Demande en indication de mesures conservatoires présentée par la République du Cameroun

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13185
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Incidental Proceedings
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COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

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AFFAIRE DE LA FRONTIERE TERRESTREET MARITIME

(Cameraun cl Nigeria)

DEMANDEEN INDICATION DE MESURES CONSERVATOIRES

1. Par une Requete enregistrite au Greffe de la Cour le 19 mars 1994 et

cornpletee par une RequMe additionnelle du 6 juin 1994, la Republique du
Cameroun a prie la Cour de dire etjuger :

- dans la RequGtedu 29 mars:

a) que la souveratnete .sur la presqu'ile de Bakassi est
camerounaise, en vertu du international, et que cette presqu'ile
fait partie integrante du territoire de la RBpubIique du
Cameroun ;

b) que la Rbpubliquefederale du Nigeria a vide et vide lprincipe
fondamentai du respect des frontieres heritees de la
colonisation(utipossidetisjum ;

qu'en utilisant la force contre la Republiquedu Cameroun, la
C)
Rkpublique federale du Nigeriaa viol6 et viole ses obligations
en vertudu droit international conventionnel et coutumier ;

d) que la Republique fkderale du Nigeria, en occupant
rnilitairement la presqu'ile camerounaisde Bakassi, a viole et

viole les obligations' qui lui incornbent en vertu du droit
conventionnel et coutumier :

que vu ces violitions des obligations juridiqclesusvisees, la
Republique fedkraledu Nigeria a le devoir expres de mettre fin

a sa presence rnilitaire sur le territoire carnerounais, et
d'evacuer sans delai et sans condition ses taupes de la
presqu'ilecamerounaise de Bakassi; des dommages pravoqubes par la Republique fed6rale du
Nigeria.

Que vu les incursions rbpetees des populations et des forces

arrnkes nigerianesen territoire camerounais tout llong de la
frontigrentre les deux pays, lesincidents graves et repet&
qui s'ensuivent, et I'attitude instable et rkversible de la
Republique fkdkrale du Nigeria relativemefit aux instruments
juridiques definissantla frontiere entre les deux pays et au

traceexact de cettefrontiere, la Republiquedu Cameroun prie
respectueusement la Cour de bien vouloir prbciser
definitivement la frontiere entre elle et la Republique federale
du Nigeriadu lac Tchad A lamer".

2. Cea dernandes ont 8tB resumees de la mani&re suivante dans les
conclusions du Memoire que la Cameroun a deposkau Greffe de laCour le 16 mars
1995, en application de I'ordonnancede la Courdu 16juin 1994 :

"la Republique du Cameroun a I'honneur de conclure a ce qu'il plaise a la
Cour internationalede Justice de dire etjuger:

a) Que la frontikre lacustreet terrestre entre le Carnerounet le Nigeria suit le
trace suivant:

- du point de longitude 14"04'59" 9999 a I'estde Greenwich et de latitude de
13" 05' 00" 0001, nord,elle passe ensuite parlepoint situea 14" 12' 11" 7 de
longitude est et 12'32 17"4de latitude nord;

- de ce point, ell@suittetrace fixepar la Declaration franco-britannique du 10
juillet1919, tel que precise par les alineas 3 a 60 de la Declaration
THOMSONJMARCHAND confirmee par IfEchange de lettres du 9 janvier
1931, jusqu'au "pic assezproeminent" decrit par cette dernikre disposition et
connu sousle nom usuelde "Mont Kombon";

- du Mont Kornbon, la frontierse dirige ensuite vers la "borne64" visee au
paragraphe 12 de I'Accordgerrnano-britannique dlObokumdu 12 avril 1913 et
suit, dans ce secteur, tetraqb decrAtla section6 (1) du Nigeria(Protectorate
and Cameroons) Order inCouncil britannique du2 aoQt1946 ;

- de la "borne 64" ellesuitle track decritpar les paragraphes 13 a 2? de
I'Accordd1Obokumdu 12 avril1913 jusqu'a lborne 114 sur la Cross River ;

- de ce point, jusqu'a I'intersectde la ligne droite joignant Bakassi Poina
King Point et du centre du chenal navigable de I'Akwayafe,la frontiereest
determinee par lesparagraphes 16 a 21 de I'Accord germano-britannique du

l? mars 7913.

b) Que, des lors, notamment, la souverainetb sur la presqu'ile de Bakassi
d'une part et sur laparcellelitigieuse occupee par le Nigeria dans zone du
LacTchad, en particulier sur Daraket sa r@gione, stcamerounaise. c) Que la Iimite des zones maritimes relevant respectivement de la
Republique du Carnerounet de la Republique fedeiale du Nigeria suit letrace
suivant :

- de I'intersectiode la ligne droite joignant Bakassi Pointa King Point etdu
centredu chenal navigable de IfAkwayafejusqu'au "point lZ1', cette limite est
determinee par la "ligne de cornpromis reportee sur la carte de I'amiraute
britannique no 3343 par les Chefs dlEtatdes deux pays le 4 avril 1971
(Declaration de Yaoundb) et, de ce 'point 12" jusqu'au "point G" par la
Declarationsignbea Maroua le ler juin 1975 ;

- du point G, cette limite s'inflechit ensuite vers le sud-ouestdans la direction
indiquee parles points G.H.I.J.K. representes sur le croquis figurant ipage
556 du prgsent Memoire et qui repond 5 I'exigence d'unesolution equitable,
jusqu'a la limite exterieurdes zones maritimes que le droit internationalplace
souslajuridiction respective des deux Parties.

d) Qu'en contestant les tracesde la fronfiese definie ci-dessusub litterasa)
et c),la Republiquefbdhrale du Nigeria a violi! et vide le principe fondamental
du respect des frontieres heritkes de la colonisation (upossidefisjuris)ainsi
que ses engagements juridiques relativementa la demarcation des frontieres
dans leLac Tchad et a la delimitationterrestre et maritime.

e) Qulen utilisant la force contre la Republique du Cameroun, et, en
particulier, en occupant militairement des parcellesdu territoire carnerounais
dans la zone du Lac Tchad et la p6ninsule carnerounaise de Bakassi, en
procedant a des incursions repktees, tant civiles que rnilitaires, tout le long de
la frontiere entre les deupays, la Republique federale du Nigeria a vide et
viole ses obligations envertu dudroit internationalconventionnel et coutumier.

9 Que la Republique federale du Nigeria a le devoir expresde mettre fin a sa
presence tant civilque militaire sur le territoire camerounet, en particulier,
d'evacuer sans dklais etsans conditions ses troupes de la zone occupee du
lac Tchad et dela pkninsule camerounaise de Bakassi et de s'abstenir de tels
faitsi I'avenir ;

g) Que larespunsabilitk de la Republique federaledu Nigeria est engag& par
les faits internationalement illicites exposes ci-dessuset precis& dans le
corps du present Memoire.

h) Qu'en consequence, une reparation est due par la RBpublique f@d&raledu
Nigeria 3 la Republique duCarneroun pour les pr6judices materiels et mosaux
subispar celle-ci selodes modalites a fixepar laCour."

3. En decembre 1995, la Republique du Nigeria a souleve huit exceptions

prkliminaires contestant de maniere extrgmement artificielle la competence de la
Cour. Conformement a I'ordonnance de la Cour du 10 janvier '996, la Cameroun
deposera des observations ecrites sur ces exceptions le 15 mai prochain.

4. Dans la journee du sarnedi 3 fbvrier 1996 a 12 heures les forces

nigerianes ont attaque les troupes carnerounaisesdans la peninsule de 8akassi, tout
le longde lalignede cessez-le-feu de fevrierf994. A la suite de cette attaque quia
fait un mod, un disparu et plusieurs blesses du c8t6 camerounais et quia cause des
degsts matkriels importants, la sous-prefecture d'ldabato et les localitt5sdlUzama,de
Kornboa Janea et d'ldabato II sont tombees aux mainsdesforces nigkrianes.5. Les affrontements militaires se poursuivent depuis !orspar intermittence.
Au surplus les moyens utilises par les troupes nigerianes, constituees de forces
terrestres et navates importantes appuybes par I'artillerielourde, dbnotent ctairement

I'intention de la Partie nigerianede poursuivre la conquete de la peninsule de
Bakassi.

6. Les graves incidents arm& qui opposent lesdeuxpays, quicontinuent de
faqon sporadique au moment oh est redigke la presente dernande, et dontle Nigeria

porte I'entiere responsabilitk constituent une menace pour le reglement judiciaire du,
diverend. Le recours aux armespar la Republique du Nigeria ternoigne de la volonte
de ce pays, qui rkcuse sans aucun fondement juridique serieux la competence de la
Cour dans cette affaire,de creer un fait accompli sur le terrain. Aussi le

Gouvernement de la RBpublique du Cameroun dernande-t'il 5 laCour de bien vowloir
indiquerles rnesure csnservatoires qui s'irnposent, en application desarticles 41 du
Statutet 73 du Reglement.

7. En application des dispositions du paragraphe 2 de I'article 73 du

Reglement, le Gouvernernent camerounais precise que si, par impossible, sa
demande venait a Btre rejetee,I'issue du conflit arme sur le terrain rendrait
impossible ou, en tout cas, compliquerait singulierement I'exkcution du futur art-& de
la Cour ; la destruction d'elements de preuve lors de la poursuite des hostilitks

risquerait de fausser le deroulement de la procedure ; et la poursuite des
affrontements arm& aggraverait cansid&rablement les dommages causes a la
Rkpublique du Cameroun et dont celle-ci a demand6reparationdans sa Requste et
dans son Memoire notamment en causant des pertes irremediables en vies et en

souffrances humaines et d'importants dommages materiels.

8. En consequence, et sans prejuger dufond du differend, le Gouvernernent
de la R@publiquedu Carneroun psiela Cour de bien vouloirindiquer les mesures
conservatoires suivantes :

1. Les forces armees des Parties se retireront a I'emplacement
qu'elles occupaient avanI'attaquearmee nigkriane du 3fevrier
1996;
2. Les Partiess'abstiendront de toute activite militailong de la

frontigrjusqu'a I'interventide I'arrgtde lCour ;
3. Les Parties s'abstiendront de toutacte ou action qui pourrait
entraver la reuniondes elements de preuve dans lapr@sente
instance.9. Etant donnee I'extrGmegravite de la situation, le Gouvernement de la
Republique du Cameroun prie instamment laCour de bien vouloirfixer a unedate
aussi rapprochee que possible la tenue de la procedure orale preuue a I'article 73,

paragraphe 3, de son Reglement.

aounde, Ee10 feurier1996

nt de la RBpublique du Cameroun
devant la Cour internationalde Justice

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