mourikis. NationsUnies,
doc S/2008/746 (1 décembre 2008). La lettre prétend également à tort que le demandeur «continue depuis plus de
dixans» de bafouer les résolutions du Conseil de sécurité en utilisant son nom constitutionnel devant les différents
organes de l’Organisation des Nations Unies ; annexe 44.
140 Lettre en date du 6 février 2009 adressée au Secrétairegénéral de l’Organisation des Nations Unies par le
représentant permanent du défendeur aupr ès de l’Organisation des NationsUnies, M.John Mourikis. NationsUnies,
doc S/2009/82 (10 février 2009) ; annexe 45.
141
Le demandeur, en revanche, avait officiellement protesté auprès de l’Organisation des Nations Unies contre le
«non-respect…de l’accord intérimaire», notamment lorsque le défendeur n’avait pas respecté le paragraphe1 de son
article 11 : voir la lettre en date du 29 juillet 1996 adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies par
le représentant permanent de l’ex-République yougoslave de Macédoine auprès de l’Organisation des Nations Unies.
Nations Unies, doc S/1996/605 (30 juillet 1996).
142 Lettre en date du 14mars2009 adressée au Secrétaire général de l’Organisation des NationsUnies par le
représentant permanent du demandeur auprès de l’Or ganisation des NationUnie s, M. Slobodan Tasovski.
Nations Unies, doc S/2009/150 (18 mars 2009) ; annexe 46.
143 Voir, par exemple, les lettres daté es des 13 mars 2009 (annexe 55) et 9 av ril 2009 (annexe 58), adressées à la
ministre des affaires étrangères du dé fendeur, MmeDoraBakoyannis, par le ministre des affair es étrangères du
demandeur, M.AntonioMilososki; la le ttre en date du 18mars2009, adressée au ministre de l’intérieur du défendeur,
M.ProkopisPavlopoulos, par la ministre de l’intérieur du demandeur, MmeGo rdana Jankulovska (annexe56); les
er
lettres datées des 19 mars 2009 (annexe 57) et 16 avril 2009 (annexe 61) et les deux notes verbales datées du 1n 2009
(annexes62 et63), adressées au bureau de liaison du défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du
demandeur. - 41 -
de l’accord intérimaire 144. Il a également réitéré des propositio ns qu’il avait déjà soumises au
défendeur dans le but de favoriser et de renforcer la coopération et les re lations de bon voisinage
entre les Parties14.
2.71. Le demandeur nie que l’une ou l’autre des questions dont le défendeur lui tient grief
puisse constituer une violation substantielle de l’acco rd intérimaire, qui justifierait le non-respect
par le défendeur du paragraphe1 de l’article11, ou la suspension de l’accord intérimaire ou de
l’une quelconque de ses dispositions. Cette question est examinée de manière plus approfondie au
chapitre V ci-dessous.
SECTION VII. C ONCLUSIONS
65
2.72. Comme il ressort des précédents paragraphes, les faits essentiels relatifs à la présente
instance sont les suivants :
⎯ En signant l’accord intérimaire, le défendeur a accepté de ne pas s’opposer à l’admission du
demandeur dans des organisations ou institutions internationales, multilatérales ou régionales
dont il était déjà membre, à moins que le de mandeur ne fût doté dans ces organisations ou
institutions d’une appellation autre que celle d’«ex-République yougoslave de Macédoine».
⎯ Après l’entrée en vigueur de l’accord intérimaire, le demandeur est devenu membre d’un grand
nombre d’organisations et institutions auxquelles appartient le défendeur.
⎯ Dans une série de déclarations et de démarches faites à la fin du mois de mars ou au début du
mois d’avril 2008, à l’occasion du sommet de l’OTAN tenu à Bucarest le 3avril2008, le
défendeur s’est opposé à l’admission du demandeur à l’OTAN, en dépit du fait que ce dernier
devait y être désigné sous le nom d’«ex-Répub lique yougoslave de Macédoine» et avait donné
son accord en ce sens.
⎯ Au cours de la période qui a précédé le sommet de Bucarest et au moment où il s’est opposé à
l’entrée du demandeur à l’OTAN, le défendeur n’a pas tenté de justifier son refus en invoquant
le seul motif autorisé pour soulever une objec tion, tel que prévu par le paragraphe1 de
l’article 11 de l’accord intérimaire.
⎯ Tout au long des 13 années qui se sont écoulées avant la cristallisation de ces différends au
printemps 2008, le défendeur n’a pas avancé, form ellement et par écrit, la moindre allégation à
l’adresse du demandeur selon laquelle celui-ci au rait commis une violation substantielle de
l’accord intérimaire, pas plus qu’il n’a tenté de soutenir que cet accord avait été suspendu en
totalité ou en partie.
2.73. Comme il est indiqué plus en détail aux chapitresIV et V ci-après, l’opposition du
défendeur à l’admission du demandeur à l’ OTAN constitue une violation manifeste du
paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire.
144 er
Voir, par exemple, la note verbale en date duouin2009 adressée au bureau de liaison du défendeur à
Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur, n/1, annexe 62.
145Voir, par exemple, supra, annexes 55, 56 et 58. - 42 -
66 C HAPITRE III
COMPÉTENCE DE LA COUR
3.1. La compétence de la Cour en l’espèce est fondée sur le paragraphe1 de l’article36 du
Statut de la Cour et sur l’accord intérimaire.
3.2. Le paragraphe 1 de l’article 36 de la Cour dispose : «La compétence de la Cour s’étend à
toutes les affaires que les parties lui soumettront, ainsi qu’à tous les cas spécialement prévus dans
la Charte des Nations Unies ou dans les traités et conventions en vigueur.»
3.3. En l’espèce, le traité ou convention en vigueur invoqué par le demandeur est l’accord
intérimaire.
3.4. L’accord intérimaire a été signé par le de mandeur et le défendeur le 13 septembre 1995.
Il est entré en vigueur le 13octobre1995 conformé ment au paragraphe1 de son article23. Il
demeure en vigueur, aucune des parties n’ayant pris de mesures pour en suspendre l’application en
tout ou en partie, ou pour le dénoncer moyennant un préavis écrit de 12 mois (comme le permet de
paragraphe2 de l’article23). Il était en vigue ur à tous les moments pertinents et demeure en
vigueur aujourd’hui. Aucune partie n’y a formulé de réserve ni n’a fait de déclaration en ce qui le
concerne relativement à l’exercice par la Cour de sa compétence en vertu de ses dispositions.
3.5. Les circonstances dans lesquelles l’accord intérimaire a été négocié ont été exposées en
détail au chapitreII 14. Comme expliqué au paragraphe2. 22. et 2.23, le texte de l’accord
intérimaire est tiré d’un projet de traité en da te du 14 mai 1993 portant conf irmation de la frontière
existante et adoption de mesures de confiance, d’amitié et de coopération dans un esprit de bon
voisinage («le projet de traité de1993»), rédigé par les co-présidents du comité directeur de la
147
67 conférence internationale sur l’ex-Yougo slavie, M.CyrusVance et LordOwen , comme indiqué
dans un rapport adressé au Conseil de sécurité pa r le Secrétaire général de l’Organisation des
Nations Unies le 28 mai 1993, en application de la résolution 817 14. Le but de l’accord intérimaire
et les questions qu’il visait à règlementer sont ex aminés en détail au chapitreIV. Ses principaux
articles s’agissant de la compétence de la Cour sont les articles 5, 11 et 21, cités ci–après.
146Chap. II, par. 2.21 et suiv.
147M. Thorvald Stoltenberg a remplacé M. Cyrus Vance comme co-président du comité directeur en mai 1993.
148
Voir annexe V à la lettre en date du 26 mai 1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le Secrétaire
général de l’Organisation des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, lui faisant tenir le rapport établi par le Secrétaire
général en application de la résoluti on 817, Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai1993): annexe33. Voir également
chapitreII, paragraphe2.21-2.24. Le projet de trai1993 a été rejeté par le défeur le 27mai1993, et par le
demandeur le 29mai1993: l’un comme l’autre ont rejetéla proposition qui figurait dans ce projet d’attribuer au
demandeur le nom unique permanent de «Nova Makedonija»; voir la déclarati on du 27mai1993 de l’ambassadeur et
envoyé spécial du défendeur, S.Exc.M. George D. Papoulias, Nations Unies, doc.S/25855/Add.1 (3juin1993):
annexe 34 ; et la lettre en date du 29 mai 1993 adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies par le
président du défendeur, M. Kiro Gligorov, Nations Unies, doc. S/25855/Add.2 (3 juin 1993) : annexe 35. - 43 -
3.6. L’article5 de l’accord intérimaire énon ce les principes devant régir la conduite des
négociations futures sur le nom du demandeur. Ses dispositions pertinentes sont les suivantes :
«1. Les parties conviennent de poursuivre les négociations sous les auspices du
Secrétaire général de l’Organisation d es Nations Unies, conformément à la
résolution 845 (1993) du Conseil de sécurité, en vue de parvenir à régler le différend
mentionné dans cette résolution et dans la résolution 817 (1993) du Conseil.
3.7. Cet article impose une obligation de co mportement, non de résultat. Depuis1995, le
demandeur négocie de bonne foi sous les auspices de l’Organisation des NationsUnies, dans le
cadre de négoci149ons facilitées par M. Cyrus Vance (de 1995 à 1999) puis par M. Matthew Nimetz
(depuis 1999) .
68 3.8. L’article11 de l’accord intérimaire tr aite de l’admission dans les organisations
internationales. Le paragraphe 1 de l’article 11 est l’objet du différ end dont la Cour est saisie. Il
prévoit que lorsque l’accord intérimaire sera entré en vigueur, le défendeur
«ne s’opposera pas à la demande d’admission [du demandeur] dans des organisations
et institutions internationales, multilaté rales ou régionales dont [le défendeur] est
membre, non plus qu’à la participati on [du demandeur] à ces organisations et
institutions ; toutefois, la Première Partie [le défendeur] se réserve le droit d’élever des
objections à une telle demande ou à une telle participation si la Seconde Partie [le
demandeur] doit être dotée dans ces organi sations ou institutions d’une appellation
différente [de] celle prévue au paragraphe 2 de la réso lution 817 (1993) du Conseil de
sécurité des Nations Unies».
3.9. L’article 21 de l’accord intérimaire porte sur le règlement des différends. Il dispose :
«1.Les parties règlent tout différend pa r des moyens exclusivement pacifiques,
conformément à la Charte des Nations Unies.
2. A l’exception de la divergence visée au paragraphe 1 de l’article 5, l’une ou l’autre
des Parties peut saisir la Cour internationale de Justice de toute divergence ou de
tout différend qui s’élèvent entre elles en ce qui concerne l’interprétation ou
l’exécution du présent Accord intérimaire.»
150
3.10. Le paragraphe 2 de l’article 21 donne à la Cour une large compétence . Elle englobe
toute divergence ou tout différend concernant toute disposition de l’accord intérimaire, à la seule
exception du différend visé au paragraphe 1 de l’article 5. Il ressort de l’existence du paragraphe 2
de l’article12, de la portée de cette disposition et de l’absence de limitations de procédure ou de
fond, que les parties ont conféré à la Cour un rôle important et particulier s’agissant de les aider à
résoudre les différends pouvant s’élever entre elles. La compétence de la Cour lui donne un rôle
central dans le système établi par l’accord intérimaire.
149
En décembre1999, M.MatthewNimetz, ambassadeur de s Etats-Unis, a été nommé par le Secrétaire général
de l’ONU pour succéder à M. Cyrus Vance en qualité d’envoyé personnel du Secrétaire général pour les pourparlers entre
le demandeur et le défendeur, un poste qu’il continue d’occuper aujourd’hui.
150Voir, par exemple, N.Zaikos, “The Interim Accord : Prospects and Developments in Accordance with
International Law” dans E.Kofo s et V.Vlasidis (dir.publ.Athens –– Skopje: An Uneasy Symbosis (1995-2002)
Hellenic Foundation for European and Foreign Policy (2005). - 44 -
3.11. Il est remarquable que le texte du paragr aphe2 de l’article21 de l’accord intérimaire
69 151
soit tiré de l’article 23 du projet de traité de 1993 . Il n’y a que deux différences pertinentes entre
le texte de l’accord intérimaire et celui du projet antérieur. Ce dernier, premièrement, prévoyait le
droit de saisir la Cour «sauf accord contraire» , une clause qui a été supprimée dans l’accord
intérimaire et, deuxièmement, ne prévoyait pas d’exception en ce qui concerne «la divergence visée
au paragraphe1 de l’article5» (parce que le pr ojet de traité de 1993 postulait que le différend
relatif au nom du demandeur, visé au paragr aphe1 de l’article5, aurait été réglé 15). Il est donc
évident que la seule question que les deux Etats ne voulaient pas que la Cour tranchât était la
question-même qu’elles ne pouvaient accepter dans le projet de traité de 1993, à savoir le
règlement final du différend concernant le nom du demandeur. A tous autres égards, le principe de
la large compétence de la Cour n’a pas été contesté et a été expressément accepté par les Parties.
Tout aussi important, les Parties entendaient faire de la Cour le premier arbitre des différends
s’élevant entre elles plutôt que de recourir à un autre mécanisme ou une autre institution ayant pu
faire l’objet d’un «accord contraire».
3.12. Comme exposé au chapitre I, le différe nd porté devant la Cour par le demandeur
concerne exclusivement la signification et l’e ffet du paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire en ce qui concerne les actes attribuables au défendeur. En particulier, le différend porte
sur la question de savoir si l’ opposition du défendeur à ce qu’une invitation à devenir membre de
l’OTAN soit adressée au demandeur est compatible avec les prescriptions du paragraphe1 de
l’article11. Il s’agit d’un différend juridique postu lant que le paragraphe 1 de l’article11 reste
applicable, et il concerne exclusivement les acte s du défendeur et son opposition à l’admission du
70 demandeur à l’OTAN. Pour se prononcer sur le di fférend dont elle est saisie, la Cour n’a pas à
statuer sur les actes d’Etats tiers ou d’organisations internationales.
3.13. Il est également clair que le différend po rté devant la Cour n’exige pas qu’une solution
soit trouvée à la «divergence visée au paragraphe 1 de l’article 5» de l’accord intérimaire,
divergence qui n’entre pas dans la compétence de la Cour. Cette divergence est décrite dans le
préambule de la résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité comme «une divergence…au sujet du
nom [du demandeur]» 153.
3.14. La divergence visée au paragraphe1 de l’article5 n’est pas l’objet du différend porté
devant la Cour. Cette divergence continue de fa ire l’objet de négociations sous les auspices de
l’Organisation des Nations Unies. Rien de ce que décidera la Cour n’affectera la poursuite de ces
négociations qui se sont poursuivies depuis que la présente instance a été introduite devant la Cour
le 17 novembre 2008 154. Aucune ordonnance ni aucun arrêt que rendra la Cour ne peut avoir
d’effet juridique sur la poursuite de ces négociations. Pour être clair, l’Etat demandeur n’invite pas
151
Ce projet d’article 23 disposait:
«1. Les Parties règlent tout différend pa r des moyens exclusivement pacifiques,
conformément à la Charte des Nations Unies.
2. Sauf accord contraire, l’une ou l’autre des parties peut saisir la Cour internationale de
Justice de toute divergence ou de tout différend qui surgit entre elles en ce qui concerne
l’interprétation ou l’exécution du présent accord.»
152De fait, le projet de traité de 1993 nomme le dema ndeur «Nova Makadonija» dans l’ensemble de son texte,
une proposition visant à apporter une solution à la divergesur le nom rejetée par les deux Parties. Voir également
Chapitre II, par. 2.23.
153Résolution817(1993) du Conseil de sécurité de l’Organisation des NationsUnies (S/RES/817)
(7 avril 1993) ; annexe 22.
154Depuis le dépôt de la requête introductive d’instance en l’espèce, il y a eu deux tours de négociations entre des
représentants des Parties, facilitées par l’ambassadeur Nimetz, et tenues à New York en février 2009 et à Genève en juin
de la même année. De plus, l’ambassa deur Nimetz a rendu visite aux deux Partie s au début du mois de juillet 2009 et a
rencontré les responsables de la conduite des négociations. - 45 -
la Cour à exprimer un avis sur les négociations en cours entre les parties en vertu du paragraphe 1
de l’article5, ni sur l’éventuel résultat de ces négociations. Sa requête concerne exclusivement
l’opposition du défendeur à son admission à l’OTAN, qui s’est cristallisée le 3 avril 2008, et
l’obligation continue du défendeur de ne pas s’opposer à l’admission du demandeur à l’OTAN et
dans d’autres organisations et institutions, régi onales, multilatérales ou internationales, et la
compatibilité de tels actes avec le paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire.
3.15. L’accord intérimaire n’oblige pas l’Et at demandeur à satisfaire à des conditions
71 procédurales avant d’exercer son droit de saisir la Co ur en vertu de l’article 21, et il n’existe aucun
autre principe susceptible d’affecter ce droit de recours.
3.16. C’est pourquoi il n’est pas douteux que la requête est recevable, que la Cour est
compétente pour connaître du différend que le de mandeur a porté devant elle en vertu du
paragraphe1 de l’article36 du st atut de la Cour et du paragra phe2 de l’article21 de l’accord
intérimaire, et que cette compétence s’étend à t outes les décisions demandées par le demandeur,
comme exposé au chapitre VI. - 46 -
72 C HAPITRE IV
L E SENS ET L ’EFFET DU PARAGRAPHE 1 DE L ’ARTICLE 11 DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE
INTRODUCTION
4.1. Le sens et l’effet du paragraphe 1 de l’ article 11 de l’accord intérimaire de 1995 sont au
cŒur de la présente affaire. Comme on l’a vu au chapitreII 155, les 23articles de l’accord
intérimaire ont été négociés et adoptés pour normali ser les relations entre les parties en répondant
aux préoccupations du défendeur, notamment en réaffirmant que le demandeur n’avait pas de
revendications territoriales à son encontre, et en facilitant l’intégrati on du demandeur dans la
communauté internationale. En grande partie, l’accord intérimaire a eu cet effet. En particulier, en
application du paragraphe1 de l’ article11, le défendeur s’est en gagé à mettre fin aux objections
qu’il formulait automatiquement à l’admissi on du demandeur «dans des organisations et
institutions internationales, multila térales ou régionales» dont il était membre. Ainsi, l’entrée en
vigueur de l’accord intérimaire et l’exécution par le défendeur de l’obligatio n que le paragraphe 1
de l’article11 met à sa charge ont permis au demandeur de deveni r membre de nombreuses
organisations et institutions internationales, multilatérales et régionales, y compris des
organisations et institutions auxquelles son admission avait jusqu’ici été bloquée par le défendeur.
4.2. Cette situation a pris brutalement fin au printemps de2008, lorsque le défendeur s’est
opposé à l’admission du demandeur à l’OTAN. L’op position du défendeur était incompatible avec
le paragraphe1 de l’article11 de l’accord in térimaire et, comme on le verra au chapitreV,
constituait une violation patente des termes de cette disposition.
4.3. L’objet du présent chapitre est d’examiner le sens et l’effet du paragraphe1 de
l’article11. De manière générale, l’interprétation du paragraphe1 de l’article11 est régie par les
73 règles énoncées dans la convention de Vienne de1969 sur le droit des traités («la convention de
Vienne»), un traité auquel et le dema ndeur et le défendeur sont parties. Ainsi qu’il est bien établi,
une disposition conventionnelle doit êt re interprétée «de bonne foi» suivant le «sens ordinaire» à
attribuer à ses termes «dans leur contexte», et à la lumière de l’«objet et [du] but» du traité. Il est
également tenu compte de tout accord ultérieur intervenu entre les parties et de toute pratique
156
ultérieurement suivie . La sectionI examine le but et l’objet de l’accord intérimaire dans son
155Section III.
156
L’article 31 de la convention de Vienne dispose :
«1.Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité
dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but.
2. Aux fins de l’interprétation d’un traitcontexte comprend, outre le texte, préambule et
annexes inclus :
a) Tout accord ayant rapport au traité et qui est intervenu entre toutes les parties à l’occasion
de la conclusion du traité ;
b) Tout instrument établi par une ou plusieurs pa rties à l’occasion de la conclusion du traité
et accepté par les autres parties en tant qu’instrument ayant rapport au traité.
3. Il sera tenu compte, en même temps que du contexte :
a) De tout accord ultérieur intervenu entre les parties au sujet de l’interprétation du traité ou
de l’application de ses dispositions ;
b) De toute pratique ultérieurement suivie dans l’application du traité par laquelle est établi
l’accord des parties à l’égard de l’interprétation du traité ; - 47 -
ensemble. Dans la section II, l’article 11 est examiné dans le contexte de ses travaux préparatoires.
La sectionIII examine ensuite les termes précis et le sens du paragraphe1 de l’article11. La
section IV conclut le chapitre par un bref résumé.
S ECTION I. L’OBJET ET LE BUT DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE DE 1995
4.4. Comme indiqué aux chapitresII et III 15, l’accord intérimaire est largement repris d’un
projet de traité confirmant la frontière existante et établissant des mesures de confiance, d’amitié et
de coopération de bon voisinage («le projet de traité de 1993»), proposé par M. Cyrus Vance et
lord Owen pour tenter de normaliser les relations en tre les deux Etats. Le projet de traité de 1993
74 fut transmis au Conseil de sécurité par le Secrétaire génér158de l’Organisation des Nations Unies en
application du paragraphe 3 de la résolution 817 (1993) , et servit ensuite de base à la négociation
de l’accord intérimaire de1995, comme le prévoy ait la résolution845 et comme il ressort de la
structure et des éléments communs aux deux documents.
4.5. Le projet de traité de 1993 comprenait un préambule et vingt-cinq articles (l’accord
intérimaire comprend vingt-trois articles). Il était divisé en six sections :
A. Relations amicales et mesures de confiance ;
B. Droits de l’homme et droits culturels ;
C. Institutions européennes ;
R.elatioconventionnelle ;s
E. Relations dans les domaines économique, commercial, environnemental et juridique ;
C.lausfisnales.
4.6. Les sections de l’accord intérimaire repr ennent exactement celles du projet de traité, à
l’exception d’une seule : la sec tion C, relative à l’admission du demandeur dans des organisations
et institutions et intitulée «Institutions européennes» dans le projet de trai té de 1993, a été élargie
dans l’accord intérimaire à toutes les «Institutions internationales, multilatérales et régionales».
4.7. L’accord intérimaire comprend un préambule et vingt-trois articles qui sont divisés
⎯comme ceux du projet de traité antérieur ⎯ en sixsections. La sectionA, intitulée «Relations
amicales et mesures de confiance», comprend huit articles concernant :
⎯ l’établissement de relations diplomatiques et de bureaux de liaison à Skopje et Athènes
(article 1) ;
⎯ l’inviolabilité de la frontière existante (article 2) ;
⎯ le respect de la souveraineté, de l’intégr ité territoriale et de l’indépendance politique
(article 3) ;
c) De toute règle pertinente de droit intertional applicable dans les relations entre les
parties.
4. Un terme sera entendu dans un sens particier s’il est établi que telle était l’intention des
parties.»
157
Voir chap. II, par. 2.22-2.23, chap. II, par. 3.5.
158Voir annexe V de la lettre edate du 26 mai 1993, adressée au présidet du Conseil de sécurité par le
Secrétaire général de l’Organisatiodes NationsUnies, M.Boutros Boutro s-Ghali, intitulée «Projet proposé par
Cyrus Vance et lord Owen», 14 mai 1993, Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai 1933) ; annexe 33. - 48 -
75 ⎯ l’obligation de s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force et de ne pas appuyer
de revendication à l’égard d’une partie quelc onque du territoire de l’autre partie ou de
revendication visant à modifier leur frontière existante (article 4) ;
⎯ l’engagement de poursuivre les négociations sous les auspices du Secrétaire général de l’ONU
en ce qui concerne le nom du demandeur, et de coopérer en vue de fa ciliter leurs relations
mutuelles, notamment en prenant des «dispos itions pratiques» pour mener des relations
normales (article 5) ;
⎯ des engagements du demandeur en ce qui concerne d’éventuelles revendications territoriales et
l’interprétation ou l’application de sa Constitution (article 6) ;
⎯ l’engagement d’interdire les actes d’hostilité ou de propagande, de ne pas utiliser un symbole
particulier sur le drapeau du demandeur et d’ examiner les préoccupations exprimées en la
matière au moyen de certaines procédures (article 7) ; et
⎯ des engagements relatifs à la circulation des pers onnes et des biens et à l’utilisation éventuelle
des bons offices de l’Union européenne et des Etats-Unis (article 8).
4.8. La sectionB de l’accord intérimaire c oncerne les «[d]roits de l’homme et droits
culturels». Elle comprend deux articles: l’ar ticle9 dispose que les parties seront guidées par
l’esprit et les principes de la démocratie, les libertés fondamental es, le respect des droits de
l’homme et de la dignité de la personne humai ne et la primauté du droit, avec renvoi à huit
instruments, dont la Charte des NationsUnies, qu’il confirme, ainsi que le principe de l’intégrité
territoriale. L’article 10 encourage les contacts entre les nationaux des parties.
4.9. La sectionC de l’accord intérimaire, qui a trait aux «[i]nstitutions internationales,
multilatérales et régionales», consiste en une seule disposition ⎯ l’article 11 ⎯ qui est au cŒur du
présent différend.
4.10. La section D de l’accord intérimaire concerne les «[r]elations conventionnelles», et elle
comprend trois articles dont l’objet est de nor maliser les relations conventionnelles entre les
parties. L’article12, relatif aux traités bilaté raux entre les parties, énumère troisaccords conclus
antérieurement entre la RSFY et le défendeur qui doivent servir de base à de nouveaux
arrangements bilatéraux. Constatant que le demandeur est un Etat sans littoral, l’article 13 dispose
76 que les Parties seront guidées par la convention des Na tions Unies sur le droit de la mer tant dans
leur pratique que dans leurs relations conventionnelles. L’ article14 prévoit la négociation
d’accords de coopération en matière économique, de transports et de communications, et
l’observation des réglementations internationales.
4.11. La sectionE de l’accord intérimaire c oncerne les «[r]elations dans les domaines
économique, commercial, environnemental et juridique», et comprend six articles concernant :
⎯ le renforcement des relations économiques (article 15) ;
⎯ le développement et l’amélioration de la coopération scientifique et technique (article 16) ;
⎯ la protection de l’environnement (article 17) ;
⎯ la coopération en vue d’atténuer les effets des catastrophes (article 18) ;
⎯ la coopération en vue d’encourager les voyages d’affaires et de tourisme (article 19) ;
⎯ la coopération dans la lutte contre la criminalité organisée, le terrorisme et une série d’autres
crimes et délits (article 20). - 49 -
4.12. La sectionF de l’accord intérimaire contient des «[c]lauses finales» relatives au
règlement des différends (article21), à l’effet de l’accord intérimaire sur les Etats tiers et les
organisations internationales (article 22), et à son entrée en vigueur (art. 23).
4.13. L’objet et le but de l’accord intérimair e sont évidents au vu de ses dispositions. Il
visait à amener une normalisation immédiate des re lations entre les Etats demandeur et défendeur
et à organiser leur coopération future, nonobstant leur différend concernant le nom du demandeur.
En particulier, compte tenu de l’in térêt que revêtait pour les Parties «l e maintien de la paix et de la
sécurité internationale», reflété dans le préa mbule de l’accord, il prévoyait la reconnaissance du
demandeur par le défendeur, l’établissement de rela tions diplomatiques, l’adoption de dispositions
pratiques dans le cadre de ces relations, un engageme nt en faveur de la lib erté de circulation des
personnes et des biens (impliquant la levée de l’embargo économique) et la confirmation de «la
77 frontière existante» entre les Parties en tant que « frontière internationale dur able». Il réaffirmait
que le demandeur n’exprimait pas de revendicati ons territoriales à l’encontre du défendeur et
définissait, entre autre, les procédures dans le cadre desquelles les préoccupations exprimées en ce
qui concerne les symboles historiques et cultu rels seraient examinés. L’accord intérimaire
prévoyait aussi, et cela est important, que le de mandeur rejoindrait la famille des nations et
deviendrait un membre actif de la communauté in ternationale. Etait au cŒur de cet accord
l’engagement clair et contraigna nt, énoncé à l’article 11, qui perm ettrait au demandeur de devenir
membre d’organisations internationales au sein desquelles, pour bon nombre d’entre elles, il n’avait
pu être admis en raison de l’opposition du défendeur liée à leur divergence au sujet de son nom.
S ECTION II. L’ARTICLE 11 À LA LUMIÈRE DE SES TRAVAUX PRÉPARATOIRES
4.14. Bien que le sens et l’effet du paragraphe 1 de l’article 11 soient éclairés par l’objet et le
but de l’accord intérimaire dans son ensemble, le différend dont est saisi la Cour ne concerne que
ce paragraphe. L’article 11 dispose :
«1. Lorsque le présent accord intérimaire sera entré en vigueur, la Première
Partie ne s’opposera pas à la demande d’ad mission de la Seconde Partie dans des
organisations et institutions internatio nales, multilatérales ou régionales dont la
Première Partie est membre, non plus qu’à la participation de la Seconde Partie à ces
organisations et institutions; toutefois, la Pr emière Partie se réserve le droit d’élever
des objections à une telle demande ou à une telle participation si la Seconde Partie doit
être dotée dans ces organisations ou instituti ons d’une appellation différente [de] celle
prévue au paragraphe2 de la résoluti on817 (1993) du Conseil de sécurité des
Nations Unies.
2. Les Parties conviennent que le dé veloppement économique de la Seconde
Partie devrait être soutenu au moyen d’un e coopération internationale, dans toute la
mesure possible grâce à une relation étroite de cette partie avec l’Espace économique
européen et l’Union européenne.»
4.15. Le sens et l’effet des termes utilisés au pa ragraphe 1 de l’article 11 s’éclairent en partie
si on les compare à l’article 11 du projet de traité de 1993. Cet article était ainsi libellé :
78 «1. La République hellénique s’efforce d’appuyer, partout où cela est possible,
l’admission de la République de Nova Ma kedonija aux institutions européennes dont
la Grèce est membre. - 50 -
2. Les Parties conviennent que la tr ansformation économique en cours de la
République de Nova Makedonija devrait êt re appuyée au moyen de la coopération
internationale, dans toute la mesure du po ssible par une relation plus étroite de la
République de Nova Makedonija avec l’ Espace économique européen et la
Communauté européenne.» 159
4.16. Si on la compare au paragraphe 1 de l’ article 11 de l’accord intérimaire, la disposition
correspondante du projet de traité de 1993 était plus limitée dans sa portée. Elle ne visait que les
«institutions européennes dont la Grèce est membre», alors que l’accord intérimaire s’applique à
toutes les «organisations et institutions intern ationales, multilatérales ou régionales dont [le
défendeur] est membre». Comme l’OTAN n’est pas une institution européenne, si les termes du
projet de traité de1993 avaient été conservés dans l’accord intérimaire, l’obligation qu’impose
celui-ci n’aurait pas été applicable à l’admission du demandeur à l’OTAN.
4.17. De plus, le paragraphe1 de l’artic le11 du projet de traité de1993 et l’accord
intérimaire diffèrent sur un autre point pertinent. Alors que le projet de traité de 1993 ne prévoyait
qu’une obligation positive peu c ontraignante à la charge du dé fendeur, à savoir «s’efforce[r]
d’appuyer, partout où cela est possible, l’admissi on [du demandeur] aux institutions européennes»,
le paragraphe1 de l’artic11 de l’accord intérimaire énonce une obligation négative
inconditionnelle et ferme à la charge du défendeur, à savoir «ne pas s’opposer» à l’admission du
demandeur dans les organisations et institutions internationales, multilatérales et régionales dont le
défendeur est membre. Le remplacement des mots «s’efforce d’appuyer» par «ne s’opposera pas»,
lesquels dénotent une obligation, souligne l’intention des rédact eurs de mettre à la charge du
défendeur, en ce qui concerne l’admission du dema ndeur dans des organisations et institutions
internationales, multilatérales et régionales, une obligation illimitée précise et non ambiguë. La
79 suppression des termes limitatifs ⎯«partout où cela est possible» ⎯ qui figuraient dans le projet
de traité de 1993 confirme la largeur et l’étendue du champ d’application du texte qui a été adopté.
4.18. Enfin, aux termes de l’accord intérimaire, le défendeur accepte de ne pas s’opposer à la
«demande d’admission» dans des organisations et institutions internationales, multilatérales ou
régionales non plus qu’à sa participation à ces organisations. Cette formule diffère de celle utilisée
dans le projet de traité de 1993 , où l’engagement pris ne concer nait que «l’admission» à certaines
organisations. En étendant la portée de l’obliga tion à toute «demande d’admission» ainsi qu’à la
«participation», l’accord intérimaire indique que l’obligation de «ne pas s’opposer» intervient à
toute étape d’un processus pouvant aboutir à une demande d’admission ou à une participation, de
telle manière que cette obligation est violée si l’opposition intervient à tout moment une fois que le
demandeur a engagé le processus devant abou tir à son admission dans une organisation ou
institution particulière.
S ECTION III. L’OBLIGATION ÉNONCÉE À L ’ARTICLE 11
4.19. Si la majorité des dispositions de l’acco rd intérimaire s’adressent aux deux parties (les
mots «les Parties…» figurent dans la plupart des dispositions), le paragraphe1 de l’article11
adopte une formulation différente. Il est parmi l es quatre dispositions de l’accord visant une partie
seulement (l’article 6 vise uniquement le demandeur, une clause du paragraphe 1 de l’article 1 et du
paragraphe 2 de l’article 7 uniquement le défendeur). Ainsi, le paragraphe 1 de l’article 11 énonce
une obligation à la charge du seul défendeur.
159
Projet proposé par M. Cyrus Vance et Lord Owen le 14 mai 1993, Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai 1993),
note 158 supra ; annexe 33. Le nom «Nova Makedonija» qui figurait dans cette disposition a été finalement rejeté par les
deux Parties ; annexes 34 et 35. Voir chap. II, par. 2.23. - 51 -
4.20. Eu égard à l’objet et au but de l’accord intérimaire dans son ensemble, y compris ses
travaux préparatoires, le paragraphe1 de l’artic le11 est dépourvu de toute ambigüité: il créé une
obligation juridique internationale contraignante et immédiate à la charge du défendeur qui oblige
celui-ci à ne rien faire qui puisse constituer une opposition à la particip ation du demandeur à des
organisations ou institutions internationales dont le défendeur est membre, à n’importe quel stade
du processus de participation ou d’admission. Le paragraphe1 de l’article11 est une entrave à
l’exercice des droits discrétionnaires que le défendeur pourrait autrement posséder en vertu du droit
international, une entrave définie de manière clai re et illimitée. Le seul motif justifiant une
opposition du défendeur est clairement énoncé : le défe ndeur ne peut élever d’objections que si le
80 demandeur doit être doté dans une organisation ou institution d’une appellation différente de celle
prévue au paragraphe 2 de la r ésolution 817 (1993). En résumé, le paragraphe 1 de l’article 11 ne
pose aucune difficulté d’interprétation particuliè re compte tenu des principes d’interprétation
établis à l’article 31 de la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités et de la pratique des
Etats : son sens est clair et ne laisse aucune place au doute.
4.21. Le paragraphe1 de l’article11 comprend deuxclauses: la première énonce
l’obligation générale du défendeur de ne pas élev er d’objections, et la seconde indique la seule
condition, exceptionnelle, à laquelle le défendeur peut élever des objections nonobstant l’obligation
générale. La première clause e xprime l’intention claire des parties de mettre fin à l’opposition du
défendeur à l’admission du demandeur dans des organisations et institutions internationales,
multilatérales ou régionales ; la seconde énonce le se ul motif pour lequel le défendeur peut élever
des objections à l’admission du demandeur dans de telles organisations ou institutions.
A. La première clause du paragraphe 1 de l’article 11 : l’obligation du défendeur
de «ne pas s’opposer»
4.22. La première clause du paragraphe 1 de l’article 11 dispose :
«[L]a Première Partie ne s’opposera pas à la demande d’admission de la
Seconde Partie dans des organisations et institutions internationales, multilatérales ou
régionales dont la Première Partie est memb re, non plus qu’à la participation de la
Seconde Partie à ces organisations et institutions.»
4.23. Comme on l’a vu au chapitreII 160, l’article11 visait à faciliter l’admission du
demandeur dans des organisations internationales, admission à laquelle le défendeur s’était opposé
ou aurait pu s’opposer.
4.24. Un certain nombre de points peuvent être soulignés, qui attestent l’étendue du champ
d’application de la disposition : si l’obligation é noncée au paragraphe 1 de l’article 11 ne s’impose
81 qu’au défendeur, elle s’applique à toutes les organisations et institutions internationales,
multilatérales ou régionales dont le défendeur est membre; de plus, comme ci-dessus, la
disposition n’est pas limitée ⎯ à la différence de la dispositi on correspondante du projet de traité
de 1993 ⎯ aux institutions européennes. Elle s’ applique manifestement à l’OTAN, dont le
défendeur est membre.
4.25. L’obligation de «ne pas s’opposer» est ég alement large. La formule utilisée est plus
large que toute autre formule possible, comme par exemple «ne pas opposer de veto» ou «ne pas
bloquer» (impliquant une obligation qui ne naît que si l’action du défendeur empêcherait le
demandeur d’être admis dans une organisation). Ainsi, l’obligation s’applique et est violée lorsque
160
Voir chap. II, par. 2.37-2.38. - 52 -
le défendeur «s’oppose», quelles que soient les conséquences de cette opposition. L’obligation
vise toute expression tacite ou expresse de désappr obation ou d’opposition, en paroles ou en actes,
à la demande d’admission du demandeur dans une organisation ou institution ou à sa participation à
une telle organisation ou institution 16. Une objection peut s’exprimer sous diverses formes, y
compris par écrit et oralement, par le silence ou autrement.
4.26. La formule utilisée englobe les actes positifs, comme un vote, aussi bien que l’inaction,
par exemple le fait de ne pas participer à une séance à laquelle la participation est nécessaire pour
exprimer un avis requis. De cette manière, l’ob ligation couvre au moins deux types de situations :
1)celle où le défendeur est en mesure par son acte d’opposition d’ empêcher le demandeur d’être
admis dans une organisation internationale (le cas de l’OTAN), et 2) celle où l’acte d’opposition du
défendeur n’aurait pas pour effet d’empêcher l’ admission (lorsque l’unan imité n’est pas exigée
pour les décisions d’admission). En d’autres termes, l’expression choisie par les rédacteurs du
82 traité, «ne s’opposera pas», indique que c’est l’ acte d’opposition lui-même qui est interdit, quelles
que soient ses conséquences. Il est également clair que l’obligation est inconditionnelle, au sens où
le défendeur ne peut invoquer aucun motif ⎯sous réserve de la seule question visée au
paragraphe 1 de l’article 11 ⎯ pour justifier une opposition de sa part.
4.27. La formule retenue englobe tout e opposition à une «demande d’admission» du
demandeur dans de telles organisations et institutions ou sa «participation» à de telles organisations
et institutions. La large acception des termes ainsi utilisés englobe l’ensemble des processus par
lesquels le demandeur peut obtenir son admi ssion, et l’accent n’est pas mis sur une opposition
formulée à tel ou tel moment de ces processus.
4.28. En bref, le libellé du paragraphe1 de l’article11 envisage un champ d’application
inconditionnel, large et immédiat en ce qui concerne le comportement du défendeur. C’est ce que
confirme la pratique ultérieu re dans l’application de cette disposition: comme indiqué au
chapitreII, entre le 13octobre1995 et le 3avr il2008, le demandeur a été admis dans un grand
nombre d’organisations internationales sans opposition de la part du défendeur 16.
B. La seconde clause du paragraphe 1 de l’article 11 : le seul motif
d’opposition autorisé au défendeur
4.29. La seconde clause du paragraphe1 de l’ article11 de l’accord intérimaire énonce la
seule exception à l’obligation inconditionnelle, large et immédiate acceptée pa r le défendeur dans
la première clause. Elle se lit comme suit :
161To object: «1. to say that you di sagree with, disapprove of or oppose something; 2.to give something as a
reason for opposing sth; synonym: protest» (Oxford University Press Dictionary) (1.exprimer son désaccord avec
quelque chose, sa désapprobation de que lque chose ou son opposition à quelque c hose; 2. donner quelque chose comme
raison de s’opposer à quelque chose ; synonyme : protester»). «1. to feel or express dislike or disapproval for; 2. to state
something as a ground for disapproval or objection» (Chambers Dictionary) (1. ressentir ou exprimer du déplaisir ou de
la désapprobation pour; 2.déclarer quelque chose pour jutifier une désapprobation ou une objection); «1.to feel or
express opposition to or dislike of something or someone» (Cambridge Advanced Leaner’s Dictionary) (1.ressentir ou
exprimer une opposition ou un déplaisir face à quelque chose ou quelqu’un); «1. to oppose something firmly and usually
with words or arguments; 2. to feel distaste for something»(Webster’s Dictionary) (1.s’opposer à quelque chose
fermement et habituellement pas des paroles ou des arguments; 2.ressentir du dégoût pour quelque chose) [traduction
du Greffe]. En droit international, les définitions adoptent une approche comparable : voir, par exemple, le Dictionnaire
de droit international public établi sous la direction du professeur Jean Salmon : «Opposition manifestée par un sujet de
droit en vue d’empêcher l’entrée en vigueur ou l’opposabilité à son égard.» Le Dictionnaire définit également la
«procédure de non-objection» comme une «[p]rocédure d’acceptation implicite de la demande d’adhésion à certaines
conventions».
162Voir chapitre II, par. 2.40 et 2.41. - 53 -
«toutefois, la Première Partie se réserve le droit d’élever des objections à une telle
demande ou à une telle participation si la Seconde Partie doit être dotée dans ces
organisations ou institutions d’une appellation différente [de] celle prévue au
paragraphe 2 de la résolution 817 (1993)».
4.30. Le sens ordinaire de cette clause ne pose aucune difficulté: en définissant la seule
circonstance dans laquelle le défe ndeur «se réserve le droit d’élever des objections» à certaines
83 demandes d’admission, les Parties ont strictement limité les conditions dans lesquelles le défendeur
peut exercer le droit qui lui est concédé d’élever des objections. Alors que l’obligation générale de
«ne pas s’opposer» est immédiate, large et inconditionnelle, le dr oit d’élever des objections est
limité et soumis à une condition rigoureuse. Lors que la condition unique prévue dans cette clause
n’est pas remplie, le défendeur n’a pas le droit d’élever des objections.
4.31. Le défendeur peut exercer son droit d’élever des objections si, et seulement si, le
demandeur «doit être doté dans ces organisations ou institutions d’une appellation différente [de]
celle prévue au paragraphe2 de la résolution817 (1993)». Comme indiqué au chapitreII, le
paragraphe2 de cette résolutio n dispose que le demandeur doit être «désigné provisoirement, à
toutes fins utiles à l’Organisation, sous le no m d’«ex-République yougosla163de Macédoine» en
attendant que soit réglée la divergence qui a surgi au sujet de son nom» .
4.32. Durant les seize ans qui se sont écoul és depuis que le demandeur est devenu membre
de l’Organisation des Nations Unies le 8 avril 1993, la pratique en relation avec la résolution 817 a
été constante. Le demandeur est devenu memb re d’un nombre important d’organisations au sein
du système des Nations Unies et extérieures à celui-ci, après avoir demandé à y être admis sous son
nom constitutionnel et en ayant par la suite été pr ovisoirement désigné de la manière indiquée dans
la résolution 817. Dans le même temps, comme indiqué aux chapitres II et V 16, et conformément à
la résolution817, le demandeur a continué à se désigner par son nom constitutionnel, notamment
dans ses relations avec les organisations et instit utions internationales. Cette approche est
conforme à celle adoptée dans le cadre des instruments bilatéraux signés à l’occasion de la
conclusion de l’accord intérimaire, notamment le mémorandum relatif aux «dispositions pratiques»
concernant l’accord 165érimaire de New York du 13 septembre 1995, signé à Skopje
le 13 octobre 1995 . Ce mémorandum stipulait que le de mandeur pouvait continuer à utiliser son
84 nom constitutionnel dans ses relations officie lles avec le défendeur, et le demandeur a
effectivement continué à le faire. Le mémora ndum et les accords bilatéraux postérieurs conclus
entre les Parties, ainsi que la pratique concer nant l’accord intérimaire, sont pertinents pour
l’interprétation de l’accord intérimaire en applica tion des paragraphes2 et3 de l’article31 de la
convention de Vienne de1969. En bref, il n’est pas contestable que, s’agissant de l’OTAN, le
processus engagé par le demandeur pour devenir me mbre de cette organisation était pleinement
conforme aux prescriptions de la résolution 817.
C. Le paragraphe 2 de l’article 11
4.33. Le paragraphe2 de l’ article11 indique que les Parties conviennent que le demandeur
devrait forger une «relation étroite … avec l’Espace économique européen et l’Union européenne».
Cette disposition est d’une importance particuliè re pour l’interprétation et l’application du
paragraphe 1 de l’article 11 en relation avec le désir du demandeur de devenir membre de l’Union
16Chapitre II, par. 2.17.
164
Chapitre II, par. 2.20 et chapitre V, par. 5.64.
16Mémorandum relatif aux «dispositions pratiques» c oncernant l’accord intérimaire de NewYork du
13 septembre 1995 (Skopje, 13 octobre 1995) ; annexe 3. Voir chapitre II, par. 2.36. - 54 -
européenne. La violation du pa ragraphe1 de l’article11 que constituerait toute opposition du
défendeur à la participation du demandeur à l’Un ion européenne alors que les conditions énoncées
dans la résolution 817 seraient réunies, serait d’auta nt plus choquante eu égard à l’accord entre les
Parties sur le texte du paragraphe 2 de l’article 11.
S ECTION IV. C ONCLUSION
4.34. Le sens ordinaire et l’effet du paragr aphe1 de l’article 11 ne posent guère de
difficultés. Le seul motif pour lequel le défende ur peut s’opposer à l’admission du demandeur à
l’OTAN serait que le demandeur soit doté dans cet te organisation d’une a ppellation différente de
celle prévue au paragraphe 2 de la résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité. Etant donné que le
demandeur a toujours été désigné de cette manière à l’OTAN ⎯ et a expressément accepté d’être
ainsi désigné en sa qualité de membre ⎯ le paragraphe1 de l’article 11 interdit au défendeur de
s’opposer par ses paroles ou ses actes à l’admission du demandeur à tout stade du processus
d’admission, y compris en s’opposant à ce que soit adressée au demandeur une invitation à
commencer des pourparlers pour devenir membre de l’OTAN. - 55 -
C HAPITRE V
85
L E DÉFENDEUR A VIOLÉ LE PARAGRAPHE 1 DE L’ARTICLE 11DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE
EN S’OPPOSANT À L ’ADHÉSION DU DEMANDEUR À L ’OTAN
INTRODUCTION
5.1. Comme indiqué au chapitreIV, la présen te affaire a trait à l’interprétation et à
l’application de l’un des articles d’un traité — le paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire —, qui lie le demandeur et le défendeur et qui est régi par les règles énoncées dans la
convention de Vienne de 1969 sur le droit des tra ités. En outre, comme exposé au chapitre III, le
paragraphe2 de l’article21 de l’accord inté rimaire stipule que «toute divergence ou…tout
différend qui s’élève entre [les Parties]» sera soum is à la Cour, à «l’exception de la divergence
visée au paragraphe1 de l’article5» (c’est-à-dire, le différend relatif au nom du demandeur). Le
demandeur insiste donc de nouveau sur le fait que le présent différend a une portée limitée et qu’il
ne vise pas à trancher la question du nom.
5.2. En effet, ce que le demandeur reproche au défendeur, c’est d’avoir violé, avant et
pendant le sommet de l’OTAN tenu à Bucarest du 2 au 4 avril 2008, l’obligation lui incombant en
vertu du paragraphe1 de l’article11 de l’accord intérimaire de ne pas «s’oppose[r] à la demande
d’admission [du demandeur] dans des organisations et institutions internationales, multilatérales ou
régionales dont [le défendeur] est membre, non pl us qu’à la participation [du demandeur] à ces
organisations et institutions», lorsque le demande ur est doté dans ces organi sations ou institutions
de l’appellation «ex-République yougoslave de Macédoine».
5.3. Avant d’agir en violation du paragraphe 1 de l’article11, le défendeur n’a jamais
officiellement indiqué au demandeur —par une note verbale ou toute autre communication
écrite—, qu’il avait violé une quelconque oblig ation lui incombant en vertu de l’accord
intérimaire, ni ne lui a demandé de cesser une te lle violation, ni n’a déclenché les procédures de
86 règlement des différends disponibles dans l’hypoth èse d’une telle violation. Dès lors, rien ne
saurait fonder le défendeur à soutenir que le fait q’il ait violé le paragraphe1 de l’article11 au
début du mois d’avril2008 serait justifié soit parce que l’accord intérimaire aurait été suspendu
avant cette date du fait d’une viol ation substantielle commise par le demandeur, soit en tant que
contre-mesure proportionnée prise en vue d’ob tenir du demandeur qu’il se conforme à ses
obligations. Ce n’est qu’après le début du mois d’avril2008 ⎯lorsque le demandeur s’est
officiellement plaint auprès du défendeur de ce que son comportement était contraire au
paragraphe 1 de l’article 11 ⎯ que le défendeur a prétendu, par écrit, en recourant à des allégations
imprécises et sans fondement, que le demandeur ava it violé l’accord intérimaire. De surcroît, ce
n’est qu’après que la présente instance a été intr oduite devant la Cour en novembre2008 que le
défendeur a adressé, de manière régulière, des co mmunications écrites dans lesquelles il prétendait
que le demandeur avait commis diverses violations et ce, en rapport avec des questions qui se sont,
pour la plupart, fait jour après le mois d’ avril 2008. En résumé, les griefs formulés post hoc par le
défendeur relativement à de prétendues violations de l’accord intérimaire par le demandeur visent à
fonder sa défense en la présente affaire et ne sont pas les raisons véritables de son comportement
fin mars/début avril 2008.
5.4. Dans la section I du présent chapitre, les actes du défendeur exposés au chapitre II sont
examinés au regard des obligations lui incombant en vertu du paragr aphe1 de l’ar ticle 11, telles
que rappelées au chapitreIV. Le comportement qu’a eu le défendeur le 3avril2008 constitue
clairement une violation du paragraphe1 de l’ar ticle11, ouvrant droit, pour le demandeur, à - 56 -
réparation. Il est démontré dans la section II que la violation commise par le défendeur n’était pas
une réaction licite à de prétendues violations d’ autres dispositions de l’accord intérimaire,
principalement parce que le défendeur n’a pas re couru aux procédures de règlement des différends
prévues par l’accord intérimaire en cas de violation supposée de celui-ci. Dans la section III sont
exposées de manière plus détaillée les raisons pour l esquelles le défendeur ne saurait expliquer son
inobservation du paragraphe1 de l’article11 en arguant de la suspension de cet article ou de
l’accord intérimaire dans sa totalité. Cette thèse ne saurait être soutenue, puisque le défendeur n’a
pas respecté le droit des traités en matière de suspension. Dans la section IV sont exposées les
raisons pour lesquelles la violation commise par le défendeur ne saurait, en vertu du droit de la
responsabilité de l’Etat, être considérée comme une contremesure prise en réponse à un acte illicite.
Enfin, bien que la Cour n’ait pas à examiner au fond d’éventuelles violations de l’accord
intérimaire par le demandeur, sont exposées, dans la section V, les raisons pour lesquelles les
87 allégations —pour l’essentiel imprécises et infondées— formulées à ce jour par le défendeur
⎯ pour autant qu’elles puissent être comprises ⎯ sont dépourvues de fondement.
S ECTION I. LE COMPORTEMENT DU DÉFENDEUR FIN MARS /DÉBUT AVRIL 2008 EST
CONTRAIRE AU PARAGRAPHE 1 DE L ’ARTICLE 11 DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE
5.5. Comme indiqué au chapitre II, le présent différend a trait aux actes du défendeur, dont le
point culminant a été atteint fin mars/début avril 2008, lorsqu’il a empêché le demandeur de mener
plus avant son processus d’adhésion à l’OTAN. Ces faits, examinés à la lumière du sens et de
l’effet du paragraphe1 de l’artic le11, tels qu’exposés au chapitreIV, permettent de formuler
plusieurs conclusions essentielles.
5.6. Premièrement, le demandeur ne s’intéresse, en l’espèce, qu’à la responsabilité
internationale du défendeur, et non de quelque autr e Etat, entité ou personne. Il ressort clairement
de l’article2 des articles de2001 de la Commissi on du droit international sur la responsabilité de
l’Etat pour fait internationalement illicite (ci-après les «articles de la CDI» 166) (dont il est
généralement admis que les principes fondament aux reflètent le droit international général 16) que,
pour qu’il y ait fait internationalement illicite de l’Etat, le fait en question doit être attribuable audit
Etat d’après le droit international. En la présente affaire, le fait en question se rapporte
exclusivement à un comportement du défendeur contraire à un traité bilatéral 16, à savoir qu’il s’est
opposé à ce que l’OTAN invite le demandeur à enga ger des pourparlers en vue de son adhésion.
Ce comportement n’est attribuable, au sens de l’article4 et des autres dispositions du chapitreII
des articles de la CDI, qu’au seul défendeur. Le présent différend n’est pas une affaire en laquelle
plusieurs Etats pourraient être considérés comme responsables du même fait internationalement
88 illicite. L’article 47 des articles de la CDI est donc dépourvu de pertinence. La présente affaire a
uniquement trait aux actes du défendeur, non pas à ceux d’un quelconque autre Etat ou d’une
quelconque organisation internationale.
16Assemblée générale, cinquante- sixièmesession, supplément n10 (A/56/10), p.43-58, NationsUnies,
o
doc. A/56/10/corr.1, art. 2ème et 49 (commentaire nommission du droit international, Annuaire de la Commission
du droit international, vol. Ipartie) (2001).
16Voir, par exemple, Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 39-46.
16Voir Interprétation des traités de paix conclus avec la Bul garie, la Hongrie et la Roumanie, deuxième phase,
avis consultatif, C.I.J.Recueil1950 , p.228 («le refus de s’acquitter ligation conventionnelle est de nature à
engager la responsabilité internationale»). - 57 -
169
5.7. Deuxièmement, comme indiqué au chapitre IV , la première partie du paragraphe 1 de
l’article 11 impose clairement au défendeur de ne pas s’opposer à la participation du demandeur à
l’OTAN. En vertu de l’article 26 de la convention de Vienne sur le droit des traités ⎯ à laquelle le
demandeur et le défendeur sont parties 170 —, le défendeur est tenu de respecter cette obligation de
bonne foi 171.
5.8. Troisièmement, comme indiqué au chapitreII 172, la question de la candidature du
demandeur à l’OTAN sous l’appellation provisoire d’«ex-République yougoslave de Macédoine» a
été examinée lors du sommet de Bucarest, les 2et3avril2008, en même temps que les
candidatures de l’Albanie et de la Croatie. Ma lheureusement, le défendeur s’y étant vivement
opposé finmars/débutavril, l’OTAN a annoncé, le 3 avril2008, qu’elle inviterait l’Albanie et la
Croatie à engager des pourparlers en vue de leur adhésion à l’A lliance, mais pas le demandeur 173.
Il est indéniable que le défendeur s’est opposé à l’adhésion du demandeur à l’OTAN et que cela a
eu pour conséquence qu’il n’a pas été invité à rejoindre l’organisation. Dès lors, le défendeur a, par
son opposition, clairement violé l’obligation éno174 cée au paragraphe1 de l’article11, et le
demandeur est en droit d’obtenir réparation .
5.9. Enfin, ainsi que cela est exposé de manièr e détaillée au chapitre IV , le paragraphe 1 de
l’article11 énonce une seule exception à l’obligat ion du défendeur de ne pas «s’oppose[r]» à une
175
demande d’admission du demandeur . Ainsi pourrait-il, à titre exceptionnel, s’opposer à la
89 candidature du demandeur à l’OTAN si — et seulement si — celui-ci devait, «en attendant que soit
réglée la divergence qui a surgi au sujet de son nom», être désigné au sein de l’OTAN sous une
appellation différente de celle pr évue au paragraphe2 de la résolution817 (1993) (à savoir,
«ex-République yougoslave de Macédoine»). Or, tel n’est clairement pas le cas en l’espèce. Le
demandeur est d’or176et déjà désigné au sein de l’OTAN, dans le contexte du programme PPP et du
processus MAP , en tant qu’«ex-République yougoslave de Macédoine» et il a clairement indiqué
qu’il acceptait cette appellation provisoire aux fins de son admission à cette organisation. Le
président du demandeur, M. Branko Crvenkovski, ne pouvait d’ailleurs être plus clair que lorsqu’il
a déclaré :
«Si le différend n’est pas résolu avant que nous ne rejoignions l’OTAN, nous
sommes prêts à accepter, à titre provisoire, de devenir membre à part entière de cette
organisation sous l’appellation par laqu elle nous sommes actuellement désignés au
sein de l’Organisation des Nations Unies.» 177
5.10. Qui plus est, il ressort des éléments de preuve que le défendeur n’a pas invoqué cette
seule exception à son obligation de ne pas «s’ opposer» à une candidature du demandeur lorsqu’il a
menacé d’opposer son veto à la candidature de celui-ci à l’OTAN avant —ou pendant— le
169Voir chap. IV, section III.
170Convention de Vienne sur le droit des traités (Vienne, 23mai1969), NationsUnies, Recueil des traités ,
vol. 1155, p. 331.
171Voir Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 78-79.
172Voir chap. II, par. 2.53-2.56.
173
Voir, chap. II, par. 2.54-2.56.
174
Voir, le chapitre VI plus loin.
175Voir chap. VI, par. 4.29-4.33.
176Voir chap. II, par. 2.50-2.51.
177
StavrosTzimas, «Nous sommes prêts à devenir me mbre de l’OTAN sous le nom d’«ex-République
yougoslave de Macédoine»», Kathimerini (4 juin 2007) ; annexe 69. - 58 -
sommet de Bucarest 17. Compte tenu des déclarations faites à l’époque par les plus hautes autorités
politiques du défendeur et des circonstances dans le squelles le demandeur a cherché à participer à
l’OTAN, il ne fait aucun doute que les objections fo rmulées par le défendeur n’entrent pas dans le
champ de l’exception strictement circonscrite énon cée au paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire.
5.11. Le 17 avril 2008, le demandeur a adress é une note verbale au défendeur, dans laquelle
il tirait grief des actes de ce dernier et invoquait une violation du paragraphe 1 de l’article11 de
l’accord intérimaire 17. Cette note verbale a été suivie, le23avril2008, par une lettre que le
président du demandeur, M. BrankoCrvenkovski, a adressée au Secrétaire général de
90 l’Organisation des Nations Unies afin d’informer l’Organisation du fait qu’il estimait que les actes
du défendeur constituaient une «v iolation flagrante de l’article11 de l’accord intérimaire» 180. La
181
réponse du défendeur figure dans une note verbale datée du15mai2008 . Dans cette note,
celui-ci reconnaît implicitement que ses actes sont contraires aux prescriptions du paragraphe 1 de
l’article11, et cherche à les justifier «d’un poin t de vue purement juridique» en arguant que le
demandeur violait de manière substantielle l’acco rd intérimaire et ce, «depuis [s]a conclusion»
en1995. Et pourtant, la note verbale est bi en plus notable pour ce qu’elle ne dit pas : à aucun
moment le défendeur ne cherche à justifier son opposition à l’adhésion du demandeur à l’OTAN en
invoquant la seule exception possible, à savoir que le demandeur ne serait pa s désigné au sein de
cette organisation par l’appellation figurant dans la résolution 817.
SECTION II. LA VIOLATION COMMISE PAR LE DÉFENDEUR N ’ÉTAIT PAS UNE RÉACTION
LICITE À DES ACTES SE RAPPORTANT À D AUTRES DISPOSITIONS DE L ’ACCORD
INTÉRIMAIRE ,CELLES -CI RENVOYANT À DES PROCÉDURES PARTICULIÈRES
POUR LE RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS
5.12. Dans ces conditions, le défendeur ne sau rait échapper à l’obligation fort claire à
laquelle il a souscrit à l’égard du demandeur en ve rtu du paragraphe1 de l’article11 de l’accord
intérimaire en se référant à d’autres dispositions dudit accord. Hormis l’exception susmentionnée
qui figure au paragraphe 1 de l’article 11, aucun autre fondement ne permet au défendeur de refuser
de se conformer à l’obligation découlant claireme nt de cette disposition, à savoir de ne pas
«s’oppose[r]» à une demande d’admission du demandeur. Le libellé du paragraphe 1 de l’article 11
est dépourvu de toute ambiguïté, et il n’autorise p as le défendeur à invoquer des motifs autres que
ceux y énoncées pour justifier ses actes 18. Aux termes des dispositions de l’accord intérimaire
relatives au règlement des différends, le défendeur aurait, en particulier, dû recourir à des
procédures donnant ou non lieu à une solution obli gatoire pour régler toute question relative à
l’interprétation ou à la mise en Œuvre de l’accord intérimaire, et non pas à une mesure unilatérale
contraire à l’article 11.
91 5.13. A cet égard, il est intéressant de relever que ce n’est que depuis que le différend
opposant les Parties s’est cristallisé fin mars/début avril 2008 — lorsque le défendeur s’est opposé
à ce que le demandeur soit invité à adhérer à l’OTAN — que le défendeur a indiqué au demandeur,
dans des notes diplomatiques ou des lettres, que le fondement juridique de son opposition à son
adhésion à l’OTAN était qu’il avait prétendument ou supposément violé l’accord intérimaire. Dans
sa note verbale du 15mai2008 (qui répondait à la note verbale susmentionnée du demandeur en
178
Voir, chap. II, par. 2.58-2.63.
179Voir chap. II, par. 2.65 et annexe 50.
180Voir chap. II, par. 2.65 et annexe 42.
181
Voir chap. II, par. 2.67 et annexe 51
182Voir chap. IV ci-dessus. - 59 -
date du 17avril2008), le défe ndeur invoquait notamment une sér ie de prétendues violations
substantielles de différents articles de l’accord intérimaire —à savoir que le demandeur aurait
«formulé des prétentions territoriales contre la Grèce et apporté son soutien à de telles prétentions»,
«encouragé et toléré l’irrédentisme», «incité à la 183iolence, à la haine et à l’hostilité contre la
Grèce», etc. — sans les rattacher à des faits précis .
5.14. Sept mois plus tard, dans sa note verb ale du 15 janvier 2009, le défendeur a réitéré son
allégation générale selon laque lle le demandeur «n’avait cessé de commettre des violations
substantielles des dispositions f ondamentales de l’accord [intérimaire]». L’objet de cette note
verbale était de donner un peu plus de corps à cette allégation. Etaient donc invoqués un fait ancien
et quatre faits «plus récents», présentés comme c ontraires à l’accord intérimaire: le fait que
l’aéroport de Skopje et une partie du «corri dor paneuropéen X» aient été baptisés
AlexandreleGrand, le fait que le principal st ade de Skopje ait été baptisé «PhilippeII de
Macédoine», et le fait que le soleil à seize rais d’or ait été utilisé dans des annonces télévisées
financées par le gouvernement 184. D’autres problèmes ont ensuite été invoqués dans de nouvelles
notes verbales, notamment: l’utilisation du sole il à seize rais d’or sur une place en ville, la
présence, sur un site du gouvernement, d’une photog raphie représentant des supporters arborant
l’ancien drapeau du demandeur lors d’un match de f ootball, et une déclaration que le ministre des
92 185
affaires étrangères du demandeur a faite en février 2009 lors d’une interview télévisée .
5.15. Dans la mesure où les griefs formulés se rapportent à des «symboles faisant partie d[u]
patrimoine historique ou culture l» du défendeur, la procédure à suivre est celle énoncée au
paragraphe 3 de l’article 7 de l’accord intérimaire. Cette disposition se lit comme suit :
«Si l’une des Parties pense que l’autr e Partie utilise un ou plusieurs symboles
faisant partie de son patrimoine historique ou culturel, elle por tera cette question à
l’attention de l’autre Partie et cette de rnière soit prendra les mesures voulues pour
remédier à la situation soit indiquera pourquoi elle ne considère pas nécessaire de le
faire.»
5.16. Même si le défendeur estimait, avant le 3 avril 2008, que le demandeur utilisait de tels
symboles, cela ne l’autorisait pas à agir unilatéralement en violation du paragraphe 1 de l’article 11
de l’accord intérimaire. En effet, la procédur e à suivre dans une telle hypothèse est celle énoncée
au paragraphe 3 de l’article 7. En énonçant le s recours et procédures diplomatiques dont disposent
les deux Parties, l’accord intérimaire exclut le recours à des mesures unilatérales telles que celles
retenues par le défendeur relativem ent au paragraphe 1 de l’article 11 et aux efforts du demandeur
pour adhérer à l’OTAN. La Cour a déjà eu l’o ccasion d’indiquer l’importance qu’il y a, dans le
183
Note verbale du 15mai2008 adressée au ministère de s affaires étrangères du demandeur par le bureau de
liaison du défendeur à Skopje (annexe51); voir également, chap.II, par.2.67.Le défendeur a également invoqué, au
titre des violations alléguées, «l’intransigeance et l’iibilité» du demandeur lors des négociations relatives à la
divergence sur le nom et s’est référé à un incident pariculier survenu à l’Organisatio n des NationsUnies en2007
relativement à l’emploi du nom constitutionnel du demandeur.
184Note verbale en date du 15janvier2009 adressée au ministère des affaires étra ngères du demandeur par le
bureau de liaison du défendeur à Skopje (annexe 52) ; voir également par. 5.59 ci-dessous.
185
Voir la note verbale en date du 24 février 2009 adress ée au bureau de liaison du de mandeur à Athènes par le
ministère des affaires étrangères du défendeur (annexe53); et la note verbale en date du 15avril2009 adressée au
ministère des affaires étrangèr es du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje, n141.1/49/AS 489
(annexe 60) ; voir également les notes verbales adressées au ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau
de liaison du défendeur à Skopje , en date du 15avril2009, n oF.141.1/49/AS488 (annexe59), et du 3juin2009
(annexe 64). - 60 -
cadre de différends ayant trait à des traités —voire n’ayant pas trait à des traités—, à mener des
négociations de bonne foi e186e te lle manière que celles-ci aient un sens, plutôt que de recourir à
des mesures unilatérales .
93 5.17. Même si les faits dont le défendeur tire grief ont trait à des articles de l’accord
intérimaire autres que le paragraphe3 de l’artic le7, ils ne sauraient justifier qu’il suspende
unilatéralement les obligations qui lui incombent à l’égard du demandeur en vertu du paragraphe 1
de l’article 11. L’article 21 de l’accord intérimaire stipule ce qui suit :
«1. Les Parties règlent tout différend pa r des moyens exclusivement pacifiques,
conformément à la Charte des Nations Unies.
2. A l’exception de la divergence visée au paragraphe 1 de l’article 5, l’une ou l’autre
des Parties peut saisir la Cour internationale de Justice de toute divergence ou de
tout différend qui s’élèvent entre elles en ce qui concerne l’interprétation ou
l’exécution du présent accord intérimaire.»
5.18. Le paragraphe 1 de l’ar ticle 21 renvoie au paragraphe 1 de l’article 33 de la Charte des
NationsUnies, qui énonce les différents modes de règlement des différends auxquels les parties à
un différend peuvent recourir en vertu de la Charte . Elles peuvent ainsi en rechercher la solution
par voie de «négociation, d’enquê te, de médiation, de conciliati on, d’arbitrage, de règlement
judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d’autres moyens pacifiques de
leur choix». Le fait, pour l’une des par ties, d’écarter unilatéralement une obligation
conventionnelle lui incombant à l’égard de l’autre ne figure pas pa rmi ces modes de règlement des
différends.
5.19. En outre, si le défendeur estimait qu’il était nécessaire de recourir à une mesure
unilatérale pour répondre à des faits tels que ceux fi gurant dans ses notes verbales, la mesure qu’il
aurait dû prendre est énoncée au paragraphe2 de l’article21 de l’accord intérimaire: il pouvait
saisir la Cour en vue d’un règlement obligatoire du différend (autre que la divergence visée au
paragraphe1 de l’article5). Le fait que le paragraphe2 de l’ article21 prévoie le recours à un
mode obligatoire de règlement des différends exclut la suspension unilatérale, par l’une des parties,
des obligations qui lui incombent à l’égard de l’autre.
5.20. En laissant entendre que ses actes sont justifiés par les prétendues violations de
94
l’accord intérimaire qu’aurait commises le demande ur, le défendeur n’a pas précisé en quoi l’une
quelconque de ces violations justifierait ses actes. Il aurait pu indiquer, par exemple, que son acte
était autorisé parce que l’accord intérimaire av ait été suspendu ou qu’il était excusé parce qu’il
s’agissait d’une contre-mesure licite. Dans le s sections suivantes, le demandeur expliquera
pourquoi aucune de ces thèses ne peut, au regard de s faits ou du droit applicable, se justifier en la
présente affaire.
186
Voir, par exemple, l’affaire du Plateau continental de la mer du Nord (République fédérale
d’Allemagne/Danemark), arrêt, C.I.J. Recueil 1969, p. 47, par. 85 («les parties sont tenues d’engager une négociation en
vue de réaliser un accord…;[elles] ont l’obligation de se comporter de telle ma nière que la négociation ait un sens, ce
qui n’est pas le cas lorsque l’une d’ elles insiste sur sa propre positienvisager aucune modification»); Projet
Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J.Recueil1997 , p.7, par.139 (la Cour a jugé que les Parties
étaient juridiquement tenues de négocieafin de trouver comment réaliser les obj ectifs du traité et, en outre, que la
Slovaquie n’avait pas le droit d’agir unilatéraleme nt). Très récemment, dans l’affaire relaCertaines questions
concernant l’entraide judiciaire ematière pénale (Djibouti c.France) , arrêt du 4juin2008, par.145, la Cour a
considéré que même une disposition conv entionnelle qui conférait à un Etat important pouvoir discrétionnaire lui
imposait néanmoins, en vertu de l’article 26 de la convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, de démontrer que
les raisons l’ayant conduit à refuser s’acquitter de son obligation étaient conformes aux excepti ons énoncées dans
ladite disposition. - 61 -
SECTION III. L’INEXÉCUTION DE SON OBLIGATION PAR LE DÉFENDEUR NE SAURAIT ÊTRE
JUSTIFIÉE PAR LA SUSPENSION DE L ’APPLICATION DU PARAGRAPHE 1 DE
L ’ARTICLE 11 DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE EN RAISON D ’UNE
VIOLATION SUBSTANTIELLE
5.21. Comme indiqué ci-dessus, depuis fin mars /début avril 2008, le défendeur a formulé un
certain nombre d’allégations générales, selon l esquelles le demandeur aurait violé plusieurs
obligations de l’accord intérimaire, et il a souten u que ces violations justifiaient ses actes. Le
défendeur n’a pas présenté les détails de son argumentation, mais on peut supposer qu’il estime que
les violations substantielles prétendument commi ses par le demandeur l’autorisaient à décider
unilatéralement, à la fin du mois de mars2008, de suspendre l’applica tion du paragraphe1 de
l’article 11 (voire de l’accord intérimaire dans son ensemble). Cela serait toutefois invraisemblable
puisque le défendeur a indiqué (et ce, encore récemment) qu’il «respect[ait] pleinement les 187
dispositions de l’accord intérimaire, sur la base du principe fondamental pacta sunt servanda» .
S’il respecte «pleinement» les dispositions de l’ accord intérimaire de 1995, alors il ne considère
sans doute pas aujourd’hui, ni ne considérait fi n mars/débutavril2008, que l’application du
paragraphe1 de l’article11 éta it suspendue. Si le défendeur devait néanmoins se fonder sur la
théorie de la suspension des oblig ations lui incombant en vertu du paragraphe1 de l’article11, il
conviendrait de faire les remarques suivantes.
5.22. Premièrement, en se fondant sur la théori e de la suspension, le défendeur concèderait
95 implicitement que le comportement qu’ il a eu fin mars/début avril 2008 est, prima facie, contraire
aux prescriptions du paragraphe1 de l’article11. En effet, point ne serait besoin pour lui de
prétendre que l’application du paragraphe1 de l’ article11 était suspendue, s’il ne considérait pas
que son comportement était contraire aux obligations lui incombant en vertu de cette disposition.
5.23. Deuxièmement, en tant que traité en vigueur, l’accord intérimaire est régi par les
dispositions générales du droit des traités qui tr ouvent leur expression da ns la convention de
Vienne sur le droit des traités. En vert u de l’article26 de celle-ci et du principe pacta sunt
servanda, l’obligation incombant au défendeur aux te rmes du paragraphe1 de l’article11 de
l’accord intérimaire (à savoir de ne pas «s’opposer» à une demande d’admission du demandeur) est
une obligation juridique revêtant un caractère contrai gnant, et aucune exception ne justifie qu’il ne
s’acquitte pas, à l’égard du demandeur, de l’obligation claire et essentielle qui lui incombe.
5.24. Troisièmement, la convention de Vienne sur le droit des traités autorise la suspension
de certaines obligations au motif d’une violation su bstantielle, mais il est clair que ce droit est à la
fois limité et exceptionnel. La partieV de la convention de Vienne tra ite de la «nullité, [de
l’]extinction et [de la] suspension de l’application des traités». Le passage pertinent de l’article 60
de la convention, qui traite de l’«extinction d’un traité ou [de la] suspension de son application
comme conséquence de sa violation», se lit comme suit :
«1. Une violation substantielle d’un traité bilatéral par l’une des parties autorise
l’autre partie à invoquer la violation comme motif pour mettre fin au traité ou
suspendre son application en totalité ou en partie…
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3. Aux fins du présent article, une vi olation substantielle d’un traité est
constituée par :
187Voir, par exemple, la lettre en date du 2juin200adressée au Secrétaire gé néral par le représentant
permanent du défendeur auprès de l’Organisation des NationsUnies, MJ.ohn Mourikis. NationsUnies,
doc. S/2009/285 ; annexe 47. - 62 -
a) un rejet du traité non autorisé par la présente Convention ; ou
b) la violation d’une disposition essentielle pour la réalisation de l’objet ou du but du
traité.
4. Les paragraphes qui précèdent ne po rtent atteinte à aucune disposition du
traité applicable en cas de violation...»
5.25. Ainsi, un traité ne peut être suspendu, en totalité ou en partie, que si l’une des parties a
96 commis une «violation substantielle» de cet inst rument. En outre, une «violation substantielle»
n’est pas une simple violation du traité. Elle n’est constituée que par les violations assimilables à
un «rejet» du traité par la partie incriminée ou pa r la violation de dispositions «essentielle[s]» pour
la réalisation de l’objet et du but du traité. Or, comme on le verra dans la sectionV ci-dessous,
aucune des violations de l’accord intérimaire pr étendument commises par le demandeur avant le
mois d’avril 2008 ne saurait constituer une violation substantielle de cet instrument.
5.26. Quatrièmement, l’article65 de la c onvention de Vienne énonce plusieurs règles
procédurales qu’une partie qui entend suspendre l’application d’un traité doit respecter. En la
présente affaire, ces conditions n’ont pas été remplie s, le défendeur n’ayant pas suivi la procédure
précise et détaillée énoncée à cet article. Ces conditions visent à régir et limiter le droit des Etats
de mettre fin à un traité ou d’en suspendre l’appli cation, et à empêcher qu’il n’en soit abusé.
Comme la Cour l’a indiqué :
«La convention de Vienne de1969 sur le droit des traités se borne à définir
⎯ de façon limitative ⎯ les conditions dans lesquelles un traité peut, de façon licite,
être dénoncé ou suspendu; les effets d’une dénonciation ou d’une suspension qui ne
satisferait pas assez ces conditions sont par contre expressément exclus du champ
d’application de la convention par le jeu de son article 73.» 188
La Cour a en outre insisté sur le fait que la «s tabilité des relations conventionnelles» exige que les
motifs énoncés par la convention de Vienne soient appliqués de manière stricte, estimant que ce
serait «établi[r] un précédent a ux effets perturbateurs pour le s relations conventionnelles et
l’intégrité de la règle pacta sunt servanda» que de permettre à une partie d’écarter unilatéralement
l’application d’un traité pour des motifs autres que ceux expressément prévus à cette fin. Dès lors,
un traité ne peut prendre fin que «pour les motifs énumérés limitativement dans la convention de
Vienne» 18.
5.27. La convention de Vienne n’autorise donc pas le défendeur à se contenter d’invoquer
une violation substantielle qu’a urait commise le demandeur pour suspendre unilatéralement ses
obligations conventionnelles. Le paragraphe1 de l’article 65 de la convention énonce une
97 procédure détaillée et graduelle pour notifier son intention de suspendre l’application d’un traité. Il
dispose, en particulier, que
«[l]a partie qui, sur la base des dispositions de la présente convention, invoque soit un
vice de son consentement à être liée par un tr aité, soit un motif de contester la validité
d’un traité, d’y mettre fin, de s’en retirer ou d’en suspendre l’application, doit notifier
sa prétention aux autres parties. La notification doit indiquer la mesure envisagée à
l’égard du traité et les raisons de celle-ci.»
188Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 7, par. 47.
189
Ibid., par. 100, 104 et 114. - 63 -
5.28. Le défendeur n’a jamais notifié au demandeur un quelconque motif de suspension de
l’accord intérimaire, ni une quelconque «mesure e nvisagée à l’égard du traité et les raisons de
celle-ci». Plus précisément, le défendeur n’a jamais, avant fin ma rs/début avril2008, notifié au
demandeur qu’il avait un motif de suspendre l’accord intérimaire et qu’il en suspendait
l’application de sorte que le pa ragraphe1 de l’article11 ne ser ait plus applicable lorsqu’il
s’opposerait à ce que le demandeur soit invité à rejoindre l’OTAN.
5.29. Il convient en outre de relever que la notification prévue au paragraphe 1 de l’article 65
de la convention de Vienne ne pe ut être faite à la légère, de ma nière informelle, ni même être
communiquée oralement par les représentants diplomatiques des parties au traité. Il ressort très
clairement de la convention de Vienne que, compte tenu de la gravité d’une accusation de violation
substantielle d’un traité, et de la gravité de l’acte de suspension d’un traité en totalité ou en partie
en réponse à une telle violation, la notificati on doit être faite par écr it, par le biais d’un
«instrument» communiqué à l’autre partie par un haut représentant diplomatique. L’article 67 de la
convention de Vienne dispose que :
«1. La notification prévue au paragraphe 1 de l’article 65 doit être faite par écrit.
2. Tout acte … réalisant … la suspension de l’application du traité sur la base
de ses dispositions ou des paragraphes 2 ou 3 de l’article 65 doit être consigné dans un
instrument communiqué aux autres parties. Si l’instrument n’est pas signé par le chef
de l’Etat, le chef du gouvernement ou le ministre des affaires étrangères, le
98 représentant de l’Etat qui fait la communicati on peut être invité à produire ses pleins
pouvoirs.»
5.30. Il va sans dire que non seulement le dé fendeur n’a jamais notifié au demandeur, avant
fin mars/début avril 2008, qu’il estimait qu’une violation subs tantielle de l’accord avait été
commise et que celle-ci justifiait la suspension dudit accord, mais il ne l’a jamais consigné par
écrit.
5.31. En outre, quand bien même aurait-il pro cédé à cette notification par écrit, le défendeur
n’aurait pas pu suspendre unilatéralement l’accord intérimaire ou une partie de celui-ci, la
convention de Vienne imposant d’ autres obligations de nature procédurale. En effet, le
paragraphe 2 de l’article 65 dispose que :
«Si, après un délai qui, sauf en cas d’urgence particulière, ne saurait être
inférieur à une période de trois mois à co mpter de la réception de la notification,
aucune partie n’a fait d’objection, la partie qui a fait la notification peut prendre, dans
les formes prévues à l’article 67, la mesure qu’elle a envisagée.»
5.32. Le demandeur n’ayant jamais reçu de no tification officielle et écrite de ce que le
défendeur estimait qu’il avait commis une violati on substantielle de l’accord justifiant d’en
suspendre l’application en totalité ou en partie, la période minimale de trois mois à compter de la
réception de la notification n’a jamais commencé à courir. Dès lors, jamais le demandeur n’a été
fondé, en vertu de la conventi on de Vienne, à «prendre» une quelconque mesure réalisant la
suspension.
5.33. En outre, si le demandeur avait reçu pareille notification — ce qui n’a pas été le cas —,
il se serait assurément élevé contre une accusation de violation substantielle de l’accord intérimaire.
Et il l’aurait fait avec d’autant plus de force que le défendeur lui aurait notifié qu’il envisageait de
suspendre l’application de l’obligation lui incomban t en vertu du paragraphe 1 de l’article 11. Le - 64 -
paragraphe3 de l’article65 de la convention de Vienne énonce la procédure qui aurait dû être
suivie si le demandeur avait eu l’occasion de soulever une objection :
«Si, toutefois, une objection a été soulevée par une autre partie, les parties
devront rechercher une solution par les moyens indiqués à l’article 33 de la Charte des
Nations Unies.»
99 5.34. Cette disposition doit être lue conjointement avec le paragraphe 4 de l’article 65, lequel
dispose que
«[r]ien dans les paragraphes qui précèdent ne porte atteinte aux droits ou obligations
des parties découlant de toutes dispositions en vigueur entre elles concernant le
règlement des différends.»
5.35. Il ressort de ces dispositions lues c onjointement que, si le demandeur avait eu
l’occasion de s’élever contre le fait que le défendeur ait eu l’intention de suspendre l’application du
traité, alors les deux parties auraient dû recherch er une solution à leur différend en recourant au
règlement judiciaire, à l’arbitrage, à la médiation ou à toute autre forme de règlement des
différends, avant que le défendeur ne puisse suspe ndre unilatéralement l’accord intérimaire, ou
l’une quelconque de ses dispositions. Comme nous l’ avons indiqué dans la section précédente, le
défendeur aurait dû saisir la Cour, en application de l’article21 de l’accord intérimaire, afin de
régler le différend. A titre subsidiaire, en e nvoyant la notification requise, le défendeur aurait
permis au demandeur de saisir la Cour avant qu’ il ne suspende unilatérale ment l’application de
l’accord. Le défendeur n’ayant toutefois pas resp ecté la procédure énoncée à l’article65 de la
convention de Vienne, comme le droit internati onal le lui imposait pourta nt, le demandeur a été
dans l’impossibilité de le faire.
5.36. Faisant fi de ces garanties procédural es, le défendeur a simplement recouru à une
mesure unilatérale. Il a ensuite attendu que le demandeur tire grief, à la fin du mois d’avril 2008,
de ses actes et de sa violation du paragraphe1 de l’article11 de l’accord intérimaire. Ce n’est
qu’après avoir reçu cette plainte que le défendeur a indiqué, dans une notification écrite, et tout
d’abord sans aucune précision, qu’il estimait que le demandeur avait commis une violation
substantielle de l’accord intérimaire. Mais là non plus, le défendeur n’a pas indiqué au demandeur
que cette violation justifiait la suspension de l’accord.
5.37. La convention de Vienne n’autorise pas de tels raccourcis pour suspendre un traité (si
tant est que la suspension soit le fondement sur le quel le défendeur entend justifier qu’il ait agi en
violation du paragraphe1 de l’article11). Un e telle attitude fait fi des prescriptions de la
100 convention de Vienne sur le droit des traités, et de la stabilité du régime conventionnel
international. Le défendeur n’ a ni notifié son intention de suspendre une partie de l’accord
intérimaire ni recouru aux procédures mentionnées à l’article65 de la convention de Vienne et
énoncées à l’article33 de la Charte des Nations Unies aux fins du règlement diplomatique des
différends. Le défendeur n’ayant ni notifié son intention de suspendre une partie de l’accord
intérimaire ni recouru aux procédures énoncées à l’article 33 de la Charte, l’obligation substantielle
énoncée au paragraphe1 de l’article11 de l’acco rd intérimaire (de ne pas «s’opposer» à une
demande d’admission du demandeur) demeure pleinement en vigueur. Elle n’est pas et n’a jamais
été suspendue. Dès lors, faute de suspension, la Co ur ne peut que parvenir à la conclusion que le
paragraphe 1 de l’article 11 a été violé.
5.38. Les garanties procédurales encadrant la suspension des traités pour violation
substantielle, telles qu’énoncées dans la convention de Vienne et la Charte des Nations Unies, sont - 65 -
absolument centrales au fonctionnement du syst ème conventionnel international. Ainsi que
sir Humphrey Waldock, le rapporteur spécial de la Commission du droit international qui a préparé
les projets d’articles de la convention de Vie nne, l’a indiqué dans son commentaire sur les
dispositions relatives à la nullité, l’extinction et la suspension de l’application d’un traité:
«l’efficacité de cette branche du droit des traités dépen190 en définitive d es clauses de procédure
réglementant l’exercice du droit d’invoquer ces causes» .
5.39. La Commission du droit international l’a d’ailleurs souligné dans son commentaire sur
le projet d’article 62 de la convention de Vienne (devenu l’article 65 du texte définitif) :
«la Commission a jugé essentiel de faire figurer dans le projet des garanties de
procédure tendant à empêcher que la nullité, la fin ou la suspension de l’application
d’un traité puisse être arbitrairement in191uée comme simple prétexte pour
s’affranchir d’une obligation gênante» .
101 5.40. Il va de soi que le défendeur ne saura it s’affranchir de l’«obligation gênante» qui lui
incombe à l’égard du demandeur en vertu du paragra phe1 de l’article11 de l’accord intérimaire,
en se contentant d’invoquer, unilatéralement, l’ existence d’une violation substantielle. Le
défendeur semble d’ailleurs parfo is en convenir puisqu’il lui arri ve de se défendre de laisser
entendre que l’application de l’accord a été suspendu e et d’insister au contraire sur le fait que «la
Grèce demeure acquise à l’accord intérimaire» 19. En réalité, l’accord intérimaire ⎯ y compris le
paragraphe1 de son article11 ⎯ était pleinement en vigueur en tre les Parties à l’époque du
comportement incriminé du défendeur fin mars/déb ut avril2008; et il est pleinement en vigueur
aujourd’hui encore. Le comportement du défende ur à Bucarest, et avant, indique non pas qu’il
prétendait avoir suspendu l’application du paragra phe1 de l’article11 en raison d’une violation
substantielle du demandeur, mais, au contraire, qu’il obéissait à de s motifs politiques. En résumé,
le défendeur a fait fi de l’oblig ation conventionnelle qui lui incombait en vertu du paragraphe 1 de
l’article 11 de l’accord intérimaire, ainsi que des obligations procédurales lui incombant en vertu de
la convention de Vienne sur le droit des trait és en matière de suspension. Les propres actes et
déclarations du défendeur, ainsi que les règles pe rtinentes du droit international, décrédibilisent
l’invocation ex post facto, comme fondement juridique, de la suspension ⎯ si tant est, bien sûr, que
telle soit la thèse du défendeur.
S ECTION IV. L A VIOLATION DU PARAGRAPHE 1 DE L ’ARTICLE 11 PAR LE DÉFENDEUR NE
PEUT ÊTRE EXCUSÉE COMME UNE CONTRE -MESURE RÉPONDANT À UN
ACTE ILLICITE DU DEMANDEUR
5.41. Etant donné que le comportement qu’il a adopté fin mars-début avril2008 constituait
clairement une violation du paragraphe 1 de l’artic le 11, le défendeur pourrait être tenté d’excuser
ce comportement par un renvoi aux règles relatives aux contre-mesures prévues par le droit de la
responsabilité des Etats pour fait internationale ment illicite, tel qu’il ressort essentiellement des
articles de la CDI. Un tel argument du défendeur différerait de celui mentionné dans la section
précédente, car il ne s’agirait plus de dire que l’obligation lui incombant est suspendue, mais
190
Deuxième rapport sur le droit des traités, A/CN.4/156 (1963), p. 87, par. 1.
191
Projets d’articles sur le droit des traités, A/CN.4/190 (18 juillet 1966), p. 262, par. 1.
192Lettre en date du 23 mai 2008 adresséau Secrétaire général de l’Orga nisation des NationsUnies par le
représentant permanent du défendeur aupr ès de l’Organisation des Nations Unies, M. John Mourikis. NationsUnies,
doc S/2008/346 (28 mai 2008) ; annexe 43. Voir également la note verbale en date du 15 mai 2008 adressée au ministère
des affaires étrangères du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje ; annexe 51. - 66 -
qu’elle reste entièrement applicable et que les violations substantielles que le demandeur aurait
102
commises constituent «un fait justificatif ou une ex cuse de l’inexécution tant que subsistent les
circonstances en cause» 193.
5.42. Toutefois, les contre-mesures ne sont pas une carte blanche permettant aux Etats
puissants de donner des leçons aux Etats faibles. En droit international général, tel qu’il ressort de
194
la jurisprudence de la Cour et des articles de la CDI, une contre-mesure est licite uniquement si i)
elle est prise pour riposter à un fait illicite ii) elle est prise après que l’Etat lésé a invité 1’Etat
auteur du fait illicite à mettre fin à son comporte ment illicite, prévenant celui-ci qu’il envisage de
prendre une contre-mesure et iii) elle est proporti onnelle au préjudice subi. Dans son commentaire
sur les articles y relatifs, la CDI indique qu’il est nécessaire de veiller à ce que «les contre-mesures
soient strictement limitées aux besoins de la situ ation et de prévoir des garanties suffisantes contre
195
tout abus» .
5.43. Le droit régissant les contre-mesures est clairement énoncé aux articles49 à54 des
articles de la CDI, qui sont l’ expression du droit international général. Comme il l’a fait à l’égard
de la justification, en vertu du droit des trait és, d’une suspension pour violation substantielle, le
défendeur a manqué à l’obligation de notification relative aux cont re-mesures. Le demandeur ne
voit donc pas comment, en l’espèce, le défendeur peut même songer à invoquer ce fondement. Le
paragraphe 1 de l’article 52 des articles de la CDI prévoit ce qui suit :
«Avant de prendre des contre-mesures, l’Etat lésé doit :
a) Demander à l’Etat responsable, conformé ment à l’article43, de s’acquitter des
obligations qui lui incombent …
b) Notifier à l’Etat responsable toute décision de prendre des contre-mesures et offrir
de négocier avec cet Etat.»
5.44. Toutefois, dans l’affaire portée devant la Cour, avant de prendre les contre-mesures
103
alléguées, le défendeur n’a pas «demand[é]» au de mandeur, de la manière prévue à l’article 43 des
articles de la CDI, de s’acquitter des obligations qui lui incombent. Cet article prévoit que l’Etat
qui se dit lésé «notifie [le préjudice qu’il a subi]». La CDI précise dans son commentaire que cette
notification est «196logue [à celle prévue à] l’article 65 de la convention de Vienne de 1969» sur le
droit des traités . Par ailleurs, le défendeur n’a pas « notifié» au demandeur «toute décision de
prendre des contre-mesures» revêtant la forme d’une objection à la demande d’admission de
celui-ci à l’OTAN, et a encore moins «off[ert] de négocier» avec celui-ci à ce sujet comme le
prévoit l’alinéa b) du paragraphe1 de l’article52 des articl es de la CDI, dans le but d’éviter ces
contre-mesures.
5.45. La notification préalable, tant de la pr étendue violation que de l’intention de prendre
une contre-mesure, vise à atteindre l’objet des contre-mesures, à savoir amener l’Etat qui aurait
commis une violation à s’acquitter des obligations qui lui incombent. Le paragraphe1 de
193Rapport de la Commission à l’Assemblée générale sur les travaux de sa cinquante-troisième session, Annuaire
de la Commission du droit international, vol.II, deuxième partie (2001), p.71; voir aibid., p.31 («C’est au droit
des traités qu’il appartient de déterminer si un Etat est partie à un traité valide, si ce traité est en vigueur à l’égard de c et
Etat et pour quelles dispositions, et comment il doit être interprété»).
194Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 7, par. 83-85.
195
Rapport de la Commission à l’Assemblée générale, voir note 193 plus haut, p. 129.
196Rapport de la Commission à l’Assemblée générale, supra, note 193, p. 119. - 67 -
l’article49 est limpide: «[L]’Etat lésé ne peut pr endre de contre-mesures à l’encontre de l’Etat
responsable du fait internationalement illicite que pour amener cet Etat à s’acquitter des obligations
qui lui incombent…»
5.46. Ainsi, loin d’être un blanc-seing pour punir unilatéralement un acte prétendument
illicite, les contre-mesures ont pour but de prévenir un Etat des mesures d’autoprotection
qu’envisage de prendre à son encontre un autre Et at, afin qu’il puisse s’acquitter de ses obligations
avant même que ces mesures ne soient prises. Comme la CDI l’indique dans son commentaire,
«[u]n Etat lésé ne peut prendre de contre -mesures que pour amener l’Etat responsable
à s’acquitter des obligations qui lui incombent…à savoir mettre fin au fait
internationalement illicite si ce fait continue et accorder une réparation à l’Etat lésé.
Les contre-mesures ne sont pas envisagées comme une forme de répression d’un
comportement illicite mais comme un moyen d’amener l’Etat responsable à s’acquitter
des obligations qui lui incombent…» 197
104 5.47. La CDI précise dans son commentaire que
«[l]e principe qui sous-tend l’obligation de notification est que, compte tenu du
caractère exceptionnel et des conséquences potentiellement graves des
contre-mesures, un Etat ne devrait pas y rec ourir avant d’avoir notifié à l’autre Etat sa
demande et de lui avoir donné la possi bilité d’y répondre...Les contre-mesures
peuvent avoir de graves conséquences pour l’Etat qui en est la cible et qui devrait
donc avoir la possibilité de reconsid érer sa position face aux contre-mesures
198
envisagées.»
5.48. Le défendeur n’ayant pas notifié au pr éalable au demandeur son intention de prendre
une contre-mesure (sous la fo rme d’une opposition à la dema nde d’admission de celui-ci à
l’OTAN) en réaction à un prétendu acte illicite, le demandeur n’était pas en mesure de répondre à
la contre-mesure envisagée. Etant donné que le défendeur n’a pas suivi les procédures prévues,
une contre-mesure (si c’est ainsi que le défendeur cherche à excuse r la violation qu’il a commise)
ne pouvait être prise de manière licite.
5.49. En outre, selon l’article 49 les contre-mes ures sont «temporaire[s]» et «doivent, autant
que possible, être prises d’une manière qui perme tte la reprise de l’exécution des obligations en
question». La CDI fait observer dans son commentaire que
«le terme «temporaire» au paragraphe2 [de l’article 49] précise le caractère
temporaire des contre-mesures. L’objectif est de rétablir une situation de licéité entre
l’Etat lésé et l’Etat responsable, et non de créer de nouvelles situations qui ne seront
pas réversibles quelle que soit la réaction de ce dernier Etat aux demandes présentées
contre lui. Les contre-mesures sont prises comme un moyen d’incitation, non de
répression: si elles sont efficaces en ce qu’elles amènent l’Etat responsable à
s’acquitter des obligations de cessation et de réparation qui lui incombent, il doit y être
199
mis fin pour permettre la reprise de l’exécution de l’obligation.»
19Ibid., p. 130.
198
Rapport de la Commission à l’Assemblée générale, supra, note 193, p. 136.
199Ibid., p.130-131 («Les Etats devraient autant que pssible opter pour des contre-mesures qui soient
réversibles»). - 68 -
105 5.50. Toutefois, la contre-mesure en cause en l’espèce (si c’est l’excuse du défendeur) n’était
pas destinée à permettre au défendeur de repre ndre utilement l’exécution de l’obligation qui lui
incombe en vertu du paragraphe1 de l’article 11, du moins en ce qui concerne l’admission du
demandeur à l’OTAN. L’admission à l’OTAN est un processus complexe comprenant des
possibilités limitées de procéder par étapes particu lières vers l’adhésion. Une contre-mesure qui
prend la forme d’une objection à l’admission d’un Etat à un stade clé du processus d’admission
peut ne pas être rapidement rectifiable par le défendeur, quelle que soit la manière dont le
demandeur pourrait y réagir.
5.51. En outre, comme l’indique l’article51 de la CDI, les contre-mesures «doivent être
proportionnelles au préjudice subi, compte tenu de la gravité du fait internationalement illicite et
des droits en cause». Cette notion de proportionnalité est bi200ancrée dans la jurisprudence relative
aux contre-mesures, et notamme nt dans celle de la Cour . Pour justifier son comportement en
tant que contre-mesure licite, le défendeur devr ait démontrer que toute violation de l’accord
intérimaire qu’aurait commise le demandeur méritait une contre-mesure qui excluait celui-ci de la
plus importante organisation multila térale de défense en Europe. Comme nous le verrons à la
sectionV, cette démonstration est impossible. En effet, empêcher le demandeur de devenir
membre de l’OTAN, pour une période qui ri sque d’être longue compte tenu du processus
d’admission, serait une réaction excessive et di sproportionnée du défendeur à n’importe laquelle
des difficultés temporaires, isolées et d’importance secondaire qui se sont parfois posées dans les
relations entre les deux parties dans le cadre de l’accord intérimaire.
5.52. En outre, ainsi que le stipule l’alinéa a) du paragraphe2 de l’ar ticle50 de la CDI, le
défendeur était tenu de s’acquitte r des «obligations qui lui incombent…en vertu de toute
procédure de règlement des différends applicables en tre lui et l’Etat responsable». Manifestement,
le défendeur a également manqué à cette obliga tion. Ainsi que nous l’avons démontré à la
sectionII, les paragraphes3 de l’article7 et1 de l’article21 de l’accord intérimaire prévoient
expressément la procédure à suivre pour résoudr e un différend: les parties s’y engagent à
«régle[r]» tout différend par des moyens non cont raignants. Si le défendeur estimait que le
106 demandeur avait commis une violation substantielle de l’accord intérimaire, il devait, dans les
formes voulues, recourir à la diplomatie, à la médiation ou à la conciliation pour résoudre le
différend (que l’une ou l’autre des parties pouvait soumettre à un règlement obligatoire en cas
d’échec de la voie diplomatique), au lieu de rec ourir à une contre-mesure. Dans son commentaire,
la CDI fait observer que
«les dispositions relatives aux contre-mesure s ont un caractère supplétif et peuvent
être écartées ou modifiées par une règle spéc ifique contraire... Ainsi, une disposition
conventionnelle interdisant, en toutes ci rconstances, la suspension de l’exécution
d’une obligation exclura toute contre-mesure touchant à l’exécution de l’obligation.
Tel sera aussi l’effet d’un régime de règlement des différends auquel les Etats doivent
201
recourir en cas de litige…»
5.53. Dès lors que les parties peuvent employ er les mécanismes de règlement de différends
prévus au paragraphe3 de l’article7 et à l’ar ticle21 de l’accord intérimaire, le recours à des
contre-mesures unilatérales est exclu.
200
Dans son arrêt rendu en l’affaire relativProjet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), la Cour a
conclu que les contre-mesures prises par la Slovaquie à l’encontre de la Hongrie n’étaient pas licite s parce qu’elles ne
respectaient pas le principe de proportionnalité. Affaire relative au Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie),
arrêt, C.I.J. Recueil 1997, p. 7, par. 85-87.
201
Rapport de la Commission à l’Assemblée générale, supra, note 193, p. 129. - 69 -
5.54. En dernier lieu, et pour lever tout do ute, le demandeur n’a pas commis contre le
défendeur de fait illicite qui justifiât le recours à une «contre-mesure», comme nous allons le voir à
la section V. Par conséquent, le défendeur n’ est pas fondé à faire valoir en l’espèce qu’il pouvait
recourir à une contre-mesure car, le demandeur n’ayant pas commis de fait internationalement
202
illicite, le défendeur ne peut prétendre être un «Etat lésé» en droit de prendre une contre-mesure .
S ECTION V. S UR LE FOND , LES ALLÉGATIONS DU DÉFENDEUR QUANT À LA VIOLATION
SUBSTANTIELLE DE L ’ACCORD INTÉRIMAIRE PAR LE DEMANDEUR SONT
DÉNUÉES DE FONDEMENT
5.55. Ainsi que nous l’avons démontré à la section II, le défendeur n’a pas suivi les
procédures de règlement de différends prévues par l’accord intérimaire en cas d’allégation de
violation. En outre, le défendeur n’a pas suiv i les procédures requises pour pouvoir soutenir que le
107
paragraphe 1 de l’article 11 avait été suspendu (section III) ou qu’il était en vigueur, mais pouvait
être violé par le recours à une contre-mesure en réaction à une violation commise par le demandeur
(section IV).
5.56. Compte tenu des éléments présentés a ux sectionsII àIV, la Cour n’a pas besoin
d’examiner quant au fond les allégations du dé fendeur selon lesquelles le demandeur aurait violé
l’accord intérimaire. Le demandeur tient toutefois à bien préciser qu’il dément catégoriquement
avoir manqué, d’une manière ou d’une autre, aux obligations que lui impose l’accord intérimaire, et
certainement pas d’une manière qui permettrait d’affirmer qu’une violation substantielle a été
commise, ou qu’une contre-mesure était justifiée.
5.57. Depuis mai2008, le demandeur a reçu toute une série de notes verbales émanant du
défendeur, par lesquelles celui-ci lui a fait grief d’avoir violé diverses dispositions de l’accord
intérimaire. Ces allégations quant au fond ne peuvent servir de base aux mesures prises par le
défendeur en violation du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire.
5.58. Premièrement, nombre de ces allégations sont des affirmations vagues et générales non
étayées par les faits. Dans sa toute première note verbale du 15 mai 2008, dans laquelle il entendait
justifier son comportement de la fin mars-début avril2008, le défendeur a cité une série de
«violations substantielles» qu’aurait commises le demandeur, telles que le fa it «[d]’affirm[er] et
[d]’appuy[er] des revendications territoriales à l’enc ontre de la Grèce», de «favoris[er] et [de]
tolér[er] l’irrédentisme» et «[d’]incit[er] à la viol ence, à la haine et à l’hostilité contre la Grèce».
Toutefois, le défendeur n’a pour ainsi dire présen té aucun fait pour étayer des allégations aussi
diverses que graves. En recourant à une rhétor ique dépourvue de fondeme nt pour justifier son
propre comportement injustifiable, le défendeur montrait qu’il ne réagissait pas à une violation
substantielle précise et concrète de l’accord in térimaire par le demandeur, car il n’en identifiait
203
aucune .
202Voir affaire relative au Projet Gab číkovo-Nagymaros (Hongrie/Slovaquie), arrêt, C.I.J.Recueil1997, p.7,
par. 83 («Pour pouvoir être justifiée, une contre-mesure … doit être prise pour riposter à un fait internationalement illicite
d’un autre Etat.»).
203Voir par exemple la note verbale en date du 15mi2008, adressée au ministère des affaires étrangères du
demandeur par le bureau de liaison du défendeur à S kopje; annexe51. Voir aussi la note verbale n5/1 en date
du 1 juin2009, adressée au bureau de liaison du défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du
demandeur, soulignant le manque de fondem ent factuel des allégations de violation de l’accord intérimaire avancées par
le défendeur ; annexe 63. - 70 -
5.59. Deuxièmement, dans la mesure où le défendeur a identifié expressément des
prétendues violations de l’accord intérimaire (pri ncipalement dans la correspondance diplomatique
108
échangée à partir de décembre2008), la quasi-tota lité de ces prétendues violations concernait des
faits postérieurs au 3avril2008. On peut citer comme exemple la décision du demandeur de
baptiser une partie du corridor paneur opéenX du nom d’Alexandre le Grand 204, décision prise en
décembre2008, soit de nombreux mois après le co mportement du défendeur de la fin mars-début
avril2008; la décision du demandeur de donner à un stade de Skopje le nom de «PhilippeII de
205
Macédoine», également prise en décembre2008 , l’utilisation d’un artéfact archéologique
montrant le soleil à seize rais d’or dans des «vignettes» télévisées de
décembre 2008-janvier 2009 206, une observation faite par le mi nistre des affaires étrangères du
207
demandeur dans un entretie n publié le 4février2009 , près d’un an après le comportement du
défendeur de la fin mars-début av ril2008, et l’utilisation du soleil à seize rais d’or sur la place
principale de l’une des municipalités du demandeur 20. Le comportement du défendeur de la fin
mars-début avril2008 ne saurait s’expliquer ou se justifier par des faits allégués qui seraient
postérieurs à ce comportement.
5.60. Troisièmement, les quelques faits précis dont le défendeur fait grief au demandeur dans
109
les notes verbales qu’il lui a adressées et qui co ncernent des actes antérieurs à avril2008 ne
constituent pas des violations de l’accord intérimaire. Ces allégations concernent le changement du
nom de l’aéroport de Skopje, qui a été rebaptis é Alexandre le Grand en décembre2006, la
présentation du président du demandeur à l’Organi sation des Nations Unies en septembre 2007 et
diverses «décisions des autorités gouvernementales et municipales…d’ériger des statues en
l’honneur de figures historiques de la Macé209 ne antique (telles qu’Alexandre le Grand et
PhilippeII) dans plusieurs villes…» . Pour le demandeur ces actes ne constituent pas une
violation, encore moins une violation substantielle, de l’accord intérimaire. Assurément, aucune de
ces mesures ne constituait un rejet de l’accord intérimaire ou une violation d’une disposition
«essentielle» pour la réalisation de l’objet ou du but dudit accord.
5.61. En outre, si tant est que le comporte ment du défendeur soit justifié en tant que
contre-mesure, la contre-mesure adoptée serait tout à fait disproportionnée par rapport aux actes
allégués du demandeur. Ainsi que nous l’avons i ndiqué au paragraphe5.51, en empêchant le
demandeur de devenir membre de l’OTAN, et ce pour une période qui risque d’être longue, le
défendeur a réagi de manière excessive et tout à fait disproportionnée à des mesures telles que le
changement de nom d’un aéroport.
204Voir la note verbale en date du 15janvier2009 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur
par le bureau de liaison du défendeur à Skopje: annexe 52; et la note verbale en date du 27février2009, adressée en
réponse au ministère des afoaires étrangè res du défendeur par le bureau de liaiso n du demandeur à Athènes : annexe 54.
Voir aussi la note verbale nF. 141. 1/48/AS 488, en date du 15 avril 2009 adressée au ministore des affaires étrangères
du demandeur par le bureau de liaison du défendeu r à Skopje: annexe59; et la note verbale n 32-4354/1 en date du
1 ejuin2009 adressée en réponse au bureau de liaison du défendeu r à Skopje par le ministère des affaires étrangères du
demandeur :annexe 62.
205Note verbale en date du 15 janvier 2009, supra.
206
Ibid.
207
Note verbale en date du 24 février 2009, adressée au bureau de liaison du demandeur à Athènes par le
ministère des affaires étrangères du défendeur : annexe 53 ; voir aussi la note verbale, en date du 19 mars 2009, adressée
en réponse au bureau de liaison du défendeur à Skopje par le ministère des affaires du demandeur : annexe 57 ; et la note
verbale suivante liée à la même question, en date du 3juin, adressée au minist ère des affaires étrangères du demandeur
par le bureau de liaison du défendeur à Skopje :annexe 64.
208 o
Note verbale n F.141.1/49/AS489, du 15avril2009 adressée au ministère des affaires étrangères du
demandeur par le bureau de liai son du défendeur à Skopje: annexe 60; et note verbale n o32-4354/1, en date du
1 juin2009 adressée en réponse au bureau de liaison du défendeu r à Skopje par le ministère des affaires étrangères du
demandeur : annexe 62.
209Note verbale en date du 15 mai 2008, supra ; annexe 59. - 71 -
5.62. Quatrièmement, le défendeur a parfo is fait valoir que son opposition à la demande
d’admission du demandeur à l’OTAN constituait un ex ercice de ses droits souverains et de ses
devoirs de membre du Traité de l’Atlantique Nord. Le défendeur tente peut-être d’affirmer que son
opposition à l’admission du demandeur découle en quel que sorte de l’obligation que lui impose le
Traité de l’Atlantique Nord d’évaluer l’attachement du demandeur «à la bonne volonté et à la
confiance mutuelle», qualité essentielle dont il accuse le demandeur de manquer en raison de sa
prétendue intransigeance dans le cadre du différend qui l’oppose au défendeur au sujet de son nom
210
constitutionnel .
110 5.63. Cet argument ne tient pas. Ces asserti ons ne reposent sur aucune base factuelle:
comme nous l’avons indiqué au chapitreII, il n’ est pas contesté que le demandeur satisfait aux
critères d’admission à l’OTAN, dont le maintien de relations de bon voisinage. Cela a été
clairement reconnu par l’Alliance dans sa déclar ation du sommet de Bucarest et par ses Etats
membres à l’exception du défendeur. En outre, en a pplication du paragraphe 1 de l’article11 de
l’accord intérimaire le défendeur ne peut tenir compte de ces considérations pour justifier son
opposition à l’admission du demandeur à l’OTAN (ou à toute autre organisation ou institution). La
seule considération dont le défendeur puisse tenir compte en vertu de cette disposition est la
manière dont le demandeur sera désigné à l’OT AN. Accepter l’inte rprétation du défendeur
reviendrait à vider de leur sens l’objet et le but du paragraphe 1 de l’article 11, qui a joué un rôle
déterminant dans la décision du demandeur de conclure l’accord intérimaire.
5.64. Cinquièmement, en soutenant que le demandeur commet une violation de l’accord
intérimaire en employant son propre nom constituti onnel au sein d’organisations et d’institutions
dont il est membre, notamment l’Organisation des Nati onsUnies, le défendeur interprète ce traité
211
de façon erronée et en déforme le sens . Au paragraphe 2.20 du chapitre II du présent mémoire,
nous avons rappelé la genèse et l’élaboration du pa ragraphe2 de la résolution817. Il ressort
clairement du libellé de ce paragraphe que la désignation «ex-Ré publique yougoslave de
Macédoine» n’était pas destinée à devenir le nouveau nom provisoire de l’Etat demandeur, comme
le souligne l’absence de majuscule à l’élément «e x», qui montre que cet élément ne faisait pas
partie d’un titre officiel. En effet, pendant les négociations, le premier ministre de l’Etat
demandeur de l’époque a adressé une lettr e au président du Conseil de sécurité
212
111 (document S/25541 , expressément mentionné dans la réso lution817) dans laquelle il déclarait
sans équivoque que «[l]a République de Macédoine n’est en aucun cas disposée à accepter le nom
d’ex-République yougoslave de Macédoine». Cette formulation était en réalité une désignation
210
Voir par exemple, Dora Bakoyann is, «Le point de vue d’Athènes», International Herald Tribune
(31mars2008): annexe 90; voir aussi la note verbale en date du 15mai2008 adressée au ministère des affaires
étrangères du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje, supra annexe 51 (dans laquelle il est dit que le
demandeur «n’a pas satisfait à la condition du respect du principe des relations pacifiques et de bon voisinage»).
211
Note verbale en date du 15 mai 2008 adressée au ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau
de liaison du défendeur à Skopje : annexe 51 ; voir aussi la note verbale en date du 16 avril 2009, adressée au bureau de
liaison du défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur en réponse à une protestation verbale
de l’ambassadeur du défendeur au sujet de l’emploi par le demandeur de s on nom constitutionnel lors d’une réunion à
Skopje: annexe 61. Le défendeur a également essayé de présenter, à tort, l’emploi par le demandeur de son nom
constitutionnel au sein de l’Organisation de s Nations Unies, comme une manifestati on du «mépris flagrant de la lettre et
de l’esprit des résolutions pertinentes du Conseil décurité». Lettre en date du 27 novembre 2008 adressée au
Secrétaire général de l’Organisationdes Nations Unies par le représentant permanent du défendeur auprès de
l’Organisation des Nations Unies, M. John Mourikis. Nations Unies, doc S/2008/746 (1 décembre 2008) ; annexe 44.
212Note du président du Conseil de sécu rité à laquelle est jointe une lettre en date du 24 mars 1993 provenant de
M.BrankoCrvenkovski, premier ministre de la République de Macédoine, NationsUnies, doc.S/25541 (6avril1993);
annexe 28. - 72 -
descriptive provisoire, qui faisait référence au stat ut antérieur de cet Etat afin qu’il puisse être
identifié au sein de l’Organisation des Nations Un ies, en attendant que soit réglé le différend
concernant son nom 213.
5.65. En outre, la résolution 817 visait uniqueme nt à régler la question de la désignation du
demandeur, «à toutes fins utiles à l’Organisation». Comme l’a précisé l’un des rédacteurs de cette
résolution, «le but n’était pas de dire quoi que ce soit sur la situation en dehors de l’Organisation
des Nations Unies (bien que d’autres organisations et certains Etats aient adopté la même manière
214
provisoire de désigner cet Etat, fait qui fut reconnu dans l’accord intérimaire de 1995)» .
5.66. Il est significatif que la résolution n’ait pas exigé que le demandeur s’appelle lui-même
«ex-République yougoslave de Macédoi ne», ce qu’il ne s’est d’ailleurs jamais engagé à faire. En
acceptant les termes de la résolution 817, le de mandeur a accepté «d’être désigné» sous cette
appellation provisoire au sein de l’Organisation d es Nations Unies, mais il n’a pas renoncé à son
droit souverain de faire usage de son nom constitu tionnel, comme il l’a clairement indiqué pendant
les négociations. Par conséquent , conformément à la résolution 817, le demandeur a continué à
faire usage de son nom constitutionnel dans ses communications écrites et orales avec
l’Organisation des Nations Unies et avec ses Etats Membres.
215
112 5.67. Par ailleurs, le chapitre II rappelle que les parties se sont engagées à prendre «des
dispositions pratiques pour que le différend relatif au nom de la seconde Partie ne porte pas atteinte
aux relations commerciales normales entre la se conde Partie et des tierces parties». Les
«dispositions pratiques» auxquelles renvoie le paragr aphe2 de l’article5 de l’accord intérimaire
étaient formulées pour permettre aux parties de dé velopper des relations mutuelles d’une manière
qui ne compromettait pas leurs positi ons respectives sur le différend relatif au nom du demandeur,
positions qui devaient faire l’objet d’autres négoc iations. Ces «dispositions pratiques» ont été
adoptées dans le mémorandum relatif aux disposition s pratiques concernant l’accord intérimaire de
216
NewYork du 13septembre1995, qui a été signé à Skopje le 13octobre1995 , et dans le
mémorandum relatif à l’accord intérimaire de New York du 13 septembre 1995, concernant la mise
217
en place de bureaux de liaison dans les deux pays, signé à Athènes le 20octobre1995 . Ces
mémorandums, et les dispositions pratiques qui y sont énoncées confirment que i)le demandeur
s’est expressément réservé le droit de faire usage de son nom constitutionnel, et que le défendeur
ne s’y est pas opposé, et ii)que le demandeur a également accepté que le défendeur l’appelle
«ex-République yougoslave de Macédoine». Ains i, concernant le nom du demandeur, on peut
21Michael Wood «Participation of former Yugoslav States in the United Nations», Max Planck Yearbook of
United Nations Law , vol.1 (1997), p.231, 329. MichaelWood a partic ipé à la rédaction de la résolution 817. Le
président du Conseil de sécurité a précisé ce point dans sa déclaration publ iée après l’adoption de la résolution 817, où il
a indiqué que l’expression «ex-République yougoslave» «traduit simplement un fa it historique, à savoir que l’Etat dont
l’admission à l’Organisation des Nations Un ies est recommandée dans ladite résoluti on était par le passé une république
de l’ex-République fédérative socialiste de Yougoslavie». Note du président du Conseil de sécurité , NationsUnies,
doc. S/25545 (7 avril 1993) : voir annexe 32.
214
Wood, supra, p. 329.
21Voir chap. II, par. 2.33-2.36.
216Mémorandum relatif aux «dispositions pratiques» c oncernant l’accord intérimaire de New York du
13 septembre 1995 (Skopje, 13 octobre 1995) ; annexe 3.
21Mémorandum relatif à l’accord intérimaire de New Yo rk du 13 septembre 1995, concernant la mise en place
de bureaux de liaison dans les deux pays (Athènes, 20 octobre 1995) ; annexe 4. - 73 -
considérer que l’accord intérimaire représente au niveau bilatéral ce qui a été convenu dans le cadre
de l’Organisation des NationsUnies, dans la ré solution 817: la position de chaque partie y est
effectivement maintenue, comme cela était expressément prévu 21.
5.68. En bref, aucune des allégations form ulées par le défendeur n’a de rapport avec le
comportement qu’il a adopté à la fin mars-début avril2008. Il ressort d’emblée d’un examen
approfondi des allégations qui semblent quelque peu étayées par les faits qu’aucune violation de
113
l’accord intérimaire, encore moins une violatio n qui pourrait être considérée comme substantielle,
n’a été commise.
S ECTION VI. C ONCLUSIONS
5.69. Au paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire, le défendeur s’est engagé à ne
pas s’opposer aux efforts du demandeur en vue d’a dhérer à des organisations ou à des institutions
internationales telles que l’OTAN, si celui-ci doit être désigné de la manière prévue dans la
résolution817 du Conseil de sécurité. En ch erchant à adhérer à l’OTAN, le demandeur a
clairement fait savoir qu’il accep tait d’être désigné provisoiremen t sous le nom d’«ex-République
yougoslave de Macédoine», conformément à la ré solution 817. Toutefois, le défendeur s’est
opposé à la demande d’admission du demandeur à l’ OTAN, violant ainsi le paragraphe1 de
l’article 11 de l’accord intérimaire. Cette violation n’est pas justifiée en droit en l’espèce, ni sur la
base d’une suspension, totale ou partielle, de l’ap plication de l’accord intérimaire à raison d’une
violation substantielle, ni à titre de contre-mesure postérieure à la commission d’un fait illicite. En
outre, pour autant qu’elles puissent être compri ses, les diverses allégations vagues et sans
fondement formulées ex posto facto par le défendeur et faisant gr ief au demandeur d’avoir violé
l’accord intérimaire, ne résistent pas à l’analyse. Le défendeur ayant manqué aux obligations qui
lui incombent, le demandeur est en droit de demander une réparation appropriée, comme nous
allons le démontrer dans le chapitre suivant.
218La note verbale du 15 mai 2008 adressée par le burde liaison du défendeur à Skopje au ministère des
affaires étrangères du demandeur (annexe51) fait d’un incident au cours duquel le président (macédonien) de
l’Assemblée générale a parlé du «président de la république de Macédoine» pour désigner le président demandeur. Cet
acte n’est pas incompatible avec les conditions énoncées dans la résolution 817 ou dans l’accord intérimaire. - 74 -
C HAPITRE VI
114
LA RÉPARATION DEMANDÉE
INTRODUCTION
6.1. Dans sa requête, le demandeur a prié la Cour de lui accorder réparation sous deux
formes, à savoir i) en déclarant que le défendeur a agi de façon illicite, et iien ordonnant à ce
dernier de prendre toutes les mesures nécessaires pour rétablir le statu quo ante et s’abstenir à
l’avenir de toute action contraire à l’obligation que lui impose le paragraphe 1 de l’article 11.
6.2. Lorsqu’il a élaboré sa requête, le demande ur s’en est tenu aux buts qu’il poursuivait en
introduisant la présente instance ainsi qu’à la pratique de la Cour. Il a soigneusement circonscrit
ses demandes pour répondre aux besoins spécifiques du différend dont il entendait saisir la Cour,
sans demander à celle-ci de prendre position sur d’autres questions susceptibles de diviser les
Parties mais non portées devant elle.
6.3. Le demandeur a également prêté beauc oup d’attention aux principes généraux reflétés
dans les articles de la CDI. L’article28 de la CDI entérine le principe général selon lequel la
responsabilité internationale d’un Etat, dès lors qu ’elle est engagée par un fait internationalement
illicite, «comporte [d]es conséquences juridiques» . L’article29, lui, indique ceci: «Les
conséquences juridiques d’un fait internationale ment illicite prévues dans la présente partie
n’affectent pas le maintien du devoir de l’Etat responsable d’exécuter l’obligation violée».
6.4. Selon la règle énoncée dans cet article , le défendeur demeure tenu de satisfaire aux
obligations que lui dicte le paragraphe1 de l’ar ticle11 de l’accord intérimaire. Cela vaut en
particulier pour les demandes d’admission que le demandeur a déjà soumises ou qu’il est
susceptible de soumettre à d’autres organisations inte rnationales. A l’heure actuelle, le respect de
cette obligation revêt en outre une importance spéciale dans le cas de l’Union européenne, le
115
défendeur ayant déclaré vouloir s’opposer à ce que le demandeur fasse partie de cette institution, ce
qui permet vraiment de douter de sa volonté de s’acquitter de l’obligation en question. Le
demandeur réserve ses droits concernant toute objection que le défendeur pourrait élever pour
bloquer son processus d’adhésion à l’Union européenne.
6.5. Les objections émises par le défendeur contre la participation du demandeur à l’OTAN
le 3 avril 2008 et pendant la période qui a précédé ont ainsi fait naître une incertitude bien réelle et
constante, tout particulièrement en ce qui con cerne les chances du demandeur de pouvoir intégrer
l’OTAN et d’autres organisations internationales à l’avenir. C’est l’une des principales raisons
pour lesquelles le demandeur a introduit la pr ésente instance: il veut mettre sur la table non
seulement la question de son appartenance à l’OTAN mais aussi celle de son adhésion à toutes les
autres organisations et institutions internationales, multilatérales ou régionales, qu’il a déjà
sollicitée ou qu’il pourrait solliciter par la suiteà laquelle le défendeur est en mesure de faire
obstacle ou d’opposer son veto. Le demandeur réser ve ses droits concernant toute objection que le
défendeur pourrait élever à l’avenir contre sa pa rticipation à l’une ou l’autre de ces organisations
ou institutions. - 75 -
6.6. Soyons clairs: ainsi qu’exposé au chapitreV, il s’agit uniquement ici de la
responsabilité internationale du dé fendeur, qui découle des mesures que celui-ci a prises pour
219
empêcher le demandeur de faire partie de l’OTAN .
6.7. Les dispositions les plus pertinentes des articles de la CDI se trouve nt dans la première
partie, au chapitre II, qui porte sur les principes généraux relatifs à la res ponsabilité internationale
de l’Etat.
6.8. L’article 30 de la CDI s’intitule cessati on et non-répétition, des questions auxquelles le
demandeur attache beaucoup d’importance. Il est ainsi libellé :
«L’Etat responsable du fait internationalement illicite a l’obligation :
a) d’y mettre fin si ce fait continue ;
b) d’offrir des assurances et des garan ties de non-répétition appropriées si les
circonstances l’exigent.»
6.9. L’article 31 traite la question de la réparation. Il dispose :
116
«1. L’Etat responsable est tenu de réparer intégralement le préjudice causé par le fait
internationalement illicite.
2. Le préjudice comprend tout dommage, tant matériel que moral, résultant du fait
internationalement illicite de l’Etat.»
6.10. Dans le même ordre d’idées, au chapitre II de la deuxième partie, l’article 34 régit les
formes de la réparation : «La réparation intégral e du préjudice causé par le fait internationalement
illicite prend la forme de restitution, d’inde mnisation et de satisfaction, séparément ou
conjointement, conformément aux dispositions du présent chapitre.»
6.11. Le demandeur souhaite obtenir réparation, mais non sous la forme d’une indemnisation
(du moins pas à ce stade, ses droits étant réservé s quant aux nouvelles mesures pouvant être prises
par le défendeur à l’égard d’autres organisations et institutions internationales, multilatérales ou
régionales). Tout ce qu’il demande, c’est la déclaration et l’ordre dont la teneur est précisée au
début du présent chapitre, et que nous allons maintenant examiner.
SECTION I. LA PREMIÈRE DEMANDE
6.12. La première demande est de nature rétr ospective, puisque liée au comportement passé
du défendeur, la Cour étant priée «de dire et j uger que le défendeur, par l’intermédiaire de ses
organes d’Etat et de ses agents, a violé les obligations que lui impose le paragraphe 1 de l’article 11
de l’accord intérimaire».
6.13. Le remède demandé est simple, et il s’inscrit clairement dans la logique des
considérations de fait et de droit exposées dans les chapitres précédents du présent mémoire. Le
demandeur veut un jugement déclaratoire confir mant que son interprétation du paragraphe1 de
l’article11 de l’accord intérimaire est correcte, et que les objections du défe ndeur sont contraires
117 aux prescriptions de cette disposition. Un tel j ugement aurait probablement aussi un effet continu
219
Voir le chapitre V, par. 5.6. - 76 -
et prospectif, et il contribuerait à instaurer des conditions propres à ce que les Parties se conforment
dans l’avenir à leurs obligations aux termes de l’accord intérimaire.
6.14. Le remède sollicité par le demandeur n’a rien de nouveau. La Cour a suivi cette voie
dans un grand nombre de ses décisions les pl us récentes. Ainsi, dans son arrêt
du 19 décembre 2005 en l’affaire des Activités armées sur le territoire du Congo (République
démocratique du Congo c. Ouganda), elle a
«[d]it que la République de l’Ouganda, en se livrant à des actions militaires à
l’encontre de la République démocratique du Congo sur le territoire de celle-ci, en
occupant l’Ituri et en soutenant activem ent, sur les plans militaire, logistique,
économique et financier, des forces irré gulières qui opéraient sur le territoire
congolais, a[vait] violé le principe du no n-recours à la force dans les relations
220
internationales et le principe de non-intervention» .
6.15. Plus récemment, dans son a rrêt du 19janvier2009 concernant la Demande en
interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en l’ affaire Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique c. Etats-Unis d’Amérique), la Cour a conclu
«que les Etats-Unis d’Amérique [avaient] vi olé l’obligation dont ils étaient tenus en
vertu de l’ordonnance en indication de mesures conservatoires du 16 juillet 2008, dans
le cas de M. José Ernesto Medellín Rojas» 221.
6.16. Les décisions de cette nature, et le ty pe de mesure déclaratoire demandée ici, sont
chose courante dans la jurisprudence de la Cour . Leur objectif a été exposé très tôt par la Cour
os
permanente de Justice internationale. Pour citer l’arrêt relatif à l’Interprétation des arrêts n 7 et 8
(usine de Chorzów),
118 «[un tel jugement] est destiné à faire reconna ître une situation de droit une fois pour
toutes et avec effet obligatoire entre les Parties, en sorte que la situation juridique ainsi
fixée ne puisse plus être mise en discu ssion, pour ce qui est des conséquences
juridiques qui en découlent» 222.
6.17. Dans l’affaire du Cameroun septentrional, la Cour indiqua que, de son point de vue,
lorsqu’un traité est interprété par jugement déclar atoire (ce que le demandeur la prie de faire pour
l’accord intérimaire), celui-ci aura une applicabilité continue. Ainsi, et tel est le but du demandeur,
le jugement déclaratoire recherché sera, pour reprendre les termes de la Cour, lourd de
«conséquences» 223.
220
Affaire des Activités armées sur le territoire du Congo(République démocratique du Congo c.Ouganda),
arrêt du 19 décembre 2005, par. 345 1).
221Demande en interprétation de l’arrêt du 31mars2004 en l’affaire Avena et autres ressortissants mexicains
(Mexique c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt du 19 janvier 2009, par. 61 2).
222Interprétation des arrêts n 7 et 8 (usine de Chorzów), arrêt n 11, 1927, C.P.J.I. série A n° 13, p. 20.
223Affaire du Cameroun septentrional (Cameroun cR . oyaum e-Uni), exceptions préliminaires, arrêt ,
C.I.J. Recueil 1963, p. 37. - 77 -
SECTION . II. LA SECONDE DEMANDE
6.18. La seconde demande a une dimension pros pective, en tant qu’elle vise non seulement
le comportement actuel du défendeur mais aussi s on comportement futur, la Cour étant priée de
Cour de dire et juger que :
«[le] défendeur d[oit] prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires afin que
celui-ci respecte les obligations que lui im pose le paragraphe1 de l’article11 de
l’accord intérimaire et de mettre fin et de renoncer à toute forme d’opposition, directe
ou indirecte, à l’admission du demandeur à l’Organisation du traité de l’Atlantique
Nord ou à l’une quelconque des autres «organ isations ou institutions internationales,
multilatérales et régionales» dont le défendeur est membre, lorsque le demandeur doit
être désigné, dans ces organisations ou in stitutions, sous l’appellation prévue au
paragraphe 2 de la résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité des Nations Unies».
6.19. Le demandeur prie la Cour de formuler un tel ordre afin que l’arrêt de celle-ci ne soit
pas uniquement tourné vers le p assé mais qu’il rétablisse aussi le statu quo ante et empêche le
119
défendeur d’adopter à l’avenir un comportement qui serait incompatible ou en contradiction avec
les obligations lui incombant au titre du paragra phe1 de l’article11, d’autant plus que le
demandeur nourrit toujours l’espoir d’être invité à rejoindre l’OTAN. En conséquence de cet
ordre, le défendeur devrait faire savoir à tous les membres de l’OTAN qu’il n’est pas opposé à la
participation du demandeur à cette organisation dès lors que ce dernier y sera doté de l’appellation
prévue au paragraphe 2 de la r ésolution 817 du Conseil de sécurité. Cet ordre est nécessaire parce
que le manquement du défendeur au paragraphe1 de l’article11 revêt un caractère continu: le
demandeur est toujours en relation avec l’OTAN, ainsi qu’exposé au chapitre II 224; il est toujours
déterminé à en devenir membre; et le défendeur affirme qu’il ne le laissera pas poursuivre ses
formalités d’adhésion tant que la question actuelle de son appellation n’aura pas fait l’objet d’une
«solution mutuellement acceptable» 225.
6.20. L’obligation énoncée au paragraphe1 de l’article11 demeurant en vigueur, il est
clairement satisfait aux conditions voulues pour que la Cour ordonne la cessation du comportement
226
incriminé .
227
6.21. L’ordre demandé, qui est conforme à l’approche adoptée à l’article30 de la CDI ,
120 n’est toutefois pas limité à la question de l’appa rtenance à l’OTAN. Il vaut également pour les
autres demandes que le demandeur a formulées ou pourrait formuler en vue de faire partie de
«toute autre organisation ou institution internationa le, multilatérale ou régionale», y compris toute
224Voir le chapitre II, par. 2.50.
225
Voir le communiqué de presse (2008) 049 de l’OT AN,«Déclaration du sommet de Bucarest publiée par les
chefs d’Etat et de gouvernement participant à la réunion du conseil de l’Atlantique Nord tenue à Bucarest le 3 avril 2008»
(3 avril 2008) ; annexe 65. En ce qui concerne la position du dé fendeur, voir le chapitre II, par. 2.60, et en particulier la
déclaration faite par son minist re des affaires étrangères, MmeDoraBakoya nnis, à l’issue de la réunion informelle des
ministres des affaires étrangères de l’OTAN à Bruxelles le 6 mars 2008 : annexe 83 ; le discours prononcé par celle-ci le
27mars2008 devant le groupe parlementaire du parti au pouv oir: annexe89; son article intitulé «Le point de vue
d’Athènes», International Herald Tribune (31 mars 2008) : annexe 90 ; la déclaration faite devant le parlement par le
premier ministre du défendeur, M.Kostas Karamanlis, le 22février2008, telle que rapportée dans l’article intitulé «Le
premier ministre évoque à demi-mot la possibilité d’un veto contre l’ERYM», Kathimerini (23 février 2008) : annexe 80 ;
ainsi que le discours prononcé le 27mars 2008 par le premier ministre du défendeur , M.KostasKaramanlis, devant le
groupe parlementaire du parti au pouvoir : annexe 88.
226Voir l’affaire du Rainbow Warrior (Nouvelle Zélande c.France) , sentence du 30avril1990,ILR, vol. 82,
p. 573.
227Voir également C.Derman, «La cessation de l’acte illiciteRevue belge de droit international (1990), n I,
p. 477. - 78 -
procédure liée à la demande qu’il a présentée pour devenir membre de l’Union européenne. Cet
aspect de la réparation demandée tient à ce que le demandeur craint beaucoup que le défendeur ne
réédite dans le cadre de l’Union européenne sa démarche illicite du 3avril2008 concernant
l’OTAN. Un ordre de la Cour sur la conduite à teni r dans le présent et dans l’avenir est nécessaire
pour mettre immédiatement un terme au comportement du défendeur, qui est totalement contraire
aux exigences du paragraphe 1 de l’article 11 de l’accord intérimaire.
6.22. L’ordre demandé est fondé sur le principe selon lequel, tant que le différend relatif à la
dénomination du demandeur n’aura pas été réglé de manière définitive, celui-ci sera désigné à
l’OTAN sous l’appellation «prévue au paragraphe2 de la résolu tion817 (1993) du Conseil de
sécurité des NationsUnies», à savoir «ex-Répub lique yougoslave de Macédoine», sans préjuger
des arrangements qui pourront être négociés en temp s utile sur cette question d’appellation. Ainsi
qu’exposé au chapitre II, telle est l’appellation sous laquelle le demandeur est actuellement désigné
dans ses relations avec l’OTAN 22. C’est aussi l’appellation sous laquelle il est désigné dans le
cadre de toutes les autres organisations et institu tions internationales, multilatérales ou régionales
dont le défendeur était membre avant lui.
6.23. L’ordre exprès demandé—en vue d’obten ir que des mesures soient prises pour faire
en sorte que le comportement futur d’une partie soit conforme à ses obligations
internationales ⎯ n’a absolument rien de nouveau. Dans l’affaire du Mandat d’arrêt, par exemple,
la Cour a conclu que le «Royaume de Belgique d[evait], par les moyens de son choix, mettre à
néant le mandat d’arrê229u 11avril2000 et en informer les autorités auprès d230uelles ce mandat
121 a[vait] été diffusé» . De la même manière, dans l’affaire Nicaragua , la Cour était priée
d’ordonner expressément aux Etats-Unis de , notamment, «mettre fin et de renoncer
231
immédiatement…à toute utilisation de la force» . Dans son arrêt, la Cour a déclaré «que les
Etats-Unis d’Amérique [avaient] l’obligation de mettre immédiatem ent fin et de renoncer à tout
acte constituant une violation des obligations juridiques susmentionnées» 23.
6.24. Dans l’affaire LaGrand, la Cour a également adopté une approche prospective en
jugeant que :
«si des ressortissants allemands devaient néanmoins être condamnés à une peine
sévère sans que les droits qu’ils tiennent de l’alinéa b) du paragraphe 1 de l’article 36
de la convention [de Vienne sur les relati ons consulaires] aient été respectés, les
Etats-Unis d’Amérique devr[aie]nt, en metta nt en Œuvre les moyens de leur choix,
permettre le réexamen et la revision du verd ict de culpabilité et de la peine en tenant
compte de la violation des droits prévus par la convention» 233.
228Voir le chapitre II, par. 2.50-2.51.
229
Mandat d’arrêt du 11 avril 2000 (République démocratique du Congo c. Belgique), arrêt, C.I.J. Recueil 2002,
p. 33, par. 78 3).
230
Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et cont re celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 14.
231Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et c ontre celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
requête introductive d’instance déposée au Greffe de la Cour le 9 avril 1984, par. 26, al. g).
232Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et cont re celui-ci (Nicaragua c. Etats-Unis d’Amérique),
fond, arrêt, C.I.J. Recueil 1986, p. 149, par. 292 12).
233LaGrand (Allemagne c. Etats-Unis d’Amérique), arrêt, C.I.J. Recueil 2001, p. 516, par. 128 7). - 79 -
6.25. Plus récemment, dans l’affaire Avena, la Cour a formulé une conclusion quasiment
identique à l’égard de ressortissants mexicains, en se fondant sur [l’alinéa b) du para234phe1] de
l’article 36 de la convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril 1963 .
122 SECTION III. RÉSERVE DE DROITS
6.26. Dans sa requête, le demandeur s’est réservé le droit «de modifier et de compléter les
termes de la présente requête, ainsi que les fondements invoqués». Par souci de clarté, le
demandeur tient à préciser que cette réserve vaut également pour la réparation demandée, dans
l’éventualité où le défendeur accomplirait de nouveaux actes appelant d’autres réparations.
234Avena et autres ressortissants mexicains exique c.Etats-Unis d’Amérique), arrêt , C.I.J. Recueil 2004,
p. 73, par. 153 11). - 80 -
C ONCLUSIONS
123
Sur la base des éléments de preuve et des moyens de droit exposés dans le présent mémoire,
le demandeur prie la Cour :
i) de dire et juger que le défendeur, par l’intermédiaire de ses organes d’Etat et de ses agents,
a violé les obligations que lui impose le
intérimaire ; et
ii) d’ordonner au défendeur de prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires afin
que celui-ci respecte les obligations que lui
l’accord intérimaire et de mettre fin et de renoncer à toute forme d’opposition, directe ou
indirecte, à l’admission du demandeur à l’Organi sation du traité de l’Atlantique Nord ou à
l’une quelconque des autres «organisations ou in stitutions internationales, multilatérales et
régionales» dont le défendeur est membre, lo rsque le demandeur do it être désigné, dans
ces organisations ou institutions, sous l’ap
résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité des Nations Unies.
Le 17 juillet 2009.
124
Macédoine, de
___________ - 81 -
C ERTIFICATION
125
Je certifie que les annexes sont des copconformes des documents mentionnés et que les
traductions fournies sont exactes.
Le coagent de la République
Macédoine, de
(Signé) NikD
___________ - 82 -
LISTE DES ANNEXES
127
V OLUME II
INSTRUMENTS INTERNATIONAUX
Annexe 1 Accord intérimaire conclu par le dema ndeur et le défendeur (NewYork, 13
septembre 1995)
Annexe 2 Convention entre la République fédéra tive populaire de Yougoslavie et le
Royaume de Grèce sur les relations juridiques mutuelles (Athènes,
18 juin 1959), Nations Unies, Recueil des traités, vol. 368, p. 81
Annexe 3 Mémorandum relatif aux «dispositions pratiques» concernant l’accord
intérimaire de New York du 13 septembre 1995 (Skopje, 13 octobre 1995)
Annexe 4 Mémorandum relatif à l’accord intérimair e de NewYork du 13septembre 1995
concernant la mise en place de bureaux de liaison dans les deux pays (Athènes,
20 octobre 1995)
Annexe 5 Protocole relatif aux transports et communications (Athènes, 20 octobre 1995)
Annexe 6 Protocole relatif au régime réciproque en matière de visas et de droits (Athènes,
20 octobre 1995)
Annexe 7 Protocole relatif à la coopération frontalière (Athènes, 23 juin 1998)
Annexe 8 Protocole relatif à la coopération en matière de police (Ohrid, 8 juillet 1998)
Annexe 9 Accord de coopération militaire (Skopje, 14 décembre 1999)
Annexe 10 Protocole entre le ministère de la défense de la seconde partie et le ministère de
la défense de la première partie relatà la coopération dans le domaine de la
formation militaire (Skopje, 19 décembre 2002)
Annexe 11 Mémorandum relatif à l’établissement de bureaux pour les affaires consulaires,
économiques et commerciales à Bitola et Thessalonique (Skopje,
22 janvier 2004)
Annexe 12 Mémorandum d’entente entre le ministère de la défense de la seconde partie et le
ministère de la défense nationale de la première partie relatif à l’appui à l’équipe
médicale conjointe aux fins de la participation à l’opération ISAF menée par
l’OTAN en Afghanistan (Athènes, 27 juillet 2005)
128
INSTRUMENTS NATIONAUX
Annexe 13 «Déclaration sur la souveraineté de la République socialiste de Macédoine»
(25 janvier 1991), Journal officiel de la Républiq ue socialiste de Macédoine,
o er
n 5, année XLVII (Skopje, 1 février 1991)
Annexe 14 «Décision portant promulgation des amendements LXXXII à LXXXV à la
Constitution de la République socialis te de Macédoine (7juin1991), Journal
officiel de la République socialiste de Macédoine, n 27, année XLVII (Skopje,
11 juin 1991) - 83 -
Annexe 15 «Déclaration»o(17 septembre 1991), Journal officiel de la République de
Macédoine, n 42, année XLVII (Skopje, 18 septembre 1991)
Annexe 16 «Résultats du référendum tenu le 8septembre1991 en Républiquo de
Macédoine», Journal officiel de la République de Macédoine, n 43, année
XLVII (Skopje, 20 septembre 1991)
Annexe 17 «Décision portant promulgation de la Constitution de la République de
Macédoine» (17 novembre 1991), Journal officiel de la République de
Macédoine, n 52, année XLVII (Skopje, 22 novembre 1991)
Annexe 18 «Déclaration sur la reconnaissance in ternationale de la République de
Macédoine en tant qu’Etat souverain et indépendant» (19 décembre1991,
Journal officiel de la République de Macédoine, n57, année XLVII
(24 décembre 1991)
Annexe 19 «Décision portant promulgation des amendements I et II à la Constitution de la
République de Mocédoine» (6janvier1992), Journal officiel de la République
de Macédoine, n 1, année XLVIII (10 janvier 1991)
Annexe 20 «oéclaration» (3 juillet 1992), Journal officiel de la République de Macédoine,
n 40, année XLVIII (4 juillet 1992)
Annexe 21 «Décision relative à l’adhésion de la Ré publique de Macédoine à l’Organisation
du traité de l’Atlantique No rd (OTAN) (23décembre1993), Journal officiel de
la République de Macédoine, no 78, année XLIX (27 décembre 1993)
129
DOCUMENTS DE L ’O RGANISATION DES N ATIONS U NIES ET
CORRESPONDANCE ÉCHANGÉE AVEC CELLE CI
Annexe 22 Résolution 817 (1993) du Conseil de sécurité de l’Organisation des
Nations Unies (SC/RES/817) (7 avril 1993)
Annexe 23 Résolution 845 (1993) du Conseil de sécurité de l’Organisation des
Nations Unies (SC/RES/845) (18 juin 1993)
Annexe 24 Lettre en date du 17 décembre 1991 adressée au président du Conseil de sécurité
de l’Organisation des NationsUnies par les représentants permanents de la
Belgique, de la France et du Royaume-Un i de Grande-Bretagne et d’Irlande du
Nord auprès de l’Organisation des Nations Unies, Nations Unies, doc. S/23293
(17 décembre 1991)
Annexe 25 Note du Secrétaire général de l’Organi sation des NationsUnies, diffusant la
demande d’admission à l’Organisation des NationsUnies, en date du
30juillet1992, présentée par le préside nt du demandeur, MKiroGligorov,
Nations Unies, doc. S/25147 (22 janvier 1993)
Annexe 26 Lettre en date du janvie1993, adressée au Secrétaire général de
l’Organisation des NationsUnies par le représentant permanent du défendeur
auprès de l’Organisation, M Antonio Exarchos, faisant tenir une lettre en date du
même jour adressée au Secrétaire général de l’Organisation des NationsUnies
par le ministre des affaires ét rangères du défendeur, MM. ichael
Papaconstantinou, ainsi que son a nnexe, Nations nies, do./25158
(25 janvier 1993) - 84 -
Annexe 27 Lettre en date du 5février1993 et mémorandum adressés au Secrétaire général
de l’Organisation des NationUni es par le président du demandeur,
M. Kiro Gligorov
Annexe 28 Note du président du Conseil de sécurité à laquelle est jointe une lettre en date
du 24mars1993 provenant de M.Bra nko Crvenkovski, premier ministre du
demandeur, Nations Unies, doc. S/25541 (6 avril 1993)
Annexe 29 Note du président du Conseil de sécurité à laquelle est jointe une lettre en date
du 5avril1993 provenant de M.Bra nko Crvenkovski, premier ministre du
demandeur, Nations Unies, doc. S/25542 (6 avril 1993)
Annexe 30 Lettre en date du 6 avril 1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le
représentant permanent du défendeur auprès de l’Organisation des
Nations Unies, M. Antonio Exarchos, transmettant au président du Conseil de
sécurité une lettre du ministre des affaires étrangères de la Grèce, M.Michael
Papaconstantinou, Nations Unies, doc. S/25543 (6 avril 1993)
130
Annexe 31 Rapport du Comité d’admission de nou veaux membres concernant la demande
d’admission à l’Organisation des NationsUnies formulée dans le document
S/25147, Nations Unies, doc. S/25544 (7 avril 1993)
Annexe 32 Note du président du Conseil de sécu rité, NationsUnies, doc.S/25545
(7 avril 1993)
Annexe 33 Lettre en date du 26 mai 1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le
Secrétaire général de l’Organisati on des NationUsnies, MB.outros
Boutros-Ghali, lui faisant tenir le raport établi par le Secrétaire général en
application de la résolution 817, Nations Unies, doc. S/25855 (28 mai 1993)
Annexe 34 Lettre en date du 28 mai 1993 adressée au président du Conseil de sécurité par le
secrétaire général de l’Organisation des Na tions Unies, contenant en annexe une
déclaration remise au Secrétaire général par l’ambassadeur et envoyé spécial du
défendeur, S. Exc. M. George D. Papoulias, le 27mai1993, NationsUnies,
doc. S/25855/Add.1 (3 juin 1993)
Annexe 35 Lettre en date du 3 juin 1993, adressée au président du Conseil de sécurité par le
Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, lui faisant tenir une lettre
en date du 29mai1993 adressée à celui- ci par le président du demandeur,
M. Kiro Gligorov, Nations Unies, doc. S/25855/Add.2 (3 juin 1993)
Annexe 36 Lettre en date du 5novembre1993 ad ressée au Secrétaire général de
l’Organisation des NationsUnies par le ministre des affaires étrangères du
défendeur, M. Karolos Papoulias, dans G. Valinakis & S. Dalis (dir. publ.), The
Skopje Question ⎯Attempts towards Recognition and the Greek Position,
Official Texts 1990-1996 [La question de Skopje ⎯ Tentatives de
reconnaissance et la position grecque, textes officiels 1990-1996] (Introduction :
E. Kofos, préface : T. Couloumbis) (2eéd., 1996), Sideris/ELIAMEP, p. 177-180
Annexe 37 Lettre en date du 8novembre1993 adressée au ministre des affaires étrangères
du défendeur, MKarolosPapoulias, par le Secrétaire général de l’Organisation
des NationsUnies, dans G.Valinakis & S.Dalis (dir.publ.), The Skopje
Question ⎯Attempts towards Recognition an d the Greek Position, Official
Texts 1990-1996 [La question de Skopje ⎯Tentatives de reconnaissance et la
position grecque, eextes officiels 1990-1996] (Introduction: E. Kofos, préface:
T. Couloumbis) (2 éd., 1996), Sideris/ELIAMEP, p. 181-182 - 85 -
Annexe 38 Lettre en date du 24novembre 1993 adr essée au Secrétaire général de
l’Organisation des NationsUnies par le ministre des relations extérieures du
demandeur, M. Stevo Crvenkovski
Annexe 39 Lettre en date du 31 mars 1994 adressée au président du Conseil de sécurité par
le Secrétaire général de l’Organisati on des NationsUnies, NationsUnies,
doc. S/1994/376 (1er avril 1994)
131
Annexe 40 Rapport du Secrétaire général présenté en application de la
résolution 908 (1994), Nations Unies, doc. S/1994/1067 (17 septembre 1994)
Annexe 41 Note du Secrétaire général de l’Organisa tion des NationsUnies faisant tenir le
Neuvième rapport périodique de la Co mmission des droits de l’homme dans
l’ex-Yougoslavie, établi par MTadeuszMazowieck i, rapporteur spécial sur la
situation des droits de l’homme, Nations Unies, doc. S/1994/1252
(4 novembre 1994)
Annexe 42 Lettre en date du 23 avril 2008, adressée au Secrétaire général de l’Organisation
des NationsUnies par la chargée d’a ffaires de la mission permanente du
demandeur auprès de l’Organisation des NationsUnies, à laquelle est annexée
une lettre adressée au Secrétaire général par le président du demandeur,
M. Branko Crvenkovski, Nations Unies, doc. S/2008/290 (2 mai 2008)
Annexe 43 Lettre en date du 23mai2008 adressée au Secrétaire général de l’Organisation
des NationsUnies par le représenta nt permanent du défendeur auprès de
l’Organisation des Nationsnies, M. John Mourikis, Nations Unies,
doc. S/2008/346 (28 mai 2008)
Annexe 44 Lettre en date du 27novembre2008 adressée au Secrétaire général de
l’Organisation des NationsUnies par le représentant permanent du défendeur
auprès de l’Organiertion des NationsUni es, M. John Mourikis, Nations Unies,
doc. S/2008/746 (1 décembre 2008)
Annexe 45 Lettre en date du 6 février 2009 adressée au Secrétaire général de l’Organisation
des NationsUnies par le représenta nt permanent du défendeur auprès de
l’Organisation des Nationsnies, M. John Mourikis, Nations Unies,
doc. S/2009/82 (10 février 2009)
Annexe 46 Lettre en date du 14 mars 2009 adressée au Secrétaire général de l’Organisation
des Nationsnies par le représentant permanent du demandeur,
M. Slobodan Tasovski, Nations Unies, doc. S/2009/150 (18 mars 2009)
Annexe 47 Lettre en date du 2juin2009 adressée au Secrétaire général de l’Organisation
des NationsUnies par le représenta nt permanent du défendeur auprès de
l’Organisation des Nationsnies, M. John Mourikis, Nations Unies,
doc. S/2009/285(3 juin 2009)
C ORRESPONDANCE DIPLOMATIQUE ÉCHANGÉE ENTRE LES P ARTIES
Annexe 48 Lettre en date du 13 novembre 1991 adressé e au premier ministre du défendeur,
M. Constantine Mitsotakis, par le président du demandeur, M. Kiro Gligorov - 86 -
132 Annexe 49 Lettre en date du 23février1994 adres sée au premier ministre du défendeur,
M. Andreas Papandreou, par le président du demandeur, M. Kiro Gligorov
Annexe 50 Note verbale en date du 17 avril 2008 adressée au bureau de liaison du défendeur
à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur
Annexe 51 Note verbale en date du 15mai2008 adressée au ministère des affaires
étrangères du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje
Annexe 52 Note verbale en date du 15janvier2 009 adressée au ministère des affaires
étrangères du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje
Annexe 53 Note verbale en date du 24février 2009 adressée au bureau de liaison du
demandeur à Athènes par le ministère des affaires étrangères du défendeur
Annexe 54 Note verbale en date du 27février2009 adressée au ministère des affaires
étrangères du défendeur par le bureau de liaison du demandeur à Athènes
Annexe 55 Lettre en date du 13 mars 2009 adressée à la ministre des affaires étrangères du
défendeur, MmeDoraBakoyannis, par le ministre des affaires étrangères du
demandeur, M. Antonio Milošoski
Annexe 56 Lettre en date du 18 mars 2009 adressée au ministre de l’intérieur du défendeur,
MP. rokopis Pavlopoulos, par la ministre de l’intérieur du demandeur,
Mme Gordana Jankulovska
Annexe 57 Note verbale en date du 19mars 2009 adressée au bureau de liaison du
défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur
Annexe 58 Lettre en date du 9 avril2009 adressée à la ministre des affaires étrangères du
défendeur, MmeDora Bakoyannis, par le ministre des affaires étrangères du
demandeur, M. Antonio Milošoski
o
Annexe 59 Note verbale n F.141.1/48/AS488 en date du 15 avril2009 adressée au
ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau de liaison du
défendeur à Skopje
o
Annexe 60 Note verbale n F.141.1/49/AS489 en date du 15 avril2009 adressée au
ministère des affaires étrangères du demandeur par le bureau de liaison du
défendeur à Skopje
Annexe 61 Note verbale en date du 16 avril 2009 adressée au bureau de liaison du défendeur
à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur
133 o er
Annexe 62 Note verbale n 32-4354/1 en date du 1 juin 2009 adressée au bureau de liaison
du défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur
Annexe 63 Note verbale n o32-4355/1 en date du 1 juin 2009 adressée au bureau de liaison
du défendeur à Skopje par le ministère des affaires étrangères du demandeur
Annexe 64 Note verbale en date du 3 juin 2009 ad ressée au ministère des affaires étrangères
du demandeur par le bureau de liaison du défendeur à Skopje - 87 -
C OMMUNIQUÉS DE PRESSE ,ARTICLES ET DÉCLARATIONS
Annexe 65 Communiqué de presse de l’OTAN (2008)049, «Déclaration du sommet de
Bucarest publiée par les chefs d’Etat et de gouvernement participant à la réunion
du Conseil de l’Atlantique Nord tenue à Bucarest le 3 avril 2008» (3 avril 2008)
Annexe 66 «La Grèce devrait opposer son veto à l’adhésion de la Macédoine à l’Union
européenne et à l’OTAN si aucun acco rd n’est trouvé sur la question du nom»,
Agence France Presse (5 novembre 2004)
Annexe 67 «La Grèce pourrait s’opposer aux candidatures de la Macédoine à l’OTAN et à
l’Union européenne en raison de la question du nom», Dow Jones International
News (5 novembre 2004)
Annexe 68 Service de presse de l’ambassade du défendeur à Washington, communiqué de
presse, «Le ministre des affaires étrangères informe le premier ministre des
derniers événements concernant la qu estion de l’ex-République yougoslave de
Macédoine» (12 octobre 2005)
Annexe 69 Stavros Tzimas, «Nous sommes prêts à devenir membre de l’OTAN sous le nom
d’«ex-République yougoslave de Macédoine»», Kathimerini (4 juin 2007)
Annexe 70 Ministère de la défense de la République de Slovénie, «Selon le ministre de la
défense, la Macédoine satisfait aux normes de l’OTAN» (27 juillet 2007)
Annexe 71 «Karamanlis: la Grèce opposera son veto aux candidatures de la Macédoine à
l’Union européenne et à l’OTAN si la question du nom n’est pas réglée»,
Southeast European Times (7 septembre 2007)
Annexe 72 «Le ministre de la défense tchèque s’enga ge à aider la Macédoine à entrer dans
l’OTAN», Agence de presse tchèque (14 septembre 2007)
134 Annexe 73 Ambassade du défendeur à Washington, Interview accordée par la ministre des
affaires étrangères, MmeBakoyannis, au quotidien athénien Kathimerini le
14 octobre 2007 (recueillie par Dora Antoniou) (15 octobre 2007)
Annexe 74 «Le ministre des affaires étrangères reçoit le soutien du Royaume-Uni à
l’intégration de la Macédoine dans l’UE et dans l’OTAN», BBC Monitoring
Europe (18 octobre 2007)
Annexe 75 «Les ministres macédonien et canadien é voquent les réformes de l’OTAN et les
er
missions de maintien de la paix», BBC Monitoring Europe (1 novembre 2007)
Annexe 76 «Des représentants des ministères d es affaires étrangères macédonien et
slovaque s’entretiennent des relations bila térales, de l’Union européenne et de
l’OTAN», BBC Monitoring Europe (23 janvier 2008)
Annexe 77 «La Turquie s’engage à Œuvrer en fave ur de l’adhésion de la Macédoine à
l’OTAN», BBC Monitoring Europe (10 février 2008)
Annexe 78 Les premiers ministres macédonien et luxembourgeois s’entretiennent de
l’adhésion à l’OTAN et à l’Union européenne», BBC Monitoring Europe
(15 février 2008) - 88 -
Annexe 79 Ministère des affaires étrangères de la République de Lettonie, communiqué de
presse, «Le ministre des affaires étrangères letton déclare qu’il soutient l’entrée
de la Croatie dans l’Union européenne et l’OTAN» (19 février 2008)
Annexe 80 «Le premier ministre évoque à demi-mot la possibilité d’un veto contre
l’ERYM», Kathimerini (23 février 2008)
Annexe 81 «La Bulgarie soutient l’adhési on de la Macédoine à l’OTAN», Sofia News
Agency (5 mars 2008)
Annexe 82 Ministère des affaires étrangères de la République de Lituanie, communiqué de
presse, «La Lituanie soutient résolument la politique de la porte ouverte de
l’Alliance atlantique» (6 mars 2008)
Annexe 83 DoraBakoyannis, «L’élargissement de l’OTAN et les princi pes de l’Alliance»,
Atlantic-community.org (téléchargé le 7 mars 2008)
Annexe 84 Ministère roumain des affaires étrangères, communiqué de presse, «Participation
du ministre des affaires étrangères, M. Adrian Cioroianu, à la réunion des
ministres des affaires étrangères de l’OTAN» (7 mars 2008)
Annexe 85 «Des députés néerlandais considèrent que la question du nom ne devrait pas
conditionner l’entrée de la Macédoine dans l’OTAN», BBC Monitoring Europe
(11 mars 2008)
Annexe 86 «La Slovaquie soutient les efforts de la Macédoine pour rejoindre l’OTAN et
l’Union européenne», People’s Daily Online (12 mars 2008)
135 Annexe 87 Gouvernement de la République d’Estonie, communiqué de presse, «Le premier
ministre Ansip confirme que l’Estonie soutenait la volonté de la Macédoine
d’enter dans l’OTAN» (26 mars 2008)
Annexe 88 Ambassade du défendeur à Washington, ex traits du discours prononcé par le
premier ministre, M. Kostas Karamanlis, devant le groupe parlementaire du parti
au pouvoir (27 mars 2008)
Annexe 89 Ambassade du défendeur à Washington, discours prononcé par la ministre des
affaires étrangères, MmeDora Bakoyanni s, devant le groupe parlementaire du
parti au pouvoir (27 mars 2008)
Annexe 90 Dora Bakoyannis, «Le point de vue d’Athènes», International Herald Tribune
(31 mars 2008)
Annexe 91 «La République tchèque et les Etats-Unis devraient conclure dans les prochains
jours un accord sur l’implantation d’une station radar…», agence de presse
nationale CTK (31 mars 2008)
Annexe 92 «La Hongrie et l’Allemagne soutiennent l’adhésion à l’OTAN de trois Etats des
Balkans», Budapest Times (31 mars 2008)
Annexe 93 Lech Kaczynski, «L’OTAN doit accueillir l’Ukraine et la Géorgie», the
Financial Times (30 mars 2008) - 89 -
Annexe 94 «Lerprésident se rendra mercredi au sommet de l’OTAN», agence de presse PAP
(1 avril 2008)
Annexe 95 «Le président Kaczynski présent à Bucarest pour le sommet de l’OTAN»,
agence de presse PAP (2 avril 2008)
Annexe 96 «Le premier ministre slovène espère qu’un compromis sera trouvé au sujet du
nom de la Macédoine», BBC Monitoring Europe (2 avril 2008)
Annexe 97 «Bush présente ses observations au sommet de l’OTAN», The Washington Post
(2 avril 2008)
Annexe 98 Département d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, bureau du chef du service de
presse de la Maison blanche, conférence de presse de la secrétaire d’Etat, Mme
Condoleeza Rice, et du conseiller pour la sécu rité nationale, M. Stephen Hadley
(3 avril 2008)
Annexe 99 Ministère des affaires étrangères du défendeur,Message du premier ministre,
M. Kostas Karamanlis (3 avril 2008)
136 Annexe 100 Julian Borger, «Karzai entend faire jouer un rôle accru à une armée afghane plus
importante; une proposition qui appo rte une embellie au moment où les
dirigeants de l’OTAN se divisent sur la question des nouveaux membres; la
promesse française d’envoyer un nouveau c ontingent ne répond pas aux attentes
de ses partenaires», The Guardian (3avril 2008)
Annexe 101 «L’ambassade d’Italie dément les informations diffusées par les médias selon
lesquelles elle soutiendrait le veto contre l’entrée de la Macédoine dans
l’OTAN», BBC Monitoring Europe (4 avril 2008)
Annexe 102 Chef du service de presse des Etats-Unis d’Amérique, allocution radiophonique
du président des Etats-Unis d’Amérique, George W. Bush (5 avril 2008)
Annexe 103 Ivo H. Daalder et James M.Goldgeier, «Un simulacre d’élargissement», The
New York Times (8 avril 2008)
Annexe 104 «Vous avez été victimes du droit de veto», Interview du premier ministre
slovène, M. Janez Jansa, A1 Television (20 mars 2009)
Annexe 105 Hristo Ivanovski, «Interview de Janez Jansa, ancien premier ministre slovène : la
Macédoine a été une victime de Bucarest», Dnevnik (21 mars 2009)
Annexe 106 Goran Momirovski, «JanezJansa: la déci sion de ne pas inviter la Macédoine à
adhérer à l’OTAN a été prise en raison d’un veto opposé par la Grèce»,
Kanal 5 TV (25 juin 2009)
A UTRES DOCUMENTS
Annexe 107 Lettre en date du 20 décembre 1991 adressée au président du Conseil des
ministres des Communautés européennes par le ministre des affaires étrangères
du demandeur, M. Denko Maleski - 90 -
Annexe 108 Ministère des affaires étrangères du demandeur, Réponses de la République de
Macédoine aux questions de la commission d’arbitrage de la conférence pour la
paix en Yougoslavie (29 décembre 1991)
Annexe 109 Lettre en date du 3janvier1992 adressée aux chefs de gouvernement des Etats
membres de la CE par le président du défendeur, M. Kostas Karamanlis, dans
G.Valinakis & S.Dalis (dir.publ.), The Skopje Question ⎯ Attempts towards
Recognition and the Greek Position, Official Texts 1990-1996 [La question de
Skopje ⎯Tentatives de reconnaissance et la position grecque, textee officiels
1990-1996] (Introduction: E. Kofos, préface: T.Couloumbis) (2 éd., 1996),
Sideris/ELIAMEP, p. 63-64
137
Annexe 110 Lettre en date du 6janvier1992 adressé e au président de la commission
d’arbitrage de la conférence sur la Y ougoslavie, M. Robert Badinter, par le
ministre des affaires étrangères du demandeur, M. Denko Maleski
Annexe 111 Lettre en date du 10janvier1992 adressée au président de la commission
d’arbitrage de la conférence sur la Y ougoslavie, M. Robert Badinter, par le
ministre des affaires étrangères du demandeur, M. Denko Maleski
Annexe 112 Lettre en date du 17 janvier 1992 adressée par le ministre des affaires étrangères
du défendeur, M.AndonisSamaras, à ses homologues des Etats membres de la
CE, dans A.Tziambiris, Greece, European Political Cooperation and the
Macedonian Question [La Grèce, la coop ération politique européenne et la
question macédonienne] (2000), Ashgate, p. 207-213 (appendice II)
Annexe 113 Lettre en date du 21janvier1992 adressée au premier ministre italien par le
président du défendeur, MKostas Karama nlis, dans G.Valinakis & S.Dalis
(dir. publ.), The Skopje Question ⎯Attempts towards Recognition and the
Greek Position, Official Texts 1990-1996 [La question de Skopje ⎯ Tentatives
de reconnaissance et la position g recque, textes officiels 1990-1996]
(Introductio:nE. Kofos, préf:eC.ouloumbis) (2 eéd., 1996),
Sideris/ELIAMEP, p. 83-84
Annexe 114 Discours officiel prononcé par le ministre des affaires étrangères du défendeur,
MA.ndoniSsamaras, «Adress of Foreign inister Andonis Samaras»
(Lisbonne, 17février1992), dans A.Tziambiris, Greece, European Political
Cooperation and the Macedonian Question [La Grèce, la coopération politique
européenne et la question macédonienne] (2000), Ashgate, p. 18-232
(appendice IV)
Annexe 115 Communiqué du président du demandeur, M. Kiro Gligorov, «Communiqué sur
la déclaration de la Communauté europ éenne sur la Macédoine, en date du
2 mai 1992» (2 mai 1992)
Annexe 116 Bureau du président, «Communiqué du président du demandeur, MKiro
Gligorov, sur la déclaration de la CE faite à Lisbonne le 27 juin 1992» (Skopje,
28 juin 1992)
er
Annexe 117 Lettre en date du 1 octobre 1992 adressée au ministre des affaires étrangères du
Royaume des Pays-Bas, M. Hans van den Broek, par le président du demandeur,
M. Kiro Gligorov
e
Annexe 118 Exposé présenté à la 52 session de l’Assemblée de la République de Macédoine
par le président du demandeur (Skopje, 9 décembre 1992) - 91 -
Annexe 119 Intentionnellement omise
138 Annexe 120 Intentionnellement omise
e
Annexe 121 Conseil de l’Europe, comité des ministres, 506 réunion des délégués des
ministres (tenue à Strasbourg du 10 au 14 janvier 1994, ainsi que le 20janvier
1994) (CM/Del/Act(94)506) (10 mars 1994)
Annexe 122 Discours d’ouverture du président du demandeur lors de la cérémonie inaugurale
du parlement de la République de Macédoine (Skopje, 19 novembre 1994)
Annexe 123 Déclaration faite par le premier ministre du défendeur, M. Kostas Karamanlis au
cours d’un débat consacré à la politiqu e étrangère au parlement du défendeur
(2 novembre 2006), Session du parlement grec tenue le 2 novembre 2006
Annexe 124 Lettre en date du janvier008 adressée au secrétaire général de
l’Organisation des Etats américains, M.José MiguelInsulza, par l’ambassadeur
du défendeur auprès des Etats-Unis d’Amérique, M. Alexandros Mallias
Annexe 125 Ministère norvégien des affaires étrangères, «Réunion des ministres des affaires
étrangères des pays membres de l’OTAN ⎯siège de l’OTAN, Bruxelles,
6 mars 2008 ⎯ Liste des points à aborder par le ministre et observations», page
Web officielle (téléchargée le 6 mars 2008)
Annexe 126 Mission des Etats-Unis d’Amérique auprès de l’OTAN, déclaration de
MD. anilried, secrétaire d’Etat adjoint aux affaires européennes et
eurasiennes, devant la commission des affaires étrangères du Sénat, «OTAN:
élargissement et efficacité» (11 mars 2008)
Annexe 127 Ministère des affaires étrangères de la République de Hongrie, «La Hongrie est
favorable à un nouvel élargissement de l’Alliance atlantique au sommet de
l’OTAN qui se tiendra à Bucarest la semaine prochaine ⎯ note d’information du
secrétaire d’Etat et directeur des affaires politiques GáborSzentiványi à
l’intention des membres du club OTAN du parlement hongrois, page Web
officielle (téléchargée le 26 mars 2008)
Annexe 128 OTAN, page Web officielle du sommet de Bucarest, «Discours d’ouverture du
premier ministre Călin Popescu-Tăriceanu à la conférence de Bucarest, «OTAN :
une transformation nécessaire»» (2 avril 2008)
Annexe 129 Aide-mémoire du défendeur
139 Annexe 130 Mémorandum du demandeur, La République de Macédoine, pays candidat à
l’OTAN et à l’UE
Annexe 131 Mémorandum du défendeur, La question du nom de l’ex-République yougoslave
de Macédoine et la propagande : une réponse aux allégations de Skopje
Annexe 132 Lettre en date du 14avril2008 ad ressée au représentant permanent du
CostaRica auprès de l’Organisation des Na tionsUnies, M.JorgeUrbina, par le
représentant permanent du défendeur auprès de l’Organisation des
Nations Unies, M. John Mourikis - 92 -
Annexe 133 Lettre en date du 19mai2008 adressée au secrétaire général de l’OTAN par
vingt diplomates, universitaires et reponsables internationaux européens et
américains de haut rang: «Pour l’adh ésion de la République de Macédoine à
l’OTAN»
Annexe 134 Ministère canadien des affaires étrangères et du commerce international, «Les
relations entre le Canada et la Républi que de Macédoine», page Web officielle
(téléchargée en octobre 2008)
Annexe 135 Service des études du Congrès des Etats-Unis d’Amérique, Elargissement de
l’OTAN : l’Albanie, la Croatie et les futurs candidats éventuels (14 avril 2009)
___________
Mémoire de l'ex-République yougoslave de Macédoine