Observations du Gouvernement de la République italienne

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Cour internationalede Justice

Enregistréau Greffe:e

InternationalCourtof Justice
Filed in thegistryon: 3 O ]AM 2~04/2 4-

COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE

Observations

du Gouvcmement de la République Italienne, représenté par M. ho M.

Braguglia , Chef du Contentieux Diplomatique etdes Traitésen sa qualit6
d'Agent, ayant éluson domicile auprèsde l'Ambassade d'Italie àLa Haye

Concernantla deinande pour avis consultatifrelativement à la question :

"Conséquences juridiques de 1'éd~~cation d'un mur

dans le ter-I-itoit-epalestinienoccupe "

au sens de l'art66, par. 2, du Statut de la Cour et de l'ordonnancede
ladite Cour du 19 décembre 2003.

La Cour infernationale de Justice, pason arrêt6du 19 d2cernbre2003, a invité les Erafà

fournir des renseignements sur la demande pour avis consulratifrelativÙ llAffuire
« Conséqitcncesjuridiquesde Irkdi/cariod'un mur dans le Territoire pdestinoccuprM

Lu ddcision de demander ù lu Cour internutionak de Justice, en vertu de l'article Y6 de la
Charfe des Nations Unies, de retrdre d'urgence un avis consultatif est de I%ssemblt!e gtrngrale,

confurmbmrnt uru: dispositionùe l'art.65 du Statut de lu Cour. Lu demande d'avis porte

sur la questionsuivanr:

" Quelles sont en droit les cons&quences de I'6dificutiondu mur qulJsruZl, puissance

occupante, esten train de construiredans le Territoire palestinoccupe, y compris Ù
I1int&rieur er sur le pourtode Jkrusaleni Est, selon ce qui est exposi dans le rapport du

Secrktaire Général . compte tenu des rtgles et des principes du droit internarionul,notamment lu quatribrneonvention de Grnive de 1949 et les résolutroconsacr&esrila
questiopar le Conseil de sécuritc!et l'As.~cinirub?

1. Le Gouvernement est fermement d'avis que la Cour

devrait déclinerla réponse à la question qui lui a étéposée par la

résolutiondu 8 décembre 2003 de I'Assembl6e génkrale , concernant

les cons6quences de la construction du mur de la part d'Israël,

puissanceoccupante , dans le territoire palestinien occupé,y compris
ies zones avoisinantes ou limitrophes deJkrusalein Est.

En cette circonstance, la Cour devrait exercer son pouvoir
discrétionnaire- clairement affirméà l'art. 65 par. 1 de soli Statut -

pour s'abstenirde résoudre la questionindiquée par ladite résolution.

En fait, le problème principal dans la situation actuelle du

Moyen Orient, c'est l'obtention d'une solution nkgociée fondée sur la

"road-inap"dksignéepar le Quatuorcomposé des NationsUnies , de

l'UnionEuropéenne, des Etats Unis d'Amériqueet de la Fédération de

Russie, et avaliséepar le Conseil de SCcwitédes NationsUniespar la
résolution1515 ( 2003 ) adoptée A I'unanimitkle 19 novembre 2003,

résolutionqui voit la "road-map" comme un moyen pour atteindre

la "vision" d'une région où deux Etats, Israël et Palestine, vivraient

l'un à côtéde l'autrc dans le cadre defrontières sûreset reconnues.

Cette résolution est ladernière d'une longue série à compter

de la résolutionfondamentale n.242 de 1967.

2. A 'la séance de la Session spkciale d'urgence ( 1013),

convoquée au sens de la résolution"Uniting for Peace" et qui s'estdéroulée le 24 avril 1997, ainsi qu'à la reprise de la Session le

20 octobre 2003, il n'y avait pratiquementeu aucune discussion sur
le projet de résolution quidemandait une opinion consultative de la

Cour, sauf quelques signes de la part du délégué dle a Palestine et

de la part des dkléguks de la Malaysie , de l'Iranet deCuba.En fait,

tous les orateurs partaient de l'idée quela construction du mur était
illegale et donc il n'y avait aucune raison d' interrogerla Cour sur

une circonstance qu'on considérait escomptée. D'autre part, cette

opinion recevait le consentement de 144 Etats alors que seuls 4 Pays

s'y opposaient, dont Israëi. En conséquence il est logique de se
demander pourquoi, sur la demande à la Cour Internationale de

Justice,la résolution obtenait90 voix favorables contre8 et pas inoins

que 74 abstentions provenantdes Pays les plus divers -à savoir, non

seulementde l'Union Européenneet des Pays associks, tous représentés
par l'Italqui, à ce moiilent-là, détenait la Présidence de l'Union

Européenne - mais aussi des Pays de 1'Amkrique Centrale et

Méridionale, du Canada, du Japon, de la Nouvelle Zélande ct des
Philippines, de la Corke, de Singapour, de nombreux Pays africains

et du Pacifique, de la Suisse et rnêrnede la Russie.

Ce groupe d'opinions provenant de Pays ayant des régimes

juridiques totalement diffirents, exprime, ànotre avis, la conviction

qu'il est tout à fait inutile, aux fins des fonctions que l'Assemblée

Gén6ral.eest tenueà exercer, de demander un avis juridique.

L'édification du mur «dans le Territoire palestinien occupé,y

compris Jérusalem-Est etses alentours ... »a Cté déjàreconnue comme
s'écartant«... de laligne d'armisticede 1949et [qui est ] contrairaux

dispositions pertinentes du droit international» (Assembléegénkrale,Résolution ES- 10/13).Le fait de demander un avis juridique n'aidera

aucunement les Parties à relancer le dialogue nécessaire, dont le
but est de mettre en oeuvre la "road-map".Et pourtant, la dalisation

de la "road-xnap" est une priorité.

Il suffit de rappeler, parmi d'autres, l'avis dela Fédérationde

Russie, Iaquelle certes n'est pas un Etat favorable aux initiatives

d'Israëlet lecoiiiparer avec celui des Etats Unis d'Amérique qui au
contraire appuient Israël et qui, en conséquence, ont exerct le droit

de veto au Conseil.de Sécurité.

Les deux opinions convergent dans le fait de rcfuser l'avis de

la Cour, dont le seul effet ne peut êtreque de politiser l'action de la

Cour elle-même sans faire progresser d'un poucele développementde

la situation vers une solution concerttj.

3. 11est intéressant de se demander pour quelle raison a-t-on

attribuéà la Cour le pouvoir de refiser de rendre un avis consultatif (
art 65, par. 1)

Ce pouvoir existe dkjà du temps de la Cour Permanente de

Justice Internationale qui,précisCrnentau débutde son activité , dans

le cas du Statut de la Carélie Orientale, exerçait un pouvoir de ce

genre. En ce cas la Cour observa que " répondre ù la question
équivaudraiten substance à trancher un différendentre lesParties ".

Chose que la Cour ne pouvait pas faire parce qu'une des Parties, la

Russie, n'était pas membre de la Societédes Nations et elle avait

spécifiquement refusél'interventionde la Cour. En ces circonstances,
la Cour se trouva dans 1'im.possibilitd'agir. Cette ancienne prise de position n'aplus été réitérépearce que la

Cour a toujours retenu qu'elle, organedes Nations Unies devait, dans

les limites du possible , fournir sa contribution à 1'Cclaircisseinent

des questions en discussion. (Interprétationdes traités de paix conclus

avec la Bulgarie,laHotzgrieet laRoumanie, C.I.J.,Recueil 1950)

((L'avestdonntlpar la Cournon aux Etats, maisà l'organe habilitépour le
lui demandur; la réponse constitue uneparticipation de la Cour, elle-même

((organedes Natiorr.~Unies)),6 l'adel'Organisation et, enprincipe, elle
ne devrapas êtrerefuséc~

Mais la Cour est toujours restée de l'avis que l'art. 65 par. f

lui attribuele pouvoir de décliner la demanded'un avis consultatif.
C'est en ce sens que la Cour s'est exprimbedans le cas dejà citéde

1'Interpretationdes traités depaix:

"L'ariicl65du Statut est souplIfdotrncàla Cour lepouvoird'examinersi

Ie-ccirconstances riquestion aientun tel caract2de Iuipennetire à décliner une

réponse àla demande...la CourpossPdeune large sphèredediscréîionen matiire. »

La Coura encore souligné qu' elle pourrait déciderde ne rendre pas

son avis consultatifpour l'existence de raisons dbcisives D propres dela
question poséeen considérant queson refus pourrait être retenue plus

positif pour l'organe demandant et le bien-êtrede l'Organisation toute

entière,( Applicabilitéde la section 22 de l'articlVIde la Convention sur

privilèges etimmunité ses Nations Unies - 15 décembre 1989).

4. Il y a donc lieu de retenir que le pouvoirde rcfuser de rendre un

avis consultatif est extrêine~nenp trésentA la Cour et qu'il peut, si de

besoin, être exerce. Le Gouvernement italien estime que, justement,

ceci est valable dans le cas présent, vu que toutes lescirconstances, qui justifient le refus de rendre un avis, sont
remplies.

Entre autre, on ne saurait passer sous silence le fait que le
diffirend qui a comme objet la construction du mur concerne un

territoire dont le sort n'a pas encoreétédéfini.

Il y a donc quelques difficultés à déterminer les parties du

différendsur lequel l'avisde la Cour devrait s'exercer , car l'une

d'entre elles est encore à l'étatfluide.

En ces conditions, interposer un avis consultatif signifie

augmenter le clivage qui sépareJsrael de l'entitépalestinienne; signifie
raidir la situation alors que ce sont des élémmtsde flexibilité qui

seraient requis et , tout bien vu, oeuvrer en sens contraire à la

solution du problème réel.

La question est et reste de nature essentiellementpolitiqueet elle

consistedans l'établirdesregles précisesde comporteinent des Parties en

cause afin de résoudre,dkfinitiveinent, les différentes questions (entre
autres celle des frontières et celle des installations israëliennes en

des zones diverses des territoires en question)qui se posent et à ce

point - mais seuleiilentà ce point - déterminerles frontièresdu territoire

en consentantla naissancede I'Etat Palestinien

Ce n'estdonc certes pas sur la questiondu mur, dkjAtranchkepar
la.- résolution ES-10/13 de l'Assemblée Générale, que la Cour

Internationale deJustice doit s'exercer.

S. Pour ces raisons ,et pour les autres qui ont étk

soulev6es par des Pays amiset alliés, leGouvernement italien estiinefermement qu'il faut que la Cour s'abstienne de prononcer l'avis

consultatif.

ROME/ LA HAYE/ 29janvier 2004

Ivo M. Braguglia

agentdu Gouverneinent italien

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